Redevance télévisuelle

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Redevance télévisuelle <i>Petite histoire inspirée par la feuille verte que le Trésor Public m’a gentiment envoyée. Une précision : ce looong texte est plutôt sentimental.</i> Fatigué, j’engage la voiture dans les derniers cent mètres à parcourir pour être enfin chez moi. La semaine n’a pas été un long fleuve tranquille, et j’ai hâte d’en avoir fini et de souffler au moins pour deux jours. Depuis que je suis redevenu globalement célibataire, ma vie a considérablement changé, je me suis même posé la question de la validité de cette maison trop grande pour moi, sauf quand je récupère la garde de mes enfants. Mais je suis bien content de m’y reposer en fin de semaine… J’ouvre la portière, je coupe le contact et l’autoradio en même temps. J’aperçois enfin le seuil de ma porte et son havre de tranquillité quand, d’un coup, une voix féminine un rien acide m’apostrophe : - Ah, vous voilà enfin, monsieur Jean Rios ! - Euh… oui ? À qui ai-je l’honneur ! - Cécile Adamsky, inspectrice du Trésor Public, contrôle de la redevance télévisuelle. Ah zut ! Il ne manquait plus que ça ! En général, ils ne contrôlent pas, mais il a fallu que ça

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Un homme, une femme...Quelques passages érotiques

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Redevance tlvisuelle

Redevance tlvisuelle

Petite histoire inspire par la feuille verte que le Trsor Public ma gentiment envoye.Une prcision: ce looong texte est plutt sentimental.Fatigu, jengage la voiture dans les derniers cent mtres parcourir pour tre enfin chez moi. La semaine na pas t un long fleuve tranquille, et jai hte den avoir fini et de souffler au moins pour deux jours. Depuis que je suis redevenu globalement clibataire, ma vie a considrablement chang, je me suis mme pos la question de la validit de cette maison trop grande pour moi, sauf quand je rcupre la garde de mes enfants. Mais je suis bien content de my reposer en fin de semaineJouvre la portire, je coupe le contact et lautoradio en mme temps. Japerois enfin le seuil de ma porte et son havre de tranquillit quand, dun coup, une voix fminine un rien acide mapostrophe:

Ah, vous voil enfin, monsieur Jean Rios!

Euh oui? qui ai-je lhonneur!

Ccile Adamsky, inspectrice du Trsor Public, contrle de la redevance tlvisuelle.

Ah zut! Il ne manquait plus que a! En gnral, ils ne contrlent pas, mais il a fallu que a tombe sur moi! Non, pas le loto, ni lEuromillion mais le Trsor Public Bah, une petite visite et hop, laffaire sera rgle, dautant que je nai effectivement aucun poste de tl la maison. Linspectrice en question me fait tout de suite songer une dame patronnesse, lame de couteau, petites lunettes rondes, une silhouette sche et rche. Presque un corbeau en jupe longue. Javoue que le soir qui tombe naide pas enjoliver le tableau! Je suis intrigu: Vous ne mavez quand mme attendu de toute la journe?

Vous surestimez votre importance! Je suis venue hier matin, jai questionn vos voisins pour savoir quand vous pourriez tre prsent.

Bel esprit de conscience professionnelle

Je ne vous le fais pas dire!

Elle ouvre sa serviette, en extirpe une feuille et annonce:

Vous avez dclar navoir aucun rcepteur tlvisuel chez vous.

Oui, en effet, je nai pas de tl chez moi.

trange! Vous avez deux antennes sur le toit Je vous prviens davance: si vous acceptez de reconnatre maintenant la fraude, lamende sera minore.

Les antennes taient dj l quand jai achet cette maison Et puis, vous verrez bien par vous-mme quil ny a pas de tl chez moi.

Jy compte bien! Dautant que cest trange quun clibataire nait pas de rcepteur chez lui je trouve a trange et bizarre! Pas vous? Je vois que le Trsor Public est bien renseign

Elle ne rpond pas, elle attend avec impatience que jouvre la porte. Sitt fait, elle sengouffre dans la maison la recherche de lobjet du dlit. la lumire du couloir, limpression qui mane de mon interlocutrice est un peu meilleure. son grand dpit, elle constate que le salon ainsi que la salle manger sont dpourvus de ce qu'elle sattendait trouver. La conscience tranquille, je dclare: Comme vous le constatez: rien!

a ne veut rien dire. Il reste bien dautres pices, comme la cuisine, les chambres, la salle de bain, les toilettes

Les toilettes?

Oui, les toilettes. On y trouve souvent des petits postes.

Ah bon? Les gens sont si accros que a?

Oui, surtout les footeux! Bon, passons aux autres pices!

Je mincline lgrement, lui indiquant le couloir qui mne aux chambres et la salle de bain. a devrait aller, tout est rang; enfin, plus ou moins

Rien dans ma chambre, sauf mon grand lit qui a vcu des treintes passionnes avec des dames, hlas, de passage. Rien non plus dans les autres chambres. Elle a bien regard lordinateur dun drle dil, mais elle na pip mot dessus. Toilettes et salle de bain: pas le moindre atome de tlviseur.

Cest quoi, cette porte? Celle de la cave?

Oui, a descend la cave. Vous croyez franchement que jaurais planqu un poste dans une cave humide?

Moi, je ne crois rien, je constate. Et, croyez-moi, jai constat des tas de choses dfier limagination!

Jouvre la porte, une forte odeur dhumidit nous gifle la face. Elle hsite, puis descend prcautionneusement les marches, une une. Moi, je reste en haut, car je sais quen bas, mis part quelques conserves et quelques bouteilles, il ny a rien.

Elle remonte peu aprs. Elle continue sa fouille accompagne de quelques toiles daraignes. Les sourcils froncs, elle spoussette mthodiquement, puis elle lve la tte. Au bout du couloir, elle avise une trappe:

Cest le grenier?

Oui, cest le grenier. Vous voulez y jeter un coup dil? Bien sr!

Si a vous chante! Vous croyez franchement que je grimpe au grenier chaque fois que je dois zieuter la tl? a serait du sport, croyez-moi!

Ah! Vous avouez?

Javoue quoi?

Que vous regardez du sport la tl, vous!

Je me contente de lever les yeux au plafond. Je fais mine de la quitter, elle questionne:

Vous faites quoi, l?

Vous voulez grimper l-haut, oui ou non?

Bien sr que je veux grimper l-haut! dit-elle, imprativement.

Donc, il faut que je prenne lescabeau

Lescabeau?

Oui, lescabeau, sinon moins de savoir bondir comme une puce ou faire de la lvitation, je vois mal comment vous iriez l-haut! moins que la tlportation ne soit un moyen de dplacement usuel des agents du Trsor Public?

Cest a, moquez-vous! On verra bien qui rira le dernier!!!

Lme en paix comme lenfant qui vient de natre, je quitte le couloir pour aller chercher lescabeau, tout en priant intrieurement que a soit la dernire chose que cette inspectrice visite chez moi!Je reviens quelques temps aprs. Mon escabeau est miteux, rouill de toutes parts, avec une allure peu engageante. Jinstalle cette chose instable sous la trappe:

Voil! Il ne vous reste plus qu grimper dessus et soulever la trappe!

Elle regarde dun drle dair lescabeau qui mne la trappe du grenier.

Et vous croyez que je vais monter sur ce truc branlant?

Ladjectif mamuse malgr moi. Je lui sors mon sourire numro trois, celui avec toutes mes dents blanches, un tantinet carnassier: Si vous voulez tout constater par vous-mme du haut de cet escabeau branlant Dans ce cas, passez le premier!

Moi, je veux bien, mais

Mais quoi?

Je connais mon escabeau! Mais dans votre cas, il faut bien que quelqu'un reste en bas pour le tenir! De plus, je sais me mettre en appui sur les mains pour passer par-dessus, mais jai des doutes vous concernant

Vous me prenez pour quoi, vous? Une cruche? Tout a pour mater mes jambes ou reluquer sous ma jupe?Jesquisse un sourire bat, celui du pervers doubl du crtin congnital, et je lui dsigne lescabeau:

Montez au moins deux ou trois marches et jugez par vous-mme de lquilibre de la chose! Moi, je reste sur le ct, ainsi je naurai pas le bon angle pour admirer vos dessous a cache quoi?

a ne cache rien du tout. Montez, cest tout, et constatez.

Moui Elle monte sur la premire marche. Elle me toise, lair suprieur:

Alors, je nai rien constat de spcial!

Deux ou trois marches

Soit, mais a ne changera ri.heiiiin?!

Je ne suis du genre laisser une femme se casser la figure, mme sil sagit dune tte claques. Je me prcipite vers elle et mes mains enserrent sa taille qu'elle a assez fine afin de la maintenir en quilibre sur lescabeau qui oscille dangereusement. Oui, bon,a va! dit-elle, mi-fche, mi-soulage.

Je nai rien dit

Mais vous nen pensez pas moins, vous!!! Et vous pouvez me lcher!

Tant pis, ctait bien la premire chose vraiment agrable depuis que cette inspectrice est entre chez moi. Elle poussette son tailleur puis regarde autour delle.

Non, non, il ny a pas dascenseur cach dans un placard

Je ne vous ai rien demand! rtorque-t-elle, les lvres pinces.

Malgr une certaine fatigue, la situation mamuse. Je songe fugacement Ubu Roi, mme si a na rien voir avec ce que je vis actuellement. Je reprends: Bon, cet escabeau, je vous le tiens ou pas? Oui, oui, oui, tenez-le moi! Mais

Mais?

Mais nen profitez pas! Sinon, je vous colle une amende pour outrage agent dans lexercice de ses fonctions!

Jimagine bien la chose! dis-je, goguenard.

Et cessez de sourire stupidement, vous!

Avec un certain courage ou une certaine inconscience, elle grimpe les marches. Elle arrive assez vite sur la petite plateforme. Cest alors que je constate que la dame porte des chaussures talons aiguilles dune certaine hauteur. Quelque chose me dit que a ne va pas tre du gteau pour passer la trappe!

Vous navez pas plus haut?

Je lve la tte pour rpondre:

Non, dsol, cest la

NE REGARDEZ PAS!!!

Ah oui, javais oubli cette histoire de reluquer sous sa jupe. La fatigue de la semaine remonte en moi. Je soupire tout en baissant la tte:

Non, dsol! Si javais su quun jour, une charmante inspectrice du Trsor Public et lagrable initiative de venir visiter mon humble demeure, jaurais alors tout fait pour installer un ascenseur de premire qualit!

Je ne vous sens pas trs sincre, l

Oh, quelle perspicacit! Bon, vous grimpez ou vous nous jouez la statue de la Libert sur son pidestal ? Oh a va! Et maintenant, je fais comment? Vous poussez la trappe sur la droite, cause des charnires, vous attrapez le cble lectrique qui est gauche et vous me le donnez que je le branche sur une prise.

Ah

Peu aprs, le cble lectrique pendouille sous mon nez. Je le branche aussitt dans la prise juste dans le coin. La lumire fuse. Elle sexclame:

Houl! Il y a plein de choses l-haut! Plein de cartons Ny aurait-il pas un poste de tlvision dans lun dentre eux?

Eh bien, allez donc vrifier!

Cest ce que je vais faire! Dautant quon dirait bien quil y a comme une sorte de coin amnag

En effet, cest l que je stocke ma collection de postes tlvisuels, comme a, je peux regarder les matches de foot sur dix-sept crans diffrents, du noir au blanc jusquau 16/9

Je le savais!!!

Je soupire de lassitude. Je commence comprendre pourquoi certains tribunaux sont remplis dhomicides mettant en jeu des paisibles citoyens au-dessus de tout soupon!Je lentends qui sescrime tenter de monter au grenier, lescabeau tangue dangereusement, jai du mal le garder stable. Visiblement pardon auditivement, elle a des problmes! Elle retombe lourdement sur la petite plateforme; si elle recommence trop souvent, elle risque de passer travers! Je soulve lgrement la tte: elle sautille littralement pour tenter de passer! Cest trs mal parti!

Un dernier bond, elle tente de se mettre en appui sur ses coudes de part et dautre de la trappe, elle cherche du pied lextrmit de lescabeau, mais elle ne le trouve pas. Elle panique, halne, ses pieds pdalant dans le vide. La situation minquite un tantinet:

Du calme, du calme! Ne bougez pas les pieds comme a!

Placez immdiatement lescabeau sous moi!

OK, cest ce que je tente de faire, mais arrtez de vous agiter comme a!

Viiiiiite!!!

Elle panique plus encore, ses pieds sagitent dans tous les sens. Soudain, elle donne un violent coup de pied dans lescabeau qui valse deux mtres de l, se fracassant dans un bruit peu engageant pour sa prennit. Et pourtant je le tenais bien. Sans doute leffet levier! Mais, nom de Dieu, calmez-vous!

Nan! Lescabeau, je veux lescabeau! Tout de suiiiiiite!!!

Ce qui devait arriver arriva: elle glisse dans un grand cri dchirant!Quand cest comme a, on ne rflchit pas de trop. Dans labsolu, jaurais eu plaisir contempler cette foutue inspectrice scraser au sol comme une tomate bien mre! Mais hlas, je suis un homme et donc faillible: je lai rcupre au vol dans mes bras, cueillie comme un enfant.

Grand silence

Avec cette femme dans les bras, je ne sais pas pourquoi, mais je me sens tout gauche. Pourtant, ce nest pas la premire fois que jai le plaisir davoir un membre du sexe oppos ainsi, mais, comment dire est-ce un plaisir? QuoiqueGrand silence qui continue

Quoique, maintenant que je la regarde mieux, elle est moins dame patronnesse que prvue, elle est dailleurs particulirement lgre. bien y regarder, elle est nettement moins moche quon pourrait le croire prime vue. Bon, pas un mannequin, je vous laccorde, mais quand mme un beau petit lot. Plus je la dvisage, plus jai limpression qu'elle fait exprs de senlaidir ainsiGrand silence qui dure

Et puis, jaime bien sa faon de rougir comme a! Elle naurait pas ce chignon qui la vieillit, elle serait mme Je mgare! Nempche qu'elle est rudement mignonne comme a, avec ses joues en feu, la bouche ouverte, ses lvres que je Non, non, je mgare compltement!!! Nempche que

Grand silence qui commence devenir gnant

La dcence voudrait que je la pose au sol, le plus dlicatement possible, mais ce nest pas possible, je suis comme fig. Je ne sais pas pourquoi, son parfum, le contact de son corps, ou simplement parce que jaime les petites pestes? Cette situation mintrigue et membarrasse terriblement!

Cest finalement elle qui rompt le silence dune petite voix:

Merci vous pouvez me reposer?

Cest trange, sa voix nest plus du tout la mme. Lexpression qu'elle affiche sur son visage la change aussi du tout au tout. Elle est nettement plus jeune que ce qu'elle paraissait tre, il y a peu. Je suis intrigu par cette subite mtamorphose. Une vague ide chemine dans mon esprit.

Vous vous me reposez? Oui ou non!?

Ah, on dirait que lancienne inspectrice refait surface, mais ce nest pas tout fait la bonne intonation. Je sors de ma torpeur en lui rpondant:

Hum OK, je vous repose

Merci.

Pas de quoi.

Elle me tourne partiellement le dos, elle en profite pour ajuster son tailleur froiss et arranger ses lunettes sur le bout de son nez. Je jurerais qu'elle tente de refaire une contenance dtache, mais le ton de sa voix la trahit:

Bon, je crois que je vais devoir abandonner la visite de votre grenier!

Pourquoi faites-vous a? dis-je dune voix douce.

Elle se retourne, me regarde dun drle dair, elle se mord fugacement les lvres. Une bouffe de chaleur monte en moi. Elle rpond lair lointain:

Pourquoi je fais ce mtier?

Non Pourquoi faites-vous a?

Je je ne comprends pas bien ce que vous voulez dire

Elle ne me regarde toujours pas, elle scarte mme un peu. Japproche dun pas. Elle recule aussitt. Je madosse alors au mur:

Oh si, vous avez parfaitement compris, mais puisque vous aimez les points sur i, je me faire un plaisir de vous les mettre!

Comment a?

Elle fait volte-face, jai prsent en face de moi linspectrice qui est entre chez moi, il y a moins dun quart dheure. Mais je ne me dmonte pas pour autant: Pourquoi vous obligez-vous tre imbuvable, infrquentable, si pte-sec?

Qu co-comment osez-vous?

Ce nest pas une rponse valable

Elle serre les dents, ses yeux lancent des clairs, ses poings ferms, les jointures blanchies sous leffort. Elle pourrait bondir sur moi, elle le ferait sur le champ, mme si jaccuse vingt centimtres de plus et au moins autant en kilos, enfin, presque le double. Elle siffle: Je ferai comme si je navais rien entendu, en compensation du fait que vous mayez sauvegarde de la chute.

Merci de votre mansutude, mais a ne rpond pas ma question

Pour tout rponse, elle pivote sur ses talons et se dirige illico vers la salle manger.

Bon, je nai plus rien faire ici: pas de poste tlvisuel comme indiqu par votre dclaration. Dossier clos.

Dossier toujours ouvert!

En trois pas, je la rejoins. Prestement, je la saisis par le bras et je la force se retourner et me rpondre. Elle crispe les dents, elle gmit:

Vous me faites mal, lchez-moi tout de suite!

Alors rpondez!

Je vous ai dj remerci de mavoir rcupre, a devrait vous convenir!

Compensation, pas remerciement mais ce nest pas le propos!

Ah oui, et cest quoi le propos? lance-t-elle, en se tortillant.

Nessayez pas de noyer le poisson! Alors? Alors quoi?

Dans la catgorie ttue et bourrique, elle nest pas mal du tout. Elle nest dailleurs pas mal du tout maintenant qu'elle narrive plus se refaire le visage davant. Je dcide demployer les grands moyens. Je lentrane avec moi vers le grand miroir de ma salle de bain, elle rsiste, elle crie, elle me martle de son petit poing rest libre, mais je ne lche pas prise.

Je la plante face au grand miroir, me tenant derrire elle, serrant ses paules entre mes mains, comme un tau afin qu'elle ne puisse senfuir:

Maintenant, regardez-vous!

Vous me faites mal!

Rpondez!

Rpondre quoi?

Elle se calme un peu, son visage se mtamorphose nouveau, mais de faon plus complte encore, je dcouvre peu peu lautre femme en elle, celle que javais entrevue tout lheure. Cen est mme hallucinant. Elle sent que je ne lcherai pas le morceau, et elle en mme temps. Elle recommence se pincer les lvres, jessaye de me contenir, trop tent. Au bout dun temps qui me parait la fois long et court, elle demande: Que voulez-vous que je vous dise

Pourquoi faites-vous a? Pourquoi ntes-vous pas vous-mme? Pff, vous en savez quoi, vous, de mon mtier?

Je crois que jen ai une petite ide

Alors, pas besoin que je vous fasse un dessin.

Et elle se met doucement pleurer. Dhabitude, jai toujours lair con face une femme en larmes, mais, trangement, pas cette fois-ci. Tout en la maintenant par les paules, je la guide hors de la salle de bain, direction le salon o je la fais asseoir dans le canap.

Jembote le pas pour aller vers la cuisine, je lui demande:

Caf, th, coca, eau plate, eau gazeuse?

Coca light ou zro si vous avez

Jai.

Et elle se mouche un bon coup. Je reviens trente secondes plus tard avec deux canettes et un verre. Je dcapsule puis je lui tends le verre, elle le refuse tout en semparant de son coca qu'elle descend dun seul trait vitesse grand V. Je suis assez admiratif de la performance!

Elle me tend la canette vide avec un sacr air de dfi malgr ses yeux rougis. Elle serre un peu les dents, visiblement pas trs contente davoir t en position de faiblesse. Avant que ne survienne lorage, je prends les devants: Ca va mieux? Je comprends bien que a ne doit pas tre rose tous les jours pour vous, mais je crois que vous avez beaucoup plus perdre jouer ce rle qu rester vous-mme

Quest-ce que vous en savez, vous? dit-elle, hargneuse.

Je ne vais pas vous faire un cours de psycho, mais jai la singulire impression que vous valez nettement mieux que ce vous montrez durant votre boulot!

Et alors? Cest mon choix, non?

Vous faites comme vous le sentez, mais jexprime mon avis. Je me doute bien que le Trsor Public ne demande pas des anges, mais entre anges et dmons, il y a une marge

Vous croyez que vous mapprenez quelque chose? Si je me comporte comme a, cest parce quil y a une raison! Vous ne savez rien de moi, vous!

Non, je ne sais rien de vous, mais je sais que vous valez nettement mieux que cette harpie que vous jouez. Point.

Elle me regarde dune drle de faon, puis elle se mouche nouveau. Je lui tends un rouleau dessuie-tout. Elle le prend en murmurant un vague merci. Je me dtourne tandis qu'elle commence sessuyer les yeux.

Bon, ce nest pas tout a, mais il faut que jy aille! Merci pour le sopalin!

Elle me plaque doffice le rouleau dans la main, tandis qu'elle se relve. Mais sa dmarche est mal assure, elle vacille sur ses jambes. La prenant nouveau par les paules, je la fais sasseoir de force:

Restez-l! Vous ntes pas en tat!

Je fais ce que je veux!

Vous tes infichue de faire trois pas. Vous tes gare o?

Qui vous dit que je suis venue en voiture?

Vous tes gare o?

Sur la place

Je me retourne, je regarde la cuisine, et sans comprendre moi-mme pourquoi, je dclare:

Vous ntes pas en tat de marcher jusque l, ni de conduire. Vous aimez les ptes la carbonara?

Qu

Vous aimez ou vous naimez pas?

Ben jaime mais

Trs bien, jen fais toujours de trop, une marotte de clibataire, comme a jen ai toujours pour le lendemain. Ne bougez pas, de toute faon, a ira vite faire, je nai plus qu faire chauffer leau, et a sera OK pour dans dix quinze minutes.

Elle renifle lgrement, puis me regarde tonne:

Pourquoi faites-vous a?

Parce que vous ntes pas en tat, je vous lai dj dit.

Que pour a?

Parce que vous le valez bien! Ca vous convient comme rponse?

Pub connue! Comme dirait mon petit frre, cest dun relou!

Men fiche, je ne suis pas un djeunsmais un vieux machin qui a la trentaine bien entame!

Elle sourit, elle est nettement plus mignonne ainsi. Ses yeux sont toujours humides mais ils ptillent:

Excusez-moi de vous contredire, mais daprs votre fiche, vous seriez plutt dans la quarantaine Seulement dans un petit mois, alors laissez-moi profiter de ma trentaine triomphante avant que je ne dgringole dans la quarantaine avachie!

Elle rit doucement.

Durant cette soire trange et improvise, nous parlons de tout. Toujours cette manie qu'elle a de ponctuer ses fins de phrases par des vous. Et dautres tics qu'elle possde, mais des tics mignons. Aprs les ptes, nous nous installons confortablement dans le canap et, sans que je ne lui demande quoique ce soit, elle me raconte son mtier, les problmes, les gens, ce concours auquel elle aspire tellement pour changer de condition; elle me raconte sa vie, ses hommes qui sont partis, sans mexpliquer exactement pourquoi, ces diverses trahisons, tous ces checs, tous ces ratages. Elle me lance, lair las: Vous comprenez pourquoi je suis dubitativeenvers les bonhommes ?

Jen ai autant votre service, mesdames! Ce qui ne mempche pas desprer, tout comme vous, vous esprez aprs votre concours.

Ce nest pas pareil!

Conceptuellement, cest kif-kif!

Conceptuellement!? Vous en avez de ces expressions, vous!

Elle rit doucement puis boit son verre. Latmosphre est la fois douce et singulire, je ne sais pas comment la dcrire autrement. Je suis heureux dtre avec elle, je suis dtendu, nous parlons de tout et de rien, elle est souvent spirituelle, une certaine faon de sautiller de sujet en sujet, de biaiser. Ccile a parfois des conversations tranges, des phrases ambigus

La vie vgtative, vous en pensez quoi, vous? demande-t-elle.

Vous faites allusion quoi?

ces accidents qui deviennent des lgumes vivants, vous en pensez quoi, vous?

Si a marrivait, je prfre alors quon meuthanasie, oui, je prfre tre mort plutt que cette non-vie et cet acharnement thrapeutique.

Et vous oseriez lappliquer vos proches?

Seulement si a serait leur conviction. Mme si a ne serait pas facile appliquer, il y a toujours une marge entre ce quon dit et ce quon ose faire. Si cest leur souhait, dans ce cas, oui. Pourquoi cette question? Vous avez dcidment des sujets de conversation pas trs gais!

Jaime bien savoir cest tout.

Elle change aussitt de thme en abordant la Cte dAzur et ses plages souvent minimalistes. Je ne cherche plus comprendre. La soire continue, agrablement, avec ici et l des petites piques, des mini affrontements. Je mamuse, elle aussi. Les heures passent vite, le soir tombe, la nuit sinstalle. Puis dun coup, elle dit:

Dsole mais il faut que jy aille il est dj tard!

Oui, il est tard je vous accompagne jusqu la place.

Merci, dit-elle, simplement.

Dehors, il fait encore bon, malgr lheure tardive. Quatre cents mtres plus loin, la place o attend sa voiture. Pendant que nous marchons, elle dit soudain:

Excusez-moi pour tout lheure, cest vrai que jai un peu pouss le bouchon quand je cherchais aprs votre poste de tl

Je ne men souviens plus

Oh si, que vous vous en souvenez! Je ne sais pas comment vous le dire, mais quand je vous ai vu, je nai pas pu men empcher, ctait plus fort que moi

Ah bon? Et pourquoi?

Nous sommes arrivs, dit-elle, coupant court la conversation.

Voil, la soire est finie, elle va repartir chez elle. Je me demande quoi faire maintenant: la laisser partir quand mme? Ou la retenir cote que cote?

Eh bien voil eh bien, merci pour tout dit-elle.

Oh pas de quoi

Si, si, jai pass une bonne soire! Heureux de vous lentendre dire

Un certain silence sinstalle, la place est vide, au loin, quelques rares voitures passent. Je me traite didiot, jaurais d bondir sur loccasion en lui rpondant: si vous avez pass une bonne soire, vous en accepterez srement dautres. Mais l, linstant est pass, cest toujours facile aprs, pas sur le moment Dcidment, aujourdhui, jai lesprit descalier!Elle est adosse sa voiture, les mains dans le dos, elle sourit trangement:

Et aussi merci

Et en quel honneur?

Vous navez pas tent dabuser de la situation

Ma maman ma bien duqu enfin, de ce que jai pu en retenir!

Vous remercierez votre maman pour moi.

Je ny manquerai pas!

Dcidment, je suis infoutu de saisir la moindre occasion! Tant pis si je my prends mal, mais je dcide de me lancer leau: Euh demain, samedi, vous faites quoi?

Elle sourit dune faon encore plus ambigu. Les mains toujours derrire le dos, elle sappuie dlibrment sur sa portire:

Quest-ce que je fais? Oh, a dpend

Ah

Pourquoi faites-vous a? dit-elle dune voix douce.

Je la regarde dun drle dair, je me pince les lvres. Une bouffe de chaleur monte en moi. Je rponds dun air lointain:

Pourquoi je fais quoi?

Non Pourquoi faites-vous a?

Je je ne comprends pas bien ce que vous voulez dire

Elle me regarde, toujours de cette drle de faon, elle se penche mme un peu. Je recule dun pas. Elle avance lgrement aussitt. Je me fige tel un poteau, avec ltrange de revivre une certaine situation:

Oh si, Jean, vous avez parfaitement compris, mais puisque vous aimez les points sur i, je vais me faire un plaisir de vous les mettre!

Comment a?

Embrassez-moi!

Je me serais attendu pas mal de choses, sauf cette demande - non - cet ordre, dit gentiment, dit malicieusement, mais un ordre quand mme. Tout ce que je trouve dire, cest:

Pardon?

Vous avez trs bien compris: embrassez-moi!

L comme a maintenant!?

Oui, pourquoi pas, nest-ce pas ce qui vous tenterait, vous? rpond-elle, malicieusement. Oui euh, non! Enfin

Je ne vais tout de mme pas arracher mon rtroviseur pour vous mettre face vous-mme, pour que vous puissiez voir votre visage, mais croyez-moi, a vaut le dplacement! Allez, avouez!Je soupire, un poids norme sur les paules:

Oui, bon, javoue!

La suite

La suite?

Oui, la suite: vous avouez quoi?

a vous amuse, nest-ce pas, dinverser la situation? Une vengeance?

Elle balaye largument dun petit geste significatif:

Jai largement les moyens de me venger, ne vous inquitez pas l-dessus. Alors, cette suite?

Elle ne lchera pas le morceau, et puis, qu'elle samuse ou non, quai-je perdre? Qu'elle se fiche de moi? Quoique cest elle qui ma demand de lembrasser Et puis, je ny comprends plus rien! Je nai jamais rien compris aux femmes, cest une vidence! Et puis, tant pis, jy vais: Oui, Ccile, vous me plaisez, vous me plaisez normment! Jaimerais beaucoup vous revoir le plus vite possible et le plus souvent

Pourquoi je vous plais?

Pourquoi voulez-vous que je vous embrasse?

Peut-tre pour la mme raison que vous

Je me penche vers elle, elle ne bouge pas, elle me fixe toujours de ses grands yeux. Japproche ma bouche tout prs de ses lvres, elle ne bouge toujours pas. Alors je dpose un doux baiser, tout tendre. Ca me fait un effet surprenant, comme une dcharge lectrique! Je me recule un peu, sans la lcher; elle pose une main ses lvres, stupfaite.

Qu?

De deux choses, lune: ou votre voiture a un faux contact

Possible et lautre possibilit?

Ou bien, cest littralement ce quon appelle un coup de foudre Et comment vrifier?

Comme a!

Je passe une main le long de sa taille et je lattire contre moi, pour capturer avidement sa bouche, pour lembrasser fivreusement. Je ressens un grand choc, des fourmillements sur tout le corps, je suis pris de tremblements, de fivre, de draison. Elle aussi, si jen crois ses doigts dans mes cheveux, dans mon cou, dans mon dos durant le trs long baiser qui nous unit.Cest finalement sa bouche qui me quitte, elle me regarde, le feu aux joues, chevele, trouble. Je ne suis pas mieux. Elle semble reprendre son souffle. Je la garde toujours prisonnire de mes bras. Elle pose son front sur ma poitrine, sous mon menton: Je crois que nous pouvons conclure la deuxime solution

Je crois aussi

Oui

Je caresse ses cheveux, je lui glisse loreille:

Je crois aussi que vous avez ressenti les mmes choses que moi!

Dsole de vous contredire, mais il y a quelque chose que vous navez pas pu ressentir comme moi

Ah bon? Et quoi?

Une certaine bosse plus bas Vous tes trs en forme, vous!

Ah euh

Elle a lart de me faire perdre mes moyens, jai lair tout con, je fais quoi? Je la garde contre moi et ma bosse, comme elle dit, ou bien, je me la joue gentleman? Dcidment, cette femme est une petite chipie sa faon, mais je sais que jaime les petites chipies, donc jai perdu davance! Elle tranche pour moi en mattirant elle.Un autre trs long baiser

Nous nous regardons, je veux la garder moi, mais il est nanmoins trop tt, mme si je meurs denvie dexplorer son corps, de la couvrir de baisers de la tte aux pieds et de rviser avec elle toutes les positions possibles et imaginables du Kama Soutra!

Elle se dtache de moi, je vois bien qu'elle hsite, elle aussi. Elle sinstalle au volant, elle met sa ceinture, puis elle abaisse la vitre, elle me regarde intensment. Je pose ma main sur la portire:

Je meurs denvie de vous demander de rester, mais ce ne serait pas raisonnable

Non, en effet, ce ne serait pas raisonnable

Serait-il raisonnable de vous demander de nous voir demain?

Cest en effet beaucoup plus raisonnable demain, vers seize heures, devant chez vous je vous invite dans un salon de th. Dans un salon de th?

Ma faon moi de vous rendre la pareille

aurait plutt t un dner, dans ce cas, dis-je en souriant.

Je sais, mais une femme bien leve ninvite pas comme a un monsieur. Le salon de th est donc un bon moyen terme. Et puis rien ne vous empche de minviter demain soir

Prestement, elle met le contact, elle se penche pour me donner un dernier baiser, puis elle part. Moi, durant tout ce temps, je nai russi rien dire! Je regarde la voiture sloigner. prsent, je suis seul sur cette place, personne autour de moi, sauf son indniable prsence, son parfum, sa voix mes oreilles. Je me pose des tas de questions, une surtout: comment en sommes-nous arrivs l? certains moments, jai cru draper dans la quatrime dimension. Maintenant, jen suis sr: je suis en plein quatrime dimension, voire mme en cinquime! Une ide dinversionJe soupire, je mets mes mains dans mes poches, puis je retourne chez moi, lesprit assez chamboul. Est-ce que je vais bien dormir? Que faire jusqu demain, seize heures? Sans men rendre compte, je suis devant chez moi, assez dboussol. Je pousse la porte, je pars me coucher, la tte pleine delle, cest le mieux que je puisse faire prsent!--ooOoo--Samedi.Inutile de dcrire ce dbut de journe, la matine et le dbut de laprs-midi! Ce nest pourtant pas la premire fois que jai un rendez-vous avec une femme, mais cest bien la premire fois que je suis dans un tel tat. Je resonge la soire dhier, tous ces actes manqus, toutes ces possibilits, ces impasses. Je suis comme devant un puzzle, jai presque tout reconstitu, mais il me manque visiblement des pices pour que tout sajuste au mieux. Je secoue la tte. Je me demande pourquoi je me casse le crne ainsi!

Alors jattends qu'elle vienne devant chez moi

Bras dessus, bras dessous, nous sommes sortis du salon de th. Depuis seize heures, nous passons notre temps nous faire des tas de petits bisous. Nous nous comportons comme des collgiens, mais mme si jai bientt le triple en ge, je me sens merveilleusement bien.

Laprs-midi passe trs vite, trop vite, main dans la main, nous nous baladons dans les magasins, les rues, les parcs. Nous parlons de tout et de rien; parfois, elle change dintonation, elle devient plus svre puis, le plus souvent, elle redevient toute douce. Assise dans le parc, au bord du lac artificiel, elle sanime concernant son futur concours: Vous ralisez que si jai ce fichu concours, ma vie change du tout au tout! Finie la galre daller faire du porte--porte et daffronter ces foutus fraudeurs!

Ils ne sont pas tous fraudeurs

Si tous, pas un pour racheter lautre! dit-elle dun ton plus dur, son regard perdu au lointain.

Pas mme moi?

Oh vous je ne sais pas, vous avez simplement le bnfice du doute, vous! Mais le jour o je pourrais visiter votre grenier sans tomber dans vos bras, je serais fixe.

Charmant pour moi!

Non, cest lesprit administratif! Tous coupables, sauf preuve du contraire! Et encore! siffle-t-elle.

Je suis tonn de ce changement, une autre femme est ct de moi, sans commune mesure avec celle avec qui je sortais il y a moins de trente secondes! Son visage se durcit, ses yeux sassombrissent, ses gestes deviennent saccads, sa voix pre.

Elle tourne sa tte vers moi, ses yeux sombres me fixent puis, sans transition, un lger sourire flotte sur ses lvres. En moins de dix secondes, je rcupre ma Ccile, celle qui me trouble tant. Je suis un peu inquiet, a doit se voir sur mon visage, car elle met sa main sur ma joue puis dpose un doux baiser sur mes lvres.Par deux autres fois, je suis tmoin de ce changement de caractre, de cette explosion dilue, de cette rage larve. Qui est-elle exactement?Je nai pas le temps de me poser la question en dtail, elle se lve:

Marchons

OK

Alors nous continuons notre balade autour du lac. Le silence se fait entre nous. Jaime le contact de ses doigts dans ma main. Dun coup, elle se lance:

Vous devez vous demander qui je suis exactement non?

Vous lisez dans mes penses, Ccile?

Oh, cest flagrant votre visage

Admettez quil y a de quoi se poser quelques questions On dirait quil y en vous deux femmes: une douce et une dure

Cest assez bien rsum une douce et une dure ou plutt une qui espre et lautre qui nespre plus

Qui espre quoi? dis-je, intrigu.

Jai bientt trente-cinq ans, pas de foyer, pas denfant, rien, sauf un mtier. Ca ne vous tonne pas, vous?

Je marrte, je la regarde dans les yeux. Avec emphase, un sourire amer aux lvres, je balaye lair dun grand mouvement inutile de la main, vers le lac:

Jai cinq ans de plus que vous, jai eu un foyer, cass-fini; deux enfants que je vois rarement; un mtier, mais finalement, rien de trs folichon non plus. Sauf mes enfants, mais enfin, jaurais aim les voir plus souvent quune fois tous les quinze jours. Finalement, le meilleur que jai pu russir sont mes bouts de chou Vous avez au moins a Bon, parlons peu mais parlons bien. Que savez-vous de la bipolarit, la maladie?

Cest a que vous avez?

Rpondez!

Sauf erreur de ma part, cest une maladie du cerveau, dorigine biochimique, qui entrane des changements subits du comportement. On a longtemps cru que a ne se soignait pas, mais il existe des traitements.

Vous tes au courant, dites-moi, vous!

Cest normal: dans un prcdent boulot, javais un collgue qui en tait atteint. Il devait souvent aller en maison de repos se faire soigner, mais il arrivait sen sortir.

Elle me regarde fixement:

Cest mon cas Vous voulez toujours de moi?

Vous avez une singulire faon de prsenter les choses!

Rpondez: vous voulez toujours de moi? Dune bipolaire?

Sauf erreur de ma part: a se soigne, non?

Oui, a se soigne, mais par des cures de repos, enferme, squestre

Elle serre les poings, broyant mes doigts. Elle sen aperoit, elle rougit, elle sexcuse:

Oh pardon! Je je ne voulais pas

Pas grave. Je vais vous donner ma rponse, elle vaut ce qu'elle vaut, vous la trouverez un peu cynique ou dsabuse. Peu importe, vous y prendrez ce que vous voudrez.

Euh, c'est--dire? Vous minquitez, vous! C'est--dire que cest toujours vous que je veux, je suis infoutu de vous dire le pourquoi du comment, mais cest bien vous que je veux, bipolaire ou pas. Vous serez peut-tre cinquante pour cent de votre temps en maison spcialise, mais les autres cinquante pour cent seront moi et rien qu moi. Et nos retrouvailles nen seront que meilleures! Je vous veux heureuse comme moi je veux ltre. Vous naimez pas les habitudes, celles qui tuent un couple? Moi non plus. Votre maladie est en quelque sorte la garantie de notre couple, nous serons cent pour cent ensembles, lun pour lautre. Mais dautres fois, nous serons loins lun de lautre.

Cest comment dire cynique ou effectivement dsabus. Comment pouvez-vous oser avouer une chose pareille, vous?

Quelle chose pareille? Que je vous veux ou que notre couple ne le sera jamais cent pour cent et que cest justement notre chance?

Les deux! Et vous parlez dj de couple alors que nous ne nous connaissons que depuis hier! Vous tes pire que le TGV, vous!Javance un peu sur lherbe, puis je massieds dessus, tout en ne lchant pas sa main. Elle sassoit de mme. Je la regarde:

Comme je vous lai dj dit: vous mattirez frocement, et a, je ny peux rien. Tout comme vous et votre maladie. Ce que je vous propose est finalement un march, un deal.

Un march? Vous tes compltement la masse, ou quoi? Peut-tre, mais posons le problme: vous tes seule, avec personne sur qui vous reposer. Vrai ou faux?

Mais je

Rpondez: vrai ou faux?

Co comment osez-vous?

Elle me regarde furieusement, mais ne fait aucun geste pour partir ou mme se lever. Dailleurs, elle ne lche mme pas ma main. Je continue:

Jose parce que je nai rien perdre; ni vous dailleurs. Jattends toujours ma rponse, chacun son tour

Oui, cest vrai: jai foir toutes mes histoires avec cette fichue maladie, idem pour mes amis, hommes ou femmes. Enfin, pas tous

Bien, je poursuis: est-ce que je vous plais, oui ou non?

Vous y allez dcidment franco, vous!

Rpondez, sil vous plat: est-ce que je vous plais?

Vous avez une drle de faon de sduire les femmes, vous! Si je suis avec vous aujourdhui, Jean, cest quil y a peut-tre une raison

Donc je prends a pour un oui. Vous savez, de votre ct, que vous me plaisez terriblement.

Vous ne cessez pas de me le dire depuis quelques minutes! Et je ne suis pas sourde! Vous tes infernal dans votre genre, vous!

Sans doute, mais au moins, vous ne vous ennuyez pas! Nest-ce pas?

Vous tes infernal, vous! Cest certain! Merci pour ce compliment qui me va droit au cur Nous nous plaisons, nous ne voulons plus rester seuls, nous avons la possibilit de fabriquer un couple qui ne sera jamais plan-plan, avec des phases dloignement, dautres de bonheur fusionnel. la fois, le feu et leau. Moi, je prends.Je lui capture les deux mains, elle ouvre de grands yeux la fois tonns et effrays. Je la regarde, je la contemple. Puis je demande:

Et vous?

Elle dglutit, dtourne la tte. Un certain silence, les enfants qui jouent au lointain, les bruits de la ville. Elle pose son menton sur sa poitrine:

Vous ny allez pas par quatre chemins, vous!

Je le reconnais. Mais jen ai marre de tourner autour du pot, et finalement, de me retrouver le bec dans leau. Vous pouvez comprendre, je suppose? Donc, je mets les choses au net, cest tout.

Jai remarqu. Cest vrai que cest clair et net! Pendant que vous y tes, vous navez pas dautres revendications ou exigences formuler?

Du style?

Vous baissez la lunette des toilettes ou pas? Votre steak, saignant ou point? Vos chaussettes, partout dans la maison ou directement dans la machine laver? Vous regardez quoi la tl? Oh pardon, joubliais, vous navez pas de tl, enfin, il parat Cest pas il parat: je nai pas de poste. Mais en contrepartie, comme mes soires sont donc libres, je peux mieux moccuper de celle qui vit avec moi

Vous jouez aux dominos tous les soirs?

Jadore le sport, surtout celui en chambre dis-je, sournois.

Que dois-je comprendre?

Vous ne voulez pas quand mme la liste de toutes mes petites manies sexuelles?

Si vous me le proposez si gentiment Faites-moi la liste pour demain

Elle sourit, son regard est lumineux, sa situation est peut-tre trange mais elle y prend visiblement got. Je rponds:

Soit, je vous ferai une liste dtaille, mais la condition davoir la vtre avant!

Vous ntes pas gn, vous! Et vous croyez que je vais vous la donner comme a? Cest donnant-donnant, donc juste et quitable, comme tout ce que fait notre bien-aime administration

Vous nen loupez pas une, vous!

Pas plus que vous. Reconnaissez que nous nous entendons bien, malgr nos chamailleries et que la vie deux ne serait pas une mauvaise chose, aussi bien pour vous que pour moi. Je me trompe?

Je dois reconnatre que vous navez pas tout fait tort

Donc, march conclu?

Elle secoue la tte:

Vous tes totalement la masse, vous! Compltement fou!

Osez dire que a vous dplat?

Cest bien la premire fois quun homme me fait ce coup-l. Et pourtant, jen ai connu des tordus! Mais, vous, vous dcrochez donf le pompon!

a ne me dit toujours pas ce que vous

Pas le temps de finir ma phrase, elle membrasse furieusement. Je rponds son baiser avec la mme fougue, nous roulons sur lherbe. Je pense que je peux prendre a pour une rponse positive

Plus tard, au restaurant, elle extirpe un crayon de son sac et crit sur la nappe en papier. Je la regarde, tonn. Je demande:

Vous faites quoi?

Je fais ma liste dit-elle, posment.

Quelle liste?

Vous savez, celle de mes prfrences sexuelles et de mes fantasmes! Noubliez pas de faire la vtre ensuite, vous. Je vous passerai mon crayon.

Je ne la demandais pas si vite

Je pense plutt que vous nen demandiez pas tant.

Un point pour vous!

Peu aprs, elle dchire la nappe et me tend le bout de papier. Jcarquille les yeux: en effet, je nen demandais pas tant, jen ai mme des sueurs froides, et chaud au bas du ventre! Elle rit doucement:

Et tchez dtre aussi franc que moi, cest notre deal, comme vous dites!

Je ferais de mon mieux

Taratata, je veux tout, et pas une seule omission, sinon, notre march est caduc!

Au dessert, je lui tends mon tour ma liste. Elle la consulte, les sourcils levs. Elle se gratte lgrement la joue, puis rpond, aprs stre racle la gorge:

En effet, vous navez rien oubli rien

Vous aussi, vous naviez rien oubli non? Siiiii Redonnez-moi ma liste, allez!

Je lui donne, elle ajoute deux lignes. Elle me retend le papier. Cest mon tout dhausser les sourcils. Je passe ma langue sur mes lvres:

Je pense que, maintenant, nous sommes comment dire quittes, au point?

Je le pense aussi

En tout cas, permettez-moi de vous dire que a ouvre des hum perspectives

Quand la glace arrive, je suis encore tout perplexe, mais secrtement ravi de la tournure de certains vnements. Ce que jai pu lire laisse prsager des folles nuits et mme plus. Jen viens me poser la question si je serais la hauteur. Chaque chose en son temps, me dis-je en plongeant ma cuillre dans la coupe.--ooOoo--Oui, chaque chose en son temps, mais tout vient point pour celui qui sait attendre.

Pour tre franc, je nai pas attendu longtemps. Elle comme moi, nous avions du retard rattraper, chose qui fut faite trois jours plus tard, juste le temps de modifier deux ou trois petites choses dans la maison

Oh oui que a en a ouvert, des perspectives! Et mme plus loin que prvu!

Pour tre franc, je ne mattendais pas certaines choses, mme si elles taient en germe dans la liste qu'elle mavait crite lors de notre premier restaurant. Je ne mattendais pas non plus ma propre faon dtre

Nous nous sommes littralement jets lun sur lautre, nous arrachant presque nos vtements, nous embrassant frocement, sans rpit. Sans avoir bien compris comment, nous nous sommes retrouvs nus, lun sur lautre, elle sur moi, moi en elle. Une cavalcade furieuse, sans tendresse, dans lurgence dun dsir primaire.La liste qu'elle avait faite trottait dans ma tte, lancinante. Elle mavait prvenue qu'elle tait plutt dominatrice: elle ne croyait pas si bien dire. Le plus trange est que je laissais faire, je me laissais faire, alors que dhabitude jtais plutt dans le rle de lasservisseur bien que, souvent, il y avait des limites que je nosais franchir.

Pas elle

Que je sois elle, qu'elle demande, qu'elle exige, qu'elle ordonne, tout a mallait et jexcutais. Jobissais, et jobis toujours, dautant plus que je suis largement pay en retour, la notion de tabou tant trs lointaine pour Ccile, ma matresse, mon amante.

Embrasser, lcher, tter, sucer, engloutir, avaler, tout plein de choses qu'elle sait admirablement faire sur moi, totalement sur moi, mme certaines choses les plus folles, celles qui ne viennent quaux esprits dtraqus condition davoir t, dtre son jouet, sa petite chose, son chiot ses pieds

Un trange quilibre, un marchandage permanent, trouble, pas trs sain, mais si jouissif!

Maintenant, chaque soir, elle est l, je peux la regarder de tout mon saoul, la contempler, ladmirer, suivre les courbes graciles de son visage et de son corps du regard, sachant que dici trs peu de temps, mes doigts suivront le mme chemin.

Deux jours plus tard, alors qu'elle est vautre nue sur mon torse, elle me demande:

Si un jour, jtais un lgume, un corps sans vie, tu me dbrancherais?

Je crois tavoir dj rpondu

Et si jtais autrement?

Comment a, autrement?

Si je ntais plus moi-mme, une autre personne, mme plus bonne vivre

Tu as vraiment de ces sujets de conversation au mauvais moment!

Comment a, au mauvais moment?

Tu crois franchement que jai la tte ce genre de conversation srieuse et tragique?

Ah oui? Et tu as la tte quoi, toi?

Ce fut trs facile pour moi de retourner la situation, elle dessous et moi dessus!

Moi, jai la tte te bisouter, te cliner, te faire lamour encore et encore!

Cest a! Dtourne la conversation!

Nanmoins, ma chrie, je puis te promettre une chose!

Ah? Laquelle?

Je ne veux que ton bonheur et je my emploierai du mieux que je puis!

Jur?

Jur!

Promis?

Tu devrais savoir que je tiens mes promesses.

Elle a un regard trange Une sourde apprhension monte en moi, vite chasse par le dsir que jai delle. Elle demande pourtant: Mme en lgume?

Mme en lgume! En parlant de lgume, je sens que

Que quoi?

Que je vais te dvorer toute crue!

Je lembrasse dans le cou, elle rit. Je sens que les minutes qui vont venir seront chaudes, trs chaudes. Une heure plus tard, je sais que ce nest pas ladjectif chaud quil fallait employer mais brlant!Comme brlant est sa bouche autour de mon sexe, comme caressante est sa langue sur mon gland! Cest un plaisir auquel je ne rsiste pas, je me laisse aller! Ses doigts semmlent dans mes poils, sa main soupse mes testicules, flattant leur peau si dlicate. Cette sensation dtre ainsi choy est divine, je flotte

Laisse-toi aller! susurre-t-elle. Hum?

Oui, laisse-toi aller lche-toi en moi

Et sa langue sactive, insidieuse, efficiente. Une main branle ma tige sa base, lautre malaxe dlicatement mes couilles. Cest diablement efficace! Quel plus grand plaisir que de se faire dorloter ainsi, sachant quon peut se laisser aller sans retenue? Je me demande fugacement si elle consommera tout Un vieux clich que celui de lamante qui boit son homme Et une si grande satisfaction et fiert pour lhomme en question! Je suis cet homme, l, maintenant; pas un autre, cest moi lheureux lu!Je me sens la fois arrogant et un tantinet stupide. Faire lamour narrange pas vraiment les capacits intellectuelles, mais actuellement, cest bien la dernire chose dont je me soucie. Peu mimporte dtre con, dtre stupidement con, pourvu que jaie du sexe, que je le vive fond, sans entrave, sans tabou!

Je songe ce qu'elle ma fait subir, il y a peu de temps. Je songe ce que jai dj reu delle, ces caresses interdites, ces mots prohibs, ces actes dfendus. Sil y a un enfer, je crois que jy brle dj. Mais peu mimporte, nous vivons, nous respirons le sexe sans contrainte, sans pass, juste au prsent.

Je me mords les lvres, je ne vais pas rsister longtemps ce tarif! Cette langue est trop dangereuse! Ces doigts qui sactivent sur ma hampe sont trop trop tout, trop efficaces, trop sensuels, trop exigeants pour que je sache leurs rsister indfiniment! Je sens dailleurs quelques micro-spasmes merger du fond de mon sexe rig et choy Cette petite vicieuse le sait bien! Du coup, elle persvre voluptueusement dans son travail de sape de ma rsistance! Je soupire bruyamment, je la vois qui sactive plus encore. Tant pis pour moi, je ny arrive plus, je plane dj, lointain

Un dernier frisson, un dernier effort pour colmater la digue qui sbrche de partout, puis le tsunami dferle, irrsistible! Je me vide en elle, je remplis sa bouche de mon sperme chaud, gluant! Sa langue visqueuse et brlante continue son action dvastatrice, je continue couler en elle, spasme aprs spasme, repu, vid, combl.Sa bouche est si torride, sa langue si caressante, cet trange mlange de sa chaleur, de sa douceur, de mon sperme et de sa salive autour de ma tige qui se ramollit dj Je sombre dans un demi-sommeil, encore conscient de ses efforts pour me nettoyer. Je souris batement: une femme qui soccupe de moi ainsi, cest le paradis!

Le paradis Mais un ciel ternellement bleu devient vite fade Bien sr, nous emes des orages, des noirs nuages par-dessus nos ttes. Histoire de mieux nous rejeter dans les bras lun de lautre! Et dcouvrir ainsi encore plus loin dautres contres, dautres plaisirsJe ne vais pas tenir jour le catalogue de nos turpitudes sexuelles; ce serait dailleurs une longue liste! Et puis, mettre trop de crme chantilly sur son dessert le rend curant la longue Pas besoin non plus daller zieuter les DVD des stars ou amateurs du X pour avoir des ides! Non, nous, a vient naturellement, comme leau de la source, avec naturel.Le temps scoule, doucement, paisiblement parfois, avec passion souvent, avec tous ces petits imprvus qui rendent belle la vieOui, si belle la vie

--ooOoo--Le mdecin a une sale tte, je naime pas beaucoup a. Il tousse un peu, puis attaque:

Ca va faire combien de temps que vous vivez avec Mademoiselle Adamsky?

Bientt dix ans.

Vous connaissez ltat de votre compagne, de ma patiente Je sais qu'elle est bipolaire, mais que cest stabilis. Cest vrai que ces derniers temps, Ccile est plus instable, mais elle est aussi trs fatigue par sa mnopause prcoce.

Monsieur Rios, je ne vais pas tourner autour du pot plus longtemps. Je suis moi-mme trs tonn que ma patiente ait pu tenir jusqu aujourdhui. Vous lui avez indniablement apport la stabilit dont elle avait besoin pour lutter contre sa maladie. Mais, hlas, lquilibre fragile est rompu par sa mnopause. Les chamboulements hormonaux et dautres qu'elle subit actuellement favorisent lextension de sa maladie. Vous tes en train dessayer de me dire quoi? Que a va aller de mal en pis?

Oui

Comment a!? Il ny a aucun traitement, aucune solution, des rayons?

Jai oubli de vous prciser quune autre pathologie sest invite Alzheimer Alzheimer? Mais comment? Alzheimer, bipolarit, ddoublement de personnalit, tout a est neurologique, une pathologie en entranant souvent une autre

Je suis prostr sur mon sige. Je ne sais que trop bien ce que tout cela signifie, jai largement eu le temps de me documenter depuis dix ans. Je tente nanmoins une question, une esprance, un miracle:

Aucune aucun espoir?

Hlas, non.

Le sol semble seffondrer sous moi. En un instant, nos dix ans de bonheur dfilent sous mes yeux. Je demande dune voie morne:

Combien de temps lui reste-il?

Dans le meilleur des cas, douze dix-huit mois.

Si peu?

Oui, si peu. Il va falloir que vous laidiez

Je le coupe, agressivement:

Parce que vous croyez franchement que je vais labandonner, la planter l sur place?

Moi, je ne crois rien, mais il va falloir que je vous explique ce qui va arriver, et croyez-moi, a ne va pas tre facile. Mais je prfre vous mettre au courant avant, par honntet. Sachez que nous disposons dtablissements spcialiss.

Expliquez-moi

Et il mexplique: le changement de caractre, la perte de contrle, les absences, les ractions brusques et brutales, les injures, la mchancet, les sangles, la camisole. Je comprends mieux le sens dtablissements spcialiss . la fin, je le questionne:

Et elle sait tout a?

Oui, elle le sait dj depuis bien longtemps.

Lentretien est clos, je pars, dboussol. Marchant mcaniquement, je retourne la petite salle o nous tions quand nous sommes arrivs. Elle est l, le trait dfait, anantie. Sans me regarder, elle me lance:

Quitte-moi!

Comment a? Pourquoi veux-tu que je te quitte?

Il ne ta rien dit?

Si, chrie, je sais tout tout de A Z.

Et a ne te fait pas peur, toi?

Honntement, si. Mais nous avons toujours t ensembles depuis dix ans, je taime toujours comme aux premiers jours et je ne veux, je ne vais certainement pas te quitter alors que tu as justement besoin de moi.

Elle me regarde dun air presque mauvais, malgr un vague sourire: Je nai pas besoin de toi! Pas besoin de ta piti! Cest a, va donc faire un petit tour dans les tablissements spcialiss. Non, jusqu prsent, nous avons russi contre la maladie, nous continuerons.

Nous ne gagnerons pas, tu sais, mon chri, nous ne gagnerons pas

Peut-tre, mais nous aurons au moins gagn des annes, des mois, des jours contre elle!

Nous rentrons la maison, Ccile est prostre sur son sige durant tout le parcours. Moi-mme, je ne vaux pas mieux. Je croise des publicits imbciles qui talent un bonheur factice. Comme si on pouvait tre heureux avec une poudre rcurer! Moi, je ne demande rien dautre que de vivre avec celle que jaime, et que le reste du monde nous oublie, que nous vieillissons ensembles, main dans la main. Rien de plus. Je hurle intrieurement contre ce foutu destin, cette vie de merde, tous ces cons qui ne savent pas quils sont malgr tout heureux, ces crtins qui se lamentent pour une peccadille.

Je suis en rage; pourtant, avec Ccile, je savais que le chemin ne serait pas facile. Je croyais narguer le destin, tre plus fort. Celui-ci a attendu bien sagement dans son coin, se faisant oublier et, paf, en pleine poire! Si je navais le volant en main, japplaudirais! Saloperie de destin, va!Soudain, je bifurque sur une petite route, puis quelques centaines de mtres plus loin, je freine et je me range sur le bas-ct. Elle me regarde dun air stupfait:

Tu fais quoi, l?

Descends, sil te plat

Mais pour faire quoi?

Descends, sil te plat, ma chrie.

Elle est prsent hors de la voiture, je lui prends la main, dlicatement, puis je lentrane travers champs, vers le petit bois. Elle me suit sans trop de rsistance. Peu aprs, toujours main dans la main, nous somme face un tang qui scintille sous le soleil. Sans prambule, je lembrasse frocement, nos bouches se soudent lune lautre, nous avons soif de vie, daimer, dtre encore pour quelques instants plus fort que tout lunivers.

Quest-ce qui te prend? demande-t-elle, me fixant dans les yeux.

Il me prend que nous allons partir, loin dici! Tu es fou, compltement la masse, toi! Comment veux-tu faire, hein?

Tu peux te mettre en disponibilit, il me semble. Quant moi, je peux toujours marranger.

Tu sais trs bien que ce nest pas possible, un beau rve mais irralisable.

Ah oui? Cest toujours quand on ny croit pas quon ny arrive pas! Tu me diras que cest simpliste, et alors? Tu te souviens de notre premier rendez-vous? Je reconnais quil y avait mieux pour sduire une femme mais a va faire dix ans que nous sommes ensembles. Tu aurais pari un kopeck sur notre relation quand tu as mis les pieds chez moi, chercher ma tlvision dans tous les coins? Non.

Tu as de ces faons de prsenter les choses, toi Comme toujours dailleurs! Ecoute, il ne faut rien prcipiter, mais je te promets dy rflchir.

Elle y a rflchi, en effet. Moins de deux mois plus tard, elle prenait un cong sans solde, le temps de tout clturer. Maintenant, depuis un bon mois, nous sommes en quasi-vacances et nous en sommes notre troisime sjour. Cest pratique davoir des relations avec une agence de voyage, surtout en hors saison! Le renouvellement de la voiture attendra un peu.Nous voici loin de chez nous, ailleurs, le soleil, la mer, aucun nuage dans le ciel depuis ce midi, depuis que lavion a atterri. La chambre est vaste, spacieuse. Nous venons juste de finir de manger aprs avoir pass la quasi-totalit de laprs-midi dans la piscine. Je sais, ce nest pas trs original, mais a dtend, a repose.

Main dans la main, nous traversons diffrents couloirs aux colonnes marbres, aux lourdes tentures. La lourde porte de notre chambre souvre. Ccile se jette lintrieur et me tire par la main. Jai juste le temps de claquer tant bien que mal la porte derrire moi, que je suis happ dans la chambre. Elle me pousse sur le lit puis se jette sur moi, sa bouche vorace sur la mienne.

Encore heureux que nous soyons en hors saison, sinon nos voisins auraient eu de quoi se plaindre! Pour tout dire, nous ne sommes pas silencieux, le lit non plus! La nuit commence dehors, la baie vitre est lgrement entrouverte, lair frais fait du bien dans la chaleur de notre frnsie! Le lit est dj un champ de bataille, les oreillers et les draps sont dj au sol pour la plupart dentre eux! Nous nous en fichons perdument!Ca va faire dix ans que nous sommes ensemble, dix ans que nous nous dcouvrons chaque jour, dix ans chercher nous apprivoiser mutuellement, malgr nos ttes de mule respectives, dix ans construire notre bonheur Dix ans damour, de tendres sentiments, de folies nocturnes. Je sais ce qu'elle dsire, je sais comment elle le dsire; le privilge de se mettre au mieux au diapason de celle quon aime!Il est vrai quil marrive encore de me planter en beaut Mais au moins jessaye de faire au mieux, autant qu'elle aussi, de son ct, fait du mieux pour me rendre heureux.

Il va tre bientt minuit, elle a dj joui de multiples fois, mais elle adore a. Au dbut, elle est plutt passive, cest moi de la chauffer en quelque sorte Il faut de nombreux clins, de bisous, dagaceries. Je joue avec ses seins tout dresss, je taquine ses ttons tout rouges sous le dsir. Jexplore du bout de ma langue son intimit, je contourne avec dlicatesse son bouton rose, je glisse le long de ses lvres intimes, elle jouit ainsi une premire fois, doucement, puis une seconde, puis dautres fois parfois, le tout en crescendo. Alors je me frotte elle, nos sexes colls lun lautre, mon frein lore de son clitoris dj trs turgescent. Elle soupire daise. Dautres plaisirs, dautres jouissances. Longtemps. Puis je me glisse en elle, lentement, posment, et alors commence une longue monte vers dautres cieux

Elle est sur moi, dans une de ses positions prfres, celle o elle me chevauche impudiquement, totalement, rive, visse sur mon pieu, pivotant autour de lui comme laxe du monde, sen servant comme dun jouet, lpousant comme un tre aim.Moi, je vois son corps ador, ses seins qui gigotent lubriquement sous ses assauts, son ventre rond oscillant, ses hanches que je ptris, son menton vers le plafond, ses petits cris, son souffle court. Cest primal, cest bestial, mais cest bon, si bon!

Je vois ma bite entrer et sortir de ses lvres luisantes, je la vois senfoncer sans rpit, sans vergogne, sans lassitude. Je voudrais la remplir, occuper tout son vagin, lexploser, la faire mourir de plaisir, la dvorer mme. Jai du mal me contenir, je veux rester dur pour elle, pour moi, faire durer linfini ce moment o elle est sur moi et moi en elle, cet instant o cest elle qui dirige tout, o cest elle qui soffre son plaisir, o cest elle limpudique, celle qui dsire, qui veut et qui prend.

Ses ongles rentrent dans ma chair, mes bras souffrent, son plaisir sannonce, ses cris redoublent, ses paroles sont incohrentes. Ses griffes entrent en moi, je serre les dents, son corps sagite, des vagues rayonnent sur sa chair, sa peau, ses seins ballotant sous ses vastes et brutales secousses.

Un cri, un seul, un long hululement, animal

Mes bras sont en sang, ma queue est torture sous ses soubresauts dments, Ccile se tord, ondule, vacille, vibre! Un instant de folie, dabandon! Soudain, comme vide, puise, elle saffaisse sur moi, son nez dans mon cou, son bassin frissonne toujours, impudiquement, son vagin convulsif enserre ma barre plante en elle. Son souffle rauque et chaud mon oreille, son plaisir qui se dilue dans tout son corps, ce plaisir que je lui ai donn, cette allgresse sensuelle qu'elle sest offerte

Peu aprs, elle est nouveau dresse au dessus de moi, conqurante, fire. Son regard trouble plant dans le mien semble me dire: tu es moi, je profite de toi, je veux tout de toi! Moi, je rsiste toujours contre la tentation de me vider en elle, de la remplir dans ses moindres recoins. Je sais ce qu'elle attend de moi, ce qu'elle exige de moi, depuis les dix ans que nous sommes ensembles. Je veux la mener lpuisement, qu'elle devienne folle de ma queue sur laquelle elle senfonce, elle se plante sans pudeur. Dautres fois, nous avons t trs loin, aujourdhui, nous irons peut-tre encore plus loin, je ne sais pas

Elle est toujours au-dessus de moi, remuant son bassin pour mieux me ressentir en elle, pour mieux profiter de mon endurance! ses dents qui se serrent, la lueur trange de ses yeux, je sais quune autre vague sannonce. Lentement de son front perle une goutte de sueur, je la vois nettement glisser le long de sa tempe puis de sa joue. Ccile ny prend pas garde, elle est trop absorbe par le plaisir qui monte en elle; moi, je regarde, fascin, cette goutte descendre sensuellement le long de son cou. Elle glisse vers le bas, aide par les innombrables sursauts du corps sur lequel elle coule, laissant peine une fine trace humide.

Mon amante dchane entre et sort, irrsistiblement; ma bite rsiste du mieux qu'elle peut, malmene dans cet antre chaud et dgoulinant qu'est cette chatte en furie. La goutte poursuit sa descente, elle pouse un sein, sapproche dune arole. Cest fascinant, trange, sensuel.

Je serre les dents, mes testicules sont deux doigts dexploser tant la tension est forte, furieuse. La goutte contourne le tton, saccroche aux asprits de larole puis essaye de continuer sa descente le long du sein convuls.

Jagrippe les bords du matelas, mes doigts serrent le drap, cherchant le rebord du lit, pour mieux rsister cette ambiance de folie, ce besoin irrpressible d'clater! En cet instant, jai envie dexploser, de dflagrer, de la mordre, de la griffer, de la gifler, de la soumettre! Jai envie darracher sa peau, de dchiqueter ses seins, que son sang jaillisse!

La goutte de sueur arrive se dtacher de larole, elle sapprte continuer son chemin. Soudain, Ccile plaque ses mains convulsives sur ses seins, crasant la goutte, lanantissant. Jamais je ne saurai jusquo elle aurait plus descendre

Elle carte un peu plus les jambes comme pour mieux sombrer en moi, ses cris sont tranges, spasmodiques, son ventre se zbre de contractions, de longs frissons la parcourent, elle se laisse totalement aller, elle coule dans son plaisir.

Soudain, elle serre les doigts, ses ongles rentrent dans la chair tendre de ses seins, elle crie, elle se cabre, la tte au ciel. Je me raidis, les yeux grand ouverts. Abasourdi, je vois alors des traces rouges perler entre ses doigts convulsifs.

Elle crie, elle hurle presque, son plaisir est intense, une vibration dans lair, une lame dair brlant. Le sang goutte le long de ses ongles, elle crie toujours, une longue plainte la fois sensuelle et rageuse.

Un fin filet rouge glisse sur un doigt, un autre pouse un premier sein, puis lautre. Ccile me chevauche toujours, se visse autours de moi, plonge en moi. Sa cavalcade insense me remue, mpuise, ma tige malmene a du mal en suivre le rythme endiabl qu'elle lui impose. Cest de la pure folie, un truc dment, je magrippe aux rebords du matelas, fascin par le sang qui perle de plus en plus entre ses doigts voraces.Soudain, elle simmobilise, ttanise. Une longue plainte schappe de ses lvres, un gmissement animal, autre. Je relche mes doigts, le temps semble fig, nous sommes deux statues rives, soudes lun lautre, dfinitivement, ternellement.

Lche!

Une autre voix, lautre Ccile parle. Je me redresse, elle saisit sans mnagement ma tte entre ses mains ensanglantes, me plaquant contre sa poitrine. Ma langue caresse ses seins, son sang tout chaud. Je sens sur moi son regard fivreux. Je lche ses plaies, je bois son sang rouge, bouillant, onctueux, jen veux encore plus, je la mordille, je presse mes lvres sur elle pour en obtenir plus, pour la boire, pour vider.

Je sais qu'elle sourit

Dautres turpitudes, dautres ordres, la mme folie diffuse Nos morsures comme pour nous manger, nos insultes comme pour nous abreuver, nos treintes furieuses, cette atmosphre dcadente, dliquescente Dominante et domin jusqu prsent, dautorit, jinverse les rles; elle se dbat, refuse puis se plie ma volont. Son regard est noir, le mien est plus sombre encore. Un instant suspendu, nous affronter. Soudain elle sourit trangement, elle sent qu'elle aura son plaisir pervers, celui qu'elle aime en final, comme un couronnement. Alors elle cde et moi, je prends!

Sa croupe rebondie est ma sombre exaltation, ma frnsie incongrue mais tellement jouissive! Mes mains sur ses hanches, mon bas-ventre sur ses fesses, elle quatre pattes et moi genoux, jentre et je sors avec dlectation, la dominant, lassouvissant.

Je coulisse sans effort dans sa mouille qui menglue, entre ses lvres dtrempes. Jadmire son mignon postrieur juste sous moi, ses reins creuss, son dos blanc, et les milles secousses qui zbrent sa peau et son corps. Parfois, lors dune secousse, jentraperois un sein qui ballotte prs de son bras. Cest un tantinet vulgaire de voir cette masse un peu flasque sagiter ainsi, dans une telle position, mais faire lamour nest pas forcment une activit de trs haute tenue! Je dirais mme que plus cest un peu (beaucoup) crapuleux sur les bords, mieux cest!Elle se presse contre moi, remue agrablement du popotin, tourbillonnant autour de laxe que je lui enfonce sans trop de mnagement, tandis que je la maintiens fermement. L, maintenant, cest moi qui tiens le manche et qui le lui fais savoir. Dailleurs, elle ne bronche pas, soumise et mme demandeuse

Je me retire momentanment, je me frotte sans vergogne entre ses fesses, juste avant de replonger voluptueusement en elle. Cest follement excitant! Pourtant ce nest pas la premire fois que je le fais, a fait mme des annes que je pratique avec Ccile, mais je ne men lasse pas! Tout comme je ne me lasse pas de lui faire lamour encore et toujours, sans raison valable, uniquement parce que cest elle, rien qu'elle. Faut-il une raison ou tre fou dune personne?Puis je me dcide, jai le manche maintenant, et jescompte bien le lui faire sentir! Alors posment, je me retire lentement, le faisant bien coulisser entre ses lvres mouilles, puis je saisis le bout de ma barre entre mes doigts et, calmement, mthodiquement, je lapplique dans le creux de la petite cuvette de son anus dj tout humecte.

Elle frmit. Je souris.

Fermement cal, je pousse lentement mais srement. Sa rondelle souvre petit petit, larrondi de mon gland senfonce dj. De son ct, elle se met en appui sur ses bras, son postrieur bien mis en vidence, moffrant une voie royale. Sans rmission, je continue ma lente avance en elle, le gland disparat peu peu, mon frein sengloutit en elle, ma tige de chair coulisse inexorablement. Jaurais pu y aller plus rapidement, plus brutalement, comme je lai dj maintes fois fait, mais aujourdhui, je veux moffrir le plaisir de menfoncer en elle trs longuement, de lui faire sentir millimtre par millimtre toute ma tige.Elle soupire, elle gmit, elle grogne. Moi, je me matrise du mieux que je puis, car senfoncer ainsi est trs dangereux pour son self-control! Avec plaisir, je contemple la moiti de ma bite dissimule en elle, je ressens terriblement bien les moindres asprits de son troit conduit. Une sensation denfer, hautement prilleuse, tant je dois lutter pour ne pas mabandonner !Toute ma tige est en elle, mes testicules butent sur sa chatte dtrempe. Je suis prsent bien au fond de son fourreau tout chaud, dans cet endroit si maudit par tant de prdicateurs, honni par la morale bien pensante de nombre de sicles davant. Mais tellement fascinant!

Cest alors que retentit le signal de la folle cavalcade!

Peu mimporte le reste du monde, je la veux compltement soumise mes coups de butoir! Je la veux consentante mon intrusion en elle! Je coulisse en elle, ma tige la pistonnant sans rpit, sans tendresse, dans une atmosphre de folie, dans le simple but daller en elle, toujours un peu plus loin, toujours un peu plus remplie, toujours un peu plus envahie! Je ne mnage pas mes efforts, elle se cabre, sentrouvre plus encore, sa rondelle totalement ouverte, son conduit compltement satur par ma prsence arrogante. Ma bite mchauffe dans cet troit couloir sombre, je nen ai cure, je veux la dfoncer, je veux lenculer bestialement, sauvagement, animalement. Je veux exploser sa chair, exploser en elle!Jagrippe comme un fou furieux sa croupe soumise, son corps qui mappartient, cette femme qui est prsent mon esclave, dont la seule loi est mon plaisir, ma femme, mon amante, ma matresse, celle que jaime et que je dsire plus que tout, elle que je vnre et que jasservis en mme temps, celle que jadore et que je salis.

Jexplose, je fuse en elle, je me dverse, je lenvahis, je dpose ma marque en elle, je la remplis de moi-mme. Je suis en elle, compltement en elle, irrmdiablement soud son corps, riv dans cet endroit sombre, viss dans ma turpitude, sale, sali, salaud mais tellement satisfait, bat!

Un temps suspendu, avachi sur elle les minutes passent, je suis bien, si bien

Je me retire, son sexe a une trange couleur, textur de rouge et de blanc, et aussi dautres choses indfinissables Entre ses fesses lgrement rougies, son anus carlate ruisselle, souvre mon regard. Je suis trangement satisfait de moi. Je maffale dans le lit, fatigu, repus! Non, pas tout fait: une dernire fois exiger. Je me rehausse juste un peu sur loreiller, mon sexe avachi et gluant sous son nez. Pas besoin de parole, elle sait, elle fait.Mort puis nouveau vivant; tnbreux puis nouveau lumineux; enfer puis paradis. Faire encore lamour, toujours, encore, une nuit de folie au cours de laquelle je trouve toujours le moyen de revenir la vie. Une nuit furieuse, sans tat dme que deux corps qui se veulent, qui se prennent, qui se dchirent

Un long gmissement, le sien, le mien, lunisson, harmonieux. Nos plaisirs, nos fantasmes, nos lubies assouvies, nos corps qui spanchent, qui scroulent, qui sentremlent, nos bras qui senlacent, nos mains qui se cherchent. Et toujours cette sourde plainte, ce souffle rauque qui nous unit

Un chant du cygne notre chant du cygne--ooOoo--Les mois passent, ltat de Ccile empire, la plupart du temps, elle ne me reconnat pas, son visage est tout autre, mconnaissable, haineux. Ses seules paroles sont des injures, peu importe qui soit prsent. Parfois, elle est apathique, sans raction. Rarement, elle est capable de me rpondre, au ralenti. Une phrase complte, parfois deux. La toute dernire fois, par trois fois, un seul mot: promesse.Je ne sais que trop bien ce que a veut dire

Dehors, le ciel est gris, sombre. Je ressens la mme chose en moi. Je dmarre la voiture rageusement. Mes ides sont confuses, mme si je sais trs bien, au fond de moi, que cest la seule solution digne delleJe retourne la voir, une fois, deux fois, plusieurs fois je temporise, un pas en avant, un en arrire. Au final, le temps passe mais ne rsout rien.

Aujourdhui, elle est l, attache sur le lit, assomme par les tranquillisants, le regard vague, mi-clos. a me fait mal au cur de la voir ainsi, inerte, lgume. Mais cest toujours mieux ainsi, plutt que cette autre personne qui lui a prit tout son corps, son me. Dlicatement, je lui pose un garrot, elle ne ragit pas. Avec soin, je prpare linjection comme je lai appris, il y a bien des annes, quand une de mes amies tait sous traitement. Je tapote sur la seringue pour vacuer les bulles. Les bulles Cest si drisoire

Un grand vide se fait en moi. Mme si cest idiot, mme si a ne sert rien, mme si ce nest plus ma Ccile qui est tendue l, je dois lui parler.

Je jai t trs heureux avec toi, ma chrie, je ne regrette franchement pas les annes, toutes ces annes de bonheur que tu as pu mapporter. Mais hlas, ma Ccile, ces annes, elles sont derrire nous. Je je tavais fait une promesse je la tiens, je

Je narrive plus parler, continuer. Mme une simple phrase vraie comme je taime, je ne sais plus la dire, elle reste bloque dans ma gorge. Alors, jexpulse un peu de liquide, je pince son avant-bras et jenfonce laiguille.

Leffet est foudroyant, peine une secousse et ses yeux sont dfinitivement clos.--ooOoo--Le procs fut long, cest aujourdhui le verdict. Je men fous, tu nes plus l depuis maintenant un an. Qui ai-je tu? Ma Ccile ou cette trangre qui vivait en elle? Les gens me regardent dun air attrist, certains disent que la loi est mal faite. Beaucoup disent que je ne suis plus que lombre de moi-mme. Jai dj pay dix ans de bonheur dune bien trange faon--ooOoo--

Je viens juste de sortir de prison. Ca va faire maintenant deux heures que je suis chez nous. Malgr les volets clos, malgr lodeur de renferm, malgr la poussire sur les meubles, ta prsence est toujours l. Je pose mon gros carton sur la table. Je le dballe avec soin. la place dhonneur, dans le salon, jinstalle une tlvision que je ne brancherai jamais sur une prise lectrique. Son cran vide sera ma seule et unique compagnie, le seul morceau palpable de toi parmi mes souvenirsUn grand merci Catsatum qui a rvis ce textePetite histoire, petite prcision: un peu pas trop petit, comme rptition courte distance

Japerois enfinne serait-il pas plus indiqu que ce bovin je regarde?

Pas de point dexclamation, elle saute pas au plafond, quand mme (pas encore du moins, je suppose)

Sa prsence mintrigue quelque peu, tout de mme? Cest un peu sec.

Ca naurait de sens que si elle avait dit je trouve cela trange et bizarre. L, soit vous remplacez par Vous ne trouvez pas?, soit vous compltez la phrase davant par ce qui aurait d tre.

que donne, que dgage, qui mane de: limpression va de linterlocutrice vers lextrieure. Sur suggre le sens contraire.

y trouver. Si vous pouvez viter les verbes un peu passe-partout comme voir, dire, faire, cest mieux, a rend lcriture plus varie.

Elle ne pourrait pas carter quelques toiles daraigne? Juste pour montrer sa conscience professionnelle

moyen de dplacement usuel

premire chose?

Dsol, si cest un jeu de mot, il tombe plat (cest le cas de le dire), les talons aiguilles nayant rien dtale, et elle ne sest aps encore tale... Sinon, pidestal est plus indiqu.

Il sagit dune norme industrielle reconnue officiellement, elle doit donc scrire selon sa graphie usuelle (chiffres).

Verbe juste et image prcise, mais ne craignez-vous pas quil soit trop prcieux?

Mme si lhomognit des temps semble imposer le prsent, celui-ci casse le rythme de cette expression courante. Dautre part, le pass simple, dans ce cas prcis, ne choque pas outre mesure: on dit que quelque chose vient darriver, et on constate quoi dans la phrase suivante.

de tenir?

aurait pu me semble meilleur.

Il semble plus logique de sparer cette phrase du paragraphe: elle marque une rupture.

Idem. Sparer les deux propositions en deux phrases permet au cerveau de parcourir plus de chemin. La virgle oblige ll aller tout de suite au bout pour cherche le sens, alors que le pojnt permet de marquer la succession des impressions.

prsent en face de moi?

Cest peut-tre volontaire, mais cest maladroit. jessaie de me contenir ou autre chose que tent (mais je ne vois pas quoi, a risquera dtre trop prcis)

Je pencherai pour carbonara, non? Toutes les recherches que je viens de faire montrent que cest une orthographe dvoye, incorrecte (une carbonate ou carbonade, en provenal, est une manire de faire griller les viandes, pas de prparer les ptes).

Vous avez pas de pot: je suis dorigine italienne, en plus

L, par contre, a ne va pas: ce genre de sauce ne se garde pas, mais en revanche est trs rapide prparer. Passage modifier.

Puisque cest le ptit frre, allez-y: cest relou!. Ca appuie le djeuns de derrire.

sentiment, impression?

Symtrie avec lun pour lautre, juste au-dessus, qui renforce le propos.

Sil y a un doute exprim, je crois est incorrect, il faudrait crie je croyais. Mais je ne vois pas ce que vous voulez sous-entendre, ici. Quil pense quelle na pas tout dit? Ou il lui en demande confirmation? Pas clair, prciser.

Etes-vous sr? On attend moi en elle, ici. Linversion prend un sens trs fort, mais peut ne pas tre comprise.

le fait rfrence au manche, alors que vous voulez faire rfrence la barre. Mais il faudrait quand mme reformuler ce passage aux anacoluthes un peu trop faciles

en elle deux fois?

Le buttoir est un outil de jardin. Je veut bien admettre une certaine polyvalence des engins, mais tout de mme, restons-en au classique et traditionnel coup darrt.

vraie, plutt, ou alors aussi vraie quun je taime. Dans un moment dmotion trs forte, prfrez des mots courts.

Je pense que ce sparateur, mme aussi proche du prcdent, est ncessaire. Vous ne dites rien de la dure de la peine (ce qui est trs bien), mais ne pas mettre de sparateur peut laisser supposer quelle a t brve. L, il y a doute.

Et je pense sincrement que cest mieux ainsi.

ta prsence flotte encore, se ressent toujours, imprgne encore chaque espace, chaque objet. Une prsence peut tre ressentie, pas exister.