Reboisements sur les dunes Laricios de Corse.

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Reboisements sur les dunes de Culbin Laricios de Corse. Domaine du Comte de Maray. Tares dues aux dégâts d'écureuils (grey squirrels) lorsque l'arbre était jeune.

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Reboisements sur les dunes de Culbin

Laricios de Corse.

Domaine du Comte de Maray. Tares dues aux dégâts d'écureuils

(grey squirrels) lorsque l'arbre était jeune.

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LES REBOISEMENTS EN ECOSSE Indice bibliographique: F 23 (41)

Cet article fait suite à un article des mêmes auteurs, intitulé « Les forêts d'Ecosse » et paru en mars 1952, pages 187 à 20c.

Malgré toutes* les différences qui peuvent marquer l'Ecosse parmi les régions qui constituent la Grande-Bretagne, il ne serait pas nor­mal d'étudier le problème du reboisement en Ecosse sans le replacer dans le cadre général de la Grande-Bretagne.

L E PROBLÈME DU REBOISEMENT EN GRANDE-BRETAGNE

M. le Conservateur DE VATSSIÈRE a déjà indiqué (1) que la Gran­de-Bretagne, dont le taux de boisement n'est que de 5,5 % pour une superficie totale inférieure à celle de la France où le taux de boise­ment atteint 18,9 %, a dû, d'abord en 1914-1918, puis en 1939-1944, entamer fortement son capital forestier par des réalisations mas­sives et abusives, et, dans notre bref historique des forêts écossaises, nous avons vu comment ces réalisations avaient conduit la nation britannique à mettre sur pied une puissante organisation de reboi­sement.

Le programme de 50 ans que les Britanniques se sont fixé a pour but essentiel d'assurer à la nation en cas de conflit une réserve de bòis convenable, et, comme but secondaire, de couvrir dès le temps de paix une part, environ un tiers, de ses besoins en bois d'oeuvre. Il cherche à obtenir dans 50 ans, 2.000.000 d'hectares de forêts, dont environ la moitié en Ecosse.

Dès 1947, pour préciser leur programme, les Britanniques se sont livrés au recensement de tous les bois de plus de 2 ha de surface. Ce recensement a été terminé en 1949, et les résultats en sont les suivants :

(1) DE VAISSIÈRE: Reconstitution de la propriété forestière en France, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. Bull. Soc. For. Franche-Comté. — Mars 1949.

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TABLEAU I

Forêts domaniales

ha '

ECOSSE

Forêts particulières

ha TOTAL

ha

Bois et plantations ioo.ooo 128.000 228.000 Idem, rasés à replanter... 8.000 152.000 160.000

TOTAL actuel 108.000 280.000 388.000 Nouvelles terres à boiser

en 50 ans 612.000

TOTAL dans 50 ans 1.000.000

TOTAL POUR LE ROYAUME-UNI

Forêts domaniales

ha

Forêts particulières

ha TOTAL

ha

Bois et plantations 248.000 480.000 728.000 Idem, rasés à replanter... 20.000 268.000 288.000

TOTAL actuel 268.000 748.000 1.016.000 Nouvelles terres à boiser

en 50 ans 984.000

TOTAL dans 50 ans 2.000.000

On voit que le total des plantations à faire sur coupes rases et terres nouvelles est de 1.272.000 hectares. Le programme, établi en 1947, c'est-à-dire avant la fin du recensement, correspondait très sensiblement à ce résultat.

Ce programme était le suivant:

Décade

i°) 1947-1956 2°) 1957-1966 3°) 1967-1976 4°) 1977-1986 5°) 1987-1996"

Totaux .

Surface orodi

Plantation

200.000 300.000

300.000

240.000

160.000

1.200.000

TABLEAU II

Régénération artificielle

240.000 300.000

40.000

40.000

40.000

660.000

Total

440.000 600.000

340.000

280.000

200.000

1.860.000

Surface produc tive au début de la décade

800.000 1.000.000

1.300.000

1.600.000 1.840.000

Z000.000 ha

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LES REBOISEMENTS EN ECOSSE 467

Et il devait se réaliser pendant la première décade au rythme sui­vant :

1946-47 . . . . 1947-48 . . . . 1948-49 . . . . 1949-50 . . . . 1950-51 . . . . 1951-52 . . . . 1952-53 . . . . 1953-54 . . . . 1954-55 . . . . 1955-56 . . . .

Totaux

TABLEAU III

Forêts domaniales

Plantation ha

τ 0.000 12.000 14.400 i6.8oo 19.600 23.200 26.000 26.000 26.000 26.000

200.000

Régénération artificielle

ha

2.000 5.200

8.800 12.000 15.200

20.800 24.000

24.000 24.000 24.000

160.000

Forêt privée Régénération

artificielle ha

2.000

4.000

6.000 8.000 10.000

10.000 10.000 10.000 10.000

10.000

80.000

Total ha

14.000 21.200 29.000 36.800 44.800 54.000 60.000 60.000 60.000 60.000

440.000

Les Britanniques se sont mis d'arrache-pied à exécuter ce pro­gramme et les écarts sur les prévisions sont faibles :

1946-47 1947-48

1949-50

Prévu ha

I 2 . 0 0 0

17.200

28 .800

Réalisé ha

IO.400

14.4ΟΟ

2 I . I O O

Défaut ha

I .600

2 .800

7.700

Ce qu'il faut retenir du programme de la Grande-Bretagne, c'est : Son importance: Reboisement de 1.860.000 hectares en 50 ans,

dont 984.000 en terrain neuf. Sa realisation méthodique, qui suit sensiblement ce qui a été tracé

à l'avance. L'importance qui y est attribuée à l'Etat: Les programmes esti­

ment que la propriété forestière privée entamée par la guerre sera capable de se reconstituer, mais non de s'étendre. Les boisements nouveaux, au rythme de 20.000 à 30.000 ha par an doivent être uniquement le fait de l'Etat.

L'importance qui est attribuée à l'Ecosse: Les forêts actuellement existantes en Ecosse représentent 38 % des forêts du Royaume-

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Uni. Il s'agit d'y effectuer plus de 80 % des plantations prévues pour porter la surface des forêts écossaises à 1.000.000 d'hectares.

Comment est prévu le financement de ce programme ? En fait, il est financé par le budget général. Le 30 novembre 1945, un crédit de 20* millions de livres sterling a été ouvert à la Forestry Com­mission pour cinq ans, moitié de la première décade, crédit cor­respondant à la dépense prévue de 40 millions de livres en 10 ans. La continuité de l'effort de la nation britannique pour créer une réserve forestière suffisante repose sur l'accord unanime des par­tis, donc du Parlement, pour reconnaître le caractère indispensable de cet effort.

PARTICULARITÉS DU PROBLÈME ÉCOSSAIS DU REBOISEMENT

Acquisitions

Si l'Ecosse a un rôle de premier plan à jouer dans l'effort de reboisement du pays, c'est tout simplement parce qu'elle offre les possibilités les plus grandes d'acquisition par l'Etat de terrains sus­ceptibles d'être reboisés. Nous avons exposé précédemment com­ment, au cours des siècles, l'Ecosse s'était trouvée déboisée, et les terres, mises en culture; puis comment, avec la dépopulation due à la répression anglaise du soulèvement Stuart, le territoire fut converti en parcours à moutons. Sur les 6.400.000 ha des parcours à moutons du Royaume-Uni, plus de 4.100.000 ha sont situés en Ecosse. En Ecosse même, ils sont répartis soit dans les Southern Uplands le long de la frontière entre Angleterre et Ecosse, soit dans les Highlands. C'est parmi ces terres que l'Etat compte acqué­rir les 612.00Q hectares qui lui sont nécessaires, l'influence de ces achats massifs sur la production du mouton ayant été soigneuse­ment étudiée et jugée négligeable, influence de 2,2 % sur la pro­duction nationale.

L'acquisition des terrains est une partie importante du problème que les forestiers écossais ont à résoudre: il faut que la réalisation du programme d'acquisition précède très largement celle du pro­gramme de plantation. L'expérience prouve que la marge de sécu­rité à observer est d'avoir constamment une avance dans ces achats égale à sept fois le programme annuel de plantation.

La valeur de la terre varie de 2,10 L à 3 L par acre, c'est-à-dire de 6.250 F à 7.500 F l'hectare.

La terre est généralement achetée en toute propriété, mais tan­dis que l'Angleterre use également de baux emphythéotiques à 99 ans, en Ecosse, il existe une disposition spéciale appelée « Feu » qui consiste dans le versement d'une rente perpétuelle.

La politique appliquée jusqu'ici très strictement est d'avoir re­cours uniquement à des achats amiables sur le marché. Ces achats ne se sont pas heurtés jusqu'à présent à des difficultés en Ecosse,

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Nous signalons toutefois qu'il y a eu des protestations tout récem­ment en Pays de Galles contre les achats massifs de la Forestry Commission, ces protestations provenant évidemment des intérêts en cause, c'est-à-dire des éleveurs de moutons.

La Forestry Commission dispose de pouvoirs qui lui permet­traient le cas échéant de procéder à l'expropriation des terrains qui lui seraient indispensables, mais c'est une mesure qui ne sera em­ployée qu'à la toute dernière extrémité, car elle répugne au tem­pérament britannique.

Les acquisitions portent sur des massifs de quelque 200 hectares à plusieurs milliers d'hectares.

Nature des sols

En Ecosse, les terrains, comme nous l'avons signalé en débu­tant, sont tous siliceux, mais d'une nature géologique extrêmement variée. Et pourtant ces sols présentent, du point de vue forestier, des conditions de plantation relativement uniformes. Cela est dû essentiellement au climat qui couvre une bonne partie de l'Ecosse d'un manteau de tourbe, d'épaisseur décroissante d'ouest en est, disparaissant à l'est sur les sols les meilleurs ou les mieux situés. En France, la tourbe est le plus souvent une formation topogra­phique clue à l'accumulation d'une eau stagnante dans un bassin. En Ecosse, la tourbe est due, répétons-le, essentiellement au climat.

L'indice le plus satisfaisant pour relier la présence de la tourbe· aux fac­teurs climatiques semble être l'indice N / S proposé par MEYER (Chemie der Erde, 1926, ff. 207-347) pour exprimer l'action combinée de la pluviosité en millimètres: « Ν », et du taux d'evaporation : « S ». Bien que la tempé­rature et la force des vents avec leurs variations saisonnières' aient une action certaine, la formation de tourbe semble bien dépendre à un degré marqué de cet indice : en Ecosse, il y a parallélisme étroit entre les régions d'indice N / S supérieur à 1.000 et les régions où la tourbe constitue le principal type du sol en équilibre.

Cette notion est capitale, car là où il s'agit de formation tour­beuse due à la topographie, la suppression des causes qui provo­quent l'excès d'eau peut faire régresser la tourbe, tandis que cette suppression ne peut être envisagée pour la tourbe d'origine clima­tique.

Main-d'œuvre

Nous avons déjà signalé les malheureux effets de la répression du soulèvement Jacobite de 1745. La dépopulation est restée telle que l'un des problèmes,, et non des moindres, que pose la mise en valeur de ces terres est un problème de colonisation, et que le dé­faut de main-d'œuvre a influencé considérablement la technique des reboisements écossais.

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470 REVUE FORESTIÈRE FRANÇAISE

LES ESSENCES DE REBOISEMENT

Le dernier recensement des terrains boisés d'Ecosse a donné pour les 228.000 hectares de forêts existantes la répartition sui­vante :

Pin sylvestre 80.000 ha Epicéa de Sitka 32.000 Epicéa commun 28.000 Mélèze d'Europe 19.200 Bouleau 1.880 Chênes 1.800

20 autres espèces ont été recensées parmi lesquelles des quanti­tés importantes de mélèze du Japon, de Douglas, etc..

Cette statistique nous donne une idée de la proportion des reboise­ments dans les forêts écossaises, et du rôle relatif attribué aux prin­cipales essences de reboisement.

Complétons les renseignements déjà fournis sur l'histoire des re­boisements.

Le mouvement commença au xvie siècle avec des feuillus spécia­lement utilisés comme abris pour les cultures. Ces feuillus, la plu­part importés d'Angleterre, furent l'érable sycomore, le frêne, l'au­ne, le hêtre, le bouleau.

Au xvin e siècle., les plantations s'orientèrent vers le pin sylves­tre et l'épicéa commun (sauf les chênes de Darnaway). C'est au cours du même siècle que furent introduits le sapin pectine et le mélèze d'Europe.

Au xix* siècle, le sapin de Douglas fut introduit en 1827, et l'épi­céa de Sitka en 1831, l'un et l'autre sous forme d'individus, et les plantations en massif de ces essences furent effectuées à partir de 1880.

Les plantations de la Forestry Commission, après 1919, com­prirent essentiellement du pin sylvestre, du mélèze d'Europe, de l'épicéa commun, et, accessoirement, du Douglas, du mélèze du Ja­pon, de l'épicéa de Sitka, et un peu de bouleau.

Le choix des espèces à planter est étroitement limité par le climat et le sol.

Voici des exemples d'action prépondérante du climat. Il résulte de la température que le tilleul et le châtaignier ne

réussissent guère en Ecosse, et que le sapin baumier et quelques épicéas y végètent plutôt misérablement.

L'action du vent est double. Il occasionne d'abord des chablis, mais surtout il provoque une diminution du taux d'accroissement qui rend certaines plantations non rentables (sycomore, etc .) . . En ce qui concerne les gelées printanières et estivales, signalons que dans des plantations récentes de mélèze, les forestiers écossais

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constatent actuellement un dépérissement caractérisé par une descen­te de cime qu'ils appellent « Dye Back » et qui leur cause quelque souci. Us attribuent ce dépérissement, auquel semblent spécialement sujettes les races en provenance de Suisse, à l'action prolongée des

•gelées printanières et estivales. Le sol est, après le climat, le facteur déterminant du choix des

essences dans les reboisements écossais. Très tôt, les forestiers ont procédé à des observations et à des études importantes pour relier l'essence à employer aux plantes existant sur le terrain, car ces plan­tes sont censées refléter l'état du sol. Ils ont très soigneusement tra­vaillé la phytosociologie des surfaces à reboiser.

Toutefois, si précises que soient les connaissances écologiques et phytosociologiques amassées par les Ecossais, elles sont parfois en défaut, car, en raison du pâturage des moutons et des écobuages pratiqués par les fermiers, la végétation du sol peut ne plus cor­respondre au climax qui serait réalisé si pâturage et écobuages étaient supprimés. Le choix de l'essence de reboisement qui doit reposer sur le climax, et non pas sur l'un de ses aspects « trauma-tiques », risque donc de ne pas être correct.

Pratiquement, voici ce qu'admettent les Ecossais : Dans les landes du type « Bruyère », le pin sylvestre doit s'em­

ployer là où la callune est dominante. Le mélèze d'Europe s'associe volontiers à la Fougère-aigle. Le mélèze du Japon peut convenir dans les sols mouilleux.

Dans les landes sur tourbes, l'épicéa commun réussit sur les tour­bes du type « Juncus » ; le mélèze du Japon, sur les tourbes du type (( Fougère-aigle » ; l'épicéa de Sitka, sur la tourbe à molinie ; le pin sylvestre et l'épicéa de Sitka, sur les tourbes à callune et molinie ; et Pinus contorta, sur les tourbes les plus mauvaises.

Il faut constater que, tout en continuant à porter une attention toute spéciale à l'écologie des terres à reboiser, les Ecossais suivent la tendance générale d'admettre qu'il est possible d'étendre la gamme des sols sur lesquels les différentes essences peuvent être utilisées, et de donner aux techniques d'emploi des essences avec travaux cul-turaux, le pas sur les études écologiques. Tous les efforts des fores­tiers écossais cherchent actuellement à perfectionner ces techniques, qui peuvent leur permettre de s'affranchir plus ou moins d'un choix d'essences trop strictement limité par l'état du sol, tel qu'il leur est livré.

Ces techniques portent sur le drainage, et surtout, comme nous le verrons plus amplement, sur les engrais et labours.

Dans l'exposé ci-dessus, nous n'avons guère parlé que d'essences résineuses, et c'est un fait que l'effort maximum se porte sur les plantations de-conifères, d'abord parce que leur rentabilité est plus immédiate, et qu'ils correspondent plus spécialement aux besoins prévisibles de la Grande-Bretagne. Mais il faut également convenir

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que c'est aussi parce qu'il y a en Ecosse très peu de sols suscep­tibles de porter des peuplements feuillus de quelque valeur, alors nue la modération du climat et l'état hygrométrique élevé convien­nent admirablement à une très belle croissance de la forêt rési­neuse.

La statistique suivante précise par des chiffres les renseignements ci-dessus donnés. Elle concerne le nombre de plants (en milliers) mis en terre en Ecosse, du 30 septembre 1947 au 30 septembre 1948.

Pin sylvestre 7,080 Pinus contorta 223 Pin laricio de Corse 213 Mélèze hybride 50 Mélèze d'Europe 521 Cyprès de Lawson 56 Mélèze du Japon 1.012 Picea omorika 77 Sapin de Douglas 342 Hêtre 107 Epicéa commun 5-173 Chênes 94 Epicéa de Sitka 13.189 Cerisier 2 Tsuga heterophylïa 10 Sycomore 19

Divers 12

28.180

Soit 28.180.000 plants pour 6.480 hectares (dont 1.955 ^ a envi­ron de reconstitution).

LA PRODUCTION DES PLANTS

En raison notamment de la surface considérable des terrains à reboiser chaque année en Ecosse, il ne pouvait être question de semer en place, car le semis entraîne automatiquement un énorme gaspillage de graines. Et de toutes façons, les Ecossais jugent indis­pensable de choyer les arbres en pépinière. Aussi, la plantation est le seul procédé de reboisement.

La production des plants est le fait de la Forestry Commission. Non seulement la Forestry Commission produit ses plants, mais encore elle approvisionne avec ses excédents les pépiniéristes lo­caux. D'ailleurs, les grands domaines, tels celui du comte de Moray à Darnaway ou celui de Lady Seafield à Grantown, possèdent leurs pépinières propres.

Graines

Pour alimenter ces pépinières, les- grands propriétaires ont de bonne heure procédé à leurs propres récoltes de cônes, et installé leurs sécheries propres, dont l'agencement, s'il n'est pas moderne, est d'une efficacité parfaite, puisque, par exemple chez M. le comte de MORAY, il permet d'extraire par la chaleur, les graines de mélèze, alors que généralement l'extraction se fait par dislocation mécanique du cône.

Signalons en passant un joli tour de force dont nous avons été témoins. Nous avions signalé à M. le Conservateur OLIVER un article belge sur le

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séchoir de Gembloux. Pour plus amples renseignements, M. OLIVER écrivit à la Station d'Alice Holt Lodge, à 60 km au sud de Londres, c'est-à-dire à plus de 1.000 km de nous. Quatre jours après, il nous présentait tranquille­ment la traduction dudit article avec photocopie des planches.

Mais les besoins britanniques sont tels que l'importation des grai­nes résineuses atteint presque la production locale. En 1947-48, plus de 13 tonnes de ces graines furent produites et plus de 9 tonnes importées, principalement de Corse (pin laricio), de France (épicéa commun), du Japon (mélèze), et de la Colombie britannique.

Pépinières

Contrairement à la tendance française d'éparpillement des pépi­nières et même d'emploi temporaire de très petites pépinières volan­tes au coin des coupes à replanter, la Forestry Commission concen­tre ses moyens sur des pépinières fixes très étendues. C'est ainsi qu'elle a acquis en 1931 la ferme de Newton (1) dont près de trente-cinq hectares ont été convertis en) pépinière forestière. Cette installation géante emploie 80 personnes, contient 43 millions de plants, et alimente sans aucune difficulté les plantations à quelque 100 à 150 km à la ronde.

Les avantages de cette concentration sont de ne confier la pro­duction des plants qu'à des spécialistes éprouvés, de supprimer les risques de négligences, de favoriser le perfectionnement des techni­ques, et de pousser à l'extrême la mécanisation de la culture.

En 1918, le problème des pépinières a été le premier auquel se soient heurtés les Britanniques. Ils l'ont attaqué avec leur ténacité coutumière, résolus à en étudier les moindres aspects avec les méthodes les plus rigoureuses.

Dès 1928, M. le Dr STEVEN, l'actuel Directeur du Département forestier d'Aberdeen, faisait le point des résultats, dans une bro­chure intitulée (.( Nursery Investigations », brochure dont les pré­cisions sont toujours valables.

Après 1928, les expériences continuèrent avec la même ardeur, î'effort majeur de la recherche se portant sur l'obtention de semis de 1 an de grande taille, bons à être plantés immédiatement, ce qui abaisse de façon considérable le prix de revient des plants, et par suite celui des reboisements. De là les travaux persévérants sur l'action et l'emploi des engrais, travaux pour lesquels les cher­cheurs de la Forestry Commission ont coopéré étroitement avec l'Université d'Oxford, la Station expérimentale de Rothamsted en Angleterre, l'Institut Macaulay en Ecosse.

Un fait s'imposa bientôt: dans les pépinières en service depuis longtemps, les semis de résineux ne réagissaient plus à l'emploi des engrais.

(1) Voir le tracé de la tournée dans le numéro de mars 1952 de la Revue, page 182. Point 4.

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4 ^ 4 REVUE FORESTIÈRE FRANÇAISE

Or, dans le même temps, le Dr RAYNER, célèbre par ses études sur les mycorhizes, avait imaginé une technique personnelle en utilisant la terre de bruyère, vierge de champignons nuisibles aux racines de résineux, et en l'engraissant au maximum par des com­posts à base de déchets de houblon. Elle obtenait ainsi en un an des semis d'épicéa de Sitka de la force de semis de 2 ans. D'autres chercheurs démontrèrent ensuite qu'il suffisait de doses bien plus réduites d'engrais, même minéraux.

Aujourd'hui, les Britanniques développent les pépinières à grand rendement type RAYNER sur terre à bruyère, comme celle de la forêt de Teindland, (Point 3).

La fumure normale est constituée comme suit: Io Là où le pH est inférieur à 5, on ajoute un peu de chaux. 2° Partout, apport de 60 tonnes à l'hectare de déchets de hou­

blon, soit à l'état brut, soit en compost, qui sont incorporés à la couche superficielle du sol.

3° Partout, introduction de N, P, TC, avant la dernière facon et le semis, sous la forme de:

250 kg à l'ha de corne moulue, 375 kg à l'ha de superphosphate, 125 kg à l'ha de chlorure de potassium.

4° Si c'est nécessaire, 125 kg à l'ha de nitrate de chaux, appli­qués au commencement et à la fin de juillet.

A Teindland, nous avons pu admirer la vigueur des semis de 1 an, ayant incontestablement l'allure des semis ordinaires de 2 ans.

Nous avons demandé si des plants ainsi « forcés » ne présen­taient pas des signes de carence après leur mise en place. On nous a montré qu'il n'en était rien, bien au contraire, par des expériences comparatives effectuées dans trois forêts sur des lots d'épicéa de Sitka et de pin sylvestre.

Depuis 1944, la recherche porte surtout sur les moyens d'avoir le même succès dans les pépinières anciennes assises en sol agricole, pépinières qu'il ne peut être question de délaisser, tant pour l'im­portance de l'argent investi que pour les avantages de gestion déjà signalés.

Un premier problème à résoudre est celui du maintien du degré d'acidité des sols, car certains engrais, des chaulages directs ou indirects, ont parfois, à la longue, amené le pH à un niveau in­compatible avec la bonne production de semis résineux, le pH con­venable devant être compris entre 5,1 et 5,4. On «étudie donc l'aci­dification artificielle par l'acide sulfurique, le soufre ou le sulfate d'ammonium, tout en notant soigneusement les effets résiduels au cours des années ultérieures.

Le deuxième problème, et le plus redoutable, est posé par l'apa­thie des semis, devenus insensibles aux engrais.

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LES REBOISEMENTS EN ECOSSE 4 7 5

Les chercheurs écossais émirent l'hypothèse que le sol devait se trouver infecté par des organismes toxiques, et cette idée les con­duisit à entreprendre des essais de stérilisation, soit par des agents chimiques (formol, benzène hexachloré, bisulfure de carbone; déri­vé du pétrole nommé DD), soit par chauffage à la vapeur. Natu­rellement, ces stérilisations détruisent indifféremment faune et flore utiles ou nuisibles. Les engrais suppléent ensuite au chimisme des organismes utiles.

Au fond, ces stérilisations procèdent de la même doctrine que la « culture sans sol » entrée de nos jours dans la phase industrielle pour les légumes frais (Américains au Japon) et pour le fourrage vert (herbagère de l'agro­nome belge P E R I N ) . On peut ainsi imaginer qu'aux frigorifiques à graines forestières, seront un jour annexés des germoirs du genre de l'herbagère P E R I N fabriquant sur commande des semis d'essences rares.

Nous avons vu un certain nombre de ces essais dans la pépinière de Newton (point 4). Pour ceux de stérilisation par la vapeur, on y emploie un système dérivé du système Hoddesdon et amélioré. La vapeur, à la pression de 8 kg, est envoyée dans des tubes per­cés de trous et enterrés dans les planches de semis à une profon­deur de io à 15 cm. Un lit de paille conserve la chaleur et dds caisses plates en acier maintiennent la vapeur. Le sol est ainsi porté à une température de 1800.

Le résultat est clair. Chaque année, depuis 1945, dans ces pla-cettes expérimentales, la stérilisation à la vapeur ou au formol, tout en détruisant les mauvaises herbes, atteint fort bien le but pour­suivi avec tant de volonté : avoir en 1 an des semis de la force de 2 ans.

Il ne reste plus qu'à abaisser suffisamment les prix de revient pour pouvoir généraliser ces méthodes.

LA PLANTATION

La mise en terre des plants n'offre rien de particulier: la plan­tation se fait en poiets, en fente, au coup de pioche, suivant l'état du sol.

Lorsqu'il y a labour préalable ou creusement de fossés, la plan­tation s'effectue normalement sur le billon ou sur l'ados en vue d'apporter au plant le maximum de terre meuble.

L'utilité en est illustrée par le bel exemple de Belton Wood en forêt de Kilcoy (Black Isle. 10).

Nous y avons vu une futaie de pins sylvestres de 81 ans (hauteur moyenne : 16,8 m; volume 339 m3 à l'ha) plantée après terrassement de fossés crevant la couche d'alios, fossés ayant 56 cm de largeur en gueule, 41 cm de ^pro­fondeur et espacés d'axe en axe de 7,9 m.

Les pins furent plantés en terrain naturel et sur les bandes de déblais re jetés au bord des fossés.

Récemment, il a été trouvé que 72 % de la surface terrière totale appar­tenait aux arbres plantés sur déblais.

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C'est la préparation du sol qui donne le plus de mal aux Ecos­sais, et leur pose des problèmes techniques intéressants, spéciale­ment pour les reboisements de landes à bruyères et de tourbières. Incidemment, nous avons eu l'occasion de visiter un reboisement de dunes qui requiert évidemment une méthode particulière.

Dunes

C'est en forêt de Culbin (point 8), près de Forres, que nous fut présenté le travail de fixation de dunes marines.

Les dunes de Culbin prirent naissance en 1694, à la suite de coups de vent violents qui mobilisèrent le sable jadis maintenu par du gourbet, gourbet que les habitants dans leur imprévoyance avaient par trop exploité pour fournir du chaume. Les dunes cou­vrirent seize fermes et bloquèrent l'embouchure de la rivière Find-horn qui fut détournée de son cours.

La Forestry Commission acquit là, de 1921 à 1947, plus de 2.400 ha dont 1.600 environ ont été plantés.

De 1923 à 1934, le travail de fixation de la dune fut effectué avec du gourbet, planté à 60 cm en tous sens, puis à 30 cm, mais cela n'empêchait pas certains transports de sable. La méthode n'était pas sûre, tout en étant fort coûteuse. En 1934, elle fut transfor­mée : la dune fut tapissée avec des matériaux ligneux, genêt à balais, bouleau, etc.. C'est cette méthode qui est employée actuellement avec l'appoint des branchages de pin provenant des premières éclair­cies voisines.

Le procédé consiste à disposer des branches aussi lourdes que possible, avec le gros bout pressé sur le sable dans la direction des vents. Quand l'endroit est trop éventé, on les fixe avec un système de crochets et de fil de fer. Il faut environ 100 tonnes de branchages à l'hectare, et le transport sur place est fait par trac­teurs à chenilles.

Le rôle des branches est triple. Elles brisent le vent et empê­chent la migration du sable. Elles réduisent l'évaporation. Elles ap­portent par leur décomposition des matières humiques au sol.

Aussitôt, la plantation de pins laricios de Corse de 1 -f 1 ou 1 + 2 ans est effectuée en fente, à 1,5 m X 1,5 m. La reprise est excellente, et les plants ne tardent pas à se développer.

Le semis, dont il existe des échantillons très réussis, n'est plus utilisé en raison des difficultés d'approvisionnement en graines de pin laricio.

A Culbin, il est interdit de fumer, et des bassins ont été creusés au bull-dozer de distance en distance, pour servir de réserves d'eau en cas d'incendie, et alimenter les pulvérisateurs classiques.

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Landes

Dans l'ensemble, les sols écossais susceptibles d'être plantés va­rient de la lande à bruyères à la tourbière, en passant par toutes les gradations possibles.

Les problèmes posés aux Ecossais pour la plantation de tous ces sols d'une même famille, et c'est ainsi en beaucoup de points de ia Grande-Bretagne, sont donc sensiblement les mêmes partout, mais avec une intensité plus ou moins grande. Ce sont:

— un problème de concurrence vitale entre le plant à introduire et la végétation préexistante, parfois en évolution vers un climax.

— un problème de structure physique et chimique du sol s'op-posant à l'installation du plant.

•— un problème de drainage pour évacuer l'eau qu'un ciel par trop généreux déverse largement sur des sols souvent imperméa­bles en profondeur.

La combinaison de ces trois problèmes, suivant les caractéristi­ques spéciales de l'endroit considéré, représente une grande variété de problèmes à résoudre pour laquelle il n'y a pas pour l'instant de solution capable d'envelopper la totalité des cas.

Pour résoudre les problèmes concomitants de concurrence vi­tale, de structure du sol, de drainage, la solution simple et la plus générale est le travail du sol à la charrue et le creusage de fossés de drainage. En fait, il semble bien que dès 1750, les planteurs écos­sais de jadis, aient adopté des laboursi efficaces. Leur façon d'opé­rer ayant été abandonnée, il fallut ensuite la réapprendre.

Mais, en raison de la rareté de la main-d'œuvre, rareté que nous avons déjà soulignée, et de son prix élevé, il a fallu autre chose que les méthodes continentales. Les procédés mécaniques et le la­bour par tracteur sont aujourd'hui d'usage banal en Ecosse.

Le labourage mécanique se prête d'ailleurs à un nombre élevé de modalités.

Il peut se faire : — en sillon simple — ou en sillon double, la terre étant re jetée

de part et d'autre; — en labourant complètement — ou en ne creusant que des

sillons à 1,5 m ou 3 m les uns des autres; — en labourant superficiellement — ou profondément pour bri­

ser la couche d'alios. Toutes ces combinaisons ne sont évidemment pas interchangea­

bles, et, en plusieurs endroits, les Ecossais se sont appliqués à déterminer sans ambiguïté le mode idéal de labour ou de drainage pour la station et les essences considérées. A Teindland (point 3), par exemple, nous avons vu des places d'expérience: leurs résultats ne sont pas toujours très nets, mais sont parfois curieux; ainsi, il a été clairement établi que le mélèze du Japon réagissait bien

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mieux à un drainage en lignes serrées et peu profondes, qu'à un drainage espacé et profond.

Actuellement, d'après M. le Conservateur FRASER, les forestiers ne sont plus sûrs que le labour profond, autrefois très en faveur, soit essentiel.

Il y a deux grandes difficultés techniques pour les labours. La première, c'est d'obtenir que le billon soit correctement déposé, sens dessus-dessous, et ne retombe pas dans le sillon sous la trac­tion des racines. La seconde est d'avoir un fond de sillon suffisam­ment uni pour permettre un écoulement convenable de l'eau et éviter la stagnation.

Lors d'une présentation d'outils mécaniques en action, nous avons pu voir les types de charrue en usage en Ecosse :

a) La charrue Massey-Harris N° 3, tractée, à tige porte-soc renforcée, qui retourne un gazon de 56 cm de largeur sur 15 cm d'épaisseur ;

b) La charrue Cuthbertson simple, tractée, pour labour profond et drainage, l'extrémité inférieure du soc étant dessinée pour lais­ser un fond de sillon en cuvette ;

c) La charrue Cuthbertson double, tractée, qui rejette de chaque côté un billon, et possède une extrémité de soc analogue ;

d) La charrue Blane's Kilifer, tractée, qui donne un petit billon, et travaille en même temps en sous-soleuse ;

é) La charrue « Blane's Disc Plough », à disque, qui, au lieu d'être tractée, est portée et poussée. Il y a peut-être là une idée qui fera son chemin pour les sols encombrés de souches.

Toutes ces charrues sont mues par de puissants tracteurs Diesel à chenilles « International » ou « Caterpillar » de 30 à 45 chevaux, avec effort à la barre de 25 à 38 chevaux. Les patins des chenilles qui sont couramment de 25 à 30 cm de large, ont été portés à 50 à 60 cm, pour pouvoir évoluer sur les terres molles. Toutefois, les forestiers locaux ont tous quelque histoire de tracteur enlisé à raconter.

Tracteurs et charrues se déplacent facilement d'un point à un autre en les chargeant sur un camion lourd, comme notre car l'ap­prit un jour au détour d'une route, en tombant nez-à-nez avec l'un de ces engins.

Nous avons donc vu travailler ces divers matériels en sol de lande à bruyères, relativement profond et gras, parsemé de blocs -pouvant peser de 10 à 50 kg et de souches assez peu résistantes.

Indéniablement, les résultats sont excellents. Ces matériels ne sont plus des matériels d'essai. Ils ont été mis à l'épreuve depuis longtemps et comptent à leur actif de très vastes réalisations.

L'impression qui s'en dégage est celle d'une grande robustesse, et d'une véritable adaptation à l'usage forestier.

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LES REBOISEMENTS EN ECOSSE 4 7 9

Si l'on compare cette présentation à celle de Montargîs (Carrefour d'Or­léans, 18 novembre 1950), on remarque:

10 L'absence des matériels légers de fauchage, de débroussaillage, etc. . Pour planter, les Ecossais ne pratiquent pas ces opérations. Ils labourent im­médiatement et préfèrent enfouir les bruyères.

2° L'absence de matériels agricoles modifiés. Ces matériels seraient considérés comme manquant du poids et de la ro­

bustesse désirables. 3° Des solutions originales, telles que le disque poussé de la charrue de

Blane.

Le labour s'effectue généralement suivant les lignes de la plus grande pente, pour éviter aux tracteurs de faire demi-tour à fianc de coteau, ce qui est toujours délicat, et aussi pour avoir un meilleur drainage.

11 est recommandé d'écobuer le terrain, mais de ne pas écobuer plus de 6 mois avant le labour, car la végétation évoluerait comme' suit: ire année, Agrostis ; 2e année, Molinie; 4e ou 5e année, Cal-lune.

Calculée sur la moyenne des labourages de sa Conservation d'Inverness, M. le Conservateur FRASER estime que la dépense se répartit comme suit :

Capital amorti en 5 ans 33 % Carburant 9 Main-d'œuvre 27 Transports 4 Dépannages , 7 Frais généraux » 20

100 %

La dépense est en moyenne de 7.625 F par ha, et varie de 3.750 F à 13.500 F.

Ce qui est absolument certain, c'est que dans les sols de lande si abondants en Ecosse, le labourage rend réalisables des plantations auxquelles on ne pourrait songer autrement, et devient inséparable de la technique écossaise des reboisements. Si chaque praticien agit encore de son mieux selon les sols à traiter, l'essence à introduire, s'il est encore prématuré de vouloir codifier1 les règles à suivre, on peut dire que la préparation mécanique du sol a conquis tout le Ser­vice forestier, et qu'elle se perfectionne sans cesse au fur et à me­sure que les outils augmentent leur puissance ou améliorent leurs caractéristiques.

Tourbières

En sol par trop tourbeux, l'engin mécanique ne peut pas péné­trer.

La méthode du « Turf planting » est utilisée. Elle fut mise au point à la suite des études poursuivies en 1923

par le Dr H. M. STEVEN qui montra que les racines de résineux

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ne se développaient qu'à la surface même de la tourbe, pratique­ment dans la couche végétale, et refusaient de s'épanouir quand elles étaient introduites dans la tourbe anaérobie. Cela conduisit les forestiers britanniques, en modifiant la plantation belge sur butte, à procéder comme suit:

On découpe dans la tourbe des mottes superficielles, de 30 à 40 cm de côté et de 10 à 15 cm d'épaisseur. Ces mottes sont placées aux points à planter, en les1 retournant face pour face, de manière que la'partie tourbeuse de la motte soit au-dessus et que sa partie herbeuse soit au contact de la végétation du sol. Pour planter, l'ou­vrier, armé d'une bêche très aiguisée, ouvre une fente au milieu de la motte, du côté opposé aux vents dominants. Ce côté est alors soulevé pour élargir la fente. On y insère le plant, racines étalées sous la motte, tandis que la tige se place au centre. Puis, on laisse retomber la motte en refermant la fente avec le talon.

Le découpage des gazons se fait à la main. Le plus commode est de le faire en bande continue. Cela épargne une coupe pour chaque motte, et peut fournir un drain de surface additionnel. Les drains proprement dits procurent déjà un bon lot de mottes et le nombre des bandes supplémentaires à couper n'est pas tellement grand.

Une formule courante est de donner à la bande une largeur de i,S m. On en extrait 5 rangs de mottes de 30' cm que Ton dispose à 1,5 m les uns des autres, des rangs restant sur les bords de la bande. De cette façon, la bande suivante parallèle est à 7,5 m de la précédente.

Si les mottes sont préparées quelques mois avant plantation, les risques dus à la sécheresse ou au soulèvement par la gelée demeu­rent faibles.

Cette méthode donne d'excellent résultats au départ. Mais en fait, il est apparu que la croissance initiale était fonction de l'im­portance du bloc de tourbe retournée mis à la disposition du jeune plant. Des recherches ont donc été entreprises pour mesurer les effets obtenus avec des tas de tourbe, des groupages de mottes, etc..

ENGRAIS

Malgré le travail du sol sur certaines bruyères, malgré la planta­tion sur mottes dans les tourbières, qui permettent aux plants de s'élancer, il a été constaté qu'après un temps plus ou moins long, ces plants boudaient, arrêtaient toute croissance et finissaient par disparaître, alors que l'application d'engrais au moment de la plan­tation avait pour conséquences de supprimer toute période de bou­derie et, contrairement à l'opinion communément exprimée en Fran­ce, de maintenir une croissance vigoureuse à longue échéance.

L'application d'engrais dans les mauvais sols de bruyère et dans les sols tourbeux d'Ecosse est donc devenue une règle constante et générale.

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LES REBOISEMENTS EN ECOSSE 4ÄI

Elle se fait au moment de planter par introduction de l'engrais dans le trou ou, s'il s'agit de plantation sur mottes, entre la motte et le sol, puis, si cela est nécessaire par la suite, en surface au pied de chaque plant.

Initialement, l'engrais employé était de la scorie basique. On lui préfère aujourd'hui le phosphate minéral moulu de Gafsa. Les sco­ries basiques contiendraient, dit-on, des traces d'éléments gênants, tels le fluor.

Les doses sont de Tordre de 60 à 70 gr par plant. Nous insistons sur cet emploi d'engrais sur tourbes et sols très

acides, car les résultats que nous avons eus sous les yeux, tant à Teindland Forest qu'à Lon Mhor, montrent de façon éclatante qu'il y a là un moyen général d'installation de la forêt, dans des conditions économiques rentables, alors que tout autre procédé est voué à l'échec absolu. Ces résultats peuvent être tenus pour défi­nitifs, et la méthode est susceptible d'être généralisée, et d'être copiée avec sûreté pour des terrains français considérés jusqu'ici comme réfractaires à tout reboisement.

Voici des chiffres témoignant des beaux résultats, atteints en conjuguant labours, drainages et engrais dans les sols les plus redoutables :

I o Teindland (podzol tourbeux, avec gley et alios). Epicéa commun — labour simple : disparu.

— labour + engrais : hauteur : τ m Tsuga heterophylla — labour simple : hauteur : 0,8 m

— labour + engrais : hauteur : 3 m

2° Lon Mhor (tourbe profonde : 2 à 3 mètres). Pas d'engrais : Plants disparus ou insignifiants.

Engrais: Hauteurs à 20 ans Mélèze hybride 3,9 m Mélèze du Japon 3,4 Picea omorïka 3 Mélèze d'Europe 2,7 Douglas 2,7

TRAVAUX D'ÉQUIPEMENT

Si la Forestry Commission consacre la majeure partie de son activité à la création de forêts, force lui a été de reconnaître qu'il lui fallait' aussi s'occuper de travaux d'équipement.

Maisons

Chronologiquement, les premiers de ces travaux ont été des travaux de construction de maisons.

Pour planter, il faut des plants, mais il faut aussi de la main-d'œuvre, et, si les pépinières sont nécessaires pour les plants, les maisons sont nécessaires pour amener dans des secteurs déshéri­tés la main-d'œuvre indispensable.

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Le problème de la main-d'œuvre et du logement a donc été étu­dié de manière fort complète dans les rapports du Conseil de la Forestry Commission sur la politique forestière d'après-guerre.

Deux exemples y sont cités: Celui de la forêt de Rendlesham, dans l'est de l'Angleterre, cou­

vrant 2.600 hectares. Originellement, il y avait 6 ou 7 hommes employés sur cette surface. Pendant le reboisement, 40 hommes en moyenne furent utilisés. En 1951, les plantations ont 31 ans, et elles doivent procurer du travail à 200 hommes employés à plein.

Celui de la forêt d'Ae, de 2.500 hectares. Les plantations, com­mencées en 1926-27, y ont été terminées en 1949-50. En moyenne, depuis le début du reboisement, 20 hommes à temps plein ont été utilisés. Leur nombre s'est élevé à 37 en 1948. Il sera de 58 en 1954, et de 89 en i960.

Pour loger ce personnel, la Forestry Commission, dès 1924, avait dû s'engager dans la voie d'un programme de petites fermes pour travailleur forestier.

Ces fermes comprennent une habitation et ses dépendances avec un maximum de 4 hectares de terre agricole ou cultivable. La location en est faite à court terme renouvelable. 150 journées de travail, au minimum, sont garanties dans la forêt. Le reste du temps du fermier est disponible pour travailler dans la ferme. Le facteur le plus important de réussite d'une telle ferme est le choix judicieux du fermier qui, ainsi que sa femme, doit pouvoir s'adap­ter à la vie rurale.

Tenant compte de l'expérience acquise, les constructions fores­tières seront désormais de deux types :

— des fermes de 4 ha capables de fournir le lait aux travailleurs forestiers locaux, et des chevaux pour le travail en forêt;

— de simples logements avec un jardin ou un terrain suffisant pour élever cochon et volailles et planter des pommes de terre.

Dans les grandes forêts, on prévoit la création de villages com­plets. Les plans en sont faits d'avance, et la réalisation est pro­gressive, au fur et à mesure que les reboisements vieillissent et réclament plus de main-d'œuvre.

La brochure sur la forêt d'Ae fait une large part au village en construction. Il ne s'agit pas d'un unique village-type. Au cours de notre voyage, nous avons vu des constructions de la Forestry Com­mission sortant de terre à allure rapide. Il s'agit bel et bien d'un effort d'envergure et généralisé, comme le prouvent les chiffres suivants :

En 1947-48: — il y a eu accroissement de 5 nouvelles fermes ; — 108 maisons ont été terminées (53 en Angleterre, 55 en

Ecosse) ;

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— 299 maisons étaient en cours d'édification tant en Angleterre qu'en Ecosse et en Pays) de Galles.

Les dépenses de bâtiments se sont montées à: 2.590.467 L pour les constructions nouvelles,

60.392 L pour les réparations.

Routes

Ce qui est plutôt étonnant, c'est que le rapport du Conseil de la Forestry Commission sur la politique forestière d'après-guerre ne fasse aucune mention du problème des routes. C'est sans doute parce que ce problème ne devient aigu que lorsqu'il y a des produits à sortir. Depuis, les Britanniques se sont aperçus de son importance et ils se sont mis au travail.

Il existe, à la Direction de la Forestry Commission pour l'Ecosse, un service spécial ayant pour attribution de créer des routes dans les reboisements en âge de produire. Nous avons vu un certain nombre de ses réalisations. Doté d'engins mécaniques modernes : bull-dozers, excavateurs, camions, il s'attache à ouvrir des ré­seaux de routes forestières suivant un plan logique, de manière que la distance maxima de débardage à cheval soit de 275 m.

Ainsi, dans la forêt de Monaughty (point 7), 1.220 hectares, il . vient d'établir 25,7 km de routes accessibles en tout temps et 9,6 km de routes accessibles par beau temps.

L'objectif de ce service est;' de faire le maximum de routes avec les crédits qui lui sont alloués, et de rendre accessible au camion dans le minimum de temps le maximum de surface. Il nous a paru que, pour obéir à ces impératifs, la construction des routes avait tendance à s'inspirer davantage de la technique des routes militaires, de durée limitée, que de la technique méthodique des routes vérita­bles, et laissait de côté les problèmes dejgranulométrie des éléments mis en œuvre, et celui de l'écoulement des eaux qui ont pourtant, nous le savons bien, une importance considérable.

Néanmoins, si, à notre avis, il est encore des imperfections dans cette technique d'exécution, nous devons reconnaître que la question des routes prend maintenant dans les préoccupations des forestiers britanniques la place qu'elle mérite.

Dans les versants rapides, la] vidange des produits reste un pro­blème difficile. D'une part, on ne peut pas toujours songer à sillon­ner le versant du kilométrage de routes coûteuses, indiqué par le calcul. D'autre part, le débardage par chevaux est délicat et scabreux. Et enfin le lancement sur la ligne de plus grande pente des pro­duits trop légers d'éclaircie fonctionne mal. Le problème s'aggrave encore pour le lancement, lorsque le bas de la pente est suivi par une route publique très fréquentée.

Les Ecossais semblent s'orienter vers la solution de glissoirs en éléments légers de duralumin, et, pour les cas les plus ardus, ils pourront tenter d'employer les câbles.

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ORGANISATION DE LA RECHERCHE

L'intéressante technique britannique des reboisements n'a pris son essor qu'après 1919. Sa mise au point, continue et tenace, a été le fruit d'une collaboration constante entre :

— le Service ordinaire de gestion, •— les milieux universitaires, — le Service de la Recherche de la Forestry Commission, — et des organismes spécialisés sur des sujets en connexion avec

les problèmes forestiers. C'est ainsi qu'en Ecosse les sols de pépinière et de terrains à re­

boiser sont examinés par le « Macaulay Institute » d'Aberdeen, institut consacré à l'étude des sols en général, et qui prête le con­cours de ses nombreux spécialistes et de ses puissants moyens ma­tériels à la Forestry Commission. Nous avons visité cet établisse­ment ultra-moderne, et nous avons pu constater combien les recher­ches y sont facilitées par une imposante bibliothèque, par l'applica­tion des tout derniers perfectionnements techniques : analyses aux spectroscope et spectographe lumineux ou à rayons X, analyses chi­miques très poussées, séparant par exemple les amino-acides de l'hu­mus, analyses mécaniques, e t c . , et, ce qui n'est pas négligeable, par une ambiance plaisante et confortable.

Le Service de la Recherche de la Forestry Commission, dirigé en Ecosse par M. J.-A.-B. MACDONALD, nous a conduit d'expérience en expérience, nous documentant sur les recherches passées, pré­sentes et projetées.

Pour se faire une idée de l'importance de ce Service, notons quel­ques chiffres :

Nombre des places d'expérience sur la croissance des peuplements, périodi­quement inventoriées 224

Nombre Nombre de Recherches diverses de forêts techniques expér.

Tourbe 11 216 Sols à callune 6 54 Age et type 7 17 Méthode de plantation 11 17 Origine des plants 19 58 Altitude 7 IS Classement des plants 3 5 Regarnis 9 *5 Drainage 6 9 Semis 5 11 ' Espacement 9 7 Sarclage » 4 6 Feuillus 3 9 Divers 19 29 Elagages 7 9 Eclaircies ' 4 4 -

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Des recherches de même nature sont poursuivies en Angleterre et en Pays de Galles, et leurs résultats sont mis à la disposition du public dans des brochures, remises à jour quand le progrès des expériences en fait sentir le besoin.

En outre, chaque année, le Service de la Recherche publie un rapport sur son activité. C'est ainsi qu'en 1949, la division de ce rapport, brochure de 80 pages, était la suivante:

1. Travaux du Personnel de la Forestry Commission. IL Travaux du Comité des problèmes de nutrition en pépinières

forestières, par le Dr CROWTHER, de la Station expérimentale de Rothamsted.

III. Travaux, effectués paf la Forestry Commission, par des cher­cheurs attachés aux Universités ou à des Institutions diverses.

Il ne semble pas qu'il y ait de grandes différences d'orientation entre la recherche britannique eti la recherche française: génétique, provenance des graines, arboretums, sols, tels sont à notre sens les buts principaux de cette recherche, qui bénéficie de moyens et de possibilités d'organisation méthodique dont la recherche française doit parfois se priver.

Parmi les succès de ces recherches, nous appelons l'attention sur les tables d'accroissement des essences en Grande-Bretagne, sur tous les aspects des travaux en pépinière, et sur le classement scientifique de la bibliographie.

REBOISEMENT DES FORÊTS PARTICULIÈRES

Tout ce qui a été dit jusqu'ici concerne les reboisements d'Etat de la Forestry Commission. Pour les bois particuliers, l'article de M. le Conservateur DE VAISSIÈRE, auquel nous nous somme? déjà référés, a apporté toutes les précisions sur l'aide reçue par la forêt privée en Grande-Bretagne.

Ces précisions restent valables, sauf deux légères modifications: pour les contrats de la Base II, les subventions ont été portées de 10 L à 12 L par acre pour la plantation, et de 3 shillings 4] pence à 4 shillings par acre et par an pendant quinze ans pour l'entretien des bois productifs comme des nouvelles plantations.

Actuellement, il y a en Ecosse 160 forêts particulières soumises (ou plus littéralement « dédiées »), toutes sous la forme Β (Base II), c'est-à-dire que pas un seul propriétaire n'a voulu tenir les comp­tes imposés et en discuter avec les représentants de la Forestry Commission. Ces derniers estiment que certains propriétaires ont tort et que la forme A (Base I), dans laquelle l'Etat paierait 25 % des dépenses, leur serait plus avantageuse.

Sauf chez les grands propriétaires forestiers qui, de tout temps, ont soigné leurs domaines et leurs plantations, qui mettent leur amour-propre 'à continuer malgré les vicissitudes des coupes de

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guerre, et s'efforcent de reboiser les blancs étocs laissés par les com­pagnies forestières d'exploitation, nous ne pensons pas qu'il existe un courant extrêmement fort de reboisement privé en Ecosse. Et cela se comprend. Pour vaincre les difficultés de sol et de main-d'œuvre, il faut de gros moyens.

Nous pensons aussi, avec MM. les Inspecteurs principaux BENDA et PouRTET, que les termes proposés aux particuliers par la Forestry Commission sont bien moins libéraux que ceux proposés par le Fonds Forestier National aux propriétaires français.

Un, relèvement des bases initiales de financement a déjà été effec­tué. Il semble qu'il en faudra d'autres pour favoriser les proprié­taires à un point suffisant.

Nous souhaitons qu'il en S£it ainsi, car la forêt privée écossaise qui a fait tant de bon travail sans aide, et·a sauvé le pays de périls excessivement gra\^es, a bien mérité d'être soutenue à son tour. Et non seulement ce serait équitable, mais ce serait conforme aux inté­rêts sociaux et économiques de la nation britannique. La forêt pri­vée écossaise peut et doit jouer un rôle très utile, notamment dans les massifs relativement petits, aux côtés des grandes forêts d'Etat.

CONCLUSION

A notre sens, il est tout à fait admirable de voir quels résultats la Forestry Commission, partie du néant en 1919, a pu enregistrer en si peu de temps, temps qui correspond par exemple à une révo­lution de nos taillis, ou à la régénération théorique d'une affectation dans nos futaies.

Certes, le problème n'était pas compliqué, comme dans les hautes montagnes françaises, par l'instabilité des pentes et les phénomènes torrentiels.

Certes, le climat écossais est spécialement favorable à une bonne reprise et à une belle végétation des résineux.

Certes enfin, le Gouvernement a mis le prix nécessaire. Mais les questions de méthode et d'organisation d'une entreprise

de cette envergure ont été résolues de façon exemplaire, par des ordres simples, peu fréquents, évitant d'alourdir les tâches. Aucune anarchie, aucun flottement.

Mais encore, les questions techniques de pépinière et de reboi­sement, qui se présentaient en Ecosse sous un jour assez particulier, ont été élucidées avec brio. Et à certains égards, notamment pour la production accélérée des plants, pour l'emploi des engrais et des travaux culturaux dans les reboisements, il nous paraît que les Ecossais sont en tête du progrès.

Quelles critiques pouvons-nous faire en contre-partie ? D'abord, l'uniformité systématique des -repeuplements. Cela im­

pressionne l'œil. Mais l'uniformité entraîne par elle-même de grands

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dangers de destruction de la forêt par tous ses ennemis, connus ou inconnus.

A ce sujet, il nous semble que des feuillus pourraient être réha­bilités, au moins comme essences subordonnées.

Ensuite, l'absence de préoccupation technologique dans le choix des essences et leur traitement. On veut du volume, et rapidement. Cela répond sans doute à des directives supérieures pour reconsti­tuer au plus tôt un capital boisé disponible pour une nouvelle crise. Mais dans l'avenir, les forestiers écossais devront faire davantage attention à bien sélectionner les espèces et les races, et à manier l'éclaircie, en prenant d'autres critères que la seule productivité en volume.

Enfin, l'absence de méthodes sylvicoles pour l'éducation des peu-. plements d'un certain âge, pour celle des peuplements mélanges, et l'absence d'aménagements des forêts. Mais cela n'est pas encore gênant.

Les Ecossais savent bien qu'ils auront à se débattre avec de nou­velles difficultés, et c'est pourquoi loin de faire fi de la science fo­restière étrangère, ils essaient de s'en informer et d'en retenir des principes applicables chez eux. Depuis plusieurs années par exem­ple, l'Université d'Aberdeen envoie ses étudiants forestiers voya­ger en France.

Naturellement, le mérite du succès de la Forestry Commission revient en premier lieu à ses chefs du début, chefs dont le choix a été déterminant.

Ces dirigeants, à l'esprit clair, ont créé un Corps Forestier pro­portionné à ses tâches, Corps sur lequel MM. les Inspecteurs prin­cipaux BENDA et POURTET ont déjà donné les renseignements utiles. On a su susciter une émulation harmonieuse entre réalisateurs et chercheurs de toutes origines.

Les dirigeants actuels, qui ont eu le loisir de méditer entre les deux guerres, et de voir les effets de leurs premiers essais, ont pu, avec sûreté, augmenter le champ de leur action dès la fin de la guerre. Ces dirigeants ont été praticiens avant de devenir adminis­trateurs, mais, après avoir été « sur le tas », ils ont pu franchir assez vite les étapes hiérarchiques, sans avoir été annihilés par une beso­gne bureaucratique.

Us veulent, avec une calme énergie et une ténacité inlassable, réussir à tenir le rôle qui leur est dévolu dans l'Economie natio­nale. Cette volonté, ils semblent bien l'avoir communiquée à leurs subordonnés, et à cela peuvent se mesurer déjà leurs qualités de chefs.

Exécutants il n'y a pas si longtemps, ils savent qu'on ne peut se payer de mots, et que, pour produire, il faut des moyens, des hom­mes, du matériel. Us les ont réclamés en temps voulu dans le fameux rapport « Forest Post-War Policy » et leur voix a porté. Les

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Page 25: Reboisements sur les dunes Laricios de Corse.

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moyens obtenus, ils ont disposé des hommes au mieux de leurs ca­pacités, ils leur ont donné les outils qu'il fallait, une documentation précise, tenue à, jour et pratique, un standard de vie honorable.

Aussi, le forestier écossais a-t-il de l'allant et du rendement. Les aînés connaissent à fond leur métier qu'ils aiment et qu'ils vivent. Et leur autorité est due à la considération qu'ils inspirent aux plus jeunes, recrutés après-guerre, lesquels s'aperçoivent qu'il faut avoir pratiqué longtemps pour pouvoir se dégager des chiffres et des for­mules toutes faites.

En bref, le Corps Forestier, Ecossais nous est apparu parfaite­ment équilibré, compétent, et digne de sa mission.

Son œuvre, capitale pour la Défense Nationale de la Grande-Bre­tagne, sera menée à bonne fin.

LEFEBVRE, RABOUILLE et VALETTE.

La maladie de la suie

Une maladie très grave, la maladie de la suie, a été observée récemment, d'une part en Angleterre, aux environs de Londres, et d'autre part au bois de Vincennes, près de Paris, sur l'érable sycomore.

Une enquête est en cours afin de déterminer l'extension actuelle de cette maladie en France.

Le premier symptôme est la réduction anormale de la taille des feuilles de certains rameaux, puis ces feuilles se fanent et le rameau en entier dépérit. Le dépérissement gagne progressivement toute la cime et la mort de l'arbre survient en deux ou trois ans.

En même temps, l'écorce du tronc se boursoufle par endroits puis éclate en libérant une abondante poussière noire comme de la suie.

Jusqu'à présent, seul l'érable sycomore semble atteint.

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