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octobre 2012 - 3, 40 leRavi crèche dans la rue ! Un cahier spécial de huit pages écrit pour et par les sans- domicile. Pour que les sans-toit donnent de la voix…. Jean-Luc Chauvin. Comme les ministres du gouvernement en pèlerinage à l’université d’été du Medef, le Ravi a invité le patron des patrons des Bouches-du-Rhône. p. 15 LA GRANDE TCHATCHE Pressés Soumis aux pressions économiques et politiques, les journalistes sont au bord de la crise de nerf… Enquête. p.10 LA GROSSE ENQUÊTE CARICATURES p. 3 & p. 8 Carpentras (84). Notre grand reporter a testé le conseil municipal où la gauche reste divisée sur les terres qu’a conquises Marion Maréchal (nous voilà) Le Pen, la nouvelle députée d’extrême droite du Vaucluse. p. 23 CONTRÔLE TECHNIQUE La Seyne-sur-Mer (83). C’est le nom des tours du quartier Berthe qui doivent être détruites l’an prochain. Un reportage dessiné d’Eric Ferrier. p. 24 GERMINAL 3 782887 103407 100 comme des citrons Bouches-du-Rhône. Des marchés du CG 13, tenus par quelques entreprises, font l’objet de soupçons de favoritisme. p. 9 FAVORITISME AU CG 13 ? MÉDIAS nouvelle formule

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octobre 2012 - 3,40 €

leRavi crèche dans la rue ! Un cahier spécial de huit pages écrit pour et par les sans- domicile. Pour que les sans-toit donnent de la voix….

Jean-Luc Chauvin. Comme les ministres du gouvernement en pèlerinage à l’université d’été du Medef, le Ravi a invité le patron des patrons des Bouches-du-Rhône. p. 15

la grande tchatche

Pressés Soumis aux pressions économiques et politiques, les journalistes sont au bord de la crise de nerf… enquête. p.10

la grosse enquête

carIcatureS

p. 3 & p. 8

Carpentras (84). Notre grand reporter a testé le conseil municipal où la gauche reste divisée sur les terres qu’a conquises Marion Maréchal (nous voilà) Le Pen, la nouvelle députée d’extrême droite du Vaucluse. p. 23

cOntrôle technIque

La Seyne-sur-Mer (83). C’est le nom des tours du quartier Berthe qui doivent être détruites l’an prochain. Un reportage dessiné d’Eric Ferrier. p. 24

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n° 100

commedes citrons

Bouches-du-Rhône. Des marchés du CG 13, tenus par quelques entreprises, font l’objet de soupçons de favoritisme. p. 9

FavOrItISme au cg 13 ?

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nouvelle

formule

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leRaviédito

Ravis !Ne jouons pas les faux modestes. le Ravi, qui publie son 100ème numéro après 9 ans d’existence, est un véritable « OPNI », un objet de presse non identifié, une exception dans le paysage médiatique local et national : un mensuel régional papier qui préfère la satire à la prudence…

Il ne faut jamais, paraît-il, mélanger les genres. Mais pourquoi se gêner ? Sujets de fond, humour à fond ! Ce mois d’octobre, le Ravi fait peau neuve avec une nouvelle formule, plus colorée, avec plus d’enquêtes, plus de reportages, plus de coups de gueule, plus de dessins. Face à l’urgence, nous faisons plus que jamais le pari de prendre le temps nécessaire à l’investigation, à l’analyse, à la réflexion.

Le journal que vous tenez entre les mains est désormais réalisé par six journalistes permanents, une dizaine de dessinateurs et de nombreux contributeurs. C’est un journal indépendant, édité par l’association La Tchatche dont les lecteurs-adhérents sont copropriétaires. le Ravi assume, sans esprit partisan, des valeurs. Il a un goût très prononcé pour le débat. La Tchatche c’est aussi une équipe qui multiplie les rencontres publiques et intervient dans les écoles et les centres sociaux, pour animer notamment des ateliers sur la presse.

Média citoyen, porté par un modèle économique à but non lucratif, le Ravi a besoin de ses lecteurs pour financer son « impertinence ». A vous tous, nous disons : soyez Ravi ! Abonnez-vous ! Et fêtez bientôt avec nous nos dix ans !

C’était en 2002, à Annecy, à l’université d’été du FN. De Marine, Jean-Marie disait : « C’est une excellente militante mais elle aime beaucoup son père et elle a encore des choses à apprendre. » Face aux discours de la fille, les militants lâchaient : « On a besoin d’un chef. Et donc d’un homme. » Dix ans ont passé. Cet été, c’était au tour de la petite fille, députée du Vaucluse, de passer son grand « O ». Et de rassurer tata : « Tu es mon chef de file. Sache que tu trouveras en moi une alliée », rapporte le site Mlactu. Reste qu’à l’oral, Marion Maréchal (nous voilà) Le Pen a encore du boulot. En témoigne cette tentative de bon mot : « Qu’est-ce qui attend aujourd’hui un jeune Français ? Le chômage, l’impossibilité de contracter un emprunt… Allez, un steak halal à midi et un petit vin rouge du Chili. Ça ne me fait pas rêver. » La benjamine de l’hémicycle a préféré sécher les bancs de l’assemblée pour passer ses examens à Assas, ayant loupé ses oraux pour cause de législatives. Parmi ses examinateurs, Carlo Santulli, ancien du journal satirique La Mèche, refusant de nous commenter sa prestation : « A l’université, il n’y a que des professeurs et des étudiants. Il n’y a pas de députés. » Ni gauche, ni droite, à Assas, on est au-delà de ces clivages. Il n’empêche, Marion fait des émules. S’il a refusé de lui serrer la main, Copé n’en recycle pas moins la vulgate frontiste avec son « racisme anti-blanc ». Mais comment s’étonner qu’un fils de proctologue touche le fond ?

1/ “ On a tellement touché le fond que 2013, ça ne peut être que de bonnes surprises. ”

HUBERT FALCO, maire de Toulon, à Marie-Josée Roig, maire d’Avignon, en évoquant le désintérêt des Français pour l’élection du nouveau président de l’UMP.

JEAN-NOËL GUÉRINI, président du Conseil général du

« 13 », à Jean-Marc Ayrault, lors des 28 heures du premier ministre à Marseille le 10 septembre.

PIERRE SAUVAGEOT, directeur de Lieux Publics, à Jean-

François Chougnet, directeur de Marseille-Provence 2013, la capitale européenne de la culture.

2/ “ Quand le climat se réchauffe, les paroles de la victime se dégèlent. ”

BORIS CYRULNIK, enseignant à Toulon, dans son dernier livre autobiographique, « Sauve-toi, la vie t’appelle ».

CLAUDE ALLÈGRE, géochimiste, lors d’une signature à

Avignon de son dernier livre, « Découvrir la terre ». SAMIA GHALI, sénatrice PS de Marseille, à court d’idées

afin de justifier son appel à l’armée pour ramener l’ordre dans les quartiers « difficiles ».

Marion Maréchal (nous voilà) Le PenLE RAVI DE PLÂTRE

Maison fondée en 2003 11, boulevard National 13001 Marseille www.leravi.org Courriel [email protected] Téléphone 04 91 08 78 77 Fax 04 91 62 03 21 Dépôt légal 12-09-05ISSN 1760-1754

Directeur de la publication Étienne Ballan Rédacteur en chef Michel Gairaud [email protected] Grand reporter Jean-François Poupelin [email protected] Développement Stéphane Sarpaux [email protected]ôneSébastien [email protected] [email protected]

Vaucluse Clément [email protected]

> Ils ont écrit dans ce numéroSamir Akacha, Sébastien Boistel, Clément Chassot, Louise Fessard, Michel Gairaud, Rafi Hamal, Sylvain Musseri, Nicolas Pivime, Jean-François Poupelin, Samantha Rouchard, Stéphane Sarpaux> Ils ont dessiné dans ce numéroBrock Olly, Marie Chéné, Coco, Eric Ferrier, Moix, Tone/ CDM, Yacine, Ysope, Na !

Secrétariat de rédaction Agnès Chapal, Zazimut Conception graphique Audrey VoydevilleMise en page Éric Besatti, Pauline PidouxWebmaster Pierre Sauze

N°CPPAP 0215G83983 Impression IPS, Z.I des Iscles 13160 Châteaurenard

leRavi est édité par latchatche, association coopérative et participative.

Spéciale dédicace à Marc Douguet

Ça n'a pas manqué, on me met sur le dos la nouvelle formule : « Et si on la fai-sait démarrer au numéro 100 ? » 100 numéros du Ravi, c'est 2800 pages : ils auraient pu faire travailler le chiffre 3000, s'ils vou-laient de la rondeur, ils auraient eu plus de temps. Et combien d'articles et de dessins, de tasses de café ou d'heures de travail ? Eh non, on compte en numé-ros entiers et, une fois encore, j'assouvis malgré moi ce besoin de repères. Déjà que c'est toujours sur moi qu'on étalonne, « pour cent » par-ci, « sur 100 » par-là. 99 et 101, mes voisins palindromes, sont jaloux. Non mais c'est vrai, en quoi suis-je vrai-ment spécial, en tant que numéro ? Je suis là parce qu'il y a eu les autres avant : suis-je meilleur qu'eux ? C'est comme si à partir de moi, rien ne sera plus comme avant. Bien sûr, il y a la nouvelle formule. Mais puisqu'elle vient parce que, juste-ment, c'est moi qui numé-rote ce numéro...

N. P.

100QUIZZ QUI A DIT ?

Réponses : I, c ; II, a

S. B.

n° 100octobre 2012

le Ravi, qui publie son 100ème numéro après 9 ans d’existence, est un véritable « OPNI »,

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Actualité oblige, le festival du dessin de presse de l’Estaque a largement parlé des caricatures de Mahomet. Un débat loin des

caricatures.

Faut pas

«Q uoi, des dessinateurs sont bloqués à la gare ? Y a une alerte à la bombe ? A Saint-

Charles ?! » Ambiance électrique à l’ouverture du festival international de la caricature, du dessin de presse et de la satire, qui s’est déroulé à Marseille du 21 au 23 septembre et dont le Ravi était partenaire. Juste avant l’ouverture, les caricatures de Mahomet publiées par Charlie Hebdo ont, dans la foulée du film anti-islam « Innocence of muslims », mis le feu aux poudres. Alors, à la maison des associations de l’Estaque, c’est avec une pointe d’humour mais aussi d’angoisse qu’on regarde sacs à dos et autres « colis suspects ». Mais pas question pour Fathy, dessinateur au Ravi et organisateur de la manifestation, d’annuler. « Ça voudrait dire qu’on a abdiqué ! » Mairie et préfecture auront toutefois dépêché CRS et RG en renfort. On ne sait jamais.

◆ Un film minableTout le week-end, les dessinateurs ne parlent que de ça. Biz le toulousain est partagé : « Je ne peux que défendre la liberté d’expression. Mais il faut peser les conséquences, notamment dans les pays arabes. Charlie a fait là une belle opération commerciale en mettant, malheureusement, de l’huile sur le feu. Peut-être aurait-il fallu attendre… » Denis le bourguignon explose : « Attendre quoi ? Et combien de temps ? On a la chance de bénéficier de la liberté d’expression. Autant en profiter ! »

Même point de vue avec Trax, dessinatrice pour le Ravi : « Dire que Charlie a mis de l’huile sur le feu, c’est oublier que ce qui a mis le feu aux poudres, c’est un film

histoire de bordilles. Contrairement au président PS du CG13 Jean-Noël Guérini, le toujours président du San Ouest Provence au moment du bouclage du Ravi, va devoir très vite quitter son poste…

Collard au Chaud ! Le député Bleu Marine avait promis qu’il serait le « casse-couilles » du Palais Bourbon. Chose promise, chose due : lors du débat sur les emplois d’avenir, il a demandé qu’ils soient réservés aux « jeunes de nationalité française ». En outre, amateur de corrida, il a été pris la main dans le sac après avoir envoyé un message de soutien à… l’alliance anti-corrida. Comme dirait Gotlib : « Ah ouh les cornes ! »

Tous volonTaires Entre autres bonnes idées pour régler les problèmes de sécurité à Marseille, Manuel Valls a décidé d’y dépêcher 205 cognes supplémentaires. Un recrutement basé sur le volontariat. Un peu comme MP2013, qui fait également appel aux « volontaires » pour assurer l’intendance de ses festivités. Parions que le ministre de l’Intérieur aura moins de mal à enrôler des bonnes âmes éprises de soleil que l’organisateur de la capitale européenne de la culture à trouver ses quelques centaines de bénévoles…

PendanT les affaires… Le calendrier judiciaire est parfois l’occasion d’heureuses coïncidences, comme ont pu l’apprécier en septembre les socialistes des Bouches-du-Rhône. Et d’un, le 11 septembre, le parquet a requis 5 ans d’emprisonnement, dont 3 fermes, et 40 000 euros d’amende contre Eric Pascal, PDG de Queyras Environnement et pote d’Alexandre Guérini, soupçonné d’avoir mis en place une fraude aux déchets sur une décharge, des déchetteries et un centre de tri dépendants des intercommunalités d’Aubagne et de Marseille (délibéré le 7 novembre). Et de deux, le 12, la cour de cassation a confirmé la condamnation du socialiste Bernard Granié à deux ans de prison ferme, 100 000 euros d'amende et 5 ans d'inéligibilité dans une autre

MaC-adaM Pour son numéro 100, le Ravi, avec la Fondation Abbé Pierre, s’est fendu d’un hors-série écrit par et pour les sans-abris accueillis à Marseille. A cette occasion et à la veille de la Journée mondiale du refus de la misère, nous avons sollicité une interview de Marie-Arlette Carlotti (« MAC »), en charge du handicap et de la grande exclusion au gouvernement. En vain. Après nous avoir assuré que la réponse serait positive, l’entourage de la ministre s’est rétracté tardivement : « C’est pour des raisons d’agenda. On vous prévient quand on peut ! » On dirait le 115…

Enquêtes

minable. Ceux qui ont vraiment soufflé sur les braises, ce sont les fanatiques qui l’ont sorti de l’anonymat. J’ai toujours dessiné sur la religion. Même si, avec Mahomet, comme il est interdit de le représenter, il est compliqué de travailler avec aussi peu de documentation… »

Kianoush accuse le coup : « Comment réagirais-tu si on insultait ta mère ? Parce que, pour un musulman, quand on s’en prend à Mahomet, c’est pareil. En tant que dessinateur iranien réfugié en France, je sais que je pourrais gagner beaucoup d’argent avec de telles caricatures. Mais c’est trop facile. La liberté d’expression, ce

n’est pas celle d’insulter. Je préfère m’en

prendre à des personnes qui

existent, comme les intégristes. » Pour lui, « on ne peut pas rire de tout, partout ».

◆ Atteinte au sacré ?Réponse de Denis : « Quand on fait de

l’humour, on blesse toujours quelqu’un. Sinon, ce n’est pas de l’humour. » Un

dessin a marqué les esprits, celui de Coco,

représentant le prophète avec une étoile au milieu

des fesses, accompagné de ce commentaire : « Une

étoile est née ». Dessinatrice pour Charlie et le Ravi, elle assume : « Ce n’est pas une opération commerciale. Comme chaque semaine, on s’est demandé quel était le sujet à traiter et on a tout de suite réagi face à la violence de quelques fanatiques à l’encontre d’un film qu’ils ont jugé blasphématoire. On n’a donc fait que notre boulot. J’ai trente ans, cela ne fait pas longtemps que je suis dessinatrice. Si je commence à m’autocensurer, ma carrière ne risque pas de durer très longtemps… »

Tunisienne, Nadia fait la grimace : « La révolution en Tunisie a été faite avant tout pour la liberté d’expression. Le problème,

c’est que le pouvoir en place veut faire passer une loi contre l’atteinte au sacré. Une loi liberticide. Mais jugée on ne peut plus nécessaire depuis la publication de ces caricatures. Celles-ci ont donc été totalement contre-productives. Mais pas question de signer les pétitions lancées par quelques expatriés pour poursuivre en justice l’hebdo. Ni de juger, comme l’ont fait certains quand leurs locaux ont été incendiés, qu’ils l’avaient bien cherché. Je trouve toutefois plus intéressant de montrer comment le pouvoir utilise la religion pour détourner des vrais problèmes, comme la misère ou le chômage. »

Et qu’en pense Fathy, l’organisateur du festival ? « Toute ma vie, je me suis battu contre le fanatisme et pour que de tels dessins existent. La caricature, cela sert à désacraliser le sacré. Au-delà de la polémique, en rencontrant le public, on est là pour susciter le débat, le dialogue et expliquer ce qu’est le dessin de presse. Parce qu’on a l’arme la plus puissante et la moins chère au monde : le crayon. » Une arme à manier toutefois avec précaution selon Samia Ghali, la député-maire PS des 15-16, lors de l’inauguration : « Aux dessinateurs, je n’ai qu’une seule chose à dire : foncez, n’ayez aucun tabou. A une exception près : ayez le souci de la sécurité de l’autre. » De la part d’une élue ayant réclamé l’intervention de l’armée dans les cités, on appréciera cet appel à la nuance et à la prudence.

Sébastien Boistel

s’mosquée !

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Enquêtes

Onfray mieux d’se casser Prêt à remplacer au pied levé Benjamin Stora pour l’expo Camus à Aix dans le cadre de 2013, le nouveau « philosophe », adoubé par l’insubmersible Maryse Joissains, a finalement jeté l’éponge, entraînant l’annulation de l’expo dans une ville où les manifestations pour le 50ème anniversaire de l’indépendance de l’Algérie n’avaient pu se tenir, à part celle des nostalgériques. Et Onfray d’hurler au complot, se disant heureux de quitter la « nef des fous », en économisant, dit-il, « une démission » puisqu’il n’avait « rien signé ». Dommage : si cela n’avait été le cas, il aurait peut-être eu droit à quelques indemnités…

Guerre des pOlices Malgré le départ du préfet de police Alain Gardère (remplacé par Jean-Paul Bonnetain), dans la cité phocéenne, la vie n’est pas rose pour les hommes en bleu. Surtout quand ils sont vus comme de « sales rouges ». Thierry Huguet, de la CGT Police, a été convoqué fin septembre par la police des polices pour une affaire de dénonciation calomnieuse. Pourtant, après avoir dénoncé les pressions subies par l’un de ses collègues de Sanary, qui, depuis, s’est suicidé, le policier aura été muté quatre fois en quatre mois…

les dOulOureuses de VeOlia Une facture de 4 572 euros de consommation d’eau pour une Avignonnaise victime d’une fuite de canalisation dans son jardin ! Le combatif collectif des usagers d’eau d’Avignon s’en est aussitôt pris à Veolia, le délégataire. La multinationale n’a pas respecté la loi, le prix d’une fuite accidentelle d’eau ne pouvant donner lieu à une facturation supérieure à deux fois la consommation habituelle d’un usager. Ce qui aurait divisé cette facture par 20. Finalement, grand seigneur, Veolia a consenti à une baisse de prix. Madame B. n’a finalement raqué « que » 1 864 euros. Une paille, quand on sait que l’entreprise reconnaît perdre 35 % de l’eau produite sur le réseau avignonnais…

Le granddétournement

Nicolas Sarkozy n’aura donc pas seulement cassé la fac et le CNRS ! Son gouvernement a aussi donné le feu vert à la création de la très séduisante Licence Sciences et Humanités que l’université d’Aix-Marseille vient d’ouvrir dans son département de sciences. Première du genre en France, elle promet à la petite cinquantaine d’étudiants qui l’ont intégrée un enseignement transdisciplinaire - à ne surtout pas confondre avec l'épistémologie ! - mêlant maths, physique, économie, histoire, ethnologie, philo, chimie, etc.

Concrètement, la licence se divise en deux temps. Un tronc commun de deux ans autour de cinq matières : optique, vision, couleur ; systèmes du monde ; nature et culture ; logique, langage, calcul ; figures du pouvoir. Dans le détail, en première année de « nature et culture » sont abordés la langue décrite comme propre de l’homme (linguistique), la communication animale (biologie), la vie en société des hommes (sociologie) et celle des animaux (biologie). En deuxième année, il est question de la théorie de l’évolution (biologie) et de ses conséquences en littérature ainsi que dans l’art (lettres). La troisième année est laissée au libre choix des étudiants : une spécialisation ou la poursuite du cursus général. Avec comme premier débouché les masters qui ont accepté de jouer le jeu. Le contrôle est uniquement continu, le suivi personnalisé, l’avis et l'implication des étudiants une priorité. « On ne vise pas l'élitisme, mais l'émulation », assure Gaétan Hagel, physicien et responsable du programme.

Curieusement, si l'université d'Aix-Marseille a fait de cette licence la vitrine de sa rentrée, l'institution n'est pour rien dans sa création. Bien au contraire ! Que ce soit au niveau local ou national, elle a longtemps résisté avant de se laisser séduire. Il a fallu mettre des pieds dans des portes. L'envie est née d'une vingtaine d'enseignants en lutte contre la casse de l'éducation nationale, de l'université et de la recherche française. Nous sommes en 2009. Une des actions phare du mouvement universitaire est les « marathons du savoir », des cycles ponctuels de courtes conférences. « On s’est rendu compte que des ponts se font entre astrophysique et philo, mais aussi que les enseignants manquent de réflexivité sur leur matière », poursuit le maître de conférence.

L'idée est aussi de lutter contre des réformes structurelles qui érigent, à tous les niveaux, la professionnalisation comme programme pédagogique. « A l'époque, nos slogans sont "l'université n'est pas une entreprise", "le savoir n'est pas une marchandise". On veut rompre avec cette demande de comptes sur l'insertion des jeunes alors que le problème est sociétal », explique Gaëtan Hagel.

Et de sourire : « On est parti sur un rêve, former des citoyens à penser bien. » Un truc certainement pas au programme des réformes de Sarkozy !

Jean-François Poupelin

On est ravi !

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Accusé de harcèlement sexuel

et de favoritisme par les élèves, le

directeur de l'Ecole d'art d'Avignon a été suspendu

de ses fonctions. Quel avenir pour

une école qui doit quitter ses locaux ?

Flou artistique autour de l'Ecole d'art d'Avignon

Un fonctionnement pareil, avec deux poids deux mesures, est totalement indigne d'une école publique. »

◆ Plaintes pour harcèlement sexuelPlus grave : en juin, quatre élèves déposent plainte pour harcèlement sexuel envers le directeur. Une accumulation de petites phrases, de sous-entendus graveleux selon Margot, l'une des plaignantes : « Il y avait un climat malsain lorsqu'il était là. C'était le coq dans sa cour. On a mis du temps avant de comprendre que ce qu'il faisait s'apparentait à du harcèlement. Du fait du rapport hiérarchique, de l'importance d'une personne qui décide de votre avenir, très peu ont porté plainte. » Une procédure pour diffamation a ensuite été lancée par Jean-Marc Ferrari au nom de l'école. Le dossier est toujours en cours d'instruction.

Autre motif du conflit : une quinzaine d'élèves de troisième année sont restés sur le carreau après le passage devant une commission qui, selon eux, n’avait pas été présentée au départ comme déterminante pour être admis en master. Pauline, qui fait partie des évincés et qui s'est depuis inscrite à l'IUFM d'Aix-en-Provence, dénonce le

Le fusible a finalement sauté. Après presque quatre mois de conflit, le maire d'Avignon

Marie-Josée Roig, présidente du conseil d'administration, s'est décidée à suspendre, le 19 septembre, Jean-Marc Ferrari, le directeur de l'Ecole supérieure d'art d'Avignon (Esaa) depuis 18 ans. Sa tête était réclamée par les élèves de SUD étudiants, en première ligne de la fronde. Le syndicat lui reproche une gestion « féodale », avec clientélisme à la clé. « Pour être certain de réussir, il fallait absolument être proche du directeur et des profs acquis à sa cause, explique Laurent Santi, de SUD étudiants. Aller boire un café, venir à certaines soirées...

règne de l’arbitraire : « On ne sait pas sur quel pied danser à l'Esaa. Les procédures changent chaque année. » Une commission extraordinaire est prévue, début octobre, afin d'entendre au moins cinq élèves qui souhaitent encore poursuivre leurs études à Avignon. Une tardive tentative de rattrapage…

◆ Ecole nomade à la rueL'organisation de l'école explique en partie que cette situation délétère ait pu perdurer. La structure est encadrée à la fois par l'Etat - via le

ministère de la Culture et la préfecture - mais aussi par la mairie. Chacun a ainsi tenté de se repasser la patate chaude tout en espérant que l'été enraye le mouvement. Peine perdue. Marie-Josée Roig n'a jamais cru bon de répondre aux lettres envoyées par les étudiants (pas plus qu’aux nombreuses sollicitations du Ravi) ni tenté de trouver une échappatoire au début de la crise. Il aura fallu le rapport d'un inspecteur du ministère, resté confidentiel, et une réunion de conciliation pour que Madame le maire d’Avignon lâche un de

ses fidèles. Si elle ne l'a pas fait avant, c'est que Jean-Marc Ferrari était indispensable à

la réalisation d'un projet municipal : le déménagement en 2015 dans les locaux de l'Esaa de

l'impressionnante collection d'objets

d'art Lambert, d'une valeur de

90 millions d'euros, récemment cédée à

l'Etat.

Pour permettre l’opération, l'école d'art doit intégrer en juillet

2013 de nouveaux

locaux à côté de la FabricA, lieu de répétition du festival In d'Avignon. Afin d’assurer la transition, Jean-Marc Ferrari, appuyé par la mairie, défendait une « école nomade ». En clair, une école sans véritable point de chute. « C’est de la gabegie, s'insurge Chantal Lamouroux, conseillère municipale PS d'opposition et membre du conseil d'administration de l'Esaa. Comment assurer, par exemple, la restauration d'œuvre d'art dans un préfabriqué ?! » Ferrari à la porte (mais il reste tout de même, à 61 ans, salarié de la mairie), un conseil d'administration exceptionnel doit se réunir. Et les mauvaises langues s'inquiètent déjà : six millions d'euros pour construire un nouveau bâtiment seraient trop peu. « Cette petite structure qui délivrait des diplômes indépendants a voulu grandir trop vite, sans le personnel et la vision pédagogique nécessaires, déplore Chantal Lamouroux. Voilà le résultat. » « Il y a eu des dysfonctionnements. Maintenant, on attend de voir la suite... si l'Esaa existe toujours », lâche Didier Herbet, le directeur administratif. Plus d'école, plus de problèmes ?

Heureux qui, communistes, viennent d’un pays gorgé de soleil ! Et qu’importe s’il n’y a plus de « bouillabaisse. Parce que c’est un plat de riches », soupire, devant le « resto de la plage », Sandro, d’Aubagne. « Ici, tonitrue Gérard, de Digne, on vend de l’huile d’olive, du savon et, surtout, on met de la lavande partout. Parce que la lavande, ça attire les gens ! » Comme les fanions Ricard ou le drapeau de l’OM. Pas folle la guêpe ! On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre. Or, depuis qu’il ne mange plus d’enfants, le communiste a troqué le couteau entre les dents pour le stylo afin de vous faire adhérer au PC. « Enfin, je vous rassure, c’est une semi-adhésion, murmure une militante de Port-de-Bouc. On transmet vos coordonnées au national, qui balance à la Fédé puis à la section et on vous invite à une réunion publique. Après, vous faites ce que vous voulez… »

Ah ! Les vertus du centralisme démocratique ! « Non, c’est fini, tout ça, assure Joëlle, du « 04 ». Avant, ici, il n’y avait que le PC. Aujourd’hui, y a tout le monde ! » Un coco du « 13 » opine du

« N’attrape pas le communisme, cette maladie sénile du gauchisme », m’avait prévenu Laurent, le premier à avoir maculé de rouge mes brouillons d’articlier en herbe. Je venais d’être embauché à l’Humanité. Dix ans durant, j’ai tenu bon. Mais, cette année, pour le Ravi, j’ai décidé de relever, à nouveau, le défi en traînant dans les travées de la « fête ». Non sans avoir été délesté, au passage, de 90 euros par un bleu, tendance marine, qui a vu rouge pour une sombre histoire de ligne blanche.

Qu’importe ! Enervé mais garé, crevé mais accrédité, direction les stands de Paca. Pas de doute, on dirait le sud. Parce que c’est le bordel ! S’il existe un hypothétique « espace Midi » (où l’on trouve… la Loire-Atlantique), les Hautes-Alpes et les Alpes-Maritimes, comme le Var, font bande à part tandis qu’avenue Louis Aragon, le Vaucluse fait bel et bien face aux Bouches-du-Rhône avec, dans un coin, les Alpes de Haute-Provence.

chef : « Regardez, on accueille les Fralib alors qu’ils sont pas au Parti ». Reste qu’Hélène, de l’école d’art d’Avignon, avec ses brochures « Sud », a eu droit à quelques remontrances : « Et puis ils veulent absolument qu’on adhère ! On a jusqu’à ce soir, paraît-il. Mais bon, ça va. La Gironde nous héberge, on s’abreuve en Rhône-Alpes et on fait la fête dans le « 13 »... »

Reste qu’avec un débat samedi matin sur le « concile Vatican 2 », ça sentait autant le vin de messe que le lendemain de cuite. Quant au débat, l’après-midi, sur l’extrême-droite, il aura été beaucoup moins rock’n’roll que celui sur le FN avec Caroline Fourest, celle-ci ayant dû quitter l’estrade après avoir reçu un « Y a bon awards » amplement mérité. Ben oui, camarades, désolé mais c’est ça, la fête : on bouge, on zappe. Comme Sandro, d’Aubagne : « Je vais pas m’éterniser tout le week-end sur le stand de la Fédé. Sinon, autant rester chez moi ! » Et rassure-toi, Laurent, je n’ai toujours pas chopé de mélenchonite aiguë. Pas besoin de carte pour distinguer un ennemi de classe d’un allié de circonstance…

j ’ a itestép O u rv o U S

Clément Chassot

sébastien Boistel

Les stands Paca de la fête de l’Huma.

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Joël Canicave, lui aussi candidat au poste de premier secrétaire. « Je ne comprends pas pourquoi au sein de la collégialité, ce sont ceux qui ont voulu la rénovation qui cherchent à empêcher son application, s’agace le conseiller général Alexandre Medvedowsky. Comprenne qui pourra ! » « Paris validera ou pas le processus, je reste serein et garant de la pluralité », conclut Jean-David Ciot.

« Les dés sont pipés, affirme Pierre Orsatelli, membre de Renouveau PS 13. La principale collaboratrice du président du CG 13, Magali Lefrançois, exerce à la fois la fonction de secrétaire générale de la fédération et celle d'attachée parlementaire de Jean-Noël Guérini ! » « Il y a plus grave encore, ajoute Annick Boët, également candidate déclarée pour diriger la fédé. Magali Lefrançois a accès au fichier Rosam et donc à la liste de tous les militants du 13. » « Faux !, s’insurge Ciot. Je suis le seul, avec la secrétaire, à avoir les codes du fichier. »

◆ Des ambitions hétéroclitesDifficile de comprendre l’importance de la bataille pour la conquête de la fédération sans avoir à l’esprit 2014 et les municipales. En cas de primaires, le rôle du premier secrétaire est moindre. « Tous n’en veulent pas à Marseille, analyse Jean-David Ciot. Patrick Mennucci (NDLR député-maire d’arrondissement) les réclame, Marie-Arlette Carlotti est réticente et Eugène Caselli (NDLR Président de l’agglomération marseillaise) les craint car il a un problème de légitimité. » Tous les trois, opposants à Jean-Noël Guérini, défendent la candidature de Joël Canicave. Mais ils peinent à réunir les conditions d’une alternative.

Rénovation contestée, clientélisme dénoncé… Plongée dans une fédération épuisée par ses tensions mais sommée de désigner son nouveau secrétaire fédéral.

Vaudeville rose à la fédé du PS 13

Un an après la visite d’Alain Richard, dépêché après le rapport accusateur de Montebourg sur les pratiques

de la fédération des Bouches-du-Rhône, l’ombre de Jean-Noël Guérini, président du Conseil général et ancien homme fort du PS, plane toujours. A quelques semaines du congrès départemental, le 20 octobre, qui verra l’élection du nouveau secrétaire fédéral, les esprits s’échauffent. Les chemins de la rénovation auraient été saupoudrés « de poudre aux yeux » selon Marie-Arlette Carlotti, ministre des Personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.

Dans un courrier adressé à Martine Aubry et signé par la majorité du conseil fédéral

collégial mis en place après le rapport Richard, des militants socialistes de l'association Renouveau PS 13

qualifient d'« arnaque » la rénovation de la fédération des Bouches-

du-Rhône engagée depuis juin 2011. Ils constatent l'absence de mise en œuvre des recommandations du rapport Richard. « Les

clefs de notre fédération restent entre les mains du Conseil général », déplorent-

ils. Ils ont obtenu de la première secrétaire sur le départ qu'Alain Fontanel, déjà chargé

de la rénovation des fédérations de l'Hérault et du

Pas-de-Calais, vienne faire une nouvelle inspection à Marseille dans les prochaines semaines.

◆ Les dés sont pipés ?« Le recours à Solférino est devenu systématique pour ne pas dire pathologique », déplore Jean-David Ciot, le premier fédéral sortant. Candidat à sa propre succession, le maire du Puy-Sainte-Réparade et tout nouveau député, qui revendique sa matrice « guérinienne », se pose en garant de la rénovation. « 80 % des recommandations du rapport ont été réalisées ou sont en voie de l’être. »« Sur les dix préconisations du rapport Richard, une seule a été mise en place, la collégialité ! », rétorque, ironique,

La collégialité n’a donné lieu qu’à la mise en perspective d’une « union » forcée et démentie par la réalité du quotidien, résumée par cette étonnante confession d’une opposante à Guérini : « Le succès de Guérini est d’abord celui d’un type qui fait de la politique au milieu du consensus mou d’opposants aux ambitions hétéroclites. » De quoi ajouter de la confusion à une situation déjà cryptée ! Jacques Pilhan, conseiller en communication, disait qu’en politique « être une cible, c’est con, mais être une cible immobile c’est encore plus con ». Alors Guérini bouge, visite et rassure. Et si l’opposition se cherche, Guérini sait encore causer dans le creux de l’oreille des élus.

Résultat : le retournement du maire de Rousset, qui avait signé la motion de Carlotti, puis s'est rallié à celle de Ciot après un chèque de 3,8 millions d'euros d'aide du Conseil général pour sa commune. « On observe un certain…reflux », trompettent même les proches de Guérini. Certains militants qui espéraient un « retour sur investissement » pour leur opposition, ont du vague à l’âme. « Guérini, c’était quand même une garantie contre les coups durs, rage un militant, dont le fils est au chômage depuis peu. Les autres, on n’existe pas pour eux. Moi j’ai collé pour les élections, Carlotti, elle est devenue ministre, moi ma vie, elle n’a pas changé. » Plus que jamais, les clés de la rénovation sont entre les mains du juge Duchaine.

Rafi Hamal

Lettres à eLise Depuis que Roland Chassain, maire UMP des Saintes Maries de la Mer (13) a perdu son siège de député, il s’ennuie ! Alors du coup, il nous écrit ! Deux lettres reçues à un jour d’intervalle ! L’une avec logo UMP, histoire de dire « je fais toujours partie de la bande », et dans laquelle il précise qu’il « ne s’est jamais désisté au profit du FN […] mais (a) laissé les électeurs libres de leur choix » (concernant la brève « Chassain le naturel » le Ravi n°99). L’autre sur papier à en-tête de la mairie, réagissant à l’article « Paranormal Pognon » où il conseille, entre autre, à notre journaliste de consulter le « K-bis » des voyants présents sur le salon. Comme si le registre du commerce prévenait de tout charlatanisme !

Mer Morte Le 9 octobre prochain, Monaco accueillera le colloque « Droit de la mer, 30 ans après Montego Bay » dont le but est de faire évoluer les comportements maritimes au niveau international. La principauté est le lieu idéal pour parler de pollution. Les Grimaldi ont réussi l’exploit de bétonner 88,9 % de son littoral. Un record en Méditerranée ! « Si tous les pays imitaient Monaco, la Méditerranée n’existerait plus » nous a déclaré Alexandre Meinesz, chercheur du laboratoire Ecomers de l’Université de Nice. (le Ravi n°87)

Chasse aux sorCières Alors que dans les quartiers nord de Marseille des habitants brûlent des camps de Roms pour les faire déguerpir (28 septembre), à Brignoles (83), la police les raccompagne à la frontière de la ville ou du département après avoir pris soin de leur enlever chaussettes et chaussures. C’est ce que révèle une enquête Mediapart du 15/09 dans laquelle deux policiers anonymes de la brigade de Brignoles évoquent aussi « des prises d’empreintes digitales en dehors de tout cadre légal, ainsi que des violences légères ». Les faits auraient eu lieu en 2010 et 2011.

MennuCCi, Le reCours L’insubmersible Omar Djellil a déposé un recours contre l’élection, aux dernières législatives, du socialiste Patrick Mennucci. Il dénonce, pêle-mêle, des subventions attribuées à des associations peu de temps avant le scrutin ainsi que des discordances entre le nombre de signatures de la liste d’émargement et le nombre de bulletins dans les urnes. Réponse du nouveau député de Marseille : « Même si j’ai le plus grand respect pour le Conseil Constitutionnel, je n’ai aucun

problème avec ce recours. Il y a eu plus de 10 000 voix d’écart ! » La réponse devrait intervenir d’ici quatre mois.

Enquêtes

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Dehors les SDF !

Monsieur le député-maire de Cavaillon,

En tant qu’administré de notre magnifique cité provençale, je tenais particulièrement à vous

féliciter. Fier de vos valeurs, les pourpres sirènes socialo-

communistes n’ont pas eu raison de votre engagement. 300 clochards

dans nos douces ruelles… Tout cela pour faire les saltimbanques !

Et puis quoi encore ?

Plus sérieusement, ils sont marrants les organisateurs de ce festival de théâtre modestement

nommé « C’est pas du luxe ». Ces gauchistes de la Fondation Abbé

Pierre, associés à la scène nationale cavaillonnaise et à l’association Le

Village qui prétend aider les plus démunis, pensent-ils vraiment que le théâtre, ça va les aider à bouffer ces pauvres gens ? Vous me direz,

si vous aviez finalement accepté de les accueillir, c’est mon beau-frère

qui tient l’épicerie de la rue Raspail qui aurait été content… Là oui, il

en aurait vendu du cubi de rouge ! 300 fois je ne sais combien, ça peut

aller vite.Et puis, quel courage politique

monsieur le maire quand même ! Leur annoncer, en pleine réunion préparatoire, que la ville refusait

finalement d’accueillir le festival… Du grand art. Rien à voir avec ce vendu écologiste, maire du Thor, qui s’est précipité pour récupérer

l’événement et en faire un joli coup de communication.

J’ai beaucoup apprécié par ailleurs la sortie de votre adjointe à la

culture, Annie Stoyanov, dans La Provence du 31 août. Elle y parle

de « mots insultants pour une ville souvent martyrisée qui souffre

qu’on la montre ainsi du doigt », après qu’on ait vilipendé votre

choix. C’est vrai ça, nous aussi on souffre. Et qui s’occupe de nous, hein ? Sarko, il est parti… Alors,

que chacun reste dans son carton et les moutons seront bien gardés. On est déjà capitale du melon, ça va comme ça ! Et puis ne vous en faites pas, de toute manière, ces

gens-là, ça ne vote pas…

Fidèlement,

L’une de vos nombreuses admiratrices anonymes

Mme Fillonne

L’association Le Cap qui lutte dans le Var contre le harcèlement au travail ne chôme

pas. Les dépôts de plainte s’accumulent, les employés sont en souffrance mais la

justice prend son temps…

dans l’entreprise

David Bordogna, en accident du travail depuis trois ans, a

déposé plainte en septembre 2009 pour entrave à délégué du personnel, discrimination syndicale, harcèlement moral, propos homophobes et violences volontaires contre son employeur la société Bonifay. Leader du BTP varois (chantiers du Tunnel et de l’hôpital de Toulon), elle salarie 350 personnes dans le département. « C’est bien simple, j’avais l’impression de travailler sous la France occupée en 1940, avec un climat malsain, tout était basé sur la délation, témoigne-t-il. Et lorsqu’on a monté une section syndicale FO avec deux collègues (1), alors là ça a été la débandade ! » L’instruction est en cours mais David a peu d’espoir : « On nous balade jusqu’à ce qu’on se lasse et qu’il y ait prescription. » Une plainte classée selon le tribunal de Toulon (courrier de février 2011), puis finalement une enquête toujours ouverte (courrier de la Cour d’appel d’Aix d’avril 2011). Et un dossier - que l’on ne savait pas perdu - visiblement « retrouvé » (courrier de la Cour d’appel d’Aix de novembre

2011) ! La justice varoise a ses mystères… « Disons qu’il y a des dysfonctionnements dont on ne connaît pas l’origine…», ironise un avocat toulonnais. André Bonifay ne se fait pas de souci particulier. « C’est du passé pour moi, nous explique le patron mis en cause. Ça fait trois ans que ça dure. C’est comme le loup. On en parle mais on ne le voit jamais venir ! »

� Affaires classéesL’association varoise Le Cap, créée en 2004 (2), qui vient en aide aux victimes de harcèlement moral a traité en 2011 222 dossiers : 174 concernaient le Var dont 113 victimes issues du secteur privé et 86 de la fonction publique, dont 48 pour la fonction publique territoriale. « Parfois une médiation suffit », indique Louisette Maret-Tiouchichine, juriste et directrice de l’association. Une solution qui fonctionne dans le privé mais que la fonction publique refuse le plus souvent. « Alors que le problème ce n’est pas l’institution elle-même mais des comportements qui engagent la responsabilité individuelle des personnes, précise-t-elle. Sauf quand l’employeur est informé

et qu’il ne fait rien. » Dans le Var, seule La Seyne-sur-Mer a mis en place, depuis 2007, une convention avec le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (CEREQ) et Le Cap. La municipalité a aussi rédigé une charte « de bien être au travail ». « On essaie de prévenir ce qui pourrait amener à des situations de harcèlement », indique Patrick Valle, adjoint au maire en charge du personnel.

L’affaire Bertolucci à Sanary, celle du Pont du Las à Toulon, de Charles Camarassa à Solliès-Pont, de René Mocellin à Ollioules : autant de dossiers mettant en cause des employés ou élus de mairie qui ont été jugés. Contrairement à de nombreux autres cas qui tardent à l’être et finissent souvent classés sans suite. Dans ce cas, la victime peut alors faire valoir son droit par la citation directe. « Mais quand ces dossiers arrivent à l’audience, ils sont méprisés par le juge qui estime que vous outrepassez le pouvoir du procureur de la République, explique la directrice de Le Cap. Alors que vous ne faites qu’appliquer la loi. C’est inadmissible ! »

� Une fenêtre muréePatrick Mazin, directeur du service technique du Castellet, quant à lui, a déposé plainte en 2010 pour harcèlement moral contre Gabriel Tambon, le maire UMP. L’affaire est en cours mais Patrick Mazin continue d’embaucher tous les matins dans ce qui ressemblait

jadis à un bureau, avant que sa fenêtre ne soit murée, son portable supprimé, son véhicule de fonction envoyé à la décharge et ses primes enlevées. « Je n’ai plus aucun contact avec qui que ce soit, les gars ne m’adressent plus la parole, se désole-t-il. Je pourrais mourir là que personne ne s’en rendrait compte ! » Il affirme ne pas connaître la raison de ce qui ressemble à une mise au placard. A 57 ans, cet Auxerrois, qui « regrette sa mutation dans le sud », ne pensait pas finir sa carrière ainsi : « Je suis parti six mois en dépression mais j’ai décidé de revenir et de me battre, c’est trop facile sinon. » Patricia Giuliano-Lombardi, fonctionnaire responsable de l’office de tourisme a déposé plainte elle aussi pour le même motif. Monsieur le maire n’a pas donné suite à notre demande d’interview. A en croire René Roubaud, élu d’opposition DVD, ce genre de persécutions est chose courante au Castellet : « Chaque fois, ça s'est terminé en cas de harcèlement. C'est comme ça depuis 50 ans… » (Var-Matin 1/09/2011). Un maire silencieux, donc, et qui a les moyens de faire durer. Il a fait appel en cassation et sa majorité lui a accordé la protection juridique.

1. Philippe Lemercier a déposé plainte pour violence physique, son épouse a été licenciée.2. L’association a interpellé les candidats aux législatives sur sa situation financière critique. Contrainte de ne pas pouvoir suivre certains dossiers, elle s’est résolue à se séparer d’un juriste

Samantha Rouchard

CHRONIQUEDE DROITE

ne connaît pas la crise

Le harcèlement

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Laïcité inchaLLah

« Dans la mesure où le port d’un voile dissimule le visage, même pour partie […] ne permet pas [...] de s’assurer de façon certaine de l’identité de celui-ci, il ne peut lui être reproché de refuser de célébrer le mariage », telle est la conclusion du juge du TGI de Toulon concernant l’affaire qui oppose un couple de Seynois à Florence Cyrulnik, adjointe au maire PS de La Seyne (la plainte a été déposée contre l’Etat). Le 6 septembre dernier, l’élue avait demandé à la mariée de dévoiler ses cheveux et ses oreilles afin de vérifier son identité. Cette dernière a refusé et le couple est reparti sans être marié. Pour eux, le débat porte sur la laïcité et « le respect des croyances religieuses ». C’est ce qu’ils comptent mettre en avant devant la cour d’appel d’Aix.

Bompard et sa mauvaise conscience Le mariage gay bientôt adopté par les parlementaires français ? Une hérésie pour le député-maire d’extrême droite d’Orange (84), Jacques Bompard. Si bien que le dévot élu réclame une « clause de conscience » pour les maires opposés au mariage entre même sexe. Et ainsi ne pas célébrer ces unions diaboliques. M. et Mme Bompard sont des habitués de l'abbaye intégriste de Sainte-Madeleine du Barroux.

Des policiers se sont sentis visés par ses textes et attaquent l’artiste qui risque un an de prison avec sursis et une amende. Jugement rendu le 3 décembre.

Laïcité si dieu Le veut L’élu PS Patrick Seror a écrit une lettre ouverte (La Marseillaise, le 08/09) en réponse à une invitation faite par le maire UMP de Draguignan (83), Max Piselli, aux élus leur demandant de participer à une procession traditionnelle qui se tenait le 8 septembre. L’élu d’opposition a rappelé que « la loi de 1905 fixant la séparation de l’Eglise et de l’Etat doit être appliquée dans tous les domaines » et « une laïcité […] trop souvent bafouée ». Amen.

100 pour sang Le 11 septembre dernier, lors des questions au gouvernement, Olivier Audibert-Troin, député UMP de la nouvelle 8ème circonscription du Var, a qualifié les 100 jours de la gauche au pouvoir de « rendez-vous manqué avec l’histoire, les citoyens et la France ». Et de se prendre un tacle de Jérôme Cahuzac, ministre délégué au Budget : « Ce qui est sûr c’est que VOUS avez manqué le rendez-vous avec les Français ! »

rappeurs BâiLLonnés Après le groupe Negresco à Nice contre lequel Estrosi a déposé plainte pour « incitation à la violence », c’est au tour du rappeur toulonnais Saigne J., d’être poursuivi pour « diffamation » et « incitation au crime ».

Orange performe avec le sourire

« Nous n’avons pas été invités, c’est déjà un signe. » Responsable France Telecom de Sud PTT 13, Michel Issenjou aurait certainement apprécié la petite sauterie organisée mardi 18 septembre par sa boîte pour inaugurer son Orange Campus de Marseille, son second « site de développement des managers du Groupe ».

Trois ans après la « crise » (35 suicides selon la justice, une soixantaine selon les syndicats), comme on dit pudiquement chez Orange, qui a valu une mise en examen pour harcèlement moral des anciens numéros 1 et 2 du groupe ainsi que de l’entreprise, le numéro 1 français de la téléphonie mobile veut faire croire à une révolution culturelle. Devant un parterre de cadres et quelques pique-assiette, Bruno Mettling (directeur général adjoint en charge des ressources humaines et en chemise ouverte) et Patrick Figuères (directeur Orange Sud Est) parlent « performance sociale, nouvelle culture managériale […] de l’entreprise », « valeur humaine comme levier de la performance » (économique ?).

La réalité semble moins rose. « Avec la crise et la concurrence de Free, les managers vont devoir revenir aux résultats », soupire Michel Issenjou. Si « on respire » aujourd’hui à France Telecom, si des investissements importants ont été faits sur la « convivialité » des locaux, « l’organisation du travail est profondément identique » assure le syndicaliste. Selon lui, cette question, comme celle de la formation, a été expédiée par la nouvelle direction. Résultat : « On est passé d’un mode de management commando à un système militaire normal. Pour blaguer, on dit que maintenant les cadres sont harcelés avec le sourire. » Si c’est avec le sourire…

Jean-François Poupelin

La bourse ou La vie

Enquêtes

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Au CG13, quelques entreprises se partagent depuis une dizaine d'années le lucratif marché de la maintenance des

500 bâtiments du département. Avec de forts soupçons de favoritisme, dénoncés en interne dès avril 2011. Malgré

un récent audit externe qui confirme les dérives, les dysfonctionnements persistent.

d’offre similaires et de continuer à travailler pour le Conseil général. Dans son offre de 2009, une entreprise propose des prix dont l’écart avec les estimations du maître d’ouvrage (qu’elle n’est pas censée connaître) est systématiquement le même, pile dans la fourchette demandée par le Conseil général. Constaté sur plusieurs centaines de prix, cet exploit n’a cependant provoqué aucune réaction du Conseil général qui a gardé sans broncher ce fournisseur très bien informé.

Marchés très appréciés

Ces soupçons portent tous sur des marchés à bons de commande (MBC), une technique d’achat public pratique en cas de travaux urgents mais également très coûteuse, dont le Conseil général use et abuse pour la maintenance de ses 500 bâtiments. Contrairement aux marchés globaux à prix forfaitaire, il est impossible de connaître le coût des marchés à bons de commande lors de leur attribution. C’est au fil des besoins de la collectivité que les bons de commande sont exécutés. Ces marchés sont normalement réservés aux cas où les pouvoirs publics ne peuvent pas anticiper la survenance du besoin et les quantités nécessaires. Par exemple dans le domaine du bâtiment, pour des urgences : dépannage d’une chaufferie, réparation d’une fuite d’eau, etc. Ils sont surtout très appréciés des élus et directeurs d’établissements du fait de leur réactivité. Au CG13 comme ailleurs.

Mais selon un audit réalisé en janvier 2012 par un cabinet parisien, le Conseil général fait un usage très excessif de ces marchés en les utilisant pour des « opérations programmées » ainsi que « des travaux […] qui relèvent davantage de la réparation lourde, voire de la réhabilitation ou de la construction, soit de dépenses d’investissement plus que de fonctionnement ». Le remplacement des systèmes incendie des collèges, dont

C’est une coquille d’un sous-fifre du Conseil général des Bouches-du-Rhône qui a

révélé le pot aux roses. Chargé de rédiger l’estimation de prix d’un marché public de rénovation des collèges du département, un document confidentiel à l’aune duquel sont sélectionnées les entreprises candidates, un cabinet indépendant fait en 2010 une erreur de frappe. Voilà le prix du mètre carré de vitrage bradé à un euro, tout comme celui du mètre carré de teinte aluminium. Etonnamment, deux des entreprises de BTP candidates reprennent texto ces prix totalement irréalistes dans leur offre.

Un exemple parmi de nombreux autres, relevés début 2011 par des agents du Conseil général, qui montre que certaines entreprises ont vraisemblablement eu accès aux estimations de prix du maître d’ouvrage, faussant ainsi les marchés. Au vu de ce tableau explosif dressé en avril 2011 par ses services, Jean-Noël Guérini, le président PS du Conseil général, ne peut qu’alerter le procureur de Marseille sur de graves soupçons de favoritisme. Une procédure qui n’est curieusement pas remontée jusqu’aux oreilles des élus.

Mais la justice, tout comme le Conseil général, semblent avoir décidé qu'il était urgent d’attendre. Saisi il y a un an et demi, le procureur de la République de Marseille indique qu’une « enquête préliminaire est toujours en cours et a été confiée à la police judiciaire. » Du côté du CG13, si quelques marchés manifestement entachés de favoritisme ont été annulés, des entreprises sont soupçonnées de remporter d’autres appels d’offre similaires et de continuer à travailler pour le Conseil général (1). Contacté, le procureur de la République de Marseille dit ne plus se souvenir de la plainte, et encore moins de ses suites judiciaires. Seuls quelques marchés manifestement entachés de favoritisme ont été annulés, ce qui n'a pas empêché les entreprises soupçonnées de remporter d’autres appels

l’obsolescence est pourtant prévisible, passe ainsi systématiquement par des marchés à bons de commande. Et systématiquement depuis dix ans, c’est également la même entreprise (Sphinx), par ailleurs soupçonnée d’avoir bénéficié de favoritisme, qui les remporte. Et se goinfre : 6 millions d’euros entre 2003 et 2011 selon l’audit.

Il y a en effet des affaires à faire sur la maintenance des bâtiments du CG13. L’ardoise annuelle s’élève à près de 40 millions d’euros. Mais, selon un document interne à la collectivité, « la pratique démontre que les urgences représentent pour une année (...) moins de 5 % de son budget ». Mieux ! Selon le même document, le choix d’une mise en concurrence par des marchés à procédure adaptée (Mapa), ou marchés forfaitaires, « étendue à l’ensemble des travaux programmables, permettrait de manière évidente de générer une économie de 5 millions à 10 millions d’euros ». Les exemples d’économies possibles ne manquent pas. La facture de la piste d’athlétisme d’un collège a ainsi fondu de 60 000 euros à 17 000 euros en passant d’un marché à bons de commande à un Mapa !

Un toit au prix d’une villa !

Une différence (en partie) justifiée par une des spécificités des MBC : l’incertitude des quantités commandées. Pour s’y retrouver, les entreprises proposent des prix moins intéressants que sur les marchés forfaitaires. Exemple : en toute légalité, une toiture et un faux plafond de 450 m2 ont été facturés 250 000 euros au CG13. « Avec [cette somme], on construit une belle villa de 250 m2 ! », s’étrangle un technicien. Pour éviter ce genre de mauvaises surprises, le Conseil général de la Côte-d’Or a de son côté fait le choix de limiter ses marchés à bons de commande. Le Conseil général du Var a, lui, adopté une autre stratégie : l’embauche de surveillants de travaux qui

vérifient sur le terrain les quantités facturées par les entreprises. Une expertise dont se passe le service des bâtiments du CG13. Résultat, le département du Var dispose du même nombre d’agents que celui des Bouches-du-Rhône pour gérer moitié moins de collèges.

L’absence de contrôle est cependant loin d’être la seule défaillance du CG13. Tout au long de ses 81 pages, l’audit de janvier 2012 pointe des dysfonctionnements plus ou moins curieux dans les services en charge de la maintenance des bâtiments départementaux : quelques entreprises historiques qui définissent les besoins de la collectivité, une « fidélité » très forte de cette dernière réduisant d’autant la concurrence, des soupçons d’entente et de favoritisme, le manque de compétences, l’inexistence de service dédié aux marchés publics, la sur-utilisation des avenants sur les marchés en cours, etc.. Une manière très pudique de s’interroger sur la sincérité de la concurrence et une possible organisation de l’incompétence du service ?

Surfacturations

Certains agents l’ont fait. A leurs dépens. Lorsqu’ils ont tenté de remettre de l’ordre et dénoncé des facturations plus que curieuses - une porte coupe-feu facturée trois fois les prix fournisseur ou la facturation de prestations non comprises dans le marché par exemple -, les entreprises n’ont pas vraiment apprécié l’initiative. La fédération du bâtiment des Bouches-du-

Rhône a protesté auprès du directeur de la construction, de l’environnement, de l’éducation et du patrimoine, Gérard Lafont, depuis passé à la tête de 13 Habitat, bras armé du Département en matière de logement social et cœur du système clientéliste mis à jour par l’instruction du juge Duchaine (le Ravi n°98). Selon nos informations, Gérard Lafont a menacé en février 2011 de déplacer les agents qui avaient remis en cause l'usage des MBC et leur a imposé de continuer à travailler exclusivement en marchés à bons de commande.

C’est certainement une coïncidence si le président de la fédération du BTP 13 n’est autre que le PDG de Climatech, une maison spécialisée dans les travaux d’installation thermique et de climatisation particulièrement appréciée du CG13. Entre 2003 et 2011, elle a été la principale bénéficiaire de ses MBC avec 17 marchés pour un montant total de 7,4 millions d’euros (2).

Aux dernières nouvelles, si une mission de conseil est en cours, à part quelques petits aménagements dans la passation des MBC initiés au début de l’audit et l’exfiltration de Gérard Lafont, rien n’a changé.

1. Contacté, le « conseil général n'apporte pas de commentaires sur les instructions judiciaires en cours. »2. Contactés, Gérard Lafont et l'ancien conseiller du président de la fédération du BTP des Bouches-du-Rhône et fondateur de Climatech n'ont pas répondu à nos sollicitations.

Louise Fessard (Mediapart) et Jean-François Poupelin (le Ravi)

Soupçons de favoritisme

au CG13

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Médias, la grosse enquête

Cela devient une tradition au Ravi. A chaque nouvelle formule, nous consacrons une enquête aux médias. « La grande dépression », titrions-nous en 2009. Trois ans plus tard, force est de constater que la situation n’est toujours pas fameuse en Paca ! Bien qu’ils absorbent l’essentiel du marché publicitaire, les quotidiens régionaux du groupe Hersant (La Provence, Var Matin…) continuent à perdre des lecteurs et pourraient changer de main. La Marseillaise peine à briser le monopole et ouvre un guichet de départ volontaire. France 3 redoute un plan social. Les médias en ligne ne sont pas rentables. Le système de diffusion de la presse frôle l’explosion. Au point d’envisager le pire : la disparition des kiosques où l’on pouvait trouver tous les titres. La précarité rogne la profession. Les médias sont pressés comme des citrons. Ils subissent la contrainte des pouvoirs économiques et politiques. Ils sont aussi soumis à l’accélération permise par les nouvelles techniques. Spectateurs, auditeurs et lecteurs se laissent noyer, parfois avec volupté, dans un flot incessant d’images, de sons et de mots aussi formatés qu’insipides. Car la société du spectacle communique plus volontiers qu’elle n’informe ! A l’inverse, le Ravi fait le choix de ralentir, d’approfondir. Heureusement, nous ne sommes pas les seuls à vouloir renouer avec les fondamentaux du métier : l’enquête, le reportage, l’analyse. Une rencontre des médias indépendants a même lieu ce mois-ci à Aix-en-Provence (cf p.16). Nous y serons. Comme nous sommes au rendez-vous, grâce à vous, tous les mois depuis neuf années.

Michel Gairaud

renouer avec le métier

Qu’à Marseille, une école de journalisme ferme donne une idée de l’état des médias en Paca. A ce titre, la situation de la Presse quotidienne régionale (PQR) est édifiante. Depuis qu'a capoté l'accord entre Rossel et Hersant pour le rachat de

La Provence, et de Nice, Var et Corse-Matin, les sala-riés sont dans l’expectative. Alors que le mandataire judiciaire est en train de négocier avec les banques la dette de 200 millions d’euros d’Hersant médias, on saura bientôt si le groupe dépose ou non le bilan. A

Var Matin, on craint à la fois « un plan social et une vente à la découpe, les régies pub de La Provence et de Nice Matin étant désormais distinctes ». à La Provence, « on vit avec les rumeurs. Rossel, après avoir claqué la porte, pourrait revenir par la fenêtre. Le Crédit mutuel, comme le groupe Centre France, s’intéresserait à nous. Car, à un an des municipales, nos journaux ne peuvent laisser indiffé-rents ». En attendant, le journal distribue, comme si de rien n’était, des I-phones à ses journalistes pour qu’ils alimentent le site. Une fuite en avant dans une entre-prise qui, pour garder la pub, a voulu tout maîtriser, tout standardiser, du print au web en passant par les gratuits.

Budgets et tiraillements

A La Marseillaise, l’ambiance est morose, les comptes dans le rouge et le guichet de départs volontaires, concernant une quarantaine de salariés, ouvert. « Si on continue comme ça, on va droit dans le mur !, s’inquiète

Jean-Marie Dinh, de la CGT. La rénovation du titre n’ayant pu se faire, si on applique qu’une logique comptable, on va déstabiliser tous les services. Alors qu’il y a, dans la région, vu les élections, de la place pour un quotidien de gauche. » Ambiance tendue alors que les journalistes sont payés en de-çà du minimum syndical (NDLR comme au Ravi !) : ils viennent de débrayer pour sauver un poste de rédacteur à la rubrique « culture » qui, à la veille de 2013, allait être supprimé ! Et pourraient, si nécessaire, interpeler lecteurs et politiques. Car il y a urgence. Faute de moyen (et de relecture), Jean-Marc Coppola, conseiller régional PCF, s’est retrouvé au « conseil général » et le patron de la « Fédé » du PCF des Bouches-du-Rhône, Pierre Dharréville, en a marre qu’on ne sache où est son « h ».

Si la presse est sinistrée, celle qui l’alimente ne va guère mieux. A l’AFP, le budget « piges » est toujours en berne alors que l’agence ne compte, pour couvrir un territoire plus grand que la région, qu’une dizaine de journalistes. « On est en permanence tiraillés entre les impératifs bud-gétaires et la nécessité de produire une info qui réponde aux canons de l’AFP », témoigne l’un d’eux. à l’autre bout, les gratuits eux aussi tirent la langue. Ainsi, à 20 minutes Marseille», suite au départ des « historiques », l’intérim a été assuré par un CDD venu de Paris, rem-placé peu après par un « junior », une jeune plume ne coûtant pas cher au « premier quotidien » de France. Et, à Metro et Direct Matin, le manque de moyens est tel qu’il est rare de voir leurs journalistes sur le terrain.

Casser le thermomètre

Côté audiovisuel public, ça ne va pas très fort. La gauche n’a en effet pas rétabli la pub après 20 heures. « Mais, même si cela avait été le cas, on serait encore en sous-financement, lâche Eva Fontenay, de la CGT de France 3. Si, avant, on produisait nos propres magazines,

Comme beaucoup d’autres, notre région est médiatiquement sinistrée. Petit tour d’horizon aux allures de balade dans un service de soins palliatifs. Bip, bip…

les médiastases de Paca

pressés commedes citrons

médias, Pressés comme des citrons

soumis aux pressions économiques et politiques, les journalistes sont au bord de la crise de nerf...

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leravi › Octobre 2012 n°100 › 11

la grosse enquête

aujourd’hui, on n’en a plus les moyens. » Le patron de la télé publique, Rémy Pflimlin, a évoqué un « plan social » qui pourrait concerner plus de 800 personnes ! « Pfli-mlin a été nommé par Sarkozy mais la tutelle ne peut pas désavouer l’austérité qu’il prône, souligne Robert Papin, de la rédaction marseillaise. On est au milieu d’une partie de poker menteur. Et puis, en agitant le chiffon rouge de la fusion des rédactions, ça détourne l’attention. En atten-dant, ordre a été donné de ne pas trop recourir aux CDD. Quant aux formations, elles sont gelées. »

Une situation qui ne profite même pas au privé. Malgré une nouvelle grille et de nouveaux propriétaires qui lorgnent déjà sur la télé locale de Nice, LCM (La chaine Marseille) ne semble pas pressée de recourir aux mesures d’audience de Médiamétrie. « Trop coû-teux », disent les nouveaux propriétaires à l’image des anciens qui avaient jugé plus prudents de « casser le ther-momètre ». Si, après des années de vaches maigres, les Sébastien Boistel

journalistes ont eu droit à une rallonge de 100 euros, ils scrutent ce que va faire leur VRP de luxe, le maire DVG d’Istres, François Bernardini, dont les appétits pourraient être réveillés par la condamnation du président socialiste du SAN Ouest, Bernard Granié…

Du rêve et du vent

Du côté des ondes, il y a aussi de la friture. Certes, Radio France n’est pas Radio Zinzine Aix, cette station associative que le CG13 veut expulser et que la mairie d’Aix cherche à reloger. « Mais nous aussi, on bosse à moyens constants, souligne Fabien Ledu, de France Bleu Provence. C’est-à-dire sans embauche ! Aujourd’hui, la moyenne pour faire tourner une locale, c’est 26 postes. Comme on est trente, on va devoir s’aligner. » Et ce, alors que le travail s’intensifie puisqu’il faut « tweeter, être sur

Facebook, bref faire du « bruit ». Sur la base, bien sûr, du volontariat. Et avec, pour coordonner tous les sites web dans le sud, une seule personne ! » Or, sur la toile, le miracle a, de plus en plus, des allures de mirage.

Pour Marjolaine Dihl, du collectif de pigistes « Presse papier », « c’est de plus en plus galère. Il est quasi impossible de travailler pour les médias locaux. La seule solution ? Bosser pour la presse parisienne ou spécialisée. Ou accep-ter des niveaux de rémunération très bas. Voire faire de la com’, des ménages… » Pourtant, note Laurent Berneron, pigiste et animateur du site B Magazine, « on a dans la région une actualité d’une richesse exceptionnelle. Sauf que médiatiquement, cela se résume à une série de clichés. Et je ne parle même pas de faire une info réflexive… »

Marc Bassoni, de l’école de journa-lisme de Marseille, n’est guère plus optimiste : « Il est de plus en plus dif-ficile de placer nos étudiants, même en stage. Alors que se multiplient, sans aucun contrôle, les formations pour devenir jour-naliste. On vend du rêve et donc du vent ! Voilà pourquoi on forme nos étudiants à être opérationnels mais aussi à avoir un regard critique. » Espérons qu’ils auront

souri en apprenant la naissance du « Cercle des Médias et de la Communication Marseille Méditerranée » ? D’abord parce qu’à Marseille, il y a maintenant deux clubs de la presse. Ensuite parce qu’il veut rapprocher - bel exemple de mélange des genres - médias et com-municants. Enfin parce que le lancement a eu lieu au Cercle des Nageurs Marseillais : pour être journaliste, faut savoir mouiller la chemise et faire de l’apnée.

« Si on continue, on va droit dans le mur ! »Jean-Marie Dinh

le Ravi existe depuis juillet 2003. et, en presque une décennie, il a vu disparaître…

En PacaBabazouk (Nice) (octobre 1999 – 2003)Cuverville (Toulon) (1995 – 2003 pour la version papier, le site internet existe encore)le Pavé (Marseille) (1998 – 2003)le tuyo (Nice) (2008 – 2009)Marseille la cité (Marseille) (2005 – 2008)Mars Magazine (Marseille) (juillet 2004 – 2005)rue 89 Marseille (septembre 2008 – mars 2009)tribune du Sud (15 mai – 30 juin 2009)

Ailleurs en Francela Mèche (septembre 2010 – décembre 2010)la tribune (1985 – 2012)le Plan B (2006 – 2010)France Soir (1944 – 2012)PlPl (juin 2000 – octobre 2005)Siné Hebdo (septembre 2008 – avril 2010)

La liste n’est, malheureusement, pas exhaustive…

In memoriam

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12 ‹ n°100 Octobre 2012 ‹ leravi

Chaque jour de la semaine, Catherine Pietralunga se lève à 5 heures du matin pour réception-ner les paquets de journaux déposés

par les livreurs de la société d’agence et de dif-fusion (SAD). Un bordereau, digne des télex de l’Allemagne de l’Est, accompagne chaque colis. Catherine les met de côté, puis place les journaux, parmi les 500 titres présents dans son kiosque devant la Préfecture de Marseille. « Je passe ici 12h par jour pour vendre des journaux et à la fin du mois, il me manque 3 000 euros, explique-t-elle. J’ai mangé mon fonds de trésorerie et je n’ai pas dégagé de salaire depuis mai. Donc, soit, je me débrouille mal, ce qui n’est pas possible puisque j’ai triplé le chiffre d’affaires du kiosque depuis que je l’ai repris voici deux ans, soit il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans le système de distribution des journaux. »

La diffusion de la presse est règlementée depuis 1947 par la loi « Bichet » qui assure la neu-tralité de la distribution entre tous les titres, et donc le plura-lisme de la presse. Au départ, le principe est de faire payer les gros par les petits. Aujourd’hui, le système est devenu extrê-mement complexe. Il s’y joue une guerre de position entre les éditeurs, les sociétés de dis-tribution et les points de vente. « L’éditeur veut que le maximum d’exemplaires de son titre soit présent dans les kiosques, explique Philipe Pérard, responsable de la société de distribution indépen-dante à Dignes. Notre rôle, c’est de modérer cette exigence par notre connaissance du terrain. On ne met pas 200 exemplaires de « ski magazine » en plein été dans les maisons de presse des stations. »

10 000 euros de prime

Pour Catherine Pietralunga, c’est pourtant ce qui se passe. « Chaque matin, je reçois des titres que je ne vends pas. Je n’ai pas le choix et le pire, c’est que la SAD me facture tout de suite ! Par contre, pour que je puisse toucher ma commission sur les titres vendus, je dois attendre au mieux 15 jours, au pire un mois. » Autrement dit, sans un fonds de trésorerie, impossible de tenir. Pour Stéphane Pérard, le système de distribution de la presse est obsolète. « Les règles n’ont pas bougé depuis 60 ans, comme si, la télé et Internet n’avaient pas été inventé entre-temps. La presse, c’est moins 35 % depuis 5 ans ! Et le pire, c’est que chaque fois que le système a essayé de s’adapter,

Le système de distribution de la presse est au bord de l’explosion. Au point d’envisager le pire : la disparition des kiosques.

« Pour bien faire,

c’était encore pire qu’avant. » Exemple : la créa-tion de primes d’animation, il y a une dizaine d’années, qui sont versées à certains points de vente de presse. Il faut, pour cela, avoir un minimum de surface de vente et des vitrines que l’on doit animer. « Personne ne contrôle rien et c’est toujours les mêmes qui touchent cette prime qui peut aller jusqu’à 10 000 euros quand même, s’étonne Philippe Pérard. Comment voulez-vous motiver les gens dans ces conditions ? »Catherine Pietralunga, elle, ne touche pas cette prime. « Moi, ce qui me fait vivre, c’est la vente de bonbons, briquets, le café, les sodas et La Provence, qui, heureusement, a son propre réseau de distribu-tion. Mais je ne m’en sors pas. Le système est déjà

en notre défaveur, mais ce n’est pas tout. J’ai fait mes calculs, je suis certain que la SAD ne me verse pas la totalité de mes commissions. Je vais les atta-quer en justice. Si je n’obtiens pas gain de cause, je ferme mon kiosque et je retourne à mon ancien métier, technicienne de laboratoire. »

Et le point de vue de la SAD « 13 » ? Le télé-phone sonne systématiquement dans le vide ou, pire, le combiné est aussitôt raccroché. Manifestement, les salariés ont d’autres chats à fouetter. Et pour cause. L’entreprise, filiale de Presstalis, est sous la menace d’une restruc-turation visant à réduire le nombre de dépôts et de personnel. Au niveau national, contre la promesse d’un investissement de 200 millions d’euros pour la modernisation des installa-tions, 1000 postes seraient supprimés sur 2500 entre 2013 et 2015. Hachette, qui possède les « Relay » dans les gares, a claqué la porte de Presstalis. Son rêve : dérèglementer totalement la distribution et s’emparer du marché. La CGT a lancé une série de grèves mi-septembre, perturbant la distribution des quotidiens. Un mouvement qui devrait se poursuivre au moins jusqu’à la fin de l’année. Pendant ce temps-là, Google qui utilise les contenus de sites d’in-formation, a dépassé cette année le milliard d’euros de recette publicitaire en France…

Dernière minute : Début octobre, le tribunal de commerce devait se prononcer sur l’avenir de Presstalis. Si le dépôt de bilan semblait devoir être écarté et si l’entreprise devrait rester sous la tutelle de la mandataire ad hoc, la suppression de plus d’un millier de postes et de deux tiers des SAD ne devrait pas rester sans réponse de la part des syndicats.

L’information, c’est vous qui la vivez, c’est eux qui en vivent. Souvent mal. Un localier, sous couvert d’anonymat, a accepté de nous raconter son quotidien. Journal d’un OS de l’information.

C’est une petite ville. Mais presque trop grande pour la modeste agence d’un quotidien régional. Pour couvrir un territoire de plusieurs dizaines de milliers d’âme, ils ne sont que deux journalistes. Autant dire rien ou pas grand-chose, face à la concurrence et à des journées ne comptant que 24 heures. « Chaque jour, il faut fournir entre quatre et cinq pages. Or, pour pouvoir prendre nos week-

ends et nos vacances, on est donc souvent tout seul pour piloter l’agence. Autant dire que les journées commencent très tôt et qu’elles finissent tard. »

Difficile pour ce localier de nous décrire une journée-type mais il se prête à l’exercice : « Le bouclage est aux alentours de 22 heures. Et, chaque matin, vers 11 heures, il faut qu’on annonce au responsable des éditions départementales du journal ce qu’on va mettre dans nos pages. Et, entre-temps, il faut bosser. La journée peut donc commencer par un piquet de grève à 9 heures, se poursuivre avec l’inauguration d’un bâtiment vers midi et il faudra enchaîner avec une conférence de presse pour un événement culturel vers 15 heures. Résultat : vous vous

Stéphane Sarpaux

Les diffuseursnoyés dans le papier

Coming out salarialCombien tu gagnes ? Question taboue à laquelle l’équipe du Ravi répond sans détours. Quand on vous dit que vos abonnements ne servent pas à nous enrichir !

La grosse enQUête

Je vis grâce à la vente des bonbons, des sodas… Catherine Pietralunga

Agnès Chapal. Relectrice.0 euros, 3 à 8 heures*« J'atants le numérau 200 pour demander une ogmantation. »

Sébastien Boistel. Journaliste, VRP dans les Bouches-du-Rhône, animateur, manutentionnaire... Presque quinze ans comme articlier, dont dix à l’Humanité.810 euros, 26 heures*, CUI« 20 minutes a pas voulu de moi, La Marseillaise non plus, La Provence encore moins et Marsactu n’en parlons pas, alors… »

Clément Chassot. Journaliste, envoyé spécial en Vaucluse. Première carte de presse obtenue au Ravi.810 euros, 26 heures*, CUI« A la sortie de l'école de journalisme, Le Monde, Le Canard et même le New-York Times étaient à mes pieds. Mais j'ai préféré le Ravi… »

Michel Gairaud. Rédacteur en chef depuis 2003, secrétaire de rédaction, coordinateur de l’équipe. Carte de presse depuis 15 ans. 1519 euros, 35 heures*, CDI« J’adore travailler plus pour gagner moins, c’est plus fort que moi ! Avec le Ravi, c’est vraiment l’extase… »

Reine Kungne. Responsable administrative et financière depuis 2 ans, étudiante en Master 2 management et stratégie d’entreprises (un gros mot pour mes collègues !).655 euros, 21 heures*, CDI« Victime de la discrimination positive, j’ai été embauchée pour faire régner la bonne humeur au rythme du « Copé » décalé… Au moment de la paye, cela s’avère très utile ! »

Jean-Baptiste Malet. Journaliste, ancien CAE à la Tchatche, salarié chez Golias et pigiste au Ravi.1 feuillet (1500 caractères), 20 euros« Je n’écris pas au Ravi par

militantisme. C’est pour prouver mon amour des bas salaires au Figaro Magazine que je rêve de rejoindre afin de remettre la France au travail. »

Jean-François Poupelin. Grand reporter, responsable de diffusion. Carte de presse depuis 6 ans.1461 euros, 35 heures*, CDI« Et on vous parle pas de la convention collective des journalistes. le Ravi c’est l’Amérique ! »

Samantha Rouchard. Journaliste en charge du Var… et quelle charge !810 euros, 26 heures*, CUI« Seul élément de l’équipe rédactionnelle à porter un soutien-gorge, enfin je crois… J’ai débuté comme stagiaire et comme je savais faire le café, ils m’ont gardée ! »

Stéphane Sarpaux. Journaliste embarqué depuis 2007, chargé de développement, animateur d’ateliers, organisateur de débats, commissaire d’expos…1201 euros, 28 heures*, CDI« Certains mois, je n’ai même pas le temps de lire le Ravi. »

TRAX. Dessinatrice free lance, animatrice d’ateliers.10 euros le dessin, 3 heures*.« Quand l’appât du gain me titille, j’hésite à quitter le Ravi pour Courrier International. Mais un journal qui ne baisse jamais les bras a forcément du mal à mettre la main à la poche… »

En octobre, Clément, Samantha et Sébastien passent à 35 heures*, Jean-François prend un congé parental. Manquent à la liste de nombreux dessinateurs, pigistes (payés comme Jean-Baptiste et Trax) et de valeureux bénévoles.

* Multipliez par deux l’horaire légal pour estimer l’horaire réel.

médiaS, PreSSéS COmme deS CitrOnS

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la grosse enquête

retrouvez vers 17 heures sans avoir écrit la moindre ligne… »

Or, poursuit notre confrère, « nous n’avons pas de photographe pour nous épauler. Nous prenons nous-mêmes nos clichés. Sur le terrain, il faut donc en permanence jongler entre le carnet de notes, le stylo et l’appareil-photo. Alors, on ruse. En achetant, à nos frais bien sûr, un dictaphone pour ne pas avoir à prendre de notes… »

De surcroît, comme dans la plupart des agences, il faut gérer les correspondants : « Des personnes qui, bien souvent, n’ont pas de formation de journaliste et qui sont payées à peine quelques dizaines d’euros par article. Il faut donc, chaque semaine, retravailler les papiers

qu’ils nous envoient, les ré-écrire, les calibrer. Un boulot fastidieux », assène ce jeune journaliste.

Qui, en outre, doit, comme c’est de plus en plus fréquent, écrire directement dans une page pré-maquettée : « Un nouveau logiciel a été installé. Chaque matin, lorsqu’on annonce les sujets que nous allons traiter dans nos pages, on doit aussi déterminer à quoi elles ressembleront. C’est-à-dire la place et la longueur de chaque article. Si, dans l’absolu, on pourrait, au vu de l’actualité, « casser » une page, dans la pratique, on est tellement le nez dans le guidon qu’on se tient à ce qu’on a annoncé le matin. » A l’autre bout de la chaîne, la rédaction en chef pourra « quasiment en direct apprécier

à quelle vitesse on remplit nos pages puisqu’il est possible de voir, article par article, où on en est… »

Pour ce localier, à qui l’on ne demande heureusement pas encore d’alimenter le site internet du journal, « alors que la richesse de la presse locale, c’est le contact avec le terrain, il nous est de plus en plus difficile de faire notre boulot correctement. On n’a pas le temps de prendre le temps, de faire de l’enquête, de se garder des sujets sous le coude pour les traiter sur la longueur. Si ce n’est dans des suppléments qui rapportent au journal beaucoup d’argent mais rien aux journalistes qui y contribuent ».

« Chaque matin, on est face à la page blanche et il faut

remplir, soupire-t-il. Alors soit vous essayez de bien faire votre boulot, en cavalant, en sacrifiant votre vie personnelle et en ne comptant plus vos heures, soit vous le désacralisez et vous passez de plus en plus de temps devant un écran d’ordinateur, à contacter vos interlocuteurs par téléphone et à aller chercher vos informations sur internet. »

La toile, « c’est la principale source d’information, reconnaît notre confrère. On commence notre journée en consultant notre boîte mail. Autre source

d’information : les collectivités, bien sûr. Et puis, évidemment, l’AFP et la concurrence. On sait très bien qu’on a moins de moyens qu’eux. Alors, quand on arrive en retard, on cherche un autre angle ».

Quand on est journaliste dans une petite ville, « les gens nous identifient avant tout à travers notre fonction ». Difficile toutefois d’être en permanence en représentation : « On ne cesse jamais d’être journaliste, une sortie au théâtre pouvant devenir un papier. On se balade toujours avec un carnet de notes, un appareil photo. » Et de conclure, dans un sourire : « Si on voulait bien faire les choses, pour se saoûler, il faudrait qu’on change de ville… »

Sébastien Boistel

il faut sacrifier sa vie personnelle »Chaque matin, l’angoisse de la page blanche

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Le net, c’est facile, c’est pas cher…

Depuis cet été, sur le site d’Alexandre Guérini, News of Marseille, la seule chose qui est réactualisée, c’est la météo. Bien qu’un édito assure que, malgré les rumeurs, le site continue, quand on appelle, on tombe sur un répondeur. Et quand on parvient à joindre Fanny, « assistante de rédaction », elle ne peut « rien nous dire », juste transmettre nos questions à Gilles Pascal, le représentant légal du site. Rien qu’en 2011, il aura coûté plus de 500 000 euros au médiatique frangin du président du CG 13 !

Tout le monde n’a pas la chance de Didier Pillet, l’ancien patron de La Provence, qui voit la ville et les eaux de Marseille arroser de pub son site, Le meilleur de Marseille. Faire de l’info sur la toile, c’est facile, c’est pas cher et ça peut rapporter gros ? A voir. En tête, l’arrêt de l’expérience marseillaise de Rue 89, le site de

Pierre Haski ayant été depuis absorbé par le Nouvel Obs’.

Né il y a moins de trois ans, Marsactu ferait presque figure de vétéran, avec sa demi-dizaine de journalistes, ses locaux flambant neufs sur le Vieux-Port et un nouvel actionnaire, Frédéric Chevalier, qui a investit « quelques centaines de milliers d’euros ». Quand on lui demande si la présence d’un membre du club Top 20 (une antenne de l’UPE 13, le Medef local, à la gloire de la « métropole ») a une incidence sur le rédactionnel, Pierre Boucaud, le patron du site, trouve cela presque « insultant : il suffit de lire ce qu’on écrit ! »

Si, jusqu’à présent, il assurait des

« missions de conseil » pour financer son site, il compte désormais sur les rentrées publicitaires : « On fait 100 000 euros de chiffre d’affaires avec des annonceurs privés, comme la Caisse d’Epargne ou la Société marseillaise de Crédit mais aussi des partenaires institutionnels comme le Conseil général ou la Région. Cette année, on devrait perdre 100 000 euros. L’an prochain, pour être à l’équilibre, on table

sur 400 000 euros de chiffre d ’ a f f a i r e s , l’objectif étant de créer des sites d’info dans d’autres villes, comme T o u l o u s e

ou Bordeaux. » Réclamant la « transparence » sur les aides à la presse ou les budgets com’ des collectivités, le patron de Marsactu note qu’à part Médiapart, « pas un seul pure-

player n’est à l’équilibre ». Reste que, pour lui, internet reste « le support sur lequel le ticket d’entrée reste le plus bas ».

Même calcul de la part des quatre fondateurs de Mlactu, quatre jeunes journalistes qui se sont rencontrés à l’école de journalisme de Montpellier et qui couvrent l’actualité des Bouches-du-Rhône, du Vaucluse, de l’Hérault et du Gard. « On ne parvient pas à en vivre jusqu’à présent, souligne Maud Fontanel. On se paye donc grâce aux piges que l’on fait à côté. Et l’on ne sait plus ce que veulent dire les mots « week-end » et « vacances » puisqu’on doit tout faire, du rédactionnel au commercial en passant par l’administratif… »

Même son de cloche Chez Albert, le site lancé par deux anciens de l’édition marseillaise de 20 minutes. « Il est illusoire de croire qu’un site ne coûte que les 50 euros d’hébergement par an, explique Frédéric Legrand. D’autant qu’à vouloir être multi-support, on se rend vite compte que chacune des

tâches qu’un journaliste en ligne a à assumer pourrait être un boulot à part entière mobilisant, à chaque fois, une personne à plein temps. Sur le net, il ne suffit pas d’écrire, de prendre des photos. Il faut faire du son, de la vidéo. Et du buzz. Autant dire qu’à vouloir tout faire, on risque rapidement de s’épuiser. »

Alors, pour sa deuxième saison, « Chez Albert » a repensé son modèle économique : « On savait que la monétisation de notre audience ne suffirait pas à nous faire vivre. On espère néanmoins qu’avec la pub et les dons, le site réussira à s’autofinancer. Et, à côté, on va monter une agence de presse pour faire de la formation et, accessoirement, nous payer. Car, si, jusqu’à présent, nous pouvions compter sur nos indemnités chômage, désormais, ce n’est plus le cas ». Reste que, pour cet ancien de 20 minutes, l’avantage de la toile, c’est que, « pour l’instant, rien n’est formaté ». Et de conclure : « Et puis, ce qui nous rassure, c’est que tout le monde en chie ! »

L'histoire se passe à Nice, le soir du 1er tour des pré-sidentielles. Christian Estrosi, député-maire UMP de la ville, prend violemment à partie deux journalistes de France 3 Côte d'Azur en reportage à la fédé UMP des Alpes-Maritimes. Leur faute ? La chaîne, qui depuis le 1er avril ne couvre plus les réunions politiques, a séché la veille le meeting de Nicolas Sarkozy...

« Motodidacte » a été à bonne école. « [Pendant ses ennuis judiciaires], Jacques Médecin était intervenu pour que le bureau niçois de Radio France Côte d'Azur soit fer-mé, rappelle Frédéric Lamasse, délégué SNJ CGT. Ici, le paysage médiatique est pauvre. Il y a un seul quotidien, Nice Matin, qui tient grâce au budget pub des collectivités. Si un papier déplaît, la campagne est annulée. Les journa-listes qui débarquent s'adaptent. »

Dans le Var, on s'adapte également. Hubert Falco, qui a eu la peau du précédent PDG du groupe Nice Matin avec Christian Estrosi, est un coupeur de têtes : quelques rédacteurs en chef de Var Matin doivent au sénateur-maire de Toulon une fin de carrière prématu-rée. « Les politiques considèrent aujourd'hui qu'on fait par-tie de leur plan com, y compris lorsqu'ils attaquent France TV », dénonce Frédéric Lamasse. Il y a pourtant plus simple : s'offrir un média comme Alexandre Guérini (lire ci-dessous).

Journaux ou tracts ?

« La relation d'un élu aux journalistes est fonction du sup-port pour lequel ils travaillent (prestige, local ou natio-nal) et de ses ambitions. S'il en a, il sera plus sur leur dos,

explique Jacques Le Bohec, sociologue des médias auteur d'une thèse sur "les interactions entre édiles et localiers". Du côté du journaliste, si la nécessité est d'avoir des sources politiques et administratives, il va faire attention à ne pas se griller. » Autre aspect à prendre en compte : « L'inévitable intégration du journaliste dans la vie locale. » Une intégration qui peut pousser jusqu'à rejoindre la com ou le cabinet de l'élu...

Qu'en pensent les principaux intéressés ? Un confrère de La Provence témoigne anonymement. Malgré quelques décisions très politiques de sa direction, comme transformer Marseille l'Hebdo en hebdomadaire sociétal pour faire plaisir à Jean-Claude Gaudin, notre journaliste jure ne pas souffrir de censure. « On a tra-vaillé autant sur la gauche, avec l'affaire Guérini, que sur la droite, avec l'histoire des HLM de la mairie de Mar-seille. La relation journaliste-élu est globalement normale. Elle relève de la responsabilité individuelle. Certains pré-fèrent ne pas faire de vagues, mais si tu veux bien faire, tu peux. » Et d'expliquer : « Dans la région, l'histoire de la presse est très politique. Jusqu'au début des années 80, j'ai vu des journaux devenir des tracts à la veille des élections. Il ne faut pas l'occulter. »

Propriété du PCF jusqu'en 1998, La Marseillaise a encore cette réputation. « La direction et certains jour-nalistes sont encore encartés, mais dans les faits les élus [communistes] ne nous imposent rien, dément un journa-liste d’une locale. Par contre, la ligne est très claire, nous sommes un journal progressiste de gauche qui s'intéresse aux questions sociales. » Pour ce témoin, lui aussi souhaitant rester anonyme, le problème des relations du journal aux politiques vient plutôt de vieux réflexes : « La direc-tion pratique l'autocensure. Depuis qu'on a pris parti pour un candidat communiste accusé de fraude électorale à Au-

bagne, ce qui s'est révélé vrai, on ne parle plus des affaires. On peut griffer sur le politique mais on ne mord pas sur l'affairisme. » Et notre confrère de rigoler : « Le rapport du journal est plus grotesque avec notre partenaire anisé du Mondial à pétanque. Cette année, on a supprimé le numéro de l'édition sur l'affiche, la 51ème, juste par crainte de mé-contenter Ricard. Qui est pourtant aussi propriétaire de la marque Pastis 51…»

Jean-François Poupelin

Les liaisonsdangereusesMédias et élus ont besoin les uns des autres pour exister. Ce qui n'est pas sans poser problème…

Entre « bizness plan » et plan sur la comète, l’info sur le net peine à être rentable. Analyse avec quelques pure-players.

Sébastien Boistel

« Pas un seul pure-player n’est à l’équilibre »Pierre Boucaud, marsactu.fr

Avant de se payer un site rien qu’à lui (News of Marseille, lire ci-contre), Alexandre Guérini s’était penché sur le sort de LCM, poussant certaines candidatures (comme celle de Michel Moulin) et rêvant, à en croire les écoutes du 26 juin 2009, de « mutualisation entre l’OM TV et LCM ». Or, ce jour-là, le frère de Jean-Noël Guérini le président du CG 13, avait rendez-vous avec un certain… Alain Armani. Depuis, ce dernier est devenu directeur général de LCM. En interne, il paraît qu’« Armani ne fait pas mystère de sa proximité avec Alexandre ». Peut-être est-ce pour cela que le CG 13 a fort peu goûté que la chaîne évoque la levée d’immunité de Jean-Noël ?

S. B.

a lCM, alexandre Guérini ?

Médias, pressés CoMMe des Citrons

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leRavi : Le Medef est-il socialo-compatible ? Jean-Luc Chauvin : On peut attribuer au gouvernement un espoir et une chance. L'espoir, c'est qu'il fasse bouger les lignes, et la chance, c'est que les sociaux-démocrates en Europe ont parfois participé à d’importantes réformes comme en Allemagne par exemple. Y aura-t-il en France le même courage et la même volonté ?

Vous pensez donc, comme un Mélenchon, que François Hollande va essayer de faire passer la pilule amère de l’austérité à ceux qui espéraient le changement ? Il s’agit surtout de préserver et de créer de l’emploi pour tout le monde. Et ce n'est pas en élevant des barrières et des freins idéologiques, qui datent d'un modèle économique qui a pris fin avec le premier choc pétrolier, qu'on va pouvoir être dans le 21ème siècle.

Etes-vous au côté du ministre Montebourg pour favoriser le « redressement industriel » ?Tout ce qui peut aider à faire sauter les blocages à l’entreprise, à l’emploi et aux salariés est une bonne chose. Il ne reste plus qu’à prendre les dossiers un à un et à les regarder. Quant à Arnaud Montebourg, sa première déclaration a tout de même été de vilipender, sans même connaître le sujet, l’une des plus grandes familles industrielles françaises, celle des Peugeot. Le seul tort de Thierry Peugeot, c’est d’avoir gardé le plus longtemps ses salariés au lieu de les délocaliser à l’étranger.

L’industrie est en crise dans les Bouches-du-Rhône. La raffinerie par exemple. Pensez-vous comme le président de la CCI Marseille, Jacques Pfister, qu’il ne sert à rien de se battre pour préserver un outil industriel devenu obsolète ?Je dis la même chose sauf que je l’explique. Ce n’est pas parce que les industries vieillissantes sont remplacées par de nouvelles industries que c’est la fin de l’industrie. Dans les années 50, on avait tous des radios TSF, dans les années 70 des TV noir et blanc. Nous sommes à l’époque des écrans plats en couleur… Nous sommes en France en surproduction d’essence et importateurs de gazole, un ajustement doit se faire. Et puis aujourd’hui, le stockage des produits pétroliers se fait là où ils sont produits.

N’est-ce pas indécent qu'une multinationale comme Unilever, qui fait beaucoup de bénéfices, veuille délocaliser en Pologne une usine comme celle des Fralib à Aubagne ? Nous sommes pourtant toujours à une époque où l’on boit du thé…En 2009, Fralib vend la marque Lipton IceTea et fait des bénéfices exceptionnels. Au titre de la loi, elle verse une prime, 24 000 euros en moyenne. C'est un revenu confortable pour des qualifications plutôt moyennes. Partant de là, certains syndicalistes ont poussé à une grève durant 19 semaines pour obtenir 15 % d'augmentation de salaire. A trois reprises,

LA TCHATCHE

Écoutez en permanence l’intégralité de cet entretien diffusé le 27/09/2012, sur www.leravi.org.Et retrouvez en direct la Grande Tchatche de Radio Grenouille à Marseille sur le 88.8 FM, avec un nouvel invité le 23 novembre, le 4ème mardi du mois.

Propos recueillis par Michel Gairaud et Rafi Hamal, mis en forme par Samir Akacha.

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etien ra

dio

ils sont même allés piller les produits de la marque Unilever dans un supermarché. Face à ce comportement, comment pensez-vous que l'actionnaire allait réagir ?

C’est donc la faute à des salariés trop payés et à des syndicalistes trop agressifs ?Je n’ai pas dit que les ouvriers étaient trop payés. Mais je maintiens que c’est la faute de certains syndicalistes qui ont cru qu’on pouvait toujours aller plus loin.

Ce n’est pas un peu facile d’attribuer tous les problèmes à un « syndicalisme voyou » spécifique à la CGT des Bouches-du-Rhône ?Le syndicalisme voyou existe dans ce département : je le dis et redis. Mais 98 % du dialogue social se passe très bien. Reste les 2 %, c'est historique ici. C'est lié à l'histoire du port. Pensez-vous que lorsqu’un délégué syndical affiche sa fierté d'avoir fait reculer le port en annulant un appel d'offre publique, c’est un combat pour l'application du droit ?

Est-ce parce que Force ouvrière est membre de votre collectif « Mon entreprise, ma ville » que vous en parlez moins ?Cela n’a pas dérangé l’UPE 13, pendant une grève des poubelles à Marseille, de mettre en place un service de ramassage des

ordures ménagères pour les commerçants du centre ville qui ne pouvaient plus travailler normalement.

Marseille justement a été au coeur de l'actualité, conférence gouvernementale, nouveau préfet, et une promesse de création d’une métropole dont vous êtes un farouche partisan…La métropole ce n’est pas un dada nouveau pour nous. Le collectif « Mon entreprise, ma ville », créé en 2008, parlait déjà du transport, du logement, de la petite enfance, qui doivent se régler à cette échelle. Les frontières communales actuelles ont été établies à l'époque de Napoléon. La métropole est une nécessité pour développer l'économie.

Vous voilà donc partisan d’un Etat fort qui légifère par la loi !Le premier ministre a pris ses responsabilités. Il a laissé aux élus locaux jusqu’à la fin décembre pour trouver une solution. Sinon, il défend une loi. Nous, on dit chiche ! Nos élus sont incapables de s’entendre, depuis 1960, pour des querelles partisanes qui dépassent les clivages entre droite et gauche. Le territoire n’a pas avancé pendant que Lyon, Lille, Bordeaux, Grenoble ont su le faire. Jean-Marc Ayrault connaît bien le sujet à Nantes, dont il a été longtemps le maire. Il a su fonder sa métropole et bénéficier de l’emploi et de la richesse qu’elle facilite.

Beaucoup d’élus locaux redoutent plutôt la création d’une usine à gaz anti-démocratique… Ils habillent leurs intérêts particuliers en instrumentalisant des peurs collectives qui sont fausses.

Vous êtes optimiste ?Les lignes bougent. Le fait que le premier ministre fasse un déplacement de deux jours ici est un message très fort. Des élus ont pris des positions intéressantes et innovantes. Souvent les élus plus jeunes sont moins repliés sur leur territoire, plus favorables à construire un projet ensemble. Mais il y a heureusement aussi des responsables plus âgés très favorables à une métropole !

Une dernière question sur un tout autre sujet : payez-vous l’impôt sur la fortune ?Non, je ne paye pas l’ISF. Peut-être que j’y serai l’année prochaine ? J’attends de voir la nouvelle loi de finances. Mais au fond, j’aimerais bien payer l’ISF. Je ne parle pas d’une taxe sur 75 % des revenus qui est confiscatoire et à laquelle je suis totalement opposé. Arrêtons de jeter la pierre sur ceux qui gagnent un peu mieux que les autres. Parce que ce sont aussi eux qui nous font avancer collectivement. Allons de l’avant ensemble plutôt que de se déchirer entre nous.

“ J’aimerais payer l’impôt sur la fortune !”

Il préside, à 42 ans, l’UPE 13, l’Union pour les entreprises, le Medef des

Bouches-du-Rhône.

A quoi reconnaît-on

un patron des patrons ? Jean-

Luc Chauvin a beau tenter de brouiller les

cartes, c’est facile ! Comme le cinéaste crypto-communiste Nanni Moretti, il roule en scooter. Oui, mais en scooter 3 roues !

Comme Bernard Thibault, il aime le mot « militant ». Oui, mais il qualifie les CGTistes locaux de « syndicalistes voyous » !

Sportif - il a même fait sport études - il n’est pas un fanatique du costard cravate.

Oui, mais il fume le cigare !

Il dit œuvrer pour l’intérêt général. Oui, mais aussi pour son compte en banque !

Né à Marseille en 70, ses études d’économie à Aix-en-Provence se prolongent par un DESS en promotion immobilière et un premier job chez l’ami Bouygues. Ah, le charme de l’immobilier, de la bétonnière, des hausses de loyer et des ventes commissionnées ! Et ça marche du tonnerre ! A 26 ans, il achète, avec un associé, sa propre société immobilière : Otim. Seize ans plus tard, il en est devenu le PDG avec 45 salariés.

Auréolé de ce succès, il dirige aussi la Fnaim des Bouches-du-Rhône avant, en

2010, de présider l’Union des entreprises départementales. Il y impose son style. Et son goût pour les coups médiatiques. Il lance une fausse campagne de pub vantant « le meilleur métier du monde » : grutier sur le port à 4000 euros pour 26 heures. Cet été, il tracte avec son collectif « mon entreprise, ma ville » pour réclamer de meilleurs transports publics et une métropole…

Il n’a peur de rien ! Pas même d’inviter lors de son dernier « forum des entrepreneurs » les frères Bogdanoff pour prendre des « nouvelles du futur ». Pas de doute : avec lui, le Medef est entré dans la 4ème dimension…

M.G.

JEAN-LUC CHAUVIN PATRON DE LA 4ÈME DIMENSION

Le Medef est-il socialo-

On peut attribuer au gouvernement un espoir et une chance. L'espoir, c'est qu'il fasse bouger les lignes, et la chance, c'est que les sociaux-démocrates en Europe ont parfois participé à d’importantes réformes comme en Allemagne par exemple. Y aura-t-il en France le même courage et la même volonté ?

comme un Mélenchon, que François Hollande va essayer de faire passer la pilule amère de l’austérité à ceux qui espéraient

Il s’agit surtout de préserver et de créer de l’emploi pour tout le monde. Et ce n'est pas en élevant des barrières et des freins idéologiques, qui datent d'un modèle économique qui a pris fin avec le premier choc pétrolier, qu'on va pouvoir être

Etes-vous au côté du ministre Montebourg pour favoriser le « redressement industriel » ?

J’aimerais payer l’impôt sur la fortune !”

Il préside, à 42 ans, l’UPE Il préside, à 42 ans, l’UPE 13, l’Union pour les 13, l’Union pour les entreprises, le Medef des entreprises, le Medef des

Bouches-du-Rhône.Bouches-du-Rhône.

A quoi A quoi reconnaît-on reconnaît-on

un patron des un patron des patrons ? Jean-patrons ? Jean-

Luc Chauvin a beau Luc Chauvin a beau tenter de brouiller les tenter de brouiller les

cartes, c’est facile ! Comme cartes, c’est facile ! Comme le cinéaste crypto-communiste le cinéaste crypto-communiste Nanni Moretti, il roule en Nanni Moretti, il roule en scooter. Oui, mais en scooter scooter. Oui, mais en scooter 3 roues !3 roues !

Comme Bernard Thibault, il Comme Bernard Thibault, il aime le mot « militant ». Oui, aime le mot « militant ». Oui, mais il qualifie les CGTistes mais il qualifie les CGTistes locaux de « syndicalistes locaux de « syndicalistes

JEAN-LUC CHAUVIN

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16 ‹ n°100 Octobre 2012 ‹ leravi

« 2012, la fin du monde. 2012, début du monde. » L'ambition de l'équipe du Pavé, Scop culturelle dans le Vaucluse emmenée par Franck Lepage, militant de l'éducation populaire, n'est pas mince : pallier le déficit de transmission et d'éducation politique, tout en pédagogie grâce au théâtre et à leurs « conférences gesticulées ». En octobre, la Scop se lance dans une « tournée » vauclusienne, du 18 au 21 octobre, en partenariat avec la structure culturelle itinérante Eclats de scènes, le bimensuel Sortir à Berlingotville (Carpentras) et le théâtre des Carmes d'Avignon. La Tchatche y est associée, à travers son exposition de dessins de presse et l'animation de débats par Clément Chassot, journaliste au Ravi.

Pendant quatre jours, entre Carpentras, La Palud et Avignon, les discussions tourneront autour de l'eau et de ses usages, de l'école, de la culture et du militantisme, le tout accompagné en journée par des ateliers en lien avec les conférences. L'esprit de ces conférences gesticulées se rapproche du théâtre forum où, à partir d'une situation de départ, d'un thème initial, le public est encouragé à débattre au fur et à mesure de la pièce selon les situations. Ici, le débat se fait à la fin, avec tous les membres de la Scop. Tout l'enjeu de cette manifestation est bien sûr de sensibiliser le plus grand nombre et d'éviter un écueil trop souvent rencontré : prêcher des convertis pour raconter une autre histoire du capitalisme. En s'appuyant sur le réseau d'Eclats de scènes, qui travaille avec des associations en milieu rural, on peut se permettre d'espérer.

Un Pavé dans la mare de l'éduc pop

Carpentras, espace AuzonL’école : jeudi 18 octobre à 19h30 ; L’eau, ça chie : vendredi 19 à 19h30

Lapalud, espace JulienLa culture : samedi 20 octobre à 19h30

Avignon, théâtre des Carmes Le plein d’énergie : dimanche 21 octobre à 16h

Infos :www.eclatsdescenes.comwww.scoplepave.org

Conférences

la tchatche

www.bmvr.marseille.fr

eexxppoossiittiioonnddee ddeessssiinnss ddee pprreesssseedduu 22 aauu 1133 ooccttoobbrree 22001122DDééppaarrtteemmeenntt SSoocciiééttéé

KKiioossqquuee

LLee RRaavvii ffêêtteessoonn nnuumméérroo 110000àà ll''AAllccaazzaarr

Médias : pressés comme des citrons !Table-ronde samedi 6 octobre 2012 à 13h30 [salle de conférence]

hatche

vie de l'asso

Dans une région où journaux, télés et radios tirent la langue, la situation des médias « alternatifs » n’est guère plus brillante : une radio aixoise menacée d’expulsion, une télé participative salonaise à qui son diffuseur réclame plusieurs milliers d’euros, un canard associatif qui peut, certains mois, ne pas toucher un kopeck sur ses ventes en kiosque…

Et pourtant, chez ces journalistes, amateurs ou non, il y a encore l’envie d’y croire. D’en débattre avec le public. Mais aussi de parler haut et fort face à des pouvoirs publics qui se contentent de faire la charité alors qu’il est urgent de repenser le financement d’une activité d’utilité publique.

Voilà pourquoi le 13 octobre se déroulera, à Aix, la « Fête des médias indépendants » à laquelle participeront le Ravi, CQFD, Radio Zinzine, Cent

Paroles, Télé O2zone… Avec comme invités, entre autres, le philosophe Miguel Benasayag, notre consœur de Mediapart Louise Fessard (avec laquelle nous co-signons à nouveau une enquête à lire en page 9)… Sans oublier Sébastien Boistel, journaliste au Ravi, qui a coordonné ce mois-ci notre « grosse enquête » sur les médias « pressés comme des citrons ».

Une initiative qui pourrait faire tâche d’huile. En effet, début octobre à Poitiers, la sixième édition des Assises du journalisme devait avoir pour thème l’épineuse question de… l’indépendance. Alors, le changement, c’est maintenant ?

De 14 à 22 heures, au CREPS d’Aix, situé Pont de l'Arc, chemin de Guiramande. Plus d’info sur le blog Cent Paroles d’Aix, hébergé par Mediapart.

Pour sauver la presse,

la F.M.I.Halte à la déprime ! Les médias indépendants font la fête à Aix-en-Provence, le 13 octobre.

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leravi › Octobre 2012 n°100 › 17

hatche

CatChà tchatche

PourPar Samantha Rouchard

«Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison

et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un

esprit de fraternité. » Aux versets bibliques, je préfère l’article premier

de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Au passage,

pas besoin d’être lesbienne ni même de croire aux sacro-saints

liens du mariage pour défendre le droit des homosexuels à pouvoir y

accéder. Parce qu’à force de faire des raccourcis clavier on mélange tout, on propose un dossier sur les gays et on s’entend dire « ah non,

pas encore un dossier cul ! », comme si homosexualité ne rimait qu’avec

backroom, Fistinière et rapports à risque. Et même ? Pourtant, j’ai

autour de moi tous les cas de figure : Jean qui géolocalise des

coups d’une heure sur Grindr, Fabien qui après des années d’abstinence

a enfin rencontré l’homme de sa vie, Véréna qui cherche encore la

femme de la sienne, Xavier qui vient de se faire plaquer après 4 ans de vie commune, Gérard et Bruno en

couple depuis 20 ans… Moi, je vois des êtres humains tout simplement avec un corps, une âme et un cœur

et avec l’envie d’aimer et d’être aimés au grand jour, le désir d’être

légitimés et enfin acceptés. Pour certains ça passera par le mariage,

pour d’autres non. Mais la liberté et l’égalité commencent là, par le droit qui est offert à chacun de choisir ce qu’il veut faire de sa vie, avec qui et

comment.

ContrePar Stéphane Sarpaux

Le mariage, c’est l’un des archaïsmes qui a survécu à la Révolution française. Marier un homme à une femme permettait à l’Eglise, quand elle était aux affaires, d’assurer la stabilité de la société, tout en culpabilisant les êtres humains de leurs désirs de l’autre. La République a conservé ce rituel et l’a même recouvert des ors de la citoyenneté avec le mariage civil. Dès lors, le mariage est devenu autant une affaire de reproduction sociale (on se marie dans les mêmes couches sociales), que de gestion de patrimoine. L’amour passe au second plan. Et c’est plutôt rassurant de savoir que deux personnes n’ont pas besoin d’un curé, d’un imam, d’un rabbin ou de l’adjoint au maire pour s’aimer. C’est de leur responsabilité de vivre cette histoire mais aussi d’y mettre fin. Car enfin, se marier avec un autre être humain et lui promettre fidélité jusqu’à la fin de sa vie, c’était peut-être envisageable en 1730, quand l’espérance de vie ne dépassait pas les 30 ans. Mais aujourd’hui où l’on peut devenir centenaire, qui a envie de passer 50, 60, 75 ans avec la même personne ? Jusqu’à présent, la communauté homosexuelle était révolutionnaire car on lui interdisait d’accéder au mariage. En réclamant à cor et à cri d’être traitée sur un pied d’égalité avec le reste de la population, elle s’embourgeoise, elle rentre dans le rang, elle s’institutionnalise. Elle devient chiante !

opinions

Le projet de loi sur le mariage et l’adoption homosexuels doit être présenté le 24 octobre au conseil des ministres. Le sujet fait « tchatcher » à la rédaction du Ravi.

Le mariage homosexuel

Les poubelles en disent long sur nos vies

Entre le mythe des bou-

teilles triées servant de

combustible à l’inci-

nérateur de Fos, de nos

rues débordantes au gré

des horaires des tour-

nois de belote au QG

des éboueurs, entre les

ténébreuses affaires

désespérant de rêver à des

lendemains plus propres,

et les promesses d’un

monde durable à l’aune

des recommandations

du Grenelle et autres

institutions de bien, qui

chaque jour nous font

flipper pour l’avenir de

la planète (et du nôtre !) :

Aux armes citoyens ?

Nos poubelles en disent long

sur nos modes de vie. Les

corpulentes poubelles des

jeunes cadres dynamiques

racontent la fuite en avant

vers un monde devenu trop

confortable. Tandis que celles

des moins dynamiques, des

moins jeunes, des moins

riches, pleines de matériaux

que l’on ne sait plus traiter

résument tout : le monde a

perdu la boule. Les déchets

naissent dans les maisons, les

lieux de travail et de loisirs, la

croissance économique sans

foi ni loi ne les aura pas, eux

aussi ont leur droit à la vie !

Regardez les ressourceries

implantées en plein cœur

des cités de Bordeaux et de

Grenoble, créatrices d’emploi

et d’une nouvelle manière de

vivre son quartier. Regardez le

gang des poussettes : ces tzi-

ganes qui envoient la richesse

contenue dans nos poubelles

vers des contrées où elles

contribueront à nourrir des

familles restées au pays, pen-

dant que des mastodontes se

taillent des parts de lions sur

nos emballages de yaourts et

autres rejetons synthétiques.

Veolia et ses copains tirent

bien leur épingle verte et

soutenable du jeu. Le slogan

« Faire du déchet une ressource » en

dit long. Les marchés publics

de collecte et de traitement

offrent des perspectives

juteuses.

Nous croyons que l’on peut

parler différemment des

déchets. Les gens, les expé-

riences, les besoins et les

initiatives que nous avons

rencontrés nous en ont

convaincues. Nous avons pris

les chemins de traverse entre

poubelles et vers à compost

pour concocter un événement

à la mesure de nos découvertes

et convictions : des journées

régionales de la concertation

sur les déchets.

Prévention, valorisation,

emploi, planifications et

concertations, tout passe au

filtre de la discussion. Les

17 et 18 octobre, à l’école de

la deuxième chance dans le

15ème de Marseille, ateliers,

tables rondes, et perfor-

mances artistiques seront

au rendez-vous pour vous

inviter à réfléchir et racon-

ter autrement les déchets.

Le tempo sera donné par des

expériences récoltées en Paca

et ailleurs. Les enfants auront

leurs temps d’expression le

mercredi 17. Des animations,

des expositions et de la mu-

sique leur seront proposées.

Demandez le programme !

([email protected]). Et en

plus, l’entrée est libre !

Lucie Greenwood et Louisa

Timhadjelt font partie de

l’équipe de l’association

Arènes. Les journées régio-

nales de la concertation sur

les déchets sont également

organisées en partenariat avec

EA-éco entreprises et l’asso-

ciation régionale des ressour-

ceries de Paca.

tribune Par Lucie Greenwood et Louisa Timhadjelt

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18 ‹ n°100 Octobre 2012 ‹ leravi

la tchatcherencards

www.provenceguide.comtous les bons plans sur

En Vaucluse,

l’été se prolonge !

Balades à pied ou à vélo dans le Luberon, expositions en Avignon, sport et loisirs au Ventoux, fêtes des vendanges dans les villages, sorties musique, théâtre ou danse,

l’art de vivre en Vaucluse…

profi tez deen Vaucluse…

aucluseattitudeça, c’est la

Marseille & La Seyne-sur-Mer

Puget-sur-Argens

Projection-débat. L’extrême droite au pouvoir, c’est maintenant à Orange et Bollène. Projection débat de Mains brunes sur la ville (doc, 2012), en présence du coréalisateur et collaborateur du Ravi Jean-Baptiste Malet. A La Seyne-sur-Mer le mardi 16 octobre, 19h30 salle Apollinaire (av. du Dr Mazen) avec la LDH. Infos : http://ldhinfoslaseynesurmer.blogspot.fr. A Marseille, le jeudi 25 octobre, 20h30 à L’Ecomotive (2 place des Marseillaises, 1er arr.) Infos : http://lecomotive.fr

« La bio est dans le pré », journée festive et éducative autour du bio organisée par l’association Bio Consom’acteurs, le domaine de le Bercail et l’Adapei du Var. Au menu : marché bio, conférences (« l’agriculteur premier acteur de santé », « le consommateur premier acteur du changement »), stands d’information, jeux, spectacle équestre, concert, bal. Restauration bio. Entrée : 3 euros. Dimanche 14 octobre, 10h-17h30 domaine Le Bercail (864 chemin de la Plaine). Infos : www.bioconsomacteurs.org

Rencontres avec leraviMarseilleFestivités. Pour fêter son 100ème numéro, le Ravi s’expose à L’Alcazar (du 2 au 12 octobre) et propose une table ronde « Médias : pressés comme des citrons ? », avec Charb, rédacteur en chef de Charlie Hebdo, Marjolaine Dihl, du collectif Presse Papier, Catherine Pietralunga, kiosquière. Sans oublier Michel Gairaud, rédacteur en chef du Ravi. Samedi 6 octobre, 13h30 salle des conférences de la BMVR (58 cours Belsunce, 1er arr.). Infos : www.leravi.org

Aix-en-ProvenceDébats. Les médias indépendants de Paca ont décidé de se réunir pour voir si une autre information était possible. Samedi 13 octobre, 14h-22h CREPS d’Aix. Infos : blog « Cent paroles d’Aix » sur Mediapart. Lire page 16.

VaucluseDébats & théâtre. le Ravi accompagne les « conférences gesticulées » à Carpentras, La Palud et Avignon. Du 18 au 21 octobre. Lire page 16.

Rencontres et débatsAix-en-ProvenceConférence-débat. « Etre mère et travailler : quels conflits en 2012 ? », prochain axe de réflexion de l’association Demeter-Core pour son travail sur la « maternité, les femmes et le genre dans l’aire méditerranéenne ». Mardi 9 octobre, 17h30-20h30 salle des mariages de la mairie d’Aix (place de l’Hôtel de ville). Infos : [email protected]

AvignonCafé politique. « Education : quelle place pour une collaboration entre l’école, les parents, l’enfant et la société ? » Pour sa rentrée, l’Agora Café d’Avignon s’attaque à une problématique de… rentrée. Jeudi 18 octobre, 20h café Chez Françoise (6 rue du Gl Leclerc). Infos : [email protected]

La Seyne-sur-Mer

Rencontres. L’association environnement et partage organise deux jours de conférences et débats pour faire connaître les différents acteurs de l’environnement du Var, les mettre en réseau et éduquer grand public et scolaires. Dimanche 7 et lundi 8 octobre, 10h-19h Parc de la navale. Infos : www.environnement-et-partage.fr

Conférence. L’université populaire et républicaine s’attaque à un sujet chaud ce mois-ci : « La laïcité expliquée aux jeunes générations ». Mardi 9 octobre, 19h-21h Maison de la Région (61 La Canebière, 1er arr.). Infos : http://upr-marseille.com

Tourves

Fête paysanne. La Confédération Paysanne et Alliance Provence organisent la 2ème édition de leur Fête de l’Agriculture Paysanne, événement qui a pour but de sensibiliser le monde agricole et le grand public. Dimanche 21 octobre, 10h-19h Espace culturel et salle Saint Pierre. Infos : http://paca.confederationpaysanne.fr

la tchatcherencards

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leravi › Octobre 2012 n°100 › 19

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Le diffuseur du mois

La dure vie d’un canard associatif s’illumine parfois, laissant à penser que les choses pourraient être plus simples et qu’on ne s’en porterait pas plus mal. C’était un petit matin d’avril, sur le Cours Julien, à Marseille. Comme chaque mercredi, Guy, apiculteur tendance « Ni dieu, ni reine », installait son étal. Dans son numéro spécial « Présidentielle », le Ravi, après lui avoir demandé ce qu’il ferait s’il était locataire de l’Elysée, lui avait tiré le portrait. Alors, en lui donnant le journal avec sa trogne en une, on lui demanda, en voyant qu’il vendait CQFD, s’il ne voulait pas nous diffuser

sur Arles où nous allions être virés des kiosques. Ce qu’il accepta bien volontiers. Et depuis,

avec la bonhomie de celui qui n’est vraiment pas décidé à perdre sa vie à la gagner, il écoule, chaque mois, sa dizaine d’exemplaires, nous ayant,

en sus, déniché un kiosque et livrant, à l’occasion, les affiches pour Jean, son pote disquaire à Arles qui, lui aussi, diffuse le Ravi [Musique-Arles, 14 rue

Reattu]. Quand on lui donna la première fois une poignée d’exemplaires,

il lâcha, dans un sourire : « P’tit joueur… » Il y a quelques années, avant

qu’une bête histoire ne vienne gâcher notre lune… de

miel, il en vendait plusieurs dizaines par mois. Mais la

greffe est en train de prendre à nouveau.

Et puis, comme le dit la sagesse populaire, « une abeille vaut mieux que mille mouches »…

S.B.

pour le mélange des genres : enquêtes fouillées, dessins de presse, tribunes libres, portraits satiriques, sujets de fond, humour à fond ;

un journal papier, régional et mensuel : un media qui nécessite du temps, pour le préparer et pour le lire, à l’heure du direct, du virtuel, de l’instantané ;

un modèle économique à but non lucratif dans un monde dévoré par le profit. leravi est édité par laTchatche, association coopérative, participative, en bref démocratique. Guy Marigot, apiculteur.

Il fait son miel et notre beurre en vendant le Ravi sur les marchés d’Arles et de Marseille

Votre Ravi ne vous quitte plus au point que vous refusez de le prêter ? Mais vous rêvez que tout le monde - vos amis, vos parents, vos frères et vos sœurs, sans oublier vos cousins, votre grand-père, votre tavernier préféré, votre maire ou encore votre député, votre meilleur ennemi - le lise ? Le mensuel qui ne baisse jamais les bras a la solution à tous vos problèmes : l’abonnement parrainage !C’est simple : lorsque vous décidez de faire cadeau d’un abonnement au Ravi, indiquez sur papier libre simplement votre nom, celui de la personne que vous parrainez (et son adresse !) et accompagnez le bulletin d’un chèque de 28 euros ! Soit 20 % de remise.

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rtt

Satie sur le dancefloorAvec « Are you Kantatik ? », l’Aixois Nicolas Cante sort son second opus après le très remarqué « Sounds from my piano » en 2009. Dans son nouvel album, on retrouve les traces nettes de ses tribulations pianistiques qui lui permettent de jeter un pont entre Eric Satie et le dancefloor (Are you Kantatik, Gnossienne), mais aussi de prêter une oreille du côté de la pop (Si jolie la vie), du jazz (Dancers in love ?). Quel que soit le style musical exploré, la touche de Nicolas Cante demeure toujours aussi précise et aérienne, rendant l’écoute de l’album assez jouissive. Pour fêter sa sortie, Mekanik Kantatik a été invité à jouer lors du dernier Marsactac, le festival de « toutes les insurrections musicales » de Nîmes et de Marseille. Il serait tout aussi à sa place au festival international de piano de la Roque d’Anthéron l’été prochain !

St. S.

« Are you Kantatik », Mekanik Kantatik, chez KMMK22

les vieux

Protection de l’humanitéLes chercheurs de l’Ufal, l’Union des familles laïques, auraient pu appeler leur essai L’écologie politique pour les nuls. Il aurait seulement fallu utiliser avec plus de parcimonie le langage universitaire. Le livre décrypte toutefois avec talent un courant de pensée préoccupé par « la qualité de vie individuelle et par la qualité de notre civilisation ». Un long chapitre s’attarde sur la critique de la technique, aliénante quand elle est contrôlée par et pour les dominants, encourageante lorsqu’elle permet à l’individu de s’émanciper des filtres capitalistes (l’Internet libre et le mouvement des Indignés). L’ouvrage s’achève sous la forme d’une discussion avec Bernard Friot, sociologue et économiste. Selon lui, entre autres, les investisseurs sont des parasites qui, après avoir ponctionné le travail des autres, dépensent massivement pour les ponctionner encore plus. Une bible de chevet pour penser autrement...

C.C.Comprendre l’écologie politique. « Pourquoi est-elle nécessairement républicaine et révolutionnaire ? », par Guillaume Desguerriers, Christian Gaudray et Dominique Mourlane, aux éditions de l’Ufal. 5 euros

Le grand bleuAuteur d’un pamphlet intitulé « Je suis de droite et je vous emmerde », Antoine Buéno a été, en 2007, la plume de François Bayrou. Il n’a donc peut-être plus grand-chose à faire… Son Petit livre bleu se présente comme une analyse politique des Schtroumpfs. Sa thèse ? Leur société serait une « utopie totalitaire empreinte de stalinisme et de nazisme ». Et de mettre en avant, pêle-mêle, le gros nez de Gargamel, le costume rouge du Grand Schtroumpf, le collectivisme forcené d’un village de clones vivant en autarcie et l’aversion des gnomes en bleu pour leurs semblables à la peau mate... Ça ne va pas très loin mais c’est écrit suffisamment gros pour que les médias s’en emparent, suscitant une mini-polémique. L’exercice n’en est pas moins plaisant et demande à être renouvelé. Antoine Buéno est l’un des invités, fin octobre à Marseille, de la 4ème édition de « La semaine de la pop-philosophie ». Quand on vous dit qu’il n’a pas grand-chose à schtroumpfer…

S. B.Le petit livre bleu, par Antoine Buéno, édition Hors Collection, 12,90 euros.

Histoire marseillaisePeut-être parce qu’ils prévoient l’afflux de touristes qui envahiront la cité phocéenne pour voyager à 20 euros la journée en 2013, les éditeurs génocident des arbres afin de publier des guides sur la ville et sa région. L’envie nous démange de jouer au basket avec Marseille, quelle histoire !. Car si la plume de François Thomazeau, auteur de polars, sait se faire alerte, son plaidoyer pour une grande métropole oscille entre conformisme bon teint et inquiétante cécité. Surtout lorsqu’il écrit : « On ne transforme pas du jour au lendemain une ville ouvrière en station balnéaire, une ville portuaire en marina, un désert culturel en capitale des arts. » Non, si on ne jouera pas au frisbee avec ce bouquin, c’est avant tout parce qu’il est illustré par Caroline Sury, dessinatrice et fondatrice des éditions marseillaises Le dernier cri. Ses personnages quasi-extraterrestres, son trait torturé, sombre et inquiétant sied à merveille à l’histoire de Marseille.

S.B.Marseille, quelle histoire !, de François Thomazeau illustré par Caroline Sury, éditions Gaussen, 12,50 euros.

Y a écrit La PosteLe Front dont il est question ici n’est pas celui du clan Le Pen. Jonathan Larabie, au scénario et au dessin, nous fait monter en première ligne de la guerre économique dont font les frais des bataillons de salariés. Le mois dernier, nous avons publié « Mourir à La Poste », le témoignage d’un facteur intérimaire observant de l’intérieur les conséquences sociales et humaines du nouveau management dans l’entreprise publique désormais soumise à la concurrence. Front décrit, par la fiction, une situation aussi peu réjouissante. Personne n’échappe au trait acerbe de Larabie : Philippe, le militant devenu autiste ; Yann, le rigolo aussi lourdingue que cruel ; Sébastien, le commercial, à la fois rouage d’un système oppressant et sa première victime ; les syndicalistes autant pragmatiques que lâches… Le seul qui croit encore en son boulot ? René, militaire retraité et militant frontiste. L’album est tout en noir. On l’aurait plus apprécié avec une petite pointe de couleur.

M. G.Front, par Jonathan Larabie, édition Les Requins Marteaux, 10 euros.

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leravi › Octobre 2012 n°100 › 21

cuisiner… c’est déjà résister !

Je vous écris ce petit texte couché dans ma tanière, au cœur de la bergerie qui me sert de nouveau « chez moi », écoutant le mistral qui fait vibrer les tuiles de mon bateau des collines.On est en septembre, et il fait froid (déjà), et y’a toujours pas d’eau.Mais comme vous lirez ça en octobre, on sera éternellement décalés vous et moi ! Jusqu’au jour où le Ravi fera sa fête internationale pour qu’on puisse enfin se voir : vous, Pierrick (NDLR l’autre auteur ce cette chronique un mois sur deux) et moi. Jusqu’au jour où, tels des physalis, nous briserons nos cages pour dévoiler nos charmes, nos saveurs et partager nos semences... Au présent... comme un présent !Laissez l’amour s’envoler ! Mangez des physalis...

J’en ai trois variétés provenant du potager d’un curieux :- Le physalis mexicain. Au sourire violet ou jaune, il est plus côté légume que fruit, mais dont le goût vaut le détour. Il est plus gros, et sa saveur a quelque chose de mystérieux.Vous pouvez le manger en salade avec les fins de tomates ou seul avec une petite sauce citron-miel.Sinon, vous pouvez le manger à la mexicaine, mais pour ça faudra rencontrer un Mexicain.Sinon encore, vous pouvez essayer cette sauce qui accompagnera très bien des pâtes ou de la viande ou même autre chose.Faites alors rissoler quelques oignons, de l’ail et les physalis coupés finement, puis laissez fondre à feu doux en coupant pour ceux qui aiment un petit piment frais. Un

- Quelques physalis- 1 œuf + 1 jaune- 25 cl de crème de soja- un peu de sucrePour la pâte sablée : - 250g de farine (T80 max)- 130g de beurre mou- 65g de sucre glace- 1 cuil. à soupe de crème fraîche- 1 cuil. à soupe de miel (lavande ou thym)- 1 œuf + un peu de sel

Mélangez dans un bol la farine, le sucre et le sel puis le beurre et malaxez jusqu’à ce que ça fasse une pâte un peu grumeleuse. Ensuite, rajoutez l’œuf, la crème et le miel et malaxez à nouveau jusqu’à homogénéité de la pâte... Mais ne malaxez pas trop quand même !

Même si c’est agréable, faites juste ce qu’il faut, c’est là le grand secret de la vie…

Puis mettez-le 1 heure au frigo et au repos.

Ensuite, coupez les physalis en deux et placez-les sur vos petites tartes sablées le cul en bas.

Confectionnez un appareil en mélangeant à l’aide d’une fourchette l’œuf et le jaune en incorporant doucement la crème de soja.

Recouvrez les physalis avec cet appareil et saupoudrez de sucre.

Et hop, au four 180° pendant à peu près 35 mn... Ou moins, ou peut-être plus.

Encore une histoire de « faites juste ce qu’il faut »...Joyeux anniversaire à toutes et tous celles et ceux dont c’est l’anniversaire !

Gros bisous et à bientôt !

El physalisPetite tarte sablée

petit peu de coriandre ciselée sur la fin, sel poivre et miam-miam.

Faut quand même que je vous dise que pour la plupart d’entre vous, vous ne trouverez pas cette variété... Simplement parce qu’elle est très peu cultivée. Mais c’est toujours intéressant de savoir que ça existe, question de culture générale !

- Le physalis petit tout petit dit « à goût de prune ». C’est le meilleur de tous, un petit bonbon à manger dans le jardin... Mais là encore, c’est tellement compliqué à ramasser que vous n’en trouverez que très rarement sur les marchés... Mais bon,

question de culture générale !

- Le physalis du Pérou, orange. C’est le plus connu. Il est super riche en vitamines, son goût est extraordinaire, on peut le trouver partout (ou presque).On le nomme quelques fois « l’amour en cage », preuve de l’intérêt qu’on lui porte dès la sortie de sa robe. Sur sa plante mère, il ressemble étrangement à une sorte de lanterne japonaise.

Et voici la recette que je vous propose pour se rappeler un peu l’été en automne.

Sylvain Musseri, paysan

ciné

Plus de films : http//killkino.canalblog.com

aux physalis

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22 ‹ n°100 Octobre 2012 ‹ leravi

colonne maurice

rtt

CultureLa Seyne-sur-MerThéâtre. Conférence théâtralisée en 3 actes, écrite et mise en scène par Tonton Dgé et jouée par Paul-Noël Jourdan, « Bert Falcomochère » est une légende inspirée d'un personnage réel, contemporain, une voix bien de chez nous. Vendredi 26 et samedi 27 octobre, 21h Théâtre 7ème Vague (38 rue Berny, on y trouve le Ravi !). Infos : http://cafetheatre7vague.com

MarseilleThéâtre. Festival doublé d'un salon du théâtre, Les Théâtralia a pour objectif de faire découvrir gratuitement toute la richesse de l'offre culturelle de Marseille durant trois jours. Du jeudi 11 au samedi 13 octobre, 11h-19h Centre Bourse (1er). Entrée libre. Infos : www.larevuemarseillaisedutheatre.com

MarseillePortes ouvertes. Pour la 7ème édition de ses Portes Ouvertes Consolat, l'association Poc ouvre 57 lieux du Chapitre pour y présenter plus de 150 artistes dans un parcours artistique (ateliers d’artistes et d’artisans) ainsi que par le biais de performances dans l’espace public. Dont Washi, alias Chloé Charlier, notre ancienne chargée de développement, qui expose « Les déserts évanouis » (dessins) à l'Académie de Hatha-Yoga (8 rue des Héros, 1er arr.). Du vendredi 5 au dimanche 7 octobre, quartier du Chapitre (1er arr.). Infos : www.assopoc.org

NiceExpo. Le Centre LGBT Côte d’Azur et ZeFestival Cinéma Paca présentent l'exposition « White Spirit » (peintures sur publicités) de Stéphane. Jusqu'au samedi 27 octobre, 10h-17h (du lundi au samedi) centre LGBT (123 rue de Roquebillière). Infos : www.centrelgbt06.fr

NiceCiné-débat. « La pirogue », dernier opus du cinéaste sénégalais Moussa Touré, est projeté au prochain ciné-débat de l’association pour la démocratie à Nice. Jeudi 18 octobre, 20h au Rialto (4 rue de Rivoli). Infos : www.adn-nice.org

RoussetFestival de courts. Quatre séances, une trentaine de films et une dizaine de pays sont représentés pour la 7ème édition du Courts bouillon, festival international de courts métrages de l’association les films du Delta. Samedi 13 octobre, 14h salle E. Ventre (bd de la Cairane). Infos : www.filmsdelta.com

TretsConcert militant. Dans le cadre de la 7ème édition du festival Champs libres, manifestation dédiée aux femmes rurales (donner plus de visibilité aux femmes, mettre en avant leurs projets, et leur offrir un lieu d’échanges sur leurs difficultés et leurs aspirations), Les Poulettes se donnent en concert. Samedi 13 octobre, 13h30 ferme de Noé (Puits du Brun). Infos : www.civampaca.org

VitrollesJazz. Charlie Free rouvre ses portes. Au menu de cette rentrée : Journal intime et Marc Ducret (guitare) pour une « Extension des feux » et Sébastien Llado (trombone) Quartet. Les samedis 6 et 20 octobre, 21h Domaine de Fontblanche. Entrée : 12 euros. Infos : www.charliefree.com

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leravi › Octobre 2012 n°100 › 23

Carpentrasconseil municipal

25/09/12

leravi teste chaque mois un conseil municipal en région Paca pour surveiller le fonctionnement de la démocratie locale...

« Alors on sert à rien ?! »

18:21 Ambiance. A l’instant où le grand reporter du Ravi s’installe sur sa chaise (en velours rouge), olivier Lapierre (UMP) et sa mèche poivre et sel lancent à Francis Adolphe, le maire socialiste de Carpentras : « San Antonio grotesque de la presse nationale ! » traduction : en juillet, Francis Adolphe a « démissionné » son premier adjoint Farid Faryssy après une explication pour le moins virile. Il lui reproche son soutien au maintien au second tour des législatives de la candidate socialiste Catherine Arkilovitch, dans une triangulaire qui a offert la victoire à Marion Maréchal Le Pen.

18h26Costard clair impeccable, cravate rayée, mèche gominée façon Clark Kent (alias superman), petites lunettes, voix et enthousiasme du commentateur es football de tF1 Christian Jean-Pierre (aka CJP), Francis Adolphe, maire depuis 2008 à la faveur d’une quadrangulaire Ps-UMP-DVD-Fn, tente de reprendre le dessus, bravache : « Je pense que l’action est plus utile que la parole. »

18h27Comme très souvent, le conseiller municipal et général Fn, Patrick Bassot, a séché la séance.

18h43« Un peu moins fort ! », crie Jean-Luc Becker, chef de file de l’opposition DVD, à Bruno Gandon, chauve et longiligne adjoint au développement économique. Ce dernier, en chemise blanche ouverte jusqu’au plexus, vient d’attaquer la lecture de la délibération 5 en haussant d’un ton sa voix déjà puissante.

18h55Un retraité se lamente dans le public : « Ça va finir à dix heures du soir ! »

19h11Farid Faryssy a la rancune tenace. Depuis quelques minutes, l’ancien premier adjoint, un petit trentenaire au visage rond en costard sombre, multiplie les demandes de parole, les provocations. Francis Adolphe finit par craquer : « Monsieur Faryssy, on a eu un mano à mano en juillet, mais moi je vous reconnais comme conseiller municipal. » Farid Faryssy, voix blanche : « Moi, je ne vous reconnais pas moralement comme maire. »

19h17Crâne dégarni, tee-shirt âgé, voix un peu précieuse, l’écolo dissident Guy Largier « rebondit » tout sourire au CV d’un nouveau collaborateur du maire : « Il a des compétences sur l’Agenda 21, c’est bien. C’était dans notre programme et je ne vois rien venir… » Francis Adolphe reste, chose rare, sans voix.

19h35Grand projet de la fin du mandat du maire, le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés du quartier de la gare, auquel est accolée la réouverture de la ligne Avignon-Carpentras, est au centre de plusieurs délibérations qui s’enchaînent. Au volet financement, Jean-Luc Becker, chef de file DVD bronzé et tenace, s’inquiète : « Pourriez-vous nous présenter le projet, je pense que même votre majorité ne le connaît pas. » Avec son excitation habituelle, le maire écarte l’idée et tranche : « Je fais voter le financement avant, ou il faudra 100 ans pour que le train entre, non pas en gare de La Ciotat, mais en gare de Carpentras. » L’UMP Marie-suzy Pons-Mermet, une petite quinqua blonde au visage dur, apprécie peu la blague : « Alors on sert à rien ?! » Francis Adolphe : « Si vous voulez. »

19h52olivier Lapierre vient de méchamment tacler Gérard rolland, délégué aux actions solidaires. Francis Adolphe, pas vraiment « solidaire » : « Y’a des tentatives de piques, mais on passe outre. »

20h00Quelques délibérations s’enchaînent dans une ambiance un poil apaisée. Les rangs du public commencent à se vider.

20h07A l’image d’un CJP ivre de bonheur au coup de sifflet final d’une victoire de l’équipe de France en match amical, Francis Adolphe explose : « Maintenant, on passe au Scot ! » (nDLr le schéma de cohérence territoriale)

20h12Les débats se cristallisent sur le schéma de développement commercial de la communauté d’agglomération Ventoux-Comtat-Venaissin (Cove), qui accompagne le document intercommunal. La limitation des surfaces commerciales exaspère Francis Adolphe, qui y voit un frein « au développement économique, à l’emploi », à son projet de déplacement d’un Intermarché et d’implantation d’un MacDo ainsi qu’un manque à gagner pour la ville.

20h30scot toujours. Contrairement à Jean-Luc Becker et Farid Faryssy qui ont tenté de raisonner le maire, Marie-suzy Pons-Mermet attaque : « Le Scot a été voté à l’unanimité à la Cove ! » Francis Adolphe s’enfonce dans son fauteuil, les jambes croisées. son opposante poursuit : « Je sais que vous avez 35 000 m2 de projet de surfaces commerciales. C’est énorme ! » Le maire agite ses mains : « Ça n’est pas parce qu’une intervention est longue qu’on a raison ! Votre interprétation est hallucinante ! » « Des âneries ! », renchérit Bruno Gandon. « Aneries » finalement non démenties.

20h45Départ du très discret Jean-François sénac de l’UMP.

20h53nouveau coup d’accélérateur. Les élus en profitent pour reprendre leur souffle.

21h00Jean-Luc Becker : « Le conseil municipal se passe derrière vous ? Il y a beaucoup d’agitation... » Francis Adolphe, qui a retrouvé son ardeur : « Je suis concentré sur vous. Ca ne va pas encore durer longtemps. »

21h04Farid Faryssy reprend sa guerre personnelle. A un « Oui monsieur Farid Faryssy » du maire, le premier adjoint répond par un obséquieux « oui monsieur Francis Adolphe. »

21h11Les bancs de la majorité commencent également à se vider. Côté public, ne reste désormais qu’une poignée d’acharnés.

21h13« J’arrête ce dialogue de sourds », grince Farid Faryssy. Depuis plusieurs minutes, l’ancien premier adjoint tente de convaincre le maire de profiter de la rétrocession de parcelles à un particulier pour lui imposer d’aménager un passage afin de désenclaver la cité Zola. Francis Adolphe louvoie pour mieux refuser. Laurent Pénard (DVD) tente une conciliation : « On reporte la délibération et on réfléchit. » en vain.

21h34Décisions du maire. La municipalité n’a curieusement qu’une confiance très limitée en son délégataire pour l’assainissement collectif : un marché de conseil pour une analyse technique est en cours.

21h46Bon prince, Francis Adolphe lance : « Allez, encore une question. » Guy Largier s’y colle : « J’aimerais que vous fassiez un point sur l’affaire Poulain. » Mauvaise question. Le maire botte en touche.

21h48« Le prochain conseil sera le mardi 11 décembre à 18h15 », lance Francis Adolphe pour lever la séance. Avec la même passion qu’un Christian Jean-Pierre donnant rendez-vous pour le prochain téléfoot.

Jean-François Poupelin

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émocratie

› 29 271 habitants (2009)› 2 fleurs « villes et villages

fleuris »› 34 caméras de

vidéosurveillance› 14,96 % de logements

sociaux (2009)› 28,54 % pour Marine Le

Pen le 22 avril 2012

Le maire : Francis Adolphe (PS), depuis 2001. 52 ans. Expert judiciaire.La majorité : Un groupe de 23 conseillers de la liste « Carpentras ville active » (PS)L’opposition : 6 conseillers de la liste « Carpentras l’avenir avec passion » (UMP) ; 3 conseillers de la liste « Carpentras le renouveau » (DVD) ; 1 conseiller de la liste « En avant Carpentras » (FN) ; 1 dissident PS ; 1 dissident EELV

Le conseil municipal soumis au test du ravi› Durée : 3h33.› Présents : 19 élus de

la majorité, 10 élus d’opposition.

› Temps de parole cumulé de l’opposition : 9 min.

› Le public : 33 personnes,

carpentras (84)

Avignon

MarseilleToulon

Dignes-les-bains

Gap

NiceCarpentras

reportages

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24 ‹ n°100 Octobre 2012 ‹ leravi

RepoRtages

Pendant un an, Stéphane Sarpaux, journaliste au ravi,et Nathalie Crubezy, photographe du collectif à-vif(s), ont suivi quatre agriculteurs de la région qui travaillent en circuits courts.

Extrait de leur livre publié ce mois-ci chez Yves Michel.

Les chiens sentent que la balade approche, ils sont tout excités quand Luc Falcot ouvre le portail de la bergerie. Nous sommes à Cuges-les-Pins, aux frontières de l’agglomération marseillaise qui semble ici bien lointaine. Les

chèvres se sont toutes rapprochées et n’hésitent pas à nous bousculer pour aller de l’avant. Avec les cornes en tire-bouchon au niveau des hanches, on a un peu peur qu’elles donnent un coup de tête malencontreux. Mais leur poussée est plutôt amicale (…).

MuSardagE daNS lES ColliNESLes premières s’arrêtent déjà pour croquer les feuilles dures des chênes kermès à la lisière de la ferme. Derrière, on entend les enfants crier dans le grand huit d’OK Corral, le parc d’attractions qui se trouve juste à côté de la ferme. Image surréaliste du trou-peau de chèvres qui traverse le parking de voitures des tou-ristes et qui s’arrête comme un seul homme sur un avertis-sement de Luc quand on croise la route qui monte sur Riboux. On passe s o u s un pont pour se retrouver de l’autre côté de la nationale et nous voilà dans la garrigue. Le chemin est caillouteux sur ce flanc de la Sainte-Baume. Les chèvres s’éparpillent et Luc arbore un sourire d’aisance. « Partir avec les chèvres dans les collines, c’est vraiment ce que je préfère dans mon métier. C’est pour ça que j’ai voulu être berger. » (…).

du burEau au trouPEauAu bout de deux cents mètres, il sort du chemin et s’arrête en contrebas. « La technicité du berger, ce n’est pas de marcher tout le temps, c’est d’observer la nature pour attirer le trou-peau sur une zone où elles peuvent trouver à brouter autre chose que des kermès. Car le secret de la brousse réside dans ce que les chèvres ingurgitent. C’est la variété des plantes qui constituent la garrigue qui donne au lait sa spécificité. Et comme il n’y a pas de traite le soir puisque la production chute de 40 %, nous pouvons musarder plus longtemps dans les collines en sortant un peu des chemins pour trouver des essences particulières. » (…).

Derrière nous, on entend tinter une cloche au son grave. « C’est Espigoule, raconte Luc, de plus en plus volubile. C’est la doyenne du troupeau, elle a treize ans. C’est un âge cano-nique pour une chèvre, mais elle est encore vaillante, même si elle a un sacré caractère. Mais je ne peux pas m’en séparer. C’est avec elle que j’ai commencé le troupeau, en 1998. » On avance doucement dans la colline où Luc recherche systéma-tiquement les sous-bois plutôt que les petits espaces plats. « Regarde, celles-ci sont les cabris nés en janvier. C’est encore des adolescentes, elles font n’importe quoi, il faut toujours que je les aie à l’œil pour pas en perdre une. »

Encore une petite montée d’une heure à un rythme d’escargots, durant laquelle Luc reste silencieux.

Son visage est détendu, ses yeux rieurs s’ar-rondissent au fur et à mesure qu’on s’éloigne de toute forme d’urbanité. Il raconte quelques blagues, demande des nouvelles de Marseille,

parle un peu de politique, répond de temps en temps à son téléphone qui sonne. Au bout de deux heures, je n’ai pas touché à mon eau et on arrive sur une zone où il s’arrête

et se lâche : « Devenir berger, c’est un rêve d’enfant. J’ai grandi dans les quartiers Nord de Marseille où je pouvais encore voir des ber-

gers avec leurs troupeaux de chèvres partir dans les collines. En fait, je viens d’une

grande famille bourgeoise car mon arrière grand-père était patron des

tuileries de Saint-Henri. Après la Seconde Guerre mondiale, c’était une famille bourgeoise ruinée. Mon père était parti au Maroc et en est revenu en che-mise après la décolonisation dans les années 1960. Il est reparti de rien à Marseille, il a travaillé dans le BTP et il a fini

commerçant en quincaillerie. J’ai donc grandi en ville. Ma seule relation avec la nature dans mon enfance, c’était des vacances à Saint-Maximin chez ma grand-mère. C’est là que je me suis reconnecté avec la nature. Là et chez mes cousins. Ils avaient une exploitation viticole dans l’Hérault et il y avait un berger qui passait six mois de la saison chez eux. C’est mon premier contact avec ce métier. Et c’est là que j’ai eu la vocation. Mais à l’époque, mes parents m’ont interdit de réaliser mon rêve. Alors j’ai fait des petites études de comptabilité et je suis rentré dans le monde du travail. J’ai travaillé pendant vingt ans, souvent dans l’admi-nistratif, forcément. Mais j’en ai eu marre des bureaux. Le dernier travail que j’ai eu, c’est responsable commercial pour une entreprise de l’Oise : je ravitaillais les supermarchés en articles de coiffure (brosses, pinces…). »

D’un coup, je comprends un peu mieux sa grosse moustache et ses cheveux en pagaille. « En 1994, c’est une année décisive pour moi : je me marie avec Magali, on a notre premier enfant, on achète le terrain à Cuges pour installer nos chevaux, qu’on gérait à côté de notre activité. On pensait faire un pensionnat de chevaux. C’était notre projet de vie. Et puis, en 1998, j’ai un coup de téléphone de ma soeur qui s’était installée comme maraîchère et qui avait sur son exploitation quelques brebis et quelques chèvres du Rove. Elle me propose un lot de dix chèvres à prendre. Il fallait se décider en trois jours. Je grimpe tout de suite dans ma camionnette, sans réfléchir. Chez le chevrier, il me prodigue quelques conseils basiques sur les chevrettes un peu sauvages et, pour faire bonne mesure, il m’en donne deux vieilles. À part savoir où étaient les cornes et la queue, je ne savais rien au départ. On s’est débrouillé comme ça. »

L

A travers quatre exploitations qui ont décidé de fonctionner en circuit court, ce système qui connecte directement les producteurs et les éleveurs avec les consommateurs, Stéphane Sarpaux et Nathalie Crubezy ont suivi la vie d’un maraîcher, d’un apiculteur, d’un arboriculteur et d’un chevrier. A travers leur travail au quotidien dans leur exploitation et la relation avec leurs clients se dessine un portrait de travailleurs de la terre humbles, respectueux de la nature et ouverts sur les autres. Tout le contraire des clichés souvent utilisés par les médias…

Court Circuit, « un an avec quatre agriculteurs qui ont réinventé leur métier », par Stéphane Sarpaux & Nathalie Crubezy, editions Yves Michel, 14 euros.

Court Circuit

Luc, les chèvres Et ok Corral

Stéphane Sarpaux

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RepoRtages

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Rackham

le poids lourd

Entraîneur du Stade français, sélectionneur du XV de France et depuis un an manager du Rugby

Club Toulonnais, Bernard Laporte a aussi été secrétaire d’Etat aux sports en 2007 nommé par son

copain Sarko. Mais c’est son parcours d’homme d’affaires et de

casinotier qu’on connaît moins…

le poids lourd

Samantha Rouchard

1. Rugbyrama, 28/08/12.2. Ce portrait est un

témoignage fictionnel et satirique, mais vous l’aviez compris !

3. « Bernard Laporte nous prend pour des bleus », Bakchich 28/11/2009.

4. L’Equipe 11/09/2007.5. « Il a fallu attendre

un communiqué du 12 septembre, soit le lendemain de la parution de l’article de L’Equipe, pour que l’opération « caritative » maillots soit annoncée » Agora Vox 17/09/2007.

6. « Laporte des casinos », Bakchich 22/07/2007.

7. L’Equipe Magazine octobre 2007.

8. « Le clan Francisci marque Laporte à la culotte », Bakchich 30/11/2007

9. Un bleu en politique de Bernard Laporte aux Presses de la cité.

«Je regrette mais il n’y avait pas d’intention d’influen-cer l’arbitre » (1). Bon ok, en août dernier, lors du match contre le Racing

métro 92, je (2) me suis fait surprendre dans les vestiaires à la mi-temps à papoter avec l’arbitre et de suite on imagine le pire ! Alors que je voulais juste lui apprendre les paroles du Pilou-Pilou : « Ah ! Nous les terribles guerriers du Pilou-Pilou / Pilou-Pilou ! / Qui descendons de la montagne vers la mer / Pilou-Pilou ! / Avec nos femmes échevelées allaitant nos enfants… / Pilou-Pilou ! » Je devrais en faire un remix tiens ! La musique, c’est le seul domaine auquel je ne me suis pas encore essayé. Contrairement au cinéma. Mais si, souvenez-vous, la pub Madrange, « le jambon star » ! « Les pâtes Lustu-cru moulées à l’ancienne », c’était moi aussi ! En 2007, mes revenus publicitaires étaient estimés à 700 000 euros par an (3), à ce tarif-là j’aurais été capable de bouffer un cochon entier !

Bon, j’étais plus connu pour ma casquette

d’entraîneur du Stade français puis

sélectionneur du XV de France. Mais tout est quand

même bon pour mettre un peu de beurre dans ses Lus-tucru ! Resto, camping, résidence de vacances… J’ai même fait dans le

textile en vendant sur mon site « 10 000 maillots de

l’équipe de France à 146 euros l’unité - soit 71 de plus que le prix conseillé

par Nike » (4), mon associé de l’époque Serge Bénaïm

avait précisé que bien entendu on allait donner une partie à une œuvre carita-

tive (5). On appelle ça botter en touche !

Mais mon truc à moi, c’est les casinos ! « Un

ministre casi-notier ? La situation est sans nul

doute inédite dans la Vème République » ! (6) En 1996, j’en monte trois sur les plages de

l’Atlantique mais celui de Lacanau n’arrive pas à obtenir l’autorisation pour les bandits-manchots car « le ministère de l’Intérieur du gouvernement Jospin bloque. Après avoir pris

connaissance du rapport d’enquête très défa-vorable des RG » (6). Ils disent que les deux casinos des Landes « sont mal gérés » (6) et que les fonds utilisés pour celui de Lacanau « ne sont pas très clairs » (6). Ils portent le soupçon sur mes potes varois, les frères Fargette, Jean-Louis, parrain du Var, abattu dans un règlement de comptes en 1993 et Robert dit « Ptit Bert », abattu en 2000 par deux motards à la sortie d’un bar de La Valette. Tous les trois, on faisait une sacrée équipe, on avait même monté un resto à Paris, on l’avait appelé « Les Princes », c’est dire ! En 2000 j’ai tout revendu…

Et puis les amitiés évoluent, je rencontre Nicolas, alors ministre de l’Intérieur. Du coup, j’essaie d’intervenir en faveur du casino de Gujan Mestras, mais la patronne déclare à la presse : « Il est venu m’assurer que j’aurai sans aucun problème mes licences de jeux… à condition que je lui cède la moitié de mes parts »(6) ! Ca m’apprendra à vouloir rendre service ! Du coup

je roule pour moi, et en 2006 je possède 33 % du capital du casino de Saint-Julien-en-Gene-voix, à la frontière suisse (6).

Nicolas, je lui dois beaucoup ! Il m’a évité pas mal d’emmerdes ! Moi, ce que je dis toujours, c’est que quand on est moitié filou, moitié looser en affaires, il faut savoir bien s’entou-rer ! En 2009, une enquête fiscale sur la gestion de certaines de mes sociétés du groupe Olé Bodéga, révèle des infractions : « double comp-tabilité, abus de biens sociaux, détournement d’actifs, transfert de fonds suspects, fausses fac-tures, travail au noir, retraits en espèce » (7). Ben heureusement que Nico il était là pour ralentir la procédure et empêcher un contrôle indivi-duel ! « Je sais qu’il n’y aura pas grand-chose, si ce n’est sur un point précis, la ventilation de la TVA. Et puis ce n’est pas moi personnellement qui suis contrôlé, ce sont les sociétés » (7), voilà ce que je leur ai répondu aux journaleux !

Nicolas m’a quand même offert le prestige : devenir secrétaire d’Etat aux sports de 2007 à 2009, c’pas rien ! Quand on vient de Rodez comme moi, qu’on est fils de monteur EDF et qu’on a que le bac en poche, forcément on a une revanche à prendre sur la vie ! Comme premier conseiller parlementaire, j’ai pris Franck Giovanucci, « qui occupait jusqu’alors des fonctions importantes auprès du président du Conseil général de Corse-du-Sud […] fief du clan Francisci, qui s’est fait, depuis un quart de siècle, une grande réputation dans le monde des jeux et des casinos » (8). J’ai proposé le service civique obligatoire de 100 heures pour les jeunes. C’est important le bénévolat, dans une société qui ne

pense qu’à l’argent !

Mais on m’a bien fait sentir que je n’étais pas à ma place. Bernard Kouch-ner, par exemple, « jamais il ne m’a serré la main pour me dire bonjour. A ses yeux,

je passe pour un bouseux. Un rustre, un bouffon même. » (9) Bon j’avoue que parfois j’ferais mieux de réfléchir avant d’agir comme lorsque à la fin de mon discours officiel à l’occasion de la journée « Vivre Sport, Vivre l’Europe » célébrant les champions des 26 pays de l’Union Européenne, j’ai déclaré : « Je tenais à dire que je ne suis pas le père de l’enfant que porte Rachida. » Autant dire que tout le monde s’est foutu de moi ! Rachida la première ! Heureusement Nico lui, il « a la trempe des plus grands. [...] Je le respecte et je l’admire » (9)… On ne sait jamais !

« Je passe pour un bouseux. Un rustre, un bouffon même. »

Moi, Bernard Laporte,

bandit-manchot

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n° 100octobre 2012