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    LINNOVATIONUN ENJEU MAJEUR

    POUR LA FRANCE

    Jean-Luc Beylat

    Pierre Tambourin

    RAPPORTEURS

    Guillaume Prunier

    Frdrique Sachwald

    MINISTRE

    DU REDRESSEMENT

    PRODUCTIF

    MINISTRE

    DE L'ENSEIGNEMENT

    SUPRIEUR

    ET DE LA RECHERCHE

    Dynamiser la croissance des entreprises innovantes

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    1LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    AVANTPROPOS

    Alors que lan 2000 avait longtemps sollicit les imaginaires, le XXIe sicle a dabord semblsinscrire dans la continuit du bouillonnant XXe sicle, consolidant les industries et lespays en place, sans apporter apparemment de ruptures majeures. En un peu plus de dixans, cette perception initiale sest rvle fausse, face un vritable bouleversement mondial : des titres divers, le dveloppement conomique acclr des pays dits mergents, leur prsencede plus en plus prgnante dans le champ de linnovation, les nouveaux enjeux sur la raretdes ressources, la concentration des investissements dans les mgapoles, la dmocratisationde laccs au savoir et aux donnes via le rseau internet, la globalisation ascendante des

    initiatives ou encore la vlocit des technologies sont, entre autres, autant de faits majeursdun monde qui se rinvente plus vite que lon ne peut le penser, plus vite mme que lon nepeut le structurer. Face cette acclration et cette complexification des enjeux, les politiquespubliques paraissent parfois dmunies, souvent dsordonnes.

    Le monde se rinvente, et au cur de cette transformation, soutenir linnovation devientun enjeu crucial pour les tats. Linnovation, cette facult porter le nouveau, changer lesparadigmes technologiques, mais aussi organisationnels, conomiques, parfois socitaux,structure les conomies, les socits, les futurs.

    Comme la dcrit Louis Gallois dans son rapport de novembre 2012 Pacte pour la comptitivitde lindustrie franaise , la comptitivit de lindustrie franaise rgresse depuis 10 ans, et

    entrane ainsi une perte de comptitivit globale de lconomie franaise. Si les constats sontinquitants ( la cote dalerte est atteinte ), la capacit de la France saisir les opportunitsdes nouveaux enjeux de linnovation est l : leffort de la recherche franaise est significatif, lescosystmes de linnovation au premier rang desquels les ples de comptitivit ont montrleur capacit fdrer les acteurs de linnovation, les instituts Carnot ont t lancs, et enfin,le programme des investissements davenir doit donner les moyens dun sursaut. Les succs dejeunes entreprises innovantes franaises, souvent mal connus, dans le numrique, la vido, ledesign, lnergie, lingnierie, ou encore les biotechnologies, sont des signes trs encourageantsdu potentiel de la France.

    De nombreuses initiatives, souvent pertinentes, ont t prises pour favoriser le dveloppementde linnovation, en particulier partir de la recherche publique. Elles lont souvent t en regard

    dun systme de valorisation de la recherche, jug trop faible, et finalement peu tourn vers lacration dentreprises forte croissance, en capacit de crer des emplois. Il en a rsult uneaccumulation et une diversit de dispositifs, de structures, tant au niveau national que rgionalou local, peu lisibles, dont lefficacit globale, conomique, industrielle et sociale (en terme decration demplois), reste dmontrer.

    Cest donc bien dune politique densemble cohrente et sinscrivant dans la dure que laFrance a besoin pour soutenir et encourager linnovation.

    Mais il ny a pas de modle unique de linnovation. Il est en effet vain de penser que lon puisseexporter le modle dcosystme de Boston, celui de la Silicon Valley, de Shanghai, ou deJrusalem dans telle ou telle rgion franaise. En revanche, des invariants existent dans tous ces

    exemples : lexcellence de la recherche, un dcloisonnement entre acteurs publics et privs,

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    2 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    une culture de lentrepreneuriat, une diversit culturelle, une capacit attirer des talents auniveau international, une politique migratoire oriente, une association russie entre jeunesentreprises, grands groupes, recherche publique, enseignement suprieur et investisseurs.

    Une politique publique de linnovation doit fortement favoriser lesprit dentreprise, la crationde valeurs, permettre une grande diversit des cultures et des savoirs, attirer les meilleurs

    tudiants, les jeunes chercheurs, les entrepreneurs, rendre efficace le transfert des rsultats dela recherche. Elle doit tre en plus une politique rsolument tourne vers les jeunes diplms(universits, grandes coles). Elle doit ainsi affirmer une vision densemble de son action enfonction des rsultats, et positionner linvestissement public l o il contribue le mieux lacroissance et la dynamisation de lconomie. Une politique publique de linnovation doitenfin accompagner la croissance des entreprises innovantes en ladossant au financement privou par la commande publique, faciliter et rcompenser la cration de valeur conomique etdemplois.

    Certains diront que linnovation est dabord la dmarche dhommes et de femmes quirencontrent une ambition, un objectif, que seule leur nergie est la cl du succs. Cest engrande partie vrai, mais la rapidit avec laquelle le monde change en ce dbut de sicle montre

    aussi que ce sont des politiques dtat, des volonts politiques fortes et prennes, comme auxUSA, en Chine, en Europe du Nord, en Isral, qui favorisent lmergence de nouveaux acteursindustriels, de nouveaux marchs, une croissance conomique et, in fine, des emplois.

    Trois ministres (la Ministre de lEnseignement suprieur et de la Recherche, le Ministre duRedressement productif et la Ministre dlgue aux PME, lInnovation et lconomienumrique) nous ont missionns pour proposer un ensemble de recommandations sur lesenjeux du transfert et de linnovation en France. Pour cela une commission de 25 acteurs etexperts de linnovation au sein de structures publiques et prives, innovateurs, entrepreneurs,prsidents de ples de comptitivit, capital-risqueurs, dirigeants dOSEO et de CDC Entreprises,a t constitue. Ils ont nourri de leur exprience le contenu de ces recommandations. Dans lemme temps, des contributions ont t demandes aux rgions car linnovation est ancre dansles territoires. Cest le fruit de ce travail collectif qui est prsent dans ce document.

    Au cours de ce travail, nous avons pris le parti de placer laccent plus particulirement sur deuxaspects :

    - labsolue ncessit dune stratgie nationale labore et revisite rgulirement au plus hautniveau de ltat ;

    - la cration et la croissance des entreprises innovantes qui demeurent un maillon fragile denotre systme dinnovation.

    Il va de soi que les autres facettes du transfert des rsultats de la R&D vers le monde socio-

    conomique, en particulier la recherche partenariale, la recherche technologique et les diversesstructures impliques dans ces activits, doivent tre maintenues, voire renforces au regarddune stratgie nationale de linnovation et aprs une valuation systmatique.

    Comme lenseignement, la justice ou la culture, linnovation devient dsormais une des trsgrandes missions de ltat. Ltat doit mettre en uvre tous les moyens pour que se dveloppecette culture de linnovation au sein des territoires et des rgions. Cest un enjeu majeur pour laFrance daujourdhui, mais cest surtout un devoir au regard de la France de demain.

    Jean-Luc Beylat et Pierre Tambourin

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    3LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Synthsedes recommandations

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    5LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    I. Introduction

    > Pour le dveloppement conomique de la France, il est essentiel et urgent de

    faire de linnovation une priorit.

    Le rapport de Christian Blanc, Pour un cosystme de la croissance , paru en mai 2004, et celuipubli par lOffice Parlementaire des Choix Scientifiques et Technologiques en janvier 2012(Claude Birraux et Jean-Yves Le Daut) ont remarquablement dmontr que dans une conomiede la connaissance, linnovation est le moteur de la croissance, de la comptitivit et de lemploi.Linnovation est en effet le principal levier de comptitivit hors-cot.

    LA DIFFICILE DFINITION DE LINNOVATION

    Il ny a pas de dnition inconteste et incontestable- de linnovation mais il est possible de faire merger quelquescaractristiques de linnovation :- linnovation est un processus long, imprvisible et peu contrlable,- linnovation ne se rduit pas linvention et linnovation nest pas seulement technologique,- au bout de ce processus, sont crs des produits, des services ou des procds nouveaux qui font la dmonstration quilsrpondent des besoins (marchands ou non marchands) et crent de la valeur pour toutes les parties prenantes.

    Un autre point mrite dtre soulign : une innovation ne se dcrte pas, ne se planie pas mais se constate par le succscommercial (ou socital) quelle rencontre. Ceci explique quelle nat souvent aux marges des entreprises existantes et dansdes interactions avec des acteurs trs dirents : Internet est le produit dune combinaison unique de stratgie militaire, decoopration scientique et dinnovation contestataire selon la phrase clbre de Manuel Castells.

    Du coup, toute politique de soutien linnovation doit aider non seulement les producteurs dinnovation, ainsi que lesearly adopters (cest--dire les premiers clients ou usagers qui prennent le risque dutiliser cette future innovation) et doitcontribuer la diusion de linnovation dans lensemble des secteurs conomiques.

    Avec cette approche, il devient clair que linnovation ne saurait tre le fait dun seul acteur et, par consquent, lenjeu pourles pouvoirs publics est dencourager la cration et le dveloppement des cosystmes locaux dinnovation grce aux moyensquils contrlent .

    Plusieurs tudes montrent que les classements de la France restent stables dans les paysageseuropen et mondial de linnovation. La France se positionne bien sur les indicateurs de moyensmais est moins performante sur les indicateurs de rsultats. Ce nest donc pas un manque demoyens publics qui est en cause mais une trop faible efficacit du systme.

    Par consquent, il ne sagit pas de dpenser plus dargent public pour linnovation, mais de le

    dpenser autrement et de manire plus efficace.

    LA POSITION DE LA FRANCE DANS LES CLASSEMENTS SUR LINNOVATION

    La situation de la France dans le paysage europen ou mondial de linnovation reste stable depuis plusieurs annes (11e rangen Europe, 16e rang mondial) alors que notre R&D est mieux positionne (de la 6e la 8e place mondiale selon les mthodesutilises). Ainsi, au niveau europen, la France est identie dans le dernier tableau de bord de linnovation de lUnionEuropenne (2013) comme appartenant au groupe des pays suiveurs , en dcrochage par rapport au groupe des paysleaders (Allemagne, Danemark, Sude, Finlande). La priode 2008-2012 fait apparatre une diminution de la performancede croissance alors que des pays suiveurs comme les Pays-Bas ou la Grande-Bretagne ont connu une amlioration de leurperformance.

    Ce dcalage entre eort en faveur de la R&D et performance en matire dinnovation traduit le problme rsoudre.

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    6 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    > Il faut pour cela changer radicalement notre mode de penser linnovation et

    les politiques qui en dcoulent : passer dune vision o la dpense de R&D est

    la principale proccupation, une vision systmique axe sur les rsultats en

    termes de croissance et de comptitivit.

    La France oscille entre le rve amricain de la Silicon Valley, o des innovations de rupture sontportes par des start-ups, le rve allemand dun Mittelstand industriel bien tabli et performanten innovation incrmentale, et une tradition franaise de la planification industrielle dansdes filires rgaliennes. Cette oscillation brouille la reprsentation que la France se fait delinnovation car elle mlange innovation de rupture, innovation incrmentale et politiqueindustrielle stratgique .

    Il faut couper court un mythe : si linnovation ncessite souvent une excellente R&D, elle nese rduit pas la R&D. Ce nest pas non plus son prolongement naturel. Linnovation, cest avanttout le processus qui mne la mise sur le march de produits ou de services rencontrant un besoin,

    ports par des individus engags dans une dmarche entrepreneuriale. Linnovation est ainsi aucarrefour de plusieurs domaines, au premier rang desquels la recherche, lentrepreneuriat,lindustrie et lducation.

    Pour apprhender notre systme dinnovation, il faut donc dpasser la simple analyse dupourcentage de la dpense de R&D dans le PIB. Dune part linnovation ne se rsume pas la R&D, dautre part, la dpense de R&D tient au moins autant des effets structurels du tissuconomique qu leffort de R&D des entreprises.

    Linnovation se matrialise par le dveloppement conomique dune entreprise, souvent ancredans un territoire, et par la cration demplois. Toute valuation de la performance dun systmedinnovation doit prendre en compte son impact conomique.

    Dans ce contexte, linnovation rsulte de plusieurs facteurs : une bonne culture de linnovation et de lentrepreneuriat, un transfert efficace vers le monde socio-conomique des rsultats dune R&D performante, des financements publics et privs (en particulier le capital-risque) pour la croissance des

    entreprises innovantes, lexistence de rseaux dacteurs ancrs sur les territoires, les cosystmes , qui catalysent

    les trois lments prcdents.

    Cest lensemble de ces quatre dimensions qui dterminent tout systme rgional et nationaldinnovation. Prendre des mesures sur une seule de ces dimensions, ou prendre des mesuressur chacune delles sans forte cohrence, ne peut avoir quun impact limit.

    La question de larticulation entre une politique publique impulse par ltat au niveau nationalet la politique conduite par les rgions, les mtropoles au sein des territoires est centrale : lapolitique publique doit tre systmique mais doit aussi, en mme temps, reconnatre quelinnovation se dveloppe dans des territoires, qui ont des spcificits (histoires, acteurs). Ilny a donc ni optimisation conceptuelle, ni schma normatif attendre.

    Dfinir une politique publique en faveur de linnovation qui prenne en compte ce caractresystmique revient traiter de manire cohrente cet ensemble, en reconnaissant toutparticulirement le rle et la spcificit des dynamiques territoriales.

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    7LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    NOS 19 RECOMMANDATIONS SONT LOGIQUEMENT STRUCTURESPAR QUATRE AXES :

    - dvelopper la culture de linnovation et de lentrepreneuriat,- accrotre limpact conomique de la recherche par le transfert,- accompagner la croissance des entreprises innovantes,- mettre en place les instruments dune politique publique de linnovation.

    Le pralable toutesimplicationouoptimisationdu systme est la mise

    en place des recommandations de notre dernier axe, en particulier une

    gouvernance et une valuation renforces.

    I. Dvelopper la culture de linnovation et delentrepreneuriat

    Linnovation est avant tout une affaire dindividus, de disposition desprit et dambition pourla socit et pour soi. La diffusion des cultures de linnovation et de lentrepreneuriat estdonc fondamentale. Ces cultures sont en effet troitement lies : esprit visionnaire, prise derisque, acception et apprentissage de lchec, capacit dinitiative, culture du projet et volontdaboutissement en sont les principales composantes. Enfin, la capacit crer des entreprises fort potentiel de croissance (spin-off et start-up), dont certaines deviendront des leadersmondiaux, parfois en quelques annes, caractrise un systme dinnovation efficace.

    Recommandation 1 : rviser les mthodes pdagogiques de lenseignementprimaire et secondaire pour dvelopper les initiatives innovantes

    Les mthodes pdagogiques doivent valoriser la prise de risque et dinitiatives, notamment autravers de dmarches projet, seul et en groupe, et de dmarches exprimentales.

    Cette volution de fond, intgrer dans une rflexion explicite sur lensemble des programmes,doit saccompagner de plusieurs lments complmentaires : lapprentissage de la programmation informatique et de langlais, qui sont reconnus au niveau

    international comme des outils essentiels pour le dveloppement de lesprit entrepreneurial,doit tre promu ds le primaire.

    la participation active la vie associative doit tre valorise ds le secondaire. les tmoignages de jeunes entrepreneurs, qui existent dj par le biais dinitiatives

    ponctuelles, doivent tre tendus pour toucher tous les lves.

    le stage en entreprise de troisime doit tre repens autour de la thmatique de lentrepreneuriat.

    Lensemble de ces actions doit donner lieu la mise en place dun programme cohrent surlensemble du cycle ducatif, avec un suivi et une valuation dans une chelle de temps longue.Tout ceci doit tre discut avec les organisations professionnelles sans laccord desquelles rienne pourra se faire.

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    8 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    COLE ET CRATIVIT : LE DCALAGE FRANAIS

    Cration de mini-entreprises lcoleUne Mini-Entreprise ou Jeune Entreprise est une vritable entreprise cre par des lves du secondaire pour une annescolaire, et encadre par un professeur et un conseiller professionnel. La Mini-Entreprise fonctionne sur le modle dune socitanonyme et dveloppe un produit ou un service en vue de sa commercialisation. Les lves, appels Mini-Entrepreneurs, se

    runissent au moins une fois par semaine.

    Lorganisation des Mini-Entreprises et Jeunes Entreprises a t dveloppe par le mouvement Junior Achievement (JA), dpositaire des droits. Une antenne locale (dans chaque pays), reconnue par JA, diuse ces informations. En France,lassociation Entreprendre Pour Apprendre gre ces droits.

    Lactivit de cette association sest dveloppe : plus de 12 000 jeunes impliqus dans 700 mini-entreprises en 2010-2011.Toutefois, elle reste modeste en comparaison avec ses quivalents europens : 1,1 million de jeunes en Russie, 700 000 jeunesen Pologne, 300 000 en Roumanie, 270 000 en Grande-Bretagne. Au total, ce sont 3,1 millions de jeunes qui ont suivi ceprogramme en Europe en 2009-2010, et 10 millions dans le monde, avec un impact prouv sur lentrepreneuriat1.

    Apprentissage de la programmation informatique ds le primaire/secondaire

    Scratch est un langage informatique utilis par plus de 3 millions de projets dans le monde et dvelopp par le groupe Lifelong Kindergarten ( La maternelle tout au long de la vie ) au MIT MediaLab. Scratch est destin lapprentissageludique de linformatique partir de 8 ans. Scratch permet par exemple de crer des dessins anims de manire trs simpleet de modier le code du programme en cours dexcution. Tout ce code est inscrit dans le langage de lenfant sous forme debriques en couleurs (par exemple les variables en rouge, les mouvements en bleu, etc.). De plus en plus utilis aux tats-Unis,lapprentissage de la programmation informatique ds le primaire est encore quasi-inexistant en France.

    Scratch permet de proposer un apprentissage plus concret, fond sur linnovation et tourn vers la crativit. Il sappuie surlapptit des jeunes pour le numrique et permet daccrotre leur intrt pour les sciences et les disciplines scientiques ettechnologiques, qui sont aujourdhui souvent dlaisses alors quelles sont un ressort de la croissance conomique et de lacration demplois.

    Crativit et dcalage de perception franais

    Dans tous les grands pays dvelopps, le systme ducatif est peru comme inhibant la crativit : 59 % des adultes enmoyenne le pensent aux USA, en Grande-Bretagne, en Allemagne, au Japon et en France, sans disparit notable entre pays2.Mais les franais sont ceux qui pensent le moins qutre cratif peut apporter de la valeur leur socit : 53 % y croient contre76 % des amricains par exemple. Et les enseignants en doutent galement : la France est avant-dernire parmi les 27 paysde Union Europenne lorsquon leur demande sils pensent que le dveloppement de la crativit des lves joue un rleimportant dans les programmes scolaires 3. Seuls un peu plus de 30 % le pensent. Et la France se classe mme largementdernire lorsquon demande nos enseignants si la crativit a fait partie de leur formation de formateur : seuls 14 % desenseignants franais rpondent oui, l o la moyenne europenne est 41 %.

    Recommandation 2 : mettre en place un programme de grande ampleurpour lapprentissage de lentrepreneuriat dans lenseignement suprieur

    La dynamique de formation lentrepreneuriat est lance avec les acquis des Ples Entrepreneuriattudiant, mais elle reste souvent de faible ampleur et en marge des formations dispenses, lexception de quelques coles de management. Cette dimension de lenseignement suprieurdoit tre pleinement intgre dans les cursus et mler cours magistraux (comptabilit, droit delentreprise), tmoignages danciens lves ayant fond leur entreprise, et mise en pratiqueau travers de jeux dentreprise ou de montages de projet entrepreneuriaux.

    1 15 20 % des tudiants qui prennent part un programme mini-entreprise au cours du cycle secondaire crent plus tard leur propre

    entreprise, soit 3 5 fois plus que le reste de la population. Business and Education : Powerful Social Innovation Partners , Stanford S ocial

    Innovation Review, C. Jenner, aot 2012.

    2 Source : enqute State of Create Study, 2012

    3 Source : rapport JRC/IPTS Creativity in Schools in Europe , 2009.

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    9LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Des actions complmentaires sont mener, en particulier : la reconnaissance de la formation lentrepreneuriat comme une discipline part entire, la transformation du stage de fin dtudes ou de la fin de la thse en projet entrepreneurial, lacculturation des futurs dcideurs doit tre favorise grce un stage obligatoire en PME

    (en priorit : , coles de commerce et dingnieurs), la gnralisation la formation continue de cette dynamique pour la formation initiale.

    STIMULER LA CULTURE ENTREPRENEURIALE

    La question de la culture entrepreneuriale est majeure pour la capacit dvelopper linnovation. Dans son livre Unpaloanthropologue dans lentreprise Sadapter et innover pour survivre, Pascal Picq dresse ainsi la comparaison entre uneculture darwinienne , propice lentrepreneuriat et linnovation, et une culture lamarckienne , plus propice aux grands projets programms .

    Culture Lamarckienne Culture DarwinienneEurope continentale tats-UnisHirarchie des coles Diversit des excellences Jai fait Polytechnique Jai cr une entreprise

    Uniformit des lites Diversit des litesGrandes entreprises Small Business ActModle de lingnieur Modle du chercheurInnovation dirige Innovation entrepreneurialeCAC40 NASDAQ

    Mme si cette opposition est schmatique, elle permet dillustrer la cohrence des environnements : cest lensemble dunrfrentiel qui permet ou non linnovation dtre favorise, avec un rle central de la culture.

    Recommandation 3 : favoriser lessaimage partir des grands groupes

    Les laboratoires de R&D des grands groupes mettent au point nombre dinnovations potentiellesqui, si elles ne trouvent pas leur place au sein du groupe, sont tues en interne pour des raisonsdallocation des ressources, de march potentiel marginal par rapport lactivit du groupe, outout simplement de non-alignement avec la stratgie du groupe. Lessaimage devrait tre, parconsquent, une voie de ralisation efficace de ces innovations mergentes qui valorise, parailleurs, les porteurs de projets en les installant dans une dmarche entrepreneuriale.

    Des ngociations sont ainsi conduire entre syndicats et patronat pour la mise en place dunepolitique favorisant lessaimage des grands groupes : places dans les incubateurs, salaricontinuant tre pay pendant une dure dtermine pour la maturation du projet de crationdentreprise avec ligibilit au CIR, voire garantie de retour possible en cas dchec.

    Cette nouvelle politique de lessaimage doit tre fonde sur une ambition : la cration dactivitset demplois et non la gestion des restructurations industrielles. Elle doit galement sappuyer surdes outils dimplmentation concrets en mobilisant les dispositifs de transfert et dinnovation.

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    10 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    LE DILEMME DE LINNOVATEUR OU POURQUOI ET COMMENT LINNOVATION ESTUNE DISSIDENCE

    Parce quelle sexprime aux marges , par une prise de risque et dans un contexte de rupture, linnovation est en gnraltroitement lie lentrepreneuriat et auxstart-ups.

    Dans son ouvrage de rfrence (1997) The innovators dilemma. Why new technologies cause great rms to fail, Clayton M.Christensen a montr, par une analyse historique, que les principaux vecteurs dinnovation sont les jeunes entreprisesinnovantes (pour environ trois quarts des innovations technologiques majeures), non pas parce que small is beautiful ,mais parce quelles peuvent/doivent prendre des risques. Les start-ups agissent comme des virus qui propagent linnovationvers les grands groupes tablis (qui se linoculent par acquisition).

    Dans un article rcent de la revue du MIT (The Empire Strikes Back; MIT Tech. Review, fvrier 2012), le mme auteur montreainsi que le rle desstart-ups reste prpondrant mais quil a conduit depuis 30 ans faire voluer les grands groupes pourtre plus actifs en matire dinnovation.

    Recommandation 4 : organiser une politique dattractivit des talents autourde linnovation

    Limmigration des talents est une vritable arme conomique, dont la France se prive alorsquelle est de plus en plus utilise ltranger. Elle permet dlargir le vivier dinnovateurs(chercheurs engags dans une dmarche de transfert, entrepreneurs, professionnels delinnovation et du capital-risque). Aux tats-Unis, elle est lorigine de plus de la moiti des start-ups de la Silicon Valley, et de prs de 25 % des entreprises technologiques cres entre 1995et 2005, soit au total 450 000 emplois en 2005.

    Une politique ambitieuse dimmigration des talents doit tre mise en place pour attirer lesmeilleurs talents entrepreneuriaux et les capitaux-risqueurs. Cette politique doit reposer surdes procdures dimmigration simplifies pour la cible talents et une fiscalit des plus-value

    de cession non dcourageante. Le projet de loi amricain Start-up Act 3.0 traite de ces deuxvolets simultanment.

    Les procdures simplifies pour limmigration des talents doivent tre dmatrialises,sappuyer sur des lettres de recommandation et sur un projet de business-plan dans le casdentrepreneurs. Lanalyse de ces lments devrait tre confie des acteurs de linnovationagrs pour cela par ltat (incubateurs, BPI, laboratoires acadmiques, France Angels).

    Une attention toute particulire doit tre consacre aux tudiants trangers venus en Francepour leur cursus denseignement suprieur, qui bnficient dun enseignement financ surdeniers publics franais, et qui constituent la cible la plus facile retenir.

    Enfin, cela doit saccompagner comme en Isral ou en Chine dune politique plus agressive etplus cible de recherche de comptences trs hauts potentiels faire venir en France (capitaux-risqueurs et chercheurs de renomme mondiale, serial-entrepreneurs). Ces personnesdoivent tre identifies par les acteurs de linnovation en France, et lAFII doit avoir la mission deles dmarcher personnellement, grce une offre globale attractive (moyens ou infrastructuresde recherche, rabais fiscaux personnaliss).

    LA MOBILIT INTERNATIONALE DES TALENTS POUR LINNOVATION

    A linstar des actions ddies lattractivit des talents scientiques (comme le programme chinois 100 talents ), plusieursinitiatives au niveau international visent faire revenir les talents dans leurs pays dorigine, pour irriguer les cosystmes

    innovants, dans un objectif de dveloppement de lactitivit conomique.

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    11LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Lincidence de ces ux pour la dynamique de linnovation a par exemple t dcrite dans The new Argonauts : regionaladvantages in a global economy (2006) o Annalee Saxenian, professeure dconomie Berkeley, tudie le retour descientiques et dentrepreneurs, aprs un passage notamment dans la Silicon Valley, pour contribuer la croissance descosystmes de linnovation de leurs pays dorigine (Bangalore, Hsinchu, Pkin, Shanghai). Louvrage montre en particulierlimpact positif pour linnovation et la croissance conomique de cette circulation des cerveaux.

    Ces nouveaux Argonautes jouent un rle cl dans le dveloppement conomique de ces cosystmes et tout lenjeu estdonc de favoriser leur retour ou dencourager leur maintien dans leur pays daccueil (comme la politique nord-amricainecherche le faire avec linitiativeStartup America, voir lencart ddi).

    II. Accrotre limpact conomique de la recherchepublique par le transfert

    La France dispose dune recherche publique de qualit. Pour bncier

    pleinement au pays, cette recherche doit accrotre son impact conomiquepar la mise en place dune politique volontariste de transfert, dont le caractre

    spcique vis--vis de la recherche doit tre clairement arm.

    QUESTCE QUE LE TRANSFERT ?

    Le transfert est usuellement dni comme leprocessus qui permet de passer dune invention, issue de la recherche publiqueou de la recherche industrielle, linnovation. La problmatique de transfert est donc pose tout autant la recherchepublique (comment avoir un impact conomique de la production de R&D des laboratoires de la recherche publique) qula recherche industrielle (comment avoir un impact conomique de la production de R&D des laboratoires dune entreprise).

    Par extension et dans une acception plus large, le transfert recouvre le transfert des personnes (la mobilit des chercheurs,en premier lieu des doctorants, vers les entreprises), le transfert et le partage des connaissances par les partenariats de R&Dentre recherche publique et entreprises (la recherche partenariale), et, enn, le transfert de technologie proprement parlerpar diusion dans le tissu conomique et cration dentreprises.

    Recommandation 5 : mettre en place le suivi oprationnel des 15 mesurespour une refondation du transfert dans la recherche publique

    Dans le cadre dune communication conjointe avec le Ministre du Redressement productifet la Ministre dlgue, aux PME et lInnovation lconomie numrique, la Ministrede lEnseignement suprieur et de la Recherche a annonc 15 mesures pour le transfert ennovembre 2012, issues, pour une trs large part, des travaux prliminaires du groupe dexpertsmobiliss pour cette mission. La mise en place effective et le suivi dans la dure de ces mesuressont essentiels.

    En particulier, les actions suivantes nous semblent majeures : la raffirmation et la clarification de la mission de transfert de la recherche publique dans le

    Code de la Recherche, la prise en compte du transfert dans lvaluation des carrires des chercheurs, la priorit donne lexploitation industrielle sur le territoire europen de la proprit

    intellectuelle de la recherche publique, la simplification de la gestion de la proprit intellectuelle issue des laboratoires de la

    recherche publique.

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    12 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Les actions ddies la professionnalisation des mtiers du transfert et laugmentation dunombre de professionnels du transfert nous semblent absolument essentielles car le transfertprocde essentiellement dun mtier daccompagnement et de prestations de services hautevaleur ajoute.

    15 MESURES POUR REFONDER LA POLITIQUE DE TRANSFERT DE LA RECHERCHEPUBLIQUE

    La Ministre de lEnseignement suprieur et de la Recherche, Madame Genevive Fioraso, a annonc une refondation de lapolitique de transfert de la recherche publique, loccasion dune communication au conseil des ministres du 7 novembre2012, conjointement avec le Ministre du Redressement productif, Monsieur Arnaud Montebourg, et la Ministre dlgue auxPME, lInnovation et lconomie numrique, Madame Fleur Pellerin. Cette politique est structure autour dun ensemblede 15 orientations, couvrant tous les verrous identis.

    Accompagner les acteurs de la recherche publique dans leur dmarche de transfertMesure 1 : rarmer et clarier la mission de transfert de la recherche publique dans le Code de la Recherche.Mesure 2 : prendre en compte le transfert dans lvaluation des carrires des chercheurs.Mesure 3 : mettre en place un nouvel ensemble dindicateurs pour mieux assurer le suivi dans la dure des activits de

    transfert.Mesure 4 : crer un comit dorientation stratgique pour le transfert au niveau de chaque site.

    Diuser la culture du transfert et de linnovation au sein de la recherche publiqueMesure 5 : crer un cycle de formation des cadres de la recherche publique.Mesure 6 : dvelopper une ore de formations ddies aux mtiers de transfert et crer un diplme spcique.Mesure 7 : mettre en place le suivi obligatoire dun cours ddi linnovation et lentrepreneuriat dans toutes les formationsde lenseignement suprieur.

    Dnir un nouveau cadre de gestion de la proprit intellectuelle par la recherche publiqueMesure 8 : simplier la gestion de la proprit intellectuelle par la recherche publique.Mesure 9 : favoriser lexploitation sur le territoire europen de la proprit intellectuelle de la recherche publique.

    Soutenir le transfert destination des PME/ETI innovantesMesure 10 : soutenir les initiatives en faveur du transfert destination des PME/ETI.Mesure 11 : incorporer un programme PME (laboratoires communs acadmique/PME) et la culture du d dans lesprogrammes de lAgence Nationale de la Recherche.Mesure 12 : augmenter les relations directes entre chercheurs et PME/ETI en crant un rseau social recherche/PME et undispositif facilitant le conseil des chercheurs auprs des PME.Mesure 13 : renforcer linsertion des doctorants dans les PME par le dispositif CIFRE.

    Soutenir le transfert par la cration dentreprisesMesure 14 : mettre en place un programme cohrent de soutien au transfert par la cration dentreprises (sensibilisation,valorisation dans les carrires, incubation, amorage).

    Renforcer la recherche sur lconomie de linnovation en support la politique publiqueMesure 15 : mettre en place un centre de recherche sur lconomie de linnovation, animant la recherche publique dans ledomaine et rservoir dides en support de la politique publique.

    Recommandation 6 : favoriser la mobilit des chercheurs entre public etpriv

    La circulation de lintelligence joue un rle essentiel dans lconomie de linnovation, enparticulier dans le contexte de linnovation ouverte.

    Dans ce contexte, il faut favoriser la mobilit des chercheurs et des entrepreneurs entre le public

    et le priv par la mise en place dun programme ambitieux.

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    13LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Ce programme doit tre global et consolider un ensemble dactions de nature diverse : la mobilit des jeunes chercheurs (dont les doctorants) vers les entreprises, la mobilit des chercheurs confirms vers les entreprises, en veillant la valorisation de

    ces parcours au sein de la recherche publique (il doit y avoir une reconnaissance pour lescarrires),

    la mobilit des chercheurs des entreprises vers les laboratoires publics, en privilgiant des sjours sabbatiques temps plein. Lobjectif est daller au-del de la surface de frottementque constituent les projets de recherche partenariale, la modalit la plus aboutie tant lelaboratoire commun entre une entreprise et un laboratoire de la recherche publique. De telssjours sabbatiques doivent tre financirement soutenus, par exemple via des modalitsspcifiques du CIR. Les problmatiques lies la gestion de la proprit intellectuellegnres par de tels sjours doivent tre rgles en amont.

    Le renforcement du dispositif CIFRE, et son extension ventuelle aux post-doctorants, est considrer dans le cadre de ce programme, avec des modalits dimplmentation prciser.

    Loprateur de gestion de lensemble de ce programme doit tre le Ministre de lEnseignement

    suprieur et de la Recherche.

    UN EXEMPLE DE DISPOSITIF RELEVANT DUNE POLITIQUE DE MOBILIT : LESCIFRE.

    Le dispositif CIFRE, qui existe depuis plus de trente ans, a deux types dobjectifs : favoriser les changes entre les laboratoiresde recherche publique et les milieux socio-conomiques et contribuer lemploi des docteurs dans les entreprises.

    Le doctorant et le projet de thse organisent un cadre de coopration entre le laboratoire acadmique et lentreprise. Lesmodalits de la coopration sont cependant trs variables, notamment en fonction de la demande de lentreprise partenaire.Ainsi, le doctorant peut passer une part trs variable de son temps dans lentreprise et donc dans le laboratoire acadmiquedaccueil. La nature du sujet de thse et le rle du doctorant dans lentreprise sont aussi variables.

    Le taux dinsertion dans les entreprises des docteurs CIFRE est trs lev, et ce rapidement aprs la thse.

    Ce dispositif, port par un oprateur spcique, lAssociation Nationale de Recherche Technologique, rpond ces objectifs,mais apparat comme isol en labsence dun programme global ddi la mobilit.

    Recommandation 7 : mettre en place un programme cohrent en faveur dutransfert par la cration dentreprise

    LE RLE DESSTARTUPSDANS LA CRATION DEMPLOIS AUX TATSUNISET LINITIATIVESTARTUP AMERICA

    Chaque pays a ses spcicits, mais il est intressant dtudier le rle que jouent lesstart-ups dans la cration nette demploisaux tats-Unis.

    Une tude rcente (The importance of startups in job creation and job destruction, 2010, Kauman Foundation) documentelimpact des start-ups sur lconomie amricaine sur une longue priode (1992-2005). Elle conclut une cration nette deprs de 3 millions demplois par an sur cette priode, ce qui permet de compenser les pertes nettes demplois des entreprisesexistantes.

    Dans ce contexte, lAdministration Obama a engag une politique trs volontariste en faveur de la cration dentreprise,notamment avec linitiative Startup America qui couvre un large spectre dactions : renforcement de lenseignementscientique dans le secondaire et les universits, facilitation de laccs au capital pour les jeunes entrepreneurs, mesuresscales, green card pour les entrepreneurs trangers, formation lentrepreneuriat des ingnieurs ( Science Talent

    Expansion Program conjoint entre la NSF et Stanford), accompagnement des entrepreneurs (cration dun programme Innovation corps de type mentorat), etc.

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    14 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Une autre caractristique notable de cette initiative est lengagement des entreprises dans le cadre dun partenariat public-priv, par exemple avec la cration de fonds dinvestissement.

    Partout dans le monde, la croissance et la cration demplois sont majoritairement dterminespar de jeunes entreprises fondant leur dveloppement sur linnovation. Dans ce contexte, la

    cration dentreprises innovantes est un enjeu majeur, articuler avec une politique ambitieuseen faveur du soutien la croissance de ces entreprises (recommandations 10 et 11).

    En prenant en compte le diagnostic qui vient dtre ralis par la Cour des Comptes sur lacration dentreprises, la mise en place dun programme cohrent permettra de consoliderun ensemble dactions qui sont actuellement parses et rgulirement remises en cause carconsidres comme des variables dajustement budgtaire :

    une nouvelle dynamique doit tre impulse pour le concours national de crationdentreprises de technologies innovantes, par laugmentation de son volume, par limplicationplus forte des rgions, par louverture de nouvelles sections (ddies aux tudiants et aux

    projets jouets issus du systme ducatif). il convient de crer une bourse pour le crateur de start-up sous la forme dune avanceremboursable pour viter la logique dassistanat, en consolidant les diffrentes aidesactuelles, et en mobilisant financements nationaux et rgionaux.

    en coordination avec les rgions, les incubateurs doivent tre renforcs, en capitalisant surles quipes qui ont montr leur expertise en matire daccompagnement, en recherchantla taille critique, en crant des antennes des incubateurs existants et ventuellement denouveaux incubateurs pour tre au plus prs des porteurs, en augmentant le nombrede places disponibles. Le modle conomique des incubateurs doit tre prcis dans cecadre, en prenant en compte, selon les situations rgionales, larticulation avec les SATT(recommandation 8).

    par ailleurs, il convient de dvelopper, au sein des cosystmes et en particulier des

    dispositifs de financement, une pratique de laccompagnement qui renonce la tentation del acharnement thrapeutique .

    En parallle, les dmarches des chercheurs et des enseignants-chercheurs pour la crationdentreprises doivent tre simplifies grce llaboration de chartes dtablissement traitant desconflits dintrt lis au transfert et rendant facultatif le passage en commission de dontologielorsque de telles chartes existent.

    La consolidation dun programme cohrent en faveur du transfert par la cration dentreprisepermettra de dfinir des indicateurs globaux de performance et darticuler de manire plusefficace la cration dentreprises innovantes avec les mesures en faveur de leur croissance

    (recommandation 10 et 11).

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    15LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Recommandation 8 : focaliser les SATT sur la maturation

    LINDISPENSABLE DFINITION DUN RFRENTIEL PARTAGDES MTIERS DU TRANSFERT

    Dnir un rfrentiel partag des mtiers du transfert est un pralable la ncessaire professionnalisation et lareconnaissance de ces mtiers, qui exigent des comptences rares.

    Le rfrentiel qui suit est donn titre dillustration. La numrotation utilise nest en aucun cas lie une description linairedes processus.

    Stimulation du transfert : de la sensibilisation la dtection.

    Lenjeu est de faire voluer le logiciel de pense des chercheurs publics an de faire merger une culture du transfert etde linnovation (essentiellement dpasser les logiques de R&D, techno-push ), dtecter et identier des possibles projetsde transfert et assurer de bonnes conditions pour leur dveloppement ultrieur. Ces actions sont le socle de toute politiquede transfert.

    (A1) : sensibiliser les chercheurs une logique de demande, eectuer des actions de veille, dvelopper la culture de laproprit intellectuelle, promouvoir lesprit dentrepreneuriat.(A2) : cartographier lore (comptences/patrimoine technologique) au sein de la recherche publique.(A3) : promouvoir lore auprs du monde industriel.(A4) : identier la demande et dtecter des opportunits via limplication dans les cosystmes.(A5) : procder une analyse stratgique en adaptant lore la demande.(A6) : protger au stade le plus prcoce et durant les phases initiales les inventions dtectes, en lien troit avec les dynamiquesscientiques et dans une logique de constitution de portefeuilles stratgiques dactifs.

    Ingnierie du transfert : construire les projets, en valuer lopportunit, les piloter suivant une logiquemarch, les suivre dans la dure

    (B1) : identier, co-concevoir avec les porteurs et accompagner les projets de transfert.

    (B2) : accompagner et nancer la cration des entreprises de technologie innovante (dont celles issues de la recherchepublique), lors de la toute premire phase de leur existence (pr-amorage et amorage ; nancement dirig vers lentreprisecre).

    Ces deux activits recouvrent ce qui est habituellement dsign respectivement comme la maturation et lincubation.Dans le cas du transfert par cration dentreprise, ces deux activits ont logiquement des recouvrements, la dirence sefaisant essentiellement sur deux points :- dans le cas de la maturation, les nancements ventuels sont dirigs vers des laboratoires de la recherche publique, tandisque dans celui de lincubation, ils sont dirigs vers lentreprise cre.- la modalit de transfert nest pas dtermine a priori lors de la maturation.

    Ces activits sont en gnral couvertes par ce qui est communment dsign au niveau international comme un TTO

    (Technology Transfer Oce). ces activits qui relvent du transfert proprement parler, on ajoute parfois des activits relevant de la gestion de larecherche partenariale, au risque dalimenter la confusion. Pour marquer cette dirence, on parle souvent de KTO (KnowledgeTransfer Oce)1 au niveau international.

    Ingnierie de la recherche partenariale : monter les projets de recherche partenariale, ngocier et grer lescontrats associs, les suivre dans la dure.

    1 Rapport IP/A/STOA/FWC/2008-096, novembre 2012 du Parlement Europen, Science and Technology Options Assessment : Knowledge

    Transfer From Public Research Organisations .

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    16 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    (C1) : aider au montage des projets de partenariat, dont les projets de recherche collaborative avec les industriels (par exempleANR, FUI, Europe), en veillant aux engagements des actifs de PI. Cette activit sappuie souvent sur les dispositifs danimationdes cosystmes.(C2) : ngocier les contrats de recherche bilatrale avec les industriels, dans le cadre de la politique PI des tablissementspublics, pour garantir la cohrence avec les ventuels projets de transfert.(C3) : suivre dans la dure les projets de recherche partenariale, au regard des opportunits de transfert technologique.

    Le dernier point est essentiel pour garantir un impact possible et matris de la recherche partenariale en matire de transfert.Ce maillon est reconnu comme tant le maillon faible des projets de recherche partenariale et est indiqu ici titre largementthorique.

    La mutualisation des activits de transfert entre acteurs de lenseignement suprieur et de larecherche sur un territoire doit tre conforte car la masse critique et le professionnalisme des

    quipes en charge du transfert en dterminent lefficacit. La mise en place des SATT contribue

    cette dynamique de mutualisation.

    Lobjectif initial des SATT tait de soutenir la maturation. Bien quissus dun mme cahier des

    charges, les modles de SATT actuellement cres prsentent nanmoins une forte dispersion

    de leurs activits, qui ne sont pas de ce fait focalises sur la maturation. Comme la maturation estidentifie comme une tape cruciale pour le transfert, il est essentiel, et ce avant la fin 2013, de

    recentrer les SATT actuelles et futures sur la maturation, avant que les modes de fonctionnement

    et les quipes ne soient figs.

    Ceci passe par les actions suivantes :

    la refocalisation sur le mtier de maturation, qui reste largement acqurir en interne :

    finalisation de la preuve de concept et approche du march. Cette action doit saccompagner

    de la dfinition claire dun rfrentiel du transfert dfinissant ce que dsigne exactement

    la maturation. En particulier, le soutien direct la recherche et la gestion de recherche

    collaborative ne peuvent tre financs dans le cadre de la maturation. Le financement de la

    protection industrielle initiale (premire demande de brevet prioritaire) pour des projets nedonnant pas lieu une maturation doit tre assur dans une logique dauto-financement,

    grce aux ressources que les actionnaires acadmiques des SATT se sont engags transfrer

    aux SATT (notamment budgets de protection industrielle).

    la priorit donne au transfert par la cration dentreprise (en cohrence avec la

    recommandation 7) : les projets de cration dentreprise sont en effet un moyen efficace

    de se confronter lensemble des enjeux non technologiques et non scientifiques ( tester

    le march ), mme si lissue nest pas ncessairement une cration dentreprise, la sortie

    pouvant tre un rachat par une entreprise existante. Cette priorit doit se concrtiser par un

    plus grand nombre de projets donnant lieu incubation.

    la sparation formelle des mtiers entre une structure de montage et daccompagnement

    des projets, et un fonds de maturation.

    la dfinition de la doctrine dintervention du fonds de maturation qui doit investir dansdes projets en phase de maturation, soumis naturellement par la structure associe mais

    galement par dautres acteurs, dont les incubateurs. Au sein de la gouvernance du fonds de

    maturation, le principe de lintervention de personnalits qualifies indpendantes (sous la

    forme dun comit dinvestissement) doit tre confirm avant toute dcision dinvestissement

    des actionnaires.

    limplication des rgions dans le fonds de maturation.

    la clarification des articulations en premier lieu avec les incubateurs, plus gnralement

    avec lensemble des acteurs de son cosystme, dont les ples de comptitivit et les autres

    structures rgionales actives dans le domaine de linnovation.

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    17LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Lvolution propose revient donc mettre rellement la maturation au cur de lactivit desSATT. Les activits de mutualisation et de services (gestion des contrats, gestion dune PI nonlie des programmes de maturation), doivent rester des activits secondaires, relevant de ladmarche volontaire des bnficiaires des services, dans une logique dautofinancement assurpar les ressources des actionnaires acadmiques des SATT.

    Cette volution va permettre de passer dune logique dquilibre conomique (dont le retourdexprience international montre quil nest pas crdible) une logique dinvestissement dansle cadre dune politique publique assumant les risques initiaux lis linnovation, lenjeu tantla reconstitution terme du fonds de maturation.

    Recommandation 9 : mettre en place une politique cohrente de recherchepartenariale public-priv, en regroupant les diffrentes politiquesaujourdhui parpilles

    SYNTHSE DE LA MISSION IGFIGAENRCGEIET SUR LA RECHERCHE PARTENARIALE

    En novembre 2012, une mission a t cone par la Ministre de lEnseignement suprieur et de la Recherche et le Ministre delconomie et des Finances lInspection gnrale des Finances (IGF), lInspection gnrale de lAdministration de lducationnationale et de la Recherche (IGAENR) et au Conseil gnral de lconomie, de lIndustrie, de lnergie et des Technologies(CGEIET). Lobjet de la mission tait une analyse de la situation en France de la recherche partenariale, dnie comme lensembledes projets de R&D mens conjointement par la recherche publique et les entreprises. Cette mission sest galement appuyesur un travail ralis par les conseillers scientiques ltranger an davoir une comparaison internationale.

    La synthse de la mission, prsente en fvrier 2013, apporte un clairage trs instructif :- lensemble des dispositifs concerns (en particulier les nombreux programmes de recherche collaborative) sont diciles consolider,- les volumes de nancement sont importants : de 4 5 milliards deuros sont ainsi mobiliss par lensemble des acteurs(laboratoires de recherche publique, entreprises, nanceurs publics rgions, tat, Europe-), avec un nancement de lordre

    de 75 % sur fonds publics,- en euros constants, le nancement priv de la recherche contractuelle par les entreprises (contrats bilatraux avec larecherche publique) stagne depuis une dizaine dannes (de lordre de 700 millions deuros 2010),- la France se distingue dans le paysage international par le fort accent mis sur la recherche multi-latrale nance sur fondspublics,- de manire gnrale, cet eort, dont limportance justie quune vritable politique publique lui soit ddie, ne donnelieu ni un pilotage stratgique, ni une consolidation des moyens consacrs, ni une valuation notamment en matiredimpact conomique.

    Les conclusions de ce travail sont donnes sous la forme de 9 propositions, reprises in extenso ci-dessous :

    Proposition n 1 : Reconnatre lenjeu central reprsent par la recherche partenariale pour les acteurs publics et privs eninstaurant, au sein de la stratgie nationale de recherche, un volet consacr la stratgie en matire de recherche partenariale

    au sein dun nouveau chapitre de valorisation.

    Proposition n 2 : Assurer une mise en uvre eective de la stratgie de recherche partenariale, notamment en termesde choix des dispositifs prioritaires et de suppression des dispositifs obsoltes, par un ministre en charge de la recherchepositionn comme chef de le, ou dfaut par une instance interministrielle anime par le ministre en charge de larecherche.

    Proposition n 3 : Structurer la dnition dindicateurs et la consolidation de donnes permettant de mesurer les rsultatsde la politique de recherche partenariale.

    Proposition n 4 : Accorder une attention spcique la stabilit et la simplicit des rgles dans la mise en uvre de lastratgie de recherche partenariale.

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    18 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Proposition n 5: Engager lexercice de simplication des dispositifs en explicitant les priorits de ltat par rapport auxtrois questions suivantes : sur quel(s) niveau(x) de maturit technologique souhaite t-on promouvoir les partenariats public-priv ? A quel type dacteur la recherche partenariale sadresse t-elle ? Dans quelle mesure souhaite t-on privilgier certainesorientations thmatiques ?

    Proposition n 6 : Coner la gestion oprationnelle de lensemble des dispositifs de soutien la recherche partenariale un

    oprateur unique.

    Proposition n 7 : Coner cet oprateur unique la mission dengager lharmonisation des rgles de slection et de gestiondes dirents dispositifs incitatifs la recherche partenariale, avec une attention particulire porte la communication et la simplicit dutilisation pour les usagers.

    Proposition n 8 : Explorer plus spciquement la pertinence dune harmonisation de lensemble des dispositifs sur lesrgles de gestion communautaires.

    Proposition n 9 : Explorer la faisabilit de lattribution Oso Innovation de la mission de gestion oprationnelle desincitations la recherche partenariale.

    Cette recommandation est directement issue des travaux mens par la mission IGF-IGAENR-CGEIET

    sur le sujet de la recherche partenariale.

    Pendant trs longtemps, la recherche publique franaise, en particulier dans ses aspects lesplus fondamentaux, a ignor le monde industriel et a rejet toute forme de collaborationavec le secteur priv au nom de grands principes . Les rares collaborations taient pourlessentiel destines boucler les budgets annuels des laboratoires. Lintrt stratgique detelles collaborations, en terme de comptitivit, de croissance et demplois, seffaait derrireles principes idologiques de sparation entre argent sale et argent propre .

    Cest en 1981 que les premires volutions se sont opres et que le monde de la recherche apris en compte sa responsabilit conomique et sociale. Au refus sans nuance sest substitu

    un principe dgalit de droits et de devoirs entre deux mondes aux motivations videmmentdiffrentes.

    Les rponses nombreuses et de qualit lappel doffres initial sur les ples de comptitivit,lancs en 2004, a dmontr, sil le fallait, les changements profonds qui staient oprs en prsde 30 ans.

    Ces changements, nous les devons en grande partie des politiques volontaristes menes par lesgouvernements successifs qui visaient rapprocher les recherches acadmique et industrielle.Cette recherche, partenariale, collaborative, contractuelle, selon les cas, a donn naissance dinnombrables soutiens, actions et structures, tous destins combler le foss et franchir les

    obstacles qui sparaient ces deux mondes.

    Les bnfices attendus sont vidents : linterfcondation des deux ensembles accrot leur qualit respective, une meilleure connaissance mutuelle permet de mieux se comprendre et dajuster finement

    les politiques, le transfert est videmment facilit et cela dans les deux sens, ce quon oublie souvent (par

    exemple, la culture industrielle a t pour beaucoup dans la naissance de la biologie grandechelle en France et dans le monde).

    La France sest ainsi singularise au niveau international par un dveloppement importantde programmes de soutien la recherche collaborative et ce, encore rcemment, par les

    investissements davenir (IRT, IEED, etc.). Un rapport rcent trs complet, command par ltat

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    19LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    lIGF, lIGAENR et au CGEIET, tablit un bilan trs riche et nuanc de cette politique laquelle

    la France consacre prs de 10 % de la dpense intrieure de R&D (plus de 4 milliards deuros

    financs pour prs des trois quarts par le public).

    Sur la base de ce diagnostic, nos propositions en faveur de la recherche partenariale sont les

    suivantes :

    la mise en place dune stratgie et dun pilotage consolids au niveau interministriel, dans

    le cadre de la vision globale donne par lAgenda stratgique de la recherche, croise avec la

    stratgie nationale de linnovation telle que dfinie dans la recommandation 17,

    la dfinition dun oprateur unique de gestion, la partie innovation de la BPI, mme

    dharmoniser lensemble des procdures et de garantir une consolidation de lensemble des

    moyens publics, en cohrence avec la recommandation 18,

    la simplification des dispositifs, une fois les deux points prcdents mis en uvre.

    III. Accompagner la croissance des entreprises

    innovantesLe soutien la croissance des entreprises innovantes est videmment un maillon

    crucial de la chane de linnovation. Nous avons choisi dans la suite de ne pas

    traiter de la question de la scalit, dont nous avons considr quelle ne rentrait

    pas dans le strict cadre de notre mission. Nanmoins, nous tenons armer quil

    est indispensable que la scalit franaise ne pnalise pas les investissements

    dans les PME innovantes, la mobilit internationale des talents et des capitaux

    tant dsormais trs importante.

    Recommandation 10 : combler le manque de financement en fonds propresdes entreprises innovantes (capital-risque et capital-dveloppementtechnologique) en mobilisant une faible part de lpargne des franais et enamliorant les stratgies de sortie possibles pour les investisseurs sur cessegments

    QUELQUES CHIFFRES SUR LE CAPITALINVESTISSEMENT FRANAIS

    Le capital-innovation (capital-risque et capital-dveloppement technologique) nest quun segment du capital-investissement.

    Daprs les donnes de lAFIC (Association franaise des investisseurs pour la croissance), le capital-investissementaccompagne 1 694 entreprises en France en 2011, parmi lesquelles plus de 25 % taient des entreprises innovantes ou enphase de cration. Pour mmoire, sur la priode 2007-2010, 3.2 milliards deuros ont t investis dans plus de 500 entreprisesindustrielles. 83 % des entreprises accompagnes taient en 2011 des PME.

    La performance des entreprises accompagnes par le capital-investissement est suprieure celle de lensemble des autresentreprises : ainsi, en 2010, les entreprises accompagnes ont eu une croissance de 4.2 % de leur eectif (contre 0.8 % pourlensemble du secteur marchand franais) et de 8.9 % de leur chire daaires (contre 3.2 % de lensemble des PME franaises).

    Dans le mme temps, les acteurs du capital investissement connaissent des dicults lever des fonds avec un dcitcumul entre les montants investis et les montants levs qui se creuse (5.7 milliards deuros entre 2009 et la n du premiersemestre 2012). Par exemple, en 2011, prs de 10 milliards deuros ont t investis par le capital investissement contre prs

    de 6.5 milliards deuros levs.

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    20 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Si les besoins en amorage sont aujourdhui relativement bien couverts (notamment laidede linvestissement public dans le cadre du Fonds National dAmorage), le capital-risque restetrop faible et davenir incertain, alors que le capital-dveloppement technologique, capabledinvestir de gros montants unitaires comme aux tats-Unis, est quasiment inexistant.

    La consquence logique en est que les entreprises innovantes franaises qui russissent sontrachetes par ltranger ds quelles entrent dans la phase la plus intressante (et souvent lamoins risque) en matire de croissance et demplois. En effet, elles ont besoin dinvestissementssuprieurs 50 millions deuros pour financer leur croissance, ce qui est impossible trouveren France, o les fonds de capital-dveloppement sont de taille trop faible pour investir desmontants unitaires suffisants. La croissance conomique et les emplois gnrs se font donc ltranger, avec transfert du potentiel de recherche, alors que ces entreprises ont vu le jour enFrance et ont t soutenues par des aides publiques linnovation franaises.

    Il manque 2 milliards deuros par an pour financer la croissance de ces entreprises innovantes.La collecte annuelle de lassurance-vie reprsente 100 120 milliards deuros, pour lesquels lespargnants franais bnficient dun avantage fiscal sans quil leur soit demand dinvestir cet

    argent de manire risque, puisque tout peut aller vers les fonds en euros capital et intrtsminimaux garantis.

    Nous proposons quen change de lavantage fiscal accord aux pargnants franais, 2 % deleur argent pargn chaque anne (en flux et non en stock) soit investi dans les entreprisesinnovantes en France, pour permettre de gnrer la croissance conomique et les emploisdont notre pays a besoin. Ces 2 % doivent tre mis en regard des 3 4 % de frais de gestionclassiquement prlevs par les assureurs sur la collecte.

    Oprationnellement, pour permettre la constitution de fonds de taille importante, nousproposons que ces 2 % de la collecte des contrats dassurance-vie soient flchs en unitde compte vers des fonds de fonds grs par la BPI, qui aura pour mission de participer laconstitution de fonds de capital-innovation de grande taille (plusieurs centaines de millionsdeuros), qui seuls seront mme dassurer les besoins de financement des entreprise decroissance innovantes, en sappuyant sur des quipes de gestion de fonds professionnelles etprives.

    Ces investissements doivent saccompagner dun amnagement de possibilits de sorties desinvestisseurs sans vente des entreprises ltranger, en favorisant et facilitant les introductionsen bourse des petits et moyens metteurs.

    Recommandation 11 : lancer des initiatives sectorielles early stage

    Le secteur de learly stage reste un segment critique et des initiatives sectorielles devraient treengages dans des domaines en mergence : par exemple les biotech, medtech, cleantech, bigdata

    Afin de tenir compte du niveau de risque li learly stage, nous rappelons que des conditionsfiscales spcifiques diffrenties (lors des investissements et lors des sorties) doivent tre misesen uvre.

    En effet, les temps de cycle de maturation sont diffrents et doivent tre intgrs en termes demontants et de calendrier de dploiement du capital.

    La construction de ces fonds cibls passe ventuellement par le recrutement dquipes identifier ltranger (recommandation 4), afin de bnficier dune expertise pointue.

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    21LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Des initiatives permettant de stabiliser sur le long terme linvestissement des grands groupesdans learly stage au travers de fonds de fonds et au travers du corporate venture doiventgalement tre engages.

    Recommandation 12 : mettre en place les instruments dune politique de

    protection (PI, normalisation) au service des entreprises innovantesLa politique de protection des droits est devenue un dterminant stratgique majeur de

    la capacit dun pays disposer dune politique efficace en faveur de linnovation. Nous

    prconisons dans ce cadre trois actions :

    a) la simplification des rgles de gestion de la proprit intellectuelle dans la recherche

    publique doit tre poursuivie, au bnfice des entreprises innovantes (en cohrence avec la

    recommandation 5).

    ce jour, la gestion de la multiproprit de la PI de la recherche publique reste un handicappour notre pays, car la situation existante se caractrise par une dpense dnergie extravagante

    au regard des rsultats de la valorisation de la recherche publique : les entreprises innovantes enpaient les consquences et ce nest plus acceptable.

    Sur la base de ce diagnostic, nous prconisons quau moment de la cration ou durenouvellement dune unit de recherche multitutelles, un accord soit sign affirmant leprincipe dune multiproprit de la PI incluant toutes les tutelles fondatrices. Il peut tre

    ajout, le cas chant, et au cas par cas, dautres entits pouvant jouer un rle important dans

    la PI dune unit particulire (exemple de lhpital pour les units de recherche clinique).

    Le partage des droits entre propritaires sera de mme dfini ce stade et doit obir des

    rgles simples : soit une qui-rpartition entre tutelles, soit une rpartition prenant en compte

    les forces respectives des tutelles mais ceci doit tre fix ex ante. De mme, dans cet accord,un titulaire gestionnaire unique des droits de lensemble de la PI gnre au sein de lunit sera

    dfini pour la dure de vie du contrat de lunit (5 ans en gnral), de manire spcifique

    lunit. Cette dsignation sera accompagne de garanties claires quant au retour financier vers

    les tutelles, lintressement des inventeurs et au processus de suivi. Le titulaire gestionnaire

    unique doit avoir toute libert pour ngocier la PI au cours du mandat de lunit. La liste

    des inventeurs est fixe pour chaque activit inventive (brevet ou logiciel) par le directeur de

    lunit et en cas de conflit, tranche par le titulaire des droits. En pratique, aprs le dpt des

    actifs immatriels, les tutelles copropritaires sengageront cder au titulaire unique tous

    leurs droits.

    Par ailleurs, nous recommandons

    la clarification des modalits de calcul de lintressement des inventeurs publics, lorientation dune plus large part des revenus de PI vers le laboratoire dont elle est issue,

    la cration dun mdiateur de la PI entre la recherche publique et les entreprises, en

    particulier les PME et ETI.

    Dans le cas de brevets impliquant plusieurs units, les titulaires des droits de chacune des units

    saccorderont pour dsigner lun dentre eux comme seul titulaire de la PI pour ce brevet.

    b) Un deuxime volet de cette politique doit conforter une volution de France Brevets au

    service de la stratgie dinnovation, en constituant un fonds souverain de la PI. Ce fonds

    souverain doit notamment tre en mesure de participer la dfense dune PME dans le cadre

    dun contentieux linternational.

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    22 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    c) Enfin, une politique plus dynamique en matire de normalisation doit tre mise en place : la

    sensibilisation la normalisation, au sein des PME et des laboratoires de la recherche publique,

    et la mise en place dun NIST la franaise doivent tre les pierres dangle de cette politique.

    QUELQUES LMENTS CHIFFRS SUR LES BREVETS

    La proprit intellectuelle ne se rsume pas aux seuls brevets, en particulier avec le rle croissant des logiciels et des marques.Les brevets sont nanmoins un bon indicateur du dynamisme dun pays en matire de PI.

    Selon les chires 2012 de lObservatoire de la PI (opr par lInstitut National de la Proprit Industrielle), la France reste enretard en matire de sensibilisation la PI. Ainsi, la France est 4e en matire de dpt de brevets europens et 6e pour lesdpts par voie internationale (PCT), derrire les tats-Unis, le Japon, lAllemagne et dsormais la Chine et la Core. Cetteplace est comparer celle de la France pour la dpense de R&D (4e). La comparaison avec lAllemagne est clairante :en 2010, la France reprsente 16.4 % de leort de R&D europen (lAllemagne 28.3 %) mais 14 % des brevets europens(lAllemagne 39.9 %).

    En 2010, les cinq premiers dposants de brevets franais sont des entreprises, respectivement PSA (1 247 brevets), EADS (dontAirbus, 1 160 brevets), Alcatel-Lucent (944 brevets), Technicolor (757 brevets) et Renault (604 brevets).

    La recherche publique franaise compte des acteurs dposant un grand nombre de brevets : le CEA la 7e place (534 brevets),le CNRS la 8e place (486 brevets) et enn lIFPEN la 20e place (181 brevets). Parmi les 10 814 demandes de brevetseectues par des personnalits morales franaises en 2011, prs de 12.1 % sont le fait dacteurs de la recherche publique.Ces dpts se caractrisent par une trs forte proportion de coproprit : alors que 8 % de lensemble des brevets sont encoproprit, cette proportion monte 26 % pour les brevets dposs par les acteurs de la recherche publique.

    Recommandation 13 : harmoniser les diffrents labels et qualificationsdentreprises innovantes pour plus de lisibilit et les inscrire dans unparcours jalonn daccompagnement vers la croissance, alignant demanire cohrente lensemble des outils de soutien disponibles

    Les labels dentreprises innovantes (FCPI, OSEO Excellence, Entreprises Innovantes des

    Ples, ) guident investisseurs et acheteurs. Une harmonisation des nombreux labels et des

    qualifications donnant droit des avantages fiscaux et sociaux (Jeune Entreprise Innovante) en

    amliorera la lisibilit et profitera aux entreprises innovantes.

    Cette action doit saccompagner en parallle de la dfinition dun parcours jalonn vers

    la croissance, avec lalignement de tous les outils disponibles au bnfice des entreprises

    innovantes rentrant dans ce parcours. La dfinition dun tel parcours doit par ailleurs permettre

    de cesser l acharnement thrapeutique qui est parfois mis en uvre, lobjectif global

    poursuivi tant de favoriser lmergence de leaders internationaux.

    La mise en place de structures spcialises daccompagnement (ou leur renforcement) tout aulong de ce parcours, doit tre une ambition des cosystmes.

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    23LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Recommandation 14 : inciter les grands groupes et les grandstablissements publics simpliquer dans lmergence et la croissance desentreprises innovantes, en intgrant de nouvelles dimensions dans leurobligation de publication de RSE

    PASSER DES COLLABORATIONS DE R&D ENTRE GRANDS GROUPES INTGRATEURSET PME TECHNOLOGIQUES AU RENFORCEMENT DE LA COMMANDE PRIVE

    Les ples de comptitivit ont permis la cration dcosystmes o se croisent les acteurs du monde conomique, ceux dela recherche et de la formation au sein des grandes lires industrielles. Il en a rsult des centaines de projets de recherchecollaboratifs. Ce mode de fonctionnement est dsormais totalement adopt et a rellement permis de casser les barriresentre tous ces acteurs. Les PME et les chercheurs se ctoient et se comprennent mieux, les responsables R&D des grandsgroupes discutent facilement avec les dirigeants de PME innovantes.

    Cette communaut constitue dhommes et de femmes qui ont construit une conance rciproque autour de projetstechniques ne rend malheureusement pas plus faciles les relations contractuelles qui pourraient sensuivre. Les PMEpeinent souvent franchir la barrire de slection des achats des grandes entreprises, mme si lexprience mene au sein

    dun consortium prouve que les produits et lquipe sont dignes de conance. Dun autre ct, les grands groupes sont la recherche de technologies de ruptures et sont friands de lagilit oerte par les PME. Le processus dinnovation nest enconsquence pas abouti, alors quil faut permettre que ce tissu conomique form par les PME innovantes puisse trouver desclients qui lentranent vers une ncessaire croissance.

    Limplication des grands groupes dans le soutien lmergence et la croissance dentreprisesinnovantes dans leur cosystme est un enjeu majeur. Afin de renforcer cette dynamique,nous proposons lajout aux obligations de publication de Responsabilit Socitale etEnvironnementale (RSE) de toute entreprise de plus de 2 000 salaris, de critres ou dindicateursde comportement vis--vis des PME innovantes, pour permettre une incitation interne forte surles cadres dirigeants et suprieurs.

    titre dexemple, les diffrents volets suivants devraient tre prciss : la simplicit de laccs pour les PME innovantes aux axes dinnovation du groupe, le soutien la cration dentreprises innovantes, que ce soit par lessaimage ou la premire

    commande, linvestissement dans des fonds de capital-risque et/ou de capital-dveloppement

    technologique, lintgration des PME dans les projets de R&D, le soutien lexport de PME de lcosystme, la publicit des dlais de paiement envers les PME, la rpercussion aux sous-traitants des conditions obtenues dans les contrats tatiques, lidentification des PME championnes que le groupe souhaite soutenir, et la mise en place

    dun plan ddi, la nomination dun mdiateur interne au groupe, haut plac et non issu de la R&D, pour

    faciliter le passage de la relation R&D la relation achat.

    Cette liste doit tre discute et valide par les syndicats professionnels reprsentatifs de filires,dans le cadre dun calendrier ambitieux, si possible avant fin 2014.

    Lensemble de ces lments peuvent constituer un levier dune ventuelle conditionnalitdune partie du CIR ou faire partie de la dclaration de CIR avec un principe de communication.

    Comme le secteur public doit donner lexemple, cette disposition est tendre aux grandstablissements publics, avec des modalits appropries prciser.

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    24 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    IV. Mettre en place les instruments dune politiquepublique de linnovation

    Linnovation doit tre vraiment au cur de la stratgie de ltat en faveur de la comptitivit, de

    la croissance et des emplois. Il ne sagit pas de jouer sur des paramtres ou dadopter quelquesmesures, aussi emblmatiques soient-elles, mais de concevoir un nouveau cadre stratgique.

    Ceci exige llaboration dune vritable politique dinnovation qui : couvre de manire transversale plusieurs dimensions : de la recherche au financement des

    entreprises, en passant par les politiques dducation, dimmigration, de fiscalit ou encorede proprit intellectuelle,

    associe la fois une approche globale et territoriale, value au regard de limpact conomique, simplifie, innove en permanence.

    Recommandation 15 : reconnatre le rle des cosystmes dinnovationmtropolitains comme points dappui des stratgies rgionales et de lastratgie nationale dinnovation

    LA DYNAMIQUE DES COSYSTMES INNOVANTS

    Partout dans le monde, linnovation est stimule au sein de rseaux dacteurs fdrant la formation, la recherche, de jeunesentreprises croissance rapide (start-up), des entreprises de services, des grands groupes engags dans une politiqued innovation ouverte , les professionnels de laccompagnement et du nancement de linnovation, et parfois lhpital.

    Les exemples les plus emblmatiques sont bien sr la Silicon Valley, la rgion de Boston ou encore Isral (autour de quelquesuniversits technologiques comme, titre dexemple, le Technion). En Europe, les tats ont commenc depuis une dizainedannes mettre en place une politique de clusters : ples de comptitivit en France (en complment de clusters djexistants de manire variable selon les rgions), avec un focus sur la dimension de la R&D collaborative, plus rcemment miseen avant dun nombre restreint deSpitzenclusterde niveau mondial en Allemagne, etc.

    Lecacit de ces rseaux repose sur la uidit et la rapidit de la circulation des actifs de linnovation : comptences(personnes), technologies, infrastructures, services, nancement. Les critres de russite commencent tre largementreconnus. Par exemple, dans Understanding Silicon Valley, the Anatomy of an Entrepreneurial Region (Martin Kenney, StanfordUniversity Press, 2000), les ingrdients indispensables sont : la prsence duniversits et de centres de recherche haut de gamme, une industrie du capitalrisque, permettant dagrger nanciers institutionnels et investisseurs privs, une ore sophistique de services pour les entrepreneurs incluant des avocats, des chasseurs de tte, des spcialistes derelations publiques et de marketing des professionnels des domaines de la haute technologie, du transfert et du management de linnovation, qui peuventapporter leur exprience.

    Un ingrdient reste critique : un environnement qui encourage et facilite la culture du risque et de lentrepreneuriat.

    Linnovation est particulirement stimule au sein dcosystmes locaux, en gnral lchelledune mtropole, ancrs sur un territoire. Ces cosystmes locaux inscrivent leur action dansle cadre de la stratgie de la Rgion laquelle ils appartiennent. Dans le mme temps, leurssecteurs conomiques les positionnent au sein de filires lchelle suprargionale, avec unrle structurant pour les ples de comptitivit.

    Une politique en faveur des cosystmes dinnovation doit prendre en compte larticulationentre ces trois chelles.

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    25LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    a) Les cosystmes dinnovation, rassemblant entreprises innovantes, acteurs de lenseignementsuprieur, laboratoires de recherche, outils ns du PIA, acteurs du capital-risque sont parnature ancrs dans un territoire. Leur organisation, leur structuration et leur animation doiventse faire en consquence cette chelle.

    Conforter et renforcer ces cosystmes, dans une logique non administre, doit constituer lun des

    principaux objectifs dune stratgie nationale et des stratgies rgionales dinnovation.

    b) Dans le cadre de la stratgie nationale pour linnovation dfinie par ltat (recommandation17), le rle de pilotage par les Rgions de la stratgie rgionale dinnovation doit tre clairementaffirm. Sa mise en uvre effective ne peut pas faire lconomie de la mise en place dunegouvernance oprationnelle entre tous les acteurs de linnovation (recommandation 16,dimension territoriale).

    c) Les ples de comptitivit jouent un rle essentiel danimation et de structuration de leursfilires respectives. cet gard, il est indispensable de maintenir dans le temps la politique desples de comptitivit, comme nonc dans la phase 3 (2013-2019), en garantissant les moyens qui

    leur sont consacrs (fonctionnement des ples, Fonds Unique Interministriel).

    Mme si leur pilotage sinscrit naturellement dans les stratgies rgionales, leurs enjeux et leursimpacts sont bien souvent suprargionaux voire internationaux. En revanche, la mobilisation desexpertises et des comptences transversales (mise en rseau, incubation, accs au financement,accompagnement linternational) est un facteur clef de leur russite : les ples doiventsarticuler avec lensemble des cosystmes locaux et favoriser par ailleurs les initiatives localesde croisement de filires.

    Recommandation 16 : organiser le systme de transfert pour le rendre pluslisible et plus efficace

    Remarque : cette recommandation a un statut particulier car elle est une synthse dun ensemble

    dactions, dont certaines donnent lieu des recommandations de ce rapport.

    Le systme de transfert et dinnovation est compos dun grand nombre de dispositifs de soutienet de structures, rsultat dune succession de politiques publiques nationales et rgionales quinont pas toujours t penses en cohrence et dans la dure.

    Ce systme peut tre dcrit selon plusieurs dimensions : lchelle territoriale (niveau rgional,national et europen), le positionnement sur la chane de linnovation (recherche partenariale,transfert technologique notamment par la cration dentreprises innovantes, accompagnementde leur croissance), le caractre thmatique (filire) ou gnrique du champ dintervention.

    Le foisonnement invitable des cosystmes de linnovation, leur plasticit et leur caractredynamique rendent non pertinentes toute simplification ou toute optimisation de ce systme, quirsulteraient invitablement dun schma prdfini, normatif et fig dans le temps.

    Cette remarque justifie, en revanche, la recommandation de mettre en place en priorit unprocessus permettant de mener une valuation dynamique et dans la dure (recommandation 17).

    Par ailleurs, le foisonnement inhrent linnovation peut dores et dj tre organis pour une plus

    grande lisibilit et une meilleure efficacit. Cette organisation doit tre adapte chacune des trois

    dimensions dcrites prcdemment.

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    26 LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Dimension territoriale (voir galement la recommandation 15)

    Au niveau rgional, certaines rgions ont dj mis en place un processus oprationneldarticulation entre tous les acteurs de linnovation, en impliquant notamment les ples decomptitivits. Ce processus est gnraliser.

    De mme, au niveau de sites locaux ou des mtropoles, la mise en place dune gouvernancelgre rassemblant lensemble des acteurs du transfert et de linnovation est une voie suivre(en cohrence avec la mesure 4 des 15 mesures pour le transfert, voir recommandation 5 de cerapport).

    Au niveau national, la mise en place effective dactions collectives entre les ples de comptitivitdune mme filire, telle quelle est prvue dans la phase 3 des ples de comptitivit, est denature rendre plus lisible et plus efficace lensemble des cosystmes franais dinnovation.

    Dans une logique similaire, la mise en place dune organisation souple des acteurs de larecherche partenariale Instituts Carnot, Socit de Recherche sous Contrat (SRC), Centres

    Techniques Industriels (CTI), nouveaux acteurs issus du Programme dInvestissement dAvenir(PIA) comme les Instituts de Recherches Technologiques (IRT) les associant ou les regroupantselon des filires technico-conomiques permettra den renforcer la lisibilit pour les entreprises,en premier lieu les PME et ETI, et sera de nature amliorer lefficacit du systme et sa cohrence.

    Au niveau europen, la mise en place rcente dun outil spcifiquement ddi linnovation,lInstitut Europen dInnovation et de Technologie (EIT), sur la base dun constat des limitesdu soutien par financement de projets collaboratifs de recherche du Programme Cadre, estlopportunit de donner une dimension europenne au systme rgional et national de transfertet dinnovation. Dans ce contexte, les cosystmes innovants, au premier rang desquels lesples de comptitivit, doivent tre les lments structurants de la participation franaise lEIT.

    Chane de linnovation

    La recommandation 9 de ce rapport est spcifiquement ddie lorganisation de la recherchepartenariale, et a pour objectif, par une approche stratgique et oprationnelle de cetterecherche, une meilleure efficacit de la politique publique en la matire. Travailler ensemble,cest bien. Le faire dans une vision stratgique densemble parat nettement prfrable

    (recommandation 17).

    Situ plus en aval dans la chane de linnovation, le transfert technologique doit donner lieu une approche spcifique. Le transfert est avant tout une affaire de processus (rien nest

    prdtermin et la rponse est au bout du processus), ce qui rend centrale la phase de

    maturation, qui est comprendre comme unprocessus de suivi et daccompagnement des projetspour dterminer la bonne stratgie de transfert. La recommandation 8 propose ainsi une volutiondu modle initial des SATT pour renforcer la maturation.

    Dans ce cadre, la cration dentreprise est une voie majeure de transfert car elle seule permet

    vraiment dinstaller le porteur dans une dmarche tourne vers le march. Or, la crationdentreprise est identifie comme le parent pauvre des politiques de transfert, ainsi quunrapport rcent de la Cour des Comptes la dcrit. La recommandation 7 propose donc un

    renforcement, une consolidation globale et une mise en cohrence, au sein dun programmeidentifi, de lensemble des dispositifs de soutien la cration dentreprises de technologies

    innovantes, aux niveaux national et rgional.

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    27LINNOVATION : UN ENJEU MAJEUR POUR LA FRANCEDynamiser la croissance des entreprises innovantes

    Approche gnrique, approche thmatique

    Les approches gnriques de soutien linnovation (que ce soit par des mesures fiscales ou, parexemple, par des outils comme le FUI pour la recherche partenariale) sont indispensables pourdonner un socle lcosystme dinnovation.

    Lobjectif dimpact conomique rend cependant ncessaire llaboration doutils thmatiques,adapts des domaines conomiques bien identifis. Nous recommandons que soientgnralises des initiatives thmatiques, permettant, dans un domaine conomique stratgiquedonn (par exemple les medtech, la robotique, les Big Data ou encore les biotech blanches) : de consolider lensemble des actions, de mobiliser sans moyens supplmentaires lensemble des dispositifs existants de soutien

    public (sur toute la chane de linnovation), de mettre en place une coordination souple entre les structures ventuellement concernes

    autour dun objectif prcis et pour une dure dtermine.

    Des outils de ce type sont de nature coordonner de manire plus efficace les efforts respectifs

    en faveur de la recherche et de la croissance des entreprises (recommandation 11 pour lefinancement early stage).

    Limplmentation doit tre spcifique chaque domaine et doit donner lieu un pilotage parlvaluation de limpact conomique potentiel.

    Recommandation 17: se donner les moyens de concevoir, de piloter etdvaluer une stratgie franaise de linnovation, globale et cohrente

    DFINIR UNE POLITIQUE ET UNE GOUVERNANCE DE LINNOVATION :UNE DYNAMIQUE AU NIVEAU MONDIAL

    La R&D est indispensable aux direntes formes que peut prendre linnovation, quelle soit de rupture ou incrmentale,technologique ou non technologique. Cependant, un pays peut avoir une politique volontariste de recherche et, en labsencedune politique cohrente en faveur de linnovation, ne pas en retirer les bnces escompts. Combien de dcouvertes etdinventions se retrouvent ainsi crer de la richesse conomique ou des emplois dans des pays plus prompts se saisir de cesrsultats pour les transformer en produits mis sur le march ? Ne dit-on pas quInternet est n en Europe ?

    De manire symtrique, une politique de soutien aux grandes lires industrielles, souvent forte intensit technologique,ninduit pas ncessairement le dveloppement de linnovation si un grand nombre dentreprises innovantes ne lesaccompagnent pas.

    La prise de conscience croissante du caractre stratgique du processus innovant, la comprhension de la complexitintrinsque linnovation e