Rapport Fintech 2020-Reprendre l'Initiative

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    Fintech 2020 : reprendre linitiativeComment la technologie Blockchain peut permettre la France et lEurope de prendre lavantage en matire de banque et de finance

    A lattentionde :

    M. Jirky Katainen, vice-prsident de la Commission EuropenneLord Jonathan Hill, commissaire europen la Stabilit financire, aux Servicesfinanciers et l'Union du march des capitauxM. Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics

    M. Emmanuel Macron, ministre de l'conomie, de l'Industrie et du NumriqueM. Mario Draghi, gouverneur de la Banque Centrale EuropenneM. Christian Noyer, gouverneur de la Banque de FranceM. Robert Ophle, second sous-gouverneur de la Banque de FranceM. Benot Coeur, membre du Directoire de la Banque Centrale Europenne

    Rapport produit par :Pierre-Alexis de Vauplane,

    Jean-Baptiste Bernard,Edouard Roblot

    sous la direction de :

    Jean Rognetta, dlgu gnral de CroissancePlus et de PMEfinance

    Avec le soutien et la collaboration de :

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    Rsum

    Les nouvelles technologies de la finance ( Fintech ) marquent avant tout une nouvelle tape

    de la dsintermdiation bancaire. Alors que, jusquici, celle-ci sest faite sur les produits(cartes de crdit, puis marchs obligataires permettant de contourner le produit bancaire maispas le banquier), elle sattaque dsormais aux mtiers. Les Fintech prtendent remplir lamme fonction que le banquier : assurer la scurit dun systme de paiement, prter delargent partir de dpts dinvestisseurs, etc. mais diffremment.Aujourdhui, la diffrencela plus vidente se rduit la relation avec le client. Elle rside en effet dans une exprienceclient mieux russie, grce aux nouvelles technologies, notamment le Big Data, et auxnouveaux moyens de communication. Pour lessentiel, et pour linstant, les Fintech restent surdes niches rserves aux clients exclus des banques, aux geeks ou des besoins trsspcifiquesnon couverts par le systme bancaire.

    A quelques (rares) exceptions prs, les banques franaises ont tard dans ladoption de ces

    nouvelles technologies, en arguant de raison de scurit, du besoin de rencontrer les clientsavant de signer un emprunt, etc. Ce faisant, elles ont confondu les besoins ncessaires lasatisfaction de leurs clients et les habitudes quelles avaient prises au fur et mesure de leurorganisation. Les Fintech reprsentent donc une menace concurrentielle avec laquelle ellesdevront composer.

    Jusque-l, lEtat naurait gure sen soucier. Nanmoins, la deuxime gnration deFintech aura des consquences immenses pour les banques, le systme financier etlconomie tout entire. Elle sincarne travers Blockchain, une technologie qui sertactuellement de support au bitcoin, et travers lensemble des protocoles dcentraliss devrification des changes. Ces nouvelles Fintech ne se rduisent pas au secteur bancairepuisquelles sattaquent des secteurs trs varis comme la preuve de lexistence, laprotection des donnes prives ou mme le vote des citoyens.

    Le premier champ de bataille se situe dans le paiement, car cette technologie est capable derduire drastiquement les cots de transaction en crant un systme alternatif de transaction.Cela concerne potentiellement chaque entreprise, et chaque Etat, qui se trouve menac danslun des piliers de sa souverainet: battre monnaie et rgir la confiance de ses sujets/citoyens.Le potentiel de Blockchain est comparable celui dun autre protocole, TCP-IP. LaFrance, attache au Minitel, a rat le virage Internet dans les annes 1990. Il convient,cette fois, de surfer la vague plutt que de lattendre. Le prsent rapport prconiseplusieurs propositions pour permettre la France et lEurope de transformer une menace enavantage concurrentiel. En voici les deux principales :

    Une Agence Europenne de la Recherche Financirepour asseoir la vague actuelledes Fintech sur une information fiable et pluraliste ;

    La cration de groupes de placeau sein de lEurosystme, BCE et Banque de France,notamment, avec pour mission de proposer, lt 2016, une volution de larglementation permettant dacclrer ladoption de Blockchain dans le systme bancaireet financier, et plus gnralement dans lconomie europenne.

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    Table des matires1. Les Fintech, une nouvelle tape de la dsintermdiation bancaire.............................. 7

    1.1 Aprs la dsintermdiation des produits financiers dans les annes 80, la dsintermdiationtouche dsormais les mtiers des banques et entre dans une phase dhyper-croissance............ 7

    1.2 Cette vague des mtiers profite de lacunes du secteur bancaire traditionnel : businessmodel centr sur le produit (et non sur le client) et une rglementation de compliancecontraignante.................................................................................................................................... 10

    1.3 Les Fintech du paiement sappuient sur denouveaux usages sans remettre en cause, pourlinstant, le systme existant............................................................................................................... 12

    1.4 Les Fintech du financement ne sont encore positionnes que sur des niches de marchs dontles banques taient largement absentes........................................................................................... 15

    1.5

    Lutilisation massive des donnes pourrait acclrer leur dveloppement et ouvrir de nouvellesvoies dans le domaine de lassurance (Insurtech )....................................................................... 18

    2. La blockchain, une technologie avec un potentiel immense........................................ 20

    2.1 La blockchain est une technologie algorithmique pour tablir la confiance entre deuxparties............................................................................................................................................... 20

    2.2 Blockchain sapplique quasi nativement aux paiements pour en rduire drastiquement lecot : il peut aller jusqu crer des systmes de paiement parallles aux systmes existants......... 22

    2.3 Mais le potentiel de Blockchain dpasse lenvironnement du seul paiement: il pourrait fairetomber les architectures traditionnelles dans le secteur financier et bouleverser des secteurs encoreprservs (stockage dcentralis de donnes, la preuve dexistence, etc.)...................................... 24

    3. Deux scnarios de risque : que se passerait-il si lon passait ct du blockchain?..... 26

    3.1 Etat des lieux : ladoption de la Blockchain par les autorits montaires et les Etats............. 26

    3.2 Scnario probable : les Etats-Unis et le Royaume-Uni confortent leur avance et la France reste la trane ; les systmes alternatifs de paiement et de financement dorigine anglo-saxonne segnralisent entranant un risque accru de Base Erosion Profit Shifting (BEPS) pour la France...... 28

    3.3 Scnario incertain : les crypto-monnaies alternatives sont adoptes par un nombresignificatif de citoyens et dentreprises entrainant un risque de perte de souverainetmontaire pour les Etats................................................................................................................ 30

    4. Actions proposes................................................................................................................... 344.1 Une action pour acclrer la dsintermdiation des PME/ETI, notamment grce aux Fintech :crer une Agence Europenne pour la Recherche Financire pour la production et la diffusiondinformations sur les PME/ETI.......................................................................................................... 34

    4.2 Deux actions pour ne pas laisser Londres et la Silicon Valley le monopole des Fintech :crer un bureau des Fintech lACPR (auquel la Banque de France serait associ) et mettre en placeun fonds de place dual, dette et fonds propres, de 100M................................................................ 37

    4.3 Une action pour faire de la France et de lEurope un territoire davenir pour la Blockchain:crer des groupes Blockchain hbergs par la Banque de France et la Banque CentraleEuropenne...................................................................................................................................... 38

    Annexe : Comment Citi Bank et le Nasdaq sapproprient le blockchain ?................................. 39

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    Bibliographie..................................................................................................................................... 40

    Remerciements............................................................................................................................... 41

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    Introduction

    Ils arrivent. Tout droit venus de Californie pour mettre mal nos vnrables banques

    franaises universelles, les envahisseurs de la plante finance dbarquent en France.Cessocits sont les Fintech . Leur objectif : faire diffremment et moins cher que lesbanques. Ces dernires annes, les leves de fonds des start-up amricaines ont mis sousles feux de la rampe le phnomne Fintech, un nologisme anglais qui dsigne les nouvellessocits du secteur financier qui se construisent sur les technologies de linformationet de la communication, et le numrique en gnral. Rien quen 2014, plus de 1Md parmois ont t investis dans le monde dans ces start-up.Ce montant est colossal : il estgal au montant total investi par le capital-risque franais chaque anne. Le primtre de cesFintech slargit en proportion. Aucun mtier de la finance nest dsormais pargn : activitsde banque de dtail, de paiement, de gestion, de financement et dassurance.

    Cet engouement nest pas sans consquence. Mme si le phnomne devait retomber,

    les start-up les plus puissantes ont accumul les moyens de transformer leur industrie, limage dAmazon et Google ds le dbut des annes 2000. Les transformations profondeset denvergure mondiale sonttoujours lentes effectuer, mais les rcentes leves de fonds deSquare (600M$ en 2015) et de Lending Club (900M$ en 2014) leur offrent du temps pour secrer leurs marchs.

    Il peut tre tentant de rduire cet essor des Fintech la perte de quelques parts de marchpour les banques dici 2020, comme le font certains analystes1. Mais tout comme Amazon etles libraires ne se ressemblent pas, la dsintermdiation financire nest pas seulement uneintensification de la concurrence entre acteurs comparables. Le modle quimposent cesstart-up va au-del dune simple innovation numrique intgrer par les banques. Il

    remet en question le modle centralis de confiance en de grandes banques et en lEtat, enouvrantun modle dcentralis o la confiance repose sur la densification des donnes et lafoule. Les consquences sont donc importantes quelle que soit lissue de la vague Fintechencours : ces socits peuvent soit transformer les banques, soit les remplacer.

    Le premier enjeu de cette acclration de la dsintermdiation est bien srconomique:quelle sera dans dix ans la place des banques, des socits financireset des start-up dans le financement de lconomie et en particulier dans celui des PME? Quel rle joueront les banques dans les oprations de paiement et dans la viequotidienne des entreprises ? Ces bouleversements peuvent remettre en cause lemodle de la banque universelle si prgnant en France.

    De plus, lpicentre de cette dynamique est californien et la France en estquasiment exclue.80% des investissements en 2014 ont t raliss aux Etats-Unis,la France reprsente 2% des investissements mondiaux, derrire le Royaume-Uni,lAllemagne et la Sude.Si les start-up franaises partent trop tard, avec trop peude moyens, les banques franaises russiront-elles intgrer une innovation si trangre ?

    Le deuxime enjeu est ainsi celui de la souverainetconomique.Les socitsqui contrlent ces nouvelles architectures et drainent lpargne des agentsconomiques sont trs majoritairement amricaines. Sans une action rapide de

    1Ainsi par exemple deux rapports rcents, The future of finance: redefine the way we pay et Therise of the new shadow banking, publis dbut 2015, o Goldman Sachs minore limpact de cesstart-up pour les acteurs traditionnels.

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    lEurope et de la France,le phnomne Fintech acclrera la migration hors dEuropedes centres de dcisions des acteurs du financement de lconomie. Un phnomnecomparable ce qua connu lEurope de lEst avec la prise de contrle des banques

    locales au moment de lentre de ces pays dans lUE.

    Enfin, notre souverainet fiscale est remise en question avec un risque accru de Base Erosion and Prof i t Shif t ing (BEPS). Cela sapplique particulirement aumodle dcentralis de vrification des transactions des crypto-monnaies et auxnouveaux usages, qui permettent de dvelopper de nouveaux systmes de paiementsmoins chers, plus adapts aux besoins du commerce moderne mais dterritorialiss etdonc hors du contrle des Etats. Ds lors quune entreprise dcide de payer sonemploy par un circuit de paiement nouveau en utilisant une crypto-monnaie, commentlEtat peut-il justifier et prlevercorrectementlimpt ? Dans une moindre mesure,ce risque de perte de contrle sur les changes financiers sur le territoire est prsentdans les services financiers Fintech, que lon peut aisment comparer au travers des

    frontires.

    Ainsi, limage sduisante de ces start-up qui challengent les acteurs traditionnels au bnficedes consommateurs masque dimportants enjeux pour les socits et les nationseuropennes : enjeuxconomique, fiscal et social dont il convient de semparer.

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    1. Les Fintech, une nouvelle tape de la dsintermdiationbancaire

    La dsintermdiation bancaire en quatre tapes

    1950 1970 1990 2010

    1.1 Aprs la dsintermdiation des produits financiers dans les annes 80, la dsintermdiationtouche dsormais les mtiers des banques et entre dans une phase dhyper-croissance

    Au cours des dernires dcennies, le secteur bancaire et financier a su innover etsadapter(Gowland, 1991). Linnovation a permis aux banques daugmenter leurs revenustout en rduisant les cots de transaction, de recherche et de marketing, de faire face laconcurrence, de rduire les risques lis lintermdiation financire ou encore de contournerla rglementation. Cette innovation a permis aux entreprises dacclrer le phnomne dedsintermdiation et donc leur indpendance vis--vis du systme bancaire. Il est noter quele phnomne a t, pour lessentiel, concentr sur les places amricaines et britanniques, limage du graphique ci-dessous.

    Part de lobligataire et assimil dans lendettement des entreprises (SNF)

    Source : Banque de France

    Cette vague dinnovation portait pour lessentiel sur les produits financiers. Dans cecadre, linnovation a t une rponse louverture la concurrence du secteur puis lapparition de nouvelles contraintes prudentiellesfaisant peser sur les banques un cotdu risque supplmentaire. Le rle croissant jou par les marchs financiers dans lefinancement de lconomie a incit les banques innover afin de demeurer un acteur financier

    incontournable : la titrisation, les drivs, les LBO sont autant de produits structurs. Avec larglementation post crise imposant des contraintes prudentielles plus leves, (voire

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    prohibitives pour certaines activits), cette innovation relative aux produits a quasimentdisparu.

    La nouvelle forme de dsintermdiation quincarnent les Fintechexplore quant elle la

    dsintermdiation des mtiers: prt, compte courant, gestion de fortune sont des mtiersaujourdhui risque pour les banques. Le graphique ci-dessous, du cabinet dtudes CBInsights (mai 2015), tmoigne de lampleur du phnomne : chacune des fonctions dunebanque, quelle sadresse aux particuliers ou aux entreprises, peut dsormaisseffectuer sur le Web ou par le biais de start-up exemptes des cots fixes dunebanque.

    Les activits traditionnelles dune banque couvertes par les start-up

    Lessor des Fintech est devenu mondial. Les volumes en jeu deviennent gigantesques. Lesmontants levs par les Fintech ont connu une forte progression avec une multiplication par

    quatre depuis 2012 et par trois en un an, entre 2013 et 2014 (2,5Md en 2012, 4Md en 2013et 12,1Md en 2014).

    2014

    (en millions $)

    2013

    (en millions $)

    2012

    (en millions $)

    2011

    (en millions $)

    Etats-Unis 9 500 3 200 2 000 1 800

    Europe 1805 env. 600 n.a. n.a.

    Autres 805 env. 200 n.a. n.a.

    Total 12 210 4 000 2 500 2 200

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    Les Etats-Unis mnent de loin la danse avec plus de 80% des leves depuis 2011. EnEurope, les principaux moteurs sont le Royaume-Uni et lAllemagne. La France est

    lcart de ces deux tendances. Elle reprsente peine 2% des montants levs en 2014. Elleest le 3me acteur europen derrire lAllemagne et est suivie de prs derrire la Sude.

    Leve de fonds dans le monde en 20142

    Les efforts raliss par le Royaume-Uni sur les Fintech sont visibles puisque lcartdinvestissement entre la France et le Royaume-Uni est suprieur lcart traditionnel entreles deux pays dans le domaine du capital-risque (graphiques Ratio capital-risque / PIB et Leves de fonds en Europe ).

    Leve de fonds Fintech en Europe en 20143 Ratio Capital-Risque / PIB4(Source : Eurostat)

    Limportance des montants levs ainsi que les niveaux de valorisations atteints,illustrent lentre des Fintech dans la phase dhyper-croissance.A la fin du deuximetrimestre 2015, linstitut Finovate relevait 45 licornes (i.e. des socits valorises plus dunmilliard de dollars) dans ce seul secteur, contre 11 un an auparavant. Parmi ces licornes, deuxsecteurs simposent : 14 sattaquaient aux mtiers du prt (LendingClub, CommonBond,

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    http://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-east3http://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-east4Tir de la note danalyse du CAS n237 : Business angels et capital-risque en France, les enjeux fiscaux

    http://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-easthttp://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-easthttp://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-easthttp://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-easthttp://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-easthttp://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-easthttp://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-easthttp://thetally.efinancialnews.com/2015/04/mapping-fintech-investment-europe-middle-east
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    Prosper, Wonga, FundingCircle, Jimubox, etc.) et 15 aux mtiers du paiement (One97,Adyen, Zuora, iZettle, etc.).

    1.2 Cette vague des mtiers profite de lacunes du secteur bancaire traditionnel : business modelcentr sur le produit (et non sur le client) et une rglementation de compliance contraignante

    Linsertion du digital dans la relation client nest pas propre au systme bancaire ; il estlargement partag dans les autres industries : transport, htellerie, restauration, etc. Cetteinsertion ne doit pas tre vue comme une digitalisation du produit mais comme uneabolition des cots de transaction permettant de rompre avec les grandes socits et

    business modles tablis, qui en taient venus tre centrs sur leurs produits au lieudtre centrs sur les clients.

    Lexemple de la banque est toutefois particulirement loquent. Alors que les banques et

    assurances restent largement organises verticalement autour de produits dfiniscentralement, les nouveaux acteurs Fintech profitent de leur souplesse pour proposer desbiens ou services nouveaux rpondant dabord aux attentes desclients. Leur but nest pas defabriquer des produits mais de proposer un mode de consommation personnalise sappuyantsur lexprience des clients, leur savoir-faire.

    En cela, les Fintech se diffrencient des acteurs traditionnels par une simplicit et une rapiditdes oprations, une convivialit dans les relations et une personnalisation des processus.Lerecours au digital ne conduit pas la standardisation et la massification de loffremais aucontraire la personnalisation de loffre. Cest la diffrence majeure entre les FinTech etles acteurs traditionnels de la finance dont les programmes informatiques sont critssur des logiciels anciens: il nest que de penser au caractre antdiluvien des distributeurs

    de billets, qui peinent proposer quatre langues alors quils pourraient proposer une vritable exprience au client contraint de les utiliser.

    Dans le mme esprit de mauvaise exprience des clients des banques, depuis plusieursannes, la rgulation de compliance (ou la rgulation des relations avec les clients) necesse de salourdir et de se complexifier.Elle oblige dsormais les intermdiaires financiers aller chercher et vrifier la ralit de lidentit, la provenance des fonds, mesurer ltenduedes connaissances de leurs clients en matire financire afin de sassurer que les produitscorrespondent leur profil de risques.

    Cette rgulation fait notamment suite aux amendes record verses par les banquesamricaines depuis la crise de 2007, en partie pour dfaut dinformation envers les clients.Bank of America a ainsi vers en cumul plus de 55Md$ depuis 2007, JP Morgan 30Md$. Lesexigences rglementaires qui psent sur les banques et assureurs conduisent ces derniers adopter le principe de prcaution cest--dire viser le zro risque en matire de non-conformit de leurs activits sur les sujets de lutte contre le blanchiment et le financement duterrorisme, comme sur les sujets de catgorisation des clients lors de lentre en relation.Cette approche de masse o chacun est catalogu dans une case afin de satisfaire auxdispositifs de Compliance et danalyse de risque ne permet pas une relationindividualise et personnalise.

    Cette rglementation a un double effet la lumire de lessor des Fintech. En premier lieu, elleimpose un surcot aux banques dont ne souffrent pas les start-up.

    Le deuxime effet est plus pernicieux mais plus structurant, il rejoint le premier effet de myopie

    marketing mis en vidence supra. Vouloir limiter de toute force le risque dans la relationaux clients ouvre un boulevard pour des socits offrant une meilleure exprience aux

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    clients. Les banques, voulant se protger des amendes des rgulateurs, risquent donc defavoriser les Fintech : ce nest pas la norme extrieure mais lincapacit sautorgulerdu secteur qui promeut linnovation disruptive.

    Ble III, cause principale de lmergence des Fintech?

    Contrairement aux ides reues, lmergence des Fintech nest pas une rponse unergulation prudentielle (Ble III) trop stricte

    Les start-up, les PME ou les particuliers cherchent des financements sur des plateformesalternatives mais ce nest pas une restriction de crdit des banques qui est en cause.

    A la suite de la crise des subprimes et la rvlation de son ampleur systmique, les accordsde Ble III proposent trois mesures principales cherchant favoriser une plus grande stabilit

    financire et soutenir ainsi la croissance de moyen terme :- Augmentation des exigences en fonds propres (atteignant en 2019 7% pour le ratiod'actions ordinaires et 8,5% pour le ratio de fonds propres de base).

    - Amliorer la gestion du risque de liquidit et renforcer les exigences prudentielles concernant le risque de contrepartie. Ble III procde la cration de deux ratios de liquiditvisant assurer dune part la capacit de financement des banques pendant 1 mois en cas decrise de liquidit svre mais pas extrme (ratio dit LCR ), dautre part la capacit definancement moyen terme (1 an) des banques en forant une meilleure harmonisation desmaturits du passif et de lactif (ratio NSFR ).

    - La troisime mesure correspond linstauration dune limite de 3% au levierdendettementautoris.

    En 2010, suite aux accords de Ble III, plusieurs institutions (OCDE, BRI, Institution ofInternational Finance, etc.) ont tent dimplmenter via des modles macroconomiquesglobaux, les mesures dictes en termes dexigence de capital. Ces diffrentes tudes quivisent mesurer a priori un impact global sur la croissance, saccordent sur les canaux parlesquels transitent les effets de Ble III.

    Nanmoins, dans sa note de conjoncture de juin 2014, lInsee, en mobilisant plusieurstudes microconomiques, rvle que les conclusions sur les effets des exigences en

    capital sont plus mitiges. Par ailleurs, les tudes menes a posteriori sur diffrents paysdans le pass semblent contrastes5.

    En effet, la plupart des banques taient dj en conformit sous la pression implicite

    des marchs. Selon ltude dimpact mene par lAutorit Bancaire Europenne sur lescomptes des banques fin 2012 : (i) les ratios de capitaux les plus restrictifs taient djrespects par 72 % des grandes banques et 84 % des petites ; (ii) le ratio de liquidit LCRtait en moyenne de 109 % pour les grandes banques et 128 % pour les petites, contre 100% exigible.

    Au cours de cette priode de mise en conformit, les banques ne semblent pas avoir modifidrastiquement leurs politiques de crdit, selon les diffrentes enqutes spcialises6. Lapriode stant davantage illustre par une faible demande de crdit de la part des entreprises

    5Jimnez et al. 2013 sur lEspagne, Aiyar et al. 2014 sur le Royaume-Uni, Brun, Fraisse, Thesmar, 2013 en France

    ainsi que Buch et Prieto 2012 en Allemagne6Jimnez et al. 2013 sur lEspagne, Aiyar et al. 2014 sur le Royaume-Uni, Brun, Fraisse, Thesmar, 2013 en

    France ainsi que Buch et Prieto 2012 en Allemagne

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    plutt que par un rationnement de la part des banques. Ainsi, la mise en place des contraintesprudentielles ne semblent pas pouvoir expliquer le choix des Fintech par rapport aux banquestraditionnelles.

    1.3 Les Fintech du paiement sappuient sur de nouveaux usages sans remettre en cause, pour linstant,le systme existant

    Depuis les annes 2000, de nouveaux moyens de paiement adapts denouveaux usages apparaissent

    La facilit dusage a peu peu remplac les chques et les espces par les moyens depaiement lectronique comme les prlvements automatiques et les paiements par

    carte bleue.Dans son rapport LAvenir des moyens de paiement en France, Georges Pauget

    rappelle lvolution des usages ces dernires annes : entre 2006 et 2010, les chques sontpasss de 24% du nombre de transaction 18%. Depuis 2006, les paiements par carte ontdpass ceux par chque.

    La France est particulirement en pointe dans le domaine des paiements lectroniques.La part des espces dans le total des transactions est en France une des plus faibles dans lemonde (55% des paiements en valeur contre 57% aux Etats-Unis, 61% au Royaume-Uni, 75%en Allemagne et 88% au Japon). Ceci sexplique notamment par la logique industrielle adoptepar les acteurs franais qui a permis de rduire la fraude (

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    smartphone) et les besoins non satisfaits de certains ensembles du march (sites marchands,artisans, TPE, etc.).

    Square, la start-up qui sattaque aux cots de transaction exorbitants des PME et TPEamricaines

    En 2014, Square a lev 150 millions deuros notamment auprs de Goldman Sachs, sur unevalorisation de plus de 5 milliards deuros. La socit sadresse particulirement aux PME etTPE amricaines dont les cots de transaction sont relativement levs. Square propose unservice plus abouti (grce la gestion de comptabilit et de facturation) pour un prixlgrement infrieur mais ce cot, comptitif dans le systme amricain, ne lest pas encoreen France.

    Stripe, une solution de paiement en ligne alternative PaypalFonde en 2011, Stripe se dfinit comme une plateforme de paiement facilement intgrablesur un site marchand (il nest plus ncessaire douvrir de passerelle de paiement bancaire nimme dinstaller un module de paiement sur son site). Sa structure de cot est relativementsimilaire celle de Paypal (i.e. commission fixe et une commission variable, sansabonnement). Elle a reu prs de 200 millions de dollars depuis sa cration et depuis lentreau capital de Visa en 2015, la socit est valorise plus de 5 milliards de dollars.

    Les Fintech nont pas remis en cause, jusqu prsent, lorganisationhirarchique du systme

    Parmi les socits qui se sont lancs dans le domaine du paiement, quatre ensembles peuventtre distingus.

    Tout dabord, les innovations qui reposent sur le systme bancaire actuel pour y faciliterles changes et apporter des services complmentaires, laide de nouveaux moyensde paiement comme les tlphones mobiles. Il sagit des innovations telles que GoogleWallet, Apple Pay, Stripe, Paypal, Square ou, en France, Slimpay. Ces innovations napportentni nouvelle monnaie, ni nouveaux trajets des paiements : les tlphones mobiles ou lescomptes PayPal sont directement relis larchitecture centralise.

    Ensuite, les innovations qui sattaquent aux failles du systme de paiement actuel :

    linstar des plateformes de financement, elles entrent sur des marchs pour lesquels lesbanques offrent des solutions de paiement aux cots levs.

    TransferWise sattaque au march sous-optimis des transferts internationaux

    Selon le rapport de Goldman Sachs, le march mondial des transferts internationauxreprsente un montant annuel de 580Md$, en croissance de 5% par an. En moyenne, lescots de transaction pour ces transferts reprsentent entre 6-7% des montants (soit env.30Md$ de revenus annuels). Des initiatives innovantes ont merg pour sy attaquer.TransferWiseest lexemple le plus reconnu lheure actuelle: envoyer 1 000 du Royaume-

    Uni lAllemagne cote seulement 0,5% du montant avec Transfer Wise contre 6,8% avecHSBC, 5,1% avec RBS et 3,3% avec Western Union. Le principe de la socit consiste faire

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    correspondre les paiements qui vont dans la direction oppose laide dalgorithmes. Par lebiais de cette compensation intrinsque , largent envoy en ralit ne quitte quasimentjamais le pays.

    Les innovations issues de la cration de monnaies reposent galement sur le systmebancaire actuel. Elles proposent nanmoins une nouvelle monnaie comme intermdiaire deschanges pour favoriser les changes locaux ou dans certaines circonstances. Gnralementces monnaies possdent un change fixe avec la monnaie nationale et les trajets de paiementsont identiques. Les exemples de monnaies locales sont lgion en France, par exemple Toulouse avec le Sol-Violette ou dans le pays Basque avec lEusko.

    Enfin, dans le dernier ensemble les innovations qui proposent un systme dchange nongr par les banques commerciales mais utilisant la monnaie nationale.Comme exemplede ces nouveaux systmes, on retrouve M-Pesa lanc par Vodafone en 2007 au Kenya et enTanzanie. Ce service permet aux utilisateurs de raliser des transactions et de dposer delargent sur un compte stock sur leur tlphone portable. Les utilisateurs peuvent galementretirer et dposer de largent auprs dun rseau dagents jouant le rle dintermdiairebancaire. Ces innovations permettent le dveloppement dun systme formel dans des payso les rseaux bancaires sont faiblement dploys. Nanmoins, ces innovations reposent pourlessentiel sur le mme systme de paiement centralis (et la prsence dun systme decompensation).

    Lorsque les Fintech rsolvent le problme du cash en Afrique

    Aujourdhui80% des Africains nont pas de compte en banque et donc de carte bancairemais quasiment tous ont un tlphone9. Le manque dinfrastructures bancaire et unerglementation souple ont permis aux oprateurs tlcoms de proposer un systme depaiement alternatif via les tlphones portables. Les portefeuilles lectroniques sont dtenuspar les oprateurs de tlcoms. Aujourdhui 183 millions dAfricains disposent dun portefeuillelectronique sur leur tlphone portable. Cest trois fois plus que le nombre de propritairesde portefeuilles lectroniques aux Etats-Unis ; la croissance y est galement trois fois plusimportante. Si la dynamique actuelle se maintient, chaque Africain possdera un portefeuillelectronique en 2021. Le principal enjeu dans les annes venir consistera connecter cesportefeuilles lectroniques locaux au sein dun rseau global(par exemple Amazon ou eBay).

    Toutes ces innovations aboutissent optimiser le systme actuel(par une rduction des

    cots notamment) et peuvent amliorer le service propos au client( linstar des gestionsde comptabilit ou des moyens de paiement adosss aux tlphone mobile) mais neremettent pas en cause le systme international des paiements.

    9

    Rappelons que jusque dans les annes 1960, peu de Franais possdaient un compte bancaire : la plupart dessalaris tant pays la semaine en liquide. La mensualisation des salaires, impose par Georges Pompidou en

    1970 qui fit basculer le pays dans la bancarisation.

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    1.4 Les Fintech du financement ne sont encore positionnes que sur des niches de marchs dont lesbanques taient largement absentes.

    Si cette dsintermdiation bancaire est dj avance pour les grandes entreprises elle se

    met en place progressivement pour les PME/ETI grce la cration de nouveaux outils

    La crise de liquidit des annes 2007-2009 et celle des dettes souveraines en Europe ontautant impact les banques que les marchs financiers europens. Elles ont rvl les limitesdun modle traditionnel de financement des PME/ETI trop dpendant des banques, et de cefait trop incertain, incapable de proposer aux entreprises, un ventail de solutions definancements rpondant de faon satisfaisante leurs besoins. Grce une mobilisationconjointe des acteurs de la place financire et des pouvoirs publics, le financement des

    PME/ETI par les banques franaises a pu tre maintenu.

    Les grandes entreprises ont t les principales bnficiaires des politiques dedsintermdiation engages depuis de nombreuses annes puisque cela leur a permisdaccder des financements abondants et de bon march: sur la priode de 2009-2014, lecrdit bancaire des grandes entreprises a baiss (tandis que leur taux dendettement sestmaintenu)10. Le financement des grandes entreprises est aujourdhuiais.

    En revanche, les PME/ETI ont longtemps t exclues de cette dynamique dedsintermdiation bancaire : le financement pour les PME/ETI repose encore aujourdhui 90% sur les financements bancaires (ce qui reprsente plus de 400Md dencoursbancaires)11. En rponse ce constat, plusieurs outils de financement ont t crs etmis la disposition des PME/ETI. LAssociation for Financial Markets in Europe (AFME) atabli la cartographie suivante12des nouvelles sources de financement de la dette. Pour cequi concerne les PME/ETI, certaines des solutions prsentes dans la cartographie ci-avantsont exclues, dautres sont possibles, et quelques-unes leurs sont ddies. Les solutionsexclues sont : le march obligataire high-yield et les placements privs sur des marchs autresque Paris (US Private Placement, Schuldschein allemand). Les solutions possibles sont : lesplacements privs dont EuroPP, avec un minimum 10-15 M, les missions obligataires surEuronext, avec un minimum 5M, ou sur certains de ses quivalents europens (Bo ndM surle Stuttgart Stock Exchange, Order Book for Retail Bonds sur le London Stock Exchange,Minibond en Italie, Marf en Espagne).

    10Le crdit bancaire ne reprsente plus que 18% de leurs dettes en 2015 contre 25% il y a cinq ans. Selon le

    cabinet bfinance, cest un tiers de la dette bancaire des 120 plus grandes socits franaises cotes (SBF 120) qui

    sest volatilis entre 2011 et la fin 2014 11Daprs le rapport 2013 de Paris Europlace sur le financement des PME ETI12Rapport de Paris Europlace de mars 2014 sur le financement en dette des PME/ETI

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    actuel :financement du risque16, financement court-terme17, financement sans garantie18, etc.Les plateformes de crowdfunding et les plateformes de financement des PME (court terme oumoyen terme) en offrent les premiers exemples. Lorsque ces start-up entrent sur un march

    dj occup par les banques, leur offre nest pas toujours comptitive en matire decot mais elle se distingue par son accessibilit : temps de rponse, numrisation desdmarches, etc.

    Aux Etats-Unis

    De la mme manire, le march amricain du prt aux petites et moyennes entreprisesa ainsi t une cible de choix pour les plateformes (OnDeck, Kabbage, etc.). Lesplateformes de prt sont avant tout des acteurs technologiques capables de quantifier laqualit dun dossier de crdit (scoring ) par lanalyse massive de donnes. Cette mthodetend ainsi rduire le rle de lintuitu personaepropre au systme bancaire mais elle permet

    aussi de rduire les cots de traitement de dossier plus levs pour cette catgoriedentreprises. Ces plateformes sont ainsi capables dindiquer dans un temps court (i.e. en 24h)et de manire automatise si le crdit peut tre accord et le taux qui sera associ. Lasimplicit du formulaire de demande de prt leur donne un avantage essentiel en

    matire dusage.

    Bien que lencours de prts de pair pair dans le monde soit pass de26M$ en 2009 1 700M$ en 201419, leur part dans le systme global de financement reste marginal.Ainsi,sur le march amricain des prts la consommation sur lequel les plateformes sont trsprsentes, leur part de march est aujourdhui infrieure 2%20. Le dveloppement de cesplateformes sappuie sur une optimisation du systme actuel (efficacit dans le credit scoringdes PME et TPE grce lanalyse massive de donnes par exemple 21) sans que cela soit en

    contradiction avec le modle bancaire.

    Du prt la consommation au financement des PME : le modle conomique de LendingClub

    Ltude de Goldman Sachs indique que le cot de LendingClubpour raliser un prt est enligne avec celui des banques traditionnelles (le volume trait par les plateformes ne semblepas tre encore suffisant pour tre comptitif)22. Le contexte amricain se distingue par uneforte prminence de crdits la consommation coteux, ouvrant un march de choix pourdes start-up aux cots dacquisition rduits. La consommation des biens nobit pas aux

    mmes rgles aux Etats-Unis et en France. Alors quen France lachat crdit est parfoissuspect, aux Etats-Unis il est la norme. A fin aot 2014, lencours des crdits la

    16En phase de deleveraging, le systme bancaire peine financer les besoins de lconomie relle lesplus pourvoyeurs de croissance terme : linnovation, les projets risqus, les PME-ETI. Cette situationdfavorable explique les nombreuses initiatives prises au niveau rgional, national ou europen17Par exemple, Finexkap en France sattaque au financement des crances des PME-TPE18 Par exemple, Unilend, une plateforme franaise de financement alternatif, en rponse auxfinancements garantis des acteurs traditionnels, propose des prts sans sret19Rapport de Goldman Sachs : The Rise of the New Shadow Banking20Idem

    21Pour plus de dtails, cf. partie 1.522Goldman Sachs a chiffr les cots de LendingClub 6,9% du total de ses crances vs. 4,9% pour JPMorgan ou 6,2% pour Citi.

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    consommation amricain slevait 3 300Md$23. Parmi ce montant, 880Md$ de crditsrenouvelables qui correspondent des achats dcouvert. Cette base de crdit fort tauxconstitue un vivier pour des socits visant entrer sur ce march. Ainsi, LendingClub

    annonce viser un march localis plus de 200Md$.Au moment de son IPO, Lending Club visait le march amricain des prts la consommationet tait valoris plus de 5Md$. Le march amricain des prts la consommation reprsenteun total de 3 200Md$ (stock) et 220Md$ par an (flux), en croissance de 6% 7% par an depuis2011. La valorisation de LendingClub au moment de lIPO correspondait lhypothseselon laquelle Lending Club serait en mesure dacqurir 50% de ce march.Sur chacundes emprunts, LendingClub prlve entre 1% 5% de commissions sur largent vers, ainsique 1% sur les versements des intrts aux investisseurs chaque mois. Sur une part demarch cible de 50% (soit 100Md$ annuels) cela fait un revenu brut annuel, pour des prtsdune dure moyenne de six mois, de lordre de 2Md$ 3Md$. Ce qui signifie que la plateformeest valorise sur une base de 2x son chiffre daffaires ( comparer la Socit Gnralevalorise 2,5x son PNB).

    Au premier semestre 2015, Lending Club a mis 3,5Md$ de prts (soit 3,5% de part demarch). Son dveloppement ne se fait pas contre le systme bancaire : Notreapproche est compltement diffrente de celle d'un flibustier comme Uber , explique RenaudLaplanche, le Franais qui a fond et dirige LendingClub outre-Atlantique. Nous voulonstransfigurer et recomposer le systme bancaire, mais d'une manire qui n'est pas

    ncessairement destructrice pour les banques. Autrement dit, nous sommes plus iTunes que

    Napster.

    En matire de financement, la similitude entre les Fintech et les acteurs traditionnelsrside dans les produits (prts avec taux dintrt amortissable)24. Leur principalediffrence rside dans la manire dont les fonds sont attribus. Pour les acteurstraditionnels, les prts sont financs par les dpts et la banque maintient le risque de crditsur son bilan.

    En revanche, les plateformes de prt mettent en relation des investisseursqui eux prennentle risqueavec les socits, de manire anonyme. Le risque systmique d la diffrencede maturit entre dpts et prts serait ainsi compens, voire limin, car le raccourcissementdes circuits met en relation des emprunteurs et des pargnants qui partagent le mme horizonde liquidit. Cette analyse frquente sera doublement mise lpreuve : (i) la premireinversion de cycle ; (ii) par la monte en puissance des Fintech, aujourdhui encore largement

    exprimentales.

    1.5 Lutilisation massive des donnes pourrait acclrer leur dveloppement et ouvrir de nouvelles voiesdans le domaine de lassurance ( Insurtech )

    Toutes les solutions de financement dsintermdi, Fintech ou non, ont en commun lancessit de collecter linformation, de lanalyser et dvaluer le risque de financement portpar les investisseurs. Or, le cot de linformation a une valeur qui nest pas proportionn aumontant de financement recherch. Ce cot comporte une composante fixe et une

    23

    Memorandum Lending Club24A lexception dun upfront feegnralement exig par les plateformes ; il constitue une source significative deleurs revenus

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    composante variable : il est donc dgressif en pourcentage et, jusqu prsent, souventprohibitif pour les PME/ETI. Labsence dun modle conomique pour la production delinformation requise a constitu jusqu prsent un handicap majeur, peut-tre le principal,

    pour la dmocratisation du financement dsintermdi.

    Lutilisation massive des donnes dans le credit s cor ingest dj une ralit aux Etats-Unis. Pour les prts aux entreprises, les socits comme OnDeck et Kabbage utilisent danslanalyse des dossiers de prt un mix de donnes htrognes issues des chiffres de vente,des lments de bilan, des retours consommateurs sur les rseaux sociaux, etc. De mme,les socits comme LendUp25utilisent des donnes supplmentaires celles gnralementutilises par les plateformes amricaines (comme le FICO score26) : pour ces socits, lesdonnes comme les habitudes de remboursement des particuliers (i.e. avec ou sans retard)sont des indicateurs fiables. Lanalyse des donnes et leur exploitation en temps rel est unlment cl du modle daffaires de ces socits.

    Ces analyses de donnes ne se cantonnent pas au domaine du crdit. Les start-up delassurance ( Insurtech )utilisent galement cette matire premire pour valuer lesrisques associs dun client (et donc le taux qui doit lui tre propos). Pour lassurance, lenjeuest de taille : les objets connects produiront dici 2020 plus de 50% du total des donnesdisponibles dans le monde27. Dans son livre blanc sur la transformation numrique delassurance, le Conseil National du Numrique affirmait que lassurance pourrait mmeconstituer le modle conomique de lInternet des Objets (comme la publicit la t pourInternet).

    Lcosystme grandissant des Fintech en FranceEn juin 2015, 35 entreprises Fintech se sont rassembles au sein dune association: FranceFintech . Si cette association na pas vocation tre exhaustive et rassembler la totalit desacteurs en France, elle exprime nanmoins le dynamisme des Fintech en France.

    Les membres fondateurs sont : Advize, Alphametry, Alternativa, Anatec, Bankin, Bolden,Credit.fr, Early Metrics, EosVenture, Evollis, Finance Active, Finexkap, Fluo, France Barter,

    FundShop, Infotrie Financial Solutions, Invivoo Software, Kantox, Ledger, Leetchi, Lendix,

    Lendosphre, Lingua Custodia, Linxo, Lydia Solutions, Pandat, Paymium, PayTop, Prt

    dUnion, Prexem, ScaledRisk, Slimpay, Smart Angel, Smile & Pay, The Assets, Yomoni.

    25LendUp est une socit fonde en 2012 qui offrent des prts court-terme aux particuliers nayant pasaccs au crdit bancaire, sur la base danalyse de donnes.26 Le FICO score est un nombre qui reprsente la probabilit quune personne soit capable de

    rembourser ses emprunts. Il a t introduit aux Etats-Unis en 1989 et est fond sur les fichiers issusdes trois bureaux nationaux (Experian, Equifax et TransUnion).27Orange

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    2. La blockchain, une technologie avec un potentiel immense2.1 La blockchain est une technologie algorithmique pour tablir la confiance entre deux

    parties

    La blockchain sort peu peu de sa zone dombre et souffre encore de la confusion quela presse fait son gard. En effet, le bitcoin utilise la technologie blockchain, ce qui a conduit lamalgame blockchain/bitcoin. Cependant, le bitcoin est une cryptomonnaie et la blockchainun protocole sur lequel repose le fonctionnement de cette cryptomonnaie.

    Ce protocole open source, quon pourrait traduire par chane de blocs ou, plus prcisment, enchanement de blocs , a deux caractristiques majeures : il est dcentralis (comme laplupart des protocoles, il vise la communication entre machines sans utiliser de machinecentrale) et cohrent.

    Que le systme soit cohrent et dcentralis signifie quau lieu de devoir consoliderlinformation en un point qui serait lautorit centrale, lensemble de linformation est disponibleen chaque nud du rseau. Il nest plus besoin dun grand livre central pour validerlensemble des informations. Par exemple dans le cas du bitcoin, lensemble des transactionssont enregistres aprs avoir t confirmes en chaque nud du rseau. Il nest donc plusncessaire davoir une autorit centrale ou un htel des Monnaies pour sassurer quil ny apas eu de fraude ou double dpense (i.e. utiliser le mme bitcoin pour deux transactionsdistinctes). Il suffit de vrifier la cohrence avec lensemble des transactions ou avec le nudprcdent du rseau.

    Comment la blockchain permet dtablir une confiance (thoriquement sans faille) entredeux membres trangers du rseau ?

    Ce problme mathmatique est aussi appel le problme des gnraux byzantins28. Il consiste sassurer quun ensemble de composants informatiques fonctionnant de concert entre euxsache grer des dfaillances ou malveillances. Le systme doit tre capable de maintenir safiabilit dans le cas o une part minoritaire des composants enverrait des informationserrones ou malveillantes pour contourner la vrification de la double dpense (fraude).

    Pour rsoudre cette difficult, le protocole utilise un systme cryptographique fond sur unsystme dcentralis de preuves : la rsolution de la preuve ncessite une puissance de calcul

    informatique leve, fournie par les mineurs. Les mineurs sont des entits dont la fonction estdalimenter le rseau en puissance de calcul, afin de permettre la mise jour de la base dedonnes dcentralise (liste des transactions dans le cas du bitcoin). Pour mettre jour labase de donnes, les mineurs doivent confirmer les nouveaux blocs en dcryptant lesdonnes (travail classique de cryptographie).

    28Des gnraux de l'arme byzantine campent autour d'une cit ennemie. Ils ne peuvent communiquerqu' l'aide de messagers et doivent tablir un plan de bataille commun, faute de quoi la dfaite serainvitable. Cependant un certain nombre de ces gnraux peuvent s'avrer tre des tratres, qui

    essayeront donc de semer la confusion parmi les autres. Le problme est donc de trouver un algorithmepour s'assurer que les gnraux loyaux arrivent tout de mme se mettre d'accord sur un plan debataille.

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    Une concurrence existe entre les mineurs pour le dcryptage des transactions, permettant la puissance disponible sur le rseau de crotre. Nimporte qui peut prter sa puissance decalcul pour miner, mais plus les mineurs sont nombreux plus la rsolution des preuves est

    difficile sattribuer. Ainsi, le protocole peut devenir quasi-inviolable ds lors que laconcurrence est forte chaque nud du rseau i.e. quaucun groupement de mineurs nedevient majoritaire.

    Entre Internet (TCP-IP) et la blockchain existe des parallles puisque ce sont tous les deuxdes protocoles permettant la cration dune infrastructure dcentralise. Nanmoins, l oInternet transfre des paquets de donnes dun point A un point B, lablockchain permet la confiance de stablir entre des parties distinctes. Dit autrement, avec lablockchain, le tiers de confiance devient le systme lui-mme.

    Quest-ce quune architecture distribue de paiement?

    Dans le cadre dune architecture distribue, la confiance des participants ne repose pas surune figure tutlaire grant les changes. La confiance repose sur la multitude desparticipants et la multitude des possibilits de vrifications des changes. Dans lexempleci-dessous, lindividu 1 souhaite raliser une transaction avec lindividu 7. Le paiement passedirectement dun individu lautre, mais lordre de transaction est vrifi par les individus miners 4, 6 et 9. Une fois la transaction vrifie et valide, elle est inscrite dans le grandregistre visible par tous.

    Exemple dune architecture distribue

    Au cur du dispositif se trouve la confiance des participants au procd qui assure lascurit des changes. Dans le cas des crypto monnaies, il sagit dun procd decryptographie. Ainsi, sil est possible de prendre le contrle des procds de codage, alorsla confiance dans le systme seffondrerait, ce qui conduirait sa destruction.

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    2.2 Blockchain sapplique quasi nativement aux paiements pour en rduire drastiquement le cot : ilpeut aller jusqu crer des systmes de paiement parallles aux systmes existants

    La Blockchain permet de rduire les cots de paiement et de les raliser en

    instantan

    Appliqu au secteur bancaire, le concept de blockchain permettrait de rduire des cots dansplusieurs activits. Dans son rapport Fintech 2.0, la banque Santander estime quelutilisation du blockchain et plus gnralement des possibilits pair--pair issues delinternet des objets permettrait de rduire les cots de structure pour les banques de15 20Md$ par an. Ce rapport explicite par exemple le cas du trade finance aujourdhuivictime dun processus de vrification et dmission de lettre de crdit complexe et coteux .Avec lavnement du blockchain, il ny aurait plus besoin de vrification pralable de type due

    diligence, puisque ltat des transactions serait mis jour en tout point du rseau de manireconstante, le processus de vrification des biens se ferait en temps rel et serait beaucoupplus difficile contourner, les petits contrats pourraient automatiquement tre vrifis par lerseau, sous rserve quils ne reprsentent pas une part significative de la puissance de calculdisponible.

    Les banques ont compris lintrt du blockchain puisque neuf banquesinternationales29 ont sign un partenariat avec une socit amricaine R3 pour

    lutilisation du blockchain dans les marchs financiers. Il faut galement rappelerlannonce faite par UBS de louverture dun centre de recherche sur la blockchain Londreset, encore plus rcemment, le projet de Citibank dmettre sa propre cryptomonnaie, le

    Citicoin30.

    Blockchain permet aussi dutiliser la digitalisation croissante des usages et despaiements pour crer des systmes de paiement parallles aux systmes

    existants

    Les paiements ont dj lourdement volu : il suffit de penser lchec de Mono et au succsdu paiement sans contact par carte bancaire. Ces paiements sans contact sont un immensesuccs. Par exemple, au Royaume-Uni o les cartes bancaires sans contact ont t introduitesen 2007, il y avait 30 millions de cartes sans contact en 2012 et 60 millions dbut 201531.

    Or rien nest plus semblable un paiement sans contact par mobile quun paiementsans contact par carte bancaire. Il sagit de deux paiements par apposition de puce et sanscode PIN pralable : linstar des pays au systme bancaire moins dvelopps, les usagesdes consommateurs tendent vers des moyens de paiement sans contact. Le dploiement despaiements par mobile semble destin devenir une tendance forte du march des paiementsdes prochaines annes.

    Une fois dmocratis le paiement par apposition de puce (Apple, Google ou tout autre type),lintrt des socits dtentrices du moyen de paiement sera de faire voluer le systme

    29Goldman Sachs, Barclays, JP Morgan, UBS, Credit Suisse, RBS, BBVA, State Street et Bank of

    Australia30http://techcrunch.com/2015/07/07/citibank-is-working-on-its-own-digital-currency-citicoin/31Lavenir des moyens de paiement en France(2012, Georges Pauget)

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    grant les paiements vers un systme autonome (utilisant une blockchain spcifique et leurrseau dutilisateurs). Mme si pour les consommateurs la premire question nest pas le cotmais la facilit dusage, cette migration diminuerait le cot des paiements Apple ou Google

    pour leurs utilisateurs et faciliterait leur gnralisation parmi les commerants.

    Aprs avoir exclu les oprateurs tlcoms du march des tlphones portables, Apple

    va-t-il russir exclure les oprateurs de paiement grce la Blockchain ?

    Jusquau lancement de liPhone en 2007, les oprateurs de tlphonie mobile rgnaient sur lemarch des tlphones portables. Aux Etats-Unis, laccord dApple avec AT&T a permis lasocit de crer un tlphone portable dans lequel il contrlait lensemble de lexprienceclient. Avec liPhone, Apple a recentr le client au centre du jeu ; ce nest plus AT&T (ou

    loprateur tlphonique) qui motivait le choix dachat du tlphone mais Apple et lesapplications dveloppes sur iOS. AT&T et les autres oprateurs avaient perdu la bataille duclient et taient relgues au bas de la chane de valeur.

    Le processus entam par Apple dans les moyens de paiement est aujourdhui assezsimilaire. En septembre 2014, Apple a lanc Apple Pay permettant aux utilisateurs de payeravec leur carte bancaire via un usage sans contact (dite NFC pour Near-Field Communication)de leur iPhone 6 ou leur Apple Watch. Au lancement du produit la socit avait conclu denombreux partenariats pour sassurer de la compatibilit du systme : Visa, MasterCard ouAmerican Express du ct des metteurs de cartes, McDonalds, Sephora, Starbucks, etc. duct des grandes enseignes, totalisant 220 000 points de vente. Pour la scurit du systme,

    Apple Pay utilise la tokenization . Cette technologie vite le vol de numro de cartespuisque liPhone ne transmet pas le numro de la carte mais un jeton (token en anglais) quele marchand communique aux metteurs de carte. Le numro de votre carte bancaire ne serajamais stock sur votre smartphone, car ds la premire utilisation du systme, celui-ci estremplac par un jeton. Cest ainsi un faux numro de compte, le device account number,propre chaque terminal, qui sera stock dans lappareil. Cette technologie distingue Applede ses concurrents qui utilisent la technologie sans contact NFC pour envoyer le numro dela carte de crdit. La tokenisation nexiste pas encore en France: les infrastructures nesont pas encore totalement en place (terminal de paiement NFC notamment).

    Si aujourdhui la version digitalise de la carte bancaire est conserve sous forme dicne dans

    liPhone, la prsence des metteurs de carte est marginalise : lorsque le client paie via soniPhone, lintermdiaire de confiancecest davantage ApplePay que Visa. Ds lors quApple acr des nouveaux moyens de paiement dmatrialiss (avec des niveaux de scuritsupplmentaire, limage des empreintes digitales), il devient plus facile de convaincre sesclients dadopter un nouveau systme dchanges.Ainsi, ds aujourdhui Apple joue le rlede tiers de confiance et les oprateurs de paiement se retrouvent peu peu sur la

    touche.

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    2.3 Mais le potentiel de Blockchain dpasse lenvironnement du seulpaiement : il pourrait faire tomber

    les architectures traditionnelles dans le secteur financier et bouleverser des secteurs encoreprservs (stockage dcentralis de donnes, la preuve dexistence, etc.)

    Les start-up utilisant la blockchain

    (source : Venture Radar)

    La blockchain trouve galement de nombreuses autres applications :

    - La preuve de lexistence (avec les start-up comme MyPowers, Assembly ouBlockCDN),

    - Le stockage dcentralis (avec Storj et BitHealth),- Les smart contracts combins lInternet des Objets, des programmes qui vrifient

    si le produit a bien t envoy par le fournisseur,- Et mme le vote lectronique.

    Everledger, une socit qui utilise la blockchain pour combattre la fraude dans ledomaine du luxe

    Le premier march auquel sest attaqu Everledger est celui du diamant o la fraude coteprs de 50Md$ par an aux assureurs. Il nexisterait pas, en effet, de base de donnescentralise fiable qui permette de tracer lorigine des diamants et la suite des transactions.Lastart-up Everledger propose dutiliser la blockchain pour btir un livre ouvert de transactionsqui relve lensemble des donnes qui identifient correctement le diamant (les 4 Cs color,clarity, cut, caratmais aussi les 40 meta-points qui le caractrisent spcifiquement).

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    La blockchain comme outil essentiel au dveloppement de lInternet des Objets

    Une tude mene par Kay Noyen, Dirk Volland, Dominic Wrner et Elgar Fleisch WhenMoney Learns to Fly met la blockchain au centre du business model Sensing-as-a-Service qui, selon les auteurs, devrait se dvelopper en parallle de lmergence de lInternetdes Objets. Derrire le Sensing-as-a-Service cest lide selon laquelle lmetteur dedonnes (issues de capteurs) en nest pas le seul bnficiaire. Plus les donnes sontpartages, plus elles sont utiles. Ainsi les plateformes de Fitness comme Runkeeper ou Nike+pourraient agrger les donnes dun certain nombre de propritaires de stations mtopersonnelles (comme Netatmo) pour gnrer des parcours de course en temps rel enfonction de la qualit de lair. Pour accder ces donnes, le cl ient devrait pouvoir acheterces donnes. La condition la ralisation de ce business model est la ncessit de dployerun systme de micro-paiements cot rduit et dont la blockchain pourrait tre un lmentessentiel32.

    De mme, IBM dveloppe dans son rapport Device Democracy lide dutiliser lablockchain pour rpondre aux principaux enjeux de lInternet des Objetsque sont les cots deconnexion et de transactions (prises au sens large i.e. messages, paiements, change dedonnes, etc.). En effet, selon IBM, pour tre efficace et dploy dans le monde entier, lerseau de lInternet des Objets doit tre pens ds le dpart comme quelque chose dedcentralis et de manire ce que les transactions soient ralises de manire anonyme,scurise et sans tiers de confiance.

    32Une tude mene par lUniversit de Zurich When Your Sensor Earns Money : Exchanging Datafor Cash with Bitcoin va encore plus loin en proposant dutiliser le bitcoin comme monnaie dchange.

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    3. Deux scnarios de risque : que se passerait-il si lon passait ct dublockchain ?

    3.1 Etat des lieux : ladoption de laBlockchain par les autorits montaires et les Etats

    Aux Etats-Unis, IBM entretient des relations troites avec la FED pour tablir un

    systme de paiement fond sur la blockchain

    Au dbut de lanne 2015, IBM a annonc quelle rflchissait crer unsystme de paiementbas sur la blockchain33. La socit a entam des discussions avec la Federal Reserveamricaine pour mettre en place linfrastructure de paiement adoss au dollar. La monnaie encirculation via la blockchain serait identique celle en circulation dans le systme actuel : It's the same money, just not a dollar bill with a serial number on it, but a token that sits on this

    blockchain (IBM/Reuters). Il ne sagit donc pas de crer une crypto-monnaie mais dutiliserune Blockchain contrle par les banques centrales pour tablir une infrastructure plusefficace et moins coteuse.

    La Grande-Bretagne et la Norvge ont entam des rflexions sur la blockchain

    Dans un rapport trs complet questionnant le rle des banques centrales aujourdhui34, laBanque dAngleterre sinterroge sur les opportunits et les enjeux de dvelopper un nouveausystme bas sur le principe des crypto-monnaies. En parallle, Andy Haldane, chefconomiste de la Bank of England et Jan F. Qvistad, Directeur Excutif de la Banque CentraleNorvgienne rflchissent au dveloppement dun nouveau systme montaire plus adaptaux nouveaux entrants35.

    La Grce a aussi rflchi lapplication du blockchainpour marginaliser la BCEet les banques europennes dans le financement de son conomie (le systme

    Varoufakis)

    Le ministre des Finances grec Yanis Varoufakis a expos en 201436 lide de recourir unsystme montaire parallle si la Grce et la Zone Euro naboutissaient pas un compromisviable. Pour contourner la politique montaire de la Banque Centrale Europenne quiljugeait trop rigide, viter le blocage des banques commerciales, viter une autre cure

    daustrit et obtenir des liquidits salvatrices, Yanis Varoufakis avait imagin unsystme inspir du Bitcoin.

    Lide tait simple. Chaque contribuable aurait obtenu un compte bancaire de rserve enfonction de son numro fiscal. Il aurait alors pu acheter un FT-coin (FT comme Future Taxes)pour environ 1000 directement au Trsor grec ou tre pay en FT-coin. Le contrat imposaitalors au Trsor de rendre les 1000 tout moment ou daccepter ce FT-coin au bout de deux

    33 http://www.reuters.com/article/2015/03/12/us-bitcoin-ibm-idUSKBN0M82KB2015031234OneBank Research Agenda, publi en fvrier 201535The evolution of central banks: a practitioners perspective36

    A flawed currency blueprint with a potentially useful application for the Eurozone ; dans son blog :http://yanisvaroufakis.eu/2014/02/15/bitcoin-a-flawed-currency-blueprint-with-a-potentially-useful-

    application-for-the-eurozone/

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    3.2 Scnario probable : les Etats-Unis et le Royaume-Uni confortent leur avance et la France reste latrane ; les systmes alternatifs de paiement et de financement dorigine anglo-saxonne segnralisent entranant un risque accru de Base Erosion Profit Shifting (BEPS) pour la France

    Dans ce scnario, lcart dinvestissement (start-up ou grandes entreprises) entre la France etles pays anglo-saxons ne se rduit pas et permet aux Etats-Unis, la Grande Bretagne et auxentreprises installes sur leur territoire de faire clore des systmes de paiement sur lesquelsla France et la zone Euro nont pas demprise.Apple, IBM et la FED pourraient, par exemple,mettre en place un partenariat pour crer et grer un systme de paiement fond sur laBlockchain et une monnaie dollarcoin dont la valeur serait fixe par la FED elle-mme (letaux de conversion serait fixe). Ce dollarcoin ne serait pas une monnaie proprementparler mais un simple token ( jeton ) amlior transitant sur un rseau Blockchain. Cesystme de paiement serait plus comptitif (les cots de transaction seraient infrieurs ceux

    des banques) et destination de la plupart des paiements des particuliers et des entreprises.

    Premier impact pour lEtat franais: accrotre le Base Erosion Profit Shifting

    La problmatique de la BEPSet de la fiscalit de manire gnrale est de plus en plussouvent voque dans le cadre du dveloppement de lconomie collaborative. Les Etatsprennent conscience de lobsolescence des rgles sur lesquelles sont btis leurs systmesfiscaux37. A lchelle internationale, ces rgles reposent assez largement sur un principedimposition des revenus en fonction de critres de prsence physique sur le territoire duntat. De tels concepts ne rsistent pas lre du numrique.

    Ce risque pourrait saccentuer ds lors que le systme de paiement ne serait plus reli auxbanques et aux acteurs financiers traditionnels. En effet, ladministration fiscale est lheureactuelle incapable didentifier les oprations en crypto-monnaie (aussi bien dollarcoin quebitcoin) ralises par un contribuable sur un systme de paiement parallle, contrairement auxoprations financires courantes renseignes par les tablissements bancaires. Elle est donccontrainte de sen remettre au civismedes contribuables pour dclarer ces nouveaux revenus,dans un contexte o la collecte de limpt est souvent considre comme injuste. Il faut sedemander si ltat sera en mesure de collecter limpt (TVA, impts sur le revenu, etc.)dans un modle o toute entit rgulatrice aura t vince.

    En septembre 2015, dans un rapport dinformation, le Snat a relev les risques fiscauxexistants et lis lconomie collaborative38 : le constat pourrait samplifier avec lablockchain

    Elments de rsum :

    Lconomie collaborative nest plus un simple phnomne de socit (prs de 31 millions depersonnes en France ont dj achet ou vendu sur des sites de mise en relation entre

    37Le rapport publi par lOCDE le 17 juillet 2013 dnomm "plan daction concernant la base dimposition et le

    transfert des bnfices" avait servi de base aux travaux du G20 qui entendait lutter contre la politique trsagressive doptimisation fiscale des multinationales (Tax Planning)38http://www.senat.fr/rap/r14-690/r14-690.html

    http://www.senat.fr/rap/r14-690/r14-690.htmlhttp://www.senat.fr/rap/r14-690/r14-690.htmlhttp://www.senat.fr/rap/r14-690/r14-690.htmlhttp://www.senat.fr/rap/r14-690/r14-690.html
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    particuliers). []Les particuliers recherchent souvent un complment de revenu qui demeuremodeste ; dautres en font une vritable activit qui, de fait, devient commerciale. [] A titredexemple, le revenu moyen dun hte franais qui met un logement disposition sur le site

    Airbnb est denviron 3600 par an. En thorie, les revenus des particuliers sur les plateformes Internet sont imposables dansles conditions de droit commun (soumis lIR et la TVA). Nanmoins, en pratique, lesrevenus sont rarement dclars, rarement contrls et rarement imposs. De fait,ladministration fiscale apparat bien dmunie face cette croissance dchanges marchandsentre particuliers. Par ailleurs, le droit de communication qui permet ladministrationdobtenir les informations ncessairesauprs des plateformes collaboratives et des sites depaiement na pas de porte extraterritoriale.

    Le rapport propose, entre autres, de mettre en place un systme de dclaration automatiquedes revenus des particuliers, avec laide des plateformes collaboratives. Les plateformes sontla cl dun recouvrement efficace, limage de la collecte de la taxe de sjour par Airbnb .

    Deuxime impact pour les particuliers et les PME : hausse des cots bancaires

    (tenue de compte et financement)

    Les moyens de paiement (pris au sens large) sont aujourdhui une source de revenusabondants pour les banques franaises, qui leur permet notamment doffrir leurs autresservices, en particulier le financement de linvestissement pour les particuliers ou les PME, bas cot. Ceci contribue expliquer la faible dsintermdiation bancaire dans le crdit auxPME en France par rapport aux Etats-Unis.

    Pour retrouver leurs marges actuelles, dj attaques, les banques devront trouver dautressources de revenus. Cette autre source de revenus ne semble pas pouvoir tre le paiementdes particuliers, qui est sujet une concurrence croissante et lobjet dune grande attention dupolitique et du rgulateur. De mme, la concurrence est forte dans le crdit aux particuliers etparticulirement nfaste pour les banques qui quand elles perdent un crdit risquent de perdreun client.

    Le crdit dinvestissement consenti aux PME et aux particuliers semble donc pouvoirtre une source de revenus de substitution au moins partielle pour les banques

    franaises. Si les banques doivent renchrir leurs conditions de financement du crdit auxPME pour compenser leur pertes de revenus, cela aura de lourdes consquences pour

    lensemble du tissu de PME franaises.De mme, une hausse des cots de gestion decompte(aujourdhui relativement faibles pour les particuliers) pourrait tre accentue avec ledveloppement de nouveaux systmes de paiement. Ceci sobserve ds aujourdhui: le CrditMutuel a ainsi annonc en septembre 2015 un cot de tenue de compte de deux eurospar mois pour lusage dun compte bancaire ou dun chquier. Des services qui taient jusquprsent gratuits...

    Troisime impact pour les banques : une comptition accrue sur le crdit

    Les consquences du renchrissement du crdit aux PME seraient importantes pour cessocits, mais elles pourraient aussi tre importantes pour les banques elles-mmes. En effet,des Fintech comme LendingClub peuvent aussi se dvelopper dans le crdit aux PME, et pas

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    seulement sur les prts la consommation. LendingClub ne semble pas comptitif aujourdhuipar rapport aux cots du crdit aux PME franaises39. Cependant, le renchrissement du crditaux PME donnerait de lespace une concurrence agile et faibles cots fixes, ce qui

    conduirait une forte recomposition du paysage bancaire aussi. Le risque conomiqueidentifi pour les PME franaises est peu de choses celui que vivent les hteliers aujourd'huiface Booking : une rduction de leurs marges. Booking prend aujourd'hui entre 10% et 30%de commissions sur les hteliers. On peut imaginer demain que LendingClub et les socitssimilaires en oligopole sur le financement des PME, imposeront aux PME des contraintessimilaires.

    On peut galement sinterroger sur limpact de la blockchain pour le modle assurantielfranais, par exemple mutualiste : modle de complmentaire sant (healthcare lafranaise) dont le principe de tiers de confiance dcentralis est fondateur (solidarit descotisations)

    3.3 Scnario incertain : les crypto-monnaies alternatives sont adoptes par un nombresignificatif de citoyens et dentreprises entrainant un risque de perte de souverainetmontaire pour les Etats

    Ce scnario semble aujourdhui le moins probable puisquil suppose une dfiancegnralise envers le systme financier actuel. Nanmoins en cas de ralisation, ilengendrerait un risque de perte de souverainet montaire et dune instabilit financire dusystme.

    Les risques dun systme de paiement dans une crypto-monnaie totalementdsintermdi (i.e. aucune entit ne dtient plus de 50% des nuds)

    La cration montaire dans le cadre des crypto-monnaies suit un processus tabli dontlvolution est connue. Loffre de monnaie ne rpond donc pas la demande et estrelativement fixe. Cette offre fixe de monnaie pose plusieurs problmes40.

    Dune part, une offre fixe impose une dflation montaire. En effet, dans une situation ola quantit de monnaie est limite et rare, la valeur de cette monnaie augmente. C'est--direque pour une mme unit de monnaie, les individus peuvent acheter davantage de biens. Leprix des biens exprims en crypto-monnaies baissent donc relativement, conduisant unaffaiblissement relatif des monnaies nationales41.

    Dautre part, une quantit fixe de monnaie apporte de la volatilit . En effet, si loffre nesadapte pas la demande, le prix doit sadapter pour permettre les changes. La demandeen biens vendus en bitcoins peut varier pour de multiples raisons comme les saisons (soldes,ftes de fin dannes,..) de manire cyclique ou structurelle du fait de lapparition de nouveauxproduits.

    Avec une quantit fixe de bitcoins en circulation, les prix exprims en bitcoins vont connatreune forte volatilit, ce qui aura un impact ngatif sur la croissance de la bitcoin economy

    39Si on se limite au seul cot de crdit car le crdit sans garantie propos par certaines plateformes alternatives

    peut se comparer dj se comparer favorablement au crdit avec garantie40

    Cette analyse reprend les tudes ralises par les spcialistes Robleh Ali, John Barrdear, Roger Clews et JamesSouthgate dans leur article innovations in payment technologies and the emergence of digital currencies.41Cet argument est galement dvelopp en 2013 par Yanis Varoufakis dans son blog.

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    et sur le bien-tre des consommateurs. Cette forte volatilit a conduit la Banque de France sinterroger sur les risques inhrents ce systme dans son Focus de dcembre 2013.

    Cette forte volatilit soulve galement le problme de la stabilit financire. Ainsi, si unbrusque effondrement de la valeur dune crypto-monnaie largement rpandue devait survenirle cours du bitcoin en prsente dj plusieurs sur les annes rcentes cela pourrait avoirdes rpercussions sur le systme financier dans son ensemble. Surtout si des dtenteurs decrypto-monnaie ont emprunt des devises nationales pour acheter des crypto-devises,exposant les cranciers au risque en tant dans lincapacit de le rembourser.

    Enfin, se pose le problme de la conduite de la politique montaire. En effet, dans lesystme actuel, la banque centrale dispose principalement dun instrument pour atteindre sesobjectifs : la fixation du taux directeur42et galement dautres instruments non-conventionnels.Si les crypto-monnaies venaient se dvelopper largement, ces courroies de transmissionsdeviendraient inefficaces. Au sein dune mme conomie, on assisterait une fragmentationmontaire avec des secteurs et des populations indiffrents aux inflexions de la politiquemontaire.

    Ce risque de perte de souverainet montaire saccompagnerait videmment dune pertefinancire si les banques centrales venaient tre court-circuites. En effet, les revenus de laBanque Centrale (seigneuriage, intrts perus, etc.) se transfrant au profit des mineurs .Pour la zone euro, cest plus de 1Mdqui seraient concerns.

    Outre ces risques macroconomiques qui pourraient affecter le systme dans son ensemble,lEuropean Banking Authorities (EBA)43dnombre plus de 70 risques de natures diffrentespouvant survenir suite lventuel dveloppement des crypto-monnaies. La plupart de ces

    risques concernent les utilisateurs de ces monnaies (traabilit, rversibilit des transactions,piratage du systme, volatilit du change, etc.) mais dautres concernent le systme financierdans son ensemble (via le risque de change). Faisant cho ltude de la Banque de France,lEBA voque les possibilits de blanchiment dargent, de trafics illgaux et dventuellesextorsions de fonds.

    Que manque-t-il au bitcoin pour devenir une monnaie part entire ?

    Dun point de vue juridique, le bitcoin nest aujourdhui pas reconnu comme une monnaie. Lesconomistes quant eux dfinissent une monnaie selon une approche utilitaire suivant troisfonctions prcises.

    La premire exigence pour une monnaie est dtre un intermdiaire des changes. Lamonnaie est linstrument qui permet dchanger des biens en saffranchissant desinconvnients du troc (ncessaire double concidence exacte des besoins entre deuxpersonnes).

    La monnaie doit galement pouvoir constituer une rserve de valeurpour permettre dedsynchroniser lachat et la vente: elle peut ainsi tre conserve pour une utilisation ultrieure.La monnaie permet ainsi de transfrer du pouvoir dachat dans le temps. Sil peut exister un

    42Le taux directeur correspond au taux dintrt auquel les banques commerciales se refinancent auprs de la

    banque centrale. Le choix du niveau et des mouvements des taux agit sur lconomie via deux principaux canauxde transmission : le canal des taux dintrts et le canal du crdit.43Dans son rapport intitul EBA opinion on virtual currencies (2014)

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    risque la dtention de monnaie (inflation, risque de change, etc.), la confiance dans lastabilit du systme montaire lui confre gnralement cette capacit. Paul Krugman, dansson blog, souligne en effet quun dollar constitue une rserve de valeur sre car quelle que

    soit sa valeur, il permet de sacquitter de ses impts et est rgul par une Banque Centrale.De lor ou une habitation constituent galement une rserve de valeur car mme si leur valeurvenait scrouler, il serait tout de mme possible de les utiliser pour en faire des bijoux ou yhabiter.

    La monnaie doit galement servir dunit de compte. Elle doit permettre de mesurer lavaleur des biens dune manire universelle. La monnaie permet de dterminer des prix absoluset saffranchir des prix relatifs (autre inconvnient du troc). La monnaie agit alors comme untalon montaire.

    A lheure actuelle, le bitcoin est utilis au sein dune communaut assez restreinte. Si au seinde cette communaut, le bitcoin joue la fois le rle dintermdiaire des changes et dunitde compte, ce nest plus vrai en dehors de cette communaut. En consquence, le bitcoinnest pas aujourdhui une monnaie universelle.

    Comme le rappelle John Barrdear de la Banque dAngleterre : si au moins deux personnessaccordent sur la capacit dun bien tre une rserve de valeur, il peut devenir unintermdiaire des changes. Si cet intermdiaire des changes est accept par lensemble dela population, il devient alors une unit de compte.

    La question de la rserve de valeur divise les spcialistes . La valeur du bitcoin nestdtermine que par la demande actuelle et la demande anticipe. Le systme particulier decration des bitcoins rend sa valeur volatile, il constitue donc une pitre rserve de valeur de

    court-terme. En revanche, les dtenteurs actuels anticipent une forte demande long-terme,les incitants investir et pargner en bitcoin, cest dailleurs l tout le business-model desminers investissant des sommes considrables dans leur quipement et esprant une haussecontinue de la valeur des bitcoins. Pour certaines personnes, le bitcoin sert de support devaleur. Nanmoins, la valeur du bitcoin nest aucunement garantie, comme le rappelle PaulKrugman, Prix Nobel dconomie. En labsence de garantie, le bitcoin ne constitue pasthoriquement une rserve de valeur sre. Nanmoins, force est de constater que lusage quien est fait par les utilisateurs lui confre cette spcificit. In fine, le bitcoin pourrait tre dfinicomme une rserve de valeur des fins spculatives. Nonobstant, lheure actuelle, le bitcoinnest passez rpandu pour remplir toutes les conditions dune monnaie.

    Lutopie dun systme dcentralis, dsintermdi et drgul ?

    Le bitcoin est n et sest dvelopp par la volont de saffranchir de toute entit rgulatricecentrale. Sa conception actuelle et le principe de rmunration des miners44 pourraientconstituer son talon dAchille. Daprs une tude de la Banque dAngleterre sur les crypto-monnaies, en effet, la forte concurrence entre miners pourrait conduire un systmecentralis long-terme.

    A un horizon lointain (2040 estiment la plupart des spcialistes), la quantit maximale debitcoin a t produite (21 millions de bitcoin). Les miners, nuds essentiels du systme qui

    44Dans le rseau de pair pair de la blockchain, les miners sont des noeuds du rseau qui, en travaillant , produisent des preuves de travail. Preuves qui les autorisent ajouter une transaction dansla chane (un block est cr toutes les dix minutes)

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    vrifient les transactions nobtiennent dsormais plus automatiquement de bitcoin pour leursservices. La cration montaire est termine. Leurs rmunrations reposent donc sur lagnrosit des personnes qui ralisent des transactions.

    Ces frais de transaction ne sont pas obligatoires ; ils sont dcids par la personne dsireusede raliser une transaction. Chaque minerchoisit la transaction en fonction de la rmunrationpropose. Il y a donc une incitation pour chaque miner dvelopper sa puissance de calculpour augmenter ses chances de rsoudre le problme plus rapidement et obtenir larmunration en consquence. En effet, le profit espr dun minerest donc dautant pluslev que sa puissance de calcul est forte. Cependant, plus forte est la puissance de calculdu rseau tout entier, plus lesprance quun miner a de rsoudre le problme est faible. Ceproblme est aussi connu sous la dnomination de tragdie des biens communs : ilapparait dans le cas de ressources limites en accs libre (exemple dune ressource piscicoleet de pcheurs en concurrence). Les miners auront donc tendance augmenter leurs

    investissements tandis que leurs revenus baissent du fait de la concurrence. Le systmedcentralis est un modle rendement croissant : plus la puissance dploye par un minerest forte, plus ses gains sont levs. Ainsi, seuls les minerspossdant une forte puissance decalcul resteront dans le systme (tant que leurs revenus excdent leurs cots). Finalement, cesystme favorise le dveloppement de ple de miners aboutissant au cas extrme dunmonopole de minersfaisant place aux risques connus de fraudes. Le systme dcentralis telquil est construit aujourdhui aboutirait logiquement un systme centralis lencontre mmede son essence. Et cette entit centrale rgulant le systme pourrait ne pas avoir de bonnesincitations. Cependant, il est peu probable quun conglomrat de minersune fois dominant lesystme cherche dstabiliser le systme en place. En effet, leur position dominante na de

    la valeur que si le systme reste viable.

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    Une entit europenne double dentits nationales, statut public ou nonprofit ;Un financement de mme nature que celui des autorits de march : public ou par flchage(publicly mandated private money )

    CroissancePlus-PMEfinancepropose la constitution dune agence europenne de moyens,sur le modle des agences nationales de la recherche, charge de financer la production etla diffusion de recherche financire sur les PME-ETI:

    tout dabord concentre sur les socits cotes ligibles au PEA-PME (environ 3500 smalland midcaps en Europe) ;progressivement tendue aux titres obligataires et la dette des socits non cotes.

    Baptise lAgence Europenne de la Recherche Financire (EFRA, pour EuropeanFinancial Research Agenc y), cette entit agira par le biais dacteurs privs en concurrence(vendors, socits danalyse, plateformes de march), avec trois champs principaux

    dintervention:Les data : collecte, traitement, organisation, bases de donnes, diffusionLanalyse: Production, diffusionLa mise disposition de la recherche auprs des investisseurs internationaux et, selonles rgles applicables dans chaque pays, le grand public. LAgence participera ainsi crer une vitrine mondiale de lentrepreneuriat europen.

    LAgence assure la slection, le financement et le suivi, selon des procdures similaires celles mises en uvre par les agences de financement de la recherche : Comit de slection ;Comit de dontologie Ils veilleront la slection des projets et programmes dactivit enfonction des objectifs et priorits retenus par lagence, des qualits et performances de ces

    projets et programmes. La cration de lAgence devra seffectuer en deux tapes:

    1. Constitution dun comit scientifique et dontologique, compos de rgulateurs,chercheurs et de reprsentants des entrepreneurs, charg de :

    a. rdiger une charte qui prcisera les critres dune analyse financire de qualit: visite sur site, critres formels, etc., pour sassurer que lanalyse est de qualit

    b. former un annuaire europen des analystes financiers partir des brokersenregistrs, des socits nationales danalystes financiers, en consultant lesinvestisseurs des diffrentes places financires

    c. tablir une premire liste des socits analyser en priorit

    d. valider la mthodologie de lagence qui se constituera

    2. LAgence elle-mme financera les analystes (1b) qui mettront disposition desinvestisseurs une recherche de qualit (1a) sur des socits pour lesquelles elle ntaitpas disponible. La somme propose :

    a. crotra en fonction de la dure pendant laquelle la socit vise naura pas tanalyse ;

    b. sera tablie en fonction des prix du march.

    Par rapport des appels doffres, le systme de financement envisag prsente lavantage de

    redynamiser plus fortement lanalyse financireen stimulant aussi bien la recherche :

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    buy-side , dont la structure de cots bouleverse par MIF II niveau 2 pourra ainsitre rquilibre ;indpendante et sell-side : les recherches ne remportant pas la bourse de lEFRA

    viendront sajouter aux circuits existants,

    Ces analyses concurrentes concourront rassurer les investisseurs, qui seront ainsiplus incits financer les PME-ETI aprs lIPO, contribuant amliorer la liquidit et lavalorisation des socits.

    Les besoins stagent entre 25 000 et 40 000 euros par socit, sur une premire populationcible de 3500 PME-ETI europennes. En premire estimation, le besoin de financementslve donc 100 M par an, soit un budget comparable celui de lESMA.

    Le financement de lEFRA peut provenir de cinq sources:

    publiques :

    Les institutions europennes, et notamment la Commission, dans le cadre de lUniondes marchs de capitaux ;

    Les gouvernements nationaux et/ou instances rgionales, notamment pour abonder lamise en avant de la recherche sur les socits implantes dans leurs territoires ;

    prives :

    Les investisseurs, par le biais dun flchage collectif, linstar de lESMA: la crationde lEFRA pourrait ainsi attnuer les effets ngatifs de la cration dune taxe sur lestransactions financires ;Les places de march, partie par un flchage collectif et partie par lmulation : larecherche produite et promue par lEFRA contribue valoriser leur cote, donc leursmarchs ;Les socits elles-mmes.

    La part de largent public, ncessaire initialement pour combler la