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Rapport final de mission Poly-Monde 2010 DANEMARK PAYS-BAS Comment le design et le développement durable peuvent initier un renouveau du climat socio-économique ?

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Rapport final de mission Poly-Monde 2010

DANEMARK • PAYS-BAS

Comment le design et le développement durable peuvent initier un renouveau du climat socio-économique ?

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Bien que la mission Poly-Monde 2010 soit supportée par plusieurs institutions et paliers de gouvernements, les contributions des entreprises demeurent vitales pour assurer le succès de la mission. Que ce soit par une contribution financière ou par une visite industrielle à leurs installations, les entreprises se sont montrées une fois de plus très coopératives cette année afin de nous permettre d’organiser une mission de qualité.

Pour une 21e année consécutive, l’École Polytechnique de Montréal a grandement contribué au succès de la mission industrielle. Par l’entremise de l’orientation Projets internationaux, les étudiants ont reçu une formation académique privilégiée sur l’innovation technologique et la compétitivité internationale, afin de profiter au maximum de leur expérience au Danemark et aux Pays-Bas et d’en retirer les meilleures pratiques de leur modèle d’innovation respectif. De plus, nous tenons à remercier le président du conseil d’administration, M. Bernard Lamarre, le directeur-général de l’École Polytechnique, M. Christophe Guy, ainsi que les directeurs de départements pour leur support financier et leurs précieux conseils tout au long de notre préparation.

Plusieurs conférenciers sont venus partager leur expérience avec les étudiants membres de la mission, dans le cadre du cours préparatoire IND5116, à l’hiver dernier. Ces professionnels méritent également nos salutations pour leur apport concret sur les enjeux auxquels ils font face dans leur milieu de travail au quotidien. Une liste complète de ces conférenciers est présentée à l’annexe 3 du rapport.

L’équipe Poly-Monde 2010 tient aussi à remercier le chef de mission Alain Aubertin, Ph.D., pour l’aide, le soutien, l’effort et les généreux conseils qui ont contribué au succès de la mission.

Un gros merci également aux parents et amis des membres de la mission pour leur participation plus qu’appréciée aux nombreuses initiatives étudiantes de financement.

Remerciements

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Nous sommes fiers de commanditerla mission Poly-Monde 2010

Nous saluons la vision des gens

qui, tout comme nos fondateurs

Georges Claude et Paul Delorme,

transportent l’innovation au-delà

des frontières.

www.airliquide.ca

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Je suis heureux de présenter mes salutations les plus chaleureuses à tous ceux et celles qui participent au projet de visites industrielles Poly-Monde 2010 de l’École Polytechnique de Montréal, au Danemark et aux Pays-Bas. À l'heure où l'économie internationale est caractérisée par des échanges commerciaux de plus en plus élevés, il est tout à fait pertinent d'analyser les rouages qui stimulent le libre-échange pour mieux positionner notre pays. C'est dans ce contexte que la mission Poly-Monde 2010 fait escale au Danemark et aux Pays-Bas afin d'y explorer les facteurs qui favorisent la compétitivité et l'innovation ainsi que l'incidence de celles-ci sur la croissance économique. Il s'agira, entre autres, pour les participants d'examiner les stratégies mises en place par ces deux pays pour être plus concurrentiels sur les marchés mondiaux et de réfléchir à l'intégration de ces mécanismes dans les secteurs d'activités de nos entreprises. Par ailleurs, cette expérience enrichissante bénéficiera, sans aucun doute, aux étudiants en leur permettant d'approfondir leurs connaissances et de découvrir d'autres cultures. Au nom du gouvernement du Canada, je vous souhaite un voyage des plus enrichissants et vous offre mes meilleurs voeux de succès pour l’avenir.

OTTAWA 2010

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Présentation des membresAlexandre Maurice

Coordonateur

Antoine Courchesne-Tardif

Responsable de l’édition

Mikaël Héroux-Vaillancourt

Édition

Yuriy Vashchuk

Webmestre

Stéphanie St-Laurent

Responsable du financement

Caroline Arnouk

Financement

Martin Cousineau

Financement

Hassan El Ouehabi

Financement

Caroline Gravel

Financement

Martin Michaud

Financement

François-Xavier Robert

Financement

Christophe Sobolewski

Financement

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Alexandra Duron

Responsable de la logistique

Dominik Tremblay

Financement

Stéphanie Bernier

Logistique

Marie-Claude Blais

Logistique

Alexis Dagenais Everell

Logistique

Gregory Dutrieux

Logistique

Mathieu Lachapelle-Neveu

Logistique

Victoria Lakiza

Logistique

Maxime Lavoie

Logistique

Patrick Maletto

Logistique

Laura Matonog

Logistique

Maryline Rancourt-Ouimet

Logistique

Marc-Éric St-Jean

Logistique

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PréfaceDans la nouvelle conjoncture mondiale, notre aptitude à améliorer la condition humaine dépendra avant tout de notre capacité d’adaptation face aux changements rapides. La crise financière mondiale, la diminution de la biodiversité, les changements climatiques, l’accessibilité à l’eau, la sécurité alimentaire et la pauvreté sont autant de problématiques intimement liées et évoluant rapidement qui requièrent des solutions innovatrices et adaptatives. Tel que la dernière récession économique l’a démontré, des changements systémiques sont requis afin d’atteindre la résilience nécessaire pour affronter un contexte aussi variable. Il est conséquemment justifié de repenser nos structures institutionnelles, légales et technologiques, celles-ci constituant une expression de nos valeurs collectives.

Les principes du développement durable nous fournissent les lignes directrices pour orienter ces changements. Les missions Poly-Monde s’inscrivent dans cette optique en nous fournissant d’indispensables pistes de réflexion. Il est en effet profitable de demeurer attentif et ouvert aux points de vue, aux approches et aux solutions qui sont implémentées ailleurs, ceux-ci pouvant inspirer des solutions durables, créatives et innovatrices chez nous. Particulièrement, les recommandations de la mission Poly-Monde 2010, inspirées de visites industrielles effectuées au Danemark et aux Pays-Bas dans les secteurs de l’agro-alimentaire, de la biopharmaceutique, des énergies alternatives et de la logistique du transport maritime, sont à la fois pertinentes et importantes afin de préserver la compétitivité et la durabilité de notre économie.

Plusieurs occasions d’amélioration de ces secteurs industriels au Québec ont ainsi été mises en valeur. Pour le secteur de l’agro-alimentaire, celles-ci touchent à l’augmentation de la protection des terres agricoles, à l’agriculture biologique et aux pratiques d’étiquetage. La culture consultative observée dans les industries biopharmaceutiques danoise et néerlandaise constitue un atout majeur; il y a fort à parier que l’industrie d’ici gagnerait à s’inspirer de ce modèle. Ayant été parmi les premiers à s’intéresser au secteur des énergies alternatives, Danois et Néerlandais récoltent aujourd’hui les fruits de leur leadership entrepreneurial dans ce domaine. Quant à l’industrie maritime, elle a un grand potentiel au Québec; des réinvestissements judicieux dans ce secteur, tel que ce fut le cas dans les pays visités, pourraient engendrer d’importants bénéfices.

Au-delà de tout cela, l’autonomisation de nos générations futures à agir de manière durable nous permet de faire face à un futur incertain avec optimisme. Poly-Monde fournit une expérience éducationnelle riche à des étudiants afin qu’ils deviennent des agents de changement, cela en plaçant en leurs mains compétentes les outils d’un futur durable. De façon similaire, l’Institut international du développement durable travaille depuis 20 ans dans le but d’améliorer la qualité de vie pour tous, ce en menant des recherches innovatrices et en soutenant de jeunes leaders à travers des programmes de stages. Pour toutes ces raisons, nous tenons à sincèrement féliciter Poly-Monde pour une autre mission couronnée de succès et nous leur en souhaitons plusieurs autres à venir.

Sincèrement,

Dr. Henry David VenemaDirecteur, Gestion durable des ressources naturellesInstitut international du développement durable

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Photo prise par Stéphanie St-Laurent

Monument néerlandais, La Haye

Maersk Line, Arhus

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INTRODUCTION...............................................15

CHAPITRE 1 : L’envergure de la missionPoly-Monde 2010...........................................16

1.1 Cadre de la mission......................................16

1.2 Objectifs de la mission................................16

1.3 Les membres de la mission........................16

1.4 Le Québec : un mariage entre tradition et innovation........................................................17

1.5 Le leadership du Danemark et des Pays-Bas.....................................................18

1.6 Problématique de la mission.....................18

1.7 Secteurs d’activités étudiés......................18

Chapitre 2 : Design et développement durable..............................19

2.1 Le Design........................................................192.1.1 Design industriel : le développement de produits..................................................................192.1.2 Design de l’espace : l’aménagement urbain.....................................................................20

2.2 Le développement durable appliqué à notre étude.......................................................23

2.2.1 Visions et approches distinctes.....................24

2.2.2 Sommet de Copenhague...............................24

2.3 Contexte de la mission...............................25

Chapitre 3 : Portrait socioculturel.........26

3.1 Danemark.......................................................26

3.1.1 Particularités géographiques.........................263.1.2 Européens certes, mais avant tout scandinaves............................................................27

3.1.3 L’héritage des Vikings....................................283.1.4 La crise énergétique, un élément déclencheur...............................................................28

3.2 Pays-Bas.........................................................29

3.2.1 Particularités géographiques.........................293.2.2 L’aménagement du territoire, une nécessité qui forge une mentalité..........................29

3.2.3 L’eau, élément central...................................30

3.2.4 Pionniers de l’Europe.....................................30

Chapitre 4 : L’étude de secteurs...............32

4.1 L’agroalimentaire.........................................32

4.1.1 Comparaison des modèles de gestion du secteur agroalimentaire.........................................33

4.1.1.1 Une association de producteur

très rigide..............................................................334.1.1.2 Le système de quotas versus

un système ouvert..................................................344.1.1.3 Être rentable sans faire de

la production agricole de masse..............................364.1.1.4 Combiner l’augmentation de lapopulation et le maintien de l’intégrité

environnementale..................................................364.1.1.5 L’industrie des produits biologiques,

une puissance en Europe........................................38

4.1.2 Qu’est-ce qu’une saine gestion du territoire agricole ?.................................................40

Sommaire

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4.2 La biopharmaceutique.............................42

4.2.1 Les brevets pharmaceutiqueset l’impact de leur échéance...............................42

4.2.1.1 Un moteur d’innovation pour l’industrie

pharmaceutique.................................................43

4.2.2 Comment contrer la concurrence des fabricants de génériques?............................44

4.2.2.1 Le cas de Pfizer.......................................44

4.2.2.2 Le cas de Novartis....................................45

4.2.3 Les pays émergeants: uneopportunité à double tranchant.........................46

4.2.4 Se regrouper afin d’assurer une création de valeur...............................................47

4.2.4.1 La volonté commerciale de la

Medicon Valley...................................................47

4.2.4.2 La transformation de Montréal.................494.2.4.3 La transparence du Eindhoven

High Tech Campus..............................................49

4.2.5 Conclusion..................................................50

4.3 Les énergies alternatives.........................51

4.3.1 Historique...................................................51

4.3.2 Enjeux politiques........................................544.3.2.1 L’origine d’une culture où

l’énergie «verte» détient un rôle central...............544.3.2.2 Pourquoi l’indépendance énergétique n’est-elle pas une priorité aux Pays-Bas, et qu’est-ce que le gouvernement préconise

en matière d’énergie?.........................................564.3.2.3 Quelles sont les politiques québécoises en termes d’énergie, et comment se comparent-elles aux politiques danoises

et néerlandaises?...............................................574.3.2.4 Quel est l’impact d’un réseau de collaboration solide entre une nation et ses voisins en termes de production

d’électricité?.......................................................57

4.3.3 Innovations technologiques.......................59

4.3.3.1 Le concept du Smart Grid, une approche intéressante pour la gestion

de la consommation d’électricité..........................59

4.3.3.2 BIOCARBURANTS- L’avenir ou non?............59

4.3.4 Enjeux économiques...................................604.3.4.1 En quoi l’énergie constitue-t-elle un

pilier pour l’économie Danoise?...........................60

4.3.5 Perspectives futures....................................624.3.5.1 En regard avec leur orientationénergétique actuelle, vers quel avenir

les nations se dirigent-elles?.................................62

4.4 La logistique du transport maritime......67

4.4.1 Description du secteur et faits saillants.......67

4.4.2 Quelques enjeux dans le domaine............68

4.4.2.1 L’importance de l’intermodalité.......684.4.2.2 Les impacts de la crise financière sur

l’industrie maritime.............................................694.4.2.3 La concurrence dans le secteur

maritime.............................................................714.4.2.4 Comment les réglementations, les infrastructures et les appuis gouvernementaux

influencent-ils l’industrie maritime?......................73

4.4.5 Le rôle du design et de l’innovationdans le secteur maritime......................................73

4.4.6 Développement durable..............................74

4.4.7 Conclusion...................................................75

Chapitre 5: Recommandations pour le Québec..............................................76

5.1 Pour le secteur de l’agroalimentaire...76

5.1.1 Les associations de producteurs................76

5.1.2 Les quotas..................................................76

5.1.3 Liens avec le développement durable..........76

5.1.4 Liens avec le design......................................77

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5.1.5 Conclusion.......................................................77

5.2 Pour le secteur de la biopharmaceutique................................................77

5.2.1 Incitatifs à maintenir..........................................775.2.2 Suggestions à considérer pourl’évolution du secteur au Québec..............................77

5.3 Pour le secteur des énergies alternatives...............................................................79

5.4 Pour le secteur de la logistique du transport maritime...........................................80

5.4.1 Revitalisation de l’industrie maritime au Canada...................................................81

5.4.2 Harmonisation des infrastructures portuaires avec les espaces urbains...........................81

Annexe 1 - Liste des entreprises visitées....................................................................82

Annexe 2 - Liste des conférenciers invités.......................................................................83

Références.....................................................84

Un grand merci à nos commanditaires!................................................92

Photo prise par Yuriy Vashchuk

Parc public, Copenhague

Photo prise par Yuriy Vashchuk

Parc d’éolienne de Middelgrunden, Copenhague

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Les membres de la mission industrielle Poly-Monde 2010 sont fiers de vous présenter ce rapport, consécration d’une année d’étude des systèmes d’innovation que partagent le Danemark, les Pays-Bas et le Québec dans les secteurs de l’agroalimentaire, de la biopharmaceutique, des énergies alternatives et de la logistique du transport maritime.

Destiné aux commanditaires, aux représentants des secteurs concernés, aux investisseurs et à la communauté universitaire, cet ouvrage a pour but d’aider à comprendre le positionnement du Québec par rapport à ces deux pays d’Europe sur des sujets d’actualité suscitant un intérêt grandissant sur la scène internationale.

Entre autres, cette étude a pour objectif de mieux saisir l’effet des modèles économiques danois, néerlandais et québécois sur l’innovation technologique et comprendre de quelle manière cette synergie influence la concurrence entre les firmes internationales dans le contexte actuel de mondialisation. L’étude d’une soixantaine de cas d’entreprises permet de reconnaître certaines différences dans les modèles, notamment en termes de design et de développement durable, deux thématiques ayant façonné depuis quelques décennies l’évolution de ces nations sur le plan de l’efficacité énergétique et de l’optimisation de leur territoire.

Le rapport est divisé en cinq chapitres :

• Le premier chapitre présente l’envergure de la mission, ses objectifs, les intervenants y ayant participé, ainsi que la problématique et les secteurs à l’étude.

• Le deuxième chapitre présente le design et le développement durable, principales thématiques de Poly-Monde 2010 et du présent rapport.

• Le troisième chapitre dresse un portrait socioculturel du Danemark et des Pays-Bas, tels que perçus par les membres de la mission : infrastructures, transport urbain, habitudes de vie, tout pour comprendre leur manière de penser et d’agir !

• Le quatrième chapitre constitue la pièce maîtresse du rapport. Traitant des secteurs à l’étude, ces derniers sont décrits selon leurs enjeux majeurs actuels et futurs, analysés sous l’angle de l’innovation technologique et de la concurrence. Les dizaines de visites industrielles réalisées alimentent grandement ce chapitre.

• Enfin, le cinquième chapitre se veut une synthèse des apprentissages réalisés en cours de mission. Il tente de susciter une discussion sur les actions à prendre au Québec, au Danemark et aux Pays-Bas pour affronter les enjeux de l’industrie, afin d’offrir une vision d’avenir prometteuse tant pour les investisseurs que pour les populations, en agissant de manière plus responsable.

Introduction

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La Petite Sirène stylisée, Copenhague

Photo prise par Alain Aubertin

Vue d’un canal, Amsterdam

Photo prise par Alain Aubertin

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Photo prise par Alain Aubertin

Vue d’un canal, Amsterdam

Chapitre 1 : L’envergure de la mission Poly-Monde 2010Ce chapitre présente la mission Poly-Monde 2010, ses objectifs, ses nombreux intervenants et de dresser un bref aperçu des différents secteurs sur lesquels la mission s’est penchée au Québec, au Danemark et aux Pays-Bas.

1.1 Cadre de la mission Le contexte industriel d’aujourd’hui est marqué par l’émergence de nouveaux marchés, la concurrence internationale ainsi que la mondialisation des technologies. L’ingénieur, quel que soit son domaine de spécialité, doit être sensibilisé à cette réalité internationale et ainsi parfaire ses connaissances en ce qui a trait aux changements affectant les systèmes industriels. Par ailleurs, les entreprises canadiennes et québécoises ont ardemment besoin de renouveler leurs compétences et leurs connaissances, notamment en contribuant à la formation d’ingénieurs tournés vers l’international.

Les missions Poly-Monde parcourent l’Asie, l’Europe et les Amériques depuis 21 ans à ce jour en tentant de comprendre de quelle manière les entreprises d’ici et d’ailleurs parviennent à tirer profit de cette réalité économique sur la scène internationale.

Cette analyse des différents pôles et systèmes d’innovation a permis à notre délégation :

• De comprendre le contexte économique actuel ;

• D’examiner et de cibler les technologies qu’ont en commun le Danemark, les Pays-Bas et le Canada ;

• D’observer l’intégration de ces technologies à travers différents modes de gestion de la production, des ressources humaines, de recherche et développement ainsi que de la protection de l’environnement ;

• De comparer les performances et les ressources de l’industrie canadienne face aux industries danoise et néerlandaise afin de prendre conscience des forces et faiblesses des entreprises de quatre différents secteurs industriels ;

• De découvrir les technologies de pointe existantes au Danemark et aux Pays-Bas qui pourraient s’appliquer dans les industries du Canada et ainsi entrevoir les opportunités d’affaires et de transferts technologiques ;

• De développer des aptitudes telles que l’entreprenariat, le sens critique, le leadership, l’interdisciplinarité ainsi que le sens de l’organisation ;

• D’inciter de futurs ingénieurs à s’ouvrir à une autre culture.

1.2 Objectifs de la missionDans un premier temps, la mission se veut de nature académique, en complémentant la formation d’ingénieur des membres étudiants dans le cadre des cours IND5115 – Technologie et concurrence internationale et IND5116 – Mission Poly-Monde. Le projet leur offre la possibilité de parfaire leur bagage de connaissances en termes d’innovation technologique, de développer leur attitude corporative par la cinquantaine de visites industrielles effectuées au Québec et en Europe, en plus de leur laisser la chance de mettre à profit leurs compétences entrepreneuriales.

Dans un deuxième temps, la mission désire contribuer à la réussite de l’industrie québécoise et canadienne. La création de partenariats entre entreprises, centres de recherche et universités des deux côtés de l’Atlantique fait partie des discussions tenues au Danemark et aux Pays-Bas. Les membres étudiants participant à la mission représentent de plus des candidats de choix pour nos entreprises, de par leur ouverture sur le monde et leur apprentissage des pratiques les plus responsables. Le présent rapport et les présentations subséquentes en entreprises servent à transférer les apprentissages réalisés en cours de mission à l’industrie locale.

1.3 Les membres de la missionLa mission industrielle Poly-Monde 2010 est rendue possible grâce à l’effort collectif de ses 25 membres, 9 femmes et 16 hommes, provenant de huit disciplines du génie : biomédical, chimique, civil, électrique, industriel, informatique, mécanique et physique. Mené par le chef de mission, Dr. Alain Aubertin, et dirigé par le coordonnateur de la mission, M. Alexandre Maurice, le groupe est composé d’étudiants en génie finissant leur baccalauréat ou débutant leur maîtrise à l’École Polytechnique de Montréal.

L’organisation de la mission demeure sous l’entière responsabilité des membres étudiants :

• Les membres du comité de logistique créent les contacts appropriés au sein d’entreprises visées par les secteurs industriels étudiés afin d’organiser les visites industrielles. Pour la mission Poly-Monde 2010, cela représente 25 visites au Canada (Montréal, Ottawa),

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12 au Danemark (Arhus, Copenhague, Lunderskov) et 13 aux Pays-Bas (Amsterdam, Eindhoven, La Haye, Rotterdam, Wageningen). Une liste complète des entreprises et institutions visitées se retrouve à l’annexe 1 du rapport. Les membres du comité procèdent également à toutes les réservations logistiques, en termes d’hébergement, de transport et de restauration, nécessaires au bon déroulement du séjour en Europe.

• Les membres du comité de financement ont pour leur part fait preuve de persévérance dans leurs démarches de sollicitation afin de rassembler les fonds nécessaires à l’envergure de la mission Poly-Monde 2010. Une liste complète de nos commanditaires se retrouve à l’annexe 2 du rapport. Ils redoublent également d’originalité dans la planification d’activités de financement efficaces et amusantes.

• Les membres du comité d’édition assurent le professionnalisme de notre mission au sein de nos communications externes. La création et la mise à jour du site web de la mission Poly-Monde 2010, la rédaction du cahier de préparation et la planification de ce rapport final d’analyse ne sont que quelques-unes de leurs contributions au cours du projet.

Jouissant d’une diversité d’expériences professionnelle, communautaire ou collective, les membres de la mission proviennent d’une sélection soignée, visant à recruter des jeunes aux capacités communicatives et entrepreneuriales hors pair. Ayant tous accumulé une expertise en industrie, dans le cadre d’un stage obligatoire demandé par l’École Polytechnique, ils ont également suivi à l’hiver 2010 une formation commune axée sur le Danemark, les Pays-Bas et les secteurs industriels ciblés par la mission. Tous ont donc acquis des connaissances pratiques en termes d’innovation et de compétitivité dans de grandes entreprises telles que Accenture, Bombardier, CAE, Ericsson, IBM, Johnson Controls, L’Oréal, Pratt & Whitney et Procter & Gamble.

La mission Poly-Monde 2010 représente pour les membres une occasion unique d’apprentissage de la réalité industrielle se déroulant au 21e siècle, venant ainsi renforcer solidement leur formation académique et professionnelle. En tant que futurs ingénieurs aux portes du marché du travail, les membres démontrent par leur dévouement au cours des 16 mois de préparation une curiosité intellectuelle certes, pour mieux saisir les rouages macro-économiques influençant l’innovation de notre société, mais surtout, un leadership et une maturité d’esprit pour amener cette mission à terme.

Leurs apprentissages sur les modèles d’innovation présents au Danemark et aux Pays-Bas leur ouvrent l’esprit sur de nouvelles cultures, aux réalités parfois différentes des nôtres, mais tout aussi riches en histoire, en politique et en habitudes de vie. La mission Poly-Monde 2010 leur ouvre les yeux sur de meilleures pratiques à adopter afin de devenir des ingénieurs plus responsables.

1.4 Le Québec : un mariage entre tradition et innovationAutrefois aux prises avec une économie basée presque exclusivement sur l’exploitation de nos ressources agricoles, forestières et minérales, le Québec s’est donné, au cours du dernier siècle, des outils pour devenir un joueur significatif sur l’échiquier mondial de l’innovation technologique.

La Révolution tranquille a profondément transformé le Québec au cours des années 60, tant sur le plan social, politique, économique, que technologique. Cette période marque en quelque sorte l’éclosion de l’esprit novateur des ingénieurs québécois. À cette époque, les yeux du monde entier sont tournés vers le Grand Nord québécois, où nos ingénieurs s’apprêtent à tirer profit du puissant débit de nos rivières. L’exploitation du potentiel hydroélectrique fournit encore aujourd’hui le Québec d’une énergie renouvelable, propre, à un prix bien inférieur par rapport à nos voisins américains et européens.

L’année 2010 marque également le 50e anniversaire de l’ouverture de la voie maritime du Saint-Laurent, s’étendant de la région de Montréal jusqu’aux Grands Lacs. Son système d’écluses a révolutionné l’ingénierie civile canadienne et permis aux navires transocéaniques de desservir encore aujourd’hui l’imposant marché du nord-est de l’Amérique.

Cet élan collectif qui a rassemblé les Québécois à l’époque s’est accompagné de mesures sociales importantes afin d’assurer une meilleure qualité de vie aux citoyens et d’encourager le développement d’une main-d’œuvre qualifiée, par l’entremise d’un système d’éducation plus performant, à la hauteur de nos ambitions. La synergie établie alors entre les institutions académiques, l’industrie et tous les agents socio-économiques a transformé le portrait industriel du Québec. Cette masse de travailleurs compétents se veut à l’origine de la venue d’industries de pointe dans la province, tel que le secteur pharmaceutique qui embauche à ce jour près de 30 000 salariés, tout en abritant à Montréal les géants de l’industrie.

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1.5 Le leadership du Danemark et des Pays-BasEn cette époque d’ouverture des marchés, où les biens, les capitaux et la main-d’œuvre traversent plus facilement les frontières, la capacité d’innover est un facteur clé permettant aux pays émergents de croître et aux économies développées de conserver une place prépondérante sur l’échiquier mondial. Cette réalité, les gouvernements du Danemark et des Pays-Bas la comprennent bien en mettant sur pied depuis plus d’une décennie des politiques concrètes visant à promouvoir l’innovation au sein de leur économie et de leurs institutions politiques. Des décisions critiques parfois nécessaires pour ces pays densément peuplés, mais qui ont su élever ces nations au rang d’exemples en termes d’efficacité énergétique et d’optimisation de leur territoire.

Tout comme le Canada, ces deux pays possèdent des économies basées sur l’industrie du savoir, principalement soutenue par de petites et moyennes entreprises (PME).

Quelques faits intéressants sur ces deux pays :

• Le Danemark et les Pays-Bas occupent respectivement les 3e et 8e rangs mondiaux sur le plan de la compétitivité économique, selon le World Economic Forum;

• 33 % de la population active du Danemark et des Pays-Bas travaillent en science et technologie, menant les pays de l’OCDE à ce chapitre;

• Les entreprises danoises et néerlandaises possèdent une excellente réputation quant à leur rapidité à adopter de nouvelles technologies;

• Les deux pays se distinguent spécialement par la qualité de leur enseignement supérieur, pilier indispensable de l’innovation technologique;

• Le Danemark et les Pays-Bas possédaient en 2008 des taux de chômage parmi les plus faibles au monde, respectivement 1,7 % et 2,8 %.

1.6 Problématique de la missionAfin de cibler davantage le sujet de notre étude, une problématique a été définie en début de préparation à la mission. D’une part, cela orientait les 25 membres étudiants vers un objectif commun dès les premières rencontres d’équipe, et d’autre part, cela permettait d’expliquer de manière plus exacte la raison d’être de notre mission lors de nos sollicitations en entreprise. La problématique se lit

comme suit :

En tant que finissants ingénieurs, quelles leçons pouvons-nous tirer du modèle d’innovation du Danemark et des Pays-Bas, où le design industriel a une longue tradition et soutient le développement durable depuis plus d’une décennie? Quel est le rôle du design et du développement durable pour initier un renouveau complet du climat socio-économique, basé davantage sur une meilleure utilisation des ressources et du territoire?

1.7 Secteurs d’activités étudiésAfin de répondre adéquatement à cette question d’étude, la mission Poly-Monde 2010 a examiné principalement des secteurs industriels liés au développement d’une industrie du savoir dans les deux pays, soient :

• L’agroalimentaire

• La biopharmaceutique

• Les énergies alternatives

• La logistique du transport maritime

Ces secteurs ont été sélectionnés par le Conseil Poly-Monde, lors des premières discussions en marge de la réalisation de la mission Poly-Monde 2010, étant donné l’innovation technologique qui s’y développe récemment et le potentiel de comparaison entre ces secteurs au Canada (Québec) et dans les pays visités.

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High Tech Campus, Eindhoven

Photo prise par Alain Aubertin

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Chapitre 2 : Design et développement durablePar la vocation des missions Poly-Monde à rechercher les pratiques les plus novatrices et responsables de l’industrie, le Danemark et les Pays-Bas représentent des destinations de choix afin d’étudier en profondeur le design et le développement durable, les principales thématiques de la mission 2010. Le périple en Europe a permis aux membres d’apercevoir l’envergure de l’influence de ces thèmes sur le paysage industriel, politique et urbain des pays visités.

2.1 Le Design L’Office québécois de la langue française définit le design comme une activité créatrice se rapportant aux qualités formelles des objets produits industriellement en vue d’un résultat esthétique s’accordant aux impératifs fonctionnels et commerciaux.1 Le présent rapport démontre toutefois que cette définition nécessite d’être élargie, en y incluant notamment le développement de nouveaux produits et l’aménagement urbain.

2.1.1 Design industriel : le développement de produitsDès la phase de conception d’un nouveau produit, le design vient influencer de manière importante la suite des processus industriels. La stratégie adoptée par les entreprises reste propre à chacune d’elles en fonction de leurs attentes et de leur capacité :

• Si une entreprise entreprend d’innover sur le procédé de fabrication, la suite des événements peut prendre l’apparence d’une démarche de simplification de la production, où les opérations

logistiques sont optimisées au maximum par souci de réduction des délais ou des coûts d’inventaire. Cette transformation des procédés peut aussi être envisagée afin d’améliorer la qualité de la production.

• Si une entreprise prévoit plutôt innover sur un produit même, sa stratégie commerciale peut s’avérer de travailler davantage sur l’aspect esthétique ou fonctionnel du produit comme avantage compétitif.

À titre d’exemple, l’entreprise danoise Bang & Olufsen obtient sa notoriété depuis les années 40 par l’élégance visuelle de ses appareils électroniques, vendus à un prix supérieur à la compétition. Cette marque de commerce est rendue possible par l’embauche au sein même de l’entreprise de designers.

De leur côté, vu l’exigence des consommateurs pour l’esthétisme de leurs biens, les fabricants de masse, et ce peu importe le secteur, se tournent maintenant vers la sous-traitance afin d’assurer la créativité de leurs produits à un coût relativement faible. C’est notamment le cas de la multinationale Philips, rencontrée dans le cadre la mission

Photo prise par Yuriy Vashchuk Photo prise par Yuriy Vashchuk

IDEAL&CO, Amsterdam Exemple de design de bicyclette, Rotterdam

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Photo prise par Yuriy Vashchuk

Exemple de design de bicyclette, Rotterdam

à Eindhoven, aux Pays-Bas. Les sous-traitants s’avèrent souvent des petites entreprises de quelques employés, généralement fondées par des travailleurs indépendants, ayant acquis une expérience dans l’industrie auparavant. Les Néerlandais acquièrent une notoriété de plus en plus reconnue à l’échelle internationale dans ce domaine.

Dans un autre ordre d’idées, certaines entreprises se démarquent de la compétition par leur effort consacré au design en phase de conception sur le plan fonctionnel, particulièrement au sein des industries de pointe. Le fabricant de pales d’éoliennes LM Glasfiber, rencontré à Lunderskov au Danemark, développe par exemple une technologie unique lui permettant de produire la plus longue pale d’éolienne de l’industrie à 61,5 mètres, et dont la courbe prédéfinie fournit une meilleure efficacité lors de mise en marche. Il s’agit de leur principale carte de visite sur le marché. Enercon, une entreprise allemande rencontrée à Montréal, base également son marketing sur son design révolutionnaire de nacelle d’éolienne sans boîte d’engrenages, donc demandant moins de maintenance et utilisant moins d’huile. Le design joue un rôle prédominant dans ce cas par rapport à la propriété intellectuelle. L’industrie dans laquelle une entreprise est établie influence nettement la stratégie commerciale de ses acteurs.

Tel que démontré, le design possède plusieurs facettes complémentaires. Lors de notre passage à Copenhague, le Centre danois du design (Dansk Design Center) présentait justement une exposition mentionnant dix caractéristiques nécessaires à un design adéquat :

• Innovateur, en apportant à l’utilisateur de nouvelles fonctions à valeur ajoutée ;

• Fonctionnel, car son objectif est de servir une ou plusieurs fonctions de façon optimale;

• Esthétique, pour donner un pouvoir de séduction à l’objet;

• Intuitif, et ainsi rendre obsolète l’utilisation d’un manuel d’utilisation;

• Rentable, c’est-à-dire qu’il doit bien se vendre et avoir un profit intéressant;

• Honnête, car il ne faut pas laisser croire à des fonctions qu’il n’a pas;

• Durable, puisqu’il ne doit pas entrer dans la mode du consumérisme à outrance;

• Responsable, en ne négligeant aucun aspect, notamment environnemental;

• Attirant, car la forme et le style sont des aspects

essentiels d’un bon design;

• Orienté vers l’utilisateur, c’est-à-dire lui apporter une valeur matérielle et immatérielle.

De cette liste ressortent deux éléments qui attirent particulièrement notre attention : durable et responsable. Il devient de plus en plus commun d’entendre parler d’éco-conception, et cela doit devenir pratique courante pour la prochaine génération d’ingénieurs. Il s’agit d’effectuer les meilleurs choix à chacune des étapes du cycle de vie du produit afin de limiter les impacts socio-économiques et environnementaux : exploration, extraction des ressources naturelles, transport, transformation, fabrication, emballage, livraison, recyclage, etc. Par exemple, utiliser des matériaux à faible empreinte de carbone, à faible coût et à faible teneur en produits toxiques. Créer des produits composés d’un minimum de matière et facilement recyclables peut s’avérer une autre solution, sans diminuer la qualité du produit. Prenez Konings Industrial Design, par exemple, qui conçoit un clavier pour Dell en réduisant la quantité de matières plastiques de 20 %, pour un produit vendu à des dizaines de millions d’exemplaires. L’impact est significatif ! L’idéal, d’un point de vue durable et responsable, demeure par contre de créer des produits n’augmentant pas la consommation des gens, ce qui peut parfois sembler contre nature pour le designer.

2.1.2 Design de l’espace : l’aménagement urbainL’optimisation du territoire passe par une conception soignée de l’espace urbain, dans lequel les individus peuvent vivre et se déplacer allégrement, tout en respectant la nature. Les villes devenant de plus en plus densément peuplées, notamment dans les pays émergents (Shanghai, Mumbai, Moscou, etc.), il paraît essentiel de développer son savoir-faire pour assurer une qualité de vie aux citoyens.

Le charme des villes telles que Copenhague, Rotterdam ou Amsterdam passe par la planification urbaine, où les pistes cyclables côtoient les avenues bondées de véhicules, alors que le réseau de transport en commun (métro, tramways, autobus) demeure une alternative appréciée par la population pour se rendre à leur lieu de travail. Même les rues piétonnes et de nombreux parcs y trouvent leur place, tout en conservant un accès aux cours d’eau. S’il peut être parfois risqué de se déplacer en vélo dans les rues de Montréal à l’heure de pointe, il s’agit d’un pur plaisir au Danemark et aux Pays-Bas, et les citoyens utilisent ce moyen de transport à profusion.

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De plus, le design s’applique aussi aux espaces de travail. Deux visites se sont montrées particulièrement révélatrices à ce sujet : le centre de création culturelle NDSM à Amsterdam et le High Tech Campus (HTC) à Eindhoven. La visite du centre NDSM s’est révélée instructive sur le plan du leadership du gouvernement néerlandais à mettre en place des infrastructures destinées à encourager la collaboration entre designers et artistes. Le gouvernement loue des espaces à prix modique à l’intérieur de cette ancienne manufacture de bateaux désaffectée. Ce genre de milieu de travail est idéal pour faciliter l’interaction de plusieurs dizaines de groupes d’artistes et de designers sous un même toit. Bien que l’idée puisse paraître marginale au premier coup d’œil, plusieurs multinationales font maintenant affaire avec ces firmes de design à titre de sous-traitants. Montréal possède également d’anciennes installations portuaires converties en studios, il sera intéressant de constater à long terme l’impact de cette initiative.

Le bâtiment principal du HTC, le Strip, promeut quant à lui l’innovation ouverte, c’est-à-dire en encourageant les échanges entre les spécialistes. Situé au cœur du complexe, le bâtiment abrite la seule cafétéria du campus, invitant ainsi plus de 7000 ingénieurs en R&D à se côtoyer quotidiennement. Le design physique des lieux contribue à cet écosystème de permettre des discussions entre les différents niveaux de la hiérarchie, et ce, entre toutes les entreprises présentes. Même les stationnements multi-étages extérieurs retiennent l’attention, leurs façades extérieures étant recouvertes de vignes, qui rehaussent l’apparence visuelle tout en captant le gaz carbonique dégagé par les véhicules.

Cette mission industrielle au Danemark et aux Pays-Bas permet réellement de constater l’envergure du design, dans toutes ses facettes, et à quel niveau il soutient le développement des sociétés afin d’assurer un avenir durable.

Aménagement du canal, Arhus

Photo prise par Yuriy Vashchuk

Photo prise par Alain Aubertin

Conception originale d’édifice, Rotterdam

High Tech Campus, Eindhoven

Photo prise par Alexandre Maurice

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Le pont Erasmus, Rotterdam

Photo prise par Alain Aubertin

Photo prise par Gregory Dutrieux

I amsterdam, Amsterdam

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2.2 Le développement durable appliqué à notre étudeLa première notion du «développement durable» (sustainable development) est apparue à l’intérieur du rapport Brundtland, publié en juin 1987 sous le titre «Our Common Future» par la Commission mondiale sur l’environnement et le développement des Nations Unies.

Après plusieurs débats, une définition générale du développement durable est maintenant généralement acceptée comme étant «(...) un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs».2 Pour atteindre ce type de développement, trois objectifs généraux devraient être visés :

• Maintenir l’intégrité de l’environnement

• Assurer l’équité sociale

• Viser l’efficience économique3

Pour la plupart des projets, ces objectifs paraissent antagonistes à première vue. En effet, le maintien de l’intégrité de l’environnement peut s’opposer à l’efficience économique et à l’équité sociale. De plus, l’efficience économique reste depuis longtemps l’objectif dominant de nos sociétés. Les entreprises et les gouvernements en font très souvent leur priorité. Cependant, il demeure de la responsabilité sociale des ingénieurs de prendre les décisions appropriées à chacune des phases d’un projet, particulièrement au stade de conception, afin de maintenir l’intégrité de l’environnement et assurer l’équité sociale.

L’idée du développement durable est de trouver des solutions pour réussir ces trois objectifs simultanément (environnemental, économique et social), et donc assurer la pérennité de notre société. Le développement durable ne doit pas être vu comme le travail d’un ministère ou d’un secteur industriel uniquement, mais comme une manière de penser et d’agir par tous pour le développement de notre société en orientant nos actions vers des objectifs à court, moyen et long terme.

Malgré la popularité actuelle du développement durable, sa définition demeure toujours incomprise par plusieurs. Une vision erronée du développement durable à tendance à l’associer prioritairement à l’objectif de «maintien de l’intégrité environnementale» au détriment de l’objectif «d’équité sociale». Les visites effectuées dans le cadre de Poly-Monde 2010 permettent effectivement de constater que les entreprises, notamment au Québec, possèdent dans la plupart des cas cette vision limitée du développement durable, en ne faisant allusion qu’aux objectifs environnementaux. Cependant, l’analyse des secteurs industriels à l’étude dans cette mission, présentée au chapitre 4 de ce rapport, relève de nombreux enjeux sociaux.

 

Photo prise par Yuriy Vashchuk

Phillips Healthcare, Eindhoven

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2.2.1 Visions et approches distinctesÀ l’international, le développement durable semble un concept interprété et appliqué différemment d’un pays à l’autre, comme en témoignent les politiques et décisions des divers gouvernements.

Au Québec, le Bureau du développement durable fait partie du Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP). Cependant, son mandat se limite aux activités de sensibilisation auprès du public et à l’adoption des plans d’action par les ministères. Il s’agit d’une démarche patiente et ordonnée pour évaluer les initiatives en développement durable, mais il ne force pas l’atteinte d’objectifs chiffrés pour l’instant.

Aux Pays-Bas, le Ministry of Housing, Spatial Planning and the Environment s’occupe surtout de la stratégie nationale de la planification du territoire4. La saine gestion du territoire étant une priorité pour les Pays-Bas, pays densément peuplé, ce ministère possède assez d’influence et de pouvoir pour faire appliquer les réglementations environnementales.

Au Danemark, le terme «sustainable» (durable) est omniprésent sur les publications officielles du pays, notamment sur le site web du gouvernement5. Il s’agit presque d’une marque de commerce pour le pays. Le Ministère de l’Environnement et celui du Climat et de l’Énergie promeuvent d’agir de manière responsable et le message semble bien inculqué dans les pratiques mises en place par les entreprises et institutions que nous avons visitées.

Si les entreprises influencent le développement durable d’une société par leurs choix technologiques, les arbitres de ce développement demeurent néanmoins les gouvernements. Par la mise en place de lois et de réglementations, ils orientent les pratiques industrielles.

Avec l’émergence de pays très densément peuplés, en quête d’un niveau de vie supérieur, la question des besoins énergétiques devient cruciale. Dans le contexte de notre étude, la mission Poly-Monde 2010 se devait de se pencher sur la question des énergies alternatives. Les grands barrages hydroélectriques du Nord du Québec et le développement de la filière éolienne à grande échelle au Danemark ont pris naissance essentiellement à la suite d’une volonté politique en ce sens. Bien que chaque pays soit libre d’appliquer les taxes et les politiques qu’il désire à l’intérieur de ses frontières, le développement durable demeure un enjeu mondial en face duquel les chefs d’État se doivent de coopérer en posant des balises respectées par tous.

Bâtiment de stationnements «verts», High Tech Campus, Eindhoven

Stationnement de vélo, Amsterdam

Photo prise par Alexandre Maurice

Photo prise par Martin Michaud

2.2.2 Sommet de Copenhague (Conférence des Parties - COP15)Du 7 au 18 décembre 2009 se tenait à Copenhague la quinzième Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Réunissant plus de 120 chefs nationaux, cette conférence revêtait une importance toute particulière, car elle devait aboutir d’un accord remplaçant le Protocole de Kyoto, dont l’échéance est prévue pour 2012. Dans un souci de respecter les trois dimensions du développement durable des nations (économique, environnemental et social), l’accord final devait couvrir sur trois sujets primordiaux :

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• Limite du réchauffement climatique basée sur des résultats scientifiques

• Cibles à moyen et long terme de réduction d’émissions des gaz à effet de serre (GES)

• Soutien financier aux mesures d’adaptation climatique à prendre pour les pays en développement.6

Au terme des négociations, l’entente signée par les principaux partis impose une limite quant à l’élévation du niveau de température à 2°C. L’entente de Copenhague ne mentionne pas d’objectifs précis chiffrés de réduction d’émissions de GES à respecter, mais les pays s’engageaient à dévoiler leurs propres cibles dans les mois suivants. Alors que la Norvège s’engage à réduire ses émissions de GES de 40 % d’ici 2020, par rapport au niveau de 1990, de 30 % pour la Russie, de 25 % pour le Japon et de 20 % à 30 % pour l’Union européenne (selon les pays), le Canada fait piètre figure avec un maigre 3 % de réduction envisagée, semblable à l’objectif américain. Cependant, le premier ministre du Québec, M. Jean Charest, a profité du sommet pour dévoiler en coulisse l’objectif de 20 % de réduction de la province par rapport à 1990. Les pays émergents s’engagent de plus à communiquer leurs résultats à tous les deux ans.

L’entente prévoit également la création du «Fonds vert de Copenhague pour le climat», dans lequel les pays industrialisés s’engagent à déposer 30 milliards $US au cours des trois prochaines années, puis 100 milliards $US par année jusqu’en 2020, afin d’assurer l’assistance financière et technologique aux pays en voie de développement pour atteindre leurs objectifs socio-environnementaux sans compromettre leur croissance économique.7

Si le secrétaire-général des Nations-Unies, M. Ban Ki-moon, considère l’Accord de Copenhague comme un «début essentiel», le secrétaire exécutif de la CCNUCC, M. Yvo de Boer, se veut plus réaliste. Il rappelle que l’entente de Copenhague n’est qu’une lettre d’intention, qui se doit d’aboutir à un texte juridique aux objectifs réels, mesurables et vérifiables, beaucoup plus ambitieux en matière de réduction de GES. L’entente de Copenhague reste cependant à revoir d’ici 2015, selon lui, sans quoi la limite de 2°C ne sera pas respectée.8

2.3 Contexte de la mission Poly-Monde 2010La question d’un développement durable des sociétés fait partie des discussions entre les nations depuis plusieurs années, mais la communauté internationale semble davantage remettre cette problématique à l’avant-scène récemment. Les réalités divergent entre les pays développés et ceux en pleine émergence. L’indépendance énergétique et le développement industriel s’affichent comme des priorités pour les gouvernements, qui doivent maintenant orienter leurs institutions afin d’agir de manière responsable, dans le respect des citoyens et de l’environnement.

La mission Poly-Monde 2010 s’intègre ainsi dans ce contexte, en analysant en profondeur les démarches mises de l’avant au Québec, au Danemark et aux Pays-Bas, en mettant en lumière les meilleures pratiques à adopter du point de vue de l’ingénieur. Le design vient soutenir le développement durable dans chacun des secteurs industriels analysés, soumis à des réalités et des enjeux distincts.

Rencontre entre design et développement durable, Rotterdam

Photo prise par Yuriy Vashchuk25

Vue sur Amalienborg, Copenhague

Photo prise par Alexandre Maurice

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3.1 DanemarkLe Danemark est à la fois le plus petit et le plus méridional des pays scandinaves. Sa population est d’un peu plus de 5,5 millions d’habitants, dont environ le quart habite la grande région de Copenhague. Tout comme le Canada, le Danemark est officiellement une monarchie constitutionnelle, et est dans les faits une démocratie parlementaire au sein de laquelle le gouvernement est dirigé par un premier ministre.

siècles en contrôlant l’entrée de la Baltique. Les territoires du Groenland et des îles Féroé sont également rattachés au Danemark, mais disposent toutefois d’une grande autonomie politique.

Quelque peu vallonné par endroits, mais relativement plat en général, le Danemark jouit d’un climat maritime et tempéré. Les vents y soufflent souvent et parfois violemment, particulièrement sur la côte ouest du Jutland, qui est bordée par la Mer du Nord.

Chapitre 3 : Portrait socioculturel Le développement de secteurs industriels compétitifs à l’intérieur d’une économie donnée est un processus fortement influencé par les traits socioculturels qui caractérisent les gens qui y habitent. Le présent chapitre se veut donc une présentation de certains éléments socioculturels marquants que nous avons observés dans les deux pays visités. Ceux-ci aideront à comprendre comment, dans les quatre secteurs industriels étudiés et en regard des deux thèmes de la mission, Danois et Néerlandais ont su créer des entreprises compétitives et développer des expertises uniques.

3.1.1 Particularités géographiquesLe territoire danois est principalement composé de la péninsule du Jutland et d’une multitude d’îles dont les principales sont l’île de Fionie et le Seeland. Il est situé à la croisée de la mer Baltique et de la mer du Nord, et constitue un pont géographique entre la Scandinavie et l’Europe continentale. Sa position stratégique lui a ainsi donné des avantages commerciaux importants durant plusieurs

Figure 1: Carte du Danemark9

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Photo prise par Gregory Dutrieux

Citadelle de Copenhague, Copenhague

Moulin à vent, Copenhague

Photo prise par Gregory Dutrieux

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3.1.2 Européens certes, mais avant tout scandinavesTout comme la Suède, le Danemark est membre de l’Union européenne (UE) sans toutefois faire partie de la zone euro (les Danois ont rejeté cette option par referendum en 2000). Le cours de la couronne danoise est néanmoins lié à celui de l’euro, et ne peut varier au-delà d’une bande de fluctuation assez stricte (2,25 %)10.

Les liens qu’entretient le Danemark avec l’Europe et notamment avec son voisin allemand demeurent cependant avant tout économiques. Au point de vue de la culture, la proximité est bien plus marquée avec les autres peuples scandinaves. Cela s’explique à la fois par une histoire commune (les trois pays scandinaves ont été réunis sous la même couronne à maintes reprises) et des langues fortement apparentées. Fait intéressant à ce sujet, un membre de la direction du port de Copenhague-Malmö nous a expliqué comment, au cours des réunions et assemblées, Danois et Suédois parlent chacun leur propre langue et arrivent parfaitement à se comprendre. Bien que les peuples scandinaves aient entretenu de féroces rivalités à travers les siècles (et en entretiennent toujours à certains égards, notamment dans les stades de football), ils sont aujourd’hui de proches collaborateurs.

Au-delà de la langue, les Scandinaves partagent un modèle de social-démocratie assez similaire, caractérisé par des taux de taxation parmi les plus élevés au monde et une redistribution de la richesse par divers programmes d’aide sociale. Ce modèle de gouvernance du bien commun, qui fait l’envie de bien des nations autour de la planète, repose sur deux éléments fondamentaux. Premièrement, la mentalité des habitants à travers les différentes couches sociales, qui acceptent ce modèle et en assurent le bon fonctionnement (le Danemark est parmi les pays les moins corrompus de la planète).11 En second lieu, l’important processus de redistribution de la richesse s’appuie sur un processus tout aussi impressionnant de création de richesse (les économies scandinaves figurent année après année parmi les plus hautement compétitives).12

Un autre trait culturel nous ayant frappé est la forte propension qu’ont les Danois à respecter les lois et règlements. Qu’il s’agisse de cyclistes qui descendent de leurs vélos aux intersections piétonnes ou encore de gens qui avertissent certains étudiants québécois de bien vouloir ôter leurs pieds des bancs du métro (!), un consensus social semble s’être établi au profit d’un mieux-vivre ensemble et d’une préservation du bien commun. Celui-ci est d’ailleurs caractérisé par une culture consultative assez étendue

ayant pour but le respect des communautés locales et de l’environnement. Tout ceci contribue vraisemblablement à faire des Danois le peuple le plus heureux au monde selon le magazine Forbes13.

Plat de poisson et fruits de mer, Arhus

Photo prise par Yuriy Vashchuk

Canal de Nyhavn, Copenhague

Photo prise par Gregory Dutrieux

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Design urbain autour du canal, Arhus

Photo prise par Alexandre Maurice

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3.1.3 L’héritage des VikingsL’époque viking danoise, qui s’étendit environ de l’an 800 à l’an 1050, est bien connue à cause des guerriers redoutables qui terrorisaient les différents peuples européens de l’époque. Moins soulignées demeurent toutefois les remarquables compétences de commerçants des vikings, qui furent souvent invités à s’établir là où leurs expéditions les menaient afin de faire profiter aux communautés locales de leur expertise en la matière14.

De plus, les Vikings furent les premiers explorateurs-pionniers européens. Habiles constructeurs de navires, ils se rendirent de Constantinople (l’actuelle Istanbul) à l’est jusqu’aux contreforts de l’Amérique du Nord à l’ouest. Ce qui demeure aujourd’hui de cet héritage, outre les territoires du Groenland et des îles Féroé, s’observe notamment par la prépondérance des Danois dans le secteur du commerce maritime.

Statue de Viking, Kronborg Castle Helsingor

Photo prise par Alexandre Maurice

3.1.4 La crise énergétique, un élément déclencheurUn évènement plus récent ayant fortement marqué la manière de penser des Danois est la crise énergétique qui a frappé l’Europe occidentale au début des années 1970. À cette époque, plus de 90 % de la demande énergétique danoise était comblée par les importations de pétrole.15 Suite à la forte hausse des prix du brut à partir de 1973, les Danois n’ont eu d’autre choix que de prioriser les économies d’énergie et l’implantation de sources d’énergie renouvelables pour assurer leur sécurité énergétique. Cet aspect sera plus largement développé dans le chapitre sur les énergies renouvelables. Présentement, le Danemark joue un rôle actif dans la coopération internationale grâce à ses efforts dirigés sur la réduction des impacts négatifs sur l’environnement liés à la production et l’utilisation de l’énergie.

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Éolienne, Copenhague

Photo prise par Alexandre Maurice

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3.2 Pays-BasAu-delà des paysages bucoliques parsemés de moulins à vent, les Pays-Bas forment une nation moderne et hautement industrialisée. La vaste majorité des 16,7 millions de Néerlandais sont des citadins, les villes les plus importantes étant Amsterdam (capitale), Rotterdam et La Haye (siège du gouvernement). Ces trois villes sont situées dans le Ranstad, conurbation constituant le cœur économique et politique du pays. Le système politique en place depuis 1815 est une monarchie constitutionnelle dans laquelle le pouvoir législatif est détenu par les membres élus des États généraux (parlement).

3.2.1 Particularités géographiquesLe territoire continental des Pays-Bas est enclavé entre l’Allemagne et la Belgique, face à la Mer du Nord. Le pays se trouve à l’embouchure de trois fleuves majeurs en Europe (le Rhin, la Meuse et l’Escaut), ce qui en fait une plaque tournante du transport maritime européen depuis des siècles. Traduction littérale de « Nederland », le nom de Pays-Bas qualifie bien le relief du pays, dont près du tiers est situé sous le niveau de la mer16. Appelés polders, ces territoires gagnés sur la mer subsistent grâce à de vastes systèmes de digues et de drainage. Le Royaume des Pays-Bas comporte également quelques possessions outre-mer dans les Antilles (dont Aruba et Curaçao), vestiges du passé colonial du pays.

3.2.2 L’aménagement du territoire, une nécessité qui forge une mentalitéPar opposition aux Néerlandais qui eux-mêmes sont physiquement très grands17, la superficie des Pays-Bas est relativement petite. Il s’agit d’ailleurs d’une des nations les plus densément peuplées de la planète.18

Depuis le Moyen-âge jusqu’au XXe siècle, cette contrainte d’espace a incité les Néerlandais à agrandir leur territoire en construisant des digues et en asséchant des territoires autrefois immergés.20 La construction et l’entretien des polders, qui nécessite entre autres canaux et systèmes de pompage, ont sans aucun doute contribué au développement d’une expertise néerlandaise dans le domaine du génie hydraulique.

Toutefois, dès les années 1960, la forte croissance de la population a incité le gouvernement à voter la première Loi sur l’aménagement du territoire, dont le but est l’optimisation de l’occupation du territoire. De concert avec cette loi, le Ministère de l’Habitation fut renommé en 1965 ministère de l’Habitation et de l’Aménagement territorial, en raison du haut niveau d’imbrication entre ces deux entités (l’Environnement sera rattaché au ministère en 1982 pour les mêmes raisons). L’une des principales politiques de ce ministère vise à promouvoir la densité en milieu urbain, notamment en donnant une seconde vie aux immeubles désaffectés et en endiguant le développement de banlieues. Ce faisant, les espaces ruraux en zones périurbaines sont préservés et l’utilisation de l’automobile comme moyen de transport devient moins indispensable, au profit du développement de réseaux de transport en commun performants. Lors de notre séjour aux Pays-Bas, nous avons d’ailleurs pu apprécier l’efficacité de ces réseaux au cours de nos nombreux déplacements, ainsi qu’être témoins des rapides transitions entre zones urbaines et rurales. Dans les régions rurales, l’accent est mis sur la multifonctionnalité des espaces et la protection de l’environnement.21

L’originalité de l’architecture néerlandaise moderne est également un fait marquant de notre passage aux Pays-Bas. La ville de Rotterdam, presque entièrement reconstruite après la Seconde Guerre mondiale, de même que certains immeubles commerciaux aux environs d’Amsterdam témoignent du goût des Néerlandais pour le design et les concepts avant-gardistes.

Figure 2 : Carte des Pays-Bas19

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3.2.3 L’eau, élément centralPerçue à la fois comme une menace et un allié, l’eau est omniprésente aux Pays-Bas. Menace bien entendu à cause des risques d’inondations, fléau qui a sans aucun doute contribué à tisser trois traits de caractère des Néerlandais. Tout d’abord, un esprit de solidarité et de coopération bien tangible lie les habitants, bien conscients de la constante imminence d’une catastrophe. Conscience environnementale également, les Pays-Bas étant particulièrement vulnérables face aux changements climatiques, responsables de la montée des eaux. De la rivalité avec les forces de la nature résulte finalement l’esprit fonceur des Néerlandais, qui n’hésitent pas à mettre de l’avant des projets ambitieux, parmi lesquels les polders demeurent le meilleur exemple.

En contrepartie, cette ressource naturelle a permis aux habitants des Pays-Bas de devenir des marchands de produits de toutes sortes, qui transitent par les voies maritimes et fluviales qui les entourent. Grâce à cela, ce pays représente aujourd’hui une porte d’entrée dominante de l’Europe. L’histoire des Pays-Bas est d’ailleurs fortement imprégnée de la présence de la mer. Au cours du XVIIe siècle, les commerçants néerlandais établirent des comptoirs et des colonies aux quatre coins du monde. Profitant à la fois d’une supériorité navale et des premiers balbutiements de l’ouverture du commerce mondial, les Pays-Bas devinrent une puissance économique dominante, dont l’esprit est encore intact aujourd’hui. Cette caractéristique leur a permis de développer des compétences dans la gestion des voies maritimes à des fins commerciales et d’attirer les entreprises internationales.

Ce qui fut surnommé le Siècle d’or néerlandais fut également caractérisé par l’épanouissement des arts et par une grande ouverture découlant de la liberté de culte, attirant ainsi érudits et philosophes de tous horizons et transformant les Pays-Bas en centre du savoir.22 Grâce à cette ouverture, de nombreux immigrants se sont installés aux Pays-Bas et ils représentent aujourd’hui 19 % de la population totale.23 Parmi ceux-ci, l’on retrouve notamment des migrants provenant du sud de l’Europe, du Maroc, de la Turquie, des Antilles et des anciennes colonies d’Indonésie et du Suriname.

Cette diversité de population, en plus d’enrichir la culture locale, a pour avantage de fournir une main-d’œuvre variée qui possède des aptitudes uniques telles que la maîtrise de plusieurs langues.

3.2.4 Pionniers de l’EuropeToutes ces caractéristiques ont prédisposé les Pays-Bas à participer activement à la libéralisation du commerce international qui suivit la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le premier pas fut la création du Benelux (1948), entité économique comprenant également la Belgique et le Luxembourg. Les trois pays du Benelux furent ensuite des membres fondateurs de la Communauté économique européenne (CEE, 1957), et plus tard de l’Union européenne (UE, 1993). Les Pays-Bas participèrent également à l’introduction de l’euro en 1999. L’intégration économique à l’Europe témoigne à la fois de l’esprit coopératif des Néerlandais et de leur fierté, eux qui ont su conserver une forte identité nationale.

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Rue achalandée Leidseplein , Amsterdam

Photo prise par Martin Michaud

Vue sur canal, Amsterdam

Photo prise par Martin Michaud

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Vue sur canal le soir, Amsterdam

Photo prise par Gregory Dutrieux

Moulins à vent, Kinderdijk

Photo prise par Alexandre Maurice

Architecture originale, Rotterdam

Photo prise par Alain Aubertin

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Architecture originale, Rotterdam

Photo prise par Alain Aubertin

4.1 L’agroalimentaireCette section couvre les secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire au Québec, au Danemark et aux Pays-Bas. L’agriculture reste un secteur primordial pour une société. Il s’avère un secteur complexe vu les problématiques reliées à l’indépendance alimentaire du pays, à l’occupation du territoire, à une production dépendant des conditions climatiques et aux impacts environnementaux. Chaque zone économique possède la liberté d’appliquer des barrières tarifaires et non-tarifaires au commerce. Conséquemment, il y a encore beaucoup de différences entre les régions du globe.

Les principaux enjeux abordés dans cette section sont les associations de producteurs, les quotas, les produits de niches, les impacts environnementaux et le commerce biologique. Dans un premier temps, une mise en contexte s’impose.

Généralités

L’industrie agricole, telle qu’analysée dans les trois régions à l’étude, regroupe plusieurs points en commun. Cette industrie est d’abord fortement subventionnée et réglementée par l’État (le gouvernement provincial au Québec et l’Union européenne au Danemark et aux Pays-Bas). De plus, elle révèle un intérêt pour la production

de haute qualité à grande valeur ajoutée, nettement automatisée. Pour ce faire, ces régions possèdent des entreprises innovatrices spécialisées dans la recherche et le développement (alimentaire et agricole).

Certaines caractéristiques semblent toutefois particulières à chacune des régions. Rappelons la situation dans laquelle évolue le Québec. Doté d’un vaste territoire et d’une faible densité de population, il offre de grandes surfaces disponibles à la culture. Situé à proximité des États-Unis, soit un producteur et un consommateur énorme, il subit néanmoins un climat nordique plutôt rude durant les mois d’hiver, rendant l’agriculture assez difficile.

Le Danemark, quant à lui, bénéficie d’une grande densité de population. Il consacre une grande portion de son territoire et de ses efforts dans le secteur agricole, ce dernier représentant 19 % des exportations totales du pays en 200624.

Du côté des Pays-Bas, une proportion de 27 % de son territoire est située au-dessous du niveau de la mer25 , ce qui amène une problématique bien particulière sur le plan de la gestion des crues et des marées. Les terres s’avèrent alors fertiles et irriguées, contribuant à leur qualité. Le tableau ci-bas donne quelques comparaisons générales sur les trois régions étudiées.

Chapitre 4 : L’étude de secteursSuite aux apprentissages effectués dans le cadre du cours préparatoire à la mission à l’hiver dernier, ainsi que par les rencontres effectuées dans plus d’une cinquantaine d’entreprises au Québec, au Danemark et aux Pays-Bas en cours de mission, il a été possible de relever les enjeux dominants des secteurs industriels à l’étude : l’agroalimentaire, la biopharmaceutique, les énergies alternatives et la logistique du transport maritime. Le présent chapitre s’avère le cœur du rapport Poly-Monde 2010, fruit d’une recherche documentaire imposante et d’une analyse approfondie de la part des étudiants membres de la mission.

Tableau 1 : Caractéristiques générales du secteur de l’agroalimentaire

(1)L’observatoire de l’administration publique – ENAP; Rôles des intervenants du secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire; pages 1 – 2.

(2)Commission européenne - Direction Générale de l’Agriculture et du Développement Rural; L’agriculture dans l’Union européenne : Information statistique et économique 2009; pages 101. 32

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43 000 producteurs, dont 40 000 sont membres. Sa double structure est présentée à la figure 3 et s’explique par le fait que l’UPA regroupe aussi les fédérations spécialisées présentes à travers le Québec. Selon M. André Drapeau, adjoint exécutif à la direction générale et directeur des affaires institutionnelles à l’UPA, l’avantage du monopole syndical réside dans le poids politique et la pression qu’exerce l’organisation sur le gouvernement. Il mentionne également qu’en brisant ce monopole, les agriculteurs n’auront plus une aussi forte influence politique et risquent de perdre une certaine crédibilité auprès des autorités gouvernementales.

Pour l’UPA, les objectifs actuels sont mis en action via un plan d’action stratégique à long terme. Le but est de retirer un revenu équitable du marché. Afin d’accomplir cet objectif, plusieurs points sont essentiels tels que la mobilisation de l’ensemble des groupes affiliés, l’appui de l’opinion publique et la reconnaissance politique de l’importance de la mise en marché collective. Quatre grands axes sont les lignes directrices de ces actions : la consolidation des projets collectifs existants, la transparence des prix sur le marché, une meilleure répartition de la richesse et un accroissement de la demande pour les produits québécois.

L’Union paysanne : l’alternative proposée

Pour sa part, l’Union paysanne est un syndicat qui défend les intérêts des plus petits producteurs et des moyens alternatifs de production. Il se proclame comme étant un mouvement d’opposition au monopole de l’UPA et au lobby de l’industrie agroalimentaire.27 L’Union paysanne a été fondée en 2001 en réaction à la crise porcine que vivait le Québec. Elle souhaite maintenant que l’État investisse dans des fermes à échelle humaine pour que le secteur puisse se développer avec les caractéristiques suivantes: l’autonomie, la diversité et la création d’emplois locaux.

Aux dires du président, M. Benoît Girouard, l’Union paysanne est aussi axée sur la promotion d’une agriculture respectueuse de l’environnement. Il pense aussi que le financement au volume de production encourage les fermes à simplement grossir leur production. De plus, le bas prix du panier alimentaire au Québec n’encourage pas non plus les agriculteurs à se tourner vers une agriculture non industrielle. À son avis, ce sont les raisons principales du retard du Québec dans l’agriculture durable par rapport à l’Europe. L’Union paysanne croit aussi que tous les changements qu’elle propose ne sont pas possibles avec l’UPA et son monopole syndical dans le secteur agricole québécois.

4.1.1 Comparaison des modèles de gestion du secteur agroalimentaire du Québec, du Danemark et des Pays-Bas

4.1.1.1 Une association de producteurs très rigidesLa gestion agroalimentaire au Québec est un système très complexe où plusieurs joueurs interagissent. On note de profondes différences entre les régions étudiées, notamment en ce qui concerne le type d’association de producteurs. Seul le Québec dispose d’un organisme monopolistique comme l’Union des producteurs agricoles (UPA).

L’UPA : le régime actuel

L’UPA demeure le seul syndicat officiel de tous les producteurs au Québec. Il joue le rôle d’office de mise en marché, donc le vendeur unique, car il reçoit et gère la totalité des productions agricoles concernées.

L’UPA est un regroupement à l’échelle provinciale qui existe depuis 85 ans. L’adhésion y étant obligatoire, il est financé à 100% par les agriculteurs de la manière suivante : une cotisation fixe de 270 $, payable annuellement par chaque agriculteur reconnu au sens de la Loi sur les productions agricoles. De plus, un montant variable appelé « prélevé » est demandé pour l’agriculteur qui est membre d’une fédération spécialisée. La troisième source de financement de l’UPA paraît sous forme d’une contribution proportionnelle au volume mis en marché de chaque agriculteur. Le mécanisme des contributions permet de rendre équitable les sources de financement tant pour les petits agriculteurs que pour les plus gros producteurs. Le syndicat compte près de

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Figure 3 : Présentation de la double structure de l’UPA26

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À la différence de l’UPA, l’Union paysanne est un regroupement non seulement d’agriculteurs, mais également de citoyens. L’organisation réserve donc 2 sièges pour les citoyens en plus des 9 sièges occupés par des agriculteurs sur leur conseil d’administration. Selon M. Girouard, l’UPA possède une structure trop rigide, représente donc mal ses membres et répond moins bien aux besoins de la société. L’objectif principal de l’Union paysanne est à présent d’augmenter le nombre de membres souhaitant la mise en place d’un nouveau pacte agricole avec la société.

Le cas du Danemark

Au Danemark, les agriculteurs ont aussi un syndicat qui les représente. La Danish Farmers’ Union est une organisation qui regroupe près de 50 000 membres et qui existe depuis 1893. Au fil des années, la Danish Farmers’ Union a mis à la disposition des agriculteurs différents centres locaux de consultation. En 1972, le syndicat a créé le Danish Agriculture Advisory Service, un centre national de recherches et de consultation. Le transfert de connaissances s’effectue alors aux centres locaux, qui eux communiquent ensuite aux agriculteurs. Ces derniers demeurent ainsi à l’affût des dernières innovations en agriculture.

Mouvement coopératif danois

La gestion de la production agricole par mouvement coopératif s’avère une autre spécialité danoise à partir de laquelle le Québec pourrait tirer quelques leçons.

Prenons pour exemple l’industrie porcine, qui est très bien développée au Québec, aux Pays-Bas et au Danemark. Les deux nations européennes produisent 14 % de la production totale de porcs européens.28 Agriculture et agroalimentaire Canada reconnaît que les deux pays ont su développer leurs institutions afin qu’elles soient aptes à répondre rapidement aux demandes du marché.29

Au Danemark, il existe 4 principales organisations qui sont responsables de l’industrie porcine : Danish Pig Producers, Danish Agriculture, Danish Pig Producers Association et Danish Bacon and Meat Council.30 Environ 90 % du porc, produit et transformé, provient de 4 coopératives. Ces coopératives regroupent à la fois les producteurs, les abattoirs et les transformateurs. Elles possèdent d’ailleurs des usines et des entreprises de transformation leur permettant d’être présents à tous les niveaux de la chaine logistique.

Il existe aussi des regroupements coopératifs dans l’industrie laitière. Arla Foods est un producteur de produits laitiers important au niveau européen, mais d’importance moindre

sur la scène internationale. Au Danemark, 90 % des produits laitiers sont achetés par Arla, une coopérative gérée par des fermiers.

Ce type de regroupement est illégal au Québec, car selon l’article 60 de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, «un office ne peut s’engager dans le commerce ou la transformation du produit visé par le plan qu’il applique»31. Il est donc impossible de voir l’UPA devenir propriétaire d’une usine de transformation à moins que la Régie lève une injonction en cas de force majeure.

Les producteurs danois de porc et de lait ont donc une gestion qui leur permet de contrôler la chaîne de valeur de l’aliment. Tout le long de cette chaîne, les rôles de chacun des acteurs sont mieux définis. De plus, ces coopératives existent pour éviter le monopole des prix par de grandes entreprises. Elles réussissent généralement à obtenir de bien meilleurs prix pour les fermiers que ce qu’ils obtiendraient en vendant leurs produits chacun pour de leur côté. Du coup, cela rend moins utile les quotas pour le maintien de prix élevés.

4.1.1.2 Le système de quotas versus un marché ouvertLa question des quotas s’est révélée l’un des principaux enjeux discutés lors de nos rencontres en entreprises et instituts, tant au Québec qu’en Europe. La section ci-contre tente de mettre en contexte les situations respectives à chacune des régions et présenter les actions mises de l’avant par chacune d’elles dans ce dossier.

Québec

Le système de quotas est bien installé au Québec. Il permet de contrôler les productions laitières afin de diminuer le risque financier de l’État, d’adapter la production en fonction de la demande, de niveler le prix du lait à l’échelle provinciale et nationale et de répartir les frais entre les différents producteurs, ce qui accroît leur pouvoir d’achat. Les notions de quotas ou de plan conjoint de commercialisation des produits agricoles sont utilisées dans la majorité des secteurs agricoles du Québec ; le lait, le porc, les bovins, la volaille, les œufs de consommation, les œufs d’incubation, les ovins (agneaux et moutons), la chèvre, le lapin, les céréales, la pomme, la pomme de terre, les légumes destinés à la transformation, le tabac, le bleuet du Saguenay-Lac-Saint-Jean et le bois de la forêt privée. Par contre, dans certains secteurs, par force de spéculation, ces quotas ont pris une valeur énorme avec le temps. Selon Benoît Girouard, président de l’Union paysanne, rencontré à l’École Polytechnique :

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«Les petits producteurs ont de la difficulté à se procurer ces quotas. De plus, l’aide financière du gouvernement est proportionnelle au volume de production. Conséquemment, ce système favorise le développement de fermes laitières d’envergure axées sur une production de masse plutôt que le respect de la terre et des animaux et de l’environnement. » Comme solution, M. Girouard propose que l’état cesse d’encourager (et de subventionner) ceux qui produisent plus au profit de ceux qui produisent «mieux». Par «mieux», il entend des fermes de tailles humaines, qui emploient un plus grand nombre de personnes dans le respect du bétail et de l’environnement.

Étant donné que la production laitière représente 30% des recettes agricoles québécoises en 200832, le principal enjeu agricole au Québec concerne l’industrie du lait. La province est le principal producteur de lait au Canada avec 37% de la production totale de lait au pays.33 Le système de quotas est contesté et fait l’objet de plusieurs débats dans la province. Parmi les associations et entreprises rencontrées, certains prônent l’utilisation et la conservation des quotas tels qu’ils sont présentement, tandis que d’autres préconisent soit une révision du système, soit l’abolition complète des quotas. L’UPA et le Centre de développement du porc du Québec sont en faveur de conserver les quotas tels qu’ils sont actuellement, car, pour eux, c’est une bonne façon de contrôler leur industrie. Par contre, cette manière de procéder n’encourage pas la relève, étant donné le prix élevé des quotas. Cela se reflète sur une baisse de la main-d’œuvre qualifiée au Québec, car peu de nouveaux agriculteurs peuvent acquérir de l’expérience.

De plus, ce système laisse peu de place à l’innovation et à la créativité des acteurs. Ceux-ci doivent suivre les indications des instances gouvernementales et lorsqu’un changement est demandé, il s’en suit souvent une longue période d’attente et de négociation. De l’autre côté, nous retrouvons l’Union paysanne et Saputo, un joueur majeur de l’industrie, qui tous deux désirent un assouplissement au niveau des quotas de mise en marché du lait.

Dans le cas de Saputo, ce n’est non seulement une question de prix du lait, mais aussi une question de quotas sur la production de fromage. Ce dernier facteur fait en sorte que Saputo doit acquérir des producteurs locaux si elle veut augmenter son volume de production.34 De plus, le coût du lait entraîne Saputo à augmenter ses activités à l’étranger. Avec son usine en Argentine, le fromager obtient du lait à faible coût et une porte sur l’Amérique du Sud.

Contexte européen

La situation est légèrement différente de l’autre côté de l’océan Atlantique. Au Danemark, le secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire évolue dans un marché libre, à l’exception de la production laitière. Au Danemark, les quotas sont attribués par l’Union européenne via la Commission Européenne de l’Agriculture et du Développement durable, puis divisés sur leur territoire par le gouvernement danois via le Danish Dairy Board.

Les Pays-Bas se retrouvent dans une situation similaire à celle du Danemark. Ils ont vu la valeur des quotas laitiers diminués de moitié depuis 2006, pour atteindre 24 €/kg en 2009. Ceci est attribuable en partie à l’échéance des quotas laitiers de l’Union européenne prévue pour 2015 et à la diminution du prix des produits laitiers. Une majorité des pays membres désire l’abolition de ces quotas et exige une plus grande souplesse de la part des autorités. Selon la Commission des communautés européennes, les états européens bénéficient d’une réduction progressive de la valeur des quotas qui devrait être égale à zéro au 1er avril 2015.

Cette diminution du prix des quotas est un élément important pour les transformateurs, qui sont dorénavant en mesure de se procurer la matière première à coût moindre. Ils deviendront alors plus compétitifs sur le plan international. En contrepartie, cette diminution affecte à la baisse les revenus des producteurs laitiers, mais l’Union européenne a déjà débuté un programme d’aide financière afin d’éviter le potentiel problème.35 Recommandations pour l’industrie laitière

Suite à notre analyse, on peut déceler des avantages et des inconvénients d’un système de quotas dans les marchés néerlandais, danois et québécois. En voici un tableau résumé.

Tableau 2 : Quelques avantages et inconvénients des quotas laitiers

Avantages              Inconvénients

Protège  l’agriculteur  déjà  établi

Difficile  de  partir  en  affaires  ou  de  réorienter  sa  

production

Limite  les  surplus  sur  le  marché

Difficile  de  percer  à  l’international  pour  la  

transformation

Le  prix  et  les  parts  établis  dès  le  départ  par  les  

producteurs,  les  transformateurs  et  les  

épiciers

Rend  difficile  l’ajout  de  valeur  sur  le  produit  (lait  biologique  vs  lait  régulier)

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Préserver la santé du système agricole est important, mais une valeur des quotas trop élevée par rapport à la valeur du marché semble freiner le développement de l’industrie. Il serait alors important que le gouvernement québécois entame des discussions sérieuses et ouvertes avec les différents intervenants du secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire au Québec. Un assouplissement du plan conjoint de mise en marché accorderait une plus grande place aux innovations et entrainerait une plus grande concurrence, qui serait bénéfique pour le consommateur québécois et les nouveaux producteurs. Ce changement nécessiterait également une révision majeure du système de financement et du modèle de soutien aux producteurs. Un changement trop brusque du système nuirait aux plus petits producteurs bénéficiant du système de quotas.

Cette recommandation va aussi dans le sens des décisions des gouvernements en Europe et au Québec. Le conseil de l’Union européenne abolira les quotas laitiers le 1er avril 2015. Au Québec, le Rapport de la Commission sur l’avenir de l’agriculture et l’agroalimentaire québécois recommande une plus grande flexibilité dans le système agricole québécois.36

4.1.1.3 Être rentable sans faire de la production agricole de masseAvec un faible territoire et une population bien nantie, l’offre et la demande du Danemark et des Pays-Bas est axée sur les produits de niche. Comme l’a si bien souligné Hanne Vernegreen durant notre visite au Danish Agricultural Advisory Service, le Danemark doit constamment se demander comment garder un secteur agricole performant grâce à des produits à haute valeur ajoutée dans un petit pays avec peu de terres et des salaires élevés. Le petit territoire des Pays-Bas, partiellement sous le niveau de la mer, se retrouve dans une situation semblable.

Un exemple de produit à valeur ajoutée vient de chez Aqualife Logistics. Cette jeune compagnie a été créée avec l’intention de son PDG de trouver un marché dans le secteur alimentaire qui n’était pas encore couvert. Puisque selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, l’aquaculture croît plus rapidement que tous les autres secteurs de production de chair animale37, il a décidé de chercher plus en profondeur et s’est lancé dans le développement de conteneurs dédiés à faire le transport de fruits de mer frais entre le Canada et l’Europe, notamment le homard. Il est donc actuellement le seul à pouvoir répondre à cette demande de luxe.

Selon Christian Toupin, Directeur du Centre de Recherche et de Développement des Aliments d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (CRDA), le Québec est le marché nord-américain qui ressemble le plus aux marchés européens. C’est l’endroit avec le plus de demandes pour les produits de luxe en Amérique du Nord avec des produits tels que le sirop d’érable, les fromages fins, le cidre de glace Pinnacle et les homards vivants. Il croit que les goûts des Québécois se sont raffinés en voyageant autour du monde et les ont poussés à développer plus de produits de luxe chez soi. Toutefois, il stipule que la situation économique actuelle des Québécois ne nous permet pas d’investir dans la transformation des aliments comme le fait l’Europe. Avec un niveau de vie moins élevé que celui de nos amis danois et néerlandais, les Québécois n’atteignent pas la masse critique d’acheteurs nécessaire pour engendrer une telle offre de luxe.

De plus, cela se reflète par les dépenses moyennes en alimentation. Selon M. Girouard de l’Union paysanne, elles sont équivalentes à 30% du revenu moyen dans les ménages européens et à seulement 8% au Canada. Il y a donc moins de marge de profit possible de faire avec des produits de luxe au Québec qu’au Danemark.

D’autre part, l’omniprésence de l’UPA ne simplifie pas la tâche des petits producteurs à haute valeur ajoutée. En comparaison, cette gestion est faite de façon plus flexible par les agriculteurs danois et néerlandais, même par l’entremise de regroupements coopératifs tels qu’Avebe aux Pays-Bas et Arla Foods au Danemark. Les quotas québécois rendent aussi difficile la vente à l’étranger dû au coût élevé des produits de base.

4.1.1.4 Combiner l’augmentation de la population et le maintien de l’intégrité environnementale Avec la croissance de la population, mais aussi avec l’augmentation de nos besoins, il semble plus difficile de maintenir l’intégrité environnementale. D’autant plus que cette industrie est en contact direct avec l’environnement et la santé humaine, en temps qu’importante consommatrice d’énergie et d’eau. L’agroalimentation durable est une philosophie qui propose de répondre à cette question. Mais comme nous le verrons, la vision de l’agroalimentation durable est différente dans chaque pays.

Danemark

Le secteur de l’agroalimentation du Danemark est l’un des plus éco-énergétiques au monde. Cela est dû au fait que ce secteur a eu l’obligation de s’ajuster et de prendre des mesures drastiques afin de devenir rentable. En effet,

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pendant les années 1970, ce secteur subissait une crise en raison des législations environnementales, des hausses des coûts énergétiques et du matériel de production onéreux. Le Danemark n’a eu d’autre choix que de prendre d’importantes mesures d’optimisation de ses procédés. À ce jour, l’agriculture de ce pays est compétitive de manière générale. De plus, ce secteur possède des connaissances uniques, permettant de produire plus de nourriture, tout en réduisant l’impact sur l’environnement. Par exemple, entre 1995 et 2005, l’industrie de la nourriture et de l’agriculture danoise a diminué de 16 % ses émissions de CO2 et de 50 % sa consommation d’eau, tout en augmentant sa production alimentaire.38

De plus, au Danemark, nous avons visité un centre de recherche sur les mollusques de l’Université technique du Danemark (DTU Shellfish Center), qui se spécialise dans la mission de conseiller sur l’exploitation durable des ressources aquatiques des mers et des eaux douces. Il livre ses études au Ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche, ainsi qu’à d’autres industries.

Arla Foods oriente fortement ses activités vers un respect accru de l’environnement. Sa phrase emblématique «Plus près de la nature» est appuyée par une multitude de gestes et de procédés écologiques qui sont priorisés par Arla. En 2005, l’entreprise s’est donnée comme objectif de diminuer de 25 % ses émissions de CO2 avant 2020. Entre 2005 et 2010, elle a diminué de 5 % sa consommation d’eau, d’énergie et d’essence. Pour arriver à ses fins, Arla s’est engagé dans une modification des processus de chacune de ses sphères d’activité. Au niveau de l’élevage du bétail, la compagnie jette un regard critique sur la composition des aliments qui nourrissent leurs bêtes ainsi que sur l’engrais utilisé dans leurs champs. De plus, les déchets provenant de l’élevage du bétail sont réutilisés afin de produire du biogaz.39

Dans le domaine des transports, Arla utilise les biocarburants et des voitures plus éco-énergétiques. La compagnie a revu sa planification des itinéraires et offre des formations à ses conducteurs afin que ceux-ci conduisent de manière à moins consommer de carburant. Les démarches écologiques d’Arla s’étendent jusqu’à l’emballage grâce aux techniques d’éco-design. En effet, la compagnie réduit sa quantité d’emballage et utilise des matériaux à faible impact sur l’environnement. On dénote aussi une augmentation de l’utilisation de matériaux recyclables.

Pays-Bas

Aux Pays-Bas, Unilever appuie les objectifs du développement durable. Dans leur Sustainable Development

Overview 200940, ils expliquent différentes mesures pour atteindre des objectifs du développement durable. Ils ont, entre autres, diminué la consommation d’eau nécessaire à la production et à la l’utilisation de certains produits. Près de 15% de leur achat d’huile de palme est certifié durable par GreenPalm certificates. Depuis 2009, en Europe de l’Est, 100% des œufs utilisés dans les produits Hellmann’s, Camorra et Calvé viennent de poules ne vivant pas en cage. Entre 1995 et 2009, Unilever a réduit de 41% sa production de CO2 et de 65% sa consommation d’eau.

Québec

Le Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec propose certains programmes. Par exemple, le programme Prime-vert encourage les producteurs agroalimentaires à remplacer un peu de leur consommation d’énergie électrique par de l’électricité provenant de la biomasse et de la géothermie. Ces technologies permettront aux producteurs de devenir plus indépendants énergétiquement (diminution des coûts) en plus d’obtenir un meilleur bilan environnemental.41

Ce programme vise également à donner suite au Plan d’action 2006-2012 sur les changements climatiques, au Plan d’action concerté sur l’agroenvironnement et la cohabitation harmonieuse et au Plan d’intervention sur les algues bleu-vert.

Dans la version 2007-2010 du Plan d’action concerté sur l’agroenvironnement et la cohabitation harmonieuse, on

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Unilever, Rotterdam

Photo prise par Alain Aubertin

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Tableau 3 : Répartitions du plan d’action concerté sur l’agroenvironnement et la cohabitation harmonieuse (en millions de dollars)

parle de certains types d’objectifs illustrés dans le tableau 3 et de moyens pour y arriver, mais en ne mentionnant que très peu de chiffres. On nous donne la quantité d’argent investi par le gouvernement et l’UPA sur 3 ans. On apprend aussi que la production agricole engendre environ 10 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) au Canada et que l’utilisation des pesticides (kg/hectare) a été réduite de 36 % entre 1992 et 2002. Le 50 % de réduction espéré pour 2007 n’a pas été atteint. Sinon, on connaît l’engagement global de la province du Québec pris en novembre 2009. Il s’agit d’une réduction d’émission de GES annoncé de 20% en 2020 sous le niveau de 1990. On peut penser que les programmes mentionnés précédemment serviront à atteindre les cibles de notre engagement.42

Il existe aussi le Programme de traitement des matières organiques par biométhanisation et compostage du Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP)43 qui a un but similaire au programme Prime-vert.44 Ces deux programmes ciblent principalement l’industrie porcine. Cependant, les programmes de financement et ces plans d’action ne proposent aucune cible pour l’industrie agroalimentaire.

4.1.1.5 L’industrie des produits biologiques, une puissance en Europe

L’industrie des produits biologiques s’inscrit parfaitement dans les objectifs du développement durable. Notre mission en Europe a permis de relever le retard du Québec sur les pays européens dans cette industrie, en termes de législations en vigueur et de perception publique face aux produits biologiques.

Certification au Québec

Au Québec, ainsi que dans le reste du Canada, il existe plusieurs entités différentes qui peuvent certifier les produits biologiques. Ces organismes doivent tout d’abord être accrédités par l’Agence Canadienne d’Inspection des Aliments (ACIA), dans le cas de la certification canadienne, ou le Conseil des appellations réservées et des termes valorisants (CARTV) pour celle du Québec. Écocert et Québec Vrai, dont les logos montrés un peu plus loin dans le texte, sont les organismes de certifications dominants au Québec.

Dans une épicerie, on peut consommer des produits ayant une multitude de certifications provenant de différentes origines. Voici différentes normes nationales américaines et québécoises disponibles en épiceries au Québec. Elles

38

Enjeux Gouvernement  du  Québec  (millions  $) Producteurs  agricoles  (millions  $)

Qualité  de  l’eau  et  biodiversité

Réduction  et  rationalisation  de  l’usage  des  pesticides

Changements  climatiques  et  efficacité  énergétique

Cohabitation  harmonieuse  et  valorisation  de  l’effort  agroenvironnemental  des  agriculteurs

TOTAL

4,0 1,1

1,6 0,7

8,0 3,4

1,3 1,3

14,9 6,5

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sont nombreuses, tellement qu’il devient difficile d’en comprendre leur signification précise, si certaines d’entre elles sont équivalentes.

Contexte européen

Aux Pays-Bas et au Danemark, il y a respectivement leur niveau de certifications nationales et celui de l’Union européenne (UE). Chacun des pays de l’Union européenne est libre d’avoir ses propres normes en plus de celles de l’UE, en autant qu’il respecte ces dernières.

La différence majeure entre les certifications biologiques et organiques chez nous par rapport aux deux pays européens étudiés réside au niveau de la reconnaissance et de la confiance de la population envers ces logos, qui est beaucoup plus importante en Europe qu’au Québec.

En effet, en Europe, le même logo est utilisé à travers l’UE et il est obligatoire sur les produits. Il y est donc beaucoup plus facile de reconnaître les produits biologiques qu’au Canada, où un support visuel tel qu’un logo n’est pas obligatoire. Les différents logos, selon l’organisme de certification en question, peuvent être apposés sur le même produit et sèment de la confusion chez les consommateurs.

De plus, le support pour commercialiser, et surtout publiciser, les produits biologiques en Europe est très complet et accessible aux agriculteurs dû au plan d’action de la Commission européenne pour le développement de l’agriculture biologique et sa promotion auprès des citoyens de l’Union européenne. Au Canada, ce type de matériel doit être créé par les agriculteurs même. Autrement dit, l’UE semble beaucoup plus proactive que nos instances canadiennes et québécoises dans la promotion des produits biologiques en donnant des moyens pour faciliter le travail des agriculteurs.

Le tableau 4 décrit plus en détail comment fonctionnent les certifications au Québec, au Canada et en Europe.

Danemark

Le Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de la Pêche du Danemark donne beaucoup d’information sur l’agriculture biologique. Les Danois sont ceux qui consomment le plus de produits biologiques en Europe. Le logo des produits organiques est contrôlé par l’État tel que celui représenté par la figure 4. Si 98% de tous les Danois le connaissent, près de 90% ont confiance en la véracité qu’un produit arborant le logo est vraiment biologique.

Tableau 4: Points de comparaison importants de l’agriculture biologique

39

Québec Canada Danemark  -­‐  Pays-­‐Bas

Législation

Accréditation  des  organismes  de  certification

Politique  d'importation

Utilisation  du  logo

Logo

Gouvernement  du  Québec  à  travers  le   CARTV   (Conseil   des   appellations  réservées  et  des  termes  valorisants)

Gouvernement   du   Canada   à   travers  l ' A C I A   ( A g e n c e   c a n a d i e n n e  d'inspection  des  aliments)

Commission  européenne  à  travers  la  Direction  générale  de  l'Agriculture  et  du  Développement  rural

CARTV ACIA États  membres  de  l'Union  européenne

Reconnaît   les   certifications   de  l'ACIA.   Sinon,   doit   être   certifié   par  un  organisme  accrédité  par  le  CARTV  lors  de  l'importation.

Produits  doivent  être  certifiés  par  un  organisme   accrédité   par   l'ACIA.  Entente   avec   les   États-­‐Unis   :  certifications   mutuelles   suivants  quelques  conditions  spécifiques.

Des   organismes   de   certifications  étrangers   peuvent   postuler   à   l'UE  pour   être   accrédités.   Certification  uniforme  à  travers  l’UE.

Facultatif.  Réservé  à  la  production  du  Québec.   Le   produit   doit   seulement  porter   la  mention  "certifié  par"   avec  l e   n om   d e   l ' o r g a n i sm e   d e  certification   et   peut   porter   le   logo  de  ce  dernier.

Facultatif.   Disponible   aux   produits  importés.   Le   produit   doit   seulement  porter   la  mention   "certifié  par"   avec  le  nom  de  l'organisme  de  certification  et  peut  porter  le  logo  de  ce  dernier.

Logo  unique  et  obligatoire.  Disponible  aux  produits  importés.

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Au Danemark, 7% de la terre cultivée est utilisée pour les produits biologiques et 6,5% de tous les produits agroalimentaires sont biologiques. Les produits laitiers contribuent pour 38% de la vente de tous les produits biologiques.

Dans ce domaine, les choses vont bien au Danemark. Le marché est en pleine expansion. En 2007, des augmentations de 33% des ventes et de 13% de la quantité de produits ont eu lieu. Le gouvernement affiche une vision positive face à la recherche dans la production biologique. De plus, selon le Danish Agricultural Advisory Service, environ 10% des fermiers produisent des produits certifiés organiques.45

Exemple : agroalimentation biologique chez Arla Foods

Arla Foods est une compagnie danoise qui utilise le logo rouge du ministère. Aujourd’hui, 7% du lait reçu est organique. Arla cible toutefois 10,5% pour 2011.46 Il y a cependant des problèmes à cultiver biologique. Le fait de ne pas pouvoir utiliser des pesticides et des fertilisants donne un rendement inférieur. Les conditions de certification exigent que les vaches puissent paître à l’extérieur l’été. Cela représente donc beaucoup de terres utilisées. Pour atteindre son objectif, Arla dispose donc d’un plan pour faire la conversion de fermes vers la culture biologique en 2 ans. Pour encourager les producteurs, elle donne le tarif du lait biologique durant les 6 derniers mois de la transition.47

Des aliments plus sains

Mis à part les diverses certifications biologiques et organiques, l’Europe mise beaucoup sur des pratiques agricoles plus naturelles et meilleures pour la santé. C’est également le cas au niveau de la transformation des aliments. Unilever en est un bon exemple avec sa mission d’entreprise qui se

résume tout simplement en « Add Vitality to Life ». L’objectif des produits conçus par Unilever est d’aider les gens à se sentir bien et bien paraître. La recherche et développement chez Unilever se concentre plus sur l’amélioration des produits existants que sur la création de nouveaux produits innovateurs. Ceci consiste en des produits avec moins de produits non naturels et moins d’additifs. Nous avons également pu constater cette tendance lors de notre visite au CRDA à Saint-Hyacinthe, où l’on nous avait mentionné la pression de plus en plus croissante de la part des consommateurs pour la recherche d’aliments plus sains.

Conclusion

Il est bien évident que le commerce biologique québécois a tout intérêt à s’inspirer du développement européen. Le Québec est un endroit de prédilection en Amérique du Nord, car il s’y vend déjà des produits alimentaires de luxe. Pour aider cette industrie, l’affichage obligatoire des organismes génétiquement modifiés (OGM) pourrait être étudié.

4.1.2 Qu’est-ce qu’une saine gestion du territoire agricole?La saine gestion d’un territoire agricole reste essentielle pour réussir une agriculture durable. Dans un contexte d’augmentation de la population au Québec, au Danemark et aux Pays-Bas, la gestion du territoire agricole devient plus ardue. L’étalement urbain représente un enjeu majeur pour les divers pays. Avant de réfléchir sur les enjeux présents et à venir, il faut bien comprendre comment la structure et la législation des terres agricoles sont administrées auprès des trois régions à l’étude.

Québec

Au Québec, il existe deux lois provinciales qui règlementent la protection et la gestion des territoires agricoles : la Loi sur la Protection du Territoire et des Activités agricoles (LPTAA) et la Loi sur l’Aménagement et l’Urbanisme (LAU). La LPTAA permet au gouvernement provincial d’assurer la pérennité d’une base territoriale pour la pratique de l’agriculture et de favoriser, dans une perspective de développement durable, la protection et le développement des activités et des entreprises agricoles dans les zones agricoles dont il prévoit l’établissement (Art. 1.1). La deuxième, la LAU, permet aux municipalités locales d’aménager leur territoire à l’aide d’un plan d’aménagement et de faire ce qu’ils désirent avec les zones agricoles. Il semble qu’il y ait une difficulté d’arrimage entre ces deux lois48 pour faire consensus entre les municipalités, les producteurs agricoles et le gouvernement provincial. Des cas d’étalement urbain

Figure 4 : Logo danois qui certifie les aliments biologiques

40

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Conclusion

La saine gestion du territoire est d’abord rendue possible lorsque plusieurs critères économiques, environnementaux et sociaux sont inclus dans les choix de développement. Pour ce faire, un meilleur contrôle du gouvernement provincial du Québec et des objectifs clairs sur le développement s’avère nécessaire afin d’éviter toute forme de confusion entre des lois provenant des différents niveaux de gouvernements. Une gestion avec un pouvoir centralisé comme aux Pays-Bas reste une approche intéressante à considérer.

existent particulièrement dans la région de Montréal. Cette situation pose un danger pour l’avenir de l’industrie agricole et de l’environnement, selon la Coalition pour la protection du territoire agricole (CPTAQ), un organisme piloté par l’UPA. Il y a une constante augmentation des demandes de dézonage dans la communauté métropolitaine de Montréal (CMM). Dans cette région, les 3000 hectares de terres agricoles qui ont fait l’objet d’une demande en 2003 sont équivalents aux totaux des demandes des 10 dernières années. Les meilleures terres se retrouvent dans la plaine du Saint-Laurent à l’intérieur de laquelle se situe la CMM.49

Danemark

D’un autre côté, 62% du territoire danois est dédié à la pratique de l’agriculture. L’inflation du prix des terres danoises a beaucoup augmenté au cours des dernières années et vu que la possibilité d’emprunter est très restreinte pour le moment, il est difficile pour les jeunes agriculteurs d’investir dans le secteur agricole.

Pays-Bas

Aux Pays-Bas, plus de 27 % de la superficie totale du territoire est destinée à la pratique de l’agriculture saisonnière ou même annuelle. La productivité a baissé50, mais plusieurs serres vouées à l’agriculture et l’horticulture ont pris beaucoup d’ampleur. De plus, étant donné que les terres sont situées en dessous du niveau de la mer sur 27 % de son territoire51, l’irrigation s’y fait facilement. Comme ces régions se trouvent souvent inondées ou saturées en eau durant toute l’année, le gazon y pousse bien et est utilisé pour nourrir les vaches. Cela expliquerait la forte présence de fermes laitières aux Pays-Bas. La production en serres sous environnement contrôlé et s’effectue sur de moins grandes superficies.

Aux Pays-Bas, il y a le Ministère du Logement, de la Planification du territoire et de l’Environnement (VROM en néerlandais). L’existence même de ce ministère témoigne de la volonté du gouvernement néerlandais de limiter les impacts sur l’environnement en contrôlant le développement sur le territoire néerlandais. Selon Adriann Slot, analyste au VROM, cette volonté vient de l’importance qu’a eue la terre pour le développement des Pays-Bas. Il a fallu dans le passé effectuer plusieurs travaux (digues, dragage, assèchement, etc.) pour obtenir des territoires habitables ou cultivables. Ces terres sont devenues alors la propriété de plusieurs personnes (surtout des banques). Elles ont maintenant une forte valeur et leur gestion complexe doit être encadrée par le VROM. Cette fonction donne beaucoup de pouvoir pour faire appliquer des règlements environnementaux.

41

Photo prise par Alexandre Maurice

Entre campagne et civilisation, Kinderdijk

Jardin de tulipes, Keukenhof

Photo prise par Yuriy Vashchuk

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4.2 La biopharmaceutiqueL’industrie pharmaceutique est l’un des secteurs clés de l’économie québécoise, avec ses 400 entreprises, dont les dix plus importantes au monde, ainsi que de nombreux centres de recherche. La province compte ainsi en 2009 un total de plus de 32 000 emplois, dont 13 000 chercheurs.52 À l’échelle nationale, les ventes de médicaments de prescription ont atteint 483 millions de dollars en 2009, représentant une croissance de plus de 5% par rapport à 2008.53 En plus d’être bien présent au pays, il s’agit d’un secteur prospère.

Cette croissance soutenue est généralisée à l’échelle mondiale, compte tenu d’une augmentation des ventes de ces médicaments d’au moins 5% annuellement depuis les huit dernières années.54 De manière générale, le succès des entreprises pharmaceutiques semble attribué depuis plusieurs années en Occident à leur capacité à développer rapidement des nouvelles molécules afin d’obtenir l’exclusivité du marché. Dans cette optique, la prospérité de l’industrie repose en partie sur une masse critique de main-d’œuvre hautement qualifiée et sur des investissements massifs en recherche et développement.

Or, ce modèle d’innovation démontre de plus en plus sa vulnérabilité à plusieurs niveaux. D’abord, les multinationales pharmaceutiques peinent à maintenir les recettes engendrées par les ventes de leurs médicaments vedettes lorsque le brevet de ces derniers vient à échéance. La commercialisation accrue de médicaments génériques, vendus à plus bas prix que les originaux, apporte une nouvelle concurrence aux fabricants de princeps. Ensuite, l’attrait des entreprises envers l’émergence de pays asiatiques ou sud-américains s’explique par les faibles coûts d’opérations sur place et l’immense bassin de patients que ces pays représentent, mais il demeure difficile de percer ce marché de consommateurs moins nantis, où la propriété intellectuelle n’est pas toujours aussi bien encadrée qu’en Occident. Finalement, bien que les gouvernements tentent parfois de préserver l’industrie locale en offrant aux entreprises des crédits d’impôt, les recherches ne sont parfois pas orientées vers des besoins concrets de l’industrie, diminuant ainsi leur viabilité commerciale à long terme.

Chacune des régions visitées dans le cadre de la mission semble agir en fonction de son héritage culturel. Au Danemark, de par leur tradition marchande, les activités de recherche du secteur pharmaceutique, notamment au sein de la Medicon Valley, sont orientées sur le développement commercial, sur la recherche de profits. Les Pays-Bas, membre de l’Union européenne, font preuve de coopération

avec leurs voisins. Le High Tech Campus d’Eindhoven démontrait bien leur tendance à discuter avec transparence de leurs développements, de manière à collaborer avec d’autres entreprises et instituts pour partager leur expertise. Au Québec, notre mode de vie plus individualiste, où chacun recherche son succès individuel, crée une sorte de culture du secret au sein de la communauté scientifique. Notre concentration remarquable d’étudiants présente un énorme potentiel pour la métropole montréalaise, mais encore faut-il que les acteurs principaux de l’industrie discutent ensemble de développement commercial.

La dizaine d’études de cas effectuées sur le secteur pharmaceutique (Dermolab Pharma, DSM, Eindhoven High Tech Campus, Institut de recherches cliniques de Montréal, Medicon Valley Alliance, Montréal InVivo, Novartis, Novo Nordisk et Pfizer) a permis de soulever certaines stratégies, envisagées par les entreprises, qui risquent de provoquer l’évolution de l’industrie : réduire les coûts d’opération, offrir des médicaments génériques et viser des marchés spécialisés (niches). Dans un premier temps, l’analyse qui suit exprimera de quelle manière l’influence de l’échéance des brevets incite les entreprises à opter pour l’une de ces trois options afin d’assurer un retour sur leur investissement en R&D. Dans un deuxième temps sera discuté en quoi le développement des pays émergents apporte un lot de compromis pour les multinationales occidentales, où habite un énorme marché d’individus possédant des moyens beaucoup plus modestes pour se soigner. Dans un dernier temps, il sera exposé en quoi le regroupement d’entreprises sous forme de grappes industrielles permet de créer de la valeur aux entreprises membres et de développer leur potentiel commercial.

4.2.1 Les brevets pharmaceutiques et l’impact de leur échéanceAvec une part croissante de leur chiffre d’affaires menacée par l’apparition de génériques bon marché pour concurrencer leurs produits phares, les entreprises pharmaceutiques ne possèdent plus souvent qu’autrement aucun produit en gestation ou en phase de lancement en mesure de combler le futur manque à gagner. À titre d’exemple, aucune nouvelle molécule chez Pfizer n’est prête à générer les 12,7 milliards $US engendrés par le Lipitor® en 2007.55 Il est donc essentiel de comprendre de quelle manière les géants de l’industrie pharmaceutique s’organisent pour pallier à cet enjeu.

Après avoir analysé les spécificités du marché pharmaceutique mondial en termes de brevets, nous tenterons de répondre à cette question en étudiant les décisions prises par les acteurs majeurs pour poursuivre

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leurs stratégies de développement, en se penchant plus particulièrement sur le cas de deux entreprises visitées dans le cadre de cette mission, soient Pfizer et Novartis.

4.2.1.1 Un moteur d’innovation pour l’industrie pharmaceutiqueLorsqu’un laboratoire découvre un médicament, il obtient l’exclusivité de sa commercialisation jusqu’à expiration du brevet obtenu, couvrant les spécificités reliées au produit. Le concept de brevet permet d’assurer aux entreprises à l’origine de l’investissement initial de pouvoir prétendre à l’exclusivité de la propriété intellectuelle du produit développé pendant un certain laps de temps. Une copie du produit original, soit un médicament dit «générique», peut alors être développé et commercialisé par d’autres laboratoires seulement après échéance du brevet.

Dans cette optique, l’innovation devient alors le principal outil de concurrence (découverte de nouvelles molécules, apparition de nouveaux produits, développement de nouvelles méthodes de production, etc.). La phase de conception s’avère la plus critique pour les grands fabricants. Si l’attribution d’un brevet demeure une course contre-la-montre vis-à-vis leurs compétiteurs, le vainqueur reste le joueur ayant le mieux réfléchi à ses démarches de conception, en passant par le développement d’équipements technologiques sophistiqués si nécessaire. Pour ce faire, les entreprises se voient obligées d’investir de façon massive en recherche et développement (R&D). Ainsi, ces investissements des entreprises privées s’élèvent à 1,2 milliard de dollars au Canada, en 2009 seulement.56

Le profit qui découle des ventes reste, dans la plupart des cas, leur seul moyen de retour sur investissement. Il est donc important de considérer que cette innovation réalisée a pour principal but de leur permettre d’évoluer sur le marché, en y soignant et guérissant un nombre accru de patients en attente de traitement.

Certes, ce système d’exclusivité comporte ses lacunes. Il conduit notamment à des situations de monopole, mais il demeure le seul à pouvoir assurer aux entreprises une juste rémunération pour récompenser leurs efforts et investissements en R&D. Les brevets apparaissent ainsi comme la seule solution proposée aux entreprises investissant en recherche et développement pour concilier la rémunération nécessaire au remboursement des sommes initialement investies et la garantie d’une reconnaissance de la propriété intellectuelle liée à leur découverte.

La compréhension de l’enjeu que représentent les brevets pour les multinationales du secteur pharmaceutique passe directement par celle de leur portfolio de développement de produits. En voici les différentes phases57 :

• Phase I : Essais cliniques sur des volontaires sains visant à déterminer la tolérance à un médicament.

• Phase II : Essais cliniques sur un nombre limité de patients visant à déterminer le dosage, la sécurité et l’efficacité d’un produit.

• Phase III : Essais cliniques à grande échelle visant à confirmer la sécurité et l’efficacité d’un médicament sur les patients.

• Phase IV - Procédure d’enregistrement : Procédure visant à obtenir des autorités de santé l’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) d’une spécialité pharmaceutique. Au pays, Santé Canada délivre cette autorisation.

On a donc vu que, du point de vue des multinationales pharmaceutiques, il était nécessaire de garantir et de protéger les innovations afin de les encourager à investir dans la quête de nouveaux produits. Toutefois, une fois cette période de monopole terminée, les entreprises se retrouvent face à une situation tout à fait nouvelle pour elles : la concurrence.

Celle-ci passe principalement par la mise sur le marché de médicaments génériques. En effet, entre 2004 et 2009, de nombreux brevets de médicaments se sont échus dans le domaine public. Aujourd’hui, le marché des médicaments génériques représente environ 10 %58 du marché mondial des médicaments et ce chiffre ne cesse d’augmenter au fil des années. À titre d’exemple, aux Pays-Bas, les génériques représentent maintenant 50 % du volume des médicaments prescrits.59

La principale différence entre un médicament princeps, soit l’original, et sa copie générique réside dans son prix de vente. En effet, les compagnies qui fabriquent les génériques peuvent se permettre de facturer des coûts beaucoup plus faibles, du fait qu’elles n’ont pas à rentabiliser d’investissements en R&D. La figure 5 montre les structures de prix d’un médicament princeps et de son équivalent générique : on peut ainsi remarquer qu’une part importante du prix du médicament (environ 30 %) correspond à la marge du pharmacien.

Cette marge monétaire reste la même (3,14 € sur la figure) pour le princeps ou son équivalent générique alors même que le prix du générique peut être deux fois moins important. On remarque également que le prix de vente

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de certains génériques peut même parfois être inférieur au prix de production du princeps.

Les compagnies pharmaceutiques danoises peuvent fixer le prix de vente de leurs médicaments, mais elles demeurent néanmoins soumises à certaines restrictions. Depuis 1994, le Ministère de la Santé utilise une politique de réduction du prix des médicaments remboursés par l’État. Un accord avec les associations de compagnies pharmaceutiques permet ainsi de limiter ou de réduire le prix de vente des médicaments. Cette initiative a pour objectif de réduire la croissance des dépenses dans le système d’assurance-médicaments tout en favorisant l’introduction des produits pharmaceutiques haut de gamme sur le marché.

Compte tenu de la situation actuelle, les laboratoires pharmaceutiques se trouvent confrontés à plusieurs défis à la fois technologiques et concurrentiels. Ils se retrouvent donc obligés de se livrer à une véritable guerre économique et stratégique contre les compagnies spécialisées dans la production de médicaments génériques. Voyons quelles sont les stratégies des firmes pharmaceutiques pour limiter ou contrôler le marché des médicaments génériques.

4.2.2 Comment contrer la concurrence des fabricants de génériques ?

4.2.2.1 Le cas de PfizerPour faire face à plusieurs pertes de brevets d’ici 2012, dont celui du Lipitor®, premier médicament vendu dans le monde, le Norvasc®, qui réduit la pression sanguine ainsi que le Zyrtec®, le groupe américain désire multiplier son nombre de projets en phase III, en plus de viser l’introduction sur le marché de quatre produits par an issus de sa recherche interne, à compter de 2011. Selon l’agence Bloomberg, la mise en marché d’équivalents génériques du Lipitor® provoquera une baisse des ventes de Pfizer de 12 milliards de dollars US à partir de 2011.61 Le tableau ci-bas affiche les plus importants médicaments dont le brevet est récemment venu, ou viendra sous peu, à échéance.

Faisant face à cette baisse de revenus estimée à plus de 15 milliards US$, sur leur chiffre d’affaires d’environ 70 milliards

Produits Pertes  de  brevet  aux  États-­‐Unis

Chiffre  d’affaires  total  en  2007  (  en  millions  de  

dollars)

Norvasc  ®  (amlodipine) 3001

Zyrtec  ® (cetirizine)                              nd

Camptosar ® (irinotecan) 969

Aricept@  (donepezil) 401

Aromasin ® (exemestane) 401

Lipitor  ® (atorvastatin) 12675

Viagra ® (sildenafil) 1764

Geodon/Zeldox ® (Ziprasidone) 854

Detrol/Detrusilol ® (tolterodine) 1190

Chiffre  d’affaires  global  des  produits  perdant  leur  brevet  aux  États-­‐Unis  d’ici  la  fin  2012Chiffre  d’affaires  global  des  produits  perdant  leur  brevet  aux  États-­‐Unis  d’ici  la  fin  2012

21255

Part  dans  le  chiffre  d’affaires  pharmaceutique  global  en  2007Part  dans  le  chiffre  d’affaires  pharmaceutique  global  en  2007 48 %

Tablau 5 : Les plus importants médicaments dont le brevet est récemment venu, ou viendra sous peu, à échéance.

Septembre 2007

Décembre 2007

Février 2008

Novembre 2010

Avril 2011

Juin 2011

Mars 2012

Septembre 2012

Septembre 2012

60

Figure 5 :

44

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US$, le groupe a annoncé une réduction de ses effectifs d’usines et de centres de recherche : 10 000 employés seront remerciés, dont 20 % de ses forces de vente en Europe. Suite à cela, le nombre de ses usines tombera à 48 en 2008, contre 93 en 2003. Ces mesures sont au cœur d’un vaste plan de restructuration visant à réduire de 1,5 à 2 milliards US$ par an ses coûts de fonctionnement, pour faire face à la concurrence des génériques, que les autorités veulent voir se développer pour alléger leurs remboursements.62 La figure 6 présente les principaux acteurs de l’industrie du médicament générique.

Pfizer affiche en outre son ambition dans les biothérapies. Lors de notre visite chez la filiale danoise de Pfizer, à Ballerup, le groupe s’est dit motivé à développer une division spécialisée dans les vaccins et devenir un leader en oncologie (il a notamment trois produits en phase III et quatre en phase II). Pfizer a alors décidé de consacrer de très importantes sommes en R&D pour tenter de développer ces opportunités. Son unité de R&D est en transition et, selon le groupe, les améliorations visant à avoir une organisation simplifiée sont en cours.

Nous avons donc vu ici que, pour Pfizer, il était plus intéressant de miser sur une stratégie de réduction des coûts d’opération et une spécialisation de ses activités dans certains secteurs clés, principalement le secteur des médicaments biomédicaux, où les avancées technologiques sont considérables. La principale raison ayant mené à la fusion entre Wyeth et Pfizer, en 2009, est le besoin de Pfizer de réduire sa dépendance à un nombre restreint de molécules, tel le Lipitor®. En 2012, la compagnie vise à n’avoir aucun produit représentant plus de 10% de ses ventes.63

La stratégie actuelle de développement de Pfizer se base sur les opportunités de diversification afin de disposer de relais de croissance. Cette réévaluation du portefeuille de produits doit prendre en compte l’importance croissante des génériques. Pfizer pourrait bénéficier, comme Novartis-Sandoz, d’une force de négociation supplémentaire face aux gouvernements en présentant une offre de génériques plus importante, complémentaire aux médicaments novateurs. Néanmoins, la marge est particulièrement restreinte sur ce marché. Tel que mentionné plus tôt, le prix de vente de certains génériques pouvant même être parfois inférieur au prix de production du princeps.64

4.2.2.2 Le cas de NovartisNovartis, contrairement à son concurrent américain Pfizer, a opté pour une stratégie totalement différente.

En effet, dès 1996, le groupe suisse a manifesté son intérêt de s’implanter sur le marché des génériques en faisant l’acquisition de Sandoz, un groupe pharmaceutique spécialisé dans la fabrication de génériques. Novartis a donc saisi l’opportunité de s’implanter dans ce nouveau marché, où plusieurs de ses concurrents ont échoué. Suite à la volonté de Novartis de développer sa filiale générique par divers rachats et fusions, celle-ci occupe le deuxième rang mondial sur le marché des génériques, avec un chiffre d’affaires de 7,5 milliards US$ en 2009, soit près de 10 % du marché international des génériques.65

Figure 6: Parts de marché mondiales des médicaments génériques en 2009a

45

Photo prise par Yuriy Vashchuk

Pfizer Denmark, Copenhague

50%  

18%  

10%  

6%  6%  

3%  3%   2%   2%   Autres  

Teva  

Sandoz  

Mylan  

Watson  

Ra=oPharm  

Stada  

Actavis  

Ranbaxy  

aSource: BCC RESEARCH

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4.2.3 Les pays émergents : une opportunité à double tranchantLes pays émergents, tels que la Chine, l’Inde, le Brésil et la Russie, s’avèrent des vecteurs de développement considérables pour les sociétés pharmaceutiques pour deux raisons principales : le bassin de plus de 3 milliards de patients potentiels et la compétitivité de la recherche et développement. Premièrement, ces pays représentent un immense bassin de patients non soignés pour des pathologies fréquemment traitées en Occident, tel le diabète par exemple. Tel que démontré sur le tableau 6, la Chine deviendrait le 3ème marché mondial en 2011. En 2008, les marchés pharmaceutiques des pays émergents ont contribué pour 30% des revenus de l’industrie pharmaceutique et leur croissance est estimée à 14% par an jusqu’en 2013.66

Deuxièmement, bien que l’importance des centres de R&D européens et nord-américains soit primordiale afin de bénéficier de clusters de compétences locaux, renforcer la présence au niveau des pays émergents permet de profiter au maximum des opportunités locales de croissance et des faibles coûts de main-d’œuvre. Ainsi, en conservant le même taux de réinvestissement en R&D, la productivité de l’innovation pourrait être renforcée. La productivité de la R&D s’avère aussi un enjeu majeur pour

Part  de  marché  à  travers  le  monde  de  l’industrie  pharmaceutique

Part  de  marché  à  travers  le  monde  de  l’industrie  pharmaceutique

Part  de  marché  à  travers  le  monde  de  l’industrie  pharmaceutique

Rang  2009 Rang  2011 Rang  2013

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14

15

16

17

18

19

20

États-­‐Unis États-­‐Unis États-­‐Unis

Japon Japon Japon

France Chine Chine

Allemagne Allemagne Allemagne

Chine France France

Italie Italie Italie

Espagne Espagne Espagne

Royaume-Uni Brésil Brésil

Brésil Royaume-Uni Canada

Canada Canada Royaume-Uni

Russie Russie Russie

Turquie Inde Venezuela

Inde Corée du Sud Inde

Mexique Venezuela Corée du Sud

Corée du Sud Mexique Turquie

Australie Australie Mexique

Grèce Turquie Australie

Venezuela Grèce Grèce

Pays-Bas Pologne Pologne

Pologne Pays-Bas Belgique

Tableau 6 : Évolution du classement des principaux marchés pharmaceutiques67

Figure 7 : Les 15 compagnies pharmaceutiques majeures en sous-performance au niveau des marchés émergeants68

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35 médicaments à rabais à une vingtaine de millions de clients aux Philippines, parfois au quart du prix original.71 Ce genre d’actions devra devenir monnaie courante à long terme pour développer une clientèle dans ces marchés. La présence d’un immense marché de consommateurs ne signifie pas nécessairement un succès commercial garanti.

4.2.4 Se regrouper afin d’assurer une création de valeur

4.2.4.1 La volonté commerciale de la Medicon ValleyNotre mission industrielle en Europe nous a permis de constater la volonté des organisations européennes à se regrouper sous forme de grappes industrielles (clusters). Cette réalité nous a été notamment présentée lors de notre visite à la Medicon Valley Alliance (MVA). Organisation sans but lucratif (OSBL) basée à Copenhague depuis 1997, la MVA représente des entreprises privées, des organisations publiques et des institutions académiques de la Medicon Valley.72 D’un point de vue géographique, le «cluster» de la Medicon Valley englobe la grande région de Copenhague, au Danemark, et le comté de Scanie, en Suède, tel qu’illustré à la figure 8.

Au cours de nos discussions à Copenhague, il a été possible de déterminer trois principaux types de grappes pharmaceutiques présentes à travers le monde. La grappe de la Medicon Valley, même si elle compte plus de 12 universités et 32 hôpitaux, semble principalement propulsée par la volonté de ses membres à engendrer des profits (business-driven). Elle diffère de la grappe industrielle de la santé de Boston, surtout réputée pour ses hôpitaux de pointe, ses universités de renom et ses écoles médicales. Elle se distingue également de la grappe

les grandes entreprises pharmaceutiques. Le prix moyen des médicaments approuvés atteint actuellement 1,6 milliard US$, comparativement à 1 milliard US$ en 2005, avec seulement 30% des médicaments mis sur le marché ayant un retour sur investissement acceptable.69

En effet, face à la volonté des gouvernements occidentaux de réduire leurs dépenses de santé, le dynamisme de ces nouveaux marchés apporte des relais de croissance prometteurs. La recherche et la production pharmaceutique au sein des régions développées telles que le Québec et les pays visités sont donc largement affectés par les décisions stratégiques des grands groupes pharmaceutiques ainsi que par les mutations du marché global. L’un des exemples de la stratégie actuelle de Pfizer d’entrée sur les marchés émergents consiste à proposer des licences de production pour une soixantaine de produits à deux compagnies indiennes.70

Les pays émergents apparaissent ainsi comme une alternative intéressante pour les sociétés pharmaceutiques, mais ils apportent également leur lot d’enjeux. La mission Poly-Russie 2009 avait soulevé l’an dernier l’absence de protection de la propriété intellectuelle (brevet) sur le territoire russe. Difficile alors pour les entreprises occidentales de compétitionner avec les marques locales de médicaments. En l’absence d’homologation obligatoire, les marques locales se trouvent sur les tablettes à une fraction du prix des grandes marques. Ces dernières, soucieuses de leur réputation, tiennent quand même à mener des tests rigoureux en termes de qualité, mais avec le temps et les coûts qui s’y rattachent.

D’un point de vue éthique, plusieurs critiques sont adressées à l’industrie pharmaceutique, mentionnant qu’elle ne contribue pas suffisamment au redressement des pays émergents, alors qu’elle possède les ressources nécessaires de venir en aide à des millions de personnes. Le développement d’une société passe notamment par un niveau de santé adéquat au sein de la population. Malheureusement, dans la plupart des cas, les populations locales n’ont pas les moyens d’obtenir des médicaments de meilleure qualité, compte tenu du prix. Lors de situations humanitaires, il arrive que des entreprises offrent des médicaments aux sinistrées.

Cependant, d’un point de vue commercial à long terme, le défi des pharmaceutiques reste d’être en mesure de réussir à vendre leurs médicaments à grande échelle à ces clients plus modestes, dans leur intérêt, et celui des consommateurs démunis. RiteMed, une division de génériques d’Unilab, a vendu récemment plus de

Figure 8 : Carte de la Medicon Valley73

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biomédicale de Singapour, Biopolis, un centre de recherche de pointe qui a été construit par le gouvernement local et principalement mené par celui-ci.

En ce sens, le président de la MVA, M. Stig Jørgensen affirme clairement la mission de son organisme : faciliter le développement économique de la Medicon Valley et la compétitivité de ses entreprises par la création de réseaux internationaux, en promouvant l’image de la marque « Medicon Valley ». Par l’entremise de leur Life Science Ambassador Programme, ils positionnent des représentants à travers le monde afin d’assurer une visibilité suffisante de la Medicon Valley au sein des autres clusters pharmaceutiques mondiaux. Au sein même de la région, les efforts de la MVA sont concentrés à encourager le partage de connaissances entre les milieux académiques et industriels, de sorte à favoriser l’entreprenariat et le développement de l’innovation fortement orienté vers le commercial.

Par l’organisation de salons internationaux, l’entremise de tournois de golf ou lors d’autres activités de réseautage, la MVA tente d’attirer des investisseurs internationaux au sein du cluster de la Medicon Valley. Regroupant plus de 300 organisations danoises et suédoises du secteur des sciences de la vie (entreprises médicales, pharmaceutiques, universités et hôpitaux), la Medicon Valley comporte également des entreprises de service telles des banques, des sociétés d’investissement, des compagnies d’assurances et de ressources humaines. Avec tous les éléments bien en place, la Medicon Valley Alliance joue principalement un simple rôle de catalyseur dans la région dans le but d’encourager la création de valeur et assurer la synergie entre les intervenants afin de stimuler l’innovation et la prospérité de ses membres.

Cette proximité physique et intellectuelle entre ces petites et grandes entreprises, danoises et suédoises, s’avère très fructueuse pour la communication entre les acteurs. La construction du pont de l’Øresund au début de la décennie a grandement influencé la croissance de la grappe industrielle. La présence d’investisseurs de capital de risque, le support des deux gouvernements nationaux, les opportunités de réseautage et de rayonnement, la facilité de réaliser des essais cliniques et la qualité de vie dans les deux pays ne sont que quelques facteurs qui font de la Medicon Valley une région propice au développement pharmaceutique. Étant donné que ce système encourage la collaboration et le partage des connaissances, les entreprises ont davantage tendance à rester indépendantes; elles semblent moins portées à devoir fusionner ou faire l’acquisition d’autres entreprises pour survivre.

M. Jørgensen se réjouit de la dynamique créée par l’omniprésence de gestionnaires des nationalités danoise et suédoise au sein de la direction de la MVA, percevant cette relation comme en étant une de complémentarité. Les Danois seraient davantage reconnus pour leurs aptitudes commerciales, tandis que les Suédois possèderaient des compétences particulières sur le plan financier. Les forces des deux joueurs ont su être mises à profit pour assurer le succès de la gestion du «cluster». Bien que le danois et le suédois s’avèrent deux langues similaires, compte tenu de leur racine germanique et de l’influence scandinave, les discussions se déroulent plus souvent qu’autrement en anglais, langue internationale des affaires. Lors des événements de réseautage sont toujours présents des représentants des deux pays. Bien que les représentants aient tout intérêt à attirer les investisseurs dans la grappe industrielle avant tout, chacun tente d’influencer à leur manière par intérêt national. Cela crée en quelque sorte une compétition saine au sein même de l’organisation, permettant ainsi aux entreprises internationales d’obtenir des offres encore plus alléchantes lorsque vient le temps de s’établir dans la région.

Au niveau des gouvernements, il semble y avoir une volonté légèrement plus marquée du côté de la classe politique danoise en termes d’incitatifs et de développement d’infrastructures pour le cluster. Cela pourrait s’expliquer par le fait que la section danoise du cluster comprend la région de la capitale danoise, Copenhague, principal centre économique du pays, où siège le parlement national et vit environ 1,5 millions de Danois.74 Du côté de la Suède, la présence de la ville de Malmö, troisième en importance au pays avec ses 300 000 habitants, apporte son lot d’attraits

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Président de la MVA, M. Stig Jørgensen, Copenhague

Photo prise par Yuriy Vashchuk

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pour les investisseurs, mais le marché demeure nettement plus petit et les décisions importantes se prennent tout de même à Stockholm, quelques 500 km plus loin.75

Ainsi, il est probable que le fonctionnement en grappes industrielles soit une solution d’avenir pour les sociétés pharmaceutiques. Bien que celles-ci établissent déjà plusieurs liens et partenariats avec des universités et centres de recherche, la proximité et les avantages qu’offre un «cluster» comme la Medicon Valley sont indéniables. En plus de rassembler un bassin important de main-d’œuvre qualifiée et d’offrir des avantages au niveau de la recherche, il offre aussi un grand nombre d’opportunités d’affaires, de création de nouveaux contacts et de partenariats durables qui peuvent aller au-delà de la recherche scientifique.

4.2.4.2 La transformation de MontréalLa région de Montréal possède aussi un cluster pharmaceutique. La métropole peut se vanter d’abriter des acteurs agissant dans chacune des phases de développement d’un médicament, jusqu’à sa commercialisation. Alimentée par de nombreux centres universitaires (Université de Montréal, Université McGill, Institut de recherches cliniques de Montréal, etc.), à l’image de la région de Boston, la région métropolitaine tente depuis plusieurs années d’encourager davantage le développement de cette industrie.

La population impressionnante d’étudiants, la qualité de vie et la présence d’industries de haute technologie s’avèrent des arguments de vente de choix pour attirer les investisseurs internationaux à Montréal. La main-d’œuvre qualifiée de la région montréalaise incite les gouvernements à promouvoir les activités de recherche, mais encore ces innovations doivent présenter un potentiel commercial, et il s’importe de profiter de ce potentiel.

Dans cette optique, la grappe industrielle Montréal InVivo a été récemment fondée dans le but d’offrir aux entreprises, universités et centres de recherche un environnement fertile et productif, propice à la création et à l’innovation. Il s’agit d’une grappe de plus de 620 organisations, dont quelque 150 organismes de recherche, œuvrant dans le domaine des sciences de la vie et des technologies de la santé dans la région du Montréal métropolitain.

À la lumière de nos rencontres effectuées dans la région de Montréal (Dermolab Pharma, Institut de recherches cliniques de Montréal, Novartis, Pfizer, Montréal InVivo), le réseau de communication entre les acteurs du milieu ne semble pas encore aussi cristallisé qu’en Europe. En effet,

pour reprendre les paroles d’un professionnel rencontré, le partage d’informations demeure un sujet sensible au Canada. Bien qu’il existe certaines collaborations, cette culture du secret s’expliquerait par le fait que les professeurs universitaires et les chercheurs en instituts semblent craindre le plagiat industriel par leurs pairs. De plus, des réussites en recherche signifient des retombées aux individus innovateurs sous forme de publications ou de subventions supplémentaires. D’autre part, certaines recherches seraient initialement conduites par intérêt personnel, sans tenir compte du potentiel commercial de l’innovation par la suite.

Il est intéressant de constater la participation active des acteurs du secteur pharmaceutique au sein des initiatives lancées par Montréal InVivo. La grappe possède plusieurs axes d’activités, « chantiers de travail », lesquels sont composés de membres du milieu universitaire, médical, privé, financier, gouvernemental. Si la Medicon Valley Alliance semble surtout agir dans l’optique d’accroître la visibilité de leur région à l’étranger, Montréal InVivo cherche tout autant à offrir à Montréal une notoriété internationale, question d’attirer les investisseurs étrangers, mais aussi à y modifier la culture d’innovation.

Répondant aux lacunes soulevées précédemment, le mandat de Montréal InVivo vise à améliorer les interactions entre les instituts de recherche et les universités avec l’industrie, de sorte à démontrer une plus grande transparence sur le contenu des travaux en cours, en plus d’élaborer des pistes de solutions technologiques afin de rentabiliser davantage les activités des centres hospitaliers.76

Le chapitre 5 du présent rapport émettra certaines suggestions afin de faire évoluer le secteur pharmaceutique dans la province et le rendre plus compétitif.

4.2.4.3 La transparence du Eindhoven High Tech CampusLes Pays-Bas possèdent eux aussi un cluster bien connu, l’Eindhoven High Tech Campus. Celui-ci a été fondé par la multinationale Philips à la fin des années 1990, dans un effort de centralisation de ses activités de recherche et développement, qui étaient dispersées à travers la ville d’Eindhoven. Le climat de partage et d’ouverture qui régnait dans les nouveaux locaux a encouragé Philips à ouvrir en 2003 son campus à d’autres entreprises technologiques et de développer une réelle culture d’innovation ouverte.L’Eindhoven High Tech Campus est maintenant composé de plus de 90 entreprises œuvrant dans le domaine des

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technologies de pointe au bénéfice des individus, ne se confinant pas seulement au domaine pharmaceutique proprement dit. Plus de 7000 chercheurs et entrepreneurs travaillent quotidiennement sur le terrain du campus, d’une superficie d’un kilomètre carré. Le High Tech Campus accueille autant les départements de recherche et développement de grandes compagnies que des nouvelles entreprises de type spin-offs ou start-ups.77

La particularité de l’Eindhoven High Tech Campus est sa philosophie d’innovation ouverte (open innovation), qui encourage les entreprises à partager leurs découvertes et à s’intéresser aux travaux des autres entreprises résidant sur le campus. Le climat de confiance et de synergie amène des innovations rapides et de hautes qualités. Le partage de certaines infrastructures techniques, comme des laboratoires, salles blanches et équipements dispendieux, permet de réduire les coûts des entreprises de petite taille. Ainsi, le design physique même du High Tech Campus stimule l’innovation des entreprises qui en font partie. Soucieux de son empreinte environnementale, le campus surprend particulièrement par l’importance accordée au capital humain, à l’aspect social du développement durable, à la qualité de vie intégrée au milieu de travail, de telle manière qu’un environnement agréable encourage l’innovation. Il peut paraître exagéré à première vue de n’avoir qu’une seule grande cafétéria au centre du campus, afin de forcer les professionnels à se rassembler en un lieu commun à l’heure du dîner pour rencontrer de nouveaux collègues, mais il s’avère assurément une initiative judicieuse pour encourager les discussions entre entreprises.

Les avantages d’un fonctionnement en grappes industrielles sont nombreux. Cela permet la création de réseaux de contacts, le partage de l’information, des technologies et des infrastructures, la création d’une synergie de recherche, le partage de certains coûts et frais indirects, et bien d’autres. De plus, les clusters favorisent la croissance économique, la compétitivité et la reconnaissance des compagnies qui en font partie, tout en leur permettant une productivité accrue dû au partage de connaissances.

Ainsi, nous pouvons voir que les entreprises danoises et néerlandaises du secteur des sciences de la vie ont tendance à non seulement se rassembler en grappes industrielles afin de stimuler l’innovation, mais aussi à concentrer leurs investissements et leurs ressources pour rester compétitives et indépendantes. Le modèle québécois se transforme peu à peu en ce sens, mais il reste une volonté à développer chez les différents intervenants du secteur afin d’obtenir la collaboration de tous en vue du succès commercial escompté.

4.2.5 ConclusionSomme toute, l’industrie pharmaceutique demeure un moteur de l’économie provinciale, tout en générant une somme appréciable d’emplois bien rémunérés et en permettant la poursuite de recherches scientifiques reconnues mondialement. Toutefois, le Québec n’est pas à l’abri des enjeux qui guettent l’industrie pharmaceutique au cours des prochaines années.

L’industrie pharmaceutique fonctionne depuis longtemps en Occident selon le même système d’innovation de base, fondé sur la course à l’obtention de brevets, afin d’assurer à son fabricant une exclusivité d’exploitation commerciale, pour ainsi capturer la valeur de son marché cible. Or, l’analyse du secteur pharmaceutique permet de constater les limitations de ce modèle. Compte tenu de leur baisse importante de revenus envisagée par l’échéance de leurs brevets, comme c’est le cas pour Pfizer avec Lipitor®, et face à la concurrence accrue des fabricants de médicaments génériques, les entreprises pharmaceutiques optent pour trois stratégies principales pour survivre, soit la réduction de leurs coûts d’opération, la spécialisation de ses activités dans certains marchés clés (niches) et l’envisagement d’offrir une gamme de médicaments génériques.

Le Québec représente depuis une quarantaine d’années un environnement propice à l’implantation de centres de recherche et de filiales étant donné les avantages fiscaux offerts78 et la main-d’œuvre hautement qualifiée. L’émergence de pays en développement comme la Chine et l’Inde force toutefois à revoir les stratégies utilisées pour maintenir ces emplois de qualité dans la province. La quantité impressionnante d’étudiants graduant des universités asiatiques, employables à des coûts de main-d’œuvre dérisoires, se veut prometteur pour les multinationales, sans compter l’effort déjà déployé par les gouvernements locaux pour attirer ces entreprises. Pour l’instant, la faiblesse de réglementations concernant la propriété intellectuelle des médicaments freine encore parfois les ardeurs des entreprises occidentales à s’y établir. Cet énorme bassin de consommateurs à revenu modeste, particulièrement attrayant pour les fabricants de médicaments génériques, ne tardera pas toutefois à venir concurrencer nos emplois.

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4.3 Les énergies alternativesÉtant donné que nous vivons au sein d’une société sans cesse plus développée et créatrice de nouvelles technologies, que la population mondiale s’accroît de manière exponentielle et que la croissance économique des pays en voie de développement est une réalité de plus en plus persistante, l’enjeu de l’approvisionnement en énergie n’est pas prêt de disparaître de la liste des priorités stratégiques des nations. En effet, alors que de nombreux facteurs font en sorte que la demande énergétique s’accroît au fil des années, de sérieux enjeux existent concernant les moyens actuels de production. D’abord, rappelons que près de 80 % de l’énergie dans le monde est produite à partir de combustibles fossiles et d’énergie nucléaire. Bien que facilement implantables et relativement efficaces, ces deux sources d’énergie sont non renouvelables et polluantes en termes de gaz à effet de serre et de déchets. À cause du contexte socio-économique actuel ainsi que de la menace grandissante du réchauffement planétaire, il est cependant primordial, désormais, de définir une façon propre et durable de produire de l’énergie.

Beaucoup d’espoir est actuellement porté vers les énergies renouvelables, qui sont par définition des sources d’énergie inépuisables à l’échelle de l’homme qui ne génèrent pas de déchets dangereux. Six principales sources sont donc considérées renouvelables : l’énergie hydraulique, l’énergie marémotrice, l’énergie solaire, l’énergie éolienne, l’énergie géothermique et les biocarburants. Pour l’instant, ces sources ne représentent qu’environ 20 % de la production d’électricité mondiale, dont 90 %79 provient de l’énergie hydraulique. Les énergies renouvelables sembleraient donc être la solution écologique et pratique pour la continuité du développement durable sur Terre.

La problématique de l’énergie constitue cependant un enjeu complexe, propre à chaque région politique et économique. En effet, dépendamment du contexte politique, géographique et social d’un pays, son approche envers les politiques énergétiques sera différente. Ainsi, la présente étude a permis de constater, que le Québec, le Danemark et les Pays-Bas adoptaient des stratégies assez distinctes pour s’assurer d’un approvisionnement fiable en énergie. Les prochains paragraphes dressent ainsi un portrait de l’historique, des défis et de l’avenir pour ces trois régions.

4.3.1 HistoriqueQuébec

En 1878, à l’exposition universelle de Paris, les citoyens du monde sont pour la première fois éblouis par un nouveau mode d’éclairage : l’éclairage électrique. Devant un tel spectacle, peu de nations industrialisées résistèrent à la tentation d’implanter elles aussi, dans leurs métropoles, un système d’alimentation électrique, et le Québec n’en fit pas exception.80 Au départ, flairant l’aubaine, plusieurs compagnies de gaz ou d’électricité se sont disputées les contrats d’éclairage des voies municipales et des espaces publics, dans l’objectif de rentabiliser la construction de leur réseau de distribution. Deux entreprises gagneront cependant le monopole, la Montreal Light, Heat and Power Company à Montréal et la Shawinigan Water and Power Company ailleurs au Québec. Évidemment, en raison de la disponibilité et de l’abondance de la ressource hydraulique, l’hydroélectricité s’impose comme source principale.

Aux environs de 1930, la grogne populaire s’élève contre les deux compagnies distributrices. En plus de maintenir des tarifs élevés, leur service ne présente pas une qualité exceptionnelle. On leur reproche également des profits exorbitants, des pratiques comptables douteuses, le refus d’étendre leur réseau aux régions rurales et leur arrogance envers le gouvernement, qui tente de régulariser le marché de l’électricité. En réponse à tous ces abus, c’est en 1944 qu’Adélard Godbout, alors premier ministre du Québec, exproprie les actifs électriques et gaziers de la Montreal Heat and Power Company, pour la transformer en société d’État. Hydro-Québec était né.

Par la suite, la prospérité de l’après-guerre donne de nouveaux défis aux compagnies d’électricité. Afin de répondre à la croissance de la demande engendrée par un boom industriel, Hydro-Québec investit sur la fiabilité de son réseau de transport et de distribution. Un peu plus tard, on assiste au fameux décret de Maurice Duplessis, qui met en place l’Office de l’électrification rurale pour fournir de l’électricité aux quatre coins du Québec.

En 1960, le gouvernement de Jean Lesage, conscient que la demande d’électricité provinciale croit de 7% par année, confie à Hydro-Québec le mandat d’harnacher et d’exploiter toutes les rivières n’appartenant pas encore à des intérêts privés. Ainsi, trois grands complexes hydroélectriques sont créés : Manic-Outardes, sur la Côte-Nord, Churchill Falls au Labrador et le complexe La Grande à la Baie-James. Le déploiement d’autant d’infrastructures assure ainsi au Québec un approvisionnement constant et à très bons tarifs d’électricité. Parallèlement, l’accroissement soudain

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de popularité de l’énergie nucléaire suscite beaucoup de discussions chez la société d’État, à savoir si elle intègre ou non cette nouvelle source à son réseau. Le verdict est désormais chose connue : la Commission hydroélectrique du Québec misera plutôt sur l’hydroélectricité.

Actuellement, étant donné le contexte mondial énergétique assez précaire, Hydro-Québec déploie beaucoup d’efforts afin de promouvoir l’efficacité énergétique. Des programmes de récupération de vieux électroménagers aux analyses énergétiques lors de rénovations, la société d’État ne ménage pas ses efforts pour réduire la consommation énergétique des Québécois. L’énergie éolienne, quant à elle, est tranquillement incorporée à la production hydroélectrique, mais l’installation de nouveaux parcs fait l’objet de discussions continuelles. Hydro-Québec promouvoit la filière éolienne par l’attribution de parts de marché par appels d’offres, majoritairement dans la région de la Gaspésie. Cependant, malgré ces efforts,la contribution de l’électricité d’origine éolienne reste toujours assez peu significative par rapport à l’hydroélectricité.

Évidemment, le fait que la production, le transport et la distribution d’électricité ne relève que d’une seule et même société d’État génère un contexte de développement et d’échanges particulier au sein du milieu industriel du Québec. Au courant de ce chapitre, les impacts de cette organisation sur le commerce, les fournisseurs, l’implantation de nouvelles technologies, l’efficacité énergétique ainsi qu’une comparaison avec des systèmes de gestion alternatifs de l’énergie seront abordés.

Danemark

Au cours de l’essor industriel du 20e siècle de la société danoise, les besoinsénergétiques étaient principalement comblés par des ressources pétrolières. Alors que des centrales aux combustibles fossiles assuraient la production d’électricité, des unités de chauffage individuelles assuraient la production de chaleur. Autour de 1930, le premier système de chauffage urbain est implanté à Copenhague. Ce système consiste à créer un réseau d’eau chaude, générée par les rejets thermiques de procédés industriels locaux, alimentant un regroupement d’habitations. Au cours des années 1950, la plupart des grandes régions métropolitaines danoises étaient équipées d’un tel système, qui valorise habilement les pertes thermiques générées par les centrales fossiles81.

Vu sa dépendance aux combustibles fossiles, la crise pétrolière de 1973 a eu un effet dévastateur sur l’économie danoise: le prix du baril de pétrole a augmenté de 233% sur

une période de trois mois, soit de 3 à 10$.82 Selon M. Anders Hasselager, de la Danish Energy Agency, le Danemark qui importait alors 99% de son énergie majoritairement sous forme de pétrole, a donc fait face à une crise économique sans précédent. Le gouvernement a dès lors réorienté sa stratégie en matière d’énergie dans le but de ne plus être sujet à de telles conjonctures.

La majorité des centrales aux combustibles fossiles ont été alors été converties en centrales au gaz afin d’alimenter efficacement un système de chauffage urbain. L’option nucléaire a également été étudiée, mais une féroce opposition populaire, encouragée par les multiples petits accidents qui s’accumulaient dans les centrales à travers le monde, a poussé les projets à l’abandon. Parallèlement, au même moment où le virage énergétique s’effectuait, le consortium DUC, alors une coopération entre A.P. Møller-Mærsk A/S, Shell and Texaco, trouvait des quantités importantes de pétrole et de gaz naturel dans la région danoise de la mer du Nord. Cela a allégé le fardeau énergétique du pays.

Quelques années plus tard, la sortie publique du rapport Brundtland, intitulé « Notre avenir à tous » et portant sur la nécessité d’adopter une approche durable à nos comportements, galvanise le domaine des énergies renouvelables danois. Stimulé par une étroite collaboration entre le milieu industriel et de la recherche pour développer de meilleures turbines et techniques d’installation, le secteur éolien prend rapidement de l’expansion. De plus, des politiques gouvernementales avantageuses et une vision nationale bien définie encourage le développement de ce secteur. Le Danemark deviendra un leader en énergie éolienne. Au fil des années, à force de promouvoir à la fois l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, la société danoise a réellement intégré la mentalité « verte ». Le pays a également développé une expertise considérable dans la conception, la production et l’installation d’éoliennes. Cette section présentera l’architecture politique, sociale et économique qui a propulsé le Danemark en tant que leader dans le secteur des énergies renouvelables, en plus de présenter les impacts de ce mode de vie sur la société danoise.

Pays-Bas83 L’historique de la production d’énergie néerlandaise remonte au milieu du 19e siècle, alors qu’apparurent un peu partout aux Pays-Bas des installations de production de gaz de synthèse à partir de charbon. Toutefois, le luxe de l’éclairage et du chauffage au gaz était réservé à une minorité aisée, puisque les usines appartenaient à des

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particuliers et que la faible capacité de production rendait le coût de l’énergie astronomique. La plupart des bâtiments étaient donc simplement chauffés avec des poêles à bois. Afin de remédier à ces inégalités, les autorités locales se sont impliquées dans les opérations, et les centrales de production sont peu à peu devenues des propriétés publiques. S’en est suivi une industrialisation de la production, ce qui a contribué à faire diminuer les coûts de l’énergie, bien que les municipalités aient profité de leur monopole local pour faire évoluer les prix à leur guise histoire de remplir leurs coffres.

Autour de 1880, la révolution électrique qui a séduit le monde entier a évidemment suscité beaucoup d’intérêt aux Pays-Bas, où Rotterdam fut la première ville à s’établir un réseau restreint, basé sur des centrales au charbon. L’alimentation des quelques bureaux riverains était alors assurée par de gigantesques accumulateurs flottant sur des pontons sur la rivière Meuse, rechargés sur la rive opposée via une centrale construite à Kinderdijk. D’abord une initiative privée, le réseau fut ensuite transféré aux pouvoirs publics. Le pays procéda par la suite au regroupement de certaines associations municipales, ce qui créa les premières compagnies d’énergie néerlandaises.

Sous la croissance économique soutenue du pays, la demande ne tarda pas à augmenter : cependant, toutes les centrales thermiques peinaient à assouvir les besoins durant le jour tout en réduisant leur production la nuit, comme le sont encore importunées nos centrales actuelles. Afin d’équilibrer la demande, quelques compagnies instaurèrent, en 1930, un tarif de nuit beaucoup moins dispendieux pour inciter les consommateurs à mieux répartir leur utilisation d’électricité. Ces années virent également l’apparition des premiers chauffe-eau résidentiels, qui pouvaient être rechargés durant la nuit pour permettre aux habitants de la maison de bénéficier du luxe d’une douche à domicile. Sous l’effet d’une féroce compétition pour gagner des parts de ce marché grandissant, les compagnies n’hésitaient pas à utiliser la publicité, comme le montre cette affiche parue dans les cinémas, qui vante les mérites de la cuisson au gaz.

En 1940, la Seconde Guerre mondiale stoppa la plupart des initiatives néerlandaises, puisqu’une pénurie générale de denrées paralysait la vie commerciale et le développement. Cependant, dès 1945, le pays sut tirer profit des évènements : étant donné que Rotterdam avait presque été complètement rasée par les bombardements, les autorités en profitèrent pour instaurer un système de chauffage urbain. Rotterdam n’était cependant pas la

première ville à se doter d’un tel système, puisqu’Utrecht avait lancé l’initiative plus tôt.

En 1950, les autorités entreprirent de relier entre elles les centrales de production des grandes villes entre elles, afin de bénéficier d’une meilleure fiabilité, et donc de réduire la surproduction de sécurité. Les premières lignes à haute-tension virent alors le jour.

Dix ans plus tard, une révolution marquait les Pays-Bas : une source naturelle de gaz fut trouvée dans le nord du pays, ce qui a réduit considérablement la complexité et les coûts d’approvisionnement en gaz. Les réseaux durent

Figure 10 : Affiche publicitaire vantant les mérites de la cuisson au gaz dans les années 3084

Figure 11 : Système de chauffage urbain installé après la Deuxième Guerre mondiale85

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41,35%  

20,17%  23,20%  

17,15%  

14,13%  

Consomma'on  d'énergie  brute  au  Danemark  (2007)  

Pétrole  

Gaz  naturel  

Charbon  

Énergie  renouvelable  

Biomasse  

cependant être adaptés au gaz naturel, puisque ce dernier était considérablement plus sec que le gaz de synthèse et faisait sécher les joints d’étanchéité.

Au fil des années, les compagnies productrices de gaz et d’électricité ont tissé des liens de plus en plus serrés afin d’assurer une bonne organisation de la production. Les années 1980 ont par la suite vu plusieurs compagnies municipales fusionner entre elles, pour devenir les compagnies privées qui gouvernent actuellement le marché néerlandais. Parallèlement, on assiste actuellement à un essor de l’énergie éolienne, dont la décentralisation et le faible impact environnemental s’inscrit bien dans le contexte d’organisation du territoire et de développement durable des Néerlandais. Quelques centrales expérimentales marémotrices sont également en opération, mais leur production reste toujours embryonnaire.

Encore aujourd’hui, les Pays-Bas assurent leur sécurité énergétique en misant sur deux volets: la coopération et la diversification. Alors que leur collaboration intime avec les producteurs locaux et étrangers ainsi que leur rôle de leader dans les pools internationaux d’échange d’énergie leur assure d’être toujours la plaque tournante où tout se transige, leur diversification brise leur dépendance à un certain type de production.

4.3.2 Enjeux politiques

4.3.2.1 L’origine d’une culture où l’énergie «verte» détient un rôle centralDepuis la profonde cicatrice laissée dans la conscience collective par la crise de 1973, les politiques préconisées par les gouvernements danois visent l’indépendance énergétique avec une ferveur impressionnante. Pour un pays social-démocrate comme le Danemark, les inégalités sociales engendrées par le fait que les citoyens les plus pauvres aient plus souffert de la hausse des prix que les citoyens riches a créé une onde de choc qui a stimulé les dirigeants à se tourner vers tous les moyens possibles pour se prémunir des fluctuations à venir. Les options étaient toutefois limitées : les seules sources d’énergies à la disposition de ce pays étaient le pétrole, le gaz naturel et le vent, étant donné que l’option de produire de l’électricité à partir de combustible nucléaire y était pratiquement condamnée en raison de la forte opposition sociale. Vu l’impopularité des combustibles fossiles, la tangente a donc favorisé l’émergence de la filière éolienne et des énergies dites «vertes».

Afin d’atteindre les objectifs d’indépendance énergétique, des politiques contraignantes envers les combustibles fossiles ont été mises en place. Au niveau de la fiscalité, une taxe fossile, basée sur les taux d’émissions de CO2 et de sulfure, a été implantée et constitue plus de 50% du prix du gaz naturel, du charbon et du pétrole. Cette implantation a eu pour effet de rendre les énergies alternatives, telles que la biomasse et l’éolien, relativement peu dispendieuses. Ainsi, le prix de l’électricité très élevé a favorisé la concurrence d’énergies autrement peu rentables comme l’énergie éolienne. Au cours d’une entrevue, M. Hasselager, de la Danish Energy Agency, a également stipulé que ces mesures étaient accompagnées d’un audacieux accord à long terme signé par tous les partis politiques danois, qui stipule que la stratégie énergétique nationale ne changera pas, peu importe le parti au pouvoir. On a donc la preuve d’une vision politique danoise engagée envers sa stratégie énergétique.

Actuellement, le pays peut se targuer de présenter un portfolio énergétique assez enviable : plus de 17% de la consommation totale électrique du pays provenait de l’énergie éolienne en 2007, une fraction considérable qui implique une logistique de réseau impeccable pour en gérer les fluctuations. La figure 12 présente une vue d’ensemble de la provenance de l’énergie consommée par les Danois en 2007 : en plus de la part accordée à l’énergie renouvelable, on y remarque les effets des efforts de diversification énergétique du pays, de par la répartition stratégique entre les différentes sources.

De nombreux programmes de subventions aux entreprises œuvrant dans le domaine des énergies alternatives sont en place au Danemark. Les secteurs de la biomasse, de l’énergie solaire, des cellules de carburant et de l’éolien sont ciblés. Ces investissements ont permis l’émergence d’une expertise danoise dans le domaine de l’éolien. LM Wind Power est un excellent exemple d’entreprise qui a bénéficié du climat favorable créé par ces programmes gouvernementaux. Selon Mme Sanne Nielsen de LM Wind

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Figure 12 :

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Power, cette entreprise, originalement manufacturière de coques de bateaux puis de réservoirs en fibre de verre, a produit le tiers des pales d’éolienne actuellement installées dans le monde et exporte son savoir-faire aux quatre coins du globe. Ceci montre bien que lorsque les politiques gouvernementales sont claires, les entreprises peuvent se transformer, innover et concurrencer sur des domaines nouveaux. La force du design, conjuguée avec le développement durable, peut alors s’exprimer.

À cause des politiques mises en place, la mentalité verte a été intégrée dans la société danoise. Par exemple, toujours selon M. Hasselager de la Danish Energy Agency, les voisins de projets de parcs éoliens sont invités à investir jusqu’à 20% de la valeur de contrats. Ils voient donc leur investissement produire un retour lorsque les éoliennes sont en marche, plutôt que de voir les effets négatifs engendrés par la présence de turbines dans leur entourage. Dans la même optique, on offre aux familles danoises des exemptions de taxes lorsqu’elles produisent elles-mêmes leur énergie. Ainsi, les familles se regroupent parfois pour acheter une éolienne ou achètent simplement des parts dans des coopératives d’éoliennes. En 2004, plus de 150 000 Danois étaient membres d’une coopérative ou propriétaires d’une éolienne.86

Parallèlement, de fortes politiques gouvernementales ont poussé à la décentralisation de la production d’électricité et de chaleur, pour les rendre plus près des centres de consommation. Cette mesure permet d’économiser entre 8 et 10% de pertes de transport, et de sauver tous les frais reliés à l’entretien du réseau électrique.87 La figure 13 montre l’évolution des infrastructures électriques entre 1985 et 2009 : on remarque clairement que le nombre de CHP décentralisés (combined heat and power) a augmenté de façon impressionnante.

Ces mesures ont également l’effet de conscientiser la population au « coût » social réel de la production d’énergie, puisqu’ils sont quotidiennement en contact avec les infrastructures de production.

Le Danemark peut se targuer d’avoir atteint un des objectifs d’indépendance énergétique car il produit aujourd’hui près de 140% de l’énergie qu’il consomme. C’est toutefois en raison de son importante production de pétrole et de gaz naturel issu de la mer du Nord qu’il dépasse la barre du 100%. Par contre, les réserves danoises de brut tirent à leur fin : selon la Danish Energy Agency, les réserves de pétrole s’élèvent actuellement à 195 millions de mètres cubes.88 En se basant sur une production annuelle de pétrole qui varie entre 12 et 14 millions de mètres cubes, les experts

prévoient donc que le Danemark sera un grand producteur de pétrole pour encore 15 ans. Il est donc évident que le degré d’autosuffisance diminuera de manière considérable en suivant l’évolution de la production d’hydrocarbures, comme l’illustre la figure 14. Raison de plus pour les Danois d’investir encore plus d’énergie dans leurs politiques énergétiques, qui ont pour objectif ultime de les rendre indépendants des fluctuations du cours du pétrole auquel ils sont vulnérables. De plus, la politique énergétique danoise a pour objectif d’être indépendant en termes de production d’électricité d’ici 15 à 20 ans, objectif qu’ils n’ont toujours pas atteint.

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Figure 13: Réseau électrique du Danemark 1985 à 2009

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nucléaires allemandes et françaises. De plus, ils possèdent également des sources de gaz naturel, et raffinent une quantité importante de pétrole, en raison à la fois de leurs grandes activités portuaires et de l’omniprésence de la Royal Dutch Shell au pays. La figure 15 montre l’évolution de la production d’énergie néerlandaise : on remarque que la part d’énergie renouvelable (partie en jaune et orange) a augmenté depuis 1990, mais qu’elle ne constitue encore qu’une mince fraction de la production totale.

Étant donné tous ces facteurs et la stabilité politique de la région, notamment grâce à l’Union européenne, l’indépendance énergétique des Pays-Bas n’est pas un enjeu majeur aux yeux des dirigeants néerlandais, contrairement à ceux du Danemark, tel que mentionné par Mme Rana Pudifin de l’Ambassade Canadienne aux Pays-Bas.

Par contre, l’efficacité énergétique constitue un cheval de bataille pour les Néerlandais, qui mettent à profit leur force en design pour optimiser leur mode de vie. En effet, la difficulté d’assurer un apport en énergie sécuritaire est directement proportionnelle à la quantité d’énergie à fournir : Si la consommation globale est plus faible, il est plus aisé de parvenir à un approvisionnement stable et assuré. Les Pays-Bas concentrent donc leurs efforts dans l’organisation du territoire plutôt que dans la production d’électricité dans le but d’être efficaces énergétiquement. Beaucoup d’efforts sont consacrés à réhabiliter les régions métropolitaines, afin de les rendre attrayantes aux yeux des familles et des individus vivant en banlieue. En vivant à

4.3.2.2 Pourquoi l’indépendance énergétique n’est-elle pas une priorité aux Pays-Bas, et qu’est-ce que le gouvernement préconise en matière d’énergie?La politique des Pays-Bas en matière d’énergie est basée sur la relation de confiance que le pays entretient avec ses voisins. Jouissant d’une localisation stratégique, les Pays-Bas représentent actuellement un lieu de transit et d’échange d’énergie pour le gaz naturel, le pétrole et l’électricité. Bien que le secteur de l’éolien soit en croissance, la majeure partie de l’électricité consommée provient de l’importation d’électricité produite par des centrales

Figure 14 : Comparaison des exportations et des importations du Danemark pour le pétrole, le gaz naturel et le charbon selon la Danish Energy Agency89

Figure 15 : Production d’énergie néerlandaise depuis 1971

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proximité des centres, le coût énergétique global du transport s’en trouve diminué : il en est de même pour les coûts de chauffage et d’entretien lorsqu’on partage les mêmes bâtiments locatifs. Des programmes gouvernementaux tels que des campagnes de sensibilisation, conjointement avec une organisation urbaine bien dirigée par les mairies, contribuent ainsi à revaloriser les centres urbains, et donc à faire des économies dans les dépenses énergétiques. En adoptant une stratégie globale pour le pays, les centres de consommation d’énergie sont centralisés, ce qui facilite la distribution et réduit les pertes.

4.3.2.3 Quelles sont les politiques québécoises en termes d’énergie, et comment se comparent-elles aux politiques danoises et néerlandaises?Au Québec, bien que l’énergie hydroélectrique soit abondante (production excédentaire) et très peu coûteuse, le gouvernement, par l’entremise d’Hydro-Québec, fait des appels d’offres dans le secteur éolien afin de favoriser le développement de technologies dans le secteur des énergies renouvelables. L’objectif est de produire 4 000 MW d’énergie éolienne d’ici 2015 et ce, même si le prix du mégawatt d’énergie éolienne reste plus élevé que celui de l’énergie hydroélectrique. En 2008, Hydro-Québec a annoncé qu’elle avait accepté des soumissions pour un total de 2 004 MW, ce qui devrait lui permet d’atteindre son objectif d’ici 2015. Les projets acceptés représentent des investissements de quelque 5,5 milliards de dollars. Les appels d’offres incluent une clause qui stipule que jusqu’à 60% des coûts liés au projet doivent être dépensés au Québec.90 Ces clauses, en plus de permettre la revalorisation des régions, offrent une opportunité à la province de développer une expertise dans le domaine.

Le fait qu’Hydro-Québec, une société d’État, soit l’acteur principal en matière d’énergie permet au gouvernement d’imposer une ligne directrice à ses politiques énergétiques. Toutefois, en raison de la production massive et rentable d’hydroélectricité, le Québec n’a pas un besoin aussi urgent et critique que le Danemark de développer de nouvelles technologies. La puissance attribuée lors des appels d’offres dans le secteur éolien est minime par rapport à la production hydroélectrique au Québec : la figure 16 illustre bien le monopole hydroélectrique de la province. Cependant, les efforts consacrés au développement de cette technologie permettent au Québec d’apprivoiser cette technologie et de développer des liens cruciaux avec l’industrie, ce qui pourrait lui être utile à long terme.

4.3.2.4 Quel est l’impact d’un réseau de collaboration solide entre une nation et ses voisins en termes de production d’électricité?

Le contexte québécois

En dépit de son potentiel énorme, l’exportation d’hydroélectricité au Québec est actuellement limitée par l’absence de coordination des divers acteurs présents dans le marché électrique du nord-sst de l’Amérique. En effet, bénéficiant d’une situation géographique avantageuse, la province a la possibilité d’exporter un important volume d’hydroélectricité vers les zones densément peuplées de la côte est américaine, leur permettant ainsi de limiter leur production de sources non-renouvelables. Cependant, en plus de devoir se positionner dans le contexte compliqué des dérèglementations, Hydro-Québec se heurte aux politiques énergétiques américaines : un débat subsiste toujours chez nos voisins, qui tardent toujours à considérer l’hydroélectricité comme une source d’énergie propre dans le cadre de leur politique de diversification de portefeuille énergétique, notamment en raison des dommages environnementaux générés par la création de bassins de rétention et par le souci de protéger les petits producteurs locaux d’énergie renouvelable.

Toutefois, comme l’énergie éolienne figure dans le palmarès des énergies vertes des Américains, le Québec aurait tout à gagner à développer rapidement ses infrastructures, pour tirer profit de ses ressources abondantes afin de satisfaire l’intarissable marché américain. Un accord avec nos voisins du sud ferait certainement passer l’industrie éolienne québécoise d’ « artifice technologique » à « ressource stratégique », entraînant par le fait même le développement d’une expertise durable et la stimulation

91Figure 16 :

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des économies des régions. De nombreuses barrières sont toutefois présentes à la réalisation de cette voie, la plus importante étant la saturation actuelle des infrastructures de transport d’électricité vers la Nouvelle-Angleterre. L’exportation d’énergie éolienne vers le sud impliquerait donc la construction de nouvelles lignes, engendrant des coûts considérables. Des facteurs sociaux freinent également l’essor du marché, puisque plusieurs Québécois éprouvent des réticences à envahir leur paysage des fameuses tours blanches qu’ils croient être au seul bénéfice de leurs voisins du sud.

La situation au Danemark

La situation est tout à fait différente au Danemark, qui constitue, avec ses voisins, un exemple à suivre en termes d’échanges d’électricité. En effet, il fait partie du marché énergétique nordique Nord Pool, en charge de tous les transits d’énergie entre les pays scandinaves et baltiques. Opéré par une compagnie privée, Nord Pool constitue le plus grand marché de puissance au monde, en offrant à ses participants, plus de 300 compagnies en provenance de 20 pays, producteurs, compagnies d’énergie et gros consommateurs, de transiger l’énergie du jour même ou du lendemain. Le système de tarification mis en place par Nord Pool, en plus d’être le système de référence pour les distributeurs pour leurs clients, vise la transparence des prix de l’électricité entre les divers acteurs. Régulé par la Direction des ressources hydrauliques et de l’énergie de Norvège, Nord Pool a également dans sa ligne de mire l’établissement d’un centre de coordination des marchés européens, afin d’étendre le champ d’action du marché. En 2009, la compagnie avait transigé plus de 72% de la consommation d’électricité des pays nordiques.92

Les infrastructures reliant les différents marchés d’énergie internationaux sont particulièrement importantes, ce qui soutient avantageusement la production éolienne et sa variabilité intrinsèque. En effet, les surplus et manques d’énergie engendrés par la fluctuation des vents peuvent être contrés par la vente d’énergie en temps réel entre les nations. Le même principe s’applique à l’absorption de la variation des niveaux d’eau des bassins norvégiens. Ainsi, durant les tempêtes génératrices de grands vents, plus fréquentes en hiver, le Danemark exporte son surplus d’énergie éolienne à ses voisins, tandis qu’au printemps, la Norvège prend le relais avec ses rivières gorgées d’eau. La Suède, quant à elle, régularise le marché durant les autres périodes puisque sa source principale d’énergie, le nucléaire, n’est pas dépendante des conditions saisonnières.

Le contexte aux Pays-Bas

En termes de capacité d’échange, les Pays-Bas misent énormément sur leur situation géographique : leurs frontières leur donnent accès aux marchés français, allemand et belge. Le gouvernement s’assure un approvisionnement fiable au pays en jouant un rôle de leader dans le développement de ces marchés de l’électricité et du gaz naturel, proposant de nouvelles politiques et règles de marché afin de favoriser et d’harmoniser les relations actuelles d’échange93. Citées en exemple par l’Agence Internationale de l’énergie, les politiques énergétiques néerlandaises reflètent les trois éléments fondamentaux d’une politique énergétique viable: la sécurité énergétique, la durabilité environnementale et la croissance économique, ces trois piliers étant appelés les « 3 E ». Le gouvernement a mis en place des politiques visant à accroître la part des énergies renouvelables à 20% d’ici 2020, en plus d’augmenter de 2% par année leur efficacité. Étant donné la difficulté de ces objectifs, les Pays-Bas se sont munis de systèmes d’implémentation stricts, chargés de mettre en pratique les objectifs et de coordonner les relations entre le gouvernement et l’industrie, dialogue crucial dans la réussite des objectifs. En mariant ces trois aspects à ses politiques, et en devenant un pionnier dans ses objectifs, le gouvernement s’assure de promouvoir les échanges, et d’ainsi permettre au pays de bénéficier d’un transit régularisé et constant d’énergie sur leur territoire, ce qui leur garantit par le fait même un accès fiable en énergie.

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Par d’éolienne de Middelgrunden, Copenhague

Photo prise par Alain Aubertain

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4.3.3 Innovations technologiques

4.3.3.1 Le concept du «Smart Grid», une approche intéressante pour la gestion de la consommation d’électricitéLa technologie du «Smart Grid», présentement en plein essor, ne manque certainement pas de publicité lorsqu’il s’agit de planifier le développement énergétique d’une région est en plein développement. Plusieurs compagnies et instituts, comme la multinationale GE Energy et le laboratoire Danois Risø, entre autres, mobilisent actuellement beaucoup de ressources à peaufiner et gérer l’implantation de cette stratégie en l’apparence logique, mais complexe à intégrer. En effet, le Smart Grid consiste à intégrer au réseau électrique actuel des échanges de données concernant à la fois la production et la consommation d’électricité, dans le but d’optimiser l’offre et la demande provenant de plusieurs sources de production et de consommation. Ainsi, on évite à la fois les pics de demande qui font grimper la production des infrastructures énergétiques, et les temps morts où l’électricité se transige à prix dérisoires. Par exemple, avec des appareils compatibles avec cette technologie, il serait possible pour un consommateur de programmer ses électroménagers pour qu’ils se mettent en marche lors des heures où la charge du réseau est basse, tard en soirée ou durant la nuit. Dans le cas où une région se procure son énergie à partir de centrales thermiques ou nucléaires, cette simple atténuation des pics de demande représente des économies substantielles, puisque les opérateurs n’ont plus à augmenter la capacité de leurs installations plusieurs heures à l’avance en prévision des périodes de pointe.

GE Energy a déjà vendu 11 millions de smart meter qui intègrent cette technologie. Ces appareils permettent aux gens de surveiller et de mieux comprendre leur consommation d’électricité. Un programme accompagnant ces compteurs leur permet aussi de gérer leur consommation de manière automatique. Aussi, le système sert de base de données : à partir des données cumulées, il est possible de mieux diriger l’énergie de manière à ne pas créer de surplus là où la demande est faible et de bien alimenter les clients qui ont besoin d’énergie. Les données de production et de consommation permettent également aux gestionnaires de réseaux d’intégrer l’électricité produite par des sources dites vertes, comme l’éolien ou le solaire. Cette énergie peut donc être dirigée vers les centres de consommation et ainsi réduire la charge des centrales thermiques ou nucléaires. En bref, le concept de «Smart Grid» , chef d’œuvre de design au

niveau des réseaux, systèmes et équipements, constitue un outil formidable qui permet à la fois aux consommateurs et aux producteurs de faire des économies tout en favorisant les énergies renouvelables.

Pays-Bas

Du côté des Pays-Bas, beaucoup d’énergie est également investie en développement de biocarburants. Neuf millions d’euros ont été déployés par une alliance entre le gouvernement néerlandais et des industries pour créer le Algae Production & Research Centre, un centre de recherche visant à combler le vide entre l’industrie et la recherche universitaire dans le secteur des biocarburants à partir d’algues. L’objectif des travaux sur les algues est de diminuer leur coût de production, afin de les rendre compétitives sur le marché de la biomasse. En effet, selon les intervenants rencontrés au Wageningen Biobased Food and Research Center, à ce jour le prix de la biomasse est compétitif à environ 0.4 euro par kilogramme alors que les algues atteignent 10.62 euros par kilogramme de biomasse.

D’autre part, acteur proéminent dans le marché des biocarburants, la compagnie Royal Dutch Shell investit 20 à 25% du budget d’investissement en recherche et développement dans le développement de biocarburants, notamment avec la compagnie canadienne Iogen. L’Energy Independence and Security Act établit en 2007 aux États-Unis est un des grands incitatifs de production dans ce secteur d’activité. Cette politique requiert la production de carburant de seconde génération pour rencontrer l’objectif de 36 milliards de gallons/an d’ici 2022, dont 16 milliards doivent provenir de l’éthanol cellulosique. De plus, que ce soit au Québec, au Canada en général ou en Europe, différentes politiques ont été établies afin d’assurer un contenu annuel moyen d’éthanol d’environ 5 % dans la consommation d’essence entre 2010 et 2012. Ces facteurs ont donc stimulé les recherches dans le secteur des carburants propres depuis quelques années.

4.3.3.2 BIOCARBURANTS- L’avenir ou non?Tout d’abord, il importe de faire la distinction entre les différents types de biocarburants et leurs impacts. L’éthanol de première génération, qui est synthétisé à partir de céréales comme le maïs, fut le premier type de biocarburant produit à grande échelle. Par contre, plusieurs débats sont actuellement en cours sur le bien fondé de cette production. En effet, plusieurs producteurs, stimulés par la soudaine hausse des prix de vente des céréales et du maïs, ont sacrifié plusieurs hectares de forêt pour étendre leur superficie arable : même si l’éthanol produit moins de gaz à effet de serre que l’essence en brûlant, la perte de

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capacité d’absorption des arbres coupés pourrait la contrebalancer.94 On évoque également que plusieurs études impliquant la quantification de l’énergie nécessaire à la production des céréales, leur transport et leur transformation par rapport à celle nécessaire à la transformation des combustibles fossiles ont été négligées95. L’impact social de cette production est également à considérer, puisque la soudaine rareté du maïs qui a fait grimper les prix en flèche a mis dans l’embarras plusieurs pays utilisant cette céréale comme base de leur alimentation. Le Mexique, par exemple, peine actuellement à se rétablir de la hausse des prix des tortillas, qui ont triplé de valeur en un an96. Étant donné tous ces impacts écologiques, sociaux et économiques, difficile de qualifier l’éthanol de première génération de solution durable aux problèmes de pénurie de carburants.

Par contre, l’éthanol de deuxième génération, aussi appelé éthanol cellulosique, est synthétisé à partir de matières premières issues de déchets, résidus, sous-produits agricoles ou plantes ne servant pas à l’alimentation humaine. Cela respecte un principe fondamental du développement durable, soit le respect de la société dans le développement de la technologie. Ces technologies sont présentement au stade de développement et démonstration de la technologie et se dirigent vers la mise en marché dans un horizon d’environ deux ans. Les biocarburants de deuxième génération, l’éthanol cellulosique étant le plus connu, peuvent être synthétisés par deux procédés, soit thermo-chimique ou enzymatique.

Québec

Le Canada, profitant d’immenses ressources en biomasse, dû à ses terres fertiles, et d’une solide base de connaissances dans le secteur de la bioénergie, est à l’origine de plusieurs systèmes avancés de densification et de conversion en biocarburants, comme l’éthanol ou les carburants diesel renouvelables. Plusieurs entreprises participent au développement de cette « bioéconomie » : entre autres, nommons Iogen, Ensyn Technologies et Enerkem.

Située à Sherbrooke, la compagnie Enerkem se spécialise dans la valorisation de déchets domestiques. Elle possède une usine pilote puis procède actuellement au développement de la deuxième phase de son usine de démonstration commerciale à Westbury. De plus, la construction de la première usine commerciale est prévue pour 2011 à Edmonton.

Enerkem n’est pas la seule entreprise canadienne à se lancer dans la production d’éthanol cellulosique. En effet,

Iogen, en collaboration avec son partenaire principal, la Royal Dutch Shell, et de Technologies du développement durable Canada (TDDC), met au point un procédé unique qui utilise des enzymes spécialisés pour convertir les fibres végétales en sucres qui sont ensuite fermentés et distillés pour fabriquer de l’éthanol cellulosique. Ce projet financé en grande partie par Le Fonds de biocarburants ProGenMC permettra la production de carburants renouvelables. Sur le marché mondial, Iogen est une compagnie figurant parmi les plus prête à passer au stade commercial. En effet, l’usine de démonstration commerciale est en activité depuis 2004. Cela a permis de mettre au point la technologie. À ce jour, Iogen a effectué environ 40% de l’ingénierie de projet pour la construction de leur future usine commerciale en Saskatchewan.

Cette capacité québécoise à innover dans un secteur en expansion découle probablement de sa sécurité énergétique : l’approvisionnement étant assuré, la province peut se consacrer au développement de technologies complémentaires qui seront valorisées à moyen terme par le biais de subventions gouvernementales.

4.3.4 Enjeux économiques

4.3.4.1 En quoi l’énergie constitue-t-elle un pilier pour l’économie danoise?Le Danemark bénéficie actuellement de sources considérables de pétrole et de gaz naturel dans la mer du Nord. Il est d’ailleurs l’unique pays de l’Union européenne à être exportateur net de pétrole brut et occupe la 45e position97 en termes d’importance d’exportation de cette ressource. Cependant, ses gisements de pétrole ne sont pas inépuisables. En effet, le pic pétrolier danois s’est produit en 2002 et la production est maintenant en déclin.98 Cela est donc un enjeu concernant l’orientation économique du pays.

Comme il a été mentionné précédemment, le gouvernement danois préconise fortement l’indépendance et la sécurité énergétique et c’est pourquoi il a anticipé la situation future en investissant rapidement dans diverses formes d’énergies autres que les combustibles fossiles. Évidemment, les changements climatiques sont aussi un important moteur favorisant les énergies renouvelables au Danemark. Grâce à ses politiques habiles et à ses convictions, le Danemark est parvenu à démentir que la croissance du produit intérieur brut d’un pays était liée à sa consommation d’énergie, et que de la restreindre affecterait forcément le PIB à la baisse. En effet, comme le montre la figure 17, depuis 1980, le PIB du Danemark

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a crû, tandis que sa consommation a diminué. Cet exploit économique, montrant qu’avec une efficacité énergétique accrue, il est possible de soutenir une importante croissance économique tout en réduisant sa dépendance aux combustibles fossiles et en préservant l’environnement, n’est pas sans susciter un réel sentiment de fierté chez les Danois, qui s’y réfèrent en tant que «The Danish Example».

Puisque les énergies fossiles existent en quantité limitée et que le monde consomme de plus en plus d’énergie, il est ainsi très probable qu’il y a aura une augmentation des prix de l’énergie. Le coût des énergies renouvelables est quant à lui en baisse.100 C’est donc dire que les technologies comme l’éolien et le solaire tendent à devenir compétitives au niveau international. L’enjeu des énergies renouvelables est à caractère économique et technologique puisqu’une meilleure technologie signifie souvent un meilleur rendement. Dans un avenir rapproché, les pays ayant une expertise avancée dans ces domaines pourront bénéficier de l’exportation de leurs produits. C’est le cas du Danemark qui parfait depuis longtemps son expertise dans le domaine des éoliennes.

En effet, le Danemark est devenu un pionnier dans le développement commercial de l’énergie éolienne pendant les années 70. Déjà plusieurs petites compagnies danoises développaient des éoliennes et le laboratoire danois Risø DTU instaurait des procédures de test et de certifications dans ce domaine. Au Danemark, le développement de cette industrie est caractérisé par la collaboration entre les recherches financées publiquement et les entreprises

œuvrant dans la recherche et développement, les tests et les certifications. Cela a eu pour effet un développement rapide de l’industrie et de produits fiables. À ce jour, l’industrie éolienne danoise est la plus importante au monde. Près de 90 % des éoliennes produites au Danemark sont exportées et comptaient pour 38 % du marché mondial en 2003, ce qui totalise un revenu de 3 milliards d’euros.101 Selon le Ministère de l’Environnement danois, cette industrie est responsable de 23 500 emplois directs uniquement au Danemark. Il est à noter que les constructeurs reliés à la fabrication d’éoliennes danoises les plus importants sont Vestas, Nordtank, Wind World, Norwin, Wincon, Danwin, Dencon, DWP, Vindsyssel et Wicon.102

En raison de l’importante taxation de l’énergie, les Danois sont les habitants européens payant leur énergie la plus chère avec un coût de € 0.268/1kWh103 (0,348 $US/1KWh) comparativement à 7,078 cents/1kWh104 (0,068 $US/1KWh) pour les Québécois. Comme il a déjà été mentionné, cette taxation favorise la présence d’énergie autrement peu rentable comme l’éolien, qui bénéficient alors d’un avantage concurrentiel par rapport aux combustibles fossiles. Au Québec, le coût beaucoup moins onéreux de l’électricité mine le potentiel de développement de l’énergie éolienne, puisque l’industrie ne dispose que d’une très mince marge de manœuvre pour assurer la rentabilité des projets. Les éoliennes québécoises sont donc principalement érigées pour des raisons stratégiques qu’économiques.

Désormais, l’importante quantité d’énergie retirée du vent par rapport à la limite théorique ajoutée au fait qu’il s’est

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Figure 17 : Accroissement du PIB tout en réduisant la demande énergétique 99

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Figure 18 : Croissance de l’emploi dans le secteur de l’énergie éolienne

instauré une quasi-normalisation des éoliennes permet d’affirmer que la technologie pour exploiter l’énergie du vent est plutôt mature105. On prévoit également une croissance importante des emplois dans le secteur d’ici à 2030, comme le montre la figure 18, tirée d’un rapport de l’Agence Européenne de l’Énergie Éolienne.

Toutefois, des progrès dans ce domaine demeurent possibles. Les grands fabricants tentent, par exemple, de pouvoir capter des vitesses de vents plus faibles. LM Wind Power, l’entreprise danoise la plus importante au monde dans le domaine des pales d’éolienne, investit d’ailleurs massivement en recherche concernant des concepts innovateurs comme les éoliennes à axe vertical.

Dans peu de temps, la Chine sera le premier pays éolien dans le monde en termes de capacités installées. Ce pays veut à tout prix réduire la part de la houille dans sa production d’énergie et accroître celle des sources d’énergie propres et renouvelables. Selon l’information recueillie auprès de LM Wind Power, depuis 2003, la Chine double annuellement sa capacité installée. Le support gouvernemental de la Chine au niveau de l’éolien favorise un développement efficace et rapide. C’est donc un marché très prometteur pour les industries danoises. À ce sujet, la technologie de pointe des Danois incite fortement les Chinois à former des coentreprises et à investir au Danemark pour acquérir des connaissances dans ces technologies avancées.

4.3.5 Perspectives futures

4.3.5.1 En regard avec leur orientation énergétique actuelle, vers quel avenir les nations se dirigent-elles?

Danemark

Deux priorités semblent guider les décisions et recherches effectuées au sein du secteur énergétique danois, soit la sécurité énergétique et les changements climatiques. Par sécurité énergétique, on entend la capacité du Danemark à fournir de l’énergie en quantité suffisante aux consommateurs, et ce, malgré leur désir de diminuer leur dépendance aux combustibles fossiles. Cette section dresse un portrait du plan de développement énergétique au Danemark pour les années à venir.

Globalement, l’objectif fixé par le Danemark consiste à augmenter la part d’énergies renouvelables produites et consommées au pays, à prioriser l’efficacité énergétique des différents systèmes et, par conséquent, réduire les émissions de gaz à effet de serre. Selon le Risø Energy Report 8, rédigé par Risø DTU, National Laboratory for Sustainable Energy, les pays membres de l’Union européenne doivent, en 2020, avoir réduit leurs émissions de gaz à effet de serre de 20% par rapport à celles de 1990, collaborer afin que 20% de l’énergie produite au sein de l’Union européenne soit de source renouvelable et contribuer à ce que la

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consommation énergétique de l’Union européenne ait diminué de 20% par rapport à une référence donnée. Le Danemark est un pays qui va plus loin et avance des scénarios ambitieux tel que, d’ici 2025, l’énergie électrique fournira 15% de l’énergie utilisée par les véhicules circulant sur les routes danoises. Il est maintenant intéressant de se pencher sur la vision qu’a le Danemark pour atteindre ces objectifs.

Dans un premier temps, le Danemark mise surtout sur l’expansion du secteur éolien par la construction de larges parcs éoliens et réseaux électriques en haute mer. D’ailleurs, la construction d’un parc éolien en haute mer partagé entre le Danemark, la Suède et l’Allemagne est prévue d’ici quelques années. Dans le cadre de ce projet, l’énergie serait envoyée au pays le plus offrant. L’implantation d’énergies renouvelables implique la dépendance à des ressources variables, tel que l’éolien, à la merci des conditions météorologiques. Il est donc nécessaire d’implanter des systèmes de gestion énergétique flexible, comme le concept Smart Grid. Pour ce faire, l’utilisation des technologies de l’information et des communications doit augmenter et être améliorée. En effet, afin de gérer des ressources variables, la communication entre les distributeurs et les consommateurs d’énergie doit être rapide et fréquente. Ces systèmes intelligents permettent d’enregistrer, contrôler et réguler les flux énergétiques de façon à assurer l’équilibre entre la production, la gestion des risques environnementaux et la sécurité d’approvisionnement. Selon l’information recueillie dans le Risø Energy Report 8, dans un avenir plutôt rapproché, des moniteurs, installés dans tous les bâtiments et liés à ces systèmes intelligents, afficheraient une fois par heure le coût de l’énergie. En exposant les consommateurs à des prix variables, il est

possible de générer une demande variable suivant une offre variable. Par exemple, en période de fort vent, la grande disponibilité d’énergie éolienne entraînerait un faible prix de l’énergie. Les consommateurs seraient donc tentés d’augmenter leur consommation énergétique à ce moment en faisant fonctionner la laveuse et la sécheuse par exemple. Au contraire, en période de faible vent, les prix seraient plus élevés et les gens consommeraient moins d’énergie. Par le fait même, le réseau énergétique serait moins sollicité lorsque peu d’énergie serait disponible.

Dans un deuxième temps, afin d’assurer un système de gestion énergétique flexible, il est nécessaire de développer les technologies de stockage d’énergie. En ce qui concerne le réseau électrique, les dispositifs de stockage permettront d’accumuler des réserves d’énergie électrique afin de les utiliser lors des périodes de pointes et d’ainsi assurer la disponibilité de l’énergie provenant de sources renouvelables et variables. L’accumulation d’eau dans des bassins ou le stockage d’air comprimé sont deux technologies priorisées dans les recherches et appropriées pour ce type d’application. Le stockage mobile de l’énergie est également à considérer. Effectivement, la voiture électrique peut être utilisée comme dispositif de stockage mobile d’énergie. Les voitures possédant la capacité de chargement bidirectionnel permettent une décharge du véhicule vers le réseau lorsque le véhicule n’est pas utilisé ou encore une charge du réseau vers le véhicule pour lui permettre de parcourir une certaine distance. Par le fait même, les véhicules électriques peuvent amoindrir les fluctuations présentes sur un réseau électrique alimenté par des énergies renouvelables.

Dans un troisième temps, dans un scénario où les énergies renouvelables occupent une proportion considérable du portfolio énergétique du Danemark, il est essentiel de fournir des solutions permettant d’augmenter la collaboration des consommateurs afin qu’ils contribuent à maintenir une demande énergétique équilibrée. Le regroupement de ces nombreuses solutions de faible consommation énergétique a un impact significatif sur la régulation de la demande.106

L’utilisation de véhicule électrique comme dispositif de stockage ainsi que l’affichage des prix de l’énergie à chaque heure figurent parmi ces solutions. Une autre solution résidentielle consiste à utiliser une pompe à chaleur pour chauffer un sol de béton. Cette solution présente une bonne inertie thermique. Ainsi, dans une résidence bien isolée, la pompe à chaleur peut être éteinte pendant quelques heures sans causer d’inconfort. Cela permet de

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Parc d’éolienne de Middelgrunden, Copenhague

Photo prise par Alexandre Maurice

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diminuer la demande énergétique de la résidence et donc la sollicitation du réseau.

Dans un quatrième temps, il est intéressant de se pencher sur un type de réseau de production de chauffage et d’électricité implanté au Danemark. Les Combined Heat & Power Plants, qui consistent à produire de l’électricité par un procédé industriel de combustion puis à en récupérer la chaleur afin d’assurer le chauffage d’un quartier, sont largement utilisés dans ce pays. Au Danemark, la combustion des déchets domestiques et de la biomasse disponible est le procédé utilisé. Ce procédé combine l’amélioration de la gestion des déchets domestiques ainsi que la production d’énergie électrique et thermique renouvelable.

Il est important de garder en tête, qu’à ce jour, le système énergétique danois est caractérisé par trois réseaux nationaux de distribution, soit un réseau électrique, de chaleur à distance et de gaz naturel. Il est donc important que les nouvelles énergies renouvelables produites s’intègrent bien à ces trois réseaux de distribution. De plus, une solution d’avenir qui est déjà partiellement entamée au Danemark est la création d’un réseau de distribution international. Cela permet d’optimiser la redistribution des surplus d’énergies. D’ailleurs, le marché du Nord, qui a été présenté précédemment, en est un bon exemple.

Le Danemark fait aussi de l’efficacité énergétique une priorité. Selon l’information recueillie auprès du Danish Energy Agency, la rédaction des normes régissant la construction des nouveaux bâtiments est réalisée en très proche collaboration avec le Danish Energy Agency. La stratégie consiste à augmenter l’isolation des bâtiments et le développement de systèmes alimentés par des sources d’énergies renouvelables.

Finalement, dans le monde entier, le transport compte pour environ 20% de la consommation énergétique mondiale et, au Danemark, consomme environ 65% des combustibles fossiles.107 Pour un pays qui désire devenir indépendant des combustibles fossiles, il n’est pas surprenant d’apprendre que plusieurs chercheurs travaillent sur l’élaboration de solutions énergétiques mobiles. Parmi les voies explorées, on retrouve les batteries, les piles à combustible, l’hydrogène, les carburants synthétiques et biocarburants. En résumé, la politique énergétique danoise pour les années à venir s’articulera autour de trois grands enjeux :

• L’expansion du secteur éolien par le biais de la création de réseaux et de parcs en haute mer en collaboration avec des partenaires voisins;

• Le développement de systèmes intelligents pour la coordination des ressources énergétiques, à savoir la gestion de la production éolienne dans un réseau occupé par des centrales thermiques par rapport à une consommation variable;

• L’emphase sur de nouvelles méthodes de stockage d’énergie afin de niveler les pics de demande, qui pourraient être constituées par des piles à hydrogène ou des véhicules.

Pays-Bas

Trois solutions énergétiques intéressantes pour l’avenir ressortent des apprentissages réalisés aux Pays-Bas. Dans un premier temps, à l’Eindhoven High Tech Campus, il a été mentionné que le secteur énergétique aurait bientôt une place au sein de cet écosystème d’innovation ouverte. En effet, il existe un potentiel intéressant pour développer des cellules photovoltaïques à prix intéressant et ce sujet sera fort probablement étudié sur ce campus sous peu. Il s’agit de l’impression de cellules solaires sur des pellicules flexibles. Il serait possible de convertir les usines d’impression (ex. journaux) en usine de production de cellules photovoltaïques en modifiant l’encre régulière par une encre appropriée et en ajustant le procédé roll-to-roll à la production de cellules photovoltaïques.

Dans un deuxième temps, le Holst Centre (Open Innovation Centre for Wireless Autonomous Microsystems & Systems-in-foil), concentre ses recherches sur la conception de produits miniatures et à faible consommation énergétique. Selon l’information recueillie auprès du Holst Centre, un défi actuel consiste à utiliser l’énergie disponible et se trouvant dans l’environnement immédiat des utilisateurs. Par exemple, des systèmes miniatures utilisant les vibrations du sol ou encore la chaleur corporelle pour fonctionner y sont développés.

Finalement, tel que discuté précédemment, le secteur des biocarburants figure également parmi les priorités de recherche du secteur énergétique aux Pays-Bas. Le gouvernement néerlandais s’est fixé des objectifs ambitieux. En effet, selon l’information recueillie auprès du Wageningen Biobased Food & Research, d’ici 2030, 25% des matériaux provenant présentement de l’industrie pétrolière doivent être fait à partir de la biomasse, l’électricité devra provenir à 25% de sources biologiques et le chauffage à 17% et 60% des carburants utilisés devront être à base biologique.

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Québec

À l’heure actuelle, les grands acteurs du domaine de l’énergie visent à assurer la compétitivité de l’économie et la disponibilité d’une énergie hydroélectrique abordable mais peu diversifiée, tout en luttant contre les changements climatiques. Soucieuse de profiter de ce marché en pleine croissance, une partie non négligeable de l’économie du Québec se tourne donc vers la fabrication de techniques nécessaires au développement de cette source d’énergie propre. L’expertise d’Hydro-Québec en termes d’hydroélectricité n’est plus à démontrer, et son réseau de fournisseurs est excessivement ben rodé. Plusieurs compagnies québécoises parviennent donc à innover et à se développer au sein du contexte économique généré par la société d’État. Toutefois, lorsqu’on considère d’autres secteurs énergétiques, comme l’éolien, l’entrée dans le marché est plus difficile pour les compagnies québécoises qui visent une portée internationale. Prenons l’exemple d’AAER, un turbinier québécois qui, malgré ses installations à la fine pointe de la technologie et sa stratégie marketing poussée, peine à faire sa place sur le marché canadien, en partie à cause de la réticence des institutions financières à cautionner des compagnies ayant un historique de fiabilité limité. Les initiatives québécoises souffrent également de la compétitivité des prix offerts par les grandes entreprises, comme General Electric et Siemens, capables de limiter leurs coûts de production par des économies d’échelle non accessibles à des compagnies régionales.

Cependant, le Québec sait profit de ses ressources éoliennes pour dynamiser ses régions en imposant des contraintes géographiques aux compagnies soumissionnaires. Par exemple, lorsqu’Hydro-Québec émet des appels d’offres pour la construction de parc éolien, la société d’État impose qu’un certain pourcentage de la fabrication se fasse non seulement au Québec, mais directement dans les régions où ces parcs éoliens seront implantés. L’économie du Québec se rabat donc actuellement sur un développement d’une industrie manufacturière dans le domaine de l’éolien.

En termes de biocarburants, plusieurs entreprises récemment émergées poussent à croire que le Québec saura se tailler une place dans ce marché en expansion. La capacité des usines de synthèse des entreprises québécoises, indicatrice du degré de maturité du procédé, est actuellement en expansion, et beaucoup de subventions publiques et privées assurent la pérennité du développement. Ainsi, il est permis de croire que le Québec est bien positionné pour les années à venir côté biocarburants.

Globalement, en combinant son expertise en hydroélectricité, un développement éolien modeste et des initiatives en biocarburants, le Québec s’assure d’un avenir stable au niveau énergétique. Cependant, certaines lacunes, notamment au niveau des objectifs à long terme et de l’efficacité énergétique, gagneraient à être étudiées plus sérieusement sous la lumière des innovations réalisées le Danemark et les Pays-Bas. Une analyse plus approfondie sera présentée au courant du chapitre 5.

Éolienne de Middelgrunden, Copenhague

Photo prise par Gregory Dutrieux

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Photo prise par Gregory Dutrieux

Parc éolien de Middelgrunden, Copenhague

LM Wind Power, Jupitervej 6

Éolienne de Middelgrunden, Copenhague

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4.4 La logistique du transport maritimeLe secteur du transport maritime est au cœur du commerce international et, par conséquent, de l’économie mondiale. La mondialisation des marchés a donc eu un impact important sur ce secteur d’activité et lui a permis d’évoluer rapidement, tant au niveau de la logistique que des innovations technologiques associées. Les villes et les pays qui jouissent de la présence d’infrastructures portuaires augmentent donc leur compétitivité au niveau international. Dernièrement, la crise économique a durement touché l’achalandage dans les ports, et ce, au niveau mondial, ce qui a forcé les acteurs de l’industrie à réviser leurs plans stratégiques. Ce revirement a par ailleurs porté fruit; la reprise du secteur est bel et bien présente.

Lors de nos visites au port de Montréal, à la Corporation de gestion de la voie maritime du St-Laurent, au port de Copenhague-Malmö, au Port de Rotterdam ainsi qu’à diverses entreprises desservant ce secteur comme APM Terminals, l’Autorité portuaire de Montréal, Maersk et Fednav, nous avons été en mesure de cibler différents enjeux du secteur. De plus, il a été intéressant de pouvoir situer les grands acteurs du secteur dans la chaîne de valeur de l’industrie.

4.4.1 Description du secteur et faits saillantsCanada

Le secteur maritime a joué une importance capitale dans l’histoire du Canada, les voies maritimes et fluviales constituant presque le seul moyen de transport disponible avant la construction du chemin de fer et des autoroutes. Bien que ces deux modes de transport soient aujourd’hui prédominants pour le transit interne de marchandises, voici quelques faits démontrant l’importance du secteur du transport maritime au Québec et au Canada :

• Le secteur du transport maritime compte 12 300 emplois au Québec;

• Environ 7000 nouveaux employés seront embauchés dans la prochaine décennie pour remplacer les travailleurs qui partent à la retraite108 ;

• Le transport de plus de 400 millions de tonnes de marchandises par année se fait par voie maritime au Canada109.

Danemark

Le pays étant bordé par la Mer Baltique et la mer du Nord, la situation géographique du Danemark est propice à l’activité portuaire. Le port le plus important du pays est celui de

Vancouver Montréal Halifax Total

Importations

Tonnes  de  fret  totales  (MM)

Tonnes  conteneurisées  (MM)  

Pourcentage  conteneurisé  

EVP  chargés  (millions)  

Exportations  

Tonnes  de  fret  totales  (MM)  

Tonnes  conteneurisées  (MM)  

Pourcentage  conteneurisé  

EVP  chargés  (millions)  

               

12,4 16,5 6,1 35,0

7,9 5,9 2,0 15,8

64  % 36  % 33  % 45  %

1,120 0,541 0,241 1,902

   

67,1 8,6 7,6 83,3

9,7 5,5 2,5 17,7

14  % 64  % 33  % 22  %

0,762 0,618 0,217 1,597

Figure 18 : Fret international manutentionné dans les ports et les terminaux maritimes canadiens

Tableau 7 : Statistiques d’importation et d’exportation de 2006 dans les ports de conteneurs principaux110

EVP : Unité de mesure équivalant à un conteneur de vingt pieds

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Avec toute la complexité que peut apporter un système intermodal, une bonne logistique s’impose afin d’éviter les ruptures d’un mode de transport à l’autre. L’intégration entre ces différents modes de transports doit être parfaitement coordonnée. L’élément majeur ayant favorisé l’intermodalité est la conteneurisation, c’est-à-dire le transport de marchandises à l’intérieur de conteneurs aux dimensions standardisées. L’essor de la conteneurisation a permis de mettre en évidence l’avantage compétitif majeur découlant d’une exploitation efficace de l’intermodalité.

L’accès rapide et efficace à divers modes de transport est d’ailleurs l’un des atouts majeurs du port de Montréal. Ainsi, le port de Montréal est le deuxième en importance au Canada et le douzième113 en Amérique du Nord. Il possède des connexions avec l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau, les principaux réseaux ferroviaires (avec plus de 100 kilomètres114 de voies ferrées directement sur les quais de déchargement) ainsi que le réseau routier canadien. Mentionnons que les réseaux ferroviaires du Canadien Pacifique et du Canadien National sont tous deux reliés au port, ce qui procure à ce dernier une indépendance parfois cruciale des transporteurs ferroviaires, notamment en cas de conflit de travail.

Selon une étude de la Chambre de commerce du Canada en vue de recommandations au gouvernement fédéral, la majorité des biens qui entrent par l’ouest et l’est du Canada sont destinés au marché central. Par exemple, 70 % des importations qui entrent dans les ports de Colombie-Britannique sont destinées à être expédiées vers le centre et l’est du Canada par camion, transport aérien ou transport ferroviaire. De même, 75 % des biens qui entrent dans les ports de l’Atlantique sont destinés à être envoyés vers le centre du Canada et des États-Unis115. Sachant ceci, pour être en mesure d’être compétitif en Amérique du Nord, des investissements dans les infrastructures doivent être ciblés pour augmenter la capacité d’import et d’export du pays. Ceci inclut le réseau ferroviaire, les routes ainsi que les infrastructures portuaires qui relient les ports d’entrée canadiens au reste du Canada et des États-Unis.

Au Danemark, le port Copenhague-Malmö a connu une grande expansion grâce à ses installations qui sont directement reliées à l’aéroport international, au réseau ferroviaire, ainsi qu’au réseau routier. De par sa situation géographique et son rôle de porte d’entrée pour l’Asie et le reste du marché européen, le Danemark a misé juste en développant un bon réseau intermodal à partir de son port principal. La construction du pont Øresund entre la Suède et le Danemark a offert un plus large éventail de solutions de transport et a permis non seulement un développement

Copenhague-Malmö, reliant la Suède et le Danemark. Il est aussi le plus important port de Scandinavie autant pour ce qui est des marchandises transitées que pour les croisières. Son emplacement stratégique permet entre autres à la Russie et à l’Asie d’accéder au marché européen, d’où son importance dans le commerce européen.

• 36 % des échanges intraeuropéens en provenance du Danemark sont faits par mer, 34 % par camion et 30 % par train;

• 18 millions de tonnes de fret transitées en 2008111;

• Compte le plus grand transporteur maritime au monde (Maersk Line).

Pays-Bas

De par leur situation géographique, les Pays-Bas étaient prédestinés au développement d’une industrie maritime dominante. Ne négligeons toutefois pas le rôle du gouvernement néerlandais dans cette réussite, qui a su reconnaître l’importance du secteur pour son économie et le soutenir par ses politiques d’investissement. Voici donc quelques faits importants sur le secteur du transport maritime aux Pays-Bas :

• Les activités maritimes représentent plus de 200 000 emplois et 3 % du PNB des Pays-Bas;

• Le port de Rotterdam est de loin le plus grand port d’Europe, notamment en ce qui concerne les hydrocarbures;

• 421.1 millions de tonnes de fret transitées en 2008112.

4.4.2 Quelques enjeux dans le domaine

4.4.2.1 L’importance de l’intermodalitéDans le domaine du transport maritime, une chaîne logistique fiable, rapide et flexible nécessite une bonne gestion de l’intermodalité. Par intermodalité, nous entendons l’utilisation séquentielle de plusieurs modes de transport ou encore de moyens de transport du même mode, mais de taille différente (par exemple du cargo océanique vers la barge). Les grands transporteurs comme Maersk Line misent grandement sur cet aspect des ports. À cet effet, M. François-Xavier Delenclos, vice-président en charge de la stratégie globale de l’entreprise APM Terminals, a mentionné que l’objectif principal poursuivi dans l’industrie n’est plus tant la croissance du volume que la satisfaction du client requérant un respect des délais. Un tel objectif s’atteint notamment en innovant sur tous les aspects de la chaîne de transport maritime, ce qui comprend aussi la localisation stratégique des nouveaux terminaux sur les routes maritimes.

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économique de la région, mais également un resserrement des liens entre les deux pays.

Aux Pays-Bas, le port de Rotterdam possède aussi de multiples connexions avec les autres moyens de transport, notamment le transport fluvial par barges étant donné la présence du Rhin et de la Meuse. À cela s’ajoutent des connexions ferroviaires et routières s’étendant sur toute l’Europe, ainsi que la présence de l’aéroport de Schiphol, troisième plus important aéroport de fret en Europe116. Tout ceci confère au port de Rotterdam une zone d’influence et d’attraction économique d’une importance inégalée en Europe.

Bref, les opportunités et les défis sont énormes en raison de la croissance des échanges et des volumes de trafic qui en découlent. Le transport maritime s’est adapté à la demande de trafic et présente de nombreux avantages pour les expéditeurs. La chaîne intermodale doit être hautement intégrée et chacun des éléments du système doit jouer son rôle adéquatement. Les améliorations et les immobilisations doivent tenir compte de l’ensemble du réseau. La collaboration entre les différents intervenants pour assurer une meilleure gestion de l’ensemble des réseaux est essentielle.

4.4.2.2 Les impacts de la crise financière sur l’industrie maritimeL’industrie du transport maritime est très cyclique et volatile. C’est un marché qui repose en grande partie sur la croissance économique. De nos jours, environ 90 % des échanges internationaux se font par l’industrie maritime. Propulsée par la mondialisation et l’industrialisation de l’Asie, la dernière décennie a été plutôt faste pour le secteur maritime. Cependant, suite à la crise financière de 2008-2009, les volumes transportés ont diminué d’environ 20 %. En effet, l’industrie a été doublement touchée par la chute importante de l’activité manufacturière ainsi que par le refus des banques d’émettre des lettres de crédit. Avec la reprise qui s’amorce, une hausse progressive des volumes de marchandises transportées jusqu’au niveau de 2008 et même au-delà est anticipée. À preuve, les principaux ports de la planète ont des plans d’expansion ambitieux. Le port de Rotterdam, par exemple, est sur le point d’entreprendre la construction de Maasvlakte 2, une extension sur la mer de 1000 hectares incorporant de nouveaux terminaux ainsi que des espaces industriels. Pour sa part, le port de Montréal prévoit aussi prendre de l’expansion, notamment à l’extrême est de la ville. Par contre, l’Administration portuaire de Montréal peut difficilement envisager un plan d’expansion aussi ambitieux que celui de Rotterdam en raison de restrictions géographiques et du tirant d’eau limité du Saint-Laurent.

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Maersk Line, Arhus

Photo prise par Yuriy Vashchuk

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Par contre, l’ajout de nouveaux navires en grand nombre, commandés lorsque la croissance des volumes atteignait des records, fera en sorte que le tonnage disponible, soit la capacité de transport totale, augmentera plus rapidement que la quantité de marchandises à transporter. Cela risque de créer une forte pression sur les prix pour quelque temps encore. Les plans d’aide aux chantiers navals instaurés dans plusieurs pays, en particulier la Chine et la Corée du Sud, risquent d’aggraver cette réalité en permettant aux chantiers de continuer à produire malgré les conditions du marché. De plus, tous les acteurs devront s’adapter à un environnement économique où la croissance de l’industrie passera d’environ 10 % en 2008 à 3-4 % pour les années à venir.

La figure 19, qui affiche l’évolution de l’indicateur des prix du transport maritime « Baltic Dry index », dépeint particulièrement bien la situation dans laquelle se trouve actuellement cette industrie. En effet, on constate que les prix ont chuté de façon radicale suite à la crise financière de 2008.

Ainsi, on peut en déduire que les armateurs seront plus affectés que les ports et les exploitants de terminaux. Cependant, il n’est pas exclu que les plus gros armateurs,

étant à court de capitaux, utilisent leurs leviers de négociation pour faire pression sur les ports et autres gestionnaires d’infrastructures et fournisseurs de services afin que ceux-ci diminuent leurs prix. Les entreprises de «charter» seront très fortement affectées aussi puisqu’à l’échéance de leurs contrats, les armateurs seront peu enclins à les renouveler. Ils risquent donc de se retrouver avec des navires inutilisés.

Il semble que la dynamique ait complètement changé suite à la crise financière. Alors qu’auparavant le manque de capacité favorisait la recherche du meilleur service possible pour obtenir des gains de temps et d’efficacité et ainsi surmonter les goulots; la nouvelle réalité encourage plutôt les réductions de coûts. Cela s’explique par le fait que les prix du fret maritime sont maintenant à un niveau plancher. La majorité des entreprises du secteur ont redéfini leur stratégie afin d’arriver à mieux comprendre et à mieux se conformer aux attentes de leurs clients. Le secteur maritime est une industrie conservatrice où les traditions ont souvent préséance sur les besoins réels des clients. Par exemple, les modèles d’établissement des prix, les modes d’interactions avec les clients et les fournisseurs ainsi que l’organisation corporative ont très peu changé au cours de la dernière décennie.

Figure 19 : Évolution de la valeur de l’indicateur des prix du transport maritime « Baltic Dry Index » de 2005 à 2010117

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L’accumulation des pertes opérationnelles des entreprises maritimes, combinée aux difficultés de financement reliées aux déboires du secteur financier, risque fortement de freiner la consolidation qui s’est produite au cours de la dernière décennie. Cela aura vraisemblablement comme effet de perpétuer la concurrence féroce et la guerre de prix qui sévit actuellement. Le manque de ressources financières ampute aussi les budgets de R&D. La recherche fondamentale et les domaines qui s’éloignent des opérations souffriront donc davantage. Les entreprises maritimes auront sans doute plus tendance à partager les risques de la R&D avec leurs partenaires et fournisseurs de solutions technologiques.

Bref, la crise économique aura des conséquences profondes sur l’industrie maritime mondiale. Le passage brutal du boom à la chute affecte durement plusieurs entreprises et forcera les survivants à s’adapter à un marché moins dynamique et plus concurrentiel que ce à quoi ils ont été confrontés par le passé.

4.4.2.3 La concurrence dans le secteur maritime Le transport maritime est un marché où les barrières à l’entrée sont plutôt faibles à priori. En effet, quoique l’accès à ce marché nécessite de solides assises financières, comme un navire peut être propriété de plusieurs investisseurs cela ne pose généralement pas problème. La barrière la plus critique reste probablement les connaissances techniques et l’expertise nécessaire à l’opération d’un navire; par contre, ces informations sont facilement disponibles et circulent librement. Il en résulte que le transport maritime a pratiquement atteint le statut de commodité.

Pour cette raison, le marché est très fragmenté, présentant quelques grands joueurs et une multitude de petites entreprises privées. Une consolidation accrue a cependant pu être observée récemment. En effet, la part du marché contrôlé par les cinq plus grands armateurs est passée de 30 % à 40 % au cours des dix dernières années. Actuellement, Mærsk est le plus important armateur mondial en ce qui concerne la dimension de la flotte et les volumes transportés; la part du marché de l’entreprise s’élève à 15 %. Parmi les autres entreprises en compétition dans cette industrie, on retrouve notamment : MSC (Mediterranean Shipping Company), CMA-CGM, Evergreen Shipping et Hapag-Lloyd. Le tableau 8 fournit une comparaison des principaux armateurs.

Quoique le marché soit fragmenté, on note qu’il y a présences d’alliances d’armateurs, par exemple la Grand Alliance et la New World Alliance. Ces alliances sont exclues

des lois antitrust à cause des nombreux avantages qu’elles apportent au chapitre de la qualité, de la fréquence du service et de l’efficacité du commerce international.

En raison du grand nombre de participants et de la très grande difficulté de différentiation, la compétition est très intense dans le marché du transport maritime, ce qui implique de faibles marges bénéficiaires. Compte tenu de cela, le nerf de la guerre demeure le contrôle serré des coûts. Pour demeurer compétitif, les armateurs tentent de tirer avantage des économies d’échelles, particulièrement importantes dans cette industrie. En effet, on estime que les coûts de fabrication d’un navire et de son opération doublent pour une capacité quatre fois supérieure, ce qui engendre forcément un coût inférieur de transport par unité transportée. Les navires ont donc tendance à grossir, tout comme les infrastructures qui les desservent.

Les opérateurs portuaires, entreprises actives dans l’acquisition et la gestion d’infrastructures portuaires, bénéficient pour leur part d’un marché où les barrières à l’entrée sont plus imposantes. En effet, quoique ces entreprises soient autant dépendantes de la situation économique mondiale et de la croissance des échanges internationaux que les armateurs, l’arrivée de nouveaux concurrents est limitée par l’accès aux sites stratégiques, aux fonds nécessaires ainsi qu’aux capacités techniques nécessaires à la construction et à l’exploitation efficace de telles infrastructures. Cependant, le rapport de force des opérateurs portuaires avec les armateurs n’est pas toujours à leur avantage, particulièrement dans la situation économique actuelle. Hutchison est la plus importante entreprise de ce secteur, suivie par PSA (Port of Singapore Authority), DP (Dubai Port) et APMT (AP Moller Mærsk Terminals). Le tableau 9 dresse une comparaison des principaux opérateurs portuaires.

Les années à venir risquent de demeurer très difficiles pour l’industrie maritime. Bien que les conditions de marché

Maersk MSC CMA-CGM Evergreen Hapag-LloydNationalité Danemark Suisse France Taiwan AllemagneEmployés 30 000 29 000 17 000 3 400 2 606Revenus 16,2 G$ N/D 15,1 G$ 4,6 G$ 8,5 G$Flotte 470 409 365 162 135

Hutchison APMT PSA Dubai  PortsNa5onalité Chine  (Hong  Kong) Pays-­‐Bas Singapour UAEEmployés 30  000 19  000 N/A 30  000Revenus 4,3  G$ 3,0  G$ 2,9  G$ 2,8  G$Ports 51 50 28 49EVP/année 65  M 31  M 57  M 43  M

Tableau 8 : Principaux armateurs

Tableau 9 : Principaux opérateurs portuaires mondiaux

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plus intéressants. Dans tous les cas, la situation actuelle demeure insoutenable à long terme, ce qui porte à croire que les modèles actuels devront évoluer pour permettre à l’industrie maritime de créer suffisamment de valeur pour être rentable.

Positionnement dans les marchés en croissance : L’exemple d’APM Terminals

Tel que vu précédemment, la crise économique a obligé les entreprises à revoir leurs stratégies. APM Terminals, ancienne division de Mærsk devenue une filiale indépendante du groupe A.P. Moller-Mærsk, utilise des stratégies agressives pour avoir accès aux marchés émergents. L’objectif est de se positionner comme étant le plus grand réseau de transport maritime au monde.

Pour y arriver, APM Terminals améliore son offre de services en ajoutant de bonnes infrastructures portuaires, soit par achat ou encore en construisant de nouvelles installations. Certaines de ces infrastructures sont utilisées pour effectuer des transbordements. Les gros navires sont déchargés dans d’autres de taille moindre, qui atteindront des régions plus éloignées et des ports au tirant d’eau plus limité. D’ailleurs dans ce genre de port, les frais d’exploitation sont élevés, mais par contre l’avantage réside dans le temps de transbordement qui est très bas, donnant ainsi un avantage concurrentiel clair.

Dans le cas de la construction d’un port, les négociations avec les gouvernements s’avèrent bien souvent longues et complexes. À cet effet, APM Terminals s’occupe de la construction et des travaux d’ingénierie, ce qui permet de réduire considérablement les délais de construction et donc d’accélérer la mise en activité de l’infrastructure. L’exemple du port de TanjerMed au Maroc illustre bien cette stratégie. APM Terminals y a collaboré très étroitement avec le cabinet royal pour accélérer la construction, qui s’est échelonnée de 2004 à 2007.

Avec une telle stratégie, l’accès aux marchés émergents devient un enjeu pour les compagnies de transport maritime. En effet, en détenant les infrastructures dans ces pays, l’entreprise garde le contrôle du marché, car les autres compagnies n’ont pas le choix de faire affaire avec elle.

La Chine figure en tête de liste des marchés émergents où les transporteurs maritimes tentent de se positionner. En effet, la Chine concentre à elle seule une énorme partie des échanges maritimes mondiaux. De ce fait, les routes maritimes reliant l’Asie à l’Europe et à l’Amérique du

s’amélioreront sans doute quelque peu avec la reprise économique, les surplus de capacité prendront plus de temps à se résorber, ce qui laisse présager plusieurs années difficiles. Au final, ceux qui s’en sortiront le mieux sont les entreprises diversifiées pouvant compter sur d’autres divisions corporatives pour endurer une guerre de prix ainsi que les entreprises d’État comptant sur l’appui de leurs gouvernements respectifs.

Vers une plus grande flexibilité des prix

L’industrie du transport maritime est cyclique et démontre une importante volatilité des prix. Cela s’explique par le fait que l’ajustement de la capacité à la demande est très difficile à effectuer rapidement. En effet, la demande est presque exclusivement déterminée par le niveau d’activité économique mondiale alors que l’offre est déterminée par la quantité de navires en fonction. On se retrouve donc dans une situation où la demande est très variable et l’offre très rigide.

En effet, pour adapter l’offre vers le bas, il faut mettre au rancart une partie de la flotte ou l’entreposer, ce qui est très coûteux; pour l’adapter vers le haut il faut investir des sommes colossales (environ 200 millions de dollars américains l’unité) pour construire de nouveaux navires qui prendront deux ans à arriver sur le marché. D’ailleurs, ceux-ci arrivent souvent trop tard sur le marché puisque la majorité des commandes sont souvent faites au pic d’un cycle haussier. L’industrie se retrouve donc dans des situations de surcapacité et de sous-capacité chronique.

Traditionnellement, les entreprises du secteur maritime établissent des prix fixes et prévisibles longtemps à l’avance, ceux-ci sont même souvent établis par un contrat à long terme. Les armateurs concentrent leurs efforts de vente vers les très grands clients qui leur assurent un apport régulier de volumes importants. Ce modèle de fixation des prix semble vouloir laisser sa place à un système s’apparentant plutôt à un marché « spot » où les prix sont libres de varier au jour le jour en fonction des conditions du marché. Actuellement, le défi des entreprises maritimes est de passer d’un système de fixation des prix qui a comme objectif d’encourager l’obtention de volumes importants vers un système qui optimise la valeur de l’espace disponible sur les bateaux. Ainsi, les prix du transport maritime risquent de devenir plus variables dans le futur.

Les entreprises pourraient aussi tenter d’aller chercher de plus petits clients en offrant des services de fret plus spécialisés et des services additionnels à des prix

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Nord, principaux marchés de consommation, sont de plus en plus achalandées. Ci-dessous la figure 20 démontrant l’évolution du trafic de conteneurs dans le port de Shanghai de 1993 à 2006.

Bref, il est primordial pour un opérateur portuaire tel qu’APM Terminals de se positionner en regard des évolutions du contexte économique mondial, que ce soit en intensifiant ses activités dans les marchés émergents ou encore en choisissant des emplacements stratégiques pour établir des ports de transbordement.

4.4.2.4 Comment les réglementations, les infrastructures et les appuis gouvernementaux influencent-ils l’industrie maritime?Développer de nouvelles infrastructures est un risque évident pour un opérateur face à la volatilité des marchés et l’instabilité de certains pays émergents. C’est pourquoi les installations portuaires visitées sont toutes en partie propriété de l’État et des municipalités qui les hébergent. À titre indicatif, le port de Malmö est propriété du gouvernement à 45 % et de la municipalité à 55 % alors que le port de Rotterdam est financé à près de 71 % par la municipalité et 29 % par le gouvernement néerlandais. Cela ne fut pas toujours le cas, puisque le gouvernement était auparavant le principal actionnaire du port de Rotterdam. En se détachant partiellement du gouvernement fédéral, les autorités portuaires ont pu éviter une certaine quantité de procédures bureaucratiques lourdes pour les investisseurs. Du point de vue des infrastructures, le port de Rotterdam est privilégié face à ses principaux compétiteurs, soient les ports d’Anvers et Hambourg. Tant son tirant d’eau, qui permet aux plus grands navires d’y entrer, que son emplacement, qui rend le transit entre la haute mer et le port près de six fois plus rapide (ce qui prend normalement plus de 12 h, se fait en près de 2 h à Rotterdam), en font un site privilégié. Cela est grandement dû à la configuration

de deux développements : Maasvlakte 1 dans les années 70 et Maasvlakte 2 dont la construction fut amorcée en septembre 2008, qui permettent d’accoster presque directement en mer, alors qu’ailleurs il est nécessaire de remonter plusieurs kilomètres dans les terres. Le port de Montréal quant à lui, est limité en ce qui a trait au tirant d’eau puisque des opérations de dragage des fonds pourraient perturber l’écosystème marin en brassant des résidus nocifs enfouis. Son emplacement en fait toutefois un port très concurrentiel face aux autres ports de la côte est puisqu’il se situe tout juste en amont de la voie maritime du St-Laurent, qui ralentit considérablement l’avancement des navires par le passage de nombreuses écluses.

Du côté du Danemark, la construction du pont Øresund par une firme d’architectes danois et sa mise en fonction en juillet 2000 a grandement amélioré le transport de marchandises et les échanges commerciaux avec la Suède. La participation des gouvernements suédois et danois a donc été sollicitée à parts égales pour financer le projet, dont le retour sur l’investissement devrait prendre une trentaine d’années. À l’annonce du projet, les ports de Malmö et de Copenhague ont exprimé une certaine réticence, croyant perdre de 15 à 20 % de leur commerce. L’impact fut cependant tout autre, comme l’indique le rapport publié après les dix premières années d’existence du pont. En effet, la mise en service du pont a attiré les compagnies maritimes à accoster d’un côté ou de l’autre, pour par la suite répartir la marchandise plus facilement entre les deux pays grâce au pont. C’est ce qui a mené à l’alliance des deux ports, dans le but d’augmenter la visibilité et la capacité, ainsi que de fournir un éventail plus large d’opportunités à leurs clients. Ainsi, dix années plus tard, le volume de fret a augmenté de 50 % comparativement à la période précédant l’ouverture du pont. En plus de l’augmentation de transit due au pont, une augmentation de la migration du peuple danois vers la Suède, où le coût de la vie et des résidences est moindre a également été observée.

4.4.5 Le rôle du design et de l’innovation dans le secteur maritimeL’innovation dans le secteur maritime joue un rôle prépondérant dans le développement de marchés. Par exemple, en inventant dans les années 70 le conteneur réfrigéré, Mærsk a transformé le marché du transport de produits alimentaires. Chez Aqualife Logistics, entreprise basée au Danemark, un nouveau concept fut mis en place pour permettre le transport de fruits de mer vivants par conteneurs, évitant ainsi le couteux transport aérien ou le manque de fraîcheur causé par la congélation. L’innovation

Figure 20 : Volume de marchandises pour le port de Shanghai de 1993 à 2006 en milliers d’EVP

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apportée par Aqualife Logistics est de recréer un environnement marin à l’intérieur d’un conteneur réfrigéré adapté pour les produits de pêche comme le homard et l’huître. Ces produits de luxe étant déjà forts en demande en Europe malgré le surcoût important dû au transport aérien, l’innovation a ici permis l’accès à un marché de niche à moindre coût.

Outre le développement de marchés, une grande partie du design et l’innovation dans l’industrie maritime se font dans un objectif de satisfaction du client. Prenons à titre d’exemple le « One click business », concept crée par Mærsk Lines. Il permet au client une meilleure communication avec la compagnie sans avoir à parler avec différents départements. À partir d’un seul appel téléphonique ou un seul clic, le client accède facilement à l’information qu’il souhaite obtenir concernant l’acheminement des marchandises.

Certains ports portent également une attention particulière au design et à l’innovation. C’est notamment le cas au Port de Rotterdam, où la contrainte d’espace a poussé les autorités à chercher sans cesse de nouvelles solutions. L’une d’elles consiste au développement d’un nouveau type de conteneurs rabattable une fois vide, prenant ainsi moins de place sur les quais. Mentionnons également que deux projets furent développés pour agrandir la superficie du port, soient Maasvlakte 1 et Maasvlakte 2. Puisque l’expansion du port ne peut dorénavant plus se faire sur le continent, ces nouvelles plateformes ont été érigées directement sur la mer. Autre fait intéressant, cette expansion a permis de développer une expertise qui mena à l’obtention du contrat de construction des îles sous forme de palmiers érigées près de la côte de Dubaï, dans le Golfe Persique.

En comparaison, au port de Copenhague-Malmö, l’innovation et le design sont davantage conduits par un souci d’économie d’énergie. On y trouve par exemple des grues électriques qui permettent une récupération d’énergie pendant la descente de la charge, un peu comme le fait une voiture hybride au freinage.

Finalement, pour rendre tous ces projets possibles, les différentes compagnies travaillent en étroite collaboration avec les universités. Ces dernières développent des solutions concrètes répondant aux différents besoins de l’industrie portuaire.

4.4.6 Développement durableBien que le transport maritime génère beaucoup moins d’émissions de CO2 pour la même quantité de fret transporté que l’avion, le train ou le camion, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une industrie très conservatrice qui semble tarder à suivre la tendance axée vers le développement durable et à réviser ses opérations pour les rendre plus efficaces. C’est principalement suite à la crise économique que plusieurs changements furent proposés dans le but d’établir une politique axée sur la réduction des coûts. Réduire les coûts est souvent synonyme également d’efficacité énergétique et de solutions alternatives aux énergies non renouvelables : comment consommer moins tout en conservant autant que possible le rythme imposé par le marché? Une initiative lancée à l’aube des années 2000, la création du World Shipping Council, permit d’établir de nouvelles réglementations comportant entre autres des normes d’amélioration des vaisseaux pour la réduction de leur impact environnemental. C’est ainsi que le Vessel Efficiency System, supporté par Mærsk, fut mis en place pour établir les standards en matière d’efficacité énergétique des navires déjà existants et de ceux en construction. Mærsk a également développé plusieurs programmes, dont le Voyage Efficiency System qui calcule la meilleure route en fonction des conditions météorologiques, de la consommation de carburant et des délais possibles. Ainsi, tout est dans l’intérêt des compagnies de se munir d’une telle planification, bénéfique à la fois pour leur image ainsi que leur portefeuille.

Aux Pays-Bas, le port de Rotterdam présente un objectif précis : celui de demeurer le leader non seulement en ce qui concerne le volume, mais également pour ce qui est de la qualité des services offerts, ceci tout en intégrant des pratiques de développement durable. Les autorités portuaires ont ainsi su tirer profit de leur pouvoir incitatif pour imposer un ratio de solutions intermodales à respecter pour qu’un opérateur de terminal puisse acquérir des terrains et y opérer. En effet, lors de l’attribution des terrains en voie de développement, les autorités ont préféré les compagnies planifiant utiliser davantage le transport ferroviaire ou par barge que le transport routier. Ceci pour atteindre la cible de 2035 en termes d’intermodalité (35 % par la route, 45 % par barge et 20 % par train), cible ayant pour but de réduire la production de gaz carbonique, comme le démontre la figure 21.

Au Canada, lors de la visite du port de Montréal, peu d’accent fut mis sur les actions entreprises envers le développement durable. Notons que l’organisme visité, l’Administration portuaire de Montréal, se charge

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principalement de la gestion des terrains ainsi que des voies navigables, et non des opérations portuaires en tant que telles. Cependant, une étude fut entreprise en 2008 pour faire l’inventaire des émissions atmosphériques provenant des activités du port, dans le but éventuel de conseiller les exploitants et d’en améliorer l’empreinte écologique. Au Canada, un des avantages dans le transport de marchandises est sans contredit l’étendue du réseau ferroviaire, permettant d’atteindre l’ensemble du marché nord-américain. Les frais supplémentaires engrangés par l’imposition de taxes foncières sur les chemins de fer favorisent cependant dans certains cas le transport routier, qui est plus polluant.

Du côté scandinave, l’intégration des ports de Copenhague et de Malmö (Suède) en une seule entité est un bon exemple de projet au cœur duquel se retrouve un souci pour l’harmonisation de l’activité économique avec la qualité de vie urbaine. Cela s’observe par la planification à long terme de l’expansion des services du port pour répondre à l’augmentation du transit de marchandises dans la Mer Baltique, occasionnée par la croissance rapide de la Russie et des pays baltes. Ce plan tient toutefois compte du fait que l’expansion ne doit pas se faire au détriment de l’accès aux rives pour les citoyens. Ainsi, l’objectif est de faire coexister terminaux portuaires, marinas, commerces, habitations et espaces verts sur les berges. À titre d’exemple, suite à la fusion des ports, un secteur entier du côté de la rive de Malmö anciennement utilisé pour des activités portuaires est en cours de transformation pour devenir un premier secteur résidentiel énergétiquement autonome et utilisant exclusivement des énergies renouvelables (projet prévu pour 2016).

4.4.7 ConclusionNotre étude du secteur du transport maritime nous amené à différencier trois types d’intervenants : les armateurs, les ports et les opérateurs portuaires. Chacun de ces joueurs doit travailler de concert afin d’assurer la plus grande efficacité de la chaîne logistique. Les solutions intermodales envisagées devraient quant à elles favoriser les modes de transport tels que le transport fluvial et ferroviaire plutôt que le transport routier, et ce, pour deux raisons : la diminution des émissions de gaz carbonique et le désengorgement des autoroutes.

Une des principales difficultés rencontrées par les armateurs est le fait qu’ils évoluent dans un marché où la demande est très volatile (car liée aux fluctuations économiques mondiales) et où l’offre est peu flexible (car dépendante du nombre de navires en service). Cela a pour conséquence, dans les périodes de récession comme celle que nous venons de connaître, de réduire au minimum les revenus, au point d’obliger les armateurs à engranger des pertes. La diversification des activités est bien entendu une solution pour les armateurs, qui tentent également d’offrir des services plus spécialisés à des clients plus petits, marché où les prix sont plus intéressants.

Du côté des opérateurs portuaires, le défi est de positionner stratégiquement leurs infrastructures, de manière à tenir compte de l’évolution de l’économie mondiale, notamment de la forte croissance de certains pays émergents. Aussi, l’établissement de ports de transbordement à proximité des carrefours maritimes importants permet d’importants gains en efficacité.

La concurrence entre les ports est avant tout régionale; un port européen ne peut perdre du volume au profit d’un port asiatique, par exemple. Pour se différencier, les ports peuvent miser sur la qualité de leurs infrastructures, de même que par l’accessibilité offerte aux différents modes de transport (cargos océaniques, barges, trains, etc.). En plus de représenter des moteurs économiques (prenons l’exemple du port de Rotterdam pour les Pays-Bas), les ports font partie intégrante du paysage urbain dans des villes comme Montréal, Copenhague et Rotterdam. Il est donc important de veiller à ce que le développement de nouvelles infrastructures ne se fasse pas au détriment de la qualité de vie des citadins.

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Figure 21 : Distance pouvant être parcourue selon le moyen de transport pour la même quantité de carburant par kilogramme de fret118

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Chapitre 5 : Recommandations pour le Québec5.1 Pour le secteur de l’agroalimentaireL’industrie agroalimentaire s’est voulue un véritable moteur de l’économie québécoise pendant des décennies, mais force est d’admettre qu’elle nécessite aujourd’hui une évolution à plusieurs égards. Le Danemark, les Pays-Bas et le Québec ont opté pour des stratégies différentes au fil du temps en fonction de leurs réalités géographique, climatique et socio-économique. Parmi les multiples enjeux analysés dans le cadre de la mission Poly-Monde 2010, certains retiennent particulièrement notre attention, où le Québec pourrait améliorer sa situation.

5.1.1 Les associations de producteursEn s’unissant, les producteurs agricoles obtiennent davantage de stabilité dans le marché et obtiennent un pouvoir de négociation plus important face aux entreprises et aux gouvernements. Cependant, au Québec, le monopole syndical de l’Union des producteurs agricoles (UPA) ne fait pas l’unanimité. Bien que cet organisme ait beaucoup contribué au développement de l’agriculture au Québec, il demeure parfois contraignant pour ses membres. Conséquemment, les agriculteurs qui veulent devenir indépendants, par quête d’une plus grande liberté de production, expriment de plus en plus leur mécontentement par le biais des médias.

À titre de comparaison, le Danemark et les Pays-Bas ne subissent pas toute cette discorde. Chez les agriculteurs, le système d’associations coopératives entre producteurs, transformateurs et vendeurs prévaut dans plusieurs secteurs et offre plus de contrôle sur la chaîne de valeur, assurant ainsi un revenu stable pour les différents acteurs en présence. De cette façon, la liberté recherchée par les producteurs agricoles est ainsi obtenue.

5.1.2 Les quotas Les systèmes de quotas sont toujours considérés par plusieurs comme étant une entrave au commerce, en maintenant artificiellement les prix très élevés. Les producteurs et les transformateurs québécois critiquent de plus en plus ce système. L’Union européenne prévoit l’abolition de ses derniers quotas en agriculture, dans l’industrie laitière, pour 2015. Dans le cas des fermes laitières québécoises, les quotas s’accompagnent de subventions à la production. Il s’en suit alors un développement axé sur une production de masse et une

spéculation sur les prix des quotas, bloquant l’accès aux nouveaux producteurs.

Pour sa part, le secteur agroalimentaire au Danemark évolue principalement sous forme d’un marché libre. Selon Hanne Vernegreen, du Danish Agricultural Advisory Service, les Danois sont opposés aux subventions en agriculture, ce qui s’avère un paradoxe intéressant pour ce pays. Autant le Danemark est gouverné selon des principes de social-démocratie, comme l’imposition progressive élevée sur le revenu et l’offre d’excellents services sociaux, autant cette société est perçue par la communauté européenne comme un pays prônant la liberté commerciale. En agriculture, entre autres, les Danois estiment que les entreprises doivent vivre de leur propre rendement. Ils s’opposent donc à une hausse artificielle du prix par le système de quotas. Leur type de marché encourage la compétitivité entre les producteurs et les différents intervenants, en incitant ces derniers à innover dans leurs techniques de production, et en encourageant l’émergence de nouvelles cultures.

Au Québec, une abolition immédiate du système de quotas entraînerait des conséquences financières significatives chez plusieurs producteurs. Par contre, un plan de transition de retrait progressif des quotas, comme c’est le cas en Europe, apparaît comme le meilleur compromis.

5.1.3 Liens avec le développement durableAux Pays-Bas, face à l’élimination anticipée des zones agricoles au profit des zones urbaines, le gouvernement s’est interposé afin que la gestion du territoire se fasse adéquatement dans le respect de la société et de l’environnement. Les Néerlandais possèdent aujourd’hui une notoriété reconnue en termes d’optimisation de leur territoire. Bien que le Québec possède un grand territoire, on constate que les terres cultivables de la province sont surtout concentrées près des zones habitées, telles les basses terres du St-Laurent. Par souci de préservation de la qualité des terres disponibles, le gouvernement provincial se devra, au cours des prochaines années, de les protéger face aux nombreux projets immobiliers.

Les pays européens assurent un leadership indéniable en matière de réglementation et d’innovation. Il serait souhaitable que le gouvernement du Québec agisse de manière concrète en resserrant et en clarifiant les lois en vigueur concernant l’étiquetage des organismes génétiquement modifiés (OGM), les règlementations

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environnementales appliquées à l’industrie porcine et l’efficacité énergétique de l’industrie agroalimentaire.

L’agriculture biologique s’avère un autre secteur où nous avons beaucoup à apprendre de l’Europe. Peu d’informations sont disponibles sur la situation actuelle de cette industrie en Amérique du Nord. Il semble y avoir une absence de leadership de la part de nos gouvernements concernant la création d’un logo clair, soit au niveau canadien ou nord-américain, pour reconnaître le caractère biologique des produits, pour en faire la promotion. Pour l’instant, le consommateur se trouve souvent confus compte tenu des multiples appellations sur le marché. Pourtant, le commerce du biologique est une industrie à valeur ajoutée qui a le mérite de ne pas polluer les sols avec des produits chimiques.

5.1.4 Liens avec le designPlusieurs changements nécessaires pour améliorer les conditions du secteur agroalimentaire sont de nature politique et sociale. C’est pourquoi le design a un rôle capital à jouer en matière de nouvelles politiques gouvernementales et de nouvelles règles municipales. Le design permet aux dirigeants d’un pays d’innover avec de nouveaux principes, permettant le bien-être des sociétés actuelles et futures. Les paradigmes doivent disparaître et le design est un outil clé pour permettre l’établissement de nouvelles visions. Il n’est pas étrange de se demander si nous sommes dans une zone agricole ou urbaine lorsque l’on voyage aux Pays-Bas. Leur difficulté à gérer leur territoire vu une densité de population élevée, jumelée à un territoire très limité, les a poussés à redéfinir la gestion du territoire, à reconceptualiser leur vision du partage entre villes et campagnes, pour finalement en venir avec un nouveau concept libéré de paradigme. Au Québec, cette industrie manque cruellement de nouvelles idées, de nouveaux concepts et reste piégée dans une routine aliénante où l’on ne se pose plus assez de questions. Il serait bon de revoir certains traits de cette industrie avec une vision « out of the box », permettant un renouveau administratif de ce secteur qui en a grandement besoin.

5.1.5 ConclusionBeaucoup de défis sont donc à relever pour dynamiser l’industrie agroalimentaire québécoise. Les producteurs nécessitent une liberté accrue dans un cadre législatif mieux défini par le gouvernement du Québec de la manière la plus responsable possible.

En terminant, revoici les principaux enjeux relevés de notre analyse du secteur agroalimentaire au Québec :

• Réformer ou éliminer le système des quotas ;

• Offrir aux agriculteurs et aux producteurs des formes d’alliances différentes, notamment sous la forme d’un modèle coopératif ;

• Donner un pouvoir plus centralisé au gouvernement provincial en matière d’organisation du territoire ;

• Encourager l’unification de la certification biologique canadienne ou même nord-américaine.

5.2 Pour le secteur de la biopharmaceutiqueAfin que l’industrie pharmaceutique québécoise continue à prospérer au cours des prochaines décennies, une prise de conscience doit être engagée à savoir d’abord, les actions nécessaires pour conserver les investissements étrangers dans la province, puis dans un deuxième temps, de quelle manière l’industrie québécoise peut-elle évoluer et modifier son modèle d’innovation actuel.

5.2.1 Incitatifs à maintenirEn ce qui a trait aux mesures actuelles à conserver, le gouvernement du Québec aurait nettement intérêt à continuer sa politique relative aux incitatifs fiscaux. Les entreprises rencontrées mentionnent d’entrée de jeu, comme attrait pour venir s’établir au Québec, les crédits d’impôt offerts pour subventionner leurs activités de R&D, combiné à la quantité de professionnels hautement éduqués en sciences et technologies, capables de mener à terme ces recherches.

La règle des 15 ans, appliquée via le Régime général d’assurance-médicaments du Québec, s’avère une autre mesure incitatrice pour attirer la présence industrielle dans la province.119 Cette règle garantit une protection contre la concurrence des médicaments génériques pendant 15 ans. Compte tenu de la présence accrue des médicaments génériques en vente libre et dans les hôpitaux, cela semble un incitatif de choix.

5.2.2 Suggestions à considérer pour l’évolution du secteur au QuébecSuite à l’analyse effectuée sur le secteur pharmaceutique au Québec, au Danemark et aux Pays-Bas, plusieurs questionnements demeurent quant à l’orientation

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vers laquelle le Québec devrait se diriger au cours des prochaines années afin d’assurer l’évolution et la viabilité de son industrie. À la suite de nos rencontres en entreprises et instituts, il paraît clair que le Québec devra mieux gérer ses activités de recherche, afin de porter une attention particulière aux besoins de l’industrie, et ce, pour plusieurs raisons.

D’abord, les entreprises pharmaceutiques tentent de cibler des marchés où elles croient pouvoir engranger des profits substantiels. Si les entreprises privées se dirigent vers un marché en particulier, c’est parce qu’il y a donc un nombre significatif de patients en attente d’un traitement pour être soignés. Ainsi, si les recherches sont menées dans cette direction, les multinationales encaissent les profits désirés, plus de patients sont maintenant guéris, donc ces derniers nécessitent moins de soins en milieu hospitalier. Cela se traduit enfin par une diminution potentielle du financement gouvernemental dans le système de santé. Au moment d’attribuer des subventions de recherche, le gouvernement du Québec possède donc tout intérêt à s’assurer que les fonds de recherche serviront à financer des initiatives cruciales de l’industrie, représentant un véritable potentiel commercial. Bien au-delà de l’argument économique, un niveau de santé accru au sein de la population ne peut être que bénéfique pour la province, comme pour toute société responsable. Il devrait s’agir de la raison principale de développement de futurs médicaments.

L’analyse du secteur a permis de relever notamment comme future stratégie des entreprises pharmaceutiques la conquête de nouveaux marchés peu exploités (niches), parfois plus spécialisés. Dans cette optique, il serait nécessaire que les universités, les centres de recherche et même les centres hospitaliers collaborent ensemble, en partageant leur expertise dans le domaine, sur des sujets répondant à une demande directe de l’industrie, afin de se complémenter pour l’atteinte de résultats concrets menant à la commercialisation de médicaments. Cette complicité entre les acteurs du secteur montréalais et cette efficacité à délivrer des résultats pourraient devenir un atout pour attirer les entreprises pharmaceutiques à investir dans la métropole. Cette harmonie inter-organisationnelle demande non seulement une modification des pratiques industrielles, mais aussi un profond changement dans la culture d’innovation.

À court terme, il paraît difficile de modifier cette culture du secret présente au Canada, voire en Amérique du Nord. Le mode de vie nord-américain, individualiste, matérialiste, où chaque individu tente de se démarquer de ses pairs

pour obtenir son propre succès, semble bien incrusté dans la mentalité des gens, dans plusieurs sphères de la société, non seulement en recherche. Cela s’annonce donc une tâche ardue d’inciter les professionnels et chercheurs à collaborer de manière plus ouverte, afin de partager le contenu de leurs recherches. C’est dans la nature même des gens, dans leur façon de se comporter au quotidien. Comme premiers pas, il s’avère intéressant de constater des initiatives comme celles lancées par la grappe industrielle Montréal InVivo afin de rassembler les acteurs de tous les milieux (privé, universitaire, hospitalier, etc.) autour d’une même table afin de former une synergie en travail d’équipe. Ils collaborent au sein de « chantiers de travail », afin de s’entendre sur des stratégies communes à envisager pour résoudre des enjeux cruciaux en recherche, financement, transfert technologique, et même, en ce qui a trait à la visibilité de la grappe industrielle montréalaise.

Cela s’avère une opportunité pour Montréal InVivo. En effet, bien que l’entrepreneurship québécois soit une fierté du gouvernement du Québec en matière d’innovation, la quantité trop importante de petits joueurs dans le secteur pharmaceutique semble parfois pointée du doigt. À ce sujet, le président de la Medicon Valley Alliance, M. Jørgensen, nous a fourni une réponse intéressante lors de notre rencontre à Copenhague. Si une petite entreprise reste dans son petit marché, elle reste pratiquement vouée à l’échec, d’autant plus que dans leur cas, le Danemark affiche une consommation de médicaments bien inférieure à la moyenne dans les pays de l’OCDE.120 Cependant, lorsque cette petite entreprise fait partie d’un réseau mondial, toutes les portes lui sont ouvertes.

Cette formation de réseaux locaux, régionaux et internationaux s’avère l’une des principales missions de la Medicon Valley Alliance, et Montréal InVivo aurait tout intérêt à poursuivre leurs démarches en ce sens, en affichant leur présence lors d’événements de réseautage à travers le monde. Un nom aussi accrocheur que « Montréal InVivo » donne des atouts pour un marketing incisif sur les marchés mondiaux, afin de donner à la grappe industrielle de la métropole la notoriété qui lui revient.

La Medicon Valley Alliance et le High Tech Campus d’Eindhoven ont tous deux soulevé l’importance de la proximité géographique entre les acteurs afin d’assurer une bonne synergie dans les relations corporatives. Compte tenu que les multinationales tentent de diminuer leurs coûts d’opération, les gouvernements pourraient investir dans la construction d’infrastructures communes, comme

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des laboratoires à la fine pointe de la technologie, munis d’équipement sophistiqué. Cela permettrait aux différents intervenants de se côtoyer sous un même toit, en plus de créer un environnement de travail agréable pour les chercheurs. Par la même occasion, certaines entreprises pourraient décider d’investir conjointement pour l’achat de matériel dispendieux, de manière à amoindrir leurs coûts.

En guise de conclusion, s’il y a une leçon à retenir des rencontres effectuées au Danemark et aux Pays-Bas, ce serait l’importance de travailler en collaboration. Ces petits pays, avec leurs quelques millions d’habitants, réussissent à se démarquer sur la scène internationale par leur volonté à collaborer avec leurs voisins et exporter leurs solutions à travers le monde. Le Québec aurait alors tout intérêt à suivre leur exemple en ce sens, à profiter des nombreux avantages que cela implique, et qui sait, devenir un exemple de réussite en la matière en Amérique du Nord.

5.3 Pour le secteur des énergies alternativesEn termes d’efficacité énergétique, force est de constater que les modèles danois et néerlandais ont su combiner les incitatifs économiques, sociaux et environnementaux afin de réduire leur consommation d’énergie.

Au Danemark, par exemple, alors que seul le coût élevé en énergie aurait suffi à inciter les citoyens et entreprises à faire preuve d’imagination pour réduire leur note d’électricité, des moyens parallèles ont été instaurés afin de guider davantage le pays vers une consommation plus faible. Une règlementation stricte et évolutive sur la construction de nouveaux bâtiments, ainsi que la participation des habitants aux projets éoliens en coopérative a consolidé chez les Danois la quasi-obsession de l’économie d’énergie. Ainsi, on a appliqué à la fois un principe restrictif, en règlementant les tarifs et les normes de construction et un principe incitatif, en proposant des avantages financiers et sociaux.

Le même principe est appliqué aux Pays-Bas, où on encourage la vie urbaine en offrant des services améliorés et des habitations adaptées, tout en appliquant des normes strictes en termes de consommation d’énergie et de construction : l’ensemble du territoire est géré en fonction d’optimiser la demande globale en énergie.

Au Québec, l’efficacité énergétique revêt plutôt l’aspect d’un artifice technologique, d’une bonne action pour le futur. Contrairement aux pays européens, où l’économie

d’énergie relève d’une réelle nécessité, le Québec doit subventionner des programmes spécifiques pour inciter l’industrie et les particuliers à investir pour réduire leur consommation électrique. À long terme, il serait plus rentable pour Hydro-Québec de pousser les citoyens à économiser de l’énergie que de construire de nouvelles infrastructures de production : voilà la raison pour laquelle des démarches d’incitation sont entreprises. Certains principes incitatifs sont appliqués. Cependant, il n’existe pas de réelles conséquences, légales ou économiques, à l’inaction, puisque la réglementation en vigueur n’est pas assez contraignante, et que l’impact d’un investissement en efficacité énergétique ne représente qu’un faible pourcentage d’économies sur sa note d’électricité. Si le Québec souhaite atteindre des cibles de réduction, une réforme des tarifs de l’énergie serait donc nécessaire, couplée à un ajustement de la réglementation en vigueur dans le domaine de la construction. Le concept de l’utilisateur-payeur serait à privilégier : un système de tarification à paliers selon la charge du réseau, similaire à celui adopté par l’Ontario, serait un outil efficace pour prévenir les abus et conscientiser les citoyens à leur consommation.

Parallèlement, le Québec devrait absolument s’inspirer des politiques néerlandaises d’organisation du territoire, visant à limiter l’exode urbain en dynamisant les villes, dans l’optique de favoriser l’efficacité énergétique. En repeuplant les centres urbains, beaucoup moins d’énergie peut être consacrée au transport individuel, les charges d’exploitation des bâtiments peuvent être mises en commun, et l’on génère un réseau social plus développé. Ces mesures, doublées d’objectifs précis, contribueraient à bâtir une société québécoise plus durable.

Dans le domaine de l’éolien, on observe une réelle différence entre l’industrie au Danemark et celle du Québec, dû majoritairement au fait que la ressource éolienne a constitué, pour les Danois, la quasi unique solution à une dépendance critique aux combustibles fossiles. En dépit du fait que l’exploitation de l’énergie éolienne ne soit pas encore mature, les Danois investissent massivement afin de soutenir le développement de cette industrie : comportement louable de leur part, puisque l’industrie éolienne représente désormais une partie importante de leur produit intérieur brut (PIB) et de leur renommée internationale : leur force de design s’est exprimée pour faire grandir leur industrie. Au Québec, l’omniprésence de l’énergie hydroélectrique sur le territoire ne crée pas cette nécessité énergétique de subventionner des projets éoliens.

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5.4 Pour le secteur de la logistique du transport maritime

Notre étude du secteur du transport maritime nous a amenés à différencier trois types d’intervenants : les armateurs, les ports et les opérateurs portuaires. Comme il a été vu précédemment, chacun de ces joueurs doit travailler de concert avec les autres afin d’assurer la plus grande efficacité de la chaîne logistique. Les solutions intermodales envisagées devraient favoriser les modes de transport tels que le transport fluvial et ferroviaire plutôt que le transport routier, et ce, pour deux raisons: la diminution des émissions de gaz carbonique et le désengorgement des autoroutes.

Le port de Montréal jouit de connexions intermodales efficaces grâce aux réseaux ferroviaires qui le desservent et à la présence de la voie maritime du Saint-Laurent. Afin de promouvoir l’usage de ces deux modes de transport, des incitatifs visant les opérateurs portuaires pourraient être mis en place par l’Autorité portuaire de Montréal. Ces incitatifs pourraient prendre la forme d’avantages économiques pour les opérateurs utilisant le transport fluvial ou ferroviaire, ou encore de pénalités pour ceux qui utilisent le transport routier au-delà d’un certain seuil.

Finalement, mentionnons que, bien que le réseau ferroviaire canadien soit efficace pour le transport de marchandises, il en va tout autrement pour le transport de passagers. Pour des raisons démographiques évidentes, les réseaux ferroviaires européens ont pu se développer de manière à assurer une rapidité et une flexibilité suffisantes pour constituer une alternative intéressante au transport aérien et routier. Bien que la densité de population canadienne soit bien inférieure à celle des Pays-Bas, il serait primordial d’améliorer les lignes ferroviaires passagères existantes entre les centres urbains, notamment en adaptant les infrastructures actuelles pour le transport rapide de passagers. L’électrification du réseau ferroviaire permettrait quant à elle de réduire notre dépendance aux hydrocarbures. L’investissement nécessaire pour un tel projet est énorme, mais on a vu avec l’exemple du pont Øresund qu’une amélioration de la mobilité des personnes est susceptible de redynamiser l’économie des régions touchées. Les impacts positifs de l’implantation d’un réseau ferroviaire électrique performant pour le transport des passagers seraient donc à la fois d’ordre économique et environnemental.

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Photo prise par Yuriy Vashchuk

Mixte Éolien-Usine thermique, Copenhague

Photo prise par Alexandre Maurice

Pales d’éolienne, LM Wind Power, Jupitervej 6

Toutefois, tel que mentionné précédemment, le développement de l’industrie éolienne québécoise génère des bénéfices non négligeables au niveau de la stimulation économique des régions québécoises, qui sont souvent hôtesses de nouvelles usines et de bureaux régionaux. Ce côté social, doublé de l’expérience acquise par les divers acteurs québécois dans la planification, la construction et l’opération de parcs éoliens, justifie à lui seul les efforts investis par Hydro-Québec dans la promotion de cette nouvelle forme d’énergie, et devrait inciter la société d’État à poursuivre des démarches vers l’implantation graduelle de nouvelles installations.

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étant pratiquement inexistants à l’heure actuelle selon nos interlocuteurs de la société Fednav. Ensuite, il serait souhaitable de renforcer les liens entre les sociétés œuvrant dans l’industrie et les universités à vocation technique. Des partenariats de recherche pourraient ainsi être mis en place dans l’optique de développer des technologies à la fois plus efficaces et plus vertes destinées directement aux besoins de l’industrie maritime.

5.4.2 Harmonisation des infrastructures portuaires avec les espaces urbainsL’accès somme toute limité aux berges du fleuve Saint-Laurent est un sujet d’actualité récurrent lors des périodes d’élections municipales. Tout comme Amsterdam, Rotterdam ou Copenhague, Montréal est une ville où l’eau est omniprésente. Toutefois, la quasi-totalité des terrains bordant le fleuve en allant du centre-ville jusqu’à l’extrême est de l’île sont occupés par le port de Montréal. À l’exception du Vieux-Port, peu d’espaces ont été aménagés de manière à permettre aux citoyens de jouir de la proximité du fleuve. Sans nier l’importance cruciale du port pour la métropole québécoise, nous croyons qu’il serait souhaitable de planifier les nouveaux développements ainsi que d’optimiser les terrains actuellement occupés de manière à dégager des espaces mixtes pour usage commercial et résidentiel. Tant la qualité de vie des Montréalais que l’attrait touristique de la ville s’en trouveraient rehaussés.

5.4.1 Revitalisation de l’industrie maritime au CanadaL’industrie maritime tient une place des plus importantes dans les économies danoise et néerlandaise. Tant le commerce maritime que les activités portuaires et même la construction navale sont des secteurs qui emploient une main-d’œuvre abondante et spécialisée. Ces secteurs sont soutenus par des établissements de formation offrant des programmes spécifiquement orientés vers l’industrie maritime, telle que la Delft University of Technology aux Pays-Bas.

Au Canada, comparativement au Danemark et aux Pays-Bas, peu d’efforts sont mis en place pour soutenir l’industrie maritime. À certains égards, celle-ci est considérée chez nous comme une commodité et non comme une industrie pouvant être à la fois innovatrice et compétitive. Notre séjour au Danemark et aux Pays-Bas nous a démontré qu’il pouvait en être tout autrement.

Puisqu’une bonne partie des échanges commerciaux internationaux du Canada se font par voie maritime, et sans compter le fait que le pays soit bordé par trois océans, il serait pertinent de porter plus d’intérêt à l’industrie maritime. Afin de hausser l’apport économique de cette industrie, une première étape consisterait à créer des programmes de formation pour les métiers reliés au transport maritime et à la construction navale, ceux-ci

81 Photo prise par Alain Aubertin

Transport maritime, Rotterdam

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Agroalimentaire

Visites au CanadaSaputoAgriculture et Agroalimentaire CanadaUnion PaysanneUnion des producteurs agricoles (UPA)Centre de développement du porc du QuébecCRNC-IMI

Visites - Danemark et Pays-BasUnileverThe Danish agriculture advisory serviceDTU shellfish centerDaniscoAqualife logisticsWageningen Bio-based Food & Research

Biopharmaceutique

Visites au CanadaAssociation québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP)Dermolab PharmaInstitut de recherches cliniques de Montréal (IRCM)Montréal InVivoNovartis CanadaPfizer Canada

Visites - Danemark et Pays-BasMedicon Valley AllianceEindhoven High Tech CampusPfizer Danemark

DesignVisites - Danemark et Pays-BasIDEAL&COKonings Industrial Design

Les énergies alternatives

Visites au CanadaKruger ÉnergieSociété générale de financement du QuébecAREVA T&DEnercon CanadaGE EnergyHatch EnergieEnerkemConseil national de recherches Canada (CNRC)Iogen

Visites - Danemark et Pays-BasLM Wind PowerDanish Energy ManagementDanish Energy AgencyRisø DTU National Laboratory for Sustainable EnergyEindhoven High Tech CampusHolst CentreShell Research and Technology Centre Amsterdam

La logistique du transport maritime

Visites au CanadaCorporation de gestion de la voie maritime du St-LaurentAutorité portuaire de MontréalFednav

Visites - Danemark et Pays-BasMaersk LinePort de Copenhague-MalmöAqualife LogisticPort de Rotterdam APM Terminals

Annexe 1: Liste des entreprises visitées

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- Pierre André, professeur titulaire, Département de géographie, Directeur, DESS en environnement et développement durable, Directeur, Centre de développement de la recherche internationale en environnement (CEDRIE), Université de Montréal

- Pierre Barbeau, capitaine de navires

- Delphine Berne, Institut de logistique de Montréal

- Alexandre Joyce, Institut de développement de produits

- Marco Bosisio, directeur développement des affaires, Black and McDonald

- Sébastien Jodoin, Chercheur, Center for International Sustainable Development Law / Centre de droit international du développement durable, Université McGill.

- Gaétan Lafrance, professeur, INRS

- Normand Mousseau, professeur titulaire, département de physique, Université de Montréal

- Michelle Savoie, directrice générale, Montréal Invivo

-Johanne Tanguay, directrice générale, Cintech Agroalimentaire

Annexe 2: Liste des conférenciers invités

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Pour le chapitre 4

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Garantie Bio:Logo de Garantie-Bio par Écocert Canada, [En ligne]http://www.ecocertcanada.com/(Page consultée le 3 novembre 2010)Reproduit avec permission.

Éco-Cert:Logo d’Éco-Cert par Écocert Canada, [En ligne]http://www.ecocertcanada.com/(Page consultée le 3 novembre 2010)Reproduit avec permission.

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Biopharmaceutique

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Niveau Platine :• Air Liquide Canada• École Polytechnique de Montréal

Niveau Or :• Letko, Brosseau & Associates Inc.• CIMA+

Niveau Argent :• Bombardier• Services d’Investissement FÉRIQUE• Fonds de solidarité FTQ• Coopoly• Fonds d’appui aux initiatives étudiantes• Pratt & Whitney Canada• Montréal InVivo

Niveau Bronze :• Peinture Sylteck• Collège André–Grasset• Sanexen Environmental Services• L’Oréal Canada

Un grand merci à nos commanditaires !

FAIE

AEP

Fonds d'appui aux initiatives étudiantes

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Air Liquide est né en 1902 d’une invention, une nouvelle techno-logie de liquéfaction et de sépa-ration des gaz de l’air. Depuis, l’innovation est un pilier essen-tiel de la stratégie. Fortement engagé dans le développement durable, Air Liquide investit 60 % de son budget de Recherche et Développement (R&D) dans les solutions visant à préserver l’environnement et la vie.

Air Liquide est leader mondial des gaz pour l’industrie, la santé et l’environnement, présent dans plus de 75 pays avec plus de 42 000 collaborateurs.

Air Liquide est établi au Canada depuis 1911. Air Liquide Canada, dont le siège social est situé à Montréal, compte près de 1 400 collaborateurs répartis à travers plus de 100 sites au pays. L’en-treprise dessert plus de 80 000 clients au Canada.

Engagé dans le développement durable

Bâtisseur de solutions pour l’environnement et la vie

www.airliquide.ca

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