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RAPPORTrelatif aux CONSEILLERS EN GESTION DE PATRIMOINE

Prsent par

Louis GISCARD dESTAING Dput du Puy-de-Dme Vice- Prsident de la Commission des finances

Parlementaire en mission auprs du Ministre de lEconomie, des Finances et de lIndustrie

- Juillet 2011 -

Remerciements

Lauteur du prsent rapport tient remercier tout spcialement pour leur rle dans le suivi des auditions de la mission, et la mise en forme de cette rdaction : Franois Gautier, adjoint au Chef de bureau Epargne et march financier la Direction gnrale du Trsor, Nicolas Reynard, collaborateur parlementaire,

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ainsi que les agents de la Commission des Finances et des responsables des salles de lAssemble nationale pour leur bienveillante attention pour le droulement des vingtneuf auditions auxquelles la mission a donn lieu.

Et lensemble des personnalits auditionnes pour leurs contributions clairantes sur ce sujet de la profession des conseillers en gestion de patrimoine.

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Avant-proposMISSION RELATIVE AUX CONSEILLERS EN GESTION DE PATRIMOINE En quoi cette mission rpond-t-elle un vritable besoin de rglementation, ce moment, et pour quelle profession ? Sur le premier point, la rglementation dune profession vise en valuer laccs, les qualifications et lexercice, et den permettre le contrle. La mise en place dun cadre lgislatif rpond galement un besoin de protection et de transparence envers les consommateurs, envers les pargnants, et envers la crdibilit renforce dune place financire. Or, la crise bancaire et financire internationale na fait que renforcer cette demande de rgulation de la chane de distribution des produits financiers dans laquelle la profession de conseiller en gestion de patrimoine a pris une place significative. En effet, la profession de conseiller en gestion de patrimoine est ne de la ncessit dapporter un conseil indpendant et de rpondre aux multiples innovations financires, rsultant du passage une conomie de marchs de capitaux. La demande du consommateur et de lpargnant est aujourdhui de plus en plus forte car lenvironnement reste complexe et incertain : rgles fiscales mouvantes, transformation, financiarisation et diversification des supports du patrimoine, rpartition nouvelle de la proprit lie laugmentation de lesprance de vie, la recomposition familiale, et la prsence simultane de plusieurs gnrations. Les conseillers en gestion de patrimoine sont aujourdhui en France prs de 2 500 professionnels, qui exercent titre indpendant les activits de conseil en organisation et en stratgie patrimoniale, de conseil et de vente de produits financiers, de conseil et de vente de produits dassurance et de transaction immobilire. Dautres utilisent ce titre dans le cadre dun emploi salari. Or, rien ne permet aujourdhui lpargnant et au consommateur dtre garantis tant sur lindpendance du conseil fourni que sur les qualifications du professionnel. cela sajoute lexistence de fortes disparits dans le niveau des connaissances et des diplmes de ceux qui exercent aujourdhui ces activits. Les conseillers en gestion de patrimoine, qui exercent une profession bien particulire ncessitant le cumul des comptences en droit civil, fiscal, des marchs financiers et immobiliers doivent donc disposer, pour des critres dquit dans lexercice de leur activit professionnelle, dun cadre juridique opposable. Cette ncessit de rglementation de la profession sinscrit dans le prolongement du rapport de Bruno Deletr sur le contrle du respect des obligations professionnelles lgard de la clientle dans le secteur financier. En outre, la prsente mission sinscrit dans la dmarche de rationalisation de la supervision des acteurs bancaires, de lassurance et de la finance, entreprise au plan europen et international, ayant conduit en France la cration de lAutorit de Contrle Prudentiel et ladoption de loi de rgulation bancaire et financire. Louis Giscard dEstaing Dput du Puy-de-Dme2

Sommaire

SOMMAIRE...........................................................................................................................................3 LISTE DES ABREVIATIONS .............................................................................................................5 RESUME DU RAPPORT ....................................................................................................................7 INTRODUCTION.................................................................................................................................9 1 ETAT DES LIEUX DE LEXERCICE DE LACTIVITE DE CONSEILLER EN GESTION DE PATRIMOINE ............................................................................................................................. 121.1 La diversit des acteurs intervenants dans le conseil patrimonial ......................................... 13 1.1.1 Les acteurs dans le domaine financier et lexercice du mtier de CGP en tant que salari dtablissement .................................................................................................................................................................................14 1.1.2 Les acteurs dans le domaine immobilier et de la dfiscalisation................................................................18 1.1.3 Les acteurs dans le domaine juridique ...................................................................................................................19 1.1.4 La dmarche transversale des conseillers en gestion de patrimoine indpendants ..................21 1.2 Le caractre fragment et insuffisant du cadre de rgulation actuel ............................................ 23 1.2.1 Labsence de rglementation spcifique au mtier de conseiller en gestion de patrimoine..........24 1.2.2 Une rgulation indirecte mais insuffisante du mtier du conseiller en gestion de patrimoine par le respect des rglementations sectorielles..........................................................................................................................25 1.2.3 La combinaison des obligations applicables aux rglementations sectorielles : larticulation des obligations dinformation et de conseil ..................................................................................................................................37 1.2.4 Les zones grises de la rglementation ....................................................................................................................42 1.3 Le mode dexercice et de rgulation des conseillers en gestions de patrimoine indpendants .............................................................................................................................................................. 43 1.3.1 Le modle conomique des CGP................................................................................................................................43 1.3.2 Le dveloppement des formations universitaires et des dmarches de certification .................. 45 1.3.3 Lorganisation et lautorgulation de la profession au travers des associations professionnelles reprsentatives ............................................................................................................................................... 52 1.3.4 Un contrle de la profession clat entre autorits de rgulations ............................................... 53 Les tentatives de dfinition et dencadrement du mtier de conseiller en gestion de patrimoine... 59 Les dernires grandes initiatives dans le domaine de la rgulation de la commercialisation des produits financiers ..................................................................................................................................... 63

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2 PRECONISATIONS POUR UN ENCADREMENT DE LACTIVITE DE CONSEILLER EN GESTION DE PATRIMOINE .......................................................................................................... 692.1 La cration et la protection du titre de conseiller en gestion de patrimoine : une dmarche dencadrement par lactivit...................................................................................................................... 74 2.1.1 Une dmarche pragmatique sappuyant sur la ralit de lexercice du mtier de conseiller en gestion de patrimoine et offrant un cadre juridique stabilis ..................................................................... 74 2.1.2 Une dmarche de normalisation protectrice du consommateur.............................................. 75 2.2 Lencadrement de lexercice de lactivit de conseiller en gestion de patrimoine, en tant qu indpendant ........................................................................................................................................... 77 2.2.1 Une dmarche pragmatique par le cumul des rglementations applicables lintermdiation financire, bancaire et dans le domaine de lassurance ............................................................................... 77 2.2.2 La ncessit de conditions de comptences professionnelles renforces..................................... 82 2.3 Lencadrement de lexercice de lactivit de conseiller en gestion de patrimoine, en tant que salari dtablissement, dans un contexte de concurrence loyale........................................................ 85 2.3.1 La possibilit reconnue de se prvaloir du titre conjugue lharmonisation des appellations sappuyant sur les modles europens.......................................................................................................... 85 2.3.2 La ncessit de conditions de comptences professionnelles renforces et quivalentes celles des indpendants ...................................................................................................................................... 86 2.4 La rgulation des conseillers en gestion de patrimoine indpendants .............................. 87 2.4.1 Lenregistrement en tant que CGP au registre unique cr par la loi de rgulation bancaire et financire : la vrification des conditions objectives daccs ...................................................................... 87 2.4.2 Un contrle renforc assur par le ple commun AMF-ACP : la supervision de lactivit transversale des CGP ...................................................................................................................................... 89 2.4.3 Un mode dautorgulation sappuyant sur une instance commune reprsentative des CGP reconnue par la loi .......................................................................................................................................... 90 2.5 Une activit transversale rendant ncessaire une meilleure articulation des rgles applicables en matire de commercialisation de produits financiers ................................................. 93

CONCLUSION.................................................................................................................................... 96 ANNEXES ........................................................................................................................................... 97

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Liste des abrviations

ACP AFECEI

Autorit de Contrle Prudentiel Association Franaise des Etablissements de Crdit et des Entreprises d'Investissement Association Franaise de la Gestion Financire Agence Franaise de Normalisation Autorit des Marchs Financiers Association nationale des conseillers financiers Association nationale des conseils diplms en gestion de patrimoine Compagnie des conseils experts financiers Centre de Formation de la Profession Bancaire Conseiller en Gestion de Patrimoine Conseiller en Gestion de Patrimoine Certifi Conseiller en Gestion de Patrimoine Indpendant Conseiller en Investissement Financier Chambre des Indpendants du Patrimoine Comptence Juridique Approprie Code Montaire et Financier Conseil National des Barreaux Chambre nationale des conseillers experts financiers Document dEntre en Relation Haut conseil du Commissariat aux comptes Intermdiaire en Opration de Banque et en Service de Paiement

AFG AFNOR AMF ANACOFI ANCDGP

CCEF CFPB CGP CGPC CGPI CIF CIP CJA CMF CNB CNCEF DER H3C IOBSP

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LRBF LSF MIF OPCVM ORIAS PSI RCP RCS RGAMF RNCP RTO SCPI

Loi de Rgulation Bancaire et Financire Loi de Scurit Financire Directive sur les Marchs dInstruments Financiers Organisme de Placement Collectif en Valeurs Mobilires Organisme pour le Registre des Intermdiaires en Assurance Prestataire de Services dInvestissement Responsabilit Civile Professionnelle Registre des Commerces et des Socits Rglement gnrale de lAutorit des Marchs Financiers Registre National des Certifications Professionnelles Service de Rception de Transmission des Ordres Socit Civile de Placement Immobilier

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Rsum du rapportLe rapport prconise une rglementation du mtier de conseiller en gestion de patrimoine permettant une rgulation de ces professionnels et une meilleure protection des consommateurs. 1) Les raisons dagir dans ce domaine rsident dans le constat du caractre fragment et insuffisant du cadre de rgulation actuel. Les conseillers en gestion de patrimoine se distinguent de lensemble des nombreux autres acteurs intervenants dans le conseil patrimonial du fait du caractre transversal de leur dmarche. Pourtant, aucune rglementation globale ne sapplique ces professionnels qui peuvent exercer ce mtier soit en tant que salari dtablissement, soit en tant quindpendant (ou libral ). De ce fait, les CGP exerant en dehors dtablissements se voient appliquer une combinaison de rglementations sectorielles qui permettent pour partie de rguler leur activit et de mieux apprhender leur existence, mais qui demeure lacunaire. La mission relve ainsi que labsence de rglementation spcifique soulve un double problme : elle ne permet pas le dveloppement de cette activit dans des conditions de scurit juridique suffisantes, notamment du fait de certaines zones dincertitude rglementaires ; et elle pose un problme de protection des consommateurs : le titre de conseiller en gestion de patrimoine pouvant tre utilis en dehors de tout cadre. Le positionnement des conseillers en gestion de patrimoine est encore rendu plus complexe par la possibilit laisse aux tablissements notamment bancaires duser de ce titre bien quaucun critre notamment de comptence ne soit vrifi dans ce cas. La mission estime que toute rgulation de ces professionnels doit sappuyer pour les indpendants sur le modle conomique existant en favorisant le dveloppement de la transparence des rmunrations. En outre, malgr labsence de rglementation globale, ces professionnels sont pour partie rguls par : une forme dautorgulation base dune part sur lexistence dassociations professionnelles reprsentatives et reconnues et dautre part sur des formations universitaires et des dmarches de normalisation ; lAutorit des marchs financiers et lAutorit de contrle prudentiel qui exercent un contrle sur lactivit dintermdiation des CGP.

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2) Pour rpondre ces dfis, le rapport formule un certain nombre de recommandations :La reconnaissance et la protection du titre de conseiller en gestion de patrimoine qui serait cr par la loi et dont lusage serait protg. Lactivit de CGP indpendant serait encadre. Afin de se prvaloir du titre de CGP, ces derniers devraient ainsi cumuler les activits de :

conseiller en investissement financier ; courtier en oprations de banque et en services de paiement ; et courtier dassurance. A titre accessoire, les CGP indpendants pourraient recourir la comptence juridique approprie et au statut dagent immobilier, afin de complter le panel de leur offre de service. - Lexercice de lactivit des CGP salaris dtablissement serait encadr. Ces derniers pourraient continuer se prvaloir de ce titre, mais cette possibilit devrait tre conjugue un travail dharmonisation des appellations utilises dans les rseaux, sappuyant notamment sur les modles europens. Par ailleurs, dans une logique de concurrence loyale, les salaris dtablissement faisant usage du titre de CGP devraient respecter des conditions de comptence professionnelles quivalentes celles des indpendants. - Afin de garantir la qualit de leur conseil, les CGP, quils soient indpendants ou salaris dtablissements, devraient ainsi tre soumis ces conditions de comptences professionnelles renforces. Ces conditions seraient vrifies par le fait de disposer dun diplme de niveau minimum Master (enregistr au RNCP) ou davoir pu faire reconnatre cette comptence par une validation des acquis de lexprience ou une certification place sous le contrle des autorits de supervision. Pour les CGP indpendants en exercice, une clause de grand pre temporaire et strictement encadre pourrait sappliquer. Enfin, la rgulation des CGP indpendants sappuierait sur trois niveaux :

le ple commun AMF-ACP serait charg de la supervision de ces professionnels ; lORIAS (registre unique) vrifierait les conditions objectives daccs et notamment le cumul des statuts ; la supervision de la profession sappuierait sur une association faitire, instance commune regroupant les associations professionnelles reconnue par la loi, qui serait le relais du ple commun et permettrait dinstaurer une autorgulation encadre de ces professionnels. Cette instance sappuierait sur deux modles : l'Association Franaise des Etablissements de Crdit et des Entreprises d'Investissement (AFECEI) et le Haut conseil du Commissariat aux comptes ( H3C ).

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Introduction

Dans la ligne de la proposition de loi visant donner un statut la profession de conseiller en gestion de patrimoine1 dpose en juillet 2010 et du dbat sur lamendement reprenant cette proposition lors de ladoption de la loi n2010-1249 de rgulation bancaire et financire du 22 octobre 2010, le Premier Ministre a confi au dput Louis GISCARD DESTAING une mission sur ce sujet auprs du Ministre de lEconomie, des Finances et de lIndustrie. Le dcret du Premier Ministre du 11 fvrier 20112 a nomm Monsieur le dput parlementaire en mission. Sappuyant sur une rflexion existante depuis plusieurs annes, la mission sest attache consulter lensemble des acteurs de la place concern par ce sujet. Elle sest donne pour objectif de prsenter des prconisations ralistes permettant une meilleur rgulation de ces professionnels tout en accompagnant le dveloppement du savoir-faire des conseillers en gestion de patrimoine et en garantissant et renforant la protection et la transparence envers les consommateurs. Ces objectifs, poss par la lettre de mission, ont constitu le fil conducteur de la dmarche. Le terme conseiller en gestion de patrimoine forme une ralit complexe. Les conseillers en gestion de patrimoine se livrent en effet diverses prestations portant sur des objets varis : aprs une phase de conseil succde gnralement une phase de commercialisation des produits (instruments financiers, contrats dassurance vie, ). En labsence de rglementation propre couvrant lensemble de cette activit composite, les professionnels se revendiquant conseillers en gestion de patrimoine ou encore conseillers en gestion de patrimoine indpendant se voient actuellement appliquer une combinaison de rgles entremles suivant la nature et lobjet du service rendu. Cette combinaison est encore rendue plus complexe par lapplication successive et cumulative de normes manant la fois des institutions de lUnion europenne, du lgislateur national, des autorits de rgulations et de rgles de dontologie ou de bonnes pratiques dordre professionnel. Le rapport prsent par M. Jacques DELMASMARSALET en 2005 relatif la commercialisation des produits financiers a mis en lumire cette complexit et avanc un certain nombre de recommandation utiles afin : dassurer une information pertinente sur les produits ; de mieux cibler la commercialisation des produits dpargne dans les rseaux ;

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Proposition de loi n2758-2010 enregistre la Prsidence de lAssemble nationale le 13 juillet 2010 Dcret du 11 fvrier 2011 chargeant un dput dune mission temporaire, NOR : PRMX1104615D

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de fournir un conseil adapt ; de prserver lobjectivit et limpartialit du conseil ; de mieux responsabiliser les acteurs ; et damliorer le service aprs-vente.

Le lgislateur est quant lui intervenu plusieurs reprises depuis la loi de scurit financire en 2003 afin daccompagner les mutations du paysage de la commercialisation des produits financiers, en sappuyant notamment sur les prconisations du rapport remis par M. Bruno DELETRE3. Le droit communautaire exerce galement une influence dterminante dans ce domaine dj largement harmonis au travers des directives sectorielles. Les dbats autour de la rvision de la directive 2004/39/CE du 21 avril 2004 concernant les marchs dinstruments financiers (MIF) ne faisant quaccentuer cette convergence. Au carrefour de ces problmatiques, les conseillers en gestion de patrimoine, estim 2 247 cabinets4 fin 2010, participent de cette volution. Par leur mission de conseil, ils se rapprochent des professions rglementes de notaire ou davocat. Ils en diffrent nanmoins par la commercialisation de produits financiers, essentielle leur modle conomique, rpondant dans ce domaine des rglementations sectorielles : intermdiation financire, intermdiation en assurance, intermdiation bancaire Pourtant, les professionnels de la gestion patrimoniale, pour la plupart rassembls au sein dorganisations professionnelles reprsentatives et structures, rclament une meilleure rgulation de leur mtier afin notamment dviter les dtournements de cette appellation et de mieux garantir leur dveloppement au sein dun cadre juridique stabilis permettant leur reprsentation et leur reconnaissance. La question de la protection des consommateurs de produits financiers se trouve galement au cur de ces rflexions. Le conseil patrimonial ne se limite cependant pas ces seuls libraux . Il est galement exerc par les salaris des tablissements bancaires et dassurance. Ces tablissements ont dailleurs, pour certains, dvelopp des structures spcifiques, notamment dans la banque prive, ddie au conseil patrimonial. Les indpendants ou libraux se prvalent quant eux dune plus grande objectivit et dune analyse plus transversale. Labsence de rglementation globale empche nanmoins de dcerner ces derniers un rel label de qualit tant les ralits dexercice du mtier sont diffrentes et tant lusage du terme mme de conseiller en gestion de patrimoine peut tre dvoy par certains. Il correspond cependant une ralit, reconnue par lesRapport de la mission de rflexion et de propositions sur l'organisation et le fonctionnement de la supervision des activits financires en France, M. Bruno DELETRE, janvier 2009 4 Les conseillers indpendants en gestion de patrimoine : le livre blanc 2011, APREDIA, avril 20113

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pargnants individuels pour certains relativement modestes, qui dcident de confier une partie de la gestion de leur patrimoine ces professionnels. Le contexte de concurrence dans lequel sexerce ce mtier ncessite donc de sinterroger sur lusage de cette appellation dans des contextes dexercice diffrents (salaris dtablissements bancaires ou indpendants ). La protection dun titre ne peut ainsi se concevoir si les rgles appliques aux diffrentes personnes pouvant se revendiquer CGP ne sont pas harmonises. Lencadrement du mtier de conseiller en gestion de patrimoine interroge par ailleurs le systme franais de rgulation qui a connu dimportantes volutions depuis la mise en place de lAutorit des marchs financiers (AMF) jusqu la cration rcente de lAutorit de contrle prudentiel5 (ACP) et de leur ple commun.

Dans ce contexte, la mission qui ma t confie par le Ministre de lEconomie, des finances et de lindustriea pu tablir des prconisations concrtes qui pourraient prendre forme dans le cadre dune rglementation garantissant aux conseillers en gestion de patrimoine un cadre juridique stable. Ces prconisations sappuient sur un tat des lieux pralable.

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LACP rsulte de la fusion des quatre autorits de la banque et de lassurance CB, ACAM, CEA et CECEI.

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1 Etat des lieux de lexercice de lactivit de conseiller en gestion de patrimoine

Apparu dans les annes soixante-dix, le mtier de CGP sest considrablement dvelopp au cours des dernires annes. De nombreux acteurs coexistent au sein de ce mtier qui pour le moment na fait lobjet daucune dfinition lgislative. De ce fait tout un chacun peut aujourdhui prtendre lexercer, soit titre principal soit de manire connexe. Les conseillers en gestion de patrimoine sont ns de la volont doffrir une alternative aux rseaux de conseils des banques et des acteurs immobiliers. Pour la plupart, il sagit dindpendants ou plutt de libraux qui travaillent leur compte et se caractrisent par leur relative indpendance de tout rseau ou entreprise, et lobjectivit revendique de leur conseil. Leur dveloppement peut galement sexpliquer pour partie par la fusion des conseils juridiques (ou conseils juridiques et fiscaux) avec la profession des avocats en 19906. Lpargnant attend de son conseiller quil laide dans la cration, le dveloppement et loptimisation, ainsi que la transmission, de son patrimoine, en formulant le plus objectivement possible des recommandations dordre financires, mais galement juridiques et fiscales, et en choisissant au mieux les outils permettant datteindre ces objectifs. Ce mtier est donc complexe, et exige de solides comptences et qualits dans des domaines aussi nombreux que varis : droit civil (rgimes matrimoniaux, droits de succession, droit social, ), droit fiscal, droit des assurances, du patrimoine, connaissances en conomie, en immobilier et finance (investissement financier, investissement immobilier, oprations boursires, gestion dactifs, etc.). Sans quil lui soit demand une expertise aussi pousse que les professions qui interviennent titre principal dans lun ou lautre de ces domaines, le conseiller patrimonial doit en avoir une bonne matrise. Cette technicit lui est indispensable et sert de base son mtier. Il lui est galement demand des qualits commerciales, pour dmarcher et convaincre les prospects, et des qualits relationnelles afin dassurer le suivi dans le temps et la prennit de son portefeuille. Il aura en effet expliquer au client la stratgie quil a imagine, tout en se dmarquant des concurrents : il nest pas rare que son client se voie proposer par une banque ou une assurance la mise en uvre, pour un cot au premier abord moindre, de la solution prconise par le conseiller indpendant. Enfin, il devra parfaitement connatre et tre capable de mettre en uvre une mthodologie propre son mtier: celle du bilan patrimonial et du profil dinvestisseur. Les situations et les portefeuilles suivis sont en effet diffrents, avec des problmatiques6

Loi n90-1259 du 31 dcembre 1990 portant rforme de certaines professions judiciaires et juridiques

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qui leur sont spcifiques. Contrairement au conseiller financier qui se focalise sur l'optimisation de la gestion financire des actifs patrimoniaux, le CGP part de la situation patrimoniale d'une personne, de ses projets de vie et de ses attentes pour dfinir une stratgie globale en tentant dy rpondre au mieux. Cette mthodologie lui est indispensable pour recueillir toutes les informations ncessaires. Loffre est plthorique, mais peu dintervenants rpondent lensemble de ces exigences.

1.1 La diversit des acteurs intervenants dans le conseil patrimonial

La gestion de patrimoine se caractrise par un march fortement clat sur lequel une dizaine dacteurs cherchent gagner toujours plus de parts de march. En effet, nombreux sont ceux qui pratiquent ce domaine dactivit : courtiers, banquiers, assureurs, agents immobiliers, avocats, notaires, experts comptables, conseillers indpendants, entreprises dinvestissement, administrateurs de biens, grants de portefeuille, commissaires-priseurs, etc. Il est cependant possible dtablir deux catgories distinctes, savoir les acteurs directs et les acteurs indirects. Dans la premire catgorie, on retrouve dune part les tablissements financiers qui disposent gnralement dun dpartement ou dune cellule ddi la gestion de patrimoine. Dautre part, les compagnies dassurance mettent elles aussi en uvre des stratgies de plus en plus offensives / agressives pour accrotre leurs parts de march, notamment avec le dveloppement considrable ces dernires annes des contrats dassurance vie et autres produits financiers. Enfin, on retrouve les socits et conseillers indpendants o lactivit de conseil est exerce dans ce cas prsent titre libral. Dans la deuxime catgorie, sillustrent des acteurs exerant plutt une fonction complmentaire ou titre accessoire dans ce domaine dactivit. Cette qualification dacteurs indirects se justifierait dautant plus par le fait que la rglementation de leur profession leur interdit de percevoir toute commission suite des prconisations sur tel ou tel produit dinvestissement. Il sagit des notaires, experts-comptables ou encore des avocats. On qualifiera ces derniers de spcialistes , alors que les CGP sont quant eux plutt des gnralistes tant donn la diversit des disciplines qui arpente cette profession. Il est galement possible de distinguer trois domaines dactivits au sein desquels le conseil patrimonial peut sexercer : (i) le domaine financier, prdominant, (ii) le domaine immobilier et (iii) le domaine juridique.

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1.1.1 Les acteurs dans le domaine financier et lexercice du mtier de CGP en tant que salari dtablissement Le conseil patrimonial, parce quil sappuie sur le patrimoine financier personnel de lpargnant, appelle en premier lieu lintervention dacteurs relevant du domaine financier. 1.1.1.1 Conseiller en gestion de patrimoine et experts comptables Le rle dun expert-comptable dans sa dimension conseil auprs des chefs dentreprise, des professions librales ou des commerants et artisans lui permet davoir une place privilgie avec un client dj souvent lcoute. Les experts comptables mnent pour leurs clients des rflexions pousses concernant leur entreprise, mais galement leur patrimoine personnel. La relation patrimoine prive et entreprise est en effet trs forte, et une dcision sur lun a ncessairement une influence sur lautre. Malgr leurs comptences indniables, ces professionnels des domaines civil, fiscal, financier ou comptable nont souvent quune vision fragmente du patrimoine. Par ailleurs, ils nont pas les moyens de mettre en place les solutions quils conseillent, toute activit de courtage leur tant interdite. Ils ne peuvent donc pas assurer le suivi client qui est fondamental lors de la mise en place dune stratgie patrimoniale. Leur conseil patrimonial et financier vient donc en complment de celui du conseiller en gestion de patrimoine, quil ne saurait remplacer. A loppos, le conseiller, quelle que soit ltendue de ses connaissances, est tout fait conscient de ne pouvoir lui seul remplacer un spcialiste tel quun expert-comptable, un notaire ou un avocat notamment sur des cas complexes. Les experts-comptables disposant de diplmes reconnus possdent la comptence juridique approprie. Par ailleurs, en tant que membre dune profession rglemente, ils sont autoriss donner des consultations en matire juridique et rdiger des actes sous seing priv, dans les conditions dfinies par larticle 22, alina 7, de lOrdonnance de 1945 Ils peuvent galement donner des consultations, effectuer toutes tudes et tous travaux dordre statistique, conomique, administratif, juridique, social ou fiscal et apporter leur avis devant toute autorit ou organisme public ou priv qui les y autorise mais sans pouvoir en faire lobjet principal de leur activit et seulement sil sagit dentreprises dans lesquelles ils assurent des missions dordre comptable de caractre permanent ou habituel ou dans la mesure o lesdites consultations, tudes, travaux ou avis sont directement lis aux travaux comptables dont ils sont chargs . Il convient nanmoins de noter que les experts-comptables ne peuvent pas pratiquer lintermdiation, notamment en assurance, ils bnficient en fait dune drogation leur

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permettant de pratiquer lactivit de conseil (CIF) sans tre adhrent dune association (L.541-1 CMF et g) du 2 du L.531-2 du mme code).

1.1.1.2 Conseiller en gestion de patrimoine et tablissements bancaires, lexercice en tant que salari Cest aux banques quordinairement, le particulier sadresse en premier lieu pour assurer la gestion de son patrimoine. Puisque toute personne possde un ou plusieurs comptes bancaires, la banque est en effet un partenaire privilgi, pour les particuliers et entreprises qui sadressent elle pour la gestion de leurs flux de trsorerie, mais aussi pour lobtention de prts. Les banques disposent trs gnralement de leurs propres conseillers patrimoniaux, sous des appellations diverses. Les formations et comptences requises ne sont nanmoins pas en tout point similaires celles des formations notamment universitaires en matire de gestion de patrimoine. Les formations bancaires sont pour certains insuffisantes pour aborder dans sa globalit la gestion dun patrimoine. Par ailleurs, un conseiller en banque gre une quantit de portefeuilles qui peut rendre difficile un bon suivi client ou une connaissance approfondie du patrimoine et des volonts de ce dernier (historique, motivations, ). Ds lors, malgr leurs comptences certaines, ils se rvlent tre plus des vendeurs de produits que de vritables conseillers. Si le client en est ncessairement conscient ds lors quil choisit un tablissement de ce type, le diagnostic patrimonial et la connaissance des outils sa disposition pourront savrer trs variables en fonction des structures et des conseillers. Enfin, les consommateurs interrogs rappellent juste titre que les salaris dtablissement bancaire sont dabord tenus de conseiller et vendre les produits maison et que le systme de rmunration les pousse privilgier tel ou tel produit, parfois au dtriment des intrts du client. Les problmatiques de transparence et de devoir de conseil apparaissent ainsi centrales. Depuis plusieurs annes les banques se sont intresses la gestion de patrimoine notamment depuis la fin des annes 1990 avec lapparition dune nouvelle gnration de clients fortuns, notamment au sein des banques prives . Ces clients sont en grande partie des chefs dentreprise et des professionnels libraux, dont la fortune est intimement lie leur outil de travail. Les groupes bancaires se sont alors organiss et ils sont nombreux aujourdhui proposer des dpartements de gestion afin de rpondre aux besoins de leur clientle fortune. Les CGP indpendants esprent concurrencer les banques prives qui, elles, tendent abaisser leurs seuils dentre et sadresser une clientle de plus en plus moyenne gamme.

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La reconnaissance par le code montaire et financier de la mission de conseil patrimonial des tablissements de crdits :

Article L. 311-2 Les tablissements de crdit peuvent aussi effectuer les oprations connexes leur activit telles que : 1. Les oprations de change ; 2. Les oprations sur or, mtaux prcieux et pices ; 3. Le placement, la souscription, l'achat, la gestion, la garde et la vente de valeurs mobilires et de tout produit financier ; 4. Le conseil et l'assistance en matire de gestion de patrimoine ; 5. Le conseil et l'assistance en matire de gestion financire, l'ingnierie financire et d'une manire gnrale tous les services destins faciliter la cration et le dveloppement des entreprises, sous rserve des dispositions lgislatives relatives l'exercice illgal de certaines professions ; 6. Les oprations de location simple de biens mobiliers ou immobiliers pour les tablissements habilits effectuer des oprations de crdit-bail ; 7. Les services de paiement mentionns au II de l'article L. 314-1. Lorsqu'il constitue la fourniture de services d'investissement au sens de l'article L. 3211, l'exercice des oprations connexes et de l'activit de conservation est subordonn l'agrment pralable prvu l'article L. 532-1.

Le cas des banques spcialises dans la gestion de patrimoine Les plus connues sont lUnion Financire de France7 ou encore Legal&General. Elles disposent de rseaux de conseillers en patrimoine et nont pas de produits propres : elles travaillent par partenariat avec de grandes banques financires, des assureurs, des promoteurs immobiliers (elles sont filiales lune dAVIVA VIE lautre de Legal & General). Leurs conseillers ont ainsi la possibilit de disposer de tous les outils patrimoniaux existants aux fins de construire des stratgies compltes. Le rseau ngocie directement auprs des partenaires ce qui permet aux conseillers moins proccups des aspects administratifs de se concentrer davantage sur les clients. Ils peuvent ainsi sadresser 7

Filiale dAVIVA Vie 74% ;

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une clientle plus large, et ne plus rserver le conseil en patrimoine aux seules grandes fortunes. Les conseillers viennent pour beaucoup dautres mtiers, souvent commerciaux, et il leur est dispens des formations qui peuvent tre qualifies de compltes. Aussi ces rseaux ont des connaissances assez pointues proches de celles des conseillers en gestion de patrimoine dits indpendants . Comme chez les autres acteurs dont la rmunration est fortement lie aux produits vendus, la dpendance des groupes des banques ou des assureurs pose galement la question de lindpendance et de la transparence des rmunrations. Il est possible faire aux conseillers en assurance les mmes reproches quaux conseillers en banque quant leur dpendance envers leur employeur.

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1.1.2 Les acteurs dans le domaine immobilier et de la dfiscalisation Aux cts des acteurs du domaine financier, les acteurs du domaine immobilier, de par limportance et la dure des placements effectus dans ce cadre, demeurent des vecteurs essentiels du conseil patrimonial au sens large. 1.1.1.3 Conseiller en gestion de patrimoine et agents immobiliers La pierre constitue un des placements durables et srs les plus apprci des Franais. De la mme faon que les assureurs, les conseillers aussi comptents soient ils ne peuvent conseiller et vendre que des produits entrant dans leur domaine dactivit, ce qui limite les stratgies possibles. De plus leur mode de rmunration tant directement li la vente des produits immobiliers, le conseil est rarement objectif. Cette profession est rgie par la loi Hoguet (loi n 70-9 du 2 janvier 1970). Elle rglemente les conditions d'exercice des activits relatives certaines oprations portant sur les immeubles et les fonds de commerce. Cette loi prcise les personnes et les oprations concernes par ce statut. Larticle 3 de la loi soumet lexercice de ces activits la dtention dune carte professionnelle, la carte T. Cette dernire est dlivre par le prfet du dpartement dans lequel le demandeur son sige. Elle est valable 10 ans, depuis un dcret du 21 octobre 2005 et seule sa dtention permet la perception de commissions lors dune opration immobilire. Plusieurs conditions doivent tre remplies pour lobtenir : justifier de son aptitude professionnelle par un diplme ou par son exprience ; disposer dune garantie financire suffisante ; disposer dune assurance en responsabilit civile professionnelle ; ne pas avoir fait lobjet dune sanction pnale suite certains dlits (vol, recel). Le dfaut de dtention de carte T est passible dune amende de 7500, voire dune peine demprisonnement de six mois (art 313-1 du code pnal). 1.1.1.4 Conseiller en gestion de patrimoine et cabinets de dfiscalisation Bas sur les systmes dincitations fiscales existants (Scellier, De Robien, Girardin, Malraux) dvelopps par exemple dans le domaine de limmobilier ou des Dom-Com, les cabinets de dfiscalisation vendent pour la plupart de limmobilier locatif de dfiscalisation . Leur offre immobilire est souvent trs complte. Leur rmunration ne dpendant que des immobiliers vendus, les conseils sont orients et posent dans certains cas de srieux doute sur la qualit du conseil fourni : comme son nom lindique, un investissement en immobilier locatif devrait tre une opration immobilire avant dtre une opration fiscale. Or limplantation de limmeuble et la demande locative sur ce lieu sont des critres primordiaux, souvent oublis par ces cabinets, avec pour rsultat une mise en location tardive ou inexistante, quand ce nest pas le dispositif fiscal qui est remis en cause.

18

1.1.3 Les acteurs dans le domaine juridique La dimension juridique du conseil en gestion de patrimoine est essentielle, cest ce titre que les professions rglementes davocats et de notaires exercent dj le mtier de conseiller patrimonial au sens large, dans les limites de leur comptences et notamment linterdiction de principe des rmunrations par commissions.

1.1.1.5 Conseiller en gestion de patrimoine et notaires Le notaire est un juriste investi dune mission dautorit publique qui prpare des contrats sous la forme authentique pour le compte de ses clients. Il exerce ses fonctions dans un cadre libral. Nombre dactes ne peuvent tre conclus sans son intervention : son rle consiste notamment authentifier les actes et les contrats passs devant lui et les conserver. Le notaire intervient dans plusieurs domaines : le droit de la famille (successions, contrats de mariage, liquidation de communaut en cas de divorce), le droit de limmobilier (transactions immobilires) et celui du patrimoine. Les domaines du droit des affaires et du conseil aux entreprises deviennent de plus en plus importants. Il est rmunr par des honoraires dont le montant est fix par un tarif spcifique, mais il lui est interdit dtre rmunr par commissionnement et courtage. Un certain nombre hsite conclure des partenariats avec des conseillers en gestion de patrimoine, experts-comptables ou avocats afin de prserver leur indpendance. Les conseillers en gestion de patrimoine, qui disposent de la comptence juridique approprie, peuvent nanmoins donner des consultations juridiques. Ils peuvent galement rdiger des actes sous seing priv en tant quaccessoire de leur activit principale. Larticle L.541-1, III du code montaire et financier (CMF) renvoie la comptence juridique approprie (CJA)8 qui autorise celles et ceux qui en sont titulaires donner des consultations juridiques relevant directement de leur activit principale et rdiger des actes sous seing priv qui constituent laccessoire ncessaire de leur activit .

8

Article L.541-1, III C. mon. fin. : Les conseillers en investissements financiers ne peuvent titre habituel et rmunr donner de consultations juridiques ou rdiger des actes sous seing priv pour autrui que dans les conditions et limites des articles 54, 55 et 60 de la loi n71-1130 du 31 dcembre 1971 portant rforme de certaines professions judiciaires et juridiques . Voir p.34 (1.2.2.2.1)

19

1.1.1.6 Conseiller en gestion de patrimoine et avocats L'avocat reprsente et dfend devant un tribunal des particuliers, des entreprises ou des collectivits. Il peut s'agir d'affaires civiles (accidents, divorces, successions, litiges lis au travail...) ou pnales (dlits, vols, crimes...). Par ailleurs, le conseil prend une place de plus en plus importante, notamment sollicit par les entreprises. Les avocats sont de plus en plus spcialiss. Mais en ce qui concerne les particuliers, le droit patrimonial et le droit fiscal sont aujourdhui des crneaux particulirement porteurs. Lavocat est soumis aux mmes rgles que le notaire quant aux activits de courtage et de vente de produits financiers.

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1.1.4 La dmarche transversale indpendants

des

conseillers

en

gestion

de

patrimoine

Face ces multiples acteurs et dans ce contexte concurrentiel, les conseillers en gestion de patrimoine libraux mettent gnralement en avance quatre caractristiques principales afin de de distinguer des autres acteurs : lindpendance, revendique ou suppose, elle peut tre amoindrie par leur mode de rmunration. Il nen demeure pas moins que face aux tablissements bancaires notamment, le caractre libral voir familial de leur activit demeure lun de leurs atouts majeurs ; la varit de leur offre ; le caractre srieux de leur conseil ; et enfin et surtout lapproche globale de leur expertise.

-

Dans ce contexte concurrentiel, lenjeu premier du CGPI rside dans sa capacit se faire rapidement identifier par le client comme un partenaire commercial long terme et forte valeur ajoute. Les indpendants tentent donc de se dmarquer des conseillers de clientle des grands rseaux en personnalisant au maximum leur analyse. Leur approche commerciale est donc primordiale et fondamentalement diffrente de celles pratiques par les autres agents du march. Le travail du CGPI se dcompose alors en trois phases : les constats, la mise en place de la stratgie et le suivi.

Le constat : Le client est au centre de lanalyse, il est identifi et diffrenci des autres par le CGP qui sefforce de clarifier les objectifs patrimoniaux de celui-ci. Le rle du gestionnaire indpendant est dans un premier temps de prendre connaissance des attentes ou besoins, exprims ou non, conscients ou non, de son client dans un contexte particulier. En plus de ltude des besoins, le conseiller doit valuer le risque que son interlocuteur peut accepter compte tenu de ses objectifs. Au cours de cette premire tape, le CGP tablit un bilan patrimonial grce aux informations quil a pu runir sur la situation globale de son client. Il sagit de raliser la photographie de la situation de celui-ci sous tous les angles: civil, familial, professionnel, financier, budgtaire, prvoyance, retraite et successoral. Tous les documents officiels (avis dimposition, contrat de mariage) doivent ainsi lui tre fournis.

21

La connaissance de lenvironnement familial du client est une donne essentielle pour tablir un bilan de son patrimoine. En premier lieu, il sagit de dterminer la structure de la cellule familiale largie aux ascendants et aux collatraux. Tous ces lments doivent tre abords de manire objective sans pour autant omettre de prendre en compte des aspects plus subjectifs. Le conseiller doit aussi prendre en compte la situation professionnelle actuelle du client mais aussi sa situation passe et future. Le statut professionnel va permettre de dterminer le rgime de protection sociale applicable. De mme, la situation fiscale, les stocks, les flux et les charges actuelles ou futures sont des donnes qui rentrent en jeu lors de llaboration du bilan patrimonial. La mise en uvre stratgie patrimoniale : Une fois que le bilan est tabli, le conseiller doit laborer une stratgie optimale pour le client afin datteindre les objectifs dfinis prcdemment. Cette seconde tape fait appel aux comptences techniques du CGP mme si celui-ci dispose doutils informatiques qui lui permettent de faciliter sa tche. Les CGP peuvent grer leur activit et raliser leurs diagnostics et simulations grce diffrents logiciels. Parmi les outils mis leur disposition, on trouve des simulateurs, des comparateurs dOPCVM, des outils dalerte Dautre part, le gestionnaire va recourir des logiciels de gestion de patrimoine qui vont lui permettre dorganiser les informations quil aura recueillies auprs de sa clientle (ex : Systella). Ces logiciels permettent un gain de temps dans llaboration des prconisations, la ralisation du diagnostic, la gestion du cabinet et la recherche dinformations. Ils peuvent galement effectuer des simulations ou mesurer limpact dune mesure sur la fiscalit et le patrimoine du client. Le suivi : Le CGP accompagne le client et assure le suivi de sa stratgie patrimoniale dans la dure. Ce suivi ne doit pas se rsumer un simple rendez-vous annuel. En effet, le gestionnaire doit veiller garder le contact avec le client et adapter la stratgie mise en place en fonction de la survenance dvnements particuliers ou de lvolution des besoins de celui-ci. Il doit suivre les placements labors au regard de lvolution des marchs financiers ou des objectifs des individus. Dans le cadre de leur profession, les CGP sont soumis des statuts diffrents rglements par plusieurs textes sectoriels. Ce cadre rglementaire a pu, dans un premier temps, tre jug comme un handicap par les CGP car il leur impose de respecter un certain nombre de conditions ce qui nest pas le cas pour les conseillers de clientle des banques par exemple qui ne sont pas soumis toutes ces formalits. Cependant, les CGP semblent voir dsormais dans ces obligations un moyen de dmontrer le srieux et la crdibilit de leur profession. Cette rglementation est aussi un gage de scurit pour leurs clients.

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1.2 Le caractre fragment et insuffisant du cadre de rgulation actuel

Depuis la loi sur la scurit financire adopte en juillet 2003, la profession du conseil en gestion de patrimoine a connu une profonde restructuration en raison du nouveau contexte lgislatif qui sest progressivement mis en place. Cette loi, dite de scurit financire a constitu une tape importante dans la modernisation du droit des marchs financiers. Elle intervient lpoque comme une rponse du gouvernement aux scandales Enron ou encore World Com. La rcente LRBF est venue complter ce cadre. La gestion de patrimoine est un march sur lequel le lgislateur nest intervenu que rcemment au niveau de la rglementation et de lencadrement de cette profession. Deux principaux facteurs permettent dexpliquer cette intervention tardive de la rglementation sur ce march. Dune part, la proportion dactifs financiers dans le patrimoine des Franais tait beaucoup moins importante il y a une quinzaine dannes compare lheure actuelle. Non pas quil sagissait dun march de niche, mais que le besoin en conseil financier tait largement infrieur celui escompt actuellement. Dautre part, la profession de CGP se caractrise comme un mtier pluridisciplinaire o le carrefour de domaines de comptences entrane invitablement plusieurs types de rglementation rentrant en jeu. Au vu des diffrentes disciplines qui parcourent la profession, on retrouve en termes de cadres juridiques le code des assurances, la loi Hoguet pour la vente de produits immobiliers, la rglementation autour des statuts CIF et de la CJA, etc. Ainsi, lindpendant soucieux de travailler de la faon la plus large possible sera tenu de respecter lensemble des dispositions numres ci-dessus. Certains professionnels ne pratiquant que le courtage et les oprations de dfiscalisation ne seront de ce fait pas concerns par lensemble de ces rgles prcdemment numres ; la rglementation dcoulant naturellement en fonction de ltendue de lactivit du conseiller. Certains auteurs avancent le fait que cette intervention tardive du lgislateur est certainement largument le plus significatif pouvant justifier le retard de la France au niveau du cadre lgal de la profession par rapport ses voisins europens.

23

1.2.1

Labsence de rglementation spcifique au mtier de conseiller en gestion de patrimoine

Le conseiller en gestion de patrimoine est susceptible dexercer plusieurs activits, afin de pouvoir assurer ses clients un conseil portant sur une gamme complte de solutions. Ainsi, il peut proposer ses clients aussi bien des valeurs mobilires sous forme d'OPCVM, que des SCPI ou encore des oprations de crdit. Il peut galement effectuer certaines oprations, comme la distribution des produits d'assurance vie ou encore les transactions immobilires Il se trouve ainsi tenu de respecter les rglementations relatives chacune de ces activits et satisfaire diverses obligations notamment celles requises pour exercer lactivit de : conseiller en investissement financier ; courtier en assurance : seul pouvoir vendre des contrats dassurance vie, hormis les rseaux dassureurs, le courtier est tenu de sinscrire lorganisme pour le registre des intermdiaires en assurance, ORIAS ; courtier en oprations de banque et en services de paiement ; dmarcheur financier et bancaire ; dmarcheur immobilier ; conseiller sur les plans juridique et fiscal ; Mais en tant que tel, le titre de conseiller en gestion de patrimoine nest pas rglement. En effet, le conseiller en gestion de patrimoine exerce le plus souvent en cabinet indpendant, le plus souvent unipersonnel, mais pouvant dans certains cas regrouper une dizaine de conseillers. Il en existe aujourdhui approximativement 2500 et il est devenu particulirement difficile, pour un particulier, de diffrencier le vritable professionnel en conseil patrimonial des autres acteurs intervenant dans ce domaine, les vendeurs de produits financiers utilisant lappellation et la mthodologie comme outil de marketing et d'animation commerciale. La dfinition de la profession ainsi que la vrification de la mise en uvre de ses principes et de ses mthodes sont devenus essentiels pour la protection des pargnants. Dautre part, il est indispensable dinformer ledit client des droits et obligations prvus par la rglementation.

24

1.2.2

Une rgulation indirecte mais insuffisante du mtier du conseiller en gestion de patrimoine par le respect des rglementations sectorielles

Si actuellement aucune rglementation spcifique ne protge les conseillers en gestion de patrimoine, une combinaison de rgles sectorielles sapplique eux ds lors quils souhaitent notamment commercialiser des produits. Principalement, on peut noter le statut de conseiller en investissement financier (CIF), dintermdiaire en opration de banque et en service de paiement (IOBSP) et de courtier dassurance. De manire plus large, on peut galement ajouter le statut dagent immobilier rgi par la loi Hoguet et la comptence juridique approprie (CJA)

1.2.2.1

Le ncessaire respect des rglementations sectorielles lintermdiation financire, bancaire et assurantielle.

applicables

Les rglementations applicables en matire dintermdiation financire sont aujourdhui celles qui permettent dapprhender au mieux la ralit du modle conomique des conseillers en gestion de patrimoine et qui en tout tat de cause structurent leur mode dexercice et leur cadre de rgulation.

1.2.2.1.1 Le statut de conseiller en investissement financier Selon ltude APREDIA 20119, 89,5% des cabinets de CGPI dclaraient avoir le statut de conseiller en investissement financier (CIF) fin 2010, soit une progression de 2,6% en un an. Lorsquil fournit titre de profession habituelle des recommandations personnalises concernant des oprations sur instruments financiers, le conseiller en gestion de patrimoine doit en effet remplir les conditions daccs au statut de conseiller en investissements financiers. Il doit ainsi respecter des conditions de rsidence, dge, dhonorabilit, de comptence professionnelle et souscrire une assurance de responsabilit civile professionnelle. Les CIF, outre lobligation dimmatriculation sur le registre unique instaur par la loi de rgulation bancaire et financire, doivent adhrer une des six associations reprsentatives agres par lAutorit des marchs financiers. Le CGP-CIF doit respecter les rgles de bonne conduite et dorganisation dont le contenu est prcis par le Rglement gnral de lAutorit des marchs financiers10.

9

10

Les conseillers indpendants en gestion de patrimoine : le livre blanc 2011, APREDIA, avril 2011 RGAMF, article 325-3 et suivants, article 325-10 et suivants.25

Depuis la transposition de la directive MIF11, les CIF sont autoriss dans le cadre de leur statut fournir un service de rception-transmission dordres (RTO) pour le compte de tiers lissue de leur prestation de conseil et dans les conditions et limites fixes par le RGAMF12. Il leur est donc possible, sans agrment particulier, de recueillir auprs de leur clientle des ordres de souscription ou de rachat en vue de les transmettre un intermdiaire habilit pour leur excution. Cette possibilit est fortement encadre par le RGAMF13. Instaur par la loi de scurit financire du 1er aot 200314, le statut de CIF se distingue du statut dagent li par son caractre dindpendance. Larticle L541-1 du Code montaire et financier, dfinit le CIF comme celui qui exerce titre de profession habituelle une activit de conseil pouvant porter sur plusieurs branches : - les services d'investissement ou les services connexes (ordres ou gestion pour le compte de tiers) ; - la ralisation doprations de banque sur instruments financiers ; - la ralisation dopration de banques ou doprations connexes ; - la fourniture de services dinvestissement ou de services connexes ; - la ralisation doprations sur biens divers. Jusqu ladoption de la loi scurit financire, lactivit de conseil ntait rgie par aucun texte. Linstauration de ce statut, troitement li lactivit de dmarchage en pratique, permet dentourer lexercice de cette profession de rgles et de garanties en vue de renforcer la protection des consommateurs. Nanmoins, il est noter que le CIF exerce exclusivement une fonction de conseil. Pour toute action de dmarchage de produits financiers, il doit obtenir les habilitations ncessaires et respecter les rgles poses par la loi. Ainsi nest-il pas habilit en tant que tel donner des consultations juridiques et rdiger des actes sous seing priv. Activits qui ne relvent pas du statut de CIF : Les conseils en matire immobilire Les conseils lis une activit d'intermdiation portant sur des immeubles ou fonds de commerce et relevant de la loi n 70-9 du 2 janvier 1970 (loi Hoguet) ne constituent pas un type de conseil ncessitant le statut de CIF. Le conseil fourni dans le cadre d'une activit de courtage en assurance ou une activit d'intermdiaire en oprations de banque Le conseil dlivr par le courtier d'assurance ou par l'intermdiaire en oprations de banque (IOB) dans l'exercice de son activit de courtage ou d'intermdiation ne relve pas du statut de CIF.

11

Directive 2004/39/CE concernant les marchs dinstruments financiers (directive MIF) Article L541-1 II CMF 13 Article 325-13 RGAMF12 14

Loi n 2003-706 du 1er aot 2003 art. 55 Journal officiel du 2 aot 200326

Dates clefs La loi de scurit financire du 1er aot 2003 insrs dans le code montaire et financier, partie lgislative Directive europenne MIF de janvier 2007 Dcret d'application de la directive MIF en France de novembre 2007 Ordonnance du 12 avril 2007 relative aux marchs dinstruments financiers transposant la MIF. Contrle de la profession La loi du 1er aot 2003 a mis en place un systme de contrle de lexercice de cette activit. En ce sens les associations professionnelles se sont vues octroyer le respect de certaines obligations telles que : procder lenregistrement des CIF ; transmettre la liste de leurs adhrents lAMF ; laborer un code de bonne conduite et veiller la stricte application de ce dernier. Ces associations professionnelles sont agres par lAMF sur la base de plusieurs critres notamment : des exigences de reprsentativit ; de moyens mis en uvre pour vrifier les comptences de leurs membres ; de la conformit de leur code de bonne conduite aux conditions qui seront prcises dans le rglement gnral de lAMF Ainsi lAutorit des Marchs Financiers joue-t-elle un rle primordial dans linstauration de ce rgime tant donn quelle fixe les critres dagrment des associations professionnelles et gre le fichier des CIF. Enfin, lAMF se voit attribuer un pouvoir de sanction des CIF en cas de manquements aux rgles et obligations sappliquant cette profession. Exercice de lactivit Le dcret en date du 29 septembre 2004 applicable aux CIF, complt ultrieurement, met en place plusieurs obligations conditionnant lexercice de lactivit. a) Obligations administratives Les associations professionnelles doivent tenir une liste des CIF (remplace demain par le registre unique) sur laquelle figure un certain nombre dinformation sur les professionnels tels que : le numro denregistrement du CIF ; les noms, prnoms, date de naissance, lieu de naissance et adresse professionnelle du CIF personne physique ; les noms, adresse et n SIREN de la personne morale qui exerce lactivit de CIF ; ainsi que les noms, prnoms, date de naissance, lieu de naissance et adresses27

personnelles des personnes physiques ayant le pouvoir de grer cette personne morale; la nature des oprations (art. L541-1 CMF) au titre desquelles le CIF exerce son activit de conseil.

b) Conditions dge et dhonorabilit CIF et dmarcheurs ne sont soumis aucune condition d'ge, seule la majorit lgale tant requise. Le CIF doit justifier d'un diplme de 1er cycle d'tudes juridiques ou conomiques ou d'une exprience professionnelle de 2 ans. Les conditions d'honorabilit sont identiques : absence d'interdiction d'exercer prononce par l'AMF, de suspension ou de dmission manant de lACP. c) Obligations professionnelles La loi nonce que lexercice de conseil doit se faire titre habituel. Ce caractre habituel doit tre apprci selon trois critres cumulatifs : profession exerce de manire indpendante profession exerce de manire courante profession donnant lieu rmunration. En outre, le CIF est tenu au respect de rgles de bonne conduite : obligation dontologique de connaissance du client : il appartient au CIF de se renseigner sur la situation personnelle et financire de son client, sur son profil de risque et ses connaissances en matire financire. Cette obligation prendra la forme dune lettre de mission. obligation de fournir un conseil adapt au client : conseil comprhensible et adapt au profil de risque ainsi qu la situation financire du client. obligation dorganisation : mise en place par le CIF de moyens informatiques permettant darchiver des donnes et un suivi des clients. obligation dinformation : sur les produits ventuellement proposs. obligation de transparence : va englober deux points : * transparence de la qualit du conseiller : le CIF dans le cadre de son activit va mentionner son statut et son numro denregistrement, lidentit de lassociation professionnelle laquelle il adhre. * transparence de la rmunration d) Responsabilit civile professionnelle Le dcret de 2004 a fix des seuils a minima qui stablissent comme suit : pour les CIF personnes physiques et pour les CIF personnes morales employant moins de deux salaris exerant une activit de CIF, 150.000 euros par sinistre et par anne d'assurance.

28

pour les personnes morales employant deux salaris minimum, ce seuil passe 300.000 euros par sinistre et 600.000 euros par anne d'assurance.

Les professionnels de la gestion de patrimoine ont pu noncer lors de la cration du statut de CIF plusieurs craintes et critiques. Lappellation de CIF a pu tre juge trop proche du titre de conseiller financier utilis dans les rseaux de banque et dassurance. Aussi une confusion peut-elle natre dans lesprit du public. La mme remarque a t exprime sagissant de lobligation de fournir un conseil adapt aux attentes du client. En effet, selon les personnes interroges, cette obligation doit concerner aussi bien les CIF que les conseillers dpendant dun groupe bancaire ou financier aussi il tait peu opportun de la prciser uniquement pour les CIF. En outre, les CGP ont exprim leur inquitude face la transparence de la rmunration des oprations dintermdiation financire que le CIF peut tre amen faire lissue de sa prestation de conseil. Dans les faits, prs de dix ans aprs lentre en vigueur de loi de scurit financire, force est de constater que la quasi-totalit des CGP ont choisi dadopter le statut de CIF qui permet aujourdhui de mieux apprhender cette profession. Il faut nanmoins noter la situation particulire des CIF dits haut de bilan , reprsents par 3 des 6 associations de CIF (AACIF, CCIF, CNCIF)) qui ont insist pour le maintien du statut existant de CIF qui reconnat leur spcificit.

La reconnaissance des conseillers en investissements financiers par la code montaire et financier et la situation des tablissements de crdits Insr par la loi n2003-706 du 1er aot 2003, art. 55 Article L. 541-1 I. - Les conseillers en investissements financiers sont les personnes exerant titre de profession habituelle les activits suivantes : 1 Le conseil en investissement mentionn au 5 de l'article L. 321-1 ; 2 (Abrog) 3 Le conseil portant sur la fourniture de services d'investissement mentionns l'article L. 321-1 ; 4 Le conseil portant sur la ralisation d'oprations sur biens divers dfinis l'article L. 550-1.

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II. - Les conseillers en investissements financiers peuvent galement fournir le service de rception et de transmission d'ordres pour le compte de tiers, dans les conditions et limites fixes par le rglement gnral de l'Autorit des marchs financiers et exercer d'autres activits de conseil en gestion de patrimoine. III. - Ne sont pas soumis aux dispositions du prsent chapitre : 1 Les tablissements de crdit et les organismes mentionns l'article L. 518-1, les entreprises d'investissement et les entreprises d'assurance ; 2 Les personnes mentionnes au g du 2 de l'article L. 531-2. IV. - Les conseillers en investissements financiers ne peuvent titre habituel et rmunr donner de consultations juridiques ou rdiger des actes sous seing priv pour autrui que dans les conditions et limites des articles 54, 55 et 60 de la loi n 71-1130 du 31 dcembre 1971 portant rforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

Le dmarchage bancaire et financier Le dmarchage bancaire et financier est prvu par les articles L 341-3 et suivants du Code montaire et financier. Les CIF ainsi que les intermdiaires en oprations de banque et en services de paiement (voir ci-dessous) peuvent faire du dmarchage bancaire et financier. Ils peuvent aussi mandater des personnes pour le faire pour leur compte. Ces personnes doivent remplir des conditions dge et de comptence (article D. 341-2 du Code montaire et financier), tre titulaires du baccalaurat ou dune formation adapte la ralisation des oprations de dmarchage ou dune exprience professionnelle de deux ans dans des fonctions lies la ralisation doprations de dmarchage acquise au cours des cinq dernires annes, justifier de conditions dhonorabilit (absence de condamnations, peine demprisonnement ferme ou suprieure six mois avec sursis pour escroquerie, abus de confiance, recel, blanchiment, corruption, tre assures en garantie de leur responsabilit civile professionnelle (RCP) avec une garantie minimale fixe par larticle D. 341-3 du Code montaire et financier. Il faut galement tre enregistr auprs dun fichier national des dmarcheurs qui est tenu par la Banque de France et tre titulaire dune carte de dmarcheur.

Le statut dagent li Le statut dagent li regroupe, depuis lordonnance du 12 avril 2007, les personnes mandates par un prestataire de services dinvestissement (PSI) en vue de fournir notamment un service de conseil en investissement15. Ce dernier semble entrer en contradiction avec lexercice dans un cadre indpendant du mtier de CGP, les CIF15

Article L545-1 CMF30

peuvent nanmoins tre amens revtir la qualit dagent li pour la fourniture de service de RTO.

1.2.2.1.2 Les intermdiaires en opration de banque et en service de paiement (IOBSP) Les intermdiaires en oprations de banque et en services de paiement sont mentionns l'article L. 519-1 du Code montaire et financier. Est intermdiaire en oprations de banque et en services de paiement, toute personne qui, exerce titre habituel contre une rmunration ou toute autre forme davantage conomique, lintermdiation en oprations de banque et en services de paiement, sans se porter ducroire. La loi de rgulation bancaire et financire (LRBF) du 22 octobre 2010 est venue prciser que dans des conditions fixes par dcret en Conseil d'Etat, l'intermdiaire en oprations de banque et en services de paiement peut agir en vertu d'un mandat dlivr par un autre intermdiaire en oprations de banque et en services de paiement ou par le client. Le mandat en vertu duquel l'intermdiaire en oprations de banque et en services de paiement agit mentionne la nature et les conditions des oprations qu'il est habilit accomplir (article L. 519-2 du code montaire et financier). La loi a confi lORIAS (Registre des intermdiaires en assurance) la tenue et la mise jour du Registre unique des intermdiaires financiers regroupant les intermdiaires en assurances, les intermdiaires en oprations de banque et services de paiement, les agents lis et les conseillers en investissements financiers.

La reconnaissance lgislative de lintermdiation en opration de banque et lexemption prvue pour les tablissements de crdits Art. L. 519-1. I. Lintermdiation en oprations de banque et en services de paiement est lactivit qui consiste prsenter, proposer ou aider la conclusion des oprations de banque ou des services de paiement ou effectuer tous travaux et conseils prparatoires leur ralisation. Est intermdiaire en oprations de banque et en services de paiement toute personne qui exerce, titre habituel, contre une rmunration ou toute autre forme davantage conomique, lintermdiation en oprations de banque et en services de paiement, sans se porter ducroire. II. Le second alina du I ne sapplique ni aux tablissements de crdit, ni aux tablissements de paiement, ni aux personnes physiques salaries dun tablissement31

de crdit ou dun tablissement de paiement, ni aux tablissements de crdit, aux tablissements de paiement et aux personnes physiques salaries dun tablissement de crdit ou dun tablissement de paiement, intervenant en libre prestation de services, ni aux personnes qui, pratiquant une activit dintermdiation en oprations de banque et en services de paiement, rpondent des conditions fixes par dcret en Conseil dEtat, ni aux personnes physiques salaries des personnes pratiquant une activit dintermdiation en oprations de banque et en services de paiement. Les conditions fixes par ce dcret tiennent notamment lactivit de lintermdiaire et la nature du contrat de crdit et de service de paiement.

1.2.2.1.3 Lintermdiation en assurance Selon ltude APREDIA 201116, 97,5% des cabinets de CGPI dclaraient tre agres ORIAS en 2010. Les CGP ou CGPI , lorsquils prsentent ou distribuent contre rmunration des assurances sur la vie, sont tenus de remplir les conditions ncessaires leur immatriculation dans lune des catgories dintermdiaires dassurance. Ils doivent ainsi respecter des conditions dhonorabilit, de capacit professionnelle, de garantie financire. Ils doivent galement souscrire une assurance de responsabilit civile professionnelle. Lactivit dintermdiation en assurance est rgie par le Livre V du code des assurances (Par ailleurs, le courtier dassurance est astreint aux mmes rgles que lagent gnral en ce qui concerne les conditions daccs la profession (en termes de niveau de diplme et dexprience professionnelle). Le courtier, en tant que commerant, doit tre immatricul au RCS et tre muni dune carte professionnelle tablie son nom. Le courtier doit notamment souscrire une assurance responsabilit civile professionnelle et sentourer dun minimum de garanties financires. Lactivit de courtage en assurances se caractrise comme un acte dintermdiation permettant la mise en relation dun client avec plusieurs compagnies dassurance. Il ne participe en aucun cas la signature du contrat. Le devoir du conseiller en tant que professionnel de lassurance est doffrir la meilleure adquation possible entre le produit propos et le besoin en couverture de risques du client, et cela au meilleur prix possible. Dans certains cas de figure, le professionnel labore vritablement un contrat sur mesure pour rpondre au mieux aux intrts du client.

16

Voir supra

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Le conseiller est mme dintervenir dans les deux principales branches du courtage en assurance, savoir la couverture de dommages et lassurance de personnes. Au dtriment dune dmarche dintermdiation, il peut notamment intervenir dans une approche-conseil en ralisant par exemple des prestations daudit ou danalyse sur un risque en particulier. Dune manire gnrale, lexercice du courtage en assurance doit rpondre aux conditions suivantes : limmatriculation, renouvelable annuellement, sur registre tenu et mis jour par lORIAS pour le compte de lEtat, est subordonne la ralisation des conditions professionnelles suivantes. Ces conditions rsultent de la transposition de la directive 2002/92/CE qui a harmonis au niveau europen lexercice de lintermdiation en assurance. Il doit notamment justifier dune capacit professionnelle rsultant : - Soit dun stage de plus de 150h permettant le dveloppement des comptences en matire juridique, technique, commerciale et administrative dfinies par les organisations reprsentatives de la profession et par arrt ministriel. - Soit de 2 ans dexprience en tant que cadre dans une fonction relative la gestion ou production de contrats dassurance et de capitalisation, auprs dune compagnie dassurance, dun courtier ou dun agent gnral. - Soit de 4 ans dexprience dans une fonction similaire et auprs des professionnels prcdemment cits. - Soit par rapport lobtention dun diplme, titre ou certificat mentionn par arrt ministriel ; le dernier en date est larrt du 18 fvrier 2008. Souscrire une assurance en RCP ; cette obligation sapplique aux contrats conclus ou renouvels compter du 31 janvier 2007 (art. R.512-14 du Code des Assurances) Respecter les conditions dhonorabilit (art. L.322-2 du Code des Assurances) Souscrire une garantie financire ; quand il encaisse des fonds Etre immatricul au RCS La directive prvoit que le devoir de conseil est formul par crit avec clart et exactitude sur un support durable Cest dailleurs dans la transposition de cette directive que le lgislateur prvoit notamment le principe dobligation des crits. Ainsi, il savre ncessaire que lintermdiaire puisse conseiller son client en dehors de toute notion de dpendance conomique avec ses fournisseurs. La mise en place des crits est galement une pratique pour le courtier lamenant affiner naturellement sa rflexion technique face la problmatique du client. Il convient nanmoins davoir lide que depuis les dernires volutions lgislatives, le monde de lassurance semble devenir un des seuls secteurs conomiques se doter dun33

cadre lgislatif et rglementaire aussi complet. Do peut-tre cette persistance du lgislateur poursuivre son intervention dans une approche par composantes dans les diffrents domaines daction du CGPI.

1.2.2.2

Lapplication titre accessoire des rglementations applicables en matire immobilire et juridique

Les rglementations applicables lintermdiation financire (CIF, IOBSP, courtier dassurance) forment donc la colonne vertbrale des rgles applicables aux conseillers en gestion de patrimoine. Nanmoins, de par la nature transverse de leur activit, ils sont galement amen devoir se soumettre aux normes applicables en matire de prestation de conseil dordre juridique - cest la comptence juridique approprie et aux rgles applicables dans le domaine de lentremise immobilire cest le statut dagent immobilier -.

1.2.2.2.1 La comptence juridique approprie Selon ltude APREDIA 201117, 63% des cabinets possdaient la comptence juridique approprie (CJA). La part des cabinets CGPI qui peuvent se prvaloir de la CJA reste relativement stable depuis plusieurs annes. En 2006, elle reprsentait dj 65% des cabinets.

Dans le cadre de sa prestation de conseil, la question est ici de savoir si le conseiller en gestion de patrimoine a le droit de se faire payer pour une consultation juridique au regard de la loi. Larticle 54 de la loi du 31 dcembre 1971 prvoit que nul ne peut, directement ou par personne interpose, titre habituel et rmunr, donner des consultations juridiques ou rdiger des actes sous seing priv, pour autrui : Sil nest titulaire dune licence en droit ou sil ne justifie, dfaut, dune comptence juridique approprie la consultation et la rdaction dactes en matire juridique quil est autoris pratiquer conformment aux articles 56 66 . Cest ainsi que les avocats ont pris historiquement depuis 1971, le monopole du conseil juridique. Cependant, la rforme de 1990 de cette loi a reconnu, titre accessoire et sous certaines conditions, certains professionnels n'appartenant pas aux professions judiciaires ou juridiques rglementes le droit de donner des consultations ou de rdiger des actes des personnes. La rglementation pose par cette loi de 1990 repose sur la distinction entre l'exercice du droit extrajudiciaire titre principal et titre accessoire.17

Voir supra

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Ainsi, la concurrence sest progressivement intensifie au cours des annes 1990 entre les avocats et les experts comptables en raison dune interprtation extensive de la notion daccessoire. La jurisprudence est rapidement intervenue pour encadrer le primtre du droit pour les professions rglementes comme les experts comptables, restreignant ainsi l'exercice de ces professionnels sur le march du droit. Concernant les conseils en gestion de patrimoine, le Conseil d'Etat sest prononc le 8 mars 2002. La Haute Juridiction Administrative a estim que les titulaires des diplmes d'tudes approfondies ou du diplme d'tudes suprieures spcialises de droit, ainsi que de la matrise de droit ou d'un diplme de troisime cycle (gestion de patrimoine, premier clerc de notaire, mastre en gestion de patrimoine) sont rputs disposer de la comptence juridique approprie (CJA) pour la consultation juridique relevant directement de l'activit de gestion du patrimoine et pour la rdaction d'actes sous seing priv qui en constitue laccessoire ncessaire. La CJA a t ainsi institue par un arrt du 19 dcembre 2000 complt par un second au 1er dcembre 2003. Cette activit reste cependant accessoire au CGPI, car elle permet uniquement ce dernier de rdiger des actes sous seing priv. Malgr lensemble des interventions du lgislateur depuis la loi du 31 dcembre 1971, il semble que les avocats conservent une place privilgie sur le plan de la prestation de conseils en matire juridique. La place des professionnels du droit dans le cadre de la gestion de patrimoine est nanmoins incontestable. Ce soutien essentiel ne se dfinit pas comme une ncessit de substitution, mais plutt comme une forme de complmentarit. Le CGP disposant de la CJA ne peut pas ainsi prtendre pouvoir travailler de manire autonome et efficace en labsence de cette ncessit interprofessionnelle avec les acteurs du droit. Daprs la Fdration Europenne des Conseils et Intermdiaire Financiers (FECIF), il ny a quen France que les CGP prtendent jouer les conseillers juridiques ; la question ne sest jamais pose dans les autres Etats membres.

1.2.2.2.2 Agents immobiliers La loi Hoguet du 2 janvier 1970 pose les conditions dexercice des activits relatives certaines oprations portant sur les immeubles et les fonds de commerce. Ainsi, les personnes vises par cette loi sont outre les agents immobiliers et les mandataires en vente de fonds de commerce, les administrateurs de biens et les grants, les syndics de coproprit. Les ajustements les plus rcents de cette loi figurent sur le dcret du 21 octobre 2005. Dans le cadre de lexercice des oprations dachats, de vente, dchange ou de location, larticle 3 de la loi Hoguet soumet les professionnels la dtention de la carte transaction , voire de la carte gestion en complment dans certains cas de figures ;

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ces cartes sont dune dure valable de 10 ans ; le professionnel doit notamment rpondre lobligation de souscription une RCP. En labsence de cette carte, il est impossible pour eux de raliser les types dopration prcdemment cits et donc den percevoir directement les commissions. Ainsi, un intermdiaire qui percevrait plusieurs commissions immobilires sans tre titulaire de la carte professionnelle est tenu non seulement au remboursement de ce quil a reu, mais sexpose notamment des sanctions pnales. Bien que la jurisprudence soit abondante en la matire pour dfinir les contours de la loi Hoguet, il est assez difficile de dfinir dune manire gnrale des critres prcis pour dterminer les cas o le professionnel est assujetti la loi. Concernant les conseillers en gestion de patrimoine, la carte T est bien entendu indispensable partir du moment o il y a versement de commissions faisant suite des oprations immobilires. Suite aux Etats gnraux de limmobilier, un projet a t prsent par le Ministre de la Justice relatif aux syndics de coproprits. Les professionnels de limmobilier souhaiteraient pour leur part une extension de ce projet lensemble des professionnels de la sphre immobilire avec la mise en place dun conseil suprieur ou dun ordre des professions immobilires rgies par la loi Hoguet.

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1.2.3

La combinaison des obligations applicables aux rglementations sectorielles : larticulation des obligations dinformation et de conseil

Depuis la loi de scurit financire de 2003, les CIF doivent : tre enregistr auprs de lAMF (demain auprs du registre unique gr par lORIAS) ; adhrer une association professionnelle (agre par lAMF) ; souscrire une assurance responsabilit civile professionnelle ; et remplir les conditions dhonorabilit. La profession de CGP connat ainsi des mutations profondes. Autrefois htrogne et dpourvue de statut, elle se structure dsormais progressivement notamment au travers dorganisations professionnelles qui regroupent la majorit des conseillers indpendants. Lobjectif de loi de scurit financire de 2003 tait avant tout de clarifier les professions non rglementes et de permettre une certaine protection de lpargnant. Cependant, la loi ne semble pas rpondre parfaitement cet objectif en raison dune intervention trop troite dans lhtrognit des domaines dactions de lindpendant. Les activits de dmarcheur de produits financiers et de conseiller indpendant peuvent notamment gnrer des conflits dintrts en raison des approches qui sont diffrentes. De plus, ladoption du statut CIF nest pas sans consquence pour le professionnel qui doit en outre souscrire une responsabilit civile professionnelle adquate ce statut et tre soumis au respect dun formalisme beaucoup plus lourd en matire de gestion administrative. Le professionnel choisit ainsi dexposer ouvertement sa responsabilit en cas de dfaut de conseil. Mme si bon nombre de fournisseurs exigent le statut CIF pour des professionnels - qui nen ont pas forcment les comptences et que les associations jouent un rle de contrle sur ces activits, bon nombre dindpendants nont pas forcment conscience des enjeux lis ce statut. Paralllement, nonobstant que bon nombre de CGPI ont pu contester linadaptation du statut CIF ltendue de leur activit, il nest pas rare de constater que certaines socits de gestion et plateformes conditionnent le versement des commissions ladoption de ce statut. Depuis lentre en vigueur de la directive MIF et de lobligation de transparence sur les rmunrations, largument des prestataires de services et dinvestissement rside dans le fait que le statut CIF est un moyen de justifier effectivement la perception de commissions sur encours. Dun autre ct, ladoption du statut est un moyen de rassurer les PSI qui y voient une dlgation de leur37

responsabilit sur le plan oprationnel en matire de devoir dinformation pour lpargnant.

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1.2.3.1 Les obligations dcoulant du statut de CIF Par souci dharmoniser la protection de lpargnant, quel que soit linterlocuteur sollicit (tablissement financier ou conseil indpendant), la directive MIF a contribu apporter certaines volutions au statut CIF. Ainsi, le CIF doit par exemple sabstenir de prconiser son client un produit sil na pas obtenu suffisamment dinformations sur celui-ci. Concernant, lobligation de transparence vis--vis des commissions, lAMF laisse deux possibilits au professionnel ; soit dinformer le client sur la nature et le montant des commissions perues avant mme la prestation de conseil, soit dinformer le client sur les conditions principales des accords en matire de rmunration et sengager dlivrer des informations supplmentaires la demande de ce dernier. A partir du moment o des conseils en investissements financiers sont dlivrs de manire habituelle, le professionnel est obligatoirement assujetti au statut CIF et sexpose des sanctions pnales dfaut de respecter les rgles qui en dcoulent. Toutefois, certaines professions rglementes telles les banques, les avocats, les notaires, etc., restent exclues de ce dispositif. Ainsi, tout conseil portant sur des oprations sur instruments financiers (achats dactions, obligations, OPCVM...), des oprations de banque et des oprations connexes (oprations de crdit et de change), la fourniture de services dinvestissement (RTO, gestion de comptes...) ou la ralisation dune opration sur biens divers relve du statut CIF. Le rle du CIF est donc priori dorienter le client sur les diffrentes opportunits saisir au niveau des services dinvestissement, mais en aucune manire ne consiste fournir ces services dans le cadre de ce statut.

Au premier contact avec un prospect, le CIF doit en outre remettre celui-ci un document dinformation, le document dentre en relation (DER). Ce document doit contenir : son statut de CIF ; son numro denregistrement sur le registre unique gr par lORIAS ; le nom de lassociation reprsentative agre laquelle il adhre ; son ventuel statut de dmarcheur

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-

le cas chant les promoteurs de produits avec lesquels il entretient une relation significative de nature commerciale et capitalistique et tout autre statut rglement dont il relverait.18

Par ailleurs, avant de formuler un conseil, le CIF doit prsenter son client une lettre de mission comportant notamment les indications suivantes : la prise de connaissance par le client du document dinformation prcit ; la nature et les modalits de la prestation ; les modalits dinformation ainsi que de son suivi ; les modalits de rmunration (honoraire ou commissions)19.

En se fondant sur la situation patrimoniale, les objectifs et lexprience de son client en matire financire, le CIF doit alors fournir son conseil dans un rapport crit justifiant les diffrentes propositions avances, leurs avantages et leurs risques respectifs20.

1.2.3.2 La combinaison avec les obligations dcoulant des autres statuts

Le devoir dinformation et de conseil du CIF se conjugue avec celui dont il est redevable lorsquil agit galement comme intermdiaire dassurance, dagent li et de dmarcheur financier. 1.2.3.2.1 Combinaison avec le statut dintermdiaire en assurance Le statut dintermdiaire dassurance impose au CGP de transmettre par crit tout nouveau client un certain nombre dinformations le concernant : Identit ; numro dimmatriculation au registre unique ; coordonnes de son ventuel service de rclamation ainsi que celui de lACP ; liens financiers avec les entreprises dassurance21.

Avant la conclusion de tout contrat, lintermdiaire dassurance doit mentionner au client, nouveau ou non, sa position vis--vis des organismes dassurance. Pour un CGP qui, par hypothse, se prvaudrait dun conseil indpendant, il devra donc indiquer18 19

Article 325-3 RGAMF Article 325-4 RGAMF 20 Article 325-7 RGAMF 21 Article L520-1 C. ass.40

navoir aucune obligation dexclusivit lgard dun ou plusieurs assureurs et prciser le niveau dobjectivit suivant lequel il mnera son analyse du march. Lintermdiaire en assurance doit senqurir par crit de la situation familiale et financire de son client, ainsi que de la nature et du montant de lopration envisage. Sur la base de ces lments, il tablit alors son conseil en identifiant formellement le ou les contrats proposs. 1.2.3.2.2 Combinaison avec le statut dagent li Un CGP peut dcider de recourir au statut dagent li afin dtendre son activit de RTO aux titres vifs, le CMF se contente denjoindre au mandataire de rvler ses clients et prospects, lorsquil entre en contact avec eux, sa qualit et lidentit de son mandant22.

1.2.3.2.3 Combinaison avec les obligations pesant sur les dmarcheurs. Les dmarcheurs sont tenus, avant toute souscription de communiquer en temps utile un nombre important de renseignement aux personnes quils sollicitent. En substance, ils doivent fournir23 : leurs coordonnes ; celles de leur(s) mandant(s) ; les documents dinformation relatifs aux produits proposs ; les conditions de loffre contractuelle ; la mention de lexistence ou non dun droit de rtractation ; lindication de la loi applicable au contrat et de la juridiction comptente.

Cette obligation dinformation se double dun devoir de conseil imposant au dmarcheur, dune part, de sinformer sur la situation financire, lexprience et les objectifs de la personne dmarche et, dautre part, de communiquer celle-ci de manire claire et comprhensible les renseignements qui lui sont utiles pour prendre sa dcision24. Ce devoir de conseil recoupe celui dont le CGP est redevable titre principal en sa qualit de CIF et titre accessoire en tant quintermdiaire dassurance. La loi de rgulation bancaire et financire de 2010 prvoit la suppression du fichier des dmarcheurs dici 2013.

22 23

Article 545-5, al. 3 CMF Article L.341-12 et R341-16 CMF 24 Article L.341-11 CMF41

1.2.4 Les zones grises de la rglementation

Le contrle des professionnels de la dfiscalisation demeure en grande partie en dehors du radar des autorits de supervision que sont lAMF et lACP. Labsence de rgle spcifique concernant notamment les cabinets de dfiscalisation peut nanmoins tre source de problmes non ngligeables dans la commercialisation de certains produits notamment immobiliers. Ces derniers peuvent en effet engager linvestisseur individuel sur de montants et des dures ncessitant tout le moins un conseil appropri et une dcision claire. Ces zones grises se situent trs clairement au niveau des produits de dfiscalisation instaurs successivement par le lgislateur et qui pour certain sont prenniss tel point de devenir des produits dont la commercialisation est trs active sur le territoire national. Les cas de mauvaise commercialisat