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Commission nationale de contrle des interceptions de scurit1ge rapport d'activit 201 0

SommaireAvant proposPremire partie 5

Commission nationale de contrle des interceptions de scurit35, rue Saint-Dominique 75007 Paris Tlphone : 01 45 55 70 20 Tlcopie: 01 45 55 71 15 Courriel : [email protected]

RAPPORT D'ACTIVIT Chapitre 1 Organisation et fonctionnement Chapitre Il Le contrle des interceptions 1991)

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de la Commission

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de scurit (loi nO91-646 du 10 juillet 15

Chapitre III Le contrle des oprations de communication des donnes techniques en matire de prvention du terrorisme (loi nO2006-64 du 23 janvier 2006) Deuxime partie JURISPRUDENCE DE LA COMMISSION Troisime partie TUDES ET DOCUMENTS Chapitre 1 Prsentation ordonne des textes relatifs aux missions de la Commission Chapitre Il Interceptions de scurit et secret-dfense........ Chapitre III lments de jurisprudence

33

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et actualits

parlementaires

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En application de la loi du 11 mars 1957 (article 41) et du Code de la proprit intellectuelle du 1e juillet 1992, complts par 10 loi du 3 janvier 1995, toute reproduction partielle ou totale usage collectif de la prsente publication est strictement interdite sans autorisotian expresse de l'diteur. Il est rappel cet gard que l'usage abusif et collectif de la photocopie met en danger l'quilibre conomique des circuits du livre. '

Table des matires~

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Avant propos

La CNCIS va entrer dans sa vingtime anne. Prsident de cette autorit administrative indpendante depuis plus d'un an, j'ai pu constater la trs grande efficacit et l'utilit de cette Commission pour le contrle des interceptions de scurit, en particulier dans le domaine de la prvention de la dlinquance et de la criminalit organise qui est demeur au cours de l'anne 2010, le motif principal des demandes d'interception. Contrairement d'autres autorits indpendantes, la suppression de la CNCIS n'a jamais t envisage. Celle-ci reste en effet un organe de contrle spcifique non absorbable par une autre structure. Grce sa jurisprudence volutive en fonction des nouveaux moyens techniques de communication, la CNCIS rpond toujours aux attentes du lgislateur de 1991 avec le souci permanent de la recherche d'un quilibre entre la protection de la vie prive et les impratifs de la protection de la scurit de la nation et des intrts suprieurs de l'tat. Comme le souligne ce rapport concernant l'anne 2010, le contrle en aval des interceptions de scurit s'est dvelopp notamment par le suivi accru des productions. Par ailleurs, la politique de dialogue avec les services s'est intensifie ce qui permet de mieux faire connatre la jurisprudence de la CNCIS. Il convient, pour conclure cet avant-propos, de souligner que la composition de la CNCIS a, durant l'anne 2010, t modifie. Aprs le dpart, vers le Conseil Constitutionnel, de M. Hubert HAENEL qui je tiens rendre hommage pour la mission qu'il a brillamment accomplie pendant plusieurs annes au sein de cette commission. On ne peut que se rjouir de l'arrive de M. le Snateur Jean-Jacques HYEST, Prsident de la Commission des lois au Snat. Son exprience nous est prcieuse.

Prsident de la Commission

Herv PELLETIER

Premire partie

RAPPORT D'ACTIVIT

Rapport d'activit

Chapitre 1

Organisation et fonctionnement de la Commission

Composition de la Commission la date de rdaction du prsent rapport, la composition Commission tait la suivante: Membres de la Commission: Herv PELLETIER, prsident de chambre la Cour de Cassation, nomm pour une dure de 6 ans par le Prsident de la Rpublique dcret du 3 octobre 2009, publi au Journal officielle 4 octobre 2009 Jean-Jacques HYEST, membre parlementaire - Snat : snateur (UMP) de la Seine-et-Marne le-de-France, dsign le 2 juin 2010 par le Prsident du Snat, en remplaant du snateur HAENEL, nomm membre du conseil constitutionnel Daniel VAILLANT, membre parlementaire - Assemble nationale: dput (PS) de Paris, dsign le 1er aot 2007 par le Prsident de l'Assemble nationale La Commission judiciaire: est assiste de deux magistrats de l'ordre en date du de la

2 mai 2007

Rmi RCIO, dlgu gnral depuis sa nomination

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Ra pport d'activit

Olivier GURIN, charg de mission depuis sa nomination du 1er juin 2010 Le secrtariat MASSET.

en date

est assur par Nathalie BRUCKER et Marie-Jos

Hubert HAENEL, snateur du Haut-Rhin, 4 juillet 2007, en remplacement du snateur Jacques BAUDOT dcd, puis le 15 octobre 2008 en qualit de membre parlementaire de la Commission titre personnel. Jean-Jacques HYEST nomm le 2 juin 2010 en remplacement du Snateur Hubert HAENEL nomm membre du Conseil Constitutionnel.

Christophe GERMIN conduit le vhicule de la Commission.

Rappel des compositions successives de la CommissionPrsidents: Paul BOUCHET, conseiller d'tat, 1er octobre 1991 Dieudonn MANDELKERN, d'tat, 1er octobre 1997 Jean-Louis 1er octobre 2003 prsident de section au Conseil

Missions et fonctionnementLa Commission est charge de veiller au respect des dispositions du titre Il [ Des interceptions de scurit ) de la loi n 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances mises par la voie des communications lectroniques, modifie plusieurs reprises, la dernire fois par la loi n 2006-64 du 23 janvier 2006. Conformment l'article 1er de son rglement intrieur, la Commission se runit intervalles rguliers l'initiative de son prsident; elle peut galement tre runie la demande d'un de ses membres. Le prsident dispose d'une habilitation permanente l'effet de formuler les avis ds lors que la demande d'interception ne pose pas de questions nouvelles par rapport la jurisprudence tablie. En application de l'article 15 de la loi, la Commission reoit les rclamations des particuliers, procde, en toute indpendance, aux contrles et enqutes qui lui paraissent ncessaires l'accomplissement de sa mission et s'attache nouer tous contacts utiles son information. Elle peut tout moment adresser au Premier ministre une recommandation tendant ce qu'une interception soit interrompue. Conformment l'article 16 de la loi, les ministres, autorits publiques et agents publics doivent prendre toutes mesures de nature faciliter son action. La Commission est en outre charge, en application de l'article 6 de la loi n 2006-64 du 23 janvier 2006 relative la loi contre le terrorisme, du contrle des demandes de communication des donnes prvues par l'article L. 34-1-1 du Code des postes et des communications lectroniques. Enfin, elle est reprsente par ses agents aux runions de la Commission consultative cre par le dcret n 97-757 du 10 juillet 1997 qui, sous la prsidence du directeur gnral de l'agence nationale de la scurit des systmes d'information, met des avis sur les demandes de commercialisation ou d'acquisition des matriels susceptibles de porter atteinte au secret des correspondances. Le prsident remet, avant publication, le rapport annuel d'activit de la Commission au Premier ministre et aux prsidents des deux assembles.

DEWOST, prsident

de section

au Conseil d'tat,

Herv PELLETIER, prsident de chambre la Cour de cassation, 3 octobre 2009 Reprsentants de l'Assemble nationale: Franois MASSOT, dput des Alpes-de-Haute-Provence, let 1991 Bernard DEROSIER, dput du Nord, 24 mai 1993 Jean-Michel BOUCHERON, dput d'ille-et-Vilaine, Henri CUQ, dput desYvelines, 4 juillet 2002 Bernard DEROSIER, dput du Nord, 20 mars 2003 Daniel VAILLANT, dput de Paris, 1er aot 2007 Reprsentants du Snat: Marcel RUDLOFF,snateur du Bas-Rhin, 17 juillet 1991 JacquesTHYRAUD, snateur du Loir-et-Cher, 26 mars 1992 Jacques GOLLlET, snateur de Haute-Savoie, 22 octobre 1992 Jean-Paul AMOUDRY, snateur de Haute-Savoie, 14 octobre 1995 Pierre FAUCHON, snateur du Loir-et-Cher, 18 septembre 1998 Andr DU LAIT, snateur des Deux-Svres, 6 novembre 2001 2004 Jacques BAUDOT, snateur de Meurthe-et-Moselle, 26 octobre 3 juillet 1997 19 juil-

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FinancementAutorit administrative indpendante, la Commission nationale de contrle des interceptions de scurit dispose de crdits individualiss figurant au budget des services du Premier ministre. Le prsident est ordonnateur des dpenses (article 18, alina 2 de la loi). Pour l'anne 2010 et conformment la dclinaison en programmes, actions et sous-actions de la loi organique relative aux lois de finances, le budget de la CNCIS a t inscrit au sein du programme 308 - protection des droits et liberts Afin de respecter l'indpendance budgtaire de notre autorit, celle-ci a t dote d'un budget oprationnel de programme (BOP), rfrenc 308AIC. Les crdits allous en 2010 se sont levs 586222 euros dont 502475 euros pour les dpenses du titre Il (dpenses de personnel) et 83747 euros pour les dpenses de fonctionnement. Les crdits du BOP CNCIS sont destins en priorit permettre le fonctionnement continu de la CNCIS en toute scurit. La structure permanente de la Commission comprend, cet effet outre le prsident, deux magistrats, deux secrtaires fonctionnant en binmes ainsi que d'un conducteur. La Commission doit pouvoir tre jointe et s'entretenir avec ses interlocuteurs de faon scurise. Ses locaux sont quips pour rpondre aux normes relatives au traitement des documents classifis secret-dfense. La Commission doit disposer des moyens d'information les plus larges comme les plus spcialiss en source ouverte (presse et documentation). Elle doit galement disposer d'un moyen qui lui soit propre pour assurer des dplacements discrets et srs, notamment pour effectuer des visites de contrle. Elle est, enfin, tenue la publication d'un rapport annuel. La CNCIS est partie prenante aux travaux mens par les services du Premier ministre sur la mesure de la performance en matire de gestion budgtaire. Elle a ainsi poursuivi depuis 2009 d'importants travaux de rationalisation financire au sein desquels on peut, titre d'exemple pour 2010, citer la finalisation d'une convention relative aux charges exposes, notamment au titre de l'occupation immobilire de la Commission, par la Direction des services administratifs et financiers du Premier Ministre et donnant lieu la facturation vers la CNCIS.

d'une Dlgation compose notamment du Vice - ministre de l'Intrieur bulgare et du Directeur du cabinet du Ministre de l'Intrieur bulgare. De mme, au mois de septembre 2010, la Commission a reu la visite d'une dlgation reprsentant le G10 allemand, celui-ci constituant, sous une forme et un primtre de mission juridiquement diffrents du rgime franais, l'autorit de contrle des interceptions de scurit pratiques en Allemagne.

Relations extrieuresAu mois d'avril 2010 et dans le prolongement des changes avec les autorits Bulgares dj voqus dans le rapport d'activit de 2009, la Commission a poursuivi ces travaux la faveur d'une visite en ses locaux

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Chapitre Il

Le contrle des interceptions de scurit (loi n 91-646 du 10 j u i Ilet 1991)

Le contrle des autorisationsIl convient ici de dcrire la nature et la porte du contrle pratiqu par la Commission sur les demandes d'interception dont elle est saisie. Ce contrle peut tre qualifi de spectral en ce qu'il intervient tant en amont de l'autorisation d'interception qui relve du pouvoir exclusif du Premier ministre (article 4 de la loi du 10 juillet 1991) qu'en aval de cette dcision et qu'il porte tant sur la forme que sur le fond de la demande d'interception. Des lments d'actualit ont, au mois de septembre 2010, conduit la Commission clarifier et prciser le primtre de ce contrle par un communiqu de presse en date du 30 septembre 2010. Une clarification quant la limite de son pouvoir de contrle rsultant de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : Article 20 - Les mesures prises par les pouvoirs publics pour assurer, aux seules fins de dfense des intrts nationaux, la surveillance et le contrle des transmissions empruntant la voie hertzienne ne sont pas soumises aux dispositions des titres 1 et Il de la prsente loi. Par cet article, le lgislateur a entendu rserver une exception au principe du contrle des seules interceptions de scurit par la CNCIS, qui trouve sa source dans la nature mme des mesures concernes, savoir une surveillance gnrale du domaine radio - lectrique, par des oprations alatoires de balayage des frquences.

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On relve, notamment dans les travaux prparatoires du texte prcit, que ces techniques ralises dans le cadre de la mission gnrale de dfense et ne visant pas de communications individualisables ne peuvent tre considres comme des ingrences de l'autorit publique dans l'exercice par toute personne de son droit au respect de sa correspondance au sens de l'article 8 de la CEDH. Au sujet de ce dispositif et au regard de la problmatique particulire de l'interception des communications passes partir des tlphones portables qui n'utilisent que la voie hertzienne, la Commission, ds 1998 (rapport 98 p. 36) indiquait clairement que l'volution technologique ne pouvait occulter le but poursuivi par le lgislateur en 1991, c'est--dire la protection du secret de la correspondance en son principe, sans en rsumer le support l'existant technologique ou sa possible volution. En quelques lignes contenues dans son rapport d'activit, la Commission rappelait ainsi la primaut du principe de liberts publiques sur l'volution technique en indiquant que l'exception son contrle prvue par l'article 20 devait s'interprter strictement: Toute interception de correspondance change par la voie des tlcommunications, qui n'entre pas dans le champ de l'article 20, est soumise quel que soit le mode de transmission filaire ou hertzien aux conditions et aux procdures fixes par la loi du 10juillet 1991,

Pour ce qui concerne la Commission quant au contrle qu'elle exerce sur ce type de donnes, il y a lieu d'observer deux fondements juridiquement distincts: - l'article 6 de la loi du 23 janvier 2006 qui encadre comme nous le dtaillerons plus avant dans ce rapport (p. 34), l'accs ce type de mesure pour la seule prvention des actes de terrorisme travers une procdure spcifique. Ce dispositif est totalement dtach de la notion d'interception de scurit. - l'article 22 de la loi du 10 juillet 1991 : ces donnes sont, par la rdaction mme de cet article intrinsquement rattaches la notion d'interception de scurit. Elles sont soumises une procdure particulire de contrle. Article 22 - (modifi par l'article 18 de la loi n 96-659 du 26 juillet 1996 sur la rglementation des tlcommunications) - Les juridictions comptentes pour ordonner des interceptions en application du Code de procdure pnale ainsi que le Premier ministre ou, en ce qui concerne l'excution des mesures prvues l'article 20, le ministre de la Dfense ou le ministre de l'Intrieur, peuvent recueillir, auprs des personnes physiques ou morales exploitant des rseaux de "communications lectroniques" ou fournisseurs de services de "communications lectroniques'; les informations ou documents qui leur sont ncessaires, chacun en ce qui le concerne, pour la ralisation et l'exploitation des interceptions autorises par la loi. La fourniture des informations ou documents viss l'alina prcdent ne constitue pas un dtournement de leur finalit au sens de l'article 226-21 du Code pnal. Le fait, en violation du premier alina, de refuser de communiquer les informations ou documents, ou de communiquer des renseignements errons est puni de six mois d'emprisonnement et de 7500 d'amende. Les personnes morales peuvent tre dclares responsables pnalement dans les conditions prvues par l'article 121-2 du Code pnal de l'infraction dfinie au prsent alina. Les peines encourues par les personnes morales sont l'amende, suivant les modalits prvues par l'article 131-38 du Code pnal. La CNCIS a, sur le fondement des dispositions de cet article, dfini une procdure de contrle reposant sur les principes suivants: - la centralisation, le traitement et le contrle a priori des demandes des services par le groupe interministriel de contrle relevant du premier ministre; - le contrle a posteriori hebdomadaire de ces demandes par la CNCIS; - la possibilit pour la Commission, de recourir aux mmes avis et recommandations que ceux adresss au Premier ministre, dans le cadre des interceptions de scurit. Au terme de dlibrations successives conduites en 2009 et 2010 dans sa formation plnire, la CNCIS a, en outre, soumis ce dispositif une valuation gnrale annuelle.

Cette rgle a, depuis cette date, t rgulirement rappele dans les dcisions prises par la Commission, notamment pour dfinir les modalits de son contrle en matire de recueil des donnes techniques des communications dans le champ de la loi du 10 juillet 1991. Une prcision quant l'tendue technique de son contrle sur l'interception de scurit. Cette prcision ft ainsi l'occasion de revenir sur une distinction dj opre par la Commission partir de l'observation du socle unique de la communication. Deux lments distincts constituent en effet les pices indissociables de ce socle: - le contenu de la communication (change de paroles, de messages, de signes ... ); - le contenant de cette mme communication constitu de l'agrgat de donnes techniques formant l'accessoire co-substantiel de la communication et qui permettent tant d'en attester l'existence que d'en dfinir le contexte. Il s'agit pour l'essentiel des donnes d'identification, de facturation dtaille (fadets) ou de localisation gographique des quipements utiliss pour la communication. Ces donnes sont devenues, au fil des ans, un lment oprationnel incontournable pour les services de renseignement ou de police judiciaire.

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Elle a, enfin, rappel l'interdiction faite aux services de solliciter directement les oprateurs pour les demandes de prestations relevant de la comptence de la Commission.

introduise l'article 4 de la loi du 10 juillet 1991 une nouvelle disposition autorisant chaque ministre, l'instar du Premier ministre, dlguer de faon permanente sa signature deux personnes. Il convient de rappeler que les contingents d'interceptions simultanes ne doivent pas tre confondus avec le nombre total d'interceptions (demandes initiales et renouvellements) ralises annuellement au profit des trois ministres concerns, Intrieur, Dfense et Budget. Dans son souci de conserver un caractre exceptionnel aux interceptions de scurit, le lgislateur de 1991 a en effet opt pour une limitation sous forme d'un encours maximum, protecteur des liberts publiques. Ce systme dj mis en place par la dcision du 28 mars 1960 du Premier ministre Michel Debr, mais rsultant l'poque de contraintes techniques (capacit maximale d'enregistrement sur des magntophones bandes ou cassettes et capacit d'exploitation par le GIC) a t consacr en 1991 comme devant inciter les services concerns supprimer le plus rapidement possible les interceptions devenues inutiles, avant de pouvoir procder de nouvelles coutes (CNCIS, 3e rapport 1994, p. 16). Le systme par lequel les interceptions sont contingentes - leur nombre doit tout moment respecter un plafond fix par ministre en vertu d'une dcision du Premier ministre, la rpartition interne entre services tant du ressort de chaque ministre - conduit ce que le nombre des interceptions un instant donn est toujours infrieur au contingent: les services doivent, en effet, se rserver la possibilit de rpondre en permanence des circonstances inattendues ou des besoins nouveaux. Laugmentation constante du parc de vecteurs de communications lectroniques (tlphone fixe, mobile, fax, Internet) a conduit des relvements progressifs du contingent (50 % depuis l'origine), qui sont rapprocher du doublement du seul parc tlphonique au cours de la mme priode (1996-2007).Tableau rcapitulatif de l'volution des contingents prvus par l'article 5 de la loi du 10 juillet 1991Initial (1991-1996) Ministre Ministre Ministre Total de la Dfense de l'Intrieur du Budget 232 928 20 1180 1997 330 1190 20 1540 2003 400 1190 80 1670

Le contrle en amontThorie et pratique du contrle La mission premire de la CNCIS est la vrification de la lgalit des autorisations d'interceptions. Elle se traduit par un contrle systmatique et exhaustif de l'ensemble des demandes tant au stade initial qu' celui du renouvellement de l'interception. La loi de 1991 avait prvu un contrle a posteriori. Toutefois, ds les premiers mois de son fonctionnement, la Commission a instaur, avec l'accord du Premier ministre, la pratique du contrle pralable la dcision d'autorisation, allant ainsi au-del de la lettre de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1991. Ce contrle a priori permet un dialogue utile avec les services demandeurs et une meilleure prise en compte par ceux-ci, ds le stade prparatoire, des lments de la jurisprudence de la Commission grce au relais centralis que constitue le Groupement interministriel de contrle (GIC). Ce contrle a priori a t tendu en 2003 aux interceptions demandes en urgence absolue en raison de leur part croissante et grce une disponibilit accrue de la Commission. Il a t confirm en 2008 par le Premier ministre lui-mme comme pratique la mieux mme de rpondre l'objectif de protection efficace des liberts poursuivi par le lgislateu r , Enfin, le prsident de la Commission est inform par le GIC des dcisions prises par le Premier ministre ou les personnes dlgues par celui-ci dans les conditions prvues par la loi de 1991. En cas de dsaccord, il soumet la divergence d'apprciation la dlibration de la Commission conformment l'article 14 de la loi. Dans l'hypothse o le dsaccord est confirm, une recommandation tendant l'interruption de l'interception en cause est adresse au Premier ministre. Il convient toutefois de noter que depuis la transmission pour avis a priori de l'intgralit des demandes d'interception, cette disposition a perdu son intrt sauf bien sr pour ce qui concerne les interceptions dj en cours et dont la Commission recommande au Premier ministre de dcider de les interrompre, ou prconise directement aux services cette interruption. Contrle formel et respect des contingents Lactivit de contrle comporte, en premier lieu, un aspect formel qui consiste vrifier que les signataires des demandes d'autorisation ont bien t habilits par les ministres comptents. Devant la multiplication des demandes urgentes et afin de fluidifier les procdures, la Commission a suggr et obtenu que la loi n? 2006-64 du 23 janvier 2006

d'interceptionsJuin 2005 450 1290 100 1840 2009* 285 1455 100 1840

* NB: cette modification de la ventilation des contingents d'interceptions ministre tient compte de l'intgration, depuis 2009, du sous contingent nationale au sein du contingent du Ministre de l'intrieur.

attribus chaque de la gendarmerie

Lanne 2010 a t marque par le deuxime exercice de l'interprtation par la Commission de ce contingent comme se rfrant un nombre maximum de cibles et non plus de lignes. Cette rfrence, la cible doit permettre de ne pas envisager une augmentation de ce contingent brve et moyenne chance.

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Contrle de la motivation et justification de la demande d'interception de scurit Le premier et le seul objectif des interceptions de scurit sont, comme leur nom l'indique, la protection de la scurit de la Nation et de ses intrts fondamentaux. Les motifs prvus par la loi du 10 juillet 1991, directement inspirs du livre IV du Code pnal qui incrimine les atteintes ces intrts fondamentaux, ne font que dcliner les diffrents aspects de la scurit, mais la rfrence prcise ceux-ci, permet une premire apprciation des demandes. Ces motifs, numrs l'article 3 de la loi, sont: la scurit nationale, la sauvegarde des lments essentiels du potentiel scientifique et conomique de la France, la prvention du terrorisme, ainsi que de la criminalit et de la dlinquance organises et de la reconstitution ou du maintien de groupements dissous en application de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices prives. Les services demandeurs doivent donc faire rfrence explicite l'un de ces motifs lgaux. Ils doivent en outre justifier leur demande par des explications circonstancies qui permettront la Commission de contrler l'articulation du fait au droit. A cet effet, la prsentation des lments de fait doit tre certes synthtique mais non strotype et suffisamment consistante pour apprcier leur adquation avec le motif lgal. Ce point, ainsi que les critres d'apprciation des motivations, seront repris dans la deuxime partie du rapport, consacre la jurisprudence de la Commission , cet effet, le cadre des imprims de demandes a t revu en 2006, en 2008 et nouveau en 2009 pour tendre, partir des modles les plus complets, une uniformisation de la prsentation gage d'une meilleure galit d'apprciation et permettre galement de potentialiser encore le contrle de la Commission dans le cadre du passage l'autorisation par cible. La Commission attache du prix au caractre exhaustif des mentions notamment celles relatives aux interceptions prcdentes ayant pu exister sur la mme cible. Ces cadres ne doivent pas pour autant tre perus comme un carcan dont on ne pourrait sortir, par exemple en prsentant spontanment des informations complmentaires indispensables l'apprciation de la demande. Le contrle s'attache d'une part une identification aussi prcise que possible des cibles, d'autre part aux informations recueillies sur leur activit socioprofessionnelle: il convient en effet de protger plus particulirement les professions ou les activits juges sensibles en raison du rle qu'elles jouent dans une socit dmocratique. Il importe aussi de s'assurer que le motif lgal invoqu ne dissimule pas d'autres proccupations. Il est ncessaire de rappeler que l'interception doit tre sollicite exclusivement pour les faits articuls et non pour une raison autre qui ne relverait d'aucun motif lgal, quelle que soit par ailleurs la vracit des faits rapports. Ceci sera dvelopp dans la deuxime partie du rapport.

La jurisprudence de la CNCIS s'attache galement la protection des liberts de conscience et d'expression. Ainsi maintient-elle que le proslytisme religieux, comme l'expression d'opinions extrmes, ds lors qu'ils ne tombent pas sous le coup de la loi, ne justifient pas en tant que tels une demande d'interception s'ils ne comportent aucune menace immdiate pour l'ordre public rpublicain, matrialise par exemple par un appel ou un encouragement la violence. De mme, elle veille ce que les interceptions, en ce qu'elles sont parfois concomitantes d'actions sur le terrain, ne portent pas atteinte la libert de manifestation. D'une manire gnrale et quel que soit le motif, l'implication personnelle de la cible dans des agissements attentatoires notre scurit doit tre au moins prsume. Le prsident de la CNCIS peut demander les lments d'informations complmentaires qui lui sont ncessaires pour fonder l'avis de la Commission. Il formule galement les observations qu'il juge utiles sur la pertinence du motif invoqu, procdant le cas chant des propositions de substitution de motif. Il s'assure que la demande respecte le principe de proportionnalit entre le but recherch et la mesure sollicite. La gravit du risque ou du danger pour la scurit des personnes, qu'elles soient physiques ou morales, ou pour la scurit collective, doit tre la mesure de l'atteinte la vie prive que constitue la surveillance de la correspondance par voie de communications lectroniques, et justifier cette atteinte. La recherche de cette proportionnalit peut se traduire ab initio ou lors du renouvellement par une restriction au cas par cas de la dure de la mesure dont le maximum est de quatre mois. Une diffrenciation des dlais a t instaure par voie jurisprudentielle: deux mois pour une cible non totalement identifie, dlai ad hoc cal sur un vnement prvu date fixe, etc. On peut galement citer l'instruction donne d'exclure certaines parties strictement prives des conversations des transcriptions (appeles productions ) et par des demandes de bilans circonstancis avant l'aval d'une nouvelle prolongation dans le cas d'une interception dj plusieurs fois renouvele. Il faut enfin veiller ce que soit respect le principe de subsidiarit et, par consquent, s'assurer que le but recherch ne puisse tre aussi bien rempli par d'autres moyens (enqute de terrain, d'environnement, mise en place de forces de l'ordre, etc.). Donnes chiffres et commentaires volutions 2009-2010 6010 interceptions de scurit ont t sollicites en 2010 (3776 interceptions initiales et 2234 renouvellements). S'agissant des interceptions initiales, 522 de ces 3776 demandes ont t prsentes selon la procdure dite d'urgence absolue (497 en

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2009) soit 13,2 % de ces demandes (18,9 % en 2009). Cette diminution constante du pourcentage d'urgences absolues rsulte du passage l'autorisation par cible qui a induit la suppression des urgences techniques qui reprsentaient, en 2008, 56,70 % des urgences. Ces urgences dites techniques taient initialement destines pallier la possible interruption de la surveillance rsultant d'un changement de ligne ou de vecteur de communication par une cible ou de son utilisation de plusieurs lignes en concomitance. Lobjectif d'un traitement par la Commission de ce type de demande dans un dlai infrieur une heure a, cette anne encore, t respect. La ralisation de cet objectif ncessite, dans le cadre de l'avis a priori donn par la Commission, la mise en uvre d'une permanence comparable celle qui est assure par chaque Parquet prs les tribunaux de grande instance. Au final, si l'on impute ce chiffre global les 31 avis ngatifs donns par la Commission lors des demandes initiales et des demandes de renouvellement, tous suivis par le Premier ministre, ce sont donc 5979 interceptions de scurit qui ont effectivement t pratiques au cours de l'anne 2010 (5029 en 2009). Pour ce qui concerne les motifs au stade des demandes initiales, la prvention de la criminalit et de la dlinquance organises reste le premier motif des demandes initiales avec 62,6 %, suivie de la prvention du terrorisme avec 20 % et la scurit nationale 16,6 %. Concernant les renouvellements, on note que la scurit nationale occupe la premire place avec 42,1 % suivie de la prvention du terrorisme 30,6 % et de la criminalit organise 25,6 %. Ces pourcentages de renouvellement rendent de fait compte du travail des services au cur de motifs qui supposent une inscription de l'investigation dans la dure. Au total, demandes initiales et renouvellements confondus, c'est encore une fois la prvention de la criminalit et de la dlinquance organises qui se dtache nettement avec 48,8 % suivie de la scurit nationale 26,1 % et puis la prvention du terrorisme 24 %. Ces trois motifs reprsentent quasiment 99 % du total des demandes. Observations La Commission a poursuivi sa dmarche de dialogue avec les services demandeurs. Cette dmarche s'est traduite par une nette augmentation des runions bilatrales avec ces mmes services. Elle s'est galement matrialise, au stade de l'examen de leurs demandes, par une logique d'avis moins binaire (avis favorable/dfavorable). De fait, le nombre d'observations a encore cr, passant de 1651 en 2009 2101 en 2010 dont 79 demandes de renseignements complmentaires et 487 limitations de la dure d'interception sollicite. Les avis dfavorables comptabiliss dans les observations se sont levs 31, se rpartissant

17 concernant les demandes initiales et 14 pour les demandes de renouvellement. Tous ces avis ngatifs ont t suivis par le Premier ministre. ce chiffre des avis dfavorables bruts, il convient d'ajouter deux techniques d'observation dj rpertories dans le rapport d'activit 2008 qui peuvent s'apparenter l'avis ngatif : la recommandation adresse au Premier ministre visant l'interruption de l'interception en cours d'exploitation qui rsulte de l'examen exhaustif des productions (transcriptions) opres partir d'une interception. Il y a t fait recours 7 reprises en 2010. Elles ont toutes t suivies par le Premier ministre. la prconisation d'interruption adresse par la Commission au service utilisateur en cours d'exploitation. Elle rsulte du mme examen des productions et procde d'un dialogue constructif men directement avec les services utilisateurs abandonner 57 interceptions en 2010. De fait, si l'on additionne avis ngatifs, recommandations d'interruption adresses au Premier ministre et prconisations d'interruption formules directement aux services utilisateurs, le nombre de cas o une interception de scurit n'a pas t ralise ou poursuivie, conformment au positionnement de la Commission, s'tablit pour l'anne 2010 95. Le contrle en aval Force est galement de constater que le contrle en amont des demandes, aussi minutieux et exhaustif soit-il, ne saurait suffire. Le contrle des productions est, en aval, le moyen privilgi pour s'assurer la fois de la bonne adquation de la demande au motif lgal invoqu et de l'intrt rel prsent par l'interception au regard des critres de proportionnalit et de subsidiarit. Ce contrle continu inaugur en 2005 s'effectue de manire alatoire ou cible. Il permet ainsi la Commission, en dpit de la charge matrielle qu'il gnre, de rendre des dcisions plus claires au stade du renouvellement de l'interception s'il est demand par le service, et le cas chant, de prendre en cours d'exploitation d'une interception, une recommandation tendant l'interruption de cette dernire. Ainsi, les productions de 560 interceptions en 2010 (326 en 2009) ont-elles t examines par la Commission. La pratique de la recommandation d'avertissement dcrite dans le rapport 2008 a galement t poursuivie: il s'agit d'une lettre annonant au Premier ministre qu'une recommandation d'interruption de l'coute pourrait lui tre envoye bref dlai si l'incertitude sur l'adquation entre le motif invoqu et la ralit des propos changs devait se poursuivre. 4 de ces recommandations ont t ainsi adresses au Premier ministre au cours de l'anne 2010.

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Un tel avertissement sortant tel ou tel dossier de son anonymat administratif, permet au Premier ministre d'interroger les Services sur une base concrte, et renforce ainsi, au niveau politique, le dialogue dj amorc par la Commission son niveau avec ces mmes Services, au cours de ces dernires annes. Enfin, la Commission fait dsormais appel la technique de l'audition, en sance plnire, d'un haut responsable d'un service de renseignement dans des dossiers o le suivi des productions ne suffit plus tablir son intime conviction. Au total, avec 5979 interceptions accordes en 2010, on constate cette anne encore, que les interceptions de scurit demeurent, au regard de vecteurs de communications lectroniques en constante augmentation, la mesure d'exception voulue par la loi.

Rpartition des motifs des renouvellements accordsen 2010Scurit nationale 935 Potentiel scientifique et conomique 28 Terrorisme Criminalit organise 569 Groupements dissous 8 Total accords 2220

680

2010

Groupements dissous

0,4 %

Criminalit organise

25,6 %

Scurit nationale 42,1 %

Tableaux annexesLes demandes initiales d'interception tat des demandes initiales d'interception (2009et 2010)Demandes 2009 Totaux 31761 1

Terrorisme

30,6 %Potentiel scientifique et conomique 1,3 %

initiales 2010 3776

Dont urgence absolue 2009 4971 1

Accordes 2009 3113

2010 522

l l

2010 3759

Demandes initiales Rpartition des motifs 2010

Activit globale: demandes initiales et renouvellements Rpartition des demandesentre interceptions et renouvellements d'interceptionsDemandes initiales circuit nonnal 2009 2616 11

Demandes initiales en urgence absolue 2009 497

Demande de renouvellement 2009 1916 11

1

2010 3254

-'

2010 522

2010 2234

1

Groupements dissous

0,3 % 16,6 %

Criminalit organise

Scurit nationale

62,6 %

2010Demandes de renouvellements 37,2 % Demandes initiales 62,8 % *

Potentiel scientifique et conomique

0,5 %

Les renouvellements

d'interception demands: 2234 * Rappel: 13,2 % des demandes initiales sont constitues en urgence absolue.par des demandes prsentes

Total des renouvellements

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Demandes d'interceptions:Demandes initiales d'interceptions Dont urgence absolue Demandes de renouvellements Total

tableau rcapitulatif 20064203 714 1825 6028

global sur cinq ans 20084330 1 095 1605 5935

20074215 964 1850 6065

20093176 497 1941 5117

20103776 522 2234 6010

Enregistrement, transcription et destructionLa mise en place en 2002 d'un effacement automatis de l'enregistrement au plus tard l'expiration du dlai de dix jours, prvu par l'article 9 de la loi, s'est traduite par un gain de temps apprciable pour les agents chargs de l'exploitation. Cette volution ne dispense cependant pas de l'accomplissement des formalits prvues par le deuxime alina de l'article 9 : II est dress procs-verbal de cette opration [de destruction des enregistrements l'expiration d'un dlai de dix jours]. En application de cette disposition, en dbut d'anne civile, le directeur du GIC atteste de la conformit logicielle du parc informatique de tous ses tablissements. Les transcriptions doivent tre dtruites, conformment l'article 12 de la loi du 10 juillet 1991, ds que leur conservation n'est plus indispensable la ralisation des fins mentionnes l'article 3, mme si cet article 12 n'dicte pas de dlai, le GIC la faveur d'une instruction permanente a, conformment aux prescriptions de l'IG 1300/SGDN/ SSD du 25 aot 2003, impos aux services destinataires finaux des productions, d'attester, auprs de lui, de la destruction effective de ces dernires ds lors que leur conservation ne prsentait plus d'utilit pour l'excution de la mission poursuivie.

Rpartitions des motifs d'interceptions

de scurit accordes:

Cumul des demandes initiales et des demandes de renouvellements accordsPotentiel scientifique et conomique

0,8 %

0,3 %

Ligues

Scurit nationale 26,1 %

Criminalit et dlinquance organises 48 %

Prvention du terrorisme

24%

Le contrle du Gleet renouvellements accords Service du Premier ministre, consacr comme tel aprs 31 annes d'existence par le dcret n 2002-497 du 12 avril 2002 (CNCIS, 118 rapport 2002, p. 50) et actuellement dirig par un officier gnral, le GIC est l'lment clef du dispositif des interceptions de scurit. Il en assure la centralisation conformment l'article 4 de la loi du 10 juillet 1991 [ Le Premier ministre organise la centralisation de l'excution des interceptions autorises ). Ce service s'adapte en permanence aux avances technologiques incessantes dans le domaine des communications lectroniques qui constituent chaque fois autant de dfis relever (citons en l'espace d'une dcennie, la tlphonie mobile, le SMS, le mail, l'Internet, le dgroupage et la multiplication des oprateurs). Conformment une recommandation prise par la Commission en 1996, le GIC a entrepris, ds 1997, la mise en place de centres locaux de regroupement des interceptions, sortes de GIC dconcentrs rpondant aux normes de scurit souhaites par la Commission. Cette phase est ce jour acheve mais le maillage du territoire en antennes secondaires se poursuit attestant, aprs la ncessaire tape de restructuration centralise, de la volont de donner aux services enquteurs la proximit attendue. Enfin, le GIC rpond toute demande d'information de la Commission qu'il assiste avec clrit et efficacit.

Rpartition entre interceptionsInterceptions accordes en 2010

Interceptions initiales

3759Total

5979

Le contrle de l'excutionCelui-ci porte sur trois domaines: - l'enregistrement, la transcription et la dure des interceptions; - les visites sur le terrain; - l'instruction des rclamations des particuliers et les ventuelles dnonciations l'autorit judiciaire.

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Les visites sur le terrainDurant l'anne 2010, la CNCIS a poursuivi son action sur le terrain sous la forme de visites inopines ou programmes des services utilisateurs d'interceptions. Lors de ces visites, les contrles portent la fois sur la scurisation des locaux, les interceptions en cours, l'examen des relevs d'interception et d'enregistrement (article 8 de la loi) et des procs-verbaux de destruction des enregistrements et des transcriptions (articles 9 et 12 de la loi). Ces dplacements peuvent tre effectus par les membres de la Commission eux-mmes, le dlgu gnral et le charg de mission. Au total, sous une forme ou sous une autre, 17 visites de centres d'exploitation ont t effectues cette anne. chacune de ces visites, les reprsentants de la CNCIS dressent un inventaire des pratiques et des procdures mises en uvre par les services pour l'application de la loi du 10 juillet 1991. Ils apportent les informations et les claircissements utiles, notamment sur le rle de la CNCIS, recueillent les observations des personnels rencontrs sur les matriels et logiciels mis leur disposition et s'informent des ralits locales se rapportant aux motifs lgaux des interceptions.

l'identique de l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 [loi Informatique et liberts) puis de l'article 41 de cette mme loi, telle que modifie par la loi du 6 aot 2004, peut sembler insatisfaisante. Mais il est difficile, notamment au regard des prescriptions de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1991 modifie par la loi du 9 juillet 2004, d'aller plus loin dans la transparence. En effet, l'occasion de son contrle, la Commission peut dcouvrir les situations suivantes: _ existence d'une interception ordonne par l'autorit judiciaire; _ existence d'une interception de scurit dcide et excute dans le respect des dispositions lgales; _ existence d'une interception de scurit autorise en violation de la loi; _ existence d'une interception "sauvage'; pratique en violation de l'article 1er du projet de loi par une personne prive; - absence de toute interception. On comprendra aisment au vu de ces diffrentes hypothses que la Commission nationale n'a d'autre possibilit que d'adresser la mme notification l'auteur d'une rclamation, quelle que soit la situation rvle par les oprations de contrle, et que toute autre disposition conduirait, directement ou indirectement, la Commission divulguer des informations par nature confidentielles (Assemble nationale, rapport n 2088 de Franois MASSOT, 6 juin 1991). Faut-il en conclure que toute requte est inutile? Non, car mme si le secret-dfense interdit toute rvlation sur l'existence ou l'inexistence d'une interception de scurit, la CNCIS dispose de deux moyens d'action lorsqu'elle constate une anomalie: _ le pouvoir d'adresser au Premier ministre une recommandation tendant faire interrompre une interception qui s'avrerait mal fonde; _ le pouvoir, qui est aussi un devoir, de dnonciation l'autorit judiciaire de toute infraction la loi de 1991 qui pourrait tre rvle l'occasion de ce contrle (cf. infra). Pour tre complet signalons que: _ la Commission d'accs aux documents administratifs (CADA) arguant du secret-dfense a mis le 18 dcembre 1998 un avis dfavorable la demande de communication d'une copie d'une autorisation du Premier ministre concernant l'interception des communications tlphoniques d'un requrant; _ le Conseil d'tat, dans un arrt du 28 juillet 2000, a rejet le recours d'un requrant contre la dcision du prsident de la CNCIS refusant de procder une enqute aux fins, non de vrifier si des lignes identifies avaient fait l'objet d'une interception comme la loi lui en donne le pouvoir, mais si la surveillance policire dont l'intress se disait victime trouvait sa source dans l'interception de lignes de ses relations.

Rclamations de particuliers et dnonciation l'autorit judiciaireLes saisines de la CNCIS par les particuliers Cette anne, 48 particuliers ont saisi par crit la CNCIS. Une minorit des courriers concernait des demandes de renseignements sur la lgislation. La majorit, constitue de rclamations, a donn lieu au contrle systmatique auquel il est procd lorsque le demandeur justifie d'un intrt direct et personnel interroger la Commission sur la lgalit d'une ventuelle interception administrative. Il convient de prciser que les agents de la Commission ont trait un nombre d'appels tlphoniques bien suprieur celui des saisines par courrier. Ces contacts pralables ont le plus souvent permis de prvenir des requtes ultrieures mal fondes ou mal orientes lorsqu'il s'agit par exemple d'appels malveillants, de problmes relevant de la saisine de l'autorit judiciaire (soupons d'coutes illgales caractre priv) ou enfin de dysfonctionnements techniques classiques; ils ont galement permis de rorienter les demandeurs vers les services ou autorits comptents. S'agissant des courriers adresss la CNCIS, il leur est immdiatement donn suite et il est notifi au requrant, conformment l'article 17 de la loi, que la Commission a procd aux vrifications ncessaires. On relve ce propos, dans les dbats parlementaires prcdant l'adoption de la loi de 1991, que l'imprcision de cette formule reprise

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Les avis l'autorit judiciaire prvus l'article 17alina 2 Au cours de l'anne 2010, la CNCIS n'a pas eu user des dispositions du 2e alina de l'article 17 de la loi du 10 juillet 1991 qui prcisent que conformment au deuxime alina de l'article 40 du Code de procdure pnale, la Commission donne avis sans dlai au procureur de la Rpublique de toute infraction aux dispositions de la prsente loi dont elle a pu avoir connaissance l'occasion du contrle effectu en application de l'article 15.

Le contrle du matrielEn vertu des articles R. 226-1 R. 226-12 du Code pnal, le Premier ministre est comptent pour accorder les autorisations de fabrication, d'importation, d'exposition, d'offre, de location, de vente, d'acquisition ou de dtention de matriels permettant de porter atteinte l'intimit de la vie prive ou au secret des correspondances. Ces autorisations interviennent aprs avis d'une Commission consultative laquelle participe la CNCIS. La structure de cette Commission a t modifie par le dcret 2009-834 du 7 juillet 2009 puis le dcret 2009-1657 du 24 dcembre 2009. Depuis, la prsidence de cette Commission est confie au Directeur gnral de l'agence nationale de la scurit des systmes d'information, lui-mme rattach au Secrtaire gnral de la Dfense et de la Scurit nationale. Le rgime de contrle, issu de l'arrt du 29 juillet 2004, participe d'une volution de l'apprhension de ce secteur d'activit sensible par la puissance publique (cf. rapport 2004, p. 34-38; rapport 2005, p. 31-33). Il traduit une vision librale quant la mise sur le march d'appareils dont la liste initiale a t rduite, vision assortie d'une logique de vigilance quant l'utilisation finale de ces appareils (cf. rapport 2004, p. 38). Si les rgles de commercialisation ont t allges par rapport au dispositif rglementaire antrieur 2004, cette facilitation de l'accs au march n'a pas induit une inflexion dans la qualification du caractre sensible de ce type de matriel par les pouvoirs publics. Ainsi, le dcret n 1739 du 30 dcembre 2005 rglementant les relations financires avec l'tranger et portant application de l'article L. 151-3 du Code montaire et financier (prsent en doctrine comme amnageant le contrle des investissements trangers dans les secteurs stratgiques en France - Recueil Dalloz 2006, p. 218) soumet au principe de l'autorisation pralable l'investissement d'un tat (intra ou extracommunautaire) portant sur les matriels conus pour l'interception des correspondances et la dtection distance des conversations, autoriss au titre de l'article 226-3 du Code pnal.

La Commission consultative prvue l'article R. 226-2 du Code pnal s'est runie cinq fois en 2010. Sa composition est la suivante: - le directeur de l'agence nationale de scurit des systmes d'information ou son reprsentant, prsident; - un reprsentant du ministre de la Justice; - un reprsentant du ministre de l'Intrieur; - un reprsentant du ministre de la Dfense; - un reprsentant du ministre charg des Douanes; - un reprsentant de la CNCIS; - un reprsentant de l'Agence nationale des frquences; - deux personnalits dsignes en raison de leur comptence par le Premier ministre. En 2010, la Commission a rendu 643 dcisions ventiles comme suit: - 321 dcisions d'autorisation initiale (236 concernant la commercialisation, 85 l'acquisition d'quipements soumis autorisation); - 110dcisions de renouvellement d'autorisation; - 163 dcisions d'ajournement; - 13 dcisions de refus ou de retrait; - 15 dcisions de mise hors champ de l'examen pour autorisation; - 21 dcisions de radiations. la diffrence des annes prcdentes (cf. rapports 2005 2009) il est observ une diminution importante du nombre de dcisions de mise hors champ de l'examen de la Commission. Cette volution rsulte vraisemblablement d'une meilleure connaissance des dispositions de l'arrt du 29 juillet 2004, qui emportent l'exclusion de certains types de matriels, qui taient jusqu' cette date soumis autorisation. La CNCIS est galement membre de la commission d'examen des demandes des services de l'tat, titulaires d'autorisation de plein droit conformment l'article R. 226-9 du Code pnal. Ces services sont invits selon le rgime mis en place en 2001 (cf. rapport 2001, p. 27) produire leurs registres et dcrire leurs rgles internes de gestion des matriels sensibles. Ces visites permettent aux reprsentants de la CNCIS de s'assurer du respect des rgles adoptes et de l'adquation des matriels dtenus avec les missions confies ces services.

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Chapitre III

Le contrle des communication techniques prvention

(loi n 2006-64 du 23 janvier 2006)

oprations de des donnes en matire de du terrorisme

l'anne 2010 constitue le troisime exercice annuel complet de l'activit du dispositif de prvention du terrorisme mis en uvre sur le fondement de l'article 6 de la loi du 23 janvier 2006 insr l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications lectroniques.Ces dispositions prvoient qu' afin de prvenir les actes de terrorisme, les agents individuellement dsigns et dment habilits des services de police et de gendarmerie nationales spcialement chargs de ces missions peuvent exiger des oprateurs et des personnes mentionnes au 1de l'article L. 34-1 la communication des donnes conserves et traites par ces derniers en application dudit article. Tirant les enseignements des attentats de Madrid du 11 mars 2004 et de Londres du 7 juillet 2005, soucieux d'assurer au mieux la scurit de nos concitoyens alors que la menace terroriste pesait aussi sur la France, le lgislateur a autoris les services de police et de gendarmerie spcialiss dans la prvention du terrorisme se faire communiquer, sur le fondement d'une rquisition administrative spcifique, comparable celle prvue par le code de procdure pnale, certaines donnes techniques dtenues par les oprateurs de communications lectroniques (OCE) et par les fournisseurs d'accs Internet (FAI).

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Le lgislateur a adopt un dispositif original dans l'ensemble des systmes europens de contrle des accs lgaux aux communications lectroniques, ncessaires pour garantir le respect des liberts publiques et la protection de la vie prive. La loi du 23 janvier 2006 institue ainsi une personnalit qualifie auprs du ministre de l'Intrieur, relevant de la Commission nationale de contrle des interceptions de scurit pour son activit de contrle de la lgalit de l'action des services habilits en matire de prvention du terrorisme. Ce dispositif, dfini dans la loi du 23 janvier 2006 relative la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives la scurit et aux contrles frontaliers, a t prvu titre exprimental dans un premier temps jusqu'au 31 dcembre 2008. Il a t prorog jusqu'au 31 dcembre 2012 par la loi n 2008-1245 du 1er dcembre 2008. Ainsi, anne mdiane de la priode d'exprimentation fixe par le lgislateur, l'anne 2010 constitue une tape nouvelle et importante pour l'valuation de ce dispositif dans un contexte trs renouvel tant sur le plan des menaces terroristes, qu'au niveau des besoins oprationnels des services judiciaires et de renseignement apparus pour s'adapter ces nouvelles formes d'actions terroristes. Les dispositifs juridiques internes, europens et internationaux dans le domaine de la lutte contre le terrorisme sont aussi en pleine volution. Les responsabilits attaches aux fonctions de la personnalit qualifie sont confies depuis le 27 novembre 2009 au contrleur gnrai Jean ESPITALIER. Que cette partie du rapport d'activit soit l'occasion de le remercier publiquement pour l'action qu'il conduit avec le souci constant de traiter dans les meilleures conditions d'efficacit et de clrit les demandes des services engags dans la lutte contre le terrorisme, tout en garantissant la protection des liberts publiques et des droits individuels que le lgislateur a entendu prserver. Par son travail et son sens constant du dialogue, il a su instaurer avec les services une dmarche de collaboration fructueuse dans le respect des contraintes de chacun et des objectifs dfinis par le lgislateur. Il a su maintenir et enrichir les conditions d'un dialogue constructif avec la Commission nationale de contrle des interceptions de scurit, en charge du contrle a posteriori des demandes valides par les services de la personnalit qualifie. Il veille avec une attention particulire l'adoption de solutions jurisprudentielles conformes celles dveloppes par la Commission nationale de contrle des interceptions de scurit, dans les autres secteurs plus anciens du contrle de l'exploitation des communications lectroniques, relevant de la comptence de cette dernire. Cette proccupation constante est une condition essentielle de l'efficacit de l'action des services et de la protection des garanties des droits des personnes voulue par le lgislateur.

Ces observations et ces remerciements s'adressent aussi aux adjoints de la personnalit qualifie dont deux d'entre eux ont t reconduits dans leur fonction par dcision de la CNCIS au cours de l'anne 2010.

Prsentation du dispositifLes agents individuellement dsigns et dment habilits pour conduire les investigations au titre de l'article 6 relvent de six services de la police nationale et de la gendarmerie nationale, chargs de la prvention du terrorisme. Il s'agit de: la direction centrale du renseignement intrieur (DCRI), la direction du renseignement de la prfecture de police (DRPP), la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), la direction rgionale de police judiciaire de Paris (DRPJ - Paris), l'unit de liaison et de coordination de la lutte anti-terroriste (l'UCLAT), la direction gnrale de la gendarmerie nationale - bureau de liaison anti - terroriste (BLAT). En 2010, il est constat une hausse du nombre global de ces dsigns et dment habilits de prs de 25 % par rapport l'anne prcdente. L:augmentation des effectifs de la DCRI est la plus importante, soit plus de 29 %. Ces personnels reprsentent dsormais 76,33 % de l'ensemble. agents individuellement

Les services en charge de missions de renseignement et l'UCLAT reprsentent 79,64 % de l'effectif total, alors que la part des personnels relevant des units comptence judiciaire est de 20,36 %.tat des effectifs au 31.12.2008 UCLAT DRCI DRPP DCPJ DRPJ PARIS DGGN BLAT Total 15 457 10 77 58 24 641 tat des effectifs au 31.12.2009 13 499 21 77 46 20 676 tat des effectifs au 31.12.2010 13 645 15 92 62 18 845

La possibilit pour les services de l'tat d'obtenir sur rquisition administrative les donnes techniques affrentes une communication lectronique, c'est--dire d'avoir accs au contenant de celle-ci (identification des numros appels ou appelants, dtail des contacts, golocalisation des terminaux utiliss) sans pouvoir en obtenir le contenu , tel que l'change des correspondances et les conversations, constitue un outil important de recueil de renseignements techniques en matire de prvention du terrorisme.

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Ces mesures sont moins intrusives dans la vie prive et moins attentatoires sur le plan des liberts publiques que l'interception des communications qui permet d'apprhender le contenu des changes et des conversations. Nanmoins, elles portent atteinte partiellement au droit l'intimit de la vie prive et au secret des correspondances. En ce sens, les instances europennes et nationales ont toujours admis le principe d'une atteinte par la puissance publique, fonde sur des motifs suprieurs de scurit nationale et des personnes, notamment dans le cadre de la prvention et de la lutte contre les infractions les plus graves portant atteinte la vie humaine et aux intrts fondamentaux de la Nation, comme les actes terroristes. Dans ce but, les mesures de renseignement technique fournies par l'article 6 de la loi du 23 janvier 2006 permettent d'carter ou de confirmer par des premires vrifications simples et rapides, les informations ouvertes et publiques, celles recueillies auprs de sources humaines varies (institutionnelles, internes ou trangres, particuliers), et les donnes techniques brutes. Les recherches effectues sur le fondement de l'article 6 sont mme de fournir des lments matriels ou des indices susceptibles de conforter des prsomptions d'implication ou de projets terroristes. Dans cette hypothse, elles sont indispensables l'ouverture d'une enqute judiciaire. Ces mesures constituent un complment essentiel pour tayer les hypothses d'enqute et les renseignements collects, en dehors de procdures judiciaires, afin de conforter les lments ou les indices probants sur des projets et des prparations d'attentats, en amont de leur perptration. Compte tenu de la particulire gravit et de la dangerosit exceptionnelle du terrorisme, la prvention de ces actions et la neutralisation des auteurs constituent un objectif essentiel avant le passage l'acte.

Au cours de ces trois annes, soit 157 semaines, si en moyenne 813 demandes ont t traites chaque semaine par la personnalit qualifie, en ralit on observe une progression annuelle des demandes formes par les services: 737 en 2008, 822 en 2009 et 879 en 2010, anne de la plus forte activit de la personnalit qualifie depuis sa cration.Priode 2008/2009 Demandes prsentes Demandes valides Demandes renvoyes Demandes rejetes 812,7 716,9 94,4 1,4 Demandes prsentes 2008/2010 2008/2009 2009/2010 + 7410 (+ 19,34 %) (+ 13,71 %) +2157 (+ 4,96 %) + 5253 2008 {52 semaines) 736,7 671,4 63,5 1,8 Demandes valides + 3655 (+ 10,47 %) (+ II,91 %) +4159 2009 {53 semaines) 821,9 737,2 84,1 0,6 Demandes renvoyes +3758 (+ 113,80 %) + 1157 (+ 35,04 %) (+ 58,33 %) + 2601 2010 (52 semaines) 879,2 741,7 135,8 1,7 -Demandes rejetes

(- 3,23 %)

-3

,

t- 67,74 %)+60 (+200 %)

-63

(- 1,29 %)

- 504

lments d'ordre statistiquePour les trois annes, de 2008 2010, les demandes des services traites par la personnalit qualifie se dcomposent de la faon suivante:Demandes prsentes 2008 2009 2010 Total 38306 43559 45716 127581 --~ Demandes valides 34911 39070 38566 112547 Demandes renvoyes 3302 4459 7060 14821 Demandes rejetes 93 30 90 213

Il rsulte de ces donnes statistiques que: le nombre des demandes prsentes a augment de 19,34 % entre 2008 et 2010 avec une hausse de 13,71 % entre 2008 et 2009 et de 4,96 % entre 2009 et 2010, caractrisant ainsi un tassement relatif de l'accroissement en 2010, mme si l'activit est son niveau le plus lev; en valeur absolue, les demandes valides ont suivi la mme hausse. Nanmoins, il est constat une baisse annuelle du taux de validation des demandes, tendance accentue en 2010. Ainsi en 2008, ce taux tait de 91,14 %, alors qu'en 2009 il est pass 89,69 %, pour tre de 84,36 % en 2010; le nombre des demandes renvoyes, afin d'obtenir des renseignements complmentaires sur les circonstances et les motifs des demandes prsentes, a augment de + 11,61 % sur l'ensemble de la priode avec une tendance la hausse, soit un taux de renvoi de 8,62 % en 2008, de 10,23 % en 2009 et de 15,44 % en 2010. Le nombre hebdomadaire des demandes renvoyes a ainsi augment chaque anne, avec une tendance accrue pour l'exercice 2009-2010 o le taux de renvoi a cru de 61,47 % alors qu'il n'tait que de 32,44 % entre 2008 et 2009; le nombre des demandes dfinitivement rejetes n'a pratiquement pas volu et est rest un niveau faible. Reprsentant 0,24 % de l'ensemble des demandes prsentes, il est pass 0,07 % en 2009 pour remonter 0,20 % en 2010.Il convient de prciser que le chiffre des demandes valides ne correspond pas au nombre rel de cibles concernes. Il est trs frquent que plusieurs dizaines de demandes portant sur des mesures diffrentes

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Rapport d'activit

ou adresses des oprateurs distincts concernent une mme personne souponne de menes terroristes. l.tude par direction requrante du nombre des demandes valides confirme la tendance la hausse en 2009 (+ 11,91 %), suivie en 2010 d'une baisse globale des rsultats par rapport l'anne prcdente (- 1,29 %) essentiellement en raison de la diminution des demandes formules par les services comptence exclusivement judiciaire:2008 DCRI DRPP DGGN DCPJ DRPJ-PARIS UCLAT Total 31003 2562 1042 223 73 8 34911 2009 34387 3093 1013 545 25 7 39070 2010 34479 2576 1192 305 12 2 38566 + 4159 (+ 11,91 %) Variation 2008/2009 + 3384 (+ 10,92 %) + 531 (+ 20,73 %) - 29 (-2,78 %) + 322 t+ 144,39 %) -48 (- 65,75 %) Variation 2009/2010 + 92 (+ 2,68 %) - 517 (- 16,72 %) + 179 (+ 16,67 %) - 240 (- 44,03 %) -13 (- 52 %) -504

inversement, les demandes de prestation Internet ont connu en 2010 une baisse significative. Ces volutions sont peut-tre rapprocher du succs croissant des offres commerciales Triple Play, et bientt Quadruple Play, grce auxquelles les particuliers ont dsormais accs sous le mme numro d'abonnement la tlphonie fixe, Internet, et de la tlphonie mobile, ainsi qu' la tlvision numrique.2008 Tlphonie Tlphonie Internet mobile fixe 31446 5289 1571 2009 30509 7824 5231 2010 31129 9609 4971 Variation 2009/2010 + 625 (+ 2,05 %) + 1785 (+ 22,81 %) - 260 (- 4,97 %)

Concernant la nature des prestations sollicites par les services, 72,18 % portent sur des demandes d'identification, alors que 27,57 % couvrent les mesures lies au trafic.Anne 2010 Tlphonie mobile fixe---

Identification

de l'abonn

Trafic de l'abonn 25,37 % 42,45% 7,25 %

t- 1,29

74,25 % 57,50 % 75 %__ L_

%)

Tlphonie Internet

Dans le mme temps, le nombre des demandes renvoyes pour renseignements complmentaires a connu une hausse constante tmoignant d'un contrle a priori de la lgalit par la personnalit qualifie plus exigeant, au fur et mesure de l'augmentation croissante des services et des personnels habilits ainsi que des demandes formules.2008 DCRI DRPP DGGN DCPJ DRPJ-PARIS UCLAT Total 3032 96 98 61 14 1 3302 2009 4180 106 115 47 9 2 4459 2010 6719 123 136 71 10 1 7060 + 1157 (+35,04 %) +2601 (+58,33 %) Variation 2008/2009 + 1148 (+ 37,86 %) + 10 (+ 10,42 %) + 17 (+17,35%) -14 (-22,95 %) Variation 2009/2010 + 2539 (+ 60,74 %) + 17 (+ 16,04 %) + 21 (+ 18,26 %) + 24 (+ 51,06 %)

La typologie des demandes formules par les services montre que la majeure partie d'entre elles, 72,18 % sont les mesures d'investigation les moins attentatoires la vie prive, l'identification correspondant de manire concrte la consultation facilite d'un annuaire tlphonique. Le traitement des demandes prsentes au cours de l'anne coule tmoigne du souci constant de privilgier un dialogue constructif avec les services demandeurs en sortant de la logique binaire acceptation/refus pour privilgier en cas de difficults, des renseignements complmentaires avant validation ou refus. Les motifs des demandes de renseignements complmentaires rsultent pour l'essentiel d'une motivation insuffisante sur les prsomptions d'implication personnelle dans des menes caractre terroriste, relatives la personne objet de l'investigation. Parfois, elles peuvent tenir au non-respect des principes de proportionnalit et/ou de subsidiarit, quelques fois la contradiction de motifs au sein de la demande, et dans quelques hypothses l'absence de prcisions sur le mouvement d'appartenance de la cible. Les motifs des refus dfinitifs des requtes sont principalement lis : - des faits dj commis et/ou faisant l'objet d'enqutes judiciaires, - des personnes dont les situations pnales ne permettent pas le recours des mesures administratives,

Les donnes statistiques sur la nature des technologies, objet des demandes, permettent de constater que: la tlphonie mobile reste la technologie gnrant le plus de demandes; les demandes concernant la tlphonie fixe progressent de manire constante, avec en 2010 une hausse de prs de 23 % par rapport 2009;

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- des faits insusceptibles en l'tat de constituer des infractions revtant une qualification en lien avec le terrorisme, en vertu des dfinitions des conventions internationales et europennes ainsi que du code pnal franais.

tendue et modalits du contrle exerc par la CNCISDe manire constante et gnrale, il a toujours t pos en application des principes dmocratiques d'un tat de droit, que les mesures d'investigation sur les communications lectroniques doivent tre explicitement prvues par la loi, qui doit prciser les motifs autorisant leurs recours et les conditions de leurs mises en uvre. Les instances europennes ont rgulirement rappel dans leurs travaux et leurs dcisions l'obligation de lgifrer sur ces matires, en raison des impratifs d'information et de prvisibilit pour les citoyens, qui sont susceptibles d'tre l'objet de ces mesures intrusives dans leur vie prive. Les lgislations nationales doivent prvoir un contrle des actions conduites dans cette matire par la puissance publique prrogative exerce par une autorit, dont la nature et la composition doivent garantir son indpendance, selon les instances excutives parlementaires et juridictionnelles europennes. Bien que moins intrusives que les interceptions de scurit dans le secret des correspondances, les prestations entrant dans le champ de l'article 6 de la loi du 23 janvier 2006 sont cependant attentatoires et ne sont autorises par le lgislateur que pour le seul motif de la prvention du terrorisme. S'agissant d'un dispositif de nature administrative, vocation prventive, utilis par les services de renseignements, le lgislateur a souhait l'encadrer de manire stricte en prvoyant des garanties pour le respect des droits des personnes, dont la protection est confie la personnalit qualifie nomme par la CNCIS, et celle-ci. La premire autorit assure un contrle de la lgalit a priori de l'ensemble des demandes de prestations des services. Ainsi, il n'est donn aucune suite une requte qui ne serait pas valide par elle. La seconde a pour mission le contrle de la lgalit a posteriori des demandes valides par la personnalit qualifie. Ce double contrle de la lgalit s'exerce pour chaque demande des services sur les points suivants: - des mesures sollicites exclusivement par des agents individuellement dsigns et dment habilits ;

- des requtes dment motives, et ce au regard de la seule prvention du terrorisme; - des demandes ayant une vocation exclusivement prventive, en amont de toute enqute judiciaire, - l'implication prsume, directe et personnelle, de la personne dans des menes terroristes, - la proportionnalit entre le but recherch et la prestation sollicite, apprcie en fonction de la gravit de la situation, - la subsidiarit du recours l'article 6, signifiant que le but recherch ne puisse tre obtenu par d'autres moyens. En application de ces principes, des demandes ont t dfinitivement rejetes en ce que les vrifications effectues montraient que les mesures sollicites relevaient d'investigations judiciaires, ou que les objectifs recherchs ne portaient pas sur des faits susceptibles de recevoir la qualification de terrorisme, mais plutt d'atteintes la scurit nationale ou d'actes relevant de la criminalit et de la dlinquance organises. Les demandes ont t renvoyes pour renseignements complmentaires, soit en raison de prsentation matrielle errone ou incomplte, soit le plus souvent en raison de l'insuffisance ou de l'imprcision des lments ou des indices ncessaires pour caractriser les prsomptions d'implication personnelle et directe de l'objectif ou la proportionnalit et la subsidiarit de la prestation sollicite. La loi a par ailleurs confr la CNCIS la responsabilit de contrler a posteriori l'activit de la personnalit qualifie, et le devoir corrlatif de saisir le ministre de l'Intrieur d'une recommandation quand elle constate un manquement aux rgles lgislatives ou jurisprudentielles ou une atteinte aux droits et liberts. La Commission a adress deux recommandations en 2010 : une recommandation a t adresse le 10 mai M. le ministre de l'Intrieur pour rappeler aux services demandeurs selon la jurisprudence de la commission la seule obdience ou appartenance une mouvance, ft-elle radicale ne suffit pas tayer les prsomptions d'une implication en lien avec des menes terroristes, une recommandation a t adresse le 31 aot la personnalit qualifie sur la valeur de la description du comportement d'un objectif et les limites de cet indice en matire de prsomption d'implication. La CNCIS exerce un contrle a posteriori sur la motivation des demandes valides par la personnalit qualifie, qui peut tre dfini comme gradu en ce qu'il s'agit: - d'un contrle modul de l'exigence d'implication et de prcision de la menace en fonction du caractre plus ou moins intrusif de la prestation sollicite au regard des liberts individuelles;

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- d'emploi d'outils gradus en fonction des anomalies constates. Ainsi la Commission recourt la recommandation et l'avertissement pour les demandes qui ne respectent pas les principes essentiels de la loi et de la jurisprudence. Pour les demandes dont l'analyse est plus complexe, la Commission met en uvre un droit de suite permettant d'apprcier la pertinence de la mesure sollicite. En 2010, pour une vingtaine de dossiers, la Commission a sollicit, via la personnalit qualifie, ce droit de suite afin que le service demandeur prcise les rsultats oprationnels, prventifs ou judiciaires de l'exploitation des donnes techniques de communications. On peut rapprocher la mise en place de ce droit de suite au sein du dispositif de l'article 6 de la mise en uvre du contrle des productions pour ce qui concerne les interceptions de scurit.

Deuxime partie

- titre prventif et par souci de prvisibilit, la Commission adresse des recommandations gnrales la personnalit qualifie et aux services soit par le biais de notes - cadre sur certains sujets en lien avec l'actualit des demandes ou l'occasion des runions mensuelles avec la personnalit qualifie et ses adjoints. Ainsi la dlimitation des frontires entre la prvention du terrorisme d'une part, et la prvention des atteintes la scurit nationale et la criminalit organise d'autre part, a fait l'objet d'claircissements plusieurs reprises au cours de l'anne 2010. La qualification de certains actes ou de certains mouvements a fait l'objet de travaux conjoints avec les services et la personnalit qualifie aux fins de veiller rigoureusement au respect du champ d'application de la loi du 23 janvier 2006 et la dfinition lgale pnale interne et internationale des infractions en lien avec des menes terroristes.

JURISPRUDENCE DE LA COMMISSION

Jurisprudence

de la Commission

La qualit de la motivation des demandes d'interceptionChaque semaine, la Commission est amene donner son avis sur plus d'une centaine de demandes de construction et de renouvellement d'interceptions de scurit. En outre et comme cela a dj t indiqu dans les lments chiffrs relatant son activit, elle statue quotidiennement sur des demandes prsentes sous la forme de l'urgence absolue. La Commission exerce le contrle de lgalit sur ces demandes en mettant en uvre deux principes, celui de la proportionnalit qui permet de mesurer l'implication de la cible et celui de la subsidiarit qui permet de s'assurer de l'absolue ncessit de recourir matriellement l'interception. Pour ce qui concerne l'examen de proportionnalit, la Commission ralise le travail initial de tout juriste pnaliste, c'est--dire la qualification des faits de leur articulation juridique avec le motif lgal invoqu. C'est bien la qualit de la motivation des demandes qui va mcaniquement induire la possibilit puis la qualit de ce contrle. Cette motivation doit donc tre suffisante et pertinente.

Une motivation suffisanteLa motivation doit tre suffisante en quantit, mais aussi en qualit: En quantit Quelques lignes ne sauraient en effet suffire. Elles ne permettent pas de cerner la personnalit de la cible, de dvelopper un minimum les soupons qui psent sur elle, et d'expliquer la nature et la gravit du danger qu'elle fait courir la scurit de l'tat et aux citoyens. Elles privent galement la Commission du contrle sur l'articulation juridique entre des lments factuels relevant du comportement de la cible et le motif lgal d'interception invoqu par le service. Dans neuf cas sur dix, les {(renseignements complmentaires fournis la demande de la Commission emporteront la conviction de cette dernire qui dplore ds lors cette insuffisance initiale d'information. En qualit La motivation doit absolument: - faire ressortir l'implication personnelle de la cible; - ne pas se rfrer un comportement purement celle-ci;

hypothtique

de

Ainsi une demande trop loigne d'une implication directe et personnelle de la cible dans des faits participant du motif invoqu encourt la censure de la Commission. Lexemple volontairement imprcis tir d'une

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demande o la dmonstration de cette implication ne reposait que sur un relationnel avec d'autres individus peut tre cit ici.

Une motivation pertinenteLexamen de cette pertinence porte sur 3 points: - la motivation doit tre exclusivement tourne vers la vocation prventive voulue par le lgislateur de 1991 pour les interceptions de scurit. Outil de renseignement, ces mmes interceptions ne peuvent tre utilises pour l'lucidation de faits passs sans prjudice de leur possible qualification pnale; - corrlativement, la motivation doit exclusivement se rfrer des investigations participant de l'activit de renseignement et en aucun cas pouvoir gnrer un risque d'interfrence avec une action judiciaire dj dclenche; - enfin, les soupons qui psent sur la cible doivent ncessairement tre en relation directe avec le motif. Ainsi un comportement dont la description reste floue, vague, imprcise et non rattachable au travail d'articulation juridique dj dcrit prive la demande de toute pertinence.

Pour mmoire, on rappellera que l'article 8, 2 de la Convention europenne des droits de l'homme dispose: Il ne peut y avoir ingrence d'une autorit publique dans l'exercice de ce droit (droit au respect de la vie prive et familiale) que pour autant que cette ingrence est prvue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une socit dmocratique, est ncessaire la scurit nationale, la sret publique, au bien-tre conomique du pays, la dfense de l'ordre et la prvention des infractions pnales, la protection de la sant ou de la morale, ou la protection des droits et liberts d'autrui. Les anciens articles, aujourd'hui abrogs, du Code pnal auxquels se rfrait le Snat taient les articles 70 103 dont les incriminations se retrouvent globalement dans l'actuel livre IV du nouveau Code pnal, constituent dsormais les atteintes aux intrts fondamentaux de la Nation , Les intrts fondamentaux de la Nation sont donc depuis 1994 un concept destin remplacer celui de sret de l'tat qui avait lui-mme succd dans l'ordonnance du 4 juin 1960 celui de scurit intrieure et extrieure. Revenons ici la lettre de l'article 410-1 du Code pnal: Les intrts fondamentaux de la Nation s'entendent au sens du prsent titre de son indpendance, de l'intgrit de son territoire, de sa scurit, de la forme rpublicaine de ses institutions, de ses moyens de dfense et de sa diplomatie, de la sauvegarde de sa population en France et l'tranger, de l'quilibre de son milieu naturel et de son environnement et des lments essentiels de son potentiel scientifique et conomique et de son patrimoine culturel. On notera que la sauvegarde des lments essentiels du potentiel scientifique et conomique constitue un motif d'interception autonome dans la loi de 1991. Rapidement (rapport 1994, p. 17 sqq.), la CNCIS a estim que la notion de scurit nationale devait bien tre comprise au vu des dispositions du Nouveau Code pnal qui fait figurer cette notion parmi les intrts fondamentaux de la Nation (article 410-1 du Code pnal) au mme titre que l'intgrit du territoire, la forme rpublicaine des institutions ou les moyens de la dfense. S'il s'agit l d'un largissement notable de la notion antrieure de sret de l'tat, on ne saurait y voir pour autant une extension par assimilation aux atteintes les plus courantes la scurit des personnes ou des biens. La Commission a ainsi estim utile de rappeler qu'il ne suffit pas d'invoquer la crainte gnrale d'un trouble l'ordre public, comme y expose plus ou moins toute manifestation, pour rpondre aux exigences de motivation rsultant de la loi. Pour ce faire, il doit tre justifi, avec la

***On dtaillera maintenant, aprs ces rflexions d'ordre gnral, l'analyse de la jurisprudence de la Commission, motif par motif

Scurit nationaleConformment l'article 3 de la loi du 10 juillet 1991, peuvent tre autorises [... [ les interceptions [ ...j ayant pour objet de rechercher des renseignements intressant la scurit nationale [ ... j. Scurit nationale, scurit intrieure et extrieure, sret de l'tat, intrts fondamentaux de la Nation sont des concepts voisins souvent employs indistinctement, tout au moins pour les trois premiers. En revanche, le concept de scurit nationale est apparu comme une nouveaut en 1991 et son usage est spcifique la loi du 10 juillet 1991.

On relve ainsi dans les travaux parlementaires (rapport de la Commission des lois du Snat) que la notion de scurit nationale est prfre celle d'atteinte la sret intrieure et extrieure de l'tat [... j. La scurit nationale, notion qui n'existe pas en tant que telle dans le droit franais est directement emprunte l'article 8 de la Convention europenne des droits de l'homme. Elle recouvre la Dfense nationale ainsi que les autres atteintes la sret et l'autorit de l'tat qui figurent au dbut du titre premier du livre troisime du Code pnal .

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prcision ncessaire, d'une menace particulirement nationale au sens ci-dessus rappel. la crainte d'un trouble

grave la scurit

On relve dans le mme rapport que: l'ordre public n'autorise le recours une interception qu'en cas de menace particulirement grave la scurit; - les interceptions de scurit ne sauraient tre utilises comme moyen de pntrer un milieu syndical ou politique ou de pratiquer la surveillance d'opposants trangers, si la scurit de l'tat franais luimme n'est pas en cause. La Commission est reste fidle cette doctrine. S'agissant des troubles l'ordre public, des demandes motives par cette crainte peuvent parfois tre prsentes sans que soit cependant allgu le risque d'attenter la forme rpublicaine des institutions ou de dboucher sur un mouvement insurrectionnel. Si des manifestations sont susceptibles de dgnrer, le droit de manifester tant constitutionnellement reconnu, il s'agit l, en principe, d'un problme d'ordre public et non d'une atteinte la scurit nationale. On peut cependant admettre que dans certaines hypothses, l'ampleur des troubles ou la charge institutionnelle voulue par leurs auteurs affectant le lieu et le temps des manifestations, la qualit des autorits ou des symboles rpublicains viss, sont tels que la scurit nationale peut tre menace. S'agissant de la recherche de renseignements, la personne dont on se propose d'intercepter les correspondances doit tre suspecte d'attenter par ses agissements personnels aux intrts fondamentaux de la Nation. Si les services de renseignements ont, par nature, une mission de collecte de renseignements qu'ils remplissent en utilisant la palette des moyens disponibles, le recours aux interceptions de scurit connat certaines limites. En effet, l'atteinte exceptionnelle la vie prive qu'autorise la loi ne peut tre justifie mme dans ce domaine que par la menace directe ou indirecte, actuelle ou future que la personne coute est susceptible de reprsenter pour la scurit nationale. En l'absence de menace, et quel que soit l'intrt que reprsente la cible comme source de renseignement pour le domaine considr, l'atteinte la vie prive serait contraire au principe de proportionnalit. Cette observation vaut naturellement pour les autres motifs lgaux d'interception comme la prvention du terrorisme et la lutte contre la criminalit organise mme si, pour ces derniers, l'implication de la cible dans le processus conspiratif ou criminel est en principe avre. Enfin, la Commission entend oprer une apprciation in concreto de la notion d'intrts fondamentaux de la Nation , la notion de scurit tant apprhende en un instant donn et dans un contexte gopolitique donn par rapport aux besoins vitaux du pays. La Commission considre au bnfice de ce raisonnement que la scurit nergtique fait dsormais intgralement partie de la scurit nationale.

Sauvegarde des lments essentiels du potentiel scientifique et conomique de la NationLa sauvegarde des lments essentiels du potentiel scientifique et conomique de la France, plus communment et rapidement nomme protection conomique, est, l'exception de la reconstitution de ligues dissoutes, le motif d'interception le plus faible en volume, bien qu'il connaisse un certain renouveau suite au dveloppement de la rflexion politique et la mise en place de structures concernant l'intelligence conomique. C'est cependant celui qui, lors de la discussion parlementaire de la loi du 10 juillet 1991, a suscit le plus de rserves. La rdaction initiale n'tait d'ailleurs pas celle adopte. Le projet de loi visait la protection des intrts conomiques et scientifiques fondamentaux de la France. Certains parlementaires, dnonant le caractre selon eux fourretout de ces motifs 1, ont obtenu que la rdaction s'inspire de celle envisage au livre IV du Code pnal pour dcrire les intrts fondamentaux de la Nation alors en gestation. I'article 410-1 qui ouvre le livre IV du Code pnal vise effectivement la {(sauvegarde des lments essentiels du potentiel scientifique et conomique [de la Nation] . D'autres parlementaires ont fait valoir que {(la possibilit d'interceptions de scurit pour la protection des intrts conomiques et scientifiques fondamentaux d'un tat est reconnue par la Convention europenne des droits de l'homme, dont le texte est d'ailleurs moins restrictif que le projet de loi, puisqu'il se rfre la notion de "bien-tre conomique" 2; [ ... ] il est ncessaire que l'tat dispose de moyens d'information et d'action adapts aux menaces rsultant de l'internationalisation des activits conorniques .

{(Larticle 410-1 susvis permet d'tendre la protection du Code pnal non seulement aux diffrents secteurs de l'conomie au sens troit du terme mais galement la recherche scientifique et aux innovations techniques ou technologiques sur lesquelles reposent prcisment la force ou la comptitivit du pavs+. l'article 410-1 du Code pnal est suivi des articles 411-1 411-11 qui incriminent les diffrentes atteintes ces intrts au titre desquelles

1) Assemble nationale, 2" sance, 13 juin 1991, JO, p. 3153; Snat du 25 juin 1991 JO, p.2065. 2) Cf. supra. 3) Franois Massot, rapport de la Commission des lois de l'Assemble nationale, 6 juin 1991, document n 2088, p. 29. 4) A. Vitu, articles 410-1 sqq, Jurisclasseur pnal.

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Jurisprudence

de la Commission

on relve plus particulirement les infractions des articles 411-5 411-8 relatives aux diffrentes formes d'intelligence avec une puissance trangre (article 411-5) et la livraison d'informations celle-ci (article 411-6 411-8). Toute forme d'espionnage, y compris conomique comme le transfert illicite de technologie, est clairement incrimine par ces articles: est en effet vise, notamment, la fourniture de procds. Cette fourniture peut tre le fait d'auteurs divers (ingnieurs, agents de renseignement de pays tiers, honorables correspondants, officines spcialises dans l'espionnage conomique) et tre destine non seulement des services de renseignements de pays tiers [ puissances tranqres ) mais galement des entreprises ou organisations trangres. Un exemple, bien videmment dconnect de tout dossier rel, permettra de mieux illustrer la lgitimit d'une demande d'interception de scurit formule dans un contexte d'espionnage conomique: Une personne est suspecte de recueillir en vue de leur transfert illicite des secrets de fabrication d'un groupe franais leader mondial dans sa spcialit. Le transfert illicite d'un secret de fabrication une entit trangre permet d'tablir la runion de plusieurs lments constitutifs des dlits de l'article 411-7 du Code pnal (on peut d'ailleurs noter que la communication de secret de fabrique tait dj incrimine par l'ancien article 418). Ce transfert illicite d'un procd de fabrication, dtenu exclusivement par un groupe national leader dans sa spcialit, est bien de nature porter gravement atteinte aux lments essentiels du potentiel scientifique et conomique de la France. Il constitue sans aucun doute une atteinte aux intrts fondamentaux de la Nation. Les lments constitutifs d'une suspicion de commission du dlit vis l'article 411-7 du Code pnal, dont on remarquera qu'il constitue un mode original de rpression de la tentative (le recueil des informations sans livraison de celles-ci est en soi punissable comme l'est le faux en criture, acte prparatoire d'une ventuelle escroquerie), sont runis et l'interception de scurit parfaitement fonde en droit. Il rsulte de ce qui prcde qu'en dpit de la dfinition extensive donne au concept d'intelligence conomique, les interceptions sollicites sous le motif sauvegarde des lments essentiels du potentiel scientifique et conomique de la France dont la formulation est directement reprise du Code pnal renvoient donc des infractions prcises. La Jurisprudence de la Commission pour ce qui concerne ce motif s'efforce une synthse: - du dispositif normatif pnal ainsi dcrit;

- du postulat originel de 1991 reposant sur l'aspect prventif et non proactif l'instar d'une partie de la doctrine ne de l'intelligence conomique; - de la ncessaire protection du noyau dur de notre patrimoine scientifique et conomique; - de la toute aussi ncessaire prservation de la vie des affaires, elle aussi protge juridiquement dans une zone europenne o le librechange reprsente une valeur constitutive. Ainsi, la Commission a dgag, partir de longs travaux ayant donn lieu deux runions plnires les 12 fvrier 2008 et 5 fvrier 2009 les critres applicables ce motif. Ces critres: les interceptions de scurit sollicites sous le motif sauvegarde des lments essentiels du potentiel scientifique et conomique de la France doivent d'une part rpondre une menace (infractions prvues par les articles 411-1 411-11 du Code pnal) vrifiable traduisant une intention de nuire aux intrts d'une entreprise 1 franaise, d'autre part, la personne dont il est demand d'intercepter les communications doit tre clairement implique dans cette menace. Lactivit de l'entreprise menace doit enfin tre lie la dfense de notre indpendance nationale 2 au sens de l'article 5 de la Constitution de la Ve Rpublique ou la Scurit nationale. Il convient par ailleurs de constater que les pouvoirs publics proposent une approche normative des intrts conomiques et scientifiques constituant une forme de noyau dur protger prioritairement ainsi que du concept d'intelligence conomique. Le Dcret n 2009-1122 du 17 septembre relatif au Dlgu interministriel l'intelligence conomique en constitue une illustration. Le dcret 2005-1739 du 30 dcembre 2005 rglementant les relations financires avec l'tranger [ ... ] est venu ainsi dfinir en ses articles 2 et 3 des secteurs d'activit dont l'intrt justifie la surveillance de leur financement au moyen d'investissements trangers. Une telle dfinition peut, par analogie, reprsenter un travail d'approche qualitative des secteurs constituant les lments essentiels du potentiel scientifique et conomique de la France.

1) Le terme entr