Qui seront les gagnants ?

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Qui seront les gagnants ? Le marché de la gestion pour compte de tiers s'emballe avec l'ANI et la généralisation de la complémentaire santé à tous les salariés. Un segment sur lequel la concurrence fait rage entre pure players et courtiers. GESTION POUR COMPTE Par Emmanuel Mayega Article paru dans La Tribune de l'assurance n° 195 à la rubrique Enquête (page 6) OCTOBRE 2014 Pierre François, directeur général de Swiss Life prévoyance santé Résolu à jouer un grand rôle sur le marché de l'ANI, Swiss Life reconfigure son offre produit, adapte ses chaînes de gestion interne aux réalités de ses contrats collectifs et forme ses équipes. On l'aura compris, sa stratégie est celle d'une gestion interne de ses contrats apportés par son réseau de courtage et d'agents généraux. Seules les affaires signées avec le grand courtage sont gérées par cette famille d'apporteurs. Néanmoins, l'assureur suit de près cette délégation de gestion et conduit des audits auprès de ces courtiers afin de garantir la conformité des actes de gestion aux bonnes pratiques du métier. Pour autant, « le groupe a une préférence pour une gestion directe et interne de ses portefeuilles, car la multiplication des intermédiaires ne peut que peser sur les coûts de gestion et donc sur les tarifs », indique Pierre François, directeur général de Swiss Life prévoyance et santé. Nicolas Famy, responsable du projet ANI Groupe Prévoir Le groupe a démarré un pilote pour commercialiser une nouvelle offre de santé collective, en complément de ses produits Madelin (prévoyance, santé, retraite) pour les TNS. En la matière, il a choisi de s'appuyer sur les produits de santé collective de son partenaire April entreprises. « Cette offre sera, dans un premier temps, gérée directement par ce partenaire, ce qui nous permettra de proposer les garanties les plus adaptées REGARDS CROISÉS : COMPTEZ-VOUS EXTERNALISER LA GESTION DE VOS CONTRATS ? Après l'invective sur l'ANI, l'offensive. D'emblée, Laurent Grouas, directeur de l'innovation et des partenariats chez Siaci Saint-Honoré, observe que « bon nombre d'assureurs sont attirés par le marché de l'assurance collective élargi par l'ANI ». Et constate : « S'agissant d'un régime de protection sociale assorti d'une couche de solidarité à intégrer par l'entreprise, le défi auquel doivent faire face les gestionnaires pour compte de tiers est de plusieurs ordres : la nécessité de gérer le socle de base tel qu'imposé par la branche, éventuellement couplé avec des produits surcomplémentaires, et d'articuler les dispositifs de prévention et de solidarité, représentant a minima 2 % de la cotisation selon le décret relatif au degré élevé de solidarité des garanties collectives (art. R. 912-1 du code de la Sécurité sociale) ». Une telle complexité peut-elle être gérée en interne ? AVANTAGE AUX OPÉRATEURS HISTORIQUES ? Car si les principaux acteurs du marché de l'assurance collective sont bien préparés pour y faire face, les nouveaux entrants doivent opérer des choix. La grande alternative consiste à sous-traiter tout ou partie de la chaîne de valeur de ces contrats à un spécialiste de l'externalisation de processus métier (BPO pour Business Process Outsourcing). Olivier Arroua, associé chez Selenis, confirme cette analyse : « Les IP ont par essence le savoir- faire pour gérer les contrats collectifs ; il en va autrement pour les assureurs de la santé individuelle, parmi lesquels bon nombre de mutuelles. Elles devront, au moins dans un premier temps, recourir aux services de courtiers délégataires ou à ceux des pure players, faute de pouvoir mettre rapidement sur pied une plate-forme et des processus alignés sur les exigences de l'ACPR (traçabilité des opérations, reporting, etc.). Sur le terrain, ils n'auront que l'embarras du choix dans un premier temps, l'offre étant supérieure à la demande, du fait des appétits générés. » Une demande qui se confirme progressivement. Selon Rodolphe Peim, directeur général du groupe Owliance Mutua, « après l'attentisme observé en 2012 et plus largement encore en 2013, nous constatons depuis plus de huit mois une dynamique du marché sans précédent. Nous recevons en moyenne deux appels à consultations hebdomadaires en provenance du marché ». Même constat chez Ciprés vie : « L'heure est déjà aux réponses aux appels d'offres. Banques, mutuelles et mêmes certains assureurs veulent sélectionner l'acteur le mieux-disant, au moins pour poser les bases de leur marche à l'ANI », explique Laurent Ouazana, directeur général associé. Page 1 sur 4 La tribune de l'assurance - Qui seront les gagnants ?

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Laurent Grouas, Directeur Partenariat et Innovation de Siaci Saint Honoré.

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Qui seront les gagnants ?Le marché de la gestion pour compte de tiers s'emballe avec l'ANI et la généralisation de la complémentaire santé à tous les salariés. Un segment sur lequel la concurrence fait rage entre pure players et courtiers.

GESTION POUR COMPTE

Par Emmanuel Mayega

Article paru dans La Tribune de l'assurance n° 195 à la rubrique Enquête (page 6)

OCTOBRE 2014

Pierre François, directeur général de Swiss Life prévoyance santéRésolu à jouer un grand rôle sur le marché de l'ANI, Swiss Life reconfigure son offre produit, adapte ses chaînes de gestion interne aux réalités de ses contrats collectifs et forme ses équipes. On l'aura compris, sa stratégie est celle d'une gestion interne de ses contrats apportés par son réseau de courtage et

d'agents généraux. Seules les affaires signées avec le grand courtage sont gérées par cette famille d'apporteurs. Néanmoins, l'assureur suit de près cette délégation de gestion et conduit des audits auprès de ces courtiers afin de garantir la conformité des actes de gestion aux bonnes pratiques du métier. Pour autant, « le groupe a une préférence pour une gestion directe et interne de ses portefeuilles, car la multiplication des intermédiaires ne peut que peser sur les coûts de gestion et donc sur les tarifs », indique Pierre François, directeur général de Swiss Life prévoyance et santé.

Nicolas Famy, responsable du projet ANI Groupe Prévoir

Le groupe a démarré un pilote pour commercialiser une nouvelle offre de santé collective, en complément de ses produits Madelin (prévoyance, santé, retraite) pour les TNS. En la matière, il a choisi de s'appuyer sur les produits de santé collective de son partenaire April entreprises. « Cette offre sera, dans un premier temps, gérée directement par ce partenaire, ce qui nous permettra de proposer les garanties les plus adaptées

REGARDS CROISÉS : COMPTEZ-VOUS EXTERNALISER LA GESTION DE VOS CONTRATS ?

Après l'invective sur l'ANI, l'offensive. D'emblée, Laurent Grouas, directeur de l'innovation et des partenariats chez Siaci Saint-Honoré, observe que « bon nombre d'assureurs sont attirés par le marché de l'assurance collective élargi par l'ANI ». Et constate : « S'agissant d'un régime de protection sociale assorti d'une couche de solidarité à intégrer par l'entreprise, le défi auquel doivent faire face les gestionnaires pour compte de tiers est de plusieurs ordres : la nécessité de gérer le socle de base tel qu'imposé par la branche, éventuellement couplé avec des produits surcomplémentaires, et d'articuler les dispositifs de prévention et de solidarité, représentant a minima 2 % de la cotisation selon le décret relatif au degré élevé de solidarité des garanties collectives (art. R. 912-1 du code de la Sécurité sociale) ». Une telle complexité peut-elle être gérée en interne ?

AVANTAGE AUX OPÉRATEURS HISTORIQUES ?Car si les principaux acteurs du marché de l'assurance collective sont bien préparés pour y faire face, les nouveaux entrants doivent opérer des choix. La grande alternative consiste à sous-traiter tout ou partie de la chaîne de valeur de ces contrats à un spécialiste de l'externalisation de processus métier (BPO pour Business Process Outsourcing). Olivier Arroua, associé chez Selenis, confirme cette analyse : « Les IP ont par essence le savoir-faire pour gérer les contrats collectifs ; il en va autrement pour les assureurs de la santé individuelle, parmi lesquels bon nombre de mutuelles. Elles devront, au moins dans un premier temps, recourir aux services de courtiers délégataires ou à ceux des pure players, faute de pouvoir mettre rapidement sur pied une plate-forme et des processus alignés sur les exigences de l'ACPR (traçabilité des opérations, reporting, etc.). Sur le terrain, ils n'auront que l'embarras du choix dans un premier temps, l'offre étant supérieure à la demande, du fait des appétits générés. »

Une demande qui se confirme progressivement. Selon Rodolphe Peim, directeur général du groupe Owliance Mutua, « après l'attentisme observé en 2012 et plus largement encore en 2013, nous constatons depuis plus de huit mois une dynamique du marché sans précédent. Nous recevons en moyenne deux appels à consultations hebdomadaires en provenance du marché ». Même constat chez Ciprés vie : « L'heure est déjà aux réponses aux appels d'offres. Banques, mutuelles et mêmes certains assureurs veulent sélectionner l'acteur le mieux-disant, au moins pour poser les bases de leur marche à l'ANI », explique Laurent Ouazana, directeur général associé.

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aux besoins de nos clients tout en développant notre expertise sur le marché. C'est la première étape de notre stratégie de développement. En fonction de son succès, nous étudierons la pertinence d'une internalisation de cette gestion », explique Nicolas Famy, responsable du projet ANI au sein de Groupe Prévoir. Un pilote externalisé a été lancé pour cette phase initiale. Le groupe n'exclut pas une internalisation de la gestion de ses processus à terme.

En fonction des contextes de délégation, les périmètres de la gestion pour compte diffèrent. Cette externalisation concerne aussi bien le marché de l'assurance santé individuelle que collective.

Pour les métiers "santé", ces périmètres recouvrent : les affiliations, les prestations (tiers payant et maîtrise du risque, plate-forme santé, prévention...) et les cotisations, dont les contentieux.

Pour les activités connexes au métier de la santé, il s'agit du décisionnel, de l'éditique, des centres de contacts (points d'accueil, courriels, appels téléphoniques) et des téléservices.

LA GESTION POUR COMPTE EN BREF

Quels sont les fondements d'un recours à un gestionnaire santé dans le cadre de l'ANI ?

Beaucoup vont externaliser toute ou partie de leur chaîne de valeur liée à l'ANI pour recourir à une logique industrielle et baisser les coûts tout en garantissant le time-to-market. Et avoir une visibilité sur le retour sur investissement. Sans attendre l'ANI, les bancassureurs ont d'ailleurs appliqué une telle stratégie en santé individuelle. Ainsi, la Société générale, BNP Paribas Cardif et les Banques populaires ont externalisé leur gestion.

Pensez-vous que la demande en gestion déléguée de contrats collectifs dans le cadre de l'ANI sera conséquente ?

La gestion de ces produits est complexe et nécessite un savoir-faire aguerri que n'ont pas tous les acteurs. Au moins, dans un premier temps, l'externalisation des processus métier (BPO) se justifiera. Sachant que beaucoup d'acteurs vont exploiter cette opportunité, la demande sera soutenue. Une demande qui ira, dans certains cas, au-delà de la simple gestion du back office pour embrasser la conception de produits et le partage du risque.

3 QUESTIONS À JEAN-LUC GÉRARD, ASSOCIÉ, TNP CONSULTANTS

LES SPÉCIALISTES EN ORDRE DE MARCHECe "gâteau" est convoité par deux familles. D'un côté, les spécialistes ou pure players ; de l'autre, les grands courtiers. Parmi les premiers figure Owliance Mutua. Selon son directeur général, « en tant que pure player, la qualité et l'industrialisation sont par nature inscrites dans notre ADN. A la différence de nos concurrents, nous sommes à même de nous engager contractuellement sur la qualité de nos prestations. Un engagement matérialisé par un système de pénalités que nous nous imposons et que nous n'avons pas peur de porter à 10 % du chiffre d'affaires réalisé ». Selon cette entreprise, l'agilité d'un prestataire de service, toujours au fait de l'actualité et de la technologie, offre aux porteurs de risque un time-to-market accéléré et un accompagnement dans la mise en œuvre des solutions réclamées par le marché. Au-delà de l'avantage économique d'une telle solution, « c'est avant tout notre capacité à gérer d'un bout à l'autre la chaîne de valeur de la gestion déléguée qui suscite l'intérêt actuel du marché », constate Rodolphe Peim.

Autre pure player, Pack solutions, qui vient de fusionner avec Avilog solutions. Grâce à cette opération finalisée au cours de l'été, le groupe dispose désormais d'une offre en particulier dans la gestion des contrats sur mesure en assurance collective. « Soucieux de la qualité de nos prestations, nous excluons tout recours à la sous-traitance auprès d'autres acteurs ; notre équipe santé collective gère tout en interne, en marque blanche voire en nom propre, ou en délégation », soutient Philippe Magdelaine, directeur général.

Chez Cegedim assurances, également un pure player, on capitalise sur l'expertise acquise en termes d'externalisation de processus IT et métier. « Certes, nous sommes considérés comme challenger au sein de la famille des spécialistes du BPO de l'assurance. En revanche, nous nourrissons de grandes ambitions sur ce terrain stratégique où va s'opérer une redistribution des cartes entre les opérateurs. Notre bonne connaissance de l'assurance complémentaire, acquise auprès de nos références, nous confère une légitimité évidente », estime Philippe Simon, son président. Il est vrai que sur ce terrain, le groupe propose déjà sa plate-forme iGestion, destinée au traitement de l'assurance individuelle et collective depuis plusieurs années. A son actif, 350 000 bénéficiaires en portefeuille et une maîtrise des processus de gestion santé et prévoyance, son cœur de métier. Selon Philippe Simon, « la gestion des prestations sera la première brique à externaliser s'agissant d'une tâche de moindre valeur stratégique ; en revanche, la gestion de contrats et les cotisations devraient être plus fréquemment conservées en interne. Pour autant, à l'instar de ses concurrents, Cegedim assurances se positionne sur toute la chaîne de valeur de cette activité ».

DÉLICATE PORTABILITÉDu côté des délégataires ayant des affinités avec le grand courtage, l'offre se veut également riche. Si historiquement Verspieren a, pendant 25 ans, directement proposé la gestion déléguée, le courtier a créé Gestineo il y a trois ans, filiale spécialiste du BPO en matière de santé et prévoyance, individuelle comme collective. Des domaines dont il couvre toutes les fonctions, du front au back office. Ses 450 000 bénéficiaires en assurancede personnes constituent une base de référence pour lui au moment où la commercialisation des contrats ANI est d'actualité. « La complexité liée à la gestion de contrats en santé collective va motiver beaucoup d'assureurs à externaliser : respect des exigences de Solvabilité II, de la convention Belorgey sur le secret médical, ou encore portabilité des contrats. Notre structure, qui maîtrise les deux premiers points, est également capable de gérer la charge administrative de la portabilité qui permet aux salariés quittant une entreprise de bénéficier "gratuitement" du maintien des garanties des couvertures complémentaires santé et prévoyance. Tous nos concurrents sont-ils capables de gérer ce point ? Je ne le crois pas. Pourtant, il aura un impact sur les comptes techniques du client si des prestations devaient être réglées à tort », avertit Pierre Crozet, directeur de marché.

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Quel regard portez-vous sur l'avenir de ces fournisseurs ?

Vous aurez noté deux camps : les spécialistes et le courtage. L'appel aux uns se justifie souvent pour des raisons économiques alors que les seconds vont plus loin, et intègrent la dimension commerciale et la gestion du risque. Point commun, tous devront faire face à la pression réglementaire qui va pousser à une professionnalisation accrue de ce marché. Ceux qui ne pourront intégrer les exigences normatives devront composer avec les plus forts ou disparaître. Les acteurs de taille modeste peineront à intégrer les exigences de Solvabilité II, les déclarations sociales nominatives (DSN), les normes PRDG, sans oublier les multiples audits imposés par les partenaires assureurs.

Propos recueillis par E.M.

Le courtier, dont le portefeuille est composé à 98 % de contrats collectifs, entend proposer son expertise dans le cadre de l'ANI. Parmi ses axes d'intervention, une approche modulaire de gestion des contrats de santé, de bout en bout, en marque blanche. Dans cette logique, le groupe prendra à sa charge l'ensemble du traitement des processus de ses partenaires. En proposant des services digitaux différenciants : accès à différentes fonctions en ligne via un extranet sécurisé, applications mobiles... D'autre part, ses clients pourront bénéficier d'un pilotage de risques aguerri. « Sur ce point, l'impact des contrats responsables et des décrets sur la solidarité et la prévention implique de nouveaux éléments de pilotage à prendre à compte. Nous devons aider nos clients dans cette logique de management du risque. Et les accompagner sur l'ensemble du champ de la prévention, en santé comme en prévoyance », observe Laurent Grouas, directeur de la stratégie, de l'innovation et des partenariats. Et de nuancer : « Pour autant, si beaucoup d'entreprises optent pour le panier de soins de base, il sera difficile d'asseoir une prévention efficace. Pourtant, je suis convaincu que la prévention permet une action réelle sur le risque, tout en améliorant la performance sociale de nombreuses entreprises, à la différence de l'approche actuelle, centrée parfois exclusivement sur l'efficience économique. »

ZOOM SUR SIACI SAINT-HONORÉ MISE SUR LA MARQUE BLANCHE

Parmi ses principaux concurrents, Ciprés vie. « Pour notre entreprise, l'ANI constitue un accélérateur de business, malgré une forte concurrence. Intervenant sur ce segment de marché depuis 15 ans, nous disposons des armes pour nous différencier », considère Laurent Ouazana. Pour gérer cette activité d'assurance complémentaire santé collective, outre les produits conçus et gérés sous marque Ciprés vie, le savoir-faire né des pratiques du groupe s'est mis progressivement à la disposition des autres acteurs du marché, dans le cadre d'une structure dédiée : Ciprés partenariat. « En back office comme en front office, nos partenaires auront l'opportunité de s'appuyer sur notre savoir-faire pour démarrer rapidement sur l'ANI et gérer toute ou partie de cette activité ; nous pouvons notamment les aider à concevoir une offre, à maîtriser l'avant-vente de ces contrats généralement responsables dont la négociation nécessite un volet en conseil coûteux. En externalisant ce genre de processus auprès de notre structure, le partenaire distributeur (mutuelle, réseau salarié, etc.) bénéficie d'un accompagnement sur mesure et en marque blanche », revendique Laurent Ouazana.

Profitant de l'opportunité de l'ANI, Solly Azar fourbit également ses armes. Après avoir déployé un système expert (www.infosantetpe.fr) permettant aux TPE/PME de s'informer sur leurs besoins en matière d'assurance collective, le grossiste propose son expertise en marque blanche aux assureurs. « Parmi nos atouts, la connaissance du marché des collectives et de l'individuelle ; bon nombre d'entrepreneurs seront tentés par le panier de base relevant de l'assurance collective ; certains assurés seront alors obligés de recourir à la surcomplémentaire individuellement pour mieux être couverts. Cette double approche de gestion est importante à prendre en compte si l'on veut se positionner sur ce terrain du BPO », rappelle Emmanuel Vallée, directeur du développement et des projets de Solly Azar.

April fait partie des autres acteurs du courtage en gros à nourrir de grandes ambitions, d'autant plus que le grossiste ne part pas de zéro. Il gère les flux de tiers payant de 350 000 bénéficiaires sur le volet entreprises à travers son bras séculier dans la gestion déléguée, en l'occurrence le Cetim. « Parmi nos avantages concurrentiels majeurs, la qualité de service, une architecture aguerrie et une expertise nous permettant de gérer la complexité des contrats collectifs émaillés des futurs dispositifs responsables », explique Patrick Petitjean, PDG d'April prévoyance santé. Le Cetim se positionne sur l'ensemble de la chaîne de valeur de l'ANI, des appels à cotisation au reporting réglementaire, en passant par la gestion des prestations. Enfin, Siaci Saint-Honoré intervient également dans cette catégorie (lire page suivante).

UN RÉFÉRENTIEL POUR BIEN CHOISIRFace à cette offre pléthorique, comment choisir ? Actuaris met en avant quatre axes à prendre en compte : conformité du gestionnaire vis-à-vis du contrôle interne, de la réglementation, du plan de secours informatique (PRA) ; efficience et réactivité pour répondre à temps aux besoins des clients ; qualité de service proposé (reporting, recours aux normes) ; organisation du délégataire (où sont situés ses sites d'intervention, qualité de l'actionnariat, politique RH, etc.). Ces différents axes ont permis à Actuaris de définir un référentiel de bonnes pratiques début 2014 entre délégataires et clients. Il y ajoutera un volet conformité à la suite d'un nouveau benchmark effectué au courant de l'été 2014. D'ores et déjà, certains opérateurs s'alignent sur cette démarche. « Owliance Mutua adhère au club Actu-gestion (initié par Actuaris, NDLR) afin de définir les normes de place du délégataire de gestion. Et milite particulièrement pour celle relative à l'indépendance. Cette dernière, comparée au grand courtage à la fois distributeur et gestionnaire, constitue un élément fort différenciant. Notre positionnement exclusif sur la gestion déléguée nous préserve du statut de "partenaire - concurrent" et de la tentation d'exploiter les données à des fins de cross selling », lance Rodolphe Peim. Pack solutions est également compatible Actu-gestion : « Nous nous sommes également alignés sur les exigences des piliers 2 (gouvernance, gestion des risques et contrôle interne) et 3 (reporting) de Solvabilité II avec, à la clé, une bonne maîtrise des risques opérationnels (plan de continuité d'activité). Et nous appliquons les principes de vigilance pour la lutte contre le blanchiment et la fraude », renchérit Philippe Magdelaine.

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Laurent Grouas, directeur de la stratégie, de l'innovation et des partenariats
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RESPECTER LES NORMES OU DISPARAÎTREQuelles conséquences de cette normalisation sur les opérateurs ? Selon Benjamin Roussel, responsable prévoyance et santé chez Actuaris, en charge notamment de la démarche "Actu-gestion", « elle va pousser les acteurs du BPO à se professionnaliser en devenant de vraies usines de gestion ». Et Olivier Arroua, associé chez Selenis, d'enfoncer le clou : « Très vite, des regroupements pourraient s'opérer sur ce marché des délégataires de gestion et certains courtiers en sortir du fait de ces exigences normatives contraignantes. »

Enfin, reste l'épineux problème de la tarification. Selon Laurent Grouas, « même si le mode d'expression d'une tarification de la gestion sur la base du pourcentage du volume de cotisations est toujours de mise, elle n'est souvent que la traduction d'un coût réel, variable selon la complexité induite par les couvertures, le niveau d'automatisation et de services associés attendus par l'entreprise (tiers payant, gestion du risque, pilotage, extranet, etc.). La véritable différenciation tarifaire proviendra, pour les gestionnaires, de leur capacité à maîtriser les coûts inhérents aux charges supplémentaires imposées, notamment du fait des exigences de Solvabilité II, mais également dans l'articulation et l'exploitation fine des données de gestion pour permettre à la fois un renforcement des automatisations et un pilotage du risque accru ». Et Philippe Simon d'ajouter : « Là où Cegedim applique des taux compris entre 7 et 8 % des cotisations du portefeuille géré en santé individuelle, nous prévoyons une fourchette comprise entre 4 et 6 % pour les collectives. » Cette tarification compétitive résulte d'une industrialisation des processus mise en place par le groupe : GED généralisée, EDI, extranet utilisateurs et partenaires, déclarations sociales nominatives (DSN). Enfin, sur le point de la facturation, les grands courtiers, exemptés de la TVA, semblent avoir un avantage sur les pure players. A bien y regarder, cela n'est pas toujours le cas. En s'appuyant sur sa filiale ayant un statut de courtier, Pack solutions, par exemple, contourne cette difficulté.

En somme, l'offensive de l'ANI est déjà lancée sur le plan de la gestion. Si l'offre de BPO est pléthorique, tous les intervenants ne tiendront pas la route. Aux porteurs de risques d'être vigilants en respectant les normes.

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