Quelles ressources mobiliser pour favoriser l’inclusion ... · allophones de classe ordinaire...

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Université Paris III ENEAD FLE Année 2016-2017 Master 2 Didactique du français langue étrangère et seconde et des langues du monde Quelles ressources mobiliser pour favoriser l’inclusion des élèves allophones en classe ordinaire de lycée professionnel ? N° de la carte d’étudiant : 21407182 Candidat : TEMPESTA Agnès Directrice de recherche : MENDONCA-DIAS, Catherine - Maître de Conférences en didactique des langues et des cultures Second lecteur : SAVATOVSKY, Dan - Professeur en Sciences du langage à l'Université Sorbonne nouvelle-Paris 3

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Université Paris III – ENEAD FLE

Année 2016-2017

Master 2 Didactique du français langue étrangère et seconde

et des langues du monde

Quelles ressources mobiliser pour favoriser l’inclusion

des élèves allophones en

classe ordinaire de lycée professionnel ?

N° de la carte d’étudiant : 21407182

Candidat : TEMPESTA Agnès

Directrice de recherche : MENDONCA-DIAS, Catherine - Maître de Conférences en

didactique des langues et des cultures

Second lecteur : SAVATOVSKY, Dan - Professeur en Sciences du langage à l'Université

Sorbonne nouvelle-Paris 3

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SOMMAIRE

Sommaire ................................................................................................................... 2

Remerciements .......................................................................................................... 3

Introduction ............................................................................................................... 4

1– CHAPITRE 1 : Cadre de recherche ...................................................................... 7

1.1 Théories de recherche : les grandes notions ........................................... 7

1.2 Le contexte............................................................................................ 12 1.3 Mise en place d’une méthodologie ....................................................... 21 1.4 Présentation des informateurs ............................................................... 29

2 - CHAPITRE 2 : Collecte de données sur le terrain ........................................ 36

2.1 Les pratiques langagières des élèves de classe ordinaire ...................... 36 2.2 Le point de vue des enseignants ........................................................... 48

2.3 Point de vue des élèves issus d’UPE2A .............................................. 58

3 – CHAPITRE 3 : Perspectives ......................................................................... 68

3.1 Diagnostic : regards croisés .................................................................. 68 3.2 De l’insécurité au développement d’un potentiel ................................. 77 3.3 Propositions d’actions ........................................................................... 85

Conclusion ............................................................................................................... 93

Bibliographie ........................................................................................................... 97

Annexes ................................................................................................................. 101

Table des matières ................................................................................................. 167

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier chaleureusement les élèves suivis pour leur investissement. Je

leur souhaite bonne chance pour la suite.

Un grand merci à ma Directrice de mémoire, Mme Mendonça-Dias pour sa

disponibilité et son aide à garder le cap dans les moments de doutes.

Je remercie également :

La Proviseure et l’équipe enseignante du lycée où j’exerce, pour la confiance qu’ils

m’ont accordée lors des observations et des entretiens. Grâce à eux j’ai pu

d’accéder aux données de l’établissement, aux classes.

Les élèves des classes ordinaires qui ont « joué » le jeu et fait preuve d’une

curiosité à l’égard des langues, d’autrui et des connaissances. Ils ont révélé une

facette d’eux-mêmes que je ne soupçonnais pas.

Un grand merci à Marlène, pour ta patience dans la lecture et la correction du

brouillon.

Merci également à Ayuko et Cola, mes profs de taïko pour leur enseignement sur

l’ancrage et les repères intérieurs, outils qui ont servi tout au long de la construction

du mémoire.

Bien sûr je remercie mes proches pour leur soutien quotidien et leur attitude zen

dans lors du rush de la rédaction du mémoire.

Je dédie ce mémoire à mon père, sans qui, ce projet n’aurait jamais vu le jour.

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INTRODUCTION

Le présent mémoire naît de nombreuses interrogations sur l’inclusion des

élèves allophones en classe ordinaire de lycée professionnel : Face à ce nouvel

environnement, sur quelles compétences scolaires s’appuient-ils ? A quelles

difficultés sont-ils confrontés ? Comment les enseignants et les élèves les

perçoivent-ils ? Quelle est l’influence des représentations sociales et linguistiques

sur les attitudes de chacun ? Dans quelle mesure constituent-elles un blocage au

développement de compétences scolaires et sociales et dans quelle mesure peuvent-

elles être porteuses de réussite ? Comment permettre à l’élève d’avoir un meilleur

rapport à l’apprentissage et à la classe ? Comment activer les ressources de chacun

au sein du lycée pour les aider à activer leur potentiel ?

A partir d’échanges interpersonnels informels, les enseignants de classe

ordinaire nous font part de leur perception des anciens élèves allophones. Elle est

globalement positive concernant l’attitude. En revanche, ils pointent les difficultés

linguistiques (maîtrise du français, compréhensions orale/écrite et expression écrite)

sociales et scolaires. Face aux élèves issus d’Unités Pédagogiques pour Elèves

Allophones nouvellement Arrivés (UPE2A), ils ont deux postures : certains

collègues trouvent l’inclusion trop rapide, tandis que d’autres perçoivent ces mêmes

élèves comme motivés, assidus et ayant des compétences linguistiques égales, voire

supérieures à leurs pairs. Des entretiens et des observations de classe nous

permettrons d’infirmer ou de confirmer ces conversations informelles.

Notre mémoire vise à confirmer/infirmer des d’hypothèses, qui relèvent

jusqu’alors de l’ordre du ressenti. L’inclusion en classe ordinaire engendre de

nombreux bouleversements chez l’élève allophone : au niveau scolaire, il doit

s’adapter au rythme de classe, se fondre dans la masse et se confronter à un nombre

important d’informations nouvelles (contenu disciplinaire, discours multiples,

méthodologie de travail, lien disciplines/monde du travail...). L’apprentissage en

UPE2A de lycée professionnel est avant tout linguistique, avec peu d’inclusion.

Comment l’élève entre-t-il dans les savoirs disciplinaires, une fois en classe

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ordinaire ? Au niveau personnel, comment s’intégrer socialement auprès de ses

pairs, en adopter les codes (« parler jeune », alternance codiques), sans se trouver

en position de conflit avec l’enseignant ? Les élèves sont-ils tiraillés entre

l’intégration scolaire et l’intégration sociale ?

Enseignants, élèves-types et élèves allophones eux-mêmes, ont des

représentations des compétences scolaires et sociales des élèves allophones.

Certaines, comme la motivation, sont source de réussite. D’autres, comme le

manque de méthode de travail ou la timidité en cours, constituent des freins à la

réussite de l’élève au sein de la classe ordinaire.

A partir de ces hypothèses, nous avons mené une recherche-action, construite

sur la problématique suivante : Sur quelles ressources l’élève et l’enseignant

peuvent-ils s’appuyer pour que l’inclusion en classe ordinaire soit porteuse de

réussite scolaire et sociale ? Comment développer le recours à ces ressources ?

Nous avons choisi comme sujet de recherche un échantillon d’élèves

allophones de classe ordinaire dans le lycée où nous exerçons. Nous utiliserons

comme outils de collecte de données des entretiens, un questionnaire, des

observations de classe, ainsi que des productions scolaires (bulletins) et

personnelles (dessins réflexifs, journal, carnet de poésie). Ces données nous

permettrons de mener une action sur le terrain, en fonction des besoins des

différents acteurs de la communauté éducative.

Notre recherche se déroule en plusieurs étapes. Dans un premier chapitre,

nous définirons les contours conceptuels, contextuels et méthodologiques du

mémoire. Les notions de représentations, sociales, linguistiques et scolaires, ainsi

que l’inclusion et le Français Langue de Scolarisation (FLSco) constitueront les

fondations théoriques de notre réflexion. Puis nous nous inscrirons dans le contexte

local d’un établissement qui accueille des élèves en inclusion après un passage en

UPE2A. Enfin des éléments méthodologiques nous permettront de développer des

outils de collectes de données et de nous positionner en tant que chercheur, sur un

terrain professionnel familier ; le lycée où nous exerçons. Le cadre méthodologique

doit nous aider à prendre de la distance par rapport aux pratiques et aux interactions

quotidiennes, tout en assumant notre positionnement d’être « juge et parti ». Nous

pourrons alors constituer un échantillon d’informateurs pertinents pour notre

collecte de données.

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Le second chapitre relie les données collectées avec notre problématique.

Nous rassemblerons la masse de données afin de comprendre comment chaque

acteur perçoit l’élève allophone et ses compétences. Nous présenterons les discours

(bulletins, entretiens, questionnaires, productions) et pratiques des élèves et

enseignants pour dégager des représentations de chacun : Que nous révèlent les

interactions de classe ? Comment sont vécus ou perçus les apprentissages ? Quels

facteurs peuvent favoriser ou freiner l’activation de compétences linguistiques et

sociales des élèves allophones ?

Dans le dernier chapitre, nous mettrons en perspective les différents discours

avec les connaissances acquises durant le Master. Le passage d’UPE2A vers la

classe ordinaire est un moment délicat dans la scolarité des élèves allophones.

Aussi, dans le cadre de notre recherche-action nous inviterons tous les informateurs

à proposer des solutions pour faciliter cette bascule. Il s’agit de répondre au mieux

aux besoins des élèves par une démarche collective. Puis, nous verrons comment

les interactions de classe constituent des zones de tensions et être sources

d’insécurité linguistique, sociale et scolaire. L’élève doit puiser à la fois dans son

capital linguistique, scolaire et social pour se mettre en conditions de réussite, qu’il

soit allophone ou pas. La reconnaissance de ses compétences cachées peut aider à

développer son potentiel. A partir de ce constat sur les freins et les leviers de

réussite dans d’apprentissage et d’intégration des élèves allophones, nous mènerons

une action de terrain. Celle-ci s’inscrira dans des dispositifs qui existent déjà

(SFLS, mise en œuvre de passerelles UPE2A-classe ordinaire) ou qui sont en cours

de création (projet d’établissement). Nous proposerons la trame d’un guide à

destination des enseignants, en nous inscrivant dans les programmes scolaires et le

projet d’établissement. Nous utiliserons des outils du FLSco et des approches

plurielles pour construire le guide.

L’objectif de cette présente recherche est d’assurer le suivi des élèves

allophones, d’œuvrer au partage d’une culture commune tout en reconnaissant la

pluralité des membres de la communauté scolaire au sein d’un lycée professionnel.

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1– CHAPITRE 1 : CADRE DE RECHERCHE

1.1 THÉORIES DE RECHERCHE : LES GRANDES NOTIONS

1.1.1 Représentations : aspects sociologiques et linguistiques

Selon Durkheim les représentations s’organisent autour de l’objectivation

(appropriation personnelle) et de l’ancrage (enracinement social). Concernant notre

problématique, cette notion de représentations individuelle et collective de la part

des enseignants et élèves nous a parue essentielle à développer dans la

compréhension du contexte où se placent les élèves suivis.

Les représentations sociales présentent un cadre général où chaque langue a

une valeur sur le marché linguistique. Cette valeur est variable en fonction des

stéréotypes véhiculés sur les langues : « l’italien est chantant, l’allemand est dur »,

(AUGER, 2010 : p.51) et du contexte social dans lequel s’inscrit leur pratique.

Valorisée en Europe, la langue espagnole est dévalorisée aux Etats-Unis, parce

qu’associée à la communauté chicana et aux migrants illégaux. Danièle MOORE

montre qu’apprendre à lire et écrire dans une langue représente un véritable acte

identitaire. « La confrontation avec la version standardisée scolaire de la langue de

référence et particulièrement sa forme écrite est analysée comme source majeure

de difficultés scolaires des enfants qui grandissent dans plusieurs langues »

(MOORE, 2006 : p.121). Il existe un écart important entre les pratiques valorisées

par l'école et l'idée généralement admise dans les sociétés de contact, que les

populations bilingues migrantes, issues de pays en voie de développement, sont peu

lettrées dans leur langue d’origine. Les personnes arrivant sur le territoire français,

se retrouvent ainsi en situation diglossique, avec une langue dominante parlée sur le

territoire, et une langue minoritaire souvent dévalorisée, ou perçue comme un

« dialecte ». Le parler bilingue de l’individu fait l’objet d’attitudes diverses :

• attitude négative : La L1 (Langue première) est un obstacle au

développement d’une L2 (Langue seconde). Beaucoup de personnes

bi/plurilingue sont dévalorisées et perçues comme ne maîtrisant

véritablement aucune des langues de leur répertoire ; si l’on prend comme

référence l’idéal du bilingue parfait (MORO, 2012).

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• attitude positive : Pour Daniel COSTE, la compétence plurilingue est la

capacité à gérer et étendre son répertoire langagier et doit être développée

par l’individu. Jim CUMMINS montre comment l’apprentissage d’une L2

ne s’empile pas sur la L1, mais forme un continuum à travers une

interlangue, où les deux langues interfèrent à travers les alternances

codiques, les calques... Pour Danièle MOORE, prendre appui sur la L1 pour

apprendre la L2, favorise le niveau d’abstraction et la prise de conscience

langagière.

Les langues du répertoire d’un individu font l’objet de pratiques variées : le

bilinguisme additif dans lequel sont valorisées les deux langues (L1 au statut

valorisé, ou utile), ou le bilinguisme soustractif. Dans ce cas, le locuteur met en

péril le maintien de sa langue maternelle, souvent minoritaire, pour développer des

compétences dans la langue au statut dominant. Cette forme de bilinguisme conduit

à la dévalorisation de l’une des deux langues. Il peut néanmoins s’avérer positif

lorsqu’il est lié à l’affect, à l’enfance. Par exemple, un petit garçon kabyle qui a

développé le lexique de la cuisine car il faisait la cuisine avec sa mère (MORO,

2012).

En France, le bi/plurilinguisme est rarement développé en classe. La norme

attendue demeure celle du monolinguisme (AUGER, 2010 : pp.40-42). La politique

linguistique éducative, issue du 19ème siècle, transporte encore le mythe de

l’homogénéité, où la diversité se résorbe au profit d’une unité nationale (AUGER,

2007 : p.80), là où elle pourrait l’enrichir. Le plurilinguisme ou les variations

linguistiques des élèves sont perçus comme une gêne dans l’acquisition des

apprentissages. D’autre part, le système scolaire est fondé sur l’idéal du bilingue

parfait, aux compétences équilibrées et optimales. Les théories de l’apprenant

arrivant « neuf » à l’école persistent. Or, cet apprenant transporte des connaissances

déjà construites, qu’il va confronter aux nouvelles connaissances. L’erreur n’est

plus une faute mais le symptôme d’une interlangue, qui montre que le savoir est en

construction (AUGER, 2010 : p.161). L’attitude des enseignants est primordiale

dans l’accès au savoir afin que l’élève puisse dissocier difficultés globales et

difficultés linguistiques. Outre les apprentissages, les représentations linguistiques

ont un impact sur le groupe classe. Elles peuvent faire émerger des tensions

identitaires lorsque l’élève est renvoyé à son incomplétude (dialecte berbère) et

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comparé à d’autres élèves dont les pratiques langagières sont valorisées (BILLIEZ,

LAMBERT, 2008).

1.1.2 L’inclusion scolaire

Pendant longtemps, la France a mené une politique d’acculturation dans les

régions et colonies françaises. Cécile GOÏ1 dénombre trois attitudes possibles :

l’assimilation (disparition de la culture d’origine), la séparation (ségrégation,

maintenir les traits des deux cultures sans interactions), l’intégration (phénomène

réciproque avec transformation mutuelle). Ce dernier terme est galvaudé : une

personne s’intègre à une société figée, qui ne se transforme pas, et ne lui permette

de s’intégrer. Quelle est la place accordée à l’autre dans la société française

(MORO, 2012 : pp.165-167) ? Autrefois l’assimilation affichait une violence où

l’individu était forcé d’abandonner sa culture, sa langue, et essayait de se fondre à

la société d’accueil. La notion d’intégration lui a succédé. Il s’agit de trouver sa

place dans la société française en occultant sa trajectoire. Cette notion est absurde

pour les jeunes de 2ème et 3ème générations puisqu’ils font partie intégrante de la

société. L’école constitue toujours le lieu où s’amplifient les inégalités en fonction

des origines, comme l’indique récemment le rapport du CNESCO : « Inégalités

sociales et migratoire : comment l’école amplifie-t-elle les inégalités ? ». Pour la

pédopsychiatre M.-F. MORO, la société doit évoluer avec l’arrivée des migrants.

La notion la plus pertinente est celle de l’inscription des individus dans la société.

On adopte les valeurs et la culture françaises sans pour autant renoncer à son

altérité.

Face à l’urgence actuelle de scolariser les Elèves Allophones Nouvellement

Arrivés (EANA), Guy CHERQUI et Fabrice PEUTOT (CHERQUI, PEUTOT,

2016 :) relèvent deux paradigmes : l’inclusion scolaire et l’inclusion sociale. S’il

est indispensable que le jeune maîtrise les codes et les langages de l’école, il doit

aussi être socialisé dans une optique communicative. La disponibilité aux

apprentissages dépend aussi de la sécurisation des familles. Ainsi, des pays comme

le Canada donnent priorité à l’accueil et à l’installation des familles avant la

scolarisation des enfants. En France, la variété du projet migratoire est souvent mal

1 GOÏ, Cécile (2015). « Chapitre : Immigration et processus d’intégration”, Des élèves venus d’ailleurs.

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perçue, et l’Education nationale est souvent mal à l’aise avec ce public. La

multitude des dénominations dans les différentes circulaires de l’Education

Nationale face aux EANA en atteste : nous sommes passés d’un système scolaire

stigmatisant l’élève arrivant (migrants, non-francophones) à un système scolaire qui

plus attaché à une situation linguistique (allophone) et temporelle (Nouvellement

Arrivé) qui ne fige pas l’individu dans un statut2. L’institution se focalise à présent

plus sur leur potentiel que sur leur handicap. L’Education Nationale mène depuis

plus de dix ans une politique d’inclusion des élèves à besoins spécifiques, qu’il

s’agisse des élèves en situation de handicap3 ou des élèves allophones. A partir de

2002, les textes officiels vont recommander aux établissements scolaires que les

élèves allophones bénéficient dès leur arrivée d’un enseignement en classe ouverte.

L’inclusion devient un objectif central dans la circulaire de 2012. Elle vise à

accepter la diversité dans la classe. C’est ainsi que les CLA (Classe d’Accueil)

deviennent des dispositifs répondant aux besoins temporaires des élèves : les

UPE2A (Unités Pédagogiques pour Elèves Allophones Nouvellement Arrivés).

La question qui se pose à l’heure actuelle est celle de la gestion de la diversité

dans la classe et de la prise en compte des besoins de chaque élève. Comment

reconnaître la singularité de chacun, tout en construisant une culture partagée ?

L’utilisation d’une interculturalité permet de se décentrer plutôt que d’exposer des

informations alimentant les stéréotypes. Présente dans le dispositif UPE2A,

l’interculturalité conduit l’apprenant à partager les valeurs du pays d’accueil, et à

être reconnu tel qu’il est. Les difficultés apparaissent lors de l’inclusion en classe

ordinaire. L’enfant doit vivre l’école comme une dynamique de réussite sans être

tiraillé entre les valeurs familiales et celles de l’école, sans se mettre dans une

situation de conflit de loyauté4.

1.1.3 Le FLSco

En arrivant dans un établissement scolaire en France, l’élève allophone est

confronté à une multitude de discours en langue française, qu’il s’agisse de la

2 GALLIGANI, Stéphanie. Cours ENEAD FLSCO Master 2, et MENDONCA-DIAS, Catherine,

Cours FLSCO présentiel, Paris Sorbonne Nouvelle, 2016. 3 Loi du 11 février 2005 Pour l’égalité des droits et des chances 4 GOÏ, Cécile, (2015). « chapitre : autorisation à réussir et conflit de loyauté”, Des élèves venus

d’ailleurs.

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matière « français », des autres matières en français, des échanges avec les

enseignants et autres élèves. Il a lui-même un parcours linguistique et scolaire lié à

cette langue, ou pas. Nous avons d’abord voulu comprendre les dénominations liées

à la notion de « français » comme langue d’information, de communication ou

d’enseignement. A partir des définitions de CUQ, VIGNER et VERDELHAN-

BOURGADE, nous avons dégagé quatre notions : Le Français Langue Maternelle

(FLM), qui désigne le français enseigné aux élèves de classe ordinaire, le Français

Langue Etrangère (FLE) qui est enseigné comme langue vivante et le Français

Langue Seconde (FLS), qui qualifie à l’étranger le bilinguisme institutionnalisé

(Québec, Afrique francophone), ou en France les enfants ayant une LM autre. Enfin

dans le contexte scolaire où nous évoluons, nous utiliserons la notion de Français

Langue Scolaire (FLSco) désignant une « langue apprise à l’école pour l’école»

(Gérard VIGNER, 1989). Ces différentes dénominations ne s’opposent pas

nécessairement. Elles peuvent se croiser en fonction des situations locales et se

recouper dans le parcours des élèves (FLSco, FLS).

Notre attention s’est plus particulièrement portée sur le FLSco, langue

partagée par toute la communauté scolaire, qu’il soit langue maternelle ou seconde.

Michèle VERDHELAN-BOURGADE lui attribue trois rôles : il s’agit d’une

matière d’enseignement qui fait l’objet d’un apprentissage, qui permet d’apprendre

d’autres disciplines (rôle de médiation) et de communiquer dans les interactions

quotidiennes de la classe. Selon l’auteur, le FLSco comprend plusieurs fonctions 5:

heuristique , langagière, méthodologique et sociale. En effet, le FLSco sert à la fois

à se représenter le monde, acquérir des connaissances, des compétences

linguistiques pour interagir et élaborer des discours, une méthode de travail, un

mode de raisonnement et de pensée. Il vise aussi à apprendre à adapter ses

comportements verbaux et non verbaux.

Pour assimiler la langue scolaire, l’apprenant doit faire appel à une vaste

palette d’apprentissages explicites (grammaire, contenus disciplinaires) et

implicites (maîtrise des discours, interactions, langage non verbal). Il doit

s’approprier les codes scolaires attendus par l’institution en verbalisant l’implicite,

dans des activités métalinguistiques autour d’analyse de manuels ou d’actes de

5 VERDHELAN-BOURGADE, M. (2002). Le français de scolarisation : pour une didactique

réaliste, pp.34-43

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compréhension des discours, par exemple (VERDHELAN-BOURGADE, 2002,

chapitres VI et VII).

Dans un monde où le niveau augmente, beaucoup d’enfants n’ayant pas les

codes scolaires sont placés en situation d’échec. Comment peuvent-ils apprendre à

gérer leurs compétences et leur répertoire langagier dans l’espace de la classe, au

contact de langages, discours et savoirs variés ? La didactique de l’interculturel

(Nathalie AUGER, Geneviève ZARATE) et du FLSco proposent des pistes de

réflexions, et de pratiques de classe, qui pourraient être expérimentées au lycée :

développement de compétences métalinguistiques et plurilingues par le biais de

portfolio, comparaison des langues, analyse de manuels scolaires…

1.2 LE CONTEXTE

1.2.1 Le contexte institutionnel

Depuis la fin du 19ème siècle l’école est obligatoire pour tous les enfants. Ce

n’est pourtant qu’au cours des années 70 qu'est prise en compte la spécificité des

élèves allophones dans le système éducatif, à cause de l’arrivée massive de

migrants d’anciennes colonies et de réfugiés politiques. La politique linguistique

était jusqu’alors assimilationniste. En effet, depuis l’ordonnance de Villers-

Cotterêts en 1539 édictée par François 1er, le français est la langue officielle du

territoire. Au 19ème siècle, pour asseoir le pouvoir en place, est menée une politique

d’unification linguistique et de monolinguisme. Les langues régionales et des

territoires colonisés se voient éradiquées durant la première partie du 20ème siècle,

afin d’asseoir la dominance du français sur d’autres langues. Aujourd’hui encore,

signalons que la France a signé, mais pas ratifié, la Charte européenne des langues

régionales et minoritaires. En effet, selon le Conseil constitutionnel, elle va à

l’encontre des principes d’indivisibilité de la République et de l’unicité du peuple

français par la langue française inscrits dans la Constitution.

Alors que le Conseil de l’Europe préconise une ouverture sur le

développement de l’éducation au plurilinguisme (COSTE, 2010), du fait des

échanges et migrations liés à la construction européenne et à la mondialisation, la

forme scolaire dominante en France reste ancrée dans la norme de l’idéal

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monolingue. Celle-ci prend rarement en compte la diversité linguistique en France.

En effet, depuis la massification de l’école des années 70, grâce au Collège Unique,

le public scolaire du secondaire présente une hétérogénéité de pratiques langagières

et scolaires, plus ou moins valorisées. Malgré des initiatives favorables au

plurilinguisme, comme les Approches Plurielles, ou la gestion de l’hétérogénéité

des apprenants, nous constatons dans notre quotidien un gap entre les exigences des

programmes, la course aux examens, et les principes des textes qui les portent, axés

sur les innovations pédagogiques et les besoins de l'apprenant. C’est un peu comme

si l’on nous demandait de fabriquer un vêtement de haute couture en utilisant des

tissus bas de gamme dans un délai de deux jours.

L'institution encadre l'accueil et la scolarisation des élèves allophones depuis

1970, à travers la succession de plusieurs circulaires adaptées au contexte social et

scolaire. La première circulaire de 19706 visait à intégrer en classe des élèves

étrangers directement lorsqu'ils étaient peu nombreux ou de former des classes

expérimentales (CLIN Classes d'INtégration, CRI Cours de Rattrapage Intégré

pour les francophones).

En 2002, deux circulaires développent les modalités d'inscription et de

scolarisation des élèves de « nationalité étrangère ». La première circulaire7

rappelle que, dans le cadre du Droit à l'Éducation, leur inscription ne peut être

subordonnée à un titre de séjour. La situation d'immigration constitue un handicap.

Dans la seconde circulaire8, les CEFISEM deviennent des CASNAV (Centre

Académique pour la Scolarisation des enfants Nouvellement Arrivés et enfants

issus de familles itinérantes et de Voyageurs), qui accompagnent les parents et

doivent faciliter l'accueil. Ils se chargent d'évaluer les compétences à l'arrivée pour

s'adapter au profil de l'enfant. Une distinction est faite entre le 1er degré (CLIN) et

le 2nd degré (CLA), ainsi que le niveau de maîtrise scolaire (Elèves Non Scolarisés

Antérieurement). Pour les plus âgés (+16ans) la Mission Générale d'Insertion de

l'Education Nationale (MGIEN) propose un cycle d'insertion, voire un parcours

pour les anciens ENSA (CIPPA-FLE ALPHA pour l'insertion professionnelle). La

6 Circulaire n° IX-70-37 du 13 janvier 1970 : « Classes expérimentales d’initiation pour enfants

étrangers » 7 Circulaire n° 2002-063 du 20 mars 2002 : « Modalités d’inscription et de scolarisation des élèves

de nationalité étrangère des premier et second degrés » 8Circulaire n° 2002-100 du 25 avril 2002 : « Organisation de la scolarité des élèves nouvellement

arrivés en France sans maîtrise suffisante de la langue française ou des apprentissages »

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maîtrise du FLSco devient une priorité qui relève de la responsabilité de toute

l'équipe pédagogique. Un suivi est assuré après le passage de la CLA vers la classe

ordinaire.

La circulaire de 20129 fixe l'organisation de la scolarité des Elèves

Allophones Nouvellement Arrivés en France (EANA). L'objectif est d'acquérir au

plus vite le socle commun et la maîtrise du français afin d'être inclus dans une

classe ordinaire. Les classes d'accueil deviennent des Unités Pédagogiques

(UPE2A), au sein desquelles l'élève a un emploi du temps adapté. Les premiers

mois, il reçoit un enseignement essentiellement de langue française, puis bascule

progressivement en classe ordinaire, en fonction de son autonomie dans la langue,

de son niveau scolaire et de son projet d'orientation.

A l’heure actuelle, le CASNAV joue un rôle majeur dans l’accueil, la

scolarisation et le suivi des enfants allophones nouvellement arrivés. Il propose des

évaluations (tests en mathématiques et français), puis affecte les jeunes dans une

formation adaptée à leurs besoins. Il a également pour mission d’accueillir les

parents en leur présentant le système éducatif, et en leur proposant des cours de

langue et cultures française avec « l’école ouverte aux parents ». Le CASNAV est

en relation avec les enseignants et leur fournit des outils pédagogiques ainsi que des

formations.

Lors de son arrivée en France, l’enfant ou l’adolescent allophone est dirigé

par des associations ou les institutions vers les mairies (école primaire) ou les

inspections académiques afin de réaliser une évaluation initiale, que l’on nomme

test de positionnement. L’évaluation se réalise pour l’école primaire au sein même

de l’école en primaire et dans les Centres d’Information et d’Orientation (CIO) ou

des cellules d’accueil en secondaire. En collège, l’élève et ses parents rencontrent le

conseiller d’orientation psychologue afin de déterminer son parcours scolaire. Le

CASNAV et l’enseignant référent du collège d’accueil conduisent les évaluations

initiales. Le CASNAV a pour mission d’informer, conseiller et organiser la

scolarité des enfants et adolescents arrivant sur le territoire. Il traite les demandes et

les besoins, participe à l’évaluation initiale. Pour le 1er degré il offre une cellule

9 Circulaire n° 2012- du 2 octobre 2012 : « Organisation de la scolarité des élèves allophones

nouvellement arrivés »

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15

d’accueil qui établit une évaluation diagnostique de la première langue de

scolarisation, par la mise en place d’une passerelle des 15 langues. Sont évaluées

les compétences de compréhension, de résolution de problème et transversales de

l’enfant en langue maternelle, ainsi que sa familiarisation avec l’écrit. Les tests sont

disponibles sur le site de la revue VEI (Ville Ecole Intégration). Le CASNAV

évalue également le niveau de maîtrise du français de l’enfant / adolescent qui

permettront aux enseignants de l’établissement qui l’accueille de pouvoir répondre

au mieux à ses besoins.

En école primaire et au collège, l’élève allophone est affecté en classe

ordinaire. Il suit à la fois sa scolarité dans la classe ordinaire où il est rattaché et en

dispositif UPE2A afin de développer l’apprentissage du Français Langue Seconde.

Il a un emploi du temps adapté en fonction de ses compétences linguistique en

français.

A partir de 16 ans et plus, il est orienté vers l’Inspection Académique. Son

niveau est évalué par le CIO, et son projet professionnel est examiné. Il peut être

ainsi orienté vers le lycée général ou professionnel. Si ses compétences ne sont pas

suffisantes pour intégrer le lycée il est orienté vers une Mission Locale contre le

Décrochage Scolaire (MLDS), qui prend en charge.

Depuis la circulaire de 201210, il n’existe plus de distinction entre

CLA/CLIN, qui portent la même dénomination d’UPE2A. Dans l’enseignement

secondaire, son inclusion doit se faire dans un niveau qui ne dépasse un écart d’âge

de plus de deux ans par rapport à l’âge de référence de sa classe d’affectation.

L’élève dispose d’un enseignement hebdomadaire du français langue seconde de 9

heures en primaire et de 12 heures en secondaires. La classe de référence de l’élève

est une classe ordinaire dans laquelle il est progressivement inclus, d’abord dans

des disciplines ne nécessitant pas la maîtrise du français (Education Physique et

Sportive, Arts Plastiques, Musique...), puis dans les disciplines s’appuyant sur la

langue (Français, Histoire-Géographie). Après une période de 6 à 12 mois, l’élève

allophone est en principe inclus dans une classe ordinaire d’un établissement de

secteur. L’objectif est l’apprentissage du français en contexte scolaire pour

communiquer (6 compétences du Cadre Européen Commun de Référence,

C.E.C.R.), comme discipline (langue et littérature), et langue d’enseignement dans

10 MEN, Circulaire no 2012-141 du 2-10-2012. "Organisation de la scolarité des élèves allophones

nouvellement arrivés". Bulletin officiel de l’Éducation nationale, no 37

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16

les Disciplines Non Linguistiques (D.N.L). L’enjeu est également d’avoir une

culture scolaire, sociale et civique, et d’obtenir un certain nombre de diplômes

(DELF Diplôme d’Etudes en Langue Française, CFG. Certificat Français Général,

DNB. Diplôme National du Brevet).

La Loi d’Orientation de 2013 sur la refondation de l’École (MEN, 2013)

réaffirme le principe d’inclusion pour lutter contre les inégalités scolaires. L’élève

allophone est un élève ordinaire. Il n’a pas à être intégré, il est constituant de la

classe. Son inclusion en classe ordinaire suppose de prendre en compte ses besoins

spécifiques, au même titre que les autres élèves. Lorsque l'élève a une maîtrise

suffisante du français de communication et de scolarisation, il intègre la classe

ordinaire. Le suivi permet de répondre à ses besoins et de le rassurer. Il est variable

d'une académie à l'autre, d'un établissement à l'autre. En effet, certaines académies

accueillent peu d’élèves allophones, parfois dispersés sur tout le territoire.

1.2.2 Le contexte local de l’Académie de Paris

Le CASNAV de Paris est très actif, puisque la région parisienne est le

principal lieu d’accueil des nouveaux arrivants sur le territoire. Pour l’année

2014/2015 la France accueillait plus de 52000 enfants allophones, dont 3 sur 10 en

Ile-de-France. L’Académie de Paris compte dans le secondaire 40 collèges et 35

lycées, dont 19 lycées professionnels, proposant un dispositif UPE2A.

L’orientation des élèves en lycée, professionnel ou général, s’effectue suite

aux tests de positionnement du CASNAV, qui évaluent leur niveau de maîtrise de

français et des mathématiques. En lycée professionnel, le dispositif UPE2A

s’adresse à un public qui a un faible niveau scolaire et « qui ne laisse pas espérer la

réussite dans la voie générale et ayant un projet professionnel 11». L’orientation

dépend également de l’âge et du parcours des élèves. Ainsi, certains élèves, passés

l’année précédente par le dispositif UPE2A-ENSA, ou arrivés à l’âge de 16 ans,

sont orientés en UPE2A-LP ou vers la Mission Locale contre le Décrochage

Scolaire (MLDS).

Lors d’un entretien téléphonique, Mme CROGUENNEC, l’une des personnes

ressource du pôle « Lycée professionnel » du CASNAV, présente les spécificités

11https://www.ac-paris.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2013-03/descriptifs_dispositifs_casnav_2013-03-29_10-

48-23_9.pdf

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17

d’organisation du dispositif en lycée professionnel. Il fonctionne plutôt en classe

fermée, du fait que les lycées professionnels proposent des enseignements aux

élèves ayant déjà choisi leur orientation. Administrativement, l’élève n’est pas

inscrit en classe ordinaire mais en UPE2A. Il dispose d’un enseignement de 30h

(18h de français + au moins deux autres disciplines). Les enseignements sont

dispensés par des professeurs de Lettres, titulaires de la certification FLS ou d’une

formation universitaire en FLE/FLS. Au regard de l’orientation, du fait que l’élève

prépare son inclusion en lycée l’année suivante, le dispositif relève du niveau

secondaire de la 3ème. L’élève profite de cette année pour construire son projet

scolaire et professionnel. Mme CROGUENNAC nous indique que près de 6 heures

doivent être dédiées à la construction de son parcours professionnel par la

découverte des métiers, les mini-stages, le PASSPRO, la participation aux Journées

Portes Ouvertes… L’inclusion se fait de manière ponctuelle : L’élève peut être

inclus en classe ordinaire dans les matières générales, dans lesquelles il a déjà

acquis un certain nombre de compétences (anglais, espagnol, maths). Il ne peut pas

être inclus dans les matières professionnelles ; puisqu’il serait complétement

arbitraire de déterminer à l’avance son orientation. D’autre part, Mme

CROGUENNEC- rappelle que ateliers professionnels ne permettent pas

d’accueillir des élèves non couverts par les assurances. Le CASNAV de Paris a

construit des outils d’accompagnement qui voient l’essentiel des programmes en

Histoire-géographie afin de préparer les élèves à l’année suivante en CAP ou Bac

Pro. Ces « passerelles pour la réussite » sont accessibles sur le site du CASNAV de

Paris. Elles se présentent sous la forme de plaquettes accompagnées de vidéos

destinées à l’exploitation pédagogique par l’enseignant d’UPE2A.

Alors que l'objectif des UPE2A est l'inclusion, aucun texte officiel ne gère

leur inclusion spécifique une fois en classe ordinaire. L'Académie de Paris a mis en

place le SFLS (Soutien Français langue Seconde) pour assurer un suivi de l’élève

dans ses apprentissages en fonction de ses difficultés. L'établissement où nous

exerçons identifie les élèves concernés, lors d'évaluations à l’entrée en seconde. Il

propose des parcours adaptés aux besoins de chaque élève. Une fois en classe

ordinaire, les anciens élèves d’UPE2A ont la possibilité de suivre 1 h de Soutien

Français Langue Scolaire (SFLS) hebdomadaire sur des heures banalisées destinées

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18

à l’Aide Personnalisée (AP). Ils approfondissent la maîtrise de la langue de

communication et scolaire (apports disciplinaires, méthodologiques et culturels).

1.2.3 Le terrain de recherche : un lycée professionnel tertiaire

Le terrain de notre recherche est un lycée professionnel tertiaire, situé dans le

17ème arrondissement de Paris. Une majorité d’élèves est boursière, et vient de

milieux défavorisés. Les élèves habitent essentiellement les 17ème/18ème et 19ème

arrondissements ou la proche banlieue (Saint Ouen, Clichy). Cette diversité de

provenance des élèves n’inscrit pas l’établissement dans leur univers quotidien. Il

n’est pas ancré dans une réalité locale de « quartier », qui pourrait favoriser

l’investissement des élèves. L’établissement accueille environ 400 élèves répartis

en deux troisièmes (Prépa Pro, UPE2A), cinq secondes, cinq premières et six

terminales (+ deux classes en CFA, Centre de Formation des Apprentis). Chaque

classe accueille au maximum 25 élèves. Le lycée dispose d’enseignement de DNL

(Disciplines Non Linguistiques) en anglais (section Accueil) et espagnol (section

Gestion). La majorité des élèves sont issus de l’immigration, enfants d’immigrés ou

immigrés eux-mêmes.

Le lycée accueille de nombreux élèves en difficultés de maîtrise de la langue,

et il revient dans les discussions que les élèves allophones arrivent rapidement au

même niveau que leurs camarades en quelques années. Dans chaque classe, il y a au

moins un élève ayant suivi un parcours en UPE2A les années précédentes. La

direction souhaiterait une plus grande mixité sociale et ethnique, pour contrer la

violence et les incivilités quotidiennes. Beaucoup d’élèves du lycée subissent leur

orientation, et vivent leur scolarité comme un échec. Seulement 30% des effectifs

ont choisi le lycée comme premier vœu, lors des affections AFFELNET.

Le lycée présente néanmoins des leviers de réussite. L’équipe enseignante est

stable et investie dans la réussite des élèves. Une liaison lycée-BTS (Brevet

Technique Supérieur) est assurée avec l’ENC-Bessières (Ecole Nationale de

Commerce), qui s’engage à accueillir un certain nombre d’élèves issus du lycée, et

propose des journées d’intégration pour familiariser les élèves à l’enseignement

supérieur (contenu, méthodologie). Une classe de Terminale Gestion offre aux

élèves redoublants des « cours personnalisés » dans les matières qu’ils doivent

Page 19: Quelles ressources mobiliser pour favoriser l’inclusion ... · allophones de classe ordinaire dans le lycée où nous exerçons. Nous utiliserons comme outils de collecte de données

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repasser. L'établissement est dans une dynamique de répondre aux besoins de

chaque élève, quel que soit son parcours.

Le projet d'établissement est en cours de réalisation et s'articule autour de

trois axes, sur lesquels les équipes enseignantes réfléchissent en groupe jusqu'au

mois de juillet 2017 : le climat scolaire, le parcours des élèves, la revalorisation de

l'établissement. Notre recherche au sein de l'établissement est transversale, et

pourra être intégrée dans plusieurs axes du projet d’établissement.

Individuellement, nous sommes déjà engagées dans les groupes de travail sur

l'amélioration du climat scolaire (relations enseignants/élèves et élèves entre eux) et

le parcours des élèves (mise en place d'un dispositif adapté aux décrocheurs et

absentéistes) avec les équipes enseignantes et la vie scolaire. Lors de la

construction de notre recherche nous établirons un lien entre le projet

d’établissement et les actions envisagées suite à l’analyse des données.

La classe d’UPE2A fonctionne en dispositif fermé. L’effectif est variable, de

sept élèves à la rentrée, jusqu’à vingt-quatre au mois de mars. L’urgence est la

maîtrise de la langue française et des codes scolaires (lecture de l’emploi du temps,

usage de l’agenda ou du cahier de textes, repérage spatial et fonctionnel dans

l’établissement...). La classe fonctionne avec un emploi du temps fixe. Les élèves

disposent d’un enseignement hebdomadaire de : 18h de FLS, 2h d’EPS, 5h de

Mathématiques et 2h d’anglais. Dans les heures de FLS, l’enseignante principale

assure des enseignements d’Histoire-Géographie, Education Morale et Civique,

Découverte Professionnelle et Education à la santé. Nous réalisons 3h de « français

de socialisation et culture », au cours desquels nous étudions des points de

phonétique spécifiques selon la provenance des élèves, la pratique du français parlé,

les types de discours (dictionnaire, bande-dessinée, presse, littérature) , la langue

des disciplines (lexique, organisation des discours), la reconnaissance de leur

culture d'origine (présentation du système scolaire du pays où ils ont été scolarisés)

et de leur répertoire langagier (présentation d'un point de grammaire dans la langue

de leur choix, puis comparaison avec les autres élèves de la classe). Ces séances les

mettent en position d'expert dans la langue, et les obligent à prendre la parole

devant une assemblée.

En fonction de leur projet d’orientation, et de leurs compétences linguistiques

et scolaires, ils sont inclus en classe ordinaire. Pour l’instant, une élève a basculé en

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classe ordinaire dès le 2ème trimestre. Son inclusion définitive a été préparée en

amont par les professeurs des deux classes, 3UPEA2 et 2nde spécialité Accueil.

Deux autres élèves sont inclus ponctuellement en cours d’Espagnol et d’Anglais de

classe ordinaire. Les enseignants de l’établissement connaissent le dispositif et

accueillent parfois ces élèves afin de leur permettre la pratique de langues de leur

répertoire (Anglais) et développer des compétences dans d’autres langues en

fonction de leur projet personnel (élève mauritanien voulant rejoindre son père qui

vit en Espagne) ou professionnel (élèves anglophones qui souhaitent travailler dans

l’import/export). Les élèves préparent un certain nombre d’examens et

certifications pendant l’année : DELF (A2 et B1), CFG (Certificat de Formation

Générale), ASSR2 (Attestation Scolaire Sécurité Routière niveau 2). Ils réalisent en

cours d’année un stage d’observation de deux semaines en entreprise, qui leur

permet de gagner en autonomie, et de se préparer au CFG (rapport de stage).

Lors du passage de l’UPE2A vers la classe ordinaire, Les enseignants du

lycée rapportent un écart de compétences scolaires dans certaines disciplines

(TICE, Techniques d’Information et de Communication dans l’Education, Histoire-

Géographie, Français). Ils relativisent néanmoins, en constatant le « faible niveau

de compétences linguistiques et méthodologique surtout » des élèves ayant réalisé

leur scolarité en France. La faible mixité sociale, et le ressenti des élèves d’une

orientation subie, conduisent à un fort taux d’absentéisme, un manque de

motivation, et un climat de tensions. Certains élèves issus d’UPE2A changent de

comportement lors du passage en classe ordinaire. La motivation peut s’étioler pour

certains d’entre eux, surtout les garçons. Elle se manifeste par un absentéisme au

soutien FLS, qui trouve souvent dans les moqueries des pairs (« on suit des cours

parce qu’on est nul en français » « on a un problème »12). Ils affichent leur volonté

de se fondre le plus possible dans la masse, et de gommer toute individualité liée à

la langue ou aux origines. Pour d’autres, au contraire l’inclusion est vécue comme

un défi. Les anciens élèves d’UPE2A-LP ayant intégré un lycée général semblent

également très motivés, et moins préoccupés du regard d’autrui, suite à des

échanges informels.

Lors des évaluations de positionnement en 2nde, les enseignants proposent à

l’ensemble des élèves plusieurs dispositifs adaptés à leurs besoins : l’Aide

12 Propos d'anciens élèves allophones tenus lors du SFLS chaque année

Page 21: Quelles ressources mobiliser pour favoriser l’inclusion ... · allophones de classe ordinaire dans le lycée où nous exerçons. Nous utiliserons comme outils de collecte de données

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Personnalisée (AP), la Maîtrise De la Langue (MDL) et le Soutien Français Langue

Seconde (SFLS) qui ont lieu tous les jeudis de 16h à 17h. Ces dispositifs destinés à

répondre aux besoins des élèves, peuvent être vécus comme stigmatisants (« je suis

en SFLS car je ne sais pas parler français »). En lien avec le CASNAV de Paris,

nous assurons les heures de SFLS au lycée. Elles peuvent être fixes (heure en

barrette pour les secondes) ou variables avec les élèves de terminale (en fonction de

leurs disponibilités). En principe, le soutien est destiné aux élèves un à deux ans

après leur sortie du dispositif. Nous proposons également à tous les élèves issus

d’UPE2A, une aide linguistique et méthodologique au CDI (Centre de

Documentation et d’Information). A l’approche du Baccalauréat, l’ensemble des

élèves de Terminale disposent également d’une aide méthodologique. D'autre part,

une réunion entre le CASNAV et les enseignants de SFLS en mars 2017 a conduit à

une réflexion collective autour des modalités du soutien et de la mise en place d’un

vade-mecum à destination des établissements. Après discussions autour des

pratiques de chacun nous convenons de la possibilité d’ouvrir le soutien FLS à des

élèves qui ont fait leur scolarité en France, manifestant des besoins spécifiques en

FLSco. Cela permettrait de ne plus stigmatiser les élèves ayant suivi un parcours en

CLA ou UPE2A, pour se focaliser sur le renforcement des compétences

linguistiques, culturelles et sociales qui composent le FLSco.

C’est dans ce contexte global et local, que nous mettons en place une

démarche de recherche. Elle vise à dégager un certain nombre de données autour

d’une problématique, axée sur les ressources à mettre en place à partir de freins et

leviers observés dans l’établissement.

1.3 MISE EN PLACE D’UNE MÉTHODOLOGIE

L’étape de la mise en place d’une méthodologie nous permettra d’avoir un

axe et de nous situer dans différents champs disciplinaires. Nous nous interrogeons

d’abord sur notre propre démarche de chercheur, avant d’explorer des concepts

issus des domaines de la Sociolinguistique, de la Didactique du FLS et du FLSco,

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de l’Ethnologie de la communication et de l’Ethnolinguistique. L’appui sur des

domaines scientifiques et démarche autoréflexive, nous permettent de construire

des outils de collecte de données en adéquation avec notre problématique.

1.3.1 Démarche réflexive et méthodologique

Dans notre contexte professionnel et de recherche, nous adoptons différentes

postures : enseignante de Lettres en UPE2A, documentaliste au CDI, chercheure

dans les observations et entretiens avec les classes et individus. Il nous semble

indispensable d'avoir une démarche réflexive par rapport à notre parcours et à notre

pratique quotidienne au sein de l'établissement. Plutôt que de compartimenter les

tâches, nous préférons inscrire notre travail de recherche dans un continuum

professionnel et personnel auprès du personnel éducatif et des élèves. La recherche

biographique nous permet de plonger au cœur de nos motivations professionnelles

et personnelles et d'assumer notre part de subjectivité, d’avoir une distance critique

sur nos propres représentations. Les données objectives côtoient l'affectif. Le fait de

choisir le champ des Sciences Humaines nous conduit forcément à composer avec

la complexité des représentations de chacun (enseignants, élèves, nous-mêmes).

L'objectif de la démarche autoréflexive est de « se décentrer pour objectiver nos

représentations » (MOLINIE, 2015 : p.33).

Notre objet de recherche prend en compte le vécu et le ressenti des sujets que

nous avons suivis, ainsi que leurs interlocuteurs adultes et adolescents. A travers la

biographie langagière des sujets, nous tenterons de faire émerger les freins et les

leviers qui participent à la mobilisation, ou pas, de leurs compétences scolaires. Le

récit du parcours individuel est abordé avec les élèves de manière directe, durant les

entretiens et les dessins réflexifs (élèves). Il leur est demandé de faire le récit du

parcours langagier et scolaire avant d’aborder leur ressenti et leur avis sur les

apprentissages et les expériences quotidiennes dans l’établissement et hors

établissement.

Afin de comprendre au mieux le processus de récit de vie, et avoir une

distance critique sur nos propres représentations, nous avons mis en place une

démarche auto-réflexive par la tenue d’un journal de bord rédigé. Il devient vite une

contrainte. Nous lui préférons un carnet « de recherche créative » (Annexe 4), qui

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synthétise notre pensée et nos idées à un moment T.. Il se matérialise par des mots,

des dessins, des schémas, des phrases… Il nous permet de conscientiser certains

concepts, de prendre du recul. Il constitue un outil de visualisation globale des

concepts et des pratiques en cours, sans passer nécessairement par la construction

verbale.

Nous favorisons une recherche action. Elle se fonde sur deux champs qui

peuvent être considérés dans le langage courant comme antithétiques : la recherche

et la pratique. La recherche en Sciences Humaines et Sociales (SHS) a pour

particularité d’étudier des sujets parlant, actant, et non des objets. Les personnes

réagissent au fait d’être observées, les interactions peuvent varier d’un moment à

l’autre, d’un lieu à l’autre, d’une personne à l’autre. La vie sociale n’est pas un

laboratoire dont les données sont reproductibles à l’infini. Aussi il ne peut y avoir

de vérité définitive ou de généralisation des données observées et analysées. Notre

finalité n’est pas de viser une supposée neutralité, mais d’opérer une

« objectivation, à savoir une démarche critique et constructive » (BLANCHET,

2010 : p.9).

Notre recherche se définit comme exigeante, faisable, de courte durée,

nécessitant un travail en équipe, et respectant une éthique (NARCY-COMBES,

2001 : p.45). Elle suppose à la fois une rigueur dans la construction et la

vérification d’hypothèses (respect des conventions, distanciation, objectivation) et

une démarche créative, dans laquelle le chercheur s’approprie personnellement les

connaissances et les confronte à la vie réelle. Nous nous inscrivons complètement

dans cette démarche, où nous nous positionnons à la fois comme acteur conscient

de ses représentations et des enjeux professionnels et personnels que la recherche

implique, et comme chercheur par une prise de distance, étayée par une

méthodologie et s’appuyant sur des théories scientifiques en didactique des langues,

en sociolinguistique, en ethnolinguistiques et en pédagogie.

Dans notre pratique quotidienne, nous agissons avec beaucoup

d’enthousiasme. Notre engagement est le moteur qui va nous conduire à mener des

actions, développer notre créativité. La subjectivité, portée par notre expérience et

nos représentations personnelles va déclencher notre envie d’agir, déclencher la

motivation. Elle est pondérée par la démarche scientifique, qui la cadre par des

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connaissances et une méthodologie de recherche rigoureuses, et nous permet une

mise à distance critique.

Nous avons d’abord construit un cadre théorique pour nous interroger sur

l’objet de recherche, sa faisabilité, les questionnements qu’il soulevait, nos

motivations profondes. Du mois de septembre à décembre nous avons beaucoup lu

et exploré de champs théoriques et disciplinaires ; afin de donner une direction la

plus claire possible à notre recherche, en prenant en compte le terrain que nous

côtoyions. Nous avons ainsi construit des outils pour articuler la posture de

chercheur avec la démarche d’action, et donner du sens à notre action.

L’observation d’un terrain humain, non reproductible, nous amène à choisir

une démarche empirico-inductive qualitative, et à construire des outils

d’observation et d’analyse adaptés à cette démarche.

Le projet d’une méthode Empirico déductive est de proposer une compréhension (une interprétation) de phénomènes individuels et sociaux observés sur leurs terrains spontanés, en prenant prioritairement en compte les significations qu’ils ont pour leurs acteurs eux-mêmes et donc en vivant ces phénomènes aux côtés des acteurs, comme un acteur parmi d’autres mais selon des procédures méthodiques qui garantissent la significativité des situations observées et comparées et qui exploitent consciemment les relations intersubjectives entretenues au sein du groupe, notamment celles où le chercheur est impliqué (Philippe BLANCHET, 2010 : p.16).

1.3.2 Construction d’outils d’observation

Notre démarche est qualitative. Il s’agit de suivre un nombre restreint

d’élèves. Notre objectif est d’observer au sein d’un lycée professionnel les

représentations et les pratiques langagières d’élèves et d’enseignants afin d’établir

un diagnostic et faire des propositions d’actions pour favoriser l’inclusion des

élèves d’UPE2A en classe ordinaire à travers des observations de classe, des

entretiens, des dessins réflexifs et des productions d'élèves. Nous souhaitons

travailler sur le parcours biographique et scolaire des élèves pour construire des

outils d’intégration et d’autoévaluation que l’apprenant peut s’approprier, et

l’enseignant accompagner (MOLINIE, 2004 : pp.87-95).

Nous démarche est aussi quantitative : suite aux observations de classes, nous

avons proposé aux élèves des classes des élèves suivis un questionnaire sur les

pratiques linguistiques et l'attitude face au langues dans la classe. Deux questions

finales porteront sur le relationnel avec des élèves nouvellement arrivés en France

qui intégreraient la classe.

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Nous mettons en place des outils pour obtenir des données analysables. La

rencontre entre les théories, les méthodologies, le terrain de recherche et l’axe de

réflexion nous amène à construire des outils qualitatifs liés à l’observation (grille)

et à l’entretien (guide de questions), et des outils quantitatifs (questionnaire). S’ils

doivent permettre de répondre aux questions : Comment mesurer les représentations

des enseignants ? des élèves suivis ? des autres élèves (ayant suivi leur scolarité en

France) ?

Nous élaborons des grilles méthodologiques nous permettant de gérer des

observations, des entretiens et des questionnaires (Annexe 5). Concernant les

données sur les élèves suivis, nous constituons un tableau informatif sur excel, et

constituons un dossier personnel où nous rassemblons toutes les données le

concernant (productions, dessins, scolarité…). Nous avons conscience que le terrain

est imprévisible, et que celui-ci nous conduira progressivement d’une observation

en retrait des classes, à une participation dans la classe, jusqu’à une animation à

travers les questionnaires.

Nous souhaitions suivre au départ d’anciens élèves d’UPE2A qui réalisent

leur scolarité au lycée, ou dans un autre établissement. Très vite nous nous sommes

confrontés à plusieurs obstacles :

- D’une part, la faisabilité. Le suivi d’élèves dans un autre établissement

présente des difficultés quant aux autorisations d’observation dans les

classes d’enseignants inconnus. Le fait de travailler à temps plein dans le

lycée présente également une contrainte liée aux horaires.

- D’autre part la pertinence. Nous avons choisi comme terrain de recherche le

lycée. En fin de compte, il nous paraît progressivement hors contexte

d’effectuer le suivi d’anciens élèves qui fréquentent d’autres

établissements. Nous resserrons notre champ de recherche au lycée

puisque les actions menées, après analyse des données, se feront dans

l’établissement où nous exerçons. Nous envisageons cependant

d’effectuer un entretien avec une élève d’UPE2A-LP ayant basculé en

filière générale afin de comprendre les facteurs de réussite de cette

dernière.

Nous mettons en place un protocole de recherche concernant les entretiens et

les observations. Pour les observations, nous adaptons les grilles fournies lors du

Page 26: Quelles ressources mobiliser pour favoriser l’inclusion ... · allophones de classe ordinaire dans le lycée où nous exerçons. Nous utiliserons comme outils de collecte de données

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MASTER1 à la Sorbonne-ENEAD l’année dernière. Pour les entretiens, nous

puisons dans la littérature scientifique afin de construire des guides qui présentent

une progression tout en restant suffisamment ouverts aux imprévus. D’autre part,

nous travaillons énormément sur le savoir-être et la bienveillance qui mettrons en

confiance nos informateurs. Pour le questionnaire, nous nous nourrissons de

travaux de recherche sur le plurilinguisme et les représentations des langues dans la

construction de la première partie. Pour la seconde partie, des discussions avec

notre directrice de mémoire nous permettent d’élaborer des questions ouvertes en

relation avec l’accueil d’élèves issus d’UPE2A dans la classe ordinaire.

La consultation du dossier des élèves constitue le premier élément de suivi

analysable directement : d’où vient chaque élève ? Quel est son parcours scolaire en

France, parfois à l’étranger ? Quel est son environnement familial (parents en

France, famille en France, fratrie, mineur isolé) ? Quel était son niveau scolaire et

linguistique à son arrivée (résultats tests CASNAV), comment sa scolarité a-t-elle

évoluée (bulletins scolaires) ? Ces données extrêmement personnelles ont été mises

à notre disposition par la direction du lycée qui nous fait entièrement confiance

quant à la confidentialité des informations.

Les résultats aux examens passés les années précédentes par les élèves suivis

(DELF, DNB, CFG, ASSR2), nous permettront d’évaluer leur degré de réussite

scolaire. La thèse de Mme MENDONCA-DIAS nous offre un cadre

méthodologique pour analyser les données, et les mettre en perspective dans un

contexte spécifique. Les enseignants sont disposés à nous fournir des copies des

productions écrites des élèves suivis, et une élève nous a remis son cahier

personnel.

Les observations font l’objet d’une réflexion préparatoire : qu’allons-nous

collecter comme informations ? Nous élaborons au départ une grille d’observation

très détaillée qui va évoluer dans la pratique du terrain vers un tableau plus libre et

manipulable (Annexe 6). Nous dévoilons à la classe, avec la complicité de

l’enseignant et des élèves suivis, un objet de notre présence factice : « je viens vous

observer, non pas en qualité d’enseignante-documentaliste, mais en tant que

chercheuse. J’effectue actuellement un Master 2 en Didactique des langues

(comment on les enseigne) et je vais observer les interactions en classe, comment la

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parole circule entre vous, avec l’enseignant… Je vous remercie tous de votre

accueil ».

La méthode d’entretien : Concernant les élèves suivis, l’entretien part de leur

parcours biographique (langagier, scolaire) pour se recentrer progressivement sur

son expérience au sein du lycée, (relations, apprentissages). Les entretiens seront de

type compréhensif (Kauffmann, 2011). Nous élaborons un guide afin d’avoir une

progression dans l’échange (Annexe 7). Il nous sert de conducteur durant

l’entretien. Nous favorisons la fluidité et la prise de parole par l’interlocuteur. Les

questions sont préparées à l’avance pour avoir une trame, mais ne doivent pas

entraver l’expression des informateurs. Elles sont de type ouvert. Nous favorisons

une démarche assez spontanée, tout en structurant l’entretien par une trame

construite en amont. Les questions portent leur parcours personnel avec le dessin

réflexif comme déclencheur/ support de parole, et leur ressenti global sur

l’ambiance de la classe ordinaire, les apprentissages (difficultés/facilités), le

répertoire langagier, l’avenir.

Les entretiens avec les enseignants font suite à l’observation de classe. Avant

chaque entretien nous leur rappelons notre démarche : dans le cadre du Master 2

FLE/FLS nous allons les interviewer au sujet des élèves allophones présents dans la

classe en vue d’améliorer le travail d’inclusion en classe ordinaire (Annexe 8).

Nous ne souhaitons pas réaliser de questionnaire annexe à l’entretien. Cela nous

obligerait à prendre des notes durant l’échange avec les enseignants, ce qui risque

de les déstabiliser ou de modifier les conditions d’interaction. Le fait de les

interroger sur leurs pratiques les expose à une réflexion sur leurs propres

représentations. En amont, nous devons insister sur le non-jugement de la

démarche. L’enjeu est d’améliorer l’inclusion en classe ordinaire des élèves

allophones par une réflexion commune et la co-construction d’outils facilitant cette

inclusion.

Les entretiens avec les élèves suivis se réalisent une fois les observations

terminées. Chaque élève doit faire signer à son tuteur légal une autorisation de

diffusion dans le mémoire des transcriptions des échanges issus de l’entretien. Le

déroulement prévu des entretiens : L’élève arrive avec son dessin réflexif, qui sert

de point de départ à l’échange. Ce dernier a lieu au CDI qui est un espace assez

neutre dans l’établissement, où tout est fait pour mettre les élèves en confiance. Le

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dessin permet d’avoir un support de parole. Il suit un protocole mais s’adaptera en

fonction des interactions avec chaque élève. Concernant le dessin réflexif, avant

chaque entretien, nous demandons aux élèves suivis de dessiner leur parcours

scolaire, « toi et l’école, ici et ailleurs ». Le dessin n’est pas analysé avec l’élève de

manière approfondie. Il doit servir de déclencheur de parole, de support pour

visualiser leur parcours. Lors de la présentation et l’analyse des données, il pourra

nous fournir des informations sur la manière dont les élèves ont pu vivre la rupture

liée à leur migration et leurs représentations de l’école.

Le questionnaire (Annexe 9), à destination des classes ordinaires où se

trouvent les élèves suivis, constitue un point d’ancrage qui lie et fait participer tous

les élèves. Au départ prévu pour être diffusé au CDI, il s’impose comme élément

d’interaction avec les classes des élèves suivis (nous le développerons

ultérieurement). Il permet d’avoir le point de vue des élèves de la classe, y compris

les élèves allophones, sur les représentations du plurilinguisme et des élèves

nouvellement arrivés. D’autre part, il nous permet d’identifier la place des langues

au sein du lycée. Beaucoup d’élèves ne sont pas identifiés comme allophones, sont

nés sur le territoire français ou sont arrivés très jeunes en France, et présentent

comme L1 ou langue maternelle une autre langue que le français.

1.3.3 Méthodologies adoptées

Notre objectif est de comprendre si l’élève issu d’UPE2A s’est familiarisé

aux situations de communication et d’apprentissage dans la classe avec ses pairs et

l’enseignant. Nous utiliserons une démarche ethnométhodologique en collectant les

données dans le cadre d’interactions de terrain dans les classes par des observations

concrètes de séances dans différentes disciplines. Nous nous appuierons également

sur les méthodologies de recherche en relations avec les interactions verbales, les

pratiques langagières lors des observations de classe. Aussi nous ferons l’analyse

des interactions verbales (observations de classes) en nous reposant sur les travaux

de KERBRAT-ORECCHIONI et sur l’Anthropologie des pratiques langagières.

Les travaux en Anthropologie de la communication nous permettront également

d’analyser le non verbal. Les discours des enseignants et des élèves sur le

comportement et les compétences scolaires des élèves (entretiens, documents

scolaires) feront l’objet d’une analyse du discours visant à dégager les

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représentations de chacun sur les difficultés et les leviers, sur les spécificités des

élèves issus d’UPE2A et leurs similitudes avec les autres élèves.

L’ethnologie de la communication et l’ethnolinguistique se dessinent

progressivement au contact du terrain. Elles constituent un positionnement

personnel face aux entretiens et aux observations de classe. Nous analyserons ainsi

les données avec un œil nouveau et orienterons notre problématique sur les discours

et les pratiques de classe des élèves et enseignants face aux langues, et à l’Autre.

Nous avons pu constater des sources de malentendus (non prise de parole) dues à

des perceptions différentes des interactions de classe des élèves allophones et des

enseignants. Ces malentendus peuvent trouver leur source dans des pratiques

culturelles verbales et non verbales de l’individu. L’ethnolinguistique offre une

approche à la fois globale et détaillée de la situation de parole. Elle met en valeur

l’aspect culturel que peut avoir tout fait de langage. L’ethnologie de la

communication donne quant à elle des clés pour comprendre les aspects

paraverbaux et non verbaux des interactions. Ces deux champs nous sont

particulièrement utiles lors de la confrontation au terrain.

1.4 PRÉSENTATION DES INFORMATEURS

Une fois la problématique élaborée et les outils méthodologiques mis en

place, nous sommes prêts pour nous confronter au terrain. Dans un premier temps,

nous réalisons le profil de chaque élève suivi et de visualiser le parcours de chacun,

et d’organiser la collecte de données. Nous allons ensuite à la rencontre des

enseignants à qui nous présentons notre démarche, notre problématique, et leur

demandons de pouvoir observer leurs classes et éventuellement nous entretenir avec

eux.

1.4.1 Parcours des élèves suivis

L’accès aux dossiers scolaires de chaque élève, ainsi que les échanges

verbaux au CDI nous permettent de construire leur parcours linguistique, scolaire et

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personnel de chacun, pour mieux comprendre les enjeux qui nous préoccupent :

l’apprentissage, l’orientation, mais aussi le terrain relationnel et affectif. En effet,

derrière chaque prénom se situe une histoire, une personnalité, un rapport

particulier avec le chercheur, l’enseignant, le documentaliste que nous sommes. Les

élèves sont présentés dans l’ordre chronologique de leur arrivée en France. L’accès

à leur dossier nous a permis de suivre leurs bulletins scolaires depuis la classe

d’accueil ou l’UPE2A jusqu’à présent et de relever leurs évolutions dans la maîtrise

des compétences. Un tableau récapitulatif nous permet de définir leur profil

(Annexe 10).

Aminata est arrivée du Sénégal en 2010. Elle a 19 ans. Elle redouble sa

terminale, et n’a que dans certaines matières : Prévention Santé Environnement

(PSE), Français, Gestion, Anglais, Histoire-géographie et Administration. En effet,

elle a le bénéfice du Baccalauréat en Espagnol, Mathématiques et Économie-droit.

Elle fait partie d’une classe expérimentale où tous les élèves ne préparent que les

épreuves qu’ils ont échouées, ainsi que leur projet post-bac. L’élève continue le

soutien en français au lycée et dans une association, en dehors du lycée. Elle a

commencé sa scolarité en France en septembre 2011, en classe de 4ème FLER

(Français Langue Etrangère Renforcé, à destination des élèves déjà francophones) à

14 ans. Malgré de très bons résultats en matières scientifiques (17,1 en

Mathématiques, 13,3 en Sciences Physiques et 15 en SVT) elle a été orientée en

3ème Préparation Professionnelle (3PP) au lycée à la rentrée 2012.

Bhagya est au lycée depuis 2015. Elle est arrivée du Sri Lanka en 2011, et a

suivi une CLA en collège durant un an avant d’intégrer une 2nde Commerce au

lycée. Pilier du CDI et du SFLS lors de son année de seconde, elle nous a confié

son classeur de classe d’accueil l’année dernière pour nous aider dans la

construction de nos cours en UPE2A. Elle est dans la classe qui a participé au projet

« 10 mois d’école et d’Opéra », mais l’opéra l’ennuie. Cette année, elle est en 1ère

Commerce. Les élèves ont un vague souvenir de sa provenance d’ailleurs parce

qu’elle parle parfaitement anglais. « Bhagya est passée par une classe d’accueil ? »

: certains enseignants manifestent leur surprise lorsque nous demandons à

l’observer en classe, parce qu’elle suit en cours, parce qu’elle est devenue une

adolescente qui se fond dans la masse, bavarde, désertant le CDI, mais visiblement

très épanouie avec ses camarades et assidue pour les matières qui lui plaisent. Elle

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est entrante dans la langue à son arrivée en France. Elle suit une année de CLA à

partir de septembre 2011, puis intègre une classe de 4ème en 2012 où elle suit un

double cursus FLE / classe ordinaire avant d’être incluse complètement en 3ème où

ses notes en matières scientifiques et en français chutent alors qu’en technologie

elle passe de 6 le 1er trimestre à 16,70 le 3ème trimestre.

Rose vient de République Démocratique du Congo francophone en 2013. Elle

a 16 ans. Elle intègre une CLA-niveau 5ème à la rentrée 2013. Bien qu’elle ait été

scolarisée en français, elle est dans le groupe des débutants et connait de grosses

difficultés dans la maîtrise de la langue. Les enseignants constatent des faiblesses

dans les matières nécessitant le français et en Mathématiques. En revanche, elle

obtient de bonnes moyennes en EPS, Éducation musicale et Arts plastiques. Sa

scolarité au collège est marquée par des évaluations notant son manque de

concentration et de travail personnel. Elle arrive néanmoins à obtenir la moyenne

dans toutes les matières en 3ème sauf en Mathématiques. Elle sera orientée en

baccalauréat professionnel au 3ème trimestre. Son entrée au lycée est marquée par de

très faibles notes, où elle n’obtient la moyenne qu’en Arts appliqués et EPS. Elle

fréquente assidument le CDI et le SFLS. En classe, les enseignants se plaignent de

son mutisme et de sa dispersion. En cherchant dans son dossier scolaire, nous

constatons qu’elle traîne cette réputation d’élève sympathique mais bavarde et pas

très travailleuse. Qu’est-ce qui la freine dans la motivation ? la langue ? le niveau

ou les codes scolaires ? Rose est dans la même classe qu’Adama, avec qui elle

communique peu. Son parcours fait état de grosses difficultés scolaires. Nous

n’arrivons pas à saisir si celles-ci sont dues à une démotivation, ou au contraire, en

sont la cause. Quand elle a su qu’elle faisait l’objet d’un suivi, elle nous a confié un

cahier dans lequel elle écrit.

Sedray a suivi une scolarité en Algérie jusqu’à l’âge de 13 ans. Il a été

scolarisé en langue arabe et a appris le français comme LVE (Langue Vivante

Etrangère) à l’école, deux heures par semaine. Il est arrivé d’Algérie en 2013 et a

intégré une classe d’accueil de collège du 19ème arrondissement de Paris en 2014,

niveau 4ème. Elève au lycée depuis la rentrée 2015, il a d’abord effectué une 3ème

Prépa Pro, avant de se diriger en seconde vente (2V) cette année. Il a réussi le DNB

avec mention « assez bien » lorsqu’il était en 3ème. Il est actuellement délégué de sa

classe. Il est très curieux, pose des questions et n’a pas peur de la prise de parole ; à

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tel point que, selon l’un de ses professeurs, il peut « saoûler » tout le monde,

enseignant et élèves. Il s’exprime très bien à l’oral, maîtrise les codes, et se laisse

parfois emporter par son enthousiasme. D’abord réfractaire au soutien FLS, car

il « ne voit pas à quoi ça sert de faire du soutien », il en devient un pilier. Nous

devons vraiment veiller, durant les observations, à ne pas me laisser piéger par

l’affection que nous avons pour cet élève.

Nous connaissons Adama depuis septembre 2015, lorsqu’il a intégré le

dispositif UPE2A. Il arrivait du Sénégal. Il souhaitait s’orienter vers un CAP

cuisine l’année dernière mais n’a pas pu participer aux entretiens du passpro. Il a

intégré une 2nde Gestion-Administration (2GA) cette année par défaut, et du fait

qu’il a progressé d’une manière spectaculaire en maîtrise du français lors de son

passage en UPE2A. Adama parlait peu. Il parle toujours peu. Il s’illumine quand il

réussit, comme lors de l’annonce de la meilleure note de la classe à l’ASSR2. Il y a

pourtant un ombre sur son parcours : nous ne trouvons que les informations

relatives à cette année dans son dossier, plusieurs fois l’assistante sociale a

demandé aux enseignants de faire preuve d’empathie à son égard, sans que nous

sachions pourquoi. Nous ne nous souvenons plus s’il est passé par une UPE2A-

ENSA. Il fait son métier d’élève, s’accroche, mais le son de sa voix est à peine

audible. Est-ce dû à son accent qu’il n’assume pas ? Au fait qu’il soit timide ? Il

venait en début d’année au soutien, puis a déserté lorsqu’il a fait l’objet de

moqueries parce qu’il va en soutien « pour les étrangers ». Nous l’avons vu

plusieurs fois dans la cour discuter avec Sadjo. De quoi parlent-ils ? du Sénégal ?

de leur classe ? de leurs cours ? d’histoires d’élèves ordinaires ?

Jaime est arrivé de Colombie avec sa famille courant 2015. Il était l’année

dernière en UPE2A au lycée, comme Jonah et Adama. Il a fréquenté une académie

militaire en Colombie (établissement privé). Les évaluations du CASNAV ont

montré qu’il était entrant dans la langue (niveaux A1 ou NF) et a fait une

performance de 5,5/20 niveau 4ème en Mathématiques. Durant son année en

UPE2A, il était très absentéiste. Il a néanmoins obtenu de bons résultats dans toutes

les matières enseignées sauf en Français. Dans la classe de 2nde Commerce qu’il a

intégrée à la rentrée 2016, il se lie beaucoup avec les autres élèves et prend sous son

aile les élèves d’UPE2A hispanophones pour les orienter, les conseiller. Il fréquente

très peu le CDI et le soutien SFLS, qu’il associe à des difficultés. Il passe cependant

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de temps en temps au CDI pour avoir des exercices de grammaire contrastive et

discuter. Lors de nos échanges nous parlons indifféremment français et espagnol.

Jonah a effectué sa scolarité en Guinée-Bissau, puis au Portugal. Il a effectué

sa scolarité en trois langues: en créole en Guinée-Bissau jusqu’à l’âge de 8 ans, en

portugais au Portugal de 8 ans à 15ans, puis en français depuis l’âge de 15 ans. Il

est arrivé du Portugal en juin 2015, après avoir quitté la Guinée-Bissau avec son

père et sa sœur aînée, Carolina, qui était aussi en UPE2A. Il a intégré l’UPE2A à la

rentrée 2015, avec Adama et Jaime. Jonah, qui avait seulement 15ans au sortir de

l’UPE2A, s’est orienté en 3ème Préparation Professionnelle (3PP) à la rentrée

2016/2017. Il a eu l’année dernière l’ASSR et prépare cette année le DNB. Cette

année, il a été séparé de Caroline, qui a choisi une orientation en Bac Pro dans un

autre établissement. Alors qu’elle a réussi le CFG et le DNB, Jonah a échoué aux

deux. Il avait 15 ans, soit 2ans de moins que son aînée. Il vient au CDI à chaque

récréation, à chaque fois qu’il a une heure de libre. Il a sympathisé avec d’autres

élèves de première qui fréquentent aussi le lieu. Il fait partie de l’équipe de football

du lycée depuis l’année dernière.

Sadjo vient du Sénégal. Sa langue maternelle est le wolof. Elle a suivi sa

scolarité en Français. Durant sa scolarité au Sénégal (à Thiès), elle n’a pas été

formée aux TICE. Elle est arrivée avec son père et son petit frère, Mouhamed en

septembre 2016. Ils sont hébergés également par le SAMU social à l’hôtel, d’abord

dans le 18ème arrondissement, à côté du lycée, puis à l’autre bout de Paris, les

contraignant à de longs trajets quotidiens. La fratrie a été placée dans la classe

d’UPE2A du lycée en septembre 2016. Elle a commencé l’année scolaire 2016-

2017 dans le dispositif UPE2A avant d’être orientée au second trimestre en classe

ordinaire de 2nde « Accueil » (2A). Après une période d’observation au premier

trimestre, elle est incluse dans la classe qui correspond le plus à ses vœux

d’orientation.

Les enseignants de 2nde sont partagés sur la rapidité de son inclusion, car il

s’agit d’une classe réputée très difficile, où une bonne partie du temps est consacrée

à la gestion du comportement de certains élèves. D’autre part, elle semble faire

l’objet de moqueries par rapport à son niveau, son accent et son physique

(conversation avec un membre de l’équipe enseignante qui a dû recadrer des élèves

de la classe).

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1.4.2 Présentation des autres acteurs du terrain

Afin de mieux cerner les leviers et les freins à la réussite des élèves issus

d’UPE2A en classe ordinaire, nous avons sollicité d’autres acteurs dans

l’établissement afin qu’ils nous fournissent des informations sur les compétences

des élèves. Nous analyserons leurs représentations des élèves, qui peuvent avoir

une influence sur ces derniers. Nous demandons aux équipes pédagogiques des

classes des élèves suivis l’autorisation de réaliser des observations et

éventuellement de réaliser un entretien suite aux observations. Tous les enseignants

acceptent de nous accueillir dans leur classe, et seul un enseignant refuse

l’entretien. Les observations se font en fonction des emplois du temps et nous

essayons de couvrir un maximum de disciplines : français, langues vivantes

étrangères, maths et matière professionnelle. Le hasard des rencontres a fait que,

lors d’une observation l’infirmière était présente. Nous avons fait un retour sur la

séance à trois avec l’enseignante, puis avons échangé sur le bagage langagier de

chacun, le rôle de la langue et de la culture dans le parcours de chacun, et que

mettre en place pour favoriser la réussite d’une majorité des élèves du lycée. Aussi

nous avons convenu d’un entretien autour de notre problématique et de ses

représentations des langues.

Nous sollicitons d’abord la proviseure du lycée pour accéder aux données

relatives aux élèves, mener les entretiens dans l’établissement et réaliser les

observations de classes. Elle nous donne carte libre pour les observations, les

recherches d’informations dans les dossiers des élèves et les entretiens au sein de

l’établissement (au CDI). Nous pouvons alors contacter les élèves du SFLS pour

avoir leur accord. Certains acceptent, d’autres ne souhaitent pas être suivis.

Concernant les enseignants, nous recherchons les personnes potentiellement

concernées (enseignants dans les classes des élèves suivis), nous vérifions leurs

disponibilités. Nous abordons chacun d’entre eux de manière différente en fonction

de nos liens : nous prenons contact de façon plus formelle avec ceux qui présentent

un faible lien, alors que la prise de contact est plus directe, plus informelle avec les

enseignants les plus proches. Nous expliquons à chacun notre démarche de

recherche-action et insistons sur le fait qu’ils constituent des partenaires précieux

pour co-construire des actions pour améliorer l’inclusion des élèves allophones. A

notre grand soulagement, tous acceptent avec enthousiasme notre présence au sein

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de leurs classes. En revanche, certains ne souhaitent pas participer aux entretiens

enregistrés

Au niveau des observations de classes, nous nous mettons d’accord avec les

enseignants et les élèves suivis : les élèves de la classe ne doivent pas être au

courant de notre motivation première (suivi d’anciens élèves allophones) afin de ne

pas stigmatiser les élèves suivis, qui peuvent faire l’objet de moqueries. D’autre

part, leur fournir la totalité des informations pourrait biaiser les observations. Ces

dernières vont certainement engendrer des modifications de comportements et

d’interactions des élèves et enseignants, dont nous devrons tenir compte lors de la

phase d’analyse.

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2 - CHAPITRE 2 : COLLECTE DE DONNÉES SUR LE

TERRAIN

Après avoir contextualisé notre recherche et développé des outils de collecte

de données, nous nous confrontons au terrain durant plusieurs semaines. Les

observations et les entretiens s’enchaînent. Nous nous faufilons dans les classes,

tentant d’être le plus discrètes possible. Nous fixons des rendez-vous aux

enseignants et aux élèves suivis au CDI pour réaliser les entretiens. Le

questionnaire finalise notre action dans les classes, et intègre le point de vue des

élèves de classe ordinaire. Nous décidons d’arrêter une date, le mois d’avril, pour

rassembler l’ensemble de nos données, les synthétiser, puis les confronter à notre

problématique et à nos hypothèses dans une 3ème partie afin de pouvoir mettre en

place une action au sein de l’établissement.

2.1 LES PRATIQUES LANGAGIÈRES DES ÉLÈVES DE CLASSE

ORDINAIRE

2.1.1 Le jeu des interactions dans les observations de classe

Les observations en classe ordinaire se déroulent du 24 février au 27 mars

2017 sur plus de 30 heures (Annexe 11). Nous nous présentons en début d’heure et

expliquons les raisons de notre présence. Beaucoup d’élèves-types nous connaissent

comme « la dame du CDI », aussi nous prenons un temps d’échange en début

d’heure pour nous positionner comme étudiant-chercheur. Nous ne mentionnons

pas le suivi des élèves qui ont été en situation de CLA/UPE2A. En effet, nous

souhaitons que les autres élèves conservent un comportement « habituel », et

surtout, ne voulons pas stigmatiser les élèves suivis. Lorsque les classes nous

demandent la raison de notre présence, nous leur expliquons (en accord avec les

enseignants et les élèves suivis qui ont été consultés précédemment) que nous

venons observer la circulation de la parole en classe, et les échanges entre élèves et

élèves-enseignants. Nous nous plaçons en fond de salle, de manière à pouvoir

observer l’ensemble de la classe et les élèves suivis. Notre posture première est de

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ne pas intervenir dans le déroulement du cours. Lorsque les élèves réalisent des

activités de groupe, les enseignants peuvent nous demander de s’intégrer à un

groupe, de préférence celui où se trouve l’élève suivi. D’autres observations se

réalisent au quotidien hors de la classe, essentiellement au CDI durant le SFLS ou

lors des récréations ou des heures de permanence, ou encore lors de sorties scolaires

(Salon du Livre de Paris, séance au cinéma Le Louxor ).

La classe est le lieu de conventions communicatives pré-établies, faisant

l’objet du contrat didactique entre l’enseignant et l’apprenant. La langue a une

fonction communicative, elle représente un outil langagier ayant une valeur

métalinguistique. Chaque classe a ses propres habitudes de communication, chaque

discipline son type de discours. Les habitudes didactiques répondent à un certain

nombre de contraintes : l’enseignant est le « maître de parole » (CICUREL, 1986 :

104) . Il dirige les échanges, oblige à parler, fait taire, a le dernier mot, évalue les

productions et sanctionne en cas de transgression. Il a l’obligation d’annoncer ce

qui va être fait, de baliser son discours pour savoir où en sont les apprenants,

d’effectuer des remédiations, de théâtraliser le savoir et de faire réfléchir sur les

contenus en opérant une métacognition L’élève a le droit d’intervenir à condition

d’y être autorisé, d’endosser son « métier d’élève ». Cependant, le terrain montre

que ces schémas d’enseignants et élèves idéaux sont mis à l’épreuve de la réalité,

chacun portant son bagage linguistique, scolaire et personnel.

Les observations de classe nous permettent d’avoir des éléments

d’interactions non verbaux et de saisir la parole en contexte, en dehors du discours

en face à face. Nous essayons de regrouper les temps d’observations de classes sur

une ou deux semaines, afin que les élèves se familiarisent à notre présence et

puissent être le plus spontanés possible. Nous sommes témoin de ce que WINKIN

appelle le « flot communicationnel » (2001 :13) au sein de la classe : les tours de

parole s’enchaînent et les discours des différents acteurs varient (consignes, exposé,

questions, réponses, injonctions, explications de notions, commentaires, insultes,

discussion personnelle…).

Nous distinguons une grande hétérogénéité de situations et de pratiques de

classe. Nous arrivons cependant à dégager des similitudes dans l’attitude des élèves

suivis au sein de la classe. Tous ont acquis les codes scolaires et choisissent de

pratiquer, ou pas, le « métier d’élève », en fonction des disciplines ou des situations

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de classe. Tous ont leur matériel et prennent des notes, même les plus décrocheurs.

D’autre part, tous ont mis en place des méthodes d’apprentissage (souligner de

différentes couleurs, suivre la lecture d’un document avec la pointe d’un stylo, se

parler à voix haute lors de la réalisation d’exercices ou de la lecture de consignes).

Concernant le placement spatial dans la classe, nous constatons que les élèves

suivis se placent devant, parfois isolés du groupe, ou proches des élèves « amis »,

leur « binôme » ou leur « bande » comme ils les appellent. Ce positionnement, face

à l’enseignant, leur permet, de voir et entendre plus facilement, mais aussi de mettre

une distance symbolique avec les autres élèves. Cette attitude favorise les

apprentissages mais peut avoir une incidence sur l’intégration au groupe classe. Par

exemple, lorsqu’un élève cherche la complicité de Jonah en lui demandant « eh

Jonah, je te fais rire ? », Jonah ne le regarde pas et continue à écrire.

Les observations de classes nous fournissent une matière dense en termes

d’interactions de classe. L’enseignant joue un rôle majeur dans l’ambiance de

classe, la prise de parole des élèves avec lui ou entre eux. Il étaye, recadre, distribue

la parole, fournit des connaissances, les vérifie…. Nous avons pu observer des

cours magistraux, des travaux de groupes, des présentations orales de productions,

des contrôles au cours desquels l’enseignant tient lieu de chef d’orchestre qui donne

le ton. Les enseignants peuvent prendre un temps pour intervenir et recadrer les

comportements jugés comme irrespectueux. Ainsi, dans la classe de Sedray13, les

surveillants apportent une enveloppe contenant des courriers à remettre aux

familles. Certains élèves rient en entendant certains noms de famille, lors de la

distribution des enveloppes. L’enseignant finit sa distribution et continue son cours.

En fin d’heure il rappelle à la classe qu’il ne tolère aucune moquerie relative au

nom. S’ils souhaitent se faire remarquer, « que ce soit pour de bonnes raisons et

pas pour donner encore une mauvaise image d’eux-mêmes ». Il les place en

situation professionnelle et fait appel à leur empathie : « Vous vous imaginez faire

cela sur votre lieu de stage ou dans l’entreprise où vous travaillez ? » « Vous

aimeriez que l’on se moque de votre nom ? ».

Dans la distribution de parole en classe, les enseignants veillent à ne pas

mettre les élèves dans des situations d’inconfort. Lorsqu’ils sollicitent un élève et

qu’il ne répond pas, ils n’insistent pas et passe le tour de parole à un autre élève.

13 Cours d’histoire-géographie du 23/02, de 14h à 15h

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Lorsque les élèves prennent spontanément la parole les enseignants les encouragent

(bravo, très bien) et font en sorte que les autres élèves ne les interrompent pas

(« laissez d’abord Aminata finir »).

Un autre point nous a semblé intéressant à relever : les élèves suivis n’ont pas

forcément les référents culturels implicites qui permettent une culture commune

entre l’enseignant et les autres élèves. Ainsi, Adama, qui en principe suit le cours

de Géographie sur les inégalités, décroche au moment où les élèves évoquent

l’affaire Fillon et questionnent l’enseignant sur le thème des passe-droits. Adama

revient sur le cours l’heure suivante, en Français, sur la concordance des temps. De

même, Jaime ignore, en cours d’Economie-Droit, ce que sont les « Restos du

cœur ». L’enseignant lui confie la mission de faire une synthèse pendant le cours de

ce que représente l’association caritative, d’écouter ce qui se dit, et de faire une

brève restitution en fin d’heure. Les enseignants sollicitent régulièrement les élèves

dans la construction des savoirs, vérifiant qu’ils ont compris le lexique, le

soulignant, l’écrivant au tableau, revenant constamment sur les notions de base de

chaque discipline pour l’ensemble des élèves.

Dans les interactions, ces élèves interviennent rarement spontanément, à

l’exception de Sedray, et affichent une certaine passivité lors des échanges verbaux

quotidiens en classe entière. Rose, Bhagya et Sadjo peuvent être absentes (dessiner,

dormir, se couper les cheveux) mais se remobilisent lorsque l’enseignant fait un

apport d’informations qui nécessite la prise de notes. Lorsque l’enseignant les

interroge sur le contenu, certains répondent de manière inaudible ou baissent les

yeux, ce qui oblige l’enseignant à solliciter un autre élève.

En revanche, dans les situations où ils se sentent sécurisés, en face à face ou

en groupe restreint, ils participent aux tours de parole avec l’enseignant ou les

autres élèves. Ils peuvent également mobiliser leurs connaissances auprès de leurs

pairs et se positionner en experts dans des domaines qu’ils maîtrisent. Bhagya et

Jaime viennent également en aide à leurs camarades individuellement durant le

cours de Mathématiques pour leur expliquer la démarche à suivre pour arriver au

résultat, mais refusent de l’expliquer à la classe entière lors de la mise en commun.

Ainsi, lors d’un travail de groupe (cinq élèves) Jaime pratique la rétroaction auprès

de ses pairs en rectifiant leurs énoncés. Durant la phase rédactionnelle, il lit sur

l’épaule de sa camarade la mise au propre d’un texte d’analyse, qui doit être remis à

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l’enseignante comme production collective. Il en a écrit le brouillon, et durant la

séance d’observation, pratique un étayage :

Elève : c’est quoi ça ?

Jaime : son talent

Elève : c’est grâce à sa serbe d’écrivain ?

Jaime : attends attends… c’est grâce à sa verve d’écrivain

Elève : hein ?

Jaime : verve, V.E.R.V.E., son talent d’orateur !

(Observation de Jaime, le 14/03/2017, français)

De même, lorsqu’ils ont des zones d’incompréhension, ils sollicitent leurs

pairs individuellement mais ne lèvent jamais la main. Seul Sedray participe

énormément, pose des questions lorsqu’il ne comprend pas, ou qu’une situation ne

lui convient pas. Il n’hésite pas à interpeller l’enseignant lorsqu’il change trop

rapidement le document support du TNI : « mais vous faites quoi monsieur !

attendez wesh ! ». Il n’est pas déstabilisé par le fait de donner des réponses

erronées, et échange avec l’enseignant sur le raisonnement qui lui a permis

d’obtenir un résultat. Il utilise sa feuille de cours pour montrer visuellement la

fonction et utilise la gestuelle pour expliquer l’évolution d’une courbe (croissance,

décroissance). Son intervention nécessite une explication détaillée de l’enseignant

pour rectifier son résultat. Sedray se positionne comme acteur de son savoir, qu’il

co-construit avec les enseignants. En revanche, il se place en marge du groupe : en

classe, dans la cour, lors de sorties scolaires, il reste avec son binôme ou les élèves

d’UPE2A.

L’intégration au groupe des pairs peut s’avérer problématique. Les élèves

arrivant d’UPE2A sont confrontés à des codes spécifiques d’adolescents, qui

pratiquent la variation linguistique et ont des postures en opposition avec le

système. Nous avons noté qu’entre pairs, les élèves ont tendance à user de la

« vanne » dès que l’occasion se présente. Une élève d’UPE2A est incluse au cours

d’Anglais dans la classe de Bhagya et intervient pour répondre à une question. Un

élève interpelle alors Bhagya en rigolant : « t’as de la concurrence ». Dans ce

même cours un autre élève commente le prénom d’un camarade : « Trop chelous

leurs prénoms pakistanais. Ils roulent les « r » (rires)». En cours d’Histoire

l’incident cité précédemment à propos des noms de famille donne lieu à des

commentaires de la part des élèves. Lorsque l’enseignant expliquer que leur

comportement n’est pas drôle, ni professionnel, les élèves répondent : « Mais vous

savez monsieur qu’on est stupides ».

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Au fil de nos observations, élèves et enseignants se familiarisent à notre

présence et nous font participer aux activités de classe. Nous tissons des relations

interindividuelles. Notre dispositif se transforme progressivement en observation

participative. Pour clore notre présence dans la classe, nous proposons de réaliser

une séance sur les pratiques linguistiques, la perception des langues, et une

réflexion sur l’accueil de personnes arrivant d’UPE2A dans leur classe. Nous

utilisons comme support un questionnaire.

2.1.2 Questionnaire dans les classes ordinaires

Le questionnaire (Annexe 9) constitue une phase d’interaction avec les

classes dans notre recherche. Après la phase d’observation, il aborde la question des

pratiques langagières, du rapport aux langues des élèves de classe ordinaire et de

leur rapport à l’Autre. Le questionnaire constitue à la fois un outil de

compréhension des pratiques langagières énoncées par les élèves et de leurs

représentations de l’Autre au niveau linguistique et scolaire (élève arrivant d’un

autre système). Il nous fournit des données quantitatives, permet un échange avec la

classe et donne un espace de réflexion sur les pratiques linguistiques au terme de

nos observations.

Les premières questions portent sur les compétences qu’ils s’attribuent dans

les langues de leur répertoire. Les questions évoluent ensuite sur les pratiques

personnelles des langues utilisées à la maison et/ou « dans leur tête ». Enfin,

plusieurs questions sont posés sur leurs représentations des langues (celles qu’ils

aiment / n’aiment pas / qu’ils aimeraient apprendre). Cette réflexion sur les

pratiques de leur répertoire et leurs représentations conduit à deux dernières

questions sur leur perception des élèves allophones. La première indique la manière

dont ils accueilleraient un élève arrivant de l’étranger, et la seconde les conseils

qu’ils lui donneraient. Cette dernière question place l’élève qui a suivi sa scolarité

en France en position d’expert et de guide pouvant aider l’élève arrivant dans ses

apprentissages et son intégration.

Nous réalisons une séance par classe, correspondant aux élèves suivis : une

3ème, quatre 2nde, une 1ère et une Terminale. Initialement, les questionnaires devaient

être distribués au CDI afin d’avoir une idée globale des représentations des langues

et des pratiques langagières des élèves du lycée. Suite aux observations de classes,

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nous utilisons le questionnaire comme outil pédagogique. En effet, les observations

ont suscité une grande curiosité de la part des élèves, qui ont manifesté leur

frustration de ne pas communiquer, échanger sur le thème des pratiques

langagières. Aussi, nous avons décidé, en accord avec les enseignants, de leur

proposer le questionnaire afin d’établir une interaction et de clore notre action de

manière formelle dans les classes.

Nous réfléchissons ensemble sur leur pratiques langagières et leurs

représentations. Tandis que le questionnaire se mettait en place, notre objectif est

d’avoir des informations sur la représentation des élèves suivis, et de pouvoir

échanger avec eux individuellement. La séance dure une heure et se découpe en

sept phases :

- Phase 1 : Rappel du projet, inscrit en continuité des observations. Travail de

master sur les pratiques langagières des élèves du lycée.

- Phase 2 : Présentation des objectifs du questionnaire : connaître leurs

pratiques et leurs représentations linguistiques, ainsi que leur attitude envers

les élèves primo-arrivants.

- Phase 3 : Distribution du questionnaire

- Phase 4 : Lecture collective des questions. Permettre aux élèves de dissiper

tout malentendu relatif au contenu (seules les langues valorisées à l’école

sont citées dans un premier temps, incompréhension de la question 3 « Dans

quelle langue penses-tu ? »), et à la forme des réponses («Peut-on cocher

plusieurs cases ou une seule ? », « On entoure ou on fait une croix ? »).

- Phase 5 : Chacun répond individuellement, de manière anonyme, au

questionnaire. Nous passons dans les rangs pour discuter individuellement

avec chacun.

- Phase 6 : Mise en commun collective à l’oral autour des pratiques et des

représentations langagières. Echange autour de l’accueil des élèves

allophones et les conseils qu’ils donneraient.

- Phase 7 : Discussion autour des langues, des contacts de langues.

Questionnements : « Qu’est-ce qu’une langue, une bonne langue », « le

vrai français », « Et vous madame vous parlez quoi ? ».

Cent deux élèves, répartis sur sept classes, participent au questionnaire. La

quasi-totalité des élèves s’investit sérieusement (seul un questionnaire sera invalidé

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pour cause de réponse en inéquation avec les questions). Nous répondons à leurs

interrogations sur les consignes, et échangeons avec eux pour activer leurs

compétences cachées (« Ben moi je connais le lingala mais c’est pas une langue

madame ! », « Je sais parler le dialecte du Maroc, mais ché pas l’écrire »).

Nous avons d’abord cherché à savoir quelles compétences les élèves

estimaient avoir dans les différentes langues de leur répertoire (Annexe 12.1).

Schéma 1 Langues du répertoire langagier des élèves : niveaux de compétences

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Aussi le français arrive largement en tête du questionnaire en termes de

compétences. Beaucoup d’élèves intègrent leurs compétences en français dans le

questionnaire, qui ne précisait pas le statut des langues pratiquées (langue

maternelle, seconde, étrangère). En termes de compétences, le français est suivi des

deux langues scolaires présentes au lycée : l’anglais et l’espagnol. Ces trois langues

arrivent en tête en termes de maîtrise de compétences équilibrées. Les langues

arabe, bambara, linguala, portugais, soninké et wolof sont pratiquées par plusieurs

élèves à des niveaux de compétences orales, en compréhension et production. Les

élèves affichent des compétences très déséquilibrées dans certaines langues, comme

le sousou, qu’une élève nous avoue comprendre, mais être incapable de parler. Ils

ont rarement des compétences écrites dans les langues parlées à la maison.

Nous cherchons à savoir quelles langues leur sont familières hors cadre

scolaire (Annexe 12.2). Nous leur posons deux questions relatives au degré

d’intimité de certaines langues : Quelles langues sont pratiquées dans le cercle

familial ? Dans quelle langue pensent-ils ? Là encore le français arrive largement en

tête, suivi de l’arabe, du bambara, du lingala, du soninké, du wolof et du djoula. La

relation entre l’usage familial et la pensée en français, lingala, et djoula est

équilibrée. En revanche, nous remarquons que certaines langues sont utilisées à la

maison (bambara, soninké), sans être toujours intégrées au système de pensée de

l’élève. La majorité des langues, au statut minoritaire en France, n’interfèrent plus

dans le mode de pensée des élèves, selon eux. Plus étonnant : le coréen et l’anglais

interfèrent avec le français comme langues de pensée, du fait qu’ils « traversent

leur tête » après le visionnage de séries dramas, ou de séries télévisées en VO. La

phase d’échange avec la classe et l’enseignant se révèle très riche, puisque

beaucoup d’élèves peuvent donner une visibilité à des langues non reconnues par

l’institution.

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Schéma 2 : langues familières, utilisées à la maison, ou « dans la tête »

Nous poursuivons le questionnaire par des questions relatives aux

représentations des langues (Annexe 12.3), le français et l’anglais sont perçues

comme les langues les plus utiles alors que l’espagnol est considéré comme inutile

parce que « peu parlé dans le monde ». L’allemand, le russe et le chinois arrivent

en tête des langues malaimées, à cause de leur difficulté d’apprentissage ou de leur

phonétique. Néanmoins plusieurs dizaines d’élèves souhaitent apprendre le chinois.

L’arabe prend la première place, suivi du portugais, du lingala et du wolof. Cet

engouement peut s’expliquer par le fait que les langues citées étaient proposées

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dans un QCM. Les réponses au questionnaire nous fournissent des informations si

nous souhaitons mettre en place, ultérieurement, des actions autour du

plurilinguisme.

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Schéma 3 : Représentations des langues

La dernière partie du questionnaire se réfère à l’accueil des élèves

allophones : quels conseils les élèves leur donneraient-ils, et que feraient-ils

personnellement pour favoriser leur inclusion ? Beaucoup d’élèves manifestent

leurs difficultés à distinguer les deux questions durant la lecture collective du

questionnaire. La première constitue un conseil qui engage l’élève arrivant, alors

que la seconde implique l’élève de classe ordinaire et sa responsabilité individuelle

dans l’accueil d’un nouvel élève allophone.

Les deux questions posées sont les suivantes :

Q.8 : Quel conseil donnerais-tu à un élève récemment arrivé en France ?

Les réponses des élèves se divisent en cinq catégories :

• L’attitude personnelle (rester lui-même, ne pas avoir honte de son accent, ne pas

rester seul dans son coin, ne pas oublier d’où il vient mais bien s’intégrer,

sortir, lire, demander des conseils, suivre les conseils de ses parents et les

professeurs, goûter à la France, ne pas stresser car la France est un beau pays)

• Le comportement scolaire (essayer de se mélanger pour bien apprendre la

langue où il se trouve, aller à la bibliothèque, aller au CDI pour avoir plus

d’informations, ne pas sécher, être attentif)

• L’apprentissage linguistique (apprendre et parler le français, regarder les

émissions, séries ou films en français sous-titré, écouter la radio, beaucoup lire

des livres, profiter de l’enseignement des langues, ne pas avoir le complexe de

parler pour bien maîtriser, aller à l’école pour trouver un travail, apprendre la

base du français, apprendre la langue anglaise, d’apprendre vraiment bien le

français car c’est important si tu veux travailler et faire ta vie en France)

• L’apprentissage scolaire ( toujours apprendre même si c’est difficile, s’adapter

au système de classe et du lycée, travailler en cours, aller à l’école, prendre des

cours, bien écouter et observer et être bien concentré dans les cours et se

mélanger, communiquer avec les autres élèves et le prof, poser des questions).

Q. 9 : Quelles propositions ferais-tu pour qu’il se sente à l’aise ?

Le discours des élèves sur l’inclusion de nouveaux arrivants contraste avec les

entretiens et les observations qui font état de certaines tensions à l’égard de

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l’altérité dans les postures de classe des élèves. Le questionnaire leur donne la

possibilité de s’exprimer anonymement en dehors du regard d’autrui, tout en les

mettant dans une posture de responsabilité et de réflexion face à une réalité

quotidienne, vécue dans la classe. Nous avons relevé quatre grands items :

• L’intégration sociale : je communiquerai avec lui, l’intégrer à ma bande

d’amis, je l’accueille, devenir son copain et apprendre à faire sa connaissance.

• L’intégration scolaire : s’asseoir à côté de moi, pour qu’il voit qu’il est bien

entouré (en classe), je lui fais visiter le lycée, je proposerais une AVS

(Assistante Vie scolaire), on peut l’aider pour apprendre et faire du tutorat, lui

apprendre de nouvelles choses, le mettre dans une classe étrangère pour pas se

sentir seul, l’aider s’il comprend pas, je lui explique comment ça se passe ici).

• L’intégration linguistique : je le forme avec mon français, utiliser Google

traduction, qu’il vienne me demander des questions et je lui traduis s’il parle

espagnol, l’aider à comprendre le français avec les jeux, parler plus

doucement pour qu’il comprenne, l’aider à lire et écrire, leur apprendre des

mots, l’aider à parler français).

• La bienveillance : être gentille avec la personne, ne pas le laisser de côté et

bien l’accueillir, montre-lui que toi aussi ça peut t’arriver quand tu voyages

d’être un étranger, ne pas se moquer d’elle et ne pas la mettre mal à l’aise,

aller avec lui et le mettre à l’aise, je lui parlerai gentiment avec le sourire, lui

parler et savoir d’où il vient, je m’engagerais à lui remettre des gâteaux.

2.2 LE POINT DE VUE DES ENSEIGNANTS

Les représentations des enseignants émergent à travers leur discours, dans les

documents scolaires (bulletins) et les entretiens semi-directifs. Ils sont orientés sur

les pratiques de classe (intégration de l’élève dans la classe, niveau de maîtrise de la

langue, de la discipline, usage des langues en classe), et sur leur connaissance du

parcours et des besoins des élèves.

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2.2.1 Le discours scolaire à travers les bulletins

Outre l’accès à l’historique de la scolarité des élèves via leurs dossiers

scolaires, nous avons accès à l’espace numérique de travail du lycée « Paris Classe

Numérique ». Les bulletins scolaires constituent des données directes pour obtenir

des informations sur le niveau de maîtrise de la langue et d’éventuelles difficultés

ou facilités scolaires des élèves. Nous sélectionnons les bulletins scolaires des

élèves suivis depuis leur arrivée au lycée jusqu’au troisième trimestre de l’année en

cours afin de saisir leur évolution. Nous observons des variables et des constantes

selon les disciplines. Ils affichent à la fois des données quantitatives (notes) et

qualitatives (appréciations). Les bulletins présentent les notes moyennes de l’élève

et les appréciations par discipline Ainsi l’élève peut de se situer par rapport à la

classe (notes) et par rapport aux attentes des enseignants (appréciation).

Les moyennes générales des élèves se situent, dans l’ensemble, au-dessus ou

au même niveau que celle de la classe (Annexe 13). Seuls les élèves ayant intégré

une 2nde Gestion-Administration ont des notes qui demeurent inférieures à la

moyenne, malgré une progression. Il est fréquent de retrouver les élèves suivis en

tête de classe dans les matières dites « non linguistiques » (EPS, Arts appliqués,

Mathématiques, PSE), mais aussi en langues vivantes (Sadjo, Jonah et Jaime en

Espagnol sont dans les trois premiers de leur classe). Les notes révèlent des

progressions parfois spectaculaires. Ainsi, Aminata qui obtenait une très faible

moyenne en Français durant l’année 2015/2016, affiche une moyenne de 14,5/20 au

premier semestre 2016/2017, dans la même discipline.

L’accès à l’ENT nous permet de visualiser le détail des notes et de constater

que les compétences des élèves issus d’UPE2A ou de CLA sont égales voire

supérieures aux élèves ayant effectué leur scolarité en France dès la N+1. Par

exemple, Jonah est parmi les seuls élèves de sa classe à avoir obtenu la moyenne au

Brevet blanc en Histoire-Géographie (11,6). Il est au-dessus de la moyenne de sa

classe dans toutes les matières. Il est l’élève le plus jeune de l’échantillon, et n’est

pas inclus directement dans le circuit professionnel, puisqu’il est en 3ème

Préparation Professionnelle. Dans cette classe, les apprentissages sont

essentiellement liés à des matières générales, avec deux modules : « Découverte

professionnelle » et « PSE », qui l’aident à s’adapter en douceur au lycée

professionnel et à choisir une orientation adaptée à ses besoins et ses désirs. Sedray,

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qui obtient de très bons résultats en 2nde Vente, est lui aussi passé par une classe de

3ème Prépa Pro.

Nous constatons que les élèves suivis obtiennent des notes supérieures à la

moyenne dans des savoir-faire liés au métier d’élève (tenue de classeur ou vie de

classe). En revanche nous observons des difficultés dans les matières

professionnelles et en Histoire-Géographie. En effet, ces dernières développent des

concepts ou connaissances qui ne sont pas liés aux apprentissages antérieurs des

élèves. Aucun élève suivi ne fait partie des têtes de classe en Economie-Droit,

discipline qui nécessite à la fois des compétences linguistiques, l’acquisition de

nouvelles notions et la familiarisation avec un champ de connaissances inconnu

dans leur parcours scolaire antérieur, d’où l’hypothèse d’une forte surcharge

cognitive liée à cette matière auprès des élèves allophones… et des autres élèves.

Les compétences orales présentent forte disparité. Selon les disciplines, la

participation orale de Sadjo est variable : 7/20 en Eco-droit et 12/20 en TICE, avec

le même enseignant. Sedray obtient en vie de classe et en participation orale des

20/20 au 3ème trimestre.

Nous remarquons que les notes ne révèlent pas toujours le niveau réel des

élèves. Par exemple, Adama affiche une moyenne de 6/20 en Mathématiques au

second trimestre, la moyenne de la classe s’élevant à 6,1. Malgré un faible résultat

il demeure dans la moyenne. Une autre élève, Sadjo, obtient une moyenne correcte

en Histoire-Géographie au 2ème trimestre grâce à la « tenue de classeur ». Sa

moyenne chute au 3ème trimestre, du fait de l’évaluation des connaissances. Ces

données normées ne nous fournissent pas des indicateurs suffisants sur les

difficultés ou des facilités d’apprentissage des élèves. Elles doivent être complétées

par des données qualitatives.

Le discours des enseignants dans les appréciations (Annexe 14) exprime une

attitude bienveillante à travers divers procédés en relation avec le travail de l’élève :

substantifs (progrès, progression, effort[s], motivation, investissement, sérieux)

adjectifs (bon, excellent, satisfaisant, louable, sérieux), adverbes (très, mieux, bien,

beaucoup) et compléments de noms (travail de qualité). Son attitude fait également

l’objet d’appréciations relevant de sa personnalité (agréable, sympathique, curieux,

volontaire) ou de son attitude scolaire (appliqué, sérieux, motivé, exemplaire). Nous

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relevons également des leviers de motivation à l’égard des élèves à travers des

verbes d’encouragement, énoncés à la seconde personne du pluriel de l’impératif :

« continuez », « persévérez », « poursuivez », «ne relâchez pas », « ne vous

découragez pas ».

Les appréciations peuvent constituer un soutien envers l’élève dans sa

progression : Jonah dont la moyenne était inférieure au groupe classe aux premiers

trimestres, est en tête de classe au dernier trimestre. Ses appréciations l’encouragent

vers le dépassement de soi ; plus particulièrement en Français, où l’enseignant

affirme : « Je ne suis pas inquiet et vous êtes sur le point de franchir un cap ».

Dans leur ensemble, les bulletins se révèlent positifs, à l’exception de celui de

Rose, dont l’équipe souligne les faiblesses et le manque d’investissement. Nous

comparons alors son parcours avec celui d’Adama, arrivé plus tardivement en

France (N+1). Il présente moins de difficultés scolaires que Rose, alors que nous

avions envisagé le contraire. En effet, le fait qu’il découvre à la fois la classe

ordinaire et la seconde, alors que Rose a déjà suivi une scolarité type au collège,

aurait pu constituer un handicap. La différence entre les deux élèves, dans la même

classe, se note au niveau des appréciations. Afin de voir si ses faibles résultats et les

appréciations négatives de Rose étaient liés à son passage en lycée, ou à la classe

ordinaire au collège, nous avons repris son historique scolaire, et constaté que son

comportement était perçu de manière identique depuis… la classe d’accueil dans

les disciplines rattachées à la maîtrise de la langue. En revanche elle obtient des

notes et des appréciations corrects dans les disciplines artistiques (Musique, Arts

plastiques).

Les difficultés relevées par les enseignants concernent principalement les

compétences écrites, rédactionnelles, et de compréhension des consignes. Le

manque de participation orale est souligné de façons indirecte à travers des

injonctions :«Ne doit pas hésiter à participer à l'oral , à poser des questions »,

« doit participer en classe et ne pas hésiter à demander de l’aide », « prenez

confiance en vous », « ne pas hésiter à poser des questions ».

Les variations entre élèves dans une même discipline font surface, du fait de

leur parcours scolaire et personnel. De ce fait, Bhagya est qualifiée « d’élève

bilingue » en anglais, alors que les faibles notes d’Adama sont justifiées par le fait

qu’il débute dans la discipline. D’autre part, un même élève peut connaître des

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appréciations très variables selon les disciplines. Ainsi, Bhagya, malgré des notes

honorables, est sanctionnée dans les appréciations, car trop d’absences.

Enfin, à l’exception d’Aminata qui est dans un dispositif particulier, cinq des

sept élèves suivis obtiennent des mentions durant l’année scolaire 2016/2017 :

quatre positives (encouragements, compliments et félicitations), et une négative

(avertissement d’assiduité) malgré des notes correctes.

Ces données nous fournissent des indices sur les attitudes des élèves (sérieux,

travailleurs mais peu loquaces). Le discours scolaire des enseignants, qui n’ont pas

nécessairement d’informations sur leur parcours antérieur, tend à confirmer les

représentations des élèves arrivant d’UPE2A ou de CLA en classe ordinaire comme

ayant les codes scolaires, étant motivés, mais connaissant des difficultés dans la

maîtrise de la langue à écrite (rédactionnel), dans la compréhension des consignes,

ainsi que dans la prise de parole en classe.

2.2.2 Ressentis et perceptions dans les entretiens14

Avant de débuter la collecte de données, nous établissons un dialogue avec

l’ensemble des enseignants dont nous observons les classes, par des entretiens

informels afin de les informer du suivi de certains élèves. Les entretiens visent à

obtenir leur ressenti global par rapport aux élèves issus d’UPE2A ou de CLA dans

leur intégration dans la classe, la maîtrise du français, l’apprentissage disciplinaire,

les leviers, les difficultés, les conseils en UPE2A et aux UPE2A. Nous nous posons

lors des échanges préalables la question de la stigmatisation des élèves : est-il

pertinent d’informer les enseignants du parcours des élèves ? L’enjeu n’est pas de

pointer leurs difficultés mais bien de répondre au mieux à leurs besoins.

Le lycée accueille en effet de nombreux élèves en difficulté scolaire et en

rupture avec les apprentissages. Aussi, les élèves issus d’UPE2A ne sont pas

toujours reconnus comme ayant des besoins spécifiques, liés à la langue ou à leur

situation. Les évaluations et entretiens de positionnement de 2nde (Adama, Rose,

Jaime), lev basculement en cours d’année d’UPE2A vers la classe ordinaire

(Sadjo), ou le suivi individuel (Sedray, Aminata) permettent d’identifier une

majorité des élèves allophones. En revanche, il peut arriver que les enseignants

14 L’annexe 15 permet d’avoir une vue globale des entretiens, qui sont détaillés dans le document

« entretiens personnels éducatif élèves» sur clé USB.

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ignorent tout du parcours des élèves. Ainsi, une nouvelle enseignante d’Anglais ne

savait pas que Jonah était lusophone. Elle associait ses difficultés à une question

scolaire et non linguistique. De même, l’enseignant de Mathématiques de Bhagya

est surpris que nous souhaitions un entretien à propos de cette élève. En effet, il

ignorait qu’elle «était passée par une classe d’accueil car ayant un excellent niveau

dans sa discipline, elle a été noyée dans la masse ».

Par rapport à l’intégration en classe, les enseignants notent que certains ont un

comportement très effacé « renfermé, timide ». Ce comportement peut constituer une

difficulté d’intégration sociale dans le groupe : « C'est pas simple pour eux parce qu'ils

sont toujours assez discrets ces gens-là contrairement à certains autres/ qui la ramènent

toutes les quatre minutes » (enseignante de Commerce, 2A-2CO-1CO, lignes 178-179).

Les enseignants ont conscience que le manque de prise de parole peut être provoqué par

la pression de la classe plus qu’aux compétences de l’élève : « Certes ils ont de petites

difficultés à l’oral mais quand je leur parle indépendamment, je n’ai pas cette timidité

que je retrouve quand ils s’expriment devant la classe » (enseignante d’Accueil, 2A,

l.23-25). Une enseignante affiche une empathie à l’égard des élèves sur le fait que la

situation « classe » peut être vécue comme violente :

« Plus que dans le pays je crois que c'est dans une salle de classe que c'est le plus angoissant pour quelqu'un. C’est pour ça que je t'ai parlé directement de la salle de classe. Parce que se retrouver à un siège derrière sa table, avec quelqu'un devant qui te parle, que tu ne comprends pas. Tu n'es même pas sûre de pourvoir lui répondre et sur le coup tu dois répondre tout de suite. Alors que si tu vas dans le pays te renseigner pour quelque chose tu prépares. Là tu prépares pas t'as quelqu'un qui te regarde. Ça t'angoisse. t'arrives pas. Les autres te regardent. Ca t'angoisse davantage et du coup je trouve que c'est ça le plus stressant. C'est pour ça que je me mets à leur place c'est pas tellement d'être dans le pays c'est de se trouver dans un contexte où tu dois répondre tout de suite. Où on attend quelque chose de toi et tu peux pas le donner. »

Enseignante d’Accueil, 2A, l.119-127

Face au groupe classe, les élèves suivis peuvent avoir un positionnement de

résignation. Pour Adama, l’enseignant d’Histoire-Géographie soulève l’hypothèse

que son comportement « lui a permis d'éviter les vagues parce qu'il est dans une

classe où ça a pas mal remué en début d'année. Donc il a fait profil bas. Il a fait le

roseau et il a attendu que ça passe » (enseignant de Lettres-Histoire, 2V-2GA2,

l.21-23). De même, Sedray « en a pris son parti. Alors y avait quelques tensions en

début d'année, je crois que ça s'est calmé là » (enseignante de Lettres-Histoire, 2A-

2V-3PP, l.53). Les élèves peuvent alors se rattacher à un autre élève de la classe.

Ainsi Jonah « est dans son coin à côté de Philippe tout le temps » (enseignante de

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Lettres-Anglais 3PP, l. 116). De même, Sedray « va plutôt se retrouver dans la

position de celui qui aide (…) son binôme E. » (enseignant de Lettres-Histoire, 2V-

2GA2, l.95-97), ou Sadjo « elle est avec des gens qui ont à peu près son profil, qui

sont calmes, posées. Donc là elle se sent à l’aise » (enseignante de Lettres-Histoire,

2A-2V, l.117-118).

Leur comportement scolaire peut engendrer des réactions de rejet de la part

des autres élèves : Sedray pour qui « il y avait quelques jalousies parce que quand

même c’est un bon élève » (enseignant de Lettres-Histoire, 2V-2GA2, ligne 56).

Jaime, au contraire, « a réussi à s'intégrer de manière à se faire respecter malgré

sa différence au niveau du langage, au niveau de l'accent. Et non les autres ne vont

pas l'embêter, ne vont pas rigoler. Il est très bien intégré. » (enseignante de

Français, 2CO, l.85-87).

Leur discours sur le comportement des élèves face au travail affiche deux

postures : des élèves exemplaires « curieux, motivés, ne posant pas de problème,

travailleurs » ou au contraire « fainéant, moins focalisés sur le travail (par rapport

au début de l’année pour Rose), voire passifs face aux apprentissages ». Cet aspect

négatif est expliqué par le fait que certains n’osent pas demander (« il ne va pas

oser mettre en avant ses propres difficultés », enseignant Lettres-Histoire à propos

d’Adama), d’autres s’ennuient dans des disciplines (« en anglais il a plus de

facilités que les autres ça s’est sûr. Il s’ennuie. (…) Il est assez fainéant Jaime.

Moins il en fait mieux il se porte », (enseignante Lettres Anglais, 2CO, l.16-19).

C’est dans la maîtrise des compétences disciplinaires qu’apparaissent des

disparités propres au parcours scolaire antérieur de chaque élève. Les enseignants

relèvent des facilités à s’exprimer à l’oral dans un français standard chez les élèves

suivis : « je trouve qu’ils parlent bien justement » (enseignante de Lettres-Histoire

2V-2A-3PP, l.145) « à l’oral elle s’exprime plutôt correctement [Rose]»

(enseignant de Lettres-Histoire, 2V-2GA, l.175). Les difficultés portent

essentiellement sur les consignes : à propos d’Adama, « effectivement quand on lui

donne des travaux à réaliser. Très souvent, c’est en venant le voir directement

individuellement qu’on s’aperçoit que la consigne n’a pas forcément été comprise

et qu’il est parti sur une mauvaise piste» (enseignant de Lettres-Histoire 2GA2,

l.28-30). Un élève comme Sedray connait sans doute une progression ralentie par

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« le manque d’outils de la langue dont il dispose pour aller au bout de sa

réflexion » (enseignant Lettres-Histoire, 2V, l.79-80).

D’autres lacunes sont relevées en orthographe, dans le passage de la

phonétique à la graphie (par exemple Sedray et Jaime), soit dans le domaine lexical,

par rapport aux notions abordées dans certaines disciplines (« barrage hydrau-

électrique » en Géographie, « somme, produit » en Mathématiques, « les mots

professionnels, la culture professionnelle » en Commerce). Les erreurs de

vocabulaire peuvent être associées à des lacunes mais aussi à des malentendus, en

relation avec le contexte d’énonciation, variable d’une culture à l’autre. Ainsi,

« Sadjo n’a aucun problème de compréhension, sinon des problèmes quand il s’agit

du contexte. De comprendre le contexte. Parce que parfois elle n’a pas le même

contexte là d’où elle vient. Elle n’a pas les mêmes codes » (enseignante d’Accueil,

2A, l.42-44).

Les freins à l’intégration et à l’apprentissage peuvent être d’ordre

linguistique, culturel ou social : « Il y a des problématiques scolaires et il y a des

problématiques sociales extrêmement importantes. Très souvent on a des mineurs

isolés (…) c’est difficile pour ces gamins-là » (enseignant de Lettres-Histoire 2V-

2GA, l.227-228). L’infirmière constate également que le lycée professionnel

accueille beaucoup plus de mineurs isolés que le lycée général (entretien Infirmière,

l.67-71) qui sont en situation de précarité. Aucun des élèves suivis n’est dans cette

situation, mais les enseignants prennent ce paramètre en compte dès lors que l’on

évoque les élèves allophones.

Le passage de l’UPE2A à la classe ordinaire peut représenter une difficulté

supplémentaire pour l’élève allophone, mis dans un cadre sécurisant pendant un an.

Les enseignants supposent que les difficultés d’adaptation peuvent trouver leur

source dans la perception même que les élèves issus de « Classe d’Accueil » ont de

la classe ordinaire. : « c'est plutôt par rapport au regard des autres qui sont dans

une classe traditionnelle alors qu eux viennent d'une classe d'accueil en fait. Je

pense que c'est à ce niveau-là, qu'ils ont été entre guillemets "cocoonés" dans une

classe de seconde "Accueil". Ils se trouvent avec des élèves qui ont le même genre

de difficultés qu'eux/ et du coup je pense qu'ils se sentent plutôt à l'aise alors que

lorsqu'ils intègrent une classe de seconde traditionnelle ils ont l'impression qu'ils

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sont face à d'autres qui n'ont pas les mêmes problèmes qu'eux ce qui n'est pas

toujours vrai ». (enseignante d’Accueil, 2A, l. 25-30).

Les enseignants trouvent qu’ils ne sont pas assez préparés à la

communication de la classe ordinaire. Le fait d’être dans un dispositif séparé

entraîne les élèves à intérioriser un sentiment d’infériorité par rapport aux autres

élèves, alors que l’enseignement en lycée professionnel vise à les rendre

autonomes. Une enseignante note des difficultés de communication dans les

interactions quotidiennes, dues à « l incapacité à s’exprimer à l’oral de façon

sociable (…) parce qu'elle était dans une situation un peu d'infériorité par rapport

aux autres, de par justement son passage par une classe comme ça [UPE2A].»

(enseignante de Commerce, l.10-16), ainsi que la nécessité de les rendre

autonomes : « Moi je les couve pas. C'est pas un service à leur rendre que de les

couver comme des œufs. Ils se débrouillent. Et elle se débrouille bien [Sadjo]. Moi

j'aurais pensé que ça allait moins bien tourner» (enseignante de Commerce, 2A-

2CO-1CO, l.85-87). Lorsqu’ils ont suffisamment d’informations sur les élèves issus

d’UPE2A, les enseignants réalisent un travail préparatoire (Les frises

chronologiques pour l’enseignante de Lettres Histoire en 2V, 2A et 3PP),

reprennent ponctuellement des points de conjugaison grammaire (même

enseignante). Beaucoup s’appuient sur ce qui est déjà fait, comme l’intégration

progressive en classe ordinaire en langues vivantes (Anglais, Espagnol) pour les

élèves d’UPE2A ayant un certain niveau ou la communication au sein des équipes

pédagogiques.

Notre échange est aussi l’occasion de les interroger sur leur parcours

langagier personnel, et leur perception des langues, à travers deux questions :

« utilises-tu l’alternance codique en classe ? », « est-ce que tu as déjà été en

situation d’allophone ? ». Les enseignantes d’Anglais sont à l’aise avec la première

question, l’alternance codique faisant partie de leur quotidien. En effet, dans leurs

cours elles basculent d’une langue à l’autre, selon le type de discours, et font plutôt

usage du français pour les consignes et les explications. Un enseignant de Lettres-

Histoire évoque également l’usage de l’alternance codique dans ses cours :

Ya des occasions très spécifiques, soit quand je veux les éveiller à l'étymologie / On aborde quand

même des notions de culture à travers les programmes d'histoire et de géographie et donc

forcément / les langues et leur particularité / ce qu'elles permettent d'exprimer sont abordés

parfois lorsque l'occasion se présente. Donc ça m'arrive parfois de passer par du latin et du grec

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parce que ce sont les langues qui: me servent le plus on va dire pour l'étymologie / pour lesquelles

j'ai quelques notions/ après je peux parfois les éveiller aux particularités linguistiques : en

prenant un mot étranger en disant voilà ce mot n'a pas d'équivalent / On a pas de traduction:

parce que c'est un concept qui est spécifique à une aire culturelle. Mais: sinon je reste vraiment

sur le français.

Enseignant de Lettre-Histoire, 2GA-2V, l.111-118

La question relative au fait d’être allophone nous semble intéressante, car elle

place l’enseignant en d’empathie. Une enseignante, d’origine marocaine, se

replonge dans ses souvenirs d’enfance, et exprime le tiraillement entre deux

langues, dont l’arabe, langue maternelle utilisée pour certains échanges :

PROFESSEUR : c'est compliqué parce que par exemple au Maroc. Quand j'allais au Maroc petite

: l'arabe qui est ma langue maternelle en l'occurrence. J'y allais mais je comprenais pas./ Donc je

me sentais un petit peu justement perdue. Et puis bon, ya la deuxième langue qui est le français là-

bas. Donc je pouvais me débrouiller quand même, mais j'me suis sentie un p'tit peu à l'écart

malgré le fait que ce soit ma langue maternelle/

ENQUÊTRICE : hmm hmm

PROFESSEUR : comme je ne l'ai pas: apprise jeune donc: je peux me retrouver:

ENQUÊTRICE : et tes parents parlaient pas arabe à la maison ?

PROFESSEUR P : quand y avait des invités. J'avais de la famille qui venait, ma mère au

téléphone mais sinon non. Entre eux et avec nous:

Enseignante Lettres-Anglais, 2CO-3PP, lignes 132-141

Les autres enseignants relatent leurs expériences, en tant que touristes ou

résidents, dans des pays dont ils maîtrisaient plus ou moins la langue. Ils évoquent

l’importance de l’usage de la gestuelle et du visuel dans la communication.

La dernière question de l’entretien porte sur les conseils que chaque

enseignant donnerait à un élève qui arrive en classe ordinaire d’UPE2A afin de

favoriser son inclusion. Nous avons repéré plusieurs types de conseils. Les

enseignants signalent d’abord l’acquisition de compétences culturelles et

linguistiques que l’élève peut trouver en dehors du cadre scolaire :

Les cours de français ne suffiront pas à lui apprendre les bases. Enseignant de Lettres-Histoire, 2V, 2GA, l.197

Je lui conseillerais d’aller un peu plus loin que ce que l’enseignant lui demande, de se renseigner de faire quelques recherches, que ce soit au CDI ou ailleurs , que ce soit aussi en musée des expositions. Ça lui permettra d'être plus ouvert et d'obtenir un peu plus de culture aussi.

Enseignante de Lettres-Anglais, 2A-2V- l.180-182

Alors bon c'est vrai qu'on va enfoncer peut-être des portes ouvertes mais: une ouverture culturelle (..) c'est primordial.

Infirmière, l.233-234)

Il faut qu'il regarde les actualités. Il faut qu'il essaie de lire les journaux,: d'avoir le plus possible un contact avec l'actualité et puis la lecture pour avoir un apprentissage le plus possible des mots. E

Enseignante Lettres-Histoire 2V, 2A-3PP, l.214-216)

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La lecture. La lecture en français(…) pour la syntaxe, pour le fonctionnement de la langue. Enseignante de Lettres-Anglais, 2CO-3PP, l.196-198)

Le second type de conseils se situe dans le cadre de la pratique de la classe, et

relève de la méthodologie

Ne pas hésiter à poser des questions. Pas hésiter à se mettre au premier rang, à dire si on comprend pas quelque chose, pas avoir peur de ce que les autres peuvent penser.

Enseignante de Lettres-Histoire, 2V-2A-3PP, l.219-221

Qu’il écoute bien qu’il note ( …) pourquoi pas enregistrer les cours si les profs sont d’accord comme ça il ré-écoute les trucs qu’il n’a pas compris.

Enseignante de Commerce, l.174-176

Qu’ils travaillent, qu’ils fassent le travail, qu’ils suivent les conseils des profs, et puis qu’ils soient rigoureux au niveau du matériel, qu’ils notent bien les cours qu’ils tiennent leur cahier à jour, après c’est des conseils qu’on donne à tous les élèves.

Enseignant de Mathématiques, l.117-120

Enfin, les équipes pointent l’importance de l’attitude scolaire ou sociale de

l’élève au sein de la classe ordinaire :

Je lui conseillerais de ne pas avoir peur de demander de l’aide. Enseignante d’Accueil, 2A, l.77

Ne pas se laisser porter par la fainéantise des autres. Enseignante Lettres Anglais 2CO-3pp, l.188

Je lui conseille de s’accrocher. Je pense à un élève comme Sedray qui se défend, se bat pour y arriver.

Enseignante Lettres Anglais, 2A-2GA-2CV-CO, l.77-78

De le rassurer en lui disant que s’il éprouve des difficultés, du moins s’il pense éprouver des difficultés parce que desfois c’est pas forcément le cas. Ben qu’il est pas le seul ( …) donc qu’ils gardent la confiance en eux. Enseignant Mathématiques, l.111-113

2.3 POINT DE VUE DES ÉLÈVES ISSUS D’UPE2A

2.3.1 Productions personnelles : un regard réflexif sur soi

Les productions des élèves sont utilisées afin de les mettre en confiance et de

déclencher des échanges formels (dessin réflexif lors des entretiens) ou informels

(productions personnelles). Elles nous permettent également d’avoir leur perception

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de l’école, de l’apprentissage et de leur évolution personnelle de manière assez

libre, sans contrainte linguistique.

Le dessin ne fait pas l’objet d’une analyse approfondie sur sa signification,

son contexte. Nous ne souhaitons pas l’exploiter de manière sociologique ou

psychologique. Il sert d’outil de médiation afin de déclencher la parole. Sur sept

élèves ayant réalisé les dessins, six arrivent à l’entretien avec leur production. Une

élève refuse de réaliser un dessin « parce qu’elle est nulle en dessin et ne veut pas

être jugée ». Malgré l’explication de notre démarche, l’élève décline notre

invitation à prendre le crayon. Un autre élève nous demande de ne pas exposer son

dessin aux enseignants. Nous lui avons assuré que tout ce qui serait dit, écrit,

dessiné, observé, serait de toute façon rendu anonyme.

Le dessin constitue un discours autour de l’école, du vécu de l’élève par

rapport à sa scolarité, qui permet d’entrer en douceur, au sein même du sujet sur la

maîtrise du français, les compétences scolaires, sur d’éventuelles difficultés et

blocages auxquels l’élève peut être confronté durant sa scolarité. Lors des entretiens

le dessin peut être décrit factuellement (l’élève décrit ce qu’il a dessiné, ce qu’il

voit sur le papier) ou être le point de départ d’un récit de vie.

Les dessins nous fournissent des informations sur les perceptions des élèves

de l’Ecole et des apprentissages : Adama n’évoque pas sa scolarité antérieure. Il

dessine spontanément le lycée actuel, point de départ de sa scolarité en France, en

UPE2A, l’année dernière, et en 2nde Gestion-Administration, cette année. Son

rapport à l’école est avant tout lié aux règles, aux codes scolaires. Son dessin de

l’établissement (Annexe 16.2) est encerclé par trois phrases : « Il faut respecter les

profs », « il faut arriver à l’heure tous les jours », « il faut pas traîner dans les

couloirs ». Lorsque nous lui demandons où il se situe dans le dessin, il nous répond

qu’il se situe à la porte (Amada, l.18-20). Un autre élève représente l’école comme

une prison entourée de barbelés avec des personnages enfermés à l’intérieur

(Annexe 16.1), mais parvenant à s’échapper pour aller « vers le soleil » qui

symbolise la « réussite professionnelle » (entretien Jaime, l.15). Il s’agit d’un mal

nécessaire pour réussir sa vie et construire son identité (entretien Jaime, l.27).

Les dessins nous offrent un découpage temporel intéressant : certains tiennent

compte de leur parcours global (Annexe 16.1), alors que d’autres se situent dans le

présent avec pour point de repère le lycée (Annexe 16.2), ou dans le passé comme

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point de repère la « maison du bled » (Rose, l.207). Les élèves qui semblent réussir

le mieux leur intégration sont ceux qui ont un point de vue global de leur parcours.

En revanche, les élèves qui ne se projettent pas sont dans des situations scolaires

délicates, l’une par rapport à ses apprentissages, l’autre par rapport à ses absences

(Annexe 16.3). L’une présente néanmoins une dynamique, où elle montre son

parcours de sa naissance, jusqu’à son arrivée en France en 2012. L’autre élève reste

dans le passé, et présente avec nostalgie son pays d’origine, sans évoquer sa

scolarité. Les lieux dessinés sont vides de présence humaine et figés.

Nous demandons également à chaque élève de nous transmettre une

production de leur choix. Sur les huit élèves suivis, six nous transmettent des

productions scolaires ou personnelles. L’objectif initial est d’obtenir une trace

matérielle de leurs pratiques linguistiques et/ou scolaires. Elles peuvent nous

fournir des informations sur le niveau de compétences rédactionnelles des élèves.

En avançant dans notre recherche, notre problématique s’affine et se fixe sur les

représentations plus que sur l’analyse des performances des élèves.

Nous écartons les productions scolaires qui émanent d’une injonction

scolaire, et gardons les productions écrites personnelles. Nous constatons que les

deux élèves nous ayant livré des éléments plus biographiques et personnels

correspondent aux deux dessins qui sont rattachés au passé et ne représentent pas

l’école. Rose nous transmet son carnet de bord personnel, dans lequel elle livre des

éléments autobiographiques (Annexe 17.1). Bhagya nous confie son carnet de

poèmes (Annexe 17.2). Elle prend une distance en se racontant par la littérature.

Elle utilise divers procédés stylistiques comme les anaphores, alterne les registres et

les langues (anglais, français). Le registre familier pointe un sentiment de rancœur

(« connard »). La strophe en français laisse percevoir une palette de sentiments

amoureux déçus : « Je te déteste, je t’aime, je t’évite, je te parle ». A travers son

carnet, Rose exprime son ressenti, mais garde un rapport scolaire au français. Sa

production est corrigée par une amie, qui lui fait un feedback à la manière d’un

enseignant. Rose montre sa volonté d’améliorer ses compétences dans la langue

française en dehors du cadre scolaire. Leurs écrits personnels expriment finalement

des préoccupations qui rejoignent celles de tout adolescent, en France et ailleurs : le

sentiment amoureux pour l’une, et la douleur de la séparation familiale pour l’autre.

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2.3.2 Discours des élèves en interactions inter-individuelles

Les échanges avec les élèves suivis sont à la fois formels, lors des entretiens,

scolaires, durant le soutien FLS, et informels, au CDI. Ils sont réalisés de mars à

avril 2017 au CDI, après la période d’observations de classe.

Nous demandons aux élèves de relater leur vécu dans le passage d’un système

scolaire étranger au système scolaire français, puis de l’UPE2A/CLA à la classe

ordinaire : Quelles difficultés ont-ils rencontrées ? Sur quelles ressources sociales,

linguistiques, culturelles et scolaires s’appuient-ils pour réussir leur inclusion ?

Quels conseils donneraient-ils aux élèves actuellement en UPE2A ?

Les élèves manifestent un ressenti positif par rapport à l’école française ;

qu’ils trouvent plus ouverte. De même la gentillesse des enseignants revient dans

plusieurs discours. Concernant les apprentissages ils évoquent dans leur scolatité

antérieure des techniques basées sur la mémorisation où « il faut tous faire rentrer

dans notre petit cerveau » (Bhagya, l.90), où « les formules, les leçons tout doit être

là [Sadjo montre sa tête] » (Sadjo, l.198).

Ils comparent également l’UPE2A avec la classe ordinaire et pointent l’apport

de chaque dispositif dans une même discipline : « Là-bas [UPE2A] tu apprends la

conjugaison, et là [classe ordinaire] tu apprends des histoires » (Adama, l.284). Ils

relèvent aussi certaines lacunes des classes d’accueil où ils ne faisaient que de « la

grammaire, la grammaire, la grammaire ! » (Julien, l.78), avec peu de disciplines

autres que le Français et les Mathématiques. Jonah manifeste sa frustration de ne

pas avoir pu faire plus d’Histoire-Géographie en UPE2A. Sedray reproche à

l’évaluation de classe d’accueil d’être trop laxe ; engendrant chez les élèves qui

arrivent en classe ordinaire un choc : ils passent de 18 à 9 parce qu’ils pensent

pouvoir avoir des notes correctes sans fournir de réels efforts. Le gap entre les notes

des deux dispositifs engendre des difficultés à se situer dans leurs apprentissages et

leur progression.

Aminata analyse ses difficultés comme venant de l’adaptation à un nouveau

système, différent de celui du Sénégal, puis du passage d’une classe d’accueil à la

classe ordinaire. Les compétences linguistiques en français sont sources de

difficultés dont elle a conscience et qu’elle exprime dans une réflexion

métalinguistique : « En classe d'accueil c'était plus facile en fait. On nous

apprenait comment faire les phrases les verbes des choses comme ça. » (l.62-63),

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« c'est en fait des vrais cours [en classe ordinaire]. On a des textes on nous pose

des questions.» (l.65-69)

Les méthodes de travail sont sources d’appréhension parce qu’ils n’ont pas

les facilités de lecture en français, n’ont pas acquis les techniques ( « il apprennent

les élèves comment travailler » Sedray, l.150) ou les connaissances (« il y a des

choses que les élèves ont apprises en bas âge des autres écoles en primaire genre

comme ça et moi j’ai pas appris » Sadjo, l.94-95). Jaime témoigne d’un regard

critique sur l’apprentissage du français en classe ordinaire. Il lui reproche « un

apprentissage du français à l’ancienne qui ne me donne pas envie d’entrer dans la

langue » (l.101).

Bhagya nous fait part de ses difficultés face à l’écrit. Le passage de la

phonétique à la graphie est source de confusion et d’interférences entre l’anglais et

le français :

ELÈVE : Parce que j'aime pas trop. Enfin j'aime bien lire mais ya desfois ya des trucs dans

ma tête ; euh c'est pas la même chose. Ché pas,° ça part en cacahuète

ENQUÊTRICE : Ça part en cacahuète ? C'est quoi ? C'est les phrases en français qui sont

différentes ?

ELÈVE : Mais Ya des mots genre que j'arrive pas à comprendre. J'me dis "c'est quoi ça?"

ENQUÊTRICE : C'est les mots qui te posent problème plus que les phrases ?

ELÈVE : Desfois j'ai l'impression que ya des mots qui sont en train…

ENQUÊTRICE : qui sont en train de ?

ELÈVE : ballader dans ma tête

ENQUÊTRICE : de se ballader dans ta tête ? Et tu sais pas où les mettre ? Et est-ce qu'il

t'arrive desfois de mélanger les langues ?

ELÈVE : Oui. Quand genre j'écris en anglais imaginez en français "juste," j'écris comme en

anglais "just"

Bhagya, lignes 172-182

Elle exprime également son malaise face à une langue qu’elle doit maîtriser à

l’écrit, et dont les mots ont une valeur égale, qu’ils soient pleins ou vides. Pour elle

tous les mots sont potentiellement porteurs de sens.

ENQUÊTRICE C'est quoi qui te pose problème ?

ELÈVE : Écrire.

ENQUÊTRICE : Écrire ?

ELÈVE : Oui écrire. Ouais c'est plutôt ça. Et aussi genre des mots clés. Quand je lis un texte

le prof il nous dit de prendre des mots clés. Moi genre des mots-clés, dans ma tête. J'ai

l'impression que c'est tout des mots-clés pour moi.

Bhagya, Lignes 135-137

Rose nous avoue pratiquer l’alternance codique en dehors du lycée pour

comprendre les documents écrits, grâce à une amie qui lui traduit en lingala les

énoncés qu’elle ne comprend pas en cours.

ENQUÊTRICE : et alors justement quand tu as dans les cours que tu as là au lycée, est-ce

que desfois tu fais appel à tes connaissances en lingala ?

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ELÈVE :oui parfois je leur parle en lingala

ENQUÊTRICE : par exemple ?

ELÈVE :euh par exemple si je comprends pas un cours et tout. je leur dis qu'ils puissent

m'expliquer en lingala parce qu'en fait il y a ma copine elle parle bien lingala et je dis Gawa

explique moi ça et elle commence à m'expliquer en lingala après je commence à / j'écoute

quoi ! je comprends

ENQUÊTRICE : ah t'as quand même des copines dans la classe

ELÈVE :oui pas des copines de cette classe là / dehors du lycée

Rose, lignes 62-71

Les pratiques de classe peuvent être déstabilisantes et source d’insécurité.

Plusieurs élèves se sentent stigmatisés, à cause de leur accent ou de leur débit, et

affichent un blocage par rapport à la lecture à voix haute.

ENQUÊTRICE : Et au niveau des cours ? ELÈVE : Lire ben faut que les profs arrêtent de nous dire: de lire. ENQUÊTRICE : Les profs arrêtent de vous dire de lire ? et pourquoi ? ELÈVE : Parce que si on se trompe tout le monde va rigoler. ENQUÊTRICE : Et donc les profs il faut qu'ils vous disent rien alors ? ELÈVE : Ben non ENQUÊTRICE : Il faut qu'ils vous laissent dans votre coin ELÈVE : Non si on a envie de lire on lève la main

Sedray, lignes352-359

ELÈVE Je lisais bien, je lis bien et tout. C’est juste que la prononciation de l'accent en fait à travailler et là dis je me noie je ne parle les accents et tout et ils rigolent. Ils rigolent et tout. Après c'est bon j'ai dit : « J'arrête de lire je lis plus. »

Rose, Lignes 132-134

ELÈVE : Mme: G. genre elle me fait lire. Ok je peux lire. Mais après ya des élèves qui rigolent et en plus elle dit rien quand je me trompe. Après Mme C. elle me dit "si tu veux lire tu lis, mais si tu veux pas je vais pas te…" ENQUÊTRICE : te forcer ? ELÈVE :"..te moquer devant la classe." Voyez ?

Bhagya, lignes 200-204

[à propos de ce qu’elle aimerait faire en SFLS] ELÈVE : Et surtout lire aussi ENQUÊTRICE : qu'on fasse de la lecture à : pour soi ? de la compréhension ou de la lecture à voix haute ? ELÈVE : à voix haute pour apprendre mieux à parler devant des gens et à lire aussi ENQUÊTRICE : à lire devant des gens ? ELÈVE : Oui. Parce que moi j'ai ce problème chui trop timide devant les gens je parle pas

Sadjo, lignes 381-385

ELÈVE : Quand je lis et les autres ils *liont . La différence que je sens c'est la rapidité.

ENQUÊTRICE : ouais ?

ELÈVE :Mais la façon de lire / on est pareil

Jonah, lignes 109-111

Concernant le passage de la classe d’accueil, ou UPE2A, les élèves évoquent

un cadre sécurisant, qui contraste avec la classe ordinaire. Pour Bhagya la CLA se

passait bien « parce que c’est des élèves comme moi » (l.34). Rose explique que les

élèves de classe ordinaire « ne respectent personne, ils sont là à critiquer les gens à

se moquer, c’est désagréable » (entretien SFLS). Sadjo, malgré un accueil positif

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de la classe et des enseignants, est surprise par les bavardages qui lui « font mal à la

tête » (l.72). Aminata, Jonah et Sedray manifestent une prise de distance à l’égard

de la classe, se focalisant sur leurs apprentissages. Aminata fait la démarche

volontaire de se mettre devant « parce que le prof il sait si on a compris ou pas »

(entretien SFLS). Jonah refuse d’être le délégué d’une classe. Son discours est axé à

la fois sur le comportement de ses camarades qu’il juge « irrespectueux », et son

manque de compétences pour les défendre (l.152-162).

Cela ne signifie pas qu’ils sont en marge des codes sociaux adolescents. Dans

leur discours nous notons l’appropriation de la langue parlée, et la tension entre

l’acceptation par les pairs et l’usage de la norme :

ENQUÊTRICE : Qu'est-ce qui était difficile avec les élèves ? ELÈVE : Parler avec eux ! ENQUÊTRICE : Pourquoi ? ELEVE : Ben ché pas ENQUÊTRICE : Qu'est-ce qui te coupait dans le fait de parler avec eux ? qu'est-ce qui te bloquait ? ELÈVE :Eux ils ont appris une langue wesh et tout et tout quoi ENQUÊTRICE : Et toi tu savais pas parler la langue wesh ? et tu l'as apprise depuis ? ELÈVE : Ben ouais ENQUÊTRICE : Et ça va mieux ? ELÈVE : Moi j'pense qu'ils m'ont appris la langue wesh mieux que le français normal. ENQUÊTRICE : Ah bon ? (rires) Ben du coup maintenant tu sais parler les deux français. Et tu sais quand est-ce qu'il faut parler le français wesh et le français "normal" ? ELÈVE : Avec tes potes tu parles wesh euh ENQUÊTRICE : Avec les potes c'est wesh ? ELÈVE : Et quand t'es en professionnel tu parles professionnellement quoi !

Sedray, l.147-163

De même, en dehors de l’école beaucoup ont trouvé des espaces de

sociabilisation auprès de jeunes de leur âge, en pratiquant une activité sportive.

Les entretiens sont aussi l’occasion de revenir sur leur parcours en UPE2A.

Nous leur avons posé une question qui fait appel à leur expérience et sollicite leur

expérience pour venir en aide aux élèves actuellement dans le dispositif UPE2A :

« Quel conseil donnerais-tu à un élève qui est actuellement en UP pour que son

intégration se passe bien ? ». Cette démarche leur permet de mener une réflexion

sur leur parcours. Nous avons relevé plusieurs types de conseils. Certains sont

relatifs au comportement à adopter en classe ordinaire face aux pairs (« se faire des

amis », d’autres sur l’attitude (« ne pas être timide », « rester soi-même »), ou le

comportement face aux enseignants (« écouter les profs », « écouter les

consignes », « écouter leurs conseils et pas les élèves »). Enfin, ils offrent des

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conseils méthodologiques (« conserver absolument le classeur d’UPE2A », « se

mettre devant en classe » ou « s’il y a des questions qu’il ne comprend pas il doit

l’écrire »).

La dernière question est portée sur l’avenir, la manière dont ils se perçoivent

dans le futur. Seuls Adama et Jaime évoquent un avenir personnel : le premier

souhaite voyager à Miami, qu’il rêve de découvrir, le second envisage de vivre avec

sa copine, se marier, et retourner en Colombie, son pays d’origine, pour la retraite.

Les élèves de 1ère et Terminale se projettent dans la poursuite d’études en

supérieur (BTS Communication, Management des entreprises ou Management

international), alors que les élèves de 2nde envisagent un métier dans un avenir plus

lointain (« être agent d’escale », « être gérant », « travailler dans une agence

immobilière »). Leur orientation est plus ou moins choisie. Sedray s’accommode de

la filière professionnelle. La méconnaissance familiale des filières, l’ont conduit à

remplir la feuille de mauvaise couleur pour son orientation. Il envisage néanmoins

les métiers de la Vente : l’idée de gérer un jour sa propre agence immobilière lui

donnera l’occasion « d’aider les gens à avoir une maison ». D’autres ont une idée

précise de ce qu’ils veulent faire. Jonah désire intégrer un CAP d’orthoprothésiste

pour « réparer les gens » (entretien SFLS). Ces deux élèves manifestent la

nécessité d’être utiles et d’aider leur prochain. Bhagya envisage, elle, à long terme,

d’aider son pays, le Sri Lanka, au niveau personnel ou dans le cadre d’une activité

professionnelle. Ayant déjà un pied dans le monde du travail, elle voit l’école

comme un moyen d’avoir un diplôme mais avoue être plus épanouie en entreprise.

Elle travaille le week-end et les vacances en tant que vendeuse. Dans l’entreprise,

elle ne se « pose plus la question d’être timide ou pas » parce qu’elle n’a pas le

choix face au client.

D’autres nous font part d’une orientation choisie, en opposition aux attentes

de leur famille. Par exemple, Sadjo vient d’un environnement familial scientifique.

Elle nous expose sa bataille pour s’affirmer comme « littéraire » et suivre une

filière « Accueil » : « Quand j’ai dit que je suis littéraire elle [famille] m’a dit

« mais tu l’as vu où ça ? Nous, nous sommes des scientifiques. Tu as l’esprit, tu

peux le faire ». Et j’ai dit « non » parce que je veux être hôtesse d’accueil » (Sadjo,

l.331-333).

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Rose et Adama envisagent d’être ré-orientés. Rose reste évasive sur son

avenir professionnel (« travailler dans des bureaux» Rose, l.241). Elle entame

actuellement des démarches pour partir en CFA Commerce à la rentrée prochaine.

Adama quant à lui, réfléchit à une réorientation dans la filière « cuisine », qu’il n’a

pas eue l’année dernière.

Certains leviers de motivation sont liés à des expériences d’ouverture

culturelle, comme la participation à « la Cour de Babel », la rencontre avec un

écrivain dans le cadre de la « Semaine des libraires ». Jonah, Sadjo, Sedray et

Aminata fréquentent tous la bibliothèque en dehors du lycée pour se sociabiliser ou

travailler.

Les entretiens sont aussi l’occasion pour eux de valoriser leurs compétences

linguistiques par la maîtrise de la variation (« avec les potes tu parles wesh (…) et

quand t’es en pro tu parles professionnellement » Sedray, l.161-163), ou au

contraire de la norme. Sadjo est fière d’avoir obtenu le meilleur résultat de la classe

à la dictée de l’école de Sèvres alors qu’elle est arrivée tardivement dans la classe

(au 2ème trimestre) et que le français n’est pas sa langue maternelle. Bhagya et

Sedray manifestent leur émotion d’avoir eu le DNB alors que la majorité des élèves

de leur classe ont échoué.

Dans leur discours, les élèves évoquent assez rarement, de manière spontanée,

l’exclusion sociale, ou scolaire. Ils sont plus focalisés sur les contenus

disciplinaires, et les freins qu’ils peuvent rencontrer au quotidien dans leurs

stratégies d’apprentissage. Ils restent dans une démarche positive, et envisagent le

futur de manière optimiste.

2.3.3 Le cahier de réussite

Au terme des actions de collecte menées au sein de l’établissement, nous

proposons aux élèves de réaliser un « cahier de réussite » (Annexe 19). En effet,

une fois le matériel à analyser rassemblé, nous souhaitons que les élèves suivis

gardent une trace de cette expérience. Il nous semble indispensable de mettre en

place un dispositif pour clore la recherche dont ils ont été protagonistes.

Nous avons constaté que les élèves manifestent un manque de confiance en

eux. L’objectif est de déclencher, ou pérenniser, une dynamique axée sur leurs

réussites. Nous mettons à leur disposition un outil expérimenté hors éducation

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nationale, dans le cadre de la pratique personnelle du taiko (tambour japonais) et de

stages pédagogiques à la Living school. Nous leur fournissons un cahier vierge,

facilement transportable, dans lequel ils peuvent inscrire toutes leurs réussites,

scolaires, personnelles, et professionnelles. Afin qu’ils s’approprient l’outil, nous

leur proposer dans un premier temps de créer la première de couverture au CDI, et

d’écrire leur première réussite Nous leur précisons que ce cahier leur appartient,

qu’ils n’ont pas à le faire lire, et qu’il leur appartient à présent de le remplir.

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3 – CHAPITRE 3 : PERSPECTIVES

Dans ce dernier chapitre nous mettrons en relation les différents discours des

informateurs afin d’établir un diagnostic sur les freins, les leviers et les besoins des

élèves allophones : quels obstacles rencontrent-ils dans leur intégration auprès des

pairs, et dans leurs apprentissages ? Quels besoins spécifiques ont-ils par rapport

aux élèves ayant fait leur scolarité en France ? ces besoins sont-ils si différents ?

Enfin, nous verrons quelles ressources peuvent être mobilisées dans l’établissement

pour les aider dans leur démarche d’inclusion. En prenant appui sur les actions déjà

mises en place et le projet d’établissement, nous proposerons un guide aux équipes

enseignantes à la rentrée 2017.

3.1 DIAGNOSTIC : REGARDS CROISÉS

« Quand tu arrives dans un pays et que tu essaies de t’intéresser à l’actualité c’est comme si tu commençais à regarder « les feux de l’amour » au 5000ème épisode »15

3.1.1 Passage d’UPE2A à la classe ordinaire : zone

d’insécurité(s)

Le passage en classe ordinaire est source de tensions, et de stress chez les

élèves arrivant d’UPE2A, d’une part, vis-à-vis des autres adolescents, dont

beaucoup sont en rupture avec le système au lycée professionnel, d’autre part vis-à-

vis des apprentissages.

« Les nouveaux arrivants sont souvent désignés par le terme péjoratif de « blédards » et leur statut de derniers venus leur vaut parfois d’être la cible de brimades de la part des natifs des cités issus des immigrations précédentes qui les perçoivent comme des « outsiders », même lorsqu’ils partagent des origines communes. » (SCHIFF, 2016 : 11)

Les adolescents arrivant d’UPE2A se trouvent confrontés en classe ordinaire

à des élèves ayant fait leur scolarité en France, et dans le cadre de notre

15 Ami italien, qui réside en France depuis plus de 10 ans, avec qui nous échangions sur les

difficultés rencontrées par les élèves issus d’UPE2A.

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établissement, issus de l’immigration pour une grande majorité. Claire SCHIFF

expose le choc de cette rencontre dans son ouvrage « Beurs & Blédards ».

Lors d’un entretien avec l’infirmière, nous évoquons l’insécurité sociale où se

trouvent les élèves allophones, dans des classes où règne parfois la loi du plus fort.

Outre leur accent, ils n’affichent pas les marqueurs identitaires des jeunes de leur

âge, ce qui peut être source d’exclusion du groupe. Elle explique ce phénomène par

le fait que de nombreux élèves-types soient entre deux cultures, et, ne sachant pas

où se positionner rejettent ce qui peut être le reflet d’eux-mêmes en adoptant des

postures rebelles et agressives à l’égard de tout ce qui peut leur rappeler leur

histoire.

Tous les signes d'appartenance langue, coiffure, vêtements sont rejetés. Les élèves ont de lourdes exigences par rapport aux autres, la période d'adolescence est très dure à l'égard de la différence.

Infirmière, lignes 93-94

Les informateurs mentionnent également une difficulté dans le passage d’un

cadre sécurisant, à la classe ordinaire. Les élèves suivis évoquent avec nostalgie le

cadre de travail privilégié d’UPE2A, où les élèves « ont le même niveau » et

« parlent plusieurs langues », où les enseignants s’occupent individuellement

d’eux. Au contraire, en classe ordinaire, ils se confrontent à un cadre hostile où les

enseignants « s’en foutent. Tu écoutes, tu écoutes pas ils s’en foutent » (Rose, ligne

152). De leur côté, les enseignants de classe ordinaire trouvent que les élèves

d’UPE2A ont été trop cocoonés, et manquent d’autonomie. Ils rappellent que

l’objectif du lycée professionnel est de les rendre le plus autonomes possible pour

affronter le monde du travail.

Moi je les couve pas. C'est pas un service à leur rendre que de les couver comme des œufs. Enseignante de Commerce, ligne 86

Nous relevons, lors les observations de classe, un repli sur soi des élèves

suivis. Adama, Rose, Aminata et Sadjo font souvent cavaliers seuls, malgré des

interactions ponctuelles avec leurs pairs (échange de matériel, aide ou demande

dans la compréhension du discours de l’enseignant ou des écrits-supports). Jonah et

Sedray fonctionnent en binôme, avec un camarade. Ils échangent entre eux, avec

l’enseignant, mais se coupent volontairement de la classe ; comme s’ils essayaient

de recréer une bulle protectrice. Seuls Jaime et Bhagya semblent intégrés parmi

leurs pairs, se plaçant dans le groupe, et échangeant avec leurs camarades. Les

autres élèves suivis cherchent un cadre rassurant, quitte à s’exclure spatialement.

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Même à l’extérieur du lycée, lors d’une sortie au cinéma, Sedray ira s’asseoir avec

son binôme dans une rangée à l’opposé de ses camarades. Dans la classe, les élèves

suivis sont souvent placés devant, ce qui leur permet un contact avec l’enseignant,

sans avoir à subir le regard de la classe. Nous notons également que les garçons ont

plus de mal à s’intégrer à leurs pairs de classe ordinaire. Dans la cour, ils

fréquentent essentiellement les élèves d’UPE2A, comme s’ils n’arrivaient pas à

couper le lien avec le dispositif.

Concernant le rapport aux apprentissages, les enseignants trouvent qu’ils ont

intériorisé le fait de ne pas avoir le même niveau de maîtrise de la langue que les

autres élèves. Ce sont des élèves qui ont du mal à trouver leur place dans la classe,

et qui arrivent avec l’étiquette d’être « ceux qui ne parlent pas français ».

Les élèves suivis évoquent la difficulté de passer d’un apprentissage

linguistique du français, vers l’apprentissage de discours complexes en français et

dans d’autres disciplines. Ils nous expliquent également être parfois perdus dans la

masse documentaire des différents supports d’enseignement (feuilles détachables de

consommables, documents authentiques, extraits de manuels photocopiés, extraits

d’ouvrages…). Le Français Langue Scolaire prend souvent la forme d’un discours

long, inscrit dans un répertoire de genres propres à l’élaboration et à la transmission

des savoirs à orientation scientifique (VIGNER, dans GALLIGANI, 2012 : 81). Or

les élèves suivis ont été familiarisés en UPE2A à la réalisation de productions

écrites d’invention, liées aux attentes du DELF. Beaucoup ont été scolarisés dans

des systèmes favorisant l’apprentissage par cœur, et n’ont pas acquis les méthodes

de travail et de logique des enseignements en France. Dans notre échantillon, seul

Jaime se plie sans difficulté à l’exercice rédactionnel scolaire, en proposant un

commentaire composé d’un extrait de « Cyrano de Bergerac ». Les autres

présentent des lacunes dans la mise en place d’une méthode et la maîtrise des

concepts pour argumenter, synthétiser, montrer qu’ils se sont appropriés les

connaissances.

L’écriture inventive est favorisée en UPE2A, présentée comme source de

créativité et d’expression de soi. D’autre part, les erreurs orthographiques et

syntaxiques sont sources d’apprentissage, de construction d’une interlangue, et ne

sont pas vécues comme des sanctions. Dans leur analyse des pratiques de l’écrit,

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Sandrine WACHS et Corinne WEBER (WACHS, WEBER, 2013 : pp.97-98) ont

réalisé un questionnaire dans des classes de troisième professionnelle où la pratique

de l’écrit « papier » se révèle extrêmement rare, alors que les élèves allophones ont

un rapport décomplexé à l’écrit. En demandant aux élèves s’ils voulaient bien nous

fournir des productions personnelles, nous avons la surprise d’avoir, de la part de

deux entre eux, un journal intime (Rose) et un carnet de poésie (Bhagya), où elles

couchent leurs pensées sur papier en français et anglais.

Au sujet de l’orthographe, les enseignants ne font pas de distinction avec les

autres élèves, dont beaucoup présentent des lacunes en termes d’écriture. Un

enseignant note même que les élèves allophones, du fait d’avoir appris la

grammaire et la conjugaison de fraîche date, s’en sortent plutôt mieux dans ces

domaines. En revanche, l’adéquation entre les consignes et les productions

attendues posent problème, tout comme l’assimilation de concepts et de notions qui

ne leur parlent pas. Ainsi, lorsqu’en classe sont évoqués « l’Affaire Fillon », « les

Restos du cœur » ou encore la bataille électorale pour les présidentielles, les élèves

suivis décrochent. Ils n’ont pas le bagage culturel qu’ont les autres élèves, baignés

dans un territoire avec ses référents et ses implicites. Les élèves suivis doivent donc

mener de front la maîtrise de la langue française comme outil de communication,

comme vecteur d’apprentissage, comme ancrage culturel, et gérer les langues de

leur répertoire. D’où peut-être une surcharge cognitive que ne connaissent pas les

élèves nés sur le territoire.

Y a des choses dont les élèves ont appris en bas âge des autres écoles au primaire genre comme ça et moi je l'ai pas appris c'est ça »

Sadjo, lignes 93-94

Dans leur discours, les enseignants mentionnent essentiellement des

difficultés de compréhension liées aux contenus d’enseignement qu’ils relient à des

lacunes lexicales et culturelles.

On avait discuté pour Sadjo elle a un peu ce problème de manque de connaissances professionnelles. Les mots professionnels. Culture professionnelle.

Enseignante de Commerce, lignes 67-68 ENQUÊTRICE : Et au niveau de la maîtrise de la langue, tu dirais que Sadjo en maîtrise du

français ?

ENSEIGNANT : Alors, je pense que Sadjo n'a aucun problème de compréhension, sinon des problèmes, parfois, mais c'est pas récurrent quand il s'agit du contexte. De comprendre le contexte. Parce que parfois elle n'a pas le même contexte là d'où elle vient. Elle n'a pas les mêmes codes. Par exemple. ENQUÊTRICE : C'est par rapport à certaines notions.

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ENSEIGNANT : Oui parce que quand on parle, je sais pas, de jardin d'enfants ou de centre aéré ou de choses comme ça, il faut lui faire la traduction et voir à quoi ça correspond.

Enseignante Accueil, lignes 42-47

Les lacunes lexicales peuvent être source d’erreurs lors des productions, alors

que l’élève a compris un énoncé. Ainsi, Aminata, lors de la préparation de l’oral

d’Anglais du Baccalauréat, n’arrive pas à traduire un mot en français. Lorsqu’un

élève lui pose une question sur l’identité d’un animal, elle lui répond « je ne sais

pas ». Pourtant quand il la questionne sur le texte, elle avoue savoir de quoi il

s’agit, mais ne trouve pas le mot français pour le dire. Elle connait le signifié, et le

signifiant en anglais, « owl », mais est incapable de nommer l’animal, la chouette.

D’autre élèves évoquent leur difficulté à instaurer un continuum entre les

différentes langues de leur répertoire qui s’interfèrent lors de la réalisation de

productions écrites. Bhagya, en lecture, a du mal à prélever les mots-clés, car tous

les mots sont porteurs de sens pour elle ; « ils se balladent dans [sa] tête mais [elle

ne sait] pas où les ranger ».

Enfin, le contraste entre les évaluations en UPE2A et en classe ordinaire est

source de stress. Durant leur passage en UPE2A, les élèves sont notés en Français

sur l’acquisition de compétences, associées au Cadre Européen Commun de

Référence pour les Langues (CECRL), en fonction de leur degré de connaissance

du français. Ainsi les mêmes compétences ne seront pas attendus d’un élève

francophone et d’un élève entrant dans la langue, ayant pour langue maternelle une

langue éloignée du français. Dans la classe ordinaire, il est attendu d’avoir les

mêmes compétences qu’un natif, et les évaluations font rarement l’objet d’une

différenciation. Sedray évoque le choc que représente le passage de 19 à 9 de

moyenne, et le fait qu’un élève brillant en UPE2A, va penser pouvoir se « la couler

douce » en classe ordinaire, alors que, pour réussir cette bascule, il doit au contraire

redoubler d’efforts. Nous pouvons relativiser les difficultés scolaires par le fait que

les élèves arrivant d’UPE2A se situent dans la norme des classes où ils sont

intégrés, comme l’attestent leurs bulletins scolaires. En revanche, beaucoup

montrent un réel mal-être dans leur discours ou leur comportement en classe

ordinaire.

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3.1.2 La difficile prise de parole en classe ordinaire

Comme nous l’avons vu précédemment, le passage d’UPE2A vers la classe

ordinaire peut générer des tensions sociales et scolaires, qui mettent l’élève en

position d’insécurité. Il existe ainsi un décalage entre la participation en dispositif

UPE2A et le mutisme en classe ordinaire (GEDAT-BITTIGHOFFER, 2013 : 163).

La prise de parole des élèves suivis est variable, selon la situation

d’enseignement (classe entière, travail de groupe, exposé, exercices, contrôle ou

sorties), ou les discours d’interactions (apport d’information, demande

d’information, reprise, organisation de la parole, évaluation). Les élèves suivis

présentent tous des difficultés dans la prise de parole durant les interactions de

classe.

Il peut s’agir de mutisme sélectif, où l’élève refuse délibérément de parler.

Nous l’observons chez Bhagya en Français, et chez Sadjo en Prospection. Cette

dernière fait un signe négatif de la tête à l’enseignante, qui comprend qu’elle doit

passer à un autre élève pour avoir la réponse à sa question. D’où la difficulté pour

les enseignants d’évaluer leurs compétences orales. La majorité des élèves suivis

affiche plus une attitude passive en classe plus qu’un réel refus de prendre la parole,

pour « ne pas faire de vague », comme le remarque si justement un enseignant à

propos d’Adama. Pour comprendre le phénomène, nous avons analysé plusieurs

facteurs possibles : l’insécurité linguistique, le rapport initial à la scolarité et le

manque d’outils linguistiques.

Tous les élèves observés ont pour dénominateur commun d’être en situation

d’insécurité linguistique. Dans la progression de nos recherches (observations,

entretiens, questionnaires), nous constatons que ce concept d’insécurité linguistique

(IL) tient une place importante dans les pratiques langagières et les discours sur la

langue. En effet, les interactions verbales répondent à des modèles normatifs qui

légitiment la parole des locuteurs… ou pas (BRETEGNIER, 2003 : p.9).

La gêne occasionnée par la prise de parole se manifeste chez les élèves suivis,

lorsque les enseignants leur posent des questions ou leur demandent de lire à voix

haute. Au sein des classes ordinaires, les élèves allophones ont souvent un accent

les identifiant à une zone géographique et les ramenant à leur statut de « migrant ».

Dans des classes dont une majorité d’élèves est issue de l’immigration, les

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nouveaux arrivants ramènent à ce statut, d’où des réactions de dévalorisation des

accents. Nous retrouvons ainsi une forte IL liée à la pratique de l’oral pour les

élèves allophones, et une insécurité masquée derrière une posture d’insolence ou de

rejet des codes scolaires par les élèves ayant effectué leur scolarité en France, qui

utilisent des variations du français dévalorisées (le « français wesh wesh » comme

ils l’appellent eux-mêmes).

Les élèves suivis se sentent en insécurité face à l’oral attendu dans la classe.

Les marques de variations, l’alternance codique ou leur accent, marquent leur

altérité à un âge où l’on a un fort besoin d’appartenance. Certains élèves justifient

leur faible prise de parole par une apparente sécurité. Par exemple, Jonah préfère

attendre que ses camarades se manifestent, car il le sait, s’il n’a pas compris, les

autres n’ont pas compris et vont forcément poser la question.

Elève : En fait je comprends tout. Si je comprends pas c'est parce que les autres élèves ils comprennent pas. Et là nous demandons et… ENQUÊTRICE : Et donc quand tu comprends pas là tu demandes ? E : Non ils demandent.

Jonah, lignes 78-81

Les difficultés dans la prise de parole peuvent être le fait d’incompréhensions

scolaires, culturelles. L’élève est placé dans une certaine insécurité : ne sachant à

quel code se fier, il préfère se mettre en retrait.

ENQUÊTRICE : et est-ce que tu participes en cours ou pas ? ELÈVE : Si. Partager la réponse et tout, je préfère le garder pour moi. ENQUÊTRICE : Pourquoi tu préfères garder la réponse ? ELÈVE : Pour pas trop participer après ils vont commencer à rigoler pff… Même si la réponse elle est bonne quoi. J’'aime pas trop participer

Rose, lignes 116-120

Les interactions de classe sont également soumises à des codes scolaires

propres au fonctionnement du système éducatif français. Les élèves issus d’autres

cultures ne le maîtrisent pas toujours. Lors du colloque « Politiques linguistiques et

inclusion identitaire. Cultiver les spécificités : les identités perçues des enfants,

migrants, déplacés et réfugiés, en milieu scolaire » en mai 2017, Ousseynou

THIAM, enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diopo de Dakar,

signalait l’embarras des apprenants sénégalais (ce qui est le cas de Aminata, Sadjo

et Adama) à prendre la parole en classe du fait d’une posture d’écoute rattachée à

l’apprenant d’Afrique de l’Ouest où « le maître parle, l’élève écoute ». Le fait de ne

pas regarder en face un enseignant est interprété comme un affront par l’enseignant

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français, alors que pour un élève africain, baisser les yeux est un signe d’humilité et

de respect.

Les blocages dans la prise de parole peuvent aussi avoir comme source le

manque de connaissances linguistiques ou culturelles. Comme nous l’avons vu

précédemment, les élèves allophones doivent à la fois intégrer la grammaire, les

discours et les variations de la langue. Lors les observations de classe, nous

relevons que beaucoup d’élèves décrochent lorsque l’enseignant fait un apport de

savoirs à l’oral en cours magistral. Ils raccrochent quand ce dernier note les idées

au tableau, que le lexique est fixé sur un support.

Le manque de maîtrise des savoirs, acquis par les autres élèves, s’observe

surtout dans la compréhension des consignes. Les élèves n’ont pas toujours le

lexique disciplinaire et les pré-requis. De ce fait, Sadjo, qui s’exprime sans

difficulté, dans un français standard, en échange interindividuel, exprime ses

difficultés dans la compréhension orale.

ENQUÊTRICE : Et le plus dur c'est quoi ? l'oral ou l'écrit ? ELÈVE : Euh… l'oral. ENQUÊTRICE : L'oral ? ELÈVE : C'est … l'écrit ya pas de problème, mais l'oral, oui. Parce que desfois on pose des questions. Donc je sais pas ;j'étais pas là quand on faisait les leçons et tout (…) Y a des choses dont les élèves ont appris en bas âge des autres écoles au primaire genre comme ça et moi je l'ai pas appris, c'est ça.

Sadjo, lignes 87-95

Nous avons noté également des comportements variables d’une discipline à

l’autre, selon leur niveau de sécurité linguistique et disciplinaire. Lors des

observations de classe, Bhagya peut participer, prendre la parole spontanément,

lever la main en Mathématiques, où elle se sent à l’aise, et être en retrait dans les

disciplines où elle présente des difficultés linguistiques (Français, Commerce). Elle

explique son comportement par les moqueries dont elle fait l’objet lors de la lecture

à voix haute :

ELÈVE : Bon après ya des élèves qui aussi rigolent quand je fais des fautes.

ENQUÊTRICE.: Et ils font pas de fautes eux ?

ELÈVE : Ché pas. Ils se moquent de moi

Bhagya, lignes 186-202

Dans d’autres disciplines, où elle a des facilités, son comportement frôle

l’irrespect. En Anglais, qui est sa Langue Seconde, elle bavarde avec ses camarades

de classe, fait preuve de désinvolture, masquant à peine son ennui. Elle nous dira,

en entretien, que « le cours d'anglais je trouve que c'est des trucs d'enfants », ( l.78-

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79). En fonction de son degré de sécurité, Bhagya répond aux attentes scolaires ou

sociales.

Le niveau d’insécurité des élèves suivis varie également en fonction du

niveau scolaire des parents et du statut de la langue maternelle. Lorsque ceux-ci ont

une pratique écrite de la langue seconde et l’utilisent dans le cercle familial, elle

sera beaucoup moins source d’insécurité pour l’enfant (LECONTE, 2010 : 64).

Pourtant, Sadjo, qui maîtrise les codes linguistiques et scolaire du français, présente

une grande insécurité face à la pratique de l’oral en classe. En effet, l’école attend

de l’individu une performance orale codée, qui n’existe pas dans les interactions

quotidiennes. L’erreur linguistique est jugée comme une faute. Une enseignante

nous fait part de son expérience qu’elle met en relation avec ce que peuvent vivre

les élèves allophones en classe ordinaire :

Plus que dans le pays je crois que c'est dans une salle de classe que c'est le plus angoissant. Enseignante d’Accueil, ligne 120

L’école est ainsi génératrice d’IL. Elle accroit la « culpabilité diglossique »

(CARAYOL In : GUEUNIER, 2003 : 45) et le sentiment de faute. L’IL ne relève pas

seulement d’un sentiment mais est également générée par des situations qui mettent

l’individu en insécurité, notamment dans le contexte scolaire.

« […] ce serait l’institution scolaire qui générerait l’insécurité linguistique en développant à la fois la perception des variétés linguistiques et leur dépréciation au profit d’un modèle mythique et inaccessibles (le français standard, le français normé). En d’autres termes, la domination symbolique à l’œuvre dans ce cas serait celle d’un norme fictive (LE bon français), exogène (toujours située en dehors de la communauté) et légitimée par l’institution scolaire. » (FRANCARD, 1993)

Dans le système scolaire français monolingue, seules sont valorisées les

langues dominantes ayant une valeur forte sur le marché linguistique (anglais,

espagnol, français, portugais, chinois, arabe) qui positionnent les autres langues

comme minoritaires. A de nombreuses reprises nous avons pu entendre élèves et

enseignants dire que les langues maternelles ou familiales des apprenants relevaient

de dialectes et pas de véritables langues.

« D’autres sont conscients de la dévalorisation linguistique et culturelle mais la rejettent et peuvent alors revendiquer une résistance culturelle. Enfin, certains sujets ont intériorisé la dévalorisation sociale qui touche les personnes porteuses de cultures non légitimes et locutrices de langues ou de variétés dominées et peuvent la reprendre à leur compte. L’intériorisation est perceptible par l’expression d’un sentiment de gêne ou de honte devant l’emploi public de la langue ou par la dévalorisation de la langue elle-même. » (LECONTE F., 201 ? : p.70)

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Ainsi l’élève peut ressentir un sentiment de honte face à des pratiques

linguistiques non légitimes dans l’espace public, non seulement par rapport à sa

langue d’origine mais également son accent. Les élèves suivis se trouvent dans une

posture très instable, dans le contexte de la classe, hyper-normée linguistiquement

et socialement. Il doit se mettre au fait des normes et variations liées aux pratiques

scolaires, adolescentes et linguistiques.

3.2 DE L’INSÉCURITÉ AU DÉVELOPPEMENT D’UN POTENTIEL

3.2.1 Les pratiques langagières

La notion d’IL touche le plurilinguisme, l’identité de l’individu qui s’inscrit

dans une/des communauté(s) donnée(s) (LECONTE, 201 ? : 68), et le statut de la

langue pratiquée. L’enceinte scolaire est le lieu d’interactions et de représentations

linguistiques multiples. Les différents acteurs usent de la variation linguistique du

français selon les situations et les types de discours qu’ils utilisent.

« L’écart entre la norme standard du français de scolarisation considéré comme langue de référence et les variations de l’univers social dominant se creuse. Pour des apprenants nouvellement arrivés exposés à des formes particulières du français en milieu scolaire et social, quelle norme enseigner et quelle place accorder à la variation ? » » (GALLIGANI, WACHS, WEBER, 2013 : 11)

La langue utilisée à l’école est à la fois standard, ordinaire, et scolaire. Les

enseignants ont une représentation négative de la langue parlée par les élèves. La

langue de l’école, par l’école, pour l’école, ne serait-elle pas soumise à la

variation ? Nathalie AUGER montre que l’utilisation de la norme dans un contexte

s’actualise selon les situations. La pratique de classe fait des allers-retours entre

plusieurs registres de langues, que les élèves ne maîtrisent pas toujours. Pourtant au

sein de l’établissement, nous observons que les élèves suivis ont une maîtrise de la

variation du français. En effet, ils font usage du parler ordinaire de socialisation

avec leurs pairs, ou, lors d’échanges interindividuels, n’hésitent pas à utiliser une

langue plus relâchée, propice aux interactions.

En revanche le plurilinguisme n’est présent dans l’établissement que dans le

cadre de Classes Européennes ou de l’e-twinning, dans un répertoire de langues au

statut valorisé sur le marché des langues. Les enseignants ont une posture assez

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réticente à l’égard de l’usage de l’alternance codique en dehors du cadre de la

classe de langues ou de projets spécifiques. Au quotidien, ils la considèrent comme

un obstacle à l’appropriation du français, et révélateur d’un repli identitaire.

Certains enseignants constatent que l’alternance codique en interactions de classe

est surtout utilisée par les élèves pour s’insulter. Les enseignants refusent ainsi

l’usage de langues qu’ils ne connaissent pas par crainte de débordement, et parce

qu’ils se sentent eux-mêmes en insécurité. C’est toute l’ambigüité du système

scolaire français qui « n’a pas de position claire pour gérer le contact des

langues » (CHNANE-DAVIN, 2011 : 38). S’ils se sont eux-mêmes retrouvés en

position d’allophone, ils ont vécu cette situation d’insécurité linguistique de

manière assez sereine. En effet, si cette dernière a pu limiter les échanges avec les

personnes autochtones, elle n’a toutefois pas remis en cause leur statut de locuteur,

puisqu’il ne leur était pas demandé d’avoir une maîtrise de « parfait bilingue » pour

voyager comme touristes à l’étranger. En revanche, l’IL au sein d’une classe

semble être plus handicapante et source de blocages pour les élèves.

Les instances normatives diffèrent d’une culture à l’autre, ainsi la France

valorise la culture écrite, ce qui n’est pas le cas dans les cultures africaines. En

revanche la connaissance du français constitue un indice de réussite sociale. F.

LECONTE relève que les élèves issus de pays francophones rencontrent moins de

difficultés à l’oral qu’à l’écrit une fois scolarisés dans le système français

(LECONTE, 201 ? : 62-63). Il s’agit d’une insécurité liée à la langue scolaire et non

à la langue quotidienne.

Michel FRANCARD définit l’insécurité linguistique à l’école comme « […]

la prise de conscience, par les locuteurs, d’une distance entre leur idiolecte et une

langue qu’ils reconnaissent comme légitime parce qu’elle est dans la classe

dominante, ou celle d’autres communautés où l’on parle un français « pur », non

abâtardi par les interférences avec un autre idiome, ou encore celle des locuteurs

fictifs détenteurs de LA norme véhiculée par l’institution scolaire. » (FRANCARD,

1993 : 13)

Les représentations sociales et linguistiques à l’égard des élèves arrivant

d’UPE2A peuvent être bienveillantes (aide, tutorat), malveillantes (insultes,

moqueries) ou indifférentes (camarade comme un autre). Or la compétence bilingue

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peut apporter des avantages cognitifs dès lors que l’individu a acquis des

compétences métalinguistiques dans la L1. La question du plurilinguisme émerge

lors des entretiens avec les élèves et dans les questionnaires. L’utilisation de

plusieurs langues de leur répertoire langagier, est perçue comme un atout par les

élèves, même s’ils ont un faible niveau de compétences. Il est important d’accorder

une légitimité aux langues originelles, ou appartenant au répertoire des élèves.

Le cadre scolaire comporte des situations de contact et de mélange de

langues, qui sont pourtant ignorés dans la société française. Muriel MOLINIE

indique ce paradoxe d’une société qui présente une grande diversité culturelle, mais

que « cette diversité ne se traduit pas dans un développement de richesses sociales,

culturelle pour l’ensemble des citoyens » (MOLINIE, 2011 : p.78). La Didactique

des Langues permet de faire des liens entre les parcours individuels et les

compétences (motivation dans les apprentissages, acquisitions linguistique et

scolaire, sociabilisation avec les pairs).

3.2.2 L’importance du bagage linguistique et culturel

Les élèves qui évoluent dans un environnement familial à fort capital culturel

et linguistique développent un métalangage et des qualités scolaires adaptées au

système de l’école française.

Sadjo et Bhagya évoluent dans un environnement avec un niveau de

qualification élevé. Toutes deux ont la maîtrise avancée de compétences dans des

langues ayant un statut valorisé. Lors des entretiens, seule Sadjo admet lire en

dehors de l’école « pour le plaisir », et a pu citer son livre préféré, L’os de Morlam

de Bigaro Diop, auteur sénégalais. Les autres élèves suivis avouent être peu

familiers de pratiques de lecture en dehors des prescriptions scolaires. D’autre part,

c’est la seule élève qui évoque spontanément les pratiques linguistiques et scolaires

de sa famille (usage du français entre parents et enfants, parents et fratrie

diplômés). Bien que locutrice wolof, elle valorise plutôt le français dans son

répertoire langagier et se centre sur des pratiques lui offrant une perspective

d’ascension sociale.

Sedray, lui, évoque le manque de compétences de sa mère en français, qui lui

a valu d’être orienté en lycée pro plutôt qu’en général. S’il rencontre des difficultés

face à la pratique écrite dans la transposition de la phonétique à la graphie. Il a

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acquis toutefois une littératie à l’école en Algérie dans la langue arabe. Celle-ci lui

permet de transférer ses savoirs métalinguistiques d’une langue à l’autre. C’est

également le cas de Bhagya, de langue maternelle singhalaise, qui a été scolarisée

en anglais jusqu’à son arrivée en France et qui a su transférer les connaissances

d’une langue à l’autre. Jonah a effectué une partie de sa scolarité au Portugal, où il

a dû passer du créole de Guinée Bissau à une autre variante du portugais. Le cas de

ces trois élèves est intéressant. Scolarisés dans une langue autre que leur langue

maternelle (arabe, anglais, portugais), et ils ont basculé vers une nouvelle langue à

leur arrivée en France.

Les élèves francophones (Aminata, Rose et Adama), n’ayant pas un

environnement familial propice à des pratiques culturelles et linguistiques variées,

se trouvent en grande insécurité linguistique, et il semble que leurs difficultés

linguistiques de départ se soient transformées en difficultés scolaires. Notre constat

rejoint le constat fait par Catherine MENDONÇA-DIAS dans sa thèse sur les

faibles résultats des élèves ayant un faible capital linguistique et scolaire

(MENDONÇA-DIAS, 2012 :307).

Enfin, Jaime, seul « monolingue » du groupe, pratique une langue maternelle

non minoritaire dans son pays d’origine. Il est aussi le seul à afficher une certaine

rigidité face à l’apprentissage du français qu’il « n’aime pas » : posture adolescente

de révolte, ou manifestation de son insécurité ?

Sedray et Jonah ont été également scolarisés dans un contexte diglossique.

Pour Sedray la langue de l’école était arabe alors que sa langue maternelle était le

kabyle. Il a étudié le français comme LVE, et a appris l’allemand à l’école en

Algérie. Son répertoire langagier dans l’école n’est pas valorisé et il doit tout

recommencer dans de nouvelles langues, et élargir son capital linguistique. Jonah a

fait l’apprentissage du portugais en Guinée-Bissau. Sa langue maternelle est le

créole. Il a ensuite été scolarisé au Portugal, où il a fait l’apprentissage d’une autre

variante. Jonah pratique plusieurs variantes du portugais, et s’adapte très facilement

à l’usage de l’espagnol, langue parente. Il opère des transferts, et le fait de jongler

avec plusieurs variantes lui donnent une flexibilité en espagnol. Lors de

l’observation nous n’avons pas relevé de fossilisation. Jaime a également un

parcours scolaire dans une école militaire en Colombie, où il a acquis une

méthodologie de travail et expérimenté des pédagogies nouvelles. Aminata et Jonah

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sont issus de fratries, avec lesquelles ils ont fait leur année d’UPE2A. La sœur de

Aminata a été orientée en baccalauréat général et la sœur de Jonah était tête de

classe en UPE2A. Ils ne se laissent pas déstabilisés par le groupe, et ne craignent

pas de faire « cavalier seul » (Jonah refuse d’être le délégué de sa classe parce qu’il

l’estime « indéfendable », Aminata préfère se rapprocher de l’enseignant plutôt que

de ses pairs en classe). Les élèves ayant un rapport distancié au français s’en sortent

mieux que les élèves francophones, qui ont pourtant fait l’apprentissage du français

Ils partagent ce point commun avec un grand nombre d’élèves ordinaires.

Comment utiliser leurs compétences linguistiques et métalinguistiques sans les

stigmatiser ? Les élèves-types oscillent entre rejet de l’altérité et revendication

d’une identité. Les pratiques sociales des adolescents issus de l’immigration ou en

migration sont plurielles, surtout chez l’adolescent en transformation et opposition.

L’enjeu n’est pas de les enfermer dans une identité, mais au contraire de prendre

appui sur leur pluralité pour partager une culture commune, et apaiser le climat de

tension qui peut exister parfois en lycée professionnel.

3.2.3 Les dynamiques de réussite

Quant au Soutien Français Langue Seconde (SFLS) ; beaucoup d’élèves

expriment leurs réticences à intégrer ce dispositif de suivi en début d’année. En

effet, ils estiment maîtriser suffisamment le français, et ne veulent pas être

stigmatisés auprès de leurs pairs. Les premières séances abordent donc leur malaise.

Ils sont invités à exposer leur ressenti sur la classe. Ils expriment leur

incompréhension face à des élèves qui ont un discours de rejet face à l’altérité (on

est pas des blédards) et se réfèrent pourtant à leur ancrage identitaire (ils disent

toujours « vous les français… les toubabs, moi je suis.. »). Progressivement nous

travaillons sur la valorisation de leur bilinguisme. Puis, au fil des séances, nous

abordons les contenus disciplinaires à partir de leurs notes de classe ou des

documents supports qu’ils étudient. Une grande partie du travail réside dans la

compréhension des écrits, de lecture à voix haute, de reformulation des énoncés.

Enfin, nous réinvestissons dans des productions (jeux, articles) les connaissances

linguistiques et méthodologiques développées durant l’année. Les élèves suivis qui

viennent au SFLS développent des compétences en FLSco, qui répondent à leurs

besoins et les difficultés identifiées en classe (rapport phonétique/graphie,

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développement du lexique, compréhension de textes complexes, lecture à voix

haute). Ils sont en demande de pouvoir s’exprimer tant à l’écrit qu’à l’oral. Ils y

trouvent un espace de confiance, pour revoir des points linguistiques ou

disciplinaires spécifiques ou développer de nouvelles compétences. Jonah réalise

une revue de presse sur la violence (le terrorisme, les casseurs) et Sadjo un article

sur le racisme. Rose et Koumba nous sollicitent sur des points d’orthographe qui

leur posent problème, alors que Jaime et Ariane se focalisent sur la prononciation et

Sedray sur la correspondance phonétique/graphie. Le soutien se déroulant au CDI,

certains élèves ne relevant pas du dispositif ont ponctuellement rejoint le groupe.

En fin d’année, les enseignants nous signalent des progressions chez tous les élèves.

Nous ne sommes pas en mesure d’affirmer si le soutien y a contribué ou non.

Les élèves allophones ont un positionnement de reconnaissance vis-à-vis de

l’institution scolaire. Claire SCHIFF relève que beaucoup d’entre eux viennent de

pays où l’on inflige encore des sévices corporels à l’école. Beaucoup d’enfants

migrants n’ont pas de place pour vivre leur adolescence, et la CLA/UPE2A leur

permet de faire l’expérience de l’altérité (SCHIFF, 2016 :32). Ils découvrent la

liberté, la curiosité d’aller dehors et s’affranchissent du passé pour réaliser leurs

ambitions. Ils sont dans un surinvestissement scolaire, et souvent viennent en aide

aux familles. Beaucoup affichent dans les entretiens leur réussite, ou leurs atouts

par rapport aux autres élèves.

Les tensions avec les élèves issus de l’immigration peuvent s’expliquer du

fait que les uns sont portés par un projet d’avenir, personnel ou familial, alors que

les autres sont enfermés dans des quartiers, des lycées, sans mixité sociale, ont peu

de connaissances de l’histoire familiale et de la langue originelle, qu’ils idéalisent,

faute de perspectives dans le présent.

« Si les jeunes primo-arrivants parlent volontiers de ce qu’ils espèrent pouvoir devenir, les Blacks et les Beurs évoquent surtout leur devenir contrarié. » (SCHIFF, 2016 : 62)

Nous sommes en présence d’élèves travailleurs face à des élèves qui ont

intégré l’échec, et sont dans une dévalorisation d’eux-mêmes par un comportement

agressif, des « vannes » et une certaine résignation : « Vous savez madame qu’on

est stupides ». Malgré des classes très agitées, certains élèves sont imperturbables et

ne dévient pas du « droit chemin », quitte à s’isoler du groupe, comme nous l’avons

vu précédemment. C’est ainsi que Jonah se positionne dans son discours comme

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élève modèle face à la classe : « ils parlent trop, pas sur le travail, sur la vie perso.

Moi je les écoute pas », ce que son comportement confirme lorsqu’un camarade

tente de le faire rire en classe, et qu’il tourne la tête ,se plongeant sur sa feuille, sans

un regard. Sedray affiche également une énorme motivation, qu’il manifeste par

une forte participation en cours. Celle-ci contraste avec son discours en entretien

par rapport à sa prise de parole, où il se présente comme un élève passif et peu

acteur de ses apprentissages :

Dans ma tête ça se passe toujours comme ça : moi j'veux demander au prof mais dans ma tête j'me dis si j'demande tu vois tout le monde va se moquer de moi et tout et par je demande pas je demande pas c'est mieux

Sedray, lignes 297-299

Les observations, ainsi que les entretiens avec les enseignants confirment le

fait que les élèves allophones sont particulièrement motivés et impliqués dans leurs

apprentissages. Ils activent leur potentiel personnel, linguistique et scolaire pour

développer de nouvelles compétences, et s’adapter aux attentes du système scolaire

français. Ils peuvent aussi jouer un rôle moteur dans les classes, même si leur prise

de parole reste faible dans le groupe-classe. Dans les interactions de classe, Bhagya

n’hésite pas à venir en aide à ses camarades. De même, dans les travaux de groupes,

en Français ou en Mathématique, Jaime se place comme leader. Il organise la

parole, distribue le rôle de chacun à l’intérieur du groupe, explique les consignes

(mathématiques), souffle à ses camarades envoyés au tableau, mais refuse

catégoriquement d’expliquer la démarche du groupe devant la classe. En Français,

il reprend à plusieurs reprises une camarade à qui il dicte le contenu du devoir à

rendre sur Cyrano. Il va faire de l’étayage en épelant et expliquant le sens d’un mot,

mal compris par la camarade qui relie son brouillon.

Les comportements observés dans les classes et des discours, montrent que

dans les situations d’échanges interindividuels ou en petits groupes, les élèves

pratiquent l’étayage et l’entraide entre pairs. Qu’il s’agisse de prêter du matériel,

corriger, expliquer etc… les élèves suivis viennent en aide à leurs camarades, et

inversément. Beaucoup préfèrent d’ailleurs interagir avec les élèves à proximité,

pour avoir une explication ou une précision, plutôt que de solliciter l’enseignant, et

mettre le focus sur soi pour des contenus scolaires.

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Malgré des postures rebelles, les élèves-types restent dans un cadre scolaire,

et ont conscience de la langue normée, sensibles au « bon parler » . Durant les

observations, ils commentent par exemple l’absence d’accent français de Jaime en

anglais : « Pourquoi lui il a pas d’accent ? » « il maîtrise, il pratique plus ». De

même, lors de la séance de rédaction collective en français dans la classe de Jaime,

certains élèves commentent à l’oral entre eux l’orthographe d’une camarade :

« T’as vu comment elle écrit « comédie » ? elle l’a écrit en deux mots ! (rires) »

[comme et dit ? comme est dit ?comme Eddie ?].

Nous avons remarqué chez ces élèves un écart important entre leur

comportement en groupe, et leur d’attitude individuelle. La réalisation du

questionnaire est l’occasion de les solliciter sur leur parcours langagier, leurs

représentations des langues, et leur attitude à l’égard des élèves allophones. Lors

des observations nous avions remarqué des interactions verbales agressives

(intonations, lexique populaire, voire ordurier entre pairs), mais peu de

stigmatisation des élèves allophones (à deux reprises nous avons entendus des

réflexions sur les accents, et sur la place de « bon élève »). Le contact des langues

s’observe à travers les différentes langues de leur répertoire, qui sont une réalité

familiale. En revanche, ils sont nombreux à revendiquer le français comme langue

première dans leur système de pensée. Si le bi/plurilinguisme familial n’est pas

reconnu par l’école, il fait pourtant partie des pratiques linguistiques lors du

recensement dans les classes.

Nous pensions qu’ils garderaient un comportement d’exclusion et de

provocation durant le déroulement de la séance de présentation du questionnaire. A

notre grande surprise la quasi-totalité des élèves a joué le jeu avec beaucoup

d’intérêt et de sincérité. Leurs attitudes tranchent avec le ressenti des élèves

allophones. Les élèves des sept classes ont une démarche auto-réflexive pendant les

séances. Leurs conseils (Annexe 9, question8) portent beaucoup de bienveillance et

d’ouverture à l’altérité et aux apprentissages scolaires. Ils invitent les élèves

allophones à ne pas avoir honte de leur accent, écouter les enseignants, ne pas avoir

de complexes, bien apprendre en cours…. De même, dans la question 9, ils

prennent au sérieux la responsabilité de venir en aide aux élèves nouvellement

arrivés en s’engageant dans des actes d’inclusion et de bienveillance à l’égard

d’autrui (bienveillance, mettre à l’aise, accueillir, être gentille, savoir d’où il vient).

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Il pourrait être intéressant de pérenniser ce type d’action dans une démarche

plus globale, s’inscrivant dans le projet d’établissement. Nous entamons alors une

réflexion sur la création d’outils pratiques qui favorisent le partage d’une culture

commune, rassemblant à la fois les besoins des élèves et des enseignants, en tenant

compte des impératifs des programmes.

3.3 PROPOSITIONS D’ACTIONS

Comment réaliser des actions qui mettent en confiance des élèves arrivant en

inclusion et l’acquisition de compétences linguistiques et scolaires ? Nous

prendrons appui sur les pratiques déjà existantes dans l’établissement, les apports

théoriques et les outils mis à disposition par les institutions nationales et

internationales.

3.3.1 Pour une culture partagée

« Et pour nous on fait quoi ? Les instits trouvaient que j’avais du retard c’est juste que je comprenais pas. A l’école on parlait français personne pouvait m’aider

et je comprenais rien », élève de 1ère Gestion Administration, née et scolarisée en France

Les données collectées affichent de grandes similitudes entre les élèves

migrants et ceux issus de l’immigration, en termes de compétences et de difficultés

face à la langue. En effet, le questionnaire a montré que de nombreux élèves avaient

pour langue maternelle, parlée à la maison, une autre langue que le français.

Souvent ils n’ont qu’une maîtrise partielle des compétences dans cette langue

(compréhension, oral), qui ne permet pas de s’appuyer sur des bases solides en

matière de construction de la pensée dans une perspective scolaire et d’avoir des

outils métalinguistiques. La notion d’inclusion suppose de prendre en compte les

besoins de chaque élève. Les élèves-types expriment souvent leur désarroi de ne

jamais rentrer dans les cases pour bénéficier de dispositifs innovants. Ils sont

« ordinaires, dans des classes ordinaires » (échange au CDI). Au regard du nombre

d’élèves issus de l’immigration et dont la langue maternelle n’est pas le français,

des actions de classe peuvent être envisagées en intégrant la didactique du FLS,

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mais également la didactique du FLSco, trop souvent réservée aux élèves

allophones alors qu’elle s’adresse à tous.

Nous cherchons un moyen de mettre en place des actions pertinentes et

réalisables afin d’instaurer un climat propice aux apprentissages. Comment

exploiter ce qui existe déjà dans l’établissement ? Comment faire bénéficier à la

communauté les apports théoriques et pratiques du Master ? L’enjeu est à la fois

d’établir des passerelles entre l’UPE2A et la classe ordinaire, et d’assurer le suivi

des élèves inclus. Comment mener une action ancrée dans les pratiques de

l’établissement ?

Nous sommes actuellement dans un contexte de réflexion collective sur le

projet d’établissement. De mars à juin 2017, l’ensemble de la communauté scolaire

se mobilise pour dresser un état des lieux et fournir des actions en relation avec les

trois axes du projet d’établissement :

- Axe1 : Le climat scolaire

- Axe2 : Le suivi des parcours

- Axe3 : La revalorisation du lycée

C’est dans ce cadre institutionnel et local que notre action s’inscrit ; plus

précisément dans les relations élève/élève, prof/élève (axe1), dans la prévention et

la lutte du décrochage scolaire en consolidant les apprentissages fondamentaux et

en améliorant la continuité des parcours (axe2), enfin en menant une ouverture

culturelle (axe3).

Concernant le climat scolaire, notre action vise un apaisement des tensions

qui existent chez les élèves, en leur offrant des espaces d’expressions qui les

reconnaissent en tant qu’individu, et valorisent le partage d’une culture commune,

pour un meilleur vivre ensemble. L’oral peut constituer un outil que les enseignants

expérimentent déjà sur le terrain, en accueillant dans leur classe, par exemple, des

metteurs en scène qui les aident à adapter « Roméo et Juliette », en alternant le

texte originel, le parler jeune, et les langues familiales.

Jacky CAILLER, enseignant-chercheur (CAILLER, 2002 : n.p.), propose une

didactique axée non pas sur la langue en tant qu’entité décontextualisée, mais sur la

langue en contexte entre élèves. Il s’agit de privilégier les interactions verbales

entre pairs dans les pratiques scolaires. Il relate des actions mises en place dans des

classes de CM2, où les élèves ont pu expérimenter le débat, réaliser des conférences

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ou faire du tutorat. Il offre des pistes concrètes. Les discussions en classe autour de

la citation « l’homme est un loup pour l’homme » permettent aux élèves de

s’approprier l’occurrence pour la réinvestir dans des productions personnelles. Le

débat a permis à la fois de créer une culture commune et de développer des

compétences individuelles. L’enjeu est de reconnaître le statut de locuteur de

l’élève, décomplexer la prise de parole de l’élève, qu’il soit allophone ou pas.

Concernant le suivi des parcours, nous réfléchissons à des passerelles pour

mieux préparer les élèves à l’inclusion dès l’UPE2A. Il existe déjà des mini-stages,

et des heures de découverte professionnelle qui les font entrer progressivement dans

les spécificités de l’enseignement en professionnel. Durant les cours, nous

travaillons sur les registres de la langue et les sources de malentendus culturels. Les

élèves réalisent des exposés où ils comparent les systèmes éducatifs et linguistiques

de différents pays. En fin d’année nous avons organisé une rencontre dans la classe

entre les élèves suivis et les élèves d’UPE2A afin d’échanger sur le fonctionnement

de la classe ordinaire, les matières… Enfin, nous avons proposé aux élèves

souhaitant s’orienter en Baccalauréat Professionnel de suivre pendant deux jours les

cours en classe ordinaire, tutorés par un élève-type. Des « inclusions ponctuelles »

ont été préparées en amont avec les enseignants, afin de choisir l’élève tuteur et

d’accueillir au mieux les élèves d’UPE2A, par exemple en reportant des contrôles.

Suite à cette expérience, réalisée un peu sur le tard, nous avons décidé de formaliser

ces « inclusions ponctuelles », plus tôt dans l’année. Cela nous permettra de

réfléchir avec les élèves sur leurs points forts et les points d’amélioration en termes

de compétence mais aussi d’attitude, en travaillant sur le comportement assertif

dans des situations qui leur ont paru source de stress.

Lors du conseil d’enseignement, l’équipe enseignante d’UPE2A et la

direction, ont décidé de consacrer des heures d’enseignement à la préparation de

l’inclusion pour établir des passerelles entre le dispositif et la classe ordinaire.

D’autre part, nous envisageons de supprimer l’anglais, source de surcharge

cognitive et linguistique pour beaucoup d’élèves du dispositif. A la place, nous

proposerons une inclusion partielle en classe ordinaire aux élèves ayant déjà une

certaine maîtrise de l’anglais ou de l’espagnol.

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Par rapport au suivi des élèves issus d’UPE2A, nous souhaitons remanier le

dispositif SFLS. Le soutien ne doit pas les stigmatiser ou les isoler de leurs pairs. Il

doit représenter un outil d’aide pour la maîtrise de compétences linguistiques,

disciplinaires et scolaires. Dans un premier temps, nous souhaitons changer le nom

du dispositif auprès des élèves et organiser des ateliers tournants. Nous envisageons

de l’ouvrir aux élèves-types ayant des besoins linguistiques spécifiques. Cette

ouverture est soumise à condition : ils doivent rester minoritaires dans le dispositif

SFLS, dans la mesure où celui-ci relève du CASNAV.

Nous avons pour l’instant dégagé dix thématiques : la phonétique

(compréhension/articulation), la ponctuation et les majuscules, le passage

phonétique vers la graphie, polysémie des mots en fonction des disciplines, la

syntaxe (construire une phrase), les consignes, la nature et l’organisation du

document, prélever l’information dans un document, les codes culturels et scolaires,

activer ses compétences à l’oral (prendre la parole en public).

L’axe du projet d’établissement « Revaloriser l’image de l’établissement »

inclue la thématique de d’ouverture culturelle. Notre position d’enseignante-

documentaliste nous donne la possibilité d’être en contact avec les partenaires

culturels et de mener une politique documentaire et des animations au CDI

favorables à l’interculturel. L’expérience du questionnaire nous a particulièrement

marquée. En effet, elle contraste avec les observations de classes, où les

interactions quotidiennes pouvaient se révéler assez violentes. Aussi, nous

orientons notre projet CDI vers la valorisation des langues et des répertoires, autour

des thèmes suivants :

• Valoriser connaissances linguistiques : questionnaire des langues, affiche

plurilingues, ateliers plurilingues « découverte des langues »

• Valoriser les compétences cachées des élèves : à partir du questionnaire sur

le plurilinguisme, proposer aux élèves eux-mêmes d’organiser des ateliers de

langues, à partir des langues que les autres élèves souhaiteraient connaître. Le point

de départ peut être une réflexion sur les compétences qu’ils ont par exemple en

lingala : Comment transmettre les bases au cours d’un atelier d’une heure au CDI ?

Quelle littératie ont-ils dans cette langue ? Comment informer les autres élèves et

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enseignants ? Nous pouvons envisager une collaboration entre élèves de classe

ordinaire et d’UPE2A dans la présentation d’une langue, lors des ateliers.

• Valoriser les cultures : Proposer une fois par mois de faire découvrir la

culture d’un pays : littérature orale, littérature savante, musique, danse, cinéma,

traduction des principales expressions de salutations et de clôture et présenter une

caractéristique culturelle dans les actions de communication… faire une exposition

au CDI.

Durant la phase préparatoire de notre action, nous mettons en corrélation les

besoins des élèves, des enseignants avec des dispositifs déjà existant. Nous nous

sommes reposées sur les lignes force du projet d’établissement. Notre action prend

source sur les Approches Plurielles, que Michel CANDELIER (2008 : p.68) définit

par « toute approche mettant en œuvre des activités impliquant à la fois plusieurs

variétés linguistiques et culturelles. En tant que telle, une approche plurielle se

distingue d’une approche singulière, dans laquelle le seul objet d’attention est une

langue ou une culture particulière, prise isolément ».

Parmi les quatre approches didactiques (approche interculturelle, didactique

intégrée, éveil aux langues, intercompréhension entre langues parentes) proposées

par le Centre Européen des Langues Vivante notre démarche se positionne

globalement dans une démarche interculturelle. Il s’agit de favoriser les contacts de

langues, pour une meilleure appropriation des savoirs linguistiques et

intercompréhension entre les individus.

Les équipes pédagogiques et administratives manifestent une certaine

défiance face à notre proposition. Ils craignent qu’elle ne renforce le rejet de la

norme chez les élèves, déjà en rupture scolaire. Or nous nous positionnons

clairement dans une démarche institutionnelle européenne qui "met l'accent sur le

fait que, au fur et à mesure que l'expérience langagière d'un individu […] s'étend

[…], il / elle ne classe pas ces langues et ces cultures dans des compartiments

séparés mais construit une compétence communicative à laquelle contribuent toute

connaissance et toute expérience des langues et dans lesquelles les langues sont en

corrélation et interagissent" (Conseil de l'Europe, 2001 : 11). Notre défi est de

proposer un outil qui fasse entrer le plurilinguisme en douceur dans l’établissement,

et de montrer son intérêt dans un lycée, où une large partie des élèves sont

Page 90: Quelles ressources mobiliser pour favoriser l’inclusion ... · allophones de classe ordinaire dans le lycée où nous exerçons. Nous utiliserons comme outils de collecte de données

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alloglottes. Il nous faut convaincre que le plurilinguisme ne se focalise pas sur des

particularités, qui stigmatisent et enferment l’individu dans sa culture d’origine.

Elle représente au contraire une passerelle, qui peut apaiser les tensions et mettre

les élèves dans des conditions propices au travail.

3.3.2 Mise en place du guide

Au fil de nos échanges avec les élèves, le personnel éducatif du lycée, les

chercheurs, et de nos lectures scientifiques, nous envisageons la construction d’un

guide à destination des enseignants. Notre objectif est d’établir une passerelle entre

l’UPE2A et la classe ordinaire. Nous partons des besoins de la communauté

scolaire, sans bousculer les pratiques quotidiennes par un écrit trop théorique.

Le guide (Annexe 20) naît à la fois de nos lectures, de nos observations de

terrain, de nos échanges en classe, mais aussi de colloques et séminaires auxquels

nous avons assistés dans le cadre du Master. Nos observations et échanges ont

permis de déterminer les besoins, mais aussi de nous nourrir des pratiques

enseignantes quotidiennes. Par exemple, l’un des enseignants utilise le tableau

comme outil d’apprentissage avec un code couleur et des espaces écrits bien

délimités (notions en haut à droite). Une autre enseignante projette son cours sur

TNI en même temps qu’elle échange avec ses élèves : les idées-forces sont de

couleur rouge, afin qu’ils notent l’essentiel du cours.

Les observations et interactions avec les élèves ont permis de confirmer ce

que nous percevions déjà de manière informelle : s’ils peuvent afficher un

comportement fermé, et une posture adolescente d’opposition à l’adulte, ils révèlent

néanmoins une ouverture au plurilinguisme et à l’Autre, qui peuvent offrir des

pistes thématiques dans la construction du guide. Les élèves allophones sont

tiraillés entre l’envie de se faire accepter par leurs pairs, et celle de réussir à l’école.

Le guide doit pouvoir constituer un outil qui permet de mieux comprendre leur

parcours, et favoriser les interactions au sein de la communauté scolaire.

Nous nous replongeons dans un certain nombre de cours reçus à La Sorbonne

Nouvelle pour construire la partie réflexive sur « l’individu plurilingue » et son

parcours, ainsi que sur la présentation du « Français Scolaire ».

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Nous trouvons les textes officiels et des pistes d’exploitation pédagogique sur

les sites académiques des CASNAV(actions, ressources pour une école inclusive,

guides d’accueil des élèves allophones), sur « Eduscol » (fiches d’accompagnement

des élèves allophones pour les enseignants, besoins linguistiques des élèves en

FLS), et sur le Centre Européen pour les Langues Vivantes du Conseil de l’Europe,

qui offre une réflexion sur le répertoire langagier (Portfolios des langues adaptés à

l’âge des locuteurs).

A partir des ressources institutionnelles, scientifiques et didactiques, nous

construisons le guide autour de plusieurs axes et idées-forces :

• L’humour et la créativité : la mise en place du guide arrive en fin de Master,

pour lequel nous avons dépensé beaucoup d’énergie. Afin de nous remobiliser dans

la « dernière ligne droite », nous avons besoin de trouver un angle de travail ludique

Nous concevons l’élaboration du guide de manière créative, en puisant dans les

ressources que nous avons pu expérimenter durant nos trois années de formation en

DU ECDF et Master. Notre objectif premier est d’aborder le sujet du plurilinguisme

en douceur, par la médiation d’un jeu. Nous avons choisi des termes relatifs à la

question des élèves allophones, utilisés par les institutions ou la recherche. Nous

souhaitons également aborder les stéréotypes dont fait l’objet le locuteur

bi/plurilingue. Abordés de front les stéréotypes peuvent être source de tension et de

repli. Aussi, nous passons par le biais de l’humour pour prendre de la distance.

L’objectif de cette première partie est d’avoir un point d’accroche auprès des

enseignants, de leur donner envie de lire l’ensemble du document.

• L’information : nous présentons dans un second temps, les textes officiels

relatifs aux élèves allophones, de l’organisation de leur scolarité en UPE2A à leur

inclusion en classe ordinaire. Ces textes ancrent notre action dans un cadre

institutionnel.

• L’intercompréhension : les trois années passées à la Sorbonne-Nouvelle (Du

ECDF, Master 1 et 2), nous ont apporté de nombreuses connaissances liées aux

élèves allophones et alloglottes (plurilinguisme, insécurité linguistique, français

parlé, sociolinguistique, ethnolinguistique et anthropologie de la communication),

ainsi qu’à l’apprentissage de la langue (FLSco, linguistique, littérature francophone

et études post-coloniales). Nous avons souhaité intégrer dans les parties « l’individu

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allophone » et « la classe » des savoirs qui nous ont été transmis, et les partager

avec les enseignants. La partie « le plurilinguisme et vous », leur donne l’occasion

d’opérer une réflexion sur leurs représentations des langues et de réaliser leur

biographie langagière. L’objectif est de donner des pistes d’autoréflexion et de

compréhension des élèves, en exploitant certains outils (questionnaire, biographie

langagière).

• La faisabilité : nous avons accès à l’ensemble des manuels au programme de

lycée professionnel. Afin que les enseignants s’approprient pleinement cet outil,

nous le rattachons aux programmes scolaires et à leurs pratiques quotidiennes. Nous

construisons un certain nombre d’activités inspirées des Approches Plurielles, qui

peuvent être intégrées à la classe sans perturber les habitudes, ni mettre les

enseignants en posture d’insécurité. Les activités ne sont pas exhaustives mais

offrent des pistes didactiques d’exploitation du plurilinguisme en classe. Chaque

activité est accompagnée de ressources auxquelles les enseignants pourront se

référer s’ils souhaitent construire leurs propres outils.

Au terme du mémoire, le guide est en cours d’élaboration pour être présenté à

la rentrée 2017 aux enseignants, puis mis à leur disposition en salle des professeurs.

Il est complété par des documents accessibles au CDI pour travailler sur le lexique

disciplinaire et le FLS, élaborés par des équipes du CASNAV ou l’IFADEM

(Initiative Francophone pour la Formation à Distance des Maitres).

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CONCLUSION

Le présent mémoire conclut une période de quatre années de réflexion sur

l’accueil et le suivi des élèves allophones en lycée professionnel. Il y a quatre ans

nous présentions la certification FLS, pour mieux répondre à aux besoins de ce

public dans le cadre de nos fonctions d’enseignante-documentaliste. Au terme de

cette année où nous avons fait du CDI un lieu d’accueil, nous avons souhaité créer

des outils didactiques. Nous nous sommes enrichis du DU ECDF, Didactique du

FLE à la Sorbonne Nouvelle. La qualité des enseignements nous a poussée à aller

plus loin, et à envisager un enseignement du Français Langue seconde en UPE2A.

Au moment où nous nous sommes lancée dans le Master, nous avons obtenu trois

heures d’enseignement de FLS et du soutien. L’expérience du terrain, nourrie des

nombreux apports théoriques et didactiques, nous a permis de nouer des liens au

sein de l’établissement, et de mettre en place des actions, qui s’inscrivent à la fois

dans le cadre institutionnel et plus global de reconnaissance du répertoire

plurilingue des élèves.

Notre réflexion est née d’une tension observée au quotidien dans le suivi des

élèves allophones, témoignant de leurs difficultés d’intégration dans les classes

ordinaires. Nous avons alors cherché auprès des différents acteurs de la

communauté scolaire la provenance de cette tension, et comment y remédier en

s’appuyant sur le potentiel linguistique, scolaire et personnel des élèves, pour les

aider à dépasser cette appréhension de la classe et être en conditions de développer

leur plein potentiel.

Au terme de notre recherche nous validons l’hypothèse selon laquelle le

passage de l’UPE2A à la classe ordinaire est source d’insécurité linguistique,

scolaire et sociale chez les élèves allophones. L’impact de cette dernière est

variable. Elle engendre des blocages dans la prise de parole et dans la

compréhension de ce qui est attendu par l’école ou par les pairs. Néanmoins, elle

est à relativiser car certains élèves arrivent à mobiliser leurs compétences scolaires

et sociales pour réussir. Leur forte implication dans les apprentissages se confirme

malgré les difficultés qu’ils rencontrent.

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Concernant les attitudes des élèves-types, nous infirmons partiellement nos

postulats de départ, par rapport à l’exclusion dont les élèves issus d’UPE2A feraient

l’objet. Si certains élèves-types affichent un comportement provocateur, insolent ou

moqueur, il est généralement dirigé contre tous : institutions, enseignants, élèves

travailleurs ou élèves sur lesquels les enseignants portent leur attention… Nous

avons plutôt relevé des attitudes bienveillantes dès lors qu’ils opèrent une auto-

réflexion sur leurs pratiques langagières et se focalisent sur le partage de valeurs

communes.

Notre mémoire s’est appuyé, dans un premier temps, sur des fondations

théoriques, afin de définir les contours de notre problématique : les élèves

allophones font l’objet de représentations. Mais comment cette notion s’actualise

dans un cadre social, linguistique ou scolaire ? La phase de contextualisation et de

réalisation de la problématique est l’occasion de nous plonger dans les cours de DU

ECDF et de Master. Nous y puisons des concepts, ainsi que des références

bibliographiques pour enrichir notre réflexion. Les difficultés des élèves allophones

se manifestent par un sentiment de rejet dans la classe et des difficultés dans la

maîtrise de la langue. Aussi, nous avons exploré des lectures autour de l’inclusion

et du FLSco. La première notion nous a aidé à contextualiser notre recherche, alors

que la seconde offre des éléments de réponses, quant à la source de certaines

difficultés d’apprentissage, qui ont pu être au départ des difficultés linguistiques.

Afin d’avoir une démarche de recherche cohérente, nous avons pris beaucoup

de temps sur la mise en place d’une méthodologie. Nous avons dû élaborer une

réflexion sur notre parcours biographique, nos motivations profondes, les

déclencheurs de notre action. Ces recherches théoriques et méthodologiques nous

ont permis d’aborder avec sérénité la posture de chercheur. Le fait de travailler sur

les représentations nous a placée dans un certain inconfort : Comment garder un

regard neutre de chercheur tout en exerçant au sein de l’établissement ? En tant que

professionnelle sur le terrain, comment nous positionner par rapport aux élèves et

enseignants ? Dans quelle mesure nos propres représentations et pratiques ont-elles

influencé notre recherche ? Comment aborder les informateurs ? Comment traiter

les données, mettre en relation les concepts avec le terrain pour créer de nouvelles

connaissances ?

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Cette phase de questionnement a permis l’émergence d’une problématique, et

la mise en place d’outils méthodologiques et didactique pour recueillir les données.

La phase de collecte a été d’une grande richesse humainement, et nous a permis de

confronter nos hypothèses au terrain. Nous nous demandons si notre présence au

sein des classes n’a pas eu d’influence sur les interactions de classe. A plusieurs

reprises, nous avons été témoins d’insultes entre pairs et d’insolence envers les

enseignants. Aussi, nous supposons que les élèves ont eu un comportement

« normal ». Ce dernier contraste avec l’attitude qu’ils manifestent envers l’altérité

dans les questionnaires. Est-ce le fait de pouvoir parler de leur parcours

biographique, de réfléchir sur leurs compétences linguistiques, d’avoir la parole sur

des sujets qui les concernent directement qui les ont motivés ? Beaucoup d’élèves

ont affiché des compétences cachées dans d’autres langues en réfléchissant sur leur

répertoire linguistique. Nous n’avons pas approfondi, dans la mesure où notre

recherche répondait à une problématique précise dans un temps limité. En

revanche, cette expérience nous a donné des pistes pour construire un outil de

partage d’une culture commune. Nous sommes réservés sur la faisabilité et la

réception d’actions autour du plurilinguisme ; les enseignants étant réticents à l’idée

d’inclure le contact des langues dans leur classe. Nous les avons sentis à plusieurs

reprises en insécurité. Ainsi lors des entretiens, beaucoup peinent à parler de leur

parcours. Ils ne voient pas le rapport entre notre objet d’étude et leurs pratiques

personnelles. Pourtant hors enregistrement, leur parole se libère. Certains nous

avouent ne pas avoir ouvert un livre avant l’âge de 17 ans, et comprennent que les

élèves sont dans un âge où la culture imposée les « saoulent ». Mais que la

communauté éducative doit se mobiliser pour leur offrir une ouverture culturelle

qui fera la différence. Aussi, nous nous sommes appuyés sur les programmes pour

faire entrer « en douceur » les compétences du répertoire langagier des élèves.

Nous envisagions d’abord de réaliser un guide présentant des concepts-clés à

développer dans chaque discipline pour aider les élèves dans l’inclusion du FLSco.

Les enseignants nous informent qu’ils le font déjà auprès de tous leurs élèves. Ils

expriment la nécessité de mieux connaître ce public, et ses besoins dans maîtrise de

la langue (types d’erreurs récurrentes, compréhension des consignes, habitudes

scolaires) et des langages (posture enseignante, référents scolaires et culturels

sources de malentendus). Notre recherche s’inscrit dans une dynamique globale de

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mise en œuvre du projet d’établissement. Elle a permis une meilleure

communication entre enseignants. Nous avons développé ensemble des actions qui

débordent du cadre de l’inclusion, et construisons à l’heure actuelle projet global de

suivi des élèves, et de mise en place de réponses adaptées aux décrocheurs

scolaires. L’ensemble de la communauté des élèves doit se sentir « incluse » dans

sa scolarité. L’entrée au lycée professionnel tertiaire reste vécue comme un échec.

A présent, nous relevons le double défi de valoriser à la fois la filière, qui peut être

source de réussite, et les compétences des élèves.

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ANNEXES

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1.ANNEXE Charte d’évaluation

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2.ANNEXE Acceptation de validation d’acquis

3.ANNEXE SIGLES AP Aide Personnalisée

APB Admission Post-Bac

ASSR2 Attestation Scolaire Sécurité Routière niveau 2

AVS Assistante Vie Scolaire

BTS Brevet Technique Supérieur

CAP Certificat d’Aptitude Professionnelle

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CASNAV Centre Académique pour la Scolarisation des enfants Allophones Nouvellement Arrivés et

des enfants issus de familles itinérantes et de Voyageurs

CDI Centre de Documentation et d’Information

CECR Cadre Européen Commun de Référence

CEFISEM Centre de Formation et d'Information pour la Scolarisation des Enfants de Migrants

CFA Centre de Formation des Apprentis

CFG Certificat Français Général

CIO Centre D'information et d'Orientation

CLA Classe d'Accueil

CLIN Classe d'Initiation

CNDP Centre National de Documentation Pédagogique

CRI Cours de Rattrapage Intégré

DELF Diplôme d’Etudes en Langue français

DNB Diplôme National du Brevet

DNL Disciplines Non Linguistiques

EANA Elève Allophone Nouvellement Arrivé

ELCO Enseignement Linguistique en Langue d'Origine

ENSA Elèves Non Scolarisés Antérieurement

EPS Education Physique et Sportive

FLE Français Langue Etrangère

FLER Français Langue Etrangère Renforcé

FLM Français Langue Maternelle

FLS Français Langue Seconde

FLSco Français Langue Scolaire

IA Inspection Académique

LGT Lycée Général et Technique

LM Langue Maternelle

LP Lycée Professionnel

MDL Maîtrise De la Langue

MGIEN Mission Générale d'Insertion de l'Education Nationale, à présent MLDS

MLDS Mission Locale contre le Décrochage Scolaire, anciennement MGIEN

PSE Prévention Santé Environnement

SFLS Soutien Français langue Seconde

TICE Techniques d’Information et de Communication dans l’Education

TNI Tableau Numérique Informatique

UPE2A Unité Pédagogique pour Elève Allophone Nouvellement Arrivé

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4.ANNEXE Carnet de recherche créative

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5.ANNEXE Tableau méthodologique

Elèves Observation

Production Dessin

réflexif Questionnaire

classe Entretien

individuel Entretien professeurs

Français HG Math Langue Pro Binôme Français HG Math Langue Pro infirmière

Sadjo 16/03

dictée

24/03

SLP

06/03 07/03 09/03 10/03 07/03 Portrait

chinois

Ok 21/03 27/03 25/03 25/03 04/05 05/05 28/

04

07/03

Jonah 08/03 08/03 08/03 16/03 Histoire Ok 17/03 15/03 25/03 04/05 26/04

Rose abs 24/02 13/03

17/03 28/02 24/02 Cahier perso Ok 30/03 28/03 02/02 02/02 05/05

Adama 24/02 24/02 13/03

17/03 28/02 24/02 Ok 30/03 31/03

27/04

02/02 02/02 05/05

Sedray 09/03

ciné

23/02 06/03 03/03 01/03 Français Ok 22/03 22/03 25/03 02/02 04/05 05/05

Bhagya 13/03 08/03 01/03 09/03 Poème

perso

Ok 27/03 26/04 04/05 05/05 28/

04

Aminata 13/03 07/03 Bac

OK

20/03 21/03

27/03

Ok 21/03 21/03

Jaime 14/03 13/03 10/03 10/03 15/03 Français ok 17/03 28/03 26/04 04/05 05/05 28/

04

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6.ANNEXE Grille d’observation élèves

Nom, prénom : observations diverses

Date, heure :

Nombre d’élèves (groupe, classe entière)

Place dans la classe, entourage autres élèves

Accès ressources (dico, manuels, ordi)

Elève

Comportement

Prise de note, materiel, écoute, participation

Interactions verbales

Aider, répondre, demander des précisions, faire répéter…

Enseignant

Elèves

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Enseignant

Techniques de classe, pédagogie supports, gestuelle, outils

Classe

Ambiance de classe, placement, activités, groupes, échanges entre élèves, avec l’enseignant, alternance codique…

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7.ANNEXE Guide entretien élève

Lieu : CDI

Durée estimée : 20-30mns

Dans le cadre d’un master en FLE, je réalise des entretiens avec des élèves et des

enseignants pour mieux vous connaître et savoir ce que l’on peut mettre en place en UPE2A

(nouveau nom pour les Classes d’accueil) et en classe ordinaire pour améliorer l’accueil des

élèves nouvellement arrivés en France. Aussi j’ai besoin de discuter avec les « anciens ». Je

t’ai demandé de faire un dessin qui illustre ton parcours à l’école. Nous pouvons commencer

par le regarder ensemble.

Commentaire sur le dessin

• Peux-tu me décrire les éléments que tu as mis sur ton dessin ?

• Que veulent-ils dire ?

Parcours personnel

• Tu es en France depuis combien de temps ?

• Tu habites avec de la famille ? tu as des frères et sœurs ?

• Tu gardes un lien avec ton pays d’origine ? tu y vas, tu t’informes ?

Pratique des langues

• Tu parles combien de langues déjà ?

• Et ta langue principale ? celle dans laquelle tu penses ?

• Quelle langue tu as apprise à l’école ? Tu la parles aussi à la maison ? quelle langue

parles-tu avec tes parents ? tes frères et sœurs ?

L’école et toi

• Tu te souviens de ton premier jour à l’école en France ? Tu peux me raconter ?

• Tu as suivi des cours en classe ordinaire quand tu étais en UPE2A/CLA ? si oui, ça t’a

aidé ? / si non, tu penses que ça aurait pu t’aider quand tu es arrivé en seconde ?

• Tu es content(e) de ton orientation ? Tu sais que dans chaque établissement il y a un

conseiller d’orientation qui peut t’aider

Le français scolaire et toi

• Pratiques de la classe : difficultés, réussites. Langue dans la classe : facilités,

difficultés en compréhension / production écrit/oral

• Au niveau des salles, elles sont bien indiquées, tu ne te perds pas ?

• Tu arrives à différencier ce qu’on attend de toi dans les différentes matières ?

• Il y a des matières plus faciles que d’autres pour toi ?... et plus difficiles ? et tu sais

pourquoi ?

• Au niveau du matériel, tu arrives à t’organiser ?

• Tu utilises le manuel scolaire en cours ? et comment ça se passe ?

• Comment te sens-tu dans la classe ? tu t’es fait des amis ?

• Le prof : est-ce que tu comprends tout ce qu’il dit ? le cours, les consignes, ce qu’il

faut faire ou pas

• Interactions en cours

• Documents supports de classe, manuels

• Contenu du cours, des autres cours

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• Sources de malentendu avec le prof

• L’apprentissage en UPE2A, qu’est-ce qui t’a servi ? qu’est-ce qu’il t’a manqué ?

Si l’élève pense dans une autre langue

• Quand tu travailles les maths par exemple tu penses dans quelle langue ?

• Comment tu fais quand le prof explique en français ? tu traduis ?

• Ca t’aide d’avoir plusieurs langues dans ta tête pour apprendre ?

• tu peux me dessiner comment tu organises les langues dans ta tête ?

• Est-ce qu’il y a des moments où même si tu comprends les mots, tu ne vois pas ce

qu’attend le prof de toi ?

• Et tu le fais répéter ?

• Tu demandes de l’aide à tes camarades ? comment, à l’oral, en regardant leurs notes ?

Le soutien FLS

• Un jour un élève qui vient au soutien m’a dit que le soutien c’était pour les nuls.

Pourquoi tu crois qu’il a dit ça ?

• Il m’a dit aussi qu’il ne voyait pas l’intérêt parce qu’il parlait déjà français Est-ce que

le soutien en français du jeudi t’aide, ou tu ne vois pas trop à quoi ça sert ? Sois

sincère, je ne me vexerai pas. Je suis là aussi pour m’améliorer .

Autres leviers

• Et tu pratiques des activités en dehors du lycée ? Tu t’es fait des amis ?

• Tu es aidé pour les devoirs ou en français en dehors des heures de cours ? par qui ?

• Est-ce que tes parents t’aident en maths ou en informatique ? Tu as un lieu où tu peux

travailler au calme ?

• Tu fréquentes un peu la bibliothèque pour travailler ?

• Tu as des livres chez toi ? Qu’est-ce que tu aimes lire ?

• Fratries/amis : vous travaillez parfois ensemble ? Vous vous aidez ?

• Dernière question, comment tu te vois dans 10 ans ? tu as un rêve en particulier

que tu aimerais réaliser ? comment tu vas t’y prendre? Tu peux faire un dessin,

si tu le souhaites, maintenant ou plus tard, et me le transmettre.

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8.ANNEXE Guide entretien enseignant

Dans la classe

• Tu as plusieurs élèves d’UPE2A dans tes classes, quel est ton ressenti global ?

• Est-ce que xx participe en cours ?

• Comment tu définirais l’attitude de ses camarades à son égard ? Pratiques enseignantes

• Est-ce que tu utilises des outils spécifiques avec les élèves allophones ?

• Est-ce que tu as des gestes professionnels particuliers ?

• Est-ce que tu l’évalues différemment ? Tu évalues plutôt les connaissances ou aussi la

maîtrise de la langue ?

• Attends-tu de lui/elle qu’il maîtrise la langue courante ? la langue scolaire ? Par

exemple en UP on leur apprend à faire des phrases complètes pour répondre à des

questions, à dire toujours « oui, monsieur /madame ». Est-ce que ça a son importance

dans ton cours, ou tu te focalises plus sur le contenu de la réponse ? Connaissance de l’élève

• Si tu avais à définir xxx au niveau de la langue, de la scolarité, du

comportement ?

• Sais-tu quel est son pays d’origine ? les langues qu’il parle ?

• Est-ce que d’après toi c’est important de connaître un peu son parcours ? Parcours perso

• Tu connais quelles langues ?

• Dans ton parcours, est-ce que tu as déjà été en contact de plusieurs langues en dehors

de l’apprentissage scolaire ?

• Est-ce que tu as déjà été en situation d’allophone ? Usage langue d’origine

• Est-ce qu’il peut prendre appui sur sa langue d’origine, par exemple pour prendre des

notes ?

• Est-ce que tu sais si dans la classe d’autres élèves parlent une des langues de son

répertoire ? Est-ce qu’il leur arrive de communiquer dans cette/ces langues ? A quelle

occasion ?

• Est-ce qu’il t’arrive de parler d’autres langues en cours ? Par exemple d’insérer des

mots en anglais, espagnol ? Perspectives

• Qu’est-ce que tu souhaiterais qu’il soit mis en place en amont pour assurer un

meilleur accueil en classe ordinaire ? Au niveau des outils, du suivi, mais aussi

des compétences à développer en UPE2A ?

• Quel conseil tu donnerais à un élève qui arrive d’UPE2A ?

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9.ANNEXE Questionnaire sur le plurilinguisme

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10.ANNEXE Profil des élèves suivis

Elèves UPE2A /

CLA

An Age Sexe LM Pays origine Classe Soutien Remarques Diplômes

Sadjo Deraismes +0 17 F Wolof Sénégal 2nde Accueil oui Francophone, FLS

Vient d’être intégrée

Frère cadet en UPE2A

Inscrite B1

Jonah Deraismes +1 16 M Créole bissau Guinée

Bissau

3ème prépa pro oui Sœur aînée dans un autre LP en

2nde

Inscrit DNB,

ASSR2

Jaime Deraismes + 1 M Espagnol Colombie 2nde Commerce oui ASSR 2

Rose Collège +4 16 F Lingala RDC 2nde Gestion oui

Adama Deraismes +2 18 M Peul Sénégal 2nde Gestion Oui, Francophone, FLS, Suivi AS ASSR2

Sedray Collège + 3 15 M Kabyle Algérie 2nde Vente oui FLE en Algérie DNB, ASSR2,

DELF A2

Bhagya Collège +5 17 F Tamoul Sri Lanka 1ère Commerce en 2nde DELF B1, DNB

Aminata Collège +6 19 F Wolof Sénégal Tle Gestion Oui+asso Francophone, FLS, Redoublante Bac en cours

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11.ANNEXE Synthèse des observations par élève

Aminata

Ambiance de classe

- En anglais, lorsque l’enseignante demande le temps d’un verbe, Aminata donne la réponse

(le prétérit), ce que commentent ses camarades (avec bienveillance) : « ohlala !

Ramatou ! »

- L’ambiance est très studieuse. Nous sommes à quelques mois du baccalauréat. En discutant

avec les élèves ils nous disent qu’ils ont conscience d’avoir une seconde chance dans cette

classe où les cours sont proposés « à la carte ». Il n’y a aucun problème de discipline durant

nos observations. L’enseignement fait sens pour eux, et ils ont une attitude plutôt

bienveillante les uns avec les autres (aide entre pairs, échange de cours, plaisanteries sans

agressivité).

- Du fait de leur petit nombre, les élèves sont disposés un par table

- En histoire, discutent de la guerre d’Algérie sans qu’il y ait de tensions. Les élèves

d’origine algérienne ne savent pas ce qu’il reste de la guerre d’Algérie car ils n’y sont

jamais allés. Il s’en suit un débat sur la mémoire collective.

- Lors de l’observation du cours en matière professionnelle, la classe est divisée en deux

groupes dans deux classes qui communiquent. Chaque groupe est avec un professeur et

travaille par tâche : groupe fiches cerise » (Aminata) pendant que l’autre groupe travaille

sur la préparation d’un évènement. En même temps qu’ils remplissent les « fiches cerise »

les élèves discutent des élections et se lancent dans un débat autour des candidats Le

Pen/Mélenchon. Aminata ne participe pas. Elle reste concentrée sur ses fiches.

Comportement

- L’enseignante de français reprend un élève lorsqu’il interrompt Aminata alors qu’elle

répondait à une question. « laissez d’abord Aminata finir »

- Les enseignants l’encouragent à plusieurs reprises en français (« très bien »), en anglais

(« oui ! très bien ! ») lorsqu’elle donne des réponses à l’oral.

- Les enseignants sont bienveillants avec les élèves qui se dévalorisent. Par exemple en

français par rapport aux sciences humaines et à la difficulté de la consigne un élève se juge

« je dis n’importe quoi », l’enseignante le reprend « vous ne dites pas n’importe quoi ».

Codes scolaires

- Méthodologie : en anglais doit lire un texte en quelques minutes. Elle lit d’abord les

questions attendues puis s’aide d’un stylo pour pointer les éléments clés du texte qui

répondent aux questions. En français, elle prend des notes et fait des synthèses, en histoire

géographie elle réalise des frises qu’elle prête aux autres élèves de la classe comme

exemple de préparation personnelle.

- Usage de l’alternance codique dans la classe. Anglais sur le contenu, le lexique, les

réponses, français pour les consignes ou les explications (temps prétérit)

- En français, l’enseignante donne pour consigne de faire une synthèse de 5,6 lignes «sous les

définitions « en quoi les sciences humaines participent-elles au modelage de l’homme

moderne ». Chaque terme est expliqué, repris. La synthèse fait l’objet d’une discussion à

l’oral

- L’enseignante échange avec les élèves en même temps qu’elle projette le contenu de son

cours sur le tableau numérique. Elle a mis en place un code couleur où ce qui est inscrit en

rose correspond à ce qu’il faut savoir par cœur pour le baccalauréat.

Expression orale

- En anglais, Aminata participe à l’oral lors de la mise en commun sur l’exercice relatif aux

textes inconnus à l’oral (textes en anglais, réponses en français)

- En histoire-géographie, elle n’hésite pas à dire qu’elle ne sait pas. Lorsqu’un élève

demande ce que veut dire « novatrice », l’enseignante demande à Aminata de répondre.

Aminata répond « j’étais justement en train de me poser la même question ».

- En histoire, elle lit le texte qui sert de support aux échanges. Elle présente également le

paratexte (texte « écrit en 1944 par Nehru ».

Connaissances

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- En anglais, Aminata doit lire un texte sur les hiboux à Londres. Les questions/réponses sont

en français, or elle ne connait pas le nom de l’animal « owl » en français, même si elle voit

ce que c’est lorsqu’un camarade lui montre une image sur son téléphone mobile.

- Elle n’hésite à montrer ses connaissances auprès de la classe. Lorsque l’enseignante

demande le temps d’un verbe, elle répond le prétérit.

- Expertise dans la transformation d’informations en tableau synthétique pour réviser. Son

travail de synthèse sert de modèle aux autres élèves de la classe.

- En histoire, L’enseignante pose des questions factuelles en relation avec le texte de Nerhu :

« l’Inde est indépendante… ? ». Un élève donne une réponse erronée que Aminata vient

rectifier : « non c’est 1947 », ses propos sont valorisés par l’enseignante « Très bien

Aminata, c’est bien 1947 ».

- En matière professionnelle, elle m’explique le fonctionnement de cerise, logiciel qui permet

de remplir des fiches de compétences à valider sur les 3ans pour le Baccalauréat. A partir

de chaque devoir, tâche exécutée en entreprise ou en classe, ils doivent remplir ces fiches

qui sont valisées, ou pas, par les enseignants.

Exemple d’échanges

Observation anglais

- P. : comment est-ce qu’on forme le preterit régulier ?

- R. : on met -ed à la fin.

- P. : oui très bien ! Et on met quoi avant pour le passif ?

- R. : was ou were

Observation anglais : Un élève pose la question à Aminata sur l’identité de l’animal qui

attaque les riverains

- R. : peux-tu répéter ?... ils ont été attaqués par cet animal, je sais pas comment ça s’appelle

- E. : un hibou

Ils vont sur internet « google image » pour identifier le signifié : « oui oui c’est ça ! je

connaissais pas le nom en français mais je vois ce que c’est ».

Observation en français, à propos de la psychanalyse dans les mouvements artistiques (objet

d’études « l’homme et son rapport au monde »)

- P. : et après l’Expressionnisme, Dali c’était quoi ?

- R. : le Surréalisme

- P. : Très bien, c’est clair pour Aminata.

Bhagya

Ambiance de classe

- Il s’agit de la classe « complète », où il y a en moyenne plus de 20 élèves. Il n’y a pas

d’échanges d’insultes comme en seconde. En revanche, l’ambiance est moins studieuse

qu’en terminale.

- Elle discute avec de nombreux élèves qu’elle aide. Elle semble intégrée dans la classe.

- Une élève d’UPE2A anglophone suit le cours d’anglais et intervient pour répondre à une

question. Un élève interpelle alors Bhagya en rigolant : « t’as de la concurrence ».

- Un élève commentent le prénom d’un camarade pendant le cours d’anglais : « trop chelous

leurs prénoms pakistanais. Ils roulent les « r » » (rires)

Comportement

- En cours d’anglais, elle a des échanges avec les autres élèves, pas nécessairement scolaires

(montre quelque chose à une camarade sur son portable, donne un chewing-gum).

- Son attitude change en fonction des cours (anglais, très désinvolte, est presque allongée sur

sa chaise, bavarde, échange des produits de beauté / maths : très attentive, sort

immédiatement son matériel, lève la main, participe). En français, elle note le cours au

début, puis décroche progressivement lorsqu’il faut analyser, et joue avec ses cheveux.

- Lors du contrôle de mathématiques, elle se parle à elle-même à voix basse pendant qu’elle

réalise une opération de calcul de fonctions. Une fois qu’elle a fini, elle aide sa camarade.

Codes scolaires

- Malgré un comportement qui semble dissipé (elle passe l’heure à discuter avec une

camarade), elle répond à l’enseignante quand elle lui pose une question en anglais à propos

du document support. Nous supposons qu’elle arrive à la fois à suivre le cours et une

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conversation privée, tout en prenant des notes par alternance.

- Elle met près de 20minutes à ouvrir son sac en anglais et à sortir un stylo.

- Dans toutes les matières, elle prend des notes et colle les documents de cours sur les

feuilles/cahiers.

- Interactions de classe : passe de la lecture d’un document, à des échanges sur le contenu du

document, a des échanges pratiques (sortir le matériel, aller fermer la fenêtre, répondre à

une requête), avec différentes personnes (prof, élève) dans le cadre du cours ou autre. Elle a

également les codes adolescents.

Expression orale

- En anglais, ne participe que lorsqu’elle est sollicitée par l’enseignante.

- En mathématiques, elle participe aux réponses.

- En animation elle peut être sollicitée par l’enseignante, ou répondre spontanément lorsqu’il

y a des réponses autour de calculs à donner. (10% de 30€)

- En français a une stratégie d’évitement quand elle ne comprend pas, mais répond

lorsqu’elle a la réponse.

Connaissances

- Répond correctement en anglais sans pour autant suivre le cours.

- Elle est sollicitée par l’enseignant pour expliquer la formule a=1 b=2 c=-3 à ses camarades

qui lui répondent « ah la prof de maths ! »

- Français parlé : P. : « tout le monde a son stabiloche ? » elle acquiesce.

- // autres élèves qui, en majorité, ne voient pas la différence entre notoriété et image de

marque en Animation. Seuls deux élèves fourniront des exemples.

- Elle a des connaissances littéraires. Type d’écrit, l’enseignante lui demande à quoi on

reconnait le journal en littérature et le point de vue.

Exemple d’échange

Observation mathématiques

- P. : quel est la 1ère étape de l’équation du 2nd degré ?

- T. (répond à voix basse) : identifier ABC

- P : très bien. (il reprend la question pour la classe)

Observation mathématiques

- P. : y a-t-il un volontaire pour aller au tableau ? (montrer la procédure)

- Un élève : Bhagya ! (T. et l’élève se charrient. Aucun ne souhaite y aller)

- L’élève : chui timide wesh ! (finalement un autre élève va au tableau)

Observation français

- P. : Bhagya vous êtes pas à Auchan à distribuer les feuilles (Bhagya est sollicitée par

plusieurs élèves qui n’ont pas de feuilles)

- Alors qu’elle donne des feuilles à un élève, un autre élève : « Bhagya tu me passes une

feuille s’il te plaît ? »

- T. : mais j’t’ai déjà passé ! » (elle donne quand même la feuille)

Observation français

- P. : comment vous reconnaissez un journal intime ?

- T. : la date, le point de vue, il raconte sa vie

- P. : quel point de vue ?

- T. : interne

- P. : pourquoi ?

- T. : parce qu’il parle de lui.

Rose

Ambiance de classe

- Pas d’animosité entre eux

- Souvent seule. Elle fait l’objet de réflexions (en gestion élève devant placé pour son

comportement difficile) auxquelles elle répond jusqu’à ce que l’enseignant intervienne

« D., laisse-la tranquille »

- Bruyants ou studieux selon les configurations (matière, horaire)

- Positionnés en groupes qui communiquent peu les uns avec les autres.

Comportement

- Dessine des fleurs (en maths, anglais)

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- Communique peu avec ses pairs sauf pour demander un compas, une règle ou des stylos

pour dessiner des fleurs

- En atelier rédactionnel sollicite les enseignants pour utiliser les TICE (ouvrir sa session,

faire un copier/coller).

- Décroche dès qu’il y a des échanges verbaux, raccroche quand il faut écrire

- Est attentive en début d’heure en maths puis commence à faire des fleurs avec son compas.

- Joue avec ses cheveux (anglais), la montre d’une camarade (histoire), envoie des SMS

(quand la classe parle de l’affaire Fillon en histoire), se coiffe (gestion).

- L’enseignant tend des perches lors des échanges sur les inégalités : « c’est dur quand vous

cumulez être une femme, jeune et étrangère », elle n’est pas concernée, continue à envoyer

des SMS.

Codes scolaires

- Ne range pas sa chaise, l’enseignant la reprend pour qu’elle laisse le lieu comme elle l’a

trouvé

- A son matériel

- Prend des notes lorsque le cours est écrit au tableau (pas à partir de l’oral)

- Surligne les informations principales en cours de maths

Expression orale

- Demande de l’aide méthodologique (faire les procédures) mais pas sur le contenu.

- Demande pourquoi l’enseignant note une définition au tableau (histoire).

- Elle appelle le prof d’histoire qui se retourne et pense que c’est sa camarade de derrière qui

l’interpelle.

- S’invective avec les autres élèves (D. en gestion, autre en anglais pour les cheveux, en

maths parce qu’une élève fait du bruit devant elle)

Connaissances

- Lexique : lacunes. Quand un enseignant vérifie si elle a compris la consigne, et si elle peut

expliquer le mot « cosmétique », elle ignore de quoi il s’agit. Il l’aide en lui parlant des

crèmes, du maquillage.

Exemple d’échange

- En anglais, l’enseignante pose une question à Pr. qui ne répond pas : « Pr. Tu n’es pas avec

nous ! .. Pr. Tu peux jeter tes bouts de cheveux à la poubelle ? »

Pr. va jeter ses cheveux à la poubelle.

- L’enseignante revient vers elle : « Pr. il est sous quelle forme le verbe ? «

- Pr. : …

Un peu plus tard

- Une élève : c’est même pas ses cheveux

- Pr. : si c’est mes cheveux !

Sedray

Ambiance de classe

- En histoire-géographie, un incident a lieu alors qu’un surveillant apporte des enveloppes à

destination d’élèves. Lorsque l’enseignant mentionne les noms de famille des

parents/tuteurs afin que les élèves récupèrent, certains se moquent des noms de famille. A

la fin de l’heure l’enseignant prend un temps pour recadrer la classe sur son comportement

qui n’est pas drôle, ni professionnel. Les élèves ont pour seule réponse : « on est stupides ».

- En accueil téléphonique l’enseignante recadre également les élèves qui bavardent ou

dorment, de manière très calme : « soit vous vous comportez comme des élèves, soit vous

faites autre chose. Mon métier c’est prof, j’enseigne à des élèves » (suivi d’un silence des

élèves)

Comportement

- Sedray lève systématiquement la main, va au tableau en histoire-géographie pour donner

ses réponses.

- Aide ses camarades : montre ses notes (anglais), son agenda (histoire-géographie) pour

qu’ils puissent prendre des notes

- Souvent le seul volontaire. Enseignant obligé de ne pas lui laisser la parole s’il veut que les

autres élèves participent.

- En mathématiques il est très concentré sur le tableau, sur ce qui y est écrit, peut lire pour

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lui-même ce qui est écrit, voire réfléchir à voix haute pour résoudre une opération.

Codes scolaires

- Délégué de la classe

- L’élève se place toujours dans les premiers rangs, près d’un camarade avec qui il s’entend.

Il a son matériel et ne se laisse pas distraire par les autres élèves (par exemple en accueil

téléphone lorsqu’un camarade lui montre quelque chose sur son téléphone auquel il ne prête

pas attention).

- Il écoute le cours et lit ses notes pendant que l’enseignant explique.

- Alors que les autres élèves interviennent sans y être invités par l’enseignant, Sedray lève la

main et attend son tour.

- Chaque support est consigné dans un lutrin, cahier, classeur… Les feuilles sont

immédiatement collées ou insérées dans le document correspondant dans toutes les

matières)

Expression orale

- Sedray donne facilement les réponses à l’enseignant ou pose des questions lorsqu’il ne

comprend pas (demande de précision en histoire géographie sur le lien qu’il peut y avoir

entre la plantation et la maison dans l’objet d’étude « le premier empire colonial français »).

- En anglais, Sedray ne comprend pas ce que l’enseignante a écrit au tableau, et n’hésite pas à

la solliciter pour lever ses questionnements : « madame c’est un quoi après le « e » ? »

(pour le mot : behavoir, le « h » pouvant être interprété comme un « n » au niveau

graphique .

- Il participe énormément même lorsque ses réponses sont erronées en mathématiques lors de

la mise en commun d’un exercice. Il utilise à la fois la parole, sa feuille qu’il montre

comme support visuel du résultat (fonctions) et la gestuelle pour mimer l’évolution d’une

courbe (croissance, décroissance).

Connaissances

- Méthodologie : souhaite savoir où noter une définition dans son cahier en histoire-

géographie. Il met en place des stratégies de reconnaissance visuelle d’éléments scolaire.

Par exemple en mathématiques il note les consignes d’une certaine couleur et les réponses

d’une autre couleur.

- En histoire-géographie, il réinvestit ses connaissances de mathématiques pour réaliser un

calcul.

Exemple d’échange

Observation anglais

- P. : Who is Maggie Finn ? (à la classe)

- S. : Maggie

- P. : and how old is she ?

- S. : she’s 17

- P. : and after her… ?

- Après elle ya** (alternance codique) marie (se parle à lui-même)

Observation maths

L’enseignant change de document support sur le TNI (Tableau Numérique Informatique) ;

trop vite pour l’élève qui l’interpelle : « Mais vous faites quoi monsieur ? Attendez wesh ! »

D’autre part, l’enseignant le reprend sur la formulation des réponses en mathématiques :

- S. (à propos d’un résultat) : « y en a pas ! »

- P. : « on dit pas « y en a pas », on dit qu’il n’y en a pas ou on dit que c’est zéro ».

Jaime

Ambiance de classe

- Pas de moqueries entre élèves

- Mixité des élèves dans les travaux de groupe

- Moqueries par rapport à l’orthographe de certains élèves (avec bienveillance), en français,

commentent entre eux l’écrit d’une camarade : « t’as vu comment elle écrit

« comédie ?... « comme et dit » (ou « comme Eddie » ou « comme est dit », nous n’avons

que l’oral, nous ne voyons pas la feuille) en deux mots ! » (rires)

Comportement

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- Lors d’un travail en groupe en français, il est notre porte-parole. Il dicte à une camarade

(chargée de la présentation écrite) ses notes.Très studieux, lit et corrige chaque erreur de sa

camarade qui copie la version finale de l’analyse d’un extrait de « Cyrano de Bergerac». En

fin d’heure décroche, mâchouille son stylo et dessine un tatouage sur la jambe de sa

camarade.

- En mathématiques, lorsqu’il faut s’exprimer devant la classe pour présenter le résultat du

travail en groupe, il préfère être celui qui écrit les résultats des opérations et souffler les le

raisonnement qui les a conduits à ce résultat à sa camarade au tableau plutôt que de

s’exposer à l’oral.

- En anglais, il lève la main pour repasser à l’oral (influence de notre présence ?). Aide des

camarades pour la compréhension de la consigne.

Codes scolaires

- Présentation des documents très rigoureuse en français et mathématiques.

- A toujours son matériel.

- Maîtrise des différents discours scolaires (consignes, demandes, aides, plaisanterie)

- S’aide de son stylo pour suivre la lecture d’un texte à voix haute par un camarade

Expression orale

- Pour le devoir collectif en français, il souffle à sa camarade et lui corrige ses fautes, mais

refuse de lui lire la production. En maths, il veut bien aller écrire les réponses, mais pas

s’exprimer à l’oral.

- Chargé par ses camarades de m’expliquer leur travail.

- Echanges entre pairs sur le sens des mots en français

- En anglais, les élèves trouvent qu’il n’a pas d’accent. Un élève : « pourquoi il a pas

d’accent en anglais ? » Un autre élève : « il maîtrise il pratique plus »

Connaissances

- Graphie : en français, trouve le terme d’un commentaire de la prof que sa camarade n’arrive

pas à retranscrire commentaire (exemple échanges)

- Lexical : connait des termes complexes (verve)

- Commentaires d’autres élèves sur son raisonnement en mathématiques pendant qu’il écrit :

« on a tous écrit pareil sauf J., J. il est parti loin » « eh ! J. t’es parti trop loin ! Pourquoi tu

cherches la complication ? » « Ne le perturbe pas pendant qu’il écrit »

- Références culturelles en éco/droit acquises entre le début et la fin du cours : en début ne

connait pas les « restos du cœur ». P. : « J.tu sais ce que c’est la Restos du cœur ? » J. :

« non ». Pendant le cours vont définir collectivement ce que sont les restos du cœur, leur

rôle, leur fonctionnement etc… En fin d’heure, l’enseignant lui demande de résumer ce

que sont les « Restos du Cœur » : « ben c’est une association qui donne à manger aux

pauvres ».

Exemple d’échange

Observation français

- E. : c’est quoi ça ?

- J. : son talent

- E. : c’est grâce à sa serbe d’écrivain ?

- J. : attends attends… c’est grâce à sa verve d’écrivain

- E. : hein ?

- J. : verve, V.E.R.V.E., son talent d’orateur !

Observation mathématiques. Sur le résultat d’une opération

- E. : tu fais 6X4

- J. : non c’est 20-6=14, 14X4…alors (montre l’opération sur la calculatrice)

- E. : Ah !OK !Ah j’ai compris !

- J. : ah ouais ! (se retourne vers un autre camarade) et c’est bon t’as compris ? toi t’as

compris ?

Adama

Ambiance de classe

- Observations : Même classe que Rose.

- Souvent placé seul ou à côté d’une élève de bon niveau mais peu assidue (plan de classe).

Comportement

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- Très effacé, ses réponses aux questions de l’enseignant sont parfois inaudibles (maths)

- Attentif à ce que dit l’enseignant et aux échanges prof/élèves. Ne prête pas attention aux

échanges entre élèves.

- Ecrit ce qui est marqué au tableau en lisant à lui-même à voix basse.

Codes scolaires

- A son matériel qu’il prête à ses camarades (colle, règle, carnet de correspondance)

- Ecoute et prise de notes

- Note les mots nouveaux en rouge avec le 4 couleurs, surligne les infos importantes avec sa

règle

Expression orale

- N’intervient que lorsqu’il est sollicité par l’enseignant dans une configuration classe

entière, en rang

- Sollicite de lui-même l’enseignant lorsqu’il est en groupe ou sur poste

- En revanche plus à l’aise en groupe ou sur poste informatique, réponses spontanées (voir

échange)

- Echanges interindividuels avec les élèves ou l’enseignant (demande d’aide)

- Lecture orale de phrases et de consignes (français, travail en groupe sur la concordance des

temps)

Connaissances

- En mathématiques, sait ce qu’est une fonction décroissante. Il donne la réponse lorsque

l’enseignant lui demande « une fonction qui inverse l’ordre ? »

- En atelier rédactionnel stratégie d’apprentissage : s’avance dans les questions qu’il connaît,

puis regarde comment font les autres pour les procédures qu’il ne connait pas.

- Il a des lacunes dans l’usage des TICE et en culture générale : lorsque des élèves évoquent

l’affaire Fillon qui déclenche de vifs échanges, il décroche fait autre chose. Lorsqu’en

français l’enseignant explique la subordonnée, comme venant d’un terme militaire de

subordonné (celui qui a le grade du dessous), Adama et les autres élèves manifestent leur

méconnaissance de l’origine du mot.

Exemple d’échange

Observation atelier rédactionnel1

- P. : à quoi sert le publipostage ?

- A.: gagner du temps

- P. : Donc pourquoi on gagne du temps Adama ? Essaie c’est bien. On est en GA, tu fais de

la com. orale.

- A.: …

- P. : Tu sais peut-être et tu ne sais pas le dire ?

- : …

- P. : Bon j’arrête de t’embêter

Tape avec un doigt.

- P : t’as combien de mains ?

- A. : cinq (les montre)

- P. : non ça c’est les doigts. Travaille aussi avec l’autre main, tu iras plus vite tu verras.

Observation français (groupe de 4 élèves)

- P. : la proposition principale ?

- A. : « il vient à l’école »

- P. : oui, très bien Adama.

L’enseignant souligne en rouge au tableau : « il vient à l’école, mais il ne souhaite pas

travailler »

- P. : Adama est-ce que ça pourrait être une phrase simple ce que j’ai souligné ?

- A.: Ben oui, on la lit seule.

- P. : très bien.

Jonah

Ambiance de classe

- Les élèves sont agités en début de classe mais se calment progressivement au fil des

activités dans tous les cours.

- Activités adaptées à l’actualité : faire le JT pour présenter le match PSG-Barça, lister le

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nom des sport et faire des phrases en espagnol, concentrés sur leurs tâches

- Pas de problème de mixité, les filles et les garçons se mélangent lorsqu’il faut travailler en

binôme (maths)

Comportement

- Se place devant, souvent près d’un même camarade d’origine portugaise qui est lusophone

- Participe peu à l’oral (PSE) ou beaucoup (espagnol) en fonction de ses connaissances et de

la confiance en lui

- Etayage, aide et corrige les autres élèves pour faire des phrases en espagnol. Reprend ses

camarades en espagnol (E : « athlétisme » P : « en español ? » J. : « atletismo »)

- Il est le porte-parole de son groupe en espagnol (nommé par l’enseignant pour le valoriser)

- Reste concentré sur le cours de français même quand un élève cherche sa complicité « hé

Jonah je te fais rire ? » il ne le regarde pas et continue d’écrire.

- Se répartit les tâches en maths avec sa camarade : elle lit les instructions du jeu, il fait les

manipulations avec la souris et déplace les blocs (cours sur les algorithmes)

Codes scolaires

- A son matériel, prend des notes, utilise un crayon papier pour répondre aux questions sur le

dossier de PSE

- En espagnol a un cahier dans lequel il note le lexique

- En français utilise un stylo à plusieurs couleurs pour souligner la nature des mots (verbes)

- Dictée inversée (corriger les fautes) : sait ce qu’il faut faire, exercice du DNB. Lors de

l’ouverture des postes informatiques en maths : reste devant son ordinateur sans savoir ce

qu’il faut faire. Attend et regarde comment font ses camarades.

Expression orale

- Lorsque l’enseignante de PSE l’interroge, il répond « ché pas », et explique qu’il n’a pas

compris la première question (« l’une des conséquences possibles d’un rapport sexuel selon

l’amie de Sylvia » réponse attendue : « tomber enceinte »), en revanche quand elle pose une

question directe : « quels sont les moyens de contraception ? » il répond spontanément :

« le préservatif ».

- Passe à l’oral pour présenter le JT, conseil de l’enseignant : d’abord lire sa feuille puis dire

la phrase en regardant les autres élèves. (thème : supporter qui fait des milliers de kms pour

voir le match)

Connaissances

- En espagnol a des connaissances lexicales et syntaxiques, transfert du portugais à

l’espagnol. Lors du travail de groupe en espagnol, c’est lui qui est chargé de noter le

lexique et chercher dans le dictionnaire les mots nouveaux, et qui est le porte-parole de son

groupe.

- En français, explique la distinction « ce »/ « se » : « ce est un démonstratif »

Exemple d’échange

Observation espagnol

- P. : on ne dit pas ping pong en espagnol, on dit… ? (attend la réponse de la classe)

- J. : tenis de mesa

- P. : si muy bien !

Observation français (auto-correction)

- J. : je allais

- P. : t’es sûr ?

- J. : j’allais

Sadjo

Ambiance de classe

- La classe est très agitée, avec six élèves renvoyés sur dix-huit présents. Les problèmes de

violence et les tensions entre les élèves ont conduit les enseignants à mettre en place des

actions avec l’infirmière pour développer le savoir-être et apaiser le climat (atelier

d’expression autour des cinq sens). Il n’y a pas de mixité dans le placement des élèves.

- Certains élèves perçoivent mal que les enseignants lui viennent en aide. En mathématiques

après que l’enseignant explique un point à Sadjo, un élève lui demande pourquoi il l’aide et

pas lui « ouais, moi aussi chui débile faut m’aider ».

- Elle trouve un cadre sécurisant en restant avec les têtes de classe, qui travaillent sans se

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préoccuper des autres élèves.

Comportement

- En prospection sort son matériel, elle écoute l’enseignante mais pose sa tête sur son bras, et

s’endort en fin de cours.

- Elle observe, note, mais refuse de participer devant la classe. Elle est plus à l’aise dans les

travaux de groupe.

- Aides : L’enseignante de prospection aide Sadjo dans la lecture (lui montre où en sont). Les

pairs : elle se retourne en prospection pour recopier les notes de sa camarade.

- Elle est devant seule, ou parmi le groupe des élèves qui manifestent un intérêt pour les

cours.

Codes scolaires

- A son matériel, prend des notes

- Met 10mn à ôter son sac en anglais, puis s’allonge sur la table, discute avec sa camarade.

Ne note pas le nom de la séquence, ne réagit pas quand on lui demande de réaliser

l’activité.

- Prend des notes, surligne les passages importants d’un document (géographie)

Expression orale

- L’enseignante en prospection lui demande comment faire venir le client. Elle répond à voix

basse, inaudible pour le reste de la classe « l’accueillir ». L’enseignante lui signale que le

client est déjà là lorsqu’on l’accueille. Lorsqu’elle lui demande quel est le 2ème bénéfice de

la stratégie de prospection, elle ne répond pas. L’enseignante n’insiste pas et passe

immédiatement à un autre élève.

- Elle ne participe pas spontanément aux échanges et refuse de répondre aux questions des

enseignants sous le regard de la classe entière (échange). En revanche, elle participe en

mathématiques, lorsqu’il s’agit de réaliser le jeu du carré en fin de cours, qui est un jeu

collectif où les élèves peuvent aller à tour de rôle inscrire leur réponse au tableau.

Connaissances

- Arrive première de la classe lors de la dictée scolaire Européenne de Sèvres le 16 mars

2017 avec 67 fautes.

Exemple d’échange

Observation géographie

- P. : le monde est dépendant des hydrocarbures car… (faire une phrase pour répondre à la

question 3)

- S. : …

- P. : tu dois prendre en compte ce que l’on voit sur la carte (une autre élève, qui fait partie

du groupe de camarades de Sadjo, se porte volontaire pour répondre et lève le doigt)

- P. : Fanta je t’écoute

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12.ANNEXE Pratiques langagières en classe ordinaire

13.1 Compétences linguistiques affichées

LANGUES mots compris parlé écrit

agni 1 allemand 4 3 2 2

anglais 14 66 59 63

arabe marocain

5 5 arabe tunisien

2 2 2

arabe 8 9 8 4

bambara 6 16 9 6

berbère/kabyle

2 2 1

bété 1 1 comorien

1

coréen 3 1 1 créole Haïti 1 1 1 1

créole Guadeloupe 2 4 2 2

créole Guinée

1 1 1

créole Martinique

3 3 2

diakhanké

1 1 djoula 3 3 3 espagnol 47 43 33 35

français 13 60 67 69

français wesh wesh

1 1 1

italien 7 2 japonais 3 2 kabyle 1 1 khassonké

1 1

kinyarwanda

1 1 1

linguala 5 6 6 6

malgache 1 1 1 "malien" 1 1 1 1

maliké

2 1 1

mandingue 2 3 2 "pakistanais"

1 1

"parler villageois" peul 1 2 2

portugais 5 7 5 3

russe

1 1 soninké 4 12 11 4

sousou 1 swahili 1 1

tamoul 1 1 1 1

thaï 2 1 1 tshiluba

1

turc 3 ukrainien

1 1 1

wolof 3 7 6 2

yabasi 1

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13.2 Langues familières

LANGUES maison tête

anglais

4

arabe egyptien 1 arabe marocain 3 1

arabe tunisien 1 arabe 7 5

bambara 9 3

berbère/kabyle 1 1

bété 1 coréen

2

créole Haïti 1 créole

Guadeloupe 2 1

créole Guinée 1 diakhanké 2 djoula 3 2

espagnol 3 1

français 66 68

français wesh wesh 1

italien

1

kabyle 1 khassonké 1 linguala 3 3

malgache 1 "malien" 1 maliké 1 mandingue 3 1

peul 2 1

portugais 4 1

singalais 1 soninké 7 3

sousou 1 tamoul 1 ukrainien 1 1

wolof 2 3

yabasi 1

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13.3 Représentations des langues

LANGUES utile inutile négatif apprendre

allemand

9 33 10

anglais 43 6 4 7

arabe 3 3 5 27

bambara 3 chinois

2 10 24

coréen

3

créole Haïti

5

créole Guadeloupe

2

5

créole Martinique

5

djoula 1 espagnol 4 18 3 2

français 36 4 grec

1

hindi

2

italien

3 1 6

japonais

1 2 6

langue des signes

1

latin

1 3 1

linguala

1

18

maliké

1

mandara

1 mandarin

2 "pakistanais"

2 "parler villageois"

1 peul 1

1

portugais

3 5 23

russe

3 8 5

soninké 3 3 1 1

swahili

1

1

turc

1 1 1

wolof

1 2 10

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13.ANNEXE Bulletins : notes 2ème trimestre ou 1er semestre 2016/2017 : notes de l’élève par discipline et moyenne de la classe (entre parenthèses)

HG Anglais Espagnol Maths Français PSE EPS Arts Eco/droit Pro Moyenne

Générale

Aminata 11,63 (3/9) NN bénéfice bénéfice (14) 14,5 (1/7) bénéfice bénéfice bénéfice 6,5 (5/5) 10,97(11/1

9)

Bhagya 9,5 (11/20) 13,25(1/17) 11,60(14/21) 16,80(2/20) 4,40(18/20) 8,33(12/18) 10(17/18) 15(1/17) 6,89(16/19) 13,56

(2/20) 10,82(5/21)

Rose 4(18/20) 2,33(18/19) 8,13(11/22) 7(6/17) 8,16(16/23) 6,13(14/20) disp 13(6/21) 3,5(17/21) 5(19/21) 6,25(16/23)

Sedray 12,5(10/18) 14,52(3/18) 9,83(7/22) 13,1(4/20) 11,43(9/20) 16(2/19) 13,75(5/20) 9,33(6/15) 10,2(7/23) 11,93(7/23)

Jaime 13,78(7/22) 15,22(2/22) 18,63(2/22) 16,2 (1/22) 11,71(9/21) 14,86(1/22) 12(14/18) 1375(9/20) 11,52(7/24) 13,33(5/2

1) 13,73(5/25)

Adama 5(17/20) 4(17/19) 7,88(12/22) 6(7/17) 8,09(17/23) 4,86(18/20) 15(3/18) 11(14/21) 5(13/21) 7 (16/22) 7,28(15/23)

Jonah 12,31(8,58) NN 18,5(13,52) 13.70(7,92) 10(10,68) 16(12,34) 16(12,37) 18(10,2) 13(10) xxx

Sadjo 5 (10/12) 12,26(5/17) 16 (3/17) 13,70 (2/16) 12,92 (3/17) 12,40(4/15) 11(8/16) nn 11,33(8/17) 15 (3/17) 11,90(7/20)

3ème trimestre ou 2ème semestre 2016/2017

HG Anglais Espagnol Maths Français PSE EPS Arts Eco/droit Pro Moyenne Générale

Aminata 7,33(5/19)

Bhagya 5,75(11/21) 15,42(3/21) 12(6/21) 12(6/21) 5,67(13/19) 11(2/20) 14(3/19) 7,86(7/17) 16,75(1/21) 9 (15/21) 10,59(5/21)

Rose 5,54(16/16) 4,13(10/17) 9(13/20) 9(8/18) 5,62(15/20) 11,73(10/14) 13,5(8/19) 11,5(13/20) 4,40(14/17) 4,5(19/22) 7,48(14/22)

Sedray 11,54 (4/18) 7,23 (2/19) 5,67(9/21) 12,7(11/19) 19 (1/19) 14,5(5/20) 12,07(4/23)

Jaime 10,5(12/22) 14,25(11/22) 17 (2/22) 9,78 (14/23) 13,5(10/22) 18,5 (1/21) 13,93 (8/23)

Adama 7,33(13/16) 6,3(7/17) 12,67(9/20) 11(5/18) 5,41(16/20) 11,8(9/14) 17(3/19) 14,75(3/21) 4,5(13/17) 7(18/22) 9,4(10/22)

Jonah 14(11,55) 16(12,33) 11,33(11,3) 14(13,75) 13,5(10,62) xxx

Sadjo 5(10/12) 12,26(5/17) 16(3/17) 12,92(3/17) 11(8/16) 15(3/16) 11,91(7/19)

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14.ANNEXE Bulletins : appréciations

Aminata

L’élève a fait une progression spectaculaire en français, passant de 1 de moyenne au

second semestre en 2015/2016 à 14,5 au premier semestre 2016/2017, se plaçant en tête de

classe alors qu’elle était dernière en 2015/2016. Elle a la moyenne dans toutes les matières.

Alors qu’en 2015/2016 les appréciations soulignaient la faiblesse de ses résultats malgré son

« courage », cette année les appréciations affichent des résultats corrects.

- Evaluation du travail : Les enseignants soulignent les efforts fournis et la progression de

son travail entre sa première terminale l’année dernière et cette année (« progrès »,

« travail de qualité »)

- Posture d’élève : L’élève est présentée comme sérieuse, assidue, présente, volontaire,

appliquée, allant au bout de ses possibilités, investie et méritante.

- Difficultés rencontrées : Aucune difficulté n’est relevée pour l’année 2016/2017, alors

que durant l’année 2015/2016, les enseignants soulignaient d’énormes difficultés liées à

la maîtrise du français et à l’écrit.

- Encouragements : Les enseignants soulignent son mérite, l’encouragent (« poursuivez »,

« ne vous découragez pas ») et notent sa progression (« félicitations », « bravo »)

- Conseils : poursuivre ses efforts

Bhagya

L’élève a énormément d’absence non justifiées sur les deux années qui lui ont valu un

avertissement assiduité. Il lui est reproché de ne travailler que dans certaines matières :

maths, anglais, arts appliqués où elle est en tête de classe.

- Evaluation du travail : En fin de 2nde, l’équipe l’invite à travailler l’oral et à réfléchir à

une méthode de travail pour la 1ère. En fonction des disciplines son travail est évalué

comme très bon, irrégulier, trop juste, voire insuffisant. Dans certaines matières comme

l’anglais sont soulignés sa maîtrise, ses acquis, dans d’autres matières les enseignants

relèvent des compétences fragiles et instables (« manque de constance »).

- Posture d’élève : L’élève est perçue comme agréable, sérieuse… ou pas (« peu investie »,

« bavardages », « manque d’intérêt pour la matière ? » « manque de travail »). Certains

enseignants notent un « bon état d’esprit ».

- Difficultés rencontrées : elles sont liées à des absences signalées dans de nombreuses

disciplines sur les deux années au lycée. En seconde les enseignants repèrent des

difficultés relatives à la maîtrise de la langue orale (« l’oral est à travailler ») ou écrites

« (difficultés manifestes de rédaction »).

- Encouragements : dans les matières où elle travaille elle est invitée à poursuivre.

- Conseils : Ils se manifestent essentiellement par une mise en garde par rapport aux

absences (« attention », « réagissez », « vos absences vous joueront des tours »)

Rose

L’élève rencontre de nombreuses difficultés dans la maîtrise de la langue et dans les

apprentissages disciplinaires qui la suivent depuis l’intégration en classe ordinaire au collège.

- Evaluation du travail : Son travail est considéré comme insuffisant. Un manque de travail

est relevé également.

- Posture d’élève : elle est considérée comme agréable, sympathique, sérieuse allant au

bout de ses possibilités ou au contraire peu concentrée et peu travailleuse

- Difficultés rencontrées : Les enseignants notent avant tout des lacunes, un manque de

base, de compréhension des consignes, l’écrit et de l’oral, ainsi que d’expression. . Son

rythme de travail est perçu comme trop lent.

- Encouragements : Les enseignants l’invitent à ne pas se décourager

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- Conseils : Il s’agit essentiellement de conseils d’attitude face au travail ( apprendre,

s’investir, travail quotidien et régulier) et de comportement (demander de l’aide,

participer)

Sedray

Il a obtenu les compliments aux deux trimestres et se place dans la moyenne de la classe

concernant les résultats. Ses notes ont légèrement baissé entre les deux trimestres, sauf en

E.P.S., où il passe de 13,50 à 16 alors qu’inversément en maths il passe de 16 au 1er trimestre à

13,5 au 2ème trimestre.

- Evaluation du travail : Le travail de l’élève est salué par la majorité des enseignants

comme satisfaisant, régulier, appliqué. Certains mettent une réserve en le qualifiant d’à

peine moyen ou trop juste.

- Posture d’élève : En revanche l’attitude de l’élève face au travail fait l’unanimité

(sérieux, motivé, agréable, curieux, consciencieux, excellente participation, assidu, bonne

participation, sait pourquoi il est là ).

- Difficultés rencontrées : Il rencontre néanmoins des difficultés relationnelles (malmené

par ses camarades), et de maîtrise de la langue (difficultés de maîtrise de la langue ,

résultats très fragiles).

- Encouragements : Il est encouragé à continuer et à persévérer dans son travail et son

attitude « moteur » dans la classe.

- Conseils : Il est invité à travailler l’écrit et à mettre en place une méthode de travail

(mieux revoir le cours à la maison pour réussir).

Jaime

Très absentéiste en UPE2A durant l’année 2015/2016, Jaime avait néanmoins de très

bons résultats. Il a obtenu aux deux premiers trimestres les compliments au conseil de classe.

Ses notes sont supérieures à celles la classe les deux trimestres, hormis le français au premier

trimestre et l’E.P.S. aux deux trimestres. Il se place en tête de classe en mathématiques, P.S.E.,

anglais et espagnol. Ils a suivi une évolution spectaculaire en français et P.S.E. entre les 1er et

2nd trimestres. Les appréciations globales l’encouragent et font état de bons trimestres malgré

une concentration aléatoire selon les cours (T1) et une faible participation orale (T2).

- Evaluation du travail : Les enseignants estiment son travail satisfaisant à l’exception de

l’EPS et la prospection pour lesquels il est « juste ».

- Posture d’élève : Son attitude est considérée comme sérieuse, positive. Il a un « bon état

d’esprit » et « participe activement »

- Difficultés rencontrées : un enseignant de professionnel remarque des difficultés de

langue ».

- Encouragements : L’élève est invité à poursuivre sa progression (« continuez ainsi »,

« poursuivez ainsi » « Bravo ») .

- Conseils : ils relèvent essentiellement de la maîtrise de la langue (« Redoublez d'efforts

en français », « les difficultés de langue surmontables avec du travail », « Poursuivez vos

efforts pour améliorer vos compétences rédactionnelles »), l’attitude face au travail

(« Vous devez vous concentrez davantage, ne vous laissez pas distraire !! », « Il faut

rester concentrer en classe et ne pas abandonner. ») et la participation orale (« ne doit pas

hésiter à participer à l'oral », « ne doit pas hésiter à poser des questions en classe », « il

faut plus de participation en classe »).

Adama

L’élève a des notes supérieures à la moyenne en arts appliqués, E.P.S. et P.S.E. au

premier trimestre. Pour les deux premières matières il a une moyenne supérieure à celles de ses

camarades de classe. Nous notons une baisse générale au 2ème trimestre, même s’il rattrape la

moyenne de la classe en maths (moyenne de 6 contre une moyenne de 6,01 pour la classe) et

en espagnol (7,88 contre 8,44). Le 3ème trimestre montre pour l’instant une forte amélioration

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en mathématiques où il obtient une note de 10,5 alors que la note globale de la classe est de 5,5.

Concernant les absences, il totalisait 6h non justifiées à chaque trimestre, ce qui est peu dans

l’établissement. Il a obtenu néanmoins aux deux premiers trimestres les encouragements au

conseil de classe. Si au 1er trimestre l’équipe pédagogique envisageait une réorientation, au

second trimestre elle note des « efforts louables »

- Evaluation du travail : Son travail est évalué comme insuffisant, faible, et l’élève comme

ayant « de grosses difficultés» dans de nombreuses disciplines.

- Posture d’élève : Les appréciations sur le comportement dénotent une attitude positive,

agréable, exemplaire, sérieuse.

- Difficultés rencontrées : en termes de manque des bases, de lacunes et dans la la

compréhension et l’expression.

- Encouragements : L’élève est encouragé à ne pas baisser les brase (« poursuivez vos

efforts et ne relâchez pas », « continuez les efforts », « continuez à vous investir et à

apprendre ».)

- Conseils : de comportement (doit participer en classe et ne pas hésiter à demander de

l’aide », «« doit interpeller davantage le professeur en classe pour favoriser sa réussite »,

et de méthodologie (apprendre les leçons, redoubler d’efforts dans le travail personnel).

Jonah

L’élève a une moyenne supérieure à celle de la classe dans toutes les matières. Nous

notons une évolution incroyable dans la maîtrise des compétences mathématiques en UPE2A et

en troisième. Il passe d’une moyenne annuelle de 5,15 dans le dispositif à 16 au premier

trimestre et 15 au second trimestre de classe ordinaire. Sa moyenne est supérieure à 15 dans les

matières suivantes : E.P.S. (19,5 au trimestre 1 et 16 au trimestre2), espagnol (16,33 au

trimestres1 et 18,50 au trimestre2), arts appliqués (15 au trimestre 1 et 18,50 au trimestre2),

P.S.E ( 16,44 au trimestre 1 et 16 au trimestre2). Sa moyenne en français a baissé entre les deux

trimestres passant de 13,67 à 10 ; mais elle se situe autour de la moyenne de la classe (13,51 et

10,68).

- Evaluation du travail : Les bulletins des deux trimestres affichent une constance dans les

appréciations : « Des résultats satisfaisants. Il faut poursuivre ainsi et ne pas relâcher les

efforts. Elève qui effectue un travail de qualité. C'est bien. » « bon trimestre » (français

T1), « élève (…) qui effectue un travail de qualité »

- Posture d’élève : Jonah est perçu comme sérieux, appliqué, exemplaire, investi.

- Difficultés rencontrées : un enseignant seulement un manque de participation à l’oral.

- Encouragements : Les enseignants le félicitent (« FELICITATIONS ! ») et l’invitent à

poursuivre (continuez, poursuivez)

- Conseils : de persévérer.

Sadjo

Arrivée en septembre 2016, Sadjo a intégré la classe ordinaire au second trimestre de

l’année scolaire 2016/2017. Durant le premier trimestre en UPE2A, elle a eu les félicitations et

faisait partie des têtes de classe avec une moyenne supérieure à 15 dans toutes les matières

(sauf l’E.P.S.). En classe ordinaire, elle affiche également des notes supérieures à la moyenne

de la classe dans les matières générales. Elle n’a pas la moyenne en TICE et en entretien de

vente. Les commentaires des enseignants sur le bulletin du 2ème trimestre révèlent certaines

attitudes vis-à-vis de l’élève :

- Evaluation du travail : elle affiche des résultats corrects.

- Posture d’élève : elle est perçue comme sérieuse, volontaire et agréable.

- Difficultés rencontrées : elle ne s’affirme pas assez dans la classe à l’oral (participation,

se laisse submerger, manque de confiance)

- Encouragements : elle est invitée à poursuivre ses efforts et à s’accrocher.

- Conseils : relatifs à l’attitude en classe (« prenez confiance en vous », « ne pas hésiter à

poser des questions »).

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15.ANNEXE Synthèse des entretiens avec les enseignants (version complète audio et extraits en documents word/pdf sur clé USB )

Maîtrise de la

langue

Prof lettre HG 2V 2GA

« : y a malgré tout des problématiques qui reviennent de l'ordre du

vocabulaire. Mais finalement: ce sont des problématiques qu'on a aussi pour

les élèves + qui sont pas allophones »

« en littérature on doit revenir sur des sur des procédés d'écriture / qui font

appel à des notions de grammaire pour la plupart des élèves qui ont suivi

leur scolarité en France c'est des notions qui sont déjà tellement anciennes

qu'ils les ont oubliées. Alors que pour les élèves : arrivés récemment / c'est

sur eux qu'on peut plus facilement s'appuyer parce que c'est quelque chose

qui est plus frais / qu'ils ont généralement bien intégré / et ça c'est une bonne

chose (…) Par contre c'est vrai que la façon dont nos programmes sont

construits fait que/ on peut pas trop revenir en arrière»,

Adama : « ya malgré tout une progression dans / globalement dans la

construction des phrases (…) là où ça pêche c'est plus sur: le lien qu'il

devrait faire entre la consigne et sa production »

Rose : elle était incapable de faire une phrase en début d’année et s’en sortait

en recopiant

« Pr. oui/ là dessus ya du mieux / c'est vrai qu'à l'oral elle s'exprime plutôt

correctement / c'est pas mal. C'est le passage à l'écrit qui pose problème »

Sedray : il a une bonne compréhension des consignes mais plus de difficultés

dans les productions

« sûrement ralenti aussi par: peut-être par le manque d'outil de langue dont

il dispose pour vraiment aller au bout de sa réflexion »

Prof lettre HG 2V 2A 3PP

« (…) pas tellement de problèmes à l'oral / hein pour l'expression. Par

contre à l'écrit: c'est compliqué quoi. »

« le sens global il est bon / tu vois la compréhension elle est bonne. Y a

aucun souci sur la compréhension après (…) c'est plus sur l'expression

écrite. »

« (…) je trouve qu'ils parlent bien justement. (…) justement ils ont pas le

langage euh un peu racaille (…). Moi je les entends pas dire wesh »

« moi j'me souviens d'une roumaine (…) qui était excellente » (…) « mais en

Roumanie tu sais ils ont un enseignement du français qui est: les deux

langues sont assez proches en fait »

Sadjo : « elle a un bon niveau à l'écrit. (…) je pense qu'elle a plus des

difficultés de compréhension de vocabulaire en fait »

« mais j'ai bien vu qu'elle comprenait pas tu vois \ barrage hydraulique \ elle

m'a rien demandé et après j'ai fait un contrôle dessus et j'ai compris qu'elle

comprenait rien \ les panneaux solaires barrage hydro-électrique tout ça elle

savait pas ce que c'était quoi. Et en géo t'as un vocabulaire disciplinaire tu

vois »

Prof lettre anglais 2CO 3PP

Jaime : « En français j'ai vu qu'il avait eu une très belle progression/ mais:

ça m'a: j'ai pensé que peut-être il y avait derrière: du wikipedia ou autre: du

recopier-coller j'ai pas été cherché. Ou alors quelqu'un qui l'a aidé/ bon là

tant mieux/parce que ça lui fait apprendre quand même »

« (…) l'orthographe. Lui comme d'ailleurs beaucoup: de la classe. C'est

pour ça. Il reste dans le lot au final » « la maîtrise de la langue\

l'orthographe\ le vocabulaire\ par moments: ça peut lui arriver de confondre:

des des significations »

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« il m'a rédigé un commentaire composé/top hein/ vraiment top » (demande

de plan simple)

Prof lettre anglais 2A 2GA 2V 1CO

« oui la maîtrise du français ça va. C'est correct. Adama je peux pas te dire

parce que j'entends à peine le son de sa voix parce qu'il est très réservé mais

les autres oui ils ont une assez bonne maîtrise du français. »

« I : et quand toi en classe tu utilises à la fois le français et l'anglais ?

P : oui je peux pas utiliser que l'anglais parce qu'ils ne comprennent pas.

I : et le français du coup tu l'utilises à quel moment en cours ?

P : hmm: la moitié du temps et je traduis aussi ce que je dis en anglais parce

que\ quand je donne une consigne en anglais elle n'est pas comprise. »

Prof accueil 2A

« I : c'est-à-dire qu'elle a un niveau scolaire/

P : très très bon je pense. Avec des difficultés au niveau de l'orthographe des

choses comme ça mais sinon je dirais qu'elle a un niveau très très acceptable

par rapport même aux élèves qui sont nés en France et qui ont un cursus

traditionnel. »

Prof de maths 3PP 2A 2CO 2V 1CO

« I : et au niveau du lexique ça va ils ont pas de difficulté ?

P : et ouais la langue: ouais le vocabulaire des mathématiques. Les mots

"somme" "produit"\ tout ce vocabulaire qu'on retrouve dans les énoncés / et

sur lesquels ils peuvent bloquer »

Prof commerce 2A 2CO 1CO

« [dénominateur commun chez les élèves issus d’UPE2A] c'est leur

incapacité à s'exprimer à l'oral de façon: sociable. Sociale? ché pas comment

on dit ». Elle point les difficultés d'expression et de communication due peut

êter à l’insécurité et au positionnement d’infériorité par rapport aux autres

élèves.

Méthode de

travail

Prof lettre HG 2V 2GA

Adama : « et effectivement quand on lui donne des travaux à réaliser:+ très

souvent/ c'est en venant le voir directement individuellement qu'on s'aperçoit

que la consigne n'a pas forcément été comprise ou qu'il est parti sur une

mauvaise piste »

I : et est-ce qu'il est plus à l'aise quand tu travailles en groupe ou:

P : évidemment. oui oui oui. Le fait de pouvoir projeter son attention plus

spécifiquement sur lui est quand même bénéfique. Ca se voit dans les cours

effectivement en demi-groupe »

Sedray : « il a de la rigueur justement sur le vocabulaire, sur les notions

nouvelles »

Prof lettres HG 2V 2A 3PP

Jonah : par rapport aux connaissances en géographie : « il sait très bien qu'il

a pas de connaissance donc lui il est très sérieux là dessus / il a conscience

qu'il a pas de connaissance »

Sadjo : « je leur explique quand ils me posent la question / mais s'ils me

posent pas la question j'ai pas forcément le réflexe tu vois. Barrage hydro-

électrique euh: pour moi c'est acquis tu vois »

Prof commerce 2A 2CO 2V

Sadjo : « je vois elle note. (…) on travaille actuellement sur l'argumentaire\

élaborer un argument. commercial mais c'est comme en français hein/ et:

elle: elle: au début elle refusait de lire par exemple »

Prof lettre anglais 2CO 3PP

Jaime : « ça m'a un peu choquée/ (rires) pour le coup. Je l'ai pas dit aux

élèves. Mais c'est vrai que parfois Ju. me rend des copies beaucoup plus

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propres: mieux organisées/ onvoit en tout cas qu'il a eu un enseignement:

structuré jusque là et il en a pris compte » (…) « : au-dessus des autres au

niveau de: surtout de la structure/ l'organisation/ je parle pas du vocab/ du:

de l'orthographe/ l'organisation et le: la mise en place de: de sa pensée en

fait/ comment il traduit sa pensée sur: sur sa copie/ on voit qu'il a des idées

claires\ que c'est: c'est argumenté »

A propos des consignes : « si il comprend pas/ les autres non plus en général

comprennent pas »

Prof Maths 3PP 2A 2CO 2V 1CO

« C'est plutôt des élèves qui ont un bon niveau et j'imagine que / qu'avant

d'arriver en France ils ont dû avoir une scolarité correcte je: j'ai l'impression

qu'ils ont des réflexes scolaires »

Sadjo : « on sent qu'elle a quand même des problèmes de compréhension de

consignes et puis d'application de méthodes. C'est-à-dire que si on fait un

exercice et qu'elle comprendra méthode/ donc si on lui demande de faire un

autre exercice ou il faut utiliser la même méthode mais en changeant deux

trois choses ça la déstabilise. Elle est fragile (…)donc pour tout ce qui est

résolution de problème c'est très compliqué parce que: quand on demande de

mobiliser plusieurs compétences: d'avoir un peu de recul de réfléchir à quelle

méthode utiliser »

Intégration

classe

Prof lettre HG 2V 2GA

Rose : « Pendant une partie de l'année Pr. était souvent associée avec In. qui

effectivement a un bon niveau de langue: elle a du vocabulaire et je la voyais

régulièrement: prêter main forte à Pr. ce qui me permettait d'avoir un relais

aussi » , elle est aidée par des élèves de la classe.

Sedray : « va plutôt se retrouver dans la position de celui qui aide »

Prof lettre HG 2V 2A 3PP

Sedray : « y avait quelques jalousies parce que c'est quand même un bon

élève tu vois »

Sadjo : « (…) elle est déjà plus en re/bon elle s'est fait de bonnes copines

(…) »

« Elle est avec des gens qui ont un peu son profil tu vois qui sont calmes

posés ++ donc là elle se sent plus à l'aise tu vois quoi ? »

Prof lettre langues 2Co 3PP

Jaime : « il a réussi à s'intégrer de manière à ce que/ à se faire respecter

malgré sa différence au niveau du langage. Au niveau de: l'accent/ et non les

autres ne vont pas: l'embêter. Ne vont pas rigoler. Il est\ il est très bien

intégré ».

Prof maths 3PP 2A 2CO 2V 1CO

Sedray : « ouais. Ben ouais Alors ça aété plus compliqué pour Sedray c'est

particulier parce qu'il a un profil: + qui est \ qui est pas très courant en :

lycée pro/ c'est à dire un élève qui est très proche des des profs qui aime la

proximité / qui aime se mettre devant et participer tout de suite/ lever la main

quand il veut s'exprimer enfin c'est le genre de réflexe qu'on apas l'habitude

de: § voir en lycée pro et donc il s'expose §§

I : §et les autres élèves ça les perturbe?§§

P : il s'expose forcément \ en début d'année en tout cas à des quolibets enfin:

§vis-à-vis des autres élèves »

Prof commerce 2A 2CO 2V

« ça a quand même été dur (…). C'est quand même difficile hein: parce que

bon c'est des j/ alors hein il se trouve que c'est deux jeunes filles. Alors est-ce

qu'avec les garçons c'est pareil j'en sais rien moi ».

« il faut pas compter sur les autres élèves pour: travailler leur intégration »

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« C'est pas simple pour eux parce qu'ils sont toujours assez discrets ces gens-

là contrairement à certains autres/ qui la ramènent toutes les quatre

minutes »

Sadjo : « là elle a une bande de copines »

Prof accueil 2A

« je pense que c'est plutôt au niveau d'une intégration parce que: certes ils

ont des petites difficultés à l'oral mais quand je leur parle à chacun

indépendamment/ je n'ai pas cette timidité\ que je retrouve quand ils doivent

s'exprimer devant la classe. Donc c'est plutôt par rapport au regard des

autres/ qui sont dans une classe traditionnelle alors que eux viennent d'une

classe d'accueil en fait. Je pense que c'est à ce niveau-là. je pense qu'ils ont

été entre guillemets "cocoonés" dans une classe de seconde "accueil" enfin de

voilà. Ils se trouvent avec des élèves qui ont le même genre de difficultés

qu'eux/ et du coup je pense qu'ils se sentent plutôt à l'aise alors que lorsqu'ils

intègrent une classe de seconde traditionnelle ils ont l'impression qu'ils sont

face à d'autres qui n'ont pas les mêmes problèmes qu'eux ce qui n'est pas

toujours vrai »

Comportement Prof lettre HG 2V 2GA

Adama : « qui est très / effacé. Ca lui a permis en quelque sorte de : d'éviter

aussi les vagues parce qu'il est dans une classe où ça a pas mal remué en

début d'année / donc lui voilà \ il a fait profil bas / il a fait le roseau et il a

attendu que ça passe euh:+ donc il est très attentif il prend bien en notes

mais il est passif face à son apprentissage »

« (…) après sa personnalité à Ab. fait que / Ilva pas oser. Il va pas oser dire

les choses / Ilva pas oser mettre en avant ses propres difficultés: donc il va\ il

va faire effectivement un: travail d'élève modèle mais malheureusement: le

sens qu'il y a derrière n'est pas: n'est pas là quoi »

Difficultés à prendre la parole, ce qui le fait passer à côté de nombreuses

informations.

Rose : elle avait envie de progresser en début d’année « … malheureusement

son état d'esprit est beaucoup moins focalisé sur le travail »

Sedray : « c'est quelqu'un de beaucoup plus entreprenant / beaucoup plus

actif dans son apprentissage / et de ce point de vue là il a fait preuve d'une

belle maturité »

« Il a envie d'apprendre. Il est curieux »

Prof lettres HG 2V 2A 3PP

« fait c'est des élèves qui sont très motivés / très sérieux \ toujours là \

toujours à poser des questions / très scolaires »

Sedray : « il reste imperturbable » , « c'est un élève très motivé et qui est

hyper sérieux, qui se laisse jamais déconcentré »

Jonah : « il est plus timide »

Sadjo : « c'est quelqu'un d'assez discret (…) elle est un peu éteinte pendant

les cours »

Prof lettres anglais 2CO 3PP

Jaime et Jonah : « c'est des élèves que j'entends pas spécialement déjà. C'est

des élèves qui ne me posent pas de problème. »

Jaime : « En anglais il a beaucoup plus de facilités que les autres ça c'est

sûr. Il s'ennuie. »

« Il est assez fainéant Ju.. Moins il en fait mieux il se porte »

« et pour le coup je lui ai dit: j'ai lu sa copie/ à la classe/ Bon je pensais qu'il

allait être fier. Mais bon pour lui euh: pff un peu blasé euh pff. (…) Bon il

s'en fichait complètement. J'fais "d'accord"/ et ensuite: il m'a dit "oui mais

bon ça: je le faisais tout le temps quoi/ des commentaires composés on en

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faisait tout le temps »

« il est discret\+ il va rigoler de temps en temps aux bêtises des autres »

Jonah : « Ja. il est dans son coin/ à côté de Fl. tout le temps/ et puis c'est . Je

l'entends pas/ »

Prof Maths 3PP 2A 2V 2CO 1CO

« I : et est-ce que tu trouves qu'il y a un point commun entre tous ces élèves ?

P : ben clairement/ c'est tous des élèves sérieux/ »

« Sedray c'est quelqu'un qui participe qui est actif. Bhagya un peu moins elle

est un peu plus timide. Jonah aussi il est plus réservé mais lui c'est plus des

problèmes d'expression.Sinon: voilà Sadjo elle est aussi renfermée aussi »

Sedray : « comme il a un certain caractère du coup il se / au bout d'un

moment il arrive à se faire respecter. »

« en tout cas c'est des élèves: qui posent pas de problème. Je pense que

quand t'es/ j'imagine que ça s'explique par le fait que quand on arrive qu'on

débarque dans un pays où on a besoin de s'intégrer \ on a un besoin que n'ont

pas forcément les autres du coup/ ça nous donne ce profil d'élève »

Prof commerce 2A 2CO 1CO

Sadjo et Bhagya : « en tout cas c'est des gamines timides » (…) « c'est un

peu le serpent qui se mord la queue. Elles sont timides pare qu'elles parlent

pas/ elles parlent pas parce qu'elles sont timides »

« C'est souvent des gamines assez travailleuses »

Bhagya : « bon Th. elle a pris du poil de la bête »

Sadjo : « Par ailleurs avant elle me regardait pas dans les yeux là aussi

maintenant ça va »

Prof accueil 2A

« alors le dénominateur commun c'est au niveau des difficultés / euh on

dirait plutôt une timidité à s'exprimer à l'oral/ quelques fragilités au niveau

de l'écrit. Chacun indépendamment enfin c'est pas toujours semblable parce

qu'il y a des élèves qui ont des niveaux plus élevés que d'autres. Mais quand

même une petite fragilité à l'écrit; mais surtout à l'oral. Surtout à l'oral. Une

prise de parole difficile. »

Référents

culturels,

disciplinaires

Prof lettre HG 2V 2A 3PP

Registre de langue élèves, famille : « Tu vois bien que c'est pas un langage

parlé par les parents non plus\parce qu'y en a plein je suis sûre que les

parents parlent comme ça »

Prof commerce 2A 2Co 1CO

Sadjo : « elle a un peu ce problème de manque de connaissances

professionnelles. Les mots professionnels. Culture professionnelle. »

Prof lettre anglais 2CO 3PP

Jaime : « en anglais il a beaucoup plus de facilités que les autres ça c'est sûr.

Il s'ennuie. »

Prof maths 3PP 2A 2O 2V 1CO

A propos des spécificités liées aux mathématiques : « non pas plus §ni moins

que les autres »

Prof accueil 2A

« je pense que Sadjo n'a aucun problème de compréhension sinon: des

problèmes parfois mais c'est pas récurrent quand il s'agit du contexte. De

comprendre le contexte. Parce que parfois elle n'a pas le même contexte là

d'où elle vient. Elle n'a pas les mêmes codes. Par exemple.

I : c'est par rapport à certaines notions/

P : oui parce que quand on parle: je sais pas de jardin d'enfants ou de centre

aéré ou de choses comme ça / il faut lui faire la traduction et voir à quoi ça

correspond.

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I : Oui elle est sénégalaise et là j'ai appris avec des élèves qui venaient

d'Afrique de l'Ouest que le jardin d'enfants pour eux c'est l'école/ avant le

primaire c'est/ la maternelle c'est la maternelle pour eux.

P : oui il faut faire des petites comparaisons et arriver à trouver les termes

qui leur parlent. C'est à ce niveau là. Au niveau petit point de culture. »

Autres Prof lettre HG 2V 2GA

«(…) il y a des problématiques scolaires et il y a souvent des problématiques

sociales extrêmement importantes. Très souvent on a des mineurs isolés (…)

c'est difficile pour ces gamins-là »

Prof lettre HG 2V 2A 3PP

Jonah : « et Ja. il est pas francophone en fait ? » « bizarrement je croyais

qu'il avait été francophone et qu'il avait pas été beaucoup à l'école tu vois »

Provenance UP : « on a pas d'infos là-dessus tu vois (…) Personne m'a dit /

elle vient d'une classe d'accueil »(…) « tu passes quand même quinze jours

déjà à repérer cet élève tu vois / parce que tu sais pas » (…)

« c'est le truc que tu découvres un peu par hasard parce qu'il parle avec un

accent »

Prof lettres anglais 2CO 3PP

Communication prof/élève [à propos des consignes non comprises] : « donc

avec ce regard-là il: il me pose en tout cas la question de "mais j'ai pas

compris" et quand je lui demande "Ju. c'est bon t'as compris?" il me regarde/

ya un temps de battement/ il me fait "hmm hmm »

Jonah : « Là je pense que c'est l'environnement qui fait qu'il a abandonné un

p'tit peu quoi »

Alternance codique dans la classe : « : j'ai entendu certains mots en arabe\

euh: qui étaient pas des très jolis mots/ » (…) « Après ce qui aurait pu être

intéressant/c'est euh: "ah ben oui ah ben tiens ce mots là en arabe: ça se dit

euh tatatatata/". Qu'ils comparent/ qu'ils puissent faire des liens: ça ça aurait

été intéressant mais: c'est pas leur réflexe. Le réflexe c'est (bruit de bouche)

les insultes\ les mauvais mots (...) »

Prof lettres anglais 2A 2V 2GA 1CO

Rose : « I : et justement par rapport à Rose si: si tu l'avais su au départ/

qu'est-ce que tu aurais changé par rapport à la notation ou à l'attitude: ?

P : oui quelque chose comme ça. J'aurais peut être préparé:/ alors ça il

aurait fallu que le fasse toute l'année / préparer un c/ je sais pas si on peut

faire ça d'ailleurs. Préparer un cours différent pour ceux qui n'ont pas le

niveau en anglais. Ca aurait été ça l'idéal mais je t'avoue que je sais pas si

j'aurais pris le temps de le faire. »

Prof accueil 2A

« plus que dans le pays je crois que c'est dans une salle de classe que c'est le

plus angoissant pour quelqu'un. c'est pour ça que je t'ai parlé directement de

la salle de classe. Parce que l'effet, se retrouver à un siège derrière sa table\

avec quelqu'un devant qui te parle que tu ne comprends pas. Tu n'es même

pas sûre de pourvoir lui répondre et sur le coup tu dois répondre tout de

suite/ alors que si tu vas dans le pays te renseigner pour quelque chose tu

prépares. Là tu prépares pas t'as quelqu'un qui te regarde. ca t'angoisse.

t'arrives pas. Les autres te regardes. Ca t'angoisse davantage et du coup je

trouve que c'est ça le plus stressant. C'est pour ça que je me mets à leur place

c'est pas tellement d'être dans le pays c'est de se trouver dans un contexte où

tu dois répondre tout de suite. Où on attend quelque chose de toi et tu peux

pas le donner. »

« ça je les comprends à ce niveau là. c'est pour ça c'est très important à mon

avis de se mettre à leur place de commencer par ça. C'est ce que: en fait c'est

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un petit peu mon cheval de bataille. Et c'est ce que j'ai expliqué un peu pour

la certification c'est qu'il faut d'abord trouver à mon sens un lien/ un lien. Et

à partir de ce lien/ on crée une confiance on arrive à trouver les problèmes

on arrive à trouver les solutions et c'est comme ça qu'on avance. Parce que si

t'es coupé de la personne qui est là/ tu comprends pas pourquoi ils

comprennent pas/ qu'est-ce qu'ils font là/ alors qu'ils comprennent pas /

pourquoi on les a mis là/ tu vois après ça donne des situations qui sont

désagréables pour tout le monde. et encore plus pour les gamins quoi. »

Passage

UPE2A classe

ordinaire

Prof lettre HG 2V 2GA

« (...) finalement sur les élèves allophones/ généralement lorsqu'ils sont pris

en charge\ ben notamment en 3ème ou les anciennes CLA (…) ya une

progression qui est ahurissante / qui est vraiment géniale et:

malheureusement ensuite euh: lorsqu'ils sont intégrés dans les classes

normales/ il va vraiment y avoir une césure entre ceux qui vont être capables

finalement de s'emparer de nouvelles façons de faire / parce qu'ils vont

continuer à: à travailler de leur côté / en sachant qu'ils doivent continuer à

travailler de leur côté / et ceux qui: effectivement euh: considèrent que: ils

ont une base minimale suffisante »

Prof lettre HG 2V 2A 3PP

« (…) les règles de la classe ils les ont »

« en 3UP ils travaillent de la même façon le français qu'en seconde. Parce

qu'en seconde c'est beaucoup de compréhension et beaucoup d'écriture »

« on la travaille (grammaire) ponctuellement tu vois / sur certaines : / quand

tu fais des corrigés / sur certaines choses \ la phrase négative par exemple.

Mais en fait tu peux pas / c'est vite lassant » (…) « ils se disent qu'en français

ils vont faire de la conjugaison / de la grammaire / de l'orthographe / les

règles de grammaire etc alors qu'on fait pas forcément » (…) « parce

qu'après euh: ceux qui maîtrisent ils disent "ah ben non ça c'est pour les

SEGPA : / pourquoi on fait ça/ et puis à la primaire" »

« mais l'histoire-géo il faut faire un travail préparatoire : par exemple des

frises chronologiques. Pour voir s'ils savent se repérer dans les grandes

périodes historiques »

« donc faire un travail préparatoire par exemple sur: la chronologie / et puis

sur les: sur le vocabulaire disciplinaire »

« Il faudrait qu'ils aient plus d'inclusion progressive aussi. Parce que:

effectivement la classe d'accueil ils sont super chouchoutés et après… »

Prof lettres anglais 2CO 2V

« J'ai trouvé que l'idée de les : mettre en classe pour voir l'organisation pour

voir comment ça se passe déjà c'est une super idée. Je pense comme ils vont

pouvoir peut-être se projeter et: bon j'espère qu'ils vont se projeter dans un

bon sens. j'espère qu'ils vont pas être un peu déçus par le fait que: + y a

p't'être de l'agitation qu'il y ait peut être+ Ca déjà c'est une bonne idée.

Après que ça dure peut-être: une semaine ? »

« Voilà moi ce que je pense essentiel c'est qu'ils: qu'ils : aient pas peur de

l'intégration donc pour ça c'est: en étape et: je pense que c'est ça/ c'est une

étape essentielle »

Prof lettres anglais 2A 2GA 2V 1CO

« Evidemment je pense qu'y a pas de solution miracle mais comme ce qui est

déjà fait actuellement/ ils ont une heure en plus d'anglais actuellement avec

E. [enseignante d'anglais en UPE2A]. Donc je sais qu'elle répartit par

groupe dans la classe. Par niveau. Ceux qui ont pas encore appris l'anglais,

ceux qui ont un niveau déjà avancé. Je pense que c'est une bonne méthode

pour: voir ensuite dans quel/ sous quel rapport ils auront besoin de

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progresser dans tel ou tel domaine en anglais. Donc je pense que ça c'est une

bonne chose à faire. C'est ce qui est déjà fait en fait. »

Prof maths 3PP 2A 2CO 2V 1CO

« I :est-ce que tu as eu en amont des informations concernant les élèves avant

leur intégration en classe ordinaire\ sur leur parcours: est-ce que tu savais

s'ils venaient d'UPE2A oupas\

P : après ça dépend de la communication dans l'équipe. Euh: en général oui

on a l'information mais c'est pas systématique parce qu'après ça dépend quel

collègue\ comment communique chaque collègue chaque professeurs

principaux chaque CPE (Conseiller Principal d'Education) enfin »

« ben des bases ce qu'on utilise le plus c'est la proportionnalité. Déjà

connaître la technique de proportionnalité et dans quel contexte on utilise

reconnaître les contextes dans lesquels on va utiliser ça. On travaille

énormément là-dessus en troisième et en seconde »

« et puis par thème enfin par: euh++ par exemple en statistiques ya un

vocabulaire spécifique lié aux statistiques en fonction l'algèbre et tout ça / on

a des mots de vocabulaire liés à chaque partie du programme »

Prof commerce 2A 2CO 1CO

« oui parce que moi je les couve pas »

« Je pense que leur faire faire des petits stages/ mais des stages assez

conséquents/ hein pas j't'observe pendant une heure. J'aurais tendance à dire

par exemple immersion dans une classe pendant huit jours »

Prof accueil 2A

« I : et tu aurais aimé qu'on t'informe ?

P : oui je pense par ce qu'au départ il faut faire la démarche et c'est pas

toujours évident d'avoir le bon renseignement parce qu'on put imaginer que

l'élève a des difficultés qui viennent d'ailleurs. Donc c'est important de savoir

ça pour les suivre les aider. J'aurais peut être mis en place plus tôt des cours

de soutien des choses comme ça qu'ils puissent s'en sortir parce que si je

l'avais su en seconde/ je ne serais peut -être pas passée à côté de certaines

choses qui peuvent m'échapper si je ne le sais pas. »

« en classe ordinaire moi je vois en accueil moi j'ai de gros problèmes au

nieau outils informatiques. Parce que je dois comme d'autres collègues, je

dois évaluer le B2i/ qu'ils n'ont pas donc du coup c'est déjà maîtriser l'outil

informatique/ on a pas toujours le temps de repartir à zéro/ avec cet outil

informatique/ donc s'ils avaient en amont une heure de cours en classe

d'accueil\ ça permettrait de dégrossir la situation. Je vois là en seconde tout

de même on a une évaluation à faire en ce qui concerne le BEP. »

Conseil

UPE2A

Prof lettre HG 2V 2GA

« les cours de français ne suffiront pas à leur apprendre la langue »

« donc ils ont généralement des acquis des bases (…) mais: ça reste

uniquement des bases/ et c'est vrai qu'on est censé aborder des notions de

littérature qu'on espère les plus complexes possible »

Prof lettre HG 2V 2A 3PP

« au niveau du travail / je lui dirai de LIRE / il faut qu'il lise \ il faut qu'il

regarde les actualités. Il faut qu'il essaie de lire les journaux / enfin: d'avoir

le plus possible un contact avec l'actualité et puis la lecture pour avoir un

apprentissage le plus possible des mots »

« et au niveau de la classe: ben ça dépend des classes.(…) ne pas hésiter à

poser des questions. Pas hésiter à se mettre au premier rang, à dire si on

comprend pas quelque chose, pas avoir peur de ce que les autres peuvent

penser »

Prof lettres anglais 2CO 3PP

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« de ne pas se forcément se laisser porter par: par: la fainéantise des autres/

par exemple/par le non travail des autres/ par l'agitation. Parce que voilà et

UPE2A il y a quand même une certaine discipline/ ils travaillent » (…)

« Donc c'est de pas perdre ça/ c'est de de: de continuer à donner le

maximum/ à ne pas dévier vers des voies qui: qui leur permettraient

d'abandonner les: qui auraient pour conséquences un abandon scolaire »

Compétences en français à développer : « : la lecture/ la lecture en

français. (…) pour la syntaxe pour euh: pour le fonctionnement de la langue/

euh: je pense que voilà/ ya ya rien de, mieux: que de lire au final.++ donc

oui au final. Un journal peu importe en fait. Même un e pub peu importe/

juste qu'ils aient le réflexe de lire la phrase. et ça en entrant dans les classes:

dans les classes: lambda/ ils auront déjà cette habitude de: ne serait-ce que

pour les consignes\ de comprendre la syntaxe la: linguistique et tout donc de

pouvoir comprendre mieux. même si le vocabulaire/ sera peut être apporté

plus tard mais/ qu'ils comprennent la construction d'une phrase et là la

lecture je pense que c'est la base. »

Prof lettres anglais 2A 2V 2GA 1CO : « pour un élève qui veut passer en

classe ordinaire je lui conseille de s'accrocher. Je pense à un élève comme

Sedray qui se défend et qui se bat pour arriver:vraiment au maximum dans

chaque matière. Pour l'anglais je lui conseille d'apprendre++ vraiment de

façon scolaire ses cours et: je lui conseillerai d'aller aussi un peu plus loin

que ce que le /l'enseignant lui demande. Donc de se renseigner de faire

quelques recherches/ que ce soit au CDI/ ou ailleurs euh: que ce soit aussi en

musée des expositions. Ca lui permettra d'être plus ouvert/ et euh: d'obtenir

un peu plus de culture aussi. »

Prof maths 3PP 2A 2CO 2V 1CO : « § ben ça dépend§§ du profil des

élèves.+ Déjà de le rassurer en lui disant que s'il éprouve des difficultés. Du

moins s'il pense éprouver des difficultés parce que desfois c'est : cest pas

forcément le cas. Ben qu'il est pas le seul. Que lorsque les élèves arrivent en

classe de seconde les profs tiennent compte des difficultés de chaque élève et

qu'on commence doucement »

« donc qu'ils gardent la confiance en eux et:++ et puis ché pas qu'ils

travaillent/ qu'ils fassent le travail demandé quoi/ qu'ils suivent les conseils

des profs/ quoi d'autre: et puis qu'ils soient rigoureux au niveau du de du

matériel/ qu'ils notent bien les cours/ ben qu'ils tiennent leur cahier à

jour/voilà après c'est des conseils qu'on donne à tous les élèves »

Prof commerce 2A 2CO 2V : « qu'il écoute bien hein qu'il note. Qu'il note.

Qu'il écoute, qu'il note: qu'il prenne /pourquoi pas enregistrer les cours si les

profs sont d'accord/ pourquoi pas/ ça peut hein/comme ça il ré-écoute des

trucs qu'il a rien compris: ou qu'il a pas compris (…) l'investissement

cultu/intellectuel/ enfin voilà c'est ça qui est la réponse(…) »

Prof accueil 2A : « ce serait de ne pas avoir peur de demander de l'aide.

Parce que je le vois avec une autre élève que j'ai aussi/ et qui elle reste

enfermée en elle-même sans préciser qu'elle est en difficultés. Et du coup

après il faut il faut aller rechercher auprès de chacun d'entre eux s'il y a

vraiment un problème détecté. Et bon c'est évident quand on découvre\ que

l'élève est en difficulté une fois deux fois et qu'elle a pas demandé de

renseignement mais au départ on le sait pas et du coup ils sont vite noyés.

C'est dommage parce que ça permettrait de les remettre à niveau très

facilement et très rapidement. »

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16.ANNEXE Dessins réflexifs (sans nom sur demande d’un élève)

17.1Dessins représentant un parcours scolaire ou personnel global

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17.2Dessins représentant la scolarité présente

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17.3Dessins représentant le passé

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17.ANNEXE Productions

18.1Journal de Rose

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18.2Poème de Bhagya

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18.ANNEXE Synthèse des entretiens avec les élèves suivis Aminata, TGA2

Ambiance classe Echange informel au CDI : [la classe est calme, on est pas nombreux et comme on

est tous des redoublants, on est plus motivés. Ceux qui restent qui passent pas en

candidats libres ils vont pas bavarder en cours]

Comportement « Non mais c'est deux ans on va pas s'entraider, chacun pour soi madame »

Echange informel au CDI : [Je participe plus en cours, j’ai plus confiance cette

année].

Interactions Elle demande parfois à l’enseignant mais pas à ses camarades de répéter lorsqu’elle

n’a pas compris une consigne.

Langues LM : wolof, français langue seconde au Sénégal, espagnol et un peu l’anglais.

Souvenir Un jour type d’école (privée) au Sénégal en primaire où elle avait un prof pour toutes

les matières. Puis elle est arrivée en CLA en 2010 à 13ans au collège. « ça se passait

bien parce que c'est c'est des élèves comme moi en fait qui venaient d'arriver (…) on

était tous au même niveau de langue »

Matières A l’aise en maths (a eu 14 au bac), et en physique-chimie au collège.

Difficultés en français et en histoire-géo (« parce que c'était pas les mêmes » au

Sénégal et en France)

Difficultés

actuelles

« - qu'est-ce qui te gêne pour parler à l'oral devant le groupe ?

- en anglais ? parce qu'en BTS les élèves ya tous les niveaux (…) et on vient pas du

même bac / le bac pro gestion administration ** les bacs généraux »

Par rapport aux consignes en français et anglais « non pas la vitesse / euh la forme

des questions en fait. Comment la question est posée ».

Soutien Soutien avec le lycée SFLS et avec l'association SOS Casamance pour l'aide en

français sur des sujets du bac. Méthodo où doit s'autocorriger mais ne voit pas

comment car pour elle c'est juste. Ne retravaillent pas sur le sujet.

Demande penant l’entretien de soutien en français (lecture du roman « la mort du roi

Tsongor ») et en anglais (préparation des oraux).

Leviers

réussite

Progression en français : « j'ai écouté les conseils de ma prof de français de Mme C.

et vous pour les révisions »

« et je révise je fais mes devoirs en même temps (…) je pose des questions »

Pratiquait le basket mais a arrêté pour réviser le bac le mercredi après-midi, l’anglais

« car en BTS l’anglais c’est important »

Révision les dernières semaines avant le Bac à la bibliothèque.

Méthodologie de travail : réalise des fiches de révisions, des tableaux récapitulatifs et

mémorise les informations par cœur surtout les dates et les évènements en histoire.

Elle met en rouge les mots les plus importants, et surligne en vert les mots pour

lesquels elle doit chercher la définition.

Il y a des livres à la maison pour ses petites sœurs et les manuels scolaires. Mais elle

lit que les résumés des livres. Cependant doit lire « la mort du roi Tsongor »pour le

Bac. Proposition de soutien pendant l’entretien.

Rêve « BTS communication pour travailler dans le journalisme plus tard »

Orientation Orientation choisie. BTS communication, commerce, gestion des PME/PMI par APB

(Admission Post-Bac)

Passage UPE2A

classe ordinaire

En 4ème, s’est bien passé, avait sa sœur avec elle en cours. Elles pouvaient s’aider.Le

français a posé problème en classe ordinaire.

« en classe d'accueil c'était plus facile en fait. On nous apprenait comment faire les

phrases les verbes des choses comme ça »

« c'est en fait des vrais cours (…) on a des textes on nous pose des questions comme

j'ai pas trouvé une grande différence au collège et maintenant (…) [c'est dans la

continuité] »

Conseil UPE2A Echange informel au CDI : [ne pas être timide participer, poser des questions s’il a

pas compris. Avant j’étais toujours derrière quand on connait personne, mais c’est

mieux d’être devant parce que le prof il sait si on a compris ou pas].

Bhagya

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Ambiance classe « j'aime bien la classe. ya la bonne ambiance mais desfois je me sens mal à l'aise

dans la classe »

Comportement En classe : « / en fait à la base chui très timide\ en classe et tout »

Au travail : « mais là-bas genre je sais que je suis obligée de: parler avec les

clients. Je suis obligée de travailler. En fait /ça enlève un peu la timidité »

Interactions A son arrivée en France : « I : et ça te faisait quoi d'entendre du français ?

E : ben euh: je / j'avais trop peur en fait / je sortais toujours avec mon père. Je

sortais jamais seule

I : et au niveau de la langue ? est-ce que ?

E : j'avais l'impression qu'ils parlaient chinois »

Aide les autres élèves en maths, anglais et gestion : « ben s'ils s'en sortent pas /dit

"That tu peux m'aider en ça /// That tu peux m'aider en ça // et tout" / même desfois

en espagnol depuis quelques jours je m'en sors bien en espagnol »

Langues LM singhalais, anglais langue seconde, français langue seconde, espagnol, tamoul.

Souvenir « je me souviens quand je rentrais (nom du collège) ya ya des enfants partout / j'ai

l'impression ils parlent que français / genre je vais euh: je savais rien du tout\ parce

que les deux mois j'ai passé à la maison je voulais pas apprendre le fran/ j'avais pas

trop envie parce que je comprenais rien. Genre tout ce que je sais dire c'est

"bonjour" »

Matières Sri Lanka : maths, histoire géo, langues, religion catholique. Cours en anglais

(« dans l'école on est obligé de parler anglais (…) il faut pas qu'on entende parler

dans notre langue maternelle (…) en fait ya les sections singhalais ya les sections

tamouls ya trois sections »). L’élève était en section anglais.

Anglais en France : « c'est trop facile c'est trop facile la 4ème anglais. Même

encore le cours d'anglais je trouve que: c'est des trucs de d'enfants »

Maths en France : « non c'est pas pareil. Parce qu'ici ya toujours la calculatrice. Au

Sri Lanka, c'est la tête qui fait marcher (…)En France ya les calculatrices où on

écrit le calcul dessus ya les réponses / mais au Sri lanka c'est: il faut qu'on fasse

avec notre petit cerveau »

« j'ai eu un 20 pour le contrôle. Toute la classe elle était choquée. elle disait "mais

comment t'as fait pour avoir un 20?" \ j'me disais "ah oui/// j'ai eu un 20" (...) » sa

note suivante est 5,75 car il y avait 2 pages à lire et 2 pages à remplir même si ce

qu'elle a écrit, le calcul, était bon »

Histoire : « Parce qu'en fait depuis que j'étais petite/ les matières que j'aime le plus

c'est l'histoire »

Difficultés

actuelles

Français : « j'arrive pas à faire un truc: que les autres ils s'en sortent assez bien et

moi non. »

« écrire° ouais c'est plutôt ça °\ Et aussi genre des mots clés genre quand je lis un

texte le prof il nous dit de prendre des mots clés. Moi genre des mots-clés/ dans ma

tête j'ai l'impression que: c'est tout des mots-clés pour moi. »

Alternance codique : « desfois j'ai l'impression que ya des: des mots qui/ un peu°

(rires)

I : qui? sont en train de?

E : ballader dans ma tête

I : de se ballader dans ta tête ? et tu sais pas ou les mettre ? (rires) et est-ce qu'il

t'arrive desfois de mélanger les langues ?

E : oui. + Quand genre j'écris en anglais imaginez en français *** / "juste" j'écris

comme en anglais / "just" »

Lecture en public : « E : genre elle me fait lire ok je peux lire mais après / ya des

élèves qui rigolent et en plus elle dit rien \ quand je me trompe°+++ Après Mme C.

elle me\ elle me dit "si tu veux lire tu lis / mais si tu veux pas je vais pas te:"

I : te forcer ?

E : "..te moquer devant la classe" voyez ? »

Soutien En français : « Après je prends des cours ». Prend 2h hebdomadaire où reprend le

contenu des cours. Lui permet de comprendre.

Dans la classe : « I : est-ce qu'il y a des gens qui t'aident en français ?

E : oui; ya [nom des élèves] »

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Famille : « en fait on savait pas que j'allais avoir le brevet. Même mes parents ils

étaient choqués / ils m'ont offert des cadeaux pare que j'ai eu mon brevet. Ils m'ont

dit que c'était bien. »

Leviers réussite Stratégie apprentissage : «I : et justement ça te posait pas de problème d'écrire des

phrases ? comme tu venais d'arriver: euh en France ,

E : ben en fait / j'avais compris ils mettaient le\ genre ya les questions que le prof il

me pose et je trouvais le résultat et je reprends *le question, je le change un peu et

j'écris le résultat »

DNB : « j'étais trop contente parce qu'y a la moitié du collège ils ont pas eu

(…)que j'étais non francophone ! (rires) j'étais trop contente° »

Environnement familial : « I : et est-ce que tes parents aiment lire ?

E: ma mère elle lit beaucoup. + on a une gros bibliothèque à la maison genre un

grand placard / où ya que des livres »

Organisation personnelle, travail le week-end : « (…) si le prof il me donne un

travail demain ou la semaine après, je le fais dans la journée (…) Quand je rentre à

la maison / je fais *toutes mes devoirs je mets toutes mes affaires au clean. Du

coup: je sais que au moins le week end j'ai pas de travail à faire »

Pratique artistique (théâtre projet « Cour de Babel » au collège et « 10 mois d’ecole

et d’Opéra au lycée) : « c'est plutôt le côté artistique ça me: on peut: on peut / on

peut pas être peur dans un scène. Si on passe dans un scène on peut pas être

timide. »

« C'est plutôt le côté artistique ça me: on peut: on peut / on peut pas être peur dans

un scène. Si on passe dans un scène on peut pas être timide. »

Enseignants : « Parce que je me retrouve aujourd'hui là / c'est grâce à ma prof de

français. Parce que c'était vraiment: la prof la meilleure »

Rêve « J’ai pas de rêve particulier. Mais j'ai juste envie / j'aurais juste envie de quelque /

en fait je veux faire quelque chose / pour le Sri Lanka. Pour que: ça augmente. un

peu plus°. Vous voyez ce que je veux dire ? »

Orientation « Je vais continuer mes études. Je vais déjà passer mon bac. Avoir le BTS (…): BTS

management international commerce international »

Suite à l’expérience « Cour de Babel » : « en fait y avait une période que je voulais

faire cinéma. Juste après je voulais trop // intégrer le cinéma / après je me suis dit

"noon"/ après j'ai fait y avait une animation y avait: une dessin animé que j'ai fait

ma voix / j'ai fait la voix de quelqu'un (…) Après j'ai une demande pour une film.

Après j'ai pas pu y aller. Parce qu'avec l'école je me disais/ en fait c'était à Lyon le

tournage et tout / pendant 6 mois un truc comme ça (…) du coup mes parents ils ont

dit "non". »

Passage UPE2A

classe ordinaire

« (…) en fait la classe d'accueil les élèves ils se moquent pas les uns les autres »

« ben en fait ils sont tous nés en France dans la classe »

« Et dans cette classe ce qui était bien / c'est que /++ c'est le paralangage. On a

parlé avec le paralangage avec les gestes et tout parce que desfois on arrive pas à

s'exprimer les uns les autres »

Conseil UPE2A « Sois pas peur. Sois pas timide. Sois pas peur. Suis tes rêves. »

« je pensais que j'allais jamais comprendre jamais arriver à l'apprendre. Je vais

rester comme ça toute ma vie/ sans apprendre rien du tout / mais en fait on s'en

sort »

Rose

Ambiance classe Echange informel au CDI : [ « Ils respectent personne, ils sont là à critiquer les

gens, à se moquer. C’est désagréable. »]

« A l'école aussi ça va pas ca marchait pas bien du tout c'était ma première rentrée

quand je suis venue ici (…)genre les gens se moquaient de moi parce qu'en fait

d'abord je m'ha/ je dis la vérité je m'habillais bien j'étais élégante j'étais sympa avec

tout le monde mais y avait deux filles de ma classe qui me détestaient qui

m'aimaient pas du tout. Un jour et tout je leur demande "pourquoi vous me détestez

comme ça et tout" ils m'ont dit "parce que t'as pas ** tu t'habilles mal" et tout des

choses comme ça alors j'ai dit "ok ya pas de souci tu me détestes ya pas de souci"

voilà moi j'ai dit ça clairement »

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Comportement Dessine des fleurs en cours. « non du coup chui pas trop concentrée aux fleurs

parce que juste que le passage quoi . Mais je suis / j'écoute »

Interactions Interagit parfois avec certains élèves de sa classe en lingala.

Participation en cours : « pour pas trop participer après ils vont commencer à

rigoler pf même si la réponse elle est bonne quoi / j'aime pas trop participer ++ »

Langues LM : lingala, français langue seconde, espagnol, anglais scolaires.

Souvenir « en fait c'est un c'est tout ça me fait plaisir de dessiner tout de dessiner des fleurs

parce que j'adore des fleurs. Parce qu'en fait qu'en j'étais petite mon premier

prénom que m'avait passé ** c'était "terreflor" donc du coup ça représente une

grande fleur pour cela en fait (…) ça représente mon prénom que on m'a donné un

surnom c'est ma maman. Je m'appelais terreflor avant. Après (…) après elle a dit

que Terreflor c'est pas du tout bien là Rose parce que la Rose c'est comme les yeux

quoi / c'est comme la lumière / Après j'ai dit ben ok ya pas de souci (…) quand

j'étais encore bébé, on cherchait pour moi le prénom. Après ils ont décidé de me

donner Rose »

Matières Distinctions entre le français et l’histoire-géographie : « en français on nous

apprend: comment je peux dire ça+++ on nous apprend juste des petits mots

comment t'exprimer. Des phrases quoi! des phrases un peu compliquées quoi (…) et

en histoire géographie il nous apprend de parler / on peut parler d'un sujet d'un

pays : comment s'est passé là bas / »

Difficultés

actuelles

« Mais là ça me fait mal. Je parle tout le temps je fais des efforts et tout à travailler

bien à l'école à penser mes projets et tout ce que j'ai dans ma tête et tout. Et prendre

soin de ma maman parce qu'elle est pas du tout bien. »

« I : et d'après toi pourquoi ils rigolent ?

E : euh je sais pas peut être l'accent ou la façon que je parle je sais pas

I : et est-ce que tu aimerais que le prof réagisse ? Dans ces moments là qu'est-ce

que tu aimerais qu'il dise ?

E : qu'il dise que d'arrêter de rigoler et que "elle est là pour apprendre / elle est

pas là pour : pour s'amuser quand même \"

I : et du coup ça te bloque ?

E : **depuis ce jour là je dis même si j'ai la réponse je préfère la garder »

Mélange les deux disciplines français et histoire car c’est le même professeur qui

dispense le cours.

Soutien A une amie en dehors du lycée qui l’aide.

Leviers réussite « si je comprends pas un cours et tout. je leur dis qu'ils puissent m'expliquer en

lingala parce qu'en fait il y a ma copine elle parle bien lingala et je dis Gawa

explique moi ça et elle commence à m'expliquer en lingala après je commence à /

j'écoute quoi ! je comprends ».

Rêve « par exemple de la gestion de la comptabilité parce que j'aime beaucoup la

comptabilité. Travailler dans des bureaux travailler dans plusieurs entreprises

quoi »

Orientation Echange informel au CDI : [souhaite partir en CFA]

Passage UPE2A

classe ordinaire

« troisième d'accueil ils appren(nent) les élèves comment: comment travailler

comment ils appren(nent) les élèves et tout comment travailler / mais en classe

ordinaire et tout ils s'en fou(tent) / les professeurs s'en foutent tu écoutes tu écoutes

pas / ils s'en fou(tent) quoi »

Conseil UPE2A « de bien travailler de: surtout de ne pas jeter ton classeur c'est important le

classeur » Ecouter ne pas hésiter à dire les choses.

Sedray

Ambiance classe « (la 3PP) ouais on pensait c'était la pire de la du lycée quoi et cette année en 2V

elle pense que c'est la pire aussi »

« je tombe toujours dans une classe qui est la pire » (bavardages)

Comportement Aide les autres élèves en maths et espagnol

« dans ma tête ça se passe toujours comme ça : moi j'veux demander au prof mais

dans ma tête j'me dis si j'demande tu vois tout le monde va se moquer de moi et tout

et par je demande pas je demande pas c'est mieux »

Interactions Avec les élèves de classe ordinaire : « moi j'pense qu'ils m'ont appris la langue

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150

wesh mieux que le français »

Avec les UPE2A actuels : « si vous voulez que je vous aide en français je vous aide

hein? »

Avec les profs : « faut que les profs arrêtent de nous dire: de lire (…) parce que si

on se trompe tout le monde va rigoler »

Langues LM : kabyle, arabe, français, allemand, anglais, espagnol

« (en maths) avant je comptais en kabyle et tout je pensais en kabyle mais

maintenant non »

Souvenir

Matières Matière préférée : maths / moins aimée au collège : anglais, qu’il n’a jamais fait en

Algérie. Mais évolution au lycée : « J'aimais pas l'anglais quand j'étais au collège

mais maintenant j'aime l'anglais (…) c'est la prof je l'aimais pas c'est pour ça »

Difficultés

actuelles

« ya des profs mais ils utilisent des mots euh des mots vraiment originals quoi

(…)mots que j'ai : personne n'a l'habitude d'entendre quoi »

Soutien

Leviers réussite Utilisation des variations : « avec tes potes tu parles wesh (…)et quand t'es en

professionnel tu parles »

A obtenu le DNB avec mention assez bien, a eu 18 à l’épreuve d’espagnol.

Bibliothèque : « ouais avant je partais souvent souvent souvent à la bibliothèque

(…) en dehors du lycée quoi \ en dehors du collège

Pratique du foot à l’As du lycée et en club, a un cercle d’amis en dehors du lycée.

Rêve Dessin réflexif : Se projette dans l’avenir : passe son bac, travaille dans une agence

immobilière, a sa propre agence, se marie.

« être docteur (…) pour aider les gens »

Orientation Malentendu. « (la prof) elle m'a proposé une feuille, et moi, moi je connaissais pas

trop. Jfaisais, jparlais pas bien français et tout. Même ma mère elle parlait pas bien

français, elle parle toujours pas. Après elle m'a proposé une feuille, j'me rappelle

elle était jaune et tout. Genre j'dois choisir. En fait c'était pour parler avec les

parents mais sur la feuille quoi ! (…) Je dois saisir en professionnel ou en général.

après moi, dans ma tête j'm'imaginais si partais en professionnel je passais pas le

brevet. »

« en fait moi dans ma tête j'me suis dit si j'vais en truc (…) en professionnel je passe

pas le brevet. Après j'ai choisi le professionnel c'est pour ça chui venu ici »

Acceptation : « depuis que je suis arrivé ici je veux faire agent immobilier »

Il souhaitait au départ se diriger vers le médical (être médecin), mais a été mal

orienté. Du coup, il veut être agent immobilier pour aider les gens à avoir une

maison.

Passage UPE2A

classe ordinaire

« qu'en classe de CLA en fait j'ai: la prof elle s'occupe de toi quoi. Mais ici elle

s'occupe de toute la classe et tu te sens un peu seul quoi »

Par rapport aux élèves : « eux ils ont appris une langue wesh et tout et tout quoi »

Conseil UPE2A « ben ne pas avoir peur et de se faire des amis en premier »

« ils donnent des notes mais pas méritée quoi ils donnent des notes pas: méritées et

après les élèves quand ils voient ils ont 18 ils ont 19 et tout ils se prend en confiance

pour l'année prochaine. Après ils travaillent pas ils vont dire euh je ça y est j'ai eu

18 l'année dernière j'travaille pas chui chaud et tout »

Adama

Ambiance classe

lycée

Dessin réflexif par rapport au lycée : « je me sens bien » / « elle est bien »

Dans le lycée : s’entend avec Jonah, Sedray, avec qui il discute du français et

« comment les gens ils vivent »n et Sadjo

Injonctions sur le dessin réflexif : « il faut respecter les profs (…) parce que les

profs ils sont gentils » « il faut arriver à l'heure tous les jours (…)pour éviter les

absences » « il faut pas trainer dans les couloirs (…) pour empêcher de déranger

les autres »

Comportement

Interactions

Langues LM : Peul, français langue seconde, arabe, wolof, anglais, espagnol

Souvenir par rapport à l’école au Sénégal : « ya ya ma petite mère (…) qui m'emmenais à

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l'école° (…)c'est elle qui m'a fait étudier tout ça là »

par rapport à son arrivée en France, quelles choses l’ont étonné : « les gens qui

dort dans les rues. Dans les rues quoi (…)ça m'a fait mal au cœur de voir ça»

Matières Comparaison classe Sénégal / France : « là-bas les classes ya plus de cinquante

élèves »

Matière préférée : PC (physique-chimie, qu’il n’y a pas en lycée professionnel),

gestion, « j’aime l’espagnol » (question : « quelle est la matière que tu aimes le

moins ? »)

Matière qu’il aime le moins (question posée à nousveau) : l’histoire-gégraphie. Il

n’aime pas le thème de la guerre qui est enseignée en cours et la manière dont c’est

raconté.

Difficultés

actuelles

En eco-droit « parce qu'il y a des choses que je comprends pas (…) parce qu'il y a

beaucoup de feuilles qu'ils nous ont donné mais je comprends même pas»

En maths, les calculs.

Soutien

Leviers réussite Traduction du peul au français avec le téléphone portable

Méthode d’apprentissage pour réviser pour un contrôle : « je reste dans le

coin (…)c'est moi qui pose les questions/ après je réponds (…) j'apprends

directement (…)à l'oral »

Echanges informels : pratique la course à pied pour se détendre et pour évacuer le

stress .

Rêve « je rêve de: j'aime les voyages (…) partout dans le monde (…) Miami (…)ben

depuis que j'étais petit je parle de Miami »

Orientation [échanges informels au CDI] : Subie. Souhaitait faire un CAP cuisine l’an passé,

mais trop tard pour le PASSPRO.

Passage UPE2A

classe ordinaire

Préférait être en UP : « parce que: tu vas avoir des amis qui parlent l'espagnol ou

bien l'anglais (…) le portugais. Ca c'est bien. Tu vas découvrir beaucoup de choses

de là-bas ».

Classe ordinaire : ne parlent « que français (…) mais entre eux ils parlent jamais

d'autres langues »

« La classe 3UPE2A, là-bas tu apprends des conjugaisons tout ça (…) et là tu

apprends des histoires »

Conseil UPE2A « il faut écouter les profs/ et+ n'écoute pas les autres. Même s'ils t'ont dit: parfois si

tu parles ils vont te rigoler toujours (…) ne l'écoute pas/ il faut concentrer

seulement.»

« s'il y a des questions qu'il ne comprend pas il doit l'écrire ça »

Jaime

Ambiance classe Lycée associé à une prison

Comportement Face à la scolarité : « je viens parce que (bruit de bouche) »

Interactions Autres élèves de classe ordinaire : « I : ils t'aident dans quelle matière ?

E : ben en français et en maths desfois »

Quand ne comprend pas quand le prof parle, ne lève pas la main demande aux

élèves :

« E : non je demande à côté

I : tu demandes aux élèves ?

E : oui »

Langues parlées Espagnol, anglais, français

Souvenir

Matières « ben ici aussi ya des matières qui me plait la mathématique »

« l'histoire mais là bas aussi / mais c'est quand même / une une prison

Français : « I : et les matières que t'aimes le moins ici c'est quoi ?

E : euh:::

I : je dirai rien ne t'inquiéte pas les professeurs ne:

E : le français

I : le français ?

E : ouais

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I : pourtant / et qu'est-ce qui te dérange dans le français ?

E : mais tout+ (…) c'est (bruit de bouche) ça donne la flemme de rentrer en cours

français ma::: c'est dur ma:: »

Anglais : « E : oui je l'aime plus ahahouais°

I : qu'est-ce que tu préfères dans l'anglais par rapport au français ?

E : ben c'est mieux l'anglais pare qu'on parle tous anglais »

Difficultés

actuelles

Français (Cyrano) : « un français à l'ancienne. Ouais c'est pour ça que j'ai pas

envie de rentrer: de rentrer dans la langue »

Soutien SFLS : « ben je viens pas parce que l'heure (bruit de bouche) ben c'est° c'est dur

(…): je sors avec ma copine »

Leviers réussite A obtenu le DNB

A une petite amie frano-colombienne en lycée général section Arts qui l’aide. Ils

font des expos ensemble.

Rêve Dessin réflexif : Se projette dans le futur « là l'extérieur, c'est la vie

professionnelle » « avant de réussir on est là en prison et après on monte »

Se voit toujours avec sa copine dans 10 ans et repartir en Colombie à la retraite

Orientation Choisie. Continuer dans la commerce, être gérant.

Passage UPE2A

classe ordinaire

UPE2A : « c'est la grammaire grammaire grammaire(…) j'aurais aimé avoir des

matières »

En maths en UPE2A a appris à écrire des phrases pour formuler des résultats.

Conseil UPE2A « la conjugaison et basiquement et pour moi / vocabulaire »

Jonah

Ambiance classe On lui a demandé d’être délégué, a refusé : « je sais pas comment les défendre (…)

ils sont très méchants / tout le monde déteste les 3PP en fait (…) tous les profs »

« ils étaient gentils avec moi » « ils sont un peu méchants(…) entre eux »

« ils parlent trop (…) pas sur le travail une autre chose / sur la vie personnelle (…)

moi je les écoute pas.»

« Tous sont mes copains en fait (…) c'est que moi qu'on respecte. Les autres ils

respectent pas »

Comportement Par rapport à ses camarades :

« ils savent pas comment comporter / comment respecter / euh: donc là les profs\

toujours ya toujours un pro/deux élèves dans un cours qui vont être renvoyés avec

un rapport

I : qui sont renvoyés avec un rapport\ et toi ça te choque ? que les élèves se

comportent comme ça ?

E : ouais

I : et si t'avais quelque chose à leur dire tu leur dirais quoi si toi t'étais prof ?

E : +++ je faisais la même chose »

Interactions Prof, consigne : Ne pose pas de question en classe « Quand je comprends pas ça

veut dire que les autres élèves ils comprennent pas aussi (…) même si quelqu'un

comprenne il pose la question »

Elèves, consigne : « mais d'habitude de nous faire du travail en groupe comme ça si

je comprends pas j'ai quand même un collègue »

Langues LM : créole de Guinée Bissau (variante portugais), portugais, français, espagnol et

un peu l’anglais.

Souvenir 1er jour au lycée, il vient s’inscrire et a été intégré le jour même à la classe « j’étais

pas prêt »

Matières Préférée : histoire-géographie au Portugal, et celle qu’il aimait le moins, l’anglais. Il

a appris l’espagnol en arrivant en France.

A l’aise : français ; maths, histoire-géo et espagnol. Mal à l’aise en anglais.

Difficultés

actuelles

Soutien Sert pour améliorer la langue apprendre du vocabulaire. Améliorer : faire plus de

français, exercices. Important de faire le travail du journal.

Leviers réussite Pratiques intensive du sport (6h de foot hebdomadaire) pour rencontrer des gens et

se faire des amis.

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Fréquentation de la bibliothèque de Barbès. A une carte de prêt.

Dessin : rencontre avec plusieurs personnes (tuteur de stage, inconnu dans la rue)

qui lui ont dit : « les études c’est important »

« mon tuteur \ le deuxième jour où je sortais \ il m' dit les études c'est important

(…) et là je savais pas quoi \ je me demandais pourquoi l'étude c'est important \ et

là je savais pas je savais pas pourquoi pourquoi l'étude est important. Et là un jour

quand je sortais de l'école quand je rentrais chez moi : j'ai / j’ai rencontré un jeune

garçon de 18, 19 ans (..) dans la rue comme ça / il m'a demandé ce que je voulais

faire plus tard \ comme métier \ là je lui ai dit "mais je sais pas" là et il m'a dit il

voulait faire un métier mais il sait pas quoi faire. Après j'ai rien dit il m'a demandé

j'ai je suis en quelle classe \ j'ai dit je suis en 3PP après il m'a dit les études c'est

important. encore la même chose »

A eu son brevet en troisième mais a redoublé.

Rêve Devenir footballeur au Réal Madrid

Orientation Choisie, veut faire un CAP d’orthoprothésiste.

Choix, discussion avec sur tuteur : « Il m'a dit un un: être humain il veut faire

quelque chose intelligent ». Il a cherché des métiers sur internet.

Changement :

passage UPE2A

classe ordinaire

Acquis UPE2A : « : la lecture (…) la lecture /++: quand je lis et les autres ils

*liont + la différence que je sens c'est la la rapidité (…) mais la façon de lire / on

est pareil »

Aurait aimé avoir plus d’histoire-géographie en UPE2A.

L’expérience « la quinzaine des libraires » lui a permis de rencontrer un auteur,

Dominique Paravel, de lire ses textes, de s’en inspirer pour faire des productions.

Conseil UPE2A « de continuer ses études », « d'être soi-même » , « écouter les consignes (…)

écouter les conseils aussi. Comme moi »

Sadjo

Ambiance classe « ils (les élèves) m'ont bien accueillie (…) et même les professeurs aussi ils m'ont

bien accueillie. »

« Par contre ce qui me déplait là-bas ils parlent trop (…) oui au début je pouvais

pas supporter j'avais tout le temps mal à la tête parce que j'étais pas habituée / mais

maintenant / ça va \ »

« ya une bonne ambiance et peut -être qu'ils sont un peu bavards mais ils sont trop

gentils(…) ils ont bon cœur. Ils ont un bon cœur tout tout. Même ici l'école ya les

gens qui ont bon cœur » Comportement « Parce que moi j'ai ce problème chui trop timide devant les gens je parle pas »

Interactions « I : quand tu ne sais pas et que tu lui dis "euh monsieur:"

E : je n'ai pas compris il vient m'expliquer

I: il vient t'expliquer. Et tu demandes desfois aux autres élèves ?

E : oui

I : et ils t'aident ?

E : oui ils m'aident beaucoup »

Sur l’utilisation des manuels consommables : « I : et comment tu as fait pour

comprendre ?

E : j'ai demandé aux élèves ils m'ont expliqué »

Langues LM : wolof, français langue seconde, arabe, anglais, espagnol, italien

Souvenir (raconte son premier souvenir au lycée) : « au pays (…)tu viens dès le premier jour

même si t'es nouvelle tout le monde vient parler avec toi. Mais par contre ici ya peu

de gens qui viennent parler avec toi »

Matières Méthode apprentissage : « E : par contre là-bas c'est plus serré qu'ici. Parce qu'ici

ya ** moi les méthodes d'apprentissage ça me plait beaucoup.

I : pourquoi ,

E : parce qu'en fait il prend pas beaucoup de choses pour le maître. Parce que là-

bas en Afrique t'es obligé de tout mémoriser tout tout

I : ah / c'est de l'apprentissage par cœur ?

E : oui par cœur tout tout/ les formules les leçons tout tout tout doit être là (montre

son crâne) »

Difficultés A l’oral en matières professionnelles : « l'oral oui/ parce que desfois on pose des

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actuelles questions donc je sais pas / j'étais pas là quand on faisait les leçons et tout »

« y a des choses dont les élèves ont appris en bas âge des autres écoles au primaire

genre comme ça et moi je l'ai pas appris c'est ça »

TICE : « E : ah oui! et là bas aussi ça pose problème parce que au pays presque

j'avais fait de l'informatique en CE2

I : hmm hmm/

E : et j'avais plus fait jusqu'ici

I : au collège vous faisiez pas d'informatique ?

E : non! »

Manuels consommables sur lesquels on écrit : « qu'est-ce qui était difficile au début

?

E : parce que: parce qu'on écrit dessus surtout en droit avec Monsieur A.»

Soutien « parce que en fait moi tout ce que je sais en informatique c'est mes sœurs qui m'ont

fait savoir ça parce qu'elles sont un peu douées là-dessus »

Souhaits SFLS : « j'aimerais bien qu'on fasse des dictées

I: des dictées?

E : oui \ et surtout lire + aussi (…)à voix haute pour que pour que / pour apprendre

mieux à parler devant des gens et à lire aussi »

Leviers réussite Ouverture culturelle, curiosité : « oui, j'étais partie à la Villette\ dans la Cité des

Sciences et de l'industrie là-bas dans la bibliothèque aussi ya des ordinateurs libres

là-bas tu peux tout faire »

Environnement familial : « I : et au niveau de l'apprentissage du du français euh:

tu: tu as été la première pour la dictée

E : oui

I : dans le lycée / ça te fait quoi ?

E : ben c'est un plaisir / c'est un plaisir pour moi parce que /même au pays desfois à

la maison on parlait un peu français c'est pour ça

E : tu parlais français avec euh: avec tes parents ?

E : avec mes parents mes sœurs

I : ouais

E : Parce que en fait je/ c'est une maison de famille familiale

I ; hmm hmm

E : j'ai les grands frères qui sont des ingénieurs et tout »

Culture personnelle : « I : et est-ce que tu lisais en français ?

e : oui je lisais beaucoup

I : tu lisais beaucoup ? c'était quoi ton livre préféré ?

E : l'os de Morlam »

Rêve « mon rêve (…) être agent d'escale comme toujours (…) j'ai toujours aimé ça

depuis toute petite »

Orientation « je veux devenir la meilleure agent d'escale »

A été incluse progressivement par les enseignants dans la classe, puis a intégré la

classe d’accueil au 2nd trimestre : « et j’ai bien aimé »

« I : donc euh une famille de scientifiques

E : oui (rires) c'est pour ça quand j'ai dit que je suis littéraire elle m'a dit "mais tu

l'as vu où ça?". Nous tous nous sommes des scientifiques. Tu as l'esprit tu peux le

faire. J'ai dit "non" parce que je veux être hôtesse d'accueil. »

Changement :

passage UPE2A

classe ordinaire

Sur les notes

« I : 12 et ça va c'est pas trop dur ? de passer de 20 à 12 ?

E : oui c'est trop dur mais c'est: ça se comprend parce que c'est pas les mêmes

matières et tout (…)et même moi au début j'étais étonnée quand on m'a dit que

j'avais la moyenne presque 12. Je me suis dit "waou!". Je pensais que j'allais pas

avoir ça. »

Conseil UPE2A

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19.ANNEXE Cahiers de réussite

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20.ANNEXE Guide pour les enseignants (en cours)

Guide – ressource pour l’inclusion

des élèves allophones en classe ordinaire

ALLO QUOI ? ALLOPHONE ?

Pourquoi un guide ?

Parlez-vous l’allophone ?

Jeu étiquettes du jargon spécialisé: allophone, alloglotte, FLE, FLS, FLSco, plurilingue,

bilingue, multilingue, intégration, assimilation, inclusion

Vademecum des stéréotypes sur les langues

ASPECT INSTITUTIONNEL

Ce que disent les textes Sur l’accueil des élèves allophones

Sur l’inclusion

Contexte local d’accueil Ressources du CASNAV

L’INDIVI ALLOPHONE

L’individu face à son parcours migratoire Des études ont montré que dans une situation de migration l’individu expérimentait plusieurs

étapes, que l’anthropologue Kalvero Oberg nomme « choc culturel » en 1954. Il constitue un

sentiment d’anxiété provoqué par un contexte qui nous est à la fois étranger et étrange. La

première phase est celle de la lune de miel, où l’individu découvre le pays en début de séjour.

La nouveauté engendre une grande curiosité et une effervescence. Elle est suivie d’une période

de crise quand la personne prend conscience au quotidien de la différence culturelle et

linguistique qui devient un obstacle et lui fait perdre confiance en lui. C’est durant cette période

que l’on peut observer un repli identitaire ou le développement de stéréotypes sur la culture

d’accueil. S’il surmonte cette crise, il entre dans la quatrième phase, où il va intégrer

progressivement la nouvelle culture à son mode de fonctionnement interne et reprendre

confiance en lui. Enfin dans la dernière phase, celle de l’adaptation, la personne a pu mobiliser

des ressources et apprendre de ses expériences. Son attitude vis-à-vis des différentes cultures

qui le traversent est plus distanciée, plus sereine. Elles lui ont permis de se construire dans une

approche diversifiée.

Pratiques langagières Aujourd’hui le bilinguisme constitue la norme. Très peu de personnes sont monolingues. Etre

bilingue ne signifie pas avoir une parfaite maîtrise d’une langue comme si nous étions natifs.

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Le bilinguisme signifie que nous avons développé un certain nombre de compétences dans une

langue. Si le sujet vous intéresse, nous vous conseillons LUDI et PY si vous souhaitez

comprendre le phénomène bilingue.

D’autre part chaque individu est pluriel, et utilise des registres de langue variables en fonction

de différents critères sociologiques (âge, lieu, catégorie socio-professionnelle…). Le linguiste

William LABOV a étudié les variations de la prise de parole aux Etats-Unis. Louise DABENE

s’est intéressée aux statuts de la langue dans son contexte d’utilisation. Enfin Corinne WEBER

développe des recherches sur l’usage du français parler et des langages utilisés par les jeunes.

Un individu venu d’ailleurs

Les élèves issus d’UPE2A que vous accueillez sont chargés d’un bagage linguistique et

scolaire. Ils peuvent avoir développé des habitudes scolaires très différentes de la classe en

France. Ainsi, dans les pays d’Asie ou d’Afrique, l’élève écoute, le maître parle. Il est

inconcevable pour les élèves de prendre la parole spontanément s’ils n’y ont pas été invités. Un

autre exemple : dans les pays du Maghreb regarder quelqu’un dans les yeux est perçu comme

un signe de défi, et interprété comme irrespectueux. Donc si certains de vos élèves baissent la

tête quand vous leur parler ne le prenez pas mal, c’est une forme de respect envers l’enseignant.

Si vous souhaitez allez plus loin sur les sources de malentendus dans les interactions, nous vous

invitons à lire les ouvrages d’Edward HALL ou de WINKIN.

LA CLASSE

Le Français scolaire Le Français scolaire est une langue propre au cadre scolaire, qui n’est pas utilisée en

dehors de l’école. Les élèves allophones présentent des difficultés dans l’acquisition du lexique

disciplinaire et des concepts liés à chaque discipline, notamment en Histoire-Géographie et

économie-droit. D’autre part, ils expérimentent dans la matière Français divers types de

discours et la littérature. L’urgence en UPE2A est de leur fournir les bases linguistiques de la

langue en une année. Si les élèves abordent les genres littéraires, en revanche, ils n’ont pas le

temps de se familiariser aux méthodes de travail (rédaction, commentaire, synthèse, prise de

note) et aux types de discours (argumentatif, narratif, descriptif, explicatif) qui parcourent le

lycée.

Copies : élève allophone vs élève-type, saurez-vous les distinguer ?

Voici deux textes réalisés par des élèves de 2nde professionnelle. Saurez-vous distinguer la

rédaction de l’élève allophone de celle de l’élève ayant fait sa scolarité en France ?

[placer texte 1]

[placer texte 2]

L’erreur L’erreur de consigne

Principales erreurs relevées chez les élèves allophones

Type d’erreur Enoncé Correction

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Le statut de l’erreur en UPE2A et en classe ordinaire

L’année d’UPE2A les élèves sont notés en français sur l’acquisition de compétences relatives

au Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (CECRL), en fonction de leur

degré de connaissance du français. Ainsi il ne sera pas attendu les mêmes compétences d’un

élève francophone et d’un élève entrant dans la langue, ayant pour langue maternelle une

langue éloignée du français.

Les postures enseignantes Certains gestes peuvent faciliter l’apprentissage des élèves allophones. Utiliser le tableau

comme outil didactique.

Utiliser plusieurs vecteurs : la parole, l’écriture. Mais pensez aussi à

la gestuelle et à tout ce qui est graphique, qui représente des

concepts. Pour donner sens au lexique, il est nécessaire qu’ils

associent le signifiant au signifié. Ce qui nous ramène à Ferdinand

de SAUSSURE, et à ses « Cours de Linguistique générale »

OUTILS POUR LE PLURILINGUISME

Vous et les langues / L’accueil des élèves allophones : questionnaire (Annexe 10, à

remanier)

Faites votre biographie langagière

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EXPLOITER LES RESSOURCES PLURILINGUES,

PLURICULTURELLES DES ELEVES DANS LES PROGRAMMES

RESSOURCES EN LIEN AVEC LES PROGRAMMES

Les notions d’ouvertures pluriculturelle et linguistique sont présentes dans les programmes des

disciplines générales et professionnelles au lycée. Nous vous proposons des ressources que

vous pouvez utiliser dans votre discipline. Elles sont souvent la forme de petites activités que

vous pouvons expérimenter, utiliser dans vos classes, adapter à vos objectifs et à vos attentes.

Ces outils permettent d’échanger autour des pratiques linguistiques et culturelles de chacun, et

des représentations. Permet à chacun de s’exprimer, pas de stigmatiser les élèves allophones,

mais de valoriser les singularités de chacun pour mieux partager une culture commune. Nous

avons réuni des éléments de programmes de lycée professionnel.

Ressources disciplinaires

Histoire géographie : Passerelles pour la réussite, CASNAV

https://www.ac-paris.fr/portail/jcms/p2_1514154/ecole-inclusive?cid=p2_1514151

Maths : Site Catherine MENDONCA-DIAS

http://www.francaislangueseconde.fr/pistes-pour-lenseignement/dossier-maths/

SE DECENTRER

Histoire 2nde – objet d’étude 2 : les Grandes Découvertes

Français Tle– objet d’étude 2 : identité et diversité

La découverte de l’Autre est l’occasion d’échanger la question de la perception linguistique,

autour de mots familiers et de la perception spatiale, fortement ancrée dans une vision

ethnocentrique du monde.

Les mots d’ici et d’ailleurs

Jeu devinette sur les emprunts - Retrouvez la langue d’origine des mots suivants : Mots Langues Votre réponse Solutions

1. Wagon A. Anglais 1. 1.E

2. Avocat B. Espagnol 2. 2.G

3. Magasin C. Hindi 3. 3.H

4. Anorak D. Portugais 4. 4.I

5. Pyjama E. Allemand 5. 5.C

6. Zèbre F. Tchèque 6. 6.D

7. Leader G. Nahualt 7. 7.A

8. Camarade H. Arabe 8. 8.B

9. Robot I. Inuit 9. 9.F

A présent vous pouvez chercher leur étymologie. Ont-ils le même sens dans la langue

originelle ?

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Les représentations du monde

Le monde vu de………………………………………………………………….

Source : http://derrierelescartes.over-blog.com/article-13788300.html

Le monde vu de……………………………………….

Source : http://derrierelescartes.over-blog.com/article-13788300.html

Page 161: Quelles ressources mobiliser pour favoriser l’inclusion ... · allophones de classe ordinaire dans le lycée où nous exerçons. Nous utiliserons comme outils de collecte de données

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Carte du monde inversée : retrouvez la localisation de la France

, Source : http://blog.akova.ca/2012/01/creativite-quand-tout-est-affaire-de-perception/

Page 162: Quelles ressources mobiliser pour favoriser l’inclusion ... · allophones de classe ordinaire dans le lycée où nous exerçons. Nous utiliserons comme outils de collecte de données

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Analyse de document

Revue « the economist », 21 mars 2009.

Article en ligne disponible en anglais : http://www.economist.com/node/13326106

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La diversité culturelle

Modes de vie d’ici et d’ailleurs

Géographie 2nde – objet d’étude 1: nourrir les hommes

Français 2nde – objet d’étude 2 : des goûts et des couleurs

Géographie 1ère –objet d’étude 2 : mondialisation et diversité culturelle.

PSE 2nde – module 2 : alimentation et santé

Les habitudes alimentaires : Les modes de vie varient en fonction des zones géographiques. Les images

suivantes sont issues du documentaire photographique de Peter Menzel et Faith Daluiso, « Hungry

planet », 2007. Une exploitation pédagogique est disponible dans le manuel d’histoire-géographie

utilisé au lycée (Belin, 2009, pp.90-91)

Quel repas vous fait le plus envie ? Essayez de retrouver le lieu de vie de chaque famille parmi

les pays suivants : Turquie, Etats-Unis, Koweit, Australie, Japon ; Italie, Chine, Mexique,

Equateur, Tchad.

Famille 1 : …………………………………………

Famille 2 : …………………………………………

Famille 3 : …………………………………………..

Famille 4 : …………………………………………..

Famille5 :……………………………………………..

Famille 6 : ………………………………….………

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164

Famille 7 : …………………………………………..

Famille 8 : …………………………………………

Famille 9 : …………………………………………

Famille 10 : ………………………………………

Solutions :

famille1-Etats-Unis, famille2-Chine, famille3-Turquie, famille4-Mexique,

famille5-Tchad, famille6-Japon, famille7-Koweit, famille8-Equateur,

famille9-Australie, famille10- Italie

Variétés du français

Géographie Tle – Objet d’étude1 : la France dans le monde

Français Tle – Objet d’étude 1 : identité et diversité Revenir sur la notion de francophonie, le français parlé dans le monde et les variétés d’une même

langue en fonction du territoire. Nous n’avons pas intégré les créoles qui constituent des langues en soi,

avec un lexique et une syntaxe propres.

Imaginez le sens des termes / expressions suivantes

1. Français cajun (Louisiane, Etats-Unis) et du Québec : Lâche pas la patate.

2. Français de Belgique: Faire le Bob

3. Français du Cameroun : « motamoter »:

4. Français du Mali : Faire un coup d’état

5. Français de Marseille : être un marque mal Solutions

1. Persévérer, ne pas laisser tomber

2. Faire du par cœur, sans comprendre ce que l’on dit. Néologisme

3. Etre le capitaine de soirée quand les autres boivent

4. Voler la petite amie de quelqu’un

5. Avoir une tenue inappropriée

Sources

TV5M Monde : http://focus.tv5monde.com/expressions-imagees/

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Traduction du français au français : http://www.dufrancaisaufrancais.com/les-expressions-du-monde-

francophone/

Ministère de la Culture et de la communication, semaine de la Francophonie :

http://www.dismoidixmots.culture.fr/2016/semainelanguefrancaise/actualites/mots-dici-mots-dailleurs-

florilege-dexpressions-francophones.html

Expressions provençales : http://roman-sf.over-blog.com/article-expressions-proven-ales-et-

marseillaises-traduction-116405784.html

Les sources d’incompréhension

Les stéréotypes

Anglais, espagnol tous niveaux

Français Tle – Objet d’étude 1 : identité et diversité

Utiliser l’humour pour désamorcer les

comportements stéréotypés, et prendre du recul

sur la perception de l’Autre.

Visionnez la vidéo suivante une vidéo et échangez

sur l’origine des stéréotypes, leur rôle dans les

sociétés, quel fond de vérité ont-ils ? Pourquoi ça

peut être dangereux de les colporter ?

Source :

Version française : https://www.youtube.com/watch?v=OCIAyHEFTrQ

Version anglaise : https://www.youtube.com/watch?v=ERD2TnMNH98

Communications interculturelles De nombreuses situations conflictuelles ou de malaise sont issues de malentendus interculturels. La

conscientisation des difficultés interculturelles permet de réfléchir sur les attitudes que nous

adoptons au quotidien qui peuvent être sources de malentendu. Outil pour s’adapter à son

interlocuteur. Très important dans les métiers de la vente.

Relation Clients Usagers 2nde – Savoirs 211, la base de la communication / Savoirs 212 : la

communication interpersonnelle

Vendre1ère / Tle Commerce – Développement personnel, mercatique point de vente

Anglais, espagnol, tous niveaux

Les énoncés suivants font-ils l’objet d’une perception positive, négative ou neutre dans une des

cultures que vous connaissez ? Pouvez-vous fournir un 6ème exemple issu de votre expérience ? FRANCE AILLEURS ?

Positif Négatif Neutre Positif Négatif Neutre

1 - Regarder quelqu’un dans les yeux X

2 – Saluer un inconnu de la main gauche X

3 – Remercier suite à un compliment X

4 – Participer, donner son avis en classe X

Elément de réponses 1- En France, le fait de regarder son interlocuteur dans les yeux est signe de respect. Dans d’autres

pays, comme au Maghreb, ou en Afrique subsaharienne, regarder dans les yeux peut être perçu comme

insultant. Aussi on baissera les yeux en signe de respect

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2- Dans certains pays, comme les Emirats, il faut toujours saluer de la main droite. Dans d’autres

pays, le contact physique avec un étranger est juste inconcevable (Japon). En Chine il faut commencer

par la personne la plus âgée.

3- En fonction des cultures, la réception d’un compliment sera plus ou moins exprimée. Dans les

pays anglo-saxons.

4- En France, l’élève est invité à participer spontanément. Sa prise de parole est un élément

soumise à l’évaluation de ses compétences d’expression orale et de sa motivation dans le groupe

classe. Or dans de nombreux pays, l’élève ne doit pas prendre la parole ; la configuration de la classe

reste « le maître parle, l’élève écoute » (Asie, Afrique).

Sources : Les impairs à ne pas commettre en entreprise, dans les relations avec l’étranger :

http://gestion-des-risques-interculturels.com/points-de-vue/malentendus-culturels-%E2%80%93-

selection-de-videos-1/

https://www.blog-emploi.com/voyages-daffaires-4-gaffes-culturelles-a-eviter/

Exercices pour développer l’interculturel : http://www.francparler-

oif.org/images/stories/dossiers/interculturel_exercices.pdf

Les malentendus dans le monde du travail au Québec :

https://www.youtube.com/watch?v=zqisUsZUUIo

Vidéo sur la bise en France : https://www.youtube.com/watch?v=b9m0OEpE0z8

Comparer les langues

Maîtrise de la langue / Aide Personnalisée

Français Tle – Objet d’étude 1 : identité et diversité

Comparer les langues. Outil DVD de Nathalie AUGER, « comparons nos langues ». Elle a

mené une expérimentation dans des classes de primaires accueillant des élèves allophones pour

leur faire accueillir un métalangage. Il s’agit de prendre appui sur la L1 pour construire des

compétences en français, et comprendre le fonctionnement des différentes langues. Outre un

outil didactique, représente une ouverture sur les modes de pensée et éventuellement la

compréhension d’erreurs récurrentes chez les élèves allophones (oubli de la négation ou de

l’article, confusion systématique entre les genres.

D’autre part, le projet « Langues et Grammaire en Ile-de-France » (LGIDF) propose des fiches

grammaire dans plusieurs langues utilisées par les personnes migrantes dans la région. Ces

fiches permettent d’avoir des informations sur les langues et de pouvoir interagir sur les

langues. Un jeu de 17 fiches est disponible au CDI.

Sources : Le projet « comparons nos langues » de Nathalie AUGER :

https://www.youtube.com/watch?v=_ZlBiAoMTBo Le projet « langues grammaire en Ile de France » : http://lgidf.cnrs.fr/

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TABLE DES MATIÈRES

Sommaire ............................................................................................................................................. 2

Remerciements ..................................................................................................................................... 3

Introduction .......................................................................................................................................... 4

1– CHAPITRE 1 : Cadre de recherche ................................................................................................ 7

1.1 Théories de recherche : les grandes notions ...................................................................... 7

1.1.1 Représentations : aspects sociologiques et linguistiques ......................................... 7 1.1.2 L’inclusion scolaire .................................................................................................. 9 1.1.3 Le FLSco ................................................................................................................ 10

1.2 Le contexte ...................................................................................................................... 12 1.2.1 Le contexte institutionnel ....................................................................................... 12 1.2.2 Le contexte local de l’Académie de Paris .............................................................. 16 1.2.3 Le terrain de recherche : un lycée professionnel tertiaire ...................................... 18

1.3 Mise en place d’une méthodologie .................................................................................. 21 1.3.1 Démarche réflexive et méthodologique ................................................................. 22 1.3.2 Construction d’outils d’observation ....................................................................... 24 1.3.3 Méthodologies adoptées ......................................................................................... 28

1.4 Présentation des informateurs ......................................................................................... 29 1.4.1 Parcours des élèves suivis ...................................................................................... 29

1.4.2 Présentation des autres acteurs du terrain .............................................................. 34

2 - CHAPITRE 2 : Collecte de données sur le terrain ................................................................... 36

2.1 Les pratiques langagières des élèves de classe ordinaire ................................................ 36 2.1.1 Le jeu des interactions dans les observations de classe ......................................... 36 2.1.2 Questionnaire dans les classes ordinaires .............................................................. 41

2.2 Le point de vue des enseignants ...................................................................................... 48 2.2.1 Le discours scolaire à travers les bulletins ............................................................. 49

2.2.2 Ressentis et perceptions dans les entretiens ........................................................... 52 2.3 Point de vue des élèves issus d’UPE2A ......................................................................... 58

2.3.1 Productions personnelles : un regard réflexif sur soi ............................................. 58 2.3.2 Discours des élèves en interactions inter-individuelles ......................................... 61

2.3.3 Le cahier de réussite ............................................................................................... 66

3 – CHAPITRE 3 : Perspectives .................................................................................................... 68

3.1 Diagnostic : regards croisés ............................................................................................. 68 3.1.1 Passage d’UPE2A à la classe ordinaire : zone d’insécurité(s) ............................... 68 3.1.2 La difficile prise de parole en classe ordinaire ...................................................... 73

3.2 De l’insécurité au développement d’un potentiel ............................................................ 77 3.2.1 Les pratiques langagières ....................................................................................... 77

3.2.2 L’importance du bagage linguistique et culturel .................................................... 79 3.2.3 Les dynamiques de réussite.................................................................................... 81

3.3 Propositions d’actions ..................................................................................................... 85 3.3.1 Pour une culture partagée ....................................................................................... 85 3.3.2 Mise en place du guide........................................................................................... 90

Conclusion .......................................................................................................................................... 93

Bibliographie ...................................................................................................................................... 97

Annexes ............................................................................................................................................ 101

Table des matières ............................................................................................................................ 167