Quel est le rôle du psychologue en éducation thérapeutique ...©moire-Marion... · Notre stage...
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Quel est le rôle du psychologue en éducation thérapeutique du patient ? Master 2 professionnel : Psychologie clinique option « psychopathologie de l’adaptation au stress » dirigé par Michèle KOLECK Marion DITCHARRY
01/09/2011
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CONTENU
1. INTRODUCTION ................................................................................................................................................... 2
2. PARTIE THEORIQUE ............................................................................................................................................. 3
2.1 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE .......................................................................................................................... 3
2.2 L’EDUCATION THERAPEUTIQUE DU PATIENT ............................................................................................... 6
2.3 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE EN EDUCATION THERAPEUTIQUE DU PATIENT ............................................. 14
3. METHODOLOGIE DE RECHERCHE ...................................................................................................................... 19
3.1 DEFINITION DU ROLE DU PSYCHOLOGUE EN ETP ...................................................................................... 19
4. PRESENTATION DES RESULTATS ........................................................................................................................ 26
4.1 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE AVEC LE PATIENT ........................................................................................... 26
4.2 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE AVEC L’EQUIPE ............................................................................................... 35
4.3 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE DANS LA DEMARCHE EN ETP ......................................................................... 40
5. ANALYSE ............................................................................................................................................................ 48
5.1 VERIFICATION DE L’HYPOTHESE OPERATIONNELLE N°1 ........................................................................ 49
5.2 VERIFICATION DE L’HYPOTHESE OPERATIONNELLE N°2 ........................................................................ 50
5.3 UN ROLE CONSTRUIT AU SEIN DE LA DEMARCHE D’ETP ....................................................................... 52
6. DISCUSSION ....................................................................................................................................................... 54
6.1 AUTOUR DU CHOIX DE LA METHODE .................................................................................................... 54
6.2 PERSPECTIVES AUTOUR DES ENJEUX LIES AU ROLE DU PSYCHOLOGUE .............................................. 56
7. CREATION ET ANIMATION D’UN ATELIER-DISCUSSION .................................................................................... 58
8. CONCLUSION ..................................................................................................................................................... 60
9. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ..................................................................................................................... 62
10. ANNEXES ......................................................................................................................................................... 65
2
1. INTRODUCTION
15 millions, il s’agit du nombre de personnes atteintes d’une maladie chronique en
France en 2010 (Briançon & al, 20101). Nous entendons la « maladie chronique » au sens de
l’OMS c'est-à-dire « un problème de santé qui nécessite une prise en charge durant
plusieurs années ». Dans un tel contexte, il apparait essentiel que le patient puisse, afin de
vivre au mieux sa maladie, « acquérir des compétences pour entretenir et développer son
capital santé » (Traynard P-Y & Gagnayre R., 2009 : p 3) ». L’Education thérapeutique du
patient (ETP) est une démarche qui vise à ce que ce dernier élabore « des compétences lui
permettant d’assurer par lui-même tout ou partie de son traitement et de réaliser les
changements personnels nécessaires pour concilier son projet de vie avec les exigences de
la gestion de la maladie et du traitement (Gagnayre R., 2008) ». Ainsi, il est dans son intérêt
d’être accompagné par « une équipe multidisciplinaire qui intègre la composante éducative »
et qui « va dans un même temps s’adresser à la dimension médicale, et aux aspects
psychosociaux (Mosnier-Pudar H., 2009 : p 2762) ». La maladie constitue « un événement ni
choisi, ni désiré et qui annonce la perspective d’interventions, de menaces parfois vitales
entraînant des répercussions au plan émotionnel qui sont déterminantes quant à l’adaptation
de la personne à sa nouvelle situation ». La dimension psychique se trouve donc « au cœur
même de l’expérience de maladie » (Lacroix A., 2007).
Notre stage de Master 2 s’est effectué au sein du programme ETAPE (Education
Thérapeutique, Amélioration des pratiques et Evaluation) coordonné par le CCECQA
(Comité de Coordination de l’Evaluation Clinique et de la Qualité en Aquitaine). Cette cellule
régionale accompagne des équipes au développement et/ou renforcement de programmes
d’Education Thérapeutique des patients. Son approche s’inscrit dans une logique
d’apprentissage, notamment par le développement de compétences d’auto-évaluation des
professionnels de santé, dans le but de favoriser l’intégration de l’évaluation aux pratiques
professionnelles.
1 HCSP, (2010). « Actualités dossier santé publique n° 72 : maladies chroniques ». Paris
2 Citation tirée de : Simon D., Traynard P.-Y., Bourdillon F., Gagnayre R., Grimaldi A. (2009). « Education
thérapeutique, Prévention et maladies chroniques ». Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson
3
Cette cellule se pose aujourd’hui la question du rôle et de la place du psychologue en
ETP, auprès des patients et des équipes. Elle souhaiterait mettre en place en 2011 des
activités visant à discuter, clarifier et promouvoir le rôle du psychologue en ETP auprès des
professionnels de santé.
Nous nous proposons d’explorer les enjeux que cette problématique sous-tend et de
tenter d’apporter des éléments pertinents pour la construction d’espaces d’échanges entre
professionnels de santé sur cette problématique. La question centrale de notre travail de
recherche est donc : « quel est le rôle du psychologue en ETP ? »
2. PARTIE THEORIQUE
2.1 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE
La psychologie est une « discipline qui vise la connaissance des activités mentales et
des comportements en fonction des conditions de l'environnement »3. Différents éléments
orientent et guident le travail du psychologue.
2.1.1 UNE CERTAINE ETHIQUE
Le respect de la personne est « le principe éthique fondamental qui guide l’exercice
professionnel des psychologues » (Bourgignon O., 2009 : p 5). L’éthique semble donc
constituer un soubassement essentiel à la pratique du psychologue. Elle s’enracine dans des
« pratiques de vie chargées de sens où s’accomplit ce qui mérite d’être tenu pour plus
qu’une hominisation : une humanisation. C’est par là que la personne devient vraiment, en
tant même que valeur, réalité humaine ». Ethos (éthique en grec) et mores (morale en latin)
sont des synonymes « désignant les mœurs, c'est-à-dire les façons habituelles de vivre et
d’agir qui peuvent être jugées bonnes ou mauvaises » (Sève, 1994)4. « L’éthique devient
alors la valeur nouvelle que tend à prendre la moralité, fondée sur la reconnaissance de la
liberté et de la dignité des êtres humains. En tant que système normatif, l’éthique est un
ensemble de principes exprimant des valeurs liée à des exigences morales (faire le bien,
3 Larousse 2012 : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais
4 Citation tirée de : Bourguignon O., (2009). « La déontologie des psychologues ». Paris : Editions Armand Collin,
p 76
4
éviter de nuire), ou à des choix culturels qui ont une dimension morale (les droits de
l’homme) » (Bourguignon O., 2009 : p 7).
De ces principes découlent des recommandations et des règles qui composent le
code de déontologie révisé de 1996. « Il constitue un guide qui oriente l’action des
psychologues en mettant l’accent sur leur responsabilité, couplée à leur indépendance
professionnelle » (Bourguignon O., 2009 : p 5). C’est pourquoi, il semble primordial de
garder à l’esprit que « le psychologue ne peut attendre de ce code qu’il soit un répertoire de
règles à appliquer ; toute situation psychologique impose une réflexion personnelle »
(Bourguignon O., 2009 : p 36).
2.1.2 UNE DEONTOLOGIE PROFESSIONNELLE
Huit principes généraux reflètent les fondements éthiques du code de déontologie
de la profession de psychologue5.
Le premier principe édicté est « le respect des droits de la personne ». Ces
principes éthiques sont issus directement de la déclaration universelle des droits de
l’homme : liberté, dignité, protection d’où découle la règle du fonctionnement libre et éclairé.
« Toute personne est libre de susciter, accepter ou refuser une intervention psychologique ».
Le respect de la vie privée est également mentionné. « Cette personne s’adresse à un tiers
expert pour être éclairée » non pour « faire effraction dans son intimité ». L’astreinte au
secret professionnel est évoquée (avec des dérogations légales à la règle).
Le deuxième principe est la « compétence ». « Un certain nombre de connaissances
acquises lors de sa formation initiale doivent être régulièrement actualisées, soit parce
qu’elles sont franchement obsolètes, soit parce que la méthode elle-même a dû tenir compte
de l’évolution des mentalités ».
Le troisième principe est la « responsabilité ». « Personne n’a à lui dicter ce qu’il
doit faire et en contrepartie, il répond personnellement de ses choix et de ses actions ».
Le quatrième est la « probité ». « Le psychologue ne peut donc pas être au service
d’éléments illégitimes ou immoraux, qu’ils s’agissent de ceux de la personne qui le consulte,
du tiers qui l’emploie et, à fortiori, des siens propres ».
5 Principes tirés de : Bourguignon O., (2009). « La déontologie des psychologues ». Paris : Editions Armand
Collin, p : 36 - 40
5
Le cinquième est la « qualité scientifique ». « Les interventions du psychologue ne
peuvent reposer sur une ascendance personnelle ou des arguments d’autorité : elles doivent
pouvoir être expliquées, justifiées et discutées ».
Le sixième est le « respect du but assigné ». Ceci signifie que « l’intervention du
psychologue poursuit toujours un objectif, qu’il prend les moyens nécessaires pour l’atteindre
et que son action ne dépasse pas ce cadre ». « C’est donc une incitation à la prudence,
sachant que des évaluations psychologiques risquent d’être détournées de leur but initial ».
Le septième est « l’indépendance professionnelle ». « Cette indépendance
recouvre l’autonomie technique du psychologue, c'est-à-dire la responsabilité du choix de
ses outils et méthodes et concerne également ses conditions d’exercice », il « ne cèdera à
aucune pression indue ».
Le huitième concerne la possibilité pour le psychologue de faire jouer la « clause de
conscience ». « Cette clause intervient comme une possibilité de se dégager d’une situation
jugée inacceptable, qui porte atteinte à son honneur, sa réputation ou à des intérêts
moraux ».
2.1.3 LE PSYCHOLOGUE CLINICIEN
Pour le psychologue clinicien, il s’agirait, avec le patient, d’« envisager la conduite
dans sa perspective propre ». Son travail est également de « relever aussi fidèlement que
possible les manières d’être et de réagir d’un être humain concret et complet aux prises avec
une situation ». Enfin, il cherche à en « établir le sens, la structure et la genèse » ainsi qu’à
« déceler les conflits qui la motivent et les démarches qui tendent à résoudre ces
conflits ». (Perron & al, 2006 : p 8).
Cependant, il semble important de mentionner que le métier de psychologue clinicien
peut comporter quelques risques et notamment de dérives dans sa pratique. En effet,
« face à la multiplicité des références théoriques possibles et à leur difficile compatibilité, le
psychologue clinicien peut être tenté par telle ou telle variété de réductionnisme ». Piaget
définissait le réductionnisme comme « la position de principe consistant à ramener
intégralement des phénomènes complexes appartenant à un certain ordre de réalité à des
phénomènes plus simples, appartenant à un autre ordre de réalité posé comme plus
« basal » » (Perron & al, 2006 : p 43).
6
2.1.4 LE PSYCHOLOGUE CLINICIEN DE LA SANTE
La psychologie clinique comprend plusieurs champs d’action et de réflexion. Le
travail du psychologue peut donc prendre différentes formes et ce, notamment en fonction de
la thématique envisagée. Nous avons choisi d’aborder le champ de la psychologie de la
santé dans la mesure où nous nous intéressons au rôle du psychologue en ETP dans le
cadre d’un mémoire de master 2 de psychologie clinique de la santé.
Cette discipline est « relativement récente en France ; elle s'est développée dans les
années 80 aux États-Unis pour étudier les facteurs psychologiques, sociaux et
émotionnels qui interviennent dans les comportements de santé et qui peuvent avoir
un rôle dans le déclenchement et l'évolution des maladies ». C'est donc
« l'interdépendance des facteurs psychiques et biologiques » qui intéresse le psychologue
clinicien de la santé, « et non plus les seuls facteurs biologiques comme élément explicatif ».
« L'apport de la psychologie de la santé est par conséquent de fournir un éclairage et une
compréhension de la santé et de la maladie en considérant l'importance spécifique des
facteurs psychologiques dans le bien-être physique comme dans le bien-être
psychologique » (Fischer G-N., 2005).
En effet, contrairement à une vision dualiste, l’apparition du modèle
biopsychosocial peut permettre au psychologue de « comprendre les processus de la
maladie et de la guérison ». Plus précisément, il s’intéresse, avec le patient, « aux processus
de somatisation, aux interactions « corps-psyché », aux problématiques liées au « travail de
deuil », à la « dépressivité », au contexte culturel, aux dynamiques institutionnelles,
constituant une juxtaposition de données, plutôt qu’un corpus disciplinaire intégré » (Siksou
M., 2008).
2.2 L’EDUCATION THERAPEUTIQUE DU PATIENT
2.2.1 DEFINITION
La loi HPST du 21 Juillet 20096 stipule que « l'éducation thérapeutique s'inscrit dans le
parcours de soins du patient » et a « pour objectif de rendre plus autonome le patient en
facilitant son adhésion aux traitements prescrits et en améliorant sa qualité de vie ».
6 loi n°2009-879 du 21 juillet 2009 - art. 84 concernant l’éducation thérapeutique du patient
7
En effet, selon le rapport SAOUT en 2008 (base de la définition législative de l’ETP,
loi HPST), l’ETP s’entend comme un processus de renforcement des capacités du malade
et/ou de son entourage à prendre en charge l’affection qui le touche, sur la base d’actions
intégrées au projet de soins. Elle vise à rendre le malade plus autonome :
par l’appropriation de savoirs et de compétences afin qu’il devienne l’acteur de son
changement de comportement,
à l’occasion d’évènements majeurs de la prise en charge (initiation au traitement,
modification du traitement, événement intercurrents,…)
mais aussi plus généralement tout au long du projet de soins,
avec l’objectif de disposer d’une qualité de vie acceptable.
2.2.2 DES PRATIQUES EMPREINTES DE THEORIES
Les programmes et les activités d’éducation thérapeutique sont empreints de
différents modèles de santé assez distincts les uns des autres. La pratique de l’ETP peut
donc revêtir différentes tournures, selon nous, plus ou moins favorables au patient vivant
avec une maladie chronique.
En effet, la pratique de l’ETP peut s’inscrire dans « un modèle biomédical de la
santé ». Elle se centre alors sur « la maladie, l’organe en souffrance sans prendre en compte
l’ensemble des facteurs sociaux, environnementaux et personnels qui interagissent dans la
maladie ». Le programme et ses activités éducatives s’érigent donc « dans une perspective
de lutte contre les maladies, pour le bien de soi et des autres ». Les professionnels optent
ainsi pour une « approche académique, behavioriste ou cognitivo-comportementale ».
Egalement, l’ETP peut s’inscrire dans « un modèle biopsychosocial de la santé ».
Sa pratique s’orientera alors vers « l’ensemble des facteurs organiques, psychosociaux et
environnementaux qui interagissent dans l’évolution de la maladie chronique ». La
« dimension temporelle » du patient, ainsi que les relations avec les soignants, font parties
intégrantes du programme. Ce dernier peut être structuré au moyen d’une « approche
behavioriste, cognitivo-comportementaliste, constructiviste ou socio-constructiviste ».
Enfin, l’ETP peut se donner pour objectif de favoriser la qualité de vie du patient
en œuvrant « pour l’existence et l’autonomie » de ce dernier. « Sa subjectivité n’est plus à
combattre et participe de la reconnaissance de sa singularité d’être humain autonome et
désirant. « Ouvrir une place à la subjectivité, c’est d’abord la reconnaitre et accepter
qu’elle soit non une tare à corriger mais, pour le soignant, une partie de sa pratique et, pour
8
le patient, l’expression de sa réalité ». Le patient est acteur et « devient partenaire de
l’éducation thérapeutique ». « L’activité éducative est conçue comme un accompagnement
au projet de vie d’un sujet ».
S’inscrire dans une démarche d’ETP « inclut une dimension critique ». De plus, il
semble important de préciser que « le rapport au savoir du patient ainsi que le rapport au
savoir du soignant sont déterminants ». L’auteur pose une question centrale : « s’agit-il
de la compliance aux traitements prescrits ou s’agit-il de la négociation d’un contrat
thérapeutique dans lequel le professionnel met son savoir et son expérience au service d’un
patient pour réaliser un projet commun ? » (Eymard C., 2010 : p 48-50).
2.2.3 UNE APPROCHE GLOBALE DU PATIENT
Le Rhun A (2008) décline le concept d’ETP en trois dimensions. Cette « approche
globale » correspond à notre perception du concept d’éducation thérapeutique :
1) L’éducation thérapeutique comme une aide aux « apprentissages de savoirs et
savoir-faire » des patients visant à renforcer leurs compétences de gestion pratique du
traitement.
2) L’éducation thérapeutique comme un « accompagnement éducatif ». Cet
accompagnement éducatif aide le patient à lever d’éventuels obstacles à son processus de
changement et à renforcer ses ressources (psychologiques, sociales, psychosociales,
cognitives, physiques, organisationnelles…) afin de faciliter la mobilisation de ces nouveaux
savoirs et savoir-faire dans sa vie. Ce type d’accompagnement vise également à renforcer
ses compétences de gestion pratique du traitement.
3) L’éducation thérapeutique comme un « accompagnement global » de la personne
ayant une maladie chronique dans son processus de changement et de développement pour
« devenir autrement le même ». « Ce processus d’empowerment vise à ce que la personne
trouve un autre équilibre de vie, un autre équilibre dans la satisfaction de ses besoins de
santé, et une autre qualité de vie satisfaisante. Il s’agit pour la personne de trouver la
possibilité de mener une vie qui soit compatible le plus possible à la fois avec les contraintes
de sa maladie et à la fois avec la représentation qu’elle se fait d’une vie « souhaitable » pour
elle ». Ce type d’accompagnement vise à aider le patient à s’adapter (notamment en
renforçant ses compétences psychosociales) pour réussir à satisfaire ses besoins propres et
pour réaliser ses projets de vie. Selon nous, cette dimension « psycho-sociale » représente
la partie la plus difficile à aborder par les soignants-éducateurs, formés à des approches bio-
médicales.
9
2.2.4. UNE DEMARCHE CENTREE SUR LE PATIENT
En ETP, l’OMS (1998 : p 8) recommande à l’ensemble des soignants accompagnant
des patients vivant avec une maladie chronique, la mise en place d’une éducation
thérapeutique « centrée sur le patient » prenant en considération « les besoins des
patients », « les processus d’adaptation du patient » (facteurs psychologiques), ses
« représentations », ses « croyances », et son « lieu de maîtrise de la santé » (facteurs
psychosociaux). « Elle concerne l’environnement psychosocial du patient et implique
autant que possible les familles, proches et amis du patient » (facteurs sociaux)7.
Selon Golay A. (2006), une démarche en ETP privilégie la prise en compte des
« besoins » du patient tant dans leur dimension cognitive qu’émotionnelle. Il le représente de
la façon suivante :
ETRE
savoir comprendre
écouté compris aidé
Pour ce qui est de la prise en compte de la dimension cognitive, Golay A. (2010) et
ses collaborateurs expliquent en effet que « les premiers objectifs de cette éducation sont de
permettre au patient d’acquérir des connaissances de sa maladie, allant des causes aux
circonstances aggravantes, ainsi que des traitements ». Cela suppose que la personne
vivant avec une maladie chronique puisse développer, renforcer, maintenir ses
compétences d’auto-soins par rapport au traitement de fond ou de crise, ou à une stratégie
adéquate et pratique établie avec son soignant. « Elle pourra ainsi apprendre à reconnaitre
et interpréter certains symptômes, pratiquer une mesure physiologique, y répondre par un
comportement adapté à l’urgence ou en prévention ». Nous parlons alors d’appropriation de
compétences d’auto soins.
7 Citation tirée de : Le Rhun A., (2008). « L’accompagnement psychosocial dans l’éducation thérapeutique du
patient : de l’accompagnement soignant/ patient à l’accompagnement formateur / soignant ». Thèse de
médecine : Nantes
Dimension cognitive
cognitive
Dimension émotionnelle
10
Parallèlement, le contenu des programmes en ETP favorise, pour le patient, le
développement de compétences d’ « auto-adaptation » à la maladie. Ce terme sous entend
pour ce dernier de « savoir vivre avec la maladie ». Il s’agit alors pour lui « d’établir un
nouveau rapport à soi, aux autres et à l’environnement ». « Ceci revient pour lui à inventer
une autre vie, à investir un autre espace dans lequel la santé antérieure a laissé place à un
nouvel état d’équilibre qui nécessite en permanence réflexion, invention, conscience des
sentiments éprouvés. . . » (d’Ivernois J-F., Gagnayre R., IPCEM ., 2011).
Le rôle de l’équipe de soignants/éducateurs est alors d’accompagner le patient vers
une autogestion de sa maladie, de l’aider à « acquérir et mettre en pratique de nouvelles
compétences, visant à changer de comportement, à contrôler sa maladie en s’appuyant sur
des programmes spécifiques ». Cela induit également pour le patient une « capacité à
évaluer ses progrès et résoudre ses problèmes ». Enfin l’autogestion de sa maladie sous-
entend que le patient est « conscient de ses compétences et a confiance en la gestion de sa
maladie » (Bourbeau J., Van der Palen J., 2009).
Il est important de noter que sans une « adhésion thérapeutique » du patient, cette
démarche d’éducation semble compromise. Le bon déroulement du suivi d’un programme
d’ETP induit alors « une implication active du patient à un traitement mutuellement
acceptable » (Haynes, 19788). Cela « rompt avec le modèle biomédical ». En effet, en ETP,
l’« interaction soignants/soignés » prend sa place « dans une perspective de négociation
autour du traitement ». « Des processus intrinsèques tels que les attitudes et la motivation
sont alors en jeu » (Deccache, 19949).
2.2.5. RELATIONS SOIGNANTS-SOIGNES
La relation entre les soignants et les patients « devient un élément prépondérant de
la réussite thérapeutique ». Il s’agit ici de « la mise en jeu d’une stratégie relationnelle dans
le suivi thérapeutique laissant une place large à la négociation ». Cette démarche ambitionne
la mise en place d’un « contrat thérapeutique » c'est-à-dire « l’acceptation par le patient de
gérer de façon autonome sa maladie ». Ces auteurs insistent sur l’idée d’une « participation
mutuelle ». Ceci sous-entend l’élaboration d’un partenariat. « Les partenaires de cette
8 Citation tirée de : Aujoulat I., Doumont D. Maladie chronique, adolescence et risque de non-adhésion : un enjeu
pour l’éducation des patients ! Les cas des adolescents transplantés. UCL Ŕ RESO Unité d’Education pour la
santé, Ecole de santé Publique, 2009
9 Citation tirée de : Le Rhun A., (2008). « L’accompagnement psychosocial dans l’éducation thérapeutique du
patient : de l’accompagnement soignant/ patient à l’accompagnement formateur / soignant ». Thèse de
médecine : Nantes
11
relation savent ou apprennent à connaitre le rôle de chacun ». En résumé, c’est de leur
« compréhension mutuelle » c'est-à-dire à la fois des « objectifs thérapeutiques du soignant
et des besoins du patient, que tient la réussite de la relation » (d’Ivernois & Gagnayre, 2008).
Goudet en 2009 incite les équipes soignantes à s’appuyer sur les potentialités des
patients pour leur permettre de se réapproprier du pouvoir sur leur maladie. Il s’agit du
concept d’« empowerment », central en ETP. Freynet (199510) explique que « l’identification
d’intérêts mobilisateurs à partir des intérêts immédiats et communs » est primordiale. Il s’agit
de s’attacher à « réduire des résistances, à dépasser des contraintes, à valoriser des
potentialités et les capacités réelles en identifiant les ressources et en valorisant les savoir-
faire ». Il parle alors de « réappropriation active du pouvoir par les personnes elles-mêmes ».
2.2.6 EN SYNTHESE
L’ETP trouve sa place à deux niveaux :
Pour le patient, elle vise à « améliorer sa santé bio-psycho-sociale, dans un
parcours de vie et de soins qui respecte son identité et qui prenne sens pour lui ». Ce dernier
est conduit à « augmenter ses connaissances et compétences en regard de la maladie et
des traitements » (compétences d’auto-soins). L’ETP l’aide également à « changer de
comportement, à suivre son traitement ou à mettre en place une nouvelle organisation de sa
vie au quotidien (compétences d’auto-soins et d’adaptation) ».
Pour les soignants et les patients, l’objectif de l’ETP est d’ « améliorer sa qualité de
vie mais aussi de favoriser la qualité de la relation et la mise en place d’un réel
partenariat entre patients et soignants » (Golay & al, 2010, p : 9).
Des éléments constitutifs d’un environnement favorable au changement de
comportement du patient et au maintien d’une relation de qualité entre soignants et soignés
méritent d’être intégrés à une démarche d’ETP.
2.2.7 UN ENVIRONNEMENT FACILITATEUR
Le fait que le patient se sente « bien » sur son lieu de soins et notamment avec
l’équipe qui l’accompagne semble constituer en soi, une exigence première. En outre, nous
10
Citation tirée de : Goudet B., (2009). « Développer des pratiques communautaires en santé et développement
local ». Lyon : Chronique sociales ; p 73
12
pouvons effectivement concevoir que plus le patient se « sent bien », plus il sera disposé à
un apprentissage de qualité.
« L’appropriation du savoir est toujours facilitée si le patient trouve un
environnement ou un contexte favorable ». En effet, ce processus peut être accéléré,
dans certaines conditions, grâce à « un environnement didactique facilitateur » (Giordan,
1987, 2002). « Il est aussi appelé allostérique en référence à un méta-modèle par analogie à
la biologie ». En effet, tous les paramètres permettant l’apprentissage sont en lien, en
interrelation avec des effets soit facilitateurs soit inhibiteurs de type bio feed-back. Le
métamodèle allostérique permet, par exemple, « de catégoriser et de mettre en relation de
nombreux paramètres indispensables pour apprendre ». « En connaissant et en prenant en
compte ces paramètres, le soignant-éducateur pourra interférer, mobiliser et favoriser
l’apprentissage du patient, voire favoriser un changement de comportement » (Giordan A.,
2010).
Nous imaginons qu’un patient bien intégré et accompagné (relations soignants-
soignés « saines ») au sein d’un programme en ETP pourra notamment plus facilement
développer des compétences psychosociales et ainsi mieux vivre avec sa maladie au
quotidien. Nous présentons ci-dessous le schéma des paramètres constitutifs de
l’environnement didactique proposé par Giordan.
J’apprends si…
j’y trouve un plus (intérêt, plaisir, sens)
J’ancre les données Je prends appui
sur mes conceptions
je suis concerné, interpellé, questionné
Je me lâche
Je mobilise mon savoir
Je trouve des aides à penser
(symboles, schémas, métaphores…
Je fais des liens
J’ai confiance (moi, situation, médiateur)
Je me confronte (autres, réalité, informations)
je prends conscience du savoir ( intérêt, structure, processus…)
13
2.2.8. LA DEMARCHE ETP
La Haute Autorité de Santé et l’Institut National de Prévention et d’Education pour la
Santé ont émis en 2007 des recommandations sur la structuration d’une démarche ETP en
quatre étapes.
La première étape consiste en l’élaboration d’un diagnostic éducatif. En effet, afin
de pouvoir accompagner et guider le patient au mieux tout au long de son parcours en ETP,
il parait indispensable d’apprendre à le connaitre. Le patient est écouté et il est amené à
dialoguer avec un ou plusieurs soignants sur « les différents aspects de sa vie, sa
personnalité, ses représentations, ses connaissances, ses demandes… ». Il est invité à
exposer les éléments qui lui semblent importants et qui lui tiennent à cœur à ce moment ci. Il
s’agit alors pour le patient, accompagné par le(s) soignant(s) d’ « identifier ses ressources,
potentialités, difficultés & objectifs éducatifs ». Ces éléments seront repris dans l’étape
suivante.
La deuxième est la définition d’un programme personnalisé d’ETP avec un
programme d’apprentissage. Il s’agit de « formuler et négocier avec le patient les
compétences (auto-soins, auto-adaptations…) à acquérir en regard de son projet ainsi que la
stratégie ». Le patient pourra alors réfléchir et exprimer ses aspirations et priorités
personnelles qui seront à adapter avec les exigences du traitement. Il s’agit alors pour le(s)
soignant(s) de « planifier un programme individuel qui sera communiqué au patient et aux
professionnels ».
La troisième étape est celle de la « planification et de la mise en œuvre des
séances d’ETP, individuelles ou collectives ou en alternance ». Il s’agit ici de « sélectionner
les contenus, les techniques d’apprentissage, les outils, les ressources humaines…. ». Il
semble pertinent de réaliser cette étape en partenariat avec les patients. En effet, consulter
un groupe de patients peut permettre d’une part de les impliquer pleinement dans une
démarche qui leur appartient et d’autre part d’intégrer un contenu pertinent et adapté aux
aspirations et profils des patients.
La dernière étape implique la réalisation d’ « une évaluation des compétences
acquises lors du déroulement du programme ». Il s’agit ici de faire le point avec le patient
sur « ce qu’il sait, a compris, sait faire et appliquer, ce qui lui reste à acquérir, la manière
dont il s’adapte ». Il nous parait pertinent d’intégrer également la prise en compte de ses
ressentis aux différentes étapes du programme et au moment présent. Cette étape semble
permettre au patient de « se poser » et de prendre un certain recul face à son expérience
vécue. Ceci peut permettre de réfléchir ensemble au « futur », à la sortie de cet
14
accompagnement pour tenter d’adapter un accompagnement de plus long terme.
Egalement, l’équipe pourra « proposer éventuellement une nouvelle offre d’ETP en fonction
de l’évaluation et des données de suivi de la maladie ».
2.3 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE EN EDUCATION THERAPEUTIQUE DU PATIENT
2.3.1 UN TRAVAIL EN INTERDISCIPLINARITE
Une personne atteinte d’une maladie chronique voit les intervenants se succéder à
son chevet et « se multiplier du fait de la spécialisation croissante de la médecine ». « Cela
a pour conséquence un morcellement et une complexification de la prise en
charge notamment du fait du nombre élevé d’acteurs de cultures professionnelles très
diverses ». « La qualité d’une prise en charge ne dépend plus seulement de
l’adéquation d’une intervention donnée mais aussi de la qualité de la communication
et de la collaboration entre professionnels ainsi que de la cohérence et de la
coordination de leur action ». « Nous passons progressivement d’un modèle
appréhendant les soins, centrés sur un organe ou une pathologie, comme relevant de
professionnels ou de structures isolées, à un modèle les considérant comme un tout
organisé autour d’une personne malade ». Il s’agit alors d’opter pour une perspective
globale, dynamique et créative. (Mazzocato C., 2003)
En effet, « l’approche d’une équipe multidisciplinaire qui intègre la composante
éducative va dans un même temps s’intéresser à la dimension médicale, et aux aspects
psychosociaux des patients. Cela permet aux patients de faire le lien entre les aspects
somatiques et son propre vécu personnel et social de la maladie ». En parallèle, cela permet
aux soignants de « partager les informations et de pouvoir formuler des objectifs
thérapeutiques pertinents pour les patients » (Mosnier-Pudar, 200911).
Le psychologue s’inscrit alors au sein d’une équipe favorisant une approche
« interdisciplinaire » dans la mesure où de réels échanges permanents et constructifs sont
nécessaires de la part de chaque professionnel au sein d’une équipe.
11
Citation tirée de : Simon D., Traynard P.-Y., Bourdillon F., Gagnayre R., Grimaldi A. (2009). « Education
thérapeutique, Prévention et maladies chroniques ». Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson ; p276
15
2.3.2 UN ROLE SPECIFIQUE AVEC LE PATIENT
UNE PERSPECTIVE HUMANISTE
Selon notre définition conceptuelle de l’ETP, l’accompagnement constitue ainsi une
dimension importante et un des éléments indispensables pour démarche de qualité centrée
sur le patient. L’ETP ne correspond donc pas ici à un « apprentissage technique » de savoirs
et de savoir-faire pratiques dans une perspective utilitariste, mais davantage à une
éducation centrée sur le développement de la personne et son droit à une éducation de
qualité, dans une perspective humaniste » (BRIEN R., 200212). En effet, « une prise en
charge thérapeutique quelle qu’elle soit ne consiste pas uniquement à « prodiguer des
soins » mais doit conjointement consister à « prendre soin » ». (Hartemann-Heurtier.,
Eschwège., 200913).
L’intervention du psychologue permettrait alors d’accompagner le malade en
garantissant cette approche humaniste tout au long du parcours de soins du patient atteint
de maladie chronique, de longue durée et évolutive.
LA DIMENSION PSYCHIQUE AU CŒUR DE L’EXPERIENCE DE LA MALADIE
Concernant l’intervention du psychologue au sein des programmes d’ETP, « les
référentiels théoriques les plus diffusés s’inspirent essentiellement de modèles
psychopédagogiques censés favoriser le développement des savoirs et des apprentissages
de gestion du traitement au dépend d’une approche clinique fondée sur la relation » et
permettant « une rencontre en relation qui ouvre l’espace d’une co-création singulière,
prémisse d’une alliance thérapeutique » 14 . Or, « entrer dans un processus de maladie
constitue un événement ni choisi, ni désiré et qui annonce la perspective d’interventions, de
menaces parfois vitales entraînant des répercussions au plan émotionnel qui sont
déterminantes quant à l’adaptation de la personne à sa nouvelle situation ». De plus, « le
retentissement de la survenue d’une maladie chronique est imprévisible car il dépend de la
personnalité du sujet, en d’autres termes de ses ressources psychiques, il dépend de son
histoire, du moment de vie qu’il est en train de traverser, il dépend encore de la maladie en
12
Tiré de : Le Rhun A., (2008). « L’accompagnement psychosocial dans l’éducation thérapeutique du patient :
de l’accompagnement soignant/ patient à l’accompagnement formateur / soignant ». Thèse de médecine : Nantes 13
Tiré de : Simon D., Traynard P.-Y., Bourdillon F., Gagnayre R., Grimaldi A. (2009). « Education thérapeutique,
Prévention et maladies chroniques ». Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson
14 Lacroix A, (2007). « Quels fondements théoriques pour l’éducation thérapeutique ? ». Santé Publique, vol 19.
SFSP
16
cause et de l’idée que s’en fait le patient, sans compter les valeurs auxquelles il est
attaché ».
On perçoit ici la place importante qu’occupe le facteur psychologique dans le
vécu de la maladie chronique. En effet, « cette dimension psychique » se trouve « au cœur
même de l’expérience de maladie » (Lacroix A., 2007) et de la compétence métier du
psychologue.
UN ACCOMPAGNEMENT PSYCHOLOGIQUE DES L’ANNONCE DE LA MALADIE
Certains auteurs préconisent l’accompagnement du psychologue dès l’annonce du
diagnostic afin d’aider le patient à s’adapter au mieux à l’apparition et à l’évolution de
la maladie. En effet, Hartemann-Heurtier et Eschwège (2009) 15 expliquent qu’ « une
annonce de diagnostic mal gérée peut entrainer divers phénomènes éprouvants ».
« Une aggravation de l’anxiété voire de la détresse psychologique du patient lié au choc
provoqué par l’annonce » peut émerger. Egalement, cela peut « favoriser dès le départ chez
le patient une représentation négative de la maladie, source de difficultés ultérieures voire de
refus à se prendre en charge ». Enfin, une annonce maladroite « peut favoriser une
représentation négative des soignants qui n’ont pas su être à l’écoute de l’anxiété ou de la
détresse en même temps qu’ils la déclenchaient. Cette mauvaise perception du soignant va
rendre difficile l’alliance nécessaire entre le médecin et le patient pour une prise en charge
de qualité ».
L’ACCEPTATION DE LA MALADIE
Une fois le diagnostic annoncé, un travail d’acceptation de la maladie semble
constituer le cœur de l’expérience de la maladie et de la relation entre le patient et le
psychologue. Anne Lacroix se réfère au travail de deuil selon le modèle psycho-dynamique
freudien pour en expliquer le processus. Deux trajectoires distinctes susceptibles d’être
empruntées par le patient sont élaborées. « Une trajectoire désigne le processus
d’intégration psychique de la perte de la santé, l’autre sa mise à distance, au point d’en
occulter la réalité grâce à des mécanismes de défense mis en place par le Moi qui se sent
menacé ». Tous les individus ne semblent donc pas égaux face à l’acceptation de leur
maladie. En effet, « il faut parfois bien du temps, depuis l’entrée en maladie et la capacité
pour le patient à consentir aux nécessaires contraintes que son état exige ». Elle a pu
observer qu’ « un grand nombre de patients oscille entre le refus, le déni et des tentatives
15
Tiré de : Simon D., Traynard P.-Y., Bourdillon F., Gagnayre R., Grimaldi A. (2009). « Education thérapeutique,
Prévention et maladies chroniques ». Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson
17
d’adaptation à leur condition chronique ». De façon générale, « ce qui est en cause n’est pas
le choix délibéré entre une stratégie et une autre mais une ambivalence entre ce qui est
prescrit et ce qui est réalisé, induisant la rigidité répétitive de certains comportements ».
A ce titre, nous pouvons noter ici l’importance de l’approche psychologique de la
maladie à plusieurs niveaux. Le psychologue peut repérer certains éléments défensifs
du patient face à sa maladie. Suite à cela, un travail sur l’acceptation de son état de santé
peut être envisagé. Ce travail peut avoir des conséquences psychologiques liées à une
diminution des troubles anxio-dépressifs entre autres mais aussi permettre d’adapter des
comportements thérapeutiques adéquats face à la gestion de sa maladie.
Par ailleurs, « l’apparition d’une telle maladie bouleversant le quotidien de la
personne » peut entrainer « une perte de sens de sa vie », « une dévalorisation de
l’image de soi », et « une rupture du sentiment de continuité, de sécurité et d’identité à
l’origine de la situation d’impuissance vécue ». Ce sentiment d’impuissance induit un
« désir de maîtrise » et la « capacité à lâcher prise » pour « consentir au changement »
nécessaire (Aujoulat I., 2006 p.3-8). Au vu des exigences, des contraintes et des
conséquences induites par la maladie chronique, le psychologue peut aider le patient à
« devenir autrement le même » (Bensaid., 197816).
2.3.3 UN ROLE SPECIF IQUE AVEC L’EQUIPE
Pour Vernier en 2006, le psychologue « se doit de collaborer avec les équipes
médicales, ceci dans l'intérêt du patient ». « Il est bien entendu soumis au secret médical
et se doit de le faire respecter et de préserver la vie privée des personnes » (extrait du Code
de déontologie des psychologues). La fonction du psychologue au sein d’une équipe
pratiquant l’éducation thérapeutique, pluridisciplinaire, est donc de « contribuer à établir et à
maintenir un climat d'humanité, à relier les gens entre eux », « à donner du sens dans le
souci d'amener une sécurité émotionnelle » au patient. Son « langage se doit d'être
compris avec des mots clairs et accessibles qui permettent de ne pas faire peur, un langage
proche de l'autre, en respectant la confidentialité qui laisse place à une véritable
rencontre ». A ce titre, les transmissions à propos du patient sont « un véritable maillage
délicat et essentiel » pour « contenir les affects » (Vernier D., 200617). L’auteur explique
16
Cité par Aujoulat I., (2005) dans : Le Rhun A., (2008). « L’accompagnement psychosocial dans l’éducation thérapeutique du
patient : de l’accompagnement soignant/ patient à l’accompagnement formateur / soignant ». thèse de médecine Nantes p 16
17 Tiré de : Société française de médecine périnatale. 36es Journées Nationales
18
que sur le terrain, « il y a une réelle difficulté à écrire quelques lignes dans les dossiers »
alors que le psychologue devrait pourtant « laisser une trace de l'entretien en restant vigilant
pour que ce qui se transmet soit utile à la prise en charge ». En pratique, « la transmission
orale est souvent plus aisée » mais, « là encore elle se doit d'être discrète et utile à la
patiente ».
Du côté des soignants, « c’est sur le terrain même du suivi des patients qu’ils
devraient bénéficier eux aussi d’un soutien, d’un cadre propre à élaborer les contacts avec
les patients, un espace de partage, de supervision de l’activité professionnelle » (Lacroix A.,
2007). Des contraintes telles que le temps, la présence d’un psychologue tiers à l’équipe
viennent freiner cet accompagnement des équipes. Il parait important de mentionner que
« ces exigences peuvent paraître excessives » mais « elles sont néanmoins nécessaires
pour optimiser les actions dans la perspective d’une approche globale des malades
chroniques » (Lacroix, 2007).
Ces aspects du rôle du psychologue aux côtés des équipes soignantes travaillant en
ETP requièrent chez ce professionnel diverses capacités et aptitudes professionnelles. En
premier lieu, une certaine « disponibilité pour accompagner le soignant si besoin », lui
« proposer sans imposer de l'accompagner » surtout lorsque « la parole n'est pas
véritablement donnée aux soignants », « trouver le temps de reparler avec lui, en lui
donnant le « retour » », lui dire combien le patient a pu parler et bénéficier de ces moments
si importants. En deuxième lieu, « une souplesse, une diplomatie » dans le dialogue avec
ses collègues. Enfin, « une rigueur et une vigilance pour ne pas se laisser entamer ».
« Il s'agit d'un véritable soin dans le sens de prendre soin, apporter un étayage à la
relation soignant-patient, une véritable relation thérapeutique qui soutient le patient et
valorise le soignant dans sa fonction, dans le respect des places de chacun ». De façon
générale, il est de la mission du psychologue intégré au sein d’une équipe interdisciplinaire
de « trouver une cohérence dans l'accompagnement humain » et « que chaque «
protocole » soit habité par le respect de l'autre. Ce professionnel doit en continu, « contribuer
à ce que le système de soins s'adapte à ce que confie le patient » pour partager une
nouvelle expérience qui lui « apportera une confiance en soi » et lui permettra de faire face
au mieux aux contraintes de sa maladie (Verdier D., 200618).
de la Société Française de Médecine Périnatale (Biarritz). Quelle place pour les psychologues ? Rueil-Malmaison : groupe Liaisons, 2006, p :112-119 18
Tiré de : Société française de médecine périnatale. 36èmes Journées Nationales
de la Société Française de Médecine Périnatale (Biarritz). Quelle place pour les psychologues ? Rueil-Malmaison : groupe Liaisons, 2006, p : 112-119
19
3. METHODOLOGIE DE RECHERCHE
Cette étude s’inscrit dans le cadre d’une recherche / action. En effet, dans un premier
temps, nous avons élaboré une définition du rôle du psychologue en ETP grâce à la
participation de nombreux acteurs opérant dans ce domaine. Dans un second temps, nous
avons mis en place et animé un atelier-discussion avec des soignants, visant à construire un
référentiel sur les compétences des psychologues et les facteurs favorisant leur intégration
dans les services.
3.1 DEFINITION DU ROLE DU PSYCHOLOGUE EN ETP
Notre protocole de recherche comprend plusieurs étapes.
3.1.1 QUESTION DE DEPART ET HYPOTHESES DE RECHERCHE
Question de départ :
Quel est le rôle du psychologue en éducation thérapeutique pour le patient ?
Hypothèse théorique :
L’intervention du psychologue au sein d’une équipe interdisciplinaire a des effets
positifs lors des différentes étapes de la démarche éducative et ce, auprès des patients et
des soignants.
Hypothèses opérationnelles :
1/ Le psychologue, de par ses spécificités, a un rôle à jouer au sein d’un programme
d’ETP pour des patients chroniques.
2/ Le psychologue, de par ses spécificités, a un rôle à jouer avec et au sein d’une
équipe lors du développement d’un travail professionnel interdisciplinaire.
Il aurait été intéressant de se pencher sur le rôle que peut jouer le psychologue
auprès de l’entourage du patient, ceci dans l’intérêt du patient et de son entourage en tant
que tel. Cependant, nous considérons que cette question mérite un travail à part entière et
nous ne pouvons la traiter de façon satisfaisante dans le cadre de notre étude.
3.1.2 PROCEDURE DE L ’ETUDE
Afin de définir le rôle du psychologue en ETP et de répondre à nos hypothèses
opérationnelles, la réalisation d’une enquête s’est imposée. Nous avons sollicité les
20
perceptions qu’ont des patients, des « experts en ETP » ainsi que des psychologues à ce
sujet et ce, tout au long de la démarche en ETP.
Six objectifs opérationnels guident cette étude. Nous nous sommes centré alors
sur l’identification :
1/ des représentations qu’ont les soignants et les patients du « psychologue »
2/ du rôle perçu du psychologue en ETP par les soignants et les patients
3/ des besoins perçus par les patients
4/ des difficultés réelles ou potentielles rencontrées (contraintes)
5/ des leviers sur lesquels s’appuyer pour favoriser la place du psychologue (ressources)
6/ de la formulation de propositions concrètes visant à l’amélioration du dispositif (sous
l’angle du psychologue)
Pour répondre à ces questions, avons constitué trois groupes :
-un groupe de six « patients » vivant avec une maladie chronique (deux patients ayant
suivi un programme de prévention des risques cardiovasculaires (Bio-Cards) à la
Polyclinique de Caudéran, deux patients accompagnés par l’AURAD (Association pour
l’utilisation du rein artificiel à domicile en aquitaine) et deux patients accompagnés par la
maison du diabète de Bordeaux
-un groupe de quatorze « experts ETP » ayant un rôle de coordination de programme en
ETP. Ce groupe est composé de quatre médecins, quatre infirmiers, deux diététiciens et trois
ingénieurs, chargés de mission en ETP. Ils travaillent avec des patients atteints de maladies
chroniques diverses comme les troubles cardiaques, l’insuffisance rénale, le diabète et les
hépatites.
-un groupe de quatorze « psychologues » qui œuvrent dans des domaines assez variés
au sein de services hospitaliers ou de structures prenant en charge des pathologies telles
que les troubles cardiaques, l’insuffisance rénale, le diabète, les troubles du comportement
alimentaire, les hépatites, la mucoviscidose ou encore l’athérosclérose. Un psychologue
membre d’un IREPS participe également. Tous ont une expérience, à des degrés divers en
ETP.
Tous sont impliqués dans une démarche d’éducation thérapeutique.
21
Avec le groupe de patients, nous avons réalisé des entretiens semi-directifs
individuels enregistrés. La grille d’entretien (cf. annexe 10.1) a été construite au regard des
six objectifs opérationnels énumérés ci-dessus. Nous avons sondé leurs représentations du
psychologue en général et en ETP, leurs expériences à ce sujet, leurs besoins, ressources
et contraintes ainsi que leurs propositions visant à intégrer les interventions du psychologue
en ETP de façon adaptée et cohérente à leurs yeux. Cette trame a également guidé
l’analyse de contenu.
Les perceptions des « experts ETP » et des « psychologues » ont été recueillies
au moyen de la méthode Delphi. Cette technique « vise à connaitre l’opinion de certaines
personnes sur les problèmes qui prévalent dans la communauté ». Elle consiste en un
processus de groupe. « Même s’ils ne communiquent pas directement entre eux, les
membres d’un groupe Delphi réagissent à l’information émise par les autres participants, de
telle sorte à ce qu’ils en arrivent à un consensus sans qu’il y ait eu discussion entre eux ».
En effet, cette méthode utilise une série de questions ouvertes adressées par courriel.
Chacune des questions est formulée à partir des réponses données au questionnaire
précédent. « La démarche se termine lorsqu’il y a consensus ou que l’information obtenue
est suffisante (Pineault & Daveluy, 1995) ». Cette méthode possède bien des avantages tels
que l’atteinte d'un réel consensus, le temps pour la réflexion mais également des
inconvénients à considérer comme l’exclusion des opinions extrêmes ou la longueur du
processus.
Nous avons choisi de mener l’étude sur le site internet de PACE (Plateforme
Aquitaine pour des Compétences en Education du patient). Ce site de partage de
ressources en éducation thérapeutique en Aquitaine, permet l’utilisation de forums. Nous
avons donc créé deux forums indépendants, l’un accessible aux « experts ETP » et l’autre
aux psychologues. Cela a permis par la suite de croiser leurs perceptions.
Notre démarche s’articule autour de plusieurs étapes identiques formulées par
Delbecq19 :
19
Pineault R., Daveluy C., (1995). « La planification de la santé, concepts, méthodes, stratégies ». Montréal :
Editions Nouvelles
22
1/ FORMULATION DE LA QUESTION DE DEPART :
Quel est le rôle du psychologue en ETP ?
2/ SÉLECTION DES RÉPONDANTS :
Un groupe d’ « experts ETP »
Un groupe de « psychologues »
3/ COMPOSITION DE LA LETTRE D’INTRODUCTION ET ENVOI DU PREMIER QUESTIONNAIRE :
Nous avons, dans un premier temps, contacté des « experts ETP » et des
psychologues travaillant dans ce domaine par téléphone afin de solliciter leur participation.
Nous avons envoyé un courriel à ceux que nous n’arrivions pas à joindre par téléphone (cf.
annexe 10.2.1). Dans un deuxième temps, nous leur avons envoyé un courriel formalisant
leur participation et expliquant les objectifs de notre étude, les étapes à suivre, ainsi que
l’utilisation ultérieure des résultats. Nous avons mentionné l’importance de leur participation
et établi un calendrier de réponses (cf. annexe 10.2.2). Un contact téléphonique ultérieur est
venu confirmer leur implication et clarifier la démarche si cela s’avérait nécessaire.
Le premier questionnaire vise à explorer les représentations concernant le rôle du
psychologue en ETP. Il a été composé d’une unique question à savoir la question de départ
qui est :
Quel(s) est (sont) le(s) rôle(s) du psychologue en éducation thérapeutique du patient ?
4/ ANALYSE DES RESULTATS DU PREMIER QUESTIONNAIRE :
Deux synthèses différentes (cf. annexe 10.3.1) ont été formalisées en fonction des
réponses des deux groupes. Elles ont été rédigées sous forme de tableaux, ce qui a permis
d’élaborer une catégorisation des réponses obtenues.
5/ COMPOSITION ET ENVOI DU DEUXIEME QUESTIONNAIRE :
Un courriel a été envoyé à tous les participants en les remerciant pour leurs
réponses. La synthèse écrite correspondant aux réponses de leur groupe leur a également
été communiquée.
Suite à cela, trois nouvelles questions visant à préciser leur réflexion leur ont été
posées pour ce deuxième tour de la démarche :
1/ Quelle(s) réaction(s) cette synthèse suscite pour vous ?
23
2/ Selon vous, quelles sont les limites de l’intervention du psychologue en ETP ? Dans quel(s) cadre(s) le psychologue n’a pas sa place en ETP ?
3/ Pour le groupe des « psychologues » : Quelle est votre expérience en tant que psychologue en ETP ? Quels sont vos ressentis personnels en lien avec votre travail auprès des patients et des équipes soignantes ?
Pour le groupe des « experts ETP » : Quelle expérience avez-vous du travail du psychologue auprès des patients et au sein des équipes soignantes ? Quels sont vos ressentis personnels ?
6/ ANALYSE DU DEUXIEME QUESTIONNAIRE :
Les précisions recueillies ont permis d’avoir un premier niveau d’organisation des
différentes réponses. Nous en avons tiré des éléments de définition plus clairs et classés par
champs plus précis. Nous avons alors obtenu une certaine validité de contenus. De plus,
nous avons identifié des limites du rôle du psychologue en ETP, ce qui enrichit notre lecture
sur le sujet. Enfin, recueillir des éléments sur l’expérience professionnelle de chacun vient
enrichir et compléter notre réflexion.
7/ COMPOSITION ET ENVOI DU TROISIEME QUESTIONNAIRE :
Une synthèse a été envoyée (cf. annexe 10.3.2) accompagnée des questions
suivantes :
1/ Quelle(s) réaction(s) cette deuxième synthèse suscite chez vous ?
2/ Pour le groupe des « psychologues » : Comment percevez-vous le regard que les autres professionnels de santé portent sur vous en ETP ? 3/ - Si vous deviez qualifier l'intérêt de votre participation à cette étude en un mot ce serait…
- Situez vous sur une échelle allant de 1 à 10 : pas intéressant 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 très intéressant
Expliquez votre réponse !
8/ REDACTION DE LA DERNIERE SYNTHESE :
Cette analyse a pour but de compiler les résultats des réflexions quant au rôle
du psychologue en ETP et de résumer les commentaires reçus à ce sujet. Nous avons
envoyé une dernière synthèse (cf. annexe 10.3.3) aux participants de chacun des groupes.
Par ailleurs, notre mémoire en guise de synthèse finale sur la définition du rôle du
psychologue en ETP sera envoyée à chacun des participants avec tous nos remerciements.
24
9/ FOCUS GROUP
Après avoir recueilli les perceptions de patients, d’« experts ETP » et de
psychologues sur le rôle du psychologue en ETP et ce, de façon indépendante, une
confrontation des points de vue a eu lieu à l’aide d’un focus groupe enregistré mêlant
des membres de chacun des groupes. L’objectif de cette rencontre était de mettre en
évidence les convergences et les divergences des différents groupes sur le rôle du
psychologue en ETP afin d’obtenir une définition commune.
10/ ATELIER DE TRAVAIL AVEC UN GROUPE DE PROFESSIONNELS DE SANTE
La définition obtenue a guidé la construction et l’animation d’un atelier-discussion
avec une dizaine de soignants inscrits dans une dynamique d’ETP à différents niveaux.
Ensemble, nous avons initié la construction d’un guide référentiel des compétences des
psychologues et des facteurs facilitant leur intégration dans les équipes soignantes. A
travers ce premier atelier-discussion sur le rôle du psychologue en ETP, il s’agissait de
prolonger notre réflexion de façon concrète afin que les équipes puissent s’en saisir à long
terme et ainsi de promouvoir le rôle du psychologue en ETP. A ce propos et suite à cette
expérience, la cellule ETAPE du CCECQA souhaite organiser d’autres rencontres sur ce
thème afin de faire perdurer ce travail interdisciplinaire et de permettre une certaine
concrétisation de ces échanges sur le terrain.
Afin de clarifier nos propos sur la méthode employée pour mener à bien cette
recherche/ action, nous vous proposons un schéma récapitulant les différentes étapes
adoptées.
25
3.1.3. SCHEMA RECAPITULATIF
Psychologues
6 PATIENTS 14 EXPERTS ETP 14 PSYCHOLOGUES
ETP
Entretiens individuels semi-
directifs enregistrés
1er
tour : question de
départ
2ème
tour : lecture synthèse n° 1
+ 3 questions
3ème
tour : lecture synthèse n°2
+ 2 questions
1er
tour : question de
départ
2ème
tour : lecture synthèse n° 1
+ 3 questions
Méthode DELPHI forum
Méthode DELPHI forum
synthèse n°1 « experts ETP »
synthèse n°1 « psychologues »
synthèse n°2 « experts ETP »
Focus groupe comprenant des
« patients », « experts ETP » et
« psychologues »
Construction et animation de l’atelier-discussion visant à promouvoir le rôle du
psychologue en ETP à travers la construction d’un référentiel sur les compétences et les
facteurs favorisant l’intégration des psychologues dans les services pratiquant
l’ETP
synthèse finale « experts ETP »
Définition commune du rôle
du psychologue en ETP
Analyse des entretiens
synthèse finale « psychologues »
synthèse n°2 « psychologues »
3ème tour : lecture synthèse n°2
+ 3 questions
26
4. PRESENTATION DES RESULTATS
Nous présentons et analysons ici les éléments recueillis quant à la perception de chacun
des trois groupes sur le rôle du psychologue en ETP.
Ayant procédé à l’aide de questions ouvertes lors de nos échanges avec les participants,
nous avons tenté d’organiser les réponses avec comme trame, nos deux hypothèses
opérationnelles. Nous les rappelons :
1/ Le psychologue de par ses spécificités a un rôle à jouer au sein d’un programme d’ETP
pour des patients chroniques.
2/ Le psychologue de par ses spécificités a un rôle à jouer au sein du développement d’un
travail professionnel interdisciplinaire.
Trois angles de réflexion paraissent apporter des éléments de réponses à ces
hypothèses. Il en suit qu’il parait judicieux d’appréhender la présentation et l’analyse des
résultats comme s’articulant autour du rôle du psychologue avec le patient puis avec et au
sein d’une équipe pluridisciplinaire et enfin, aux différentes étapes de la démarche en ETP,
ceci pour apporter une vision de terrain aux éléments recueillis.
Chacune de ces trois parties tient compte des perceptions du groupe de patients, du
groupe d’« experts ETP » puis du groupe de psychologues. Cela permet de faire émerger les
convergences et les divergences sur le sujet. Egalement, ces propos permettent d’introduire
les différents éléments recueillis lors du focus group pour obtenir une définition commune sur
le rôle du psychologue en ETP, avec le patient, avec l’équipe puis aux différentes étapes de
la démarche.
Des cartes conceptuelles présentées en annexes relatent la perception globale de
chacun des trois groupes de manière indépendante. Elles viennent éclaircir de façon imagée
ce recueil de données. Cela permet, de notre point de vue, une appropriation plus évidente
du contenu des réflexions des trois groupes de façon indépendante.
4.1 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE AVEC LE PATIENT
4.1.1 LA PERCEPTION DES PATIENTS
Pour les patients ayant participé à l’étude, rencontrer un psychologue lors de leur
participation à un programme d’ETP semble important pour :
27
POUVOIR PARLER LIBREMENT A QUELQU’UN
Rencontrer un psychologue, c’est « pourvoir parler à quelqu’un librement de ce qui
nous tracasse ». Son aide permettrait d’ « analyser la dépression, le mal-être » mais
également de « réfléchir », « pour faire le point, la part des choses ». En outre, « prendre
conscience » de certaines choses, en « creusant dans son vécu » parait alors central.
ACCEPTER LA MALADIE
L’une des premières « missions » du psychologue serait d’aider « à admettre la
maladie ». Selon l’un d’entre eux, «il faut admettre qu’on est malade, qu’on a besoin des
médicaments ou de la machine », chose « pas évidente ». L’un d’entre eux explique :
« puisque chaque malade ne sait pas qu’il est malade, si on lui dit qu’il est malade et qu’on
lui apprend à se soigner c’est déjà bien » et ajoute « il faut que le patient fasse ce qu’il faut
pour se soigner » sinon « la maladie nous tue à petit feu ».
GERER LA MALADIE
Aux côtés des autres membres de l’équipe, le psychologue aurait un rôle dans la
gestion de la maladie. En effet, « le quotidien de la maladie n’est pas facile à vivre ». « Si on
apprend aux gens à la gérer ou pour une grande partie, c’est déjà beaucoup ».Un autre
ajoute : « dès qu’on arrive à mieux gérer sa maladie, après, le reste peut aller tout seul ». A
ce niveau ci, le psychologue interviendrait pour « apporter les clés pour solutionner certains
problèmes » et pour cela, « faire ressortir les points forts ». Enfin, « mieux vivre sa maladie »
aurait, selon deux patients, des conséquences positives sur « une certaine hygiène de vie ».
AVOIR UNE MEILLEURE CONNAISSANCE DE SOI ET DE SA MALADIE
Pour apprendre à gérer sa maladie, les patients expliquent qu’il faut avant tout
apprendre à « mieux se connaitre et connaitre sa maladie ». A cet effet, les ateliers ou
rencontres en groupe paraissent appropriés. Effectivement, « ça permet de parler avec
d’autres patients, d’apprendre des choses sur la maladie » car « c’est vrai qu’en faisant des
séances d’ETP, y a des fois où on mélange tout et de se dire « c’est vrai !, ça c’est ça », on
arrive à mieux comprendre la maladie donc on arrive à beaucoup mieux la gérer ». Un autre
explique que « ça rassure et ça permet de partager les solutions et les problèmes ». Par
conséquent, « ce n’est pas elle qui prend le dessus sur nous, c’est nous qui prenons le
dessus sur elle ». Ces temps d’échanges permettent alors de « montrer aux gens qu’on peut
faire plein de choses » et « de ne pas s’enfermer dans la maladie ».
28
DECULPABILISER
Un patient confie que « la psychologue a créé un lien parce que quand on est
malade, on se sent un peu seul ». Nous comprenons qu’à travers ces rencontres animées
par le psychologue, les patients peuvent « apprendre à déculpabiliser ». Une patiente
confie : « des fois je culpabilise », alors « quand on peut en parler avec des gens, ça aide ».
Elle dit en effet, « comprendre que les problèmes qu’on a eu sont tout à fait normaux ». Pour
un autre, « il faut bien se rendre compte que notre cas n’est pas unique ». Un dernier
raconte que « ça fait du bien d’être avec des gens avec qui on peut se sentir normaux parce
qu’on est pareils ». Un patient explique que par la suite ils vont « échanger les vécus », ce
qui favoriserait alors « la possibilité de rendre l’avenir plus agréable ». Si une dynamique
positive peut être instaurée ; le groupe peut alors commencer à « chercher des solutions ».
Cependant, il est important de mentionner que si pour la majorité des patients, les
échanges collectifs semblent bénéfiques, tous ne souhaitent pas y participer. Une patiente
explique : « je ne veux pas que certains connaissent ma vie et mes problèmes ».
MIEUX VIVRE LA MALADIE
De façon générale, le soutien du psychologue permettrait de « mieux vivre la
maladie » car « ça favorise le bien-être ». Cela encouragerait « l’exploitation de l’énergie » et
« donnerait de la force » car « on a tous de l’énergie en soi mais on sait pas l’exploiter ». Le
psychologue « rasure » et permettrait « d’aller vers l’essentiel ». Plus précisément, cet
accompagnement « peut être très très bénéfique dans la mesure où il met l’accent sur les
points faibles et il peut développer surtout les points forts ». « Il faut sortir le bien qui est une
béquille ». Il peut permettre de « donner la confiance pour rebondir, et pour s’appuyer sur
des bases fortes ». « A partir de là, on peut avancer ». Pour avancer, plusieurs patients
rencontrés confient que ce dialogue contribue à « penser à soi ». Le « respect de soi » parait
primordial « pour vivre mieux pour les autres et ne pas se dévitaliser parce que quand on
s’enferme !». Ce dernier raconte : « avant mon passage à la clinique, je ne m’octroyais pas
de repos, je me respectais pas parce que je n’écoutais pas ce que mon corps et mon esprit
me donnaient ». Il conclut : « j’étais en souffrance, j’ai appris à me respecter pour vivre
mieux ». Par ailleurs, les patients attendent du psychologue un travail sur « la confiance en
soi ». L’un d’eux avance à ce propos : « j’ai appris à dire non, une chose que je ne savais
pas dire, quand vous avez appris à dire non, tout s’équilibre et tout s’accomplit ».
GERER SON STRESS
Pour mieux vivre sa maladie et se sentir bien, nombre de patients réclament une
intervention du psychologue pour les guider dans « la gestion du stress » au quotidien. Pour
29
eux, la première étape serait de « déceler les causes ». Une patiente explique : « derrière un
stress, il y a eu quelque chose de passé donc il faut traiter avant que ça aille trop loin », « le
psy a beaucoup de clés, il peut poser des questions bien fines pour déceler si avant il y a eu
des choses ». L’étape suivante serait l’apport de « solutions pour mieux gérer son stress ».
Cela pourrait comprendre l’apprentissage « d’exercices de respiration » ou « de relaxation ».
Une patiente raconte qu’une psychologue de sa structure de soins lui avait transmis des
techniques de relaxation à entreprendre seule à la maison. Elle dit s’y employer « des fois »
quand elle a eu « des journées difficiles », ça l’aide « pour s’endormir ». Elle ajoute : « y
avait une patiente qui avait peur des aiguilles, si elle avait connu l’exercice de respiration
avant, ça aurait été mieux ». Une autre explique qu’elle pratique « des séances de
réflexologie » à l’extérieur et que ça lui « apporte un bien fou ».
FAVORISER LE LIEN AVEC LES SOIGNANTS
Par ailleurs, selon les patients, un des rôles non négligeables du psychologue dans le
domaine de l’ETP serait de favoriser le lien avec les soignants. Il semble important pour eux,
que le psychologue tente de « voir si la personne est réceptive par rapport à ce que les
médecins ou infirmières peuvent lui dire ou pas ». Il représenterait alors un intermédiaire qui
pourrait alors « apporter de la nuance aux interdits, aux discours des médecins ». Un patient
exprime le fait qu’il « y a des grandes lignes, et après, faut vivre quoi ! ».
Nous notons que rencontrer un psychologue travaillant au sein de la structure
fréquentée semble tenir à cœur aux patients. En effet, « l’avoir ici, c’est mieux parce que
dans le privé, je suis allée en voir mais y en a, elles ne savent pas ce que c’est notre
maladie donc c’est un peu plus compliqué ». « Moi, j’avançais pas, je n’avais pas
l’impression d’avoir une écoute en face de moi ». Ici, « à force, y a une confiance qui
s’installe » et « c’est pas un psy qui vous reçoit dans son cabinet derrière son bureau ». « Je
sais que si elle n’avait pas été là, je serais vraiment mal et déprimée, j’ai réussi à bien
remonter alors que j’avais pas un bon vécu à l’extérieur ». Une autre explique que rencontrer
un psychologue qui n’intervient que très ponctuellement au sein de la structure de soins n’est
en rien bénéfique. Elle confie, « on a été inscrit parce que c’était le parcours. Ce psy, je suis
désolée mais il m’a rien apporté. Je n’étais pas la seule, nous étions une dizaine autour de la
table, on a pas fait tilt avec ses trucs ». Mais deux d’entre eux admettent que cela « dépend
aussi de la personnalité » du professionnel. La plupart ajoutent que « pour que ça
fonctionne, faut que la personne le veuille, que le patient soit ouvert à ces thérapeutiques »,
qu’il ait « confiance » et que « les barrières soient coupées avec de l’humain, du naturel ».
30
4.1.2 SELON LES « EXPERTS ETP»
Les experts semblent accorder une importance particulière au travail du psychologue
avec les patients. Ils situent son intervention à des niveaux distincts et y perçoivent certaines
limites.
SON ROLE AVEC LES PATIENTS
REPERER LES TROUBLES PSYCHOLOGIQUES
La première mission du psychologue intégré dans un programme d’ETP est, selon ce
groupe d’ « experts », de repérer et de « prendre en charge des patients présentant des
problèmes d’ordre psychologique ». Nous comprenons ici que son rôle est alors d’identifier si
oui ou non le suivi du programme est envisageable pour tous les patients. Si tel n’est pas le
cas, le psychologue devrait en informer son équipe.
ETRE A L’ECOUTE
De façon générale, ce professionnel « est à l’écoute » du patient. Il « explore » avec
le patient « ses représentations de façon plus spécifique et professionnelle ».
ABORDER : LE VECU ET L’ACCEPTATION DE LA MALADIE
Il accompagne le patient dans « le vécu de sa maladie » en l’aidant « à verbaliser ses
besoins propres » en fonction de sa pathologie. Ce dernier peut ainsi « faire des liens » et
« prendre conscience de son processus de raisonnement ». Cette démarche peut conduire
la personne vers « l’identification de son stade d’acceptation de la maladie ».
LA GESTION DE LA MALADIE
Le rôle du psychologue est également d’accompagner le patient dans la « gestion de
sa maladie ». Le malade chronique doit gérer « sa santé » au quotidien et aurait besoin, pour
cela, d’une aide dans « sa nouvelle vie ». Les « experts » parlent ici d’ « adaptation
psychoaffective à la maladie chronique ». La mission du professionnel est alors « d’aider » la
personne dans « le développement de son sentiment d’auto efficacité » en travaillant
notamment sur son « estime personnelle ».
31
ANALYSER LES TROUBLES DE L’HUMEUR ET DU COMPORTEMENT
Afin d’optimiser ces différents éléments, le psychologue travaillant en ETP ne doit en
aucun cas négliger l’analyse « des troubles de l’humeur et du comportement ». Tout comme
« les conflits de vie », ces derniers peuvent « entraver » le suivi d’un « programme d’ETP ».
IDENTIFIER LES RESSOURCES ET DIFFICULTES
Une des tâches du psychologue dans ce domaine est, selon eux, « d’identifier les
difficultés et les ressources » du patient, autrement appelés « freins et leviers » pour « fixer
des objectifs d’éducation qui lui sont propres », « les conforter ou les réajuster ».
TRAVAILLER LES MOTIVATIONS
Un travail de « renforcement de la motivation au changement » semble crucial pour
élaborer une réflexion autour des « stratégies d’adaptation à la chronicité de la maladie ».
FAVORISER LE DEVELOPPEMENT DE COMPETENCES PSYCHO-SOCIALES
Afin de pouvoir « mettre en action » ces stratégies d’adaptation, le professionnel
devrait aider la personne à « développer des compétences d’adaptation à la maladie
chronique ». Ils parlent alors de « savoir-être ». Rentrent en considération ici également le
« développement du sentiment d’auto-efficacité et de l’estime personnelle ».
PRENDRE COMPTE DES FACTEURS SOCIO-CULTURELS
Selon certains, le psychologue serait le plus apte de l’équipe à prendre en compte au
cours du suivi du patient « les facteurs socioculturels » tels que « la religion ou la culture ».
INCLURE L’ENTOURAGE
Enfin, tout au long de leur réflexion, les experts ont mentionné que le psychologue
devrait veiller à inclure dans son travail l’entourage du patient dès que possible.
LES LIMITES DE SON ROLE
Pour certains membres de ce groupe, le rôle du psychologue semble se cantonner à
une approche individuelle avec les patients. En effet, l’un d’entre eux explique que « sa place
peut être plus difficile à trouver dans les séances collectives dans lequel il ne peut faire une
thérapie de groupe ou une thérapie individuelle en groupe ».
32
4.1.3 SELON LES PSYCHOLOGUES
SON ROLE AVEC LES PATIENTS
Selon eux, rencontrer un psychologue en ETP peut permettre au patient de :
POUVOIR « DEPOSER SON FARDEAU »
Le patient, de par la présence d’un psychologue au sein d’un programme d’ETP
aurait la possibilité « d’être écouté ». Il s’agit pour le professionnel « d’accueillir la parole »
du patient « pour soulager » et « établir une relation de confiance ». Le malade est alors
« invité à se confier » et peut « parler de choses très personnelles ». Le psychologue
« reconnait la souffrance et/ou la colère du patient ». Ce rapport alors instauré, permettrait
« d’assouplir l’aspect parfois rigide du cadre ».
EXPLORER SES « REPRESENTATIONS »
Avec l’aide du psychologue, le patient pourrait « explorer ses représentations de la
maladie » et « faire des liens ». Selon certains psychologues, le patient pourrait « repérer
l'impact des antécédents familiaux sur la perception de sa pathologie » et alors émettre des
« liens entre les évènements de la vie et les répercussions sur sa santé psychique ».
ABORDER SON « VECU DE LA MALADIE »
A travers l’expression de ses « ressentis », est offert au patient « un espace de
parole » et « de pensée » lorsqu’il a « le désir de parler de ce qu’il a vécu ». Il s’agit alors de
« donner du sens », afin « qu'une expérience vécue devienne pensable humainement ». Le
psychologue se doit alors d’« être attentif aux étapes de la vie que traversent les patients, à
l’impact de la maladie sur sa vie relationnelle… ». Il doit adopter « une fonction contenante
qui permet de penser et de métaboliser les expériences vécues ».
ACCOMPAGNER LE CHEMINEMENT VERS L’ACCEPTATION DE LA MALADIE
Il semble être important pour les psychologues d’aider le patient à « repérer où il en est
dans le cheminement de sa maladie chronique ». Ce dernier doit être « accompagné dans
l’acceptation de sa maladie », en ayant la possibilité « d’exprimer ses inquiétudes, ses peurs
des complications, ses révoltes, dénis, ou son incompréhension face à sa pathologie… ». Il
s’agit ici de « mettre du sens sur les résistances ». Cependant, la nécessité d’ « accepter la
temporalité de chacun » et de « ne pas chercher à faire tomber les défenses qui par
définition protègent le sujet », parait primordiale pour ce groupe de psychologues. Il s’agirait
uniquement d’ « ouvrir par la parole » et de « soutenir les patients dans leur légitimité à
33
avancer à leur rythme et ce, en effectuant des compromis qui leur sont acceptables même si
cela n'est pas l'idéal pour les objectifs soignants ».
PARTICIPER AU MAINTIEN DE LA QUALITE DE VIE
Les psychologues ont abordé l’importance de garder à l’esprit, dans leur travail avec
les patients, le maintien d’une qualité de vie acceptable.
TRAVAILLER SUR L’IMAGE DE SOI
L’image de soi est, selon ce groupe, un élément central à travailler avec les patients
vivant avec une maladie chronique. En effet, « renforcer une réappropriation de leur corps »
semble constituer une étape non négligeable dans cet accompagnement.
PRENDRE EN COMPTE LES TROUBLES DE L’HUMEUR
Les psychologues ne dérogent pas, en ETP, à une de leurs missions traditionnelles
qui serait de « prendre en compte l'humeur du patient (syndromes anxio-dépressifs..) ».
ACCOMPAGNER POUR PRENDRE CONSCIENCE ET EXPRIMER SES RESSOURCES ET DIFFICULTES
Lors du suivi d’un programme d’ETP, le patient est amené à prendre conscience et
exprimer ses « difficultés liées à la maladie ». Le psychologue devrait l’aider à identifier les
« freins » et les « résistances » au changement de comportement. Afin de les dépasser, le
psychologue devrait valoriser les « ressources » du patient. « Porter attention à d’autres
aspects de la vie » que les volets médicaux à savoir « ses goûts, projets, vie
relationnelle… » semble crucial pour « oser le changement sans être englouti dans un
sentiment de perte ».
TRAVAILLER SUR LES MOTIVATIONS
Une fois les ressources et difficultés identifiées, le rôle du psychologue serait de
« travailler sur les motivations » en faisant émerger chez le patient « ce qui peut donner
envie d'opérer des changements tout en reconnaissant le prix psychique ».
PERMETTRE AU PATIENT D’ « ETRE ACTEUR DE SA SANTE »
Le rôle du psychologue serait ici d’ « ouvrir une voie parallèle et complémentaire à celle
strictement médicale » pour permette au patient « de se sentir acteur de son avenir ». Le
patient devrait être guidé vers une « prise de conscience » de « la responsabilité de ses
actes » et ce, « non pas pour le culpabiliser mais pour lui ouvrir des pistes de réflexion qui
pourraient l'aider à amorcer des changements profonds dans sa conception de la vie ». Il
34
faut cependant ne pas « risquer de perdre son identité et le goût de vivre ». Il s’agit en fait,
pour le patient, de « Retrouver un certain contrôle sur sa santé et un bien être ».
AMENER A DEVELOPPER DES COMPETENCES PSYCHO-SOCIALES
Conduire le patient vers « un développement de ses capacités d’auto-surveillance,
d’auto soin, d’adaptation et de réajustement de la thérapeutique à son mode de vie » ferait
partie intégrante du rôle de ce professionnel. La « gestion du stress » est également
évoquée.
IMPLIQUER L’ENTOURAGE
La prise en compte de l’entourage se situe à deux niveaux. En premier lieu, cela peut
constituer un véritable appui pour le patient. En effet, son entourage peut l’« aider à repérer
ses compétences ou ses difficultés » pour « trouver ensemble des solutions ». En second
lieu, « faire participer les proches aux ateliers sur le vécu psychologique de la maladie » peut
leur permettre de « partager la façon dont ils font face, eux mêmes à la maladie ». Cela leur
donne ainsi la possibilité de « parler de leur rôle d’aidant, de leurs difficultés, freins et
résistances à l’acceptation de nouvelles adaptations ordonnées par la maladie ».
LIMITES DE SON ROLE ATTENTION A UNE POSTURE TROP EDUCATIVE
Selon ce groupe de participants, le psychologue doit veiller à ne pas adopter une posture
proprement éducative avec les patients. Il ne doit pas « standardiser le patient » et « éviter
l'écueil du bon patient avec un dressage » en lui laissant « toute la responsabilité et donc la
culpabilité en cas d'échec ou de difficultés ». Le psychologue ne doit pas « penser qu'en
terme d'observance ». Il « faut être vigilant quant au sentiment d’insatisfaction ».
4.1.4 VERS UNE DEFINITION COMMUNE : FOCUS GROUP
Nous rappelons que ce focus group a regroupé des membres de chacun des groupes
ainsi qu’une anthropologue de la santé et avait pour objectif, à partir des résultats des
éléments recueillis avec les trois groupes, d’établir une définition commune du rôle du
psychologue en ETP.
Concernant son rôle avec les patients, un consensus s’est établi autour des éléments
suivants :
35
- Ecouter, rassurer, favoriser le bien-être.
- Faire verbaliser aux patients leurs représentations et affects en lien avec leur(s)
maladie(s), déposer leur fardeau, faire le point, mieux se comprendre, les conduire
vers une prise de conscience.
- Elaborer un travail autour de la qualité de vie, l’image de soi, l’estime de soi,
l’acceptation de soi, le respect de soi, la confiance en soi, l’estime personnelle
- Aborder le vécu et l’acceptation de la maladie
- Analyser et prendre en compte l’humeur des patients (dépression, anxiété, mal-
être…)
- Faire ressortir des points forts, donner de la force, permettre de déculpabiliser
- Expliquer et nuancer les messages des médecins
- Amener les patients à exploiter leur énergie et gérer leur stress
- Initier une motivation au changement ainsi qu’un sentiment d’auto efficacité
- Développer des compétences d’adaptation à la maladie pour mieux vivre la maladie.
- Amener le patient à être acteur de sa maladie, à la gérer au mieux et à adopter une
hygiène de vie saine
- Favoriser un soutien psychosocial en prenant en compte l’entourage des patients
Lors de ce temps d’échanges, une psychologue a spécifié que pour elle, « il est difficile
de différencier ce qui est de l’ordre de l’ETP et de nos missions en général » avec les
patients. Il semble que pour elle comme pour beaucoup de psychologues (au sein du forum),
la majorité des éléments ici cités ne sont pas spécifiques à l’ETP mais font partie des
missions traditionnelles du psychologue. Un consensus existe ici sur le fait que parmi ces
aspects, « il existe des compétences à développer chez les autres professionnels
soignants ». L’anthropologue mentionne cependant que le psychologue « doit faire valoir ses
spécificités ».
Plus généralement, alors qu’un diététicien exprime le fait que « ça manque de
psychologues dans les structures », un patient ajoute simplement que « ça manque de
dialogue et de compréhension ! ».
4.2 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE AVEC L’EQUIPE
4.2.1 SELON LES PATIENTS
36
UN MEMBRE A PART ENTIERE DE L’EQUIPE
Pour les patients, le psychologue semble bien faire partie intégrante de l’équipe en
ETP. Il n’est donc pas perçu comme un maillon indépendant. L’un d’entre eux explique que
dans ce domaine, « tout le monde doit travailler ensemble » et que « les uns ne vont pas
sans les autres ». Les notions de « complémentarité » et de « cohérence » sont très
présentes dans leurs propos. Pour l’un d’entre eux, « travailler en équipe permet de se
remettre en question ». Ils avouent avoir « besoin de tous dans un même endroit pour mieux
avancer ».
GARANT D’UNE APPROCHE HUMANISTE
Cependant, le psychologue aurait un rôle à jouer auprès de l’équipe. Il garantirait une
« approche plus humaine » et « non dictatoriale » en aidant parfois les soignants à « adapter
le discours » aux spécificités de chaque patient. Il pourrait permettre à l’équipe de «
comprendre des comportements » et de considérer le patient « en tant qu’humain » avec
« un physique mais aussi un psychique ».
4.2.2 SELON LES « EXPERTS ETP»
La présence du psychologue au sein d’une équipe en ETP semble être opportune
pour :
UNE APPROCHE GLOBALE DU PATIENT
Le psychologue, de par son « recul » apporte une « approche globale » du patient. Il
semble alors être davantage considéré comme une personne avec un « vécu », des
« ressentis » et des « perceptions » qui lui sont propres. Ce professionnel saurait « valoriser
la personne » afin que l’équipe puisse s’appuyer sur ses ressources et spécificités. Il
« donne du sens à l'histoire de l'individu, à son parcours de vie avec ou sans maladie ». Un
« expert » raconte « leur présence dans l'équipe a apporté beaucoup d'humanisme dans les
relations et des changements d'attitude progressifs vis à vis des patients ». En effet, un autre
explique que sa présence leur aurait permis de « mieux connaitre les patients, sous des
angles que les soignants "biomédicaux" n'abordaient pas spontanément ».
FAVORISER LA COMMUNICATION ENTRE SOIGNANTS ET SOIGNES
Le psychologue parait également pouvoir favoriser une bonne communication entre
les patients et l’équipe. Il peut « faire le lien avec les patients » ou même « désamorcer des
situations critiques » en « adoptant la bonne attitude ». Il saurait « apporter une expertise
37
dans les échanges » et ainsi « expliquer les conduites du patient » voire « ses problèmes
psychologiques », « ses attentes », « ses projets » ou « son évolution ». Cela enrichit alors
la vision qu’a l’équipe du patient. Il constituerait « une aide précieuse pour optimiser la
relation au quotidien ». Son rôle semble donc se poser comme très « complémentaire » à
celui des autres membres de l’équipe. Cela nous parait incontournable de mentionner que ce
groupe de participants accorde, dans ce même souci de complémentarité, une importance
particulière à la transmission de notes cliniques pour les aider dans leur prise en compte du
patient dans sa globalité et pour pouvoir ajuster leurs pratiques.
SOUTENIR LES EQUIPES DANS LEUR TRAVAIL
Bien que cette position ait été très discutée au cours des échanges, certains attribuent au
psychologue travaillant en ETP, un véritable rôle de soutien pour les équipes. Selon l’un
d’entre eux, « son écoute privilégiée est une ressource pour les soignants ». Une personne
raconte qu’au sein de son équipe, « la vision et le recul du psychologue » auraient aidé « à
la remise en question » et ajoute : « ses qualités nous font dépasser nos doutes ».
AMENER L’EQUIPE A SE QUESTIONNER
A un premier niveau, les participants le considèrent comme une ressource pour
« amener l'équipe à se questionner sur sa pratique pour éviter la routine qui peut entraver la
démarche éducative ». Il « soutiendrait et renforcerait le lien dans les
équipes pluridisciplinaires » et permettrait aux coordonnateurs de programmes « d'interroger
et mieux comprendre les fonctionnements interpersonnels au sein de l'équipe ». Il serait à
même de « mettre en place des groupes de travail sur l’éducation thérapeutique » en
proposant « des temps d’échanges et de réflexions sur les pratiques en ETP, sur l’éthique,
les représentations sociales, la stigmatisation, le poids des normes, etc… ». Enfin, il aiderait
à « travailler sur l’amélioration et le développement des ateliers ». En effet, une personne
explique que la psychologue de son équipe a aidé à « développer de nouvelles compétences
au sein de l'équipe (relationnelles), partager des outils et des façons de faire différentes ».
Une autre regrette « le peu de lien » que le psychologue de son équipe entretient avec ses
collègues soignants. Elle déplore le fait qu’il n’y ait « pas d'enrichissement des compétences
de l'équipe », registre qui dépend de l’initiative de la psychologue.
38
APPORTER UN SOUTIEN PERSONNEL POUR LES MEMBRES DE SON EQUIPE ?
Pour certains, le psychologue apporterait « un soutien » aux membres de l’équipe qui
peuvent être objets « de découragement, d’épuisement ou de vulnérabilité ». Il pourrait
proposer « des temps d’expression et de régulation ou des espaces de parole ».
D’autres considèrent ces éléments comme relevant d’« une prise en charge
supplémentaire faute de compétences des soignants éducateurs ». Il s’agirait pour eux
davantage d’ « une équipe en ETP "multi-compétences", qui avance sur un même chemin
avec le patient, mais avec plusieurs moteurs ». Selon ces derniers, il faut faire « attention à
la confusion des rôles ». « Jusqu'à quel degré le psychologue doit s’impliquer ? ».
4.2.3 SELON LES PSYCHOLOGUES
Les psychologues interrogés situent leur propre rôle avec les équipes en tant que :
GARANT D’UNE APPROCHE HUMANISTE
Le psychologue serait, au sein de l’équipe, le « représentant psychique du patient »
et garantirait une « approche globale ». Sa « déontologie » et son point de vue
« humaniste » placent le patient « au centre de l’ETP ». Il contribuerait à « faire reconnaitre
institutionnellement » « la complexité de l'être humain » et favoriserait alors « la
différenciation de la prise en charge du service vers un programme centré sur l'individu-sujet
plutôt que sur les objectifs ». C’est de ce point de vue que, selon un des psychologues
interrogés, « cela permet aussi de faire émerger une réflexion collective particulièrement
riche et constructive au sein de l’équipe ». Pour appuyer ces propos, une psychologue
explique : « Au fur et à mesure, nous constatons une approche différente du patient par les
équipes, elles mettent du sens sur la non observance du traitement et sont moins dans le
jugement, plus empathiques et plus disponibles ». Les « représentations semblent évoluer »
et décoller du « biomédical ».
MEDIATEUR
Le rôle de ce professionnel serait également de « favoriser la communication entre
les soignants et les patients ». Cela se met en place tout d’abord en ne « transmettant à
l'équipe que ce qui est important dans la compréhension du ressenti du patient ».
« Eclairer l’équipe sur des éléments de compréhension et de questionnement du patient
dans sa globalité (histoire du sujet, famille, couple, profession) » semble se situer au cœur
de sa mission. Il peut alors « aider une équipe à repérer la trajectoire d’acceptation de la
maladie » afin qu’elle puisse « lui proposer » des « objectifs d’ETP qui tiennent compte de
39
ses spécificités ». Cela suppose par exemple le fait d’ « interroger les équipes sur leurs
projections personnelles par rapport à la façon dont on doit s'adapter à sa maladie ».
ACTEUR D’UN TRAVAIL EN COMPLEMENTARITE
De par ses spécificités, le psychologue apporterait donc, des compétences
complémentaires et utiles à son équipe. Il aurait alors, au même titre que les autres, sa place
lors de « la création du programme ». Il pourrait « proposer de nouveaux ateliers ETP en
fonction des attentes et des besoins » repérés chez les patients. Il serait par exemple, apte à
« animer des ateliers spécifiques sur le vécu de la maladie, les représentations ou les
croyances » vis-à-vis de la maladie.
Le psychologue pourrait également partager « l’utilisation d’outils
psychopédagogiques » favorables à la communication, à l’écoute et à la compréhension du
patient et ainsi « sensibiliser les soignants « aux dynamiques de groupes ». Il trouverait donc
sa place dans la « co-animation d’ateliers thématiques ». Son rôle serait alors de veiller à
« l’accueil des patients, au choix des règles de fonctionnement du groupe, à l’expression des
ressentis… ». En effet, il serait « présent, observateur et attentif à tous ».
Les expériences semblent très diverses quant au positionnement du psychologue
dans l’équipe. En effet, l’un d’eux raconte : « c’est très dynamique et riche de travailler au
sein d'une équipe pluridisciplinaire car il y a toujours des idées qui émergent et nous
échangeons beaucoup ». En revanche, un autre explique que « ça n’a pas toujours été facile
de trouver sa place au sein d’une équipe travaillant en ETP ».
LIMITES DE SON ROLE
Une des limites principalement mentionnées par les psychologues quant à leur rôle
avec les équipes est la difficulté « de ne pas empiéter sur la spécialité de chacun ». En
effet, selon eux, « le patient a parfois du mal à s'y retrouver et pose des questions sur les
traitements », « on peut être tenté de répondre » mais il « faut recadrer à cet instant ».
4.2.4 VERS UNE DEFINITION COMMUNE : FOCUS GROUP
Un consensus s’est également établi lors de cette table ronde autour des spécificités
du rôle du psychologue avec et au sein d’une équipe de professionnels soignants travaillant
en ETP. Selon les participants, le rôle du psychologue est ici de :
- Favoriser une approche humaniste en considérant le patient avant tout en tant que
personne
- Permettre à l’équipe de mieux connaitre le patient et ce, dans sa globalité
40
- Permettre à l’équipe de mieux comprendre certains comportements des patients
- Permettre à l’équipe d’adapter parfois son discours et d’utiliser des techniques de
communication
- De renforcer les relations et la communication entre les soignants et les patients
- De formaliser une transmission de données pouvant être utiles à l’équipe dans sa
pratique pour le suivi des patients
- Favoriser au sein de l’équipe une certaine remise en question
Une question fait débat : est-il du rôle du psychologue de mettre en place un soutien et
une régulation avec notamment des espaces de parole pour les soignants quand cela
s’avère nécessaire ?
Au vu des premiers éléments cités ici, une psychologue a partagé le fait que, ce que lui
« apporte l’ETP, c’est la dynamique d’équipe, discuter, échanger… » et ajouté « on construit
tout ensemble ». Cependant un « expert » n’a pas omis de mentionner qu’en ETP, « il peut y
avoir de la multidisciplinarité sans interdisciplinarité ! ».
En revanche, une psychologue et un expert expriment le fait que « pour la régulation
d’équipe, c’est bien que ce ne soit pas du rôle du psychologue de l’équipe ».
Plus généralement, une « experte » a, dans ce cadre de références, « l’impression ici
d’un psychologue tout sauveur ! ».
4.3 LE ROLE DU PSYCHOLOGUE DANS LA DEMARCHE EN ETP
Ces trois sous parties ont pour objectif de situer au cours des différentes étapes de la
démarche le rôle du psychologue à la fois avec les patients et avec les équipes. L’objectif est
donc de mieux visualiser à quels moments le psychologue intervient et sur quelles
thématiques. Tous les éléments évoqués précédemment ne seront donc pas repris pour
éviter trop de répétitions.
4.3.1 SELON LES PATIENTS
EN AMONT DE LA DEMARCHE
Le psychologue pourrait intervenir « dès qu’on décèle la maladie » car « c’est bien joli
une pilule mais ça fait pas tout ! ». Un autre patient explique que « certaines personnes
viennent contraintes et forcées » suivre un programme d’ETP et selon lui, « ça pourrait
débloquer des réticences ».
41
LORS DU DIAGNOSTIC EDUCATIF
Le psychologue pourrait « voir les points à prendre en considération en fonction des
personnes ». Un patient illustre bien cette idée : « pourquoi je vais prendre mes
médicaments si je me dis que ça sert à rien ? » ou « pourquoi je vais faire attention à ce que
je mange si je suis pas conscient du danger ? ». Egalement, en complément d’un autre
membre de l’équipe, le psychologue peut identifier « les motivations ». La notion de
complémentarité est bien présente, « ils pourraient communiquer sur le suivi ».
LORS DE LA CONSTRUCTION DU PROGRAMME ET DES ATELIERS
Il « enrichit » et « aide l’équipe à arborer « une approche plus humaine que
technique ».
LORS DU DEROULEMENT DU PROGRAMME
Les patients souhaitent rencontrer le psychologue en « entretiens individuels » pour
installer « des bases solides ». Egalement, les ateliers de groupes animés par un
psychologue semblent adaptés à des thématiques telles que le vécu et la gestion de la
maladie entre autres et créent du lien entre les patients.
LORS DE L’EVALUATION DES ACQUIS DES PATIENTS
Il aiderait le patient à « mieux appréhender l’impact, les changements qu’un toubib ou
un diététicien » auraient apprécié en veillant à « faire ressortir les points positifs »
notamment.
EN AVAL DES SEANCES D’ETP INITIALES
Enfin, aux côtés d’autres membres de l’équipe, le psychologue pourrait intervenir 3,6
et / ou 12 mois après le programme (selon les programmes) pour « maintenir ou remotiver »
les patients dans une gestion adaptée de leur maladie en fonction des priorités de chacun.
4.3.2 SELON LES « EXPERTS ETP»
EN AMONT
A ce moment précis, le rôle du psychologue serait de déceler et prendre en charge
des patients ayant des problèmes d’ordre psychologique ».
LORS DU DIAGNOSTIC EDUCATIF
C’est bien dans la mesure où ce professionnel serait celui qui « connait le patient »
que le psychologue aurait un rôle à jouer ici. Il serait le plus apte pour aider le patient à
« explorer ses représentations », ses « ressources et difficultés ». Le patient pourrait ainsi
42
plus facilement aborder « son histoire et son vécu de la maladie », ce qui permettrait d’établir
un rapport de confiance et de le situer dans sa globalité. C’est également à ce moment ci
que le psychologue pourrait identifier « le stade d’acceptation de la maladie du patient » et
ainsi aiguiller ses collègues dans leurs pratiques professionnelles. La personne pourrait
exprimer ses aspirations et « ses besoins » et ainsi « fixer ses objectifs d’éducation
propres ». Le psychologue est visiblement perçu comme la personne de l’équipe valorisant
le plus la subjectivité du sujet.
LORS DU MONTAGE DES SEANCES EDUCATIVES
Le psychologue aurait sa place ici, au même titre que les autres professionnels. Il
apporterait « une vision complémentaire » et aiderait alors « les membres de l’équipe à
aborder le patient autrement, se poser d’autres questions, se centrer sur son vécu, ses
ressentis, ses perceptions ». Selon eux, la construction des séances tiendra compte de
certains aspects visant à maintenir un respect des patients dans leur condition d’être humain
et pas seulement de « malades ». Au-delà de cette approche bienveillante, le psychologue
pourra partager avec les autres soignants, ses habitudes et « méthodes de travail », « ses
outils » et ainsi participer au transfert de compétences tant souhaité par ces derniers.
LORS DE L’ANIMATION DES SEANCES EDUCATIVES
Le psychologue pourrait intervenir « seul » avec le patient lors « d’entretiens individuels »
ou lors « d’ateliers de groupe ». C’est alors qu’il peut « être à l’écoute », les aider à
« verbaliser » des éléments « du vécu de leur maladie », les accompagner dans « la prise de
conscience de l’acceptation de la maladie » et bien d’autres choses citées précédemment.
Egalement, c’est lui qui visiblement, « maitrise le plus les entretiens motivationnels » et peut
alors guider le patient dans « la mise en place de stratégies d'adaptation à la chronicité ».
Concernant l’animation de groupes de patients, il semble également souhaité qu’il
intervienne en binôme avec un autre membre de l’équipe « spécialisé » sur le thème abordé.
Le psychologue se chargerait alors de « gérer les émotions exprimées » et de « guider les
échanges vers une évolution favorable » en adoptant « la bonne attitude, le bon discours ». Il
semble être doté d’une « expertise des échanges sociaux ». Son sens de l’ « observation et
son analyse lors d'une séance collective » permettrait de veiller à garder « une place pour
chacun » en adoptant une posture appropriée « (retrait, écoute, réponse, empathie…) ». Les
« experts » soulignent cependant le fait que le psychologue n’aurait « pas sa place, seul, si
la séance aborde des sujets plus spécifiquement de soins ou pathologie ».
43
LORS DE LA PHASE D’EVALUATION DES ACQUIS DES PATIENTS
Selon les « experts », le psychologue pourrait ici « amener l'équipe à se questionner
sur sa pratique ». Egalement, il participerait à la création d’outils d’évaluation en veillant à y
intégrer « les ressentis » et autres éléments subjectifs liés au parcours du patient. Des
critères d’ordre non biomédicaux seraient alors intégrés à « la démarche qualité ».
4.3.3 SELON LES PSYCHOLOGUES
Avec les patients et au sein des équipes pluridisciplinaires en ETP, les psychologues
formalisent et différencient leur travail à différentes étapes de la démarche.
LORS DE LA CONCEPTION DU PROGRAMME
Ils souhaitent « participer à la création du programme avec l’équipe ». Leur approche
« humaniste » apporterait, selon eux, au programme une dimension humaine et une écoute
attentive des patients. Ils peuvent proposer des ateliers en fonction des attentes repérées
des patients comme nous l’avons souligné précédemment.
Par ailleurs, ces professionnels se sentent légitimes et aptes à « coordonner
certaines activités de programmes ».
Comme nous avons pu le comprendre, ils pensent « pouvoir favoriser la réflexion
concernant les outils utilisés » en faveur de la compréhension et du respect des patients.
LORS DE L’ELABORATION DU DIAGNOSTIC EDUCATIF
Le psychologue se chargerait ici « d’accueillir la parole pour soulager et établir une
relation de confiance ». Le patient pourrait alors partager « des choses très personnelles ».
A ce moment précis et crucial pour la suite du parcours, il se placerait en tant que
« représentant psychique du patient » et pourrait alors « pointer son mode de
fonctionnement psychique ». Il porterait une attention particulière à d’autres aspects de la
vie » que les aspects biomédicaux. Le quotidien du patient prend ici tout son poids et son
sens dans son suivi en ETP. Par ailleurs, l’identification du cheminement d’acceptation de la
maladie pourrait permettre à l’équipe de « respecter la temporalité du patient » et une
certaine remise en question concernant les objectifs éducatifs des soignants ».
AU COURS DES ENTRETIENS INDIVIDUELS
Certains psychologues rencontrent « individuellement les patients dès leur arrivée »
pour créer du lien. Ces entretiens seraient, selon eux, souhaitables et envisageables tout au
44
long de la démarche en fonction des patients. En effet, en amont ou en parallèle de la
démarche éducative, « proposer un espace pour dire les deuils et les pertes vécus et subis
que la maladie » provoque s’imposerait et permettrait au patient « de trouver du sens et
d’intégrer par la suite, la possibilité de changement et donc d’adaptation à la maladie ».
AU COURS DES ACTIVITES EDUCATIVES
Les psychologues voient leur rôle en tant qu’élaborateurs d’ateliers spécifiques sur des
thématiques telles que les représentations, les croyances, le vécu de la maladie, les
ressentis….ou l’acquisition de compétences psycho-sociales.
Par ailleurs, la co-animation d’ateliers sur des thèmes spécifiques relevant des
compétences des soignants les intéresse. Selon eux, ils pourraient « faciliter les échanges,
le soutien entre les participants et aider à questionner et écouter autrement ». Le
psychologue installerait « une dynamique » intéressante en complémentarité avec ses
collègues soignants.
AU COURS DE L’EVALUATION DES ACQUIS DES PATIENTS
Cette phase de la démarche suscite beaucoup de questionnements chez les
psychologues. L’une d’entre eux explique que : « l'ETP formalise, cadre, décrit les outils,
procédures et pratiques que nous pouvions déjà avoir » et « oblige le psychologue à évaluer
sa pratique et faire part de ses résultats ». En revanche, certains ne comprennent pas
toujours son intérêt notamment au vu de la façon dont elle semble être amenée par les
instances supérieures. Selon eux, cette phase d’évaluation peut également permettre
« d’orienter les patients vers d’autres structures » alors plus adaptées pour les accompagner
dans leurs problématiques.
Nous notons que le rôle de médiateur entre les soignants et les patients (transmission,
réflexions, remises en questions, discussions…) semble s’établir tout au long de la
démarche et non pas spécifiquement à certaines étapes.
Bien que les psychologues semblent être globalement assez bien intégrés dans cette
pratique de l’ETP sur le terrain, ils perçoivent cependant de nombreuses difficultés et limites
liées à leur rôle tout au long de la démarche.
45
DES LIMITES
UNE RIGUEUR EXAGEREE ?
Tout d’abord, ils ne se sentent vraisemblablement pas toujours très à l’aise avec « le
cadre rigoureux » que requiert cette démarche en ETP. En effet, selon eux, il parait parfois
compliqué notamment lors du diagnostic éducatif de « faire en sorte de ne pas faire rentrer le
patient dans des cases ». De plus, « l’ETP peut parfois être lourd au niveau administratif où
tout doit être noté et évalué ».
UN PSYCHOLOGUE EDUCATEUR ?
Selon ce groupe, il parait « important que le psychologue ne soit pas dans l’éducation
stricte, c'est-à-dire qu’il ne s’agisse pas d’apprendre au patient à réagir de telle manière ». Il
doit, avec le patient, « conserver un apprentissage de compétences psychosociales autour
de l’échange et de la réflexion ». En effet, « si les facteurs cognitifs sont d’une importance
capitales pour l’ETP, ils ne doivent surtout pas être compris séparément des facteurs
émotionnels et comportementaux ».
UN NOMBRE DE SEANCES LIMITE
Il semble tout simplement « difficile de travailler réellement sur la motivation ou sur les
représentations » avec les patients au vu « du nombre de séances souvent limité ».
De plus, « pour des personnes qui sont à la base très résistantes et qui découvrent en
ETP les bienfaits de la parole, la limite est alors de semer des questionnements sans les
accompagner de manière singulière et durable ». En effet, « creuser les problématiques des
patients » sans pouvoir les exploiter ni les contenir n’est pas toujours ni envisageable ni
souhaitable pour leur bien-être futur.
UN TRAVAIL AVEC L’ENTOURAGE DIFFICILEMENT ABORDABLE
Un participant exprime le fait qu’« un travail avec les familles serait intéressant »
notamment pour « faire le lien entre ce qu'a appris le patient pendant le séjour et les
changements dans sa vie quotidienne » mais cela semble s’avérer compliqué par manque
de temps.
DES ATTENTES TROP IMPORTANTES DE LA PART DES EQUIPES ?
« Le psychologue doit être intégré à l’élaboration et mise en place du programme mais
ne doit pas être systématiquement présent à tout ou faire tout ! ». Il semble nécessaire qu’il
soit « intégré à l’équipe » mais doit, « garder sa place, comme tous les autres intervenants ».
46
UN REEL TRAVAIL INTERDISCIPLINAIRE ?
Au-delà du fait que l’ETP implique un travail pluridisciplinaire, de réels échanges entre
les membres de l’équipe sur le suivi des patients semblent difficiles à mettre en place.
Certains psychologues regrettent le manque de « temps hebdomadaires de transmission »
par exemple « pour informer les autres membres de l'équipe des enjeux psychiques de la
maladie » et ainsi « décaler un peu le regard des équipes médicales sur les patients ».
UNE EVALUATION DES ACQUIS DES PATIENTS DIFFICILE A METTRE EN PLACE
Les psychologues relatent des difficultés pour évaluer leurs pratiques. En effet, il leur
semble « plus difficile que pour les autres professionnels de l'équipe » « de quantifier,
mesurer les effets » de leurs interventions. Certains paraissent subir cette phase évaluative
et semblent dans l’incompréhension : « comme s’il fallait traduire le travail
d’accompagnement et de cheminement du patient dans la maladie chronique en terme
d’objectifs psychologiques et donc de compétences à atteindre ».
UNE OBLIGATION DE RESULTATS…
Certains psychologues regrettent le fait qu’on leur « demande toujours de l'objectivité,
du quantifiable, pour prouver l’efficacité du programme et obtenir des financements ». Ceci,
alors que « le fonctionnement psychique d'un individu, son rythme d'intégration, d'évolution
peut prendre du temps ».
4.3.4 VERS UNE DEFINITION COMMUNE : FOCUS GROUP
Ces échanges en groupe ont permis d’obtenir une perception commune du rôle du
psychologue en ETP. Une trame de son intervention a alors été établie et peut être
présentée comme suit.
EN AMONT DE LA DEMARCHE D’ETP
Il semble important que le psychologue puisse rencontrer les patients afin de pouvoir
mieux les connaitre et ainsi évaluer s’ils ont « besoin d’aide » avant d’entamer un travail
éducatif. En effet, une équipe s’était vraisemblablement déjà posé cette question car un
diététicien explique : « c’est vrai qu’à la première séance, on leur sautait dessus !». Sa
collègue psychologue ajoute : « Maintenant, on laisse un espace de parole avant le
diagnostic éducatif ». Pour un patient ayant suivi un programme dans lequel ce temps
n’existe pas, « ça remet tout en question car des bras vont accueillir » le malade. Enfin, pour
un expert, « il s’agit d’une porte d’entrée ».
47
LORS DU DIAGNOSTIC EDUCATIF
Le groupe a identifié ici, des compétences propres au psychologue et d’autres qui
peuvent être sollicitées chez les soignants éducateurs. Le psychologue serait le
« représentant psychique du patient » et l’unique professionnel apte à analyser « son
fonctionnement psychique ». En revanche, à ce stade de la démarche, tous les membres de
l’équipe éducative peuvent explorer des « représentations » et des « réticences » chez le
patient. Ils pourraient également « identifier des freins et des leviers » pour « fixer des
objectifs propres au patient ». Enfin, chacun peut également contribuer au renforcement
« des motivations » du sujet.
Un patient explique que selon lui, l’important « c’est déjà le contact humain » même si
l’idéal à ce stade de la démarche serait de « rencontrer le psychologue avec l’infirmière »,
cela « nous permettrait de nous libérer de nos appréhensions ». Selon l’anthropologue, le
psychologue jouerait ici « un rôle de médiateur ». Un expert approuve vivement cette idée de
la nécessaire complémentarité entre les approches.
LORS DE LA CONSTRUCTION DES ACTIVITES
A cette étape, le psychologue est perçu par le groupe comme « le garant d’une
approche humaniste ». Il « enrichit » et apporte « un autre regard ». Il permet « d’adapter les
ateliers aux besoins des patients ». En outre, il véhicule et partage une « méthode »
complémentaire qui lui est propre au moyen notamment « de techniques d’animation »
adaptées.
Selon un expert, ce qui est central avec ce professionnel, c’est qu’il apporte « sa
façon de faire » qui « n’est pas biomédicale ». Il « recentre sur les besoins des patients ». A
ce titre, un patient dit qu’il « explique et rassure ».
LORS DU DEROULEMENT DES ACTIVITES EDUCATIVES
Tous les membres du groupe sont d’accord pour dire que le psychologue peut
intervenir seul lors d’entretiens individuels ou en groupe sur des thèmes spécifiques. Il ne
s’agit ici pas de faire « une thérapie de groupe » et il est important que la participation des
patients se fasse sur la base du volontariat. En outre, il peut être accompagné d’un soignant
pour animer des échanges en groupes. Son rôle est alors de « gérer les émotions et les
ressentis » des patients. Il peut favoriser l’expression « du vécu de la maladie à travers les
expériences » des participants. Enfin, il est apte à faire passer des messages aux patients et
à favoriser une bonne évolution des échanges.
48
La présence du psychologue lors de l’animation d’activités éducatives est
« importante » selon un « expert ». Une psychologue ajoute que « c’est une occasion pour
revoir individuellement les patients ».
LORS DE L’EVALUATION DES ACQUIS DES PATIENTS
Selon ce groupe, le psychologue peut réaliser une évaluation « qualitative et/ou
quantitative » des « besoins et ressentis » des patients. Par ailleurs, ces professionnels
peuvent mentionner leur « perception des inquiétudes » du malade ainsi que « les points
positifs » à mettre en avant.
Une psychologue avance le fait que leur « rôle est plus neutre du fait du manque de
techniques ». D’un point de vue très concret, un consensus s’établit sur la nécessité que le
patient rencontre « la même personne à l’arrivée et à la sortie » du programme. Un patient
insiste pour que ce soit « une personne qui respecte l’interprétation du patient ».
A DISTANCE DE LA DEMARCHE
Selon le groupe, lorsqu’il s’’agit d’un programme existant sous forme de séjour à
durée limitée, il semble pertinent que le psychologue intervienne, seul ou accompagné par
un collègue éducateur, pour renforcer « les motivations » aux changements de
comportement des patients. Un patient regrette le fait qu’au mieux, « on attende un an », il
faudrait selon lui, « une piqure de rappel à 3 et 6 mois ». L’anthropologue conclut en
avançant que selon elle, « c’est un suivi tout au long du parcours qui est nécessaire », il
faudrait « contacter régulièrement le patient pour faire le point ». Nous ressentons que le
groupe a le sentiment que le patient serait « lâché dans la nature » et que les bénéfices du
programme se verraient alors amoindris.
5. ANALYSE
L’objet de notre étude est d’observer si l’intervention du psychologue au sein
d’une équipe interdisciplinaire a des effets positifs lors des différentes étapes de la démarche
éducative et ce, auprès des patients et des soignants. Afin de vérifier la validité de cette
hypothèse de recherche (théorique), nous allons ici, confronter les résultats obtenus à nos
deux hypothèses opérationnelles. Enfin, nous tenterons d’en analyser leur déclinaison au
cours des différentes étapes de la démarche en ETP pour apporter des perspectives
d’actions construites, plus facilement transférables à un travail de terrain.
49
5.1 VERIFICATION DE L’ HYPOTHESE OPERATIONNELLE N°1
Notre hypothèse opérationnelle n° 1 est : « Le psychologue, de par ses spécificités, a
un rôle à jouer au sein d’un programme d’ETP pour des patients chroniques ». Cette
hypothèse semble se vérifier auprès de notre population d’étude.
Accueillir le malade au sein d’un programme à priori « médical » en lui offrant une
forme d’ « écoute » lui permettant de se « confier librement », en l’absence de tout jugement,
sur des éléments liés ou non à sa maladie, semble essentiel, en particulier pour tenir compte
de ses représentations personnelles liées à sa santé. C’est en cela que le positionnement de
l’ETP semble pouvoir, de par la présence du psychologue, rompre avec une approche
purement biomédicale et ce, pour un suivi de qualité du patient en le considérant « en tant
que personne » et non en tant qu’objet de soins. Etablir « une relation de confiance » parait
représenter une garantie nécessaire au bon déroulement du programme.
Certains patients se retrouvent à suivre un programme d’ETP sans trop savoir
toujours pourquoi, souvent parce que leur médecin généraliste ou leur « spécialiste » le
souhaitent. Se soigner alors que l’on ne sent pas forcément malade n’a pas tellement de
sens. Le psychologue peut alors aider le patient à « cheminer », à sa façon, « prendre
conscience » des enjeux liés à sa santé dans son quotidien, pouvoir faire des liens et/ou
peser le pour le contre… Il faut que le patient puisse se situer dans son « cheminement vers
l’acceptation de sa maladie » pour acter d’un certain intérêt au suivi d’un tel programme et
s’y impliquer activement.
Par ailleurs, avec le psychologue, le patient peut aborder des éléments tout aussi
importants (selon les participants) que la prise en compte des aspects médicaux pour « vivre
au mieux sa maladie ». En effet, le patient va pouvoir travailler sur son « rapport au corps »
(problématique essentielle chez des malades chroniques), « l’image de soi », « le respect de
soi », « la confiance en soi », « son estime personnelle », « le sentiment d’auto efficacité »,
« ses sentiments de culpabilité » ou plus globalement « sa qualité de vie ». Le psychologue
semble être là également pour évaluer et prendre en considérations les éventuels troubles
de l’humeur des patients « qui entraveraient » le bon déroulement des activités. En forgeant
du lien entre les aspects « médicaux » et « psychologiques », une réflexion de fond peut
alors s’envisager et ce, notamment pour une « gestion saine de la maladie » au quotidien et
de façon durable.
Dialoguer avec un psychologue peut alors permettre de prendre de la distance avec
les apports éducatifs reçus, en y mettant du sens, afin de pouvoir mieux les intégrer. En
parallèle, cela donnerait « de la confiance et de la force pour mieux rebondir ». L’attention
50
particulière portée par ce professionnel sur les « ressentis » et « questionnements » des
patients permettrait de mettre « l’accent sur les difficultés », « les points faibles » et en
valorisant « les ressources » et « les points forts ». Le patient se sentirait alors davantage
capable de mettre en action les « recommandations » des soignants. « Renforcer » chez le
patient « sa motivation au changement » en lui donnant envie « de développer des
compétences d’auto soins et d’auto-adaptation » à la maladie parait relever de la mission du
psychologue. Le patient pourrait également « apprendre » à gérer son stress avec ce
professionnel. Il s’agit ici pour le patient de « retrouver un certain contrôle sur sa santé et son
bien-être ». Cela contrebalancerait avec une approche biomédicale dans laquelle le patient
ne serait que l’objet de soins. En ETP, l’objectif est que le patient devienne acteur de sa
propre santé en mettant en action lui-même les compétences qu’il aura élaboré en particulier
avec le psychologue et ce, en fonction des objectifs qu’il se sera fixé lui-même, accompagné
et non dirigé par les soignants.
Le psychologue ferait alors continuellement le lien entre le patient et les soignants
afin, d’expliquer, de relativiser, de donner du sens et d’adapter le programme au patient et
non d’adapter le patient au programme. L’instauration d’une relation de confiance semble, de
ce fait, primordiale pour que la personne se sente à l’aise et puisse bénéficier pleinement de
cette approche « globale » que saurait proposer l’ETP.
Enfin, le rôle du psychologue serait de « veiller à inclure dans son travail l’entourage
du patient » dès que possible. En effet, cela pourrait constituer un « appui pour le patient »
mais également, donner la possibilité aux proches d’aborder « leur propre vécu de la
maladie » et d’exprimer « les difficultés liées au rôle d’aidant ».
5.2 VERIFICATION DE L’HYPOTHESE OPERATIONNELLE N°2
L’hypothèse n°2 de notre travail est : « le psychologue, de par ses spécificités, a un
rôle à jouer avec les équipes au sein du développement d’un travail professionnel
interdisciplinaire ». Cette hypothèse semble également se vérifier au vu des éléments
recueillis par les participants des trois groupes.
Concernant le rôle du psychologue, il est intéressant ici, d’observer un certain
décalage entre les perceptions des patients, les attentes des équipes et les conceptions des
psychologues quant à leur propre rôle.
Pour tous, ce professionnel semble perçu « comme un maillon à part entière » de
l’équipe en ETP. En effet, le psychologue parait relativement bien intégré dans ce type de
programmes, mais est-ce le cas au sein de toutes les structures de soins. Ici, il occupe une
51
place « complémentaire » à celles de ses collègues soignants. Il ne travaille donc pas « à
côté de l’équipe » mais bien « avec l’équipe ».
En effet, c’est dans l’intérêt du patient que l’ETP tente de « combiner » une approche
médicale avec une approche « psychologique et sociale » pour une considération « plus
humaine » et moins « médicale » du patient avec sa maladie chronique. Des ponts sont
censés s’opérer pour travailler en « interdisciplinarité ». Le psychologue est alors apprécié
en tant que « garant d’une approche humaniste » au sein de l’équipe. Son rôle serait de
veiller à ce que le patient ne subisse pas son parcours de soins de façon « dictatoriale » à
travers une démarche « descendante » dans laquelle le patient ne serait pas impliqué
directement mais de veiller à adapter, avec les soignants, une démarche plus
« ascendante » avec un respect des choix des personnes.
Les « experts » et les psychologues sont également d’accord sur le fait que ces
derniers devraient favoriser une « bonne communication entre les soignants et les patients ».
L’ETP, de par sa démarche éducative, conduit les soignants à prendre davantage en
considération des aspects « psychologiques » des patients dans leurs pratiques et ce,
notamment pour fixer des objectifs adaptés et travailler avec des stratégies propres à
chacun. C’est ainsi que le psychologue adopte un rôle de « rapporteur » et/ou de
« médiateur » amenant une meilleure compréhension des « pensées et comportements du
patient » chez les soignants. Ce professionnel « ferait le lien » en « éclairant l’équipe » sur
les « conduites », « attentes » et « les projets » des patients.
En revanche, les « experts » semblent attendre un rôle de soutien pour les équipes
que les psychologues ne mettent pas en avant. En effet, d’un point de vue professionnel,
« son écoute privilégiée » semble constituer « une ressource pour les soignants ». Nous
comprenons que les soignants auraient besoin de la part du psychologue, d’une forme de
« supervision » de leur travail. Selon, eux, le psychologue comprendrait mieux que ses
collègues soignants les fonctionnements et disfonctionnements inter-équipes. Il pourrait alors
susciter chez les soignants une certaine « remise en question » de leurs approches ou
attitudes auprès des patients. Avec lui, leurs doutes pourraient être « dépassés » et les
soignants pourraient alors plus facilement adapter leurs discours et postures auprès des
malades. D’un point de vue plus « personnel », les « experts » (qui sont pour la plupart des
soignants), attendraient également du psychologue, un soutien individuel lors de « périodes
vulnérables » ou en cas d’ « épuisement professionnel » par exemple.
Les psychologues ne semblant pas s’attribuer ce(s) rôle(s) et ces compétences ci,
nous nous questionnons : ne seraient-ils pas conscients de ces compétences qu’ils
52
paraissent posséder ? Ou, ne veulent-ils pas endosser cette « casquette », peut-être pas si
facile à porter au quotidien ? Pour quelles raisons ?
5.3 UN ROLE CONSTRUIT AU SEIN DE LA DEMARCHE D’ETP
Nous avons précédemment pu vérifier le fait que d’une part, le psychologue, de par
ses spécificités, avait un rôle à jouer au sein d’un programme d’ETP pour des patients
chroniques et d’autre part avec les équipes au sein du développement d’un travail
professionnel interdisciplinaire. Au vu de notre hypothèse théorique notamment, il parait
désormais intéressant de préciser ces propos en proposant une vision globale des
participants sur la déclinaison de « ces rôles » aux différentes étapes de la démarche.
Officiellement, la démarche en ETP comprendrait quatre étapes à savoir le diagnostic
éducatif, la construction des activités, le déroulement et l’évaluation. Un des points qui a
attiré notre attention au cours de cette étude est le fait qu’un manque serait décelé face à
cette « méthode ». En effet, selon les patients et les « experts », il serait crucial, pour
l’équipe, à travers le psychologue plus particulièrement, d’intervenir avant d’enclencher une
démarche éducative. En effet, les psychologues eux-mêmes, relèvent ce manque et parlent
de la nécessité d’instaurer un temps « non éducatif » pour « connaitre le patient » avant
toute autre chose. Ces rencontres en amont, aideraient les équipes à se positionner face au
patient pour ajuster leur postures et propos lors du diagnostic éducatif. En outre et de façon
plus générale, les patients regrettent de ne pas toujours avoir la possibilité de rencontrer un
psychologue « dès l’annonce de la maladie ». Ce dernier pourrait également, dans le respect
de la difficulté du moment, faire le lien avec l’ETP en l’informant de son existence.
L’intervention du psychologue semble relativement incontournable lors du diagnostic
éducatif. Il ne devrait pas nécessairement mener cet entretien seul, bien au contraire, mais
sa présence semble indispensable. La notion de complémentarité de son approche
« humaniste » avec celle plus « biomédicale » d’un de ses collègues soignants est avancée
par les trois groupes. Le psychologue prendrait donc en considération des aspects de sa
personnalité, de son état psychologique du moment, de son cheminement par rapport à la
maladie pour « valoriser la subjectivité » de la personne et ne pas opter pour une
standardisation des objectifs en fonction des pathologies.
A propos de la notion de conception, tous affirment que le psychologue, au même
titre que les autres professionnels, aurait sa place, à différents niveaux. Les psychologues
revendiquent le fait d’occuper un rôle au niveau de la conception du programme à son
origine. Ils pourraient alors orienter la réflexion vers le choix de thématiques et de méthodes
d’intervention veillant à considérer le patient « dans sa condition d’humain et non comme un
53
malade », « objet de soins ». Plus spécifiquement, tous accordent une importance
particulière à sa présence pour ce qui est du montage des activités éducatives. Il repérerait
des besoins spécifiques à prendre en compte pour, d’une part que le patient trouve du sens
aux activités auxquelles il participe et se sente « bien » au sein du programme, et d’autre
part, pour faciliter l’intégration d’objectifs éducatifs.
Lors du déroulement, le psychologue semble avoir une place naturelle lors
d’animation d’ateliers de groupe, seul, sur des thèmes qui sont spécifiques à sa discipline et
en binôme avec un soignant spécialisé lorsqu’il s’agit de thématiques « médicales »
auxquelles ses compétences ne suffiraient pas. Il apporterait ses compétences très
complémentaires pour « la gestion des émotions », « l’adaptation du discours »… En
revanche, il est intéressant de constater que les patients et les psychologues insistent sur
l’importance d’instaurer des temps d’échanges individuels et ce, notamment pour aborder
des éléments ne relevant pas d’une démarche proprement éducative. Ces temps n’ont pas
toujours leur place au sein des programmes en ETP. Il s’agit, selon nous, d’un propos de
fond qui remettrait en question la philosophie même de certains programmes d’ETP en tant
que démarche éducative uniquement.
Bien que tous les psychologues ne semblent pas apprécier la phase d’évaluation car
cela les « oblige à évaluer leurs pratiques » au moyen de critères jugés pas toujours
adaptés, les patients et les « experts » y trouvent sa présence opportune. En effet, les
patients paraissent attendre beaucoup de lui ici, car, il permettrait de « faire ressortir des
points positifs », chose pas perçue comme coutumière chez les soignants, et prendre en
compte des « changements » tels que les raisonnements, attitudes… Pour les « experts », le
psychologue « amènerait l’équipe à se questionner sur sa pratique » pour sortir d’une
évaluation exclusivement biomédicale.
Enfin, arrêter la démarche éducative ici ne semble avoir que peu de sens pour les
participants et les patients en particulier qui réclament « des piqures de rappel » et un travail
de « renforcement de la motivation ». Le psychologue serait bien placé pour faire prolonger
cette démarche sur un suivi de plus long terme.
Plus généralement, un fait attire notre attention. Selon tous les groupes de
participants, le psychologue aurait sa place pour évaluer les acquis ou les ressentis des
patients. En revanche, la question de sa place lors de l’évaluation de la pertinence du
programme dans sa conception, son déroulement, son approche … ne semble pas s’être
posée. N’avons-nous pas initié ce débat de par nos questions peut-être trop orientées ? Les
équipes en général et les psychologues en particulier ne sont peut-être pas toujours très
familiers de ce type de démarche. Il semblerait ici, que son approche « humaniste » ou ses
54
compétences spécifiques puisse également prendre tout leur sens pour favoriser une
démarche qualité au service du patient dans sa globalité.
6. DISCUSSION
6.1 AUTOUR DU CHOIX DE LA METHODE
Nous admettons un premier biais de subjectivité dans le choix des participants. En
effet, concernant les « experts » et les psychologues, le CCECQA nous a largement aiguillés
dans notre recherche. Cette association travaille avec de nombreux professionnels de la
région qui sont inscrits dans une démarche de réflexion et d’analyse critique de leurs
pratiques. Il était alors très prévisible qu’ils acceptent, pour la majorité, de participer à ces
temps d’échanges. Nous avons ensuite contacté au hasard, des équipes de la région. Même
si cela a été relativement laborieux de les mobiliser, seuls trois « experts » et un
psychologue ont refusé d’y participer pour des raisons de contraintes de temps ou de
convictions personnelles. Les patients ont été également choisis selon des critères très
« subjectifs ». Certains psychologues rencontrés lors de notre stage nous ont orienté vers
des « patients ressources », très demandeurs pour être consultés sur ce genre de
thématiques. En résumé, nous nous doutions, à priori, que les participants ne seraient pas
ou que très peu « hostiles » à ce type de démarche et s’y impliqueraient assez activement.
Avec les patients, nous avons choisi une méthode classique d’analyse de contenu
d’entretiens semi-directifs enregistrés. Le contenu des propos relatés dans ce document est
donc très fidèle à la réalité, repris intégralement avec les mots des patients. Cependant, ces
propos ont été catégorisés et interprétés par nous-mêmes, nous ne pouvons donc pas
revendiquer une totale objectivité quant à la restitution.
Le choix de la méthode Delphi pour consulter les avis des « experts » et des
psychologues nous a permis de recueillir la parole de deux groupes au moyen de réponses
individuelles très riches et abondantes. Nous recherchions des avis pour identifier des
éléments pertinents sur le rôle du psychologue et tendre vers un consensus de la définition.
La parole de groupe a été privilégiée dans notre étude.
Nous sommes lucides sur le fait qu’avec cette méthode, « la parole du groupe n’est la
parole de personne en réalité », tout au moins, elle ne représente celle d’aucun des
participants individuellement sinon celle de tous à travers le groupe. Cette méthode permet
également, selon nous, de minimiser le pouvoir que certains individus pourraient prendre sur
d’autres s’ils étaient réunis physiquement.
55
Cependant, un « cortège d’opinions » n’est en rien un gage de vérité car tous les
participants peuvent « se tromper » (même si nous n’attendions pas de bonnes réponses) et
un phénomène de contagion peut voir le jour d’autant plus qu’ils disposaient ici d’une culture
professionnelle intra groupe commune. De plus, nous ne pouvons pas, ici, garantir d’une
cohérence dans les réponses. En effet, il semble important de mentionner le fait que cette
méthode fasse appel aux intuitions des sujets. De plus, les participants répondent les uns
après les autres au vu de tous et cela peut engendrer une certaine pression de conformité
difficilement contrôlable.
Nous ne pouvons alors pas parler de rationalité dans l’expression et le traitement des
éléments recueillis ici mais bien d’une « enquête d’opinion » qui a cependant, le mérite
d’avoir consulté l’avis de nombreux professionnels directement impliqués sur le terrain
autour de la thématique de l’étude. A ceci s’ajoute que les opinions « déviantes » sont
relativement écartées de l’analyse de contenu pour obtenir un consensus alors qu’en termes
prospectifs et pour débattre de certains éléments en profondeur, ces opinions seraient, à
priori, fort intéressantes à prendre en compte. Enfin, nous avons nous-mêmes synthétisé les
réponses des sujets à chaque tour puis analyser de façon globale. Le traitement des
données reste alors subjectif dans la mesure il a été guidé par nos propres perceptions,
conceptions, normes et valeurs faisant référence à la thématique étudiée. Il en est de même
pour le focus group.
A ce sujet, nous regrettons de n’avoir pu réunir « que » sept personnes lors du focus
groupe. En effet, en proportion, moins d’un tiers des membres de chaque groupe était
présent. Cela ne contribue donc pas à valider de façon incontestable les propos mentionnés
par chacun des groupes durant l’étude pour arriver à un consensus autour de la définition du
rôle du psychologue en ETP. Tous les participants n’ont donc pas pu valider cette définition.
En outre, cette étude s’est étalée sur une durée de deux mois et demi avec trois tours
de réponses consécutifs. Cela a pu engendrer une certaine lassitude chez certains
participants et a suscité quelques abandons. En effet, chez le groupe des « experts », sur les
quatorze personnes ayant accepté de participé, onze ont répondu au premier tour, dix au
deuxième et six au troisième. Chez les psychologues, sur les quatorze personnes ayant
accepté de participé, onze ont répondu au premier tour, neuf au deuxième et six au
troisième.
56
6.2 PERSPECTIVES AUTOUR DES ENJEUX LIES AU ROLE DU PSYCHOLOGUE
Les diverses réflexions autour de notre démarche nous permettent de distinguer deux
perspectives :
En premier lieu, il semble que nous abordons ici, une perspective quasi
« philosophique » qui traiterait d’un changement de paradigme dans le domaine de la santé.
En effet, avec l’ETP, s’instaurerait un lien nouveau entre le patient et sa maladie, son
traitement, et l’équipe des soignants.
En second lieu, nous distinguons une perspective « métier ». En effet, chaque
membre de l’équipe occuperait un rôle et des fonctions spécifiques à caractère éducatif, ce
qui permettrait de mettre en œuvre le programme d’ETP. Une réelle interdisciplinarité
s’organiserait autour du patient et supposerait que chaque corps de métier puisse
développer et mettre en action ses propres compétences afin que l’ensemble du programme
puisse se dérouler de façon cohérente.
Pour envisager un parcours concluant dans l’accompagnement et le traitement d’une
maladie, les soignants travaillant en ETP attendent et suscitent chez le patient l’adoption
d’une position de « partenaire » et non simplement de « bénéficiaire » de l’offre de soins qui
lui sera proposée.
Pris en compte dans sa globalité, le patient serait alors accompagné dans
l’acceptation et la gestion de sa maladie en étant notamment soutenu sur ses difficultés
psychologiques et sollicité sur ses ressources. Il serait alors conscient de sa responsabilité
et de sa capacité pour « prendre en main » et « gérer » sa maladie chronique. Le malade se
positionnerait alors dans un statut d’acteur, conscient et entreprenant. Cependant, ce
cheminement ne va, à priori, pas de soi et suppose souvent un vrai travail
d’accompagnement dans la durée. La gestion de la relation entre l’équipe et le patient
semble alors au centre de la problématique. L’établissement d’un lien de confiance parait
primordial.
Il ne semble pas nécessairement aisé, pour un patient vivant avec une maladie
chronique, de « s’ouvrir » à une équipe. En outre, autoriser un tiers, psychologue, à
l’accompagner, le questionner sur la globalité de sa personne en favorisant l’expression de
ses faiblesses intimes, de ses ressources et divers éléments de son histoire de vie, semble
assez difficilement envisageable sans cette relation de confiance.
57
La question se pose alors de savoir si cette relation de confiance peut s’opérer dans
un cadre collectif, c'est-à-dire avec l’équipe dans sa globalité ou si elle requiert une méthode
particulière qui serait par exemple inhérente aux compétences du psychologue.
Désigner un référent professionnel comme garant de la « relation de confiance » au
patient n’est-il pas antinomique avec l’esprit même de l’ETP dans lequel le patient serait
acteur des modalités de cet accompagnement. Serait-ce du ressort du psychologue ?
Pour le patient, cette relation avec l’équipe passerait visiblement par l’instauration
d’un lien privilégié, personnalisé et continu avec un de ses membres. Cette attente nous
semble assez naturelle dans la mesure où l’asymétrie qui existe généralement entre un
malade et une équipe de soins est très importante et, seule la relation bilatérale viendrait
rééquilibrer ce rapport d’infériorisation. Il est alors intéressant de noter les fonctions que les
patients associent au psychologue. Nous remarquons qu’elles sont autant référées à des
« savoirs techniques » (accepter, gérer la maladie, déculpabiliser, mieux se connaitre…)
qu’à des « savoirs être » et à des postures (être à l’écoute, pouvoir se confier librement,
pouvoir avoir une relation de confiance, aider à cheminer…). Le patient attend de la part du
psychologue en ETP, une expertise technique traitant du domaine « psychologique » mais
également une relation relevant d’une posture de bienveillance et d’humanité tout au long de
la démarche.
Les psychologues semblent se reconnaitre dans ce profil « double face ». Selon
nous, ces attentes des patients concernant la garantie de relation bienveillante dans le
monde du soin reflèteraient une « déshumanisation » très importante, perdurant (sauf
exceptions) dans le milieu très technicisé de la santé. La nécessité de rendre cet
environnement acceptable et vivable serait alors une priorité pour les patients et le
psychologue semblerait être « le mieux placé » pour y répondre. Nous pouvons cependant
nous demander si ce « savoir-être » relèverait spécifiquement des compétences du
psychologue ou si d’autres professionnels (infirmier, diététicien, médecin et pourquoi pas
aide soignant) ne pourraient pas s’en saisir également pour libérer parfois le psychologue
afin de le positionner davantage sur la technicité et l’originalité de ses compétences. Cette
question reste ouverte.
La contribution du psychologue en ETP vis-à-vis des soignants poserait des
questions comparables. Il est souvent perçu par ses collègues comme étant le référent du
patient, en quelques sortes le garant d’un fonctionnement humanisé dans l’équipe, l’acteur
en capacité d’éclairer et de négocier une réponse pertinente et adaptée à la réalité
psychique du patient. Ici encore, le positionnement du psychologue fait figure d’interface, en
fil rouge, et le renvoie à un statut de tiers facilitateur, de quasi médiateur des relations entre
58
le patient et l’équipe. Cette fonction est-elle compatible avec le référentiel métier qui construit
normalement l’identité professionnelle du psychologue ? Cette fonction n’encouragerait-elle
pas la démobilisation des autres membres de l’équipe sur cette dimension nécessairement
partagée ?
Enfin et à propos de la fonction de supervision attendue par les soignants, il semble
difficile de l’affecter au psychologue travaillant dans l’équipe. Il parait en effet difficile de
trouver une légitimité suffisante pour questionner des pratiques dans lesquelles le
psychologue est lui-même partie prenante. Par ailleurs, en envisageant l’intervention
ponctuelle d’un psychologue tiers non intégré à l’équipe, il va de soi que cette hypothèse
suppose en amont un réel degré de maturité de l’équipe médicale.
Voici autant de questions que notre recherche éclaire et que nous renvoyons au
débat dans les équipes.
7. CREATION ET ANIMATION D’UN ATELIER-DISCUSSION
Après avoir élaboré une définition du rôle du psychologue en ETP avec les patients,
les équipes interdisciplinaires et ce, aux différentes étapes de la démarche, nous avons jugé
opportun de réunir une dizaine de professionnels de santé (cadres de santé, médecins,
infirmiers, psychologues…) impliqués dans une démarche de construction de programme en
ETP. L’objectif était double :
Dans un premier temps, il s’agissait de sensibiliser ces soignants sur le rôle du
psychologue en ETP. Penser un programme en intégrant dès le départ un psychologue dans
l’équipe nous parait pertinent au vu des résultats de notre étude. Nous avions pour ambition
de les aiguiller dans leur réflexion en leur transmettant les éléments de modalités du travail
du psychologue en ETP. Le second était alors de créer ensemble un référentiel sur les
compétences des psychologues et les facteurs favorisant leur intégration dans les services.
Nous souhaitions donner une dimension de terrain à cette rencontre en traitant des éléments
très concrets de notre réflexion.
Sur une durée de trois heures, nous avons présenté les résultats de notre étude sur
power-point, recueilli les perceptions de l’assemblée et animé les échanges de ces
professionnels pour débuter la construction de ce référentiel.
L’assemblée, souveraine dans son appréciation a retenu des compétences et les
facteurs déterminants suivants, liés :
59
AU PSYCHOLOGUE LUI-MÊME:
Sa formation :
o En ETP, idéalement en même temps que l’équipe
o Notions de base sur les pathologies concernées.
La façon dont il se présente :
o Etre ouvert à la discussion avec ses collègues
o Préparer ses interventions
Son positionnement : Signifier au patient :
- « le poids ou l’importance ainsi que la valeur de sa parole »
- « le sens de la démarche »
- « déplacer le savoir des soignants »
- Les règles au cours des ateliers
Sa disponibilité :
o Pour le patient : à différentes étapes
o Avec l’équipe : « un temps de mise en commun »
Sa volonté de travailler en interdisciplinarité et :
o Accepter d’adapter les interventions aux demandes du groupe
o Donner des clés, éclairer les soignants pour comprendre le patient
o Aider à réfléchir sur les conséquences potentielles des pratiques
o Participer à une dynamique de création d’outils et de supports
AUX PATIENTS ET A LEUR ENTOURAGE :
La demande des patients vis-à-vis de ce professionnel
Leur capacité et disponibilité pour se saisir ou non des propositions des soignants et
de pouvoir expliquer leurs choix (et en discuter avec le psychologue)
Leur représentation du rôle du psychologue
Leur positionnement en tant qu’acteur du soin : capacité à choisir et adapter en
fonction de leurs besoins (idée de « responsabilisation »)
Volonté et disponibilité pour participer à des rencontres et échanges entre
« anciens » et « nouveaux » patients animés par le psychologue
A L’ENVIRONNEMENT ET A L’EQUIPE EN PARTICULIER :
Son degré de maturité et les cheminements personnels des soignants
(développement de compétences,…)
60
La reconnaissance de la dimension psychoaffective, sociale et familiale
Sa capacité à pratiquer de l’interdisciplinarité (espaces de communication, …)
Ses représentations du rôle du psychologue, acceptation des approches différentes
des psychologues, prise en compte de ses apports
Des temps communs de réflexion, d’écriture et d’évaluation
Accepter le refus de l’offre par les patients (notamment ceux qui ne souhaitent pas
rencontrer de psychologue)
Capacité de réorienter les patients
Pas de confusion des rôles : psy ETP et psy de l’équipe !!!
Idée : croisement des psys : régulation dans un autre service de la même structure si
possible
Ecriture du projet :
o Stratégie interdisciplinaire
o Coordonnée par une personne compétente et réactualisée
o Notion de transversalité : partenariats et espaces de rencontres entre acteurs
o Avoir un promoteur de projet ETP clair dans ses orientations
o Montrer le rapport coût/ bénéfice de la présence d’un psychologue dans le service
et être force de propositions.
8. CONCLUSION
Le rôle du psychologue en ETP se situerait au carrefour de plusieurs enjeux.
Ce professionnel doit trouver sa place au cœur d’une démarche interdisciplinaire qui
se veut avant tout éducative. Ce statut d’éducateur est-il compatible avec celui de
psychologue ? L’un devrait-il prendre ici le dessus sur l’autre ? Quelle est sa place dans
cette interdisciplinarité ?
Ses multiples compétences lui permettraient d’agir à différents niveaux.
Il userait en effet de « savoirs faire » c'est-à-dire de compétences techniques qui lui
permettraient d’aborder tant l’expression et la gestion des affects, le vécu de la maladie…
que les motivations ou le développement des compétences psychosociales. Ces différents
aspects seraient alors à aborder de façon complémentaire. Les uns ne se justifieraient pas
au détriment des autres. Les « missions traditionnelles » semblent ici avoir alors toute leur
61
place et méritent d’être assumées en tant que telles tout en s’intégrant à la démarche
éducative pour « faciliter » le parcours du patient en le rendant acteur de sa maladie.
Son « savoir-être » occuperait une place tout aussi importante dans son travail en
ETP. En effet, c’est principalement par son approche, particulière dans le monde du soin, sa
posture et sa gestion de la communication qu’il semble jouer un rôle essentiel en ETP. Il
favoriserait le « lien » entre les patients et les soignants pour veiller à un climat général
favorable à l’évolution du patient en garantissant le respect de la personne globale du patient
tout au long du programme.
Parallèlement, un rôle de soutien professionnel auprès des équipes lui serait attribué.
Etablir une forme de régulation ferait alors partie intégrante de son rôle. Il guiderait les
soignants vers une réflexion autour de leurs pratiques. Il semble qu’il serait cependant
judicieux, si cela s’avérait être du ressort du psychologue, que ces échanges soient animés
par un psychologue extérieur à l’équipe.
Par ailleurs, l’avis du psychologue peut constituer un appui utile voire précieux à
toutes les étapes de la démarche éducative, du diagnostic éducatif à l’évaluation, sans
oublier celles de la conception des programmes. Voire lors de l’évaluation de leur pertinence
dans leur contenus et approches ?
Enfin, des multiples sensibilités s’expriment dans notre recherche, ce qui en rend la
forme parfois un peu répétitive mais il semble que cela constitue le « prix à payer » afin de
recueillir la parole de l’ensemble des parties prenantes au débat quant à un sujet d’actualité
dans le domaine de la psychologie de la santé. Consulter et confronter ces différents points
de vue aura d’ailleurs enrichit notre culture professionnelle.
Le CCECQA va vraisemblablement se saisir de ce travail et le prolonger notamment
en complétant la construction du guide référentiel au moyen de rencontres sous forme
d’ateliers-discussion sur cette thématique. Un autre prolongement très intéressant
consisterait à réfléchir autour du rôle d’autres professionnels impliqués dans cette démarche
interdisciplinaire en ETP à savoir le diététicien, l’infirmier, le kinésithérapeute, le médecin et
pourquoi pas l’aide soignant.
62
9. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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enjeu pour l’éducation des patients ! Les cas des adolescents transplantés. UCL Ŕ RESO
Unité d’Education pour la santé, Ecole de santé Publique, 2009
Bourbeau J., Van der Palen J. Promouvoir les programmes d’autogestion pour améliorer les
programmes BPCO. Eur Respir, 2009
Bourguignon O., (2009). « La déontologie des psychologues ». Paris : Editions Armand
Collin
D’Ivernois F-P., Gagnayre R., (2008). « Eduquer le patient ». Paris : Editions Maloine
D’Ivernois F-P., Gagnayre R., IPCEM. Compétences d’adaptation à la maladie du patient.
Sète : EDP Sciences, 2011
Fischer G-N., (2005). « Traité de psychologie de la santé ». Paris : Editions Dunod
Foucaud J., Bury J-A., Balcou-Debussche M., Eymard C. Education thérapeutique du
patient. Modèles, pratiques et évaluation. Saint Denis : Inpes, coll. Santé en action, 2010 :
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Giordan A., (2002). Des modèles pour comprendre l'apprendre :
de l'empirisme au modèle allostérique.
(http://www.andregiordan.com/articles/apprendre/modeleallosterique.html)
63
Golay A., Diaporama : « Education thérapeutique chez les patients obèses ». Service
d’Enseignement Thérapeutique pour Maladies Chroniques, diabète, obésité Hôpitaux
Universitaires de Genève
Golay A., Lagger G., Giordan A., (2010). « Comment motiver le patient à changer ? ». Paris :
Editions Maloine
Goudet B., (2009). « Développer des pratiques communautaires en santé et développement
local ». Lyon : Chronique sociales
HAS & INPES, « Guide méthodologique : Structuration d’un programme d’éducation
thérapeutique du patient dans le champ des maladies chroniques ». Paris, 2007
HCSP., « Actualités dossier santé publique n° 72 : maladies chroniques ». Paris, 2010
Lacroix A., « Quels fondements théoriques pour l’éducation thérapeutique ? ». Santé
Publique, vol 19. SFSP, 2007
Lacroix A., Assal J-P., (2003). « l’Education thérapeutique des patients, nouvelles approches
de la maladie chronique ». Paris : Editions Maloine
Le Rhun A., « L’accompagnement psychosocial dans l’éducation thérapeutique du patient :
de l’accompagnement soignant/ patient à l’accompagnement formateur / soignant ». thèse
de médecine Nantes, 2008
LOI n°2009-879 du 21 JUILLET 2009 - art. 84 concernant l’éducation thérapeutique du
patient
64
Mazzocato C., Interdisciplinarité des structures de soins. Utopie ou émergence d’une
nouvelle culture ? Médecine & Hygiène : Revue internationale de soins palliatifs, 2003/4 -
Vol. 18 p 161 Ŕ 162
Pineault R., Daveluy C., (1995). « La planification de la santé, concepts, méthodes,
stratégies ». Montréal : Editions Nouvelles
Perron R., & al. (2006). « La pratique de la psychologie clinique ». Paris : Editions Dunod
Saout C., Charbonnel B., Bertrand D., « Pour une politique nationale d'éducation
thérapeutique du patient ». Rapport pour la ministre de la santé, Paris, 2008
Siksou M., « Psychologie de la santé, psychologie clinique ». Le Journal des psychologues.
Martin Média, 2008
Simon D., Traynard P.-Y., Bourdillon F., Gagnayre R., Grimaldi A. (2009). « Education
thérapeutique, Prévention et maladies chroniques ». Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson
Société française de médecine périnatale. 36es Journées Nationales
de la Société Française de Médecine Périnatale (Biarritz). Quelle place pour les
psychologues ? Rueil-Malmaison : groupe Liaisons, 2006, p : 112-119
Sites :
http://erwan.neau.free.fr/Toolbox/Methode_DELPHI.htm (méthode Delphi)
http://www.pace-aquitaine.com/ ( forum)
65
10. ANNEXES
10.1GRILLE D’ENTRETIEN SEMI-DIRECTIF INDIVIDUEL DESTINEE AUX PATIENTS
1/ En général, à quoi sert un psychologue?
Et en ETP?
2/ Parlez moi de votre expérience avec les psychologues et tout au long de votre parcours
de soins...
- points positifs
-points négatifs
- ...
3/ S'ils ont une expérience en ETP: A quelles étapes de la démarche le psychologue a t-il sa
place?
- diagnostic éducatifs (priorités...)
- construction du programmes, des ateliers ...
- déroulement du programme: animation, entretiens...
- évaluation
4/ Quelle est sa place dans l'équipe, complémentarité avec les autres professionnels...? Tout
le temps? ...?
5/ Ressentez-vous un manque, un besoin par rapport à son intervention dans le
programme? Que souhaiteriez-vous dans l'idéal?
6/ Propositions de thématiques à aborder avec le psychologue par rapport à la maladie, des
idées d'ateliers...
10.2 COURRIELS ADRESSES AUX « EXPERTS ETP » ET AUX PSYCHOLOGUES
10.2.1 EXEMPLE DE COURRIEL DE SOLLICITATION A L ’ETUDE
Bonjour Monsieur,
Je me permets de vous contacter de la part de…, médecin de santé publique au CCECQA
(Comité de Coordination de l'Evaluation Clinique et de la Qualité en Aquitaine) pour
participer à une recherche sur le rôle du psychologue en Education Thérapeutique du
Patient. Cette recherche s'inscrit dans le cadre de mon mémoire de Master 2 de psychologie
de la santé à Bordeaux II et est encadrée par le CCECQA.
Pour y répondre, des patients, psychologues et coordonnateurs de programmes sont
66
sollicités.
En tant que médecin travaillant en ETP avec des patients souffrant de troubles alimentaires
au sein de …, vous me semblez très bien placé pour échanger à ce sujet.
La diététicienne ainsi que la psychologue de votre service ont accepté d'y participer.
Vous trouverez ci-joint le protocole de la recherche qui vous permettra de mieux comprendre
de quoi il s'agit si cela vous intéresse. Je pense que la participation à cette recherche peut
être constructive pour les personnes qui y répondent dans la mesure où les réflexions seront
partagées. Cela peut également aboutir à la création d'un groupe de travail en ETP si les
participants désirent s'y impliquer.
N'hésitez pas à me contacter par téléphone au …!
En vous remerciant par avance,
Très cordialement,
Marion DITCHARRY
10.2.2 PROTOCOLE JOINT AU COURRIEL DE SOLLICITATION
Objet : solliciter votre participation à une enquête sur le rôle du psychologue en Education
Thérapeutique du Patient
Madame, Monsieur
Le sujet de mon travail de recherche pour l’obtention de mon Master 2 de
Psychologie de la Santé à Bordeaux II porte sur le rôle du psychologue en éducation
thérapeutique auprès des patients et dans une équipe pluridisciplinaire.
Les résultats de ce travail serviront de base pour élaborer des outils et processus
visant à promouvoir le rôle du psychologue dans ce domaine.
Ce travail de recherche est réalisé dans le cadre d’un stage au CCECQA (Comité de
Coordination de l’Evaluation Clinique et de la Qualité en Aquitaine) encadré par un médecin
de santé publique, un ingénieur en éducation thérapeutique, supervisé par une psychologue
de la santé. Une enquête sur les perceptions du rôle du psychologue va être menée d’une
part auprès d’un groupe représentatif de coordonateurs de programmes ETP et de
psychologues ayant une expérience en ETP, et d’autre part auprès d’un groupe de patients
volontaires.
L’enquête sera réalisée en deux temps, d’une part avec le groupe des psychologues
et d’autre part avec les coordonateurs de programmes ETP :
67
- Par Internet (méthode DELPHI) : trois séries de questions ouvertes seront adressées à
chaque personne qui s’est engagée à participer à l’enquête. Les réponses seront à
fournir dans un délai maximum de deux semaines. Chacun pourra voir les réponses des
autres (forum). A chaque « tour » une synthèse des réponses collectées sera rédigée et
aboutira à la formulation d’autres questions plus précises qui vous seront alors envoyées.
Une synthèse finale reprenant toutes les idées des participants vous sera communiquée.
- Deux entretiens de groupes enregistrés (sous forme de table ronde avec chaque groupe
de professionnels qui le souhaitent) permettront de finaliser les échanges amorcés par
internet, voire le cas échéant, la création d’un groupe de travail sur les thématiques
dégagées par cette étude.
Un engagement de votre part sur la durée du processus est indispensable pour la bonne
conduite de cette enquête. Le temps nécessaire à consacrer à chaque tour de questions (x3)
est d’environ 30mn à 1 heure et le focus groupe est prévu sur 2 heures.
Si vous souhaitez vous engager à participer à cette enquête et/ou obtenir des
précisions, n’hésitez pas à me contacter au 06 … ou m’adresser un mail à l’adresse
suivante : [email protected].
Je vous remercie par avance.
Très cordialement,
marion Ditcharry
10.3 SYNTHESES DE LA METHODE DELPHI
10.3.1 TOUR N°1
GROUPE DES PSYCHOLOGUES
LE PSYCHOLOGUE AIDE A REPONDRE A QUELS OBJECTIFS POUR LE PATIENT
Pouvoir « déposer son fardeau », en sachant qu’il sera écouté, accueilli
Situer le psychologue comme faisant partie intégrante de l’équipe soignante
Prendre conscience de l'importance de "rester acteur" de sa santé
Ouvrir aux patients une voie parallèle et complémentaire à celle strictement médicale
qui leur permette de se sentir acteur de leur avenir
Retrouver un certain "contrôle" sur sa santé et un bien être
Développer des capacités d’auto-surveillance, d’autosoin, d’adaptation et de
réajustement de la thérapeutique à son mode de vie, d’intégration des nouveaux
acquis en lien avec la psychologie
DANS QUELS DOMAINES (CHAMPS) D’INTERVENTION ? QUELLE(S) APPROCHE(S) ?
68
Auprès des patients et de l’entourage
Ecoute, accompagnement et soutien des patients :
Ressentis/vécu/perceptions/représentations de la maladie,
Liens entre les évènements de la vie et les répercussions en santé psychique
Cheminement/difficultés/freins/résistances, motivations au changement
Soutien psycho-social, compétences psycho-sociales, gestion du stress
Qualité de vie
Auprès des équipes et dans les activités ETP
Approche globale, humaniste, place du patient au centre de l’ETP
Reconnaissance institutionnelle. Promouvoir la complexité de l'être humain
Favorise la différenciation de la prise en charge du service vers un programme centré
sur l'individu-sujet plutôt que sur les objectifs
Animation d’ateliers : dynamique, fonctionnement de groupe, utilisation d’outils
psycho-pédagogiques ;
Utilisation de techniques de communication,
Pratiques d’entretiens (entretien motivationnel, questionner autrement, écouter
autrement)
AUPRES DE QUI, DE QUOI ?
Des patients
L’entourage
Des équipes de soignants
Le programme, des activités d’ETP
DE LA DISPONIBILITÉ….
« du temps dans la structure »
« Après la session, patients avec des questions ou le désir de reparler de ce qu’ils y
ont vécu . d’offrir un espace de parole à ce moment-là, afin de continuer à élaborer
ce vécu, lui donner du sens afin de lui permettre d’intégrer la vie quotidienne.
s’adapter au besoin de « reformulation » du patient
-permet « d’assouplir » l’aspect parfois rigide du « cadre »
A QUELS MOMENTS, SUR QUELLES ACTIVITES, POUR Y FAIRE QUOI ?
« Le rôle de psychologue en ETP est très varié selon le public concerné, le type de structure
qui l'accueille, les outils d'intervention dont il dispose et les possibilités de travail en
collaboration avec l'équipe médicale et paramédicale »
69
Objectifs/activités du psychologue
PROGRAMME ETP
Conception/création
Coordination
Elaboration, gestion du programme global ETP
Participer à la création du programme avec l’équipe
Coordonner les activités du programme ETP (dans certaines
équipes)
Proposer de nouveaux ateliers ETP en fonction des attentes et
des besoins repérés. »
Etre le garant d’une approche humaniste de l’ensemble de
l’équipe, éclairer cette dimension dans la relation en ETP
Aider le personnel à identifier ses propres représentations
Etre le garant d’une approche déontologique : le patient doit se
sentir en confiance
Elaboration d’ateliers ETP
Favoriser la réflexion concernant les outils utilisés
Aider à la création d'outils en terme de renforcement, processus
décisionnel, mnésique..) »
Former les soignants à mieux comprendre le patient et mieux
communiquer
Sensibiliser les équipes aux dynamiques de groupe
DIAGNOSTIC EDUCATIF
Connaitre le patient
(élaboration)
Accueillir la parole pour soulager et établir une relation de
confiance
Reconnaissance de la souffrance et/ou de la colère du patient
Porter attention à d’autres aspects de la vie : leurs goûts, leurs
projets, leurs inquiétudes, leurs motivations, leur vie relationnelle
Etre attentif aux étapes de la vie que traversent les patients, aux
représentations de la maladie, à l’image de soi, à l’impact de la
maladie sur sa vie relationnelle : famille, amis…
Inviter à se confier, à parler de choses très personnelles
Repérer où en est le patient dans le cheminement de sa maladie
chronique (temporalité)
Repérer l'impact des antécédents familiaux sur la perception de
la pathologie
Etre le représentant psychique du patient : pointer ses
souffrances, ses mécanismes de défense, son mode de
fonctionnement psychique
Mettre du sens sur les résistances du patient
COMMUNICATION
faire le lien entre les
soignants et les
Pour que les soignants comprennent mieux : par exemple lorsque
l'on détecte des incompréhensions du patient par rapport à sa
maladie, son traitement, en faire part au professionnel concerné pour
70
patients
TRAVAIL D’EQUIPE
qu'il éclaircisse ses points avec le patient
Travailler en collaboration avec l'équipe soignante
Aider une équipe pluridisciplinaire à repérer le patient dans sa
trajectoire d’acceptation de la maladie, où en est-il par rapport à
sa maladie ? Que peut-on lui proposer ?
Eclairer l’équipe des éléments de compréhensions et de
questionnements du patients dans sa globalité (histoire du sujet,
famille, couple, profession, ….)
Œuvrer pour que les objectifs d'éducation thérapeutique de
l'équipe tiennent compte de façon singulière de la spécificité pour
chaque patient de son rapport à la maladie
encourager les soignants à ne pas se fixer d'objectifs trop
complexe et
à savoir se contenter de petites avancées pour leur patient sans
sentiment d'échec; cela passe par les aider à être vigilant et en
tous
cas à s'interroger sur leur projection personnelle sur la façon
dont on
doit s'adapter à sa maladie
Transmettre à l'équipe que ce qui est important dans la
compréhension du ressenti du patient
ACTIVITES
EDUCATIVES :
animation
Ateliers de groupe
Co-animer des ateliers thématiques : « le psychologue intervient
lorsqu’il s’agit d’accueillir les patients, choisir les règles de
fonctionnement du groupe, faciliter le dialogue , permettre
l’expression du ressenti, l’échange sur les sujets qui les motivent
en lien avec la maladie. Il anime ou il observe, il est présent,
attentif à tous »
Animer des ateliers spécifiques sur le vécu de la maladie,
représentations, croyances (groupes de parole)
Favoriser l’acquisition de compétences psycho-sociales
Faciliter l’entraide, les échanges, le soutien entre les participants
atteints de la même maladie
Favoriser la circulation de la parole dans les groupes
Aider à questionner et écouter autrement
71
« ATELIERS /
RENCONTRES »
SPECIFIQUES
PSYCHOLOGUE
Mobilisation de
compétences
métier
Avec les patients
Repérer les motivations au changement
Travailler ces motivations à travers l’entretien motivationnel
Faire émerger ce qui peut leur donner envie d'opérer des
changements dans leurs habitudes de vie tout en reconnaissant le
prix psychique de tels changements,
Donner au patient/sujet la responsabilité de ses actes non pas pour
le culpabiliser mais pour lui ouvrir des pistes de réflexion qui
pourraient l'aider à amorcer des changements profonds dans sa
conception de la vie et de ce qu'il a envie d'en faire sans risquer de
perdre son identité et le goût de vivre
S’assurer que des savoirs être n’entravent pas l’acquisition de
savoirs faire ou de savoirs
Ouvrir un espace de pensée pour qu'une expérience vécue devienne
pensable humainement, qu'elle prenne sens pour le patient.
Se mettre en position de pouvoir exercer la fonction contenante qui
permet de penser, de métaboliser les expériences vécues
Proposer un espace de parole pour verbaliser ce qu’est l’expérience
du malade, comment il peut vivre avec et donc quelles ressources il
se sent de mobiliser
Valoriser leurs ressources pour qu'ils puissent oser le changement
sans être englouti dans un sentiment de perte
Repérage des mécanismes de défenses
Accepter la temporalité de chacun, ne pas chercher à faire tomber
les défenses qui par définition protègent le sujet mais simplement
ouvrir, par la parole
L'aider à faire le lien entre les évènements de vie (familiaux, affectifs,
professionnels : séparation, deuil, chômage… et leur répercussion
sur la santé (stress).
Accompagner le patient dans l’acceptation de la maladie chronique,
permettre au patient d’exprimer ses inquiétudes, peur des
complications, révolte, déni, incompréhension face à sa pathologie
soutenir les patients dans leur légitimité à avancer à leur rythme et
en effectuant des compromis qui leur sont acceptables même si cela
n'est pas l'idéal pour les objectifs soignants
Renforcer une réappropriation de leur corps et de leur vie
Prendre en compte l'humeur du patient (syndrome anxio-dépressif)
dans la prise en charge du patient
Renforcer le soutien psycho-social
Trouver ensemble des solutions
Avec l’entourage
72
Aider à repérer leurs compétences ou leurs difficultés dans leur
accompagnement de la maladie chronique
Faire participer aux ateliers, entre autres celui sur le vécu
psychologique de la maladie, de façon à ce qu'ils puissent partager la
façon dont ils font face à la maladie
Donner la possibilité de parler de son rôle d’aidant, de ses difficultés,
de ses freins et résistances à l’acceptation de nouvelles adaptations
(parfois
quotidiennes) ordonnée par la maladie
EVALUATION
de la pratique
en ETP
Evaluer sa pratique quantitativement pour démontrer l'importance du
rôle du psychologue en ETP
Faire évoluer les ateliers et mieux cerner les besoins
Analyser la pratique d’éducation
Réaliser des débriefing des ateliers afin d'améliorer les techniques de
communication : Le niveau de lecture du psychologue apporte un
éclairage complémentaire : les affects, la dynamique de groupe, les
actes manqués, les rôles adoptés par les participants, les attitudes,
ce qui s’est dit et ce qui ne s’est pas dit… »
GROUPE « EXPERTS ETP »
LE PSYCHOLOGUE AIDE A REPONDRE A QUELS OBJECTIFS POUR LE PATIENT
Gérer sa maladie, sa santé, sa nouvelle vie
Développer ses compétences d’adaptation à la maladie chronique (savoir-être), son
sentiment d’auto-efficacité et son estime personnelle.
DANS QUELS DOMAINES (CHAMPS) D’INTERVENTION ?
Auprès des patients et de l’entourage
représentations, vécu de la maladie
adaptation psycho-affective à la maladie chronique
Auprès des équipes et dans les activités ETP
Approche globale
« Son recul permet de faire de l'éducation thérapeutique des personnes avant de faire de
l'éducation thérapeutique des patients et nous sensibilise à prendre en compte la globalité de
la personne. »
« Son écoute privilégiée est une ressource pour les soignants »
73
AUPRES DE QUI, DE QUOI ?
Des patients
Des équipes de soignants
Des activités d’ETP
Son intervention dépend du temps disponible : « un temps très partiel est plus intéressant à
exploiter en soutien d’équipe ». Si disponibilité : exploitation de leurs compétences auprès
des soignants et des patients
« il fait partie intégrante de l’équipe et contribue au développement de compétences, en
apportant et aprtageant son expertise »
A QUELS MOMENTS, SUR QUELLES ACTIVITES, POUR Y FAIRE QUOI ?
Objectifs/activités du psychologue
PROGRAMME ETP
Conception
Conception d’ateliers
DIAGNOSTIC
EDUCATIF
Connaitre le
patient
(élaboration)
Faire émerger lors des entretiens les difficultés et ressources des
patients dans leur adaptation psycho-affective à la maladie chronique
(savoir-être).
Aborder les représentations, vécu de la maladie de façon plus
spécifique et"professionnelle"
Enrichir le diagnostic éducatif : représentations, difficultés
éventuelles, précisions sur son vécu, son histoire (un autre angle de
lecture)
Permettre à la personne de faire des liens avec son état de santé,
amener à des prises de conscience (en faisant ces liens)
identifier les réels besoins du patient et les fixer les objectifs
d'éducation propres au patient, conforter les objectifs ou les réajuster
voire les reformuler.
Identification des freins et leviers à l'éducation, du stade
d'acceptation de la maladie et motivations. »
Identification du stade d’acceptation de la maladie et motivations
COMMUNICATION
faire le lien
entre les
soignants et les
patients
TRAVAIL
Aide précieuse pour les soignants pour optimiser la relation au
quotidien
Enrichir la vision qu’ont les équipes du patient
Soutenir les équipes si elles sont « coincées »
Aider à désamorcer des relations soignant-soigné difficiles »
Expliquer les conduites du patient
Apporter une expertise dans les échanges
Valoriser la personne, l’équipe en s’appuyant sur les ressources et
spécificité de chacun et de manière si naturelle
Rédiger des notes cliniques et rapports d’activités
74
D’EQUIPE Adopter la « bonne attitude », le « bon discours »
ACTIVITES
EDUCATIVES
animation
Observation et analyse d'un groupe lors d'une séance collective :
place de chacun, participation, retrait, écoute, réponse, empathie……
Complémentarité : « un binôme constitué d'un animateur spécialisé
et d'une psychologue me parait le duo idéal pour gérer les émotions
exprimées, aider à la verbalisation des /du patient et son processus
de raisonnement. »
Intéressant en groupe de parole avec ou sans thème de départ car il
permet à chaque patient de s’exprimer librement et à partir de là :
l’échange guidé du groupe de le faire évoluer
Aider les membres de l’équipe à aborder le patient autrement, se
poser d’autres questions sur le patient, se centrer sur son vécu, ses
ressentis, ses perceptions
ATELIERS
SPECIFIQUES
PSYCHOLOGUE
Mobilisation de
compétences
métier
Il peut « être l’écoute »
Maitriser les entretiens motivationnels
« Expertise des échanges sociaux »
Travailler avec le patient sur ses freins possibles à l’ETP :
Psychologiques: Stades d'acceptation de la maladie, dépression,
troubles du comportement alimentaire… Socioculturels : religion,
culture…
Repérer les conflits de vie qui entraveront l’ETP
Renforcer la motivation au changement, la mise en place de
stratégies d'adaptation à la chronicité, le changement de
comportement
Aider à la verbalisation des patients sur leur pathologie »
Aider à la prise de conscience et processus de raisonnement pour
l'expression de ses besoins propres
Prise en charge des patients présentant des problèmes d’ordre
psychologique
EVALUATION
de la pratique
en ETP de
l’évolution des
patients
Equipe
« Amener l'équipe à se questionner sur sa pratique (ce qu'elle dit,
fait…) pour éviter la routine qui peut entraver la démarche
éducative »
Programmes
Créer avec l’équipe les outils d’évaluation et participer à la tenue du
dossier éducatif, l’évaluation formative et sommative.
Participer à la démarche de qualité dans le soin.
Patients
Analyser l’évolution de la personne en ETP, son cheminement
75
SOUTIEN AUX
EQUIPES
Favorise la construction d’une équipe et la définition de la
complémentarité entre les membres
Soutenir et renforcer le lien dans les équipes pluridisciplinaires
Apporter un soutien aux équipes qui peuvent être marquées de
découragement, épuisement, vulnérabilité
Analyser des comportements entres patients et entre soignants-
patients
Proposer des temps de régulation d’équipe, des espaces de parole
pour les soignant/éducateurs et modérer ces temps d’expression et
d’échanges
Aider en cas de difficultés inter équipe
Travail sur des cas cliniques problématiques (aide en cas de
problèmes avec la prise en charge d’un patient)
Mise en place d’un groupe de travail sur l’éducation thérapeutique :
− Proposer un temps d’échange et de réflexion sur les pratiques en
ETP
− Animer des réunions de travail de réflexion sur l’éthique, le choix,
les représentations sociales, la stigmatisation, le poids des normes,
etc…
− Travailler à l’amélioration et au développement des ateliers
d’éducation thérapeutique »
DIFFICULTES POTENTIELLES
« sa place peut être plus difficile à trouver dans les séances collectives dans lequel il ne peut
faire une "thérapie de groupe" ou une "thérapie individuelle en groupe" »
10.3.2 TOUR N°2
GROUPE DES PSYCHOLOGUES
SYNTHESE DE VOS REPONSES : TOUR 2 (GROUPE PSYCHOLOGUES)
REACTIONS SYNTHESES :
CETTE SYNTHESE PERMET DE :
« représente bien le rôle du psychologue en ETP, la diversité de ses missions, de ses champs d'intervention et des publics »
« correspond plutôt bien à ma représentation du métier de psychologue en ETP dans la mesure où elle montre son rôle dans sa globalité »
« confirme l’importance de notre rôle en ETP et plus largement auprès des patients atteint de pathologies chroniques » « également du côté de l'équipe soignante »
Permet de « réfléchir sur notre propre pratique » : certains « travaillent avec les proches des patients, ce qui n'est pas mon cas, je me demande
comment faire pour les intégrer davantage… »
76
« comment communiquer davantage avec l'équipe, j'ai cru comprendre que certaines psychologues formaient les équipes alors je me demande en quoi cela peut consister, ce que je pourrais éventuellement mettre en place »
JE RETIENS/JE PARTAGE :
Intégré dans une équipe interdisciplinaire, le psychologue « doit »
« s’intégrer aux programmes d’ETP pour éviter certaines dérives de l’ETP (travailler sur les
représentations, interpréter les choses d’un point de vue psy, faire du soutien psy…) »
« éclairer les autres soignants sur l’histoire ou le vécu du patient, co-animer ensemble des ateliers, participer au diagnostic pour éviter que les objectifs soient des objectifs des soignants et non ceux du patient, faire en sorte que ces objectifs soient accessibles au patient et validés par lui, … »
MAIS ÉGALEMENT :
« parfois l’impression que le psychologue « acteur en ETP » devient éducateur ». Il faut être vigilant afin qu’il ne devienne pas omnipotent et qu’il conserve la spécificité de son métier »
« Je ne suis pas tout à fait d’accord concernant la rubrique du diagnostic éducatif. Selon moi les items cités révèlent l’essence même du travail du psychologue avec le patient dans une équipe d’ETP mais aussi et surtout dans n’importe quel service de MCO »
LIMITES DE SON ROLE (EXPRIMEES DANS VOS REPONSES EN TERMES DE DIFFICULTES)
« Mission » du
psychologue
« Les consultations psy doivent-elles rester en dehors de l’ETP ? Ou bien on les intègre à la globalité de la prise en charge en ETP ? »
«l 'ETP étant issu des disciplines de la psychologie et ou de l'éducation, font que pour un psychologue travailler sur la globalité, le vécu, les représentations, le développement personnel… recouvre ses missions "traditionnelles" »
Rigueur de la
démarche ETP
« l’ETP demande parfois un cadre assez rigoureux notamment l’étape du diagnostic éducatif (…) faire en sorte de ne pas faire rentrer le patient dans des « cases »
« l'ETP formalise, cadre, décrit les outils, procédures et pratiques que nous pouvions déjà avoir. Elle "oblige" le psychologue à évaluer sa pratique et faire part de ses résultats »
« « l’ETP peut parfois être lourd au niveau administratif où tout doit être noté et évalué »
Respect de la
place de chacun
dans l’équipe
« ne pas confondre son rôle avec celui d'un autre professionnel de la structure. Le patient a parfois du mal à s'y retrouver et pose des questions sur les traitements… (…), on peut être tenté de répondre. Recadrer à cet instant »
« Difficulté de séparer les corps de métiers et de ne pas « empiéter » sur la spécialité de chacun »
77
Positionnement
dans les activités
ETP
« le psychologue doit être intégré à l’élaboration et mise en place du programme mais ne doit pas être systématiquement présent à tout ou faire tout ! Il est intégré à l’équipe et garde sa place de psy comme tous les autres intervenants »
« sur mon rôle en éducation » « dans les ateliers avec les autres professionnels de santé, la notion d'éducation est plus claire je trouve (…) c'est concret. Dans mes ateliers ils ont davantage la parole, et donc je ressens moins la fonction d'éducation (…). Il y a bien l'apprentissage de la relaxation, de techniques de gestion du stress, d'affirmation de soi, mais quand même, il y a une différence en termes "d'éducation" »
« important que le psychologue ne soit pas dans l’éducation stricte, c'est-à-dire qu’il ne s’agit pas d’apprendre au patient à réagir de telle manière (…) conserver un apprentissage de compétences psychosociales autour de l’échange (…), réflexion »
« je ne fais pas forcément rentrer les consultations psy dans le champ de l’ETP sauf celles en lien avec le projet éducatif du patient »
« Rôle
vigilant » du psyc
hologue
« ne pas standardiser un patient, éviter l'écueil du bon patient avec un dressage, laisser toute la responsabilité au patient et donc la culpabilité en cas d'échec ou de difficultés, ne penser qu'en terme d'observance, s'illusionner sur le fait qu'un patient ayant bénéficié de l'ETP ne rencontrera pas de difficultés d'adaptation ou d'observance »
Lors des ateliers : « le fait ne pas "apprendre" des choses "concrètes" dans l'atelier "gestion du stress" est parfois difficile (…) bien que dans cet atelier nous abordons assez simplement pourtant des notions » Etre vigilant quant au sentiment d’insatisfaction
Suivi des patients
pas de suivi prévu pour accompagner et soutenir un travail de motivation « je rencontre les patients dans un temps limité et au sein d'un programme
chargé : le patient se trouve dans un "espace temps" particulier. Etre vigilant à ce que nous allons faire émerger de ses échanges. Et ensuite? le patient repart avec cela mais n'aura pas forcement la possibilité de reprendre ce qui a été verbalisé avec une psychologue »
« plus difficile que pour les autres professionnels de l'équipe (…) on a plus de mal a quantifier, à mesurer les effets de notre intervention »
« …pourtant une demande de l'équipe, de nos supérieurs et de nos financeurs » « comme si il fallait traduire le travail d’accompagnement et de cheminement du
patient dans la maladie chronique en terme d’objectifs « psychologiques » et donc de compétences à atteindre
Avec certains, il y a un réel travail psychothérapeutique qui se met en place dans un lieu de consultation voué à l’éducation et qui de ce fait nécessite moins de liens avec l’équipe mais qui n’empêche d’apporter à cette même équipe des éléments de compréhensions concernant le patient et son vécu dans la maladie
78
« Evaluation des
pratiques »
chronique, au psychologue de faire le pont »
manque d’autres
opportunités /
possibilités
d’intervention
que les temps
ETP
« le nombre de séances limité est également une difficulté car il est difficile de travailler réellement sur la motivation ou sur les représentations »
« un travail avec les familles serait intéressant (où en sont – ils par rapport à cette maladie chronique ?) pour faire le lien entre ce qu'a appris le patient pendant le séjour et les changements dans sa vie quotidienne »
« lorsqu'un travail de thérapie s'avère utile » « il doit se faire dans un autre cadre or pour des personnes qui sont à la base très résistantes et qui découvrent dans le transfert avec le psy en ETP les bienfaits de la parole, casser ce transfert peut freiner le processus de changement en cours. La limite est alors de semer des questionnements sans les accompagner de manière singulière et durablement »
« pour informer/former les autres membres de l'équipe aux enjeux psychiques de la maladie. Décaler un peu le regard des équipes médicales sur les patients : voir l'aspect positif de la maladie en ce qu'elle constitue une période de crise en elle-même propice aux changements pour peu que ceux-ci ne soit pas perçu par le sujet que comme menaçant son intégrité » « il faudrait qu'il y ait des temps hebdomadaires de transmission »
« "creuser" les problématiques des patients comme je le voudrais car mes ateliers se déroulent en groupe »
« Obligation de
résultats »
« mes chefs demandent toujours de l'objectivité, du quantifiable, pour toujours prouver notre efficacité et obtenir des financements pour le réseau »
« alors que le fonctionnement psychique d'un individu, son rythme d'intégration, d'évolution peut prendre du temps ou évoluer lentement au risque de stigmatiser le patient si l'esprit ou la philosophie de l'ETP n'a pas été bien comprise par l'équipe »
Ne pas « se
laisser happer »
par l’aspect
éducatif
« se détacher de l’aspect psychologique de notre intervention en se laissant « happer » par son aspect éducatif. Si les facteurs » cognitifs sont d’une importance capitales pour l’ETP, ils ne doivent surtout pas être compris séparément des facteurs émotionnels et comportementaux » « le psychologue doit rester à sa place et donc ne pas se placer uniquement en « éducateur » de la même manière que l’infirmière reste infirmière animant par exemple un atelier éducatif »
FACTEURS INFLUENÇANT SA PLACE ET SON ROLE
Caractéristiques
psychologue
« l’approche » « la manière de travailler » « la personnalité »
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« structure »
« tout dépend de la structure dans laquelle on travaille »
patients
« leur pathologie »
« le fait que les patients viennent de loin pour leur suivi et qu'il est parfois difficile de les faire revenir aussi bien pour des questions humaines que financière s » nécessité de développer des coordinations entre les
différents lieux médicaux où se rendent les patients
« Dynamique
de l’équipe »
« la philosophie de l'équipe et sa sensibilité à la dimension humaine »
« coordinateur ou chef de l'équipe, de leur façon de voir les choses et du rôle qu'ils nous donnent auprès des patients »
« j'apprécie qu'un autre membre de l'équipe se positionne en observateur et échange avec moi à l'issue de la séance »
Peut « utiliser le psychologue pour amener le patient à faire ce que l'équipe souhaiterait de lui, lorsqu'il n'y a pas d'enjeux médicaux vitaux derrière cette demande mais plus une non acceptation de la diversité des réactions, du rythme du patient… »
Moyens
« temps »
« Dépend étroitement du temps accordé aux psy pour accomplir sa mission »
« nous manquons de temps de staff pour échanger et partager! »
« pour accompagner les patients dans leurs changements : « dans certains programmes je ne rencontre qu'une seule fois les patients lors d'un atelier de groupe. J'ai peu de temps pour lire leur dossier et doit ensuite y laisser une trace… difficile d'animer un atelier et de poser ensuite des observations sur des dossiers individuels ! »
80
EXPÉRIENCES :
Rôle
tout au long de la
démarche
élaboration du diagnostic éducatif, du programme rencontrer chaque nouveau patient (et proche) qui arrive recevoir les patients en entretiens individuels animer des groupes, de co-animer des groupes (observatrice) animer des groupes de paroles suivis (vécu de la maladie pour les patients,
vécu et rôle de l’aidant dans la maladie chronique pour les proches) animer /coanimer journées collectives participer à la coordination et à la collaboration du programme création
des outils évaluation du programme suivis courts, d’évaluation et d’orientation vers d’autres professionnels
« proposer un espace pour dire les deuils et les pertes vécus et subis que la maladie impose, d’y donner du sens pour que le patient puisse à un moment (qui sera le sien) intégrer la possibilité de changement et donc d’adaptation à la maladie »
« ce projet d’ETP, (…) permis une dynamique d’équipe très intéressante et enrichissante »
« le travail en équipe est également très enrichissant : essayer de comprendre le patient et de le prendre en charge dans sa globalité »
« la mise en place du programme a amélioré la dynamique de l’équipe, nous échangeons maintenant sur les patients au cours d’un staff toutes les semaines. C’est vraiment très riche d’avoir instauré ce moment qui permet de mieux connaître le patient et son histoire afin d’adapter la prise en charge. L’etp a permis de créer plus d’énergie dans l’équipe ce qui est très motivant au quotidien! »
« très dynamique de travailler au sein d'une équipe pluridisciplinaire, c'est très riche. il y a toujours des idées qui émergent et nous échangeons beaucoup. Il y a un vraie respect de la fonction de chacun, c'est agréable et les rôles sont bien répartis »
« L'ETP a soudé l'équipe, l'a mobilisée autour d'un projet et a permis de développer des liens, de nouer des échanges, mieux faire connaitre le rôle et la place du psychologue, sa façon de travailler et de penser » « L'ETP est moteur dans l'équipe et a permis à certains de développer leur empathie et la prise en compte de la dimension humaine, émotionnelle… »
« Il n'a pas toujours été facile de trouver sa place et de faire entendre la façon dont un psychologue pouvait travailler ni ce que pouvait représenter l'ETP »
81
Avec
l’équipe
« cohésion
Apport du psy
« Il amène une vision subjective du patient (aspect psychosocial). Et au fur et à mesure, nous constatons une approche du patient par les équipes différentes : mettre du sens sur la non observance du traitement par exemple. Les équipes sont moins dans le jugement, sont plus empathiques, plus disponibles. »
«faire évoluer les représentations d’une équipe » (du point de vue biomédical) « afin d’améliorer la prise en charge des patients »
Avec les
patients
rôle(s)
spécifique(s)
interventions collectives « psy » surtout centrées sur la verbalisation du vécu de la maladie et du traitement à travers différents outils
« en individuel (repérer l'histoire de la maladie – représentations- impact des antécédents familiaux…) avec une évaluation de leur humeur (échelle anxiété – dépression)
"atelier motivationnel" ( partage du vécu de l'arrêt du tabac, évoquer les liens entre anxiété et compulsion alimentaire… , consommation d'alcool dans un but anxiolytique »
« mettre en place des séances collectives (entre patients et patients/proches) »
« l'apprentissage de la relaxation, de techniques de gestion du stress, d'affirmation de soi »
De façon générale :
« L’ETP reste une démarche extrêmement intéressante car elle amène le corps médical à adopter une vision
globale du patient, à prendre en compte la personne telle qu’elle est et non pas pour ce qu’elle a. Ce point est
très important pour moi, car je pense qu’il facilite l’intégration du psychologue dans cette démarche ». L’ETP
82
est « continuellement dynamisante pour l’équipe, qui cherche toujours à l’améliorer. Cela permet aussi de
faire émerger une réflexion collective particulièrement riche et constructive »
« les DU en ETP ont permis aux docteurs d'évoluer dans leur représentation et compréhension de l'ETP et de
l'être humain, ainsi le travail fut plus aisé par la suite »
GROUPE DES « EXPERTS »
SYNTHESE DE VOS REPONSES : TOUR 2 (GROUPE EXPERTS)
REACTIONS A LA SYNTHESE DES PREMIERES QUESTIONS
CETTE SYNTHÈSE PERMET DE : confirmer la place définie et nécessaire du psychologue en ETP enrichir nos représentations du rôle de psychologue en ETP clarifier ce qu'une équipe soignante et/ou patient peut attendre de ce professionnel de santé
JE RETIENS QUE / JE PARTAGE :
En général
un rôle multiple : auprès des équipes, des patients, de l’entourage ubiquitaire
ressources professionnelles
nombreuses et mobilisables dans différents domaines
des compétences
polymorphes « comme s'il rassemblait de façon "plus professionnelle" parfois ce que les autres soignants peuvent apporter individuellement et parfois plus "superficiellement" »
écoute et de renforcement positif créer du lien prise de distance positive dans la relation "faire parler" observer la communication non verbale maîtrise parfois mieux les techniques qu'un autre professionnel,
comme l'entretien motivationnel…
une utilité /nécessité
à tout moment du processus éducatif tant pour le patient que pour le soignant éducateur
un travail en interdisciplinarité
au sein d'un travail pluridisciplinaire et non comme un simple relais de consultations sans échanges
au sein du diagnostic éducatif, et ce dans une optique de binôme où la complémentarité entre psychologue d'origine et soignants d'origine ne peut être, à mon avis, que positive car chacun est attentif à des choses différentes
progressivement, il peut faire de la "transmission de compétences" à l'autre membre du binôme (et inversement bien sûr)
auprès du patient
Un vrai rôle de soutien allant d'une place de référent, à celle de membre de binôme avec un
autre soignant
83
En particulier
auprès de l’équipe
un vrai rôle de soutien allant d'une intégration totale dans l'équipe ETP, voire "moteur"
(animation de réunions de réflexion sur l'éthique…) à des places plus "effecteur"
« Le psychologue peut se révéler un élément moteur et de dynamisme du groupe aidant à sa construction, à promouvoir les échanges et propice à l'établissement d'une confiance entre les intervenants. Le psychologue est effectivement plus à même de "prendre en main " guider les échanges et temps de parole au sein d'une équipe »
JE ME RENDS COMPTE QUE/ DE : « Son rôle est multiple et je n'avais pas pensé à autant de domaines d'intervention » « Sa place ne semble pas discutée, celui-ci est parfaitement intégré à l'équipe éducative » « Son rôle dans l'évaluation, je trouve cela très judicieux »
CELA M’ETONNE, ME SURPREND, NE ME PARAIT PAS EVIDENT : Avec les équipes :
l'importance accordée au rôle de soutien On lit "thérapie" dans la synthèse. « Cela ne correspond pas complètement à ce que j'appelle le
rôle du psychologue dans une équipe d'ETP (…) J'imagine plus un psychologue qui travaille dans une collaboration d'équipe ETP à toutes les étapes, en aidant les soignants éducateurs à se sentir capables (en binôme ou plus tard seuls…) d'accéder au domaine psycho-social sans tabou, sans peur.
Pas un psychologue qui aide à identifier les soucis d'ordre psychologique ou du savoir-être, qu'on leur passerait comme une prise en charge supplémentaire faute de compétence des soignants éducateurs, ces derniers restant frustrés, en difficulté relationnelle, etc… Une équipe en ETP "multi-compétences", qui avance sur un même chemin avec le patient, mais avec plusieurs moteurs »
Rédiger des notes cliniques et rapports d'activités, ou encore tenue dossier : pas spécifique du rôle du psychologue en ETP
Aider à la prise en compte du contexte socio-culturel
LIMITES DE SON RÔLE
En général
Il n’a pas sa place
en commission d’éthique, de pratiques : « il est un membre à part entière de l'équipe, sauf bien sûr s'il intervient dans un autre contexte »
« quand ses compétences ne sont pas nécessaires pour répondre aux besoins des patients, des soignants, des proches »
En particulier
avec les patients
« au niveau de la thérapeutique des maladies chroniques de plus en plus ciblée»
« difficile en séance collective seul si la séance aborde des sujets plus spécifiquement de soins ou pathologie. Le mieux, comme cela a été souligné, est de travailler en binôme en complémentarité ou alors en groupe de parole »
avec les équipes Attention à la confusion des rôles ! « Jusqu'à quel degré s'impliquer ? »
« s'il y a des conflits cristallisés: comment "écouter" l'intimité du professionnel collègue ? »
84
FACTEURS INFLUENÇANT SA PLACE ET SON ROLE
Caractéristiques
du programme ETP
approche plutôt biomédicale, globale, humaniste….
du psychologue
approche attitude caractère position par rapport au "pouvoir" « il existe vraisemblablement des approches différentes selon les écoles :
« rien ne devrait être figé puisque chaque patient est différent et demande donc une approche individualisée »
« l'extrémisme » ne permet pas la remise en question et le fait de "mélanger" certaines approches pourraient convenir en fonction de l'instant, du patient (ou de l'équipe), en fonction d'où chacun en est de sa propre réflexion
Attentes, demandes, besoins
de l’équipe Intentions clarifiées sur les rôles de chacun et les complémentarités
des patients
Moyens disponibles
financements malgré le rôle important du psychologue, ce professionnel intègre les
équipes d’ETP tardivement en raison des moyens réduits de financement des programmes. Dommage !!!
temps « Il est difficile de faire du lien lorsque l'équipe n'est pas présente »
organisation travail en binômes…
Représentations
des patients
« le psychologue reste encore associé « aux maladies mentales » et donc les patients peuvent mal vivre son intervention (tabou) si celle-ci est ponctuelle. Il faut donc que le psychologue soit présent tout au long du déroulé du programme et pas uniquement en entretien individuel ou groupe de parole »
IL « FAUDRAIT » QUE LE PSYCHOLOGUE fasse « un effort réflexif sur sa formation initiale et sa pratique afin d'avoir un réel rôle éducatif et non
uniquement de "soutien psychologique" » acquiert « de nouvelles compétences (ou réactualise des anciennes) sur le processus d'apprentissage et
sur l'animation de groupe » « intègre l'équipe éducative dans son esprit et son organisation, et que les messages soient cohérents et
non contradictoires (idem quel que soit le métier en ETP) » « soit présent tout au long du déroulé du programme et pas uniquement en entretien individuel ou
groupe de parole car il reste encore associé « aux maladies mentales » et donc les patients peuvent mal vivre son intervention (tabou) si celle-ci est ponctuelle »
IL « FAUDRAIT » QUE L’ETP: « démontre que les prises en charge évoluent, il faut que les professionnels suivent le même chemin »
EXPÉRIENCES
il me paraitrait impossible de travailler sans ce poste « leur présence dans l'équipe a apporté beaucoup d'humanisme dans
les relations entre les membres de l'équipe, et des changements d'attitude progressif vis à vis des patients »
« mieux connaitre les patients, sous des angles que les soignants "biomédicaux" n'abordaient pas spontanément »
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Expérience positive
avec l’équipe
« notre psy est à l'origine du programme ETP et sa présence est indispensable aux patients et à l'équipe. Sa vision et son recul aident à la remise en question et ses qualités nous font dépasser nos doutes »
expérience très riche : « elle m'a aidé à trouver une nouvelle approche en ETP » « Contrairement aux autres professionnels de santé, elle n' a pas besoin de prendre du recul, elle donne du" sens" à l'histoire de l'individu, à son parcours de vie avec ou sans maladie »
« elle a été un véritable + pour améliorer ma relation au patient, animation, améliorer mes compétences psycho sociales faibles compte tenu de ma formation initiale ! »
aider à « développer de nouvelles compétences au sein de l'équipe (relationnelles essentiellement), partager des outils, des "façons de faire" différentes »
l'action enrichit le portefeuille de compétences globales d'un seul métier: "l'éducateur", joué par plusieurs personnes, avec une approche globale multi-sourires mais (presque) d'une seule voix, où tout le monde se sent en capacité d'avancer, sans tabou, sans crainte (presque…)
« utiliser les compétences des deux psychologues pour animer des espaces de réflexion au sein de l'équipe »
au coordinateur du programme « d'interroger et mieux comprendre les fonctionnements interpersonnels au sein de l'équipe »
Expérience positive
avec les patients
« j'ai rencontré des patients qui étaient opposants à son intervention, mais son "savoir-communiquer" par des moyens détournés a très souvent permis d'établir le contact et de détendre les freins aux échanges. Dans d'autres cas, le respect clair du refus du patient à participer aux groupes d'ETP a permis un cheminement … et parfois un changement d'attitude »
« la force de l'équipe ETP plurielle est que le patient puisse communiquer avec au moins une personne qu'il choisira dans l'équipe. La position de non-soignant du psychologue est souvent celle-ci dans un premier temps pour accepter la maladie, puis ensuite les autres membres selon ses besoins
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Expériences moins
positives
des difficultés à trouver sa place dans l'animation de séance car elle
semblait particulièrement plus à l'aise dans le colloque singulier et par la régularité des rencontres + attitude un peu "normative"
CS de psychologie (de qualité) mais peu de lien avec le travail de l'équipe éducative. Pas d'enrichissement des compétences de l'équipe qui reste "dépendante" de la psychologue, alors que l'équipe soignante se sent en besoin de compétences relationnelles auprès de tous les patients pris en charge
« les transmissions écrites manquent trop souvent »
Sans psychologue dans l’équipe
« C'est complexe en terme d'annonce (amputation), de projection dans le futur pour le patient, modification de son image corporelle et dépendance…Mais aussi parfois pour lui dans ses choix: exemple parfois si les douleurs sont trop intenses, le patient peut de lui-même demander une amputation. Si c'est une infection, non maîtrisée, on lui explique qu'il "vaut mieux perdre sa jambe" plutôt que de mourir d'un choc septique »
En ETP, « lorsqu'un psy s'en va, alors le circuit tourne moins bien. C'est indéniablement nécessaire pour le patient, malheureusement l'accès à ces rencontres n'est pas forcément toujours si bien réglé et l'équipe reste seule dans son désarroi et ses échecs sans personne ressource »
10.3.3 TOUR N°3
GROUPE DES PSYCHOLOGUES
SYNTHESE DE VOS REPONSES : TOUR 3 (GROUPE PSYCHOLOGUES)
RÉACTIONS SYNTHÈSES :
JE REMARQUE :
« constats, préoccupations et demandes relativement identiques, alors que nous travaillons dans des
services différents »
CETTE SYNTHÈSE M’ÉVOQUE :
Un travail
d’équipe
« On est assez bien intégrés dans nos équipes »
« une marge de manœuvre assez importante »
« diversité des actions réalisées »
« beaucoup de communication entre les différents professionnels de santé »
« On s'éloigne du tout-médical, pour aller vers un mieux vivre avec la maladie,
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Un éloignement
du tout médical
avec une qualité relationnelle importante »
« Conversion dans les soins : position beaucoup plus humble, moins toute-
puissante, où la parole du patient a autant de valeur que celle du soignant »
« l’ETP (et les formations) a permis d’améliorer la relation soignant/soigné »
« nouveau regard sur les pratiques »
« beaucoup de réflexions et de remises en question » « certains soignants
comme les diéts ne sont plus dans la prescription stricte des régimes
alimentaires » « les médecins, plus à l’écoute, temps de consult plus
important,… »
L’ETP est
compatible avec
nos missions
traditionnelles
« important de s’intégrer pleinement en ETP et d’y faire rentrer nos
« missions traditionnelles » »
« je garde la spécificité de mon métier de psychologue et enrichi
ma pratique et mes réflexions grâce entre autres à ces formations
(éducateur thérapeutique + tabacologue) »
Un travail délicat
pour le
psychologue
« tentation propre à L'ETP en général de "dresser" des
patients en évaluant leurs moindres comportements,
représentations »
« niveau éthique » : « rester dans une perspective humaniste »
« ne jamais réduire entièrement un sujet à un objet » « part irréductible du
sujet »
« la maladie …chronique, renvoie une vulnérabilité du sujet qui
devrait conduire tout soignant à s'interroger sur la pulsion d'emprise
que cela suscite forcément en lui »
« réaliser que nous avons les moyens de supporter notre impuissance plutôt que
de croire que certaines méthodes ou comportements nous dispenseraient de
questions existentielles »
« accompagner le patient de sorte qu'il puisse "subjectiver" les
multiples recommandations qu'il reçoit, c'est à dire l'aider à
identifier ce qui facilite ou l'empêche d'être observant en fonction de
son histoire, de sa situation actuelle, de ses projets, bref en
fonction de son unicité ». « Cela suppose parfois une temporalité bien
différente des exigences d'un programme d'ETP »
« Cela peut être
thérapeutique quand on décolle des recommandations et qu'il y a un
partage émotionnel sur des questions humaines qui parlent à tous »
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Une difficulté
pour faire revenir
les patients et
leurs proches
« nous avons souhaité proposer des interventions collectives en dehors des
séances » de dialyse. « Une minorité de personnes se sont inscrites et les inscrits
ne viennent pas toujours… »
« Mais ce qui est intéressant sur ce format, c’est qu’à ce moment là, nous
touchons des personnes intéressées et motivées et que nous offrons la possibilité
de venir avec un proche (ce qui était plus compliqué pendant l’ETP en séance de
dialyse…) ».
NOTRE PARTICIPATION :
REMOTIVE !
« cela fait du bien à l'équipe, la remotive, lui insuffle un nouveau dynamisme, et la rapproche des patients,
considérés chacun dans sa singularité »
EST VALORISANTE :
« nous avons tous beaucoup réfléchi à notre pratique et c'est très intéressant d'avoir pris le temps de l'écrire
noir sur blanc (ce qui est assez rare dans notre pratique!!). C'est du coup valorisant! »
PERSPECTIVES PROFESSIONNELLES INTERESSANTES DE PARTAGER AU VU DES ECHANGES :
« SUR LE TRAVAIL AVEC LES FAMILLES »
Les « moments d’expression sur le vécu de la maladie entre patients, entre proches, & entre proches et les
autres patients sont très riches ». Les patients apprécient ces moments et parfois plus que les moments
purement éducatifs basés sur l’apprentissage ou les connaissances. Une de mes perspectives futures de travail,
serait de proposer des groupes spécifiques aux proches (tout comme certaines psy le font déjà) que j’animerais
en binôme avec un autre soignant ».
PERCEPTION DU REGARD DES AUTRES PROFESSIONNELS DE SANTE SUR NOUS-MEMES :
« Evolution favorable surtout de la part des médecins qui
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« Intérêt pour une
approche
psychologique »
« Complémentaire »
- tiennent compte de mes synthèses
- me demandent mon avis concernant certaines résistances
- prennent plus en compte la souffrance de certains patients suite à
un évènement de santé
- ont réalisé l'intérêt d'une approche psychologique et évaluation de
l'humeur ».
« très ouverts à mes propositions, sont curieux de ce qui se passe dans les
groupes »
« Considèrent le rôle du psy comme complémentaire aux leurs ». « Ils me voient comme une collègue au même rang que les autres je
pense.
« Ils me sollicitent régulièrement pour avoir mon avis ou des conseils sur
les patients ou sur leurs ateliers, leurs outils » « l'équipe s'intéresse toujours, ils donnent leur avis, et ont toujours un
regard bienveillant sur ce que je veux mettre en place ou modifier et
c'est motivant »
Acceptent une
invitation à la
« métacognition »
« réfléchir à ce qu'on fait : est-ce pour le bien du patient? Cela
correspond-il à ses besoins? Quelle est la manière la plus
adaptée de s'y prendre ? »
« L'équipe a bien compris que mon apport permet de
temporiser parfois l'ETP ; est-ce le bon moment? Le patient
est-il disponible ou ne vaut-il pas mieux travailler avec lui les
freins, les motivations, les dénis…avant de commencer
l'ETP ».
Comprennent-ils
toujours nos
réticences ?
« ils doivent trouver que « j’exagère » quand je me place trop du côté du
patient ». Par exemple, quand je suis réticente à ce que les ateliers psy
soient filmés dans le cadre d’un projet pour une formation, quand on est
trop centré sur les objectifs du soignant et non pas ceux du patient, qu’ils
veulent changer le comportement d’un patient alors que c’est sa manière
de faire face à la maladie, ect ».
« je dois parfois passer pour la rabat-joie » « des remarques désagréables
sur le physique des patients obèses, j'essaie de tempérer, de leur donner
un autre point de vue »
«Ils pensent peut être que je ne laisse pas assez de trace écrite sur les
dossiers ».
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Influencé par notre
propre
positionnement
« Ils apprécient que je ne me sois pas mise dans ma tour
d'ivoire, et que j'ai bien voulu "plonger" dans cette aventure.
Chaque "point de vue" est valorisé et s'enrichit mutuellement,
et chacune a sa place et sa parole de professionnel ». « la question du statut est toujours centrale dans
l'investissement d'un poste : remplacement » « dépend aussi de mon positionnement et du regard que je porte sur
eux »de ne pas interpréter toutes leurs réactions…, de reconnaître la
qualité de leur travail, leur faire retour des impressions des patients ».
Influencé par leur
représentation du
psychologue
« la chef de service porte un regard bienveillant et confiant dans ma façon
d'animer les groupes de paroles et les entretiens ». « Pour les autres membres de l'équipe, cela dépend du rapport
de chacun plus ou moins défensif avec la représentation du
psychologue. Je pense qu'une image de toute-puissance associée au
fantasme inquiétant que peut-être les psys voient des choses cachées…, il
y a parfois unlong chemin pour désamorcer les inquiétudes générées par
cette place de psy ».
« Perception du
métier pas toujours
très claire »
« leur perception du métier de psychologue n'est pas toujours très claire »
« ils me proposent de travailler avec la diététicienne sur les perceptions du
gout, des sensations, de faire les courses avec les patients et la diet… »
Une diététicienne perçoit, « le métier de psychologue en ETP est perçu
comme un rôle d'éducation, comme le sien, elle ne semble pas faire de
différence entre les 2 », elle dit : « il faut que ce soit concret » sinon « les
orienter vers un CMP »
INTERET PORTE A L’ETUDE : MOYENNE 9/1
« Intéressant » « de pouvoir exprimer notre ressenti sur notre place en ETP »
« d’échanger « virtuellement » sur nos points de vue »
« d'avoir un point de vue global sur des pratiques si singulières »
« utile » « de s'interroger sur le sens de nos pratiques, sur leurs fondements,
leurs objectifs et la diversité des outils de pensée ».
« Pour se rassurer sur les difficultés qu'on avait en commun »
« se donner des idées en comparant nos pratiques »
« réflexion »
« Indispensable »
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Laborieux « l’écrit reste cependant plus compliqué dans la formalisation des
réponses et demande plus de réflexion »
« Réseau ? » « cela pourrait aboutir à un travail en réseau où on échange, ce qui est
toujours riche ».
GROUPE DES « EXPERTS »
SYNTHESE DE VOS REPONSES : TOUR 3 (GROUPE EXPERTS ETP)
REACTIONS A LA SYNTHESE N°2 :
CETTE SYNTHESE :
« Confirme le rôle
important du psy en ETP »
« rôle important, voire
indispensable d’un psychologue au sein d’un programme d’ETP »
« Permet de réfléchir à la place
de chaque professionnel »
« confronter les représentations » : « Complémentarité: les réponses : nécessité de travailler ensemble, tout en
gardant ses compétences spécifiques Pour que la place de chacun soit « effective, il faut qu'elle soit consciente,
explicitée, et non pas la considérer comme "allant de soi" » Pour cela, il faut : « prendre du temps pour se connaitre, expliquer ce que l'on fait
ou peut faire et de définir/clairifier des objectifs communs dans un projet de soins global. Donner de sens »
« Prendre conscience de la
notion de complémentarité »
pour développer des compétences d'équipe, en enrichissant les compétences individuelles
pour mieux répondre aux besoins complexes des patients (chacun avec ses compétences spécifiques)
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Relate « l’importance de la
coordination »
« dans l'orientation donnée aux diverses professions » « la pluridisciplinarité et l'importance des échanges »
« l’importance des transmissions du
psy »
Transmission sur le suivi des patients « transmission de compétences psycho-sociales aux autres membres de l’équipe »
« compétences en écoute active »
Permet de « prendre conscience d’autres aspects du rôle du
psy »
Du « rôle multiple : accompagnement équipe/patient, animation et élaboration
des programmes… » « Des compétences à développer comme l’animation de groupes » Que « cette idée de soutien apporté aux patients reste
encore à développer, celle-ci doit prendre toute sa place au sein d’un programme d’ETP »
- pour développer des compétences d'équipe, en enrichissant les compétences individuelles
REMARQUES :
« Il aurait peut-être été intéressant de solliciter et d'interroger des associations de patients (ex : AMOC) et des représentants d'établissements de santé pour connaitre leur avis sur la place du psychologue en ETP »
« Je suis étonnée qu’il n’ait pas sa place en comité d’éthique.. Pourquoi ? »
« Etre le psychologue qui participe à l’analyse de pratique de l’équipe dans laquelle lui est aussi un membre à part entière me semble tendu ».
…Bon, au final cela est aussi pas mal une question de financement de poste, il me semble…
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INTERET PORTE A L’ETUDE : moyenne 8.5/10
LES QUALIFICATIFS EMPLOYES POUR L’ETUDE : « utile », « très intéressant », « riche/enrichissant ». Ceci
pour les raisons suivantes:
Pour les coordonateurs de
programmes :
« « pour comprendre certaines positions » « l'importance de la place du psy ».
Pour les professionnels
soignants :
Réflexion générale:
Permet de :
- « réfléchir », - « un travail de construction de groupe » - « confirme la place du psy » - « clarifier les rôles du psychologue dans ce domaine en plein
développement »
question de « la formation initiale et continue des psychologues »
Remarques :
« Par manque d'expérience », « il m'était parfois difficile de
répondre à certaines questions par exemple : les limites de
l'intervention du psychologue ».
« En dépit de leur « pertinence » les moyens financiers ne sont pas alloués pour permettre de recruter »
PERSPECTIVES :
« Exercice à étendre à d'autres professions (diététicien, kiné…) qui ont du mal encore dans certaines équipes à trouver leur place »
« Il serait souhaitable de poursuivre ce travail peut être dans des contextes spécifiques comme celui de la médecine de ville ».
10.4 CARTES CONCEPTUELLES : PERCEPTION GLOBALE IMAGEE
10.4.1 DES PATIENTS