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Prométhée noir

Daouda Massa Diarra

14.88 625337

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 184 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,07 mm) = 14.88 ----------------------------------------------------------------------------

Prométhée noir

Daouda Massa Diarra

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Dédicace

L’art ne peut se mettre au service de ceux qui font l’histoire, il est au service de ceux qui la subissent, disait Albert Camus. Ce livre est dédié au Président Amadou Toumani Touré pour ses efforts prométhéens dans la construction du Mali. Efforts qui, comme Prométhée d’ailleurs, ont failli lui coûter la vie.

Daouda Massa DIARRA.

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Préface

Au moment où les hommes font le déni de l’histoire et de la réalité politique, au moment où les œuvres d’un homme obsédé par la démocratie et la liberté ont tendance à s’éclipser dans les gouffres de l’oubli et de l’ingratitude, au moment même où certains cherchent à lyncher le bienfaiteur exilé, Prométhée noir nous invite à jeter un regard sur notre passé et sur notre histoire. Et à travers cela, sur le passé et l’histoire de l’un des héros déchus de la démocratie et de la république. Aucune société encore moins aucun homme ne peut construire son avenir en foulant de son pied son passé, en le réduisant à son aspect négatif, en le diabolisant.

Véritable chef-d’œuvre de réhabilitation, Prométhée noir nous invite à regarder le verre à moitié rempli et non le verre à moitié vide. Notre devoir étant de combler le vide resté au lieu de verser ce qui est déjà un acquis. Et conserver les acquis c’est rester fidèle aux idéologies de la révolution de mars 1991, conserver les

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acquis c’est se rattacher aux principes de la démocratie et de la république, conserver les acquis c’est éviter les drames de guerre, le massacre des populations civiles et militaires, conserver les acquis c’est éviter la tragédie des populations déplacées et refugiées.

Que représente Prométhée pour l’humanité ? Il est le symbole de l’humanisme, celui qui a plaidé la cause des hommes auprès d’Atlas, le voleur de feu. Il est aussi celui qui réfléchit avant d’agir. Quoiqu’on dise, le président Amadou Toumani Touré demeure l’auteur de notre démocratie et nous devons, à lui et à tous ceux qui ont mené ce combat, une totale reconnaissance. C’est donc l’occasion pour nous tous bons maliens de dire merci à ATT. Nous avons été ensemble, nous le sommes et nous le serons. Avec cette œuvre, nous rappelons notre chère devise : « Retrouvons ce qui nous unit »

Amadou Koïta, Président du Parti Socialiste

« Yelen Coura »

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« En réalité, si Prométhée revenait, les hommes d’aujourd’hui feraient comme les dieux d’alors : ils le cloueraient aux rochers, au nom même de cet humanisme dont il est le premier symbole. Les voix ennemies qui insulteraient alors le vaincu seraient les mêmes qui retentissent au seuil de la tragédie eschylienne : celles de la Force et de la Violence. »

Prométhée aux Enfers, Albert Camus.

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Acte I

(Le régime dictatorial du Président-Général bat son plein. Le Mali est en même temps plongé dans une crise sans précédent. Les étudiants ont six mois d’arriérés de bourses non payées, la même situation persiste chez les fonctionnaires, des mois sans salaire. Le comité AEEM formé par Marico et soutenu par le syndicat des enseignants est rejeté par l’Etat. Il lui est interdit des rassemblements ou des manifestations. Les étudiants tiennent donc leur réunion clandestinement)

Scène 1

Venez ! Venez ! Venez ! Oh venez ! Venez ! Bienfaiteurs du monde, Venez ! C’est le temps de construire la patrie. La musique parle mes frères, elle parle, La musique parle mes frères, le balafon du Kénédougou parle ! Le balafon parle mes frères, le balafon parle,

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Ah oui ! Le balafon parle, Nèba Solo du Kénédougou parle, Que nous enseigne le balafon, mes frères ? Ecoutez-bien, je vais vous le dire. Que nous enseigne le balafon ? Que les voisins s’entendent, Que les frères s’entendent, Que les amis s’entendent, Que la famille s’unisse, Que le village s’unisse, Que le pays s’unisse, Je vous assure que si nous ne nous entendons pas, Personne d’autre ne quittera nulle part ailleurs Pour venir faire notre patrie à notre place. Ah oui mes frères, j’accompagne mon balafon au Kénédougou, Ah oui mes frères, j’accompagne mon balafon au Kénédougou, Il y a de la bonne nouvelle au Kénédougou, Solo va au Kénédougou, Il y a la joie de vivre au Kénédougou, Solo va au Kénédougou, Il y a de la bonne banane au Kénédougou, Solo va au Kénédougou, Il y a de la bonne pomme de terre au Kénédougou, Solo va au Kénédougou, Il y a de l’arachide fraiche au Kénédougou, Solo va au Kénédougou,

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Ah oui mes frères, j’accompagne mon balafon au Kénédougou. Il y a de ces gens dans la foule, Méfiez-vous de leur confier le pouvoir ! Il y a de ces gens dans le pays, Méfiez-vous de leur confier le pouvoir ! Ceux qui n’ont pas la volonté d’unir, Méfiez-vous de leur confier le pouvoir ! Ceux qui n’ont pas l’esprit du bien, Méfiez-vous de leur confier le pouvoir ! Ceux qui n’ont pas le sens de la réflexion, Méfiez-vous de leur confier le pouvoir ! Je vous assure que si vous leur confiez le pouvoir, Ils confieront votre dignité au margouillat ! Et cela ne fait pas honneur, Cela ne fait pas honneur mes frères, Prions tous les uns pour les autres. (Les tracts circulent dans les classes de l’Ecole de Médecine, de l’Ecole Normale Supérieure, de l’Ecole Nationale d’Administration et de l’Ecole Nationale d’Ingénieur.)

Marico

Tiens ! (Il tend des lots de papier à Soumeylou)

Soumeylou C’est quoi ?

Marico Ouvre-les et tu le sauras.

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Soumeylou

(Il ouvre et lit) « Le grand-père de Marico est décédé. Enterrement prévu chez lui à deux heures. Sentiments distingués. » J’ai compris.

Marico

Fais-le passer aux autres. Je vais de ce pas à l’E.N.Sup pour remettre un lot à Lifon.

Soumeylou

A ce soir donc !

Marico

(Il fait rouler ses gros yeux rouges de gauche à droite) Fais attention à toi mon petit. (Il lui tape sur l’épaule puis disparaît sur sa mobylette).

Scène2

Marico le Secrétaire Général du Comité AEEM de l’Ecole de Médecine, Soumeylou celui de l’Ecole Nationale d’Administration, Lifon celui de l’Ecole Normale Supérieure et Baby celui de l’Ecole Nationale d’Ingénieur.

Il est deux heures du matin et les étudiants continuent à somnoler dans une salle obscure légèrement éclairée par une lampe à pétrole posée sur la table au-devant de la scène sur des bancs et des chaises vieillis en bois. Les participants arrivent à peine à se reconnaître. Les uns

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baillent les mains sur la bouche et les autres se frottent les yeux.

Marico Oser lutter !

Les autres C’est oser vaincre !

Marico Oser lutter !

Les autres C’est oser vaincre !

Marico Oser lutter !

Les autres C’est oser vaincre !

Marico Les poltrons !

Les autres A bas !

Marico

Les béni-oui-oui !

Les autres

A bas !

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Marico

Les garçons demoiselles !

Les autres

A bas !

Marico

Les corrompus !

Les autres

A bas !

Marico

Les lâches !

Les autres

A bas !

Marico

Les dirigeants dirigés !

Les autres

A bas !

Marico

Camarade Bonjour ! Je ne vais pas faire de grands discours car notre réunion est clandestine. Je vous remercie chacun du sacrifice. Par ailleurs, ce qui nous rassemble ce soir est la situation dans laquelle se trouve plongé notre pays en général et nous étudiants en particulier. Il est temps que nous agissions contre cette crise qui est partout et qui frappe à la fois tout le monde.

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En tout cas, pour ce qui concerne moi Marico, je la vois comme étant l’aboutissement de la mauvaise gestion des ressources de l’Etat. Il y a une minorité qui est en train de s’emparer de la part de la majorité et cela jusqu’au minimum vital. Avec tout ce que le Mali a comme atouts, nos mines d’or, notre fer, notre commerce. Comment comprendriez-vous que les fonctionnaires ne soient payés que chaque quatre ou trois mois soit quatre ou trois fois par an ? Quant à nous étudiants, on n’en parle pas ! Des mois d’arriérées de bourses et après, c’est ce même Etat qui viendra nous reprocher notre bas niveau. En tout cas, je ne sais pas ce qui se produira mais il est temps que l’on sorte du silence.

Soumeylou

Camarade Marico, je te donne entièrement raison. Le régime dictatorial qu’on nous impose par la force militaire et dont le mécanisme de fonctionnement est la violence et la peur est à combattre par tous les moyens. Je propose que nous réclamions nos arriérées de bourses et que nous partions en grève si nous n’avons pas de suite favorable.

Baby

Je vous trouve d’ailleurs trop passifs. Je propose que le mot d’ordre de grève soit déclenché dès demain.

Marico Camarades ! Je suis satisfait de vos réactions

pleines de vaillance et de dignité. Nous allons par contre être stratégiques. Pour l’instant, contentons-

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nous de réclamer nos arriérées de bourses et observons deux semaines pour voir. S’il n’y a pas de réaction de la part du gouvernement, nous irons en grève comme le propose le camarade Soumeylou. Sur ce, nous allons lever la séance mais restez vigilants. Je vous tiendrai informer de la suite.

Scène3

Tenue du conseil des ministres au palais présidentiel présidé par le Président-Général.

Le Président-Général

(Il porte un grand boubou et des babouches. Son visage exprime la rigueur et le sérieux) Messieurs et dames, je déclare la séance ouverte. Que chacun me tienne au courant de ce qui se passe dans son département ministériel et des rumeurs qui circulent dans la ville.

Le ministre de l’éducation

Monsieur le président, le syndicat des enseignants réclame les arriérées de salaire. Il menace de partir en grève. J’ai reçu la requête des étudiants qui réclament aussi leurs arriérées de bourses.

Le Président-Général Nous avons accordé assez d’attention aux

enfantillages de vos étudiants et de vos enseignants. Il

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est grand temps qu’ils comprennent que la crise est toujours là et touche à la fois à tout le monde et cela partout au Mali. Ce qui est urgent, c’est autre chose.

Le ministre de l’éducation Je crains seulement qu’ils ne se rassemblent pour

constituer un front. Le Président-Général

Vous devez utiliser tous les moyens pour prévenir ce drame.

Le ministre de l’éducation Le seul moyen de le faire est de leur donner au

moins la moitié des arriérées qu’ils réclament. Le Président-Général

J’ai l’impression que vous êtes du syndicat des enseignants ou de celui des étudiants. Vous exagérez dans votre prise de position en tant que ministre de l’Etat. Vous devez trouver les moyens de les dissuader. Vous commencez à me mettre sur mes nerfs. Si les autres n’ont rien à ajouter, je déclare la séance levée.

Unique roi, roi qu’on n’accuse pas, Pauvres et orphelins, personne ne sait son avenir, Unique roi, roi qu’on n’accuse pas, Pauvres et orphelins, personne ne sait son avenir ! Unique roi, roi qu’on n’accuse, Pauvres et orphelins, tous ont Dieu comme espoir ! Unique roi, roi qu’on n’accuse pas, Pauvres et orphelins, personne ne sait son avenir !

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Lève-toi, soutien des pauvres, Lève-toi, amateur des misérables, Lève-toi, espoir des orphelins, Lève-toi, les ennemis ne te vaincront pas ! Tout ce que l’homme fait dans sa vie, En bien et en mal, il le fait pour lui-même. Lève-toi, soutien des pauvres, Lève-toi, amateur des misérables, Lève-toi, espoir des orphelins, Lève-toi, les ennemis ne te vaincront pas !

Scène4

Marico, Soumeylou, Baby, Lifon et les autres.

Marico Oser lutter !

Les autres Oser vaincre !

Marico Oser lutter !

Les autres

c’est oser vaincre !

Marico Les lâches !