Projet Alptransit: Instrumentation et essais in Situ pour ...

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Dr. Thut Solexperts AG Mr Piedevache Solexperts France Mr Prouvot Solexperts AG P P 331 PROJET APLTRANSIT : instrumentation et essais in-situ pour deux tunnels de base en contexte alpin Le projet Alptransit comprend la réalisation des deux tunnels de base du Saint Gothard et du Lötschberg, longs respectivement de 56,8 et 34,6 km, qui relieront Zurich et Berne à Milan. Les deux tunnels comprennent chacun deux gale- ries à voie unique distantes de 40 mètres. La géo- logie des tracés est généralement favorable mais quelques difficultés locales ont conduit à procéder à un suivi de mesures décrites par les auteurs : convergence et mesures de contraintes transmises à deux centres d’acquisition pour le St Gothard ; mesures de mouvements en surface, extrusion de sol, débits et pression des arrivées d’eau sur le Lötschberg. Dans certaines zones de fortes convergences, des essais spécifiques ont été réali- sés tels que les cintres coulissants sur le St Gothard et les éléments HDC sur le Lötschberg. Les auteurs concluent en insistant sur l’impor- tance des reconnaissances et de l’instrumentation dans les zones présentant des risques liés à la qualité médiocre des terrains et mettent l’accent sur l’évolution des instruments de mesure qui résulte du traitement de telles situations. ALPTRANSIT : instrumentation and in situ tests for two base tunnels in Alpine environment The Alptransit scheme includes the Saint Gothard and the Lötschberg base tunnels, respectively 56.8 and 34.6m long, linking Zurich and Bern to Milano. Both tunnels include two one-way galle- ries, 40m apart each other.The geology is gene- rally favourable but a few difficult areas have been encountered, leading to several measure- ments herein described : convergence and stress values transmitted to two acquisition centers for the St Gothard tunnel, surface movements, soil extrusion, water ingress and pressure value for the Lötschberg tunnel. In high convergence zones, specific tests were carried out such as sliding rings for the St Gothard and HDC (High Deformable Concrete) elements for the Lötschberg.The authors conclude by pointing out the particular attention to be given to investiga- tion and instrumentation in the areas presenting risks due to the poor quality of rock and point out the evolution of instruments resulting from dea- ling with such situations. 1 - INTRODUCTION 1.1 - Projet Alptransit : tunnels de base Dans le cadre de la mise en œuvre du réseau ferroviaire européen à grande vitesse pour les passagers et du développement du trans- port fret, la Suisse réalise actuellement le percement de deux tunnels de base alpins. Les tunnels de base du Saint-Gothard et du Lötschberg permettront de relier Zurich et Berne à Milan et de désenclaver ainsi l’Italie vis-à-vis de l’Europe septentrionale. Les conditions géologiques complexes et un contexte géotechnique difficile dû au fort recouvrement, ont nécessité une attention particulière lors du creusement. 1.1.1 - Tunnel de base du Saint-Gothard Le tunnel de base du Saint-Gothard, long de 56.8 km, comprend deux galeries à voie unique, distantes l’une de l’autre de 40 m, reliées entre elles tous les 325 m par des rameaux de communication. Trois points d’attaque intermédiaire ont été réalisés pour faciliter la construction. A Sedrun, un puits d’accès a été creusé à l’emplacement de la station multifonction n°1. A Faido, une galerie d’accès d’une lon- gueur de 2.7 km et d’inclinaison 12.7 % permet d’atteindre la station multifonction n° 2. Le point d’attaque d’Amsteg est situé quant à lui au nord, sous la forme d’une galerie d’accès horizontale. Cinq tronçons de creusement sont effectués : • Erstfeld, au nord, réalisé dans une fouille à ciel ouvert au niveau initial, doit être excavé par tunnelier (marché non attribué à ce jour suite à un recours sur le lot 151). • Amsteg, depuis une galerie creu- sée à l’explosif, des tunneliers progressant vers Sedrun. 800 m restant environ à ce jour. • L’accès au tronçon Sedrun est rendu possible au moyen d’une galerie d’accès de 1 km de lon- gueur, reliée à deux puits de 835 m de profondeur. Excavation à l’explosif vers Amsteg (80 %) et Faido (40 %), station multi- fonctions achevée.. ROJET ALPTRANSIT : ROJET ALPTRANSIT : instr instr umentation et essais in-situ pour deux tunnels de base umentation et essais in-situ pour deux tunnels de base en contexte alpin en contexte alpin TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS - N° 198 - NOVEMBRE/DECEMBRE 2006 Représentation schématique du système à deux galeries

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Dr. Thut Solexperts AG

Mr Piedevache Solexperts France

Mr Prouvot Solexperts AG

PP

331

PROJET APLTRANSIT : instrumentation etessais in-situ pour deux tunnels de base encontexte alpinLe projet Alptransit comprend la réalisation desdeux tunnels de base du Saint Gothard et duLötschberg, longs respectivement de 56,8 et34,6 km, qui relieront Zurich et Berne à Milan.Les deux tunnels comprennent chacun deux gale-ries à voie unique distantes de 40 mètres. La géo-logie des tracés est généralement favorable maisquelques difficultés locales ont conduit à procéderà un suivi de mesures décrites par les auteurs :convergence et mesures de contraintes transmisesà deux centres d’acquisition pour le St Gothard ;mesures de mouvements en surface, extrusion desol, débits et pression des arrivées d’eau sur leLötschberg. Dans certaines zones de fortesconvergences, des essais spécifiques ont été réali-sés tels que les cintres coulissants sur le StGothard et les éléments HDC sur le Lötschberg.Les auteurs concluent en insistant sur l’impor-tance des reconnaissances et de l’instrumentationdans les zones présentant des risques liés à laqualité médiocre des terrains et mettent l’accentsur l’évolution des instruments de mesure quirésulte du traitement de telles situations.

ALPTRANSIT : instrumentation and in situtests for two base tunnels in Alpine environmentThe Alptransit scheme includes the Saint Gothardand the Lötschberg base tunnels, respectively56.8 and 34.6m long, linking Zurich and Bern toMilano. Both tunnels include two one-way galle-ries, 40m apart each other.The geology is gene-rally favourable but a few difficult areas havebeen encountered, leading to several measure-ments herein described : convergence and stressvalues transmitted to two acquisition centers forthe St Gothard tunnel, surface movements, soilextrusion, water ingress and pressure value forthe Lötschberg tunnel. In high convergence zones,specific tests were carried out such as slidingr ings for the St Gothard and HDC (HighDeformable Concrete) elements for theLötschberg.The authors conclude by pointing outthe particular attention to be given to investiga-tion and instrumentation in the areas presentingrisks due to the poor quality of rock and point outthe evolution of instruments resulting from dea-ling with such situations.

1 - INTRODUCTION

1.1 - Projet Alptransit : tunnels de baseDans le cadre de la mise en œuvre du réseauferroviaire européen à grande vitesse pourles passagers et du développement du trans-port fret, la Suisse réalise actuellement lepercement de deux tunnels de base alpins.Les tunnels de base du Saint-Gothard et duLötschberg permettront de relier Zurich etBerne à Milan et de désenclaver ainsi l’Italievis-à-vis de l’Europe septentrionale.

Les conditions géologiques complexes et uncontexte géotechnique difficile dû au fortrecouvrement, ont nécessité une attentionparticulière lors du creusement.

1.1.1 - Tunnel de base du Saint-GothardLe tunnel de base du Saint-Gothard, longde 56.8 km, comprend deux galeries à voieunique, distantes l’une de l’autre de 40 m,reliées entre elles tous les 325 m par desrameaux de communication.

Trois points d’attaque intermédiaire ont étéréalisés pour faciliter la construction. ASedrun, un puits d’accès a été creusé àl’emplacement de la station multifonctionn°1. A Faido, une galerie d’accès d’une lon-gueur de 2.7 km et d’inclinaison 12.7 %permet d’atteindre la station multifonctionn° 2. Le point d’attaque d’Amsteg est situéquant à lui au nord, sous la forme d’unegalerie d’accès horizontale.

Cinq tronçons de creusement sont effectués :

• Erstfeld, au nord, réalisé dans une fouille àciel ouvert au niveau initial, doit êtreexcavé par tunnelier (marché non attribuéà ce jour suite à un recours sur le lot 151).

• Amsteg, depuis une galerie creu-sée à l’explosif, des tunneliersprogressant vers Sedrun. 800 mrestant environ à ce jour.

• L’accès au tronçon Sedrun estrendu possible au moyen d’une

galerie d’accès de 1 km de lon-gueur, reliée à deux puits de 835 m

de profondeur. Excavation à l’explosif versAmsteg (80 %) et Faido (40 %), station multi-fonctions achevée..

ROJET ALPTRANSIT : ROJET ALPTRANSIT : instrinstr umentation et essais in-situ pour deux tunnels de base umentation et essais in-situ pour deux tunnels de base en contexte alpinen contexte alpin

TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS - N° 198 - NOVEMBRE/DECEMBRE 2006

Représentation schématique du système à deux galeries

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• Le tronçon de Bodio est réalisé à ciel ouvert,puis par attaque ponctuelle dans les éboulisde pente, et enfin au tunnelier dans la rochegranitique.

• La station multifonction de Faido est creuséeà l’explosif, puis deux tunneliers y sont ame-nés depuis Bodio. Le creusement vers Sedrunest dès lors effectué avec les deux tunneliers(320 m réalisés).

La géologie rencontrée sur le tracé est caracté-ristique des massifs de l’Aar et du Saint-Gothard,à savoir un ensemble de gneiss et de granite.Cependant, l’orogenèse alpine à l’ère tertiaire aintégré des intercalaires sédimentaires et pro-voqué des fracturations nombreuses et uneforte hétérogénéité des formations, nécessitantdes reconnaissances préalables. Des foragesréalisés à partir d’une galerie pilote d’une lon-gueur de 5.5 km ont permis d’éclaircir les zonescomplexes du synclinal de Piora. Les résultatsont révélé que les circulations d’eau étaientabsentes à cette profondeur. A l’opposé, lemassif intermédiaire du Tavetsch, sous-jacentau village de Sedrun, est la partie la plus défa-vorable, car elle présente des gneiss sous fortecontrainte et comporte des hautes pressions. (voir schémas ci-dessus)

1.1.2 - Tunnel de base du LötschbergLe tunnel, d’une longueur de 34.6 km, est com-posé de deux galeries à voie unique, séparées de40 m entre elles, reliées entre elles tous les 333 mpar des rameaux de communication.

Cinq points d’attaque, dont trois intermé-diaires, ont permis d’obtenir des tronçons nedépassant pas 10 kilomètres. Les portails sontsitués à Frutigen (Canton de Berne) et Raron(Canton du Valais). Le portail nord à Frutigencomporte en outre une tranchée couverte.

Les fenêtres d’accès intermédiaires de Mitholz,Ferden et Steg sont des tunnels longs de 1.5 à 4.5 kmet constituent des voies de garage et de secours.

La géologie rencontrée sur le tracé est assezfavorable ; les zones plus difficiles ont été recon-nues à l’aide de 2 forages profonds (longueur de1400 m) ainsi que par des sondages plus courtsà partir de la galerie de reconnaissance deFrutigen (longueur 9.4 km) et des tunnels rou-tiers et hydroélectriques existants. Trois zonesdifficiles ont été reconnues d’après la géologie :

Le trias au niveau du portail sud (sous le village deSt. German), le cône de la Vierge (Jungfraukeil)aux alentours de Ferden, et la nappe calcaireallochtone du Doldenhorn au sud de Mitholz.

80 % de l’excavation est réalisée à l’explosif et20 % au tunnelier.

2 - SÉCURITÉ DES OUVRAGES

2.1 - Suivi de la stabilité desouvrages souterrains

2.1.1 - Mesures de convergence : St.-GothardNeuf sections de mesure sont réparties sur lazone de Sedrun en fonction des profils géolo-giques rencontrés. Chaque section comprenddes mesures de déformations radiales du massifgrâce à trois ou cinq extensomètres 4 tiges delongueur 25 m (convergence absolue), complé-tées par des mesures de convergence relativespar théodolite manuel. Ces extensomètres sontconçus pour être complètement installés dans leforage avec un logger à mémoire intégré avectransmission radio afin de pouvoir être mis enœuvre au plus près du front, même dans le casd’utilisation d’explosifs.

P rojet AlpTransit : instrumentation et essais in-situ pour deux tunnels de base en contexte alpin

Géologie et galerie desondage du synclinalde Piora (AlptransitGothard, 2005)

Profil géologique en long du tunnel du St.-Gothard (Alptransit Gothard, 2005)

Tracé du tunnel du Lötschberg (BLS Alptransit, 2003)

Profil géologique en long du tunnel du Lötschberg (BLS Alptransit, 2003)

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Les déformations sont comprisesentre 2 et 180 mm (inférieures auseuil d’alerte), ce qui correspond auxprévisions.

En cas d’arrêt prolongé de l’avancement versle nord, la stabilité du front de taille est sur-veillée en continu par un théodolite automatisé.

2.1.2 - Mesures de contraintesLes mesures de déformation sont complé-tées par des mesures des contraintes dans lesoutènement.

L’instrumentation des boulons au moyend’ancrages de mesure permet de donner ledéplacement par rapport à la tête de forageen quatre points répartis sur la longueur duboulon. On peut ainsi calculer l’évolution dela tension normale et ensuite optimiser lepositionnement et la longueur des ancrages.Cet instrument a été utilisé pour des mesuresdans la calotte au niveau des stations multi-fonctions de Faido et de Sedrun dans le tun-nel de base du St.-Gothard.

Dans le tunnel de base du Lötschberg, lesmesures des contraintes sur les cintres de

soutènement, dans le béton projeté et dansl’anneau béton sont réalisées soit à l’aided’extensomètres à cordes vibrantes, dontsont déduites les contraintes dans la struc-ture, soit avec des cellules de pression totale.La mise en œuvre des cellules de pressiontotale nécessite de soigner le remplissage debéton projeté, afin que la cellule soit parfaite-ment enrobée par le matériau.

P rojet AlpTransit : instrumentation et essais in-situ pour deux tunnels de base en contexte alpin

Exemple de section de mesure en tunnel (Transco Sedrun, 2004)

Résultat de l’ancrage de mesure MA1 dans la sectionEST-NW-1598 (Solexperts, 2003)

Cellules de pression tangentielles sur le ferraillage (Solexperts, 2005)

2.1.3 - Visualisation des données,St.-GothardL’ensemble des capteurs est relié à deux cen-trales d’acquisition de données GeoMonitor,une pour chaque front d’attaque sud et nord.Le système modulaire est adapté aux condi-tions du chantier, avec par exemple l’utilisa-tion de loggers à mémoire dans les zonesd’excavation à l’explosif, qui sont câblésaprès éloignement du front. Toutes lesmesures automatiques ainsi que les mesuresmanuelles sont intégrées dans une base dedonnées gérée par le logiciel de visualisationWeb-Davis. Les différents intervenants(Maître d’ouvrage, Maître d’œuvre, entre-prises, bureaux experts) ont accès aux don-nées via un site internet sécurisé, où ils peu-vent consulter et décharger les données demanière simple et rapide. Les différents pres-tataires de mesure (topographes…) peuventégalement intégrer leurs mesures à cette basede données au travers d’un site de transfertFTP dédié. Diverses informations relatives auchantier sont visualisables sur cette base dedonnées : rapport journalier d’activités, avan-cement, procédures d’alarme.

Visualisation graphique des mesures sur le lot de Sedrun(Solexperts, 2003)

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2.2 - Suivi des ouvrages desurface à Frutigen,LötschbergLes deux tubes de la tête nord du tunnel duLötschberg sont prolongés par une fouille de2.5 km de long, parallèle à la gare et à la voieferrée de Frutigen. Une paroi berlinoise etune paroi clouée retiennent les terrains destructure grossière avec des lentilles desable. Le niveau de la nappe se situe à peuprès au niveau du fond de fouille.

La circulation des trains étant maintenue,les conditions de sécurité imposent un suivien continu des parois de la fouille et de lavoie ferrée.

La stabilité de la fouille est contrôlée par desmesures optiques automatisées avec cinqthéodolites fonctionnant simultanément. Cesmesures de déformation sont complétéespar des mesures manuelles d’inclinomètre etde déformètre de forage en paroi. L’effort surles tirants d’ancrage est contrôlé à l’aide decellules de charge et d’extensomètres àsimple tige placés le long des ancrages.

Les voies ferrées attenantes à la fouille sontinstrumentées avec un système de mesurespécifique développé pour suivre les varia-tions d’inclinaison. Les capteurs utilisés,d’une précision de 0.01 mm/m sont conçuspour des conditions difficiles en termes d’am-plitude thermique et d’effets dynamiquesdus au passage des trains. Les variations d’in-clinaison latérale des voies sont contrôléessur quatre sections avec chacune 2 capteursmontés sur les traverses en bois.

Le système GeoMonitor assure l’acquisition desdonnées de tous les capteurs, et l’ensembledes calculs de mise en forme des mesuresoptiques par théodolites. La précision, la simpli-cité du système et les seuils d’alarme associésau dispositif permettent d’analyser efficace-ment les effets de l’excavation et de prendrerapidement des mesures correctives.

A cet effet un plan d’action (PQM) a été misen place, définissant par exemple une limitede déplacement de 10 mm/24 h pour laparoi berlinoise. En cas de dépassement,l’alarme programmée sur le système de sur-veillance envoie un fax et un SMS, permet-tant aux responsables de comparer lesvaleurs de tous les instruments voisins, etd’appliquer les mesures correctives néces-saires. Le chantier n’a pas présenté de pro-blèmes à ce niveau, la valeur maximale dedéplacement atteinte par la paroi ayant été de15mm vers la fouille sur quelques semaines.

2.3 - Suivi des ouvrages de surface à St German,LötschbergDans la zone du portail de Raron, sous-jacente au village de St German, le tunnel debase passe à une profondeur de 80 à 100 mdans des roches fortement perméables(calcaires du Lias). Un débit d’eau de 40 à90 l/s a été rencontré lors du passage du tun-nelier, provoquant l’abaissement de la nappephréatique sous le village et des tassementsproches de 20 cm, qui se sont ralentis après6 mois. Quatre-vingt bâtiments de la com-mune ont ainsi été endommagés. Deuxforages ont alors été équipés avec des tubesTRIVEC afin de mesurer les déplacementsverticaux et horizontaux et de caractériser leszones de tassement.

Il apparut dès la troisième mesure que les 13 men surface (humus) avaient subi des tasse-ments. Cependant, et contre toute prévision,la partie inférieure des éboulis surmontantle Lias avait également présenté des mouve-ments. L’étude géologique détaillée desmatériaux a montré que les blocs formantl’horizon inférieur sont en effet enrobés desédiments qui se sont rétractés avec lavidange provoquée par le percement dutunnel.

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Fouille de Frutigen en construction (Solexperts, 2003)

Mesures au théodolite sur la fouille

Mesure de contraintessur les tirants d’ancrage(Solexperts, 2003)

Capteur inclinométrique sur une traverse (Solexperts, 2003)

Courbe temporelle des déformationsen 4 points de mesure optiques(Solexperts, 2003)

Visualisation des déformations verticales et mise en relation avec la géologie (P. Teuscher, BLS Alptransit, 2002)

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Les études ont donné une suite favorableaux habitants de St German qui se sont vusindemnisés par le Groupement d’Entreprisedu Lötschberg.

3 - MESURES À L’AVANCEMENT

3.1 - Mesures d’extrusion, St.-GothardL’analyse des déformations du noyau enréponse à l’excavation d’un tunnel est indis-pensable pour l’organisation et l’ajustementdu soutènement, permettant d’assurer uneconstruction sûre et économique. L’extrusiondu noyau d’avancement sur le front du tunnelest mesurée en pratique grâce au déformètrede forage. Ces mesures, efficaces dans lesmassifs "classiques", ont posé plusieurs diffi-cultés dans le cadre du tunnel du St.-Gothard,du fait de la forte convergence et des hautespressions du terrain. Le tube de mesure, enHPVC, puis en acier renforcé, ne résistait pasaux fortes pressions et aux déformations àl’avancement.

Un nouveau type d’instrument, le RH-Extensometer (Reverse Head), a été déve-loppé et breveté pour mesurer l’extrusion àl’avancement dans les massifs à grandeconvergence afin d’estimer l’extrusion, puisle maillage d’ancrages nécessaires dans lefront de taille.

La tête de mesure avec logger à mémoireintégré est placée en fond de forage, etmesure en continu les déplacements de 6ancrages répartis dans le forage. Dans le casprésent, un dispositif de 30 m à 6 ancrages aété utilisé. L’excavation provoque le dépla-cement des ancrages par rapport à la tête demesure ultra-renforcée et fixe placée au fonddu forage. Les ancrages sont détruits au pas-sage du front. Les données sont relevées soitpendant, soit à la fin de l’excavation aprèsrécupération de la tête de mesure.

En comparaison avec le déformètre deforage, les déformations sont enregistrées encontinu sur des positions d’ancrages détermi-nées, et la gamme de mesure est bien supé-rieure en amplitude (jusque 500 mm). Larépartition des ancrages dans le frontd’excavation ainsi que dans le soutènementa ainsi pu être adaptée par l’entreprise enfonction des déplacements attendus.

3.2 - Mesures des débits et pressions d’eau en zonesfracturées, LötschbergLes reconnaissances préalables avaient mon-tré l’existence de zones à risque avec deskarsts présentant de très fortes pressionshydrostatiques et des débits de fractureimportants dans la nappe calcaire allochtonedu Doldenhorn au sud de Mitholz. Pourassurer la sécurité de l’ouvrage et des per-sonnes, et pour prévoir au plus tôt les traite-ments à mettre en œuvre, une reconnais-sance systématique à l’avancement parforages horizontaux longs a été préconisée.

Une première phase de reconnaissance a étéconduite avec un forage horizontal de plusde 500 m de long, parallèle au tunnel et réa-lisé depuis une niche d’essais. La suite de lareconnaissance s’est faite directement enfront de taille par deux forages horizontauxparallèles de plus de 300 m de long, avec unrecouvrement de 50 m entre forages succes-sifs. Un relevé géologique, des essais radar(par G-tec SA) et des tests hydrauliques sontconduits dès la fin des forages ou lors devenues d’eau importantes.

Après retrait du train de tige uniquement surla longueur de la chambre de test souhaitée(environ 50 m), un système à obturateur

(PDPS) est pompé et ancré au travers dutrain de tiges. Après ancrage des obtura-teurs, le premier dans le massif définissantune chambre de test en fond de forage, et lesecond dans les tiges pour utiliser celles-cicomme lignes hydrauliques, des tests sontconduits, en général en production. La trans-missivité, la pression de formation, les carac-téristiques de la fissuration et les débitslibres sont déterminés après interprétationen temps réel sur site.

En fin de test, le système est retiré avecl’overshot de carottier et la foration peutreprendre aussitôt. La réalisation desmesures, à plus de 50 m du front de taille,supprime l’influence de l’excavation du tun-nel sur les mesures de pression et permet detester uniquement la zone fracturée voulue.Le train de tige reste dans le forage, ce quiassure la stabilité du trou, le BOP reste enfonctionnement pour la sécurité du person-nel (jusqu’à 75 bar de pression), et la mise enœuvre rapide (5 heures par test) bloque rela-tivement peu le chantier.

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Extrusion du massif après excavation dans le St.-Gothard(Solexperts, 2006)

Courbe d’extrusion tempo-relle du RH-Extensometer(Solexperts, 2006)

Foration par la société Morissette en front de taille,une des 2 foreuses visible sur le cliché

(Solexperts, 2003)

Retrait des tiges de forage,pompage du train de test PDPS

Concuite des essaisDésancrage des obturateurs,retrait du système avec overshot

Ancrage des obturateurset ouverture de l’accès à l’intervalle

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15 essais dans 13 forages ont été effectués,avec des transmissivités mesurées jusqu’à5.10-5 m2/s et des débits libres au maximumde 1500 l/min dans les tiges de forage(Ø77.8 mm).

Ces résultats de tests ont conduit au traite-ment préventif de plus de 3 zones, ce qui aévité tout arrêt de chantier et permis de tra-verser sans problèmes majeurs cette partiedifficile.

4 - ZONES À FORTECONVERGENCE

4.1 - Essais sur cintres coulissants, St.-GothardAu niveau de la station de Sedrun (Saint-Gotthard), dans le massif intermédiaire duTavetsch, on prévoit un soutènement avecdes cintres coulissants, qui permettent uneréduction du diamètre du tunnel jusqu'à1,4 m de sa valeur nominale, et qui se com-portent ensuite comme des cintres ordi-naires. Pour tester le comportement endéformation et en portance de ces nouveauxcintres, une série d'essais a été élaborée avecle Prof. Dr. K. Kovári et réalisée en collabora-tion avec le groupement Transco Sedrun. Aumoyen de coussins gonflables en gommerenforcée, la pression du massif est simuléejusqu'à 300 t/m2 avec une déformationradiale de 60 cm sur des cintres dont le dia-mètre initial est de 13 m. Cet essai estconduit dans une niche de section équiva-lente au tunnel, pour simuler exactement lesconditions de fonctionnement réelles.

Dans une deuxième série d'essais prélimi-naires, différentes sections de cintres,réduites d'un huitième de leur circonférencetotale, ont été testées. Au cours des expé-riences, différents paramètres ont été mesu-rés : les efforts au moyen des relevés de pres-sions, les déplacements des cintres au droitdes clefs à l'aide d'extensomètres spéciaux.La répartition des contraintes a été détermi-née par des mesures des déformations àcorde vibrante, et le suivi de la position ducintre a été réalisé au moyen d'un théodolitemotorisé.

Les essais ont permis de valider un systèmede cintre simple coulissant avec un espace-ment intercintre de 1 mètre.

4.2 - HDC- Eléments,LötschbergDans la zone de houiller du tunnel de basedu Lötschberg, la maîtrise du soutènementpour éviter les effondrements et la formationde cavités s’est en premier lieu effectuée aumoyen d’un profil d’excavation à contre-voûte en radier. La réduction des déforma-tions n’ayant pas été suffisante, un profil cir-culaire déformable a été proposé et réalisésur les 60 mètres de la zone difficile, dans unpremier temps pour le reprofilage, puis demanière systématique à l’avancement.

Le profil déformable est réalisé au moyen desaignées radiales, situées au niveau des ser-rures de cintre, remplies avec des HDC-Eléments (High Deformable Concrete, bre-veté) de dimension 800 x 200 x 200 mm,développés par le Prof. Dr. Kovari etSolexperts AG. Les HDC-Eléments présentent

la caractéristique majeure de se déformer jus-qu’à 50 % de leur taille initiale, tout en conser-vant la même résistance en compression.

Avec 6 HDC-Eléments et 31 Ancrages IBO38 N par métré de tunnel, la convergence aété réduite de plus de 100 mm par rapportau profil initial avec contre-voûte. Un réajus-tement du profil a été réalisé 2 mois plustard, étant donné que les HDC-Elémentsavaient atteint leur course de déformationlimite. Le nouveau profil a permis de mettreen œuvre 6 éléments avec 16 ancrages IBO38 N de 16 m de longueur par métré detunnel, et ainsi de freiner davantage laconvergence.

5 - CONCLUSIONLa construction des tunnels de base en milieualpin avec une forte couverture est actuelle-ment achevée dans le cas du tunnel duLötschberg, qui est actuellement en phasede test des voies ferrées, et réalisée à 65 %dans le cas du St-Gothard.

Les conditions géologiques, géotechniqueset hydrogéologiques complexes nécessitentune attention toute particulière à l’instrumen-tation et à la reconnaissance des zones àrisques. Solexperts a ainsi pu mettre enœuvre toute son expérience dans le suiviclassique de la stabilité d’ouvrages parmesures automatisées, mais a surtout pudévelopper de nouveaux équipements demesure d’extrusion et de reconnaissancehydrogéologiques à l’avancement, ainsi quede nouvelles procédures de soutènementadaptées aux zones à forte convergence.

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Réalisation de l’essai sur cintre à grande échelle(Solexperts, 2003)

Principe de fonctionnement des HDC-Eléments(Solexperts, 2006)

Section du tunnel du Lötscherg en zone houillère avecdes HDC-Eléments de type poutre (Solexperts, 2004)

BIBLIOGRAPHIEBIBLIOGRAPHIE ••••••••••••GTS (Groupe Spécialisé pour les Travaux Souterrains) (2002 - 2005) "Alptransit-Tagung, Fachtagung für Untertagbau", Band 1, 2, 3 und 4.UNTERSCHÜTZ, P. (2005) " La nouvelle ligne du Saint-Gothard ", AlpTransit Gotthard AG.EHRBAR, H., HENKE, A. (2003) "AlpTransit Gotthard : Aktuelle Erfahrungen und Entwicklungen beim Bau des Gotthard Basistunnel",Universität Karlsruhe.EHRBAR, H. (2004) "AlpTransit Gotthard, Teilabschnitt Sedrun : Vortriebskonzept in den druckhaften Zonen – Vom Projekt zurAusführung", EUROCK 2004 & 53rd Geomechanics Colloquium. TEUSCHER, P. (2002) " Lötschberg-Basistunnel – Das Walliser Dorf St. German senkte sich – Was ist passiert? " Felsbau n°20BLS ALPTRANSIT (2003) " Lötschberg tunnel de base. En Suisse, l’ouvrage du siècle prend forme", BLS AlpTransit.