procédure pénale crfpa efb

67
PROCEDURE PENALE INTRODUCTION La procédure pénale est la matière qui organise les règles relatives à la constatation d’une infraction, au rassemblement des preuves, et à la recherche et au jugement des auteurs. Cela recouvre donc deux intérêts contradictoires : la procédure pénale a pour objectif la protection des intérêts de la société, mais elle permet aussi de garantir le justiciable contre les erreurs judiciaires. Selon l’intérêt privilégié, on parle de procédure inquisitoire ou accusatoire. 1°- L’encadrement politique de la procédure pénale Section 1 – Les modèles de procédure pénale • LE MODELE ACCUSATOIRE Ce modèle insiste sur la protection d’intérêts particuliers. L’accusation est portée par la victime (preuves) et la personne mise en cause doit montrer qu’elle n’a pas commis l’infraction. Le juge, lui, n’a qu’un rôle d’arbitre. Dans ce système, il n’a pas pour mission de découvrir la vérité, il doit juste s’assurer que les débats se déroulent loyalement. Il ne peut donc pas demander une expertise ou appeler un témoin non cité à comparaître. Trois caractéristiques du modèle accusatoire : - oralité - publicité - contradictoire • LE MODELE INQUISITOIRE A l’inverse, ce modèle protège les intérêts de la société. Les poursuites sont engagées par un organe d’Etat : le Ministère public. En principe, les preuves ne sont pas apportées par les parties, mais par le Procureur de la République au cours de l’enquête et par le juge d’instruction dans le cadre de l’information judiciaire. Le juge a pour mission de découvrir la vérité, et il peut donc provoquer d’autres preuves : témoins, expertises… 1

Transcript of procédure pénale crfpa efb

Page 1: procédure pénale crfpa efb

PROCEDURE PENALE

INTRODUCTION

La procédure pénale est la matière qui organise les règles relatives à la constatation d’une infraction, au rassemblement des preuves, et à la recherche et au jugement des auteurs. Cela recouvre donc deux intérêts contradictoires : la procédure pénale a pour objectif la protection des intérêts de la société, mais elle permet aussi de garantir le justiciable contre les erreurs judiciaires.

Selon l’intérêt privilégié, on parle de procédure inquisitoire ou accusatoire.

1°- L’encadrement politique de la procédure pénale

Section 1 – Les modèles de procédure pénale

• LE MODELE ACCUSATOIRE

Ce modèle insiste sur la protection d’intérêts particuliers. L’accusation est portée par la victime (preuves) et la personne mise en cause doit montrer qu’elle n’a pas commis l’infraction. Le juge, lui, n’a qu’un rôle d’arbitre. Dans ce système, il n’a pas pour mission de découvrir la vérité, il doit juste s’assurer que les débats se déroulent loyalement. Il ne peut donc pas demander une expertise ou appeler un témoin non cité à comparaître.Trois caractéristiques du modèle accusatoire :

- oralité- publicité- contradictoire

• LE MODELE INQUISITOIRE

A l’inverse, ce modèle protège les intérêts de la société. Les poursuites sont engagées par un organe d’Etat : le Ministère public. En principe, les preuves ne sont pas apportées par les parties, mais par le Procureur de la République au cours de l’enquête et par le juge d’instruction dans le cadre de l’information judiciaire.Le juge a pour mission de découvrir la vérité, et il peut donc provoquer d’autres preuves : témoins, expertises…Trois caractéristiques du modèle inquisitoire :

- écrit- secret- non contradictoire

Section 2 – Le modèle français de procédure pénale

On dit souvent qu’il est inquisitoire, et il est vrai que ce fut longtemps le cas. L’ordonnance de 1670 l’était de façon certaine puisqu’elle sacrifiait tous les droits de la défense pour les besoins de l’instruction. La Révolution a voulu faire table rase de ces méthodes anciennes (les aveux étaient régulièrement obtenus par la question), et a instauré un modèle plus accusatoire par la

1

Page 2: procédure pénale crfpa efb

loi du 08/10/1789. Mais des troubles apparaissant, des caractères inquisitoires ont été ajoutés. Cela a conféré un caractère mixte au modèle. Ainsi, la phase d’instruction est inquisitoire (ex : instruction est secrète) avec quelques éléments accusatoires (ex : loi du 15/06/2000 a renforcé la présomption d’innocence), tandis que la phase de jugement est plutôt accusatoire (ex : oral, contradictoire) avec des tendances inquisitoires (ex : huis clos).

2°- L’encadrement processuel de la procédure pénale

La loi n’a pas tous les droits ! Des principes directeurs de procédure pénale, qui avaient été dégagés par la jurisprudence du Conseil constitutionnel et la CEDH, ont été insérés dans la loi du 15/06/2000.

Section préliminaire – Les sources de procédure pénale

• LES SOURCES NATIONALES

- La constitution du 04/10/1958 ainsi que le bloc de constitutionnalité énumèrent les grands principes gouvernant notre procédure pénale : droit à la sûreté (art 2 CESDH), présomption d’innocence (art 9), et mise en cause du Chef de l’Etat et des membres du Gouvernement.- La loi et notamment le Code de Procédure Pénale, mais aussi le Code des douanes et le Code d’entrée et de séjour des étrangers.- Les sources non codifiées : ordonnance du 02/05/1945 sur la protection de l’enfance.

• LES SOURCES INTERNATIONALES

Cadre universel   : - La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1948 qui prévoit le droit à un procès équitable. Toutefois, pas de valeur contraignante, simple valeur politique et morale.- Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1968 qui lui aussi prévoit le droit à un procès équitable. Il a lui valeur contraignante et est d’application directe (peut être invoqué devant les tribunaux français).

Cadre régional   : Attention, l’Europe recouvre deux réalités différentes : l’UE et le Conseil de l’Europe (CEDH). Dans ce deuxième cas, il ne faut surtout pas parler de droit communautaire !- Dans l’Union européenne, le Traité d’Amsterdam de 1997 a prévu l’harmonisation et à terme l’unification des règles de droit pénal dans l’UE. Des décisions cadre modifient aussi souvent les règles de procédure pénale (ex : mandat d’arrêt européen).- Le Conseil de l’Europe est également un élément déterminant de la procédure pénale en France. Texte fondamental : Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme (CESDH) de 1950 ratifiée par la France en 1976.Elle garantit le droit à la sûreté, droit de ne pas faire l’objet d’une détention arbitraire (art 5), droit à un procès équitable (art 6), présomption d’innocence (art 6-2), droits de la défense (art 6-3).

Influence en droit interne :- Création par la loi du 15/06/2000 du pourvoi dans l’intérêt des droits de l’homme (art 626 s. CPP). Cette nouvelle voie de recours extraordinaire concerne l’individu condamné au pénal en France et qui a reçu un constat de violation par la CEDH, qui pourra désormais demander le réexamen de son affaire en droit interne.- Abrogation de la procédure de mise en état (obligation faite à un condamné à une peine d’emprisonnement ferme sans mandat de dépôt de se constituer prisonnier la veille de l’examen de son pourvoi devant la Cour de cassation). La CEDH a considéré que cela constituait une sanction disproportionnée au regard de l’importance primordiale du droit à un juge de cassation (Khalfaoui c/ France, CEDH 14/12/1999). Cette solution a été

2

Page 3: procédure pénale crfpa efb

respectée de façon contra legem par le Garde des Sceaux Guigou jusqu’à sa promulgation par la loi du 15/06/2000.

Section 1 – La garantie judiciaire

Il s’agit de la garantie de l’intervention d’un membre de l’autorité judiciaire dès lors qu’un acte est attentatoire aux libertés individuelles. Il ne s’agit pas là d’un droit au juge ! Cela signifie qu’un acte attentatoire aux libertés doit être autorisé par un juge ou un magistrat (magistrats du parquet ne sont pas des juges).

§1. Garantie judiciaire avant jugement

Le Conseil constitutionnel a dégagé une jurisprudence dans deux cas :- atteinte à l’intimité de la vie privée- atteinte à la liberté d’aller et venir

A. Atteinte à l’intimité de la vie privée

Dès 1977, le Conseil constitutionnel a considéré comme contraire à la Constitution (art خ16) une loi qui permettait aux enquêteurs de décider d’office de fouiller des véhicules en cas de risque de troubles à l’OP. Selon le Conseil constit, il faut pour cela avoir recours à un magistrat. La loi du 18/03/2003 a officialisé cette jurisprudence. Il faut l’autorisation du Procureur. Idem en matière de perquisitions nocturnes (interdites entre 21h et 6h sauf exception خpour les infractions graves). Le Conseil constit a souligné que de telles perquisitions ne pouvaient être décidées par un enquêteur en raison de l’atteinte à la vie privée (CC 16/07/1996), et qu’elles devaient être décidées par le juge des libertés et des détentions (JLD).

B. Atteinte à la liberté d’aller et venir

Protection européenne : l’article 5 de la CESDH garantit le droit de sûreté. Ainsi les خEtats parties doivent motiver toute arrestation ou détention (§1) et garantir que les prévenus soient traduits le plus tôt possible devant un magistrat (§2). Protection interne : l’article 2 de la DDH garantit également le droit de sûreté. Cela a خpermis de déclarer contraire à cette déclaration une loi qui permettait la détention d’étrangers en situation irrégulière sans l’intervention d’un magistrat (CC 09/01/1980 « arrêt prévention de l’immigration clandestine »).De même, le Conseil constit estime que la prolongation d’une garde à vue de 24h doit être décidée par le Procureur de la République (CC 11/08/1993 « arrêt Garde à vue »). Au-delà, l’autorisation doit provenir d’un magistrat du siège, mais pas le juge d’instruction, soit le JLD.

§2. Le droit à un juge de jugement

A. Affirmation effective du droit au juge

: Affirmation du droit au juge خ - art 14 §1 Pacte - art 6 §1 CESDH

- art préliminaire §1 CPPLa CEDH protège ce droit en première instance, mais également en appel et en cassation ! C’est une extension de la portée du droit au juge.Dans un arrêt CC 23/07/1975 « Juge unique », le Conseil constitutionnel constate la violation d’un droit au juge naturel. Le juge naturel signifie que des personnes poursuivies pour une même infraction et se trouvant dans la même situation doivent être jugées par le même juge.

Effectivité du droit au juge : la CEDH dans un arrêt 23/02/1975 Golder c/ Royaume Uni خs’est engagée à « sanctionner » les Etats créant des obstacles injustifiés à la saisine des tribunaux.

3

Page 4: procédure pénale crfpa efb

Obstacle matériels   : CEDH 17/01/2006 Barbier c/ France : un détenu entendait interjeter appel, mais il n’avait pu le faire en raison de gardiens qui avaient tardé à lui communiquer les documents nécessaires. La CEDH considère cette situation comme contraire à l’article 6 de la CESDH.Idem quant au coût de la procédure. Un détenu ne pouvait interjeter appel en raison du prix fixé pour la consignation : 160000 euros pour un RMIste (consignation = système mis en place pour limiter l’encombrement des tribunaux et qui consiste en déposer une certaine somme garantissant le paiement d’éventuelles amendes civiles). La CEDH, dans un arrêt Aïb-Mouthoub c/ France 28/10/1998 a considéré que la consignation doit être proportionnelle, et donc prendre en compte les charges et revenus de l’intéressé.

Obstacles juridiques   : « La justice ne doit pas dire le droit à l’égard de celui qui se dérobe à ses commandements ». Ainsi, la France prévoyait qu’un condamné avec mandat de dépôt qui se soustrayait à l’incarcération ne pouvait interjeter appel. Cela constitue une sanction disproportionnée au regard du droit d’accès à un juge d’appel selon la CEDH (Poitrimol c/ France 23/11/1993). Et si la Chambre criminelle a résisté, elle a finalement abandonné cette décision le 30/06/1999.Procédure de mise en état (cf Khalfaoui).Condamnation par contumace qui interdisait tout appel. La CEDH considère cela comme une violation du droit au juge (Mariani c/ France 31/03/2005).

B. Les qualités attendues du juge

Indépendance du juge : il خ doit être indépendant du pouvoir exécutif qui ne peut lui dicter la solution à un litige (la France a fait l’objet d’un constat de violation car un juge était lié par l’avis d’un ministre : Beaumartin c/ France CEDH 1994).Il doit également être indépendant du pouvoir législatif (Zielinski et autres c/ France 28/10/1999).

Impartialité du juge : cette qualité est attendue du juge professionnel comme du juge خnon professionnel (ex : juré d’assises).La CEDH distingue entre impartialité objective et subjective (Piersack c/ Belgique 01/10/1982).

Impartialité subjective   : état d’esprit du juge qui entre dans la salle d’audience. Il ne doit pas avoir de parti pris (ex : Remli c/ France 23/04/1996, un juré d’assises raciste qui juge un algérien). Elle est présumée.

Impartialité objective   : renvoie à la théorie des apparences. Cela signifie qu’en apparence le juge doit être impartial. Incidence importante en cas de cumul de fonctions par un magistrat dans une même affaire (juge d’instruction devenu magistrat du siège).La même solution est retenue par Crim 24/05/2005 mais la Cour de cassation prohibe seulement le cumul d’un magistrat qui aurait auparavant eu à se prononcer sur la valeur des charges pesant sur le suspect (pré jugement). C’est le cas des magistrats du parquet et du juge d’instruction, mais pas du JLD.Cf. doc. 6 : Crim 27/10/2004.

Section 2 – Les garanties liées à l’organisation et au déroulement de la procédure

§1. Les garanties structurelles

A. La publicité des débats judiciaires

Principe fondamental selon la CEDH dans la mesure où il permet de protéger les justiciables contre les errements d’une justice secrète, et qu’il constitue le meilleur

4

Page 5: procédure pénale crfpa efb

moyen de préserver la confiance des justiciables dans leurs cours et tribunaux. La violation du principe est donc sanctionnée.En France, la CEDH est surtout intervenue dans des procédures disciplinaires (ex : Conseil de l’ordre des médecins, CEDH Diennet c/ France 26/09/1995, condamnation pour violation de l’art 6).

Mais aucune condamnation n’est encore intervenue en matière de procédure pénale, bien que des requêtes aient été formulées. En effet, la CEDH accepte que des limites soient posées au principe, soit pour des considérations d’OP (anonymat d’agents infiltrés), soit pour des considérations d’ordre privé (huis clos pour agressions sexuelles).Mais surtout, la CEDH a une approche différenciée quant à la publicité selon qu’on se situe :

• En 1ère instance et en appel : il s’agit de juger les FAITS et donc la CEDH exige que soit satisfait le principe de publicité.• En cassation : comme on juge le DROIT, le principe de publicité peut ne pas être respecté car les justiciables ne sont pas de grands techniciens du droit (CEDH Fontaine et Bertin c/ France 08/07/2003).

B. Le droit à être jugé dans un délai raisonnable

La CESDH en prévoit deux types :• Art 5 § 3 : délai raisonnable de la détention avant jugement.• Art 6 § 1 : délai raisonnable de la procédure dans sa globalité.

Il faut se poser deux questions :

Détermination de la période à prendre en considération : si le point d’achèvement ne خpose pas de difficultés, le point de départ est plus incertain. Au moment où l’infraction a été constatée, ou au moment où le requérant est placé en position d’accusé ? L’art 6 retient la seconde proposition, privilégiant le moment où le requérant est placé en position « d’accusé » (au sens large de la convention, tandis qu’en droit français le terme n’existe qu’en droit criminel, devant la Cour d’assises), donc de suspect.

Appréciation du caractère raisonnable ou non de la durée de la procédure : la CEDH خapplique 3 critères :

• complexité de l’affaire• attitude de l’autorité judiciaire• attitude du requérant (recours dilatoires)

La CEDH ajoute parfois un 4ème critère qui réside dans l’enjeu du litige. Il est très peu appliqué, et que dans des domaines où l’Etat devait aller plus vite que d’habitude (ex : affaire vitale telle que l’affaire des hémophiles contaminés par le HIV et dont on devait reconnaître le statut de victime CEDH Mocie c/ France 08/04/2003).

§2. Les garanties fonctionnelles

A. L’équilibre des parties

Aussi appelé principe « d’égalité des armes ». Il implique la reconnaissance à toute partie d’une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire.Ce principe ne doit pas donner lieu à des applications systématiques (CA Paris, 04/04/2001 : l’erreur de menuisier, càd le fait que le Ministère Public soit sur une estrade, ne porte pas atteinte à l’équilibre des parties).

• DROIT A L’INFORMATION DONT BENEFICIENT LES PARTIES

Droit à la connaissance : selon la jp de la CEDH (art 6 § 3 a), cela implique pour la خpersonne mise en cause de connaître la nature et la cause de l’accusation. Non seulement il doit connaître les faits portés à sa charge, mais il doit aussi être informé de la qualification juridique de ces faits (CEDH Pelissier et Sassi c/ France 25/03/1999 : sur les requalifications clandestines. Une personne était mise en examen pour banqueroute et se voyait condamné pour complicité de banqueroute).

5

Page 6: procédure pénale crfpa efb

Cette décision a modifié la jp française qui autorisait la requalification clandestine (Crim 07/02/2006 doc. 9).

Droit de communication : toutes les parties doivent pouvoir prendre connaissance خdes pièces et documents versés au dossier. La question de conventionalité de la procédure devant la Cour de cassation a été posée sur deux points :

Communication du rapport du conseiller rapporteur   : longtemps le rapport n’était communiqué qu’à l’avocat général mais pas aux parties privées. Constat de violation de l’équilibre entre les parties selon la CEDH (Reinhardt et Slimane-Kaïd c/ France 31/03/1998). Suite à cela, la procédure française a été modifiée : la 1ère

partie est communiquée à tous, la 2ème qu’aux juges.

Réquisitions de l’avocat général   : avant elles étaient communiquées au juges mais pas aux parties privées, qui elles devaient communiquer leurs mémoires aux juges mais aussi à l’avocat général. Rupture d’égalité ! (même arrêt). Depuis, l’avocat général (représentant du parquet près de la Cour de cassation) communique aux parties la teneur de sa réquisition, et ils peuvent répliquer grâce à des notes en délibéré.

Droit à la confrontation : (art 6 § 3 d) la personne mise en cause doit pouvoir citer خles témoins à charge et discuter leur témoignage (= principe du contradictoire). Mais ce droit renvoie aussi au droit d’information car pour que le contre interrogatoire soit réellement efficace, il faut que le défendeur connaisse l’identité du témoin. A défaut, la personnalité du témoin disparaît (CEDH Kostovski c/ Pays Bas 20/11/1989). Mais la CEDH admet parfois le recours à des témoignages anonymes (ex : considérations liées à l’intérêt privé pour le témoin qui risque des représailles). Toutefois, encadrement :

• qu’à au moins un moment de la procédure, le témoin anonyme ait été confronté à la personne mise en cause.• et la CEDH refuse qu’une décision de condamnation puisse se fonder exclusivement sur les déclarations d’un tel témoin (ce ne peut être la seule preuve à charge). C’est donc la résurgence de l’ancien droit de la corroboration (CEDH Saïdi c/ France 20/09/1999).

• RESPECT DU CONTRADICTOIRE

Ils doivent pouvoir discuter de ces informations fournies dans le dossier. La participation, longtemps acceptée, de l’avocat général au délibéré de la Cour de cassation a fait l’objet de contestations. En effet, il pouvait soutenir son argumentation une seconde fois en l’absence des parties privées (constat de violation de l’art. 6 CEDH Delcourt c/ Belgique 17/01/1970, CEDH Fontaine et Bertin c/ France 08/07/2003). Pratique abandonnée depuis.

B. Les droits de la défense

Principe conventionnel (art. 6 § 3 CESDH), et principe fondamental reconnu par les lois de la République selon le Conseil constitutionnel (CC 19-20/01/1981 dite « sécurité et liberté »).

• DROIT DE DISPOSER DU TEMPS ET DES FACILITES NECESSAIRES A L’ELABORATION DE SA DEFENSE

Art 6 § 3 b. Impose à l’autorité judiciaire de mettre à la personne mise en cause un laps de temps pour qu’il puisse préparer sa défense. Elle doit en plus disposer des moyens matériels et techniques permettant de contester sa mise en cause.Cela explique donc la possibilité qui lui est faite de demander au juge d’instruction la réalisation de tout acte utile à la recherche de la vérité, ainsi que le fait que les juridictions ont l’obligation d’entendre tous les témoins cités à décharge (Crim. 09/11/2005, Crim. 26/03/2006 doc. 11). Ce principe est parfois malmené et la CEDH n’hésite pas à constater la violation de l’art. 6 (CEDH Makhfi c/ France 19/10/2004 : affaire criminelle dans laquelle le défenseur avait dû plaider devant la Cour d’assises à 4h du matin après 14h de débats, en respect du principe de continuité des débats devant la Cour d’assises. La seule limite au principe est la fatigue des jurés. L’avocat avait demandé une suspension, mais elle avait été refusée

6

Page 7: procédure pénale crfpa efb

car les jurés se jugeaient toujours aptes. Constat de violation par la CEDH). La Chambre criminelle résiste à cette vision car elle considère qu’il n’y a pas d’atteinte au principe (Crim 10/11/2004 doc. 12).

• DROIT A L’ASSISTANCE D’UN AVOCAT

Art 6 § 3 c. En fait, cet article prévoit le droit pour la personne mise en cause de se défendre elle-même, puis le droit à la présence d’un avocat. La CEDH impose aux Etats de garantir la présence d’un avocat quand l’accusé ne dispose pas de l’expérience ou, même si c’est le cas, si l’affaire est particulièrement complexe (attention, cela ne signifie pas le droit à l’assistance gratuite d’un avocat. Pour cela, il faut manquer de ressources).

Ce droit joue non seulement pendant la phase de jugement (audience), mais aussi pendant la phase préparatoire (enquête) :

,Ainsi خ le CE a annulé la circulaire Garde des Sceaux du 02/09/04 relative à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) en application de ce principe, car la circulaire prévoyait que la CRPC pouvait intervenir pendant la GàV. Or, l’avocat n’est pas présent à tout moment au cours de la GàV, et la proposition de CRPC doit être faite en sa présence (CE 26/04/2006, Syndicat des avocats de France doc. 14).

Dans la خ phase d’audience, la CEDH est allée plus loin en consacrant le droit à la représentation par un avocat (≠ assistance, où le client doit être présent !). CEDH Van Belt c/ France 28/05/2000 : la question était posée quant à la conventionalité d’anciennes dispositions du CPP qui empêchaient le prévenu et l’accusé absents de se faire représenter par un avocat. La CEDH a constaté la violation du principe en jugeant la sanction disproportionnée. En conséquence, la Cour de cassation s’est inclinée et a admis le droit de représentation en l’absence du client (Ass. Plén. 02/03/2001). Cette jp contra legem a été officialisée par la loi du 02/03/2004. Cette disposition est toutefois contestable eu égard au principe du contradictoire, et cette jp va à l’encontre de notre système pénal qui recherche la VERITE ! Il faut une personne présente au moment de l’infraction.

Section 3 – Les principes directeurs relatifs à la preuve pénale

Il n’y a pas de théorie générale de la preuve pénale dans le CPP. C’est donc la jp qui a dû développer ces principes directeurs, notamment à partir de l’art. 427 CPP.

§1. La charge de la preuve

En principe il appartient à l’accusation de prouver la culpabilité du prévenu. Mais la question prend une acuité particulière quand l’accusation doit renverser la présomption d’innocence (prévue à l’art 2 de la CESDH et par l’art. 9 de la DDHC).Celle-ci est en pleine mutation, devenant de plus en plus un droit matériel et non plus processuel : droit à ne plus être présenté comme coupable.

A. Le droit à la présomption d’innocence   : un droit processuel

L’accusation doit prouver la culpabilité, et en cas d’insuffisance de preuves, le doute profite à l’accusé (in dubio pro reo). La personne mise en cause ne doit pas prouver son innocence, et il ne doit pas participer à la procédure. Ainsi, il n’a pas l’obligation de parler (droit au silence du suspect) en application du droit à ne pas contribuer à sa propre incrimination. Ce droit au silence est déduit par la CEDH de la présomption d’innocence, tout en considérant que l’exercice de ce droit peut constituer une preuve à charge (ex : pas d’alibi = aveu implicite de culpabilité).Attention, la CEDH refuse qu’une condamnation résulte exclusivement du silence de l’accusé. Il faut corroborer (CEDH Condron c/ Royaume Uni 02/05/2000).

Le droit à la présomption d’innocence connaît des exceptions, et notamment la présomption de responsabilité pénale (ex : le Code des douanes présume coupable de

7

Page 8: procédure pénale crfpa efb

contrebande celui qui est trouvé en possession de marchandises importées et non déclarées).Cette atteinte est admise par ma CEDH à deux conditions (CEDH Salabiaku c/ France 07/10/1988):

• Ces présomptions doivent préserver les droits de la défense (présomption ne doit pas être irréfragable).• Elles doivent prendre en compte l’enjeu du litige (donc pas possible pour des infractions faisant encourir de lourdes peines, et donc à fortiori en matière criminelle).

Même conditions pour le Conseil constitutionnel (CC 16/06/1999 « délit de grande vitesse »).

B. Le droit à la présomption d’innocence   : un droit substantiel

La champ d’application a été progressivement étendu, suite à l’arrêt CEDH Allemet de Ribemont c/ France 10/02/1995 qui mettait en cause un Ministre de l’Intérieur français qui avait prononcé à la télévision un accusé coupable des faits qui lui étaient reprochés. A la suite de cet arrêt, un arsenal juridique s’est développé pour prévenir, réparer et réprimer les atteintes à cette présomption.

• LA PREVENTION DES ATTEINTES

Procédure de référé présomption d’innocence (art. 9-1 al 2 Cciv) : « le Président du TGI خpeut prescrire toute mesure utile afin de faire cesser une atteinte à la présomption d’innocence et donc pour éviter son aggravation » (ex : communiqué). L’atteinte dans ce cadre est le fait de présenter publiquement comme coupable une personne pour des faits objets d’une enquête de police ou d’une information judiciaire.

Fenêtre d’information (loi du 15/06/2000) : permet au Proc. Rép. De rendre publics des خéléments objectifs tirés d’une procédure pénale en cours, afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes (art. 11 CPP : exception au secret de l’enquête).

Port خ des menottes et entraves (art. 803 CPP) : Selon l’alinéa 1, les policiers et gendarmes ne peuvent y recourir qu’à l’égard des personnes dangereuses pour elles-mêmes ou pour autrui, et celles dont il y a à craindre un risque de fuite. L’alinéa 2 dispose que les enquêteurs doivent prendre toute mesure utile pour éviter la fixation de l’image d’une personne menottée ou entravée.

• LA REPRESSION DES ATTEINTES

Le vecteur principal des atteintes est la presse, donc la plupart des dispositions sont dans la loi du 29/07/1881 relative à la liberté de la presse.Ces entraves à la liberté d’expression sont tolérées par la CEDH à condition qu’elles soient justifiées par un intérêt légitime et que les sanctions de ces infractions soient proportionnées.Ainsi, l’art 35 ter érige en délit puni d’une amende de 15000 € le fait de diffuser par quelque moyen que ce soit et sans le consentement de l’intéressé l’image d’une personne mise en cause dans une procédure pénale, faisant apparaître soit que cette personne est menottée ou entravée, soit que cette personne est placée en détention provisoire.Même sanction quant au fait de réaliser, diffuser ou commenter un sondage d’opinion relatif à la culpabilité d’une personne mise en cause, et non définitivement condamnée.

• LA REPARATION DES ATTEINTES

Réparation morale : art. 177-1 CPP prévoit que la personne qui bénéficie d’un non lieu خpeut obtenir de la juridiction d’instruction qu’elle ordonne la publication de cette décision ou d’un communiqué. Les frais de publication incombent à l’Etat. Attention, ne désigne pas la relaxe ni l’acquittement !

: Réparation pécuniaire خ art. 149 CPP permet à la personne qui a fait l’objet d’une détention et qui a bénéficié d’un non lieu, d’une relaxe ou d’un acquittement de

8

Page 9: procédure pénale crfpa efb

demander la réparation de son préjudice. Il faut s’adresser au 1er Président de la CA, avec recours possible devant la Commission nationale d’indemnisation des détentions injustifiées.Et l’art 800-2 CPP prévoit que la personne qui a fait l’objet d’une poursuite et a bénéficié d’un non lieu, d’une relaxe ou d’un acquittement peut obtenir réparation de son préjudice par la juridiction qui a prononcé la relaxe, l’acquittement ou le non lieu.

§2. Les modes de preuve

Il existe un principe fondamental de liberté de la preuve, toutefois encadré par le principe de légalité de la preuve en raison de l’objet de la matière répressive.

A. Le principe de liberté de la preuve

Il a été dégagé par la jp à partir de l’art. 427 CPP : « les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve ». Ce principe marche tant au niveau correctionnel que criminel (témoignages, Pvs, aveux…).Ce principe connaît toutefois quelques exceptions. Ainsi l’art. 537 al 1 CPP dispose que les contraventions ne peuvent être prouvées que par des PV de police ou à défaut par témoins. Des indices ne suffiront pas, ni même les aveux du contrevenant (Crim, 16/03/2005 cf. fascicule).

B. Le principe de légalité de la preuve

Ce principe n’est pas prévu dans le CPP en tant que tel. On trouve des dispositions éparses y faisant référence. Ex : art. 81 al 1 CPP : « le juge d’instruction instruit conformément à la loi ».

1. Les deux aspects du principe

• LA LEGALITE DANS LA RECHERCHE DE LA PREUVE

Les خ procédés interdits : la PP est soucieuse des droits de l’Homme et donc la recherche de la preuve ne saurait porter atteinte à la dignité de l’homme (CEDH 27/08/1992, Tomasi c/ France concernant des brutalités policières pour obtenir des aveux. Violation de l’art 3 « interdiction des traitements inhumains ou dégradants », et CEDH 28/07/1999, Selmouni c/ France pour des actes de torture).De la même façon, les procédés médicamenteux sont interdits pour obtenir une preuve (CEDH 11/07/2006 Jalloh c/ Allemagne consacrant l’interdiction de la narco-analyse. Ici, administration forcée d’un médicament pour faire vomir le suspect qui avait ingéré les sachets d’héroïne qu’il était en train de vendre. Violation de l’art. 3).Idem quant à l’hypnose car la personne n’a pas conscience de ce qu’elle dit, ce qui représente donc une violation potentielle du droit de ne pas s’auto incriminer (Crim, 12/12/2000 confirmé par Crim, 28/11/2001).Enfin, interdiction de recourir à des méthodes d’investigation portant atteinte aux droits de la défense. Donc interdiction d’utiliser comme preuve les échanges écrits ou oraux entre un avocat et son client.

Existe-t-il en procédure pénale un principe de loyauté ? Plus ou moins, mais on ne peut pas vraiment parler de principe, plutôt de règle. La loyauté s’envisage de façon différente selon la personne qui recherche la preuve.

Pour le juge : la preuve obtenue de façon déloyale ne peut être versée au dossier. Un juge renie sa fonction s’il triche (Ch. Réunies, 31/01/1888, Affaire Wilson).

Pour les enquêteurs : même règle de loyauté. Cela signifie que ne peut pas se faire passer pour une fille pré-pubère sur internet pour débusquer un pédophile.Un arrêt semble jeter un doute sur ce point (Crim, 13/10/2004 doc. 16 : affaire des paillotes corses. Enregistrement clandestin entre un gendarme et un préfet. Elément déclaré recevable même s’il a été obtenu de façon déloyale. Remise en cause du principe ? Pas vraiment car il était considéré ici que le gendarme agissait en tant que particulier. Donc OK).

9

Page 10: procédure pénale crfpa efb

En fait, ces procédés sont interdits sauf si la loi les autorise (ex : opérations d’infiltrations dont les dispositions ont été élargies par la loi du 09/03/2004 en matière de drogue et de criminalité organisée). Voir art. 706-72 et 706-73 CPP, et régime juridique à l’art. 706-89 CPP. Toutefois, le législateur opère une distinction entre la provocation de la preuve (admise et objet même de l’infraction), et la provocation à l’infraction (trop déloyale). Distinction soufflée par la CEDH au législateur (CEDH 09/06/1998, Texeira de Castro c/ Portugal).

Pour les particuliers : la situation est différente. En effet, ils ne peuvent avoir recours à des pouvoirs coercitifs (prérogatives de puissance publique), donc la jp admet qu’ils aient recours à des méthodes déloyales de recherche et d’obtention des preuves. Ainsi, le gérant de grande surface peut produire la vidéo d’une caissière pour établir le vol, et ce même à son insu (Crim, 11/02/1992). La Cour admet également le recours au testing (Crim, 11/06/2002). Méthode officialisée par la loi sur l’égalité des chances du 31/03/2006 – art. 225-3-1 CPP. Mais plus que cela, la jp admet même que les particuliers aient recours à des méthodes illégales (preuves volées. Crim, 30/03/1999) dès lors qu’elles ont pu être discutées contradictoirement devant un juge. = Le principe du contradictoire prime sur celui de légalité de la preuve.

Les خ procédés réglementés : il n’est pas possible de prévoir tous les types d’investigation recevables, d’où le principe de liberté de la preuve. Néanmoins, dès qu’une méthode d’investigation porte atteinte aux droits et libertés, il faut qu’elle soit autorisée par la loi. Donc en procédure pénale, tout ce qui porte atteinte aux droits et libertés est interdit (ex : sonorisations). La loi du 09/03/04 l’autorise. Si le principe n’est pas respecté, la nullité est encourue, et le juge ne peut fonder sa décision sur un tel acte.

2. Les nullités de procédure (sanctions)

• LES CAUSES DE NULLITE

Les causes de nullité textuelles : art. 802 pose le principe selon lequel il n’y a pas خde nullité sans texte. Il va donc falloir vérifier que pour l’irrégularité invoquée, la sanction prévue par le législateur est la nullité. Il y en a d’innombrables, mais retenons celle faite en matière de perquisitions (art. 59). Ex. d’absence de nullité : obligation faite aux OPJ d’informer immédiatement le Proc. Rép. De la découverte de l’identité d’un suspect dans le cadre d’une enquête préliminaire. En l’absence de précision, pas de nullité (Crim, 23/08/2005). Idem pour l’obligation faite aux enquêteurs d’indiquer dans les PV la teneur des questions auxquelles il a été répondu (Crim, 21/09/2005 cf. doc. 19).

Les causes de nullité substantielles : art. 802 et 170 CPP. Aussi appelées causes de خnullité virtuelles. Elles permettent à la jp de considérer qu’une irrégularité doit entraîner la nullité d’un acte (sans texte). Pour ce faire, la jp qualifie certaines règles de PP comme fondamentales, essentielles et substantielles pour lesquelles malgré le mutisme du législateur la sanction doit être la nullité (casuistique). Cette règle ne fait qu’encourir la nullité !

• LA MISE EN OEUVRE DES NULLITES

Il y a une exigence de grief (art. 802). Règle issue des lois du 04/01/1993 et 24/08/1993 selon lesquelles il ne peut y avoir de nullité des irrégularités des PP lorsque celle-ci n’est pas essentielle. Pour obtenir l’annulation d’un acte litigieux, il faut donc prouver l’existence d’un préjudice.

Il existe cependant de nullités d’OP qui entraînent la nullité de la PP sans qu’il y ait nécessité d’un grief (Crim, 28/02/2006, doc. 20). Et la jp a dégagé des nullités assimilées à des nullités d’OP (donc dispensées de grief) : les irrégularités qui portent nécessairement atteinte aux droits de la défense.Ex : règle de notification immédiate des droits au gardé à vue. A défaut, il ne peut invoquer ses droits.

10

Page 11: procédure pénale crfpa efb

Ex : règle selon laquelle la partie mise en cause doit toujours parler en dernier à l’audience. Règle fondamentale dont la violation entraîne nécessairement une atteinte aux droits de la défense (Crim, 07/07/2005 doc. 21).

Attention : des revirements sont toujours possibles. Ainsi, en matière de perquisitions où il faut désormais prouver un grief (Crim, 15/06/2000 : perquisition en l’absence de témoins et du maître des lieux. Avant, cela aurait entraîné la nullité d’OP de la PP). Parfois, le législateur va plus loin en interdisant aux juridictions de prononcer une nullité, non-obstant une irrégularité. Ainsi la loi du 09/03/2004 qui disposait que les actes réalisés dans le cadre d’une loi dérogatoire ne peuvent être annulés, même si après les faits, ils sont requalifiés en infraction de droit commun. Censure du CC (CC 02/03/2004 et Crim, 31/06/2006 doc. 23) qui admet la requalification à condition qu’au moment de la qualification des faits, on ait pu penser à l’existence d’une bande organisée. Ce faisant, le CC censure les détournements de procédure.

• LES EFFETS DES NULLITES

Elles peuvent porter sur l’ensemble de l’acte de PP (auquel cas il est retiré) ou que sur une partie (cancellation des éléments irréguliers avec un marqueur). Quelle est l’étendue de la nullité sur les actes subséquents ?La jp souhaite pérenniser la procédure. Selon la chambre criminelle, la nullité d’un acte n’entraîne l’annulation des actes ultérieurs que s’ils trouvent un support nécessaire dans l’acte annulé.Ex : arrestation en flagrant délit, et mise en GàV. Pendant la GàV, le suspect révèle l’identité d’un complice chez qui on perquisitionne. Si la GàV est annulée pour absence de lecture des droits, la perquisition doit l’être aussi car elle est fondée sur la GàV.En revanche, si arrestation en flagrant délit, et mise en GàV puis perquisition du domicile du gardé à vue chez qui on trouve des éléments pour identifier un complice, qui avait déjà été nommé en GàV, l’annulation de l’arrestation (pas de la GàV) entraîne-t-elle l’annulation de la 2nde perquisition ? Non car elle est fondée sur les éléments trouvés au domicile du gardé à vue.Quand un acte irrégulier est annulé, le juge ne peut y puiser aucune information et ne peut fonder sa décision dessus.

§3. La valeur des preuves

Art. 427 CPP : le juge décide d’après son intime convictions (idem pour la Cour d’assises art. 353 CPP).

A. La signification du principe

Le juge statue en conscience, au regard des impressions qu’ont provoqué sur sa raison les éléments de preuve débattus devant lui. Ce principe, aussi appelé système de preuve morale, s’oppose au système de l’ancien droit (système de preuve légale) qui consistait à opérer une tarification préalable des preuves (ex ordonnance de 1670 : pas de condamnation possible que sur la base d’un seul témoin). Système abandonné à la Révolution, en même temps que la torture.Aujourd’hui l’aveu existe, mais il n’a pas de valeur prépondérante.L’intime conviction signifie : un jugement en conscience, une rupture avec l’ancien droit et l’effectivité de la séparation des pouvoirs.

B. Les nuances apportées au principe

La خ limite : l’obligation de motivation : le juge motive sa décision pour éviter l’arbitraire. Cette obligation n’implique pas que le juge doit indiquer pourquoi il a penché dans un sens, mais quelles sont les preuves qui lui ont permis de statuer dans ce sens. Donc l’intime conviction ne peut être qualifiée de mode de preuve ! C’est une méthode d’appréciation de la preuve, obtenue légalement.Cette obligation de motivation est elle-même limitée. Ainsi, les verdicts de Cour d’assises n’ont pas à être motivés car :

- le jury est supposé souverain et infaillible- difficulté de dégager une motivation commune à 12 jurés (15 en appel).

11

Page 12: procédure pénale crfpa efb

Cette absence de motivation n’est pas vue par la CEDH et Crim. comme une violation au droit à un procès équitable duquel on a déduit l’obligation de motivation car elles décèlent un semblant de motivation dans les réponses aux questions posées au jury, élaborées par le Président de la Cour d’assises à partir de la décision de renvoi, qui elle-même est motivée (CEDH 09/12/1994, Ruiz Torija c/ Espagne).

: Les exceptions au principe خ

En faveur de la personne mise en cause   : résurgence de la corroboration (obligation de rajouter des éléments à certains éléments de preuve). Un juge ne peut pas condamner en l’absence d’autres éléments, même s’il est convaincu de la culpabilité.

En défaveur de la personne mise en cause   : s’agit de l’art. 537 al. 2 CPP qui prévoit que les PV en matière correctionnelle font foi jusqu’à preuve du contraire, qui ne peut être rapportée que par écrit ou par témoin. Donc un juge convaincu de l’innocence d’un prévenu ne peut pas le relâcher sans écrit ou sans témoin (cf. doc. 24 et 25).

THEME 2 : LES ENQUETES

1°- La police judiciaire

La PJ est un auxiliaire très important de la justice répressive avant et après l’ouverture d’une information judiciaire. Avant : le rôle de la PJ est de constater les infractions, de rechercher les preuve, et d'identifier les auteurs, et donc d’apporter au magistrat les éléments nécessaires dans l’appréciation des suites à donner à l’affaire. Ils permettent donc au Proc. Rép. d’exercer en connaissance de cause son pouvoir de poursuivre.Après : leur rôle est fondamental car le CPP fait de la PJ l’organe qui seconde le magistrat dans ses investigations.

Section 1 – La nomenclature

La PJ est composée de deux corps principaux : la police nationale (Min. Int.) et la gendarmerie nationale (Min. Déf.). Cette dualité de direction peut mener à des conflits. Donc la loi du 18/03/2003 a officialisé les GIR (groupements d’intervention régionaux) pour la criminalité et la délinquance organisée, sous l’autorité du préfet et donc du Min. Int. (loi Sarkozy, on n’est jamais mieux servi que par soi-même).Art. 15 CPP : on constate que la PJ est composée d’officiers de PJ, d’agents de PJ, d’agents de PJ adjoints, et d’autres personnes.

: Les OPJ : art. 16 CPP خ - maires et adjoints- directeurs et sous-directeurs de la police nationale et de la gendarmerie nationale - officiers et gradés de la gendarmerie nationale- fonctionnaires de police titulaires du corps d’encadrement et de commandement ayant fait l’objet d’une habilitation personnelle par le Proc. Gén. près la CA (commissaires et lieutenants de police).

12

Page 13: procédure pénale crfpa efb

La liste n’est pas complète. Il faut ajouter deux magistrats : le Proc. Rép. et le Juge d’instruction. Ce n’est pas précisé, mais cela va de soi au vu de leurs pouvoirs. Le Proc. Rép. dirige l’enquête, et le JI dirige l’investigation.

: Les APJ : art. 20 CPP خ - sous-officiers de Gendarmerie nationale- fonctionnaires de police (…) pas titulaires d’une habilitation

perso.

: Les APJA : art. 21 CPP خ - gardiens de la paix- agents de police municipale

 : Autres personnes خ - certains fonctionnaires (agents des douanes). Ms leurs actes doivent être requis par le Proc. Rép. Pas de pouvoir d’initiative.- certains particuliers (loi 15/11/2001 sur la sécurité quotidienne : des pouvoirs de PJ sont accordés à des personnes collaborant à une entreprise de gardiennage ou des surveillance). Elles peuvent procéder à des palpations de sécurité et à des fouilles de sacs à main.

Section 2 – La compétence de la PJ

§1. Compétence matérielle

L’OPJ dispose de l’ensemble des prérogatives de police judiciaire. Il est donc logique خqu’il dispose d’une compétence matérielle coïncidant avec les objectifs de la PP dans sa phase préparatoire.

• constat de l’infraction• rassemblement des preuves• recherche de l’auteur de l’infraction

Il a la possibilité de décider d’actes coercitifs. Ainsi, il décide seul du placement en GàV. Il doit néanmoins informer de l’avancement de l’enquête soit le Proc. Rép, soit le juge d’instruction (quand il agit sur commission rogatoire).

L’APJ doit seconder l’OPJ. Pour ce faire, il doit dresser les PV et procéder à l’audition des خpersonnes disposant d’informations sur l’enquête.

L’APJA خ a pour rôle de seconder l’OPJ. Sa tâche fondamentale est de constater l’infraction, mais il n’est pas habilité à dresser un PV (sauf pour les infractions au Code de la route).

§2. Compétence territoriale

Art. 18 CPP : « l’OPJ a compétence sur l’ensemble du département » (loi du 18/03/2003). Auparavant, ce n’était que sur une partie du département. L’objectif est de répondre à la mobilité croissante des délinquants.Ont une compétence territoriale étendue :

- l’OPJ attaché à la DST (Direction de Surveillance du Territoire),- les APJ et APJA, qui ont la même compétence territoriale que les OPJ qu’ils ont

pour mission de seconder.

La loi du 15/06/2000 a inséré dans le CPP un art. 15-1 qui institue une sorte de guichet unique. Quand la victime d’une infraction s’adresse à un service territorialement incompétent, cette circonstance ne peut plus lui être opposé. C’est au service qu’il revient de faire suivre le dossier au service compétent.

L’art. 18 s’applique aussi pour étendre la compétence pour :- l’urgence dans la poursuite des investigations ou des auteurs d’une infraction.

L’OPJ peut aller au-delà de sa compétence territoriale (sauf limites, cf. art. 18),

13

Page 14: procédure pénale crfpa efb

- tout OPJ sur réquisition du Proc. Rép. ou sur commission rogatoire du juge d’instruction peut être habilité à agir sur l’ensemble du territoire de la République.

- La Convention de Schengen de 1990 prévoit à l’art. 40 s. au profit des enquêteurs un droit d’observation et de poursuite transfrontalier. Toutefois, ce droit ne permet pas à l’enquêteur d’avoir recours à la force (atteinte à la souveraineté des Etats étrangers). Donc l’arrestation n’est pas possible, il faudra avoir recours aux enquêteurs étrangers.

Section 3 – Le contrôle de la PJ

La police nationale et la gendarmerie nationale, qd elles exercent une activité de police administrative, sont placées sous le contrôle du préfet. En revanche, quand elles exercent une activité de police judiciaire, le contrôle est exercé d’une part par le Ministère Public, d’autre part par la Chambre d’instruction.

§1. Le contrôle exercé par le Ministère Public

A. Le contrôle exercé par le Procureur de la République

C’est le chef du parquet du TGI. Le contrôle sur la PJ résulte de l’art. 12 CPP : « le Procureur de la République dirige les enquêtes de la police ».

Ex : • art. 78-1 CPP : lorsqu’il décide de l’ouverture d’une enquête préliminaire, le Proc. Rép. doit fixer un délai d’exécution aux OPJ. Le même article dispose que lorsque l’enquête préliminaire est ouverte d’office par l’OPJ, il doit informer le Proc. Rép. au moins tous les mois de l’état d’avancement de l’enquête.• art. 78-2 CPP : impose à l’OPJ d’informer immédiatement le Proc. Rép. quand un suspect est identifié dans le cadre d’une enquête préliminaire.

Ces obligations ne sont pas prescrites à peine de nullité. Selon la Chambre criminelle, toutes les investigations menées d’office par l’OPJ sans information préalable du parquet demeurent régulières. En conséquence, elles sont interruptives du délai de prescription de l’action publique (Crim, 01/12/2004, doc. 33).

B. Le contrôle exercé par le Procureur Général

C’est le chef du parquet de la Cour d’appel. L’art. 13 CPP permet de contrôler la PJ de deux façons :

parce que c’est lui qui note l’aptitude des membres de la PJ, il a donc un rôle déterminant sur l’avancement,

et parce que c’est lui qui délivre l’habilitation personnelle donnée aux OPJ, et qu’il peut les retirer.

§2. Le contrôle exercé par la Chambre d’instruction

Appelée Chambre d’accusation avant la loi du 15/06/2000. C’est le second degré de juridiction de l’instruction préparatoire. Elle connaît les appels contre les décisions du JI et du JLD.Autres compétences : extradition, juridiction disciplinaire des membres de la PJ (peut, conformément à l’art. 227 CPP, décider de sanctions disciplinaires allant de l’avertissement/blâme, à l’interdiction définitive d’exercer).Ex : Affaire Olivier Foll, directeur de la police nationale. Il avait refusé de prêter main forte au JI pour perquisitionner chez les époux Tibéri. Il a été retenu contre lui une interdiction définitive d’exercer en raison de la méconnaissance de l’obligation d’obéir aux ordres du JI (Ch. Acc. CA Paris confirmé par Crim, 26/02/1997).

2°- Le régime juridique des enquêtes

14

Page 15: procédure pénale crfpa efb

: Enquête préliminaire خ longtemps appelée « enquête officieuse » car issue de la pratique (pas de texte), elle est destinée à permettre au Proc. Rép. de disposer de preuves suffisantes pour prendre une décision quant aux suites à donner à l’affaire. Finalement, le Code de 1958 la prévoit aux art. 75 s. CPP.

Enquête de flagrance : prévue par le Code d’instruction criminelle de 1808. Il s’agit خde l’enquête ouverte suite à la constatation d’une infraction flagrante. Ce qui la rend particulière, c’est qu’elle autorise le recours à des méthodes coercitives de recherche de la preuve (ce qui la différencie de l’enquête préliminaire).Mais du coup, cela justifie qu’elle soit encadrée par le législateur :

il confie les actes les plus coercitifs à l’OPJ (ex : GàV, révélation d’identité, perquisitions….) en raison de sa formation et du contrôle du Proc. Rép.

le champ d’application est limité car l’enquête de flagrance ne peut concerner qu’un crime ou délit puni d’emprisonnement. Cette exigence est nuancée par la jp car à l’instar du CC, la Chambre criminelle n’annule les enquêtes de flagrance qu’en cas de détournement de procédure. Il n’y aura pas d’annulation des actes dès lors qu’au moment de l’ouverture, on pouvait croire qu’il y avait crime ou délit puni d’emprisonnement (Crim, 03/09/2002 doc. 34). Annulation si procédure détournée.

l’art. 53 al. 2 limite l’enquête de flagrance à 8 jours à compter de la constatation de l’infraction. Au-delà, il n’y a donc pas de possibilité d’actes coercitifs car on retombe dans l’enquête préliminaire.La loi du 09/03/2004 autorise désormais le Proc. Rép. à prolonger l’enquête de flagrance de 8 jours supplémentaires quand l’investigation porte sur des faits criminels ou sur un délit puni d’au moins 5 ans d’emprisonnement (art. 53 al. 3).

Donc le critère que l’on étudie pour savoir dans quel type d’enquête l’on se situe, c’est la flagrance.

Section 1 – La flagrance

Dans le langage courant, il s’agit de l’infraction en train de se commettre.

§1. Les conditions de la flagrance

Pour la flagrance, le CPP pose deux conditions communes à tout hypothèse de flagrance. Elle doit être préalable et objective.

Préalable : la constatation de l’infraction doit être préalable à l’emploi de la force, sauf خà commettre un excès de pouvoir. Dès lors, l’OPJ ne peut pas pénétrer dans un appartement, même s’il sait que l’on s’y adonne à la torture. Il faut une enquête préliminaire pour obtenir des preuves (Crim, 17/11/1998 doc. 36).

Attention, cela ne signifie pas que la flagrance ne peut pas être constatée dans le cadre d’une procédure préexistante.Ex : • pendant la perquisition chez un suspect au cours d’instruction judiciaire sur le

vol organisé, on constate des actes de torture. Peu importe que la force ait été employée pour entrer dans le domicile car elle était justifiée par l’enquête préexistante.• un motard accidenté gisant sur la chaussée est fouillé par la police pour découvrir son identité. Au cours de la fouille (opération de police administrative destinée à éviter une aggravation de son état de santé), on trouve une arme à feu non autorisée. Cela constitue la flagrance. Donc peu importe que l’opération soit administrative ou judiciaire, ou même qu’il n’y ait pas d’opération, il faut un préalable (Crim, 05/01/2005 doc. 35).

,Objective : l’enquêteur doit, pour décider de l’ouverture d’une enquête de flagrance خse fonder sur des éléments de preuve suffisamment tangibles. Cela explique la jp de la Chambre criminelle qui exclut l’ouverture d’une enquête de flagrance sur le fondement d’une dénonciation anonyme, parce qu’elle n’est pas identifiable (Crim, 02/02/1988).

15

Page 16: procédure pénale crfpa efb

A l’inverse, une enquête de flagrance pourra être ouverte sur le fondement de la dénonciation d’un témoin identifié car on pourra vérifier ses allégations (Crim, 01/10/2003).

§2. Les situations de la flagrance

L’art. 53 CPP en prévoit 4 depuis que la loi du 23/06/1999 a supprimé l’ancienne situation fondée sur les réquisitions du chef de maison (possibilité d’ouverture de l’enquête de flagrance quand une personne rentrait chez elle et découvrait une infraction). La présomption de flagrance est supprimée.

On en compte 4, mais les 2 dernières sont des illustrations de la 2nde : infraction en train de se commettre. Pas de difficulté, recours à la force

possible. infraction qui vient de se commettre. Pb de détermination du délai entre la

commission et la constatation. Face au silence du législateur, la jp a dû se prononcer.

Crim, 11/02/1998 : un délai de 6 jours est trop long.Crim, 26/02/1991 : un délai de 28h est valable pour l’ouverture d’une enquête de flagrance.

cas de la personne qui dans un temps très voisin de l’action est trouvée en possession d’objets laissant penser qu’elle a participé à l’infraction.

cas de la personne quid ans une temps très voisin de l’infraction est poursuivie par la clameur publique (« au voleur ! »).

Conclusion : parfois le législateur autorise l’ouverture d’une enquête de flagrance alors même qu’une infraction n’a pas été préalablement constatée (art. 74 CPP).Pendant longtemps, il n’y avait qu’une seule situation : la découverte d’un cadavre sans qu’il soit possible de déterminer les causes de la mort.

Puis le législateur a ajouté 3 hypothèses (loi du 09/03/2004) : personne grièvement blessée sans qu’il soit possible d’établir l’origine de la

blessure. disparition d’un mineur ou d’un majeur protégé, ou disparition suspecte d’un

majeur. hypothèse de fuite d’une personne faisant l’objet d’un mandat d’arrêt ou d’une

condamnation pénale sans sursis d’au moins un an de prison.

Section 2 – Les actes d’enquête

Il faut distinguer les actes pouvant être faits par tous les enquêteurs, et ceux réservés aux OPJ.

§1. Les actes exécutés par tout enquêteur

A. Le constat d’une infraction

Tout enquêteur peut constater la commission d’une infraction ayant eu lieu sur la voie publique, dans un lieu ouvert au public, voire dans un lieu privé dès lors que l’enquêteur y est entré légalement. Le constat de l’infraction donne lieu à la rédaction d’un PV (OPJ, APJ) ou d’un rapport de police (APJA).

Attention : ne pas confondre constat d’une infraction et constatation ! Le constat de l’infraction est le constat de la commission d’une infraction, tandis que la constatation est l’opération de récolte des preuves sur les lieux d’une infraction. Elles sont déterminantes pour l’enquête, dès lors elles ne peuvent être réalisées que par un OPJ (assisté le plus souvent par les services techniques et scientifiques).

B. Les contrôles d’identité

16

Page 17: procédure pénale crfpa efb

Tout enquêteur peut procéder à un contrôle d’identité. L’étude du CPP n’est pas suffisante, il existe des dispositions spécifiques en matière de vérification des titres de séjour des étrangers.

• CONTROLES DE POLICE GENERALE

Art. 78-2 CPP : contrôles de police judiciaire et de police administrative.

.Contrôles de police judiciaire : art خ 78-2 al. 1 : « tout enquêteur peut contrôler l’identité d’une personne à l’encontre de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner soit qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction, soit qu’elle se prépare à commettre un crime ou délit, soit qu’elle dispose d’informations utiles à une enquête en cours, soit qu’elle fait l’objet d’une recherche diligentée par l’autorité judiciaire ».

Il doit donc être motivé au regard du comportement de l’intéressé. L’enquêteur doit motiver sa décision au regard d’indices objectifs de suspicion. La Cour de cassation refuse donc qu’un contrôle d’identité se fonde sur une dénonciation anonyme (Civ. 1, 31/05/2005, doc. 38 arrêt 1). En revanche, si des indices objectifs laissent penser qu’il y a un comportement suspect, alors un contrôle est possible. Ex : fait de se dissimuler à la vue d’un véhicule de police (Civ. 1, 17/01/2006 doc. 38 arrêt 4).Enfin, la motivation insuffisante du contrôle entraîne sa nullité. Mais celle-ci ne saurait affecter la validité des poursuites exercées sur un fondement indépendant (ex : délit de rébellion, ou outrage à agent). Cela résulte de la présomption de régularité des actes.

.Contrôles de police administrative : il en existe 3 types خ

Contrôles de police administrative stricto sensu   : art. 78-2 al. 3 CPP selon lequel tout enquêteur peut contrôler l’identité de toute personne, quelque soit son comportement, afin de prévenir un trouble à l’OP.Mais le CC a posé une limite à ce principe beaucoup trop large (CC 05/08/1993) : le contrôle est valable à condition qu’il soit motivé au regard des circonstances particulières établissant un risque de trouble à l’OP. La motivation doit être spécifique au regard des circonstances locales et temporelles, et si elle n’est pas assez précise, le contrôle est annulé (et souvent toute la procédure).Ex : le contrôle fondé sur la recrudescence de vols de scooters sur toute une ville n’est pas assez précis (Crim, 12/05/1999).Ex : en revanche, le contrôle est valable s’il est fondé sur le fait que tous les matins entre 6h et 8h, depuis plusieurs mois, des infractions d’entrée irrégulière sur le territoire ont été constatés (Crim, 15/01/2003 doc. 39).

Contrôles sur réquisition du Proc. Rép.   : art. 78-2 al. 2 CPP prévoit que « les enquêteurs peuvent contrôler l’identité de toute personne sur réquisition du Proc. Rép. ». Ces contrôles sont des opérations « coup de poing ». Parce qu’ils sont faits sur ordre, ils n’ont pas à être motivés par les enquêteurs. En revanche, il appartient au Proc. Rép. de limiter les contrôles à la fois temporellement et localement, et de motiver la réalisation de ces contrôles (CC 05/08/1993).

Contrôles de police Schengen   : art. 78-2 al. 4 CPP habilite tout enquêteur à contrôler l’identité de toute personne se trouvant dans la zone Schengen, composée des zones accessibles au public, ouvertes au trafic international : ports, aéroports, gares. (Civ. 1, 14/02/2006 doc. 41 : gare de Poitiers Ok pour le contrôle Schengen).La zone est aussi composée de la zone de 20 km située en deçà de la frontière terrestre de la France avec les Etats à la convention.La loi du 23/01/2006 a étendu ce contrôle d’identité Schengen quand il a lieu à bord d’un train effectuant une liaison internationale. Le contrôle est valable jusqu’à l’arrêt du train sur le territoire français au-delà des 20 km.

• CONTROLES ET RELEVES DE POLICE SPECIALE

: Hypothèses de contrôles خ

17

Page 18: procédure pénale crfpa efb

Contrôle des titres de séjour ou de circulation d’un étranger : L 611-1 s. Code de l’entrée et du séjour des étrangers prévoit la possibilité pour les enquêteurs de contrôler le titre de séjour d’une personne de nationalité étrangère se trouvant sur le territoire français. Cela pose des difficultés car le législateur ne dit pas comment déterminer l’extranéité de la personne ! C’est donc la jp qui a dû pallier ce mutisme.

Ce contrôle ne peut se fonder que sur des éléments objectifs déduits des circonstances extérieures à la personne même de l’intéressé. Dès lors, le contrôle de faciès est prohibé (fondé sur la couleur de la peau), ainsi que le contrôle sur une personne s’exprimant en langue étrangère (Civ. 2, 14/12/2000).Mais quand il es fondé sur des circonstances extérieures, le contrôle est valable : personne qui sort d’une ambassade, personne circulant dans un véhicule immatriculé à l’étranger, ou personne lisant une revue étrangère (circonstance extérieure!). Cette condition a été reprise par CC 13/08/1993.

Contrôle de lutte contre le travail clandestin   : art. 78-2-1 CPP qui habilite les enquêteurs, sur réquisition du Proc. Rép., à pénétrer dans des locaux professionnels afin de contrôler l’identité des personnes s’y trouvant, et vérifier que ces personnes ont fait l’objet d’une déclaration préalable à l’embauche.En cas de découverte d’une autre infraction, il est possible de mener l’enquête (flagrance).

Contrôle douanier Schengen   : art. 67 quater Code des douanes habilite les agents des douanes à contrôler l’identité des personnes de nationalité étrangère se trouvant dans la zone Schengen. Attention : il ne s’agit que des étrangers ! Les conditions pour déterminer l’extranéité sont les mêmes : indices objectifs se fondant sur des éléments extérieurs à la personne même de l’intéressé.

: Hypothèses de relevés خ art. 78-6 CPP habilite les agents de police municipale à relever l’identité des contrevenants aux arrêtés de police du maire et aux dispositions contraventionnelles du Code de la route. Il s’agit d’un relevé et pas d’un contrôle ! Ils ne peuvent donc les retenir contre leur gré plus que le temps de prévenir l’OPJ, si la personne refuse le relevé d’identité. Le même principe est posé par l’art. 529-4 CPP concernant les agents assermentés de service public du transfert de voyageurs.

Ex : APJ à Menton décide de contrôler l’identité d’une personne prenant des notes dans une ruelle obscure. Contrôle régulier ?

- contrôle PJ ? Non car il n’y a pas d’infraction, ni de personne en fuite.- contrôle PA ? Non car pas de trouble à l’OP ni de réquisition du parquet- en revanche, nous sommes à Menton, et donc à moins de 20 km de l’Italie qui

fait partie de la zone Schengen. Le contrôle est donc justifié.

C. Les fouilles

Fouille ≠ perquisition. Il s’agit de la recherche de preuves ou d’indices partout ailleurs que dans un domicile. Le régime des perquisitions ne s’applique donc pas : les fouilles sont possibles à n’importe quel heure.

• FOUILLES DE PERSONNES

Palpations خ de sécurité : hypothèse la moins attentatoire aux liberté puisqu’elle exclut tout contact avec le corps de l’intéressé. La palpation est réalisée par tout enquêteur lorsqu’il y a :

situation de flagrance

18

Page 19: procédure pénale crfpa efb

risque de trouble à l’OPIl n’y a aucune disposition relative à ces palpations dans le CPP. Il s’agit d’une création jptielle fondée sur le contrôle d’identité (Crim, 27/09/1988). La loi du 15/11/01 relative à la sécurité quotidienne autorise les agents de sécurité privés à procéder à ces fouilles. Il existe des conditions : ils doivent avoir reçu une agrémentation personnelle délivrée par le préfet et une habilitation spéciale. La fouille doit être fondée sur des circonstances particulières montrant un risque de trouble à l’OP. Et contrairement aux enquêteurs, les agents de sécurité privés doivent obtenir le consentement de l’intéressé. A défaut, il doit demander l’aide des enquêteurs.

Fouille à corps : elle coïncide avec la notion classique de fouille, càd l’obligation de خvider ses poches, voire de se déshabiller. La décision ne peut être prise que par un OPJ et dans le cadre d’une enquête de flagrance (Crim, 22/01/1953). La fouille à corps ne doit pas être confondue avec la fouille à corps de sécurité qui concerne l’hypothèse particulière de la GàV : l’OPJ peut décider de retirer au gardé à vue les objets dangereux pour les tiers ou pour lui-même (ex : ceinture, lacets,…).

Fouille in corpore : prévue par l’art. 63-5 CPP. Elle est très attentatoire aux libertés et خconcerne aussi le gardé à vue. L’OPJ peut le faire quand il est convaincu qu’il dissimule dans son corps des éléments utiles à l’enquête. Evidemment, ce n’est pas l’OPJ qui réalise l’acte, c’est un médecin.Il existe également la fouille in corpore douanière pour les trafics de stupéfiants pour les agents des douanes. Il faut au préalable avoir l’autorisation du JLD (art. 60-10 Code douanes).

• FOUILLES DE BAGAGES

Il n’y a pas de spécificité par rapport au contrôle d’identité. La fouille est valable en cas d’infraction flagrante (police judiciaire) ou en cas de risques de trouble à l’OP (police administrative).

Les bagages normaux : la loi du 15/11/2001 permet à tout enquêteur et à tous les خagents de nationalité française et ressortissants communautaires désignés par les entreprises de transport aérien ou maritime de fouiller les bagages se trouvant dans des zones portuaires et aéroportuaires (suite aux événements du 11/09 de NY). Ces mesures devaient être en vigueur pour une durée de 3 ans, mais elles ont été pérennisées par la loi du 09/03/2004.

Les bagages à main : la loi du 15/11/2001 prévoit comme pour les palpations que les خagents privés de sécurité peuvent procéder à une inspection visuelle ou à une fouille. Mais pour cela il faut le consentement de l’intéressé et une habilitation spéciale. A défaut de consentement, il faut avoir recours à un enquêteur.• FOUILLES DE VEHICULES

La Chambre criminelle exclut l’application du droit des perquisitions à la fouille des véhicules. Il n’y a donc pas lieu de respecter les heures légales, les fouilles de nuit sont valables (Crim, 08/11/1979). Mais il faut tout de même des garanties (cf. arrêt CC 12/01/1977 « fouilles de véhicule »). La loi du 18/03/2003 a systématisé les solutions.

Attention : la loi fait application du droit des perquisitions lorsque le véhicule concerné est spécialement aménagé aux fins d’habitation, et utilisé comme tel (art. 78-2-2 CPP).

Pour le reste, il s’applique le même régime que pour les contrôles d’identité :

Infraction flagrante (ou une ou plusieurs raisons plausibles de le croire). La fouille doit être motivée par le comportement du suspect (art. 78-2-3 CPP).

Risque de trouble à l’OP (police administrative). Elle doit être motivée par l’OPJ, mais il faut obtenir le consentement de l’intéressé. S’il ne consent pas à l’acte, l’enquêteur peut s’adresser au Proc. Rép. pour vaincre l’opposition de l’individu. En attendant, le conducteur peut être immobilisé, mais pas plus de 30 minutes (art. 78-2-4 CPP).

19

Page 20: procédure pénale crfpa efb

Sur réquisition du Proc. Rép. de fouiller les véhicules se trouvant à un endroit donné, à un instant donné. Toutefois, celle-ci ne peut concerner que des infractions limitativement énumérées. Quand l’enquête porte sur :

• Terrorisme• Trafic d’armes• Trafic de stupéfiants• Vol ou recel

D. Les arrestations

Art. 73 CPP : tout enquêteur et même tout particulier peut procéder à l’arrestation de l’auteur d’une infraction flagrante.

Attention : il ne peut s’agir que d’une infraction flagrante ! Il ne peut donc y avoir aucune arrestation dans une enquête préliminaire !Pour le simple suspect, il faut recourir à la voie classique de la convocation (s’il vient, on peut le mettre en GàV), ou du mandat de recherche (créé par la loi du 09/03/2004) par lequel le Proc. Rép. autorise l’arrestation du suspect.

L’art. 73 CPP pose une règle fondamentale en droit pénal : c’est le fait justificatif de l’infraction de séquestration commise par un particulier sur l’auteur d’une infraction flagrante. Elle peut durer un très court instant. L’article justifie ce délit si :

L’auteur a commis une infraction flagrante L’auteur de l’arrestation appelle immédiatement les force de l’ordre.

E. L’audition

Audition ≠ interrogatoire. Elle ne concerne que les personnes qui disposent d’informations utiles à l’enquête, tandis que l’interrogatoire ne concerne que le suspect et ne peut être mené que par un OPJ. Etudier l’audition mène nécessairement à étudier le secret professionnel et les auditions de témoins.

Le secret professionnel : dans ce cas, la personne auditionnée est dans une position خdifficile. Elle risque le délit de violation du secret professionnel (1 an et 15000 €) si elle parle, et le délit de témoin défaillant (3750 €) si elle ne parle pas.Pour résoudre cette situation, il faut déterminer à quel type de secret on a affaire.

Secret relatif   : il peut être opposé à tous, sauf à la justice. La personne a l’obligation de déposer (ex : fonctionnaire, agent des douanes…)

Secret absolu   : le témoin a l’interdiction de déposer (avocat, médecin, ministres du culte dans le cadre de la confession). TC Caen, 04/09/2001 : si les informations sont données en dehors de la confession, il a l’obligation de déposer (ex : parents de victimes de pédophiles qui se plaignent à un évêque).

La protection de témoin : le témoin ayant l’obligation de déposer, la justice doit le خprotéger. La protection est organisée par la loi du 15/11/2001. On distingue deux niveaux de protection :

Pour toutes les infractions   : le témoin peut être autorisé à déclarer son domicile au commissariat ou à la gendarmerie. Il faut une autorisation du Proc. Rép.

Pour les enquêtes portant sur les crimes ou délits punis d’au moins 3 ans de prison   : le témoin pourra bénéficier de l’anonymat sur décision du JLD. Si c’est le cas, il ne sera jamais fait référence à son identité. En cas de confrontation, l’anonymat doit être protégé (pièce annexe et voix déformée). Toutefois, aucune condamnation ne peut se fonder exclusivement sur un témoin protégé ! Il faut corroborer.La révélation de l’identité d’un témoin protégé est un délit puni de 5 ans d’emprisonnement et de 75000 € d’amende.

20

Page 21: procédure pénale crfpa efb

§2. Les actes accomplis par le seul OPJ

Les investigations matérielles ainsi que la collecte de dépositions lui sont réservées.

Sous- §1 . Les investigations matérielles

La loi du 09/03/2004 a quasiment fait une procédure pénale bis en matière de criminalité et délinquance organisée. Il faut donc distinguer le droit commun de ce droit spécial.

I/. Les investigations matérielles de droit commun

A. Le transport sur les lieux

Art. 54 CPP impose à l’OPJ qui est informé de la commission d’une infraction flagrante de se déplacer sur les lieux de l’infraction. Il doit également informer le Proc. Rép. qui peut lui-même décider de se déplacer, ce qui dessaisit l’OPJ. Cela ne signifie pas que l’enquêteur ne pourra pas y retourner ! Il pourra notamment réaliser une reconstitution des faits (Crim, 26/02/2003).

B. Les constatations

Art. 54 CPP prévoit que seul l’OPJ peut procéder aux opérations de constatation sur les lieux de l’infraction. Pour ce faire, il pourra avoir recours à un tiers (cf. réquisitions).

C. Les réquisitions

Traditionnellement, elles se définissent comme « l’acte permettant à un OPJ d’obtenir d’un tiers une prestation d’ordre manuelle ou intellectuelle ». La loi du 09/03/2004 crée une 3ème hypothèse.

• REQUISITIONS A MANOEUVRIER

Elles désignent les réquisitions tendant à l’obtention d’une aide matérielle (ex : serrurier, entreprises de pompe funèbre pour exhumation). Il a l’obligation d’obéir, sinon une peine d’amende correctionnelle de 3750 € est encourue.

• REQUISITIONS A PERSONNE QUALIFIEE

Il s’agit de l’obtention d’une prestation intellectuelle, technique ou scientifique (ex : médecine légale, balistique). La loi du 23/06/1999 en a étendu le champ. Il n’y a pas lieu de justifier l’urgence en la matière. Donc l’OPJ peut disposer d’un éventuel recours à une expertise dans le cadre d’une enquête (mais l’expression est impropre : il faut parler de réquisition à personne qualifiée !). cf. doc. 44. Il y a deux types d’opérations.

: Prélèvements : deux hypothèses خ

Opérations de prélèvement externe   :  art. 55-1 CPP : elles peuvent être demandées par l’OPJ sur un suspect ou un témoin dans le cadre d’une enquête flagrante. L’objectif est d’analyser les traces trouvées sur eux (attention : pas de prise de sang, il s’agit d’un prélèvement externe). Le refus de s’y soumettre est constitutif d’un délit puni d’un an d’emprisonnement et 15000 €, sans possibilité de forcer l’intéressé à s’y soumettre.

Dépistage de MST   : art. 706-47-2 CPP : l’OPJ peut y recourir sur toute personne à l’encontre de laquelle existent des indices graves et concordants d’infractions sexuelles. Là aussi le refus est constitutif d’un délit (1 an et 15000 €), mais il peut être vaincu sur autorisation écrite du Proc. Rép. Le résultat doit être immédiatement communiqué à la victime.

Alimentation et exploitation du FNAEG : (fichier national automatisé d’empreintes خgénétiques).

21

Page 22: procédure pénale crfpa efb

Il a été créé par la loi du 17/06/1998 pour les infractions sexuelles. Mais avec la succession de lois en PP, le champ a été étendu. Désormais, le fichier regroupe l’ensemble des prélèvements concernant toutes les infractions commises avec violence.

Il regroupe les analyses génétiques des personnes inconnues. Quant aux personnes connues, il s’agit des personnes définitivement condamnées, et depuis la loi du 18/03/2003 de celles à l’encontre desquelles existent des indices graves et concordants de culpabilité (pour les infractions entrant dans le champ du fichier).

L’OPJ va pouvoir requérir de la police scientifique l’autorisation de faire des prélèvements sur les personnes connues, sachant que le refus de s’y soumettre est sanctionné pénalement : 2 ans et 30000 € quand la personne a commis un crime, 1 an et 15000 € dans les autres cas. Le refus peut être vaincu sur réquisition écrite du Proc. Rép., mais seulement à l’égard des condamnés pour crime ou délit puni de plus de 10 ans d’emprisonnement (pas de victoire pour les autres).=> En revanche, il est possible de recueillir le matériel biologique qui se serait

naturellement détaché du corps de l’intéressé (cheveux, poils…).

Attention : l’alimentation du fichier ne peut être réalisé que par un technicien spécialisé de police scientifique. Quant à l’exploitation, il peut être réalisé par l’OPJ seul (rapprochement de fiches).

• REQUISITIONS AUX FINS D’OBTENTION D’INFORMATIONS

-Communication d’informations utiles à l’enquête : art. 60-1 (enquête F), art. 77-1 خ1 (enquête P). L’OPJ peut requérir de tout organisme, public ou privé, la communication de toute information utile à l’enquête en cours, sans qu’il soit possible en principe d’opposer le secret professionnel (sauf pour les personnes surprotégées dans le droit des perquisitions (avocat, médecin)).Il faut toutefois l’autorisation du parquet. La méconnaissance de cette obligation est une cause de nullité assimilée à une cause de nullité d’OP, donc pas de grief (Crim, 06/12/2005 doc. 21, arrêt 8).

.Communication d’informations contenues dans un système informatique : art خ60-2 (enquête F), art. 77-1-2 (enquête P). Elles permettent à l’OPJ de requérir de tout organisme, public ou privé, la communication de toute information utile à l’enquête en cours, contenue dans les systèmes informatiques. Mais là le secret professionnel peut être opposé à l’OPJ. Dans ce cas, il devra avoir recours à la perquisition pour briser le secret.

D. Les perquisitions

Il s’agit de la recherche de preuves dans un domicile. Il faut distinguer les conditions de forme des conditions de fond.

• CONDITIONS DE FOND

≠) Notion de domicile : la Chambre criminelle donne une définition large du domicile خ

droit civil en vertu de l’autonomie du droit pénal). Selon Crim, le domicile est « le lieu habitable où une personne a le droit de se dire chez elle, quelque soit le titre juridique de son occupation, mais aussi le lieu où une personne a son activité professionnelle ». Cela permet de rendre compte de l’acceptation large de la notion de vie privée au sens de l’art. 8 CESDH (Crim, 26/02/1953).

L’objectif est d’assurer l’effectivité de la protection de la vie privée. Donc est un domicile : un appartement, une maison, une chambre d’hôtel (même si ce n’est que temporaire).Par conséquent, on comprend mal pourquoi la Crim refuse l’application du droit de la perquisition à la loge d’un chef d’orchestre, alors qu’elle est occupée privativement par lui tout le long de la prestation et qu’il y développe une intimité. Arrêt critiquable (Crim, 06/12/2005 doc. 43 arrêt 2).

22

Page 23: procédure pénale crfpa efb

A l’inverse, lorsque le lieu n’est pas habitable, on exclut l’application du droit de la perquisition (ex : un appartement ravagé par les flammes (Crim, 31/05/1994), ou une hutte de chasse dépourvue des éléments les plus élémentaires (Crim, 06/05/2002 doc. 43 arrêt 1). Dans ces lieux, il n’est pas possible d’y développer sa vie personnelle ou professionnelle).

: Condition de nécessité et de proportionnalité خ Nécessité : il doit exister un lien entre l’enquête et la personne ou le lieu concerné. Attention : l’intervention n’a pas forcément lieu au domicile du suspect ! Elle peut avoir lieu au domicile d’un tiers si tout laisse à penser que des indices s’y trouvent.Proportionnalité : elle est relative à l’étendue de la perquisition. Il appartient à l’OPJ d’indiquer pourquoi il a entendu fouiller telle ou telle pièce. Sur cette question, depuis la loi du 18/03/2003, l’OPJ peut accéder au système informatique se trouvant sur les lieux, et il peut avoir accès aux autres ordinateurs fonctionnant sur le réseau, même s’ils ne se trouvent pas sur les lieux de la perquisition.

• CONDITIONS DE FORME

Obligation de l’intervention de l’OPJ : lui seul est compétent pour décider d’une خperquisition, et il doit mener l’opération lui-même, ou par d’autres enquêteurs placés sous sa direction. Sa présence est obligatoire.Dans certains cas (crainte de violation du secret professionnel), le législateur considère que le Proc. Rép. est compétent (art. 56-1) : au domicile ou au cabinet d’un avocat, au domicile d’un notaire, avoué, huissier, médecin, et dans les locaux d’une entreprise de presse ou de communication audiovisuelle.C’est la liste des personnes que l’on dit « surprotégées ».

: Consentement du maître des lieux خ pendant longtemps, on utilisait le droit de perquisition pour distinguer entre enquête P et enquête F (coercitive).Mais la loi du 09/03/2004 prévoit une exception importante en matière d’enquêtes P : le principe reste le même, il faut le consentement écrit du maître des lieux. Mais désormais des perquisitions coercitives peuvent intervenir dans le cadre des enquêtes P, quand elle porte sur un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’au moins 5 ans, sur autorisation du JLD.Dans l’enquête F, il n’y a pas de changement, le consentement du maître des lieux n’est pas exigé, et il n’y a pas lieu de demander l’autorisation à un juge.

,Présence du maître des lieux : art. 57 CPP : le maître des lieux, ou son représentant خdoit être présent. A défaut de désignation d’un représentant, deux témoins sont choisis par l’OPJ ou par le Proc. Rép. s’il est compétent, parmi des personnes ne figurant pas sous son autorité.La loi du 09/03/2004 permet de recourir directement au représentant ou aux témoins lorsque le maître des lieux est en GàV ou incarcéré.

Dans certains cas, lorsque le secret professionnel est en jeu, le législateur prévoit la présence d’une personne supplémentaire. Ainsi, les perquisitions menées chez un avocat ou à son cabinet, ou au cabinet d’un notaire, avoué, médecin (pas dans les entreprises de presse et d’audio-vision), doivent être menées en présence d’un représentant de l’ordre concerné. Celui-ci peut formuler des observations écrites quand il considère qu’il y a eu une violation qui pourrait servir de fondement à une annulation.

La loi du 12/12/2005 sur la récidive renforce les garanties concernant la perquisition au domicile et au cabinet d’un avocat. Désormais, lorsque le Proc. Rép. la décide, il doit prendre une décision préalable, écrite et motivée indiquant la nature des infractions sur le fondement desquelles la perquisition va avoir lieu. Il n’y a pas de voie de recours ! Et cette décision n’est pas notifiée à l’avocat bien sûr. Cette décision fixe le cadre de la perquisition, ce qui aura des incidences en matière de saisie : elles ne pourront concerner que des documents relatifs à la décision du Procureur.

: Respect des heures légales خ les perquisitions nocturnes sont interdites (art. 59 CPP) : elles sont interdites entre 21h et 6h.Il existe toutefois des exceptions (cf jp sous art. 59) :

23

Page 24: procédure pénale crfpa efb

En matière de criminalité/délinquance organisée   : art. 706-89 s : permet le recours à la perquisition nocturne sur autorisation du JLD, sachant qu’elles peuvent intervenir dans tout local dans une enquête F, mais seulement dans le locaux professionnels dans une enquête P.

En matière de trafic de stupéfiant   : art. 706-28 : la perquisition nocturne est autorisée dans ce cas dans les lieux où l’on peut suspecter l’usage de stupéfiants ou la fabrication ou le stockage de stupéfiants. Ce n’est toutefois possible que dans des locaux professionnels.Cet article s’applique, même en cas de criminalité ou délinquance organisée. Donc pas d’autorisation du JLD requise.

En matière de proxénétisme   : art. 706-35 : la perquisition nocturne est autorisée dans les lieux où sont habituellement reçues des personnes se livrant à la prostitution, sans autorisation du JLD (et pas d’exclusion des locaux d’habitation : la perquisition de la chambre d’hôtel est donc valable).

Rappel sur les sanctions des irrégularités : il faut que la nullité soit indiquée dans un texte. Mais ce ne sont que des nullités d’ordre privé. Elles sont donc soumises à la preuve d’un grief.

E. Les saisies

Les dispositions de l’art. 56 ne sont pas spécifiques à cet acte de procédure. Elles s’appliquent tant aux perquisitions qu’aux saisies. Attention : la saisie n’intervient pas forcément après une perquisition fructueuse. Elle peut intervenir dans un lieu public après une fouille.Elle doit être nécessaire et proportionnée (cf perquisitions). Elle donne lieu à la rédaction d’un PV par l’OPJ qui dresse l’inventaire des objets saisis, chacun d’entre eux donnant lieu à placement sous scellé pour en garantir l’authenticité.

La loi du 15/06/2000 sur les saisies pratiquées au domicile ou au cabinet d’un avocat (art. 56-1 CPP) impose que dans ce cas, le bâtonnier soit présent ou représenté. Mais contrairement aux autres représentants de l’ordre, cette loi ne lui donne pas un rôle actif. Il peut s’opposer à la saisie des documents qu’il considère comme portant une atteinte injustifiée au secret professionnel. Les documents litigieux seront alors mis sous des scellés distincts et communiqués directement au JLD. C’est lui qui décide (juge du secret).Il doit statuer sous 5 jours, après avoir provoqué une audience dans son cabinet où il entend le Proc. Rép., l’avocat et le bâtonnier ou son délégué. La décision du JLD est exécutoire immédiatement, et elle ne peut pas faire l’objet d’un recours. Cela n’implique pas que la saisie ne peut pas après être contestée devant la Chambre d’instruction ! Mais alors ce n’est pas la décision du JLD qui est contestée, mais l’acte du Proc. Rép.

Enfin, la loi du 12/12/2005 impose au Proc. Rép. d’indiquer les infractions sur le fondement desquelles la perquisition aura lieu chez l’avocat. Le législateur prévoit à peine de nullité pour les saisies qu’elles ne doivent pas porter sur des documents étrangers aux infractions visées dans la décision préalable du Proc. Rép.

II/. Les investigations matérielles en matière de criminalité et délinquance organisée

A. Les interceptions de communications

Jusqu’à la loi du 09/03/2004, elles ne pouvaient intervenir que dans le cadre d’une information judiciaire. Depuis, elles sont également possibles dans le cadre des enquêtes (P et F) portant sur la criminalité et la délinquance organisée (art. 706-95).

Il appartient au Proc. Rép. de saisir le JLD qui est habilité à les autoriser par ordonnance.

24

Page 25: procédure pénale crfpa efb

Elles durent 15 jours, et sont renouvelables une fois. Au-delà, il n’est pas possible de les poursuivre dans le cadre d’une enquête. Il faudra ouvrir une information judiciaire.Le régime est le même que pour les écoutes téléphoniques réalisées dans le cadre d’une information judiciaire (art. 100 s.). Cf. infra, l’information judiciaire.

B. Les opérations d’infiltration

Jusqu’à la loi du 09/03/2004, elles n’existaient que pr les infractions de trafic de stupéfiants. Depuis, le champ a été étendu aux infractions de criminalité et délinquance organisée (art. 706-93).Elles consistent pour les agents infiltrés à se faire passer pour des délinquants, afin de pouvoir découvrir l’identité des membres du réseau.

Art. 706-81 CPP : en la matière, l’initiative appartient au Proc. Rép., qui doit délivrer une autorisation écrite indiquant les infractions justifiant le recours à cette procédure, l’identité de l’OPJ chargé de coordonner l’opération, et l’identité réelle et d’emprunt des agents effectivement infiltrés. La durée de l’autorisation est de 4 mois, renouvelable autant de fois que nécessaire. Cette autorisation permet de justifier les infractions commises par les agents infiltrés, sachant que le législateur exclut la commission des infractions sur les personnes (seulement sur les biens !).L’agent infiltré peut provoquer la preuve, mais pas la commission de l’infraction, à peine de nullité.

L’OPJ doit rédiger un rapport quand l’opération est achevée, qu’il transmet au Proc. Rép. En principe, seul l’OPJ coordinateur peut être entendu comme témoin (anonymat des agents infiltrés). Néanmoins, en cas de confrontation, on agira comme pour les témoins protégés (pièce différente, voix amplifiée et déformée). La révélation de l’identité d’un agent infiltré est un délit puni de 5 ans de prison, et 75000 € d’amende, et 10 ans et 150000€ lorsque la révélation a causé le décès de l’agent, même indirectement. Comme pour les témoins protégés, il ne peut y avoir de condamnation pénale fondée exclusivement sur les déclarations d’un témoin protégé. Il faut corroborer.

Sous- §2 . Les collectes de dépositions

A. Les vérifications d’identité

Art. 78-3 CPP : quand la personne soumise à un contrôle d’identité ne peut pas ou ne veut pas justifier de son identité, l’enquêteur peut retenir l’intéressé le temps d’informer l’OPJ de cette circonstance, sachant que seul l’OPJ peut décider d’avoir recours à une vérification d’identité. Cela consiste dans la rétention de l’intéressé au commissariat ou à la gendarmerie nationale pendant maximum 4h, délai pendant lequel il doit pouvoir prouver son identité.Evidemment, il bénéficie de la garantie judiciaire : (art. 5 CESDH) l’OPJ doit immédiatement prévenir le Proc. Rép.

Dans le cadre des vérifications d’identité, deux niveaux de recherche sont prévus : L’OPJ doit mettre à la disposition de l’intéressé les moyens lui permettant de

justifier de son identité (téléphone à son employeur, conjoint… pour attester de son identité)

S’il refuse de collaborer, on passe au 2nd stade. Sur autorisation écrite du Proc. Rép., il est possible de recourir à l’identité judiciaire par la prise d’empreintes digitales et de photos.

Une fois l’identité découverte, l’OPJ peut avoir recours à 2 fichiers pour vérifier que la personne n’est pas un suspect qui s’est soustrait à la justice :

Système de traitement des infraction constatées   : (STIC) : longtemps officieux, il a été officialisé par une loi du 18/03/2003. On y trouve regroupée l’identité des personnes contre qui existent des indices graves et concordants d’avoir participé à un crime, délit ou contravention de 5ème classe. On ne fait pas de distinction selon l’âge du suspect (mineur ok), mais il ne peut s’agir que de suspects, pas de témoins.

25

Page 26: procédure pénale crfpa efb

Fichier national des auteurs d’infraction sexuelles ou violentes   : (art. 706-53) il regroupe l’identité et l’adresse des personnes ayant fait l’objet d’une condamnation définitive ou pas, mais aussi de celles ayant été mises hors de cause pour trouble mental, de celles ayant fait l’objet d’une composition pénale, et de celles mises en examen et placées sous contrôle judiciaire.Toutes ces personnes doivent justifier périodiquement de leur adresse (tous les 6 mois) à peine d’encourir 2 ans de prison et 30000 € d’amende).

B. La convocation de témoin

L’audition d’un témoin peut être réalisée par tout enquêteur. En revanche, sa convocation ne peut être faite que par l’OPJ. Depuis la loi du 15/06/2000, l’OPJ qui est sur les lieux de commission d’une infraction flagrante (présence obligatoire), peut interdire à toute personne se trouvant sur les lieux de s’éloigner. Extension aux personnes se trouvant sur les lieux d’une perquisition depuis la loi du 09/03/2004. L’objectif est de recueillir toutes les informations utiles à l’enquête.

Dans les autres hypothèses, l’OPJ peut convoquer toute personne susceptible de disposer d’informations utiles. Le témoin a l’obligation de comparaître à peine d’encourir une amende correctionnelle de 3750 €. L’OPJ pourra même utiliser la force à l’encontre d’un témoin récalcitrant, mais il doit avoir au préalable obtenu l’autorisation du Proc. Rép., appelée « ordre de comparution ». Le pouvoir de contrainte existe dans les enquêtes F, mais aussi dans les enquêtes P (art. 62 et 78 CPP).

Le témoin présent a l’obligation de témoigner : révéler les infos dont ils disposent (amende de 3750 €). Mais la contrainte physique n’est pas possible. La seule contrainte est l’amende.Quand il est présent devant l’OPJ, il ne peut être retenu que le temps strictement nécessaire à son audition. C’est une disposition vague car il n’existe pas de plafond légal (contrairement aux vérifications d’identités). Mais elle est susceptible d’entraîner un constat de violation de l’art. 5 CESDH.

C. La garde à vue

Il s’agit de la rétention d’un suspect dans les locaux de Police ou de Gendarmerie. Le régime juridique a été systématisé par les lois du 04/01/1993 et du 24/08/1993, complétées par la loi du 15/06/2000. L’objectif est de s’assurer que la dignité du gardé à vue reste intacte (art. 5 CESDH). Donc le législateur a prévu un contrôle des GàV. Ainsi, la loi du 15/06/2000 autorise les parlementaires à visiter à tout moment les locaux de GàV de leur circonscription. C’est le contrôle de l’activité policière par les représentants du peuple. Et le Proc. Rép. a l’obligation de visiter au moins une fois par an les locaux de GàV de son ressort.

Motivation de la GàV : jusqu’à la loi du 15/06/2000 (entrée en vigueur le 01/07/01), la خGàV pouvait être décidée contre les suspects, mais aussi contre les témoins. Depuis, seul le suspect peut faire l’objet d’une GàV.

Limitation du champ d’application de la mesure, avec une définition étroite du suspect à l’époque : « personne à l’encontre de laquelle il existe des indices laissant présumer sa participation à l’infraction ». La définition a été critiquée par les syndicats de police, et la même majorité parlementaire a modifié cette définition. Désormais, depuis la loi du 14/03/2002, le suspect est «  la personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner sa participation à l’infraction ».La définition est plus large à deux titres :

Emploi du singulier (avant : deS indiceS) Plus terme « indice » (élément matériel : objet), mais « raison » (subjectif :

psychologique).Par exemple : animosité notoire est désormais valable !La GàV ne peut être décidée qu’en matière criminelle et pour les délits punis d’une peine de prison. Attention : tout dépend de l’appréciation faite au moment de la mesure. La requalification n’a donc pas d’incidence (cf. supra).

26

Page 27: procédure pénale crfpa efb

: Durée de la GàV خ il faut bien évidemment s’intéresser à la période à prendre en considération.

Point de départ   : la jp fixe le point de départ au moment de l’emploi de la coercition sur le suspect. En pratique, au moment de son arrestation ou en cas de perquisition, au moment du départ de la perquisition (car elle est coercitive). A l’inverse, s’il n’y a pas d’emploi de la coercition, il n’est pas nécessaire de placer la personne en GàV et le délai ne court pas (ex : personne qui répond volontairement à l’OPJ). Ce n’est que quand l’OPJ retient la personne contre son gré que le délai commence (cf. docs 45 et 46).

Point d’achèvement   : atteinte des délais légaux, sachant que le Proc. Rép. peut l’anticiper (ex : aveux rapides), et décider du déferrement de l’intéressé devant lui. Quand c’est le cas à l’issue d’une GàV réalisée dans les formes de la criminalité et délinquance organisée, le suspect doit être assisté par un avocat (art. 706-106).

Durée maximale   : en principe, la GàV dure 24h. Une prolongation supplémentaire de 24h peut être décidée par le Proc. Rép. qui délivre une autorisation écrite versée au dossier.Si la GàV intervient suite à la constatation d’une infraction flagrante, le Proc. Rép. n’a pas à entendre au préalable le suspect. Dans les autres cas, il ne peut autoriser le prolongement que s’il a entendu au préalable le suspect.Donc le délai de droit commun est de 48h maximum !

Pour les infractions liées à la criminalité et délinquance organisée, deux prolongations supplémentaires de 24h, ou une seule de 48h, peuvent être décidées sur réquisition du Proc. Rép. au JLD, qui doit au préalable se faire présenter le suspect (art. 706-88).Donc le délai pour la criminalité et délinquance organisée est de 96h maximum !

Et depuis la loi du 23/01/2006, quand l’enquête porte sur des faits de terrorisme, il est possible de décider de deux prolongations supplémentaires (en plus des 2 précédentes), de 24h chacune, sur autorisation du JLD après présentation du suspect. Elles doivent être motivées spécialement au regard soit d’un risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger, soit sur les nécessités impérieuses de la coopération internationale en matière terroriste.Donc le délai pour les faits de terrorisme est de 144h (6j) maximum !

La loi du 09/03/2004 a officialisé l’ancienne pratique de « petit dépôt de nuit », qui consiste à placer en cellule le suspect à l’issue de la GàV, le temps d’organiser le déferrement devant le Proc. Rép., ou que soit réuni un tribunal correctionnel (comparution immédiate).La durée maximum est de 20h, et il n’est pas possible de d’interroger le suspect pendant cette période. Attention : ne peut pas être utilisé quand la GàV a duré plus de 72h !

GàV successives   : lorsque les GàV sont successives mais séparées dans le temps : si elles portent sur des faits différents, chacune obéit au régime qui lui est propre. Si elles portent sur les mêmes faits, leur durée cumulée ne peut excéder la durée maximale prévue pour une seule et même GàV.

Lorsque les GàV sont immédiatement successives : il ne peut s’agir que de faits différents (ex : arrestation pour vol, et découverte au bout de 10h de GàV que le suspect est un trafiquant de stupéfiants). Dans ce cas, on limite la durée de la GàV à la durée maximale de l’infraction la plus grave (Crim, 17/03/2004 : 96h dans l’exemple précédent car c’est la durée maximale pour le trafic de stupéfiants). L’objectif est de respecter les engagements internationaux de la France (art. 3 et 5 CESDH).

27

Page 28: procédure pénale crfpa efb

.Garanties accordées au gardé à vue : il s’agit de l’information immédiate du Proc خRép. (garantie judiciaire) et la notification immédiate de ses droits au gardé à vue (+

contenu de ses droits).

L’information immédiate du Proc. Rép.   : (art. 5 CESDH : garantie judiciaire, art. 63 et 77 CPP). L’OPJ doit, dès le début de la GàV, informer le Proc. Rép. du recours à cette mesure.La méconnaissance de cette règle est une cause de nullité assimilée à une cause de nullité d’OP (dispense de la preuve d’un grief). Toutefois, la jp admet qu’une circonstance insurmontable justifie le retard dans l’information du Proc. Rép. (ex : tempête de 1999 qui avait coupé les lignes téléphoniques, ou fait que de nombreuses GàV soient en cours simultanément selon Crim, 12/04/2005 doc. 53).

La notification immédiate des droits   : art. 63-1 CPP : elle doit se faire dès le départ de la GàV ! Notification des droits, mais aussi de la durée de la GàV et de la nature des infractions justifiant le recours à cette mesure (ex : vol). En revanche, il n’est pas obligatoire de notifier au gardé à vue les soupçons qui pèsent sur lui.La notification doit se faire dans une langue comprise par l’intéressé (pas forcément sa langue maternelle). La difficulté réside dans le fait que la notification doit être immédiate. Or, le début de la GàV ne coïncide pas forcément avec l’arrivée dans les locaux de la police ou de la gendarmerie, et elle peut même rétroagir au moment de l’emploi de la coercition ! La GàV ne devient obligatoire que quand il y a suspicion et coercition.

Pour les étrangers, la jp admet la notification verbale en français (Crim, 23/03/1999), si la situation est régularisée dès leur arrivée dans les locaux de police par un interprète ou par un formulaire écrit dans une langue comprise par lui. Tout retard injustifié dans la notification des droits constitue nécessairement une atteinte aux droits de la défense et justifie la nullité de la GàV, sachant que la jp admet des circonstances insurmontables (ex : état d’ébriété du suspect, Crim, 04/01/2005 doc. 51). Le temps passé en chambre de dégrisement ne s’impute pas sur le temps de GàV.

Toute prolongation de GàV doit donner lieu à une notification des droits prévus pendant cette période de prolongation.

Le contenu des droits accordés   : il y en a quatre principaux.

Droit au silence  : ce droit subsiste même s’il ne lui est plus notifié (depuis la loi du 18/03/2003) car on s’est aperçu que c’était contre-productif. Il résulte du droit à ne pas s’auto-incriminer (lui-même issu de la présomption d’innocence).

Droit à être examiné par un médecin  : peut être demandé par le gardé à vue mais aussi par l’OPJ ou par le Proc. Rép. pour se couvrir contre d’éventuelles allégations de brutalité policière. Ce droit peut être demandé dès le début de la GàV, sachant qu’alors depuis la loi du 04/03/2002 l’examen médical peut être réalisé dans les 3h du début de la GàV. Au-delà, il doit être fait immédiatement.

En matière de criminalité et délinquance organisée, elle doit être réalisée à la 49ème heure.En matière de terrorisme, à la 97ème et à la 121ème heure.

Cet examen donne lieu à un certificat portant sur l’aptitude du détenu à être placé ou maintenu en GàV. Si le certificat conclut à l’inaptitude, il doit être immédiatement libéré (en pratique, on l’emmène à l’hosto et on le remet en GàV).

Droit de faire prévenir un proche   : art. 63-2 CPP : prévoit une liste limitative des personnes susceptibles d’être prévenues.

- personne habitant habituellement avec le gardé à vue- l’un des parents en ligne directe- l’un de ses frères et sœurs- son employeur

Le coup de fil est passé par l’OPJ (un seul coup de fil, l’OPJ n’est pas une

28

Page 29: procédure pénale crfpa efb

secrétaire) dans un délai de 3h à compter du début de la GàV (loi du 04/03/2003).

Droit de s’entretenir avec un avocat   : (ce n’est pas l’assistance d’un avocat, il n’est pas présent pendant les interrogatoires : simple entretien). Il intervient lorsque le gardé à vue le demande, dès le début de la GàV (pas de possibilité de retarder), et dès sa prolongation (25ème heure). L’OPJ n’a que comme obligation d’informer l’avocat choisi ou le bâtonnier en cas de commission d’office. Peu importe ensuite que l’avocat soit arrivé tardivement ou pas du tout.La jp admet des circonstances insurmontables : rupture des télécommunications.

En cas de prolongation supplémentaire, l’avocat intervient à la 49ème et 73ème heure. Pour plusieurs infractions de criminalité et délinquance organisée, il est prévu que l’avocat n’intervient pour la première fois qu’à la 49ème heure (proxénétisme, vol en bande organisée, association de malfaiteurs). Parfois même, l’avocat n’intervient pour la première fois qu’à la 73ème

heure (trafic de stupéfiants ou terrorisme), voire à la 97ème ou 121ème

heure dans certains cas de terrorisme depuis la loi du 23/06/2006.

La durée de l’entretien est de 30 minutes. La confidentialité est totale, sachant que l’avocat n’a pas le droit d’accéder au dossier (PV de l’enquête). Il n’est informé que de la nature des infractions objets de l’enquête. Son rôle est donc limité.Il peut toutefois formuler des observations écrites quant au déroulement de la GàV (ex : pas de nourriture pendant 10h). Et il a le devoir de ne pas briser le secret (il ne doit pas révéler d’informations relatives à la GàV du client, sauf à encourir la sanction de la violation du secret professionnel, qui couvre le secret de l’enquête).

: Trois observations sur la GàV خ

Rédaction d’un PV : obligatoire. Il doit indiquer les motifs de la GàV, le moment de l’information du Proc. Rép., le moment de la notification des droits, les demandes formulées par le gardé à vue quant à ses droits, et le moment où elles ont été satisfaites. Le PV doit toujours contenir une comptabilité horaire de la GàV indiquant les périodes d’interrogatoire, de repos, et d’alimentation (depuis la loi du 15/06/2000).

Sanction des irrégularités : la plupart des règles ne sont pas prescrites à peine de nullité. Mais parce qu’elles touchent aux droits de la défense, on considère que la nullité est encourue (règle des nullités substantielles), ces causes de nullité étant assimilées à des causes de nullité d’OP. Elles sont donc dispensées de grief.L’annulation de la GàV n’a de conséquences que sur les actes subséquents que s’ils trouvent leur fondement exclusif dans la GàV irrégulière (Crim, 12/04/2005 doc. 53).

Propositions de la Commission d’Outreau : - préconise l’obligation de notifier au gardé à vue les soupçons qui pèsent sur

lui.- recommande l’enregistrement des interrogatoires au cours des GàV, ce qui est déjà la règle pour les mineurs depuis la loi du 15/06/2000 (cf. doc. 32).- possibilité reconnue à l’avocat à l’expiration des premières 24h de GàV d’avoir accès au dossier et d’assister son client pendant l’interrogatoire. - obligation faite au Proc. Rép. de rédiger un rapport annuel sur les conditions matérielles de la GàV de son ressort, communiqué au Garde des sceaux, qui devra en débattre devant le Parlement.

29

Page 30: procédure pénale crfpa efb

THEME 3 : LES ACTIONS

Les actions ont deux finalités : Le rétablissement de l’OP et la sanction de l’auteur de l’infraction (action

publique) La réparation du dommage subi par la victime par des DI (action civile)

1°- Les titulaires des actions

L’action est mise en mouvement par le Parquet. Elle peut aussi être déclenchée par la partie civile.

Section 1 – Le Ministère public, titulaire de l’action publique

Dans certains cas, des fonctionnaires peuvent être habilités à la déclencher (art. 1) : l’administration fiscale pour les fraudes aux impôts par exemple.

§1. L’unité du parquet

A. Indivisibilité du parquet

Notion de parquet : (utile pour le Grand Oral) : avant 1670, les magistrats du parquet étaient une partie comme une autre. Elle était donc sur le parquet au même titre que l’accusé.Depuis 1670, ils sont situés sur une estrade.

« Le parquet a une tête et plusieurs bras », il est donc indivisible. Par conséquent, au sein d’une même affaire, le magistrat du parquet pourra changer, et ce même dans la phase d’audience (même pendant le procès puisque ce n’est pas un magistrat du siège). Inversement, sur une même affaire, il peut s’agir tout le temps du même magistrat sans que l’on puisse lui reprocher sa partialité puisqu’il s’agit d’une partie, représentant l’Etat. Il n’y a donc pas lieu de se soucier de son impartialité objective (donc peu importe qu’à l’audience le magistrat soit le même qui a décidé la GàV).

B. Organisation hiérarchique du Ministère public

Il s’agit d’un principe, réaffirmé avec force par loi du 9/03/2004 (qui a modifié les art. 30 et 35 CPP), mais que connaît certaines limites.

• LE PRINCIPE DE L’ORGANISATION HIERARCHIQUE

Art. 30 CPP : le garde des Sceaux conduit la politique d’action publique déterminée par le gouvernement, et dans ce cadre, il a pour mission d’assurer la cohérence de l’application de l’action publique sur l’ensemble du territoire.Pour ce faire, l’art. 30 indique qu’il peut adresser aux Procureurs Généraux des instructions générales quant à la mise en œuvre de la politique d’action publique. Il peut aussi adresser des instructions particulières, mais elles ne peuvent que demander

30

Page 31: procédure pénale crfpa efb

l’ouverture des poursuites. Ces instructions sont écrites et versées au dossier pour éviter que demande soit faite de ne pas poursuivre.

Art. 35 CPP : reprend presque les mêmes dispositions mais s’agissant du rôle du Procureur Général. Ce dernier est investi du rôle de veiller à la cohérence de l’action publique dans l’ensemble de son ressort. Il peut donc adresser des instructions générales ou particulières aux Procureurs de la République.

Tous ces ordres doivent être obéis.

• LES LIMITES DE L’ORGANISATION HIERARCHIQUE

Existence de pouvoirs propres des chefs de parquets (Procureurs Généraux et Procureur de la République). Mais le fait qu’il y ait désobéissance ne constitue pas une cause d’irrégularité des poursuites (a l’ordre de poursuivre, mais il ne poursuit pas).Néanmoins, cela constitue un manquement disciplinaire susceptible d’être

sanctionné.

« Si la plume est serve la parole est libre » art. 33. Cela signifie que les parquetiers sont tenus dans leurs réquisitions écrites d’aller dans le sens indiqué par leur supérieur (obligation de requérir les poursuites par exemple). Mais à l’audience, il pourra développer une argumentation différente, et considérer qu’il y a lieu de relaxer, même si on lui a donné initialement l’ordre de poursuivre.

§2. La fonction du parquet

Art. 31 : il exerce l’action publique et requiert l’application de la loi. Dans ce cadre, le Procureur de la République dispose d’une totale liberté puisque l’art. 40 formule le principe de l’opportunité des poursuites. Lorsqu’il est informé de la commission d’une infraction pénale, et s’il n’a pas reçu d’ordre de ses supérieurs, il choisit s’il veut poursuivre ou non.

Ce système s’oppose au principe de légalité des poursuites que certains pays connaissent (Allemagne) dans lesquels le parquet est obligé de poursuivre dès lors qu’il y a une infraction. En France, le principe de liberté est renforcé par le principe d’irresponsabilité du parquet.

A. Indépendance

Par rapport aux autres juges : les juridictions d’instruction ou de jugement ne peuvent lui enjoindre de déclencher les poursuites, ni lui enjoindre de modifier ses réquisitions.

Par rapport aux parties privées : le MP peut décider seul de déclencher les poursuites sans que soit nécessaire d’avoir reçu une plainte ou dénonciation préalable. La personne mise en cause ne peut pas critiquer le déclenchement des poursuites, ni récuser les magistrats du parquet.

B. Irresponsabilité  

Ce n’est qu’en cas de manquement grave que sa responsabilité peut être engagée (Crim, 14/06/1994 : responsabilité pénale d’un PR pour délit d’atteinte à la liberté individuelle. En l’espèce, placement en GàV de son gendre qui venait de quitter sa fille).

Comment désigne-t-on les magistrats du parquet   ?

- Devant la juridiction de proximité (contraventions classes 1 à 4) : le parquet est représenté par le commissaire de police.

- Devant le tribunal de police (contraventions de 5ème classe) : le Procureur de la République est compétent, mais il peut se faire représenter.

31

Page 32: procédure pénale crfpa efb

- Devant TGI : Procureur de la République.- Devant CA : Procureur Général (les magistrats qui plaident sont les avocats

généraux, et ceux qui rédigent les réquisitions sont les substituts généraux.- Devant Cass : Procureur Général près la Cour de cassation. En dessous, on

trouve le 1er avocat général (Nadal), puis les avocats généraux.C’est le même parquet pour la Cour de Justice de la République et pour la Haute Cour de Justice.

Section 2 – La victime, titulaire de l’action civile

Art. 2 et 3 CPP : l’action civile peut être exercée devant les juridictions répressives afin d’obtenir la réparation du préjudice occasionné par l’infraction. Pour pouvoir agir, elle doit d’abord disposer de la capacité à agir et avoir un intérêt à agir (art. 2 qui pose aussi des exceptions).

§1. Les conditions de droit commun

Art. 2 CPP : la victime doit justifier d’un préjudice personnel, issu directement de l’infraction.

A. Un préjudice personnel

Pas de difficulté lorsque l’infraction a touché la personne même ou son patrimoine. En revanche, les victimes par ricochet peuvent-elles exercer l’action civile ? Souvent, elles invoquent un préjudice moral lié au fait d’avoir vu un être cher victime d’une infraction pénale.Pendant longtemps, Cass s’est montrée sévère et excluait l’action des victimes par ricochet (Ass. Plen. 12/01/1979), mais un revirement est intervenu par Crim, 09/02/1989.

Evidemment, lorsqu’il n’y a aucun lien affectif entre la victime de l’infraction et celui qui agit, il faudra écarter l’action civile. Ex : action du Ministre de l’Intérieur contre Sniper pour diffamation à l’encontre d’agents de police (Crim, 02/09/2003).

B. Un préjudice direct

Il s’agit d’une condition nécessaire pour exercer l’action civile devant les juridictions répressives. Ex : l’assureur qui a dédommagé la victime d’une infraction pénale ne peut pas demander réparation devant les juridictions répressives, car son préjudice n’est qu’indirect. Il devra s’adresser aux juridictions civiles, à moins bien sûr qu’il ne soit la victime directe et personnelle d’une infraction (Crim, 23/02/2005, doc. 69).Autre ex : les salariés d’une compagnie aérienne en liquidation judiciaire suite aux détournements commis par leurs dirigeants ne peuvent se constituer partie civile du chef d’ABS à l’encontre des dirigeants. Leur préjudice n’est qu’indirect. L’infraction d’ABS porte atteinte en premier lieu aux biens de la société (Crim, 23/02/2005).

§2. Les dispositions dérogatoires

Il s’agit de l’action civile exercée par certaines PM, et celle exercée par d’autres PP que la victime.

A. L’action civile des PM  

Le droit commun s’applique aux PM. La question se pose donc de savoir si elle peut se constituer partie civile, au motif que l’infraction lèse l’intérêt collectif qu’elle protège. En principe, si l’on applique le droit commun, l’action devrait être écartée (pas de préjudice direct). Mais d’importantes dérogations existent en faveur des syndicats et des ordres professionnels, et d’autres, plus limitées en faveur des associations.

Les خ syndicats et ordre professionnels (L 411-11 CT) : cet article autorise les syndicats à exercer tous les droits appartenant à la partie civile s’agissant des infractions qui portent un préjudice direct ou indirect à l’ordre collectif de la profession représentée.

32

Page 33: procédure pénale crfpa efb

Le même principe est reconnu aux ordres professionnels, ce qui permet par exemple au conseil national des barreaux de se constituer partie civile pour diffamation à l’encontre d’un avocat qui porte atteinte à l’ensemble de la profession (doc. 70).

: Les associations خ cette dérogation est plus limitée et ne peut agir que dans les hypothèse des articles 2-1 à 2-21 CPP (doc. 62). Trois conditions sont généralement exigées par le législateur :

Conditions tenant à l’association elle-même : elle doit être régulièrement constituée, et doit être reconnue d’utilité publique (doc. 71)

Conditions quant aux infractions : infractions très particulière qui correspondent à l’atteinte aux intérêts représentés. Ex : une association de lutte contre les discriminations peut se constituer partie civile (que si discrimination bien sûr)

L’association ne peut se porter partie civile que par voie d’intervention, c'est-à-dire lorsque le parquet aura déjà agi. Cela permet d’éviter que les associations ne confisquent l’exercice de l’action publique au parquet.

Pour les autres PM, elles ne peuvent agir sur le fondement de l’intérêt collectif qu’elles représentent. Les PM de droit public ne peuvent se constituer PC au motif de l’atteinte à l’intérêt public qu’elles protègent, puisque c’est l’intérêt général. Or l’intérêt général est protégé par le parquet.

B. L’action civile exercée par d’autres personnes physiques que la victime

Les héritiers de la victime disposent de deux possibilités :

Ils peuvent agir sur le fondement de leur préjudice personnel (victime par ricochet).

Ils peuvent aussi agir à la place de la victime. Longtemps écartée, cette solution est désormais admise (Crim, 4/11/2003), mais un arrêt récent vient limiter cette possibilité : il semblerait que l’action au nom du de cujus ne peut qu’être poursuivie par l’héritier et non commencée par lui (Crim, 27/04/2004).

Pour le reste, les autres personnes susceptibles d’agir (ex : créanciers de la victime, tiers subrogés dans les droits de la victime…), ne peuvent agir que devant les juridictions civiles.

2°- La mise en œuvre des actions

§1. La décision du parquet

Le parquet dispose de l’opportunité (art. 40 CPP). Il a trois choix : il peut décider de classer sans suite, d’avoir recours à une alternative aux poursuites, ou décider de poursuivre.

A. La décision de classement sans suite

La décision du parquet de poursuivre ou pas peut être fondée en droit (ex : prescription de l’action publique) ou en fait (ex : insuffisance de charges).Cette décision est une mesure d’administration judiciaire qui en principe ne peut pas faire l’objet de recours, mais on peut revenir dessus (si de nouveaux faits apparaissent, et sous réserve du délai de prescription de l’action publique).

La loi du 09/03/2004 a encadré le pouvoir de classement sans suites. Depuis, l’art. 40 dispose que lorsqu’une infraction a été commise et que l’on connaît l’identité et l’adresse de l’auteur de cette infraction, le parquet peut :

- soit engager les poursuites - soit mettre en œuvre une alternative aux poursuites- soit classer sans suites, mais cette décision doit être justifiée au regard des

33

Page 34: procédure pénale crfpa efb

circonstances particulières liées à la commission de l’infraction. Le but est d’éviter les classements secs et de contraindre le parquet à engager les poursuites ou à trouver des alternatives.

De plus, en cas de décision de classement sans suite dans cette hypothèse (connaissance de l’auteur et de son adresse), l’art. 40 al. 2 prévoit l’obligation pour le Proc. Rép. d’informer les plaignants et les victimes de sa décision et de leur indiquer les raisons juridiques ou d’opportunité qui justifient le classement. Et depuis la loi du 09/03/2004, l’art. 40-3 permet à ces victimes d’exercer un recours gracieux devant le Procureur Général, qui pourra enjoindre par une instruction écrite le Proc. Rép. de poursuivre.

B. Le recours à une alternative aux poursuites

Il y en a trois :

- le classement conditionnel- la médiation pénale- la composition pénale

• LE CLASSEMENT CONDITIONNEL

A longtemps été une pratique officieuse, officialisée par la loi du 23/06/1999 (art. 41 CPP). Permet au Proc. Rép., avant l’exercice de l’action publique, d’imposer certaines mesures à l’auteur des faits s’il apparaît que ces mesures sont susceptibles d’assurer la réparation du dommage subi par la victime, de mettre fin au trouble à l’OP, ou de contribuer au reclassement de l’auteur.

Attention : ces mesures ne peuvent jamais consister en une sanction pénale (CC 2/02/1995 : décision « injonction pénale »), puisque celles-ci ne peuvent être prononcées que par les magistrats du siège.

Exemples de mesures que le Proc. Rép. peut imposer : rappel à la loi (admonestation) suivi d’un stage de formation professionnel/scolaire (ou sensibilisation aux risques

routiers) régularisation de la situation réparation du dommage subi par la victime.

En cas d’exécution de la mesure, le Proc. Rép. va en général prononcer le classement. Mais il peut également décider de ne pas la classer. En revanche, depuis la loi du 09/03/2004, si le classement conditionnel n’est pas satisfait, le Proc. Rép. a l’obligation soit de recourir à une composition pénale, soit de poursuivre. Le recours au classement conditionnel est une cause de suspension du délai de prescription de l’action publique.

• LA MEDIATION PENALE

Elle peut être proposée par le Proc. Rép. dans le cadre d’un classement conditionnel, mais elle fait l’objet de dispositions spécifiques (art. 41-1, 5° CPP).Le classement conditionnel fait intervenir deux personnes : l’auteur et le Proc. Rép., tandis que la médiation pénale ajoute une troisième personne qui est le médiateur.

Conditions de recours à la médiation   :

elle n’est pas possible si l’action publique est déjà engagée. il faut obtenir l’accord des parties (privées) : victime et auteur de l’infraction.

Difficulté au regard du droit de ne pas s’auto-incriminer : aveu implicite de culpabilité ? Quid si la médiation échoue et que des poursuites sont engagées ? Cette difficulté n’est pas vraiment résolue par la loi.

Lorsque ces conditions sont réunies, la médiation pénale peut être entamée. On parle de médiation retenue lorsque elle est menée par un magistrat du parquet, et de médiation déléguée lorsqu’elle est confiée à un tiers qui est en général une association agréée,

34

Page 35: procédure pénale crfpa efb

intervenant dans le cadre de l’INAVEM (institut national d’aide aux victimes et de la médiation). Cf. art. D 15-1 CPP.

Qu’elle soit retenue ou déléguée, la médiation fait se rencontrer auteur et victime pour qu’un accord soit obtenu sur les modalités et montant de la réparation du dommage. Depuis la loi du 18/12/1998, les parties privées disposent du droit à l’assistance d’un avocat et à l’aide juridictionnelle. Quand la procédure de médiation est achevée, il appartient au parquet de décider des suites à donner.

Si succès, le parquet peut toujours poursuivre (mais n’arrive jamais en pratique). Si échec en raison du comportement de l’auteur, la loi du 9/03/2004 impose au

parquet soit de poursuivre, soit de recourir à une composition pénale.

Le recours à la médiation pénale entraîne la suspension du délai de prescription de l’action publique.

Attention : pour les mineurs, cette procédure est possible mais on parle alors de réparation pénale des mineurs (art. 12-1 ord. 2/02/1945). A peu près la même procédure, mais l’objectif est de responsabiliser le mineur. Il y a donc possibilité en plus d’imposer un stage de sensibilisation. On prévoit aussi la possibilité de recourir à la réparation des mineurs par le Proc. Rép., mais aussi par le juge d’instruction ou par l’autorité de jugement (donc quand les poursuites sont commencées).

• LA COMPOSITION PENALE

Loi du 23/06/1999 (art. 41-2 CPP) : consiste pour le Proc. Rép. à proposer à l’auteur des faits, qui reconnaît sa culpabilité, l’exécution de certaines sanctions pénales. En échange, l’intéressé bénéficiera de l’extinction de l’action publique. Il ne sera plus possible de le poursuivre sur le fondement de cette infraction. La création de cette alternative ménage le droit des victimes car elle peut demander la réparation de son préjudice devant la juridiction répressive qui ne statuera que sur l’action civile (car l’action publique est éteinte).

Le domaine de la composition pénale : elle ne peut être décidée qu’à l’égard d’un خmajeur (âge au moment de la commission de l’infraction). Elle vaut pour :

les délits punis d’une peine d’amende et/ou d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à 5 ans.

cette mesure peut aussi être proposée pour les contraventions de 5ème classe (délinquance routière en particulier).

Il peut s’agir de sanctions pénales, mais jamais d’une mesure de privation de liberté. Peut être :

versement d’une amende au Trésor Public (qui ne peut être supérieure au montant encouru)

retrait d’un permis administratif (permis de conduire) obligation d’accomplir un TIG nouvelle mesure depuis loi du 12/12/2005 (relative à la récidive) : interdiction pour

un conjoint/concubin de résider au domicile du couple en cas de violences commises au sein du couple.

le législateur a prévu la possibilité pour le procureur de proposer la réparation du dommage subi par la victime.

La mise en œuvre de la composition pénale : elle émane du Proc. Rép., voire de خl’OPJ puisque la composition pénale peut être proposée aujourd’hui dans le cadre d’une GàV.L’accord de l’intéressé doit être recueilli par PV et il doit reconnaître sa culpabilité, qui doit être faite en présence d’un avocat.

Une fois l’accord de l’intéressé obtenu, la proposition doit être communiquée à un magistrat du siège (CC 2/02/1995 : un magistrat du parquet ne peut décider seul d’infliger une sanction pénale).

35

Page 36: procédure pénale crfpa efb

président TGI pour délits président du TI pour les contraventions

Depuis la loi du 18/01/2005 : la validation des compositions pénales peut être validée par le président du tribunal de proximité.

Si elle est validée, la sanction doit être exécutée par l’intéressé. Dans ce cas, il y a extinction de l’action publique. Si elle n’est pas validée, le magistrat du parquet pourra alors modifier la proposition et saisir le magistrat du siège a nouveau après un nouvel accord de l’intéressé.Si l’intéressé refuse la proposition, ou s’il ne l’exécute pas, le procureur a l’obligation de poursuivre depuis la loi du 9/03/2004.

ATTENTION  : la composition pénale n’est pas la procédure du plaider coupable (comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité). C’est une alternative aux poursuites qui ne mène pas à une condamnation. Il n’y aura donc pas de récidive. En revanche, la CRPC mène à une décision de culpabilité. Ce n’est pas une alternative aux poursuites mais une méthode particulière de saisine des tribunaux.

Création depuis la loi du 31/03/2006 (sur l’égalité des chances) d’un nouveau pouvoir de transaction reconnu au maire (article 44-1 nouv.) : pour les contraventions commises au préjudice de la commune, le maire peut, tant que l’action publique n’est pas mise en mouvement, proposer au contrevenant une transaction consistant en la réparation du dommage. Cette transaction doit être acceptée par le PR. Elle peut consister en l’exécution d’un TIG, mais elle doit alors être homologuée par un magistrat du siège (puisque c’est une peine).

juge de proximité pour contraventions de classe 1 à 4 président TI pour les contraventions de 5ème classe.

C. La décision de mise en mouvement de l’action publique

• LES MODALITES DES POURSUITES

Deux voies sont ouvertes au Proc. Rép. qui a décidé de poursuivre :

il peut décider de saisir directement une juridiction de jugement : c’est la citation directe

ou saisine d’une juridiction d’instruction par un réquisitoire introductif ou à fin d’informer. Pour les crimes, l’instruction est obligatoire donc pas de citation directe possible. Idem pour les délits et contraventions de 5ème classe commis par un mineur).

Une fois l’action publique engagée, le Proc. Rép. ne dispose plus de l’action. Il ne peut la retirer. Il appartient aux juges du siège de la retire. Certaines administrations peuvent avoir recours à une transaction, mais toute transaction qui intervient après le déclenchement de l’action publique doit être homologuée par un magistrat du siège (CE Ass, 7/07/2006 « France Nature Environnement »).

• LES LIMITES A LA LIBERTE DE POURSUIVRE

L’exigence d’une condition préalable : 4 hypothèses doivent être évoquées où il خfaut une condition préalable pour poursuivre :

Exigence d’une plainte ou d’une dénonciation préalable : pour que des poursuites soient engagées. Ex : diffamation ou injures (vie privée), ou délits commis à l’étranger par un français ou à l’encontre d’un français (art. 113-8 CPP). Dans ce cas, l’action publique ne peut être exercée que sur plainte préalable de la victime, ou dénonciation officielle de l’Etat dans lequel l’infraction a été commise.

36

Page 37: procédure pénale crfpa efb

Mais attention : la plainte préalable n’oblige pas le MP à poursuivre, c’est juste une condition à la poursuite.

Exigence d’une mise en demeure préalable : pour que le parquet puisse poursuivre. Ex : en matière d’hygiène et sécurité du travail (art. L 231-4 CT).

Exigence d’une autorisation préalable : jusqu’à la loi constitutionnelle du 4 août 1995, les poursuites parlementaires ne pouvaient être engagées que sur autorisation préalable de la Chambre concernée (séparation des pouvoirs). Depuis la loi, l’art. 26 de la Constitution prévoit un système inversé : les poursuites sont possibles mais elles peuvent être suspendues pendant la session parlementaire si le président de la Chambre concernée le requiert.Attention : maintien de l’autorisation préalable lorsqu’une mesure privative ou restrictive de liberté est décidée contre un parlementaire. Elles ne peuvent être exécutées qu’après l’autorisation du bureau de l’Assemblée ou du Sénat.

Exigence d’un jugement préalable : il peut s’agir d’un jugement d’une juridiction non répressive. Ex : la poursuite du délit de banqueroute ne peut intervenir que si le TC a préalablement décidé l’ouverture d’une procédure collective. Et les poursuites ne peuvent être engagées que si l’acte de procédure a été jugé irrégulier par une décision définitive de la juridiction répressive. Ex : perquisition décidée par un OPJ sans raison. Il ne pourra être poursuivi sur le fondement de la violation de domicile qu’une fois que la perquisition aura été déclarée irrégulière (Crim, 7/12/2005, doc. 63 : sur des allégations de faux à l’encontre d’un OPJ concernant un PV de GàV. La poursuite pour faux de l’OPJ ne peut intervenir qu’après que la GàV ait été annulée de manière définitive). Art. 6-1 CPP : pendant la procédure de l’irrégularité de l’acte, le délai de prescription de l’action publique est suspendu.

: L’exercice de l’action publique par d’autres organes que le parquet خ

Possibilité offerte aux juridictions de jugement d’exercer l’action publique pour les infractions commises lors de l’audience. Cette règle est écartée lorsqu’il y a outrage à magistrat (car atteinte à l’impartialité), ou lorsque l’infraction est un crime (l’instruction étant obligatoire).

La victime va pouvoir contraindre le déclenchement de l’action publique en se constituant partie civile devant les juridiction répressives. En effet, l’action civile exercée devant les juridictions répressives déclenche l’action publique (art. 2 al. 1 CPP).

§2. La décision de la victime

Si le préjudice est personnel et direct, la victime dispose d’un droit d’option.

A. Le droit d’option

• LES CONDITIONS

- Il faut que les deux voies lui soient ouvertes. Parfois, une voie est imposée : en matière de diffamation contre des corps constitués (ex : agents de l’Etat et Etat), la loi du 29/07/1881 impose que la victime emploie la voie pénale. Et la victime ne peut pas saisir le juge répressif devant la Haute Cour de Justice et devant la Cour de Justice de la République.

- L’action publique ne doit pas être éteinte, sinon la victime doit s’adresser au juge civil (art. 2 CPP).

• IRREVOCABILITE DE L’OPTION

La victime peut-elle revenir sur sa décision de choisir tel ou tel juge ?L’art. 5 CPP dispose que la victime qui s’est d’abord adressée au juge civil ne peut pas se désister de son action et s’adresser au juge pénal. Cette règle est en faveur de l’auteur

37

Page 38: procédure pénale crfpa efb

de l‘infraction (la victime pourra seulement engager sa responsabilité civile – cf. doc. 72). Cette règle tombe toutefois lorsque pour des mêmes faits, le juge répressif s’est trouvé saisi (par le parquet ou par une autre victime). Il ne s’agit pas là d’une règle d’OP, le juge n’a pas à la soulever d’office. Il revient à la partie concernée de l’invoquer (Crim, 10/10/2000).

B. L’exercice de l’action par la victime

• L’ACTION CIVILE PAR LA VOIE CIVILE

Il est possible d’aller devant le juge civil sans que l’affaire ne soit parallèlement portée devant le juge répressif. Dans ce cas, il n’y a pas d’interférence car il n’y a qu’une seule action, qui est régie par le NCPC. La question de l’interférence se pose quand il y a deux actions.

La règle est que le pénal (protection de l’intérêt général) l’emporte sur le civil (protection de l’intérêt privé) en cas d’utilisation des deux voies (art. 4 CPP). Il appartient donc au juge civil saisi des mêmes faits de surseoir à statuer dans l’attente du juge répressif. Cette règle a pour conséquence que le juge civil ne peut contredire le juge pénal quand leurs décisions portent sur le même objet. Or la loi du 10/07/2000 relative aux infractions non intentionnelles occasionnant un dommage a opéré une distinction partielle des fautes civiles et pénales. Elle fait une équation entre la gravité de la faute et le lien de causalité :

Quand une faute simple est commise, un lien de causalité direct permet d’engager la responsabilité pénale de l’agent (donc pas l’auteur indirect !)

Quand une faute qualifiée (délibérée ou caractérisée) est commise, l’auteur indirect pourra voir engagée sa responsabilité pénale.

Au regard de ces deux règles, il apparaît que (art. 4-1 CPP) :

- Si l’on est face à un auteur direct, la solution du juge pénal s’impose au juge civil car la faute simple est la même notion en matière civile et pénale.

- Si l’on est face à un auteur indirect que le juge répressif souhaite relaxer, il y a rupture des notions et le juge civil pourra le condamner à payer des DI à condition qu’il existe une faute simple.

- Si l’on est face à un auteur indirect que le juge répressif souhaite condamner, il est normal que cette décision s’impose au juge civil, car s’il y a faute qualifiée, il y a forcément faute simple.

• L’ACTION CIVILE PAR LA VOIE REPRESSIVE

Il est certain que la voie pénale est assez séduisante car les juridictions répressives sont plus rapides, et que la victime n’a pas à rechercher de preuves. Il s’agit là de l’effet de la tendance inquisitoriale de la phase préparatoire.

Modes d’introduction

La victime peut agir par voie d’action (voie directe) ou par voie d’intervention (en greffant son action sur une autre déjà engagée).

Par voie d’action : la victime dispose alors comme le parquet de deux voies خ

s’adresser à une juridiction de jugement : citation directe (quand on connaît l’auteur de l’infraction, et à l’exclusion des affaires criminelles où l’instruction est obligatoire)

s’adresser à un juge d’instruction : plainte avec constitution de partie civile

Attention : dans les deux cas, on parle de constitution de partie civile d’où la nécessité de préciser quand il s’agit de plainte avec constitution de partie civile.

Dans les deux cas, il appartient à la victime d’indiquer précisément les faits dénoncés

38

Page 39: procédure pénale crfpa efb

pour déterminer le cadre de la saisine, et les juridictions peuvent contraindre les victimes à verser une consignation pour prévenir les actions fantaisistes ou calomnieuses.

,Par voie d’intervention : la victime greffe alors son action à une autre. Dans ce cas خle CPP ne prévoit aucun formalisme particulier (le cadre est celui déjà établi par la 1 ère

action). Cette constitution de partie civile par voie d’intervention peut intervenir avant l’audience de jugement. Il appartient à l’OPJ qui entend la victime de l’informer qu’elle peut se constituer partie civile. Depuis a loi du 15/06/2000, lorsque la victime demande à obtenir réparation pendant l’audition, cette demande vaut constitution de partie civile.Elle peut également intervenir au cours de l’audience, sachant que le CPP impose alors que l’action soit exercée avant les réquisitions du parquet sur le fond.

Effets de l’introduction de l’action civile

,L’effet commun aux deux voies d’action : la victime qui se constitue partie civile خpar voie d’action ou par voie d’intervention, va alors bénéficier du statut de partie à la procédure, ce qui a des incidences sur ses droits :

- droit à être assisté par un avocat- accès au dossier pendant l’instruction- ne prêtant pas serment, la victime ne pourra pas être poursuivie pour faux

témoignage- droit de demander au JI des actes d’intervention- possibilité d’exercer des voies de recours : requêtes en nullité de procédure ou

appel.

L’effet particulier à l’action civile par voie d’action : cette action a pour effet خmoteur de déclencher l’action publique (résulte de Crim, 08/12/1906, Laurent-Atthalin, confirmé par l’arrêt Placet). Cette règle se trouve aujourd’hui explicitement énoncée à l’art. 1 al. 2 CPP.

Cela explique donc que l’exercice de l’action civile devant le juge répressif interrompt le délai de prescription de l’action publique (Crim, 22/11/2005 arrêt 6 doc. 66).

Il s’agit d’un moyen commode de commander le parquet, mais aussi de jeter facilement l’opprobre sur une personne. D’où des conditions préventives et répressives :

la juridiction répressive peut exiger le versement d’une consignation elle peut aussi exiger à peine d’irrecevabilité de la plainte que la victime produise

tous les documents et pièces utiles à sa demande

Délit de dénonciation calomnieuse (art. 226-10 CP) : 5 ans et 45000 euros En cas d’absence d’intention de calomnier (simple légèreté de la victime), une

amende civile peut être prononcée, pouvant aller jusqu’à 15000 euros.Le montant de la consignation permet de payer cette amende civile.

3°- L’extinction de l’action publique

Pour l’action publique : décès, amnistie Pour l’action civile : transaction Pour les deux : chose jugée, prescription

§1. La prescription de l’action publique

La prescription de l’action publique se justifie afin de prévenir les erreurs judiciaires (preuves). Elle agit in rem, càd qu’elle bénéficie à tous les protagonistes : tant à l’auteur qu’à ses complices. Il s’agit là d’une règle d’OP qui doit être soulevée d’office par le juge.

Attention : ne pas confondre la prescription de l’action publique et la prescription

39

Page 40: procédure pénale crfpa efb

de la peine. La première est l’écoulement d’un délai à compter de l’infraction qui a pour conséquence l’impossibilité de poursuivre, et la seconde est l’écoulement d’un délai à compter de la condamnation définitive d’un individu qui empêchera l’exécution de la peine.

A. Le délai de prescription de l’action publique

.Durée : art. 7, 8 et 9 CPP خ

Prescription action publique : Prescription peine :- Crime : 10 ans - Crime : 20 ans- Délit : 3 ans - Délit : 5 ans- Contrav° : 1 an - Contrav° : 2 ans

Il existe des cas où le délai est allongé :

Crimes contre l’humanité : imprescriptibles Crimes de trafic de stupéfiants et terrorisme : 30 ans Délits de trafic de stupéfiants et terrorisme : 20 ans Crimes sexuels sur mineurs : 20 ans Délits sexuels sur mineurs : 10 ans

Il existe également des délais plus courts :

Délits de presse : 3 mois (sauf infractions racistes : 1 an) Fraude électorale : 6 mois

.Point de départ : le délai court à compter du jour de la commission de l’infraction خCela implique des connaissances du droit pénal. On distingue :

- Infractions instantanées ou continues • Instantanées : le délai court à compter de l’infraction• Continues : le délai ne commence à courir que quand l’infraction cesse

- Infractions simples ou complexes• Simples : un seul fait matériel (ex : vol). Le délai court immédiatement• Complexes : plusieurs faits matériels. Le délai court à compter du dernier fait

matériel(escroquerie)

- Infractions matérielles ou formelles• Matérielles : faut un résultat. Le délai court qd il est survenu (homicide

volontaire)• Formelles : n’exige pas de résultat (l’empoisonnement n’impose pas le décès

de la victime)

Dans certains cas, le point de départ est retardé :

Par la loi : pour les infractions contre les mineurs (sexuelles ou violence), le délai est retardé à la majorité de la victime (CE, 10/02/2006 doc. 64)

Par la jp : pour les infractions clandestines qui ne peuvent faire l’objet d’une décision d’opportunité du Parquet, la Cour de cassation décide de retarder le point de départ au jour où l’infraction est découverte dans des conditions permettant de choisir l’opportunité de poursuivre (ex : ABS, étendu à la tromperie Crim, 07/07/2005 doc. 65).

B. La paralysie du délai de prescription

Interruption du délai : il remet les compteurs à zéro. Art. 7 al. 1 CPP  vise tout acte خd’instruction ou de poursuite réguliers.

40

Page 41: procédure pénale crfpa efb

Actes d’instruction : actes qui tendent à la constatation d’une infraction et à la recherche de son auteur (perquisition, GàV, audition…)

Actes de poursuite : actes qui tendent à la mise en mouvement de l’action publique (citation directe, réquisitoire introductif), mais aussi tous les actes qui permettent d’informer le parquet (simples « soit-transmis » sont interruptifs : actes par lesquels le Proc. Rép. formule une demande d’information à une administration. Crim, 20/02/2002 sur les disparues de l’Yonne, confirmé par Crim, 08/02/2005 doc. 66 arrêts 1 et 2).

Attention : Tous ces actes doivent être réguliers ! A défaut, le délai n’est pas interrompu (Crim, 21/06/2005 doc. 67 arrêt 2).

Suspension du délai : Il y a suspension mais le délai acquis demeure acquis. Cas des خalternatives aux poursuites. Mais la jp n’est pas en reste car elle développe d’autres causes suspensives :

Causes factuelles : trouble mental de l’auteur de l’infraction qui intervient au cours des poursuites (Crim, 01/08/1919)

Obstacles de droit : chef de l’Etat dans le cadre de son mandat sauf en cas de Haute trahison. Donc pour les infractions de droit commun, il y a suspension du délai (Ass. Plén. 10/10/2001)

§2. La prescription de l’action civile

Pendant longtemps était prévue la règle de l’unité des prescriptions pénales et civiles. Elle était illogique car le délai pour réparer un préjudice résultant d’une infraction pénale était plus court que pour les infractions civiles.Désormais, l’art. 10 CPP dispose que l’action civile se prescrit selon les règles du droit civil (contractuel : 10 ans, délictuel : 30 ans).

THEME 4 : L’INSTRUCTION PREPARATOIRE

L’instruction préparatoire est aussi appelée information judiciaire. Attention, ne pas parler de d’instruction car cela recouvre tant l’instruction préparatoire (chambre d’instruction) que l’instruction définitive (chambre de jugement).

Chapitre préliminaire – Le secret de l’instruction

Il s’agit de la manifestation inquisitoriale de la phase préparatoire de la procédure pénale. Trois significations :

La procédure a lieu sans que ne soit informé le suspect Les personnes qui participent aux investigations sont tenues au secret L’instruction préparatoire n’est pas publique, donc les audiences de la chambre

d’instruction sont tenues en chambre du conseil (pas de public).

Le secret professionnel est prévu par l’art. 11 CPP à l’égard de toutes les personnes qui concourent à la procédure. Mais l’art. 11 ne vise pas que le secret professionnel, il vise également le secret de l’enquête. En cas de méconnaissance de cette obligation, les intéressés encourent les mêmes peines que pour le secret professionnel (art. 226-13 CP : 1 an et 15000 euros).

41

Page 42: procédure pénale crfpa efb

Et quand la violation est délibérée, la loi du 09/03/2004 a instauré l’art. 434-7-2 qui permet de porter les peines à un niveau supérieur, sachant que sous la pression des avocats, le texte a été modifié par la loi du 12/12/2005 sur la récidive afin d’insister sur la violation délibérée.

Il faut :- une révélation commise sciemment- faite à une personne que l’intéressé sait être impliquée dans l’affaire- et avec une volonté d’entraver les investigations (dol spécial)

La peine est de 2 ans et 30000 euros d’amende (avant la loi du 12/12/2005 : 5 ans et 75000 euros), et si les faits relèvent de la criminalité et délinquance organisée, les peines sont alors de 5 ans et 75000 euros. Attention : cela ne concerne que les personnes qui concourent à la procédure !

§1. Les personnes concourant à la procédure

Elles sont entendues dans un sens strict : les personnes faisant avancer la procédure. Il s’agit des magistrats, des greffiers, des huissiers, des enquêteurs publics, des experts et des interprètes. En revanche, cela ne concerne ni les parties ni les avocats (car ils représentent les parties).

Il existe toutefois une permission de révélation d’informations : la possibilité qui est faite au Proc. Rép. de révéler des informations objectives tirées d’une procédure en cours afin de prévenir ou faire cesser une atteinte à la présomption d’innocence.

§2. Les personnes ne concourant pas à la procédure

Le secret s’applique-t-il à d’autres ? Cette question renvoie à celle de l’accès au dossier.

Avocats : ils ont un droit d’accès direct au dossier, qui doit être mis à leur disposition خdans les quatre jours ouvrables au plus tard avant la 1ère audition ou le 1er interrogatoire. Puis le dossier est librement accessible à l’avocat.Cet accès est susceptible de mener à des fuites. D’où la loi du 31/12/1971 relative au statut des avocats qui prévoit l’obligation pour les avocats de satisfaire au secret professionnel.Une disposition d’application englobe dans le secret professionnel le secret de l’instruction (décret du 27/11/1991). Les avocats encourent alors la peine prévue pour la violation délibérée. Cette mesure a donné lieu à des applications récentes (Crim, 20/06/2006).

: Clients خ ils ont un droit indirect d’accès au dossier car ils peuvent accompagner l’avocat quand celui-ci va consulter le dossier. Ils peuvent aussi consulter les copies que avocats ont pu se faire remettre.Il existe un risque de fuite important car l’avocat peut donner des copies de ces copies à son client ; Pour encadrer cette pratique, le législateur prévoit des conditions :

l’avocat doit faire attester son client par écrit qu’il a pris connaissance de l’interdiction qui lui était faite de les communiquer à des tiers

l’avocat doit dire au JI la liste des pièces qu’il souhaite communiquer à son client. Le JI dispose d’un droit d’opposition insusceptible de recours dans un délai de 5 jours. A défaut de prononciation dans ce délai, la communication est possible.

La communication à des tiers constitue un délit puni d’une amende correctionnelle de 3750 euros.

Cela pose des problèmes lorsque une partie ne souhaite pas avoir d’avocat. Traditionnellement, Ccass écarte la communication à une partie que ne serait pas assistée par un avocat (Crim, 22/01/2002). Il y a un risque d’atteinte aux droits de la défense !Pour l’instant la CEDH ne s’est pas encore prononcée sur cette question. Elle ne s’est

42

Page 43: procédure pénale crfpa efb

prononcée que pour la partie civile qui n’a pas accès au dossier car elle ne souhaite pas être assistée par un avocat. Dans ce cas, elle ne constate pas de violation à l’art. 6 CESDH. Ce faisant, elle met en balance les droits des justiciables et l’efficacité de la répression (CEDH Menet c/ France, 14/06/2005 doc. 83).

: Journalistes خ ils sont rattrapés par le secret de l’enquête et de l’instruction. S’ils révèlent des informations couvertes par le secret, ils sont condamnés sous la qualification de recel de violation du secret de l’instruction. Il n’y a toujours pas d’arrêt de la CEDH qui pour savoir s’il s’agit là d’une violation de l’art. 10 relatif à la liberté d’expression des journalistes. La Cour ne s’est prononcée que sous la qualification de recel du secret fiscal (affaire du Canard enchaîné : CEDH Fressoz Roire, 21/01/1999 : la condamnation est une atteinte à la liberté d’expression). Toutefois, on peut douter que cette solution serait étendue pour le secret de l’instruction qui protège l’intérêt général, tandis que le secret fiscal ne protège qu’un intérêt privé.

1°– L’instruction préparatoire par le juge d’instruction

§1. La saisine du juge d’instruction

A. Les modalités de la saisine

Il peut être saisi par un réquisitoire introductif (ou à fin d’informer) par le Parquet, ou par une plainte avec constitution de partie civile par la victime.Dans ce cas, il n’a pas l’obligation d’instruire ! Il peut rendre une ordonnance de refus d’informer ou de non-informer lorsqu’il considère que les faits dénoncés ne sont pas susceptibles de tomber sous le coup d’une qualification pénale (ex : prescription de l’action publique : poursuites contre un général sur des tortures pendant la guerre d’Algérie Crim, 17/06/2003).

B. Etendue de la saisine

Le JI est saisi in rem, mais pas in personam, càd qu’il ne peut instruire qu’à l’égard des faits qui lui ont été dénoncés dans l’acte de saisine. S’il découvre des faits nouveaux pendant ses investigations, il ne peut en principe décider d’office d’instruire (application de la règle selon laquelle une juridiction ne peut s’auto-saisir).Il doit en informer le Proc. Rép. qui décidera des suites à donner : classer l’affaire, décider d’une alternative, saisir une juridiction de jugement ou saisir le JI. S’il s’agit du même JI que dans la première affaire, le Proc. Rép. étend la saisine de celui-ci : on parle de réquisitoire supplétif.Attention : cette possibilité n’est reconnue qu’au parquet. La victime ne peut pas étendre la saisine du JI au moyen d’une plainte additionnelle (Crim, 26/09/2000).

Il existe une nuance à la saisine in rem : lorsque le JI découvre des faits nouveaux et qu’il y a urgence à procéder aux investigations, il peut réaliser des vérifications sommaires, à l’exception de tout acte coercitif (Crim, 06/02/1996). C’est pour cette raison que l’accusation contre Xavière Tibéri est tombée ! Cette condition n’avait pas été respectée : au cours de la perquisition, le juge avait trouvé des documents relatifs à une autre affaire, et il les avait saisis au lieu d’en informer le Proc. Rép. Tous les actes subséquents ont été annulés de ce fait, et donc toute la procédure est tombée.

Attention cas pratique : dans la saisine in rem (contrairement à la saisine in personam) le JI peut instruire à l’égard de toute personne dans la limite des faits dénoncés. Il ne peut donc pas être contraint à mettre une personne en examen, même si elle est désignée dans l’acte de saisine.

§2. Les pouvoirs du juge d’instruction

43

Page 44: procédure pénale crfpa efb

Sous-§ 1. Les pouvoirs du JI

A. Les pouvoirs du JI quant aux suspects

1. Le témoin assisté

Une loi de 1987 définit de manière stricte le témoin assisté, puis la loi du 15/06/2000 élargit la notion. Il s’agit d’un suspect intermédiaire, qui n’est plus un simple témoin car il existe des éléments de suspicion contre lui. Il bénéficie donc de droits particuliers (art. 113-1 s. CPP et doc. 85) : Cinq catégories de personnes doivent bénéficier du statut :

1. Les personnes nommément visées dans réquisitoire introductif ou supplétif.2. Les personnes nommément visées par la victime ou dans une plainte avec

constitution de partie civile qui, lorsqu’il sont auditionnés par le JI en font la demande. Le JI doit donc notifier l’intéressé de ce droit.Toutefois, si la personne est entendue par un OPJ sur commission rogatoire, l’obligation de notification n’existe pas. Cela permet de contourner le statut, et de fraude aux droits de la défense (Crim, 23/03/2000).

3. Les personnes qui ont fait l’objet d’un interrogatoire de 1ère comparution (qui doit être fait par le JI qui veut mettre quelqu’un en examen) et qui n’ont finalement pas été mises en examen.

4. Les personnes dont la mise en examen a été annulée.5. Les personnes qui font l’objet d’un mandat de comparution, d’amener ou d’arrêt

depuis la loi du 09/03/2004 (acte qui désigne une personne contre qui existent des indices graves et concordants de culpabilité).

Trois catégories de personnes peuvent bénéficier du statut

1. Les personnes désignées par une plainte et qui ne font pas la demande de bénéficier du statut.

2. Les personnes mises en cause par un témoin.3. Les personnes à l’encontre desquelles existent des indices rendant vraisemblable

leur participation à l’infraction.

Attention : dans tous les cas, l’octroi du statut n’est pas contradictoire, à l’inverse de la mise en examen. Une simple lettre recommandée suffit.

Le témoin assisté bénéficie d’un certain nombre de droits :▪ Il a droit à l’assistance d’un avocat (et donc accès au dossier par ce biais). ▪ Il ne prête pas serment (car c’est un suspect).

Néanmoins, le statut n’équivaut pas à celui de la mise en examen, car il ne peut formuler de demande d’acte d’investigation, sauf à être confronté aux personnes qui le mettent en cause. Par ailleurs, il ne peut exercer de voie de recours. Mais, depuis la loi du 09/03/04, il est autorisé à formuler des requêtes en nullité.Et il ne saurait y avoir de détention provisoire ni de contrôle judiciaire car il n’est pas un suspect.

2. Le mis en examen

• LA MISE EN EXAMEN

: Motivation خ art. 80-1 al. 1 CPP indique quelles personnes peuvent être mises en examen. Le JI ne peut mettre en examen que les personnes contre qui existent des indices graves ou concordants de culpabilité. Ce n’est qu’à ce niveau de suspicion qu’il est possible de recourir à cette procédure.Une circulaire du 20/12/00 donne des exemples :

- mise en cause formelle par victime ou par témoin direct de l’infraction.- témoin indirect pas suffisant. Faudra alors plusieurs indices.

44

Page 45: procédure pénale crfpa efb

Le JI ne peut pas y avoir recours trop tôt, car cela permet éventuellement sa mise en détention provisoire. Il faut donc des éléments à charge suffisants.

Il faut compléter ces dispositions avec l’art. 105 CPP : les personnes à l’encontre desquelles existent des indices graves et concordants ne peuvent être entendues comme témoin (avant, le JI était obligé de mettre l’intéressé en examen pour ce cas. L’objectif était d’octroyer les droits de la défense à ce suspect. On parlait de la théorie des procédures tardives, qui donnaient systématiquement lieu à annulation). Aujourd’hui, cette obligation a été annulée, mais il n’est pas possible d’être entendu comme témoin. Il doit, au minimum, bénéficier du statut de témoin assisté.

Attention : il faut donc bien distinguer s’il existe des indices graves et concordants ou s’il existe des indices graves ou concordants.

Conditions de forme : le principe du contradictoire doit être respecté depuis la loi du خ15/06/2000 pendant l’interrogatoire de 1ère comparution. Le JI doit adresser une convocation à l’intéressé par lettre recommandée, sachant que le délai de convocation ne peut être inférieur à 10 jours afin de ménager un certain temps à la personne qui risque d’être mise en examen.Elle doit mentionner les faits et leur qualification juridique, le fait que la victime a le droit d’être assistée par un avocat, et qu’au terme de l’interrogatoire une mise en examen est envisageable.

L’interrogatoire commence par un rappel des faits par le JI, qui rappelle le droit d’être assisté par un avocat (et d’un interprète Crim, 25/05/05 doc. 88). Contrairement à la GàV, le JI a l’obligation de notifier à l’intéressé son droit de se taire, sachant que l’exercice de ce droit ne s’oppose pas à sa mise en examen (Crim, 30/03/04). A l’issue de l’audience, le JI notifie à l’intéressé sa mise en examen. Il doit alors lui notifier tous les droits dont il dispose. S’il n’est pas mis en examen, l’intéressé bénéficie nécessairement du statut de témoin assisté. Et en cas d’annulation de la procédure (puisque les conditions de forme sont d’OP), il en va de même.

Attention : la mise en examen peut intervenir à l’initiative du témoin assisté pour bénéficier des droits qui vont avec (recours, demande d’acte…). Elle s’impose au JI, sachant qu’alors la mise en examen peut intervenir par simple lettre recommandée.

• LA LIBERTE DU MIS EN EXAMEN

La détention provisoire : art. 137 et 144-150 CPP. Elle désigne l’incarcération de la خpersonne mise en examen dans l’attente de son jugement. Elle ne peut intervenir qu’après la prise d’un mandat de dépôt par le JLD, et a lieu en maison d’arrêt, sachant que depuis la loi du 09/09/2002, il n’est plus possible d’exécuter un détention provisoire par surveillance électronique.Evidemment, le temps passé en détention provisoire viendra se déduire de la peine privative de liberté prononcée.

Conditions de fond

▪ Il doit s’agir d’une peine criminelle ou d’une peine correctionnelle punie d’au moins 3 ans d’emprisonnement.

▪ Elle doit être motivée (3 motifs alternatifs) :o Afin de conserver les preuves, d’empêcher une éventuelle concertation,

d’empêcher des pression sur les témoins ou les victimes.o Protéger le mis en examen contre ses comparses ou assurer la garantie du

maintien de la personne mise en examen à la dispos de la justice.o Afin de mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant de l’OP provoqué par la

gravité de l’infraction.

Toutefois, quand la détention est décidée suite à la méconnaissance des obligations

45

Page 46: procédure pénale crfpa efb

résultant d’un contrôle judiciaire, il n’est pas nécessaire de remplir ces 2 conditions de fond.

Conditions de forme

▪ L’art. 145 CPP, instauré par la loi du 15/06/2000 a retiré le pouvoir de mise en examen au JI au profit du JLD, qui doit être saisi par le JI (l’objectif est de recueillir des avis concordants de deux magistrats du siège). Mais depuis la loi du 09/09/2002, quand le JI ne décide pas de saisir le JLD alors qu’il a reçu un réquisitoire dans ce sens du Proc. Rép., il doit rendre une ordonnance spécialement motivée. Et depuis la loi du 09/03/2004, en matière criminelle et pour des délits punis de 10 ans d’emprisonnement, le Proc. Rép. peut saisir directement le JLD malgré le refus du JI.

▪ Le placement en détention provisoire doit toujours faire l’objet d’un débat devant le JLD. Il doit alors laisser un certain délai au suspect pour se préparer, sachant que ce délai n’est pas fixé par la loi mais qu’en pratique il est d’au minimum 4 jours. Mais en cas d’urgence, il peut incarcérer temporairement le suspect pendant ce temps là (art. 145 al. 7).

▪ Au terme de cette audience, le JLD peut délivrer un mandat de dépôt, sachant qu’appel peut être interjeté contre cette décision devant la Chambre de l’instruction, qui doit statuer dans les 10 jours. Attention : cet appel n’est pas suspensif (l’individu est quand même incarcéré).

D’où la création du procédé de référé liberté (par la loi du 24/08/1993). Si l’appel est interjeté au plus tard au lendemain de la décision, la personne mise en examen peut demander à ce que l’appel soit immédiatement envisagé par le Président de la chambre qui se prononcera sur son caractère suspensif ou non (et pas sur le fond). Il dispose alors d’un délai de 3 jours pendant lequel la personne est incarcérée.Depuis la loi du 15/06/2000, une personne peut demander à ce que son référé liberté soit examiné par une formation collégiale, mais celle-ci dispose de 5 jours pour statuer. Le Président ou la forme collégiale saisis d’un référé peuvent choisir d’évoquer le fond, et statuer sur le fond.

▪ Durée de la détention provisoire : doit respecter le délai raisonnable (art. 144-1 CPP). Cette question du délai raisonnable est inspirée de l’art 5§3 CESDH et est une question de fait qui échappe au contrôle de la Ccass (Crim, 14/03/2006 doc. 92).Le point de départ est le jour de l’ordonnance du JLD. Peu importe qu’à ce jour le suspect fasse déjà l’objet d’une détention provisoire pour une autre cause (Crim, 23/08/2005 doc. 89). Par ailleurs, le cumul de détention provisoire n’est évidemment possible que lorsque des informations judiciaires portant sur des faits distincts (Crim, 24/05/05 doc. 90).

Quels sont les plafonds ? - En matière correctionnelle (art. 145-1) : la détention ne peut excéder 4 mois si la personne n’a pas déjà fait l’objet d’une condamnation antérieure à 1 an d’emprisonnement ferme et si elle encourt une peine inférieure ou égale à 5 ans. Dans le cas inverse, la détention peut être prolongée par le JLD par tranches de 4 mois supplémentaires (avec un nouveau débat contradictoire chaque fois). La durée totale ne peut excéder 1 an sauf exception : 2 ans s’agissant des délits en bande organisée faisant encourir 10 ans d’emprisonnement, 3 ans pour le délit d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste (art. 706-24-3).Dans toutes ces hypothèses, depuis la loi du 09/09/2002, la Chambre de l’instruction peut décider d’une ultime prolongation de 4 mois supplémentaires à l’issue du délai butoir en matière correctionnelle, mais cette tranche s’applique (affaire du chinois). Donc max = 1 an et 4 mois.

- En matière criminelle (art. 145-2), la détention est en principe d’une année, sachant que le JLD peut décider de prolongations pour 6 mois après débat contradictoire, et que la détention ne peut excéder 2 ans, sauf si la peine encourue est supérieure à 20 ans auquel cas la détention peut aller jusqu’à 3 ans.Par ailleurs, en matière de criminalité organisée, le plafond de 2 ans passe à 3, celui de 3 à 4, et depuis la loi du 09/09/2002, la Chambre d’instruction peut prononcer à 2 reprises une ultime prolongation de 4 mois. Donc max = 4 ans et 8 mois.

46

Page 47: procédure pénale crfpa efb

Attention : il ne s’agit là que des délais de détention au cours de la période d’instruction ! Après s’appliquent les délais d’audiencemment (2 ans max).

Lorsque l’on atteint ces délais butoir, l’intéressé doit être remis en liberté, sachant que même pendant la détention, la pers mise en examen peut demander sa liberté. Il s’adresse au JI qui peut décider seul. En cas de refus, on peut saisir le JLD. En cas de refus des 2, on peut interjeter appel contre l’ordonnance de refus devant la Chambre de l’instruction.

Lorsqu’une ordonnance de mise en liberté est prise ou lorsqu’un refus de prolongation de la détention provisoire est prononcé (nouveau Crim, 20/06/06), on peut recourir au référé détention institué par la loi du 09/09/2002. Comme en matière de décision de placement, l’appel n’est pas suspensif (donc la personne doit être libérée). Néanmoins, à compter de l’ordonnance débute un délai de 4 h pour informer le parquet de la décision du juge. Si un appel à l’encontre de la décision est formé pendant le délai de 4h, le 1er président de la CA se trouve saisi du caractère suspensif ou non de l’appel, sachant qu’il doit statuer dans les 2 jours qui suivent la saisine (pendant lesquels la personne demeure incarcérée).

Le خ contrôle judiciaire : art. 137 CPP : la personne mise en examen présumée innocente reste libre. Elle peut toutefois être astreinte à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire (limitation de liberté sans la supprimer) par le JLD lorsqu’il est saisi en matière criminelle ou correctionnelle pour un délit puni de plus de 10 ans d’emprisonnement.

Le contenu du contrôle judiciaire

Il peut avoir 3 objectifs : - probation, soutien de la personne mise en examen (réinsertion). Ex : formation

professionnelle ou scolaire- prévention du renouvellement de l’infraction (mesure de sûreté). Loi 12/12/05 a

jouté comme obligation possible l’obligation pour le concubin ou le conjoint violent de résider hors du domicile du couple. (art. 138 17°)

- maintien de l’intéressé à la disposition de la justice. JI peut imposer la remise du passeport, ou le fait de pointer au commissariat ou à la mairie la plus proche de son domicile.

Attention : une particularité a été créée par la loi du 15/06/2000 dans le cadre du contrôle judiciaire : on peut interdire à un avocat l’exercice de sa profession à condition que cette décision appartient au seul conseil de l’ordre dans sa formation disciplinaire. Le JI ne peut donc la décider.

Le déroulement du contrôle judiciaire

Il est fixé par le JI ou par le JLD, qui peuvent au cours du contrôle modifier, ajouter ou supprimer une obligation par le biais d’une ordonnance modificatrice. Celle-ci peut aussi être demandée par l’intéressé, et un appel est possible devant la chambre d’instruction.Le JI peut aussi décider la main levée du contrôle, de sa propre initiative ou à la demande de la personne mise en examen, qui dispose d’un recours contre la décision. Pour l’avocat, la règle du parallélisme de formes impose que la décision appartient au Conseil de l’ordre (Crim, 15/05/02)

En cas de manquement volontaire aux obligations du contrôle judiciaire, le JI peut saisir le JLD aux fins de placement en détention provisoire, sachant qu’il peut alors intervenir sans respecter les règles de fond (cf. supra)

B. Les actes d’investigation du juge d’instruction

1. Les actes directement exercés par le juge d’instruction

Comme au cours des enquêtes de flagrance, la recherche de la preuve est coercitive. Il

47

Page 48: procédure pénale crfpa efb

existe quelques spécificités.

• LES INVESTIGATIONS MATERIELLES

Les perquisitions : le JI peut décider la perquisition d’un domicile (art. 94). Dans ce خces, les mêmes règles s’appliquent que pour les enquêtes de flagrance, et notamment il n’est pas besoin d’obtenir le consentement de l’intéressé.S’agissant des perquisitions nocturnes (art. 706-83), la loi du 09/03/2004 prévoit un régime différent en mat criminalité et délinquance organisée. En principe elles ne sont possibles que dans les locaux professionnels. Mais il est possible de perquisitionner un domicile quand 3 conditions cumulatives sont remplies :

▪ flagrance▪ risque immédiat de disparition des preuves▪ raisons plausibles de soupconner que les pers présentes sur les lieux sont en train

de commettre des infractions de crim et del org au sens de 706-73.

Comme dans le cadre de l’enquête, le JI doit se soucier des droits de la défense. Cela signifie en particulier que lorsqu’il mène une perquisition au domicile de la personne mise en examen, il ne peut l’interroger car elle doit être assistée par un avocat. Il y aura donc annulation de la perquisition pour violation des droits de la défense (Crim, 21/02/2002).

: Les écoutes téléphoniques خ art 100 à 100-7 CPP. Elles ont longtemps été le seul apanage du JI, mais la loi du 09/03/2004 les autorise aussi dans les enquêtes portant sur des faits de criminalité et délinquance organisée. Elle peuvent toujours être ordonnées par le JI quand l’instruction porte sur des faits criminels ou correctionnels faisant encourir une peine d’au moins 2 ans d’emprisonnement, et doivent être motivées. Elles peuvent concerner le suspect, mais aussi toute personne (témoin assisté, témoin, partie civile, avocat). Mais aucune écoute ne peut avoir lieu sur la ligne dépendant du cabinet ou du domicile de l’avocat sans en avoir informé le bâtonnier (à peine de nullité art. 100-7). Et aucune interception ne peut avoir lieu sur la ligne d’un parlementaire sans que le président de la chambre concernée n’en soit informé. Cette règle ne s’applique toutefois pas aux eurodéputés (Crim, 16/03/05 doc 95).Enfin, depuis la loi du 09/03/2004, quand l’écoute intervient sur la ligne d’un magistrat, il faut au préalable en informer soit le 1er président CA, soit le Procureur Général.

Cette décision du juge de placer sur écoute n’est pas susceptible de recours (art. 100-2) pour préserver& l’efficacité de la mesure. La décision est prise pour une durée de 4 mois, renouvelable autant de fois que nécessaire.En cours d’exécution, chacune des interceptions donne lieu à un PV mentionnant la date et l’heure du début et de la fin de chaque opération. Elles sont enregistrées et placées sous scellés. Par ailleurs, la loi impose la transcription de toute la correspondance utile à la manifestation de la vérité. Toutefois, la loi du 12/12/2005 a inséré dans l’art 100-5 un dernier alinéa qui dispose qu’à peine de nullité ne peuvent être transcrites les correspondances avec un avocat relevant des droits de la défense. Cette exclusion concerne non seulement la communication qui intervient entre la personne mise en examen et son avocat, mais aussi avec les proches (père pour Crim, 18/01/2006 doc. 98). Une exception à cette exclusion existe néanmoins quand la conversation échangée avec l’avocat fait apparaître la participation de l’avocat à la commission de l’infraction (Crim, 08/11/2000).

L’ensemble de ces documents sera versé à la procédure, et ils pourront être consultés par les intéressés dans le cadre de la consultation du dossier. Ils pourront être contestées, sachant que pendant longtemps, la chambre criminelle a cantonné le droit de contestation qu’aux seules personnes mises en cause. Les tiers n’étant pas parties à la procédure, ils ne pouvaient pas contester (écoutes incidente : utilisation de la ligne de la personne écoutée, ou appel de la personne écoutée). Il s’agissait d’une violation de l’art. 8 selon CEDH (Mathéron c/ France, 29/03/05 doc 96). Suite à cet arrêt, Ccass a opéré un revirement de jp.

Les expertises : art. 166 s. CPP : elles peuvent être ordonnées d’office par le JI ou à la خdemande du parquet ou des parties privées. Il n’y a pas d’obligation de le faire quand la demande est faite, toutefois si une première expertise est intervenue constatant

48

Page 49: procédure pénale crfpa efb

l’irrecevabilité de la demande, la demande de contre expertise formulée par la partie civile doit obligatoirement être satisfaite, et elle sera faite par 2 experts.

Quand il a recours à une expertise, le JI ne doit pas déléguer l’intégralité de l’instruction (Crim, 29/01/03). L’expert désigné est choisi sur une liste officielle. Il doit prêter serment d’apporter à la Justice son concours en honneur et en conscience. Ce serment lie alors l’expert quant au secret de l’enquête et de l’instruction. Dans le cadre de sa mission, il agit sous le contrôle du JI et il ne peut en principe interroger les parties privées ni le témoin assisté. Les questions sont formulées par le JI.D’où la loi du 09/03/2004 qui prévoit que sur autorisation expresse du JI, l’expert puisse interroger directement ces personnes.

Une fois l’expertise terminée, un rapport est rendu au JI qui doit convoquer les parties (personnes mise en examen, partie civile et témoins assistés) pour leur en faire part. Ils peuvent s’en faire remettre une copie intégrale depuis la loi du 09/03/2004, et ils peuvent communiquer le rapport à des tiers pour contre expertise.

Les sonorisations : ce sont des actes nouveaux, créés par la loi du 09/03/2004, qui ne خpeuvent intervenir que dans le cadre de l’information judiciaire, lorsque celle-ci porte sur des faits de criminalité et délinquance organisée.

Avant, certains juges du fond avaient admis le recours aux sonorisations dans des domiciles ou dans des véhicules. Crim n’avait pas dégagé de solution stricte en la matière. Cela a donné lieu à des constats de violation par la CEDH dans la mesure où la loi ne les prévoyait pas (doc 99). Désormais, la loi les prévoit. Le JI peut agir d’office ou sur réquisition du parquet. Toutefois, si elle doit intervenir dans un lieu d’habitation et pendant la nuit, le JI doit saisir le JLD qui délivre l’autorisation (706-93 CPP). La décision des 2 prend la forme d’une ordonnance qui doit être motivée, et indiquer les lieux et véhicules concernés (parloir d’une maison d’arrêt est possible Crim, 01/03/2006 doc. 100). Elle doit indiquer que les faits sont relatifs à la criminalité et délinquance organisée au sens de l’art. 706-73.

La décision est prise pour 4 mois, et elle est renouvelable autant de fois que nécessaire. Toutefois, cette ordonnance ne peut décider de sonoriser certains lieux qui sont sanctuarisés (cabinet et domicile d’un avocat, locaux d’une entreprise de presse, cabinet des médecins, notaires, avoués, huissiers, locaux privés et professionnels des parlementaires et des magistrats).Le JI doit requérir l’intervention d’enquêteurs privés pour installer le dispositif. Cela permet de justifier la violation de domicile.

Chaque opération donne lieu à la rédaction d’un PV indiquant la date et l’heure du début et de la fin de l’opération. On y transcrit l’ensemble des éléments utiles à la manifestation de la vérité. Ils sont enregistrés et mis sous scellés.

Des recours existent : les parties peuvent contester la mesure après en avoir eu connaissance. Même solution pour les sonorisations incidentes.

• LES COLLECTES DE DEPOSITIONS

49