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1 PRINCIPES ET PHYSIOLOGIE DE LA DIALYSE PÉRITONÉALE François Vrtovsnik SOMMAIRE A - CONTRAINTES ANATOMIQUES & ÉCHANGES PÉRITONÉAUX 1. Le mésothélium normal 2. Interstitium 3. Les capillaires péritonéaux 4. Transition épithélio-mésenchymateuse en dialyse péritonéale 5. Composition normale du liquide péritonéal B - PRINCIPES DES ÉCHANGES TRANSPÉRITONÉAUX 1. Transport par diffusion 2. Transport par convection 3. Absorption - Transport de la cavité péritonéale vers le sang 4. Clairance péritonéale C - MODÉLISATION 1. Le Modèle à 3 tailles de pores a. Les aquaporines et systèmes de transport péritonéaux b. Equation de l’ultrafiltration péritonéale c. Tamisage du sodium : transport de l’eau libre 2. Caractérisation de la membrane péritonéale – le PET test 3. Paramètres de transport et dialyse péritonéale à long terme RÉFÉRENCES L’AUTEUR Professeur François Vrtovsnik Hôpital Bichat - Paris PU-PH, Service Néphrologie

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PRINCIPES ET PHYSIOLOGIEDE LA DIALYSE PÉRITONÉALE

François Vrtovsnik

SOMMAIRE

A - CONTRAINTES ANATOMIQUES & ÉCHANGES PÉRITONÉAUX1. Le mésothélium normal

2. Interstitium

3. Les capillaires péritonéaux

4. Transition épithélio-mésenchymateuse en dialyse péritonéale

5. Composition normale du liquide péritonéal

B - PRINCIPES DES ÉCHANGES TRANSPÉRITONÉAUX1. Transport par diffusion

2. Transport par convection

3. Absorption - Transport de la cavité péritonéale vers le sang

4. Clairance péritonéale

C - MODÉLISATION1. Le Modèle à 3 tailles de pores

a. Les aquaporines et systèmes de transport péritonéauxb. Equation de l’ultrafiltration péritonéalec. Tamisage du sodium : transport de l’eau libre

2. Caractérisation de la membrane péritonéale – le PET test

3. Paramètres de transport et dialyse péritonéale à long terme

RÉFÉRENCES

L’AUTEUR

Professeur François VrtovsnikHôpital Bichat - ParisPU-PH, Service Néphrologie

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A - CONTRAINTES ANATOMIQUES & ÉCHANGES PÉRITONÉAUX

1. Le mésothélium normal

La membrane péritonéale comprend successivement, du sang vers le dialysat péritonéal, la mem-brane basale des capillaires péritonéaux, le tissu conjonctif de soutien, la membrane basale sous mésothéliale et la monocouche des cellules mésothéliales. La surface péritonéale est de l’ordre de 0,5 à 2 m² ; la part relative que les péritoines viscéral et pariétal prennent dans les échanges trans-péritonéaux n’est pas connue. La surface fonctionnelle d’échange dépend de la surface ana-tomique mais aussi de la surface capillaire et de la distance séparant le sang et le dialysat, c’est à dire de l’épaisseur de la membrane.

La surface péritonéale effective d’échange dépend de la proportion de la surface péritonéale anato-mique vascularisée et utilisée pour les échanges. Le débit sanguin dans les capillaires péritonéaux est généralement estimé entre 50 à 100 ml/min ; il n’est en règle générale pas un facteur limitant la diffusion transpéritonéale des substances dissoutes. Les volumes de dialysat élevés augmente la surface d’échange; en revanche le recrutement de nouveaux capillaires, comme en cas de va-sodilatation associée à une inflammation périto-néale (péritonite), augmentent la capacité de dif-fusion et notamment celle du glucose qui devient plus rapidement réabsorbée du liquide péritonéal vers les capillaires.

La monocouche de cellules mésothéliales est la première au contact du liquide péritonéal, mais elle n’offre pas de résistance aux échanges trans-péritonéaux ; l’interstitium et surtout l’endothé-lium des capillaires péritonéaux offrent l’essentiel de la résistance à ces transports. La résistance intrinsèque de la membrane péritonéale dépend du nombre de « pores » par unité de surface ca-pillaire, et de la distance (ou de « l’épaisseur ») qui sépare les capillaires de l’interface mésothé-liale dans l’interstitium; elle augmente en cas de fibrose associée à la DP à long terme.

Les cellules mésothéliales développent des jonctions serrées et ont des microvillosités à leur pôle apical, en regard de la cavité péritonéale. Ces cellules contiennent des cavéoles et de nombreuses vésicules qui témoignent de phénomènes de transcytose. Des fentes mésothéliales établissent une communication entre la cavité péritonéale et les lymphatiques sous mésothéliaux. Ces données suggèrent des phénomènes d’échanges ou de transport trans-mésothéliaux même si le mésothé-lium ne représente pas une barrière anatomique importante.

Les cellules mésothéliales peuvent produire de nombreuses cytokines, protéases et facteurs de croissance mis en jeu dans les altérations du péritoine observées chez les patients traités en dialyse péritonéale. Le CA125 est une glycoprotéine normalement produite par les cellules méso-théliales ; en cas de péritonite, la nécrose mésothéliale s’accompagne de la libération de CA125 dosable dans l’effluent péritonéal. En surveillance longitudinale, chez un même patient, la baisse progressive de la concentration de CA125 témoigne de la diminution de la masse cellulaire méso-théliale.

Figure 01 : La membrane péritonéale

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2. Interstitium

3. Les capillaires péritonéaux

4. Transition épithélio-mésenchymateuse en dialyse péritonéale

5. Composition normale du liquide péritonéal

Le tissu conjonctif sous mésothélial contient habituellement peu de cellules, fibroblastes et masto-cytes, monocytes et macrophages ; ces cellules sont une première ligne de défense en cas d’in-fection péritonéale. Leur rôle en physiopathologie péritonéale reste mal connu. L’interstitium a la structure d’un gel formé par des faisceaux de fibres collagène et des polysaccharides anioniques. Chez les patients traités par DP, on note le développement d’une fibrose collagène qui entraîne une augmentation de l’épaisseur de l’espace sous mésothélial pouvant limiter les phénomènes de diffusion et de transport transmembranaires.

Les capillaires péritonéaux sont essentiellement de type non fenêtré. Les cellules endothéliales sont riches en vésicules dont certaines forment, comme dans les cellules mésothéliales, des « ca-naux trans-cellulaires ». La membrane basale capillaire a une épaisseur variable; elle est notable-ment épaissie en cas de diabète et chez les patients traités en dialyse péritonéale.

Le débit sanguin splanchnique est élevé, de l’ordre de 25 % du débit cardiaque ; pourtant, seuls 25% des capillaires péritonéaux sont perfusés en situation basale. Chez l’animal, la modulation expérimentale du débit sanguin splanchnique a peu d’effets sur les échanges péritonéaux; chez l’homme en situation d’insuffisance cardiaque grave, les paramètres de transport péritonéaux ne sont pas modifiés en dépit de la baisse attendue du débit splanchnique. En revanche, l’augmenta-tion de la « surface d’échange vasculaire » induite par des vasodilatateurs ou liée à une angioge-nèse péritonéale s’accompagne d’une modification des propriétés de transport.

Les capillaires lymphatiques présents dans la membrane péritonéale assurent normalement la réabsorption du flux généré par les gradients de pression hydrostatique et oncotique ; ils assurent également la réabsorption des protéines ayant quitté le lit capillaire sanguin.

Un phénomène de trans-différentiation de cellules mésothéliales péritonéales en fibroblastes est caractérisé au cours de la dialyse péritonéale, et semble contribuer au processus de fibrogénèse et d’angiogénèse péritonéal.

La cavité péritonéale contient normalement moins de 100 ml d’un liquide formé à partir d’un ultra-filtrat du plasma. Ce liquide est riche en surfactant - synthétisé par les cellules mésothéliales - qui prévient par ses propriétés lubrifiantes et tensio-actives la formation d’adhérences entre les viscères. Le surfactant pourrait également limiter la fuite protéique vers la cavité péritonéale, et réduire le risque d’invasion bactérienne. Le liquide péritonéal contient des immunoglobulines qui ont des propriétés anti-infectieuses.

L’effluent péritonéal normal ne contient pas de neutrophiles et contient moins de 50 cellules/ml, essentiellement des macrophages (50%), des lymphocytes, mastocytes, et des cellules mésothé-liales. En cas d’infection, la cellularité augmente du fait d’un afflux de polynucléaires neutrophiles.

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B - PRINCIPES DES ÉCHANGES TRANSPÉRITONÉAUX

1. Transport par diffusion

La dialyse péritonéale réalise le passage transpéritonéal d’eau et de substances dissoutes, entre le compartiment sanguin des capillaires péritonéaux et le liquide de dialyse mis en place dans la cavité péritonéale, qui est rendu hyperosmolaire par l’ajout de concentrations variables de glucose (figure 02). La membrane péritonéale qui sépare ces deux compartiments se comporte comme une membrane hétérogène, hétéroporeuse, semi-perméable.

Les échanges transpéritonéaux se font suivant trois flux essentiels :• Diffusion, des substances urémiques et du potassium suivant les gradients de concen-tration, du sang vers la cavité péritonéale, tandis que glucose, calcium diffusent en sens inverse vers le sang des capillaires péritonéaux• Ultrafiltration, transfert d’eau, et des substances dissoutes, suivant le gradient osmotique• Absorption, d’eau et de substances dissoutes de la cavité péritonéale vers les capillaires sanguins et les lymphatiques

Le transport par diffusion d’une substance se fait suivant son gradient de concentration ; ce trans-port dépend de la perméabilité de la membrane et de la surface d’échange. Le transport des molé-cules de faible poids moléculaire est surtout assuré par convection et dépend de l’ultrafiltration. L’importance relative du transport par diffusion augmente avec le poids moléculaire des subs-tances (urée : PM 60, créatinine : PM 113, glucose PM 180, albumine PM 69000).

Le transport diffusif varie avec la surface péritonéale effective ou surface vasculaire d’échange. Celle-ci peut être augmentée par de grands volumes de dialysat, ou en cas d’inflammation périto-néale et de vasodilatation des capillaires péritonéaux. La résistance intrinsèque de la membrane péritonéale est fonction de l’équivalent du nombre de pores par unités de surface capillaire ; ses déterminants sont mal connus.

Figure 02 : Transport péritonéaux

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3. Absorption - Transport de la cavité péritonéale vers le sang

2. Transport par convection

Le transport par convection accompagne le flux d’eau induit par le gradient osmotique ; il dépend du volume d’ultrafiltration et de la concentration de la substance dans ce volume, et de la résistance que la membrane oppose à son passage, qui est représentée par le coefficient de réflexion (s).

Le gradient de concentration de l’agent osmotique est maximum au début de l’échange, il diminue ensuite du fait de la réabsorption de l’agent osmotique et de la dilution liée à l’ultrafiltration. La réabsorption du glucose contenu dans les solutions de dialyse péritonéale est d’environ 60 % ; la réabsorption de l’agent osmotique atteint 80 % dans le cas d’une solution d’acides aminés. Le gradient de concentration peut être réduit en cas de grande hyperglycémie. L’effet osmotique est maximisé par les échanges courts, comme dans les protocoles de dialyse automatisée.

Le coefficient de réflexion de l’agent osmotique conditionne le volume d’ultrafiltration. Un coeffi-cient proche de 0 traduit une dissipation la plus rapide du gradient et un faible pouvoir de générer de l’ultrafiltration. Pour chaque substance dissoute, le coefficient de tamisage (Sieving, S), reflète l’importance du transport convectif (transport de l’eau et des substances dissoutes) tandis que le coefficient de réflexion (s) traduit son pouvoir osmotique. Ces deux coefficients sont liés par S = (1 – s) . S est de l’ordre de 0,6 à 0,7 pour les molécules de petit poids moléculaire ; le coefficient de réflexion du glucose est beaucoup plus faible, de l’ordre de 0,02 à 0,05.

Les flux trans-péritonéaux d’eau et des substances dissoutes sont bi-directionnels : en DP, l’impor-tance des flux générés vers la cavité péritonéale est en partie limitée par un transport hors de la cavité péritonéale. La résultante de ces flux est le volume d’ultrafiltration nette. La réabsorp-tion lymphatique peut être estimée d’après la vitesse de disparition de macromolécules marquées ou traceuses injectées dans la cavité péritonéale. Cette vitesse est constante, habituellement de l’ordre de 1 à 1,5 ml/min chez des patients traités en DPCA, soit un volume réabsorbé de 250 à 500 ml pendant un échange de 4 heures.

A la différence de la membrane glomérulaire, la membrane péritonéale n’exerce pas de sélec-tion suivant la charge électrique des molécules. S’il existe des charges négatives fixées à la sur-face des cellules endothéliales et mésothéliales, celles-ci n’affectent pas sélectivement le passage trans-péritonéal des protéines. La perte péritonéale de protéines est de l’ordre de 5 à 10 g par jour, dont environ la moitié d’albumine.

Figure 03 : Diffusion et Convection

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4. Clairance péritonéale

La clairance péritonéale d’une substance, habituellement exprimée en ml/min ou en litres/semaine, représente le volume de plasma épuré de cette substance par les effets combinés de la diffusion, de la convection, et de la réabsorption. Si la dialyse péritonéale est une méthode d’épuration conti-nue, la clairance d’une substance varie sensiblement du début de l’échange où elle est maximale, le gradient de diffusion étant alors maximum, à la fin de l’échange où le gradient de diffusion et le gradient osmotique sont les plus faibles (tandis qu’en hémodialyse les valeurs de clairance sont constantes du fait du débit élevé de dialysat, mais où cette clairance n’est délivrée que de manière intermittente).

La clairance péritonéale d’une substance peut être calculée comme le produit du volume total de dialysat drainé et du rapport de diffusion D/P de cette substance. Si la concentration plasmatique de cette substance est constante (comme en DPCA), le prélèvement sanguin peut-être réalisé à toute heure ; en revanche en DPA, il est recommandé de réaliser ce dosage plasmatique en milieu de journée c’est à dire à mi-distance de sa valeur minimale (à la fin des cycles nocturnes) et maxi-male (à l’amorce des cycles nocturnes).

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C - MODÉLISATION

1. Le Modèle à 3 tailles de pores

a. Les aquaporines et systèmes de transport péritonéaux

Des modèles mathématiques ont été élaborés pour rendre compte des échanges trans-périto-néaux réalisés en dialyse péritonéale. Le modèle à 3 tailles de pores proposé par Bengt Rippe reflète fidèlement les transports réalisés en DP ; ce modèle mathématique ne permet toutefois pas de déterminer les mécanismes moléculaires de ces transports.

Des pores de très petite taille rendent compte d’un passage exclusif d’eau. Ce passage « d’eau libre », correspond au transport dépendant des aquaporines. Le flux de diffusion des petites molé-cules emprunte une autre voie de passage transmembranaire, représenté par des « petits pores ». Le passage des macromolécules se fait surtout par diffusion et nécessairement par des pores de plus grande taille. Les équivalents moléculaires et histologiques de ces petits pores et grands pores ne sont pas connus.

Chez les patients traités en dialyse péritonéale, la moitié du flux d’eau est transcellulaire, et a lieu par ces ultra-petits pores. Plusieurs aquaporines sont exprimées dans les cellules endothéliales et mésothéliales péritonéales ; elles permettent le passage transcellulaire sélectif d’eau, et rendent compte du transport péritonéal « d’eau libre ». Expérimentalement, la perméabilité hydraulique du péritoine de souris dont la protéine AQP1 a été invalidée est diminuée.

Figure 04 : Le modèle à 3 tailles de pores

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b. Equation de l’ultrafiltration péritonéale

Le flux transcapillaire dépend des propriétés de perméabilité du péritoine (KUF), des gradients de pression hydrostatique (DP) et oncotique (DP) dans le capillaire péritonéal, et du gradient osmo-tique mis en place dans la cavité péritonéale (sDO).

On a : TCUFR = KUF (DP – DP + sDO) (TCUF : Trans Capillary Ultra-Filtration Rate, ou flux d’ultra-filtration transcapillaire)

La pression hydrostatique dans les capillaires péritonéaux est de l’ordre de 17 mmHg , la pression intrapéritonéale est de l’ordre de 2 à 8 mmHg et la pression colloïde interstitielle est de l’ordre de 26 mmHg.

c. Tamisage du sodium : transport de l’eau libre

A la phase initiale d’un échange en dialyse péritonéale, un flux osmotique d’eau est immédiatement généré vers la cavité péritonéale et entraîne une dilution de la solution de dialyse ; il résulte une baisse de la concentration de sodium dans le dialysat, dont l’amplitude dépend de ce flux initial. Ce flux d’eau initial représente un transport « d’eau libre » qui est présumé emprunter la voie transcell-lulaire des aquaporines. La diffusion du sodium est retardée ; elle dépend du gradient établi entre le sang et le dialysat, gradient qui est majoré par cet effet de « tamisage » initial du sodium.

L’effet osmotique exercé par les molécules de petit poids moléculaire (osmose cris-talloïde) dépend de la résis-tance que la membrane op-pose à leur transport. Cette résistance est représentée par le coefficient de ré-flexion s qui varie de 0 (pas de restriction de passage, donc pas d’effet osmotique) à 1 (pas de passage ; cas d’une membrane semi-per-méable « idéale »).

Le coefficient de réflexion du glucose est de 1 pour les ultra-petits pores, mais tend vers 0 pour les pores de grande taille. Le coefficient « moyen » de restriction du glucose en DPCA est de l’ordre de 0,02 à 0,05. Pour un coefficient de réflexion de 1, la loi de Van’t Hoff permet de calculer qu’une mosmole de glucose exerce une pression osmotique de 19,3 mmHg. Le gradient de pression onco-tique s’oppose à l’ultrafiltration ; il est limité en cas d’hypoalbuminémie.

Différents systèmes de transport de glucose sont présents dans les cellules mésothéliales . Dans l’intestin et le tube proximal, des systèmes équivalents assurent un transport de glucose suivant son gradient de concentration (transport passif GLUT) ou contre un gradient défavorable (transport actif SGLT) ; l’activité de ces systèmes permet de couvrir les besoins métaboliques et d’assurer une réabsorption trans-épithéliale du glucose. Leur rôle au cours de la dialyse péritonéale reste à établir.

Figure 05 : Le modèle à 3 tailles de pores

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2. Caractérisation de la membrane péritonéale – le PET test

Les rapports de concentration d’une substance dans le dialysat et dans le plasma (D/P) varient au cours de l’échange suivant les effets combinés de la diffusion et de l’ultrafiltration. La mesure des rapports D/P des petites molécules (urée, créatinine, sodium, glucose) constitue la base de l’ana-lyse fonctionnelle péritonéale et de la classification des types de transporteurs. Enfin, en DPCA, le rapport D/P de l’urée est proche de 1 en fin d’échange; il s’ensuit que la clairance péritonéale de l’urée est surtout déterminée par le volume de dialysat (figure 06).

Le test d’équilibration péritonéale (PET) est à la fois un moyen de surveillance de l’intégrité de la membrane péritonéale et un outil d’aide à la prescription. Il est habituellement réalisé après les 3 premiers mois de début de la DP puis à un rythme semestriel ou annuel. En cas de péritonite, il doit être différé de 4 semaines.

Le PET comporte un échange de 4 heures avec une solution de glucose hypertonique faisant suite à un échange nocturne long avec la même solution. Des prélèvements de dialysat et plasma sont réalisés à 0, 2h et 4h pour déterminer les ratios (D/P) de l’urée et de la créatinine et le ratio (D/Do) du glucose. Le ratio (D/P) de la créatinine permet une classification en 4 stades de perméabilité : rapide ou High (0,81 à 1,03) ; moyen-rapide ou High Average (0,65 à 0,80) ; moyen-lent ou Low Average (0,50 à 0,64) ; Lent ou low (0,34 à 0,49). Il existe une variante courte de 2 heures (mini-PET).

Plus généralement, pour chaque substance dissoute, le coefficient de tamisage (Sieving, S), re-flète l’importance du transport convectif (transport de l’eau et des substances dissoutes) . Les deux coefficients S et s sont liés par S = (1 - s). Le coefficient de tamisage S est de l’ordre de 0,6 à 0,7 pour les molécules de petit poids moléculaire.

Figure 06 : Tests fonctionnels péritonéaux, le PET

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3. Paramètres de transport et dialyse péritonéale à long terme

A long terme, l’exposition prolongée du péritoine aux solutions de dialyse et la répétition des épi-sodes de péritonite entraînent des altérations morphologiques et fonctionnelles du péritoine. La di-minution ou la disparition de la couche mésothéliale et le développement d’une inflammation, d’une fibrose et d’une vasculopathie péritonéales sont bien caractérisés. Ces altérations s’accompagnent d’une perte d’ultrafiltration (UF) qui est présente chez plus de 30 % des patients après 6 ans de DP.

Une augmentation des paramètres de transport des petites molécules (rapports D/P, MTAC) peut être mesurée, suggérant le rôle de l’augmentation de la surface d’échange vasculaire et du déve-loppement pathologique de néo-vaisseaux péritonéaux. Les mécanismes de la perte d’UF sont le plus souvent intriqués et complexes, associant de manière variable une augmentation de la réab-sorption lymphatique et une baisse de la conductance osmotique du glucose.

L’utilisation pour le PET d’une solution hypertonique à 3,86% amplifie le tamisage du sodium et permet de mieux analyser la fonction de transport de l’eau libre dépendante des aquaporines. Enfin, un volume d’ultrafiltration de moins de 400 cc obtenu après un échange de 4 heures avec 2 litres de solution hypertonique définit la situation de perte d’ultrafiltration.

Un transport rapide permet une bonne épuration mais une absorption importante de glucose et une ultrafiltration limitée ; les échanges longs de solution glucosée sont alors déconseillés. Au contraire, en cas de transport lent, la réabsorption de glucose est limitée ; les échanges longs sont recommandés.

Figure 07 : Perméabilité péritonéale

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RÉFÉRENCESLONGITUDINAL RELATIONSHIP BETWEEN SOLUTE TRANSPORT AND ULTRAFIL-TRATION CAPACITY IN PERITONEAL DIALYSIS PATIENTS

SIMON J. DAVIESDepartment of Nephrology, University Hospital of North Staffordshire, Stoke-on-Trent, Stafford-shire, United Kingdom; and Institute of Science and Technology in Medicine, Keele University, Keele, Staffordshire, United KingdomThe Pathophysiology of the Peritoneal MembraneOlivier Devuyst,* Peter J. Margetts,† and Nicholas Topley‡

NEW INSIGHTS INTO THE PHYSIOLOGY OF PERITONEAL FLUID TRANSPORTRaymond T. Krediet,1 Annemieke M. Coester,1 Alena Parikova,1,a Watske Smit,1,2 and Dirk G. Struijk1,2

Division of Nephrology,1 Department of Medicine, Academic Medical Center, University of Amster-dam and Dianet Foundation Amsterdam/Utrecht,2 Netherlands

EVALUATION OF PERITONEAL MEMBRANE CHARACTERISTICS: A CLINICAL ADVICE FOR PRESCRIPTION MANAGEMENT BY THE ERBP WORKING GROUP

Wim van Biesen1, Olof Heimburger2, Raymond Krediet3, Bengt Rippe4, Vicenzo Lamilia5,Adrian Covic6, Raymond Vanholder1 and for the ERBP working group on peritoneal dialysis1Renal Division, University Hospital Ghent, Ghent, Belgium, 2Dept of Clinical Science, Karolinska Institute, Stockholm, Sweden,3Division of Nephrology, Academic Medical Center, Amsterdam, the Netherlands, 4Dept of Neph-rology, University Hospital of Lund,Lund, Sweden, 5Dept of Nephrology and Dialysis, A. Manzoni Hospital, Lecco, Italy and 6Nephro-logy Clinic, Parhon UniversityHospital, Iasi, Romani

THE PATHOPHYSIOLOGY OF THE PERITONEAL MEMBRANEOlivier Devuyst,* Peter J. Margetts,† and Nicholas Topley‡

*Division of Nephrology, Universite catholique de Louvain Medical School, Brussels, Belgium; †Division of Nephrology,St. Joseph’s Hospital, Department of Medicine, McMaster University, Hamilton, Ontario, Canada; and ‡Department ofInfection, Immunity and Biochemistry, School of Medicine, Cardiff University, Cardiff, Wales, United Kingdom