Prevost-Paradol - Etude Sur Etienne de La Boetie [1864]

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Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France Étude sur Étienne de La Boétie, par M. Prévost- Paradol, publiée à l'occasion d'une fête de charité donnée à Sarlat le 31 [...]

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Prevost-Paradol - Etude sur Etienne de La Boetie [1864]

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Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Étude sur Étienne de LaBoétie, par M. Prévost-

Paradol, publiée à l'occasiond'une fête de charité donnée à

Sarlat le 31 [...]

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Prévost-Paradol, Lucien-Anatole (1829-1870). Étude sur Étiennede La Boétie, par M. Prévost-Paradol, publiée à l'occasion d'unefête de charité donnée à Sarlat le 31 juillet 1864. 1864.

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ETUDE

SUE

ETIENNE DE LA BOÉTIE

PAR M. PRÉVOST-PARADOL,

PUBLIÉE

Prix : 1 franc.

PERIGUEUX

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LA BOETIE.

I.

Les lettres ont comme la guerre leurs héros enlevés àla fleur de l'âge et au milieu de leur première victoire.Elles peuvent montrer leurs Hoche, leurs Marceau, leursDesaix, qui ont traversé si vite la scène du monde, que lagloire a eu à peine le temps de toucher leur front et queleur vie, pleine de promesse, n'a été qu'une belle aurore.La Boétie, qui reçoitaujourd'hui de ses concitoyens un siglorieux hommage, est un des plus attrayants parmi cesillustres morts, et il est peu de figures sur lesquelles nosregards puissent aujourd'hui s'arrêter avec plus de pro-fit pour nos âmes.

C'est le souvenir de La Boétie qui a inspiré a Montai-gne les pages les plus touchantes qui soient sorties de saplume. Si ce traité de la Servitude volontaire qui a donnéà Montaigne le désir de le connaître et qui a conduit cesdeux belles âmes à l'intimité la plus douce eût été dé-robé, comme il a failli l'être, à la postérité, le nom de LaBoétie n'en serait pas moins immortel, grâce à cettepein-ture achevée de l'amitié que Montaigne a placée sous soninvocation et inséparablement confondue avec sa mé-moire. Le chapitre sur l'amitié ne pouvait périr, et lenom de La Boétie ne pouvait plus en être arraché ; il estpour ainsi dire la sève de ce bel arbre, le plus gracieuxpeut-être de cette riche et capricieuse forêt des Essais,au milieu de laquelle il s'élève ; on sent qu'il est habitépar une âme encore plaintive ; on croit voir, en l'appro-chant, un de ces lauriers ou de ces cyprès dans lesquelsles dieux de l'Olympe enveloppaient doucement à leurdernière heure les mortels aimés qu'ils ne pouvaientem-pêcher de mourir.

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— 2. —Montaigne nous peint donc d'un même trait, dans ce

chapitre, l'amitié la plus parfaite que les hommes puis-sent concevoir et l'amitié qui l'unissait à La Boétie. C'estpour lui qui écrit et pour nous qui le lisons une seule etmême chose. Rien n'y a manqué : ni, cette inclinationmytérieuse, antérieure à toute rencontre, qui les faisait« s'embrasser par leurs noms » avant de s'être vus, nicette prompte attraction des âmes qui les fit se confon-dre au point d'anéantir leurs volontésparticulières en lesplongeant l'une dans l'autre et en les transformant enune seule ; si bien qu'il leur eût été difficile de s'y recon-naître et de savoir qui des deux avait voulu le premierou voulu d'avantage ce qu'ils voulaient toujours ensem-ble, de n'est point l'amitié qui unit le fils au père, et quiest limitée par des réticences aussi bien que tempéréepar le respect ; ce n'est point l'amitié du frère pour lefrère mêlée à l'idée du devoir et imposéepar la communeorigine ; c'est encore moins l'amitié de l'homme et dela femme, qui n'échappe guère à l'amour, soit que l'a-mour s'y mêle pour la détruire un jour, soit qu'il l'im-portune et la combatte en attirant l'âme ailleurs. Non,c'est l'amitié toute pure, forte de sa simplicité, fière deson libre choix, sûre de l'emporter sur tout et de survivreà tout. Dans ce libre et noble commerce, les mots de bien-faits, d'obligation,de remercîments, de reconnaissancen'ont plus de pouvoir, ni de significationmême, et l'on ygoûteun bonheurplein et tranquille,inimagninable a ceuxquitterontpoint connu. Montaigne et La Boétie n'ont jouique quatre ans de ce bonheur. Ce fut une courte amitié,et l'on eut dit, à voir son ardeur, qu'elle se sentait me-nacée de près par la mort. Elle était en même temps ani-mée et ennoblie par ce souffle de la renaissance et parcette jeune émulation avec toutes les grandeurs du mon-de antique qui enflammait alors tant de belles âmes :

« Je vous avais choisi parmi tant d'hommes, disait LaBoétie à Montaigne sur son lit de mort, pour renouve-ler avec vous cette sincère et vertueuse amitié de la-quelle l'usage est par les vices dès si longtemps éloignéd'entre nous, qu'il n'en reste que quelques vieilles tracesen la mémoire de l'antiquité. » Cette amitié était à l'é-

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— 3..preuve de tout et bravait les distractions de l'amour.Montaigne nous dit, dans un superbe langage, que de

ses deux passions l'une maintenait sa route d'un volhautain et superbe et regardait dédaigneusement passerl'autre au-dessous d'elle. Pour LaBoétie, on n'écrit point

sans avoir aimé quatre vers comme ceux-ci :

J'ai vu ses yeux perçants,j'ai vu sa face claire;Nul jamais sans son dam ne regarde les dieuxjFroid, sans coeur, me laissa son oeil victorieux,Tout étourdi du coup de sa forte lumière ;

mais il n'est pas douteux que Montaigne n'ait possédéaprès tout et jusqu'au bout le meilleur de cette belleâme.

Ils étaient faits pour s'entendre ; même amour du beau,même goût pour l'antiquité, même modération en touteschoses. Après la mort prématurée de son ami et toutdésireux qu'il est d'honorer sa mémoire, Montaignerenonce à publier la Servitude volontaire, parce qu'elle adéjà servi de texte à ceux qui veulent troubler l'Etatsans savoir s'ils pourront l'amender. Et nous entendonsLa Boétie, près d'expirer, exhorter doucement le frèrede Montaigne, M. de Beauregard, à fuir les extrémitésetà ne point se montrer âpre et violent dans son désir sin-cère de réformer l'Eglise. Mais, malgré ce commun éloi-gnement pour toutes les apparences d'excès, il y avait enLa Boétie une certaine ardeur d'ambitionet un penchantà intervenir dans les affaires humaines, qui manquaientà Montaigne. II avait plus de confiance, ou, si l'on veut,il se faisait plus d'illusion sur la possibilité de donner al'intelligenceet à l'honnêtetéun rôle utile dans les diversmouvements de ce monde. Montaigne nous avoue queson ami eut mieux aimé être né à Venise qu'à Sarlat ;plus explicite encore dans une lettre au chancelier del'Hôpital, il regrette que La Boétie ait « croupi aux cen-dres de son foyer domestique,» au grand dommage dubien commun. Ainsi, ajoute-t-il, sont demeurées oisivesen lui beaucoup de grandes parties desquelles la chosepublique eût pu tirer du service et lui de la gloire. On.croirait volontiers entendre dans ce regret le murmure

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— 4 —de La Boétie s'exhalant après sa mort par cette bouchefraternelle; mais lui-même enlevé, comme Vauvenarguesdevait l'être un jour à la fleur de l'âge, laisse échapperen mourant ce que Vauvenargues avait répété toute savie : « Par adventure, dit-il a Montaigne,n'étois-je pointné si inutile que je n'eusse moyen de faire service à lachose publique ? Quoi qu'il en soit, je suis prêt à partirquand il plaira à Dieu. »

Rien de plus tranquille ni de plus beau, rien de pluspropre à servir de soutien et d'exemple que cette mort,telle que nous l'a peinte Montaigne qui en était le témoinet qui se voyait lentement arracher la moitié de lui-même. La grandeur d'âme s'y montre à découvert, nonpoint par de vifs éclats et par d'orgueilleuses pensées,mais avec une lumière égale et constante que nos yeuxpeuvent endurer, qui élève notre esprit sans secousse etqui nous réchauffe le coeur. Noire façon d'accueillir lamort dit mieux que tout le reste de nos actions ce quenous sommes ; la fin de la Boétie est de celles qui hono-rent l'espèce humaine; la mort venant avant son heurefut rarement acceptée et embrassée de meilleure grâce.Il remplit ses derniers devoirs envers tout le mondecomme envers Dieu, il se résigna à toutquitter sans ces-ser d'aimer ceux qu'il aime; il exhorte, il console, il estcourageuxet tendre ; il cite les anciens et il est plein del'Evangile; ce que l'antiquité a de plus ferme, ce que lechristianisme a de plus humble et de plus doux se ren-contre dans son coeur et sur ses lèvres ; rien ne lui man-que enfin de ce que l'humanité a trouvé de plus noble etde meilleur pour se soutenir à travers cet obscur passageet pour s'encourager à regarder au delà, afin de le mieuxfranchir.

Tel était l'homme qui, dans la première ferveur de lajeunesse, a écrit en l'honneur de la liberté contre les ty-rans, comme dit Montaigne, cet éloquent traité de laServitude volontaire. Bien que l'inspiration de l'antiquitéy soit à chaque pas reconnaissable, ce n'est point un deces traités dogmatiques à la façon des anciens, dans le-quel on rechercherait avec méthode la nature de la ser-vitude et l'explication de ses causes ; c'est une pure in-

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— 6 —vective contre la lâcheté des peuples trop prompts àrendre leurs armes à la tyrannie et à s'endormir dansl'obéissance. Le jeune discoureur ne peut revenir de lasurprise que cet aveuglement lui cause. Qu'un seulhomme, et le plus souvent le moins redoutable et lemoins respectable de tous, selon l'ordre de la nature etde la raison, soit accepté ou plutôt subi pour maître,qu'on lui abandonne ses biens, sa liberté et parfoisl'honneur des siens et son propre honneur, tout ce quifait enfin le prix de la vie, comment cela peut-il sefaire ? par quel renversementdes instincts naturels un sitriste prodige peut-il s'accomplir et durer ? Il n'a pour-tant que deux yeux, deux mains comme les autres, maisce sont précisément les mains et les yeux de ceux qui leservent avec trop de complaisance qui lui donnent surtous cet irrésistible empire. « Comment donc, s'écrie La» Boétie, vous oseroit-il courir sus, s'il n'avait intelli-» gence avec vous-mêmes ? Que vous pourroit-il faire» si vous n'étiez receleurs du larron qui vous pille, com-» plices du meurtrier qui vous tue et traîtres de vous-» mêmes î Vous semez vos fruits afin qu'il en fasse le» dégast, vous meublez et remplissez vos maisons pour» fournir à ses voleries, vous nourrissez vos filles afin

» qu'il est de quoi saouler sa luxure, vous nourrissezvos» enfants afin qu'il les mène pour le mieux qu'il fasse en» ses guerres, qu'il les mène à lu boucherie, qu'il les

» fasse les ministres de ses convoitises, les exécuteurs» de ses vengeances... » Et cependant les bêtes mêmesessaient de se défendre contre celui qui veut les conqué-rir; elles crient liberté dans leur langage, mais l'hommesoutient lui-même son maître et ne peut prendre seule-ment sur lui de le laisser tomber.

De tous les maîtres qu'il peut avoir, le pire, selon LaBoétie, ce n'est point celui qui règne par droit de con-quête et qui abuse sans scrupule de son butin, ce n'estpoint celui qui a reçu son peuple comme un héritage etqui le traite en naturel esclave ; c'est celui qui a leroyaume par l'élection du peuple, à qui le peuple lui-même a donné l'Etat. » Il est le pire, dit La Boétie, parceque, résolu à ne « point bouger » du sommet où l'on l'a

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mis,et décidé « à rendre à ses enfants la puissance quele peuple lui a baillée s, il a plus à faire que les autrespour « estranger ses sujets de la liberté encore que la» mémoire en soit fraîche. » Sa tâche est donc plus diffi-cile que celle des autres; aussi est-il réduit à l'exécuteravec plus d'énergie et plus de violence.

Mais la faiblesse de la nature humaine lui vient enaide, et ceux-là même qui ont d'abord servi par forces'accoutument par degrés à servir. Tout va mieux encorequand est éteinte la génération qui a vu la liberté et quepour les nouveaux venus ce n'est plus qu'un mot vide desens. « Ceux qui, en naissant, se sont trouvés le joug aucol, ne s'aperçoivent point du mal. » Mais ils ont perdutout ce qui fait la dignité de l'homme, et quand on va deVenise à Constantinople, « n'estimerait-on pas que sor-tant d'une cité d'hommes on est entré dans un parc debêtes? » Deux choses entretiennent cette tyrannie, unefois fondée, l'ignorance et le goût des vils plaisirs. Ilfaut donc proscrire «les livres et la doctrine qui donnent» plus que toute autre chose aux hommes le sens de se» reconnaître et de haïr la tyrannie » ; il faut de plusleur prodiguer les divertissementsles plus capables de lesénerver et de les étourdir^G'est ainsi que Cyrus, maîtrede Sardes, y établit avant tout des tavernes, des théâtres,des jeux et tout ce qui pouvait favoriser le goût des plai-sirs, et « il se trouva si bien de cette garnison » mise dansSardes, qu'il n'eut plus besoin d'y tirer l'épée. De mêmeà Rome, où les « théâtres, les jeux, les farces, les gladia-

» teurs, les bêtes étranges, les tableaux et autres telles» drogueries étoientles appasts de la servitude. » La ty-rannie n'est pas toujours aussi sincère dans son desseind'efféminer les hommes, mais La Boétie assure que « sousmain » elle ne « pourchasse » jamais autre chose. Et cesuccès une fois obtenu, qui dira l'abêtissement sous le-quel sert et languit cette multitude 1 Les choses les plusclaires lui échappent, et il n'est rien qu'on ne puisseattendre de sa stupidité : « Tel, dit La Boétie, eut amassé

» aujourd'hui le sesterce (jeté au peuple), tel se fut gorgé» au festin public en bénissant Tibère et Néron de leur

i belle libéralité,

qui le lendemain estant contraint

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» d'abandonner ses biens à l'avarice, ses enfants à la» luxure, son sang même à la cruauté de ces magnifiques

» empereurs, ne disoit mot non plus qu'une pierre et ne» se remuoitnon plus qu'une souche. » Bienplus, la fouledispense la plus entière popularité, elle garde son meil-leur souvenir non-seulement à Jules César, qui « donnacongé aux lois.et à la liberté.», mais à Néron lui-même,non-seulement à ceux, qui ont fondé la servitude, mais àceux qui l'ayant trouvée établie en' ont le plus abusé.

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— 8 —ciel et gardonsnotre honneur avec l'aide de Dieu, qui nesaurait aimer l'avilissement de ses créatures.

Telest ce traité, qui n'est, à vrai dire, qu'un cri élo-quent contre la servitude, mais qui nous explique à peineen quoi elle consiste et qui est bien loin de nous donnerla raison véritable de son existence. Ce n'est point, eneffet, nous découvrir le ressort du pouvoir despotiqueque de nous dire seulement qu'il intéresse de proche enproche un grand nombre d'hommes à son maintien et àsa prospérité. Il y a des causes plus profondes à ce fléaulorsqu'il se déclare dans une société humaine et qu'il laconsume. Il revêt des formes diverses, il parle diverslangages, il agit de diverses manières, et si La Boétie asaisi au vif quelques-uns de ses caractères les plus géné-raux et les plus durables, il est bien d'autres traits im-portants de sa physionomie qu'il a laissés dans l'ombre.Il n'apoint cherché où commence la tyrannie, où finit lepouvoir légitime, nécessaire au maintien de toute sociétéhumaine ; il n'a rien dit qui pût nous aider à entrevoiren quel moment, de quelle façon la juste obéissancequ'une créature raisonnable peut comprendre et souffrirperd son nompourprendre le nom honteux de servitude.En un mot, il soulève plus de questions qu'il n'en résout,et en agitant avec une éloquence si brûlanle ce tristesujet de méditation pour les plus nobles intelligences, ilnous instruit moins qu'il ne nous oblige à penser. Fran-chissons donc les bornes un peu étroites de ce discourset cherchons nous-mêmes ce que c'est véritablement quela servitude, à quoi on peut la reconnaître et d'où ellevient.

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— 9 —

II.

Si la servitude n'était fondée, comme La Boétie paraitle croire, que sur l'abêtissement du grand nombre et surl'intérêtpersonneldes malhonnêtes gens, groupés autourd'un pouvoir despotique, elle n'aurait aucune chance dedurée, et on ne la verrait jamais longtemps abaisser etravager un peuple. Elle a des fondements plus solides, etsi l'on étudie de près ce qui la soutient, on découvrira,comme il arrive le plus souvent, une parcelle de justiceet de vérité qui prête sa force à un échafaudage de men-songes. Rien de complètement faux et d'absolument mau-vais ne peut se soutenir dans le monde, et c'est dans unmélange, à la vérité fort inégal, de mal et de bien qu'ilfautchercher la raison de tout fléauqui dure.L'obéissanceest la condition inévitable et l'indispensable lien de toutesles sociétés humaines ; c'est cette obéissance juste et né-cessaire qui, altérée dans ses traits essentiels et détour-née de son but légitime, devient la servitude. Mais alorsmême que cette obéissanceest ainsi gâtée et déshonorée,alors même qu'elle a changédenomaux yeux de tousceuxqui pensent, elle n'en garde pas moins une partie de savertu parce qu'alors même on la sent nécessaire et qu'onne peut songer à s'en passer. L'art de la tyrannie con-siste à confondre cette obéissance avec la servitude aupoint que les deux choses paraissent n'en faire plusqu'une seule et que le vulgaire devienne incapable de lesdistinguer. Les gens sages ne s'y trompent pas aussiaisément que le vulgaire, mais ils peuvent désespérer deséparer deux choses si adroitement mêlées ; et s'ils nevoient aucun moyen de rendre à l'obéissance, sans la-quelle la société ne peut vivre, sa noblesse et sa pureténaturelles, les plus honnêtes d'entre eux peuvent êtretentés de l'endurer sous la forme mensongère et pesantequ'on lui a donnée, plutôt que d'ébranler inutilementtout l'Etat. C'est ce genre de résignation qui s'estappelé danstous les tempset dans toutesleslangues,préfé-rer la servitude à l'anarchie ; et cette expression si familière

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— 10 —n'exprime pas autre chose qu'un certain désespoir dedégager l'obéissance raisonnable et nécessaire de l'obéis-sance déréglée et honteuse avec laquelle on l'a trop ha-bilement confondue. Ce désespoir ou, si l'on veut, cettedéfiance d'eux-mêmes et de la fortuné poussée jusqu'à larésignation que les honnêtes gens peuvent ressentir estdonc le fondement véritable de toute tyrannie qui sub-siste un certain temps sur la terre. Elle ne se soutient,comme La Boétie l'a clairement vu, que si on l'endure ;mais on ne l'endure que par le désespoir d'y porter re-mède ou, ce qui revient au même, par la crainte d'en-courir un mal plus grand encore en essayant de s'enaffranchir. Et ceux qui aiment à réfléchir peuvent com-prendre ici, sans qu'il soit besoin de s'y arrêter, pour-quoi la servitude ne peut guère être accompagnée, chezles peuples qui l'endurent, d'aucune générosité de senti-ments, d'aucun bel effort de génie ou de vertu, pour-quoi il y a une guerre secrète et perpétuelle entre elleet tout ce qui élève ou enhardit le coeur de l'homme :c'est qu'elle provient avant tout du découragement del'âme humaine, de l'impuissance qu'elle se reconnaît ouse suppose, et que par là elle tient de près aux idées etaux sentiments les plus propres à nous énerver et ànous allanguir.

J'ai dit sur quoi repose la servitude et dans quel senselle mérite, en effet, le nom de volontaire.En quoi cepen-dant consiste-t-elle elle-même? A quel moment peut-ondire qu'elle existe, à quel signe peut-on reconnaître quela limite de l'obéissance raisonnable est franchie etqu'une société humaine, détournée du droit chemin parles événements ou par une main coupable, a fait lepremier pas vers les tristes et malsaines régions del'esclavage? Cette limite qui sépare l'obéissance né-cessaire et légitime de la servitude est variable,selon les lieux et les temps, selon l'état des socié-tés qui ont besoin de plus ou moins de disciplinepour se soutenir, selon l'état des âmes qui peuvent ac-corder plus ou moins d'obéissance sans s'abaisser. Necroyez point cependant vous échapper par ce chemin,apologistes de la servitude, en vous écriant que cette con-

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— 11 _cession suffit, qu'il est des sociétés où ce que nous enten-dons par despotisme est nécessaire,et que ce motmêmeest vide de sens puisqu'il peut s'appliquer à des étatstout différents. Oui, la limite de l'obéissance légitime estvariable, et ce qui pourrait être servitude à Paris ou àLondres pourrait ne point l'être à Constanlinople ou àIspahan ; mais si cette limite est variable, on n'en est

que plus certain de la bien connaître où l'on se trouve,et par sa flexibilité même elle échappe à ces chancesd'erreur que les règles trop absolues ne peuvent guèreéviter. Du reste, cette flexibilitén'exclutpas toute règle,et il est des signes constants auxquels la servitude peutse reconnaître. On peut dire qu'elle existe lorsqu'un peu-ple est tenu éloigné du degré de liberté dont il est évi-demment capable,' ou mieux encore lorsqu'il est privéde la liberté dont il a joui pendant un temps assez longd'une façon régulière. Il est certain, par exemple, qu'ense refusant à l'extension des privilèges du Parlementaussi bien qu'au maintien de quelques-uns de ses anciensdroits, Charles Ier tendait doublement à mettre le peupleanglais en servitude, et que la révolution qui l'a renverséfut légitime. Il est plus évident encore qu'en « donnantcongé, selon l'expression admirable de La Boétie, auxlois et à la liberté », c'est-à-dire en confondant dansleur main tous les pouvoirs, en se déclarant tribunsperpétuels du peuple, en présentant leurs candidats auxfonctions consulaires et en faisant des comices une for-malité vaine, César et Auguste ont efficacement, et pourtoujours, réduit le peuple romain en servitude.

Mais j'entends déjà qu'on triomphe de ce dernierexemple, et qu'on s'écrie : Si ce changement d'état étaitnécessaire chez le peuple romain comme il peut l'êtrepour d'autres, pourquoi le déplorer comme un malheur,pourquoi le reprocher comme un crime à ceux qui l'ontaccompli? Pourquoi parler de tyran et de servitude? —Je demanderai à mon tour pourquoi les choses inévita-bles changeraient de nom et de valeur parce qu'ellessontinévitables, et pourquoi l'asservissement d'un peuplecesserait d'être un malheur et un crime parce que sesfautes, ses discordes; sa mollesse, l'ont irrévocablement

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— 12 —jeté sur cette funeste pente et l'ont précipité vers cetabîme. Ni le peuple qui s'est mis dans cet état de souffriret parfois d'invoquer comme un bien relatif un mal pro-rfond et incurable, ni les hommes qui ont été choisis parla destinée ou qui se sont sentis appelés par leur perver-sité naturelle à inoculer ce poison à leur patrie ne sontinnocents et encoremoins recommandables, par cela seulque les uns et les autres se sont laissé aller au courant quiles poussait tous ensemble. On voit et il se passe sur lavaste scène du monde bien des choses inévitables dontla nécessité ne peut atténuer la laideur : la servitude estde ce nombre et aussi le tyran qui doit paraître en mêmetemps qu'elle ; il n'y a point cependant de servitude ho-norableni de tyran innocent, et de tels mots ne s'accor-deront jamais dans les langues humaines. Nulle sociéténe s'est encore passée de supplices ; qui a jamais mis sagloire à être bourreau ? Je ne sais s'il faut ajouter foi auxprédictions flatteuses qu'on nous prodigue sur l'avenirde notre race; je ne sais si nos descendants jouiront,comme on l'assure, d'une paix profonde et d'une invio-lable liberté répandues sur toute la terre ; mais aussilongtemps que le monde verra ce qu'il a toujours vu de-puis qu'il existe : des Etats se former et périr, des socié-tés se civiliser et se corrompre, des peuples s'élever à laliberté, s'y maintenir un certaintemps,puis s'abîmer dansla servitude, on aurabeau remarquerou prétendrequ'uneloi supérieure à tous nos efforts provoque périodique-ment et ordonne ces décadences, il sera toujours beau des'en défendre, coupable d'en profiter, honteux d'y con-courir. Ne nous est-il pas aussi ordonné à tous de mou-rir, un jour? Ne devons-nouspas tous retourner enpous-sière ? Et cependant le mal qui termine notre vie est unfléau, et celui de nos semblables qui nous l'arrache unmeurtrier.

Etre tenu éloigné de la liberté dont on est capable ouprivé de celle dont on a joui, voilà donc les signes cons-tants de la servitude ; mais afin qu'il ne subsiste aucuneobscurité dans ces sortes de choses et que notre mol-lesse n'ait point d'excuse, un signe intérieur nous a étédonné qui nous avertit, à ne pouvoir nous y méprendre,

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— 13 —de notre état de servitude. C'est l'humiliation que nousressentons en accordant à notre semblable plus d'obéis-sance qu'il ne lui en est dû selon l'ordre de la nature etde la raison. Cette humiliation intérieure est pour ainsidire d'ordre divin, en ce sens qu'elle est inévitable et in-volontaire et que l'homme le plus dévoré de la passionde servir sait qu'il sert, et se méprise au-dedans de lui-même presque autant qu'il le mérite. Enfin, cette honteinstinctive est si bien le signe moral de la servitude,qu'elle suit la servitude à travers ses transformations lesplus diverses, et est enfermée, comme elle, dans des li-mites variables selon les lieux et les temps. Un honnêtehomme de la cour de notre roi Louis XIV pouvait, parexemple, ne point se sentir humilié de certains actes dedéférence que le plus vil courtisan de nos jours hésite-rait à remplir envers le plus adulé des souverains mo-dernes ; d'un autre côté, ce Français du dix-septièmesiècle n'aurait pu supporter l'idée de témoigner à cegrand roi le respect abject en usage chez les Mèdes etles Perses. Cette humiliation intérieure est donc variablecomme la servitude, et elle avertit que la servitude existeparce qu'elle ne paraît dans l'âme que si l'acte commisest réellementservile par rapport au lieu et au temps quile voient se produire ; mais rien alors ne peut l'empê-cher de paraître et de crier à la conscience de l'hommequ'il est esclave et qu'il se résigne à l'être. Cette voixde la dignité humaine mortellement blessée s'entend plusaisément que jamais si la servitude est nouvelle et si lesouvenir d'un état meilleur est récent, parcequela compa-raison, impossible à éviter entre le présent et un passé sivoisin rappelle sans cesse à l'hommequ'il sert et qu'il esthonteux de servir. Plus la servitude est donc incontes-table et réelle, plus cette humiliation,, qui en est le signe,est importune et vive, plus il est interdit à l'homme des'y méprendre ou de l'oublier. En général, loin de luidonner le désir d'être meilleur, .cette humiliation cons-tante le rend pire ; car une fois que l'homme a de bon-nes raisons pour se mépriser lui-même et qu'il en prendson parti, il devient capable de tout. La Boétie a doncbien fait de remarquer que la servitudenouvellementéta-

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blie devenait aisément la pire de toutes, et qu'en ce genrede chute on tombe d'autant plus lourdement qu'on tombede plushaut.

Ne perdons point de vue cette limite variable de la ser-vitude, et accoutumons-nousà ne point regarder la ty-rannie comme inséparable de ces images violentes etgrossières dont les moeurs des anciens, le peu d'étendueet le peu d'unité de leurs Etats l'avaient entourée. Lafemme de bois et de clous de Nabis qui meurtrissait enles serrant dans ses bras les plus riches citoyens deSparte asservie jusqu'à ce qu'ils eussent fait l'abandonde leur fortune, serait un meuble fort inutile dans lestemps modernes où la collection régulière et savante desimpôts peut suffire à tous les besoins. L'arbitraire desexécutions dans l'ancienne Rome, les ordres de mortenvoyés par le prince, le centurion et son glaive, la lan-cette du médecin grec et l'effusion volontaire du sangdans l'eau tiède sont des vieilleries bonnes pour cestemps inhabiles où la puissance souveraine devait sup-pléer par la terreur à l'imperfection de ses instruments,où l'on ne connaissait pas l'art devenu vulgaire de toutembrasser, de tout contenir, de tout courber, d'étendresur tous et partout comme un réssau vivant d'autorité.Bien plus, une société peut n'être en proie ni au meurtre,ni au pillage, les droits de chacun peuvent être mêmejusqu'à un certain point respectés, et cette société peutcependant, par la violation évidente du droit de tous,être réduite et maintenue en servitude. Prenons unexemple qui nous soit familier et considérons un instantl'Angleterre. Deux sortes de droits y existent aujourd'huiet s'y appliquent sans être contestés par personne. Lepremier, que j'appellerais volontiers le droit personnel,consiste en ce point, que chaque Anglais a des garantiesfortes et nombreuses de n'être lésé par le pouvoir ni dansses biens ni dans sa personne ; le second, qui mérite lenom de droit national, consiste en ceci, que le peupleanglais décide souverainement, par le moyen de sonParlement et des ministres qui en dépendent, de la poli-tique extérieure et intérieure du pays. N'est-il pas aiséde concevoir et d'imaginer un concours de circonstances

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— 4§ —qui, sans porter atteinte aux droits personnels de chaqueAnglais, les priverait tous ensemble de leur droit na-tional ? Ne peut-on supposer un nouvel état de chosesoù leurs ministres ne relèveraient plus de leurs assem-blées, où la décision en temps opportun de leurs plusgrandes affaires serait enlevée à leur Parlement, où ceParlement enfin, atteint dans sa formation par l'inter-vention excessive et prépondérante du pouvoir central,ne serait plus que l'ombre de lui-même ? Certes, l'An-gleterre, après ce grand changement, ne ressembleraitpas tout d'un coup à l'ancienne Rome ou à la Syracusede Denis-le-Tyran. On pourrait y vivre avec sécurité, ytrafiquer avec liberté, y jouir de ses biens, les échanger,les transmettre ; on pourrait même parler de temps àautre de la marche des affaires publiques et s'en plain-dre, faire même semblant d'élire et semblant de discuter;mais l'histoire qui va aufond des choses, et qui ne se paiepas de mots dirait qu'à partir de tel jour la mesure d'o-béissance que le peuple anglais devait à son gouverne-ment a été franchie, en d'autres termes que l'Angleterrea été ce jour-là réduite en servitude ; et le coeur humiliéde chaque Anglais le lui dirait à lui-même avec cetteinsistance et cette clarté dont nous parlions tout àl'heure.

Il suffit maintenantque cette tyrannie existe, ou, si l'onveut, que cette suppression d'une liberté capitale de faitet de droit ait été accomplie pour qu'aussitôt on retrou-ve dans la société qui aurait éprouvé ce malheur tous lescaractères que La Boétieareconnus et signalés dans l'étatde servitude. C'est une éternelle vérité que l'image decette chaîne, rattachant au tyran tous ceux qui partici-pent à son pouvoir et en profitent, -depuis le plus arro-gant jusqu'aumoins redouté ; c'est une vérité que les piressont tout d'abord attirés vers lui comme les humeurs ducorps autour d'une plaie qui le dévore ; c'est une véritéque la foule ignorante est portée à,l'aimer en raison deson despotisme même, et à faire de son pouvoir illimitéle centre unique de ces espérances sans bornes et de cevague désir du mieux qui couvent toujours au sein desmultitudes; c'est une vérité qu'un tel régime est favora-

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— 16 —ble à tous les genres de plaisirs qui peuvent distraire leshommes de leurs devoirs envers eux-mêmes ; c'est enfinune éternelle vérité (et la plus honorable pour la naturehumaine) que ceux qui se refusent à ces distractions vai-nes et qui ne se laissent point aller à ce joyeuxdélire sontsuspects, comme ceux dont la pâleur déplaisait à César,de chercher àgarder la dignitéde leur âme et deregretterla liberté perdue.

Quiconque a exprimé avec bonheur une de ces véritésqui ne changent point et que chaque pas de l'humanitéconfirme, est assuré de vivre dans la mémoire de notrerace, et mérite en effet de n'y point mourir. La Boétieétait un savant et ardent ami de l'antiquité, un poète ai-mable et souvent énergique ; il a fait de beaux vers, il atraduit, avec une grâce digne d'Amyot, l'Economique, deXénophon, la Ménagerie comme il l'appelle d'un nomheureux et juste que nous aurions dû garder ; rien detout cela cependant ne l'aurait fait vivre à travers letemps. Mais Montaigne a écrit sur lui un chapitre desEssais, lui-même il a écrit la Servitude volontaire, et levoilà immortel, car son nom est étroitement uni aux

Jt4. Périgueux. Imp. J. BOUNET, rue d'Angoulême, 18.

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