Prévision hydrologique distribuée pour la gestion des barrages publics du Québec

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Prévision hydrologique distribuée pour la gestion des barrages publics du Québec Richard Turcotte, Pierre Lacombe, Corrine Dimnik et Jean-Pierre Villeneuve Résumé : Les principaux éléments du développement d’un système de prévision hydrologique, adapté au support à la gestion des barrages publics du sud du Québec, sont présentés. Le système opérationnel repose sur l’utilisation de mo- dèles hydrologiques conceptuels distribués fonctionnant à un pas de temps de 3 h. Ce choix apparaît essentiel pour l’émission de prévisions à court terme qui sont adéquates sur les petits bassins versants aux temps de réponse rapides qui alimentent ces barrages. Le rôle des modèles dans l’ensemble du processus d’émission opérationnelle des prévi- sions est aussi mis en évidence. Une application numérique portant sur une forte crue sur la rivière Chaudière en juillet 2001 illustre l’intérêt d’utiliser une modélisation distribuée à pas de temps courts, malgré la lourdeur que cela impose dans le processus de mise en place et d’utilisation du système de prévision. L’analyse de prévisions émises lors de la crue de printemps 2003 montre que la bonification, par le prévisionniste, des simulations brutes émanant des modèles permet d’émettre de meilleures prévisions hydrologiques et peut être améliorée par l’utilisation de modèle distribué. Mots clés : hydrologie, prévisions de débits, modèles hydrologiques distribués, crue. Abstract: The development of a flow forecasting system for public dam management in southern Quebec is presented. The system is based on distributed hydrological models using 3-h time steps to correctly perform short-term forecasts on small watersheds, located upstream of these dams, with quick hydrological responses. The contribution of models in the complete process of forecast evaluation is also studied. A numerical application, using the flood of the Chaudière river in July 2001, illustrated that distributed models with short time steps are needed despite the added complexity in the installation, calibration, and operation of the forecasting system. Also, the analysis of flow forecasted for the Spring 2003 flood shows that interpretation of model runs can lead the operational forecaster to better forecasting of results and can be improved by the use of distributed models. Key words: hydrology, flow forecast, distributed hydrological model, flood. Turcotte et al. 320 1. Introduction Au mois de juillet 1996, une crue est survenue dans la ré- gion du Saguenay au Québec causant de nombreux domma- ges matériels. À titre d’exemple, l’apport maximal journalier au lac Kénogami a alors atteint près de 2000 m 3 /s, soit près de quatre fois le débit maximal annuel journalier moyen des 80 années précédentes. Une Commission scientifique et technique sur la gestion des barrages (1997), faisant l’analyse à posteriori de cet événement, a recommandé la mise en place de mesures visant la réduction des impacts des crues. L’une de ces mesures est la mise en place d’un sys- tème de prévision hydrologique, comme outil de gestion pré- ventive des barrages, pour les bassins versants les problématiques de gestion le justifient. Le Centre d’expertise hydrique (CEHQ; 2001) du minis- tère de l’Environnement du Québec a, parmi ses mandats, la gestion des barrages appartenant au Gouvernement du Qué- bec. Le CEHQ voit actuellement à l’exploitation des barra- ges de contrôle du lac Kénogami ainsi qu’à celle de 33 autres barrages (fig. 1) situés principalement dans le sud du Québec. Ces barrages sont caractérisés par des bassins ver- sants de petite et moyenne superficies (entre 15 et 7500 km 2 , moyenne 1150 km 2 ) avec des temps de réponse relativement courts (moins de 24 h). C’est dans la perspective de favori- ser une gestion efficace de ces barrages, en conformité avec la recommandation de la Commission scientifique et tech- nique sur la gestion des barrages, que le CEHQ effectue do- rénavant de la prévision hydrologique. La combinaison des attentes élevées associées à la mise en place d’un système de prévision hydrologique et les temps de réponse rapides des bassins versants sur lesquels le CEHQ exploite ses barrages impose le recours à un en- semble d’outils avancés de prévision. Entre autres, le CEHQ Can. J. Civ. Eng. 31: 308–320 (2004) doi: 10.1139/L04-011 © 2004 CNRC Canada 308 Reçu le 7 août 2003. Révision acceptée le 29 janvier 2004. Publié sur le site Web des Presses scientifiques du CNRC, à http://rcgc.cnrc.ca, le 31 mars 2004. R. Turcotte, P. Lacombe et C. Dimnik. Centre d’expertise hydrique du Québec, Boîte 20, 675, René-Lévesque Est, Québec, QC G1R 5V7, Canada. J.-P. Villeneuve. Institut national de la recherche scientifique – Eau, Terre et Environnement, Sainte-Foy, QC G1V 4C7, Canada. Les commentaires sur le contenu de cet article doivent être envoyés au directeur scientifique de la revue avant le 31 aôut 2004. 1. Auteur correspondant (courriel : [email protected]).

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Prévision hydrologique distribuée pour la gestiondes barrages publics du Québec

Richard Turcotte, Pierre Lacombe, Corrine Dimnik et Jean-Pierre Villeneuve

Résumé : Les principaux éléments du développement d’un système de prévision hydrologique, adapté au support à lagestion des barrages publics du sud du Québec, sont présentés. Le système opérationnel repose sur l’utilisation de mo-dèles hydrologiques conceptuels distribués fonctionnant à un pas de temps de 3 h. Ce choix apparaît essentiel pourl’émission de prévisions à court terme qui sont adéquates sur les petits bassins versants aux temps de réponse rapidesqui alimentent ces barrages. Le rôle des modèles dans l’ensemble du processus d’émission opérationnelle des prévi-sions est aussi mis en évidence. Une application numérique portant sur une forte crue sur la rivière Chaudière en juillet2001 illustre l’intérêt d’utiliser une modélisation distribuée à pas de temps courts, malgré la lourdeur que cela imposedans le processus de mise en place et d’utilisation du système de prévision. L’analyse de prévisions émises lors de lacrue de printemps 2003 montre que la bonification, par le prévisionniste, des simulations brutes émanant des modèlespermet d’émettre de meilleures prévisions hydrologiques et peut être améliorée par l’utilisation de modèle distribué.

Mots clés : hydrologie, prévisions de débits, modèles hydrologiques distribués, crue.

Abstract: The development of a flow forecasting system for public dam management in southern Quebec is presented.The system is based on distributed hydrological models using 3-h time steps to correctly perform short-term forecastson small watersheds, located upstream of these dams, with quick hydrological responses. The contribution of models inthe complete process of forecast evaluation is also studied. A numerical application, using the flood of the Chaudièreriver in July 2001, illustrated that distributed models with short time steps are needed despite the added complexity inthe installation, calibration, and operation of the forecasting system. Also, the analysis of flow forecasted for theSpring 2003 flood shows that interpretation of model runs can lead the operational forecaster to better forecasting ofresults and can be improved by the use of distributed models.

Key words: hydrology, flow forecast, distributed hydrological model, flood.

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1. Introduction

Au mois de juillet 1996, une crue est survenue dans la ré-gion du Saguenay au Québec causant de nombreux domma-ges matériels. À titre d’exemple, l’apport maximal journalierau lac Kénogami a alors atteint près de 2000 m3/s, soit prèsde quatre fois le débit maximal annuel journalier moyen des80 années précédentes. Une Commission scientifique ettechnique sur la gestion des barrages (1997), faisantl’analyse à posteriori de cet événement, a recommandé lamise en place de mesures visant la réduction des impacts descrues. L’une de ces mesures est la mise en place d’un sys-tème de prévision hydrologique, comme outil de gestion pré-ventive des barrages, pour les bassins versants où lesproblématiques de gestion le justifient.

Le Centre d’expertise hydrique (CEHQ; 2001) du minis-tère de l’Environnement du Québec a, parmi ses mandats, la

gestion des barrages appartenant au Gouvernement du Qué-bec. Le CEHQ voit actuellement à l’exploitation des barra-ges de contrôle du lac Kénogami ainsi qu’à celle de 33autres barrages (fig. 1) situés principalement dans le sud duQuébec. Ces barrages sont caractérisés par des bassins ver-sants de petite et moyenne superficies (entre 15 et 7500 km2,moyenne 1150 km2) avec des temps de réponse relativementcourts (moins de 24 h). C’est dans la perspective de favori-ser une gestion efficace de ces barrages, en conformité avecla recommandation de la Commission scientifique et tech-nique sur la gestion des barrages, que le CEHQ effectue do-rénavant de la prévision hydrologique.

La combinaison des attentes élevées associées à la miseen place d’un système de prévision hydrologique et lestemps de réponse rapides des bassins versants sur lesquels leCEHQ exploite ses barrages impose le recours à un en-semble d’outils avancés de prévision. Entre autres, le CEHQ

Can. J. Civ. Eng. 31: 308–320 (2004) doi: 10.1139/L04-011 © 2004 CNRC Canada

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Reçu le 7 août 2003. Révision acceptée le 29 janvier 2004. Publié sur le site Web des Presses scientifiques du CNRC, àhttp://rcgc.cnrc.ca, le 31 mars 2004.

R. Turcotte, P. Lacombe et C. Dimnik. Centre d’expertise hydrique du Québec, Boîte 20, 675, René-Lévesque Est, Québec,QC G1R 5V7, Canada.J.-P. Villeneuve. Institut national de la recherche scientifique – Eau, Terre et Environnement, Sainte-Foy, QC G1V 4C7, Canada.

Les commentaires sur le contenu de cet article doivent être envoyés au directeur scientifique de la revue avant le 31 aôut 2004.

1. Auteur correspondant (courriel : [email protected]).

doit disposer de résolutions spatiale et temporelle suffisam-ment fines pour capturer les phénomènes météorologiques ethydrologiques générateurs de crue. De même, les temps deréponse rapides des bassins impliquent qu’il est nécessairede focaliser sur la prévision à très court terme (jusqu’à 48 h)de manière à ne pas rater les événements critiques. Le pré-sent texte a pour objectif de décrire les éléments principauxdu développement de système de prévision hydrologique duCEHQ, soit les choix scientifiques, le système informatiqueet le mode d’opération, tout en tentant à la dernière sectiond’analyser certaines caractéristiques critiques du système àl’aide d’illustrations numériques.

On notera finalement que, bien que le CEHQ soit aussiimpliqué dans le développement d’un outil d’aide à la ges-tion de barrage qui nécessite la production de scénarios sto-chastiques de prévisions hydrologiques et de prévisions àlong terme utilisant la climatologie, seule l’approche déter-ministe sur un horizon court terme est présentée ici.

2. Choix scientifiques

Si l’on fait l’hypothèse que le contrôle de l’hydrologuesur les données d’entrée (observations et prévisions météoro-logiques et observations hydrométriques) est faible et queces données agissent comme des contraintes du système, leschoix scientifiques à faire pour le design d’un système deprévisions se font surtout aux niveaux des outils de modéli-sation hydrologique qui permettront d’exploiter adéquate-ment ces données. Si l’on élimine les approches basées sur

une modélisation hydraulique qui suppose une connaissancedu débit en amont du site où l’on désire effectivement fairela prévision, le recours à une modélisation hydrologique,qu’elle soit empirique ou conceptuelle, devient l’option prin-cipale (Lettenmaier et Wood 1992).

Une façon concrète d’aborder les nombreuses approchesde modélisation disponibles (Lettenmaier et Wood 1992;Fortin et al. 1997) est de considérer l’horizon temporel pourlequel des prévisions sont désirées. Fortin et al. (1997) ontfait l’exercice d’identifier les forces et les faiblesses des dif-férents types de modélisation pour un horizon à court terme(jusqu’à 7 jours). Ils indiquent que les approches empiriquescomme celles de Box et al. (1994), des plus proches voisins(Shamseldin et O’Connor 1996) et voir même de réseaux deneurones artificiels (Coulibaly et al. 1999) sont réputéesavoir le potentiel de bien performer sur un court horizon detemps. Dans le cas des deux premières approches, elles sontaussi réputées faciles à mettre en place. Par ailleurs, la répu-tation de bien performer est conditionnelle à l’existence dansl’historique de situations hydrologiques se rapprochant decelles que l’on désire prévoir et donc d’un ajustement préa-lable couvrant l’ensemble des situations potentielles.

Fortin et al. (1997) indiquent aussi que les modèles hydro-logiques conceptuels sont très performants sur un horizoncourt terme tout en soulignant la lourdeur de leur mise enplace. Par ailleurs, leur capacité à reproduire des situationshydrologiques pour lesquelles ils n’ont pas été ajustés spéci-fiquement avec l’historique est plus grande. Comme cesmodèles représentent conceptuellement les processus,

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Fig. 1. Les barrages gérés en temps par le Centre d’expertise hydrique du Québec.

l’extrapolation des simulations à l’extérieur de la plage dessituations hydrologiques pour lesquelles le modèle a été caléne s’effectue pas arbitrairement, mais en tentant, de manièresimplifiée, de mimer le comportement du bassin versant.Comme il est fondamental pour le CEHQ de bien prévoir lesévénements extrêmes dont l’implication en gestion de barra-ges est très importante et pour lesquels il n’existe souventpas de précédent dans l’historique observé, les modèlesconceptuels semblent donc les plus appropriés pour atteindrecet objectif.

Il faut souligner le potentielqu’ont les modèles concep-tuels pour intégrer un ensemble important d’informationsdécrivant le bassin et les sollicitations sur celui-ci. On penseici, à titre d’exemple, à la capacité des modèles hydrologi-ques distribués à tenir compte de la répartition spatiale desprécipitations, des températures, des occupations du sol, destypes de sol, des altitudes du terrain et des observations desvariables d’état comme l’humidité du sol et la neige au sol.Finalement, il ne faut pas négliger que, par leur sophistica-tion, les modèles conceptuels les plus avancés présentent descapacités d’évolution future grandes et bénéficient d’uneperception positive dans la communauté. Vu de l’extérieur, ilest plus facile de justifier un choix qui inclut les outils lesplus sophistiqués et qui intègre un grand nombre de donnéesque l’inverse.

Il faut, en dernier lieu, noter que la lourdeur de la mise enplace des modèles conceptuels est dépendante des décisionsqui sont prises quant aux résolutions spatiale et temporellede la mise en place du modèle hydrologique choisi. En effet,il est beaucoup plus facile de mettre en place un modèle hy-drologique global simulant à l’échelle de 24 h et dont lescoefficients d’ajustement sont purement empiriques qu’unmodèle hydrologique distribué simulant au pas de temps ho-raire et dont les coefficients portent un certain sens physique(Sorooshian et Gupta 1995). Il faut donc comprendre que leprix à payer pour recourir à un modèle conceptuel, mis enplace à des résolutions temporelle et spatiale fines, est lalourdeur. La recherche du juste compromis entre cette lour-deur et les besoins dans la finesse des résultats constitue l’undes défis principaux du développement d’un système de pré-vision.

L’émission de prévisions hydrologiques ne repose par ail-leurs pas uniquement sur une modélisation hydrologique.Les outils qui permettent l’édition interactive des prévisionsdans le processus d’émission de prévisions et qui incorpo-rent l’expertise humaine doivent aussi être inclus. À titred’exemples pensons à (i) des modèles de corrélations des er-reurs, (ii) des algorithmes de fusion des résultats de modèlesconceptuels (Cavadias et Morin 1985) ou (iii) des interfacesgraphiques permettant aux prévisionnistes d’ajuster manuel-lement les résultats de simulation. Les modèles conceptuelsdoivent être considérés comme des points d’ancrage sur les-quels les prévisionnistes s’appuieront pour émettre une pré-vision. Suivant cette vision, la prévision doit êtredécortiquée en deux étapes : la simulation à l’aide de modè-les conceptuels et l’ajustement de la prévision.

2.1 La simulation à l’aide de modèles conceptuelsLa prévision hydrologique à l’aide de modèles concep-

tuels, préalablement mis en place et calés, s’effectue en si-mulant la réaction d’un bassin versant sous une sollicitation

météorologique pendant un intervalle de temps s’étendant dupassé récent jusqu’à la fin de l’horizon futur pour lequel desprévisions sont désirées. Pour ce faire, les modèles concep-tuels peuvent être mis à jour en fonction, entre autres, desobservations hydrométriques et nivométriques récentes.Cette mise à jour fait aussi partie de l’étape de la simulationdans la mesure où elle s’effectue par le recours à un modèleconceptuel.

2.1.1 La séquence météorologique utiliséeLa séquence météorologique est composée d’une partie du

passé récent et d’une partie future. Le passé récent sert à lafois à bien évaluer les conditions initiales au moment du toutdébut de la période de prévision et, conjointement avec lapartie future, à contribuer directement à la prévision pour lesinstants de l’horizon prévisionnel inférieurs au temps deconcentration des différents sous-bassins du bassin étudié.Pour le passé récent, les observations météorologiques utili-sées sont celles du réseau météorologique coopératif duQuébec, qui rend disponible en temps réel ou légèrementdifféré les observations au sol de quelque 300 stations, dontenviron le tiers est situé dans des secteurs stratégiques pourle CEHQ.

L’utilisation des observations météorologiques aux sta-tions soulève par ailleurs la question de l’interpolation spa-tiale entre les stations pour alimenter les modèles avec unchamp continu. À ce jour, la stratégie retenue consiste à uti-liser une approche très simple d’interpolation, les polygonesde Thiessen, de manière à ne pas créer artificiellement uneinterpolation qui donnerait la fausse impression d’être réa-liste. Les précipitations sont alors interpolées sans aucunajustement, et les températures le sont en appliquant un gra-dient de –0,5° par 100 m de différences d’altitudes, ce quireflète approximativement la valeur moyenne du gradientadiabatique pour les températures courantes (Météo-France,http://www.meteo.fr/meteonet/decouvr/a-z/html/16_expert.htm).

En parallèle, les précipitations estimées par radar sont uti-lisées qualitativement et permettent de savoir si les stationsdu réseau au sol ont capturé ou non la variabilité spatiale desprécipitations. Cette analyse qualitative permet aux prévi-sionnistes opérationnels de faire, au besoin et selon leurcompréhension du phénomène météorologique, des ajuste-ments manuels de l’interpolation qui leur permettront demieux simuler le comportement hydrologique du bassin ver-sant.

Les prévisions météorologiques, obtenues des bureaux desuivi météorologique et environnemental (BSME) d’Environ-nement Canada, sont : (1) les températures et les précipita-tions par pas de temps de 3 h telles qu’ajustées par les mé-téorologues opérationnels des BSME à l’emplacement exactdes stations météorologiques automatiques au sol, pour lepremier 48 h de l’horizon de prévision, et (2) les sorties bru-tes du modèle numérique GEM sous sa configuration glo-bale, pour les heures suivantes jusqu’à 6 jours. Les donnéesdes deux sources sont interpolées sur une grille au 10 km,par les BSME, selon une approche cubique bidirectionnelleincluant les cinq points les plus près et les pondérant parl’inverse de la distance. L’interpolation offre l’avantage dedisposer de données supportées par un même grillage pourtout l’horizon prévisionnel, bien que celle-ci a pour effet,

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comme la majorité des approches d’interpolation, de lisserlégèrement les données brutes.

Pour le premier 48 h, il aurait aussi été possible d’utiliserdirectement les sorties du modèle GEM dans sa configura-tion régionale. L’utilisation des prévisions émanant des mé-téorologues trouve sa justification dans le fait que ceux-cidisposent d’outils de post-traitement qui permettent formel-lement d’intégrer différents modèles (GEM, mais aussid’autres modèles). Les informations subjectives émanantd’Environnement Canada indiquent que l’intervention hu-maine est particulièrement profitable pour déterminer le typede précipitations (solide ou liquide), les tendances de tempé-ratures inversées (température maximale atteinte la nuit) etpour intégrer les effets orographiques que la résolution spa-tiale du modèle ne permet pas de capturer. Actuellement,Environnement Canada effectue systématiquement l’analysede la qualité de prévisions émanant des météorologues pourles températures uniquement. Comme le paramètre le plussignificatif pour la prévision hydrologique est la précipita-tion, il faut donc s’en remettre aux conclusions tirées des in-formations subjectives.

Autrement, il faut surveiller pour l’avenir les améliora-tions importantes qui peuvent être apportées aux modèles at-mosphériques en réduisant de manière importante la taille dumaillage de base et en améliorant les schémas de surface,notamment en les couplant avec des modèles hydrologiques(Benoît et al. 2000; Pellerin et al. 2004). Sans vouloir mini-miser le rôle des météorologues opérationnels, il est clairque ces travaux tendent à rapprocher de plus en plus lesmodèles atmosphériques et hydrologiques et qu’il seranécessaire d’ici peu qu’une réévaluation de la place del’intervention humaine, sans aucun doute essentielle, dansl’ensemble du processus de prévisions météorologique et hy-drologique soit faite.

2.1.2 Modèle hydrologiqueLe choix d’un modèle hydrologique tient à la fois de la

sélection d’un modèle parmi l’ensemble de ceux qui sontdisponibles dans la communauté et à la fois de la définitiondes échelles spatiale et temporelle auxquelles il sera appli-qué. Il existe à travers le monde un nombre important demodèles hydrologiques conceptuels, certains étant utilisésopérationnellement pour la prévision hydrologique. Des mo-dèles comme TopModel (Beven 1995), SHE (Abbott et al.1986), SAC-SMA (Burnash 1995), HBV (Bergström 1995),SSARR (Speers 1995), HSPF (Donigian et al. 1995), PRMS(Leavesley et Stannard 1995) sont des exemples parmi lesplus connus à l’échelle mondiale. Plusieurs modèles cana-diens, tels que WatFlood (Kouwen et al. 1993), Slurp (Kite1995), UBC (Quick 1995), Cequeau (Morin et Paquet 1995),HSAMI (Fortin 2000) et Hydrotel (Fortin et al. 2001a) sontaussi connus et utilisés au Canada et ailleurs dans le monde.Sans entrer ici dans les détails qui distinguent les modèlesentre eux, il semble à propos de mentionner qu’une compa-raison de plusieurs modèles hydrologiques menée parl’Organisation mondiale de la météorologie (OMM; WorldMeteorological Organization 1992) a montré la grande diffi-culté à classer, suite à des tests numériques, un modèle audétriment d’un autre.

En bout de piste, les raisons pour choisir un modèle serapportent souvent à des considérations générales, non nu-

mériques, qui peuvent être de nature théorique ou purementcontextuelle. Entre autres, il nous apparaît nécessaire poureffectuer une prévision à court terme sur des petits bassinsversants de disposer de modèles qui permettent un décou-page du bassin versant en entités suffisamment petites poursupporter un calcul avec des pas de temps courts. On saitaussi qu’au Québec, la neige joue un rôle important. Il fautdonc, pour des considérations théoriques, s’assurer que lesdeux caractéristiques énoncées précédemment soient inclu-ses dans le modèle retenu. Comme les modèles distribuéssont plutôt récents et sont en constant développement, il estpratique, pour des considérations d’ordre contextuel, dechoisir un modèle pour lequel il existe des canaux facilitantl’échange entre les développeurs et les utilisateurs.

Au Québec, l’Institut national de la recherche scientifiqueest très actif en modélisation distribuée et a développé deuxmodèles, Cequeau et Hydrotel, qui permettent de simuler àdes pas de temps égaux ou inférieurs à 24 h. Le modèle Ce-queau a été implanté et est encore utilisé de manière opéra-tionnelle à certains sites de prévision du CEHQ. Ce modèleest principalement basé sur des équations empiriques et offrel’avantage d’être assez peu coûteux en temps de calcul, unefois la mise en place faite, tout en utilisant un découpage dubassin en mailles carrées de dimension moyenne (environ 25à 100 km2).

Le modèle Hydrotel est aussi implanté sur quelques bas-sins du CEHQ. Par rapport à Cequeau, le modèle Hydrotelest basé sur des équations qui sont un peu plus proches de laphysique des phénomènes tout en conservant une partd’empirisme. Les simulations y sont distribuées sur chacundes tronçons du réseau hydrographique et sur des unités hy-drologiques correspondant aux sous-bassins de ces tronçons.Cinq algorithmes de diverses complexités (de l’équation dePenman–Monteith à une équation empirique développéechez Hydro-Québec; Fortin 2000) sont disponibles pour lecalcul de l’évapotranspiration potentielle et sont sélectionnésselon les données disponibles. L’évolution et la fonte ducouvert de neige est calculée à l’aide d’une méthode mixte(énergie et indice de température) qui ne nécessite que lestempératures de l’air comme donnée d’entrée. Le bilan verti-cal est effectué selon une division du sol en trois couchesconceptuelles, mais dont les propriétés hydrauliques et leséquations d’échanges entre les couches proviennentd’approches physiques. L’écoulement sur la partie terrestredu bassin est évalué à l’aide d’un hydrogramme géomorpho-logique unitaire, lui-même constitué par l’application del’équation de l’onde cinématique sur chacun des sous-bassins discrétisés sur un maillage carré. Finalement,l’écoulement par le réseau hydrographique est simulé oubien par les équations de l’onde diffusante ou bien par leséquations de l’onde cinématique.

Actuellement, le CEHQ priorise Hydrotel pour l’implant-ation sur des nouveaux bassins, bien qu’il continue aussi àutiliser opérationnellement Cequeau. Par ailleurs, ce n’estpas vraiment l’étude des différences entre les deux modèlesqui a permis de trancher de la sorte, mais plutôt la synergiequi existe actuellement au Québec autour d’Hydrotel. En ef-fet, Hydro-Québec a entrepris, simultanément avec leCEHQ, l’utilisation de ce modèle pour ses propres bassinsdu sud du Québec. La mise en commun des ressources etdes expertises des deux organisations s’avère un incitatif im-

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portant. Il ne faut pas négliger qu’en périphérie de la sciencehydrologique incluse dans un modèle, il y a aussi des consi-dérations de nature informatique et d’assimilation de don-nées qui requièrent un effort considérable. Autrement,l’implantation du modèle Hydrotel pour la prévision risqued’apporter des retombées secondaires importantes, notam-ment dans le domaine de la gestion par bassin versant (Gou-vernement du Québec 2002), entre autres, parce qu’Hydrotelfait partie du système de modélisation intégrée GIBSI(Rousseau et al. 2000).

Finalement, il faut mentionner qu’Hydro-Québec utiliseopérationnellement le modèle HSAMI et que le U.S. Na-tional Weather Service utilise opérationnellement le modèleSAC-SMA, pour nommer deux exemples qui peuvent servirde référence dans un contexte québécois et nord-américain.Ces deux modèles sont installés selon une approche globale.Les deux organisations sont entrées, depuis quelques années,dans un processus de modernisation de leur système qui pas-sera, entre autres, par l’utilisation d’une approche distribuéede simulation. En ce sens, le développement de la prévisionau CEHQ et les choix technologiques qui s’y rattachent sefont dans la mouvance des tendances actuelles et sont cohé-rents avec la démarche d’autres organisations, la devançantsur certains thèmes et leur emboîtant le pas sur d’autres.

2.1.3 La mise à jour des simulationsL’OMM (World Meteorological Organization 1992) défi-

nit la mise à jour d’un modèle hydrologique commel’ajustement de ce dernier pour tenir compte des plus récen-tes observations hydrométriques et nivométriques disponi-bles et indique que le recours à la mise à jour est souhaitableen prévision hydrologique. Au CEHQ, les méthodes de miseà jour d’Hydrotel (Fortin et al. 1999) et de Cequeau (WorldMeteorological Organization 1992), qui sont assez similairesentre elles et plutôt classiques (World Meteorological Orga-nization 1992), sont utilisées pour effectuer l’ajustement desdonnées d’entrée et des variables d’état en fonction des ob-servations récentes. Ces méthodes consistent à : (i) modifierles quantités de précipitations pour ajuster l’intensité descrues générées par la pluie; (ii) modifier les températurespour ajuster le taux de fonte de la neige et bien reproduireles débits dans les périodes de l’année contrôlées par lafonte; et (iii) modifier la teneur en eau du sol en période derécession. Les ajustements des précipitations et des tempéra-tures, qui sont des données d’entrée, et de la teneur en eau,qui est une variable d’état, sont faites de manière interactivepar le prévisionniste de manière à minimiser l’écart entre lessimulations et les observations récentes (généralement lesdernières 24 h). Hydrotel, comme certains autres modèles(World Meteorological Organization 1992), dispose d’uneprocédure automatique pouvant encadrer la recherche desajustements optimaux. Ceci dit, il faut remarquer que les ap-ports déduits par bilan hydrique aux réservoirs de barrages,qui sont à la base des ajustements, ne sont pas suffisammentprécis pour que l’on puisse utiliser, sans intervention hu-maine, cette capacité d’automatisation.

2.2 L’ajustement de la prévisionÀ un site où des prévisions sont émises, la prévision hy-

drologique finale, qui sera diffusée par le CEHQ, s’évalue àl’aide d’une simulation principale provenant d’un modèle

conceptuel et, le cas échéant, d’une ou de plusieurssimulations auxiliaires disponibles à titre indicatif. À titre deprévision hydrologique finale, la simulation principale peut :(i) être conservée comme telle; (ii) être mise à jour et doncrévisée pour ensuite devenir la prévision hydrologique fi-nale; et (iii) être ajustée à l’aide d’outils statistiques et inte-ractifs. C’est cette dernière étape qui constitue l’ajustementde la prévision. L’outil statistique qui a été implanté auCEHQ est un modèle régressif basé sur la corrélation entrel’erreur de simulation de débits sur les dernières 24 hd’observation et l’erreur historique sur chacun des pas detemps de l’intervalle de prévision (World MeteorologicalOrganization 1992).

Les outils interactifs sont ni plus ni moins que des outils àl’intérieur d’un interface graphique permettant : (i) l’éditionmanuelle des prévisions; et (ii) le filtrage des résultats de si-mulation ou la modification linéaire ou parabolique entrecertains de ces résultats. Il faut par ailleurs comprendre que,lorsqu’ils éditent manuellement les prévisions, les prévision-nistes ne se substituent pas entièrement au modèle, et que,lorsque c’est possible, il est toujours préférable de procéderpar mise à jour des variables d’état plutôt que par édition di-recte des résultats. En effet, les prévisionnistes effectuerontune édition lorsque le modèle performera mal et qu’il n’yaura pas de moyen cohérent de rectifier le tire à l’aide de lamise à jour. Dans cette situation, les prévisionnistes ontl’obligation de comprendre le signal qu’envoie le modèle,même quand ce dernier diverge, et, par leurs interprétationspersonnelles, de produire une prévision qui soit cohérenteavec cette interprétation.

Par exemple, imaginons le cas d’un événement de précipi-tations très fortes, mais très court. Imaginons aussi que lemodèle hydrologique n’est pas discrétisé à une échelle tem-porelle suffisamment fine pour capturer cet événement. Dansune pareille situation, le modèle hydrologique laminera levolume de crue plus qu’il ne se doit. Que doit alors faire leprévisionniste? Émettre une prévision de pointe trop faible,mais en respectant le volume et en ne modifiant pas la simu-lation? Faire la mise à jour manuelle du modèle en ajoutantune quantité importante de pluie fictive de telle sorte qu’ilobtienne la montée rapide de l’hydrogramme déjà observée,mais ainsi risquer de prévoir trop de volume? Doit-il finale-ment interpréter la simulation du modèle à la lumière de cequ’il connaît de l’événement et des limites du modèle ens’autorisant de modifier la forme de l’hydrogramme tout enconservant le volume total que lui indique le modèle? Dansle cas de la prévision au CEHQ, nous avons opté pour cedernier choix.

Le fonctionnement opérationnel simultané de deux modè-les hydrologiques sur un bassin donné (par exemple, les mo-dèles Hydrotel et Cequeau sur le bassin de la rivièreChâteauguay; fig. 2) est une autre situation qui favorise lamodification manuelle des prévisions. En effet, compte tenude la difficulté supplémentaire qu’apporte le fait que les mo-dèles ont été implantés à des pas de temps différents sur cer-tains bassins, aucune approche automatique de fusion desmodèles n’a encore été mise en place. L’expérience des pré-visionnistes peut permettre de prioriser les résultats de l’undes deux modèles ou une combinaison des deux pour unévénement ponctuel précis et peut permettre de modifier lesprévisions en fonction de ce choix.

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3. Opération du système

La réflexion scientifique entourant la prévision hydrolo-gique doit, pour être complète, pendre en compte les impéra-tifs opérationnels. Certains de ces impératifs sont révisésdans les sections suivantes.

3.1 Système informatiqueBien que les détails du développement du système infor-

matique relèvent plus du monde des sciences informatiquesque de l’hydrologie, certains choix technologiques et archi-tecturaux ont un effet structurant sur la mise en valeur del’information hydrologique et sur la possibilité de mainteniret d’améliorer en continu le système de prévision. Le sys-tème informatique de prévision, appelé SPH, inclut troiscomposantes principales : (1) une composante d’acquisitionet de pré-traitement des données observées et prévues;(2) une composante de simulation hydrologique et de prévi-sion hydrologique; et (3) une composante de diffusion desprévisions. Ces trois composantes, schématisées à la figure 3,sont organisées autour d’un programme principal de pilotagemuni d’une interface graphique et dialoguant avec des basesde données relationnelles. C’est ce programme de pilotagequi fait le ciment entre chacune des opérations nécessairespour l’émission de la prévision hydrologique.

3.1.1 Composante d’acquisition et de pré-traitement desdonnées

Le module d’acquisition et de pré-traitement des donnéesa comme première fonction l’acquisition des données hydro-métriques et météorologiques disponibles sur les dépôts de

données officiels du Québec, soit les bases de données hy-drométriques (BDH) et climatologique (CLIMATO), et desprévisions météorologiques disponibles sur un serveur ex-terne opéré par Environnement Canada. L’objectif del’acquisition est de ramener les données dans des bases dedonnées locales de petites dimensions uniquement dédiées àla prévision hydrologique et de regrouper ainsi d’une ma-nière cohérente l’ensemble des données nécessaires à la pré-vision. Le même module a comme seconde fonction la

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Turcotte et al. 313

Fig. 2. Les sites actuels de prévisions, les modèles hydrologiques utilisés et les pas de temps correspondants.

Fig. 3. Schématisation du système de prévision hydrologiqueSPH.

déduction d’informations à partir des données de basescomme, par exemple, les apports aux barrages qui sont dé-duits par bilan hydrique à partir des niveaux et des soutira-ges mesurés.

3.1.2 Composante de simulation et de prévisionhydrologique

La composante de simulation et de prévision hydrologiqueest le cœur du SPH. Elle se structure autour de simulationset de prévisions. Le terme simulation doit ici être compriscomme le résultat de l’exécution d’un modèle hydrologiqueconceptuel à un moment et à un site donné. Ce résultat peutavoir été obtenu après plusieurs exécutions du modèle sui-vant par exemple la mise à jour des variables d’état. Men-tionnons au sujet des simulations que l’ensemble dudéveloppement du SPH a été fait avec le souci de pouvoirutiliser, avec un minimum d’ajustements informatiques, desmodèles hydrologiques divers. Actuellement, le systèmefonctionne avec les modèles Cequeau et Hydrotel qui peu-vent, selon l’installation propre à un bassin donné, être l’unet l’autre disponibles. Il faut aussi noter que sur le plan del’interface graphique, l’utilisation de l’un ou l’autre des mo-dèles est complètement transparente. Le terme prévision ré-fère, quant à lui, à une prévision hydrologique émise à unsite donné. Une simulation au même site est utilisée commeproposition initiale de prévision. Il est ensuite possible selonle jugement du prévisionniste d’effectuer un ajustement aposteriori de la prévision en s’écartant de la simulation.

3.1.3 Composante de récupération et de diffusion desprévisions

Le module de récupération et de diffusion des résultats deprévisions permet de récupérer les sorties des modèles et deles intégrer à la base de données du système. Le module per-met aussi de diffuser les prévisions sur une page Internet ac-cessible au public et sur des pages HTML internes au CEHQdestinées aux utilisateurs experts. Pour ces derniers, les pré-visions sont diffusées au pas de temps de 3 h et, en complé-ment des prévisions finales validées par le prévisionnistes,des prévisions non validées peuvent aussi être disponibleslorsque ces dernières sont plus récentes que les dernièresprévisions validées.

3.2 Détails de l’opérationDans 80 % et plus des situations au CEHQ, l’émission de

prévision n’est pas critique. Par ailleurs, le défi d’une équipede prévisionnistes est d’être prête pour une situation cri-tique. On considère trois modes de fonctionnement : le mode« normal », le mode « crue forte » pour lequel une crue im-portante est prévue, bien que celle-ci se situe à l’intérieur deconditions relativement fréquentes dans l’historique, et lemode « crue exceptionnelle » pour lequel une crue majeureet catastrophique (de l’ampleur de l’événement de juillet1996 au Saguenay par exemple) est attendue.

Ainsi, chaque jour ouvrable à 7 h 30 heure locale, le SPHdémarre automatiquement et exécute dans l’ordre les modu-les correspondant aux trois composantes du système. Le mo-dule de simulation et de prévision est exécuté en modeautomatique, ce qui signifie que les variables d’état ne sontpas mises à jour et que la prévision à un site donné corres-pond à la simulation proposée en première approximation

sans autre ajustement. La diffusion est alors limitée àl’intérieur du CEHQ et porte la mention non validée. De8 h 30 à 9 h 30, le prévisionniste de service parcourt chacundes sites de prévision, effectue la mise à jour des variablesd’état et, au besoin, des ajustements manuels ou statistiquesaux prévisions. La diffusion est alors reprise pour diffusionautant interne qu’externe et porte cette fois la mention va-lidée. Le système est lancé en mode automatique les jourschômés à 7 h 30 et, en juillet et en août, alors que les risquesd’orage soudains sont plus élevés, en après-midi à 15 h 00,sauf si l’on est en mode « crue forte » et qu’alors l’ensemblede la procédure interactive de validation est effectuée. Dansle cas de « crues exceptionnelles », l’ensemble des person-nes disponibles et aptes à faire de la prévision se mobilise, etdes prévisions sont émises pratiquement en continu à mesureoù des nouvelles informations sont disponibles.

3.3 Parc de bassins actuel et défis de la mise en placeLa figure 2 présente le parc de bassins où le CEHQ ef-

fectue actuellement de la prévision. L’exercice d’étendre leparc de bassins et, voire même, de consolider la mise enplace des modèles sur les bassins où il y a déjà de la prévi-sion est un défi d’envergure pour les prochaines années. Eneffet, l’utilisation de modèles distribués, que nous jugeonsindispensables aux types de bassins sur lesquels nous travail-lons, requiert un effort considérable de mise en place. Bienque longue et laborieuse, la structuration des données debase, dans l’effort de mise en place, ne présente pas de diffi-culté insurmontable, si le temps nécessaire y est mis. Parexemple dans le cas d’Hydrotel, une approche automatisée aété développée au cours des années (Turcotte et al. 2001).

Une deuxième étape de la mise en place, le calage des pa-ramètres des équations des modèles, est beaucoup pluscomplexe et est une source de profond inconfort pour toutprévisionniste. Il n’est pas de notre intention de résumer iciles problèmes qui rendent le calage des modèles hydrologi-ques difficiles. Le lecteur peut consulter Shaake (2002) etDuan et al. (2002) pour des résumés éclairés à ce sujet. Dansbien des situations opérationnelles, les prévisionnistes parleur regard quotidien sur le modèle, leur expérience des ratéset des réussites, sont amenés à sans cesse questionner la qua-lité du calage. La forte dépendance des prévisionnistes à laqualité des simulations d’un modèle les amène à ne jamaispouvoir se satisfaire de la qualité du calage d’un modèle.Dans le cas du modèle Hydrotel, la difficulté du calage estaugmentée par la non-disponibilité d’outils automatiquesd’aide au calage. Les travaux proposés par Turcotte et al.(2003) devraient permettre de combler cette lacune, maisentre-temps, c’est au prix d’efforts considérables que le ca-lage du modèle s’effectue. Par ailleurs, il y a dans l’exercicede caler un modèle hydrologique pour la prévision un pro-cessus d’appropriation ou d’acceptation du calage par lesprévisionnistes qui est aussi important que la qualité mé-trique d’un calage. En ce sens, nous sommes d’avis commeSmith et al. (2002) que l’utilisation d’outils automatiquesn’est possible que lorsque les prévisionnistes connaissentsuffisamment le modèle pour être en mesure d’interpréter lesvaleurs de paramètres issues du calage automatique. Le ca-lage des modèles est donc un élément central, à la foissource d’inconfort et source de connaissance sur le modèlelui-même. À notre avis, la lourdeur ajoutée par la modélisa-

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tion distribuée rend plus difficile encore l’appropriation ducalage d’un modèle.

4. Illustrations justificatives

Deux séries de résultats sont étudiées dans les sectionssuivantes de manière à bien illustrer quelques-uns des choixde développement les plus critiques.

4.1 Crue de juillet 2001 à SartiganComme on l’a vu précédemment, l’un des principaux élé-

ments contraignants du développement est le caractère distri-bué du modèle et l’utilisation d’un pas de temps de 3 h.C’est aussi ces deux éléments qui sont les plus coûteux pourla mise en place, pour le calage du modèle et pour la lour-deur de l’ensemble du processus incluant l’acquisition et lestockage des données.

Le cas étudié pour cette première illustration est la cruequi a culminé le 1er juillet 2002 dans la partie sud du bassinde la rivière Chaudière. Le barrage Sartigan, situé non loinde là, sur la rivière Chaudière a nécessité plusieurs opéra-tions au cours de la journée du 1er juillet de façon à suivreles importants changements de débits qui sont survenus; laprévision hydrologique est, dans cette perspective, un outilprécieux d’aide à la gestion.

Les pluies qui ont généré la crue sont tombées entre mi-nuit et 5 h 00 du matin le 1er juillet. Les stations météorolo-giques transmettant en temps réel de Beauceville(Environnement Canada) et Hilaire (MENV) ont rapportéenviron 65 mm de précipitations, bien que cette dernière aconnu une panne. A posteriori, les responsables du suivi del’état de l’environnement du MENV ont évalué que 118 mmde pluie étaient en fait tombés à Saint-Hilaire. À l’aided’une douzaine de stations avec observateurs, qui ne sontpas disponibles en temps réel pour l’émission de la prévisionhydrologique, ils ont été en mesure de définir à posteriori lescourbes isohyètes de l’événement. Finalement, une valeurmoyenne de 65 mm sur l’ensemble du bassin semble assezacceptable.

Il faut noter qu’aucune précipitation n’a été prévue dansles bulletins opérationnels de prévisions météorologiquesémis par Environnement Canada à 14 h 00 le 30 juin 2002,bien que les météorologues opérationnels ont émis, au fur età mesure que l’événement s’approchait, des bulletinsd’alerte météorologique. Il faut bien saisir que les prévisionshydrologiques émises le 1er juillet en avant-midi ont été di-rectement alimentées par la précipitation déjà tombée, tellequ’observée à travers les précipitomètres de Beauceville etde Hillaire. Le reste de la journée du 1er juillet de même queles journées qui ont suivi sont exemptes de précipitationsmajeures.

Le CEHQ opère le modèle hydrologique Hydrotel sur larivière Chaudière et émet des prévisions sur la base de simu-lation au pas de temps de 3 h au barrage Sartigan. Le calaged’Hydrotel sur ce bassin est discuté dans Fortin et al.(2001b) et dans Turcotte et al. (2003). La figure 4 présentele découpage spatial qui compte 145 unités hydrologiques enamont du barrage Sartigan. Ce découpage en 145 unités estutilisé opérationnellement pour distribuer spatialement lescalculs et les bilans hydrologiques. La figure 4 présenteaussi un découpage spatial à faible résolution comptant 46

unités hydrologiques en amont de Sartigan qui n’est pas,quant à lui, utilisé opérationnellement, mais qui a servi à ef-fectuer un test numérique présenté plus loin. Il faut noterque les soutirages observés et annoncés par le gestionnaire,au barrage Mégantic, sont introduits directement dans le mo-dèle, de telle sorte que la simulation de l’hydrologie du bas-sin du lac Mégantic n’influence pas la simulation à Sartigan.Le bassin du lac Mégantic n’est donc pas inclu dans le dé-nombrement des unités en amont de Sartigan.

La figure 5 présente des résultats de simulations hydrolo-giques avec Hydrotel qui ont été émis à titre de prévision le1er juillet. Il est à noter que, comme le 1er juillet est un jourférié et qu’aucune prévision de précipitation n’avait permisd’alarmer l’équipe de prévision hydrologique, les prévisionsont été émises en mode automatique, sans intervention hu-maine. Partant de la figure 5, on peut noter que la simulationa permis de reproduire avec une bonne précision le volumede la crue, alors que le débit de pointe a été sous-évalué.

À posteriori, des tests ont été menés pour tenter d’avoirune première compréhension de l’impact qu’ont pu avoir leschoix d’échelle temporelle et spatiale sur la qualité de laprévision de cet événement.

On peut conclure en comparant les simulations faites aupas de 3 et de 24 h et présentées à la figure 5 que la qualitéde la prévision est fortement dégradée par la diminution dela résolution temporelle. En effet, le taux et le temps demontée de la crue sont beaucoup moins bien simulés avec lepas de temps de 24 h. Ceci est dû au fait que l’événementmétéorologique considéré n’a duré au maximum que 4 h. Laréduction du pas de temps a pour effet de mieux capturer lavariation temporelle de l’intensité de la pluie. En ce sens, ily a évidement un intérêt marqué pour l’utilisation d’un mo-dèle fonctionnant à un pas de temps aussi court que possible.De plus, il faut mentionner que le volume de crue, avec lepas de temps de 24 h, équivaut à 76 % de celui simulé aux3 h. Comme l’intensité de la pluie est diminuée parl’utilisation d’un pas de temps de 24 h, le modèle simule uneinfiltration trop élevée.

Le pas de temps minimal utilisé au CEHQ est de 3 h, cequi s’explique par diverses raisons dont les principales sont :(i) de réduire la lourdeur du modèle et les besoins en stoc-kage de données; et (ii) de coller à la résolution temporelledes prévisions météorologiques qui sont fournies. Àl’analyse de la figure 6, on devine qu’un pas de temps pluscourt que 3 h aurait probablement permis d’améliorer la qua-lité de la simulation et que, bien que les arguments précé-dents sont cohérents avec les contraintes actuelles, il fautprévoir dans le développement du système de prévision toutela souplesse nécessaire pour pouvoir réduire le pas de tempslorsque l’évolution des outils et des technologies rendra cesarguments caduques.

Nous avons aussi voulu tester l’effet de l’augmentation dela résolution spatiale. Alors que pour le changement de pasde temps de 3 à 24 h le calage des hydrogrammes unitairesqui contrôle la vitesse d’écoulement, vers et dans le réseauhydrographique, n’a pas à être refait (exception faite d’unajustement automatique des hydrogrammes unitaires pour lechangement de pas de temps selon l’approche développéepar Fortin et al. (1998)), il n’en est pas de même pour lechangement de résolution spatiale. En effet, il est certainqu’un hydrologue qui dispose d’un modèle à résolution

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faible tentera de le caler pour qu’il reproduise le mieux pos-sible les observations malgré la faible résolution. Il est à no-ter que le calage des paramètres qui règlent les bilans devolume n’a, à notre avis, pas nécessairement à être réévaluélorsque l’on change de résolution spatiale. Seul le calage desparamètres qui influencent les hydrogrammes géomorpholo-giques unitaires d’Hydrotel (principalement les coefficientsde frottement de Manning) doit impérativement l’être. Cebesoin d’ajuster le calage pose le problème de la définitiond’une base de comparaison valable des simulations à diffé-rentes échelles spatiales.

Pour les fins de notre illustration, la solution que nousavons retenue consiste à effectuer un calage sommaire dutaux de montée des hydrogrammes géomorphologiques uni-

taires sur la crue du 27 juin 2002 qui offre l’avantaged’avoir été générée par des pluies s’étant étirées sur près de24 h. À titre de résultante de ce calage, on remarque à la fi-gure 5 que les deux résolutions permettent de simuler de fa-çon équivalente la montée de la crue du 27 juin. Bien qu’uneréflexion plus poussée sur le calage pourrait permettred’expliquer les différences entre les résultats de ces deux si-mulations et les observations, il demeure que l’analyse per-met de constater que le choix de la résolution spatialeinfluence quelque peu la qualité des résultats. Par ailleurs,les gains apportés ici par la plus fine résolution spatiale sontmoins marqués et moins évidents que dans le cas de la réso-lution temporelle. Comme d’autres l’ont aussi constaté, no-tamment Smith et al. (2003), il n’est pas évident de mesurer

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Fig. 4. Le bassin de la rivière Chaudière : (a) ses principaux sous-bassins, (b) son découpage en 392 unités hydrologiques, dont 145unités (pour 2295 km2) faisant partie du sous-bassin de Sartigan excluant le sous-bassin du lac Mégantic et (c) en 118 unitéshydrologiques dont 46 unités pour Sartigan.

Fig. 5. Résultats de prévision et de simulation de la crue de juillet 2001 pour la rivière Chaudière à Sartigan avec des pas de temps de3 et 24 h et des découpages en 145 et 46 unités hydrologiques.

a priori les gains en précision qu’apporte l’utilisation d’unerésolution plus fine. Une étude plus approfondie, déjà encours à l’interne avec la collaboration de l’Institut nationalde la recherche scientifique (INRS), nous apparaît à ce sujetnécessaire. Il n’en demeure pas moins que l’utilisation d’unerésolution spatiale plus fine demeure, à moins de la preuvedu contraire, souhaitable dans la mesure où elle permet detenir compte avec plus de précision des données distribuéesqui sont disponibles.

Bien que nous n’ayons analysé qu’un seul événement (parailleurs assez représentatif des événements estivaux problé-matiques), nous en venons à la conclusion qu’il n’est pas fu-tile de s’être imposé des contraintes de développementimpliquant l’utilisation de modèles distribués à pas de tempsde 3 h, tout en demeurant conscient que ce choix doit conti-nuer à être étudié.

4.2 Crue du printemps 2003La figure 6 présente les prévisions émises au printemps

2003 pour la rivière Famine, un affluent de la rivière Chau-dière, non influencé, plutôt représentatif de l’hydrologie dusud du bassin (voir la fig. 4). Ce site en rivière, par rapportaux sites où l’on retrouve des réservoirs de barrages, sim-plifie l’analyse en diminuant l’incertitude sur les apports ob-servés. On note, de manière générale à la figure 6, que lesprévisions sont de bonne qualité et qu’il y a une améliora-tion des prévisions, valides pour un jour donné, lorsqu’ellessont émises le matin du même jour (fig. 6a) par rapport àcelles qui sont émises le matin du jour précédent (fig. 6b).

Une analyse plus détaillée de certains événements permetpar ailleurs de mieux cerner le processus d’émission des pré-visions.

Pour la pointe de crue principale du 16 avril au matin, onnote que les prévisions de débits émises le 15 avril sous-évaluent la pointe et sont en retard sur l’estimation de sonmoment d’arrivée. Dans ce cas précis, l’explication princi-pale semble être une légère sous-évaluation et une réparti-tion inexacte des intensités de précipitations dans le temps(voir le tableau 1), bien que d’autres facteurs sont aussi enjeu. La courbe de simulation de la figure 6b présente la si-mulation brute sans aucune mise à jour des variables d’étatet permet de fouiller cette idée. Cette simulation est ef-fectuée à posteriori en utilisant des observations météorolo-giques plutôt que des prévisions, ce qui indique que, si lemodèle avait été alimenté par les observations, il aurait biensynchronisé la pointe de crue, mais en la surévaluant plutôtqu’en la sous-évaluant. On peut trouver diverses explicationspour cette erreur résiduelle, dont les plus évidentes sont leserreurs inhérentes au modèle lui-même et aux détails de samise en place (erreur structurale, erreur de calage, mauvaisereprésentativité spatiale des données d’entrée, …) et àl’imprécision des conditions initiales. C’est le rôle des prévi-sionnistes, à travers la mise à jour interactive du modèle, detenter de minimiser cette erreur.

Si on revient sur l’exemple du 16 avril, on doit savoir queles prévisionnistes ont jugé bon ne pas effectuer de mise àjour préalable (voir le tableau 2) sachant que les débits me-surés avant cette date, sous un couvert de glace, sont peu

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Fig. 6. Prévisions pour la rivière Famine, à l’emplacement de la station hydrométrique (691 km2), lors de la crue de printemps de 2003.

précis. Dans cet exemple, une mise à jour hâtive, telle quel’aurait probablement faite une procédure automatique, au-rait eu tendance à augmenter la capacité du modèle à fairefondre la neige au sol et contribué à augmenter l’erreur rési-duelle. Par ailleurs, la courbe de simulation de la figure 6a,qui inclut quant à elle l’effet des diverses mises à jour, il-lustre que la mise à jour effectuée le 16 avril au matin (uneréduction des précipitations par les prévisionnistes) a permispar la suite d’améliorer la qualité de la prévision de décrueémise ce matin là. Dans l’émission de prévisions pourl’événement du 16 juillet, l’intervention des prévisionnistess’est principalement faite en interprétant la qualité des débitsmesurés.

Les 18 et 19 avril 2003 sont des jours fériés, de telle sorteque les prévisions émises ces jours là l’ont été de façonautomatique sans intervention des prévisionnistes. Onremarque de ce fait que la prévision sous-évalue systémati-quement l’observation pour les jours suivants, alors qu’unemise à jour par les prévisionnistes aurait permis de corrigercette tendance. C’est d’ailleurs ce qui a été fait le 20 avril(voir le tableau 1).

L’exemple des 25, 26 et 27 avril illustre un des avantagesde l’utilisation d’une modélisation distribuée. Pour cette pé-riode de la fonte de neige, les prévisionnistes ont deux possi-bilités pour interpréter l’écart qu’ils notent le 24 avril entrela simulation et l’observation. En effet, ou bien cet écart pro-vient d’une mauvaise évaluation de la température, et corol-lairement du taux de fonte de neige, ou bien l’écart provient

d’une mauvaise évaluation par le modèle de l’équivalent eneau de la neige au sol et de sa distribution (ce qui a alors uneffet plus indirect sur la fonte de neige).Comme on peut levoir à la figure 7, les informations terrain dont disposent lesprévisionnistes sont deux mesures ponctuelles del’équivalent en eau qu’ils peuvent comparer avec les valeurssimulées sur les unités hydrologiques correspondantes. Parcette comparaison, ils concluent que la mise à jour doit sefaire sur les températures plutôt que sur les équivalents eneau qui sont adéquatement simulés. Dans la perspective oùun modèle global plutôt que distribué aurait été utilisé, il au-rait été beaucoup moins évident d’évaluer l’erreur sur laneige au sol, alors que seule une valeur moyenne (dans notreexemple 65 mm au 17 avril) aurait pu être comparée avecles valeurs aux stations.

Bien que sommaire, l’analyse de la figure 6 illustre laconstante interaction entre le modèle et les prévisionnistesdont le rôle apparaît ici essentiel. Les prévisionnistes doiventjongler avec un nombre important d’informations, et le ca-ractère distribué de certaines d’entre elles, notamment laneige, permet une analyse plus précise qui mène à des misesà jour manuelles mieux éclairées. Il ne faut par ailleurs paspasser sous silence que de nombreux outils informatiquesdoivent, dans cette perspective, être disponibles pour per-mettre aux prévisionnistes de pouvoir accéder facilementaux informations les plus pertinentes sans quoi, dans uncontexte opérationnel, la masse d’informations distribuéesdevient plus problématique qu’utile. Des travaux de dévelop-

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Prévisions Observations

Date Heure Température (°C) Précipitations (mm) Précipitations (mm) Température (°C)

2003-04-15 6 10 0 3,6 5,32003-04-15 9 12 1,2 1,3 6,92003-04-15 12 14 1,9 1,4 8,12003-04-15 15 11 2,2 4,0 8,12003-04-15 18 8 2,4 8,4 7,72003-04-15 21 5 2,4 1,9 5,72003-04-16 0 4 2,4 0,1 3,02003-04-16 3 2 2,4 0,6 0,5Totaux : 17,3 21,3

Tableau 1. Comparaison des précipitations et des températures observées et prévues (le 15 avril au matin) à la sta-tion météorologique de Beauceville (71323).

Date à laquelle la miseà jour a été effectuée(à 9h00)

Période pendant laquellela mise à jour s’applique(de 6h00 à 6h00) Nature de la mise à jour

16 avril Du 15 au 16 avril Précipitation réduite de 20 %20 avril Du 18 au 20 avril Température augmentée de 4 °C22 avril Du 20 au 22 avril Température augmentée de 4 °C23 avril Du 22 au 23 avril Température augmentée de 5 °C24 avril Du 23 au 24 avril Température réduite de 0,5 °C25 avril Du 24 au 25 avril Température réduite de 0,5 °C26 avril Du 25 au 26 avril Température réduite de 0,5 °C27 avril Du 26 au 27 avril Température réduite de 0,5 °C28 avril Du 27 au 28 avril Température réduite de 0,5 °C30 avril Du 29 au 30 avril Température réduite de 4 °C

Tableau 2. Mises à jour des données d’entrées pour la mise à jour des variables d’étattelles qu’effectuées en avril 2003 pour l’ensemble du bassin de la rivière Famine.

pement sont actuellement en cours au CEHQ pour améliorerl’accès opérationnel aux informations pertinentes.

5. Conclusion

Le présent document a servi à décrire le système de prévi-sion hydrologique du CEHQ. Plusieurs décisions scientifi-ques à la base du design du système y sont exposées. Decelles-là, deux des plus importantes, les résolutions spatialeet temporelle à utiliser sont discutées plus à fond et sontanalysées par l’intermédiaire d’illustrations numériques.

À la lumière de la première illustration, il apparaît claire-ment que le choix d’un pas de temps de simulation le pluscourt possible, lui-même limité par diverses contraintes opé-rationnelles, est souhaitable pour l’amélioration de la qualitédes prévisions. Le choix d’une résolution spatiale plus finedemeure souhaitable dans la mesure où elle permet de tenircompte avec plus de précision des données distribuées quisont disponibles. Par ailleurs, l’illustration numérique a per-mis de constater qu’il n’est pas toujours évident de mesurerles gains de précision qu’une pareille approche génère. Laseconde illustration permet de mettre en évidence la néces-sité de recourir à une bonification des simulations des modè-les par les prévisionnistes. Il en ressort par ailleurs que lasomme d’informations nouvelles ajoutées par des échellestemporelle et spatiale plus fines peut permettre aux prévi-sionnistes, dans certaines situations, la prise de décisionsplus éclairées.

Remerciement

Les auteurs tiennent à remercier les personnes suivantespour leur contribution, à différents niveaux, au développe-ment du système de prévision hydrologique du CEHQ :Y. Landry, J.F. Voros et P. Pellerin d’Environnement Canada;D. Tremblay, V. Fortin et L. Bibeau d’Hydro-Québec; J.P.Fortin, G. Morin, A.N. Rousseau, A. Mailhot, A. Royer et P.

Lavoie de l’Institut national de la recherche scientifique; C.Desmarais du Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et del’Alimentation du Québec; et J. Dufresne, Y. Gosselin, R.Poulin, R. Dumont, P.Clavet et F.Godin du Centred’expertise hydrique du Québec.

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