PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS...

311
PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS DOUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle au service du développement local Co-organisée par le Conseil régional de la Guyane et le Centre INFFO sous l’égide des régions d’outre-mer et le parrainage du Secrétariat d’État à l’outre-mer, avec la participation des CARIF Dom et de l’ANT

Transcript of PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS...

Page 1: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION

PROFESSIONNELLE

DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER

2, 3 et 4 octobre 2000

à Cayenne, Guyane

La formation professionnelle

au service du développement local

Co-organisée par le Conseil régional de la Guyane et le Centre INFFOsous l’égide des régions d’outre-mer

et le parrainage du Secrétariat d’État à l’outre-mer,avec la participation des CARIF Dom et de l’ANT

Page 2: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 2

La formation professionnelle

au service du développement local

Ce document comprend deux parties : une synthèse pour chacun des différents thèmes

abordés et l'ensemble des interventions et débats. Pour cette seconde partie, il s'agit

d'une transcription intégrale, à partir essentiellement d'enregistrements audio, avec

cependant la nécessaire adaptation du langage oral au langage écrit.

Nous remercions tous ceux qui par leur participation ont alimenté ces actes, avec une

attention particulière pour Irig-Défis (Carif Guyane) qui a assuré l'enregistrement de la

rencontre et nous a communiqué les cassettes correspondantes.

La synthèse et les actes de l'université sont disponibles

sur notre site www.centre-inffo.fr.

ACTES

• Synthèse (sommaire) page 3

• Texte intégral (sommaire) page 52

Rédaction des actes : Patricia Gautier-Moulin

Décryptage des cassettes : Bénédicte Marin

Secrétariat-Mise en page : Evelyne Thullier

Correcteur : Honoré M’Bous

Avril 2000

Page 3: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 3

Sommaire de la synthèseSommaire de la synthèseSommaire de la synthèseSommaire de la synthèse

DISCOURS D’OUVERTURE :

• Les objectifs de l’université• Les priorités régionales des ROM• Les relations État-RégionsSynthèse de Mme Patricia Gautier-Moulin (Responsable de l'Observatoire duCentre INFFO)

page 5

FORMATION DES HOMMES ET COHESION SOCIALESynthèse de Mme Patricia Gautier-Moulin

page 12

FORMATION ET COOPERATION REGIONALESynthèse de Mme George Pau-Langevin (Directrice générale de l’ANT)

page 16

LA MISSION LOCALE DE GUYANESynthèse de Mme Patricia Gautier-Moulin

page 21

ATELIER : L’apprentissage et les contrats en alternanceSynthèse de M. Gérard Arzilli (Directeur général adjoint de la CCI de laRéunion) et M. Clément Abdallah (Directeur du CFA de la Réunion)

page 24

ATELIER : La formation et les nouvelles technologies de l’information etde la communicationSynthèse de Mme Elisabeth Caristan (Chargée de mission à l’AGEFMA,CARIF Martinique)

page 30

ATELIER : La reconnaissance des acquis professionnelsSynthèse de Mme Marie-Danièle Rino (Chargée d’études au CARIF Guyane)

page 35

ATELIER : L’illettrismeSynthèse de M. Jean-Claude Maccès (Directeur du CARIF-OREFGuadeloupe)

page 40

LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA FORMATION PROFESSIONNELLEet les problématiques du développement régional et local des ROMSynthèse de Mme Viviane Capgras (Chef de la mission formationprofessionnelle au Conseil régional de Martinique)

page 43

SEANCE DE CLOTURESynthèse de Mme Patricia Gautier-Moulin

page 45

CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES page 49

Page 4: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 4

SynthèseSynthèseSynthèseSynthèse

Intervenants des tables rondes et conférencesM. Christian Paul, Secrétaire d’État à l’outre-mer, par vidéoconférenceM. Vincent Merle, Directeur de cabinet de Mme Nicole Péry, Secrétaire d’État auxDroits des Femmes et à la Formation professionnelle,M. Antoine Karam, Président du Conseil régional de GuyaneM. Patrick Kessel, Directeur du Centre INFFO

Elus régionauxMme Andrée Baboul, Vice-Présidente du Conseil régional de GuyaneMme Chantal Berthelot, Vice-Présidente du Conseil régional de Guyane, déléguée à laformation professionnelleMme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régional de la RéunionM. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional de MartiniqueM. Christian Thénard, Vice-Président du Conseil régional de Guadeloupe

ConférenciersM. Gabriele, Directeur général adjoint du Conseil régional de GuyaneM. Serge Hermine, Directeur du CIDO (Centre d’information, de documentation etd’orientation de l’université René Descarte – Paris V)M. Nicolas Kezie, Université Antilles-Guyane, Chargé des relationsuniversité/entreprises, GuadeloupeM. Jean-Michel Nicolas, Directeur de l’AFPA, GuyaneM. Fabrice Payet, Directeur de l'AFPA, la RéunionM. Francis Riffaux, Directeur de l’AFPA, MartiniqueMme Sandra Trochimara, Directrice de la Mission locale de Guyane

Page 5: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 5

Synthèse de Mme Patricia Gautier-Moulin, Responsable de l'Observatoire du Centre

INFFO

DISCOURS D’OUVERTUREDISCOURS D’OUVERTUREDISCOURS D’OUVERTUREDISCOURS D’OUVERTURE

Les discours d’ouverture ont permis aux intervenants de dresser un rapide historique

de cette première Université et de préciser ses objectifs. Chaque élu régional a ensuite

présenté les axes prioritaires de son Conseil régional en matière de formation

professionnelle et son point de vue pour améliorer les relations entre les ROM et l’État.

LES OBJECTIFS DE L’UNIVERSITÉLES OBJECTIFS DE L’UNIVERSITÉLES OBJECTIFS DE L’UNIVERSITÉLES OBJECTIFS DE L’UNIVERSITÉ

Mme Joëlle Prévot-Madère (Vice-Présidente de la CCI de Guyane) a été la première à

souhaiter la bienvenue dans les locaux de la CCI de Guyane, aux participants de

l’Université de la formation professionnelle dans les régions d’outre-mer. Pour elle, "la

formation professionnelle, longtemps perçue comme un instrument de traitement social

du chômage, ou le moyen subtil de garantir la paix sociale dans l’entreprise, s’affirme

de plus en plus comme facteur à part entière de développement économique,

d’intégration et de cohésion sociale".

Mme Chantal Berthelot (Vice-Présidente du Conseil régional de Guyane, déléguée à

la formation professionnelle) a remercié tous les organisateurs et notamment les quatre

conseils régionaux, qui ont travaillé en étroite collaboration avec le Centre INFFO et les

CARIF d’outre-mer. M. Patrick Kessel, Directeur du Centre INFFO a rappelé la

double ambition qui anime, depuis 1989, les Universités de la formation professionnelle

du Centre Inffo : "proposer à tous les acteurs de la formation professionnelle, un lieu

d’échanges et de mutualisation des expériences, dans un cadre convivial et résidentiel

qui facilite largement la liberté d’expression ; inscrire la démarche dans la durée, à

l’instar de l’université, symbole d’unité de temps et de lieu, mais aussi de rigueur

intellectuelle et de diversité d’opinions". M. Christian Thénard, Vice-Président du

Conseil régional de Guadeloupe a souligné l’opportunité de cette manifestation qui

s’inscrivait dans un contexte de réforme profonde de la formation professionnelle.

Page 6: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 6

Mme Chantal Berthelot a insisté sur les résultats concrets attendus de cette Université.

Elle a vivement invité les participants à ne pas se limiter au constat des multiples

difficultés rencontrées mais à faire de cette manifestation "un creuset d’idées, de

solutions et de réponses, un tremplin de résolutions". Le même souci de conclusions

constructives animait M. Daniel Marie-Sainte qui a vu dans cette manifestation

l’occasion "de dégager des perspectives d’avenir, pour une plus grande efficacité de nos

politiques régionales de formation professionnelle dans la dynamique d’insertion sociale

et professionnelle de nos concitoyens". Pour Mme Marie-Andrée Jaubert (Vice-

Présidente du Conseil régional de la Réunion), la confrontation des expériences doit

permettre de mieux appréhender les besoins de qualification "pour faire de la formation

professionnelle un vecteur essentiel de la valorisation des ressources humaines" et pour

"transformer les contraintes en atouts".

S’appuyer sur les similitudes pour dégager des initiatives convergentes

Les élus régionaux se sont attachés à préciser les similitudes entre les difficultés

affrontées par les ROM, sur le plan économique, social et culturel, en particulier :

- une économie mal développée, où la balance commerciale est franchement

deséquilibrée,

- un chômage massif et malheureusement durable,

- une situation géographique éloignée des grands centres de ressources ou une très

grande dispersion de la population sur le territoire,

- une population majoritairement issue de la période tri-séculaire de l’esclavage qui a

longtemps, trop longtemps, mis un signe d’égalité entre la notion de travail et celle de

servitude .

Les intervenants ont souhaité que ces difficultés, largement partagées par les ROM,

mais également la diversité des réponses et des solutions mises en œuvre, soient source

d’enrichissement des débats de l’Université pour dégager des initiatives convergentes.

LES PRIORITÉS RÉGIONALESLES PRIORITÉS RÉGIONALESLES PRIORITÉS RÉGIONALESLES PRIORITÉS RÉGIONALES

La Martinique a investi fortement (300MF pour l’année 2000) sur la qualification des

demandeurs d’emploi. Ces crédits, alimentés tant par ses ressources propres que par le

Page 7: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 7

Fonds social européen, lui permettent de mener une politique de qualification - au

bénéfice des publics les plus en difficulté, jeunes exclus de l’Éducation nationale sans

un CAP, chômeurs de longue durée, sans négliger les actifs - fondée sur la collaboration

avec les partenaires sociaux. Une étude prospective sur les emplois et les qualifications

au niveau des branches professionnelles a servi de base pour l’élaboration du PRDFPJ

(Plan régional de développement de la formation professionnelle des jeunes).

La Réunion a placé "la formation des hommes au cœur de son action en faveur du

développement économique, social et culturel". Cette volonté se décline autour de six

priorités : l’insertion des jeunes sans emploi, le maintien de l’effort de la formation

professionnelle des adultes, la lutte contre l’exclusion (actions de lutte contre

l’illettrisme, de remise à niveau et d’orientation des publics en difficulté), la

diversification et la modernisation des modes de formation, l’amélioration de la

performance du système de formation et de la qualité de l’offre de formation,

l’assignation au système de formation d’une mission de développement et

d’accompagnement de l’action de mobilité et de coopération régionale.

La Guadeloupe a également fait de la formation des hommes, un objectif majeur de

son programme de développement économique. En 1999, 433 MF ont été consacrés aux

domaines de la formation, de l’enseignement supérieur, de l’apprentissage et de

l’emploi. Chaque année, 7 000 personnes sont formées grâce aux financements

régionaux et aux fonds européens. La stratégie principale est de favoriser l’accès à

l’emploi des jeunes et des adultes demandeurs d’emploi, afin de fournir aux petites

entreprises, constituant l’essentiel du tissu économique, une main-d’œuvre de qualité

pour renforcer leur compétitivité, tout en donnant aux jeunes des atouts

supplémentaires.

La formation des jeunes, une priorité absolue

Chaque région a mis l’accent sur des aspects particuliers de la formation des jeunes. La

population de la Guyane se caractérise autant par sa diversité que par sa jeunesse (50%

a moins de 25 ans). M. Antoine Karam, Président du Conseil régional de Guyane

conçoit la formation professionnelle comme "le moyen de transformer le potentiel

naturel de nos jeunes et de certains adultes en aptitudes de travail, susceptibles

d’enrichir l’horizon de nos entreprises … et plus largement, le moyen pour la société

d’intégrer par le travail les éléments de sa diversité démographique, de sa richesse

Page 8: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 8

naturelle".

La Guyane doit agir sur le volume de l’offre de formation pour répondre à la pression

démographique et permettre à chaque jeune de se former selon ses aspirations et les

besoins des entreprises. Mais surtout le rapport des jeunes à la formation doit changer :

la formation professionnelle doit non seulement amener les jeunes aux niveaux de

qualification exigés par les entreprises mais doit aussi "leur apprendre à être

responsables, acteurs de leur propre destin, du destin de l’entreprise et artisans du destin

de la société guyanaise".

La Guadeloupe a privilégié l’alternance : la région exige un temps en entreprise pour

chaque action de formation qu’elle finance. M. Christian Thénard (Vice-Président du

Conseil régional de Guadeloupe) a présenté l’effort particulier consenti pour

développer l’apprentissage. La Région accorde 1 000 francs par mois pendant la

première année à toute entreprise qui embauche un jeune en apprentissage et finance les

trois centres de formation existants. Elle s’attache également à revaloriser l’image de

l’apprentissage, tout en l’élargissant à d’autres secteurs porteurs d’emplois (comme la

pharmacie ou les transports...) et en construisant de nouveaux centres de formation, dans

un souci de rééquilibrage du territoire. Plusieurs mesures spécifiques favorisent

l’alternance et l’insertion professionnelle. Par exemple, "découverte de 1’entreprise"

permet à de jeunes diplômés d’acquérir une première expérience professionnelle

significative, l’opération "solidarité jeunes" propose aux jeunes de découvrir l’entreprise

pendant les vacances scolaires.

M. Christian Paul, Secrétaire d’État à l’outre-mer, dans son intervention vidéo

diffusée lors de l’université, a exprimé la volonté des pouvoirs publics de participer à

l’effort de formation des jeunes. Le PIJ (Projet Initiative Jeunes), qui sera

prochainement mis en place, constituera une aide au projet professionnel de tout jeune

de moins de 30 ans, "soit pour créer son entreprise par une aide en capital, soit pour

aller acquérir ailleurs une formation qualifiante, en mobilité". L’objectif du PIJ est de

toucher 10 000 jeunes en 2001. Il a également confirmé le rôle des RSMA (Régiments

du service militaire adapté) : "les RSMA, que l’État transforme actuellement pour tenir

compte de la suppression du service national, continueront à apporter leur concours à

l’effort de formation".

Page 9: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 9

L’information sur la formation

Une offre de formation, quelle que soit sa qualité, serait inopérante sans une bonne

information des publics visés.

Pour augmenter l’égalité des chances d’accès à la formation, la Région Martinique a

confié à l’AGEFMA (Carif), la mission de diffuser très largement cette information en

utilisant les NTIC (Nouvelles technologies de l’information et de la communication) et

en s’appuyant sur les réseaux des Points information jeunesse des PAIO (Permanence

d’accueil, d’information et d’orientation) et des Missions locales.

La Région Guadeloupe a mis en place, en partenariat avec le Rectorat, l’ANPE, et

l’AFPA, une Cité des métiers, à l’instar de la Cité des Sciences et de l’Industrie de

Paris.

La mobilité

L’exiguïté des territoires ou des marchés du travail locaux conduisent les ROM à

entretenir un partenariat actif avec l’ANT (Agence nationale pour l’insertion et la

promotion des travailleurs de l’outre-mer) pour développer des mobilités permettant

d’élargir les propositions de formation et d’emploi. "Le rôle de l’ANT n’est plus à

prouver. Il doit être poursuivi et amplifié afin que chaque jeune d’outre-mer ait une

chance équivalente à celle d’un jeune de métropole. C’est cela aussi l’égalité

républicaine", a rappelé M. Paul.

L’utilisation des NTIC

Toutes les ROM font des efforts particuliers pour développer l’utilisation des NTIC au

service de la formation. Mme Marie-Andrée Jaubert a souligné leur importance dans

l’évolution des politiques de formation des ROM : "ces nouveaux outils de

communication doivent nous permettre de rompre notre isolement, tant en matière

d’éducation et de formation que dans le domaine du développement économique.

Connaître et faire connaître, savoir et faire savoir deviennent des concepts qui peuvent

être démultipliés, sans subir les contraintes d’exiguïté du territoire, d’isolement ou de

croissance démographique. Ces outils technologiques peuvent également faciliter le

rapprochement entre nos quatre régions et servir à l’essor de nos politiques de

coopération régionale".

Améliorer la diffusion de l’information, notamment par les NTIC est également une

priorité du Centre Inffo et M. Patrick Kessel a présenté les dernières réalisations

Page 10: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 10

multimédias du Centre : productions de CD ROM (les fiches pratiques, les accords de

branches, le Formacode), enrichissement permanent des informations disponibles sur le

site Internet.

LES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONSLES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONSLES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONSLES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONS

Les intervenants se sont interrogés sur la pertinence des différents dispositifs mis en

place par les pouvoirs publics et de leur adéquation à la situation des ROM.

M. Christian Thénard s’est inquiété notamment des dispositifs destinés aux jeunes :

"Sont-ils suffisamment pertinents, pour répondre à leurs besoins ? Quels sont les

moyens et mesures appropriés à mettre en œuvre, en harmonie avec l’économie de nos

territoires, pour une meilleure insertion professionnelle ?" Pour Mme Chantal

Berthelot, il s’agit de revoir la plupart des dispositifs, voire d’en créer "sur mesure", en

particulier pour accompagner la très forte augmentation des jeunes en difficulté

d’insertion. Plusieurs dispositifs nationaux ont été revus en fonction de la décélération

démographique de l’hexagone, sans tenir compte des réalités des régions ultramarines.

Ces désengagements sont durement ressentis et pèsent lourdement sur les budgets

régionaux. Elle a souhaité la normalisation simplifiée des champs de compétences État-

Régions d’outre-mer : "avec nos outils spécifiques, pourtant renforcés, nous ne

parvenons plus à nous attaquer réellement au recul des difficultés rencontrées par les

jeunes non admissibles au RMI. Que dire de la subtilité techno-administrative, qui

traverse la plate-forme de professionnalisation des emplois jeunes ?"

Enfin, elle a regretté que des expérimentations qui ont démontré leur efficacité ne

puissent être pérennisées, parce que "hors normes", vues de l’hexagone : discontinuité

territoriale interne, jeunes étrangers dont l’intégration pose des problèmes

considérables, absence d’équipements ou surcoûts d’interventions.

"L’illettrisme, la reconnaissance des acquis professionnels, la formation à distance, les

technologies innovantes, l’apprentissage... sont autant d’ateliers qui, par notre travail

collectif, permettront d’obtenir de nouvelles propositions. Cependant, elles ne doivent

pas être vaines. Elles doivent êtres adaptées aux contextes de nos régions et prises en

compte par les instances gouvernementales". Ce vœu de M. Christian Thénard faisait

écho à la volonté commune aux quatre ROM de voir leurs difficultés davantage prises

en considération par l’État.

Page 11: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 11

Ces préoccupations ont trouvé un début de réponse dans l’intervention de M. Christian

Paul, qui a précisé que "les moyens budgétaires, dégagés au titre des contrats de plan

ainsi que du Fonds social européen, pour les actions de formation professionnelle dans

les ROM, vont presque doubler dans la période à venir, par rapport aux années

écoulées". Il a insisté sur la nécessité de favoriser le développement économique local et

détaillé les nouvelles mesures de soutien fiscal à l’investissement outre-mer. Ce

dispositif devrait créer des conditions plus favorables au développement économique

de l’outre-mer. Sont ainsi prévues des exonérations importantes de cotisations (Sécurité

sociale) pour les entreprises de moins de onze salariés, et celles qui relèvent de secteurs

spécifiques comme l’industrie, l’agriculture, la pêche, le tourisme, les nouvelles

technologies, le bâtiment. Les activités indépendantes seront également stimulées par

des allégements de charges sociales. "Au total, c’est un effort de 3,5 milliards de francs

contre un milliard précédemment qui sera mis au service de l’emploi et du

développement de l’outre-mer".

Page 12: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 12

Synthèse de Patricia Gautier-Moulin, Centre INFFO

FORMATION DES HOMMESFORMATION DES HOMMESFORMATION DES HOMMESFORMATION DES HOMMES

ET COHESION SOCIALEET COHESION SOCIALEET COHESION SOCIALEET COHESION SOCIALE

Conférence-débat de M. Serge Hermine,Directeur du CIDO (Centre d’information, de documentation et d’orientation)

de l’université René Descarte – Paris V

L’école pour lutter contre la fracture sociale

Les économies des ROM se caractérisent notamment par une forte dépendance vis-à-vis

de la métropole, l’absence de tissu industriel et une croissance démographique beaucoup

plus élevée qu’en Europe. Ces éléments pèsent fortement sur le développement régional

et entraînent des phénomènes d’exclusion et de fracture sociale. Ces problèmes sont

encore aggravés parce qu’ils se posent dans un contexte où se croisent des cultures

d’une grande diversité.

L’école, vecteur jusqu’ici d’une idéologie fondée sur l’égalité formelle, juridique et

politique de l’individu citoyen a permis d’intégrer des populations hétérogènes, par leur

origine sociale et régionale nationale. Aujourd’hui, les thèses, en partie importées des

États-Unis, qui prônent une société pluriethnique et le "droit à la différence" remettent

en cause les modalités traditionnelles de l’assimilation, caractéristiques de l’école

républicaine. La société est alors conçue comme l’emboîtement de communautés

distinctes, soucieuses de préserver leurs spécificités ethniques, linguistiques et

religieuses. Pour Alain Touraine, cette approche "aboutit à détruire l’appartenance à la

société politique et à la nation".

On assiste donc actuellement à l’affrontement de deux logiques : celle des

particularismes et celle unitaire de la République française. La première est porteuse de

risques de rupture sociale et la seconde, d’une grande capacité intégrative, exige

cependant des aménagements pour tenir compte des contextes locaux. En effet, les

écarts, par exemple entre la Guyane et la métropole, dans les domaines de l’emploi et de

Page 13: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 13

la formation, sont très importants, que ce soit le taux de scolarisation (90% en

métropole, 65% en Guyane) ou le taux de chômage (10% en métropole, 25% en

Guyane).

Comment, dans ce contexte, transmettre une culture unitaire, dans laquelle chacun, avec

ses différences, puisse néanmoins se reconnaître ?

L’acceptation de l’autre est un élément important de la cohésion sociale. Ce qui conduit

à s’interroger sur les facteurs, notamment dans l’éducation et la formation, qui

permettent de renforcer la reconnaissance et le respect de l’altérité. Un enseignement de

l’histoire, qui tient compte des cultures et des particularismes locaux, peut certainement

contribuer au développement de la cohésion sociale.

L’individu au centre de la cohésion sociale

La crise du système économique est une invitation à faire revivre l’esprit Condorcet, qui

nous propose une autre piste pour favoriser la cohésion sociale par l’éducation. Pour lui,

la connaissance est un processus toujours inachevé et son progrès, s’il dépend des

chercheurs, dépend également des savoirs des plus humbles dont la science elle-même

se nourrit. Selon cette analyse d’une construction dialectique et démocratique du savoir,

la cohésion sociale naît de ce que tout individu est porteur d’une parcelle singulière de

savoir et participe à l’œuvre collective de la "connaissance". L’éducation et la formation

ne sauraient alors être limitées à une période particulière et l’âge adulte peut, au

contraire, constituer un temps fort dans une éducation ainsi comprise.

Cette conception ouvre la voie d’un recentrage du système éducatif sur le sujet - l’élève

ou l’apprenant - qui échappe de plus en plus aux institutions pour tenter de recréer des

espaces informels de socialisation. Il faut mettre l’accent, non sur la distance entre les

cultures, mais sur les capacités des individus à construire un projet de vie commun. Le

rôle de la formation est non seulement de permettre aux stagiaires de s’insérer dans

l’emploi mais aussi de valoriser, selon le point de vue qu’on adopte, l’individu, la

personne, l’homme. Pour Condorcet, la finalité de tout effort social est la réalisation des

individus. C’est pourquoi la formation ne peut ignorer le caractère culturel - c’est-à-dire

ce qui développe la personnalité - qui devrait être associé à tout apprentissage.

La culture est à la fois réalisation individuelle et insertion sociale. Cette insertion

sociale, qui a pour conséquence la cohésion sociale, permet aux individus de vivre les

uns avec les autres, de se rencontrer et d’échanger. Mais il ne suffit sans doute pas

Page 14: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 14

d’améliorer les contacts sociaux pour résoudre les problèmes sociaux. Autant que les

échanges sociaux, la justice sociale est nécessaire.

Pour que chacun trouve sa place dans la production, une éthique sociale est

indispensable. Celle-ci s’apprend par l’exercice des valeurs républicaines et la

formation à la vie citoyenne, qui permet à chaque individu de développer son sentiment

d’appartenance à une nation, en faisant siennes un certain nombre de valeurs de la

République et de la démocratie.

L’articulation entre formation initiale et formation continue

Un nombre important de personnes sont exclues de l’apprentissage de la cohésion

sociale, en raison en particulier des carences du système éducatif. Certains chiffres sont

éloquents : 50 % d’illettrés en Guyane, surtout pour cause de non scolarisation ; plus de

la moitié des élèves guyanais quitte le système éducatif sans les acquis minimum.

La formation continue prend alors une importance grandissante par rapport à la

formation initiale. Or, il s’agit de deux formations tout à fait hétérogènes. Toute

formation initiale est une formation tournée vers l’universalité : la science et la raison

sont universelles. La formation continue, de son côté, est une formation de la

singularité, de la particularité. On ne peut donc pas fusionner ces deux dispositifs, mais

il faut les articuler l’un à l’autre.

La formation professionnelle apparaît alors comme un dispositif réparateur du système

scolaire. Elle prend le relais de la formation initiale, afin de permettre aux jeunes qui ne

sont pas préparés au monde du travail, de s’y adapter. Les travaux actuels de la science

cognitive tendent à montrer qu’il est possible pour un adulte d’apprendre et d’apprendre

à apprendre, que l’abstraction n’est pas inaccessible si des méthodes appropriées sont

utilisées. Les apprentissages ne sont donc pas indissociables de la période scolaire mais

peuvent aussi commencer et se développer ultérieurement.

Cette approche répond en partie à la question de la formation à la cohésion sociale des

personnes dont la vie scolaire a été un échec. La cohésion sociale relève de

l’apprentissage, donné d’abord par l’école puis par la formation continue, de la

citoyenneté et de ses modalités d’exercice, de la connaissance des institutions et de leur

fonctionnement, pour participer à la vie collective et lutter contre l’égoïsme et

l’exaltation de l’individualisme. La formation continue, notamment lors des périodes

d’alternance en entreprise, peut s’appuyer par exemple, sur l’apprentissage du droit du

Page 15: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 15

travail, du droit syndical et développer la connaissance d’institutions réelles comme le

Comité d’entreprise. Apprendre à mener collectivement une négociation, apprendre à

utiliser la parole comme outil de résolution des conflits évite l’opposition physique et

participe à la cohésion sociale.

Mais l’entreprise ne joue pas toujours son rôle formateur lors des périodes d’alternance

et les acquis ne sont pas, le plus souvent, ceux qui étaient annoncés au départ. Pourtant,

pour de nombreux sociologues, l’entreprise apparaît comme le véritable lieu de la

socialisation et de la formation de l’identité individuelle et collective.

Le travail, facteur majeur de cohésion sociale

Le travail constitue l’une des formes majeures de lien social qui se fonde sur des

notions de réciprocité et d’utilité sociale : en apportant ma contribution, je renforce mon

sentiment d’appartenance à la société, je suis lié à elle parce que j’ai besoin d’elle et

que je lui suis utile. Ainsi permet-on la satisfaction des besoins humains, réalisée

collectivement, mais aussi celle des désirs individuels et collectifs.

On comprend mieux pourquoi nos sociétés s’évertuent à lutter contre le chômage par la

formation, car travail, formation et cohésion sociale sont intimement liés. Tout déficit

de l’appareil éducatif et de l’appareil de formation, génère du chômage et un manque de

cohésion sociale. Et inversement, un manque de cohésion sociale remet en cause la

formation.

DébatsDébatsDébatsDébatsLes débats ont été essentiellement alimentés par des réflexions et des témoignages sur

l’articulation formation initiale / formation continue et le rôle de l’alternance.

Un intervenant a insisté sur le rôle spécifique de la formation continue pour adapter les

qualifications aux évolutions des besoins des entreprises. Un autre a souligné les

changements induits par l’irruption des nouvelles technologies. Ces dernières, mieux

prises en compte par la formation continue qui a l’avantage d’une plus grande souplesse

d’adaptation, pourraient remettre en cause le positionnement de la formation continue

comme lieu de réparation de l’échec scolaire.

Si plusieurs intervenants ont adhéré à la vision plutôt pessimiste de l’alternance

présentée par M. Hermine, d’autres ont témoigné d’expériences positives, l’alternance

constituant au contraire "la voie royale de la professionnalisation".

Page 16: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 16

Synthèse de Mme George Pau-Langevin, Directrice générale de l’ANT

FORMATIONFORMATIONFORMATIONFORMATION

ET COOPÉRATION RÉGIONALEET COOPÉRATION RÉGIONALEET COOPÉRATION RÉGIONALEET COOPÉRATION RÉGIONALE

Table rondeTable rondeTable rondeTable ronde

Nous nous sommes tout d’abord longuement interrogé pour savoir ce qu’on entend par

coopération régionale.

• Pour certains, on entend par coopération une meilleure mutualisation pour organiser

l’offre de formation entre les trois DFA (départements français d’Amérique) - la

Réunion étant plus éloignée - afin que le stagiaire de Guyane, par exemple, puisse avoir

accès à l’intégralité des formations disponibles en Martinique ou en Guadeloupe. Il y a

des choses déjà réalisées en ce sens, mais il est important d’améliorer encore ce point.

• On peut également noter ce qui est fait par les entreprises privées. D’ailleurs, la

plupart des initiatives prises en matière de coopération le sont par des entreprises qui

vont travailler sur le territoire d’un pays frontalier.

• On peut aussi rappeler de vieux souvenirs, parfois désagréables, sur les projets ou

initiatives venant d’Europe en direction des pays du tiers monde ou des Dom et qui ont

été plus ou moins appréciés.

• On a parlé des échanges avec d’autres régions d’Europe qui sont encore à développer.

• On a évoqué également les actions dispensées aux étrangers présents dans les Dom et

singulièrement en Guyane, ce qui peut être considéré comme une forme de coopération.

Pour la majorité des participants, le terme de coopération régionale correspond plutôt à

des échanges avec les pays de la zone ou limitrophes. Même si des initiatives anciennes

existent, cette forme de coopération s’est développée récemment avec la mise en place

d’outils juridiques et un intérêt accru pour les pays de la zone dans le public et chez les

élus.

Page 17: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 17

Les outils juridiques existants

- La Convention de Lomé IV se prononce pour l’intensification de la coopération

décentralisée. Elle recommande de s’appuyer à cette fin, sur les collectivités locales et

la société civile, notamment les ONG.

- Des financements européens existent pour cela. Le FED ou le FEDER sont

mobilisables, même si les montants existants sont encore modestes au regard du FSE.

- Le FSE permet aussi d’envoyer des stagiaires ressortissants des Dom en formation à

l’étranger dès que cette action répond aux critères habituels d’éligibilité des actions FSE

et s’il est plus expédient de procéder à la formation dans la zone qu’en métropole ou

dans un autre pays européen. Cela ne doit cependant pas être systématique, a précisé M.

Margos.

- M. Riffaux nous a rappelé la loi sur les compétences régionales du 2 Mars 1982 qui

prévoit que les conseils régionaux peuvent organiser, à des fins de concertation, des

contacts réguliers avec les collectivités décentralisées étrangères ayant une frontière

commune avec la région. Il faut savoir que la loi d’orientation pour l’outre-mer prévoit

un élargissement considérable du rôle des collectivités locales d’outre-mer dans cette

coopération et notamment, la possibilité d’intervenir dans les engagements

internationaux de l’État. Le pouvoir des présidents des collectivités locales d’outre-mer

sera sensiblement accru.

- Des fonds spécialisés existent : le FIC (Fonds interministériel de coopération)

décentralisé au niveau de la région Guadeloupe pour la Caraïbe et le fonds spécifique

qui existe pour l’Amérique latine, mais aussi le Fonds de Solidarité prioritaire géré par

le Ministère des affaires étrangères. Là aussi, quand la loi sera adoptée, il y aura sans

doute des évolutions sur la gestion de ces fonds.

Les régions manifestent un intérêt grandissant dans leur stratégie politique pour

cet axe d’action.

La région Martinique souligne que la mise en place des actions de coopération

correspond certes à des financements disponibles, mais aussi et surtout à la volonté

politique des élus qui peuvent engager leurs fonds propres. Par exemple, la formation de

Page 18: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 18

pêcheurs de Martinique, associant des pêcheurs de Sainte-Lucie, avec lesquels de petites

difficultés de voisinage avaient surgi. Cette action devait leur permettre de mieux se

connaître et de travailler ensemble. Elle s’est déroulée sans l’aide de fonds européens.

La région Réunion, comme l’a expliqué M. Payet, a un rôle spécifique à jouer en la

matière, car elle souffre certes de handicaps propres et bien connus (insuffisance de

ressources, forte croissance démographique, faible PIB) mais en revanche, elle a un

atout majeur de par sa situation de seule région française dans l’océan indien. Elle a

donc inscrit l’ouverture internationale et l’intégration régionale au cœur de sa stratégie

de développement. L’objectif visé est de favoriser l’intégration harmonieuse de la

Réunion dans son environnement régional mais aussi de faire de la coopération

régionale un atout majeur au service du co-développement durable pour la Réunion et

les pays de la zone. La région a ciblé des zones d’action prioritaires et notamment des

pays du premier cercle comme Madagascar, ou Maurice (pays de la COI - Commission

de l’océan indien).

Les actions concrètes

Actuellement, cependant, entre les intentions déclarées de chacune des régions et la

réalité, il existe une marge certaine, les réalisations étant encore peu nombreuses et

fragmentaires, en tout cas souvent menées de manière isolée par tel ou tel opérateur.

Sur la Caraïbe

L’UAG (Université Antilles-Guyane) a fait part de projets développés dans le cadre

d’un réseau de 11 pays incluant 17 universités et permettant d’étudier à la fois les

formations en développement local existant dans ces universités et aussi de mettre en

commun et d’organiser un mastère de formation en développement local, qui peut se

dérouler sur plusieurs universités. Le stagiaire peut assister à des formations sur place

mais aussi par visio conférence.

L’AFPA Martinique, qui a pu accéder au statut d’ONG, a cité plusieurs actions

originales qu’elle a conduites :

- accueil de 20 membres du personnel des ambassades du CARICOM pour une

formation en français langue étrangère en 93 /94 ;

Page 19: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 19

- en 1993, action de perfectionnement pour artisans bijoutiers de la Dominique, Antigua,

St-Kitts, et Sainte-Lucie ;

- avec Cuba, stage de cuisine gastronomique internationale et de boulangerie-viennoiserie ;

- action de formation pour 10 ressortissants de 5 États de 1’OECS (Organisation des

États de la Caraïbe orientale) à la maintenance biomédicale avec le concours du CHU de

Fort-de-France et d’une organisation paramédicale à la Barbade.

Les délégations de l’ANT adressent un certain nombre de stagiaires, notamment des

BTS, pour leur stage pratique dans les pays de la zone comme Trinidad ou Barbade,

voire en Amérique du Nord. Avec le soutien de la région Martinique, l’ANT a pu mettre

au point un projet complet, auprès du gouvernement haïtien, pour des consultants

stagiaires qui ont, durant plusieurs mois, effectué une tâche utile de conseil pour

l’électrification ou la gestion des déchets. Le gouvernement haïtien se dit prêt à

accueillir de nouveaux jeunes mais l’Agence, conformément au souhait de la région,

attend de trouver un partenaire fiable sur place pour l’accompagnement des jeunes avant

de réitérer l’expérience. D’autres projets concernent Sainte-Lucie et Barbade,

principalement dans l’hôtellerie.

Sur la zone de l’océan indien

Des actions ont été mises au point avec le soutien de la région Réunion et en partenariat

avec l’ANT et l’Université de la Réunion. Il s’est agi d’abord de permettre à de jeunes

diplômés de se rendre, pour six mois de stage, dans des entreprises en Afrique du Sud.

Malgré les différences culturelles, la plupart des stagiaires ont été appréciés et ont eu

des propositions d’emploi par les entreprises ; à noter cependant, la nécessité de repartir

pour solliciter un nouveau visa. Des élèves professeurs qui se préparent à enseigner le

français langue étrangère, se sont rendus, avec le soutien de la région et de l’ANT, à

Madagascar où ils ont enseigné durant six mois dans des écoles malgaches, expérience

très profitable au village où ils ont enseigné et qui leur a permis de valider leur diplôme.

Les freins à lever pour développer les actions de coopération régionale

Il appartient aux élus de définir la stratégie adoptée par leur collectivité en matière de

coopération et singulièrement les destinations qui leur semblent pertinentes. Les

Page 20: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 20

opérateurs de mobilité comme l’ANT ou les organismes de formation peuvent ensuite

intervenir dans le cadre ainsi tracé. L’exemple de la Réunion a été évoqué, où un groupe

de travail réunit l’ANT, la CCI, l’AFPA, la Chambre des métiers pour inventorier les

possibilités et mettre au point une méthodologie commune. Les participants à la table

ronde ont manifesté leur intérêt pour une telle expérience. Cet exemple pourra être mis à

profit dans les autres DOM car, d’une part nous avons des connaissances réduites sur ce

qui se fait dans les pays de la zone et d’autre part, mettre en commun nos expériences et

nos moyens nous permettraient d’aller plus vite et de faire des choses plus intéressantes.

En effet, il importe de mieux connaître les systèmes éducatifs et de formation des

principaux pays susceptibles d’être concernés. Comme l’a souligné M. Riffaux,

entretenir un réseau de connaissances et des relations avec les principaux acteurs de

terrain dans ces pays s’avère nécessaire. Ceci pose évidemment la question d’une

maîtrise suffisante d’une langue commune. Pour coopérer avec le Brésil, il faut aller au

Brésil. Il apparaît donc utile pour les principaux acteurs de s’organiser et d’envisager

une mission exploratoire commune pour améliorer la connaissance de terrain et mettre

au point les premiers projets expérimentaux. De plus, des lignes d’assistance technique,

voire même d’autres crédits européens, pourraient être mobilisés pour cette phase

exploratoire.

En conclusion, il a été souligné aussi qu’il fallait s’appuyer sur les structures existantes

et particulièrement les postes d’expansion économique des ambassades. La recherche de

partenariats ne doit pas toutefois masquer les difficultés réelles qui demeurent à

affronter, y compris les oppositions d’intérêt, les différences linguistiques, les

différences de niveau de vie (qui peuvent surprendre les stagiaires), les questions de

visas ou autres. Cependant, les différents participants ont estimé qu’il s’agissait de

projets intéressants et innovants qui pouvaient tracer de nouvelles perspectives pour les

jeunes, et leur ouvrir l’horizon et que donc, à ce titre, cela valait la peine de défricher

ces nouveaux champs.

Page 21: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 21

Synthèse de Mme Patricia Gautier-Moulin, Responsable de l'Observatoire du Centre

INFFO

LA MISSION LOCALE DE GUYANELA MISSION LOCALE DE GUYANELA MISSION LOCALE DE GUYANELA MISSION LOCALE DE GUYANE

Interventions de :

Mme Andrée Baboul, Vice-Présidente du Conseil régional de Guyane

Mme Sandra Trochimara, Directrice de la Mission locale de Guyane

Historique

La Mission locale régionale de Guyane est encore "jeune", puisqu’elle a été créée le 28

décembre 1999, sous la forme juridique d’un Groupement d’intérêt public. La PAIO

(Permanence d’accueil, d’information et d’orientation) qui l’a précédée avait été mise

en place en 1980. Cette Permanence a rencontré d’énormes difficultés dès sa création

qui se sont aggravées lors de la mise en place d’une zone de formation de 90000 m2 !

Malgré des moyens supplémentaires apportés par le contrat de plan de 1994 à 1999,

cette PAIO restait dans une situation critique et ne pouvait faire face à la montée du

chômage. En Guyane, il est très difficile de comptabiliser les demandeurs d’emploi. Si

l’ANPE déclare 2 500 jeunes inscrits, la région en compte en réalité plus du double. Le

transfert de compétence de l’État à la Région de l’insertion sociale et professionnelle du

public jeune a décidé la Guyane à se doter de nouveaux moyens pour intervenir auprès

de l’ensemble de la jeunesse sur la totalité du territoire, et s’est concrétisé par la mise en

place d’une Mission locale Régionale, qui intègre l’ex PAIO. Cette nouvelle structure

s’appuie sur un partenariat le plus large possible, notamment les élus locaux, les

organismes de formation, les structures qui gèrent l’insertion et l’accompagnement

social, les chambres consulaires, les chefs d’entreprise, l’Education nationale, l’ANT.

Traiter le jeune dans sa globalité

La Mission locale de Guyane va se baser sur une pédagogie dynamique qui gravitera

autour de 8 pôles : formation, orientation, emploi, santé, logement, transport, culture,

loisirs, destinés à apporter une réponse adaptée à chaque jeune et à contribuer à lui

donner une place de citoyen à part entière. Sur chaque pôle, des partenariats avec les

Page 22: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 22

structures adéquates seront développés. Le pôle "emploi" va améliorer la connaissance

du marché de l’emploi et la constitution d’un réseau d’entreprises. À moyen terme, la

Mission locale va s’orienter vers une labellisation "espace jeune" à travers un

partenariat avec l’ANPE et la Région.

Les activités de la Mission locale

En 1999, la Mission locale régionale de Guyane comptait 3 241 jeunes inscrits. 685

d’entre eux ont bénéficié d’actions d’orientation, de formation, ou de pré-qualification

et 468 de formations qualifiantes diplômantes. En terme d’emploi, des résultats

tangibles ont été obtenus. 235 jeunes ont conclu un contrat de travail et 42 se sont

positionnés sur des contrats, type apprentissage, orientation ou qualification. La Mission

locale a quatre antennes et d’ici fin 2000, deux autres verront le jour : l’une située à St

Georges dans la région de l’est et l’autre sur la région de Matoury ; en 2001, s’ouvrira

l’antenne de Maripasoula.

L’antenne de Maripasoula

La PAIO prévoit d’installer une antenne dans une région profonde de l’ouest guyanais.

Il s’agit de Maripasoula qui rencontre des difficultés culturelles spécifiques, avec une

jeunesse qui se trouve confrontée assez brutalement à une éducation et à une

information occidentales. Cette région compte 37 520 habitants répartis sur 8

communes fortement enclavées. Certaines ne sont accessibles que par voie aérienne ou

par le fleuve. La situation sociale et économique est fragile avec une forte démographie,

liée aussi à un fort et permanent courant d’immigration. Les problèmes de transports

(les organismes de formation sont concentrés à St Laurent), la pauvreté du bassin de

l’emploi augmentent encore les difficultés d’insertion. Pour faciliter ses relations avec

les jeunes de la région, la Mission locale a d’abord établi un partenariat avec le CCOG

(Centre de la communauté commune de l’ouest guyanais). Actuellement, les réponses

proposées aux jeunes concernent principalement les dispositifs de pré-orientation, de

lutte contre l’illettrisme, sur les chantiers écoles et sur la plate-forme mobilisation qui

est pour l’instant saturée.

Page 23: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 23

DébatsDébatsDébatsDébats

Les débats ont permis de préciser plusieurs points abordés lors de la présentation.

• La structure du GIP est gérée par un Conseil d’administration qui comprend un

Collège d’élus (conseillers régionaux, généraux, et maires de communes), un Collège

des représentants de l’État, un Collège des chambres consulaires et un Collège d’une

fédération d’associations.

• Le lien entre la Mission locale et le monde économique. L’entreprise est largement

prise en compte au niveau de cette nouvelle structure, à travers une personne référente :

un responsable emploi-formation développera un réseau d’entreprises. Le tissu

économique est faible mais on assiste cependant à une relance de la construction, sur les

métiers classiques (bâtiment, installations, équipements routiers, infrastructures…).

Un observatoire a été mis en place avec l’État et les professionnels pour essayer de

dynamiser les entreprises locales. Le développement du tourisme est une priorité

nationale et régionale qui devrait déboucher sur des emplois, et en particulier sur de

nouveaux métiers. Le secteur minier peut aussi devenir source de création d’emplois.

La Mission locale souhaite également que les entreprises, notamment du bâtiment, qui

s’installent sur la zone embauchent localement plutôt que d’employer une main-d’œuvre

étrangère.

• Un référent technique "accompagnement social" proposera des réponses pour tous

les problèmes liés aux troubles psychologiques et à la toxicomanie, à travers des

campagnes de prévention en partenariat avec les structures œuvrant dans ce champ. Une

collaboration est déjà engagée avec la DASS État et une cellule de lutte contre la

toxicomanie et ses déviances,.

• Il existe 9 000 jeunes de 18 à 25 ans dont on ne sait rien si ce n’est qu’ils ne sont ni

à l’Éducation nationale, ni en formation, ni en emploi. L’ANT met en place un logiciel

commun qui permettra de suivre un jeune d’une extrémité à l’autre du territoire de la

Guyane et jusqu’à l’extérieur quand il partira.

Page 24: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 24

Synthèse de M. Gérard Arzilli, Directeur général adjoint de la CCI de la Réunion,

chargé de la formation et de M. Clément Abdallah, Directeur du CFA de la Réunion

L’APPRENTISSAGE ET LES CONTRATS ENL’APPRENTISSAGE ET LES CONTRATS ENL’APPRENTISSAGE ET LES CONTRATS ENL’APPRENTISSAGE ET LES CONTRATS EN

ALTERNANCEALTERNANCEALTERNANCEALTERNANCE

AtelierAtelierAtelierAtelier

Cadrage :

Les contrats en alternance constituent une voie privilégiée d’insertion durable des

jeunes et les possibilités de développement de ces contrats, dans les régions d’outre-

mer, sont importantes. Cependant, le taux de rupture de ces contrats, en particulier pour

l’apprentissage, est élevé.

Quelles préconisations formuler ? Quelles actions les décideurs politiques et

économiques doivent-ils mettre en œuvre pour remédier à cette situation ?

Etat des lieux et expérimentations en coursEn préambule, et après un rapide examen des statistiques, notre atelier a établi trois

constatations, véritables préambules à l’alternance en général et à l’apprentissage en

particulier :

• L’apprentissage peut être un mode de formation à part entière. Ce n’est pas seulement

une deuxième chance mais un choix alternatif à d’autres modes de formation, qui

permet l’épanouissement du jeune par une pédagogie basée sur la confrontation

permanente des enseignements avec la réalité.

• L’entreprise apporte bien évidemment le savoir-faire et le savoir-être, mais elle est

également un lieu producteur de connaissances aussi bien générales que pratiques.

• Un échange permanent doit s’établir entre ces deux lieux de vie et de formation. De la

qualité de ce lien dépend la réussite de l’apprentissage… C’est dire toute l’importance

que revêt dans l’alternance, la fonction tutorale, qu’elle s’exerce au niveau de

Page 25: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 25

l’entreprise ou au niveau du CFA. C’est de sa qualité et de sa pertinence que dépendra

la qualité de l’apprentissage lui-même.

Ces constats établis, nous avons fait un rapide état des lieux de l’apprentissage outre-

mer, en nous livrant à une approche plus qualitative que quantitative et en nous

attachant à identifier ses faiblesses pour mieux les combattre.

Pour les départements français d’Amérique (où l’on dénombre plus de 3 000

contrats d’alternance), nous avons relevé des préoccupations communes :

• un apprentissage essentiellement développé sur des niveaux V, orienté majoritairement

sur les métiers de l’artisanat, exception faite de l’agriculture et du commerce en

Guadeloupe, celui-ci étant d’ailleurs de niveau III ;

• une faiblesse du tissu économique et la fragilité de certaines entreprises qui constituent

des obstacles réels à son développement serein et harmonieux ;

• un manque d’information des jeunes et de leurs familles sur les potentialités offertes

par l’alternance, méconnaissance qui continue à entretenir une mauvaise image. Cette

réelle difficulté n’autorise pas, par ailleurs, la mise en place de filières d’excellence, ce

qui permettrait sans doute de mieux valoriser l’apprentissage dans ces régions ;

• la dispersion de l’habitat, comme les distances existant entre les CFA et les entreprises

d’alternance, constitue souvent un frein ;

• enfin, pour la Guyane, la faiblesse d’équipements des centres comme des entreprises

est, pour certains métiers, un handicap réel.

Pour le département de la Réunion, la situation est quelque peu différente, du fait

d’une alternance fortement développée et intégrée dans le tissu économique,

puisque ce sont plus de 5 000 contrats qui sont réalisés chaque année (3 500 en

apprentissage et 1 500 en qualification).

Malgré ces chiffres, quelques interrogations sur le système :

• au niveau du taux de rupture (entre 24 % et 30 %), même si les causes sont

aujourd’hui fortement identifiées et des mesures correctives progressivement mises en

place ;

• au niveau de la forte prédominance des formations diplômantes (80%), par rapport aux

formations qualifiantes directement déclinées des conventions collectives et aux CQP

qui apparaissent comme plus en prise avec les besoins évolutifs des entreprises.

Page 26: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 26

Cependant, il est à remarquer que, dans nos départements, l’alternance est une réalité

qui, certes, connaît parfois des difficultés, mais qui mobilise énergie et imagination pour

améliorer ses performances.

Citons quelques-unes des initiatives prises :

• pour réduire le taux de rupture et faciliter l’orientation, ont été développés des

modules préparatoires aux contrats en alternance, formation courte dans laquelle le

jeune est un acteur de son projet par la recherche de son stage, tout en bénéficiant du

soutien méthodologique du centre et des remises à niveau nécessaires ;

• toujours pour réduire le taux de rupture, la fonction tutorale a été renforcée, afin

d’améliorer le dialogue entre l’entreprise et le centre ; pour cela, ont été créés des outils

formalisés d’évaluation des difficultés rencontrées par l’apprenti, à seule fin d’intervenir

de manière préventive à une éventuelle rupture ;

• renforcement du lien entreprise/centre et valorisation du rôle de l’entreprise par la

méthode du séquençage, qui permet d’obtenir un diplôme par unité de valeur dont la

validation se fait tant par l’entreprise que par le CFA ;

• accompagnement du développement économique par le projet PEDAC (Pacte

entreprise pour le développement d’activités complémentaires), qui permet à une

entreprise de s’attacher les compétences d’un jeune de niveau Bac + 2 pour vérifier la

faisabilité d’un projet d’activité nouvelle. Une lettre de mission claire entre l’entreprise

et le stagiaire, un accompagnement formatif universitaire personnalisé, l’obtention d’un

diplôme Bac + 3 en fin de cursus et une nouvelle activité créée sont les objectifs fixés à

cette expérimentation.

Vous constatez, au travers de ces quatre exemples, que l’apprentissage et l’alternance,

en général, sont fortement soucieux de qualité et d’efficacité et même de retour sur

investissement en termes économiques. Dans ce mode de formation à part entière, où

l’entreprise et le centre relèvent ensemble un défi au seul bénéfice d’un apprenti

stagiaire, le tissu économique joue évidemment un rôle primordial… Pas de

développement de l’alternance "ex nihilo" mais un développement de l’apprentissage et

de l’alternance qui accompagne le développement économique. L’alternance au sens

large du terme, parce qu’elle est profondément ancrée dans cette réalité, joue un rôle

Page 27: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 27

important en matière de cohésion sociale, puisqu’elle facilite l’accès au monde du

travail.

Au-delà de ces constats et expérimentations, notre groupe s’est aussi largement livré à

de la prospective, en élaborant un certain nombre de propositions, visant toutes à

l’amélioration d’un système profondément ancré dans le réel. Ce sont ces propositions

que mon collègue va vous présenter.

Préconisations

Préalablement, nous voulons rappeler avec force que l’apprentissage est une voie

normale de formation et de qualification scolaire et universitaire, au même titre

que les autres filières générales et technologiques. Cette valorisation de

l’apprentissage doit s’étendre en particulier aux niveaux IV, III et II.

Prenant en compte les forces et les faiblesses du dispositif des formations par la voie de

l’alternance, les participants ont émis un certain nombre de préconisations, que l’on peut

regrouper en quatre volets et qui visent au développement et à l’adaptation de ce

dispositif par la qualité. Ces quatre volets sont :

- connaissance du public et préparation à l’entrée,

- adaptation de l’offre de formation aux réalités locales,

- une meilleure coordination de l’alternance,

- le financement.

1 - Connaissance du public et préparation à l’entrée

• développer l’information "tout public" sur l’alternance et en particulier

l’apprentissage ;

• renforcer le rôle des dispositifs d’accueil, d’accompagnement et de positionnement,

afin de promouvoir réellement l’alternance et en particulier l’apprentissage ;

• renforcer les dispositifs d’accompagnement et d’aide au choix professionnel pour les

publics en difficulté.

Page 28: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 28

2 - Adaptation de l’offre de formation aux réalités locales

• mettre en œuvre réellement le PRDF, qui doit bien évidemment prendre en compte

cette réalité locale ;

• professionnaliser l’offre de formation ; la professionnalisation attendue s’appuiera sur

divers outils existants : les politiques de branches professionnelles, les contrats

d’objectifs par filières signées entre les partenaires (État-Région-Branches, etc…) ;

• se doter de jurys aptes à délivrer des certifications (diplômes, CQP) ;

• la réussite de l’alternance reposant avant tout sur la liaison entre le centre et

l’entreprise, il est nécessaire de valoriser le tutorat en entreprise et de faciliter la

rencontre entre ce tuteur et son homologue en centre de formation ;

• intensifier et développer la mobilité formative avec la métropole et au-delà l’Europe,

et la rendre obligatoire pour les spécialités de niveau IV et III ;

• développer l’apprentissage dans le secteur public, aujourd’hui quasi inexistant, en

réfléchissant à d’autres modalités d’accès à la fonction publique que le concours ;

• accroître l’égalité des chances des jeunes de nos départements, par un

accompagnement capable de prendre en compte leurs difficultés sociales et culturelles.

3 - Une meilleure coordination de l’alternance

La coordination du dispositif d’alternance est devenue nécessaire. Cette coordination

opérationnelle doit concerner l’ensemble des stades, depuis l’information du futur

apprenti jusqu’à son intégration à l’emploi. Ce dispositif régional de coordination devra

aussi prendre en compte les difficultés locales de développement des contrats en

alternance et, en particulier :

• les difficultés d’accès à des dispositifs de formation par rapport aux critères établis,

• les mesures concurrentielles aux dispositifs existants, notamment dans le cadre

d’exonération des charges,

• le problème de la Médecine du travail en Martinique pour l’apprentissage,

• l’application des 35 heures et leurs effets dans l’organisation des formations en

alternance,

• la saturation des postes d’entreprises par l’utilisation exacerbée des stages dans tous

types de formation,

• l’intégration des problématiques liées aux démarches qualité.

Page 29: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 29

4 - Le financement

Le financement des centres en fonction des heures effectuées ne facilite pas une gestion

sereine de la qualité sur le moyen et le long terme. Les intervenants ont préconisé un

conventionnement pluriannuel.

Aussi, il ressort qu’à la faiblesse de collectes en matière d’apprentissage, s’ajoute

désormais la réduction des transferts pour le financement des autres contrats en

alternance. Il y a donc lieu de tenir compte de ces difficultés dans les différentes

programmations :

• le PRDF (Plan régional de développement de la formation),

• le DOCUP (Document unique de programmation),

• le contrat de plan État-Région.

Page 30: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 30

Synthèse de Mme Elisabeth Caristan, Chargée de mission à l’AGEFMA, CARIF

Martinique

LA FORMATION ET LES NOUVELLESLA FORMATION ET LES NOUVELLESLA FORMATION ET LES NOUVELLESLA FORMATION ET LES NOUVELLESTECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ETTECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ETTECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ETTECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET

DE LA COMMUNICATIONDE LA COMMUNICATIONDE LA COMMUNICATIONDE LA COMMUNICATION

AtelierAtelierAtelierAtelier

Cadrage :

Dans une société de la connaissance, l’utilisation des technologies de l’information et

de la communication est un outil et un axe stratégique d’aménagement du territoire.

Les perspectives ouvertes par la formation à distance et les NTIC revêtent une

importance particulière pour l’accès au savoir et la gestion des parcours de formation.

Les échanges qui se sont déroulés au cours de l’atelier nous rappellent que le

développement des Nouvelles technologies de l’information et de la communication

(NTIC) dans les DOM trouve sa vitalité dans la nécessité de développer des systèmes de

formation permettant de faire face à des contraintes particulières. Quelle que soit la

région concernée, il importe en effet de :

- développer des infrastructures et des équipements pour donner au plus grand nombre

la possibilité de se relier aux réseaux locaux et mondiaux,

- développer des services de proximité, pour faciliter l’accès des usagers à l’information

et au savoir,

- favoriser un travail coopératif en réseau,

- faciliter des économies d’échelle.

Au-delà de son intérêt intrinsèque, la présentation de ces différents dispositifs a pu

éveiller en chacun d’entre nous un intérêt personnel. En effet, la description de ces

expériences, à un stade particulier de leur évolution, nous permet de mieux repérer les

étapes indispensables à la mise en place de telles démarches :

Page 31: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 31

- le questionnement préalable,

- l’élaboration d’un projet,

- l’expérimentation,

- la pérennisation d’un dispositif.

Ainsi, les réalités régionales observées coïncident avec ces différentes étapes.

La Guyane : le questionnement en amont

C’est à partir de la description des expériences menées dans sa région que M. Jean-

Raymond Passard, de l’AFPA Guyane, nous conduit à dresser un inventaire des

questions qu’il convient de se poser en amont de la mise en œuvre d’un dispositif de

formation s’appuyant sur les NTIC.

• Comment prendre en compte les dimensions cognitives, affectives et sociales des

formés, notamment dans un environnement pluriethnique et pluri-culturel ?

• Quels nouveaux systèmes de collaboration humaine faut-il envisager autour des

systèmes multimédias ?

• Comment aider les organismes de formation à s’adapter et à s’approprier ces nouvelles

techniques ?

• Mais surtout, comment créer les conditions de mise en place d’un tutorat efficace,

destiné à relier tout ce qui est dissocié dans le processus de formation à distance :

l’apprenant et l’institution, l’apprenant et le formateur, le cognitif et le relationnel et

enfin, la théorie et la pratique.

En d’autres termes, il convient de penser, dès la genèse de ces démarches, aux différents

facteurs qui aideront à assurer la qualité des actions dans un environnement virtuel.

La Guadeloupe : la mise en place d’un projet global

En écho aux propos de M. Jean-Raymond Passard, le représentant de la Guadeloupe

apporte des éléments sur le nécessaire rapprochement entre, d’une part les bénéficiaires,

d’autre part l’information et le savoir. Le dispositif présenté par M. Hubert Salcède,

responsable de la formation professionnelle au Conseil régional, est axé sur la

performance technologique et la démocratisation. Concrètement, il s’agit de créer, dans

l’archipel guadeloupéen, une boucle locale permettant :

• la diffusion à haut débit de l’information,

Page 32: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 32

• la construction d’un réseau de télé-centres,

• le déploiement de points publics d’accès au réseau de données,

• la création d’un intranet régional,

• la mise à disposition de 10 000 ordinateurs dans des foyers.

Cette démarche globale, dont les outils peuvent servir à autre chose que de la formation,

s’inscrit donc plus particulièrement dans une logique d’économie d’échelle et de

développement local.

La Martinique : l’expérimentation

En Martinique, la démarche s’appuie sur une volonté affirmée du Conseil régional de

soutenir l’introduction des nouvelles technologies, d’accompagner les modifications des

comportements de travail et de permettre aux institutions de travailler en réseau.

L’exposé, illustré de démonstrations, présenté par Mme Myriam Samathay, Secrétaire

générale de l’AGEFMA, nous a permis de découvrir les initiatives qui s’inscrivaient

dans ce schéma directeur :

• la mise en place, par le CARIF, d’un site Internet consacré à la diffusion de

l’information sur l’offre de formation,

• la réalisation, par l’AFPA Martinique, de modules de mise en relation entre les

stagiaires et les entreprises désireuses de les accueillir,

• la mise à disposition, pour les étudiants de l’Université des Antilles et de la Guyane,

d’un parc de machines,

• la création par la Chambre de commerce et d’industrie, de modules d’enseignement à

distance dans le domaine des langues étrangères.

Parmi les innovations actuellement en pleine expérimentation, citons :

- un dispositif de Formations ouvertes par l’usage des réseaux multimédia pour

l’insertion (FOURMI), piloté par la DAFCO,

- l’organisation d’entretiens candidats/employeurs par visioconférence, à l’initiative de

l’ANT,

- la coordination, par l’AGEFMA, de la mise en réseau de l’ensemble des opérateurs de

l’emploi et de la formation.

Page 33: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 33

Dans cette approche, centrée sur la formation, il importe que l’effort financier, consenti

en matière d’équipement, soit assorti d’un effort quasiment identique en matière de

recherche et d’ingénierie pédagogique.

La Réunion : la pérennisation d’un dispositif

Le dispositif Resinter, présenté par M. David Rivière, Chef de projet au CARIF-OREF,

a été mis en place, dès 1997, à l’initiative de l’État et de la Région. À l’origine, il

s’agissait d’un réseau de centres de ressources partagés, mettant à la disposition des

formateurs des moyens techniques. Cette plate-forme contribue aujourd’hui à

l’élaboration et à la mise en œuvre de la politique régionale en matière de formation

professionnelle. Elle constitue en effet :

- un instrument d’aide à la décision pour les financeurs de projets pédagogiques

intégrant les NTIC,

- un outil d’accompagnement des organismes de formation dans la définition de leur

ingénierie d’enseignement à distance,

- un espace de veille pédagogique à la disposition des professionnels,

- un outil d’aide à l’aménagement sur le territoire, d’un réseau de points d’accès à la

télé-formation.

L’interface est assurée par un site Internet, composé de trois volets accessibles aux

publics, aux formateurs et aux commanditaires. Le déploiement du dispositif se fait

aujourd’hui sur des axes régionaux, nationaux, internationaux : accompagnement de

projets locaux, partenariats inter dispositifs, échanges avec la zone océan indien, …

Un inventaire de constats

L’état des lieux des expériences présentées par les intervenants, enrichi des témoignages

des participants à l’atelier, nous permet de dégager une série de constats, dans le but de

consolider les démarches en cours. Nous retiendrons en particulier :

• le repérage de conditions de réussite à l’introduction des NTIC,

• la volonté des institutions de développer des partenariats locaux et de s’ouvrir sur le

monde dans un esprit de réciprocité,

• la mise en place de formations de formateurs répondant aux nouveaux enjeux de la

formation,

Page 34: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 34

• la réalisation de systèmes efficaces, adaptés à nos environnements culturels, ethniques,

sociologiques et géographiques,

• la diversification des formes de formation (en présentiel et à distance),

le regroupement des projets isolés dans une dynamique globale, inscrite dans les

politiques régionales,

• le recours à des plates-formes d’enseignement mutualisant des processus techniques

sans exclure les spécificités pédagogiques.

la multiplication des chantiers de réflexion, principalement ceux qui portent sur :

- les moyens d’assurer la qualité de l’acte pédagogique dans un environnement modifié,

- l’évolution du marché de la formation dans les DOM et les conditions de son

ouverture sur l’extérieur,

- la transformation des modalités d’action dans le champ de la formation, liée à

l’intégration de nouveaux métiers dans la fonction formation.

Au-delà de ces constats, il convient de réaffirmer, en conclusion, que le développement

des NTIC vise, pour l’ensemble des acteurs concernés, le rééquilibrage du droit à

l’éducation, à la formation et au développement des individus.

Page 35: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 35

Synthèse de Marie-Danièle Rino, Chargée d’études au CARIF Guyane

LA RECONNAISSANCE DES ACQUISLA RECONNAISSANCE DES ACQUISLA RECONNAISSANCE DES ACQUISLA RECONNAISSANCE DES ACQUIS

PROFESSIONNELSPROFESSIONNELSPROFESSIONNELSPROFESSIONNELS

AtelierAtelierAtelierAtelier

Cadrage :

Dans un univers socio-économique marqué par la mobilité et les ruptures, les salariés et

les entreprises doivent disposer de repères stables attestant des connaissances et des

savoir-faire de chacun.

La reconnaissance des acquis et des compétences fait l’objet d’une réflexion

approfondie, compte tenu des attentes des acteurs économiques et prend une dimension

toute particulière au regard des réalités des régions d’Outre-mer.

Définition de la VAPCet atelier avait deux objectifs principaux :

- d’une part, mettre à disposition de l’ensemble des participants, les informations

relatives aux dispositifs officiels existants en matière de VAP, ainsi qu’aux pratiques

relatives à la reconnaissance des acquis professionnels ;

- d’autre part, dégager des pistes de réflexion dans ce domaine pour l’ensemble des

DOM.

Des concepts aussi différents que :

- évaluation des compétences,

- reconnaissance des acquis professionnels,

- validation des acquis professionnels,

- certification,

Page 36: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 36

ont été définis en constatant que tous reposent sur des acquisitions de savoirs, savoir-

faire, savoir-être, qui découlent d’une activité professionnelle et excluent a priori la

formation.

Par exemple, la VAP se définit comme suit :

• Validation des acquis professionnels

- Modalité spécifique de délivrance des diplômes professionnels ou technologiques, par

l’octroi de dispenses.

- Dispenses d’unités ou d’épreuves.

• Validation des acquis (AFNOR)

- Procédure entreprise en vue d’une reconnaissance institutionnelle des acquis.

- Acte officiel par lequel ces acquis sont reconnus.

• Certification (CEDEFOP)

- Délivrance d’un diplôme, d’un certificat ou d’un autre titre par les autorités, les

organismes de formation et les personnes compétentes.

L’approche est différente selon le lieu d’où l’on parle : Éducation nationale, AFPA,

Chambres de commerce et d’industrie, DDTEFP.

Elles ont chacune leur logique, vraisemblablement complémentaires.

Présentation des différents dispositifs de VAP

Éducation nationale

Il s’agit d’un dispositif législatif institué par la loi du 20 juillet 1992. Ses points forts

sont :

- reconnaissance que les compétences acquises par le travail sont équivalentes aux

capacités acquises en formation,

- possibilité d’accéder au diplôme hors du parcours de formation,

- rapprochement du monde professionnel et de l’éducation.

Les réflexions conduisent à s’interroger sur :

- l’analyse des activités réelles effectuées (travail réel par rapport au travail prescrit),

- l’utilisation d’un dossier unique pour tous les niveaux de qualification (dossier moins

accessible au niveau V).

Page 37: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 37

Jeunesse et sports et Agriculture et forêt

Ces deux ministères fonctionnent selon les mêmes principes que l’Éducation nationale.

On peut cependant remarquer que la DDJS a peu de demandes et peu de recul sur la

question. Elle doit, par ailleurs, faire face à la lourdeur de la procédure.

AFPA (Association de formation pour adultes)

Le système AFPA consiste à reconstituer une situation de travail qui permet de

(reconnaître) de valider des acquis par la délivrance de certificats de compétences

professionnelles. Les formations étant modulaires, seul le module de synthèse est

indispensable pour l’obtention du titre. Une expérience a été menée en partenariat avec

les formateurs du 2ème RSMA (Régiment du service militaire adapté) de Guadeloupe,

dont l’objectif était de varier l’offre du RSMA (espaces verts, hôtellerie) en allant plus

loin dans les programmes AFPA. L’une de ces formations, réalisée intégralement dans

les installations du RSMA et avec l’appui technique et pédagogique de l’AFPA, a été un

réel succès avec 75 % de réussite à l’examen.

ACFCI (Assemblée des chambres françaises de commerce et d’industrie)

La démarche ACCP (Association pour la certification des compétences

professionnelles) se caractérise par l’évaluation des compétences en situation de travail.

À partir de référentiels d’évaluation, d’unités de compétences, l’évaluation consiste à

constituer un portefeuille de preuves et débouche sur la délivrance de certificats de

compétences.

Ces unités des compétences s’articulent avec le Répertoire opérationnel des métiers

(ROME, ANPE) et les diplômes de l’Éducation nationale.

DDTEFP (Direction départementale du Travail, de l’Emploi et de la Formation

professionnelle)

Des demandeurs d’emploi ont pu bénéficier de la RAP au cours de l’opération 1 000

emplois , relative au BTP. Cette expérimentation a donné lieu à des chantiers de

production et d’application et à une reconnaissance des acquis par le système AFPA.

Page 38: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 38

Réflexions des participants

A quoi sert la VAP, si elle ne réduit pas les parcours de formation proposés par les

organismes privés ?

L’objectif est de gagner du temps. La VAP permet de réduire le temps de formation si

elle est modulaire. Force est de constater que tel n’est pas toujours le cas pour les

organismes de formation privés.

Comment la VAP peut-elle contribuer à la titularisation des personnels

contractuels des collectivités territoriales ?

L’accès à la titularisation étant conditionné par un concours, l’individu doit justifier

d’un niveau de formation, éventuellement reconnu par un diplôme ou un titre

homologué (CTH).

Comment certifier ou reconnaître des formations locales très spécifiques ?

Plusieurs réponses possibles :

• L’Éducation nationale a un dispositif de Formation complémentaire d’initiative locale

(FCIL). Il faut, pour cela, que la profession établisse un référentiel métier en relation

avec le rectorat.

• L’ACCP peut délivrer des certificats de compétences.

• Les formations proposées peuvent faire l’objet d’une validation par la Commission

technique d’homologation.

• Les professionnels peuvent susciter la création d’une branche professionnelle non

existante, qui favorisera la création de Certificats de qualification professionnelle (CQP)

spécifiques.

Les atouts de la VAP

L’intérêt de la VAP est apparu aussi bien pour l’individu que pour l’entreprise, même si

la VAP demeure une démarche individuelle.

Page 39: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 39

Les intérêts pour l’individu

- revalorisation de l’image de soi ;

- la reconnaissance des acquis professionnels est un facteur de motivation pour les bas

niveaux de qualification, permettant de les inciter à s’inscrire dans un parcours de

formation tout au long de la vie ;

- accès facilité aux diplômes pour les personnes qui s’en croyaient éloignées,

- facteur de promotion sociale en réduisant la durée du parcours en formation.

Les intérêts pour l’entreprise

- réduction des coûts de formation par la réduction du temps de formation (formation

modulaire) ;

- disposer d’une main-d’œuvre qualifiée par la reconnaissance de ses compétences.

Pistes de recherche

- La modularisation des formations des organismes privés est nécessaire et urgente.

- Les passerelles entre les différents modes de reconnaissance et de validation des

acquis professionnels doivent être réalisées.

Page 40: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 40

Synthèse de M. Jean-Claude Maccès, Directeur du CARIF-OREF Guadeloupe

L’ILLETTRISMEL’ILLETTRISMEL’ILLETTRISMEL’ILLETTRISME

AtelierAtelierAtelierAtelier

Cadrage :

La proportion des jeunes et adultes illettrés est plus élevée dans les régions d’Outre-

mer qu’en métropole. L’ampleur du phénomène constitue un obstacle au

développement des régions d’outre-mer. Des constats doivent être dressés : difficultés,

inadaptations, impact des flux migratoires, croissance démographique, et doivent

amener à s’interroger sur les programmes, les méthodes de formation et le lien entre

formation et insertion/activité.

Le déroulement de cet atelier a été organisé autour de problématiques permettant à

chacune des régions de s’exprimer et d’établir un échange avec les participants à

l’atelier. Les items choisis sont :

- individualisation,

- professionnalisation des acteurs de la formation,

- développement de pédagogies, de méthodes et d’outils innovants,

- ancrage de la formation dans le vécu des apprenants,

- ingénierie financière.

Individualisation

L’individualisation s’appuie sur le développement d’ateliers permettant la mise en

œuvre de parcours dans une perspective de personnalisation de la formation. Les

modalités de mise en œuvre tiennent compte de l’ingénierie et de l’environnement

formation de chacune des régions. L’objectif d’acquisition ou de réacquisition des

savoirs de base (lire, écrire, compter, se repérer dans l’espace et le temps,…) est un

élément important des dispositifs régionaux, et est associé quelquefois à des objectifs

plus transversaux d’élaboration de projet. Les contenus sont, certes, différents mais

Page 41: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 41

s’appuient tous sur un positionnement - évaluation qui permet de repérer les actions à

conduire avec les apprenants. Dans toutes les régions, la démarche de positionnement

est un axe de réflexion pour mieux appréhender la centration de l’intervention

pédagogique et didactique sur l’apprenant.

Professionnalisation des acteurs de la formation

Les démarches de professionnalisation portent sur des échanges de pratiques et la

formation de formateurs. La formation de formateurs est un axe de développement des

compétences des formateurs et des capacités d’intervention des organismes de

formation. La prise en compte des données culturelles et de la problématique

linguistique est au centre de la démarche de professionnalisation des opérateurs des

actions de lutte contre l’illettrisme. L’insuffisance des échanges entre opérateurs et

l’absence de mutualisation au niveau régional ont été signalées par l’un des participants.

Développement de pédagogies, méthodes, outils innovants

Un des intervenants rappelait qu’il ne faut pas faire de fixation sur les outils. Ce qui est

important, selon lui, c’est de repérer les bonnes pratiques, de reprendre les outils

existants et de les analyser. Il faut toutefois signaler la démarche initiée en Martinique

pour la conception et la diffusion d’un outil dénommé Ourelle. Cet outil de remédiation

s’appuie sur trois références théoriques :

1) prise en compte de l’environnement socioculturel (langue créole),

2) approche cognitive à partir d’une évaluation des potentiels d’éducabilité,

3) apprentissage de la lecture.

Une autre région s’appuie sur son CRI pour la conception d’un outil de positionnement

commun à tous les organismes de formation et pourl’information sur les outils qui

apparaissent au niveau national et canadien. L’objectif est de permettre aux formateurs

de découvrir, expérimenter et s’approprier les outils.

La Guyane a informé sur une démarche de création d’outils autour de :

- outil de dynamique du projet,

- livret de compétences.

Page 42: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 42

En ce qui concerne les pédagogies, des approches expérimentales ont été développées,

outre la remédiation cognitive, par exemple la pédagogie de la médiation adaptée aux

publics illettrés, illettrisme et santé.

Ancrage de la formation dans le vécu des apprenants

Les actions développées s’appuient toutes sur une prise en compte de l’environnement

socioculturel, et sur les centres d’intérêt des apprenants en fonction de l’environnement

économique local. La contextualisation de la formation est une donnée essentielle dans

la mise en œuvre des actions.

Ingénierie financière

L’illettrisme est traité comme toutes les actions avec un "saucissonnage" des publics en

fonction des financeurs. Il n’y a pas de problème de financement. Ce qui est signalé,

c’est l’absence de visée politique à long terme et de coordination des actions mobilisées.

Les actions sont financées entre 28 et 36 francs, avec des modalités d’exécution

différentes.

Page 43: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 43

Synthèse de Mme Viviane Capgras, Chef de la mission FP du Conseil régional

LES NOUVEAUX ENJEUXLES NOUVEAUX ENJEUXLES NOUVEAUX ENJEUXLES NOUVEAUX ENJEUXDE LA FORMATION PROFESSIONNELLEDE LA FORMATION PROFESSIONNELLEDE LA FORMATION PROFESSIONNELLEDE LA FORMATION PROFESSIONNELLE

ET LES PROBLÉMATIQUES DU DÉVELOPPEMENTRÉGIONAL ET LOCAL DANS LES RÉGIONS D’OUTRE-MER

Table rondeTable rondeTable rondeTable ronde

Partant du constat commun de faible développement des régions, du taux de chômage

élevé, de l’illettrisme… les régions ont présenté leurs orientations prioritaires, leur

contexte local, leurs problèmes spécifiques et les différentes réponses apportées à ces

problématiques. Cependant, on a pu noter trois enjeux transversaux :

l’accompagnement des ressources humaines, la nécessaire interrogation interactive

entre mode économique et formation et la prise en compte de l’environnement

géographique et géopolitique.

Sur l’accompagnement des ressources humaines

Les régions développent des options différentes.

Pour la Réunion, il convient de mettre l’accent sur l’individualisation des parcours de

formation pour relever le défi de l’insertion. En fait, le bénéficiaire est acteur dans le

processus de formation qui doit nécessairement accompagner l’évolution de ses

compétences. Il convient aussi d’accentuer les phénomènes de démocratisation donnant

accès à la formation professionnelle.

La Guyane choisit de se mobiliser sur l’accueil du jeune, par principe de

territorialisation. Il s’agit en fait d’aller vers le jeune en confortant la Mission locale,

voire en la transformant en espace jeune. "Il faut faire venir les jeunes à la structure

d’accueil" disait Mme Chantal Berthelot. L’approche retenue est la socialisation et

enfin, grâce à la plate-forme de mobilisation, il s’agirait de mettre en place un dispositif

de découverte des métiers. En fait le défi est d’augmenter la capacité d’accueil et

d’orientation de la plate-forme, et par voie de conséquence, d’augmenter l’offre de

formation.

Page 44: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 44

Pour la Martinique, il s’agit d’accentuer les dispositifs d’orientation, de travailler sur

l’ingénierie de l’orientation avec les organismes de formation et avec le centre de

psychologie du travail.

Sur l’interaction entre monde économique et formation

Pour la Martinique, il s’agit de renforcer les partenariats, soit en faisant fonctionner les

lieux de concertation - tels les lieux institutionnels comme le COREF, les conseils de

perfectionnement qui existent dans les organismes de formation - mais également en

travaillant davantage avec les branches professionnelles. Dans ce sens, il s’agit de

repérer les besoins des entreprises et ceux des branches professionnelles pour

déterminer les politiques de formation à développer.

Pour la Guadeloupe, il faut insister sur une politique active du marché du travail en

favorisant particulièrement l’accès des femmes à l’emploi et à la formation. Certains

d’ailleurs ont estimé qu’à ce titre, il faudrait préparer les entreprises à la mondialisation.

Effectivement, cet aspect, peut-être par manque de temps, a été peu évoqué.

Sur l’environnement géographique ou géopolitique.

La Réunion pense qu’il faut régionaliser les politiques de formation, donc se centrer sur

les territoires environnants, en mettant l’accent sur la mobilité pour améliorer les

compétences et pour acquérir des savoir-faire.

Conclusion

Certains ont semblé regretter que le développement local lui-même n’ait pas été

réellement défini. Cependant, nous avons beaucoup parlé de l’entreprise et du

rapprochement nécessaire entre les évolutions des métiers et l’adaptation de l’offre de

formation.

Page 45: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 45

Synthèse de Mme Patricia Gautier-Moulin, Responsable de l'Observatoire au Centre

INFFO

SÉANCE DE CLOTURESÉANCE DE CLOTURESÉANCE DE CLOTURESÉANCE DE CLOTURE

Les débats

La séance de clôture a donné la parole aux participants pour leur permettre d’exprimer

leur point de vue sur cette première Université.

De nombreuses voix ont souligné la richesse des échanges qui se sont déroulés au cours

de cette Université et qui ont incontestablement permis de confronter les expériences et

d’établir des passerelles entre tous les acteurs de la formation des quatre ROM.

Différents participants sont revenus sur l’orientation, l’accompagnement et l’ingénierie

de formation, et la nécessité de constituer dans les ROM un "pôle d’excellence" dans

ces domaines pour combler les écarts importants entre le public "standardisé" à

l’européenne et le public des ROM qui a un lourd passif "historique, psychologique et

institutionnel".

Le dispositif "Action immersion bilan de compétences", développé en Martinique, a été

cité comme exemple d’action initiée dans une région d’outre-mer, qui a fait la preuve de

sa pertinence et de son efficacité et dont la reconduction est menacée alors qu’il pourrait

être étendu aux autres ROM. Un appel a été lancé pour que, dorénavant, les dispositifs

imaginés sur place puissent être reconnus et soutenus par l’État.

La question du suivi de cette Université a été soulevée : "Comment reprendre les pistes

qui ont été lancées, les faire vivre, les faire évoluer et les transformer en projets et en

actions ?"

Les organisateurs ont annoncé la pérennisation de cette Université. Quant au suivi, il

pourra se réaliser d’une part dans le Comité de coordination où existe un groupe de

l’outre-mer qui se réunit régulièrement et d’autre part par l’intermédiaire des Carif. Le

Directeur du Carif-Oref de Guadeloupe a confirmé que son organisme assurerait la

diffusion la plus large possible des actes de cette Université et que des échanges

thématiques pourraient être organisés.

Page 46: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 46

Développer les NTIC pour renforcer les échanges inter ROM

M. Gabriele, Directeur général adjoint des services du Conseil régional de Guyane est

revenu sur le rôle important de certains partenaires qui n’avait peut-être pas été assez

développé lors de cette rencontre. Les départements et les conseils généraux jouent, et

joueront avec l’application de nouveaux décrets, un rôle important dans la lutte contre

l’exclusion, inséparable du champ de la formation. Les entreprises auraient aussi pu être

évoquées plus largement. "Il est bien évident qu’au cœur de nos discussions, il y avait le

développement local, avec l’entreprise à l’intérieur d’un même cercle, celui de

l’économie, de la densification du tissu économique".

Lors de la synthèse des quatre ateliers, M. Gabriele a insisté notamment sur

l’importance des nouvelles technologies pour les ROM. "Nous pouvons prendre la

résolution, par l’entremise des CARIF ou d’autres, d’élargir les mises en réseau, dont

on nous annonce la mise en place en Guadeloupe et dont on a vu également

l’expérience en Martinique. Essayons d’être là-dessus à l’avant-garde, pour ouvrir

véritablement un espace de coopération, d’échange et de mise en commun. Sur le

champ de la formation professionnelle, il nous a été proposé d’élargir la communication

interROM : réseaux inter région des régions ultra périphériques, pour pouvoir échanger

plus largement". Il a également relevé la disparité des situations entre les ROM sur les

questions d’apprentissage et d’alternance en insistant sur la lutte qu’il faut mener pour

réduire les trop nombreuses ruptures en cours de cursus et sur l’exigence de "remettre

l’alternance au centre des préoccupations de nos régions".

Réforme de la FPC : performance économique et cohésion sociale

M. Vincent Merle, Directeur de cabinet de Mme Nicole Péry a félicité, au nom de

Madame Nicole Péry, Secrétaire d’État aux Droits des Femmes et à la Formation

professionnelle, les régions qui avaient pris l’initiative de cette Université et tous ceux

qui s’y sont associés. Il s’est engagé à lui transmettre le vœu des ROM de voir les

pouvoirs publics rompre avec "la mise en application mécanique dans des territoires fort

loin de Paris de schémas d’intervention, d’outils qui ont été conçus sans doute de

manière un peu trop technocratique sur la rive gauche de la Seine". Il a rappelé que la

formation avait été un instrument privilégié de lutte contre le chômage et y avait

"quelque peu perdu son identité". La reprise économique devrait permettre de renouer

avec des logiques d’actions de partenariats, des logiques de coopération entre acteurs.

Page 47: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 47

"La formation professionnelle est un laboratoire extraordinaire parce que c’est bien en

croisant la question de la construction de la compétence et de la qualification des

personnes et la question des performances économiques des entreprises, petites ou

grandes, que l’on redécouvre l’importance de la logique territoriale et l’importance du

développement local". Il a rappelé que la réforme de la formation professionnelle

engagée vise non seulement une simplification absolument nécessaire des multiples

dispositifs qui, au cours des années se sont empilés, mais surtout qu’elle cherche à

prendre en compte la "double exigence, de performance économique d’une part, et

d’autre part de cohésion sociale. C’est le croisement de ces deux préoccupations qui est

la motivation principale". La réforme a déjà obtenu des résultats sur certains points. La

loi sur la RTT a permis de reconnaître que l'adaptation des salariés aux évolutions des

entreprises est bien une "obligation inhérente à la relation de travail et qui doit s'inscrire

dans le long terme aussi bien pour l’individu que pour l’entreprise". Deux autres étapes

sont en cours : la réforme du financement de l’apprentissage et la loi sur la

reconnaissance de l’expérience par la validation des acquis professionnels. Les

évolutions de l'apprentissage visent "une plus grande transparence et une plus grande

égalité de traitement entre les CFA" pour conforter son positionnement comme voie de

formation à part entière.

La reconnaissance de l’expérience par la validation des acquis professionnels est,

pour reprendre l’expression de Mme Nicole Péry, "une petite révolution" qui va

constituer un levier considérable pour développer autrement la formation

professionnelle en France. Un répertoire national des certifications professionnelles,

géré par une commission nationale comprenant les principaux acteurs concernés va être

créé. Ce cadre institutionnnel d'accès à un titre ou à un diplôme par la validation des

acquis professionnels permettra de bâtir un système de repères collectifs avec une réelle

complémentarité entre les titres et les diplômes, Ce travail a été réalisé "dans un esprit

d’ouverture, de complémentarité et de cohérence entre les différentes certifications". A

travers cette démarche, c’est la représentation même de la formation, d'un parcours de

formation, qui va être modifiée.

Ces deux projets de loi doivent être compléter par la mise en place d'un "droit individuel

transférable et garanti collectivement", qui permettra de traduire concrètement la

thématique de la formation tout au long de la vie en jouant notamment sur l'articulation

Page 48: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 48

des différentes logiques financières qui interviennent dans la formation (Région,

Unedic, Etat, Copacif, etc). La prochaine négociation des partenaire sociaux dans le

cadre de la refondation sociale devrait apporter des éléments décisifs sur ce thème.

D'autres points font l'objet de réflexions dans des groupes de travail ou dans le cadre des

expérimentations lancées par Mme Nicole Péry : la commande publique de formation,

la qualité de l'offre de formation, les NTIC, la lutte contre l'illettrisme avec la mise en

place prochaine de l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (sous forme d'un

GIP), l'orientation, etc.

La définition d'objectifs européens pour la formation est à l'ordre du jour. Un

mémorandum préparé par la Commission sur le thème de la formation tout au long de la

vie sera présenté prochainement à Biarritz. Il s'agit à la fois "d'un enjeu central pour la

construction de l’Europe sociale et en même temps d'un enjeu décisif du point de vue

des performances économiques de l’union européenne". Enfin, l'égalité est "une

thématique extrêmement importante en matière de formation professionnelle".

Rendez-vous à la Martinique en 2002

"Cette manifestation a, de mon point de vue, atteint son objectif" s’est félicité M.

Antoine Karam, Président du Conseil régional de Guyane en remerciant, au nom des

quatre régions tous les participants de cette Université qui a "renforcé le partenariat

entre les quatre exécutifs régionaux, au-delà de leur appartenance à des environnements

géographiques, culturels, économiques et politiques différents". Il a souligné l’occasion

qu’a constitué cette Université de soutenir la mise en réseau de différentes

institutions liées à la formation : les AFPA, les organismes paritaires, les Chambres de

Commerce et d’industrie, les autres chambres consulaires, les techniciens issus des

ministères, des départements ministériels déconcentrés ou des différentes institutions

sous tutelle du gouvernement.

Il a informé les participants de la pérennisation de cette manifestation qui se déroulera

tous les deux ans et annoncé que la prochaine Université de la formation professionnelle

dans les régions d’outre-mer se tiendrait en 2002 à la Martinique.

Page 49: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 49

Mme Patricia Gautier-Moulin, Responsable de l'Observatoire au Centre INFFO

CONCLUSIONS ET PERSPECTIVESCONCLUSIONS ET PERSPECTIVESCONCLUSIONS ET PERSPECTIVESCONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

• "Etre un lieu d’échanges et de mutualisation des expériences". La rencontre de

Cayenne a très largement répondu à cet objectif et ces actes en portent témoignage.

La multiplicité des thèmes traités, la diversité et la richesse des expériences présentées

par les participants constituent pour chaque acteur de la formation - qu'il soit en

métropole ou dans les ROM - l'occasion de confronter ses pratiques, de s'inspirer des

points forts dégagés et de repérer des organismes ou des personnes ressources pour

alimenter ses projets. Le foisonnement des dispositifs et actions nous empêche de les

reprendre tous ici mais vous les retrouverez en détail dans les actes, que ce soit en

séance plénière ou dans les ateliers.

• Cette rencontre visait aussi à définir des pistes de réflexion à explorer, des

démarches à entreprendre pour améliorer l'efficacité des dispositifs et des actions

de formation. Au-delà des échanges qui constituent une base solide pour avancer dans

cette voie, plusieurs points ont émergé qui devraient développer et renforcer le

partenariat entre les ROM, notamment :

- l'adaptation des dispositifs de formation aux réalités de l'outre-mer,

- le développement des liens entre formation et tissu économique,

- l'amélioration de l'information sur la formation,

- l'apprentissage de la citoyenneté,

- l'individualisation de l'orientation, des parcours, des actions de formation,

- une meilleure connaissance des acteurs et des dispositifs de formation dans les pays

limitrophes (Caraïbe ou Océan indien),

- les actions pour réduire le nombre de ruptures des contrats d'apprentissage, l'adaptation

de l'offre d'apprentissage aux réalités locales, une meilleure coordination de l'alternance,

- le développement des infrastructures et de la formation de formateurs pour favoriser

l'utilisation des NTIC,

Page 50: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 50

- l'utilisation de la VAP pour réduire les parcours de formation, la reconnaissance de

formations très spécifiques aux ROM, la modularisation des formations, la création de

passerelles entre les différents modes de validation,

- la mutualisation des outils de lutte contre l'illettrisme.

Cette liste n'est pas exhaustive et les partenariats pourront bien sûr se développer dans

de nombreux autres domaines évoqués dans cette université.

• Plusieurs participants se sont inquiétés des suites de l'Université. C'est pourquoi le

Centre Inffo met à votre disposition sur son site un forum de discussions et d'échanges

sur les thèmes traités lors de l'université. Cet espace vous permettra d'apporter des

corrections ou de compléter les informations présentées dans les actes, de nouer des

contacts, de rechercher des précisions sur l'expérience qui vous intéresse, ... et de vous

préparer à la prochaine université prévue en 2002 à la Martinique.

Page 51: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 51

TEXTE INTEGRALTEXTE INTEGRALTEXTE INTEGRALTEXTE INTEGRAL

Page 52: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 52

Sommaire des actesSommaire des actesSommaire des actesSommaire des actes

DISCOURS D’OUVERTURE :

les priorités régionales et les relations État-Régions page 53

FORMATION DES HOMMES ET COHESION SOCIALE page 83

FORMATION ET COOPERATION REGIONALE page 107

LA MISSION LOCALE DE GUYANE page 150

ATELIER : L’apprentissage et les contrats en alternance page 165

ATELIER : La formation et les nouvelles technologies de

l’information et de la communication page 184

ATELIER : La reconnaissance des acquis professionnels page 208

ATELIER : L’illettrisme page 235

LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE

et les problématiques du développement régional et local des ROM page 266

SEANCE DE CLOTURE page 286

INDEX ALPHABETIQUE DES INTERVENANTS page 309

Page 53: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 53

Discours d'ouverture du 2/10/00

LES PRIORITÉS RÉGIONALESLES PRIORITÉS RÉGIONALESLES PRIORITÉS RÉGIONALESLES PRIORITÉS RÉGIONALES

ET LES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONSET LES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONSET LES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONSET LES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONS

Animateur :

M. Luc Germain, journaliste

Intervenants

GUADELOUPE :M. Christian Thénard, Vice-Président du Conseil régional

GUYANE :Mme Chantal Berthelot, Vice-Présidente du Conseil régional, déléguée à la formationM. Antoine Karam, Président du Conseil régionalMme Joëlle Prévot-Madère, Vice-Présidente de la Chambre de commerce et d'industrie(CCI)

MARTINIQUE :M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional

METROPOLE :M. Patrick Kessel, Directeur du Centre INFFOM. Christian Paul, Secrétaire d’État à l’outre-mer

REUNION :Mme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régional

Page 54: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 54

LES PRIORITÉS RÉGIONALESLES PRIORITÉS RÉGIONALESLES PRIORITÉS RÉGIONALESLES PRIORITÉS RÉGIONALES

ET LES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONSET LES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONSET LES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONSET LES RELATIONS ÉTAT-RÉGIONS

GUYANE : Mme Joëlle Prévot-Madère,Vice-Présidente de la Chambre de commerce et

d’industrie (CCI)

Mesdames, Messieurs,

Le Président J.P. Prévot étant alité, je me permets de vous transmettre les mots stricto

sensu qu’il aurait souhaité vous adresser lui-même.

Madame la Secrétaire d’État aux Droits des Femmes et à la Formation professionnelle,

Monsieur le Secrétaire d’État à l’outre-mer,

Mesdames et Messieurs les parlementaires, Monsieur le Préfet,

Mesdames et Messieurs les Présidents des régions,

Messieurs les Présidents des CCI de la Réunion, de la Martinique, de la Guadeloupe et

de Mayotte.

Mesdames et Messieurs, les élus, chers amis,

Bienvenue à la CCI de Cayenne

Je voudrais d’abord vous dire combien il est agréable à la Chambre de commerce et

d’industrie de Guyane d’accueillir cette première Université de la formation

professionnelle dans les régions d’outre-mer. Au nom de l’ensemble des élus

consulaires, ce sont des paroles de cordiale et chaleureuse bienvenue que j’adresse à

tous nos hôtes, qu’ils viennent des Antilles, de l’Océan indien ou de l’hexagone.

Réduction substantielle du chômage et singulièrement celui des jeunes, recul de

l’exclusion et de son corollaire la délinquance, tels sont les grands défis auxquels les

régions d’outre-mer en général, et la Guyane en particulier, doivent aujourd’hui faire

face.

Longtemps perçue comme étant exclusivement un instrument, voire un gadget de

traitement social du chômage, ou le moyen subtil de garantir la paix sociale dans

l’entreprise, la formation professionnelle s’affirme de plus en plus comme facteur à part

entière de développement économique, d’intégration et de cohésion sociale.

Page 55: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 55

Loin de gêner le fonctionnement de l’entreprise, la formation professionnelle,

lorsqu’elle s’inscrit dans le cadre d’une planification cohérente, optimise ce

fonctionnement. C’est de la formation professionnelle que dépend la transformation des

femmes et des hommes de nos régions respectives pour une meilleure gestion des

relations humaines, indispensable à notre économie.

Les Chambres de commerce et d’industrie d’outre-mer en sont conscientes depuis

longtemps et participent de plus en plus, dans leurs régions respectives, à la formation et

à la qualification professionnelles des femmes et des hommes, en partenariat étroit avec

les conseils régionaux, faut-il le souligner. Formation des hommes, cohésion sociale,

formation et coopération régionale, les nouveaux enjeux de la formation

professionnelle, la reconnaissance des acquis professionnels, tous ces thèmes de travail

en disent long sur l’étendue de notre champ de réflexion tout au long de cette université.

J’espère donc, Mesdames, Messieurs, que vos travaux seront des plus féconds et

contribueront ainsi au renforcement nécessaire, à la symbiose entre formation

professionnelle et développement économique. Merci de votre attention.

GUYANE : Mme Chantal Berthelot, Vice-Présidente du Conseil régional, déléguée à

la formation

Mesdames et Messieurs les Ministres représentés,

Madame la Ministre de l’Emploi et de la Solidarité,

Monsieur le Secrétaire d’État à l’outre-mer,

Madame la Secrétaire d’État aux Droits des Femmes et à la Formation professionnelle

Mesdames et Messieurs les Présidents des régions d’outre-mer, mes collègues de la

Guadeloupe Monsieur Christian Thénard, de la Martinique Monsieur Daniel Marie-

Sainte, de la Réunion Madame Marie-Andrée Jaubert, et de la Guyane le Président

Antoine Karam,

Messieurs les Conseillers, membres du Collège des régions du Comité de coordination

des programmes régionaux de l’apprentissage et de la formation continue,

Madame la Présidente du Comité de coordination, Jeannine Jarnac,

Messieurs les Préfets des régions d’outre-mer ici représentés,

Monsieur le Préfet de la région Guyane,

Page 56: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 56

Mesdames et Messieurs les représentants des administrations centrales de l’État, des

services déconcentrés, des institutions et établissements publics nationaux, des services

régionaux et des collectivités publiques,

Mesdames et Messieurs les représentants des services territoriaux et des institutions de

Mayotte,

Messieurs les représentants de la Commission européenne, tout spécialement du FSE,

Mesdames et Messieurs les élus consulaires, les présidents, directeurs et représentants

des structures professionnelles, des organismes techniques ainsi que de leurs réseaux

régionalisés d’appui et de développement de la formation,

Mesdames et Messieurs les responsables de la formation professionnelle des

organismes,

Monsieur le Président du Centre INFFO et ses administrateurs,

Monsieur le Directeur du Centre INFFO, Monsieur Patrick Kessel,

Mesdames et Messieurs les Chargés de mission du Centre INFFO,

Chers collègues et amis,

De l’idée d’une université à sa concrétisation

En ouvrant les travaux de notre première Université de la formation professionnelle des

régions d’outre-mer, organisée par les quatre conseils régionaux, en étroite collaboration

avec le Centre INFFO et les CARIF d’outre-mer, il m’échoit l’honneur de vous

souhaiter la bienvenue. Bienvenue au nom de la population guyanaise, bienvenue au

nom du Conseil régional de Guyane et du Président Antoine Karam qui s’exprimera

dans quelques instants. C’est avec un vif plaisir que je procède à cette ouverture et je

souhaite associer à mes propos de bon accueil toutes celles et tous ceux qui - je ne vais

pas recommencer le pensum du début parce qu’ils sont nombreux et ceux-là se

reconnaîtront - au long de ces derniers mois avec conviction, ténacité ainsi "qu’une

note" indispensable de diplomatie ont œuvré, afin que puisse se réaliser ce projet. Je

voudrais remercier le Président de la Chambre de commerce et d’industrie, représenté

par Joëlle Prévot-Madère, de nous faire profiter de ses installations qui nous permettront

de travailler durant ces trois jours, ainsi que le Président du Conseil général, M. André

Lecante, d’avoir mis à notre disposition des salles afin que nous puissions tenir nos

ateliers.

Page 57: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 57

Cette première université se déroulant à Cayenne, le Maire, M. Jean-Claude Lafontaine

nous fait l’amabilité de recevoir ce soir, à l’Hôtel de Ville, les membres des délégations

invitées et je l’en remercie au nom de tous.

Avant de rentrer dans le vif du sujet, quelques mots sur cette fabuleuse aventure qu’est

la concrétisation de l’Université de la formation professionnelle dans les régions

d’outre-mer. Tout d’abord, rendons à César ce qui lui appartient. À l’origine, nous

trouvons une proposition du directeur du Centre INFFO, relayée par son équipe de

direction et adoptée par le Secrétariat d’État à l’outre-mer. Les professionnels de la

formation connaissent les universités d’hiver du Centre INFFO et ceux de la France

hexagonale ont déjà pris l’habitude de s’y rendre régulièrement. Le groupe de l’outre-

mer, composé des quatre conseillers régionaux du Comité de coordination, saisi par

cette proposition, a volontiers encouragé la marche en avant de ce projet. Les quatre

régions d’outre-mer ont adhéré, ayant ajouté en quelque sorte une quatrième dimension

: une nouvelle perspective, peu apparente au sein de la première esquisse technique. Il

s’est agi d’une prise en compte pleine et entière de sujets d’actualité brûlants dans

chacune de nos régions, dans des domaines fortement ancrés sur le socle de

compétences des régions. Nous lui avons confié le caractère de rassemblement aux

côtés des départements concernés, des ministères, des professionnels, des techniciens,

afin d’établir une tribune d’échanges, de résonances des problèmes de la formation de

l’outre-mer. Chacun doit y trouver son juste et précis positionnement et ainsi nous

assurerons le succès de chacun et de tous.

On ne paie pas les gens avec des paroles, c’est pourquoi nous voulons être au maximum

concrets, démonstratifs, persuasifs s’il le faut, pour bien faire valoir l’intérêt profond à

donner à l’expression de nos besoins, dans chacun des domaines que nous allons

aborder. Avec le souci de la précision et du détail, notamment au sein des ateliers. Je

souhaite, que partant des réalités, de ce qui est présent et dense et qui pose problème,

nous puissions, par l’échange de nos expériences, dégager des voies de résolution car

personne ne détient de solution toute faite et de savoir préexistant. Les régions de

l’outre-mer vivent des réalités décalées, beaucoup plus méconnues que d’aucuns ne

l’imaginent s’ils sont observateurs lointains, fussent-t-ils curieux, attentifs et

volontaires. Rechercher les points communs ne signifie pas la globalisation

uniformisante et le nivellement.

Page 58: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 58

Trois vœux pour cette Université

Le premier résonne dans l’immédiat puisque je viens de vous faire part de mon vif

plaisir de vous recevoir. La Guyane, terre lointaine immense et méconnue, trait

d’union entre la Caraïbe, l’Amérique du Sud, l’Europe, terre de contrastes, attachante

pour tous ceux qui, un jour, dans leur vie, l’ont croisée, vous ouvre ses portes. Que votre

séjour permette de lever et d’effacer, si nécessaire encore, les ultimes craintes que vous

pourriez nourrir. En effet, les initiatives médiatiques de longue date ainsi que de très

récentes encore, dramatisent outrageusement certaines situations. Ces dernières sont

certes inadmissibles et dénoncées depuis de longues années, notamment dans le

domaine sanitaire, et ne réussissent qu’à effrayer, à rendre soupçonneux l’extérieur à

notre égard. Il ne s’agit pas seulement d’un problème ponctuel mais de la question plus

générale de l’image de Guyane. Je ne m’étendrais pas plus sur cette question et je dirais

simplement que vous avez eu raison de franchir la distance et de répondre à notre appel.

Le second souhait porte sur la fécondité de nos débats, véritables carrefours

d’échanges, d’idées issues des horizons ultramarins, de la France et de l’Europe. Que

notre première université puisse marquer la naissance d’une longue lignée. Chaque jour,

nous constatons ce qui nous différencie et ce qui, dans nos évolutions, nous éloigne de

la France hexagonale. En même temps, ce mouvement où converge nombre de données

lourdes en matière d’écarts, de retards, de handicaps et de constats inversés par rapport

aux évolutions hexagonales, nous rapproche singulièrement les unes des autres, nous,

régions d’outre-mer. Nos régions, bien que distinctes, avec de notoires particularités,

affichent néanmoins de nombreux points communs. Ces derniers sont insuffisamment

explorés, exploités et mis en valeur dans des initiatives convergentes et la recherche de

résolutions. Nous devons forger, et nous le ferons mieux encore ensemble, au cœur de

nos pratiques particulières, de nouvelles relations de connaissance et de reconnaissance

réciproques pour enrichir nos réponses que nous devons, les uns et les autres, à nos

concitoyens dans nos domaines de compétences.

Le troisième souhait concerne le caractère foncièrement participatif que nous devons

accorder à l’expression de cette université. Nous devons la concevoir comme un creuset

d’idées, de solutions et de réponses. Nous n’allons pas nous contenter uniquement de

parler de nos difficultés, de nos durs constats, mais il faut que nous fassions de cette

université un tremplin de résolutions, lorsque nous sentons le besoin d’amélioration et

Page 59: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 59

d’adaptation de certains cadres standards inappropriés ou inapplicables. En effet, durant

près de trois jours nous allons écouter, échanger, participer activement, nous confronter

aussi, afin de réussir à partager une somme de connaissances nouvelles. Chacune et

chacun, à l’écoute des uns et des autres, vont devoir consolider ce qui constitue nos

patrimoines respectifs. Avec l’appui précieux des experts, nos journées de Cayenne vont

marquer une étape décisive, je l’espère et je souhaite que vous le partagiez, dans nos

efforts et notre véritable combat pour le développement régional et local et l’avenir de

nos jeunesses.

Mon rôle n’est pas le plus facile puisque je dois parler, en même temps, au nom des

trois autres régions co-organisatrices de cette université, mais en cette ouverture, mon

devoir est aussi de planter quelques éléments du décor.

Des problématiques communes aux DOM

J’estime devoir attirer votre attention sur quelques questions lourdes et récurrentes.

Le premier point sera à propos de la problématique de remise à niveau de la

plupart de nos dispositifs, de la création de dispositifs sur mesure et de

l’accompagnement du choc démographique qui s’amplifie durablement.

L’auscultation des réalités hexagonales, par les spécialistes, est totalement incapable de

nous révéler quoique ce soit sur les scénarios d’évolution de nos régions. Ce qui nous

place au-delà du miroir ou dans le brouillard le plus total, vu de Paris. Nous affrontons

les unes comme les autres de nos régions, les chocs les plus frontaux en matière de

formation professionnelle des jeunes et de leur insertion. Il s’agit d’une politique

prioritaire pour le présent et l’avenir. Il s’agit aussi des tout derniers et très récents

transferts de compétences avec des moyens qui n’ont pas reçu les bons calibres.

Dans ces mêmes domaines, la décélération démographique ressentie dans de

nombreuses régions de l’hexagone peut induire des repositionnements prioritaires dans

les politiques nationales qui ne sont absolument pas aptes à traduire les réalités de

l’outre-mer.

Par ailleurs, ces dernières années, des dispositifs ont été effacés comme les emplois

verts dans le domaine de l’environnement ou le dispositif profession emploi sport et

animation ou encore d’autres dispositifs aidés. La poussée persistante de l’immigration

des jeunes, sans moyens d’action adéquats, les insuffisances de certaines dotations

propres aux publics les plus en difficulté, voici autant d’évolutions que de

Page 60: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 60

désengagements qui laissent nos régions face à elles-mêmes. Elles ont subi les effets des

politiques chaotiques. Aujourd’hui ces dernières pèsent lourdement sur nos budgets. Là

où nous appelons de nos vœux, de la créativité décentralisée pour des outils

d’intervention sur l’insertion ou sur les formations locales ou encore sur les dispositifs

de redynamisation par l’activité, nous voyons redescendre des resserrements

d’éligibilité des publics, des exclusions de certaines situations jadis admises. Ce sont

autant d’interventions motivées par des logiques dans lesquelles les voix qui s’élèvent

de nos régions demeurent sans écho.

Ne nous voilons pas la face, nous sommes en devoir aussi d’évoquer certaines autres

mesures qui, même après plusieurs années d’installation, ne sont toujours pas passées

du stade de l’intention à celui de l’efficience. Des interventions viendront, je l’espère et

je n’en doute pas, enrichir le débat à ce sujet. Avons-nous les capacités réelles

d’ajustement et d’adaptation des mesures qui nous seraient nécessaires ? Souvent l’idée

est bonne, et même excellente au départ, mais au final, l’application et l’instrumentation

qui en découlent deviennent soit inopérantes, soit homéopathiques.

Le deuxième point serait la normalisation simplifiée des champs de

compétences État-Régions d’outre-mer. Pourquoi avoir compliqué ceux-ci, au risque

de créer de nouvelles interférences et des effets larsen persistants qui brouillent la

lisibilité et compliquent l’action sur le terrain. Par exemple, le transfert des dispositifs

jeunes, qui concernent la jeunesse en grande difficulté sinon en situation de détresse.

Sur ce point, nous touchons à l’extrême faiblesse des moyens consacrés au dispositif

intitulé Programme Trace, pourtant au cœur de nos préoccupations. Soyons également

attentifs à la proportion croissante de jeunes en détresse sociale, non éligibles au RMI,

dispositif dont relèverait pourtant une fraction de la jeunesse. Avec nos outils

spécifiques, pourtant renforcés, nous ne parvenons plus, en de nombreuses

circonstances, à nous attaquer réellement au recul de ces difficultés. Que dire de la

subtilité techno-administrative, qui traverse la plate-forme de professionnalisation des

emplois jeunes. Pour les nouvelles qualifications, pour les validations des formations,

face à la poussée considérable des sollicitations, les financements lourds sont

naturellement à la charge des régions. Au total, les moyens accrus dans les contrats de

plan et les projets de DOCUP (document unique de programmation) peuvent ne pas être

Page 61: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 61

de nature à nous permettre d’être présents, à la hauteur souhaitée, sur toutes nos

responsabilités.

Le troisième point sur lequel je souhaiterais m’exprimer, tient à des expérimentations

qui devraient être rendues possibles sur une durée suffisante pour leur évaluation,

en ce qui concerne des situations totalement hors normes. Certaines proviennent de la

discontinuité territoriale interne, de l’isolement des communes, d’autres de la situation

de jeunes étrangers scolarisés dont l’intégration en aval pose des problèmes

considérables, d’autres enfin tiennent à l’absence d’équipements ou à des surcoûts

d’intervention sur le terrain très nettement supérieurs aux critères nationaux. Pour les

jeunes gens et les jeunes filles victimes de ces situations, la présidente de la Mission

locale régionale de Guyane, Mme Andrée Baboul et son équipe nous apporteront des

éléments de réflexion incontournables lors de nos débats ultérieurs.

Je n’aime guère le terme qu’on évoque souvent, "la spécificité", car cette notion nous

renvoie trop au cas d’espèce, au particulier isolé du reste. En réalité, nous ne voulons

pas nous isoler dans nos interventions, mais nous voulons combler nos inégalités. Il

existe dans toutes nos régions, des valeurs patrimoniales, socioculturelles historiques

qui doivent pouvoir vivre, se transmettre et constituer un élément de refondation des

racines identitaires. Nous avons sollicité un conférencier de renom en la personne de M.

Serge Hermine, que nous saluons ici aujourd’hui, afin de nous éclairer sur ces questions

de grande importance pour nos sociétés. Comme vous le savez, des fractures nous

menacent. Nous devons explorer en permanence les pistes d’évolution de nos politiques

culturelles, de formation, d’enrichissement, d’éducation, de socialisation et d’éveil à la

citoyenneté, de nos sociétés qui se modernisent. Le multiculturalisme de nos régions

confère sans aucun doute des éléments d’enrichissement pour nous-mêmes, mais aussi

pour la communauté française, européenne et internationale.

Aux représentants du monde économique, des structures professionnelles, des

institutions consulaires, des entreprises, aux employeurs comme aux salariés et à leurs

centrales syndicales, je souhaite les assurer de la totale attention que portent en commun

nos régions à leurs problèmes. Nous savons combien ils participent activement, souvent

paritairement, à l’ouverture des entreprises, à la formation des salariés et nous

Page 62: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 62

souhaiterions sans doute des portes toujours plus grandes ouvertes encore, à

l’apprentissage, à la formation, à l’insertion des jeunes, à l’accueil des nouveaux

diplômés, élite de nos économies de demain.

Aux représentants du monde de la formation, je souhaite aussi leur dire combien leurs

actions à nos côtés, sur les programmes publics et privés, sont appréciées, tout en

marquant la nécessité de progrès continus en matière d’outils, de méthodes et de

contenus dont il sera beaucoup question au sein des ateliers. La reconnaissance

réciproque de la qualité, plus exigeante et élevée dans les réalisations, apportera un

bénéfice certain aux jeunes et à toutes les personnes formées.

À tous les autres partenaires, conseillers techniques, experts, qu’ils soient intervenants

ou animateurs, je souhaite que, de nos journées, ils puissent en sortir avec des constats

dont nous saurons extraire au maximum l’apport de connaissances, le transfert d’idées,

l’appropriation de savoirs et de savoir-faire. Tout cela prend un relief particulier,

s’agissant des nouvelles technologies mises en œuvre dans le monde de la formation des

hommes.

Aux représentants du monde de l’éducation, de l’enseignement et de la formation

initiale, que ces journées de Cayenne puissent ponctuer le travail de rapprochements

présents et futurs que bon nombre de nos régions ont déjà largement entamé. L’heure

est à la rencontre afin de travailler en amont sur la prévention et en aval sur de

meilleures articulations pour la formation des jeunes et de leur insertion.

L’Université de la formation professionnelle dans les régions d’outre-mer deviendra ce

que nous voulons, vous et nous, qu’elle devienne. Je vous remercie.

MARTINIQUE : M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional

Monsieur le représentant de la Ministre de l’Emploi et de la solidarité,

Monsieur le représentant du Secrétaire d’État à l’outre-mer,

Madame la Présidente du Comité de coordination,

Monsieur le Président du Conseil régional de Guyane,

Mesdames et Messieurs les représentants des régions de France,

Mesdames et Messieurs les représentants des régions de Guadeloupe, Réunion et

Guyane,

Mesdames et Messieurs les Présidents,

Page 63: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 63

Monsieur le Président du Centre INFFO, Messieurs les administrateurs du Centre

INFFO, Monsieur le Directeur du Centre INFFO, Monsieur Patrick Kessel

Mesdames, Messieurs,

J’adresse un salut particulier aux acteurs de la formation en Martinique, qui suivent nos

débats par visioconférence.

Permettez-moi au préalable de vous présenter le salut du Président du Conseil régional

de la Martinique, M. Alfred Marie-Jeanne qui n’a pas pu se joindre à nous pour

l’ouverture de cette première Université de la formation professionnelle des régions

d’outre-mer, car il est retenu par d’autres obligations à l’Assemblée nationale, mais qui

néanmoins, par ma voix, formule des vœux de succès pour nos travaux.

De nombreuses similitudes entre les ROM

Depuis de nombreuses années, en tout cas depuis 1992, il nous est personnellement

apparu nécessaire de mener une réflexion, à partir d’un échange sur nos pratiques, nos

méthodes, nos problématiques dans le domaine de la formation professionnelle. Chacun,

sur nos territoires régionaux, nous sommes confrontés à des réalités qui présentent de

nombreuses similitudes sur le plan économique social et culturel :

- une économie mal développée, où la balance commerciale est franchement

deséquilibrée (les exportations représentent à peine 10 % des importations),

- un chômage massif et malheureusement durable : près de 30 % en Martinique, soit 45

657 demandeurs d’emploi inscrits à l’ANPE (juin 2000), sur une population de 385 000

habitants, vivant sur une île de 1 100 km2,

- des régions isolées, voire ultra périphériques, éloignées des grands centres de

ressources, (la Martinique est à 7 000 km de l’Europe, à 2 000 km des USA et autant de

la Guyane),

- une population majoritairement issue de la période tri-séculaire de l’esclavage qui a

longtemps, trop longtemps, mis un signe d’égalité entre la notion de "travail" et celle de

"servitude". Et pour laquelle l’industrie touristique tente difficilement de prendre la

relève de la canne et de la banane.

C’est donc à partir de ces réalités vécues que nous devons élaborer une politique de

formation professionnelle, pour contribuer à faire de nos ressources humaines une force,

un atout pour le devenir de nos régions.

Page 64: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 64

Cette première Université de la formation professionnelle des régions d’outre-mer est,

pour nous, également l’occasion de poursuivre la réflexion déjà engagée dans le cadre

des conférences des présidents, dans un esprit de coopération et de partenariat des

régions d’outre-mer. Champ d’intervention fort des régions, la formation

professionnelle constituait le thème idéal pour la Région Martinique. C’est donc, avec

un grand plaisir, que nous avons accueilli le projet d’organisation de cette rencontre,

notamment au regard de l’accroissement des compétences dévolues aux régions depuis

la décentralisation, et également parce qu’elle se situe dans un contexte de réforme

profonde de la formation professionnelle, voire dans un contexte historique et politique

de revendication sur l’accroissement de responsabilité, et même de souveraineté

politique, de nos pays.

Le pari de la qualification

Ainsi, depuis 1983, l’évolution du niveau de compétences professionnelles, et

notamment le pari de la qualification des demandeurs d’emploi, constitue la priorité

pour la région Martinique. Environ 300 MF sont consacrés, en cette année 2000, à la

formation professionnelle, faisant par là même de ce secteur l’un des plus importants

des dépenses totales régionales (17 %). Ces crédits, alimentés tant par nos ressources

propres que par le Fonds social européen, nous permettent de mener une politique de

qualification - au bénéfice des publics les plus en difficulté, les jeunes exclus de

l’Education nationale sans un CAP (13 %) et les chômeurs de longue durée, sans

négliger le perfectionnement des actifs (salariés, artisans, agriculteurs, etc) - fondée sur

la collaboration avec les partenaires sociaux représentatifs au plan régional, notamment

par le biais d’une étude prospective sur les emplois et les qualifications au niveau des

branches professionnelles pour l’élaboration du PRDFPJ (Plan régional de

développement de la formation professionnelle des jeunes).

Par ailleurs, il nous a semblé que la mise à disposition d’une offre de formation serait

inopérante sans une bonne information des publics visés. Aussi, grâce aux nouvelles

technologies d’information et de communication, nous tentons de rapprocher

l’information des bénéficiaires de l’ensemble du territoire martiniquais. C’est pour cela

que nous avons confié à notre CARIF, en plus de ses missions réglementaires, celle

d’irriguer, grâce aux NTIC, notre territoire de l’offre de formation, en s’appuyant sur les

réseaux des Points information jeunesse des PAIO (Permanences d’accueil,

Page 65: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 65

d’information et d’orientation) et des Missions locales, pour augmenter l’égalité des

chances d’accès à la formation.

Nous avons tous le souci constant de coller aux réalités de notre région, de notre

économie, de nos entreprises, mais en ce qui nous concerne, nous subissons le handicap

de l’exiguïté de notre marché local du travail. Nous sommes donc condamnés à trouver

des réponses à la fois dans et hors de nos territoires régionaux grâce au partenariat actif

de 1’ANT (Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs de l’outre-

mer). Dans les deux cas, la formation professionnelle est un moyen incontournable pour

l’insertion sociale de nos ressortissants.

La similitude de nos problèmes, mais également la diversité des réponses et des

solutions mises en œuvre dans nos régions respectives, sont de nature à constituer un

enrichissement de nos débats. C’est pour cela que je suis convaincu que les thèmes qui

seront abordés et les discussions qui seront animées par les experts qui nous

accompagnent pendant ces trois jours, nous permettront de dégager des perspectives

d’avenir, pour une plus grande efficacité de nos politiques régionales de formation

professionnelle dans la dynamique d’insertion sociale et professionnelle de nos

concitoyens.

Qu’il me soit encore permis, en conclusion provisoire, au nom de la région Martinique

de remercier la région Guyane pour la qualité de son accueil et de souhaiter un plein

succès à la première Université de la formation professionnelle des régions d’outre-mer.

REUNION : Mme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régional

Monsieur le Président du Conseil régional de Guyane,

Mesdames et Messieurs les représentants des conseils régionaux de Guyane, de

Guadeloupe et de Martinique,

Monsieur le représentant du Préfet de Guyane,

Mesdames et Messieurs les représentants de l’État,

Monsieur le Président du Centre INFFO et son Directeur.

Permettez-moi de commencer par vous adresser les salutations de mon Président Paul

Vergès qui m’a déléguée pour le représenter à cette manifestation. C’est à ce titre que

j’ai l’honneur de participer à cette première Université de la formation professionnelle

Page 66: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 66

des régions d’outre-mer. Je voudrais tout particulièrement remercier le Président

Antoine Karam qui a bien voulu accueillir dans sa région cette première manifestation.

Comme vous le savez, nos quatre régions connaissent des situations particulières, dont

les causes sont liées à la fois à leur histoire et à leur positionnement géographique.

Malgré ces particularités, il nous paraît légitime que nous nous rencontrions, afin

d’aborder des thématiques communes, de confronter nos expériences et d’enrichir nos

propres perspectives d’orientations pour faire de la formation professionnelle un outil au

service de nos populations. Tous les acteurs institutionnels et socioprofessionnels sont

aujourd’hui conscients des enjeux du développement et des défis auxquels nous sommes

tous confrontés. Face à cela, la formation professionnelle, en tant que vecteur essentiel

de la valorisation des ressources humaines, peut nous aider, si nous le voulons, à

transformer nos contraintes en nos meilleurs atouts. Pour cela, il nous faut mieux

appréhender et mieux anticiper sur nos besoins de qualification, tout en restant présents

dans le débat national et européen sur l’évolution de la formation professionnelle.

Investir dans l’homme

Avant d’aborder l’intérêt des thèmes choisis pour cette première université, je voudrais

vous faire part des orientations stratégiques de notre collectivité dans le domaine de la

formation professionnelle. Celle-ci a placé la formation des hommes au cœur de son

action en faveur du développement économique, social et culturel de la Réunion. Cette

orientation a été réaffirmée à travers le Plan régional de développement des formations

(PRDF) et constitue une ambition forte qui guide notre politique en matière d’éducation

et de formation professionnelle pour les années à venir. Notre volonté d’investir dans

l’Homme afin qu’il soit porteur de compétences et d’initiatives, participe à l’ambition

plus large de valoriser nos ressources, tant au plan collectif qu’au plan individuel. Elle

correspond également au souci de responsabilisation nécessaire de tous les acteurs pour

une action collective pouvant créer les conditions d’un développement durable et faire

reculer les menaces qui pèsent sur le maintien de la cohésion sociale.

Nos orientations en matière de formation professionnelle se déclinent autour de six

priorités :

- la mise en œuvre d’une politique de formation professionnelle contribuant à l’insertion

des jeunes sans emploi,

- le maintien de l’effort de la formation professionnelle des adultes,

Page 67: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 67

- la participation à la lutte contre l’exclusion en développant les actions de lutte contre

l’illettrisme, de remise à niveau et d’orientation des publics en difficulté,

- la diversification et la modernisation des modes de formation,

- l’accentuation des efforts d’amélioration de la performance du système de formation et

de la qualité de l’offre de formation,

- l’assignation au système de formation d’une mission de développement et

d’accompagnement de l’action de mobilité et de coopération régionale.

Je me félicite que pour cette première université les thèmes retenus par les quatre

régions et le Centre INFFO rejoignent nos axes prioritaires d’action. Parmi ces

thèmes, quatre d’entre eux retiennent particulièrement notre attention :

Le premier concerne les formations en alternance. Celles-ci constituent en effet une

voie de qualification à privilégier dans nos régions où le taux de chômage des jeunes est

très élevé. Elle est en outre particulièrement adaptée aux caractéristiques des tissus

économiques constitués de petites et moyennes entreprises et de très petites entreprises.

Le deuxième thème relatif à la lutte contre l’illettrisme est une problématique

commune à nos quatre régions qui, pour des raisons historiques et sociolinguistiques,

subissent encore, à l’heure actuelle, les insuffisances d’efficacité du système scolaire.

En effet, trop de jeunes souffrent encore de l’illettrisme, malgré les efforts constants de

scolarisation. Les solutions pour traiter ce problème ne sont pas simples, car il s’agit à la

fois de bien identifier les causes et d’apporter des réponses pédagogiques adaptées.

C’est donc, à mon avis, une thématique où les échanges d’expériences entre nos régions

demeurent indispensables pour améliorer nos pratiques respectives.

Un autre thème qui semble également pertinent est la place des nouvelles technologies

de l’information et de la communication (NTIC) dans l’évolution des politiques de

formation. Ces nouveaux outils de communication doivent nous permettre de rompre

notre isolement, tant en matière d’éducation et de formation que dans le domaine du

développement économique. Connaître et faire connaître, savoir et faire savoir

deviennent des concepts qui peuvent être démultipliés, sans subir les contraintes

d’exiguïté du territoire, d’isolement ou de croissance démographique. Ces outils

technologiques peuvent également faciliter le rapprochement entre nos quatre régions et

servir à l’essor de nos politiques de coopération régionale.

Page 68: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 68

Enfin le dernier thème que je voudrais citer est justement celui de l’action de

formation en matière de coopération régionale. La coopération régionale constitue un

vecteur essentiel du développement des relations de nos régions, avec les pays de leur

zone de proximité géographique respective. Dans cette optique, la formation doit faire

partie des domaines d’activité parmi lesquels les possibilités de coopération peuvent se

concrétiser le plus facilement, notamment dans le cadre des nouvelles compétences, qui

seront prochainement déléguées aux régions d’outre-mer avec l’adoption de la loi

d’orientation pour l’outre-mer.

Pour terminer, je souhaite que les ateliers et tables rondes, qui vont se réunir pendant

ces trois jours, permettent de faire progresser les réflexions et de faire émerger des

perspectives d’évolution de la formation professionnelle dans nos régions d’outre-mer.

Cela nous permettra, je n’en doute pas, d’apporter notre contribution aux travaux

conduits au niveau national, dans le cadre du projet de la réforme de la formation

professionnelle.

Je vous remercie de votre attention.

GUADELOUPE : M. Christian Thénard, Vice-Président du Conseil régional

Monsieur le représentant du Secrétaire d’État à l’outre-mer,

Monsieur le représentant de la Secrétaire d’État aux Droits des Femmes et à la

Formation professionnelle,

Monsieur le Président du Conseil régional de la Guyane,

Monsieur le Président du Conseil régional de la Martinique,

Monsieur le Président du Conseil régional de la Réunion,

Madame la Présidente du Comité de coordination,

Monsieur le Directeur du Centre INFFO,

Monsieur le Directeur du CARIF de Guyane,

Madame la Responsable de la coordination,

Mesdames et Messieurs les Délégués des organismes de formation,

Permettez-moi de remercier la région Guyane pour le chaleureux accuei1 réservé à la

délégation guadeloupéenne. J’ai le privilège et le plaisir aujourd’hui de représenter

Mme Lucette Michaux-Chevry, présidente du Conseil régional de la Guadeloupe qui

Page 69: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 69

n’a pu être parmi nous, étant retenue par d’autres obligations. Le groupe DOM au sein

du Comité de coordination a pris l’initiative d’instaurer, tous les deux ans, l’Université

de la formation professionnelle dans les départements d’outre-mer. Je ne peux,

Mesdames et Messieurs que saluer la région Guyane qui a décidé de s’engager, dès la

première année, dans la mise en place de cette manifestation. Ce colloque sera

l’occasion, pour l’ensemble des acteurs de la formation professionnelle des DOM, de

confronter leurs expériences, d’engager des réflexions sur les politiques respectives de

formation professionnelle dans nos régions.

D’un grand intérêt, ce colloque répond à un besoin essentiel si l’on considère que, dans

nos régions, le taux de chômage élevé, le manque de qualification sont autant

d’obstacles qui génèrent en aval un environnement global des plus critiques. Il s’agit

pour nous de réfléchir ensemble et de susciter des propositions pour faire évoluer la

formation professionnelle dans nos départements. Pendant trois jours, les thèmes

abordés répondront aux préoccupations de chacune de nos régions. En effet, nos

territoires sont aujourd’hui de plus en plus confrontés aux difficultés d’insertion

professionnelle des jeunes malgré les dispositifs en place. Il s’agit de s’interroger sur

leur efficacité. Sont-ils suffisamment pertinents, pour répondre à leurs besoins ? Quels

sont les moyens et mesures appropriés à mettre en œuvre, en harmonie avec l’économie

de nos territoires, pour une meilleure insertion professionnelle ? Il ne faut pas que la

désespérance s’empare de nos jeunes mais, qu’au contraire, grâce aux orientations vers

les métiers du futur ou encore la revalorisation de certains métiers, une vision plus

encourageante de leur avenir leur soit proposée. Il faut rompre avec ces clichés trop

faciles, qui tendent à conclure que nos jeunes se laissent aller à la drogue ou à la

délinquance parce qu’ils n’ont pas de formation ou de perspectives d’avenir. C’est pour

faire face à ces problèmes d’insertion et d’emploi que la région Guadeloupe a fait de la

formation des hommes, un objectif majeur de son programme de développement

économique.

Faire coïncider formation avec insertion

Même si la formation ne crée pas directement l’emploi, je suis convaincu qu’elle

constitue le passeport le plus sûr pour une insertion professionnelle réussie. C’est tout le

sens des actions de la région. Cette forte conviction se traduit par une politique

offensive et volontariste, mettant en œuvre des moyens nouveaux et le développement

Page 70: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 70

d’un partenariat institutionnel fort avec un ultime but, le maintien et la création

d’emploi. En 1999, 433 MF ont été consacrés au domaine de la formation, de

l’enseignement supérieur, de l’apprentissage et, bien entendu, de l’emploi et nous

sommes particulièrement fiers de constater que nos efforts ne sont pas vains puisque,

chaque année, 7 000 personnes sont formées grâce à l’aide de la région Guadeloupe et

des fonds européens.

La stratégie principale est de permettre une meilleure insertion professionnelle et de

favoriser l’accès à l’emploi des jeunes et des adultes demandeurs d’emploi, afin de

fournir aux petites entreprises, constituant l’essentiel de notre tissu économique, une

main-d’œuvre de qualité pour renforcer leur compétitivité tout en donnant aux jeunes

des atouts supplémentaires. Pour parvenir à ce résultat positif, la formation en

alternance est la voie privilégiée que nous proposons. Car, Mesdames, Messieurs,

1’alternance permet sans conteste aux jeunes d’avoir une vision concrète du monde du

travail. Notre collectivité développe l’apprentissage et exige un temps en entreprise pour

chaque action de formation qu’elle finance. Fondé sur un contrat de travail,

l’apprentissage associe la préparation d’un diplôme à une première expérience

professionnelle. Grâce à cette 1iaison emploi-formation, il apparaît comme un outil

efficace d’insertion des jeunes dans la vie active. Pour le développer, notre assemblée

régionale fait un effort supplémentaire dans deux directions : premièrement, elle apporte

un soutien financier à toute entreprise qui embauche un jeune en apprentissage, à raison

de 1 000 francs par mois pendant la première année et deuxièmement, elle finance les

trois centres de formation existants. L’année dernière, 19 MF ont été consacrés au

développement de l’apprentissage et 1 320 jeunes ont pu être formés. Mais le souci

actuel de la région Guadeloupe est de revaloriser l’image de l’apprentissage, tout en

l’élargissant à d’autres secteurs porteurs d’emplois (comme la pharmacie ou les

transports...). Elle construit de nouveaux centres de formation et de nouvelles structures

dans un souci de rééquilibrage du territoire, conformément à ce qui avait été préconisé

dans le PRDFI (Plan régional de développement de la formation et de l’insertion).

Rapprocher formation et emploi

La région Guadeloupe a mis en place des mesures spécifiques qui favorisent

l’alternance et bien évidemment l’insertion professionnelle. Il s’agit plus

particulièrement de :

Page 71: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 71

- la mesure "découverte de 1’entreprise" qui permet à de jeunes diplômés d’acquérir

une première expérience professionnelle significative qui valorise leurs acquis. Plus de

3,3 MF ont été consacrés l’an dernier à cette action et 72 jeunes ont pu en bénéficier.

- l’opération "solidarité jeunes", initiée par la région dès 1996, répond aussi à notre

besoin d’une meilleure insertion professionnelle. Après une année scolaire, les jeunes

peuvent découvrir le monde de l’entreprise pendant leurs vacances. 496 MF ont été

investis cette année par notre assemblée et 2 300 lycéens et étudiants ont pu s’initier à la

vie active.

L’action de la région Guadeloupe ne s’arrête évidemment pas à ces seuls dispositifs. En

tenant compte de la taille des entreprises, nous faisons tout pour :

- développer la fonction tutorale au sein des entreprises en mettant en place des actions

de formation ;

- soutenir les contrats d’orientation en apportant 1 000 francs par stagiaire aux

entreprises dans le cadre du programme TRACE ;

- signer des contrats d’objectifs avec les secteurs professionnels pour définir leurs

besoins en matière de formation et d’apprentissage ;

- développer les partenariats tels que "un parrain pour l’emploi" qui permettent aux

chefs d’entreprise d’accompagner des jeunes en difficulté ; notre collectivité n’a

d’ailleurs pas attendu le projet de loi d’orientation pour mettre en place ce dispositif ;

- encourager la validation des acquis afin de mettre en valeur les expériences

professionnelles.

Enfin, la région Guadeloupe favorise aussi l’orientation et 1’information des jeunes en

mettant en place, en partenariat avec le Rectorat, l’ANPE, et l’AFPA, une Cité des

métiers, à l’instar de la Cité de la Villette à Paris. Cette structure en libre-service, qui

ouvrira prochainement ses portes, offrira aux jeunes non seulement des informations sur

les métiers, l’orientation professionnelle, la formation et l’emploi, mais aussi des

conseils sur les thèmes évoqués. Outil indispensable de lutte contre l’exclusion, aussi

bien sociale que technologique, la Cité des métiers permettra sans aucun doute de créer

une dynamique de l’emploi dans notre archipel et contribuera à l’assurance d’un avenir

prometteur.

Page 72: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 72

Cependant, malgré tous ses efforts, la région reste consciente des handicaps structurels

qui existent en Guadeloupe, mais aussi dans les régions d’outre-mer. Nous savons

pertinemment que nos tissus économiques sont loin d’absorber le flot de jeunes formés.

Nous savons aussi qu’il est indispensable de trouver des alternatives pour leur insertion.

L’illettrisme, la reconnaissance des acquis professionnels, la formation à distance, les

technologies innovantes, l’apprentissage et j’en passe... sont autant d’ateliers qui, par

notre travail collectif, permettront d’obtenir de nouvelles propositions. Cependant, elles

ne doivent pas être vaines. Elles doivent être adaptées aux contextes de nos régions et

prises en compte par les instances gouvernementales.

Nous comptons sur vous, Messieurs les représentants de l’État, pour les faire valoir en

haut lieu. Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter un bon travail. Puissent nos travaux se

pérenniser au-delà de ces simples journées et garantir le devenir de notre jeunesse

d’outre-mer. Merci de votre aimable attention.

GUYANE : M. Antoine Karam, Président du Conseil régional

Mesdames, Messieurs,

C’est avec un intérêt particulier que je participe avec vous à l’ouverture de la première

Université de la formation professionnelle dans les DOM. Je voudrais, pour être fidèle à

notre tradition de terre d’accueil, comme l’a fait la Vice-Présidente Chantal Berthelot,

souhaiter la bienvenue à l’ensemble des participants.

La diversité comme atout

Amis de Martinique, de Guadeloupe, de la Réunion et de l’hexagone, votre présence va

en toute hypothèse nous permettre d’aborder la question de la formation

professionnelle, sous l’angle de la comparaison, par l’échange notamment de nos

expériences. Elle constitue dans ce cadre le meilleur enrichissement possible au débat.

Votre participation, à tous ici présents, me paraît opportune puisqu’elle renvoie la

formation des hommes à une priorité, un enjeu d’intérêt public. C’est aussi notre

conception. Je pense très sincèrement que la population de la Guyane constitue sa

principale ressource. Ainsi la question de la formation professionnelle est pour elle

d’une importance vitale. Notre population se caractérise autant par sa diversité que par

la jeunesse de ses classes d’âge. Formée historiquement à partir de l’apport successif de

diverses communautés, la Guyane rassemble aujourd’hui sur son territoire une

Page 73: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 73

population dont les origines sont à rechercher aux quatre coins du monde. On a

longtemps parié sur les inconvénients de cette diversité, notamment, les risques qu’elle

fait courir en termes de segmentation sociale. Laissez-moi vous dire qu’il s’agit au

contraire d’une chance pour la Guyane.

L’originalité de notre société, sa force aussi sans doute, tient au fait qu’elle représente

une terre de rencontres où des hommes venus d’ici et de là ont été amenés à partager la

même communauté de destins, à un moment donné de leur histoire et de l’histoire du

monde. La formation sociale dans d’autres pays de notre environnement géographique,

à partir de l’implication de leurs différentes communautés, est la preuve que la Guyane

ne correspond pas à un modèle de société voué de facto à l’échec.

Former les jeunes pour développer les entreprises

La formation professionnelle des jeunes et des adultes doit aujourd’hui servir en

Guyane, non seulement à favoriser la promotion de l’individu, mais aussi à soutenir la

cohésion de la société. Dans une région où 50 % de la population a moins de 25 ans, ce

choix me paraît rationnel, contenir du sens, présenter une portée certaine, répondre

surtout à un vrai besoin. Au moment où je vous parle, la Guyane présente encore, il

nous faut le déplorer, un déficit de qualification dans presque tous les secteurs, malgré

les efforts consentis. Ce défaut de qualification n’est, du reste, pas sans rapport avec le

taux élevé de chômage. Il faut pourtant se garder de gâcher l’énorme potentiel humain

que présente notre société. Cela nous oblige à faire de l’homme le premier agent du

développement économique. Cela nous oblige à donner à notre projet de développement

durable des fondations éducatives fortes. Cela nous oblige à privilégier et à développer

la formation des hommes. Je conçois ici la formation professionnelle comme le moyen

de transformer le potentiel naturel de nos jeunes et de certains adultes en aptitudes de

travail, susceptibles d’enrichir l’horizon de nos entreprises. Potentiel naturel qui est lié à

des cadres de référence, d’expérience ou culturel, à des savoirs et à des savoir-faire en

rapport avec les caractéristiques de chaque groupe. J’y vois pour l’entreprise un

véritable stimulant, un élément de valorisation, de diversification de son capital humain,

de renforcement de sa production. Et plus largement, le moyen pour la société d’intégrer

par le travail les éléments de sa diversité démographique, de sa richesse naturelle. Nous

aurions vraisemblablement tort aujourd’hui de minimiser les avantages liés à la

formation d’individus issus indifféremment de l’ensemble des composantes sociaIes de

Page 74: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 74

la Guyane, et des retombées qu’on est en droit d’attendre en termes d’homogénéisation

sociale et de développement local.

Former les hommes pour qu’ils soient à la pointe du développement est un projet

salutaire dont les effets sont de nature à dépasser le cadre strict de l’entreprise, pour

s’attaquer à la modélisation du tissu économique, à la structuration de la société,

notamment par une nouvelle distribution des rôles sociaux. La Guyane doit aujourd’hui

privilégier de telles orientations. Je sais combien les jeunes sont intéressés, créatifs mais

en même temps soucieux, voire inquiets par rapport à l’avenir.

Insister sur la notion de responsabilité

La formation professionnelle doit être l’occasion de forger le sens des responsabilités de

chacun. J’introduis ici, Mesdames et Messieurs, la notion de responsabilité pour

partager avec vous une autre idée que je me fais de la formation. La formation

professionnelle ne doit pas être la solution du dernier recours, celle qu’on envisage

seulement lorsqu’il n’y a plus rien à faire. La formation professionnelle ne doit pas être

une voie de garage pour des individus sans ambition ou projet professionnel. La

formation professionnelle ne doit pas être non plus le lieu de l’enregistrement de l’échec

de l’Education nationale. Nous devons, en Guyane, agir aujourd’hui sur le volume de

l’offre de formation pour répondre à la pression démographique et permettre à chaque

jeune de se former selon ses aspirations et les besoins du terrain. Mais nous devons

surtout changer le rapport de nos jeunes à la formation, en agissant sur la qualité de

l’offre. Je connais l’attachement des professionnels de la formation à cette idée. Il nous

faut amener les jeunes à la partager, en développant chez eux le goût de l’excellence. La

formation professionnelle doit être le lieu de l’apprentissage de l’excellence. C’est

seulement à cette condition que la qualification des jeunes viendra relever le défi de

l’emploi et soutenir le développement économique. L’efficacité doit être le support de la

responsabilité. Je crois très sincèrement qu’il nous faut utiliser la formation

professionnelle non seulement pour élever nos jeunes aux exigences des secteurs

d’activité mais aussi pour leur apprendre à être responsables, acteurs de leur propre

destin, du destin de l’entreprise, artisans du destin de la société guyanaise. Si nous

voulons placer la Guyane sur les rails du développement économique, nous ne pouvons

pas faire l’économie de cette idée de responsabilité. Cette responsabilité n’est pas

l’apanage seulement du politique, elle est avant tout collective.

Page 75: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 75

Mesdames et Messieurs les professionnels de la formation, la mission qui est la vôtre est

déterminante. Je dirais même qu’elle est sacrée. Vous devez tout faire pour que les

jeunes prennent conscience de la nécessité qu’ils ont de se former en se dotant de

connaissances pratiques et techniques, leur permettant de maîtriser les paramètres de

l’entreprise et d’influencer ses politiques. Les parcours de formation doivent

absolument intégrer cette compétence spécifique comme le moyen de renforcer leur

place dans le monde de l’entreprise et dans la société. Au niveau de la Guyane, le

Consei1 régional qui a compétence en matière de formation professionnelle vous

encourage à traduire cet objectif dans vos programmes pédagogiques. Les jeunes, c’est

notre intime conviction, ne doivent pas seulement trouver à s’insérer passivement dans

les entreprises, ils doivent déterminer leurs résultats, valoriser leurs acquis pour en

profiter aussi. Qui ne peut mieux que ces derniers changer le cadre des entreprises en y

introduisant leurs métiers, leurs compétences, leurs savoirs et leurs motivations. Comme

vous le voyez, tout est 1ié : les jeunes, la formation, les entreprises, la société.

L’heure est à l’aménagement, l’heure est à l’audace

Plus nos jeunes auront un rapport positif à la formation, plus leur implication dans les

entreprises sera réelle, plus leur vocation à se conduire en véritables citoyens sera

grande. Pour donner cette chance à nos jeunes, à notre société, à nous-mêmes, il nous

faut, Mesdames et Messieurs, aller beaucoup plus loin. L’heure est à l’aménagement.

L’heure est à l’audace. L’engagement de la société civile, des responsables politiques de

notre région dans l’organisation de 1’éducation en Guyane est devenu une nécessité.

Nous ne pouvons plus et nous ne voulons plus être condamnés à construire des murs et

à regarder passivement, en spectateurs impuissants, l’organisation et l’application d’une

éducation en Guyane, qui se traduit par les résultats que nous connaissons.

Le moment est venu pour que notre partenaire l’État comprenne que la concertation, le

dialogue et le partenariat, la discussion, engagés sur la base d’une évolution

institutionnelle dont l’éducation fait partie intégrante, sont devenus vitaux pour l’avenir

de notre jeunesse, de notre pays. Cette nouvelle donne exige le transfert de nouvelles

compétences au profit d’un pouvoir local plus fort, afin que nos réalités puissent être

prises en considération et traitées de manière optimale. Au cœur de ce dessein, la

jeunesse s’impatiente. À nous, à vous de ne pas la décevoir. Je vous remercie.

Page 76: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 76

METROPOLE : M. Christian Paul, Secrétaire d’État à l’outre-mer (diffusion d’un

enregistrement vidéo)

Mesdames et Messieurs, c’est avec plaisir que je m’adresse à vous aujourd’hui pour

l’ouverture de cette Université de la formation professionnelle dans les régions d’outre-

mer, même si je regrette bien sûr de ne pas pouvoir être personnellement parmi vous

aujourd’hui. En effet, cette semaine est consacrée à la préparation du débat à

l’Assemblée nationale sur la loi d’orientation pour l’outre-mer qui est, comme vous le

savez, un enjeu important pour les DOM et particulièrement pour la Guyane. Je

voudrais tout d’abord vous saluer, vous qui représentez les régions d’outre-mer, les

conseils régionaux, les administrations d’État, les organismes de formation et je

voudrais tout particulièrement saluer et remercier la région Guyane en la personne de

son président, M. Karam et de sa vice-présidente, Mme Berthelot, conseillère

économique et sociale qui vous accueillent aujourd’hui. J’associe dans ces

remerciements le Centre INFFO, son président M. Mignot et son directeur M. Kessel. Je

remercie également tous les intervenants et tous les participants à cette université. M.

Alain Guédon, chef du département Emploi Formation Insertion me rendra compte très

prochainement et très fidèlement de vos travaux. L’initiative de cette université et son

thème "la formation professionnelle au service du développement local" me paraissent

en effet très positifs, car l’enjeu de la formation est essentiel pour les ROM. Et c’est

peut-être pour cela que plus encore que les régions de métropole, elles en font une de

leurs priorités majeures. L’État et l’Europe également les accompagnent pleinement

dans cet effort. Les moyens budgétaires dégagés au titre des contrats de plan ainsi que

du Fonds social européen, pour les actions de formation professionnelle dans les ROM

vont presque doubler dans la période à venir, par rapport aux années écoulées.

Page 77: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 77

Une priorité : la formation des jeunes

La formation des jeunes est en effet une priorité économique et sociale essentielle. Le

niveau de formation des jeunes s’est beaucoup amélioré au cours de ces dernières

années, mais les écarts avec la métropole restent encore significatifs et surtout

l’illettrisme est beaucoup trop élevé. Le niveau de formation des jeunes est une

nécessité pour le développement économique local, un atout pour l’intégration et le

rayonnement de l’outre-mer dans l’environnement régional. C’est l’avenir économique

de ces régions qui en dépend. Aussi, il nous faut répondre aux aspirations des jeunes

d’outre-mer, avec un appareil de formation adapté aux besoins et implanté dans les

régions. Il doit être capable de répondre à l’essentiel des demandes. Les RSMA

(Régiments du service militaire adapté) que l’État transforme actuellement pour tenir

compte de la suppression du service national continueront à apporter leur concours à cet

effort de formation.

Pour autant, n’oublions pas la mobilité nécessaire, nécessaire pour des formations plus

spécialisées qui ne sont pas réalisées sur place. Le rôle de l’ANT n’est plus à prouver. Il

doit être poursuivi et amplifié afin que chaque jeune d’outre-mer ait une chance

équivalente à celle d’un jeune de métropole. C’est cela aussi l’égalité républicaine.

À cet effet, je voudrais insister sur un dispositif spécifique de la loi d’orientation pour

l’outre-mer que nous allons débattre à nouveau dans les prochains jours à l’Assemblée

nationale. C’est le Projet Initiative Jeunes, le PIJ. C’est une aide au projet professionnel

de tout jeune de moins de 30 ans, soit pour créer son entreprise par une aide en capital,

soit pour aller acquérir ailleurs une formation qualifiante, en mobilité. Mon objectif est

que, dès l’année 2001, 10 000 jeunes puissent construire et orienter leur projet

professionnel grâce au PIJ.

Un objectif : le développement local

Vous allez travailler pendant trois jours sur la formation au service du développement

local. Ce développement local est indispensable pour l’emploi. L’emploi et plus

particulièrement l’emploi des jeunes est, et demeure la priorité du gouvernement. Le

chômage des jeunes, le chômage en général que connaissent les économies de l’outre-

mer n’est pas une fatalité et ma volonté est de lutter très fortement contre le chômage et

l’exclusion. C’est aussi mon engagement. Depuis un an, dans les quatre DOM, on ne le

sait pas assez, le chômage a baissé de 5 % et celui des jeunes a décru de 10 %. C’est un

Page 78: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 78

début. Il nous faut, bien sûr, aller plus loin. Si la formation est un atout indéniable, une

condition pour accéder à l’emploi, encore faut-il que des activités économiques se

créent et se développent.

Dès le début 2001, les dispositifs prévus par la loi d’orientation pour l’outre-mer seront

mis en place ainsi que le nouveau dispositif que j’ai annoncé la semaine dernière de

soutien fiscal à l’investissement outre-mer. Avec ces outils, nous sommes en situation

aujourd’hui de travailler tous ensemble pour créer des conditions plus favorables au

développement économique de l’outre-mer et surtout à une croissance économique plus

forte et plus riche en emplois. Les exonérations massives de cotisations (Sécurité

sociale) pour les entreprises de moins de onze salariés, ainsi que pour toutes les

entreprises particulièrement exposées à la concurrence - c’est vrai pour l’industrie,

l’agriculture, la pêche, le tourisme, les nouvelles technologies, le bâtiment - toutes ces

exonérations de charges ont en effet pour objectif de donner une bouffée d’oxygène à

ces entreprises, particulièrement dans un environnement régional fait de pays, d’États

où le coût du travail reste encore très faible. Les activités indépendantes seront

également stimulées par des allégements de charges sociales. Au total, c’est un effort de

3,5 milliards de francs contre un milliard précédemment qui seront mis au service de

l’emploi et du développement de l’outre-mer. Je ne doute pas de la créativité et du

dynamisme des populations d’outre-mer pour saisir cette chance.

Les NTIC au service de la formation

Pour conclure, je voudrais souligner le rôle des nouvelles technologies de l’information

et de la communication au service de la formation. Je me réjouis que vous ayez prévu

un atelier sur ce thème, car je crois très fortement aux potentialités que recèlent ces

technologies pour la formation. Les régions d’outre-mer doivent être à la pointe en la

matière. En effet, ces NTIC permettent un meilleur accès au savoir, un meilleur accès

aussi à la connaissance pour des régions qui ont pour principale fragilité leur isolement

et leur éloignement. Je souhaite avec vous une réflexion commune sur ces sujets afin de

mettre en œuvre un plan d’ensemble permettant une utilisation plus complète, plus

large, de ces NTIC au service des actions de formation professionnelle.

J’attends avec beaucoup d’intérêt désormais le fruit de vos travaux, les conclusions de

ces trois journées. Je les souhaite particulièrement utiles à notre réflexion et bien sûr à

Page 79: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 79

notre action. La formation est un droit pour tous les jeunes d’outre-mer. Ce doit être

aussi une réalité pour chacun d’entre eux. Bon travail. Merci à vous.

METROPOLE : M. Patrick KESSEL, Directeur du Centre INFFO

Le Centre INFFO est une structure associative, créée en 1976, placée sous la tutelle du

ministère en charge de la formation professionnelle, dont la vocation essentielle est

d’informer sur la formation professionnelle. Il s’appuie dans le cadre de sa mission

d’intérêt général sur tous les partenariats, qu’ils soient régionaux ou nationaux, travaille

avec l’État, les partenaires sociaux et les experts qui composent par ailleurs son conseil

d’administration.

C’est donc légitimement que le Centre INFFO a pris l’initiative d’organiser, en 1989, la

première Université de la formation professionnelle, avec une double ambition :

- proposer à tous les acteurs de la formation professionnelle, un lieu d’échanges et de

mutualisation des expériences, dans un cadre convivial et résidentiel qui facilite

largement la liberté d’expression ;

- inscrire la démarche dans la durée, à l’instar de l’université, symbole d’unité de temps

et de lieu, mais aussi de rigueur intellectuelle et de diversité d’opinions.

Historique des universités du Centre INFFO

La première édition s’est donc déroulée aux Karellis, avec pour thème "l’accueil,

l’information, l’orientation, le conseil", enjeux cruciaux à l’époque, et toujours

d’actualité. 150 professionnels s’étaient retrouvés, qui par la richesse de leurs débats,

avaient contribué au succès de la manifestation. Les deux premières éditions furent

placées sous le patronage de la Délégation à la formation professionnelle (DFP),

aujourd’hui Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP),

devenue par la suite co-organisatrice. Au trio des organisateurs, DGEFP, Intermif,

Centre INFFO, s’est joint le réseau Intercarif lors de la Ve édition. À l’occasion de la

Vle édition de l’université, qui s’est déroulée en Arles et qui a rassemblé plus de 400

participants, le Centre INFFO a, dans un premier temps, souhaité associer de manière

plus forte, les régions d’outre-mer à l’organisation, puisque nombreux étaient ses

représentants qui participaient assidûment aux précédentes éditions. L’idée d’organiser

une édition spécifique pérenne, se déroulant en alternance tous les deux ans dans une

Page 80: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 80

des régions d’outre-mer, s’est très vite imposée. Le projet, au départ soutenu par le

Secrétariat d’État à l’outre-mer et à la formation professionnelle, puis par le Comité de

coordination et l’ANT, a très vite suscité l’intérêt de toutes les régions, qui se le sont

rapidement approprié, permettant aujourd’hui la tenue de cette première édition en

Guyane.

Le Centre INFFO, partenaire des ROM

La présence du Centre INFFO s’inscrit dans la nécessaire recherche de

complémentarités et s’appuie sur des synergies développées par le passé, à savoir

notamment :

- la co-organisation avec Optimum des premières rencontres de la formation

professionnelle en 1993, en Guadeloupe,

- l’association de l’Intercarif, donc des régions pour l’organisation de l’Université

d’hiver de la formation professionnelle,

- la co-édition d’un numéro spécial d’Inffo Flash sur 15 ans de décentralisation de la

formation professionnelle,

- la réalisation d’un numéro spécial d’AFP (Actualité de la formation permanente)

consacré à la formation professionnelle dans les régions d’outre-mer, et qui figure dans

la mallette des participants,

- l’expertise que le Centre INFFO apporte au moment de la création de structures

régionales d’information, qu’il s’agisse de nouveaux CARIF ou de structures à vocation

plus large.

C’est ainsi que le Centre INFFO étudie également, en ce moment, une possibilité de

partenariat avec la région Guadeloupe pour la création d’une Cité des métiers, à l’instar

de la Cité des métiers créée au sein de la Cité des sciences et de l’industrie à Paris la

Villette, avec le concours du Centre INFFO en 1993. D’autres grands chantiers sont en

cours, c’est-à-dire, l’égal accès de tous à l’offre de formation nationale et régionale, ce

qui suppose une mutualisation des savoir-faire en matière de banques de données sur

l’offre de formation, l’adoption à terme d’une charte commune faisant appel aux critères

de qualité. Le Centre INFFO reste, bien entendu, disponible pour tout projet auquel les

partenaires régionaux voudront l’associer et qui permet de faire rayonner la formation

professionnelle.

Page 81: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 81

Les NTIC au Centre INFFO

Le Centre INFFO a, depuis 1997, mis en place de nouveaux supports d’information

notamment dans le domaine du multimédia, avec l’ouverture d’un site Internet qui

permet l’accès :

- à l’actualité de la formation professionnelle au quotidien,

- à des forums de discussions,

- aux grands chantiers initiés dans le cadre de la réforme du dispositif de la formation

professionnelle continue (FPC),

- aux principales sources documentaires,

- à la formation professionnelle dans les différents pays de l’Union européenne.

Plusieurs CD-Rom sont également proposés aux professionnels, qu’il s’agisse :

- du CD-Rom sur la négociation collective qui présente l’intégralité des accords de

branches en matière de formation professionnelle,

- du CD-Rom des fiches pratiques de la formation continue qui présente tout le

dispositif juridique,

- ou du CD-Rom sur le thésaurus formacode, outil d’indexation et de recherche sur

l’offre de formation, par ailleurs utilisé en priorité par les CARIF et les organismes

collecteurs.

Tous ces CD-Rom sont mensuellement mis à jour sur le site Internet du Centre. Dès

2001, les professionnels pourront aussi accéder au fonds documentaire du Centre

INFFO qui sera en grande partie numérisé puisque le Centre a initié cette année une

politique de gestion électronique des données. Cet accès au fonds numérisé coïncidera

avec l’installation du Centre INFFO sur son nouveau site à Saint-Denis.

Le Centre INFFO voudrait remercier :

- M. Cadenet et M. Appredérisse, à 1’époque représentants du Secrétariat d’État à

l’outre-mer, qui ont porté et défendu ce projet au sein du cabinet du Ministre, alors M.

Jean-Jack Queyranne,

- M. Vincent Merle, porteur d’un message de Mme Nicole Péry, Secrétaire d’État

chargée du Droit des Femmes et de la Formation professionnelle,

- Mme Chantal Berthelot de la Région Guyane,

Page 82: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 82

- M. Daniel Marie-Sainte et Mme Viviane Capgras de la Région Martinique,

- M. Hubert Salcède de la Région Guadeloupe,

- Mme Marie-Andrée Jaubert de la Réunion, première Région à soutenir le projet,

- Les directeurs des CARIF Dom, partenaires naturels du Centre INFFO dans

l’information sur la formation professionnelle et son développement, et qui ont

activement participé aussi à la réalisation du dossier documentaire figurant dans la

mallette du participant,

- Mme Gisèle Bourquin, chargée de coordonner l’organisation de l’université pour le

compte du Secrétariat d’État à l’outre-mer,

- M. Radjou, maître d’œuvre de cette première édition, Directeur d’Irig-Défis,

- M. Patrick Clemenceau et Mme Dominique Leccia du Comité de coordination, qui

nous ont fourni la logistique nécessaire durant les travaux préparatoires à l’organisation

de cette université, et qui aujourd’hui participent activement à nos travaux aux côtés de

Mme Janine Jarnac, Présidente du Comité de coordination.

Page 83: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 83

Conférence-débat du 2/10/00

FORMATION DES HOMMESFORMATION DES HOMMESFORMATION DES HOMMESFORMATION DES HOMMES

ET COHESION SOCIALEET COHESION SOCIALEET COHESION SOCIALEET COHESION SOCIALE

Conférence-débat de M. Serge Hermine,

Directeur du CIDO (Centre d'information, de documentation et d'orientation)

de l'université René Descarte- Paris V

Débats

GUADELOUPE :M. Nicolas Kezie, Université Antilles-Guyane, Chargé des relationsuniversité/entreprise

GUYANE :M. Michel Ardès, société IFDTM. Gabriele, Directeur général adjoint des services du Conseil régionalM. Radjou, Directeur de IRIG DEFIS, CARIFM. Gabriel Serville, Président du GRETA

REUNION :M. Gérard Arzilli, Directeur général adjoint de la CCIM. Lépinay, CESR (Comité économique et social régional)M. Bernard Sabban, CSFOR (Chambre syndicale des organismes de formation)M. Alain Séraphine, Président de l'ILOI (Institut de l'image de l'Océan indien)M. Yves Zoogones, Directeur de l'AREP

Page 84: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 84

FORMATION DES HOMMESFORMATION DES HOMMESFORMATION DES HOMMESFORMATION DES HOMMES

ET COHESION SOCIALEET COHESION SOCIALEET COHESION SOCIALEET COHESION SOCIALE

Conférence-débat de M. Serge Hermine,

Directeur du CIDO (Centre d’information, de documentation et d’orientation)

de l’université René Descarte – Paris V

Aujourd’hui, l’idée de société conçue comme une totalité organisée fonctionne comme

l’idée de communauté au siècle dernier. Elle est un type idéal antérieur, un moment

d’équilibre au regard duquel la vie sociale actuelle apparaît comme une longue crise,

comme la rencontre d’un monde perdu et d’une évolution destructrice avec

l’individualisme, le marché et le désenchantement du monde. Mais, je vois que grâce au

travail commun, nous pouvons reprendre espoir. Par ailleurs, la définition de la société

comme un ensemble naturel ne rend plus compte de la complexité et de la

diversification des conduites sociales. Certains sociologues ont parlé de déconstruction

de l’idée de société. Est apparue la notion d’expérience sociale qui montre que les

acteurs sont contraints de gérer des rationalités et des logiques différentes.

Situer la formation dans son contexte local

Par ailleurs, la question fondamentale de la construction de l’Union européenne, à

laquelle nous appartenons, relève de notre capacité à nous référer à des logiques

antagonistes. En effet, les cultures différentes des pays européens d’une part, la

spécificité des nôtres, d’autre part, ne permettent pas d’utiliser sans aménagements les

mêmes politiques économiques. Comme le souligne Nestor Radjou dans son article

"Formation professionnelle et stratégie de développement" dans le n° 164-165 de la

revue AFP du Centre INFFO, en Guyane, le contexte économique et social, le retard

d’équipements collectifs (notamment scolaires), l’absence de tissu industriel ne

favorisent pas la création d’emplois et l’insertion de personnes même très diplômées.

L’économie guyanaise est en état de dépendance vis-à-vis de l’extérieur, notamment de

la Métropole. Comme le montrent très bien les chiffres, les taux démographiques

Page 85: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 85

n’évoluent pas de la même façon dans nos régions (5,6 % pour la Guyane) que dans les

pays européens. Et donc ceux-ci ne sont pas confrontés aux mêmes problèmes. En

Guyane, la situation s’aggrave chaque année : les besoins non satisfaits s’accumulent et

les déficits s’accroissent.

Quand on regarde de près le document que je citais plus haut, les points importants qui

apparaissent, et je les donne dans le désordre, ce sont avant tout :

- les questions liées à la mobilité, par suite de l’insuffisance de tissu économique et de

certaines filières professionnelles et universitaires,

- la désagréable impression pour de nombreux jeunes que leurs études, leur formation,

ont du mal à être utilisées ou valorisées,

- les problèmes qui demandent des solutions rapides : l’analphabétisme et l’illettrisme,

- la formation à la santé (vaccination, précautions sexuelles, etc) liée à un certain

fatalisme, voire une inconscience de trop nombreux jeunes.

- la formation des jeunes (16-25 ans) et des demandeurs d’emploi,

- l’alternance en entreprise et ses difficultés,

- la nécessité de définir des parcours de plus en plus adaptés au tissu économique et de

répondre à la demande des entreprises en compétences nouvelles,

- l’amélioration de l’efficience des dispositifs d’accueil, d’information et d’orientation,

de suivi des publics,

- la compétence et la responsabilité de certains formateurs,

- l’immigration avec la charge considérable pour la région de scolariser et de régler les

questions d’habitat, de santé et d’accompagnement social.

C’est dans ce contexte que le Conseil régional et ses services m’ont demandé

d’intervenir. Il me paraîtrait déplacé de vouloir me situer au plan technique car, dans ce

domaine, j’entre dans la catégorie des bas niveaux de qualification.

C’est pourquoi, il apparaît clairement que la formation occupe une place privilégiée

dans la problématique de développement régional et interrégional, que la coopération

interrégionale est de plus en plus nécessaire et la présence ici des quatre régions en est

un indice fort. Quelles liaisons sont à établir entre les régions et l’État en matière

d’éducation scolaire et de formation professionnelle ? Qu’est-ce qui a manqué à ces

formations pour qu’il soit nécessaire de les remettre sur le métier ?

Page 86: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 86

La Guyane, de par sa situation géographique, est au carrefour de différentes cultures.

Ces cultures peuvent-elles se rencontrer ? Quelle est la place et le rôle de l’école dans la

transmission des patrimoines de chaque communauté ? Comment les prendre en compte

dans la formation ? Travail immense en tout cas pour la région, pour les régions qui,

chacune à sa façon, sont confrontées aux mêmes difficultés.

Définir la cohésion sociale

Pourquoi poser cette question de la cohésion sociale aujourd’hui ? D’abord demandons-

nous pourquoi former des hommes ? Pour qu’ils trouvent un emploi ou pour qu’ils

deviennent des citoyens vertueux et cohérents ? Qu’est-ce que la cohésion sociale ? Ne

peut-on pas la définir par son contraire, la désagrégation ?

La cohésion, c’est une idée mécanique et chimique à la fois ; c’est le ciment des

bâtisseurs. La cohésion donne une impression de masse, d’agglomération. Mais c’est

une notion qui laisserait apparaître qu’on redécouvre la nécessité de la lutte pour

l’égalité des chances, la lutte contre les disparités, la lutte contre les échecs scolaires. Il

y a 120 ans au moins qu’on lutte contre l’échec scolaire et pour l’égalité des chances.

Quand on regarde les choses de près, on constate qu’il y a des progrès, insuffisants au

regard des moyens déployés, et que nous ne savons plus très bien comment faire des

avancées significatives. D’une manière provocatrice, on pourrait dire que parler

d’égalité des chances signifierait une forme de nivellement. En effet, certains souhaitent

cette sorte de mondialisation à leur profit. Peut-il y avoir cohésion sociale sans conflit ?

Prenons un exemple : depuis une cinquantaine d’années, en France, il y a une

émergence significative de la formation continue par rapport à la formation initiale. Or,

on a affaire à deux formations tout à fait hétérogènes l’une et l’autre. Hétérogènes car

toute formation initiale est une formation tournée vers l’universalité. Les contenus de

savoir, la science, la raison, sont universels. On administre ces contenus par la

transmission à des enfants qui souvent n’en ont ni l’envie, ni le besoin. La formation

continue, de son côté, est une formation de la singularité, de la particularité. On a donc

bien deux formations hétérogènes. Ce qu’il faut donc, ce n’est pas intégrer ces deux

formations, mais les articuler l’une à l’autre. Cela signifie qu’il faudrait penser les deux

formations en même temps, ce qui conduirait à un changement d’état d’esprit dans la

formation, non pas pour se dire que l’on a tout son temps quand on commence des

études, mais qu’aucune situation n’est désespérée. Des travaux contemporains, en effet,

Page 87: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 87

permettront de dépasser le fatalisme social qui consiste à penser que la cause des

illettrés adultes est une cause perdue, que l’entreprise leur est à jamais fermée, que les

modernisations et les évolutions techniques leur sont à jamais inaccessibles. Les travaux

de la science cognitive tendent à montrer que tout ne se joue pas nécessairement dans

l’enfance et qu’il est possible d’apprendre et d’apprendre à apprendre, que l’abstraction

n’est pas inaccessible si des méthodes appropriées, liées à la motivation, sont mises en

place. Néanmoins, la précocité est très valorisée pour de nombreuses raisons. On ne

peut ignorer l’impact de la pré-scolarisation, à deux ans, sur les acquis des élèves en

primaire, ni que c’est dès l’école maternelle qu’apparaissent les premiers symptômes de

la diminution de la cohésion sociale.

Le titre de l’université étant : Université de la formation professionnelle dans les régions

d’outre-mer, la première idée qui vient à l’esprit pour traiter un tel sujet, c’est de se

demander comment la formation professionnelle peut contribue à favoriser la cohésion

sociale. Il m’a semblé que les jeunes et les moins jeunes avaient eu une formation

antérieure, que la formation ne commençait pas à ce niveau-là, mais déjà dans la famille

et à l’école, dans le cadre de la formation initiale.

Le modèle d’intégration à la française

C’est pourquoi, il ne me paraît pas inutile, pour essayer d’apporter quelques éléments

susceptibles d’éclairer cet immense sujet, de partir de ce qu’apportent et de ce qu’ont

apporté la République et son école. La cohésion sociale commence par l’éducation prise

au sens large, que l’école a cherché à inculquer. Qui dit formation éducative dit

socialisation, c’est-à-dire création d’une idéologie minimale qui peut tout simplement

s’appeler la démocratie. Au printemps 1995, avaient été annoncés des états généraux,

préparatifs à un référendum. La consultation prévue devait porter sur trois axes : la

réforme des rythmes scolaires ; le développement des formations technologiques et

professionnelles ; la modernisation du premier cycle des universités dans le cadre d’un

système de coresponsabilité entre l’État et les Régions.

Les réformes envisageaient de rapprocher le système éducatif et le monde du travail

pour lutter contre le chômage. Si l’on mène aujourd’hui une réflexion sur l’école, celle-

ci doit prendre en compte les problèmes de société auxquels elle peut apporter une

contribution précieuse. Il se trouve que les problèmes qui nous touchent le plus et qui

menacent de faire de la Guyane un pays éclaté, sont l’exclusion et la fracture sociale. Ce

Page 88: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 88

qui est en jeu, c’est la solidarité et la cohésion nationales. Problèmes aggravés parce

qu’ils se posent en Guyane et dans leurs rapports avec la métropole, voire aujourd’hui

avec l’Europe et le monde. Ces exclusions, ces fractures sont de natures diverses mais

relèvent, à des degrés divers, de la responsabilité du système éducatif qui est surtout

d’ordre culturel. Nous avons aujourd’hui à nous demander quels sont les problèmes

posés par l’intégration des minorités culturelles et par les conceptions qui mettent en

cause les modalités traditionnelles de l’assimilation, caractéristiques de notre école

républicaine, par le truchement de multiculturalismes ou l’exaltation de différenciations

culturelles.

Une des questions fondamentales est de se demander quelle logique doit l’emporter,

celle unitaire de la République française une et indivisible ou celle des particularismes,

dans une cacophonie qui peut faire craindre le différentialisme et les ruptures. Comment

trouver des degrés de liberté face à cette unité ? Quels aménagements doivent être

apportés au système pour tenir compte des contextes locaux quand on sait, par exemple,

que le taux de chômage en Guyane ne baisse pas, et qu’il est de 25 % contre 10 % dans

l’Hexagone, que l’appareil scolaire est insuffisamment développé, dans la mesure où le

taux de scolarisation, qui est de plus de 90 % en métropole, n’est que de 65 % en

Guyane ? Dans de telles conditions, les bénéfices de la modernité, de l’innovation

peuvent-ils s’exprimer de la même façon en Guyane et en France ? On peut dire qu’il y

aurait aberration à ne pas tenir compte de tels paramètres et à partir de là, se pose la

question de la cohésion sociale. Toute société est fondée, par ailleurs, sur l’acceptation

de l’autre. L’éducation, la formation y contribuent, ce qui conduit à se demander quels

facteurs permettent de renforcer cette acceptation. On ne peut réfléchir à un modèle

unique, car on est parfois tenté de croire que l’unité est synonyme d’homogénéisation.

Les normes techniques relèvent de l’homogénéisation, mais dès qu’il s’agit de

formation, d’éducation, l’histoire intervient. Les peuples, même sans écriture, ont une

histoire dont il faut tenir compte, une culture, et en Guyane, la culture, l’histoire

française, sont pénétrées par les particularismes locaux et la connaissance de l’histoire

des hommes apporte une contribution non négligeable à cette cohésion sociale.

C’est dans cette perspective que l’on peut poser le problème de la contribution du

système éducatif aux préparations aux métiers et à l’insertion professionnelle à

Page 89: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 89

condition que la logique productiviste ne l’emporte pas sur une logique civique et

nationale moderne.

Comment donner une culture unitaire, dans laquelle chacun, avec ses différences, puisse

néanmoins se reconnaître ? L’école républicaine française s’est donnée, et cela est un

héritage de la Révolution, un dispositif d’une grande capacité intégrative. C’est même

l’une des caractéristiques les plus fortes et les plus singulières de l’école républicaine

depuis la fin du XIXe siècle, dont la portée et l’enjeu ne sauraient être en aucun cas

sous-estimés. Si l’on transpose d’ailleurs, ce qui se passait en France - qui avait été le

seul pays européen à avoir connu une immigration massive depuis le début du XIXe - à

ce qui a lieu aujourd’hui dans nos départements, on peut dire, avec Dominique

Schnapper, que c’est cette politique liée à l’histoire de la citoyenneté et de la

démocratie, qui a permis d’assimiler les étrangers pour reprendre un terme utilisé jusque

dans les années 70. Les institutions de la IIIe République ont effectivement nationalisé

les enfants des paysans de France et les immigrés en leur apprenant, éventuellement

avec brutalité, le Français et le calcul et en leur interdisant d’user de la langue de leurs

parents. Ce projet politique était fondé sur le fait et l’idéologie de la citoyenneté

individuelle ; c’est grâce à ce projet qu’ont été intégrées des populations hétérogènes

par leur origine régionale, sociale et nationale. Plus que dans d’autres pays, le modèle

d’intégration "à la française" a été fondé sur l’idée et la valeur de la citoyenneté

individuelle, sur l’égalité formelle, juridique et politique de l’individu citoyen.

Les dangers du "droit à la différence"

Les républicains, pourtant, n’ignoraient pas que les cultures étaient multiples, mais ils

croyaient à l’unicité progressive et progressiste de la civilisation. La décolonisation a

provoqué des remises en cause. Le bouleversement s’est trouvé relayé par le discours de

relativisme culturel tenu par les anthropologues et pour n’en citer qu’un, Claude Lévi-

Strauss, qui a montré qu’il n’y a pas de hiérarchie simple et simpliste entre les cultures,

ce qu’a du mal à admettre le philosophe Alain Finkielkraut, dans "la Défaite de la

pensée" (Gallimard, 1987). Cette croyance en l’universel ayant été prise au piège en

quelque sorte, beaucoup d’intellectuels et d’enseignants se sont mis à penser qu’elle

n’était qu’un leurre et qu’il valait mieux se situer dans le relatif, le particulier. Ainsi

était né ce fameux droit à la différence. Durant les années 80, sur le thème très sensible

de l’immigration, on en est venu à repenser le monde unitaire de l’État-nation,

Page 90: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 90

caractéristique jusque-là de la tradition française, de l’école française. On appelle à

respecter les particularismes des communautés immigrées et l’on plaide pour une

société pluriethnique qui n’amènerait pas les étrangers à se fondre dans le creuset de

l’identité française.

L’attention se porte sur les réponses apportées par les USA et par la majorité des nations

européennes, qui privilégient des représentations différentialistes de la réalité sociale.

La société n’est pas conçue comme la réunion d’individus-citoyens formellement égaux,

mais comme l’emboîtement de communautés distinctes, soucieuses de préserver leurs

spécificités ethniques, linguistiques et religieuses. Chaque groupe doit revendiquer sa

culture dans l’absolu, dans ce modèle multiculturel. Les identités en présence sont

conçues statistiquement (sans échange entre groupes différents) au détriment des autres

et aux dépens d’une société politique dont l’objectif et la fonction consistent à régler les

questions communes. En définitive, on est conduit à partager la préoccupation d’Alain

Touraine quand il écrit "un multiculturalisme radical comme celui qui aux USA se

prétend "politically correct" aboutit à détruire l’appartenance à la société politique et à

la nation" dans "Qu’est-ce que la démocratie ?" (Fayard, 1994).

La démocratie n’est pas compatible avec le rejet des minorités, mais pas davantage avec

celui de la majorité par les minorités et avec l’affirmation de contre-cultures et de

sociétés alternatives qui se définissent non plus par leur position conflictuelle dans la

société, mais par leur rejet de cette société considérée comme le discours de la

domination. La démocratie s’appuie sur l’idée de conflit social, mais elle est

incompatible avec la critique radicale de toute la société, avec le multiculturalisme

extrême. Mais, face aux étrangers en passe de ne pas être intégrés, les crispations

identitaires régressives peuvent devenir fortes, surtout en temps de crise économique et

sociale. Et elles peuvent devenir très dangereuses.

Faire revivre l’esprit Condorcet

En toutes choses, il faut savoir garder raison. Il faut s’efforcer d’être rationnel

"raisonnablement". Et la rencontre peut se faire avec une tradition personnifiable par

Condorcet, le philosophe des progrès de l’esprit humain, homme d’un optimisme

raisonné, prudent et patient. Pour lui, rien n’est plus dangereux que l’enthousiasme de la

plupart des grands dirigeants de la 1ère République ; en même temps, rien ne lui répugne

davantage que l’arrogance de la Raison (impériale). Il a et il veut la Raison modeste. Il

Page 91: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 91

refuse donc toute religion civile, toute religion politique. Et c’est pourquoi, il est peut-

être au fondement d’une école profondément laïque, d’une école de la rationalité non

seulement républicaine, mais démocrate, une école d’instruction civique modeste et

rigoureuse. La réflexion de Condorcet sur l’éducation s’inscrit dans un contexte de

transformation de la société dans son ensemble qui peut être d’un certain secours pour

réfléchir les temps de crise et de mutation profonde à l’instar de ceux que nous vivons.

Pourquoi encore avec Condorcet, la cohésion sociale par l’éducation doit-elle être

interrogée ? Quand il y a faillite d’un système social, non seulement la conception

traditionnelle de l’éducation est affectée, et ne peut plus jouer son rôle naturel de

reproduction sociale, mais surtout la réflexion sur l’éducation peut participer activement

à la rénovation et à une nouvelle représentation de l’avenir.

L’essentiel est d’offrir à tous les individus de l’espèce humaine les moyens de pourvoir

à leurs besoins, d’assurer leur bien-être, de connaître et d’exercer leurs droits,

d’entendre et de remplir leurs devoirs. Condorcet ajoute que la connaissance est un

processus toujours inachevé, toujours en mouvement, et que son progrès, s’il dépend

des hommes de sciences, dépend également des savoirs les plus humbles dont la science

elle-même se nourrit. On a surtout retenu de Condorcet, la volonté de démocratiser la

connaissance et de la rendre accessible à tous avec la généralisation de l’enseignement

scolaire. Mais on a oublié l’autre versant, celui de la construction d’un savoir

démocratique, c’est-à-dire la participation de chacun, en tant qu’individu porteur d’une

parcelle singulière de savoir, à cette grande œuvre de la connaissance. De cette

conception dialectique de l’éducation, de la coexistence de ce double mouvement par le

haut et par le bas de la construction des savoirs, découle naturellement une vision

extensive de l’éducation, c’est-à-dire d’une éducation permanente.

La cohésion sociale naît de ce que tout individu participe à l’œuvre collective de la

connaissance et s’il doit autant donner que recevoir, on sait bien que l’éducation et la

formation ne sauraient être limitées à une tranche d’âge particulière, que nul ne doit être

laissé sur le bord de la route et que l’âge adulte peut, au contraire, constituer un temps

fort dans une éducation ainsi comprise. La crise du système industriel et productiviste

est une invitation à la réanimation de l’esprit Condorcet. Un système qui semble avoir

épuisé ses ressorts idéologiques, ouvre la voie d’un retour du sujet, pour reprendre une

expression chère à Alain Touraine. Sujet qui échappe de plus en plus à ses institutions

Page 92: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 92

pour tenter de recréer des espaces de socialisation, d’échanges et d’éducation informels

(le développement de la culture en réseaux des jeunes en forme un exemple). Parler de

formation des hommes signifie recentrer le système éducatif (au sens large) sur le sujet

de l’éducation, sur l’élève, sur l’apprenti, sur l’apprenant.

Pour revenir d’un mot sur le multiculturalisme, on peut dire qu’il se comprend par une

combinaison d’intégration, de liberté personnelle et de reconnaissance des identités. Il

faut mettre l’accent non sur la distance entre les cultures, mais sur les capacités des

individus à construire un projet de vie. Ceci aussi participe à la cohésion sociale et les

institutions de formation et culturelles doivent y veiller pour qu’en définitive on parle

moins de rencontre entre des cultures et davantage d’hommes, d’individus.

Ceci étant, pour éviter les règles identitaires que j’ai évoquées plus haut, on doit partir

de l’idée qu’il n’est ni souhaitable, ni possible de retirer à la culture propre de

l’enseignant, pris au sens large, un statut privilégié dans notre système éducatif, mais il

n’en reste pas moins qu’on ne peut comprendre sa propre culture qu’à condition de la

confronter à celle des autres. L’enseignant (le formateur) ne doit pas se croire obligé

d’être un gestionnaire d’identités culturelles, mais il doit utiliser ses instruments

d’analyse de la réalité pour comprendre les différences culturelles. Une des missions des

régions est d’assurer le développement par la formation, en l’adaptant aux besoins de

chaque région, en tenant compte des bassins d’emplois existants ou potentiels. Une

vision prospective à moyen et long terme est donc nécessaire pour mieux choisir les

filières, les formations, mieux aider les personnes en difficulté. Parfois, un certain

courage est nécessaire pour aller à contre courant des habitudes et des idées reçues, des

avantages acquis et de la reproduction de certains modèles.

Former à la cohésion sociale

Ceci ne saurait faire oublier qu’il faut une éthique pour que chacun trouve sa place dans

la production. Il faut la constitution d’une éthique sociale qui s’apprend par l’exercice

des valeurs républicaines et la formation à la vie citoyenne. La cohésion sociale n’est

pas seulement due à la paix sociale, mais relève de l’apprentissage donné d’abord par

l’école et qui doit être poursuivi dans le cadre de la formation professionnelle.

Apprentissage des droits, des devoirs, de la citoyenneté, se sentir intégré, faire partie

d’une nation, c’est-à-dire faire siennes un certain nombre de valeurs de la République et

Page 93: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 93

de la démocratie qui sont, je l’espère, des valeurs auxquelles chacun, quelles que soient

ses convictions politiques, philosophiques ou religieuses, peut adhérer.

Cette formation axiologique passe par la connaissance de l’histoire : la connaissance des

rouages, des modalités de la vie citoyenne, des institutions, pour participer et lutter

contre l’égoïsme, l’individualisme forcené.

En même temps, comment former à la cohésion, comment y inviter, comment la créer

avec des personnes dont la vie scolaire est un échec et dont les moyens n’ont pas permis

d’acquérir une formation scolaire ou professionnelle jusque-là. Si, comme nous l’avons

vu, la formation se fait dans les entreprises, en alternance ou en CFA, il ne faut pas

oublier que la formation peut utiliser le livre : l’apprentissage dans les vraies institutions

comme le Comité d’entreprise par le biais de la formation syndicale ; l’apprentissage

par le biais de la formation au droit du travail.

Ceci ne mettra pas fin aux conflits, mais permettra leur négociation. Pour cela, une

formation aussi est nécessaire, pour acquérir des avantages sociaux, savoir mener

collectivement une négociation, apprendre aussi à se servir du langage, de la parole,

comme outil de résolution des conflits. C’est la symbolisation à apprendre pour éviter le

corps à corps, la lutte physique. Cette symbolisation passe, répétons-le, par

l’apprentissage de la Constitution, des droits et des devoirs, tous éléments nécessaires à

la cohésion sociale.

Si le rôle de la formation est de donner à ceux qui la suivent la possibilité de trouver la

place qui leur convient sur le marché du travail (valeurs, horaires par exemple), on ne

saurait s’en satisfaire uniquement. La formation devrait avoir pour objectif de valoriser

l’individu, la personne, l’homme, la personnalité (selon les différentes façons de

s’exprimer). La finalité de tout effort social est la réalisation des individus, répétons-le

encore avec Condorcet. C’est pourquoi la formation ne peut ignorer le caractère culturel

qui devrait être associé à toute activité. Culturel signifie toute activité qui développe la

personnalité, les qualités de base de l’individu. La culture de la personne, qui passe par

une amélioration de la qualité de la vie, est réalisation individuelle et insertion sociale.

Cette insertion sociale, qui a pour conséquence la cohésion sociale, c’est de permettre

aux gens de vivre les uns avec les autres, de se rencontrer, d’échanger, de participer.

Mais il ne suffit sans doute pas d’améliorer les contacts sociaux pour résoudre les

problèmes sociaux. Autant que les échanges sociaux, la justice sociale est nécessaire.

Page 94: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 94

Articuler la formation initiale et la formation continue

Pour conclure, je voudrais revenir à la formation professionnelle et rappeler comment je

la perçois, et quel rôle elle peut jouer dans cette cohésion sociale. La formation

professionnelle a pour objectifs : l’insertion des jeunes, la productivité, donner des

salaires décents. De sorte que tout déficit de l’appareil éducatif et de l’appareil de

formation, génère du chômage et un manque de cohésion sociale. Et inversement, un

manque de cohésion sociale remet en cause la formation. Le système éducatif ne peut

tout assurer. Alors la formation professionnelle prend le relais du système éducatif, du

système scolaire, afin de permettre aux jeunes qui ne se sont pas préparés au monde du

travail, de s’y adapter. Et pourquoi ne sont-ils pas adaptés ? formation insuffisante,

formation inadaptée car trop homogène, formation non lisible par les employeurs,

formation ciblée sur les savoirs, trop abstraits (l’un des maux de l’enseignement

français).

Il y a 50 % d’illettrés en Guyane, car l’appareil éducatif est déficient, non pas par la

faute des maîtres, mais pour cause de non-scolarisation de nombreuses personnes. Le

système éducatif n’est pas complet partout. Il génère des illettrés, voire des analphabètes

qui ne peuvent comprendre la cohésion sociale, ce qui entraîne des fissures sociales.

Face à toutes ces insuffisances scolaires, la formation professionnelle peut être un

moyen de réparation. Mais, il y a des difficultés à la mettre en place par l’intermédiaire

de nos structures (à tous les niveaux) qui sont parfois trop rigides. Ces difficultés sont

aggravées par une forte immigration qui remet en cause les acquis au fur et à mesure de

l’arrivée des nouveaux immigrés, et de la pauvreté qui l’accompagne. Et de ce fait, le

manque de cohésion sociale s’accentue. La multiplicité des ethnies aggrave le malaise.

Plus de la moitié des élèves quittent le système éducatif sans les acquis nécessaires pour

suivre une formation professionnelle de qualité. La formation professionnelle, quand

elle peut être suivie avec profit, apparaît comme un système réparateur du système

scolaire.

Mais peut-être faut-il s’efforcer de donner la formation la plus adéquate dans le cadre

de la formation initiale ? Pour diverses raisons : un gain de temps pour le système qu’on

ne peut presque jamais évaluer ; une plus grande disponibilité des formés, etc.

On peut schématiquement dire que la formation professionnelle se donne trois objectifs

:

Page 95: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 95

- l’insertion des jeunes pour répondre à la demande du marché du travail - on constate

que parfois ces jeunes ne sont pas formés ou ne sont pas capables d’utiliser leur

formation - et aider les demandeurs d’emploi (+ de 29 %) à trouver un emploi ;

- la formation continue comme élément de promotion sociale des salariés avec ses deux

aspects de formation humaine et professionnelle ;

- elle est une réponse apportée au développement des entreprises. Des salariés mieux

formés, maîtrisant mieux les techniques, permettent d’en accroître la productivité.

Comment ces trois fonctions conditionnent-elles la cohésion sociale ? Et pourquoi toute

dégradation de la formation professionnelle entraîne-t-elle la dégradation de cette

cohésion sociale ?

Les réponses aux questions posées par la poursuite de ces objectifs peuvent être

apportées de manière globale. En effet, toute pratique de formation apporte d’abord une

compétence (et pas seulement sur le plan technique), donne des savoirs adaptés à la fois

par l’utilisation d’une culture technique générale, mais aussi plus spécialisée. Elle

permet un transfert des savoirs et des compétences acquis dans le cadre de la formation

initiale. On ne part jamais de zéro. Une des spécificités du système français est de

donner suffisamment d’éléments généraux réutilisables et de permettre à chacun de

trouver, au sein de l’entreprise et en fonction des besoins de celle-ci, des réponses

adaptées.

Alternance et cohésion sociale

L’enseignement par alternance, en donnant un rôle formateur aux entreprises, devra

réaliser cette synthèse heureuse. On attendait de l’alternance : qu’elle améliore

l’adéquation entre formation et emploi ; qu’elle conduise à une meilleure insertion

professionnelle pour un plus grand nombre de jeunes ; qu’elle leur donne de meilleures

connaissances techniques afin qu’ils puissent s’adapter aux évolutions technologiques et

pratiques (les savoir-faire de métiers). Qu’en est-il en réalité ? L’étude menée par

Antonio Monaco "Alternance école-production : entreprises et formation des jeunes

depuis 1959" (Editions PUF, 1993), permet de s’en faire une idée, d’autant qu’il

privilégie le point de vue des entreprises. Il met d’abord en garde sur le fait qu’une

alternance idéale, où seraient étroitement articulés les différents lieux et moments de

formation, risque d’aboutir à deux types de déviation :

Page 96: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 96

- soit imputer unilatéralement à l’école le dysfonctionnement que pose l’entreprise

comme lieu de référence auquel l’école doit se conformer, avec souvent une

représentation de l’entreprise ;

- soit insister sur la différence, voire l’antagonisme, entre une logique éducative et une

logique de production, et vouloir faire entrer les entreprises dans une logique éducative.

L’enquête montre le faible impact de l’alternance sur le taux d’activité des jeunes et,

quant à la résorption du chômage, elle est souvent éphémère. La difficulté est que

nombre d’entreprises qui acceptent les jeunes en alternance sont soit en difficulté, soit

dans des secteurs offrant beaucoup de particularités (bâtiment, commerce de détail,

services marchands, hôtellerie et restauration, réparation et commerce automobile) et à

forte instabilité d’emploi. Dans ces conditions, même si les jeunes sont satisfaits de leur

stage, les acquis ne sont pas, le plus souvent, ceux qui sont énoncés et annoncés. Les

stagiaires sont souvent cantonnés dans des tâches d’exécution, de préparation, d’aide,

qui ne réclament pas de connaissances techniques. Le centre de formation ne joue pas

vraiment son rôle, car il rencontre des difficultés pour trouver un lieu de stage. Le

personnel s’implique peu. S’il y a tuteur, sa désignation repose normalement plus sur

des critères propres à l’entreprise que sur des qualités d’encadrement des jeunes. Les

entreprises qui prennent réellement en compte la formation des jeunes sont celles qui

considèrent la formation comme un moyen de dynamiser leur personnel : ou de grandes

entreprises ; ou des entreprises qui intègrent la gestion des stages dans une organisation

générale de la formation continue dans l’entreprise.

Le travail, forme majeure de cohésion sociale

Et, ne l’oublions pas, l’un des objectifs de la formation professionnelle est de préparer à

l’entrée dans le monde du travail. Le travail, selon Dominique Méda dans "Le travail,

une valeur en voie de disparition" (Paris, Flammarion, 1995), permet l’intégration

sociale et constitue l’une des formes majeures de lien social. Le travail est facteur

d’intégration, non seulement parce qu’il est une norme, mais aussi parce qu’il est l’une

des modalités d’apprentissage de la vie en société. Il donne accès à autrui, à soi-même

et à la règle sociale. Il redonne en même temps une dimension de sociabilité, celle que

l’on développe au bureau, à l’atelier, en équipe, une sociabilité douce opposée aux

rapports hiérarchiques et aux rapports privés.

Page 97: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 97

Enfin, l’idée de lien social se fonde sur celle de réciprocité, de contrat social et d’utilité

sociale : en apportant une contribution, je dope mon sentiment d’appartenance à la

société, je suis lié à elle parce que j’ai besoin d’elle et que je lui suis utile. Le travail est

un moyen de communication sociale et de relation avec autrui. Pour de nombreux

sociologues, le travail, et particulièrement le travail en entreprise, apparaît comme le

véritable lieu de la socialisation réelle et de la formation de l’identité individuelle et

collective. Le travail est fondamentalement social, car il permet la satisfaction des

besoins humains, réalisée collectivement, mais aussi la réalisation des désirs individuels

et collectifs. Le travail est l’œuvre réalisée collectivement et c’est le vrai moyen de

communication entre des individus qui ne produisent plus de façon aliénée. On

comprend pourquoi nos sociétés cherchent tant à lutter contre le chômage par la

formation, car travail, formation et cohésion sociale sont intimement liés.

Devant les fractures qui s’ouvrent dans nos sociétés, des pensées s’élèvent pour sauver

le travail. En effet, le travail n’a pas toujours occupé la place qu’il a aujourd’hui. Il a

existé des sociétés sans travail au sens où nous l’entendons aujourd’hui. C’est le cas de

sociétés non industrialisées, les sociétés primitives qui offrent un premier exemple de

sociétés non structurées par le travail. Pour les petites gens, le travail est assimilé à des

tâches dégradantes et n’est nullement valorisé. Le travail relève de la sphère de la

nécessité, c’est une tâche pénible, dégradante et, par essence, servile. Etre vraiment

humain, c’est autre chose : faire de l’art, admirer le beau, pratiquer l’activité politique,

dans tous les cas, utiliser sa raison, car l’homme est un être raisonnable. Alors pourquoi

le travail ? Par peur de devoir y renoncer, parce que le travail est notre fait social total. Il

structure notre rapport au monde, mais aussi nos rapports sociaux. Sa disparition, à

l’évidence non souhaitée, remettrait en cause les ordres qui structurent nos sociétés et

ainsi s’explique la véritable panique qui saisit gouvernants et gouvernés devant la

montée inexorable du chômage, même si une baisse se fait jour depuis bientôt deux ans.

Car, là où il faut inventer de nouveaux rapports sociaux, il y a toujours de la place pour

l’arbitraire et donc aussi pour la contestation, la violence et la guerre.

Page 98: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 98

Débats

Un intervenant dans la salle (AFPA)

Il faut que, lorsque les gens viennent à la formation professionnelle, ils sentent que ce

type de formation, cette pédagogie répondent bien à leurs besoins. A l’AFPA, nous

accueillons des jeunes, des adultes avec lesquels nous élaborons un projet professionnel

et en même temps un projet social, un projet de vie. Je crois que c’est ce qui est

intéressant. Ce projet de vie, qui les conduit à acquérir une profession qu’ils maîtrisent

et dont ils sont fiers, leur permet d’être intégrés dans la société, parce qu’ils se sentent

bien dans leur peau. La cohésion dans la formation professionnelle est d’abord le

partage d’un intérêt commun et, sur un projet professionnel, c’est le partage d’un métier

commun. Si vous arrivez à mobiliser les gens tous ensemble sur un projet et quelles que

soient leur culture et leur diversité, ils se sentiront bien ensemble. On accepte les autres

parce qu’on partage un projet commun, même avec des cultures complètement

différentes. Je crois que c’est ce qui est intéressant dans la formation professionnelle :

aqrriver à rassembler autour de nous, des gens différents sur un projet commun qui les

attire. J’aurais aimé que l’on parle de cette partie positive de la formation

professionnelle qui peut nous amener à refuser l’échec et aller au contraire au-devant

d’un projet qui puisse nous apporter quelque chose de plus.

METROPOLE : M. Serge Hermine, Directeur du CIDO (Centre d’information, de

documentation et d’orientation à l’université René Descarte - Paris V)

Je partage votre point de vue. Vous accueillez des jeunes et vous les prenez sans tenir

compte du fait que c’est une seconde chance du point de vue de la société. La société a

tendance à valoriser ce qui se fait dans la formation initiale classique. On peut le

regretter, mais la réalité est que, lorsque vous prenez le haut ou le bas de la hiérarchie, il

y a toujours les mêmes problèmes. Ceux qui passent le concours de l’ENA par la

deuxième ou troisième voie et ceux qui le passent en tant qu’étudiants n’ont pas les

mêmes postes. De même, il existe des différences entre le garçon qui, à 14 ans, est en

classe de seconde et celui qui, à 14 ans, est apprenti dans son quartier. C’est une réalité,

ce n’est pas un jugement moral. Évidemment, il faut aller dans le sens que vous

avancez. Il ne faudrait pas que la formation professionnelle (lycée professionnel, lycée

Page 99: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 99

technique…) soit considérée comme marginale, mais comme quelque chose de positif

et qui a été choisi.

GUADELOUPE : M. Nicolas Kezie, Université Antilles-Guyane, Chargé des relations

université/entreprise

Concernant la relation formation, cohésion sociale et développement, je pensais que

vous alliez parler de ce lien : la cohésion sociale contribue-t-elle ou non au

développement ? On pourrait aussi s’interroger sur le type de développement qui est

choisi : permet-il ou non la cohésion sociale ? Souvent on a des difficultés à

comprendre la logique entre le plan de développement d’une région et le plan de

formation continue qui est mis en place dans cette région. Il est intéressant de savoir si

cela contribue ou non à la cohésion sociale. Je me demandais d’ailleurs pourquoi ne pas

changer de logique ? Pourquoi ne pas partir du type de développement que l’on

souhaite, pour remonter vers le type de formation et d’éducation adéquates.

GUADELOUPE : un représentant du MEDEF

Une petite contribution positive : on a créé, via l’ASFO, avec le concours du Conseil

régional de la Guadeloupe, un CFA qui accueille uniquement des Bac + 2. La première

année, nous avions essentiellement des jeunes qui se présentaient. Nous étions obligés

de leur proposer des contrats de qualification, parce que finalement ils n’avaient pas le

Bac. On ne pouvait pas les inscrire dans le cadre de l’apprentissage, car ils ne rentraient

pas dans la bonne grille. Trois ans après, on s’est aperçu que les jeunes, avec des bonnes

notes au Bac, font la queue pour entrer dans ce CFA. Cela veut dire qu’il y a une prise

de conscience que l’alternance n’est pas une voie de garage, mais une voie royale de

professionnalisation. Elle permet également, quand le projet pédagogique est adapté,

d’obtenir des développements de comportements qui permettent une meilleure cohésion

sociale à l’intérieur de l’entreprise et cela fait bouger les valeurs. Je suis fier par ailleurs

de vous annoncer un chiffre qui peut être considéré comme un échec : à la fin du

premier cycle de notre BTS force de vente, il y a eu seulement 25 % de diplômés ; par

contre, il y a eu 65 % de CDI qui n’étaient pas tous diplômés.

Page 100: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 100

REUNION : M. Yves Zoogones, Directeur de l'AREP (Association réunionnaise

d’éducation populaire)

Je ne crois pas que l’on puisse faire une distinction très nette, tout le temps, entre

éducation et formation. Effectivement, si la formation professionnelle n’est là que pour

formater et préparer à un métier, elle n’a pas à se poser les problèmes de l’éducation.

Mais je crois que la réalité de la formation professionnelle est hétérogène et ne se limite

pas à former à un métier. Dans nos régions, il y aussi des jeunes qui sortent de

l’Education nationale en ayant le sentiment qu’ils ont perdu des choses comme la

confiance en soi ou leur culture. C’est à ce moment-là, que la formation professionnelle

est obligée de se situer, non plus seulement sur la formation métier, mais aussi sur la

préparation en amont des gens, en intervenant dans des domaines qui ressemblent à

l’éducation.

REUNION : M. Alain Séraphine, Président de l'ILOI (Institut de l'image de l'Océan

indien)

Concernant la différence entre formation professionnelle et formation initiale, je partage

ce qui a été dit, mais je pense qu’il y a un élément nouveau qui arrive dans le débat, et

cela va changer un certain nombre de données. La lourdeur des dispositifs de la

formation initiale ne permet pas l’adaptabilité nécessaire et indispensable à l’évolution

des technologies. Il se trouve aujourd’hui, que la formation professionnelle semble

répondre un peu mieux. On se rend compte que les étudiants, après avoir fait une

formation initiale, cherchent une formation professionnelle. On voit que des

établissements comme SUP INFOCOM qui recrutent à la sortie des universités

apportent un plus par la formation professionnelle qui va être valorisé sur le plan

international. Ce que la société a acté, en faisant le parallèle entre formation

professionnelle et situation d’échec, est en train d’être inversé par l’arrivée des

technologies nouvelles.

GUYANE : M. Michel Ardès, société IFDT

Je suis un peu déçu parce que, dans le débat, vous avez fait un constat d’échec, de

fatalisme. Mais cela fait 35 ans que j’entends ce discours. Je suis passé par la formation

professionnelle et, depuis l’âge de 15 ans, j’entendais le discours que vous tenez M.

Page 101: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 101

Hermine. Cela veut dire qu’au lycée professionnel, on nous disait qu’il ne fallait pas

croire que nous étions sur une voie d’échec. Je vois qu’aujourd’hui, on est toujours dans

la même situation. Je souhaite que cette première Université de la formation aille de

l’avant pour les jeunes qui viennent. Il y a un choix qui est important à faire au départ et

il y a aussi un potentiel énorme dans la formation professionnelle dont je suis issu et

fier. Effectivement, il faudrait peut-être inciter les jeunes à s’orienter vers la formation

professionnelle, la formation technique pour leur permettre d’obtenir un vrai métier. Je

pense qu’il faut valoriser cette formation-là et faire en sorte que les jeunes n’aient plus

le sentiment d’une voie d’échec, parce qu’elle est aussi une voie de succès.

REUNION : : M. Bernard Sabban, CSFOR (Chambre syndicale des organismes de

formation)

Concernant l’alternance, vous avez parlé d’une étude qui a été faite. Est-elle nationale

ou guyanaise ? Parce que, bien que nous soyons conscients des dérives qu’il y a, nous

n’avons pas le même type de constatations sur le terrain.

R : C’est une enquête nationale ( Alternance école-production : entreprises et formation

des jeunes depuis 1959 , Alberta Monaco, Editions PUF, 1993)

REUNION : M. Gérard Arzilli, Directeur général adjoint de la CCI

J’ai été surpris par vos propos M. Hermine et je souhaite m’inscrire en faux contre

l’idée que formation professionnelle, apprentissage, alternance égalent solutions

d’échec. Sur la Réunion, l’enquête à laquelle vous faites référence est contredite par les

faits et les chiffres. Nous avons des formations en alternance de niveau Bac, Bac + 3

avec des taux d’insertion qui sont de 100 %, diplômés ou non diplômés. Nous avons un

accord qui permet de réorienter les jeunes en situation d’échec au niveau universitaire,

non pas parce qu’ils ne sont pas bons, mais parce qu’ils ne sont pas faits pour des études

universitaires. À la fin de ces réorientations, les taux d’insertion sont de 100 %. Je crois

qu’il y a une vision un peu passéiste que vous avez évoquée, parce que les choses

bougent vite outre-mer et peut-être pourrions-nous donner au plan national des notions

positives qui sont un peu absentes de votre discours.

Page 102: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 102

METROPOLE : M. Serge Hermine, Directeur du CIDO (Centre d’information, de

documentation et d’orientation, à l’université René Descarte - Paris V)

Je n’ai pas tranché et j’ai seulement présenté les problèmes qui sont posés par cette

enquête. Vous me dites que vous n’avez pas été interrogés mais, cette enquête a été

faite. Il faudrait peut-être proposer une contre-enquête. Il y a des avancées, mais je

pense que, malgré tout, un certain nombre d’éléments restent valables. Je ne dis pas

que l’alternance est pour les gens un échec. Vous avez des expériences qui ont marché,

néanmoins elles concernaient un public particulier.

GUYANE : M. Gabriele, Directeur général adjoint du Conseil régional

Il est clair que nous n’avons pas demandé à M. Hermine d’intervenir pour apporter des

solutions, mais pour poser des questions et des problématiques.

En ce qui concerne la formation professionnelle, un certain nombre de propos m’ont fait

réagir. Quand on regarde la formation professionnelle sur 35 ans, elle a été créée pour

résoudre des problèmes de criantes inadaptations, pour répondre à des besoins de main-

d’œuvre et ensuite pour réadapter complètement la main-d’œuvre et offrir des bouées

de sauvetage à ceux qui allaient être des sacrifiés. Elle a dû accompagner la création des

organismes nouveaux. Elle a vu l’introduction dans les entreprises du paritarisme et le

développement du partenariat social. Elle a introduit une notion de qualité, elle a été la

deuxième chance. Mais la deuxième chance par rapport à quoi ? Cela pose des

questions sur la formation professionnelle, qu’on la regarde sous l’angle des dispositifs

(systèmes traditionnels ou bien établis et qui accomplissent leur œuvre) ou que ce soit

par l’externalisation, l’ANT, l’AFPA, … Le problème de cette deuxième chance est que

l’on demande à la formation professionnelle, comme à l’Education nationale, beaucoup

de choses. On lui demande, en effet, d’être une formation pour une insertion

professionnelle dans un contexte où offrir une deuxième chance est devenue une

gageure, voire un défi, à l’échelle de plusieurs milliers de jeunes. Cela devient une

question immense. Lorsqu’un jeune sort de l’école sans n’avoir rien compris, comment

peut-on reconstruire, image après image, ce film qui s’est complètement dévidé pendant

des mètres et des mètres. C’est une entreprise pratiquement impossible. Or, c’est cette

masse de jeunes que nous avons, de plus en plus nombreuse, qui pose de nouveaux

Page 103: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 103

problèmes par rapport à la formation professionnelle et par rapport à la rareté de

l’emploi.

Dans les DOM, à quelle formation professionnelle pouvons-nous réfléchir ? Quelle est

la place des hommes dans leur contexte local ? Quelles méthodes et quels contenus de

formation ? Ce sont des questions importantes parce que, par le levier de l’homme, nous

devons créer sur place le développement. C’est notre problématique. La formation

professionnelle commence à englober un champ plus large que les dispositifs

traditionnels que nous avons, que nous améliorons et qui se complètent, s’articulent et

créent la formation professionnelle au sens noble du terme. Mais la mobilité en Guyane,

c’est 8 % de l’ensemble des jeunes qui sont admis en formation professionnelle. A

l’AFPA, c’est une fraction de 14 à 15 % des jeunes adultes qui sont admis dans la

formation professionnelle. 14 + 8, cela fait 22 %. Quand on met bout à bout tout cela,

on se rend compte que nous avons, dans la formation professionnelle, des charges qui

doivent répondre à des publics, à des objectifs qui sont autres que ceux que nous venons

de citer. Cela pose de nouvelles questions par rapport aux conditions dans lesquelles

nous devons créer le citoyen, le travailleur, le créateur de richesses voire l’homme qui

crée des activités sur le plan local. Nous devons le faire dans ces régions avec des

cultures totalement différentes et diverses.

Un intervenant dans la salle

À propos du concept de différentialisme, faut-il y voir une sorte de gestion

conservatrice des différences ? Ce serait effectivement à proscrire : gestion

conservatrice, entités fermées, … Dans la perspective des mouvements pédagogiques de

rencontre du sujet, de rencontre de l’acteur, n’y a-t-il pas lieu d’instrumentaliser et de

faire travailler les différences, parce que c’est le lieu fort d’une certaine culture ? Pour

rencontrer le sujet, il faut approcher sa culture, c’est ce que j’appelle instrumentaliser la

culture, de manière que les discours pédagogiques ne restent pas une abstraction pour

certains sujets, notamment pour les enfants issus des couches populaires. Ne faut-il pas

ausculter ces cultures-là pour les mener dans le champ de la réussite ? Ces enfants ont

quelque chose à dire et les formateurs ont quelque chose à entendre.

Concernant l’alternance, il n’y a pas lieu de s’aveugler idéologiquement. Il est évident

que l’alternance est vécue massivement, sauf dans des cas marginaux, comme le lieu de

Page 104: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 104

l’échec. Il peut y avoir des renversements de tendance. Par contre, M. Hermine a parlé

de l’antagonisme entre le lieu de formation et l’entreprise. Cet antagonisme est-il une

fatalité ? Ne peut-on pas en faire un champ épistémologique nouveau, un champ de

recherche, un champ d’expérimentation sociale et pédagogique ? Il serait intéressant de

faire fructifier cette interactivité entre les savoirs expérientiels de l’entreprise et les

savoirs de l’espace de formation qui pourraient se combiner pour former une nouvelle

approche pédagogique.

METROPOLE : M. Serge Hermine, Directeur du CIDO (Centre d'information, de

documentation et d'orientation de l'université René Descarte- Paris V)

Faire des expériences et créer un champ pédagogique nouveau, cela voudrait dire que

les gens, les élèves serviraient de sujets d’études pour les chercheurs, les politiques et

les entreprises ? C’est une question. Chacun de nous peut avancer une idée. Si elle n’est

pas corroborée par une enquête, on ne sait pas si cela marche. Je dis que l’alternance

pose autant de questions qu’elle apporte de réponses.

Quant aux replis identitaires, vous parlez du choc des cultures et de faire travailler les

différences. C’est un challenge intéressant dans le cadre de l’enseignement, mais c’est

terriblement difficile pour ceux qui le pratiquent. C’est pourquoi cela a du mal à être

généralisé. Cela pose des problèmes aux lycéens, des difficultés avec la famille, avec

les élèves dans la classe…

REUNION : M. Georges-Marie Lépinay, CESR (Comité économique et social

régional)

Sur l’alternance, je sais qu’il existe une tendance des domiens à vouloir témoigner au

monde. Mais, le Conseil économique et social serait très intéressé par la démonstration

de l’efficacité de l’alternance à la Réunion.

Deuxièmement, on parle de la formation et de la cohésion sociale. J’ai l’impression que

l’on prend la formation en tant que telle, comme un enjeu pour elle-même. Je sais que,

dans les dernières décennies, on y a consacré beaucoup de moyens et on a beaucoup

formé. La formation professionnelle est aussi un marché, c’est un fait. Dire que la

formation professionnelle est une deuxième chance, c’est vrai, je ne parle pas d’échec,

mais d’une chance que l’on a perdue quelque part. Quand le jeune arrive et qu’on lui

Page 105: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 105

demande quel est son projet, si le jeune nous retournait : quel est votre projet collectif,

quelle est votre ambition collective en termes de développement ? Peut-on concevoir

une formation professionnelle simplement adaptée aux besoins de telle ou telle

entreprise, déconnectée de cette ambition sur les moyens de développement pas

seulement local, mais économique, social et culturel.

Peut-on également déconnecter l’éducation de la formation professionnelle, qui est une

caractéristique de notre système ? Souvent les uns et les autres interviennent avec

beaucoup d’antagonisme. N’aurait-on pas besoin de ce prolongement naturel de

l’éducation (acquisition de savoirs) et de la formation professionnelle (acquisition de

savoir-faire), pour entrer dans la vie active ?

METROPOLE : M. Serge Hermine, Directeur du CIDO (Centre d'information, de

documentation et d'orientation de l'université René Descarte- Paris V)

La formation de l’homme, ce n’est pas la formation pour la formation. Il ne s’agit pas

de se faire plaisir en formant ni que cela réponde uniquement à un projet politique, mais

que cela réponde à un projet social pour les personnes qui sont en formation. Il ne faut

pas oublier la notion d’éthique dans la formation. L’élève à former est une personne et

non un objet ; c’est un sujet.

GUYANE : M. Radjou, Directeur IRIG DEFIS, CARIF

M. Hermine a évoqué de façon théorique et abstraite de nombreuses problématiques.

Cependant il nous fait comprendre que le système de formation professionnelle est un

système éducatif qui prend le relais du système initial et qu’il appartient à la Guyane

d’en définir la stratégie.

GUYANE : M. Gabriel Serville, Président du GRETA

Je voudrais dire qu’il n’y a pas d’antinomie concernant l’alternance entre ce qu’a dit le

professeur Hermine et les différentes interventions. Il faudrait que l’on dégage deux

niveaux d’intervention : que l’on se positionne avant ou après le niveau Bac. En

Guyane, il y a des stagiaires qui sont en alternance au niveau post Bac. Ils ne se

plaignent pas et obtiennent de très bons résultats comme partout. Le problème se situe

en amont, avant le Bac. Par exemple :

Page 106: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 106

- En métropole, on a dit que l’on supprimait l’orientation après la cinquième, parce que

l’on a mis en place un nouveau système. Il fallait que 80 % d’une classe d’âge arrive au

niveau du Bac et l’on a appliqué ce principe à l’identique en Guyane. Or il se trouve

que, dans les collèges de Guyane, il y a beaucoup d’enfants non francophones qui

arrivent en cinquième sans les prérequis, ni les aptitudes pour pouvoir continuer en

troisième ou quatrième. Mais on les pousse à continuer avec la certitude d’échec que

l’on connaît.

- La mise en place de filières CAP, BEP est soumise à des principes de quotas dans les

lycées professionnels. Ces quotas, qui ont du sens en métropole avec 60 millions

d’habitants, n’ont pas de signification tangible en Guyane où nous n’avons que 180 000

habitants.

- Certaines classes d’accueil, au niveau de la 6e, accueillant des enfants non

francophones, analphabètes, qui n’ont jamais été scolarisés dans leur pays d’origine, ont

été supprimées, sous le motif qu’elles ne remplissaient pas leur mission et qu’elles ne

faisaient pas leurs preuves. Cette directive venait de Paris, sans aucune concertation

avec la Guyane, sans savoir dans quelle mesure ce dispositif rendait service ; il a été

complètement supprimé.

Cette liste peut être très longue. Les collègues des régions voisines ont certainement

leurs propres difficultés, mais je crois qu’il y a dans les systèmes de formation initiale

quelque chose qui gêne. Ce n’est pas tant la lourdeur, mais le fait que certains

dispositifs ne sont pas adaptés. Il faudrait peut-être dégager une situation intermédiaire

entre la formation initiale qui conduit à l’universalité et la formation continue qui

conduit à la singularité. Il faudrait trouver une singularité universelle ou une

universalité singulière, je ne sais pas. Il faudrait, comme on nous le demande dans nos

classes, trouver une pédagogie différenciée, adaptée à certains profils, en mettant en

place dans nos régions des règlements, des lois qui soient différenciées et qui tiennent

compte de nos particularités...

Page 107: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 107

Table ronde du 2/10/00

FORMATIONFORMATIONFORMATIONFORMATION

ET COOPÉRATION REGIONALEET COOPÉRATION REGIONALEET COOPÉRATION REGIONALEET COOPÉRATION REGIONALE

Animateur :

M. Luc Germain, journaliste

Rapporteur :

Mme George Pau-Langevin, Directrice générale de l'ANT

Page 108: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 108

Intervenants

GUADELOUPE :M. Nicolas Kezie, Université Antilles-Guyane, Chargé des relationsuniversité/entreprises

GUYANE :M. Jean-Michel Nicolas, Directeur de l'AFPA

MARTINIQUE :M. Francis Riffaux, Directeur de l'AFPA

METROPOLE :M. Aris Margos, Commission européenne

REUNION :M. Fabrice Payet, Directeur de l'AFPA

Débats

GUADELOUPE :M Hubert Salcède, Directeur de la formation professionnelle du Conseil régional

GUYANE :M. Paulin Bruné, Vice-Président du Conseil régionalM Gabriele, Directeur général adjoint du Conseil régional

MARTINIQUE :Mme Brafine, Formatrice à la Cellule emploi jeune du RectoratMme Leufroy, Conseillère en formation continueM. Raymond Marie, CESR (Conseil économique et social régional)M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régionalM. Marie-Séraline, Directeur de l’IPFEPMme Mestraud, AFPA

METROPOLE :M. Gabriel Mignot, Président du Centre INFFOMme George Pau-Langevin, Directrice générale de l'ANT

REUNION :Mme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régionalM. Lépinay, CESR (Conseil économique et social régional)

Page 109: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 109

FORMATIONFORMATIONFORMATIONFORMATION

ET COOPÉRATION REGIONALEET COOPÉRATION REGIONALEET COOPÉRATION REGIONALEET COOPÉRATION REGIONALE

GUYANE : M. Jean-Michel Nicolas, Directeur de l'AFPA

Cette table ronde consacrée à la coopération régionale et à la formation est un thème

important pour cette première Université de la formation professionnelle dans les DOM

et je souhaiterais engager mon propos en situant un certain nombre de facteurs

sociologiques et géographiques qui me paraissent essentiels pour aborder ce thème de la

coopération régionale.

Le contexte géographique

Si l’on prend le cas de la Guyane, il faut rappeler sa position géographique

exceptionnelle, puisqu’il s’agit d’un vaste territoire nord amazonien, situé entre les

Caraïbes et appartenant au plateau de Guyane. Cette position géographique lui confère

des atouts pour tisser des liens de coopération avec les pays limitrophes. La Guyane

n’est pas que cela. Elle est une région ultra périphérique, qui appartient à l’Europe, tout

en étant rattachée géographiquement à l’Amérique du Sud. Ce sont aussi des atouts

supplémentaires pour pouvoir situer la région Guyane dans son environnement

géopolitique et géostratégique. D’une certaine manière, la Guyane serait, sera peut-être

un carrefour. Elle est déjà un carrefour international pour développer des politiques de

coopération avec le Surinam, le nord du Brésil, la Guyana, les deux départements

français d’Amérique (Guadeloupe, Martinique) et aussi les pays de la Caraïbe. Tous ces

éléments sont au cœur d’une problématique de positionnement géographique qui est

extrêmement intéressante.

Le contexte juridique et réglementaire

Ce deuxième point influence aussi aujourd’hui les problèmes de coopération régionale.

Ce cadre juridique est en train d’évoluer de façon favorable. Le code général des

collectivités territoriales indique, jusqu’à aujourd’hui, qu’aucune convention, de

quelque nature que ce soit, ne peut être passée entre une collectivité territoriale et un

Page 110: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 110

État étranger. Aujourd’hui, normalement, la Guyane n’a pas la possibilité d’engager

véritablement un accord international avec un État limitrophe qui pourrait être le

Surinam, ou l’État d’Amapa ou l’État de Para dans le nord du Brésil. Cette situation est

en train de commuer favorablement car, dans le projet de loi d’orientation, il sera tout à

fait possible aux DOM et aux TOM de signer des accords de coopération dans le cadre

des compétences qui sont les leurs, en l’occurrence la formation professionnelle, Ces

nouvelles dispositions de la loi d’orientation, en cours de discussion, vont permettre à

l’Union européenne d’adapter ses politiques en fonction de l’environnement

géographique des régions concernées. Ceci est un point important et ce nouvel article

199.2 du traité d’Amsterdam va permettre à l’Europe, de mettre en place des politiques

communautaires, adaptées à la réalité. Tous ces facteurs sont des conditions positives

pour permettre le développement de la coopération.

Autre atout également, la Guyane étant la seule région francophone et européenne

présente en Amérique du sud, elle pourrait être aussi un lien, dans le cadre des

politiques et des échanges qui pourraient se faire avec les pays de l’ACP (Afrique,

Caraïbes, Pacifique). Encore faudrait-il que des réalités concrètes au niveau régional

puissent inscrire ces nouvelles dimensions.

Les initiatives concrètes

Je voudrais rappeler aussi les initiatives propres à ces régions, prises pour faciliter le

cadre de cette coopération régionale décentralisée. Par exemple :

- la Région a signé des accords avec la région d’Amapa, pour développer des zones

d’intérêt commun sur l’agriculture, la pêche, la diffusion de la connaissance scientifique

et technique ;

- la Chambre de commerce et d’industrie de la Guyane a aussi engagé des missions pour

découvrir des entreprises du Surinam et voir comment fonctionnait l’économie du pays.

Ces initiatives ont été prises depuis plusieurs années, en dépit d’un contexte

réglementaire pas toujours favorable à cette dynamique de coopération. Les élus, les

socioprofessionnels ont essayé de tisser des liens, reconnus aujourd’hui comme

incontournables avec les pays de la zone.

Voilà les grands facteurs positifs de développement de la coopération régionale

décentralisée.

Page 111: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 111

Faciliter la mobilité

La Guyane est une société pluri-culturelle, pluriethnique et pluri-linguistique. Quand on

parle de coopération régionale en matière de formation professionnelle, il faut savoir

que la Guyane compte déjà un certain nombre de ressortissants des pays environnants

qui vivent et se forment en Guyane. D’ailleurs, des dispositions ont été prises

récemment, permettant aux jeunes ressortissants d’origine étrangère, à jour de leurs

papiers , de bénéficier de la mobilité en formation, notamment vers les Antilles et la

métropole. Ce qui est tout à fait nouveau, puisque jusqu’à une date encore récente, ils

étaient exclus de cette mobilité en raison de leur origine étrangère. Il en est de même

pour les stages AFPA. Aujourd’hui, en tant que directeur général de l’AFPA, je peux

vous dire que nous avons des stages de remise à niveau, de formation qualifiante où

nous accueillons de nombreux jeunes du Brésil et du Surinam. La Guyane contribue

déjà à apporter des solutions de formation professionnelle à un certain nombre de ces

ressortissants d’origine étrangère.

Ne serait-il pas normal que cette coopération, dans le cadre de la formation

professionnelle, ne se fasse pas à sens unique ? Il serait intéressant que le jeune

guyanais, en parcours de formation professionnelle, puisse bénéficier de l’offre de

formation professionnelle qui existe au Surinam, à la Guyana, au Brésil … Sinon nous

serions dans une logique à sens unique, où la Guyane seule ferait des efforts pour

former les ressortissants d’origine étrangère et où les jeunes guyanais vivant ou

travaillant en Guyane n’auraient pas la possibilité de se rendre dans ces pays

environnants où il existe aussi des formations intéressantes. Je vous parlerai tout à

l’heure de ce qui se fait de mieux dans ces pays, afin de pouvoir diffuser ces

informations auprès des publics. Et pourquoi ne pas déterminer de nouveaux choix de

formation professionnelle en mobilité vers ces pays.

Mieux connaître les pays limitrophes

Aujourd’hui, dans un certain nombre de métiers, nous avons aussi des ressortissants

d’origine étrangère qui sont très opérationnels en Guyane. On retrouve beaucoup de

gens d’origine brésilienne, salariés en Guyane et reconnus pour leurs compétences dans

la charpente et la menuiserie, pour les métiers du bâtiment ou la pêche. Ces personnes

étrangères ont des compétences professionnelles reconnues sur le marché de l’emploi

où elles sont recrutées pour ces qualités. La question que l’on doit se poser maintenant

Page 112: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 112

est de savoir comment sont formées ces personnes. Quels diplômes professionnels

possèdent-elles ? Quel est leur niveau de formation générale ? Leur expérience

professionnelle joue-t-elle un rôle dans leur formation ? La formation professionnelle

mise en œuvre en Guyane est-elle sanctionnée par un diplôme ? Voilà des questions

fondamentales. Il faut s’interroger sur ce lien entre les diplômes (délivrés dans la zone)

et les systèmes de validation des pays environnants.

La lisibilité de l’offre de formation des pays limitrophes est très faible. Aujourd’hui, à

l’heure des nouvelles technologies de l’information et de la communication, à l’heure

où l’on parle d’une explosion des communications, que sait-on des formations qui se

sont ouvertes au Brésil dans un certain nombre de filières ? Il me semble

qu’actuellement, nous ne savons pas suffisamment ce que ces pays peuvent nous offrir

comme opportunités de formation professionnelle pour permettre des choix de mobilité.

Cela nécessite un travail de longue haleine : aller sur place pour rencontrer des

responsables d’organisations, identifier les institutions politiques qui interviennent dans

le dispositif de la formation professionnelle, investir dans la connaissance du système

éducatif et de formation professionnelle de ces pays. Tant que ce type de travail ne sera

pas fait, je vois mal comment on pourrait favoriser la mobilité en formation, en

direction de ces pays.

La coopération régionale entre les 3 DFA (Départements français d’Amérique)

Grâce à une volonté forte de coopération entre les trois AFPA d’outre-mer

(Guadeloupe, Martinique et Guyane), l’offre de formation professionnelle pour adultes

est un peu plus lisible. Ainsi, nos diplômes homologués par le ministère du Travail sont

mieux connus pour les publics qui souhaitent bénéficier de mobilité en formation en

Guadeloupe, Martinique et Guyane. Là, les choses sont bien engagées. Il faudra certes

que l’on soit plus concrets dans les offres de formation en mobilité, qu’on pourrait

proposer au jeune guyanais qui irait se former en Guadeloupe ou en Martinique. Ces

échanges ont quand même déjà lieu. Cette coopération régionale entre ces 3 DFA, (je

mets un peu de côté la Réunion - distante de près de 20 h d’avion - bien que des

rencontres aient eu lieu lors des interrégionales en Martinique) tient compte de la

pertinence de l’espace géographique. Nous ne sommes pas très loin des Antilles, du

Surinam, du Brésil ou de la Guyana. Cette idée forte d’une interaction un peu plus

Page 113: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 113

structurée entre les 3 DFA me paraît être une bonne chose et nous avons engagé ce

partenariat depuis quelques mois.

Partager les opportunités

La question de la formation professionnelle demande aussi de favoriser l’insertion

professionnelle de la main-d’œuvre dans l’inter-région. Ce matin, certains intervenants

faisaient remarquer que l’offre de formation en Guyane ne peut pas suffire pour

répondre à l’ensemble de la demande. Donc, la formation en mobilité, par des accords

de coopération avec les pays limitrophes, doit offrir des opportunités beaucoup plus

grandes. Cela permettrait de développer des savoir-faire professionnels, de nature inter-

régionale. Sur des spécialisations comme l’agriculture, la sylviculture, la gestion de la

forêt, les métiers de l’environnement, je suis sûr qu’au Brésil, au Surinam, on trouve

des formations tout à fait intéressantes qui pourraient concerner la Guyane. Cela

nécessite que l’on aille sur le terrain, que l’on rencontre ceux qui ont mis en place ces

formations pour connaître la qualité des offres et des produits de formation dont nos

publics pourraient éventuellement bénéficier. La connaissance des systèmes éducatifs et

de formation des pays limitrophes me paraît être le levier de la formation mobilité dans

le cadre de la coopération régionale.

Un atout : les nouvelles technologies

Quelques mots pour finir sur les nouvelles technologies de l’information et de la

communication : il faudrait que ces techniques soient au service de l’information des

publics, pour qu’ils connaissent mieux l’éventail des formations disponibles en

Guadeloupe, en Martinique ou même à la Réunion, mais aussi du côté du Surinam, de la

Guyana ou du nord du Brésil. Dans ces pays limitrophes, des choses intéressantes se

font, parfois dans des secteurs d’activité très proches des préoccupations guyanaises. À

part la barrière linguistique, qu’il faudra surmonter, il faudrait coopérer un peu plus

avec ces pays et connaître ce qui se fait.

MARTINIQUE : M. Francis Riffaux, Directeur de l'AFPA

Mesdames et Messieurs les élus,

Messieurs les représentants de l’autorité militaire,

Mesdames, Messieurs, chers amis,

Page 114: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 114

La convention de Lomé IV

La coopération régionale décentralisée est une idée neuve qui a germé dès 1989, lors de

la conclusion de la convention de Lomé IV et qui a été réaffirmée par l’accord portant

modification de la quatrième convention de Lomé, signé à l’île Maurice le 4/11/1995.

En effet, dans son article 12 bis, l’accord précise : "Reconnaissant que les acteurs de la

coopération décentralisée peuvent apporter une contribution positive au développement

des États ACP, les parties contractantes conviennent d’intensifier leurs efforts visant à

encourager la participation des acteurs ACP et de la Communauté européenne aux

activités de la coopération. À cet effet, les ressources de la présente convention peuvent

être utilisées pour appuyer les activités d’actions décentralisées. Ces activités doivent

êtres conformes aux priorités, aux orientations et aux stratégies de développement des

États ACP". Dès lors, la problématique du développement économique durable se

trouve posée de façon complètement nouvelle, et singulièrement pour les départements

français d’outre-mer. En effet, ceux-ci, pour des raisons historiques connues, sont à la

fois géographiquement des pays assez peu en retard de développement et

institutionnellement des pays de l’Union européenne. Ce positionnement ambigü leur

donne malgré tout un avantage comparatif non négligeable.

La quatrième convention de Lomé a voulu promouvoir un type de développement

participatif, s’appuyant sur les collectivités locales et la société civile. Elle y a consacré

un chapitre particulier où il était recommandé de faire appel à un large éventail de

partenaires locaux : pouvoirs publics décentralisés, entreprises, syndicats, organisations

non gouvernementales, organismes d’enseignement et de formation, centres de

recherche. À l’occasion de la révision de 1995, il a été décidé de donner une impulsion

à cette forme de coopération. Tout en étant d’accord sur les objectifs, les pays de l’ACP

se sont inquiétés des possibilités accrues d’actions et d’un accès direct des acteurs de la

coopération décentralisée au financement de leur activité. Ces procédures pourraient

porter atteinte aux prérogatives de l’ordonnateur national et encourager des activités en

dehors du contrôle des autorités nationales. Un compromis a été trouvé qui, tout en

ménageant les compétences de ces autorités nationales, consacre sur la base de

dispositions plus détaillées qu’auparavant, une coopération combinant efforts et

ressources des États ACP et de l’Union européenne. La contribution du Fonds européen

Page 115: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 115

de développement, le FED, peut aller jusqu’à 300 000 écus par projet ou par

programme.

Quelques précisions sur…

…la convention de Lomé

La convention de Lomé organisait jusqu’ici la coopération de l’Union européenne et de

ses États membres avec les États ACP. Elle a été signée dans la capitale togolaise en

1975, puis révisée régulièrement, en 1979, 1984 et 1989. La 4ème convention de Lomé

a été révisée en 1995 à Maurice et a expiré l’année 2000. Elle a été remplacée par

l’accord de Cotonou.

…l’accord de Cotonou

Signé le 23 juin 2000 dans la capitale du Bénin, l’accord de Cotonou marque le

renouveau de la coopération entre l’Union européenne et les États d’Afrique, Caraïbes

et Pacifique (ACP). Conclu pour 20 ans, cet accord, qui sera révisé tous les 5 ans, réunit

les 77 États du groupe ACP et les 15 pays de l’Union européenne, soit une population

totale de plus d’un milliard de personnes.

L’accord de Cotonou a pour objectif de rétablir les équilibres macro-économiques, de

développer le secteur privé, d’améliorer les services sociaux, de favoriser l’intégration

régionale, de promouvoir l’égalité des chances hommes-femmes, de protéger

l’environnement et d’abolir de manière progressive et réciproque les entraves aux

échanges commerciaux.

Le programme de développement, mis au point dans le cadre de l’accord de Cotonou,

repose sur cinq piliers : dialogue politique, participation de la société civile, réduction

de la pauvreté, nouveau cadre de coopération économique et commerciale, réforme de

la coopération financière.

Pour en savoir plus :

http://info-europe.fr/europe.web/document.dir/fich.dir/

L’espace Caraïbe

Il convient tout d’abord de s’accorder sur la terminologie. La Caraïbe, dans son

acception la plus large, comporte un ensemble de 37 pays situés dans l’archipel des

Antilles et la bordure maritime du continent américain. Ce sont des pays assez peu

indépendants (2 territoires irlandais et 5 territoires britanniques, 3 départements français

Page 116: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 116

d’outre-mer, 2 territoires liés aux USA, Cuba) et 9 pays hispanophones indépendants

d’Amérique centrale et du sud. La mer des Caraïbes, c’est le marché commun

d’Amérique centrale, c’est le Mexique, la Colombie et le Venezuela. La grande majorité

de ces entités est regroupée au sein de la récente association des États de la Caraïbe, qui

date de 1995, et qui représente un espace économique potentiel de 220 millions

d’habitants, un niveau d’exportation de 178 milliards de dollars et un niveau

d’importation de 183 milliards de dollars. Cet espace génère de plus un PIB (produit

intérieur brut) de 694 milliards de dollars, soit plus du tiers de l’ensemble du sous-

continent latino américain. Les pays de la Caraïbe se distinguent donc des autres

régions de l’ACP. Leur avenir économique passe, sans doute, par une intégration

progressive au continent américain, équilibrée certes par le maintien de leurs solides

liens avec l’Europe.

Mais avant tout, ils ont à relever des défis multiples et complexes : la consolidation de

la démocratie, la transition politique en Haïti, l’arrimage de Cuba dans ce nouvel

environnement régional et international, la lutte contre la marginalisation face à

l’émergence des blocs régionaux, le développement durable, en particulier celui des

ressources humaines, la protection de l’environnement et la prévention des catastrophes

naturelles. Ils doivent lutter contre les menaces socio-économiques et culturelles,

notamment la drogue, et la gestion des pressions migratoires. Ils doivent aussi gérer la

transition économique et le passage des économies de la Caraïbe à l’ère des services et

de la technologie, le passage de la protection commerciale à l’économie ouverte et

compétitive, l’ajustement économique et l’atténuation de son impact social négatif.

L’une des stratégies possibles pour la Caraïbe dans ce contexte demeure la promotion

d’une forme réaliste et ouverte de coopération régionale qui fait l’objet de notre

réflexion aujourd’hui.

La formation des hommes et singulièrement la formation professionnelle reste un des

axes majeurs de cette coopération régionale que nous appelons de nos vœux. Quelle

place peuvent prendre les DOM dans cette perspective ? De quels moyens disposent-

ils ? Quels sont les axes méthodologiques à promouvoir ? Telles sont les questions

auxquelles nous aurons à répondre lors de cette table ronde. Nous allons tout d’abord

planter le décor en trois parties.

Page 117: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 117

Dans une première partie, nous allons dresser le cadre institutionnel de la coopération

décentralisée. Dans une deuxième partie, nous allons relater des exemples de

coopération régionale en matière de formation professionnelle réalisés à partir des

DOM et singulièrement le cas de la Martinique. Enfin dans une troisième partie, nous

tenterons de proposer quelques pistes méthodologiques et d’inventorier les moyens

actuels et souhaitables à mettre en place.

Les accords caribéens

Les tendances structurelles de l’économie mondiale et la stratégie de regroupement des

pays de la Caraïbe au cours des 20 dernières années ont déterminé, au niveau régional,

plusieurs types de réponses que reflètent les différents cercles concentriques

d’intégration régionale ou subrégionale. Les premiers efforts d’intégration régionale en

Caraïbe datent de la constitution de la Fédération des Antilles anglaises, dissoute en

1962. En 1965, fut constituée l’Association caribéenne de libre-échange avec

notamment Barbade, Trinidad et Tobago (CARIFTA - Caribbean free trade

association). Cette association connut un élargissement en 1968 avec l’entrée de la

Dominique, de Sainte-Lucie et de la Jamaïque. Le CARICOM (Caribbean community

and common market) lui succéda par le traité de Chaguaramas, en 1973. Aujourd’hui, le

CARICOM est constitué de 14 membres avec l’intégration du Surinam en 1995.

L’objectif poursuivi par le CARICOM, dont le Secrétariat général est établi à

Georgetown (Guyana), est de promouvoir l’intégration des économies de ses membres

par une coordination politique extérieure et une coopération fonctionnelle dans les

domaines socio-économiques, des ressources humaines et du développement durable

d’une façon générale. Le CARICOM a intégré en 1995 l’association des États de la

Caraïbe.

À l’intérieur de ces grands ensembles, il existe des sous-ensembles régionaux comme

l’OECS (Organisation des États de la Caraïbe orientale) et celui des départements

français d’outre-mer (DOM). Au titre de ces efforts d’intégration, il faut signaler aussi

la création de la banque caraïbéenne de développement (CDB - Caribbean development

bank), créée en 1969 à Bridgetown à la Barbade. Il convient enfin de mentionner, pour

être exhaustif, l’influence du Canada dans la zone, avec le CARIBCAN (Caribbean -

Canada trade agreement) et le CBIE (Canadian bureau for international education) qui

Page 118: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 118

irriguent par des fonds très importants les pays de la Caraïbe. Qu’en est-il des

départements d’outre-mer ?

Quelques précisions sur …

Le CARICOM (Communauté du bassin des Caraïbes) est actuellement composé de

14 membres : Antigua-et-Barbuda, les Bahamas, la Barbade, Belize, la Dominique, la

Grenade, la Guyane, Haïti (qui n’est pas encore tout à fait un membre), la Jamaïque,

Montserrat, Saint Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les Grenadines, Trinité-

et-Tobago et le Surinam. Elle est régie par le Traité de Chaguaramas (1973) et son

annexe sur le Marché commun, le Marché commun des Caraïbes n’étant qu’une des

composantes du CARICOM. Ainsi, les Bahamas sont membres de la Communauté,

sans pour autant faire partie du Marché commun. Tous les membres ont comme langue

commune l’anglais et partagent des traditions historiques et institutionnelles communes,

à l’exception du Surinam (qui s’est incorporé au CARICOM en février 1995 et dont la

langue et les institutions sont d’origine néerlandaise) et d’Haïti (dont la langue et les

institutions sont d’origine française et créole). Le CARICOM compte aussi plusieurs

pays observateurs (Aruba, les Bermudes, les îles Cayman, la Colombie, la République

dominicaine, le Mexique, les Antilles néerlandaises, Porto Rico et le Venezuela) et

membres associés (Anguilla, les îles vierges et Turks-et-Caicos). La population

représente 1,3 %, son territoire 2 % et son PIB 1,2 % du total de l’Amérique latine et

des Caraïbes. Une des caractéristiques de ce regroupement est qu’il est parmi les plus

grands en termes de participants, mais aussi parmi les plus petits en termes

économiques et géographiques. Le CARICOM bénéficie d’une longue tradition de

coopération en matière de politique étrangère, de santé, d’éducation et des questions

touchant le développement.

Pour en savoir plus :

http://unites.uqam.ca/gric/CARICOM.htm

Le CARIFORUM : il est intégré par les États caribéens bénéficiaires de la convention

de Lomé IV, les membres du CARICOM, Haïti et la République dominicaine (ces deux

derniers pays sont membres depuis 1989).

Page 119: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 119

Quelques précisions sur…

L’OECS (Organisation des États de la Caraïbe orientale) : organisation qui a pour

objectif de promouvoir la coopération, la solidarité et l’unité entre les membres afin de

permettre un développement semblable à celui des pays plus développés de la Caraïbe.

Les pays de l’OECS ont une monnaie commune, administrée par une banque centrale

commune, la Eastern caribbean central bank.

Pour en savoir plus :

http://unites.uqam.ca/gric/CARICOM.htm

Le cadre institutionnel de la coopération décentralisée

Dans la loi du 2 mars 1982, dénommée loi de décentralisation, le 2e alinéa de l’article

65 prévoit que le Conseil régional peut décider, avec autorisation du gouvernement,

d’organiser à des fins de concertation, dans le cadre de la coopération transfrontalière,

des contacts réguliers avec des collectivités décentralisées étrangères ayant une

frontière commune avec la région. Cette autorisation du gouvernement se manifeste au

niveau du préfet de région. Il faut souligner aussi que le texte précise que l’autorisation

gouvernementale n’est requise que pour des contacts ayant un caractère régulier. A

contrario, des relations d’espèce et limitées dans le temps n’imposent aucune

autorisation. L’article 9 de la loi du 31 décembre 1982 précise que les conseils

régionaux des DOM peuvent êtres saisis, pour avis, de tout projet d’accord relatif à la

coopération régionale en matière économique, sociale, technique ou scientifique, entre

la République et les États caraïbes voisins de la Guyane et les États de l’Océan indien.

La conclusion de ce descriptif juridique s’impose d’elle-même. Le principe de libre

administration des collectivités locales décentralisées est solidement ancré dans le droit

administratif, bien qu’il y ait un principe d’unicité de la représentation internationale

par le gouvernement central. Les conseils régionaux ont une marge de manœuvre non

négligeable en matière de coopération régionale. Le Conseil régional de la Martinique a

d’ailleurs constitué, en son sein, une commission spécifique, en coopération avec la

Caraïbe et les affaires européennes pour bien montrer tout l’intérêt qu’il portait à cette

coopération.

Page 120: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 120

Dans le cadre institutionnel français, les différents gouvernements qui se sont succédé

depuis la décentralisation ont de plus en plus encouragé des coopérations spécifiques

entre les DOM et leur environnement géographique : la Réunion dans l’Océan indien, la

Guyane en Amérique latine, la Guadeloupe et la Martinique dans la Caraïbe, en matière

culturelle, sportive, technique, de formation initiale et professionnelle, de santé…

Dans le cadre de ses priorités sectorielles pour la période 2000/2002, le service de

coopération et d’action culturelle de l’Ambassade de France auprès des États de

l’OECS a retenu par exemple la formation professionnelle et technique. Un projet

financé par le fonds de solidarité a été accepté par le ministère des Affaires étrangères et

va être engagé dans les prochains mois, pour être finalisé dès 2001. Il est prévu que ce

projet se réalise avec le concours des structures de formation des DOM, dans le cadre

d’accords de partenariat. Enfin, le projet de la loi d’orientation pour l’outre-mer, dans

son titre 2 de l’action internationale des ROM, stipule aux articles 13 et 17 que, dans les

domaines de compétence du département ou de la région, le Conseil général ou régional

de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de la Réunion peut, chacun en ce qui

le concerne, habiliter par délégation son président à négocier, dans le respect des

engagements internationaux de la République, des accords avec les territoires, les états

ou organismes régionaux des Caraïbes, de l’Amérique ou de l’Océan indien. Ils peuvent

également adresser au gouvernement des propositions, en vue de la conclusion

d’engagements internationaux concernant la coopération régionale en matière

économique, sociale, scientifique, culturelle.

Les financements de la coopération régionale

Les moyens techniques sont indispensables, mais il ne faut pas oublier les moyens

financiers. Les sources de financement de la coopération régionale décentralisée sont

multiples comme par exemple le FED (Fonds européen de développement). Deux cas

de figure peuvent se présenter : soit il s’agit d’un programme qui est un co-financement

d’initiatives locales, auquel cas il peut bénéficier de décisions simplifiées (article 290 de

Lomé), soit il s’agit d’un programme d’envergure, conçu et préparé par des acteurs

décentralisés, envisageant des programmes de grande ampleur, auquel cas c’est le

schéma classique des programmes FED qui s’applique avec avis favorable du FED

(article 288 et 289 de Lomé).

Page 121: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 121

Il existe aussi une coopération financière et technique pour les pays d’Amérique latine.

Les fonds peuvent notamment financer les coûts d’une structure de coordination des

actions. Un grand nombre de lignes budgétaires thématiques ou géographiques, dont la

ligne de promotion de coopération décentralisée et celle consacrée aux actions de

réhabilitation, sont accessibles aux acteurs non gouvernementaux.

Parmi les sources de financement nationales, il existe :

- le FIC (Fonds interministériel de coopération), géré pour les DFA, par le Préfet de

Guadeloupe, par délégation du Secrétariat d’État à l’outre-mer.

- le Fonds de solidarité prioritaire (FSP), géré par le ministère des Affaires étrangères,

- les sources de financement locales décentralisées,

- les conseils régionaux peuvent également cofinancer des actions, en partenariat avec

des acteurs non gouvernementaux. Par exemple dans le contrat de plan État-Région

2002/2006 pour la Martinique, 31 millions de francs ont été contractualisés pour des

programmes de coopération décentralisée.

Toutes ces sources de financement supposent une technicité particulière pour le

montage et le suivi des dossiers.

Quelques précisions sur …

Le Fonds européen de développement (FED) est le principal instrument financier de

la politique communautaire d’aide au développement. Il accorde des aides non

remboursables à des programmes de coopération destinés aux pays ACP, signataires de

l’accord de Cotonou. Le budget du FED est de 15,2 milliards d’euros pour 2000-2005

(100 milliards de francs). Ses champs d’application comprennent notamment le

développement social et culturel (enseignement et formation, habitat, santé).

Pour en savoir plus :

http://www.info-europe.fr/europe.web/document.dir/fich.dir/QR000927.htm

Page 122: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 122

Quelques précisions sur…

Le Fonds européen de développement régional (FEDER). Ses ressources servent

principalement à cofinancer :

- les investissements productifs permettant la création ou le maintien d’emplois ;

- les infrastructures ;

- les initiatives de développement local et les activités des petites et moyennes

entreprises.

Plus concrètement, de nombreux axes de développement sont concernés, dont la

formation.

Pour en savoir plus sur la programmation 2000-2005

(programmes financés, carte des régions éligibles aux objectifs 1 et 2, etc…) :

http://www.inforegio.cec.eu.int/wbpro/PRORD/prord_fr.htm

Le Fonds interministériel de coopération régionale (FIC)

Le Préfet de la Région Guadeloupe dispose d’un fonds de soutien intitulé Fonds

interministériel de coopération régionale (FIC) qu’il anime et coordonne avec les

Préfets de la Martinique et de la Guyane. Créé pour contribuer aux actions facilitant

l’insertion des départements français d’Amérique dans la région géographique des

Caraïbes et des Guyanes, le Fonds interministériel de coopération régional concourt aux

programmes visant à favoriser le développement économique, social et culturel des

pays du bassin caraïbe et des pays limitrophes.

Les secteurs de coopération tels que la santé, le secteur rural, le commerce, les énergies

renouvelables, la protection contre les catastrophes naturelles, le développement de la

francophonie, l’éducation, la formation professionnelle, la jeunesse et sports, la culture,

la conservation du patrimoine, le tourisme sont autant de thèmes susceptibles de faire

l’objet d’un financement du FIC.

La coordination des actions de coopération s’effectue en liaison avec le ministère des

Affaires étrangères, le ministère de la Coopération et le Secrétariat d’État à l’outre-mer.

Pour en savoir plus :

http://pro.wanadoo.fr/cooperation.caraibes/Accueil_Imagemap.htm

Page 123: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 123

Quelques précisions sur…

Le Fonds de solidarité prioritaire (FSP) est l’instrument du ministère des Affaires

étrangères. Issu de la réforme du dispositif de la coopération française, il remplace le

fonds d’aide et de coopération. Il a pour vocation de financer, par dons uniquement,

l’appui apporté par le ministère des Affaires étrangères aux pays de la zone de solidarité

prioritaire (ZSP) en matière de développement institutionnel, social, culturel et de

recherche. Le FSP est un instrument privilégié de partenariat avec les États, mais aussi

avec les autres bailleurs de fonds et la société civile. Par sa vocation institutionnelle, il

est susceptible d’intervenir sur l’ensemble des structures nationales d’un pays :

ministères, collectivités territoriales, établissements publics. Le FSP associe deux

niveaux de pilotage : le Conseil d’orientation stratégique (COS), instance d’orientation

et de contrôle impliquant la représentation nationale française, et le Comité des projets,

instance interministérielle d’examen des projets

Pour en savoir plus

http://www.France.diplomatie.fr/cooperation/ressourc_hum/zsp/zsp01.html

Des expériences concrètes de coopération

Des expériences concrètes ont été menées dans le domaine de la formation

professionnelle en matière de coopération. L’expérience de l’AFPA remonte à 1992.

Elle a commencé avec Trinidad et Tobago par l’accueil de 20 membres des ambassades

des pays du CARICOM, pour une formation en français langue étrangère (FLE). Cette

demande a été introduite par l’attaché culturel de l’Ambassade de France à Trinidad,

avec lequel l’AFPA entretenait de très bonnes relations. Cette formation, financée par le

FIC, s’est déroulée en 2 temps, en 1993 et 1994, avec succès. Elle intéressait deux

groupes de stagiaires : 9 en 93 et 10 en 94.

En 93, l ‘AFPA Martinique, en partenariat avec la Mission française de coopération à

Ste-Lucie et le Canadian training award project, met en place à Ste-Lucie un

perfectionnement d’artisan bijoutier pour 15 ressortissants de la Dominique. Cette

formation, conduite par un formateur martiniquais, s’est déroulée sur 9 jours, à la

satisfaction de tous.

Page 124: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 124

En même temps, l’AFPA Martinique a commencé à développer un champ de

coopération avec l’Ambassade de France à Cuba. Après signature d’un protocole

d’accord, en juillet 1991, plusieurs actions ont été menées de 1993 à 1996 :

- un stage de cuisine gastronomique international sur 3 sites (La Havane, Santiago de

Cuba, Paramaribo au Surinam), financé par le FIC durant l’année 1993 et qui concernait

36 stagiaires ;

- un stage de boulangerie, pâtisserie, viennoiserie pour 20 personnes sur 2 sites (la

Havane et Paramaribo) et 4 actions d’initiation à la formation de formateurs en 1994.

- En 1996, l’AFPA Martinique a accueilli 10 enseignants de l’Ecole des hautes études

de l’hôtellerie de Cuba, pour un perfectionnement ; ce stage a été cofinancé par le FIC

et le Conseil régional.

- Dès 1994, le bureau de coopération inter Caraïbe, installé à St Domingue, à l’initiative

du ministère français des Affaires étrangère, en accord avec l’Institut national de la

formation technique et professionnelle dominicaine, sollicite l’AFPA Martinique pour

réaliser un programme pluriannuel de coopération dans le cadre d’une formation aux

métiers du tourisme et de l’hôtellerie. Après une mission d’évaluation, deux

propositions ont été faites, l’une portant sur une formation en cuisine gastronomique

française, l’autre portant sur une formation en cuisine créole. Seule la formation en

gastronomie a été réalisée sur 2 sites (Santo Domingo et Puerto Plata), en 1995. La

deuxième action n’a pas pu être réalisée pour des raisons administratives.

- La dernière action menée par l’AFPA Martinique est une action de formation à la

maintenance biomédicale pour 10 stagiaires, dont 5 ressortissants de l’OECS. Elle s’est

déroulée sur 18 mois au centre François Trianon, en partenariat avec le Centre

hospitalier universitaire de Fort-de-France et l’Hôpital de Trinité d’une part, et la

paramédical es organisation basée à Barbade d’autre part. Cette opération qui a eu lieu

dans d’excellentes conditions, avec des stagiaires très motivés, a été financée par la

Mission de coopération et d’action culturelle pour les petites Antilles, de l’Ambassade

de France à Sainte-Lucie.

S’agissant d’un projet de coopération, l’AFPA Martinique a établi un programme sur 3

ans, qu’elle compte proposer à la Mission de coopération de Sainte-Lucie, portant

notamment sur la petite enfance et la formation de techniciens médicaux. L’AFPA

Page 125: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 125

Martinique a demandé et obtenu le statut d’organisation non gouvernementale. La

confirmation de ce statut passe par la réalisation d’expériences concrètes sur le terrain.

Repères méthodologiques

Ces expériences de quelques années nous permettent de tirer quelques enseignements.

Tout d’abord la méthodologie.

Il me paraît indispensable de nouer des relations avec les principaux acteurs de terrain,

comme les ambassades de France dans la zone et les représentants des organisations

socioprofessionnelles des pays concernés. Ceci, afin de développer des contacts

humains solides et durables. Le partenariat est le maître mot de la coopération

décentralisée.

Les équipes d’intervention doivent être vraiment motivées et compétentes. L’erreur

dans ce domaine peut être fatale. Il faut être capable de résoudre des problèmes

multiples et complexes : des problèmes de visas, d’hébergement, d’animation, de

linguistique et des problèmes liés à la différence de niveau de vie, singulièrement pour

les ressortissants de la Caraïbe sud, lorsque les stagiaires sont accueillis dans nos

centres.

Pour l’action menée à l’étranger, les intervenants doivent faire preuve de compétence

mais, aussi d’adaptation et de diplomatie. Le problème du suivi est important, les

équipes sur place devant être soutenues sur le plan logistique. Le cadre de leurs

interventions doit être très précis et validé par tous les partenaires. Les actions de

coopération régionale doivent être sous-tendues par une volonté politique forte de la

part des conseils régionaux, afin de mieux légitimer les acteurs et les associations sur le

terrain. Sans concertation, rien n’est possible.

GUADELOUPE : M. Nicolas Kezie, Université Antilles-Guyane, Chargé des relations

université/entreprises

Il est difficile d’intervenir seul au nom de l’ensemble de la région de la Guadeloupe. Il

est vrai que le programme régional est immense en Guadeloupe ; au moins six actions

importantes sont déclinées dans le programme régional de la Guadeloupe et en dehors

de ces actions, la plupart des instances en Guadeloupe font de la coopération, chacune

isolément. L’Education nationale, l’université, les centres de formations privés et

publics font de la coopération… Il est donc difficile de parler au nom de la Guadeloupe

Page 126: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 126

puisque chacun organise sa coopération. Je vais vous présenter quelques expériences

simples que nous avons pu mettre en œuvre au niveau de l’université. Il est vrai que

parfois, nous avons fait des ébauches de coopération, mais il s’agissait plutôt

d’échanges de stagiaires, par exemple dans le domaine de la formation touristique.

Nous l’avons fait aussi, au niveau de la formation continue de l’université, pour des

stagiaires qui se perfectionnaient au commerce extérieur.

17 universités coopèrent

Il y a un dossier sur lequel nous avons travaillé de façon concrète, où nous pouvons là

parler de coopération. C’était dans le cadre d’un réseau international d’ingénierie de la

formation, appliquée au développement local. Les Antilles et la Guyane étaient

impliquées dans ces réseaux qui touchent trois continents : la Caraïbe, l’Europe et

l’Amérique centrale et latine. Il s’agissait d’un réseau de près de 11 pays qui incluait 17

universités. C’était un réseau ambitieux, qui a obtenu un financement du programme

européen ALFA (qui finance les programmes de la formation supérieure des pays

d’Amérique Latine et d’Europe). Nous avons voulu mettre en place un système de

formation interrégional sur ces 17 universités. Il est vrai que les difficultés étaient

immenses. Dans un premier temps, un travail d’approche et de connaissance des

partenaires a été réalisé. Il nous a fallu pas moins de 4 rencontres sur 3 continents

différents pour commencer à parler le même langage. A la cinquième rencontre, nous

avons pu mettre en place le programme d’un mastère d’ingénierie de la formation pour

le développement local.

Les atouts et les handicaps de la coopération

Je voulais faire ressortir les atouts et les handicaps que nous avons remarqués de notre

côté, au niveau de l’Université de la Guyane et de la Guadeloupe.

Le premier atout est financier. Les financements de l’Europe, des régions, du FIC et

l’aide particulière de l’ANT pour le déplacement des stagiaires nous ont beaucoup aidé.

Le deuxième atout est le réseau. Les réseaux que nous avons développés, notamment au

niveau de la diplomatie française, de l’université et des acteurs de l’enseignement du

français à l’étranger, sont importants. A l’université, ce sont les enseignants chercheurs

qui président les jurys des baccalauréats français dans les autres pays du monde qui se

sont impliqués.

Page 127: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 127

Le troisième atout, ce sont les postes d’expansion économique sur lesquels nous nous

sommes largement appuyés pour faciliter l’accueil de nos stagiaires.

Malheureusement, les handicaps sont plus nombreux que les atouts. Le handicap de la

langue, aussi curieux que cela puisse paraître, est important. À Sainte-Lucie, à la

Dominique, nous avons compris que la langue soutenait beaucoup le schéma mental.

On ne parlait pas de la même chose. Quand on passe aux choses concrètes, nos

interlocuteurs ont des demandes assez précises, auxquelles nous n’arrivons pas toujours

à répondre parce que nous n’avons pas les mêmes attributions en tant qu’organisme de

formation, par exemple, quand il s’agit de demandes de visas ou de demandes

administratives qui ne relèvent pas de notre compétence.

Le niveau de développement des partenaires n’est pas le même et l’on n’a pas toujours

les mêmes intérêts quand il s’agit de coopération. Certains, derrière la coopération, ont

d’autres objectifs en tête. Ils veulent d’abord rattraper le niveau de développement,

avant de parler de coopération. Pour le financement de l’ALFA, la loi européenne dit

qu’il doit être géré par une université sud américaine. Dans notre cas, c’était une

université salvadorienne ou costaricaine. Quand il s’est agi de vérifier l’état des

comptes, puisque nous sommes tous membres du même réseau, nous avons rencontré

quelques difficultés.

Même si la diplomatie française joue un rôle positif, elle peut être un handicap dans

certains cas. Il nous est arrivé d’être en désaccord complet avec la diplomatie française

dans certaines régions, que ce soit en République dominicaine ou ailleurs. On ne parle

pas toujours le même langage dans les instances françaises et sur le terrain, surtout à

l’étranger.

Le quatrième handicap, c’est parfois la législation sociale de ces pays-là. Il nous est

arrivé d’envoyer des stagiaires à Dominique, Ste-Lucie ou autres, espérant secrètement

que cela leur ouvrirait aussi le marché de l’emploi local. Mais cela ne s’est pas réalisé.

Dernier handicap, c’est le problème de l’hébergement lorsque les stagiaires viennent

chez nous. On a introduit une demande, auprès du Conseil régional, pour construire une

cité qui puisse accueillir des stagiaires en nombre. Pour l’instant, nous ne disposons pas

de locaux pour accueillir ceux qui viennent en stage, dans le cadre d’échanges et de

coopération.

Page 128: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 128

Malgré tous ces handicaps, on peut dire qu’il existe une forte demande, car les rapports

culturels sont importants. Les intéressés nous aident beaucoup et mettent de grands

espoirs dans cette coopération. Mais, à notre humble avis, il faut commencer par des

projets concrets avant de "faire de la philosophie". C’est sur le terrain qu’on perçoit les

problèmes réels. Faire de la coopération, c’est commencer par des projets ; ainsi, on

arrive à banaliser au fur et à mesure les difficultés. On apprend beaucoup de choses des

deux côtés.

Je vous remercie.

REUNION : M. Fabrice Payet, Directeur de l'AFPA

Je consacrerai mes propos d’une part, aux enjeux stratégiques de la Réunion en matière

de coopération régionale et d’autre part, au champ géographique et enfin, à quelques

actions.

Les enjeux stratégiques

Située à 10 000 km de l’Europe continentale, mais seulement à 1 480 km de l’île

Maurice et 800 km de Madagascar, la Réunion compte actuellement plus de 720 000

habitants sur un territoire de 2 512 km2. La population et l’économie réunionnaises se

caractérisent par trois points : une croissance démographique forte, une prépondérance

du secteur tertiaire et un PIB par habitant qui n’atteint que 50 % de celui de l’Europe ou

de la métropole.

Les cinq handicaps les plus flagrants de la Réunion sont :

- une forte pression démographique et un contexte social fragile,

- le développement d’un chômage important,

- des contraintes naturelles fortes, compte tenu de la démographie,

- une économie fragile et mal équilibrée,

- et enfin, des insuffisances en matière d’équipement du fait du retard initial dans le

développement des infrastructures et de l’explosion démographique. Les besoins en

équipements restent considérables, notamment en matière de routes, d’équipements

éducatifs et socioculturels, sanitaires et sociaux.

Malgré ces handicaps, la Réunion possède un certain nombre d’atouts :

- sa population jeune, facteur structurel de croissance,

Page 129: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 129

- un dynamisme économique, puisque l’économie réunionnaise continue à afficher un

taux de croissance supérieur à la moyenne nationale et européenne (2 300 emplois nets

sont créés en moyenne par an depuis 1992),

- des services et des infrastructures de qualité,

- et surtout en matière de coopération régionale, une situation géopolitique unique.

Un champ géographique privilégié

La Réunion se situe dans l’Océan indien, en pleine mutation démographique, politique

et économique. Par conséquent, la Réunion a vocation à jouer tout à la fois un rôle de

plate-forme logistique et de pôle technologique. Ces atouts et ces handicaps nous ont

amenés à mettre en place une stratégie de développement sur l’ouverture. Seule région

française et européenne située dans l’Océan indien, la Réunion inscrit résolument

l’ouverture internationale et son intégration régionale au cœur de son développement.

C’est pourquoi, dans le cadre des diverses programmations, l’Union européenne, l’État,

la région et le département ambitionnent de développer une politique active de

coopération régionale, articulée autour de deux objectifs globaux :

- favoriser l’intégration harmonieuse de la Réunion dans son environnement régional,

- faire de la coopération régionale, un atout majeur au service du co-développement

durable et solidaire entre la Réunion et les pays de la zone Océan indien, Afrique

australe.

Complémentarité et réciprocité

Cette politique s’appuie sur de grands principes d’action : la complémentarité et la

réciprocité des actions de développement entre la Réunion et les pays de la zone.

Les partenaires de la Réunion, que ce soit l’État, la région ou le département, ont

développé des actions de formation de mobilité au service de la coopération régionale.

Ces actions visent surtout à ouvrir des perspectives nouvelles dans les principaux

secteurs d’activité qui peuvent faire l’objet d‘une coopération régionale. Elles

bénéficient autant à la Réunion qu’aux systèmes éducatifs des pays de la zone de

l’Océan indien, qui sont très demandeurs d’échanges avec notre île, dans de nombreux

domaines. Plusieurs facteurs se conjuguent actuellement pour que s’opère le passage

d’une organisation fondée sur une multiplication d’actions isolées à une logique de

Page 130: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 130

projets et de programmes de mieux en mieux définis et maîtrisés, utiles à chacun des

partenaires.

Il s’agit essentiellement pour les dispositifs réunionnais de l’apprentissage des langues

étrangères, de l’ouverture à l’international des établissements scolaires, des universités

et des organismes de formation professionnelle, de l’intégration des réalités régionales

aux formations dispensées à la Réunion.

Pour les dispositifs étrangers, l’apprentissage du français pour les non-francophones,

l’adaptation des systèmes de formation aux évolutions sociales, économiques et

culturelles sont en cours pour l’intérêt stratégique de la Réunion. Il s’agit de développer

une francophonie ouverte et dynamique, de positionner la Réunion comme pôle de

réseau et de réussir son intégration dans une zone géographique, économique et

culturelle progressivement élargie.

Afin de conforter cette dynamique d’échanges internationaux, plusieurs axes peuvent

être proposés. Accueillant de plus en plus d’étudiants étrangers à la Réunion, il nous

faudrait mobiliser les bourses de la coopération française au profit des étudiants inscrits

à notre université. Il faudrait renforcer les programmes de recherche ayant un intérêt

régional, établir un partenariat entre la Réunion et les différents pays de la zone, mais

aussi avec les universités des établissements métropolitains et européens. Il serait

également nécessaire de développer chez les acteurs de la formation professionnelle,

une culture de la mobilité dans le cadre de la coopération régionale et, pour cela,

intégrer des périodes de mobilité dans tous les cursus de formation, ouvrir enfin nos

organismes de formation à des ressortissants issus des autres pays.

Pour terminer mon propos, je voudrais citer deux exemples :

- L’AFPA Réunion a contribué à transférer du matériel sur le territoire de Madagascar ;

des opportunités nous permettent d’espérer pouvoir enclencher un processus de

formation de formateurs.

- Un deuxième type d’action à Madagascar a permis à de jeunes réunionnais de pouvoir

vivre, pendant 6 mois, dans des écoles primaires et des collèges malgaches, afin de

mettre en pratique l’enseignement du français langue étrangère.

Page 131: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 131

DébatsDébatsDébatsDébatsGUADELOUPE : M Hubert Salcède, Directeur de la formation professionnelle du

Conseil régional

Question à l’attention de M. Margos de l’Union européenne : Quel type de coopération

peuvent développer les régions d’outre-mer, compte tenu de leur environnement ?

Quels types de financements peut-on envisager dans le cadre du prochain DOCUP ?

Les financements européens

METROPOLE : M. Aris Margos, Commission européenne

La question est en fait : que peut faire la Commission européenne ?

La commission européenne intervient principalement pour appuyer financièrement des

priorités qui sont inscrites dans les DOCUP. Les DOCUP sont négociés avec la

Commission, pour trouver des adéquations entre vos priorités et celles de la

Commission. Nous venons de terminer les négociations pour l’ensemble des DOCUP

des départements d’outre-mer. Ces négociations ont porté sur vos priorités comme la

lutte contre le chômage, l’égalité des chances, la lutte contre les exclusions et la

stratégie européenne pour l’emploi de la Commission. Voilà pour le fonds social. Cette

approche est identique, indépendamment des thèmes dont nous avons discutés et

s’applique également à la coopération régionale. Mais ce que je souhaiterais expliciter

sur l’acception du terme "coopération régionale" serait dans trois dimensions

différentes.

La première c’est la mobilité. La mobilité est une coopération régionale, qu’elle soit

faite avec les régions de la métropole ou d’autres.

La deuxième, c’est la coopération régionale dans la zone, comme on vient de

l’expliquer.

Et le troisième type de coopération, c’est la coopération régionale avec les autres

régions de l’Europe, dont personne n’a parlé aujourd’hui.

On a tous compris qu’il existait des difficultés législatives ou financières pour

développer certaines actions. Mais le développement avec d’autres régions européennes

ne pose pas de problèmes particuliers au point de vue législatif, au contraire. Il faut se

Page 132: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 132

rendre compte que, pour ces régions également, des demandes de coopération régionale

existent. Il faudrait lancer une réflexion qui va un peu plus loin que celle que nous

avons eue jusqu’à présent sur : comment aborder cette coopération, avec quelles

structures, c’est-à-dire qui fait quoi et comment. La vraie question est qu’on ne peut pas

faire de coopération régionale si on ne maîtrise pas un minimum la langue des pays

avec lesquels on veut coopérer. De ce point de vue, je crois qu’il y a très peu de choses

qui se font dans vos régions. Un effort particulier doit être conduit au niveau des

langues et là, les fonds communautaires, dans le cadre du DOCUP, peuvent intervenir

sans aucun problème.

Je voudrais citer deux points du discours de Mme Berthelot de ce matin. Elle souhaitait

que cette discussion débouche sur un maximum de concrétisation, et un deuxième point

serait de passer des intentions à la réalisation. Ces deux acceptions s’appliquent

particulièrement à la coopération régionale, parce que c’est un thème que l’on entend

depuis des années. La coopération régionale a toujours été une priorité. Cela fait dix ans

que je travaille sur les fonds européens ; cela fait dix ans que j’entends parler de cette

priorité et cela fait dix ans que l’on voit des choses tout juste émerger. De ce point de

vue, il faudrait essayer de passer de l’intention aux réalisations. Je sais que ce n’est pas

facile à mettre en œuvre, mais il faut franchir le pas. M. Nicolas disait qu’il fallait aller

voir au Brésil ce qui se faisait. Oui, mais il ne suffit pas de le dire, il faut y aller, sinon il

n’y aura pas de coopération régionale.

Sur la question de l’éligibilité des dépenses dans le cadre du financement social, le

Fonds social européen peut intervenir pour financer la formation de personnes qui sont

résidentes et habitent dans les départements d’outre-mer. Dans ce cas, on peut financer

une action de formation où qu’elle soit, sur des secteurs dans lesquels il n’y a pas la

compétence dans la région et pour laquelle un résultat, financier ou autre, peut être mis

en valeur. Ce type d’expérience est possible, mais ne doit pas être généralisé. Il ne

s’agit pas d’envoyer la moitié des jeunes guyanais se former au Surinam. On peut faire

des expériences de ce type, on l’a déjà fait. Parfois, cela coûte moins cher d’envoyer des

jeunes juste à côté qu’au Portugal ou en Espagne. Il faut cependant, utiliser ce procédé

avec parcimonie.

Ce qui n’est pas éligible, c’est le financement d’actions de formation pour des

personnes qui viennent de l’extérieur du territoire communautaire. Dans votre cas, si les

Page 133: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 133

jeunes de Sainte-Lucie devaient venir en Martinique pour être formés, cette formation

ne serait pas éligible, mais le contraire pourrait être possible, sous les conditions

précitées.

Les financements européens passent par des documents de programmation qui ont été

négociés. Après, le principe de subsidiarité veut que ce soient les régions qui mettent en

œuvre ces actions au niveau de leur territoire.

MARTINIQUE : M. Raymond Marie, CESR (Conseil économique et social régional)

Je voudrais ajouter aux propos de M. Nicolas, qui a évoqué la formation professionnelle

et la coopération, que nous sommes associés sur deux sujets : la formation

professionnelle et le développement local. Je voudrais dire ce que peut apporter la

coopération en matière de formation professionnelle, pour le bien du développement

local. Nous avons déjà réalisé en Martinique, plusieurs autres actions, dont les actions

de prestige à Barbade qui ont été très appréciées. Il faut identifier ce dont nous avons

besoin en matière de développement local et que nous pouvons aller puiser dans les

autres pays. On a parlé de ce qui se fait au Brésil, notamment dans le bois mais, chez

nous, nous avons toutes ces formes de métiers dans tous les départements. Mais nous

avons un besoin auquel nous pouvons répondre, c’est la question linguistique. Quand

j’ai créé l’AFPA, je me rappelle du propriétaire, aujourd’hui défunt, du plus grand hôtel

de la Martinique, qui me disait : Ce que je veux, c’est que vous appreniez à vos

stagiaires à parler l’anglais ; le reste, je m’en occupe. Je pensais que ce n’était pas tout à

fait la vocation de l’AFPA, quoique nous soyons le premier organisme, à l’époque, à

avoir mis en place un laboratoire de langues. Mais cela n’est pas suffisant, il faut

pouvoir mettre les personnes en immersion et qu’elles puissent, en dehors de ce qu’elles

apprennent à l’école, comprendre comment parle un américain. Il faut nous pencher sur

la coopération en matière linguistique et sur ce que ces pays pourront nous apporter. Le

corollaire est qu’il faut que les hommes d’État nous aident à régler le problème des

visas. Quand nous avons un groupe à envoyer, nous sommes confrontés à une telle

quantité de barrières, que nous sommes obligés quelquefois d’abandonner le projet. Au-

delà des problèmes de visas, il y a aussi celui du logement. Quand les stagiaires nous

font un compte-rendu, nous sommes presque découragés de faire une nouvelle

formation.

Page 134: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 134

METROPOLE : Mme George Pau-Langevin, Directrice générale de l'ANT

À l’ANT, nous essayons, conformément aux orientations dégagées par chacune de nos

régions, de faire des projets tant en coopération avec l’Europe que dans la zone. M.

Margos a raison de dire que faire des projets sur des secteurs innovants comme la

coopération régionale sur des pays étrangers, cela prend un temps infini et beaucoup

d’énergie. Mais nous avons pu, à l’initiative de différentes régions, avec leur concours,

monter des projets intéressants et qui sont de nature à plaire aux jeunes. Aujourd’hui, ils

ne souhaitent pas seulement partir en métropole, que tout le monde connaît au moins de

manière théorique, mais ils souhaitent aussi faire des choses nouvelles. Avec la région

Martinique, nous avons envoyé des jeunes étudier l’hôtellerie en Grande-Bretagne. Ils

ont travaillé sur le terrain et ont été fort contents. Avec la région Guyane, nous avons

eu un peu plus de mal, car nous avons envoyé des pêcheurs au Portugal, et travailler au

Portugal est plus pénible, il y fait froid. Ceux qui ont réussi à aller jusqu’au bout ont eu

le sentiment d’avoir fait une chose originale et en étaient satisfaits. Il est plus facile de

monter des projets avec l’Europe, malgré les difficultés de langues, parce qu’il y a des

structures, des programmes déjà prévus. Avec la Chambre de commerce de la Réunion,

nous envoyons très régulièrement des jeunes en Grande-Bretagne, en Allemagne, en

Autriche. Quand on lance des projets ailleurs, on innove et il faut parfois tout inventer.

Sur l’impulsion de la Réunion, nous avons réalisé un projet où des jeunes sont partis

enseigner ou apprendre à enseigner le français langue étrangère à Madagascar. Cela

demande que tous se mettent autour de la table et que la Région accepte de prendre le

risque de tenter quelque chose de nouveau. Il faut que les jeunes sachent que, ce qu’ils

vont trouver à l’arrivée, ne sera parfois pas aussi élaboré que ce dont ils ont l’habitude.

Il faut aussi que les uns et les autres réfléchissent aux difficultés et se rendent sur place.

Nous avons mis en place des petits groupes de travail avec l’AFPA et la Chambre de

commerce à la Réunion pour savoir comment on pourrait expérimenter de nouvelles

destinations. Sur la Guyane, on pourrait faire ensemble l’inventaire des difficultés et

voir comment démarrer une expérience. On n’arrivera pas à élaborer de grandes

théories mais, peu à peu, on peut réaliser des expériences, en faire le bilan et avancer

un peu plus loin. J’ai grand espoir que nous arrivions à faire un peu plus dans la

prochaine période, parce qu’outre les moyens et les orientations des régions, on va

Page 135: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 135

disposer de crédits supplémentaires, si la loi d’orientation sur l’outre-mer est votée.

Aujourd’hui, nous avons tous les éléments pour aller de l’avant et mieux développer la

coopération régionale. En tout cas, l’ANT joue son rôle d’opérateur et elle est prête à

aller beaucoup plus loin que ce nous faisons déjà actuellement.

MARTINIQUE : un représentant de la CCI

Comment se fait-il que les organismes vont seuls en mission à l’étranger ? On vient de

voir que la coopération régionale comporte de nombreuses difficultés : les langues, la

différence de culture… Mais on a appris que chacun y va seul. La Guadeloupe a

reconnu qu’il y avait de multiples opérateurs dispersés et que parfois, quand elle va en

mission, elle sait que l’AFPA vient de passer. Je pense qu’il est intéressant qu’avant ces

opérations, on puisse lancer une sorte d’appel à candidatures internes à une région pour

cumuler les compétences sur un objectif et mettre en commun les analyses pour la

préparation de l’action. Des structures transversales comme l’ANT, rencontrent

facilement toutes sortes d’opérateurs. Mais à la Chambre de commerce de la

Martinique, nous n’avons pas souvent, avant les opérations, des informations sur ce qui

va se passer, alors que l’on pourrait apporter des éclairages, diffuser des comptes rendus

de visites des missions antérieures pour aider à la préparation.

Coopération ou échanges ?

GUYANE : M. Paulin Bruné, Vice-Président du Conseil régional

J’interviens sur le décalage évident entre notre vocabulaire et la réalité. Peut-on parler

de coopération régionale ? Personnellement je ne le pense pas. La coopération est un

terme qui concerne des États souverains ayant des intérêts communs, des divergences et

parfois des intérêts qui relèvent de la raison d’État. La coopération est de cet ordre. La

coopération décentralisée est une chose, mais comment parler de coopération

décentralisée sans une vision de l’autorité supérieure. Par conséquent, il ne faut pas

viser trop haut, ni utiliser des termes à la mode quand on n’en a pas les moyens. La

coopération régionale n’est pas une idée nouvelle. En 1957, en Guyane, des jeunes sont

allés se former à Porto Rico. Ils sont de bons spécialistes parce qu’ils ont appris un

métier dans une culture professionnelle proche de la nôtre. Par conséquent, je préfère

que l’on parle davantage de politique d’échanges. Le terme de coopération est tellement

Page 136: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 136

décalé par rapport à la réalité, que je voudrais rebondir sur un cas concret. Je vois que le

représentant de l’Europe a une étiquette marquée "métropole", ce qui est d’une très

grande ambiguïté puisque l’on est soit Europe, soit métropole. Mais Mme Pau-Langevin

a parlé de l’expérience malheureuse des guyanais au Portugal. C’est exactement

l’exemple classique d’un décalage entre les politiques. Quand on a décidé que nos

jeunes devraient se former avant d’avoir des bateaux, les interlocuteurs locaux ont

proposé d’organiser le stage au Brésil ou à la Guyana qui demeurent des pays où on

fournit de bons pêcheurs. Mais il y avait un obstacle : les stages sont financés par la

Communauté européenne ; il faut que la formation se déroule en Europe. On a choisi le

pays qui semblait le plus adapté, mais les eaux du Portugal sont glacées. Et voilà une

raison de l’échec de cette politique de formation des pêcheurs, non pas parce qu’ils sont

mauvais ou que le Portugal n’est pas un beau pays, mais parce que les jeunes n’étaient

pas disposés à travailler dans de telles conditions. Cet exemple montre le décalage entre

une politique européenne pas forcément compatible avec une volonté franco-française

et une politique étatique française, pas forcément compatible avec une politique d’une

région d’outre-mer. Il est utile que nous restions dans des mots plus précis, à savoir aux

relations de bon voisinage ou encore d’échanges. Au cours des débats, nous avons

montré les difficultés réelles qui sont liées à la nature des choses. Comment peut-on être

souverain à la place d’un État souverain ?

Dans la deuxième partie des exposés, on a montré concrètement ce que régions,

chambres des métiers, universités pouvaient faire, sans s’inscrire dans le cadre d’une

coopération, parce que cela supposerait l’autorisation de l’État souverain. Ce qui montre

que lorsque l’on veut, dans un cadre précis, on peut réussir. Le cadre même de cette

université montre la tendance que nous avons trop souvent à vouloir limiter les

politiques à un cadre institutionnel. L’Université sur la formation professionnelle aurait

été très bien, si elle avait également associé les acteurs concrets de l’échange

interrégional. L’échange interrégional n’est pas une chose nouvelle, le BUMIDOM

(Bureau des migrations des DOM, auquel a succédé l’ANT) a été créé dans les années

60 et il est l’exemple le plus réussi d’une coopération entre un pays vide qui pouvait

recevoir des jeunes stagiaires et d’autres départements qui avaient une montée en

puissance de jeunes qui cherchaient une formation. Pour parler de régions plus

lointaines, on a accueilli à Marcouria, en Guyane, des jeunes qui venaient de

Page 137: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 137

Madagascar ou de la Réunion dans une période difficile. Et ils se sont installés ici, à

notre grand bonheur. L’échange interrégional est une réalité qui appartient à certaines

institutions qui ont la volonté de le réaliser, mais en aucun cas il ne doit être prisonnier

des institutions. Elles n’ont pas leur place quand elles veulent se substituer à l’État

souverain, du moins jusqu’à ce qu’il y ait d’autres accords de Matignon pour la Guyane.

Mais nous n’en sommes pas encore là.

MARTINIQUE : M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional

Je n’ose plus dire coopération puisque ce terme devrait être réservé à des institutions

qui en ont le droit. Néanmoins, coopérer, travailler ensemble, selon l’étymologie, est

progressivement devenu une réalité entre des États reconnus et souverains.

Mais, certaines expériences n’ont pas toujours pris la forme d’échanges, car certains

d’entre nous venaient avec un esprit de pays du nord et regardaient leurs voisins comme

des pays du sud, en se demandant ce qu’ils pouvaient leur apporter. Nous avons eu à

discuter de ces questions-là. Il ne faut pas que nous regardions uniquement ce que l’on

peut apporter à ces pays, mais également ce qu’ils peuvent nous apporter. Ces échanges

doivent être fondés sur une base de respect mutuel. Nous parlerons des expériences qui

ont été faites. Comme M. Margos le souhaite, il faut faire plutôt que parler. Il y a des

choses qui se font. Nous avons mené des expériences qui ont consisté à demander à de

jeunes martiniquais de formation supérieure, d’aller faire leur première expérience

professionnelle en Haïti. L’ANT a été opérateur pour encadrer ce projet. De même,

certains de nos jeunes sont partis apprendre l’anglais et l’opportunité financière les a

conduits dans le sud de l’Angleterre. Ces dispositifs nous donnent accès à des fonds

européens.

Coopérer pour mieux cohabiter

Mais il y a d’autres expériences que nous avons entreprises sous notre propre

responsabilité, puisque les fonds européens ne nous permettaient pas de le faire. S’il

existe une volonté politique, on peut le faire à partir de nos fonds propres, parce que

développer des rapports de bon voisinage est essentiel. Il est important d’avoir les pieds

sur terre, mais aussi sur mer, parce que nous sommes dans des îles et que nos marins

pêcheurs ont des problèmes de voisinage avec ceux de Ste-Lucie ou de la Dominique.

Nous avons eu l’idée de développer nos relations de voisinage en coopérant dans le

Page 138: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 138

domaine de la formation avec un État déjà indépendant. Nous ne le sommes pas encore,

mais nos marins pêcheurs n’ont pas attendu que l’on soit indépendant pour se disputer

les zones de pêche ou pour parfois s’entendre. La région les a accompagnés dans des

actions de formation pour apprendre des techniques de pêche et nous sommes allés

chercher les formateurs dans le Pacifique. Il y a eu des transferts de technologies et de

savoir-faire au niveau de la pêche. Ce transfert a bénéficié aux pêcheurs martiniquais et

nous avons proposé à ceux de Ste-Lucie ou de la Dominique d’acquérir cette même

formation. Cela a joué un rôle considérable dans le rapprochement des peuples, dans

leur acceptation l’un de l’autre. La formation a permis d’acquérir des connaissances,

mais aussi de favoriser les relations. Somme toute, c’est la même finalité pour la

coopération entre les États. Et puis à Cuba, M. Riffaux a fait état des échanges qui ont

eu lieu de la Martinique vers Cuba, en formation de formateurs pour le savoir-faire en

cuisine française, parce que de plus en plus de touristes français s’y rendent. Mais il

existe aussi des domaines dans lesquels Cuba excelle et nos jeunes nous sollicitent pour

qu’on les aide financièrement à faire une formation à Cuba. Il y a d’excellentes

universités dans les domaines médicaux, agricoles et culturels (musique, danse…). Il

existe un problème pour reconnaître les titres, mais nous faisons ces échanges en dehors

même des institutions, parce que cela est nécessaire. Le bassin de la Caraïbe se prête à

cela. Il suffit d’avoir la volonté politique pour ensuite le faire. En tout cas, nous voulons

des garanties. Nous avons toujours demandé à l’ANT de développer des réseaux, des

partenariats, parce que nous souhaitons avoir des opérateurs de manière à éviter les

incidents. Nous souhaitons que chacun de nos ressortissants qui va suivre une formation

à l’extérieur, puisse en même temps représenter notre pays et qu’il soit bien encadré.

Parce que des dysfonctionnements peuvent créer un tort considérable à ceux qui

viennent ultérieurement, nous lançons à nouveau un appel. Nous recherchons des

partenariats pour qu’une politique d’échanges de stagiaires puisse se faire dans les

meilleures conditions. La région Martinique est prête à accompagner ces pratiques.

Merci.

Page 139: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 139

REUNION : M. Georges-Marie Lépinay, CESR (Conseil économique et social

régional)

Je me refuse à considérer l’expérience des réunionnais, envoyés d’abord à la Sakay à

Madagascar, puis en Guyane, comme une expérience de coopération entre les régions.

L’origine de cette affaire concerne des réunionnais sortis de chez nous, blancs

essentiellement, envoyés à la Sakay et qui, après l’échec de cette expérience, n’ont pas

pu revenir dans leur pays et ont été renvoyés en Guyane. Si c’est ça la coopération

régionale, cela me laisse un peu rêveur.

De même je ne peux pas accepter la mobilité comme forme de coopération. Avant la

mobilité des dernières années que l’on appelait immigration , il existait d’autres

mobilités aussi et ce n’était pas de la coopération : par exemple, mon ancêtre

débarquant à la Réunion, il y a trois siècles, dans des conditions de coopération peu

acceptables. La mobilité n’est pas de la coopération. Il faut la resituer dans le cadre

français pour savoir à quoi elle a servi et à quoi elle sert. Je suis très favorable, et j’ai

fait une suggestion au Conseil régional de la Réunion en ce sens, à la mise en place

d’un service de la mobilité formation et d’un bureau de l’immigration qui clarifieraient

les situations.

Troisièmement, la coopération régionale, idée neuve, je dis non. Elle n’est pas neuve.

Lorsque les entreprises françaises arrivent sur notre marché, qui est un marché réservé,

captif et rebondissent à l’île Maurice pour aller ensuite à Madagascar, elles font de la

coopération. La générale des eaux, qui a le quasi-monopole du marché de l’eau à la

Réunion, et qui rebondit à l’île Maurice, fait de la coopération régionale. Est-ce de cela

dont on parle ? Ce n’est pas neuf, mais ce n’est pas de cela dont on parle, à mon sens.

La coopération, une question de volonté politique

Il y a d’abord une volonté politique, et je reviens sur le discours de M. Karam ce matin.

C’est cette volonté politique de nos régions qui est en cause.

On a parlé de la COI (Commission de l’océan indien), mais honnêtement - je ne veux

vexer personne - région et département constituent essentiellement la valise de

l’administration centrale. Cela a un peu changé ces derniers temps, mais nous ne

sommes pas les acteurs de notre coopération régionale et nous n’en avons pas les

moyens. Nous sommes les spectateurs d’une coopération qui se fait par les compagnies

de navigation dans la région et qui finissent par truster l’ensemble de notre région. Nous

Page 140: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 140

n’avons même pas été les sous-traitants d’une coopération que d’autres faisaient en

fonction de leurs intérêts et pas forcément des nôtres. La question de la volonté

politique doit être tranchée. Volonté politique veut dire moyens politiques, juridiques,

institutionnels, pratiques, financiers et autres. Je ne crois pas que la langue soit un

obstacle, la décision politique prise, il faut se donner les moyens.

Exemple 1

Il y a eu débat à l’AFPA, à un moment où la Martinique coopérait avec Haïti, espace

créolophone. Cela a été une bataille parce que la section internationale de l’AFPA

considérait que c’était son domaine, alors que personne dans ce service ne parlait le

créole. La Martinique était mieux à même d’intervenir, à partir de cette créolité de la

langue et du français, puisqu’elle avait la chance d’apporter les deux. Mais, contre

l’avis du centre martiniquais, la section internationale de l’AFPA a réalisé l’opération.

Exemple 2

Nous sommes à côté de Madagascar et que je sache, à Paris, on ne parle pas plus le

malgache que moi, mais pourtant c’est l’AFPA nationale qui est intervenue. J’ajouterai

que nous avons au moins l’avantage culturel. En écoutant le discours d’un intervenant

précédent, je retrouvais la structuration du discours malgache où l’on passe beaucoup de

temps aux salutations, en s’en excusant. C’est la palabre, où l’on parle du ciel, des

nuages, des premières feuilles… et on descend tout au long de l’arbre, on suit la sève

jusqu’à la racine, on revient à la terre et on fait le chemin inverse, sans jamais parler de

l’arbre. Sur ce plan, dans nos relations avec les malgaches, c’est une chose que nous

connaissons. C’est cependant l’AFPA métropole, l’AFPA nationale qui est installée sur

place, parce que nous, nous ne sommes pas tout à fait "national".

Je rappellerais que la formation est un produit, qui se vend et s’achète et qui transfère

des technologies. Nous sommes obligés de l’aborder de cette manière. Qu’est ce que

nous pouvons vendre aux autres et acheter pour nos besoins ? Ce sont des échanges et

nous devons faire en sorte qu’ils soient équivalents.

Page 141: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 141

Quelques précisions sur ...

La Sakay (1952-1977)

Pour faire face à des problèmes de surpeuplement et de très grande pauvreté, les élus

réunionnais, et en particulier le député Raphaël Babet, décident de créer une colonie

réunionnaise sur le sol malgache. Le BPDA (Bureau pour le développement de la

production agricole dans les territoires d’outre-mer) installe, en 1952, un village témoin

dans la vallée de la Sakay à Madagascar, dans une zone dépeuplée de3000 ha, réputés

inclutivables, à 150 km à l’ouest d’Antananarivo. Le BPDA développe des

infrastructures : défrichement et assolement des terrains, réalisation de plus de 300 km

de pistes, construction d’habitations et de bâtiments agricoles, mise en place d’un

village-école, d’un dispensaire, d’un magasin d’approvisionnement, etc.

Le recrutement des immigrants est réalisé parmi les volontaires des régions les plus

défavorisées, qui doivent en outre être acceptés par la Commission départementale

d’immigration réunionnaise. Le BPDA met à la disposition de chaque nouvelle famille

une ferme, 50 hectares, du matériel agricole, du cheptel et des semences qu’elle devra

rembourser mensuellement sur 15 ou 20 ans. Près de 250 familles au total (qui

donneront naissance à 2 500 enfants) viendront s’installer à la Sakay. Une formation

agricole et une "formation sociale de la famille" sont dispensées à tous les nouveaux

arrivants. La production des fermiers, qui continue à être gérée sous forme de

coopérative par le BPDA, est répartie entre cultures maraîchères, fruitières, céréalières

(maïs, riz, tournesol, etc) et élevage (le territoire deviendra le troisième producteur

mondial de porcs).

Madagascar devient indépendant en 1960 mais sans conséquence importante sur la

Sakay, devenue Babetville. En 1964, le BDPA est remplacé par la SPAS (Société

professionnelle et agricole de la Sakay) qui fonctionne grâce aux crédits de l’État et sur

ses ressources propres, notamment la commercialisation des produits agricoles.

L’arrivée au pouvoir de Ramanantsoa en 1972 et sa politique de "malgachisation" des

moyens de production vont provoquer les premiers départs des fermiers réunionnais.

L’accession à la présidence de Ratsiraka en 1976 et l’étatisation de l’économie

signeront la fin de l’expérience.

Page 142: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 142

La Sakay (suite)

En avril 1977, la SPAS est nationalisée et en décembre a lieu l’évacuation des derniers

colons. Finalement, quatre familles seront retournées à la Réunion, six auront rejoint

Marcouria, en Guyane - sur un domaine de 5000 ha acheté par le BUMIDOM* pour le

"reclassement" des fermiers de Babetville - et les autres auront été réparties dans

différents centres de rapatriés de la métropole.Après une période d’abandon du site, le

gouvernement malgache a tenté, dans les années 80, de relancer culture et élevage pour

assurer l’autosuffisance alimentaire des jeunes qui effectuaient leur service civil. Les

résultats ont été décevants et actuellement, s’inspirant du service militaire adapté

français, des moniteurs militaires sont formés pour ensuite dispenser à leur tour une

formation agricole aux jeunes, dans le cadre du service militaire obligatoire de 24 mois.

Une démarche de privatisation du domaine est également engagée.

Les avis sont partagés sur cette expérience. Certains anciens de la Sakay sont

nostalgiques de cette période, "si c’était à refaire, nous repartirions là-bas sans hésiter"

ou encore évoquent "la belle histoire de la Sakay". Mais, un article de Philippe

Decraene, publié dans le "Monde" du 9-10 avril 1978, soutenait un point de vue

particulièrement négatif : "Rarement échec économique, social, et humain n’aura été

plus complet que celui de cette expérience... Des va-nu-pieds qui, au terme d’une vie de

travail, auront mis de côté une somme moins importante que la solde mensuelle de

certains administrateurs de la SPAS ... Leur longue marche à partir des Hauts de la

Réunion s’achève lamentablement ... dans l’anonymat, dans la clandestinité et surtout

dans l’indifférence".

*BUMIDOM : Bureau des migrations des DOM, auquel a succédé l’ANT

REUNION : Un intervenant de l'AFPA

Nous avons eu à cœur à l’AFPA, de faire de la coopération avec Madagascar. Nous

avons eu un premier contrat qui n’a pas pu être réglé avec la Banque mondiale pour

faire une expertise des dispositifs de formation professionnelle. Nous en sommes,

quatre ans après, au même point. Nous avions des équipements de formation qui

n’étaient plus aux normes puisque, pour nous, ce sont les normes européennes qui

s’appliquent. Ce matériel marchait bien, mais il n’était plus aux normes ; il fallait donc

Page 143: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 143

le jeter. On s’est dit : ce matériel peut encore rendre service ; on va proposer à

Madagascar l’équipement et la formation correspondante. Nous pensions qu’en faisant

cette amorce de coopération, nous obtiendrions le marché de 500 000 F de la Banque

mondiale et que nous pourrions ensuite, dans un deuxième temps, lancer le dispositif de

formation et le faire financer à la fois par la Banque mondiale et un peu par l’Europe,

qui peut aussi aller dans cette région mais, cela n’a pas été possible.

Je reviens sur une expression du Président Chirac, qui a dit en Martinique : "Il y a

aujourd’hui des compétences et des volontés sur place et il y a des moyens à Paris. Il

faut mettre les moyens à la disposition des compétences sur place". Je ne suis pas tout à

fait d’accord, parce que je pense que la France doit développer sa propre politique de

coopération. Mais je pense qu’il faut harmoniser les relations entre l’État et les

collectivités, non pas pour faire plaisir aux collectivités, mais parce que nous

contribuerions à ce moment-là, l’État et les collectivités, à une œuvre commune. Quand

je défends la formation, et je parle sous le contrôle du nouveau président de l’AFPA

Réunion, n’essayons pas de vendre ce que nous n’avons pas. Mais dans le domaine des

bâtiments publics, de la santé, de l’éducation et autres, nous pouvons faire des

propositions. Dans tous ces domaines, quand nous vendons de la formation, nous

vendons un bout de France. Si on développe la coopération dans la mécanique avec

Madagascar, on prendra un peu de place au marché japonais ou allemand. Ce problème

se pose au niveau de l’État. Comment sortir de ce centralisme hérité du passé et

comprendre que cette diversité, cette pluricapacité d’intervention est beaucoup plus

avantageuse. Je crois que c’est notre volonté politique, mais aussi celle de Paris. Je ne

trouve pas trace de cela dans la nouvelle loi d’orientation sur l’outre-mer !

Echanges avec la Martinique par visioconférence

MARTINIQUE : Mme Brafine, Formatrice à la Cellule emploi jeune du Rectorat

Nous avons également un projet d’échange entre nos aides éducateurs de la Martinique

et la Jamaïque. Il s’agit de formation en langues car nous avons constaté que c’était un

handicap, surtout dans le secteur touristique. Nous avons rencontré des difficultés pour

faire avancer notre projet, encore en instance. Nous avons eu en partie, l’aval de la

région, mais nous n’avons pas pu conclure faute de moyens financiers. Bien que nous

Page 144: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 144

constations qu’en terme de coopération, ce projet serait très intéressant pour nos aides

éducateurs. Nous aimerions savoir quelles sont les possibilités dans le domaine des

emplois jeunes.

MARTINIQUE : M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional

Je rappelle la position officielle du Conseil régional de Martinique puisqu’il s’agit de la

professionnalisation des jeunes. En ce qui concerne les emplois jeunes, il s’agit de CDD

de 5 ans maximum, dont l’État paie 80 % des salaires. Le Conseil régional a décidé,

quand il s’agit d’associations employeurs, de compléter les 20 % restants du salaire.

Concernant la formation, qui peut aider soit à la pérennisation de l’emploi, soit à la

professionnalisation, notre position est la suivante. Si le jeune a besoin d’un bilan de

compétences pour définir son projet professionnel, nous le finançons à 100 %. S’il

s’agit d’une formation professionnelle, le Conseil général de Martinique finance à 50

%. Il reste à la charge de l’employeur de ce jeune de trouver le financement

complémentaire. Si c’est une association, elle peut contacter son organisme collecteur.

REUNION : Mme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régional

Notre expérience diffère un peu de celle de la Martinique, ce qui illustre le degré

d’autonomie de chacune de nos régions qui n’obéissent pas à des normes préétablies ou

dictées par Paris. Au Conseil régional de la Réunion, nous avons choisi de séparer les

dispositifs des aides éducateurs, emplois jeunes de l’administration, des emplois jeunes

du secteur associatif ou autre. Pour ces derniers, l’État met 80 % et les 20 % restants

sont financés par le Conseil régional, le Conseil général et la structure employeur, sauf

dans des domaines précis comme les nouvelles technologies où l’État finance la totalité

de la part résiduelle. Pour la formation des aides éducateurs, cela concerne leur

employeur : l’Education nationale. Pour le reste, le Conseil régional de la Réunion

consacre une part de ses financements (10 millions de francs en deux fois) à la

professionnalisation de ces emplois jeunes. Une plate forme de professionnalisation a

été mise en place, dans laquelle figurent un certain nombre de partenaires dont un poste

mis à disposition par l’AFPA. Pour les secteurs, qui nous semblent porteurs pour

l’avenir (environnement, nouvelles technologies, protection du patrimoine…), nous

mettons en place, non pas des formations spécifiques, où seraient ghettoïsés ces emplois

Page 145: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 145

jeunes, mais nous tentons de les intégrer à d’autres publics qui bénéficient de ces

formations, afin qu’il y ait un mixage des publics.

REUNION : Un intervenant dans la salle

Je voudrais rebondir sur la problématique de la formation professionnelle au service de

la coopération régionale et les différents échelons en présence. L’échelon politique, à

travers un programme et une orientation politique, accepte ou n’accepte pas de valider

des projets de formation professionnelle qui rentrent dans la philosophie définie et

validée par les élus. Il y a ensuite l’échelon technique qui est l’opérateur de formation

professionnelle. Comme le précisait un intervenant précédent : "Nul mieux qu’un

organisme de formation ne peut concevoir des contenus, des évaluations et une

validation de formation". Troisièmement, il me semble que dans cette politique de

coopération, il y a la dimension de la mobilité, évoquée par M. Margos.

Je crois que chacun doit être à sa place et que le politique valide ou non un projet que

l’opérateur de formation lui a présenté. Ensuite, vient un opérateur de mobilité et il n’y

a pas d’opérateur privilégié.

MARTINIQUE : M. Marie-Séraline, Directeur de l’IPFEP

Je voudrais présenter des projets qui entrent dans le cadre général de l’université. Sur

l’environnement géographique proche, je voudrais vous faire part de deux projets de

coopération éducative en matière de formation.

Projet avec la Dominique. Il s’agit de travailler avec les territoires caribéens qui sont

depuis plusieurs années en relation avec nous. C’est un projet qui part d’une dynamique

humanitaire et culturelle, puisque ce sont des personnes en situation d’exclusion. Nous

sommes en train de mettre en place un projet, déjà présenté à la Martinique, visant à

apporter sur le territoire Caraïbe, un complément aux personnes résidentes de cette zone

dans le domaine des nouvelles technologies, du tourisme et de l’artisanat. Ce projet a

été accepté par le Conseil des Caraïbes et les amérindiens de la Dominique. Bien

entendu, même si la région a donné son aval, nous avons encore des difficultés

d’approche et de résolution de problèmes liés au juridique et à l’économique.

Projet avec Ste-Lucie. Par le biais d’activités culturelles, nous avons amené au

carnaval de la Martinique, une délégation de personnes que nous avons formées aux

Page 146: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 146

techniques du costume de carnaval. Sainte-Lucie a été intéressée et nous demande

d’envisager une formation commune pour les jeunes de la Martinique et de Sainte-

Lucie.

Voilà deux cas concrets qui nous montrent comment on peut avancer par rapport à tout

ce qui a été dit. Merci.

GUYANE : M. Gabriele, Directeur général adjoint du Conseil régional

Il y a une question toujours posée en terme de coopération. Comment se fixent les axes,

les priorités et comment se mettent-elles en œuvre ?

Les entreprises privées de formation peuvent avoir des projets de coopération, comme

toute entreprise. Elles travaillent dans une zone, dans leur domaine de compétences, et

peuvent intervenir au Brésil, au Surinam… là où elles pensent pouvoir se développer.

Pour autant, il n’est pas obligatoire que la totalité de ce projet soit en adéquation avec

les priorités de la collectivité régionale. A ce moment-là, il y a des règles qui conduisent

à ce qu’un projet privé, dans le cadre d’un intérêt général, puisse être retenu ou non par

la région. Au bout du compte, ce sont les régions qui ont établi les priorités et les axes

du DOCUP, défini les axes de programme prioritaires en termes de coopération dans

tous les domaines (éducation, économie, transport… et formation des hommes). Cette

clef d’entrée est très importante.

Sur les emplois jeunes, il est important de dire que l’État, dans le cadre de l’embauche

de ses propres emplois jeunes, les a très parcimonieusement servi en matière de

formation professionnelle. Pour l’Education nationale, le budget de la formation de ces

jeunes est très faible. Cela signifie que si des projets conduits au profit d’emplois jeunes

Education nationale sont par ailleurs soutenus par certaines de nos régions, c’est en

contre-partie avec un engagement important de l’employeur.

Et quand il s’agit d’autres types d’employeurs, c’est évidemment avec un engagement

important et d’autres sources de financement. Il est fondamental que le monde

associatif, les employeurs éligibles aux emplois jeunes se responsabilisent sur cet axe de

professionnalisation. Sinon, à ce rythme-là , aucune région ne sera capable de tenir le

choc de la prise en charge financière intégrale de la formation pour professionnaliser

ces emplois jeunes.

Page 147: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 147

MARTINIQUE : M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional

Nous avons une volonté politique de coopérer, d’échanger avec les pays qui nous sont

les plus proches dans le bassin Caraïbe et nous recherchons tous les domaines dans

lesquels ces échanges puissent s’établir. D’ailleurs, nous avons une commission

sectorielle d’élus, dont la mission essentielle est de réfléchir à ces questions. Il peut y

avoir des initiatives régionales pour entamer telle action en direction de tel pays voisin,

comme il peut y avoir des initiatives d’entreprises privées qui sollicitent le Conseil

régional pour telle action. Ces entreprises privées peuvent être des entreprises de

formation. Quand il s’agit de formation, la question est soumise d’abord à la

Commission d’élus qui donne un premier avis, puis à la Commission de la formation

professionnelle pour un second avis. Cela peut conduire à un accord pour financer

l’action, partiellement ou en totalité. Nous nous servons de relais pour présenter ces

actions auprès du FIC qui s’est un peu éloigné de nous puisqu’il est en Guadeloupe.

Nous avons l’espoir qu’à l’avenir, un fonds soit créé pour chacune de nos régions.

Lorsque les actions sont réalisées au bénéfice de ressortissants de pays qui ne font pas

partie de la Communauté européenne, le Fonds social européen ne les finance pas. Il

faut prendre ceci comme une donnée, il ne faut pas avoir l’impression que tout ce qui

n’est pas financé par l’Europe ne peut pas se faire. L’Europe fait des choix politiques ;

nous en faisons également. Quand nos formations sont éligibles à tel ou tel fonds, nous

les présentons. Mais, si nous avons une volonté de coopérer, on peut le faire avec nos

faibles moyens. Dans ces affaires, comme le dit un dicton, le geste de donner est aussi

important que ce que l’on donne, parfois même plus important. Pour avoir différentes

expériences avec les États voisins, je peux dire que ce n’est pas la valeur matérielle qui

est importante, mais le geste qui établit de bons rapports de voisinage.

MARTINIQUE : Mme Mestraud, AFPA

En ce qui concerne les fonds qui financent les interventions sur la Caraïbe, M. Margos,

est intervenu au titre d’un fonds structurel qui est le FSE. Un intervenant de Guadeloupe

a parlé du programme ALFA, il existe aussi d’autres programmes. Toute une série

d’interventions éligibles aux ressortissants de la Caraïbe sont possibles dans le cadre du

FED, et il est possible de coupler certaines de ces actions avec d’autres financements.

Quelqu’un pourrait-il parler de ces autres types de fonds ?

Page 148: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 148

METROPOLE : M. Aris Margos, Commission européenne

Sur le fonds social qui est un des fonds structurels, j’ai exprimé la position de notre

direction générale. D’autres fonds peuvent effectivement prendre en charge les

formations. Je ne pourrai pas vous répondre sur les autres financements.

MARTINIQUE : Mme Leufroy, Conseillère en formation continue

J’ai eu l’occasion d’être porteuse de projet dans le cadre de fonds communautaires.

Mettre en place des coopérations en matière de formation est très long et compliqué

mais, en contrepartie, du point de vue pédagogique, on obtient des résultats inespérés et

qui dépassent très largement les objectifs que l’on s’était fixés au départ.

En matière d’ingénierie de mise en place d’une coopération de formation, pourrait-on

espérer une aide technique pour favoriser la coopération, sous la forme de sites Internet

par exemple ? Nous avons beaucoup de difficultés à trouver des entreprises d’accueil

pour des stagiaires. Je m’occupe des emplois jeunes, par exemple, et nous avons un

énorme besoin de développement des compétences linguistiques. Nous avons besoin de

faire partir nos jeunes, de les rendre mobiles, de profiter au maximum de la coopération

pour développer leurs capacités à s’insérer dans le milieu professionnel.

METROPOLE : M. Aris Margos, Commission européenne

Cela fait partie du montage d’un projet. Cette partie-là peut être prise en compte par

l’assistance technique qui peut être propre ou séparée du projet. Mais je vous parle

toujours en termes de possibilité d’éligibilité. Le projet doit être présenté aux instances

qui l’examinent. C’est à elles de juger de l’opportunité, de voir si les éléments

nécessaires sont dans le dossier et si ce projet peut bénéficier de financements. Mais sur

le point de l’éligibilité, l’ingénierie peut rentrer dans le cadre de l’assistance technique.

METROPOLE : M. Mignot, Président du Centre INFFO

J’ai eu à travailler sur ces problèmes de projets financés par l’Europe. Comme l’a dit M.

Margos, il y a trois points sur lesquels il faut réagir.

D’abord, dans l’espace français, la procédure de gestion des crédits européens est

compliquée. On a monté des usines à gaz. Il est évident que l’opérateur de base ne voit

Page 149: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 149

arriver les résultats que quelques mois plus tard. Il existe un vrai problème sur

l’organisation qui a été mise en place pour gérer les fonds européens.

Deuxième point, dans les crédits européens, deux types d’aides sont prévus. D’abord,

quand vous dépensez 100 F, 5 F sont réservés à la gestion. On peut obtenir,

parallèlement au financement du projet, une aide à l’assistance technique et qui peut

représenter des montants significatifs des projets (10, 15 %). Certains opérateurs ont

utilisé ces fonds pour se constituer une compétence bureaucratique de l’organisation des

projets. Nous savons qu’une partie des crédits européens n’est pas complètement

utilisée. Cela tient sans doute à une complexité trop grande.

Enfin, les opérateurs, je pense aux régions par exemple, qui sont les principaux supports

locaux des projets, peuvent essayer d’obtenir des crédits d’assistance technique qui ne

sont pas affectés à un projet particulier mais à une catégorie de projets.

GUADELOUPE : un intervenant dans la salle

Je voudrais vous parler des problèmes techniques. Pour obtenir le financement de notre

projet, il a fallu que l’on se déplace à Bruxelles. Nous avons mis un certain temps pour

connaître tous les rouages et la structure juridique la plus adaptée. On a trouvé le

programme ALFA qui finance les échanges de formation entre universités européennes

et universités d’Amérique latine et centrale. Il nous a semblé utile de chercher un

financement complémentaire dans la zone Caraïbe, un appui technique pour cofinancer

le programme, géré par l’université sud américaine. Nous avons pu obtenir un

financement FIC. Seulement, quand on fait des programmes de cofinancement, il faut

toujours les justifier les uns par rapport aux autres. Quand il a fallu justifier cette

seconde avance, il nous fallait des rapports de nos amis sud américains, nord américains

et autres. Cela a posé un autre problème. Pour débloquer l’argent français, il fallait

justifier les compléments aux fonds ALFA, et comme nos amis étrangers ne voulaient

pas nous donner les documents correspondants, on s’est donc retrouvé bloqués par

l’administration française. Il y a des financements mais, il faut bien étudier leur mode

d’octroi.

Page 150: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 150

Expérience innovante

le 3/10/00

LA MISSION LOCALE DE GUYANELA MISSION LOCALE DE GUYANELA MISSION LOCALE DE GUYANELA MISSION LOCALE DE GUYANE

Expérience innovante présentée par :

Mme Andrée Baboul, Vice-Présidente du Conseil régional de Guyane

Mme Sandra Trochimara, directrice de la Mission Locale

Débats

GUYANE :M. Gabriele, Directeur général adjoint du Conseil régionalM. Pascal Gombauld, APFR

MAYOTTE :Mme Echati Abdallah, Directrice de la Mission locale

METROPOLE :M. Michel Abhervé, Président du CARIF Ile-de-France

Page 151: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 151

LA MISSION LOCALE DE GUYANELA MISSION LOCALE DE GUYANELA MISSION LOCALE DE GUYANELA MISSION LOCALE DE GUYANE

GUYANE : Mme Andrée Baboul, Vice-Présidente du Conseil régional

Nous allons vous présenter essentiellement des projets, parce que la Mission locale

régionale de Guyane est toute jeune. Elle est née le 28 décembre 1999, et nous sommes

donc seulement en fin d’installation. Je vais dans un premier temps vous expliquer

pourquoi cette mission locale a été créée sous la forme d’un GIP (Groupement d’intérêt

public).

Historique

Cette jeune Mission locale régionale de Guyane a la forme juridique d’un Groupement

d’intérêt public. En Guyane, nous avons une histoire, si souvent rencontrée ailleurs,

celle qui place la Guyane en butte à l’homéopathie des mesures gouvernementales

prises par le législateur et ajustées par les gouvernements sans tenir compte de nos

réalités, celle également qui place la Guyane en butte à un autre mal, celui de la cécité.

Cet aveuglement est coupable, au fil des années, puisque des retards identifiés et connus

ne sont jamais pris en compte, excepté sous la pression d’événements sociaux. La

Permanence d’accueil, d’information et d’orientation (PAIO), pour les jeunes de 16 à 25

ans, aurait eu 20 ans, il y a quelques mois. Structure modeste au départ, placée sous la

responsabilité de l’État, tutelle qui devait s’exercer jusqu’en 1998 et déjà, les premiers

signes de paralysie se manifestent en 1980. Durant les années qui suivent, l’AFPA

Guyane est choisie comme structure de gestion de cette PAIO. En 1990, par le

recrutement de nouveaux agents correspondants, une zone de formation est mise en

place. C’est la zone la plus vaste de France et, de fait, la plus problématique, voire la

plus insensée, puisqu’il a été décidé que cette vaste région ne constituerait qu’une seule

et même zone de formation, 90 000 m2, la Guyane. Voilà un exemple typique de la

discordance technocratique, quand tout se décide dans les ministères.

La PAIO qui, disait-on à l’époque, était de nature à répondre aux besoins des jeunes

demandeurs d’emploi, avait en moyenne 1 000 inscrits au chômage. Elle s’est trouvée

dans une situation critique quand ce chiffre est monté à 1 400, avec une population qui

présentait des difficultés de plus en plus grandes, voire une certaine détresse. Malgré les

moyens supplémentaires apportés par le contrat de plan de 1994 à 1999, qui permit de

Page 152: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 152

disposer de postes stabilisés, les chiffres du chômage ont poursuivi inexorablement

leurs ravages. Force est de constater combien les statistiques officielles sont

considérablement éloignées des réalités de terrain. Des 2 500 jeunes inscrits à l’ANPE,

il faut en annoncer plutôt 6000, si l’on intègre la jeunesse laissée pour compte à

l’intérieur de la Guyane. Nous sommes en 1998 ; la Guyane traverse une grave crise

économique et sociale. Les mouvements de 1992 et de 1994 l’attestent. La collectivité

régionale vient de se voir transférer la compétence intégrale de l’insertion sociale et

professionnelle du public jeune. Elle s’engage dans cette nouvelle démarche de

rattrapage et de conquête et décide de se doter de nouveaux moyens pour intervenir

auprès de l’ensemble de la jeunesse sur la totalité du territoire de la Guyane. Le projet

est alors né, pour mettre en place une structure nouvelle et efficace avec le partenariat

de l’État et aboutit à la création de la Mission locale régionale. Il n’a pas été possible de

maintenir la structure PAIO en Guyane à côté d’une nouvelle structure. Il fallait

l’intégrer, d’où le transfert qui a été fait de cette ancienne PAIO vers la Mission locale.

Nous n’avons pas la prétention de tout résoudre et d’effacer tous les problèmes

rencontrés tout de suite mais, nous avons la détermination, sans faille, de travailler en

partenariat en tout premier lieu avec les élus locaux, mais aussi les instances de

formation, les organismes assurant la gestion de l’insertion, de la formation et de

l’accompagnement social, les chambres consulaires, les chefs d’entreprise, l’Education

nationale. Ces partenariats doivent, si besoin est, passer la frontière grâce au réseau mis

en place par l’ANT. Tout cela, il le faut pour combattre le fatalisme qui écrase notre

jeunesse et pour inverser les tendances de l’exclusion. C’est l’ambition de toute l’équipe

de la Mission locale.

Notre directrice va maintenant parler d’une autre expérience qui vous montrera que la

Guyane est grande et complexe. D’une frontière à l’autre, se posent des problèmes

spécifiques. Nous avons un projet à développer : la mise en place d’une antenne dans

une région profonde de l’ouest guyanais, il s’agit de Maripasoula qui rencontre des

difficultés spécifiques culturelles, des problèmes de reconnaissance au niveau de l’Etat

civil, avec une jeunesse qui se frotte à une éducation et à une information occidentales.

On ne pouvait pas arriver là, comme antenne de la Mission locale ; il fallait d’abord

établir des relations ; nous allons nous y employer, avec les partenaires du CCOG

Page 153: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 153

(Centre de la communauté commune de l’ouest guyanais) qui va nous permettre de nous

installer et d’aller à la rencontre des jeunes enclavés.

GUYANE : Mme Sandra Trochimara, Directrice de la Mission locale

Notre jeunesse manifeste de plus en plus son inquiétude face à l’avenir, car elle est

confrontée de façon massive au manque de formation, à des périodes de transition

professionnelle de plus en plus longues, entraînant la spirale de la précarité, de

l’exclusion, enfin des situations sociales extrêmement limites. Aussi, se mobiliser pour

accompagner cette jeunesse dans la construction d’un avenir meilleur et d’une identité

stable est incontournable et prioritaire. Cette dynamique nécessite l’implication,

l’adhésion totale de tous les partenaires œuvrant dans les dimensions économiques,

sociales, culturelles et institutionnelles. L’objectif de la mise en place de cette Mission

locale est de contribuer au développement d’une véritable politique locale d’insertion

sociale et professionnelle, afin que chaque jeune puisse exercer sa citoyenneté.

Des obstacles importants à l’insertion

La population guyanaise est très jeune (plus de 50 % de la population totale). Le taux de

chômage est de 26 % chez les jeunes de moins de 30 ans (qui représentent 43 % des

chômeurs) et de 56 % chez les moins de 25 ans. Les jeunes ont donc des difficultés à

entrer dans le monde du travail et, parmi ces moins de 25 ans, un actif sur 4 occupe un

emploi précaire. La première explication est un manque crucial de qualification. En

effet, près d’un jeune sur deux ne possède pas de diplôme. S’insérer

professionnellement est, pour beaucoup, une véritable course d’obstacles, un parcours

parsemé d’embûches. Cette catégorisation jeune en difficulté évolue vers jeune en

risque d’exclusion (exclusion par rapport au marché du travail) ou encore jeunesse à

risques . L’association entre la jeunesse et le chômage devient de plus en plus fréquente

et l’image du jeune en difficulté côtoie celle de l’individu suspect. La majorité de ces

jeunes cumule un certain nombre de handicaps qui freinent leur insertion. Ces handicaps

se focalisent principalement autour de leur santé (fragilité psychologique, troubles

psychosomatiques, toxicomanie, alcoolisme), des difficultés liées au logement et à

l’accès aux activités de loisirs. Tous ces problèmes entraînent des situations

personnelles proches de la précarité sociale, traduisant le malaise d’une jeunesse dont

les repères tendent à s’estomper. Il est donc impératif d’endiguer ce mouvement par une

Page 154: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 154

mobilisation accrue des structures et des différents partenaires institutionnels œuvrant

dans le champ de l’insertion des jeunes.

Traiter le jeune dans sa globalité

Je vais rappeler brièvement les objectifs des missions locales :

- traiter le jeune à la recherche d’emploi ou de formation dans sa globalité ;

- soutenir ou accompagner chaque jeune dans la construction de son parcours d’insertion ;

- mobiliser, sur le plan local, tous les acteurs de l’insertion.

Ainsi cette Mission locale se veut une structure prête à accompagner le jeune dans la

construction d’un itinéraire personnalisé. C’est un lieu qui se veut espace, où chaque

jeune est l’acteur principal de cette dynamique ; et pivot mobilisateur et catalyseur d’un

grand nombre de partenaires, œuvrant sur des champs très diversifiés, tels que l’emploi,

la formation, la santé et le logement.

Dans ce dessein, la Mission locale de Guyane va se baser sur une pédagogie dynamique

qui gravitera autour de 8 pôles - formation, orientation, emploi, santé, logement,

transports, culture, loisirs - destinés à apporter une réponse adaptée à chaque jeune et à

contribuer à lui donner une place de citoyen à part entière.

- Le pôle "orientation", comportant l’accueil et l’information, accompagnera le jeune

dans l’élaboration d’un parcours cohérent et réaliste, à partir d’une pédagogie reflétant

la réalité locale.

- Le pôle "formation" va permettre au jeune d’acquérir une qualification professionnelle

pour faciliter son insertion. Il apportera une information large sur les différents

dispositifs de formation et les lieux ressources, afin de rendre le jeune autonome face à

sa recherche de formation.

- Le pôle "emploi" améliorerera la connaissance des métiers du marché de l’emploi et la

constitution d’un réseau d’entreprises. À moyen terme, la Mission locale va s’orienter

vers une labellisation "Espace jeune" à travers un partenariat avec l’ANPE et la Région.

- Le pôle "santé" doit déboucher sur la mise en place d’un réseau d’informations, de

prévention, de permanence professionnelle en collaboration avec les différents

partenaires.

- Par rapport à la dynamique de mobilité, beaucoup de jeunes ont du mal à accéder à

certains dispositifs de formation car ils se heurtent à un manque crucial de logements.

Tout ce qui concerne le pôle "logement", voire "transports" sera clairement identifié :

Page 155: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 155

tout un travail de collaboration et de partenariat avec les différentes structures œuvrant

dans ce champ sera réalisé.

Bien sûr, d’autres problématiques sont à prendre en charge, notamment la situation des

jeunes étrangers. Par-delà la dynamique de l’insertion, se greffe celle de l’intégration et

les difficultés d’analphabétisme et illettrisme sont prégnantes. L’étendue de nos

territoires entraîne la mise en place, à court terme, de réponses qui devront être adaptées

aux jeunes de l’intérieur et des communes éloignées. Ces réponses seront le résultat

d’un partenariat accru avec les différents acteurs. Nous allons nous orienter vers

l’ouverture d’antennes répondant à des besoins locaux, notamment au niveau de la

région de l’est et de l’ouest.

Nous avons quatre antennes existantes : deux à Cayenne, une à Kourou et une à St-

Laurent. Pour la fin de l’année 2000, deux autres antennes verront le jour : l’une située à

St-Georges dans la région de l’est et l’autre sur la région de Matoury ; il est prévu, pour

2001, l’antenne de Maripasoula qui nous permettra de répondre largement aux besoins

des jeunes de la région de l’ouest. Courant janvier 2001, nous allons aussi mettre en

place une permanence à Remire Montjoly.

Afin de vous permettre de mieux cerner la réalité de notre territoire, je vais vous donner

quelques données quantitatives, qui font référence au bilan de l’activité de la structure.

En 1999, la Mission locale régionale de Guyane comptait 3 241 jeunes inscrits, soit 1

800 pour le bassin de Cayenne, 895 pour Kourou, 546 pour St Laurent. Sur ces 3 241

jeunes, 685 ont bénéficié d’actions d’orientation, de formation, de préqualification,

voire de remise à niveau et 468 ont suivi des formations qualifiantes diplômantes. Au

niveau de l’axe emploi, nous avons obtenu des résultats tangibles. 235 jeunes ont

décroché un contrat de travail de type CDI, CDD ou contrat aidé. 42 jeunes se sont

positionnés sur des contrats, type apprentissage, orientation ou qualification.

L’ouest Guyanais

Dans un premier temps, nous nous sommes focalisés sur toute la région ouest où la

situation géographique est très particulière. En effet, cette région se caractérise par un

territoire de 40 945 km2 avec une population de 37 520 habitants. Elle se répartit sur 8

communes fortement enclavées. Seuls Awala Yalimapo, Mana et St Laurent sont

accessibles par la route. Apatou, Grand senti, Papaïchton sont abordables uniquement

Page 156: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 156

par le fleuve, Maripasoula par voie aérienne ou par le fleuve. La commune de Saül n’est

accessible que par voie aérienne.

La situation socio-économique est fragile avec une forte démographie, (liée aussi à un

fort et permanent courant migratoire) et se caractérise par :

- une population multiethnique,

- une scolarité difficile liée aux problèmes de langue ; souvent, la langue maternelle

n’est pas la langue française,

- beaucoup de lacunes au niveau éducatif et pédagogique, d’où une certaine inadaptation

des contenus pédagogiques,

- une insuffisance des structures d’hébergement,

- une démobilisation de la structure familiale, avec difficulté à s’investir dans la

dynamique éducative et surtout, une démotivation de la part des jeunes, quant à leur

parcours,

- des problèmes liés aux papiers d’identité ce qui freine, pour beaucoup, l’accession à

certains dispositifs,

- un choix restreint de filières,

- pour les jeunes femmes, problèmes de grossesse précoce, ce qui fait que la scolarité est

interrompue très tôt. Au niveau des réponses que l’on pourrait apporter en matière de

formation, cet élément est à prendre en compte.

Pour l’année 2000/2001, 50 élèves ne sont pas inscrits au lycée par manque de place.

Ces jeunes vont devoir s’orienter vers d’autres réponses. Une grande partie de la

jeunesse de l’ouest se retrouve, entre 15 et 16 ans, hors du système scolaire.

Au niveau de la formation professionnelle, ces communes enclavées ont du mal à

accéder à un certain nombre de formations. Les difficultés identifiées sont surtout liées

aux facteurs économiques, en particulier à la pauvreté du bassin de l’emploi, ce qui

entraîne une étroitesse des débouchés et augmente les difficultés d’insertion. Les

communes enclavées bénéficient des chantiers écoles, mais n’accueillent pas en

permanence d’organismes de formation qui sont concentrés à Saint-Laurent. Nous

avons de grandes difficultés pour mettre en place tout ce qui concerne la formation en

alternance. Pour le jeune public en très grande difficulté, au-delà du niveau 6, il faudrait

peut-être prévoir d’autres niveaux. La formation est souvent davantage considérée par le

Page 157: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 157

jeune comme un bien de consommation, qu’une possibilité de pouvoir s’insérer

durablement. L’absence d’hébergement et les problèmes liés au coût des transports sont

importants. Malheureusement, les politiques mises en œuvre par les pouvoirs publics

n’ont pas suffisamment intégré les spécificités démographiques de la région.

Enfin, concernant les communes du fleuve, et notamment Saül, elles sont très peu

touchées par les dispositifs de formation centralisés sur la zone de St-Laurent.

Actuellement, les réponses apportées concernent principalement les dispositifs de pré-

orientation, de lutte contre l’illettrisme, sur les chantiers écoles et sur la plate-forme

mobilisation qui est pour l’instant saturée. La Mission locale va se trouver renforcée par

cette antenne de Maripasoula qui permettra de répondre aux besoins de ces jeunes, en

tenant compte largement de la réalité locale parce que, si cette antenne ne s’inscrit pas

véritablement dans une dynamique de développement local, nous aurons beaucoup de

mal à répondre efficacement aux difficultés rencontrées par les jeunes.

Voilà la photographie actuelle de la région de l’Ouest.

DébatsDébatsDébatsDébats

La structure du GIP et ses partenariats

GUYANE : M. Gombauld, APFR

Quelles relations entretenez-vous avec vos partenaires ? Vous avez parlé de GIP,

pouvez-vous préciser les organismes qui le constituent ? Quelles relations entretenez-

vous avec le CIJ (Centre information jeunesse) qui a une vocation un peu similaire à la

vôtre ?

GUYANE : Réponse de Mme Andrée Baboul, Vice-Présidente du Conseil régional

La structure du GIP est gérée par un conseil d’administration. Dans ce conseil, nous

avons tenu à faire siéger, à parité, les différentes instances, les forces vives, les

partenaires qui pourraient travailler avec la Mission locale. Il y a donc un collège d’élus

: conseillers généraux, régionaux et maires de communes. Nous avons commencé par

une symbolique Communauté de communes, parce qu’il y a 24 communes. Mais c’est

très ouvert dans la mesure où, à chaque fois qu’une commune sera intéressée, elle

pourra intégrer ce conseil. Une mission locale relève d’abord de la gestion communale.

Page 158: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 158

Si l’impulsion a été autre, c’est parce que les maires n’auraient pu ni monter, ni soutenir

un tel dispositif. Il faut savoir que les jeunes que nous accompagnons, que nous

encadrons et que nous formons, sont bien issus des différentes communes. Nous

attendons que ces communes prennent de plus en plus en compte cette mission.

Certaines ont déjà adhéré. En plus du Collège d’élus, il y a un Collège des représentants

de l’État, un Collège des chambres consulaires et un Collège d’une fédération

d’associations. Ce dernier, pour représenter les associations comme le DSQ

(Développement social de quartier), par exemple, qui est dans une zone difficile au sud

de Cayenne.

Vous voyez que notre partenariat est une réalité. Nous attendons que chacun des

partenaires travaille avec nous en réseau. Je vous ai parlé de l’ANT, qui met en place un

logiciel commun qui nous permettra de suivre un jeune d’une extrémité à l’autre du

territoire de la Guyane, jusqu’à l’extérieur quand il partira. L’espace jeune est un

partenariat d’appoint que nous mettrons en place avec l’ANPE. Pour tout ce qui est de

l’accompagnement social, c’est un partenariat avec les dispositifs soit du département,

soit des services de l’État qui travaillent dans ce domaine-là.

Il est évident que le Centre information jeunesse nous intéresse au plus haut point, dans

la mesure où nous sommes submergés de problèmes. Mais, il faut savoir aussi que des

personnes avec un Bac ou plus pourront être accompagnées pour des besoins

spécifiques par la Mission locale. C’est à ce moment-là que le CIJ devient notre

partenaire. Nous continuerons à prendre notre bâton de pèlerin et continuerons à établir

des contacts au coup par coup. Nous allons continuer à travailler en réseau et en

complémentarité.

Les relations avec les entreprises

GUADELOUPE : un responsable formation de la CCI

Quelles sont vos relations avec les entreprises ? Chez nous, on se rend compte que la

grande difficulté, dans la problématique de l’insertion des jeunes, est la relation à établir

avec les entreprises. La connaissance et l’approche entreprise ne sont pas, à mon sens,

optimales. Avez-vous des expériences de terrain ? La Chambre de commerce travaille

beaucoup avec les missions locales justement pour leur apporter la connaissance des

besoins des entreprises, de ce qu’elles attendent des jeunes en termes de compétences. Il

Page 159: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 159

est important que, dans le cadre de l’insertion, l’on n’oublie pas l’entreprise. Il est vrai,

qu’il y a tous les problèmes sociaux annexes, mais il faut resituer l’insertion des jeunes

également dans un cadre institutionnel.

GUYANE : Réponse de Mme Sandra Trochimara, Directrice de la Mission locale

Concernant l’axe entreprise, je ne pourrai pas vous donner d’expériences de terrain. Par

contre, cet aspect est largement pris en compte au niveau de cette nouvelle structure, à

travers une personne référente. Un responsable emploi-formation sera le relais privilégié

entre les structures qui œuvrent dans le champ de la formation et le champ de l’emploi,

afin que nous puissions, en interne, élaborer un réseau d’entreprises qui nous

permettraient de répondre aux différents besoins, à travers les contrats proposés aux

jeunes. Nous sommes en train de tisser ce travail. Il a été fait en amont et aujourd’hui,

nous le structurons pour prendre en compte complètement cet élément incontournable.

Question d’un intervenant dans la salle

Je suis sensible à votre détermination, à votre motivation et à la manière dont vous

abordez un problème que je considère comme insondable. La situation que vous

décrivez est préoccupante. Vous avez parlé de tous les axes sur lesquels vous allez

travailler avec les jeunes. Vous envisagez une prise en charge globale. Avez-vous un

outil de référence concernant le développement économique de la Guyane ? Vous allez

faire un travail avec les entreprises. J’imagine que cela doit être très difficile, puisqu’il y

a très peu d’entreprises. Avez-vous un outil de projection qui puisse vous permettre de

prendre en charge des jeunes en vue du développement économique dans certaines

régions, d’une installation de pôles industriels ou de production ?

GUYANE : Réponse de M. Gabriele, Directeur général adjoint du Conseil régional

Nous n’avons peut-être pas suffisamment parlé du lien entre la Mission locale et

l’insertion en entreprise, de notre relation au monde économique.

Concernant les outils, nous avons un certain nombre d’observatoires. Depuis trois ans,

nous nous sommes battus au niveau de la région Guyane, auprès des professionnels,

pour créer un premier observatoire.

Page 160: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 160

Vous savez combien la commande publique est importante dans notre région. On ne

parle pas de la commande publique du CNES (Centre national des études spatiales), car

celle-ci est réservée, bien qu’on constate depuis cinq ans, une volonté d’élargissement

de la sous-traitance locale, mais dans des spécialités qui génèrent très peu d’embauches

locales, je parle de la commande publique autre. On retombe sur la relance de la

commande publique, des chantiers, de la construction, sur les métiers classiques

(bâtiment, installations, équipements routiers, infrastructures…). Un observatoire a été

mis en place avec l’État et les professionnels pour essayer de dynamiser les entreprises

locales. Nous sommes en retard en ce qui concerne l’occupation des métiers de la

construction par la main-d’œuvre locale. Nous réfléchissons sur les questions de

développement local de Maripasoula, à plus d’une heure d’avion de Cayenne ou à deux

à trois jours de pirogue selon le niveau des eaux. Nous voulons structurer l’activité

économique des entreprises et qu’au moins, quand certaines viennent s’installer,

notamment dans le bâtiment, elles puissent embaucher la main-d’œuvre locale plutôt

que de venir avec leur propre main-d’œuvre étrangère. Cette reconquête interne de

l’emploi passe par une revalorisation de l’image de certains métiers, la nécessité

d’améliorer l’orientation et la réorientation. Il s’agit de capter l’intérêt des jeunes et de

les motiver, en montrant que ce ne sont pas des formations à visée éphémère,

inutilisables lorsque les chantiers s’arrêtent.

Il y a aussi les grands objectifs. Le Président Karam et Chantal Berthelot parlaient hier

du tourisme. On a triplé le montant de tous les crédits croisés sur le tourisme, que ce soit

l’effort de l’État, de la Région, des collectivités locales ou de l’Europe. Mais, tripler les

crédits tourisme, cela veut dire des équipements, un aménagement des territoires pour

un tourisme de pleine nature. Le réseau hôtelier du littoral est à peu près suffisant : il est

saturé au moment des tirs d’Ariane ; ensuite ces structures sont inoccupées. Réfléchir à

un tourisme qui irradie, qui valorise la richesse de l’intérieur, cela implique de créer des

emplois, des métiers nouveaux, autant de pistes sur lesquelles on s’est engagé

(formation dans l’éco-tourisme en milieu tropical équatorial). Cela nous conduit à des

formations dans des métiers plus proches culturellement de notre environnement

régional. À partir de là, tout est conçu avec les communautés ou les ethnies pour que la

formation des jeunes soit réalisée au niveau local. Cela nous permet de ne pas passer par

les voies académiques de l’Éducation nationale qui sont intéressantes mais que nous

Page 161: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 161

devons réadapter. Il n’y a pas que l’éco-tourisme, il existe aussi d’autres possibilités,

comme le développement du secteur minier. Des bases de vie se sont constituées, des

sociétés se structurent, un certain nombre de spécialisations apparaissent et l’on

réfléchit, à partir de là, pour mettre en place des formations structurelles.

Ceci est un ensemble qui couvre le littoral mais aussi la Guyane de l’intérieur, avec

l’éco-tourisme, le secteur minier, les reconquêtes d’emplois afin que les entreprises des

chantiers de l’intérieur recrutent de la main-d’œuvre locale. C’est autant de mises en

résonance avec le plan 2000-2006, avec la façon dont nous avons cherché à le

concevoir, avec les relations que nous avons établies avec l’État, pour essayer

d’affirmer notre savoir-faire concernant la conduite d’opérations dans une optique

d’intérêt régional et local, sans parachutage de l’extérieur.

MAYOTTE : Mme Echati Abdallah, Directrice de la Mission locale

Quelles sont vos relations avec la Direction du Travail ? Arrivez-vous à participer à

l’élaboration des appels à projets ? Vous, qui êtes au contact direct des jeunes,

proposez-vous des formations qui prennent en compte la demande du jeune ? Est-ce que

les formations proposées sont en adéquation avec les besoins des entreprises en matière

d’emplois ? Comment réalisez-vous le suivi des jeunes à l’issue de la formation et avec

quels outils ?

GUYANE : Mme Sandra Trochimara, Directrice de la Mission locale

Le jeune va exprimer des souhaits qui vont être étudiés et qui vont permettre la mise en

place d’appels à projets. Nous recueillons aussi les besoins des entreprises en matière de

développement. Il est vrai que les formations proposées ne répondent pas toutes aux

exigences des entreprises. On parle de la formation professionnelle au service du

développement local. Il faut partir de cette réalité locale, afin que les organismes de

formation puissent proposer des actions qui répondent aux besoins des entreprises et

que nous puissions faire un travail d’information pour orienter les jeunes vers les

secteurs porteurs et pas seulement répondre à leurs demandes, lorsqu’elles ne

correspondent pas à des possibilité d’insertion. Un certain nombre de jeunes suivent

toute une série de stages qui se répètent ou se suivent sans cohérence. La formation en

elle-même devient un système pour obtenir une rémunération, mais qui ne répond pas à

Page 162: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 162

des visées d’insertion. Nous sommes confrontés à des jeunes qui cumulent des

formations sans direction précise.

L’accompagnement social

Question d’un intervenant dans la salle

Vous avez indiqué que, dans le cadre des problèmes généraux qui sont vécus par les

jeunes, il y a des retentissements d’ordre psychosomatique, voire des problèmes de

toxicomanie. Quelles sont les stratégies que vous envisagez de développer pour conjurer

ces problèmes ?

GUYANE : Réponse de Mme Sandra Trochimara, Directrice de la Mission locale

Ces éléments vont entrer dans la partie "accompagnement social". Nous avons prévu, au

niveau de la Mission locale, un référent technique "accompagnement social". Il devra

mettre en place toutes les réponses concernant les problèmes liés aux troubles

psychologiques et à la toxicomanie, à travers des campagnes de prévention en

partenariat avec les structures œuvrant dans ce champ.

GUYANE : Réponse de Mme Andrée Baboul, Vice-Présidente du Conseil régional

Avec la DASS État et sa responsable, avec une cellule de lutte contre la toxicomanie et

ses déviances, un travail de partenariat a déjà commencé. Des séances d’information se

sont déroulées avec les conseillers de la Mission locale. Nous disposons d’enveloppes

financières pour nous permettre, soit de mieux former le personnel à l’accueil de ces

jeunes, soit pour faire des animations ponctuelles directement auprès des jeunes

toxicomanes. Le maillage est déjà engagé ; nous attendons la mise en place de toute

l’équipe de direction pour reprendre ce type de relations qui seront suivies et

approfondies.

Des jeunes hors normes

GUYANE : M. Gabriele, Directeur général adjoint du Conseil régional

La Guyane a connu une flambée de travaux entre 1986 et 1992. Il y a eu effectivement

énormément d’emplois, mais quand les entreprises se sont retirées, on a laissé la

Guyane dans le désespoir. Le chômage, au début du plan précédent de 1993, comptait

Page 163: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 163

moins de 4 000 personnes. On avait 3 500 demandeurs d’emplois depuis 8 à 9 ans. On

est passé de 3 500 à 7 000 entre 1992 et 1995. Aujourd’hui, nous en sommes

officiellement autour de 17 000 et, vraisemblablement, plus près de 22 000. On parlait

de 3 200 jeunes suivis par la Mission locale. Actuellement, dans la tranche des 18 à 25

ans, nous comptons 27 000 jeunes. Nous savons que 9000 d’entre eux poursuivent leurs

études. 9000 autres sont en emploi, en formation ou en dispositif d’insertion. Par contre,

pour les 9000 derniers, nous n’avons aucune information, ni aucun contact. Le pari de la

Mission locale est d’intervenir dans des zones où nous connaissons l’importance du

nombre de jeunes et l’envergure des problèmes. Un recensement a été fait et, dans les

années 1995-96, un très gros travail administratif de régularisation des jeunes étrangers

a été réalisé.

Formation professionnelle et cohésion sociale sont pour nous très importantes.

METROPOLE : M. Michel Abhervé, Président du CARIF Ile-de-France

Je constate que nous sommes inspirés par les mêmes valeurs, même si nous travaillons

dans des territoires différents. Il ne faut pas faire de confusion entre le métier propre de

la Mission locale, c’est-à-dire l’accompagnement des jeunes vers leur autonomie (les

aider à se construire, à s’approprier leur propre projet) et les domaines où elle est

partenaire d’autres structures, parfois en première ligne parce qu’il n’y en a pas

d’autres, parfois en soutien pour traiter la situation des jeunes dans toutes leurs

dimensions. Mais si on ne veut pas condamner la mission locale à échouer, il ne faut pas

lui faire porter trop de choses. La mission locale est la structure d’accompagnement des

jeunes. Cela ne doit pas être la structure de lutte contre la toxicomanie en Guyane, ni la

structure de développement économique de la Guyane, même si elle doit participer à

cette démarche. Enfin, son principal outil est une équipe de salariés.

GUYANE : Mme Andrée Baboul, Vice-Présidente du Conseil régional

Je me permettrais de vous dire qu’en Guyane, nous sommes le pays des exceptions, des

dérogations. Je comprends, vous venez d’Ile-de-France où tout est institutionnalisé.

C’est vrai que nous avons en face de nous des jeunes avec les mêmes drames et les

mêmes problèmes. Mais il faut que vous fassiez un effort de visualisation. Sans avoir

sur les épaules toute la misère de la Guyane, nous devons parfois déroger et

Page 164: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 164

accompagner le plus loin possible un très grand nombre de jeunes. Nous ne sommes pas

dans un contexte économique comme celui de l’Ile-de-France. Nous avons une

indigence d’activités et cela fait une différence dramatique pour tous ces jeunes. Nous

n’allons pas sortir de nos missions, mais nous devrons parfois davantage accompagner

les jeunes que cela ne se fait dans une mission locale "normale".

Page 165: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 165

Atelier du 3/10/00

L’APPRENTISSAGEL’APPRENTISSAGEL’APPRENTISSAGEL’APPRENTISSAGE

ET LES CONTRATS EN ALTERNANCEET LES CONTRATS EN ALTERNANCEET LES CONTRATS EN ALTERNANCEET LES CONTRATS EN ALTERNANCE

Animateur :

Noël Terrot, Directeur du CUIDEP

Rapporteurs :

M. Gérard Arzilli, Directeur général adjoint de la CCI de la Réunion

M. Clément Abdallah, Directeur du CFA de la Réunion

Page 166: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 166

Intervenants

GUADELOUPE :Mme Carole Riga, Déléguée régionale à l'ingénierie de formation, rattachée à la DAF(Direction de l'agriculture et de la Forêt)

GUYANE :Mme Cécile Minne Ebelle Dim, Directrice du CFA

MARTINIQUE :M. Patrick Laport, Directeur du CFA

REUNION :M. Serge Payet, Directeur de l'OPCAREG

Débats

GUYANE :M. José Euryale, Inspecteur de l’Éducation nationaleM. Michel Manguer, Direction du travail

MARTINIQUE :M. Christian Cayol, Président de la Chambre des métiers

METROPOLE :Mme Dominique Leccia, Conseillère technique au Comité de coordination desprogrammes régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue

REUNION :M. Guy Lemarie, Délégué à l'ANPEM. Bernard Sabban, CSFOR (Chambre syndicale des organismes de formation)M. Alix Sery, DTEFP

Page 167: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 167

L’APPRENTISSAGEL’APPRENTISSAGEL’APPRENTISSAGEL’APPRENTISSAGE

ET LES CONTRATS EN ALTERNANCEET LES CONTRATS EN ALTERNANCEET LES CONTRATS EN ALTERNANCEET LES CONTRATS EN ALTERNANCE

METROPOLE : M. Noël Terrot, Directeur du CUIDEP

Nous avons organisé le débat en deux temps. Chacun des quatre intervenants va

disposer de quelques minutes pour présenter l’état des lieux de l’alternance et en

particulier de l’apprentissage dans son département. On pourra ainsi aller à l’essentiel

et, en fonction de cet état des lieux, nous dégagerons un certain nombre de perspectives.

On a distingué dans ces présentations deux temps : des thèmes qui portent sur l’amont

de la formation (accueil, l’orientation, la préparation préalable de l’apprenti et de

l’entreprise) et d’autres sujets sur des réalisations actuelles.

Le CUIDEP et FORMASUP

Je dirige un organisme inter universitaire à Grenoble qui s’appelle le CUIDEP (Centre

Universitaire de Recherche d’Information et de Documentation sur l’Education

Permanente). C’est une institution ancienne, créée en 1971, un lieu de rencontre entre

les 5 universités grenobloises ou écoles d’ingénieur, le patronat et les syndicats. Depuis

sa création, toute une tradition de rencontres et d’échanges avec les partenaires sociaux

s’est développée. Le CUIDEP intervient à la demande des conseils régionaux dans tout

ce qui relève de l’amont de la formation. Depuis une dizaine d’années, et plus

particulièrement ces cinq dernières années, je suis coordonnateur de la formation

continue et de l’apprentissage en Rhône-Alpes pour l’enseignement supérieur. À ce

titre, j’étais un des initiateurs de la création de FORMASUP Rhône-Alpes. Il s’agit d’un

dispositif régional qui met en œuvre l’apprentissage dans l’enseignement supérieur.

C’est un dispositif partenarial, en matière de projets pédagogiques, de financements, de

décisions politiques, puisque 15 présidents d’université ou d’écoles, plus les

représentants des écoles supérieures de commerce et 15 représentants patronaux

décident du devenir de ce dispositif. Aujourd’hui nous en sommes à 65 diplômes de

l’enseignement supérieur (IUT, DUT, diplômes d’ingénieur) préparés par

l’apprentissage et quelque 2000 apprentis suivent ces formations qui débouchent sur le

Page 168: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 168

même diplôme que les formations traditionnelles de l’enseignement supérieur. À partir

de là, je voudrais faire trois observations.

L’alternance, et plus particulièrement l’apprentissage, est devenu un moyen de

formation à part entière et valorisé. M. Rigout en 1982 –1983, à la suite de l’accord

entre les partenaires sociaux qui venaient de créer l’ensemble des mesures en alternance

(contrats de qualification et autres modules) disait qu’à travers les contrats de

qualification, on allait relancer l’apprentissage industriel. L’apprentissage, à cette

époque, avait quasiment disparu du paysage industriel et il apparaissait comme

particulièrement dévalorisé. Vingt ans après, j’estime qu’il y a une avancée

considérable et que l’alternance est devenue un outil important de formation. Qui eut

imaginé, il y a 20 ans, que dans l’enseignement supérieur, on créerait FORMASUP

avec ces 65 diplômes en apprentissage et que les étudiants se précipiteraient dans ces

formations ? On constate au plan général une valorisation de l’apprentissage.

Selon nos propres constats à travers l’apprentissage, l’entreprise apparaît comme

dispensatrice de connaissances. Or, jusqu’à présent on disait que l’entreprise ne

développait que du savoir faire et du savoir être et que seul le lieu de formation, en

particulier l’université, était capable d’apporter de la connaissance. Cela n’est plus le

cas. Lorsqu’on a mis sur pied nos formations par l’apprentissage, nous nous sommes

demandés ce que pouvait apporter l’entreprise au-delà du savoir être et du savoir faire et

l’on s’est rendu compte à travers la pratique, qu’il y avait aussi des connaissances dans

l’entreprise. La répartition classique entre théorique (lieu de formation) et pratique

(entreprise) n’était plus tout à fait aussi pertinente. Cette observation générale est, bien

entendu, à nuancer selon les cas.

L’importance évidente, déterminante du lien à créer entre le lieu de formation et

l’entreprise. Comment créer, maintenir, alimenter continuellement cette liaison

fondamentale ? Il y a ce que l’on appelle le tuteur d’enseignement et la personne dans

l’entreprise qui va être le référent de l’apprenti, le tuteur dans l’entreprise… Comment

les aider à se rencontrer, se former et à maintenir ce lien ? On verra que l’apprenti peut

jouer un rôle important dans le lien en question. Ce qui différencie l’alternance de ce

qui peut exister ailleurs, c’est ce lien fondamental à créer, maintenir cette charnière de

l’apprentissage.

Page 169: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 169

ÉTAT DES LIEUX

GUADELOUPE : Mme Carole Riga, Déléguée régionale à l'ingénierie de formation,

rattachée à la DAF (Direction de l'agriculture et de la Forêt)

Nous avons deux CFA, l’un agricole avec une capacité d’accueil d’une centaine

d’apprentis, l’autre de la chambre des métiers, éclaté sur deux sites. Récemment l’union

patronale, ASFO, avec l’appui du Conseil régional a mis en place un système de

formation par alternance pour les Bac + 2. Il faut savoir que dans les deux centres

précités, ce sont en majorité des diplômes de niveau V qui sont délivrés et quelques uns

de niveau IV. Les principaux secteurs concernés sont l’artisanat et l’agriculture. En

Guadeloupe, l’apprentissage est peu développé par rapport à toutes les formations qui

sont délivrées dans les lycées d’enseignement professionnel.

Quelques caractéristiques des difficultés rencontrées pour le développement de

l’alternance : la faiblesse du tissu économique, la fragilité des entreprises, l’entrée

tardive des jeunes en apprentissage (entre 18 et 20 ans), l’insuffisance d’information des

jeunes et des familles, l’éloignement des entreprises par rapport au lieu de formation et

au lieu d’habitation, le taux élevé de rupture de contrats… La question qui nous

interpelle actuellement concerne les nouvelles orientations prises par la loi d’orientation

agricole qui exonère certaines entreprises. Quel est le devenir des relations entre

apprenti et maître d’apprentissage ?

MARTINIQUE : M. Patrick Laport, Directeur du CFA

Je souhaite parler des freins au développement de l’apprentissage chez nous. À la

Martinique, on compte 20 000 entreprises et seules 1500 recrutent des jeunes en

alternance, soit moins de 10 % d’entre elles.

Parmi les éléments qui constituent un frein, il y a le fait qu’il n’existe pas de véritables

filières de formation permettant aux jeunes de passer du niveau V au niveau III car, bien

souvent, on ne trouve pas dans les entreprises les qualifications nécessaires pour assurer

le rôle de maître d’apprentissage. Les chambres consulaires pourraient peut-être

proposer à leurs ressortissants des outils comme la VAP pour accéder à des niveaux de

qualification supérieurs.

Le deuxième frein concerne la médecine du travail. Les chefs d’entreprise sont réticents

à payer la médecine du travail, parce que cela leur coûte cher. Quand ils n’ont pas

Page 170: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 170

encore adhéré, ils doivent payer pour tout le monde, cela coûte entre 5 et 10 000 francs.

Quand ils ont adhéré, cela leur coûte 450 francs par apprenti, mais l’apprenti peut

démissionner ou ne pas venir du tout. Cela constitue donc une perte pour l’entreprise.

Le troisième frein correspond au profil des jeunes qui, dans certains cas, choisissent

l’apprentissage pour des raisons financières et pas nécessairement parce qu’ils ont un

projet à réaliser.

Un autre frein est lié à la perception de l’apprentissage. On considère que

l’apprentissage est la voie de la deuxième chance, après la formation initiale. Si

l’apprentissage était considéré comme une voie de formation comme les autres, le jeune

choisirait simplement entre plusieurs formules, en fonction de son projet, de ses

capacités d’apprentissage cognitives. À ce moment-là, les différents dispositifs seraient

sur un pied d’égalité.

REUNION : M. Serge Payet, Directeur de l’OPCAREG

On peut s’interroger longtemps sur l’apprentissage, mais ce qui est important à mon

avis, c’est surtout ce que l’on fait de l’apprentissage et de l’alternance. Pour la Réunion,

pour 8000 jeunes qui arrivent sur le marché de l’emploi, on a signé 3500 contrats

d’apprentissage et 1 500 contrats en alternance (qualification ou orientation). Le

problème, comme partout ailleurs, est le taux de rupture qui reste un peu plus élevé

qu’en métropole. Nous avons un souci d’égalité d’accès à ces contrats et nous voyons

d’autre part que ces contrats (surtout l’alternance) sont souvent des moyens de "copier"

l’Éducation nationale. Parce que la part du diplômant est de l’ordre de 80 % à la

Réunion, alors que les CQP et les validations sur les conventions collectives

représentent près de 50 % en métropole. Il y a donc lieu de développer les contrats de

qualification professionnelle. Nous avons observé un succès du contrat d’orientation.

Ce contrat permet au jeune, non seulement de s’orienter, mais d’intégrer l’entreprise et

nous pensons qu’il représente une voie privilégiée d’insertion durable. Cela a été un peu

contesté par M. Hermine, mais je vais vous démontrer qu’à la Réunion, c’est le cas. Les

contrats en alternance affichent un taux de réussite de 82 %.

On dit que les possibilités de développement sont importantes, mais nous sommes déjà

arrivés à un niveau élevé de contrats, compte tenu du faible tissu économique. Le taux

de rupture est élevé : nos enquêtes montrent que ces ruptures sont dues pour 25 % à

Page 171: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 171

l’entreprise (dont la moitié sont des disparitions de l’entreprise) et d’autre part aux

jeunes et à leur représentation du travail. Nous allons donc essayer d’y remédier.

Certaines démarches sont déjà en place depuis 1993.

GUYANE : Mme Cécile Minne Ebelle Dim, Directrice du CFA

L’apprentissage en Guyane, c’est un CFA sur Cayenne, qui accueille tous les jeunes de

l’île de Cayenne jusqu’à Kourou, et une annexe sur St Laurent qui accueille les jeunes

du fleuve. Le CFA de la Guyane forme à une vingtaine de métiers, essentiellement ceux

tournés vers l’artisanat et l’industrie et quelques-uns vers les services, mais très peu. Cet

effectif est en légère progression mais reste encore insuffisant, compte tenu des

capacités d’accueil du CFA et au regard du potentiel d’entreprises susceptibles

d’accueillir des apprentis en Guyane.

Ce déficit est dû en premier lieu à un problème d’image, davantage véhiculé par les

adultes que par les jeunes. Les jeunes n’ont pas forcément l’impression de déchoir

lorsqu’ils se tournent vers l’apprentissage. Il faut distinguer les formations qui ne sont

accessibles que par l’apprentissage, qui vont donc résulter d’un choix du jeune.

(pharmacie, coiffure, esthétique), des formations qui sont en revanche un pis-aller pour

un jeune qui n’a pas réellement de projet professionnel. Malgré tout, les contrats en

alternance sont en augmentation, tant en apprentissage qu’en contrat d’orientation ou de

qualification. Le contrat d’orientation nous sert à raisonner en termes de filières, c’est-

à-dire à accueillir le jeune et ensuite à le prendre éventuellement en apprentissage.

Le faible niveau d’entrée des jeunes quand ils arrivent en apprentissage est aussi un

frein au développement de l’alternance. Cela peut aller de l’illettrisme à un certain

nombre de carences cognitives qui peuvent être rattrapées par un programme adapté.

Les difficultés d’insertion sociale jouent aussi un rôle, puisqu’on ne peut pas extraire le

jeune de son environnement global. Beaucoup de jeunes sont un peu livrés à eux-

mêmes. Ils n’auront pas forcément l’appui de leurs parents, surtout pour les primo

arrivants qui vont cumuler les handicaps.

Nous nous heurtons également à la difficulté à maintenir un apprentissage réel dans les

communes de l’ouest, et encore plus dans les communes de l’intérieur. Les jeunes qui

entrent en apprentissage originaires de St-Georges ou de Maripasoula sont souvent

Page 172: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 172

marginaux. Autant à St Laurent nous avons accueilli une trentaine de personnes, autant

sur St Georges nous n’avons que deux apprentis.

Nous avons également un déficit d’équipement dans le CFA, puisque bien que nous

formions à une vingtaine de métiers, nous avons encore beaucoup d’ateliers qui ne sont

pas équipés. Ce qui pose le problème de l’enseignement de remédiation. Nous sommes

fortement tournés vers l’artisanat mais, les entreprises qui accueillent les jeunes sont

souvent peu équipées et nous devrions normalement pouvoir donner un enseignement

de remédiation.

PERSPECTIVES

METROPOLE : M. Noël Terrot, Directeur du CUIDEP

Nous allons écouter deux exposés sur l’amont de la formation. Ils vont aborder le

problème de la rupture. Comment faire pour que le jeune engagé en alternance soit bien

orienté, ne se décourage pas et choisisse la mesure qui lui convient le mieux ? Le

représentant de la Réunion va nous parler des modules préparatoires à l’entrée dans

l’apprentissage. Mme Mine Ebelle Din fera un exposé sur la construction du lien

tutoral. Ensuite suivront deux exposés sur les formations elles-mêmes. Mme Riga

interviendra sur le séquençage, une série de mesures, de modules d’unités capitalisables

dans le cadre du Programme National d’Individualisation que la Guadeloupe a adapté.

Et enfin, M. Laport interviendra sur le PEDAC (Pacte d’entreprise pour le

développement d’activités complémentaires).

REUNION : M. Serge Payet, Directeur de l’OPCAREG

Le travail en amont

Si nous avons porté nos efforts sur l’amont, c’est que nous avions des informations en

aval. Depuis 1993, nous avons mis au point le dispositif tutoral qui ne concerne pas

seulement la formation de tuteur, mais tout un dispositif qui intervient sur la prévention,

la gestion, l’accompagnement mais aussi sur une évaluation indépendante. Cela nous a

donné des précisions sur l’importance des ruptures et permis de faire une gestion

prévisionnelle, comme dans le secteur de la finance. Nous avons une connaissance des

causes des ruptures, par secteur. À partir de ces données, nous nous sommes rapprochés

de l’ANPE, partenaire efficace et d’un réseau d’organismes de formation et de systèmes

Page 173: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 173

d’information des jeunes. Nous avons construit le Module préparatoire au contrat en

alternance (MPCA). Il date de 99/2000. Il s’agit d’un module de 4 mois, avec des

périodes en entreprise. Il va répondre à un ensemble de causes que nous avons repérées

grâce au dispositif tutoral.

L’un des premiers points est la connaissance du monde économique. Ensuite, le module

préparatoire va traiter de l’accompagnement dans l’élaboration du projet professionnel

et surtout concerne l’apprentissage de nouvelles attitudes et comportements pour

augmenter les chances d’insertion professionnelle. On débute avec des jeunes en

difficulté, qui vont être préparés avant d’être envoyés deux semaines en stage en

entreprise, de manière à se faire connaître. Nous les dynamisons dans leur recherche

emploi.

L’OPCAREG, l’ANPE et les organismes de formation ont fait de gros efforts et la

Région a financé la plus grande partie de ce module. On s’est imposé un taux de

réussite dès le départ, d’au moins 60 %. J’ai assisté à une réunion avec ces jeunes en

compagnie de M. Paoli, de l’ANPE au Port. J’ai vu des jeunes gens transformés. Ils

nous ont présenté ce qu’ils avaient fait. Le groupe était géré par deux stagiaires ; douze

absents manquaient parce qu’ils avaient déjà été embauchés. Mais le dispositif est

extrêmement difficile pour les organismes de formation. Sur les trois qui font partie de

l’expérimentation, un obtient de très bons résultats, un autre des résultats moyens et le

dernier est loin de l’objectif visé. Ce qui est significatif, c’est la transformation de ces

jeunes par rapport à leur entrée en stage. Selon mon expérience, nous allons avoir des

ruptures de contrats en alternance, parce que ces stagiaires ne suivront pas la totalité de

la formation et seront embauchés en CDI avant. Ce sera bien des ruptures de contrats,

mais des sorties positives.

Dernier point, 95 % des contrats d’orientation vont jusqu’à leur terme. La rupture se

produit ensuite mais, il y a très peu de rupture en cours de contrat d’orientation. Si on

couple MPCA et contrat d’orientation, on arrive à traiter un grand nombre de difficultés

en amont.

Page 174: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 174

GUYANE : Mme Cécile Minne Ebelle Dim, Directrice du CFA

Le lien tutoral

Au-delà de la rupture objective due à des difficultés financières de l’entreprise, une

baisse de l’activité ou un comportement du jeune, souvent la rupture du contrat

d’apprentissage va être un symptôme d’un mal-être. Prendre le problème le plus en

amont possible est certainement la solution la plus efficace. Nous avons mis également

en place des classes préparatoires à la vie professionnelle, dont nous espérons recueillir

les fruits dès cette année. Ceci étant, tout l’accompagnement pendant la formation du

jeune est important, et notamment la construction du lien entre les deux pôles de

formation : le CFA qui reste un peu théorique et l’entreprise qui, au-delà de son rôle

pédagogique, poursuit ses objectifs de production.

Il y a trois ans déjà, nous avons mis en place une formation pour les enseignants du

CFA. Le code du travail nous fait l’obligation de suivre le jeune sur son lieu de travail

dans l’entreprise. Les enseignants qui interviennent chez nous sont pour la plupart des

vacataires qui n’interviennent que quelques heures par semaine et avec lesquels il est

donc difficile de construire un réel projet pédagogique. Il nous a semblé important de

les remobiliser sur la spécificité de l’alternance, c’est-à-dire de les aider à recueillir

dans l’entreprise le vécu du jeune pour le faire remonter vers le CFA et le prendre en

compte dans la démarche pédagogique. Par ailleurs, ils doivent assister le chef

d’entreprise dans son rôle de pédagogue, puisqu’il n’est pas préparé à cela. Cette

formation, qui s’est déroulée deux années de suite, a permis aux enseignants du CFA de

construire un certain nombre de documents-supports de l’alternance, notamment des

tableaux d’objectifs. Ils sont présentés au chef d’entreprise et lui précisent notamment,

ce que l’on attend de lui, quels sont les objectifs de formation, quels sont les acquis que

le jeune doit maîtriser à l’issue de sa formation. C’est important, parce que lorsque le

chef d’entreprise signe un contrat d’apprentissage, il ne connaît pas le référentiel et ne

sait pas à quel niveau de formation il doit amener le jeune, ni les gestes professionnels

qu’il doit lui montrer.

Dans le deuxième volet de cette formation, il s’agissait de concevoir la fiche navette qui

permet au jeune de faire remonter vers ses enseignants du CFA les points qu’il a

abordés en entreprise sur la base des propositions de l’enseignant. Le professeur

référent ou professeur de liaison est généralement le professeur d’enseignement

Page 175: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 175

professionnel qui va, comme le demande le code du travail, effectuer des visites en

entreprise pour observer comment se déroule le contrat. C’est très important, parce que

souvent cela permet de désamorcer des situations de crise, de repérer un malaise dans

l’entreprise. Le patron se sent plus assisté, plus épaulé, plus accompagné, parfois il a

l’impression d’être un petit peu surveillé, mais, généralement cela se passe bien. Nous

avons pu constater qu’avec cette démarche, les relations avec les chefs d’entreprise

étaient plus soutenues, plus fructueuses. Une réelle relation de confiance s’est

s’instaurée, si bien que maintenant nous avons de nombreux appels de chefs

d’entreprise qui s’interrogent ou qui s’intéressent au déroulement de la formation, ce

qui est nouveau.

C’est l’exploitation de ces documents de liaison qui a permis de réduire sensiblement le

taux de ruptures. Nous espérons reconduire ce programme de formation pour les

enseignants avec l’aide de l’Assemblée permanente des chambres de métiers qui a mis

en place des programmes de formation très intéressants. Mais surtout, nous avons en

projet, à partir de janvier, après la période des recrutements en apprentissage,

d’organiser des réunions de formation sectorielles qui permettront non plus de former

les enseignants, mais de former les maîtres d’apprentissage à leur rôle de pédagogues et

à la construction de ce lien entre le CFA et l’entreprise. Ce n’est pas très original

comme démarche, la plupart des CFA ont déjà initié ce genre de projet, et l’appliquent

depuis de nombreuses années. Mais pour nous, jeune CFA, c’était quelque chose de tout

à fait nouveau et qui déjà porte des fruits.

METROPOLE : M. Noël Terrot, Directeur du CUIDEP

Vous savez, si tous les CFA maintenaient réellement le lien, ce serait une avancée

considérable.

GUYANE : Mme Cécile Minne Ebelle Dim, Directrice du CFA

C’est vrai que c’est très variable, d ‘un métier à un autre. Pour tous les métiers du

bâtiment par exemple, c’est souvent très difficile de joindre les patrons qui sont sur les

chantiers. Néanmoins, les téléphones mobiles nous facilitent désormais la tâche.

Page 176: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 176

MARTINIQUE : M. Patrick Laport, Directeur du CFA

Le PEDAC

Le PEDAC (Pacte d’entreprise pour le développement d’activités complémentaires) n’a

rien à voir avec l’apprentissage mais, il s’inscrit dans le cadre des contrats d’alternance

puisqu’il s’agit d’un contrat de qualification. Le PEDAC est né du constat que très

souvent, les chefs d’entreprise ont des projets qu’ils n’arrivent pas à réaliser, parce

qu’ils n’ont pas le temps ou pas le personnel. À côté de cela, nous avons des personnes

en situation de chômage qui voudraient créer leur entreprise mais qui n’ont pas les

moyens en termes de gestion, de management. Deuxième constat, il y a l’idée de

structurer et d’organiser la création d’entreprise pour essayer d’en éviter la mort

prématurée.

Comment peut-on passer d’un projet à la concrétisation d’entreprise, en s’appuyant sur

le dispositif contrat d’orientation ? Le PEDAC a été créé au départ par l’AGEFOS

PME Martinique avec le concours de la CGPME et l’université Antilles Guyane, le

CNAM et des chefs d’entreprises. On a d’un côté un chef d’entreprise qui a un projet,

de l’autre une personne au chômage qui a aussi un projet. On va essayer de faire en

sorte que ces deux personnes puissent se rencontrer et créer une activité

complémentaire ou différente. A partir du projet, un contrat de qualification est passé

entre le jeune et l’entreprise. À ce contrat, vient s’adjoindre une convention de mission

qui fixe les objectifs assignés au jeune. Ce projet PEDAC s’accompagne d’une

formation d’un an en contrat de qualification.

Pour entrer dans ce dispositif, un niveau Bac + 2 est nécessaire. Les candidats passent

un test de personnalité (Hermann) qui permet de savoir si leurs qualités sont

compatibles avec la création d’entreprise. Ensuite, la personne en contrat de

qualification va suivre, pendant un an, la formation du DUCEM (Diplôme Universitaire

de Créateur de Management d’Entreprise), de niveau Bac + 3. Cette formation doit

commencer au 1er janvier 2001. Elle est axée sur la gestion et le management adaptés à

l’environnement de l’entreprise d’accueil. Le contenu de l’enseignement est décidé par

les différents acteurs cités tout à l’heure. Cette formation est complétée par un suivi

personnalisé des deux acteurs du projet (entreprise et étudiant) et par un consultant qui

va essayer de faciliter la concrétisation de ce projet. Quand le projet sera devenu réalité,

Page 177: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 177

après la formation d’un an, le consultant suivra encore le projet pour lui éviter de

mourir prématurément.

Plusieurs hypothèses peuvent se présenter :

- Le chef d’entreprise décide de créer l’activité complémentaire. Le diplômé aura alors

un contrat de travail et sera chargé de mettre en œuvre ce projet.

- On crée une structure totalement différente. Le chef d’entreprise décide d’être

actionnaire principal de cette nouvelle structure, le diplômé actionnaire minoritaire et

salarié de cette structure.

- Le chef d’entreprise décide de parrainer uniquement le nouveau projet et de laisser

l’étudiant le développer.

Néanmoins, un problème de tutorat s’est posé en raison du niveau Bac + 3. Ce

problème va être régularisé : on étudie actuellement la possibilité de la VAP pour les

chefs d’entreprise qui accueillent ces jeunes.

GUADELOUPE : Mme Carole Riga, Déléguée régionale à l'ingénierie de formation,

rattachée à la DAF (Direction de l'agriculture et de la Forêt)

Le séquençage

Il s’agit de définir des séquences de formation. J’illustrerai mes propos dans le secteur

de l’agriculture où les diplômes sont délivrés par unité de contrôle capitalisable (UC).

Pour obtenir le diplôme, il faut capitaliser, selon les niveaux, de 8 à 12 UC.

Le premier objectif du séquençage est d’améliorer la qualité de la formation dispensée.

Le deuxième est de ne pas utiliser les référentiels en l’état. Il faut faire un travail

prospectif afin de construire un ruban pédagogique cohérent, à partir d’un certain

nombre de critères. Chaque diplôme est balisé par un référentiel avec des UC qui

déclinent les différents objectifs, principaux, intermédiaires et opérationnels. Ce travail

de réflexion est entrepris par l’équipe pédagogique qui doit restituer à la fin de ses

travaux tous les résultats des investigations faites en amont. L’objectif principal est

décliné en objectifs intermédiaires de plus en plus fins pour arriver aux objectifs

opérationnels. Chaque fois, il faut définir les stratégies à mettre en place pour asseoir

l’acte d’apprentissage. Quels sont les intervenants, quels sont les outils et les ressources

éducatives nécessaires ?

Page 178: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 178

Il faut donc faire un inventaire des ressources éducatives, impliquer tous les acteurs,

tous les partenaires dont il faut définir les rôles respectifs. Ensuite, ces ressources

peuvent être disponibles en auto-formation. Car la partie séquençage intéresse toutes les

UC des enseignements généraux (mathématiques, français, économie) mais aussi la

partie Entreprise, dans la mesure où le maître d’apprentissage a un rôle défini qui a été

négocié avec l’ensemble des formateurs. L’apprenti a une fiche de "tâches à faire". Au

retour de l’entreprise, l’équipe pédagogique doit réaliser avec le maître d’apprentissage,

une validation des acquis. Et dans la partie séquence, après évaluation, on doit mettre en

place une médiation. C’est un système de va et vient entre l’acte pédagogique en centre

de formation et l’apprentissage chez le tuteur.

Le séquençage n’est qu’une partie d’une grande réflexion qui a commencé au niveau du

ministère de l’agriculture depuis 1997, mais ce n’est pas le seul thème de réflexion. Il

faut savoir qu’il est relié à des ateliers en amont, notamment sur l’accueil (atelier

d’accueil, livret d’accueil). L’accueil doit être compris au sens large, c’est-à-dire

présenter la structure de l’établissement, les modes de validation, etc.

Cette partie séquence est aussi à relier au positionnement qui ne devrait pas se limiter

aux pratiques actuelles. Nous réfléchissons actuellement à des méthodes pour améliorer

le positionnement. Et ce n’est qu’ensuite, que nous passerons au séquençage. Une autre

équipe s’intéresse au suivi en entreprise et au suivi post formation, jusqu’à l’intégration

du stagiaire.

Voilà le cadre du PNI (Programme national d’individualisation) qui est spécifique au

ministère de l’agriculture et auquel la Guadeloupe a adhéré. C’est une expérience que

nous allons partager avec d’autres secteurs (artisanat…) pour voir dans quelle mesure

on peut échanger les outils et progresser dans la démarche.

Il faut préciser que tout cela devrait déboucher sur la mise en place d’un centre de

ressources, avec des partenaires ciblés et des structures repérées à l’avance, pour offrir

aux stagiaires des possibilités d’auto-formation.

Page 179: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 179

DébatsDébatsDébatsDébats

REUNION : Mme Dominique Leccia, Conseillère technique au Comité de

coordination des programmes régionaux d’apprentissage et de formation

professionnelle continue

Il me semble qu’il y a un certain nombre de facteurs qui auront à terme un impact sur le

développement de l’apprentissage ou la configuration de l’apprentissage.

Le premier facteur est le taux de croissance qui permet la création d’emplois Cette

situation semble perdurer avec une pénurie d’emploi dans certains secteurs d’activité.

Le deuxième facteur, et plus particulièrement dans les DOM, se situe dans les limites

des financements régionaux, parce que les financements de l’apprentissage relèvent a

minima à hauteur de 80 % des conseils régionaux et qu’on constate une faiblesse de la

taxe d’apprentissage.

Le troisième facteur est la généralisation de l’alternance dans l’ensemble des dispositifs

de formation et un tissu économique qui ne peut plus trop absorber les publics

concernés.

Le dernier facteur est l’application des 35 heures, avec une moindre attraction des

contrats d’apprentissage tant du point de vue des employeurs que du point de vue des

apprentis.

Voici quelques éléments de diagnostic. Avec la nécessité pour l’Éducation nationale de

se repositionner, notamment en matière d’enseignement professionnel et cela donnera

des configurations différentes pour l’apprentissage.

MARTINIQUE : M. Patrick Laport, Directeur du CFA

A la Martinique, il y a une dizaine d’année, 3000 jeunes sortaient du système scolaire

sans qualification. Aujourd’hui, 800 jeunes sont concernés et ceci entraîne une baisse de

la pression de la demande auprès des entreprises. Il y a 3 ans, nous avions du mal à

trouver des entreprises, aujourd’hui la situation s’est inversée, nous ne trouvons plus de

jeunes. Notre situation est donc particulière.

Page 180: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 180

Je voudrais réagir aussi sur la généralisation de l’alternance. J’ai dit que 1500

entreprises recrutaient des jeunes en alternance. Nous nous rendons compte que ce sont

ces mêmes entreprises qui sont sollicitées par l’Éducation nationale dans le cadre des

stages en entreprise en milieu scolaire. Il y a un phénomène de saturation et l’entreprise

a tendance à accueillir un scolaire qu’elle ne rémunère pas plutôt que de payer un jeune

apprenti. À terme, elle peut, peut-être, découvrir que la gratuité du scolaire n’apporte

pas à l’entreprise les résultats escomptés.

Réponse d’un intervenant dans la salle

Ce phénomène de saturation existe aussi dans les entreprises artisanales. Le besoin en

personnel n’est pas forcément extensible. Quand l’entreprise a formé un jeune et l’a

embauché, il arrive que cette entreprise ne prenne plus d’apprenti, le temps d’absorber

le recrutement qu’elle vient d’effectuer. Il y a donc nécessité de renouveler le vivier

d’entreprises partenaires. L’année dernière, un certain nombre d’agréments de

formations ont été délivrés pour finalement un taux d’augmentation des contrats signés

qui n’était que de 20 %.

MARTINIQUE : M. Christian Cayol, Président de la Chambre des métiers

Le mode de financement de l’apprentissage est très stressant car il est lié au nombre

d’apprentis et, nous ne sommes pas maître des effectifs. Il y a une fluctuation de

l’activité économique, ce qui influe sur l’effectif. On donne beaucoup de missions aux

chambres consulaires, notamment sur la gestion de l’apprentissage, en tant

qu’organisme décisionnaire et finalement sans les moyens correspondants. Il est

important de voir le mode de financement parce qu’on n’est pas maître de la situation,

surtout dans les DOM.

Malgré les réformes qui ont ouvert l’apprentissage au service public, c’est encore le

même tissu de petites entreprises qui jouent le jeu de l’apprentissage. Parce que les

entreprises publiques dans les DOM, à la Martinique notamment, il n’y en a pas et

depuis les emplois jeunes, c’est devenu plus difficile. Les chambres des métiers ont

construit des CFA, alors que les financements européens n’existaient pas et elles

remboursent encore les emprunts. Quand on demande aux organismes gestionnaires de

Page 181: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 181

consacrer 10 % de leurs ressources propres à l’apprentissage, ce n’est pas évident. La

baisse des effectifs génère beaucoup de déficits et de difficultés.

Il existe aussi un problème social. Comment voulez-vous préserver l’équilibre vis-à-vis

des enseignants ? On a des personnels qui travaillent dans le stress parce que du jour au

lendemain, on les menace de fermeture de sections. Ils savent qu’ils peuvent être

remerciés à tout moment. Comment bien travailler dans ces conditions ?

La notion d’information est aussi un élément important. Il faut aider les chefs

d’entreprise dans leur tâche de recrutement et informer les parents et les jeunes. Les

jeunes n’ont aucun contact avec l’entreprise et ne la connaissent pas. Ils formulent des

vœux sans idée précise sur le métier choisi et c’est une des causes de rupture de contrat.

Il est important aujourd’hui de mettre des modules de préapprentissage, si on veut avoir

des jeunes et des entreprises motivés.

REUNION : M. Guy Lemarie, Délégué à l'ANPE

Un des points importants est la question de la rupture et des échecs. On a mis en place

quelques expériences à la Réunion, mais j’aimerais savoir si d’autres types

d’expériences ont été menées pour lutter contre ce type d’échecs ?

L’apprentissage dans les établissements publics, même s’il est minoritaire, peut exister

puisque nous avons embauché au 1er octobre un apprenti à l’ANPE de la Réunion.

Je m’intéresse aux difficultés avec les employeurs. Deux entreprises m’ont dit qu’elles

avaient eu des ruptures de contrat dues à des problèmes de comportement des apprentis,

qu’elles ont ensuite été condamnées aux prud’hommes et donc qu’elles ne souhaitaient

plus entendre parler de l’apprentissage. Je voudrais savoir si ce sont des cas courants ou

résiduels ?

D’autre part, quels sont les éléments du système, malgré toutes les difficultés qui ont été

signalées, qui ont pu faire que nous sommes passés de 4412 contrats en 97 à 5403 en

1999 à la Réunion.

MARTINIQUE : M. Christian Laport, Directeur du CFA

Concernant les ruptures de contrat, nous avons eu un taux de rupture identique aux

autres CFA de France et de Navarre. Pour réduire ce taux de 6 points, nous avons mis

en place un système pour anticiper la rupture. Un certain nombre de facteurs expliquent

Page 182: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 182

la rupture et il ne faut pas constater la rupture, mais la prévoir. L’absentéisme,

l’indiscipline sont par exemple des comportements qui montrent que ce jeune a un

projet professionnel sans rapport avec le métier choisi ou que nous n’avons pas la bonne

entreprise pour le bon jeune. Mais si le contrat est déjà signé, on ne peut pas faire grand

chose. Pour anticiper, on va observer ces clignotants et on va intervenir dans

l’entreprise. L’intervention se fait avec l’inspecteur de l’apprentissage, un membre de

l’Éducation nationale, un du CFA (moi-même, un psychologue ou un enseignant) et

l’on essaie de trouver une solution avant d’arriver à une situation de non-retour. On a

même fait intervenir un inspecteur du travail dans une entreprise où il y avait un

problème. On réduit le taux de rupture de 6 points parce qu’on est intervenu avant que

le conflit soit trop dur. Vous avez parlé des prud’hommes, c’est un problème à la fois

simple et compliqué. Quand une entreprise a un apprenti, si elle décide après les deux

mois d’essai de rompre le contrat, il y a deux solutions : ou avoir l’accord de l’apprenti

ou les prud’hommes, contrairement à un contrat de travail classique où l’on peut

licencier pour faute professionnelle. Cela n’existe pas dans l’apprentissage. Si le chef

d’entreprise rompt le contrat sans l’accord de l’apprenti, il est cité aux prud’hommes et

sera automatiquement condamné. Il y a des cas exceptionnels comme la violence…

REUNION : : M. Bernard Sabban, CSFOR (Chambre syndicale des organismes de

formation)

Je voulais connaître le taux de rupture.

MARTINIQUE : Réponse d’un intervenant

30 % en moyenne, qu’il s’agisse de contrats en alternance ou des contrats

d’apprentissage. On peut discuter sur l’évolution de ces taux qui peuvent avoir baissé

dans certains cas jusqu’à 24 %.

GUADELOUPE : Réponse d’un intervenant

Chez nous, le taux avoisine les 13 à 14 % mais il faut le ramener à l’effectif total des

apprentis, car il faut compter plus d’un millier de jeunes dans les secteurs de l’artisanat

et dans l’agriculture autour d’une centaine. Il faut toujours ramener le taux net par

rapport à un effectif qui est réduit. Dans l’agriculture, on rencontre des choix vraiment

Page 183: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 183

motivés ; on ne choisit pas ce secteur par hasard ; l’agriculture est toujours synonyme

d’un certain passé.

REUNION : M. Alix Sery, DTEFP

Au dernier pointage que nous avons fait, nous avions entre 10 et 12 % de ruptures

constatées et j’insiste sur ce terme, parce que la rupture n’est pas toujours constatée

officiellement. En revanche, nous avons pu remarquer que les autres contrats en

alternance enregistraient moins de ruptures que les contrats d’apprentissage. La rupture,

une fois enregistrée à la DTEFP, est comptabilisée dans les statistiques. Cela ne signifie

pas forcément que le jeune ne va pas terminer sa formation parce que le CFA a le

devoir, selon le code du travail, de faciliter sa réintégration dans une autre entreprise.

GUYANE : M. Michel Manguer, Direction du travail

Je voulais rappeler que le contrat d’apprentissage est un contrat de travail, donc régi par

un certain nombre de textes du code du travail. L’apprentissage est un module

d’insertion permettant de pérenniser un emploi et allant vers un emploi stable.

Comment se passe tout ce cheminement d’insertion vers un emploi ?

GUYANE : M. José Euryale, Inspecteur de l’Éducation nationale

Juste une précision, au niveau de la Guyane, il y a des sections d’apprentissage dans les

lycées en niveau IV et III.

En raison de difficultés techniques, nous n’avons pu obtenir la version intégrale des

débats (Merci de vous reporter à la synthèse).

Page 184: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 184

Atelier du 3/10/00

LA FORMATION ET LES NOUVELLESLA FORMATION ET LES NOUVELLESLA FORMATION ET LES NOUVELLESLA FORMATION ET LES NOUVELLES

TECHNOLOGIES DE L’INFORMATIONTECHNOLOGIES DE L’INFORMATIONTECHNOLOGIES DE L’INFORMATIONTECHNOLOGIES DE L’INFORMATION

ET DE LA COMMUNICATIONET DE LA COMMUNICATIONET DE LA COMMUNICATIONET DE LA COMMUNICATION

Animateur :

Mme Valérie Hellouin, Chargée d'études au Centre INFFO

Rapporteur :

Mme Elisabeth Caristan, Chargée de mission

à l'AGEFMA-CARIF Martinique

Intervenants

GUADELOUPE :M. Hubert Salcède, Responsable de la formation professionnelle au Conseil régional

GUYANE :M. Jean-Raymond Passart, Formateur à l'AFPA

MARTINIQUE :Mme Myriam Samathay, Secrétaire générale de l'AGEFMA

REUNION :M. David Rivière, Chef de projet RESINTER

DébatsMARTINIQUE :Mme Elisabeth Caristan, Chargée de mission CARIFMme Lucienne de Montaigne, Déléguée académique à la formation continue

Page 185: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 185

LA FORMATION ET LES NOUVELLESLA FORMATION ET LES NOUVELLESLA FORMATION ET LES NOUVELLESLA FORMATION ET LES NOUVELLES

TECHNOLOGIES DE L’INFORMATIONTECHNOLOGIES DE L’INFORMATIONTECHNOLOGIES DE L’INFORMATIONTECHNOLOGIES DE L’INFORMATION

ET DE LA COMMUNICATIONET DE LA COMMUNICATIONET DE LA COMMUNICATIONET DE LA COMMUNICATION

Des difficultés techniques n’ont pas permis l’enregistrement intégral des interventions

et débats de cet atelier. Vous trouverez ci-après la transcription des éléments dont nous

avons pu disposer et les notes et documents de travail utilisés pour cette rencontre ou

pour sa préparation.

METROPOLE : Mme Valérie Hellouin, Chargée d’études au Centre INFFO

Depuis 3 ans, je suis manager d’un projet européen ADAPT-bis, intitulé Internet :

nouveaux horizons pour la formation . C’est grâce à ce projet que j’ai le plaisir d’être

parmi vous aujourd’hui, car il m’a permis d’étudier 26 expériences de formation via

Internet ou Intranet en Europe, en 1998-1999 et 12 nouvelles expériences européennes,

d’ici juin 2001. Les pays explorés ont été jusqu’à présent : l’Allemagne, l’Espagne, la

Finlande, la France, l’Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.

La Martinique suit nos débats par visioconférence et nous les remercions de leur

présence virtuelle parmi nous.

GUYANE : M. Jean-Raymond Passart, Ingénieur à l'AFPA

Adapter les NTIC au contexte guyanais

- une population dans un contexte pluriethnique et pluriculturel avec plus de 50% de la

population âgée de moins de 25 ans ;

- une région dans un contexte géographique forestier qui s’étend sur plus de 91 000 km2

avec des communes fortement enclavées ;

- une économie dans un contexte peu industrialisé, avec une activité essentiellement

centralisée sur le littoral et le chef lieu ;

- une infrastructure en télécommunication émergente mais qui ne couvre pas encore

l’ensemble du territoire.

Page 186: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 186

Tous ces contextes font de la Guyane un chantier idéal qui justifie en tous points les

cadres d’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication

: rompre l’isolement, aménager le territoire, rendre accessible à tous la formation et

l’information. C’est dans cette volonté d’un rééquilibrage du droit à l’éducation, à la

formation et au développement pour l’ensemble du territoire que la Région Guyane

s’inscrit. Le cadre d’utilisation des NTIC, et plus précisément de la FAD (Formation à

distance), reste sur la Guyane très sporadique :

- L’AFPA Guyane l’utilise, dans le cadre d’échanges avec la direction technique de

l’AFPA nationale, comme centre de ressources pour les référentiels de formation, les

contenus de cours et les documentations techniques.

- L’IFODES a très récemment mis en place une formation de management qui utilise la

FAD.

Les vrais enjeux portent sur les catégories de publics formés et leur nombre.

J’ai souhaité traiter dans cet atelier la problématique des nouvelles technologies de

l’information et de la communication comme support à la formation professionnelle

dans un environnement social pluriculturel et pluriethnique.

En effet, au-delà des techniques et des technologies à mettre en place pour l’utilisation

des nouvelles technologies, il me paraît important de préciser qu’il convient de

considérer les NTIC comme un outil à disposition d’objectifs dont l’individu doit se

trouver au centre de nos préoccupations. Nous disposons aujourd’hui d’outils tels

qu'Internet, et plus généralement les industries adjacentes comme les

télécommunications, le multimédia qui ont une très forte croissance dans les régions

développées du monde. Ce phénomène devrait profiter également aux régions et pays

isolés qui émergent, sous réserve que l’approche globale de ces nouvelles technologies

et de ces nouveaux marchés soient adaptée au contexte. Sinon, il risque de se produire

une reconduction du phénomène de dépendance, avec les handicaps visibles aujourd’hui

de non adéquation des produits à nos environnements et à nos populations. Les

nouvelles technologies ouvrent potentiellement les marchés en réduisant les distances et

en abaissant les frontières ; c’est une opportunité que nous devons saisir et nous

approprier.

Pourquoi cette préoccupation ? Au dernier congrès de l’Unesco sur les "nouvelles

technologies de l’information et de la communication", on a constaté le fossé qui se

Page 187: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 187

creuse entre les pays industrialisés et ceux en voie de développement et au sein même

des pays industrialisés, entre les individus, selon leur environnement social. Il ne

dépend que de nous, et des approches que nous aurons de la mise en place de ces

nouvelles technologies pour reproduire ou non dans nos départements, ce phénomène

que nous constatons au niveau mondial.

La formation et les NTIC

En matière de formation, les politiques sont claires et les orientations affichées :

- individualisation des parcours de formation,

- multiplication des APP (Ateliers pédagogique personnalisés),

- élargissement du catalogue des formations proposées,

- élargissement des catégories des publics formés.

Là encore les NTIC vont pouvoir servir de support à des formes de formations

permettant de répondre à nos besoins : la formation ouverte à distance (FOAD), la Web

formation, la formation collaborative, l’accès à des centres de ressources, des ateliers

flexibles de formation.

Au-delà de ces préoccupations d’ordre politique, il convient de mettre en place les

infrastructures et les équipements nécessaires comme support aux NTIC. Les besoins et

les objectifs sont en partie définis, reste à savoir comment et quelle stratégie adopter

pour mettre en place ces outils pour qu’ils puissent être efficaces dans notre

environnement culturel, ethnique et géographique. Pour répondre et élaborer des

stratégies, je vous propose que nous nous interrogions sur les mutations nécessaires à

l’approche des NTIC, dans le domaine de la formation professionnelle à distance.

La nécessaire mutation des organismes de formation

Un système de NTIC présente plusieurs caractéristiques. C’est un système informatique

qui gère des données au sein d’une architecture distribuée. Le cœur de cette architecture

est un réseau qui véhicule des flux engendrés par les échanges de données, où il y a une

transparence totale de la localisation des données et des traitements, ce qui implique en

particulier, que le réseau soit dimensionné pour garantir la brièveté du temps de transit.

Autour du système informatique, il y a non pas un homme mais une organisation

humaine ; c’est un système collaboratif, hiérarchisé, cloisonné et cependant coopérant.

La dimension multimédia par le système informatique permet d’accélérer la

compréhension, mais aussi d’améliorer la collaboration des individus. Nous portons un

Page 188: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 188

intérêt tout particulier à cette collaboration, afin d’adapter les approches aux divers

publics.

Dans cet environnement, la formation à distance représente une nouvelle approche

conceptuelle, qui ne répond plus à la règle des trois unités de la formation présentielle :

unités de lieu, de temps et d’action. La formation à distance suppose une mise en œuvre

informatique des processus cognitifs permettant de palier l’absence de la médiation

d’un formateur.

Ce sont les organismes de formation qui, en premier lieu, devront s’adapter et

s’approprier ces nouvelles techniques pour la conception de nouveaux contenus et de

nouveaux scénarios. Les formateurs devront maîtriser les outils permettant de créer des

didacticiels. Ils devront aussi acquérir de nouvelles compétences leur permettant de

transcrire, sur support informatique, l’ensemble du processus de formation, en tenant

compte des nouveaux concepts tels que le multimédia.

Grand nombre d’expérimentations ont été et sont réalisées. Les organismes doivent se

préparer à cette mutation en profitant des expériences des centres qui se sont déjà

engagés dans cette démarche. Il est à noter que la formation à distance ne peut couvrir

l’ensemble du processus de la formation professionnelle. Des formations mixtes, qui

combinent le présentiel et la distance, seront alors proposées pour répondre aux

exigences pédagogiques du savoir, savoir-faire et savoir-être.

L’individu au centre du système de formation

L’individu que nous avons placé au centre de notre système est en Guyane multiple à

plus d’un titre :

- culturellement, il peut avoir une approche difficile des nouvelles technologies,

- de niveau scolaire très hétérogène, ce qui implique un large éventail des besoins en

formation,

- plusieurs langues sont utilisées, ce qui nécessite une adaptation des outils.

De plus l’individu va devoir s’approprier un outil informatique qui ne constitue pas une

finalité dans son processus de formation, dont l’objectif est d’acquérir des

connaissances ou les compétences professionnelles d’un métier.

Dans ce contexte, mettre en place des outils de FAD sans prévoir un dispositif de tutorat

efficace serait un projet voué à l’échec. Dans la démarche globale d’organisation de

formation à distance, on constate que le lien social entre le formé et le groupe en

Page 189: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 189

formation n’est plus et ne peut plus être assuré par l’organisme de formation. Or, la

prise en compte des dimensions cognitives, affectives, culturelles et sociales du formé

doit être intégrée au processus de formation pour éviter tout échec.

Globalement le tutorat est destiné à relier tout ce qui est dissocié dans le processus de

formation à distance : l’enseignement et l’apprentissage, l’apprenant et l’institution,

l’apprenant et l’enseignant, le cognitif et le relationnel, la théorie et la pratique.

Plus concrètement, le tuteur permettra le suivi du formé : gestion du temps, des conflits,

des orientations. Il permettra de prendre en compte le vécu de la personne qui apprend,

pour soutenir sa motivation, et mieux évaluer son travail au final (dimension sociale et

ethnique). Il aidera à articuler temps de travail et activités extra scolaires. Enfin, il

favorisera la cohérence entre le projet professionnel et personnel.

Nous observons un éclatement du fonctionnement des organismes de formation. Le

tuteur ne représente pas forcément une seule personne. Il peut être multiple. Il peut

intervenir de façon provisoire ou permanente, dans une relation instituée ou informelle,

dans une relation duale ou en groupe. Les lieux de tutorat peuvent être multiples :

l’entreprise, une association, un service social. Et les formes diverses :

- le tutorat d’accueil : dimension informative et explicative.

- le tutorat d’accompagnement : dimension cognitive et relationnelle (savoir guider

méthodologiquement, gérer les différents temps, établir un calendrier, corriger les

erreurs d’interprétations).

- le tutorat de transmission : sur le terrain, en entreprise (savoir analyser sa propre

pratique)

- le tutorat d’évaluation : savoir observer, mesurer les écarts (évaluer les pré-requis,

faire prendre conscience des lacunes, favoriser l’évaluation formative).

- le tutorat de gestion : relations avec l’institution (prêt de matériel).

Dans l’objectif d’ouvrir au plus grand nombre l’accès à la formation à distance, vous

comprendrez qu’elle doit s’accompagner d’un tutorat réfléchi et efficace.

Page 190: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 190

L’aménagement des infrastructures

Les mutations doivent aussi nécessairement s’opérer sur les infrastructures de

télécommunications. La mise en place des NTIC suppose de posséder des canaux de

télécommunications internes et externes. Les canaux externes permettent de s’ouvrir

vers l’extérieur et d’intégrer la structure collaborative du réseau mondial (exemple de la

fibre Américas II qui relie le Brésil, le Surinam, la Guyane, la Martinique, la

Guadeloupe à la Floride). Les canaux de télécommunications internes permettent un

large déploiement sur le territoire pour l’accès au réseau d’un maximum d’individus.

Dans les stratégies d’aménagement du territoire, il faut privilégier la multiplication des

portails d’accès sur le territoire et la technologie numérique, qui est la plus appropriée

au support des données multimédia (son, image, texte) et de l’Internet à haut débit. Une

architecture basée sur une technologie filaire (fibre optique) ou hertzienne numérique

(boucle locale radio) pour la proximité locale et satellitaire, pour l’international et les

communes très enclavées en réception, permettrait de répondre déjà à bon nombre de

besoins. Dans notre département, il reste un effort notable à faire sur le remplacement

d’équipements de télécommunications de type analogique en numérique et sur

l’aménagement complet d’un réseau sur l’ouest guyanais (Apatou, Grand santi, etc…).

Un projet est en cours de négociation entre l’État, France Telecom et la Région, et nous

devrions voir émerger un réseau fin 2001, début 2002. De même, l’opérateur Média

overseas, par le biais de Netplus en Guyane, devrait proposer fin 2000, début 2001, des

accès Internet en boucle locale à haut débit. Pour les communes enclavées, la

problématique se pose pour les opérateurs, en termes de coût des investissements au

regard du nombre d’abonnés.

En conclusion, les raisons qui justifient le recours aux nouvelles technologies et à la

formation à distance sont :

- l’évolution quantitative de la demande de formation pour tous et tout au long de la vie,

- l’évolution qualitative du développement d’une relation plus autonome et

personnalisée,

- le renouvellement accéléré des connaissances,

- le coût et la recherche de solutions économiques, à long terme,

- la garantie d’un développement, permis par les supports de communication, plus

harmonieux sur l’ensemble du département.

Page 191: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 191

Seule une analyse approfondie du contexte (le système, le public, les objectifs, les

moyens en temps, en personnes, en budget et en technologie disponibles) permettra

d’apporter une réponse efficace.

METROPOLE : Mme Valérie Hellouin, Chargée d’études au Centre INFFO

Un élément évoqué hier par le Conseil régional de Guyane était le choc démographique.

De ce point de vue, l’ensemble des pilotes d’expériences que j’ai interrogés affirment

que les technologies Internet permettent de former un plus grand nombre de personnes

par rapport aux voies classiques de formation. De plus, la jeunesse des populations à

former peut laisser augurer une moindre résistance à l’utilisation des technologies Web.

En écho aux propos de M. Passard, le Conseil régional de la Martinique a évoqué le

nécessaire rapprochement entre l’information sur l’offre et le bénéficiaire, ce qui pose,

là aussi, clairement la question des équipements permettant aux bénéficiaires de se

connecter et de s’informer en ligne. Un exemple de solution nous est fourni par le

dispositif University for Industry au Royaume-Uni, avec la mise à disposition de PC

connectés à Internet, dans les bibliothèques, les centres commerciaux ou les maisons de

quartier.

Le Conseil régional de Guyane a également soulevé le problème de la qualité en

formation, qui se pose de manière accrue pour les formations via Internet du fait de leur

caractère virtuel. Sur cette question, des groupes de travail se constituent actuellement,

afin de tenter d’élaborer des normes de qualité et certains organismes tentent de les

appliquer (Norme AFNOR, Quality Mark). Mais cette question, encore très peu

explorée, appelle au regard des expériences que j’ai étudiées, une attention toute

particulière sur l’accompagnement de la formation via Internet et donc sur la formation

de formateurs.

MARTINIQUE : Mme Myriam Samathay, Secrétaire générale de l’AGEFMA

La traduction d’une volonté politique en action partenariale

Avant 1996, il n’existait pas à proprement parler de société de l’information en

Martinique, les premiers accès Internet ayant été mis en place en 1997. Quelques rares

internautes commençaient à produire quelques embryons d’outils, mais nous étions

encore loin de ce que l’on peut appeler un positionnement stratégique en matière de

Page 192: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 192

NTIC. La France était encore positionnée sur le développement du minitel et rien ne

laissait présager l’explosion qui devait suivre.

En matière de formation professionnelle, l’État et la Région réfléchissaient, dans le

cadre du contrat de plan 1994-1998, à la mise en place d’une structure permettant aux

professionnels du secteur de travailler en réseau. Cette réflexion se concrétisa en 1996

par la création de l’AGEFMA (Association de gestion de l’environnement de la

formation en Martinique), au sein de laquelle le CARIF (Centre d’animation et de

ressources de l’information sur la formation) devait jouer un rôle de pilote, dans le

cadre de sa mission d’information sur la formation, et en particulier d’informatisation

de l’information sur l’offre de formation. Par cet acte, ils marquaient leur volonté

politique d’investir dans ce que l’on appelait alors les nouvelles technologies de

l’information et de la communication. C’est cette volonté politique qui, durant ces

quatre dernières années, a constitué le fondement d’un système plus global.

Durant l’année 1997, et singulièrement après le discours d’Hourtin, un mouvement

commença à prendre forme en faveur du développement des technologies de

l’information et de la communication ; il n’a cessé de s’amplifier. La Martinique s’est

préparée à entrer dans la société de l’information. En janvier 1998, le Comité de

pilotage de la société de l’information en Martinique a vu le jour. Composé à l’origine

du Conseil régional, du Conseil général, de la Mairie de Fort-de-France, de la SEMAFF

(Société d’économie mixte d’aménagement de la ville de Fort-de-France), de la CCIM

(Chambre de commerce et d’industrie de la Martinique), il s’est adjoint plus tard

l’Association des Maires, puis un représentant de l’État. L’animation de ce Comité a été

confiée à la CCIM. Dans le cadre de l’élaboration du DOCUP 2000-2006, le Comité de

pilotage de la Société de l’information en Martinique s’est donné comme mission de

préparer un projet stratégique global, visant à faciliter l’entrée de la Martinique dans la

Société de l’Information et ceci, à partir de sept grands objectifs :

- doter la Martinique des équipements structurants indispensables,

- améliorer l’environnement de la Société de l’information à la Martinique,

- assurer un positionnement fort de la Martinique sur le réseau des réseaux,

- sensibiliser les acteurs publics et privés aux problématiques de la Société de

l’information,

Page 193: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 193

- promouvoir l’égalité des chances entre ceux qui ont les moyens d’avoir accès aux

NTIC et ceux qui ne les ont pas,

- encourager la création d’entreprises liées aux nouvelles technologies,

- investir dans l’employabilité et l’adaptabilité de la main-d’œuvre.

Les utilisateurs

Le secteur de la formation professionnelle connaît lui aussi, de manière plus spécifique,

d’importantes transformations. Dès le début 1997, le CARIF réalisait son site Internet

(le second site CARIF créé après celui de l’Ile-de-France), une base de donnée "Offre

de formation" interrogeable à distance, et mettait en place des groupes de travail

utilisant les technologies nouvelles : "chat", mailing list... Si ces techniques furent bien

accueillies dans le réseau Intercarif, au niveau local, il fallut plus de temps pour se les

approprier, bien que dans un premier temps, une expérience menée avec les APP

(Ateliers pédagogiques personnalisés) ait connu un franc succès. Cet état de fait

semblait prendre sa source dans un problème d’équipement, puisqu’une étude menée

sur l’équipement des structures, en 1997, mit en évidence des disparités importantes en

matière d’équipement et d’appropriation des technologies. L’État et la Région mènent

depuis une politique d’équipement des structures, mais les moyens mis en œuvre

semblent encore insuffisants par rapport aux besoins et à l’évolution rapide des

technologies.

La problématique fondamentale est qu’il s’agit bien aujourd’hui de la transformation

radicale d’une société émergeant d’un stade d’oralité et de son passage excessivement

rapide à un stade de l’écrit et qui plus est, de l’écrit virtuel. Cette transformation

révolutionne les pratiques de travail, de communication et d’apprentissage, alors même

que personne ne s’y était préparé. La rapidité avec laquelle le phénomène se développe

ne sera pas sans poser problème, notamment pour des publics se trouvant déjà en voie

d’exclusion et pour lesquels il convient de définir une politique adaptée.

L’offre de service en formation

L’offre de service en matière de technologies de l’information adaptées à la formation

s’est développée, elle, rapidement. Elle était soutenue par la volonté politique exprimée

de modifier les comportements de travail et de permettre aux institutions (dans

lesquelles on classe les organismes collecteurs et les chambres consulaires), au

Page 194: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 194

dispositif d’accueil (ANPE, PAIO, Missions Locales, ..), aux organismes de formation

et aux entreprises de travailler en réseau. Effectivement, le réseau commence à prendre

forme, avec une offre de service qui tente de satisfaire la demande des professionnels,

en proposant un contenu adapté et des innovations intéressantes

• Le site de l'AGEFMA , hébergé à l’Université des Antilles et de la Guyane, permet

une information générale sur l’actualité de la formation professionnelle, les aspects

législatifs et documentaires de la formation et l’offre de formation disponible en

Martinique et en France via le réseau Intercarif. Il est à noter que cette base est de

conception locale, puisqu’elle est l’œuvre d’un professionnel martiniquais.

• Le site de l’AFPA Martinique qui informe spécifiquement sur l’offre AFPAM a

développé un module de mise en relations entre les stagiaires et les entreprises

désireuses de les accueillir. Bien entendu, pour faciliter l’appropriation de l’outil, des

mesures d’accompagnement ont été mises en place par les offreurs de service.

Partant du constat qu’un tiers des martiniquais habitent Fort-de-France et disposent de

nombreuses possibilités d’information, alors que les habitants des autres communes se

trouvent particulièrement démunis en termes d’information sur la formation et l’emploi

(problèmes de transport et absence d’infrastructures adaptées), et afin d’améliorer

l’égalité des chances d’accès à l’offre de formation, l’AGEFMA a recruté un

informateur relais, qui assure des permanences d’information décentralisées dans les

communes et au sein des Points information jeunesse. Il est doté de matériel

informatique portable (ordinateur et imprimante) et de matériel d’information

(panneaux, dépliants ... ). Il informe les demandeurs sur les métiers à partir de CD ROM

édités par l’ONISEP et les accompagne dans leur recherche de formation à partir de la

base de données de l’AGEFMA ou d’autres sites liés à la formation professionnelle

(AFPA, ANT, Intercarif, ...).

Par ailleurs, l’AGEFMA assure des sessions de sensibilisation à Internet et aux TIC, à

destination des professionnels de la formation et de l’emploi, afin de faciliter

l’appropriation de l’outil. Afin de favoriser l’intégration des TIC dans la vie des

étudiants, l’Université met à leur disposition (en dehors des heures de cours) un parc de

40 machines, qui devrait passer à 70 d’ici deux mois. Par ailleurs, très prochainement,

chaque étudiant disposera d’une adresse électronique.

Page 195: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 195

La CCIM s’est attelée plus spécifiquement au problème de la formation en langues. Elle

a créé, avec la collaboration de l’ARDTM et l’ODTM, un test de français langue

étrangère dénommé "test your french". Celui-ci est composé d’un questionnaire de 50

items. En fin de passation, le stagiaire potentiel le transmet, via le web, à CCIM

Formation, ce qui permet de reprendre contact avec lui par téléphone pour lui proposer

une formation adaptée à son niveau.

L’Université, qui par ailleurs participe au programme U3M (Université du 3ème

Millénaire), assure une veille technologique au travers du CRI/M (Centre de ressources

informatiques de la Martinique) et s’intéresse plus particulièrement aux nouvelles

possibilités apportées par la technologie SMIL (prononcer "Smile"). Cette technologie

permet de mettre en ligne des cours magistraux.

Pour asseoir leur stratégie de changement, l’État et la Région ont inscrit au contrat de

plan 2000-2006 la mise en réseau des relais. Il s’agit d’un vaste chantier de connexion

Intranet, élaboré dans une démarche d’aménagement du territoire et permettant de

développer un réseau interactif d’information sur l’emploi, la formation et le droit social

entre les opérateurs de l’information (institutions et CARIF-OREF) et les relais en

contact avec le public (ANPE, PAIO, missions locales, mairies, CLI, PLIE, AFPA,

Organisations syndicales et professionnelles, centres de formation). Dans cette optique,

l'AGEFMA a procédé, cette année, à un état des lieux technique avant de passer à une

phase expérimentale d’une durée de 6 mois à 1 an. Durant cette phase expérimentale, il

sera proposé une harmonisation des pratiques et le recours à des outils communs, ou la

mise en place de modules d’extraction pour ce qui est de la collecte de l’offre de

formation en direction du CARIF. Cette expérimentation sera soutenue par un effort de

formation des hommes visant à l’appropriation de l’outil. Il s’agira d’effectuer, sur site,

de courts modules de formation à l’utilisation des technologies dites nouvelles de

l’information sur la formation.

Les projets en matière d’enseignement à distance

Cette démarche s’inscrit dans le projet global développé par le Comité de pilotage de la

Société de l’information en Martinique dont les domaines d’actions privilégiés sont les

suivants : infrastructures ; compétitivité et développement des entreprises ; création et

développement de réseaux logiques ; efficacité et accessibilité des services publics ;

Page 196: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 196

promotion, sensibilisation, formation ; culture, loisirs ; diversification, implantation,

création d’activités ; transfert de technologies.

La DAFCO a mené une expérimentation, dénommée FOURMI (Formations ouvertes

par l’usage des réseaux multimédia pour l’insertion). L’objectif de cette

expérimentation était double :

- rapprocher la formation des personnes isolées socialement ou géographiquement, en

proposant une offre de service plus souple et mieux adaptée aux besoins de chaque

apprenant ;

- tester de nouvelles modalités de formation individualisée, intégrant l’usage du

multimédia et des réseaux Internet et Intranet en termes d’accompagnement

pédagogique à distance et auto-formation assistée.

FOURMI entre donc maintenant dans une phase de généralisation avec 3 axes de

développement envisagés :

- poursuivre l’opération en partenariat avec les APP en auto-formation assistée et

accompagnement pédagogique à distance ;

- renforcer la formation de formateurs GRETA et l’étendre aux autres organismes

formation ;

- impliquer le réseau des GRETA dans le fonctionnement de FOURMI par l’accès aux

ressources pédagogiques multimédia disponibles sur le serveur pédagogique du CAFOC

et la mutualisation des moyens et donc de l’offre de formation intégrant les ressources

propres aux GRETA.

L’ANT, elle, a convenu, dans le cadre de la conclusion de contrats en alternance, de

généraliser les entretiens candidats-employeurs par visio-conférence. Ainsi, avant

l’entretien, le candidat suivra un module de TRE avec mise en situation devant caméra,

pour le préparer à rencontrer son employeur via la visioconférence. Une fois le premier

entretien passé et l’employeur d’accord pour accueillir le jeune, celui-ci pourra entrer en

formation. L’ANT mobilise actuellement le réseau AGEFOS PME d’Ile-de-France pour

finaliser ce projet.

En conclusion, je dirai que pour accompagner la volonté politique qui s’est manifestée,

il est nécessaire, au-delà des problèmes d’équipement qui semblent devoir se

solutionner dans un très proche avenir :

Page 197: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 197

- de réaliser une analyse des besoins des utilisateurs potentiels, afin non seulement

d’adapter l’offre à la demande, mais de définir un plan d’action et un calendrier de mise

en œuvre ;

- de développer des contenus spécifiques, adaptés aux besoins locaux. Ceci suppose que

l’effort financier consenti en matière d’équipement soit assorti d’un effort quasiment

identique en matière de recherche et d’ingénierie pédagogique, mais aussi de

développement informatique en vue d’une production locale ;

- de systématiser l’évaluation des outils existants pour en garantir la pertinence et

permettre leur évolution en créant, par exemple, des groupes de travail techniques ;

- de permettre aux professionnels de bénéficier de l’appui d’un centre de ressources

pédagogique et technique, capable de mettre en place un programme de formation

adapté à leurs besoins ;

- d’inclure, dans la politique générale, des actions spécifiques en vue de l’insertion des

publics les plus en difficulté, afin de ne pas leur ôter toute chance d’insertion ou de

réinsertion, l’absence de maîtrise des technologies apparaissant à terme comme un

facteur potentiel d’exclusion ;

- de renforcer les partenariats, notamment entre les institutions (DAFCO, Université,

AGEFMA, ... ) et les actions en réseau ;

- d’analyser les résultats et de recentrer les objectifs en permanence.

Il ne faut pas perdre de vue que toutes les actions entreprises auront des répercussions

sur l’économie martiniquaise, en matière de production locale, de consommation de

biens et de services, et donc de création de richesses.

METROPOLE : Mme Valérie Hellouin, Chargée d’études au Centre INFFO

M. Marie-Sainte de la Martinique, évoquait hier l’isolement géographique et

l’éloignement des centres de ressources. Là, l’utilisation d’Internet et du travail en

réseau prend tout son sens. En effet, les ROM peuvent se connecter, via Internet, sur des

formations proposées sur Internet par des organismes d’autres ROM, de la Métropole

ou encore de divers pays européens. Le laboratoire virtuel de robotique d’Aalen

(Allemagne) prévoit par exemple d’ouvrir vers l’extérieur, une formation ultra

Page 198: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 198

technique de manipulation à distance d’un robot industriel extrêmement coûteux.

Internet permet donc d’accéder à une plus grande variété d’offre de formation.

Mme Jaubert de la Réunion a de son côté, évoqué la nécessaire diversification des

formes de formation et l’utilisation d’Internet fait certainement partie de cette

dynamique, comme les actions partenariales. On a également abordé en séance pleinière

(la Guadeloupe et la Guyane notamment) la question du passage des intentions à

l’effectivité, avec des moyens souvent inopérants ou homéopathiques. Il me semble que

de ce point de vue, les technologies Internet peuvent avoir un rôle à jouer, notamment

par la mise en œuvre d’outils simples mais efficaces (e-mail, forum, chat, pages HTML

par exemple), capables de toucher un grand nombre de personnes et peu complexes

pour l’utilisateur.

GUADELOUPE : : M. Hubert Salcède, Responsable de la formation professionnelle au

Conseil régional

Guadeloupe numérique : stratégies de développement des NTIC

Associer les technologies innovantes et la formation à distance, c’est en reconnaître la

nécessité comme outil de développement local et d’aménagement du territoire. En effet,

l’apparition de ces nouveaux outils conduisent à repenser la conception de

l’aménagement du territoire guadeloupéen qui est particulier de par son caractère

archipélagique. Cette caractéristique nous amène à réfléchir à un maillage, une

couverture de notre territoire qui ouvre à la population guadeloupéenne de nouvelles

perspectives en termes d’égalité des chances, par la vulgarisation des nouveaux outils

multimédias et d’accès au savoir : utilisation d’un portail vers l’information et la

formation, à partir de différents sites (l’entreprise, le centre de formation, le domicile).

Les technologies de l’information et de la communication modifient l’analyse

économique de la formation en termes de :

- valeur ajoutée, s’agissant de l’implication des stagiaires et l’appropriation de l’outil

informatique comme support à l’acquisition des pratiques professionnelles,

- rentabilité, puisque l’accompagnement pédagogique est mobilisé en cas de besoin par

les utilisateurs.

Page 199: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 199

Le développement des nouvelles technologies nous oblige à poser la question de leur

place et de leur rôle dans notre société en général, et dans la formation tout au long de la

vie, en particulier.

En Guadeloupe, il existe aujourd’hui pour chaque type d’activité, différents projets

intégrant les technologies de l’information et de la communication. Ces projets sont

relativement isolés. Les actions paraissent dispersées et l’on constate l’attente générale

de tous les acteurs d’une fédération des projets, d’une globalisation des actions dans une

dynamique régionale. Ce sont les conclusions d’une étude menée sur le terrain.

Aujourd’hui, les principaux acteurs sont la Maison régionale de la formation et de

l’emploi, chargée de gérer l’offre de stages de formation professionnelle ; le Centre

départemental de documentation pédagogique, qui dispose d’un centre visio conférence

; l’Académie des Antilles et de la Guyane ; l’Université.

Que ce soit dans l’enseignement primaire et secondaire, ou pour l’enseignement

supérieur, la problématique actuelle est triple : la constitution et l’organisation de

réseaux de télé-formation et d’échanges entre enseignants ; le renforcement massif des

établissements scolaires ; 1’accès à Internet, notamment pour les échanges

internationaux.

A cet effet, la Région Guadeloupe a adopté une stratégie de développement des

technologies de l’information et de la communication pour l’archipel guadeloupéen,

avec deux volets : performance économique et démocratisation.

Un des moyens à sa disposition est le programme "Guadeloupe numérique" qu’elle a

initié et qui vise à valoriser un ensemble d’infrastructures et de services performants à

l’échelle régionale. Trois objectifs principaux : offrir à la Guadeloupe des atouts

déterminants pour le développement de ses entreprises (notamment à l’export) ;

améliorer l’attractivité de la région pour l’implantation d’entreprises internationales ;

accompagner le développement économique et social de l’archipel guadeloupéen.

Pour atteindre ces objectifs, la Région a défini plusieurs axes stratégiques : création

d’un support technique (boucle locale qui permet la diffusion à haut débit de

l’information) ; la construction d’un réseau de télé-centres (téléservice...) ; le

déploiement de points publics d’accès aux réseaux de données (borne) ; la création d’un

Intranet régional et la production de contenus guadeloupéens ; l’opération "10 000

micros".

Page 200: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 200

Ce projet est inscrit au contrat de plan État-Région, pour un coût de 160 MF. C’est en

élaborant un tel développement planifié, que la Guadeloupe s’est inscrite dans un

concept de pôle d’excellence. La nouvelle économie bouscule le monde de la formation.

On est rapidement passé de la FOAD (Formation ouverte à distance) à l'e-formation

(e-learning), réunissant ainsi l’ensemble des moyens technologiques permettant

d’apprendre. Il s’agit là, d’une véritable révolution dans l’approche des métiers et des

process de formation. L'e-formation est la rencontre clé de la formation avec le monde

de l’Internet et de la nouvelle économie. Cette rencontre donne naissance à de nouvelles

pratiques de formation : formation tutorée à distance (via des plates-formes) ; classes

virtuelles (formation à travers le web) ; marché virtuel de la formation ; Intranet de

gestion de la formation.

Il est vrai que les technologies innovantes de communication permettent d’avoir de

nouvelles approches de la gestion des formations par les centres de formation. La

formation professionnelle est une compétence régionale. Aussi, les régions doivent

jouer un rôle moteur dans le développement des FOAD. Aujourd’hui les régions les

plus citées sont : Pays de Loire, Bretagne, Rhône-Alpes. Les perspectives ouvertes par

la formation à distance et les technologies innovantes de communication sont

considérables. Toutefois, elles devront tenir compte des expériences menées hors de nos

départements. Il n’en demeure pas moins qu’il importe aux pouvoirs publics, et

notamment les régions, d’accompagner ce changement, afin qu’il soit pèrenne. Il faut

donc prévoir un accompagnement des centres de formation, car c’est un saut culturel ;

faciliter la maîtrise des savoirs de base et de l’outil informatique du plus grand nombre ;

adapter la pédagogie en prévoyant un formateur susceptible d’encadrer les stagiaires ;

déterminer l’investissement financier, lequel peut représenter un frein pour certaines

structures.

Trois interrogations subsistent dans la cadre des réflexions de cet atelier : D’un point de

vue économique, existe t-il un marché au niveau local pour la FOAD ? Le public est-il

prêt ou suffisamment motivé pour ce type de formation ? L’avenir de la formation

réside-t-il dans la reconstitution de classes virtuelles ?

Page 201: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 201

METROPOLE : Mme Valérie Hellouin, Chargée d’études au Centre INFFO

Mme Berthelot a évoqué les similitudes entre les ROM et en parallèle le refus

d’uniformisation. Cette situation me fait penser aux 90 folk high schools de Finlande

(Académies d’éducation populaire) qui utilisent une même plate-forme pédagogique sur

Internet (Campus Internetix), tout en y intégrant des formations extrêmement variées,

de manière à répondre à leurs besoins spécifiques. Cette plate-forme a été validée par un

travail coopératif en réseau et permet une économie d’échelle, du point de vue des outils

techniques, sans exclure les spécificités pédagogiques.

REUNION : M. David Rivière, Chef de projet RESINTER

État des lieux et enjeux de la téléformation à l’île de La Réunion

L’introduction des NTIC dans la formation professionnelle représente un véritable défi

pour l’ensemble des acteurs de la formation. La formation des formateurs, leur rôle dans

les nouveaux dispositifs de FOAD, les ressources pédagogiques, l’adaptation nécessaire

de la réglementation, les risques d’industrialisation de la FOAD, les enjeux des

politiques d’aménagement du territoire, la place des NTIC dans la pédagogie, la

démocratisation de l’accès à la formation à tous les individus (des niveaux VI à I),

l’encadrement des apprenants dans ces nouveaux dispositifs, ou encore les choix à

réaliser en ingénierie de formation et en technologie, sont autant d’exemples qui

confirment la complexité d’un projet d’intégration des nouvelles technologies

éducatives.

A La Réunion, les commanditaires État et Région ont mis en place, en 1997, dans le

cadre de trois grandes phases (expérimentation, transition, pérennisation), un dispositif

visant à cerner l’ensemble de ces enjeux et à accompagner les acteurs de la formation

professionnelle dans leurs projets de FOAD et de nouvelles technologies éducatives. Il

s’agit du dispositif RESINTER (Réseau pour l’intégration des nouvelles technologies

éducatives à la Réunion). Aujourd’hui piloté par le pôle ingénierie du CARIF-OREF de

la Réunion, RESINTER commence à porter ses fruits.

RESINTER : de quoi s’agit-il ?

L’idée initiale d’un réseau de centres de ressources partagées mettant des moyens

techniques à disposition des formateurs, a été complétée par de nouveaux axes

Page 202: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 202

directement guidés par l’amélioration des services rendus aux publics. Resinter

représente :

- Un outil de la politique régionale en matière de formation professionnelle. C ‘est un

instrument d’aide à la décision pour les financeurs (État, Région Réunion et FSE)

participant ainsi à la définition des programmes régionaux de formation et aux

diagnostics de projets pédagogiques intégrant les nouvelles technologies éducatives.

Resinter intervient dans le pilotage des actions de formation de formateurs ou encore de

lutte contre l’illettrisme. Sur ce dernier point, nous devrions déposer un projet à la

DGEFP, dans le cadre du programme FORE.

- Un outil d’accompagnement des organismes de formation. Les organismes de

formation partenaires du dispositif bénéficient d’un accompagnement, tant dans la

définition de leur ingénierie de formation à distance, que dans le suivi de leurs projets.

A l’heure actuelle, des projets de partenariat sont sur le point d’être signés avec le

CRA-CNAM, la Chambre de métiers, le réseau des APP, Connect 01, lRTS, la

Chambre de commerce et d’industrie de la Réunion, le CNED, l’AREP, l’IPFA,... Des

actions de FOAD, telles que celles de l’AFPAR, de l’ILOI (Institut de l’image de

l’océan indien) ou encore PROTEL avec son Euromaster CITCOM, ont déjà eu lieu ou

sont en phase de démarrage. Sur le thème de l’illettrisme, RESINTER a signé, en 2000,

5 conventions de partenariat avec l’ADAP, Faire Plus, l’IPFA, l’AREP et l’ARFUTS,

pour expérimenter des actions innovantes avec le logiciel REACT2 sur des publics

analphabètes ou illettrés, en milieu rural, urbain voire carcéral.

- Un outil d’information et d’animation. Resinter contribue à la veille pédagogique des

organismes de formation, en leur proposant d’accéder à son portail (centre de ressources

électronique), à sa lettre d’information ou encore à ses ateliers thématiques.

- Un outil d’aide à l’aménagement du territoire. Afin de rapprocher l’offre de

formation des publics isolés, le dispositif favorise le déploiement d’un réseau de points

d’accès à la téléformation, suivant un cahier des charges de labellisation des sites.

Les missions du dispositif

Par le biais d’une équipe de chefs de projets technico-pédagogiques, le dispositif

RESINTER vise plusieurs objectifs :

Page 203: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 203

- la mise en place de moyens d’accès à la téléformation, notamment par le déploiement

d’un portail Internet à usage des publics, des organismes de formation et des

commanditaires. Ce portail se déploie en trois grandes étapes, visant entre autres à

mettre à la disposition des organismes de formation, une plate-forme de

télé-enseignement ;

- participer à l’aménagement pédagogique du territoire, par le biais d’un réseau de sites

d’accès à la formation. Ces sites seront labellisés par Resinter, selon un cahier des

charges qualité ;

- informer et animer sur le thème des nouvelles technologies éducatives et de la

formation ouverte et à distance : Resinter propose aux acteurs de la formation

professionnelle un portail, des lettres de diffusions, des forums thématiques, des

conférences ou des échanges de pratiques ;

- assister les commanditaires dans le diagnostic des dossiers et dans l’aide à la définition

d’orientations ;

- accompagner les organismes de formation dans la mise en place de projets de

formation à distance, d’appropriation et de diffusion des nouvelles technologies

éducatives. Cet accompagnement se concrétise par une intervention de diagnostic déjà

mentionnée, par l’élaboration de propositions de démarche de réalisation de leur projet

d’intégration des nouvelles technologies éducatives et de solutions de formation de

formateurs et par le suivi des évolutions apportées au projet ;

Les moyens du dispositif RESINTER

Afin d’offrir un service optimal en réponse à ses missions, le dispositif RESINTER

s’appuie sur :

• Un site Internet Portail, composé de 3 volets :

- Pour les publics : accès à l’ensemble de l’offre de formation régionale par un guichet

unique. Cet accès permettra à tout organisme de formation de faire connaître son offre.

- Pour les formateurs : un centre de ressources en ligne leur permettant de mener à bien

leur activité de veille. Il leur fournit une information utile pour la préparation de leurs

projets et la préparation d’aide à la décision. Il donnera accès, entre autres, aux

informations diffusées par les autres centres de ressources locaux, nationaux et

internationaux.

Page 204: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 204

- Pour les commanditaires : la possibilité d’impulser, de suivre et d’évaluer l’activité de

formation des organismes et des sites.

• Une plate-forme de télé-enseignement. Resinter propose, outre le portail

d’information, une plate-forme de téléformation sur Internet, destinée à favoriser le

démarrage des projets des organismes de formation. Durant la phase expérimentale de

leur projet, cette plate-forme proposera aux organismes de formation les outils leur

permettant de mettre en ligne leurs ressources pédagogiques (contenus, plans de

formations, gestion de la formation) nécessaires au déroulement de leurs téléformations.

• Un réseau de sites d’accès à la formation. Dans l’optique de contribuer à un

aménagement du territoire visant à rapprocher rapidement l’offre de formation des

demandeurs, RESINTER participe à l’animation d’un réseau de sites d’accès à la

formation. Ces sites d’accès à la formation seront des relais de proximité, labellisés par

une commission émanant du comité de pilotage, sur la base de leur réponse à un cahier

des charges qualité qui fixera les modalités de fonctionnement du site. Ils peuvent être

gérés soit par des organismes de formation qui acceptent d’ouvrir leurs locaux aux

autres organismes, soit par des structures accueillant les publics concernés mais

souhaitant élargir leur activité à la formation, ou encore par les cybercentres lorsqu’ils

seront créés. Leur intervention se situe comme une prestation de service standard

apportée aux organismes de formation qui le souhaitent. Ces sites permettront la

délocalisation de l’accès à l’information et à la téléformation.

La FOAD nécessite un certain niveau de technologie, afin de garantir une qualité de

services. En ce qui concerne les problématiques de bande passante, notamment d’accès

à Internet, la Réunion devrait accéder à des technologies haut débit via le projet de

boucle locale radio et de câble sous-marin SAFE. Cette évolution permettra sans aucun

doute une avancée dans les possibilités de tutorat synchrone, telles que la

visioconférence sous IP (Internet protocole). Par ailleurs, ces débits permettront aux

ressources pédagogiques d’intégrer le multimédia en ligne. De fait, la pédagogie sera

plus efficace grâce à une véritable interactivité.

En conclusion, la caractéristique fondamentale du dispositif RESINTER est sa

transversalité, car il doit répondre aux besoins de plusieurs organismes de formation

travaillant avec des publics hétérogènes. Afin d’optimiser l’efficacité des projets de

Page 205: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 205

FOAD, un travail de fond est actuellement mené par le pôle ingénierie du

CARIF-OREF sur la formation de formateurs, afin d’amener le formateur vers des

fonctions de concepteur multimédia et de chef de projet FOAD en prenant en compte

les concepts de chaînes de compétences. L’objectif étant d’arriver, là aussi, à bâtir une

offre de téléformations régionales adaptée aux publics réunionnais. RESINTER aide

donc les organismes de formation à mettre en place l’ensemble des pré-requis à la

FOAD.

METROPOLE : Mme Valérie Hellouin, Chargée d’études au Centre INFFO

On peut également penser à l’utilisation des technologies Web dans la lutte contre

l’illettrisme (évoquée par de nombreux intervenants), en se fondant sur l’idée d’une

valorisation des personnes et d’un regain de confiance en soi, de par l’usage même de

supports modernes de formation (redonner le goût d’apprendre).

Quelques précisions sur…

…les 7 méthodes pédagogiques sur Internet

- Tests de positionnement ou d’évaluation

- Autoformation accompagnée, tutorat

- Cours à distance

- Travaux dirigés, travaux pratiques

- Etudes de cas, résolution de problèmes

- Réalisation de projets

- Simulation, jeux, micromondes

Page 206: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 206

DébatsDébatsDébatsDébatsCe débat s’est déroulé à l’issue de la présentation de la synthèse de l’atelier, lors de la

séance plénière de clôture.

MARTINIQUE : Mme Lucienne de Montaigne, Déléguée académique à la formation

continue

Il me semble qu’il y a un courant communément admis qui voudrait que, dans ce

domaine-là, les problèmes techniques ne soient pas importants et je n’ai donc pas été

étonnée d’entendre Elisabeth Caristan rapporter ce point de vue. Alors moi, qui suis

porteur de projet, qui ai fait l’expérience de FOAD par l’usage de technologies

nouvelles, j’ai le sentiment qu’il faut cesser de tenir ce discours. Parce que je crois que

quelquefois, les problèmes techniques peuvent tellement polluer le fonctionnement du

dispositif de formation, qu’il me semble utile de prévenir les personnes qui s’engagent

dans cette voie. Il faut au préalable, très en amont, éclaircir, élucider, résoudre tous les

points de dysfonctionnements techniques qui pourraient justement freiner la réflexion

pédagogique, la mise en place et le fonctionnement des dispositifs. À ce propos, il me

semble que les compétences dans ce domaine ne sont pas assez clairement définies et

connues des utilisateurs. Quand un technicien de haut niveau est contacté, il est difficile

de savoir au préalable exactement ce qu’il sait faire, quels services il va exactement

vous rendre.

D’autre part, beaucoup de personnes sont arrivées à développer un savoir-faire

personnel, par "bidouillage", par tâtonnements et finalement ont acquis une grande

compétence dans la manipulation de ces outils-là. Je crois que tout cela crée un peu de

confusion et empêche d’avoir une idée claire du développement efficace de l’usage de

ces technologies.

Toujours dans le même atelier, je crois que c’est M. Rivière qui a évoqué un point que

l’on a complètement occulté. Il s’agit de l’industrialisation des FOAD, des géants de la

formation à distance. Notre veille est-elle suffisamment active sur le développement de

la mondialisation de la FOAD ? Que va-t-il advenir de nos petits dispositifs régionaux,

face à ces phénomènes-là ? Il me semble qu’il faut s’en préoccuper davantage.

Page 207: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 207

MARTINIQUE : Mme Elisabeth Caristan, Chargée de mission CARIF

Sur les NTIC, une chose intéressante a été dite hier : est-ce que le formateur doit être

pluri compétent ? C’est un peu la tendance actuelle. On est formateur, on s’initie tout

seul à l’informatique puis, lorsqu’un véritable problème se présente, on est incapable de

le résoudre et finalement, il a des incidences néfastes sur la pédagogie. L’autre option

qui a été proposée hier et qui me paraît intéressante, est celle qui fait intervenir le

formateur au sein d’une équipe pluridisciplinaire où, chacun avec ses compétences,

intervient sur des points bien précis. Et dans cette situation-là, il me semble que les

problèmes techniques ne vont pas disparaître mais perdre de leur importance.

Le deuxième point que je voulais aborder concerne l’industrialisation des FOAD.

Allons-nous nous laisser envahir par des produits venant de l’extérieur ou au contraire,

allons-nous, nous aussi, nous mettre en situation de réaliser des produits qui nous

concernent, mais qui seraient également reconnus au niveau international ?

Page 208: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 208

Atelier du 3/10/00

LA RECONNAISSANCE DES ACQUISLA RECONNAISSANCE DES ACQUISLA RECONNAISSANCE DES ACQUISLA RECONNAISSANCE DES ACQUIS

PROFESSIONNELSPROFESSIONNELSPROFESSIONNELSPROFESSIONNELS

Animateur :

Mme Françoise Leplâtre, Chargée d'études au Centre INFFO

Rapporteur :

Mme Marie-Danièle Rino, Chargée d'études au CARIF, Guyane

Page 209: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 209

Intervenants

GUADELOUPE :M. Raymond Pentier, CESR (Conseil économique et social régional)

GUYANE :Mme Joëlle Prévot-Madère, Vice-Présidente à la Chambre de commerce et d'industrie

MARTINIQUE :Mme Jacqueline Guillot, Conseillère formation continue, DAFCO

REUNION :M. Michel Ducotterd, Chargé de mission à l'ARVISE (association de réseau ANACT)M. Alix Sery, Directeur DDTEFP

Débats

GUADELOUPE :M. Francis Hervé, Président du FONGECIF

GUYANE :Mme Joseline Heder-Mormon, CCIGMme Marie-Danièle Rino, Chargée d'étude au CARIF

MARTINIQUE :Mme Jacqueline Guillot, Conseillère en formation continue, DAFCOM. Alain Hierso, CESR (Conseil économique et social régional)

Page 210: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 210

LA RECONNAISSANCE DES ACQUISLA RECONNAISSANCE DES ACQUISLA RECONNAISSANCE DES ACQUISLA RECONNAISSANCE DES ACQUIS

PROFESSIONNELSPROFESSIONNELSPROFESSIONNELSPROFESSIONNELS

METROPOLE : Mme Françoise Leplâtre, Chargée d'études au Centre INFFO

Cet atelier a deux objectifs principaux :

- informer les participants sur les dispositifs officiels existants en matière de validation

des acquis professionnels, ainsi que sur les pratiques relatives à la reconnaissance des

acquis professionnels ;

- dégager des pistes de réflexion dans ce domaine pour l'ensemble des DOM.

Vous entendrez évoquer tout au long de l'atelier des notions sensiblement différentes.

Par exemple vous entendrez parler de reconnaissance des acquis, de validation des

acquis, d'évaluation des compétences et de certification.

Au-delà de la référence commune d'acquisitions de savoirs, savoir-faire, savoir-être

dans le cadre d'une activité professionnelle, c'est-à-dire hors formation, ces termes ne

sont pas équivalents et recouvrent des réalités et des pratiques variées qui ont chacune

leur valeur et leur légitimité.

Pour éviter toute ambiguïté, il nous paraît nécessaire de commencer par préciser les

définitions officielles de certaines notions :

Acquis : ensemble de savoirs, savoir-faire et savoir-être, dont un individu manifeste la

maîtrise dans une activité professionnelle, sociale ou de formation (guide de la

validation - ADEP, Ministère de l'Éducation nationale).

Reconnaissance des acquis : prise en compte du capital de formation et d'expériences

qu'un individu peut prouver, pour lui-même et pour autrui (AFNOR) - Identification de

savoirs, savoir-faire et savoir-être d'un individu, sous quelque forme que ce soit, par

évaluation des compétences, portefeuille de compétences ou autre.

Validation des acquis : procédure entreprise en vue d'une reconnaissance

institutionnelle des acquis ; acte officiel par lequel ces acquis sont reconnus (AFNOR) -

Page 211: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 211

Modalité spécifique de délivrance des diplômes professionnels ou technologiques, par

l'octroi de dispenses d'unités ou d'épreuves.

Certification : délivrance d'un diplôme, d'un certificat ou d'un autre titre par les

autorités, les organismes de formation et les personnes compétentes (CEDEFOP).

L'approche est différente selon le lieu d'où l'on parle : Éducation nationale, AFPA,

Chambres de commerce et d'industrie ou DDTEFP, ont chacun leur logique,

vraisemblablement complémentaire.

L'initiative revient toujours au salarié, tantôt seul, tantôt en concertation avec son

entreprise.

Des liens forts unissent reconnaissance des acquis professionnels, validation des acquis

et formation professionnelle continue.

MARTINIQUE : Mme Jacqueline Guillot, Conseillère formation continue, DAFCO

Reconnaître que l’activité dans l’entreprise produit des compétences et des

connaissances, professionnelles mais aussi générales (comme les mathématiques, le

français, l’anglais), c’est une des évolutions que connaît la formation professionnelle

depuis quelques années. L’accès au diplôme par la VAP constitue une avancée

institutionnelle importante. On peut se demander si ce type de validation est devenu un

repère recherché par les entreprises.

La loi reconnaît que l’expérience au travail confère à celui qui l’exerce ou l’a exercé

(nous incluons donc les demandeurs d’emploi) des compétences et des savoirs. Ces

compétences et ces savoirs sont constitutifs d’un diplôme et peuvent être validés. A

l’Éducation nationale, ces diplômes de l’enseignement technologique ou professionnel

vont du CAP au BTS. Ils sont validés, au même titre, dans toutes les Académies, et

nous l’appliquons aux Antilles/Guyane depuis 1995.

La procédure de l'Education Nationale

1. La première étape est l’accueil du candidat qui permet de l’informer sur la loi et les

règles de procédure. C’est une phase que nous réalisons de façon collective. Nous

réunissons les personnes intéressées toutes les semaines.

2. Nous proposons à tous les candidats une phase d’accompagnement facultative sous

forme d’entretien et nous avons formé 200 personnes, en Martinique, susceptibles de

Page 212: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 212

réaliser ces accompagnements. Il s’agit d’écouter le candidat décrire son activité

professionnelle et nous essayons de déterminer avec lui les éléments les plus pertinents

dans son parcours professionnel, qui peut recouvrir plusieurs emplois, voire des

activités extra professionnelles, pour l’aider à élaborer son projet de validation. C’est

une phase facultative qui est facturée 500 francs. Nous essayons de trouver d’autres

dispositions pour que les demandeurs d’emploi soient pris en charge.

3. Si le candidat souhaite réellement s’engager dans la procédure, nous lui remettons un

dossier qu’il complète seul. La VAP est une démarche individuelle qui vient du

candidat, il n’est pas obligé de faire part de son projet à l’entreprise.

4. Nous réunissons ensuite un jury de validation qui est une émanation du jury du

diplôme. Il est donc constitué d’enseignants et de socioprofessionnels.

Si cette procédure a été suivie, le jury décide d’accorder ou non les unités constitutives

du diplôme. Il peut aussi proposer au candidat un entretien d’octroi. Cet entretien n’est

ni un test ni un contrôle de connaissances mais il doit permettre au jury de compléter les

informations fournies dans le dossier.

C’est le candidat qui complète un dossier, c’est lui-même qui va déclarer son activité.

On peut se poser la question de la preuve. Est-ce que le candidat est sincère ?

L’Éducation nationale, comme les autres ministères, a fait le choix de la démonstration

plutôt que celui de la preuve. On aurait pu faire d’autres choix, on aurait pu aller dans

l’entreprise et voir comment la personne agit, mais les demandeurs d’emploi auraient

été exclus. On aurait pu reconstituer des situations professionnelles, on se serait trouvé

alors en situation d’examen, sauf si on avait reconstitué l’entreprise dans toute sa

complexité. Le choix retenu est celui de la démonstration que l’on exerce, ou que l’on a

exercé un emploi, avec des exigences qui correspondent au diplôme, d’où certaines

difficultés. La VAP repose sur une logique de présomptions et nous sommes bien dans

le domaine du déclaratif. Nous ne pensons pas que ce choix puisse être infléchi dans

l’avenir. Il est vrai que c’est une révolution culturelle du point de vue des évaluateurs

qui sont plus habitués au contrôle.

Quels sont les points forts de la loi de 1992 ?

D’abord reconnaître que la situation de travail produit des compétences, c’est une

originalité. Ensuite, obtenir un diplôme par une autre voie que la voie scolaire,

c’est aussi révolutionnaire.

Page 213: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 213

Mais on peut aller plus loin. Je vous ai parlé de l’entretien d’accompagnement. Par

expérience, nous nous sommes aperçus que beaucoup de personnes ne connaissaient pas

réellement leurs compétences. Elles n’ont pas conscience de leurs compétences et c’est

vraiment flagrant. On peut se demander aussi quelle place elles s’octroient dans le

milieu professionnel, face à cette absence de valorisation personnelle ? Nous

rencontrons pourtant des parcours professionnels extrêmement riches.

Voici quelques statistiques concernant notre activité en Martinique, uniquement de

septembre 95 à juin 2000. Nous avons accueilli 1592 personnes, nous avons réalisé 206

entretiens d’accompagnement, nous avons examiné 301 dossiers et nous avons fait 85

entretiens d’octroi. Mais, au niveau national, c’est environ 4000 personnes que nous

recevons annuellement. Est-ce que c’est beaucoup, peu, trop peu ? Dans tous les cas, ce

sont des personnes qui n’auraient certainement pas passé un diplôme par une autre voie.

Je vais parler maintenant pour mes collègues de l’agriculture et de la jeunesse et des

sports. Le Ministère de l’Agriculture, en Martinique a démarré très récemment, en

1999. On compte très peu de dossiers pour l’instant et mal remplis. Un gros travail doit

être conduit sur l’information du candidat et la compréhension du dossier.

En ce qui concerne le Ministère de la Jeunesse et les Sports, le niveau ministériel

s’est engagé, depuis deux ans, dans la VAP. On peut obtenir des diplômes dans le

domaine de l’animation et du sport, mais tous les diplômes ne sont pas concernés. A la

Martinique, seulement 3 dossiers ont été présentés pour le sport et aucun pour la

jeunesse. Le frein essentiel tient à la lourdeur de la procédure et aux difficultés

d’écriture des candidats.

Quelles réflexions l’Education Nationale doit-elle approfondir maintenant ?

Nous travaillons sur l’analyse du travail et nous avons souvent du mal à faire

comprendre au candidat qu’il doit nous décrire son travail réel et non pas le travail

prescrit par les référentiels.

Actuellement, nous avons un dossier unique, quel que soit le niveau. Les candidats de

niveau V (CAP, BEP) ont quelquefois des difficultés à compléter un dossier qui est très

élaboré. Doit-on revoir les dossiers pour les niveaux V ? Il faut savoir que nous avons

80% de demandes en BTS et, parmi celles-ci, 50 % concernent le tertiaire.

Nous devons convaincre le public qu’il s’agit d’une démarche globale qui ne vise pas

seulement l’obtention de quelques unités ou épreuves mais le diplôme complet. Nous

Page 214: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 214

nous situons dans cet objectif en termes de vie professionnelle et vie personnelle. Nous

incitons les candidats à s’inscrire dans un dispositif global et à utiliser plusieurs outils

pour réussir. Nous proposons aux salariés de se rendre dans un centre de bilan de

compétences, afin de déterminer leurs besoins de formation pour préparer la deuxième

partie du diplôme. Nous leur proposons aussi de se renseigner auprès des organismes de

formation. Nous avons passé des accords avec le CNED et les GRETA pour faire des

formations sur les parties manquantes des diplômes. Au niveau national, nous

réfléchissons à ces possibilités-là. Nous voulons offrir au candidat un package pour

qu’il soit capable de valider des acquis professionnels, de suivre la formation

manquante, de trouver des financements (FONGECIF pour les salariés).

Nous nous interrogeons également sur la fonction d’accompagnement facultative.

Celle-ci est absente de la loi du 20 juillet 1992, mais elle figure dans la note de service

du 11 juillet 1994. Elle permet au candidat de cerner son activité réelle et d’identifier

les informations pertinentes pour l’octroi de la dispense. Nous sommes en train de

réfléchir à l’étendue du service que nous proposons au candidat. Nous nous demandons

si nous devons étendre cette fonction d’accompagnement à la compréhension du

dossier, notamment pour les publics de niveau V.

La VAP ne peut pas être considérée isolément. Elle s’inscrit dans un dispositif plus

large qui implique une approche multi partenariale. Notre but n’est pas qu’un candidat

parte de chez nous avec 2,3,4 dispenses d’épreuves mais qu’il ait son diplôme.

Le rapprochement du monde de l’Education et du monde professionnel est

important. C’est une proximité que l’on connaissait déjà dans les milieux de

l’enseignement technologique et professionnel, notamment dans les lycées

professionnels, pour les BEP, bac pro, BTS. Mais là, nous travaillons ensemble. Tous

les professionnels qui ont travaillé avec nous sur la VAP, même les enseignants, ont une

vision différente de leurs partenaires et cela est extrêmement important. Nous avons des

témoignages de membres de jury qui effacent les premières suspicions vis-à-vis de ce

dispositif et qui confirment qu’un diplôme acquis par la VAP est bien le même diplôme

que celui obtenu par l’examen traditionnel.

Le ministère de l’Éducation nationale développe des partenariats avec les entreprises et

les branches professionnelles pour explorer des modalités innovantes de VAP. Au

niveau national, des conventions ont été signées avec des grands groupes (SNCF, EDF,

Page 215: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 215

sociétés industrielles…). De nombreuses réflexions sont menées et un colloque aura

lieu à Nice en novembre 2000. Nous améliorons l’offre de validation par une

information plus large auprès des entreprises, des milieux socioprofessionnels, des

partenaires institutionnels. Nous amplifions notre aide auprès des candidats par des

modules d’information ou de formation complémentaire. Nous sommes heureux d’avoir

été les premiers à nous engager malgré les difficultés. Nous avons capitalisé une

expérience et nous souhaitons que le dispositif évolue. La partie professionnelle du

projet de la loi de modernisation sociale nous convient : réduction de la durée d’activité

professionnelle de 5 à 3 ans et possibilité d’obtenir toutes les dispenses par le biais de la

VAP.

GUADELOUPE : M. Raymond Pentier, AFPA, Conseil économique et social régional

Le sujet étant vaste et mes connaissances restreintes, je limiterai mon intervention

premièrement à quelques observations personnelles sur la reconnaissance des acquis et

deuxièmement à quelques témoignages sur la certification des compétences

professionnelles. Je laisserai à d’autres le soin de commenter les textes récemment

publiés au sujet de la reconnaissance des acquis.

En qualité de conseiller économique et social, j’ai la satisfaction de vivre

l’officialisation par la puissance publique du travail des bénévoles. Il me semble en

effet que cette catégorie de citoyens constitue l’une des cibles privilégiées du dispositif

qui vise notamment à prendre en compte l’expérience et le travail de ces milliers de

personnes de toute condition, de tout milieu, qui ont en commun l’esprit de partage, de

solidarité, d’obligation et qui œuvrent, bien entendu, pour le concitoyen. Le milieu

associatif coopératif et mutualiste, vivier de bonnes volontés, est une pépinière

d’animateurs, de conseillers, d’accompagnateurs, de formateurs. Mais tous ces

bénévoles, jeunes ou vieux, chômeurs, travailleurs ou retraités, forment-ils une masse

inépuisable et en permanence disponible, se substituant à toutes les défaillances

institutionnelles ? Hélas non.

Dans un environnement de plus en plus affairiste, égoïste et consommateur, le sens de

la gratuité s’amenuise et rendre service est passé de mode. Il convient donc, non pas de

récompenser les efforts déployés par ces bénévoles mais de les prendre en

considération, de les valoriser et de les mettre en exergue, pas seulement les efforts

Page 216: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 216

d’ailleurs, mais aussi les capacités développées et les compétences acquises,

l’expérience emmagasinée et les savoir-faire issus d’une auto-formation. Pour

l’intéressé, comme pour son entourage, une reconnaissance officielle et formelle de ce

capital est un encouragement, une garantie et parfois même une incitation à aller plus

loin. Aussi, quelles que soient les méthodes, les procédures et les formalités mises en

place, il faut absolument développer cette approche, impliquer tous les acteurs possibles

et procurer un peu de fierté et de satisfaction morale à tous ceux qui peuvent fournir la

preuve de leurs connaissances, de leurs compétences et de leurs technicités.

Au chapitre de la certification des compétences professionnelles et pour ne pas redire ce

qui a déjà était dit, je me limiterai à citer quelques exemples vécus par l’AFPA de

Guadeloupe dont je suis un des cadres de direction.

Après le cyclone Hugo, qui fit beaucoup de dégâts matériels, et à la demande de

certaines municipalités, des chantiers-écoles ont été ouverts, notamment avec l’appui

financier de la DDTEFP puisque cela s’adressait à des jeunes. Plusieurs corps de métier

du bâtiment ont été concernés, avec des équipes travaillant soit seulement avec leur

moniteur, soit en liaison avec les entreprises. La gestion administrative, pédagogique,

disciplinaire de ces jeunes ainsi que l’aspect théorique de leur travail étaient assurés par

le formateur de l’AFPA. Le plus remarquable de cette expérience fut que la plupart des

formés ont souhaité obtenir un diplôme pour concrétiser ce qu’ils avaient appris. Ainsi,

un complément de formation fut apporté dans les locaux du centre de formation

professionnelle des adultes de Petit-Bourg, afin de les préparer à affronter des examens.

À la satisfaction de tous, stagiaires, formateurs, bailleurs de fonds et municipalités, le

pourcentage de succès aux différents examens de fin de stage fut très important alors

que cette exigence ne figurait pas dans le cahier des charges initial et malgré aussi

l’absence de sélection préalable aussi rigoureuse que pour l’accès aux formations

traditionnelles de l’AFPA.

Le partenariat développé entre l’AFPA Guadeloupe et le deuxième RSMA (Régiment

du service militaire adapté) fut une autre expérience réussie. Désireux d’aller plus loin

que la simple préformation qu’il proposait, le RSMA s’est en effet rapproché depuis

quelques années du centre de l’AFPA de Petit-Bourg où se déroulent les formations du

bâtiment et de la maintenance. Le RSMA a amélioré ses infrastructures et ses

équipements pédagogiques pour proposer aux appelés du contingent le début de

Page 217: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 217

formations de type AFPA, dans des spécialités comme la peinture, l’électricité, la

menuiserie et la mécanique auto. Les stages de l’AFPA étant constitués de modules, le

RSMA dispense le premier module et parfois plusieurs, qui sont ensuite validés par les

formateurs de l’AFPA. Ces premiers modules, contrairement aux unités de valeur,

correspondent déjà à une employabilité et permettent de prétendre à un poste de travail.

Aussi le militaire de retour à la vie civile peut, soit exploiter ses connaissances en

trouvant un emploi, soit intégrer un stage AFPA en étant dispensé des étapes déjà

parcourues. Au fil des années, le partenariat s’est renforcé et s’est concrétisé par la

signature d’une convention qui permet de tenir compte des modules suivis

antérieurement. Aujourd’hui, avec le volontariat qui draine des jeunes plus motivés et

souvent d’un meilleur niveau scolaire, le deuxième RSMA est en mesure d’élargir son

offre de formation aux espaces verts et à l’hôtellerie, et d’aller plus loin dans les

programmes AFPA. Ainsi, récemment, une formation d’agent d’entretien polyvalent du

bâtiment s’est déroulée intégralement dans les installations du deuxième RSMA avec

l’appui pédagogique des techniciens AFPA du centre de Petit-Bourg. La phase finale,

comportant le module de synthèse et la semaine d’examen, a été assurée par l’AFPA,

dans ses locaux. Il s’agit là d’une obligation stricte qui conditionne l’attribution du titre

homologué. L’opération a été un succès puisque 75 % des soldats ont réussi l’examen.

Pour être tout à fait honnête et exhaustif dans ma présentation, je dois confesser que

d’autres initiatives, prises dans un esprit de partenariat et de complémentarité dans le

cadre de la certification des compétences ont beaucoup moins bien réussi. En effet,

certains organismes privés, intervenant sur des contrats de qualification ou ayant signé

des conventions CIF ou autres actions jeunes, ont sollicité l’AFPA pour faire valider

leur formation suivant la procédure décrite ci-dessus. Mais le niveau des personnes à

former, la faiblesse ou l’inadéquation des structures pédagogiques de ces organismes,

leur méconnaissance des méthodes et des programmes de l’AFPA ont rendu leurs

tentatives infructueuses et leurs résultats décevants. En effet, même quand un succès à

l’examen était enregistré, c’était toujours de justesse et le lauréat présentait de réelles

lacunes.

Que conclure de ces témoignages ?

Les textes prévoient que certains ministères peuvent mettre en œuvre des procédures de

validation des compétences afin que, par la formation continue permanente, tout citoyen

Page 218: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 218

puisse acquérir partiellement ou totalement un titre ou un diplôme pouvant figurer dans

un CV ou en vue d’une promotion sociale ou professionnelle. L’AFPA permet à des

personnes formées dans des structures extérieures de venir présenter et préparer les

épreuves de validation officielles élaborées à l’échelon national et notées par des jurys

de professionnels. L’exemple du RSMA prouve que cette démarche peut réussir. Les

autres expériences démontrent que ce n’est ni facile ni automatique. Pourtant, de l’avis

de nombreux observateurs et décideurs, c’est une coordination qu’il faut encourager et

développer, en incitant les organismes de formation publics et privés à multiplier, en

concertation étroite avec l’AFPA, les pré-qualifications et les modules initiaux. Un plus

grand nombre de personnes pourront être accueillies sur des durées écourtées dans les

ateliers de l’AFPA, habilités par le ministère de l’Emploi et de la Solidarité, afin d’y

recevoir le complément de formation indispensable à la maîtrise du métier et à

l’obtention d’un titre qualifiant et reconnu, passeport pour l’insertion et l’emploi.

GUYANE : Mme Samia Belabdelmoumen, ACFCI/ACCP (Assemblée des chambres

françaises de commerce et d'industrie - Association pour la certification des

compétences professionnelles)

Le dispositif des Chambres de commerce

Il existe un dispositif de certification des compétences professionnelles en entreprise,

initié en 1998 par les chambres de commerce et d’industrie. Pour nous, la

reconnaissance des acquis professionnels passe par la certification, par la

reconnaissance professionnelle et sociale des acquis de la vie professionnelle et

personnelle.

L’Association pour la certification des compétences professionnelles (ACCP) a été

officiellement créée le 27 août 1998, à l’initiative du réseau des chambres de commerce

et d’industrie (CCI). Dans l’approche de l’ACCP, la certification des compétences

repose sur trois principes : les compétences sont certifiées uniquement en situation de

travail, la certification est basée sur l’évaluation par une tierce partie avec un contrôle

qualité à différentes étapes, la certification est séparée de la formation.

De ces préceptes découlent deux conséquences : le résultat d’un processus de formation

ne peut être certifié, et la certification des compétences ne débouche pas sur l’obtention

d’un diplôme, d’un titre, ou d’un certificat de qualification professionnelle.

Page 219: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 219

Pour mettre en place son dispositif, l’ACCP a entrepris, durant plus de 2 ans, la création

de référentiels d’évaluation d’unités de compétences et la mise en place de centres de

validation dans lesquels opèrent des évaluateurs et des vérificateurs formés et certifiés.

Dans le même temps, la rédaction d’un manuel qualité a été lancée en vue de

l’accréditation de l’ACCP par le Comité français d’accréditation (COFRAC), un label

qualité apportant une garantie aux entreprises. Ainsi, le fonctionnement de l’ACCP

obéit aux critères de la norme européenne EN45013, signée par 18 pays européens dont

la France, et qui concerne les organismes de certification des compétences des

personnes.

Si la qualité des certificats de compétences en entreprise (CCE) a d’abord exigé une

séparation entre le système d’évaluation des compétences en entreprise et le système de

formation, l’autre exigence, tout autant primordiale, est la participation active des

entreprises dans l’élaboration du processus de la validation, et leur représentation à

toutes les étapes de ce processus.

Des référentiels pour les compétences transversales

Depuis 1998, l’ACCP a porté son choix sur la création de référentiels essentiellement

dans les domaines de compétences transversales, car il devient de plus en plus évident

qu’elles jouent un rôle capital dans l’univers professionnel. Elles permettent aux salariés

de s’adapter aux évolutions des nouvelles technologies et de l’organisation du travail, et

sont communes à l’ensemble des secteurs d’activité, favorisant ainsi les mobilités

verticales et horizontales.

Aujourd’hui, l’ACCP a élaboré et validé, à partir d’une méthodologie propre, une

centaine de référentiels d’évaluation d’unités de compétences dans une dizaine de

domaines de compétences. Parmi les domaines validés à ce jour, on peut citer : le

service clients, le secrétariat-assistanat de direction, le management, les compétences

clés (communication, résolution de problème), la vente à distance, l’utilisation de l’outil

bureautique.

Pour chacun de ces domaines, l’ACCP a constitué un groupe de pilotage comprenant en

moyenne une dizaine d’entreprises partenaires. Le choix des entreprises partenaires a

permis de constituer des groupes très diversifiés où sont représentés les différents

secteurs d’activité des services, de l’industrie et du commerce. Les tailles des

Page 220: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 220

entreprises s’échelonnent de la PME à la grande entreprise, et les implantations

géographiques sont très variées.

Dans le processus mis en place par l’ACCP, les référentiels d’évaluation, une fois

élaborés, sont présentés au comité pour la certification (CPC) pour validation. Celui-ci

rassemble les parties intéressées par une certification. Il est composé d’experts issus des

entreprises et d’institutions intéressées. Ces experts sont répartis en deux collèges :

d’une part, les entreprises et institutions qui proposent ce service et, d’autre part, celles

qui utilisent ce service. Tout ce qui concerne la certification est soumis au comité pour

la certification qui est amené à se prononcer et qui est le garant de la qualité de

l’ensemble du processus.

La relation évaluateur / candidat

Si l’accès à la certification est libre de tout mode d’apprentissage, il requiert cependant

un minimum d’expérience professionnelle. L’évaluation des compétences dans ce

dispositif a pour objectif la reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle, et

débouche sur la certification des compétences par la délivrance de CCE. Elle dure deux

à quatre mois au cours desquels un évaluateur et son candidat se rencontrent pour

repérer et collecter les preuves à rassembler. Les compétences étant caractérisées

comme "l’ensemble des capacités démontrées par les preuves de la vie professionnelle

et sociale courante", leur évaluation est centrée sur les preuves extraites de la situation

de travail. Elle s’adresse uniquement aux personnes en situation réelle de travail et

exclut la simulation comme support de l’évaluation des compétences.

Accompagné par un évaluateur, le candidat rassemble un ensemble de preuves de ses

compétences professionnelles qui se matérialise par "un portefeuille de preuves".

La constitution de ces portefeuilles s’appuie sur les référentiels d’évaluation de

compétences remis à jour régulièrement. Ceux-ci constituent le référent qui sert, d’une

part, de guide au candidat et à l’évaluateur pour collecter les preuves, et d’autre part, de

norme à l’évaluateur et au vérificateur pour juger les preuves rassemblées par le

candidat.

L’évaluateur est un professionnel d’un secteur donné, formé à l’évaluation et certifié. Il

accompagne le candidat tout au long de l’élaboration de son portefeuille de preuves.

Son rôle est d’aider le candidat à constituer son portefeuille et d’établir son plan

Page 221: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 221

d’évaluation. Il évalue ensuite les preuves apportées, et quand elles sont suffisantes au

regard des critères d’évaluation, les enregistre dans le portefeuille de preuves.

Cette démarche d’évaluation a l’avantage de motiver les salariés en identifiant leurs

compétences, d’améliorer les pratiques individuelles des collaborateurs et de ce fait

accroître le professionnalisme collectif de l’entreprise, d’aider à la formalisation des

pratiques, d’améliorer les pratiques managériales en entreprise, et l’organisation du

travail.

Nous avons aujourd’hui 70 référentiels validés par le comité pour la certification, 15

centres de validation, 30 évaluateurs et 15 vérificateurs qui sont formés et aptes à

délivrer des certificats de compétences professionnelles en entreprise.

REUNION : M. Alix Sery, Directeur DDTEFP

Compte tenu du temps, je vais être très rapide. Je vais vous citer les expériences que

nous avons pu réaliser à la Réunion en matière de VAP et je ferai un bref bilan chiffré

en termes de validation.

Pour la reconnaissance des acquis, le champ d’intervention qui a été choisi est le BTP.

Pourquoi le BTP ? Ce secteur se trouvait, il y a dix ou douze ans, dans une situation

doublement complexe puisqu’il devait accroître ses effectifs et améliorer la

qualification de ses salariés. Un certain nombre de procédures ont été expérimentées au

cours du programme Coopération 1000 emplois qui visait les demandeurs d’emploi. Ce

dispositif impliquait un certain nombre de partenaires et d’acteurs qui étaient les

chambres consulaires, l’AFPA, l’Éducation nationale, des organismes de formation

privés ainsi que les structures de la branche professionnelle du bâtiment. D’autres

formules de VAP ont été tentées ensuite dans le cadre de chantiers de formation de

production puis poursuivies par les chantiers d’application encadrés par le GIBTP.

Enfin, il existe actuellement avec l’AFPA un système de formation continue des salariés

de ce secteur qui met en pratique une procédure de reconnaissance des acquis

professionnels, héritée des expériences passées. Voilà les trois initiatives que nous

avons prises.

Pour ce qui concerne le bilan sur la VAP entre 96 et 99, 502 personnes ont été

accueillies dans le dispositif, 125 dossiers ont été déposés, 115 examinés et 10 candidats

ont obtenu le diplôme dans sa totalité. Au 31 décembre 1999, 238 personnes avaient été

Page 222: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 222

impliquées dans la procédure de la VAP, d’origines diverses : des professionnels, des

enseignants, des universitaires… Cette opération a mobilisé de nombreux intervenants,

pour des résultats un peu décevants. Mais 10 personnes ont tout de même obtenu leur

diplôme.

Je laisse la parole à Michel Ducotterd qui va vous décrire ces actions.

REUNION : M. Michel Ducotterd, Chargé de mission à ARVISE (association du

réseau ANACT)

Je suis plus particulièrement chargé des diagnostics de compétences en entreprise. Je

vais vous relater ce qui s’est passé autour de ces expériences de formation, ce que cela a

induit à la longue, après 11 ans de travail d’un certain nombre d’organismes de

formation, en association avec la branche professionnelle et en étroite concertation avec

les politiques publiques de l’État et de la Région.

Pour préciser les propos de M. Sery, j’ajouterai qu’il s’agissait de former des

demandeurs d’emploi et des opérateurs d’entreprises dans un contexte particulier qui

perdure en partie encore aujourd’hui. On était dans la nécessité impérative d’augmenter

à la fois compétences et volume d’opérateurs dans le bâtiment. La défiscalisation avait

vraiment dopé la construction à la Réunion et on était confronté à des problèmes de

faibles niveaux de qualification.

Deuxième caractéristique : les actions de formation sont étroitement associées à des

situations concrètes sous la forme d’alternance ou de chantiers. Plusieurs

problématiques étaient posées conjointement : l’évaluation et l’attestation des acquis

professionnels, et aussi l’intégration dans la grille de classification des entreprises.

En ce qui concerne les effets, on a connu des fluctuations importantes au cours de ces

10 ans. Ce qui reste aujourd’hui, c’est une expérience de système en entrées-sorties

permanentes où l’on voit le nombre de demandeurs d’emploi équilibré par le nombre de

salariés d’entreprises, une demande qui perdure et qui est même plus pressante

qu’auparavant. On constate que les effets sur les classifications se font à partir

d’attestations et non pas de système de validation. Des personnes sont classées dans les

métiers, sachant que, sur le fond, il y a des applications de conventions collectives qui

sont récentes et pas toujours au point. Un système de VAP a été mis en place. Il

Page 223: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 223

s’appuie sur les évaluations d’entrée en formation et celles-ci sont reproduites de façon

intégrale dans les attestations de sorties, ce qui pose problème.

Nous avons aussi un certain nombre de questions qui sont posées par les opérateurs de

formation et les tuteurs, surtout en entreprise :

- Qu’identifie-t-on, quand on parle des acquis professionnels ?

- Que fait-on des acquis identifiés en amont de la situation de formation ? Je précise que

ce sont des formations qui n’ont pas de visée diplômante.

- Le système de formation est en permanence questionné sur l’élargissement des

référentiels. Il y a de fortes pressions de l’entreprise pour que les compétences dites

molles (comportements, compétences transversales) soient prises en considération à la

fois dans le positionnement et dans la formation.

- Quelle est la place du parcours dans les attestations qui vont être délivrées ?

- Qui identifie pour pouvoir reconnaître ?

- Quelle est la place des opérateurs de formation, des formateurs, des organismes de

formation ? Il s’agit essentiellement d’un système porté par l’AFPA Réunion.

- Comment s’opère la représentation de la branche professionnelle dans les systèmes de

reconnaissance ?

- Quelle est l’implication des représentants des politiques publiques ? Aujourd’hui, sur

les attestations, nous voyons apparaître le logo du conseil régional.

- Quel est le rôle et la place des tuteurs dans cette identification et cette

reconnaissance ?

- Comment préparer les tuteurs à faire ce travail d’identification et d’évaluation des

acquis professionnels ?

- Comment trouver des articulations avec les procédures de VAP et de certification

professionnelle ?

Page 224: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 224

DébatsDébatsDébatsDébats

GUADELOUPE : Mme Thérésa Edmond, Directrice de la formation à la CCI de Basse-

Terre

Je suis Directrice de la formation à la Chambre de commerce de Guadeloupe et je suis

partenaire de la Chambre de commerce et d’industrie de Guyane sur une opération que

la Guyane vous présentera. Nous nous situons en tant que chambre de commerce dans

une approche compétences. Pour nous, la compétence est dans les entreprises. Nous

avons créé un réseau des observatoires des compétences des DOM et de la Corse en

1997 avec l’ensemble des chambres de commerce de Guyane, Guadeloupe, Réunion et

Corse pour justement observer ces compétences dans les entreprises, mieux les évaluer

et les adapter. La première action que nous avons menée dans le cadre de ce réseau était

une enquête sur les emplois faiblement qualifiés, notamment dans les services. Ce

secteur est porteur dans l’ensemble de ces régions et il recrute essentiellement des

emplois faiblement qualifiés. Nous avons mené une étude interrégionale sur cette

problématique commune auprès de 1800 entreprises sur l’ensemble des départements.

Nous avons interrogé les entreprises sur l’activité, la reconnaissance et l’évolution de

ces emplois, le mode de recrutement qu’elles comptaient mettre en place et les

compétences développées. Une grande conclusion s’impose : au-delà des compétences

techniques, l’entreprise demande également des compétences comportementales. Elle

attend du salarié qu’il ait la compétence de travailler, de mobiliser les ressources dont il

dispose, d’être autonome, flexible … Ces traits de comportements semblent

particulièrement essentiels pour l’entreprise du fait même que ce public faiblement

qualifié n’a pas une grande compétence technique.

L’entreprise, quand elle a un choix à faire, préfère embaucher quelqu’un avec un niveau

de qualification inférieur, si cette personne peut mobiliser ces compétences

comportementales dans l’entreprise. Mais qu’entend-on par compétence

comportementale ? Comment évaluer ces compétences pour permettre à l’entreprise,

d’avoir une meilleure gestion des RH (Ressources Humaines), au salarié, de mieux se

positionner ou au demandeur d’emploi d’être employable ? Cette étude a démarré en

1997 et une grande partie des résultats a été restituée en 1998 à Basse-Terre

(Guadeloupe). Nous avons travaillé avec l’ensemble des acteurs de l’emploi et de la

Page 225: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 225

formation pour faire quelques préconisations, entre autres sur la certification et la VAP

de ces métiers peu qualifiés. Actuellement, dans la droite ligne de cette étude, nous

testons un nouvel outil "Compétence pro" mis en place par l’OFEM (Observatoire de

l’emploi et de la formation de la chambre de commerce de Paris) qui concerne

spécifiquement les emplois faiblement qualifiés. Cela nous permettra d’analyser ces

compétences avec l’entreprise et d’établir éventuellement un passeport pour l’emploi

pour permettre aux personnes évaluées de disposer d’un référentiel de leurs

compétences. Cet outil, pas encore finalisé, est accessible sur Internet. Il a été élaboré

par Europe Manager (partenaire de l’OFEM). Les entreprises ont été interviewées pour

mettre en place une base de données qui a permis l’élaboration de critères pour la

conception même du logiciel. L’outil a été testé auprès de 600 entreprises et

actuellement par 6 chambres de commerce et par des APP (Ateliers pédagogiques

personnalisés).

Les dimensions mesurées sont la communication, les connaissances et les savoirs, le

social, le professionnel (adaptation, flexibilité, souci d’intégration), l’émotionnel et

l’attention. Ces dimensions sont repérées à partir de 16 critères comportementaux. Cet

outil permet de regrouper les métiers par famille d’emplois. Il comprend 8 familles

d’emplois pour favoriser la mobilité entre les emplois. Il est spécifique sur les

compétences comportementales mais applicable sur plusieurs familles d’emplois. Le

test comporte 120 questions fermées et sa durée de passassion est de 20 minutes. À la

fin du test, un certain nombre de préconisations sont faites à la personne évaluée. On lui

communique les résultats, notammment sur sa capacité d’intégration, sa sociabilité, ses

points forts et ses points faibles, tels qu’ils sont apparus dans le test. C’est un outil qui

peut être utilisé pour une orientation professionnelle, pour permettre au salarié de faire

le point sur ses compétences. Pour ces publics peu qualifiés qui manquent de confiance

en eux, c’est un élément important. Pour l’entreprise c’est aussi un outil de gestion des

RH pour situer les personnes sans que ce soit un outil sanction. Il permet d’apporter

notre contribution à ceux qui établissent les plans de formation pour ces publics. Dans

nos régions, nous avons beaucoup de formations pour des publics faiblement qualifiés

qui regroupent des contenus parfois un peu vagues et souvent décalés par rapport aux

besoins des entreprises.

Page 226: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 226

GUYANE : Mme Joseline Heder-Mormon, CCIG

Nous terminons une action décidée à la suite de l’étude sur l’évolution des emplois de

bas niveau de qualification, menée dans le cadre du réseau des observatoires des

compétences et des métiers des DOM et de la Corse. Il s’agit d’une action

d’accompagnement et d’appui aux entreprises dans leur démarche de recrutement

et aussi d’une opération "marketing" pour ce qui concerne la formation

professionnelle. Des équipes sont allées dans les entreprises pour les informer des

mesures incitatives à l’emploi existantes et de toutes les procédures et réglementations

liées à la formation professionnelle. Nous nous sommes rendu compte que, tant au

niveau du recrutement que de la formation professionnelle, il y avait une grande

méconnaissance, par les chefs d’entreprise, des règles et des mesures existantes. Nous

avons pu réaliser un certain nombre de recrutements et nous avons fait émerger des

informations intéressantes dans un champ d’investigation assez large car plus de 1000

entreprises ont été contactées. En relation avec les entreprises, les demandeurs

d’emplois et l’ANPE, nous avons pu mettre en adéquation offres et demandes d’emploi.

Nous avons constaté que la demande des entreprises avait largement évolué pour

certains postes et qu’il y avait une grande difficulté à déterminer les profils de postes. Il

existe un problème d’emploi, même pour des publics qualifiés, que les entreprises

hésitent à embaucher. En fait, nous avons constaté que même lorsque les savoirs sont

validés, le savoir être est un facteur essentiel lors du recrutement. L’entreprise a

tendance à recruter à des niveaux de plus en plus élevés, sur des qualités de motivation

et d’adaptabilité au projet. Nous entrons dans la démarche d’évaluation des

compétences, notamment comportementales, de la Chambre de commerce de Paris.

.

GUADELOUPE : M. Francis Hervé, Président du FONGECIF

Nous sommes très intéressés par la VAP car cela devrait faire gagner du temps au

niveau de la formation, surtout compte tenu de notre budget (en 99, pour un budget

disponible de 7 millions de Francs, nous avions pour 44 millions de Francs de

demandes). La VAP nous permet d’envoyer plus de personnes en formation et surtout

de ne pas faire perdre de temps à celles qui ont déjà des acquis. Pour l’instant, nous

essayons de mettre en place un partenariat avec les organismes de formation, mais nous

sommes assez déçus parce que tous les centres de formation nous proposent une

Page 227: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 227

formation complète. À quoi sert la VAP, si on ne peut pas l’utiliser après ? Cela pose le

problème de l’organisation des centres de formation qui n’est pas encore réglé.

Travailler sur la VAP devrait se faire avec tous les organismes concernés pour que l’on

puisse aboutir à des solutions.

MARTINIQUE : Mme Jacqueline Guillot, Conseillère en formation continue, DAFCO

Je peux vous répondre effectivement sur ce que nous faisons en Martinique. Nous nous

sommes aperçus qu’il était indispensable d’accompagner les candidats jusqu’à

l’obtention du diplôme et nous avons développé une expérience au sein de l’Éducation

nationale, avec le réseau des GRETA. Nos candidats sont essentiellement des BTS et

nous avons mis en place des modules sur les dispenses qu’ils n’obtiennent pas dans les

domaines économie, droit, anglais, français, mathématiques... Nous incitons les

candidats salariés à se rapprocher des FONGECIF pour obtenir un module de

préparation pour la partie manquante (minimum 60 heures). Cette expérience a débuté

l’année dernière et nous avons eu d’excellents résultats. Obtenir une dispense équivaut à

la note 10 à l’examen ; il y a donc une certaine neutralité qui peut être réajustée par le

jury. Nous avons des candidats qui ont réussi à avoir leur BTS avec mention.

MARTINIQUE : M. Alain Hierso, CESR (Conseil économique et social régional)

Je suis enseignant et je voudrais revenir sur les propos de Mme Guillot pour avancer

une position sur la VAP, précisément sur la phase de certification et des dispenses

accordées. On observe qu’il y a une grande déperdition, compte tenu des moyens

mobilisés dans les résultats de la certification. Aucun diplôme n’est totalement validé

par la VAP, organisée par l’Éducation nationale, et il faut toujours passer au moins une

épreuve. La dispense donne droit à la note de 10, comme si le candidat avait passé

l’examen. Le candidat ne perd pas mais ne gagne pas non plus, alors que s’il avait passé

cet examen, il aurait pu avoir 12. Je pense que donner une note moyenne à quelqu’un

dont on reconnaît des acquis professionnels, ce n’est pas équitable. Si la personne

maîtrise certains domaines, on doit reconnaître que le résultat est satisfaisant. Dans

l’Éducation nationale, satisfaisant c’est plus de 10. Il faut trouver un moyen

d’évaluation plus juste. Traduire en note une dispense devrait être la reconnaissance

réelle d’un acquis professionnel.

Page 228: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 228

MARTINIQUE : Mme Jacqueline Guillot, Conseillère en formation continue, DAFCO

L’objectif de la VAP, c’est d’obtenir un diplôme de l’Éducation nationale ou d’un autre

ministère. On a établi certaines règles. C’est vrai qu’aucune dispense n’est accordée

totalement, néanmoins dans le projet de loi, il est prévu que toutes les dispenses

puissent être accordées. Mais sommes-nous sûrs que, dans notre activité

professionnelle, nous recouvrons tous les champs de compétences qui concernent le

diplôme ?

Obtenir une dispense d’épreuve équivaut à 10 et cette note est acquise pour 5 ans.

Pendant cette période, le candidat peut se préparer à passer d’autres épreuves. C’est un

projet personnel, de vie et le candidat doit se donner les moyens pour obtenir ce

diplôme, même si nous faisons tout pour l’y aider. Il est vrai qu’il faut faire un choix

entre obtenir une dispense à 10 ou passer une épreuve dans laquelle on peut être

brillant. C’est au candidat de voir où est son intérêt, c’est un projet personnel.

Le référent, c’est le référentiel du diplôme mais c’est aussi l’activité professionnelle

décrite par le candidat, c’est le travail réel. Un des points de réflexion que nous devons

encore approfondir concerne l’analyse du travail. On fait un rapprochement entre le

travail réel et ce que l’on demande dans le référentiel. Le texte dit que le candidat

dispensé de passer l’épreuve peut choisir de garder cette dispense ou de passer

l’épreuve. Quand le jury octroie une dispense, il met une appréciation nuancée entre 1,

2 et 3. Quand il a 3, le candidat maîtrise parfaitement le sujet, et au moment de la

délivrance du diplôme, le jury peut tenir compte de cette appréciation.

GUYANE : Mme Samia Benabdelmoumen, ACFCI/ACCP

Il faut resituer la reconnaissance de la VAP dans la problématique de la réforme de la

formation continue avec ce que l’on appelle la formation tout au long de la vie. On avait

constaté qu’une partie importante de la population qui travaille ou qui a travaillé

(demandeurs d’emploi) n’avait pas de diplôme. Des personnes travaillent depuis des

années et en fin de compte, elles ne "savent rien faire" puisqu’elles n’ont pas de

diplôme. Un salarié qui travaille pendant 10 ans dans une entreprise acquiert un savoir

faire. S’il se trouve au chômage, il n’a pas de diplôme et donc aucune reconnaissance de

ses compétences. Le deuxième constat était que la formation continue avait profité

Page 229: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 229

surtout aux hauts niveaux de qualification (les cadres). Enfin, le troisième constat était

que la formation n’était pas toujours adaptée au marché du travail et aux besoins des

entreprises.

C’est dans cette problématique que s’est inscrite la réflexion sur la reconnaissance des

acquis. L’Éducation nationale était précurseur, puisqu’elle avait mis en place un

dispositif depuis 1992. Au-delà des notes, ce qui est important est que l’on reconnaît

l’expérience professionnelle. C’est un progrès de dire que l’on peut obtenir un diplôme,

pas seulement en allant à l’école, mais que l’on peut apprendre en dehors de l’école.

L’idée principale était de ne pas obliger les gens à réapprendre ce qu’ils savaient déjà.

A l’Éducation nationale, la reconnaissance se fait par validation : on ne délivre pas un

certificat, mais on donne une dispense pour obtenir un diplôme.

Le dispositif du Ministère de l’Emploi et de la Solidarité, avec les expérimentations

ANPE et AFPA, adopte une autre démarche. On peut obtenir des certificats de

compétences professionnelles de l’AFPA par deux voies, par la formation ou par la

reconnaissance des acquis pour ceux qui ont une expérience. On peut obtenir un, deux,

trois certificats, mais calés sur des référentiels métiers. On peut faire un va-et-vient

entre la certification et la formation. Une personne qui a deux certificats et qui veut

accéder au titre suivra la formation correspondant à ceux qui lui manquent. Cela

suppose la mise en place dans la formation continue d’une formation individualisée, à la

carte et adaptée aux besoins des individus.

Le troisième dispositif entre dans le même champ sur le même principe. Néanmoins,

l’Association pour la certification des compétences professionnelles, est centrée sur les

salariés parce que l’on considère que la compétence s’acquiert en entreprise. Nous

évaluerons des demandeurs d’emplois après un stage en entreprise ou après une

formation en alternance.

Là, on voit bien la complémentarité entre ces différentes modalités d’évaluation. À

l’Éducation nationale, on demande un dossier, on se base sur du déclaratif, au Ministère

de l’Emploi et de la solidarité, ce sont souvent des situations de travail reconstituées,

des simulations et pour nous, c’est la preuve extraite de la situation de travail. La

complémentarité de ces dispositifs est intéressante parce qu’il y a des publics qui

veulent des diplômes et d’autres qui souhaitent seulement faire reconnaître leurs

compétences. Ils ont le choix entre ces trois dispositifs de reconnaissance et de modes

Page 230: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 230

d’évaluation. Notre objectif est de voir nos certificats reconnus dans le dossier VAP de

l’Éducation nationale et par l’AFPA et qu’ainsi une complémentarité s’installe. Cela

suppose pour les formateurs qu’ils modularisent les formations. En réorganisant les

programmes de formation, il faut permettre des passerelles entre la reconnaissance des

acquis et la formation des adultes.

Les débats transcrits ci-après se sont déroulés à l’issue de la présentation de la

synthèse de l’atelier lors de la séance plénière de clôture.

GUADELOUPE : un intervenant de l’AFPA

Je voudrais apporter quelques précisions sur l’expérience avec le RSMA de

Guadeloupe. Depuis plusieurs années, l’AFPA Guadeloupe et le deuxième RSMA

collaborent. Au cours des années, il est apparu souhaitable d’aller plus loin dans la

démarche. Nous en sommes donc arrivés à un stade où le RSMA de Guadeloupe permet

aux conscrits, et maintenant aux volontaires, de suivre intégralement le ou les premiers

modules des formations de type AFPA. Cela présente l’avantage pour le jeune qui quitte

l’armée de pouvoir accéder à un emploi puisqu’un module AFPA correspond à une

employabilité. Le jeune sorti de l’armée, suffisamment sensibilisé et intéressé au métier

peut, s’il le souhaite, aller plus loin et entrer en formation à l’AFPA qui tiendra compte

des acquis précédents. L’évolution suivante consiste, maintenant que les volontaires qui

s’engagent ont un peu plus de temps et ont souvent un meilleur niveau de départ à aller

le plus loin possible dans la formation. Tout le monde y trouve son avantage. L’AFPA

continue à garantir la validation, la certification de la formation en accomplissant dans

ses locaux la phase finale des formations et l’organisme initial a donné une garantie au

jeune de ne pas voir son effort de formation stoppé par son départ de l’armée. Cette

expérience s’est déroulée essentiellement jusqu’ici, dans les métiers du bâtiment, du

bois, de l’électricité et devant le succès de ces premières expériences, nous envisageons

d’élargir les actions aux espaces verts et à l’hôtellerie.

MARTINIQUE : Mme Jacqueline Guillot, Conseillère en formation continue, DAFCO

Je m’occupe du dispositif de validation des acquis professionnels. Alors il me semble

important d’apporter quelques précisions. Nous avons bien parlé dans notre atelier de la

Page 231: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 231

loi du 20 juillet 1992, mais je tiens à souligner qu’elle ne concerne pas uniquement le

ministère de l’Education nationale, mais aussi les ministères de la Jeunesse et des

Sports, de l’Agriculture et aussi l’Université. Alors bien sûr, l’Education nationale est

peut-être un petit peu en avance et donc a une expérience plus importante, mais les

autres ministères nous ont déjà fait savoir qu’ils s’étaient engagés dans la démarche. Ils

se rendent compte justement des difficultés qu’il y a à la mettre en œuvre et ils font un

effort important, notamment au niveau de l’information des candidats.

L’autre précision importante sur cette loi est que la reconnaissance des compétences

concerne bien les compétences acquises par le travail pour obtenir un diplôme ou une

partie de diplôme de l’enseignement technologique ou professionnel. En ce qui nous

concerne, cela va du CAP au BTS. Les conditions sont des conditions d’activité : il faut

être en activité, ou avoir exercé au moins pendant 5 ans. L’autre condition est

l’obtention uniquement d’une partie du diplôme. C’est ce que dit la loi de 1992 mais

nous savons qu’elle est en cours d’évolution : le délai d’activité antérieure sera

certainement réduit à 3 ans et on pourra obtenir l’ensemble du diplôme. La formation

n’est pas obligatoire, mais elle est préconisée pour les unités ou les épreuves qui ne sont

pas obtenues par la validation des acquis professionnels.

Enfin, je crois que nous nous sommes rendu compte, mais nous le savions déjà au

travers de toutes les personnes qui sont intervenues dans cet atelier, que nous avions à

nous tous, AFPA, CCI, Education nationale peut être la réponse à un individu qui vient

nous voir et qui cherche, soit à trouver un emploi, soit à s’insérer, soit à se maintenir

dans son emploi. Et je crois que c’est très important que nous soyons tous conscients

que chaque structure, prise isolément, n’apportera peut-être pas la réponse à son

problème. Mais ce qu’il faut, c’est que nous soyons capables de lui dire qu’ailleurs, il

existe peut-être une solution pour lui.

GUYANE : Mme Marie-Danièle Rino, Chargée d'étude au CARIF

En effet, il existait un consensus sur ce point et il est vrai que je n’ai pas fait état des

autres ministères. On a effectivement parlé de la Direction de la jeunesse et des sports,

de la Direction de l’Agriculture et des forêts, notamment en indiquant qu’ils avaient à

peu près le même dispositif que l’Éducation nationale. Pour la direction de la jeunesse

Page 232: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 232

et des sports, le constat actuel était que les demandes étaient peu nombreuses et que la

démarche était relativement lourde.

GUYANE : Mme Samia Benabdelmoumen, ACFCI/ACCP

Je voudrais proposer en fait, une piste de réflexion à partir de la reconnaissance des

acquis professionnels. Les débats montrent qu’il y a d’immenses ressources humaines et

richesses naturelles, et je me demande si les dispositifs de reconnaissance des acquis

professionnels ou des acquis personnels ne permettront pas justement, d’aller dans le

sens du développement local. Dans les discussions, il est apparu que des métiers qui ne

sont pas reconnus existent avec des formations correspondantes comme, par exemple,

l’accompagnateur en milieu naturel. Contrairement à la France, où l’on parle beaucoup

de métiers nouveaux, je me demande s’il ne faut pas reconnaître ici des métiers anciens,

catalogués nulle part mais pour lesquels il existe parfois des formations qui ne sont pas

reconnues. Je me demande si ce n’est pas la combinaison de cette richesse humaine

avec les ressources naturelles qui permettrait justement d’aller dans le sens du

développement local. Je pense qu’une piste d’action est de lier reconnaissance des

acquis et programmes de formation qui peuvent favoriser la création d’entreprise par les

jeunes, en combinant justement ces savoirs ancestraux et les savoir-faire que l’on

connaît habituellement. Merci.

GUADELOUPE : M. Francis Hervé, Président du FONGECIF

Je regrette qu’on n’ait pas davantage insisté sur les autres systèmes de validation,

notamment de type AFPA. En ce qui concerne l’action avec le RSMA, pour moi, il ne

s’agit pas de validation des acquis, mais de transfert de formation.

Au niveau des coûts de formation pour le FONGECIF et surtout des temps de

formation, il serait souhaitable que les centres utilisent les moyens qu’ils ont et l’AFPA

en a beaucoup, notamment les ECAP (Evaluation de capacités professionnelles) pour

diminuer les temps de formation et ainsi diminuer les coûts. Compte tenu des

financements que nous avons, il faudrait que les personnes qui n’ont besoin que de

quelques modules ne suivent pas intégralement un stage. Je souhaiterais qu’un effort

soit fait dans ce sens-là.

Page 233: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 233

GUYANE : Mme Marie-Danièle Rino, Chargée d'étude au CARIF

En effet, ce point avait été abordé dans notre atelier à propos des formations modulaires.

L’AFPA nous faisait remarquer que le principe des formations modulaires permet

justement de réduire ce temps de formation et pour le FONGECIF entre autres, de

gagner sur le coût de formation.

Des difficultés techniques n’ont pas permis l’enregistrement intégral des interventions

et débats de cet atelier. Vous trouverez ci-après la contribution écrite d’un intervenant

de l’atelier.

ContributionContributionContributionContribution

REUNION : M. Michel Ducotterd, Chargé de mission à ARVISE (association du

réseau ANACT)

Pour une approche globale du thème de "la reconnaissance des acquis

professionnels", on doit se poser la question du "pourquoi" ces questionnements, et

"pourquoi aujourd’hui" ?

Dans le sillage des très actuelles et très ouvertes discussions sur le sujet, qu’elles soient

engagées au sein des branches professionnelles ou au cœur des discussions nationales

entre partenaires sociaux ( cf. les groupes de travail entre le MEDEF et les centrales

syndicales…) je pense qu’il est très réducteur de cantonner l’approche à des

considérations de normes existantes et de procédures établies. En se calant sur la réalité

des acteurs qui traitent concrètement des compétences professionnelles, les récentes

avancées en sciences sociales dans ce domaine, ainsi que les réflexions de personnes

"autorisées" ( CEREQ , A.M. Charrau …), vont dans le sens du besoin de renforcer un

débat dans la perspective de nouvelles identifications de nouvelles solutions à

construire.

En effet :

1. Quelles que soient les tentatives normatives – AFNOR ou non – et avec les remises

en causes dont il est l’objet, le thème des "compétences" n’est pas un sujet abouti.

2. Sur ce terrain, les "compétences dures" ( savoirs, savoirs faire) sont à peu près

identifiables et identifiées par métiers et groupes de métiers, tout en étant assorties de

systèmes et procédures d’évaluation-validation-certification établies.

Page 234: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 234

3. Les compétences dites "molles", c’est-à-dire les compétences "comportementales",

sont encore pour une part dans le flou même si de réels progrès ont abouti. Leurs

systèmes d’identification-validation-certification ont avancé et sont opérationnels, mais

ils conservent encore un aspect aléatoire.

4. Les compétences "hyper-molles" ou "transversales" (capacités d’initiative, de

réactivité, de communication …) font l’objet d’investigations nouvelles. Les identifier

sur des critères clairs et généralisables est encore de l’ordre de ce que nous ne savons

pas vraiment faire.

Or, compétences "molles" et "compétences transversales" fournissent de plus en plus

d’items aux "critères classants" dans les nouvelles approches de classification des

compétences reconnues en entreprises.

Validations et certifications restent et resteront un élément fort de la reconnaissance des

acquis professionnels. Mais il apparaît que la "valeur diplôme" est déjà - et sera sans

doute encore - de plus en plus contrebalancée par d’autres valeurs et d’autres systèmes

de reconnaissance. La modification des références et des systèmes de classifications

dans les entreprises l’affirment en tout cas. Ces autres valeurs, ainsi que les systèmes

qui se construisent à leur propos, seront à inventorier, calibrer, rectifier… puis

"patenter" le plus rapidement possible pour éviter les dérapages qui menacent

inévitablement notre système de reconnaissance.

La problématique de la reconnaissance des acquis professionnels est bien au cœur du

débat social actuel :

- Par sa réalité dans les situations de négociation sociale dans les entreprises,

- Par le questionnement des modes d’identification et de validation qui revient en

permanence dans les systèmes de formation continue.

De ce point de vue, il devient intéressant d’observer et d’interroger les tentatives

concrètes qui se développent sur le terrain, car elles seront à coup sûr indicatives à la

fois de l’évolution des contenus de compétences et des formes possibles d’identification

et de reconnaissance.

Ces tentatives sont multiples sur l’ensemble du territoire français.

Page 235: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 235

Atelier du 3/10/00

L’ILLETTRISMEL’ILLETTRISMEL’ILLETTRISMEL’ILLETTRISME

Animateur :

Mme Patricia Gautier-Moulin,

Responsable de l'Observatoire au Centre INFFO

Rapporteur :

M. Jean-Claude Maccès, Directeur du CARIF-OREF, Guadeloupe

Page 236: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 236

Intervenants

GUADELOUPE :M. Daniel Cucheval, Directeur adjoint DTEFP

GUYANE :Mme Line Lican, Directrice du CIO (Centre d'information et d'orientation) de Guyane

MARTINIQUE :Mme Maryse Chenière, Responsable formation à l'AASM (Association d'action socialede Martinique)

REUNION :M. Paul Soupe, Chargé de mission au CARIF-OREFM. Yves Zoogones, Directeur de l'AREP (Association réunionnaise d'éducationpopulaire)

Débats

GUYANE :Mme Florence Foury, Chargée de mission DPLI

METROPOLE :Mme Maryse Chaix, Sous-Directeur DGEFP

REUNION :M. Yves Zoogones, Directeur de l'AREP

Page 237: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 237

L’ILLETTRISMEL’ILLETTRISMEL’ILLETTRISMEL’ILLETTRISME

METROPOLE : Mme Patricia Gautier-Moulin, Responsable de l'Observatoire au

Centre INFFO

Je vais dresser un rapide historique des actions de lutte contre l’illettrisme et nous

verrons ensuite dans l’atelier où nous en sommes aujourd’hui sur un certain nombre de

points.

L’évolution des actions de lutte contre l’illettrisme

Années 60. A cette époque, on ne parlait pas encore d’illettrisme mais

d’alphabétisation. Les associations à connotation religieuse et humaniste furent les

premières à mettre en place ce type d’actions, en particulier les "Pères blancs", ces

religieux qui avaient officié en Afrique. Les formations, destinées aux travailleurs

immigrés, étaient assurées par des bénévoles avec une pédagogie calquée sur

l’apprentissage scolaire de la lecture et de l’écriture et se déroulaient surtout en cours

du soir .

1970-1976. Après Mai 68, la référence politique s’impose. Un idéal d’éducation

permanente et populaire se développe avec notamment des actions de lutte contre les

inégalités sociales et culturelles et contre le racisme. Les actions sont dispensées par des

"formateurs-militants". Le public est toujours constitué essentiellement de personnes

immigrées qui suivent ces formations en cours du soir. Au point de vue pédagogique,

l’approche est encore scolaire avec une évolution vers la méthode globale et des

supports liés à la vie quotidienne (formulaires, factures, etc).

1976-1981. La crise économique et la montée du chômage influencent les actions qui

ont alors pour objectif de préparer l’entrée ou le retour sur le marché du travail. Les

"préfo" (préformations) se développent. Il s’agit d’intégrer les apprentissages de base à

des ateliers professionnels, le plus souvent menuiserie, bâtiment, peinture, électricité.

Les stagiaires sont souvent chômeurs et suivent la formation à temps plein sur une durée

pouvant aller jusqu’à 18 mois. Des formateurs salariés remplacent peu à peu les

bénévoles.

1982-1990. Le sigle "BNQ" (bas niveaux de qualification) apparaît. Il concerne toujours

le public immigré traditionnel mais aussi toutes les personnes qui éprouvent des

Page 238: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 238

difficultés dans les apprentissages de base. Les dispositifs regroupent immigrés et

français, dont on s’est aperçu qu’ils rencontraient aussi des difficultés de lecture et

d’écriture (licenciements massifs de la sidérurgie, du textile, etc). Le concept

"d’illettrisme" se développe et, en 1984, est créé le GPLI (Groupe permanent de lutte

contre l’illettrisme).

On évoque beaucoup la professionnalisation des formateurs et des dispositifs

spécifiques de formation leur sont proposés. La pédagogie s’enrichit d’approches

cognitives (apprendre à apprendre), comme par exmeple le PEI (Programme

d’enrichissement instrumental) et les ARL (Ateliers de raisonnement logique).

1990-2000. Dans les entreprises, les démarches Qualité se généralisent, et avec elles,

l’écrit s’installe dans les ateliers : procédures, modes opératoires, compte-rendus

d’activités. Les ouvriers deviennent des "agents" ou des "opérateurs". Les

apprentissages s’appuient de plus en plus souvent sur les situations de travail pour être

plus rapidement opérationnels et directement applicables au retour sur le poste de

travail. Parallèlement, les pédagogues s’intéressent à la motivation à lire, au sens de la

lecture. Les durées de formation sont raccourcies. Les formateurs interviennent auprès

des demandeurs d’emploi et des salariés. Ils s’impliquent davantage dans l’ingénierie de

formation, notamment sur l’amont : accueil, positionnement, élaboration de projets

professionnels et de parcours de formation.

Et aujourd’hui, où en sommes-nous ? C’est ce que nous allons essayer de voir dans cet

atelier à travers plusieurs thématiques : l’individualisation de la formation, la

professionnalisation des formateurs et des acteurs de la lutte contre l’illettrisme, le

développement de pédagogies, méthodes et outils innovants, l’ancrage des

apprentissages dans le vécu et les situations professionnelles des stagiaires et enfin, les

modalités d’ingénierie financière. Ces éléments ne sont pas exhaustifs mais ont été

retenus parce qu’ils correspondent à des évolutions générales de la lutte contre

l’illettrisme et cités dans les recommandations du rapport Geffroy (Lutter contre

l’illettrisme : rapport à Mme la Ministre de l’Emploi et de la Solidarité et à Mme la

Secrétaire d’État aux Droits des Femmes et à la Formation professionnelle, Marie-

Thérèse Geffroy, Paris, mars 1999).

Page 239: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 239

L’individualisation de la formation

REUNION : M. Paul Soupe, Chargé de mission au CARIF-OREF

À la Réunion, la lutte contre l’illettrisme était plutôt de type militant, bénévole dans les

années 70, notamment grâce à l’ARCA (Association réunionnaise des cours pour

adultes) qui a aujourd’hui disparu. A l’époque, cette problématique sur l’alphabétisation

était une préoccupation locale, une dynamique de terrain. Avec l’institutionnalisation du

problème au niveau national, il y a une reconnaissance, une légitimation de cette

problématique à la Réunion, mais on a un peu perdu la dynamique et l’authenticité

locales.

L’individualisation est bien sûr un des axes forts des préoccupations des

commanditaires et des opérateurs intervenant à n’importe quel moment de la formation.

Effectivement, ce n’est pas un concept nouveau et ce n’est pas spécifique non plus à la

lutte contre l’illettrisme. Un pédagogue nord américain avait dit : "If you have to teach

John, you must know John" (Si vous devez enseigner à Jean, vous devez connaître

Jean). Cette notion repose sur un principe très simple, mais pas si facile à mettre en

place. Effectivement, si l’on veut véritablement faire de l’individualisation, il faudrait

dès le départ individualiser les processus de repérage, de positionnement voire

déterminer des plans individuels de formation et mettre en place des démarches et des

outils d’individualisation dans l’acte pédagogique, ce qui n’est pas toujours évident.

Par rapport au public concerné, je ne pense pas que le tout individualisation soit une

bonne chose parce qu’on n’apprend pas toujours tout seul. Il y a des moments où il est

nécessaire d’apprendre tout seul, mais aussi, on sait que pour apprendre, on a besoin de

confronter ses idées avec celles des autres. Il faut de temps en temps des groupes, des

sous groupes de travail. La non prise en compte de la personnalité du sujet peut poser

des problèmes. À un moment ou un autre, on a tous était témoin d’apprentissages qui se

passent mal, car on a méconnu la culture, l’histoire, les motivations mais aussi les

blocages du sujet. Je laisse la parole à M. Zoogones, Directeur d’un organisme de

formation, qui va illustrer très concrètement l’individualisation à travers un atelier

permanent que nous avons mis en place.

Page 240: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 240

REUNION : M. Yves Zoogones, Directeur de l’AREP (Association réunionnaise

d’éducation populaire)

Je dirige l’AREP (association de loi 1901) qui a travaillé, dès les années 60, dans le

domaine de la lutte contre l’illettrisme. Nous gérons un atelier permanent de lutte contre

l’illettrisme dans le sud de l’île qui à vocation à couvrir quatre communes. La première

phase a été menée sur deux communes et on va l’étendre sur deux autres.

Le principe de cet atelier permanent est l’individualisation. Au départ, on essaie

d’établir un positionnement, d’élaborer un projet, puis de définir un parcours. Les

personnes viennent quand elles sont disponibles. La durée moyenne passée par chaque

stagiaire correspond à un mi-temps. C’est une structure très souple. On décide

ensemble, par un contrat, de la ou des journées ou demi-journées que les stagiaires

consacreront à cet atelier. On alterne ce travail individuel avec des ateliers de groupe,

soit basés sur des envies, soit sur des besoins, détectés par le formateur. Effectivement,

les gens ont besoin de confronter leurs idées mais aussi de la parole des autres. La

parole d’un stagiaire est parfois plus efficace que celle du formateur.

Nous avons un nombre d’heures global, décidé par la DTEFP et nous accueillons entre

20 et 30 personnes, ce qui correspond à 3 ou 4 ateliers dans la journée avec des

moments de travail individuel. Le public est composé à la fois de la population

immigrée et de réunionnais. Une très forte population vient de Mayotte et des Comorres

(30 % de ces publics dans un atelier). On essaie de prendre en compte les spécificités,

mais aussi les problèmatiques globales. Les supports d’apprentissage sont le plus

possible liés à la vie quotidienne. On essaie aussi de faire en sorte que les réunionnais et

les immigrés apprennent à se connaître dans cet atelier, à comprendre les différences

culturelles et peut-être, changer le fonctionnement social global de la société

réunionnaise. La durée moyenne de la convention générale est de 600 heures, mais les

stagiaires peuvent faire moins. Cela dépend du contrat qui a été conclu. Si on prend une

personne qui ne sait pas lire, ce n’est pas 600 heures, mais plutôt 800 heures, voire un

peu plus qui seraient nécessaires. On se dit aujourd’hui, qu’il vaut mieux rester sur des

temps courts, quitte à redéfinir un autre contrat ensuite. Il est préférable de

contractualiser de façon très ponctuelle sur des objectifs opérationnels un peu plus

restreints, plutôt que d’engager la personne sur un an de formation.

Page 241: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 241

MARTINIQUE : Mme Maryse Chenière, Responsable formation à l'AASM

(Association d'action sociale de Martinique)

Je ne reprendrai pas ce qui a été dit sur la Réunion, parce que c’est un peu le même

schéma en Martinique, notamment dans les ateliers permanents. J’ajouterai pourtant que

nous avons des ateliers entre autres de français, calcul de base, mais aussi des actions

qui comprennent l’intervention de professionnels, d’assistantes sociales, de

puéricultrices pour des groupes de mères de famille. Quelquefois, à la demande des

apprenants, il peut y avoir un atelier de rédaction de courrier, de lecture de factures. Ce

sont des choses très concrètes qui se font à la demande des personnes, mais sinon dans

l’ensemble c’est à peu près la même façon de travailler.

J’ajouterai aussi que concernant les durées, nous allons de plus en plus sur des durées

courtes de 600 heures. Les résultats dépendent, c’est vrai, des personnes et des profils,

mais indépendamment du niveau d’arrivée en terme de connaissance en lecture, ce qui

est très important, c’est le niveau de développement intellectuel des personnes.

Certaines arrivent avec un niveau de connaissances faible et apprennent très vite. La

question de la motivation est très importante. Certaines personnes se donnent les

moyens, en travaillant chez elles, par exemple, et d’autres sont en difficulté cognitive

assez importante. Pour celles-ci, je pense que c’est un autre problème ; ce n’est peut–

être pas dans ces dispositifs qu’elles vont trouver des réponses. Au moment du

positionnement, nous faisons une évaluation du potentiel cognitif. Nous en reparlerons

peut-être au moment des outils.

GUADELOUPE : M. Daniel Cucheval, Directeur adjoint DTEFP

Je ne suis pas un spécialiste de l’illettrisme, je suis plutôt un prescripteur. Mon rôle

consiste à mobiliser des financements, pour mettre en place des programmes de lutte

contre l’illettrisme. En Guadeloupe comme à la Réunion, il y a création, à partir des

années 94/95, des ateliers permanents de formation de base qui prévoient une

individualisation dans le cadre de la formation et des entrées et des sorties permanentes

des stagiaires. La sortie a lieu au moment où les savoirs de base sont acquis. Ces ateliers

sont à déconnecter des formations professionnelles classiques, puisque le but de ces

ateliers est l’acquisition ou la réacquisition des savoirs de base que sont l’écriture, le

calcul et la lecture. L’individualisation est le maître mot de ces ateliers comme à la

Page 242: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 242

Réunion. Deux niveaux préalables à la formation permettent de réaliser cette

individualisation :

- d’une part le bilan de compétences, revu et corrigé par le CIBC de la Guadeloupe, où

il s’agit d’évaluer les acquis et les compétences, puisque les illettrés ont des acquis et

des compétences mais il leur manque les savoirs de base indispensables pour pouvoir

entrer dans des cursus pré-qualifiants et qualifiants, les menant à l’emploi. Ce bilan de

compétences a pour but essentiel de mobiliser la personne sur l’idée d’un cursus de

formation qui va durer un certain temps. Pour réussir un acte formatif vis-à-vis d’un

illettré, ce dernier doit être motivé personnellement dans cette action. Les prescripteurs

des bilans de compétences sont des psychologues, particulièrement formés pour

recevoir ce type de public, évoquer avec eux leurs objectifs personnels et les aider à

définir les objectifs formatifs qu’il faudra nécessairement "subir" pour les atteindre.

- d’autre part, au niveau du centre de formation, si l’on veut pratiquer

l’individualisation, il faut un outil de positionnement qui soit harmonisé et commun à

l’ensemble des organismes sollicités dans ces stages. Nous avons 5 organismes de

formation en Guadeloupe qui ont obéi à un cahier des charges et qui ont mis en place

une structure particulière. Nous leur avons demandé de réfléchir ensemble sur un outil

de positionnement qui permette de définir les temps de formation dans les différents

savoirs de base.

Ce n’est qu’après ces deux préalables que la formation commence avec une

individualisation et des entrées et sorties permanentes. Chez nous, la formation peut être

d’une durée maximum de 900 heures, la moyenne étant de 600, 700 heures. Dans les

modalités d’ingénierie financière, pour mettre en place ces projets, tous les partenaires

financiers doivent se mobiliser au même moment pour passer commande en même

temps. Vous savez que les budgets sont saucissonnés selon les publics. Il est

important, pour que les organismes de formation respectent le cahier des charges, qu’ils

aient une commande, unique et au même moment, de l’ensemble des prescripteurs pour

pouvoir faire entrer et sortir les stagiaires avec des mixages de publics. Le programme

de formation est assez important. Nous n’avons pas inventé un système particulier en

Guadeloupe. Il faut dire que les réunions avec le GPLI ont permis à chacun des

partenaires de réagir sur ses pratiques. Finalement, nous sommes arrivés à des pratiques

d’individualisation qui sont un peu communes à celles de nos collègues des autres

Page 243: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 243

DOM. Je pense à la Martinique et à la Guyane qui a d’ailleurs fait des expériences

pertinentes un peu plus poussées qu’en Guadeloupe. Je pense qu’il faut être très

modeste dans la lutte contre l’illettrisme, nous n’avons pas la solution. C’est en

tâtonnant depuis plusieurs années que nous sommes arrivés à développer des outils

d’individualisation qui commencent à porter leurs fruits aujourd’hui.

METROPOLE : Mme Patricia Gautier-Moulin, Responsable de l'Observatoire au

Centre INFFO

Quand on parle d’individualisation, on différencie l’individualisation des parcours de

formation et l’individualisation des apprentissages.

Pour l’individualisation des parcours, la formation est organisée, le plus souvent, en

modules et chaque personne suit uniquement les modules dont elle a besoin.

Pour l’individualisation des apprentissages, les méthodes pédagogiques seront adaptées

à chaque profil d’apprentissage, sachant que l’on apprend mieux selon certaines

caractéristiques (mémoire auditive, visuelle, fonctionnement cognitif). Jusqu’ici, c’est

plutôt l’individualisation des parcours de formation qui a été mise en place.

La professionnalisation des formateurs et des acteurs

REUNION : M. Paul Soupe, Chargé de mission au CARIF-OREF

En matière de lutte contre l’illettrisme, la professionnalisation des formateurs et de

l’ensemble des intervenants est primordiale et, à la Réunion, nous y sommes

particulièrement sensibles. L’expérience le démontre : outre les moyens matériels et

financiers qu’il ne s’agit aucunement de sous-estimer, la mise en œuvre opérationnelle

et la réussite d’un dispositif de lutte contre l’illettrisme repose - encore plus que dans

d’autres dispositifs de formation - sur la mobilisation des ressources humaines,

notamment en matière d’ingénierie, d’animation et de suivi pédagogiques.

C’est un thème qui me tient particulièrement à cœur puisque je me suis occupé de la

formation de formateurs à l’ARCA, pendant une quinzaine d’année. À la Réunion, le

CIRILLE (Centre interinstitutionnel de ressources sur l’illettrisme) a comme principale

mission d’accueillir, d’informer, de fournir des documentations ou de l’aide technique à

tous les organismes des formation et les formateurs qui ont des projets pour mettre en

Page 244: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 244

place des actions de formation. Nous organisons aussi des échanges de pratiques. C’est

quelque chose qui commence à prendre forme et à avoir du succès. Nous déployons la

logistique nécessaire pour que l’ensemble des formateurs qui interviennent dans ce

domaine puissent échanger concrètement sur les pratiques, les outils, les démarches.

Cette prestation est proposée depuis 3 ans et véritablement, les résultats ont un peu

dépassé nos espérances. Ce qui est intéressant, c’est que participent à ces échanges de

pratiques, aussi bien des formateurs débutants que des confirmés, voire des financeurs.

Il y a une espèce de communauté qui est en train de se mettre en place et qui commence

à échanger parce que ce réseau correspond à un véritable besoin. Cependant, il faut

rester modeste sur ces questions-là car personne n’a le secret qui rendrait un illettré,

lettré du jour au lendemain.

Nous organisons aussi une série de conférences, voire de visioconférences sur ce thème

précis. On en réalise trois ou quatre par an, en collaboration avec nos homologues de la

BPS de Toulouse. Ce qui nous a permis d’avoir des intervenants de haut vol que l’on

n’aurait pas pu faire venir, parce que le voyage coûte cher. Chaque fois qu’il y a une

conférence de ce type, cela bénéficie en même temps au public de Toulouse et au public

de la Réunion. Après, nous diffusons les actes par écrit et par vidéo.

Contrairement à ce qui s’entend ici ou là, l’encadrement social et pédagogique de ces

publics, n’est pas chose aisée. Au contraire, tous ceux qui ont été confrontés à ce type

de publics le savent : former des hommes et des femmes "analphabètes" ou "illettrés"

exige un savoir-faire pédagogique de haut niveau.

En effet, il ne s’agit pas simplement d’inculquer quelques savoirs élémentaires à des

personnes qui en auraient été, jusque là, dépourvues. Il s’agit plus généralement de

convaincre, motiver et soutenir des personnes souvent "fâchées avec l’école" et/ou en

butte à toute une série de difficultés d’ordre social, familial, financier... Bref, des

individus qui, compte tenu de leur histoire personnelle ou collective, se trouvent

souvent comme englués dans une spirale de l’échec. Et un des buts de toute action vis-

à-vis de ces personnes est justement de les aider à sortir de cette spirale. Autrement dit,

et sans sombrer dans du misérabilisme de bazar, autour de la question de l’illettrisme, se

greffent souvent d’autres problèmes qui, très légitimement, apparaissent aux yeux des

intéressés comme plus urgents à résoudre que la seule non-maîtrise du savoir

Page 245: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 245

lire-écrire-compter... C’est dire donc que l’encadrement pédagogique de ce type de

publics ne peut être confié au premier venu.

L’ensemble de ces actions constitue une priorité du nouveau contrat de plan État-

Région 2000-2006, cofinancé par l’Europe.

Des difficultés techniques n’ont pas permis l’enregistrement intégral des interventions

et débats de cet atelier. Vous trouverez ci-après des notes et documents de travail

utilisés lors de cette rencontre ou pour sa préparation ainsi que des contributions

écrites a posteriori et enfin la partie enregistrée des débats.

Notes / documents de travailNotes / documents de travailNotes / documents de travailNotes / documents de travail

Développement de pédagogies, méthodes et outils innovants

REUNION : M. Paul Soupe, Chargé de mission au CARIF-OREF

Qu’importe la méthode, pourvu qu’on ait l’ivresse. L’ivresse de la connaissance, bien

entendu. A travers cette boutade (en est-elle vraiment une ?) j’ai voulu attirer l’attention

sur la dérive d’une centration parfois excessive sur les outils, qui seraient comme

investis d’un pouvoir quasi-magique et qui résoudraient à eux seuls le délicat problème

des apprentissages ; ce que d’aucuns qualifient de dérives du "pédagogisme" ou du

"didactisme" ...

Cette petite mise en garde faite, il est vrai qu’en matière de formation comme dans

d’autres champs d’activités, il existe des démarches, méthodes et outils qui sont

meilleurs que d’autres. Encore faut-il s’entendre sur ce que meilleur signifie ici.

Comme Mme Thérèse Geoffroy l’a fort justement souligné dans son rapport, un bon

outil pédagogique n’est pas forcément celui qui fait référence à la dernière théorie à la

mode, mais plutôt celui qui a concrètement fait ses preuves, sur le terrain, auprès d’un

public réel ! D’où l’importance d’une veille pédagogique permanente, nécessaire à la

capitalisation, l’évaluation et la diffusion des méthodes et des pratiques. Un objectif que

l’on s’efforce, à la Réunion, d’atteindre au travers de deux prestations complémentaires

: d’une part, la formation des formateurs et, de l’autre, lors d’une animation mensuelle

d’échanges de pratiques. Dans un cas comme dans l’autre, un des objectifs est de

Page 246: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 246

repérer les organismes et les formateurs "innovateurs", afin de capitaliser et modéliser

leurs approches, méthodes et outils, et permettre ainsi leur transfert après évaluation.

Par ailleurs, on veille à ce que l’évaluation des méthodes et outils ne se fasse pas en

"vase clos", exclusivement sur l’île de la Réunion. C’est pourquoi il nous importe d’être

à jour des démarches et outils expérimentés ailleurs. Cette veille sur l’extérieur se

concrétise, notamment par des échanges avec les autres centres de ressources

illettrisme, des groupes de recherche, des éditeurs, etc.

A ce propos, l’organisation, depuis 1998, d’un cycle de visio-conférences avec nos

collègues de la BPS de Midi-Pyrénées, constitue une expérience enrichissante de

collaboration à distance en matière de veille et d’innovation pédagogiques.

Signalons enfin un projet soumis au programme européen FORE, d’une

expérimentation de l’usage des NTIC dans le champ de la lutte contre l’illettrisme. Il

s’agit de concevoir et d’expérimenter un outil on line de repérage et de positionnement

des publics, sur plusieurs sites et auprès d’une centaine de personnes. Cette phase

initiale d’expérimentation sera suivie par des expériences de formation ouverte et à

distance (FOAD), tutorée par un expert "humain".

Présentation de l'outil OURELLE

MARTINIQUE : Mme Maryse Chenière, Responsable formation à l'AASM

(Association d'action sociale de Martinique

Ourelle est un outil d’aide à l’apprentissage de la lecture et de l’écrit pour des

publics illettrés, de culture antillaise francophone.

Contexte d’émergence. A l’aube du 3ème millénaire, l’illettrisme, cette nouvelle

pathologie sociale, force à l’exclusion ceux qui maîtrisent peu les savoirs de base et qui,

de ce fait, ont du mal à s’adapter aux rapides mutations technologiques que nous vivons

en ce moment. Dans nos régions antillo-guyanaise, l’illettrisme, bien entendu, interpelle

les différents acteurs de la formation professionnelle. Leur imagination et leur efficacité

pédagogiques sont mises à rude épreuve, faute de pouvoir disposer d’outils adaptés.

Ourelle a l’ambition de combler en partie des lacunes en proposant une pédagogie

dynamique, réparatrice et des supports adaptés aux particularités culturelles des publics.

Ourelle est le fruit d’une recherche-action menée par trois professionnelles de terrain

(une animatrice de formation, une psychologue sociale et une orthophoniste) œuvrant

Page 247: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 247

dans la lutte contre l’illettrisme depuis de nombreuses années, dans des structures

implantées en milieu rural. Le public accueilli dans ces différents établissements gérés

par l’AASM est, dans sa grande majorité, issu de milieux économiquement et

culturellement défavorisés. Il présente un lourd passé d’échec scolaire et est avant tout,

créolophone. Notre conception de l’apprentissage et nos convictions idéologiques nous

avaient tout naturellement amenées à constuire nos propres supports pédagogiques. Face

à la demande pressante des acteurs de la formation professionnelle et après trois années

de recherche, d’approfondissement théorique et d’expérimentation, nous sommes

aujourd’hui en mesure de proposer cet outil qui, nous l’espérons, sera un maillon dans

la chaîne de solidarité qui se met en place progressivement pour lutter contre

l’illettrisme dans nos régions.

Référents théoriques. Ourelle est conçu de manière à remplir trois fonctions : une

fonction de lecturisation, une fonction de remédiation cognitive, une fonction de

socialisation. Ces trois fonctions agissent en complémentarité et reposent sur deux pôles

théoriques et un choix idéologique :

- l’éducabilité cognitive : cette nouvelle compréhension des conduites d’apprentissage,

qui s’appuie sur les travaux d’auteurs tels que Piaget, Vigotsky, Bruner et Feuerstein,

centre l’apprenant sur ses procédures plutôt que sur le contenu.

- la lecture idéo-visuelle : notre recherche se situe dans la lignée des travaux d’auteurs

tels que Foucambert et Bentolila, qui dénoncent les méfaits de la syllabation et de

l’oralisation comme unique stratégie dans l’apprentissage. Nous nous sommes

également appuyées sur les travaux de Charpentier, Fijalkov, Downing qui mettent en

avant l’importance de la perception visuelle, point de départ de la lecture, la nécessité

d’un fonctionnement cognitif efficace pour la recherche du sens et la connaissance de la

langue écrite dans tous ses aspects.

- la prise en compte de l’environnement socioculturel des apprentis répond à une

conception de la pédagogie qui repose sur un choix idéologique : l’impérieuse nécessité

de l’ancrage des apprentis dans leur univers socioculturel et géographique, du moins, au

début de l’apprentissage.

En effet, la problématique linguistique est très complexe dans nos régions. Malgré une

percée significative enregistrée cette dernière décennie, le créole demeure une langue

mineure. A l’école, seul le français est utilisé comme langue d’enseignement et ce, dès

Page 248: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 248

le plus jeune âge et sans aucune précaution pédagogique. Arrivés en formation, les

adultes ont un rapport très ambivalent vis-à-vis du français et du créole : ils n’osent

s’exprimer en français, redoutant les moqueries ; ils n’osent s’exprimer en créole de

peur de paraître incultes. Cette population s’exprime peu et/ou mal en français ; elle a

des modes de pensée créole qui ne coïncident pas toujours avec la pensée française. La

structure grammaticale créole est différente de celle du français. Mettre le créole entre

parenthèses ne peut que freiner les capacités d’expression et d’élaboration de la pensée.

Donner au créole un statut de langue de communication, faire une étude comparative

des deux langues (créole / français) nous paraît indispensable pour la réussite de

l’apprentissage. Par ailleurs, la lecture ayant, entre autres, une fonction sociale marquée,

aider les illettrés à se repérer dans les écrits sociaux, souvent complexes, a été un de nos

axes de travail.

Le public visé. Ourelle s’adresse à toute personne illettrée. Il peut être utilisé dans les

stages d’alphabétisation, dans les centres de formation professionnelle, dans les

établissements médico-éducatifs et, bien entendu, dans les cabinets d’orthophonie. Il

s’adresse plus particulièrement à des jeunes et des adultes, mais les supports peuvent

être adaptés à des enfants.

Objectifs généraux. Ils sont de trois ordres : aider à l’apprentissage de la lecture et de

l’écrit ; remédier aux déficiences cognitives ; développer des capacités d’adaptation

sociale (lecture fonctionnelle, enrichissement culturel, communication aisée).

Les effets attendus :

- un enrichissement des compétences langagières de compréhension et d’expression,

- un comportement de lecteur "intelligent" s’appuyant sur des connaissances et des

compétences cognitives,

- une valorisation personnelle et un enrichissement culturel,

- une motivation pour la poursuite des apprentissages.

Composition de l’outil. Ourelle est un outil papier-crayon comportant trois volumes

d’exercices pour l’apprenant. Il est accompagné d’un guide pédagogique à l’intention du

formateur. Chaque volume vise des objectifs spécifiques et comporte une progression

interne. Les volumes sont divisés en parties, chacune d’elles répondant à des objectifs

particuliers.

Page 249: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 249

Volume 1 - Pré-requis (PR)

Ce volume comporte 71 pages d’exercices de modalité picturale. Son objectif est de

développer certaines capacités cognitives. Il est subdivisé en cinq parties, chacune

d’elles visant plus particulièrement une opération mentale.

- Perception-comparaison : faire de la perception, une véritable activité cognitive ;

- Classification : apprendre à structurer l’information, pour faciliter la

conceptualisation, la verbalisation et la mémorisation ;

- Codification : apprendre à passer d’un système de représentation à un autre ;

- Induction-déduction : analyser des données de plus en plus nombreuses, opérer des

mises en relation, découvrir et appliquer des lois, raisonner en vue de tirer des

conclusions ;

- Situations-problèmes : apprendre à raisonner à partir de données multiples, à planifier.

S’exercer à des tâches complexes - Apprendre à transposer les compétences acquises

d’un domaine à un autre.

Volume 2 - Entraînement à la lecture et à l’écrit (ELE)

Comportant 222 pages, subdivisé en 7 parties, de difficulté croissante, ce volume a pour

objectif de :

- apprendre la langue française écrite dans ses composantes phonétiques, syntaxiques et

sémantiques,

- produire des écrits et s’entraîner à l’orthographe de mots et phrases simples et usuels,

- utiliser des stratégies variées de recherche de sens par l’exercice de fonctions

cognitives diverses.

- repérage visuel : identifier et comparer des lettres, des syllabes, des mots et des

phrases. La modalité est essentiellement graphique. Les consignes font appel à des

capacités de repérage, de discrimination et de synthèse.

- mots-images : utiliser les bases phonétiques (graphies les plus usuelles), syntaxiques

(déterminants, pluriel) et sémantiques (synonymie, antonymie) pour lire des écrits

simples. La modalité est picturale et graphique. Le recours à l’image a pour but de

déconditionner par rapport à la syllabation et l’oralisation en donnant un sens immédiat,

de faciliter la constitution d’un stock visuel de mots, de servir de support à l’analyse

graphophonétique. Les consignes permettent de faire des relations, des classements, des

Page 250: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 250

exercices de codage, de closure… Les champs lexicaux sont variés et favorisent

l’enrichissement du vocabulaire. La retranscription écrite des réponses permet

l’appropriation visuelle et scripturale des mots.

- phrases-images : maîtriser l’organisation d’une phrase simple par l’apprentissage

d’indices nouveaux (ponctuation, notion de verbe et d’adjectif…). Les consignes font

appel à la sélection d’indices, à l’anticipation, à la projection de relations.

- mots sans images : approfondir la connaissance de la langue par un enrichissement

lexical et l’apprentissage de catégories nouvelles (prépositions, adverbes, pronoms,

verbes conjugués…), s’entraîner à la lecture rapide. Les consignes permettent

l’entraînement à la dénomination, la catégorisation, la codification, la mise en

relation…

- phrases sans images : s’approprier la langue écrite dans toute sa complexité. Les

consignes nécessitent la sélection d’indices variés (typographiques, contextuels,

orthographiques…). Il s’agira d’anticiper, de lire des mots inconnus, de comprendre des

nuances…

- traitement de l’information : interpréter l’écrit, utiliser l’implicite, trouver des

stratégies de recherche du sens dans des écrits complexes. Les consignes font appel aux

connaissances et mobilisent des opérations mentales telles que l’induction, la déduction.

- production d’écrits : s’entraîner à des jeux littéraires (mots-croisés, mots codés,

devinettes…) jusque là réservés aux "lettrés".

Volume 3 - Lire et écrire au quotidien (LEQ)

L’objectif de ce volume est de :

- faciliter le transfert des acquis sur des supports tels que les bons de commandes,

affiches publicitaires, formulaires administratifs, modes d’emploi, autant d’écrits que

ces personnes côtoient quotidiennement ;

- entraîner à une lecture fonctionnelle ;

- développer l’adaptation sociale et l’enrichissement culturel.

Ce volume est réparti en trois niveaux de difficulté croissante : le niveau "Initiation"

sollicite l’analyse perceptive et la mémoire visuelle ; le niveau "Entraînement" demande

une attitude de recherche ; le niveau "Perfectionnement" fait intervenir le

raisonnement, l’utilisation de connaissances et des stratégies élaborées.

Page 251: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 251

Parallèlement, ce volume est structuré par thèmes. Huit thèmes sont proposés :

- Identité. La spécificité de notre problématique identitaire justifie l’importance

accordée à ce thème : les concepts et les représentations propres à l’identité individuelle

sont flous, les repères temporels mal maîtrisés.

- Logos, affiches, étiquettes. Ce thème propose un type d’écrits propices à la

symbolisation. De plus, la modalité picturale permet d’entraîner à l’utilisation d’indices

hors-texte qui facilitent l’anticipation.

- Nombres. Les nombres, par leur caractère abstrait, sont souvent facteurs de blocage.

Mais leur présence fréquente dans les écrits divers nécessite une approche fonctionnelle

et sécurisante, en termes de lecture et non de calcul (notions de poids, horaires, prix…).

- Ecrits administratifs. Il s’agit ici de familiariser avec ce type d’écrits par un

entraînement systématique à la lecture et à la transcription.

- Consignes. Respecter des consignes ou appliquer correctement un mode d’emploi sont

des activités qu’il convient d’aider les illettrés à assumer.

- Recherche d’informations. Apprendre à s’informer pour s’adapter, faire des choix,

développer une curiosité intellectuelle.

- Lectures variées. L’activité de lecture, pour être totalement enrichissante, ne doit pas

se cantonner à l’urgence du moment. Lire pour se cultiver, pour s’ouvrir à des horizons

nouveaux, lire pour le plaisir.

Protocole d’utilisation. La mise en œuvre pédagogique d’Ourelle exige le respect d’un

protocole strict qui se déroule en 5 phases. La phase 1 (analyse de la page) et la phase 2

(analyse des exercices) ont pour objectif de procéder à la prise d’informations, à

l’apprentissage de notions nouvelles, à l’anticipation des consignes, à l’explicitation des

procédures. Au cours de la phase 3 (exécution de la tâche), l’apprenant travaille seul. Le

médiateur aide, recentre en cas d’égarement ou de blocage, renforce au besoin les

enseignements. La phase 4 (vérification) permet l’auto-évaluation, la confrontation des

procédures, l’analyse et la rectification des erreurs. La phase 5 (prolongements) assure

l’ancrage des apprentissages par l’utilisation d’autres supports afin de faciliter la

généralisation et les transferts.

Le rôle du formateur. Le formateur doit se situer en tant que médiateur. Il doit tout

mettre en œuvre pour faciliter les apprentissages. Chaque séquence doit être une

Page 252: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 252

expérience d’apprentissage médiatisé qui fonctionne selon des règles précises. Ses

principales fonctions sont de :

- enseigner les notions nécessaires à l’apprentissage, selon une procédure déterminée,

- repérer et traiter les difficultés cognitives,

- créer et entretenir la motivation,

- exploiter et valoriser les compétences individuelles,

- utiliser la fonction socialisante du groupe pour des confrontations constructives, une

émulation saine,

- utiliser l’erreur comme tremplin vers la connaissance,

- assurer la généralisation et le transfert,

- appréhender la personne dans sa triple dimension affective, cognitive et sociale.

C’est l’ensemble de ces compétences qui feront du formateur un technicien de la

médiation et qui permettront à Ourelle d’atteindre son efficacité maximum. En

conséquence, une formation est un préalable indispensable à l’utilisation de cet outil.

Evaluation. EDILL, conçu par les auteurs d’Ourelle, est un test d’évaluation

dynamique de l’illettrisme. Il a pour objectif de : repérer les potentialités et les acquis ;

identifier les déficiences cognitives ; situer le degré d’illettrisme afin d’élaborer un

itinéraire de formation à partir des 3 volumes. Tout au long de l’apprentissage, diverses

procédures d’évaluation sont prévues.

Les auteurs

Madame Maryse Chénière (orthophoniste) - Madame Martine Mac-Biron (psychologue

sociale) - Madame Ghislaine Ozier-Lafontaine (travailleur social)

Pour toute information, contacter : l’Association d’action sociale de Martinique

(AASM), avenue Frantz Fanon, BP 20, 97211 Rivière Pilote -

Tél. (0596) 63 65 30 / 62 60 06 - Fax : (0596) 62 63 00

L’ancrage des apprentissages dans le vécu et les situations professionnelles

des stagiaires

REUNION : M. Paul Soupe, Chargé de mission au CARIF-OREF

Le public de la Réunion n’est pas celui de Guyane, encore moins celui de

Châlons-sur-Saône. Or, cette évidence n’est malheureusement pas toujours prise en

compte dans les pratiques pédagogiques.

Page 253: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 253

Si on admet que ni les causes ni le vécu de l’illettrisme ne sont forcément les mêmes

partout, on doit porter une attention particulière aux spécificités tant sociales, culturelles

que linguistiques des apprenants. Ceci nous paraît d’autant plus nécessaire qu’il s’agit

ici d’adultes et non d’enfants en situation d’apprentissage scolaire, où un programme

standard est généralement de mise.

Pour ne rester que sur un des points évoqués - la situation linguistique - il va sans dire

qu’une prise en compte du créole constitue une nécessité pédagogique ; ce qui suppose

de la part du formateur, non seulement une connaissance pratique des deux langues

concernées (ici créole réunionnais et français) - ne serait-ce que pour établir une

communication minimale entre formateur et formé - mais aussi de faire preuve d’une

expertise linguistique des points d’interférences syntaxiques, lexicales, phonologiques

et plus largement communicationnelles entre ces deux langues.

Un meilleur ancrage des apprentissages suppose, par ailleurs, l’affinement des

procédures d’analyse de besoins des publics, par pôle de "communautés d’intérêts".

Pour ne prendre qu’un exemple, on peut supposer qu’au delà d’une difficulté commune

face à l’écrit, un groupe de mères au foyer n’a pas forcément les mêmes besoins

immédiats, et par conséquent les mêmes centres d’intérêt, que celui d’un groupe de

marins pêcheurs. Or, les modes habituels de repérage des publics - principalement par le

biais des structures institutionnelles d’accueil et d’orientation (Missions locales,

Agences locales pour l’emploi, Agences départementales d’insertion ...) - ainsi que les

critères d’éligibilité administrative, font que ces regroupements par communautés

d’intérêts ne sont pas toujours aisés à mettre en place.

Autrement dit, parallèlement à des publics "captifs" des dispositifs publics, constitués

majoritairement de jeunes et adultes demandeurs d’emplois, il importera de s’intéresser

à des publics, pour l’heure moins bien répertoriés. Cette entrée par pôle d’intérêts,

plutôt que par des critères à dominante administrative, nous semble être plus propice à

favoriser l’ancrage des apprentissages sur du vécu et des motivations plus facilement

identifiables. C’est en tout cas, une des options fortes, prise dans le cadre d’un dispositif

permanent actuellement en cours de restructuration à la Réunion.

Page 254: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 254

ContributionsContributionsContributionsContributions

GUADELOUPE : M. Daniel Cucheval, Directeur adjoint DTEFP

. Le dispositif de lutte contre l’illettrisme mis en place en Guadeloupe, par le Préfet de

Région en 1995, sous l’égide du Groupe permanent de lutte contre l’illettrisme, sera

vraisemblablement rénové avec la création de l’Agence nationale de lutte contre

l’illettrisme. Les régions sont en attente d’une circulaire qui devrait prochainement en

fixer les lignes directrices.

Sur le terrain, la Guadeloupe a mis en place :

- des outils d’accompagnement : un centre de ressources de lutte contre l’illettrisme à

Basse-Terre basé au CARIF-OREF et un lieu d’information basé à Pointe-à-Pitre,

animé par le CIBC.

- un outil technique : l’Atelier permanent de formation de base (APFB) conforté par un

cahier des charges et confié à un nombre limité de prestataires.

Actuellement, les principaux financeurs de la lutte contre l’illettrisme en Guadeloupe

sont l’ADI (Agence départementale d’insertion), la DTEFP et le FSE.

Le Conseil régional intervient dans son programme, en direction de ces publics, par des

actions de remobilisation et de remise à niveau, sans qu’apparaisse véritablement un

programme spécifique de lutte contre l’illettrisme.

Compte tenu de l’expérience acquise depuis 1995 et des études réalisées - et notamment

la dernière sur le devenir des stagiaires des APFB - les partenaires ont souhaité que le

cahier des charges des APFB soit remanié dans un contexte d’ouverture vers

l’apprentissage professionnel, soit par des systèmes d’alternance avec le monde

associatif ou de l’entreprise et le milieu de la formation ; l’APFB ne devant être qu’une

étape dans un dispositif plus ambitieux que le DOCUP 2000-2006 a bien intégré en

termes de financement.

GUADELOUPE : M. Jean-Claude Maccès, directeur du Carif-oref

Quelles pratiques de formation de base en Guadeloupe ?

La mise en œuvre du programme PAQUE a été un élément de prise en compte de

l'absence de maîtrise des savoirs de base des jeunes en insertion et surtout des difficultés

rencontrées par les formateurs face à ce public.

Page 255: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 255

Face à ce problème, la Déléguée Régionale à la Formation professionnelle, Melle

Roselyne Eyraud décide la mise en œuvre d'une politique d'accompagnement des

capacités d'intervention des opérateurs locaux. Le CRAPT a été chargé de la réalisation

de cette politique d'accompagnement. Afin de mieux appréhender les orientations à

proposer, deux études sont réalisées pour mieux cerner les actions à développer et

définir les actions de formation de formateurs.

Une étude réalisée par Colette Dartois ("Evaluation des actions de formation conduites

pour l'acquisition des savoirs de base en Guadeloupe, CRAPT, 1994) avait pour objet de

dresser un bilan des actions de formation du programme PAQUE et de dégager des axes

d'intervention pour la formation des opérateurs. La deuxième étude effectuée par le

CEPI de l'Université Paris V avait pour objet l'évaluation pratiquée par les formateurs

auprès des stagiaires. A partir de ces deux études, une politique régionale de lutte contre

l'illettrisme est lancée.

Une orientation est très vite apparue, celle de l'accompagnement des opérateurs locaux

dans une perspective de plus grande professionnalisation.

A ce titre, la DRFP a mobilisé des crédits du CPER, ce qui a été un élément important

d'une professionnalisation du réseau des organismes intervenant dans la formation des

publics en situation d'illettrisme. Un programme très lourd de formation de formateurs

est mis en place, en nous appuyant sur des personnalités dont les travaux nous

semblaient intéressants au regard des problématiques à traiter. Nous avions décidé de

proposer des actions permettant aux formateurs de maîtriser les approches

conceptuelles, et de mettre en place des démarches pédagogiques adaptées au contexte

guadeloupéen. Ainsi, avons-nous fait appel entre autres, à l'équipe du CUEEP et du

CEPI. Nous avons proposé des actions sur la lecture, la médiation, la santé et le

Diplôme universitaire "Illettrisme et apprentissage".

Après 7 années d'animation du Centre Ressources Illettrisme, nous pouvons dire que

l'illettrisme ne saurait se réduire à la seule question du "lire et écrire", nous sommes face

à un phénomène complexe d'ordre socio-cognitif, socio-linguistique, à replacer dans

notre environnement historico-économique, culturel et psychologique. C'est un

phénomène variable selon les individus aussi bien en ce qui concerne l'oral que l'écrit.

La situation linguistique spécifique de la Guadeloupe amplifie cette complexité. Une

Page 256: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 256

recherche sur les "pratiques langagières, discours et représentations chez les adultes

illettrés en Guadeloupe" nous indique que :

- les performances en lecture, écriture ne sont pas très différentes de celles des adultes

métropolitains de situation socio-économique comparable .

- la survalorisation de l'emploi du français renvoie bien à une dévalorisation corollaire

du créole, mais ceci n'empêche pas, dans certains cas, une valorisation maintenue du

créole ;

- dans l'usage quotidien, les deux langues s'interpénètrent ;

- l'écrit créole n'est pas reconnu ;

- la représentation est dichotomique : d'un côté, les savoirs de l'école en langue française

ont un vrai statut de savoirs, de l'autre, les savoirs utilitaires qui se transmettent par le

geste et le créole .

A cet effet, un partenariat avec une orthophoniste a été développé pour une formation à

la linguistique créole et pour une formation intitulée "Orthophonie et illettrisme".

Les jeunes illettrés en Guyane

GUYANE : Mme Line Lican, Directrice du CIO (Centre d'information et

d'orientation) de Cayenne

La lutte contre l'illettrisme est une étape de l'accompagnement des jeunes dans le

processus d'intégration sociale et professionnelle.

Qui sont ces jeunes adolescents illettrés, en difficulté, sans solution d'insertion

scolaire, sociale ou professionnelle ?

Leur nationalité. Des français francophones (Guyane, Antilles françaises) ; des

français non-francophones (populations amérindiennes et noirs marrons) ; des étrangers

francophones (Haïti) ; une mosaïque d'allophones venus de la Guyana, du Surinam, de

Saint-Domingue, d'Afrique du nord (Maroc, Algérie), d'Afrique du sud (Sénégal, Côte

d'Ivoire), d'Asie (Chine, Japon, Vietnam, Laos), d'Amérique du sud (Brésil, Pérou,

Bolivie), d'Italie, du Cap-Vert,…

Ils sont, le plus souvent, issus de familles jeunes constituant ce que l'on appelle

économiquement population active, en réalité population peu ou non qualifiée.

Page 257: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 257

Leur histoire scolaire. Les jeunes français ont redoublé 2 ou 3 classes dans le primaire,

le plus souvent le CP et le CM1. Les jeunes non français ont peu ou pas été scolarisés

dans leur pays d'origine.

En primaire et en secondaire, ils sont dans des classes nomenclaturées "clin", "clad",

"classe d'alphabétisation", "classe d'accueil linguistique", "classe d'accueil soutien". Ce

sont des structures théoriquement élaborées, aux réponses pédagogiques adaptées aux

besoins des jeunes, mais à la mise en œuvre beaucoup plus complexe : programmes

flous, variant d'un établissement à l'autre en fonction des moyens restant, heures

d'enseignement attribuées en complément d'horaires, à des professeurs non motivés, non

formés, non encadrés, puisant au fin fond de leur mémoire quelques réminiscences en

anglais, portugais, espagnol. Les professeurs compétents, en nombre très insuffisant,

s'affrontent sur le thème de l'enseignement du "français langue seconde" plutôt que du

"français langue étrangère". Certains règlent le problème en cachant leur qualification,

surtout ceux désignés pour aller enseigner sur le fleuve ou les communes éloignées.

En secondaire, la non-maîtrise de la langue, la faiblesse des acquis, l'absence de projets

pédagogiques adaptés, écartent des classes traditionnelles valorisantes un nombre

important de primo arrivants. Passés à l'ancienneté ou par défaut de classe en classe, ils

présentent tous les mêmes constantes : retards scolaires, grosses lacunes dans les

connaissances de base, non-maîtrise du langage. S'ils n'ont pas trouvé leur place à

l'école, ils ne la trouvent toujours pas au collège où les structures d'accueil se

transforment en parcours scolaire menant à l'exclusion. Ceux qui arrivent dans le

département à 1 ou 2 années de l’âge limite d'obligation scolaire sont dirigés vers des

filières non-avouées de relégation. Qualifiés de nuls, ils sont exclus de l'institution la

plus représentative de la reconnaissance sociale, l'Éducation nationale.

A 16-17 ans, ils sont exclus des circuits de formation professionnelle pour cause de

situation irrégulière. Bien que, selon l'interprétation qu'a des textes le responsable du

moment, il faut un stage pour prétendre à des papiers ou des papiers en règle pour suivre

un stage. Ils sont exclus du centre de formation des apprentis parce qu'ils n'ont pas

atteint le niveau d'une classe de 3ème de collège. Le seul espace d'où ils ne soient pas

exclus reste la rue, où ils se retrouvent de plus en plus nombreux, totalement

désemparés.

Page 258: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 258

Bien sûr, les familles ne produisent pas systématiquement des jeunes en difficulté.

Certains traversent ces situations difficiles avec succès. Nous nous sommes interrogés

sur ce processus d'adaptation au système scolaire traditionnel. Comment s'y prennent les

jeunes qui s'en sortent, ceux qui réussissent ? Sont-ils victimes d'acculturation

réussie ? Sont-ils des assimilés volontaires ? Ne sont-ils motivés que par la réussite

sociale ? Ou leur enracinement communautaire est-il suffisamment fort pour faciliter

une adaptation ?

Sur quels repères travaillons-nous à rendre ces jeunes autonomes, responsables,

acteurs de leur devenir ? Comment les accompagnons-nous dans une réflexion de

poursuite de formation et/ou d'insertion professionnelle ?

Notre mission est de les accompagner dans leur construction d'un projet d'insertion

sociale et professionnelle. Or, la dynamique du projet s'inscrit dans le temps et dans

l'espace. Elle s'appuie sur trois axes :

- connaître son passé,

- pour maîtriser son présent,

- afin de construire son futur.

Notre objectif est d'amener le jeune à être acteur de cette dynamique.

Connaître son passé. Les jeunes de nos actions d'insertion sont arrivés dans le

département très jeunes, soit légalement par le regroupement familial ou avec un visa de

tourisme, soit illégalement ; d'autres sont la première génération née sur le territoire

français. Ils n'ont pas d'enracinement géographique. Leur histoire ethnique,

communautaire, familiale, n'est pas transmise. Ils ignorent tout de leur ascendance et

surtout les anecdotes et les secrets qui sont le ciment des familles. Ils ne se sont pas

appropriés les repères culturels : normes, valeurs, principes de vie, rituels qui fondent

notre code de conduite. Cette non-appartenance (au sens des racines) à un peuple, une

nation, une communauté rend difficile la construction identitaire de ces jeunes

adolescents.

Maîtriser son présent.

• Comprendre la structuration de son environnement familial. Ils vivent dans des

"familles" éclatées, destructurées, le plus souvent monoparentales (mère ou père),

parfois avec un parent proche (oncle ou tante), voire des amis de la famille. Cela peut

Page 259: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 259

être des frères et sœurs exclusivement, surtout quand le parent a été ramené à la

frontière. Le responsable "légal" est parfois l'aîné inscrit dans nos actions, souvent en

retard, toujours fatigué, au regard triste, adulte avant l'heure, désireux de réussir mais

noyé par les soucis ménagers, l'alimentaire des plus petits et les lacunes scolaires qui

s'accumulent. Le père se caractérise par un rôle flou, une absence chronique ou une

présence intermittente, des responsabilités mal définies, enfermé dans un statut d'étalon

pourvoyeur de fonds. L'inceste est une pratique courante. Les beaux-pères sont

fréquents. Les jeunes sont victimes de viols. Garçons et filles se prostituent dès l'âge de

12 ans. Le nombre de grossesses précoces augmente chaque année.

• Quand nous incitons ces jeunes à connaître les institutions de leur environnement :

administrations, collectivités, services publics divers, nous leur expliquons la nécessité

d'en maîtriser les missions, le fonctionnement. Nous leur apprenons à se repérer dans les

organigrammes, à poser les bonnes questions. Eux nous éclairent sur les réseaux, les

stratégies de terrain, les modes de transgression des règles permettant l'obtention

accélérée d'un titre de séjour, d'allocations diverses, d'un passeport ou d'une carte

d'identité.

• Quand ils nous jouent la provocation, l'opposition, la révolte, l'agressivité, nous

travaillons l'estime de soi, la connaissance de soi, le respect de soi, le respect de l'autre,

la tolérance. A leur tour, ils nous renvoient leur quotidien fait de réflexions méprisantes,

d'attitudes rejetantes, de propos racistes. Ils nous jouent en classe toute la xénophobie

extérieure (1 qualificatif par communauté). Nous déplorons leur inadaptation au

système. Ils nous racontent leurs bandes, où ils sont engagement, écoute de l'autre,

cohésion, esprit d'équipe. Nous découvrons que leur quotidien les oblige à rapidement

repérer les caractéristiques d'une situation, à l'analyser, à s'adapter à elle, à faire preuve

de capacité d'improvisation, d'imagination, voire même à développer des stratégies de

compensation pour contourner les difficultés en utilisant leurs ressources propres.

• Si nous exigeons la prise en compte et le respect des normes et des règles, si nous

insistons sur les valeurs morales, ils nous prient d'expliquer le droit de cuissage pour la

constitution de dossiers, les enveloppes discrètement glissées à certains guichets, la

place achetée entre 400 et 2500 F dans les files d'attente. Ils s'amusent de notre

impuissance face à leurs vrais faux papiers, ramenés parfois en moins de 24 heures. Ils

nous demandent si dans nos normes et nos règles, s'alimente la xénophobie qui nous

Page 260: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 260

envahit jour après jour, qui nous fait répéter à longueur de temps notre exaspération à

être ceux qui paient des impôts, à être les fonctionnaires régulièrement ponctionnés,

mais surtout la minorité qui contribue au mieux-être de la majorité ; celle qui bénéficie

de tous les avantages par application de ses propres règles.

• Comme nous y croyons, nous mettons en place des plates-formes de mobilisation, des

actions de remotivation, d'aide à la construction du projet professionnel, des stages en

alternance. Eux nous renvoient les inscriptions des aînés datant de 2 à 3 ans, les stages

en nombre insuffisant qu'ils n'arrivent jamais à intégrer, les stages pré-qualifiants puis

qualifiants, heureusement rémunérés, qui se terminent par une attestation de stage, celle

qui permet les démarches à la préfecture. Ils nous parlent de leurs parents, chômeurs

déclarés, combinant Assedic, RMI, allocations et travail au noir, le tout sans payer

d'impôts ou de taxes. Ils nous décrivent la petite délinquance source de revenus. S'ils ont

confiance en nous, ne craignant plus notre regard moralisateur, ils avouent leurs

compétences extra-scolaires. Ces jeunes vont mal, et même s'ils sont mal, ils ont en eux

des potentialités, des ressources cachées que nous devrions apprendre à connaître, à

accepter, sur lesquelles nous pourrions, en les extrayant de leur contexte, nous appuyer

pour les accompagner.

• Nous persévérons sur la connaissance des métiers et des parcours de formation ; la

structuration de l'économie en Guyane et les projets de développement. Eux nous

forment à la répartition des secteurs économiques par communautés, à l'économie

parallèle nocturne et souterraine, aux petits trafics et business en tout genre. A nouveau,

nous découvrons qu'ils possèdent des compétences inconnues du système scolaire qui

gagneraient à être utilisées, valorisées : des compétences acquises qui ont facilité leur

adaptation, leur intégration à un monde que nous ignorons ou refusons de reconnaître ;

des éléments extérieurs à nos circuits de formation qui sont la face cachée de ce public,

mais surtout sa réalité et son présent ; des éléments qui pourraient être le point de départ

d'un travail effectif sur l'acquisition de compétences sociales.

Construire son futur. On peut se poser la question de savoir :

- si nos critères d'évaluation de la réussite sociale, qui sont des critères purement

européens, ne diffèrent pas des critères de référence des populations dites en difficulté

d'intégration ;

Page 261: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 261

- si ces populations n'utilisent pas notre système social pour atteindre des objectifs de

réussite en accord avec leur histoire, leur vécu, leur culture et surtout leurs aspirations ;

- si les pratiques légales prônées, énoncées, reconnues, ne vont pas à contre-courant des

réalités de leur environnement, où le non-respect de la loi permet d'améliorer son train

de vie, d'accéder aux biens de consommation sans payer de charges ;

- si la méconnaissance ou la non-gestion de la réalité de nos circuits de formation ne

leurrent pas les familles quant à leur désir de formation professionnelle pour leurs

enfants.

Quel sens peut avoir l'accompagnement que nous voulons mettre en place au regard

des projets d'intégration des différentes communautés résidant dans le département ?

Symboles d'un système à intégrer, nous participons légalement au phénomène

d'exclusion et de marginalisation. Nous entretenons la colère, l'amertume et la

frustration avec nos filières trompe l'œil, nos actions pédagogiquement bien conçues

mais ne débouchant que sur un stage de plus, notre sens de l'espoir et de la dignité

retrouvée, avec au bout l'obligation de repartir vers les petits boulots et les magouilles

en tout genre. Nous devenons les symboles d'un futur sans perspectives, sans projet,

sans but.

Le temps ne serait-il pas venu :

- de sortir des éternels constats qui ne sont pas valablement quantifiés ;

- de ne plus nous réfugier derrière d'éternelles estimations ;

- de vérifier, quantifier les suppositions et les impressions ;

- d'avoir le courage d'une réelle politique de l'insertion, de la formation et de l'emploi ;

- de préciser, au-delà du maintien de paix sociale, quelle insertion nous voulons pour

ces jeunes ;

- d'avoir le courage de définir la société guyanaise : avec qui voulons-nous la construire

? pour quel développement ? que chacun sache s'il y a sa place, pas dans les mots, mais

dans les pratiques et dans les faits.

Quel est notre projet de société ? Sommes-nous dans une dynamique de projet ? Nous

ne pouvons exiger des jeunes ce dont nous sommes incapables : nous projeter dans

l'avenir.

Ne serait-il pas opérationnel :

Page 262: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 262

- de valoriser le travail des acteurs de terrain, de les sortir de la marginalité pédagogique ?

- de reconnaître leur engagement, de lui donner des moyens et du sens ?

- de favoriser la mutualisation et la circulation des expériences pédagogiques en liaison

avec la formation initiale ?

- de former les éducateurs-formateurs, surtout ceux non directement concernés par leur

propre flux migratoire ?

Notre travail pour aider ces jeunes à s'insérer dans notre société n'aura de sens que dans

le cadre d'une volonté politique actée d'insérer socialement et professionnellement. Là,

nous pourrons partir de la réalité de ces jeunes pour les amener à un futur, si ce futur a

un cadre politique, institutionnel local clairement défini, repérable, explicité par ceux

qui en ont le devoir et la responsabilité ; à moins que ne soyons que les acteurs peu

lucides d'un système bien orchestré.

DébatsDébatsDébatsDébats

GUYANE : Mme Florence Foury, Chargée de mission DPLI

En Guyane, nous avons mis en place un dispositif qui comprend deux types de

formations dont des ateliers permanents d’apprentissage des savoirs de base. C’est assez

proche du fonctionnement décrit par mes collègues des autres départements. Les

personnes ont un crédit d’heures qu’elles peuvent utiliser à l’année (150 heures

minimum, 600 heures maximum). Elles peuvent, par contre, renouveler leur contrat

l’année suivante, ce qui fait qu’il n’y a pas de limites sur le nombre d’heures de

formation. Le système a même été conçu pour qu’elles puissent faire des pauses. Faire

200 heures, s’arrêter, revenir un an plus tard pour respecter un peu le rythme de

formation de chacun, mais aussi un peu son rythme de vie.

En Guyane, nous avons un nombre important de personnes qui pratiquent beaucoup

d’activités traditionnelles d’auto-subsistance : la chasse, la pêche, la culture vivrière.

Les inclure dans des formations à temps plein peut les mettre en difficulté par rapport à

leur vie quotidienne. Dans la formation individuelle, que nous appelons plutôt

personnalisation, nous essayons vraiment de prendre en compte les centres d’intérêts,

les valeurs culturelles de la personne. Celle-ci se fixe des objectifs à l’entrée en

formation, qui sont renégociés de manière régulière, puisque normalement, plusieurs

Page 263: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 263

contrats peuvent se succéder. Je dis normalement parce que c’est le système idéal, mais

c’est difficile pour les formateurs de mener cela au quotidien.

Nous proposons des activités telles que les ateliers d’écriture ou de technologie, où les

personnes viennent s’inscrire comme elles le souhaitent. Nous organisons aussi des

regroupements sur des difficultés particulières. On constate que Georges, Paulette et

Pierre ont un problème avec les homophones orthographiques (on, ont,…), on va les

réunir et faire avec eux un travail de groupe. C’est dans ce sens-là que l’on alterne la

formation individuelle et le travail en petit groupe selon les difficultés. Nous organisons

aussi des activités de communication orale et de lecture en groupe. Ces groupes sont

mouvants parce qu’ils dépendent de la difficulté que rencontre la personne.

Un intervenant dans la salle

Quel est le pourcentage de salariés qui participent aux actions présentées par rapport

aux personnes sans emploi ?

REUNION : M. Yves Zoogones, Directeur de l'AREP (Association réunionnaise

d'éducation populaire)

Pour l’instant, chez nous les salariés sont peu nombreux, ils représentent autour de 2 %

des stagiaires et sont, pour la plupart, des agents des collectivités locales. Nous voulons

donc mener une action auprès des entreprises. L’ancienne association ARCA avait une

tradition de collaboration avec les entreprises. Il y a eu une coupure après sa disparition

et on est en train de renouer des liens avec les entreprises.

Sur l’individualisation des apprentissages, je voudrais ajouter que nous avons un Atelier

pédagogique personnalisé. Nous essayons d’offrir la même chose, en disant que

l’accompagnement est plus rapproché dans un APP.

Nous réalisons une petite expérimentation afin que les personnes illettrées ne soient pas

exclues des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Nous

avons acquis du matériel avec deux objectifs :

- les personnes ne doivent pas être des illettrées de l’informatique donc nous faisons en

sorte qu’elles viennent, qu’elles connaissent ces outils ;

- utiliser l’outil informatique comme un support d’apprentissage, pour elles aussi.

Page 264: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 264

Cette expérimentation prouve que ce n’est pas plus compliqué pour elles, voire même

peut-être plus facile ; nous utilisons même la création de pages Web comme support de

l’apprentissage de la lecture.

GUADELOUPE : M. Daniel Cucheval, Directeur adjoint DTEFP

En Guadeloupe, nous avons eu une expérience qui a porté sur une action de l’AGEFOS

PME pour 25 salariés d’entreprise. J’attends les résultats de cette expérience pour

reconduire une action similaire. Il faut savoir qu’au niveau des salariés d’entreprise, la

durée des formations pose aussi problème. Il est plus difficile de permettre à des salariés

de suivre une opération de formation de longue durée. Il faudrait peut-être davantage

utiliser les nouvelles technologies, puisqu’on met en place, en Guadeloupe, avec

l’Éducation nationale, une opération d’enseignement à distance qui s’adressera dans un

premier temps à des bas niveaux de qualification et non à des illettrés. Mais on pourrait

utiliser ce système au niveau des entreprises parce qu’elles disposent du matériel

informatique nécessaire pour se brancher sur un serveur extérieur. On pourrait alterner

pour ces salariés, à la fois le regroupement, le face à face pédagogique classique et le

suivi et l’encadrement par ce dispositif d’EAO. Ce projet est encore à l’état

d’expérimentation. Il est évident que, dans les entreprises il faut se préoccuper du

phénomène d’illettrisme qui favorise, d’après la direction du travail, les accidents de

travail, le non respect des consignes. Il est nécessaire, tout en maintenant la personne

dans son poste de travail, de lui permettre de travailler dans des conditions de sécurité

optimum. C’est une de nos préoccupations à la direction du travail en Guadeloupe.

METROPOLE : : Mme Patricia Gautier-Moulin, Responsable de l'Observatoire au

Centre INFFO

Si on regarde les politiques de formation des entreprises vis-à-vis des publics illettrés

sur une assez longue période, on remarque un phénomène de "balancier". Dans les

années 70, beaucoup d’entreprises, comme Renault par exemple, avaient fait de gros

efforts pour la formation des travailleurs immigrés. Ensuite, les entreprises ont licencié

massivement les personnes de faible niveau de qualification et ont plutôt recruté des

personnes immédiatement opérationnelles. Depuis quelques années, les entreprises

Page 265: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 265

intègrent de nouveau dans leurs plans de formation des actions de lutte contre

l’illettrisme.

METROPOLE : Mme Maryse Chaix, Sous-directeur DGEFP

A la DGEFP, nous menons une action de sensibilisation et de prise de conscience

auprès des branches, au niveau national. Nous sommes d’ores et déjà en phase de

contractualisation avec certaines branches. On voit bien maintenant, avec les démarches

Qualité, que des opérateurs, qui n’avaient pas besoin d’utiliser l’écriture et la lecture de

façon courante, aujourd’hui, y sont complètement confrontés, même dans les toutes

petites entreprises. Il y a une prise en conscience qui correspond à un besoin, dans le

cadre de l’adaptation des salariés à leur emploi. On contractualise, par exemple, avec

des organismes mutualisateurs tels que l’AGEFAFORIA (agriculture), mais aussi avec

le FAFP propreté sur tout ce qui permet d’établir des cursus et des déroulements de

carrière, ce qui s’insère bien dans le développement des compétences des salariés.

Il est important de rappeler que la a loi de 98 de lutte contre l’exclusion a fait de la lutte

contre l’illettrisme un point du plan de formation. Les entreprises peuvent maintenant

financer ces actions.

GUADELOUPE : M. Daniel Cucheval, Directeur adjoint DTEFP

Je suis tout à fait d’accord avec ce que vous dites, puisqu’en Guadeloupe nous avions

tenté une expérience avec une collectivité locale. On s’était rendu compte que, parmi les

personnels qui accompagnent les enfants pendant les repas ou à l’interclasse, plus de

80% étaient confrontées aux phénomènes de l’illettrisme. La précarisation de leur

mission au sein des collectivités n’a malheureusement pas permis de déboucher sur un

plan de formation.

Page 266: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 266

Table ronde du 3/10/00

LES NOUVEAUX ENJEUX DE LALES NOUVEAUX ENJEUX DE LALES NOUVEAUX ENJEUX DE LALES NOUVEAUX ENJEUX DE LA

FORMATION PROFESSIONNELLEFORMATION PROFESSIONNELLEFORMATION PROFESSIONNELLEFORMATION PROFESSIONNELLE

ET LES PROBLEMATIQUES DU DEVELOPPEMENT

REGIONAL ET LOCAL DES ROM

Animateur :

M. Luc Germain, journaliste

Rapporteur :

Mme Viviane Capgras, Chef de la mission formation professionnelle

au Conseil régional de Martinique

Page 267: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 267

Intervenants

GUADELOUPE :M. Christian Thénard, Vice-Président du Conseil régional

GUYANE :Mme Chantal Berthelot, Vice-Présidente du Conseil régional, déléguée à la formation

MARTINIQUE :M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional

REUNION :Mme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régional

Débats

GUYANE :Mme Chantal Berthelot, Vice-Présidente du Conseil régional, déléguée à la formationM. Claude Lau-Pau, Chargé de mission à l'ANPE

MARTINIQUE :M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional

REUNION :M. Michel Dejean, Président du CARIF-OREFMme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régionalM. George-Marie Lépinay, CESR (Conseil économique et social régional)

Page 268: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 268

LES NOUVEAUX ENJEUXLES NOUVEAUX ENJEUXLES NOUVEAUX ENJEUXLES NOUVEAUX ENJEUX

DE LA FORMATION PROFESSIONNELLEDE LA FORMATION PROFESSIONNELLEDE LA FORMATION PROFESSIONNELLEDE LA FORMATION PROFESSIONNELLE

ET LES PROBLÉMATIQUES DU DÉVELOPPEMENT

RÉGIONAL ET LOCAL DES ROM

REUNION : Mme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régional

Notre propos se veut bien calé au niveau de la réflexion sur les nouveaux enjeux de la

formation professionnelle. J’espère ne pas vous infliger un pensum, mais la formation et

la politique exigent un minimum de rigueur. Depuis le début de nos travaux, toutes nos

réflexions ont permis de constater le rôle fondamental que doit jouer la formation

professionnelle pour répondre aux enjeux du développement de nos régions, pour

accompagner de façon permanente l’évolution et l’enrichissement des compétences

individuelles et collectives, conditions indispensables pour réussir un développement

durable. La formation professionnelle est confrontée à plusieurs enjeux. Pour nous, ils

se situent à plusieurs niveaux et sont de nature différente, mais ils conditionnent les

ambitions et les moyens nécessaires à notre action. Eu égard à notre contexte régional,

marqué par des besoins immenses et diversifiés de formation, quatre niveaux d’enjeux

sont à identifier.

La démocratisation de l’accès à la formation professionnelle. Face à l’ampleur

et à la diversité des demandes de formation, comment nos politiques de formation vont-

elles pouvoir garantir une égalité d’accès aux dispositifs de formation et d’insertion ?

C’est un enjeu d’égalité des chances et de cohésion sociale, étroitement lié à notre

capacité d’optimisation des moyens engagés et à nos priorités budgétaires, elles-mêmes

liées au niveau des moyens financiers qui ont été transférés par l’État lors des phases de

décentralisation.

L’individualisation des réponses et des parcours professionnels. C’est autour

de cet enjeu que nous pourrons répondre à la professionnalisation des compétences et

relever les défis de l’insertion. Pour cela, il faut que le bénéficiaire de formation soit

acteur du processus qui accompagne l’évolution de ses compétences. Cet enjeu relève,

Page 269: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 269

pour une large part de la capacité d’évolution de l’offre de formation, notamment en

intégrant l’utilisation des NTIC.

L’ouverture indispensable de nos régions sur leur environnement. Il est de la

mission de la formation professionnelle d’accompagner l’évolution des compétences

nécessaires à la fois à la mobilité de nos concitoyens et au développement des actions de

coopération régionale. Cet enjeu est un facteur de redynamisation et de décloisonnement

de notre dispositif de formation, notamment par la mise en réseau avec des organismes

extérieurs à leur territoire habituel d’intervention.

La régionalisation des politiques de formation professionnelle. C’est l’enjeu de

la cohérence et de l’efficience de nos actions. À travers cet enjeu, les acteurs financeurs

de la formation professionnelle, que sont l’État, le Conseil régional, les partenaires

sociaux, pourront répondre ou non aux trois premiers enjeux que j’ai cités.

Pour intégrer ces différents enjeux, nos stratégies de formation devront donc apporter du

sens et des valeurs à la formation professionnelle au-delà de la transmission formelle de

connaissances et de techniques et ensuite, devront replacer l’investissement au cœur des

priorités d’action. C’est à ce prix que la formation professionnelle deviendra un acte de

responsabilisation individuelle et collective au service du développement local.

GUADELOUPE : M. Christian Thénard, Vice-Président du Conseil régional

Les quatre objectifs du DOCUP 2000-2006

Je vais intervenir sur le développement local et la mise en adéquation de la formation

d’une manière globale, dans le schéma de développement régional. La formation

professionnelle, initiale ou continue, est un outil essentiel à la réussite de toute politique

de développement économique local. La Guadeloupe n’a pas comblé son retard de

développement. La volonté de placer la formation professionnelle au cœur du

développement local n’est pas pour la Guadeloupe, une démarche philosophique. C’est

une réalité budgétaire : 434 millions versés au titre de la formation professionnelle. Les

problématiques de développement local de notre archipel sont très complexes. Il faut

arrêter des stratégies, notamment sur la formation des hommes pour des ressources

humaines adéquates. Si, en priorité, nous nous sommes engagés à développer l’activité

professionnelle par une action cohérente sur l’environnement productif, les nouvelles

Page 270: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 270

orientations en la matière imposent d’élever la qualification et le niveau de technologie

des personnes concernées. La capacité d’adaptation des travailleurs, comme des

entreprises, doit en ce sens être encouragée par le financement de plans de formation

ambitieux, issus de diagnostics et d’expertises à développer. L’accent est mis dans le

DOCUP (Document unique de programmation) 2000-2006 sur quatre objectifs :

- le maintien d’une politique active du marché du travail s’appliquant à éviter des

situations de chômage de longue durée et à améliorer l’orientation, en favorisant l’accès

des femmes ;

- l’adaptation des qualifications, des formations technologiques, en particulier pour la

communication ;

- le développement de la formation initiale à tous les niveaux, en incluant la formation

en alternance avec les entreprises.

- un appui exceptionnel donné pour les équipements de formation.

Université et spécialisation régionale

L’enseignement supérieur va s’étoffer du principe de spécialisation régionale avec une

ambition raisonnée de diversification et d’aménagement équilibré sur le territoire,

notamment dans la perspective d’U3M (Université du 3ème millénaire). Il faut

comprendre que notre PRDF prend en compte 5 programmes : l’AFPA, l’apprentissage,

la perspective emploi, l’insertion professionnelle et l’accompagnement de projets.

Cette université est vraiment l’occasion d’échanges d’expériences, de propositions et de

recherches innovantes, surtout sur le plan de la formation professionnelle et cela doit

s’exprimer dans les ateliers. Bien sûr, nous avons à respecter les orientations des uns et

des autres. Un travail de synthèse est attendu pour retenir les éléments forts d’une

méthodologie à adopter, pour un projet local différencié qui doit rester évolutif.

Le développement local doit prendre en compte la formation dans sa globalité et en

Guadeloupe, c’est ce à quoi nous nous sommes attachés. Dès le 1er janvier 1996, la

Région Guadeloupe a engagé une démarche volontaire en prenant en charge l’ensemble

du dispositif de formation professionnelle des jeunes de 16 à 25 ans. Consciente de ce

rôle de pivot dans l’insertion professionnelle des jeunes et de ses compétences en

matière d’insertion, la collectivité régionale a joué un rôle actif dans la rédaction et la

Page 271: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 271

mise en œuvre du DOCUP. Dans ce cadre, on a pu impulser des orientations pour

trouver l’indicible, voire l’introuvable lien entre formation et emploi. Je vous remercie.

MARTINIQUE : M.Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional

Tout d’abord, une petite introduction pour rappeler les données du contexte économique

et social, une partie concernant l’orientation des jeunes et des adultes et une conclusion

sur les problèmes de partenariat institutionnel ou avec les entreprises ou avec les centres

de formation.

L’évolution du tissu économique

À l’instar des autres régions, la Martinique connaît un développement contrasté que j’ai

qualifié de mal développement . Nous devons travailler à changer cet état de fait. La

promotion de la qualification des ressources humaines constitue un élément de base de

cette politique. Les données de l’ANPE de juillet 2000 démontrent une diminution de la

demande d’emploi, au regard des chiffres de l’an dernier. Mais le chômage reste très

important en Martinique. L’ANPE affiche 45 091 demandes d’emploi non satisfaites,

parmi lesquelles les femmes représentent 60 % et les jeunes la part la plus faible. Sur ce

point, il faut signaler que cette baisse du chômage des jeunes est une des conséquences

directes de la loi Aubry sur les emplois jeunes, auxquels la Martinique a largement

contribué puisqu’elle intervient financièrement sur la part restant à la charge des

employeurs, surtout quand ce sont des associations. Face à cette population en

difficulté, quelle est la situation des différents secteurs professionnels ?

Des études récentes, menées en concertation avec les acteurs de la formation

professionnelle, nous ont permis de faire le constat d’une tertiairisation de l’économie

de la Martinique, depuis 1990, où les services gagnent du terrain sur le secteur primaire.

Le tissu économique est constitué, pour l’essentiel, de micro-entreprises représentant au

moins 50 % des entreprises de divers secteurs. De plus, sur les 5 dernières années, on

note une diminution du nombre d’entreprises (- 9,7 %) et du nombre d’actifs occupés (-

3,4 %). L’industrie et le commerce sont les secteurs d’activités où l’on note une perte

d’emploi, alors que la construction, les services aux entreprises et aux particuliers, la

santé, l’éducation et l’administration apparaissent comme créateurs d’emplois. En

revanche, les emplois se tassent dans l’agriculture, les transports, la finance et

l’immobilier. Enfin, sur les 5 dernières années, le poids des entreprises sans salarié dans

Page 272: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 272

le total des entreprises de la Martinique, toutes activités confondues, est passé de 53 %

en 1995 à 63 % en 1999. Cette photographie économique souligne la nécessité de

rapprocher les ressources humaines de l’entreprise. Aussi, pour le Conseil régional de

Martinique, deux démarches apparaissent comme prioritaires :

- permettre à l’individu de réaliser son projet de vie en l’aidant dans ses choix

professionnels ;

- accentuer les partenariats.

L’orientation et le partenariat feront donc l’objet de mon propos.

L’orientation au cœur des projets de vie

L’analyse des publics tend à mettre en exergue un changement dans la demande, voire

des populations elles-mêmes. En effet, bien que la priorité régionale soit la qualification

des actifs occupés ou inoccupés, la collectivité a fait le constat d’abandons en cours de

formation ou encore d’un taux élevé d’échecs aux validations. Sans compter que

l’adéquation parfaite entre formation et offres d’emplois n’existant pas, sur les 8 000

bénéficiaires de formation par an, nombreux sont ceux qui restent encore sans emploi un

an après la formation. Mettre l’accent sur l’orientation, la finalisation des choix

professionnels nous a semblé une piste prometteuse.

Les jeunes de la Martinique sans qualification, qui ont quitté le système de formation

initiale et relèvent de la Région, doivent pouvoir bénéficier d’un accompagnement

individualisé et personnalisé, afin que la formation professionnelle soit véritablement

une seconde chance pour eux. Pour cela, les structures d’accueil constituent un pivot

dans le dispositif, qu’il s’agisse des Permanences d’accueil, d’information et

d’orientation ou des Missions locales (2 en Martinique), ou encore des Centres

information jeunesse ou des Centres d’information et d’orientation et d’autres… En

fonction des problématiques de quartier, nombreuses sont les associations qui

développent des actions tendant à améliorer l’information sur les métiers ; par exemple,

le village emploi qui a été réalisé par un Comité associatif d’un quartier de Fort-de-

France. Ce dernier permet aux jeunes de se rencontrer en un seul lieu, et surtout de

rencontrer les professionnels de l’emploi et de la formation. De même, grâce à l’action

du CARIF, le Centre d’animation et de ressources de l’information sur la formation,

nous tendons à rapprocher l’information sur l’offre de formation par la mise en place

d’informateurs relais itinérants. Ceux-ci fonctionnent par l’intermédiaire et grâce aux

Page 273: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 273

nouvelles technologies de l’information et de la communication. Mais l’information sur

l’offre de formation ne suffit pas. Elle reste inopérante si le jeune n’a aucune idée de

son projet de vie. En effet, bien souvent, choisir un métier sous-entend un mode de vie.

Il faut savoir qu’il existe des métiers difficiles, des horaires à respecter, une certaine

discipline ; le jeune qui n’est jamais allé dans une entreprise ne le sait pas, a priori. Cela

nous a conduit, avec l’appui de la Mission locale de la Cabesterre, à développer une

prescription de bilan de compétences et d’orientation, dans un dispositif innovant. Les

bilans de compétences, de manière générale, sont ouverts aux jeunes sans qualification

qui relèvent du dispositif régional mais, aussi aux jeunes bénéficiaires des dispositifs

emplois jeunes. Mais, à titre expérimental à la Mission locale de la Cabesterre, nous

avons souhaité généraliser un dispositif appelé AIBC, Action d’immersion et de bilan

de compétences. Il s’agit, avant que le jeune n’opère son choix sur la qualification

adéquate, d’effectuer une immersion en entreprise et ensuite de préconiser le bilan de

compétences. Cela permet au jeune de déceler toutes les facettes d’un métier et de

connaître ses possibilités. Enfin, si l’approche individualisée est adaptée, il nous semble

plus judicieux de parler d’approche personnalisée. Il ne s’agit pas d’orienter uniquement

en fonction des desiderata des jeunes, mais aussi de mettre l’accent sur les perspectives

d’insertion professionnelle, en fonction du marché de l’emploi, et des besoins de

l’économie. L’objectif régional n’est pas simple mais, l’orientation du jeune doit lui

permettre de bénéficier de toutes les cartes : choisir son lieu de vie (vivre sur place ou

tenter l’aventure à l’extérieur) ; il doit pouvoir prédéterminer s’il cherche un projet où il

sera salarié ou s’il préfère créer sa propre activité. Nous lui demandons de bien réfléchir

à toutes ces données au moment de l’élaboration de son projet.

L’accompagnement du public adulte

Afin d’optimiser la politique régionale de formation professionnelle, qui représente une

part importante dans notre budget (300 millions de francs par an), nous avons souhaité

aider également le public adulte demandeur d’emploi dans son orientation. C’est

devenu, après une période d’expérimentation, un axe majeur à côté de l’orientation des

jeunes. En effet, les programmes mis en œuvre chaque année tiennent compte de la

demande en provenance des secteurs économiques repérés par les divers contrats

d’études prospectives. Néanmoins, l’action de formation ne peut être complètement

efficace que dans la mesure où le stagiaire en tire tous les bénéfices. Seul le choix

Page 274: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 274

adapté peut permettre d’y parvenir. Aussi, à partir de constats tirés sur le mode de

recrutement des stagiaires par les organismes de formation, la région Martinique a mis

en place, depuis deux ans, un dispositif d’orientation des futurs bénéficiaires de stages,

en s’appuyant sur le Centre de psychologie du travail de l’AFPA Martinique. Cette

opération prend la forme d’un accompagnement des centres de formation pour la

construction d’outils de recrutement. Ces outils dépassent largement les tests de niveau,

ce sont des outils d’évaluation. Avant toute entrée en formation, le stagiaire bénéficie

d’un entretien qui permet de confronter sa motivation, les implications du futur métier

et son profil. Il convient de noter qu’il ne s’agit pas d’un simple transfert des méthodes

de l’AFPA vers les autres organismes de formation mais d’un travail de partenariat.

Cette opération permet une double action : l’une en direction de l’individu, l’autre en

direction du dispensateur de formation. Elle tend à éviter les effets pervers : d’un côté

des centres pour lesquels le remplissage serait le plus important, de l’autre un

bénéficiaire qui recherche l’occupationnel. De plus, le bénéficiaire peut être informé sur

l’ensemble de l’offre régionale de formation. Il se voit proposer une autre orientation en

cas de besoin. Le dispositif étant encore récent (2 ans), nous n’avons pas assez de recul

pour en mesurer complètement le effets. Les premiers résultats paraissent plein d’espoir.

Ils donnent déjà un fort taux de satisfaction chez les stagiaires et les centres de

formation.

Le partenariat, vecteur d’une formation intégrée au contexte local

Bien que cet enjeu ne soit pas nouveau, le développement de partenariats institutionnels,

en Martinique, nous semble constituer le second pilier de la politique de formation

professionnelle, à côté de l’action en direction des ressources humaines proprement

dites. La mise en œuvre d’une formation adaptée ne peut être véritablement

opérationnelle sans le développement d’une politique concertée et d’une réflexion

commune. Dans cette optique, cette réflexion s’organise aussi bien dans le cadre du

COREF (Comité régional de l’emploi et de la formation), de rencontres régulières (au

moins trois fois par an) qu’au niveau des organismes paritaires collecteurs agréés ou

bien directement auprès des branches professionnelles. Nous privilégions les

organismes qui ont une réelle représentativité au sein de notre économie.

S’agissant du COREF, au-delà de sa mission fonctionnelle d’émettre des avis, il nous

permet d’échanger sur les pratiques d’aujourd’hui et devrait favoriser la

Page 275: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 275

complémentarité des politiques. Ces dernières restent trop souvent juxtaposées, au

détriment des bénéficiaires, qui doivent essuyer un véritable parcours du combattant

avant de trouver réponse à leur demande. Il faut souligner que l’amorce d’une

complémentarité du partenariat se décide à travers la mise en œuvre des contrats de plan

État-Région. C’est ainsi qu’à ce titre, il nous a semblé nécessaire d’introduire un atelier

pédagogique personnalisé, spécialisé dans le secteur agricole. Ce projet est prévu au

DOCUP 2000-2006. En ce qui concerne les organismes paritaires collecteurs agréés, le

partenariat a pu apporter dans certains cas une réponse adaptée aux besoins des actifs

occupés, en mettant l’accent sur la professionnalisation et les améliorations des

compétences, voire d’anticiper sur la demande des entreprises.

Des relations efficaces avec les branches professionnelles et les entreprises

Enfin, nous avons développé une démarche particulière avec les branches

professionnelles pour la mise en œuvre d’actions de formations spécifiques en fonction

de besoins immédiatement repérés. C’est ainsi qu’avec le Comité départemental des

jeunes agriculteurs (CDJA), nous avons développé des actions destinées à permettre

l’installation de jeunes agriculteurs qui ne rentraient pas dans les cadres déjà référencés.

Les textes prévoient que l’agriculteur doit être d’abord diplômé. Ensuite, il peut

bénéficier d’une dotation d’installation et acquérir éventuellement un terrain. Nous nous

sommes aperçus qu’en Martinique, certains agriculteurs étaient déjà installés sur des

terrains qu’ils avaient hérités de leurs parents mais qu’ils n’avaient pas les titres requis

et donc ne pouvaient pas accéder aux aides. Avec le CDJA, nous avons mis en place des

actions en faveur de ces actifs déjà occupés, pour leur donner une formation et leur

permettre de rentrer dans la norme. C’est le contact direct avec ces professionnels qui

nous a permis de répondre à leurs besoins. Nous avons non seulement délivré des

brevets de techniciens mais, aussi des brevets de techniciens supérieurs. Et comme le

problème de l’eau, par exemple, est important dans cette île car elle est victime de

pollution, il nous a paru utile de mettre en place un brevet de technicien de gestion et de

maîtrise de l’eau. C’est un diplôme qui n’existe pas, et c’est une demande que nous

avons pu satisfaire. C’est une illustration de l’efficacité du partenariat rapproché.

D’autres exemples peuvent êtres cités, par exemple, dans les formations culturelles de

danse ou de musique pour tenter de sauvegarder notre musique traditionnelle et

transformer en véritables professionnels ceux qui ont choisi d’en faire leur métier.

Page 276: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 276

Tous ces exemples témoignent de partenariats étroits et d’une réflexion commune avec

les branches professionnelles ou avec certaines catégories professionnelles. En

définitive, le leitmotiv est de faire fonctionner les lieux de concertation. C’est d’ailleurs

ce principe qui a été à l’origine de l’exigence régionale pour que les conseils de

perfectionnement, qui doivent être institués à l’intérieur des centres de formation, soient

effectifs et non plus purement formels. L’action de formation doit recueillir l’avis sinon

l’aval des professionnels ou encore s’adapter à l’évolution des métiers. La formation

professionnelle en Martinique, au regard de l’évolution des tissus économiques, devra

de plus en plus privilégier la dimension entreprenariale. En effet, les petites entreprises

périclitent par méconnaissance des principes de base des entreprises, alors que les

savoir-faire existent. Cette démarche reste trop timide dans les démarches formatives,

quel que soit le secteur d’activité. Les formations doivent prendre en compte cet aspect.

Le témoignage des entreprises que nous avons expérimentées en Martinique en atteste.

Ces démarches accusent de bons résultats en termes de placement, mais elles restent

pour l’heure marginales. Il convient de placer l’entreprise au centre de la formation.

Deux niveaux paraissent fondamentaux : l’alternance centre de formation-entreprise et

le développement de la fonction gestion des entreprises. Il n’est pas nécessaire de

revenir sur le premier niveau ; il en a été fait largement état dans nos débats. En

revanche, la gestion des compétences au sein des très petites entreprises devrait être

privilégiée car sa mise en œuvre devrait permettre aux entreprises elles-mêmes

d’anticiper les évolutions des métiers et donc conduire à l’adaptation de l’offre de

formation. Compte tenu de la structure des très petites entreprises, il peut s’agir d’une

fonction partagée. Par ailleurs, le rapprochement centre de formation et entreprise doit

être développé dans cette démarche, sous l’angle de l’alternance et de l’anticipation des

besoins.

Un autre aspect est essentiel dans les nouvelles orientations de la formation

professionnelle. Il s’agit de l’évolution des technologies et du développement d’un

système de formation très réactif à la demande.

Voici en quelques mots, les nouveaux enjeux de la formation professionnelle en

Martinique devant faciliter le mieux-être de la population.

Page 277: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 277

GUYANE : Mme Chantal Berthelot, Vice-Présidente du Conseil régional, déléguée à

la formation

Le constat de la situation de nos quatre régions a largement été évoqué, notamment un

taux de chômage élevé. Pour la Guyane, l’enjeu majeur, au-delà de la formation

professionnelle, est la situation des jeunes (16-25 ans). Je vais vous relater la politique

cohérente de la Région et les orientations que nous avons prises dans le cadre du contrat

de plan.

Les jeunes, préoccupation majeure

Aujourd’hui, il est difficile d’obtenir les chiffres du taux de chômage des jeunes.

Combien en avons-nous sans emploi ou hors formation ? L’ANPE n’est pas en mesure

de nous répondre. C’est un outil qui existe en Guyane mais, qui ne correspond pas à la

demande des collectivités. Il faut que la mission locale puisse se doter de moyens pour

être espace jeune, pour pouvoir inscrire les jeunes et faire l’adéquation entre les

demandes et les offres d’emplois. Sur les jeunes, il existe certains chiffres : 50 % de la

population a moins de 25 ans. L’ANPE nous communique un certain nombre de

demandes d’emplois de jeunes, mais en fonction des données que nous avons et du

rapport sur l’insertion du Comité de coordination, on doit compter, en Guyane, 9 000

jeunes sur lesquels nous n’avons aucune prise. Ils ne sont dans aucun système, dans

aucun dispositif. C’est le premier travail, notre plus gros enjeu, le plus grand défi.

Le défi pour ces 9 000 jeunes c’est d’agir effectivement sur l’étendue du territoire, car

ils ne sont pas sur le littoral, mais sur tout le territoire. En Guyane, le territoire est

immense et enclavé. Il faut pouvoir ouvrir l’accès de la formation à tous et engager la

démocratisation de la formation. Mme Sandra Trochimara, nouvelle directrice de la

Mission locale, grâce à son expérience sur la plate-forme de mobilisation de l’AFPA,

pense que quand un jeune sera pris dans le parcours que nous mettons en œuvre, la

première chose à faire sera la restructuration de son identité et de sa personne. On

demande de plus en plus aux organismes de formations : d’une part, d’être des

formateurs ce qui implique d’être formé à la pédagogie mais, d’autre part, on leur

demande en plus de jouer le rôle d’une assistante sociale, de faire du sanitaire… On

demande aux centres de formation beaucoup de choses. C’est un métier très difficile

qu’il faut saluer.

Page 278: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 278

On peut donner à ces jeunes une approche de la socialisation (cf. conférence de M.

Serge Hermine sur la cohésion sociale). On veut que nos jeunes soient de bons citoyens,

mais sommes-nous de bons élus ? Un jeune peut être un bon citoyen s’il a des droits et

devoirs ; pour cela, nous avons nous aussi des droits et des devoirs envers ces jeunes.

On doit lui donner les moyens d’accéder à cette citoyenneté. Donner au jeune des

repères, une identité, un cadre, un référent, lui donner tout ce qui va faire de lui un être

humain, car la formation a aussi cette dimension et elle est de plus en plus importante

dans les domaines sur lesquels nous travaillons. On essaie de lui donner un métier. Un

intervenant de l’AFPA Réunion souhaitait que le jeune ait un projet, mais avons-nous,

nous collectivement, un projet pour lui ? Pour qu’il ait un projet, il lui faut des repères,

un environnement qui l’inspire, qui lui donne la possibilité de se situer dans cet espace.

Cela se passe ainsi dans la nouvelle plate-forme de mobilisation. On permet au jeune de

découvrir des secteurs d’activité, des métiers, de choisir ce qu’il aimerait faire. Sur ce

sujet, l’AFPA a une expérience très importante et très convaincante, avec un taux de

réussite significatif.

Une fois le choix déterminé, il faut offrir une formation au jeune. On ne peut pas le

laisser pendant deux, trois mois sans aucune activité, sinon il perd encore plus espoir. Il

faut tout de suite lui proposer quelque chose. Le défi pour la Guyane sera d’augmenter

ses capacités de plate-forme, les correspondants de mission locale le répètent et on les

écoute. Ensuite on a aussi une offre de formation que l’on doit augmenter pour

permettre à ces jeunes d’avoir un parcours d’insertion cohérent. Cela peut paraître très

idyllique, mais si on veut faire rêver nos jeunes, nous devons savoir rêver. Le rêve,

c’est que le parcours d’insertion du jeune débouche sur la professionnalisation. C’est ce

que l’on doit au jeune, c’est la cohérence de notre politique qui se joue là.

Je n’oublie pas les autres, on a parlé de partenariat, de la professionnalisation des

emplois jeunes, des cycles de formations supérieures, des partenariats avec le monde de

l’entreprise… On a développé dans le prochain contrat de plan, et l’on continuera à le

faire des partenariats avec l’AGEFOS PME, avec l’ASFO, avec des centres privés sur

des formations supérieures… La collectivité régionale doit regarder la situation de la

formation professionnelle comme une pyramide. Elle a sa base à faire monter et c’est le

plus gros effort financier et politique qu’elle doit mener. Le discours du président

Karam était très clair, c’est la volonté de la collectivité régionale qui se traduit dans le

Page 279: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 279

contrat de plan, car nos axes sont clairement affichés et vont se traduire dans notre

budget 2001. Pour les deux, trois ans à venir, ce qu’il y a de plus important pour la

Guyane, c’est l’enjeu de la formation professionnelle. Merci.

DébatsDébatsDébatsDébats

GUYANE : M. Claude Lau-Pau, Chargé de mission à l'ANPE

Je comprends ce que Mme Chantal Berthelot veut dire s’agissant des chiffres sur les

jeunes. Les chiffres publiés ne traduisent pas la gravité de la situation. Mais l’ANPE

gère uniquement la liste des demandeurs d’emploi inscrits. Il en est de même pour les

demandeurs d’emploi de longue durée, si nous disons que fin août, on en compte 2000

en Guyane, c’est 2000 inscrits, même s’il y en a peut-être beaucoup plus. La loi accorde

le titre de demandeurs d’emploi aux personnes qui sont inscrites administrativement aux

ASSEDIC puis à l’ANPE. Il y a une différence entre un chercheur d’emploi et un

demandeur d’emploi. Nous, nous parlons des IDE, c’est-à-dire des inscriptions comme

demandeurs d’emploi.

REUNION : M. Michel Dejean, Président du CARIF-OREF

J’interviens au titre de Président du CARIF-OREF Réunion. Je siège par ailleurs au

Conseil régional, je suis premier adjoint d’une petite commune de 10000 habitants et

agent de l’ANPE. Je vais me référer aux propos de M. Hermine, de M. Marie Sainte et

de Mme Berthelot sur les organismes de formation.

On a parlé de marché de la formation, j’aimerais savoir à quoi correspondent ces

termes de marché de la formation ? Il est difficile pour moi, à l’issue de ces deux

journées, de tirer un bilan positif, même s’il y a eu des échanges très enrichissants.

De nombreux problèmes de coopération régionale ont été abordés, notamment la

barrière des langues et la mobilité, et aujourd’hui, je reste sur ma faim. Par exemple, il

m’est arrivé sur les aéroports de Paris de rencontrer des frères de l’île Maurice qui

parlaient intelligemment trois ou quatre langues. Aujourd’hui, à la Réunion, notre

Page 280: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 280

problème est bien celui de la barrière des langues. J’ai entendu hier que la Caraïbe

rencontrait les mêmes problèmes. Mais avons-nous avancé ?

On a parlé d’un certain nombre de réussites ici et là, mais je regrette que l’on ait mis de

côté le contexte économique. Il est évident que, si on veut faire des contrats

d’apprentissage ou de qualification pour des publics BAC + 2 ou 3, il faut un tissu

économique qui nous permette de le faire. Or, à l’heure actuelle, au niveau des DOM, je

ne suis pas persuadé qu’on ait ce tissu économique.

Tout à l’heure, j’entendais certaines remarques au niveau du recrutement des

stagiaires. Le recrutement des stagiaires doit-il se faire en fonction d’un potentiel

économique ou doit-il se faire pour répondre à la problématique du marché de la

formation ? Recruter un stagiaire veut dire, pour moi, le préparer à être recruté demain

par une entreprise.

Sur la problématique des NTIC, j’ai l’impression qu’on dit que les NTIC résoudront

tous les problèmes. Je reste dubitatif.

On a parlé de mobilisation de budget. Doit-on mobiliser les budgets à travers le contrat

de plan simplement sur des grandes stratégies, sur des orientations ? Prenons-nous le

temps, avons-nous les moyens d’informer le public ressortissant ?

On a parlé de la formation des emplois jeunes, mais se donne-t-on les moyens pour

aller vers les associations, vers ce public jeune qui a un contrat précaire pour lui donner

les moyens d’espérer et de progresser ? Cela reste des interrogations pour moi.

GUYANE : M. Luc Germain, Journaliste

Nous pourrions débattre de la problèmatique du marché de la formation, qui a été

évoquée à plusieurs reprises. Sur la barrière de la langue, ce qui est apparu est le

consensus pour agir. C’est effectivement un des paramètres principaux sur lequel il

faudra mettre en œuvre des actions réelles, concrètes et efficaces qui pourraient

développer une coopération entre régions avant d’abvorder les pays limitrophes. Sur

l’économie, je crois effectivement qu’on attend de chaque intervenant des propositions.

Page 281: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 281

REUNION : M. Georges-Marie Lépinay, Conseil économique et social régional

Je voudrais articuler mon propos sur 3 points : la formation, le développement et les

emplois jeunes.

La formation est un marché parce qu’elle se vend et s’achète. Nous assimilons encore

parfois la formation à l’école, qui est un service public. Aujourd’hui, on vend de la

formation à l’extérieur ; ce sont des transferts de compétences. C’est donc un produit

comme un autre. Du temps où j’étais conseiller régional, on a clarifié le rôle des

associations de formation. Vous aviez des formateurs qui arrivaient par avion le matin,

et le lendemain ils vous vendaient une bonne formation et c’était à la collectivité de

payer. Cela se fait dans le cas de la coopération avec Madagascar où vous avez de

véritables VRP de la formation. Il faut mettre de l’ordre si nous voulons aller vers une

véritable formation plutôt qu’un produit marchand.

J’ai entendu dire hier que le chômage avait baissé. Si c’était le cas, on s’en serait aperçu

chez nous. J’ai des chiffres différents. Je vois juillet 2000 par rapport à juillet 99, j’ai +

9 % d’inscriptions en catégorie 1, + 41 % en catégorie 2, + 95 % en catégorie 3. La

seule catégorie qui est prise en compte comme référence pour le taux de chômage est la

catégorie 1. C’est-à-dire les demandeurs d’emploi à la recherche d’un emploi en CDI à

temps complet. Qui peut attester de cela dans un marché où il n’y a pas d’emplois ? Les

autres éléments ne servent pas pour le calcul du taux de chômage. À la Réunion, quand

le demandeur arrive, il dit : "Je veux un CDI à temps complet". On lui répond que ce

n’est pas possible : il n’y a pas assez de place sur le marché . On a aujourd’hui 129 000

demandeurs d’emploi en catégorie 1, c’est-à-dire là où on a le moins de chance de

trouver un emploi. On lui propose un CES et la personne bascule dans la catégorie 2 ou

3 … Et c’est comme cela que l’on fausse les chiffres du chômage. Ce n’est pas le propre

du fonctionnaire de chez nous, ce sont les directives du ministère.

L’autre difficulté pour obtenir un chiffre réel, c’est qu’après un certain temps, comme le

marché du travail est fermé, les gens ne vont plus à l’ANPE. Pour aller s’inscrire, il faut

dépenser de l’argent. L’INSEE établit qu’à la Réunion, on doit avoir 15 à 20 000

demandeurs d’emploi qui ne sont plus inscrits, parce qu’ils sont fatigués d’aller

chercher du travail et de ne pas en trouver. Si bien qu’on arrive, d’après une étude

DEMO 97, à compter pratiquement autant de salariés en emploi que de salariés en

recherche d’emploi, compte non tenu de la précarisation qui s’est considérablement

Page 282: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 282

aggravée. Je pense que sur ce plan, il faut un langage vrai. Il faut connaître précisément

la source du mal pour la guérir. Si on la cache parce que c’est une maladie honteuse, on

n’arrivera pas à la médicalisation.

Nous sommes ici à l’Université de la formation. On constate qu’il y a la formation

initiale, la formation professionnelle (2ème chance) et l’alphabétisation. On parlait de

l’articulation entre les deux, mais il y a une coupure très nette. Où est l’Éducation

nationale ? On vit chacun en vase clos. A la Réunion, l’effort du Conseil régional en

matière de formation est important mais, la formation professionnelle, c’est 300, 350

millions de francs et l’alphabétisation, c’est 10 millions. L’État dans sa générosité

rajoute 10 millions de francs. Voilà un problème pour la formation professionnelle, ce

sont des choix, et je ne tiens pas compte des efforts de l’État au niveau de l’Éducation

nationale.

Au niveau des appareils de formation, nous avons l’Éducation nationale qui est la voie

royale. Pour la formation professionnelle, vous avez des associations type AFPA avec

obligation de service public et enfin pour l’alphabétisation, c’est au bon cœur des

bénévoles. Le coût/heure en formation initiale, c’est plusieurs centaines de francs par

heure. Au niveau de la formation professionnelle, on tourne autour de 60, 65 francs par

heure. Ce matin, on a appris que pour l’alphabétisation c’est 22, 25 francs par heure.

C’est un problème. Comment concevoir la formation comme une continuité puisqu’il

n’y en a pas ?

Au-delà de la formation des hommes, la formation professionnelle continue doit faire

partie intégrante du travail parce qu’elle permet de valoriser le travail et d’augmenter la

productivité. La formation ne fait pas perdre de l’argent à celui qui la paie, mais lui

permet d’en gagner davantage. Il faut donc l’inscrire dans le champ même du travail.

C’est un élément qu’il nous faudra prendre en compte. Former des gens pour des

emplois de demain, c’est former pour des emplois d’aujourd’hui, en se situant dans une

perspective de développement. Si nous n’avons pas de développement… Je me

souviens d’un night-club dans lequel il y a eu le feu. Tout le monde s’est précipité sur

les portes qui étaient fermées. Il y a eu beaucoup de morts. C’est un peu la situation

dans laquelle nous sommes. Former, c’est bien, mais si devant tout est fermé, il n’y aura

pas de possibilités d’emploi. L’outil de formation ne peut pas être sous cloche, en

dehors d’une politique de développement de notre pays.

Page 283: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 283

MARTINIQUE : M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régional

Notre conception en Martinique est de lier la formation au développement. J’ai

parlé d’un outil que nous utilisons qui est le contrat d’étude prospective. Cela nous

permet de déterminer les besoins en compétences, donc en formation. Ceci est fondé sur

un plan de développement. Ce n’est pas le rôle de ceux qui sont chargés de la formation.

Cela relève de la compétence de la région, dans sa globalité, d’élaborer un programme

de développement pour savoir sur quels secteurs elle souhaite mettre l’accent. Quels

sont les secteurs qui vont se développer ? Quelles sont les potentialités de notre région ?

Ceci est élaboré dans ce document qui nous a servi de guide dans le cadre de la

négociation du contrat de plan avec l’État et du DOCUP. Deux types de projets se

présentaient : ceux qui pouvaient être éligibles à des fonds européens et ceux non

éligibles mais, que nous considérons comme essentiels pour valoriser les ressources que

nous avons (les ressources humaines). Les études prospectives par branche

professionnelle nous ont indiqué les secteurs en déficit ou en surabondance d’emplois.

Nous sommes conscients qu’il faut offrir un choix à nos concitoyens. Ils choisissent de

travailler au pays ou ils optent pour la mobilité, mais nous souhaitons que cela relève de

leur choix. Nous souhaitons pouvoir les aider à faire leur choix pour qu’ils réussissent

leur projet de vie.

Sur la notion de marché, je crois qu’il existe un marché de la formation. Il ne faut pas

donner une connotation péjorative à ce mot. Depuis 1992, on essaie de moraliser ce

marché, de rechercher la qualité des prestations. Il y a marché quand il existe une offre

et une demande. C’est cette rencontre qui crée le marché. Ce marché crée des emplois.

Mais les entreprises doivent veiller à la qualité de la formation continue qu’elles

financent. Nous, institution publique, nous devons veiller, pour le compte des

bénéficiaires, à ce que cela soit des produits de qualité. La notion de qualité doit être

dominante parce qu’il s’agit d’un marché. Il se trouve que l’on est dans une société

libérale, capitaliste… Nous faisons des appels à propositions, des appels d’offres avec

certains critères. Je pense qu’il ne faut pas donner de connotation négative parce que

cela ne changera pas la réalité.

Sur la barrière des langues, je pense qu’il ne faut pas la considérer comme

infranchissable. L’expérience nous a montré que l’on peut la franchir si l’on se donne

Page 284: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 284

les moyens de le faire. Rappelons-nous l’expérience menée par la Martinique en

Grande-Bretagne : grâce à ce programme européen, ces jeunes qui ne connaissaient la

langue de Shakespeare qu’à travers la formation initiale, après quatre mois

d’immersion, étaient capables de faire le point sur le stage en anglais. En Martinique,

pour ceux qui choisiraient la mobilité, nous pensons trouver des méthodes pour leur

permettre de surmonter cet obstacle.

GUYANE : Mme Chantal Berthelot, Vice-Présidente du Conseil régional, déléguée à

la formation

Beaucoup de problèmes ont été abordés et c’est tous ensemble que nous arriverons à les

résoudre. Il n’y a pas la politique d’un côté et vous en face. Il n’existe pas de solutions

préexistantes. Vous êtes des acteurs, nous les politiciens on impulse mais, c’est

ensemble que l’on trouve les solutions.

Ce que j’ai voulu dire à propos de l’ANPE, c’est l’importance des chiffres. Quand on dit

que le chômage baisse et que l’on n’en voit pas les répercussions, on peut se poser des

questions sur la manière dont sont établis les chiffres. Les chiffres que donne l’ANPE

sur les jeunes ne sont pas les mêmes que ceux que nous avons par déduction. La volonté

politique de la région est de faire de la Mission locale un moyen, un outil politique pour

connaître le nombre de jeunes sortis du système scolaire sans qualification et de leur en

donner une.

L’ANPE parle de jeunes à la recherche d’emploi, mais le jeune de Maripasoula à la

sortie du collège devrait prendre un billet d’avion pour aller s’inscrire à l’ANPE.

Sur le marché, je rejoins M. Marie Sainte. Au niveau de la région, nous essayons au fur

et à mesure d’améliorer la qualité des prestations de formation. Il y a les appels d’offres,

il y a aussi les objectifs que l’on fixe.

En Guyane, un partenariat entre la région et l’Éducation nationale permet de proposer

des classes expérimentales ou de pré-apprentissage aux jeunes qui sortent du milieu

scolaire à 16 ans. Cette démarche est encore à développer.

Page 285: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 285

REUNION : Mme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régional

Je crois que ce n’est pas un hasard si la table ronde sur les nouveaux enjeux de la

formation professionnelle est animée par des politiques. Nous sommes là bien au cœur

d’un débat politique. Et ce n’est qu’à partir du fait qu’on ait pensé et déterminé une

politique que l’on peut la décliner au niveau opérationnel.

J’ai été frappée que l’on n’ait pas défini le concept de formation professionnelle : j’ai

entendu parler de l’enseignement professionnel. Or, la formation professionnelle est

pour moi une formation complète. L’enseignant qui va à l’IUFM reçoit une formation

professionnelle ; celui qui va être, demain, maçon reçoit une formation professionnelle

et le médecin, à la suite de stages, a aussi une formation professionnelle, au-delà de la

formation initiale. Il ne faut pas faire de confusion.

J’ai été également frappée, cet après-midi, par les propos de ma collègue Chantal

Berthelot qui évoquait des difficultés pour cibler les publics et qui précisait les

missions respectives de l’ANPE et des Missions locales. Le fait même que nous ayons

parlé de l’ANPE et de la dimension du chômage et du travail, montre que nous posons

le concept de la relation de la formation à l’emploi.

J’adhère à ce qu’a dit M. Lépinay en ce qui concerne la formation professionnelle

continue qui, est à mon sens, une plus-value au travail puisque l’employeur et l’employé

en tirent avantage. Nous sommes là dans une stratégie de gagnant / gagnant.

Sur le marché, je ne suis pas gênée de dire qu’il existe un marché de la formation

professionnelle. Nous ne sommes pas en économie collectiviste, du moment qu’il y a

une demande et une offre, il existe bien un marché. Le rôle des politiques est de réguler

le marché en recherchant à garantir la qualité des prestations. C’est ce qui a été fait,

quelquefois de manière imparfaite, quand nous créons des habilitations pour les

organismes. M. Lépinay rappelait que l’on a vu un certain nombre de margoulins venir

le matin et s’installer formateurs le lendemain. Je crois que les procédures d’habilitation

qui répondent à des critères précis, définis bien entendu par les politiques mais en

concertation avec les acteurs de la formation, sont autant de moyens pour instaurer des

valeurs et de la moralité sur un marché qui, au-delà de la dimension financière, touche

l’homme de très près et qui se doit donc d’avoir une éthique.

Page 286: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 286

SÉANCE DE CLÔTURE du 4/10/00SÉANCE DE CLÔTURE du 4/10/00SÉANCE DE CLÔTURE du 4/10/00SÉANCE DE CLÔTURE du 4/10/00

Intervenants

GUYANE :M. Antoine Karam, Président du Conseil régional

METROPOLE :M. Vincent Merle, Directeur de cabinet de Mme Nicole Péry, Secrétaire d'État auxDroits des Femmes et à la Formation professionnelle

Débats

GUADELOUPE :M. Berthelot, Président de l'AGEFOS-PMEMme Marie-Laure Laquitaine, Chargée de mission au FSEM. Jean-Claude Maccès, Directeur du CARIF-OREF

GUYANE :M. Rémy-Louis Budoc, Vice-Président du Conseil régionalM. Serge Kramer, Directeur du Centre régional de psychologie du travail de l’AFPAMme Cécile Minne Ebelle Dim, Directrice du CFA

MARTINIQUE :Mme Lucienne de Montaigne, Déléguée académique à la formation continueMme Chang Hua Numeric, Directrice adjointe de l’ANPEM. Patrick Laport, Directeur du CFA

Page 287: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 287

SÉANCE DE CLÔTURESÉANCE DE CLÔTURESÉANCE DE CLÔTURESÉANCE DE CLÔTURE

GUYANE : M. Antoine Karam, Président du Conseil régional

Monsieur le Directeur du Cabinet représentant le Ministre,

Mesdames, Messieurs les élus de Guyane, de la Martinique, de la Réunion, de la

Guadeloupe, de la France hexagonale,

Mesdames et Messieurs,

La première Université de la formation professionnelle dans les régions d’outre-mer

arrive à son terme. Cette manifestation commencée lundi a, de mon point de vue, atteint

son objectif et je voudrais, au nom des quatre régions, la Réunion, La Martinique, la

Guadeloupe et la Guyane, vous adresser tous mes remerciements. Je sais que la présence

et la contribution de chacun ont servi à enrichir les travaux. La première université de la

Formation Professionnelle dans les régions d’outre-mer vous doit son existence. Faut-il

déjà en tirer un premier bilan ?

En dehors de toute considération technique, cette première Université aura eu

l’immense mérite de soutenir la mise en réseau de relations, de savoirs, de compétences

pour la compréhension des problèmes de la formation. Les prochaines rencontres

permettront de les entretenir.

• Cette mise en réseau a joué au niveau des régions qui, vous le savez, ont une

compétence de maîtrise d’ouvrage en matière de formation professionnelle. Cela

constitue une étape supplémentaire dans le renforcement du partenariat des quatre

exécutifs régionaux que sont Mme Lucette Michaux Chevry pour la Guadeloupe, M.

Alfred Marie Jeanne pour la Martinique, M. Paul Verges pour la Réunion et votre

serviteur pour la Guyane. Cette rencontre autour de la formation des hommes est un

enrichissement considérable, vu l’appartenance de nos régions à d’autres

environnements géographiques, culturels, économiques et politiques.

• La mise en réseau a joué au niveau des institutions intermédiaires. Il s’est presque agi

d’un INTERDOM. Les AFPA se sont retrouvées et ont échangé dans leur champ

propre.

• La mise en réseau a joué aussi au niveau des organismes paritaires collecteurs, dont

Page 288: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 288

l’AGEFOS, centrée sur les PME, en constitue un noyau important. Cela laisse augurer

un partage des connaissances emploi-formation qui est de nature à enrichir le présent,

mais surtout l’avenir des uns et des autres.

• La mise en réseau a enfin joué au niveau des Chambres de Commerce et d’industrie

qui ont pour habitude de collaborer sous l’égide de l’ACFCI et de bénéficier de l’aide

de grandes Chambres, comme celle de l’Ile-de-France.

• Je veux aussi noter la participation des autres chambres consulaires, de tous les

techniciens, certains relevant des ministères, de départements ministériels déconcentrés

ou de différentes institutions sous tutelle du gouvernement, qui ont contribué à

l’avancement des travaux, notamment dans les différents ateliers qui portaient sur

l’illettrisme, la formation et les technologies de l’information et de la communication, la

reconnaissance des acquis professionnels, l’apprentissage et les contrats en alternance.

• Je veux enfin noter la participation de l’ANT qui est notre partenaire en matière de

formation professionnelle en mobilité.

Des pistes à développer

Au niveau de la Guyane nous sommes résolument pour la formation de nos jeunes. Mais

nous misons aussi sur leur retour chez nous. Car notre pays est immense, c’est un pays à

construire, à aménager. Il y a de la place pour nos jeunes compatriotes, pour qu’ils

puissent se mettre au service de leur pays. Grâce à ce dispositif, il faut travailler dans la

perspective du développement de la Guyane.

Cette première université va, en toute hypothèse, nous permettre de cerner de plus en

plus de problèmes de formation, d’adapter l’offre de formation aux évolutions de

l’entreprise, de faciliter l’adaptation du salarié au poste de travail, de favoriser la

mobilité professionnelle. Nous serons attentifs aux résultats que renfermeront les actes

de cette université. Nous continuerons pour les prendre en compte, à nous battre pour la

formation de nos jeunes, à renforcer le financement de nos postes de formation, ce qui

n’est pas dans nos régions une dépense mais un investissement dans ce que la société a

de plus sûr : ses hommes.

Lutter contre les stéréotypes

Vous savez, il nous faut aujourd’hui tout faire pour éviter que certaines images, certains

Page 289: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 289

stéréotypes soient véhiculés au détriment de nos régions d’outre-mer. Il est de plus en

plus insupportable de voir que tous les efforts que nous faisons dans nos régions

d’outre-mer, et je vais plus particulièrement parler de la Guyane, soient vains. Les

stéréotypes, les clichés, les images les plus nauséabondes frappent nos pays. Il y a

quelques semaines c’était le Figaro, hier France-soir. Mesdames et messieurs, vous qui

avez été reçus par nous, vous ne repartirez pas avec des moustiques qui vous ont perforé

le corps. Vous ne repartirez pas avec des morsures de serpent, sidaïques ou drogués

parce que c’est l’image qui est véhiculée par la presse nationale française sur nos pays.

Elle nuit à tous les efforts que nous faisons dans le contrat de plan État-Région ou

ailleurs, avec des moyens énormes, pour que le tourisme soit une priorité dans notre

pays, parce que le tourisme est créateur d’emplois. Tous ces moyens financiers que nous

mettons en place pour faire la promotion de nos régions, pour changer l’image de notre

pays sont balayés à chaque fois qu’un journaliste en mal d’exotisme vient voir la fusée,

sort de l’enclave de Kourou et va se promener pour démontrer que dans notre pays tout

est foutu, que nous sommes au cœur d’une guerre. Voilà les images qui sont véhiculées.

Je m’éloigne du discours de clôture de cette manifestation, mais vous qui êtes venus,

vous qui avez échangé avec nous, je sais que vous avez été enchanté par ce pays

immense. Je vous remercie.

METROPOLE : M. Vincent Merle, Directeur de cabinet de Mme Nicole Péry,

Secrétaire d’État aux Droits des Femmes et à la Formation professionnelle

Monsieur le Président Karam,

Mesdames les présidentes, messieurs les présidents, mesdames les directrices,

messieurs les directeurs,

Madame, Monsieur,

Je voudrais avant toute chose vous présenter les excuses de Nicole Péry, qui aurait

souhaité être parmi vous, parce qu’elle connaît bien cette région. Elle y a séjourné dans

ses anciennes fonctions de vice-présidente du Parlement Européen. Je me suis même

laissé dire qu’elle était marraine d’une fusée de la base spatiale, pas très loin d’ici.

Par ailleurs, comme elle me l’a dit récemment, elle est persuadée de l’importance de ce

type d’échanges et de rencontres sous forme d’université, parce que c’est là qu’on y

échange de bonnes pratiques. C’est là où on innove ensemble, c’est là où on apprend à

Page 290: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 290

construire des réseaux parce qu’on se rapproche dans sa manière de parler de la

formation, parce qu’on va chercher des bonnes idées chez les voisins, chez ceux qui ont

innové avant vous. Donc en matière de formation professionnelle, plus que les décrets,

les circulaires et les lois, ce qui importe, c’est la transformation des pratiques.

Elle m’a chargé de féliciter les régions qui ont pris l’initiative de cette Université et de

remercier tous ceux qui ont accepté de s’y associer, tous ceux qui ont concouru à sa

réalisation technique, ce qui n’est jamais chose simple. Je pense entre autres au Centre

INFFO, qui est un organisme au service de tous, comme un certain nombre d’autres

organismes qui sont fortement financés par le secrétariat d’État à la formation

professionnelle. Il est au service bien sûr des administrations concernées par la

formation professionnelle, mais aussi au service des partenaires sociaux et des régions,

comme le reflète la composition de son conseil d’administration.

Développer une logique de territoire

Nicole Péry m’a aussi chargé d’écouter avec la plus grande attention ce qui se dirait tout

au long de ces journées et de lui rapporter vos principales conclusions. Je crois que le

premier message dont je serais porteur en revenant à Paris, c’est cette interpellation que

j’ai entendue à plusieurs reprises sur le fait qu’il fallait sans doute essayer de rompre

avec la mise en application mécanique, dans des territoires fort loin de Paris, de

schémas d’intervention, d’outils qui ont été conçus sans doute de manière un peu trop

technocratique sur la rive gauche de la Seine. J’ai entendu ce matin encore, certains dire

qu’il existe aussi dans les régions d’outre-mer des capacités à innover, que toutes les

innovations ne viennent pas de Paris. Je crois que c’est un message que Nicole Péry

entendra sûrement, d’abord parce que c’est une élue locale, c’est quelqu’un qui a été

élue régionale et n’a cessé de répéter depuis qu’elle a pris ses fonctions de Secrétaire

d’État aux droits des Femmes et à la Formation professionnelle, que pour elle, la

formation supposait à la fois un processus de décentralisation et une logique de

territoire très accentuée. Il est important que nous ayons tous en tête que ces logiques de

décentralisation, ces logiques de territorialisation de la formation professionnelle sont

essentielles à la réussite de nos projets.

Il est vrai que souvent à Paris, on a eu tendance à concevoir des outils, des procédures,

qui arrivaient mécaniquement dans les différents espaces régionaux avec des

Page 291: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 291

injonctions à faire. Il est vrai aussi qu’on a pu reprocher à l’État, parfois à juste titre, de

reprendre d’une main ce qu’il semblait donner de l’autre. Et de ne pas laisser

suffisamment d’autonomie aux acteurs, et en particulier aux acteurs régionaux. Les

départements d’outre-mer sont particulièrement sensibles à ces questions, mais sachez

que vous n’êtes pas les seuls. Lorsque Nicole Péry est amenée à rencontrer des acteurs

régionaux, ici ou là, ces remarques lui sont souvent faites. Il faut comprendre les raisons

pour lesquelles nous connaissons cette tension.

Articuler compétences et performances économiques

Avec la forte montée du chômage depuis les années 75, la formation professionnelle a

souvent été mise dans une sorte de position de subordination à l’égard d’une logique

d’urgence du chômage. Autant la formation professionnelle a fait l’objet de la loi de

décentralisation en 83 d’abord, à travers la loi quinquennale ensuite, autant les

questions de l’emploi n’avaient, elles, pas fait l’objet de décentralisation. Il a fallu dans

l’urgence, à travers le service public de l’emploi, à travers de grands établissements

publics comme l’ANPE par exemple, mettre en place des programmes, des démarches,

des procédures qui permettaient de lutter le plus efficacement possible contre cette

montée du chômage. La formation professionnelle y a perdu quelque peu son identité.

Nous sommes maintenant dans une phase tout à fait différente, où la formation

professionnelle pourrait retrouver une partie de sa raison d’être et une partie de son

autonomie en tant que champ de l’action publique et de l’action collective. Pourquoi ?

Parce que d’abord, la pression du chômage toujours forte, diminue considérablement,

d’autre part parce que la reprise économique fait apparaître de grands besoins en main-

d’œuvre et que nous savons que les réponses sont multiples mais que la réponse

formation est une des réponses essentielles. Progressivement, nous pouvons donc

abandonner ces logiques que certains qualifieraient de trop technocratiques, où

effectivement beaucoup de choses se conçoivent à Paris, avec une application

mécanique sur le terrain. Place donc à des logiques d’actions de partenariats, à des

logiques de coopération entre acteurs. En effet, s’il y a une donnée permanente en ce

qui concerne la formation professionnelle, c’est que c’est une construction qui est pluri,

multi, acteurs : les partenaires sociaux ont leur mot à dire et sont actifs dans ce

domaine, les champs consulaires également, les collectivités territoriales aussi et l’État

Page 292: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 292

y a sa part. Il nous faut apprendre à travailler ensemble, dans une logique qui soit

coopérative et de partenariat. Une fois bien défini le champ de compétence dechaque

acteur, au sens juridique, chacun pourra jouer sa partition. Il n’y a pas d’opération

réussie en matière de formation professionnelle qui ne mêle les compétences juridiques

et le savoir-faire des différents acteurs impliqués dans l’action. Vous vous interrogiez

sur le développement local, c’est un des thèmes forts de cette Université, mais l’a-t-on

défini et sait-on ce que c’est. Je ne sais pas s’il existe une réponse définitive à ce sujet,

je laisse les universitaires tenter d’apporter une réponse conceptuelle. Ce que je sais,

c’est que la formation professionnelle est un laboratoire extraordinaire parce que c’est

bien en croisant la question de la construction de la compétence et de la qualification

des personnes et la question des performances économiques des entreprises, petites ou

grandes, que l’on redécouvre l’importance de la logique territoriale et l’importance du

développement local. Certes, il y a bien l’articulation possible entre réussite

économique, performance économique et formation à un niveau très macro, voir même

parfois à un niveau international. Mais dans la plupart des cas, c’est au niveau du

territoire que se construit ce croisement fécond entre une logique de construction des

compétences et une logique de performance économique.

La réforme de la formation professionnelle

C’est dans ce contexte que se pose aujourd’hui la question de la réforme de notre

système de formation professionnelle. Cette volonté de réforme anime le gouvernement

et particulièrement Nicole Péry qui a la charge d’animer et de conduire cette réforme.

Cette volonté n’est pas simplement de simplifier des dispositifs qui se sont empilés ou

sédimentés depuis une trentaine d’année et qui ont fini par donner à notre système une

opacité, une complexité rarement atteintes : 1500 pages de textes, lois décrets,

circulaires régissent notre système de formation professionnelle. C’est probablement

trop lourd : demandez à un chef de PME s’il connaît les règles les plus courantes en

matière de formation professionnelle ; demandez a fortiori à tel ou tel de vos

concitoyens, s’il connaît tel ou tel dispositif, pour accéder au financement d’une

formation ou s’il connaît la loi de 92 sur la VAP. Nous constaterons que nous avons

beaucoup empilé, parfois des choses forts savantes, parfaitement bien construites

techniquement mais qui n’ont plus de lisibilité. Voilà au moins un motif suffisant pour

Page 293: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 293

tenter cette réforme. Mais la raison fondamentale est de savoir comment faire en sorte

que le système de la formation professionnelle d’aujourd’hui et de demain réponde à

cette double exigence, de performance économique d’une part, et d’autre part de

cohésion sociale, de progrès possibles pour chacun d’entre nous dans sa trajectoire

professionnelle. C’est le croisement de ces deux préoccupations qui est la motivation

principale. D’ailleurs d’un côté comme de l’autre, les attentes, les pressions sont

extrêmement fortes. Du côté de la performance économique parce que quel est l’expert

en macro et micro économie, qui ne va pas répétant que ce qui fait la différence et qui

fera la différence demain dans le monde des entreprises, ce sont les compétences et les

compétences sont rares. On le voit bien dans cette période de tension sur le marché du

travail, peut être un peu moins dans les régions d’outre-mer, encore que… En tout cas,

sachez qu’en métropole, nous connaissons aujourd’hui des goulots d’étranglement de

main-d’œuvre qui sont extrêmement préjudiciables à la production. Sur le volet de la

cohésion sociale, là aussi les pressions sont très fortes parce que nous sommes dans un

univers professionnel de plus en plus marqué par des aléas, des ruptures. Peut-on

espérer simplement des garanties statutaires qu’elles nous permettent de retrouver une

certaine sérénité des individus sur le marché du travail ou ne faut-il pas au contraire,

envisager que cette sécurité passe par une mise à jour permanente de leurs

connaissances, par des savoir-faire solidement établis et donc, par la possibilité pour

chacun, de vivre d’éventuelles mobilités, d’éventuelles ruptures dans sa vie

professionnelle, avec des garanties que sont effectivement ses savoir-faire, ses

compétences et ses qualifications reconnues. Dans ce contexte aux enjeux considérables

(pas seulement un simple enjeu de politique sociale), c’est un enjeu économique, un

débat social fondamental. Quels axes ont été retenus et où en sommes-nous du point de

vue de processus de réforme ? Nicole Péry avait défini quelques étapes pour conduire

cette réforme, menée dans la plus grande concertation possible avec les principaux

acteurs que j’ai indiqués tout à l’heure mais aussi parce que nous voulions tenter

ensemble certaines expérimentations pour préfigurer cette réforme. C’est bien ce

schéma qui a été mis en œuvre, avec quelques étapes déjà derrière nous, d’autres qui

sont en cours et enfin d’autres qui s’annoncent. Parmi celles qui sont derrière nous, je

rappelle que, dans la loi sur la RTT, l’article 17 mentionne explicitement les questions

de formation professionnelle et a permis deux progrès :

Page 294: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 294

- le premier, c’est de reconnaître que l’adaptation des salariés aux changements de

l’emploi, aux changements organisationnels et technologiques est bien une obligation

inhérente à la relation de travail elle-même, ce que la jurisprudence reconnaissait

jusqu’ici mais qui n’était pas encore inscrit dans la loi.

- le deuxième progrès accompli, c’est l’invitation très forte faite aux partenaires sociaux

- que ce soit au niveau interprofessionnel, des branches ou de l’entreprise - de négocier

des accords qui permettent de résoudre le plus intelligemment possible la question très

délicate de la formation sur le temps de travail ou en dehors du temps de travail.

En réalité, l'interrogation beaucoup plus fondamentale est la suivante : comment faire

converger d'une part les aspirations de chacun à progresser professionnellement, à

mobiliser l’ensemble de ses potentialités et d’autre part, la préoccupation tout à fait

légitime des entreprises de voir se développer les compétences utiles à leur réussite

économique.

Bien souvent, la formation est pensée comme une adaptation à court terme, avec une

finalité économique immédiate alors que précisément, nous devons retrouver le sens

d’une formation qui prépare le long terme aussi bien pour l’individu que pour

l’entreprise. J’entendais un intervenant parler ce matin d’entreprise apprenante. Derrière

cette expression, se cache une question tout à fait importante : l’entreprise n’est pas

simplement un lieu où on consomme de la compétence, où l’on utilise des savoirs qui

ont été acquis ailleurs mais l’entreprise est elle-même un acteur de la formation

professionnelle par les savoirs qui s’y dispensent et s’y développent, pour peu qu’on

sache les accompagner par le tutorat et des apports en matière de connaissances

techniques.

Deux autres étapes sont en cours : la réforme du financement de l’apprentissage et la loi

sur la reconnaissance de l’expérience par la validation des acquis professionnels.

Ces deux transformations législatives figurent dans le projet de loi de modernisation

sociale qui, pour diverses raisons, a du être reportée et qui sera examinée prochainement

en première lecture par l’Assemblée nationale. Sachez que sans attendre le vote de cette

loi, beaucoup de changements contenus potentiellement dans ces deux projets de loi

sont déjà en cours.

Page 295: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 295

Sur l’apprentissage, nous avons tenté avec l’ensemble des acteurs concernés, de

trouver des règles du jeu communes qui favorisent la transparence et une plus grande

égalité de traitement entre les CFA. Nous avons donc souhaité introduire des règles

beaucoup plus transparentes pour tout le monde sans déresponsabiliser ces acteurs

essentiels que sont notamment les conseils régionaux qui verront d’une certaine façon

leur capacité de décision et de régulation du système de l’apprentissage renforcé, à

travers ce processus législatif.

L’apprentissage et plus généralement les formations en alternance des jeunes devront

évoluer. Certains ont rappelé ce matin que l’apprentissage doit être reconnu comme une

voie de formation à part entière, c’est très largement fait heureusement et je crois que

globalement, il a acquis ses lettres de noblesse. Dans un certain nombre de régions

aujourd’hui, les demandes de formation en apprentissage sont extrêmement nombreuses

et on constate en revanche une diminution des effectifs dans certaines sections CAP ou

BEP des lycées professionnels. Les complémentarités à trouver entre la formation dans

le système éducatif sous statut scolaire et celle réalisée sous contrat de travail devront

progressivement être revues. Je pense d’ailleurs que ce devrait être un des thèmes de la

négociation que les partenaires sociaux doivent conduire prochainement entre eux sur

les questions de formation professionnelle.

La reconnaissance de l’expérience par la validation des acquis professionnels est un

sujet majeur et je suis tout à fait satisfait de constater que dans vos propres discussions,

le caractère décisif de cette transformation a été souligné par de nombreux participants.

Pour reprendre l’expression de Nicole Péry, c’est d’une certaine manière, une petite

révolution. Il y a deux façons de lire les textes qui ont été préparés. Une première façon,

je dirais "minimaliste", qui consiste à penser qu'il s'agit d'un léger toilettage des textes

pour donner un petit coup d’accélérateur à cette procédure dont on s’accorde en général

à reconnaître qu’elle est plutôt bonne. L’autre lecture qui n’est pas maximaliste, qui est

simplement la bonne, c’est qu’à travers les changements que nous avons essayé

d’opérer tous ensemble, il y a un levier considérable pour développer autrement la

formation professionnelle en France. L’accès à un titre ou à un diplôme par la validation

des acquis professionnels est à mon sens décisif. Nous avons essayé de créer un cadre

institutionnel pour bâtir un système de repères collectifs avec une réelle

Page 296: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 296

complémentarité entre les titres et les diplômes, d’où le remplacement de la procédure

actuelle dite de l’homologation, par la création d’un répertoire national des certifications

professionnelles qui sera géré par une commission nationale comprenant les principaux

acteurs concernés. Il ne s’agit pas bien évidemment de construire un système

monolithique où selon une tendance bien française, seuls les diplômes compteraient. Il

faut au contraire que ce système soit ouvert et laisse la place à des formes de

certification différentes. Par exemple celles qui sont établies paritairement par les

branches comme les CQP. Nous avons travaillé dans un esprit d’ouverture, de

complémentarité et de cohérence entre les différentes certifications. Nous voulons éviter

qu’à la faveur de cette loi, on ne retombe dans une sorte de "bagarre" de la certification.

Chacun veut bien développer ses propres certifications mais souhaiterait avoir

l’exclusivité de la formation correspondante. Or c’est précisément ce que nous voulons

à tout prix éviter, en déconnectant la certification de la formation proprement dite. Par

exemple, nous voulons faire en sorte que si un titre a été élaboré dans un organisme de

formation, une chambre consulaire, ou encore paritairement par les partenaires sociaux,

ce titre soit réputé accessible, aussi bien à l'issue d’une parcours de formation que par la

voie de la validation des acquis professionnels. C’est déjà un changement majeur parce

que l’essentiel de notre système de certification a été conçu plutôt dans un esprit de

sanction d’une action de formation.

C’est un levier de changement important, non seulement comme cela a été très

justement dit ce matin, pour raccourcir les temps de formation mais aussi pour

l’organisation de la formation avec une offre de formation plus souple de la part des

organismes et une modularisation des actions. L’obligation faite à un certain nombre de

personnes de suivre la totalité d’une formation alors qu’elles ont déjà des acquis est une

absurdité. Les moyens ainsi dégagés pourront être très facilement, reportés sur l’amont

de la formation : l’orientation, les bilans de compétences, etc, afin que la formation

apparaisse bien comme un élément d’une trajectoire, d’un parcours personnel.

Mais au-delà de ce changement, c’est l’ensemble des pratiques en matière de formation

qui va changer. Je vais prendre un exemple simple. Aujourd’hui pour accéder à un

diplôme de l’Education Nationale par la voie de la reconnaissance des acquis

professionnels, vous devez présenter un dossier dans lequel vous mettez l’ensemble des

preuves professionnelles, qui montrent que vous avez les savoirs et les savoir-faire

Page 297: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 297

utiles pour obtenir le diplôme. La loi change un élément modeste en apparence, mais

essentiel sur le fond. Elle dit non seulement vous remplirez un dossier mais vous aurez

la possibilité de le soutenir devant un jury qui définira avec vous, candidat, quelles sont

les modalités complémentaires de certification ou de validation nécessaires pour obtenir

la totalité du titre. D’une certaine manière, on induit par là une représentation tout à fait

différente de ce qu’est un parcours de formation professionnelle. J’irais même un peu

plus loin, ce qu’on invite le candidat à faire, c’est de développer ses savoirs, ses savoir-

faire et ses compétences, quelles qu’en soient les modalités, quitte à ce que la formation

soit une de ces modalités, mais seulement une parmi d’autres.

En discutant avec des entreprises de nettoyage industriel qui ont développé récemment

des procédures de validation des acquis, en s’appuyant sur la loi de 92, j’ai été très

frappé des effets induits. Elles s’attendaient à des revendications salariales pour un

réajustement des rémunérations par rapport au diplôme obtenu, alors que les principales

réactions ont été des demandes d’enrichissement des situations professionnelles pour

développer les compétences où des lacunes avaient été constatées par le jury.

Jusqu’ici la formation, comme la tragédie classique, respectait la règle des trois unités :

de lieu, de temps et d’action. Aujourd’hui, la formation est un moment dans un

processus beaucoup plus complexe. Elle s’inscrit dans un parcours vers la qualification

par l’enrichissement progressif des compétences. C’est un changement radical pour les

formateurs qui sont déjà bousculés, vous avez eu raison de le dire, par l’introduction des

NTIC, mais qui le seront sans doute davantage par ce changement culturel fondamental

dans l’univers de la formation.

Nous travaillons déjà avec tous les acteurs concernés, pour que dès le vote de la loi, elle

soit immédiatement opérationnelle et qu’on n’attende pas plus longtemps avant d’avoir

des jurys capables d’accueillir les candidats, avant d’avoir une commission qui

fonctionne avec un répertoire permettant à chacun de repérer quelles sont les

certifications en France. Les régions y ont bien entendu leur part.

J’entendais parler tout à l’heure, de piroguier, d’accompagnateur en milieu naturel. S’il

s’agissait là de créer des certifications nouvelles, je dirais pourquoi pas, mais est-ce

vraiment le problème ? Faut-il à tout prix tout certifier ? Est-ce qu’il n’est pas plus

important dans des compétences de ce type de simplement les valider, parce qu’elles

permettent d’aller plus loin. Méfions-nous de ne pas tout faire passer par des diplômes.

Page 298: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 298

La formation tout au long de la vie : du concept au droit

Ces deux étapes, ces deux projets de loi sont essentiels. Ils doivent être complétés par la

mise sur pied d’un droit individuel, que dans le livre blanc diffusé par Nicole Péry nous

avons appelé "droit individuel transférable et garanti collectivement". Il s'agit de faire

en sorte que nous traduisions dans la réalité concrète la thématique de la formation tout

au long de la vie.

Je vais encore prendre un exemple simple. Si vous êtes demandeur d’emploi, vous avez

le droit de vous former. Mais connaissez-vous vos droits ? Est-ce qu’il ne serait pas

normal qu’un demandeur d’emploi, qui n’a pas eu la chance en formation initiale

d’acquérir une qualification solide, puisse au moment où il est au chômage, se voir

ouvrir un droit à une formation le conduisant à cette qualification.

Se pose alors le problème du financement qui est toujours assez compliqué. Les conseils

régionaux font beaucoup d’efforts en direction des demandeurs d'emploi, l’Unedic

aussi, l'Etat y contribue également. Mais des difficultés subsistent parce que ce droit,

que tout le monde s’accorde à reconnaître comme nécessaire, devient difficile à exercer

au moment où il faut travailler ensemble, en partenariat, et bien souvent, les logiques

financières ne permettent pas d'aboutir.

Nous essayons de travailler avec certaines régions. Par exemple actuellement en PACA,

nous conduisons une expérience pour des travailleurs saisonniers du tourisme, secteur

qui manque de main d’œuvre qualifiée. Parfois cette main d’œuvre saisonnière

souhaiterait rester dans cette branche, mais elle ne le fait pas, faute d’une qualification

reconnue. Petit à petit, dans la profession, le niveau général de compétence est tiré vers

le bas. Comment faire en sorte qu’entre deux saisons, les personnes puissent se former ?

L’idée paraît bonne, encore faut-il qu’on mêle des financements du conseil régional,

peut-être du Copacif (pour des congés individuels de formation), de l'Etat. Et

immédiatement on butte sur d’énormes difficultés administratives pour mettre en place

ce dispositif, qui paraît pourtant simple et de bon sens.

Nous avons avancé vers ce droit individuel mais nous n’y avancerons pas tout seuls

parce qu’une des clefs de ce dossier est détenue par les partenaires sociaux qui doivent

ouvrir prochainement une négociation dans le cadre de la refondation sociale souhaitée

Page 299: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 299

par le Medef. Bien entendu, l’ouverture de cette négociation est elle-même liée à la

conclusion du dossier de l'Unedic. Comment veut-on revoir l’équilibre qui s’est

construit depuis les années 70 (le plan de formation, le CIF, …) pour mettre en place ce

droit individuel ?

Quelle politique pour développer les NTIC ?

Ce grand chantier ne nous empêche pas de travailler sur des plus petits mais qui sont

essentiels pour les actifs, les demandeurs d'emploi et les entreprises. Trois de ces sujets

par exemple ont été abordés lors des groupes de travail dont Nicole Péry a souhaité la

constitution l’an dernier autour du thème de l’offre de formation, de sa qualité, de sa

transformation. Trois groupes ont travaillé dont l'un sur la commande publique en

matière de formation, un autre sur les NTIC - je constate d’ailleurs que les réflexions de

ce groupe rejoignent très fortement ce qui s’est dit dans votre université - et un

troisième sur la qualité de l’offre de formation en tant que telle. Quelles procédures pour

améliorer cette qualité à travers tous les dispositifs existants déjà : les normes mais aussi

probablement les démarches de certification.

Les conclusions principales de ces trois groupes sont connues. Un certain nombre de

propositions sont aujourd’hui sur la table. Le 12 octobre prochain, Nicole Péry

rassemblera à nouveau les personnes qui ont participé à ces groupes de travail et devrait

décider que tel point devrait donner lieu assez rapidement à une modification

réglementaire, que sur tel autre, nous devons concevoir une politique en commun, et

que sur tel autre encore, il faut être prudent et continuer à réfléchir ensemble, etc.

Pour les NTIC par exemple, faut-il avoir une politique de soutien public essentiellement

tournée vers l’accès aux NTIC, en favorisant la mise à disposition des outils, en

familiarisant les individus avec des procédures comme l’accès à Internet ou faut-il

mettre l’accent sur la question de la construction par une offre publique ou privée, des

contenus, qui sont encore d'une très grande pauvreté. Aujourd’hui, nous sommes

directement confrontés à cette question-là. Si nous voulons éviter d’être envahis par les

produits venant du monde entier, si nous voulons respecter nos identités culturelles à

travers nos propres produits, il importe que nous mettions nos forces en commun. Je ne

suis pas sûr d’ailleurs que les pouvoirs publics doivent se prononcer pour une politique

de soutien financier massif. Des consortiums peuvent aussi se créer ; des universités le

Page 300: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 300

font, de grands établissements publics comme le CNED, le CNAM, l’AFPA essaient

d’unir leurs forces. Bien entendu il faut le faire dans un esprit là encore de partenariat et

de concertation avec les autres grands acteurs que sont notamment les conseils

régionaux pour favoriser un contenu de qualité et un contenu qui ne consiste pas

seulement à rendre accessible un cours magistral par Internet ou à le mettre sous forme

d’images de synthèse.

Un GIP pour mieux lutter contre l'illetttrisme

Et puis enfin, puisqu’il en a été longuement question, je voudrais aussi signaler que le

secrétariat d’Etat n’est pas restée inactif dans le domaine de la lutte contre l’illettrisme.

Le GPLI qui a porté ce sujet à bout de bras pendant de longues années - y compris

pendant certaines périodes où l’attention des politiques faiblissait un peu – va être

remplacé par l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme qui sera une structure

beaucoup mieux assise institutionnellement. Ce GIP (groupement d'intérêt public)

associera les principaux acteurs et s'attachera à organiser un redéploiement des moyens

et surtout des formes d'échanges, de partenariat et de concertation. Ce sera aussi un lieu

de capitalisation. Vous avez évoqué des expériences conduites dans vos propres régions

en matière de lutte contre l’illettrisme, vous avez développé vos propres outils, il

importe que tous les outils, où qu’ils apparaissent, puissent être évalués, confrontés et

qu’on ne réinvente pas dans l’ensemble du territoire ce que les autres ont déjà fait, mais

qu’au contraire on réalise une mise en commun. C’est une tâche absolument urgente à

laquelle Mme Marie-Thérèse Geffroy, la future directrice du groupement d’intérêt

public s’attachera certainement avec ardeur et je pense qu’elle aura d’autant plus à cœur

de faire participer les collectivités territoriales à ces travaux qu’elle-même est aussi une

élue locale et qu’elle a présidé pendant longtemps le comité de coordination des

programmes régionaux d’apprentissage et de formation professionnelle continue.

Voilà donc un panorama probablement un peu trop succint de ce qui est en cours dans le

processus de réforme. Souvenez-vous aussi qu’il est accompagné par une volonté

d’expérimentation très forte. Quand Nicole Péry a lancé son appel à l’expérimentation,

il a été largement entendu. Nous aurons signé, je pense, au début de l’année prochaine,

une vingtaine de protocoles d’expérimentation dont la majorité sont des protocoles

Page 301: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 301

conclus avec des conseils régionaux qui ont montré leur souci d’anticiper la réforme et

de montrer, que sans attendre nécessairement les textes, il était déjà possible de

travailler dans l’esprit nouveau que nous souhaitons.

Nous réfléchissons à des questions de fond comme par exemple celle de l’orientation

dont il a été longuement question ici. Il ne s’agit pas simplement de former mais aussi

d’aider de plus en plus les individus à construire un parcours qui les accueille, qui peut

prescrire non seulement la formation elle-même mais aussi des prestations du type bilan

de compétences, etc. Tout cela suppose aussi une mise en commun. Il est hors de

question de dire qu’il y ait le service public de l’emploi d’un côté et puis les structures

des conseils régionaux de l’autre et qui s’ignorent réciproquement. Il faut apprendre à

travailler ensemble sur des plateformes de service, comme cela se fait déjà dans

certaines régions. Un des protocoles d’expérimentation a été conclu avec le Conseil

régional de la Réunion et il met parfaitement en avant cette question de l’accueil, de la

mise en réseau des structures d’information et d’orientation et de prescription de

formation.

Définir des objectifs européens pour la formation

Nicole Péry a pris aussi des initiatives au niveau européen. Un prochain séminaire se

tiendra à Biarritz en décembre prochain avec nos collègues de l’ensemble des pays

européens. Il s’agit non pas de se congratuler mais de confronter nos expériences, de

définir en commun les objectifs pour l’ensemble de l’union européenne en matière de

formation tout au long de la vie, sachant que l’histoire de nos systèmes de formation est

très différente d’un pays à l’autre mais qu’en même temps nous sommes confrontés aux

mêmes défis. Peut-on faire de l'amélioration du taux d'accès des salariés et des

demandeurs d'emploi à la formation continue un objectif commun à l’ensemble des pays

européens comme on l’a fait dans d’autres domaines, comme l'emploi par exemple.

Un mémorandum préparé par la Commission sur ce thème de la formation tout au long

de la vie sera présenté à Biarritz. Il s'agit à la fois d'un enjeu central pour la construction

de l’Europe sociale et en même temps d'un enjeu décisif du point de vue des

performances économiques de l’union européenne.

Page 302: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 302

Favoriser l'égalité d'accès au savoir et à la culture

Le secrétariat d’Etat n’a pas la prétention de tout régir mais notre rôle dans le cadre de

nos institutions, consiste à faire en sorte que les règles du jeu soient claires pour tous, et

qu'à travers toutes les initiatives qui se prennent, tous les degrés de latitude laissés aux

acteurs, un certain nombre de préoccupations fondamentales demeurent. Je pense en

particulier à celle de l’égalité qui est une thématique extrêmement importante en matière

de formation professionnelle.

La collectivité fait des investissements considérables dans notre pays en matière de

formation initiale comme en matière de formation continue. C'est un des principes

fondamentaux de notre République que celui de l’égalité des citoyens. Et existe-t-il

aujourd’hui une composante plus importante pour aujourd’hui et pour demain que

l’accès de tous au savoir et à la culture ?

Vaste chantier, auquel chacun d’entre nous au niveau qui est le sien, acceptera de

contribuer pour rendre concret, pour chacun et en particulier pour les plus fragiles, la

notion de formation tout au long de la vie.

Je vous remercie.

Page 303: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 303

DébatsDébatsDébatsDébats

MARTINIQUE : Mme Chang Hua Numeric, Directrice adjointe de l’ANPE

Je voulais remercier les partenaires guyanais, à la fois pour la qualité de l’accueil,

l’organisation générale des travaux et pour effectivement le fait un peu militant je pense

qui a prévalu à l’organisation de cette première université, ici en Guyane. Ce que je

retiens donc de ces journées, c’est le rapprochement des hommes et des femmes qui

travaillent dans ce secteur. Je crois qu’on a ouvert des pistes dont on n’a pas

nécessairement la solution et il nous appartient aujourd’hui, chacun dans nos régions, de

reprendre celles qui ont été lancées, de les faire vivre, de les faire évoluer et de les

transformer en projets et en actions. Il faut arrêter de nous lamenter. Aujourd’hui,

pendant ces 3 jours, on a engagé les débats et c’est ce qui me paraît intéressant. Encore

une fois des passerelles ont pu s’établir entre des hommes et des femmes d’horizons

différents, de régions différentes et c’est vraisemblablement le plus important. Je tenais

donc à vous remercier tous.

MARTINIQUE : Mme Lucienne de Montaigne, Déléguée académique à la formation

continue

Bien entendu, je souscris totalement à l’analyse que vient de faire l’intervenante

précédente, dans la mesure où la confrontation des expériences et puis les contacts que

nous avons pu nouer seront, à mon avis, déterminants dans l’avenir de la formation

professionnelle dans nos régions respectives.

GUYANE : M. Serge Kramer, Directeur du Centre régional de psychologie du travail

de l’AFPA

Je crois qu’il faut revenir sur l’orientation. On peut parler de formation des jeunes,

mais je pense que les ROM ne pourront pas faire l’économie d’un travail sur

l’orientation - pas seulement celle des jeunes - et d’un travail sur le projet. Cette

réflexion devra s’attacher à l’orientation de salariés actuels, ou d’adultes ne travaillant

pas, et qui ont besoin d’un travail sur le développement de carrière, adapté justement à

des problématiques de développement local. C’est aussi pour nous, techniciens, un

Page 304: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 304

challenge technique hyper appétitif. Des travaux commencent justement à se développer

entre l’AFPA Guyane et la région à ce sujet.

On parlait hier, de cohésion sociale. Ce double travail doit se faire à chaque étape :

orientation, formation, insertion, pour qu’à travers la famille, à travers l’inter

génération, des liens se retrouvent entre jeunes et adultes, permettant un développement

local plus cohérent et plus construit. Il faut développer un dispositif d’excellence en

matière d’orientation collective et individuelle des jeunes et des adultes et en matière

d’ingénierie pédagogique, notamment pour lutter contre l’illettrisme.

Il faut donner les moyens aux organismes de formation d’avoir les compétences

extraordinaires que va demander ce challenge de formation. On demande aux

organismes de formation des ROM, de travailler sur un public entre guillemets normal

ou standardisé à l’européenne, alors qu’ils s’adressent à un public qui a un passif

historique, psychologique et institutionnel (non-réponse éducative préalable de

l’Education nationale). Il faut pouvoir combler ces écarts avec des méthodologies et des

outils de très haute qualité. Ces enjeux là doivent véritablement être pris en compte, aux

niveaux politique et financier, par les ROM. Il ne s’agit pas de répondre en qualité

moyenne, soyons, comme le Président Karam l’a dit, je crois, innovants. A travers nos

décideurs et nos organismes de formation, nous devons être fiers de développer quelque

chose qui sera, pour une fois peut-être, une référence au niveau national, voire

international, parce que nous avons une ressource extraordinaire qui est notre jeunesse

alors que l’Europe vieillit.

En dernier lieu, le troisième pôle après l’orientation, la formation est le pôle de

l’insertion. Nous avons effectué des travaux en commun avec la région et d’autres

organismes en Guyane en mars-avril sur l’insertion des jeunes. Nous avons ainsi pris

conscience que de nouveaux métiers doivent apparaître. On ne peut pas demander à des

formateurs d’être aussi des conseillers et des accompagnateurs de l’insertion sociale et

professionnelle. De nouvelles ingénieries, de nouvelles formations à des métiers

nouveaux doivent être mises en place dans nos régions, qui ne peuvent s’appuyer sur

les standards habituels de l’insertion des jeunes et des adultes. Il faut développer des

pratiques, là encore d’excellence, par rapport à ce que peut être un accompagnement en

insertion sociale et professionnelle dans nos ROM, avec tout ce que cela demandera

d’innovation, de dynamisation et de volonté à faire et à faire bien.

Page 305: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 305

Et je voudrais terminer en rappelant qu’à la différence peut-être de pratiques

commerciales de certains organismes de formation, en Guyane, nous avons besoin

d’organismes de formation ayant un sens messianique. Pour mener à bien notre

ambition de développement des hommes, nous avons tous ici, les techniciens, besoin de

compétences et de moyens financiers. Il faut permettre à ceux qui en ont envie de

développer leur région, de former les habitants de leur région, jeunes, adultes, travaillant

ou ne travaillant pas. Nous avons besoin de politiques pour nous accompagner par

rapport à l’enjeu exceptionnel que nous avons. Merci.

MARTINIQUE : un intervenant dans la salle

L’expérience sur l’orientation en Martinique est déjà centrée sur l’orientation des

adultes, demandeurs d’emploi et salariés. C’est un travail d’ingénierie qui est fait avec

l’aide du centre de psychologie du travail, mais en direction des organismes de

formation. Donc c’est déjà un enjeu pour la Martinique et cela depuis bientôt deux ans.

D’abord orientation, évaluation et aide à la réalisation du projet de vie.

GUYANE : Mme Cécile Minne Ebelle Dim, Directrice du CFA

Je voudrais revenir sur l’orientation des jeunes, au moment où ils entrent en formation.

Dans l’atelier "Formation en alternance et apprentissage", nous avons insisté sur tous les

dispositifs qui pouvaient être mis en amont de l’entrée du jeune en formation. Nous

avons particulièrement parlé des préparations à l’apprentissage, quels que soient leur

forme, leur intitulé, tout ce qui relève du préapprentissage et qui prévoit un

positionnement métier, une construction du projet professionnel et également une

socialisation du jeune.

Nous avons également insisté sur la mise en place des CAF (Centres d’aide à la

formation) qui proposent un volet information aux entreprises qui vont accueillir les

jeunes, mais aussi un volet d’orientation, d’accueil et d’orientation des jeunes. Il

faudrait insister sur la façon dont est donnée l’information sur la formation

professionnelle, au-delà de l’orientation vers l’apprentissage ou les formations alternées.

On peut regretter que souvent, cette information ne soit donnée qu’aux publics qui sont

déjà avérés en difficulté, ce qui ne permet pas de revaloriser l’image de ces formations.

Page 306: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 306

Peut-être faudrait-il envisager des informations qui soient globales, au même titre que

tous les circuits de formation proposés aux jeunes, à quelque niveau que ce soit.

MARTINIQUE : M. Patrick Laport, Directeur du CFA

Je voudrais compléter le propos de Mme Minne Ebelle Din sur l’orientation. Dans

certains cas, nous imaginons des dispositifs innovants, par exemple l’action Immersion

bilan de compétences (cf. article sur le spécial DOM du Centre INFFO), qui ne viennent

pas de Paris et nous avons du mal à ancrer le dispositif dans nos pratiques. Cette action

a été mise en place il y a quelques années, fortement soutenue par le Conseil régional et

finalement, au-delà de l’expérimentation, au-delà de la validation, cette action ne peut

pas continuer à se développer. Je crois que, lorsque nous imaginons quelque chose, nous

devons nous efforcer de le continuer, de le pérenniser et de l’étendre à l’ensemble de la

région. C’est le cas de la Martinique, mais ce dispositif pourrait éventuellement trouver

un relais efficace au niveau des autres ROM, parce que nous avons pu vérifier sa

pertinence. La difficulté que nous avons, j’insiste, c’est probablement tout simplement

parce que ce n’est pas venu d’ailleurs, ce n’est pas venu de Paris, même si c’est un peu

provocateur de dire cela. Donc là aussi, je lance cet appel pour que dorénavant, nous

puissions imaginer des choses, mais aussi pérenniser les choses que nous imaginons.

GUADELOUPE : Mme Marie-Laure Laquitaine, Chargée de mission au FSE

On a beaucoup parlé de la formation, du développement local mais très peu de

financement. Et c’est vrai qu’on ne peut parler de FP sans parler du FSE qui est un

outil vraiment incontournable dans la réalisation de projets.

Je vais être brève. Nous sommes dans une nouvelle programmation 2000–2006, les

DOCUP n’ont pas encore été validés par Bruxelles et je souhaiterais dire que nous

attendons des projets innovants, des projets qui respectent les critères d’éligibilité de la

Commission européenne et qui respectent aussi les priorités, c’est-à-dire l’égalité

hommes-femmes. Quand vous présentez des dossiers, pensez à préciser effectivement

pour chaque action de formation, chaque projet, la participation des femmes. Allons

plus loin : si on met en place une action de formation, il faut impérativement que les

femmes puissent se déplacer pour y participer. C’est vraiment une priorité. La garde

Page 307: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 307

d’enfants ne doit plus être un problème et les femmes doivent pouvoir suivre des actions

de formation. Je voulais mettre l’accent sur ces différents points.

Autre priorité : toutes les formations qui entreraient aussi dans le cadre d’initiatives

locales. Je parle de la Guadeloupe, où l’on vous aide à monter vos projets pour qu’il n’y

ait pas d’obstacle. Puisque tout le monde dit que faire un dossier FSE, c’est très

compliqué, nous sommes là pour vous aider et assurer une assistance technique.

Merci.

GUYANE : M. Rémy-Louis Budoc, Vice-Président du Conseil régional

Je profite de la présence des responsables du Ministère de l’Emploi pour poser une

question. Sur la représentation Antilles Guyane au niveau de la FPC, il semble qu’il

y ait un délégué, nommé par décret, basé aux Antilles. On m’a dit qu’il y avait, en

Guyane, un correspondant, qui serait à la DTEFP. Quel est le rôle de cette personne et

quels sont les contacts qu’on peut avoir avec elle ? Dans la pratique, pourrait-on mener

des partenariats qui soient cohérents et qui correspondent réellement aux enjeux dont

vous avez effectivement parlé de manière très précise et détaillé durant ces journées. Je

vous remercie.

GUADELOUPE : M. Berthelot, Président de l'AGEFOS-PME

Ma question s’adresse directement aux représentants des Régions. Quelles sont les

dispositions qu’ils pensent prendre, après cette Université ? Y aura-t-il la mise en place

d’un comité de suivi de cette université ? Je sais très bien que les Régions ont déjà

défini leur politique en matière de FP. Pourtant, ces jours-ci, nous avons travaillé

énormément et je voudrais bien savoir quel sera le suivi par rapport à ces universités ?

Quelle sera leur périodicité ? À quel moment en ferons-nous le bilan ?

Réponse d’un élu régional

Je vais apporter une réponse à M. Berthelot de l’AGEFOS-PME. Le premier point porte

sur la périodicité et la pérennisation de l’université. On l’a dit lundi, nous, les

régions souhaitons que ce soit pérenne. Je crois que c’est acté entre les 4 Régions. Le

lieu sera annoncé, par le Président Karam, au moment de la clôture. Ce sera tous les 2

ans.

Page 308: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 308

Sur le suivi, c’est vrai que nous, au niveau des Régions, nous avons l’avantage de nous

retrouver dans le Comité de coordination où nous avons constitué le groupe de l’outre-

mer. Ce que j’aurais tendance à proposer, sans avoir consulté les CARIF qui sont dans

nos régions des centres de ressources, c’est qu’ils puissent être le lieu d’échanges

d’informations. J’aurais tendance à dire aussi aux institutions et organismes type

AGEFOS-PME, AFPA d’avoir d’eux-mêmes des relations. Il me semble que la

coopération interrégionale aussi passe la concertation entre les différents organismes.

GUADELOUPE : M. Jean-Claude Maccès, Directeur du CARIF-OREF

Je voudrais compléter la réponse pour dire qu’au niveau de la région Guadeloupe, et je

pense que ce sera la même chose pour l’ensemble des collectivités régionales après cette

université, il nous appartient de prendre acte de la synthèse de toutes les expériences qui

ont été si bien exprimées au niveau de cette université. Et aussi de la proposer à tous nos

partenaires puisqu’il y aura une diffusion. Il y aura des séances de travail avec nos

partenaires pour qu’on soit conscients des orientations arrêtées et en fonction des

problématiques de chacun, nous allons peut-être redéfinir les grandes orientations de la

formation. Est-ce que ce qui est arrêté au niveau des PRDF, ce qui est déjà en cours,

pourrait subir un certain nombre de modifications ? La périodicité des PRDF est de 3

ans. Nous allons peut-être revoir ensemble un certain nombre d’axes arrêtés, à partir des

expériences qui vont être proposées ici. Je pense que nous pourrions, au niveau de la

collectivité, nous engager à faire de l’information dans un premier temps auprès des

différents partenaires et discuter encore à partir des documents de synthèse que nous

attendons avec impatience. Merci.

Page 309: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 309

Index alphabétique des intervenants

GUADELOUPE :M. Berthelot, Président de l'AGEFOS-PMEM. Daniel Cucheval, Directeur adjoint DTEFPM. Francis Hervé, Président du FONGECIFM. Nicolas Kezie, Université Antilles-Guyane, Chargé des relationsuniversité/entrepriseMme Marie-Laure Laquitaine, Chargée de mission au FSEM. Jean-Claude Maccès, Directeur du CARIF-OREFM. Raymond Pentier, CESR (Conseil économique et social régional)Mme Carole Riga, Déléguée régionale à l'ingénierie de formation, rattachée à la DAF(Direction de l'agriculture et de la Forêt)M Hubert Salcède, Directeur de la formation professionnelle du Conseil régionalM. Christian Thénard, Vice-Président du Conseil régional

GUYANE :M. Michel Ardès, société IFDTMme Andrée Baboul, Vice-Présidente du Conseil régionalMme Chantal Berthelot, Vice-Présidente du Conseil régional, déléguée à la formationM. Paulin Bruné, Vice-Président du Conseil régionalM. Rémy-Louis Budoc, Vice-Président du Conseil régionalM. José Euryale, Inspecteur de l’Éducation nationaleMme Florence Foury, Chargée de mission DPLIM. Gabriele, Directeur général adjoint des services du Conseil régionalM. Luc Germain, JournalisteM. Pascal Gombauld, APFRMme Joseline Heder-Mormon, CCIGM. Antoine Karam, Président du Conseil régionalM. Serge Kramer, Directeur du Centre régional de psychologie du travail de l’AFPAM. Claude Lau-Pau, Chargé de mission à l'ANPEMme Line Lican, Directrice du CIO (Centre d'information et d'orientation) de GuyaneM. Michel Manguer, Direction du travailMme Cécile Minne Ebelle Dim, Directrice du CFAM. Jean-Michel Nicolas, Directeur de l'AFPAM. Jean-Raymond Passart, Formateur à l'AFPAMme Joëlle Prévot-Madère, Vice-Présidente de la Chambre de commerce etd'industrie (CCI)M. Radjou, Directeur de IRIG DEFIS, CARIFMme Marie-Danièle Rino, Chargée d'étude au CARIFM. Gabriel Serville, Président du GRETAMme Sandra Trochimara, Directrice de la Mission locale

Page 310: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 310

MARTINIQUE :Mme Brafine, Formatrice à la Cellule emploi jeune du RectoratMme Elisabeth Caristan, Chargée de mission CARIFM. Christian Cayol, Président de la Chambre des métiersMme Maryse Chenière, Responsable formation à l'AASM (Association d'actionsociale de Martinique)Mme Lucienne de Montaigne, Déléguée académique à la formation continueMme Jacqueline Guillot, Conseillère formation continue, DAFCOM. Alain Hierso, CESR (Conseil économique et social régional)Mme Chang Hua Numeric, Directrice adjointe de l’ANPEM. Patrick Laport, Directeur du CFAMme Leufroy, Conseillère en formation continueM. Raymond Marie, CESR (Conseil économique et social régional)M. Daniel Marie-Sainte, Vice-Président du Conseil régionalM. Marie-Séraline, Directeur de l’IPFEPMme Mestraud, AFPAM. Francis Riffaux, Directeur de l'AFPAMme Myriam Samathay, Secrétaire générale de l'AGEFMA

MAYOTTE :Mme Echati Abdallah, Directrice de la Mission locale

METROPOLE :M. Michel Abhervé, Président du CARIF Ile-de-FranceMme Maryse Chaix, Sous-Directeur DGEFPMme Patricia Gautier-Moulin, Responsable de l'Observatoire au Centre INFFOMme Valérie Hellouin, Chargée d'études au Centre INFFOM. Serge Hermine, Directeur du CIDO (Centre d'information, de documentation etd'orientation de l'université René Descarte- Paris V)M. Patrick Kessel, Directeur du Centre INFFOMme Dominique Leccia, Conseillère technique au Comité de coordination desprogrammes régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continueM. Aris Margos, Commission européenneM. Vincent Merle, Directeur de cabinet de Mme Nicole Péry, Secrétaire d'État auxDroits des Femmes et à la Formation professionnelleM. Gabriel Mignot, Président du Centre INFFOM. Christian Paul, Secrétaire d’État à l’outre-merMme George Pau-Langevin, Directrice générale de l'ANTM. Noël Terrot, Directeur du CUIDEP

REUNION :M. Gérard Arzilli, Directeur général adjoint de la CCIM. Michel Dejean, Président du CARIF-OREFM. Michel Ducotterd, Chargé de mission à l'ARVISE (association de réseau ANACT)Mme Marie-Andrée Jaubert, Vice-Présidente du Conseil régionalM. Guy Lemarie, Délégué à l'ANPEM. George-Marie Lépinay, CESR (Conseil économique et social régional)

Page 311: PREMIERE UNIVERSITE DE LA FORMATION ... UNIVERSITE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LES REGIONS D’OUTRE-MER 2, 3 et 4 octobre 2000 à Cayenne, Guyane La formation professionnelle

Université de la formation professionnelle dans les ROM - Centre INFFO - page 311

M. Fabrice Payet, Directeur de l'AFPAM. David Rivière, Chef de projet RESINTERM. Bernard Sabban, CSFOR (Chambre syndicale des organismes de formation)M. Alain Séraphine, Président de l'ILOI (Institut de l'image de l'Océan indien)M. Alix Sery, Directeur DDTEFPM. Paul Soupe, Chargé de mission au CARIF-OREFM. Yves Zoogones, Directeur de l'AREP (Association réunionnaise d'éducationpopulaire)