PREMIER CONGRES du RESEAU ASIE Enseignants, …

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PREMIER CONGRES du RESEAU ASIE Enseignants, Chercheurs, Experts francophones sur l’Asie orientale, centrale, méridionale, péninsulaire et insulaire, 24-25 sept 2003 au Centre de Conférences Internationales du Ministère des Affaires Etrangères Comité scientifique : 1. Evelyne DOURILLE-FEER, économie , Asie orientale 2. Vincent FOURNIAU, histoire, Asie centrale 3. Pierre GENTELLE géographie, Chine 4. Roberte HAMAYON, ethno - anthropologie, sciences religieuses, Mongolie-Sibérie 5. Christian HENRIOT, histoire, Asie orientale 6. Marc HUMBERT, économie, Asie Orientale 7. Marc KALINOWSKI, sinologie classique 8. François MACE, littérature, Japon 9. Denis MATRINGE, littérature, Inde, Asie du Sud 10. Michel PICARD, sociologie, ethnologie, Asie du Sud-Est insulaire 11. Jean-Luc RACINE, géographie, géo - politique, géo - économique, Inde, Pakistan, Asie du Sud 12. Marielle SANTONI, archéologie, Asie de Sud-Est, Pakistan 13. Eric SEIZELET, droit, sciences politiques, Japon, 14. Serge TCHERKEZOFF, ethnologie, Océanie 15. Hugues TERTRAIS, histoire, Asie du Sud-Est continentale Comité d’organisation : - Jean-François HUCHET, économie, Université Rennes 2 - Claude MEYER, économie, Université Paris 1 Panthéon - Sorbonne - Jean-François SABOURET, sociologie, CNRS-Université Paris V, directeur du Réseau Asie - Hugues TERTRAIS, histoire, Université Paris 1 Panthéon – Sorbonne - Jean-Claude THIVOLLE, chargé de mission Europe-Asie, Maison des Sciences de l’Homme - Jeanne GOFFINET, chargée de mission, secrétaire générale du Réseau Asie, Maison des Sciences de l’Homme Programme en français_1 er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.1

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PREMIER CONGRES du RESEAU ASIE

Enseignants, Chercheurs, Experts francophones sur l’Asie orientale, centrale, méridionale, péninsulaire et insulaire,

24-25 sept 2003 au Centre de Conférences Internationales du Ministère des Affaires Etrangères

Comité scientifique : 1. Evelyne DOURILLE-FEER, économie , Asie orientale 2. Vincent FOURNIAU, histoire, Asie centrale 3. Pierre GENTELLE géographie, Chine 4. Roberte HAMAYON, ethno - anthropologie, sciences religieuses, Mongolie-Sibérie 5. Christian HENRIOT, histoire, Asie orientale 6. Marc HUMBERT, économie, Asie Orientale 7. Marc KALINOWSKI, sinologie classique 8. François MACE, littérature, Japon 9. Denis MATRINGE, littérature, Inde, Asie du Sud 10. Michel PICARD, sociologie, ethnologie, Asie du Sud-Est insulaire 11. Jean-Luc RACINE, géographie, géo - politique, géo - économique, Inde, Pakistan, Asie du Sud 12. Marielle SANTONI, archéologie, Asie de Sud-Est, Pakistan 13. Eric SEIZELET, droit, sciences politiques, Japon, 14. Serge TCHERKEZOFF, ethnologie, Océanie 15. Hugues TERTRAIS, histoire, Asie du Sud-Est continentale Comité d’organisation :

- Jean-François HUCHET, économie, Université Rennes 2 - Claude MEYER, économie, Université Paris 1 Panthéon - Sorbonne - Jean-François SABOURET, sociologie, CNRS-Université Paris V, directeur du Réseau Asie - Hugues TERTRAIS, histoire, Université Paris 1 Panthéon – Sorbonne - Jean-Claude THIVOLLE, chargé de mission Europe-Asie, Maison des Sciences de l’Homme - Jeanne GOFFINET, chargée de mission, secrétaire générale du Réseau Asie, Maison des Sciences de

l’Homme

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Programme scientifique

11 thématiques

I - Histoire des sciences et des techniques : Ateliers 1-3 II - Pouvoir et société : Ateliers 4-7 III - Art : Ateliers 8-9 IV - Contestation et violences : Ateliers 10-13 V - Rapports au corps et à l’environnement : Ateliers 14-19 VI - Politique et religion : Ateliers 20-22 VII - Tensions internationales et équilibres régionaux : Ateliers 23-29 VIII - Mondialisation et systèmes économiques : Ateliers 30-35 IX - Rapports à l’histoire : Ateliers 36-39 X - Transformations urbaines : Ateliers 40-44 XI - Langues, éducation : Ateliers 45-46

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11 THEMATIQUES 2

I- HISTOIRE DES SCIENCES ET DES TECHNIQUES 10

1. L'HISTOIRE ET L'ANTHROPOLOGIE DES TECHNIQUES ORDINAIRES DANS LE MONDE CHINOIS 10

Coordinatrices : 10

- Françoise SABBAN, Directrice d'études à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), Centre d'études sur la Chine

moderne et contemporaine (CECMC, UMR 8561) 10

- Caroline BODOLEC, Post-doc., Centre National de la Recherche Scientifique, Centre d'Etudes sur la Chine Moderne et

Contemporaine (UMR 8561 CECMC-EHESS) 10

Intervenants : MAU Chuan-Hui, Camille SCHMITT, ZHAO Bing, Stéphane VACCA 10

2. HISTOIRE DES SCIENCES EN ASIE 12

Coordinatrice : Karine CHEMLA, Directeur de recherche, Recherches Epistémologiques et Historiques sur les Sciences Exactes et

les Institutions Scientifiques (REHSEIS, CNRS-Université Paris 7) 12

Intervenants : Annick HORIUCHI, Florence BRETELLE-ESTABLET, Agathe KELLER 12

3. LES CONTRIBUTIONS CONJOINTES DES TECHNIQUES DE LA REPRESENTATION ET DES SCIENCES

HUMAINES A L’ETUDE DE LA CHINE ET DE L’ASIE CENTRALE 14

Coordinateur : Philippe FORET, Fonds national suisse de la recherche scientifique et Ecole polytechnique fédérale de Zurich 14

Intervenants : Svetlana GORSCHENINA, Andreas KAPLONY 14

II- POUVOIR ET SOCIETE 15

4. ‘SUPPLICE CHINOIS’ : APPROCHE METHODOLOGIQUE PLURIDISCIPLINAIRE D'UNE REPRESENTATION

EXOTIQUE 15

Coordinatrice : Muriel DETRIE, Littérature comparée, Université de la Sorbonne Nouvelle (Univ. Paris III), responsable de

l'équipe de recherche ‘Littérature et Extrême-Orient’ (CERC Paris III-CRLC Paris IV) 15

Intervenants : Jérôme BOURGON, Claire MARGAT, Maria PIA DI BELLA 15

5. LES ÉLITES DANS LES SOCIÉTÉS ASIATIQUES CONTEMPORAINES : RENOUVELLEMENT ET

RECONVERSIONS 17

Coordinatrice : Marie-Orange RIVE-LASAN, doctorante, Centre de Recherches sur la Corée (CRC-EHESS), membre du

Laboratoire Études coréennes (CNRS) 17

Intervenants : Gilles GUIHEUX, Mathieu SALOMON, Aurore MERLE, Romain BERTRAND 17

6. POUVOIR ET SOCIETE DANS LES PAYS COMMUNISTES D'ASIE 19

Coordinateur : Jean-Louis MARGOLIN, Maître de Conférences en Histoire, Université de Provence; Chercheur, IRSEA/CNRS 19

Intervenants : Jean-Philippe BEJA, Michel BONNIN, Pierre RIGOULOT 19

7. DROITS ET INSTITUTIONS EN ASIE: GLOBALISATION ET DEMOCRATISATION 21

Coordinateurs : 21

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- Jean-Pierre CABESTAN, Directeur du Centre d'Etudes Français sur la Chine contemporaine (CEFC) 21

- Leïla CHOUKROUNE, Doctorante en droit international, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I) 21

Intervenants : Mesmin Saint-Hubert, Eric Seizelet 21

III- ART 25

8. MUSIQUE ET RITUEL EN ASIE 25

Coordinateur : François PICARD, professeur d'ethnomusicologie, Chine (la fête du Sacré Coeur de Jésus en l¹église du Beitang,

Pékin, 1772-2002), responsable du DEA Histoire de la musique et musicologie, Université Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV) 25

Intervenants : Fabrice CONTRI, Véronique JACOB DE LAVENERE, Bruno MESSINA, William TALOTTE, Laurence

QUICHAUD 25

9. ASPECTS DE LA RECHERCHE EN ARCHEOLOGIE ET EN HISTOIRE DE L'ART EN INDE ET EN ASIE DU SUD-

EST 28

Coordinateur : Michel JACQ-HERGOUALC’H, Directeur de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (Section 33,

CNRS), Archéologue et historien de l'art de l'Inde et de l'Asie du Sud-Est indianisée 28

Intervenants: Anne-May CHEW, Hedwige MULTZER O’NAGHTEN, Bérénice BELLINA, Catherine RAYMOND 28

IV- CONTESTATION ET VIOLENCES 30

10. INEGALITES, SOLIDARITES ET VIOLENCES DANS LES VILLES ASIATIQUES 30

Coordinatrice : Laurence ROULLEAU-BERGER, Chargée de recherches au CNRS, Groupe de recherche sur la socialisation,

Université Louis Lumière Lyon 2, Ecole Normale Supérieure Lettres et Sciences Humaines 30

Intervenants : Djallal HEUZE, MA Li, SHI Lu, Kazuhiko YATABE 30

11. ORDRE ET DESORDRES URBAINS DANS LA CHINE REPUBLICAINE 32

Coordinateur : Christian HENRIOT, Institut d’Asie Orientale (UMR 5062) ; Professeur d’Université ; Directeur Scientifique

Adjoint, Département SHS-CNRS 32

Intervenants : Aglaia DE ANGELI, Xavier PAULES 32

12. FIGURES DE LA CONTESTATION, DE L’ASIE DU SUD A L’ASIE ORIENTALE, A&B 34

PANEL A : SOCIETE CIVILE ET ESPACES DE CONTESTATION EN ASIE DU SUD 34

Coordinatrice : Aminah MOHAMMAD-ARIF, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Centre d’Etudes de l’Inde et

de l’Asie du Sud (CEIAS) 34

Intervenants : Philippe RAMIREZ, Stéphanie TAWA-LAMA, Nicolas JAOUL 34

13. FIGURES DE LA CONTESTATION, DE L’ASIE DU SUD A L’ASIE ORIENTALE : A&B 36

Panel B : LES NOUVELLES FORMES DE LA CRITIQUE SOCIALE EN ASIE DE L’EST ET DU SUD EST: ARMES DES

FAIBLES, FORTES ARMES ? 36

Coordinateur : Paul JOBIN, Maître de conférences, Université Michel de Montaigne (Univ. Bordeaux 3), chargé de cours, Institut

National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO), sociologie du Japon ; chercheur associé Institut National de la Santé et

de la Recherche Médicale - Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (INSERM-EHESS) 36

Intervenants : David MALINAS, Éric SAUTEDE, Antoine KERNEN 36

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V- RAPPORTS AU CORPS ET A L’ENVIRONNEMENT 39

14. REPRESENTATIONS DU MILIEU NATUREL 39

Coordinatrice : Jane COBBI, Chargée de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Civilisation japonaise39

Intervenants : ÐINH Trong Hiêu, Sophie HOUDART, Marie-Claude MAHIAS, BUI Thi Mai, Michel GIRARD 39

15. CHAMANISMES ET GESTION DES MAUX (SIBERIE, MONGOLIE) 41

Coordinatrice : Virginie VATE, Doctorante Centre d’Etudes Mongoles et Sibériennes – EPHE Ve Section / Siberian Studies Center

– Max Planck Institute for Social Anthropology - Halle, Allemagne 41

Modératrice: Roberte HAMAYON, Directrice d’Etudes, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE) 41

Intervenants : Jean-Luc LAMBERT, Alexandra LAVRILLIER, Laetitia MERLI 41

16. POSTER : LE PORT DU SARI ET LA FEMME INDIENNE: DECODAGE D'UNE APPARENCE ET D'UNE

GESTUELLE, PARTICIPATION DANS LA CONSTRUCTION DE LA PERSONNE ET REPRESENTATIONS DU CORPS

42

Sylvie SANSEAU : doctorante en ethnologie et anthropologie sociale, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) ;

travaille sur l'Inde 42

17. MEDECINES DE CHINE, MEDECINE D'EUROPE : RENCONTRES, CONFLITS, INFLUENCES CROISEES 43

Coordinateur : Frédéric OBRINGER, chargé de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Centre d'Études

sur la Chine Moderne et Contemporaine (CECMC, UMR 8561 CNRS/EHESS) 43

Intervenants : Lucia CANDELISE, Isabelle LANDRY-DERON 43

18. CONSTITUTION DES ESPACES THERAPEUTIQUES EN ASIE DU SUD-EST. ETAT DES LIEUX, INTER-

RELATIONS ENTRE THERAPEUTES, COMPARAISON REGIONALE 45

Coordinatrice : Anne Y. GUILLOU, Docteur en ethnologie, Chargée de recherche ADDRAS, Chargée de cours, Université de

Haute Bretagne (Univ. Rennes II ) 45

Intervenants : Claire CHAUVET, Annick GUENEL, HSIEH Ting-Chih, Jean-François PAPET, Laurent PORDIE 45

19. LES PERCEPTIONS DE L'ENVIRONNEMENT CHEZ LES NOMADES ET LES SEDENTAIRES D'ASIE CENTRALE

ET ORIENTALE 47

Coordinatrice : Gaëlle LACAZE, Anthropologie aire culturelle turco-mongole (Mongolie-Kazakhstan), Centre d'Études Mongoles

et Sibériennes, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE) 47

Modérateur: Jacques LEGRAND : Professeur de langue et civilisation mongoles, (INALCO-Langues’O). 47

Intervenants : Alexandra MAROIS, Laurent QUISEFIT, Gregory DELAPLACE, Bertrand GUILLON 47

VI- POLITIQUE ET RELIGION 49

20. LIENS ENTRE LE POLITIQUE ET LE RELIGIEUX : A&B 49

A : VERS LE LIEN SYMBIOTIQUE ENTRE LE POLITIQUE ET LE RELIGIEUX 49

Coordinateurs : 49

Yannick BRUNETON, Post-doctorant, Laboratoire d’Etudes Coréennes 49

Nathalie LUCA, Chargée de recherche, Centre d’Etudes Interdisciplinaires des Faits Religieux, membre associée du Laboratoire

d’Etudes Coréennes 49

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Intervenants : Evelyne CHEREL-RIQUIER, Arnaud BROTONS, Nathalie KOUAME, Jean-Pierre BERTHON 49

21. LIENS ENTRE LE POLITIQUE ET LE RELIGIEUX : A&B 51

B : VERS UN LIEN D’EXCLUSION ENTRE LE POLITIQUE ET LE RELIGIEUX 51

Coordinatrice : Nathalie LUCA, Chargée de recherche, Centre d’Etudes Interdisciplinaires des Faits Religieux, membre associée du

Laboratoire d’Etudes Coréennes 51

Intervenants : Fabienne DUTEIL-OGATA, Vincent GOOSSAERT, Jérémy JAMMES, Charles MACODNALD 51

22. APPROCHE POLITIQUE COMPAREE DES CULTES aux DIEUX DU SOL DANS L’AIRE SINO-INDIENNE 52

Coordinateur : Grégoire SCHLEMMER, Doctorant en ethnologie, Université de Nanterre (Univ. Paris X) 52

Intervenants : Vanina BOUTE, Stéphane GROS, Emma GUEGAN, Raphaël ROUSSELEAU 52

VII - TENSIONS INTERNATIONALES ET EQUILIBRES REGIONAUX 54

23. LA QUESTION DES FRONTIERES 54

Coordinateur : Jean-Luc RACINE, Directeur de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Membre du

Centre d'Etudes de l'Inde et de l'Asie du Sud (CEIAS), Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) et Responsable du

Programme international d'études avancées, Maison des Sciences de l’Homme 54

Intervenants : Sébastien COLIN, Nathalie FAU, Florence TOIX, Laurence HENRY 54

Discutant: Michel BRUNEAU, Directeur de recherche au CNRS 54

24. ENJEUX GEOPOLITIQUES DANS LES MERS D'ASIE ORIENTALE 59

Coordinateur : Philippe PELLETIER, Professeur de géographie, Université Lumière (Univ. Lyon II) 59

Intervenants: LI Jin-Mieung, Eric DENECE, Eric FRECON 59

25. REFLEXIONS PLURIDISCIPLINAIRES SUR LA NOTION DE LIMITES ET FRONTIERES EN ASIE CENTRALE 61

Coordinateurs : 61

- Vincent FOURNIAU, Maître de conférences, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), ex-directeur, Institut

français d’Etudes sur l’Asie centrale (IFEAC) 61

- Catherine POUJOL, Professeur, Institut National Des Langues et Civilisations Orientales (INALCO) 61

Intervenants: Marlène LARUELLE, Isabelle OHAYON, Carole FERRET, Seïtkassym AOUELBEKOV 61

26. RELATIONS INTERNATIONALES ET INTEGRATION REGIONALE EN ASIE ORIENTALE 66

Coordinateur : Hugues TERTRAIS, Maître de conférences, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I) 66

Intervenants : Sophie BOISSEAU DU ROCHER, Stephen DUSO-BAUDUIN, Isabelle SAINT-MEZARD, Guy FAURE, Karine

DELAYE 66

27. NOUVELLES ORGANISATIONS REGIONALES EN ASIE ORIENTALE 69

Coordinatrice : Manuelle FRANCK, Maître de conférences, Institut national des Langes et Civilisations orientales (INALCO) ;

Membre du Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et le Monde austronésien (LASEMA) 69

Intervenants: 69

- Philippe PELLETIER, Professeur de géographie, Université Louis Lumière (Univ. Lyon II) 69

- Christian TAILLARD, Directeur de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Laboratoire sur l’Asie du

Sud-Est et le Monde Austronésien (LASEMA), 69

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- François DURAND-DASTES : Professeur émérite, Université Denis Diderot (Univ. Paris VII), 69

- Jean-Luc DOMENACH : Directeur de recherche, Fondation nationale des Sciences Politiques-Centre d’Etudes et de Recherches

Scientifique (FNSP-CERI) ; Responsable de l’antenne franco-chinoise de Sciences humaines et sociales de Pékin 69

Discutant: Hugues TERTRAIS, Maître de conférences, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I) ; Président de l'Association

française pour la Recherche sur l’Asie du Sud-Est (AFRASE) ; Membre du bureau de l'European Association for South-East Asian

69

28. MIGRATIONS INTERIEURES EN CHINE : DEFIS AUX INSTITUTIONS SOCIALES ET INNOVATIONS 70

Coordinatrices : 70

- Marianne BASTID, Directeur de recherche, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS) 70

- Isabelle THIREAU-MAK, Directeur de recherche, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS), Centre d’Etudes sur la

Chine moderne et contemporaine (CECMC) 70

Intervenants : Christine NGUYEN, Jacqueline NIVARD, Martine RAIBAUD, HU Xinyu, HUA Linshan 70

29. LES TRAVAILLEURS MIGRANTS EN ASIE DU SUD-EST CONTINENTALE ET INSULAIRE : ESCLAVES DU

MONDE MODERNE 72

Coordinateur : Guy LUBEIGT, Chargé de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS), Equipe PACIFICA,

Université Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV), Laboratoire PRODIG (Pôle de Recherche pour l’Organisation et la Diffusion de

l’Information géographique). 72

Intervenants : Marie-Eve BLANC, Laurence HUSSON, Grace SWE ZIN HTAIK 72

VIII- MONDIALISATION ET EVOLUTION DES SYSTEMES ECONOMIQUES 75

30. LA CRISE ASIATIQUE : LA DIVERSITE DES TRAJECTOIRES DES PAYS ASIATIQUES (Atelier AnnulE) 75

Coordinateur: Robert BOYER, Directeur de recherche, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS), Régulation,

ressources humaines et économie publique, (CEPREMAP), Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) 75

Intervenants : Sébastien LECHEVALIER, Wooseok OK, Irène HORS 75

31. OUVERTURE ECONOMIQUE ET STRATEGIES D'ENTREPRISES EN ASIE 76

Coordinateur : Gilles GUIHEUX, Chercheur, Centre d’Etudes Français sur la Chine Contemporaine - Hong Kong (CEFC-Hong

Kong) 76

Intervenants : Xavier RICHET, Joël RUET, Jean-François HUCHET, Marc HUMBERT, Marc LAUTIER, Jean ESMEIN 76

32. CRISES FINANCIERES, CONSOLIDATION BANCAIRE ET RESTRUCTURATIONS DES ENTREPRISES EN ASIE

79

Coordinateur : Christian MILELLI, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS - Forum Globalization-Innovation-Firm-

Territory - Nanterre) 79

Intervenants : Cyril ANDRIEU-LACU, Françoise NICOLAS, Anne ANDROUAIS 79

33. LES MUTATIONS DE L’APPAREIL INDUSTRIEL DES PAYS ASIATIQUES APRES LA CRISE 81

Coordinatrice : Diana HOCHRAICH, Forum Globalisation-Innovation-Firm-Territory (Forum Gift-Nanterre), Centre national de la

Recherche scientifique (CNRS) 81

Intervenants : Françoise HAY, Evelyne DOURILLE-FEER, Yveline LECLER 81

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34. MICROFINANCE ET PROBLEMATIQUE DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETE 81

Coordinatrice : Kamala MARIUS-GNANOU : Maître de conférences en géographie à l’Université de Bordeaux 3 et enseignante-

chercheure à l’UMR ADES (CNRS-Université Bordeaux3) 81

Intervenants : Jean-Michel SERVET, Isabelle GUERIN, François DOLIGEZ, Thierry PAIRAULT, Jane PALIER 81

35. GESTION DU SECTEUR PETROLIER ET INSTITUTIONS POLITIQUES, UNE ANALYSE COMPARATIVE ENTRE

LE KAZAKHSTAN ET LE VIET-NAM 84

Coordinateur : Gérard DUCHENE, Professeur, Directeur de Réformes et Ouverture des systèmes économiques post-socialistes

(ROSES), Université Panthéon-Sorbonne (Univ. ParisI) 84

Intervenants : TRAN Thi Anh Dao, CAO Xuan Dung, Ferhat ESEN, Gaël RABALLAND 84

IX- RAPPORTS A L’HISTOIRE 85

36. MEMOIRE ET IDENTITE. QUELQUES EXEMPLES EN ASIE DANS LES TEMPS MODERNES 85

Coordinateur: Jean-Louis BACQUE-GRAMONT, directeur de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS),

Centre Georges Dumézil d'Etudes Comparatives sur le Caucase 85

Intervenants : Hartmund O. ROTERMUND, Anne VERGATI, Jean CALMARD, Sabine TREBINJAC, UEHARA Mayuko 85

37. ENTRE LOYAUTE ET DELOYAUTE : LA COMPLEXITE DU CHOIX EN CONTEXTE COLONIAL EN

INDOCHINE 88

Coordinateur : Christopher E. GOSCHA, chercheur, Institut d’Asie Orientale (IAO), Maître de conférences, Université Louis

Lumière (Univ. Lyon II) 88

Intervenants : Agathe LARCHER-GOSCHA, Gilles DE GANTES, Claire TRAN THI LIEN 88

IX - RAPPORTS A L’HISTOIRE 93

39. LES MUTATIONS DE L'ETAT CHINOIS 93

Coordinateurs : 93

- Yves CHEVRIER, Directeur du Centre d’Etudes de la Chine Moderne et Contemporaine (CECMC), Ecole des Hautes Etudes en

Sciences Sociales (EHESS) 93

- Christian LAMOUROUX, Directeur d’études, Centre d’Etudes sur la Chine moderne et contemporaine (CECMC), Ecole des

Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) 93

Président de séance: Pierre-Etienne WILL, Professeur, Collège de France 93

Intervenants : Jérôme KERLOUEGAN, Luca GABBIANI, Xiaohong XIAO-PLANES, Emilie TRAN 93

X- TRANSFORMATIONS URBAINES 96

40. LES GRANDS HOTELS ET LA VILLE EN ASIE ORIENTALE 96

Coordinateurs : 96

- Valérie GELEZEAU, Maître de conférences, Université de Marne-la-Vallée 96

- Thierry SANJUAN, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I) 96

Intervenants : Nicolas FIEVE, Françoise GED, Sylvie GUICHARD-ANGUIS 96

41. VILLES, MOBILITES et NTIC, REGARDS CROISES EN INDE, CHINE ET AUSTRALIE 97

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Coordinatrice : Blandine RIPERT, ethno-géographe, Chargée de recherche, Centre d’Etudes de l’Inde et de l’Asie du Sud (CEIAS),

Equipe 'Circulation et Territoire', Centre national de la Recherche scientifique (CNRS) 97

Intervenants : Jean-François DOULET, Eric LECLERC, Patrick PONCET 97

Discutant: Frédéric LANDY 97

42. LA REFONDATION MEGAPOLITAINE AUX DEUX BOUTS DE L'ASIE 101

Coordinateur : Philippe HAERINGER, Directeur de recherche, Institut de Recherche pour le Développement (IRD), Professeur

associé, Université de Nanterre (Univ. Paris X) 101

Intervenants : CHI Faï Lam, Marie-Hélène ORSAY, NGUYEN Duc Nhuan, Laurence NGUYEN, Gholam Reza SHOKRANI,

Tazagol CHEMAGHA 101

43. DYNAMIQUES FONCIERES ET MUTATIONS URBAINES EN ASIE 103

Coordinatrice : Natacha AVELINE, chercheur, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS), Institut d'Asie Orientale

(IAO) 103

Intervenants : Marie-Hélène FABRE, Valérie GELEZEAU, Adeline CARRIER, Xavier GUILLOT 103

44. L’ARCHITECTURE DE LA VILLE EN ASIE 105

Coordinateurs : 105

- Philippe BONNIN, Anthropologue, Directeur de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS), Architecture-

Urbanisme-Sociétés (UMR AUS) 105

- Nathalie LANCRET, Architecte, Chargée de recherche, CNRS, Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et le Monde austronésien

(LASEMA, UPR 297-CNRS) 105

Intervenants : Emmanuel CERISE, Sophie CLEMENT, Hélène NJOTO-FEILLARD, Christian PEDELAHORE DE LODDIS,

Thomas BEAUFILS 105

XI- LANGUES, EDUCATION 108

45. LANGUES EN CONTACT 108

Coordinatrice : Claire SAILLARD, Maître de conférences en linguistique, Université Denis Diderot (Univ. Paris VII) 108

Intervenants : Annie MONTAUT, Jean-Michel CHARPENTIER 108

46. EDUCATION EN ASIE : CONDITIONS D’EXISTENCE DES MODELES EDUCATIFS ET FORMATIFS, ET DE

LEURS SYSTEMES DE TRANSMISSION ; TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DES PRATIQUES 109

Coordinateur : Jean-Marc DE GRAVE, Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et le Monde austronésien (LASEMA), Bureau de

l’Association Française de Recherche sur l’Asie du Sud-Est (AFRASE) 109

Intervenants : Natacha COLLOMB, David GIBEAULT, Stéphane RENNESSON, Samuel BERTHET, Didier BERTRAND, Odette

LESCARRET, TRAN Thu Huong, KRUY Kim Hourn 109

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I- Histoire des sciences et des techniques 1. L'HISTOIRE ET L'ANTHROPOLOGIE DES TECHNIQUES ORDINAIRES DANS LE MONDE CHINOIS Coordinatrices :

- Françoise SABBAN, Directrice d'études à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), Centre

d'études sur la Chine moderne et contemporaine (CECMC, UMR 8561)

- Caroline BODOLEC, Post-doc., Centre National de la Recherche Scientifique, Centre d'Etudes sur la Chine

Moderne et Contemporaine (UMR 8561 CECMC-EHESS)

Intervenants : MAU Chuan-Hui, Camille SCHMITT, ZHAO Bing, Stéphane VACCA

L’anthropologie historique des techniques ordinaires s’entend comme l’étude des pratiques et des connaissances mises

en œuvre dans l’organisation matérielle de la vie humaine. Elle se fonde sur un mode d’approche du monde chinois par

l’identification du fait matériel dans son interaction entre empirique et idéel. Cette approche conjugue des recherches

textuelles et philologiques à un travail de terrain fondé sur l’observation des pratiques, l'identification des gestes, la

collecte des objets, dans leurs contextes d’usage et d’application. Ces recherches, qui portent sur un champ assez peu

exploré des études sinologiques, visent à mettre en évidence des configurations techniques et à l’exploration des

imaginaires liés aux pratiques dites « matérielles ».

Caroline BODOLEC : Post-doctorante CNRS, Centre d'Etudes sur la Chine Moderne et Contemporaine

(UMR 8561 CECMC-EHESS)

La construction chinoise : entre architecture savante et architecture populaire

Cette communication a pour objectif la présentation des méthodes de travail concernant l’histoire de la construction

chinoise. L’étude est centrée sur les liens entre l’architecture savante (c’est-à-dire dans laquelle l’État et les institutions

sont partie prenantes et génèrent des écrits) et l’habitat populaire aux savoirs vernaculaires.

Dans une première partie, je présente le sujet de recherche et les différentes problématiques qui ont sous-tendu la

réflexion sur l’histoire de la forme en voûte dans l’architecture chinoise. Ce travail a permis de mettre en lumière des

implications plus générales sur les transmissions de techniques entre l’administration et l’artisanat privé.

Dans une seconde partie, je souhaite présenter la méthodologie d’une recherche impliquant la comparaison entre

sources et études de terrain. Ces recherches ont des implications contemporaines sur la compréhension des

transmissions de techniques artisanales dans le domaine de l’architecture populaire et de la restauration de bâtiments

anciens.

Cette communication s’appuie sur des exemples précis et des illustrations de bâtiments et de chantiers de construction.

MAU Chuan-Hui : Post-doctorant en Histoire, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS),

équipe de Pierre-Etienne Will.

La soie : fond de la civilisation chinoise et moteur d'échanges

Le présent papier est le résultat d’un travail de synthèse qui a pour objectif de souligner l’importance des études sur la

soie pour une meilleure compréhension de la culture chinoise et de son histoire. Des documents anciens en chinois et en

langues étrangères, notamment en français, et des objets (soieries et outils du travail de la soie) constituent un corpus

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important pour cette recherche. Elle est également alimentée par des découvertes archéologies et des études récentes

concernant les techniques de la soie et les échanges entre la Chine et l’étranger.

Cette étude comporte trois parties :

I. Les techniques de la soie et l’évolution géographique de la production : présentation des essentiels du travail de la soie

et des subtilités pour une production de belle qualité.

II. La soie, fonds de la culture chinoise : la soie occupait une place économique centrale dans la société chinoise. Elle

jouait aussi un rôle culturel considérable, comme en témoignent les éléments idéologiques qu’ont développés autour

d’elle les lettrés, ou les croyances et les célébrations populaires. Largement utilisée dans les différentes couches de la

société traditionnelle, elle apparaît comme un fonds de la culture chinoise.

III La soie, moteur des échanges : la grande valeur marchande de la soie poussa des hommes à braver des difficultés

pour son commerce. Ils cherchaient aussi à percer les secrets des techniques de fabrication chinois pour les introduire

dans leurs pays. Des découvertes effectuées sur la route de la soie maritime témoignent d’échanges très anciens entre la

Chine et l’étranger. La confrontation de documents écrits et d’objets permet d’apprécier les multiplicités des domaines

concernés par les échanges grâce au commerce de la soie.

Camille SCHMITT : Docteur en Histoire de l’Art (thèse soutenue en décembre 2002), Post-doctorat au

Centre de recherche sur l’extrême-orient de Paris Sorbonne (CREOPS- Paris IV), dirigé par Flora Blanchon.

Histoire de l'art du montage et de la restauration

Dans la présente intervention, nous nous pencherons sur l’étude de l’art du montage et de la restauration des œuvres

graphiques, c’est-à-dire des peintures et des calligraphies sur soie et papier. Par montage, nous entendons la mise en

valeur des œuvres neuves par un assemblage de soie et des renforts de papier, et nous désignons sous le terme de

restauration le processus complexe suivi par l’artisan pour assainir et consolider les œuvres anciennes, souvent abîmées

ou parfois complètement mutilées, a des fins conservatoires. En Chine, le montage et la restauration sont une seule

technique pratiquée par le même artisan, à la fois monteur et restaurateur.

Il se trouve que les œuvres d’art se sont généralement concentrées dans les mains d’une élite, mais leur montage est

confié à des artisans ou ateliers d’artisans, aussi cette technique particulière se rattache-t-elle aux techniques ordinaires

dans la mesure où les œuvres sont nombreuses, et qu’il est nécessaire de les restaurer fréquemment.

ZHAO Bing : Post-doctorant, Civilisation chinoise (UMR 8583, CNRS-EPHE), équipe de Éric Trombert.

L'artisanat de la céramique à l'époque des Song (Xe-XIIIe siècles) : dialectiques des fours impériaux et des fours

privés.

Le monde des artisans, peu mentionné dans les sources historiques traditionnelles, échappe aux investigations des

historiens. Nous proposons ici d’étudier la céramique produite dans les ateliers privés et importée à la cour des Song du

Nord (960-1127) en tant que tribut local. Cette étude a pour objectif d’examiner les relations entre le milieu des artisans

potiers privés et l’administration chinoise d’une part, et de déterminer le rôle qu’a joué cette dernière dans l’essor des

ateliers privés aux Xe-XIIe siècles d’autre part. Nous la divisons en trois parties principales : les travaux effectués, puis

les principales caractéristiques de la céramique envoyée à la cour des Song du Nord, enfin sa répercussion sur l’artisanat

céramique privé des Xe-XIIe siècles.

Stéphane VACCA : Ingénieur chimiste ; agrégé de chimie ; ancien élève, Ecole Normale Supérieur-

Cachan (ENS-Cachan) ; enseignant de chimie depuis 1992, Université Paris-Sud (Univ. Paris XI) ; Etudiant de

chinois sur les procédés chimiques et la terminologie technique sous les Ming, Institut National des Langues

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.11

et Civilisations Orientales (INALCO) ; Etudiant sur les procédés de fabrication des médicaments minéraux

des pharmacopées Ming, Centre de Recherche de la Médecine chinoise, Centre d’histoire de la Médecine-

Pékin

Préparations et usages de l'alun blanc (baifan) dans la Chine de la fin des Ming

La préparation de l’alun blanc est avérée en Chine sous la dynastie des Han mais il est probable qu’elle soit bien

antérieure. Ses utilisations couvrent à la fois les domaines de la vie courante et d’occupations spécialisées. Sa

préparation consiste en un grillage de l’alunite empilée en couches alternatives avec du charbon. Le produit obtenu est

ensuite recristallisé dans l’eau bouillante. L’alun sec (kufan) est préparé par un chauffage sévère de l’alun blanc. L’alun

blanc est utilisé comme mordant dans la teinture des textiles. Par dépôt d’alumine, il donne une teinture plus uniforme et

plus résistante ; par formation de complexes, il peut également donner de nouvelles teintes. Selon la médecine chinoise

l’alun blanc a les propriétés d’assécher et d’obturer les sources de liquides. Pour ce qui est du traitement des affections

banales, ses usages principaux se trouvent dans les domaines de l’hygiène buccale et des soins dentaires, du traitement

des blessures occasionnées par les morsures d’animaux et enfin dans celui d’affections dermatologiques.

2. HISTOIRE DES SCIENCES EN ASIE Coordinatrice : Karine CHEMLA, Directeur de recherche, Recherches Epistémologiques et Historiques sur les

Sciences Exactes et les Institutions Scientifiques (REHSEIS, CNRS-Université Paris 7)

Intervenants : Annick HORIUCHI, Florence BRETELLE-ESTABLET, Agathe KELLER

Cet atelier visait non pas à permettre de présenter des travaux pointus en histoire des sciences, mais plutôt à examiner

par plusieurs biais la manière dont les études sur les sciences pourraient interagir avec les travaux autres sur l’Asie. C’est

pourquoi il a fait l’objet d’exposés portant sur des époques, des régions et des sujets les plus variés.

Il y a été question de la manière dont le Japon découvre les savoirs venant d’Occident à travers le hollandais au 18e

siècle et de l’impact de ce mouvement sur la société de l’époque (A. Horiuchi). Dans un tout autre ordre d’idées, nous y

avons examiné les liens entre savoirs et institutions médicales, d’une part, politique, d’autre part, à travers le cas de

régions périphériques de l’Empire chinois (F. Bretelle-Establet), au moment même où l’Etat s’engage dans un processus

de modernisation. Enfin, nous nous sommes tournées sur la manière dont les discours politiques de l’Inde post-coloniale

se nourrissent de représentations relatives à l’histoire des sciences (A. Keller).

Ce parcours, par sa variété, voulait permettre d’amorcer une discussion générale sur les rapports qui pourraient se

nouer, dans les recherches sur l’Asie, entre études sur les sciences et travaux d’historiens, de sociologues ou

d’anthropologues.

Annick HORIUCHI : Université Paris 7-Denis Diderot, UMR « Civilisation japonaise » CNRS/EPHE

L’apprentissage du regard « hollandais » au Japon au tournant du XIXe siècle

Peu d’études ont été consacrées jusqu’ici aux transformations intervenues dans la représentation du monde sous l’effet

des ouvrages produits par les spécialistes de sciences hollandaises (rangaku) dans les dernières décennies du XVIIIe. Le

présent article a pour objet de faire entrevoir la méthode qui pourrait être employée pour une telle recherche, sachant que

pour la mener à bien il faudra non seulement examiner les textes proprement scientifiques mais aussi les ouvrages de

vulgarisation ou les textes ne mentionnant ces savoirs que de manière incidente. Nous entreprenons ici cette recherche

pour un thème précis : la représentation du monde céleste. Pour ce faire, nous examinons deux types d’ouvrages

distincts : les ouvrages de Shiba Kôkan, considérés comme ayant popularisé la cosmologie copernicienne, et celui d’un

interprète de Nagasaki, Shizuki Tadao, dont le propos est relativement proche des sources occidentales. On montrera

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.12

que les deux types de textes se rejoignent dans leur effort de construire ou de définir un regard particulier, caractérisé par

ses capacités de prise de distance, de hauteur et sa réflexivité.

Florence BRETELLE-ESTABLET : Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Recherches

Epistémologiques et Historiques sur les Sciences Exactes et les Institutions Scientifiques (REHSEIS, CNRS-

Univ. Paris 7)

Les acteurs de la santé en Chine du Sud à la fin de l’empire et au début de la république : étude préalable à une

histoire de la médecine en Chine

Cette contribution tendra à montrer comment les travaux en histoire sociale peuvent interagir avec les travaux en histoire

des sciences. Précisément ce qu’un travail sur la santé - sur les traditions individuelles et collectives, les institutions, les

politiques sanitaires, les thérapeutes-, peut apporter à l’histoire de la médecine. L’histoire d’une science ne peut

s’entreprendre sans que soit étudié aussi le champ institutionnel dans lequel elle s’élabore et qui peut jouer un rôle

important dans la normalisation des savoirs et des pratiques scientifiques ; sans que soit étudié l’environnement

extérieur –technique, sanitaire- qui peut la mobiliser ; et enfin sans que soient étudiés les milieux socioculturels qui la

produisent.

Ceci est vrai pour l’histoire des sciences dans les sociétés contemporaines où les sciences paraissent pourtant bien

structurées par des cursus universitaires normalisés et où les scientifiques paraissent appartenir à des corps sociaux bien

définis. Ce travail préalable ou concomitant est peut être encore plus indispensable lorsqu’il s’agit d’étudier l’histoire des

sciences dans des sociétés « pré modernes », ou tout au moins dans celles où la transmission des savoirs se fait hors

institution et où l’élaboration des savoirs scientifiques et parfois leur pratique ne sont soumis à aucun contrôle

bureaucratique.

C’est le cas de la médecine en Chine jusqu’en 1928 : hormis l’infime élite formée régulièrement par le Taiyiyuan,

Académie de Médecine impériale, du VIe au début du XXe siècle, mais attachée principalement à la Cour et aux

Yamens, la formation et la pratique médicales échappent au contrôle de l’Etat.

Dans le cadre de cette communication, je vais me limiter à présenter ce qu’une étude sociologique menée sur les

médecins, ou les « experts en l’art de soigner » dans le cadre particulier de la Chine du Sud à la fin de l’empire et au

début de la république, laisse entrevoir sur l’histoire de la médecine en Chine.

Agathe KELLER : Recherches Epistémologiques et Historiques sur les Sciences Exactes et les

Institutions Scientifiques (REHSEIS, CNRS-Univ. Paris VII)

Enjeux multiples de l’histoire des sciences en Inde

Dans cette communication nous verrons comment des groupes associatifs et politiques utilisent l'idée de « sciences

traditionnelles » en Inde pour promouvoir des politiques de recherche et d'enseignement. À travers un cas particulier,

celui des « mathématiques védiques », nous nous interrogerons sur l’origine de cette pratique mathématique en tentant

d’évaluer comment une certaine histoire des sciences indiennes a constitué un élément important dans la construction

d'une identité post-coloniale en Inde.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.13

3. LES CONTRIBUTIONS CONJOINTES DES TECHNIQUES DE LA REPRESENTATION ET DES SCIENCES HUMAINES A L’ETUDE DE LA CHINE ET DE L’ASIE CENTRALE Coordinateur : Philippe FORET, Fonds national suisse de la recherche scientifique et Ecole polytechnique

fédérale de Zurich

Intervenants : Svetlana GORSCHENINA, Andreas KAPLONY

L’idée directrice est d’étudier certaines des méthodologies suivies en aires culturelles. Nous voulons expliquer comment

au cours du XXe siècle une problématique commune à plusieurs disciplines et techniques s’est élaborée autour de la

carte et de l’image. L'originalité de l’atelier est de partir des représentations de l’espace et des populations que proposent

la cartographie, la photographie et la peinture pour analyser les mécanismes de collaboration qui mettent en rapport

écoles, institutions et cadres nationaux de référence. L’archéologie, la géographie, l’ethnographie, l’histoire de l’art et

l’histoire des sciences sont les domaines privilégiés de notre réflexion. Les parties musulmanes et russophones de

l’ouest chinois et de l’Asie centrale prennent pour nous valeur d’exemples, bien que nous nous situions au delà des

particularismes régionaux.

Pays concernés :

Asie centrale musulmane, Chine (Xinjiang, Nei Menggu), Mongolie, Turquie, Turkestan russe, URSS

Andreas KAPLONY : Université de Zurich

La complémentarité de la carte et du texte dans la géographie arabe de l’Asie centrale pendant le Moyen-Age

Pendant des siècles, la Route de la Soie et celle des Indes ont uni les péninsules de l’Eurasie. L’Asie centrale doit son

importance à sa localisation au centre du réseau qui met en communication la Chine, l’Inde, le Moyen Orient, la

Méditerranée et la Russie. L’histoire du commerce transcontinental s’étudie notamment à partir des sources arabes du

Moyen-Age, dont la richesse est remarquable. Dans ce vaste corpus, Andreas Kaplony trouve les éléments nécessaires

à l’analyse de la fonction des cartes et à l’élargissement de la définition de la cartographie. Les trois questions principales

qui retiennent son attention sont celle de la relation des symboles cartographiques au texte, celle des éclaircissements

que le texte fournit à la carte, et celle des échanges entre les écoles arabe, turque et chinoise de cartographie.

Philippe FORET : Fonds national suisse de la recherche scientifique et Ecole polytechnique fédérale de

Zurich

La place de la cartographie dans les expéditions scientifiques en Mongolie intérieure et au Xinjiang

Philippe Forêt compare deux périodes dans l’histoire des expéditions scientifiques dans l’ouest chinois : les campagnes

que le géographe suédois Sven Hedin mène de 1893 à 1908 et les reconnaissances faites par les missions chinoises,

sino-suédoises et sino-soviétiques à partir de 1927. Le but de ces expéditions demeure le même puisqu’elles continuent

à compiler les informations topographiques, à dresser des cartes, et à rassembler de la documentation photographique.

Les méthodes de travail se modifient toutefois quand s’organise la mission scientifique sino-suédoise pour les provinces

nord-ouest de la Chine. Des équipes internationales et interdisciplinaires remplacent l’explorateur du début du XXe

siècle, qui était un héros solitaire et un savant omniscient. Philippe Forêt explique comment la cartographie a provoqué

ces changements radicaux, rappelle quels ont été les débats épistémologiques de l’époque, et s’interroge sur ce qu’ils

ont signifié pour les sciences humaines.

Svetlana GORSHENINA : Université de Lausanne

L'Orient que crée l’Orient : l'orientalisme en Asie centrale russe, soviétique et post-soviétique

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.14

L’art de l’Asie centrale moderne est resté mal connu en Europe et en Amérique. La re-écriture des histoires nationales

des républiques ex-soviétiques décourage en outre l’étude de l’orientalisme de l’époque coloniale. L’analyse de

l’orientalisme russe au sein de l’art centre-asiatique peut cependant enrichir la compréhension de l’orientalisme comme

l’expression d’un phénomène universel. Svetlana Gorshenina propose donc l’examen des images de l’Orient

ethnographique des peintres-voyageurs, de l’Orient imaginaire des voyages d’atelier et de l’Orient stéréotypé (images de

rapts de femmes et de fumeurs d’opium). Sa communication porte sur quatre thèmes : la quête identitaire, la synthèse

des styles européens et leur adaptation à l’Orient, l’ethnographisme du réalisme socialiste, et le romantisme historicisant

que les découvertes archéologiques inspire de 1930 à 1970. Les capacités de l’orientalisme centre-asiatique à

renouveler la perception de l’Orient peuvent être ainsi mieux appréciées.

II- Pouvoir et société 4. ‘SUPPLICE CHINOIS’ : APPROCHE METHODOLOGIQUE PLURIDISCIPLINAIRE D'UNE REPRESENTATION EXOTIQUE Coordinatrice : Muriel DETRIE, Littérature comparée, Université de la Sorbonne Nouvelle (Univ. Paris III),

responsable de l'équipe de recherche ‘Littérature et Extrême-Orient’ (CERC Paris III-CRLC Paris IV)

Intervenants : Jérôme BOURGON, Claire MARGAT, Maria PIA DI BELLA Un groupe de recherche a été créé à l'ISH (Lyon) en décembre 2002 dans le cadre du projet ACI (Action Concertée Incitative financée par le Ministère de la Recherche) : ‘Supplices chinois ; approche iconographique, historique et littéraire d'une représentation exotique’, par Jérôme Bourgon, IAO, Lyon. L'équipe inclut des chercheurs de plusieurs institutions représentant des disciplines variées (sinologie, histoire, histoire de l'art, littérature, littérature comparée, philosophie, esthétique). Dans le cadre du projet, leurs travaux se partageront entre la recherche, la réalisation d'une banque de données et la publication sur le Web. La partie centrale du projet est en effet la constitution d'un site internet regroupant une grande variété d'informations et de recherches concernant le thème général du supplice chinois. Le champ de la recherche s'étend de la réalité au fantasme, depuis les données factuelles relatives au droit pénal chinois et à son application, jusqu'aux discours philosophiques ou esthétiques inspirés par le sujet en Occident en passant par les récits de voyage ou les oeuvres de fiction, voire les oeuvres d'art (picturales, cinématographiques, etc) occidentales mais aussi chinoises. Le thème étant intimement lié aux représentations figurées, l'axe central de la recherche sera constitué par la collecte de documents iconographiques, l'analyse de leurs sources et des discours qui les accompagnent, l'étude de leur diffusion et de leur réception, etc. Dans l'atelier que nous proposons ici, il s'agira de présenter les approches méthodologiques propres à plusieurs des disciplines représentées dans le projet. Chaque discipline a en effet son mode de fonctionnement dans la recherche, défini à la fois par la nature du matériel étudié et par l'histoire de la discipline elle-même. La confrontation des présentations cherchera à la fois à mettre en valeur les spécificités de chaque discipline, mais aussi à montrer comment, en s'appliquant à un même objet d'étude, les approches se complètent et s'éclairent mutuellement.

Jérôme BOURGON : Droit chinois, Institut d’Asie Orientale (IAO-Lyon), pour la présentation des différents

niveaux d'analyse

‘Supplice chinois’ : construire le cadre d'analyse d'une représentation complexe.

Le groupe de recherche interdisciplinaire sur la représentation du ‘supplice chinois’ qui vient de se créer s'est donné pour

objectif de comprendre comment et pourquoi une réputation de "cruauté subtile et raffinée" s'est attachée à la Chine,

plutôt qu'à bien d'autres pays qui ont pratiqué des peines ou des tortures analogues. Par son ampleur, sa durée, la

diversité des formes sous lesquelles elle a essaimé dans les récits de voyage, les ouvrages à prétention historique ou

ethnologique, le roman, l'opéra, le théâtre, la peinture..., cette représentation complexe défie les méthodes d'analyse

courantes dans les divers domaines de spécialité. Ainsi la position de l'historien pour qui la recherche s'arrête en 1905,

date de l'abolition des supplices, ne permet-elle pas de rendre compte de la masse de photos de supplices et tortures qui

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.15

ont circulé à partir des années 1910. D'où l'idée de mettre en place un cadre d'analyse qui intègre les approches

spécialisées autour de la critique des sources à trois niveaux :

1. Analyse des documents visuels : que montrent-ils (temps, lieu, personnes) ?

2. Analyse des faits : que disent les textes attachés de près ou de loin à ces sources visuelles (légendes de photos, récits

de témoins oculaires, commentaires journalistiques) ; et que nous disent les sources chinoises sur les mêmes faits

(archives judiciaires, recueils de cas, journaux officiels) ?

3. Analyse des représentations : que ‘fait-on dire’ à telle photo, simplement en en modifiant la date ? Que veut-on dire en

décrivant une scène de supplice ou de torture dans un récit de fiction ou de pseudo-témoin oculaire ; ou en spéculant sur

les états d'âme et l'ultime sensation d'un condamné à l'agonie ?

Articuler ces différents niveaux permet d'intégrer faits et représentations à la construction historique de ce cliché et de

comprendre comment cet événement majeur que fut l'abolition des ‘supplices chinois’ a pu être durablement occulté.

Maria PIA DI BELLA : Centre de Recherches Sur les Arts et le Langage (CRAL-EHESS)

Voir le Christ en Chine: les sources chrétiennes des représentations du Lingchi

Dans le but d'éclairer la vogue des représentations du supplice chinois (le lingchi en particulier) en Europe -du milieu du

XIXe au début du XXe siècle- mon intervention portera d'abord sur ma propre recherche, c'est-à-dire sur le réconfort

donné par les compagnies italiennes spécialisées dans le sauvetage des âmes des condamnés à mort (surtout les

Bianchi de Palerme, 1541-1820) pour préparer ces derniers à une mort "christique". Les supplices que les condamnés à

mort siciliens devaient endurer sans protester étaient très durs (ils étaient tenaillés avec des fers chauds; on leur coupait

la main droite; on leur brûlait les pieds; ils pouvaient aussi être traînés liés, presque nus, sur une table attachée à la

queue d'un cheval pour être écartelés vivants ou semi-vivants, etc.). Ces supplices ont contribué à susciter des

sentiments populaires de piété face à la théâtralisation de la justice, donnant lieu -à partir de la fin du XVIIIe siècle- à la

"sanctification populaire" des criminels exécutés. Ensuite, mon intervention illustrera les différents modes d'exécution

utilisés en Europe -pendaison,

décapitation, étouffement, roue, etc.- du Moyen-âge jusqu'au XVIIIe siècle, dans le but de proposer une typologie

susceptible de nous aider dans la recherche d'une filiation entre supplices du monde chrétien et supplices chinois.

L'hypothèse sous-jacente à cette approche est que la Passion du Christ conditionnait les représentations des supplices

en Europe et que cette tradition a, par la suite, exercé son influence sur les

représentations des supplices chinois commanditées en grande partie par les voyageurs européens en Chine.

Muriel DETRIE : Littérature comparée, Université de la Sorbonne Nouvelle (Univ. Paris III), pour l'analyse des

descriptions fournies par les récits de voyage

Approche imagologique des récits de voyage ; à propos du topos des ‘supplices chinois’

Au sein des études de Littérature comparée, l'imagologie, qui se définit comme l'étude des représentations de l'étranger

dans la littérature, s'intéresse tout particulièrement aux récits de voyage dans la mesure où ils contribuent à la formation

des "images" de l'autre tout en participant de l'imaginaire social qui fonde ces "images".

A partir de la fin du XIXe siècle, le thème des "supplices chinois" devient un véritable topos des récits de voyage en

Chine. Il appartient à la critique historique de déterminer ses rapports avec la réalité, mais selon l'approche imagologique,

il n'est pas tant reflet ou reproduction de la réalité que recréation ou invention culturelle. A ce titre, il relève des méthodes

d'analyse littéraire. Le comparatiste s'attachera donc à dégager dans les textes les structures, les grandes oppositions

thématiques, les stratégie narratives ou discursives et les champs lexicaux dans lesquels s'insère le topos. Il mettra aussi

en évidence l'articulation du topos avec les textes antérieurs auxquels il fait écho (intertextualité) et en particulier ses

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.16

rapports avec les textes de fiction dont il se nourrit mais qu'il nourrit aussi en leur apportant la caution de sa référentialité.

Il s'agira enfin de déterminer sa place et sa fonction dans le discours idéologique contemporain, "l'image" de l'autre

n'étant le plus souvent qu'une représentation idéalisée ou fantasmée de soi-même. L'approche imagologique du "supplice

chinois" rejoint ainsi les études historiques et sociologiques sur l'imaginaire social qui nous apprennent comment une

communauté à une époque donnée pense son identité.

Claire MARGAT : Philosophie et esthétique, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I), pour la réception

littéraire et artistique

Etude de la réception littéraire et artistique de l'image du supplicié chinois

La réception d'une image n'est pas une question matérielle, elle met en oeuvre une réflexion sur les interprétations qu'on

peut en faire et sur les malentendus qu'elles peuvent ou ont pu susciter. Il faut réfléchir à la relation des images au texte,

et dégager le discours que cette relation produit.

Le rapport de la violence à la représentation engage des considérations théoriques portant sur un champ déterminé dont

il s’agit de produire une histoire, en étudiant comment, à partir de l'émergence des représentations de supplices chinois,

s'est construit un discours complexe :

- comment s'est mise en place, puis diffusée une esthétique de l'horreur dont le "supplice chinois" est l'emblème dans la

construction romanesque d'Octave Mirbeau, Le Jardin des supplices (1899),dans le récit de Louis Carpeaux Pékin qui

s'en va (1913), etc.

- quel rôle a joué le topos du supplice chinois dans l'oeuvre de Georges Bataille

- enfin, comment il s'est réfléchi - au sens du jeu de miroir – dans l'oeuvre de l'artiste taiwanais Chen Chieh-jen dont le

film intitulé "Echoes of a historical photography" a été présenté en 2002 à la FIAC.

Comment est-on passé de l'esthétisation d'un document à la production d'une légende ? Pourquoi s'est mise en place au

cours du XXe siècle, à travers la représentation de la Chine cruelle, une esthétique de l'horreur ?

La communication cherchera à retracer les étapes d'un questionnement qui intéresse à la fois l'histoire littéraire, la

philosophie et l'esthétique, et s'interrogera sur la manière dont il a pu en croiser d'autres.

5. LES ÉLITES DANS LES SOCIÉTÉS ASIATIQUES CONTEMPORAINES : RENOUVELLEMENT ET RECONVERSIONS Coordinatrice : Marie-Orange RIVE-LASAN, doctorante, Centre de Recherches sur la Corée (CRC-EHESS),

membre du Laboratoire Études coréennes (CNRS)

Intervenants : Gilles GUIHEUX, Mathieu SALOMON, Aurore MERLE, Romain BERTRAND Les élites asiatiques contemporaines sont plus que jamais au cœur de l'effervescence des sociétés asiatiques. Ouverture en Chine ou au Vietnam, croissance économique rapide, démocratisation en Corée du Sud ou à Taiwan, transition vers des régimes civils comme en Corée du Sud ou en Indonésie, sont autant de contextes qui induisent une transformation de l'espace social, et un renouvellement des élites. Les questions sont multiples : qui sont les nouvelles élites ? Que deviennent les élites évincées, en particulier lorsqu'il s'agit d'élites dirigeantes ? Qu'en est-il de leurs éventuelles reconversions ? Quels rapports entretiennent entre elles anciennes et nouvelles élites ? Quels rôles jouent ces élites dans l'intégration économique, mais aussi politique et culturelle au reste du monde ? Histoire sociale ou sociologie des élites, anthropologie ou sociologie politique permettent d’aborder ces questions.

Gilles GUIHEUX : Chercheur, Centre d'Études français sur la Chine contemporaine (CEFC)

Les élites économiques chinoises

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.17

Celles-ci sont au coeur de l'actualité économique et politique de la Chine populaire. Les autorités chinoises attendent du

secteur privé qu'il crée l'essentiel des emplois nouveaux, et appellent ses dirigeants à participer, plus nombreux, aux

responsabilités politiques. Les entrepreneurs privés sont-ils pour autant un groupe social nouveau ? Ils entretiennent de

fait des liens complexes avec les élites du temps de l'économie planifiée. Et constituent-ils une bourgeoisie revendiquant

son autonomie ? Rien n'est moins sûr. Comparer la bourgeoisie naissante chinoise à l'histoire récente de ses voisins

asiatiques contribuera à élaborer une réponse pertinente.

Marie-Orange RIVE-LASAN : Doctorante en histoire, Centre de Recherches sur la Corée (CRC-EHESS) ;

membre du Laboratoire Études coréennes (CNRS)

Les reconversions des ex-élites dirigeantes sud-coréennes au pouvoir de 1961 à 1992 : l'après-pouvoir des élites

pro-militaires à l'épreuve de la démocratisation

Que sont devenues les élites d'origine militaire ou civile au pouvoir pendant les trente années de dictature militaire en

Corée du Sud ? Coups d'État et élections ont permis le renouvellement de ces élites. Les ex-élites dirigeantes à la tête de

l'État ont dû s'adapter au changement pacifique vers un régime civil dans les années 1990. Optant pour le soutien du

régime en place ou de l'opposition, certains ont obtenu une autre forme de pouvoir politique, en devenant députés par

exemple. D'autres ont quitté définitivement les sphères du pouvoir politique et semblent opérer une véritable reconversion

professionnelle.

Mathieu SALOMON : Doctorant, Sciences-Po ; rattaché au Centre d’Etudes et de Recherches Internationales

(CERI), Lauréat du Programme Vent d'Est (2001-2003) (MAE-Ambassade de France au Vietnam)

L’Assemblée nationale : ‘lieu’ de renouvellement des élites politiques vietnamiennes ?

Depuis le lancement du renouveau du communisme vietnamien (doi moi) et afin de satisfaire leur quête de légitimité, les

dirigeants communistes vietnamiens affichent une volonté d’ouverture et de renouvellement des élites politiques du

régime. Ainsi, notamment en réponse à la nouvelle donne économique, les postes de responsabilités deviendraient plus

accessibles à des non membres du Parti. Il s’agit notamment de promouvoir des experts, bureaucrates et personnalités

spécialisés dans certains domaines (gestion économique, droit…), issus de milieux et secteurs socioprofessionnels

différents (monde de l’entreprise…), mais aussi des représentants de « minorités politiques » (femmes, minorités

ethniques, jeunes…). Le « lieu politique » principal par lequel le régime communiste vietnamien tente d’intégrer, de

coopter, d’attirer de nouvelles élites est l’Assemblée nationale. Ainsi, le processus électoral a été réformé et s’est «

ouvert » : autorisation des candidatures indépendantes, revalorisation de la prise en compte des qualifications des

candidats (vs. critères politiques), politique de « quotas »…

Néanmoins les interrogations sur la réalité de ce phénomène sont multiples : qu’en est il vraiment de l’ouverture du

processus électoral ? Quelles évolutions réelles des profils socio-économiques des députés peut-on observer ? Peut-on

caractériser un groupe cohérent de nouvelles élites ? In fine la logique profonde de promotion/élection des représentants

du peuple vietnamien a-t-elle évolué depuis le lancement des réformes ? Et si oui dans quel sens?

Aurore MERLE : Doctorante en sociologie, Institut d’Asie Orientale (IAO), Université Lumière (Univ. Lyon II,

Glysi-safa)

Elites, classes sociales, stratification sociale : comment les sociologues chinois analysent leurs élites?

Les années 1990 voient se développer un nouveau champ de recherche dans les sciences sociales chinoises consacré à

la question de la stratification sociale : enquêtes statistiques sur la nouvelle stratification sociale issue des réformes,

études sur les couches sociales défavorisées (paysans, xia gang...), sur les entrepreneurs privés...Que nous apprennent

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ces recherches ? Comment est abordée la question des élites ? Que nous révèlent-elles sur l’attitude des sociologues à

l’égard des élites dirigeantes ? Si le questionnement sur les élites apparaît de manière indirecte et a tendance à se

focaliser sur l’apparition d’une nouvelle élite économique, il est pourtant au cœur de la réflexion sur la polarisation de la

société chinoise. Le balancement entre un discours de gestionnaire, préoccupé par la stabilité sociale, et la critique de la

reproduction d’une élite politico-économique montre les difficultés des sociologues, et plus fondamentalement des

intellectuels chinois, à se positionner à l’égard du pouvoir.

Romain BERTRAND : Chercheur, Centre d’Etudes et de Recherches Internationales (CERI)

Le personnel politique de la Reformasi indonésienne : entre inertie sociologique et innovation idéologique

Cinq années après le début de la période de changement politique connue sous le nom de Reformasi, et tandis que

l'archipel se prépare à la tenue d'un nouveau scrutin législatif, force est de constater que la question du personnel et du

travail parlementaires est la grande absente des travaux de sociologie politique consacrés à l'Indonésie. L'attention des

chercheurs et des experts s'est presque exclusivement tournée vers ces temps forts de la vie politique nationale que sont

les manifestations de rue, les campagnes électorales et les chutes de gouvernement. L'analyse statistique du vote et la

biographie de dirigeants sont devenus les genres privilégiés du récit politologique, aux dépens d'une interrogation sur les

routines du métier politique, et notamment du travail parlementaire. On ne sait donc presque rien, ou si peu, du personnel

politique de la Reformasi, c'est-à-dire de l'origine sociale et du parcours professionnel des membres des assemblées

élues, de l'organisation pratique du travail législatif, de la perception sociale des députés. A partir de l'étude d'une série

de nouvelles dispositions législatives et réglementaires concernant le rôle des députés et de deux séries d'entretiens

(l'une menée en mai-juin 1998 avec une quarantaine de secrétaires-généraux et de membres des comités exécutifs de

nouveaux partis politiques, l'autre en avril 2002 avec une quinzaine de députés et les présidents des différentes

commissions parlementaires) on se propose ici de réfléchir sur les pratiques parlementaires indonésiennes.

6. POUVOIR ET SOCIETE DANS LES PAYS COMMUNISTES D'ASIE Coordinateur : Jean-Louis MARGOLIN, Maître de Conférences en Histoire, Université de Provence; Chercheur,

IRSEA/CNRS

Intervenants : Jean-Philippe BEJA, Michel BONNIN, Pierre RIGOULOT

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.19

Les régimes communistes asiatiques (Chine, Corée du Nord, Vietnam, Laos, Cambodge, Mongolie) ont eu pour projet déclaré une transformation de la société, qui s'est traduite de manière primordiale par le développement de mécanismes de domination, à peine dissimulés sous le discours émancipateur. L'objet de cet atelier est de les mettre en lumière, dans leur logique implacable, mais aussi dans leurs limites. On s'interrogera en particulier sur la réalité d'un contrôle total des groupes sociaux (ou autres...) et des individus, souvent approché, mais peut-être jamais réalisé. L'analyse comparative permettra de faire la part de la persistance d'un projet unique - dans l'espace et dans le temps -, mais aussi du poids des inflexions chronologiques et de la diversité des inscriptions nationales. Des interventions portant sur une seule expérience nationale, voire locale, mais coordonnées dans leur thématique seront la source principale de cette perspective comparatiste trop peu présente dans les études sur le communisme. Jean-Philippe BEJA : politiste, Directeur de recherches, Centre d’Etudes et de Recherches Internationales (CERI, CNRS) La résistance sociale en République populaire de Chine: 1949-2000 Malgré la tentative d’imposition par le parti d’un contrôle total sur tous les champs de l’activité humaine entre 1949 et 1976, et surtout à partir du lancement du Grand bond en avant de 1958, la société n’a pas cessé de résister. Les informations manquent notamment sur la manière dont les classes populaires, paysans et ouvriers, ont mis en œuvre la résistance passive. On étudiera donc la manière dont les intellectuels ont exprimé leur opposition lorsque les occasions leur en ont été fournies par l’aggravation des luttes au sommet du Parti. On cherchera d’isoler les traits communs aux divers épisodes de résistance avant et après la mort de Mao Zedong, de la critique exprimée par Hu Feng en 1955 au mouvement pour la démocratie du printemps 1989.

Michel BONNIN : sinologue, Maître de conférences, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

Les métamorphoses du totalitarisme en Chine

Depuis le lancement des réformes, il y a plus de 20 ans, la Chine a connu de profonds changements économiques et

sociaux. Elle fonctionne partiellement sur un mode « capitaliste ». Pourtant, de façon surprenante, son régime politique

est resté fondamentalement le même. Le Parti communiste dirige toujours la Chine, selon des méthodes héritées de

Lénine, Staline et Mao Zedong, mais adaptées par Deng Xiaoping, à la fin des années 1970. Pour des raisons d'efficacité

économique, le pouvoir a alors laissé plus d'initiative aux acteurs sociaux et, n'ayant plus la prétention utopique de former

«l'homme nouveau», il s'est en partie retiré de la vie privée des citoyens.

Il a également accordé un peu plus de liberté aux intellectuels, aux écrivains et aux artistes. Il a cependant conservé

l'essentiel des institutions existantes de contrôle des idées, des personnes et des groupeso: propagande, censure,

certificat de résidence, dossier personnel, prise en charge complète de chacun par son unité de travail, etc. Si le pouvoir

ne cherche plus à surveiller ce que chacun pense ou dit en privé, s'il laisse une assez grande marge de manoeuvre aux

entrepreneurs privés, il continue à vouloir contrôler totalement l'espace public. Se concentrant sur l'essentiel, il persiste à

régner sur l'information, la communication et, surtout, l'organisation politique et sociale. Son refus d'accepter l'existence

de toute organisation sociale autonome (association, syndicat, église, parti politique ou autre) le distingue nettement d'un

banal autoritarisme. On pourrait définir ce type de pouvoir comme un totalitarisme « replié ». En effet, s'il laisse subsister

des zones d'indifférence dans lesquelles sa présence ne se fait pas directement sentir, c'est qu'il s'est replié sur un noyau

dur du totalitarisme (symbolisé par les Quatre principes fondamentaux de Deng Xiaoping). À partir de ce noyau, l'État -

Parti peut à tout moment, si besoin est, se déplier et frapper toute personne ou toute force sociale considérée comme

dangereuse. C'est ce qu'a montré, par exemple, la répression de la « secte » Falungong. Quant aux changements

intervenus dans l'idéologie (renforcement du nationalisme), et dans les rapports du Parti avec les différentes couches

sociales (abandon des ouvriers au profit des entrepreneurs et de la classe moyenne), ils témoignent d'une intégration par

le régime d'éléments de type fasciste, beaucoup plus que d'une orientation vers un système libéral et démocratique.

Jean-Louis MARGOLIN : Maître de Conférences en Histoire, Université de Provence (Univ. Aix-Marseille I);

Chercheur, Institut de Recherche sur le Sud-Est Asiatique (IRSEA, CNRS)

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.20

Le Cambodge des Khmers Rouges dans l'histoire du communisme asiatique: paroxysme ou anomalie?

Il y a un "air de famille" entre le polpotisme et les autres variantes du communisme asiatique: idéologie volontariste

ultramaoiste, brouillage des repères entre Etat, parti et société, négation extrême du droit, manipulation de la jeunesse et

des déclassés en tout genre, recours au nationalisme comme facteur privilégié de mobilisation, réorganisation sociétale

sur la base de castes de type nouveau. Néanmoins ce n'est qu'au Cambodge qu'un véritable génocide a eu lieu, dans

une fuite en avant finalement suicidaire à court terme. Cas-limite, caricature proprement ubuesque de tout ce que le

communisme de pouvoir peut offrir de pire, le Cambodge pose donc aussi de façon aïgue le problème de l'inévitable

localisation (dans l'espace, le temps, la culture, l'ethnicité) du phénomène communiste, surtout après la conquête du

pouvoir.

Pierre RIGOULOT : historien ; Directeur de l'Institut d'Histoire Sociale-Nanterre (IHS-Nanterre)

Politique et ethnicité en Corée, du Nord au Sud

Quel est le poids du facteur ethnique, voire racial, dans les événements politiques actuels de la péninsule coréenne?

Au Nord "communiste", la "bonne" et la "mauvaise" origines, transmises héréditairement, mais aussi certaines mesures

eugéniques comme la mise en place d'une "dynastie" au sommet de la hiérarchie, soulignent l'importance du facteur

biologique.

Au Sud, l'écho favorable rencontré par la Sunshine policy et sa récente avalisation par l'élection de Roh Moo-hyun, ne

sauraient se comprendre sans la conscience aiguë d'une unité, sinon d'une unicité ethnique et raciale de tous les

Coréens, de part et d'autre du 38 ème parallèle. C'est cette donnée, nécessaire à toute analyse en profondeur des

tensions vécues dans et autour de la péninsule coréenne, son importance comme ses limites, que nous voudrions mettre

en évidence.

7. DROITS ET INSTITUTIONS EN ASIE: GLOBALISATION ET DEMOCRATISATION Coordinateurs :

- Jean-Pierre CABESTAN, Directeur du Centre d'Etudes Français sur la Chine contemporaine (CEFC)

- Leïla CHOUKROUNE, Doctorante en droit international, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I)

Intervenants : Mesmin Saint-Hubert, Eric Seizelet En 1993, lors de la Conférence de Vienne sur les droits de l’homme, Boutros Boutros Ghali, ancien Secrétaire général des Nations Unies, résumait par ces quelques lignes son idée de la démocratie : « La démocratie n’appartient à personne. Elle peut être et doit être assimilée par toutes les cultures. La démocratie n’est pas un modèle à copier sur certains Etats, mais un objectif à atteindre par tous les peuples ! Elle est l’expression politique de notre patrimoine commun ». On se souvient également que la remise en cause de l’universalité des idées démocratiques et des droits de l’homme venait à l’époque d’Asie avec l’apparition du concept de « valeurs asiatiques » dont Lee Kuan Yew, Premier ministre de Singapour de 1959 à 1990, et Mohamad Mahatir bin Mohamad alors Premier ministre de Malaisie, étaient les deux principaux exégètes. Une décennie plus tard, l’Asie de la globalisation économique, de la crise de 1997, de la transition politique, de la régionalisation et des mouvements d’autodétermination, ne remet plus en cause aussi massivement l’universalité des droits de l’homme ou d’Etat de droit. Bien au contraire, devenue plus nettement plurielle, l’Asie fonde aujourd’hui plus nettement son développement économique (Chine), ses réformes institutionnelles (Japon, Chine, Inde) et sa stabilité sociale (Inde, Chine) sur la mise en place d’un Etat de droit, quelles que soient l’ambiguïté de la définition qui est parfois donnée de ce concept ou l’approche encore souvent utilitariste qui en est privilégiée. Ces incertitudes tiennent au fait que l’idée démocratique, qui a séduit Taiwan et la Corée du Sud, ne fait pas partout l’unanimité. La diversité de l’Asie n’en est ici que plus grande. Démocratie la plus peuplée de la planète, l’Inde n’a pas su exporter ce modèle à son voisin chinois alors que le Japon semble s’enliser dans une crise institutionnelle et politique sans précédent. Les spécificités des droits et des modèles politiques

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.21

asiatiques n’en rendent pas moins nécessaire l’identification de concepts communs seuls capables de fournir une grille de lecture pertinente. Alors que les institutions japonaises se trouvent aujourd’hui à un tournant de leur histoire, Eric Seizelet se propose d’explorer les causes du dysfonctionnement du pouvoir législatif nippon et de monter pourquoi la rénovation de la Diète participe non seulement de la restructuration de l’Etat et du ré-équilibrage des pouvoirs entre l’exécutif et le législatif mais aussi, de la nécessaire redistribution des rapports de force entre majorité et opposition. C’est également le thème de la rénovation du parlementarisme qui occupera Jean-Pierre Cabestan puisque celui-ci a choisi de mettre en lumière le rôle nouveau joué par l’Assemblée populaire nationale chinoise dans le contrôle de l’exécutif et l’émergence progressive bien que limitée d’un véritable droit constitutionnel. En Chine toujours, Leïla Choukroune posera la question de savoir si l’internationalisation et la rationalisation du droit réalisées notamment au travers d’une accession à l’Organisation mondiale du commerce qui visait entre autres à construire le socle d’un futur Etat de droit, seront capables d’enclencher les réformes nécessaires à l’établissement d’une démocratie pluraliste et respectueuse de la personne humaine. En Inde enfin, Mesmin Saint-Hubert montrera pourquoi le mécanisme de contrôle de constitutionnalité a su emprunter aux modèles américain et kelsenien en mettant en place un contrôle diffus et un contrôle concentré, tout en adaptant un concept classique tel que celui de « due process of law ». Tandis que l’avenir politique et économique de l’Asie ne pourra se faire sans ces trois grandes puissances que sont le Japon, la Chine et l’Inde, ces pays seront-ils capables de tracer pour le reste de la région la ou les voies institutionnelles et juridiques qui lui permettront de réussir son adaptation à la globalisation et au besoin de démocratie et de justice que l’on perçoit de plus en plus nettement dans cette partie du monde ?

Jean-Pierre CABESTAN : Directeur de Recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) ;

Directeur du Centre d’Etude Français sur la Chine contemporaine-Hong Kong (CEFC-Hong Kong)

La montée en puissance de l'Assemblée populaire nationale : vers l'émergence d'un droit constitutionnel en Chine?

Depuis le début des réformes économiques en Chine, l'Assemblée populaire nationale (APN) a vu son influence

s'accroître. Il est clair que cette institution reste sous la tutelle du Parti communiste qui continue d'exercer un rôle

politique dirigeant. Cependant, la volonté de mettre en place un "Etat de droit", le rôle notable joué par l'APN en matière

législative, son ambition de mieux contrôler l'action du gouvernement et le plus grand pluralisme des débats qui s'y

déroulent ont renforcé la position institutionnelle de cette instance. L'APN est-elle pour autant en mesure de favoriser

l'émergence d'un véritable droit constitutionnel ? Tandis que les procédures formelles énoncées par la Loi fondamentale

chinoise sont mieux respectées, le droit constitutionnel éprouve de réelles difficultés à s'affirmer. Et surtout, le contrôle de

la constitutionalité des lois reste aujourd'hui embryonnaire.

Leïla CHOUKROUNE : Doctorante en droit international, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I) ;

Ancienne boursière de recherche, Centre d’Etude Français sur la Chine contemporaine-Hong Kong (CEFC-

Hong Kong)

L’internationalisation du droit chinois participe-t-elle à la démocratisation du régime ?

Il y tout juste un an, la Chine devenait le 143ème membre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). L’un des

espoirs suscités par cette accession reposait sur la possibilité de mettre en place un Etat de droit fondé sur

l’internationalisation des normes chinoises. Les amendements apportés aux statuts du Parti communiste chinois, lors de

son XVIe Congrès, participent en apparence de cette même logique puisque la mission qui a été confiée par Jiang Zemin

à son successeur, Hu Jintao, est de construire « une démocratie socialiste » gouvernée en toute complémentarité par

« le droit » (yifa zhiguo) et « la vertu » (yide zhiguo).

Mais à quel Etat de droit avons-nous aujourd’hui à faire en Chine ? Tout laisse penser qu’il s’agit en réalité d’un Etat de

droit sui generis incapable de s’affranchir du leadership du Parti et que l’on pourrait qualifier, comme certains n’ont pas

hésiter à le faire en dépit des problèmes posés par une telle qualification, « d’Etat de droit économique ». Reste à savoir

si cette juridicisation du régime chinois pourrait à terme concourir à sa démocratisation.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.22

Si l’histoire récente du droit chinois est celle d’une internationalisation des normes —pour ne pas dire occidentalisation—,

ce processus prend tout son sens avec la révolution juridique qui a été entreprise pour mettre la législation chinoise en

conformité avec le droit OMC. C’est ainsi près de 1500 textes de lois et de règlements nationaux et locaux qui ont dû ou

doivent encore, pour une grande partie d’entre eux, être abolis, amendés ou reformulés. Cette entreprise sans précédent

touche virtuellement tous les aspects du droit chinois des affaires.

Au cœur du processus d’internationalisation du droit chinois, l’accession à l’OMC n’est pas sa seule composante. Cette

évolution encore inachevée prend en effet sa source dès la première moitié du XXe siècle avec une première vague de

modernisation. Il faudra cependant attendre le début des années 1990 pour voir la Chine retranscrire en droit interne les

évolutions du droit international. Nous prêterons donc une attention particulière à cette pratique à partir de l’étude de cas

relatifs à différents aspects du droit chinois (affaire, civil, pénal), mais en tenant compte également de la participation de

la RPC aux travaux d ‘organisations internationales à vocations régionales ou universelles.

L’internationalisation du droit chinois et l’hyper activité législative qui en découle ne sont donc pas inédites. Elles

soulignent avec d’autant plus de force les difficultés auxquelles est confrontée la Chine en matière d’effectivité alors que

seule l’abrogation par désuétude sert à réguler les excès législatifs.

L’accession de la Chine à l’OMC était l’occasion d’initier une phase de rationalisation du droit chinois en conformité avec

les principes d’application uniforme, de transparence, et de contrôle juridictionnel des actes administratifs consignés dans

son Protocole d’accession. L’ensemble de ces transformations visait à construire le socle d’un futur Etat de droit lui-

même nécessaire à l’établissement d’une démocratie pluraliste et respectueuse de la personne humaine.

Or, il nous semble que l’accession de la Chine à l’OMC a eu pour effet pervers d’alimenter la confusion qui règne

aujourd’hui autour de la définition de l’Etat de droit.

Fondé sur le principe de la légalité et son contrôle juridictionnel, l’Etat de droit vise en quelque sorte à circonscrire la

puissance de l’Etat par le droit et à garantir la protection des droits de l’Homme. L’Etat de droit se caractérise également

par la séparation des pouvoirs, l’indépendance de la justice, l’existence d’un contrôle de constitutionalité et d’un contrôle

juridictionnel des actes administratifs.

Aucune de ces conditions n’est aujourd’hui réunie en Chine en dépit des efforts méritoires déployés afin de réformer

l’appareil judiciaire. De plus, comme nous aurons l’occasion de le montrer, l’Etat de droit tel qu’il est défini aujourd’hui par

Pékin ne vise à rien d’autre qu’à renforcer la main mise du Parti sur l’Etat en juridicisant son action. Il est d’autre part

volontairement limité aux aspects économiques d’un droit au service de la croissance et donc de la stabilité sociale. En

ce sens, il n’est en rien l’un des piliers d’un futur régime démocratique.

Eric SEIZELET : Directeur de recherche, Institut d’Asie Orientale (IAO, CNRS) ; professeur, Institut National

des Langues et Civilisations Orientales (INALCO)

Réforme de l’Etat et rénovation de l’institution parlementaire au Japon

Les institutions politiques japonaises se trouvent dorénavant placées à un tournant de leur histoire. La Diète japonaise a

adopté en 1999 un train de mesures visant, à travers la réorganisation des administrations centrales, à restaurer la

prééminence du politique sur la bureaucratie et à renforcer les pouvoirs du Premier ministre. La même année, deux

commissions d’investigation constitutionnelle ont été installées dans chacune des deux chambres du parlement nippon

afin d’explorer les voies d’une réorganisation d’ensemble de l’architecture des institutions de 1946. Pour autant, si ces

évolutions sont connues, il en est d’autres qui, pour l’être moins, sont tout aussi importantes car elles touchent au pouvoir

législatif. Le Japon souffre en effet, comme dans la plupart des pays avancés, d’une crise de la représentation liée à

l’autonomisation progressive de la société civile et à la concurrence de formes alternatives d’association et de

mobilisation citoyennes. A cela s’ajoutent le discrédit de la classe parlementaire engluée dans de multiples scandales

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.23

politico-financiers et la soumission de fait de la Diète à la technocratie. Le constat d’un « déclin du parlement » longtemps

considéré comme une simple chambre d’enregistrement par le parti libéral-démocrate au pouvoir, s’est longtemps imposé

dans la littérature politique.

Pour autant, depuis le milieu des années 1990, de multiples rapports se sont succédé sur les bureaux des présidents des

deux chambres, visant à la réactivation des débats parlementaires, à augmenter les capacités législatives des élus, à

instaurer davantage de transparence dans la gestion des fonds et des personnels mis à la disposition des parlementaires

pour accomplir leur mission, à renforcer l’éthique des élus et à mettre fin aux négociations de couloir afin de restaurer le

rôle de l’hémicycle en tant qu’espace public de discussion. Dans le même temps, la Diète japonaise ne devrait pas

échapper à une réorganisation des services des chambres souvent jugés pléthoriques et peu efficaces, aux yeux mêmes

des membres de la Diète.

La présente communication se propose ainsi d’explorer les causes de dysfonctionnement de l’institution parlementaire

japonaise, de faire la synthèse des propositions de réforme effectuées et d’en évaluer la faisabilité, à la lueur, en

particulier du nouveau contexte politique des gouvernements de coalition et des fluctuations du paysage politique nippon.

Si certaines des mesures proposées appellent sans doute des dispositions législatives appropriées, d’autres visent

surtout à réformer les pratiques parlementaires en vigueur. La rénovation de la Diète participe certes d’une prise de

conscience salutaire de la faiblesse du pouvoir législatif japonais au moment même où la problématique de leadership

politique est au cœur des réflexions sur la restructuration de l’Etat. Elle peut tout aussi bien s’enliser dans les méandres

des intérêts partisans, car au delà même des interactions entre le législatif et l’exécutif, elle appelle également à une

redistributions des rapports de forces traditionnels entre majorité et opposition. afin d’éclairer le point de vue propre à la

société concernée, lequel doit servir de base à une comparaison portant sur le contexte asiatique envisagé dans son

ensemble.

Mesmin SAINT-HUBERT : Doctorant, Centre d’Etude Français sur la Chine contemporaine-Hong Kong (CEFC-

Hong Kong)

Le contrôle de constitutionalité en Inde

L’indépendance acquise, aussitôt les nouveaux dirigeants de l’Inde entreprirent de doter ce nouvel Etat d’une

Constitution démocratique. La ‘Résolution sur les buts objectifs’ présentée par J. NEHRU et adoptée à l’unanimité par

l’Assemblée constituante posait les grands principes que la future Constitution devaient consacrer :’Une République

indépendante et souveraine dans laquelle tout le pouvoir et l’autorité des organes institués et gouvernementaux sont

issus du peuple et dans laquelle seront garantis à tout le peuple de l’Inde la justice sociale, économique et politique,

l’égalité de statut, l’égalité d’opportunité et l’égalité devant la loi, la liberté d’expression, de croyance, de foi, de culte…

Ce discours démocratique sera immédiatement suivi d’une réflexion sur les différentes techniques juridiques permettant

d’atteindre ces ‘buts et objectifs’.

Formés par les plus prestigieuses universités anglaises, les rédacteurs de la Constitution vont doter l’Inde de

mécanismes constitutionnels inspirés du système juridique anglo-saxon. L’Inde a ainsi hérité de la Grande Bretagne le

régime parlementaire et le gouvernement du modèle de Westminster. Et des Etats-Unis, elle s’est inspirée du principe

fédératif, d’une déclaration des droits, du contrôle de constitutionnalité et d’une Cour suprême au sommet de la hiérarchie

judiciaire.

Ces emprunts à des systèmes juridiques étrangers auraient pu être source de difficultés dans leur application à une

réalité sociale très différente de leur terrain d’origine. Malgré tout, l’analyse de la vie politique indienne de ces 50 années

montre que la greffe démocratique a réussi. On peut attribuer une partie de ce succès à la Cour suprême indienne qui a

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.24

su ne pas rester prisonnière du cadre juridique anglo-saxon en l’adaptant aux réalités socio-économiques et culturelles

de l’Inde.

Le mécanisme de contrôle de constitutionnalité mis en place par la Constitution indienne illustre parfaitement ces deux

points : emprunt et adaptation. En effet, la Constitution de 1950 a retenu à la fois le modèle américain et le modèle

kelsenien du contrôle de constitutionnalité en mettant en place un contrôle diffus (article 226) et un contrôle concentré

(article 32) (Partie I). Toutefois, ce contrôle assuré par les tribunaux a suscité des réactions hostiles de la part du

législateur et a nécessité qu’un concept classique tel que celui de ‘due process of law’ soit adapté progressivement à la

situation indienne (II).

III- Art 8. MUSIQUE ET RITUEL EN ASIE Coordinateur : François PICARD, professeur d'ethnomusicologie, Chine (la fête du Sacré Coeur de Jésus en

l¹église du Beitang, Pékin, 1772-2002), responsable du DEA Histoire de la musique et musicologie, Université

Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV)

Intervenants : Fabrice CONTRI, Véronique JACOB DE LAVENERE, Bruno MESSINA, William TALOTTE, Laurence

QUICHAUD 'La liturgie parle sans faire de discours' Paul De Clerck On ne peut aujourd'hui rendre compte des musiques traditionnelles, d'ici ou d’ailleurs, en s'en tenant aux concepts périmés et imposés de l’extérieur qui opposent savant et populaire, de tradition orale ou relevant de l'écrit, ou encore tradition et modernité. L'analyse en fonction ‹ du lieu : dans le temple, dans sa cour ou aux alentours, dans la cité, par les rues, les chemins, ou encore dans les maisons ‹ du temps : temps prescrit, calendérique, temps familial, social, régulier, occasionnel ‹ de la fonction des acteurs : officiants d’un culte, spécialistes, associations, professionnels ‹ rend mieux compte de la diversité des situations, des enjeux, en particulier esthétiques, et, en premier lieu, des vitesses différentes d'évolution. Le manuscrit, l'imprimé, l’enregistré, le reproduit s’inscrivent bien dans ces différentes vitesses. De son côté, le rituel, au-delà des résultats acquis par l'analyse formelle ou génétique (historique), montre souvent non seulement la place accordée à ce qu’il est convenu, ici ou là, d'appeler 'la musique', mais que son organisation même est structurée par le sonore ; la musique y intervient de manière particulière ‹ on pense ici aux instruments à hauteurs distinctives (mélodiques) ‹ mais aussi comme composition générale où lectures, récitatifs, psalmodies, cloches et tambours, à sons indéterminés, chants donnent une lecture claire du déroulement. On pourra ici reprendre la vieille analogie entre rituel/messe et tragédie/opéra, en faisant toutefois l’économie du délire d’interprétation. Il se trouve que les méthodes (analyses paradigmatiques et synoptiques) d’analyse musicale et d’analyse structurale des rituels sont les mêmes, et qu'au-delà du concept flou de performance la notion d'acteur, dans son espace et dans son temps, commune aux deux domaines, apporte une vision neuve, au-delà des fantasmes la place de la croyance ou sur la sincérité dans l'efficacité symbolique.

François PICARD : Professeur d'ethnomusicologie, Université Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV), Centre de

Recherches Langages Musicaux et Groupe de Sociologie de la Religion et de la Laïcité

La fête du Sacré Coeur de Jésus en l’église du Beitang, Pékin, 1772-2002,

Le Père Louis Le Comte écrivait en 1692 : « Il faut aux Chinois, même en manière de dévotion, quelque chose qui frappe

les sens. Les ornements magnifiques, le chant, les processions, le bruit des cloches et des instruments, les cérémonies

de l’Eglise, tout cela est de leur goût et les attire au culte divin. » Après avoir reconstitué les musiques de la messe des

jésuites de Pékin, le travail en cours vise à les restituer aux fidèles d’aujourd’hui ; enjeu de mémoire, d’histoire,

expérience d’ethnomusicologie expérimentale.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.25

Fabrice CONTRI : Doctorant, Université Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV), Centre de Recherches Langages

Musicaux

Le Bhadrakâli-Thiyattu, un rituel domestique du Kerala

Le rituel Bhadrakâli-Thiyattu – ‘danse du dieu’ ou ‘danse du feu’ – est dédié, comme nombre des rituels du Kerala, à la

déesse-mère Kâli. Réalisé dans l'enceinte du temple ou parfois dans la maison, il se présente comme l'alliance de

plusieurs formes d'expression artistique : le dessin (le kal am à base de poudres colorées), la musique (récitations et

chants à Kâli), le théâtre (narration vocale et gestuelle du combat de la déesse Kâl i avec le démon Dârikkan) et la danse.

Cérémonie ‘domestique’, commanditée par un dévot, une famille ou un village, le Bhadrakâli-Thiyattu est interprétée par

un seul acteur, initié et membre d'une famille qui possède l'exclusivité de son exécution. L'action, concentrée dans un

espace et un temps réduits, atteint, du fait même de ces limites, une rare efficacité. Bien qu’il possède de nombreux liens

avec les autres formes dramatiques du Kerala, le Thiyattu se caractérise néanmoins par un répertoire musical, un

instrumentarium, certaines techniques chorégraphiques spécifiques.

Cette communication visera dans un premier temps à comprendre de quelle manière s'articulent, au sein de ce rituel,

musique et scénographie. A partir de cette analyse, le propos s'attachera à mettre en valeur l'aspect synthétique du

Bhadrakâli-Thiyattu : synthèse des arts, synthèse des rituels dramatiques et religieux du Kerala.

Cette recherche apparaît comme le fruit de rencontres avec le monde du Kathakali et du chant du Gîtâ-Govinda ainsi que

de recherches effectuées sur différentes formes musicales et rituelles du Kerala. J'étudie également dans cet état de

l'Inde du Sud auprès de maîtres ‘classiques’ en tant que musicien mais aussi dans le cadre de ma thèse qui aborde les

processus de la composition dans la musique carnatique.

Véronique JACOB DE LAVENERE : doctorante, Université Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV), Centre de

Recherches Langages Musicaux

La Musique d’Orgue à bouche au cœur de rituels Hmong et Lolo :Les funérailles Hmong et le Nouvel an Lolo (Laos)

L’Orgue à bouche, instrument emblématique d’un grand nombre de populations du Laos, se révèle comme un instrument

paradoxal, à la fois profane et rituel, occupant une place toute particulière dans les pratiques religieuses.

L’analyse comparative de deux rituels (les funérailles Hmong et le nouvel an Lolo), leur organisation sonore, les critères

de bon fonctionnement et d’efficacité prêtés à leur musique, permettront de soulever la question de « la spécificité »

d’une musique rituelle – par le caractère unique d’une musique propre à un rituel – et des « similitudes » - par la

présence de traits musicaux communs aux rituels de deux populations pourtant bien différentes- .

Bruno MESSINA : doctorant, Université Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV), Centre de Recherches Langages

Musicaux

Une messe catholique à Java

S'il est vrai qu'à Java le catholicisme ne s'est pas véritablement développé avant le début du XX° siècle et qu'il a surtout

participé à la diffusion de la culture occidentale, on peut noter que paradoxalement, dans son ensemble, la minorité

catholique javanaise est restée attachée à la science kejawen et a préservé dans l'église quelques éléments forts de la

culture javanaise.

Ainsi, encore aujourd'hui, on peut voir -et entendre- des offices catholiques chantés en javanais par des officiants vêtus

de batik traditionnels et accompagnés des instruments du gamelan.

À l'appui des documents collectés lors de messes catholiques dans les principales églises de Java Central (ainsi qu'à

Jakarta) ces dix dernières années nous présenterons quelques aspects singuliers du rituel catholique ainsi adapté.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.26

William TALLOTTE : doctorant, Université Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV), Centre de Recherches Langages

Musicaux

Musique et rituel en pays tamil

Conques, cloches, chant, musique instrumentale et récitation védique interviennent aujourd'hui lors des rituels (pûjâ) des

temples brahmaniques du pays tamoul. Simples sons ou musique en tant que telle, leurs rôles diffèrent : les conques et

les cloches jouent comme signaux, le chant et la musique instrumentale comme offrandes et la récitation védique comme

‘actes de voix’, indissociables des actes rituels (gestes, manipulations...) ; dans tous les cas ils soulignent la structure du

rituel. A différents niveaux, musique et rituel fonctionnent donc de paire.

A travers l'analyse d'une pièce instrumentale jouée - en lieu et en temps - par les sonneurs et les batteurs du periya

mêlam nous tenterons 1/ de préciser ce lien, 2/ de montrer combien la structure d'une pièce est elle-même dépendante

de son contexte et, au delà 3/ de voir s'il y a écho entre structures musicales et structures rituelles.

Laurence QUICHAUD : post-doctorante, Université Paris-Vincennes (Univ. Paris 8)

Le dixi du Guizhou ou la danse des dieux, Chine

Le dixi du Guizhou est un ‘théâtre’ rural d’origine rituelle qui a lieu deux fois par an, dans les environs de Anshun, dans la

province du Guizhou, au sud-ouest de la Chine. La présentation de ces pratiques, qui a suscité l’écriture d’une thèse, doit

se comprendre dans une perspective ethnoscénologique. Elle ne se veut ni un travail anthropologique ni une étude

sinologique traditionnelle. L’anthropologie, en effet, ne permettrait pas de prendre en compte ‘le noyau de sens’ de la

performance mais l’apprécierait comme une particularité des fêtes ou des rites auxquelles elle est liée. Considérée

comme un avatar d’autres comportements, elle perdrait son intégrité et ne serait pas envisagée pour elle-même, du

moment qu’elle appartient à une autre sphère culturelle. Saisir les pratiques performatives dans leur dynamique, dans

leur processus d’élaboration, comprendre comment elles se réalisent nécessitent à la fois de les ‘isoler’ au sens chimique

du terme ou du moins de ne pas les voir comme une dégénérescence des rites ou un mime de la réalité. En effet, si

pratiques performatives et religion se recoupent souvent, pourquoi ne pas les considérer pour elles-mêmes et en elles-

mêmes et non comme une ‘illustration’ d’une cérémonie religieuse ou rituelle. L’ethnoscénologie permet en ce sens de

redonner toute leur intégrité aux pratiques performatives. Nous essaierons ici d’aborder les pratiques de dixi dans leur

dimension performative en tenant compte du contexte culturel dans lequel elles s’inscrivent, à partir d’une expérience de

terrain.

Après avoir brièvement retracé l’histoire du dixi forgé par les tunbao, soldats laboureurs établis dans le Guizhou sous le

règne de Zhu Yuanzhang (1328-1398), nous exposerons l’origine rituelle du dixi. En effet, le dixi entretient des liens

étroits le nuoxi, théâtre d’exorcisme, dont le Rituel des Zhou (Zhouli) de l’époque confucéenne ou les Entretiens de

Confucius (Lunyu) nous ont légué quelques descriptions. Dans les rituels de nuoxi comme dans les représentations de

dixi, l’accent est mis sur les déplacements et la gestuelle des acteurs-paysans, la puissance des chants et de la musique

d’accompagnement ainsi que sur le port des masques. L’énergie dégagée doit alors expulser les pestilences (zhuyi) et

ouvrir la porte des richesses (kai caimen) afin d’aborder la saison à venir sous des auspices favorables.

Dans un deuxième temps, nous parlerons des caractéristiques du dixi, en particulier du déroulement des spectacles qui

débutent par l’ouverture de la malle (kai xiang) dans laquelle se trouve les masques et le balayage de la scène (saoshou

chang).

La prépondérance des gestes et leurs liens avec les rituels antiques s’illustrera par une présentation du pas de Yu et

quelques danses des villages Zhengjia tun ou Penglai. Ensuite, nous étudierons plus en détails les types de

personnages, matérialisés par des masques en bois sculptés. Ceci nous donnera l’occasion de parler un peu du

répertoire constitué en majorité d’épisodes du Roman des Trois royaumes (Sanguo yanyi). Nous terminerons cette partie

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.27

en présentant la déclamation et la façon de chanter spécifique des acteurs accompagnés par le gong et le tambour,

instruments traditionnels des rituels.

Enfin, nous conclurons par l’importance du dixi au sein de la communauté villageoise à l’heure actuelle avant de

rapporter quelques témoignages d’acteurs-paysans de Zhengjia tun et Jin guan.

9. ASPECTS DE LA RECHERCHE EN ARCHEOLOGIE ET EN HISTOIRE DE L'ART EN INDE ET EN ASIE DU SUD-EST Coordinateur : Michel JACQ-HERGOUALC’H, Directeur de recherche, Centre National de la Recherche

Scientifique (Section 33, CNRS), Archéologue et historien de l'art de l'Inde et de l'Asie du Sud-Est indianisée

Intervenants: Anne-May CHEW, Hedwige MULTZER O’NAGHTEN, Bérénice BELLINA, Catherine RAYMOND Je souhaite constituer cet atelier, quelque peu informel, parce que je considère que la recherche en archéologie et en histoire de l'art sur le domaine géographique qui est le mien est aujourd'hui totalement sinistrée par l'incapacité des institutions en place (CNRS, EFEO, Université) à recruter des jeunes chercheurs récemment formés. Il n'en a pas toujours été ainsi. Le CNRS, comme l'EFEO, ont eu autrefois de nombreux chercheurs dans ces disciplines, et sur ce domaine, qui ont largement contribué à faire progresser la connaissance sur les civilisations de cette partie du monde. Quant à l'Université, elle est tout aussi frileuse, le seul poste de professeur en titre sur ces sujets et sur ces domaines étant celui du Professeur Bruno Dagens à Paris III. C'est donc un cri d'alarme que je souhaite pousser en donnant la parole à quelques-unes des personnes qui pourraient constituer la relève française dans ces disciplines. Anne-May CHEW : Docteur ; Chercheur associé, Laboratoire Péninsule Les temples rupestres de Po Win Taung. Un site archéologique d'une grande importance Située dans la zone sèche en Birmanie centrale, Po Win Taung, ou Colline de Po Win, est un site archéologique qui recèle environ huit cents grottes excavées dans la roche gréseuse, sur plusieurs niveaux. Les façades de ces grottes, qui vont de la simple pièce de méditation à l'imposant temple-sanctuaire, sont décorées de motifs ornementaux en bas et hauts reliefs, avec certaines entrées encadrées de sculptures, humaines ou animalières, en ronde-bosse. A l'intérieur, de nombreuses images de Budha sont sculptées directement dans le rocher. Le nombre de sculptures s'élèverait à environ 3 500. Une centaine de grottes-sanctuaires ont leurs parois ornées de peintures murales illustrant des scènes bouddhiques traditionnelles (les 28 Buddha du Passé, les vies antérieures (jatakas) du Buddha Gautama, et la vie du Buddha historique) ainsi que des scènes de la vie quotidienne. Les oeuvres de Po Win Taung permettent, d'une part, de saisir sa richesse artistique et, d'autre part, d'identifier les diverses influences étrangères (chinoise, indienne, portugaise, siamoise, musulmane et européenne) qui s'y sont excercées. Les productions artistiques de Po Win Taung datent surtout de la seconde période d'Ava (du XVIe au XVIIIe siècle) et de la période coloniale (du dernier quart du XIXe siècle au milieu du XXe siècle). Le style d'Ava est communément désigné en Birmanie sous le nom de Nyaung Yan. Ce nom est celui d'un roi qui a régné pendant une courte période (de 1597 à 1606). Quant à la période dite coloniale, elle représente la continuité du style de Mandalay que l'on peut qualifier d'art birmano-colonial.

Hedwige MULTZER O’NAGHTEN : Doctorante, Université de la Sorbonne nouvelle ( Univ. Paris III)

La géographie divine du royaume de Jayavarman VII, Cambodge, fin du XIIe siècle-début du XIIIe siècle A.D., les

modes d'aménagement du territoire

Plus qu'aucun autre souverain khmer, Jayavarman VII, souverain de la fin du XIIème siècle et du début du XIIIème, a

multiplié les fondations, couvrant son royaume d'images et d'édifices de différentes catégories. En cela il n'a fait qu'obéir

à la tradition khmère aux termes de laquelle le souverain est tout à la fois le protecteur, mais aussi le possesseur du sol

qu'il se doit de marquer de son empreinte comme d'un sceau.

Cependant, il se distingue de ses prédécesseurs par la diversité des moyens mis en œuvre et leur nombre

impressionnant à l'échelle d'un territoire extrêmement vaste. Les inscriptions de Ta Prohm et Preah Khan attestent

effectivement de l'existence de programmes de construction ambitieux - sanctuaires nouveaux, refondation, diffusion

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.28

d'images divines - et mentionnent des toponymes, pas tous identifiés de nos jours, mais qui permettent cependant de se

faire une idée des réseaux mis en place.

Certaines de ces fondations ont particulièrement retenu l'attention des chercheurs par leurs spécificités architecturales et

iconographiques ; s'appuyant sur des modèles définis par le pouvoir, elles se caractérisent notamment par leur aspect

répétitif et systématique.

Nous ne nous attarderons pas plus que nécessaire sur les éléments typologiques de ces différentes catégories, rappelant

simplement les caractéristiques les plus évidentes - architecturales et iconographiques - qui permettent au premier coup

d'œil de les identifier comme datant du règne de Jayavaman VII.

Ce qui nous intéresse plus particulièrement aujourd'hui, dans le cadre de nos recherches, c'est la manière dont ces outils

ont été utilisés au niveau de l'organisation du territoire, ainsi que les différentes interprétations - historique, religieuse,

socio-économique - que l'on peut en tirer.

A travers une analyse d'ensemble du territoire de Jayavarman VII, basée sur des investigations récemment menées sur

le terrain, nous souhaitons mettre en lumière les critères fondamentaux ayant présidé à l'aménagement de l'espace et,

par extension, en dégager les fondements des grandes orientations du règne.

Cette approche devrait nous amener à proposer de nouvelles interprétations concernant les spécificités du règne de

Jayavarman VII.

Bérénice BELLINA : Docteur associée, Langues, Textes, Histoire et Civilisations du Monde indien (laboratoire

UPRES-A 7019)

La vision des échanges dans la Baie du Bengale au XXème siècle

La vision des échanges entre les deux ensembles régionaux que sont l’Asie du Sud et l’Asie du Sud-Est, a varié tout au

long du XXème siècle. Selon le contexte politique et les régions concernées, les archéologues et historiens ont favorisé

l'hypothèse de la colonisation indienne, celle de l'influence culturelle indienne impliquant une plus ou moins forte

acculturation, celle d'une acquisition d'éléments indiens réélaborés localement ou, enfin, celle d'une évolution sud-est

asiatique indépendante. Cet exposé présentera les grandes étapes de l’historiographie du sujet et l’état de la question en

ce début du XXIème siècle.

Catherine Raymond, Associate Professor, Southeast Asian Art History, Director, Center for Burma Studies,

Adams Hall Rm. 410, Northern Illinois University:

Nouvelles recherches et mise en valeur du patrimoine au Laos: Les peintures murales de Vat Sisaket à Vientiane.

Les peintures murales dans l’enceinte des monastères appartiennent aux traditions des pays bouddhistes d’Asie du Sud-

Est. Les histoires racontées sont généralement très populaires et jouent un rôle didactique.

Au Laos, les thèmes privilégiés sont généralement la vie du Bouddha et les dix derniers existences du futur Bouddha,

avec une préférence pour le Phavet, dernier des jâtaka où le prince Vessantara fait l’expérience du don ultime. Mais au

XIXe siècle, pour ce nouveau monastère royal construit au centre de l'ancienne cité, le roi en décida autrement et fit

représenter le Balasankhya jâtaka, ayant pour héros le prince Pookkharabat et son éventail magique, texte extra

canonique très populaire entre le XVIIe et le XIXe siècle au Lanna et au Laos.

Le Vat Satasahatsârâma, plus connu de nos jours sous le nom de Vat Sisaket, est certainement l'un des monuments les

plus emblématiques de la capitale lao. Il est l'unique joyau architectural attribué à Chao Anouvong, dernier roi de

Vientiane, qui l'embellit entre 1819 et 1824 , peu de temps avant la mise à sac de la ville par les Siamois. Seul ensemble

architectural religieux du XIXe siecle de l’ancienne cité royale, il est un des plus importants monuments historiques du

patrimoine lao.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.29

C’est au cours de l’étude menée depuis 2001 au Vat Sisaket par le projet d'inventaire iconographique lao, PIIL, dans le

cadre d’un accord de coopération entre l’INALCO et le département des Musées et de l’Archéologie du Ministère de

l’Information et de la Culture Lao, que fut découverte la signification des peintures murales du site. Suite à cette étude, sa

mise en valeur a été entreprise.

IV- Contestation et violences 10. INEGALITES, SOLIDARITES ET VIOLENCES DANS LES VILLES ASIATIQUES Coordinatrice : Laurence ROULLEAU-BERGER, Chargée de recherches au CNRS, Groupe de recherche sur la

socialisation, Université Louis Lumière Lyon 2, Ecole Normale Supérieure Lettres et Sciences Humaines

Intervenants : Djallal HEUZE, MA Li, SHI Lu, Kazuhiko YATABE Les villes asiatiques en Inde, au Japon et en Chine continentale sont aujourd'hui traversées par des processus ségrégation urbaine, de différenciation sociale et d'éviction économique. Comme d'autres ‘villes globales’ elles mettent à jour le phénomène de croissance des inégalités et de développement d'un individualisme de marché qui produisent aussi de nouvelles formes de solidarités, de résistances et de violences collectives. Ces contextes urbains révèlent comment des sociétés en transition se pluralisent en produisant des phénomènes de redéfinition et de fragmentation identitaire qui font émerger des figures d'individus comme ce que Robert Castel a appelé ‘l'individu par excès’ et ‘l'individu par défaut’, mais aussi des formes de mobilisation collective qu'il conviendra d'analyser. On regardera alors comment rentrent en conflit différents ordres de reconnaissance dans des sociétés différentes et quels types de relations à l'Autre ils génèrent.

Djallal HEUZE : Chargé de recherche, Centre d'Anthropologie de Toulouse, Centre National de la Recherche

Scientifique (CNRS)

Délinquance, communautarisme, expulsions et liens de proximité à Mumbai

Mumbai, la plus importante métropole d’Asie du Sud a derrière elle une longue histoire de violences qui frappent par leur

variété: grèves, émeutes interconfessionnelles, émeutes de subsistance, conflits de voisinage et linguistiques, affirmation

régionaliste, conflits de caste et last but not least, répression policière puisque les forces de l’ordre ne sont pas équipées

pour juguler les fortes tensions sans user d’armes à feu et que l’assassinat légal fait partie des politiques usuelles.

L’exemple des grandes émeutes et des attentats de 1992-1993, qui ont fait 1200 morts (dont 470 tués par la police),

6000 blessés graves, deux cent mille déplacés et cinquante mille maisons brulées dans le cadre d’un conflit opposant

des hindous et des musulmans est particulièrement intéressant. Il se présente comme la résultante sur le long terme de

facteurs divers, qui ont fini par se conjuguer. Il y eut d’abord les violences policières de l’état d’urgence (1975-1977)

période d’exception qui mit pourtant en place des protections populistes des habitants défavorisés et des migrants. Elles

seront ensuite l’objet de campagnes très dures d’opposition de la part des nouvelles couches dominantes. Ensuite, après

une vague de grèves marquée des rivalités brutales et de fusillades, mais ou l’espoir restait de mise, l’échec total du

terrible conflit des cotonniers (260 000 grèvistes sur un an et demi) a débouché sur la déstructuration à long terme du

mouvement ouvrier qui faisait rempart au communautarisme et à certains types de délinquance. La précarisation du

travail et les licenciements ont marqué toutes les années 1990, pendant que les émeutes interconfessionelles

exprimaient en langage crû le passage, sur la scène publique, de considérations de salaires et de la perspective de

progrès dans le cadre de ‘relations industrielles’ à une lutte acharnée pour l’espace et le droit de rester dans la ville,

exprimée par une chaine de conflit pour le contrôle d’un bien rare et de statuts dans la cité. Les politiques engagées dès

1981 par le Parti hégémonique du Congrès, visant à expulser les habitants du trottoir puis les résidents en bidonvilles

illégaux (30% de la population) avant de commencer à viser les résidents de bidonvilles légaux (18% env) et les habitants

de taudis anciens légaux (15%) se sont traduites par des millions d’évictions et un climat de plus en plus délétère,

marqué par le surgissement de délinquants spécialisés dans les expulsions, assez nombreux pour former une couche

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.30

sociale. Les changements au sein des classes dominantes plus que le tournant néo libéral du gouvernement, expliquent

la tendance. Cette dernière s’est vue freinée durant les campagnes électorales (de 1991 à 1995) qui ont chassé le

Congrès pour placer au pouvoir régional (important en Inde) la Shiv Sena et le BJP (nationalistes hindous) qui ont su

capitaliser la peur des émeutes et le sentiment d’instabilité des mal-lotis, expulsés, incrustés (protégés) et autres

malmenés des politiques urbaines. Quand leur coalition a pris le pouvoir en 1995 elle s’est cependant distinguée en

reniant ses engagements en faveur des mal logés, échouant à mettre en place ses programmes de construction, pillant

les deniers publics, faisant de la surenchère sur les polémiques sécuritaires lancées par les couches aisées, usant de la

répression policière et jetant vers des camps de relogements, des zones lointaines arides ou des marécages une

nouvelle population de plus d’un million de personnes. La construction d’hôtels de luxe de bureaux et de grandes tours a

continué changeant l’aspect des quartiers populaires, les nouveaux arrivants vivant protégés par des gardes et des murs

dans des milieux ou la solidarité locale ont été et demeurent encore très fortes, dans le cadre d’une vie de proximité

particulièrement intense. Ce sont ces dernières, avec le maintien des familles comme unités de socialisation qui

empêchent de nouveaux accès de fièvre mais Mumbai demeure une marmite de tensions, ce que sa forme géographique

ne fait d’ailleurs qu’accentuer.

MA Li : Chargée de cours, Université de Technologie de Troyes ; Chercheur associé, Institut d’Asie

Orientale-Lyon (IAO-Lyon)

Crises de légitimité, inégalités, et dissensions collectives violentes dans les villes chinoises

Depuis la mise en oeuvre des réformes, la légitimité du régime chinois a évolué, et repose maintenant bien moins sur

l’idéologie que sur un soutien spécifique lié à ses performances. Mais les réformes économiques ont également produit

une autre dynamique, qui commence à ronger le soutien du régime et qui alimente une crise de légitimité : les fruits du

développement sont très inégalement répartis. Les inégalités se creusent, ce qui génère un fort sentiment d’insatisfaction

parmi les plus modestes, qui forment la grande majorité de la population. Cette insatisfaction, ces griefs, cette colère des

exclus, génèrent et alimentent de nombreux mouvements sociaux, quelquefois violents. Les mouvements sociaux

urbains (grèves, manifestations) sont très nombreux, et sont principalement liés aux restructurations en cours : faillites

d’entreprises d’état, grands retards de paiement de salaires, retraites dérisoires ou non payées, licenciements,

dénonciation des conditions de travail. Après l’entrée de la Chine dans l’Organisation du Commerce Mondial en

novembre 2001, ces mouvements vont certainement s’amplifier. Des manifestations visent également à dénoncer des

problèmes structurels, tels que la corruption, la pollution, ou les réformes du système de sécurité sociale. Nous

considérons ici les liens entre les inégalités et les dissensions collectives, le mécanisme de leur déclenchement dans une

société en crise de légitimité, et leur place dans le régime chinois actuel. Dans le cadre de l’hypothèse de la " mobilisation

des ressources " appliquée aux mouvements sociaux dans les villes chinoises, nous considérons la façon dont ces

mouvements de dissensions collectives mobilisent et organisent leurs ressources, définissent leurs buts collectifs, et sont

interprétés et traités par le régime chinois. Ainsi, par exemple, les mouvements urbains sont relativement mal organisés

et ont surtout des buts à court terme d’ordre économique. L’étude des ressources, des objectifs et de la fragmentation de

ces mouvements permet finalement d’étudier pourquoi ceux-ci n‚ont pas mené à des révoltes de grande ampleur, malgré

leur nombre.

Laurence ROULLEAU-BERGER : Chargée de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique

(CNRS), Groupe de recherche sur la socialisation

SHI Lu : Maître de conférences, Université Jean Moulin (Univ. Lyon III) ; Membre associée à l'Institut d'Asie

orientale (IAO)

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.31

Inégalités, disqualification sociale et violences symboliques à Shanghai

Les villes chinoises, comme Shanghaï, sont traversées aujourd'hui à la fois par des processus de précarisation

économique et de ségrégation urbaine qui touchent tout particulièrement les provinciaux récemment installés et victimes

de situations de grande paupérisation. Comme d'autres villes globales elles mettent à jour le phénomène de croissance

des inégalités en Chine; en effet les provinciaux chinois sont immédiatement confrontés à leur arrivée en ville à des

situations de disqualification économique et sociale; ils apparaissent comme une population flottante, invisible

économiquement et très précarisée. La question posée est alors de comprendre comment ils passent du statut d'invisible

au statut de visible dans l’espace public, où et comment se fait l'accès à l'emploi, sur quels statuts et dans quels secteurs

d'activités en fonction du parcours migratoire et des types de mobilisation des ressources économiques, sociales,

culturelles et symboliques acquises dans les villages ou villes d'origine. L'accès aux marchés du travail urbain apparaît

très hiérarchisé en ce qui concerne ces populations migrantes, on peut alors parler "d'entrée segmentée" dans le sens où

on assiste à une véritable différenciation et hiérarchisation des segments du marché de l'emploi urbain en fonction des

régions d'origine des provinciaux qui se trouvent engagés tantôt dans des processus aléatoires et réversibles

d'intégration économique tantôt dans des processus de relégation sociale dans les villes chinoises. Ces migrants se

trouvent alors sans cesse confrontés au mépris social, objets de violences institutionnelles et symboliques; et c'est autour

de la distribution de biens économiques mais aussi de biens moraux que se réorganisent les concurrences et les

inégalités dans la Chine urbaine.

Kazuhiko YATABE : Maître de conférences, Université Denis Diderot (Univ. Paris VII)

La ville japonaise et la modernité : Intégration, différenciation, réflexivité

Construire une société intégrée et intégratrice, tel a été le souci majeur des dirigeants japonais, que ce soit après 1868,

date de l’ouverture du pays à l’Occident, ou après la défaite de 1945. Pourtant, les efforts pour maintenir l’archipel

comme un tout cohérent ne parviennent plus, depuis une dizaine d’années, à masquer les effets du processus de

différenciation à l’œuvre dans la modernité japonaise. L’écart grandissant entre la définition courante de l’identité et de la

culture japonaises, d’une part, et la réalité telle qu’elle est vécue par les individus, d’autre part, s’avère propice à

l’émergence d’une pluralité de points de vue, de prises de position, de comportements. La multiplication des pratiques et

des visions du monde, plus ou moins conscientes, plus ou moins discursives, proposées par les Japonais d’aujourd’hui

mettent à l’épreuve la reproduction routinière d’un ensemble de dispositifs institutionnalisés — que l’on a appelé le

“ modèle japonais ” — mis en place durant la période de forte croissance économique. Dans ce contexte, la ville joue un

rôle majeur. C’est l’espace par excellence où s’expérimentent les nouvelles façon d’être, où les individus, et en particulier

les jeunes générations, tentent de d’aménager avec plus ou moins de bonheur des lieux de “ relocalisation ”, pour

reprendre l’expression du sociologue Anthony Giddens.

11. ORDRE ET DESORDRES URBAINS DANS LA CHINE REPUBLICAINE

Coordinateur : Christian HENRIOT, Institut d’Asie Orientale (UMR 5062) ; Professeur d’Université ; Directeur

Scientifique Adjoint, Département SHS-CNRS

Intervenants : Aglaia DE ANGELI, Xavier PAULES La recherche historique sur la société urbaine dans la Chine de la fin de l’empire et de la République s’est déplacée progressivement de l’étude des ‘grands groupes sociaux’ (bourgeoisie, prolétariat) à celle du petit peuple, des marges sociales, des exclus, en opérant dans le même temps un recentrage sur la culture populaire et la ‘rue’. L’ambition de cet atelier est d’apporter un éclairage sur divers aspects de ce qui constitue des formes diverses de ‘rupture’ de l’ordre établi ou des usages sociaux dans les villes de la Chine

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.32

républicaine. Les quatre aspects retenus sont la consommation de l’opium, la criminalité, la population flottante et les réfugiés, et la contestation ouvrière spontanée. Xavier PAULES : Doctorant, Institut d’Asie Orientale-Lyon (IAO-Lyon) La vie des fumeries d’opium de Canton dans les années 1920-1930 La recherche historique a jusqu’à présent négligé l’étude des fumeries d’opium de la Chine de la fin des Qing et de la République. Cela est d’autant plus dommageable à la juste appréciation de leur nature que les témoignages généralement cités à leur sujet, et auxquels on les réduit donc, décrivent presque toujours des bouges sordides peuplés d’opiomanes misérables et faméliques. Je vais tenter de montrer, à partir de l’exemple de la ville de Canton, qui compte sous la République plusieurs centaines de fumeries, que, s’il est exact que des fumeries de ce genre existent, lieux dédiés à la consommation au moindre coût par une clientèle extrêmement populaire et parfois interlope, d’un opium de très mauvaise qualité, elles ne constituent néanmoins qu’une partie de l’ensemble des fumeries cantonaises. En effet, d’autres fumeries sont au contraire de véritables lieux de sociabilité, agréablement aménagés, où les clients viennent autant pour se rencontrer, boire le thé, manger des douceurs, discuter que pour fumer la drogue. Ma communication serait donc centrée sur la richesse de cette vie, qui rapproche les fumeries des maisons de thé et des lupanars, c’est à dire des lieux dont la vocation première (la consommation d’opium dans le cas des fumeries), ne recouvre qu’imparfaitement la variété des fonctions qu’ils assurent dans une ville où l’espace domestique privé à la disposition de la grande majorité de la population est réduit à sa plus simple expression.

Aglaia DE ANGELI : doctorante, Institut d’Asie Orientale (IAO)

Crime et châtiment: les institutions et l’ordre public

Shanghai a vu pendant la période républicaine s'enraciner et s'étendre la criminalité organisée et la diffusion de la

délinquance ordinaire. Le cadre politique, assez transformé comme le reste du pays, n'a pas fait obstacle à la mise en

place de nombreuses institutions modernes par les autorités locales. En même temps, la présence des concessions et

des institutions à elles liées faisaient de la ville un contexte international singulier.

Les années vingt et trente, qui sont particulièrement marquées par une augmentation du taux de croissance du crime,

offrent l'opportunité d'analyser la politique des autorités grâce à l'ouverture de nouvelles structures d’enquête et

judiciaires, la modernisation du corps de la police et enfin la réforme du code.

Les concessions et le droit d'extraterritorialité dont jouissaient les étrangers résidant à Shanghai (sauf pour les Russes et

les Allemands) créent d’une part un terrain privilégié pour l'expansion du crime organisé. De l'autre, ils posent le

problème de la façon dont pouvaient être réglées les questions judiciaires avec les Chinois résidant dans ces territoires.

L'ouverture de la Courte Mixte a donc été le fruit de la collaboration entre les autorités chinoises et les autorités

étrangères de deux concessions, soit pour arrêter les trafics du crime organisé, soit pour ouvrir un dialogue entre les

parties et régler les cas dits internationaux en évitant les moyens diplomatiques et en plaçant toutes les parties au même

niveau. Une analyse détaillée des institutions chinoises et de leur collaboration avec les institutions étrangères, en plus

de la Cour Mixte, permettra d’offrir une vision de ce qu'était le concept d'ordre public et ses transgressions dans le

contexte de la ville multiethnique et polycentrée qu’était Shanghai.

Christian HENRIOT : Institut d’Asie Orientale (IAO, UMR 5062) ; professeur d’Université ; Directeur

Scientifique Adjoint, Département SHS-CNRS

Réfugiés et population flottante à Shanghai dans les années 1930-1940

Les villes chinoises ont connu, à partir du milieu du 19e siècle, un accroissement des flux de population liés à la force

d’attraction des nouveaux marchés du travail et aux ravages des campagnes à l’occasion des grandes rébellions

paysannes. Shanghai représente l’archétype de la ville qui offre un nouvel espace économique vers lequel converge en

masse des travailleurs de tout le pays et constitue dans le même temps un havre de sécurité et de protection face aux

cataclysmes humains et naturels qui secouent le pays. Au 20e siècle, ces processus se sont doublés d’événements intra-

urbains (conflits armés) qui ont entraîné la ruine et départ en hâte de la population des quartiers sous administration

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.33

chinoise. A chaque calamité naturelle ou humaine, des vagues entières de réfugiés – ou de résidents devenus réfugiés –

ont submergé la ville et placé les institutions publiques et privées aux limites de leurs capacités de gestion et d’accueil de

ces populations déplacées. L’afflux de migrants temporaires ou de réfugiés par dizaines voire centaines de milliers,

entassés dans des habitations précaires, des camps de fortune ou tout simplement dans les rues, mettait en cause tant

l’ordre social, qu’économique ou les conditions sanitaires. Ce papier cherchera à montrer ce que représente le

phénomène de population flottante et de réfugiés et ses effets sur le contrôle social dans le Shanghai des années 1930

et 1940.

12. FIGURES DE LA CONTESTATION, DE L’ASIE DU SUD A L’ASIE ORIENTALE, A&B De l’Asie du Sud à l’Asie de l’Est et du Sud-Est, ce sont différentes figures de la contestation sociale, économique et politique que nous voudrions aborder au sein d’un grand atelier articulé en deux-fois-cinq interventions. Tandis que le panel autour de l’Asie du sud (Inde, Népal, Pakistan et diaspora) aborde des formes de contestation qui semblent spécifiques au temps long de l’histoire et de la société du sous-continent indien, les expressions contestataires décrites dans le panel sur la Thaïlande, la Chine, et le Japon s’inscrivent davantage dans le temps court de la « mondialisation ». Une interrogation commune sur le politique traverse cependant nos observations respectives qu’il s’agisse des mouvements féministes en Inde et au Pakistan, des mouvements dalits, des « maoistes » népalais ou des diasporas indiennes et pakistanaises, du mouvement paysan en Thaïlande, du mouvement ouvrier et des cybernautes en Chine, des syndicalistes et des sans abri au Japon. Bien que nos projets initiaux soient nés séparément et dans une perspective différente, nous voudrions essayer de les confronter, moins pour établir des comparaisons entre ces vastes ensembles géopolitiques que pour nous interroger ensemble autour de ce que contester veut dire.

PANEL A : SOCIETE CIVILE ET ESPACES DE CONTESTATION EN ASIE DU SUD Coordinatrice : Aminah MOHAMMAD-ARIF, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Centre

d’Etudes de l’Inde et de l’Asie du Sud (CEIAS)

Intervenants : Philippe RAMIREZ, Stéphanie TAWA-LAMA, Nicolas JAOUL

Les pays d’Asie du Sud, Inde, Pakistan, Bangladesh, Népal, Sri Lanka…, ont chacun adopté des régimes politiques différents (démocratie, monarchie, dictature militaire…), mais tous sont traversés par des mouvements (ultra)-nationalistes, fondamentalistes, etc. Ils sont en outre soumis, l’Inde et le Pakistan en particulier, à des tensions croissantes tant intérieures qu’extérieures (émeutes inter-communautaires, détérioration des relations entre New Delhi et Islamabad, etc.). Sur le plan social, de graves déséquilibres continuent de marquer les relations entre individus au sein de ces Etats, en fonction de leur sexe, de leur caste, de leur religion, etc. Face à ce paysage, la contestation s’organise, témoignage d’une société civile dynamique. Nous nous intéresserons donc à ces espaces de la contestation (nationaux et transnationaux) qui (dé)structurent les sociétés du sous-continent indien, en privilégiant quatre axes particuliers : les mouvements socio-radicaux, les mouvements féministes, les mouvements des intouchables (Dalits) et les espaces diasporiques.

Philippe RAMIREZ : Chargé de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)

La lutte pour les symboles dans quelques insurrections d'Asie du Sud

Les insurrections ne peuvent être réduites ni aux actions militaires par lesquelles elles attirent l'attention, ni aux étiquettes

« maoïstes » ou « ethniques » par lesquelles elles sont conventionnellement cataloguées. Car ces mouvements

développent des efforts notables pour construire et imposer, à l'intérieur autant qu'à l'extérieur, des édifices sémantiques

qui non seulement contestent l'état des relations ethniques ou économiques existantes, mais qui visent aussi une

régénération profonde du corps social. L'étude de ces corpus donne accès à la fois aux mécanismes de la lutte

symbolique dans le domaine politique et à la mutation des représentations du monde dans les sociétés d'Asie du Sud.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.34

Stéphanie TAWA-LAMA : Chargée de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) ;

rattachée au Centre d’Etudes de l’Inde et de l’Asie du Sud (CEIAS)

La difficile conversion politique du mouvement indien des femmes

Le positionnement du mouvement indien des femmes vis-à-vis de la scène politique a évolué depuis un siècle à travers

de spectaculaires revirements : né au sein du mouvement pour l'indépendance de l'Inde, le mouvement des femmes est

d'abord intimement associé à la politique du Congrès ; il connaît une « deuxième vague », plus radicale, dans les années

1970 à la faveur des mouvements de contestation, souvent violents, qui marquent les années précédant l'imposition de

l'état d'urgence par Indira Gandhi. Depuis les années 1980, le mouvement des femmes revient progressivement à la

scène politique « classique » (les partis, les élections), à travers sa longue campagne en faveur de quotas féminins à

tous les niveaux de la vie politique. Pour comprendre cette relation fluctuante entre le mouvement des femmes et la

scène politique, j'explorerai plusieurs facteurs : la composition sociologique du leadership du mouvement, ses ressources

matérielles et symboliques, ses choix stratégiques, enfin la difficile légitimation du genre comme catégorie politique (y

compris par et pour les féministes indiennes).

Nicolas JAOUL : doctorant, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

Le mouvement Dalit Panther et la contestation de la jeunesse Dalit à Kanpur (Uttar Pradesh)

Le mouvement Dalit Panther, inspiré à l’origine des US Black Panthers, s’est implanté à Kanpur à la fin des années 1970

au sein de la jeunesse scolarisée des milieux ouvriers intouchables. La contestation a été alimentée par la frustration et

le castéisme auxquels se heurtent ces jeunes, autant que par leur identification à la lutte du leader Dalit Ambedkar. Je

propose de revenir sur l’histoire locale de ce mouvement et de son leadership, en montrant notamment comment la fibre

révolutionnaire des débuts s’est heurtée à la réaction violente de la police et des dominants ruraux, puis muée en une

stratégie de cooptation des hauts fonctionnaires Dalits. L’organisation locale, plaçant ses jeunes militants en position de

leaders au sein de leurs milieux d’origine, dirige sa voix contestataire non seulement contre l’hégémonie des hautes

castes mais aussi contre les dérives opportunistes du parti des Dalits (BSP), dont l’alliance avec le parti Nationaliste

Hindou (BJP) est dénoncée comme une tentative plus générale de cooptation des Dalits.

Aminah MOHAMMAD-ARIF : chargée de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) ;

rattachée au Centre d’Etudes sur l’Inde et l’Asie du Sud (CEIAS)

Espaces alternatifs en diaspora: les mouvements contestataires des Indo-Pakistanais d’Angleterre et des Etats-Unis

Un nombre croissant d’Indo-Pakistanais se sont solidement implantés en Angleterre et aux Etats-Unis depuis la fin de la

deuxième guerre mondiale et les années 1960 respectivement. La plupart d’entre eux ont conservé des liens solides

avec leur pays d’origine (visites régulières, envois d’argent, etc.). A cela s’ajoute un attachement émotionnel. Certes,

chez nombre d’entre eux cet attachement a tendu à déboucher sur un nationalisme exacerbé. Ils se sentent en d’autres

termes plus Indiens ou Pakistanais dans la diaspora qu’ils ne sentaient dans leur pays d’origine. De tels sentiments ne

facilitent pas forcément les rapprochements inter-communautaires, contribuant même au contraire à élargir le fossé entre

communautés. Néanmoins, un certain nombre d’Indo-Pakistanais, se composant notamment de femmes et de membres

de la deuxième génération, ont construit en diaspora des espaces alternatifs dans lesquels s’expriment des

revendications multiples. Celles-ci peuvent revêtir une couleur purement locale (défense des femmes battues, défense

des droits des homosexuels, etc.) ou largement empiéter sur des préoccupations plus transnationales (harmonie inter-

communautaire en Inde, amélioration des relations entre l’Inde et le Pakistan, etc.). On s’interrogera donc sur les

modalités et l’impact de ces mouvements progressistes, voire contestataires, sur les populations migrantes comme sur la

société d’origine.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.35

13. FIGURES DE LA CONTESTATION, DE L’ASIE DU SUD A L’ASIE ORIENTALE : A&B De l’Asie du Sud à l’Asie de l’Est et du Sud-Est, ce sont différentes figures de la contestation sociale, économique et politique que nous voudrions aborder au sein d’un grand atelier articulé en deux-fois-cinq interventions. Tandis que le panel autour de l’Asie du sud (Inde, Népal, Pakistan et diaspora) aborde des formes de contestation qui semblent spécifiques au temps long de l’histoire et de la société du sous-continent indien, les expressions contestataires décrites dans le panel sur la Thaïlande, la Chine, et le Japon s’inscrivent davantage dans le temps court de la « mondialisation ». Une interrogation commune sur le politique traverse cependant nos observations respectives qu’il s’agisse des mouvements féministes en Inde et au Pakistan, des mouvements dalits, des « maoistes » népalais ou des diasporas indiennes et pakistanaises, du mouvement paysan en Thaïlande, du mouvement ouvrier et des cybernautes en Chine, des syndicalistes et des sans abri au Japon. Bien que nos projets initiaux soient nés séparément et dans une perspective différente, nous voudrions essayer de les confronter, moins pour établir des comparaisons entre ces vastes ensembles géopolitiques que pour nous interroger ensemble autour de ce que contester veut dire.

PANEL B : LES NOUVELLES FORMES DE LA CRITIQUE SOCIALE EN ASIE DE L’EST ET DU SUD EST: ARMES DES FAIBLES, FORTES ARMES ?

Coordinateur : Paul JOBIN, Maître de conférences, Université Michel de Montaigne (Univ. Bordeaux 3), chargé de

cours, Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO), sociologie du Japon ; chercheur

associé Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale - Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

(INSERM-EHESS)

Intervenants : David MALINAS, Éric SAUTEDE, Antoine KERNEN

Au Japon, malgré son incapacité à réguler la crise économique, le Parti Libéral Démocrate et ses partis satellites peuvent continuer d’ignorer les voix discordantes des associations et des syndicats trop minoritaires pour menacer son emprise sur la vie sociale et politique. A Taiwan et en Corée du sud, les syndicats ouvriers et le mouvement écologique sont amers à l’égard des démocrates qu’ils avaient contribué à porter au pouvoir. En Chine, la répression sans appel de toute voix dissidente, en particulier des militants syndicaux et des représentants du mouvement religieux falungong, est encore la règle générale. Si, à l’image de la Thaïlande, les pays d’Asie du sud est ne sont pas le théâtre d’une telle répression, la collusion entre politiciens et milieux d’affaire ainsi qu’une position de faiblesse à l’égard des investisseurs étrangers depuis la crise de 1997-1998 fragilisent de nouveau le processus de démocratisation. Ces observations peuvent néanmoins s’interpréter de manière plus optimiste si on considère l’originalité, d’un point de vue européen, des formes de critique sociale qui continuent d’éclore et de mûrir en Asie orientale et méridionale. Il s’agit souvent de mouvements interstitiels qui, à l’instar de leurs homologues européens de l’anti-globalisation, trouvent dans l’organisation en réseau les moyens de pousser les pouvoirs en place dans leurs contradictions. Dans un contexte où la croissance économique accélérée n’a cessé de légitimer le « sacrifice » ou « l’exclusion » d’un petit nombre au profit du plus grand nombre, au point de finir par exclure le plus grand nombre au profit d’une infime minorité, comme c’est le cas en Chine, ils optent résolument pour « le droit des exclus » et une critique radicale du tout économique. Malgré des situations diverses et contrastées et bien qu’ils opèrent dans des régimes leur faisant « une violence » différenciée, plus symbolique au Japon, à Taiwan, en Corée et en Thaïlande, plus « physique » en Chine, ces mouvements puisent l’essentiel de leur énergie dans une position de résistance à la primauté de l’économique sur le politique.

Paul JOBIN : Maître de conférences, Université Michel de Montaigne (Univ. Bordeaux 3) ; chargé de cours,

Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO), sociologie du Japon ; chercheur associé,

Institut National de la Santé et de la Recherche Médical-Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

(INSERM-EHESS)

Minoritaires et fiers de l’être : perspectives et limites des nouveaux syndicats ouvriers au Japon

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.36

Dans la foulée de l’agitation étudiante, du mouvement antipollution et du mouvement contre la guerre du Vietnam du

milieu des années soixante au milieu des années soixante-dix, les syndicalistes réfractaires au « coopérationnisme » ont

réussi à développer une nouvelle forme d’organisation syndicale intitulée community union. Par la diversité de leurs

engagements, de la lutte pour la reconnaissance syndicale à la lutte contre les accidents du travail et maladies

professionnelles, en passant par le soutien à d’autres « minorités sociales discriminées » (victimes de la pollution

industrielle, « travailleurs étrangers », « gens des hameaux », …) ou les bourgeons de syndicalisme ou de mouvements

écologiques en Asie, ces syndicats sont fidèles à « l’esprit de 68 » qui les avait fait naître. Parce qu’ils ont été contraints

de sortir la critique des confins de l’usine et de l’ouvriérisme, ils offrent aujourd’hui des pistes intéressantes pour le

renouvellement du syndicalisme ouvrier dans d’autres pays industrialisés, de façon comparable à ce que la

Confédération Paysanne en France ou le Mouvement des Sans Terre au Brésil ont fait pour restaurer le prestige

symbolique des paysans. Ils puisent leur énergie « spirituelle » dans leur position minoritaire et marginale pour résister au

« nouvel esprit du capitalisme » né lui aussi de 1968. C’est ainsi qu’ils renouvellent la culture de masse critique des

grandes fédérations syndicales japonaises des années cinquante (Sôhyô). Ils travaillent les institutions existantes comme

leurs homologues en France (AC !, DAL, ATTAC…), de manière peut-être moins polémique, en tout cas jamais au-delà

du légalement autorisé. Mais leurs facultés d’innovation contraste de plus en plus avec leur extrême faiblesse numérique

et leur absence quasi complète de la scène médiatique, surtout si on les compare à leurs confrères d’autres pays

asiatiques comme les Philippines ou la Corée du sud. Bien installés idéologiquement dans leur position minoritaire, ils

risquent de renoncer à transformer en force politique l’essai syndical qu’ils ont su marquer, au risque de disparaître et de

laisser le champ complètement libre au « consensus » du Parti Libéral Démocrate.

David MALINAS : doctorant en sciences politiques, Université Hitotsubashi (Tokyo) ; Boursier du Monbusho

(ministère de l’Education du Japon)

Politiques de la misère au Japon : « exclusion » et reconversion des savoirs

Au début des années 1990, les sans-abri japonais ont fait apparition dans les grandes villes japonaises. Le phénomène a

surpris à la fois les politiques mais aussi les associations qui sont restés dans un premier temps sans réponse. Les

chercheurs peinent également à définir cette pauvreté qui s’écarte des schémas traditionnels. De sorte que cette

population marginale est encore stigmatisée par l’opinion publique. Il importe à la fois de rapprocher et de distinguer les

sans abris japonais des travailleurs journaliers résidant dans les yoseba, ces ghettos qui sont une particularité en voie de

disparition du capitalisme japonais. Tout d’abord parce que de nombreux sans abris proviennent des yoseba, notamment

à Osaka. Ensuite parce que d’un point de vue plus théorique, il s’agit pour les journaliers des années de croissance du

Japon comme pour les sans abris des années de dépression d’une même pauvreté d’ « exclusion ». En d’autres termes

le journalier du yoseba et le sans abri sont des figures de la chute sociale. Enfin parce que les membres des associations

de défense de sans abris ont commencé leur engagement auprès des travailleurs journaliers. Longtemps passifs, l’Etat et

les collectivités publiques ont laissé se développer les yoseba en abandonnant le contrôle de ces quartiers à la pègre, et

la défense de ces ouvriers journaliers aux rares associations et syndicats qui osaient s’y aventurer. Aujourd’hui, ces

mêmes associations se battent auprès des sans abris pour assurer la reconnaissance de leurs droits et leur réinsertion.

Par leur travail de lobbying, elles ont également obligé l’attitude des pouvoirs publics à évoluer et s’engager dans une

nouvelle politique sociale. Cependant, cette politique comporte de nombreuses limites en terme de couverture sociale et

elle ne diminue en rien la discrimination subie par les sans abris.

Éric SAUTEDE : Rédacteur en chef de la Revue Perspectives chinoises ; Chercheur, Centre d’Etudes

Français sur la Chine contemporaine à Hong Kong (CEFC, Hong-Kong)

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.37

Les leurres de la modernité Internet, information et crise du « SRAS » en Chine

Depuis plus de vingt ans déjà, le régime communiste chinois a fait le pari que sa survie dépendait du développement

économique et de la course effrénée à la croissance : l’« économie socialiste de marché » est devenu le maître mot d’un

« national économisme » en lieu et place d’un communisme aux caractéristiques chinoises déjà fortement teinté de

patriotisme. Nul doute que la croissance économique enregistrée dans les années 1980 et 1990 et l’ouverture à l’étranger

qui l’a accompagnée ont eu de profondes conséquences structurelles sur cette Chine qui a enfin rejoint partiellement le

« temps libéral du monde ». Cependant, ces profondes transformations économiques ont eu un coût social

particulièrement lourd : en même temps que la nation chinoise s’enrichissait globalement, les écarts de revenus se

creusaient et le statut de ceux qui étaient hier le « moteur de l’histoire », ouvriers d’Etat et paysans, se dégradait. Plus

encore, ces réformes économiques n’ont été accompagnées d’aucune forme de libéralisation politique, ni d’aucune

tolérance à l’égard de la critique des autorités en place : le massacre du 4 juin sur la place Tiananmen constitue toujours

un horizon politique indépassable. Avec l’irruption des communications modernes, l’Internet en particulier, beaucoup ont

cru, dans la seconde moitié des années 1990, que la démocratie était « au bout du clavier ». C’était ignorer un principe

essentiel d’un régime communiste : l’impossibilité de voir son monopole sur l’information disputé. Cela relevait également

d’une vue de l’esprit s’agissant de l’Internet : la communication en réseau n’est qu’un support, un moyen, et non une fin

en soi. L’euphorie électronique passée, l’on s’est bien vite aperçu que les autorités chinoises avaient été promptes à

placer l’Internet dans « une cage dorée » et plus récemment à s’en servir comme d’un redoutable instrument de

propagande et de « filtrage » des ressources qu’elles jugent indésirables sur les autoroutes de l’Intranet national chinois.

L’usage politique de l’Internet continue d’être une pratique rare et riche de sanctions particulièrement sévères à l’égard

des impétrants. S’agissant de la critique sociale — sur les questions d’exclusion, de discrimination, de négligence, de

manquement des pouvoirs publics, etc. —, l’état des lieux est plus « positif » : plus encore, sa présence, directe ou

indirecte, nous apparaît comme l’élément quasi-exclusif d’une forme de liberté d’expression sur le net chinois. Parce que

le régime de Pékin ne tolère aucune organisation alternative autonome et qu’il se donne les moyens de cette intolérance,

les formes traditionnelles de la protestation ont encore récemment montré leurs limites, comme on l’a constaté avec la

violente répression dont est victime le Falungong depuis juillet 1999 ou la dissolution par étouffement imposée aux

grandes manifestations ouvrières de Daqing et Liaoyang de mars 2002. Sur le net, les communautés se font et se défont,

et le gouvernement peut même s’approprier des idées et recueillir des informations alternatives sans que cela vienne

remettre en cause son pouvoir monopolistique. Avec l’entrée de la Chine dans l’OMC, ces critiques se font plus

nombreuses et plus vives. Reste à savoir quel est le seuil de tolérance des membres du Bureau politique du Parti

communiste chinois : la gronde sociale peut bien vite se muer en « désordre social », cette peur obsessionnelle de toute

dynastie régnante.

Antoine KERNEN : maître de conférences en sociologie politique, Université de Lausanne ; chargé de cours

de civilisation chinoise, Université de Genève

Vers une mise en réseau de la contestation ouvrière en Chine ?

Les manifestations ouvrières sont de plus en plus fréquentes en Chine depuis quelques années. Les « dépôts de pétition

collective » (jiti shangfang) sont quotidiens dans les villes du Nord-Est, mais aussi dans les provinces du Henan, du

Hunan, du Hebei, du Hubei, du Shanxi, du Shaanxi ou du Sichuan. Les caractéristiques de ces mobilisations sont

aujourd’hui mieux connues : elles sont généralement limitées aux employés d’une même entreprises et ne soulèvent que

des revendications particularistes. L’atomisation de la contestation et la faible organisation de ces mouvements est à

l’évidence la conséquence d’une « structure d’opportunité » (S. Tarrow) très fermée. C’est seulement dans ce cadre très

limité que le pouvoir les tolère. Si l’organisation de ces mouvements repose essentiellement sur les liens interpersonnels

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.38

qui traversent les entreprises, il convient de s’intéresser à leur « mise en réseau », car on ne peut pas manquer de

remarquer que de plus en plus de manifestants ont une connaissance assez précise d’autres conflits similaires ayant eu

lieu ailleurs dans le pays. De cette meilleure connaissance découle un processus d’ « apprentissage » dans les modalités

de la contestation. Il serait sans doute faux d’y voir les ramifications souterraines d’un quelconque syndicat clandestin.

Cette « mise en réseau » de la contestation ouvrière se structure autrement. Elle s’appuie d’une part sur le travail de

récolte d’information fournie par certaines ONG basées à Hong Kong, et surtout sur le rôle de relais joué par certains

centres récents de consultation juridique. Bien sûr ces centres ont des ambitions plus larges mais ils facilitent une

meilleure connaissance des procédures juridiques et informent parfois les intéressés sur d’autres procédures similaires

ayant eu lieu ailleurs dans le pays. Dans cette communication, nous nous efforcerons d’abord de rendre compte de

l’évolution récente de la contestation ouvrière, en cherchant à mettre en évidence les processus d’apprentissage entre

ces mouvements. Dans un deuxième temps, nous analyserons les structures très lâches de la mise en réseau de la

contestation ouvrière.

V- Rapports au corps et à l’environnement 14. REPRESENTATIONS DU MILIEU NATUREL Coordinatrice : Jane COBBI, Chargée de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS),

Civilisation japonaise

Intervenants : ÐINH Trong Hiêu, Sophie HOUDART, Marie-Claude MAHIAS, BUI Thi Mai, Michel GIRARD

L'Asie est une partie du monde où les hommes ne se considèrent généralement pas comme les maîtres de la nature. Ils se voient plutôt comme faisant partie d'un vaste ensemble, parmi d'autres êtres vivants (animaux, végétaux...). Cette conception se retrouve, à divers niveaux selon les régions, les groupes sociaux ou les domaines d'activités, dans bien des spécificités culturelles relevant des représentations collectives, dans les modes de perception et d'utilisation de l’environnement, et notamment dans le degré de considération réservé aux animaux et aux végétaux. Faute de pouvoir faire, dans ce vaste continent habité par des populations diverses à systèmes de langues différenciés, une étude comparative qui réunisse suffisamment d’éléments significatifs, nous pouvons du moins essayer de comprendre la relation avec l'environnement naturel par des rapprochements, voire une mise en regard de cultures très éloignées de cette région. Ainsi il a paru utile de confronter, dans un premier temps, des données récentes et des interrogations suscitées par les formes particulières de représentations collectives sur l'environnement naturel, qu'il s'agisse de le redécouvrir ou le construire par le media d'une exposition (Houdart), de le protéger ou le préserver par des modes d'action endogènes (Dinh), de le reconstituer par une démarche archéologique (Bui), enfin de cerner les limites posées à son utilisation par des prescriptions positives ou négatives (Cobbi, Mahias). Ces différentes approches groupées en un même atelier ont suscité des questions et des commentaires qui ont souligné l'articulation entre les sujets traités et les convergences de perspective ; et il semble plus qu'utile de prolonger cet échange pour reprendre la discussion que les limites du temps imparti nous ont obligés à interrompre, et pour engager une action concertée. On notera néanmoins que chacun des textes réunis ici est indépendant de tous les autres, et n'engage que son auteur.

DINH Trong Hiêu : Chargé de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) ; ethno-

botaniste, Techniques et cultures, Musée National d’Histoire Naturelle (MNHN)

Quelques modèles asiatiques de protection de la nature et de préservation biodiversitaire

Les "modèles" de protection de la nature et/ou du biodiversitaire préconisés ("Parcs", "Réserves", etc.) sont-

ils universellement valables ? N'y a-t-il pas des "lieux" en Asie où, de fait, ces protections existent déjà? L'expérience de

terrain montre que les autochtones disposent souvent de structures de conceptualisation et d'action analogues, et qu'il

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.39

est vain de plaquer des modèles qui, même quand ils sont justifiés, n'en sont pas moins exogènes. L'un des rôles de

l'ethnologue travaillant sur l'Asie est d'attirer l'attention sur cette existence, non pour que cela serve comme "exemples"

universaux, mais pour démontrer qu'une réelle articulation entre le global et le local est nécessaire (d'où l'apport de

l'école française d'ethnologie).

Sophie HOUDART : Laboratoire d'ethnologie et de sociologie comparative (CNRS-UMR 7535)

Exposer la nature d'hier, construire la nature de demain

Une Exposition Internationale prévue en 2005 au Japon (Aichi), intitulée "Au delà du développement : la redécouverte de

la sagesse de la nature", a pour propos de reconsidérer les rapports de l'homme à la nature en cette période où les

problemes liés à l'environnement (pollution, renouvellement des énergies, etc.) deviennent symptomatiques d'une

modernité mal gérée ou dépassée. Ce qui ne se fait pas sans contestations (association pour la protection de la nature,

etc.). Le concept de départ est le SATOYAMA, type paysager japonais que l'on veut rendre universel (pour ses propriétés

de sagesse, notamment). On a donc deux types de représentation de ce qu'est le satoyama et surtout de ce à quoi il doit

servir.

Jane COBBI : Chargée de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) ; Civilisation

japonaise (Collège de France-Ecole Pratique des Hautes Etudes-EPHE)

Nature interdite, nature prescrite

Les représentations sur le milieu naturel apparaissent de façon particulièrement évidente dans le domaine des pratiques

alimentaires. Il s'agit en effet d'un domaine particulièrement sensible puisque l'homme doit incorporer -à la fois

mentalement et physiquement- des éléments de son environnement. Ce qui engage non seulement des représentations

du rapport à la nature mais aussi des conceptions implicites du rapport aux autres, à la vie et au surnaturel.

Nous proposons d'étudier et de confronter les formes particulières que ces représentations peuvent prendre dans le

domaine des prescriptions et des interdits de consommation (notamment du végétal), car il est intéressant de constater

qu'elles peuvent être radicalement opposées de part et d'autre du continent asiatique (de l'Inde au Japon). En nous

occupant d'alimentation, nous effleurons aussi certaines des questions soulevées par une actualité brûlante, notamment

depuis l'apparition de la vache folle

Marie-Claude MAHIAS : Chargée de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) ; Centre

d’Etudes de l’Inde et de l’Asie du Sud (CEIAS-EHESS)

Le végétarisme des Jains ou la nature animée

En Inde, Marie-Claude Mahias considérera le cas des Jains, qui allient une puissance financière indéniable à un

végétarisme strict. Elle montrera comment le régime alimentaire, en particulier ses prescriptions négatives telles qu'elles

s'expriment dans les prohibitions et les jeûnes, révèle une représentation du monde, une classification des êtres vivants

dans laquelle l'homme a sa place. Mais cette place n'est que transitoire puisque l'âme peut se réincarner dans des corps

divers. L'homme ne peut donc pas s'opposer à un monde naturel dont il serait fondamentalement différent.

BUI Thi Mai : Laboratoire de Palynologie Centre d'Etudes Préhistoire, Antiquité, Moyen Age

GIRARD Michel : Laboratoire de Palynologie Centre d'Etudes Préhistoire, Antiquité, Moyen Age

Paysage végétal de l'Holocène final à Oc Eo (civilisation du Fu Nan) dans le Sud Vietnam

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.40

Les premiers résultats de l'étude pollinique du site archéologique Oc Eo (civilisation du Funan) localisé au Viet Nam

dans le Delta du Mékong ont permis d'enregistrer deux ensembles différents de végétation : l'un très riche en arbres de la

mangrove, l'autre composé essentiellement d'herbacées et de Ptéridophytes.

Cette succession d' associations végétales a ainsi permis de mettre en évidence un recul de la mer. En effet, la

mangrove dominée surtout par les Rhizophoracées croissant dans les eaux saumâtres (Bruguiera, Rhizophora,

Ceriops) est remplacée au cours du temps par une formation marécageuse en eau douce (limons de débordement)

constituée principalement d'herbacées (Poacées, Chénopodiacées..) , de plantes hygrophiles (Cypéracées, Joncacées,

Sparganium, Lemna, Ceratopteris ) et des spores de Stenochlena palustris.

Les atterrissements alluviaux ont permis à l'homme de s'implanter dans la région.

15. CHAMANISMES ET GESTION DES MAUX (SIBERIE, MONGOLIE) Coordinatrice : Virginie VATE, Doctorante Centre d’Etudes Mongoles et Sibériennes – EPHE Ve Section / Siberian

Studies Center – Max Planck Institute for Social Anthropology - Halle, Allemagne

Modératrice: Roberte HAMAYON, Directrice d’Etudes, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE)

Intervenants : Jean-Luc LAMBERT, Alexandra LAVRILLIER, Laetitia MERLI

Jean-Luc LAMBERT : Docteur en Ethnologie, Centre des Etudes Mongoles et Sibériennes

Les deux conceptions nganassanes de la maladie

Dans le chamanisme nganassane traditionnel, les maladies sont imputées soit aux ombres des morts (namterü’), soit à

des moitiés d’homme impersonnelles (barusi), elles aussi associées aux morts. Si l’ombre du mort vole l’ombre du vivant

dont elle prend la place, la moitié d’homme dérobe de la même manière la vitalité symbolisée par le souffle. Dans ce

dernier cas, la cure consiste à aller dans le monde des défunts reprendre le souffle du malade, le chamane des vivants

affronte alors celui des morts. Comme ces deux grands types de conceptions de la maladie semblent attestés dans de

nombreuses autres sociétés sibériennes, et plus largement asiatiques, cette communication essaiera également

d’envisager quelques unes de leurs variations.

Alexandra LAVRILLIER : Doctorante en ethnologie, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE), Section des

Sciences religieuses

Les formes actuelles de chamanisme chez les Evenks et les Iakoutes de Iakoutie et région de l’Amour

La christianisation au XIXe siècle et plus de 70 ans de politique d’athéisme militant durant la période communiste ont

conduit à une disparition presque totale des chamanes de Sibérie. Cependant, chez les Evenks, quelques uns d’entre

eux ont pu, en cachette des autorités, continuer leurs pratiques rituelles. De plus, face au manque de chamane, les

guérisseurs traditionnels se sont multipliés dans les milieux nomades. Enfin, depuis la déclaration de la souveraineté de

la République de Iakoutie, ce nouveau gouvernement a envisagé de faire du chamanisme une religion d’Etat en même

temps qu’il s’engageait dans une politique nationaliste de retour à la tradition. Poussés par cette politique et influencé par

les courants New-Age occidentaux, de nouveaux chamanes urbains ont créé une association de chamanes et des

centres de consultations. Ainsi, dans cette région, chez les Iakoutes et les Evenks, peuples en contacts depuis plusieurs

siècles, on constate la coexistence de différentes formes de chamanisme : un chamanisme typique des sociétés

nomades de chasseurs et d’éleveurs, un « chamanisme métisse » entre tradition et concepts New-Age qui correspond

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.41

aux besoins des populations villageoises et un chamanisme urbain. Dans chacune de ces formes de chamanisme, qui

correspondent aux formes d’organisation sociale de ces groupes, le rôle, les fonctions et la figure du chamane varient.

Laetitia MERLI : Doctorante en Anthropologie Sociale et Culturelle, Ecole des Hautes Etudes en Sciences

Sociales (EHESS)

Chinggis Khan et le renouveau du chamanisme en Mongolie

Dans le courant des années 90, de nombreux centres chamaniques se sont ouverts à Oulan Bator, capitale de la

Mongolie. Ces centres sont des lieux de visite où l’on va consulter les chamanes pour résoudre des problèmes de toutes

sortes et où sont organisés des rituels chamaniques. Le plus souvent liés à des associations de défense et de promotion

de la culture mongole, ils sont aussi devenus pour certains, des lieux de rassemblement d’organisations nationalistes

plus préoccupées par des questions de reconstruction identitaire et culturelle, que par des questions de gestion

individuelle du malheur. Nous verrons, dans cet article, au travers d’exemples de rituels qui se sont récemment déroulés

dans la capitale, comment Chinggis Khan et les chamanes d’aujourd’hui jouent un rôle dans la reconstruction d’une

culture, longtemps bafouée par le régime d’obédience soviétique.

Virginie VATE, Doctorante Centre d’Etudes Mongoles et Sibériennes – EPHE Ve Section / Siberian Studies

Center – Max Planck Institute for Social Anthropology - Halle, Allemagne

Rituels de chasse et rituels d’élevage chez les Tchouktches: deux approches du chamanisme? (Nord-Est sibérien)

Les Tchouktches se divisent traditionnellement en deux groupes en fonction de leur activité économique : une partie vit

de l’élevage de rennes et nomadise dans la toundra selon les besoins du troupeau, tandis que l’autre, sédentarisée dans

les villages du littoral, pratique la chasse aux mammifères marins. Cette dichotomie se reflète dans les pratiques rituelles.

Cette présentation se propose d’effectuer une analyse contrastive entre le chamanisme des Tchouktches chasseurs et

celui des Tchouktches éleveurs, tout en comparant la situation actuelle de l’un et de l’autre.

16. POSTER : LE PORT DU SARI ET LA FEMME INDIENNE: DECODAGE D'UNE APPARENCE ET D'UNE GESTUELLE, PARTICIPATION DANS LA CONSTRUCTION DE LA PERSONNE ET REPRESENTATIONS DU CORPS

Sylvie SANSEAU : doctorante en ethnologie et anthropologie sociale, Ecole des Hautes Etudes en Sciences

Sociales (EHESS) ; travaille sur l'Inde

L'étude part d'une monographie de onze mois dans un village de 1000 habitants, Puru, et dans une petite ville de 20 000 habitants, dans le Chhattisgarh, dans le centre de l'Inde, de 1998 à 2002. Elle vise à décrire et analyser un port de vêtement féminin, le sari, tout en le comparant au vêtement masculin dans un environnement et un contexte définis. L'atelier a pour objectifs: remettre en valeur un thème quelque peu délaissé en ethnologie: le vêtement développer le thème du corps en relation avec le vêtement et la personne présenter une étude sur le vêtement: le sari, drapé porté par la femme indienne, dans une petite ville et un village du Chhattisgarh: Le sari, vêtement drapé porté par la femme indienne, est étudié dans ses pratiques et ses usages, dans un environnement rural et semi-urbain du Chhattisgarh afin de définir et d'analyser des systèmes de représentations du corps et de la personne en Inde. Il s'agit de présenter les divers modes de port recensés au cours du travail de terrain dans le village et la ville, en partant d'un type régional, le sari dit 'chhattisgarhi' jusqu'au sari de type urbain, en passant par les types transitoires et spécifiques. Chaque mode de port est mis en contexte, sur des femmes de caste, génération, statut marital et social divers, dans des activités, des lieux, des moments différents et comparé aux vêtements

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masculins. De là, des critères de reconnaissance, de distinction et d'appartenance de la femme indienne sont dégagés et comparés. L'étude présente la participation du port du sari dans la construction de la personne féminine, dans le temps (cycle de vie, l'année) et l'espace (la maison, les lieux de travail et de culte). Elle insiste sur les rites de passage (puberté, mariage, mort, naissance), les moments de transition (entre les saisons, les mois, les semaines) et les échanges (intérieur, extérieur du foyer), incluant les codes de conduite en matière de pureté et de hiérarchie. Le drapé féminin, comparé à celui ou ceux de l'homme, est présenté tout au long de l'étude comme un espace, comprenant des polarités (haut/bas, devant/dos, droite/gauche) et se situant lui-même dans un espace, orienté par les points cardinaux. La gestuelle attribuée au sari, dans sa mise en place, son maintien et son utilisation est fortement codifiée selon des règles s'intégrant dans les valeurs de la pureté, l'impureté et la hiérarchie, au sein et à l'extérieur de la caste en Inde. Le sari, et de façon plus large, le vêtement, est indépendant du corps et de la personne. Il est appréhendé comme un indicateur non verbal de significations. Décrit dans des contextes familiaux, sociaux et religieux, s'intégrant dans les réseaux d'échanges et de relations, il permet de définir des systèmes de représentations culturels. En second lieu, l'étude présente la participation du port du sari dans la construction de la personne féminine, dans le temps (le cycle de vie et l'année)et l'espace (la maison, les lieux de travail et de culte). Elle insiste sur les rites de passage (puberté, mariage, mort, naissance), les moments de transition (entre les saisons, les mois, les semaines)et les échanges (intérieur, extérieur du foyer), incluant les codes de conduite en matière de pureté et hiérarchie. En dernier lieu, le sari, présenté comme un espace sur le corps de la femme indienne est décrit dans sa mise en place et son maintien, en termes de polarités et de directions. Il est comparé aux vêtements que portent les hommes et à divers éléments (le cordon sacré) et actes (orientations dans les rituels). De là seront dégagées des représentations du corps et leur intégration dans les valeurs culturelles indiennes. Le port du sari est abordé comme un moyen d'échanges, de relations et de communications dans des contextes sociaux et culturels. Il est considéré comme un médiateur, un indicateur non verbal de significations que l'ethnologue décode afin de comprendre le système de relations et de représentations convergentes qui est établi autour de la femme indienne.

17. MEDECINES DE CHINE, MEDECINE D'EUROPE : RENCONTRES, CONFLITS, INFLUENCES CROISEES Coordinateur : Frédéric OBRINGER, chargé de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS),

Centre d'Études sur la Chine Moderne et Contemporaine (CECMC, UMR 8561 CNRS/EHESS)

Intervenants : Lucia CANDELISE, Isabelle LANDRY-DERON

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Les connaissances médicales, les conceptions nosologiques, les pratiques diagnostiques et thérapeutiques intriguèrent à des degrés divers les jésuites portugais qui atteignirent le Japon dès le XVIe siècle, puis les jésuites des Missions de Chine et les médecins de la Compagnie des Indes Néerlandaises aux XVIIe et XVIIIe siècles, et enfin les savants et les autres visiteurs de l'Extrême-Orient au XIXe siècle. De ces contacts résultèrent de nombreux textes de présentation des divers aspects de la médecine, textes dont la nature, le statut et l'ampleur varièrent considérablement selon les informateurs et selon l'époque. Parallèlement, un certain nombre d'ouvrages, spécialisés ou plus généraux, furent rédigés en chinois, en premier lieu par les missionnaires, qui exposaient des conceptions occidentales concernant le corps humain et la maladie (XVII-XVIIIe s.) ; des pratiques médicales nouvelles commencèrent également à s'introduire en Chine à partir du XIXe s. La réception en Occident de la « médecine chinoise », comme celle, en Chine, de la vulgate médicale occidentale, furent conditionnées par de multiples facteurs : état du savoir à un moment donné, qui permettait ou non l'intégration de concepts ou de pratiques dans des représentations taxinomiques différentes, problèmes de terminologie et de traduction, statut et objectifs des informateurs et des rédacteurs, forme de la démarche intellectuelle (curiosité, dénonciation...), enjeux pratiques et sociaux. Il s'agira toujours de replacer cette « confrontation » dans le contexte historique, en mettant en lumière les attitudes intellectuelles de résistance, de transformation, d'incompréhension, ou plus simplement de tâtonnement, sans perdre de vue les résonances idéologiques, politiques ou encore marchandes presque toujours sous-jacentes aux discours ou aux actes sur le terrain. Les quelques études de cas présentées par les intervenants permettront, grâce à leur diversité, de proposer quelques jalons pour une archéologie à faire de cette rencontre croisée.

Lucia CANDELISE : Doctorante, Centre d'Etudes sur la Chine Moderne et Contemporaine (CECMC, UMR

8561, CNRS/EHESS)

L'acupuncture dans les structures publiques de santé

Le propos de notre exposé sera de présenter les résultats du travail de terrain mené en 2003 dans des hôpitaux français

(deux à Paris et deux à Strasbourg) où l'acupuncture est proposée dans les consultations médicales. Depuis une dizaine

d'années cette pratique médicale "hétérodoxe" tend de fait à s'insérer d'une manière capillaire dans les prestations

médicales des hôpitaux français.

Centrée sur la pratique de l'acupuncture en milieu public notre présentation sera caractérisée par une approche

comparative qui mettra en relation les résultats obtenus dans l'étude des situations hospitalières françaises avec ceux

observés dans des situations analogues en Italie.

Grâce aux enquêtes de terrain menées en participant aux consultations et grâce aux entretiens avec les praticiens et les

responsables des centres choisis on montrera la spécificité de chaque consultation. Les quatre exemples nous

permettrons de dévoiler sous quelle forme se concrétise la coexistence de l'acupuncture avec des pratiques médicales

officielles en montrant comment, avec quels objectifs et grâce à quels acteurs l'acupuncture trouve des moyens

d'intégration et d'échanges avec les techniques médicales conventionnelles.

L'étude de ces centres ou structures publics qui accueillent le travail des acupuncteurs nous permettra une description

des situations-types que l'on rencontre de plus en plus fréquemment en France où une médecine sans une véritable

reconnaissance institutionnelle est néanmoins considérée digne d'occuper une place dans un contexte de soin

publiquement reconnu.

Cette analyse nous permettra de dessiner un champ de rencontre culturelle et sociale où les données de deux tradition

médicales cherchent et trouvent une forme de mélange et de compromis dans la pratique qui donne preuve de son

efficacité, et en même temps qui est acceptée par l'institution et demandée par le public. Cela nous conduira à nous

interroger aussi bien sur les motivations passées que sur les aspirations futures rattachées à cet exemple d'échange

culturel.

Notre travail aura donc comme but d'amorcer une série de questions concernant le statut de la médecine chinoise en

Europe, l'attitude des praticiens confrontés aux pathologie courantes liées à la douleur et, plus largement, la confrontation

sur le terrain de la santé de deux systèmes souvent très différents de représentations du corps et de la maladie.

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Isabelle LANDRY-DERON : Post-doctorante associée, Centre d’Etudes sur la Chine moderne et

contemporaine (CECMC)

Les premiers rudiments d’information sur la médecine chinoise en France au XVIIIe siècle

Frédéric Obringer : Chargé de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) ; Centre

d'Études sur la Chine Moderne et Contemporaine (CECMC, UMR 8561 CNRS/EHESS)

Les lettrés chinois et le cerveau de Galien

Nous aborderons les questions soulevées par l'irruption dans le champ intellectuel chinois de certaines conceptions

occidentales ayant trait à l'anatomie et à la physiologie du corps humain telles qu'elles apparurent dans quelques

ouvrages composés par les missionnaires dans un but apologétique, à un moment correspondant à la transition Ming-

Qing. Nous nous intéresserons tout particulièrement à la réception par des lettrés comme Fang Yizhi ou des médecins

comme Wang Ang ou, plus tardivement, comme Wang Qingren, des développements concernant le système nerveux et

le cerveau, ainsi que le rôle essentiel de celui-ci en tant que siège de la mémoire. C'est ainsi par exemple que quelques

années avant l'arrivée de Fang Yizhi à Pékin (en 1635-1636), Adam Schall von Bell (1592-1666) avait composé un

ouvrage de prosélytisme, le Zhuzhi qunzheng (Preuve que toutes choses sont dirigées par Dieu), traduction chinoise du

De providentia Numinis de Leonard Lessius, paru à Antwerpen en 1613. Ce traité donne quinze arguments (rationes) en

faveur de la divine providence. Or il se trouve que certains passages ayant trait au cerveau sont cités par Fang Yizhi

dans son Wuli xiaoshi, puis repris en partie par d'autres auteurs. Il s'agira de repérer et de tenter de comprendre, en les

replaçant dans un contexte plus large, les attitudes de curiosité ou de résistance suscitées par de telles informations.

18. CONSTITUTION DES ESPACES THERAPEUTIQUES EN ASIE DU SUD-EST. ETAT DES LIEUX, INTER-RELATIONS ENTRE THERAPEUTES, COMPARAISON REGIONALE Coordinatrice : Anne Y. GUILLOU, Docteur en ethnologie, Chargée de recherche ADDRAS, Chargée de cours,

Université de Haute Bretagne (Univ. Rennes II )

Intervenants : Claire CHAUVET, Annick GUENEL, HSIEH Ting-Chih, Jean-François PAPET, Laurent PORDIE Il faut entendre par ‘espaces thérapeutiques’ la coexistence de praticiens différents au sein d'une même unité sociale et territoriale et les relations (concurrence, évitement, collaboration, emprunts mutuels, etc) qu'ils entretiennent; relations structurées par un grand nombre de facteurs (symboliques, historiques, politiques, économiques, sociaux) pour chaque société. De multiples acteurs interviennent en effet dans les espaces thérapeutiques ainsi définis, auprès de publics variés, dans des circonstances diverses et suivant des modalités particulières – autant de variations dans lesquelles on peut repérer, à l'intérieur d'une même société, des similitudes et des différences entre thérapeutes. Ces dernières décennies, la ‘modernisation’ des sociétés traditionnelles et leur ouverture (plus grande) sur les sociétés globales nationales voire internationales, a induit de nombreux changements dans l'organisation des systèmes traditionnels de soins. L'objectif de l'atelier est la mise en commun et la comparaison de matériaux ethnologiques couvrant l'ensemble de l'Asie du Sud-Est, à partir d'un renouvellement des problématiques (dépasser les problématiques ‘symboliques du corps’ et ‘pluralisme médical’), en abordant les thérapeutes dans leur interaction (avec les patients, les autres thérapeutes, les pouvoirs publics), dans leurs pratiques quotidienne et non plus dans leur seule dimension cognitive (car la pratique fonde parfois aussi la connaissance). Cet atelier s'inscrit dans la démarche plus large d'une opération de recherche lancée en octobre 2002, à laquelle une dizaine de chercheurs environ ont répondu jusqu'à présent.

Claire CHAUVET : Doctorante en ethnologie, ATER, Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Représentations des maladies et pratiques thérapeutiques de médiums viet (Hà Noi, Viet Nam)

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Parmi les nombreux cultes existant au Viet Nam, le culte des Quatre Palais est caractérisé par la possession de médiums

par des esprits. Sans en constituer l'élément essentiel, une part du culte tourne autour de la maladie. La relation établie

entre les médiums et les entités spirituelles permet ainsi d'énoncer l'existence de certaines maladies et de mettre en

place des pratiques rituelles à visée thérapeutique, qui doivent être envisagées dans leurs interactions avec d'autres

thérapeutes.

Laurent PORDIE : Chercheur allocataire, Institut Français de Pondichéry ; Membre associé, Laboratoire

d'Ecologie Humaine et d'Anthropologie (LEHA), Université de droit, d’économie et des sciences (Univ. Aix-

Marseille III)

Les usages détournés de la propriété intellectuelle: Comprendre la construction sociale et politique de la médecine

tibétaine au Ladakh, Inde

En Inde, le mouvement national contre le biopiratage et les reccherches pharmaceutiques trouvent un écho dans chaque

région du pays, y compris auprès des minorités ethniques (scheduled tribes). Au Ladakh de la même façon, les

protagonistes locaux suivent officiellement les directives nationales mais, en réalité, redéfinissent le sens et les objectifs

de celles-ci afin de servir leurs propres intérêts, tant au niveau local que national. Cette communication explorera de ce

fait les usages politiques et sociaux de la "bioprospection" et des droits de propriété intellectuelle (DPI), en allant au-delà

des aspects juridiques et développementaux qui sont les seuls habituellement traités.

L'ethnographie de plusieurs institutions médicales relevant de la médecine tibétaine montrera comment les individus

utilisent les DPI comme un nouvel objet du champ médical, pour renforcer leur statut social tant à l'intérieur qu'à

l'extérieur de leur groupe. De plus, les DPI apparaissent comme une tribune pour des revendications identitaires

ethniques et médicales, qui révèlent des stratégies collectives en lien étroit avec le contexte politique global du Ladakh.

Les DPI peuvent potentiellement nourrir les revendications d'autonomie régionales et s'en inspirer. En fin de compte, ces

"manipulateurs" locaux nous aideront à comprendre comment un système médical s'appropprie de nouveaux thèmes et

intègre des arguments rhétoriques venus de l'extérieur dans le but de générer sa propre dynamique sociale et, de ce fait,

de redéfinir son propre espace thérapeutique.

Annick GUENEL : Ingénieur d'Etude, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) ; Laboratoire Asie

du Sud-Est et Monde Austronésien, (LASEMA-CNRS)

Transformations des pratiques, évolutions des espaces et des pouvoirs : quelques données sur l'histoire des

thérapeutes traditionnels et de la santé publique en Asie du Sud-Est dans la première moitié du 20 ème siècle

Sans que les systèmes traditionnels de soin en Asie du Sud-Est aient connu un réel déclin au contact de la médecine

occidentale dans la première moitié du 20ème siècle, des transformations dans les pratiques sont assez tôt visibles. Elles

concernent aussi bien les méthodes ou les ‘remèdes’ utilisés que les rapports économiques du thérapeute à la société

dans laquelle il opère... Le Viêt-nam servira d'illustration à ce métissage des pratiques ainsi qu'à l'évolution du statut des

thérapeutes traditionnels. Tout en étant ‘tolérés’ par les pouvoirs coloniaux, ceux-ci sont remis en cause par la nouvelle

élite locale, formée à la médecine occidentale. Néanmoins, avant même la date de l'indépendance, deux facteurs au

moins interviennent pour revaloriser leur rôle : la montée du nationalisme et la direction prise par les organismes

internationaux vers le développement de la médecine rurale.

HSIEH Ting-Chih : Chargée de formation, Association pour la Communication Interculturelle Eurasie (ACIE)

Une explication du Sida par un praticien/acupuncteur chinois ou le Sida sans virus

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.46

Le Sida, c'est l'appellation moderne, à la mode, de l'affection connue depuis fort longtemps en Chine sous le nom

‘d'affection froidure aux reins’, ou encore plus précisément ‘atteinte directe de froidure perverse’. Description du

processus morbide et du rétablissement thérapeutique. (résumé d'un article intitulé ‘le Sida’, écrit par le Père Paul Wang,

Paris, août 2002, traduit par HSIEH Ting-Chih et Jean François PAPET).

Jean-François PAPET : Chargé de formation, Association pour la Communication Interculturelle Eurasie

(ACIE)

Un itinéraire thérapeutique laotien: le cas de S., 55 ans, fonctionnaire au cadastre

S., malade, cherche à ‘résoudre sa maladie’, chez un médecin d'Etat, une médium, un guérisseur herbaliste, une clinique

chinoise pratiquant l'acupuncture, 2 guérisseurs exorcistes, l'hôpital, un médecin vietnamien (extraits de notes de terrain

au Laos, janvier 99).

19. LES PERCEPTIONS DE L'ENVIRONNEMENT CHEZ LES NOMADES ET LES SEDENTAIRES D'ASIE CENTRALE ET ORIENTALE Coordinatrice : Gaëlle LACAZE, Anthropologie aire culturelle turco-mongole (Mongolie-Kazakhstan), Centre

d'Études Mongoles et Sibériennes, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE)

Modérateur: Jacques LEGRAND : Professeur de langue et civilisation mongoles, (INALCO-Langues’O).

Intervenants : Alexandra MAROIS, Laurent QUISEFIT, Gregory DELAPLACE, Bertrand GUILLON Les perceptions de l’environnement conditionnent les représentations de l’espace qu’une société construit en l’occupant. Si l’occupation de l’espace est une manifestation sociale, l’expression d’une société donnée, les perceptions qu’elle s’en fait relèvent de catégories, à la fois, culturelles sociales et individuelles. Perceptions de l’environnement, modes d’occupation de l’espace et utilisation des sens du corps constituent donc des perspectives de recherche distinctes, respectivement situées au niveau culturel, social et individuel, mais complémentaires. L’utilisation des sens déterminent les perceptions de l’environnement mais elle n’est pas uniforme et change en fonction de l’utilisation de l’espace d’une société déterminée. Nomades et sédentaires possèdent ainsi des perceptions distinctes d’un même espace, souvent complémentaires mais, parfois aussi, contradictoires. La comparaison des perceptions de l’environnement de peuples différents dans un même écosystème ou de peuples d’une même aire culturelle dans des environnements différents offre donc des thèmes riches à l’analyse transversale de l’anthropologie et de l’archéologie. L’aire de peuplement mongol (Mongolie, Sibérie méridionale, Chine septentrionale) accueille des populations, à la fois, turques et mongoles, nomades et sédentaires, chasseurs, pasteurs et agriculteurs. Russifiées, mongolisées ou sinisées, ces populations turco-mongoles sont souvent voisines, mutuellement acculturées et locutrices de toutes les langues locales. Cette perspective de recherche comparative et transversale reste localisée dans une aire géographique suffisamment homogène pour permettre une réelle exhaustivité de la démarche.

Laurent QUISEFIT : Doctorant en Etudes de l’Extrême-Orient, spécialisation Corée, Université Denis Diderot

(Univ. Paris VII) ; Ancien élève des langues orientales, diplômé de coréen et de mongol

Nomades et sédentaires : considérations culturelles sur les campagnes mongoles en Corée

Les campagnes mongoles en Corée ont d’une manière générale, dans l‘historiographie internationale, été sacrifiées au

profit d’autres théâtres d’opérations, plus prestigieux, tels que la campagne contre la Chine du Nord, la campagne de

Transoxiane (1220-1221) ou les campagnes d’Europe et du Proche-Orient.

Souvent ignorée, délaissée au profit des invasions de la Chine, du Moyen-Orient et de Russie, la Corée apparent trop

souvent comme un théâtre d’opérations périphérique, et par là même, anecdotique, alors qu’elle offre de nombreux traits

originaux par rapport aux autres campagnes mongoles que nous connaissons, et offre, par là-même, de nouveaux angles

d’interprétation.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.47

La Corée a réussi à résister aux Mongols durant plus de quarante ans et malgré sa soumission totale en 1259, la

pacification complète n'intervint pas avant 1274. Les Mongols n'occupèrent jamais totalement la Corée, mais se

contentèrent, après 1232, d'opérer des raids destructeurs destinés principalement à faire pression sur le gouvernement

qui s'était réfugié sur l'île de Kanghwa, à l'ouest de Séoul.

A la fin de la période, les Mongols s’adapteront, et opéreront des débarquement dans plusieurs îles pour menacer les

refuges insulaires.

Mon propos est ici de restituer le mécanisme qui conduit à la guerre, et surtout, de réfléchir sur les conditions mêmes

dans lesquelles s’inscrivent ces campagnes, en tentant d’évacuer tout le référentiel sentimental qui transparaît aussi bien

dans les chroniques médiévales coréennes que dans les études historiques plus récentes.

Dans cette optique, je souhaite confronter différents aspects culturels coréens et mongols, afin de trouver de nouvelles

clefs d’explication.

Alexandra MAROIS : Doctorante, Laboratoire d’Ethnologie et Sociologie comparative, Université de Nanterre

(Univ. Paris X), Aire culturelle sino-mongole (RAMI)

Perception et gestion de l'espace domestique chez les éleveurs nomades de Mongolie Intérieure à travers le passage

de la yourte au bâtiment en dur

L'adoption d'une forme d'habitat fixe en contexte de steppe auprès de groupes d'éleveurs mobiles pose un ensemble de

questions quant aux transformations que subissent les modes d'habiter de groupes caractéristiques pour leur nomadisme

et leur utilisation de la tente mobile. Il apparait qu'à défaut d'une sédentarisation présupposée, les manières qu'ont les

éleveurs mobiles d'investir l'habitat en dur présentent des particularités disctinctives permettant de mettre en évidence

certains fondements de leur rapport à l'espace, imprégné d'une nécéssité de mouvement et de flexibilité. A travers l'étude

du rapport à l'espace domestique et environnant, des modes de protection sensitifs et matériels de soi et de ses biens

précieux, nous montrerons comment des principes fondamentaux perdurent, mutent et s'adaptent au changements

contemporains.

Gaëlle LACAZE, Anthropologie aire culturelle turco-mongole (Mongolie-Kazakhstan), Centre d'Études

Mongoles et Sibériennes, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE)

Les perceptions de l’environnement : comparaison nomades-sédentaires

L’étude transversale et comparée de dessins d’enfant, de la proxémie et des sens corporels utilisés dans les conceptions

de l’environnement révèlent des différences fondamentales entre les Mongols orientaux, nomades, et les populations

turco-mongoles de la Mongolie occidentale, sédentarisés, transhumants ou migrants. Ces différentes modalités

d’utilisation et de construction de l’espace renvoient à des perceptions de l’environnement distinctes. L’analyse

comparative de la proxémie des Mongols et des Kazakhs, des nomades et des transhumants, des pasteurs et des

citadins, permet de poser l’hypothèse d’une diminution de la place de l’odorat et de l’ouïe au profit de la vue. La notion de

déplacement, l’orientation relative ou absolue du corps dans l’espace changent également en fonction des contextes. Il

s’agira alors d’analyser l’utilisation cognitive des sens en fonction de l’occupation de l’espace et de la proxémie d’un

groupe donné.

Grégory DELAPLACE : Doctorant, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE)

Le crapaud, les tortues et les canards (Sur la pratique du fengshui à Ulaanbaatar)

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.48

Et Bertrand GUILLON : doctorant, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), spécialisé sur

l’ésotérisme chinois.

Le Feng Shui mongol ou le new-âge des nomades sédentarisés

Depuis peu un centre de Feng shui vient d’ouvrir ses portes à Ulaanbaatar. Contre toute attente, il déchaîne passion et

engouement ; la queue est longue et les heures d’attente ne découragent pas les citadins venus pour rendre propices les

augures de voyages d’affaires, d’entreprises et de constructions diverses. Or, malgré la proximité avec la Chine, le Feng

shui introduit en Mongolie est une version new-âge d’origine anglo-saxonne. Les principes et les pratiques du Feng shui

utilisé en Mongolie révèlent, cependant, une représentation déterminée du monde environnant : celle des citadins

mongols et des « Nouveaux riches ». Ils témoignent de processus de sédentarisation aboutis et de mouvements

d’acculturation en cours chez les Mongols. La sinisation relative des Mongols pourrait ainsi permettre l’émergence de

quelques éléments originaux par rapport au new-âge occidentalisé qui a été importé. En ce sens, principes et pratiques

du new-âge mongol caractériseraient une vision moderne et post-socialiste des rapports aux mondes, à la fois, social et

naturel, de peuples de tradition nomade sédentarisés.

VI- Politique et religion 20. LIENS ENTRE LE POLITIQUE ET LE RELIGIEUX : A&B

A : VERS LE LIEN SYMBIOTIQUE ENTRE LE POLITIQUE ET LE RELIGIEUX Coordinateurs :

Yannick BRUNETON, Post-doctorant, Laboratoire d’Etudes Coréennes

Nathalie LUCA, Chargée de recherche, Centre d’Etudes Interdisciplinaires des Faits Religieux, membre associée

du Laboratoire d’Etudes Coréennes

Intervenants : Evelyne CHEREL-RIQUIER, Arnaud BROTONS, Nathalie KOUAME, Jean-Pierre BERTHON

Comment, à l’intérieur de la société, le politique et le religieux se construisent-ils mutuellement ? Historiens, sociologues et anthropologues, spécialistes de la Chine, de la Corée du sud ou du Japon, les participants des deux panels proposés ci-dessous ont en commun de s’intéresser aux types de liens existant entre le religieux et le politique. Il leur a semblé possible d’en déterminer quatre (d’ordre idéal-typique) susceptibles de concerner leur terrain : le lien symbiotique, où l’Etat et sa religion semblent indissociables ; le lien hiérarchique, lorsque l’Etat se place autoritairement au dessus de la (des) religion(s) et régule celle(s)-ci ; le lien d’autonomie réciproque, lorsque la religion apparaît comme un interlocuteur parmi d’autres de l’Etat ; et le lien d’exclusion, quand l’Etat tente de repousser l’influence des religions dans la stricte sphère privée. La détermination de ces quatre types de lien – toujours relatifs dans les faits - pose la question de la régulation institutionnelle : quelles sont les conditions de l’acceptation politique de la visibilité sociale du religieux (suppose-t-elle sa participation au système politique dominant ? Jusqu’à quel point le religieux peut-il faire entendre une voix politique discordante ?) ; et quels sont les modes de reconnaissance de cette visibilité (procédures administrative, éducative, juridique ou autres qui créent éventuellement un lien économique entre l’Etat et l’institution religieuse). C’est selon la spécificité tant du terrain que des outils conceptuels de chacun que les participants situeront leur objet dans cette problématique. Il est d’ores et déjà apparu qu’ils pouvaient se diviser en deux groupes : le premier constatant plutôt des liens, certes mouvants, mais s’orientant vers le type symbiotique ; le second traitant au contraire de situations également évolutives, mais se rapprochant davantage du lien d’exclusion. C’est donc séparés en deux panels distincts mais extrêmement complémentaires que les participants se demanderont : Comment, à l’intérieur de la société, le politique et le religieux se construisent-ils mutuellement ?

Yannick BRUNETON : Post-doctorant, Laboratoire d’Etudes Coréennes ; boursier, Centre National de le

Recherche Scientifique (CNRS)

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.49

Apports du bouddhisme dans la construction de l'État de Koryò (918-1392) : les institutions hors code

Dans la Corée médiévale (Xe-XIVe siècles), au cours de la dynastie de Koryò (918-1392), État et bouddhisme ont

interagi dans le cadre d'une administration de type confucéen organisée sur le modèle chinois des Tang. Le statut de

religion d'État du bouddhisme et le rôle socio-politique joué par le clergé monastique expliquent la mise en place

d'organismes spécifiques hors code : trésors inépuisables po, conseils temporaires togam, offices saek... Ces institutions,

qui tiraient vraisemblament leur origine des pratiques de la dynastie précédente de Silla, se caractérisaient par la

collégialité de leurs membres et associaient moines et fonctionnaires séculiers.

Evelyne CHEREL-RIQUIER : Maître de conférences, Université de la Rochelle ; membre associé du

Laboratoire d’Etudes Coréennes (CNRS - ESA 8033), Jeune Equipe SEAMAN (ULR - CNRS)

Les Eglises chrétiennes et l'Etat en Corée du Sud (1945-1950) : naissance d'un lien de type symbiotique

s’interrogera sur la collaboration entre l’Eglise catholique coréenne et le pouvoir politique dans la construction de l’Etat

sud-coréen (1945-1948). En cette période, le politique entre dans une période de bouleversements et de profondes

interrogations, devant assumer la mise en place d’une structure étatique succédant au système colonial japonais. Elle

cherchera les modalités qui ont conduit l’institution catholique coréenne à s’allier avec certaines forces politiques afin de

devenir l’une des forces fondatrices de la République de Corée.

Arnaud BROTONS : ATER, Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO)

Les pèlerinages impériaux à Kumano à la lumière de la théorie de l’interdépendance de la Loi royale et de la Loi

bouddhique au Japon

réfléchira sur la place des pèlerinages lointains des empereurs après leur abdication, dans la tentative de reconstruction

du pouvoir impérial. Ces pèlerinages apparaissent en effet comme un des aspects majeurs de la vie politique et

religieuse au Japon entre la fin du XIe siècle et le XIIIe siècle.

Nathalie KOUAME : Maître de conférences, Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO)

L’état des Tokugawa et la religion, entre intransigeance et tolérance (XVIIe-XIXe siècle)

constate pour sa part que, pendant toute la période de leur installation au pouvoir, au XVIIe siècle, les shôgun du clan

Tokugawa ont mené une active politique religieuse à l’échelle de l’archipel tout entier. A la même époque, quelques

seigneurs féodaux du Japon ont également engagé des réformes religieuses dans leur fief. Elle se demandera donc

jusqu’où les uns et les autres ont voulu ou ont pu intervenir dans la vie religieuse des Japonais.

Jean-Pierre BERTHON : Chargé de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Centre

de Recherche sur le Japon (CRJ)

Les nouvelles religions sous l‘État impérial japonais : résistance et adaptation

Après le processus de « shintoïsation » de la religion qui se met en place à partir de la Restauration de Meiji (1868) sous

l’influence du shintô d’État, les conflits se multiplient entre l’Etat et les divers mouvements religieux existants. La place

que ces mouvements occupent et les stratégies qu’ils élaborent pour continuer à se développer au cours de cette

période, montrent à la fois, le dynamisme de ce nouveau courant religieux, mais aussi les compromis nécessaires à son

maintien. Résistances et processus adaptatifs, face à l’idéologie impériale, sont les deux principales tendances à partir

desquelles s’appuiera notre réflexion.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.50

21. LIENS ENTRE LE POLITIQUE ET LE RELIGIEUX : A&B

B : VERS UN LIEN D’EXCLUSION ENTRE LE POLITIQUE ET LE RELIGIEUX Coordinatrice : Nathalie LUCA, Chargée de recherche, Centre d’Etudes Interdisciplinaires des Faits Religieux,

membre associée du Laboratoire d’Etudes Coréennes

Intervenants : Fabienne DUTEIL-OGATA, Vincent GOOSSAERT, Jérémy JAMMES, Charles MACODNALD Comment, à l’intérieur de la société, le politique et le religieux se construisent-ils mutuellement ? Historiens, sociologues et anthropologues, spécialistes de la Chine, de la Corée du sud ou du Japon, les participants des deux panels proposés ci-dessous ont en commun de s’intéresser aux types de liens existant entre le religieux et le politique. Il leur a semblé possible d’en déterminer quatre (d’ordre idéal-typique) susceptibles de concerner leur terrain : le lien symbiotique, où l’Etat et sa religion semblent indissociables ; le lien hiérarchique, lorsque l’Etat se place autoritairement au dessus de la (des) religion(s) et régule celle(s)-ci ; le lien d’autonomie réciproque, lorsque la religion apparaît comme un interlocuteur parmi d’autres de l’Etat ; et le lien d’exclusion, quand l’Etat tente de repousser l’influence des religions dans la stricte sphère privée. La détermination de ces quatre types de lien – toujours relatifs dans les faits - pose la question de la régulation institutionnelle : quelles sont les conditions de l’acceptation politique de la visibilité sociale du religieux (suppose-t-elle sa participation au système politique dominant ? Jusqu’à quel point le religieux peut-il faire entendre une voix politique discordante ?) ; et quels sont les modes de reconnaissance de cette visibilité (procédures administrative, éducative, juridique ou autres qui créent éventuellement un lien économique entre l’Etat et l’institution religieuse). C’est selon la spécificité tant du terrain que des outils conceptuels de chacun que les participants situeront leur objet dans cette problématique. Il est d’ores et déjà apparu qu’ils pouvaient se diviser en deux groupes : le premier constatant plutôt des liens, certes mouvants, mais s’orientant vers le type symbiotique ; le second traitant au contraire de situations également évolutives, mais se rapprochant davantage du lien d’exclusion. C’est donc séparés en deux panels distincts mais extrêmement complémentaires que les participants se demanderont : Comment, à l’intérieur de la société, le politique et le religieux se construisent-ils mutuellement ?

Charles MACDONALD : Directeur de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Maison

de l'Asie et du Pacifique (UMS-MAP)

Polythéisme et messianisme en Asie : le cas du christianisme aux Philippines

Dans une première partie de cette communication, je m’interrogerai sur la nature du christianisme dans cet archipel, en

tant que religion populaire. Je montrerai qu’il s’agit fondamentalement d’un polythéisme et j’en tirerai les conclusions qui

s’imposent. L’une d’elles est que les cultes populaires ne sont pas en rupture idéologique aussi complète qu’on le pensait

par rapport aux anciennes représentations sur lesquelles se fondaient des pratiques chamaniques et médiumniques.

Il a été démontré d’autre part que les mouvements populaires de révolte et de contestation politique étaient d’origine

chrétienne et s’inspiraient du texte de la Passion (Ileto). Mais dans ce domaine la nature polythéiste ou les antécédents

préhispaniques de la religion sont-ils déterminants ? En quoi le christianisme est-il responsable des soulèvements

populaires en Asie ? Pour répondre à cette question, je comparerai brièvement des mouvements messianiques aux

Philippines (et la Révolution de 1896 en fut un) à des phénomènes de même nature ailleurs en Asie, particulièrement la

rébellion de Shimabara, au Japon en 1638, menée par le « Messie » Amakusa Shiro.

Jérémy JAMMES : Doctorant, Laboratoire d’Ethnologie et de Sociologie comparative, Université de Nanterre

(Univ. Paris X)

Cao Dai Tay Ninh - Nationalisme culturel et religion nationale

Je propose ici de m’arrêter sur la religion vietnamienne Cao Dai, et notamment sur son premier Saint Siège historique

(dans la province de Tay Ninh, au Sud du Vietnam). J’entamerai une réflexion sur les rapports de celui-ci depuis le début

du siècle avec les différents gouvernements en place (français, japonais, communiste). Cette intervention tentera de

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cerner les différentes stratégies d’action (ou de réaction), politiques et religieuses, mises en œuvre par cette communauté

caodaïste depuis ses origines.

Vincent GOOSSAERT : Chargé de recherche, Groupe de Sociologie de la Religion et de la Laïcité

Religion et Etat en Chine au 20e siecle: Separation, controle et reinvention

constate pour sa part que le rapport Etat-Religion en Chine est totalement reconstruit au cours des premières années du

XXe siècle, puisque l’Empire qui se donnait un fondement religieux est renversé par une République qui se veut laïque ;

la gestion législative et politique des institutions religieuses est alors réinventée. L’entreprise de destruction de la religion

chinoise, perçue par les élites politiques comme un obstacle à la modernité, avait en fait commencé dès avant la

révolution républicaine ; en même temps et sous l’influence occidentale, la notion de « religion » se forme, et la Chine

cherche si elle a une religion, et laquelle. Confucianisme, bouddhisme et taoïsme cherchent à s’ériger en religion

autonome sur les décombres de la religion chinoise. La période 1890-1930 en Chine apparaît donc non seulement

comme un immense bouleversement mais aussi comme un laboratoire ou toutes les formes de relations Etat-religion sont

mises à l’épreuve.

Fabienne DUTEIL-OGATA : Post-doctorante en ethnologie, Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Dispositifs législatifs actuels portant sur la religion et réalité sociale : étude de cas : la vie religieuse d'un quartier de

Tôkyô

Depuis 1946, la Constitution japonaise garantie la liberté religieuse et la séparation de l'État et de la religion. De même, la

loi de 1951 sur les personnes juridiques religieuses régule de nos jours les organisations religieuses. Comment

actuellement ces dispositifs législatifs sont-ils concrètement appliqués dans un quartier de Tôkyô? Pourquoi existe-t-il un

décalage entre cette législation et les pratiques des différents acteurs locaux impliqués dans la vie religieuse du quartier

(mairie, association de voisinage, association des fidèles du sanctuaire shintô, associations des paroissiens des

monastères bouddhiques et résidents du quartier)?

Nathalie LUCA : Chargée de recherche, Centre d’Etudes Interdisciplinaires des Faits Religieux ; membre

associé du Laboratoire d’Etudes Coréennes

Religion et Etat en Chine au 20e siècle: Séparation, contrôle et réinvention

fera une étude comparative des motifs d’hostilité et des types de réactions des Etats chinois, japonais et coréen

confrontés à certains groupes qu’ils jugent en contradiction avec les valeurs de la société. Elle s’arrêtera notamment sur

l’exemple du Falungong en Chine, sur celui d’Aum Shinrikiô, au Japon, et sur la différence de traitement que l’Etat

accorde, en Corée du Sud, aux groupes protestants intramondains et extramondains. Elle s’interrogera donc sur ce

qu’est, pour les trois Etats, un religieux inacceptable.

22. APPROCHE POLITIQUE COMPAREE DES CULTES AUX DIEUX DU SOL DANS L’AIRE SINO-INDIENNE Coordinateur : Grégoire SCHLEMMER, Doctorant en ethnologie, Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Intervenants : Vanina BOUTE, Stéphane GROS, Emma GUEGAN, Raphaël ROUSSELEAU Ce panel consistera en la présentation des cultes communément appelés ‘aux dieux du sol’ en marge des formations étatiques des mondes indien et sud-est asiatique. Cette approche trans-frontalière veut poser une identité commune des minorités ethniques, quelque soit leur famille linguistique, qui tient justement à leur

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statut ‘d’habitants des marges’. En dépit des importantes différences culturelles, cette position d’inféodalisation à des entités politiques plus puissantes force l’ensemble de ces groupes à se poser et à s’opposer, bref à se définir par rapport à cette ‘prise en tenaille’ des civilisations étatiques rizicoles des plaines à ‘grandes religions’. Dans une telle perspective, l’approche des cultes aux dieux du sol est particulièrement féconde. Parce qu’ils mettent en jeu un rapport au territoire, source de subsistance des groupes, ils sont le lieu de cristallisation de nombreux enjeux imbriqués : celui de la définition et de la légitimation de ce territoire, mais aussi des instances, temporelles et spirituelles qui en sont les maîtres et les gestionnaires. On essayera donc d’analyser en détail l’articulation de ces cultes, tant avec la question du foncier qu’avec le pouvoir politique, interne au groupe ou englobant ces populations, qui se présentent alors souvent comme ‘autochtones’. Les travaux se baseront sur des études menée en Inde, Népal, Chine, Thaïlande et Laos.

Raphaël ROUSSELEAU : Doctorant en anthropologie, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

(EHESS)

Les Joria Poraja (Orissa, Inde) ont-ils une déesse-terre? Hundi devata entre le village et le royaume

Cet article s'intéresse au culte d'une divinité généralement représentée par une pierre ou un petit monticule de terre,

hundi devata, qui est honorée notamment dans les villages d'une communauté agricole du Sud de l'Orissa, les Joria

Poraja (Scheduled Tribe). Cette divinité était généralement qualifiée de 'déesse-terre' et/ou 'déesse de village' par les

anciens ethnologues. L'étude des rituels de fondation et l'examen de la fête printanière de Chaitra révèlent une entité

plus complexe, reflétant la situation politique et culturelle des Joria Poraja, combinant règles ancestrales et valeurs pan-

hindoues.

Grégoire SCHLEMMER : Doctorant en ethnologie, Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Ancêtres du lieu, alliés de la forêt et pouvoir politique : les cultes aux dieux du sol chez les Kulung, Népal

Les cultes au territoire des Kulung Rai des collines du Népal oriental, longtemps restés en marge de la centralisation

étatique, offrent une configuration originale. Alors que partout au Népal, ce culte est lié au chef de clan défricheur et/ou

aux chefs de village délégués du pouvoir royal, chez les Kulung, cette fonction reste ouverte à tous. Le représentant du

culte est en effet tiré au sort parmi des anciens représentant l’ensemble des clans du village. On peut lire, derrière ce

système d’élection original, la permanence d’un système politico-religieux ancien à tendance acéphale. Ce phénomène

n’est pas anodin quand on connaît les enjeux politiques et identitaires qui se joue au travers de ces cultes au Népal. On

examinera en détail le fonctionnement de ce culte, que l’on mettra en parallèle avec un autre culte, qui lui légitime

individuellement la relation à un être aquatique fondateur de la tribu, et l’on présentera quelques autres exemples de

culte chez des populations voisines, de sorte à en montrer les modalités de variations.

Stéphane GROS : Doctorant en ethnologie, Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Sacrifice et culte aux montagnes. Espaces et principes du politique dans les marches tibétanisées du Yunnan (Chine)

L’exposé prendra comme point de départ l’analyse de deux pratiques rituelles, le sacrifice de bovin et le culte aux

montagnes, telles qu’elles coexistaient autrefois chez les tibéto-birmans Drung. Nous questionnerons alors les liens entre

ces deux pratiques, leurs implications politiques respectives. Si dans le sacrifice se dessinait un enjeu de prestige qui

semble être au fondement du principe politique qui prévalait au sein de cette société et dans ses rapports avec les

sociétés voisines, le culte aux montagnes ne semble avoir de son côté aucune implication politique. Cependant, sa

réalisation implique une délimitation symbolique des limites du territoire, territoire qui correspond à l’extension

géographique de ce culte et concorde avec l’ancien espace politique qui prévalait dans la vallée du temps où les Drung

versaient un tribut à des chefs Tibétains considérés comme maîtres du lieu. Nous nous interrogerons alors sur l’éventuel

rapport entre le culte aux montagnes et la relation politique qui liait les Drung à ces chefs Tibétains.

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Emma GUEGAN : Doctorante en Ethnologie, Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Spécificités et implications rituelles de la relation entre autochtones et esprits du sol (Thaïlande)

Les populations austro-asiatiques sont généralement reconnues par leurs voisins, notamment de langue tai, comme étant

les autochtones de la région. De ce fait, un lien particulier les unissant aux esprits du sol leur est attribué. Nous tâcherons

de spécifier la nature de ce type de relation à travers l’étude de groupes austro-asiatiques (T'in et Khmu') et de leurs

voisins Tai dans la province de Nan. On verra que cette relation authochtone/dominant s’exprime avant tout à travers des

coopérations rituelles. Lorsque la province de Nan était encore une principauté tai, des représentants des autochtones

étaient sollicités pour mener des rituels à la cour. Actuellement, il est fréquent que des villageois ou des villages d'autres

ethnies, dont des Tai, fassent appel aux services d'un spécialiste religieux austro-asiatique afin qu'il rende un culte aux

esprits du territoire. Nous présenterons ces différents types de coopération rituelles interethniques pour tenter de mieux

saisir les modes de relations unissant les autochtones et les Tai par le biais de la relation entretenue par les deux aux

esprits du sol.

Vanina BOUTE : Doctorante en ethnologie, Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et le Monde Austronésien

(LASEMA), Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Centralisation politique et cadastrage foncier : tribulations d’un culte aux divinités du sol dans le Nord Laos

Partant du constat que les transformations du système religieux phounoy sont indissociables de l’évolution des rapports

que ces montagnards ont entretenus avec la société globale, nous analyserons les différentes étapes du processus de

transformation du culte aux divinités du sol Phounoy, en relation avec les changements politiques, administratifs et

fonciers des pouvoirs dominants (Tai lü, royaume de Luang Prabang, puis Etat lao). Le processus d’évolution de ce culte

révèle une volonté des Phounoy de se démarquer des autres groupes montagnards de la région et d’asseoir une position

de ‘dominants parmi les dominés’. Cependant, contrairement à ce qui a été observé pour d’autres sociétés dans un

contexte identique, la centralisation politique ne s’est pas doublée d’un processus de centralisation des cultes et l’on

assiste au contraire à un éclatement des fonctions religieuses. Nous essayerons de comprendre ce phénomène en le

mettant en parallèle avec la parcellisation des terres et la segmentation des clans en petites unités exogames.

VII - Tensions internationales et équilibres régionaux 23. LA QUESTION DES FRONTIERES Coordinateur : Jean-Luc RACINE, Directeur de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS),

Membre du Centre d'Etudes de l'Inde et de l'Asie du Sud (CEIAS), Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

(EHESS) et Responsable du Programme international d'études avancées, Maison des Sciences de l’Homme

Intervenants : Sébastien COLIN, Nathalie FAU, Florence TOIX, Laurence HENRY

Discutant: Michel BRUNEAU, Directeur de recherche au CNRS

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L’atelier s’est donné un triple but. En premier lieu, aborder la question des frontières en Asie de façon à offrir quelques cas représentatifs d’une typologie que l’on sait très diverse : frontières effectives, frontières contestées, frontières amenuisées par les dynamiques de coopération régionalse, espaces transfrontaliers, zones grises frontalières où les autorités étatiques de tutelle n'opèrent pas un plein contrôle, etc... On espère ainsi enrichir une réflexion théorique sur le concept de la frontière, susceptible d'éclairer la dialectique actuelle entre Etats nations, réseaux transfrontaliers et mondialisation. En second lieu, l’atelier a voulu regrouper dans une même session des études sortant du cadre sub-régional fréquemment privilégié, spécialisation oblige, pour aborder au contraire, dans un esprit trans-asiatique, aussi bien l’Asie du Nord-Est (frontière Chine-Corée du Nord, Mer de Chine du Nord), l’Asie du Sud-Est (lesdynamiques transfrontalières dans le détroit de Malacca) que l’Asie du Sud (la frontière Pakistan-Afghanistan. Enfin, l’atelier a voulu privilégier les jeunes chercheurs, doctorants à divers stades de leur thèse, tant pour faire connaître de nouveaux thèmes d’études que pour donner à ces jeunes chercheurs, encadrés par l’organisateur et soumis à la critique de l’invité, l’opportunité de s’exprimer devant un large public divers : l’auditoire de l’atelier (une quarantaine de personnes), comprenait aussi bien de jeunes chercheurs et des universitaires confirmés que des experts, des diplomates, des journalistes.

Nathalie FAU : Doctorante, Université de Nanterre (Univ. Paris X) ; détachée au Laboratoire d’Asie du

Sud-est et du monde Austronésien (LASEMA UPR 297 du CNRS)

Les espaces transfrontaliers dans le détroit de Malacca

Le détroit de Malacca est l'une des routes maritimes les plus fréquentées et les plus stratégiques du monde. Il est la

principale voie maritime entre l’Océan Indien et la Chine. Le détroit de Malacca est non seulement la route la plus courte

entre le golfe persique et l’Asie Orientale mais il est également une mer intérieure entre Sumatra (Indonésie) et la

péninsule malaise et Singapour. La mise en application du régime de passage en transit défini par la Conférence des

Nations Unies de 1982 impose aux états riverains de coopérer afin de prendre en charge la sécurité de la navigation

dans le détroit et de préserver l’environnement maritime. D’autres formes de coopération existent cependant. En dépit de

la frontière, les deux rives du détroit ont toujours maintenu des flux intenses : ressources naturelles, capitaux, migrants,

légaux ou non et contrebande. Le détroit de Malacca est également divisé en deux « triangles de croissance », des

zones infra-régionales de coopération qui n’intègrent pas la totalité des territoires nationaux, mais des régions limitrophes

disposant de capacités et de ressources complémentaires. Le premier triangle de croissance, qui a pris un essor rapide

au début des années 1990, réunit Singapour, Johore (Malaisie) et Riau (Indonésie). Le second, développé plus

tardivement et dénommé le triangle de croissance nord, relie le nord de Sumatra à Penang/Kedah/Perlis/Perak (Malaisie)

et le sud de la Thailande. Cette contribution examine ces coopérations transfrontalières et les différents flux unissant les

deux rives et évalue le rôle du détroit de Malacca dans la formation d’une région transnationale.

Articles déjà publiés ou en cours de publication sur le thème de la frontière :

FAU N. et NUR Y. (1998) : “ Le pari des triangles de croissance SIJORI et IMT-GT ”, Hérodote, n°88, pp. 124-140.

1999 :“ Le triangle nord (Indonesie-Malaisie-Thaïlande): quelle réalité ? ” Actes du Colloque d’Arras sur les Méditerranées

dans le monde, pp. 135-149.

FAU N., 1999. “ Hong Kong et Singapour, des métropoles transfrontalières ”, Espaces Géographiques, n° 3 : 241-255.

FAU N. (2000) : “ D'une rive à l'autre : les migrations entre l'Indonésie et la Malaisie dans le détroit de Malacca ”, Revue

Européenne de Migrations Internationales, Vol. 16, n° 1, pp. 151-183.

2002 : conseiller scientifique pour un reportage sur “ la frontière entre Hong Kong et la Chine méridionale ” au CNDP,

série “ Frontières ”.

2002/2003 : “ Enjeux et organisations spatiales du détroit de Malacca”, publication du groupe NORAO (Nouvelles

Organisations Régionales en Asie Orientale) sous les directions de CH. Taillard et Ph. Pelletier.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.55

2002/2003 : “ Etre Malais de part et d’autre du détroit de Malacca ”, publication dans un ouvrage collectif placé sous la

direction de Bénédicte BRAC DE LA PERRIERE, Yves GOUDINEAU et Michel PICARD sur “ Identité, ethnicité, religion et

intégration nationale ”

Sébastien COLIN : doctorant en géopolitique, Institut Français de Géopolitique, Université Paris VIII

Ouvertures et coopérations frontalières en Chine du Nord-Est : état des lieux, enjeux et perspectives

Sujet de thèse de doctorat : La politique frontalière chinoise en Asie du Nord-Est : géopolitique et coopération

économique au carrefour Chine, Corée du Nord et Russie d'Extrême-Orient.

La frontière entre la Chine et la Corée est une des plus anciennes frontières d'Asie. Les deux pays ont très tôt considéré

les fleuves Yalu et Tumen comme leur frontière commune, même s'ils n'ont, au début, jamais trouvé utile de la délimiter

formellement. Il faut attendre les tensions géopolitiques des années 1950 (guerre de Corée, rupture sino-soviétique, etc.)

pour que les deux Etats, qui sont alors la République populaire de Chine et la République Populaire Démocratique de

Corée (ou Corée du Nord), décident de renégocier le tracé de leur frontière. Après de multiples négociations, le traité

concernant la délimitation frontalière est finalement signé en 1962. D'autres traités annexes sont ensuite signés durant

les années 1960 et 1970.

Suite à ces signatures, la frontière entre la Chine et la Corée du Nord se ferme complètement. Seul le doublet frontalier

Dandong-Sinuiju, situé à l'extrémité sud de la frontière, est ouvert aux flux officiels (commerce, visites officielles, etc.).

La situation change au début des années 1990, lorsque les autorités chinoises et nord-coréennes se lancent dans une

politique d'ouverture de leur frontière. Ces politiques provoquent l'apparition de nouvelles dynamiques frontalières

caractérisées par la connexion des réseaux de transports, la renaissance du commerce frontalier – qu’il soit légal, illégal,

officiel ou informel -, et l'accroissement des flux de personnes. Malgré leur faiblesse, en raison notamment de la situation

économique désastreuse dans laquelle se trouve la Corée du Nord et de son imprévisible comportement politique, ces

nouvelles dynamiques n'en sont pas moins intéressantes à étudier dans la mesure où elles permettent de présenter les

politiques frontalières des deux Etats.

Cette communication présentera la frontière entre la Chine et la Corée d'un point de vue géographique, bien sûr, mais

aussi historique et géopolitique.

Dans un premier temps, une analyse géohistorique du tracé, décrivant l'évolution du tracé et la délimitation de la

frontière, sera effectuée. Elle permettra de se faire une première idée sur les politiques frontalières d'alors des deux Etats

et de présenter les caractéristiques historiques et géographiques de la frontière.

Un second point sera consacré à une analyse géographique présente du tracé dans laquelle les politiques d'ouverture de

la frontière sino-coréenne et les nouvelles dynamiques qu'elles provoquent seront étudiées. Cette analyse permettra de

présenter une géographie précise de la frontière et de localiser deux grands sous ensembles transfrontaliers, l'un

organisé autour du fleuve Tumen, au nord, l'autre autour du fleuve Yalu, au sud, où la structure et l’intensité des flux

frontaliers diffèrent. Cette division de la frontière en deux sous-ensembles trouve sa cause dans les politiques des deux

Etats. En effet, dotés de caractéristiques géographiques et historiques différentes, (lesquelles auront été étudiées dans le

premier point), les sous-ensembles transfrontaliers du Tumen et du Yalu ne posent pas les mêmes enjeux géopolitiques

aux deux gouvernements, qui ne leur accordent donc pas les mêmes politiques.

Ces différents enjeux seront étudiés dans une analyse géopolitique de la frontière. Ils sont tout à la fois des enjeux

géopolitiques internes aux deux Etats et des enjeux géopolitiques externes, qui les touchent au premier chef, comme la

question de la réunification coréenne. Ainsi, cette analyse géopolitique reviendra à s'interroger sur la place et le rôle de

l'ouverture de la frontière entre la Chine et la Corée du Nord dans le processus de la réunification de la péninsule.

Articles déjà publiés ou en cours de publication :

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.56

Articles déjà publiés :

COLIN Sébastien (2000) : ‘Ambitieuse tentative de coopération en Asie du Nord-Est : la zone de développement

économique du fleuve Tumen’, Hérodote, n° 97, deuxième trimestre, pp. 88-106.

(2002) : ‘Confins sino-russes’, in Asies nouvelles, sous la direction de M. Foucher, Paris, Belin, pp. 331-335.

À paraître :

(2003) : ‘Difficile coopération régionale en Asie orientale : progrès, problèmes et enjeux du programme Tumen’, in

Nouvelles organisations régionales en Asie orientale, sous les directions de Ch. Taillard et Ph. Pelletier, Paris, CNRS

Éditions, vol. 2.

(2003) : ‘Géopolitique d'une région frontalière en Chine du Nord-Est : la préfecture autonome des Coréens de Yanbian’, à

paraître dans la revue Perspectives chinoises.

(2003) : ‘Coopérations frontalières entre la Chine et la Russie’, à paraître dans Les études du CERI.

Florence TOIX : Doctorante en géopolitique, Institut Français de Géopolitique, Université Paris VIII

Territoire, Nation et Djihad. La frontière afghano-pakistanaise

De la Chine à l’Iran, la très poreuse et montagneuse frontière afghano-pakistanaise, longue de 2432 Km, constitue l’une

des frontières internationales issues du processus de colonisation. La présence d’une zone tribale semi autonome

(Agences Tribales sous Administration Fédérale, FATA), bordant la frontière côté pakistanais, demeure plus que jamais

un legs colonial problématique. Dans la période post-coloniale, marquée par la création du Pakistan en 1947, cette zone

frontalière majoritairement pachtoune et coupée par une ligne ‘ artificielle ’ sur le plan ethnique donna lieu ans un premier

temps à un litige territorial avec l’Afghanistan, s’appuyant sur la revendication de l’élite pachtoune de Kaboul et de

Peshawar au droit des peuples à l’autodétermination pour les Pachtounes du Pakistan (les Pathans). Puis, elle devint

une ligne de front dans le contexte de la Guerre Froide, en intersection avec la stratégie militaire pakistanaise pro

djihadiste et pro pachtoune, recherchant une « profondeur stratégique » en Afghanistan, en réaction à la menace

indienne. Aujourd’hui, avec la traque menée par les Américains à l’échelle mondiale contre « le terrorisme » et depuis la

chute des Talibans, la frontière constitue l’un des points très « chauds » de la géopolitique internationale. Elle soulève de

nombreuses questions relatives à la capacité de contrôle des zones tribales de la part du Pakistan, à l’arrivée au pouvoir

d’une coalition d’islamistes à Peshawar et au difficile processus de normalisation frontalière en cours des deux côtés de

cette ligne poreuse. Ce partant, cette étude se propose, dans un premier temps, de présenter les différentes stratégies

transfrontalières, souvent opaques, ayant utilisé les territoires de la Province Frontière du Nord-Ouest pakistanaise

(NWFP), de la zone tribale (FATA) et la Ligne Durand qui les borde, émanant tant du Pakistan, que de l’Afghanistan et

d’acteurs non étatiques, et ce, spécialement depuis l’invasion soviétique de 1979. Dans un second temps, elle analyse

les effets géopolitiques locaux de ces stratégies frontalières, tout en ayant le souci de contribuer à éclairer la signification

identitaire et politique de cette frontière floue.

Laurence HENRY : Doctorante en droit public international, Université de droit, d’économie et des sciences

(Univ. Aix-Marseille III), Centre d’Etudes et de Recherches Internationales et Communautaires (CERIC, CNRS

UMR 6108)

Délimitations territoriales et maritimes dans la Pacifique du nord-ouest, entre revendications et coopération

Le Japon s’oppose à ses voisins, la Corée, la Chine et la Russie relativement à la possession de trois groupes d’îles,

respectivement Takeshima/Tokdo, Senkaku/Diaoyutai et les Kouriles, situées dans le Pacifique du Nord-ouest. Ces

différends territoriaux trouvent leur origine dans l’invocation de titres historiques parfois très anciens. L’incertitude quant à

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.57

l’appartenance de ses îles a été accentuée par les actes des alliés lors de la Seconde guerre mondiale, et non résolue

par les accords de paix subséquents. De plus, l’évolution du droit de la mer ces cinquante dernières années a permis aux

États de revendiquer des zones de juridiction en mer, que ce soit la mer territoriale, la zone économique exclusive ou le

plateau continental. Or, ces zones se chevauchent souvent, notamment parce qu’elles sont calculées à partir de

territoires revendiqués par les différents États de la région. Ces droits maritimes ont dans un premier temps exacerbé les

revendications territoriales concurrentes, comme en témoignent les législations nationales japonaises, coréennes,

chinoises et soviétiques puis russes. Néanmoins, si les controverses territoriales restent des sujets politiquement très

sensibles, une approche plus fonctionnelle de la souveraineté a résulté de ce nouveau droit de la mer, tel que codifié par

la convention de Montégo Bay en 1982. Les États concernés ont donc développé des accords de coopération maritime

bilatérale, que ce soit en matière de pêcheries ou d’exploitation des ressources hydrocarbures offshore. Ainsi, alors qu’il

n’existe aucune Organisation régionale entre ces pays, généralement considérée comme le moteur de la coopération,

voire à l’intégration d’États d’une même région, ces traités font figure de précurseurs dans ce domaine.

Publications

- Laurence Henry, « L’accès de la Chine à l’OMC, réformes ou révolution ? », L’Observateur des Nations Unies,

Printemps 2002, n°12, pp. 147-177.

- Laurence Henry, « L’administration des Nations Unies sur un territoire : démocratisation et respect de la souveraineté

ou le paradoxe de l’histoire juridique internationale », La contribution des Nations Unies à la démocratisation de l’État, R.

Mehdi (dir.), Actes des Dixième rencontres internationales d’Aix-en-Provence, Pedone, 2002, pp. 161-188.

- Laurence Henry, « La démocratisation en Afrique subsaharienne : une problématique de l’État », L’Observateur des

Nations Unies, Hiver 2000, n°9, pp. 1-17.

- Laurence Henry, « Participation au Premier Congrès du Réseau Asie, Enseignements, recherches et expertises sur

l’Asie, 24 et 25 septembre 2003, dans le panel dirigé par Jean-Luc Racine, « La question des frontières », ‘Délimitations

territoriales et maritimes dans la Pacifique du nord-ouest, entre revendications et coopération’.

- Laurence Henry, « Commentaire des arrêts de la Cour internationale de justice dans les Affaires Pulau Sipadan et

Pulau Ligitan (Malaisie contre Indonésie), Arrêt Requête aux fin d’intervention de Philippines, 23 octobre 2001 et Arrêt au

fond, 16 décembre 2003 », L’Observateur des Nations Unies, n° spécial « Asie », automne-hiver 2003, à paraître

Traductions :

- F. Snyder, « Gouverner la mondialisation économique : pluralisme juridique mondial et droit européen », L’Observateur

des Nations Unies, automne-hiver 2002, n°13, pp. 3-63 et dans Droit et Société, n°54/2003,.pp. 435-490.

- F. Snyder, « Ethique, OMC et pluralisme juridique mondial : Réflexions sur la Gouvernance de la mondialisation, in Yves

Nauder (dir.), Mondilisation et éthique des échanges, Presse de l’Université d’Aix-Marseille, 2003, pp. 117-156.

Travaux de recherche en cours :

- Participation à un programme de recherche dirigé par le Professeur Rostane Mehdi, CERIC, sur le thème : « Une

société internationale en mutation : quels acteurs pour quelle gouvernance ? », démarré début 2002. Etude sur le

discours de la Banque mondiale sur le secteur informel en Afrique, publication chez Bruylant en 2004

- Revue conjointe de deux ouvrages, G. Distefano, L’ordre international entre légalité et effectivité, Pedone, 2002, 584pp.

et J. Castellino and S. Allen, Title to Territory in International Law. A Temporal Analysis, Ashgate, 2003, 265pp.,

European Journal of International Law, Printemps 2004, à paraître

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.58

24. ENJEUX GEOPOLITIQUES DANS LES MERS D'ASIE ORIENTALE Coordinateur : Philippe PELLETIER, Professeur de géographie, Université Lumière (Univ. Lyon II)

Intervenants: LI Jin-Mieung, Eric DENECE, Eric FRECON La façade Pacifique de l'Eurasie, appelée ici 'Asie orientale' par commodité et par communauté croissante d'espace, forme une zone aux terres morcelées et dispersées dans un espace à dominante océanique, péninsulaire, insulaire et surinsulaire. Elle dispose d'une situation géographique exceptionnelle entre les océans Pacifique et Indien. L'accroissement des échanges internationaux par voie de mer lui confère une importance considérable. C'est l'un des principaux carrefours mondiaux de la circulation maritime et l'une des artères majeures de l’approvisionnement énergétique du Japon et de la Russie. Les ressources halieutiques, naturellement importantes, sont convoitées par des pêcheries très actives, mais à l'évolution différente selon les pays : la concurrence et les risques de surpêche sont considérables. Des gisements d'hydrocarbures ont été découverts ça et là, surtout en mers de Chine. La délimitation des ZEE (Zones économiques exclusives) au milieu des années 1990 a réactivé les tensions à propos des litiges territoriaux maritimes et insulaires, chaque terre émergée comptant pour le tracé de la ligne de base droite et des ZEE. S'ajoute en effet une recrudescence de la piraterie, des activités clandestines et des incidents militaires. L'histoire et la géographie sont appelées à la rescousse pour résoudre ces différents litiges, ce qui ne va pas sans problèmes d'interprétation que l'atelier veut exposer.

Eric DENECE : Directeur du Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R)

La liberté de navigation et l'importance des routes maritimes en Asie du Sud-Est à l'ère de l'hyperterrorisme

Deux aspects font des mers d' Asie du Sud-Est une zone d'intervention majeure pour la sécurité internationale : les

communications maritimes et la délimitation des espaces océaniques en mer de Chine méridionale. La dynamique

terroriste opérant autour d'Al-Qaeda a déjà envisagé de s'en prendre aux artères stratégiques est-asiatiques, véritables

poumons de l'économie mondiale occidentalisée.

Par ailleurs, la découverte d'hydrocarbures dans le sous-sol de la mer de Chine méridionale a définitivement consacré

celle-ci comme l'un des espaces les plus convoités de la planète. Car elle est parsemée d'une myriade d'archipels qui

sont autant de terres susceptibles de servir de bases à des revendications maritimes. Les disputes sur ces îles,

réclamées en partie ou en totalité par sept Etats (Chine populaire, Taïwan, Viêt-nam, Malaysia, Indonésie, Philippines,

Brunei), reviennent périodiquement sous les projecteurs de l'actualité. Malgré l'entrée en vigueur de la Convention de

l'ONU de 1982 sur le droit de la mer, ces litiges mal maîtrisés pourraient facilement dégénérer en confrontations navales

ou en conflits pour le contrôle de zones d'un intérêt économique incertain. Ces aspects essentiels de la géostratégie de

l'Asie du Sud-Est confèrent au théâtre de la mer de Chine méridionale tous les attributs d'une zone maritime à risque. La

région se caractérise en effet par la montée en puissance des ambitions stratégiques chinoises et le glissement

progressif des antagonismes régionaux du continent asiatique vers les espaces océaniques voisins.

Compte tenu du morcellement des terres qui la caractérise, l'Asie du Sud-Est présente la particularité d'offrir une

multiplicité de voies de communication transocéaniques. Les flux maritimes qui traversent la région, dopés par

l'accroissement des échanges internationaux par voie de mer, lui ont conféré une importance considérable. Le Sud-Est

asiatique contrôle aujourd'hui plusieurs des grandes artères mondiales de la circulation maritime. Mais ces voies de

navigation sont tributaires de nombreux détroits afin de traverser la région. Cette originalité fait d'elle un espace propice

au développement d'opérations d'interdiction maritime.

Or, la montée en puissance de l'islamisme wahhabite dans le Sud-Est asiatique, et sa détermination à conduire des

actions violentes, représente un danger nouveau pour la circulation maritime internationale. En effet, dans cet espace

archipélagique, les possibilités d'action pour perturber ou interrompre le trafic maritime sont nombreuses, d'autant que

pirates, criminels et terroristes peuvent facilement trouver refuge dans le dédale insulaire qui caractérise la région. Ce qui

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.59

n'était qu'une hypothèse d'état-major, avant le 11 septembre 2001, a pris une nouvelle dimension depuis les attentats de

Bali (octobre 2002) et de Djakarta (août 2003).

Les menaces qui pèsent sur les communications maritimes sont de deux types. Le premier correspond à la piraterie

endémique qui ne cesse de s'accroître dans la région. Le second concerne les diverses formes d'interdiction violente du

trafic maritime : minage, sabordage ou attentat. Tous les deux revêtent une acuité nouvelle en raison de la montée en

puissance des groupes islamistes locaux et de leur détermination à lancer des actions spectaculaires.

Les hypothèses d'actions terroristes en mer, visant à perturber le trafic maritime périasiatique, sont prises très au sérieux

par les Occidentaux. Mais quelle que soit la nature des menaces qui pèsent sur la navigation, il paraît quasiment

impossible d'interrompre la totalité des communications maritimes entre le Pacifique et l'océan Indien, en raison de la

multiplicité des passages transocéaniques. C'est là l'une des grandes originalités de la région.

LI Jin-Mieung : Professeur de langue et civilisation coréennes, Université Jean-Moulin (Univ. Lyon III)

Mer de l'Est / Mer du Japon, pour rectifier une injustice de l'Histoire ?

La Corée du Sud et le Japon s'affrontent par l'Organisation Hydrographique Internationale (OHI) interposée, qui doit

publier prochainement sa 4e édition des ‘Limites des océans et des mers’ (S-23). La parution de ce fascicule a été

repoussée plusieurs fois en raison de multiples revendications des pays membres.La Corée du Sud réclame l'inscription

d'un nom double ‘Mer de l'Est / Mer du Japon’ sur le fascicule S-23 de l'OHI en arguant que le toponyme ‘Mer du Japon’

avait été adopté officiellement par cet organisme en 1929 alors qu'elle se trouvait sous le joug colonial du Japon. Mais ce

dernier s'en défend, pour que seul le nom ‘Mer du Japon’ y soit maintenu comme dans la précédente version datant de

1953 car, selon lui, cette appellation avait été adoptée et fixée dès le début du XIXe siècle. Depuis une quinzaine

d'année, les autorités sud-coréennes ont été très actives auprès des différentes instances internationales pour proposer

son changement de nom. Jusqu'à très récemment, les autorités japonaises se sont montrées indifférentes à la question.

Mais depuis l'été 2002 des rebondissements ont lieu, avec, comme épicentre, le rôle de l'OHI. Dans ce tumulte, ce qui est

clair, c'est que les Coréens ne veulent pas entendre dire qu'ils vivent au bord de la ‘Mer du Japon’, tandis que les

Japonais sont déterminés à défendre à tout prix l'acquis historique de ce toponyme. Notre intention n'est pas de

départager qui a raison ou qui a tort. C'est d'ailleurs impossible. Mais dans le cadre de cette communication, nous

pouvons examiner l'origine, l'évolution et le symbole du toponyme de cette mer du point de vue historique et de

géographie humaine, au vu des arguments invoqués par les deux pays protagonistes.

Philippe PELLETIER : Professeur de géographie, Université Louis Lumière (Univ. Lyon II)

Le rôle de la cartographie européenne (XVe-XIXe s.) dans la dénomination de la mer entre Japon, Corée et Sibérie

La tradition cartographique sinisée dans les cultures chinoise, coréenne et japonaise n'a pas cherché à dénommer les

mers de façon, préférant le vide toponymique ou bien de simple appellations générales. Cette habitude a été prise sous

l'influence de la cartographie européenne à partir du XVIe siècle. Les Européens ont apporté avec succès en Asie

orientale leurs connaissances géographiques et scientifiques, après, notamment, la découverte du Nouveau monde. Le

crédit qu'ils ont obtenu auprès des élites est-orientales n'ont cependant pas effacé l'acquis géographique que celles-ci

avaient de leur zone, d'où l'originalité du premier planisphère sino-européen de Matteo Ricci (1602).La découverte des

mers du Monde et la confirmation de la sphéricité terrestre ont posé des problème à la fois techniques et géopolitiques

pour les différentes écoles de cartographie européennes (ibérique, italienne, hollando-flamande, germanique, française,

anglaise, russe, jésuite…) : comment, dans un contexte de rivalités coloniales outremer et d'élaboration du droit

international maritime (mare librum versus mare clausum), dénommer les mers ? Quel nom choisir, où le placer, jusqu'où

l'étendre ? Deux approches techniques se sont opposées.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.60

Par ailleurs, attribuer plusieurs noms pour un même espace maritime n'avait rien de choquant, ce qui fut le cas pour la

mer entre Japon, Corée et Sibérie. Une analyse attentive révèle que le choix toponymique localisé (échelle micro)

dépend aussi, sinon largement, des choix qui ont été faits pour l'ensemble (échelle macro). Le fait que le ‘quart nord-est’

de l'Eurasie soit l'un des derniers endroits au monde à être connu précisément mais avec des erreurs, complique une

situation que les conflits de la période contemporaine vont aggraver jusqu'à nos jours, rendant très délicate tout recours à

la cartographie historique.

Eric FRECON : Chargé d’études, Centre d’Enseignement Supérieur de la Marine (Ecole militaire) ; Membre de

l’Institut de Recherche sur l’Asie du Sud-Est Contemporaine (IRASEC) ; Doctorant à Sciences Po Paris sous

la direction de Jean-Luc Domenach

Réalité de la menace pirate de l’Indochine à l’Insulinde :un défi à la sociabilité interne et externe en Asie orientale

(1991-2003)

Nous sommes en 2003 après J.-C., au lendemain de la Guerre froide. Toutes les mers du globe obéissent aux règles

d’un nouvel ordre mondialisé et enfin pacifié. Toutes? Non ! Les détroits d’Insulinde peuplés d’irréductibles pirates sont le

théâtre d’une violence transnationale et non-militaire depuis les années 90. Du détroit de Malacca aux côtes des Sulu, la

littérature du Bureau Maritime International se démarque nettement des récits de Joseph Conrad. Chaque jour, les

rapports du centre de Kuala Lumpur font état d’abordages et parfois de navires transformés en « bateau fantôme ». Les

records datent des années 2000, avec 469 abordages recensés, et 1998, avec 78 morts, précisément au lendemain de la

crise de 1997. Face à ce réveil d’un fléau millénaire, symbolique des périodes de chaos et de transition, il est temps

d’éliminer les idées reçues - à défaut des pirates - en s’appuyant sur les témoignages recueillis auprès des forces de

l’ordre et des lointains héritiers de Raga, Koxinga et Madame Ching.

Reflet des problématiques post-Guerre froide - coming anarchy (Kaplan), nouveaux barbares (Rufin), menaces

asymétriques (Quesnot)… - la piraterie propose une lecture originale des enjeux sécuritaires et maritimes en Asie

orientale. Cette menace longtemps abandonnée aux seuls romanciers permet d’insister sur les causes socio-

économiques (coexistence des bénéficiaires et oubliés de la croissance), voire géopolitiques (départ des marines

américaines et soviétiques) qui, conjuguées au contexte géographique propice à toutes les formes de guérillas maritimes,

expliquent le réveil de la piraterie. Parmi les principaux risques notons : l’idée d’une catastrophe écologique suite à

l’échouage d’un pétrolier, la prise en otage des SLOC (Sea La(i)nes of Communication) ou les manipulations diplomatico-

stratégiques de la part de l’Inde et du Japon.

L’enjeu ultime touche sans doute la stabilité de la région et des Etats dépossédés de leur monopole de la violence

(Weber). En s’interrogeant sur les dispositifs répressifs mis en place par les gouvernements et organisations régionales,

sur le rôle des grandes puissances ainsi que sur l’attitude des Etats a priori instables et déliquescents, il sera peut-être

possible de trouver des raisons de baisser à l’avenir le pavillon noir.

25. REFLEXIONS PLURIDISCIPLINAIRES SUR LA NOTION DE LIMITES ET FRONTIERES EN ASIE CENTRALE Coordinateurs :

- Vincent FOURNIAU, Maître de conférences, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), ex-

directeur, Institut français d’Etudes sur l’Asie centrale (IFEAC)

- Catherine POUJOL, Professeur, Institut National Des Langues et Civilisations Orientales (INALCO)

Intervenants: Marlène LARUELLE, Isabelle OHAYON, Carole FERRET, Seïtkassym AOUELBEKOV

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.61

L’Asie centrale est une aire culturelle et historique organisée et traversée de frontières visibles et invisibles. Une réflexion pluridisciplinaire entre historiens, historiens des religions, philosophes politiques, sociologues et anthropologues doit pouvoir permettre d’affiner et diversifier les outils nécessaires pour progresser dans l’analyse des rédéfinitions politiques, économiques, sociales et identitaires que traverse cette aire. L’Asie centrale est la moins bien connue des grandes aires culturelles de l’Asie dans la recherche occidentale. Elle prend une importance accrue à nos yeux depuis 1991. Cependant, la complexité d’une histoire riche comme peut l’être celle d’une zone placée au cœur du plus grand des continents, le manque d’outils méthodologiques qui s’appuieraient sur des études de cas menées en Asie centrale même, la difficulté d’accès aux sources et l’enchevêtrement des grilles de lecture, endogènes et exogènes, pour les interpréter, tels sont les éléments avec lesquels doit compter le développement des études d’Asie centrale. Il est donc nécessaire de régulièrement réunir les chercheurs de disciplines complémentaires pour se pencher sur l’objet d’étude et confronter les approches, où les certitudes sont vraiment rares. L’angle proposé ici pour cet échange indispensable est celui des frontières et limites spatiale et chronologique, visible et invisible, et de leur perception selon les méthodologies suivies et les outils mobilisés pour « fabriquer des connaissances » sur l’Asie centrale. Avec l’ouverture de cette zone à des échanges suivis, il se constitue pour la première fois dans l’histoire de l’étude de l’Asie centrale, une véritable génération de jeunes chercheurs. On atteint enfin un seuil de connaissance et d’expériences de terrain suffisamment diversifiées, cependant que la mise en place des connaissances générales sur la région se fait lentement. Les limites chronologiques de cet atelier sont inscrites dans le long terme, tout en privilégiant les périodes de ruptures : fin XIXè siècle - XXè siècle, fin de la période soviétique- première décennie d’indépendance des Etats d’Asie centrale.

Vincent FOURNIAU : Maître de conférences, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) ; ex-

directeur, Institut français d’Etudes sur l’Asie centrale (IFEAC)

Quelques réflexions sur l’histoire des frontières en Asie centrale

Une réflexion pluridisciplinaire sur la notion de frontières et de limites dans la zone de l’Asie centrale est suffisamment

importante pour susciter la formation d’un atelier qui soit consacré à quelques uns des aspects que ces notions peuvent

recouvrir dans cette aire culturelle.

Située au coeur du plus grand des continents et contiguë de certains des plus importants ensembles historiques de

l’Asie, l’Asie centrale fut marquée par l’expansion du bouddhisme, de l’islam, par des migrations de peuples, en

particulier les peuples turcophones, par l’implantation du communisme dans des sociétés pré-industrielles, etc...

Elle fut au cours de son histoire une région carrefour reliant entre elles différentes grandes aires culturelles de l’Asie. Sa

position de point de rencontre de domaines ethno-linguistiques et religieux majeurs et d’intérêts géo-politiques et

économiques considérables en a fait une zone de fracture, instable sur la longue durée, mais dont la profondeur

historique est exceptionnelle.

L’Asie centrale n’a jamais formé un seul Etat. Cette aire s’est constituée sur la longue durée au travers de processus de

rencontre entre des facteurs monde et facteur locaux. Ces processus constituent un terrain d’interprétations multiples, qui

d’ailleurs, dominent la construction de l’objet d’études « Asie centrale ».

L’une des particularités de l’Asie centrale est d’être à la fois une notion géographique et une aire culturelle, mais une aire

culturelle qui ne porte pas la marque de l’existence dans le passé d’un Etat qui en aurait rassemblé les différentes parties

en une seule entité politique dont il resterait une sorte d’ensemble culturel.

Monde indien, monde ottoman, monde chinois : les continuités culturelles propres à chacun d’eux ont été accompagnées,

voire structurées, par l’existence d’un Etat, d’un empire rassemblant dans ses frontières pour une longue période la

majorité des régions ou pays qui constituent ces mondes. Ces derniers forment dans l’histoire à la fois des empires et

des aires, aux frontières variables mais définies. L’Asie centrale ne tient pas son unité, profonde cependant, de ce type

d’héritage car elle n’a jamais constitué un seul Etat et c’est là une des raisons de la diversité des approches qui en sont

proposées et de la lenteur de sa construction comme objet d’études.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.62

En conséquence, l’expression Asie centrale définit un vaste ensemble historique articulé en plusieurs sous-unités et

recouvre une quantité de situations politiques et économiques, de communautés ethniques et de processus identitaires.

Ces domaines ont eu des limites, variables dans le temps, dont l’histoire constitue un domaine d’études encore très peu

exploré, y compris les plus facilement identifiables d’entre eux dans l’Asie centrale pré-coloniale : ses entités politiques.

Durant l’aire coloniale, puis à la période soviétique, l’Asie centrale a été l’objet de nouvelles délimitations territoriales qui

demeurent aujourd’hui. Avec la nouvelle culture de l’indépendance qui se développe dans chacun des pays qui la

compose, un nouveau regard est porté sur l’histoire de ces pays et sur leur génèse.

Cette communication proposera quelques réflexions sur l’histoire des limites dans l’Asie centrale, en particulier des

limites de ses entités politiques pré-coloniales et les échos qu’elles trouvent dans les découpages territoriaux ultérieurs.

Catherine POUJOL : Professeur, Institut National Des Langues et Civilisations Orientales (INALCO)

Les frontières du possible : quelques aspects du licite et de l’illicite dans la Ferghana post-soviétique

Les sociétés urbaines et rurales d’Asie centrale post-soviétiques sont encore fortement normatives malgré les ruptures

brutales que leur ont imposées la modernité russe, l’idéologie soviétique, la « post-modernité de l’indépendance ». Elles

sont régies par une étiquette stricte qui varie selon les régions (anciennement nomades, sédentaires), les milieux

(intelligentsia, grandes familles, « émigrés de l’intérieur »), les affiliations religieuses (majorité musulmane, minorités

chrétiennes, juives). Elles sont aujourd’hui inscrites dans les frontières d’Etats-nations formés à l’époque précédente

mais qui ont toujours centré leur identité sur la religion, l’ascendance patrilinéaire et le terroir, par delà de nombreuses

pressions idéologiques visant à « réorganiser autrement ». Ainsi, le code du comportement licite ouzbek ou tadjik diffère-

t-il quelque peu de celui en usage chez les Kazakhs et les Kirghizes, notamment dans les pratiques sociales

(matrimoniales, funéraires, culinaires), même si le XX siècle a œuvré pour la fabrication d’une strate commune dont la

trace persiste malgré la disparition du principal référent.

Aujourd’hui, dans un contexte de transformations brutales, d’ouverture volontaire ou subie au monde extérieur, il est

intéressant d’étudier les contours du licite et de l’illicite dans des sociétés qui cherchent obstinément à se démarquer les

unes des autres, afin de retrouver une hypothétique étiquette validée rétrospectivement par sa simple antériorité au fait

soviétique. La situation actuelle, bien qu’en pleine mutation depuis une quinzaine d’années, est encore le reflet d’une

combinaison d’éléments fortement antagonistes : reconstruction d’une morale islamique à partir de fragments résiduels

issus de la norme musulmane pré-existante, persistance d’un comportement soviétique issu de la norme socialiste plus

ou moins intégrée selon les milieux et les générations. Le tout se produit dans un contexte d’acculturation dû aux

pressions des acteurs extérieurs (bailleurs de fond occidentaux, idéologues islamistes), de volontarisme étatique

d’imposer une nouvelle norme, de perte des repères et de désespérance sociale. Une telle approche permet de mesurer

le degré de stabilité et de persistance de sociétés soumises à de nouveaux sursauts de l’histoire.

Marlène LARUELLE : Docteur, Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO) ; affiliée au

Centre du monde russe-Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) ; chercheur associée,

Institut français d’Etudes sur l’Asie centrale (IFEAC)

Faire le deuil de l'empire. Les enjeux de mémoire autour de la frontière russo-kazakhe

Les cinq républiques post-soviétiques d'Asie centrale ont à construire de nouvelles identités étatiques et doivent, à ce

titre, légitimer et matérialiser leurs frontières nationales. Les problèmes de frontières peuvent être bien réels (maîtrise des

flux de population, de biens, de drogue ou d'armes), mais ils sont également imaginaires. Construire un Etat-nation,

comme le revendiquent les pouvoirs en place, signifie en effet créer un discours permettant de se dissocier du voisin et

de revendiquer son appartenance à une certaine aire culturelle. Il faut donc réaménager les événements dits fondateurs,

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.63

opérer un tri parmi ce qu'il convient de dire et de se souvenir : il ne peut exister de conscience communautaire sans mise

en œuvre d'un travail d'auto-définition.

L'histoire de la steppe en tant que frontière entre les mondes russe et turcique avait déjà été, tout au long de la période

soviétique, un enjeu de lutte historiographique. Depuis la perestroïka et l'indépendance de 1991, le discours historique

kazakh dénonçant la Russie comme une puissance coloniale s'étant appropriée des territoires étrangers n'a fait que

s'amplifier. La minorité russe du pays (30% de la population au recensement de 1999) s'est sentie tout particulièrement

visée par cette nouvelle historiographie officielle, qu'elle interprète comme un réquisitoire contre sa propre mémoire de la

steppe.

Cette opposition pour l'appropriation narrative de la steppe s'est focalisée sur la frontière Nord et Nord-Est du pays : les

Kazakhs estiment qu'elle reflète la réalité historique de l'étendue géographique du peuplement kazakh, les Russes

considèrent qu'elle était vierge de toute présence nomade régulière avant leur arrivée au 18e siècle. Le fait que cette

région frontalière ait appartenu pendant longtemps (jusqu'à la fin du 19e siècle, voire pour certaines de ses parties

jusqu'en 1920) à l'entité administrative sibérienne (préfigurant la Russie) et non à celle des steppes (préfigurant le

Kazakhstan), sert d'argument historique central dans la tentative de légitimation des Russes. Est donc en jeu l'idée qu'il

existe une frontière ‘vraie’ et ‘naturelle’ entre les deux mondes et que celle-ci se doit de concorder avec les frontières

politiques contemporaines. Ces polémiques contribuent ainsi à renforcer chez les Russes un fort mythe du pionnier :

comme chez les colons nord-américains ou pieds-noirs, c'est le noble travail de la terre qui donnerait le droit de propriété.

La frontière, en tant qu'inscription dans le sol du souvenir collectif, se révèle donc un enjeu fondamental pour les élites

des deux peuples concernés. Entre le mythe d'une nation inchangée depuis un millénaire et celui de la création, de toute

pièces, par le pionnier russe, d'un nouveau pays, aucun compromis discursif ne semble possible. L'importance accordée

à ces polémiques frontalières révèle néanmoins toute la difficulté du travail de deuil du territoire qui est aujourd'hui en

cours chez l'ancienne puissance coloniale.

Isabelle OHAYON : Doctorante, Institut des Langues et Civilisations Orientales (INALCO)

Fronts et frontières de la sédentarisation des Kazakhs (XIXè-XXè siècles)

On attribue souvent la sédentarisation des Kazakhs aux mesures soviétiques concomitantes à la collectivisation forcée.

Pourtant, en 1928, à la veille de cette violente campagne, seul un quart des Kazakhs menait une vie complètement

nomade, la moitié avait une résidence d’hiver fixe et permanente, tandis que le dernier quart était devenu sédentaire.

Cette situation résulte en effet d’un long processus qui commence au début du XIXème siècle et qui s’accélère à la

période soviétique. On peut dégager de l’étude de la progression de la sédentarisation, les logiques territoriales qui y ont

présidé et proposer ainsi une analyse de ses limites.

Le premier front de colonisation matérialisé par les lignes de fortifications établies au nord de la steppe au cours de la

première moitié du XVIIIème siècle ne coïncide pas avec un front de sédentarisation. Les entraves à la mobilité

qu’engendre l’installation des cantonnements cosaques n’entraînent qu’une modification des itinéraires pastoraux. La

consolidation du pouvoir russe dans les steppes qui amène une construction administrative rigoureuse du territoire

conquis est seule à l’origine des premières vagues de sédentarisation. Le peuplement exogène –en particulier slave,

limité par une interdiction légale jusqu’au début du XXème siècle ne constitue pas quant à lui un facteur déterminant pour

expliquer ce phénomène.

La réforme administrative réorganise à partir de 1867-68 le territoire de façon à circonscrire les populations dans de

petites unités, à inscrire les représentants du pouvoir local recrutés parmi les élites traditionnelles sur le territoire des

chefs-lieux de districts, tout en assignant aux groupes claniques, aux aouls, une domiciliation territoriale et administrative.

Les frontières d’une sédentarisation partielle ou totale qui touche la moitié de la population kazakhe sont alors fonction de

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.64

la force du pouvoir impérial, inégalement réparti sur le territoire des steppes, dessinant un front nord et un front sud. Les

nombreux bouleversements socio-économiques (paupérisation, dégradation du statut des autorités coutumières,

développement de l’agriculture céréalière et du commerce, etc.) provoqués par la colonisation contribuent à accentuer ce

passage à la sédentarité.

Le pastoralisme nomade se trouve dès lors relégué aux régions les plus arides du Kazakhstan (Kazakhstan central et

péninsule du Manguychlak) impropres à l’agriculture. Mais, le projet soviétique de sédentarisation totale transgressera les

limites agro-climatiques. La volonté de transformation radicale de la société kazakhe qui passait à la fois par la

destruction des élites traditionnelles, stigmates d’un système pensé comme « féodalo-clanique », et par la

sédentarisation totale des éleveurs s’appliqua à l’ensemble du territoire du Kazakhstan. A l’issu du programme de

sédentarisation forcée, achevé vers 1936 et soldé par une catastrophe démographique sans précédent, l’espace kazakh

est « dénomadisé ». Des formes marginales de semi-nomadisme subsisteront dans le Manguychlak et dans certaines

régions de piémont et de steppe. L’éventail des diverses pratiques pastorales pose dès lors la question de la frontière

entre semi-nomadisme et transhumance.

Seïtkassym AOUELBEKOV : Collectif de Recherches sur l’Asie Centrale (CRAC- INALCO)

Découpage de l’espace et normes de comportement chez les Kazakhs

La vision du monde traditionnelle des Kazakhs divise le milieu naturel habité entre un espace domestiqué, c’est-à-dire

socialisé, et un espace vierge, sauvage. L’espace domestiqué, que l’homme s’est approprié, se décompose lui-même en

cinq éléments concentriques.

La iourte s’y trouve au centre. C’est là que se règlent les questions importantes, et qu’on prend les décisions « entre

soi ». Dans la iourte ou dans le campement (aoul), les conflits s’apaisent et trouvent une issue judiciaire favorable. Mais,

quand les dissensions ne peuvent se résoudre, elles doivent se déplacer, sortir de l’espace socialisé, afin de trouver une

solution à sa marge, dans cet espace que les Kazakhs nomment adyr. Le vol du bétail (barymta), érigé en institution chez

les Kazakhs, permet de lever tous les griefs, par l’application d’une loi « naturelle », « sauvage » : celle du plus fort.

La conduite des hommes est strictement réglementée à l’intérieur de l’aoul. Les normes du comportement des étrangers

pénétrant dans ce territoire notamment sont codifiées en détail, surtout quand ils sont à cheval.

La limite extérieure de l’aoul représente en même temps la frontière symbolique des terres vierges, que les Kazakhs

nomment adyr « désert ». L’adyr est ambivalent. C’est une terre sacrée. Et en même temps, c’est un espace où les

signes + et – perdent de leur netteté, où le positif et le négatif tendent à se confondre. C’est pourquoi les normes

culturelles peuvent s’y trouver transformées. C’est le terrain de la mouvance, de l’imprévision et de l’instabilité, où le

voyageur est le héros principal.

L’adyr est une masse de nature sauvage qui sépare « nous » et « les autres ». Le secteur de l’espace où se trouvent

« les autres » est à la périphérie, tandis que « nous » sommes au centre. Les règles du jeu de l’adyr régissent donc la

conduite et les interactions avec autrui.

Carole FERRET : Collectif de Recherches sur l’Asie Centrale (CRAC- INALCO)

Les discontinuités pastorales de l’espace altaïque

Comment concevoir une frontière dans la steppe centrasiatique parcourue par des nomades ? La notion de frontière

implique le découpage stable de l'espace en zones dotées d'une homogénéité interne et hétérogènes entre elles. Où

trouver de l'hétérogène dans un espace steppique apparemment parfaitement continu et homogène ? Comment concilier

la stabilité de la frontière avec la mouvance du nomadisme ? L'activité traditionnelle des peuples turco-mongols de

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.65

Sibérie et d'Asie centrale, à savoir le pastoralisme, a créé des discontinuités qui ont structuré cet espace apparemment

continu.

Marquant les territoires par des repères naturels et artificiels, les éleveurs mesurent l'espace à l'aune de leur bétail.

Nombre de leurs unités de mesure spatiale se fondent sur la mobilité du bétail, appréciée, soit selon la longueur de

l'étape journalière, la vitesse de déplacement, ou encore la distance susceptible d'être parcourue d'une traite. A la

relativité de l'appréciation des distances s'oppose l'absoluité des catégories d'orientation spatiale, où les points cardinaux

prennent le pas sur la latéralité, malgré une définition originale de la droite et de la gauche, toujours déterminées à partir

d'un point de référence interne à l'objet, même inanimé comme une iourte.

Par leurs parcours de migration stables et leurs cycles de nomadisation répétés, les éleveurs découpent l'espace en

quatre classes de pâtures saisonnières, appréciant la qualité des terres en fonction des besoins du bétail et relativement

à une saison donnée. Tout ouvert qu'il soit, l'espace altaïque n'est donc pas indifférencié. Et l'absence de propriété privée

des terres n'empêche pas leur appropriation clanique ou familiale, l'usage dressant dans l'espace des barrières invisibles

presqu'aussi tangibles que de véritables clôtures. Une brève analyse du fonctionnement des différentes formes de

pastoralisme nomade au tournant des XIXe et XXe siècles, du Turkménistan à la Iakoutie, suffit néanmoins à révéler

l'insuffisance de ce schéma classificatoire en pâtures saisonnières. Ces classes ne sont en effet ni équivalentes ni

exclusives ni homogènes. Basée sur une fine connaissance du milieu naturel, l'activité pastorale structure l'espace de

manière bien plus complexe.

Autre idée reçue méritant d'être questionnée, le lien entre la mobilité des hommes et la composition spécifique des

troupeaux se relâche à l'examen, aussi bien synchronique que diachronique. Il ne peut être analysé indépendamment du

statut symbolique des différentes espèces de bétail, partagées par des dichotomies opposant le mobile à l'immobile,

l'extérieur à l'intérieur, le masculin au féminin, le blanc au noir, etc., qui conduisent à célébrer le cheval, animal rapide

permettant de grands déplacements, et à honnir le boeuf, qui s'accommode mal au mode de vie nomade.

26. RELATIONS INTERNATIONALES ET INTEGRATION REGIONALE EN ASIE ORIENTALE Coordinateur : Hugues TERTRAIS, Maître de conférences, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I)

Intervenants : Sophie BOISSEAU DU ROCHER, Stephen DUSO-BAUDUIN, Isabelle SAINT-MEZARD, Guy FAURE,

Karine DELAYE Atelier consacré aux relations régionales et internationales en Asie : rôle et jeu des puissances dans l’histoire récente (Royaume-Uni, France) et dans la situation actuelle (Etats-Unis, Japon, Chine, Inde) ; lieux de rencontre, de coopération et/ou de rivalité (Asie du Sud-Est notamment) ; modalités d’intégration régionale.

Guy Faure : Chargé de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Institut d'Asie

Orientale (IAO)

Le rôle du Japon dans le programme de développement de la sous-région du « grand Mékong »

La question centrale qui est posée est celle des initiatives et du leadership japonais dans le développement de la région

indochinoise. Bien que le Japon soit le premier donneur d’aide en Asie du Sud-Est, économiquement puissant et

politiquement influent, il lui reste à démontrer plus ouvertement ses capacités à orchestrer un projet de développement

transfrontalier de l’ampleur de celui de la Sous-Région du Grand Mékong (Greater Mekong Subregion), qui réunit cinq

pays (la Birmanie, le Cambodge, le Laos, la Thaïlande, et le Vietnam) et une région chinoise, le Yunnan. Au cours de la

décade passée, l’Indochine est devenu un des terrains de prédilection de la diplomatie japonaise. Le gouvernement

japonais a accordé une priorité particulière à l’aide à l’Indochine constatant que la région du Mékong serait appelée à

devenir une nouvelle frontière de développement.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.66

Cependant, quelques années après la crise asiatique, le Japon semble avoir perdu la main en matières d’initiatives

politiques en Asie du Sud-Est. De plus sa politique d’aide arrive à un tournant avec des coupes budgétaires

programmées. Pendant ce temps, la Chine se fait de plus en plus présente y compris de le domaine de l’aide publique au

développement, et prend des initiatives qui oblige le Japon à réagir (accord de libre échange avec l’ASEAN de 2001).

Ainsi, les grands programmes de développement dans la région du Mékong constituent une bonne étude de cas sur les

dispositions du Japon à jouer un rôle moteur sur le plan politique à l’étranger. Nous tenterons de répondre aux deux

questions suivantes : Quel pays influence le plus le développement de ce projet pharaonique de la Sous-Région du

Grand Mékong, par Banque Asiatique de Développement interposée ? Il s’agit d’évaluer l’influence aujourd’hui du Japon

dans cette organisation internationale. La seconde question sera : Le Japon a t-il encore la volonté de jouer un rôle

central dans cette partie du monde, ou s’accommode t-il d’une place plus modeste au sein du triangle Chine-Japon-

Etats-Unis?

Isabelle SAINT-MEZARD : Post-doctorante, Centre d’Etudes et de Recherches Internationales (CERI- Sciences

Po), China-India Project, Centre of Asian Studies, The University of Hong Kong, Hong Kong SAR

Les relations sino-indiennes depuis la fin des années 1990 : entre coopération et rivalité en Asie

En dépit des initiatives bilatérales lancées depuis la fin des années 1980 pour rétablir un climat de confiance, les relations

sino-indiennes sont restées assez chaotiques. Celles-ci ont de nouveau touché le fond lorsque l’Inde a invoqué la

menace que la Chine posait sur sa sécurité pour justifier ses essais nucléaires de mai 1998. Pourtant, la politique de fait

accompli de l’Inde semble avoir forcé les décideurs chinois à composer : depuis 1999, les relations sino-indiennes n’ont

jamais été aussi intenses et diversifiées. Les deux Etats savent l’intérêt qu’ils ont à améliorer leurs relations bilatérales,

une période de paix leur permettant de se consolider économiquement... et militairement. Une certaine rivalité continue

en fait d’opposer l’Inde et la Chine, car dans la perception traditionnelle qu’elles ont chacune de leur sphère d’influence

respective, les chevauchements sont nombreux, en Asie du Sud-Est et en Asie centrale, dans l’océan Indien et dans le

massif himalayen. A ce titre, la Chine voit d’un mauvais oeil l’Inde affirmer ses ambitions en Asie. Celle-ci s’attache en

effet à intensifier ses relations avec les Etats asiatiques qui, comme elle, nourrissent certaines inquiétudes à l’égard de

leur immense voisin. Surtout, depuis 1999, l’Inde est parvenu à redresser ses relations avec les Etats-Unis au point de se

positionner comme un partenaire potentiel pour la paix et la stabilité en Asie, ce qui n’est pas sans provoquer une

certaine nervosité à Pékin. Les rapports entre l’Inde et la Chine apparaissent donc comme un aspect important de la

future distribution de la puissance en Asie.

Stephen DUSO-BAUDUIN : Maître de conférences à Sciences Po (IEP-Paris) ; Professeur Associé à ESM

Saint-Cyr Coëtquidan et Chercheur à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS-CIRPES) et au

CRD-CDES.

Les tensions autour de la Chine et le rôle des Etats-Unis dans cet espace régional

La Chine devient la puissance économique régionale, avec un taux de croissance qui est officiellement de 8% en 2002 et

la tendance semble se maintenir dans le même ordre d’idée, contrairement au ralentissement qui continue au Japon.

Mais cette situation de leader économique régional(surtout grâce à ses exportations de produits manufacturés) va de pair

avec un certain nombre de dépendances, en particulier énergétiques, la consommation d’énergie de la Chine ayant

augmenté de plus de 250% depuis 1980(développement industriel et de l’automobile). Ces dépendances ont un certain

nombre de conséquences géopolitiques primordiales. En outre, la Chine n’entend pas être limitée au rôle de puissance

économique régionale, elle aspire à devenir dans le même temps la puissance militaire et politique régionale, voire

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.67

mondiale, rival possible des Etats-Unis à moyen terme. Ces deux facteurs entraînent des tensions régionales avec les

voisins d’Asie Orientale, Japon, Taiwan, Philippines, Vietnam, Indonésie. Nous nous centrerons en particulier sur les

deux questions majeures, sources de conflits potentiels, celle de Taiwan et celle des revendications chinoises en mer de

Chine du Sud(îles Spratley…). Nous développerons particulièrement le rôle crucial des Etats-Unis comme tiers dans ce

jeu de puissance et nous interrogerons sur les facteurs de stabilité, sur le rôle par exemple des réseaux économiques

dans cette zone. Notre analyse complètera bien les problématiques des autres intervenants prévus dans cet atelier, sur

le Japon, les relations sino-indiennes ou sur le développement des autoroutes de l’information.

Sophie BOISSEAU DU ROCHER : Maître de conférences, Institut d’Etudes Politiques de Paris (IEP),

Chercheur au Centre Asie IFRI

La crise de l’ASEAN et du régionalisme en Asie du Sud-Est

L’ASEAN traverse de grandes difficultés, en partie antérieures à la crise économique de 1997 (élargissement,

mécanismes et pratiques diplomatiques), en partie accentuées par celle-ci (anachronisme des modes de coopération,

absence de mécanismes de solidarité, concurrence de la Chine). Il n’est pas certain que dans un contexte en pleine

recomposition et marqué d’incertitudes majeures (internes et externes), l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est

parvienne à redonner l’impulsion nécessaire pour regagner une crédibilité et une légitimité éprouvées. Il n’est pas non

plus certain que les acteurs qui marquent l’espace d’Asie orientale (Chine et Etats-Unis en priorité) soutiennent les

initiatives ASEAN ; à l’inverse, une ASEAN affaiblie pourrait favoriser leurs desseins.

Karine DELAYE : Doctorante à l'EHESS, membre correspondant de l'Institut de recherches sur l’Asie du Sud-

est (IRSEA)

Coopération coloniale et construction régionale : les relations franco-anglaises en Asie du Sud-Est (1860-1922)

Renouvelant l'approche souvent univoque des puissances coloniales en termes de rivalités impérialistes ou l'étude

traditionnelle des rapports métropole/colonies, mon travail porte sur l'analyse des relations intercoloniales

qu'entretiennent les possessions britanniques d'Asie du Sud-Est (Birmanie et British Malaya) et l'Indochine française

(vers 1860-1920).

Le thème de la coopération coloniale franco-britannique durant cette période est à ce sujet particulièrement éclairant. A

travers cet axe de lecture original de l'histoire coloniale asiatique, cette communication aura aussi plus largement pour

objet d'apporter quelques éléments permettant d'évaluer la contribution coloniale à la construction régionale en Asie du

Sud-Est.

Ainsi, au delà des réseaux traditionnels qui préexistaient à la domination coloniale, dans quelle mesure les relations intra-

régionales ont-elles pu être encouragées par la situation coloniale ? Celle-ci a-t-elle représenté une rupture consistant à

couper les pays colonisés de leur environnement régional? Ou a-t-elle, au contraire, permis de développer de nouvelles

dynamiques tout en intégrant cet espace dans une perspective internationale ?

Afin de répondre à ces interrogations, j'étudierai en particulier l'organisation progressive d'une collaboration policière face

à la préoccupation commune que constitue alors la lutte contre la piraterie et la contrebande. Les accords établis

concernant la recherche et l'interpellation des criminels, la police de la navigation et les procédures d'extradition seront

ainsi précisés. Quelques exemples de soutien de plus en plus étroits ou d'opérations militaires conjointes dans la région

pourront aussi être évoquées. Mais l'accent sera surtout mis sur le développement d'une coopération scientifique et

culturelle aux dimensions aussi bien régionale qu'internationale. En effet, que ce soient à travers les multiples

informations que s'échangent les autorités coloniales sur la situation sanitaire de leurs possessions, ou la mise en

commun de recherches médicales et agronomiques aux applications régionales extensibles, une véritable coopération se

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.68

met alors en place dans tous les domaines scientifiques intéressant le développement des colonies. Des collaborations

s'engagent aussi dans des directions plus improbables comme l'orientalisme, par le truchement d'institutions aux

ramifications régionales, comme l'EFEO, ou encore l'enseignement, grâce au rôle actif des missionnaires français

présents en Birmanie et Malaisie britanniques. Suivant les thématiques retenues, cette communication pourrait aussi

s'adapter et s'intégrer dans différents ateliers concernant aussi bien les nouvelles approches de l'histoire coloniale que la

mise en perspective sur le long terme de la construction régionale.

27. NOUVELLES ORGANISATIONS REGIONALES EN ASIE ORIENTALE Coordinatrice : Manuelle FRANCK, Maître de conférences, Institut national des Langes et Civilisations orientales

(INALCO) ; Membre du Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et le Monde austronésien (LASEMA)

Intervenants:

- Philippe PELLETIER, Professeur de géographie, Université Louis Lumière (Univ. Lyon II)

- Christian TAILLARD, Directeur de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Laboratoire

sur l’Asie du Sud-Est et le Monde Austronésien (LASEMA),

- François DURAND-DASTES : Professeur émérite, Université Denis Diderot (Univ. Paris VII),

- Jean-Luc DOMENACH : Directeur de recherche, Fondation nationale des Sciences Politiques-Centre d’Etudes et

de Recherches Scientifique (FNSP-CERI) ; Responsable de l’antenne franco-chinoise de Sciences humaines et

sociales de Pékin

Discutant: Hugues TERTRAIS, Maître de conférences, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I) ; Président

de l'Association française pour la Recherche sur l’Asie du Sud-Est (AFRASE) ; Membre du bureau de l'European

Association for South-East Asian Le groupe de travail Norao s'est réuni pendant quatre ans, lors de rencontres régulières tenues dans le cadre général du GDR Libergéo, autour du thème des nouvelles organisations régionales et des dynamiques spatiales macro-régionales et trans-nationales en Asie orientale. Issu des réflexions qui avaient animé la rédaction des deux volumes Chine-Japon-Corée et Asie du Sud-Est, Océanie de la Géographie Universelle coordonnée par Roger Brunet dans le cadre du GIP-Reclus, le groupe s'est élargi dans une optique résolument pluridisciplinaire. Abandonnant l’échelle nationale qui était celle de la Géographie universelle, il s’est concentré sur les espaces qui constituent les axes centraux et les ensembles majeurs, ainsi que sur les acteurs dominants de cette régionalisation en devenir. Il en résulte deux volumes, à paraître en 2003 aux éditions des Indes Savantes, dont les contributions ont été longuement et librement discutées. Le premier se concentre sur les modèles et les identités qui ont structuré les espaces d'Asie orientale et sud-orientale : héritages pré-coloniaux, héritages coloniaux, les redéfinitions asiatiques et asiatistes, les organisations politiques macro-régionales. Le second volume privilégie l'analyse des dynamiques spatiales intra-régionales : l'intégration régionale par les réseaux et les flux, par l'industrialisation et la grande distribution, la question des mers, des îles et des détroits, celle des espaces transfrontaliers et transnationaux. Les deux coordinateurs de l'ouvrage, tous deux géographes, Christian Taillard, Directeur de recherche au Lasema/CNRS et Philippe Pelletier, Professeur à l'Université Lumière Lyon 2, ont exposé la problématique et les principales conclusions des ouvrages. Deux discutants et un modérateur ont donné leur analyse avant de donner la parole à la salle.

Groupe NORAO :

Nicolas BAUTES (géographe) ; Thomas BEAUFILS (anthropologue) ; Sophie BOISSEAU DU ROCHER (politologue) ;

Yves BOUGON (historien) ; Pierre BROCHEUX (historien) ; Michel BRUNEAU (géographe) ; Philippe CADENE

(géographe) ; Jean-Raphaël CHAPONNIERE (économiste) ; Muriel CHARRAS (géographe) ; Sébastien COLIN

(géographe) ; Patrice COSAERT (géographe) ; Philippe DEBROUX (économiste) ; Eric DENECE (géographe) ; Olivier

DEHORNE (géographe) ; Alain DELISSEN (historien-géographe) ; Frédéric DURAND (géographe) ; Nathalie FAU

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.69

(géographe) ; Guy FAURE (politologue) ; Manuelle FRANCK (géographe) ; Antoine FREMONT (géographe) ; Pierre

GENTELLE (géographe) ; François GIPOULOUX (économiste) ; Eric GUERASSIMOFF (sociologue) ; Gilles GUIHEUX

(géographe) ; Jean HEFFER (historien) ; David HOYRUP (économiste) ; Laurence HUSSON (sociologue) ; Doryane

KERMEL-TORRES (géographe); Yveline LECLER (économiste) ; Pierre-Yves MANGUIN (historien); Jean-Louis

MARGOLIN (historien); Louis MARROU (géographe) ; Philippe PELLETIER (géographe) ; Carine PINA-

GUERASSIMOFF(sociologue) ; Karoline POSTEL-VINAY (politologue) ; Thierry SANJUAN (géographe) ; Jean-

Christophe SIMON (économiste) ; Christian TAILLARD (géographe) ; Hugues TERTRAIS (historien) ; Anne de TINGUY

(politologue).

28. MIGRATIONS INTERIEURES EN CHINE : DEFIS AUX INSTITUTIONS SOCIALES ET INNOVATIONS Coordinatrices :

- Marianne BASTID, Directeur de recherche, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS)

- Isabelle THIREAU-MAK, Directeur de recherche, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS), Centre

d’Etudes sur la Chine moderne et contemporaine (CECMC)

Intervenants : Christine NGUYEN, Jacqueline NIVARD, Martine RAIBAUD, HU Xinyu, HUA Linshan Les participants à ce panel sont membres de l’axe de recherche du Centre d’études sur la Chine moderne et contemporaine intitulé ‘Appartenances et mécanismes sociaux dans la Chine d’aujourd’hui’. Les historiens et sociologues spécialistes de la Chine et participant à ce panel ont entamé depuis un an une réflexion commune sur le développement de flux migratoires extrêmement complexes, remettant en cause les modalités de contrôle social, les droits assignés aux citoyens chinois en fonction de leur lieu de résidence officielle, les liens entre locaux et « étrangers », le droit du travail mais aussi le marché du travail, l’accès à l’éducation mais aussi le marché de l’éducation. Sans prétendre ici dresser un tableau exhaustif de la situation, il s’agit d’engager une discussion prenant appui sur des études proposant des approches distinctes mais complémentaires de la mobilité géographique, des raisons qui la motivent, des obstacles qu’elle rencontre mais aussi des transformations institutionnelles qu’elle suscite, des effets non anticipés qu’elle induit parfois et des initiatives qui tentent alors d’y remédier. Ces études sont ancrées dans différentes régions de Chine. Elles évoquent des flux migratoires intérieurs très variés, de plus ou moins grande distance, certaines d’entre elles évoquant également le cas des migrations internationales.

Marianne BASTID : Directeur de recherche, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS)

L’accroissement de l’illétrisme à la suite des migrations

Les déplacements de population en Chine sont à l’origine d’une recrudescence de l’analphabétisme en ville, notamment

dans les métropoles les plus développées où la scolarité obligatoire avait pourtant été généralisée depuis des années. Le

phénomène tient en partie à ce que l’accès à l’école est lié au hukou, le lieu de résidence légal. Il échappe largement aux

statistiques officielles de l’éducation, fondées sur la résidence légale des enfants. On essaiera d’évaluer son ampleur et

sa distribution. On examinera aussi les moyens mis en oeuvre pour tenter d’y remédier, du moins en ce qui concerne

l’éducation de base.

Christine NGUYEN : Maître de conférences, Institut national des Langues et Civilisations orientales (INALCO)

Education et mobilité : migrations internes et écoles privées en République Populaire de Chine

Si les toutes premières « écoles privées » sont apparues en Chine peu après le lancement des réformes soit dès les

années quatre-vingt, leur création s’est multipliée depuis le début des années quatre-vingt dix. Tous les niveaux de

l’enseignement sont concernés, de la maternelle (et même du jardin d’enfants) au supérieur. Les conséquences d’un tel

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.70

phénomène sont multiples. Dans cet exposé, je voudrais m’arrêter sur les « mouvements » humains qu’il suscite :

montrer comment les demandeurs, parents et enfants, sont prêts à aller chercher au loin ce qu’ils n’arrivent pas à trouver

sur place ; comment ceux qui souhaitent investir dans l’éducation sont prêts à prospecter à travers tout le pays pour

obtenir les meilleurs « rendements » ; et finalement comment la privatisation de l’éducation, comme bien d’autres

mesures accompagnant les réformes, peut conduire à amener les Chinois à se déplacer à travers tout le pays (pas

seulement pour des études supérieures comme par le passé), mais aussi à l’étranger.

Jacqueline NIVARD : Rédactrice de la Revue Bibliographique de Sinologie

Migration et condition féminine en Chine

L’étude menée porte sur les liens entre migration et condition féminine en Chine à travers la lecture de Nongjianü

baishitong, une revue destinée aux paysannes. Après avoir établi un corpus portant sur les années 2002-2003, il s’agit

d’identifier les principaux thèmes abordés et d’analyser si les informations recueillies permettent d’identifier une

spécificité du parcours migratoire des femmes. Existe-t-il des différences entre hommes et femmes sur le plan des

raisons ayant conduit à la migration et des stratégies élaborées ? Quelles sont les conditions de vie des femmes

migrantes dans le lieu d’accueil, et celles-ci diffèrent-elles selon les régions et les secteurs d’activité ? Quels liens les

femmes migrantes entretiennent-elles avec leur village d’origine ? Quel est le rôle de la Fédération des femmes dans ces

parcours de migration ?

Martine RAIBAUD : Maître de conférences, Université de la Rochelle

HU Xinyu : Doctorante, Université Lyon II ; Ater de Chinois, Université de la Rochelle

Les migrations intra-provinciales : le cas de la province du Guangxi

La migration rurale est souvent analysée en privilégiant les flux de longue distance et, notamment, les migrations dites

« aveugles » des paysans vers les grandes villes côtières. Il s’agit ici de montrer l’importance et la nature des migrations

s’effectuant sur une plus petite distance, et plus particulièrement, des migrations intra-provinciales. En prenant pour

exemple le cas de la province du Guangxi, le processus d’élaboration des projets migratoires et le choix de la localité

d’accueil seront étudiés, ainsi que les liens entre migration à courte et à longue distance et l’influence des chaînes

migratoires.

Isabelle THIREAU-MAK : Directeur de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS)

HUA Linshan: Chercheur associé, Centre d’études sur la Chine moderne et contemporaine (CECMC)

Entre le local et le national : migrations et citoyenneté au lendemain des réformes

Il s’agit d’analyser la diversité du groupe social désigné par le terme de « paysans-ouvriers », en prenant appui sur une

enquête menée dans les villes de Pékin, Nankin, Tianjin, Wuhan, Xian, Changchun et Shenzhen, et en distinguant les

situations selon la distance géographique parcourue, la nature de la migration –individuelle ou familiale-, la mobilité

professionnelle et les liens établis avec ouvriers non migrants.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.71

29. LES TRAVAILLEURS MIGRANTS EN ASIE DU SUD-EST CONTINENTALE ET INSULAIRE : ESCLAVES DU MONDE MODERNE Coordinateur : Guy LUBEIGT, Chargé de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS), Equipe

PACIFICA, Université Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV), Laboratoire PRODIG (Pôle de Recherche pour

l’Organisation et la Diffusion de l’Information géographique).

Intervenants : Marie-Eve BLANC, Laurence HUSSON, Grace SWE ZIN HTAIK Les flux de l’Asie du Sud-Est Continentale et Insulaire L’Asie du Sud-Est Continentale et Insulaire est caractérisé par une instabilité qui, endogène ou exogène, donne naissance à des flux économiques, financiers et humains. L’étude de ces courants, et des territoires qu’ils irriguent, insiste sur les réseaux, lignes de fracture et liens verticaux qui relient les différentes composantes de cet espace. L’approche dynamique, qui insiste sur les continuités existant entre les composantes de l’Asie du Sud-Est continentale et péninsulaire, permet de lire autrement cet espace. L’observation du flux des travailleurs migrants, permet d’illustrer cette dynamique spatiale, dont l’étude pourrait être étendue aux divers flux (licites et illicites) qui irriguent divers secteurs des économies de la région. Le flux des travailleurs migrants en Asie du Sud-Est continentale et péninsulaire Les travailleurs migrants en Asie du Sud-Est continentale et insulaire représentent, toutes catégories et nationalités confondues, plusieurs millions de personnes. Leur présence dans les pays de l’Asie du Sud-Est, généralement discrète, se révèle parfois avec acuité au cours des crises sporadiques qui secouent périodiquement la région. Ces travailleurs participent aux flux de migrations internationales engendrées par divers facteurs (pauvreté, guerres, épidémies, famines, catastrophes naturelles) parmi lesquels la surpopulation joue un rôle qu’on ne peut ignorer. D'un côté on enregistre des déficits de main-d’œuvre que les États s'efforcent de pallier en important les travailleurs dont ils ont besoin pour leur économie, et de l’autre des excédents de main-d’œuvre qu’il faut exporter pour réduire le potentiel revendicatif qu’ils représentent afin de garantir la stabilité nécessaire au fonctionnement politico-économique des Etats. L’existence d’une masse de travailleurs migrants dans l’Asie du Sud-Est Continentale et Insulaire suscite une série d’interrogations aussi bien sur leurs nombre, origine géographique et raisons qui les poussent à migrer, que sur les conséquences de leur présence sur les économies locales. Quels regards les pays d’accueil portent-ils sur ces hommes, femmes et enfants qui peuvent être à la fois source d'instabilité et de profits licites ou illégaux ? Le trafic des êtres humains Les travailleurs migrants sont à la fois une ressource (naturelle, humaine), tant pour les pays de départ que pour les pays d'accueil. Ils peuvent aussi devenir un enjeu (économique, politique) lorsque les flux les ont conduit loin de leur lieu de naissance. On pourrait les qualifier de « travailleurs-marchandises » : ils ne coûtent rien à produire, le coût de leur entretien est nul et ils peuvent rapporter gros à ceux (entrepreneurs privés, agences de recrutement, profiteurs et escrocs en tous genres, et Etats) qui les emploient ou les exploitent après les avoir intégrés dans le flux des travailleurs migrants. Les conditions de vie des travailleurs migrants dans leurs pays d’accueil suscitent de nombreuses interrogations. Il s’y ajoute un questionnement sur la nature des relations qu’entretiennent les Etats avec leurs propres concitoyens-travailleurs : ceux qui vivent dans leur pays comme ceux qui sont expatriés. Quelles sont les responsabilités des Etats, dont la politique socio-économique permet d’alimenter les flux de travailleurs migrants, envers leur main-d’œuvre nationale ? Que deviennent ces travailleurs quand cessent les conditions favorables à leur emploi : quelles sont les modalités de leur sortie des circuits du travail migrant ?

Marie-Eve BLANC : Docteur en Sociologie, Membre associée à l´Institut de recherche sur le sud-est asiatique

(IRSEA), Centre National de Recherche Scientifique (CNRS), Université de Provence (Univ. Aix-Marseille I) ;

Post-doctorante au Département d´Histoire de l´Université de Montréal, Centre d´Etudes de l´Asie de l´Est

(CETASE).

Les stratégies d'intégration des migrants vietnamiens en France

Cet article est le résultat d’une longue enquête dans la communauté vietnamienne en France dans les années 1990.

Cette étude correspond à un défi pour un non-vietnamien que de pénétrer dans cette communauté d’apparence fermée

et en même temps sans problème au regard de la question de l’intégration des migrants à la société française. Notre

approche n’est pas uniquement basée sur une analyse de l’identité, mais se propose d’étudier les réseaux associatifs

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.72

communautaires comme l’anti-chambre de l’intégration à la société française, ou bien comme une sorte de sas entre la

communauté d’origine et la société d’accueil. A travers un échantillon de 125 jeunes âgés de 11 à 24 ans fréquentant les

associations de la communauté, nous montrons l’éventail des stratégies d’intégration mises en œuvre par ces jeunes,

révélant parfois une ambivalence des comportements entre un fort investissement pour la réussite scolaire dans le

modèle éducatif français et une revitalisation constante des valeurs familiales traditionnelles. Cette étude nous révèle une

identité vietnamienne multi-faces.

Laurence HUSSON : Institut de recherche sur le sud-est asiatique (IRSEA), Centre National de Recherche

Scientifique (CNRS), Université de Provence (Univ. Aix-Marseille I)

Bonne ou prostituée ? La féminisation des exportations de main-d’œuvre indonésienne et philippine

Depuis une quarantaine d’années, les flux de main-d’œuvre asiatique n’ont cessé de croître et de se diversifier en

direction des Emirats arabes unis et des nouveaux pays industrialisés d’Asie Orientale. Dès les années 1980-1990, les

experts notent une « féminisation » croissante de ces flux. Cette féminisation est désormais largement confirmée,

puisque, en Indonésie et aux Philippines par exemple, les femmes sont désormais plus nombreuses à migrer que les

hommes. Ces femmes, âgées de 20 à 45 ans, qu’elles soient célibataires ou mariées, avec ou sans enfants, partent,

généralement munies d’un contrat de travail, via des agences de recrutement gouvernementales ou privées, pour

occuper un emploi dans le secteur des services, lui-même en plein essor. La crise financière de 1997 a davantage

affecté les flux de main-d’œuvre masculine que féminine. Leur migration est dite circulaire du fait que les pays d’accueil

n’autorisent pas le regroupement familial, ni ne permettent de s’établir de façon permanente. Ces jeunes femmes partent

donc seules, passent quelques années à l’étranger et rentrent chez elles à l’expiration de leur contrat. Il s’agira de

présenter les caractéristiques générales de ces flux de main-d’œuvre féminine en comparant les deux grands pays du

sud-est asiatique exportateurs de main-d’œuvre féminine 1 : l’Indonésie et les Philippines.

Parallèlement à ces migrations officielles, des femmes migrent clandestinement. Le BIT estime leur nombre à 700 000.

Par ailleurs, le Bureau international du travail, l’OMI et l’Unicef dénoncent le trafic et la quasi-mise en esclavage de plus

de 300 000 femmes et enfants dans les pays du Mékong en l’an 2000.

Ces femmes sont triplement vulnérabilisées et exposées à de possibles formes d’exploitation, tant dans le pays d’accueil

qu’à leur retour dans leur pays d’origine, du fait de leur sexe, à cause de leur statut de migrantes, ainsi que par le métier

qu’elles exercent : bonne ou entraîneuse dans la grande majorité des cas.

Guy LUBEIGT : Chargé de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS), Equipe PACIFICA,

Université Paris-Sorbonne (Univ. Paris IV), Laboratoire Pôle de Recherche pour l’Organisation et la Diffusion

de l’Information de la géographie (Laboratoire PRODIG)

Les esclaves du monde moderne

Les travailleurs migrants en Asie du Sud-Est continentale et insulaire sont nombreux. Leur présence dans les pays de la

zone Asie-pacifique, généralement discrète, pose cependant de nombreuses interrogations. Ces travailleurs participent

aux flux des migrations internationales qui sont engendrés d'un côté par des surplus (hommes, marchandises) et de

l'autre par des déficits que les États s'efforcent de rééquilibrer. Il convient donc d'étudier ces courants d'échanges afin de

1 Nous ne traitons pas de l’Asie du Sud et donc pas du Sri Lanka qui est pourtant un autre gros exportateur de main-

d’œuvre féminine vers les Emirats arabes unis (80 % des 1,2 millions de Sri Lankais qui travaillent à l’étranger sont des

femmes).

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.73

comprendre comment et pourquoi les êtres humains qui les constituent sont intégrés à ces flux. On doit s'interroger sur

leur nombre, sur leur origine géographique, et sur les raisons qui les poussent à migrer.

Les travailleurs migrants sont à la fois une ressource (naturelle, humaine) aussi bien pour les pays de départ que pour les

pays d'accueil, et un enjeu (économique, politique). Quels regards ces pays portent-ils sur ces hommes, femmes et

enfants qui peuvent être à la fois source d'instabilité et de profits licites ou illégaux ? Ceci conduit à s'interroger sur la

responsabilité des États qui alimentent ces mouvements de populations.’

Grace SWE ZIN HTAIK : Diplômée en droit de l'Université de Rangoun et de l' Alliance française de Rangoun ;

Chargée de communication d’une ONG américaine (PSI = Population Services International ) en Birmanie ;

Actrice dans plus 200 films.

Access of health messages on hiv/aids for migrant workers in Burma

Le PNB de la Birmanie est un des plus bas du monde. La détérioration continuelle de l’économie provoque une inflation

permanente et la baisse incessante du niveau de vie de l’ensemble de la population. La pauvreté conduit ainsi une partie

des surplus de main-d’œuvre à s’expatrier pour tenter d’obtenir des conditions de vie décentes. La communication traite

essentiellement des travailleurs migrants employés à l’intérieur du pays dans les exploitations forestières, les mines, les

pêcheries et le petit commerce.

L’OMS estime que le nombre des personnes atteintes par le virus HIV est compris entre 180.000 et 400.000 personnes,

alors que le régime ne reconnaît que 31.453 porteurs du virus, 4.472 cas de SIDA (1998-2000) et 1834 morts de cette

maladie. Le « Plan d’action conjoint » (2001-2002) de l’ONU recommande un partenariat entre les organisations

internationales et les ONG pour lutter contre ce fléau. Le but est de changer les comportements à risques dans la

population, notamment masculine, car la situation de la santé publique en Birmanie peut avoir des conséquences

sérieuses sur les relations économiques et sociales de l’Union avec ses voisins.

La culture birmane est principalement basée sur les enseignements du bouddhisme. La plupart des chefs religieux

soutiennent publiquement le mariage, l’abstinence et la monogamie. La femme, qui n’a aucun contrôle sur son propre

corps, a pour seule responsabilité de se soumettre aux désirs du mari. Ceci lui garantit une renaissance comme mari

dans sa vie future.

L’industrie du sexe est illégale. Selon certaines études le nombre des travailleurs employés dans cette activité atteindrait

150.000 personnes. La prostitution se dissimule sous diverses enseignes : bordels, boîtes de nuit, hôtels, restaurants,

massages, etc. Les revenus de ces personnes vulnérables s’élèvent entre 200 et 15.000 kyats la passe [1 dollar = 900

kyats]. Il existe 22 ONG, dont PSI, qui travaillent sur cette question en Birmanie. La stratégie de PSI est fondée sur deux

volets : la vente à perte de produits préservatifs afin d’atteindre les plus pauvres dans les régions les plus exposées ; et

la communication de messages d’information diffusés par tous les moyens médiatiques, notamment la vidéo (6,34 postes

de TV pour 1000 habitants et 20.696 salles de vidéos) et le théâtre, pour atteindre un public maximum. PSI possède

également 3 bateaux (baptisés « Love Boat ») et deux camions pour accéder aux régions minières.

En conclusion l’auteur souligne le caractère fondamental d’un partenariat (organisations internationales, gouvernement et

ONG) de longue durée pour fournir une éducation et une information spécifiques indispensables à une modification du

comportement sexuel et à une amélioration de la qualité de vie de ses concitoyens.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.74

VIII- Mondialisation et évolution des systèmes économiques

30. LA CRISE ASIATIQUE : LA DIVERSITE DES TRAJECTOIRES DES PAYS ASIATIQUES (ATELIER ANNULE) Coordinateur: Robert BOYER, Directeur de recherche, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS),

Régulation, ressources humaines et économie publique, (CEPREMAP), Ecole des Hautes Etudes en Sciences

Sociales (EHESS)

Intervenants : Sébastien LECHEVALIER, Wooseok OK, Irène HORS

La ligne directrice générale de cet atelier est la suivante. Depuis plus de 10 ans, l’histoire des économies du Sud-Est

asiatique a été marquée par une série de déceptions, qui ont été d’autant plus fortes, que l’on vantait précédemment leur

mérite. En effet, l’éloge de ces économies par les observateurs extérieurs a précédé de peu leur entrée en crise. Ainsi la

crise japonaise éclate en 1992, quelques années après qu’on a parlé de japonisation du monde ; les crises asiatiques

éclatent en 1997, quatre ans après le fameux rapport de la Banque mondiale (1993), qui érigeait ces économies en

modèle de développement. Par réaction, on a eu alors tendance à souligner les limites de tels modèles, qui s’étaient en

partie inspirés de l’exemple japonais, et de leur mauvaise adaptation commune aux nouvelles exigences de la

mondialisation.

Mais, au vu de la divergence des trajectoires depuis la fin des années 1990, il apparaît qu’il faut au contraire souligner la

diversité des crises asiatiques et des modèles qui supportaient la croissance de ces économies. Cette diversité

n’empêche pas cependant d’envisager de façon très réaliste un processus de régionalisation, dont les lignes restent à

définir. C’est le mérite d’une approche macroéconomique et institutionnelle de ces crises que de pouvoir analyser ces

trajectoires.

Cette ligne directrice serait déclinée en 4 interventions.

Sébastien LECHEVALIER : CEPREMAP – Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

La crise japonaise dans un contexte asiatique

La crise japonaise fait encore aujourd’hui l’objet de plusieurs débats sur sa nature et ses causes (demande/offre ;

finance/économie réelle ; crise interne/chocs externes ; erreurs de politique économique/problèmes structurels, etc.) ainsi

que sur les solutions pour en sortir. Cette contribution adopte une autre perspective qui met l’accent sur la chronologie de

la longue crise japonaise, dont on montre ainsi la singularité.

Si des enchaînements singuliers font que la crise japonaise est fondamentalement différente des crises asiatiques, il n’en

est pas moins vrai qu’elle ne peut pas être comprise sans référence à son contexte mondial et surtout régional. On

s’attache donc dans un deuxième temps à analyser les interactions entre la crise japonaise et le reste de l’Asie.

Enfin, on soutient qu’on ne peut envisager une sortie de crise et qu’on ne peut définir le modèle d’après crise que par la

prise en compte du contexte asiatique et du processus de régionalisation, au sein duquel on analyse la place du Japon,

qui reste à déterminer.

Wooseok OK : Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)

La Corée – un nouveau modèle d’après - crise ?

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.75

Il y a une large unanimité parmi les économistes sur le fait que la crise financière en 1997 a révélé les faiblesses du

modèle coréen de développement économique, qui étaient passées inaperçues dans l’euphorie de la réussite des

années antérieures. En revanche, le modèle qui a commencé à se former après la crise n’a fait que rarement l’objet

d’une analyse. Ce projet de communication vise d’abord à repérer des éléments d’un nouveau régime à partir des

réponses spécifiques de la Corée du sud à la crise. On mettra en particulier l’accent sur les changements dans le

système d’entreprise et l’insertion dans l’économie internationale. Ces nouveaux éléments pourraient être en suite

comparés avec le modèle d’avant la crise, ce qui permettra de s’interroger sur la viabilité de ce « nouveau » régime à

long terme.

Irène Hors : Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)

Le cas de Taïwan

Alors que Taiwan avait plutôt bien résisté à la crise financière de 1997 - 1999 (gardant un taux de croissance de l'ordre

de 5%), ce pays a connu un taux de croissance négatif en 2001 et est fortement marqué par la récession mondiale.

L'objectif de cette intervention est de montrer en quoi la prédominance des PMEs dans l'économie taiwanaise a

déterminé son évolution récente.

Robert BOYER : Directeur de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Régulation, ressources

humaines et économie publique, CEPREMAP – Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

L’intégration régionale comme réponse aux crises asiatiques

La communication se propose d’insister d’abord sur la diversité des trajectoires des pays asiatiques à partir de la

comparaison du Japon, de la Corée et de Taïwan depuis le début des années quatre-vingt-dix. On développe ensuite une

comparaison du processus d’intégration européenne et des tentatives de constitution d’un fond monétaire asiatique

comme réponse aux crises ouvertes à partir de 1997. Si l’accord politique et la construction institutionnelle sont

caractéristiques de l’intégration européenne, c’est l’investissement direct et le commerce qui constituent les forces de

l’intégration asiatique. Il ressort de plus que la mobilité financière internationale affecte la possibilité de l’intégration

asiatique. On se propose d’esquisser une stratégie tenant compte de ces deux différences par rapport à l’intégration

européenne.

31. OUVERTURE ECONOMIQUE ET STRATEGIES D'ENTREPRISES EN ASIE Coordinateur : Gilles GUIHEUX, Chercheur, Centre d’Etudes Français sur la Chine Contemporaine - Hong Kong

(CEFC-Hong Kong)

Intervenants : Xavier RICHET, Joël RUET, Jean-François HUCHET, Marc HUMBERT, Marc LAUTIER, Jean ESMEIN

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.76

Au cours des 20 dernières années, l'Asie a vu sa situation dans l'économie mondiale se transformer. Le Japon, la Corée et Taiwan avaient fondé leur réussite économique sur la puissance de leurs exportations. Ces économies ont dû s'ouvrir aux importations étrangères, et se caractérisent aujourd'hui par une forte extraversion. La Chine, le Vietnam, l'Inde étaient auparavant des économies largement fermées sur l'extérieur. Suivant des chronologies qui leur sont propres, elles se sont tour à tour ouvertes, misant sur l'investissement étranger comme source de financement de la croissance et comme moyen d'acquisition de technologies modernes. Aujourd'hui, la Chine, dont les rythmes de croissance se maintiennent à un niveau élevé, constitue l'un des pôles de la croissance mondiale, alors que l'économie japonaise peine à redémarrer. Quels rôles ont joué les investissements internationaux dans l'insertion des économies asiatiques à l'économie mondiale? Quelle est la part des flux économiques intra- et extra-asiatiques ? Dans quelle mesure l'Asie constitue-t-elle ou non un espace économique ? Les entreprises de l'Asie en développement se contentent-elles de produire pour des donneurs d'ordre étrangers ou ont-elles développé des capacités de créer (et de vendre) leurs propres produits sur les marchés internationaux ? Quels rôles ont joués les Etats et les politiques économiques dans cette dynamique d'insertion à l'économie mondiale ? Les intervenants au panel fourniront des réponses à ces questions à l'échelle d'un pays ou d'un secteur d'activité.

Gilles GUIHEUX : Chercheur, Centre d’Etudes Français sur la Chine Contemporaine (CEFC-Honk Kong)

Les industries de l'information à Taiwan : le défi continental

Un faisceau de facteurs contribue à expliquer la spécialisation de l'économie taiwanaise dans le secteur des industries de

l'information : la détermination de l'Etat à financer à partir du début des années 1980 (en particulier via la recherche), le

retour d'ingénieurs diplômés des universités américaines, l'intensité des liens scientifiques et humains entre Taiwan et la

Californie. Ce secteur est aujourd'hui confronté à un nouveau défi : les investissements massifs en Chine continentale.

Quelles implications pour l'avenir de ce secteur ? Quel positionnement de Taiwan dans la chaîne mondiale de

production? Quel rôle peut aujourd'hui jouer la puissance publique ?

Xavier RICHET : Professeur, Centre Interuniversitaire d’Etudes hongroises (CIEH), Université de la Sorbonne

nouvelle (Univ. Paris III)

Nouvelles formes d’entreprises au Vietnam

Depuis maintenant près de deux décennies, l’économie vietnamienne est en cours de transformation à la suite des

réformes introduites au cours des années quatre-vingt. Les réformes introduites de manière récurrente et discontinues

ont, jusqu’ici eu des effets limités en termes de productivité et de performance globale. L’ouverture aux investissements

étrangers n’a pas joué le rôle de catalyseur qu’il a rempli dans d’autres pays, notamment en Chine. Le Vietnam est le

seul pays de la région a avoir enregistré un retrait massif des investisseurs étrangers au cours des années quatre-vingt

dix.

Face à la montée en puissance de la Chine comme partenaire régional, face aux stratégies de sortie de crise qui a frappé

la région à la suite de la crise financière de 1997-98, comment les firmes vietnamiennes s’ajustent, comment

l’environnement concurrentiel affecte ces comportements. ? La reprise récente de l’IDE, le développement rapide de

l’entrepreneuriat et du secteur privé peuvent-t-ils conduire à de novelles formes de concurrence et à la spécialisation de

l’économie vietnamienne dans le nouvel environnement asiatique.

Joël RUET : Chercheur, Centre de Recherche en Sciences Humaines à Delhi

La réponse des groupes industriels indiens à l'ouverture à la concurrence des services publics

Les firmes de Technologies de l’Information (TI) tirent l’émergence de l’Inde, non seulement compte tenu de leur rôle

exportateur, mais également en tant que nouveau modèle de croissance pour le privé et peut-être en termes de

développement, en conjonction avec l’Etat. Les firmes de biotechnologies (BT), en tout cas celles du ‘secteur des

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.77

biotechnologies modernes’ (définies comme articulant l’analyse, la cartographie, la manipulation, ou la modification du

patrimoine génétique).

L’article décrit l’émergence de ces deux secteurs industriels en Inde, ainsi que leurs récents progrès technologiques et

leur ‘remontée dans la chaîne de création de valeur’ (section 1). Il analyse ensuite la spécificité des actifs des deux

secteurs, afin d’explorer deux questions d’économie industrielle:

- En quoi les diverses spécificités d’actifs expliquent les divers arrangements contractuels au sein de ces secteurs,

ainsi que les divers degrés de partenariats et de quasi-intégration avec d’autres firmes ou laboratoires (section 2)?

- Puis, dans une perspective où la globalisation de ces firmes est définie comme la ‘mise en place de stratégies

globales pour intégrer et optimiser à l’échelle mondiale leurs ressources techniques et académiques’, comment peut-on

analyser le degré d globalisation des firmes indiennes en fonction de leurs spécificités d’actifs (section 3)?

Concernant ces deux derniers aspects, l’article montre en particulier que, la spécificité d’actifs étant plus forte pour les

biotechnologies que pour les TI, les partenariats avec les groupes industriels classiques sont d’autant plus nécessaires.

Dès lors, et de fait, peu de firmes sont réellement devenues globales dans les TI, et aucune dans les BT.

Marc HUMBERT : Professeur d’économie, Université de Rennes I

Jean ESMEIN : Centre de Recherches sur la Culture Japonaise de Rennes (CRCJR)

Les firmes manufacturières japonaises et l'investissement extérieur

Les firmes japonaises ont inauguré dans les années soixante des comportements d'investissement extérieur qui ont

dénoté par rapport aux pratiques occidentales et théorisées (KOJIMA), leurs modes de fonctionnement sur leur sol

national les amenant en particulier à retarder leur mouvement d'internationalisation vers leurs territoires d'exportation

(PERRAULT). En revanche elles ont eu des relations plus précoces et aussi vite originales vis-à-vis des voisins

asiatiques. En ce qui concerne la Chine on peut noter une spécificité permanente au contenu perpétuellement réajusté

qui donne une saveur originale aux modes de coopération-concurrence entre les industries japonaises et chinoises. La

lecture des expériences passées devrait nous permettre de s'essayer à décrypter les voies qui risquent d'être explorées

dans les années qui viennent.

Marc LAUTIER : Maître de conférences, Université de Rouen, Centre d’Analyse et de Recherche en Economie

(Laboratoire CARE)

De l’ouverture sur le monde à l’ouverture au monde : l’ultime modernisation de Korea Inc ?

Auparavant l’une des économies capitalistes d’Asie les plus fermées, la Corée est devenue en quelques années l’une

des plus ouvertes aux IDE. L’évolution de la position de l’Etat vis-à-vis des investisseurs étrangers marque un

changement de paradigme d’ouverture qui s’articule à la transformation du régime de concurrence. Pour réformer le

système industriel et les modes de gouvernance, une alliance Etat/IDE tend à se substituer à la traditionnelle coalition

Etat/groupes face aux firmes étrangères. L’articulation entre concurrence interne et externe est ainsi modifiée. Le

précédent régime oligopolistique qui combinait protection des chaebols de la concurrence externe et rivalité intense entre

les chaebols au niveau domestique est remis en cause au profit d’un schéma fondé sur la consolidation des groupes et

une plus large ouverture à la concurrence internationale. La Corée passe d’une ouverture sur le monde à une ouverture

au monde.

Il s’agit probablement de l’ultime paradoxe de Korea Inc. En effet, le modèle industriel coréen s’est construit et développé

avec succès sur la base d’une coalition nationale forte articulant l’Etat, les banques et les groupes. Or, ce modèle fondé

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.78

sur un nationalisme étroit ne pouvait être réellement reformé de l’intérieur. Sa modernisation nécessite au contraire une

ouverture élargie et durable de l’économie aux entreprises et aux investisseurs étrangers.

32. CRISES FINANCIERES, CONSOLIDATION BANCAIRE ET RESTRUCTURATIONS DES ENTREPRISES EN ASIE Coordinateur : Christian MILELLI, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS - Forum Globalization-

Innovation-Firm-Territory - Nanterre)

Intervenants : Cyril ANDRIEU-LACU, Françoise NICOLAS, Anne ANDROUAIS

L’atelier se propose de revenir sur les relations étroites entre crises financières régionale ou nationale, consolidation

bancaire et restructurations des entreprises en Asie. Dans un premier temps, seront rappelées les diverses mesures de

consolidation bancaire et de restructuration des entreprises menées dans les pays affectés par la crise financière

régionale de 1997-98. Une attention particulière sera portée au cas coréen. Dans un deuxième temps, la situation

japonaise caractérisée depuis 1991 par une crise financière inédite sera abordée.

Christian MILELLI, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS - Forum Globalization-Innovation-

Firm-Territory - Nanterre)

L’ambivalence de la restructuration bancaire après la crise financière régionale

La crise a mis en évidence la relation étroite entre les banques et les entreprises dans des pays asiatiques qui

s’ouvraient aux marchés financiers internationaux. Elle a été pointée comme l’une des principales causes des

déséquilibres financiers qui ont conduit à une situation de crise en 1997 et 1998. Partant de là, ces pays ont dû prendre

des mesures soit sous la contrainte des institutions internationales, soit de leur propre initiative : il s’agissait de lutter en

priorité contre des effets, comme le risque d’illiquidité pour l’ensemble du système bancaire, particulièrement

préjudiciables pour l’économie nationale. Il s’agissait aussi dans le cadre de la restructuration obligée des banques et de

la dette des entreprises nationales d’introduire de nouvelles règles du jeu. Toutefois, les programmes mis en œuvre ont

rapidement buté sur un certain nombre de limites.

Françoise NICOLAS : Institut Français des Relations Internationales, Paris

La restructuration du secteur financier en Corée du Sud

La crise a mis en lumière les fragilités du système bancaire national dans le cadre de l’ouverture internationale (rôle de

l’Etat, poids des structures conglomérales, insuffisance de la supervision et des règles prudentielles). Les autorités sont

rapidement venues à l’aide du secteur bancaire et ont joué un rôle actif dans sa consolidation. Mais l’absence de

régulation des autres sociétés financières a entraîné un gonflement du marché obligataire privé et au financement

d’entreprises surendettées, comme le troisième chaebol, le groupe Daewoo, acculé à la faillite en 1999. Toutefois,

l’entrée significative d’investisseurs étrangers dans le capital social de grandes banques commerciales constitue à terme

un levier de changement pour un système bancaire, qui reste encore marqué par de nombreux liens avec les structures

conglomérales.

Cyrille ANDRIEU-LACU : Centre d’Etudes Prospectives et d’Informations Internationales, Paris

Du bon usage de la politique macro-économique en déflation : le cas de la crise japonaise

Le Japon est entré en déflation en 1991. Enclenché par l’effondrement des marchés d’actifs suite à l’éclatement de la

« bulle » c’est un processus dynamique qui a déréglé avec une vitesse croissante tous les rouages de l’économie

nationale. Le comportement des autorités à juguler un tel phénomène, et plus précisément leur promptitude à rétablir la

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.79

confiance, à restaurer les chaînes d’engagement financiers et à soutenir l’économie dans sa phase d’assainissement a

été un échec : la croissance économique sur la période 1990-2000 a été en moyenne de 0,5 % et quasiment nulle si est

exclut l’année exceptionnelle de 1996.

Anne ANDROUAIS : Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS-Forum, Nanterre)

Les relations économiques japonaises en Asie et la répartition des devises

* Le yen et la répartition des devises en Asie

L’Asie de L’Est a le statut de partenaire privilégié au regard de l’économie du Japon, mais pour l’Asie de l’Est, le Japon

n’est qu’un des partenaires; les pays d’Asie de l’Est effectuent leurs transactions commerciales en dollar avec les Etats-

Unis, mais préfèrent également le dollar dans le commerce intra-zone, ainis la devise en yen est assez peu utilisée car

considérée comme une monnaie locale.

Grâce à la hausse rapide du yen et donc la baisse du dollar depuis 1985 (accords de Plaza), les pays asiatiques ont

effectué un développement économique remarquable jusqu’au milieu des années 1990. Ces pays ont eu un taux de

croissance élevé en grande partie due aux investissements japonais. L’industrie manufacturière japonaise a reçu un choc

avec la hausse rapide du yen et, pour retrouver une compétitivité des prix, le Japon a accru ses investissements directs

extérieurs en Asie: dans les NPI d’Asie, l’ASEAN et la Chine ; ceci a eu pour résultat de reconquérir les marchés dans la

région. Et les économies asiatiques se sont renforcées grâce à l’augmentation des exportations des NPI asiatiques dans

le monde.

* Effets de complémentarités et dynamiques sectorielles par les IDE

Le processus déjà engagé doit maintenant mieux répondre aux exigences de ses partenaires immédiats : le Japon et les

pays de l’ASEAN, en ce qui concerne notamment les réallocations de ressources, l’intensification des IDE en Chine et les

exigences de l’OMC. Par les zones ou foyers de développement économique et technologique, la logique transfrontalière

est de faire jouer des effets de complémentarités dus à la mobilité du travail et surtout du capital entre les territoires.

Ceux-ci engendrent des dynamiques économiques en attirant les IDE, vecteurs de transfert technologique, provoquant

ainsi la diffusion de relations sectorielles en réduisant les coûts de transactions. Ainsi, des autorités locales décident

d’accroître des zones économiques concurrentielles situées chacune dans un espace frontalier et industriel plus

développé. Ainsi, elles augmentent par la même, des relations complémentaires créant un environnement favorable à

l’IDE japonais.

* La transformation d’un processus productif de l’innovation et la position concurrentielle de l’économie du Japon

La problématique des liaisons marché – concurrence - innovation en Asie porte sur l’étude de l’innovation accroissant la

position concurrentielle des entreprises dans les pôles technologiques formés par les zones transfrontalières, encore

nommés : étapes intermédiaires du développement de la coopération intra-régionale. Le problème se pose quant à la

stimulation de l’innovation, créant un effet de diffusion dans les économies des pôles dominants de la région, dont les

industries s’orientent vers une plus haute technologie.

Les vagues technologiques ont entraîné des réductions dans les coûts de production, du secteur textile à celui de

l’électronique et des externalités sont apparues engendrant des effets d’extension caractérisés ; ainsi, les NPI asiatiques

paraissent menacés non seulement par les pays de l’ASEAN, mais aussi par la Chine.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.80

33. LES MUTATIONS DE L’APPAREIL INDUSTRIEL DES PAYS ASIATIQUES APRES LA CRISE Coordinatrice : Diana HOCHRAICH, Forum Globalisation-Innovation-Firm-Territory (Forum Gift-Nanterre), Centre

national de la Recherche scientifique (CNRS)

Intervenants : Françoise HAY, Evelyne DOURILLE-FEER, Yveline LECLER Cet atelier se propose d’examiner les conséquences de la crise asiatique sur les stratégies des firmes multinationales en Asie et sur la spécialisation des systèmes productifs nationaux. Ce problème sera abordé sous deux angles : macro-économique (D I T en Asie, cadrage des IDE et évolution des stratégies d’IDE manufacturiers japonais) et micro-économiques (motivations des délocalisations japonaises en Asie dans le secteur de l’automobile et de l’électronique). L’interrogation centrale de cet ensemble de contributions est posée au niveau de l’évolution de la D.I.T en Asie et des changements de rapports entre les firmes. Diana HOCHRAICH : Forum Globalization-Innovation-Firm-Territory (Forum Gift-Nanterre), Centre national de la Recherche scientifique (CNRS) La nouvelle D.I.T en Asie La crise asiatique a souligné la perte de compétitivité des pays asiatique émergents. Par ailleurs l’entrée de la Chine à l’O.M.C a intensifié son rôle d’atelier du monde par le biais des délocalisations d’entreprises étrangères sur son sol. L’afflux massifs d’IDE (asiatiques, européens et américains) en Chine bouleverse la DIT asiatique et mondiale. Pour les firmes asiatiques, se pose la question de la finalité de la production en Chine : solution aux problèmes de compétitivité ou fuite en avant ?

Françoise HAY : Université de Rennes I

L’impact de la crise sur les IDE en Asie

La présentation s'attachera à montrer comment les réceptions et les émissions d'IDE asiatiques ont évolué suite à la crise

dans leur contexte de réalisation, dans leurs montants, et dans leurs destinations géographiques.

Les évolutions observées ont été inégales selon les pays. Certes, la dynamique des IDE ayant prévalu dans la région

dans les années antérieures s'est globalement trouvée perturbée, mais la crise a aussi favorisé des ouvertures nouvelles

dans certains pays d'accueil et elle a donné l'opportunité à certains investisseurs de restructurer leurs opérations en Asie.

Evelyne DOURILLE-FEER : Centre d’Etudes Prospectives et d’informations internationales (CEPII)

L’évolution des stratégies d’IDE manufacturiers japonais en Asie

Avant la crise asiatique, les stratégies d’implantations des firmes japonaises en Asie ont été guidées dans l’ensemble par

l’exploitation de leurs avantages compétitifs, tout en intégrant certains avantages comparatifs des pays. L’après crise est

marqué par une accentuation des spécialisations des investissements japonais par pays, le renforcement des

dynamiques d’échanges et d’investissements intra-régionaux, notamment de l’axe Japon-Chine.

Yveline LECLER : Institut d’Etudes Politiques de Lyon, Institut d’Asie orientale (IAO)

La division du travail des firmes japonaises en Asie : le cas de l’électronique et de l’automobile

A travers l’analyse de l’évolution des réseaux d’approvisionnement des entreprises japonaises des deux secteurs

considérés, la présentation a pour but de montrer comment depuis la crise asiatique, mais aussi la libéralisation des

échanges…, leur division du travail, restée relativement nationale dans chacun des pays investis, tend aujourd’hui à

intégrer l’ensemble de la zone dans une dynamique de spécialisation hiérarchique des espaces.

34. MICROFINANCE ET PROBLEMATIQUE DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETE Coordinatrice : Kamala MARIUS-GNANOU : Maître de conférences en géographie à l’Université de Bordeaux 3 et

enseignante-chercheure à l’UMR ADES (CNRS-Université Bordeaux3)

Intervenants : Jean-Michel SERVET, Isabelle GUERIN, François DOLIGEZ, Thierry PAIRAULT, Jane PALIER

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.81

La microfinance recouvre un ensemble très diversifié de dispositifs offrant des capacités d'épargne, de prêt ou d'assurance à de larges fractions de populations rurales et urbains n'ayant pas accès aux services financiers des établissements soumis à des contraintes de rentabilité immédiate. Dans de nombreux pays la microfinance est présentée comme une branche devant se développer comme un secteur financier en tant que tel et parvenir progressivement à dégager des ressources assurant la viabilité et pérennité des institutions mis en place, et on observe souvent l'abandon d'un objectif prioritaire de lutte contre la pauvreté par la microfinance. A l'inverse, l'Inde maintien un lien explicite fort entre microfinance et lutte contre la pauvreté, avec intervention des pouvoirs publics. La présente proposition d'atelier souhaite analyser quelques causes de ce choix politique indien et l'impact réel en ce domaine des actions des organisations de la société civile développant des programmes de microfinance. Des comparaisons avec d'autres pays asiatiques (Bangladesh, Vietnam, Laos) sont prévues .Cibler les ‘pauvres’ en tant que tels par la microfinance permet-il, au delà des ressources financières nouvelles apportées, de lutter le plus efficacement contre les processus d'exclusion et les situations de marginalité sociale.

Kamala MARIUS-GNANOU : Kamala MARIUS-GNANOU : Maître de conférences en géographie à l’Université

de Bordeaux 3 et enseignante-chercheure à l’UMR ADES (CNRS-Université Bordeaux3)

Jane PALIER, Doctorante en sciences économiques, allocataire de recherche au Centre Walras, Université

Louis Lumière Lyon 2, et boursière de l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD) rattachée à

l'Institut Français de Pondichéry (IFP).

Le rôle innovant des Self-help groupes féminins au-delà de la lutte contre la pauvreté en Inde

Les SHG (groupes solidaires) forment le pivot des programmes de microfinance en Inde. La simplicité du processus

d’adhésion et le rôle fondamental de l’Etat indien comme financier et interlocuteur majeur de ces programmes, explique

le développement rapide de ces SHG en Inde. La NABARD (banque nationale de développement rural) fortement

impliqué dans le développement des liens SHG-Banques, estime que d’ici 2008, seraient crée un million de SHGs

rassemblant 17 millions de femmes . Ces groupes de 15 à 20 femmes empruntent en leur nom auprès d'une agence

bancaire ou d'une institution de microfinance et se chargent de répartir les montants prêtés, de décider des taux

appliqués et des modalités de remboursement en fonction des besoins des femmes impliquées. Le fonctionnement en

groupe est considéré comme un moyen de renforcement des capacités (capacity-building). Dans le SHG, on retrouve

aussi un potentiel pour l’accumulation de capital social : l’action collective des SHG s’apparente à une mise en commun

des ressources (économiques, financières, culturelles,…) qui va permettre d’atteindre des objectifs communs - lutte

contre la pauvreté, viabilité financière et empowerment - lesquels seraient inaccessibles de manière individuelle. Ces

SHG sont une occasion pour ces femmes d’exprimer leur volonté de créer des lieux de parole, d'action collective et de

bâtir ainsi des espaces d'autonomie et de négociation. Plus que la microfinance, ce sont ces SHG qui peuvent impulser

des changements positifs dans la perception du rôle des femmes tant au niveau individuel qu’au sein du foyer et de la

communauté.

Jean-Michel SERVET : Directeur de recherche, Institut de Recherche pour le Développement (IRD), en

détachement à l'Institut Français de Pondichéry (IFP) ; Professeur de sciences économiques, Université

Lumière (Univ. Lyon II)

Modèles comparés de microfinance à partir d’expériences indiennes

La mise à disposition de services financiers d’épargne, de prêt et d’assurance de faibles montants pour des populations à

faibles revenus et en situation de marginalité sociale connaît en Inde un développement important depuis plus de dix

ans. Celui ci est encouragé par les pouvoirs publics, en particulier grâce à la mise en place de self help groups. Ces

petits groupes locaux, ayant moins de vingt membres sont en contact direct avec un établissement financier ou le sont

par l’intermédiaire d’une ong. L’article présente les principaux dispositifs de microfinance existant. Il compare le modèle

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.82

dominant des self help groups à celui de la Grameen Bank du Bangladesh et analyse les raisons de sa prévalence en

Inde.

Isabelle GUERIN : Chargée de recherche, Institut de Recherche pou le Développement (IRD), Laboratoire

Population Environnement Développement (LPED)

La servitude pour dette. L’exemple du Bengladesh

La servitude pour dette est une des multiples facettes de la pauvreté : les familles sont amenées travailler pour

rembourser un prêt, souvent dans des conditions de travail médiocres, et pour une durée indéterminée : elles sont prises

dans un cercle vicieux de surendettement et d’exploitation du fait de taux d’intérêt très élevés et/ou de salaires

insuffisants voire nuls qui les obligent à ré-emprunter régulièrement. Dans un pays comme le Bangladesh, même si la

servitude pour dette est moins prononcée qu’en Inde, au Pakistan ou au Népal, ce type de situation existe. Deux

organisations de microfinance (Society for Social Services, Tangail District ; et Thengamara Mohila Sabuj Sangha,

Serajganj District), soutenues par un programme du Bureau international du travail, ont décidé d’utiliser la microfinance

comme mode de prévention de la servitude pour dette en s’adressant à trois types de population : familles d’agriculteurs,

de tisserands et prostituées. A partir d’enquêtes de terrain réalisées en décembre 2002, nous proposons de décrire leur

action et d’en analyser à la fois les potentialités et les limites.

François DOLIGEZ : Chargé de programme, Institut de recherches et d'application des méthodes de

développement (IRAM)

La microfinance rurale au Laos : contexte, expériences, contraintes de développement

Le Laos est un des rares pays d'Asie où la microfinance connait un développement très limité. La communication

analysera cette situation : caractéristiques du milieu rural, politiques macro-économiques et poids de la ‘répression

financière’. Cependant, différentes expériences de caisses villageoises et de coopératives de crédit ont pu se développer

dans le cadre d'interventions localisées. Elles illustrent le potentiel de ce secteur en termes de contribution au

développement rural, mais aussi les limites du cadre institutionnel au niveau national. Leur analyse, à partir d'études

d'appui spécifiques et des enquêtes d'impact menées sur le terrain, permettra d'esquisser un certain nombre de

perspectives pour construire un ‘agenda’ de politique publique destiné à promouvoir le secteur et à orienter son

développement

Thierry PAIRAULT : Directeur de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS), Centre

Chine, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), Institut National des Langues et Civilisations

Orientales (INALCO)

La résurgence de la finance informelle en Chine populaire

Quand le Parti communiste chinois accède au pouvoir en 1949, il identifie sans ambiguïté aucune toute forme de finance

informelle à de l’usure. Cela a été la position officielle jusqu’à la fin des années 1980 quand commencèrent à apparaître

partout en Chine des structures autonomes d’épargne et de crédit, des officines de crédit, de prêt sur gage exerçant à

titre privé, semi-privé, voire même sous couverture officielle. Après plus de vingt années de discussion, de lutte et de

marchandage certaines de ces résurgences ont été admises, d’autres ne sont seulement que tolérées, d’autres encore

ont été l’objet d’une réglementation s’imposant à tous les acteurs économiques. C’est ainsi que nous avons déjà abordé

l’étude des maisons de prêt sur gage ( Les habits neufs des maisons de prêt sur gage chinoises », Mondes en

développement, 2002, n°118) dont la renaissance exprime d’une certaine façon le pouvoir croissant de la société civile

en Chine de nos jours. Ce que nous nous proposons d’entreprendre est un élargissement de la démarche antérieure et

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.83

de produire, dans le cadre du premier congrès du Réseau Asie, un état général du secteur de la microfinance en Chine

ainsi que de présenter les diverses expériences entreprises dans la région de Wenzhou (province du Zhejiang) qui a

toujours bénéficié depuis les années 1980 d’une grande liberté de manœuvre pour expérimenter des solutions encore

interdites ailleurs.

35. GESTION DU SECTEUR PETROLIER ET INSTITUTIONS POLITIQUES, UNE ANALYSE COMPARATIVE ENTRE LE KAZAKHSTAN ET LE VIET-NAM Coordinateur : Gérard DUCHENE, Professeur, Directeur de Réformes et Ouverture des systèmes économiques

post-socialistes (ROSES), Université Panthéon-Sorbonne (Univ. ParisI)

Intervenants : TRAN Thi Anh Dao, CAO Xuan Dung, Ferhat ESEN, Gaël RABALLAND Terry Lynn Karl (2000) explique qu'au regard des expériences au Moyen-Orient et en Amérique latine qu'il est indispensable que de véritables institutions politiques et sociales aient été mises en place avant qu'un boom pétrolier n'intervienne. A l'heure où les pays du bassin Caspien commencent à retirer les profits liés à l'exploitation des hydrocarbures, cette question semble capitale. Les institutions influencent-elles la gestion des secteurs rentiers ? A l'opposé, comment l'existence d'importantes ressources à l'exportation provoque un retard de développement des institutions ? Dans le cas des pays du bassin Caspien, il apparaît que le type d'exploitation des hydrocarbures est intimement lié à la situation politique. Luong et Weinthal (2001) expliquent que les stratégies de développement des hydrocarbures sont fonction de deux éléments : la possibilité ou non de se procurer des ressources alternatives à l'exploitation des hydrocarbures et le niveau de la contestation politique. Ainsi, en Ouzbékistan et au Turkménistan, l'agriculture (et notamment le coton) fournit d'importants revenus aux budgets nationaux si bien que le pouvoir a préféré un engagement assez limité des entreprises étrangères et conserver aux mains de l'Etat le secteur pétrolier et gazier pour pérenniser le statu quo hérité de la période soviétique. L'Azerbaïdjan a hérité, à l'indépendance, d'un appareil économique dépendant économiquement des hydrocarbures et avec des ressources nationales de financement faibles. Aussi, a-t-elle dû faire appel aux entreprises étrangères tout en conservant la mainmise sur ce secteur en maintenant dans le secteur public la compagnie pétrolière nationale. La gestion de la rente est corrélée à la force des institutions. Or, on peut douter de l'efficacité économique des institutions politiques aujourd'hui dans le bassin Caspien. Von Hirschhausen et Waelde (2001) décrivent l'Etat dans les économies du bassin Caspien comme étant autocratique, dominé par des structures de clan…, [pays] où il n'existe pas de séparation entre Etat et économie. L'Etat est devenu source de profit car le secteur privé reste assez faible et vulnérable lorsqu'il n'est pas lié au pouvoir. L'objectif de cette étude, dans le cadre du réseau Asie, est d'analyser plus précisément, le niveau du développement institutionnel et les interactions institutions/secteur rentier dans un cadre comparatif. Le ROSES possède une expertise reconnue sur les économies en transition. En conséquence, les applications de ces recherches théoriques seront faites sur les pays du bassin Caspien ainsi que le Viêt-Nam. Même si le pétrole n'a pas la même importance dans les exportations vietnamiennes que dans les exportations kazakhes ou turkmènes, Hanoi a des exportations concentrées sur des secteurs intensifs en ressources naturelles, notamment le pétrole. L'intérêt de comparer les pays d'Asie centrale au Viêt-Nam réside aussi dans le fait que, ce sont tous des économies en transition, mais avec un développement institutionnel différent. En outre, la gestion des rentes semble elle-même différente selon les pays. Aussi, la question de savoir si le niveau de corrélation entre institutions et secteurs rentiers est capital pour le futur développement économique de ces Etats.

Gérard DUCHENE : Professeur, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I) ; Directeur de Réformes et

Ouverture des systèmes économiques post-socialistes (ROSES)

La justification d'une analyse comparative Kazakhstan/Viêt-Nam dans la gestion du secteur pétrolier et le niveau de

développement institutionnel

TRAN Thi Anh Dao : Maître de Conférences, CEPN-UMR 7115 et ROSES-UMR 8055, Université Paris Nord

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.84

CAO Xuan Dung : Doctorante, Réformes et Ouverture des systèmes économiques post-socialistes (ROSES-

UMR 8055), Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Maison des sciences économiques

Gestion du secteur pétrolier et développement institutionnel. Le cas du Vietnam.

Après avoir établi le bilan plutôt encourageant d’une décennie de développement du secteur pétrolier, nous nous

proposons d’examiner les caractéristiques institutionnelles de ce secteur, lesquelles nous apparaissent comme facteurs

déterminants de son dynamisme. L’obsession du contrôle du processus de transition pousse les dirigeants vietnamiens à

adopter une approche pragmatique à un double niveau : d’une part, la décentralisation de la gestion économique est

encadrée par une centralisation des pouvoirs de décision via les conglomérats d’Etat ; d’autre part, l’Etat opère une

libéralisation sélective et contrôlée du secteur pétrolier, privilégiant une extension horizontale et une concurrence interne

aux entreprises d’Etat. Cependant, l’orientation socialiste d’un mode de gestion bousculé de plus en plus par les règles

du marché commence à manifester ses effets contradictoires : du côté des provinces, la politique de décentralisation se

heurte à une dépendance budgétaire qui continue de modeler les relations entre l’Etat et les autorités locales ; du côté

des entreprises, l’autonomie de gestion est refrénée par une dépendance de décision qui entrave le dynamisme

entrepreneurial.

Mots clés : transition, socialisme de marché, revenu pétrolier, conditions institutionnelles

Gaël RABALLAND : Doctorant en économie, Réformes et Ouverture des systèmes économiques post-

socialistes (ROSES), Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I)

Ferhat ESEN : Doctorant en économie, Réformes et Ouverture des systèmes économiques post-socialistes

(ROSES), Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I) ; Stagiaire, Institut Français du Pétrole (IFP)

Gestion du secteur pétrolier et développement institutionnel. Le cas du Kazakhstan

Depuis l'indépendance du Kazakhstan, la gestion du secteur pétrolier a été très politique. Le pétrole est au centre des

relations de pouvoir dans la mesure où l'argent de la rente sert de plus en plus à une consolidation du pouvoir par une

redistribution sélective.

En quoi cette gestion rentière est-elle influencée par le niveau de développement institutionnel du Kazakhstan ? Il semble

que ces deux mécanismes soient liés. Du fait de la faiblesse originelle de l'Etat kazakhstanais, il y eut un consensus pour

adopter, à l'indépendance, un Etat de type unitaire (où la centralisation était très forte contre la sécession). Mais ce

régime fort se transformera graduellement en régime autoritaire avec comme outil la redistribution de la rente pétrolière.

IX- Rapports à l’histoire 36. MEMOIRE ET IDENTITE. QUELQUES EXEMPLES EN ASIE DANS LES TEMPS MODERNES Coordinateur: Jean-Louis BACQUE-GRAMONT, directeur de recherche, Centre national de la Recherche

scientifique (CNRS), Centre Georges Dumézil d'Etudes Comparatives sur le Caucase

Intervenants : Hartmund O. ROTERMUND, Anne VERGATI, Jean CALMARD, Sabine TREBINJAC, UEHARA

Mayuko A travers quatre cas significatifs, choisis en divers points de l’Asie, les auteurs esquissent, par des voies diverses, une approche de l’idée et du vécu de l’identité dans des sociétés fort différents les unes des autres du fait de leur histoire, de leurs structures et de leurs traditions, depuis la veille de la flambée des nationalismes jusqu’à nos jours. En situant ruptures et continuités des mémoires, ils tenteront de comparer ce qui peut l’être dans un cadre largement intersectoriel et interdisciplinaire, en s’assurant de la présence dans l’auditoire de collègues sinisants et arabisants pouvant éclairer le débat, mais qu’il était pas possible d’intégrer

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.85

dans une équipe de quatre orateurs principaux. D’autre part, l’Iran et la Turquie ne faisant pas partie de l’aire ‘Asie’ considérée ici, au contraire de l’Asie Centrale et de la Haute Asie, les exposés deJ. Calmard et J.-L. Bacqué-Grammont s’attacheront, en un bref contrepoint, à souligner l’impact de ces dernières, comme négatifs par lequel se définit l’identité iranienne dans un cas, en tant que porteuses d’images identitaires turquesidéales dans l’autre.

Hartmund O. ROTERMUND : Directeur d'Etudes, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EHESS), Ve section

Le Japon et l'Ere Meiji face à l'Occident: repli et ouverture dans le domaine de l'éducation

Au terme de la révision des ‘traités inégaux’, l’Empire japonais se trouvait dans l’obligation de consentir aux nations

signataires une ouverture totale du pays, donnant aux étrangers le droit de circuler librement à l’intérieur de l’archipel, d’y

élire domicile, d’y faire du commerce, d’y exercer des activités missionnaires, etc.

La perspective d’un brusque afflux d’Occidentaux déclencha alors la publication d’un nombre considérable de ‘discours

sur la préparation à la cohabitation [avec les étrangers}'’. L’examen de ces textes, véritables cris d’alarme, nous fait non

seulement comprendre la crainte inspirée par les multiples influences qu’excerceraient les étrangers dans tous les

domaines de la vie de la nation (éthique, religion, éducation, famille, langue, droit, économie, mœurs et coutumes) mais il

permet aussi de brosser un tableau des occidentaux vus à travers le prisme de l’imaginaire japonais exaspéré de cette

époque.

L’exposé aura pour but d’analyser quelques-uns des thèmes traités par nos documents :

- l’impact présumé de la coexistence avec les étrangers dans le domaine de l’éducation et de l’enseignement. La

fréquentation d’une école gérée par les occidentaux ne ferait-elle pas perdre aux petits Japonais, côtoyant des

ressortissants d’autres pays, leur identité nationale ?

- l’éducation envisagée comme un moyen de combattre l’insularisme’ qui marquerait l’esprit japonais ;

le nécessaire tri à faire entre la civilisation matérielle -à accueillir- et la civilisation spirituelle –à rejeter ;

- l’enjeu d’une meilleure éducation des femmes, etc.

UEHARA Mayuko : Phd. Student, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

La quête de l'identité japonaise au temps de la modernisation : le cas des philosophes

Le Japon a connu l'introduction des valeurs scientifiques et culturelles de l'Occident à l'époque de Meiji. L'émergence de

la subjectivité individuelle fait partie de cette occidentalisation. Mais la réaction nationaliste, tendance générale dans

différents domaines, commence vers les annés 1910 et va être renforcée jusqu'à la défaite de la Seconde Guerre

mondiale. Cette étude se bornera à la quête de la notion de sujet

ou individu effectuée par des philosophes (Nishida Kitaro, Watsuji Tetsuro, Miki Kiyoshi, entre autres), qui ont essaye de

dépasser la limite des notions de sujet occidentales. la spécificité japonaise de ‘sujet’ consiste grosso modo en le rapport

dialectique entre le sujet et son lieu ou environnement. on exposera certaines des théories des philosophes japonais

choisis, afin de caractériser la probleématique d'une nouvelle identité japonaise dans le contexte historique de la montée

du nationalisme et même de l'ultra-nationalisme.

Anne VERGATI : Directeur de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS), Laboratoire

d'ethnologie et de sociologie comparative (CNRS-UMR 7535), Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Identité, mémoire et histoire locale. Quelques exemples en Inde du Nord (Rajasthan)

Dans le contexte indien, il est souvent question d’identité religieuse : les études récentes ont souvent insisté sur celle-ci

au niveau national, et on a cherché l’unité nationale à partir d’une certaine ‘unité’ religieuse dans l’hindouisme. Ce qui

donne l’identité d’une région, et aussi d’une communauté, est le panthéon local différent du grand panthéon hindou. Les

‘histoires’ de ces divinités locales sont construites à partir d’un savoir local (local knowledge, cf C. Geertz), et dans ces

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histoires, le fonds historiques -j’entends, les dates précises- a peu d’importance et change souvent. Dans l’Ouest du

Rajasthan, la littérature orale épique a joué un rôle important dans la construction d’une telle identité sociale et religieuse.

Sabine TREBINJAC : Chargée de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS),

Laboratoire d’ethnologie et sociologie comparative (CNRS-UMR 7535), Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Comment conserver sa mémoire et son identité : l’exemple des Ouïgours du Xinjiang (Chine)

Il est tout à fait frappant de constater que les Ouïgours appartenant depuis des millénaires à la sphère géopolitique

chinoise ont su conserver une mémoire et une identité propres malgré les changements culturels qui leur ont été imposés

par la force politique dominante. En effet, comment garder sa culture quand, en un siècle, on doit utiliser alternativement

l’alphabet cyrillique, les lettres latines, les caractères chinois ou les lettres arabes ? Comment se reconnaître ? Nous

proposerons au travers de plusieurs exemples tant ethnonymiques que linguistiques pris dans l’histoire des Ouïgours du

XXe siècle voire même de l’aube du XXIe siècle (avec un édit de janvier 2003) une analyse de ce savant savoir-faire

centrasiatique.

Jean CALMARD : Directeur de recherche honoraire, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS)

Littératures épiques et sentiment national en Iran

Ecrit autour de l’an mille par Ferdowsi, le Shâh Nameh (Livre des rois) constitue pour la société de l’Iran islamique la

principale source de connaissance-ou pour le moins de perception- de son prestigieux passé. Dépassant largement les

limites de la vie littéraire, cet ouvrage comporte des implications tant sur le plan de l’idéologie royale (à laquelle

s‘assimilent les souverains turcs et mongols iranisés) que celui de la mythologie et de la métaphysique. Ferdowsi s’écarte

de la structure linéaire de l’historiographie, alors d’expression arabe ; il donne à sa conception du passé iranien un

mouvement cyclique, au centre duquel l’Iran maintient ses valeurs culturelles, malgré les vicissitudes des revers ou des

défaites. Cela permet de valoriser, dans un sens tout autant dynastique que mystique, la conquête d’Alexandre le Grand.

Malgré les sentiments fortement anti-arabes qu’il exprime, Ferdowsi valorise, du moins implicitement, l’Islam iranien

auquel il adhérait dans sa composante chiite.

La grande impulsion donnée par Ferdowsi au cycle épique entraîna, après lui, la composition de nombreuses épopées

dites secondaires, exposant avec plus d’emphase et , souvent, d’exagérations invraisemblables, les exploits héroïques.

les récitations épiques, tant à la cour des grands que dans les lieux publics, furent concurrencées, à partir de l’époque

seljoukide (Xie-XIIe siècles), par les séances de déploration du martyre de l’Imam Hoseyn et des siens à Karbalâ (Iraq,

680). Comme dans le cas d’Alexandre le Grand, Hoseyn fut iranisé par la fiction de son mariage avec une princesse

sassanide dont descendraient tous les Imam. Fonctionnant comme un récit épique, la déploration des héros vengeurs,

comporte une forte charge émotive. Le ’paradigme de Karbalâ‘ fut systématiquement utilisé dans la dernière phase

révolutionnaire islamique d’Iran (1978-1979).

Nous tenterons de déterminer, dans une perspective historique, l’impact respectif de ces littératures épiques et épico-

religieuses sur les mentalités en Iran. Notre analyse portera aussi sur des aspects régionaux du sentiment national, où

ces littératures sont utilisées avec des adaptations ou des variantes.

Jean-Louis BACQUE-GRAMONT : directeur de recherche, Centre national de la Recherche scientifique

(CNRS), Centre Georges Dumézil d'Etudes Comparatives sur le Caucase (UPRESA 8003)

Occultation, résurgence et développement de la mémoire altaïque en Turquie

A la suite de leur mainmise, au XI ème siècle, sur le califat abbasside et la majeure partie de l’Asie Mineure, les Turs

Seljoukides adhérèrent rapidement à la civilisation islamique, en particulier par l’intermédiaire de la forme iranienne de

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celle-ci. Dès lors, sans l’oublier dans l’usage parlé, les élites turques abandonnèrent pour longtemps leur propre langue

et la riche littérature qu’elle véhiculait aux ‘Turkmènes’ ou plus simplement, ‘Turcs’, nomades obstinément attachés à

leurs traditions anciennes. Il fallut attendre le XV ème siècle pour que le turc, rendu apte à noter de subtiles nuances de

la pense grâce à des emprunts massifs au persan et à l’arabe, accédât au rôle de principale langue de culture d’un

empire devenu immense. De manière parallèle, les racines identitaires furent recherchées davantage dans un passé

islamique tendant au fabuleux et ethniquement assez indifférencié que dans des souvenirs centre-asiatiques, d’autant

plus que le dernier en date de ces derniers correspondait à l’écrasement de Bajazet ‘la Foudre’ par Tamerlan en 1402.

Ce ne fut qu’à la fin du XIX ème siècle que parmi les nombreuses composantes ethno-religieuses du monde ottoman et

surtout sous l’influence de Tatars de Russie qui avaient élaboré une conception de leur ‘turcité’ en opposition avec le

nationalisme de l’Empire des tsars, les Turcs prirent conscience du fait qu’au-delà de l’appartenance à l’islam, leur

identité propre était différente de celles d’autres coreligionnaires, eux-mêmes en train de définir la leur en opposition avec

le pouvoir d’Istanbul et de leurs représentants.

On tentera de tracer les grandes lignes et de marquer les temps forts de ce processus d’occultation-redécouverte-

exaltation de l’identité turque, jusqu’à son intégration dans la vision kémaliste d’une Turquie à la fois resourcée en Haute-

Asie et tournée vers l’Occident

37. ENTRE LOYAUTE ET DELOYAUTE : LA COMPLEXITE DU CHOIX EN CONTEXTE COLONIAL EN INDOCHINE Coordinateur : Christopher E. GOSCHA, chercheur, Institut d’Asie Orientale (IAO), Maître de conférences,

Université Louis Lumière (Univ. Lyon II)

Intervenants : Agathe LARCHER-GOSCHA, Gilles DE GANTES, Claire TRAN THI LIEN Choisir son camp, revendiquer telle appartenance communautaire plutôt qu’une autre, refuser les comportements majoritaires et rompre les rangs, ces questions que tout homme se pose un jour ou l’autre dans sa vie revêtent en contexte colonial une gravité décuplée. Elles se posent alors en terme de ‘ loyauté ’ et de ‘ déloyauté ’ vis-à-vis de l’autorité dominante, mais aussi vis-à-vis de sa patrie, de sa famille, de son village ou de sa région d’origine, de ses amis et fréquentions. Dans un monde où tous les repères traditionnels se fissurent ou se transforment rapidement, comment se positionner dans la société, quelle fidélité garder ou rompre, envers qui afficher son loyalisme ? Les historiographies officielles, coloniales ou nationalistes, ne se sont pas embarrassées de la question du choix. Il est évident et irrécusable, facile à adopter puisque le bon s’impose de lui-même. On est ‘ loyaliste ’ ou ‘ rebelle ’, Français ou ‘ anti-Français ’, ‘ colonialiste ’ ou ‘ nationaliste ’, ‘ patriotes’ ou ‘ traîtres ’. La réalité est bien sûr autrement complexe et sinueuse, aussi obscure que l’intimité d’une décision peut l’être. C’est précisément la difficulté du positionnement entre loyauté et déloyauté, fidélité et infidélité, qui saisit différentes catégories de Vietnamiens durant la période coloniale et post-coloniale. Pour pénétrer dans ces zones obscures de la loyauté/déloyauté, cet atelier dégagera quatre thèmes majeurs qui couvrent la période de la colonisation et de la décolonisation en Indochine : la question du ‘ ralliement ’ des Vietnamiens qui ont décidé de marcher avec la France ; la question du ‘ métissage ’ et la complexité d’une loyauté et une déloyauté raciales ; le choix religieux et la guerre de libération ; et, enfin, la question épineuse de la ‘ désertion ’. Les deux premiers sujets se consacrent à la question de la loyauté pendant la période coloniale, lorsque la force française était à son apogée, tandis que les deux derniers sujets traitent la déloyauté pendant la guerre, lorsque la puissance française était contestée et que de nouveaux choix se présentaient. Non seulement ces quatre sujets se complètent sur le plan problématique et chronologique, mais ils comportent chacun forcément des aspects pluridisciplinaires, tant anthropologiques, sociologiques que politiques et historiques. Telle est la complexité du choix entre loyauté et déloyauté, que nous nous proposons d’explorer .

Agathe LARCHER-GOSCHA : Chercheur associé, Institut d’Asie Orientale-Lyon (IAO-Lyon)

Entre loyauté coloniale et déloyauté patriotique : Les partisans vietnamiens de la conquête et de la pacification

française en Indochine (1858-1914)

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Depuis le milieu du XIXe siècle, face à l’invasion du pays par des troupes d’occupation étrangère, la monarchie et la

population vietnamienne furent contraintes de réagir pour défendre leurs intérêts et préserver leur identité nationale

menacée. Les choix qu’elles durent assumer ne furent pour autant jamais simples et nettement définis une fois pour

toute. Bien au contraire, de multiples stratégies furent mises en œuvre pour freiner la progression des empiètements

territoriaux et politiques des Français, eux-mêmes longtemps hésitants et indéterminés dans leurs projets de conquête.

La négociation, l’attentisme, la fermeté et l’appel à la résistance populaire furent tour à tour, voire simultanément,

envisagés par l’Empire vietnamien pour préserver l’intégrité du royaume.

L’histoire de cette conquête n’a pas échappé à une vision manichéenne, que ses différents protagonistes ont

pareillement soutenue dans le but de légitimer leurs causes. Ainsi beaucoup de récits français de la période coloniale ont

mis en avant la relative facilité de la conquête de l’Indochine pour appuyer l’idée qu’elle se faisait dans un esprit

pacificateur (au Laos et au Cambodge, particulièrement) et civilisateur, bien compris par les populations locales. Au

contraire, l’historiographie nationaliste vietnamienne depuis la décolonisation mit en avant l’élan de résistance à la

conquête française, menée par d’authentiques figures héroïques, comme si la question du choix ne pouvait justement

pas se poser alors.

Cette communication se propose d’étudier les itinéraires singuliers, mais pas moins significatifs, d’auxiliaires vietnamiens

de la conquête et de la pacification coloniales, d’hommes qui choisirent, parfois au péril de leurs vies, de se montrer

“ loyaux ’ envers l’occupant sans pour autant se penser nécessairement “ traîtres ’ à leur patrie. Certains ne se posèrent

même pas la question en faisant ‘ leurs soumissions ’ qui s’avéraient parfois réversibles, transitoires, opportunistes.

Leurs cas illustrent la complexité des choix qui s’offrirent alors aux lettrés comme aux simples paysans dans ces périodes

si troublées de l’histoire. Dès 1860, des ralliements à l’armée coloniale se produisent en Cochinchine, bientôt suivis

d’autres en Annam et au Tonkin vers 1880-1890. Nous suivrons en particulier les pas de ces fonctionnaires vietnamiens

(Tran Ba Loc en Cochinchine, Nguyên Than en Annam, Hoang Cao Khai et Lê Hoan au Tonkin) qui formèrent des

colonnes de miliciens pour pourchasser les ‘ pirates ’ et ‘ rebelles ’ à l’autorité française. Nous chercherons à comprendre

les motivations diverses —familiales, religieuses, honorifiques, financières, politiques, conjoncturelles— qui les animaient.

Notre propos n’est pas de saluer le courage de ces hommes ou de jeter l’opprobre sur eux, mais de montrer comment et

pourquoi un noyau de Vietnamiens influents refusèrent contre toute attente de s’opposer aux Français pour préférer

collaborer avec eux dans leurs entreprises colonisatrices, quitte à composer avec leurs perceptions du ‘ loyalisme ’ et de

la ‘ fidélité ’ à la Patrie.

Gilles DE GANTES : Chercheur associé, Institut de Recherche sur le Sud-Est asiatique (IRSEA)

‘Dau ga, dit vit’ La place improbable des métis franco-vietnamiens en situation coloniale

Dans son principe, la colonisation telle qu’elle fut pratiquée par les pays européens aux 19ème et 20ème siècle, entraîne

une inégalité radicale : d’un côté les colonisateur, de l’autre les colonisés. Dans la mesure où l’inégalité radicale était

difficile à justifier et impossible à pratiquer, les colonialistes ont eu tendance à la sur-affirmer, ignorant plus ou moins

volontairement les groupes sociaux dont l’existence contredisait le modèle dominant : juifs du Maghreb, soldats

sénégalais en garnison en AEF, fonctionnaires vietnamiens dirigeant des contribuables khmers et bien d’autres. Parmi

ces groupes intersticiaires, dont la loyauté est partagée entre les dominants et les dominés, les métis ont une place

particulière puisqu’ils sont prédestinés à la nécessité du choix.

Le cas des métis franco-vietnamiens est original si on le compare à celui des métis d’autres colonies françaises et à celui

des métis franco-khmers ou franco-lao. Ils sont très nombreux (30% des enfants français dont la naissance est déclarée

dans les années 1930 en Indochine sont des métis). Beaucoup sont déclarés Français et n’ont aucun doute sur leur

communauté d’appartenance, d’autant plus que celle-ci est plus valorisante et qu’ils sont souvent rejetés par la

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.89

communauté vietnamienne. Les mères d’enfants métis qui n’ont pas été reconnus cherchent d’ailleurs souvent à les faire

reconnaître Français, ce q’une loi de 1927 autorisa à la seule condition que l’aspect physique du candidat à la nationalité

française laisse penser qu’il avait un géniteur européen.

J’envisage de développer trois points concernant la place des métis dans le système colonial indochinois :

La représentation que s’en font les colonisateurs. La littérature et la presse véhiculent des stéréotypes racistes et/ou

sociaux (beaucoup de ces métis sont des enfants illégitimes) excluant nettement les métis du groupe dominant. Ces

représentations sont traduites dans la réalité par le fait que les métis n’accèdent jamais avant les années 1930 à des

postes de responsabilité dans l’administration.

Cependant, rapidement, des voix s’élèvent, notamment au sein des Sociétés (privées) des métis abandonnées, pour

défendre la place des métis. Les motivations exprimées sont diverses : philanthropie pure, volonté ethnocentriste de ne

pas abandonner un descendant de blanc à la culture vietnamienne, volonté politique de pérenniser la présence française

en Asie au moyen de l’existence d’une communauté franco-vietnamienne.

Les réponses des métis à ces attentes sont diverses naturellement. Ceux qui avaient été reconnus et élevés à

l’européenne s’intègrent totalement (du moins autant que le permettait le racisme diffus de l’administration), au niveau

social qui était le leur : le fils du sous-officier chez les enfants de troupes, les enfants de colons aisés dans la bonne

société. La question de la loyauté ne se pose pas pour eux. Ces intégrations dont les exemples sont nombreux sont

souvent sous-estimées. Le problème était plus compliqué pour les métis abandonnés, pour des raisons sociales autant

que pour des raisons raciales. Beaucoup parvinrent à s’intégrer moyennant une participation active au projet colonial, en

servant d’intermédiaires grâce à leurs connaissances linguistiques

TRAN Thi Liên : Chercheure indépendante, Centre d’histoire du XX e s. (CHEVS – IEP Paris) Quelle loyauté et déloyauté ?Le cas des catholiques vietnamiens pendant la période coloniale et post coloniale Nous nous pencherons sur la question essentielle qui s’est posée aux catholiques vietnamiens, de la double loyauté à leur foi, et à leur patrie. Cette question n’est certes pas spécifique aux catholiques vietnamiens et se pose à tout croyant. Ce qui nous intéresse plus particulièrement, c’est de décrire la complexité des choix politiques des catholiques vietnamiens au lendemain de la guerre d’indépendance. Pour cela, nous évoquerons la situation difficile de la communauté catholique, sur laquelle pesait le soupçon de collaboration avec les colonisateurs depuis la conquête française. Nous reviendrons aussi sur la période cruciale de la guerre d’indépendance pendant laquelle un grand nombre de catholiques, soucieux de mettre fin à ce soupçon, s’engagèrent de manière déterminée dans le combat pour l’indépendance, mais furent très vite confrontés au dilemme suivant : collaborer ou non avec les communistes, les combattants les plus intransigeants contre les occupants Français. Au moment de l’indépendance, une majorité de catholiques fit clairement le choix d’une voie opposée à celles des communistes, convaincus que seule la solution politique non communiste au Sud Vietnam pouvait leur permettre la double loyauté à leur patrie et à leur foi. Certains catholiques, qui avaient combattus aux côtés des communistes pendant la Résistance contre les Français et qui craignaient une dépendance américaine funeste, firent un choix politique plus complexe. Soucieux à la fois de leur fidélité à leur religion, et de l’unité de leur pays, certains aspiraient à terme à un avenir commun avec leurs frères du Nord. Nous évoquerons donc la complexité de ce choix, certes peu représentatif, mais significatif néanmoins. Nous parlerons en particulier du cas de Pham Ngoc Thao : catholique issu de la riche bourgeoisie cochinchinoise francisée, entré dans la résistance communiste contre les Français, il rallia le régime de Diem et accéda à de hautes fonctions militaires. Impliqué dans plusieurs complots, il mourut sous la torture à Saigon en février 1965, lors d’un complot raté contre le général au pouvoir, Nguyên Khanh. Il est actuellement considéré comme l’un des espions les plus remarquables de la RDVN au coeur même des plus hautes instances militaires de la RVN. Christopher E. GOSCHA, chercheur, Institut d’Asie Orientale (IAO), Maître de conférences, Université Louis Lumière (Univ. Lyon II) Ambiguïté et loyauté dans une guerre de décolonisation : le cas des déserteurs vietnamiens et européens durant la guerre d’Indochine Par sa nature même, la question de la « désertion » pose d’emblée le problème de la « loyauté » et de la « déloyauté ». Déserter une armée veut dire trahir la Nation et ses enfants – les camarades en armes. Plus

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qu’autrefois, le « Mythe de l’expérience de guerre » et la « sacralisation » de la guerre au 20ème siècle, pour reprendre les expressions du grand historien Georges Mosse, ont transformé tout déserteur en une aberration nationale, un fléau à bannir à jamais de la mémoire de la Nation moderne. Les cas des déserteurs de la Première Guerre Mondiale en donnent un très bon exemple : c’est seulement en 1998 que Lionel Jospin a pu commémorer publiquement et au nom de la Nation les âmes des jeunes soldats qui avaient déserté la France lors des attaques suicidaires au Chemin des Dames. Et on sait que le film de Stanley Kubrick, Les sentiers de la gloire, qui traite justement ce sujet, fut longtemps interdit en France, surtout pendant la guerre d’Algérie. Tout au long du 20ème siècle, la glorification nationaliste de la guerre se répandit à travers le monde, surtout lors des guerres de libération nationale opposant colonisateurs et colonisés. De la même façon que les nationalistes européens au début du 20ème siècle, les nouveaux nationalistes de la deuxième moitié du 20ème siècle mettront en avant la Nation et ses soldats en armes dans leurs luttes pour l’indépendance nationale. La guerre est de nouveau sacralisée au nom de la Mère patrie. Or, si les historiens des deux guerres mondiales ont commencé à explorer de leurs côtés l’ambiguïté de la désertion, on cherche toujours en vain des études semblables concernant les guerres de décolonisation en Asie et en Afrique. Et pourtant l’ambiguïté de la désertion était à son sommet lors de ces guerres de « libération nationales ». Du point de vue des soldats engagés dans ces conflits, les buts et les justifications de la violence n’étaient pas toujours si claires et les contours de la loyauté loin d’être nets. Ce fut même le cas pour des milliers de soldats vietnamiens qui quitteront les rangs du gouvernement de Ho Chi Minh pour se rallier aux Français ou à son Etat vietnamien associé. Cette communication aborde le sujet de la loyauté et de la déloyauté en examinant et comparant les cas des déserteurs européens et vietnamiens. Nous nous intéresserons d’abord aux soldats européens qui ont quitté l’armée française pour se rallier à la cause nationale du gouvernement de Ho Chi Minh, aussi bien qu’aux transfuges vietnamiens qui ont déserté ce même gouvernement pour se rallier aux Français. Dans les deux cas, nous nous bornerons à montrer que les choix et les loyautés étaient divers, complexes et surtout ambigus. La question de la loyauté se posait, ainsi que celle du nationalisme, mais pas forcément là où l’on pourrait l’attendre, ni chez les Vietnamiens, ni chez les Européens. Les mythes héroïques entourant la guerre « moderne » ont occulté bien des choix difficiles et ont simplifié bien de loyautés obscures au nom de la Nation. La guerre d’Indochine ne fait pas d’exception … 38. LES FABRICATIONS DU PASSE EN ASIE (ASIE DU SUD-EST, CHINE, INDE) : IMAGES, HISTOIRES, RITUELS Coordinateur : Yves GOUDINEAU, Chargé de recherche, Institut de Recherche pour le Développement (IRD), Ecole française d’Extrême-Orient (EFEO), chargé de conférences, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE), Université de Nanterre (Univ. Paris X), Vice-Président, Association française pour la Recherche sur l’Asie du Sud-Est (AFRASE) Intervenants : Bénédicte BRAC DE LA PERRIERE, Denis VIDAL, Stéphane DOVERT Que le passé fasse l’objet d’une continuelle ré-élaboration est une idée triviale, sur laquelle s’accordent aujourd’hui sans peine le praticien comme l’épistémologue de l’histoire. Mais l’une des conséquences en est que l’historiographie comme l’anthropologie des “ prismes ”, formant et déformant, de l’écriture et de l’imagerie du passé devient un élément essentiel à sa compréhension. L’Asie est à cet égard exemplaire qui, généralement soucieuse d’abord de l’efficacité du prisme plutôt que de la quête d’une éventuelle objectivité, multiplie sans états d’âme apparents les fabrications du passé et les révisions successives - et souvent radicales - de l’histoire. L’intérêt est dès lors l’analyse, tout autant que de leurs raisons, des supports variés de ces “ fabriques ” du passé, qui utilisent l’image comme l’écrit , l’invention “ folklorique ” comme la ré-élaboration rituelle, et qui mobilisent l’archéologue ou l’ethnographe au même titre que le danseur ou l’artiste peintre. Le prisme qui sera ici particulièrement discuté est celui du nationalisme (plutôt que celui du religieux, ou du patriotique dans la guerre, etc .) où interviennent presque inéluctablement deux “ démons ” familiers, celui des origines et celui de l’intégrité (et/ou de l’antiquité) culturelle. Là encore ce sont les variations qui importent, et les propositions - pour l’instant limitée à trois, mais d’autres collègues nous ont signalé leur intérêt –s’attacheront à des contextes différents en Chine, en Inde et en Asie du Sud-Est.

Yves GOUDINEAU : Chargé de recherche, Institut de Recherche pour le Développement (IRD), Ecole

française d’Extrême-Orient (EFEO); Chargé de conférences, Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE),

Université de Nanterre (Univ. Paris X) ; Vice-Président, Association française pour la Recherche sur l’Asie du

Sud-Est (AFRASE)

Ethnographie et ré-écriture de l’histoire ancienne de la péninsule indochinoise

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Linguistiques et archéologues s’accordent pour dire que les populations austroasiatiques sont, de toutes celles occupant

aujourd’hui la péninsule indochinoise, les plus anciennement installées dans cette région. Longtemps admise sans

objection, cette perspective, reconnaissant de fait l’autochtonie de nombreuses minorités ethniques austroasiatiques, fait

actuellement l’objet d’un re-traitement local, visant à dénier toute ‘indigénéité’ particulière à ces populations et à affirmer –

parfois contre toute évidence - la haute antiquité de la présence des populations majoritaires sur le territoire national.

C’est en fait toute une fabrication de l’histoire régionale de l’ethnicité qui est en cours, et l’on montrera que, si ses biais

diffèrent sensiblement d’un pays à l’autre, par exemple du Viêt-Nam à la Thaïlande, elle entend partout s’adjoindre

l’ethnographie, dont elle commande largement les modes d’investigation comme elle régit la présentation écrite ou

muséographique de ses ‘ données ” (mythologiques, rituelles, etc.).

Béatrice David, Maître de conférences à Paris VIII, Chargée d’enseignement à l’Université de Hong Kong

Narration historique postcoloniale. Débats autour de l’exposition ‘Histoire de Hong Kong’.

En été 2001, le Musée d’histoire de Hong Kong inaugurait dans ses nouveaux bâtiments une exposition intitulée

‘L’histoire de Hong Kong’ (The Hong Kong story). Nous proposons d’examiner, à travers son analyse, le rôle tenu par

l’institution muséographique pour accompagner le processus politique à l’œuvre dans l’ancienne colonie britannique

instituée ‘Région Administrative Spéciale de la République Populaire de Chine’ depuis le premier juillet 1997. Nous

verrons notamment comment, se désolidarisant de la narration historique coloniale incarnée par le mythe du rocher

inculte, cette exposition construit une nouvelle narration qui s’efforce d’essentialiser le lien de Hong Kong à la Chine et

propose une vision folklorisée des éléments constitutifs d’une identité locale à laquelle est niée toute signification

politique.

Bénédicte BRAC DE LA PERRIERE : Chargée de recherche, Centre national de la Recherche scientifique

(CNRS), Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et le Monde austronésien (LASEMA) ; Chargée de cours,

Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Retour à Sambya: de la pagode des dockers à celle du gouvernement, histoire d’une ré-écriture de l’histoire

En Birmanie, les années quatre-vingt-dix ont été marquées par un réinvestissement par le gouvernement de la position

de patron du bouddhisme. Cela s’est traduit par de vastes programmes de rénovation de pagodes et de fondations

religieuses visant d’abord à assurer la légitimation du pouvoir. Ces programmes s’inscrivent cependant aussi dans

l’énergique réorganisation de l’espace urbain initiée par l’ouverture d’immenses nouvelles villes aux portes des

anciennes. L’examen des rénovations de pagodes - notamment des peintures murales et des adjonctions d’éléments

symboliques- montre qu’elles sont l’occasion de ré-écritures de l’histoire contribuant d’une part à transformer les

nouveaux espaces urbains en espaces bouddhisés, d’autre part à inscrire les nouvelles pagodes dans l’histoire d’un

bouddhisme birman qui permette au gouvernement de se les approprier. L’examen se fera à partir de l’exemple de

Yanmyôaung, pagode qui date de la fin des années cinquante et qui a récemment fait l’objet d’aménagements

importants.

Denis VIDAL : Chargé de recherche, Institut de Recherche pour le Développement (IRD), Centre d’Etudes de

l’Inde et de l’Asie du sud (CEIAS); Chargé de conférences, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

(EHESS), Institut national des Langues et Civilisations orientales (INALCO)

La quête de l'Orient dans la peinture moderne indienne, du XIXème siècle à nos jours

Depuis la seconde moitié du XIXème siècle, en Inde, l'imagerie sous ses différentes formes a joué un rôle

particulièrement central dans les nombreuses tentatives qui ont été faites pour renouer avec le sens du passé, aussi bien

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sur le plan historique que sur un plan culturel. Cette quête s'est exprimée, notamment au début du XXème siècle, par la

volonté d'en revenir aux origines supposées d'une esthétique purement ‘ orientale ’ qui non seulement se distinguerait de

la culture occidentale mais qui, en outre, transcenderait les différences pouvant exister entre les diverses régions de

l'Asie. Le cas indien offre un point de départ privilégié, surtout dans le domaine pictural, pour analyser certaines de ces

tentatives poursuivies depuis un peu plus d’un siècle aux fins de matérialiser le sens d'un passé commun à toutes les

cultures d'Asie.

Stéphane DOVERT : Directeur de l’Institut de Recherche l'Asie du Sud-Est Contemporaine (IRASEC)

La réécriture des histoires nationales et la construction politique régionale

Pour s’affranchir des colonisations, pour invoquer la nécessité d’une unité dans le cadre forgé par l’occupant occidental

ou tout simplement pour galvaniser leurs citoyens, les nationalistes du Sud-Est asiatique ont procédé à une réécriture de

leur histoire précoloniale et de celle des conditions de leur accession à l’indépendance. Ils ont ainsi défini des « âges

d’or » et des « modèles glorieux » conçus comme des outils de légitimation de leur autorité, non seulement sur leur

espace national actuel, mais également sur une partie de ce qui est aujourd’hui devenu celui de leur voisin. A l’heure des

constructions régionales, l’histoire doit être à nouveau revisitée afin de substituer l’idée d’unité à celle de domination. On

entend ici, à travers les exemples indonésien, cambodgien, vietnamien ou thaïlandais, mesurer en quoi les discours

nationalistes du passé et les évènements auxquels ils ont donné lieu, ont laissé des traces qui constituent aujourd’hui un

handicap à une régionalisation conçue comme un symbole de modernité politique.

IX - Rapports à l’histoire 39. LES MUTATIONS DE L'ETAT CHINOIS Coordinateurs :

- Yves CHEVRIER, Directeur du Centre d’Etudes de la Chine Moderne et Contemporaine (CECMC), Ecole des

Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

- Christian LAMOUROUX, Directeur d’études, Centre d’Etudes sur la Chine moderne et contemporaine (CECMC),

Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

Président de séance: Pierre-Etienne WILL, Professeur, Collège de France

Intervenants : Jérôme KERLOUEGAN, Luca GABBIANI, Xiaohong XIAO-PLANES, Emilie TRAN L'objectif de cet atelier est de mettre en valeur des travaux ayant pour thème commun l'histoire de l'Etat chinois et de ses mutations. Par Etat il faut entendre ici non une entité abstraite, mais des dispositifs concrets, des pratiques de pouvoir, des ‘acteurs’ (administratifs, politiques, civils, militaires, etc.), des savoirs, des normes et des symboles, sans oublier les relations de l'Etat avec les acteurs sociaux. Les interventions ont été choisies afin d'illustrer les transformations de l'Etat au cours de la longue durée (des Ming au temps présent). Par là, il nous a semblé qu'il serait possible non tant d'insister sur la continuité de l'Etat impérial et post-impérial en Chine que sur son historicité. Ce faisant, il sera possible de confronter les questions que se posent les historiens des périodes et configurations successives de l'Etat chinois. Nous souhaitons également que ces problématiques chinoises s'ouvrent en direction de celles qui ressortissent à l'histoire des formations étatiques dans d'autres aires historico-culturelles. L'idée de cet atelier résulte de l'entrée en résonance de recherches réparties sur la longue durée qui ont lieu au Collège de France (Pierre-Etienne Will) ainsi qu'à l'EHESS (Yves Chevrier, Christian Lamouroux, Xiaohong Xiao-Planes). Mais un autre objectif de l'atelier est de mettre en avant des travaux récents ou en gestation, autrement dit des recherches doctorales. Ainsi, dans trois cas sur quatre, les intervenants sont des doctorants. L'atelier sera placé sous la présidence de P.-E. Will. L'Etat chinois en mutation sera étudié à partir de quatre périodes charnières : la fin des Ming, la fin des Qing, l'incertaine modernisation républicaine et les transformations de l'ère post-maoïste. Chaque intervenant

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approchera la question des mutations de l'Etat en éclairant une des missions que celui-ci a toujours assumées comme une partie intégrante de son dispositif de légitimation en même temps que de sa sphère d'activité et de contrôle : l'organisation militaire (dans la société de la fin des Ming), la gestion de la sécurité et de l'organisation sanitaire dans la ville capitale (à la fin des Qing), le système éducatif et le rôle des élites dans une province réputée pour ses traditions intellectuelles (de la fin des Qing à la République), le contrôle de l'économie et de la société et les moyens politiques et sociaux de ce contrôle (à travers l'étude des domaines de désengagement et de réengagement de l'Etat post-maoïste à Shanghai).

Jérôme KERLOUEGAN : Doctorant, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

Minbing et minzhuang sous les Ming

La communication porte sur la milice sous les Ming. Le terme générique de minbing (« troupes civiles », par opposition

aux troupes professionnelles héréditaires du système des garnisons, le weisuo) englobe celui de minzhuang

(« milicien »), bien que les deux mots soient parfois employés indifféremment dans la littérature. Le besoin de lever des

milices s’est fait sentir dès le XVe siècle pour pallier les insuffisances qualitatives et quantitatives du weisuo (désertions

aux causes multiples, vieillissement des effectifs, rigidités du système, maillage géographique pas assez serré). Les

minzhuang sont institutionnalisés par la loi de 1494, qui fait du service dans la milice une corvée rattachée au système du

lijia (financement local par l’impôt). Ils obtiendront parfois de probants succès, notamment dans la lutte contre les

soulèvements de minorités dans le Sud ou contre les pirates japonais au milieu du XVIe siècle, même s’ils ne demeurent

jamais qu’une force d’appoint. Néanmoins, les incessantes tentatives pour redynamiser les minzhuang au XVIe siècle

confirme que le système a vite souffert des mêmes maux que le weisuo : laxisme dans la tenue des registres (tâche

déléguée aux commis et donc vaste système de corruption), relâchement de la discipline et de l’entraînement, désertions

(avec des causes similaires), dégradation de la qualité des miliciens (vauriens dangereux pour la sécurité). La

commutation de la corvée en un paiement monétaire n’a fait qu’accélérer le phénomène tout en introduisant

progressivement un troisième système, le mercenariat (mubing). Enfin, les minzhuang ont été détournés de leur mission

première : ils ont fini par devenir de simples commis de yamen qui ne remplissaient plus aucun rôle de défense. Ces

évolutions étaient prédictibles car les minzhuang ont été progressivement assimilés au système weisuo (même caractère

obligatoire et universel, même encadrement, même organisation). Le vieil idéal du « peuple en armes » est resté un vœu

pieux. Toutefois, il faut garder en mémoire le fait que les milices ont été utilisées jusqu’à la fin des Ming, en même temps

que les soldats du weisuo et les mercenaires : le schéma d’évolution chronologique weisuo-minbing-mubing est

simplificateur.

Luca GABBIANI : Doctorant, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

Mutations et permanences : réformes et gestion urbaine à Pékin à la fin de la dynastie des Qing

La période xinzheng (1901-1911) a été à juste titre considérée comme charnière dans l’histoire de la fin des Qing. Cette

communication l’illustre en s’appuyant sur le cas de la gestion locale de Pékin, capitale de l’empire chinois. Dans un

premier temps, nous nous intéresserons à la façon dont les réformes lancées au cours de ces années là ont transformé

le dispositif traditionnel de gestion locale sur le plan institutionnel d’abord, mais aussi du point de vue des sphères de

compétence des autorités et des outils de travail administratif. Ces divers aspects témoignent du caractère effectif des

réformes et documentent l’affirmation d’un pouvoir civil sur le plan local, mutation majeure en regard du dispositif

antérieur de prise en charge de la ville.

La deuxième partie est consacrée aux problèmes auxquels les nouvelles mesures ont été confrontées. Les sources

d’archives de l’époque permettent en effet de les étudier dans le détail. Nous verrons ainsi que les capacités financières

du gouvernement ont entravé le bon déroulement du processus de réforme. Nous aborderons aussi les difficultés posées

par le personnel administratif, largement composé d’individus qui avaient occupé des fonctions dans les organismes

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antérieurs. Sans remettre en cause les acquis des réformes, ces deux aspects permettent de rendre plus adéquatement

compte de leur mise en œuvre en illustrant les contraintes que leur a imposé l’héritage du passé.

Xiaohong XIAO-PLANES : Maître de conférences, Université de Nanterre (Univ. Paris X), Centre d’Etudes sur

la Chine moderne et contemporaine (CECMC), Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

Nouvelle mission de l'Etat : moderniser l'éducation dans la Chine de la première moitié du XXe siècle

La modernisation du secteur éducatif constitue un élément fondamental du processus de construction de l'État-nation. La

nouvelle mission attribuée à l'État consiste à vulgariser l'enseignement pour toute la population, à former des

enseignants, des pédagogues et des administrateurs spécialisés, et à adapter les programmes et cursus scolaires aux

besoins socio-économiques du pays. L'État des Qing jette les premières bases d'un système d'enseignement moderne

grâce au concours des élites nationalistes et progressistes. Ces dernières, rejointes par une génération de diplômés

rentrés d'Occident ou du Japon, s'efforcent de prendre le relais de l'État lorsque le pouvoir central se disloque à l'ère

républicaine. D'un côté, ces élites ont innové en matière de réforme de la langue et de ‘Nouvelle Culture’. De l'autre, elles

ont développé l'enseignement technique et professionnel. Portée par le souci de l'intérêt public, la collaboration de l'élite

réformatrice avec l'État s'inscrit dans la tradition politique chinoise. Mais le nouveau système d'enseignement a du mal à

retrouver son rôle d'intégrateur social et politique, en raison de la dichotomie entre ville et campagne, du pluralisme des

valeurs et des ressources culturelles, ou encore de l'archaïsme des relations entre l'État et la société.

Emilie TRAN : Doctorante, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS)

Les multiples facettes de l’Etat chinois à l’ère des réformes

Lorsque la Chine s’est engagée sur la voie des réformes et de l’ouverture, l’on prédisait la fin du communisme et partant

celle du Parti-Etat dans un scénario à la soviétique. Or, un quart de siècle plus tard, le constat est celui de la stabilité de

l’Etat central chinois. Après de multiples et profondes réformes qui ont donné naissance à une nouvelle société chinoise

— et aux problématiques inédites que ces mutations sous-tendent —, il s’avère non seulement que l’appareil du Parti-

Etat est toujours en place, mais aussi et surtout que le Parti communiste chinois (PCC) est plus vigoureux que jamais, à

en juger d’une part par sa capacité à renouveler ses élites dirigeantes, comme l’a montré la transition de la troisième à la

quatrième génération de dirigeants et d’autre part, par la croissance du nombre de ses adhérents qui s’élève aujourd’hui

à 63 millions de membres.

S’il est inamovible, le Parti-Etat chinois n’en est pas pour autant immuable.

En effet, dans les années 1980 et 1990, on lui a attribué divers rôles, le qualifiant tour à tour d’entrepreneur et

développementaliste, ou alors dans une vision plus négative, de clientéliste, prédateur, ou encore néo-autoritaire voire

néo-totalitaire. Cela étant, au regard de l’immensité du pays et donc de la diversité des contextes locaux, aggravée par

les priorités qu’a fixées la politique des réformes et d’ouverture, il n’y a pas un seul modèle d’Etat chinois mais bien la

coexistence de plusieurs modèles ou même de tous à la fois.

Plus récemment, puisque la politique de transition du plan vers le marché ne parvient pas — ou n’est pas encore

parvenue — à déstabiliser l’Etat chinois, certains chercheurs, ont mis en lumière une autre facette du Parti-Etat à l’ère

des réformes, celui de sa capacité étatique. Cette dernière notion englobe à la fois la légitimité, les aptitudes à la

négociation, à la réglementation et les ressources pour sa mise en application, ainsi que celles au contrôle et à

l’apprentissage. Car le ralliement des élites politiques et économiques ainsi que celui de la classe moyenne émergente et

même des paysans qui, dans leurs révoltes contre les gouvernements locaux, persistent à voir un Etat central vertueux,

ou encore la présence accrue de la Chine sur la scène internationale, sont autant de signes qui témoignent d’une

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capacité étatique renforcée en dépit ou grâce aux réformes. Se pose dès lors la question suivante : quelle (nouvelle)

méthode d’analyse peut-on adopter pour comprendre l’évolution du Parti-Etat qui gouverne la République populaire de

Chine depuis le plénum de décembre 1978 ?

C’est une question que l’on laisse ouverte au débat avec les participants de l’atelier. Et afin de préparer le terrain à la

réflexion, on se propose ici de retracer l’évolution de l’Etat chinois au cours des vingt-cinq dernières années par une mise

en perspective historiographique.

X- Transformations urbaines 40. LES GRANDS HOTELS ET LA VILLE EN ASIE ORIENTALE Coordinateurs :

- Valérie GELEZEAU, Maître de conférences, Université de Marne-la-Vallée

- Thierry SANJUAN, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I)

Intervenants : Nicolas FIEVE, Françoise GED, Sylvie GUICHARD-ANGUIS A travers des exemples chinois, coréens et japonais, cet atelier se propose de réfléchir sur la spécificité des liens entre le grand hôtel de luxe et la ville en Asie Orientale. Objets parfois standards à l’échelle internationale dans la mesure où ils répondent aux normes de confort de l’hôtellerie cinq étoiles, les grands hôtels des métropoles asiatiques apparaissent comme des marqueurs urbains particuliers, par leur architecture, leur taille et le luxe qu’ils affichent. Apparue dans la deuxième moitié du XIXe siècle, cette hôtellerie de luxe a d’ailleurs joué un rôle important dans la diffusion d’une modernité urbaine et architecturale, tout en participant de l’ouverture à l’Occident. Encore aujourd’hui, ces hôtels sont des lieux de contacts avec l’étranger et de transmission de la modernité. De plus, au-delà même de la fonction d’hébergement temporaire qui est la leur, ils apparaissent comme des espaces de sociabilité importants, notamment à destinations des bourgeoisies locales. Les participants de l’atelier se proposent de développer ces aspects selon trois axes problématiques : 1. émergence des grands hôtels et temporalités urbaines ; 2. fonctions du grand hôtel et inscription dans l’espace urbain ; 3. images et usages sociaux du grand hôtel.

Nicolas FIEVE : Chargé de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS)

Pouvoir politique, modernité architecturale et paysage urbain dans le Japon de l’ère Meiji : l’hôtel Impérial de Tôkyô

L'Hôtel Impérial de Tôkyô (1890) a été le lieu de sociabilités nouvelles dont avait besoin le Japon de l'ère Meiji (1868-

1912) et fut conçu comme un maillon nécessaire à la mise en place d’une infrastructure industrielle moderne. Son

fonction première était d'assurer un continuum de luxe et de modernité entre les capitales occidentales et la Japon. À

l’échelle de la ville, l'Hôtel se situait sur un nœud urbain entre les lieux du pouvoir et le réseau de communication

nationales et internationales. L’édifice reposait sur les modèles architecturaux du grand hôtel européen et son

architecture monumentale était celle des lieux du pouvoir de l'empereur Meiji.

Françoise GED : Observatoire de l’architecture de la Chine contemporaine

L’hôtel emblème de la modernité urbaine et sociale : une permanence shanghaïenne ?

Valérie GELEZEAU : Maître de conférences, Université de Marne-la-Vallée

Les cinq étoiles à Séoul : dynamiques urbaines et usages sociaux

A Séoul, les grands hôtels, véritables complexes urbains de commerces et de services de luxe, se situent au cœur des

dynamiques métropolitaines en participant activement à la fonction de transmission qui est l’apanage des grandes

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métropoles mondiales. Pour la bourgeoisie locale, ces hôtels constituent par ailleurs un des lieux privilégiés d'une

consommation de caractère ostentatoire liée à la nécessité d'affirmer son rang social. L'hôtel moderne et luxueux est

aussi le lieu où l'on va pour se donner l'impression de voyager et pour être en contact avec l'Occident. Lieu du contact

symbolique et réel avec l'Occident, le microcosme que constitue le grand hôtel fournit à la bourgeoisie locale un des

espaces privilégiés de la mise en scène de son rang social.

Sylvie GUICHARD-ANGUIS : Chargée de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS),

Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris IV), Laboratoire Espace et Culture

L’exception japonaise et la coexistence de deux modes d’hébergement de luxe : grands hôtels et « ryôkan »

Dans cette communication nous nous proposons de souligner le caractère exceptionnel d'une singularité japonaise, soit

la coexistence de deux modes d'hébergements. Le premier se situe dans le prolongement d'un type apparu dans

l'archipel et qui s'est modelé progressivement au cours des siècles pour devenir les «ryôkan» ou «Nihon no yado»

(auberges japonaises) de l'époque contemporaine. Le second apparu dans la seconde moitié du XIXe siècle est

directement associé à la modernité d'origine occidentale et donne naissance aux grands hôtels. Comment et à quels

besoins répondent ces deux catégories qui poursuivent leur propre évolution et s'influencent réciproquement, telles

seront les questions auxquelles nous tenterons de répondre.

Thierry SANJUAN : Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I)

Grands hôtels et sociétés urbaines en Asie Orientale

Productions occidentales de la première moitié du XIXe siècle, les grands hôtels jouent un rôle important dans la

modernisation urbaine des grandes villes de l’Asie orientale, dès l’époque Meiji au Japon, dans les villes chinoises

ouvertes aux étrangers à la fin de l’Empire puis lors de l’ouverture contemporaine, depuis notamment les années 1970 à

Séoul. Si les grands hôtels apparaissent comme un lieu de contact avec une modernité architecturale, technologique,

économique et culturelle importée, ils répondent surtout à des besoins nouveaux de sociabilité venant des populations

urbaines locales. En cela, ils s’inscrivent dans une temporalité de la ville asiatique, mais aussi dans ses aspirations à

produire localement des espaces internationaux signifiant des lieux de l’ailleurs culturel.

41. VILLES, MOBILITES ET NTIC, REGARDS CROISES EN INDE, CHINE ET AUSTRALIE Coordinatrice : Blandine RIPERT, ethno-géographe, Chargée de recherche, Centre d’Etudes de l’Inde et de l’Asie

du Sud (CEIAS), Equipe 'Circulation et Territoire', Centre national de la Recherche scientifique (CNRS)

Intervenants : Jean-François DOULET, Eric LECLERC, Patrick PONCET

Discutant: Frédéric LANDY

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.97

Les travaux présentés dans cet atelier s’inscrivent dans le cadre de deux groupes distinctes de recherche : l’un constitue une équipe du CEIAS, réfléchissant sur des questions de circulation et de territoire dans le monde indien contemporain, l’autre rassemble quatre chercheurs au sein d’une Action Concertée Incitative 'Ville et NTIC', réfléchissant à de nouvelles clés de lecture des stratégies spatiales proprement urbaines, enrichies de nouveaux facteurs explicatifs intégrants l’évolution des moyens techniques de communication. Cet atelier propose de réfléchir sur les questions de mobilités liées au développement des Nouvelles Technologies d’Information et de Communication (NTIC) dans les métropoles chinoises, indiennes et australiennes. L’Inde et la Chine, comparables pour leur taille et leur population dépassant le milliard d’hommes, n’en sont pas moins très différentes à divers points de vue. La Chine urbaine fait aujourd’hui l’expérience du changement social ; les mobilités, refreinées durant la période maoïste, émergent pour participer à la reconfiguration des pratiques sociales et spatiales. Dans ce contexte, les NTIC apparaissent comme des techniques dont la socialisation contribue à la formation de la ville dite 'post-maoïste'. En Inde, la libéralisation économique de 1990 a notamment permis une très forte expansion d’un secteur de pointe, celui de l’informatique et des NTIC, parallèlement à une métropolisation plus rapide de certaines de ses régions. L’Inde et l’Australie posent le problème en référence à une urbanité particulière, combinant des extrêmes, mais dans des contextes sociaux très différents. Une société de type occidental et techniquement développée, surtout en ce qui concerne les NTIC en Australie ; la société traditionnelle segmentée et hiérarchisée par le système des castes, et aux rapports complexes avec les valeurs occidentales (à l’époque coloniale et par la constitution actuelle d’une classe moyenne occidentalisée) en Inde. Ainsi, malgré des territoires nationaux comparables en taille pour l’Inde et l’Australie, les deux pays se situent chacun à une extrémité de l’échelle des populations, des densités (globales, rurales, et urbaines), mais aussi de l’urbanisation (80 % en Australie, 25 % en Inde), et dans une moindre mesure de la métropolisation, ou encore de l’équipement technologique et des télécommunications. Les exposés de cet atelier analyseront les transformations observées dans les mobilités urbaines au sein de quelques aires métropolitaines, en prenant en compte le rôle joué par le développement des NTIC, qu’il s’agisse de leur usage par les particuliers, du rôle qu’elles peuvent avoir dans les nouveaux projets d’aménagement ou comme source d’une mobilité des professionnels des nouvelles technologies intra et inter urbaine, voir même internationale. Les comparaisons menées entre Mumbay et Sydney dans les deux derniers exposés, résultats d’une recherche collective, devraient permettre de réexaminer la portée et les limites des grands découpages du Monde en 'aires culturelles'.

Jean-François DOULET : géographe-aménagement ; Maître de conférences, Sciences-Po

Villes, mobilités et NTIC en Chine, Eléments de problématique

L’approche proposée pour cette intervention sera générale ; elle aura pour objectif de mettre en perspective l’usage des

NTIC dans les métropoles chinoises dans un contexte du changement social en Chine depuis les réformes de la fin des

années 1970. Cette notion de 'changement social' est particulièrement développée par la recherche anglo-saxonne et

trouve un écho dans les méthodes d’analyse des instituts d’études marketing qui tentent d’appréhender les valeurs et les

pratiques des consommateurs chinois.

Ainsi, l’intervention sera articulée autour de plusieurs points :

1. Le contexte socioéconomique : la reprise des mobilités en Chine et le rôle des NTIC dans le projet de ville moderne

(dans cette partie seront analysées les principales caractéristiques de la ville 'post maoïste' en gestation et la façon dont

les NTIC prennent sens) ;

2. La production du savoir sur les mobilités : le 'changement social' en Chine est essentiellement lié à l’idée d’un

'nouveau contrat social' fondé sur l’épanouissement de la société de consommation (dans cette partie, on verra les

approches et les points de vue défendus à la fois par des études académiques et des études marketing qui participent à

associer les NTIC aux nouvelles pratiques de consommation et aux nouvelles valeurs) ;

3. Les principaux apports des approches développées : les NTIC révèlent en Chine un nouveau rapport à la ville, à la

société et au monde. Des questions de types prospectifs peuvent être posées (dans cette partie, on s’interrogera sur la

capacité des villes chinoises à intégrer les NTIC et à les employer pour produire des configurations sociales et spatiales

inédites).

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.98

Finalement, cette intervention se propose d’utiliser les réflexions sur l’usage des NTIC pour porter un regard nouveau sur

les enjeux du développement urbain en Chine.

Eric LECLERC : Géographe ; Maître de conférences, Université de Rouen

Mobilité induite par les hautes technologies : le cas des professionnels des technologies de l’information à Hyderabad

(A.P. Inde)

Contrairement aux prédictions de Marshall Mac Luhan ou Alvin Toffler, l’évolution des technologies de l’information et de

la communication n’a pas aboli les distances, ni dissout les villes. Les métriques réticulaires se sont renforcées dans tous

les systèmes de production, a fortiori dans les activités liées directement à la nouvelle économie, fabrication d’ordinateurs

ou production de logiciels. Une nouvelle géographie des technologies de l’information se met en place sous nos yeux,

avec la dissémination à l’échelle mondiale des entreprises du secteur, autorisée par des flux de produits toujours plus

nombreux et plus rapides. L’Inde est devenu un acteur majeur dans la production de logiciels en recevant une part

toujours grandissante des délocalisations en provenance des pays innovateurs.

A travers l’exemple précis des entreprises de production de logiciels et de services informatiques installées dans la ville

d’Hyderabad (Andhra Pradesh – Inde), nous analyserons un aspect des rapports entre NTIC et mobilités urbaines : la

mobilité professionnelle des acteurs de cette nouvelle économie. Nous aborderons dans notre intervention les mobilités

induites directement par la mise en place de ce système productif à deux échelles et suivant deux orientations

complémentaires :

La mobilité pour l’emploi : Les conditions de la mobilité sont abordées en étudiant l’impact de l’implantation des

entreprises de production de logiciels sur les migrations à destination d’une métropole indienne en cours d’émergence à

l’échelle mondiale, Hyderabad. L’étude de ces flux migratoires à l’échelle nationale débouche sur l’identification de

nouveaux comportements migratoires.

La mobilité dans l’emploi : Le dispositif technologique de ces mobilités est ensuite observé dans les déplacements de

longue distance au sein de l’entreprise. L’échelle est ici mondiale puisqu’il s’agit d’entreprises exportatrices de logiciels.

La comparaison de ces déplacements professionnels avec les mouvements de retour de certains informaticiens indiens

dans leur pays montre la complexité des systèmes de mobilité au sein de ces entreprises.

Les différents angles de vues proposés sur les mobilités professionnelles des producteurs de NTIC mettent en évidence

les modalités d’intégration d’Hyderabad au réseau urbain mondial.

Patrick PONCET : Géographe, Monde-Itinéraires-Territoires (MIT), Université Denis Diderot (Univ. Paris VII)

Blandine RIPERT : Ethno-géographe ; Chargée de recherche, Centre d’Etudes de l’Inde et de l’Asie du Sud

(CEIAS), Centre national de la Recherche scientifique (CNRS)

Mumbai et Sydney, villes d’Asie ? Les “aires culturelles”, de la nomenclature au concept

S’appuyant à la fois sur une approche géographique, partiellement théorique, et sur des enquêtes de terrain menées en

Australie pendant l’été 2002 par Patrick Poncet, comparées en particulier à celles menées à Mumbai dans l’hiver 2003

par Blandine Ripert, cette double intervention se propose de montrer comment les changements en cours dans la

mobilité et la télécommunication incitent à réexaminer les stratégies spatiales dans la ville et les processus

d’urbanisation, mais permet également de réfléchir à la portée et aux limites des grands découpages du Monde.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.99

L’agglomération de Mumbai compte presque autant d’urbains que l’Australie, et quatre fois plus d’habitants que

l’agglomération de Sydney, tout en étant deux fois moins étendue. Avant même de recourir à des différenciations d’ordre

culturel, ces simples chiffres (qui seront complétés par d’autres analyses) incitent donc à penser que la ville n’y est pas la

même dans les deux cas. Cependant, c’est aussi là une approche de l’urbanité qui insiste sur la coprésence, à laquelle la

mobilité et la télécommunication seraient subordonnées. Or, à une époque où l’évolution des sociétés conduit à la prise

d’importance de ces deux types de relation, multipliant les échelles de vie, il est légitime de s’interroger sur ce que leur

meilleure prise en compte change dans notre manière d’appréhender l’urbanité, et par conséquent la culture, en

particulier celle qui structurerait une 'civilisation urbaine'.

À l’échelle du fuseau australo-asiatique, deux phénomènes, en interaction l’un avec l’autre, contribuent à lier l’Australie à

l’Asie : les migrations d’établissement durable ou d’études et le tourisme. Dans le contexte d’un pays occidental

d’immigration et de tourisme, ces mobilités individuelles s’ajoutent aux liens économiques et culturels déjà serrés que

l’Australie a tissés avec ses voisins asiatiques. Elles sont en outre productrices de lieux urbains, mais sur un modèle

plutôt moins diversifié (outre la décoration) que ne le sont les formes urbaines des différentes aires culturelles à l’échelle

du Monde. La mobilité accrue des hommes rime-t-elle donc avec la mobilité des villes, leur évolution vers un modèle

unique ?

Ainsi, à l’échelle des villes, la mobilité est un indicateur à prendre en compte pour compléter une approche

morphologique dont la tendance 'naturelle' est au différentialisme. Alors, outre le contexte culturel, il faut se demander si

la métropolisation et le rang mondial de villes comme Mumbai et Sydney correspondent à une convergence de leurs

modèles urbains. Réciproquement, se pose ainsi plus profondément la question de la relation entre culture locale et ville

mondiale.

Enfin, si la télécommunication est une composante ancienne de l’urbanité, la prise en compte de ses mutations récentes

(complexification par diversification et amélioration) renforce l’intérêt des interrogations portant sur les mobilités aux deux

échelles évoquées. Autrement dit, il s’agit de poser sous un angle géographique la question des relations entre technique

et culture dans le contexte urbain. En d’autres termes, il faut dégager les convergences et les divergences médiologiques

que génère l’articulation entre urbanité, mobilité, et télécommunication.

Ainsi, l’Asie, qui a d’abord été pensée depuis l’Europe à la fois comme un 'ailleurs' et comme un 'au-delà', une sorte de

périphérie largement autonome, profitable mais difficilement contrôlable, verrait probablement sa définition enrichie si on

la considérait dans une perspective plus équilibrée, moins unilatérale et homogène. La Géographie, tout en intégrant la

dimension culturelle des sociétés, y compris dans sa diversité, lui offre alors des outils et des concepts pour penser

l’articulation aujourd’hui fluide et réticulaire de ses centres et de ses périphéries.

Frédéric LANDY, Maître de conférences, Université de Nanterre (Univ. Paris X), Département de géographie

Résumé de la discussion

Les NTIC peuvent être considérées de deux façons, soit comme des facteurs, soit comme des vecteurs de

mobilité. Dans le premier cas, il s’agit d’une approche en termes de production technologique : il ne faut pas alors être

surpris de la relative banalité des résultats quant à la géographie de cette activité. Dans le second cas, il s’agit d’analyser

les déplacements de l’information, et par là même l’impact de ces technologies sur les mobilités des hommes : celles-ci

apparaissent alors tout à la fois freinées et accélérées par les NTIC. Encore faut-il ensuite distinguer les différentes

formes de mobilité : se découvrent alors des clivages socio-économiques entre les groupes d’utilisateurs (et de non-

utilisateurs). Au total, une partie des communications de cet atelier prend le parti de renverser la perspective habituelle

de la théorie des « villes mondiales », et d’insister sur l’ancrage local de ces métropoles.

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.100

42. LA REFONDATION MEGAPOLITAINE AUX DEUX BOUTS DE L'ASIE Coordinateur : Philippe HAERINGER, Directeur de recherche, Institut de Recherche pour le Développement (IRD),

Professeur associé, Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Intervenants : CHI Faï Lam, Marie-Hélène ORSAY, NGUYEN Duc Nhuan, Laurence NGUYEN, Gholam Reza

SHOKRANI, Tazagol CHEMAGHA On s'était habitué à considérer que l'utopie urbaine n'avait plus prise, au mieux, que sur des fragments de ville. Depuis que la ‘mégapolisation’ s'était emparée du monde entier, même la planification au jour le jour de la ‘fabrique’ urbaine paraissait être vouée à un épuisant rattrapage. Or voici que, dans la récente inflexion du siècle, quelques-unes des métropoles les plus considérables semblent avoir abordé de nouveaux rivages, où les inversions refondatrices les plus folles paraissent à nouveau jouables. Ces perspectives sont-elles illusoires ? Sinon, quelles perversions cachent-elles ? Quels dangers ? Quels bonheurs ? ... Telle est l'amorce d'un ouvrage récemment publié par le Centre de prospective et de veille scientifique du Ministère de l'Equipement, en collaboration avec l'Institut de recherche pour le développement (IRD) : La refondation mégapolitaine, une nouvelle phase de l'histoire urbaine ? (Ph. Haeringer, dir.), tome 1 : l'Eurasie post-communiste, tome 2 à paraître : L'Orient méditerranéen et persique. Le présent atelier n'aura pas l'ambition de refaire tout ce parcours, mais de souligner les liens qui unissent, contre toute attente, les bouleversements urbains que connaissent l'Asie orientale et l'Asie occidentale. Aux emblématiques chantiers de la Chine, consécutifs à la confirmation de son ouverture économique dans les années 90, répondent les mutations moins connues, moins radicales, mais tout aussi significatives, enregistrées dans le même temps par les deux plus grandes villes d'Iran. Le cas vietnamien, avec son concept de ‘tournant urbain’, confirmera par de nombreux paramètres le processus chinois, tout en s'en démarquant par d'autres. On complétera cet atelier par l'évocation d'un cas de figure propre à l'Asie centrale ex-soviétique où, par la volonté d'un ‘bashi’ autoproclamé, une capitale se voit imposer les signes d'une refondation de pantomime. Les études présentées ici*, issues de programmes différents, ne montreront peut-être pas d'emblée tous les parallélismes qu'une analyse comparative aurait pu révéler. Elles mettront davantage en valeur l'extraordinaire diversité des contextes : comme toujours, les pulsions mondiales se déclinent sur chaque terrain d'une façon singulière. On en apprendra néanmoins assez pour se convaincre de l'ampleur partagée, sur le continent asiatique, du renouvellement urbain engagé dans les dernières années du siècle échu. (*) Le présent recueil n'est pas, à ce jour, complet ni définitif.

Philippe HAERINGER : Directeur de recherche, Institut de Recherche pour le Développement (IRD) ;

Professeur associé, Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Une nouvelle phase de l'histoire urbaine ?

La simultanéité, dans des contextes nationaux extrêmement différents, d'un phénomène d'inversion brutale des modèles

urbains, semble devoir être reliée au séisme issu de la ‘chute du Mur’. La fin de la bipolarisation idéologique a renversé

des politiques urbaines traditionnellement fondées sur des conceptions étatiques, non seulement dans les pays de

l'ancien bloc communiste, mais aussi dans les pays du glacis méridional de ce bloc. Comme après une trop longue

attente, la libéralisation du foncier et de l'immobilier s'est exprimée par une formidable flambée qui, malgré d'inévitables

crises (bulles), semble devoir marquer dans la durée la destinée des villes. Les liens évidents avec les enjeux

économiques de la ‘mondialisation’ exacerbent ce scénario dans les métropoles majeures, accentuant la polarisation

mégapolitaine. Mais la reproduction mimétique gagne de nombreuses villes plus modestes.

Chi Faï LAM : Architecte, Agence Orsay-Lam, Paris

Marie-Hélène ORSAY : Architecte et Urbaniste, Office des HLM du Mans et Agence Orsay-Lam, Paris

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.101

Le pari risqué des villes chinoises

A partir de quelques exemples concrets pris dans diverses villes de la Chine du Sud, on illustrera la tension existant entre

les effets de vitrine et la satisfaction des besoins quotidiens. La dureté des conditions faites aux habitants ‘bousculés’ par

des recompositions urbaines drastiques ne semble pourtant pas altérer leur adhésion au pari moderniste. Cependant, à

force de ‘regarder devant’, peuples et gouvernants paraissent ne pas mesurer ce qu'ils laissent derrière eux. Nul ne sait

ce que peut leur réserver, pour l'avenir, la perte d'un lien social traditionnellement fondé sur la proximité, et que la

nouvelle échelle des villes a rompu.

NGUYEN Duc Nhuan : Chargé de recherche, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS),

Laboratoire Sociétés en développement, Université Denis Diderot (Univ. Paris VII)

Laurence NGUYEN : Laboratoire Théories des mutations urbaines, Institut français d'urbanisme (IFU),

Université Paris-Vincennes (Univ. Paris VIII)

Le Vietnam et le tournant urbain

Le dôi moi dô thi, ou renouveau urbain du Vietnam, est un phénomène majeur. Depuis 1989, il porte les grandes

transformations du pays. En dix ans, la population des cinq grandes villes du pays a doublé, alors qu'elle avait diminué

précédemment. Cet urban turn n'est pas seulement quantitatif. Il est marqué par une dé-monopolisation du pouvoir

étatique, par une intervention de plus en plus active des habitants et de nombreux acteurs internationaux dans les

affaires du pays. La cosmopolitisation de la société vietnamienne lui permet de s'ouvrir aux grands sujets mondiaux (dans

les domaines des droits de l'homme, de l'environnement, etc) et d'alimenter un vrai débat public. Mais cette intégration

mondiale par la métropolisation dépasse les limites de la grande ville. Elle s'étend au monde paysan qui, par ses

centaines de ‘villages de métiers’ et ses bourgs-marchés, alimente un va-et-vient incessant au profit partagé de la grande

ville et d'une campagne virtuellement urbanisée.

Gholam Reza SHOKRANI : Maître de conférences, Université Azadi (Téhéran) ; Doctorant, Université de

Nanterre (Univ. Paris X)

Les dimensions culturelles de la refondation urbaine en Iran

Le tournant thermidorien de la révolution iranienne, après la mort de Khomeiny et la fin de la guerre avec l'Irak, a permis

au nouveau maire de Téhéran de faire commerce de permis de construire en hauteur. Cela a eu deux conséquences : 1.

la croissance exponentielle des ressources de la ville a financé son redéploiement dans des directions inédites, qui ont

remis en cause les gradients sociaux ; 2. l'abandon du modèle de la maison familiale (jusque-là partagé par toutes les

couches sociales) au profit de l'appartement d'immeuble a profondément changé les données de la vie citadine,

notamment pour les femmes des nouvelles classes moyennes. Des observations similaires peuvent être faites dans la

deuxième ville du pays, Machad (proche de la frontière afghane), où l'économie de pélerinage tient le premier rôle.

Tazagol CHEMAGHA : Politologue ; Doctorante, Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Un simulacre de refondation urbaine à Achkhabad ou Ubu-roi au Turkménistan

Symbolisant jusqu'à l'outrance la figure de l'aparatchik soviétique mué, à l'occasion de l'indépendance, en potentat

nationaliste et mégalomane, le ‘turkmènbashi’* Saparmourad Nyasov, président de la république turkmène, a entrepris de

refonder sa capitale. Sur le flan le plus noble de la ville, il a fait table rase des quartiers existants au profit des nouveaux

emblèmes du pouvoir et du culte du chef. Dans une mise en scène géante, le thème de l'eau, par exemple, si fort en

pays désertique, est décliné en une myriade de fontaines et de jeux d'eau, voire de ‘tours d'eau’. Dans la ville réelle,

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.102

cependant, l'eau manque comme beaucoup d'autres choses, comme le gaz en dépit d'une importante production

nationale. La démonstration urbaine ne fait que relayer un comportement qui s'exprime sur tous les plans, y compris sur

un calendrier recomposé à la gloire de la famille Nyasov.

(*) ou ‘leader’ des Turkmènes.

43. DYNAMIQUES FONCIERES ET MUTATIONS URBAINES EN ASIE Coordinatrice : Natacha AVELINE, chercheur, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS), Institut

d'Asie Orientale (IAO)

Intervenants : Marie-Hélène FABRE, Valérie GELEZEAU, Adeline CARRIER, Xavier GUILLOT L’exceptionnelle croissance économique en Asie au cours des deux dernières décennies a opéré de profondes mutations spatiales dans les grandes métropoles. Des cycles de grande envergure affectant les marchés fonciers ont induit des dysfonctionnements dans l’allocation des sols et pénalisé l’accès au logement pour les catégories les plus défavorisées. Les pays en transition du socialisme vers l’économie de marché n’ont pas été épargnés par ces mécanismes de cycle, comme l’atteste la spectaculaire « bulle » immobilière de Shanghai. Nous nous proposons, dans le cadre de cet atelier, d’étudier les déterminants des mutations urbaines dans différentes villes d’Asie, en mettant l’accent sur la mobilisation de la ressource en sol, les politiques foncières et les modes opératoires des acteurs de l’immobilier. Marie-Hélène FABRE : Doctorante, Ecole nationale des ponts et chaussées, Laboratoire Théorie des mutations urbaines (UMR CNRS - ex FRE 2408) Les mutations urbaines au cours des deux dernières décennies dans la région de Séoul La région métropolitaine de Séoul a connu, ces deux dernières décennies, de profondes mutations urbaines amorcées dès le début des années 1960 avec la politique volontariste de développement économique de la Corée du Sud. Ces transformations, lisibles aussi bien dans les secteurs du foncier et de l'immobilier qu'à travers les outils et modes même de fabrication de la ville, étaient arrivées à une sorte de maturité à l'aube des années 1990. Après les grands travaux de rénovation et d'extension de Séoul et de ses environs (avec la création de villes nouvelles, notamment) menés dans une logique de tabula rasa, suivirent des projets d'ordre plus symbolique, visant à reconstruire une identité par le biais, entre autres, d'action sur le patrimoine architectural et urbain. Cependant, la crise asiatique qui toucha la Corée du Sud en 1997 a conduit à des réformes économiques aux effets certains sur l'aménagement urbain, par l'ouverture des marchés fonciers et immobiliers aux investisseurs étrangers, d'une part et, d'autre part, par la réorientation du pays vers les industries de technologie avancée. En outre, le temps de la réflexion (et de la mondialisation) s'imposant, la notion de développement durable prise dans autant de sens possibles s'infiltre dans la pensée urbanistique et politique. On assiste ainsi aujourd'hui à une recomposition du territoire au gré de projets de villes nouvelles ou de pôles urbains technologiques, aux impératifs économiques comme environnementaux, menés par des collectivités fortes de leur autonomie acquise il y a moins de dix ans. Qu'en est-il de cette deuxième génération de villes nouvelles émergeant tandis que les premières ne sont pas encore affranchies ? Comment les initiatives locales tissent-elles le réseau urbain à venir d'une région métropolitaine comptant déjà près de la moitié de la population coréenne ? Celle-ci est-elle en train de réaliser un rêve ouvertement affiché : devenir à elle seule le hub de l'Asie de l'Est, avec pour principales composantes l'aéroport international Inch'òn, la technopole Songdo Inpia associée au nouveau port d'Inch'òn et la ville-centre Séoul, reliée à Pusan (port international, situé au sud de la péninsule) en deux heures grâce à une ligne TGV bientôt achevée ? C'est ce que nous tenterons d'éclaircir à travers notre exposé, composé d'une analyse globale appuyée par des cas concrets.

Valérie GELEZEAU : Maître de conférences, Université de Marne-la-Vallée

Grands ensembles d’appartements et processus de maîtrise foncière à Séoul : Les ap’at’ŭ tanji : une spécificité

foncière séoulienne ?

A Séoul, la part des grands ensembles d’appartements (ap’at’ŭ tanji) dans le parc de logements est passé de 4% à

environ 50% des unités entre 1970 et 2000, signalant de profondes mutations urbaines et paysagères. Dans un contexte

de vive pression foncière, le développement de ces grands ensembles a été porté par l’orientation résolue de la politique

du logement vers le logement de masse. Cette communication se propose d’analyser certains des outils les plus

importants de la mise en œuvre de cette politique à Séoul, en lien avec l’action des acteurs principaux de la production

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.103

du logement. L’analyse sera centrée sur les modes de mobilisation des ressources foncières (processus de

remembrement, de rénovation urbaine et de reconstruction des tanji vétustes) fournissant un cadre aux acteurs de la

production du logement. A terme, l’article souligne les deux éléments qui ont caractérisé la question foncière à Séoul

entre 1970 et 2000 : 1. le problème du manque de temps (plus que du manque d’espace) pour aménager et 2. le

problème de la propriété foncière dans les quartiers de squatters urbains.

Natacha AVELINE : chercheur, Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS), Institut d'Asie Orientale

(IAO)

Cycle foncier et aménagement à Tôkyô

Au cours des deux dernières décennies, Tôkyô a connu des fluctuations spectaculaires sur les marchés fonciers. Une

première période, de 1985 à 1990, a été caractérisée par une envolée des prix des terrains, dans un contexte de rareté

de l’offre de grandes parcelles nécessaires à la construction d’immeubles de bureaux aux normes internationales.

L’obstacle du mortellement parcellaire et de l’enchevêtrement des droits de propriété a pu néanmoins être levé au prix de

longues négociations dans des périmètres de remembrement. Il en a résulté une surproduction immobilière, et, par suite,

le déclenchement d’une phase descendante du cycle foncier. L’érosion des valeurs foncières, qui se poursuit aujourd’hui,

s’accompagne d’une surabondance de grandes parcelles à Tôkyô, phénomène totalement impensable deux décennies

auparavant. La problématique des politiques foncières s’est donc inversée : il ne s’agit plus, désormais, de lutter contre la

spéculation mais d’enrayer la baisse des prix fonciers. Dans ce nouveau contexte, totalement inédit, les nouvelles

opérations d’aménagement urbain diffèrent considérablement de celles de la période précédente, tant en terme de

localisation que de programme. Nous examinerons donc les effets des différentes phases du cycle foncier sur les

recompositions spatiales à Tôkyô

Adeline CARRIER : Doctorante, Laboratoire Théorie et mutation urbaine, Institut français d’Urbanisme (IFU)

Les ‘marqueurs de propriété’ et leurs interactions dans la relation espace urbain/habitat à Phnom Penh

L’évolution même de la fonction du logement au sein d’un contexte de reconstruction urbaine illustre à bien des égards

les transformations des comportements résidentiels.

Du refuge provisoire à l’acquisition définitive, l’habitat constitue un témoin clé rappelant les phases successives

d’accession au sol (occupation de principe sous le régime socialiste puis privatisation du parc foncier et ouverture au

marché spéculatif).

La notion de propriété privée se trouve alors en porte-à-faux entre une autorisation de principe héritée du socialisme et

légitimant l’occupation spontanée et la réglementation foncière récemment véhiculée. Ce paradoxe lisible fait apparaître

des espaces de non-droit qui mettent en exergue la difficulté de cerner les limites espace privé/espace public. Cette

confrontation entre les usages de l’espace et la ‘norme urbaine’ est d’autant plus visible qu’elle rend compte de divers

modes ‘d’accès à la ville’

Afin de saisir cette ambiguïté de sens, l’approche des interstices (ces lieux de litiges ou la distinction entre privé et public

est incertaine) me paraît rendre compte de ces contradictions paysagères. A ce titre, les clôtures et autres délimitations

spatiales témoignent, à l’image des écriteaux scellés sur les portes phtĕah mi∋n m∋-cah (la maison a un propriétaire), de

la nécessité d’affirmer la possession.

Xavier GUILLOT : Laboratoire Théorie des mutations urbaines, Institut français d’urbanisme (IFU), Université

Paris-Vincennes (Univ. Paris VIII)

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.104

L’étude des dynamiques foncières et des mutations urbaines en Asie sera abordée au travers de l’évolution des

politiques du logement à Singapour

Depuis la création de la cité-Etat en 1960, le logement public a constitué la principale offre de logement en accession à la

propriété pour la population singapourienne. Simultanément, la production de logement a été un levier essentiel du

développement économique du pays.

Or, depuis les années 1990, on assiste à une nouvelle orientation de cette politique avec la montée en puissance de

nouveaux acteurs et de nouveaux modèles, comme en atteste le « boom » dans la construction des condominiums

financés par la promotion privée. En dépit de l’essor du secteur privé de l’immobilier, Singapour n’en demeure pas moins

« fidèle » à ses principes fondateurs en matière de plannification urbaine, notamment caractérisés par un « hyper

contrôle » de son foncier et une gestion méticuleuse de son stock de logement

Comment Singapour a t-elle « géré » cette mutation, quels en sont les principaux acteurs institutionnels et privés ; quels

ont été les mécanismes réglementaires mis en place et ses conséquences sur l’aménagement du territoire, telles sont

les questions principales que j’envisage de développer dans ma communication.

44. L’ARCHITECTURE DE LA VILLE EN ASIE Coordinateurs :

- Philippe BONNIN, Anthropologue, Directeur de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS),

Architecture-Urbanisme-Sociétés (UMR AUS)

- Nathalie LANCRET, Architecte, Chargée de recherche, CNRS, Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et le Monde

austronésien (LASEMA, UPR 297-CNRS)

Intervenants : Emmanuel CERISE, Sophie CLEMENT, Hélène NJOTO-FEILLARD, Christian PEDELAHORE DE

LODDIS, Thomas BEAUFILS ‘L'architecture de la ville en Asie’ regroupe des chercheurs et des doctorants de différentes disciplines intéressés aux questions architecturales et urbaines. Les périodes de transition politique et économique (ouverture et internationalisation des économies) que traversent plusieurs pays d’Asie du Nord-Est et du Sud-Est, continentale et insulaire, ne sont pas sans provoquer des bouleversements rapides et profonds des structures architecturales et urbaines existantes. L’accélération des taux d’urbanisation, l’ampleur et la rapidité de la croissance urbaine, les changements d’échelle et de nature des projets architecturaux amènent à renouveler les interrogations et à croiser les points de vue. Dans cette perspective, les villes asiatiques en tant qu’objet de recherche se chargent de significations particulières en raison : - de la présence persistante de formes architecturales et urbaines anciennes et de modes d’organisation de l’espace traditionnels ; - de la montée en puissance du développement urbain et de l’introduction de modèles exogènes dans la conception et la mise en œuvre de nouveaux projets urbains, mais également dans les pratiques habitantes, les ‘ manières de faire’ des usagers de la ville. Notre intérêt porte sur la formation et les transformations des villes, considérées sous un angle historique et dynamique. Il nous conduit à la lecture et à l’analyse des phénomènes contemporains et à leur mise en perspective pour tenter d’appréhender leur genèse et les formes du changement, dans la confrontation de modèles fondateurs établis sur la longue durée et d’expressions architecturales et urbaines importées, copiés et/ou appropriées. Nos interrogations portent principalement sur les villes de taille moyenne où une grande variété de situations urbaines concrètes peuvent être observées in situ.

Philippe BONNIN : Architecte ; Anthropologue ; Directeur de recherche, Centre national de la Recherche

scientifique (CNRS), Architecture-Urbanisme-Sociétés (UMR AUS)

Esthétique ordinaire de la ville japonaise

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.105

Ce que révèle l’observation de la mégapole tôkyôïte actuelle, des grandes villes mais aussi des villages, répond-il le

moins du monde de l’axiologie classique de l’esthétique nippone ? A vaste échelle au moins, il semble y avoir disjonction

entre les principes esthétiques traditionnels et la production actuelle de la ville. L’observation de la dégradation du

paysage urbain d’une ville comme Kyôto tend à accréditer l’idée de l’abolition du système de l’esthétique traditionnel, de

son ignorance, voire de sa transformation (l’expression d’autres valeurs, telles que la modernité, la fascination pro-

occidentale, le profit économique, l’inaliénable liberté du propriétaire).

Il faut toutefois prendre garde ici aux échelles d’observation : ces faits sont les plus massifs et les plus patents dans

certains lieux urbains, mais ils ne doivent pas masquer les pratiques quotidiennes (ou festives) plus modestes : la

floraison des devants de maisons, l’arrosage de la chaussée, les décorations festives d’un côté, tout autant que les

aspects négatifs tels que les débordements, les manifestations d’indifférence au voisinage qui eussent été impensables

avant Meiji. C’est cet ordinaire de l’esthétique urbaine que l’on interrogera.

Thomas BEAUFILS : Maître de conférences, Département d'études néerlandaises, Université Marc Bloch

(Strasbourg)

L’architecture néerlandaise à Batavia de 1910 à 1940 : Etat des lieux

Jakarta a mauvaise presse et l'opinion générale prétend qu'il n'existe plus de patrimoine architectural de valeur dans la

ville. A première vue en effet, aucun bâtiment ne frappe véritablement l’œil. Et pourtant, la cité est un extraordinaire

musée en plein air. Ce gigantesque livre ouvert raconte l’histoire de l’architecture néerlandaise et son adaptation au

climat des Indes depuis le XVIIe siècle. Des architectes néerlandais renommés ont visité, puis se sont installés à Java.

Berlage y a fait un voyage en 1923, Dudok en 1927. Tous deux ont influencé plusieurs générations de bâtisseurs aux

Indes. Ce ne furent pas les seuls. Aujourd’hui, il y a urgence, car nombre de ces édifices se dégradent ou sont menacés

de disparition. Cette communication sera l’occasion de présenter, à travers des photos anciennes et récentes, plusieurs

de ces trésors oubliés et de raconter les voyages de ces architectes. Une préférence sera donnée à l’architecture de

Batavia des années 1920 à 1940, où l’on retrouve un goût prononcé pour les volumes emboîtés, les beffrois, et les

surfaces rectilignes, égayées parfois par des lignes galbées. Ce travail fera également allusion à Rem Koolhaas, qui a

séjourné dans sa jeunesse en Indonésie de 1952 à 1956, et à Jaya Ibrahim, un architecte indonésien, également

contemporain.

Emmanuel CERISE : Architecte ; doctorant, Université Paris-Vincennes (Univ. Paris VIII), Institut parisien de

recherche : architecture, urbanistique, société (IPRAUS, UMR 7543-CNRS)

Transformation du tissu urbain à Hanoi : la rue De La Thanh

L’évolution urbaine de Hanoi, capitale du Vietnam, connaît une accélération depuis la politique de renouveau

économique (Doi Moi) en 1986, et surtout suite à la levée de l’embargo économique en 1994. Les mutations urbaines

ainsi engendrées voient le jour dans le contexte d’un développement urbain marqué par la confrontation, sur le terrain,

des pratiques habitantes spontanées et d’une planification étatique. Si les deux systèmes semblent s’ignorer, suivant

chacun leur propre circuit, certaines situations obligent à la rencontre ou au détournement, notamment dans les projets

de restructuration viaire.

L’ancienne route-digue De La Thanh est actuellement l’objet d’un grand chantier du ministère de la Construction

vietnamien : élargissement, percée, remembrement parcellaire... Cette voie planifiée est, dans le même temps, le théâtre

d’une urbanisation spontanée de la ville : processus de densification vertical et horizontal, découpages territoriaux,

recomposition du bâti existant, introduction de nouveaux modèles, alignement de boutiques sur la rue, organisation

pragmatique du quartier...

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.106

Au travers de l’analyse des transformations de la rue De La Thanh, nous tenterons de comprendre comment les modes

de production de la ville de Hanoi jouent de ce double système de production des formes architecturales et urbaines.

Sophie CLEMENT : Architecte-ethnologue ; Ingénieur de recherche, Ecole des Hautes Etudes en Sciences

Sociales (EHESS), Groupe de géographie sociale et d’études urbaines

Naissance et formation de deux capitales, Phnom Penh et Vientiane, de la fin du XIXe siècle jusqu’aux années 1930

Les Français, en arrivant au Cambodge et au Laos au début de la période coloniale, eurent à créer des villes pour

asseoir leur autorité. Quelle a été leur perception des sites qu'ils ont décidé d'ériger en capitale de ces états ? L'un

abritait une bourgade, l'autre les ruines d'une ancienne capitale dévastée et inhabitée depuis plusieurs décennies. Pour

fonder ces capitales, ils ont dû adapter leurs modèles de ville occidentale à des contextes très différents. En s'implantant

dans ces villes indigènes, ils ont réorganisé l'espace en tenant compte des repères existants. Les conceptions de

l'espace khmer ou lao se sont fondues dans l'organisation d'une ville répondant à d'autres critères. Faisant preuve de

pragmatisme, les autorités coloniales ont dû trouver des réponses à des difficultés de tous ordres, en particulier

techniques. Ils ont dû adapter les principes urbanistiques de la métropole à la réalité du terrain, notamment dans le tracé

des rues.

Hélène NJOTO-FEILLARD : Historienne de l’Art ; Doctorante, Université Panthéon-Sorbonne (Univ. Paris I)

Notes sur l’identité des modèles architecturaux du Taman sari de Yogyakarta (1758-1765)

Le jardin palatin de la ville de Yogyakarta, le Taman Sari ou “jardin odorant” (1758) demeure jusqu’au XIXe s. le jardin

javanais le plus considérable, en Indonésie. Distribués sur douze hectares, les cinquante neuf constructions ainsi que les

nombreux bassins parcourus par des passages subaquatiques et alimentés par un ingénieux réseau hydraulique firent

grande impression sur ses visiteurs européens dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et la première moitié du XIXe

siècle. Le parc, dans un état de délabrement, fait l’objet d’un chantier de restauration suite à son classement parmi les

cent sites les plus menacés du Fonds du Patrimoine Mondial. L’identification architecturale et stylistique des pavillons du

Taman Sari demeure néanmoins incomplète et son étude n’est toujours pas envisagée. Nous voulons remettre en

question l’opinion répandue d’une intervention portugaise, qui semble ignorer le contexte urbain et paysager javanais,

chinois et néerlandais à Java, contemporains au Taman sari. Nous interrogerons également les enjeux de la commande

ainsi que la destination du jardin, afin de mieux saisir leur impact dans les choix architecturaux et ornementaux.

Nathalie LANCRET : Architecte ; Chargée de recherche, Centre national de la Recherche scientifique (CNRS),

Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et du Monde austronésien (LASEMA, UPR 297-CNRS)

La formation d’une rue marchande et son impact sur les tissus urbains à Bali, Indonésie : le cas de la rue Hasanudin,

ancien axe fondateur de la capitale royale de Denpasar.

Quelles sont les configurations spatiales et les expressions architecturales qui interviennent dans les extensions

contemporaines de la ville de Vientiane, aujourd’hui fortement marquée par un contexte de métropolisation et

d’internationalisation ? Aménagements du réseau de voirie, reconversion progressive des terres agricoles, agrégation

et/ou découpages des parcelles, renouvellement des fronts bâtis, introduction de nouvelles formes architecturales et

urbaines, recomposition des modèles hérités, extensions, densification et/ou reconstruction des groupements anciens,

effacement de pans entiers du bâti, etc.

Nos questionnements porteront sur la « rue marchande » de Dongpalane, figure urbaine récurrente des villes d’Asie,

caractérisée par la juxtaposition de parcelles oblongues bâties de compartiments. Inscrite dans des ensembles urbains

différenciés, tant dans la ville de fondation coloniale que dans les nouvelles extensions urbaines, ses fronts bâtis

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.107

manifestent une certaine homologie des trames et tissus urbains, des modèles et expressions architecturales. Faisant

l’hypothèse qu’il existe des rapports opérants entre la rue, les tissus et le bâti, on s’interrogera sur les modes de

formation et de transformation du paysage urbain actuel.

Si la « rue marchande » demeure une figure génératrice de la ville sud-est asiatique contemporaine, il s’agit d’observer

ce vers quoi elle tend à Vientiane, depuis les moments inauguraux de refondation coloniale aux projets urbains

contemporains.

Christian PEDELAHORE DE LODDIS : Architecte ; Enseignant, Ecole d’architecture de Paris La Villette

Hanoi, syncrétisme architectural et pluralité urbaine (1873-2000) Métamorphoses et dialogique des modèles

Du point de vue de l'analyse des modèles, des types et des formes architecturales étudiées dans leurs transformations

temporelles et leurs interactions, la ville de Hanoi constitue à la fois un corpus inépuisable et un cas exemplaire à plus

d'un titre.

Ville agrégative et feuilletée, Hanoi associe, mélange et tresse ainsi, sur plus d'un siècle, à la fois la continuité des

villages urbains et la rupture rêvée d’une cité-jardin cosmopolite ; les types génériques et organisateurs de l'habiter

oriental et occidental que sont le compartiment et la villa ; les schèmes de la cité végétale asiatique et le carroyage d’un

urbanisme colonial pragmatique et contextuel.

Évolutive, marquée par de très fortes continuités anthropologiques et culturelles, Hanoi synthétise un savoir-faire

historique de l'appariement dans une dialectique millénaire de l'appropriation et de la transformation inventive des

modèles exogènes.

Hanoi est, également, lieu de projection sur les espaces urbains et domestiques d'un rapport spécifique et séculaire à la

modernité et à l'externalité qui constitue la pointe inventive de ses transformations, fondation d'une spécificité souterraine,

sociale et culturelle.

Par l'élaboration et la création continues de types et de modèles architecturaux syncrétiques et hybrides, cette ville

constitue, depuis une épaisseur d'observation privilégiée -tant historique que comparative- le substrat quasi

archéologique permettant d'étudier les mutations urbaines contemporaines induites par une métropolisation et une

globalisation asymptotiques.

XI- Langues, Education 45. LANGUES EN CONTACT Coordinatrice : Claire SAILLARD, Maître de conférences en linguistique, Université Denis Diderot (Univ. Paris VII)

Intervenants : Annie MONTAUT, Jean-Michel CHARPENTIER Cet atelier rassemblera des linguistes étudiant le contact des langues dans diverses régions d'Asie. Il s'agira de mettre en lumière les divers modes de contacts entre les langues dans des ensembles historiquement, géographiquement ou socialement cohérents, ainsi que les phénomènes engendrés par ces contacts entre langues apparentées ou non : influences des contacts sur la structure des langues elles-mêmes, sur les comportements langagiers de leurs locuteurs, sur le statut des langues en société...

Annie MONTAUT : Centre d’Etudes de l’Inde et de l’Asie du Sud (CEIAS), Institut national des Langues et

Civilisations orientales (INALCO), Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales (EHESS)

Contact de langues en contexte multilingue : l’exemple de l’Asie du Sud

Les nombreuses langues qui se perpétuent depuis des siècles en situation de diaspora dans le sous-continent indien

(dont la dakkhini hindi/ourdou en milieu dravidien) font état d’un maintien linguistique remarquable. Il est sans doute dû

au multilinguisme généralisé. Le plurilinguisme indien relève d’un multilinguisme organique et stratificationnel, l’usage des

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.108

divers segments du répertoire étant régi par l’hétérogénéité fonctionnelle, traditionnellement non compétitif. En

comparant la sociologie des usages (variétés hautes et basses) en situation de diglossie ou bi-dialectalisme avec la

situation de bilinguisme dans les communautés en diaspora, on s’explique mieux les changements formels qui

interviennent dans les langues diasporisées. Ces changements partagent nombre de traits avec les processus de

convergence liés au contact, parfois proche de la créolisation, et peuvent éclairer la dynamique du changement

linguistique en milieu multilingue.

Claire SAILLARD : Maître de conférences en linguistique, Université Denis Diderot (Univ. Paris VII)

Les langues chinoises en contact : quelles conséquences fonctionnelles

Je m'attacherai à montrer quels phénomènes sociolinguistiques récurrents ou isolés sont à l'oeuvre dans les situations de

contact entre les langues chinoises entre elles d'une part (contacts entre topolectes et langues standard en Chine), et

avec d'autres langues (contact entre langues chinoises et langues austronésiennes à Taiwan, contacts entre langues

chinoises et français en France dans les situations de migration.

L'optique adoptée sera tout autant macro-sociolinguistique, s'intéressant à l'évolution des fonctions et statut des langues

en contact, que micro-sociolinguistique, abordant par exemple la question de la construction du répertoire plurilingue des

locuteurs.

Jean-Michel CHARPENTIER : Chargé de recherche, Langues et Civilisations à Tradition Orale (LACITO),

Centre national de la Recherche scientifique (CNRS)

Concurrence entre superstrat et substrat dans le pidgin Bislama du Vanuatu (Pacifique sud)

La Mélanésie et plus particulièrement le Vanuatu se distinguent par la multiplicité et la dimension des langues qui y sont

parlées. Ce multilinguisme vieux de plusieurs millénaires ne se perpétuait que grâce à un équilibre économique,

démographique imposé par les lois coutumières. Chaque groupe, jaloux de ses spécificités linguistiques, cultivait les

différences. La colonisation initiée par les missionnaires, poursuivie par les colons et les administrateurs allait détruire les

équilibres anciens, privilégiant certaines langues vernaculaires, faisant émerger des langues véhiculaires comme le

pidgin bichelamar. Aujourd’hui, l’omniprésence de l’anglais met à mal l’autonomie du pidgin, la concurrence

anglophonie/francophonie héritée du système condominial perdure, l’influence réciproque du pidgin et des langues

locales est occultée par la créolisation rampante du bichelamar à laquelle beaucoup s’opposent. Dans le contexte

sociolinguistique actuel, à l’ordre ancien a succédé une situation riche en conflits divers. Ceci a rendu impossible jusqu’à

ce jour toute élaboration d’un système d’enseignement assurant une place aux différents types langagiers.

46. EDUCATION EN ASIE : CONDITIONS D’EXISTENCE DES MODELES EDUCATIFS ET FORMATIFS, ET DE LEURS SYSTEMES DE TRANSMISSION ; TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DES PRATIQUES Coordinateur : Jean-Marc DE GRAVE, Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et le Monde austronésien (LASEMA),

Bureau de l’Association Française de Recherche sur l’Asie du Sud-Est (AFRASE)

Intervenants : Natacha COLLOMB, David GIBEAULT, Stéphane RENNESSON, Samuel BERTHET, Didier

BERTRAND, Odette LESCARRET, TRAN Thu Huong, KRUY Kim Hourn La mise en place en Asie d’une économie de marché fondée sur la productivité industrielle, et de systèmes politiques centralisés, s’accompagne de la formation d’un système éducatif concomitant fondé sur la scolarisation, la tradition linguistique écrite, la formalisation extrême et l’uniformisation du système de transmission. Ce système éducatif qui s’impose comme étant référentiel dans les sociétés industrielles

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occidentales, oriente de façon quasi-univoque le rapport au monde et à l’existence et les systèmes socio-relationnels concernés, subordonnant parfois les formes éducatives de proximité telles que les relations de parenté et de voisinage, ou les liens à la culture d’origine. Il semble que l’on puisse ainsi considérer deux orientations en matière d’éducation et de transmission des savoirs et des pratiques. Là où les mythes, les rituels et les philosophies existentielles dépassent le simple cadre du séjour terrestre comme référence ultime des relations sociales, les modes de transmission sont progressifs et en quelque façon liés au perfectionnement du comportement social, ce qui veut dire qu’ils sont souvent posés comme s’étalant sur l’ensemble de l’existence humaine. Les modèles plus laïques et plus formels se caractérisent par un système de formation plus dichotomique dont la forme dualiste la plus marquée est celle du modèle occidental : « période de formation/période de vie active » qui implique la subordination explicite de toute activité hors cadre « vie active ». De façon globale, quelle a été la politique des nations asiatiques, au moment de leur formation, en matière d’éducation ? Y a-t-il eu acceptation en bloc d’un système scolaire de type occidental ? Y a-t-il eu établissement ou tentative d’établissement d’un système national approprié au(x) contexte(s) socio-culturel(s) concerné(s) ? Si oui, suivant quelles modalités et quelles caractéristiques ? En parallèle à la politique nationale en matière d’éducation, comment se sont développés jusqu’à aujourd’hui les modes éducatifs non institutionnels et les activités traditionnelles de formation du caractère et d’apprentissage ? Comment s’est organisé le registre non formel d’éducation ? Quelles activités concerne-t-il ? Que nous apprend la valorisation de ces activités sur la nature du lien social et des valeurs internes, sur le rapport au monde, les registres d’action en cause et le système de relations sociales ? Les présentations pourront s’appuyer sur un type précis d’activité en insistant notamment sur les modes de transmission qui entrent en jeu pour la perpétuation du savoir ou du savoir-faire en cause. Elles pourront tout aussi bien s’appuyer sur un modèle éducatif particulier, qu’il soit local ou national, traditionnel, non-formalisé ou formalisé. Il s’agira alors de se rattacher d’une façon ou d’une autre à la problématique qui se résume en quelque sorte à la compréhension interne de modèles d’éducation, de formation ou de transmission, et aux contingences d’existence et de maintien de ces modèles. L’atelier s’efforcera ainsi d’initier une approche pluridisciplinaire du phénomène, notamment au travers des disciplines ethnologique, historique et psychologique.

Natacha COLLOMB : Doctorante, Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (UMR 7535-CNRS),

Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Transmettre et apprendre chez les Taï Dam du Nord-Laos. Quelques pistes de réflexion.

Comment, dans une société de riziculteurs non bouddhisés du Nord Laos, les Taï Dam, un nouveau-né devient peu à

peu, pendant les premières années de sa vie et au cours d’un long et progressif processus de transmission et

d’acquisition de savoirs (savoir être, savoir se comporter, savoir faire), une personne à la fois résolument humaine et

résolument taï dam. Anthropologie du quotidien, cette recherche s’intéresse en premier lieu aux faits d’apprentissage qui

n’entrent pas dans un cadre défini par un temps et un lieu précis et désigné par le discours (rites de passage, d’initiation,

éducation formelle), mais passent autant par la pratique et le geste que par la parole.

L’apprentissage continue à évoquer pour les ethnologues un champ privilégié de la recherche en psychologie. Ce faisant,

l’apport particulier que l’ethnologie est susceptible d’apporter en ce domaine, notamment par le biais d’un

questionnement systématique des universaux en matière de fonctionnement humain, est négligé. À l’inverse de la

psychologie du développement, qui s’intéresse plutôt à un processus pensé comme interne et universel, une

anthropologie de l’apprentissage se doit de mettre à jour des catégories locales de pensée : comment est pensée,

localement, cette relation entre le naturel et l’appris, comment la terminologie en témoigne-t-elle, comment s’expriment et

sont marqués les âges et les étapes de la vie ?

David GIBEAULT : Doctorant, Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales (EHESS)

Les Maîtres de chants: les paroles de la totalité en contexte moderne

Programme en français_1er congrès 2003 RESEAU ASIE <[email protected]> p.110

Cet exposé présentera dans ses grandes lignes en quoi consiste le statut de ‘Maître de chants’ dans un village chinois.

Plusieurs des activités habituellement associées aux prêtres taoïstes sont dans la région étudiée accomplies par des

hommes ayant acquis la maîtrise, par une série de participations à des fêtes et des échanges, d'un corpus original de

chants. Ce corpus témoigne dans chaque cas d'une participation active à des fêtes anciennes: la parole vient ici en

résultat des relations sociales (et non l'inverse). Mais la transformation de ces activités dans les années maoïstes puis

libérales (au sens économique) remet grandement en question la valeur accordée à cette socialité. De nouvelles

expériences sont toutefois tentées pour valoriser dans un cadre nouveau le savoir des Maîtres de chants: l'établissement

d'un ‘maison de la tradition orale’, patronnée par le gouvernement local. Il sera fait état de cette innovation et de la

conception du savoir traditionnel comme 'culture', séparée des relations sociales dont les chants étaient la voix, qui la

sous-tend.

Stéphane RENNESSON : Doctorant, Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (UMR 7535-

CNRS), Université de Nanterre (Univ. Paris X)

Le corps comme outil et matériau du processus pédagogique du muay thai

Il s’agit de mettre au jour la relation entre la boxe thaïe et la culture thaïlandaise ainsi que les manières dont ce sport

national est conçu et pratiqué. La boxe thaïlandaise occasionne des comportements d'extériorisation des passions chez

les spectateurs et les parieurs. Ces attitudes tranchent singulièrement avec les dehors sereins que les Thaïlandais

impriment aux interactions sociales dans la vie quotidienne. Or, la valorisation d'une telle pratique, apparemment violente,

peut a priori sembler contradictoire avec les manifestations de l'idéologie dominante. Cette dernière est imprégnée du

dogme bouddhiste et valorise la non-violence, l'évitement comme moyen de gérer les pressions sociales et, plus

généralement, la non-manifestation de ses émotions en public.

Mon travail de rédaction se structure autour de l’hypothèse selon laquelle la boxe thaïe, par son caractère agonistique,

constitue une situation paroxystique de la mise à l'épreuve des qualités morales de l'individu. La boxe thaïe cristallise des

valeurs fondamentales de la société thaïlandaise. Du boxeur au promoteur, chacun y trouve la matière symbolique, et les

rapports sociaux qui la matérialise, pour se projeter, mais aussi pour se construire en tant que personne, en tant que

‘ destin ’ pour reprendre une terminologie plus locale.

Samuel BERTHET : Post-doctorant, Centre de Recherche et d'Histoire du Monde Atlantique (CRHMA) ;

membre de la Société Anglo-indienne et Histoire de l'Inde Britannique et contemporaine (SAHIB) ; Chercheur

invité au Centre des Sciences Humaines de New Delhi.

Le système éducatif indien: entre utopie villageoise et pression sociale

La volonté des fondateurs de l’Inde contemporaine telles que Tagore et Gandhi de renouer avec l’Inde ‘ authentique ’,

des villages, par opposition à celle du Raj et des villes, s’est traduite par une volonté de retour à la langue maternelle ou

de recours à la langue nationale.

Afin de donner une réalité à cette volonté politique, l’école et l’éducation représentaient bien entendu des enjeux majeurs.

En dehors des divergences internes entre les grandes figures fondatrices de la nation indienne, les stratégies politiques

et les réalités économiques rattrapèrent les rêves initiaux et finalement il semble que ce soit plutôt les desseins

de Macaulay, grand instigateur de la diffusion de la langue par l’enseignement comme instrument de colonisation, qui

s’imposent avec toujours plus de force.

L’école : lieu où se dessine l’identité des nations par le biais de la langue donc, de l’éducation en général, mais aussi de

l’idéologie et de la formation des élites ; nœud du pouvoir et du devenir des nations.

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Didier BERTRAND : Ethnopsychologue ; Chercheur associé, Institut de Recherche sur le Sud-Est Asiatique-

Marseille (IRSEA), Centre national de la Recherche scientifique (CNRS) ; chargé d’enseignements en

Psychologie, Université de Toulouse le Mirail (Univ. Toulouse II)

Odette LESCARRET : Professeure de Psychologie du développement, Université Paul Valéry (Univ.

Montpellier III), Laboratoire Personnalisation et Changements Sociaux

TRAN Thu Huong : Enseignante-chercheure en psychologie, Université des Sciences Sociales et Humaines

de Hanoi, Vietnam

KRUY Kim Hourn : Enseignante-chercheure en psychologie, Université Royale de Phnom Penh, Cambodge

Education et socialisation de l'enfant au Viêtnam et au Cambodge : analyse comparative des ethnothéories

parentales et de l'intégration de modèles ethnoscientifiques

Les systèmes de représentations des adultes concernant le développement et les problèmes des enfants, interagissent

en permanence avec leurs pratiques effectives d'éducation et de soins en situation familiale ou professionnelle. Ces

théories implicites connues parfois sous le nom d'ethnothéories, une fois formalisées par des ethnologues ou des

anthropologues, se distinguent de théories plus formelles faisant référence à des modèles dits scientifiques développés

notamment dans la pédiatrie, la sociologie ou la psychologie dans le monde occidental essentiellement : les

ethnothéories scientifiques. Les parents ne sont toutefois pas à l'abri de ces influences car les différents savoirs sont de

moins en moins étanches. En outre, en Asie du Sud Est des modèles sensiblement différents pourraient être comparés

(confucéen, theravadin, animiste). Différentes théories relatives à l'enfance et à l'éducation sont en oeuvre dans les

systèmes de représentations des adultes intégrant ces apports allogènes.

La psychologie cherche maintenant au travers de ses avancées cognitivistes à mieux connaître et investir finement ces

phénomènes, quitte à reconsidérer ses propres théories. Nous proposons aussi dans cet atelier de réfléchir à la

complémentarité entre les approches des psychologues et des ethnologues.

Jean-Marc DE GRAVE : Laboratoire sur l’Asie du Sud-Est et le Monde austronésien (LASEMA), Bureau de

l’Association Française de Recherche sur l’Asie du Sud-Est (AFRASE)

Profil de l’éducation indonésienne. Perspective renouvelée sur les dimensions formelle et non formelle de l’éducation

en Asie

Avant et après la déclaration d’indépendance de 1945, les fondateurs de l’éducation indonésienne – sous l’égide du

mouvement éducatif nationaliste Taman Siswa – avaient formulé les bases d’une éducation dans laquelle les activités

corporelles et artistiques seraient transmises de façon équilibrée avec les activités intellectuelles, selon un système de

transmission de type tutorat. Qu’est-il advenu de cet idéal éducatif qui s’opposait à celui, élitiste et spécialisé, du système

scolaire colonial hollandais ? Quelle est la place des pratiques corporelles (arts martiaux, danse) dans la conception

éducative javano-indonésienne ?