Portrait Vassiliu

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5/21/2018 PortraitVassiliu-slidepdf.com http://slidepdf.com/reader/full/portrait-vassiliu 1/2 *K6---NOIR080503* K6--- NOIR Edition: ML - 31 SETE - 7 - 08/05/03 Sortie le: 07/05/03 20:46 . . Le chant eur sort son 15e album I l se l’était promis, juré, on ne l’y reprendrait pas. Pierre Vassiliu n’enregistrerait plus dedisque. Avec sadernière livraison, Parler aux Anges (1999), qui n’apasdépassél es 20000 exemplaires, i l honorait la fi n de son contrat de troisalbums avec WH productions. La messeétait dite, la bouclebouclée.Malgré plusieurs succès d’estime, et un accueil positif parl es quelquescri tiques musicalesqui daignaient y prê- ter uneoreille, le chanteur étaitlas. Lasde cesmagasinsqui ne donnent plus le tempsautemps,et retournent àl’envoyeur les exemplaires qui ne partent pas dans les 72heures. Las des radios, qui, par manqued’audace, sesuivent les unes les autres. Las de la techno aussi, du rap surtout, que le chanteur goûte peu : «Ce qu’ils racontent me navre, ils se construi sent leur propreghetto. Ils ont pris leur placeaux chanteurs, qui sesont sent i s u n peu é tou ff é s. » Ajoutez à celades relations devenues exécrables avec son producteur Harry William, fils del’accor- déoniste André Verchuren, pour lequel il n’a pas de mots assez durs, et vous obtenezun PierreVassiliu résigné à neplusfaire de disque.  «Pas aigri , insiste-t-il, ma i s démorali séde pa sser du temps àfai re des disques quel’on nepeut m ême pas trouver dans les kiosques, de voi r que les ventes sont pri mé es, pas le talent… » Il seconsacreraitdoncauxgalaset concerts,qui,eux, lui pro- curenttoujours autantde plaisir.E t pour cela,nul besoindefai- rel a premièrepartiedes Beatlesà l’Olympiaou detourner avec  Johnny Hallyday, comme dans les annéessoixante. «A chaque concert, il y a des gens qui pleurent. Et cela, ça continue àme toucher. » Plaisir, comme en 1999, lors d’un de ses "grands retours", à Bobino. Ou l’été dernier au F estival breton du bout dumonde,où il s’est produit devant 45000personnesen premiè- repartie deCompay Segundo. J usteretourdes choses delapart d’un Cubain que Pierre Vassiliu, parrain du Festival de Thau depuis 12ans, a contribué à faireconnaîtreenF rance.Un par- rainqui futparmi lespremiersà épicersestitresdesaveursexo- tiques, dès son second album, Attends  (1972) déjà imprégnéde référencessud-américaines. Aujourd’hui encore,dans sadisco- thèque, le folklore réunionnais côtoie Youssoun’Dour ou Cesa- ria Evora. Le restedutemps,il passerait"la vieà nerien faire", commel etitre desonuniquel ivre, aux côtés desafemmeLaura etde celledeses cinqenfantsqui vitencore à la maison,dans la résidence mézoise. Une maison dont il se dit  «amour eux » acquiseaprèsdix rudes années dans le Gers«qui m’ont un peu ruiné» . Ou sur le petit bateauà moteur qu’il vient d’acquérir à Sète,et pour lequel il passeactuellementson permis afin dene plus êtreseulement « l’homme qui regarde la mer » . Oui maisvoila,la vieça va, eton nesaitpasoù ellemène. Elle peutmener à goûter tous lesplaisirsde la vie, deCubaau Séné- gal. A ouvrir L’usine, sallede spectacles autogéréedansle Lubé- ron dans la période "baba" du début desannéesquatre-vingt. Ou à ouvrir un club jazz- bien plus club quejazz, d’après lesdires del ’intéressé- dans les environs deDakar, suivi d’un restaurant dans labrousse. Et aussi, plusrécemment, àcroiser lechemin d’un groupe de… mécènes, qui asu le convaincre de changer d’avis. Il s’agit de quatre couples toulousains plutôt fortunés. «Des gens sym pas, bons vi vants, qui voulai ent r é ellement se lancer dans l’aventure. » Rassemblés autour du PDG d’Affat voyages,qui avait faitvenirVassi- liu à Saint-Domingue, ils ontdéci- déde produirel e nouveaudisque decelui qui a autant voyagédans les pays que dans les labels (Dec- ca, Barclay puis Polygram, RCA, Polydor…) Ils y mettraient les moyensqu’il faudrait,et enlui lais- sant une totale latitude d’action.  J usqu’à peu se préoccuper des paroles des chansons qu’ils sou- mettaient à leur écoute. Ce qui, lors d’un mémorable repas, a eu le don de passablement énerver l’auteur compositeur. Et lui aper- mis detrouver un nomà ce nou- vel album, lorsque, hors de lui, il leur a lancé : «Vous n’é coutez pas ces chanson s, a lor s qu e ce sont des pi err es pré cieuses… » Lorsduconcert dedemainsoir, au foyer municipal de Mèze, il présentera un singulier Pierre pr é ci eu ses , qui sera enventepour la premièrefois, avant d’être distribuéà partir du 16mai. I l s’agit d’un double CD, compre- nant douzenouveaux morceaux d’un côté, et del’autreun live enregistré en avril et décembre derniers au Printival Bobby Lapointe dePézenas etau théâtre Toursky deMarseille. Le tout dans un confort detravail dont il n’était pluscoutumier. «J’ai même é tr op r ai sonn abl e » , témoigne-t-il aujourd’hui «en renonçant, par exemple, àinsé rer des vi olons sur l’u n des morceaux. Pour me pousser au cul, je leur ai dit de me fixer une date limite. » Comme à son habitude, ce précurseur de la world music que d’aucuns, mal i nformés,qualifientde chanteur franchouillard, emprunte partout,à l’imaged’un Lavilliers: sal- sa,jazz,musiques folkloriquesdesquelque44paysoù il aséjour- né… Sur trois morceaux, il a même fait appel à de vieilles connaissances, le groupe Kalone de Casamance, accompagné d’un griot. Pour le reste, il s’est entouré, par commodité, de musiciens du cru, mais reste fidèle à son équipe toulousaine pourl atournéequi suivra. Lesmusiciensse sontretrouvés pour enregistrer, d’abord au studio Mésua,  «une sorte de garage » , situénonloin dechezVassiliu, auborddel’étangdeThau.Puis au studio melgorien des Aviateurs : «Enregistrer est tellement plus si mple : quelques ordi nateurs, des baffles installé es dans un petit espace… » Le chanteur a sollicitédesMontpelliérains comme FredBre- tonau clavier, ou un groupemanouchepour les cordes. Ontrou- veégalement Leilla Négrau, réunionnaiseinstallée à Sète, aux percussionset huit choristes pour agrémenter le tout etdonner audisque,avec les cuivres, ce côtéfestif qu’il affectionne. Grâ- ce à tous ces éléments, le disque dégage comme un parfum d’Afrique.Parfum distillé parl esi nstruments traditionnelscom- me par les textes. P ierreVassiliu prend en exemple le premier titre:  «Un mor ceau comme Mogambo dé cri t un e j our né e en Casam ance, d e ces j our né es que l’on peut passer àregarder une langouste se dé placer sur le sable. » Il a également introduit deséléments d’ambiancesonore : «Sur la chanson "Dis lui", celle que l es gens pr é r ent , j e me su i s lancédans une improvisation à la gui tare, seul dans un mar ché , comme un mec qui a ratésa vie et vous crache des mots àla f igu- re. » Commesouvent,il s’est éga- lement offert deux reprises qu’il voulait mettre sur sillon depuis longtemps : Mon pote le Gitan, que chanta autrefois Yves Mon- tand, et L’étrangère, d’Aragon. Et des textes érotiques, indissociables de l’œuvre de l’érotomane. Un insatiable épicurien qui partage avec son poteNougaro « l es mêmes d é li res, les m êmes d é si r s » et se remémore ces virées nocturnesoù ils débarquaient tousdeux àl’improvistechez des couples parisiens éberlués. Aujourd’hui, ayant (pour un temps?) mis decôté ses rêvesde créer un cabaretà Mèzeou à Sète, il travaille d’ailleurs à une comédie musicale qui inclurait le même Nougaro, mais aussi Zazi, ou ManuDibango, « l’u n des premiers àm’avoir fait vibrer » . Reste que dans ce dernier album, le titre qui accroche irrémé- diablementl’oreille est unechanson baptiséeMoustache, où le chanteur jouedeses éternellesbacchantes - unpeublanchies, à 65ans passés- qui font de lui une figure tout droit sortie d’un film sur les gitans d’Emir Kusturica: «Tout le monde appelle a mwin moustache » , clame le gitancréole. Il y ade bonnes chan- cesque cettechansondraine l’album, surles radios etles lèvres de leurs auditeurs. Carla carrièredeVassiliu est ainsi faite: ses plusgrossuccès nesont pas ses plus grandes fiertés. Prenez le single Qui c’est celui là ?,unefaceB qui «de man i è re total ement i natt endue » , en 1974, dépassa le million d’exemplaireset resteindissociable dunomde Vassiliu. Et bien figurez-vous quece titre, issu dela traduction libre de Partido Aldo , interprétépar Chico Buarque dans une comédie musicale censurée au Brésil, est celui qui a rendule chanteur françaisle plusmalheureux. Car l’auteur n’a  jamaispardonnéaufrançaiscetteversiondrolatiqued’unbrûlot politique. Et n’a pas voulu le rencontrer, même si la reprise a bien étoffé soncompte en banque. Autreexemple, les Grillons, en1989, uneautrereprise etle dernier gros succèsde Vassiliuà ce jour. Le chanteur bat aujourd’hui sa coulpe car il a réalisé «que, sans s’en rendr e compte, la versi on original e é tai t assez raciste » . Combledu comblepour ce voyageuri mpénitent, chan- trede l’échange entre les peupleset les cultures. Qui a d’ailleurs enmémoirecetépisodeà la cabanedes pêcheursde Marseillan, où,lors d’un concert délocalisé du Festival deThau,un specta- teur s’enorgueillissait : «on n’a pas d’Arabes, ici » . Et celui qui a fait du Sénégalais Ismaël Lole parrain desa fille, delui rétor- quer:  «Mais regardez sur scè ne, c’est un orchestre d’Ara- bes… » Le résidant mézois a d’ailleurs été «mi s par terre » par le score deJ ean-MarieLe Penà la présidentielle,même s’il l’ex- pliquepar le faitque« tout l e monde en a r as le cul de la poli ti - que actuelle » et se dit persuadé que les hauts scores du Front national sont avant tout le fait deceux qui se sont installés ici récemment. Et çaemmerde lesgens,quand on vit pas comme eux, pour- rait ajouter enparaphrasant ànouveau ChicoBuarquecelui qui voit son dernier disque,  «presque i mprovisé , comm e un pi ed denez àtout ce qu’on entend » . Quant aux concerts, pour l’heu- re,le chanteur est dansl’expectative: «La tourn é e qui sui vr a pendra de la pr omoti on et des ventes. Mais j e n’aur ai pas 25 semi -remorques. » Autre originalité de ce double album: l a distribution sera assuréepar Pure music, qui s’est surtout fait connaîtredansla conception… d’objets ésotériques, du type tarots ou boule de cristal. Celaramènerait presqueà l’époqueafricaine, où, alors habitantd’unecase sur uneplagede Casamance,il s’était laissé tentépar unbaptêmevaudou. A proposduquel il lâcheun ellipti- que« j’aur ai s pas dû… » , sans plusde précision. S’il est ques- tiondesort,cettefois,il serabon. «C’est u n di sque tr è s é clecti - que, on y croit beaucoup » , assurele chanteur, qui mise égale- ment sur le revival que connaissent aujourd’hui plusieurs chan- teurs de sa génération, les Valérie Lagrangeet autres Christo- phe. «Les anciens reviennent, il y a du bon vent pour moi » .  Au foyer municipal de Mèze demain à 21 h. 15  €. 04 67 43 93 08. Vassiliu est revenu Photo V.ANDORRA «Sur lachanson Dislui, celle que les gens préfèrent, jeme suislancé dans uneimprovisation à la guitare, seul dansunmarché, comme unmec qui araté sa vie et vouscrache des mots à la figure » «Un morceau comme Moganbo décrit une  journée en Casamance, de cesjournéesque l’onpeut passerà regarderune langoustese déplacersur le sable» Parfum d’Afrique Avec m on bateau, je ne serai plus seulem ent celui qui regarde la m er BenoîtdeBESSES Dépit é par l’industrie du disque et les résult at s décevant s de ses derniers opus, Pierre Vassiliu, qui réside à M èze depuis t rois ans, ét ait décidé à ne plus enregist rer de disque. M ais un groupe de Toulousains, fans de la prem ière heure et m écè- nes provident iels, ont su le faire revenir sur sa décision. Le chant eur / baroudeur sort donc ces jours-ci "Pierre Précieuses", qu’il présent era ce soir lors d’un concert au foyer m unicipal de M èze. PAYSDE THAU  7 Midi Libre K6---    Jeudi8 m ai2003

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  • *K6---NOIR080503* K6--- NOIREdition: ML - 31 SETE - 7 - 08/05/03Sortie le: 07/05/03 20:46.

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    Le chanteur sort son 15e album

    Il se ltait promis, jur, on ne ly reprendrait pas. PierreVassiliu nenregistrerait plus de disque. Avec sa dernirelivraison, Parler aux Anges (1999), qui na pas dpass les20 000 exemplaires, il honorait la fin de son contrat detrois albums avec WH productions. La messe tait dite, la

    boucle boucle. Malgr plusieurs succs destime, et un accueilpositif par les quelques critiques musicales qui daignaient y pr-ter une oreille, le chanteur tait las. Las de ces magasins qui nedonnent plus le temps au temps, et retournent lenvoyeur lesexemplaires qui ne partent pas dans les 72 heures. Las desradios, qui, par manque daudace, se suivent les unes les autres.Las de la techno aussi, du rap surtout, que le chanteur gotepeu : Ce quils racontent me navre, ils se construisent leurpropre ghetto. Ils ont pris leur place aux chanteurs, qui se sontsentis un peu touffs. Ajoutez cela des relations devenuesexcrables avec son producteur Harry William, fils de laccor-doniste Andr Verchuren, pour lequel il na pas de mots assezdurs, et vous obtenez un Pierre Vassiliu rsign ne plus fairede disque. Pas aigri, insiste-t-il, mais dmoralis de passerdu temps faire des disques que lon ne peut mme pas trouverdans les kiosques, de voir que les ventes sont primes, pas letalent

    Il se consacrerait donc aux galas et concerts, qui, eux, lui pro-curent toujours autant de plaisir. Et pour cela, nul besoin de fai-re la premire partie des Beatles lOlympia ou de tourner avecJohnny Hallyday, comme dans les annes soixante. A chaqueconcert, il y a des gens qui pleurent. Et cela, a continue metoucher. Plaisir, comme en 1999, lors dun de ses "grandsretours", Bobino. Ou lt dernier au Festival breton du boutdu monde, o il sest produit devant 45 000 personnes en premi-re partie de Compay Segundo. Juste retour des choses de la partdun Cubain que Pierre Vassiliu, parrain du Festival de Thaudepuis 12 ans, a contribu faire connatre en France. Un par-rain qui fut parmi les premiers picer ses titres de saveurs exo-tiques, ds son second album, Attends (1972) dj imprgn derfrences sud-amricaines. Aujourdhui encore, dans sa disco-thque, le folklore runionnais ctoie Youssou nDour ou Cesa-ria Evora. Le reste du temps, il passerait "la vie ne rien faire",comme le titre de son unique livre, aux cts de sa femme Lauraet de celle de ses cinq enfants qui vit encore la maison, dans larsidence mzoise. Une maison dont il se dit amoureux acquise aprs dix rudes annes dans le Gers qui mont un peuruin . Ou sur le petit bateau moteur quil vient dacqurir Ste, et pour lequel il passe actuellement son permis afin de neplus tre seulement lhomme qui regarde la mer .

    Oui mais voila, la vie a va, et on ne sait pas o elle mne. Ellepeut mener goter tous les plaisirs de la vie, de Cuba au Sn-gal. A ouvrir Lusine, salle de spectacles autogre dans le Lub-ron dans la priode "baba" du dbut des annes quatre-vingt. Ou ouvrir un club jazz - bien plus club que jazz, daprs les diresde lintress - dans les environs de Dakar, suivi dun restaurantdans la brousse. Et aussi, plus rcemment, croiser le chemindun groupe de mcnes, qui a su le convaincre de changerdavis. Il sagit de quatre couples toulousains plutt fortuns. Des gens sympas, bons vivants, qui voulaient rellement selancer dans laventure. Rassembls autour du PDG dAffatvoyages, qui avait fait venir Vassi-liu Saint-Domingue, ils ont dci-d de produire le nouveau disquede celui qui a autant voyag dansles pays que dans les labels (Dec-ca, Barclay puis Polygram, RCA,Polydor) Ils y mettraient lesmoyens quil faudrait, et en lui lais-sant une totale latitude daction.Jusqu peu se proccuper desparoles des chansons quils sou-mettaient leur coute. Ce qui,lors dun mmorable repas, a eule don de passablement nerverlauteur compositeur. Et lui a per-mis de trouver un nom ce nou-vel album, lorsque, hors de lui, illeur a lanc : Vous ncoutez pas ces chansons, alors que cesont des pierres prcieuses Lors du concert de demain soir,au foyer municipal de Mze, il prsentera un singulier Pierreprcieuses, qui sera en vente pour la premire fois, avant dtredistribu partir du 16 mai. Il sagit dun double CD, compre-nant douze nouveaux morceaux dun ct, et de lautre un liveenregistr en avril et dcembre derniers au Printival BobbyLapointe de Pzenas et au thtre Toursky de Marseille. Le toutdans un confort de travail dont il ntait plus coutumier.

    Jai mme t trop raisonnable , tmoigne-t-il aujourdhui en renonant, par exemple, insrer des violons sur lun des

    morceaux. Pour me pousser au cul, je leur ai dit de me fixerune date limite. Comme son habitude, ce prcurseur de laworld music que daucuns, mal informs, qualifient de chanteurfranchouillard, emprunte partout, limage dun Lavilliers : sal-sa, jazz, musiques folkloriques des quelque 44 pays o il a sjour-n Sur trois morceaux, il a mme fait appel de vieillesconnaissances, le groupe Kalone de Casamance, accompagndun griot. Pour le reste, il sest entour, par commodit, demusiciens du cru, mais reste fidle son quipe toulousainepour la tourne qui suivra. Les musiciens se sont retrouvs pourenregistrer, dabord au studio Msua, une sorte de garage ,situ non loin de chez Vassiliu, au bord de ltang de Thau. Puisau studio melgorien des Aviateurs : Enregistrer est tellementplus simple : quelques ordinateurs, des baffles installes dansun petit espace

    Le chanteur a sollicit des Montpellirains comme Fred Bre-ton au clavier, ou un groupe manouche pour les cordes. On trou-ve galement Leilla Ngrau, runionnaise installe Ste, auxpercussions et huit choristes pour agrmenter le tout et donnerau disque, avec les cuivres, ce ct festif quil affectionne. Gr-ce tous ces lments, le disque dgage comme un parfumdAfrique. Parfum distill par les instruments traditionnels com-me par les textes. Pierre Vassiliu prend en exemple le premiertitre : Un morceau comme Mogambo dcrit une journe en

    Casamance, de ces journes quelon peut passer regarder unelangouste se dplacer sur lesable. Il a galement introduitdes lments dambiance sonore : Sur la chanson "Dis lui", celleque les gens prfrent, je me suislanc dans une improvisation la guitare, seul dans un march,comme un mec qui a rat sa vieet vous crache des mots la figu-re. Comme souvent, il sest ga-lement offert deux reprises quilvoulait mettre sur sillon depuislongtemps : Mon pote le Gitan,que chanta autrefois Yves Mon-tand, et Ltrangre, dAragon. Et

    des textes rotiques, indissociables de luvre de lrotomane.Un insatiable picurien qui partage avec son pote Nougaro lesmmes dlires, les mmes dsirs et se remmore ces viresnocturnes o ils dbarquaient tous deux limproviste chez descouples parisiens berlus. Aujourdhui, ayant (pour untemps ?) mis de ct ses rves de crer un cabaret Mze ou Ste, il travaille dailleurs une comdie musicale qui incluraitle mme Nougaro, mais aussi Zazi, ou Manu Dibango, lun despremiers mavoir fait vibrer .

    Reste que dans ce dernier album, le titre qui accroche irrm-diablement loreille est une chanson baptise Moustache, o le

    chanteur joue de ses ternelles bacchantes - un peu blanchies, 65 ans passs - qui font de lui une figure tout droit sortie dunfilm sur les gitans dEmir Kusturica : Tout le monde appelle amwin moustache , clame le gitan crole. Il y a de bonnes chan-ces que cette chanson draine lalbum, sur les radios et les lvresde leurs auditeurs.

    Car la carrire de Vassiliu est ainsi faite : ses plus gros succsne sont pas ses plus grandes fierts. Prenez le single Qui cestcelui l ?, une face B qui de manire totalement inattendue ,en 1974, dpassa le million dexemplaires et reste indissociabledu nom de Vassiliu. Et bien figurez-vous que ce titre, issu de latraduction libre de Partido Aldo, interprt par Chico Buarquedans une comdie musicale censure au Brsil, est celui qui arendu le chanteur franais le plus malheureux. Car lauteur najamais pardonn au franais cette version drolatique dun brlotpolitique. Et na pas voulu le rencontrer, mme si la reprise abien toff son compte en banque. Autre exemple, les Grillons,en 1989, une autre reprise et le dernier gros succs de Vassiliu ce jour. Le chanteur bat aujourdhui sa coulpe car il a ralis que, sans sen rendre compte, la version originale tait assezraciste . Comble du comble pour ce voyageur impnitent, chan-tre de lchange entre les peuples et les cultures. Qui a dailleursen mmoire cet pisode la cabane des pcheurs de Marseillan,o, lors dun concert dlocalis du Festival de Thau, un specta-teur senorgueillissait : on na pas dArabes, ici . Et celui quia fait du Sngalais Ismal Lo le parrain de sa fille, de lui rtor-quer : Mais regardez sur scne, cest un orchestre dAra-bes Le rsidant mzois a dailleurs t mis par terre parle score de Jean-Marie Le Pen la prsidentielle, mme sil lex-plique par le fait que tout le monde en a ras le cul de la politi-que actuelle et se dit persuad que les hauts scores du Frontnational sont avant tout le fait de ceux qui se sont installs icircemment.

    Et a emmerde les gens, quand on vit pas comme eux, pour-rait ajouter en paraphrasant nouveau Chico Buarque celui quivoit son dernier disque, presque improvis, comme un piedde nez tout ce quon entend . Quant aux concerts, pour lheu-re, le chanteur est dans lexpectative : La tourne qui suivradpendra de la promotion et des ventes. Mais je naurai pas 25semi-remorques.

    Autre originalit de ce double album : la distribution seraassure par Pure music, qui sest surtout fait connatre dans laconception dobjets sotriques, du type tarots ou boule decristal. Cela ramnerait presque lpoque africaine, o, alorshabitant dune case sur une plage de Casamance, il stait laisstent par un baptme vaudou. A propos duquel il lche un ellipti-que jaurais pas d , sans plus de prcision. Sil est ques-tion de sort, cette fois, il sera bon. Cest un disque trs clecti-que, on y croit beaucoup , assure le chanteur, qui mise gale-ment sur le revival que connaissent aujourdhui plusieurs chan-teurs de sa gnration, les Valrie Lagrange et autres Christo-phe. Les anciens reviennent, il y a du bon vent pour moi . Au foyer municipal de Mze demain 21 h. 15 . 04 67 43 93 08.

    Vassiliu est revenu

    Photo V. ANDORRA

    Sur la chansonDis lui, celle queles gensprfrent, je mesuis lanc dansune improvisation la guitare, seuldans un march,comme un mecqui a rat sa vieet vous crachedes mots lafigure Un morceaucomme Moganbodcrit unejourne enCasamance, deces journes quelon peut passer regarder unelangouste sedplacer sur lesable

    ParfumdAfrique

    Avec monbateau, je neserai plusseulement celuiqui regardela mer

    Benot de BESSES

    Dpit par lindustrie du disque et les rsultatsdcevants de ses derniers opus, Pierre Vassiliu,qui rside Mze depuis trois ans, tait dcid ne plus enregistrer de disque. Mais un groupe deToulousains, fans de la premire heure et mc-nes providentiels, ont su le faire revenir sur sadcision. Le chanteur / baroudeur sort donc cesjours-ci "Pierre Prcieuses", quil prsentera cesoir lors dun concert au foyer municipal de Mze.

    PAYS DE THAU 7Midi Libre

    K6--- Jeudi 8 mai 2003