POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

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GABRIEL BLOUIN GENEST POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES Le cas latino-américain de 1980 à 2006 Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures de l'Université Laval dans le cadre du programme de maîtrise en Études.intemationales pour l'obtention du grade de maître ès arts (M.A.) INSTITUT QUÉBÉCOIS DES HAUTES ÉTUDES INTERNATIONALES UNIVERSITÉ LA V AL QUÉBEC 2008 © Gabriel Blouin Genest,

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GABRIEL BLOUIN GENEST

POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES

Le cas latino-américain de 1980 à 2006

Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures de l'Université Laval

dans le cadre du programme de maîtrise en Études .intemationales pour l'obtention du grade de maître ès arts (M.A.)

INSTITUT QUÉBÉCOIS DES HAUTES ÉTUDES INTERNATIONALES UNIVERSITÉ LA V AL

QUÉBEC

2008

© Gabriel Blouin Genest,

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Résumé

La littérature concernant les cycles politiques a mis en évidence que les politiciens

semblent manipuler l' économie par l' élaboration de politiques expansionnistes en période

électorale afin de faciliter leur réélection. Les hypothèses classiques des cycles politiques

ont trouvé un écho empirique important pour les pays de l'OCDE. Toutefois, les

différentes recherches concernant les démocraties des pays en développement ont généré

des résultats mixtes, voire même contradictoires. Ceux-ci ont emmené les chercheurs à

conclure que les élections, plutôt que de nuire au développement économique, peuvent

favoriser un comportement responsable chez les politiciens au pouvoir. Basé sur des

données trimestrielles représentant 18 pays latino-américains pour la période 1980-2006,

èe mémoire revisite le modèle des cycles politiques en Amérique Latine. · Au-delà de

l'analyse des hypothèses traditionnelles, cette recherche innove par la prise en compte de

l' impact des institutions politiques, des facteurs partisans ainsi que du contexte

économique sur les cycles politiques.

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Abstract

Prior work on the political business cycles (PBC) has found that politicians

seemingly manipulate the macroeconomy through expansionary policies along the

electoral calendar in order to ease their re-election. While the PBC hypothesis has found

support in most of the literature focusing on OECD countries, research on emerging

democracies generated mixed and even contradictory findings, leading sorne scholars to

conclude that instead of inducing expansionary policy behaviour, elections provided an

opportunity for politicians to act responsibly. Drawing on quarterly data gathered for 18

countries over the 1980-2006 period, this paper (revisits the PBC model in the Latin

American region. Beyond exploring t~e traditional hypotheses, the proposed model

innovates by controlling for the effect of political institutions, partisanship and economic

contexts.

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François Gélineau, Directeur de recherche Arnaud Dellis, Co-directeur de recherche

Gabriel Blouin Genest, Étudiant

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IV

Avant-propos

Un être seul ne peut prétendre individuellement à la recherche de la connaissance.

Dans son sillage, une multitude d'acteurs participent, bien souvent involontairement, à

cette laborieuse édification. Les milliers de mots qui ~uivent n'auraient ainsi pu trouver

leurs sens sans le riche apport des personnes qui m'entourent.

Merci tout d'abord à mes parents qui m'ont tout donné sans jamais rien demander

en retour. Leur confiance sans bornes fut un refuge indispensable dans les moments les

plus difficiles que j'ai rencontrés sur ma route. C' est à eux que je dois tout.

À celle qui partage mes jours et mes nuits, aucune expression n'est assez forte pour

témoigner de ce qu'elle m'a apporté. Ses mots, ses sourires et son dévouement m'ont

permis d'affronter chaque matin avec la même force et le même bonheur. Tout mon amour

va pour elle.

Un ami tout particulier, il se reconnaitra, a grandement nourri mes réflexions. Sa

sagesse a été un rempart contre bien des égarements.

Merci enfin à François Gélineau pour les innombrables heures quotidiennes emplies

de rires qu' il m'a consacrées. Sa rigueur intellectuelle a éclairé ma route. Beaucoup de ce

qui suit lui revient. Merci aussi à Arnaud Dellis pour les judicieux conseils qu' il m'a

prodigués.

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v

Et ces maîtres, vous espérez qu'ils sauront la grammaire, la/able, l 'histoire, la géographie, la morale dont ils lui donneront des leçons?

Denis Diderot, Le Neveu de Rameau

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VI

Table des matières

Résumé ................................................................................................................................... i

Abstract .................................................................................................................................. ii

Table des matières ................................................................................................................ vi

Liste des tableaux ............................................................................................................... viii

Liste des figures ...... ' ............................................................................................................... x

Liste des abréviations et acronymes .................................................................................... xi

CHAPITRE 1

INTRODUCTION ET PROBLÉMATIQUE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 1

1.1 INTRODUCTION : L'ÉCONOMIE POLITIQUE LATINO-AMÉRICAINE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 1

1.2 PROBLÉMATIQUE ET QUESTION DE RECHERCHE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 4

1.3 INTÉRÊT ET JUSTIFICA TIONS ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 5

1.4 REMARQUES CONCEPTUELLES •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 8

CHAPITRE 2

ÉLECTIONS ET MACROÉCONOMIE: QUELS IMPACTS? .......................................................... 11

2.1 LA THÉORIE DES CYCLES POLITIQUES •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 11 2.1.1 La théorie partisane ...................................................................................................................... 12 2.1.2 La théorie opportuniste ................................................................................................................. ·13

2.1.2.1 Le modèle traditionnel ................................................. .......................................................... 13 2.1.2.2 Le modèle rationnel ............................. .. ....... ........ .................................................................. 16

2.2 LES ÉVIDENCES EMPIRIQUES ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 19

2.3 LES IMPACTS INSTITUTIONNELS •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 24

CHAPITRE 3

CONTEXTES LATINO-AMÉRICAINS •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 27

3.1 CONTEXTE MACROÉCONOMIQUE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 27 3.1.1 La décennie 1980 ........................................................................................................................... 27 3.1.2 La décennie 1990 et les années 2000 ............................................................................................ 32

3.2 CONTEXTE POLITIQUE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 34

CHAPITRE 4

CADRE THÉORIQUE ET MÉTHODOLOGIQUE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 39

4.1 HYPOTHÈSES ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 39

4.2 DONNÉES ET OPÉRA TIONNALISATION ••••••••••••••••••••.•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 44

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Vll

4.3 SÉLECTION DES CAS •••••••••••••••••••••••••••••••••••••• ~ ••••••••••••••••••••••••••• ~ ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 48

4.4 MODÈLE ÉCONOMÉTRIQUE ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• ~ •••••••••••••• 50 4.4.1 Type d'analyse ............................................................................................................................... 52

CHAPITRES

ANALYSE ÉCONOMÉTRIQUE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 54

5.1 PRÉSENTATION ET DISCUSSION DES RÉSULTA TS ................................................................ 54 '5.1.1 Modèle original ............................................................................................................................. 54 5.1.2 Modèles avec ajouts de variables explicatives .............................................................................. 56

5.1.2.1 Contrôle partisan de la chambre basse et réélection des gouvernements ....................... ...... 58 5.1.2.2 Contexte économique ..................... ~ .................................................. ........... ............... .......... 62

CHAPITRE 6

DISCUSSION DES RÉSULTATS D'ANALYSE ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 67

6.1 POLITIQUES ÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES EN AMÉRIQUE LATINE •• 67 6.1.1 La notion de cycle politique .......................................................................................................... 67 6.1.2 Les facteurs institutionnels et politiques ...................................................................................... 69 6.1.2 L'impact du contexte économique ................................................................................................ 72

6.2 LE MODÈLE DE CAPITAL POLITIQUE ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 75

CHAPITRE 7

CONCLUSIONS ET DÉVELOPPEMENTS ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 80

7.1 APPORTS À LA LITTÉRATURE SCIENTIFIQUE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 80

7.2 IMPLICATIONS ET RECOMMANDA TIONS •••••••••••••••••••• ~ ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 81

7.3 DÉVELOPPEMENTS POSSIBLES ET CONCLUSION ................................................................. 82

Références .................................. ~ ........................................................................................ 85

Annexes ............................................................................................................................... 97

A.1- CARTE GÉOGRAPHIQUE DE L'AMÉRIQUE LATINE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 97

A.2 - TRANSFORMATION DES DONNÉES MACROÉCONOMIQUES ............................................. 98

A.3 - DONNÉES MANQUANTES •••••••••••••••• ~ •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 99

A.4-RÉSULTATS DE L'ANALYSE DE VÉRIFICATION DE L'AUTOCORRÉLATION ••••••••••••••••••• 100

A.5 -PROCÉDURE DE VALIDATION INTER PAYS ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 102

A.6 - RÉSULTA TS DES RÉGRESSIONS INCLUANT LE CAS DU NICARAGUA ............................. 105

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Liste des tableaux

Tableau 2.1 Modèles théoriques des cycles politiques

p.12

Tableau 2.2 Évidences empiriques des cycles politiques

p. 24

Tableau 3.t Évolution du contexte macroéconomique latino-américain

p. 31

Tableau 4.1 Sommaires numériques avant transformation

p. 46

Tableau 4.2 Sommaires numériques après transformation

p. 47

Tableau 4.3 Élections présidentielles latino-américaines de 1980 à 2006

p.50

Tableau 5.1 Régressions des variables macroéconomiques sur les variables électorales

p. 56

Tableau 5.2 Régressions de la balance fiscale sur les variables électorales ajoutées des variables

institutionnelles et politiques p.59

Tableau 5.3 Régressions du taux de change sur les variables électorales ajoutées des variables

institutionnelles et politiques p.61

Tableau 5.4 Régression de la balance fiscale et du taux de change par période temporelle

p.65

Vll1

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Tableau 6.1 Résumé des résultats du modèle de base

p. 67

Tableau 6.2 Résumé des résultats du modèle incorporant les variables institutionnelles et politiques

p.69

Tableau 6.3 Résumé des résultats du modèle de base par période temporelle

p.73

IX

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Liste des figures

Figure 1.1 Processus de choix des politiques

p. 8

Figure 2.2 Courbe de Phillips,

p. 14

Figure 3.1 Libertés civiles et politiques en Amérique Latine: Comparaison 1978-2006

p. 36

Figure 3.2 Appui pour la démocratie en Amérique Latine

p.38

Figure 6.1 Mod~les de cycles politiques

p. 77

x

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BF

BM

CEPALC

CH

Dif

EE

FMI

IDE

IPC

LN

Ml

OCDE

ONG

OPEP

PBC

PIB

PME

PVD

TC

UNDP

Liste des abréviations et acronymes

Balance fiscale

Banque mondiale

Commission économique pour l'Amérique Latine et les Caraïbes

Changement

Différence

Évidence empirique

Fonds monétaire international

Investissements directs étrangers

Indice des prix à la consommation

Logarithme népérien

Indicateur de l'offre de la monnaie

Organisation de cooperation et de développement économiques

Organisation non gouvernementale

Organisation des pays exportateurs de pétrole

Political business cycle

Produit intérieur brut

Petite et moyenne entreprise

Pays en voie de développement

Taux de change

United Nations development program

Xl

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1

CHAPITRE 1

INTRODUCTION ET PROBLÉMATIQUE

1.1 INTRODUCTION: L'ÉCONOMIE POLITIQUE LATINO-AMÉRICAINE

S' il fut une époque marquante pour le développement politique et institutionnel de

l'Amérique Latine, c' est bien celle des années 1980-1990. À l'aube de cette décennie,

l' autoritarisme des régimes politiques en place, les crises économiques issues du second

choc pétrolier ainsi que les velléités impérialistes de plus en plus marquées de la part des

États-Unis ne laissent présager rien de positif pour la région (Skidmore et Smith, 2005).

L'Amérique centrale s' empêtre dans une sanglante guerre civile; Pinochet règne avec une

forte légitimité sur un Chili réduit aux «manifestations de casseroles »; des règles

électorales «particulières» issues de l' influence des militaires réduisent au silence

l'opposition brésilienne; quatre coups d'État ébranlent le Parlement bolivien de 1978 à

1980 et l'Argentine, sous l' impulsion d'un général autoritaire en mal de patriotisme, part

en guerre contre la Grande-Bretagne . . Nonobstant ces obstacles apparents, il ne faut que

quelques années pour que l'élection de Violeta Chamorro à la tête de l'État nicaraguayen

en 1990 vienne clore un cycle de transition démocratique, connue à l'échelle planétaire

comme la troisième vague de démocratisation (Huntington, 1991), qui n'épargne que Cuba

en Amérique Latine

Si 20 ans plus tôt il n'y avait que 5 régimes non militaires 1 en Amérique Latine2,

plus aucun pays n'est régi par ce type de régime à la fin de l'année 1990. Ce jeu de domino

démocratique débuté par l'élection du populiste équatorien Jaime Roldos en 1979

provoqua la plus importante vague de démocratisation que la région n'ait jamais connue

(Rernrner, 1991 , 1993). Ces transitions vers une organisation démocratique des règles de

1 Colombie, Costa-Rica, Mexique, République dominicaine et Venezuela. 2 Le lecteur intéressé par l'aspect géographique de 1'Amérique Latine peut se reporter à]a carte située à l 'annexe A.l

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2

gouvernance emmènent notamment plusieurs États à adopter d~ nouvelles constitutions.

Au cœur de ces nouvelles règles réside entre autres l' idée de « démocratie directe»

entendue au sens de souveraineté du peuple et d' implication citoyenne dans les décisions

collectives (Gomez Buendia, 1996: 8). Un des éléments majeurs de ce processus

démocratique concerne l' acceptation de l' élection comme unique mode d'accession aux

postes de représentation politique, et ce, à tous les niveaux - municipale, provinciale et

nationale. Ce facteur propre aux transitions démocratiques qui marquent la décennie 1980

en Amérique Latine mène ainsi à un renforcement des principes démocratiques. Pluralisme

politique, émergence de nombreux partis, alternance du pouvoir, prise en compte de plus

en plus grande des droits de l'homme, séparation des pouvoirs et légitimité de l' élection

comme mode d'accession au pouvoir sont maintenant la norme plutôt que l'exception en

Amérique Latine.

Mais cette rapide et en apparence homogène transition d'un système autoritaire et

autarcique à un modèle de démocratie et de marché dissimule en fait les véritables défis

auxquels font face ces toutes jeunes républiques. Dans bien des cas, le processus de

démocratisation se limite à la tenue d'élections sans que soit atteint un véritable niveau

supérieur d'organisation démocratique. Droits de l'homme, loi d'amnistie, séparation des

pouvoirs, bonne gouvernance; l'ajout de la tenue d'élections libres et compétitives dans

l' arsenal des élites politiques latino-américaines ne résout pas pour autant ces épineuses

questions. Si les États du sous-continent latino-américain peuvent se targuer d'être

pratiquement tous régis par un système qualifié de démocratique au début des années 1990,

le lourd héritage historique, politique et institutionnel dont sont tributaires ces pays les

amène à affronter dè plein fouet les véritables défis de la démocratisation.

En matière de gestion, les nouveaux gouvernements démocratiquement élus ont à

faire face à des obstacles institutionnels de taille. Le changement du mode d'accession au

pouvoir ne modifie pas automatiquement les façons de faire, la nature des institutions ou

les règles et usages coutumiers de la gouvernance. Même s' il est vrai que « Latin America

is moving this time in the direction of history, i. e, of political democratization and

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3

economic liberalization»3 (Fukuyama, 1992: 139), la nécessaire stabilité que requière

l'établissement durable de cette nouvelle façon de gouverner est souvent payée au prix

d'un fort laxisme sur le plan de l'effectivité de ces nouvelles règles. Ces gouvernements

doivent aussi favoriser l' intégration et la participation de la société civile dans la vie

politique tout en jugulant les velléités des militaires nouvellement éloignés du pouvoir.

L' impunité de certains dirigeants de second rang ou fonctionnaires restés en place après la

chute des militaires ainsi que l'absence de mécanisme d' imputabilité des gouvernements

élus représentent autant de nouveaux défis politiques pour le sous-continent latino­

américain, sans compter la perte rapide de légitimité qu'essuient ces régimes en matière

d'opinion publique à partir des années 1990 (Payne et coll. , 2007: 271-297).

D'un point de vue économique, les transitions démocratiques que vivent les États

latino-américains s'accompagnent de la pire vague de stagflation et dè paupérisation que la

région n'a jamais connue. La décennie 1980, qualifiée de « perdue» par la Commission

'économique pour l'Amérique Latine et les Caraïbes (CEP ALC), se caractérise par une

détérioration généralisée, quoique différenciée en intensité et dans le temps, des conditions

économiques. L' inflation atteint dans plusieurs États les quatre ou. cinq chiffres, les

revenus par habitant déclinent d'environ 1 ° % pour l'ensemble de la région et plusieurs

pays rendus insolvables ne peuvent plus s' acquitter du paiement de leurs obligations

comme les salaires de la fonction publique ou le service de la dette (UNDP, 1991). Les

programmes de stabilisation et d'ajustement structurel sont donc entrepris dans ce contexte

de déclin et de volatilité économique. Ces nouvelles stratégies économiques se concentrent

sur l'établissement d'un contexte macroéconomique stable, sur la réduction' de la taille du

gouvernement et sur une stimulation du' secteur privé.

Ce qui est intéressant ici, c'est que ces réformes économiques, et problèmes qui les

accompagnent, s'inscrivent dans un contexte où les dirigeants qui les entreprennent sont

maintenant portés au pouvoir par les urnes. À plusieurs reprises, ces évènements

économiques représentent même des enjeux électoraux majeurs dans les campagnes

3 Les citations reportées dans ce mémoire Je sont dans la langue originale de l'auteur, et ce, dans le but de ne pas en modifier indument le sens.

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4

menant aux plus hautes fonctions politiques de l 'État. Les mesures et réformes

économiques entreprise~ dans ce contexte de démocratisation présentent en ce sens un fort

potentiel d ' interaction avec le processus de démocratisation en cours, et particulièrement

avec la tenue cl' élections libres et compétitives. Ce sont ces possibles répercussions, ainsi

que leur utilisation à des fins détournées, qui font l ' objet d 'une étude dans ce mémoire.

1.2 PROBLÉMATIQUE ET QUESTION DE RECHERCHE

Les systèmes électoraux basés sur la tenue d ' élections libres et démocratiques font

donc en sorte que les individus au pouvoir peuvent se retrouver à la fois architectes des

politiques et orientations économiques de leur pays et en même temps candidats à leur

propre réélection. Ce dédoublement de personnalité pousse à s' interroger sur la possible

utilisation des prérogatives gouvernementales à des fins électorales. Ce mémoire explore

donc l'impact de la tenue d'élections libres , et compétitives sur la performance

macroéconomique des pays latino-américains, phénomène connu sous le concept de

« cycle politique »4. Basé sur un article présenté par Karen L. Remmer (1993), il

reconsidère les conclusions avancées par cette auteure aux vues de profonds changements

contextuels et historiques en Amérique Latine. Dans son article, Remmer met en évidence

les fluctuations de l'économie de huit pays latino-américains en fonction du calendrier

électoral présidentiel, tout en précisant que ces variations s'opposent à ce que suggère la

théorie opportuniste des cycles politiques. Ses résultats montrent ainsi que non seulement

les élections n'ont pas, comme le prédit la théorie, modifié négativement la performance

macroéconomique des pays latino-américains, mais qu' elles ont au contraire facilité la

gestion et la régulation de certains problèmes économiques, notamment au niveau fiscal ,

par l ' application de nouvelles politiques (Remmer, 1993.: 404). Les conclusions présentées

dans cette étude par Remmer s' appuient cependant sur un contexte particulier, celui de la

décennie 1980. L' évolution qu'ont connues par la suite les situations économiques,

politiques et institutionnelles de ces pays emmène à reconsidérer les conclusions énoncées

par cette auteure dans son article.

4 L'expression « cycle politique» est utilisée dans ce mémoire pour désigner ce que la littérature anglophone qualifie de « political business cycle », ou PBC.

Page 17: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

5

L'étude de l' économie politique des élections latino-américaines, sur le modèle de

Remmer, est guidée par trois principales interrogations. Tout d' abord, est-ce que les

politiciens au pouvoir, au travers de leurs politiques macroéconomiques, tentent de

manipuler l'économie afin de favoriser leur réélection? Ensuite, existe-t-il des facteurs qui

favorisent la présence de ces manipulations? Et enfin, est-ce que les modèles théoriques

des cycles politiques développés pour les démocraties du bassin Nord Atlantique

s'appliquent également pour des pays caractérisés par une instabilité économique, des

institutions naissantes et une remise en question de la légitimité politique?

Ce mémoire propose donc de reprendre l' approche théorique développée par

Remmer et de l'appliquer cette fois-ci non seulement à la période étudiée par cette auteure

(1980-1990), mais de l'étendre en plus à la période temporelle 1991-2006. L'évolution

politique de l'Amérique Latine durant cette période permet du même coup d'accroître la

sélection des pays et élections étudiés. La question de recherche guidant ce projet de

recherche est la sui vante :

De quelles manières la tenue d 'élections présidentielles libres et

concurrentielles en Amérique Latine de 1980 à 2006 a-t-elle influencé la

performance macroéconomique ainsi que l 'élaboration des politiques

économiques des gouvernements au pouvoir dans ces pays?

1.3 INTÉRÊT ET JUSTIFICATIONS

Le fait que la performance économique est un déterminant majeur du soutien

politique récolte un important consensus au sein de l' abondante littérature scientifique qui

s'est intéressée à ce sujet (p. ex. Lewis-Beck, 1988; Lewis-Beek et Paldam, 2000;

Anderson, 2000). Par contre, l'idée voulant que « [some J vote-maximizing activities give a

rise to a sort of political business cycle» (Alt et Chrystal, 1983: 52) n'a pas permis

d'atteindre ce même niveau d'évidence empirique. Un nombre relativement important

d' auteurs se sont concentrés sur ce sujet (voir tableau 2.2, p.23) mais les résultats établis

jusqu'à ce jour n'ont pas permis de faire consensus sur le sujet. Les différentes études sur

Page 18: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

6

une même région ont même pa~fois conduit à des résultats contràdictoires. La présence

d'un « boom officiel» avant l'élection, comme le prédit la théorie opportuniste des cycles

politiques, semble donc être sujette aux situations et contextes spécifiques des pays étudiés.

Originellement proposés par N ordhaus (1975), les modèles des cycles politiques

ont ensuite été traités, et modifiés, par plusieurs auteurs, dont Linbeck (1976), Hibbs

(1977, 1987) et Alesina (1987). La majorité de la littérature scientifique concernant la

théorie des cycles politiques s' est concentrée sur les démocraties des pays développés, les

États-Unis accaparant à eux seuls la majeure partie de cette vaste littérature. Les pays de

l'OCDE ont aussi fait l' objet d'une attention considérable de la part des chercheurs.

Cependant, beaucoup moins d'auteurs se sont attardés à appliquer cette approche théorique

à des démocraties naissantes caractérisées par des niveaux d ' instabilité et de volatilité

économiques importants (Block, 2001). Les conclusions de leu~s études contrastent avec

celles relatives aux pays du bassin Nord-Atlantique. Il y a donc des raisons de croire que

l'Amérique Latine de la période 1991-2006, et les jeunes démocraties qui la composent,

répondent différemment à 1) la théorie des cycles politiques basée sur les expériences des

pays du bassin Nord Atlantique et 2) aux conclusions de Remmer (1993) concernant la

période 1980-1991.

En effet, les crises et fluctuations économiques ayant accompagné la transition des

économies latino-américaines d'un modèle autarcique vers une économie de marché

peuvent rendre les individus particulièrement sensibles aux questions économiques

(Roberts et Wibbels, 1999). Cette sensibilité accrue des électeurs favorise du même coup

l'utilisation de l'économie à des fins électorales. Ensuite, ces crises économiques,

affaiblissant potentiellement les dirigeants politiques au pouvoir (Remmer, 1991 ;

Echegaray, 2005), peuvent les pousser à chercher des sources d'appui se situant au-delà

des propositions de leur programme électoral. La reprise économique qui a caractérisé

plusieurs États latino-américains durant la période post-19905 permet aussi de croire à un

meilleur contrôle des gouvernements sur l' économie, et donc à une plus grande

disponibilité des ressources, rendant sa manipulation plus aisée. Un apport majeur de ce

5 Voir à ce sujet le tableau 3.1 , pAO.

Page 19: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

7

mémoire est précisément de permettre de tester les modèles de cycles politiques dans

différents contextes économiques. De plus, le fait que la majorité des pays étudiés soient de

«jeunes» démocraties fait en sorte qu' il y a plus de chance que de tels cycles soient

mesurés dans ces pays comparativement aux « vieilles » démocraties (Brender et Drazen,

2005). Le clientélisme et le népotisme, historiquement présents et ayant de profondes

racines dans la structure sociale et politique latino-américaine (Roberts, 2002: 22), peuvent

aussi favoriser une attitude démagogique des gouvernements envers la population.

Enfin, s' intéresser aux cycles politiques permet de mettre en évidence l' étendue des

facteurs influençant le processus de choix des politiques. Schématisé par Persson et .

Tabellini (2003), et représenté à la figure 1.1 , ce processus complexe fait intervenir divers

acteurs sociétaux et se déroule en plusieurs étapes qui interagissent entre elles. Ainsi, les

institutions politiques en place agrègent, notamment par l'intermédiaire des élections, les

différentes préférences concernant les choix de politiques et permettent d'aboutir à des

décisions de la part des gouvernements (zone droite de la figure 1.1). Ces différentes

politiques affectent l'économie et reviennent interagir avec les préférences des différents

acteurs (zone gauche de la figure 1.1). En ce qui concerne les cycles politiques, nous nous

situons au niveau de l'interaction entre les institutions politiques et la performance

économique. Comme il a été souligné par Persson et Tabellini (2004: 76), « [an] dverall

message is /oud and c/ear: constitutiona/ ru/es systematically shape economic policy ».

Ainsi, la nature des institutions - qui est régie par les constitutions - peut influencer le

choix des différentes politiques économiques. L' étude de l' économie politique des

élections en Amérique Latine permet donc d' intégrer les facteurs institutionnels

schématisés par Persson et Tabellini au modèle d' analyse des cycles politiques.

Page 20: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

Figure 1.1 Processus de choix des politiques

Performance économique

Marché

1.4 REMARQUES CONCEPTUELLES

Préférences concemantles

politiques

Choix des politiques

Règles constitutionnelles

Résultats politiques et électoraux

8

L'étude des cycles politiques implique de faire référence à la notion de démocratie.

Bien que la définition de ce concept ne fasse pas consensus, il est généralement admis que

«free and fair elections are the cornerstone of any democratic system of government »

(Snyder and Samuels, 2001: 146). Depuis l'élection de Violeta Chamoro à la tête de l'État

nicaraguayen en 1990, l'ensemble de l'Amérique Latine, avec la notable exception de

Cuba, est ma~ntenant engagé dans un processus de démocratisation où l'élection comme

mode d'accession au pouvoir en est une des caractéristiques principales. L 'objectif

développé dans ce mémoire est donc de mieux cerner l' impact de la tenue d'élections

présidentielles libres et concurrentielles, élément majeur de la démocratisation, sur les

politiques et performances macroéconomiques.

Page 21: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

9

S' intéresser à la _ démocratie comporte cependant des risques conceptuels fort

importants. Le terme démocratie a été tout d'abord sur utilisé par les politiciens qui se l'ont

souvent accaparé à des fins personnelles et opportunistes. Il a été d'un autre côté délaissé

par les chercheurs , en sciences sociales par peur des ambigüités qui entourent ce concept et

qui mènent rapidement sur le sentier de la subjectivité, lequel n'est pas le préféré des

chercheurs dans ce domaine. Il est donc essentiel de fixer les bases au travers desquelles se

fera l'utilisation du terme démocratie dans ce mémoire. Génériquement, la démocratie se

définit comme «a unique system for organizing relations between rulers- and ruled»

(Schmitter et Karl, 1991: 76). Définir la démocratie comme un mode d'organisation entre

différents groupes sans en spécifier certains éléments minimaux a amené plusieurs dérives

conceptuelles voulant être évitées ici. Ces éléments minimaux concernent ceux qui font en

sorte que leur présence ne garantit pas le caractère démocratique d'un régime, mais que

leur absence, elle, en fait nécessairement un système non démocratique . .

D'un côté, la doctrine de l' électoralisme (Schumpeter, 1950: 269) a amené certains

à soutenir, que la mise en place .d'un processus électoral libre est l'élément central, sinon

unique, d'une démocratie. De l'autre, repose une vision idéaliste de la démocratie où celle­

ci est perçue non pas comme un moyen, mais comme une fin, un idéal permettant de régler

l'ensemble des problèmes de gouvernance puisque reposant sur la volonté majoritaire des

citoyens. L'utilisation qui est faite ici du terme démocratie se détache évidemment de ces

deux extrêmes.

Trois caractéristiques principales découlènt de notre utilisation du concept de

démocratie. Tout d'abord, celle-ci n'est pas entendue comme un idéal à atteindre. Il s' agit

ici d'un moyen pouvant produire des effets à la fois positifs et négatifs - l' objet de ce,

mémoire est précisément d'en mesurer un de ses impacts potentiellement négatifs. Ensuite,

la démocratie s' inscrit dans un processus réversible. Il peut y avoir ainsi des avancées et

reculs de celle-ci et il est possible de classer les pays sur un continuum plus ou moins

démocratique. Enfin, l'utilisation du terme démocratie se détache d'un sens positif de

justice sociale utilisé notamment par les acteurs politiques. La définition proposée par Karl

Page 22: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

10

(1990: 2), et inspirée en grande partie de Dahl, est celle qui se rapproche le plus de notre

utilisation. La démocratie est donc entendue comme :

Un ensemble d 'institutions qui permet à la population de choisir leurs décideurs

par l 'intermédiaire d 'élections libres, compétitives et régulières; s 'inscrivant dans

un contexte de libre de participation citoyenne et associative, du respect des règles

de 'droit, de responsabilité et représentativité des décideurs ainsi qUf! du contrôle

des civils sur le militaire.

Cette parenthèse concernant l' utilisation du concept de démocratie dans ce mémoire

est essentielle à l'absence d' ambigüités. Le lecteur doit aussi noter que le sujet de ce

mémoire ne vise pas à alimenter le débat concernant la définition et l'utilisation du concept

de démocratie 6•

6 Le lecteur intéressé par ce sujet peut se référer en autres aux auteurs suivants: Schmitter et Karl (1991), Karl (1990), Drake et Silva (1986), BoHen (1990) et Dryzek, (2000)

Page 23: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

Il

CHAPITRE 2

ÉLECTIONS ET MACROÉCONOMIE: QUELS IMPACTS?

2.1 LA THÉORIE DES CYCLES POLITIQUES

La théorie des cycles politiques est basée sur deux principaux postulats. Le premier

concerne la capacité des gouvernements au pouvoir à mettre en œuvre des politiques

économiques qui induisent des résultats prévus et anticipés . par eux. Ainsi, les

gouvernements ont un contrôle direct et connu par eux sur la performance économique de

leur pays. Le second, inspiré de la théorie du vote économique (p. ex. Lewis-Beck, 1988;

Nannestad et Paldam, 1994; Lewis-Beck and Paldam, 2000), concerne l' idée voulant que

les électeurs sanctionnent ou récompensent électoralement les gouvernements au pouvoir

pour leur performance économique. Ainsi, les choix de politiques économiques, et les

résultats qu' elles entrainent, peuvent avoir des effets considérables sur l'appui électoral des

gouvernements au pouvoir. La conséquence de ce phénomène largement étudié par la

littérature scientifique est que la performance économique va théoriquement suivre des

cycles reliés au calendrier électoral afin de faciliter la réélection des gouvernements qui

engendrent cette performance.

La littérature scientifique concernant les cycles politiques s'est développée en deux

approches théoriques différentes, toutes deux basées sur une évolution cyclique de

l' économie engendrée par le calendrier électoral (Brenden et Drazen, 2005). Ces deux

approches se distinguent par la nature soit partisane, soit opportuniste des motivations qui

induisent ce type de comportement chez les gouvernements au pouvoir. Cette distinction,

présentée au tableau 2.1 où seuls les ouvrages fondateurs sont répertoriés, a été

originellement résumée par Alesina, Roubini et Cohen (1999: 2) et ensuite modifiée par

Franzese (2002: 373). Ces deux approches théoriques font également une distinction entre

les types de formation des attentes et d 'évaluation des gouvernements chez les électeurs.

La première distinction correspond à l' évaluation de l ' économie de manière adaptative

Page 24: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

12

rétrospective, tandis que la seconde se base sur une évaluation de type rationnelle

prospective. Chacun de ces modèles est discuté séparément à la section suivante (section

2.1.1 ).

Tableau 2.1 Modèles théoriques des cycles politiques

Modèle

Opportuniste

Partisan

2.1.1 La théorie partisane

Formation des attentes et évaluation Adaptative rétrospective

Nordhaus (1975), Lindbeck (1976), Tufte (1978)

Hibbs(1977, 1987a, b)

Rationnelle prospective

Cukierman -Meltzer (1986), Rogoff and Sibert (1988), Rogoff (1990), Person and Tabellini (1990)

Alesina (1987, 1988), Alesina and Rosenthal (1995), Alesina, Roubini and Cohen (1999)

La théorie partisane des cycles politiques (p. ex. Hibbs, 1975, 1977, 1992; Alesina,

1987, 1988; Alesina et Rosenthal, 1995; Alesina, Roubini et Cohen, 1999) implique une

variation de l' économie en fonction des motivations partisanes - motivations induites par

la dichotomie gauche droite - des gouvernements au pouvoir. Selon cette approche,

« right-wing and left-wing parties have difJerent position on economic issues and hence

difJerent macroeconomic objectives» (Drazen, 2000: 88). Ainsi, les partis de gauche

favorisent une diminution du chômage au profit d'une augmentation de l'inflation,

contrairement aux partis de droite qui préfèrent une diminution de l'inflation. Fondée

principalement sur des évidences empiriques tirées des élections législatives états­

uni ennes, cette approche théorique s' applique mal au contexte latino-américain et ne sera

donc pas étudiée ici7. En effet, comme le souligne Schuknecht (1996: 158), «this

approach is hardI y applicable to developing countries where the distinctions between

7 Pour une excel1ente revue de la littérature concernant la théorie partisane des "Cycles politiques, le lecteur in~éressé peut se référer entre autres au chapitre III de Alesina, Roubini et Cohen (1999).

Page 25: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

13

parties do not always exhibit the typical Western right-left pattern ». Puisque la

polarisation gauche droite à l' origine du développement de la théorie partisane des cycles

politiques n'est pas applicable au contexte latino-américain, cette approche n 'est pas

adéquate pour anticiper les variations cycliques de l'économie dans ces pays. De plus, les

orientations partisanes des gouvernements en Amérique Latine sont souvent moins

apparentes en raison d'une plus grande importance politique du président par rapport à son

parti ainsi que par la · présence de ce qui a été qualifié d 'hyperprésidentialisme

(Ducatenzeiler et Oxhorn, 1994: 19), ce qui nous amène à laisser tomber cette approche

théorique des cycles politiques pour cette recherche.

2.1.2 La théorie opportuniste

La seconde approche théorique, qualifiée d'opportuniste, et étudiée dans ce

mémoire, concerne la tentative de facilitation de la réélection des présidents au pouvoir par

une manipulation de certains déterminants macroéconomiques. La littérature scientifique

relative à la théorie opportuniste des cycles politiques s' est construite en deux phases

distinctes.

2.1.2.1 Le modèle traditionnel

Le modèle initial, proposé par Nordhaus (1975), Lindbeck (1976) et Tuf te (1978)

au milieu des années 1970 met en scène des gouvernements stimulant artificiellement

l' économie en périodes préélectorales et électorales. Ce modèle implique . un cycle

économique correspondant à la durée du mandat présidentiel des gouvernements au

pouvoir et dont le boom se situe aux périodes préélectorales et électorales afin de favoriser

leur réélection. Ce premier modèle a été qualifié d'opportuniste traditionnel ou de pré

rationnel (Alesina et Roubini, 1992). Il met tout d' abord en scène, à la manière de Downs

(1957), des polit.iciens identiques dont le ~eul objectif est la réélection, d'où le qualificatif )

d'opportuniste. Ceux-ci préfèrent rester en poste plutôt que de perdre leur réélection, ce qui

les amène à mettre en place des politiques économiques favorisant leur réélection. Ensuite,

la poursuite de leurs politjques macroéconomiques est basée sur l'application pratique de la

Page 26: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

14

courbe de Phillips (1958). Cette relation est représentée à la figure 2.2 et postule

l'existence d'une relation empirique inverse de court terme entre le taux de chômage et le

taux d' inflation. Elle permet aux politiciens en place de manipuler indirectement l' inflation

et le chômage - ainsi que par extension la croissance économique - par le biais de

politiques influant sur l'un ou l'autre de ces indicateurs macroéconomiques. L'utilisation

de cette relation empirique pour favoriser leur réélection a comme conséquence une

évolution cyclique de l'économie en fonction du calendrier· électoral.

Figure 2.2 Courbe de Phillips

T alL~ (le cholna ge

Dans ce modèle, les politiciens font face à des électeurs myopes et naïfs, qui

oublient le passé, qui n'ont pas conscience des motivations électorales des représentants

politiques et qui ne possèdent pas une connaissance suffisante de l' économie pour

comprendre les interactions économiques issues . de la courbe de Phillips (Alesina, Roubini

et Cohen, 1999; Block et Vaaler, 2004; Price, 1997). Ces électeurs sont donc considérés

comme , formant leurs attentes de manière adaptative rétrospective, c' est-à-dire qu'ils

«base their voting decision largely on the recent performance of governments »

Page 27: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

15

(Schuknecht, 1996: 157)~ Ainsi, leur évaluation de la performance économique des

gouvernements se base uniquement sur leurs observations du passé récent, et non de

l 'ensemble des observations passées. Cette évaluation adaptative ne prend donc pas en

compte l'ensemble de l' information disponible. De la sorte, les électeurs ne peuvent pas

être qualifiés de «rationnels» quant à la façon de construire leurs évaluations de

l' économie ainsi que leurs anticipations futures de celle-ci. Ils ont donc plus de chance de

récompenser, comme le prédit la théorie du vote économique (p. ex. 'Lewis-Beck, 1988),

les gouvernements au pouvoir pour des conditions économiques favorables juste avant

l' élection, et ce, sans tenir compte des variations passées de l' économie ou les

ralentissements postélectoraux futurs que ces cycles impliquent. Les électeurs sont ici

floués indéfiniment par les politiciens opportunistes.

Dans ce modèle de base, les électeurs attribuent donc une importance plus élevée

aux conditions économiques en périodes préélectorales et électorales qu'aux autres

moments. Ils préfèrent la croissance économique et n'apprécient pas de hauts niveaux

d'inflation et de chômage. Ce modèle prédit donc que les gouvernements au pouvoir vont

obtenir un support plus important des électeurs si les conditions économiques, à savoir la

croissance économique, l'inflation et le chômage, leur sont favorables en période

électorale. Dans le cas contraire, les dirigeants au pouvoir ont plus de chance de perdre leur

réélection au profit d'un concurrent. En ce qui a trait aux conséquences pratiques et

concrètes, ce modèle opportuniste traditionnel prédit une augmentation de la croissance

économique et une diminution du chômage en période préélectorale, une augmentation du

niveau d'inflation dans la période électorale et finalement, une récession postélectorale

(Alesina et Roubini, 1990, 1992; Alesina, Roubini et Cohen, 1999; Brenden et Drazen,

2005; Drazen 2000a, 2000b; Khemani, 2000; Price, 1997; Schultz, 1995).

Le problème avec cette première approche théorique est, comme suggéré par

McCallum (1978), que pour agir de la sorte, les électeurs doivent être considérés comme

irrationnels. Ils doivent oublier le passé et être aveugles aux manipulations des politiciens

opportunistes, et ce, élection après élection. Évidemment, comme le mentionne Price

(1997), la réalité semble être quelque peu différente. Un autre problème avec ce premier

Page 28: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

16

modèle est qu'il fait complètement abstraction du processus de choix des politiques,

processus rapidement mentionné à la figure 1.1 du premier chapitre. Cette idée d'un

«politico-economic model » qui inclue le processus de choix des politiques est abordé par

Frey (1978) et Frey et Schneider (1978, 1981)8. Ce sont ces critiques, ainsi que les

modifications apportées au modèle traditionnel des cycles politiques, qui ouvrent la voie à

une seconde génération de modèles opportunistes des cycles politiques: le modèle

rationnel.

2.1.2.2 Le modèle rationnel

L' intérêt et la pertinence du modèle N ordhaus-Linbeck sont ainsi balayés dans les

années 1970 par une véritable petite « révolution» théorique (Rogoff et Sibert, 1988b: 1)

qui modifie profondément les sciences politiques, et particulièrement l' économie politique.

Issue des sciences économiques, l'application de la rationalité à la formation des atte~tes

rend obsolète la première version du modèle opportuniste des cycles politiques, celle

appelée « traditionnelle» ou « irrationnelle ». La seconde génération de ce modèle a été

formalisée par Pers son et Tabellini (1990) .devant l'insatisfaction théorique et conceptuelle

soulevée par 1) l'inexistence de préférences partisanes ou personnelles chez les politiciens

au pouvoir, 2) la naïveté et la myopie des électeurs et 3) la formation des attentes et

évaluation de la performance économique de manière adaptative rétrospective. Le modèle

précédent où les électeurs n'apprennent pas des évènements du passé et où les politiciens

ne perdent jamais leur crédibilité a ainsi été remplacé par une seconde version. Dans celle­

ci, les électeurs ont une évaluation rétrospective plus large des gouvernements leur

permettant d'anticiper leur performance économique future. Ceux-ci peuvent également

être sanctionnés P9ur avoir essayé de manipuler l'économie à .des fins électorales. Ce

second modèle est qualifié « d'opportuniste rationnel » en référence à l' application de la

notion de rationalité dans la formation des attentes9. La rationalité est entendue ici comme

« [a] goal-directed, optimizing behavior » (Suzuki et Chappell, 1996: 224) qui permet aux

8 Cette incorporation du processus de décision politique dans le modèle des cycles politiques a cependant été accompagnée de nombreuses critiques de la part d'auteurs s' intéressant à la question, voir entre autres à ce sujet AIt et Christal (1981). 9 L 'application de ]a notion de rationalité dans la formation des attentes est attribuable au Nobel de l'économie de 1995 Robert Lucas.

Page 29: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

17

électeurs de ne pas être dupés perpétuellement pas des politiciens opportunistes, d 'avoir

une évaluation rétrospective plus large des performances du gouvernement au pouvoir et

de comprendre la relation éntre le chômage et l' inflation (courbe de Phillips) permettant

d' identifier les manipulations potentielles des gouvernements au pouvoir cherchant la

réélection plutôt que l' intérêt général.

Ce second modèle se distingue du précédent à deux niveaux. Tout d' abord, la

rationalité des acteurs économiques fait en sorte que la performance macroéconomique est

plus difficilement manipulable. En effet, comparativement au modèle traditionnel, les

individus sont capables de distinguer entre la situation réelle de l' économie et sa

manipulation, ce qui les emmène à répondre différemment aux stimuli économiques en

fonction de leurs contextes. Ainsi, le « boom» préélectoral peut être interprété non pas

comme un signe de compétence du gouvernement au pouvoir, mais bien comme une

tentative · de manipulation de l'économie. Les électeurs peuvent ainsi avoir un

comportement économique différent d'une situation où il y aurait une véritable

amélioration de l'économie en anticipant les effets négatifs postélectoraux de cette

manipulation. Ainsi, les impacts économiques de la manipulation sont attendus et donc (

contrecarrés, ce qui augmente d'autant plus les chances du gouvernement au pouvoir de

perdre les élections.

Ensuite, la rationalité des électeurs fait en sorte qu' ils ne peuvent être trompés

indéfiniment par les politiciens. Les électeurs peuvent se rendre compte de ce type

d' actions et les sanctionner (Alesina et Roubini, 1992). Ils construisent ainsi leurs attentes

concernant la performance du gouvernement au pouvoir en fonction de leur performance

passée de long terme. Ils peuvent se rendre compte des manipulations présentes, juger la

performance économique du président au pouvoir pour l'ensemble de son mandat - et non

seulement pour la période préélectorale comme c' est le cas avec le modèle N ordhaus­

Lindbeck - et garder en mémoire les précédentes tentatives · de manipulation de

l' économie. Ces caractéristiques, qualifiées de rationnelles chez l' électeur, . font en sorte

que les manipulations de l'économie à des fins électorales par les gouvernements au

Page 30: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

18

pouvoir ne sont pas aussi aisées à mettre en œuvre que le suggère le modèle traditionnel

des cycles politiques

Ce second modèle incorpore à la fois la notion de compétence chez le politicien et

celle d'asymétrie d' information chez l'électeur. La compétence du politicien, entendue

comme sa capacité à réduire le gaspillage budgétaire, à promouvoir la croissance sans

inflation et à réduire la prépondérance des crises économiques (Alesina, 1987, 1988;

Alesina et Roubini, 1992; Alesina, Roubini et Cohen, 1999; Block et Vaaler, 2004;

Cukierman et Meltzer, 1986; Persson et Tabellini; 1990; Rogoff, 1990; Rogoff and Sibert,

1988) est connue par celui-ci, mais pas par l'électeur. Pour juger de la compétence du

gouvernement, l 'électeur doit donc se baser sur le résultat des politiques économiques

mises èn place par le gouvernement au pouvoir. Un problème de hasard moral est engendré

par cette situation. En effet, il y a une asymétrie d'information entre les électeurs et le

gouvernement au pouvoir puisque ce dernier est le seul conscient de son niveau de

compétence. L'électeur ' juge plutôt de celle-ci par l'intermédiaire de la performance

économique du gouvernement. Ainsi, les politiciens ont intérêt à apparaître compétents

s'ils veulent être réélus, particulièrement au moment des élections (Alesina, Roubini et

Cohen, 1999). Les électeurs ' vont être plus enclins à voter pour un président au pouvoir si

le gouvernement fait preuve de compétences, c' est-à-dire si le contexte économique est

favorable au moment ' des élections puisque cela signale sa capacité à fournir des biens

publics (Rogoff et Sibert, 1988; Rogoff, 1990). S'engage donc une variation cyclique de la

performance macroéconomique en fonction du calendrier électoral.

Ces cycles, contrairement au premier modèle, présentent d'un point de vue pratique

une plus faible amplitude (Rogoff et Sibert, 1988) en ce qui a trait aux taux de chômage ou

aux indicate~rs monétaires et fiscaux ainsi qu'une possible inexistence pour ce qui est de la

croissance économique (Alesina et Roubini, 1992). Comme le soulignent Alesina et

Roubini (1992: 664), « the assumption of rationality reduces the extent and the likelihood

of regular political cycles, although if does not eliminate them ». Cette réduction de

l' étendue et de la prépondérance des cycles est due au fait que les politiciens essaient

d'apparaitre comme compétents et non comme des manipulateurs de l ~ économie. En effet,

Page 31: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

-19

s'ils mettent en œuvre des politiques économiques créant des cycles de grandes ampleurs

contrastant fortement avec la situation économique passée, les électeurs peuvent suspecter

une manipulation. Ceux-ci ne vont donc non pas voter pour les gouvernements qui mettent

en place un boom économique trop important en période électorale, mais bien pour ceux

qui maximisent dans le long terme leur utilité. Cette ,maximisation de l'utilité se fait sur des

éléments macroéconomiques précis, entre autres monétaires et fiscaux (Rogoff et Slbert,

1988), et non sur l' ensemble de l'économie (Alesina et Roubini, 1992). La croissance n'est

donc pas sujette à des variations cycliques dans ce modèle, contrairement au précédent.

L'analyse présentée dans ce mémoire repose sur cette approche théorique.

2.2 LES ÉVIDENCES EMPIRIQUES

Bien qu'il existe une certaine cohésion dans le domaine théorique entre les auteurs

ayant abordé le phénomène des cycles politiques, il en va tout autrement pour ce qui est

des résultats empiriques. Les évidences empiriques présentées ci-dessous concernent "'-

uniquement le modèle opportuniste des cycles politiques1o. À ce titre, Alesina (1988),

Alesina, Roubini et Cohen (1999), Golden et Poterba (1980), Hibbs (1987), Klein (1996),

McCallum (1978) et Paldam (1979) n'ont trouvé aucun support empirique positif pour une

variation cyclique de la croissance, du chômage ou de- l'inflation pour les États-Unis.

Toujours pour ce pays, la présence de cycles économiques en fonction du calendrier

électoral a toutefois été mise en évidence pour certains indicateurs fiscaux et monétaires

(Haynes et Stone, 1989, 1990, 1994; Bizer et Durlauf, 1990). Ces manipulations sont

particulièrement significatives en ce qui concerne la période préélectorale, confortant ainsi

les attentes théoriques développées par Nordhaus (1975). Tufte (1978) souligne aussi la

présence de variations cycliques des transferts fiscaux et de l'offre de la monnaie en

fonction du calendrier électoral. Ces manipulations ne sont cependant présentes que pour

quelques élections états-uniennes. Cet auteur met également en évidence, comme Hibbs

(1987), une augmentation des revenus disponibles pour le gouvernement en période

électorale. Alesina (1988) confirme les résultats de Tufte (1978) pour les transferts fiscaux

10 Pour un résumé des évidences empiriques relatives au modèle partisan des cyc1es politiques, Je 1ecteur intéressé peut se référer aux excellents chapitres 4, 6 et 7 de A1esina, Roubini et Cohen (1999).

Page 32: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

20

en excluant cependant les données antérieures aux années 1950. En ce qui a trait aux

politiques monétaires et à l'offre de la monnaie, Beck (1987) et Grier (1987, 1989),

contredisant Allen (1986) ainsi qu'Alesina, Roubini et Cohen (1999), démontrent la

présence de cycles significatifs pour les quatre années du mandat présidentiel états~unien.

Pour terminer, Frey et Schneider (1978) confirment que la popularité des présidents au

pouvoir influe négativement sur la mise en place de telles manipulations préélectorales.

Comme le résument Alesina, Roubini et Cohen (1999: 108), les évidences empiriques

soutenant le modèle opportuniste des cycles politiques sont au mieux faibles et concernent

majoritairement les politiques fiscales.

Puisqu' il n 'y a pas de raison pour que les États-Unis représentent un cas unique

quant à la présence des cycles politiques, d' autres pays industrialisés ont aussi reçu une

attention considérable de la part des chercheurs s' intéressant à ce phénomène. Deux

principaux aspects du système politique états-unien permettent cependant d'anticiper des

résultats empiriques différents pour les autres pays industrialisés. Tout d' abord, le

bipartisme structurel de l'organisation partisane aux États-Unis n'est pas commun, ou aussi

fort du moins, dans les autres pays industrialisés. En effet, la forte structure bipartite aux

États-Unis amène les partis à proposer des politiques qui se rapprochent de l'électeur

médian (Alesina, 1987: 71). Cette similarité au niveau des politiques économiques peut

favoriser une manipulation de l' économie par les gouvernements au pouvoir pour se

démarquer momentanément de l ' autre parti. Les cycles politiques devraient donc être plus

importants aux États-Unis comparativement aux autres pays développés. Aussi,

contrairement aux États-Unis, l 'organisation du calendrier électoral de beaucoup de pays

industrialisés ne repose pas sur des élections à jours fixes. La possibilité de choisir le

moment des élections peut favoriser la mise en place de manipulations cycliques au profit

du gouvernement au pouvoir.

Pour les pays de l'OCDE, Alesina (1989), Alesina, Roubini et Cohen (1999),

Alesina et Roubini (1992) n ' ont trouvé aucune variation cyclique des taux de chômage ou

de la croissance en fonction des élections. Ces auteurs, en particulier Alesina, Roubini et

Cohen (1999), ont cependant observé une légère augmentation postélectorale de l ' inflation

Page 33: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

- -- --- ----------- - ------,

21

pour 18 pays de l'OCDE, à · l' exception des États-Unis, confortant ainsi le modèle

inflationniste de Rogoff et Sibert (1988). Paldam (1979) a quant à lui noté la présence

d'une variation cyclique, bien que de faible amplitude, pour ces mêmes déterminants

économiques dans 17 pays de l'OCDE. Frey et Schneider (1978), Golden et Poterba,

(1980), Keil (1988), Schultz (1995) ainsi que Carlsen (1997) ont finalement souligné que

l' intensité des cycles politiques dans les pays de l'OCDE est plus élevée lorsque la

popularité des présidents au pouvoir est faible.

Contrairement à leurs contreparties . du bassin Nord Atlantique, les pays

traditionnellement qualifiés de « en voie de développ~ment » ont reçu beaucoup moins

d' attention dans la littérature scientifique. Lorsqu'existante, cette littérature se concentre

presque exclusivement sur le modèle opportuniste des cycles politiques (Block, 2002) pour

les raisons mentionnées plus haut (voire section 2.1.1.1 ci-dessus). Les implications

pratiques de ce phénomène apparaissent particulièrement importantes pour les pays en

développement pour deux principales raisons. Premièrement, les mécanismes de contrôle

et de contrepoids politiques (checks and balances) sont moins importants et moins

développés dans les jeunes démocraties, laissant plus de place pour de possibles

manipulations. En ce sens, selon Schuknech, « there should be even more room for

election-oriented poUcy making in developing countries [whereJ checks and balances are

often /ittle developed and the incumbent government has significant monetary and

budgetary discretion » (Schuknech, 1996: 158). Ensuite, la nécessité d' implantation de

réformes économiques importantes pour les pays les moins développés économiquement

introduit la dualité réforme/élection où la première interagit négativement avec la seconde.

Ainsi, les manipulations de l' économie avant l' élection peuvent représenter une

échappatoire temporaire à l' insatisfaction provoquée par ces, réformes électoralement

difficiles à mettre en place et à faire accepter par la population.

Ici toutefois, et contrairement aux pays les plus industrialisés, les résultats révèlent

la présence de variations cycliques de l' économie en fonction des élections,

particulièrement en ce qui a trait aux cycles fiscaux (Drazen, 2000). La zone étudiée ainsi

que la période temporelle en question apparaissent aussi influencer la nature des résultats.

Page 34: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

22

Ben-Porath (1975) et Brender (1999) obtiennent respectivement des résultats positifs pour

les taxes et les politiques fiscales en Israël ll . En particulier, Ben-Porath (1975) observe que

les taxes diminuent généralement en période préélectorale pour augmenter par la suite, le

phénomène étant particulièrement important pour les élections israéliennes de 1982.

Krueger et Turan (1993), concernant la Turquie, mettent aussi en relief des variations

cycliques des politiques fiscales cohérente.s avec les prédictions de la théorie opportuniste

des cycles politiques pour la période 1958-1997. Block (2002) et Fouda (1997) soulignent

quant à eux la présence, encore une fois conséquente avec les prédictions du modèle

opportuniste, de cycles pour la politique monétaire en ce qui concerne respectivement 35

pays d'Afrique subsaharienne ainsi que le Cameroun. S' intéressant à 35 pays en voie de

développement pour la période 1970-1992, Schuknecht (1996, 1999, 2000) obtient des

résultats positifs pour les dépenses publiques et les déficits fiscaux. Shi et Svensson (2000,

2002) trouvent finalement que les cycles politiques concernant les transferts et déficits

fiscaux sont plus élevés dans les pays en voie de développement.

En ce qui concerne spécifiquement l'Amérique Latine, les résultats divergent en

fonction de la période analysée et des variables mesurées. Remmer (1993) ne trouve

aucune variation cyclique de l' économie en période préélectorale, mais souligne la

présence d'une augmentation postélectorale de l'inflation, d'une dépréciation

postélectorale des taux de change et d'une augmentation des ajustements fiscaux après

l' élection pour certains des huit pays latino-américains qu'elle analyse - ce qui contredit la

théorie opportuniste des cycles politiques. Ces résultats, discutés brièvement

précédemment (voir section 1.2), pointent dans la direction d'un impact potentiellement

positif du processus électoral sur la performance économique. Arnes (1987), à l'opposé,

démontre la présence de cycles pour les d~penses publiques de 17 de ces pays pendant la

période 1947-1982. Ces résultats sont cependant à prendre avec certaines précautions étant

donnée 'la nature non libre et concurrentielle, selon nos critères méthodologiques, des

élections étudiées par cet auteur. Kraemer (1997) ainsi que Rojas-Suarez et coll. (1998)

soulignent que les gouvernements latino-américains semblent plus prompts à mettre en

Il Israël ne peut pas être qualifié de « pays en voie de développement ». Cependant en raison du niveau de développement de la structure économique de ce pays à J'époque de l'étude de Ben-Porath (1975), ainsi que de sa situation géographique, il est classé dans cette catégorie de pays.

Page 35: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

23

place des politiques fiscales expansionnistes en périodes électorales. Finalement, Gonzalez

(1999), pour le Mexique, et Edwards (1994) pour le Chili, obtiennent des résultats positifs

pour respectivement les dépenses publiques et l'inflation.

Les principaux résultats empiriques concernant le modèle opportuniste des cycles

politiques sont présentés au tableau 2.2. Il y apparait une dissimilitude , entre les pays du

bassin Nord-Atlantique et ceux des pays en voie de développement, ces derniers pointant

de façon claire vers une évidence empirique positive.

Page 36: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

24

Tableau 2.2 Évidences empiriques des cycles politiques

Résultats Bassin Nord Atlantique Pays en développement

Positifs Tufte (1978), US Krueger et Turan (1993), Turquie Klein (1996), US Schuknecht (1996, 1999, 2000), Beck (1987), US PVD Grier (1987, 1989), US Shi et Svensson (2000), PVD Haynes et Stone (1989, 1990, 1994), Ames (1987), Kraemer (1997), US Rojas-Suarez et coll. (1980), Paldam (1979), OCDE Amérique Latine Frey et Schneider Gonzalez (1999), Mexique (1978) , OCDE Edwards (1994), Chili Keil (1988), OCDE Carlsen (1997), OCDE

Mixtes Alesina (1988), US Ben-Porath (1975), Israël Bizer et Durlauf (1990), US Brender (1999), Israël Alesina, Roubini et Cohen (1999), Block (2000), Afrique OCDE subsaharienne

Fouda (1997), Ca'!leroun

Négatifs Allen (1986), US Remmer (1993), Amérique Latine Alesina (1989), US Alesina, Roubini et Cohen (1999), US McCallum (1978), US

Golden et Poterba (1980), US Hibbs (1987), US Paldam (1979), US Alesina (1989), OCDE Alesina et Roubini (1992), OCDE Lewis-Beek (1988), OCDE

2.3 LES IMPACTS INSTITUTIONNELS

L' analyse des impacts institutionnels comme facteurs d' explication des cycles

politiques représente notre deuxième partie d' analyse dans ee mémoire. Il a été mis en

évidence à ce suj et que :

Page 37: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

electoral and partisan cycles in policies and outcomes should emerge in ail

democracies, but to degrees and in characters heavily conditioned by multiple

interactions among international and domestic political-economic institutional,

structural, and strategie conditions (Franzese, 2002: 371).

25

Les déterminants institutionnels ont cependant été inclus tardivement dans la

littérature. Pers son et Tabelini (2003) ont tout d'abord souligné le fait que les règles

électorales ont une influence importante sur le phénomène des cycles politiques. En effet,

ces auteurs affirment que les pays régis par un système électoral majoritaire diminuent les

taxes en période électorale contrairement aux systèmes proportionnels qui augmentent pour

cette même période les investissements relatifs aux services publics. Ils soulignent aussi

que les diminutions de taxes en période préélectorale sont tout autant communes aux

régimes de types présidentiels que parlementaires. Cependant, les diminutions dans les

dépenses gouvernementales ainsi que les augmentations de taxes en période postélectorale

sont plus importantes pour les régimes présidentiels. Suivant Persson et Tabelini, Brender

et Drazen (2005) spécifient quant à eux que les cycles de déficit fiscal ne concernent que

les régimes parlementaires, et ce, dans ce qu' ils identifient comme étant les « vieilles»

démocraties, c' est-à-dire les démocraties du bassin Nord Atlantique.

L' effet négatif des élections à dates fixes sur les cycles fiscaux a également été mis

en évidence par Brender et Drazen (2005) ainsi que par Shi et Svensson (2006). Ces

derniers auteurs soulignent aussi que le niveau de corruption ainsi que les activités de

recherche de rentes représentent des facteurs amplifiant les cycles politiques. De plus,

selon ces auteurs, le niveau d'information des électeurs a un effet inverse sur la présence

de ce phénomène économico-électoral. Brender et Drazen (2005) ainsi que Gonzalez

(2002) mettent en évidence l' influence négative du niveau de démocratie des pays sur la

présence des cycles politiques. Selon eux, plus un pays atteint un .niveau de démocratie

avancé, moins la présence de cycles politiques est mise en évidence. Le niveau de

compétition du système de parti influence aussi positivement la mesure des cycles

politiques (Block, 2002). Enfin, l 'effet des programmes d'ajustement structurel du Fonds

monétaire international (FMI) est inclus aux modèles d'analyse des cycles politiques par

Page 38: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

26

Schuknecht (1996) sans toutefois présenter les effets négatifs anticipés sur la présence de

cycles politiques.

Ce bref parcours de la littérature scientifique relative aux cycles politiques permet

de mettre en évidence deux caractéristiques importantes de ce phénomène. Tout d'abord,

une grande partie des recherches effectuées, particulièrement en ce qui a trait aux ouvrages

majeurs, est concentrée sur les pays du bassin Nord-atlantique au détriment des pays en

développement. Ensuite, les conclusions de ces études ne permettent pas d'en arriver à un

consensus quant aux évidences empiriques des cycles politiques ainsi qu'aux différents

facteurs influençant ce phénomène.

Page 39: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

27

. CHAPITRE 3

CONTEXTES LATINO-AMÉRICAINS

L' étude de Remmer (1993) et ses conclusions correspondent à un contexte

économique, politique et institutionnel particulier, c'est-à-dire celui de 1980 à 1990.

Cependant, les évènements et évolutions politico-économiques qui sont venus marquer le

contexte latino-américain depuis le début des années 1990 nous amènent à reconsidérer les

conclusions et résultats de Remmer. Comme mentionné précédemment, un apport

important de ce mémoire concerne l'influence du contexte économique sur la présence et

les caractéristiques des cycles politiques. Une description détaillée des différents contextes

économiques présents des années 1980 à 2006 est donc fondamentale à la compréhension

de leurs possibles impacts sur les cycles politiques en Amérique Latine.

3.1 CONTEXTE MACROÉCONOMIQUE

3.1.1 La décennie 1980

Dans les années 1980, «Latin America entered the longest and most severe and

widespread crisissince the Great Depression of the 1930s » (Iglesias, 1992: 38). Après

plus de 25 années de croissance économique qui prennent fin dans les années 1970, les

suivantes sont marquées par une crise structurelle majeure aux origines et impacts

multiples. À la base de ce qui sera qualifié de « crise de la dette» (Edwards, 1995) repose

le premier choc pétrolier de 1973 pendant lequel les décisions prises par l'OPEP

CI 'Organisation des pays exportateurs de pétrole) font quadrupler les prix du pétrole et

donc les recettes issues du commerce de ce produit. Les pétrodollars déposés dans les

banques commerciales se retrouvent ainsi sur le marché des prêts internationaux alimentant

la dette extérieure de plusieurs pays latino-américains. De 1975 à 1982, la dette cumulative

de l'Amérique Latine envers les banques commerciales augmente à un rythme de plus de

20 % par année pour s' établir à quelque 333 milliards en 1983, ce qui représente un peu

Page 40: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

28

plus de 50 % de son PIB total (Theberge, 1999; Edwards, 1995). Une grande partie de ces

prêts vont au financement de la balance commerciale déficitaire de plusieurs de ces pays.

Mais tandis que les exportations à la fin des années 1970 augmentent au rythme

d 'un peu plus de 10 % par années, le service de la dette augmente quant à lui de près de

25 % pendant cette même période. Cet écart grandissant entre les revenus issus des

exportations et le paiement de la dette favorise du même coup les emprunts à l ' étranger

pour financer ce déficit, engendrant un cercle vicieux d ' endettement. Qui plus est, cette

entrée de devises favorise une appréciation du taux de change, et donc un contexte

défavorable aux exportations. La crise de la dette débute «officiellement» lorsque les

marchés financiers internationaux commencent à douter de la capacité des pays latino­

américains à repayer leur dette. C'est chose faite lorsque, en août 1982, le ministre des

Finances mexicain Jesus Silva Herzog annonce que son pays cesse le paiement du service

de sa dette. Les banques commerciales, alertées par la crise mexicaine, cessent la

renégociation des prêts avec les autres pays latino-américains et demandent le paiement de

ceux -ci, propageant ainsi la situation de crise à d'autres pays. L' attribution de nouveaux

prêts cesse aussi pour pratiquement tous les pays de la région, même ceux qui, comme la

Colombie par exemple, ne souffrent pas de problèmes particuliers de paiements ou de

déséquilibres macroéconomiques (Ocampo, 1990; Bulmer-Thomas, 2003; Edwards, 1995).

Par crainte d ' un effondrement total du système économique et financier, de

nombreux investisseurs locaux et internationaux retirent par la suite leurs investissements

d 'Amérique Latine de. De 1973 à 1997, c ' est plus de 150 milliards de dollars qui fuient la

région favorisant du même · coup une dépréèiation des monnaies locales et une

augmentation des taux d ' intérêt, ce qui nuit à l'investissement et donc à la reprise

économique. Le marasme économique s' installe dans la région et le paiement des intérêts,

qui représente à lui seul 106 milliards de dollars de 1982 à 1985, enlise encore plus les

économies latino-américaines. L 'arrêt des entrées de ressources provenant des banques

commerciales étrangères, qui entraine des transferts nets négatifs de plus de 25 milliards de

dollars de 1982 à 1987 (Edwards, 1995), demande des ajustements importants des pays

latino-américains, exaspérant souvent la situation de crise.

Page 41: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

29

Ces déficits majeurs se concrétisent à court terme par une baisse significative de

plus de 25 % dans les importations de biens primaires et intermédiaires amputant la

croissance future des pays de la région. Les exportations souffrent elles aussi d'une

diminution importante en raison de la détérioration des termes de l' échange (Edwards,

1995: 24). Pour ce qui est des investissements, un profond ralentissement s ' installe dans la

plupart des pays, notamment pour ce qui est des infrastructures, des services publics et des

aides au développement des PMEs (Petite et moyenne entreprise). Des pays comme

l'Équateur, le Mexique, l'Uruguay ou le Venezuela réduisent ainsi leurs dépenses de plus

de 20 %, particulièrement celles liées aux salaires de la fonction publique, favorisant du

même coup une généralisation de la corruption de l' administration publique. Le

ralentissement économique diminue également les entrées fiscales des gouvernements, qui,

couplées à l ' inefficacité et la complaisance de leurs systèmes fiscaux, accroissent les

déficits. Les _ politiques économiques expansionnistes mises en avant pour stimuler

l' économie, notamment au niveau monétaire, poussent à la hausse la croissance de la .

monnaie en circulation favorisant l'apparition de niveaux très élevés d' inflation,

phénomène prenant le nom d'hyperinflation (Fernandez, 1991).

En résultante, la décennie 1980 se caractérise pour la plupart des pays latino­

américains par un ralentissement de l'économie. Comme il est possible de le constater au

tableau 3.1, la décennie 1980 est marquée par un profond ralentissement de la croissance

économique pour l'ensemble de l'Amérique Latine la faisant passer à un maigre 1.6 %

comparativement aux hauts niveaux de croissance enregistrés pendant la décennie 1970

(Fraga, 2004 :90-95). Plusieurs pays enregistrent même une diminution marquée de leur

croissance, ce qui est le cas pour l 'Argentine, la Bolivie, le Salvador, le Nicaragua ainsi

que le Venezuela. La décennie 1980 voit aussi les pays latino-américains être affectés par

des niveaux d ' inflation exorbitants atteignant souvent les trois ou quatre chiffres.

L'Argentine, la Bolivie, le Brésil, le Nicaragua ou le Pérou atteignent des niveaux

d' inflations moyens de plusieurs centaines de points de pourcentages avec des piques de

plus de 11000 % pour la Bolivie par exemple. L' Amérique Latine de ces années va aussi

connaitre de profonds déséquilibres de la balance commerciale ainsi que des dépréciations

des taux de change pour plusieurs de ses pays la composant. La région va de plus être

Page 42: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

30

marquée par un nombre important de crises bancaires ou financières. Comme définies par

Goldstein, Kaminsky et Reinhart (2000: 19-20), ces crises représentent une situation

incontrôlable et à large échelle de faillites, fusions forcées, ou reprises gouvernementales

de banques rendues insolvables .. Pour la seule décennie 1980, le nombre de ces crises pour

les six plus importants pays latino-américains - ceux du tableau 3.1 - est supérieur à 25, ce

qui affecte grandement la confi~nce des épargnants envers ces institutions et engendrant

des millions de dollars en pertes pour les investisseurs et les entreprises.

Page 43: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

31

Tableau 3.1" Évolution du contexte macroéconomique latino-américain

Croissance annuelle du Taux de change PIB par personne (%) annuel moyen

80-89 90-99 00-06 80-89 90-99 00-06 Argentine -0.88 4.29 2.77 0 0.63 0.81 Brésil 2.98 1.72 3.1 0 0.43 1.15 Chili 3.57 6.42 4.27 70.34 234.75 311.62 Mexique 2.36 3.39 2.94 0.31 3.04 6.94

Pérou 0.65 3.24 4.56 0 0.97 1.50 Venezuela 0.16 2.48 4.18 7.67 " 166.1 1144.13

Amérique 1.60 3.74 3.57 16.02 85.41 208.68 Latine

Inflation annuelle Balance des comptes moyenne (%) courants moyenne

80-89 90-99 00-06 80-89 90-99 00-06 Argentine 565.67 253.71 8.89 -2.47 -7.16 2.27

Brésil 332.31 854.78 7.83 -4.98 -13.24 -1.63

Chili 21.37 Il.74 2.9 -1.63 -1.76 0.61

Mexique 69.05 20.42 5.39 -2.71 -14.13 -10.34

Pérou 481.27 807.9 2.23 -1.43 -2.57 -0.17

Venezuela 23.06 47.44 19.06 1.13 1.979 14.493

Amérique 322.45 140.75 8.47 -0.89 -2.40 -0.02 Latine

IFM, 2007 World E-conomic Outlook Database

Page 44: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

32

3.1.2 La décennie 1990 et les années 2000

Contrairement aux années 1980 qualifiées de « décennie perdue », les années 1990

et suivantes se caractérisent plutôt par une alternance «d'ombres et de lumières»

(CEPALC, 2003). D'une manière générale, l 'Amérique Latine connaît au courant de cette

décennie une importante relance économique la plaçant parmi les « zones émergentes les

plus prometteuses de la planète» (Dabène, 2006: 201). Le contexte économique latino­

américain est, à cette époque, marqué par une accélération des processus de libéralisations

commerciales, des réformes fiscales ainsi que des privatisations (Morley, Machado et

Pettinato, 1999; CEP ALC, 2003). Ces réformes, connues sous l' appellation de « consensus

de Washington» et proposées originellement au nombre de 1 0 par Williamson (1990),

débutent à la fin des années 1980 et trouvent leur apogée au début de la décennie suivante.

Bien que différenciées dans le temps et variant beaucoup d'un pays à l'autre, elles incluent

généralement une austérité fiscale et monétaire, une plus grande ouverture au commerce

international ainsi qu'une augmentation des privatisations et dérégulations (Fraga, 2004:

89). Bien que ces réformes aient été vertement critiquées12, il n 'est reste pas moins que leur

établissement est corrélé à une amélioration significative de la situation économique

globale en Amérique Latine.

Pour beaucoup de pays latino-américains, la décennie quatre-vingt-dix se concrétise

donc par plusieurs éléments positifs, dont une croissance du PIB, un "meilleur contrôle de

l'inflation, l'équilibre de la balance des paiements et le retour des investissements directs

étrangers (Wise et Roett, 2003; ECLAC," 2003). Les facteurs de productivité connaissent

aussi une légère croissance durant cette période notamment en raison des nombreuses

privatisations issues des réformes économiques qui ont emmené une rationalisation des

facteurs de production. Le nombre de crises bancaires s'est aussi considérablement réduit

dans la première partie de la décennie 1990 diminuant à moins de 10 pour les sept plus

importants pays de la région. À partir de 1991 , les courants financiers affluent de nouveau

dans la région. Si depuis le début des années 1980 la région a largement souffert d'un flux

12 Le lecteur intéressé par les critiques des réformes économiques mises en place en Amérique Latine peut consulter entre autres l'ouvrage de Stiglitz (2000).

Page 45: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

33

financier négatif, leur transfert net est maintenant positif en raison d'un courant financier

favorable ainsi que de la baisse généralisée des taux d'intérêt internationaux (ECLAC,

2003: 110). Ces flux financiers positifs associés à l 'utilisation de taux de change nominaux

pour juguler l' inflation dans certains pays ont aussi favorisé une appréciation marquée des

taux de change (ECLAC, 2003: 110). Les finances publiques ont aussi été grandement

redressées grâce, entre autres, à la mise en place d'un contrôle beaucoup plus serré des

dépenses publiques. Ce contrôle s' est cependant avéré fort couteux, notamment en matière

d'accès aux services publics et sociaux pour les populations les plus défavorisées. Ces

éléments se poursuivent jusque dans les années 2000, quoique plus faiblement et

différemment selon les pays (voir Tableau 3.1).

La période de croissance moyenne de plus de 3 % pour la région durant la première

partie des années quatre-vingt-dix est cependant suivie par plusieurs crises économiques et

financières. Une première série de crises affecte le Mexique, la Bolivie, le Venezuela et le

Brésil en 1994, l'Argentine et le Paraguayen 1995 et l'Équateur-en 1996. Contrecoup des

crises russe et asiatique de 1997, le Brésil et l'Équateur souffrent eux aussi, en 1998, d'une

seconde vague de crises économiques et financières. Peut-être la plus médiatisée, la crise

argentine de 2001-2002 provoque un affaissement du système bancaire argentin, un

triplement de l'inflation, une dépréciation marquée du peso en plus d'une partie de chaise

musicale présidentielle où se succèdent cinq présid~nts en dix-huit mois. D'une manière

générale, le système financier et économique latino-américain a présenté une importante

volatilité durant cette décennie, particulièrement dans la seconde partie. Cependant, cette

volatilité a été atténuée par le redressement global qu'ont connu les économies latino­

américaines durant cette période.

Ce nouveau contexte économique, différent de la période analysée par Remmer

(1993) justifie la reprise de l'étude des cycles politiques en Amérique Latine. Cette

nouvelle situation économique se caractérise par une reprise de la croissance, une

diminution de l' inflation, une appréciation des taux de change ainsi qu'un équilibre de la

balance commerciale. L' amélioration du contexte économique favorise ainsi le contrôle de

l' économie par les gouvernements et donc sa possible manipulation à des fins électorales.

Page 46: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

34

L'assainissement des finances publiques qui caractérise la décennie 1990 en Amérique

Latine fournit aussi potentiellement plus de ressources aux gouvernements pour une

utilisation opportuniste en période électorale. De plus, l'ampleur des manipulations étant

limitée (Alesina, Roubini et Cohen, 1999; Rogoff et Sibert, 1988), une économie volatile

favorise la sensibilité des électeurs à de faibles modifications de celle-ci rendant plus

probables de petites manipulations de l'économie par les gouvernements au pouvoir.

Dans les années 2000, la situation économique en Amérique Latine constitue la

continuation de ce qui s'est produit à la décennie suivante. Ainsi, les premières années de

cette troisième période temporelle à l'étude dans ce mémoire correspondent aux

contrecoups et impacts des crises de la fin des années 1990 ainsi que de 2001-2002.

Plusieurs pays de la région, dont l'Argentine, le Chili, le Brésil, l'Uruguay et le Paraguay,

souffrent d'un profond ralentissement de leur croissance économique. Leurs exportations

diminuent également en raison des fortes dévaluations des monnaies locales. Cependant, et

malgré tout les effets négatifs liés à ces crises, dont notamment une diminution généralisée

des dépenses publiques par les gouvernements, l'Amérique Latine se remet assez

rapidement de ces crises. Les années suivantes se caractérisent ainsi par une bonne

croissance économique (quatre à six pour cent de croissance dans plusieurs pays), un bon

apport d'IDE ainsi qu'un contrôle de l'inflation. Les années 2000 et suivantes peuvent

. donc être globalement qualifiées de généralement positives en ce qui a trait à l'économie

pour le continent latino-américain.

3.2 CONTEXTE POLITIQUE

Dans le domaine politique, les années 1980 marquent pour l'Amérique Latine ce

qUI sera qualifié plus tard à l'échelle mondiale de «third wave of democratization »

(Huntington, 1991). Les cinq uniques régimes non militaires présents en Amérique Latine

à la fin des années 1970 font rapidement place au début des années 1990 à une quasi­

unanimité de gouvernements portés au pouvoir par la tenue d'élections libres et

compétitives. L'exception majeure reste toujours Cuba. Les difficiles expériences de la ,

région jusqu'aux années 1990 où dictatures, gouvernements militaires, coups d'Etat et

Page 47: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

35

guerres civiles se sont alternés ont favorisé une maturation des différeQ.ts acteurs des

sociétés latino-américaines rendant possible l' établissement de règles de gouvernance

démocratique. La tenue d 'élections libres et compétitives comm~ unique mode q' accession

. au pouvoir devient la norme, plutôt que l' exception en Amérique Latine. On assiste ainsi à

une augmentation de l'occurrence 'des élections à partir de 1979, année de l' élection de

Jaime Roldos à la tête de l'État équatorien. Le nombre d' élections en territoire latino­

américain passe de 28 pour la décennie 1980 à plus de 67 pour les années 1990-2006. C'est

cette augmentation du nombre d' élections en Amérique Latine qui nous permet d 'élargir

notre étude à un ensemble beaucoup plus vaste d'élections et de pays que ce qu'a pu

étudier Remmer (1993) pour les années 1980.

L' affirmation d'un système politique basé sur des fondements démocratiques a

permis l'intégration d'un pluralisme politique, d'une acception de l'alternance du pouvoir,

du respect des droits de l' homme et de la séparation des pouvoirs. Même si ces idées se

sont tout d'abord imposées dans les discours sans qu'elles ne se concrétisent réellement sur

le terrain, l 'utilisation de ces termes s'est finalement matérialisée dans la majorité despays

latino-américains. Comme il est possible de la constater à la figure 3.1, les libertés civiles

et politiques se sont grandement améliorées dans la région. En 1978, peu de pays reçoivent

la mention libre,. en gris sur la carte, de la part de l' ONG (Organisation non

gouvernementale) Freedom House 13 et plusieurs pays étaient de façon claire non libres (en

noir sur la carte). Au contraire, l'évolution entreprise par les jeunes républiques latino­

américaines à partir des années 1980 a permis à une majorité de celles-ci d'atteindre le

statut de libre ou de partiellement libre. L'unique exception reste .toujours Cuba. Ces

nouvelles règles démocratiques ont aussi résisté à de nombreuses crises institutionnelles

qui ont marqué la région dans les années 1990 et 2000. Que l' on pense à l'autogolpe de

Fudjimori au Pérou ou à la crise équatorienne de 2000, les régimes démocratiques ont tenu

le coût, notamment en raison du fort soutien de la population civile et de l' écart de la

sphère politique respecté par les militaires.

13 Des bémols concernant la méthodologie utilisée par Freedom House pour classer les pays ont été emmenés notamment par Burkhart et Lewis-Beck (1994).

Page 48: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

Figure 3.1 Libertés civiles et politiques en Amérique Latine: Comparaison 1978-2006

Libre D Partiellement libre D Non libre _

Source·: Freedom House

36

L'acceptation de l'élection comme unique mode d'accès au pouvoir politique ainsi

que les libertés civiles et politiques ne représentant qu'un élément d'un processus plus

large et global d'établissement des règles démocratiques, de nombreuses réformes

institutionnelles ont aussi été implantées pour renforcer les jeunes institutions latino­

américaines. Ces réformes, qui touchent les constitutions, l ' administration, la justice ou les

services publics ainsi que les systèmes électoraux (ECLAC, 2003: 58) se font de manière

différenciée à la fois dans le temps et dans l' espace. Elles favorisent tout d'abord une plus

grande indépendance du judiciaire face au politique ainsi qu'une plus grande transparence

de l'administration dans l'allocation des différents services publics. En matière électorale,

on observe une tendance vers une plus grande représentativité des législatures (Payne,

2007: 69) par l' ajout de députés, la diminution de la taille des districts électoraux ou

l'adoption de formules de calcul semi ou totalement proportionnel. Des pays comme le

Salvador, le Guatemala, le Honduras, le Mexique, le Nicaragua ou le Panama sont ceux qui

ont fait les pas les plus importants dans cette direction. Ces différentes réformes se sont

traduites entre autres par une augmentation significative du nombre effectif de partis en

Page 49: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

1 -

37

compétition - c' est-à-dire les partis principaux qui récoltent une part importante des

votes14 - entre 1980 et 2000 (Payne, 2007: 69). Les résultats pointent donc vers une plus

grande représentativité des politiciens ainsi que vers une plus importante valorisation de la

participation des citoyens aux différents processus de décision politique.

Cependant, en même temps que l'on favorise le renforceme'nt des règles de

gouvernance, une profonde désaffection pour le système de gouvernance démocratique est

enregistrée par les enquêtes d'opinion publique. Ces enquêtes, effectuées entre autres par le

Latinobarometro, affichent clairement, comme on le voit à la figure 3.2, une diminution de

l'appui pour la démocratie. Mesuré à l' aide de la question « est-ce que la démocratie est

préférable aux autres formes de gouvernement? », l'appui pour les systèmes démocratiques

avant les années 2000 oscille autour de 60 %. Les années suivantes · montrent, avec une

diminution abrupte pour 2001 , une réduction marquée du soutien pour la démocratie. Les

années 1990 s' inscrivent donc dans un contexte contradictoire ou le renforcement de la

démocratie s' accompagne d'une profonde mise en doute de sa légitimité.

14 Pour une description détaillée du concept de nombre effectif de partis voir Laakso et Taagepera (1979)

Page 50: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

Support

40 -1

1996

Figure 3.2 Appui pour la démocratie en Amérique Latine

1

1998 1

2000 Année

1 1

2002 2004

Source : Payne et coll ., 2007

38

Les années 1980 à 2006 en Amérique Latine sont donc l'objet de profonds

bouleversements tant en matière politique, électorale que législative. Ces changements

importants nous permettent non seulement d'élargir notre étude des impacts économiques

des élections à plusieurs pays non analysés par Remmer, mais ils rendent aussi possible la

prise en compte de différents contextes politiques comme facteurs d'explication potentiels

des cycles politiques.

Page 51: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

39

CHAPITRE 4

CADRE THÉORIQUE ET MÉTHODOLOGIQUE

4.1 HYPOTHÈSES

L 'hypothèse générale guidant notre étude de l' économie politique des élections

latino-américaines est que les gouvernements au pouvoir, en période préélectorale,

stimulent artificiellement l' économie par des politiques monétaires ou fiscales

expansionnistes afin de gagner les votes des électeurs. Si, à la manière de Downs (1957), la

réélection est l'objectif premier des présidents en postel S, que leur popularité varie en

fonction de leur capacité à offrir des avantages matériels à l ' électorat et que le choix des

politiques est guidé par une maximisation de l' appui électoral (Ait et Chrystal, 1983;

Lewis-Beck, 1988; Remmer, 1993), on devrait mettre en évidence la présence d ' un boom

économique en période préélectorale. Cette expansion préélectorale est théoriquement

contrebalancée par des politiques réductionnistes · après l' élection.

Dans le cas où la théorie opportuniste des cycles politiques prédit adéquatement le

comportement des gouvernements au pouvoir pour lesquels des considérations électorales

guident l'élaboration des politiques économiques, on s' attend à ce que:

Hypothèse 1: L 'offre de la monnaie (Ml) et les déficits fiscaux augmentent plus rapidement que la tendance normale dans la période précédant une élection présidentielle et se contractent précipitamment en période postélectorale.

L'hypothèse 1 met en évidence la présence d 'un « biais politique» (Heckelman et

Berument, 1998) en faveur de politiques économiques expansionnistes en périodes

15 Dans le cas où les règles constitutionnelles limitent la réélection, voir à ce sujet Carey (2003), ou que les présidents en poste ne briguent pas leur propre succession, l'objectif des présidents au pouvoir devrait être la réélection d'un membre de son parti à cette même fonction, ce qui ne modifie pas nos attentes théoriques concernant la mise en place de politiques économiques opportunistes puisque celles-ci bénéficient au nouveau candidat du parti du président.

Page 52: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

40

préélectorales et électorales. Les conséquences de ce type de politiques monétaires et

fiscales, conformément aux modèles rétrospectifs du vote économique (p. ex. Lewis-Beek,

1988; Lewis-Beek et Paldam, 2000; Anderson, 2000), sont présumées favoriser la

popularité des gouvernements qui les mettent en place.

Une croissance de l' offre de la monnaie (Ml), en diminuant les taux d ' intérêt,

stimule les investissements. Cette augmentation des investissements favorise

l' augmentation des dépenses ce qui a pour conséquence d' engendrer une croissance du PIB

(Parkin, Bade et Carmichael, 2000). L'offre de la monnaie, mesurée par l' agrégat

monétaire Ml , est donc un indicateur valable de la volonté du gouvernement de stimuler la

croissance économique, effet considéré positif pour l' électeur (Schuknecht, 1996: 158).

Les conséquences d'une augmentation de l'offre de la monnaie sont temporaires et

contrebalancées par une augmentation ultérieure de l' inflation. On s' attend donc, pour

cette raison, à une contraction de l'offre de la monnaie aux périodes électorales ou

postélectorales afin de neutraliser le plus rapidement possible la poussée inflationniste

engendrée par cette première politique monétaire.

En ce qui concerne la balance fiscale des gouvernements au pOUVOIr, une

augmentation du déficit gouvernemental peut être utilisée pour effectuer un transfert de

richesse · afin de gagner les votes des bénéficiaires de ces transferts (Schuknecht, ·1996).

L' augmentation des dépenses publiques a potentiellement un impact positif sur la

popularité, et donc sur l' appui électoral, des gouvernements au pouvoir qui les implantent.

En effet, cette politique économique favorise directement ou indirectement le contexte

économique du pays par la création d' emplois, d' infrastructures ou de services et stimule la

demande en augmentant les dépenses des gouvernements ou des individus, ce qui profite à

la croissance du PIB (Parkin, Bade et Carmichael, 2000). Ce type de mesures se

matérialise cependant par une augmentation du déficit pour les gouvernements qui les

mettent en œuvre. Comme le mentionne Schuknecht «a bias towards expenditure

increases can be expected in developing countries » (1996: 159) en raison des faibles ou

inadéquats systèmes d' imposition et de taxation dans ces pays. On s'attend donc à la

présence d'une augmentation du déficit gouvernemental en périodes préélectorales et

Page 53: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

41

électorales. Ce déficit est appelé à diminuer en période postélectorale afin de stabiliser la

balance budgétaire de l'État dans le long terme.

Hypothèse 2 : L 'inflation' de court terme et le taux de change diminuent dans la période précédant ' une élection présidentielle et augmentent dans la période postélectorale.

Selon l'hypothèse 2, les gouvernements au pouvoir tentent de minimiser l' inflation

ainsi que la détérioration des taux de change, deux éléments influant négativement sur le

contexte économique. Des niveaux faibles d' inflation ont été identifiés comme facteur

affectant positivement l'appui électoral ' (Nordhaus, Alesina et Schultze, 1989: 5).

L' inflation ayant des impacts directs sur le prix des biens de consommation et des services

ainsi que sur les salaires, elle influe ainsi sur la condition économique des individus et des

ménages (Parkin, Bade et Carmichael, 2000). L' importance électorale de l' inflation est

renforcée par le contexte latino-américain où plusieurs pays ont été soumis à une

hyperinflation depuis le début des années 1980 (Weyland, 1998; Paunovic, 2000; Biglaiser

et DeRouen, 2004). On s'attend donc à ce que l' inflation de court terme dans les trimestres

précédant une élection présidentielle diminue ' sensiblement avant de croître en période

postélectorale. L'augmentation postélectorale s' explique par la réaction aux politiques

expansionnistes mises en avant pour stimuler la croissance de l'économie ainsi , que par

l' interconnexion entre le chômage et l ' inflation de court terme, relation explicitée par la

courbe de Phillips.

En ce qui concerne le taux de change, les gouvernements maximisent leur chance

de réélection en minimisant la dévaluation de la monnaie. Une dévaluation de la monnaie

nuit potentiellement à l' appui électoral. Bien qu' il soit vrai que dans le long terme une

dévaluation de la monnaie peut favoriser les exportations (Mishkin et Serletis, 2004: 433),

dans le court terme, elle présente une série de conséquences négatives au niveau de

l'organisation économique de l'État. Une dévaluation de la monnaie, en augmentant le coût

des importations, demande un réalignement de la production industrielle sur les biens de

consommation locale, maintenant difficilement importables. Ce rapide changement

industriel freine la croissance de ce secteur, favorise le chômage, induit une augmentation

Page 54: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

42

des prix et stimule le déficit public (Sachs, 1989 ; Remmer, 1993). On s' attend donc à

observer un maintien du taux de change, ou une légère appréciation, en période

préélectorale contrebalancée par une dévaluation après l ' élection pour alléger les tensions

sur le secteur industriel.

Les hypothèses mentionnées ci-dessus (hypothèse 1 et hypothèse 2) correspondent

au modèle de base des cycles politiques. La pertinence de ce mémoire provient des

éléments supplémentaires qu' il intègre à ce modèle initial. Ces différents paramètres, de

nature institutionnelle, politique et contextuelle sont pris en compte par les hypothèses 3 à

5 et sont ajoutés, au modèle dans une seconde étape d ' analyse.

Hypothèse 3 : Les cycles devraient être plus prononcés lorsque le parti du président au

pouvoir contrôle une majorité de sièges dans la chambre basse.

La capacité des présidents à utiliser les politiques économiques dans le but de

favoriser leur réélection devrait être affectée par le , contrôle effectif du président sur les

politiques économiques. La véritable capacité de l ' exécutif à mettre en place des cycles

dépend donc de qui «controls political power as weil as where the status quo is »

(Tsebelis, 2002: 17). Dans les systèmes présidentiels, la chambre basse peut être d 'une

influence cruciale dans le proce~sus de décision politique, spécialement en ce qui concerne

les questions budgétaires. Comme souligné par Shugart et Carey, dans les systèmes

présidentiels, «vetoes built into the legislative pro cess can be defended as protection

against the capricious head of state power» (Shugart et Carey, 1992: 44). Ce système de

balance des pouvoirs est donc fonction de l ' emprise du parti du président sur la chambre

basse. Dans le cas où celui-ci ne contrôle pas la majorité des sièges de cette institution, le

législatif pourrait alors jouer le rôle de « veto player » en freinant le choix de certaines

politiques économiques, par exemple celles induisant des variations cycliques négatives de '

l'économie. Comme mentionné précédemment, cela pourrait être particulièrement le cas

Page 55: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

43

dans les pays où le législatif a un pouvoir budgétaire important 1 6. Les cycles devraient

donc être plus importants lorsque le parti du président au pouvoir dispose de la majorité

des sièges au sein du Parlement.

Hypothèse 4: Les cycles postélectoraux devraient être plus prononcés lorsque les

gouvernements sortants sont reportés au pouvoir.

Comme suggéré par Besley et Case (1995: 10), « the possibility ofre-election will

affect policy choices ». Une hypothèse alternative au modèle traditionnel des cycles

politiques est que les présidents au pouvoir ne vont pas nécessairement mettre en œuvre

des politiques expansionnistes avant l' élection, mais vont plutôt tenter de reporter les

politiques électoralement défavorables à la période postélectorale afin de ne pas nuire à

leur candidature. Qui plus est, les gouvernements ont un fort intérêt à « eschewed the

temptations of expansionism in favor of policies emphasizing austerity, stabilization, and

relatively orthodox solutions to problems of macroeconomic instability » après l' élection

(Remmer, 1993: 403). Il semble que « contractionary measures after elections are also

easier to implement» (Schunetch, 1996: 160) puisqu'elles permettent d' échapper à

l'insatisfaction qui aurait été provoquée chez les électeurs par detelles mesures en période

électorale. Ces politiques économiques, comme une dépréciation du taux de change, une

augmentation du niveau de taxation ou une réduction des dépenses publiques, devraient

donc être plus visibles en période postélectorale si les gouvernements sont reportés au

pouvoIr.

Hypothèse 5 : Les cycles politiques devraient être plus prononcés lorsque le contexte

économique s 'assainit et se stabilise.

Le contexte économique des pays peut aussi avoir un impact potentiel sur la mise

en place de manipulations de l' économie par des présidents cherchant la r~élection. Il a

16 Les législatures latino-américaines possédant de forts pouvoirs budgétaires incluent l'Argentine, la Bolivie, le Guatemala, le Honduras, le Mexique, ainsi que Je Paraguay et dans une moindre mesure le Costa Rica, la République dominicaine, le Nicaragua, le Panama, l'Uruguay et le Venezuela (Payne, 2007)

Page 56: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

44

ainsi ·été mis en évidence que « voters ' evaluations of government performance de pend on

the economic context in which they live» (Palmer et Whitten, 1980: 625). Puisque les

électeurs peuvent évaluer différemment la performance d'un gouvernement au pouvoir en

fonction du contexte économique, il apparait de façon claire que ces gouvernements n'ont

pas les mêmes intérêts à mettre en place des manipulations de l'économie en fonction des

différents contextes économiques. Dans un contexte d'amélioration de la situation

économique, les gouvernements au pouvoir devraient avoir un meilleur contrôle sur les

résultats de leurs politiques économiques ainsi que plus de ressources potentiellement

utilisables à des fins électorales. Les résultats négatifs de Remmer ne sont donc pas

surprenants étant donné le manque de ressources économiques à la disposition des

gouvernements pour engendrer des cycles dans la décennie 1980. Aussi, dans un contexte

d'assainissement de l'économie, les électeurs étant relativement plus sensibles à de faibles

modifications de l'économie (Roberts et Wibbels, 1999), ils ont donc potentiellement plus

de chance de récompenser une amélioration de l'économie engendrée 'par des

manipulations des gouvernements. Dans ce cas, on devrait mesurer une amplitude plus

grande des cycles politiques lorsque le contexte économique latino-américain s' améliore,

c' est-à-dire pour les années 1990 et suivantes.

4.2 DONNÉES ET OPÉRATIONNALISATION

La théorie opportuniste des cycles politiques prédit que les gouvernements au

pouvoir vont tenter de manipuler l'économie à des fins électorales (N ordhaus, 1975, 1989).

Cette manipulation se fait par l'entremise du contrôle du président au pouvoir sur les

politiques économiques. L'analyse de ces politiques économiques et leurs résultats

représentent donc les éléments centraux de ce mémoire. L'ensemble des variables

mesurant la performance économique étant trop vaste, nous nous restreignons ici à la

macroéconomie. Bien que limitatif quant à l'étude de l'interaction entre les élections et

. l'économie, ce choix est guidé par la prépondérance du vote sociotropique par rapport au

vote égoïste (Lewis-Beck, 1988), c' est-à-dire que les électeurs sont plus influencés par

l'état général de l'économie que par celui de leur portefeuille lorsqu' ils votent. Puisque ce

n~ est pas l ~ ensemble d~ la macroéconomie qui peut être l'objet d'un contrôle direct par les

Page 57: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

45

gouvernements au pouvoir, nous nous intéressons donc spécialement à quatre indicateurs

macroéconomiques particuliers susceptibles d' être manipulés ou influencés par l' entremise

des politiques économiques. Dans la seconde partie de notre analyse, la première

constituant l' analyse du modèle de base de Remmer, l' impact des facteurs institutionnels et

politiques ainsi que du contexte économique est inclus dans notre étude.

Les concepts macroéconomiques de notre modèle se détaillent en quatre variables

disposant chacun d'un indicateur propre. Le choix de ces indicateurs est motivé par: 1)

l' accessibilité des données, 2) la reproductibilité avec l' étude de Remmer (1993) et 3) la

cohérence avec la théorie opportuniste des c):'cles politiques. Les modèles utilisés entre

autres par Alesina et Roubini (1992), Alesina, Roubini et Cohen (1999), Drazen (2000a,

2000b), Khemani (2004), Lewis-Beck (1988), Nordhaus (1975, 1989) et Schultz (1995)

ont, en tout ou en partie, les mêmes indicateurs.

Les cInq hypothèses décrites ci -dessus seront testées à l'aide de données

macroéconomiques tirées du Monthly Financial Statistics, un rapport statistique publié

mensuellement par le FMI incluant une série d'indicateurs économiques pour l'ensemble

des pays du globe. Nos variables dépendantes consistent donc aux quatre indicateurs , . • 17 economiques SUIvants :

1 - Le taux de changement trimestriel de l'Indice des prix à la consommation (IPC);

2 - Le taux de changement trimestriel de l'offre de la monnaie mesurée par -l' agrégat monétaire Ml;

3 - Le taux de changement trimestriel du taux de change (devise nationale par dollar US);

17 Le problème des nombreuses valeurs aberrantes présentes dans nos données est résolu par la transformation logarithmique de nos données. Pour une description détaillée de ]a transformation des données voire l' annexe A.2.

Page 58: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

46

4 - La différence première, en pourcentage du PIB (Produit intérieur brut) (dollar courant), de la balance fiscale contrôlée pour l' inflation.

Puisque nous nous intéressons aux changements trimestriels intervenus pour ces

indicateurs, et non à leur valeur absolue, l'analyse des modèles de régression s'effectue à

l'aide de données transformées selon la formule de calcul des taux de croissance 18. Il est à

noter cependant qu'en raison de la structure des données de la variable balance fiscale dans

laquelle les valeurs sont soit positives (surplus), soit négatives (déficit), nous utilisons

plutôt le calcul de la première différence 19 en pourcentage du PIB2o• L'utilisation de cette

formule nous permet d'éviter les problèmes liés au calcul des taux de changement lorsque

la balance fiscale trimestrielle passe de positive à négative et inversement.

Un des problèmes importants auquel nous faisons aussi face avec l' ensemble de nos

données est la présence de nombreuses valeurs extrêmes. Comme il est possible de le

constater au tableau 4.1, nos quatre indicateurs macroéconomiques présentent des valeurs

extrêmes affectant l'étendue, l'asymétrie, l' aplatissement et les valeurs minimales et

maximales de nos distributions. Cela est particulièrement visible avec les valeurs

d'asymétrie et d' aplatissement qui sont largement à l'extérieur des zones acceptables

comprises entre 3 et -3 (Howell, 1998).

Tableau 4.1 Sommaires numériques avant transformation

Var Obs Moenne Dev Std Min Max Variance A latissement

Ml 1815 20324,82 81439,27 2,83e-07 898667 6,63e+09 7,15831 59,9178 BF 1595 -437,43 2883 ,91 -52649,3 36291 ,02 8316934 -2,537686 94,97183 IPC 1836 59,53632 54,40701 5,22e-l0 310,205 2960,123 0,7730335 3,371594 TC 1836 2,18e+08 2,81 e+09 0,00004 5,88+ 10 7,88e+ 18 15,66415 268,9705

18 La formule de calcul des taux de croissance utilisée ici est : (ecn-ecnt_l)/ecnt_l où ecn représente l ' indicateur macroéconomique analysé. 19 La formule de calcul de la première différence utilisée ici est: ecn-ecnt_l où ecn représente l' indicateur macroéconomique analysé. 20 L' utilisation de la première différence de la balance fiscale en pourcentage du PIB rend plus aisée la comparaison de la mesure entre des économies de tailles différentes.

Page 59: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

47

Pour résoudre ce problème, nous effectuons une transformation logarithmique qui

permet de diminuer l' impact des valeurs extrêmes21. Comme il est possible de le voir au

tableau 4.2, la transformation logarithmique permet de corriger, quoique partiellement,

l ' asymétrie et l' aplatissement de nos quatre distributions. Leurs valeurs se rapprochent

ainsi des seuils acceptables de ± 3 pour une distribution normale, particulièrement en ce

qui concerne l ' asymétrie. Cette correction nous permet d'effectuer nos régressions sans

anticiper de distorsions trop importantes induites par les valeurs extrêmes de notre

distribution.

Tableau 4.2 Sommaires numériques après transformation

Var Obs Moenne Dev Std Min Max Variance Asymétrie Aplatissement

logM1 1794 0,068965 0,172110 -0,5031 1,8395 0,02962 3,355071 25,08966 10gBF 1565 -0,19822 3,415612 -8,1217 8,1332 Il ,6664 0,103354 2,023201 10gIPC 1819 0,074379 0,161469 -0,0211 2,1413 0,02607 6,073815 52,55317 10 TC 1819 -0,04545 0,102015 -0,6624 0,6932 0,01041 -2,50687 13,59311

Enfin, notre base de données présente de multiples données manquantes qui ne

nous permettent pas de couvrir entièrement la période analysée. Une piste possible de

résolution de ce problème consiste en l'exécution d'une procédure d'interpolation des

données manquantes. Cependant, étant donné la nature de ce mémoire consistant à mettre

au jour des changements brusques et non prévisibles de la performance économique, ce

type de procédure est non approprié puisqu' il rendrait prévisible quelque chose que nous

suspectons ne pas l'être. Les données manquantes22 sont laissées comme telles et réduisent

donc nos observations d'un potentiel de 1944 cas à 1819 pour le taux de change, 1794 pour

l'offre de la monnaie, 1819 pour l' inflation et finalement 1565 pour la balance fiscale. Un

des impacts majeurs de la présence de données manquantes, comme il est mentionné à la

section 4.4, concerne l'utilisation d'une méthode différente de régression pour la balance

2 1 Afin d' éliminer les valeurs se situant en dessous de 1 qui produirait un logarithme négatif, nous ajoutons 1 à l ' ensemble des données afin d'éliminer les valeurs plus petite~ que 1. 22 Les principaux groupes de données manquantes incluent le Chili, le Nicaragua et le Paraguay pour la mesure de la balance fiscale ainsi que l ' inflation pour le Nicaragua. Pour une revue systématique des données manquantes voire l ' annexe A.3 .

Page 60: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

48

fiscale. Ce problème, contrairement à nous, n~ a pas été répertorié par Remmer en raison du

type d~analyse par pays qu~elle utilise.

Trois variables indépendantes spécifiant les périodes temporelles à 1 ~ étude sont

aussi utilisées. Ces trois variables él~ctorales indiquent les trimestres préélectoral, électoral

et postélectoral pour chaque ensemble élection/pays analysé ici. Les informations

concernant les dates des élections sont tirées des sources officielles - les gouvernements .

respectifs des pays analysés -lorsqu~accessibles, ou si tel n~est pas le cas, de sites internet

spécialisés23 répertoriant les informations concernant les calendriers électoraux passés.

En ce qui concerne notre hypothèse relative aux facteurs institutionnels ayant un

impact sur les cycles politiques, nous utilisons tout d~ abord une variable représentant le

nombre de sièges détenus par le parti politique du président au pouvoir. Cette variable est .

utilisée pour tester 1 ~ impact du contrôle de 1 ~ exécutif sur le législatif. Cet indicate~r est issu

du livre « Democracies in Development: Politics and Rejorm in Latin America» publié par

l'International Institute for Democracy and Electoral Assistance (Inter-American

Development Bank) et par le Dav~d Rockefeller Center for Latin American Studies

(Harvard University). Enfin, pour distinguer entre les gouvernements qui ont été reportés

au pouvoir et ceux qui ont perdu leur réélection, nous incorporons une variable

représentant le report au pouvoir des partis des présidents déj à en place24.

4.3 SÉLECTION DES CAS

La période analysée est constituée des années 1980 à 2006. Le choix de cette

période pour tester le modèle opportuniste des cycles politiques en Amérique Latine est

guidé par deux facteurs importants. Tout d~abord, cette période coïncide avec la plus

importante vague de démocratisation que la région ait connue au cours de son histoire

politique (Remmer, 1991, 1993). La fin des régimes militaires, l'établissement de la

23Entre autres: www.electoralgeography.com; www.electionguide.org; www.binghamton.eduJcdp/eraJ 24 Nous utilisons la réélection des partis du président plutôt que la réélection directe des présidents en poste en raison ·de la faible occurrence de cette deuxième situation (8,51 %) comparativement à la première (34,04 %).

Page 61: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

49

démocratie (Dabène, 2006) ainsi que sa consolidation institutionnelle pour l' ensemble de

l'Amérique Latine, à l' exception de Cuba toujours, permettent d'étendre notre étude de

l' économie politique des élections latino-américaines à plusieurs élections et pays non

analysés par Remmer (1993). La partie de domino démocratique débutée avec l' élection du

populiste Jaime Roldos à la tête de l'État équatorien en 1979 crée donc une rare

opportunité d' explorer les impacts de l' implantation du processus électoral sur les

politiques économiques. Cet élargissement de l' échantillon à l' étude nous emmène donc à

appréhender des conclusions différentes. Ensuite, l ' étude de la période 1980-2006 permet

de comparer la prévalence des cycles politiques dans deux contextes économiques

différents. Comme mentionné plus haut (voir chapitre 3), la décennie 1980 - celle analysée

par Remmer - est profondément différente économiquement de la suivante ainsi que des

années 2000. Ce double contexte économique permet donc de comprendre son influence

sur la présence et les caractéristiques des cycles politiques en Amérique Latine.

La sélection des cas s~ fait selon les critères établis par Remmer (1993) dans un

objectif de comparabilité des résultats. Les élections doivent pouvoir être qualifiées de

libres et concurrentielles. À ce titre, (1) le transfert de pouvoir doit s' effectuer d 'un

président élu à un autre - c'est sur cette base que les élections post régime militaire ainsi

que les premières élections après le retour de la démocratie sont exclues de notre analyse -

(2) deux partis ou plus doivent être en compétition lors de l' élection et (3) le contexte

social doit être propice au libre arbitre des individus. Dix-huit pays font ainsi l 'objet d'une

analyse pour ce mémoire à savoir l'Argentine, la Bolivie, le Brésil, le Chili, la Colombie,

le Costa Rica, l 'Équateur, l'El Salvador, le Guatemala, le Honduras, le Mexique, le

Nicaragua, le Panama, le Paraguay, le Pérou, la République dominicaine, l'Uruguay et le

Venezuela. Comme le résume le Tableau 4.3 , un total de 87 élections présidentielles sont

étudiées. Le cas .cubain est explicitement exclu de notre analyse en raison de la structure de

son système électoral ne nous permettant pas de le qualifier de libre et concurrentiel.

Page 62: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

50

Tableau 4.3 Élections présidentielles latino-américaines de 1980 à 2006

Pays Années Nb. Pays Années Nb.

Argentine 89, 95, 99, 03 4 Honduras 85, 89, 93, 97, 01 , 05 6

Bolivie 85, 89, 93, 97, 02, 05 6 Mexique 82, 88, 94, 00, 06 5

Brésil 89, 94, 98, 02, 06 5 Nicaragua 96, 01 , 06 3

Chili 93 , 99, 05 3 Panama 99, 04 2

Colombie 82, 86, 90, 94, 98, 02, 06 7 Paraguay 93, 98, 03 3

Costa Rica 82, 86, 90, 94, 98, 02, 06 7 Pérou 85, 90, 95, 00, 01 , 06 6

Équateur 84, 88, 92, 96, 98, 02, 06 7 Dom.R. 90, 94, 96, 00, 04 5

Salvador 84, 89, 94, 00, 04 5 Uruguay 89, 94, 99, 04 4

Guatemala 90,95,99, 03 4 Venezuela 83, 88, 93 , 98, 00, 06 6

Total 87

4.4 MODÈLE ÉCONOMÉTRIQUE

Plusieurs tests statistiques existent pour mesurer l'existence de cycles politiques

(Drazen, 2000: 81). La logique du modèle utilisé ici pour tester la présence des cycles

politiques en Amérique Latine, inspirée entre autres de Remmer (1993) et Lewis-Beck

(1986, 1988), repose sur l'hypothèse selon laquelle les gouvernements au pouvoir vont

artificiellement stimuler l'économie dans les trimestres préélectoral et électoral. En retour,

l'économie devrait être affectée à la baisse en période postélectorale afin de compenser

pour la surchauffe des deux trimestres précédents. Le modèle employé ici pour mettre en

évidence ce phénomène peut être résumé de la sorte :

ECN= a + ~lPRE + ~2ELE + ~3POST + ~4TRIMESTRE + LAGS + DUMMYpays+ E,

où a représente l'ordonnée à l'origine. ECN représente les variables dépendantes

macroéconomiques sous la forme de N observations trimestrielles. PRE, ELE et POST sont

trois variables dichotomiques pour les trois trimestres analysés ici - respectivement les

trimestres préélectoraux, électoraux et postélectoraux. Ces trois variables électorales sont

codées 1 pour le trimestre analysé et 0 autrement. TRIMESTRE est une variable de mesure

temporelle allant de 1 à N pour l 'ensemble des trimestres. Un certain nombre de variables à

Page 63: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

51

la traine de la variable dépendante (LAOS) sont incorporées au modèle afin de corriger

pour la présence d' auto corrélation dans nos données macroéconomiques25. Une variable

dichotomique représentant chaque pays (DUMMYpays) est aussi incluse au modèle afin de

corriger pour les situations propres à chaque pays. Finalement, et est un terme d'erreur.

Dans une seconde partie de l' analyse, nous incluons au modèle initial deux

nouvelles variables afin de tenir compte des impacts des facteurs institutionnels et

politiques sur la présence de cycles politiques en période postélectorale. Ces nouvelles

variables sont incorporées au modèle par la création d 'une variable interactive

correspondant à la multiplication de chacune d'elle avec la variable dichotomique

postélectorale. La première variable institutionnelle utilisée représente le contrôle du parti

du président sur la chambre basse. Elle est codée 1 si le parti du président possède plus de

la majorité des sièges et 0 autrement. La seconde variable politique indique le report au

pouvoir, ou non, du parti du président à l'exécutif. Cette ultime variable est codée 1 si le

parti du président est effectivement reporté au pouvoir et 0 s'il ne l'est pas.

Les régressions sont finalement effectuées en distinguant pour les différents

contextes économiques présents durant les années 1980-2006. Nous comparerons donc nos

analyses pour la période 1980-1990, 1991-2000 et 2001 à 2006. Cette ultime étapè 1

d ' analyse des cycles politiques en Amérique Latine concerne les ajouts faits au modèle

traditionnel par les hypothèses 3 et 4.

Les coefficients de régression, lorsque statistiquement significatifs, montrent la

présence de cycles politiques. bl , b2 et b3 représentent les changements dans les variables

dépendantes - les indicateurs macroéconomiques détaillés plus haut - en fonction des trois

périodes temporelles étudiées. b4 représente la tendance générale de la série chronologique

et permet de départager la variation cyclique de la variation continue dans le long terme.

25 Le problème d 'autocorrélation est résolu par la régression des résidus de la variable dépendante (variable macroéconomique) sur toutes les variables indépendantes (variables électorales et variables dichotomiques pour les pays) additionnées des variables à la traine (lags) un à quatre de la variable dépendante. Une correction de niveau un à quatre est ensuite ajoutée au modèle original dépendamment de la significativité statistique des coefficients des résidus à la traine (lags). Les résultats de cette procédure d' autocorrélation sont reportés à l'Annexe A.4

Page 64: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

52

Les coefficients des variables à la traine de la variable dépendante ainsi que ceux des

variables pays ne sont pas analysés ici. L'utilisation 4e ces · variables sert uniquement à

mesurer leurs impacts sur les coefficients b l à b4 et non pas pour leurs valeurs en elles­

mêmes. L' analyse des coefficients des variables institutionnels et politiques en période

postélectorale met finalement en évidence l' impact respectif de ces éléments sur la

présence et les caractéristiques des cycles politiques.

4.4.1 Type d'analyse

En raIson du nombre important de pays étudiés ici (18), l ' analyse de série

temporelle par pays faisant intervenir la méthode des moindres carrés (OLS Time-Series),

comme utilisée par Remmer, n'est pas adéquate pour estimer nos modèles de régression.

L'utilisation de cette méthode rendrait difficiles l'analyse et l'interprétation des résultats

puisqu'un tableau d'analyse des coefficients serait produit par pays. Il serait donc difficile

de tirer une conclusion générale étant donné que 4 variables, pour 18 pays, et ce, en

fonction de trois périodes temporelles font l'objet d'une étude dans ce mémoire. Ce type

d'analyse ne permet pas non plus de corriger pour les deux principaux enjeux présents avec

des données de séries temporelles organisées par panels. Le premier enjeu, de type

chronologique, est lié à la présence d' autocorrélation à l'intérieur des pays. Ce problème

est résolu par l'inclusion de variables à la traine au modèle (lags). Le second enjeu, de type

panel, est relatif à la présence d' autocorrélation ainsi que d 'hétéroscédasticité entre les

différents pays (les panels). Cette difficulté est prise en compte par la méthode d' analyse

spatiolongitudinale qui corrige pour les erreurs · entre les panels.

Dans l'objectif de rendre cohérent le choix de notre méthode d'analyse avec la

structure de notre base de données, nous utilisons donc un modèle spatiolongitudinal pour

estimer nos coefficients. Étant donné la corrélation des erreurs entre les panels, on utilise

l ' analyse spatiolongitudinale avec les erreurs corrigeant pour les panels (XTPCSE)26. Afin

26 En raison du nombre é1evé de données manquantes dans la variable balance fisca]e nous empêchant d'utiliser la méthode XTPCSE, nous utilisons, uniquement pour cette variable, l' analyse de série temporelle

Page 65: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

53

d'estimer la validité et la cohérence de notre modèle entre les pays, nous effectuons aussi

une analyse de validation inter pays27. Les résultats de ce test, présentés à l' annexe A.5 , ne

présentent pas de différences significatives entre les pays, sauf pour le Nicaragua. Après

étude des différentes opportunités s'offrant à nous pour tenir compte de cas à part,

l' exclusion définitive de l' analyse est celle qui est retenue28.

avec effet fixe (XTREG). Le problème avec ce type d' analyse, contrairement à la méthode XTPCSE, est qu ' il ne permet pas de corriger la présence d'autocorrélation entre les panels. 27 Notre procédure de validation du modèle entre pays consiste en 18 régressions de notre modèle de base, chacune d'elle excluant un pays à la fois. Les valeurs prédites sont ensuite estimées pour chacun des pays exclus sur la base des résultats des 17 autres. La somme des carrés de la différence entre les valeurs prédites et les valeurs réelles est fmalement comparée pays par pays. Nos attentes sont qu ' il n 'y aura pas de différences significatives dans la distribution des différences des sommes au carré entre les pays, et que donc, notre modèle de régression est valide pour tous les pays. 28 Le lecteur doit noter que le Nicaragua est exclu de l'analyse sur la base de l'analyse exploratoire comme suggéré par Beck et Katz (2004: 2). Les régressions effectuées en éliminant le Nicaragua de notre base de données affectent légèrement les résultats. Ceux-ci sont présentés à l' annexe A .6

Page 66: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

54

CHAPITRE 5

ANALYSE ÉCONOMÉTRIQUE

5.1 PRÉSENTATION ET DISCUSSION DES RÉSULTATS

L' analys'e des cycles politiques en Amérique Latine se fait selon trois étapes

d'analyse. La première concerne le modèle original d~ la théorie opportuniste des cycles

politiques, c'est-à-dire celui utilisé par Remmer (1993). La seconde teste le modèle

original, mais en y ajoutant cette fois des variables institutionnelles et politiques. La

dernière analyse reprend finalement la deuxième étape, mais en distinguant les résultats

pour les trois périodes analysées.

5.1.1 Modèle original

Si les présidents au pouvoir en Amérique Latine tentent de favoriser leur réélection

par une manipulation de l' économie" nous devrions observer une évolution de celle-ci en

fonction du calendrier électoral. Le tableau 5.1 présente les résultats de régression pour le

modèle original appliqué aux 17 pays inclus dans notre analyse. Ce tableau, et les suivants, .

ne présentent pas les variables dichotomiques pour les pa~s ainsi que les variables

dépendantes à la traine, et ce, dans un souci d ' économie d'espace.

Nos résultats démontrent tout d 'abord que les taux de change se détériorent

rapidement en période postélectorale tout en demeurant stables pour les trimestres

préélectoraux et électoraux. Cette accentuation des dépréciations en période postélectorale

confirme en partie nos attentes relativement à l' hypothèse 1. Le coefficient de la variable

« trimestre» démontre quant à lui une faible augmentation dans les temps des changements

de taux de croissance.

Page 67: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

55

En ce qui concerne l' inflation mesurée par l'IPC, nos résultats indiquent une

augmentation du coût de la vie en périodes électorales et postélectorales~ Pour ce qui est de

l' augmentation de l' inflation postélectorale, celle-ci est conséquente avec nos attentes

théoriques présentées à l'hypothèse l , ce qui n' est pas le cas pour son augmentation en

période électorale. L' inflation devrait en effet augmenter uniquement en période

postélectorale29. Les changements de taux de croissance de l' inflation démontrent enfin

une faible ~iminution dans le temps, ce qui est visible avec la variable « trimestre ».

Les gouvernements au pouvoir en Amérique Latine semblent aussi générer une

augmentation de l'offre de la monnaie en période électorale. Cette variation de l' indicateur

Ml , puisqu'uniquement présente pour le trimestre électoral, ne confirme donc que

partiellement nos attentes théoriques précisées à 1 ' hypothèse 2.

En ce qui a trait finalement aux changements dans la balance fiscale, ceux -Cl

présentent une augmentation des surplus en période postélectorale. Ainsi, les élections

semblent induire une augmentation des ajustements fiscaux en période postélectorale plutôt

qu'une augmentation des déficits avant les élections.

29 Cela est peut-être dû à une erreur de calcul. Le trimestre électoral capture en effet peut-être une partie de l' inflation de la période postélectorale, dépendamment du moment où l 'élection a été tenue dans le trimestre électoral. Cette interprétation est compatible avec le faible niveau de significativité statistique de notre coefficient pour le trimestre éJectoral. \

Page 68: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

56

Tableau 5.1 Régressions des variables macroéconomiques sur les variables électorales

T. de IPC Ml Déficit change

Préélectoral ,0012 -,0006 ,0037 -,3706 (,0093) (,0104) (,0118) (,3436)

Électoral ,0005 ,0194 * ,0257 * -,4185 (,0087) (,0096) (,0110) (,3337)

Postélectoral -,0199 * ,0290 ** ,0143 1,0771 ** (,0094) (,0106) (,0118) (,3483)

Trimestre ,0004 *** -,0003 *** -,0003 ,0023 (,0001) (,0001) (,0002) (,0026)

Constante -,0398 *** ,0283 *** ,0366 * -,4131 * (,0113) (,0062) (,0157) (,1631 )

N 1751 1768 1712 1448 R-carré 0,386 0,682 0,495 0,320 Chi-carré 987,26 *** 3591 ,21 *** 1495,92 *** 88,2530 ***

* < .l , ** < .01 , *** < .001

Les résultats présentés ci-dessus permettent de tirer une première série d'évidences

empiriques (EE) concernant les cycles politiques en Amérique Latine. Celles-ci sont

présentées ci-dessous:

EEI : Les cycles mesurés concernent majoritairement la période postélectorale;

EE2 : Ces cycles ne correspondent pas aux attentes théoriques du modèle opportuniste

des cycles politiques ce qui confirme les résultats de Remmer;

5.1.2 Modèles avec ajouts de variables explicatives

On constate donc que l'économie latino-américaine varie effectivement en fonction

du calendrier électoral dans la période 1980-2006. Cependant, ces variations ne se font pas

30 Il s'agit ici d 'un coefficient F en raison de l'utilisation de la procédure XTREG plutôt que XTPCSE,.

Page 69: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

57

dans le sens prédit par la théorie opportuniste des cycles politiques. Selon celle-ci, les

ma~ipulations induites par la volonté de réélection des présidents au · pouvoir rendent

incertaine dans le long terme la performance économique (Alesina, Roubini et . Cohen,

1997). Dans le cas à l' étude, il apparait, selon notre première étape d'analyse, que les

élections n'ont pas affecté ~égativement la performance économique des 17 pays étudiés.

Dans le pire des cas, les politiques économiques risquant de nuire à l'appui électoral des

gouvernements semblent être reportées à la période postélectorale afin d'échapper à

l' insatisfaction des électeurs. Cela est le cas en ce qui con.cerne la dépréciation marquée du

taux de change pour cette période. Le report de la dépréciation du taux de change après

l'élection n'est cependant pas un élément qui peut affecter négativement r ensemble de

l' économie dans le long terme.

Dans le meilleur des cas, les élections favorisent la mise en place d'ajustements

fiscaux réduisant les déficits en période postélectorale. Cette conclusion, qui confirme les

résultats de Remmer (1993: 404), suggère la présence d'impacts positifs des élections sur

la performance économique. Comme le démontrent aussi nos résultats, les cycles mesurés

ont tendance à être concentrés en période postélectorale, particulièrement en ce qui a trait

les indicateurs macroéconomiques envers lesquels l'exécutif a un certain contrôle. Cela est

le cas pour la balance fiscale ainsi que le taux de change. Ces deux indicateurs font l'objet

d'une étude plus poussée dans les prochaines sections. Les deux autres indicateurs sont

laissés de côté pour les raisons suivantes. Tout d'abord, l' inflation est une mesure de

l'évolution du coût de la vie et n'est pas sous le contrôle direct de l'exécutif. Ensuite,

l'offre de la monnaie est généralement contrôlée par la banque centrale, mais

contrairement au taux de change, elle fait rarement l'objet de débat politique ce qui

favorise son isolation d'une possible manipulation à des fins électorales. Enfin, le taux de

change et le déficit fiscal font l'objet de politiques économiques directes et représentent

souvent des priorités dans les actions des gouvernements au pouvoir.

Ainsi, existe-t-il des facteurs qui permettent d'expliquer la présence de ces cycles

en période postélectorale? Dans quelle mesure les facteurs institutionnels et politiques

influencent-ils les variations cycliques de Péconomie? Pour répondre à ces questions, nous

Page 70: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

58

nous intéressons à trois facteurs d'explication. Tout d'abord, nous incluons dans notre

analyse le contrôle partisan du président au pouvoir 'sur la chambre basse. Ensuite, nous

distinguons entre gouvernements réélus et ceux qui sont nouvellement portés au pouvoir.

Enfin, nous comparons nos résultats pour trois différents contextes économiques. Ces

facteurs d'explication des cycles politiques font l'objet des prochaines sections.

5.1.2.1 Contrôle partisan de la chambre basse et réélection des gouvernements

Le tableau 5.2 présente les résultats d'analyse de nos ~ouveaux modèles des cycles

politiques en Amérique Latine. Ce tableau concerne les variations cycliques de la balance

fiscale à la période postélectorale. Il introduit trois nouveaux modèles. Le modèle l reprend

les résultats du tableau 5.1 et est inclus à titre comparatif. Le modèle II distingue les cycles

postélectoraux entre les gouvernements pour lesquels le parti du président au pouvoir ne

contrôle pas la chambre basse (minorité) et ceux où le parti du président a une majorité de

sièges au Parlement (majorité). Le modèle III fait la distinction entre les gouvernements

nouvellement élus (nouveau) et ceux qui ont été reportés au pouvoir (réélu). Le modèle IV

incorpore finalement conjointement ces deux facteurs d'analyse.

Comme le montrent nos résultats du tableau 5.2, les ajustements fiscaux en période

postélectorale sont observés uniquement lorsque le parti du président ne contrôle pas une

majorité de sièges à la chambre basse (modèle II). Il apparait donc que les gouvernements

qui n'ont pas de contrôle sur le législatif se sentent forcés d'agir de manière responsable en

induisant des réductions du déficit fiscal. Nos résultats démontrent aussi que les

ajustements postélectoraux sont uniquement l' affaire des gouvernements qui sont

pouvellement élus (modèle III). Les gouvernements qui sont nouvellement portés au

pouvoir semblent ainsi être plus enclins à mettre en œuvre des ajustements fiscaux pouvant

avoir des conséquences négatives sur leur popularité. Finalement, lorsque l'on inclut ces

deux dimensions dans un même modèle (IV), il apparait que les réductions des déficits

fiscaux en période postélectorale concernent uniquement les gouvernements nouvellement

élus qui ne contrôlent pas une maj orité de sièges à la chambre basse. Les deux facteurs

Page 71: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

59

d' explications incorporés au modèle ont donc chacun un rôle important dans la mise en

place de ces variations cycliques de l'économie.

Tableau 5.2 Régressions de la balance fiscale sur les variables électorales ajoutées des variàbles

institutionnelles et politiques

II III IV

Préé 1 ectoral -,3706 -,3684 -,3699 -,3677 (,3436) (,3436) (,3437) (,3439)

Électoral -,4185 -,4164 -,4179 -,4161 (,3337) (,3337) (,3338) (,3339)

PostÉ1ectora1 1,0771 ** (,3483)

Post minorité 1,2591 ** (,4112)

Post_majorité ,6378 (,6323)

Post nouveau 1,1828 ** (,4272)

Post réélu' ,8779 (,5816)

Post nouv min 1,3518 ** . (,4909)

Post réélu min 1,0481 (,7352)

Post_ nouv _ maj ,6709 (,8502)

Post_réélu _ maj ,5949 (,9419)

Trimestre ,0023 ,0021 ,0023 ,0022 (,0026) (,0026) (,0026) (,0026)

Constante -,4131 * -,4048 * -,4142 * -,4068 * (,1631) (,1634) (,1632) (,1637)

N 1448 1448 1448 1448

R-Carré 0,320 0,320 0,320 0,320

F 88,25 *** 78,50 *** 78,42 *** 64,16 ***

* < . l , * * < .01 , * * * < .001

Page 72: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

60

Utilisant la même stratégie d ' analyse, nous étudions maintenant les changements

postélectoraux du taux de change. Les résultats sont présentés au tableau 5.3. Comme pour

la balance fiscale, les cycles sont uniquement présents quand les gouvernements ne

disposent pas d 'une majorité de sièges à la chambre basse (modèle II). Ainsi, les

dépréciations marquées du taux de change en période postélectorale concernent les

gouvernements affrontant une forte opposition dans le domaine législatif. Ensuite, et

contrairement aux résultats · précédents, les dévaluations du taux de change n' ont lieu que

pour les gouvernements qui sont reportés au pouvoir (modèle III). Lorsque l' on incorpore

ces deux variables dans un même modèle (IV), il apparait clairement que le contrôle

législatif n ' a pas d' impact sur la présence des cycles . postélectoraux. Le seul effet qui

persiste concerne la réélection des gouvernements. En effet, les dépréciations

postélectorales' ne concernent que les gouvernements reportés au pouvoir, peu importe s' ils

contrôlent ou non une majorité de sièges à la chambre basse3l. Ces résultats suggèrent que

les gouvernements dont la dévaluation du taux de chance était reportée à la période

postélectorale avaient une plus grande probabilité d' être réélus.

3 ] Cette conclusion est confIrmée par un test Wald effectué sur les coefficients post_réélu _ min et post_réélu _ maj démontrant qu ' il n 'y a pas de différences statistiques entre les deux.

Page 73: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

Tableau 5.3 Régressions du taux de change sur les variables électorales ajoutées des variables

institutionnelles et politiques

II III IV

Préélectoral ,0012 ,0012 ,0013 ,0012 (,0093) (,0993) (,0093) . (,0093)

Électoral ,0005 ,0004 ,0006 ,0005 (,0087) (,0087) (,0087) (,0087)

Postélectoral -,0199 * (,0094)

Post minorité -,0247 * (,0112)

Post_majorité -,0077 (,0163)

Post nouveau -,0038 (,0119)

Post réélu -,0508 *** (,0145)

Post no uv min -,0108 (,0137)

Post réélu min -,0561 ** (,0187)

Post_ nouv _ maj ,0180 (,0226)

Post_réélu _ maj -,0414 * (,0227)

Trimestre ,0004 *** ,0094 *** ,0004 *** ,0004 *** (,0001 ) (,0001) (,0001) (,0001)

Constante -,0398 *** -,0399 *** -,0395 *** -,0398 *** (,0113) (,0113) (,0112) (,0113)

N 1751 1751 1751 1751 R-Carré 0,386 0,386 0,388 0,389 Chi-carré 987,26 *** 971 ,26 *** 997,19 *** 967,95 ***

* < .1 , * * < .0 1, * * * < .001

Certaines évidences empiriques peuvent être également tirées de cette seconde étape

d' analyse. Celles-ci sont résumées ci-dessous:

61

Page 74: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

EE3 : Les cycles postélectoraux sont plus importants lorsque les présidents ont un

faible contrôle partisan sur la chambre ' basse;

EE4 : Les cycles postélectorauxd 'ajustement fiscal sont plus importants lorsqu 'il

s'agit de gouvernements nouvellement élus;

62

EEs : Les cycles postélectoraux de dévaluation du taux de change sont plus importants

lorsque les gouvernements sont réélus;

5.1.2.2 Contexte économique

Il apparait donc que la performance économique des pays latino-américains varie

en fonction du calendrier électoral, et ce, de manière différente de ce qui est prédit par la

théorie opportuniste des cycles politiques. Il semble aussi que ces cycles sont

majoritairement concentrés dans la période postélectorale et qu'ils sont influencés par le

contrôle partisan du président sur la Chambre basse ainsi que par la réélection, ou non, des

gouvernements en poste. Cependant, ces deux premiers niveaux d'analyse ne nous

permettent pas de prendre en compte l'influence des différents contextes latino-américains

dans lesquels les choix de politiques économiques ont lieu. Ainsi, puisque la période

étudiée pour ce mémoire comporte plusieurs contextes économiques différents (voir à ce

sujet le chapitre 3), il est pertinent de s'interroger sur l'impact de ceux-ci sur la présence

des cycles politiques identifiés précédemment. Cela permet de plus de justifier la reprise de

l'étude de Remmer qui portait sur la période 1980-1990. Pour ce faire, nous reprenons

notre analyse du modèle initial (avec les périodes préélectorales, électorales et

postélectorales) pour les variables économiques pour lesquelles des cycles ont été

identifiés à l'étape précédente (taux de change et déficit fiscal). Nous distinguons

cependant ici pour les trois périodes temporelles à l'étude. La première période concerne

les années 1980-1990, se caractérise par une situation économique catastrophique pour la

majorité des pays de la région et porte sur les années étudiées par Remmer (1993). La

seconde période concerne les années 1991-2000 et présente une reprise de l' économie et

un meilleur contrôle de celle-ci par les gouvernements latino-américains. Enfin, la dernière

Page 75: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

63

période analysée se rapporte aux années 2001-2006 et se caractérise par la sortie de crise

économique qui a marqué la fin des années 1990 et le début des années 2000.

Les résultats de nos analyses sont présentés au tableau 5.4. Celui-ci présente les

résultats des régressions pour les dévaluations ou appréciations du taux de change ainsi que

pour les ajustements fiscaux des trois trimestres analysés, et ce, en fonction des trois

périodes temporelles. Pour ce qui est tout d'abord du taux de change, les variations

cycliques mesurées se concentrent dans la décennie 1980, c' est-à-dire lorsque l'on assiste à

une dégradation généralisée du contexte économique. On mesure ainsi dans cette période

une dévaluation du taux de change en période postélectorale. Ce cycle correspond aux

résultats identifiés pour l'ensemble de la période 1980-2006, résultats présentés dans notre

précédente étape d'analyse. Les dévaluations cycliques du taux de change en période

postélectorale concernent donc uniquement les années 1980-1990. Ces résultats confirment

aussi les conclusions de Remmer (1993) stipulant que les élections accélèrent la

dépréciation du taux de change après la tenue de celles-ci.

En ce qui concerne les variations cycliques de la balance fiscale, celles-ci se

concentrent à l'inverse uniquement dans la décennie 1990. -Le cycle mesuré correspond à

une augmentation des déficits fiscaux en périodes électorales ainsi qu'à une augmentation

des surplus en périodes postélectorales. Cette variation de la balance fiscale en fonction du

calendrier électoral est cohérente avec nos attentes théoriques concernant le modèle

opportuniste des cycles politiques. Les gouvernements semblent ainsi engager plus de

dépenses avant les élections, phénomène qui est contrebalancé par des ajustements fiscaux

plus importants après les élections. Les années 1991-200Ô, c'est-à-dire celles où le

contexte économique se stabilise et s' améliore correspondent donc à une accélération des

déficits fiscaux aux trimestres électoraux ainsi qu'à la mise en place d'ajustements fiscaux

après l'élection. Ces résultats sont partiellement cohérents avec les résultats de Remmer, ce

qui peut être en partie dû au type d'analyse de régression par panel utilisé dans ce mémoire

contrairement à la méthode par pays de cette auteure.

Page 76: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

64

Le contexte économique a donc un impact important sur la mesure des variations

cycliques de l' économie. Lorsque celui -ci se caractérise par une instabilité marquée et des

difficultés majeures, on assiste à la mise en place de cycles de dévaluation des taux de

change en période postélectorale. Au contraire, lorsque la situation économique s'assainit,

on mesure plutôt une augmentation des ajustements fiscaux en période postélectorale

accompagnée d'une augmentation des déficits au trimestre électoral. Le contexte

économique favorise donc la variation cyclique de certains éléments économiques au

détriment d' autres.

Page 77: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

65

Tableau 5.4

Régression de la balance fiscale et du taux de change par période temporelle

Taux de change.

80-90 91-00 01-06

Préé 1 ectoral -,0120 ,0066 ,0022 (,.0222) (,0130) . (,0099)

Électoral -,0327 ,0066 ,0135 (,0219) (,0117) (,0092)

Postélectoral -,0791 ** -,0203 ,0140 (,0258) (,0137) (,0098)

Trimestre -,0004 ,0005 ,0012 ** (,0004) (,0003) (,0004)

Constante -,0092 -,0482 * -,1433 ** (,0202) (,0249) (,0451)

N 595 680 476 R-Carré 0,424 0,399 0,129 Chi-Carré 1811 ,45 *** 1534,84 *** 305,60 ***

Déficit 80-90 91-00 01-06

Préélectoral -,4965 -,6058 ,2958 (,7921) (,5148) (,4733)

Électoral ,9151 J ; -1 ,1469 * -,1172 (,8155) (,4808) (,4660)

Postélectoral 1,0627 1,5801 ** ,2477 (,8638) (,5236) (,4585)

Trimestre -,0123 -,0258 * ,0032 (,0148) (,0100) (,0148)

Constante -,1670 1,3209 * -,4743 (,3652) (,6234) (l ,3903)

N 502 575 371 R-Carré 0,262 0,331 0,488 Chi-Carré 23 ,62 *** 35.13 *** 49,25 ***

* <.1 ** <.01 *** < .001

Page 78: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

À partir de cette dernière étape d'analyse, il est possible de compléter nos

évidences empiriques en incluant les deux suivantes:

EE6 : Les dépréciations postélectora/es du taux de change se concentrent dans les

années où le contexte économique se détériore (1980-1990);

EE7 : Les ajustements fiscaux en période postélectorale se concentrent dans les

années où le contexte économique s 'améliore (1991-2000).

66

Page 79: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

67

CHAPITRE 6

DISCUSSION DES RÉSULTATS D'ANALYSE

6.1 POLITIQUES ÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES EN AMÉRIQUE LATINE

6.1.1 La notion de cycle politique

Comme nos résultats l'indiquent, la performance économique des pays latino­

américains varie effectivement en fonction du calendrier électoral. Ces résultats, résumés

au tableau 6.1" ne concordent cependant pas avec les prédictions de la théorie opportuniste

des cycles politiques. En effet, aucun d'entre eux ne suit exactement le sens prévu par nos

hypothèses présentées à la section 4.1.

Tableau 6.1 Résumé des résultats du modèle de base

Variables Pre Ele Post

Ml - i -

IPC - i i

TC - - ~

BF - - i

Tout d'abord, les cycles mis en évidence ont pour la plupart trait à la période

postélectorale. Ce résultat, conséquent avec d'autres études concernant les États-Unis

(Drazen, 2000a: 85; 2000b) semble pointer vers une concentration de certaines politiques

économiques, comme les dévaluations du taux de change ou les ajustements fiscaux, en

période postélectorale. La théorie opportuniste des cycles politiques suppose au contraire la

Page 80: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

68

mise en place de politiques expansionnistes en périodes préélectorales et électorales qui

doivent être contrebalancées par un ralentissement économique après l' élection. Qui plus

est, les évidences empiriques présentées dans ce mémoire contredisent la nature de ce

phénomène économico-électoral. En effet, en rendant la performance économique aléatoire

dans le long terme, les cycles politiques, et donc les élections, sont censés avoir des

impacts négatifs sur l'économie (Alt et Chrystal, 1983; Lewis-Beck, 1988; Rernmer,

1993). Nos résultats montrent qu'au contraire, la tenue d ' élections libres et concurrentielles

peut avoir des impacts positifs sur la gestion de l' économie. Cet élément est à intégrer dans

notre compréhension de ce phénomène ainsi que dans sa théorisation.

En effet, dans le pIre des cas, les élections favorisent le report de politiques

économiques qui peuvent avoir des impacts négatifs sur la popularité des gouvernements

les mettant en place. C'est le cas de l' augmentation des dévaluations de la monnaie

mesurées en période postélectorale. Le fait de reporter au trimestre postélectoral ce type de

politiques économiques permet aux gouvernements au pouvoir d' échapper à

l'insatisfaction provoquée par ces mesures si elles avaient eu lieu juste avant les élections.

Dans le meilleur des cas, les élections ont plutôt favorisé des agissements responsables de

la part des gouvernements quant à la gestion des finances publiques. Non seulement les

périodes préélectorales et électorales n'ont pas été l'objet d'un accroissement des déficits

fiscaux, mais en plus, les périodes postélectorales ont aidé à la mise en place de mesures

d'ajustement fiscal favorisant un meilleur contrôle de la balance fiscale. Ce dernier point

confirme les résultats introduits par Remmer (1993) voulant que les élections favorisent

une meilleure gestion des finances publiques par les gouvernements au pouvoir.

N os résultats amènent donc à nuancer l'apriori négatif dont fait l' 0 bj et le

phénomène de cycle politique. Au lieu d'être manipulées à des fins opportunistes, les

politiques économiques _ sont plutôt utilisées soit pour éviter momentanément

l' insatisfaction des électeurs dans le trimestre électoral - ce qui ne nuit pas à l' économie

dans le long terme - soit pour mettre en évidence leur gestion responsable de l' économie.

Le modèle des' cycles politiques doit donc être modifié afin d' incorporer ces nuances,

Page 81: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

69

particulièrement pour les pays situés à l'extérieur du bassin Nord Atlantique. Cela est fait

à la dernière section de ce chapitre.

6.1.2 Les/acteurs institutionnels et politiques

Les résultats concernant les impacts des facteurs institutionnels et politiques sur la

présence de cycles politiques en Amérique Latine sont résumés au tableau 6.2. Il est à

noter que ces résultats ne portent que sur le trimestre postélectoral.

Tableau 6.2 Résumé des résultats du modèle incorporant les variables institutionnelles et politiques

Variables Mino Majo Nouv Réél Nouv- Nouv- Réél- Réél-mIn maJ mIn maJ

TC ~ - - ~ - - ~ ~

BF i - Î - i - - -

On constate tout cl ' abord que les cycles, à la fois pour les taux de change et pour la

balance fiscale, concernent les présidents dont le parti ne contrôle pas une majorité de

sièges à la chambre basse. Même lorsque l'on distingue entre les gouvernements

nouvellement élus et ceux reportés au pouvoir, les gouvernements dont l'appui partisan

dans la législature est le plus faible sont ceux présentant le plus d'ajustements fiscaux en

période postélectorale32•

Une théorie relativement récente en science politique, appelée «prospect theory »,

permet d'apporter quelques pistes de réflexion pour ce qui est du comportement des

présidents à l' appui partisan minoritaire dans leur choix de politiques économiques. Cette

théorie, développée par Kahneman et Tversky en 1979, permet d' expliquer les

comportements en situation de risque et représente une alternative à l'utilisation de la

32 Pour ce qui est du taux de change, il n 'y a pas de différence significative entre ]es présidents dont le parti est minoritaire ou majoritaire à la chambre basse.

Page 82: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

70

notion d'utilité comme facteur d'évaluation des différents choix d'action. Elle décrit entre

autres comment les individus évaluent les gains et pertes potentielles en situation de risque,

élément pertinent dans le cas à l'étude. Bien que cette théorie ait été développée

relativement aux gains et pertes monétaires, elle peut tout à fait être appliquée aux

conséquences issues de la joute politique (Kahlleman et Tversky, 1992: 577). Ainsi,

lorsque des gouvernements au pouvoir font face à des «domain of losses » (Weyland,

1996), c'est-à-dire à des situations où ils s'exposent à des pertes importantes, ils vont plus

facilement s'engager dans des politiques risquées qui, à terme, peuvent résulter soit par une

situation de perte totale, soit par une situation de gains considérables.

Dans le cas d'un président dont le parti ne contrôle pas ~ne majorité des sièges à la

chambre basse, cehii-ci fait face à des pertes potentiellement importantes. Tout d' abord, il

peut se voir imposer des décisions contraignantes de la part de cette institution, notamment

par rapport aux lois budgétaires (Payne, 2007: 81-112). Ce contrôle peut entre autres se

faire par l'intermédiaire du véto de la législature sur certaines décisions ou sur leur pouvoir

d' amendement des projets de loi à l'étude. Les présidents à l' appui partisan minoritaire

peuvent aussi faire face à des procédures de destitution (Payne, 2007: 98) concernant les

ministres de leur cabinet ou même leur propre poste. Ces différentes situations font en

sorte que ces présidents sont confrontés à des pertes politiques potentiellement

importantes. Si l'on se réfère à la «prospect theory », dans un tel contexte, il est possible

que les présidents favorisent des politiques risquées qui peuvent leur faire perdre gros,

mais aussi, si elles portent leurs fruits, peuvent leur être bénéfiques dans le long terme.

L'accélération des ajustements fiscaux en période postélectorale représente

précisément ce genre de politiques risquées. En effet, réduire les déficits fiscaux impose

soit une augmentation des niveaux de taxation, soit une diminution des dépenses

gouvernementales - ou les deux en même temps. Dans les deux cas, cela peut provoquer

de l' insatisfaction au sein de la population et ainsi affecter l' appui électoral et la popularité

de ces gouvernements. Il est donc possible, si ces politiques austères ne produisent pas des

éléments positifs par la suite, qu'elles défavorisent la réélection future des présidents en

poste. Cependant, · des politiques d'ajustement fiscal, quoique potentiellement

Page 83: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

'71

impopulaires, permettent « to avoid further deterioration, regain precrisis levels of well­

being, 'and-as regards leaders-secure their own political capital» (Weyland, 1996: 7).

Elles favorisent également un meilleur contrôle de l ' économie et donc une augmentation

des ressources qUI seront ultérieurement disponibles pour d' autres politiques

gouvernementales. Les ajustements fiscaux peuvent ainsi permettre de mettre en évidence

les compétences de gestion de· l'économie des gouvernements et leur allouer plus de

ressources pour une utilisation future. Les gouvernements peuvent donc avoir un intérêt

considérable à mettre en place des politiques d 'ajustement fiscal en périodes

postélectorales.

En ce qui concerne le facteur de réélection des gouvernements, deux schémas de

choix de politiques économiques sont observés en fonction des deux indicateurs

macroéconomiques (Tableau 6.2). Pour ce qui est du taux de change, les dépréciations

postélectorales concernent uniquement les gouvernements qui sont reportés au pouvoir.

Inversement, les réductions des déficits fiscaux après les élections n'ont lieu que lorsqu' il

s' agit de gouvernements nouvellement élus. Ces deux choix de politiques économiques

induisant des cycles se justifient séparément. Tout d'abord, une dévaluation du taux de

change a des impacts à court terme potentiellement nuisibles pour l' économie (Remmer,

1993: 396-397) ainsi que d'importantes conséquences politiques potentielles (Broad, 1998;

Cooper, 1971). Selon la théorie du vote économique, le niveau de l'économie influence

l'appui électoral des gouvernements au pouvoir (Lewis-Beck, 1988). En retardant à la

période postélectorale les politiques économiques qui affectent négativement l ' économie,

les gouvernements peuvent ainsi échapper à l ' insatisfaction provoquée par ces mesures. Le

report des dévaluations de la monnaie à la période postélectorale apparait donc comme une

stratégie électorale efficace.

Ensuite, la réduction des déficits enregistrés pendant la période postélectorale ne

concerne au contraire que les gouvernements réélus. La mise en place de politiques fiscales

austères semble donc être guidée ici aussi par des objectifs de st~atégie politique, mais

cette fois-ci non pas pour favoriser la réélection, mais bien pour aider à justifier le choix

des politiques économiques difficiles et éprouvantes pour la population. En effet, les

Page 84: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

72

politiques fiscales austères, bien que souhaitables dans des perspectives comptable et

financière, peuvent provoquer de l' insatisfaction dans la population, car elles risquent de

l' affecter d'un fardeau fiscal supplémentaire ou de restreindre les services et ressources lui

étant offerts. Cependant, lorsqu' il s'agit de gouvernements nouvellement élus, il est plus

facile de justifier la mise en place de telles politiques par la mauvaise gestion de

l' économie des gouvernements sortants. Ainsi, en justifiant de la sorte leurs politiques

fiscales austères, les nouveaux gouvernements peuvent atténuer l' insatisfaction provoquée

par ces mesures tout en bénéficiant de leurs avantages - meilleur contrôle de l' économie,

compétence de gestion, augmentation des ressources futures. Dans le cas des

gouvernements qui sont reportés au pouvoir, de telles politiques fiscales ne sont

probablement pas mises en place, car de telles justifications seraient impossibles

puisqu'étant le résultat de leur propre gestion de l'économie. Qui plus est, il serait difficile

de légitimer des ajustements fiscaux en périodes postélectorales, et donc de contenir

l' insàtisfaction de la population provoquée par ces mesures, spécialement si la dévaluation

du taux de change a déjà été reportée à cette même période.

Enfin, lorsque l'on intègre les deux facteurs d'explication dans un même modèle

pour la balance fiscale, on constate que les deux éléments ont une importance respective et

interagissent ensemble. En effet, ce sont les gouvernements nouvellement élus avec un

contrôle partisan minoritaire sur la chambre basse qui favorisent le plus les ajustements

fiscaux en période postélectorale. Si l' on se réfère aux modèles II et III, il semble que le

contrôle partisan sur la chambre basse soit l' élément qui influence le plus la présence des

cycles d' ajustement fiscal mesurés en périodes postélectorales.

6.1.2 L'impact du contexte économique

Si les facteurs institutionnels et politiques ont un impact important sur les variations

cycliques de l'économie en Amérique Latine, le contexte économique influence aussi

grandement le choix des politiques économiques ainsi que les stratégies des

gouvernements au pouvoir. Les résultats de notre ultime étape d' analyse, correspondant à

l' influence du contexte économique sur nos modèles des cycles postélectoraux de la

Page 85: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

73

balance fiscale et des taux de change, sont résumés au tableau 6.3. Ceux-ci précisent les

différents schémas de choix de politiques économiques, et donc de mise en place de

variations cycliques, en fonction des contextes économiques identifiés précédemment (voir

chapitre 3 pour la description des différents contextes économiques).

Tableau 6.3 Résumé des résultats du modèle de base par période temporelle

Variables Périodes Pre Ele Post

BF 80-90 - - ~ 91-00 - - -01-06 - - -

TC 80-90 - - -91-00 - Î ~ 01-06 - - -

D'une manière générale, les trois périodes sont marquées par des évolutions

différentes des cycles des indicateurs économiques. Soit une période correspond

uniquement à des variations cycliques d'un seul indicateur, comme c'est le cas pour la

première et deuxième période, soit aucune variation d'un indicateur économique n 'y est

mesurée, ce qui se produit pour les années 2000 et plus~ On constate ainsi de façon claire

que les variations cycliques dans la balance fiscale concernent uniquement le contexte

économique de la décennie 1990. Ces années, où le contexte économique global s' améliore

et s' accompagne d'une reprise de la croissance, d'un meilleur contrôle des finances

publiques et d 'un retour des IDEs, correspondent donc uniquement à la mise en place de

cycles fiscaux. La distinction entre les différentes périodes temporelles modifie cependant

sensiblement les conclusions avancées plutôt pour l'ensemble des années 1980-2006. Cette

fois-ci , non seulement on assiste à une amélioration de la balance fiscale en période

postélectorale, comme c'est le cas lorsque l' on analyse la totalité des années 1980-2006,

mais il y a aussi une augmentation des déficits en période électorale. Ce deuxième élément,

qui correspond à ce qui est prédit par la théorie opportuniste des cycles politiques, peut être

Page 86: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

74

interprété comme une volonté des gouvernements de favoriser leur réélection en dépensant

plus que leurs revenus en période électorale.

L' amélioration du contexte économique correspond donc à la mise en place de

cycles fiscaux cohérents avec la théorie opportuniste des cycles politiques. Ceux -ci se

traduisent par une augmentation des déficits en période électorale et une amélioration de la

balance fiscale en période postélectorale. Il est à noter cependant que le coefficient de

changement dans la balance fiscale en période postélectorale est beaucoup plus élevé que

celui de la période électorale (1 ,58 versus -1 ,15). Le cycle postélectoral étant supérieur de '

27,2 % à l ' augmentation du déficit avant l ' élection, cela suggère que l ' effet global des

élections pour la performance économique des pays reste globalement positif. Les

ajustements postélectoraux surpassent ainsi les déficits engendrés par l' augmentation des

dépenses en période électorale. Il est aussi important de considérer que l ' augmentation des

déficits en période électorale n' est peut-être pas uniquement due à une manipulation des

gouvernements au pouvoir cherchant à se faire réélire. Il peut s' agir en effet d 'une

. augmentation des dépenses induites par le coût de l' organisation et de l ' administration du

processus électoral. Cet élément n ' a jamais été pris en compte par la littérature scientifique

et devrait donc faire l'objet d' une attention particulière par ceux qui s' intéressent aux

cycles fiscaux trimestriels. L ' augmentation des déficits fiscaux en période électorale doit

donc être considérée avec prudence et l ' on doit ainsi se garder de conclusions expéditives

sur l ' explication de ce phénomène. Plus de recherche est ici nécessaire.

En ce qui a trait à l ' impact du contexte économique sur les cycles du taux de

change, les résultats de nos analyses montrent également une concentration des cycles dans

une seule période. La période 1980-90 est ainsi marquée par une accélération des

dépréciations du taux de change en période postélectorale. Cette période, qui se caractérise

globalement par un contexte économique défavorable présentant de nombreux problèmes

endémiques majeurs - décroissance, diminution des IDEs, ralentissement des exportations,

augmentation des flux financiers sortants - correspond donc à la mise en place de cycles

pour les indicateurs monétaires. .

Page 87: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

75

Les conclusions qu'il est possible de tirer de l'influence du contexte économique

sur les variations de l'économie en fonction du calendrier électoral sont les suivantes. Des

variations cycliques de l "économie sont mesurées pour les deux contextes économiques

majeurs. Cependant, chacun de ces contextes correspond uniquement à un seul type _

d'indicateur macroéconomique. Lorsque le contexte économique est défavorable, des

cycles monétaires sont mesurés. Au contraire, lorsque l'économie s'assainit, des cycles

fiscaux sont enregistrés. L'amélioration du contexte économique semble ainsi défavoriser

l'utilisation du report des dévaluations à la période postélectorale comme stratégie

électorale au profit de la mise en place de cycles postélectoraux d'ajustement fiscal. Ainsi,

l'amélioration de la situation économique a un effet inverse sur les cycles monétaires et un

effet positif sur les cycles fiscaux.

6.2 LE MODÈLE DE CAPITAL POLITIQUE

Les résultats présentés ci-dessus, en incorporant de nouveaux facteurs d'explication

dans l'étude des cycles politiques, amènent à reconsidérer le modèle théorique qui a été

développé pour les pays du bassin Nord Atlantique. À la lumière de nos résultats, 4

facteurs principaux qui ont un impact sur la présence et la nature des cycles des indicateurs

économiques mesurés en Amérique Latine doivent être ajoutés au modèle:

1. Le trimestre analysé;

2. Le contrôle partisan du président sur la chambre basse;

3. La réélection des gouvernements·.au pouvoir;

4. Le contexte économique.

Ces facteurs, qui ne sont actuellement pas pris en compte par les modèles

traditionnels d'analyse des cycles politiques, doivent donc être incorporés à la théorie afin

de produire une vision actualisée de ce phénomène, particulièrement en ce qui concerne les

pays en voie de développement. Un premier pas dans ce sens a été fait par Remmer (1993)

Page 88: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

76

avec son «political capital model» (p. 405). Cependan~, cette proposition largement

innovatrice n ' a pratiquement provoqué aucune répercussion dans la littérature scientifique .

. Spanakos et Renno (2006) y réfèrent tout en précisant que ce modèle ne permet pas

d ' expliquer le choix des politiques économiques au Brésil. Braguinsky (1998) Y fait aussi

référence pour expliquer la crédibilité que procure une victoire électorale dans la mise en

place des politiques en Russie. L' absence d ' évidences empiriques directes ainsi que de

développements théoriques plus poussés pour cette nouvelle génération de modèle des

cycles politiques ont freiné son incorporation ainsi que son acceptation dans la littérature

scientifiquè concernant les cycles politiques.

Le «political capital model » de Remmer, que nous appelons ici modèle de capital

politique, peut être enrichi et amélioré par les différentes évidences empiriques mises en

. évidence dans cette recherche. Le modèle de capital politique met l ' accent sur les

possibilités de changements dans la légitimité d ' action des politiciens, mesurés par un

« capital politique» évoluant en cours de mandat électoral. Cette idée a aussi été soulignée

par Gaubatz (1991) relativement aux impacts des conflits internationaux sur le~ cycles

électoraux. Ce modèle met l' emphase sur la légitimité des gouvernements à mettre en

œuvre telle ou telle action plutôt que sur leur simple volonté de réélection comme c'est le

cas avec le modèle traditionnel. La légitimité des gouvernements en cours de mandat peut

donc être influencée par divers éléments comme les situations de crise, leur popularité, le

contexte économique, etc. Le capital politique tiré de cette légitimité va donc moduler le

choix des politiques économiques des gouvernements au pouvoir. Le modèle traditionnel

ainsi que celui incorporant nos améliorations au modèle de capital politique introduit par

Remmer (1993) sont présentés à la figure 6.1.

Page 89: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

Volonté de réélection

Figure 6.1 Modèles de cycles politiques

Modèle traditionnel

Choix des politiques économiques

Opportunisme

Politiques expansionnistes avant l'élection

Politiques récessionnistes après l'élection

Cycles politiques

Effets négatifs sur l'économie

Modèle de capital politique amélioré

Contrôle partisan

Contexte économique

(

Capital et légitimité politique

Stratégie électorale

Choix des politiques économiques

Cycles politiques

Effets neutres ou positifs sur l' économie

)

Réélection des gouvernements

Trimestre postélectoral

77

Page 90: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

78

Le capital politique ou la légitimité des présidents en poste sont tout d' abord

influencés par le trimestre analysé ainsi que par la réélection ou non des gouvernements.

Le trimestre postélectoral en particulier semble avoir un impact positif sur le capital

politique des gouvernements au pouvoir. En effet, dans le cas d'un changement de

gouvernement, ce trimestre est plus propice à la justification du choix des politiques

économiques sur la base de la gestion de l' économie qui a été faite par le gouvernement

sortant. Cette occasion de justifier des politiques austères et ainsi d'éviter l' insatisfaction

qu'elles peuvent potentiellement provoquer renforce les gouvernements au pouvoir. De

plus, le trimestre postélectoral est plus prompt au report des politiques économiques qui

peuvent avoir des conséquences électorales négatives si elles ont lieu juste avant l'élection.

Le report de ce type de politiques à la période postélectorale semble donc être une bonne

stratégie électorale, ce qui accroit le capital politique et la légitimité des gouvernements en

place.

Le ' capital politique des présidents latino-américains en poste est aussi modulé par

' le contrôle partisan dont dispose leur parti à la chambre basse. Contrairement à ce que l'on

peut s'attendre, ce ne sont pas les gouvernements majoritaires qui induisent des variations

cycliques de l'économie, mais bien ceux dont le parti contrôle moins de la majorité des

sièges de la Chambre basse. Comme expliqué précédemment, ce comportement peut être

en partie dû au fait que lorsqu'un gouvernement fait face à des pertes potentiellement

importantes, comme c'est le cas avec un gouvernement minoritaire, il est plus enclin à

mettre en place des politiques risquées qui ont une chance d'être bénéfiques dans le long

terme et qui peuvent de. ce fait lui permettre d'accroître son capital politique. Un faible

contrôle partisan du. président sur le législatif a donc un effet positif sur l'intérêt qu' il a à

essayer de mettre en place des politiques économiques favorisant sa réélection.

Enfin, le contexte économique influence aussi grandement le capital politique des

gouvernements au pouvoir. Si le contexte économique est défavorable, les cycles

concernent majoritairement les indicateurs monétaires et financiers. En particulier, ce type

de contexte économique est propice à un report des dévaluations des taux de change à la

. période postélectorale afin d'éviter l'insatisfaction que provoquent de telles mesures si

Page 91: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

79

elles avaient lieu au moment de l' élection. Un contexte économique défavorable implique

donc peu de capital politique au gouvernement en place et ne lui permet donc que des

mesures qui soulagent momentanément les difficultés économiques des électeurs. C'est ce

qui est le cas avec le report des dévaluations du taux de change après l'élection. Au

contraire, un contexte économique qui s'améliore est propice à des variations cycliques des

indicateurs fiscaux. Un meilleur contrôle de l' économie est ainsi associé à une utilisation

des dépenses gouvernementale à des fins électorales avec cependant un effet final positif

sur la balance fiscale et l'économie en général. Ce type de contexte économique renforce

donc le contrôle des gouvernements sur leur finance ce qui accroit leur légitimité dans le

choix des politiques économiques.

En terminant, un des éléments importants qui doit être ajouté au concept de cycle

politique est la nuance de l' apriori négatif qui lui est généralement attribué dans la

littérature scientifique. Le modèle traditionnel des cycles politiques considère que l'effet

global de ce phénomène est une performance économique aléatoire dans le long terme.

Comme l'ont montré nos évidences empiriques, cette caractéristique doit être remise en

question. Dans le pire des cas, les élections entrainent le report de certaines politiques

économiques électoralement défavorables au trimestre suivant le scrutin sans altérer

globalement le niveau de l'économie. Au mieux, les élections favorisent même une gestion

responsable de l'économie par les gouvernements au pouvoir en aidant à la mise en place

d'ajustements fiscaux permettant de redresser les finances gouvernementales. Il est donc

important d'inclure dans le nouveau modèle de capital politique l'idée que les variations

cycliques de l'économie en fonction du calendrier électoral ont un effet général allant de

neutre à positif sur l'économie. L'approche théorique générale des cycles politiques semble

donc être à reconsidérer~ Ce mémoire en représente une des premières pistes.

Page 92: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

80

CHAPITRE 7

CONCLUSIONS ET DÉVELOPPEMENTS

7.1 ApPORTS À LA LITTÉRATURE SCIENTIFIQUE

Notre étude des cycles politiques en Amérique Latine permet plusieurs apports à la

littérature scientifique ainsi qu'à la compréhension des cycles politiques. Elle permet tout

d'abord de reconsidérer la validité des conclusions d'une étude antérieure effectuée dans

un contexte socioéconomiqueet politique particulier, et ce, en fonction de modifications

profondes de celui-ci. La pertinence de la reproduction de cette étude se trouve dans les

bouleversements économiques majeurs qui ont affecté la région à partir des années 1990 .

ainsi que dans la poursuite du processus de démocratisation, phénomènes qui n'ont pas été

accompagnés d'une mise à jour théorique et empirique de la littérature scientifique. En

étendant l'étude de l'économie politique des élections latino-américaines jusqu'en 2006, ce

mémoire permet ainsi d' accroitre considérablement l'échantillon de pays et d'élections

étudiés. Cet élargissement de la période temporelle permet de faire passer le nombre de

pays étudiés de 8 à 18 et le nombre d'élections de 14 à 87. L'augmentation du nombre de

cas étudiés renforce la validité de nos résultats et conclusions.

Ensuite, cette recherche ' permet un apport en termes d'évidences empIrIques

concernant les facteurs explicatifs des cycles politiques. Elle renforce tout d'abord les

précédentes conclusions voulant que les variations cycliques de l'économie soient

majoritairement confinées à la période postélectorale. Bien que des variations des

indicateurs macroéconomiques soient aussi mesurées pour d'autres trimestres, les plus

importantes en termes d'amplitude et de signification statistique concernent la période

postélectorale. Autre apport supplémentaire, le contrôle partisan du président sur la

chambre basse a un impact majeur sur la présence et le type de variations cycliques

mesurées. Les présidents dont le parti ne contrôle pas une majorité de sièges à la chambre

Page 93: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

81

basse sont ceux qui présentent les cycles les plus 'significatifs pour la balance fiscale et le

taux de change. Le fait qu' il s'agisse d'un gouvernement nouvellement élu ou bien reporté

au pouvoir influence aussi les cycles fiscaux et monétaires. En effet, ces deux types de

gouvernement favorisent respectivement une amélioration de la balance fiscale et une

dévaluation des taux de change en période postélectorale. Ce mémoire souligne également

que le contexte économique joue un rôle majeur dans la mesure des variations cycliques de

l'économie en Amérique Latine. L'amélioration de la situation économique a ainsi comme

effet global de modifier les types de cycles mesurés en les faisant passer de cycles

monétaires n'ayant pas de conséquences sur l' économie pour les années 1980-1990 à

cycles fiscaux dont l' effet global reste positif pour les années 1991-2000.

Enfin, cette recherche permet de tester l' applicabilité du modèle opportuniste des

cycles politiques à des pays situés à l'extérieur du bassin Nord Atlantique. Puisque la

majorité de la littérature scientifique concerne des pays développés ou industrialisés, il est

pertinent de se questionner sur la validité théorique et empirique de ce modèle dans des

États caractérisés par une forte instabilité économique ainsi que par de hauts niveaux de

pauvreté et d' inégalité. Nos différents résultats permettent ainsi d' enrichir une alternative

au modèle traditionnel d'explication des cycles politiques qui a été présenté par Remmer

mais qui est restée lettre morte dans la littérature scientifique. Ainsi, nous pouvons

proposer un modèle amélioré de cycles politiques basé sur le capital et la légitimité

politique en incorporant les notions de contrôle partisan, de réélection, de contexte

économique ainsi que de stratégie politique.

7.2 IMPLICATIONS ET RECOMMANDATIONS

Dans le domaine pratique maintenant, les conclusions avancées dans ce mémoire

ont un nombre important d'implications. Tout d'abord, le domaine de la politique comparée

a été marqué par un débat majeur portant sur l' impact du type de régime - démocratique ou

autoritaire - sur la performance économique. uri certain nombre d'auteurs ont avancé

l' idée selon laquelle la démocratie peut avoir des impacts négatifs sur la capacité des .

gouvernements à maintenir une stabilité économique et à mettre en place, ainsi qu'à

.~

Page 94: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

82

compléter, des réformes économiques difficiles et éprouvantes, malS nécessaires

(Skidrilore 1977; Pion-Berlin 1983; Kaufman 1985; Haggard 1986, 1990; Haggard and

Kaufman 1989a, 1989b, 1992; J. Nelson 1989, 1990; Remmer 1986, 1991 ; Siddell1987;

Snider 1990). Nos conclusions suggèrent au contraire que la tenue d'élections libres,

élément fondamental du concept de démocratie, a un impact potentiellement positif, ou

dans le pire des cas neutre, sur la performance économique des gouvernements au pouvoir.

Ces conclusions doivent donc favoriser le soutien et le renforcement des règles

démocratiques pour la stabilité et le développement des économies en voie de

développement. Il est aussi possible d'exclure la tenue d' élections libres comme facteurs

d'explication majeurs des problèmes économiques qu'a connue l'Amérique Latine dans les

années 1980-2006. Plus précisément, la volonté de réélection des présidents au pouvoir ne

semble pas avoir d' impacts négatifs sur la performance économique de leur pays, bien au

contraire. L' attention peut donc se tourner vers d'autres facteurs d'explication liés par

exemple aux institutions, aux types de système partisan ou aux contraintes extérieures.

Ensuite, une opposition majoritaire à la chambre basse favorise une meilleure

gestion des dépenses gouvernementales. Lorsque les présidents au pouvoir affrontent 'une

forte opposition partisane, cela favorise la mise en place cl' ajustements fiscaux après

l'élection. Cette conclusion doit ainsi modifier la vision immobiliste associée à une

législature opposée au président (Payne, 2007). La possibilité de renouveler un mandat

présidentiel ou non peut aussi jouer sur la mise en place de certains types de politiques.

Ainsi, lorsqu'un président peut concourir pour sa réélection, il y a plus de chance qu' il

mette en place une stratégie électorale favorisant le report des politiques économiques

électoralement défavorables à la période postélectorale. Cet élément permet donc

d'alimenter le débat sur la possibilité de réélection des présidents, débat nourri entre autres

par Carey (2003).

7.3 DÉVELOPPEMENTS POSSIBLES ET CONCLUSION

L'économie latino-américaine évolue donc en fonction du calendrier électoral. '

Comme nous l'avons vu, plusieurs facteurs renforcent et conditionnent cette interrelation.

Page 95: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

83

D'autres éléments, qui ont été laissés de côté dans ce mémoire, peuvent aussi avoir un

impact sur la présence de variations cycliques de l' économie ainsi que sur leur

instrumentalisation par les gouvernements au pouvoir. On peut penser entre autres aux

limitations de choix de politiques économiques induites par les programmes d'ajustement

structurel des institutions financières internationales comme le FMI ou la BM. Ces facteurs

pourraient être intégrés aux différents modèles d'analyse des cycles politiques appliqués à

l'Amérique Latine. L' impact des crises économiques, lesquelles fortement présentes dans

cette région, est un autre facteur qui pourrait aussi être ajouté aux possibles explications de

ce phénomène. L'orientation idéologique des gouvernements pourrait elle aussi faire

l'objet d'une étude approfondie dans son effet sur les choix de politiq.ues économiques. Les

types de valeurs - libérales, conservatrices ou progressistes - pourraient ainsi avoir un

impact sur la mise en place potentielle des variations cycliques de l'économie.

L' alternance du pouvoir engagée dans la région depuis le début des années 2000 avec

l' arrivée au pouvoir de partis de gauche pourra permettre dans le futur de mesurer. l' impact

de ce changement sur la présence des cycles politiques.

Il pourrait aussi être pertinent de mettre en relief les facteurs d'opinion publique

pouvant influencer l'attitude des gouvernements au pouvoir dans leur choix de politiques

économiques ainsi que dans leur légitimité d' action. Autre élément, il serait pertinent de

tester les différents modèles des cycles politiques avec des données dont la mesure est plus

rapprochée. Ainsi, il est possible que des cycles soient induits au niveau mensuel par

exemple. Des données de ce type pourraient faciliter la détection des cycles politiques qui

échappent aux données trimestrielles. Il serait aussi opportun de mesurer les cycles pour les

élections législatives afin d'en départager l' effet avec celui des élections présidentielles.

Enfin, il serait judicieux de reprendre l' analyse effectuée dans ce mémoire en étendant la

période postélectorale aux deux trimestres suivant l' élection. En effet, il est possible que

l'effet réel de l' élection sur l'économie ne se fasse pas sentir dans le premier trimestre

suivant l' élection puisque la prise effective de pouvoir prend souvent quelques mois.

L' incorporation des deux trimestres après l' élection pourrait permettre de prendre en

compte cet élément.

Page 96: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

84

La performance économique des gouvernements latino-américains varie ' donc en

fonction du calendrier électoral. De manière surprenante cependant, cela va à l' encontre de

ce que prédit la théorie opportuniste des cycles politiques. Les prérogatives

gouvernementales en matière d' économie n 'ont ainsi pas été utilisées pour maximiser

l'appui électoral des gouvernements au pouvoir. Au contraire, elles ont même favorisé,

dans certaines circonstances, une meilleure gestion de l' économie et des agissements

responsables de la part de ces gouvernements. Les élections ont donc un impact

potentiellement positif sur la performance économique des pays qui intègrent cet élément

dans leurs règles de gouvernance. Mais si les élections ont effectivement des impacts

positifs sur la performance économique, la question de savoir si ceux-ci, particulièrement

dans le contexte latino-américain, profitent également et équitablement à tous ceux qui se

pressent aux urnes reste encore sans réponses. L' inégalité, même si elle s' accompagne de

règles démocratiques ou d'un progrès économique important, reste toujours un obstacle de

taille au réel développement des pays les moins avancés.

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Annexes

A.l- CARTE GÉOGRAPHIQUE DE L'AMÉRIQUE LATINE

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North Pacifie Ocean

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South Pacifie

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Page 110: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

A.2 - TRANSFORMATION DES DONNÉES MACROÉCONOMIQUES

Offre de la monnaie (Ml)

Ml = ln (% ch de Ml - 1)

Taux de change

Te = ln (% ch de Te - 1)

Indice des prix à la consommation

IPe = ln (% ch de IPe - 1)

Balance fiscale

BF = ln (1 er dif de BF - 1)

98

Page 111: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

A.3 - DONNÉES MANQUANTES

Taux de change

Nicaragua de 2001Q3 à 2006Q4.

Indice des prix à la consommation

Nicaragua de 1980Q1 à 2004Q4

Ml Colombie en 1985Q3, 1986Q3 à 1987Q1 , 1989Q1 à 1990Q3 et 1991Q1 à 1991Q38

Balance fiscale Argentine de 1985Q3 à 1985Q4, 1995Ql à 1995Q4 et de 2005Q3 à 2006Q4. Bolivie de 1989Q1 à 1992Q4 et 2006Q3 à 2006Q4. Brésil pour 1986Q1 et 1986Q2, 1988Q4 à 1989Q3. Chili de 1980Q 1 à 1994Q4 et de 1998Q4 à 2005Q 1. Costa-Rica de 2003Q1 à 2005Q4. Rep. Dom. pour 2001Q4, 2003Q4 et 2006Q4. Équateur de 1980Q1 à 1983Q4. Guatemala pour 1984Q4. Honduras pour 1989Q4. Nicaragua de 1985Q2 à 1987Q4. Panama pour 1986Q4, 1987Q4 et de 2006Q2 à 2006Q4. Paraguay de 1989Q3 à 2006Q4. Venezuela de 2004Q1 à 2006Q4.

99

Page 112: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

100

A.4 - RÉSULTATS DE L'ANALYSE DE VÉRIFICATION DE L'AUTOCORRÉLATION

, Résultats de la procédure de vérification de l 'autocorrélation pour l 'offre de la monnaie (Ml)

Source SS df MS Number of obs 1792 F ( 8 , 1 78 3) 210.71

Mode l 28.7162804 8 3.58953505 Prob > F 0.0000 Res i dua l 30.3735697 1783 .017035092 R-squared 0.4860

Adj R-squared 0.4837 Total 59.0898501 1791 .032992658 Roo t MSE .13052

resm1 Coe f . Std. Err. t P> l t l [ 95 % Conf . Inte rva l]

ml res l ag l .4159043 .02307·52 18.02 0.000 .3706471 .4611.615 m1reslag2 .1357942 .0250362 5.42 0.000 .0866908 .1848976 m1res l ag3 .0135093 .0249754 0.54 0.589 -.0354748 .0624934

. m1res l ag4 .2255342 .0226479 9·.96 0.000 .1811149 .2699535 pre -.0079277 .0145361 -0.55 0.586 -.0364373 .020582 ele -.0043841 .0138585 -0.32 0.752 -.0315648 .0227966

post ':".0028126 .0148435 -0.19 0.850 -.0319251 .0262999 quart -.0000698 .0001044 -0.67 0.504 -.0002747 .000135

cons .0061973 .0067789 0.91 0.361 -.0070981 .0194927

Résultats de laprocédure de vérification de l 'autocorrélation pour le taux de change

Source SS df MS Number of obs 1832 F ( 8 , 1 823) 0.94

Model 1.06385604 8 .132982004 Prob > F 0.4816 Res i dual 257.743299 1823 .141384146 R-squared 0.0041

Adj R-squared -0.0003 Total 258.807155 1831 .141347436 Roo t MSE .37601

reste Coef. std. Err. t P> l t l [95 % Conf. Inte rva l]

t cres l ag1 -.0335732 .0234076 -1.43 0.152 -.0794816 . 0123353 t cres l ag2 -.0468484 .0234189 -2.00 0.046 -.092779 -.0009178 t cres l ag3 -.0030702 .0234198 -0.13 0.896 -.0490026 .0428622 t creslag4 .0265018 .0234047 1.13 0.258 -.019401 .0724045

pre .0000817 .0417555 0.00 0.998 - . 0818121 .0819754 e l e .000586 .0398619 0.01 0.988 -.0775937 .0787658

post .0014435 .0424632 0.03 0.973 -.0818381 .0847251 quart · .0001115 .0002992 0.37 0.709 -.0004753 .0006983

c ons -.0082598 .0190228 -0.43 0.664 -.0455685 .0290489

)

Page 113: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

101

Résultats de la procédure de vérification de l 'autocorrélation pour l 'IPC

Source SS df MS Nurnber of obs 1754 F ( 8 , 1745) 413.14

Mode l 28.6739672 8 3.58424589 Prob > F 0.0000 Res i dllal 15.1390093 1745 .00867565 R-squared 0.6545

Adj R-squared 0.6529 Total 43.8129765 1753 .024993141 Root MSE .09314

resipc Coef. Std. Err. t P> l t l [ 95 % Conf. Interv a l]

i pcres l ag1 .5933176 .0239279 24.80 0.000 .5463873 .6402479 i pcres l ag2 .1968705 .0277848 7.09 0 . 000 .1423756 .2513655 i pcres l ag3 .0562559 .02776 2.03 0.043 .0018095 .1107023 i pcres l ag4 .0064935 .0238525 0.27 0.785 -.040289 .053276

pre -.0257219 .0103624 -2.48 0.013 -.0460459 -.0053978 ele -.0064163 .0099104 -0.65 0.517 -.0258537 .0130212

post -.0072283 . 01-06143 -0.68 0.496 -.0280464 .0135898 quart -.0000516 .0000752 -0.69 0.493 -.0001992 .0000959

cons . . 0059826 .0048331 1.24 0.216 -.0034966 .0154618

Résultats de la procédure de vérification de l 'autocorrélation pour la balance fiscale

Source SS df MS Nurnber of obs 61 F ( 8 , 5 2 ) 3 . 06

Model 814.636872 8 101.829609 Prob > F 0.0068 Res i dual 1732.3606 52 33.314627 R-squared 0.3198

Adj R-squared 0 . 2152 Total 2546.99748 60 42.4499579 Root MSE 5 . 7719

resbf Coef. std. Err. t P> ltl [ 95 % Con f . I nte rva l]

bfres l agl -.3190488 .1348438 -2.37 0.022 -.5896326 -.048465 bfres l ag2 -.2699442 .1411032 -1.91 0.061 -.5530886 .0132001 bfres l ag3 -.2934744 .1405904 -2.09 0.042 -.5755896 -.0113592 bfres l ag4 .2302402 .1437094 1.60 0.115 -.0581338 .5186142

pre -3.178517 6.261656 -0.51 0.614 -15.74345 9.386414 ele -1.6483 6.335128 -0.26 0.796 -14.36066 11.06407

post 3.868647 6.255434 0.62 0.539 -8.6838 16.42109 quart -.0511056 .0333826 -1.53 0.132 -.1180926 .0158815

cons 3.161019 2.387806 1.32 0.191 -1.630464 7.952503

Page 114: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

102

A.5 - PROCÉDURE DE VALIDATION INTER PA YS33

Diagramme en boîtes de la procédure de validation inter pays pour l 'offre de la monnaie (Ml)

I.{)-

e 45 e 43

e 42

0 . -

u;>-

=:

. fflgl9: jJII: ~} 1~r37!::1}7~!§9l}~~I::I lJ18 15 0'" cn o ~-

1.{) • ~~ e 83 l è9 e 25 T"""- e 94 1 e 64

e 95 e 48 e 18 e 106

e 14 e 101

0 ~-

e 8

1 234 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18

33 Le Nicaragua est le pays numéroté 13.

Page 115: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

103

Diagramme en boîtes de la procédure de validation inter pays pour le taux de change

~- . 45

::= ;C; CT en

~ r~. l • i 8

, lllllésI _ Il f21 0 -

0

T lJ9~l7I 1 :~il~I~§!8~!~J~~! Il ~t~~T I~i16 ,..--1

0 • 108 • 10c1 90 • 39 ~- 8 68 8 101

1 234 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18

Diagramme en boîtes de la procedure de validation inter pays pour l ']PC

o ,..-

: ~1 .

f~ •• III l ~ l r9

l_ I;: 10~:t:r91o!or t~18·

. 75 I ~§ . 23 e 56

o

o "? ~------------------------------------------~

1 2 3 4 5 6 7 '8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18

Page 116: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

104

Diagramme en boîtes de la procédure de validation inter pays pour la balance fiscale

0 C\J

LO Il • e 70

'1 1 ::t= ~ C" ,-en

0

LO e 50

2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18

Page 117: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

105

A.6 - RÉSULTATS DES RÉGRESSIONS INCLUANT LE CAS DU NICARAGUA

Taux de change

Li near regression , correlated panels correct ed standar d errors (PCSEs )

Group variab l e : Time variabl e :

pays quart

Panels : correlated (unbalanced) Autocorrelation : no autocorrelation Sigma computed by casewise selection Estimated c ovariances 171 Estimated autocorrelat ions 0 Estimated coef f icients . 25

Panel - correcte d logtc Coef . Std . Err.

pre -.0143383 .0248449 ele -.0128347 .0227973

post -.032287 .0252322 quart .0009483 .0003065

t c_lagl -.0520351 .1036527 t c_l a g2 -.0660622 .1036219 tc_lag3 -.0222531 .1036206 tc_l ag4 .0076909 .1036154

a r gentina -.1692703 .0881298 bol i v i a -.1179613 .0837202

braz i l -.2229402 .0908874 chi le -.0766113 .0822774

colombia -.0877772 .0824948 costarica -.0841093 .0825509

elsalv ador -.0771656 .0811571 ecuador -.1136455 .0848378

guatema l a -.0600772 .0822315 honduras -.0673013 .0823094

mex i c o -.0646758 .0825237 nicaragua -.1046419 .0824507

paraguay -.0526967 .0827661 peru -.0842214 .0824547

r epdom -.1513163 .0893029 uruguay -.1230548 .0836862

cons -.0002014 .0875756

z

-0.58 -0.56 -1.28 3.09

-0.50 -0 . 64 -0 . 21 0.07

-1.92 -1.41 -2.45 -0.93 -1.06 -1.02 -0.95 -1.34 -0.73 -0.82 -0.78 -1.27 -0.64 -1.02 -1.69 -1.47 -0.00

Number of obs 1832 Numbe r of groups 18 Obs per group : mi n 81

avg = 101.7778 max 103

R- squared 0.0260 Wald chi2 ( 24) 310.72 Pr ob> chi2 0 . 0000

P> lzl [95 % Conf . Interval]

0:564 -.0630335 .0343569 0.573 -.0575166 .0318473 0.201 -.0817413 .0171673 0.002 .0003476 .001549 0.616 -.2551907 .1511205 0.524 -.2691575 .1370331 0.830 -.2253458 .1808396 0.941 -.1953916 .2107733 0.055 -.3420016 .003461 0.159 -.2820498 .0461273 0.014 -.4010764 -.0448041 0.352 -.237872 .0846494 0.287 -.2494641 .0739096 0.308 -.245906 .0776875 0.342 -.2362306 .0818994 0.180 -.2799245 .0526336 0.465 -.2212481 .1010936 0.414 -.2286249 .0940222 0.433 -.2264192 .0970677 0.204 -.2662423 .0569586 0.524 -.2149152 .1095218 0.307 -.2458296 .0773868 0.090 -.3263468 .0237143 0 . 141 -.2870767 .0409671 0 . 998 -.1718464 .1714436

Page 118: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

Indice des prix à la consommation

(note : the number o f observ at i ons per panel , e (n s i gma ) = 4 , u sed t o compute the d i s t urbance o f c ovariance matrix e (S igma ) i s less than half o f the a v erage number o f obse r v a t ions per panel , e(n_av g ) = 98 . 44 444 4 ; you may want t o c onsider t he pa i rwise op t i on )

Li near r e gre ssion , correla t ed p a ne l s c o rrect ed standa rd error s (PCSEs )

Group vari ab l e : Ti me vari able :

pays quart

Pane l s : correlated (unbalanced) Auto c o r r e l ation : no autocorrelat1on Si gma c omput ed b y casewise selection Estimat ed c ov a riances 171 Es t imat ed a u t o c orrelat i ons 0 Estimat ed coefficients 24

Pane l - c o rrec ted l ogipc Co e f. Std . Err .

pre -.0006993 .0020264 ele .0192089 .0019017

p o s t .0289878 .0020775 qua-rt -.0003296 .000012

ipc l ag l .5792467 .0056654 ipc l ag2 .1892089 .0064429 ipc_I ag3 .0426825 .0055718

argentina .02077 ·72 .0036273 b o livia .0102664 .0029182 bra z il .0333637 .0050002

chile -.0071896 .0020863 c o l ombi a -.0058183 .0035561

c ostari c a -.0054993 .0029968 e lsa lvado r -.0052256 .0019349

e cua d o r -.0005988 .0021693 guatemal a -.0074682 .0017023

h ondu ras -.007123 .0020994 mexi co -.0069454 .002126

ni c a r agu a .0000463 .0029158 paraguay -.0102895 .0024835

peru -.0041855 .0044358 rep dom .0183486 .0054089

urugu a y .0024328 .0020526 c o ns .028457 .0027516

z

-0.35 10.10 13.95

-27.57 102.24 29.37

7.66 5.73 3.52 6.67

-3.45 -1.64 -1.84 -2.70 -0.28 -4.39 -3.39 -3.27

0.02 -4.14 -0.94 3.39 1.19

10.34

Number o f obs 1772 Numbe r o f g r oups 18 Obs per group : min 4

a v g = 98.44444 max 104

R- squared 0 . 6824 Wald chi2 ( 12) 149747.75 Prob > ch i 2 0 . 0000

P> l z l [ 95 % Conf . I n t e r v a l ]

0.730 -.004671 . 0032724 0.000 .0154816 .0229362 0.000 . 0249159 .0330597 0.000 -.000353 -.0003062 0 . 000 .5681426 .5903507 0.000 .1765811 .2018367 0.000 .0317621 . 053603 0.000 .0136679 . 0278865 0.000 .0045468 .015986 0.000 .0235635 .043164 0.001 -.0112787 - . 0031004 0.102 -.0127881 .0011515 0.066 -.0113729 . 0003743 0.007 -.009018 - . 0014332 0 . 783 -.0048507 .003653 0.000 -.0108047 -.0041317 0.001 -.0112379 -.0030082 0.001 -.0111123 -.0027785 0.987 -.0056686 .0057612 0.000 -.0151572 -.0054219 0 . 345 -.0128795 .0045086 0.001 .0077472 .0289499 0.236 -.0015903 . 0064558 0.000 .0230639 .0338501

106

Page 119: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

107

L'offre de la monnaie (Ml)

Number o f g a ps in samp l e : 4

Linear r egression, c o rre l ated p ane l s corre c ted s tandard erro rs (PCSEs)

Group variab le : Time v a riable :

pays quart

Pane l s : correlated (unbalanced) Autoc o r r e l ation : no autocorrelation Sigma c omputed b y casewise selection Es t i mated covariances 171 Es timated a u t o c o rre l ations 0 Estima t e d coe f fi c ients 24

Pa ne l - cor recte d logml Coef . Std . Err .

p re .0007422 .0108424 e l e .0256689 .010148 1

post .0136035 .010691 quart -.000285 .0001843

ml l agl .4004021 .0269535 -

ml l ag2 .1252988 .028609 -

ml l a g 4 .2122759 .0231924 argentina .0287405 .0121949

b ol i v i a . 0016091 .010504 brazi l .0535389 .0169235 chile -.00866 .0076527

colombi a -.004583 .0102262 cos t ar i c a -.0066914 . 0095304

e l sa lvador -.0065186 .0085325 e cuador -.0188734 .0125915

gu atema l a - . 0177522 .0096851 honduras -.0102613 .0079922

mexico -.008692 .0091581 nicaragua -.0006782 .0082397 paraguay -.0112522 . 0086995

pe r u -.008989 .0084941 repdom .0220979 .0111275

u r ugua y .0017852 .0104095 cons .0381642 .014602

z

0.07 2.5~ 1.27

-1.55 14.86

4.38 9.15 2.36 0.15 3.16

-1.13 -0.45 -0 . 70 -0.76 -1 . 50 -1.83 -1.28 -0 . 95 -0.08 -1.29 -1.06

1 . 99 0.17 2.61

Numbe r .of ob s 1792 Numbe r o f groups 18 Obs p er group : mi n 75

a vg = 99.55556 max 103

R- s quared 0 . 5035 Wald chi2 ( 23 ) 2372 . 09 Prob > c h i2 0 . 0000

P> l zl [95% Con f . Interval]

0.945 -.0205085 .021993 0.011 .005779 . 0455588 0.203 -.0073505 . 0345575 0 . 122 -.0006462 .0000762 0 . 000 .3475742 . 4532299 0.000 .0692262 .1813715 0.000 .1668196 .2577321 0.018 .004839 .052642 0.878 -.0189784 .0221965 0.002 . 0203694 .0867085 0.258 -.023659 .006339 0.654 -.0246259 .0154599 0.483 -.0253707 .0119879 0.445 - . 023242 .0102048 0.134 -.0435524 .0058056 0.067 -.0367347 .0012302 0.199 -.0259257 .0 054031 0 . 343 -.0266416 . 0 092575 0.934 -.0168277 .0154712 0.196 -.0283029 .0057985 0.290 -.0256372 .0076592 0.047 .0002883 .0439075 0.864 -.0186171 .0221875 0 . 009 .0095448 .0667835

Page 120: POLITIQUES MACROÉCONOMIQUES ET ÉLECTIONS …

Balance fiscale

Fixed- effects (wi thin ) regressi o n Group variable (i): pays

R- sq : within between overal l

c o rr (u i , Xb)

l ogbf

pre ele

p ost quart

bf lagl -

bf lag2 -

bf lag3 -

bf lag4 -

c o ns

sigma u sigma_e

0 . 3289 0.7675 0.3248

-0.2337

Coef .

-2.25024 -2.288656

6.423579 -.062897

-.3086397 -.2897263 -.2876255

.2280335 3.990825

1.0443989 6.0575958

Std . Err .

6.611884 6.717369 6.688297 .0464658 .1411906 .1509885 .1515974

.153112 3.321544

t

-0.34 -0.34 0.96

-1.35 -2.19 -1.92 -1 . 90

1 . 49 1 . 20

Nurnber o f obs Nurnber o f groups

Obs per group : min avg max =

F( 8,46) Prob > F

108

61 7

1 8.7

22

2.82 0.0125

P> l t l [ 95% Con f . Interva l]

0.735 -15.55927 11.05879 0.735 -15.81002 11 . 23271 0.342 -7.039265 19.88642 0.182 -.1564279 .0306339 0.034 -.5928415 - . 0244378 0.061 -.5936504 .0141978 0 . 064 - . 5927752 .0175242 0.143 - . 080165 . 536232 0.236 -2.695096 10 . 67675

rho .0288676 (f r actio n o f variance due t o u i )

F test that aIl u i=O : F ( 6, 46) = 0.14 Prob > F 0.9906