Pôle Mécanique des Matériaux et de l’Environnement … · RAPPORT SCIENTIFIQUE- MME 1- Equipe...

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RAPPORT SCIENTIFIQUE- MME Chapitre 2 Pôle Mécanique des Matériaux et de l’Environnement (MME) Les activités de recherche du pôle Mécanique des Matériaux et de l'Environnement (MME) sont centrées sur la modélisation du comportement mécanique des matériaux. Elles comportent des volets théoriques, expérimentaux et numériques et s'organisent autour des activités suivantes : o Le thème Mécanique des Matériaux Solides et des Milieux Complexes est axé sur des recherches ayant pour objectifs l’étude des propriétés en service des matériaux solides (métaux, polymères, tissus, …) et l’étude du comportement des milieux complexes (matériaux granulaires, composites, bétons …). Des recherches théoriques sont développées par des approches phénoménologiques et par passage micro-macro. En parallèle, une activité expérimentale riche et soutenue permet de valider ces différentes approches théoriques. Cette activité est basée sur des essais de caractérisation des comportements thermomécaniques des matériaux : essais usuels (traction- compression, torsion, cisaillement, …) et originaux (essais multiaxiaux variés, essais à forte pression de confinement, essais à plusieurs échelles, …). Dans cette optique, un effort important est consacré à l’acquisition des grandeurs physiques pertinentes (mesures de déformation par différents types d’extensométrie, acquisition rapide des mesures,…). Enfin, une approche numérique est développée, pour présenter une recherche complète sur la prédiction du comportement. Cette approche se caractérise par l’intégration de lois de comportement dans des codes d’éléments finis (ABAQUS, CASTEM) et par la mise en oeuvre de la méthode des éléments discrets (PFC3D). o Les activités de l'équipe "Mécanique et Couplages Multiphysiques en Milieux Hétérogènes" (MC2MH) concernent l'étude de phénomènes mécaniques et physiques en milieux complexes. L'équipe s'intéresse plus précisément à la déformation et/ou aux écoulements au sein de milieux enchevêtrés, poreux, ou multiphasés en lien avec les mécanismes physiques pertinents associés. Ainsi, une attention particulière est apportée à l'étude des couplages entre les phénomènes mécaniques et des phénomènes tels que le transport, la thermique ou les changements de phase. L'objectif des travaux est le développement de modèles de comportement. Ces modèles théoriques sont obtenus soit par approche macroscopique, soit par passage micro-macro. Des travaux expérimentaux et numériques sont également réalisés dans le but d'analyser les phénomènes étudiés et de valider les modèles. Enfin, l'équipe participe également au processus d'intégration des modèles qu'elle développe dans des codes de calculs commerciaux ou universitaires. Section 2- 37

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Chapitre

2

Pôle Mécanique des Matériaux et de l’Environnement (MME) Les activités de recherche du pôle Mécanique des Matériaux et de l'Environnement (MME) sont centrées sur la modélisation du comportement mécanique des matériaux. Elles comportent des volets théoriques, expérimentaux et numériques et s'organisent autour des activités suivantes :

o Le thème Mécanique des Matériaux Solides et des Milieux Complexes est axé sur des recherches ayant pour objectifs l’étude des propriétés en service des matériaux solides (métaux, polymères, tissus, …) et l’étude du comportement des milieux complexes (matériaux granulaires, composites, bétons …). Des recherches théoriques sont développées par des approches phénoménologiques et par passage micro-macro. En parallèle, une activité expérimentale riche et soutenue permet de valider ces différentes approches théoriques. Cette activité est basée sur des essais de caractérisation des comportements thermomécaniques des matériaux : essais usuels (traction-compression, torsion, cisaillement, …) et originaux (essais multiaxiaux variés, essais à forte pression de confinement, essais à plusieurs échelles, …). Dans cette optique, un effort important est consacré à l’acquisition des grandeurs physiques pertinentes (mesures de déformation par différents types d’extensométrie, acquisition rapide des mesures,…). Enfin, une approche numérique est développée, pour présenter une recherche complète sur la prédiction du comportement. Cette approche se caractérise par l’intégration de lois de comportement dans des codes d’éléments finis (ABAQUS, CASTEM) et par la mise en oeuvre de la méthode des éléments discrets (PFC3D). o Les activités de l'équipe "Mécanique et Couplages Multiphysiques en Milieux Hétérogènes" (MC2MH) concernent l'étude de phénomènes mécaniques et physiques en milieux complexes. L'équipe s'intéresse plus précisément à la déformation et/ou aux écoulements au sein de milieux enchevêtrés, poreux, ou multiphasés en lien avec les mécanismes physiques pertinents associés. Ainsi, une attention particulière est apportée à l'étude des couplages entre les phénomènes mécaniques et des phénomènes tels que le transport, la thermique ou les changements de phase. L'objectif des travaux est le développement de modèles de comportement. Ces modèles théoriques sont obtenus soit par approche macroscopique, soit par passage micro-macro. Des travaux expérimentaux et numériques sont également réalisés dans le but d'analyser les phénomènes étudiés et de valider les modèles. Enfin, l'équipe participe également au processus d'intégration des modèles qu'elle développe dans des codes de calculs commerciaux ou universitaires.

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1- Equipe « Mécanique des Matériaux Solides et des Milieux Complexes »

1-1 Propriétés en service des matériaux solides

1-1-1 Comportement en service des céramiques réfractaires Acteurs : Enseignant chercheurs : Evariste OUEDRAOGO, Benjamin LORET ; Doctorants : Mohsen ROOSEFID ; Technicien : Antoine MIRAS Publications : Revues à CL : [A-SAN02-030] ; [A-OUE03-358] ; [A-SAN04-931] ; [A-PRO05-934] ; [A-OUE05-936] ; Actes CL : [B-OUE02-443] CI : [-OUE04-443] ; [B-MAR03-938] ; [B-OUE04-948] ; [B-OUE04-949] ; [B-ROO05-943]; Actes SCL : [C-ROO05-941]; [C-ROO04-966] ; [C-ROO04-967] ; [C-ROO05-359]; DEA : [F-TRA03-451] ; [F-MAG04-947] ; [F-ARO04-946]; [F-SLI04-945]. Crédits publics concernant l’action: Convention N° 02 4 90 6126 de soutien de l’Etat à des actions de développement technique et d’Innovation – Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, dans le cadre du Programme national de recherche sur les matériaux réfractaires PROMETHEREF 1: 107 k€ (2002-2005), Contrat d’accompagnement du programme Prometheref de la Sté TRB : 30 k€ (2003-2007). Utilisation des crédits : Financement d’une thèse de doctorat et financement partiel des systèmes de chargement et d’instrumentation de l’installation Haute Température Grande Capacité (1600°C, 400 KN) du Laboratoire 3S. Le cadre général de cette recherche porte sur l’étude du comportement thermomécanique de structures industrielles utilisant des garnissages en béton réfractaire. Problématique Les bétons réfractaires sont des matériaux utilisés comme couche d’usure ou de sécurité de différentes installations industrielles fonctionnant à haute température dont les rigoles de haut fourneau, les poches acier, les centrales d’affinage du zinc, les centrales thermiques de type LFC (Lit Fluidisé Circulant) en sont quelques illustrations. Beaucoup de ces installations ont un fonctionnement continu et la défaillance des garnissages réfractaires peut entraîner leur arrêt avec les conséquences financières et de sécurité des personnes qu’on peut imaginer. La simulation numérique du comportement de ces structures industrielles soulève bon nombre de questions. Tout d’abord leur caractère multi-composants pose le problème de la caractérisation de tous les matériaux en présence mais aussi celui du traitement numérique de la liaison entre ces diverses couches. On distingue les couches de matériaux réfractaires qui supportent les contraintes thermomécaniques des couches extérieures telles que le casing métallique qui ont pour rôle de contenir les premières. La géométrie des couches extérieures souvent munies de raidisseurs de faible épaisseur doit souvent être « homogénéisée » pour réduire la dimension du problème (3D à 2D) et/ou le nombre d’éléments finis du modèle. Enfin, pour ancrer le casing dans le béton réfractaire, des pièces métalliques en acier appelés ancrages sont utilisées. La présence de ces ancrages constitue une source d’endommagement potentielle pour les matériaux réfractaires ; il convient donc de s’intéresser à ses effets par des moyens expérimentaux et numériques. De tous ces problèmes, l’analyse montre que la connaissance du comportement thermomécanique des bétons réfractaires est primordiale. Le programme Prometheref L’importance de ces travaux de recherche aux yeux des industriels et du Ministère de l’Industrie est mise en évidence par le financement d’un programme national de recherche sur les matériaux réfractaires PROMETHEREF. Ce programme de recherche labellisé par les réseaux RNMP et financé par le Ministère de

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l’Industrie porte sur deux types de matériaux : les réfractaires électrofondus pour les applications aux fours verriers (produits et utilisés par ST-GOBAIN-CREE) et les bétons réfractaires silico-alumineux (produits et utilisés par TRB). Le réseau se structure en deux groupes de travail distincts : l’INPG-Laboratoire 3S assure la responsabilité « universitaire » du groupe Bétons Réfractaires. Outre le pilotage du groupe, il est chargé de la caractérisation en compression uniaxiale à haute température, de la modélisation et de l’identification du comportement des matériaux, et de la simulation numérique comme aboutissement du travail entrepris. Le travail en synergie des trois laboratoires universitaires (essais mécaniques de traction et microstructure à haute température par l’EMAC-Albi, compétences en analyses microstructurales par l’ENSCI-Limoges) a permis une meilleure compréhension de l’évolution du comportement des matériaux avec la température à l’aide de l’analyse micro-structurale et une identification complète de la loi de comportement. Ce programme s’étend de Juin 2002 à décembre 2005. Quelques résultats sur le comportement thermomécanique des bétons réfractaires Les financements obtenus dans le cadre de ce programme ont permis de finaliser le développement d’une installation Haute Température et de Grande Capacité (400 KN, 1600°C) au Laboratoire 3S. Des essais de caractérisation rhéologique en compression uniaxiale de deux bétons réfractaires silico-alumineux ont été effectués (Fig. 2).

Figure 1 : Vue de l’installation Haute température Grande Capacité (400 KN, 1600°C) du Laboratoire 3S développée dans le cadre du réseau Prometheref

Figure 2 : Résultats d’essais de compression uniaxiale à différentes températures sur un béton réfractaire

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0-6,E-02 -5,E-02 -4,E-02 -3,E-02 -2,E-02 -1,E-02 0,E+00

500°C

700°C900°C

1200°C

(MPa)

20°C

L’analyse des résultats des essais de compression simple à basse et moyenne températures montre que des déformations inélastiques plus ou moins importantes se manifestent au cours des décharges. On observe un comportement de faible endommagement jusqu’au pic de contrainte et un endommagement plus important après le pic. On observe aussi souvent des ruptures fragiles après le pic de contrainte qui se traduisent par une décroissance brutale de la résistance en compression ou en flexion. La corrélation des résultats entre les essais de flexion quatre points et ceux de compression simple est bonne. A haute température la courbe en cloche typique du comportement élastique endommageable disparaît au profit d’un comportement présentant un palier en contrainte à des niveaux assez bas, caractéristique de manifestations viscoplastiques. Ces effets visqueux ont été confirmés par des essais de fluage à haute température. Modélisation du comportement des bétons réfractaires et simulation numérique En résumé, l’analyse des résultats des essais réalisés dans le cadre du programme PROMETHEREF fait apparaître que la loi de comportement idéale serait celle qui décrirait un comportement élastoplastique couplé à l’endommagement aux basses et moyennes températures et qui évoluerait ou dégénérerait en une loi de comportement viscoplastique couplée à l’endommagement à haute température. Si formellement une telle loi peut être définie, son implémentation dans des codes de calcul par éléments finis et son utilisation dans un contexte industriel sont loin d’être acquis. Pour avancer la compréhension du comportement du

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matériau ainsi que la simulation numérique des structures industrielles en prenant en compte l’endommagement, notre choix s’est pour l’instant porté sur la loi élastique endommageable de Mazars . Cette loi a l’immense avantage d’être reconnue pour décrire convenablement le comportement des bétons hydrauliques et elle est implantée dans bien nombre de codes de calcul par éléments finis ; c’est le cas du code CAST3M que nous utilisons. L’identification du modèle sur les résultats expérimentaux montrent tout de même qu’un tel choix fait n’est pas déraisonnable (Fig. 3), compte tenu de l’objectif de fournir un modèle robuste, utilisable dans des délais définis. Des simulations numériques ont ainsi permis de calculer le champ d’endommagement autour d’un ancrage métallique (Fig. 4). Des études sont en cours pour déterminer par simulation numérique le comportement d’une poche d’aciérie.

a°), Echantillon de 54BO1- FS étuvé à 110°C b°), Echantillon de 33BO1- FS étuvé à 110°C

c°), Echantillon de 33BO1- FS cuit à 900°C d°), Echantillon de 33BO1- FS cuit à 1200°C

Figure 3 : Exemple d’identification du modèle élastique endommageable de Mazars en compression uniaxiale

Figure 4 : Champ d’endommagement dans le béton réfractaire autour d’un ancrage métallique

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0-0,9 -0,8 -0,7 -0,6 -0,5 -0,4 -0,3 -0,2 -0,1 0

Déformation en %

Con

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en M

pa

ExpérienceMazars E0=115684 MPa, Epsd0=6.43e-5, Ac=0.41, Bc=741

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0-1 -0,9 -0,8 -0,7 -0,6 -0,5 -0,4 -0,3 -0,2 -0,1 0

Déformation en %

Con

trai

nte

en M

Pa

ExpérienceMazars E0=71253 MPa, Epsd0=6.43e-5, Ac=0.84, Bc=682

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0-1,6 -1,4 -1,2 -1 -0,8 -0,6 -0,4 -0,2 0

Déformation en %

Contrainte en M

Pa

ExpérienceMazars, E0=24579 MPa, Epsd0= 2.98e-4, Ac=1.34, Bc=408

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0-1,50E+00 -1,30E+00 -1,10E+00 -9,00E-01 -7,00E-01 -5,00E-01 -3,00E-01 -1,00E-01

Déformation en %

Con

trai

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en M

PaExpérienceMazars E0=28767 MPa, Epsd0=2.98e-4 Ac=1.28 Bc=503

500°C500°C500°C500°C250°C250°C250°C250°C

Partenaires impliqués : Industriels : TRB, Producteurs de produits réfractaires, SAINT-GOBAIN – CREE, Producteurs et utilisateurs de produits réfractaires électrofondus, EDF – Centre de Recherche des Renardières, Utilisateurs de produits réfractaires. Universitaires : Ecole des Mines de Paris - Centre des Matériaux FOURT à EVRY, Ecole des Mines d’ALBI-CARMEAUX - Laboratoire CROMeP à ALBI, Ecole Nationale Supérieure des Céramiques Industrielles de Limoges - Laboratoire Groupe d’Etudes des Matériaux Hétérogènes (GEMH), INSA- LYON - Laboratoire GEMPPM.

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Perspectives Le programme Prometheref a permis de constituer une base de données très importante sur les deux bétons réfractaires silico-alumineux et nous n’en avons fait pour l’instant qu’une exploitation très partielle dans le cadre du programme compte tenu des temps impartis. Il faudrait s’appuyer sur cette base de données pour proposer une modélisation complète et unifiée si possible du comportement de ces matériaux.

1-1-2 Comportement thermomécanique des solides polycristallins Acteurs : Enseignant chercheur : A. Tourabi. Doctorants : G. Bles, M. Chache, G. Losilla Publications : Revues à CL : [A-LEC02-799] ; [A-BRA02-052] ; [A-BLE02-465] ; [A-LOS04-466], Actes SCL : [C-LOS02-469]; [C-DOR04-221], Thèse : [T-BLE02-470] ; [T-CHA04-222]. Contrats : [E-RDA03-468] ; [E-MIG03-220]. Crédits publics concernant l’action: BQR UJF: 15k€ (2003), Quadriennal 12k€ (2004) Utilisation des crédits : Rénovation et extension de la machine de traction biaxiale directe.

Ce thème de recherche concerne la définition et le développement, en déformations finies, de lois constitutives applicables à une large gamme de matériaux solides, tels que : les alliages métalliques, les alliages à mémoire de forme, les matériaux tissés, les polymères solides. Les applications envisagées portent spécialement sur la description des réponses aux sollicitations cycliques complexes. Les mécanismes physiques mis en jeu aux échelles pertinentes (microscopique et/ou mésoscopique) correspondent, en général, à des processus simultanés de natures réversibles et irréversibles. Ces processus conduisent au niveau macroscopique à des effets d’élastohystérésis, de viscoélastohystérésis, d’écrouissage cycle, de rochet d’écrouissage cyclique, de rocher lié aux effets du second ordre.... Pour décrire le comportement macroscopique et rendre compte des manifestations complexes de la réalité physique, nous adoptons une démarche phénoménologique qui privilégie la prise des aspects physiques et thermodynamiques du comportement des matériaux. Dans le cadre de ce thème de recherche, la caractérisation fine des grandeurs cinématiques, mécaniques et thermiques est à la fois difficile et essentielle. Pour cela nous avons consenti, au laboratoire, depuis plusieurs années, un effort important au développement de moyens expérimentaux adaptés.

Plate forme expérimentale Presse biaxiale servohydraulique de traction-compression et de torsion alternée – De nombreuses transformations ont été apportées sur cette machine afin d’améliorer sa rigidité, l’alignement des axes et les attaches des éprouvettes (élimination du jeu aux inversions des signes des efforts). Cet équipement a permis d’obtenir des résultats originaux dans le cadre de ce thème de recherche (E-RDA03-468, E-MIG03-220), ainsi qu’à la collaboration à d’autres thèmes de recherches (A-LEC02-799, A-BRA02-052). Presse de traction biaxiale directe – Cet équipement prototype, très original, construit au laboratoire 3S, au début des années 90 a été prévu initialement pour des trajets de chargement monotones dans le plan des contraintes. Des améliorations mécaniques notables ont été apportées sur cette machine d’essai et des résultats originaux de caractérisation de l’évolution des surfaces seuils à faible offset en traction biaxiale directe, d’une plaque en alliage d’aluminium, ont été obtenus, dans le cadre de la thèse de G.Losilla (A-LOS04-466). Un résultat typique est donné sur la figure 5. Cette machine est actuellement en rénovation et en extension, pour étendre ses capacités aux chargements cycliques complexes dans le plan des contraintes. Les résultats attendus sont très prometteurs pour l’étude du comportement cyclique biaxial des matériaux métalliques, des polymères solides et des matériaux tissés. Platine de cisaillement cyclique à force latérale nulle – Ce dispositif est destiné au cisaillement de plaques minces. Des résultats originaux de caractérisation du comportement et des effets secondaires, d’un polyamide 6-6, en cisaillement cyclique à force latérale nulle, ont été obtenus dans le cadre de la thèse de G.Bles (T-BLE02-470, A-BLE02-465).

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Presse micomécanique - Cette presse de petite taille est destinée à l’étude du comportement des matériaux de la micro-électronique. Ses dimensions extérieures sont de 144 x 125 x 40 mm3. Elle est actuellement en cours de développement. Elle possède un module de sollicitation quasistatique et un module piézoélectrique pour les sollicitions rapides. L’objectif essentiel de cet équipement concerne l’étude de la fiabilité des microassemblages. Elle permet, d’une part, de caractériser le comportement mécanique de matériaux disponibles sous des formes particulières telles que des fils ou des films minces. D’autre part, cet équipement permettra de réaliser des essais in situ sous microscope optique ou électronique, avec une variété de sollicitations telles que la traction-compression, la flexion ou le cisaillement cyclique. Les résultats attendus sont très prometteurs pour l’étude des aspects mécaniques des matériaux qui sont au cœur de la problématique de défaillance et de fiabilité des microassemblages (C-DOR04-221). Modélisation phénoménologique du comportement élastoplastique Dans le cadre des travaux sur le comportement thermomécanique irréversible des matériaux métalliques, on distingue un thème de recherche, qui présente un intérêt actuel et des développements importants des points de vue théorique et expérimental : ce thème concerne la caractérisation expérimentale et la description théorique de la surface seuil à faible offset et de son évolution avec l’écrouissage monotone et cyclique. Ce thème a été adopté dans le cadre de la thèse de M.Chache (T-CHA04-222, C-LOS02-469). Un résultat typique de simulation de l'écrouissage observé le long du chargement irréversible Mx de la figure 5 est donné sur la figure 6. Responsabilité régionale A.Tourabi, représentant de Grenoble au bureau de la Plateforme REgionale de CAractérisation Mécanique (PRECAM) du cluster MAtériaux et COnception pour un DEVeloppement durable (MACODEV) de la région Rhône-Alpes. Collaboration internationale Institute of Fundamental Technological Research - Polish Academy of Sciences - Warsaw – Pologne; Acteur: W.K.Nowacki ; Sujets: Etude du comportement des matériaux tissés et des polymères solides, Essais mécaniques, Essais de thermovision.

PerspLes dirréveessent* l’étuet des* l’étu* l’étu

Figure 5 - Résultat typique de l'écrouissageobservé le long d'un chargement irréversible Mx(A-LOS04-466).

ectives scientifiques : éveloppements expérimentaux et théoriques sont rsible des matériaux solides, en sollicitations ciellement: de du comportement des matériaux métalliques,

effets de rochet du second ordre ; de du comportement des matériaux tissés et des pode du comportement des matériaux ferromagnétiq

Section 2

Figure 6 - Résultat typique de simulation del'écrouissage observé le long du chargementirréversible Mx de la figure 5 (T-CHA04-222).

liés à l’étude du comportement thermomécanique ycliques. Les projets de recherches concernent

des phénomènes de rochet d’écrouissage cyclique

lymères solides ; ues et ferroélectriques déformables.

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1-1-3 Etude expérimentale de la fatigue oligocyclique et à grand nombre de cycles Acteurs : Enseignant chercheur : M. MHAMDI ALAOUI ; DEA : [F-DRI03-226]. Publications : Actes SCL : [C-DOR04-221] ; Rapport interne : [E-MHA05-225]. Ce thème concerne le développement et la mise en œuvre d’un équipement expérimental destiné à l’étude du comportement en fatigue oligocyclique et à grand nombre de cycles. Le principe de fonctionnement de la machine d’essai se distingue par une sollicitation de l’éprouvette en flexion pure sans effort tranchant. Initialement, cet appareil a été conçu et réalisé sous la responsabilité de D. Favier, L. Orgeas et L. Debove pour l’étude du comportement en fatigue à grand nombre de cycles des « stents ». Ces structures se présentent sous la forme de tubes en alliages à mémoire de forme, utilisés dans le domaine des applications médicales (F-DRI03-226).

Cet équipement a été mis au point et mis en œuvre avec profit pour la caractérisation de la courbe de Wöhler d’un acier inoxydable martensitique à durcissement structural P930 (E-MHA05-225) (Fig. 9). Ce matériau est utilisé pour la fabrication de turbo-machines ayant pour fonction d’extraire de l’énergie à partir de courant fluviaux et marins.

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Figure 9 : Courbe de Wöhler de l’acier inoxydable martensitique à durcissement structural –P930 Nous avons aussi étudié l’opportunité de l’utilisation de cet équipement dans le cadre du projet de recherche sur la conception fiable des conducteurs multicouches de l’électronique de puissance (C-DOR04-221). L’utilisation de cette machine sur le P930 a révélé quelques imperfections liées à la conception des moyens de réglage de l’amplitude de la sollicitation. En effet pour solliciter les éprouvettes dans le domaine de la fatigue à grand nombre de cycle, il est nécessaire d’améliorer la pression de ces réglages. Un travail de conception et de modification de la machine a été mené par J.B. CARRE, stagiaire du département GMP de l’IUT1 de Grenoble avec le concours de L. DEBOVE, pour pallier à ces insuffisances. Les résultats de ce travail ont permis de proposer une solution qui reste à exploiter.

1-1-4 Structure immergée – Projet Hydroliennes Acteurs : Enseignants chercheurs : D.Imbault, A. Tourabi, (Brevet déposé en février 2005).

L’idée de récupérer l’énergie cinétique des courants océaniques ou côtiers avec des hydroliennes n’est pas nouvelle puisque deux projets ont fait l’objet d’études dans les années qui ont suivi le premier choc pétrolier. Le CNEXO (maintenant IFREMER) a effectué en 1974 une étude sur la base du site du Raz Blanchard (situé entre la presqu’île du Cotentin et l’île anglo-normande d’Aurigny). L’effet de la marée provoque un courant moyen de 2 m/s environ. Cette étude indiquait qu’en équipant 10% de la section du Raz Blanchard avec 390 éoliennes marines à axe horizontal de 10 m de diamètre et de 5 MW de puissance de crète, la production énergétique serait identique à celle de l’usine marémotrice de la Rance (24 groupes bulbes de 5.35 m et 10 MW). Indépendamment des problèmes d’impact environnemental, l’étude concluait à la non rentabilité d’un tel équipement. En 1977, un projet ambitieux, dénommé CORIOLIS, proposant l’installation de turbines de très grandes dimensions dans le Gulf-Stream fût lui aussi abandonné pour des questions de réalisation technique et de rentabilité. Dans ce contexte général, le laboratoire LEGI pilote dans le développement d’un nouveau type turbo-machine a pris contact au cours de l’année universitaire 2001-2002 avec l’équipe afin d’approfondir la

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thématique de la tenue en service des structures. Aujourd’hui les travaux réalisés en collaboration avec différents partenaires ont conduit à déposer une demande ANR. Les études menées par le laboratoire 3S au cours des années 2003 et 2004 en collaboration avec le LEGI ont montré que certaines conceptions pour le maintien de l’ensemble de l’axe turbines conduisaient à des coûts d’installations prohibitifs compte tenue des technologies off-shore requises pour les points d’ancrage. Suite à ces premiers résultats, les définitions des architectures générales des axes turbines et des systèmes de maintien associés ont été ré-analysées en vu de réduire d’un ordre de grandeur les composantes verticales ascendantes des efforts exercés sur les points d’ancrage. Les résultats numériques associés à ces nouvelles architectures confirment que les efforts principalement appliqués aux points d’ancrage sont les composantes dues aux efforts de traînée engendrés par les modules d’hydroliennes composant une tour. Ces travaux menés conjointement entre les laboratoires LEGI et 3S ont conduit au début de l’année 2005 à la rédaction d’un brevet décrivant un certain nombre d’architectures générales pour les structures de maintien de l’axe turbines. Un dispositif expérimental de fatigue en flexion pure a déjà produit des résultats exploitables, mais il doit être amélioré car la précision des chargements appliqués est insuffisante dans le domaine des grands nombres de cycles (supérieurs à 106 cycles). Les travaux actuels concernent aussi la conception et la fabrication de modules d’hydroliennes élémentaires à l’échelle 1/5ème. Sur la base des collaborations déjà engagées depuis 2 ans, le projet requiert de nouveaux développements concernant les deux axes principaux suivants :

- Conception et optimisation des structures : • Optimisation des tours et des fermes notamment au regard des efforts dus aux interactions

entre fluide et structures ; • Intégration de données plus précises concernant les chargements subis (LEGI, LDMS) ; • Pré-dimensionnement des modules élémentaires d’hydroliennes et des tours (3S, LDMS) ; • Pré-dimensionnement suivant la nature du sol des points d’ancrages (3S).

- Tenue en service des matériaux et des structures sous chargements quasi-statiques et cycliques : • Caractérisation des comportements des matériaux et des structures ; • Etude de la tenue en fatigue sous chargements cycliques ; • Intégration numérique de lois de comportement adaptées ; • Tenue en service des points d’ancrages.

Les études envisagées traitent premièrement des modules d’hydroliennes élémentaires à l’échelle 1/5ème et des modules d’hydroliennes élémentaires en vraie grandeur. Les contraintes mécaniques subies par les pales dépendent principalement des dimensions caractéristiques du module d’hydrolienne élémentaire, de la géométrie précise des pales, de la vitesse du courant amont et de la vitesse de rotation. Au cours du fonctionnement, les pales subissent un cycle de chargement défini par la variation du champ de pression en fonction de la position angulaire de la pale. Les contraintes induites au sein du matériau constitutif des pales varient fortement, par exemple entre 20 et 300 Mpa, pour un tour dans le cas de modules d’hydroliennes élémentaires à l’échelle 1/5ème. Par ailleurs, les modules d’hydroliennes tournent à des vitesses de rotation de l’ordre d’une centaine à quelques centaines de tours par minute. Les cas à fonctionnement prolongé conduisent ainsi à des sollicitations mécaniques cycliques complexes à très grands nombres de cycles. L’étude du phénomène de fatigue des matériaux mis en œuvre pour fabriquer le module élémentaire constitue ainsi un aspect très important afin de réunir les conditions requises pour assurer une durabilité et une tenue en service adaptées.

Perspectives du projet Hydroliennes à Axe de Rotation Vertical Stabilisé – HARVEST Ce projet fait l’objet d’un dossier ANR non thématique piloté par le LEGI (3S, LDMS et LEG). La contribution de notre équipe concerne essentiellement la conception des structures (sélection des matériaux), la tenue aux sollicitations cycliques (caractérisation expérimentale du comportement en fatigue des matériaux, modélisation théorique et numérique du comportement des hydroliennes et des tours, interactions fluide-structure).

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1-2 Comportement des milieux complexes 1-2-1 Comportement mécanique des milieux granulaires Acteurs : Enseignants chercheurs : P.Dorémus, D.Imbault. Doctorants : A. Frachon, T. Lecompte, Y.Chen Programme européen Brite : Dienet 2002-2005, Programme région : Compact 2001-2003, Exora 2003-2005, Rhodia 2001-2005. Contrat 2005 : Lafarge. Les recherches traitant du domaine des poudres industrielles portent sur la compression de milieux granulaires ductiles ou fragiles. Plus précisément, les travaux développés sont orientés vers la caractérisation mécanique des mélanges de poudre et la modélisation de leur comportement. Ces actions permettent de mieux comprendre les comportements mécaniques depuis le remplissage (état pulvérulent) jusqu’à la tenue suite à compaction (état à haute densité relative). Caractérisation et Simulation : Publications : [B1-ALV02-191], [B1-IMB03-453], [A-DOR02-321], [B1-DOR05-191], [A-DOR04-902], [A-DOR03-903], [I-DOR03-462], [B1-DOR03-456], [A-DOR02-458], [B1-DOR02-192], [T-FRA02-318], [A-TOU02-179] De 2002 à 2005 le laboratoire a participé aux actions de recherche menées dans le cadre du réseau européen « Dienet » (Programme Brite), impliquant 7 universités et 22 industriels. L’objectif de ce réseau était de constituer une base de données sur le comportement mécanique de poudres, puis d’utiliser ces données afin de simuler à l’aide de code par éléments finis le procédé de compression en matrice de différentes pièces présentant diverses difficultés pour la simulation. Les résultats des calculs ont été confrontés aux mesures faites par les industriels lors de la réalisation de ces pièces. Le laboratoire 3S avait la responsabilité des bases de données relatives à la caractérisation des poudres. L’ensemble de ses données a permis d’effectuer la simulation numérique de pièces de différentes géométries, de différentes conditions de remplissage et de différentes cinématiques de compression. Le laboratoire 3S est l’un des cinq laboratoires à avoir effectuer la simulation de la compression de ces pièces. Hormis une base de données relativement riche, il ressort du travail effectué par ce réseau une meilleure connaissance de la qualité de la prédiction de la simulation numérique mais aussi l’importance des phases de la compression sur le produit compacté. Ainsi, la densité initiale, obtenue au cours du remplissage, ainsi que les premiers instants de la compression correspondant aux faibles densités ont des répercutions importantes sur la répartition de densité finale. Pour des données matériaux et procédés identiques, les résultats issus de plusieurs codes de calcul (Abaqus, PowCom, Dyna, Précad,..) différent notablement. De plus pour un même code, suivant la version utilisée, les résultats présentent des écarts indiscutables. Le bilan du travail effectué par les partenaires du réseau est fructueux dans le sens ou il permet de cadrer l’intérêt de la simulation numérique des procédés de compression des poudres industrielles. Ce travail met en évidence la valeur de l’ensemble des moyens et méthodes utilisés: équipements de laboratoire pour la caractérisation, mesures sur presse industrielle, lois de comportement, codes de calcul, mesures sur pièces réelles,… D’autres travaux de caractérisation se poursuivent actuellement sur des poudres microniques. Granulation sèche : Publications : [A-DOR05-901], [C-DOR04-221], [B1-LEC04-904], [B1-DEB03-464], [T-LEC05-364] L’expertise acquise dans le domaine de la compression en matrice a permis d’aborder le domaine spécifique de la granulation sèche. Au cours des transports ou des stockages, certains pulvérulents ont tendance à s’agglomérer entre eux jusqu’à parfois créer une énorme motte d’une tonne, rendant la vidange des sacs impossible. Pour pallier à ce problème, l’idée est d’augmenter la taille des grains de poudre en les transformant en granulés, afin d’améliorer leur coulabilité et de réduire les risques d’agglomération. La granulation sèche possède des avantages, elle améliore la productivité et améliore l’homogénéité de la taille des granulés. L’objet de l’étude a consisté à appréhender les liens qui peuvent exister entre les

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caractéristiques de la poudre, et les caractéristiques des plaquettes produites. Une presse à rouleaux instrumentée a été développée afin de mesurer la pression exercée par la poudre en plusieurs points et d’en déduire des profiles de pression en fonction de l’entrefer, de la vitesse des rouleaux et de la vitesse d’alimentation. Une cartographie des plaquettes produites en fonction de deux paramètres opératoires a été réalisée : sous certaine pression, les plaquettes sont peu cohésives ; sous un certain rapport d’alimentation des confettis sont produits ; au-delà de ces valeurs existe une zone de bon fonctionnement qui permet de produire des plaquettes cohésives et relativement homogènes.

Figure 10 : Définition des zones de fonctionnement de la presse à rouleaux

Le nombre important de paramètres du procédé rend l’étude expérimentale très lourde. Ainsi une approche par la simulation numérique de la compaction a été entreprise. Rapidement, la modélisation 3D est devenue incontournable. La poudre a été caractérisée au cours de sa densification à l’aide d’installations de laboratoire : essais en matrice, essais de cisaillement, etc. Un modèle mathématique du comportement a pu être ainsi calibré et utilisé dans un code de calcul par éléments finis. Il a été montré que la simulation 3D est possible mais reste délicate du fait des changements brusques des caractéristiques de la poudre qui génèrent des instabilités au cours des calculs. Approche par éléments distincts maillés : Publications : [B1-CHE05-190], [B1-CHE03-457] Parmi les approches en cours de développement au sein de l’équipe, les approches par éléments distincts maillés ou non maillés permettent le tracé de surface de charge en fonction de la densité et du chemin de chargement comme réponse globale de l’empilement considéré. Par ailleurs, la modélisation du comportement par éléments distincts représente un axe de recherche pour aborder les phases de remplissage, de vibration voire de transfert pour lesquelles il n’y a pas encore de forte cohésion entre les grains. Elle permettrait aussi de prédire la distribution des densités et le réseau des contacts entre les grains avant le début de la compression, ces paramètres étant reconnus comme importants pour le procédé. En effet, distribution des densités et réseau des contacts conditionnent le comportement de l’ensemble de la poudre aux premiers instants de la compression.

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Figure 11 : Contrainte principale maximale en début de compression

050

100150200250300350400450

0,75 0,8 0,85 0,9 0,95 1densité relative

forc

e F2

(N)

avec frottement sans frottement

Figure 12 : Evolutions des forces normales appliquées sur la face supérieure de l’empilement Ce type de modèle éléments finis permet d’introduire de nombreux aspects en rapport avec l’état initial pulvérulent des matériaux : granulométrie, empilement et arrangement, comportements spécifiques des grains et des interfaces. Les résultats proposés sont à compléter dans le sens où les configurations réelles concernent des empilements en 3D (densité relative de remplissage moins élevée que dans le cas 2D). Concernant la mise en œuvre des modèles micro-mécaniques au sein d’un outil numérique pour la simulation de la phase de compression, trois points restent à souligner. Lors de la simulation de la mise en forme d’une pièce industrielle, l’utilisation de modèles éléments finis semble particulièrement adaptée. Dans ce contexte, le modèle micro-mécanique doit, au travers de la transition micro-macro, simuler la réponse mécanique à l’échelle macroscopique d’assemblages constitués de très nombreux grains. La validation de ces modèles micro-mécaniques requiert donc le développement de dispositifs expérimentaux particuliers. Il s’agirait par exemple de mesurer des orientations de surfaces lors de la caractérisation de types d’empilement et des surfaces de contact moyennes en fonction de la densité. Produits Multifonction : Publications : [B1-DOR03-454], [C-DOR02-194], [B1-DOR02-190] Une collaboration (programme région) avec le CETIM (Centre Technique des Industries Mécaniques), certaines industries de la petite mécanique et d’autres laboratoires de l'INPG nous mènent vers la recherche de possibilités d'élaborer des nouveaux produits multifonction issus de la MdP. Ces produits doivent répondre à des caractéristiques mécaniques et fonctionnelles. On peut citer par exemple des bagues associant des propriétés d'usure et de conductibilité thermique, des outils de mise en forme associant usure et ténacité, des pièces anti-effraction associant dureté et ductilité, etc. Les difficultés de cette étude résident dans l'obtention de couples de matériaux frittables dont la cohésion au niveau de l'interface des deux constituants soit mécaniquement saine. Des éprouvettes sont actuellement réalisées et caractérisées. La deuxième difficulté, concerne la réalisation de

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produits aux géométries spécifiques. Pour cette deuxième phase la compression est l'étape majeure. Il s'agit de réussir à comprimer deux poudres différentes avec une répartition finale des couches répondant au cahier des charges. Dans cette étape la simulation numérique doit apporter une aide précieuse. Connaissant le comportement de la poudre au cours de la densification, le challenge sera de déterminer la répartition initiale de chaque composant avant compression ainsi que la cinématique de pressage des différents outils afin d'obtenir le produit désiré. Cette recherche est prometteuse car elle ouvre une voie pour des nouveaux produits (impossible à obtenir par moulage) avec les avantages de la MdP : temps de fabrication (1000 pièces heure), pièce juste aux cotes, géométrie complexe. La compression grande vitesse développée au CETIM sur presse industrielle et à 3S sur presse de laboratoire peut être une alternative intéressante à la mise en forme traditionnelle. En effet, lors de ce procédé à énergie contrôlée, la structure du produit comprimé diffère par une porosité mieux distribuée, des rebonds élastiques plus faibles, etc… Des premiers travaux ont permis d’obtenir des résultats encourageants.

Figure 13 : Exemples de produits multicouches obtenus par compression de poudre

Perspectives scientifiques - remplissage - Les travaux antérieurs ont montré l’importance des conditions initiales à la compaction des milieux granulaires, l’état du milieu pulvérulent précédant la forte augmentation de la densité relative. Cet axe doit être développé grâce à deux programmes, un ANR et un Cluster industriel en partenariat avec le CEA. Dans cette partie, le L3S mettra en place des moyens de mesure et d’observation des écoulements granulaires. Cette tâche est fondamentale dans la mesure où elle permettra le dimensionnement des systèmes de remplissage. En particulier, cette tâche conduira à l’utilisation du code de calculs par éléments discrets (PFC3D). Ce type de simulation est important pour décrire les trajectoires des particules au sein du système de remplissage. La simulation sera donc utile pour dimensionner les déflecteurs et autres diffuseurs afin d’assurer un remplissage homogène de la matrice. En parallèle, le CEA et l’INPG mettront en place des expériences de laboratoire afin de comprendre et d’anticiper le comportement des poudres sur le remplissage des matrices. Ces effets sont connus par les fritteurs mais n’ont jamais été clairement expliqués : effet des lubrifiants, des paramètres ambiants (température, pression, humidité), effet de la nature de la poudre. Pour cela, les partenaires mettront en place des moyens d’observation des écoulements des poudres par caméra rapide, mesures de cohésion, observation en tambour tournant… . Le L3S interviendra aussi dans la caractérisation des matériaux frittés (essais mécaniques), essais cycliques de fatigue. - Compression grande vitesse - La compression grande vitesse est un procédé à énergie contrôlée. Ce type de densification des poudres permet d’obtenir de haute densité sur des produits de dimension assez importante. De plus les pièces à vert présentent une porosité plus fine, et par conséquent un potentiel de résistance à la fatigue plus élevé. Le laboratoire 3S développe actuellement une presse de laboratoire permettant de comprimer un volume de l’ordre du cm3. Cette étude pourra se dérouler en relation avec un programme PNIR-PGVE du CNRS. 1-2-2 Homogénéisation en calcul à la rupture Acteurs : Enseignants chercheurs : Sylvain TURGEMAN, Benaceur GUESSAB Publications : [A-TUR02-234] ; [B1-GUE05-235] ; [A-TUR05-246](soumis) ;D.E.A.: [NGU04-274] Après avoir développé une méthode d’optimisation performante, tenant compte des spécificités du calcul à la rupture ( élimination des contraintes d’inégalité non linéaires convexes par une pénalité extérieure

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exacte faisant intervenir un coefficient de pénalité dont on peut a priori exhiber un majorant) [A-TUR01-826] , nous nous sommes intéressés au problème de l’homogénéisation des matériaux dans le cas non linéaire et aléatoire. Dans le cas favorable où les matériaux sont périodiquement hétérogènes, des procédés mécaniquement bien fondés et capables d’intégrer toutes les informations microstructurales disponibles ont été développés dans les années 80. Dans le cas non périodique, différentes méthodes ont été proposées pour les comportements non linéaires (extensions du modèle auto-cohérent initialement conçu pour le comportement linéaire ; modèle extrémal hétérogène…). La méthode d’homogénéisation développée a pour objet la prédiction du domaine de résistance ou du critère de plasticité macroscopique d’un matériau hétérogène avec une répartition aléatoire des hétérogénéités. Cette méthode s’appuie sur le concept de matériau de comparaison, celui-ci étant homogène et de comportement directement non linéaire, à la différence des extensions du modèle auto-cohérent classique. Le matériau hétérogène est décrit par une famille de microstructures, chacune d’elles occupant un volume réduit (de l’ordre des hétérogénéités) et étant bien définie par la donnée du domaine de résistance en tout point. On réalise des échantillons de géométrie quelconque en plongeant un nombre quelconque de microstructures (en adéquation avec le poids attribué à chacune d’elles) dans le milieu de comparaison. La disposition aléatoire des microstructures au sein de la matrice homogène est caractérisée géométriquement par un paramètre ρ lié à la distance minimale qui les sépare (fig. 14). Ces échantillons sont soumis à des processus de chargements de type Reuss (conditions aux limites en contraintes uniformes) et de type Voigt (conditions aux limites en vitesses de déformations uniformes).

Matériau de comparaison

Microstructures

Figure 14 : Echantillon

On établit des équations d’auto-cohérence qui traduisent le fait que ces échantillons hétérogènes se comportent, sous des contraintes de cohérence et pour les processus de chargement indiqués, comme s’ils étaient homogènes et constitués du seul matériau de comparaison ([A-TUR02-234]). Ce dernier ayant la propriété d’être non influencé par la présence des inclusions représentatives du matériau hétérogène aléatoire étudié, est précisément le matériau équivalent recherché. Le système d’équations d’auto-cohérence, paramétré par ρ, se présente sous la forme de deux équations à une inconnue (le domaine de résistance du matériau de comparaison), chacune de ces équations ayant trait à chacun des deux processus de chargement considérés. Malheureusement ce système d’équations n’admet en général pas de solution quand la distance qui sépare les inclusions est finie, et une infinité de solutions quand cette distance est infinie. Ceci signifie que la condition « réponse des échantillons hétérogènes égale celle des mêmes échantillons homogènes constitués du seul matériau de comparaison » n’est pas discriminante dans le sens qu’elle ne permet pas de distinguer les matériaux de comparaison, soit par absence de solutions, soit au contraire par une multiplicité de solutions. Il s’ensuit que les seules indications que l’on obtienne sur le domaine de résistance macroscopique recherché par ce procédé de comparaison, sont les bornes de Reuss ou Voigt généralisées, sauf à fixer arbitrairement le paramètre ρ.

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On a cherché à résoudre ce problème lié à la non-existence des solutions du système auto-cohérent, lorsque les distances entre les inclusions sont finies, en modifiant les équations d’auto-cohérence par l’utilisation d’une égalité approchée, afin que l’ensemble des solutions du système, caractérisé par son diamètre, ne soit pas vide. Ce procédé, basé sur une définition de l’égalité des convexes « à ε près », conduit à un système d’équations ε-auto-cohérentes, paramétré par ρ et par ε. Ces paramètres sont fixés de manière à ce que le diamètre de l’ensemble des solutions soit minimum. Ceci revient à faire le choix du couple (ρ,ε) qui est le plus discriminant. La mise en œuvre effective de cette caractérisation du matériau homogène équivalent est complexe puisqu’elle suppose la détermination des solutions du système ε-auto-cohérent afin d’en déduire le diamètre qu’il convient de minimiser. On s’affranchit de cette difficulté en ramenant le problème initial à la résolution séparée de chacune des deux équations qui forment le système. A cet effet on montre que chacune des deux équations admet une solution extrémale fonction de (ρ,ε), et donc que toute solution du système ε-auto-cohérent se trouve bornée par ces solutions particulières. La réciproque de cette dernière propriété, nécessaire pour aboutir à la simplification souhaitée, n’est pas établie en toute généralité. Elle est vraie sous les hypothèses que les solutions extrémales soient homothétiques et que ε ne soit pas trop grand. Cependant, du fait de son intérêt pratique, on l’utilise dans une démarche heuristique. On peut alors substituer au diamètre de l’ensemble des solutions, la distance entre les solutions extrémales. On a appliqué la méthode proposée à la recherche du domaine de résistance macroscopique d’un matériau anisotrope fissuré (problème plan) (fig. 15).

Figure 15 : Matériau fissuré

Le matériau sain admet un domaine de résistance qui a pour expression dans un repère privilégié Oxy :

)σ,σ,(σ g G 0000 = avec { }'σ' IIσ ; σ' IIσ ; σ IIσ / IR σ ')σ',σ',(σ g yxyx4S ≤≤≤∈= .

On obtient pour une densité donnée de fissures la prédiction suivante du domaine de résistance

macroscopique recherché : σ hG ) 1 , 0.645 , 0.645 g( σ G ) 1 , 0.645 , 0.502 g( 0h0 ⊂⊂

Le contexte suffisamment simple de cette application (fissures de mêmes longueur et orientation ; expression de G0) permet de déterminer une approximation du domaine Gh en effectuant un calcul de structure sur un volume supposé représentatif du matériau hétérogène. Ce calcul utilise la méthode cinématique du calcul à la rupture. Il est réalisé sur 1000 échantillons carrés comportant 25600 fissures disposées aléatoirement, pour deux types de conditions aux limites : BC1 : uniformes en vitesses de déformation (conditions de Voigt). BC2 : mixtes en contraintes et vitesses de déplacement (approchant les conditions de Reuss et permettant de s’affranchir des problèmes de couches limites qui apparaissent pour ce type de condition). Le calcul direct conduit aux résultats moyens (avec une dispersion très faible) suivants :

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BC1 conditions les pour ) 1 , 0.767 , 0.767 g( σ G 0h = BC2 conditions les pour ) 1 , 0.645 , 0.645 g( σ G 0h =

Les volumes finis utilisés dans le calcul direct paraissent a priori représentatifs, compte tenu du grand nombre de fissures considérés. Cependant cette représentativité pourrait être contestée, puisque le calcul direct donne des résultats bien différents selon la nature des conditions aux limites considérées. Il faut voir là la conjonction des faits suivants : le caractère asymptotique du processus d’homogénéisation ; et surtout la difficulté du calcul de structure lui-même qui induit une certaine imprécision, certainement beaucoup plus importante dans le cas des conditions aux limites BC1 que dans celui des conditions mixtes BC2. Néanmoins, avec ces réserves, il apparaît que la borne supérieure théorique obtenue constitue une prédiction intéressante. Bien entendu, cette application ne constitue qu’une première étape du processus de validation de la méthode d’homogénéisation proposée. D’autres applications (matériaux renforcés) sont en cours pour l’étude des capacités prédictives de la méthode d’homogénéisation élaborée. Perspectives scientifiques Endommagement : dans le domaine de l’endommagement, nous cherchons à développer un modèle basé sur la saturation du critère de résistance du matériau sain ou partiellement endommagé. L’intérêt de ce modèle réside dans le fait qu’il permet de s’affranchir du mode réel d’endommagement du matériau (souvent très difficile à appréhender) en tenant compte localement de toutes les sollicitations, mêmes des plus complexes. Ce modèle se présente en deux versions. La première version déjà testée, dite de « Tout ou Rien » n’admet que deux états possibles (matériau sain ou rompu). Notre objectif est d’élaborer une seconde version qui admet des états d’endommagement partiel (endommagement progressif entre les deux états « sain » et « rompu »). Cette version nécessite la définition d’une loi d’endommagement continu ainsi qu’un couplage avec une méthode d’homogénéisation pour déterminer le critère de résistance du matériau dans chacun de ses états d’endommagement partiel. Calcul à la rupture : pour éviter la complexité numérique liée à l’approche cinématique de la théorie du calcul à la rupture, nous cherchons à développer une formulation de l’approche extérieure des chargements extrêmes mais, cette fois, posée en termes de contraintes. Ce travail est largement entamé et les résultats obtenus à ce jour sont très encourageants. Nous avons néanmoins constaté une dépendance sensible entre la forme du maillage en éléments finis du solide et la qualité des résultats, et l’objectif fixé est de résoudre ce problème. Homogénéisation : dans le cadre de l’homogénéisation non linéaire, nous cherchons à élaborer des codes de calcul basés sur la méthode ε-autocohérente que nous avons développée. Ces codes permettront la détermination de critères de résistance de matériaux hétérogènes aléatoires et de valider les prédictions de la méthode en l’appliquant à des matériaux tels que les milieux granulaires denses (ou encore les solides poreux, le matériau béton, le béton renforcé…).

1-2-3 Application du principe d’entropie maximum à la modélisation des milieux granulaires Acteurs : chercheur : Mayeul Arminjon - CR CNRS. Doctorants : Mohamed Najib - Codirection avec Hichem Smaoui (ENIT, Tunis). La relation entre les mécanismes élémentaires et les évolutions macroscopiques d’un milieu granulaire reste un problème difficile. Nous avons tenté d’élaborer un modèle micro-macro pour les milieux granulaires en partant d’une nouvelle approche, reposant sur le principe d’entropie maximale (Maxent). Ce dernier s’applique à la recherche d’une loi discrète de probabilité, (pi), sur un ensemble fini à M éléments, dans le cas où seules les moyennes de certaines grandeurs selon cette loi sont connues. Il consiste à sélectionner la loi qui minimise l’entropie statistique S = − Σ i pi Log pi, sous certaines contraintes. Nous avions donné précédemment [ARM00-372] une reformulation de Maxent pertinente pour le problème du passage macro-micro dans un milieu continu hétérogène. Cette formulation introduisait des “constituants élémentaires” supposés caractérisés par une valeur Dj de la sollicitation micro et par une valeur Xk de

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“l’état local” : Maxent s’applique à la recherche des fractions volumiques p jk de ces constituants

élémentaires − sous des contraintes consistant à profiter de l’information connue, par ex. à imposer la sollicitation macro et les fractions volumiques des constituants. Cette reformulation de Maxent a maintenant été elle-même adaptée par nous au cas d’un milieu granulaire. La nécessité d’une adaptation vient du fait qu’ici les constituants élémentaires ont un caractère discret, et la sollicitation micro n’est pas un objet de même nature que la sollicitation macro. Au lieu d’un tenseur “sollicitation micro”, nous définissons alors la liste sc = (Fc, vc) des « variables dynamiques » micro, où C est la liste des contacts dans l’agrégat, Fc (c∈C) sont les forces mutuelles exercées par les grains en contact, et vc sont les vitesses de glissement relatives. L’état local au point x dans le milieu granulaire est défini par la donnée Xc = (nc, rc) pour le contact c(x) le plus proche de x, nc (c∈C) étant les normales aux plans de contact et r c les distances entre les centres des grains en contact. Bien que s et X soient ainsi discrétisés dès le départ, le modèle numérique considèrera des listes en général différentes des listes réelles, soit sj et Xk (j = 1, ..., m ; k = 1, ..., n). L’application de Maxent fournit, modulo les contraintes qu’il convient d’imposer, la répartition la moins biaisée des fractions volumiques pj

k des zones du milieu granulaire où les variables dynamiques valent sj et où simultanément l’état possède la valeur Xk. Les lois physiques élémentaires du contact et du frottement (Coulomb-Signorini) sont prises en compte sous la forme de contraintes à introduire dans Maxent. Le modèle a été implanté sur ordinateur, pour différentes configurations d’agrégats bidimensionnels (rouleaux) réguliers soumis à une compression avec une contrainte de confinement imposée. La solution Maxent est différente de la solution « de référence » d’un problème posé au milieu granulaire régulier considéré, ce qui est normal puisque Maxent est une modélisation statistique. Toutefois, après avoir vu la nécessité d’imposer une contrainte de cohérence énergétique, nous avons amélioré la qualité des simulations numériques. Nous avons aussi trouvé des formules plus exactes pour le calcul de la déformation moyenne. Pour mieux tester ce modèle, il faudrait pouvoir l’appliquer à des matériaux réels. Dans ce but, nous avons formulé le calcul de la loi incrémentale macro avec le modèle Maxent. En se donnant l’incrément de déformation macro δε entre t et t+δt, et supposant connu le tenseur contrainte macro σ(t), la résolution de Maxent à l’instant t permet (via des relations de fermeture pour l’évolution des états) d’accéder à σ(t+δt). Ce calcul est en cours d’implantation.

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2 - Equipe « Mécanique et Couplages Multiphysiques en Milieux Hétérogènes» (MC2MH)

Introduction Les recherches menées dans le cadre de l’activité "Mécanique et Couplages Multiphysiques en Milieux Hétérogènes" (MC2MH) concernent l'étude de phénomènes mécaniques et physiques en milieux complexes. Plus précisément, cette activité est centrée sur l’étude de la déformation et/ou des écoulements au sein de milieux poreux, enchevêtrés, ou multiphasés en lien avec les mécanismes physiques pertinents associés. Ainsi, une attention particulière est apportée à l'étude des couplages entre les phénomènes mécaniques et des phénomènes tels que le transport, la thermique ou les changements de phase. L'objectif des travaux est le développement de modèles de comportement. Ces modèles théoriques sont obtenus soit par approche macroscopique, soit par passage micro-macro. Des travaux expérimentaux et numériques sont également réalisés dans le but d'analyser les phénomènes étudiés et de valider les modèles. Enfin, dans certains cas les modèles développés sont intégrés dans des codes de calculs commerciaux ou universitaires. Dans ce contexte, les travaux réalisés au cours de ces quatre dernières années s’organisent en trois thématiques, dont nous présentons par la suite les résultats principaux :

Ecoulement, transport et acoustique en milieux poreux, ⇒ ⇒ ⇒

Déformation et propriétés physiques des milieux enchevêtrés, Déformation et couplages thermomécaniques dans les alliages à mémoire de forme.

2-1 Ecoulement, Transport et Acoustique en Milieux Poreux Acteurs : Chercheurs : J.-L. Auriault, L. Debove, C. Geindreau, L. Orgéas, P. Royer ; Doctorants : J. Chastanet (2004), E. Sawicki (2004), M. Tejchman (2004), Z. Idris (2006). Publications : Revues à comité de lecture : [A-ORG05-245], [A-AUR05-223], [A-CHA05-212], [A-SAW05-037], [A-LEW05-018], [A-AUR05-987], [AUR05-760], [A-IDR04-754], [A-GEI04-498], [A-LEW04-490], [A-CHA04-489], [A-CHA04-488], [A-AUR04-418], [A-ROY03-419], [A-LEW02-266], [A-GEI02-175], [A-AUR02-107], [A-ROY02-924], [A-AUR02-922], [A-AUR02-807], [A-AUR02-762]. ; Actes à comité de lecture : [B1-PHI05-200], [REN05-019], [B1-IDR05-002], [B1-IDR05-007], [B1-IDR05-014], [B1-CHA05-006], [B1-JLE05-005], [B1-SAW05-004], [B1-SAW05-003], [B1-IDR05-002], [B1-AUR05-001], [B1-JLE04-573], [B1-ORG03-571], [B1-SAW03-357], [B1-GEI03-356], [B1-KHU02-232], [B1-BLO02-231], [B1-GAU02-230], [B1-CHA02-229], [B1-AUR02-228]. ; Conférences invitées : [I-AUR05-008], [I-AUR05-000], [I-AUR03-320], [I-AUR02-026] ; Autres actes : [B2-SAW04-842], [B2-CHA02-027] ; Ouvrages, chapitres d’ouvrage : [O-AUR05-600], [O-AUR02-233] ; Mémoire d’Habilitation à Diriger des Recherches : [T-GEI04-204] ; Mémoire de thèses, de master : [T-TEJ04-205], [T-CHA04-203], [T-SAW04-198], [F-PHI04-199], [F-TIS02-215], [F-GRO04-156].

L’étude des milieux poreux est un domaine de recherche très actif du fait du large champ de ses applications. Par essence transversale à la mécanique du solide et à la mécanique des fluides, l’étude du transport, de l’écoulement et de la propagation d’ondes en milieu poreux déformable devient très rapidement interdisciplinaire pour peu que l’on veuille prendre en compte les couplages multi-physiques qui peuvent s’y développer. Lorsqu’elle est

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possible, l’utilisation de modèles continus est la démarche privilégiée par l’ingénieur pour obtenir des prévisions fiables. L’objet de nos recherches est d’utiliser une méthode de passage micro-macro pour déterminer les modèles continus pour des phénomènes et/ou des structures de milieux poreux complexes. Notre démarche consiste en premier lieu à identifier, dans de très larges champs d’applications, des problématiques physiques impliquant des milieux poreux et pour lesquelles les modèles macroscopiques sont soit inexistants, soit empiriques. La méthode de passage micro-macro utilisée est la méthode d’homogénéisation à échelles multiples pour structures périodiques, parfaitement adaptée à la recherche de modèles. Sans aucun pré-requis à l’échelle macroscopique et sous la condition qu'il existe deux ou plusieurs échelles séparées d'espace et/ou de temps, cette méthode théorique permet de déterminer l’existence de toutes les descriptions continues et macroscopiquement équivalentes possibles, leur domaine de validité, structure et propriétés fondamentales, remplaçant ainsi la description complexe du phénomène à l’échelle microscopique. Notons que la détermination des coefficients effectifs ainsi que la validation des modèles macroscopiques établis théoriquement donne également lieu des travaux expérimentaux et/ou numériques réalisés en collaboration avec des spécialistes des domaines concernés. Dans les thématiques abordées, l’accent est mis sur la complexité des phénomènes (milieux tournant, écoulements et fluides complexes), la prise en compte de couplages multiphysiques (écoulement en présence d’un champ magnétique, transports réactifs, effets thermiques) et/ou sur la complexité des milieux (milieux à faible séparation d’échelles, à double porosité ou biporeux). Nous énumérons ci-dessous nos principaux résultats obtenus sur les quatre dernières années. 2-1-1 Ecoulement de fluides en milieu poreux F l u i d e s n o n - n e w t o n i e n s La problématique de l’écoulement de fluides non-newtoniens en milieu poreux concerne de nombreux domaines d’application (exploitation des ressources naturelles, mise en forme des composites à matrice organique, du papier, industries pharmaceutique, agroalimentaire…). Si l’on recense de nombreux travaux expérimentaux et théoriques sur la filtration de fluides newtoniens ou non-newtoniens en milieux poreux isotropes (lits de billes aléatoirement réparties), très peu d’études se sont penchées sur l’écoulement de tels fluides en milieux anisotropes et à la formulation des lois de filtration correspondantes. Nos travaux de recherche tentent de combler cette carence. A l’heure actuelle, ils se restreignent aux écoulements lents et isothermes de fluides incompressibles purement visqueux (loi puissance) en milieux poreux rigides. Ils comportent des aspects expérimentaux théoriques et numériques. Ils ont été soutenus par le CNRS dans le cadre d’une action intitulée "Ecoulements de fluides non-newtoniens en milieux poreux anisotropes" (Soutien aux Jeunes Chercheurs, 2001-2003, C. Geindreau, L. Orgéas (resp.) et P. Royer). Ils se poursuivent actuellement dans le cadre de la thèse de Z. Idris. Les résultats déduits de ces études sont directement applicables aux problèmes d’écoulement dans les milieux fibreux (voir paragraphe « déformation et propriétés physiques de milieux enchevêtrés »). Volet expérimental – Plateforme de filtration : une plate-forme expérimentale de filtration a été conçue et mise au point lors des masters de recherche B. Tison [F-TIS02-215] et S. Grouhel [F-GRO04-156]. Nous avons pu ainsi caractériser la filtration de quelques fluides non-Newtoniens modèles dans des milieux poreux modèles. A titre d’exemple [B1-IDR05-007], [B1-IDR05-014] on montre sur la Figure 1(c) les pertes de charges enregistrées au cours de l’écoulement en régime permanent de solutions aqueuses de Xanthan (dont les viscosités ont préalablement été déterminées sur rhéomètre cône-plan, cf. Figure 1(a)) au sein d’un milieu fibreux élémentaire constitué de cylindres parallèles à section droite circulaire (Figure 1(b)). Dans la zone où les nombres de Reynolds de pore sont faibles (zone blanche sur la Figure 1(c)), les pertes de charges sont des fonctions puissance des vitesses filtrantes, dont les exposants sont ceux des lois puissance utilisées pour modéliser l’évolution des viscosités en fonction du taux de cisaillement (lignes continues sur la Figure 1(a)). Volet théorique – Changement d’échelle : en parallèle, les propriétés générales de la loi de filtration macroscopique d’un fluide incompressible visqueux en loi puissance (d’indice de sensibilité à la vitesse de cisaillement n) s’écoulant lentement en régime permanent dans un milieu poreux rigide ont été déterminées théoriquement par la méthode d’homogénéisation à échelles multiples [A-AUR02-922]. Il ressort de cette étude que le gradient de pression macroscopique est, au premier ordre, une fonction homogène de degré n de la vitesse macroscopique de filtration : ceci est en accord avec les résultats expérimentaux présentés sur la Figure 1.

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10

100

1000

104

105

106

10-6 10-5 0.0001 0.001 0.01 0.1 1 10

c=0.1%c=0.3%watersimulation

-∆p/

L [P

a. m

-1]

<v1> [m.s-1]

experiment

10

100

1000

104

105

106

10-6 10-5 0.0001 0.001 0.01 0.1 1 10

c=0.1%c=0.3%watersimulation

-∆p/

L [P

a. m

-1]

<v1> [m.s-1]

experiment

e

2a

e

e1

e2

e3

h

e

2a

e

e1

e2

e3

h

0.001

0.01

0.1

100 1000

c=0.1%c=0.3%

µ [P

a. s

]

shear rate [s-1]

(a) (b)

(c) (d)

2a = 6 mm e = 6.85 mmh = 50.65 mm50×10 cylindres

⟨v1⟩

)0(pgrad )0(pgrad

]sm[ 1)0( −v

Figure 1 : Viscosités de solutions aqueuses de Xanthan (a) forcées de s’écouler dans un milieu fibreux modèle élémentaire (b). Les pertes de charges enregistrées en régime permanent sont représentées en fonction des vitesses filtrantes (c). Les prévisions du modèle micro-macro sont données en (c) par les traits continus, elles sont obtenues par résolution numérique sur un Volume Elémentaire Représentatif de la microstructure (d) de problèmes aux limites déduits du passage micro-macro. Volet numérique – Changement d’échelle : Afin de quantifier la loi de filtration, nous avons résolus numériquement [B1-ORG03-571], [A-IDR04-754], [B1-IDR05-002], [B1-IDR05-007], [B1-IDR05-014] (avec le logiciel éléments finis Femlab) sur des Volumes Elémentaires Représentatifs (VER) des problèmes aux limites issus du processus d’homogénéisation. Les résultats numériques obtenus ont permis de (i) comparer les prévisions du schéma micro-macro avec les expériences de filtration sur fluides et milieux fibreux modèles (cf. Figure 1(c) et (d)) ou bien encore avec les modèles analytiques et numériques de la littérature (fluides Newtonien ou en loi puissance, microstructures fibreuses élémentaires) (ii) souligner le rôle du couplage rhéologie du fluide – microstructure sur l’anisotropie de la loi de filtration (iii) constituer une base de données d’expériences numériques pour la construction et l’identification de lois macroscopiques de filtration (cf. point suivant). Volet théorique – Loi macroscopique de filtration : l'homogénéisation permet de démontrer l'existence et les propriétés élémentaires d'une loi d'écoulement macroscopique, mais ne donne pas sa structure. Celle-ci a été définie en utilisant la théorie de représentation des fonctions tensorielles anisotropes dans différents cas d'anisotropie [A-AUR02-922]. Dans ce cadre, nous avons également montrer que le gradient de pression pouvait également s’écrire comme le gradient par rapport à la vitesse filtrante d’un potentiel de dissipation visqueuse macroscopique (moyenne en volume des dissipations locales) [A-ORG05-245] (soumis), [B1-IDR05-002]. En utilisant la base de données numériques obtenues sur microstructures fibreuses orthotropes simples, nous avons mis en place une méthodologie d’identification des lois ainsi formulées. Perspectives – Pour (in)valider les modèles que nous avons proposés, nous envisageons du point de vue expérimental de caractériser (i) l’anisotropie de la filtration de fluides modèles en milieux fibreux modèle 2D (cellule tournante) (ii) la filtration dans des milieux fibreux 3D plus complexes (papiers, composites). Du côté théorique et numérique, nous comptons étendre nos travaux aux cas (i) de fluides non-Newtoniens plus complexes (Carreau, Bingham,…), (ii) des régimes inertiels (iii), des milieux à double porosité.

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M i l i e u x t o u r n a n t s

ω 3 = 0 rad/s ; Ek-1 = 0

e1

e2

ω 3 = 7.0 rad/s ; Ek-1 = 0.5

e1

e2

αω3

ω 3 = 28.0 rad/s ; Ek-1 = 2

e1

e2

αω3

ω 3 = 14.0 rad/s ; Ek-1 = 1

e1

e2

αω3

kvk=kv (0)km ax

hv i hv i hv i

ω 3 = 0 rad/s ; Ek-1 = 0

e1

e2

ω 3 = 7.0 rad/s ; Ek-1 = 0.5

e1

e2

αω3

ω 3 = 28.0 rad/s ; Ek-1 = 2

e1

e2

αω3

ω 3 = 14.0 rad/s ; Ek-1 = 1

e1

e2

αω3

kvk=kv (0)km ax

hv i hv i hv i

ω 3 = 0 rad/s ; Ek-1 = 0

e1

e2

ω 3 = 7.0 rad/s ; Ek-1 = 0.5

e1

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αω3

ω 3 = 28.0 rad/s ; Ek-1 = 2

e1

e2

αω3

ω 3 = 14.0 rad/s ; Ek-1 = 1

e1

e2

αω3

kvk=kv (0)km axkvk=kv (0)km ax

hv ihv i hv ihv i hv ihv i

Figure 2 : Arrangement triangulaire de cylindres (fraction de solide de 0.3). Evolution de la vitesse microscopique en fonction de la vitesse angulaire �. Le gradient macroscopique imposé est G=-e1. L'intensité de la vitesse microscopique (carte de couleur) est normalisée par la vitesse moyenne ou macroscopique en l’absence de rotation. (Thèse E. Sawicki [T-SAW04-198]). L'étude de l'écoulement d'un fluide dans un milieu poreux non-galiléen concerne de nombreuses applications industrielles en géophysique, en géotechnique et pour la mise en forme de matériaux industriels. Les forces de Coriolis sont la plupart du temps totalement ignorées ou prises en compte de façon rudimentaire dans la loi d'écoulement. La loi d'écoulement obtenue par changement d'échelles [A-AUR02-792] est de structure classique de type Darcy, mais avec une perméabilité Krot(Ek) dépendant du nombre d'Ekman Ek=µ/2ρωl2 , i.e. de la vitesse de rotation. Dans ce cas, le tenseur de perméabilité n'est plus symétrique : une situation analogue se produit pour le tenseur de conductivité électrique dans le cas de l'effet Hall d'un champ magnétique. Une étude numérique a été réalisée lors de la thèse de E. Sawicki [T-SAW04-198], [A-GEI04-498], [A-SAW05-037], [B1-SAW05-003], [B1-SAW05-004], [B2-SAW04-842] afin de quantifier les effets de Coriolis sur l'écoulement en milieu poreux. Les milieux poreux considérés sont des milieux fibreux ou particulaires modèles : arrangements de cylindres parallèles de section circulaire ou de sphères. Les simulations numériques par éléments finis réalisées à l'échelle microscopique et macroscopique ont permis de montrer : (i) Que les effets de Coriolis sur la vitesse à l'échelle microscopique se manifestent par la déviation de

l'écoulement par rapport au gradient de pression appliqué et la diminution de son intensité (freinage) (Figure 2),

(ii) l'influence des paramètres microstructuraux (arrangement, rayon des cylindres ou des sphères, fraction de solide, ...) et de l'orientation de la vitesse angulaire par rapport à la microstructure sur les paramètres effectifs,

(iii) que l=K0.5, où K est la perméabilité dans la direction perpendiculaire au gradient de pression et la vitesse angulaire, semble une longueur pertinente pour estimer le nombre d'Ekman, i.e. les effets de Coriolis,

(iv) que pour les couples microstructure-vitesse angulaire étudiés, la loi d'écoulement peut en première approximation se mettre sous la forme d’une loi de Darcy modifiée par une force de Coriolis macroscopique,

(v) l'insuffisance des mesures actuellement effectuées en centrifugeuse géotechnique pour déterminer les composantes du tenseur Krot, mais la possibilité d'estimer les composantes du tenseur Krot en effectuant une mesure de débit et trois mesures de pression.

Une des perspectives à ce travail est de valider expérimentalement l'ensemble de ces résultats. Dans ce but, des essais sont envisagés sur la centrifugeuse du LCPC à Nantes, en collaboration avec J. Garnier et son équipe.

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G a z à f a i b l e p r e s s i o n : e f f e t K l i n k e n b e r g e t e f f e t K n u d s e n A faible pression, la vitesse de filtration d'un gaz dans un milieu poreux est supérieure à celle prédite par la loi de Darcy. Ce phénomène s’appelle effet Klinkenberg et a lieu lorsque le nombre de Knudsen, rapport entre le libre parcours moyen et la taille de pore devient non-négligeable : 1lKn p≈= /λ . On le décrit grâce au concept de perméabilité au gaz , définie par la loi de Klinkenberg : gK )/( pb1KlgK += , où désigne la perméabilité au liquide. Lorsque le nombre de Knudsen est très supérieur à 1, le transport du gaz devient diffusif: il s’agit de la diffusion de Knudsen. La prédiction de ces phénomènes est cruciale pour de nombreux domaines concernés par les écoulements de gaz en milieux poreux (modélisation des réservoirs de gaz ou géothermiques, migration de pollutions souterraines, stockages de déchets, mise en forme du papier etc.). Par ailleurs, la mesure de perméabilités d’échantillons se fait souvent aves des gaz et dans des conditions où l’effet Klinkenberg est susceptible d’avoir lieu. La thèse de J. Chastanet [T-CHA04-203], a consisté à étudier divers problèmes liés à ces phénomènes.

lK

Afin d’examiner la robustesse de la loi de Klinkenberg à grande échelle, le cas d’un milieu poreux composite a été considéré. L’échelle locale pour cette étude est celle d’un volume élémentaire représentatif qui comprend deux constituants poreux au sein desquels on suppose que la loi de Klinkenberg est vérifiée. Différents comportements macroscopiques sont obtenus suivant que les constituants du composite sont homogènes ou hétérogènes, ou encore suivant que les perméabilités des deux constituants sont du même ordre ou pas. Les résultats montrent que d’une manière générale, à grande échelle, la loi de Klinkenberg n’est vérifiée que dans quelques cas particuliers [A-CHA04-488], [B1-CHA02-027], [B1-CHA02-229]. On s’est ensuite intéressé à l’écoulement d’un gaz à faible pression en milieu à double porosité. Il s’agit d’un milieu constitué de deux systèmes de pores interagissant et dont les propriétés de transfert de fluide sont très différentes. Pour cette étude, on a considéré l’exemple classique de milieu à double porosité que constitue un milieu poreux fracturé. Le volume élémentaire représentatif comprend des fractures ouvertes connectées entourées de blocs de matrice poreuse. Les lois de Klinkenberg puis de Knudsen ont successivement été considérées dans la matrice à l’échelle locale. Six nouveaux modèles macroscopiques ont ainsi été déterminés, que nous avons comparés aux trois modèles macroscopiques obtenus dans une étude antérieure, lorsque le régime local dans la matrice est décrit par la loi de Darcy. L’analyse des domaines de validité de ces modèles a permis de mettre en évidence des propriétés remarquables concernant l’écoulement d’un gaz à faible pression en milieu à double porosité [B1-CHA05-006]. En particulier, elle a permis de mettre en évidence l’existence de trois types de comportements macroscopiques ainsi que de trois régimes macroscopiques d’écoulements. Un article présentant les résultats de cette étude vient d’être soumis [A-CHA05-212]. Perspectives – Dans le cadre de sa thèse, J. Chastanet a commencé à implanter des lois (à simple et double porosités) dans un code éléments finis et a obtenu des résultats très prometteurs. Ce volet numérique s’est fait en collaboration avec le LM2S (Paris). La première perspective à développer serait de poursuivre et de compléter cette étude numérique. Celle-ci s’avère particulièrement complexe puisque les modèles sont multi-échelles et fortement non-linéaires. Un second aspect à développer consisterait à déterminer les modèles en milieux à double porosité lorsque la loi de Knudsen s’applique dans la matrice et un écoulement moléculaire dans les fractures ouvertes, décrit par les équations de Boltzmann.

M a g n é t o h y d r o d y n a m i q u e Un champ magnétique permanent est parfois appliqué au cours de la solidification d'un alliage afin de diminuer l'intensité des écoulements convectifs entre les dendrites, i.e. dans le milieu poreux. Cette technique permet de réduire les phénomènes de micro et macro ségrégation qui sont à l'origine des défauts dans le produit final. En présence d'un champ magnétique, nous avons montré [A-GEI02-175], [B1-AUR02-228] que l'écoulement est décrit par deux lois d'écoulement hydraulique et électrique couplées qui dépendent du gradient de pression et du potentiel électrique et dont les coefficients effectifs varient fortement en fonction de l'intensité de l’induction magnétique B, i.e. du nombre de Hartmann qui caractérise le rapport entre la force de Lorentz et les forces visqueuses dans l’équation de Navier-Stokes. Des simulations numériques [B1-GEI03-356] ont été réalisées afin d'identifier les propriétés effectives (perméabilité, conductivité) d'un milieu poreux modèle constitué de cylindres parallèles. L'induction magnétique B est supposée constante parallèle à l'axe des cylindres. Les résultats obtenus montrent d'une part que la longueur pertinente pour estimer le nombre de Hartmann est K0.5 (K est la

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perméabilité du milieu poreux en l’absence de champ magnétique) et d'autre part, que l'application d'un champ magnétique peut notablement "freiner" l'écoulement au sein la zone pâteuse dès lors que le nombre de Hartmann est O(1).

M i l i e u x à f a i b l e s é p a r a t i o n d ’ é c h e l l e Lorsque la séparation des échelles �=l/L est pauvre , i.e. lorsque la taille des pores l n’est pas très petite par rapport à la taille macroscopique L, la loi de Darcy peut se trouver modifier. Ceci peut se produire typiquement dans deux situations : (i) dans un milieu macroscopiquement homogène, la présence de singularités (puits ou sources) peut conduire à des variations brutales de la pression p. Par conséquent, la longueur macroscopique L=O(p/∇p) n’est pas nécessairement grande par rapport à l, (ii) dans un milieu macroscopiquement hétérogène, le champ de pression dépend directement de l’évolution de la perméabilité K (à travers la condition l’incompressibilité), par conséquent L=O(p/∇p)= O(K/∇K). Un fort gradient de perméabilité peut donc conduire à une faible séparation des échelles. Afin d’étudier les modifications de la loi de Darcy lorsque la séparation des échelles est pauvre, la méthode d’homogénéisation à échelles multiples a été utilisée [A-AUR05-760], [B1-AUR05-001].. Au premier ordre, l’homogénéisation de la description locale (i.e. à l’échelle des pores) de l’écoulement lent d’un fluide newtonien dans un milieu poreux rigide conduit à la loi de Darcy, où le tenseur de perméabilité peut varier à l’échelle macroscopique. L’étude a consisté ensuite à déterminer et à analyser les résultats obtenus aux ordres suivants, définissant ainsi d’éventuels correcteurs. Dans un milieu macroscopiquement homogène, les correcteurs font intervenir les gradients successifs du champ de pression (correspondants à des effets non-locaux) et de nouveaux tenseurs associés à la microstructure du milieu poreux. Il a été montré que le premier correcteur O(ε) s’annule, par conséquent le correcteur de la loi de Darcy est O(ε2). Ceci montre la robustesse de la loi de Darcy dans un milieu macroscopiquement homogène. Par ailleurs, dans le cas d’un milieu isotrope, le second correcteur correspond à un terme de Brinkman, proportionnel au Laplacien de la vitesse. Dans un milieu macroscopiquement hétérogène, le premier terme correcteur O(ε) ne s’annule pas et les principaux correcteurs sont directement liés aux gradients successifs de la perméabilité. 2-1-2 Transport de soluté en milieux poreux T r a n s p o r t r é a c t i f e t n o n - r é a c t i f e n m i l i e u à d o u b l e p o r o s i t é Le transport par diffusion, convection, dispersion et les phénomènes physico-chimiques qui peuvent s’y associer sont les mécanismes qui étalent et qui règlent le transfert d’une pollution en milieu poreux. Dans un milieu poreux fracturé, l’écoulement d’un fluide a lieu essentiellement dans les fractures, qui délimitent des zones microporeuses et très faiblement perméables. La littérature fait état de nombreuses études expérimentales in-situ qui ont mis en évidence des effets de retard, lesquels sont attribués aux blocs microporeux qui joueraient ainsi un rôle dans la rétention des polluants. Toutefois, les modèles existant ne permettent pas une prévision fiable des temps de transfert d’une pollution en milieu géologique fracturé. Cette étude a donc été motivée par la nécessité de déterminer les modèles macroscopiques continus pour décrire le transport en milieu poreux fracturé ainsi que leurs limites d'applicabilité, et également d'étudier l'origine de ces effets de retard. Elle a constitué pour partie le sujet de thèse en co-tutelle (Grenoble-Gdansk) de M. Tejchman [T-TEJ04-205], et fait l’objet de nombreuses collaborations : J. Lewandowska et J.-P. Gaudet (LTHE, Grenoble), J. Jaffré et J. Roberts (INRIA, Rocquencourt), C. Serres (IRSN, Fontenay-aux-Roses), B. Amaziane (Université de Pau). Ce travail a fait l’objet d’un contrat avec l’IRSN et a également été financé par une subvention de la Région Rhône-Alpes (TEMPRA). Dans un premier temps, le catalogue complet des modèles mathématiques continus décrivant le transport seul (par diffusion et convection aux échelles locales) d’un soluté en milieu poreux fracturé saturé a été déterminé [A-ROY02-924], [A-ROY03-419]. Les résultats théoriques montrent que, dans la limite de validité des modèles établis, il n’existe pas d’effets de retard dus à la diffusion dans les micropores. Les essais expérimentaux menés par J.-P. Gaudet (LTHE, Grenoble) et M. Tejchman ont permis de restituer les effets de retard dont il est fait état dans la littérature [T-TEJ04-205], [B1-GAU02-230], [B1-TEJ01-784]. L'interprétation de ces essais à la lumière des résultats théoriques obtenus par homogénéisation a permis de démontrer que ces effets n'intervenaient qu'en dehors des limites de validité des modèles macroscopiques équivalents (un article est en cours de rédaction). Afin de proposer une seconde interprétation à ces effets de retards observés, nous avons considéré le cas où le soluté diffuse dans les grains solides. Les modèles théoriques montrent que la diffusion dans le solide peut

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donner lieu à des effets de retard [T-TEJ04-205]. Enfin, dans le but de proposer une modélisation pour la migration d'un radionucléide (soluté radioactif) en milieu poreux fracturé, les phénomènes d'adsorption et de décroissance radioactive ont été pris en compte. Nous avons obtenu un catalogue de modèles dont les paramètres dépendent des ordres de grandeur des nombres adimensionnels appropriés tels que les nombres de Péclet (régime de transport), les nombres de Damkhöler (adsorption), ou encore l'ordre de grandeur de la demi-vie du radionucléide par rapport au temps caractéristique de transport (un article est en cours de rédaction). E c o u l e m e n t e t t r a n s p o r t e n p r é s e n c e d ’ u n b i o f i l m Le laboratoire 3S est actuellement impliqué dans un projet qui vise à développer un nouveau procédé de traitements des effluents gazeux. Ce projet est soutenu par le Ministère de la Recherche et des Nouvelles Technologies, la DGA, l'INRS et le CNRS dans le cadre de l'Action Concertée 2003-2006 intitulée "Biofiltration des gaz" (Responsable Ph. Séchet, LEGI de Grenoble). Trois laboratoires grenoblois (LEGI, LTHE et 3S) sont impliqués dans ce projet. Le procédé proposé se compose de deux phases : une dissolution des gaz en phase liquide et une biofiltration des effluents obtenus. Ces deux phases s'effectuent dans des réacteurs à lit fixe, i.e. en milieu poreux. Dans le cadre de ce projet, notre contribution concerne la modélisation de (i) l'écoulement de fluides à bulles avec prise en compte des transferts de masse gaz-liquide en milieux poreux, (ii) l’écoulement et le transfert de solutés réactifs en présence d’un biofilm évolutif (croissance des bactéries). Les premiers travaux réalisés concernent le second point (DEA A. Philippe) [B1-PHI05-200]. A l’échelle microscopique, le milieu poreux est constitué de trois phases : le squelette solide supposé indéformable, le biofilm fixé sur le squelette solide et la phase fluide. L’écoulement du fluide Newtonien est supposé lent et permanent. Le transport de nutriment s’effectue par convection, diffusion dans la phase liquide et par diffusion – réaction (loi de Monod) dans le biofilm. La croissance du biofilm supposée lente est décrite par un terme de réaction (Monod). A l’échelle macroscopique l’écoulement est décrit par la loi de Darcy, le transport de nutriment est décrit par une équation de convection diffusion réaction. La croissance du biofilm est décrit un terme de réaction similaire à celui de l’échelle microscopique. Une étude numérique est actuellement en cours afin de quantifier l’influence de la fraction volumique de biofilm sur les coefficients effectifs de la description macroscopique établie. Par ailleurs, une étude expérimentale (plateforme développée au LEGI) est aussi en cours afin de valider la modélisation proposée. 2-1-3 Acoustique des milieux poreux M i l i e u r i g i d e s a t u r é p a r u n f l u i d e à b u l l e s La modélisation de la propagation des ondes sismiques dans un poreux saturé est d’évidence un point clé de toute exploration pétrolière. Si le modèle de Biot s’applique correctement dans le cas d’un fluide monophasé, les pétroliers éprouvent des difficultés pour différencier un réservoir de gaz d’un réservoir saturé par une huile près du point d’ébullition. Nous avons déterminé le modèle macroscopique dans ce dernier cas en prenant en compte les effets thermiques, de changement de phase et capillaires. Près du point d’ébullition, où les phénomènes capillaires dominent, le fluide à bulles présente une compressibilité effective négative, si bien que la compressibilité « moyenne » du poreux saturé par le fluide à bulles est plus faible que celle du poreux saturé par un gaz. Cette différence permet donc de distinguer les deux types de réservoir in situ. Cette étude [A-AUR02- 807] a été réalisée en collaboration avec C. Boutin, ENTPE, et D . Schmitt, Exxon-Mobil USA. M i l i e u r i g i d e s a t u r é p a r u n g a z à f a i b l e p r e s s i o n Cette étude a été effectuée dans le cadre de la thèse de J. Chastanet [T-CHA04-203]. L'objectif est de déterminer et d'analyser la loi de filtration dynamique qui décrit l'acoustique d'un milieu poreux saturé par un gaz, lorsqu'il se produit un glissement du fluide sur la paroi des pores. Le comportement macroscopique n'est pas décrit pas la loi de Klinkenberg dynamique. Toutefois, la loi de filtration dynamique est telle que la loi de Klinkenberg généralisée donne une bonne approximation de la perméabilité dynamique à faible nombre de Knudsen (rapport entre le libre parcours moyen et la taille de pore). L'analyse de ces résultats sur une géométrie simple montre que cette approximation n'est pas valable à forte pulsation. Cette étude a fait l’objet d’une publication [A-CHA04-489] et de plusieurs communications [B1-CHA02-229], [B1-CHA02-027].

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M i l i e u é l a s t i q u e t o u r n a n t Une étude préliminaire a consisté à étudier la propagation d’ondes en milieu solide élastique, soumis à une rotation angulaire [A-AUR04-418]. Celle-ci est conditionnée par l’ordre de grandeur du nombre de Kibel , où est la pulsation de l’onde. Deux ondes dispersives sont obtenues, et , qui tendent respectivement vers les ondes classiques de compression et de cisaillement lorsque le nombre de Kibel tend vers l’infini. L’onde possède une fréquence seuil en dessous de laquelle l’onde ne se propage pas. Le cas d’une faible rotation angulaire est également considéré. On montre que les corrections à apporter aux ondes de compression et de cisaillement sont de l’ordre de . Le cas d’ un milieu poreux élastique saturé et soumis à une rotation angulaire a ensuite été considéré [A-AUR05-987]. Pour des nombres de Kibel O(1), on obtient un modèle de propagation qui est similaire au modèle de Biot. Il s’en distingue pas la présence de termes inertiels supplémentaires dus à la rotation du milieu. De plus, la perméabilité dynamique dépend de la vitesse angulaire . L’analyse de ce modèle montre l’existence de trois ondes dispersives qui sont des combinaisons des trois ondes de Biot (deux ondes de compression et une onde de ciaillement). On montre que ces trois ondes dispersives tendent vers les trois ondes de Biot lorsque tend vers zéro et que les deux ondes de pseudo-compression présentent une fréquence seuil ( ). M i l i e u b i p o r e u x s a t u r é d é f o r m a b l e Un milieu biporeux est un milieu poreux qui comprend deux systèmes de pores connectés indépendants. Cette configuration correspond à celles d’échangeurs de chaleur ou encore d’organes (poumons, reins). L’objectif de cette étude est d’étudier l’influence de la présence de deux systèmes de pores sur la propagation d’ondes [A-AUR05-223]. Dans un milieu poreux déformable à un seul système de pores, on montre par homogénéisation qu’il existe trois comportements macroscopiques décrivant la propagation: un comportement diphasique décrit par le modèle de Biot, un modèle monophasique élastique et un modèle monophasique visco-élastique. Ces trois modèles correspondent à trois ordres de grandeur distincts d’un nombre adimensionnel caractérisant le rapport entre les termes de pression et les termes visqueux. On montre que dans les conditions d’obtention d’un modèle monophasique élastique ou visco-élastique, la présence d’un second système de pores ne modifie pas le modèle macroscopique. On s’est intéressé au cas qui donne lieu à un comportement macroscopique multiphasique, afin de comparer le modèle macroscopique de propagation avec le modèle multiphasique de Biot, valable pour un milieu à un seul système de pores. En milieu isotropique, le modèle de Biot met en évidence la présence d’une onde de cisallement S et de deux ondes de compression et . On montre que la présence d’un second système de pores fait apparaître une troisième onde de compression .

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2-3 Déformation et Propriétés Physiques des Milieux Enchevêtrés Acteurs : Chercheurs : J.-L. Auriault, D. Caillerie, G. Chagnon, L. Debove, D. Favier, C. Geindreau, L. Orgéas ; Doctorants : C. André (2008) P. Dumont (2003), M. Decain (2007), V. Gaudin (2006), T.H. Le (2007), L. Meunier (2008), J.-P. Vassal (2007), Publications : Revue à comité de lecture : [A-LEC05-244], [A-LEC05-164], [A-DUM05-162], [A-LEC04-547], [A-DUM03-902], [A-ORG03-349], [A-DUM03-339], [A-LEC02-799] ; Keynote : [I-DUM03-347] ; Actes à comité de lecture : [B1-CHA05-074], [B1-DEC05-202], [B1-DUM03-379], [B1-LGO05-075], [B1-DUM05-013], [B1-LEC05-012], [B1-VAS05-161] ; Autres actes, Communications : [B2-LEC04-871], [B2-DUM02-932], [B2-DUM02-260], [C-GAU05-076], [B2-FBO04-570] [C-DUM03-350], [C-DUM04-568], [C-ORG03-351] ; Ouvrage, Chapitres d’ouvrage : [O1-FAV02-137], [O1-FAV04-876], [O2-CMM02-122], [O2-FAV02-123] ; Mémoires de thèse, de master : [T-DUM03-546], [F-AND05-159], [F-DEC04-155], [F-ACH04-157], [F-FOU03-421], [F-PIZ03-422] ; Rapports : [E-FAV04-572], [E-FAV05-011], [E-ZAM03-423] ; Logiciels : [K-LEC02-259], [K-DUM04-757]

Introduction La problématique de la modélisation du comportement des milieux enchevêtrés se pose pour des matériaux mono ou pluri-constituants ([O1-FAV02-137], [O1-FAV04-876]) dès lors que l’un des constituants se présente sous la forme d'un assemblage désordonné ou ordonné de particules en concentration suffisamment importante de manière à constituer un squelette de particules enchevêtrées. Durant ces quatre années, le cas des particules fibreuses a plus particulièrement été étudié, les travaux antérieurs portant sur les milieux à particules sphériques molles ayant été mis en veille (alliages métalliques semi-solides, [O2-CMM02-122], [O2-FAV02-123], [A-ORG03-349]). Les modèles disponibles dans la littérature pour prédire et optimiser les propriétés mécaniques et physiques des milieux fibreux ne permettent pas de prendre en compte l’ensemble des caractéristiques physiques et géométriques associées à ces milieux et présentent des domaines de validité restreints. Ainsi, notre principal objectif est de développer un ensemble de travaux de recherche contribuant à combler cette lacune. Ces travaux s’intéressent plus particulièrement :

• à la rhéologie des suspensions très concentrées de fibres : étude expérimentale et modélisation des couplages entre écoulement et phénomènes de redistribution, d’orientation des fibres (travaux de thèse de P. Dumont, T.H. Le, J.-P. Vassal, et post doc de P. Dumont)

• aux écoulements de fluides en milieux fibreux : détermination de la perméabilité dans les milieux fibreux enchevêtrés complexes (travail de thèse de M. Decain) et fluides non-Newtoniens (travaux déjà développés dans la thématique « écoulement transport et acoustique en milieux poreux »).

• aux propriétés mécaniques et physiques des milieux fibreux à l’état solide : transport par conduction, comportement mécanique sous humidité (hygro-expansion), comportement mécanique de structures fibre - matrice élastomère gonflables (travaux de thèse de C. André, M. Decain, V. Gaudin, L. Meunier et J.-P. Vassal).

D’une manière générale, notre démarche passe dans un premier temps par l’établissement d’une base de données expérimentales mettant en évidence les liens entre la microstructure particulière des milieux fibreux, les mécanismes physiques activés à l’échelle locale (fibre,matrice, interfaces) et les propriétés macroscopiques résultantes. Cette base de données est établie à partir d’expériences sur des systèmes fibreux modèles et des matériaux manufacturés avec des microstructures contrôlées ou non. Dans un deuxième temps, nous modélisons le comportement macroscopique de ce type de milieux en utilisant soit directement les données expérimentales (approche purement macroscopique), soit des techniques de changement d’échelles : méthode d’homogénéisation à échelles multiples pour milieux et physiques locaux continus et discrets, approche auto-cohérente. Les systèmes fibreux modèles sur lesquels nous travaillons actuellement sont des composites à matrice polymère chargés de fibres de verre et des papiers élaborés « à façon » en collaboration avec nos partenaires universitaires.

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Les applications et matériaux manufacturés visés sont de même nature : composites à matrice polymère thermodurcissable (SMC, BMC) ou thermoplastique (GMT), papiers et cartons industriels, structures fibreuses gonflables par effet osmotique pour applications biomédicales. Contexte & intégration de la recherche L’ensemble de ces travaux font partie des axes de recherche du GDRE « HETerogeneous MATerials » (HETMAT, CNRS-FédéRAMS FR 2145, Vienna Univ. of Technology, Austrian Academy of Science, Max-Planck Institute of Metal Research, Univ. of Sheffield, Univ. of Gröningen, Eotvos Lorand Univ. Budapest, Polytechnic Univ. of Madrid, Univ. Cath. de Louvain, Technol. Univ. of Clausthal, Univ of Thessaly, EPFL). Ils s’intègrent également dans les thématiques « Matériaux Enchevêtrés » et « Défaut de Ségrégations lors de la mise en forme » développés au sein de la FédéRAMS. Depuis le début de l’année 2005, ils sont soutenus par le CNRS dans le cadre d’une jeune équipe CNRS FédéRAMS « Comportement de Milieux Fibreux » (G. Chagnon, C. Geindreau, L. Orgéas (resp.) et P. Royer pour le laboratoire 3S porteur du projet, L. Chazeau et C. Gauthier pour le GEMPPM, R. Dendievel, M. Fivel, D. Rodney et L. Salvo pour le GPM2). Les laboratoires partenaires privilégiés sont le LGP2 (EFPG, J.-F. Bloch) et le LTC (EPFL, P. Dumont, V. Michaud, J.A. Manson). Le GéM (EC Nantes, S. Le Corre) est également impliqué. Les industriels qui soutiennent cette équipe sont Arcelor, ArjoWiggins et Schneider Electric. Les travaux portant sur les matériaux composite à matrice polymère et sur les papiers sont également soutenus par la région Rhône-Alpes dans le cadre de deux projets de recherche : (i) « Approches théoriques et expérimentales pour la modélisation de systèmes enchevêtrés multifonctionnels » (2003-2006, resp. D. Favier, 3S-GEMPPM-GPM2-LTC/EPFL, Schneider Electric) (ii) « Structures et propriétés d’usage des papiers et cartons » (2003-2006, resp. J.-F. Bloch, LGP2-3S-LTSI-ESRF, ArjoWiggins). Enfin, le travail portant sur le comportement de réseaux de fibres gonflables par effet osmotique a été soutenu par le CNRS dans le cadre du programme interdisciplinaire ROBEA (ROBotique et Entité Artificiel) : projet de recherche « Robot Osmotique Médical au Sucre » (2002-2004, resp. P. Cinquin, CHU de Grenoble-CERMAV-INSA de Toulouse-TIMC/IMAG-3S). Il se poursuit dans le cadre d’un projet Région Emergence « OSROBOT » (2005-2006, resp. P. Cinquin, LG2P- INSA de Toulouse-TIMC/IMAG-3S).

2-3-1 Rhéologie des suspensions concentrées de fibres C a r a c t é r i s a t i o n e x p é r i m e n t a l e La difficulté principale pour étudier le la rhéologie des suspensions de fibres courtes telles que les SMC, BMC ou GMT vient de la taille non négligeable des renforts fibreux (5-50mm). Pour s’affranchir de tout effet d’échelle parasite induit par cette taille, nous avons développé au cours des thèses de S. Le Corre (cf. dernier rapport scientifique) et de P. Dumont [T-DUM03-546] des rhéomètres spécifiques de grande taille. Les résultats expérimentaux que nous avons obtenus sur des formulations industrielles de SMC ([A-LEC02-799], [A-DUM03-902], [F-PIZ03-422]) et de BMC ([F-AND05-159], thèse de T.H. Le en cours) soulignent le caractère visqueux dominant de la rhéologie de ce genre de matériaux, rhéologie fortement influencée par la température, le taux et l’orientation des renforts fibreux. La matrice des composites industriels étant opaque, il est très difficile de corréler facilement les propriétés rhéologiques des suspensions étudiées avec leur microstructure fibreuse évolutive : ceci ne permet ni de valider certaines des hypothèses physiques locales des modèles micro-macro que nous développons, ni de construire des modèles macroscopiques pertinents à anisotropie évolutive (cf. paragraphes suivants). Ainsi, nous avons élaboré en collaboration avec le LTC de l’EPFL (V. Michaud et post-doc de P. Dumont) un suspension fibreuse modèle dont la microstructure est proche de celle des SMC ou GMT, et dont la matrice en PMMA est transparente. La conception d’un rhéomètre transparent pour suivre in situ les évolutions de microstructures au cours de l’écoulement de ces suspensions modèles fait partie du travail de thèse à venir de J.-P. Vassal (poursuite de notre collaboration avec l’EPFL, V. Michaud et P. Dumont). En parallèle, dans le cadre de la thèse de T.H. Le, nous envisageons une analyse post mortem par tomographie 3D RX à l’ESRF (collaboration avec L. Salvo, GPM2 et E.Maire du GEMPPM) d’échantillons de SMC industriels déformés [F-PIZ03-422], pour étudier et (in)valider les hypothèses physiques des modèles que nous développons.

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M o d è l e r h é o l o g i q u e m o n o p h a s i q u e – A p p r o c h e m a c r o s c o p i q u e En se fondant sur les expériences réalisées sur les SMC, nous avons proposé lors de la thèse de P. Dumont une première amélioration des modèles rhéologiques de la littérature ([T-DUM03-546], [A-DUM03-902]). Dans ce modèle, écrit dans le cadre de la théorie de représentation des fonctions tensorielles anisotropes, le composite est un corps purement visqueux non-Newtonien orthotrope de révolution dont l’axe est porté par l’épaisseur des feuilles de composites. La partie visqueuse du tenseur des contraintes dérive d’un potentiel de dissipation visqueuse, fonction puissance d’une vitesse de déformation équivalente. Cette dernière est une forme quadratique des invariants de la vitesse de déformation et du tenseur de microstructure caractérisant l’orthotropie de révolution. Les paramètres constitutifs du modèle ont été entièrement identifiés à partir des résultats expérimentaux que nous avons obtenus. M o d è l e r h é o l o g i q u e m o n o p h a s i q u e – A p p r o c h e m i c r o - m a c r o A partir de la base de données expérimentales (cf. point précédent), nous avons modélisé par approche micro-macro la rhéologie des suspensions fibreuses telles que les SMC ou GMT (cf. figure 3). A l’échelle locale, nous avons considéré le problème d’un réseau de mèches de fibres enchevêtrées plutôt orientées dans le plan (e1, e2), très souples dans l’épaisseur des feuilles e3 et rigides dans le plan (e1, e2). Des forces et des moments d’interactions visqueux (loi puissance) aux points de contact entre fibres sont considérés. Ils sont induits par les mouvements relatifs des fibres au cours de la déformation de la suspension. Du fait des fortes concentrations de fibres étudiées, la rhéologie de la matrice n'intervient que dans ces forces et moments d'interaction. Le comportement macroscopique d’un telle suspension a été obtenu théoriquement par la méthode d’homogénéisation à échelle multiples des structures discrètes périodiques [A-LEC04-547]. En fonction du type d’interactions locales (moments de laisons locaux vs. moments de forces de liaisons), plusieurs milieux continus équivalents ont été identifiés : corps visqueux (loi puissance) anisotropes de Cosserat ou de Cauchy. Dans le cas de ce dernier modèle et à partir d’un schéma de résolution numérique de type éléments discrets résolvant sur des VER des problèmes d’auto-équilibre déduits du passage micro-macro (cf. figure 3, [K-LEC02-259]), nous avons pu souligner l’influence des paramètres rhéologiques locaux et microstructuraux sur le comportement macroscopique des suspensions étudiées [A-LEC05-244]. En outre, les prévisions du modèle ont été comparées avec succès avec les résultats obtenus sur SMC [A-LEC05-164]. Elles ont également été comparées aux modèles d’évolutions de l’orientation des fibres de la littérature [F-FOU03-421], [I-DUM03-347], [T-DUM03-546], [B1-LEC05-012].

(a) (b)

e1

e3

e2 e1

e3

e2 Figure 3 : Volume Elémentaire Représentatif d’un réseau de fibres connectées entre elles par des liaisons visqueuses non-Newtoniennes (taux de fibres de 0.15). Avant un chargement macroscopique de compression en déformation plane dans le plan (e1, e3) à vitesse de déformation macroscopique constante (a), l’orientation des fibres est isotrope dans le plan (e1, e2). Après l’application de ce chargement jusqu’à une déformation logarithmique �33 de -0.5 (b), les fibres se sont alignées selon e1. Au cours de la thèse de Jean-Pierre Vassal, nous comptons enrichir la micromécanique relativement simple du présent modèle micro-macro discret : corps frottant non-Newtoniens plus complexes (Carreau, Bingham,...), microstructures à orientation 3D, prise en compte de la flexibilité des fibres (poursuite de notre collaboration avec l’EC Nantes et l’EPFL, S. Le Corre et P. Dumont).

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M o d è l e r h é o l o g i q u e b i p h a s i q u e Pour modéliser les phénomènes de ségrégations qui peuvent se produire au cours de la déformation de telles suspensions, un modèle macroscopique biphasique a été construit en utilisant le cadre proposé par la théorie des mélanges multiphasés [A-DUM03-339]. Les suspensions sont ainsi vues comme des milieux biphasiques saturés. Le comportement effectif de la phase « réseau fibreux » est donné soit par une extension du modèle monophasique macroscopique donné ci-dessus, soit par le modèle micro-macro également présenté ci-dessus. Les échanges de quantité de mouvement entre la phase « matrice » et la phase « renfort » fibreux tirent quant à eux profit des études « amont » que nous menons sur les écoulements de fluides non-Newtoniens en milieux fibreux [A-ORG05-245], [A-IDR04-754], [A-AUR02-922]. A p p l i c a t i o n à l a m i s e f o r m e d e s c o m p o s i t e s L’ensemble des modèles de suspensions développés ci-dessus a été introduit dans une maquette de code de calculs éléments finis à deux champs cinématiques pour simuler la mise en forme de coque en composites. Cette maquette a été développée au cours de la thèse de P. Dumont en partenariat avec Renault S.A. [A-DUM05-162] [K-DUM04-757] [T-DUM03-546]. Pour cela, les modèles rhéologiques développés ont été simplifiés aux cas des écoulements de Barone & Caulk (écoulements bouchon). De premières comparaisons encourageantes avec des compressions effectués sur des SMC (presse industrielle instrumentée, Compositec, [F-PIZ03-422]) ou des GMT [B1-DUM05-013] montrent que les capacités du modèle à reproduire les comportements monophasique ou biphasique des composites étudiés.

P r o p r i é t é s p h y s i q u e s d e s m i l i e u x f i b r e u x , p e r m é a b i l i t é A partir de l’analyse théorique donnée par l’homogénéisation à échelle multiple, nous nous sommes également attachés à déterminer quantitativement les propriétés physiques de milieux fibreux (conduction, perméabilité), et ce, selon trois méthodes complémentaires. C a l c u l a n a l y t i q u e – M o d è l e a u t o - c o h é r e n t Dans le cas de VER et physique locale « simples », il est possible d’obtenir des solutions analytiques pour estimer les propriétés effectives (conduction thermique, perméabilité). Ainsi, au cours de la thèse de M. Decain réalisée en collaboration avec le LGP2 (EFPG, J.-F. Bloch), un modèle analytique fondé sur un schéma de type auto-cohérent a été développé pour estimer la conduction thermique dans les papiers [B1-DEC05-202]. Le schéma développé est bien adapté aux cas où de faibles contrastes de propriétés locales existent entre la matrice (air) et les réseaux fibreux. L’influence des porosités intra ou extra-fibres a pu être soulignée et les résultats analytiques ont été comparés avec des résultats expérimentaux que nous avons obtenus sur des papiers modèles (méthode flash). C a l c u l n u m é r i q u e s i m p l i f i é – A p p r o c h e d i s c r è t e Dans le cadre de la thèse de J.-P. Vassal, nous avons déterminé par la méthode d’homogénéisation à échelle multiple le comportement effectif d’un réseau fibreux soumis à des transferts de chaleur par conduction, avec résistance de contact entre fibres et matrice isolante. En fonction de l’ordre de grandeur des nombres adimensionnels de Fourier et de Biot, trois modèles ont été identifiés. Tenant compte de la géométrie élancée de fibres, un passage continu → discret du problème d’homogénéisation initial a été obtenu par simplification de la physique locale (approche type poutre), réduisant de fait le nombre de degrés de liberté du problème. Les limites de l’approche discrète vis à vis de l’approche usuelle continue (cf. paragraphe suivant) ont été mis en évidence sur des VER élémentaires. Le schéma discret a ensuite été introduit dans le code de calcul éléments discrets (cf. paragraphe sur la rhéologie des suspensions) pour étudier les propriétés thermiques sur des VER tels que ceux représentés sur la figure 3 [B1-VAS05-161].

2-3-2 Calcul numérique complet – Volumes ou Eléments Finis Cette étude consiste à corréler précisément les caractéristiques microstructurales de réseaux fibreux, ici des papiers, avec leur perméabilité. Elle est réalisée dans le cadre de la thèse de M. Decain. Des microstructures de papiers sont dans un premiers temps analysées en tomographie 3D RX à l’ESRF. Le traitement des images

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scannées permet alors la détermination de la perméabilité de Volumes Elémentaires, via l’homogénéisation à échelle multiple et l’utilisation d’un code de calcul volumes finis spécifiquement développé par D. Bernard, à ICMCB, Bordeaux. La figure 4 illustre la démarche et montre l’influence de la taille des VE choisis sur la valeur moyenne de la perméabilité : pour peu qu’un nombre important de « petits calculs » sur des VE de petite taille soit réalisé (i.e. sur des machines monoprocesseur), nous avons montré qu’il était possible d’estimer précisément la perméabilité des VER des papiers étudiées. Perspectives – Durant de la thèse de M. Decain, en collaboration avec D. Bernard de l’IMCB, nous envisageons à cours terme d’apporter les modifications nécessaires au code de calculs afin d’estimer les propriétés thermiques des milieux fibreux. Il sera alors possible sur des structures fibreuses complexes de comparer les trois méthodes développées dans ce paragraphe (thèses de M. Decain et J.-P. Vassal) et de mettre en exergue l’influence des paramètres microstructuraux sur les propriétés effectives.

(a)

(b)

(c)(a)

(b)

(c)

Figure 4 : Volume Elémentaire Représentatif d’un papier industriel numérisé à partir d’une image tomographie 3D Rx effectué à l’ESRF (a). Un calcul d’écoulement lent est effectué par volumes finis dans les pores, comme le montre les lignes de courant . Calcul réalisé à l’IMCB en collaboration avec D. Bernard (b). La perméabilité transverse déduite de ces calculs est donnée en fonction de la taille des VE utilisés (c).

2-3-3 Propriétés mécaniques des milieux fibreux C o m p o r t e m e n t m é c a n i q u e d e s t r u c t u r e s f i b r e s - é l a s t o m è r e g o n f l a b l e s En collaboration avec le laboratoire TIMC-IMAG (P. Cinquin), nous avons entamé depuis le début de la thèse de V. Gaudin une série de travaux concernant la conception de structures fibreuses gonflables par effet osmotique pour une utilisation de type muscle artificiel [B2-FBO04-570]. Pour le moment, le travail réalisé s’est concentré sur la caractérisation, par le biais de dispositifs expérimentaux spécifiques conçus au laboratoire, (i) des niveaux de pression et des débits atteignables par effet osmotique [F-ACH04-157] (ii) du comportement mécanique des membranes semi-perméables utilisées pour générer l’osmose. Dans notre travail, ces dernières sont des structures microporeuses d’esther de cellulose dont le seuil de coupure est de 100 daltons, alors que les solutions aqueuses concentrées utilisées sont à base de dextran. Si les cinétiques d’installation de l’effet osmotique sont lentes (quelques heures), les niveaux de pression (quelques bars) atteints permettent tout à fait d’envisager l’utilisation de ce principe pour des applications de type muscle artificiel. Pour illustrer les potentialités du principe osmotique, un premier exemple de structure fibreuse creuse élémentaire et gonflable a été envisagé, i.e. un joint osmotique in vivo incorporé des endoprothèses d’anévrisme de l’aorte abdominale [C-GAU05-076]. Dans le cadre de la thèse de L. Meunier, qui débute cette année, nous envisageons d’élaborer des structures fibreuses plus complexes et déformables selon le même principe : membranes gonflables par effet osmotique et composées de fibres enchevêtrées (rigidité directionnelle) noyées dans une matrice élastomère (souplesse, déformabilité, étanchéité). Pour cela, nous envisageons d’élaborer puis de caractériser par des essais multi-axiaux des membranes fibreuses modèles. La base de données ainsi obtenue doit permettre la construction de

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modèles de comportement pertinents élaborés par une approche soit macroscopique (étape 1) soit micro-macro (étape 2). Ce travail bénéficiera des compétences apportées par G. Chagnon (MCf récemment recruté dans l’équipe MC2MH) sur les élastomères et leur modélisation [B1-CHA05-074] [B1-LGO05-075]. Sur ce sujet, une collaboration est envisagée au sein de la Fédération Matériaux de Structure Rhône-Alpes, d'une part avec P. Boisse, (LAMCOS-INSA Lyon) sur la caractérisation et sur la modélisation des structures, d'autre part avec C.Gauthier et L. Chazeau (GEMPPM-INSA Lyon) sur le comportement des élastomères (un projet ANR a été déposé). P r o p r i é t é s m é c a n i q u e s d e s p a p i e r s e t h y g r o - e x p a n s i o n La stabilité dimensionnelle des papiers est très sensible aux moindres variations du degré d’humidité ambiant. Les hétérogénéités de structures des papiers spéciaux (papiers abrasifs, hétérogénéités contrôlées) ou des papiers traditionnels (variation non maîtrisée du taux et de l’orientation des fibres) entraînent alors des phénomènes parasites de tuilage ou curl qu’il faut éviter. Ce travail sera réalisé dans le cadre de la thèse de C. André qui débute cette année en collaboration avec le Centre Technique du Papier et dont l’objectif est de contribuer à une meilleure compréhension du phénomène de curl dans les papiers usuels : cela passe par une campagne de caractérisation (i) du phénomène in situ, (ii) des propriétés mécaniques et hygro-expansives des papiers étudiés. Une modélisation macroscopique est ensuite envisagée.

2-4 Déformation et Couplages thermomécaniques dans les Alliages à Mémoire de Forme Nickel-Titane. Acteurs : Chercheurs : G. Chagnon, L. Debove, D. Favier, L. Orgéas ; Doctorante : P. Schlosser (2008) Publications : Revue à comité de lecture : [A-LIU02-271], [A-LIU04-758], [A-ORG04-599], [A-YLI05-163] [A- YLI05-266] ; Conférence invitée : [I-FAV02-818] ; Actes à comité de lecture : [B1-FAV05-160] [B1-YLI04-564] ; Autres actes, Communications : [C-FAV03-565] ; Mémoire de master : [F-SCH05-158] Introduction On sait que les propriétés spectaculaires des alliages à mémoire de forme sont associées à une transformation martensitique displacive thermoélastique entre une phase austénitique stable à « haute température » et une phase martensitique stable « à basse température ». Les plages exactes des températures caractéristiques sont fonctions des compositions précises, mais aussi du mode exact d’élaboration du matériau et du produit. La particularité de la transformation est qu’au sein des grains du polycristal, un monocristal d’austénite A peut se transformer en plusieurs variantes de martensite M. Cette transformation peut être induite mécaniquement et la transformation de l’austénite en un certain nombre de variantes de martensite privilégiés (transformation exothermique) constitue alors un mode de déformation supplémentaire par rapport aux mécanismes élastiques et plastiques usuels pour les matériaux métalliques (déformation de transformation). De même, la réorientation entre variantes de martensite est un mode additionnel pour une structure martensitique auto-accomodée. Pour des alliages riches en Nickel, utilisés dans les applications biomédicales (stents, cathéters,...), les séquences de transformation sont complexifiées par la présence d’une phase rhomboédrique R intercalée entre l’austénite (cubique) et la martensite (monoclinique). Les mécanismes de déformation impliquant ces changements de phase exo-endothermiques interviennent tant dans l'utilisation de ces alliages dans des applications que lors de la mise en œuvre initiale des semi-produits de type tube et fils, lors des étapes terminales d'étirage à froid. Nos travaux de recherche sur ce sujet sont réalisés en collaboration avec l’University of Western Australia (Y. Liu), l’Université de Franche Comté (FEMTO, C. Lexcellent), et l’Université de Savoie (LMECA, H. Louche et P. Vacher). Ils sont soutenus par l’industriel Minitubes (P. Comte-Gaz et P. Missilier), fabriquant de tubes, en particulier en NiTi pour applications biomédicales. Ils ont pour motivation la meilleure compréhension des mécanismes de déformation et des couplages complexe changement de phase / thermique / mécanique. A ce titre, plusieurs aspects sont abordés :

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Etude expérimentale de l’influence de l’histoire thermomécanique sur les changements de phase dans les alliages NiTi riches en Ni.

Etude de la localisation de la déformation et des couplages thermomécaniques lors de la transformation induite sous contrainte.

2-4-1 Influence de l’histoire thermomécanique L'histoire thermomécanique intervient, (i) lors de la fabrication du semi-produit, (ii) lors de la mise au point des applications et (iii) lors de l'utilisation même du produit. Sur le premier point, en collaboration avec la société Minitubes, nous avons caractérisé et analysé l'influence de l’histoire des traitements thermomécaniques réalisés sur des semi-produits de type tube (diamètre de 6mm) tant sur les transformations induites thermiquement que mécaniquement, en montrant les liens entre ces types de transformation [B1-FAV05-160]. La figure 5 illustre ces influences. Sur le second point, les études précédentes ont permis d'analyser les hétérogénéités de propriétés dans des stents obtenus par expansion [C-FAV03-565]. Nous avons montré que ces hétérogénéités étaient reliées aux hétérogénéités d'état de sollicitation mécanique dans les stents lors des traitements thermomécaniques finaux. Enfin, sur le dernier point, l'histoire thermomécanique intervient par deux phénomènes, d'une part ceux d'hystérésis, d'autre part ceux de stabilisation. L'hystérésis a été étudiée expérimentalement en cisaillement sur des monocristaux de cuivre [A-ORG04-599], conduisant à des conclusions similaires à celles obtenus sur des alliages polycristallins NiTi [A-YLI05-266]: l'hystérésis en contrainte dépend de l'amplitude des boucles, mais est indépendante de la déformation à laquelle est effectué cette boucle. Nous avons étudié la stabilisation induite par une déformation initiale, monotone ou cyclique, en transformation ou en réorientation [A-LIU02-271]; cette stabilisation conduit à une augmentation importante de la température d'effet mémoire simple lors du premier réchauffage, ainsi que de la chaleur latente associée. L'ensemble de ces analyses a été traduit par des modèles analogiques, basés d'une part sur les concepts d'énergies élastiques et de friction intervenant dans les mécanismes de transformation-réorientation, d'autre part sur la nécessaire intervention des mécanismes de plasticité dans une zone intergranulaire pour accommoder les incompatibilités de déformation [A-LIU04-758], [A-YLI05-163].

180 200 220 240 260 280 300 320 340 360 380

Hea

t Flu

x

Temperature (K)

0.1 W/g

(a)

(b)

(c)

TA-RTR-M

TR-M

TA-R

TA-RTR-M

TR-ATM-R

TR-ATM-R

TM-A

0

100

200

300

400

500

600

700

800

900

0 1 2 3 4 5 6 7 8

Stre

ss (M

Pa)

Strain (%)

Ti-50.8at%Nitested at 310K

(a)(b)(c)

σA-M

σM-A

9

Figure 5 : Courbes de calorimétrie différentielle (à gauche) et de traction simple à 37°C (à droite) d'un tube NiTi : (a) tube sans traitement, (b) tube vieilli 15min à 500°C, (c) tube vieilli 15 min à 500°C à déformation radiale imposée.

2-4-2 Couplage thermomécanique et Localisation Une majorité d'études expérimentales de la littérature sur les alliages à mémoire de forme ont été réalisées à l'aide d'essais de traction. Une grande partie des modèles proposés utilisent ces résultats. Nous avons depuis plusieurs années développé des études expérimentales sous d'autres types de sollicitations, i.e. en compression et cisaillement. Ces essais ont permis de montrer des disymétries traction-compression, de montrer la non-pertinence de critère de type Mises pour décrire les surfaces de transformation. Ils nous ont aussi conduit à remettre en cause la validité de l'hypothèse d'homogénéité utilisé, en particulier lors des essais de traction [I-FAV02-818], complétant en cela des études réalisées par Shaw et Kyriakides, Sun et al, Brinson et al. Notre préoccupation actuelle est de mettre à profit les moyens modernes de mesure de champ, tant de déformations que de températures, pour revisiter les essais réalisés sur des alliages NiTi. Ces études sont réalisés en collaboration avec le LMECA d'Annecy (H.Louche, P.Vacher) et la société Minitubes (P.Missilier, P. Compte-Gaz). Nous

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présentons sur la figure 6 un résultat illustratif des résultats obtenus lors d'un essai de traction superélastique d'un tube NiTi [F-SCH05-158]. On observe tout d'abord une déformation homogène (0 s ≤ t ≤ 15 s), associée à une élévation de température provenant d'une transformation A-R, et ce dès le début de la traction. Il n'y a pas de stade purement élastique. Le long d'un pseudo-plateau de contrainte axiale (15 s ≤ t ≤ 37.5 s), on observe une localisation s'organisant en deux spirales, dans les conditions de l'essai. La décharge met en jeu la déformation inverse R-A dans les zones non-localisées (t=64s).

10s

25

32

25

3218s 27s 37.5s 46s

23

27

23

2764s

22

24

22

24

0

5

-3

0

7

25

32

25

32

25

32

25

32

25

32

25

32

0

500

Stre

ss (M

Pa)

10 18 27 37.5 46 64-3

0

7

∠T

(°C

)

0

5

Exx

(%)

0

5∠l

/lo (%

)

time (s) 60Ex

x (%

)∠T

(°C

)

Figure 5 : Localisation de la transformation martensitique thermoélastique induite “mécaniquement”. Essai de traction simple sur un tube mince de 80 mm de longueur en NiTi superélastique à une vitesse de traverse de 1 mm s-1. En haut : carte de déformations axiales (à gauche) et de températures (à droite) à différents instants de l'essai. Au milieu : les isovaleurs représentent l’évolution temporelle de la température le long de la génératrice centrale du tube ; les courbes bleue et verte sont les températures en deux points distincts au cours du temps ; la courbe noire représente l’évolution temporelle de la contrainte axiale nominale. En bas. les isovaleurs représentent l’évolution temporelle de la déformation axiale logarithmique le long de la génératrice centrale du tube ; les courbes bleue et verte font la même chose pour deux points distincts sur le tube ; la courbe noire représente l’évolution temporelle de la déformation axiale globale. Perspectives – Les travaux initiés au cours du master de P. Schlosser [F-SCH05-158] vont se poursuivre de manière plus approfondies lors de son futur travail de thèse (poursuite des collaborations avec l’University of Western Australia, le LMECA de l’Université de Savoie, le LG2M de l’Université de Bretagne Sud et Minitubes). Ce travail consistera à faire l’étude du comportement du NiTi sous plusieurs cas de sollicitations, en poursuivant l’approche expérimentale originale mettant en œuvre des mesures couplées de champ de déformations et de champ thermique. Il s’agira d’identifier précisément les mécanismes de déformation mis en jeu lors en transformation ou réorientation martensitique : sous quelles conditions de chargement (type de sollicitation, vitesse de chargement, température et milieu ambiant), de géométrie d’échantillons, d’histoire initiale d’élaboration, existe-t-il des modes de déformation homogène ? Pour cela, des essais usuels seront réalisés en laboratoire, afin d’identifier les paramètres influant sur la réponse thermique et mécanique des échantillons puis de mettre en place un modèle de comportement thermomécanique pertinent. Ce modèle profitera entre autre des analyses amont effectuées sur le comportement hystérétique des AMF. Le modèle thermomécanique développé sera enfin intégré dans un logiciel de calculs de structures par éléments finis (Abaqus par exemple, collaboration ), permettant de simuler le comportement du NiTi sous les différents cas d’utilisation ou de mise en forme.

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3 - Autre thème de recherche du pôle MME THEORIE SCALAIRE DE LA GRAVITATION AVEC UN REFERENTIEL PRIVILEGIE Acteurs : chercheur : Mayeul Arminjon - CR CNRS. Publications : Revues à CL : [A-ARM02-930], [ARM03-433], [ARM03-738], [A-ARM04-434], [ARM04-441], [ARM04-737], [ARM04-740], [ARM04-881], [ARM05-884]. Actes CL : [B1-ARM04-441], [B1-ARM04-442], [B1-ARM04-883] ,[B1-ARM05-884]; Ouvrages : [O2-ARM03-738],[O2-ARM04-740] , [O2-ARM05-739]. Cette recherche avait commencé à la suite d’une étude sur l’ « objectivité » (l’invariance par changement de référentiel rigide) de la force, qui avait amené – dans le cadre de la mécanique classique – à donner le même statut physique aux forces d’inertie qu’aux autres forces, en groupant les forces d’inertie et de gravitation sous le nom de « forces de masse » [ARM93-885]. Il se trouve que ceci est le principe d’équivalence, bien connu en théorie moderne de la gravitation. De plus, le développement de la théorie scalaire alternative s’est fortement appuyé sur des notions de mécanique des milieux continus, notamment avec l’interprétation heuristique de la gravitation comme due au gradient de pression (poussée d’Archimède) dans un fluide parfait (« éther »). Les équations aux dérivées partielles, telles qu’elles sont pratiquées en Mécanique, et en particulier les calculs asymptotiques effectués en théorie de l’homogénéisation, ont également été d’un grand secours – par ex. lorsqu’il a fallu développer un schéma d’approximation « post-newtonien » cohérent, pour voir si cette théorie alternative (qui passe un certain nombre de tests) est réellement viable. On a ainsi obtenu les équations de mouvement des centres de masse (EMCM) d’un système de corps évoluant sous le champ de gravitation faible qu’ils produisent, et on les a ajustées dans le système solaire [ARM03-738]. Un résultat frappant est l’intervention dans ces EMCM de paramètres dépendant de la structure des corps, en violation de l’universalité de la gravitation [ARM03-433]. On a alors étudié la limite « particule ponctuelle » des EMCM, la taille de l’un des corps étant un petit paramètre. L’influence de la structure subsiste même à cette limite, i.e., l’accélération d’un corps arbitrairement petit est influencée par la structure de ce corps lui-même [ARM04-441,ARM04-881]. Ceci est possible à cause de la non-linéarité des équations, et arrive effectivement – de façon quantitativement rédhibitoire – par suite de l’anisotropie de la métrique spatiale dans la première version de la théorie. On a modifié la théorie pour avoir une métrique spatiale isotrope [ARM04-740,ARM05-884]. La nouvelle version a les mêmes points forts que la version précédente (simplicité, limite newtonienne, effets sur les rayons lumineux, et sans doute rayonnement gravitationnel quadrupole [ARM04-737]), et n’exhibe pas d’influence de la structure pour un corps très petit. Toutefois, l’influence de la structure des corps sur leur mouvement, celui-ci étant causé par le champ gravitationnel créé par leur ensemble, a un caractère générique dans les théories relativistes de la gravitation. On a récemment appliqué au calcul des EMCM le schéma post-newtonien asymptotique proposé pour la relativité générale en jauge harmonique par Futamase & Schutz. Les équations obtenues comportent des termes de structure (article soumis). Dans le cadre d’un séjour au Département de Physique de l’Université de Bari (Italie), les recherches actuelles portent sur la mécanique quantique dans un champ de gravitation. On avait déjà montré que l’existence d’un référentiel privilégié dans la théorie scalaire étudiée changeait cette problématique, en permettant d’utiliser l’ancienne « mécanique ondulatoire » pour écrire l’équation de Klein-Gordon dans un champ de gravitation statique [ARM98-221,ARM98-222]. Nous tentons actuellement d’obtenir des résultats similaires pour l’équation de Dirac, qui est plus importante en pratique. Il semble que cette méthode conduise effectivement à une équation cohérente, et distincte de la généralisation classique de Weyl-Fock.

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