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(Photo: Inondations a Madagascar à la suite du cyclone Bingiza en provenance de l’Océan Indien, février 2011)

INTRODUCTION

Madagascar est le pays d’Afrique le plus exposé aux chocs climatiques. Il est régulièrement touché par des cyclones, des inondations et la sècheresse. On estime que près du quart de la population vit dans des régions à risques. De plus, le développement progressif du secteur industriel et minier malgache accroît les risques d’accidents pouvant entraîner le rejet de produits chimiques dangereux. Différents types de risque se combinent parfois, comme par exemple lorsqu’une catastrophe naturelle affecte des installations industrielles, ajoutant ainsi des risques chimiques à l’impact d’autres formes de catastrophes. On les appelle les catastrophes Natech.

Malgré la vulnérabilité du pays aux catastrophes Natech, le Rapport sur l’Evaluation en Matière de Réduction des Risques de Catastrophe à Madagascar de juin 2012 publié par Capacité pour l’Initiative de Réduction des Catastrophes, initiative du PNUD, d’OCHA et d’UNISDR, fait état de l’absence de loi ou de politique régissant spécifiquement la Réduction des Risques de Catastrophes au niveau national, régional et local. Même si le pays dispose depuis longtemps d’une expérience dans la gestion et la réponse aux cyclones et inondations, les stratégies de réduction des risques à proprement parler, datant de 2003, sont alors assez récentes au niveau national et pratiquement encore inexistantes au niveau local, à l’exception des

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initiatives localisées menées par des ONG.

Parmi les principaux instruments nationaux relatifs à la gestion de catastrophes on distingue la Stratégie Nationale de Gestion des Risques de Catastrophe. Elle englobe à la fois le législatif, la politique et la stratégie pour la gestion des risques et catastrophes.

Au niveau de la mise en œuvre, plusieurs organes nationaux et locaux sont à retenir :

- D’abord, le Conseil National de Gestion des Risques et Catastrophes, présidé par le Premier Ministre, vice-présidé par le Ministre de l’Intérieur et composé des autres ministères concernés par les risques spécifiques est chargé de définir la stratégie et la politique nationale en matière de gestion de risque de catastrophes, ainsi la mise en œuvre de celle-ci.

- Au niveau opérationnel, le Bureau National de Gestion des Risques et Catastrophes, rattaché au ministère de l’Intérieur, est le point focal permanent pour la coordination de la préparation, la réponse et la reconstruction suite aux catastrophes. Il met en œuvre les plans opérationnels d’urgence et gère les moyens matériels nécessaires aux interventions d’urgence.

- Enfin, les Comités Locaux de Gestion des Risques et des Catastrophes représentent le Bureau National de Gestion des Risques et Catastrophes au niveau décentralisé.

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MISSION EXPLORATOIRE

La Région Atsinanana, qui se trouve dans la côte Est de Madagascar, abrite le plus grand port maritime du pays et sa deuxième ville la plus peuplée, Toamasina. Elle est également un important bassin minier où le secteur industriel se développe. L’existence du transport et de l'utilisation de produits chimiques à grande échelle dans la zone constitue un danger potentiel pour la population et l’environnement.

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Une compagnie minière s’est installée à Toamasina et ses environs pour extraire et transformer sur place du nickel et du cobalt, à partir des minéraux extraits à 220 km de la ville, et acheminés à travers un long pipeline, il s’agit d’Ambatovy.

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(Photo: Vue d’un des containers industriels d’Ambatovy)

Une série de petits rejets chimiques et de poussières de l'usine fut sujet de préoccupation pour les acteurs locaux. En effet pendant la phase de test de 2012, et à nouveau en 2013, plusieurs fuites de gaz (du dioxyde de soufre) ont nécessité que les ouvriers et les habitants des communautés voisines bénéficient de soins médicaux mineurs.

Le Bureau National pour la Gestion des Risques et des Catastrophes, soutenu par le Coordinateur Résident des Nations Unies et l’UNOCHA Madagascar, a identifié la nécessité d’évaluer les risques industriels et les orientations possibles pour une action approfondie. En Mars 2013, pour répondre à la demande du Comité Local de Gestion des Risques Industriels mis en place à Toamasina, le Coordinateur Résident des Nations Unies a demandé une mission d’expertise, par le biais du Bureau Régional de l’OCHA pour l’Afrique du Sud. La Joint UNEP/OCHA Environment Unit, ainsi que la Direction Générale de l’aide humanitaire de la Commission Européenne, ont ainsi déployé une équipe d’experts du 8 au 13 Avril 2013. La mission a reçu le soutien technique de la Division du PNUE pour la Technologie, l’Industrie, et l’Economie. L’objectif de la mission exploratoire était d’établir une vision générale de la situation de risque industriel à Toamasina et de fournir des recommandations pour la prévention et la préparation aux accidents industriels.

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(Photo: Habitations informelles agglutinées a proximité du pipeline) Durant celle-ci, les principaux sites d’intérêt, où sont stockés ou transportés des matériaux dangereux, ont été visités et évalués. La mission a permis de constater que les normes de sécurité d’Ambatovy étaient de bonne qualité, ce qui rendait faible le risque d’accidents majeurs, et de remarquer la dangerosité du site abandonné de la société de production d’engrais Zeren, en particulier ses containers en piteux état contenant 26 mt d’ammoniac et autour desquels 4.000 ménages habitent. Le scénario général de risque industriel autour de Toamasina s’est avéré plus complexe que ce qui avait été anticipé initialement sur la base des termes de référence. Les risques industriels intrinsèques se voient aggravés par le modèle d’urbanisation de Toamasina qui a vu se développer des habitations et des routes publiques en proximité étroite avec les installations gérant des matières très dangereuses, mais aussi par la localisation de plusieurs installations appartenant à d’autres grandes sociétés, proches de la mer dans une zone balayée par les cyclones.

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(Photo: Panneau oxydé d’Ambatovy)

Parmi les recommandations de cette mission exploratoire on trouve:

D’abord au niveau régional :

- Une évaluation plus détaillée des risques de certains sites à devrait être entreprise dès que possible et des mesures de limitation mises en œuvre.

- Le Comité Local de Gestion des Risques Industriels devrait, en partenariat avec d’autres partenaires nationaux et internationaux, prévoir un atelier et un séminaire APELL de trois jours avant la fin de l’année 2013, afin de présenter le processus APELL à Toamasina.

Puis au niveau national :

- Le Bureau National de Gestion des Risques et Catastrophes devrait inclure les accidents chimiques dans sa planification des catastrophes nationales, y compris la création d’un point focal permanent ou d’une cellule spécialisée dans les risques chimiques.

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- Le Gouvernement de Madagascar devrait renforcer davantage les services d’urgence civile pour gérer les accidents chimiques, en se basant sur l’assistance internationale (Française) déjà reçue.

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(Photo: Cuves d’ammoniac abandonnées de Zeren)

Sur la base de cette première mission, un plan d’action fut mis en place instaurant comme première priorité la neutralisation immédiate de la friche industrielle de Zeren. Cette mesure est suivie de près par celle de l’élaboration d’une analyse de risque, la mise en place d’un plan pour les risques identifiés probables et le renforcement des capacités du CLGRI d’Antsinanana.

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(Photo: Installations corrodées)

SECONDE MISSION

La seconde mission de terrain de la Joint Environment Unit à Toamasina se déroula entre le 18 et le 30 novembre 2013, afin faire le suivi de la mission exploratoire, et sur ses recommandations, mais après une mission de la Coopération Française du 5 septembre au 6 octobre 2013.

En effet, la Coopération Française a déployé une équipe sur le terrain afin d’appuyer la mise en place d’une unité de Corps de Protection Civile spécialisée en intervention sur les accidents industriels et d’élaborer des Plans Particuliers d’Intervention sur la base de différents scénarios d’accidents.

Ces plans se sont concentrés sur deux aspects principaux de la situation de risques industriels :

1. Risques de fuites d’ammoniac des sites de stockage d’Ambatovy et de son pipeline

2. Destruction des cuves d’ammoniac abandonnées de Zeren sur ses friches

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(Photo de haut en bas, deux scénarios:

1) Echec de l’intégrité ou débordement du réservoir de stockage d’ammoniac d’Ambatovy.

Il est évident que dans ce scénario, une population importante vit à l’intérieur du cercle bleu et qu’un grand nombre de personnes vivent dans le cercle vert.

2) Echec de l’intégrité de l’une des cuves de Zeren.

Il est évident qu’un très grand nombre de personnes vivent à l’intérieur des cercles rouge et vert dans le cadre de ce scénario.

Légende:

Les cercles rouges représentent une concentration de 5000 ppm. Les individus se trouvant à l’intérieur de ces cercles sont susceptible de mourir en 30 minutes.

Les cercles verts représentent une concentration de 1700 ppm. Les indivius à l’intérieur de ces cercles sont susceptibles d’être gravement blessés en 30 minutes.

Les cercles bleus représentent une concentration de 500 ppm. Les individus à l’intérieur de ces cercles sont susceptible de souffrir d’une irritation immédiate des

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yeux, du nez, de la gorge et du système respiratoire. )

Sur la base de ces évaluations, une première version de plans de réponse d’urgence en cas de fuite d’ammoniac a été préparée sous la direction du Comité Local de Gestion des Risques. Une simulation d’accident focalisée sur la réaction de la population à une fuite éventuelle pendant le processus d’incinération des cuves de Zeren est programmée en octobre 2013. Leur état de délabrement les empêchant d’être transportées, l’opération, financée par Ambatovy, devra avoir lieu sur le site.

La seconde mission de la Joint Environment Unit de novembre 2013 a procédé à une évaluation plus approfondie des risques industriels à Toamasina à travers la visite des installations et sites d’intérêt, la réalisation d’entretiens avec les ingénieurs et responsables des sites. Différents scénarios d’accidents chimiques et de fuites de gaz ont été envisagés et leurs conséquences modélisées – s’agissant notamment des cuves abandonnées de Zeren.

Le rapport de mission note qu’il subsiste deux préoccupations majeures :

- Une supervision inadéquate de la sécurité liée aux aléas industriels majeurs illustrée par la non-ratification de la Convention 174 sur la prévention d’accidents industriels du BIT, par l’absence d’une « autorité compétente » claire et par le manque de ressources allouées pour l’inspection des installations.

- La préparation inadéquate aux urgences majeures d’origine chimique. Cela est reflété par le manque d’équipements et de matériel, de plans, de procédures, de formation, de coordination entre les différentes agences, de communication des risques et de mesures d’intervention d’urgence nécessaires au sein de la communauté.

Selon les recommandations du rapport de mission, les problèmes devraient être traités en mettant en place, respectivement:

- Le Cadre Flexible du PNUE pour la Prévention et la Préparation en matière d’Accidents Chimiques qui comprend la Convention ILO 174

- Le Programme de Sensibilisation et de Préparation aux Urgences au Niveau Local (APELL) du PNUE.

Par ailleurs, la mission a réitéré que l’action requise la plus urgente était encore d’éliminer en toute sécurité les cuves d’ammoniac anciennes et corrodées de Zeren

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qui représentaient un risque élevé.

En septembre 2014, la Joint Environment Unit UNEP/OCHA a de nouveau facilité un atelier d’initiation à l’APELL et au CAPP en rassemblant tous les acteurs concernés par ces processus.

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(Photo: Vidange des cuves d’ammoniac de Zeren)

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(Photo: Démantèlement des cuves d’ammoniac de Zeren)

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(Photo: Dépôt portuaire d’Ambatovy)

OUVERTURE

Dans le courant de l’année 2014, le CGRI, avec l’appui Ambatovy et le plaidoyer mené par le Bureau du Coordonnateur résident du Système des Nations Unies à Madagascar, a réussi à trouver un partenaire adéquat et à coordonner, avec l’appui des pouvoirs publics, le démantèlement des containers de Zeren. De plus, le programme APELL du PNUE a été mis en place et de nouveaux organes locaux de gestion des risques et des catastrophes ont vu le jour à Toamasina. Afin de mettre en lumière les clefs de succès de ces changements et examiner l’ensemble du processus de coopération technique lancé en 2012, je vais maintenant donner la parole à nos intervenants.

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