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Philosophie de la théorie de l‘évolution: l’adaptation et la sélection naturelle Philosophie de la biologie Cours 2

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Philosophie de la théorie de l‘évolution: l’adaptation et la sélection

naturelle Philosophie de la biologie

Cours 2

1. Les éléments d’une théorie de l’évolution

•  La descendance des organismes (angl. descent)

•  Les mécanismes de la genèse des espèces (spéciation)

•  Les mécanismes de la modification des espèces

•  La base génétique de l’évolution

La descendance selon Jean Baptiste Lamarck (1744-1829)

présent

La descendance selon Charles Darwin (1809-1882)

Au contraire de Lamarck, Darwin ne postulait quʼune seule origine pour toutes les espèces#

Tandis que chez Lamarck la diversité du vivant sʼexplique par la multiplicité des origines, selon Darwin lʼarbre de la vie contient des branchements!

Le mécanisme de la modification des espèces

Lamarck: principe de l’auto-organisation de la matière

Darwin: combinaison de variation aléatoire (angl. random mutation) des traits héréditaires et sélection naturelle (« survival of the fittest »)

Sélection naturelle : reproduction différentielle dû aux différences parmi les traits héréditaires

Mécanisme de l’origine des espèces

Lamarck: mêmes mécanisme pour l’origine et pour la modification des espèces Darwin: Diversification et adaptation (par la sélection naturelle) aux différents habitats Exemple : les pinsons de Galapagos (« Darwin’s finches »)

La base génétique

Lamarck: transmission des caractères acquis Darwin: « provisional hypothesis of pangenesis » :

postulat des particules héréditaires qui circulent librement à l’intérieur de l’organisme et qui représentent les différentes structures. Des organes bien développés peuvent émettre plus de telles particules, donc la transmission des caractères acquis est bien possible selon Darwin!

Sélection naturelle

Thomas Malthus (1798): Essay on the Principle of Population La croissance exponentielle produit une compétition pour les ressources Alfred Russell Wallace / Charles Darwin: Dans une telle compétition seules les individus les mieux adaptés peuvent survivre

Gradualisme

Natura non facit saltum (Leibniz)

Charles Lyell Principles of Geology (1830-33): Remplace le catastrophisme par le gradualisme

Saltationisme

De nouvelles espèces se forment par bonds 1900: redécouverte des lois génétiques par Gregor Mendel Hugo de Vries : pensait que la variation phénotypique parmi les individus se partage en la variation graduelle et une variation discontinue. Le lois de Mendel ne portent que sur la dernière selon De Vries. De plus, la variation graduelle n’est pas pertinente pour l’évolution (contre ce que pensa Darwin)

L‘ „argument from design“

•  William Paley (1743-1805) •  Bridgewater Treatises: physico-

théologie •  Design et adaptation comme preuve

pour l’activité de Dieu

Le fixisme par rapport aux espèces comme obstacle pour le Darwinisme

Richard Owen (1814-1892): les espèces sont immuables Idéalisme (Platonisme): les types abstraits des espèces peuvent exister sans leur instances (théorie des archétypes de J.W. v. GOETHE) Essentialisme: l’appartenance des organismes aux espèces est déterminée par les traits phénotypiques Attention: au 19ème siècle le fixisme ne fut pas une doctrine religieuse mais un postulat scientifique, postulat qui fournit le fondement de la taxinomie

Population thinking

Darwin remplaçait le fixisme par rapport aux espèces par le "population thinking" (Ernst MAYR). PT: les espèces ne sont pas des essences abstraites mais des populations concrètes, réelles et variables Cette variabilité est une condition nécessaire pour l’évoluabilité et l’adaptabilité des espèces Les espèces sont définies par des relations généalogiques et pas par des essences intrinsèques

Récapitulation: Les éléments de la biologie Darwinienne

1.  Descendance avec un seul origine des toutes les espèces en existence aujourd‘hui

2.  „Population thinking“ au lieu de l’essentialisme 3.  Adaptation par sélection naturelle comme

mécanisme de changement 4.  Spéciation graduelle 5.  Fondement génétique théorie de pangenesis avec

transmission des traits acquis

2. Fondations conceptuelles de la théorie de la sélection naturelle

Conditions pour sélection naturelle (R. Lewontin): (1) Variation phénotypique. Les individus d’une population d’une espèce manifestent de différents traits phénotypiques (pas de sélection naturelle entre des espèces différentes !) (2) Différences de fitness. Les différents phénotypes diffèrent en vue de leurs taux de reproduction et survie (3) Corrélation entre la fitness des parents et leurs descendants Fitness (héritabilité de la fitness, c-.à.-d. des traits qui déterminent la fitness)

Sélection naturelle

Est seulement présent si des différences génétiques causent des différences systématiques par rapport à la reproduction et la survie des organismes, différences qui conduisent à un changement des fréquences de certains gènes dans la population

Si la composition génétique d’une population change a cause des fluctuations statistiques dans les nombres de descendants d’un phénotype dans des petites populations, on parle de la dérive génétique (genetic drift)

Variation / mutation aléatoire

Ne signifie pas que les mutations dans les gènes sont produites par des processus indéterministe (comme dans la mécanique quantique, p. ex. la décroissance radioactive) Ne signifie pas non plus que les mutations ne soient pas prévisibles (même qu’elles le soient normalement) Le sens correcte de « chance mutation » dans la biologie signifie que la probabilité qu’une mutation se produise est indépendante de son effet sur la fitness de l’organisme

Le problème de tautologie

Tautologie: un énoncé qui ne peut pas être faux pour des raisons logiques ou conceptuelles (1) logique: P ou non-P; si P alors P (2) conceptuelle: tous les célibataires ne sont pas mariés, tous les points d’un cercle sont équidistants du centre N.B. Les explications vides comme « l’opium cause la fatigue parce qu’il contient une vertu dormitive » ne sont pas des tautologies ! (Molière, Le malade imaginaire)

La critique de Karl POPPER

Karl Popper: de bonnes théories scientifiques contiennent des énoncés universaux qui courent un haut risque d’être faux (critère de falsifiabilité) Ex.: physique, théorie de la relativité Contrexemple: la théorie de psychoanalyse de FREUD Le principe « survival of the fittest » ne court aucun risque d’être faux. Si l’organisme le plus « fit » (adapté) survit, la théorie est ipso facto confirmée. S’il ne survit pas, alors il n’était pas le plus « fit »

1e proposition: fitness comme disposition

[J. Beatty und S. Mills (1979), The Propensity Interpretation of Fitness, Philosophy of Science 46: 263-286] Fitness comme propensité probabiliste L’interprétation propensité de la probabilité : les probabilités sont des dispositions à produire une certaine distribution Propriétés dispositionelles: conditions de déclanchement et base physique (base catégoriale)

2e proposition : la conception sémantique des théories

Conception sémantique: il n’est pas possible de distinguer conceptuellement entre les lois empiriques et les énonces définitionnels (=tautologies) d’une théorie Ex. La loi de NEWTON F=ma : définition? Loi empirique ? Une théorie est plutôt comme un prédicat complexe qu’un système des lois. Elle ne fait aucune assertion empirique avant que l’on l’utilise pour énoncer des faits (par ex. « tout mouvement est décrit par les équations de NEWTON ») Donc l’objection que la théorie de la sélection n’est qu’une tautologie est nulle

Deux conceptions de l’adaptation en biologie

La première conception : Un trait est est adaptatif si et seulement s’il contribue directement et positivement à la fitness d’un type Un trait est une adaptation si et seulement s’il est présent dans un organisme parce qu’il est adaptif Contribuer directement à la fitness : il faut distinguer entre « selection pour » et « selection de » Ex. la peau massive de l’ours polaire a été sélectionnée parce qu’elle protège l’ours contre le froid et pas parce qu’elle est très, très lourde

Deux conceptions de l’adaptation en biologie

Ex. la peau massive de l’ours polaire a été sélectionnée parce qu’elle protège l’ours contre le froid et pas parce qu’elle est très, très lourde Donc c’était sélection pour une peau très, très lourde mais sélection d’une peau qui fournit une excellente isolation contre le froid On ne peut pas physiquement séparer ces deux propriétés, mais on peut les distinguer conceptuellement !

Sélection pour – sélection de

Deux conceptions de l’adaptation en biologie

La deuxième conception : L’adaptation des organismes selon la première conception n’est pas expliquée mais définie par la sélection ! Mais pour Darwin lui-même l’explication des adaptation était le premier explanandum de la théorie de la sélection (puisqu’il voulait proposer une alternative au créationnisme de Paley) Donc la théorie contemporaine, accepte-t-elle le défi du créationnisme ou a-t-elle simplement changé de sujet?

Deux conceptions de l’adaptation en biologie

La deuxième conception : Il y a aussi une autre conception de l’adaptation : l’adaptation comme optimalité Analyse de l’optimalité : Souvent, la fitness de l’organisme dépend d’une manière quantitative de la manifestation d’un trait

L‘analyse de l‘optimalité

- optimal foraging theory : il était possible de mettre en évidence que lors de la recherche de nourriture, les animaux emploient des stratégies qui sont caractérisées par une maximale efficacité par rapport à la proportion unité d’énergie assimilée / unité d’énergie dépensée -  Lack clutch size : la ponte des oiseaux est normalement optimisée en vue du nombre des poussins survivants [après D. LACK (1947), The Significance of Clutch Size, Ibis 89: 302-52]#

L‘analyse de l‘optimalité

Enjeux méthodologies

Les modèles d‘optimalité, sont-ils testables?

Faut-il déjà présupposer qu’un trait soit optimalisé afin de construire un modèle d’optimalité

S. H. Orzack und E. Sober (1994), Optimality Models and the Test of Adaptationism. American Naturalist 143: 361-380#

L’ambiguïté du terme « adaptation »

Il faut toujours distinguer entre

Adaptation comme résultat de la sélection naturelle

Adaptation comme optimalité

L’analogie des spandrilles

Stephen J. Gould und Richard Lewontin (1979): The Spandrels of San Marco and the Panglossian Paradigm: A Critique of the Adaptionist Programme. Proceedings of the Royal Society of London B 205: 581-598#