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1 mai 2019 - N°31

L'Europe, terrede convoitise.

(américaines)

« Ce podium est comme un rêve. Mais il n'enreste pas moins qu'un Américain n'a jamaisgagné. On va seremettre au boulot et revenir,année après année, pour toucher au but. »Tim Tollefson, ultra-traileur américainoriginaire du Minnesota, aussi doué quecharismatique, a lâché cette phrase à l'ar-rivée de l'UTMB 2017.11a fini 3ème commel'année précédente. Cette année-là, sur lacourse phare du circuit mondial, quatreAméricains ont accroché le top 10 : TimToffelson (3ème), JimWalmsley (5èn,e), DylanBowman (7è,ne) et Zach Miller (9ème).

Ce que les hommes peinent à faire, plusieursfemmes l'ont réalisé, ouvrant une sacréebrèche dans cette idée, aussi persistanteque la neige au sommet du mont Blanc, quivoudrait que les Américains aient du mal àperformer sur les sentiers européens. AucunAméricain n'a jamais remporté l'UTMB...Rajoutez un petit «e » et la réalité prendun tout autre relief. Sur les 16 éditions de lacourse étalon du trail mondial, cinq victoiresaméricaines.

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L'incroyable Krissy Moehl (2003 et 2009),la formidable Nikki Kimball (2007) et lafantasque et fantastique Rory Bosio (2013 et2014). Et puis le trail européen ne se résumepas à l'UTMB ; des Américains ont réussi às'imposer au Lavaredo (Anton Krupicka en2014 et Hayden Hawks en 2018), au 90-kmdu Mont-Blanc (Alex Nichols en 2015), au42-km du Mont-Blanc (Stevie Kremer en2013 et Megan Kimmel en 2017), ou à l'ultrade Madère (Zach Miller en 2016)... HaydenHawks, le natif de l'Utah, a déjoué le signeindien pour les mâles américains en rempor-tant la CCC en 2017. Mais comme il est sicourant et si suspect de réduire ce sport àson versant masculin, il est tout aussi insup-portable d'entendre chaque année cettemême litanie, les Américains n'y arrivent pasà l'UTMB... Jerêve de ce jour où, comme surcertains ultras aux États-Unis, une femmeremporte l'UTMB devant les hommes - cequi est tout à fait envisageable - pour que lesvieilles lunes dégringolent, que les clichésbrûlent. Ce serait aussi jouissif qu'unevictoire du poétique mais peu prudent JimWalmsley, qui écrit avec ses compas les pagesles plus improbables de l'ultra-endurance.

À gauche Rory Bosio fait partie de celles qui ont réussià remporter l'UTMB en 2013 et 2014 ! Preuve que lesAméricaines sont bien présentes en Europe.Ci-dessous La pétillante Krissy Moehl lui avait ouvertla voie en gagnant la course mondialement connueen 200 3 et 2 0 0 9 !

Une certaine effervescenceJim Walmsley, qui ne rêve pas seulementde courir le marathon olympique. Il « adorel'effervescence » du trail en Europe, et parti-culièrement fin août à Chamonix : « C'estune course vraiment spéciale, unique. Passeulement par son parcours ou son plateausans équivalent chaque année. On ne voitpas aux États-Unis un tel engouementautour du trail-running. Cela dit beaucoupde la place de ce sport en Europe ». Cetteannée, 263 coureurs américains ontcomposté leur billet pour une des coursesde l'UTMB. Parmi ce peloton US, StephanieHowe Violette (16ème en 2014 et 8ème en 2015).Elle trépigne à l'idée de venir passer troismois d'été en Europe : « La compétition en

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w« La culture de la course à pied estbien plus importante en Europe. »

Europe est incroyable. Certains des meilleursathlètes vivent, s'entraînent et courent là-bas.Je trouve que la plupart des grandes coursesen Europe sont beaucoup plus compétitivesque les courses américaines du même calibre.La raison principale, c'est que la culture dela course à pied est bien plus importante enEurope. J'aime l'organisation des courses etle support lors des courses en Europe. J'aimel'idée d'une certaine autonomie en course, etpeu de courses américaines en ont. »

Des spécificités européennesL'athlète américaine de The North Face, titu-laire d'un doctorat en nutrition et physiologiedu sport et de l'exercice, apprécie aussi le« partage » avec les athlètes européens : « Ussont très forts et disciplinés. Ils n'ont pastendance à cette vision égoïste qui gagnebeaucoup d'athlètes américains ». Savie d'au-jourd'hui s'articule autour de son sport :« J'ai ma propre entreprise de nutrition spor-tive liée à la course à pied. J'ai passé beaucoupde temps à l'université, mais j'ai découvertque je pouvais courir en y allant. J'équilibrema vie en fonction de la période de l'année :plus de temps passé au travail en hiver etprintemps, et plus de temps sur les sentiersen été et automne.

Jim Walmsley apprécie l'effervescence de Chamonixfin août chaque année.

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Je peux travailler à distance, c'est facile pourmoi de voyager. J'aime passer la majeurepartie de l'été en Europe. Cette année, jecompte y être entre juin et septembre. Je nepeux pas attendre ! ». Son amie et compatriote,Clare Gallagher, vainqueure de la CCC en2017, partage le même attrait pour le trail enEurope : « C'est très, très développé. Quel quesoit le parcours choisi, il est généralementfantastique, comme dans les Dolomites oules Alpes. Vous n'avez jamais de parcoursennuyeux ou plat. Il y a des montagnes magni-fiques partout. Il y a aussi des refuges un peupartout, des abris, et vous n'êtes jamais loind'un village, d'un foyer, d'une fontaine. Quandje cours en Europe, je n'ai pas à porter ungros sac, je sais que je peux m'arrêter pourun expresso si j'en ai besoin ! C'est tellementdifférent en Amérique, où le trail dans monÉtat d'origine, le Colorado, oblige à l'isole-ment. Vous devez souvent conduire loin de laville, puis vous devez avoir suffisamment denourriture et d'eau pour votre sortie ». L'athlèteaméricaine de Patagonia, ultra-positive,ardente sentinelle de l'environnement, porteun regard admiratif sur ses collègues du VieuxContinent : « Ils sont aussi engagés dans leursport que sympas. La plupart des femmescontre qui je cours sont des vraies pros : ellesprennent leur entraînement et leurs connais-sances très au sérieux et ont souvent desannées d'expérience. Aux États-Unis, je coursle plus souvent contre des femmes plus jeunesou de mon âge. En Europe, je me fais souventbattre par des femmes dans la quarantaine !C'est cool ! En bonne Américaine, je ne parlebien que l'anglais... et je ne suis pas devenueproche d'athlètes européennes, mais j'ai eu lachance de passer du temps avec Nuria Picasl'année dernière. Elle est incroyable, et sisimple ! Elle s'entraîne, travaille, donne desinterviews, a une famille et lit des livres ! Maisà la fin du jour, Européens ou Américains,nous sommes les mêmes, rassemblés parnotre amour de la course à pied... ».

Malgrés son âge, l'Espagnole Nuria Picasimpressionne toujours ses collègues américaines...

Ci-dessus Les courses européennes pluscompétitives ? Chaque année l'engouementest en tout cas bien présent !

Ci-dessous : Clare Gallagher ne s'ennuie jamais lorsdes courses en Europe ! Vainqueure de la CCC en 2017,

elle loue notamment les paysages des parcours français...

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Certains athlètes comme Zach Miller ont d'autresmanières d'envisager la discipline et de la pratiquer.

Courses emblématiquesPour JoeGrant, né en Angleterre, ayant grandien France et installé aux États-Unis depuisplus de dix ans, le développement du trail estplus transversal que vertical aux États-Unis :« Les gens courent de plus en plus, optentpour le trail, mais ne glissent pas forcémentvers la compétition. Ils y voient une forme deliberté, de déconnexion. La plupart des ultrasne dépassent pas 400 à 600 concurrents. Ceconstat doit aussi prendre en compte desspécificités régionales fortes : en Californie,il y a une course tous les week-ends commeen Europe. Dans certains États, il y en aune par an... Mais pour moi comme pourla plupart des athlètes américains, femmeset hommes, certaines courses européennessont emblématiques de notre sport, l'UTMBmais d'autres aussi. En sachant que le profildes athlètes est très différent des standardseuropéens. Tim (Tollefson), Clare (Gallagher)ou Zach (Miller) sont des compétiteurs, maisAnton (Krupicka) par exemple représente plusune façon d'envisager notre sport commeun mode de vie, Rob Krar également. C'estle cas de Mathéo Jacquemoud chez vous, undes meilleurs mais qui ne s'engage pas surles grandes courses ». En août prochain, deuxAméricaines prendront le départ de l'UTMB :Kaci Lickteig et Stephanie Howe Violett, etcinq hommes : Hayden Hawks, Tim Tollefson,Zach Miller, Jason Schlarb, Alex Nichols. •

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