Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de...

14
This article was downloaded by: [University of Cambridge] On: 08 October 2014, At: 03:08 Publisher: Routledge Informa Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954 Registered office: Mortimer House, 37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH, UK Sites: The Journal of Twentieth-Century/ Contemporary French Studies revue d'études français Publication details, including instructions for authors and subscription information: http://www.tandfonline.com/loi/gsit19 Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest Lydie Moudileno Published online: 29 Oct 2010. To cite this article: Lydie Moudileno (2002) Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest, Sites: The Journal of Twentieth-Century/Contemporary French Studies revue d'études français, 6:1, 67-78 To link to this article: http://dx.doi.org/10.1080/10260210290021789 PLEASE SCROLL DOWN FOR ARTICLE Taylor & Francis makes every effort to ensure the accuracy of all the information (the “Content”) contained in the publications on our platform. However, Taylor & Francis, our agents, and our licensors make no representations or warranties whatsoever as to the accuracy, completeness, or suitability for any purpose of the Content. Any opinions and views expressed in this publication are the opinions and views of the authors, and are not the views of or endorsed by Taylor & Francis. The accuracy of the Content should not be relied upon and should be independently verified with primary sources of information. Taylor and Francis shall not be liable for any losses, actions, claims, proceedings, demands, costs, expenses, damages,

Transcript of Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de...

Page 1: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

This article was downloaded by: [University of Cambridge]On: 08 October 2014, At: 03:08Publisher: RoutledgeInforma Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954Registered office: Mortimer House, 37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH,UK

Sites: The Journal ofTwentieth-Century/Contemporary French Studiesrevue d'études françaisPublication details, including instructions forauthors and subscription information:http://www.tandfonline.com/loi/gsit19

Pas de romance sans finance:La construction du couplemoderne dans les romanssentimentaux de l'Afrique del'OuestLydie MoudilenoPublished online: 29 Oct 2010.

To cite this article: Lydie Moudileno (2002) Pas de romance sans finance: Laconstruction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest,Sites: The Journal of Twentieth-Century/Contemporary French Studies revue d'étudesfrançais, 6:1, 67-78

To link to this article: http://dx.doi.org/10.1080/10260210290021789

PLEASE SCROLL DOWN FOR ARTICLE

Taylor & Francis makes every effort to ensure the accuracy of all theinformation (the “Content”) contained in the publications on our platform.However, Taylor & Francis, our agents, and our licensors make norepresentations or warranties whatsoever as to the accuracy, completeness,or suitability for any purpose of the Content. Any opinions and viewsexpressed in this publication are the opinions and views of the authors, andare not the views of or endorsed by Taylor & Francis. The accuracy of theContent should not be relied upon and should be independently verified withprimary sources of information. Taylor and Francis shall not be liable for anylosses, actions, claims, proceedings, demands, costs, expenses, damages,

Page 2: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

and other liabilities whatsoever or howsoever caused arising directly orindirectly in connection with, in relation to or arising out of the use of theContent.

This article may be used for research, teaching, and private study purposes.Any substantial or systematic reproduction, redistribution, reselling, loan,sub-licensing, systematic supply, or distribution in any form to anyone isexpressly forbidden. Terms & Conditions of access and use can be found athttp://www.tandfonline.com/page/terms-and-conditions

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 3: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

Pas de romance sansfinance: la constructiondu couple moderne dansles romans sentimentauxde l’Afrique de l’Ouest

L y d i e Moud i l e n o

Ces vingt dernieres annees, le canon de la litterature franco-phone s’est a la fois consolide et elargi. Par ailleurs, parune evolution dialectique previsible, cette litterature queBernard Mouralis assimilait en 1975 aux ‘‘contre-litteraturesde l’Europe’’ a desormais produit sa propre marge, s’enrichissantdu meme coup de genres jusque-la inexistants. Un des pheno-menes marquants des annees 80–90 est l’emergence d’une‘‘contre’’-, ou ‘‘para’’-litterature africaine relativement floris-sante, dont les formes les plus visibles sont le roman policier,la litterature de jeunesse et le roman sentimental ecrits enfrancais.

Une quarantaine de romans policiers et neopolars africainsont fait leur apparition depuis le milieu des annees quatre-vingt.1 Le domaine de la litterature de jeunesse, soutenu pardes pratiques editoriales actives, est en pleine expansion depuis1980; finalement, apres le lancement d’une demi-douzaine detitres dans la collection ‘‘Plaisir d’Afrique’’ dirigee par CalixtheBeyala, le roman sentimental populaire s’impose en force surle marche africain a la fin des annees quatre-vingt-dix avec lelancement de la collection ‘‘Adoras’’ en Cote d’Ivoire. C’estcette derniere qui fera l’objet de mon analyse.

ISSN 1026-0218 # 2002 Taylor & Francis Ltd

DOI: 10.1080/10260210290021789

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 4: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

Bien qu’il soit trop tot pour tirer des conclusions edifiantes,l’affaire semble bien partie, puisque Adoras annonce 10,000exemplaires tires par titre, pour une collection riche aujourd’huide quatorze titres. Une production de telefilms inspires des ou-vrages Adoras serait prevue en Cote d’Ivoire. Si une etude delectorat reste a faire, il semble legitime de le supposer de compo-sition similaire aux lectorats occidentaux, a savoir, une majoritede femmes issues des classes moyennes.2 Nul n’a encore recensel’etendue de ce phenomene en Afrique, d’un point de vue socio-logique par exemple, comme cela a ete fait en Europe ou auxEtats-Unis.

L’apparition de cette collection constitue une veritableirruption de la categorie ‘‘roman d’amour’’ dans le corpus fran-cophone, par le biais de la litterature populaire. Dans la littera-ture ‘‘haute’’ en effet, la categorie ‘‘roman d’amour’’ brille parson absence.3 Dans la profusion des typologies proposees parles critiques depuis maintenant un demi-siecle, celle de ‘‘romand’amour’’ est introuvable. A peine Lilyan Kesteloot y fait-elleune allusion de quatre lignes dans sa recente Histoire de la littera-ture negro-africaine, ou elle pose la question: ‘‘Est-ce dans leroman d’amour d’evasion qu’il faut classer le roman d’amour?’’(280), ne citant a l’appui que trois titres pour le moins mineurs.4

Dans ces circonstances, les romans Adoras marquent demaniere spectaculaire l’avenement – ou en tous cas lavisibilite – du roman d’amour dans la litterature africaine, et cepar le biais de sa forme la plus populaire, qui est le roman senti-mental, ou ‘‘roman a l’eau de rose’’. ‘‘Nous comblons un vide surle marche’’ affirme Meliane Boguifo, directrice de la collection.Plus qu’un nouveau creneau commercial, c’est aussi un nouvelespace fantasmatique qu’ouvrent ces recits a l’eau de roseafricains. ‘‘On nous parle de chateaux, de neige, d’attitudes quine collent pas avec notre realite’’ poursuit-elle, or, ‘‘les gensdoivent pouvoir se retrouver dans les histoires’’. Ainsi sere-pose, au niveau de la litterature populaire, la question del’alienation/identification, le syndrome du ‘‘nos ancetres lesGaulois’’ dans l’imaginaire amoureux.

Dans la mesure ou elle est regie par des codes generiquesherites de la tradition litteraire occidentale, tout en etant soumisea des imperatifs d’africanisation, la narration qui va se deployerdans ces recits oscillera necessairement entre le mimetisme etl’affirmation d’une difference, entre l’universel et le specifique,entre la valorisation du ‘‘global’’ et l’inscription dans le ‘‘local’’.Dans la mesure aussi ou, par la loi du genre, le couple y est

Pas de romance sans finance

68

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 5: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

erige en paradigme central, il s’agira de reperer dans cetteoscillation la projection d’un ideal, l’ideal du couple africainmoderne.

Par ‘‘couple moderne africain’’ j’entendrai une formehybride proche de ce que decrit Sami Tchak dans La sexualitefeminine en Afrique, qui ‘‘par son cote moderne reproduit certainsaspects du couple occidental, comme cela se passe de plus en plusdans le monde. Mais, par son immersion dans les cultureslocales, conserve son originalite’’. (76)

Comment, des lors, ‘‘africaniser les recits?’’ Comment leroman sentimental africain va-t-il negocier cette irruption lit-teraire de l’histoire d’amour au temps de la post-colonie? Ouva ‘‘passer’’ la difference, et sur quelle ‘‘africanite’’ le couplemoderne va-t-il s’affirmer?

Africaniser passe dans sa forme la plus evidente par un an-crage spatial des recits dans un ‘‘local’’ africain. Invariablement,le cadre des histoires d’amour presentees dans la collectionAdoras est l’Afrique de l’Ouest francophone, plus precisement,Dakar capitale du Senegal, ou Abidjan, capitale de la Coted’Ivoire. Au-dela du processus d’idealisation dont je reparlerai,l’inscription dans un espace africain se fait par des referencesextremement precises a ces deux villes reelles.

Situes a la fin des annees quatre-vingt dix, les recits construi-sent la ville post-coloniale comme site fantasmagorique a lafaveur d’une profusion de details renvoyant a une topographiereelle, identifiant des quartiers, des rues, des restaurants, desbatiments administratifs, des boutiques ou des hotels de luxe.Pour qui connaıt un peu ces villes, certains recits deviennentde veritables guides de promenades amoureuses dans un univers‘‘local’’ aisement reconnaissable. Erigees en sites tout entiersvoues a l’amour et a la jouissance, Dakar et Abidjan accedentainsi, dans la litterature populaire, au statut de villes mythiques,dotees d’une veritable topographie romantique, comme Parisou Venise.5

De meme, l’instauration d’un fond sonore pris en charge pardes chanteurs africains contemporains (Youssou N’Dour,Meiway, Aicha Kone, Ismael Lo, Tshala Mwana) et les refe-rences a la nourriture (kedjenou, poulet yassa, alocas, bissap,jus de gingembre) suggerent la possibilite d’un roman d’amourdont l’africanisation fonctionnerait par simple substitution demotifs d’un contexte culturel a un autre.

Ce serait oublier l’autre aspect de cette transposition, qui estla fidelite rigoureuse aux codes du roman sentimental tel qu’il est

Pas de romance sans finance

69

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 6: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

ecrit et commercialise enEurope et enAmerique.A l’africanisationsomme toute aisee des motifs que je viens de signaler s’opposeune fixite generique et formelle qui, on le verra, a des implica-tions cruciales quant au nouvel imaginaire amoureux que cesrecits vehiculent. La filiation au genre, disons-le brievementavant d’entrer dans les details, impose necessairement l’adoptionde paradigmes occidentaux concernant l’amour. Le processus serevele alors double: d’un cote la narration plaque sur les histoiresd’amour un ‘‘fond culturel’’ africain, comme je viens de le mon-trer, tandis que de l’autre, elle reaffirme par son affiliation augenre une conception occidentale de l’amour.

Pour commencer, l’affiliation au genre occidental se repereau niveau du paratexte et de la presentation generale. La formu-lation des titres: Cœurs rebelles, Tu seras mon epouse, Folie d’unenuit, Un bonheur inattendu, Cœurs pieges, Ce regard de feu, Quandla cascade entraıne les cœurs suggere une representation un peumievre et sans grande complexite. Les accroches de quatriemesde couverture confirment elles aussi la conception sentimenta-liste de l’histoire d’amour annoncee, avec sa charge de dramati-sation et de questions rhetoriques: ‘‘Ils s’etaient jure’’, lit-on audos deUn bonheur inattendu, ‘‘que plus jamais, ils ne se laisseraientprendre au piege de l’amour . . . Irresistiblement et malgre eux, ilssont attires l’un vers l’autre. Arriveront-ils a refrener cet amourgrandissant’’?

Les illustrations de couverture attestent dans le choix descouleurs et des traits de la volonte de conserver, au niveaude la representation visuelle, une stylisation conventionnelle –du feminin et du masculin, entre autres, du roman sentimentalpopulaire tel qu’il est commercialise a travers le monde.Pour finir, le principe de diffusion europeen est respecte,avec des recits courts, de petit format et qui se vendent a prixmoyen dans les kiosques et librairies des capitales africaines(1500 CFA) et a la librairie Presence Africaine a Paris(22FF).

Avatar, en sa qualite d’objet commercial, du processus deglobalisation de masse, le livre Adoras se presente avant toutcomme une variation sur un genre. Autant l’utilisation d’unappareil paratextuel extremement codifie l’inscrit dans un circuitglobal de consommation, autant le contenu des textes confirmele mimetisme generique. En effet, tous les recits du corpussuivent rigoureusement la ‘‘morphologie’’ du roman sentimental.Les travaux de structuralistes ont montre que le roman senti-mental et ses sous-genres reposent sur un programme narratif

Pas de romance sans finance

70

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 7: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

quasi invariable, caracterise par:

1. une phase initiale de mise en place du couple central mar-quant la rencontre des deux protagonistes et la revelation del’amour;

2. une phase de conflit dans laquelle des obstacles et epreuvesmenacent le couple amoureux de disjonction;

3. une phase de confirmation de l’amour et de conjonction ducouple par le mariage.6

Cette structure se retrouve intacte dans les romans de la col-lection africaine.7 A titre d’exemple, il suffit de lire les derniereslignes de Un bonheur inattendu, juste apres le rituel echange de‘‘je t’aime’’:

Il la serra a l’etouffer. Elle noua les mains derriere sa nuque. � Je

veux etre a toi pour la vie, mon amour, murmura-t-elle en lui offrant

ses levres. Il se pencha au-dessus de son visage qu’il encadra

amoureusement de ses mains et lui donna un baiser prometteur

d’un bonheur eternel (132)

L’adoption de cette structure specifique ne peut pas etre deta-chee d’une certaine adherence a l’imaginaire de l’amour qu’ellea vehicule au cours des siecles. Comme l’a montre EllenConstans, etant donne que tout le programme narratif posecomme principe et finalite du recit l’evolution d’un couple versla conjonction, le roman sentimental instaure de facto lecouple (heterosexuel) comme ‘‘unite fondamentale, fondatricedu point de vue taxinomique’’. Quelles que soient les transposi-tions culturelles ou actualisations des motifs, la formation ducouple demeure le principe structural, l’objet de la quete amou-reuse et la condition du bonheur.

Le deplacement a un contexte socioculturel africain devientalors problematique. Car si le couple existe dans les societes afri-caines, les realites qu’il recouvre sont parfois loin des concep-tions occidentales. Entre autres, la dependance a l’espace, auxchoix et aux interets de la famille au sens large, l’officialisationde la polygamie, l’institutionalisation du systeme de‘‘maıtresses’’ (les premier, deuxieme, voire troisieme bureauxdans le vocabulaire africain); l’existence d’un droit coutumierpatriarcal selon lequel la femme est la possession de l’homme,sont autant de differences culturelles entre les conceptionsafricaines et europeennes.8 Si l’univers romanesque est effec-tivement ‘‘africanise’’ par la substitution de motifs relatifs

Pas de romance sans finance

71

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 8: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

concernant la nourriture, les vetements ou la musique, on estfrappe par le caractere indeniablement occidental du comporte-ment amoureux. L’ideal du couple moderne africain des romansAdoras prend appui sur des valeurs resolument modernes, asavoir, en contrepoint a la conception africaine: l’autonomie, lamonogamie, et, a un certain niveau, le partenariat dans le couple.

Tout se passe alors comme si l’erotisation de l’univers urbainavait pour but la circonscription d’un espace africain ou pour-raient se developper des relations amoureuses sur un modeautonome. Consacrant, dans cet univers, leur independancevis-a-vis de la collectivite, les couples ideaux n’obeissent qu’auxlois de leur desir individuel. La narration insiste beaucoup surla fonction de ces moments privilegies dans la constitution ducouple, comme dans ce passage:

Ils savouraient chaque moment de leur bonheur tout neuf. Ils pas-

saient leurs apres-midi dans les expositions, d’ou ils rentraient tou-

jours les bras charges de fleurs, de tableaux, etc. Et les soirs, ils

dınaient tous les deux aux chandelles, avant de se retrouver dans

leur chambre ou l’un dans les bras de l’autre, plus rien n’existait.

(Un bonheur inattendu 129)

Ce ‘‘plus rien n’existait’’ qui clot le tableau de la plenitudeamoureuse fait penser au titre bien significatif d’une serie deromans-photos francaise: ‘‘Nous deux.’’

Dans un contexte occidental, la representation de momentsd’exclusivite renverrait simplement a une longue tradition depromenades romantiques. Dans le contexte africain, il faut ylire aussi l’evacuation, au nom du bonheur individuel, de ladependance a la collectivite. De meme, le motif de l’escapadeamoureuse valorise-t-il l’image d’un couple qui prend symboli-quement ses distances vis-a-vis de l’environnement social: qu’ils’agisse de week-ends aux destinations locales, ou de voyagesde noces vers des destinations ‘‘exotiques’’ comme lesSeychelles, le Maroc, les Etats-Unis, la Grece, le voyage desaf-franchit le couple de ses responsabilites sociales.

Plus encore que l’autonomie du couple, la monogamieofficielle definit le couple occidental, alors que la polygamie semaintient dans de nombreuses societes ouest-africaines. Lecouple moderne passe par le refus de la polygamie. De manierelogique, la seconde epouse ou le deuxieme bureau ne peut pastrouver de place legitime dans la rhetorique du ‘‘nous deux’’.9

Les deboires de la jeune protagoniste de Aurore s’inscrivent

Pas de romance sans finance

72

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 9: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

dans une quete dont l’objet est explicitement le couple mono-game. Refusant le modele de Fatou, la mere, qui s’est laisseemourir de chagrin quand son mari a pris une seconde epouse,ou celui de son amie Lily ‘‘engluee dans la polygamie . . . quiavait accepte de partager [Djibril] avec son epouse legitime’’(70), la jeune Aurore cherche ‘‘l’amour auquel elle a toujoursreve: un sentiment pur et sans tache qui se vit a deux’’ (42).Ou s’est formule ce reve? Peut-etre, comme chez la protagonistede Chants de la lagune, par la lecture de ‘‘romans de DanielleSteele’’. A moins que ce ne soit, comme dans Cache-cached’amour, par la lecture de Cœurs pieges de Carmen Lopez, pseu-donyme sous lequel publie la directrice en personne, MelianeBoguifo. Toujours est-il que lorsque Aurore soupconne sonfiance d’avoir une maıtresse, elle l’econduit par un violent: ‘‘Vajouer au polygame ailleurs’’!

Finalement, le modele du couple occidental se devine dans laprojection de couples dans lesquels la femme acquiert et reven-dique elle aussi son autonomie. Si elles ne possedent pas toutesde ‘‘cellulaire’’ ni ne conduisent leur ‘‘Peugeot 205 rouge,’’ etsi elles sont invariablement de statut socioprofessionnel inferieuraux heros masculins, toutes travaillent ou expriment le desir detravailler.10

Dans Ce regard de feu, par exemple, le fait que le beauThierry n’accepte pas que sa fiancee continue son metier demannequin apres l’avoir rencontree constitue un des obstaclesmajeurs a la relation. Meme si le denouement voit la jeunefemme demissionner, c’est parce qu’elle est enceinte, nonparce qu’elle a cede a son fiance. Certains recits vont memejusqu’a inverser les roles du masculin et du feminin. L’hommeideal de Un bonheur inattendu non seulement apporte le petitdejeuner au lit, et fait couler un bain a la promise, mais serevele ‘‘un veritable cordon bleu’’.

Progressivement, plus l’on avance dans la constitution ducouple, et plus le modele occidental s’impose. Au niveau stylis-tique, plus le recit se recentre sur l’intimite du couple, et plusla narration devient conventionnelle. Invariablement, le mime-tisme est a son comble dans les scenes et dialogues amoureux.Que l’on en juge, par cet extrait de Parfums d’Assinie:

Kablan sourit et l’invita pres de lui. Elle se blottit contre lui en souhai-

tant que cette nuit tendre soit sans fin. Sans trop savoir comment ils

se retrouverent en train de s’embrasser. Kablan se leva, la prit par la

main et la conduisit dans sa chambre. Lentement, il fit glisser les

Pas de romance sans finance

73

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 10: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

bretelles de sa robe legere et ouvrit la fermeture a glissiere. A son

tour, elle ouvrit les boutons de sa chemise, ouvrit la boucle de

sa ceinture [. . .].

Peau contre peau, guides par leurs sens et par l’amour, ils plon-

gerent dans la mer du desir ou des vagues et sensations delicieuses

les transporterent sur les hauteurs de la volupte.

– Je t’aime chuchota Kablan a l’oreille d’Eve-Anne.

– Je t’aime aussi, declara Eve-Anne spontanement. (91)

Qu’on les tire de Cœurs pieges, de Cache-cache d’amour, de Folied’une nuit ou de Quand la cascade entraıne les cœurs, les scenesles plus intimes sont ecrites sur le meme mode. Est-ce a direque l’universel reprend ses droits des qu’il s’agit de l’erotismeet du discours amoureux? L’africanisation doit-elle necessaire-ment s’arreter au seuil de la chambre conjugale?

Comme le rappelle Mama Seck Mbaye, l’on sait qu’il existebel et bien des pratiques de seduction specifiques a certainescultures ouest-africaines:

En Afrique, l’erotisme a une forme particuliere qui se retrouve dans

l’habillement (coupe des camisoles et corsages cintres). Exemple:

le petit pagne brode utilise comme dessous de pagne et recouvrant

a peine les fesses quand on est debout, fermant a peine par-

devant et laissant entrevoir au moindre mouvement le mont de

Venus . . .Certains produits speciaux d’encens melanges a des ex-

traits d’essence ou parfums: c’est le gongo attache sous les seins,

saupoudre a l’aine de la femme ou sous l’oreille. La ceinture de

perles multicolores, parfumee, produisant un cliquetis excitant

quand la femme se deplace. (citee in Clavreuil 17)

Si certains romans de la ‘‘haute litterature’’ ont parfois inte-gre avec plus ou moins de succes ces elements du patrimoineerotique ouest-africain, rien de tel dans le roman Adoras. Onassiste au contraire a un processus d’africanisation assez para-doxal par lequel, alors meme la narration insiste sur le caracteredeterminant de la scene d’amour, celle-ci, dans son style, resteabsolument depourvue du vocabulaire et des motifs africainsqui proliferent par ailleurs. Aucune valorisation d’un erotisme‘‘local’’ n’est en jeu. Litterairement parlant, les ancetreserotiques du couple moderne africain demeurent les Gaulois.

Dans La sexualite des femmes africaines Sami Tchak parled’une ‘‘occidentalisation [des] comportements sexuels’’ et constatel’existence d’un ‘‘ordre sexuel qui se mondialise’’, au point

Pas de romance sans finance

74

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 11: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

qu’aujourd’hui, ‘‘la maniere de faire l’amour dans certains mi-lieux a Cuba est a peu pres la meme que celle d’autres personnesen France, en Allemagne, en Thaılande, au Japon, au Togo, enAustralie, etc.’’ (149). Ce constat meriterait, en ce qui concernela litterature, d’etre soutenu par une analyse comparative des dif-ferents ‘‘ordres sexuels’’ tels qu’ils ont pu apparaıtre dans l’ima-ginaire. La tache etant au-dela des limites de cette etude, on peutse contenter d’infirmer la proposition en constatant aussi, dansl’imaginaire Adoras, une representation codifiee de l’actesexuel, dans ses cliches, ses ellipses et ses metaphores.

L’invocation d’un ‘‘ordre global’’ apparaıt en revanche tota-lement pertinente au regard des representations de la masculi-nite. Comme dans les recits occidentaux, le portrait deshommes s’etablit, superficiellement, sur le mode de ce queJanice Radway appelle une ‘‘masculinite spectaculaire’’, asavoir, un ensemble de qualites physiques et morales qui fontd’eux des objets de desir, exprimees sous la forme de clichesincluant les adjectifs ‘‘beau’’, ‘‘grand’’, ‘‘muscle’’, ‘‘seduisant’’.Bref, le physique de l’homme ideal doit etre plein de promessesde jouissance et de protection.

A une exception pres,11 la description du corps masculin n’arecours a aucune metaphore renvoyant a l’Afrique. En revanche,l’insistance sur les attributs exterieurs comme le vetement, la voi-ture et autres accessoires participe, elle aussi, d’une masculiniterendue spectaculaire. En contraste avec la platitude du styledans les descriptions du corps, les references aux attributs exte-rieurs de la masculinite se caracterisent par une surenchere dedetails et de marques commerciales. Les hommes exercent leurseduction grace a une panoplie vestimentaire impressionnante,faite de tricots Lacoste, des chaussures Sebago, des costumesFrancesco Smalto, et autres, dont la valeur est dument documen-tee dans les recits. On ne parle pas de voiture. On parle deMercedes XL, de Ferrari Testa Rossa, de BMW decapotable,de Toyota Land Cruiser, etc. Toutes ces marques integrentl’espace africain, au meme titre que les alocos, le jus de bissapet le poulet yassa.

Ainsi se profile l’ideal d’un couple africain qui atteint l’uni-versel du bonheur amoureux grace a la circulation d’un capitalenorme. Les hommes sont desirables parce qu’ils sont impliquesdans un circuit de production du capital: ‘‘Il portait une montreSuper-Rollex (sic) d’une valeur de pres de deux millions de francsCFA. Cet homme l’intriguait’’. (Sugar Daddy. Une jeune fille aimeun tonton 13–14)

Pas de romance sans finance

75

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 12: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

Le monde d’Adoras est un monde idealise caracterise parune circulation, une exhibition, et un echange de capital evidem-ment non problematise. Un monde ou l’argent est propre, et ou,paradoxalement, l’accumulation du capital signale une virilitehonnete, au-dessus de tout soupcon. Apres que son amant luioffre successivement une paire de chaussures, un telephone cel-lulaire, une voiture, un cheque d’anniversaire de vingt-sept mil-lions de francs CFA, une jeune femme a soudain la revelation desentiments authentiques pour lui, et, cedant a ses propositions,elle annonce: ‘‘Tu m’as donne trop de signes de ton amour sin-cere pour que je puisse rester longtemps insensible a ton appel’’(81). Dans Tu seras mon epouse, l’Ivoirien Justin Ngala depenseune fortune a courtiser sa belle, qui elle aussi finit par accepterla proposition de mariage assortie du cadeau d’un jet prive, endeclarant: ‘‘Tous tes gestes montrent que tu es tres epris demoi’’ (80). Ironie finale, ce PDG de banque est venu auSenegal participer a un colloque sur le theme: ‘‘La pauvrete enAfrique, comment y remedier’’?

Interviewe par le Nouvel Observateur, Biton Coulibaly, auteurde deux romans chez Adoras sous le pseudonyme de B. Williams,affirme: ‘‘Le couple n’existe pas en Afrique. Il faut apprendre auxhommes a faire la cour aux femmes et a ne pas les considerercomme des objets’’. Malgre ce vœu pieux, il reste a savoir si lesromans d’amour vont effectivement etre lus par des hommes.En attendant, il ne fait aucun doute que les romans Adorasproposent, dans un contexte marque par l’absence de couplefondamental en litterature, un nouvel imaginaire du couplemoderne africain. Moderne parce que se construisant dans unaffranchissement progressif des valeurs traditionnelles africainesqui implique un rapport mimetique au modele europeen. Maisafricain aussi, en ce qu’il signale la possibilite de formuler, surun mode ‘‘local’’, des ideaux qui prennent en compte l’evolutionde la societe urbaine ouest-africaine, en particulier la participa-tion indeniable des hommes et des femmes au mouvement deglobalisation contemporain.

En contrepoint aux representations pessimistes de la villeafricaine, le roman a l’eau de rose post-colonial projette certesun univers idealise, mais aussi, dans les mots de Stuart Hall,‘‘the emergence of new subjects, new genders, new ethnicities,new regions, new communities, hitherto excluded from themajor forms of cultural representation, unable to locate them-selves except as decentered or subaltern’’ (34). L’emergenced’une litterature populaire locale est la pour en attester.

Pas de romance sans finance

76

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 13: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

Notes

1 Dans des collections speciales comme ‘‘Polars noirs’’ chez l’Harmattan; ‘‘Serie noire’’de Gallimard; Serpent a Plumes noir, et africaines (NEA polar des Nouvelles EditionsAfricaines).

2 Dans le contexte ouest-africain l’existence d’un lectorat issu des petites classes est peuprobable, notamment pour des raisons financieres et linguistiques.

3 Le roman Harlequin � du nom de la maison d’Edition nord-americaine qui lesdiffuse � est l’avatar le plus populaire de ce phenomene qui deferle sur la France a lafin des annees soixante-dix, via les Etats-Unis, ou il jouit deja d’un succes considerabledepuis la fin de la deuxieme guerre mondiale.

4 Il est possible de reperer un traitement plus ou moins superficiel des thematiques lieesau couple et a l’amour dans des textes assimiles a d’autres genres, comme le ‘‘roman dela denonciation’’ (Ville cruelle de Mongo Beti); le ‘‘roman militant’’ (Les bouts de bois deDieu de Sembene Ousmane); le ‘‘roman de la desillusion’’ (Les soleils des independancesd’Ahmadou Kourouma); ou le ‘‘roman de la dictature’’ (Le Pleurer-rire d’Henri Lopes).De meme, il existe des passages erotiques dans des romans bien anterieurs aux anneesquatre-vingt. Voir l’anthologie de Clavreuil.

5 Il va sans dire que ce type de representation s’oppose radicalement aux representationsde la ville dans la plus haute litterature africaine. Voir Michel Cornaton dans Sexualiteet pouvoir, qui parle de la ‘‘ville-pourriture’’.

6 Voir Constans.7 Dans des travaux plus specifiquement axes sur les formes contemporaines du roman

sentimental populaire, Bruno Pequignot identifie trois grandes periodes en Europe eten Amerique, de 1977 a 1990: Une periode caracterisee par la presence d’heroınesvierges, ou il n’y a ‘‘pas de relations sexuelles entre les personnages, en dehors debaisers fougueux’’ (1977–1982); une periode ou la virginite disparaıt, mettant en scenedes femmes plus experimentees et ou ‘‘les relations sont plus physiques: caresses,deshabillages mutuels, coıts apparaissent petit a petit’’ (1982-88); et enfin, une periodecontemporaine liberee des preoccupations de ‘‘mariage, enfants, differences d’age’’ etde plus en plus erotique. S’il fallait les classer selon cette typologie, c’est a la deuxiemeperiode qu’il faudrait rattacher la plupart des recits, bien que la virginite de l’heroınedemeure presente dans le corpus.

8 Voir Sami Tchak.9 Si c’etait tout le propos d’une si longue lettre de Mariama Ba, l’equation n’est plus

aujourd’hui aussi evidente entre polygamie et drame conjugal. Voir le discours de KenBugul dans Riwan.

10 Parmi les professions representees on trouve, entre autres: secretaire, hotesse,mannequin, employee de communication, choregraphe, mannequin, responsabled’agence de voyage, institutrice.

11 Je n’ai trouve comme seul exemple que la comparaison ‘‘beau a la facon des Saheliens’’.

Works Cited

Collection Adoras

Joelle Anskey. Cœurs rebelles. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998.Kone Fibla. Cache-cache d’amour. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998.—. Folie d’une nuit. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1999.Lydie Guet. Un bonheur inattendu. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998.Christopher Hill. Parfums d’Assinie. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998.Charley Legend. Ce regard de feu. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998Carmen P. Lopez. Cœurs pieges. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998.Frank Saturn. Choregraphie d’amour. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998.Fara Seye. Les chants de la lagune. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998.Eva Stone. Aurore. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998.

Pas de romance sans finance

77

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014

Page 14: Pas de romance sans finance: La construction du couple moderne dans les romans sentimentaux de l'Afrique de l'Ouest

—. Quand la cascade entraıne les cœurs. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1998.B. Williams. Sugar Daddy. Une jeune fille aime un tonton. Abidjan: Nouvelles Editions

Ivoiriennes, 1998.—. Tu seras mon epouse. Abidjan: Nouvelles Editions Ivoiriennes, 1999.

Critique

Clavreuil, Gerard. Erotisme et litterature. Afrique noire, Caraıbes, Ocean Indien. Paris: Hatier,1988.

Constans, Ellen. Parlez-moi d’amour. Le roman sentimental. Des romans grecs aux collections del’An 2000. Limoges: Presses Universitaires de Limoges, 1999.

Cornaton, Michel. Pouvoir et sexualite dans le roman africain. Paris: L’Harmattan, 1990.Hall, Stuart. Culture, Globalization and the World System. Anthony D. King, Ed. Minneapolis.

University of Minnesota Press, 1997.Kesteloot, Lilyan. Histoire de la litterature negro-africaine. Paris: Karthala-AUF, 2001.Mouralis, Bernard. Les contre-litteratures. Paris: Presses Universitaires de France, 1975.Pequignot, Bruno. La relation amoureuse. Analyse sociologique du roman sentimental moderne.

Paris: L’Harmattan, 1991.Pliskin, Fabrice. ‘‘Harlequin made in Cote d’Ivoire’’. (Le Nouvel Observateur. no 1858).Radway, Janice A. Reading the Romance. Women, Patriarchy and Popular Literature. Chapel

Hill and London: U. of North Carolina Press, 1984 [1991].Tchak, Sami. La sexualite feminine en Afrique. Paris: L’Harmattan, 1999.Tervonen, Taina. ‘‘Des histoires d’amour qui finissent bien’’. Africultures, Ete 1999,

pp. 71–72.

Pas de romance sans finance

78

Dow

nloa

ded

by [

Uni

vers

ity o

f C

ambr

idge

] at

03:

08 0

8 O

ctob

er 2

014