Opération Barbarossa

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Opération Barbarossa 1 Opération Barbarossa Opération Barbarossa Concentration de véhicules et de tanks panzer III en Pologne, à la veille du déclenchement de l'opération Barbarossa. Informations générales Date 22 juin 1941 5 décembre 1941 Lieu Biélorussie, Ukraine, Lituanie, Lettonie, Estonie, Ouest de l'Union soviétique Issue Victoire tactique allemande mais défaite stratégique majeure Belligérants Union soviétique Reich allemand  Roumanie  Finlande Italie  Hongrie  Slovaquie Commandants Joseph Staline Adolf Hitler Forces en présence ~ 2 300 000 soldats 15 000 chars 9 000 avions 3 300 000 soldats 3 648 chars 2 700 avions Pertes ~ 1 500 000 morts ~4 000 000 prisonniers dont ~2 000 000 périssent sous la garde de la Wehrmacht ~ 700 000 tués et disparus 650 000 blessés Seconde Guerre mondiale Batailles

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Opération Barbarossa

Opération Barbarossa

Concentration de véhicules et de tanks panzer III en Pologne, à la veille du déclenchement de l'opération Barbarossa.Informations générales

Date 22 juin 1941 – 5 décembre 1941

Lieu Biélorussie, Ukraine, Lituanie, Lettonie, Estonie, Ouest de l'Union soviétique

Issue Victoire tactique allemande mais défaite stratégique majeure

Belligérants

Union soviétique Reich allemand  Roumanie  Finlande Italie  Hongrie  Slovaquie

Commandants

Joseph Staline Adolf Hitler

Forces en présence

~ 2 300 000 soldats15 000 chars9 000 avions

3 300 000 soldats3 648 chars2 700 avions

Pertes

~ 1 500 000 morts~4 000 000 prisonniers dont ~2 000 000 périssent sous la garde de la Wehrmacht

~ 700 000 tués etdisparus650 000 blessés

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Front de l’EstCampagne de Pologne · Guerre d’Hiver · Opération Barbarossa · Guerre de Continuation · Bataille de Białystok–Minsk · Opération Silberfuchs · 1re

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Front d’Europe de l’Ouest

Campagnes d'Afrique, du Moyen-Orient et de Méditerranée

Bataille de l’Atlantique

Guerre en Asie et dans le Pacifique

Guerre sino-japonaise

Théâtre américain

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L’opération Barbarossa (en allemand, Unternehmen Barbarossa), nommée en référence à l'empereur FrédéricBarberousse, est le nom de code désignant l'invasion par le IIIe Reich de l'Union des républiques socialistessoviétiques pendant la Seconde Guerre mondiale.Le 23 août 1939, l’Allemagne nazie et l’Union soviétique signent un traité de non-agression et de partage de l'Est del'Europe.Cependant, le 21 juillet 1940, moins d’un an après, Hitler demande à son état-major de préparer un plan d’invasionde l’Union soviétique.Confiant, il déclenche le 22 juin 1941, un an jour pour jour après la signature de l'armistice entre la France et le IIIe

Reich[2], l’opération Barbarossa qui ouvre le front de l'Est qui devient le principal théâtre d'opérations de la guerreterrestre en Europe (de 1941 à 1945, 80 % des pertes de la Wehrmacht sont subies sur le front russe[3]) et le facteurcrucial dans le succès ou la défaite du Troisième Reich nazi. Ce front va être le théâtre des plus grandes et des plussanglantes batailles terrestres de la Seconde Guerre mondiale. Cette invasion marque aussi un tournant dans laguerre, jusqu'alors encore assez localisée et européenne. Elle va bientôt embraser le monde entier.La Wehrmacht possède une supériorité initiale considérable en hommes (de 2 contre 1 au minimum) et enéquipements. Elle est mieux organisée, bien mieux commandée et dispose, au moins jusqu’à la gigantesque bataillede Koursk de juillet 1943, d'une incontestable supériorité tactique. Elle bénéficie de l'effet de surprise. L'Arméerouge, si elle est loin d'être préparée au choc avec l'Allemagne, décapitée par les Grandes Purges, dispose cependantd'importantes réserves humaines, d'avantages matériels certains (base industrielle, armements) et d'un patriotismerusse que Staline saura opportunément réactiver après vingt ans de répression sous la férule d'un État en guerrepermanente contre sa propre société. Le nazisme, qui ne laissera aux « Untermenschen » d'autre alternative que lamort ou l'esclavage, jouera également un rôle important dans le sursaut patriotique.Comme en 1914, l'Allemagne entend agir rapidement : le plan Barbarossa fixe à quatre mois le délai nécessaire àl’anéantissement militaire de la Russie, cœur névralgique de l’Union soviétique. En pratique, l'opération Barbarossas'étendra de juin 1941 à janvier-février 1942, l'échec allemand de la bataille de Moscou étant le dernier épisode de lapremière phase du conflit sur le front russe.

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Les justifications de cette invasion sont historiques (l'échec du plan Schlieffen en 1914 qui a conduit au traité deVersailles, ressenti comme une humiliation par l'Allemagne de 1919), stratégiques (conquête rapide du cœurhistorique et économique russe comme levier de la domination globale du continent européen) et idéologiques (lamise en œuvre géopolitique du nazisme), l'aboutissement affiché de la politique nazie étant la conquête d'un espacevital à l'Est : le Lebensraum.

Situation politique et diplomatiqueLa situation au printemps 1941 semble largement en faveur de l'Axe. La France a été vaincue en quelques semaines,le corps expéditionnaire britannique a été défait. Une partie majeure de l'Europe est occupée. À l'Est, Adolf Hitler amis en place des régimes alliés de gré ou de force : Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Slovaquie. Le seul ennemi enguerre qui lui tienne encore tête est la Grande-Bretagne et son empire, qui résistent en grande partie grâce à unevolonté collective incarnée par Winston Churchill, mais elle n'a été sauvée jusqu'alors que par son insularité. Audemeurant, la Grande-Bretagne ne constitue pas, en Europe continentale, une menace militaire terrestresuffisamment significative pour inquiéter la Wehrmacht.Hitler connaît les risques d'attaquer l'Union soviétique, mais il estime qu'il doit agir immédiatement car, en 1941,l'Armée rouge est désorganisée et profondément affaiblie par les Grandes Purges staliniennes. Encore éloignés de laguerre, les États-Unis d'Amérique penchent cependant de plus en plus du côté des Alliés. Invaincue, la Wehrmacht,fait figure de première armée du monde en 1941. La situation semble donc favorable à la conquête du « Lebensraum». Une seule puissance continentale peut encore empêcher cette conquête : l'Union soviétique. Depuis la signature duPacte germano-soviétique (1939), dans lequel l'URSS voit un moyen de se protéger après les accords de Munich(Allemagne-France-Grande-Bretagne) de 1938, et grâce auquel l'Allemagne et l'Union soviétique se sont partagé leterritoire de la Pologne le long de la frontière orientale acuelle, les deux pays, malgré l'opposition inconciliable desidéologies qui les dirigent, ont ostensiblement établi des relations amicales de façade et des relations commercialesqui profiteront surtout au Troisième Reich jusqu'en juin 1941. L'Allemagne signe par ailleurs un pacte denon-agression avec la Turquie le 18 juin 1941, ce qui lui permet de sécuriser un accès aux ressources pétrolifères duCaucase.

Montée de tensionsArticle connexe : Controverse sur les plans d'offensive soviétiques.L'évolution de la situation dans les Balkans, après l'occupation de la Bessarabie, destinée à donner à l'Unionsoviétique le contrôle de l'embouchure du Danube[4], et de la Bukovine du Nord, contribue à pousser davantageencore la Roumanie dans la sphère d'influence allemande[5], malgré des tentatives soviétiques à l'automne 1940 pourse concilier ce royaume[6]. Dans le même temps, l'URSS recherche, dans la tradition de la diplomatie russe du débutdu XXe siècle, un accord avec l'Italie[7], pour s'opposer à une main-mise progressive mais systématique du Reichdans les Balkans[8]. Ainsi, la diplomatie soviétique cherche-t-elle à ressusciter, malgré les réserves du roi et de sesproches, l'alliance avec la Bulgarie, dont la population affiche des sentiments prosoviétiques sincères[9] ; ainsi, ennovembre 1940, la mission diplomatique soviétique dans les Balkans, menée par des officiers généraux soviétiques,insiste-elle auprès du roi Boris pour que ce dernier n'adhère pas pacte tripartite[10].Les Allemands, de leur côté, ne voient pas d'un très bon œil les velléités soviétiques de prendre pied en Bulgarie et ne veulent à aucun prix remettre en cause leur suprématie sur le Danube, et tentent, lors du second arbitrage de Vienne, de faire du Danube un fleuve sous influence allemande exclusive, malgré les quelques contre-feux allumés par une diplomatie soviétique parfaitement consciente de cette politique[11]. En outre, à l'automne 1940, des incidents de frontière, le long du Danube, se déroulent entre la Roumanie et l'Union soviétique : occupant de manière unilatérale des petites îles sises dans les bras du delta du Danube, des bâtiments de guerre soviétiques affectés à cette mission essuient des tirs roumains, puis se retirent[6]. Dans la foulée de l'arbitrage de Vienne, les Allemands auraient, en outre déclaré aux Roumains, selon des renseignements transmis à Moscou, que les cessions de territoires à l'URSS

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étaient temporaires et réversibles, ce qui ne manque pas de susciter des inquiétudes en Union soviétique[12].

Les derniers jours : le mois de juin 1941Lors du déclenchement des opérations, il apparaît aux responsables soviétiques, l'ambassadeur en poste à Berlin, leministre des Affaires étrangères, que la guerre n'a pas été voulue par les diplomates. En effet, autant Ribbentrop queSchulenburg semblent désolés de devoir déclarer aux Soviétiques, non la guerre, mais que la situation créée par lapolitique soviétique et les mesures défensives soviétiques le long de la frontière, mettaient le Reich dans l'obligationd'engager les hostilités de manière préventive[13]. En effet, l'ambassadeur du Reich à Moscou doit remettre àMolotov, à 4 heures du matin, peu de temps après le déclenchement des hostilités, un rapport détaillé des prétenduesviolations soviétiques de l'accord de 1939[14].

L'invasion crée le front stratégique majeur du second conflit mondialEn déclenchant l'opération Barbarossa, le régime nazi provoque l'ouverture d'un front auquel le Reich doit désormaisconsacrer l'essentiel de ses moyens militaires, de ses ressources industrielles et humaines. Engagée dans une guerretotale contre l'Union soviétique, l’industrie de guerre allemande « tourne » au maximum de ses capacités et ne cessede se développer jusqu’au début de 1945. Le Reich consacre ainsi 35 % de son PNB en 1940, puis 65 % en 1944, àses dépenses militaires. Non seulement l’Allemagne, première puissance industrielle du continent, affecte la totalitéde ses ressources économiques à sa production de guerre, mais elle exploite également systématiquement à cette finles ressources industrielles, économiques, démographiques (deux millions de prisonniers français travaillent enAllemagne) de l’Europe occupée.Du déclenchement de « Barbarossa » aux dernières étapes de la guerre, en mai 1945, la Wehrmacht consacrel’essentiel de ses ressources en hommes et en matériels au front de l'Est, sans jamais être en mesure, à partir del’hiver 1942-1943 (échec de Stalingrad), de prendre l’initiative, si ce n’est dans des secteurs de plus en plus étroits dufront. En juillet 1943, lors de la gigantesque bataille de Koursk, à peine sept divisions et deux brigades (2,7 % desforces allemandes) étaient engagées face aux Américains et aux Britanniques dans les affrontements de la guerre dudésert. Le reste (91 divisions et 3 brigades) se trouvait cantonné dans les territoires de l’Europe occupée. Les Alliésprennent pied en Afrique du Nord en novembre 1942 (débarquement de 70 000 hommes à Alger et Oran et auMaroc), en Sicile en juillet 1943 (débarquement de 160 000 hommes), en Italie à Salerne (sud de Naples) enseptembre 1943 et à Anzio en janvier 1944, mais les moyens engagés pèsent de peu de poids (la Wehrmacht disposede 23 divisions en Italie début 1944), comparés à la démesure des effectifs et des matériels présents depuis juin 1941sur le front soviétique. Durant les quatre années que dura le conflit germano-soviétique il y eut, en permanence, unemoyenne de 9 millions d'hommes simultanément impliqués dans les opérations de ce front.Le cumul des pertes militaires de l’Union soviétique et de l’Allemagne nazie, dans sa guerre d'invasion de l'Unionsoviétique, se monte à 80 % du total de toutes les pertes militaires enregistrées sur le théâtre d’opération européen de1940 à 1945. C'est sur le front russe que la Wehrmacht a les reins brisés, bien avant le débarquement des Alliés enFrance. Après le débarquement de Normandie d'un corps expéditionnaire en juin 1944, c’est encore à l’Est que lesAllemands continuent à engager et à perdre la majorité de leurs hommes. La comparaison des pertes subies par laWehrmacht sur les deux fronts à partir de juin 1944 montre la part presque exclusive du front russe même après cedébarquement. Du 1er juillet au 31 décembre 1944, pendant cinq mois, lors de la grande offensive soviétique contrele groupe d’armées Centre, les Allemands perdront chaque mois en moyenne 200 000 soldats et près de 4 000 Hiwis,des auxiliaires étrangers (russes) de l'armée allemande. À l’Ouest, au cours de la même période, c’est-à-dire après ledébarquement allié en France, la moyenne des pertes allemandes s’élèvera à 8 000 hommes par mois soit un rapportde 1 à 25.Les pertes en vies humaines sont colossales et les conditions de vie effroyables pour les deux camps. En 2001, les historiens russes estimaient les pertes du conflit germano-soviétique à 26,2 millions de tués (environ 16 % de la population de l’Union soviétique de 1940) dont plus de 11 millions de soldats et officiers (6,8 millions de tués directs

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et 3,8 millions de prisonniers de guerre décédés entre les mains de la Wehrmacht), et surtout 15,6 millions de civilspuisque l’importance sans précédent des pertes civiles est d’abord la conséquence d'une guerre d’anéantissementmenée en Union soviétique par le Reich nazi. Trente-quatre millions de Soviétiques ont été mobilisés dans les rangsde l'Armée rouge de 1941 à 1945. L’ampleur de l’engagement allemand a été gigantesque : quelque 20 millionsd’Allemands ont porté, à un moment ou à un autre, l’uniforme de la Wehrmacht sur le front russe, de sorte que c’esttoute la société allemande qui fut impliquée dans l’expérience de la guerre sur le front de l'Est. Celle-ci a été voulue,dès sa phase de préparation, comme une lutte à mort, exigeant un engagement sans limites, une obéissance absolue,la destruction totale de l’ennemi. À ce titre, la guerre totale déclenchée contre l'URSS constitue non seulement lesommet du régime nazi, mais aussi l’élément essentiel de son image dans la mémoire collective des Allemands aprèsla guerre. Pour l’écrasante majorité des soldats allemands, l’expérience de la guerre est celle du front russe[15].À la fin du mois de mars 1945, la totalité des pertes de l’Ostheer (le nom de la Wehrmacht sur le front russe) s’élèveà 6 172 373 hommes (tués, mutilés, disparus), soit près du double de ses effectifs initiaux, au 22 juin 1941[15]. Cechiffre représente 80 % des pertes subies par la Wehrmacht sur tous les fronts depuis le déclenchement de l’invasionde juin 1941. En mai 1945, on dénombre plus de 3 millions de prisonniers allemands détenus en Union soviétique.Tous camps confondus, les tués de l’Armée rouge, hors les 3,8 millions de prisonniers de guerre soviétiques décédésaprès leur capture, constituent 52 % du total des pertes militaires en Europe, ceux de la Wehrmacht 28 % (moins de 2% pour l'armée des États-Unis). Les pertes militaires de l’Union soviétique représentent 85 % du total des pertesalliées en Europe (Royaume-Uni 3,7 % - France 2,9 % - États-Unis 2,6 %). Enfin, le front ouvert en juin 1944 enFrance a eu, militairement, environ 11 mois d’existence contre 47 mois pour le front russe ouvert en juin 1941.

Préparatifs allemandsLe Reich prépare l'invasion de l'Union soviétique minutieusement, jusque dans ses moindre détails ; cettepréparation, à la fois politique, militaire et économique, se propose non seulement de réaliser des objectifs politiquesraciaux et territoriaux précisément définis, mais aussi de mettre en place la répartition des rôles entre militaires et dedéfinir la place des acteurs économiques dans le conflit qui s'annonce.

Motivations et justifications idéologiques et politiquesLa volonté allemande d'écraser définitivement la Russie, adversaire oriental de l'Allemagne dans le cadre d'uneguerre sur deux fronts, remonte à la Grande Guerre. Cette volonté est renforcée par la mise en place du régimecommuniste.En effet, dans Mein Kampf, Hitler, qui n'est ici qu'un avatar parmi d'autres de la pensée de l'extrême-droite allemandedes années 1920[16], amalgame la figure du Juif et la représentation du bolchevik, entre autres dans la figurefantasmagorique du Judéo-Bolchevik, représentation dans l'idéologie nazie du mal absolu, le Juif, « nuisible »(schädling) à la Nation allemande[17]. cette conception, relayée par la propagande, est partagée par de nombreuxofficiers de la Reichswehr, puis de la Wehrmacht : des documents internes de cette institution propagent cetteconception chez les officiers, qui perçoivent les territoires occupés de l'URSS à travers ces prismes[16]. Cettepropagande touche non seulement les officiers, mais aussi les soldats engagés dans les opérations de 1941, quiendurent à partir de 1943 défaites et retraite sans cesser de se battre. Elle est en outre instillée dès les années 1930dans la police allemande, sous le contrôle de Himmler à partir de 1936 ; cet arrière plan idéologique fournit lapréparation psychologique des policiers ayant participé aux tueries de 1941[18].En outre, la défense de la civilisation contre le « déluge Moscovite-asiatique »[19], joue une rôle non négligeable dansles motivations des soldats : il s'agit pour eux de reprendre le combat des Germains contre les Slaves, arriérés ;relayés par la propagande, ces stéréotypes sont fermement ancrés dans les représentations des soldats et des officiersenvoyés sur le front de l'Est[20] : aux officiers qui s'offusquent de la brutalité des ordres reçus, Keitel répond quedans cette guerre « la conception militaire d'une guerre chevaleresque » n'entre pas en ligne de compte, puisqu'ils'agit de « détruire une conception du monde (Weltanschauung) »[21].

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Enfin, réparer l'humiliation de la défaite non reconnue de la Première Guerre mondiale face à l'alliancerusso-franco-britannique de 1914 est aussi une motivation importante : en effet, sur le front russe, l'Allemagne et sesalliés ont signé une paix de victoire à Brest-Litovsk en mars 1918, mais ont dû évacuer les territoires qu'ilsoccupaient à l'hiver 1918-1919. Ainsi, pour les militaires de haut rang, qui ont tous fait la Grande Guerre, commepour les décideurs nazis, la défaite de 1918 ne peut être que la conséquence du coup de poignard dans le dos donnépar les socialistes allemands, marxistes donc nécessairement juifs, la guerre à l'Est venge donc 1918-1919[22]. Uncertain nombre de théoriciens nazis font, précocement dans l'histoire du NSDAP, l'assimilation entre marxistes etJuifs, mais ne font alors que reprendre des stéréotypes largement diffusés, sinon dans la société, au moins dans lescercles conservateurs dans lesquels se recrutent les officiers généraux de la Wehrmacht[16].Ainsi est fait le lien, dans l'imaginaire nazi, entre la figure du Juif, le communisme et le Slave ; cet imaginaire est àl’œuvre dans la propagande allemande depuis 1933. Le refus de la Grande-Bretagne de mettre fin à la guerre après ladéfaite de la France conduit aussi Hitler à voir dans le maintien d'une URSS puissante dans le dos de l'Allemagne ledernier espoir des dirigeants britanniques ; l'élimination de ce facteur permettra donc d'amener la Grande-Bretagne àrésipiscence ; de ce fait, l'hégémonie allemande sur l'Europe sera indiscutée et l'allié japonais en sera renforcé faceaux États-Unis.Dès le 22 juin, les propagandistes allemands développent le thème de la nécessaire lutte contre les bolcheviks, qui,alliés aux Juifs, seraient responsables de la misère que connaît le peuple russe. Jusqu'au dernier jour du conflit, lapropagande allemande exploite le thème du judéo-bolchevisme jusqu'à la corde[23].

Objectifs territoriaux et projets nazisLes vastes espaces de l'Union soviétiques sont destinés, dans la direction tracée autrefois par les chevaliersTeutoniques, à devenir le Lebensraum, l'espace vital allemand, une fois débarrassé de ses populations. Lespopulations urbaines doivent être exterminées par la famine, les populations rurales sont destinées à constituer lamain-d’œuvre servile pour fournir des surplus alimentaires destinés à l'Allemagne et à la colonisation aryenne.Dès la fin de l'année 1940, les rapports des services de renseignements soviétiques fourmillent d'indications sur lesobjectifs territoriaux nazis. Ainsi, en février 1941, le directeur de ces services est en mesure de fournir à Staline lanature des objectifs territoriaux allemands dans la guerre, alors en préparation, qui se dessine à l'Est : créationd'entités étatiques sensibles aux intérêts du Reich de la Baltique à la mer Noire et contrôle direct des régionsindustrielles[24], ce qui explique la priorité donnée à la conquête et au contrôle des bassins industriels ukrainiens. Lalimite de l'avancée allemande serait l'Oural, au-delà de laquelle les Soviétiques seraient repoussés[25]. Toutes lesinformations rapportées dans les rapports soviétiques, collectées par des informateurs auprès d'officiers allemandsparfois exceptionnellement détendus[25] confirment l'importance des objectifs territoriaux assignés aux troupes qui sepréparent à attaquer l'URSS et l'ampleur des moyens pour parvenir à cet objectif[25].De plus, les préparatifs de Barbarossa redonnent de l'influence à Alfred Rosenberg, le rédacteur du VölkischerBeobachter. En effet, natif de Reval, celui-ci, au printemps 1941, joue un rôle non négligeable dans les discussionsautour des projets de recomposition territoriale et raciale des zones conquises, discussions dont le Generalplan Ostconstitue l'aboutissement : il propose un redécoupage des territoires en quatre Reichskommissariat, l'Ostlandcomprenant les pays baltes et la Biélorussie, celui d'Ukraine, le Kaukasus avec la zone autour des monts du Caucaseet celui de Moskowien pour le reste de la Russie européenne. Il esquisse des politiques de court terme différentesdans chacune de ces circonscriptions : en Ukraine, il propose la création de ghettos, sur le modèle du ghetto de Lodzet la création de colonies de travail, l'Ostland doit être germanisé sans ménagement ; il ne s'étend pas sur lescommissariats de Moscovie et du Caucase, mais fait parvenir aux futurs commissaires du Reich des directives danslesquelles il insiste sur la nécessité d'une exploitation très sévère, y compris des mesures organisant une famine demasse dans les territoires placés sous leur juridiction[26].Dans le même ordre d'idées, les planificateurs économiques de la guerre à l'Est proposent une exploitation sans merci des espaces conquis, en créant deux zones distinctes de production agricole, étanches du point de vue économique :

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une « zone déficitaire » (Zuchusszone), appelée « zone forestière » (Waldbauzone) ou « aire de famine »(Hungergebiet), centrée autour de Moscou et Léningrad, dont la population est promise à la mort, et une « zone desurplus » (Überschusszone), appelée « zone de terres noires » (Schwarzerderzone), comprenant l'Ukraine et leCaucase, dont la population peut espérer, en raison de son utilité dans la production de matières premières agricoles,survivre[27].De même, Himmler voit la guerre à l'Est comme un moyen de recomposer la carte ethnique de l'Est de l'Europe auprofit de l'Allemagne, en créant des colonies de peuplement dans les territoires nouvellement conquis. En effet, lesconcepteurs des plans, qui se succèdent à ce sujet au printemps 1941, prévoient l'expulsion des Slaves en grandnombre, entre 30 et 50 millions, vers la Sibérie[28].

Hitler et le Parti dans la phase de préparation de BarbarossaDu fait de son caractère éminemment politique, l'opération est principalement une création d'Hitler[29]. L'état-majorde la Wehrmacht est alors réticent car il craint de devoir combattre sur deux fronts simultanément (un front terrestrecontre l'URSS, un front maritime et aérien contre la Grande-Bretagne). Mais le Führer, auréolé du prestige desvictoires fulgurantes en Pologne et surtout en France, croit en son génie politique et militaire et refuse de leur prêterl'oreille. Opposé, lui aussi, par principe, à la division de ses forces sur deux fronts qui fut, à ses yeux, la grandeerreur du Reich lors de la Première Guerre mondiale, il finit par se convaincre lui-même que le Royaume-Uni est àbout de souffle et demandera la paix une fois l'Union soviétique vaincue et démantelée, car il ne veut pas différerplus longtemps sa grande conquête à l'Est. Il surestime ses forces, prenant en compte ses victoires éclairs contre laPologne puis la France, et sous-estime celles de la Russie soviétique, du fait des piètres résultats et des fortes pertesessuyées par l'Armée rouge au cours de la guerre d'Hiver contre la Finlande (125 000 soldats soviétiques y périrentcontre 48 000 hommes pour l'armée finlandaise). La préparation de l'armée allemande souffre donc de plusieurscarences qui se révèlent fatales à terme pour la réalisation des objectifs.Mais cette phase de préparation voit également la mise en place de quartiers généraux pour Hitler et ses fidèlesdirectement impliqués dans la guerre à l'Est : le quartier général de Rastenburg, aménagé dans une zone de forêts enPrusse-Orientale, est occupé par Hitler le 23 juin : il comprend à la fois des maisons en bois et des bunkers en béton,reliés par des routes et des voies ferrées[30]. C'est sur ce modèle qu'Himmler fait bâtir son propre quartier général àAngerburg, à 30 km de Rastenburg[30]. À cet endroit, il reçoit le résumé des rapports quotidiens des Einsatzgruppen,par l'entremise du siège central du RSHA[31].

La préparation opérationnelle

Plans élaborés dès 1940

La première mention d'une invasion de la Russie soviétique apparaît dans la directive no 21 du Führer, mise en circulation restreinte fin 1940[32]."Les armées allemandes précisait la directive, doivent être prêtes, avant même la conclusion de la guerre contre l'Angleterre, à écraser la Russie soviétique à la faveur d'une rapide campagne[33]". La directive indique déjà la date de l'invasion: le 15 mai 1941. Dès ce document, le plan de conquête et les objectifs à atteindre sont tracés, avec la séparation en deux du champ de bataille : le nord et le sud des marais du Pripet. Les deux groupes d'armées au nord doivent dans un premier temps détruire le maximum de forces soviétiques en appliquant les tactiques de la Blitzkrieg, puis prendre d'abord Léningrad et son port de guerre de Kronstadt, et seulement ensuite la capitale Moscou. Le groupe sud, lui, doit progresser vers Kiev, son flanc droit étant couvert par l'armée roumaine et quelques divisions allemandes. Par la suite, les opérations au sud ont pour objectif l'occupation du bassin du Donets (et au-delà le pétrole du Caucase). Le plan préparé par Hitler est axé sur la destruction des forces soviétiques sur la frontière grâce à des encerclements réalisés à toute vitesse par des unités blindées et à la capture des grands centres économiques. Il rencontre une certaine défiance de la part d'une partie de l'état-major de la Wehrmacht, davantage attaché à des stratégies plus conventionnelles, où la capture de la capitale politique, objectif symbolique, est prédominante. Même si Hitler considère ces préoccupations d'un autre temps, il concèdera la

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poursuite simultanée des objectifs que sont Moscou et Léningrad. Lors de la mise en œuvre de ce plan, le groupeNord sera incapable de prendre Léningrad seul, malgré sa supériorité en effectifs et en artillerie sur la faible garnisonqui protège la ville de Pierre le Grand et décidera de l'affamer.

Plan d'origine des Allemands.

Benito Mussolini et Adolf Hitler.

Hitler décide que le premier but à atteindre est l'anéantissement del'Armée rouge le plus tôt possible, pour l'empêcher de se replier etd'appliquer la politique russe traditionnelle de défense devant touteinvasion majeure : la terre brûlée. Pour ce faire, la Wehrmacht doitencercler, chaque fois qu'il sera possible, des portions importantes desforces soviétiques pour les anéantir.

Le plan adopté est une sorte de mélange des deux stratégies. Il prévoitune attaque sur trois axes, avec du nord au sud :• Une poussée vers Léningrad, à travers les pays baltes, menée par les

16e et 18e armées, ainsi que le 4e groupe blindé, regroupé dans legroupe d'armées Nord commandé par le maréchal Wilhelm Rittervon Leeb et appuyé par la 1re flotte aérienne du général AlfredKeller.

• L'attaque principale menée par le groupe d'armées Centre,commandé par le maréchal Fedor von Bock, et comprenant les 2e et4e armées,ainsi que les 2e et 3e groupes blindés, le tout étant soutenupar la 2e flotte aérienne du général Albert Kesselring. L'objectif dece groupe est Moscou, mais grâce à sa position centrale, il doitappuyer les deux autres mouvements et s'attacher à anéantir lemaximum d'unités soviétiques.

• Le groupe d'armées Sud, commandé par le maréchal Gerd vonRundstedt et comprenant les 6e, 11e et 17e armées ainsi que le1er groupe blindé, appuyé par la 4e flotte aérienne du généralAlexander Löhr. Il doit bénéficier de plus, dès leur entrée en guerre,de l'appui non négligeable des 3e et 4e armées roumaines. Il a pourobjectifs premiers la ville de Kiev, le port d'Odessa, puis les grandesvilles industrielles de Kharkov, Dniepropetrovsk et Donetsk. Sesobjectifs finaux étant les ports de Sebastopol en Crimée,Rostov-sur-le-Don et la grande ville de Stalingrad, clé du contrôlede la Volga.

La campagne doit au final établir, avant l'hiver, un front qui partant deLéningrad suivrait le cours de la Volga, jusqu’à son embouchure. D'icilà, l'Allemagne compte sur une destruction complète de l'Armée rouge, car les effectifs engagés seront incapables demener les tâches d'occupation du pays conquis et la tenue de ce gigantesque front, long de plusieurs milliers dekilomètres. Le 12 août 1941, le maréchal Wilhelm Keitel, chef de l'Oberkommando de la Wehrmacht, indique danssa directive 34a le principal objectif opérationnel de l'offensive: L'objet des opérations doit être de priver l'ennemi,avant la venue de l'hiver, de son gouvernement, de son armement et de son centre de communication dans la régionde Moscou, et de l'empêcher ainsi de reconstituer ses forces et de faire fonctionner de façon ordonnée ses organes degouvernement[34].

Initialement fixée au 15 mai 1941, l'invasion est finalement reportée au 22 juin afin de terminer les opérations deconquête de la Grèce et de la Yougoslavie, rendues nécessaires, dans l'esprit de Hitler, par le putsch de Belgrade demars 1941 (à la suite des déboires de Mussolini en Grèce).

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Déploiements de troupes et derniers préparatifs

déployer plus de 2 millions de soldats le long de la frontière est une action de longue haleine.En effet, dès le mois de juillet 1940, les services de renseignement soviétiques prennent conscience de l'ampleur desdéploiements de troupes allemandes le long de la frontière soviétique[35].Dans les dernières semaines précédant le déclenchement de l'opération, des concentrations de troupes allemandessont repérées par les services de Beria: au mois de juin, les agents de ces services en postes en Ukraine et dans lespays baltes informent le gouvernement soviétique non seulement des concentrations de troupes allemandes, maisaussi de l'impact de ces concentrations de troupes sur les transports ferroviaires[36]: le renseignement soviétiquedresse au fur et à mesure des mois précédant le conflit non seulement l'inventaire des unités de plus en plusnombreuses cantonnées sur la frontière occidentale de l'Union soviétique, mais aussi la cartographie de leurdéploiement et de l'implantation de leur commandement[36]. Les agents soviétiques comptent, le 9 juin 1941, parexemple, le nombre de convois militaires transitant par Königsberg en direction de l'Est: sur dix-sept trains, douzeassuraient le transport d'unités mécanisées, trois le transport de chars d'assaut, un le transport d'artillerie decampagne, et un train de matériel médical; de même, en Roumanie, des unités sont acheminées par train au plus prèsde la frontière soviétique[37]. un agent soviétique de retour en URSS, empruntant le train depuis Varsovie, note laprésence de nombreuses unités cantonnées dans les forêts à proximité de la frontière, des convois de camions d'unelongueur importante[38].Dans les semaines précédant l'invasion, le réseau de communications est remis en état: les routes stratégiques sontréparées et pavées, le réseau ferroviaire, dans les parties de la Pologne anciennement russe occupée par le Reich,adapté pour l'écartement du matériel allemand et les ponts gardés par des unités d'artillerie légère[39]. Dans le mêmetemps, de aérodromes sont aménagés, des dépôts d'essence et de munitions sont mis en place à proximité de lafrontière[36].De plus, au cours du printemps 1941, la Luftwaffe multiplie les vols de reconnaissance sur le territoire soviétique: le21 juin, l'ambassadeur allemand, Schulenburg, est convoqué par Molotov qui se plaint de la quantité des vols dereconnaissance allemands violant l'espace aérien soviétique, 180 depuis le début du mois d'avril, selon la note del'ambassade soviétique remise au ministère allemand des affaires étrangères[40]. Aux mois de mai et juin, dans lesjours précédant l'invasion, ces vols de reconnaissance se font de plus en plus nombreux et comptent à leur bord desofficiers supérieurs: le NKVD en dénombre 91, soit autant que dans les six mois précédents[39]. Au cours du mois dejuin 1941, Göring, chef de la Luftwaffe reçoit l'ordre de transférer les quartiers généraux des flottes aériennesallemandes (Luftflotten) en Roumanie, et, ainsi, de quitter Berlin; dans le même temps, la deuxième ligne de laLuftwaffe, sorte de réserve opérationnelle est transférée vers l'Est, alors qu'elle se trouvait jusqu'alors en France etdans l'Ouest du Reich, tandis que son état-major est transféré à Posen[41]

Consignes et ordres donnés aux commandants

Dès ses prémisses, la préparation opérationnelle est doublée de la préparation d'un certain nombre de consignesdistribuées à l'ensemble des commandants de corps engagés dans les opérations militaires. Ces consignes font l'objetde discussions entre le haut-commandement et la SS durant tout le printemps 1941. En effet, le 3 mars 1941, Jodlrencontre Hitler pour lui faire état des propositions des militaires relatives à l'occupation de larges portions duterritoire soviétique[42]. Ces propositions sont débattues entre les intéressés durant tout le printemps.Tout d'abord, toutes les consignes données sont élaborées ; influencées par un ordre de Jodl qui suit sa discussionavec Hitler le 3 mars 1941 :•• La zone de compétence de l'armée doit être la moins profonde possible, avec le moins possible de cadres

administratifs militaires ;•• Les tribunaux militaires sont incompétents pour juger les partisans capturés, compétence qui relève du ressort de

la SS ; celle-ci dispose en outre de la liberté d'action dans les zones de combat ;

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• Les territoires occupés à l'Est seront placés sous l'autorité du Reichsführer SS, qui dispose d'une totale autonomied'action ;

• Non seulement les Juifs, mais aussi les commissaires et les fonctionnaires du parti, doivent être exterminés[43].Le 30 mars 1941, à l'OKW, Hitler présente aux généraux qui seront responsables du front certaines consignes quiseront données aux troupes : ils propose aux officiers présents de mener une guerre d'extermination contre l'URSS,dont les cadres sont considérés comme des « criminels asociaux », et contre le bolchevisme désintégrateur, dont leJuif est la figure de proue[44]. Dans les deux mois précédant l'invasion, d'autres directives autorisent les exécutionsde représailles de grande ampleur, accordent de fait l'impunité aux soldats auteurs d'exactions contre les civils,justifient les exécutions des commissaires[45].Enfin, les directives distribuées au niveau des divisions comportent non seulement la seule mention explicité du sortréservé aux Juifs, mais surtout aussi fournit un cadre légal au comportement d'une troupe d'occupationimpitoyable[46].La guerre à l'Est est donc bien présentée comme une guerre idéologique totale contre le Judéo-bolchevisme, contreune sous-humanité (Untermenschtum[18]) ; dans ce contexte, ces ordres impitoyables tendent tous à extirper le «bolchevisme Juif »[47]. Mais ces ordres demeurent flous, sujets à interprétations par les soldats et les officiers quisont appelés à les exécuter[18].

Préparatifs économiques de l'invasionDans ses propos au début de l'année 1941, Hitler développe également un argumentaire économique de justificationde l'invasion, mettant en exergue les immenses richesses de la Russie d'Europe, que le Reich pourrait utiliser dansdes conflits à l'échelle continentale[48]. L'exploitation de ces richesses est confiée à une administration dépendante duPlan de Quatre Ans, dirigée par Göring, qui doit, dès les premiers jours de l'occupation, assurer l'approvisionnementde l'armée en nourriture, donner au Reich des moyens alimentaires supplémentaires et remettre en marche l'appareilproductif des régions occupées[49]. Organisé en groupes spécialisés, l'état-major économique Est se voit représentéau sein de chaque groupe d'armées par un service spécifique[49]. Les arguments développés par Hitler ne laissent pasinsensibles les responsables militaires: anticipant une victoire rapide, Halder inclut Bakou et les champs pétrolifèresde la mer Caspienne[50].Des conférences sont organisées dans le courant de mai 1941 entre les chefs des services économiques de l'OKW etles représentants des ministères économiques[51]. Dans le même temps, le secrétaire d'État à l'agriculture HerbertBacke propose une politique de réduction par la famine, conséquence de la priorité accordée aux prélèvementsallemands, et par l'exil en Sibérie des populations urbaines du Nord de la Russie d'Europe (régions de Moscou), et lamise en place de deux zones de production de denrées alimentaires[52].De plus, la guerre à l'Est doit autant que possible ménager le contribuable allemand, selon une note des services deGöring[53] et se faire à coût réduit pour le Reich: les bénéfices tirés de l'exploitation des territoires à conquérirdoivent être utilisés pour rembourser les dettes de guerre, générées par leur conquête[54].Enfin, à cette préparation économique est adjoint un volet bancaire, dans lequel la Reichsbank joue un rôle essentiel.En effet, au début du mois de juin 1941, sont organisées des caisses de crédit motorisées de la Reichsbank, créditéedans un premier temps de la somme totale de 1,5 milliard de marks de campagne, émis pour l'occasion par laReichsbank à la demande de la Wehrmacht à partir du 12 juin 1941[55]. Ces marks de campagne doivent constituerdans les zones envahies la seule monnaie ayant cours légal au fur et à mesure de l'avance des troupes allemandes, lesautres pièces étant confisquées par les agents de ces caisses de campagne motorisées[56].Dans le même temps, les responsables de la Reichsbank qui mettent au point les modalités de la circulationmonétaire dans les territoires occupés, planifient la reprise par les entreprises allemandes des unités de productionsoviétiques: une politique de prêts, destinée à accélérer la remise en marche de ces industries, est ainsi définie: lesprêts sont octroyés directement et en l'absence de toute garantie, contrairement aux usages[56].L'ensemble des préparatifs économiques de lu Reich et de ses alliés, en vue de l'invasion de l'URSS, n'échappe ni aux diplomates, ni aux agents de renseignements soviétiques: en effet, au cours du printemps 1941, les responsables

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soviétiques sont parfaitement informés de l'ensemble des paramètres industriels de l'invasion. Ainsi, le NKGBrenseigne-t-il sur la nature des productions de guerre: bombardiers tactiques et projets de bombardiers stratégiques,chars d'assaut[50].

La réalité de la préparation soviétique

Char lourd KV-1 soviétique détruit près deKaunas en juin 1941.

L'inéluctabilité d'une guerre avec une Allemagne nazie qui considèrel'URSS comme son « espace vital » (en allemand Lebensraum) ne faitguère de doutes en URSS. Peu avant la signature du pacte, l'URSSrappelle ainsi à l'Allemagne qu'elle « n'a pas oublié ce que Hitler a écritdans son livre Mein Kampf »[57]. En outre, après la défaite de laFrance, c'est un secret de polichinelle que l'Allemagne a déployé sonarmée vers l'Est, le gouvernement soviétique estimant que 94 divisionsd'infanterie nazies sont désormais positionnées sur la frontière orientalede l'Allemagne[58]. Staline lui-même déclare que l'effet du pactegermano-soviétique est que « nous [soviétiques] seront épargnés par la

guerre un peu plus longtemps », tandis que Hitler souligne que l'URSS est en attente « d'une situation difficile pourl'Allemagne » et que Staline se révèle « plus effronté » pendant les mois d'hiver, où il se sent à l'abri d'une attaquenazie[59]. L'effet des purges sur le commandement de l'Armée rouge avait fortement affaibli l'armée, même si cespurges ont aussi contribué à renouveler l'armée par une génération plus éduquée[60]. Le pacte germano-soviétiqueétait en partie justifié par les Soviétiques par la volonté de bénéficier de temps pour s'armer. En juin 1941, lesviolations de l'espace aérien soviétique par des avions de reconnaissance allemands ne provoquent aucune réaction etmalgré les signes croissants d'une attaque allemande, Staline refuse les mesures les plus élémentaires de préparationau combat, comme la création de fortifications de campagne, la dispersion des matériels et la mise en alerte del'Armée rouge. Staline interprétait les mouvements allemands comme des provocations, auxquelles il ne fallait pasrépliquer en engageant des préparatifs de combats[61]. C'est donc dans un relatif état d'impréparation que l'attaqueallemande du 22 juin surprend l'URSS.

L'encadrement soviétique à la veille du déclenchement des opérationsVassili Grossman, témoin direct du front, raconte dans ses « Carnets de guerre » : "Au moment où la guerre acommencé, beaucoup de commandants en chef et de généraux étaient en villégiature à Sotchi. Beaucoup d’unitésblindées étaient occupées à changer les moteurs, beaucoup d’unités d’artillerie n’avaient pas de munitions, pas plusque, dans l’aviation, on n’avait de carburant pour les avions…. Lorsque, depuis la frontière, on commença à avertirpar téléphone les états-majors supérieurs que la guerre avait commencé, certains s’entendirent répondre : « Ne cédezpas à la provocation ». Ce fut une surprise, au sens le plus strict, le plus terrible du terme[62]".Les unités sont cruellement handicapées par le manque d’officiers correctement formés. L’armée a perdu la plupartde ses représentants les plus compétents. Après la « Grande Terreur » communiste de 1936-1938 (près de 750 000Russes fusillés, et sans doute 200 000 morts dans les camps du Goulag) une grande partie de l’encadrement del’Armée rouge a disparu. Ont été fusillés : 11 000 officiers sur 70 000 (et plus de 20 000 sont internés dans lescamps), 154 généraux de division sur 186 (82 %), 50 généraux de corps d’armées sur 57 (88 %), 13 commandantsd'armées sur 15 (87 %), la quasi-totalité des maréchaux (90 %) et des amiraux (89 %). Khroutchev devait soulignerque cette épuration massive des cadres de l'armée avait été l'une des causes principales de l'état d'impréparation desforces soviétiques en juin 1941: "Tant d'hommes avaient été exécutés que le haut commandement avait été dévasté,ainsi que tous les échelons du corps des officiers"[63]. À noter que cette épuration continuait alors même quel'invasion allemande se développait, ce qui faisait dire à Stepan Anastasovich Mikoyan: "Une grande guerre s'étaitengagée, notre armée souffrait de lourdes pertes et essuyait des défaites, et, dans le même temps, des chefs militairesexpérimentés, au lieu d'être appelés à sauver la situation, étaient mis à mort en toute hâte…"[64].

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Durant les purges ont non seulement été exécutés les militaires, mais aussi les conceptions militaires permises dansle contexte révolutionnaire des années 1920-1936: rompant partiellement avec les conceptions héritées deClausewitz, des théoriciens militaires, regroupés autour de Toukhatchevsky, théorisent un troisième niveau dedécision militaire, à mi-chemin entre le tactique et le stratégique: le niveau opérationnel, qui permet d'associer le butà atteindre et les moyens, ceux dont disposent le commandement et ceux à mettre en œuvre pour la réalisation desbuts définis[65]. Ainsi, la doctrine militaire soviétique allie la mise en place de troupes de couverture etordonnancement d'unités sur de grandes profondeurs, pour permettre une contre-attaque rapide[66].Les conséquences sur la qualité du corps des officiers sont tragiques. Au moment où l’armée française s’effondresous les coups de l’armée allemande, à peine 7,1 % des officiers soviétiques possèdent une formation militairedéveloppée ; près de 25 % sont dans des cours de formation accélérée et 12 % n’ont aucune formation militaire. Plusd’un tiers des officiers soviétiques est donc incapable de remplir un commandement à la veille de l’attaqueallemande[67]. Le commandement est tétanisé. En outre, beaucoup des officiers en place en 1941 ont d'abord étéchoisis pour leur fidélité au régime et non pour leur compétence. S'ajoutant aux consignes de modération données àl'égard des préparatifs allemands, leur incompétence favorisa la désorganisation et le déploiement hasardeux desunités chargées de la défense de la frontière. Les troupes étaient, en effet, pour la plupart placées trop près de lafrontière et s'appuyaient sur une ligne de fortification encore en cours de réalisation, la Ligne Molotov. Enfin, lesofficiers soviétiques de 1941 sont placés sous l'autorité des commissaires politiques de l'Armée rouge. Le contrôle deces derniers sur les ordres d’opérations ne sera levé qu’à la mi-1943 (et après Stalingrad, l’Armée rouge remet envigueur les grades et les épaulettes de l’Armée Impériale de la monarchie).De plus, les Grandes purges ont abouti à priver l'Armée Rouge de cette doctrine et de ses cadres.

Des changements au sommet de la hiérarchie militaire soviétiqueEn juin 1940, le remplacement de Vorochilov par Timochenko met un terme à cette hémorragie: 4000 officiers sontlibérés et rappelés par l'Armée, un certain nombre d'officiers ayant fait leurs preuves sont promus (ils forment l'épinedorsale du commandement soviétique durant le conflit), le commandement de la flotte est reconstitué, mais, parmanque d'expérience, il n'est pas en mesure d'obtenir les mêmes succès que les commandants des troupesterrestres[68]. Parallèlement à ce renforcement du commandement, de nouveaux règlements sont édictés,réintroduisant la discipline, les grades et supprimant les compétences militaires du commissaire politique[69].Timochenko se propose de revoir également la totalité du dispositif défensif et offensif soviétique: en septembre1940, il présente ses projets de défense à Staline et insistent sur la possibilité d'une guerre contre une coalitiondirigée par le Reich et comprenant l'Italie les États balkaniques, Hongrie, Roumanie et la Finlande[70]: différentsprojets sont élaborés, axés sur une concentration des opérations soit au centre du front (Pologne, Biélorussie), soit ausud, pour s'emparer de la péninsule balkanique[71].Dans les heures précédant l'invasion, le commandement soviétique connait une dernière mue, dans la lignée deschangements de 1940: Joukov, chef de l'armée d'Orient qui vient de vaincre l'armée japonaise en Mandchourie duNord, promoteur de la mobilisation préventive contre le Reich, alors de plus en plus agressif, est nommé le 21 juin,commandant des fronts Sud et Sud-Est, où l'on imagine alors le principal axe de l'attaque allemande et son ancienchef d'état-major, promoteur comme lui d'une préparation accélérée du conflit, est nommé au commandement dufront Nord, stationné dans les Pays baltes[72]. Aussitôt nommés, ces généraux donnent des consignes en vue d'unemobilisation accélérée des troupes de couvertures, et ordonnent la mise en place de mesures spécifiques sur les villeset les installations militaires, à mettre en place pour le petit matin du 22 juin[72]

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Les services du renseignement soviétiques face aux préparatifs allemandsLa surprise ne fut pas totale pour le pouvoir soviétique puisqu'il a été établi que l'espion Richard Sorge et lesanalystes suédois menés par Arne Beurling avertirent Staline de la date exacte de l'invasion allemande. Plus de 80avertissements furent transmis, d'une manière ou d'une autre, à Staline, qui pensait que l'attaque lui étaitpolitiquement interdite. Il semble que Staline se soit entêté dans l'idée qu'Hitler n'ouvrirait pas un second front sansen avoir fini avec l'Angleterre, conformément au conseil formulé autrefois par le chancelier allemand Bismarckintimant à l'Allemagne de ne pas avoir deux fronts simultanément à l'est et à l'ouest. Il refusa catégoriquement toutemesure risquant d'être perçue comme une provocation par le régime de Berlin[61].De plus, les préparatifs allemands n'échappent cependant ni aux agents de renseignement soviétiques, ni auxmilitaires, qui, de leur côté, donnent l'ordre aux unités stationnées à la frontière occidentale de se tenir prêts à toutinitiative allemande, malgré les réserves de Staline[73]; dans la deuxième quinzaine de juin, Joukov ordonne decamoufler pour le 1er juillet les installations militaires, les concentrations de troupes et de blindés soviétiques[74]:dans ses consignes du 19 juin, Joukov accorde une place importante aux terrains d'aviation, ordonnant des mesures àmettre en place au 1er juillet: camouflage des pistes d'atterrissage et des installations, enterrement des citernes decarburant, création de terrains factices[75]. De même, les commandants d'unités reçoivent l'ordre de se tenir prêts aucombat, dans les deux ou trois heures, selon qu'ils exercent leur commandement dans des unités d'infanterie,d'artillerie ou de blindés, y compris dans le détail : plein d'essence pour les véhicules, obus à déballer des boites destockage, bandes de mitrailleuses à tenir prêtes, rations de nourriture conditionnées et cuisines roulantesopérationnelles[76]…Dans le même temps, les services soviétiques sont informés de certains aspects de la préparation politique del'invasion: les tentatives de la propagande allemande de désigner courant juin un autre adversaire que l'Unionsoviétiques laissent de marbre les responsables du renseignement soviétiques, mais dupent Staline[77]. Cependant,ces rumeurs alimentées par la presse allemande laissent sceptiques les relais soviétiques dans le Reich[78]; cessources soviétiques sont conscientes du rôle dévolu à Alfred Rosenberg, qui déclare vouloir rayer de la carte de nomde Russie, comme elles sont informées de l'identité des futurs responsables nazis des territoires occupés[79]. Demême, les services de renseignement s'interrogent sur l'évacuation des personnels, de leur famille et de certainesarchives (d'autres sont brûlées dans la cour de l'ambassade) de l'ambassade du Reich à Moscou à partir du 10 juin,tandis que l'Intourist doit faire face à une demande exceptionnelle de billets d'avions à destination du Reich pour lemois de juin (ces demandes de billets étant liées à des demandes de visas, les services du NKVD en sontautomatiquement informés)[80].Dans le même temps, la forte activité des indépendantistes ukrainiens n'échappent pas non plus aux servicessoviétiques. Le directeur du KGB de la République Socialiste Soviétique d'Ukraine signale l'existence d'une bandearmée d'un millier d'hommes regroupés autour de Stephan Bendera: ce millier d'hommes réfugiés dans les forêts àproximité de la frontière avec le Reich et la Roumanie attaquent les Kolkhozes, en outre des nationalistes ukrainienssont interceptés par des patrouilles soviétiques; de plus, de nombreux cas de sabotage de la production agricole sontrapportés[81]. En Moldavie, des activistes entretiennent l'agitation les jours de marché, en affirmant par exemple, quel'Armée Rouge, dans sa retraite, emportera avec elle tout le bétail des paysans; ces derniers apeurés quittent lemarché et s'empressent de mettre leurs troupeau hors d'atteinte[81].Les services de renseignement soviétiques sont également informés par leurs homologues britanniques[82]. Parfaitement informé des concentrations de troupes allemandes, les Britanniques, sur les ordres de Eden, informent les responsables du renseignement soviétique de cet état de fait le 9 juin; le 13 juin, Eden convoque l'ambassadeur soviétique à Londres pour le tenir informé des derniers renseignements dont il a eu connaissance, mais ce dernier reprend la position officielle soviétique, à savoir que la Grande-Bretagne souhaite faire basculer l'Union Soviétique dans le conflit[83]. Cependant, à la réception de ces informations, l'ambassadeur soviétique à Londres demande, puis obtient le 15 juin 1941, après accord de Churchill, que les messages allemandes interceptés et décodés par les Britanniques soient communiqués au gouvernement soviétique[84]. Le lundi 16 juin 1941, alors que, sceptique,

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Maisky, l'ambassadeur soviétique est convoqué, à sa grande surprise, au Foreign Office, il est abasourdi par le détaildes renseignements militaires fournis par les britanniques, et câble en urgence un rapport précis de l'entretien,dressant un tableau relativement précis des mesures de concentration allemande[85]. L'avant veille du déclenchementde l'opération, le 20 juin, alors qu'il se repose dans la campagne anglaise, Maisky est à nouveau convoqué au ForeignOffice, pour recevoir les derniers renseignements britanniques sur les concentrations allemandes: sur la foi dedécryptages de messages allemands, l'attaque aurait lieu le 21 ou le 22 juin[86]. Dans la semaine précédant l'attaque,la diplomatie soviétique s'accroche à l'idée d'un ultimatum allemand précédant l'attaque que le gouvernement deMoscou trouve néanmoins inéluctable[87].Le 21 juin, alors que l'ambassadeur allemand oppose une fin de non-recevoir à toutes les demandes soviétiques, alorsque Ribbentrop souhaite savoir où se trouve l'ambassadeur soviétique à Berlin[88], deux transfuges allemandsporteurs d'informations importantes relatives à l'attaque du lendemain est intercepté en territoire soviétique, l'un dansla journée du 21, l'autre quatre heures seulement avant le déclenchement des hostilités[72]; à la réception de cesinformations, malgré les dernières réserves de Staline, des ordres de mobilisation sont préparés et les troupes decouverture maintenues en état d'alerte[89].

Les mesures de concentration soviétiquesAu cours des mois d'avril et mai, Joukov et Timochenko préparent des plans de mobilisation en vue de mener uneguerre défensive sur les frontières soviétiques, et les mettent à jour à la mi-juin, dans des consignes diffusées auxcommandants des forces de couverture, disséminées le long des frontières occidentales de l'Union Soviétique, maistoutes les mesures préconisées sont écartées pour éviter qu'elles n'induisent de la part du Reich un sentiment deprovocation soviétique[73]. En outre, courant juin, des unités reçoivent des ordres de transfert à proximité de lafrontière allemande et en Ukraine, ces transferts devant se faire de manière discrète et devant aboutir par la mise enétat de combat des zones dans lesquelles les unités ont été transférées au 1er juillet[74]. De plus, à partir du 10 juin,Joukov et Timochenko se font plus insistants auprès de Staline, à qui ils demandent de mettre les troupes stationnéesen Europe en état d'alerte maximum : le 18 juin, par exemple, ces deux officiers participent à une réunion avecStaline, à qui ils présentent des cartes établies par leurs services, des concentrations de troupes du Reich et de sesalliés le long de la frontière soviétique, ce qui l'homme fort de l'Union Soviétique refuse dans un déchainement deviolence et de menaces contre ses généraux[90].En outre, le jour de l'invasion, beaucoup d'unités sont paralysées par des carences en matériels de guerre. Les armesindividuelles ont été distribuées en quantités insuffisantes. Déjà, en mars 1941, 30 % seulement des unités blindéesdisposaient des pièces de rechange nécessaires à leur fonctionnement. Un mois avant l'attaque allemande, lesgénéraux signalaient que "l'exécution du plan pour la fourniture des équipements militaires dont l'Armée rouge a unbesoin si aigu est extrêmement peu satisfaisante".

Un complexe militaro-industriel en pleine mutationPourtant, l'Union soviétique de 1941 est loin d'être un pays faible  : l'industrialisation forcée des années 1930 lui permet de n'être dépassée que par les États-Unis en termes de production industrielle (industrie lourde principalement). Ses matériels militaires sont souvent à la pointe de l'industrie mondiale, comme les chasseurs I-16 ou le char T-26. Cependant, depuis 1939, l'industrie d'armement du pays traverse une crise de transition, les nouveaux matériels ont beaucoup de mal à entrer en production de masse. D'autant que depuis le pacte germano-soviètique le transfert vers l'est de l'appareil militaro-industriel(machines+personel) est effectif.Le déclenchement de la guerre contraindra le système soviétique à davantage d'efficacité, comme le montre la rapide montée en puissance de nouveaux matériels de guerre performants. Considéré comme le meilleur char « tout emploi » de la Seconde Guerre mondiale, le T-34 sera le tank le plus important des forces alliées. Il influencera nettement tous les chars conçus ultérieurement. Il sera le premier char capable de rivaliser et de surpasser ses adversaires tant par sa puissance de feu que par ses performances. Quand les premiers exemplaires de série sortirent en juin 1940, il

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n'avait pas d'équivalent. Produit en grand nombre dans différentes usines en fonction de l'avancée de la Wehrmachten territoire soviétique (usines de Stalingrad, de Kharkov, de Nizhnij Tagil, d’Omsk, etc.), il pesait 32 tonnes etemportait un équipage de 4 hommes. Il existait à peine plus de 1 000 T-34 lorsque les Allemands attaquèrent laRussie. Seuls 10 % des chars soviétiques étaient alors des T-34, mais à la mi-1943 ce taux montait à 60 % avant quele T-34 n'ait totalement remplacé en 1944 les modèles les plus anciens. De 1941 à 1945, dans ses différentesversions, l’industrie russe en produisit près de 52 000 exemplaires.

Panzer IV en déplacement vers les zones destationnement précédant le déclenchement de

l'opération. On voit les réserves d'essence sur ledernier char.

L'ampleur des épreuves qu'ont subi les Russes depuis la chute dutsarisme (guerre civile, collectivisation forcée, périodes de terreur,exécutions massives, déportations) ont fini par forger un peuple dur àla souffrance et ayant, malgré tout, appris à survivre dans lesconditions les plus difficiles. Enfin, l'économie soviétique vit sous unrégime permanent d'économie de guerre depuis l'avènement dubolchévisme, ce qui facilitera, à partir de 1942, la mobilisation totaledes ressources économiques pour faire la guerre au Troisième Reich.

Les forces en présence

Forces de l'AxeLe dispositif d'invasion de l'Axe est sans équivalent dans l'histoire militaire (excepté l'immense offensive soviétiquede conquête de l'Allemagne lancée le 12 janvier 1945 avec 6,7 millions de combattants). Hitler a mobilisé 3 millionsde soldats du Reich qui commencent à se déployer en février, en Prusse-Orientale, en Pologne, en Slovaquie et enMoldavie.

L'Ostheer inclut également des divisions hongroises, roumaines et finlandaises (500.000 hommes pour ces troisnationalités) et, par la suite, italiennes (l’Italie aura jusqu’à 200 000 hommes sur le front) : soit 201 divisions dont 42de pays satellites, 3 650 chars d’assaut (85 % des disponibilités en blindés du Reich), 2 770 avions, plus de47 000 canons et mortiers de campagne.Avec ses alliés, l'Allemagne aligne 3 600 000 soldats, 3 648 chars, dont 444 d'un modèle récent, le Panzer IV[91],appuyés par 2 510 avions.L’Allemagne engage 159 divisions sur les 220 dont elle dispose alors (73 % des effectifs totaux de la Wehrmacht).Ce sont pour la plupart des troupes aguerries par les campagnes précédentes, bien équipées et bien motorisées(600 000  véhicules) grâce en particulier aux prises de guerre de la bataille de France. On note cependant l’utilisationen juin 1941 de 600 000 chevaux par les équipages du train[92].Si ces effectifs sont sans précédent dans une guerre de conquête, ils semblent insuffisants au regard du potentiel del'Union soviétique et des immensités russes. L'armée d'invasion compte seulement 800 chars et 30 divisions[93] deplus qu'au déclenchement du Fall Weiss contre la France. Il reste que, sur les axes de pénétration et les points depercée, la supériorité de la Wehrmacht en matériels et en effectifs est écrasante, dans un rapport de 4/5 contre 1 etque l'armée allemande est remarquablement rompue au combat tactique, capacité qui fait cruellement défaut auxtroupes soviétiques au moins jusqu'à la bataille de Koursk. La Blitzkrieg est donc la carte maîtresse qui décide del'issue du front que le Reich nazi décide d'ouvrir contre la Russie.Forces soviétiques

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Les chars récents équipant l'armée rouge au moment de l'invasion : de gauche àdroite, un BT-7, le prototype A-20, le T-34 modèle 1940 et le T-34 modèle 1941.

La découverte du T-34, non signalée par les services de renseignement del'Abwehr, sera une surprise si frappante pour l'État-major allemand que le généralVon Kleist le considèrera comme "le meilleur char du monde" [94] ; l'URSS en

produira 55 000 avant la fin de la Grande guerre patriotique.

L’Armée rouge dispose au total, en juin1941, de 209 divisions d’infanterie dont 160sont stationnées en Russie occidentale, soiten principe 2 900 000 soldats à effectifspleins (en 1941 la division d’infanterieallemande compte à effectif au complet16 500 hommes contre 14 474 pour lasoviétique). En réalité, 144 divisionscomptent seulement la moitié de leurseffectifs et 65 un tiers. C’est donc à peine unpeu plus d’un million de soldats, pris audépourvu, qui vont devoir s’opposer à ladéferlante allemande sur un front deplusieurs milliers de kilomètres. LesSoviétiques peuvent mettre en ligne37 500 canons, 1 540 chasseurs de dernière génération, mais un nombre considérable de vieux avions (7 500) et detanks sont déclassés. L’Armée rouge n’a plus, depuis leur dissolution par le pouvoir soviétique en 1939, de corpsmécanisés à opposer à la Wehrmacht, corps blindés qui sont en grande partie une création du maréchal MikhaïlToukhatchevski (fusillé en juin 1937 - sa femme, sa mère et son fils, élève-officier, sont exécutés également en1937). Enfin, l’Union soviétique doit se garder sur deux fronts : une quarantaine de divisions restent stationnéesjusqu’en août 1945 en Extrême-Orient russe face aux armées japonaises qui occupent la Mandchourie.

L’état-major allemand entend profiter à plein de la faiblesse militaire de la Russie soviétique. Hitler devait ainsidéclarer au général Jodl : « Nous n'avons qu'à donner un coup de pied dans la porte et toute cette structure pourries'effondrera »[95]. Pourtant, d’après le rapport entre les effectifs humains engagés et le nombre d’engins, laWehrmacht sur le front russe (l’Ostheer) était moins moderne que son adversaire direct, l’Armée rouge, même si,malgré les enseignements de Toukhatchevski, les Soviétiques, comme leurs alliés occidentaux, n’avaient pas encoreappris à tirer le maximum de leur puissance matérielle. En juin 1941, sur les 3 648 chars qui se ruent sur la Russie,seuls 444 sont des modèles relativement récents (Panzer IV). Face à eux se trouvent un million d’hommes, soutenuspar 15 000 chars, sur un stock total de 24 000, soit plus que tous les chars du reste du monde réunis. Si la grandemajorité de ces engins étaient des modèles périmés, 1 861 d’entre eux étaient des chars T-34 et des chars lourds KV,supérieurs aux meilleurs engins produits à l’époque en Allemagne, mais handicapés par l'absence de radios ennombre suffisant.

L'invasion

L'attaque initialeLes conditions sont donc très favorables pour l'Allemagne nazie. Le dimanche 22 juin 1941, l'armée allemande s'ébranle. Les unités d'assaut (élite) franchissent la frontière et attaquent les premières lignes soviétiques constituée de formations tout-venant (les troupes d'élites ne seront engagée que sur la bataille de Moscou). L'attaque terrestre est précédée par la plus gigantesque attaque aérienne de tous les temps, menée par la majorité des 2 770  avions engagés en appui de ce front. Cette attaque commence sans déclaration de guerre à 3 h 30[96] et vise 66 aérodromes soviétiques. Elle a des résultats désastreux pour l'Armée rouge, puisqu'elle donne à la Luftwaffe la maîtrise absolue du ciel soviétique pendant plusieurs semaines. Les bombardiers allemands trouvent les avions soviétiques alignés ailes contre ailes à leur base, généralement sans camouflage ni protection. La plupart du temps, l'alerte n'a même pas été donnée et peu d'avions de chasse peuvent décoller. Les pertes de l'Armée de l'air russe sont terribles : attaquée sur 66 aérodromes, à midi elle a perdu 1200 avions, dont 800 cloués au sol[97] ; le soir, 1 489 appareils ont été détruits au

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sol et 389 autres abattus en vol. La Luftwaffe ne perd que 63 avions le 22 juin et 150 en tout les deux premiers joursde l'offensive.

Déroulement de l'opération sur l'année 1941.

Ce cliché de l'un des panzers III de la 18e Panzerdivision franchissant, àl'aide du Schnorchel, la rivière du Boug occidental fut exploité dans les

revues d'actualité allemandes. Le franchissement de la ligne de démarcationgermano-soviétique qui séparait le Reich de l'URSS depuis l'invasion de laPologne et son équivalente soviétique était éminemment symbolique pour

l'opération Barbarossa ; la propagande se targua d'une première dansl'utilisation des véhicules amphibies.

À 4 h 15, l'artillerie allemande se met à pilonnerles positions avancées de la défense soviétiquesur la frontière et, à 4 h 45, les premières unitésterrestres franchissent celle-ci. La surprise chezles Soviétiques est totale : la Stavka avait bienémis un ordre qui avertit les unités frontalièresde l'imminence de la guerre, mais la plupart desunités ne l'avaient pas reçu. La premièreopération est menée sur le front central, par uncoup de main d'un corps franc de la3e Panzerdivision, qui s'empare du pont deKoden, sur le Bug. Dans la matinée, un pont debateaux est lancé à Drohizyn, 80 km plus aunord. La tête de pont ainsi créée est appuyée parl'emploi de 80 chars Pz-III submersibles. Àl'extrémité Nord du front, le long de l'anciennefrontière lituanienne, le 22 juin dès ledéclenchement de l'invasion, un bataillonallemand tente de prendre la ville de Garsden ;jusque tard dans l'après-midi, ils doiventaffronter les gardes frontières soviétiques, armésde pistolets, dans plusieurs quartiers de laville[98].

La résistance des Soviétiques est assez décousuesur la plus grande partie du front : des groupesde soldats se rendent au premier blessé, d'autresne cèdent rien[99]. Lorsque, à partir de 3h30 dumatin, les premiers pilonnages ont lieu, Staline,perplexe sur les motivations allemandes, interditaux militaires de répliquer, ou d'ordonner lesdéploiements prévues par les plans demobilisation[100], pensant n'avoir affaire qu'à uneattaque locale, malgré les renseignements deTimochenko concernant toute la longueur de la frontière occidentale de l'Union Soviétique[101]; ce n'est que tarddans la journée, après une réunion du Politburo et des échanges en parallèle entre certains de ses membres (Staline,Kaganovitch, Molotov, Malenkov et Vorochilov) et lorsque les contre-mesures prévues de longue date sont devenusinapplicables, que les unités reçoivent l'ordre de répliquer aux troupes allemandes[102].

Improvisée dans son ensemble, malgré les directives de Joukov et Timochenko, la résistance soviétique estcependant acharnée sur quelques points, comme la citadelle de Brest-Litovsk défendue par les 6e et 42e divisions detirailleurs, qui résistent, pratiquement sans eau, jusqu’à la fin juillet, bien qu'ayant été attaquée dès le matin du 22juin. Sans appui d'aucune sorte, les soldats soviétiques de la citadelle sont totalement encerclés et sans espoir desecours puisque la nouvelle ligne de front est à 400 kilomètres plus à l'est. Ils continuent à se battre en dépit de la

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disproportion des forces et de l'emploi d'artillerie de siège lourde comme les mortiers de 620 mm. La seule45e division d'infanterie affectée à la prise de la forteresse déplorera 482 tués (dont 80 officiers) et plus de1 000 blessés. Les Russes perdront de 2 000 à 2 500 tués et autant de prisonniers. Mais par son action, cetterésistance ralentit considérablement le mouvement des unités d'infanterie qui doivent empêcher les troupessoviétiques de s'échapper de la poche de Bialystok-Minsk.Pendant ce temps, malgré quelques contre-attaques soviétiques, les unités mécanisées du groupe d'armées Centrefranchissent le Bug, et s'enfoncent dans les arrières des unités de l'Armée rouge. Les deux groupes blindés du centremènent alors, à partir du 26 juin, deux percées parallèles, pour finalement converger sur Minsk, le 9 juillet, créant lapoche connue sous le nom de Bialystok-Minsk, où plus de 400 000 soldats soviétiques et d'énormes quantités deblindés et de matériels sont pris au piège. Relevés par l'infanterie des 2e, 4e et 9e armées, les blindés allemandscontinuent leur progression en direction de Smolensk. Ils franchissent la Bérézina le 28 juin, ayant parcouru600 kilomètres depuis la frontière.

Enfants pendant un raid aérien : des enfantsbiélorusses pendant une attaque aérienne nazie le

24 juin 1941.Image: archive RIA Novosti.

Au Nord, le groupe d'armées de Leeb progresse très rapidement grâce àl'attaque très en profondeur du 56e corps d'armée motorisé du généralErich von Manstein, qui s'empare du pont d'Ariogala situé à 80 kmdans la profondeur du dispositif soviétique, dès 19 h 00, le 22 juin etrenouvela l'exploit le 26, avec celui de Dunaburg à 350 kilomètres dela frontière, malgré une contre-attaque des chars du 3e corps mécanisésoviétique contre la 6e Panzerdivision au village de Rossiény. Labataille de chars qui en résulte fait rage pendant deux jours : l'Arméerouge y engage une centaine de chars de type KV-1 et KV-2, ce quiprovoque une crise dans l'armée allemande, car ce char lourd est alorsinvulnérable aux canons des chars et aux armes antichar allemands ;l'usage de pièces d'artillerie de 88 et 105 mm employées en tir directpermet néanmoins aux Allemands d'endiguer la résistance soviétique.L'offensive marque un temps d'arrêt, car Hitler et son état-major préfèrent que les blindés attendent l'infanterie avantde poursuivre leur progression vers Léningrad. Mais le 3 juillet, Staline parle enfin à la radio, "l'ennemi est cruel...",et partout, l'Armée Rouge se raidit.

Le groupe d'armées Sud connaît pour sa part une progression bien plus difficile. Dans ce secteur sont massés le plusgros des chars de l'Armée rouge, dont de nombreux KV-1 et T-34. Bien que manquant complètement decoordination, les contre-attaques blindées coûtent cher aux Allemands. De plus, la Roumanie n'intervient qu'à partirdu mois de juillet. Le 28 juillet, la situation empire brusquement pour les Soviétiques, quand le 1er groupe blindé etla 17e armée font leur jonction à l'est d'Ouman, enfermant dans une poche la majeure partie des 6e et 12e arméessoviétiques. Les troupes encerclées résistent jusqu'au 8 août, mais elles sont contraintes à la reddition. Les pertes sontterribles pour l'Armée rouge, avec environ 200 000 tués et 100 000 prisonniers.

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La bataille de SmolenskArticle détaillé : Bataille de Smolensk.

Soldat allemand équipé d'un lance-flammes.Photo identifiée en 1941.

Le 10 juillet, le groupe d'armées centre a commencé une opérationd'encerclement contre les troupes défendant Smolensk, jalon importantsur la route de Moscou; le Dniepr est atteint et franchi le 11 juillet ;Smolensk tombe le 16, les troupes soviétiques étant coupées de leursarrières. Mais cette fois, la réduction de la poche formée(323 000 soldats soviétiques) va se révéler problématique: les troupesrusses continuent à résister malgré leur isolement. À la suite d'une fortecontre-attaque, l'encerclement est même rompu temporairement. Lescombats vont durer jusqu'au 10 septembre, l'Armée rouge ramenantconstamment de nouvelles troupes fraîches. Certes, ses pertes sont làaussi très importantes, mais la progression des Allemands est enrayée,et obligée de lutter pied à pied contre des troupes déterminées, l'arméeallemande subit elle aussi une véritable hécatombe avec la perte de près de 250 000 hommes (tués et blessés).310 000 soldats et officiers soviétiques sont faits prisonniers, beaucoup seront sommairement exécutés. La batailledu chaudron de Smolensk porte à la Wehrmacht un coup dur dans sa progression vers l'est. Le général Blumentrittrelève que "le comportement des troupes russes dans la défaite contrastait terriblement avec celui des Polonais ou desOccidentaux. Mêmes encerclés, les Russes s’accrochaient et combattaient".

La bataille de KievArticle détaillé : Bataille de Kiev (1941).

L'encerclement de Kiev et l'opération Typhon

À la mi-septembre, l'Armée rouge, à la suite des terribles pertes qu'ellea subies, a été contrainte de se replier sur une ligne de défense derrièrela Divna et le Dniepr. Les armées allemandes ont regagné leur libertéde mouvement avec la fin de la liquidation de la poche de Smolensk.Les généraux réclament une attaque en direction de Moscou, désormaisà 400 km du front. Il semble certain aux généraux allemands que,compte tenu de l'ampleur énorme de ses pertes, l'Armée rouge seraincapable de résister à une poussée dans cette direction. Hitler n'est pasde leur avis, il veut s'emparer de la région industrielle du Donbass. Ilvoit également la possibilité d'en finir avec les forces arméessoviétiques qui ont mission de défendre l'Ukraine. Les arguments

avancés par Hitler pour soutenir une avancée blindée vers le Sud sont que les lignes d'approvisionnement de l'arméecentre seraient exposées sur un flanc de plus de 800 km si l'offensive continuait vers Moscou. En conséquence, ilordonne au 2e groupe blindé de Guderian de se porter vers le sud pour rejoindre le 1er groupe blindé dufeld-maréchal von Kleist qui remonte du sud après avoir traversé le Dniepr. Le 25 août, la 3e division blindées'empare du point stratégique qu'est le pont sur la Desna, près de Novgorod-Severski. Lorsque les officiersd'état-major soviétiques prennent conscience du danger mortel qui se rue sur les armées du Sud, il est trop tard. Lesdeux pointes blindées allemandes se rejoignent à Lokhvitsa. Un gigantesque encerclement est réalisé autour de larégion de Kiev et des marais du Pripet, dans lequel plus de 500 000 soldats soviétiques sont pris au piège. Kiev, « lamère des villes russes » dans la culture slave, tombe le 19 septembre et le reste de la poche suit dans le mois. Seuls15 000 soldats et officiers parviennent à franchir le cordon allemand, dont Nikita Khrouchtchev, le général SemionTimochenko et le maréchal Boudienny. C'est le plus vaste encerclement militaire de l'Histoire. C'est aussi la plus

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grande défaite militaire ponctuelle de l'histoire soviétique. Au terme de la bataille de Kiev, l’armée allemande aencore 200 000 tués, blessés et disparus, mais les Soviétiques perdent près d'un million d’hommes (400 000 tués,500 000 prisonniers exécutés sur place ou que les Allemands laisseront mourir de faim avant de déporter lessurvivants dans les camps d’Europe centrale).

Les principes de mobilité et d'effet de surprise,qui caractérisaient jusque ici les engagementsstratégiques de la Wehrmacht sous le terme de

Blitzkrieg, semblent encore prévaloir pendant l'étéet l'automne 1941.

Partout, les unités de l'Armée rouge battent en retraite, dépassées par larapidité de l'invasion. La plupart des habitants des zones envahies sonteffondrés :

« La population. Ils pleurent. Qu'ils soient en route, qu'ils soientassis, qu'ils soient debout près des palissades, à peinecommencent-ils à parler qu'ils pleurent, et on a soi-même enviede pleurer malgré soi. Quel malheur ! »

— Vassili Grossman.Pourtant, on commence à voir, çà et là, des habitants réserver unaccueil prévenant aux troupes allemandes.La route du Donbass est ouverte pour le groupe d'armées sud, quiatteindra Rostov-sur-le-Don le 21 septembre, mais les divisionsblindées et motorisées de la Wehrmacht sont très éprouvées par lesdeux féroces batailles de la fin de l'été, et ce n'est que le 30 septembreque la progression peut reprendre en direction de Moscou. La saison des boues, la rapoutitsa, rend les routesimpraticables, et provoque alors un arrêt des opérations mobiles pendant près de quinze jours, obligeant à patienterjusqu'aux premières gelées pour reprendre le mouvement.

Au nord, les troupes allemandes arrivent devant les premières lignes de défense de Léningrad, au début du mois deseptembre. La prise de la ville, dont la défense est organisée par Joukov, s'avère vite impossible malgré les faiblesmoyens de défense de l'Armée rouge. Les Allemands s'abstenant d'un assaut direct, décident de l'investirprogressivement pour l'affamer, avec l'aide des Finlandais, mais la ville, malgré des pertes humaines colossales(700 000 civils périrent de faim et des bombardements), résistera en fait jusqu’à son dégagement en 1944, au coursdu siège le plus long et le plus impitoyable de l'histoire moderne.

En quelques semaines à peine, les divisions allemandes ont progressé de 500 km vers le Nord, de 650 km vers l’Est,de 350 km vers le Sud-Est. De juin à octobre 1941, l’Ostheer (la Wehrmacht sur le front russe) a fait au total plus detrois millions de prisonniers. Les premiers massacres en masse de Juifs, Russes et Tsiganes débutent quelquessemaines seulement après le début de l’invasion.

L'échec de la bataille de MoscouArticle connexe : Bataille de Moscou.Les Allemands trouvent un pays las du communisme soviétique[103], mais les Einsatzgruppen massacrentsystématiquement les Juifs (plus de 1 500 000 personnes, essentiellement des femmes et des enfants, serontassassinées de 1941 à 1944) et multiplient les atrocités dans le cadre de ce qui ressemble à une guerred'anéantissement.La population devient de plus en plus hostile à un envahisseur qui apparaît comme un ennemi venu pour anéantir et non pour libérer. Si les premières villes capturées avaient semblé accueillir favorablement l'envahisseur (en Ukraine en particulier), du fait de la lassitude face à la férocité du régime stalinien et aux problèmes des nationalités, les très nombreux massacres de civils transforment rapidement cet a priori favorable. Les massacres de civils désarmés et l'intention déclarée de réduire les Slaves en esclavage retournent vite les populations. Le traitement inhumain réservé aux prisonniers de guerre a fini par filtrer. Les Allemands éprouvent des difficultés croissantes à capturer des prisonniers, les soldats soviétiques préférant lutter jusqu’à la mort plutôt que de mourir sommairement exécutés. Les

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opposants au régime se persuadent qu'il s'agit d'une lutte à mort où ils n'ont guère le choix du camp.Les troupes allemandes traversent des régions affreusement pauvres et désertes, et l'étendue des espaces russes faitperdre tout son sens à la Blitzkrieg. Les lignes de communications de la Wehrmacht s'allongent démesurément.Assez rapidement, des groupes de partisans se forment sur les arrières de la Wehrmacht, obligeant celle-ci àconsacrer une partie importante de ses forces au maintien de ses routes de ravitaillement. Ce dernier rencontre denombreux problèmes, comme la différence d'écartement des voies de chemin de fer soviétiques avec celles d'Europeoccidentale. Après des centaines de kilomètres parcourus dans les plaines russes, le matériel est usé et en mauvaisétat (surtout pendant la raspoutitsa, la période des mauvaises routes à cause des intempéries). Surtout, le manqued'hommes disponibles, compte tenu de ses pertes, commence à poser un problème à la Wehrmacht. Après plus d’unmois de combats, elle a déjà perdu plus d’hommes qu’au cours de toutes ses campagnes à l’Ouest, tout en étant trèsloin d’avoir atteint ses objectifs opérationnels. En septembre 1941, les divisions combattantes, alors au nombre de142, déclarent avoir perdu près de 50 % de leurs forces initiales en hommes et en matériel et, en novembre, la plupartdes formations d’infanterie ont perdu la moitié de leurs effectifs.

L'armée allemande bloquée par la boue durantl'automne 1941.

Début septembre, les Allemands, bloqués par les boues, tiennentplusieurs conseils de guerre pour envisager la suite des opérations, dontla conférence d'Orcha, à laquelle participe Hitler. Il est désormais clairque malgré les pertes colossales infligées à l'Armée rouge, celle-ci n'apas été détruite. Sa combativité, loin de s'écrouler, semble mêmes'accroître. Il apparaît que seul le groupe d'armées Centre sera capablede reprendre la progression quand les routes seront de nouveaupraticables. Malgré l'aide des Finlandais, le groupe Nord est incapablede mener une action de vive force contre Léningrad, il arrive tout justeà maintenir un encerclement partiel et précaire, qui laisse passer leravitaillement pour la ville par le lac Ladoga. Le groupe d'armées Sudest soumis à une forte pression soviétique et le corps blindé de vonKleist a été contraint de passer à la défensive, voire de céder du terraincomme à Rostov-sur-le-Don, aux portes du Caucase, face auxcontre-attaques de Semion Timochenko : c'est le premier reculallemand depuis le déclenchement de l'invasion.

Devant l'échec inéluctable de Barbarossa, on prépare une opération derechange pour essayer d'en finir avant l'hiver, l'opération Taïfun(typhon). Hitler adopte, malgré ses idées précédentes, l'idée qui veutque la prise de la capitale de l'adversaire doit briser sa volonté derésistance. Les objectifs initiaux de Barbarossa (la ligne Arkhangelsk-Kouïbychev) sont abandonnés, ce qui renddésormais impossible la destruction de l'industrie de guerre soviétique, mise à l'abri derrière l'Oural(à partir du pactede Munich). De plus, Staline a acquis la certitude, par les renseignements fournis par le réseau Orchestre rouge etRichard Sorge, mais surtout par des communications qui ont été interceptées, que la politique d'expansion japonaisen'a plus que des visées vers le Sud-Est asiatique et que le Japon s'apprête à attaquer la flotte des États-Unis à PearlHarbor. Les troupes fraîches et expérimentées (commandées par Joukov) qui gardent la frontière extrême-orientaleen Sibérie vont pouvoir être rapatriées en Russie occidentale. De fin 1941 au début de 1942, près de 400 000 «Sibériens » sont ainsi transférés vers l'ouest à bord de trains spéciaux qui mettent de une à deux semaines pourarriver à destination. Sur ce total 250 000 soldats furent assignés à la défense de Moscou.

Fin octobre 1941, Adolf Hitler décide la bataille de Moscou, déclarant à ses généraux son intention de raser la ville jusqu’à ses fondations et d’en faire un immense lac artificiel. Il donne l'ordre le 14 octobre 1941 d'un double enveloppement de Moscou, avec pour objectif la jonction à Noguinsk. Le Reich regroupe tous ses moyens disponibles en vue de l'assaut. Moscou renforce ses défenses : un demi-million d’hommes et de femmes creusent

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8 000 km de tranchées et 100 km de fossés antichars.De novembre à décembre, la Wehrmacht engage 1,8 million d’hommes dans cette bataille (80 divisions mais àeffectifs incomplets), soit plus de 50 % de toutes ses divisions, 30 % de son artillerie, sur un front de 600 km de largeet de 250 km de profondeur. En deux semaines de combats, l’Armée rouge perd 700 000 combattants faitsprisonniers (poches de Viazma, d’Orel, de Briansk, etc.), 1 200 chars et 5 000 canons. Le 7 novembre 1941, dans undiscours resté célèbre, prononcé sur la place Rouge, devant les troupes qui partent au front, Staline délaissel’idéologie et en appelle aux valeurs et aux grandes figures historiques de la nation russe. Le front de Kalinine (un «front » est un groupe d'armées dans la terminologie soviétique), au nord de Moscou, lance sa contre-attaque le 5décembre dans une neige de plus d'un mètre d'épaisseur et par des froids de -20 °C à -30 °C. L’offensive hitlérienneest stoppée à 30 km de Moscou, non loin du faubourg de Khimki, à proximité de l'actuel aéroport internationalCheremetievo), grâce également à un terrible hiver pour lequel elle n'est pas équipée. Une contre-offensive menéefin décembre par des bataillons sibériens casse enfin le front allemand et rejette de 100 à 200 km en arrière le grouped’armées centre. Le 22 janvier, la bataille de Moscou est gagnée par Joukov. Guderian est contraint à une retraiteprécipitée, abandonnant une grande partie de son matériel. L’armée allemande perd encore 615 000 hommes. C’est leretour de balancier. Jusqu'en janvier 1942, la Wehrmacht recule partout.Une étude récente[104] réévalue la bataille de Moscou et fait de celle-ci

« la bataille la plus importante de la Deuxième Guerre mondiale et, de façon indiscutable, le plus vasteengagement militaire de tous les temps. En additionnant les effectifs des deux camps, environ 7 millionsd'hommes furent engagés, à un moment ou à un autre, dans ces combats. Sur ces 7 millions de soldats, 2,5millions furent tués, faits prisonniers, portés disparus ou assez grièvement blessés pour être hospitalisés, avecdes pertes beaucoup plus lourdes du côté soviétique que du côté allemand. Selon les archives militaires russes,958 000 soldats soviétiques ont péri, ce qui comprend les tués, les disparus et les hommes faits prisonniers.Étant donné le traitement que leur réservaient les Allemands, la plupart des prisonniers de guerre soviétiquesétaient, de fait, condamnés à mort. De plus, 938 500 de leurs camarades furent hospitalisés pour blessures(sans oublier les maladies consécutives au froid et à l'humidité), ce qui porte le total des pertes soviétiques à1 896 500 hommes. Pour les Allemands, le total des pertes était de 615 000 hommes »

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Collaboration avec l'occupant

Auxiliaire cosaque de l'armée allemande.

Durant l'occupation de leur territoire, près de deux millions deSoviétiques se rangèrent du côté des Allemands : des Baltes, desUkrainiens, des Russes, quelques Polonais enrôlés de force[105] entreautres, soit moins de 3 % de la population de la zone occupée par leReich dans la partie occidentale de l'Union soviétique. Pour les enrôlésvolontaires, les motivations sont nationalistes (comme dans les régionsbaltes), anticommunistes et antisémites. Dès la conquête de certainesvilles, des pogroms furent perpétrés, par ces collaborateurs, comme àKaunas, à Lviv[106], etc. Mais rapidement, cette violence devientmultidimensionnelle et de moins en moins contrôlable par les militaireset les policiers allemands, ce qui incite Heydrich et la SS à encadrerétroitement ces collaborateurs par l'emploi localisé de ces supplétifs,par l'armement qui leur est donné, par le contrôle de leurs actions[107].

En 1943, certaines divisions allemandes comptaient plus de 20 %d'auxiliaires russes (les Hiwis). Il y eut deux divisions SS russes, la 29edivision SS de grenadiers RONA et la 30e division SS de grenadiers,les deux divisions de l'armée Vlassov et le 15e SSKosaken-Kavalerie-Korps constitué de Cosaques du Don. Beaucoup agissaient par nationalisme, les pays baltes etl'est de la Pologne, qui faisaient partie de l'Empire russe jusqu'en 1917, ayant été de nouveau annexés par l'Unionsoviétique en 1939.

Exemple parmi d'autres du soutien que reçurent les envahisseurs de la part de certaines populations locales à certainsendroits : les milices pro-allemandes étaient assez efficaces pour rendre inutiles des représailles. Tel était le cas dudistrict administratif autonome de Lokot, dans la région d'Orel-Koursk, au sud de Briansk. Comptant 1 700 000habitants, ce district fut défendu par une milice intégralement russe en 1941-1942. Ici, la base de la collaborationétait de nature politique (anti-communisme) et la milice de Lokot créée par le général Rudolf Schmidt de laIIe Armée Panzer conjointement avec un ingénieur russe (remplacé plus tard par le fameux Bronislaw Kaminski), futconnue sous le nom de Russkaya Osvoboditelnya Narodnaya Armiya (Armée de libération russe). Certaines de cesmilices, dans les pays baltes et en Ukraine en particulier, apportèrent aux autorités d'occupation un soutien nonnégligeable dans la politique d'extermination des populations juives.Un élément capital des transactions fut que les SS avaient interdiction d'opérer dans toute cette région où lesAllemands acceptèrent de s'abstenir de toute action de représailles du fait des activités de la résistance qui sepoursuivaient toujours. De tels arrangements, bien que généralement moins formels, étaient monnaie courante dansles régions occupées par les Allemands. Ils trouvaient des avocats fervents parmi les officiers de la Wehrmacht. LesSS s'y opposaient de façon tout aussi véhémente, car ils refusaient d'armer des « sous-hommes ». Par la suite, lasituation ayant empiré pour le Reich nazi et le besoin d'effectifs devenant criant, les SS furent amenés à tempérerleur refus initial. Ils s'opposaient toujours à la création de milices, mais seulement parce qu'ils voulaient recruter tousles hommes disponibles pour leurs nombreuses unités « ethniques ».

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Bilan de l'opération Barbarossa

L'épuisement et le 1er recul allemand à Rostov surle Don.

Situation tactique

Les Allemands réussissent à stabiliser la ligne de front de la Baltique àl’Ukraine au prix de pertes énormes en hommes et en matériels(l’essentiel des 3 500 chars engagés est resté sur le terrain — 50 % dumatériel roulant est hors d’état de marche). Les divisions aériennes nedisposent plus que de 25 à 50 % de leurs appareils de combat. LaLuftwaffe se voit disputer la maîtrise du ciel avec la montée en ligne denouveaux chasseurs soviétiques (Mikoyan-Gourevitch MiG-1,Sturmovik « tueur de chars »). L'infanterie d'invasion ne parvient pas àmaintenir le contact avec ses fers de lance blindés sur de longuesdistances. Compte tenu de ses pertes et de l’étendue des espaces russes,l’armée allemande doit donc renoncer à la Blitzkrieg tout en devant faire face à un adversaire qui ne cesse de semoderniser. À ce moment, il apparaît que c’est à l’impréparation des armées soviétiques de juin 1941, à l’effet desurprise, que le Reich doit d’avoir évité de graves difficultés dans ses combats contre l'Armée rouge lors de l'invasionde juin 1941.

Pour l'Allemagne, si déjà les pertes avaient été lourdes pendant la bataille de France avec près de 1 500 tués par jourdu 10 mai au 22 juin 1940, c’est en Union soviétique que la Seconde Guerre mondiale commence vraiment, avec unecampagne qui du 22 juin 1941 au 22 janvier 1942 voit tomber en moyenne 3 200 soldats allemands par jour. Alorsque pendant les deux premières années de la guerre (1939 et 1940), 1 253 officiers « seulement » étaient morts aucombat, entre juin 1941 et mars 1942 ; 15 000 officiers furent tués, ce qui indique un changement radical dansl’évolution des pertes[15]. Au cours des six premiers mois de l’invasion, les pertes de l’Ostheer (la Wehrmacht sur lefront de l'Est) s’élevèrent à 750 000 hommes, qui furent portées à un million à la fin de mars 1942, dont plus d’untiers de tués ou de disparus. Au total, lors de la première année de la campagne contre l'URSS, le Reich perd 1,3million d’hommes, sans compter les malades, soit 40 % des 3,2 millions d’hommes de l’Ostheer. Le manque générald’hommes dans le Reich ne permet pas d’assurer les remplacements à une pareille échelle.

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Sonderkraftfahrzeug 251 se concentrant dans lessteppes sud de la Russie le 21 juin 1942, à la

veille de l'opération Fall Blau, l'offensiveallemande de l'été 1942.

À la fin de 1941, la Wehrmacht s’est enfoncée de 800 km en Unionsoviétique et a conquis plus de 1 500 000 km2 de territoire soviétique,comptant 65 millions d’habitants (17 millions de personnes sontparvenues à fuir). En 1942, la longueur du front russe, de la Finlandeau Caucase, passe à 6 200 km. L’Allemagne occupe alors l’Ukraine, laBiélorussie, une grande partie du nord de la Russie, soit plus de lamoitié de la Russie d’Europe (qui concentre 80 % des industrieslourdes et de la population), acculant les Russes sur des zones moinspeuplées et les privant d’une grande partie de leur potentieléconomique (de 60 à 70 %). Mais le Reich a perdu ses meilleurestroupes.

Les pertes de l’Armée rouge sont colossales : 1,5 million de tués, 4millions de prisonniers dont 2 millions au moins seront anéantis. Fin1941, les Allemands estiment avoir détruit plus de 20 000 blindés et35 000 canons soviétiques.

L'Union soviétique en guerre totale

C’est pourtant à ce moment que la société soviétique se lance dans unemobilisation de ses forces et de ses ressources, totale et éperdue, dansle cadre d'une économie de guerre d'une extrême rigueur. Le 3septembre 1941, le pouvoir soviétique décrète la mobilisation de tous les hommes de plus de 18 ans. Dès l’automne1941, plus de 2 000 groupes de partisans se constituent en territoire occupé. « Tout pour le front ! Tout pour lavictoire ! », « Encore plus d’armes pour le front » deviennent les slogans dans les usines. Les bureaux de recrutementde l’Armée rouge sont submergés par les volontaires désireux de se battre pour « la défense du sol natal ». Denombreuses jeunes filles s’engagent dans l’Armée rouge (de 1941 à 1945 plus de 800 000 femmes ont combattucomme volontaires sur le front). La journée de travail monte à 12 heures par jour, voire davantage. Les décès parépuisement au travail ne sont pas rares dans les usines. La législation, déjà très dure, du 26 juin 1940 est encoreaggravée par la loi du 26 décembre 1941, qui assimile tout changement de travail non autorisé, tout départ ou touteabsence injustifiée à une désertion, passible des tribunaux militaires et sanctionnée d’une peine de 5 à 10 ans decamp (plus de 900 000 personnes furent condamnées en vertu de la loi du 26 décembre 1941). Un décret de février1942 instaure la mobilisation totale des femmes âgées de 15 à 45 ans, femmes dont la part dans la main-d’œuvreindustrielle passa de 37 à 60 % entre 1941 et 1945 (alors que Hitler était réticent à faire travailler les femmesallemandes dans les usines d'armement).

Entre juillet 1941 et janvier 1942, en Russie d’Europe, 17 millions de personnes participent dans des conditions exténuantes au démontage et au transfert de plus de 1 500 grandes entreprises industrielles dans l’Oural, la Volga, l’Asie centrale (Kazakhstan surtout) et la Sibérie ; transfert nécessitant la construction en quelques mois de plus de 10 000 km de voies ferrées. Plus de 2 600 usines auront été évacuées et reconverties dans l’industrie de guerre. Leur remise en route, en plein hiver, n’exigera pas un effort moins gigantesque. Au terme d’opérations titanesques d’une grande complexité logistique, plus de 10 millions d’ouvriers prennent le chemin de l’Oural et, dès le début de 1942, après cet effort pharaonique dont il n’existe aucun équivalent dans l’histoire industrielle de l’Europe, la production de guerre est remontée à 48 % de son niveau de 1940. Alors qu’en 1940, 358 chars de dernier modèle avaient été construits, au cours des six premiers mois de 1941 seulement leur nombre s’éleva à 1 503 et dans les six derniers mois de cette année-là, malgré l’occupation par les Allemands du cœur industriel de l'Union soviétique, 4 740 chars dernier modèle supplémentaires furent produits. Dès la fin de 1942, l'URSS dépasse l’Allemagne dans sa production d’armements alors que la Wehrmacht occupe plus de 50 % de la partie européenne du territoire soviétique. La

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production de blindés et d’avions est alors le double (50 000) de la production allemande, en 1944 celle de canonsusinés est trois fois supérieure (122 000). Par ailleurs, depuis le 7 décembre 1941, l'Union soviétique pouvaitcompter sur l'aide américaine.

Interprétations historiographiquesL'opération Barbarossa se solde, fin 1941/début 1942, par une défaite stratégique considérable pour l'Allemagnepuisqu'il apparaît, dès ce moment, que le Troisième Reich n'avait peut-être pas les moyens de vaincre l'Unionsoviétique en juin 1941. En mai 1945, les fantassins soviétiques planteront leur drapeau au sommet du Reichstag, auterme d'une bataille de Berlin, qui fera 78 000 tués dans leurs rangs.Le général Volkogonov, biographe de Staline, pouvait écrire en 1996 : « Il serait difficile de trouver pire début à uneguerre que ce mois de juin 1941. Toutes les autorités politiques et militaires majeures ont pensé que l'URSS nepourrait pas survivre plus de trois mois. Mais le peuple soviétique leur a finalement donné tort. Pourtant, le mérite decette incroyable capacité de résistance allait être attribué à la “sage direction” de Staline, la personne même la plusdirectement responsable de la catastrophe[108]. » Et Stepan Mikoyan de préciser : « Nous avons gagné la guerre endépit de la dictature de Staline[64]. »

Notes et références[1] http:/ / fr. wikipedia. org/ w/ index. php?title=Op%C3%A9ration_Barbarossa& action=edit& section=0[2] On notera aussi une autre date : le 22 juin 1812, Napoléon entamait la Campagne de Russie.[3] Omer Bartov, L’Armée d’Hitler, Hachette Littératures, 1999.[4] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[5] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[6] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[7] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[8] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[9] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[10] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[11] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[12] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[13] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[14] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[15] Omer Bartov. L’Armée d’Hitler. Hachette Littératures. 1999.[16] C. R. Browning, Les origines de la Solution finale, .[17] J. Mosse, De la Grande Guerre au totalitarisme : la brutalisation des sociétés occidentales, Hachette Littérature, 1999, éd. Françaises, .[18] C. R. Browning, Les origines de la Solution finale, .[19] Cité par Browning, Les origines de la Solution finale, .[20] C. R. Browning, Les origines de la Solution finale, .[21] Pierre Ayçoberry, La société allemande sous le Reich, .[22] C. R. Browning, Les origines de la Solution finale, .[23] Saul Friedlander, Les Années d'extermination, .[24] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de Dupes, .[25] G. Gorodetsky, Le Grand Jeu de Dupes, .[26] C. R. Browning, Les Origines de la Solution finale, .[27] C. R. Browning, Les Origines de la Solution finale, .[28] C. R. Browning, Les Origines de la Solution finale, .[29] Hitler a mené des réunions secrètes avec des gradés de l'armée dès juillet 1940 à ce sujet ; le chef d'état-major Franz Halder, passé dans le

camp américain après le conflit, l'a évoqué dans ses mémoires.[30] R. Breitamnn, L'Architecte de la solution finale, .[31] R. Breitamnn, L'Architecte de la solution finale, .[32] Un dernier round diplomatique a tourné court le 24 novembre 1940 concernant les .[33][33] H.R. Trevor-Roper. Hitler's War Directives. 1939-1945. .[34][34] H.R. Trevor-Roper. Hitler's War Directives. 1939-1945. 150.[35] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[36] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .

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[37] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, et 497.[38] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[39] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[40] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[41] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[42] C. R. Browning, Les Origines de la Solution Finale, .[43] C. R. Browning, Les Origines de la Solution Finale, .[44] C. R. Browning, Les Origines de la Solution Finale, .[45] C. R. Browning, Les Origines de la Solution Finale, .[46] C. R. Browning, Les Origines de la Solution Finale, .[47] Rapporté par C. R. Browning, Les Origines de la Solution Finale, .[48][48] C.Baechler, Guerres et exterminations à l'Est,[49][49] C.Baechler, Guerres et exterminations à l'Est,[50] G.Gorodetsky, Le grand jeu de Dupes, .[51][51] C.Baechler, Guerres et exterminations à l'Est,[52][52] C.Baechler, Guerres et exterminations à l'Est,[53][53] C.Baechler, Guerres et exterminations à l'Est,[54][54] C.Baechler, Guerres et exterminations à l'Est,[55][55] Aly, Comment Hitler a acheté les Allemands, .[56][56] Aly, Comment Hitler a acheté les Allemands, .[57] Michael jabara Carley, 1939: the alliance that never was and the coming of world war II,[58] Michael jabara Carley, 1939: the alliance that never was and the coming of world war II,[59] Cité dans Staline, histoire et légende d'une critique noire, Domenico Losurdo, .[60] Selon Zinoviev, ce fut même in fine un facteur déterminant de la victoire. Voir Le Héros de notre jeunesse, éditions l'Âge d'Homme, ou[61] Stalin, The Court of the Red Tsar, Simon Sebag Montefiore, Phoenix, 2004 ; chap. 31, 32[62] Vassili Grossman, Carnets de guerre. Calmann-Lévy. 2007.[63][63] Jerrold L. Schecter et Vyacheslav V. Luchkov, Khrushchev Remembers: The Glasnost Tapes[64][64] Stepan Mikoyan, Memoirs of Military Test-Flying and Life with the Kremlin's Elite[65] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[66] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[67][67] Jacques Sapir. La défaite française de 1940 vue par les Soviétiques. 2002[68] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[69] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[70] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[71] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[72] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[73] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[74] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[75] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[76] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[77] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[78] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[79] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[80] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[81] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[82] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[83] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[84] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[85] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[86] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[87] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[88] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[89] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[90] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de dupes, .[91][91] Omer Bartov, l'Armée d'Hitler, .[92] Anthony Beevor (op. Cit.), chapitre 2 évoque le chiffre de 600 000 chevaux, et précise que les unité du train n'allaient pas plus vite que

Napoléon pendant la campagne de Russie.[93][93] Pierre Ayçoberry, La société allemande sous le Reich, .

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[94] Basil Henry Liddell Hart, (1951 [1999]). The other side of the hill: Germany's generals, their rise and fall, with their own account of militaryevents, 1939–1945, London: Cassell.

[95][95] Dmitri Volkogonov. Stalin: Triumph and Tragedy. Prima Pub. juin 1996.[96] Les grandes batailles de l'Histoire : La bataille de Moscou, Henri de Turenne et Jean Louis Guillot, 10m04s.[97] La bataille de Moscou, Les grandes batailles de l'Histoire, Henri de Turenne et Jean Louis Guillot, 12m30s.[98] C.R.Browning, Les Origines de la solution finale, .[99] P.Masson, Histoire de l'Armée allemande, .[100] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de Dupes, .555.[101] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de Dupes, .[102] G.Gorodetsky, Le Grand Jeu de Dupes, .[103] Voir URSS de Staline[104][104] Andrew Nagorski. La bataille de Moscou[105] Soldats malgré eux - ARTE (http:/ / www. arte. tv/ fr/ recherche/ 621860. html)[106] C. R. Browning, Les Origines de la Solution finale, .[107] C. R. Browning, Les Origines de la Solution finale, .[108] Dmitri Volkogonov, Stalin: Triumph and Tragedy

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Sources et contributeurs de l’article 29

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