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Dans un monde qui change, repenser la « culture scientifique et technique » dans une perspective « d'éducation populaire » Olivier Las Vergnas, intervention au colloque organisé à l’occasion des 50 ans de Planète-Sciences, 2012, Paris. http://enviedesavoir.org

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Dans un monde qui change,

repenser la « culture

scientifique et technique »

dans une perspective

« d'éducation populaire »

Olivier Las Vergnas, intervention au colloque organisé

à l’occasion des 50 ans de Planète-Sciences, 2012, Paris. http://enviedesavoir.org

1970 ---- 1980 ---- 1990 ------------------------ 2000 ------------- 2010

Répétition des discours sur la nécessité de développer la culture scientifique

du plus grand nombre

Pourquoi ces discours de “culture

scientifique et technique” se

répetent-ils depuis trois décennies

sans réel effet macroscopique ?

C1 : Causes à l’échelle

individuelle dont le

caractère systématique

produit des effets à

l’échelle de la société

toute entière

C3 : Causes liées à

l’organisation du système

socio éducatif ou culturel

dans son ensemble

C2 : Causes

sémantiques inhérentes

aux ambigüités des

discours sur la CST

Répétition des discours de déploration d’une

désaffection et de prescription du développement

de la CST

Causes possibles à

la répétition des

discours

Exemple : les sciences sont

trop ardues pour que des non

spécialistes s’y intéressent

Exemple : il est impossible de

déterminer à quelle définition de

« scientifique et technique » ces

discours font référence

Exemple : c’est le système

éducatif qui dégoute des

sciences la majorité des

élèves

Les 5 modalités des actions de CSTI

1. Découverte

scientifique pratique

pour tous les jeunes

3.

« Vulgarisation »

ou dialogue dans

le respect des

catégories

2.

Encouragement

des vocations

4. Appropriation de

savoir en transgression

des catégories

5. Développement des

savoirs des scientifiques

Trois obstacles principaux aux appropriation de “savoirs scientifiques” post catégorisation :

• Un obstacle COGNITIF epistémologique (Bachelard, 1938)

• Un nouvel obstacle CONATIF (motivationel) = Prophétie auto-réalisatrice d’etre incapable ?

• Un nouvel obstacle SCHOLASTIQUE (la science du quotidien ne ressemble pas à la science scolaire)

Approfondir = travailler sur

allégeance ou transgression

• Le champ des actions de la CST pour adultes

peut alors s’analyser en deux familles.

• La première organise le dialogue entre

scientifiques et “profanes”, sans remettre en

cause ce clivage.

• La seconde favorise l’appropriation de savoirs et

de méthodes qui transgressent la catégorisation

scolaire scientifique/non scientifique.

Trois premieres familles d’adultes

potentiellement transgressifs vis à vis de la

catégorisation et des “savoirs scientifiques”

1. Geeks, scientifiques “amateurs” et clubs de sciences ou technos

2. Malades chroniques pratiquant leur autoclinique

3. Les acteurs de situations d’”épidémiologie populaire” (Ph. Brown) et autres investigateurs militants

caractérisation de la scientificité

des savoirs issus des malades :

croisement de leur prédictivité et du niveau de partage

Communauté

scientifique

Hypothèse scientifique à vérifier Savoirs dits

scientifiques

Quelques

soignants Hypothèse locale à vérifier Retours d’expérience

Groupe d’entrai

de mutuelle Ensemble des

croyances

profanes

Savoirs dits profanes Quelques

proches/pairs

Soi-même Savoirs

personnels

Souvent

pertinents

Toujours

pertinents

Réfutables et jamais

réfutés

Pertinence en prédictivité

Niveau

De

Partage

Approche par les Manifestations d’intérêt scientifique

ou technologique (MIST)

et la culture vécue / culture prescrite

Une difficulté

à la mise en œuvre

• donner un sens précis du point de vue des apprenants à des savoirs « liés aux sciences » ou à des "MIST" :

• éviter l’autoréférence créée par le fait que ces termes

• n'ont de sens que par référence à des représentations sociales qui elles-mêmes viennent très largement des souvenirs scolaires complétés par la mise en scène que proposent les médias.

pour éviter cette auto-référence,

il faut recentrer sur la

description des effets de la

catégorisation scolaire comme

« non scientifique »

La plupart des systèmes éducatifs nationaux catégorisent les élèves dès la fin des études secondaires, définissant en particulier une catégorie de « scientifiques ». C'est le cas du système français

qui délivre chaque année un bac intitulé « scientifique » à ¼ de chaque classe d’âge.

Nous travaillons en particulier à étudier les conséquences de cette catégorisation sur les rapports aux savoirs des adultes

1. Chercher les effets de cette catégorisation sur les personnes non

diplômées comme scientifiques autant en termes de sentiment

d'efficacité personnelle qu'en termes de

représentation de ce qui est qualifiable de

"scientifique"

2. préciser les effets de cette catégorisation scolaire sur les

représentations individuelles ou

sociales du caractère

« scientifique ».

3. travailler sur les dispositifs dits de CST au regard de cette catégorisation scolaire.

Pour ce qui concerne les adultes non scientifiques, ils peuvent :

- viser à limiter des effets secondaires négatifs de cette catégorisation scolaire (en

terme d'image des activités des scientifiques) en organisant le dialogue

entre les scientifiques et les autres

- viser à réduire la catégorisation elle-même, en favorisant des acquisitions de

savoirs, transgressant cette catégorisation et les éventuelles prophéties associées de

ne pas être capable d'apprendre.

Les représentations du "contraire de scientifique" ne se résument donc pas, pour ces non scientifiques, à une simple opposition duale entre sciences et lettres.

Elles se situent sur des registres d'une toute autre nature par ailleurs très clivés les uns par rapport aux autres.

Le contraire de « scientifique » c’est :

• 1. La croyance aveugle, la pensée magique

• 2. L'émotion, l'intuition, le sensoriel

• 3. L'action sans la réflexion

Différentes conceptions du caractère

scientifique selon John Durant (1996)

C : le caractère scientifique

est lié à un corpus de

connaissances

S : le caractère scientifique est

lié à un système socio-

économique de production

d’innovations

M : le caractère

scientifique est lié à

l’application des méthodes

inducto-hypothético-

déductives

Evolution de la conception du caractère

scientifique par Camille (entretien n°4)

Corpus

Système Méthode

(1) Diplôme /

(2) Métier

(10/4) Etat d’esprit

rationnel

(11) Méthode

expérimentale

(9) Maths/

Chiffres

OUI, la

catégorisation

a un sens

NON, la catégorisation n’a pas de sens

Entretien n°4 Camille

1

2

3

4

5

(3) Travailler sur les dispositifs dits de CST au regard de cette

catégorisation scolaire

• Pour ce qui concerne les adultes non scientifiques, les dispositifs dits de CST peuvent viser à

• Limiter des effets secondaires négatifs de cette catégorisation scolaire (en terme d'image des activités des scientifiques) en organisant le dialogue entre les scientifiques et les autres

• Réduire la catégorisation elle-même, en favorisant des acquisitions de savoirs, transgressant cette catégorisation et les éventuelles prophéties associées de ne pas être capable d'apprendre.

Les acteurs de « la science pour tous » ne

devraient-il pas être avant tout dénoncer la

catégorisation ? La déclarer vétuste en

arguant que le caractère « scientifique » ne

devrait pas être vu comme une catégorie

scolaire, mais comme une composante de

toutes les qualifications professionnelles et

une perspective appropriables par toutes et

tous les citoyens ?

S’opposer à la fabrication d’un

« genre scientifique »

• Pour cela, la feuille de route des acteurs de

l’éducation populaire ne devrait-elle pas être

d’utiliser la qualification de “scientifique” comme

une perspective accessible à toutes et tous

• et non seulement comme désignant une

catégorie spécifique de personnes, les

scientifiques,

• vus comme les détenteurs du pouvoir des

méthodes scientifiques et de “l’esprit

scientifique”, a contrario des hommes de la rue ?

Une feuille de route pour

l’éducation populaire

La CSTI, une prophétie sociale auto-

référente et auto réalisatrice ?

Qui déterminerait la représentation

sociale de la science plutôt que gérer des

rapports aux sciences

Différentes conceptions de l’activité

scientifique selon Derek Price (1963)

C : le caractère scientifique

est lié à un corpus de

connaissances

BIG

SCIENCE : liée à

un système socio-économique

de production d’innovations

LITTLE

SCIENCE : le

caractère scientifique est lié

à l’application des

méthodes inducto-

hypothético-déductives IMPURE

SCIENCE (Epstein, 1996)

En résumé (1/3) : • le terme de « scientifique » ne doit plus être réservé à

désigner que des personnes spécialisées ; le

qualificatif de scientifique désigne aussi un regard,

une perspective sur le monde que tout le monde

doit pouvoir s’approprier, qui concerne tous les

métiers, et potentiellement toutes les facettes de la vie

de chacun. L’éducation populaire en particulier doit se

battre pour cela et non seulement pour un dialogue

science = chercheurs / société = profanes.

• Nous disons qu’il existe encore une science à petite

échelle dont il faut refuser la destruction.

En résumé (2/3) :

• Comme chercheur et comme praticien, nous

pouvons regarder si ce que font les acteurs de

l’éducation populaire ou de la CSTI va dans le

sens de la catégorisation disciplinaire et scolaire

(scientifique = recherche mondialisée) ou dans

le sens du regard sur le monde.

• On peut dire cela d’autant plus facilement que

tout le monde s’accorde désormais sur le fait

que le mythe de la « désaffection des filières de

la recherche scientifique » est dépassé.

En résumé (3/3) :

• Si à l’origine, une association comme Planète

Sciences avait notamment pour objet de

détecter les élites et de sélectionner des

scientifiques, le contexte 50 ans plus tard nous

oblige à penser à un nouvel objectif de

refondation de l’action associative.

• Si l’on est d’accord sur cette affirmation, il reste

à se mettre d’accord sur la feuille de route qui

m’apparaît assez claire.

• Ce qui est vital pour l’éduc pop c’est de s’allier

pour reconstruire et faire vivre la petite science

populaire.

Merci de votre écoute.

Et si nous confrontions nos

visions sur ces questions ?

Pour poursuivre : http://enviedesavoir.org