Observatoire des multinationales : La majorité des grandes entreprises européennes mises en cause...

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La majorité des grandes entrepriseseuropéennes mises en cause dans desviolations de droits humains

Par Yvan du Roy sur Observatoire des Multinationales La majorité des grandes entreprises allemandes, britanniques et françaises se sont trouvées misesen cause dans des atteintes présumées aux droits humains ces dernières années. C’est ce queconstate une étude publiée le 21 octobre par une coalition européenne d’organisationsindépendantes, European Coalition for Corporate Justice, qui travaille sur les responsabilitéssociales et environnementales des entreprises.

L’European Coalition for Corporate Justice, basée à Bruxelles, regroupe des grandes ONG commeAmnesty International ou Greenpeace, ainsi que des coalitions nationales consacrées à la questiondu pouvoir et de la responsabilité des entreprises, comme en France le Forum citoyen pour la RSE.

L’étude s’appuie sur une revue de presse au long cours [1] : des dizaines d’articles et rapportsimpliquant des grandes entreprises dans des atteintes aux droits humains ont été recensés pendanthuit ans, de 2005 à 2013. Cette revue de presse s’est concentrée sur les trois premières économieseuropéennes et leurs grandes multinationales cotées : celles du CAC 40 en France, du DAX 30 enAllemagne et du FTSE 100 à Londres. Les auteurs de l’étude précisent bien qu’il ne s’agit pasforcément de violations des droits humains juridiquement avérées (ce qui serait extrêmementdifficile en matière d’atteintes aux droits humains causées par des multinationales, pour les raisonsexposées ici), mais d’un recueil d’allégations sérieuses, dont certaines « ont été vigoureusement niéepar les sociétés concernées ». D’un autre côté, la liste laisse certainement de côté un certain nombrede cas de violations de droits humains qui n’ont pas été rendus publics dans un média couvert par larevue de presse, qui n’est pas exhaustive. Cette étude quantitative dresse cependant une premièrephotographie de cet épineux sujet.

Les entreprises allemandes, comme Adidas, Bayer ou Siemens, sont les plus nombreuses à êtrecitées : 77% des entreprises cotées à la Bourse de Francfort sont ainsi mises en cause dans desatteintes présumées aux droits humains (soit 23 compagnies sur 30). Les Françaises suivent, avec65% des sociétés du CAC 40 (24 compagnies sur 37) ciblées par des accusations, puis lesBritanniques avec 51% de leurs multinationales cotées (43 compagnies sur 84), telles la banquesBarclays, British American Tobacco ou Mark &Spencer.

La finance aussi concernée que l’énergie et les minesDu point de vue du secteur d’activités, ce sont les activités liées aux ressources naturelles (mines,énergie) et aux biens de consommation (agroalimentaire, textile, électronique) qui, sans surpriseparaissent les plus prônes à occasionner des atteintes aux droits humains. L’autre cible principaledes médias et des ONG n’est autre que le secteur financier : 4 entreprises sur 5 en Allemagne, 4 sur

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4 en France et 9 sur 15 au Royaume-Uni.

Au vu de ces résultats peu encourageants, les auteurs de l’étude rappellent « l’urgence » pourl’Union européenne et ses États membres « à veiller à ce que les entreprises s’acquittenteffectivement de leur devoir » en matière de responsabilité sociétale et « à lever les obstacles àl’accès à la justice des victimes d’abus ».« Une question qui a été largement ignorée jusqu’àprésent », souligne le document.

Les deux tiers des entreprises du CAC 40 concernéesCôté CAC 40, les entreprises françaises les plus souvent citées sont Total, Sanofi, ArcelorMittal etBNP Paribas. Total a par exemple été accusé en mars 2013 d’avoir détruit des fermes et des culturesen Ouganda, lors d’une opération de prospection pétrolière à proximité d’un village de pêcheurs aubord du lac Albert (à la frontière avec la République démocratique du Congo). Autre exemple : ennovembre 2011, un article du quotidien britannique The Independant met en cause Sanofi – etd’autres compagnies pharmaceutiques occidentales – qui auraient financé des essais cliniquespratiqués sur des patients indiens, survivants de la catastrophe de Bophal, au sein du BhopalMemorial Hospital. Ces essais cliniques n’auraient pas respecté les standards internationaux etauraient provoqué la mort de plusieurs dizaines de patients.

Enfin, dernière illustration, BNP Paribas et sa filiale états-unienne Bank of West, ont été pointées dudoigt en juin 2012 pour avoir financé des industriels de l’armement produisant des armes à sous-munitions – ces missiles et bombes qui dispersent des explosifs ou des mines sur plusieurs centainesde mètres. Du fait de leur extrême dangerosité pour les populations civiles, ces armes sont interditesdepuis 2010 par une convention internationale, ratifiée par la France… Selon les principesdirecteurs de l’Onu de 2011, partagés par l’Union européenne,« les entreprises ont la responsabilitéd’identifier, de prévenir et d’atténuer les effets négatifs éventuels de leurs activités », rappellel’étude. Encore une obligation trop contraignante pour les entreprises ?

Pour accéder au rapport de l’European Coalition for Corporate Justice.

Ivan du Roy

[1] Celle qui est réalisée par le Centre de ressources sur les entreprises et les droits humains, basé àLondres. Voir leur site.

Source: Observatoire des Multinationales