OBESITE DE L’ADULTE : DIAGNOSTIC, ENJEUX ET PRISE EN CHARGE Pr...

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1 OBESITE DE L’ADULTE : DIAGNOSTIC, ENJEUX ET PRISE EN CHARGE Pr J.L. Schlienger Service de Médecine Interne, Endocrinologie, Nutrition Hôpital de Hautepierre Ojectifs pédagogiques - comprendre les mécanismes physio-pathologiques de l’obésité, les enjeux de santé publique (complications) - savoir proposer un traitement hygiéno-diététique et discuter d’une éventuelle indication chirurgicale - savoir accompagner au long cours un obèse I. INTRODUCTION L’obésité est une maladie chronique, multifactorielle, de plus en plus fréquente chez l’adulte et l’enfant. A tel point qu’elle est reconnue grande cause nationale en 2011 de par son impact en santé publique. Elle est définie par une augmentation de la masse grasse résultant d’un défaut de régulation de l’équilibre énergétique. Il s’agit d’une maladie à part entière qui altère la qualité de vie et entraîne des complications somatiques, psychologiques et sociales. Sa prise en charge, difficile, doit s’inscrire dans la durée. Le médecin de famille est en première ligne pour la prévenir et la traiter. 1. Epidémiologie Les pays industrialisés connaissent tous une forte progression de l’obésité. Dans l’Union Européenne on estime que 35,9 % des adultes sont en surpoids et que 17,2 % sont obèses. En France la prévalence de l’obésité des adultes est passée de 8,6 % en 1997 à 14,5 % en 2009. Parallèlement à l’augmentation de la prévalence de l’obésité, il y a eu une augmentation du tour de taille (+ 4,3 cm en 13 ans). Figure 1 : évolution de l’obésité en France (enquête ObEpi)

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OBESITE DE L’ADULTE : DIAGNOSTIC, ENJEUX ET PRISE EN CHARGE

Pr J.L. Schlienger Service de Médecine Interne, Endocrinologie, Nutrition

Hôpital de Hautepierre

Ojectifs pédagogiques

- comprendre les mécanismes physio-pathologiques de l’obésité, les enjeux de santé publique (complications)

- savoir proposer un traitement hygiéno-diététique et discuter d’une éventuelle indication chirurgicale

- savoir accompagner au long cours un obèse

I. INTRODUCTION

L’obésité est une maladie chronique, multifactorielle, de plus en plus fréquente chez l’adulte et l’enfant. A tel point qu’elle est reconnue grande cause nationale en 2011 de par son impact en santé publique. Elle est définie par une augmentation de la masse grasse résultant d’un défaut de régulation de l’équilibre énergétique. Il s’agit d’une maladie à part entière qui altère la qualité de vie et entraîne des complications somatiques, psychologiques et sociales. Sa prise en charge, difficile, doit s’inscrire dans la durée. Le médecin de famille est en première ligne pour la prévenir et la traiter.

1. Epidémiologie

Les pays industrialisés connaissent tous une forte progression de l’obésité. Dans l’Union Européenne on estime que 35,9 % des adultes sont en surpoids et que 17,2 % sont obèses.

En France la prévalence de l’obésité des adultes est passée de 8,6 % en 1997 à 14,5 % en 2009. Parallèlement à l’augmentation de la prévalence de l’obésité, il y a eu une augmentation du tour de taille (+ 4,3 cm en 13 ans).

Figure 1 : évolution de l’obésité en France (enquête ObEpi)

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L’augmentation de l’obésité touche tous les milieux sociaux, mais les écarts se sont creusés entre agriculteurs, catégorie la plus touchée par l’obésité, les cadres et les professions intellectuelles supérieures, les moins touchés. Le niveau d’étude et le niveau de revenus influencent le risque d’obésité qui devient peu à peu un marqueur de faible niveau de vie.

Encadré 1

2. Mécanismes physiopathologiques et déterminants environnementaux

L’obésité témoigne d’une inflation des réserves énergétiques résultant d’un déséquilibre entre les apports et les dépenses énergétiques. Le métabolisme de repos représente 60 à 80 % des dépenses énergétiques des 24 heures. La thermogénèse alimentaire représente en moyenne 10 % des dépenses énergétiques quotidiennes. L’activité physique est extrêmement variable d’une personne à l’autre et d’un moment à l’autre.

Les facteurs susceptibles de prendre en défaut le système de régulation s’inscrivent dans une échelle de causalité qui va de l’anomalie d’un seul gène (exceptionnelle obésité monogénique) à des formes purement comportementales.

a) Aspects génétiques

Il existe une agrégation familiale de l’obésité sous-tendue par des interactions gène-environnement. Ainsi, la probabilité pour un enfant de devenir obèse varie de 10 à 70 % selon la présence ou l’absence d’obésité chez les parents. Le fait que pour un même excès d’apports énergétique, la prise de poids varie considérablement d’une personne à l’autre traduit la part de l’inné… Après ajustement sur le poids, la taille, l’âge et le sexe, les dépenses énergétiques de repos varient de ± 400 kcal/jour d’une famille à l’autre. Il existe également une ressemblance intra-familiale pour les capacités d’oxydation lipidique, les comportements sociaux-culturels, alimentaires et le niveau d’activité physique.

L’obésité monogénique est exceptionnelle. Très sévère, elle apparait dès les premières semaines de vie. Les formes polygéniques correspondent à l’obésité commune. De nombreux variants et de nombreux gènes sont concernés mais l’effet individuel de chaque variant est faible et s’exprime à la faveur d’un environnement permissif.

b) Déterminants environnementaux

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Les modifications des habitudes de vie liées aux changements de l’environnement contribuent à modifier l’équilibre énergétique au profit de l’augmentation des réserves énergétiques et du poids.

Un comportement sédentaire et/ou une diminution de l’activité physique entraînent une diminution des dépenses énergétiques des 24 heures. Les activités quotidiennes telles que la marche ou la pratique de la bicyclette pour rejoindre le lieu de travail sont inversement associées au gain de poids.

Les apports énergétiques, tant quantitatifs que qualitatifs, sont un déterminant essentiel de la régulation pondérale. La disponibilité des aliments, l’augmentation de la taille des portions et de leur densité énergétique (contenu calorique par gramme d’aliment ingéré) favorisent l’augmentation des apports énergétiques. La teneur en graisses et en eau des aliments conditionne la densité énergétique de l’alimentation.

Déterminants psychologiques. Parfois les troubles psychologiques induisent une modification du comportement alimentaire favorisant la prise de poids. L’ingestion des aliments apparaît comme une réponse comportementale à un désordre affectif, une anxiété, une émotion. La restriction cognitive, définie par une tentative souvent non réussie de perdre du poids par une diminution des apports alimentaires, contribue à l’obésité via des épisodes de désinhibition alimentaire entrecoupant les phases de restriction. La restriction cognitive peut être à l’origine d’échecs thérapeutiques ou de troubles du comportement alimentaire (boulimie ou frénésie alimentaire).

Certain médicaments contribuent à une prise de poids ou aggravent une surcharge préexistante : insuline, des sulfamides hypoglycémiants, glitazones, corticoïdes, neuroleptiques…

Des facteurs socioculturels interagissent également avec le risque d’obésité.

3. Diagnostic et examen de l’obésité

L’IMC (en kg/m2) obtenu par division du poids corporel (kg) par la taille (m) au carré, est considéré comme la référence internationale pour le diagnostic positif de l’obésité dès lors que le résultat atteint ou dépasse 30 kg/m2.

Figure 2 : Définitions de l’obésité et risque associé

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L’interrogatoire reconstitue l’histoire pondérale du patient : âge de début de la prise de poids, évolution récente du poids (stabilité ou phase dynamique de prise ou de perte de poids), contexte familial. L’interrogatoire précise les circonstances favorisant la prise de poids : puberté, grossesses, ménopause, évènements de la vie familiale ou professionnelle, prise de médicaments, immobilisation prolongée, arrêt d’une pratique sportive ou sevrage tabagique sont autant de circonstances qui peuvent favoriser la prise de poids. Le retentissement psycho-social de l’obésité doit être évalué. Les traitements antérieurs à visée amaigrissante sont identifiés tout comme le niveau habituel d’activité physique.

Une enquête alimentaire par interrogatoire identifie les préférences et les travers alimentaires ainsi que les troubles du comportement alimentaires.

L’examen clinique. Il doit inclure la mesure du tour de taille qui définit l’obésité viscérale. L’évaluation du risque cardiovasculaire par la mesure du tour de taille est surtout importante dans les obésités de grade I. La pression artérielle sera mesurée idéalement avec un brassard adapté à la circonférence du bras. L’examen clinique est complété par la palpation de la thyroïde, la recherche de signes d’hypercorticisme (obésité facio-tronculaire, buffalo-neck, vergetures, hypertrichose, acné, érythrose du visage). Un acanthosis nigricans signe la présence d’une résistance marquée à l’insuline. La recherche de signe d’apnée du sommeil doit être systématique (ronflements, asthénie et céphalées matinales, agitation nocturne, nycturie, somnolence diurne, troubles de la mémoire et de la concentration).

Les examens complémentaires sont limités et ciblés : glycémie à jeun, bilan lipidique, transaminases, gamma-GT, uricémie, ionogramme sanguin, créatininémie et numération formule sanguine. La recherche d’une maladie endocrinienne est effectuée selon le contexte clinique tout comme la polygraphie ventilatoire nocturne, l’épreuve d’effort ou l’échographie hépatique.

Les complications de l’obésité. L’obésité est associée à une mortalité accrue et en particulier à une mortalité cardio-vasculaire.

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Tableau 1 : les complications de l’obésité

Ainsi, pour chaque augmentation de 5 kg/m2 de l’IMC la pression artérielle systolique augmente de 5,8 mmHg chez l’homme et de 5,2 mmHg chez la femme. Le HDL-cholestérol diminue (- 0,16 mmol/l chez l’homme) et le LDL-cholestérol augmente (+ 0,50 mmol/l chez l’homme). La prévalence du diabète est multipliée par 6 lorsque l’IMC progresse de 18 à 45 kg/m 2).

La mortalité cardiovasculaire est très nettement majorée par la prédominance viscérale de l’obésité. Tel est le cas également des autres complications métaboliques de l’obésité. Le tableau 1 résume les complications de l’obésité dont le traitement doit être intégré dans le projet thérapeutique global.

Le retentissement psychologique de l’obésité est fréquent : mauvaise estime de soi, sentiment d’échec personnel favorisant la dépression, perception d’une discrimination sociale et professionnelle, détérioration de la qualité de vie etc…

4. Approches thérapeutiques. Prévention

Le traitement de l’obésité s’inscrit dans la durée et va au-delà de la perte de poids. La prise en charge doit prendre en compte les dimensions psycho-sociales.

L’objectif thérapeutique initial est bien la perte de poids et doit être adapté à chaque cas en restant réaliste. Une perte de poids de 5 à 10 % du poids initial, souvent considéré comme insuffisante par les patients, s’accompagne d’une amélioration des facteurs de risque. La perte pondérale peut être précédée d’une étape de stabilisation pondérale quand l’évolution est marquée par une prise pondérale récente rapide. Des résistances métaboliques et psychologiques peuvent apparaître en cours d’amaigrissement et exposent à un rebond pondéral.

Le maintien de la perte de poids est un objectif fondamental et difficile à réaliser. Il suppose un changement comportemental.

Le traitement des complications. Nombre d’entre elles peuvent s’améliorer avec la perte de poids. Un traitement spécifique est proposé chaque fois que nécessaire.

Les moyens thérapeutiques. Les conseils alimentaires visant à diminuer les apports énergétiques sont primordiaux. Ils contribuent avec l’activité physique à induire la perte de poids. Les conseils

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doivent être adaptés aux habitudes et préférences alimentaires et doivent, au même titre que l’activité physique, s’inscrire dans des changements durables. La présence de troubles du comportement alimentaire est une cause importante de mise en échec des conseils diététiques. Ils nécessitent une prise en charge psycho-comportementale et une éducation nutritionnelle.

a) Diététique

Le succès de la prescription diététique dépend en pratique de 3 facteurs qui sont l’information du patient, la personnalisation du conseil et son accompagnement dans la durée.

La notion de régime est généralement associée à celle de contrainte et de restriction difficilement compatibles avec un changement durable des habitudes. Il est donc important d’expliquer au patient que la prescription diététique n’est pas synonyme de privation. Il est possible de consommer une quantité rassasiante d’aliments en réduisant la densité énergétique des aliments consommés.

Figure 3 : la notion de densité énergétique : les aliments les plus énergétiques sont les plus gras et les moins hydratés

Le plaisir de la table doit être maintenu et les occasions festives ne doivent pas être systématiquement refusées. Cette étape d’information permet au patient de s’approprier les conseils et le libère de l’anxiété, de la contrainte et le met en meilleure disposition pour la poursuite de l’entretien diététique.

La personnalisation des conseils s’appuie sur le recueil de trois types d’information.

L’analyse des habitudes alimentaires est nécessaire (enquête alimentaire, recueil des 24 heures ou semainier) et permet d’identifier les préférences alimentaires, les quantités, la nature et les quantités de boissons consommées et d’ingrédients utilisés (matières grasses ajoutées).

La connaissance du nombre de repas, la convivialité ou au contraire l’isolement, les activités associées à la prise du repas (lecture, radio, télévision…), les émotions et le plaisir associés à la prise alimentaire aideront à la personnalisation du conseil.

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L’adhésion du patient aux conseils prodigués dépend également de sa motivation. L’ambivalence est habituelle. Les craintes et les croyances devront être identifiées.

La réduction des apports caloriques est le point essentiel sans lequel une perte de poids ne peut être obtenue. Il n’existe pas de recette standard ni de régime miracle. Les conseils doivent aboutir à une consommation rassasiante d’aliments à faible densité énergétique. L’adhésion aux conseils diététiques est d’autant moins supportable à moyen ou long terme que les changements demandés s’éloignent des habitudes et comportements usuels.

Les conseils diététiques doivent contribuer à une perte de poids de qualité c’est-à-dire prédominant sur la masse grasse sans remettre en cause l’équilibre alimentaire. A cet égard, une attention particulière sera portée à la ration protéique et les conseils diététiques seront associés à des conseils portant sur l’activité physique. Des régimes très restrictifs sont envisageables en situation d’urgence ou semi-urgence et pour un temps très limité. Ils seront associés à une éducation diététique permettant un retour vers une alimentation diversifiée et équilibrée.

Comme pour toute prescription thérapeutique, l’efficacité et la tolérance des conseils diététiques doivent être évaluées. Ceci justifie des rencontres régulières entre le thérapeute et le patient. Ces rencontres permettront de renforcer ou d’entretenir les motivations du patient et d’identifier les difficultés pratiques, les déviances éventuelles et les conséquences psychiques. Une phase de découragement survient fréquemment lors de l’arrêt de la perte de poids. Cette phase de stabilisation est rassurante pour le thérapeute témoignant que les mécanismes d’adaptation à la perte de poids sont opérants. En revanche, cette stabilisation génère chez le patient un sentiment d’échec relatif, le conduisant à penser qu’il est inutile de poursuivre ses efforts. L’accompagnement dans la durée permettra de lever les doutes et de résoudre les difficultés.

5. Les différents types de régimes

Recommandations générales pour la prise en charge diététiques de l’obésité

Saufs régimes particuliers, il est souhaitable d’éviter l’interdit et de préconiser la consommation quotidienne de chacune des grandes catégories d’aliments. La réduction de la taille des portions et la substitution par des aliments à densité énergétique réduite (plus de fruits, légumes, céréales complètes et aliments pauvres en lipides) sont les deux piliers des régimes. Une alimentation monotone augmente le risque de déséquilibre nutritionnel et diminue l’observance.

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Différents régimes restrictifs

Il est recommandé de réduire les apports caloriques au 2/3 des dépenses énergétiques totales soit 500 à 700 kcal/jour. Cette diminution entraine en général une perte de poids de l’ordre de 0,5 à 1 kg par semaine.

Régime hypocalorique dit équilibré

La diminution des apports concerne l’ensemble des macronutriments en respectant la répartition habituelle : glucides 45 à 65 %, lipides 20 à 35 %, protéines 10 à 35 %. Les régimes les pus populaires proposent des répartitions délibérément déséquilibrées. La question de savoir si à déficit énergétique identique, il y a intérêt à réduire plus les glucides que les lipides ou inversement reste débattue.

Régime hypocalorique hypoglucidiques

Les régimes pauvres en glucides et riches en lipides et protéines (type régime Atkins) apportent environ 20 g de glucides par jour à la phase initiale. Certains de ces régimes limitent la consommation d’aliments qui apportent des nutriments essentiels et ne réunissent pas la variété et la diversité alimentaire nécessaires pour couvrir les besoins nutritionnels. L’utilisation de ces régimes à long terme expose au risque d’apports inadéquats en micronutriments. Ces régimes pauvres en glucides entraînent une perte de poids rapide, au prix de l’exclusion d’aliments complets usuels (pain, riz, pâtes, pomme de terre, maïs, semoule…) et se focalisent sur une perte de poids à court terme.

Régime hypocalorique de type méditerranéen

Le régime méditerranéen se caractérise par une consommation importante de légumes et faible de viande. Les lipides n’excèdent pas 35 % des apports énergétiques et la source principale en est l’huile d’olive. Ce type de régime a démontré des bénéfices cardio-vasculaires.

Les régimes basses calories

Ils apportent entre 800 et 1200 kcal/jour soit des apports énergétiques situés en dessous des dépenses énergétiques de repos. Ils peuvent être confectionnés en tout ou partie à l’aide des aliments habituels ou faire appel à des substituts de repas mais l’utilisation des substituts de repas n’enseigne pas aux patients comment faire des choix diététiques pertinents. Il est essentiel de conseiller les patients sur les principes de la gestion de la ration calorique et de l’équilibre alimentaire.

Les régimes très basses calories (<800 kcal/j)

Qualifiés de « diète protéique » ces régimes ne doivent être utilisés que dans des situations exceptionnelles où une perte de poids rapide est recherchée et sous contrôle médical spécialisé pour une durée limitée. Du fait du risque de carence en macro et micronutriments ce type de régime expose au risque de dénutrition et de déminéralisation. Le risque de rebond pondéral est considérable et régulier lors de la levée de la restriction calorique.

6. Activité physique

La lutte contre la sédentarité constitue un levier thérapeutique à part entière et suppose un programme structuré (fréquence, durée et intensité) d’activité physique adapté aux possibilités du patient. L’activité physique est un élément du succès de la perte pondérale mais surtout de la prévention de la rechute à long terme et améliore l’estime de soi.

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7. Approche pharmacologique

Les médicaments devraient, comme dans toute maladie chronique, avoir une place de choix. Malheureusement il n’existe plus qu’un seul médicament disponible. En l’occurrence l’orlistat (Xenical®, Alli®), inhibiteur de la lipase pancréatique, a une efficacité limitée. Il provoque une réduction de la digestion et de l’absorption des graisses d’environ 20 %. Pour en limiter les effets secondaires (flatulences, diarrhée, fuites anales, stéatorrhée), il doit être associé à une alimentation à teneur réduire en matières grasses à la posologie d’une gélule de 120 mg/repas. Il est indiqué en cas d’obésité ou de surpoids (IMC >27) en cas de complications.

8. Approche psycho-comportementale

a) Le traitement psychologique a une place privilégiée tant sont fréquents les troubles de l’estime de soi, la détérioration de l’image corporelle et la dépression. Le rôle du thérapeute est d’identifier les besoins et d’accompagner le patient dans une démarche de prise en charge multidisciplinaire.

b) La thérapie cognitivo-comportementale sera proposée comme une aide à la gestion des comportements qui contribuent à la genèse sinon à l’entretien de l’obésité après une analyse fonctionnelle (analyse du comportement alimentaire, des facteurs déclenchants, du contexte de survenue, des émotions, de l’anxiété et des sentiments qui l’accompagnent). Elle repose sur des techniques de déconditionnement et de reconditionnement ainsi que des stratégies de renforcement de l’estime de soi.

9. Les cures de réduction pondérale

Les cures en établissements spécialisés offrent des prestations de reconditionnement à l’activité physique et d’éducation diététique. Ces cures n’ont pas d’intérêt si elles sont proposées de façon sporadique sans accompagnement préalable et sans suivi post-cure.

10. La chirurgie de l’obésité

La chirurgie bariatrique est une alternative thérapeutique qui a fait ses preuves dans le traitement de l’obésité morbide. Elle propose soit une réduction du volume gastrique (cerclage, gastrectomie verticale ou sleeve gastrectomie) soit une restriction-malabsorption (bypass).

Figure 4 : Les interventions les plus courantes

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Les indications répondent aux recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) de 2009 (tableaux 2 et 3)

Tableau 2 : Six conditions sont requises pour bénéficier de la chirurgie bariatrique

Tableau 3 : contre-indications à la chirurgie bariatrique

L’acte chirurgical n’est qu’une phase d’un projet thérapeutique global comportant une prise en charge multidisciplinaire hygiéno-diététique et psycho-comportementale. La surveillance post-opératoire, systématique et régulière, est obligatoire du fait des risques nutritionnels et psychologiques générés par les changements profonds des habitudes alimentaires et de l’image

corporelle. L’efficacité de la chirurgie bariatrique est variable. Les études à long terme (> 10 ans) ont

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montré l’efficacité du court circuit gastrique sur la perte pondérale, sur la qualité de vie, sur le contrôle des co-morbidités et sur la mortalité.

Prise en charge et suivi du patient après chirurgie bariatrique

Le suivi après chirurgie bariatrique a fait l’objet de recommandation spécifique par la HAS en 2009. Il doit s’intégrer dans un programme personnalisé mis en place dès la phase préopératoire. Il est assuré par l’équipe pluridisciplinaire qui a posé l’indication opératoire en liaison avec le médecin traitant. Ce suivi doit être assuré la vie durant en raison notamment du risque de complications tardives (chirurgicales ou nutritionnelles). Le patient doit être informé des conséquences potentiellement graves de l’absence de suivi. Il est recommandé de revoir les patients au moins 4 fois la première année, puis au minimum 1 ou 2 fois par an.

Après chirurgie bariatrique, il est recommandé d’évaluer la perte de poids et sa cinétique , de surveiller les comorbidités et d’adapter leur traitement. Des ajustements diététiques sont souvent nécessaires. Il en va de même des traitements en cours en raison du risque de malabsorption de certains médicaments. La recherche de signes cliniques de dénutrition ou de carence vitaminique et la réalisation d’un bilan nutritionnel, orienté par la clinique sont recommandés. Le bilan peut comporter un dosage d’albumine et de préalbumine, d’hémoglobine, de ferritine et coefficient de saturation en fer de la transferrine, de calcémie, de vitamine D, de PTH, de vitamine A, B1, B9, B12, de zinc ou de sélénium. Les dosages sont recommandés 3 à 6 mois après l’intervention, puis au moins annuellement. Après chirurgie malabsorptive (bypass gastrique), il est recommandé de recourir à une supplémentation systématique (à vie par défaut) : multivitamines, calcium, vitamine D, fer et vitamine B12.

Recours à la chirurgie réparatrice

Il est recommandé d’informer le patient du recours possible à la chirurgie réparatrice. Celle-ci peut être réalisée au plus tôt 12 à 18 mois après la chirurgie bariatrique, en l’absence de dénutrition. L’indication doit être discutée avec le patient, l’équipe de chirurgie réparatrice et l’équipe pluridisciplinaire de chirurgie bariatrique.

6. Perdre du poids à long terme est-il possible ?

Les caractéristiques les plus communes d’un groupe de patients ayant perdu au moins 13 kg pendant 5 ans étaient la consommation d’un régime pauvre en calories et en lipides, la consommation d’un petit déjeuner, une pesée au moins hebdomadaire et une activité physique élevée (en moyenne 1 heure par jour).

La lutte contre l’obésité passe également par des actions de prévention coordonnées, réalistes et évaluables qui ont été listées dans le Programme National Nutrition Santé I et II qui fait la promotion de l’activité physique régulière et de l’alimentation diversifiée. Les actions de prévention doivent cibler de façon privilégiée les franges de la population les plus affectées par une forte prévalence de l’obésité (jeunes, milieux défavorisés, zones géographique à forte prévalence).

7. Résistance à l’amaigrissement

Un manque de motivation, un objectif pondéral inadapté aux possibilités du patient et un trouble du comportement alimentaire sont les principales causes de résistance à l’amaigrissement.

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En cas d’échec de perte de poids, la motivation du patient doit être réévaluée. Un plan concret, réaliste et progressif peut aider le patient dans sa démarche. Par nature, le changement dérange et certaines personnalités n’y sont pas prêtes. C’est le cas de ceux qui considèrent que l’obésité dont ils souffrent n’est pas liée à leur comportement.

Un objectif pondéral inadapté constitue également une cause fréquente d’échec. Une perte de poids lente (2 kg/mois) pour atteindre un objectif pondéral raisonnable (-5 à 15 % du poids) n’est pas facile à accepter pour le patient. Chez les personnes ayant une évolution du poids en yoyo, il convient de décrire le cercle vicieux qui consiste à attribuer par erreur l’échec de perte de poids à un manque de volonté ou à un régime mal calibré.

Les troubles du comportement alimentaire sont une cause habituelle et très fréquente de résistance au traitement de l’obésité. Ils sont souvent cachés par le patient et méconnus de l’entourage.

Plus encore que la difficulté à perdre du poids, les patients ont des difficultés à maintenir la perte de poids. Au décours de la phase dynamique de perte de poids, alors que, sous l’influence de la diminution des dépenses énergétiques liée à l’amaigrissement le patient atteint un plateau pondéral, tout relâchement se traduit par une reprise pondérale.

Pour en savoir plus : les recommandations françaises

1) Prise en charge de l’obésité http://www.alfediam.org/membres/recommandations/alfediam-obesite.asp

2) Obésité de l’enfant et de l’adolescent http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/version_finale_-_recommandations_obesite_2006_10_25__15_29_37_144.pdf

3) Chirurgie de l’obésité http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2009-04/obesite_-_prise_en_charge_chirurgicale_chez_ladulte_-_synthese_des_recommandations.pdf