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■ Internet et téléservices en agriculture et dans Pagroalimentaire

■ Agenda 2000 : les conséquences de l’accord de Berlin pour l’agriculture française

L i b e r t é • É g a l i t é • F r a t e r n i t é

R é p u b l iq u e F r a n ç a is e

M I N I S T È R E

DE L ’AGRICULTURE

ET DE LA P Ê C H E

ÊD i r e c t i o n d e s A f f a i r e s F i n a n c i è r e s

Sous-Direction de l’Évaluation, de la Prospective et des Études

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NOTES ET ÉTUDES ÉCONOMIQUES

Directrice de la publication : Mireille RIOU-CANALS, DAF

Rédacteur en chef : Philippe BOYER, DAF

Membres du comité de lecture :

E r ic BARDON, SCOMAlain BLOGOWSKI, DAFBernard DECHAMBRE, DAFMagali DEMOTES MAINARD, DAFYves GEFFROY, DEPSEDenis HAIRY, DAFHervé LE GALL, DAFOlivier MARTIN DE LAGARDE, DERFJoël MATHURIN, DPEIEvelyne SIROTA, DAF

Composition : DAF/SDEPEImpression : Ministère de l’agriculture et de la pêche

Dépôt légal : à parution

ISSN : 1275-7535

Renseignements et diffusion : voir page 4 de couverture

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INTERNET ET TÉLÉSERVICES EN AGRICULTURE ET DANS L ’ AGRO-ALIMENT AIRE

Les enjeux principaux

Vincent W AHL

Mission des entreprises

Service des stratégies agricoles et industrielles ( d p e i )

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L’ESSENTIEL DE L’ARTICLE

En s ’appuyant sur les sources suivantes :

- l’expérience du Bureau des systèmes d ’information en agriculture ( b s i a ) , dont l’auteur a été responsable de 1990 à 1996, et notamment la réflexion de Louis-Noël Netter, responsable du b s i a de 1981 à 1989,des visites d ’entreprises effectuées par l’auteur,

- un repérage approfondi effectué sur le Web,

cet article repère les innovations apportées par Internet en termes de réponses aux besoins des utilisateurs du secteur agricole et agro-alimentaire, au-delà des seuls aspects technologiques.

Une typologie de l’offre en services Internet dans l’agriculture et l’agro-alimentaire montre que le quart des sites se limite à promouvoir la notoriété d ’une entreprise ou d ’un service. Les fonctions commerciales, depuis la simple présentation d ’un catalogue de VPC à la possibilité d ’effectuer des « achats en ligne », sont présentes dans 40% des sites.

Les sites permettant d ’échanger des informations ciblées et de court term e apparaissent en nombre légèrement inférieur aux services assurant essentiellement une fonction documentaire. Cette proportion suscite quelques interrogations quant à l’adéquation de l’offre aux besoins, lorsqu’on garde à l’esprit que c’est principalement avec le premier type de « p rodu it» que le Minitel a rencontré quelque succès en agriculture. Les enseignements de l’expérience du Minitel, longue de vingt ans, restent valables aujourd’hui, notamment en ce qui concerne le marketing et la prise en compte des besoins.

Les « promesses » du commerce électronique via Internet dans le domaine agro­alimentaire doivent être mises en perspective : l’élément prédominant en matière de commerce électronique reste les échanges inter-entreprises (le business to business, ou « B to B ») ; Internet n ’est que l’un des outils du commerce électronique ; enfin, la vente au détail par correspondance concerne des marchés de niche et, surtout, reste un «m étier» , avec certaines pratiques et contraintes qui demeurent et qu ’il faut savoir maîtriser quelles que soient les possibilités ouvertes par l’innovation technique.

Plusieurs exemples montrent que les facilités techniques apportées par Internet dans la consultation et l’échange d ’informations ne sont pleinement valorisées que si l’utilisateur les intègre dans une organisation déjà cohérente, ce qui requiert le concours de «m édiateurs» divers (consultants, prescripteurs...) ainsi que la coordination et la négociation avec d ’autres partenaires. Cette analyse nous conduit ainsi assez loin de l’imagerie naïve de l’autonomisation complète des acteurs grâce aux nouvelles techniques de l’information.

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INTERNET ET TELESERVICES EN AGRICULTURE ET DANS L’AGRO-ALIMENTAIRE

Les enjeux principaux

Et si l’histoire, déjà riche, d’Internet en Agriculture était moins nouvelle qu’il y paraît ? L’agriculture et dans une moindre mesure l’agro-alimentaire français n’en sont pas à leur première «m ode» en matière de nouvelles technologies de l’information et de la communication. En effet, depuis la fin des années 70, l’agriculture, les PME de l’agro-industrie et du commerce, mais aussi les PME du service aux agriculteurs, ont vu déferler différentes vagues du « progrès » de l’informatique, des télécommunications, de l’imagerie, de la télédétection satellitaire... et de leur convergence dans la télématique. Le Minitel et le micro- ordinateur individuel, puis l’intelligence artificielle et les systèmes experts, la robotique, 1’ EDI, déjà le multimédia avec les premiers CD-ROM, l’agriculture de précision, et aujourd’hui Internet. Il reste pourtant chaque fois quelque chose sur le sable, et au cours de ces dernières années, on a pu constater que s’était produit un mouvement de fond, se traduisant par l’équipement des entreprises et des exploitations agricoles, au moins 50 000 étant équipées d’une informatique personnelle [SCEES, 1997], De même, les organisations de service se sont informatisées et ont inventé de nouvelles manières de travailler. Une offre de logiciels professionnels s’est structurée. On a vu se développer l’électronique de mesure liée aux équipements pour les agriculteurs, etc.L’arrivée d’Internet bénéficie cependant d’un écho médiatique sans précédent. En effet, il s’agit cette fois d’un phénomène qui concerne la communication dans son ensemble. Pour autant, la question de ce qui, au-delà de la technique elle-même, est réellement nouveau, garde sa pertinence, comme le montre Dominique Wolton [Wolton D., 1999].

Mais cet article borne strictement son analyse aux utilisations professionnelles. Pour évaluer les enjeux d’Internet et du Web pour l’agriculture et l’agro-alimentaire, en effet, une prise de recul nous semble nécessaire vis à vis du discours global sur Internet et le Web, dans la limite où il se limiterait à la description émerveillée des « nouvelles possibilités », voire des « promesses » qu’il peut offrir. Il ne s’agit pas de s’inscrire en faux contre un ensemble d’innovations techniques, mais d’observer les formes actuelles de leurs applications pour essayer de cerner les conditions d’une mise en oeuvre à bon escient.

Les techniques évoluent tellement vite qu’on a l’impression, à chaque innovation majeure, qu’il s’est produit une rupture, et à cet égard, Internet1 semble radicalement nouveau par rapport à ce qui lui préexistait. Les usages, tout au moins professionnels, évoluent de manière beaucoup plus linéaire, quitte à détourner les outils de la fonction qu’avaient imaginé hier les concepteurs. De ce point de vue, il est sans doute trop tôt pour évaluer ce que les nouveautés d’Internet (le multimédia, l’interconnexion et la mondialisation) auront apporté aux mages professionnels. Par contre, l’hypothèse d’une continuité dans les besoins des entreprises, des agriculteurs, ou des organismes de service nous paraît féconde, et devrait permettre de commencer à cerner les enjeux.

* Considéré au sens large, c ’est à dire en tenant compte aussi des progrès dans le matériel et les logiciels qui permettent les applications multimédia, la navigation dans ou entre des systèmes “ sans couture apparente ”,

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Notre objectif n’est pas d’introduire le lecteur à l’Internet et à ses outils : pour cela, il existe une abondante littérature [voir par exemple: Sonneville A. et al., 1998], Il s’agit ici de considérer les usages du Web et de l’Internet du point de vue de l’offre de biens ou de services et donc de l’entreprise. Quant aux “usages ”, il s’agira pour nous exclusivement des fonctions assignées à un service Web et à leur articulation avec la stratégie de l’entreprise. Il y aurait eu une autre manière de traiter de ce sujet : les usages du Web pour la recherche documentaire, ou dans la fonction d’achat. Nous nous serions alors placés selon le point de vue du “client”. Mais sur cette problématique différente, nous ne détenons pas d’éléments originaux.

Au-delà des quelques idées de bon sens que nous souhaitons suggérer aux organisations, aux entreprises, nous aimerions contribuer à améliorer la description de ce nouveau phénomène et son intelligibilité. Nous espérons, à travers quelques exemples, donner à percevoir de véritables innovations, non pas du point de vue des techniques, mais du service offert aux utilisateurs, et de l’utilisation dynamique de l’information. Enfin, nous souhaitons que notre interprétation sur la signification et les enjeux de l’émergence d’une société de l’information trouve son sens dans un cadre de réflexion collective renouvelé, à l’instar de celui qui a existé entre 1982 et 1997, de par la volonté conjointe des entreprises, des organisations professionnelles agricoles et du ministère de l’agriculture [Wahl V., 1994]. En 1989, à propos des utilisations du Minitel, Louis-Noël Netter [Netter L.N., 1989] appelait à faire le bilan des expériences passées, de façon à consacrer l’essentiel de l’énergie aux développements positifs. Valoriser la richesse des expériences faites avec le Minitel ou les logiciels micro et ce qu’elles nous ont appris au cours des 15 à 20 années précédentes reste une possibilité a priori féconde, et l’on se prend à rêver que des chercheurs s’y intéressent !

LES UTILISATIONS ACTUELLES D ’INTERNET (DU W EB) EN AGRICULTURE ET EN FRANCE

Il s’agit de répondre aux questions : Combien de sites Web existent dans l’agriculture, le service à l’agriculture, l’approvisionnement, la transformation et le commerce des produits agricoles et alimentaires ? Qui en sont les auteurs et à qui s’adressent-ils ? A quelle diversité d’utilisation répondent-ils ? Ce qui pose en premier lieu la question des outils de connaissance de l’offre, de type répertoires, listes de signets, etc.

Faute de catalogue ou d’annuaire, il existe un certain nombres de listes de sites, directement consultables sur le Web : la liste EUNITA2, des services Internet agricoles francophones, maintenue par F a c t a et qui est la principale base des éléments d’analyse donnés ci-dessous ; des particuliers comme Pierre Laroche3; le contenu de ces deux listes est très voisin. Le service de la communication du Ministère de l’agriculture et de la pêche propose de son côté un petit répertoire ayant essentiellement pour but de donner envie d’aller voir les sites les plus beaux [M AP, 1999], comme un encouragement à l’initiative ! Enfin, le « Guide Internet à l ’usage des professionnels de l ’agro-alimentaire » [Sonneville A., op. cit.] présente un choix très large d’environ 350 sites (dont une partie seulement se réfère à l’agro-alimentaire, les autres

^ Liste m aintenue par ACTA-Informatique, en collaboration avec Jean-Claude Ballandonne de l’Orne Agricole. http://www.acta.asso.fr/acta/eunita.htm. Version de référence : 29 janvier 1999. (à l’exception des sites " machinisme ” rajoutés vers le 20 janvier.

3 Agriculture et photographie : http://perso.infonie.fr/pilaroche/

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concernant l’information économique, la recherche, l’information juridique, les moteurs de recherche, etc.) avec une classification assez pratique et un commentaire lié à chaque adresse Internet.

À l’exception du dernier, ces instruments ne proposent que des repères pour une première entrée sur le Web, avec une valeur ajoutée assez faible, par rapport à ce que peuvent donner des moteurs de recherche comme Yahoo ou Alta Vista. La classification qu’ils offrent n’est pas directement utilisable : à l’intérieur de la logique et des catégories proposées, il y a de nombreuses erreurs de typologie ; enfin, les catégories proposées ne sont pas définies par rapport à une intention explicite.

Il existe quelques sites portails spécialisés, comme Terre-Net 4, « portail » filiale d ’ISAGRI, Agronet ou Epinet, qui offrent des sélections assez larges de sites (nous les analyserons ci- après, de manière plus détaillée). Mais il s’agit d’une logique de sélection, de référencement, plus que de description exhaustive.

II paraît ainsi difficile de répondre à la question “combien ?” (combien de sites, combien de services, combien d’entreprises concernées)...

...à moins de se livrer à des consultations multiples et permanentes, à des comptages fastidieux. En effet, contrairement à ce qui se passe encore avec Teletel, on n’est plus dans le cas d’un opérateur unique, capable de recenser les services de manière exhaustive. Par ailleurs, dans le bouillonnement actuel, des sites ouvrent et disparaissent constamment ; ou bien se déplacent, et changent d’adresse Internet, etc...

Mais aussi parce qu’il y a de nombreux problèmes de définition.

Dans le domaine de l’information institutionnelle ou de la documentation, il existe des sites très vastes, hébergeant en réalité des services distincts, de nature parfois très différente, avec des auteurs autonomes. A cet égard, un bon exemple est le site de l ’iNRA, qui comprend des services de documentation ou de recherches d’article, de l’information institutionnelle, etc., mais qui héberge aussi des sites d’information spécialisée gérés par ses propres chercheurs, comme le courrier de l’environnement, l’index de la flore de France, etc..

Il existe aussi des sites collectifs institutionnels, comme ceux de chambres régionales d’agriculture, réservant une page, parfois une simple « carte de visite », aux chambres départementales, ceux des collectivités territoriales hébergeant des pages pour des chambres ou des entreprises. Il existe enfin des sites collectifs commerciaux (Epicuria, Confédération des caves particulières), sur lesquels des entreprises agro-alimentaires ou des viticulteurs sont regroupés en “boutique en ligne” ou en base de données.

Dans les listes évoquées ci-dessus, ces cas, nombreux, sont traités de manière non systématique, voire aléatoire : par exemple, certains sites appartenant à un « service collectif » sont recensés, mais pas tous, et pas le service collectif lui-même.

Une illustration de la difficulté de ces décomptes est fournie par la comparaison entre les sites recensés par la liste EUNITA (ACTA) et celle du BIMA [MAP, 1999]. La comparaison a porté sur

^ Terre-Net : http://www.terre-net.fr/ ; is a g r i, sa maison mère, est le leader du progiciel pour agriculteurs et techniciens.

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les sites français recensés par le BIMA (au nombre de 340). Le nombre de références communes aux deux n’est que de 114, soit 33,5% des sites recensés dans le BIMA.Maintenir un catalogue général à jour de sa représentativité peut paraître une gageure. Ce qui conduit à une contradiction entre d’une part, l’ouverture à toutes les informations et à toutes les surprises que permet théoriquement le « Websurfing », et d’autre part, le rôle de plus en plus important que devraient avoir ces îlots d’ordre et d’intelligibilité que seront les annuaires et les “portails” grâce à la sélection de sites qu’ils seront capables d’offrir. De même, on peut sans doute prédire un rôle accru aux prescripteurs, voire de la publicité sur les supports traditionnels. A l’inverse, un nouveau site ne peut espérer trouver sa place que s’il bénéficie d’une bonne stratégie de promotion... hors du Web !

Cet article va par contre, essayer dans une certaine mesure, de répondre aux questions : “qui? ”, “quelle diversité d’auteurs ?” et “quelle diversité d’utilisations ?”.

Pour cela, nous avons choisi comme base d’étude, et bien qu’il participe aux défauts cités ci- dessus, la liste de signets de l ’ACTA [H Ni l A. 1999]. Dans cette liste francophone, nous n’avons gardé que les références françaises. Nous nous intéressons en effet en priorité à l’offre des entreprises, et non pas aux ressources pour le chercheur d’informations. Sur une dizaine de mois, ce qui en relativise le résultat, nous avons vérifié l’existence de chacun de ces sites. Pour chaque référence, l’auteur a été identifié, ainsi que la nature ou l’objectif du site. Par ailleurs, nous avons choisi la convention de ne pas prendre en compte dans les tableaux ci-dessous, les sites individuels d’entreprises ou d’organismes regroupés dans des services plus larges. Nous n’avons pas corrigé les omissions dont nous pouvions avoir conscience, ni fait de panachage (sinon nous serions devenus nous même gestionnaire d’une liste de signets !) Enfin, nous n’avons pas conservé les quelques références qui se trouvaient dans des champs voisins, quoique clairement hors des champs de l’agriculture et de l’agro-alimentaire (tourisme, sciences naturelles, etc.). La liste de l ’ACTA était alors maintenue de manière continue, quoique assez aléatoire, selon une procédure fondée, apparemment, sur la prise en compte de l’envoi d’informations complémentaires par les auteurs de sites.

Le résultat de cette analyse est présenté dans le tableau 1 : 232 sites ont été retenus sur environ 350 recensés sur la liste EUNITA, sites étrangers compris.

Tableau 1 - Typologie des auteurs de sites recensés dans la liste de signets EUNïï'A

NombreFormation et recherche 64Service public et intervention 9Syndicats d'agriculteurs 9Services aux entreprises (agricoles, de service aux agriculteurs, mise en marché et transformation), lobbies 56Entreprises nées pour le Web 6Editeur traditionnel, entreprise de presse 9Agrofoumiture et amont agricole 18Exploitations agricoles de tyf 9Appro-collecte 17Production et négoce industriels, produits agricoles et transformés 29Distribution grand public et VPC 6TOTAL 232

On est donc en présence d’un échantillon diversifié, dont on sait que sa représentativité est très partielle (elle semble assez bonne pour les organisations professionnelles et les établissements d’enseignements et recherche ; elle est très insuffisante pour les entreprises des filières d’approvisionnement, agricoles, et agro-alimentaires), mais qui permet des études qualitatives, et permet de juger en premier lieu de la diversité des auteurs de sites Web.

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Il faut insister : la typologie ci-dessus concerne les auteurs de sites, et non pas les objectifs de chaque site et les services offerts, qui seront étudiés plus bas.

Dans la catégorie « formation et recherche » ont été regroupés les établissements d’enseignement secondaire (et des sites collectifs spécialisés comme educagri.fr), des instituts de formation professionnelle, des écoles supérieures d’ingénieurs ou vétérinaires, etc., ainsi que les sites des instituts et centres techniques agricoles ou industriels, ou des institutions professionnelles agricoles d’expérimentation.

Dans la catégorie « services aux entreprises », ont été regroupés les banques, assurances, les organisations de service direct aux agriculteurs (chambres d’agriculture, centres d’économie rurale, une partie des organismes d’élevage) ; les consultants, laboratoires d’analyses, etc. dont les clients sont des entreprises ; les éditeurs de progiciels pour agriculteurs ou techniciens, comme Gestami, Isagri, ou pour entreprises agro-alimentaires, et enfin les quelques salons professionnels inclus dans la liste (Salon de l’agriculture, le SIMA, SPACE, etc..).

La catégorie « entreprises nées pour le Web » est difficile à distinguer de la précédente, mais aussi de la catégorie des vépécistes (cf. plus bas); nous avons voulu y regrouper les auteurs de sites spécifiques au Web (de type « portail », commerce électronique), indépendants, ou filiales de sociétés de conseil, mais qui dans ce cas constituent un nouveau métier pour celles-ci, et non pas une simple vitrine. La pertinence de cette catégorie reste à confirmer.

Les autres catégories nous semblent parler d’elles-mêmes. A noter la catégorie « agriculture familiale » (nous la distinguons des grandes exploitations spécialisées comme les domaines viti- vinicoles, les élevages de poules pondeuses de grande dimension, au fonctionnement quasi industriel, dont nous avons fait une catégorie à part), qui comprend des exploitants pratiquant la vente directe. Cette catégorie est probablement largement sous-estimée : parce qu’elle ignore sans doute de nombreux exploitants qui ont un site Web individuel, mais peut-être surtout, parce que nous n’avons pas décompté les nombreux producteurs regroupés dans un service collectif.

Le tableau 1 illustre donc le fait que, même sur une liste dont on sait qu’elle n’est pas exhaustive, et qu’elle n’est pas mise à jour systématiquement, la diversité des auteurs de sites est forte.

Après cette approche par les auteurs, tentons une approche par les utilisations. Il s’agit de tester l’hypothèse selon laquelle le principal usage du Web restait la mise en ligne de plaquettes à fins de publicité institutionnelle, ou de notoriété.

Nous avons donc essayé de caractériser les objectifs de chaque site, en limitant cette analyse aux sites dont les auteurs ont une démarche commerciale (y compris les organismes de service aux agriculteurs qui, de plus en plus facturent à la prestation, et doivent tenir compte des attentes de leurs clients ). Sont exclus, par contre, les sites de l’enseignement et de la recherche, des administrations, des syndicats et lobbies. En d’autres termes, nous avons exclu les catégories pour lesquelles les analyses ou interprétations en termes de coût-efficacité ne répondent pas a priori à des règles simples. Les sites étudiés dans cette 2e phase sont au nombre de 150 sur 232, soit 65%.

Le tableau 2 présente un croisement entre une caractérisation très synthétique des auteurs, à travers leur « activité d’origine » et une typologie des services offerts ou de la fonction assurée par le site Web. En ce qui concerne ces fonctions des sites Web, les catégories que nous

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proposons ne sont pas mutuellement exclusives, et certains sites se sont vus attribuer plusieurs fonctions : sur le tableau ci-dessous, le total des sites d’un même type d ’auteur (ligne) recensés au titre des différentes fonctions (colonnes) est donc supérieur au nombre de sites réellement mis en ligne par catégorie d’auteurs (figurant dans la colonne « nombre »).

Tableau 2 - Typologie des sites selon leurs auteurs et leurs fonctions

Fonction du site web par type de métier

activité d'origine de l ’auteur du site web 1c notoriété

seulement

notoriété, image, info, institution­

nelle

appro et services agriculteurs

commerce vers entreprises et

services

promotion tous publics de produits

agricoles

vente directe consom-mateurs

services 49 14 26 7 10 3 0Information 14 0 1 0 0 2 0transformation et commerce de produits agricoles et agroal I mentaires

42 11 15 0 12 5 14

approvisionnement ou collecte agriculteurs 18 7 13 8 1 0 0

agro-fourniture 26 6 17 7 8 0 0

Total 149 38 72 22 31 10 14% 100% 25% 48% 15% 21% 7% 9%

Fonction du site web par type de métier (suite et fin)

activité d'origine de l'auteur du site web

nom

bre

information des agricuteurs

services spécialisés web

(portail, hébergement)

documentation, Info spécialisée

(agences, recherche,

thématique)

info, événement animation réseaux professionnels

info, grand public, sites ludiques,

etc..

services 49 5 9 10 3 5 3information 14 5 2 7 1 2 2transformation et commerce de produits agricoles et agroalimentaires

42 0 0 1 0 0 3

approvisionnement ou collecte agriculteurs 18 2 0 1 0 0 0

agro-fourniture 26 0 0 6 0 1 2Total 149 12 11 25 4 8 10

% 100% 8% 7% 17% 3% 5% 7%

Fonctions de notoriété, d’image, d’information institutionnelle

Un site Web présentant ce type de fonctions contient des pages d’information sur la vocation et l’organisation de l’auteur, son histoire, son activité, éventuellement ses résultats financiers. Son rôle équivaut à celui d’une « plaquette ». La diversité de ces sites est grande. On y trouve la simple « carte de visite » hébergée par un service collectif, comme c’est le cas de plusieurs chambres d’agriculture, mais aussi d’entreprises agro-alimentaires. Le service collectif est, par exemple, offert par le conseil général, ou la chambre régionale d’agriculture ; l’objectif affiché peut-être de faciliter l’accès à une forme de « visibilité » internationale. En présence de cas de ce genre, et devant la pauvreté des pages, nous nous sommes demandés si certaines de ces contributions n’avaient pas été fournies à contre cœur, en tous cas à moindres frais, pour ne pas refuser.D’autres « plaquettes » sont plus complexes et visiblement assumées par l’entreprise. Certaines d’entre elles semblent s’adresser à des publics divers et mal identifiés ; dans d’autres cas, le ciblage est explicite, vers des clients, des adhérents, etc., et reflète une stratégie de communication définie ; un cas original est celui de la marque collective « Prince de

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Bretagne », qui présente aux distributeurs le matériel de promotion à leur disposition (www.prince-de-bretagne.eom). Un quart des sites (38 sur 149) remplit uniquement une fonction de « notoriété ». Seule ou associée à des objectifs d’image et d’information institutionnelle, cette fonction est présente dans 72 sites sur 149, soit 48%.

Certains sites de cette catégorie peuvent comporter de l’information sur les produits de l’entreprise. La frontière que nous avons dessinée entre les sites dont nous considérons qu’ils assument seulement une fonction de notoriété, et ceux dont nous considérons qu’ils ont également une fonction commerciale tient à la précision de l’information sur l’offre de l’entreprise : s’agit-il d’un vrai catalogue propre à faciliter la décision d'achat (même si les prix ne sont pas toujours fournis ou si la commande en ligne n’est pas possible)? Un contact commercial ciblé est-il proposé ?

Services Web assurant une fonction commerciale

Ils recouvrent dans la typologie du tableau 2, les catégories : « Approvisionnement et services pour agriculteurs » ; « Commerce d’entreprise à entreprise » ; « Promotion tous publics de produits agricoles » ; « Vente directe consommateurs ». Les fonctions commerciales représentées sont très diverses, et vont du simple catalogue détaillé, voire du formulaire de demande d’un catalogue, jusqu’à la commande avec édition du bulletin à renvoyer par la poste, ou à la commande et au paiement en ligne. Plus de 40% des sites commerciaux étudiés ici sont concernés, ce qui peut paraître assez faible en première analyse.

- Approvisionnement et services pour agriculteurs : le tableau 2. montre que ce n’est pas une fonction limitée aux sites Web des commerçants traditionnels de « l ’appro» : coopératives et négociants en approvisionnement des cultures ou de l’élevage, concessionnaires de machines agricoles, équipementiers, etc. Outre ceux-ci, on trouve dans cette catégorie des exploitations d’élevage tournées vers la génétique, des concepteurs de progiciels pour agriculteurs, voire des sociétés semencières. Quant au « service » aux agriculteurs, en ligne, il se manifeste par de la fourniture d ’information (cf plus bas); une part importante a pu nous échapper, car elle relève plutôt des parties « Intranet » dans les sites Web, c’est à dire des zones à l’accès restreint aux possesseurs d’un mot de passe : abonnés, clients à qui l’on offre un service pour les fidéliser, etc. Les éditeurs de progiciels pour agriculteurs méritent une mention spéciale, dans la mesure où les logiciels constituent actuellement les premiers produits échangés par le commerce en ligne. La liste EUNITA- ACTA en recense cinq. Deux d’entre eux sont de grands éditeurs nationaux, qui disposant de réseaux de distribution, se contentent d’une « plaquette ». Ce sont les plus petits qui proposent des versions de démonstration, ainsi que leurs tarifs en ligne.

- Commerce d ’entreprise à entreprise : les sites Web assumant ces fonctions semblent conçus pour servir à l’information des clients de firmes d’agro-fourniture (phytosanitaires, semencières), d’industries ou d’entreprises de négoce alimentaire, d’organismes de promotion collective ou de sociétés de service, etc. Quelquefois très sobres (limités à la présentation d’un catalogue), ces sites sont en général spécialisés (mais le commerce avec les entreprises coexiste parfois avec la vente aux particuliers), et paraissent les mieux ciblés. La commande en ligne n’y est pas fréquente. En caricaturant peut-être un peu, on peut dire que ces sites ont pour but de soutenir une relation commerciale existante, voire d’inviter à en créer une, mais ne sont clairement que l’un des outils de la panoplie.

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- Promotion tous publics de produits agricoles : il s’agit de sites, qui sans être au service de relations commerciales, donnent des informations sur des produits alimentaires, fournissent des conseils, des recettes culinaires, souvent d’ailleurs associées à des informations touristiques et culturelles... Les sites qui remplissent cette fonction sont très divers. On y trouve, pêle-mêle, trois organisations représentant des viticulteurs, dont un fait aussi de la vente directe, mais où les deux autres se contentent d’associer à des textes et des informations autour du vin, des descriptions et adresses de caves particulières ; un site fédérateur (portail) apicole, un institut technique (centre d’information des viandes), des sites de « pays » (l’Y grenoblois, Dordogne-Périgord, Auvergne) ; une ferme auberge... . Au delà de ces dix sites provenant du secteur commercial, on trouvera de nombreux sites institutionnels pour promouvoir les produits du terroir.

-Vente directe aux consommateurs: c ’est dans cette catégorie que se retrouveront les professionnels de la vente par correspondance, d’autres sites qui jouent un rôle de mandataire (fédérant des offres complémentaires, assurant la fonction commerciale, mais n ’étant pas propriétaires des produits, et n’assurant pas la logistique des livraisons) comme Epicuria; ce dernier type d ’entreprises est spécifique du Web. C’est souvent à cette fonction de vente directe que l’on pense lorsqu’on cite les applications agricoles du commerce électronique [Menanteau J., 1999], Quelles perspectives pour cette nouvelle forme de vente directe, c’est une question que nous discuterons plus bas.

- Enfin, à la frontière de la promotion collective, du service aux entreprises et des sites portails, ou d’aiguillage sur le Web (cf. ci-dessous) deux sites de promotion collective, tournés vers l ’export, celui du comité de promotion agro-alimentaire Rhône-Alpes, ou celui de Normandie. Nous analyserons plus loin la stratégie qui leur est sous-jacente (cf.. dernière partie de l’article « commerce électronique en agriculture et dans l’agro-alimentaire »).

“Portails” et services d’accès au Web.

De très nombreux sites, émanant de services publics, d’organisations professionnelles à vocation générale ou technique, d ’entreprises de presse, voire d’entreprises diverses proposent une liste d’adresses sur le Web, plus ou moins développée ou originale ; quelques sites en font une fonction principale, qu’ils associent ou non à d’autres services : information spécialisée, forums, accès, hébergement, etc. Cela ne veut d’ailleurs pas dire que leurs listes de signets sont dans tous les cas plus développés que ceux d’autres sites, ou que la sélection en soit toujours plus originale ! Car dans cette catégorie de sites existe aussi une grande variabilité quant à l’intérêt qu’ils présentent.

Ces fonctions méritent un intérêt particulier car spécifiques au Web ; nous avons par conséquent examiné de plus près les services qui les offrent . Par ailleurs, devant la variété de l’offre sur le Web, et l’impossibilité de réaliser des annuaires exhaustifs, les services offrant des sélections de liens avec d’autres sites représentent des enjeux importants.

Le tableau ci-après présente les sites étudiés.

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Tableau 3 - Présentation des sites de type « portails, services d ’accès au Web » étudiés

Nom Adresse Web : http://

Type de service Spécialisation

Agriculture et Elevage, les fournisseurs bretons

Agrelnet.com Annuaire de sites, référencement payant

Agrofourniture

Agronet www.agronet.tm.fr Annuaire de sites Site non spécialiséEpinet www.epinet.fr Portail spécialisé grandes cultures

Export Agriculture France

www.agriexport.com Annuaire de sites Site non spécialisé

Frenchfoodfinder www.frenchfoodfinder.com Base de données (^entreprises

Industrie alimentaire

Galerie apicole www.apiculture.com Portail spécialisé ApicultureHyltel www.hyltel.fr Portail spécialisé Elevages porcin bovin

volaillesInterAgri www.acdev.com/interagri/ Annuaire de sites Site non spécialisé

MHR Viandes www.mhr-viandes.com Base de données d'entrepri­ses, et informations marchés

Filières viande

Terre-Net www.terre-net.fr Portail généraliste Site non spécialisé

Ces sites ont en commun, à deux exceptions près, de servir plus ou moins explicitement de vitrine à des prestations de conseil, réalisations, hébergement de sites sur le Web, vente d’espace publicitaire, fourniture d’accès, etc. Il faudrait effectuer une enquête sur leur bilan économique. Les possibilités de recette que l’on aperçoit sont les abonnements, les référencements dans l’annuaire (pour un site), la publicité, le sponsoring, ainsi que la réalisation de prestations.

Nous n’avons qualifié de « portails » que les sites qui présentent conjointement plusieurs des éléments ci-après : service d’information à courte durée de vie en propre, sélection d’articles techniques, consultation d’archives, services d’annonces fréquentés, animations thématiques (forum), sélection de sites par thèmes, de promotions de produits, etc. soit une large palette de services pour informer, conseiller, mais également retenir leurs clients. C’est le cas du généraliste Terre net, d’Epinet qui, bien que limité aux grandes cultures, présente une large palette de services, de la Galerie Apicole qui dans son domaine restreint, fédère un très grand nombre d’organisations et d’entreprises, de Hyltel qui présente des services ciblés mais également assez larges. Terre-Net et Epinet offrent l’accès à Internet, et réservent le service complet à leurs abonnés. Epinet en particulier présente explicitement une large gamme de prestations.

Nous avons appelé, par contre, annuaires de sites, les services qui proposent essentiellement des liens avec d’autres serveurs. Ceux-ci peuvent fournir une valeur ajoutée, si la sélection est suffisamment large, et le système de classement commode. Dans plusieurs cas, cette valeur ajoutée paraît très faible. Le site apparaît alors comme une simple vitrine pour la société de services qui en est l’auteur. Est-elle efficace ? On peut en douter.

Enfin, deux sites sont dédiés à un véritable service d’information sur le Web : French food finder, qui permet de rechercher des entreprises selon plusieurs clés, de produits, de taille, etc. et MHR Viandes.

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Informations pour agriculteurs

Les sites qui assurent cette fonction appartiennent surtout à la presse agricole, ou aux « portails » et sites carrefours décrits plus haut. Il s’agit d’informations sur les marchés, d’informations techniques, de météo. Un centre de gestion, une coopérative céréalière, un groupement de producteurs porcins, ainsi qu’Uniporc Ouest offrent aussi des services d’information ciblés vers les agriculteurs

Informations spécialisées

Celle-ci s’adresse plutôt à des spécialistes, vétérinaires, ingénieurs, techniciens. Les sites qui assurent cette fonction, comme le montre le tableau 2, sont ceux des organisations et sociétés de service, des journaux et périodiques, et des firmes d’agro-fourniture pour qui le passage par des prescripteurs plutôt que la communication directe de données techniques est une constante. Les sites de presse, voire une partie des organismes de service, ne font en quelque sorte que se doter d’un nouvel outil pour continuer (peut-être en l’amplifiant) le même métier. Par contre, pour d’autres organismes de service et les firmes d’agro-foumiture, le site d’informations spécialisées semble être la version adaptée de la plaquette « image ».

Ces sites d’information spécialisée sont également la forme privilégiée par les instituts de recherche publique, les instituts techniques agricoles, de. que nous n’avons pas étudié d’aussi près.

Enfin, quelques sites concernent des événements, comme des salons professionnels.

L ’HYPOTHESE D ’UNE CONTINUITE AVEC L ’EXPERIENCE DU M INITEL

Quoi d’apparemment plus dissemblables, que le Minitel, d’une part, avec son ergonomie minimale, son graphisme fruste, son incapacité à stocker de l’information et sa lenteur, et d’autre part, le micro modeme, puissant, capable d’afficher des images avec une bonne définition ; le graphisme évolué, dynamique et joyeux des pages Web ; les capacités de navigation du réseau ; l’agrément qu’offre la souris ; la possibilité de stocker et d’utiliser localement l’information ainsi recueillie ?

Notre hypothèse de continuité ne cherche pas à minimiser les différences dans les outils. Par contre, elle tend à prétendre que malgré les possibilités technique extrêmement accrues, les usages n’ont pas radicalement changé, et que cela a un sens de raisonner sur ce que l’on a appris en observant les usages du Minitel.

A partir du début des années 80, la télématique "traditionnelle" de type Télétel a donné matière à un grand nombre de tentatives et de services opérationnels ayant permis de constituer une expérience d'une grande richesse, qui reste malheureusement à rassembler et à exploiter

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Dans les domaines agricole et agro-alimentaire, de nombreux services ont été développés: le catalogue édité plusieurs années de suite, et jusqu’en 1992, par l'ACTA a dénombré jusqu'à 120 services pour près de 500 applications5. À cette époque, 150 000 exploitations agricoles étaient équipées d’un Minitel, 35 000 déclaraient l’utiliser pour des usages professionnels. Ces développements ont souvent été financés par des fonds publics et parapublics (budget des chambres d'agriculture, subventions de l'Etat à travers le Ministère de l'agriculture ou l'Agence de l'informatique)

Le Minitel, malgré sa rusticité, si on le compare aux techniques d’aujourd’hui, a permis le développement d’une grande diversité d'applications : marchés télématiques, incluant des systèmes d'enchères, relations clients-foumisseurs, messageries de groupe, retour d'information personnalisé, services de calcul délocalisé, accès à des bases de données. Ces projets ont connu des destins divers, les uns ne parvenant pas à rencontrer de besoins solvables et disparaissant rapidement, d'autres artificiellement maintenus en vie pendant plusieurs années; d'autres enfin ayant atteint un véritable succès.

Comprendre pourquoi tel ou tel type de service Minitel a été couronné de succès, ou non, devrait permettre de bien raisonner les utilisations futures d’Internet

Le tableau n° 4 fournit une analyse typologique, basée sur les données de 1989, analysées par Louis-Noël Netter [Netter L.N., 1989] ; aucune mise à plat d’ampleur comparable n ’a été effectuée depuis, mais les tendances observées postérieurement paraissent identiques. Netter s’était basé sur des données en provenance du catalogue des applications télématiques agricoles, édité alors par l ’ACTA, et avait pu obtenir par ailleurs de France Telecom, l’opérateur du système Télétel, des informations détaillées sur les temps de connexion à chaque service, ce qui permettait d’avoir une indication de son utilité pour les agriculteurs, mais aussi des éléments sur l’économie du système (un tel outil de mesure n’est malheureusement pas disponible pour le Web).

Tableau 4 - L a télématique agricole en 1989

N° Type d’application NombreUsage comparable au micro ordinateur 1 Comptabilité, gestion de l'exploitation 28ou 2 Analyse de groupe 3à la calculette 3 Programmes de calcul (rations, fumure...) 93Usage comparable au livre et aux revues

4 Information à longue durée de vie 125

Usage comparable à la radio, à la presse, aux répondeurs

5 Information à courte durée de vie 96

Usage comparable à la communication

6 Résultats individuels (performances zootechniques, analyses de sol ou de vin...)

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téléphonique, 7 Courrier électronique 28au courrier 8 Relation agriculteurs- fournisseurs 6Enchères électroniques 9 Enchères électroniques 3Divers 0 Divers 29Total Total 430

Ce tableau présente une offre de services dédiée aux agriculteurs, tous services, marchands ou non, confondus, et n’est donc pas directement comparable à notre analyse de l’offre en sites

7000 services au total étaient alors recensés en France.

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Web. Par ailleurs, les services correspondant aux types 1 et 3 (qui correspondaient à une utilisation concurrente à celle du micro-ordinateur) ne sont plus imaginables aujourd’hui.

La dichotomie principale séparait donc les services à but documentaire (type 4) et les services qui correspondent à un échange d’informations plus ou moins individualisées, et dont il est utile de disposer rapidement (types 5, 6, 7). Il s’agissait, par exemple, de la météo ou des avertissements agricoles, des retours d’information individuels (résultats d’abattoir, résultats d’analyse de lait, etc.) pour lesquels la rapidité du retour d’information a de l’importance. L’analyse des temps de connexion démontrait que l’essentiel des consultations concernait la seconde catégorie, avec d’ailleurs une concentration sur trois applications majeures (prix observés sur les marchés, données météorologiques, avertissements agricoles).

C’est sans doute ce contraste entre large variété de service d’information, et un très petit nombre de services réellement consultés, qui constitue la leçon principale de l’expérience du Minitel en agriculture. On note en particulier l’existence de 125 services basés sur de l’information à durée de vie longue, très peu consultés, témoignages de l’absence de réflexion sur les besoins des utilisateurs.

Avec le Web, la proportion en faveur des services d’information journalistique ou documentaire s’est encore accrue. Rien que dans notre échantillon de 150 services marchands, le nombre de services documentaires est légèrement supérieur à celui des services basés sur l’échange d’informations ciblées et de court terme. Or, dans les services émanant de centres techniques, d ’établissements d’enseignement et d’institutions à but non lucratif la proportion d’information documentaire ou institutionnelle est encore plus forte. Certes l’ergonomie du Web, la possibilité de stocker des pages ou de les imprimer facilite incomparablement la fonction documentaire. Les lecteurs se multiplieront-ils pour autant en proportion de l’offre ? Nous pensons quant à nous que la leçon du Minitel reste bonne à méditer.

Plus positivement, parmi les services de communication entre clients et fournisseurs (type 8), ceux qui avaient du succès étaient ceux qui faisaient gagner l’échange en efficacité, tout en s’adaptant bien aux modes d’organisation préexistants, sans les modifier profondément. C’était le cas du champion toutes catégories parmi les services Télétel dédiés à l’agriculture, qu’est restée la commande de doses d’insémination bovines. Un agriculteur ayant une vache à inséminer devait auparavant attendre, parfois longuement, au standard du centre d’insémination, dicter un numéro d’identification à dix chiffres à l’opératrice, qui elle-même devait ensuite procéder à une saisie. Cet acte s’accommode fort bien de la saisie directe, qui évite l’attente et les erreurs de transcription, et permet ensuite l’automatisation de la chaîne de traitement qui suit la commande (organisation des tournées des inséminateurs, édition de factures, etc.) Dans ce cas, c’est à chaque étape du processus que le Minitel a fait gagner en productivité et en fiabilité. Organisation globale inchangée, simple adaptation du processus à la télématique, c’est le modèle de tous les services “gagnants” parmi lesquels également des services d’enchères dont nous reparlerons plus bas. Enfin, dans la vente par correspondance de vins au grand public, que nous avons observé par ailleurs, le Minitel semble avoir trouvé une certaine place ; les services encore actifs dans ce secteur paraissent très professionnels en matière de v p c (vente par correspondance).

Le Minitel agricole est globalement un échec financier, quoique son coût soit resté largement caché dans les frais de fonctionnement des institutions : ce fut notamment le cas des services généralistes édités par certaines organisations professionnelles agricoles. Mais même des services mieux ciblés, qui connurent un succès relatif, comme la météo ou les avertissements agricoles, n’ont pas atteint l’équilibre économique. Seuls y sont parvenus ceux qui étaient

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intégrés à une stratégie d’entreprise, et dont l’utilité se mesurait en améliorant globalement le fonctionnement ou le service aux usagers. Netter a ainsi pu calculer en 1989 que la télématique agricole générait un déficit annuel de 30 millions de francs (un coût de création et de gestion estimé, en cumulé, à 35 millions, pour des recettes de 5 millions).

Autres leçons de l’expérience du Minitel

11 ne s’agit pas de sous-estimer les caractéristiques nouvelles d’Internet et notamment du Web, ses possibilités supplémentaires (international, multimédia, graphisme, vitesse, intégration entre communications plus puissantes et capacités de traitement locales plus forte), l’ergonomie nouvelle qui rend possible une utilisation documentaire, à laquelle le Minitel n’était vraiment pas adapté. Il ne s’agit pas non plus de sous estimer les progrès dans la facilité et agrément de l’utilisation, ni le fait que l’effet de ces progrès sera d’autant plus sensible que beaucoup d’utilisateurs ont déjà effectué leurs premiers pas en télématique, sur le Minitel, justement. Mais il s’agit, par contre, de tirer quelques leçons, d’ailleurs de bon sens, de l’expérience du Minitel.

Avec l’évolution vers les techniques de l’Internet, les services sont aujourd’hui moins chers à créer. Il ne faut pas oublier pour autant l’équation économique : les coûts se sont en partie déplacés, notamment vers la conception graphique (voire sonore, vidéo,etc.) ; les coûts de fonctionnement et de mise à jour, souvent sous-estimés lors de la conception, de promotion, voire de vente demeurent ; les recettes ne sont pas évidentes. Il faut donc aujourd’hui comme hier, raisonner en besoin du client, en avantage pour le client ou pour l’organisation, faire l’effort d’une étude de marché, etc..

Quand on parle du Minitel, on parle en fait d’un ensemble de services, encore bien vivants, appuyés sur un parc de terminaux beaucoup plus répandus que le micro-ordinateur, malgré la diffusion déjà importante de celui-ci. Les services Minitel qui continuent (par exemple, les sites de commerce de vins), ont une sobriété et une efficacité, qui a, semble-t-il, transformé en atout la contrainte de la pauvreté du terminal. Enfin, grâce au système du kiosque, la perception de redevances à la consultation est possible.

Plutôt que penser à une substitution complète du micro au Minitel, et d’Internet au service Télétel de France Télécom, il vaut mieux penser coexistence et évolution conjointe.

D’autant plus que l’une des leçons des années Minitel, c’est le développement parallèle d’autres supports, comme le fax, les messageries vocales, aujourd’hui, la téléphonie mobile. Et il ne faut surtout pas oublier le développement de la bureautique (ainsi que des nouveaux services de façonnage de courrier) qui ont paradoxalement développé les possibilités d’utilisation du papier : mailings commerciaux, feuilles d’information, etc., ce développement parallèle de média différents s’est accompagné d’une spécialisation. En d’autres termes, ce qui compte c’est de travailler sur les solutions adaptées à chaque organisation, c’est aussi de résoudre en priorité les goulots d’étranglement dans un process, plutôt que de penser l’intégration complète. De ce point de vue, si on considère en priorité les possibilités techniques théoriques des nouveaux outils, si on se laisse fasciner par elles, on peut être amené à utiliser les capacités intégratrices d’Internet d’une manière régressive.

On peut illustrer ceci par un exemple appartenant au monde de l’édition scientifique : en 1995, le PDG des éditions Hermès expliquait l’usage qu’il faisait d’Internet. Ce qui le retenait alors de publier ses revues sur ce support, c ’était la difficulté de sécuriser des abonnements. Vendre

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article par article : impossible, non pas pour des raisons techniques directement liées à l’édition, mais parce que percevoir de petits chèques revenait à un prix prohibitif, dans le type d’organisation administrative qui était le sien. Par contre, Internet était utilisé en amont : dans le processus d’édition d’une revue scientifique, qui demande de faire circuler des propositions d’article entre un auteur et des référés, le courrier électronique permettait d’alléger et d’accélérer grandement les tâches de reprographie, de secrétariat, etc.6. Cet exemple nous semble bien illustrer le fait que les bienfaits d ’une nouvelle technique peuvent s’exprimer de manière très diverse selon l’organisation du service qui les met en œuvre.

Nous nous attendons donc à ce que continue, voire s’amplifie, la coexistence de plusieurs types d’outils, dans le paysage de la communication professionnelle. Inversement, dans le cas d’une entreprise ou d ’une organisation réfléchissant sur ses stratégies de communication, les exemples qui suivent rappellent qu’il faut savoir mettre un ensemble d ’outils au service de ses objectifs, dans un système de contraintes et de choix d’organisation particulier à chacun.

Avant d’examiner quelques enjeux dans les domaines du service, et du commerce électronique, nous voulons dire deux mots d’un problème de communication implicite lorsqu’il s’agit d’Internet (mais qui était déjà présent lorsqu’il s’agissait de mettre au point des services Télétel ou des progiciels de micro-ordinateurs). Dans le cas particulier d’Internet, on pourrait parler de la dialectique du lointain et du proche ! Dans la presse de grande diffusion, à la radio ou à la télévision, l’image d’Internet, c’est celle du grand large ! le « surf », la recherche non dirigée, l’ouverture à toutes les surprises et toutes les rencontres, monde immédiatement proche élargi à la dimension du Monde. Si ces usages existent bien, ils nous semblent être caractéristiques, soit du domaine des loisirs, soit de quelques activités professionnelles, comme l’intelligence économique, qui concernent indirectement beaucoup d’entreprises, mais n’acquerront pertinence et utilité qu’en se spécialisant et se professionnalisant.

Dans la plupart des usages professionnels de la télématique, il s’agira de services de proximité, qui complètent des relations existantes, dont l’usage résulte d’une prescription, etc.. Les services nouveaux ne seront connus et utilisés que s’ils sont promus, et n’en déplaise aux moteurs de recherche et autres annuaires, ceci se fera probablement grâce aux méthodes classiques de publicité, de notoriété, d’image, etc.

SERVICE AUX AGRICULTEURS

Les sites d’organismes de service aux agriculteurs que nous avons observé sont, pour le moment, essentiellement des « plaquettes » de communication institutionnelle, et n ’offrent pas ou peu de services en ligne (c’est moins le cas des sites des organismes de recherche appliquée, des instituts techniques, qui au contraire essaient de prolonger leur mission de documentation sur le Web, soit par la mise en ligne d’informations ou de brochures, soit par la diffusion de leurs catalogues). Il faut atténuer ce constat, par le fait que les “services” (notamment de conseil et d’appui technique) relèvent plutôt des Intranet accessibles à des abonnés. Ces services n’ont pas particulièrement vocation à figurer dans les annuaires de sites Web.

6 Menascé, Sami. PDG éditions Hermès. 1995. Projets d'édition pour l’Hypermonde. Communication au Club de l’Hypermonde, le 24/10/95, compte-rendu disponible sur www.coda.fr/HYPER/ .

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Ce qui existe déjà, à travers les services d’information que nous avons décrits plus haut, c’est un début de transposition des services d’information à courte durée de vie (météo, avertissements phytosanitaires ou pour l’irrigation, retours de résultats d’analyse) dont nous avons rappelé l’intérêt pour les agriculteurs sous leur forme « Minitel ».

Mais quel rôle d’Internet dans le domaine du conseil ? Dans l’attente d’informations factuelles sur ce rôle à venir, on peut rappeler quelques éléments destinés à la réflexion des organisations concernées :

Depuis le début de l’informatique agricole, il y a une dialectique entre l’informatisation individuelle des agriculteurs, celles de leurs techniciens, et les démarches d’informatisation utilisant la télématique que certains ont perçu comme plus collectives. Nous renvoyons à l’article « Le marché des logiciels pour agriculteurs et techniciens » [Wahl V., 1994], pour la description des conflits entre anciens et nouveaux acteurs du service, autour des outils de saisie et de gestion élémentaire des données, ainsi qu’à l’ouvrage de Sophie Taponnier et Dominique Desjeux [Desjeux D., Taponnier S., 1994] pour une réflexion sur les jeux d’acteurs qui leurs sont liés.

Jusqu'à l’apparition d’Internet, un équilibre s’était finalement établi, avec, sur le plan des outils, une spécialisation de la télématique dans le retour d’informations, et de la micro-informatique dans les domaines de la gestion de données, du calcul et du contrôle. L’échange de données par téléinformatique était pratiquement limité à l’échange entre les outils des techniciens et les serveurs de leurs propres organisations. Quant aux acteurs, ceux du développement agricole étaient finalement peu à même de prendre en compte, dans leur clientèle, l’existence d’un sous- ensemble informatisé, et de leur offrir les déclinaisons spécifiques de leurs services, qui valoriseraient les données propres de ces agriculteurs : il y avait, il y a encore sans doute, cinq ans après, un déficit de réflexion sur l’intégration de l’information dans les méthodes de conseil.

Or, c’est une des promesses d’Internet et du Web, que de faciliter l’intégration de la télématique et de l’informatique personnelle. De notre point de vue il y a là un danger : le déficit est dans la réflexion méthodologique. Ce serait sans doute une erreur que de croire que l’apparition de techniques « plus puissantes » pourrait suffire à résoudre le problème d’une meilleure prise en compte des situations particulières. De ce point de vue, l’engouement actuel pour « l’agriculture de précision » nous interroge : là encore, n’y a-t-il pas une tentative de résoudre un désir légitime d’individualisation du conseil par une fuite en avant technologique ?

La dialectique du conseil individualisé et du conseil standard s’exprimera donc sans doute dans les applications d’Internet dans ce domaine. On retrouvera peut-être également des tentatives d’organismes divers (recherche, agrofoumiture) pour établir une relation de conseil ou de recherche documentaire directes, en s’affranchissant de la médiation des techniciens des organismes de développement, des coopératives, ou des documentalistes, etc. (cf. aussi le livre de Dominique Wolton).

Ceci nous ramène à ce qui nous paraît être l’enjeu véritable : il s’agit de raisonner les systèmes éventuels de « conseil assisté » ou d’enrichissement, par l’information, des services de conseil, destinés aux agriculteurs dans une approche globale de l’offre de service : des systèmes télématiques libérant les agents au contact des agriculteurs de tâches fastidieuses, et leur permettant de consacrer davantage de temps à la relation et à l’adaptation du conseil aux situations spécifiques, sont sans doute à la fois plus accessibles et plus porteurs d’avenir que

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des systèmes trop sophistiqués, ne tenant pas compte de la réalité des relations et des pratiques de chacun.

COMMERCE ELECTRONIQUE EN AGRICULTURE ET DANS L’AGRO- AIJMENTAIRE

Le commerce électronique est l’une des applications les plus médiatisées de l’Intemet, bien qu’il ne l’ait pas attendu, avec, en France, dans le domaine de la VPC des applications anciennes et efficaces sur le Minitel, et dans le domaine de l’automatisation des échanges inter­entreprises de données et de documents commerciaux, un développement de l’EDI dès le début des années 1990. Par ailleurs, il s’agit d ’un domaine vital pour les entreprises.

Pour ces raisons, il faut remettre en perspective les différentes applications et les outils de leur informatisation. Nous essaierons ensuite de nous rapprocher d’un point de vue plus prospectif, à partir d’exemples qui nous semblent révélateurs des difficultés et des potentialités réelles du Web et de la télématique en général, ainsi que de la « bonne manière », pour une entreprise, d’aborder le problème de la place de la télématique dans sa stratégie.

Le commerce électronique, ses acteurs et ses outils. La place du Web.

Commerce pour les particuliers, ou commerce entre professionnels ?

L’observatoire du commerce et des échanges électroniques, mis en œuvre conjointement par l’Association française pour le commerce électronique (A FC EE)7 et EDIFRANCE 8, et dont les résultats sont disponibles sur le site de cette dernière ; relevait en juin 1998 [Edifranee-Afcee, 1998], sur la base d’une enquête statistique, que 39% des entreprises de plus de dix salariés utilisaient le commerce électronique (Internet, le Minitel, l ’EDI9, les échanges de formulaires électroniques, etc..). Parmi celles-ci, 61% n’utilisaient les outils du commerce électronique que pour de la diffusion d’information, 33% pour les achats, 32% pour les paiements, et 18% pour les ventes. 98% utilisaient le commerce électronique avec d’autres entreprises (échanges Business to Business, « B to B », selon la terminologie anglaise) et seulement 2% avec le grand public (Business to Consumer, ou , « B to C »). 11 n ’y a pas de raison de penser que les entreprises agricoles et agro-alimentaires réagiront autrement. Pendant sans doute encore longtemps le commerce électronique concernera les échanges inter-entreprises.

Comme on vient de le voir, le Web n ’est qu ’un des outils du commerce électronique.

Il ne faudrait pas que le Web soit l’arbre qui cache la forêt. Les modifications massives dans les manières de produire et de vendre feront appel à toujours plus d’information transmise par les réseaux informatique, mais de façon invisible pour l’observateur extérieur.

^ www.afcee.asso.fr

8 www.edifrance.asso.fr

9 Echanges de données informatisées ; selon la définition qu’en donne l’observatoire EDIFRANCE-AFCEE, il s’agit de la “ Transmission d ’application à application, de données structurées selon des messages préétablis et normalisés via un moyen de télécommunication. ”

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L ’EDI, dont nous avons rappelé la définition ci-dessus, s’implante rapidement dans l’industrie et le commerce de gros alimentaires, sous la pression de la grande distribution et de la restauration collective. Au contraire de la mise à disposition d’informations sur le Web, qui s’effectuent selon de grandes variations de formes (les graphistes y jouent notamment un grand rôle pour différencier les sites de communication des entreprises, l’EDI est le domaine des échanges d’informations répétitives et en nombre, parfaitement codifiés : bons de commande, factures, bons de livraison et autres documents de suivi logistique, dont les grands distributeurs automatisent la gestion, réalisant dans certains cas une véritable « industrialisation » des entreprises commerciales. Il s’agit notamment des cas où les produits sont suffisamment standardisés pour que l’on puisse distinguer la négociation sur les prix, de l’acte d’achat lui- même, matérialisé par la commande. Enfin, grâce au code à barres et aux méthodes de lecture optique, les distributeurs peuvent intégrer les commandes et la gestion de stock, voire procéder à des ordres de réapprovisionnement automatiques, déclenchés par le garnissage des rayons. Nous nous trouvons donc, à des degrés divers, dans le domaine des approvisionnements en flux tendus, et de la réactivité aux comportements des clients, que les distributeurs appellent l ’ECR10,

Que l’on mette l’accent sur l’accroissement de pression sur les producteurs auxquels aboutissent ces nouveaux modes d’organisation commerciale et logistique, ou au contraire sur les possibilités inédites de coopération entre distributeurs et industriels (à travers l’exploitation des données de comportement des consommateurs, en matière de pilotage par l’aval, en matière de traçabilité, etc.), ces méthodes et ces techniques accompagnent sans doute des changements importants, à suivre avec attention. Mais là encore, considérer que ce sont les techniques et les outils qui seraient moteurs risquerait de rendre aveugle aux enjeux réels !

De manière plus générale, ce qui est sans doute en jeu, c’est l’accroissement des flux d’information qui accompagnent les flux de produits et de services. Nous avons parlé de la traçabilité [ACTA-ACTIA, 1998], rendue possible par l’identification précise des lots de produits finis , de matières premières, qui répond aujourd’hui au besoin de sécurité exprimé à la suite des crises sanitaires récentes, mais qui devrait également concerner la capacité pour un industriel, voire un agriculteur, à fournir des produits différenciés selon les qualités spécifiées par les différents clients.Il s’agit déjà, en quelque sorte, de produire ou au moins de livrer sur cahier des charges !

La pression commerciale ou organisationnelle se traduit-elle pour les entreprises, notamment les PME, par une pression technique auxquelles elles auraient des difficultés pour faire face ? Il ne s’agit pas de sous estimer le problème ; pour lequel il n’est pas, par ailleurs, de solution générale (ce qui justifie les actions de sensibilisation et de formation aux enjeux stratégiques de l’information autant des chefs d’entreprises que des agents des CCI et des administrations des collectivités territoriales ou de l’État) mais, dans le cadre limité du présent article, de donner deux éléments de relativisation :

- Il existe toujours plusieurs niveaux de réponse à mettre en œuvre, plus ou moins complets, plus ou moins porteurs de productivité certes, mais aussi plus ou moins rapides ou coûteux. Il y a quelques années, les organisations qui voulaient sensibiliser les entreprises à l ’EDI avaient un discours assez globalisant, insistant sur l’intégration et la remise à plat totale des systèmes d’information rendue incontournable, selon eux, par l’arrivée de la nouvelle technique. Des enjeux à ce niveau paraissent insurmontables pour beaucoup de P M E ... . Or, on s’est aperçu assez vite, que beaucoup d’entre elles se sont contentées de mettre en place

' ® « Efficient consumer response », en français : réponse optimale au consommateur.

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un terminal dédié et ainsi de répondre suffisamment à l’exigence des groupes de distribution, donc à la condition de leur survie11.

- Les grands prestataires de service (en premier lieu La Poste) accompagnent ces évolutions grâce à des offres d’intermédiation sophistiquées, qui permettent par exemple de recevoir sur papier un document que son auteur aura émis sous forme électronique. Voilà une autre façon de s’adapter à son propre rythme aux évolutions techniques.

Internet et notamment le Web sont d’ailleurs l’un des supports d’applications qui permettent à des PMI de venir plus facilement à l ’EDI (à travers des « formulaires électroniques », par exemple).

Le Web, facilitateur de la relation directe producteur consommateur ?

Le commerce électronique alimentaire vers le grand public étant un thème à la mode, il nous paraît utile ici encore, de donner quelques éléments de relativisation. Nous nous appuierons sur quelques données publiques de l’enquête du Benchmark group12 : celle-ci révèle une « explosion » du commerce sur Internet en France en 1998 (400 MF de chiffre d’affaires contre 42 MF en 1997), mais qui a profité de manière très inégale aux différents secteurs. L'informatique et les voyages ont représenté ensemble plus de 70% des ventes grand public en ligne en 1998, alors que les fleurs ont représenté 0,9% des achats, les vins et l’alimentaire chacun 0,7%. Le chiffre d’affaires mensuel moyen des sites est de 50 000 francs avec d'énormes disparités : les dix plus importants marchands français réalisent plus de 1 million de francs de ventes par mois. Le coût moyen de construction d'un site marchand a augmenté de 25% entre 1997 et 1998 : il est passé de 400 000 à 500 000 francs, etc. : les perspectives pour la vente de faibles volumes de produits alimentaires ne sont, pour le moment du moins, pas si larges!

Pour rester dans le registre de la prudence, rappelons que l’on ne s’improvise pas « vépéciste » (de VPC : vente par correspondance); il s’agit d ’un métier en soi (administration des ventes, logistiques des expéditions13 ) avec, probablement plus encore quand il s’agit d’alimentation, que de livres ou de disques, le besoin d’une médiatisation. Il ne s’agit pas ici de services d’achats courants à domicile qui s’adressent à une frange particulière de cadres urbains sur­occupés, mais plutôt de l’achat exceptionnel de produits gastronomiques, etc..

Les producteurs cherchant à toucher le « grand public » pensent peut-être que le fait d’alléguer leur lien à un terroir précis est susceptible de jouer en leur faveur... mais songent-ils, par exemple, au nombre de domaines viticoles ayant aujourd’hui un site ou une page sur le Web, soit directement, soit à travers de sites de regroupement comme celui des caves particulières (www.caves-particulières.com) ou d’organismes régionaux de promotion, etc., tous insistant sur

* * Il ne s ’agit pas pour nous d ’encourager à ce comportement. On sait que dans certains cas on ne rend pas service à une entreprise en l'aidant à différer une modernisation nécessaire. De là cependant à avoir sans arrêt un discours de Cassandre...

*2 Le commerce électronique sur internet en France. Février 1999. Principales conclusions, sommaire et bon de commande sur www.joumaldunet.com

13 y 0 jr pgj. exemp|e5 et pour rester parmi les nouveaux acteurs du net, « Chateaunet », www.chateaunet.com qui prend en charge non seulement les fonctions de paiement et de logistique, mais aussi les aspects fiscaux et douaniers pour l’exportation, et fédère une quarantaine d ’entreprises viticoles indépendantes, sélectionnées pour le rapport qualité prix de leurs vins. On trouve une description de ce service et de ses aspects les plus novateurs dans « les électrophées », fiches de présentation des entreprises nommées, Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie. Brochure éditée à l’occasion de la « fête de l’Internet », 19 mars 1999.

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leur propre lien au terroir, à la tradition, etc. Lorsqu’on achète des produits alimentaires ailleurs que dans la distribution classique, c’est souvent parce qu’on cherche un contact direct avec un vigneron auquel on fera confiance ; on médiatisera le choix, ce qui me paraît contradictoire avec l’achat direct sur Internet.... ou bien on fait confiance au caviste, au Savour Club, voire à de nouvelles entreprises créées pour le Net, comme « Paniers » [Menanteau J., 1999], ou « Chateaunet » (www.chateaunet.com, cf. note page précédente) et on revient au modèle de la sélection pour un professionnel qui bâtit son image sur la qualité de cette sélection, et finalement de la VPC professionnelle. La capacité de créer une marque, d’obtenir la confiance de l’acheteur à travers sa sélection de produits, constitue probablement l’un des facteurs critiques de succès ou d’échec pour les futurs commerçants en ligne. Paradoxalement, cela tend à diminuer l’espace de la vente directe. Qui n ’a éprouvé un sentiment d’absurdité rétrospectif, pour s’être entendu demander au producteur : « mais il est bon votre produit, vous me le garantissez ? »,

Qu’il y ait des « success stories », qu’il en apparaisse chaque mois de nouvelles, à propos de la vente par Internet de produits de terroir, qu’il y ait eu dans ces cas un impact réel sur la trajectoire de certains acteurs, sur leurs conditions de vie, il ne s’agit pas de le nier. Et pourquoi pas le site Internet offrant la possibilité de perpétuer un lien né pendant les vacances, ou venant compléter et potentialiser d’autres relations. En 1992, après l’achat d’un pot de miel, au salon des produits fermiers, à Paris, en provenance des Causses, et ayant réglé par chèque, j ’ai reçu plusieurs relances et mailings. Ceux-ci ne se contentaient pas de m’envoyer un catalogue du même producteur, mais faisaient la promotion de toute une gamme de produits allant des conserves de viande aux herbes médicinales en passant par les boissons, proposés par plusieurs producteurs associés. Ils m’indiquaient dans quelle boutique je pouvais trouver ces produits à Paris, m’avertissaient de l’arrivée prochaine d’un camion et de l’opportunité de faire une commande, etc. Il paraît difficile qu’un site Web seul, parmi beaucoup d’autres, puisse produire plus d’effet qu’un filet qu’on se contente de laisser traîner dans le courant. Par contre, un site Web inséré intelligemment dans une stratégie globale de recherche et de fidélisation de clients, pourquoi pas.. Mais en termes de volumes d’affaires, cela devrait rester faible, sinon marginal. On peut s’interroger sur l’éthique de campagnes médiatiques aussi massives, comme celle sur l’e-business, en ce moment, quand on sait qu’elles portent sur des marchés de niches !

Peut-être, au contraire, avons-nous tort de nous étonner. D. Wolton [op. cit.] explique le pouvoir de séduction des nouvelles technologies de communication et notamment d’Internet, par l’utopie « d ’un monde ouvert, accessible à tous, et qui finalement donne une chance à chacun ».

Le Web et la présence internationale des entreprises

L ’Internet permet de s’ouvrir au monde entier ! Voilà l’un des slogans les plus souvent entendus.D’assez nombreux sites institutionnels proposent aux entreprises la possibilité d’ouvrir une vitrine sur les marchés internationaux, grâce à une fiche descriptive. C’est le cas notamment de deux sites spécialisés en agroalimentaire : celui des chambres consulaires de la région Rhône- Alpes et celui de la chambre régionale d’agriculture de Normandie.

La visite du site Web R3AP (Rhône-Alpes Agro-alimentaire Promotion) donne l’occasion d’entrer dans une vitrine de présentation des filières, des produits, des signes de qualité, ainsi que des entreprises de la région Rhône-Alpes. Le site comprend une partie commune, avec des informations statistiques, la liste des distinctions de qualité, etc. ainsi qu’une base d’informations sur les entreprises qui en concerne aujourd’hui plus de 160. Chacune d’entre

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elles est décrite par une fiche individuelle, déclinant un même modèle, comprenant une information très synthétique (quelques lignes de présentation générale ou d’historique, la liste des produits, les types de distribution visés, quelques chiffres clé). Si l’entreprise dispose d’un site Web en propre, un lien avec ce site est proposé. Enfin, le classique lien avec la boîte aux lettres de l’entreprise est remplacé par un formulaire type... géré par le service R3AP. Cette particularité découle de la stratégie de services choisie par l’organisation.

Il s’agit en effet d’éviter aux entreprises le souci de recevoir et répondre à des tentatives de prise de contact aléatoire, provenant de n ’importe quel pays, concernant n’importe quel sujet ou produits, et donc de leur permettre d’être présents, de ne pas laisser de courrier sans réponse.

Le site Web est également là pour accompagner les autres outils de promotion, notamment la présence dans des salons, en France ou à l’étranger, éventuellement en créant des pages spéciales pour ce type d’événement.

Séduire les importateurs ? Il faudra évaluer les retombées réelles. L’exemple de R3AP suggère qu’il ne suffit pas d’attendre le chaland , mais que le site Internet n’est qu’un outil supplémentaire de la promotion internationale, qui s’ajoute et ne concurrence pas la présence dans les salons, la recherche d’importateurs, de partenaires ou de représentants, etc.

Mais R3AP, en développant des services d’accompagnement à la présence sur le Web (notamment logistique de réponse aux e-mails, qui seront peu nombreux pour chaque entreprises, etc.) est déjà présent dans une autre stratégie : offrir des services à des entreprises qui ont consciemment choisi une stratégie de niche, etc.

Services aux nouvelles formes de commerce, enrichissement des circuits, niches

Premier exemple : une coopérative qui fournit un système de vente des céréales assisté pour les agriculteurs qui veulent s’investir dans la fonction commerciale.

Cette coopérative de collecte et d’approvisionnement de Poitou-Charentes a une politique commerciale qui distingue une prestation de base, à laquelle donne accès l’adhésion à la coopérative, et des services facturés en sus. Elle recherche une “optimisation de la relation” avec l’adhérent, dans laquelle la précision des relations contractuelles et qualité des services sont des éléments essentiels.

L’un de ces services porte sur la vente des céréales : il s’agit d’offrir aux agriculteurs, en alternative à la prestation de base d’achat des céréales à prix mutualisé, un service de vente assistée, qui leur permet de choisir le moment de la vente en fonction de l’évolution des cours. Ce service s’adresse à des agriculteurs qui possèdent, ou non, des capacités de stockage propre. Dans le deuxième cas, la coopérative stocke les céréales pour leur compte en leur facturant le stockage et les services rattachés.

Le service a existé avant Internet, utilisant le fax. En voici les principales caractéristiques :

des contrats très encadrés, passés avant la récolte, qui fixent la quantité concernée pour chaque produit, les modalités de déclenchement de la vente, la quantité minimum qui peut être vendue en une fois, la période concernée et les prix de chacun des services (stockage, séchage, transport, information sur les cours) ainsi que les délais de paiement.

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Chaque semaine, l’agriculteur abonné reçoit par fax une page d’information sur les cours par produit ; cette page comprend également le formulaire de mise en vente qu’il suffit à l’agriculteur de compléter et de retourner. Chaque renvoi d’ordre déclenche l’envoi d’une confirmation de la part de la coopérative.

La coopérative prévoyait de porter ce service sur un Intranet ; on voit que la logique d’interactivité et de personnalisation est tout à fait présente. Cette évolution technique, de plus, donnerait la possibilité d’adjoindre des informations techniques sur les approvisionnements, éventuellement personnalisés, et donc d’intensifier la relation, ce qui est le but de la coopérative. Mais on voit à quel point le contexte créé par la stratégie commerciale et de service de la coopérative est là pour donner sa cohérence à l’ensemble.

Deuxième exemple : un opérateur de marché aux enchères

La SICAMOB est une entreprise de mise en marché de produits agricoles (bovins, produits avicoles et d’aquaculture, céréales) implantée dans l’Ouest de la France (Bretagne, Vendée) depuis 25 ans. Elle y joue un rôle économique original et complémentaire des circuits de commercialisation traditionnels, en déclinant des formes diverses de marché aux enchères, physiques (avec présentation des lots) ou télématiques. Le volume annuel de transactions est de l’ordre d’un milliard de francs. Ce gestionnaire de marchés affiche d ’excellentes performances commerciales : prix supérieurs aux références régionale et nationale, parts de marché en constante augmentation. Nous allons voir que l’utilisation de l’information et des télécommunications est au cœur de son fonctionnement.

En moyenne, 26 marchés ont lieu chaque semaine (19 physiques , 7 télématiques). Les marchés physiques concernent exclusivement les bovins , tandis que les marchés télématiques portent sur les bovins (10% des transactions pour ces produits), la génétique bovine, les œufs, les poules, les lapins, les céréales, les truites d’élevage et les huîtres. L’accès aux marchés télématiques diffère selon les produits : libre dans le cadre d’une adhésion préalable pour les bovins, avec des engagements d’apport pour les œufs. Le vendeur reste maître de la décision de vendre, en définissant un prix de retrait sur les marchés télématiques, prolongement du droit de retrait sur les ventes physiques qui peut lui, être exercé directement. Par ailleurs, comme dans une vente au cadran classique, l’anonymat des enchérisseurs est préservé.

- les marchés avicoles, produits d’aquaculture et céréales fonctionnent en deux temps : une bourse télématique permet de faire un premier rapprochement des offreurs et acheteurs potentiels, ainsi qu’une pré-sélection; la transaction est ensuite terminée au téléphone. Les vendeurs sont des adhérents qui ont souscrit à une charte de qualité et bénéficient d’un encadrement technique. Cette garantie de qualité joue un grand rôle dans l’obtention de hauts niveaux de prix. Autre facteur explicatif: il s’agit pour les acheteurs, d’un marché de complément.

- le marché télématique bovin, au contraire, simule un véritable marché au cadran, en temps réel. Il en restitue autant que possible la dynamique: les acheteurs se connectent de chez eux à volonté pendant la plage de temps dévolue au marché, grâce à un terminal spécifique (“pupitre acheteur”) qui leur permet d’entendre le chef des ventes, de visualiser les “bougies” et de transmettre les enchères par impulsion). Le catalogue de chaque vente est transmis à l’avance aux abonnés au service d’enchères télématiques, (ce qui détermine la décision, pour un abonné, de se connecter ou non). La description du lot en cours de vente et l’évolution des enchères sont transmises en temps réel par Minitel. Les enchères concernent le prix au kilo de viande pour une qualité déclarée a priori : les éleveurs sont donc payés en

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fonction de ce prix de base et des résultats d’abattage qui permettent une correction. Ceci n’est possible que grâce à un cadre non ambigu de description des lots, et une méthode de réajustement du prix pour les cas de non conformité à la description figurant dans le catalogue (fruit d’un travail de concertation, mené à l’initiative de Porganisme avec les abattoirs et l’interprofession). Dans ce cadre, l’organisme assure également le suivi d’abattage, le paiement, le recouvrement de créances auprès de l’acheteur, et demande éventuellement des contrôles sur la validité des données.

Ce marché télématique concerne une population de négociants ou d’éleveurs d’assez grande taille, capables de remplir un camion (on retrouve l’importance de la logistique), alors que sur les marchés physiques, les animaux sont souvent apportés en tous petits lots, voire à l’unité.

Les marchés aux enchères physiques permettent, grâce à la concentration de l’offre, de procéder à des ré-allotements et offrent donc aux opérateurs (abattoirs comme négociants) la possibilité d’homogénéiser la qualité de leurs lots, sans coûts d’approche. Pour la version télématique, cette fonction de complément de lots permettant une homogénéisation existe également ; l’avantage est aussi fortement lié à la suppression ou la limitation des déplacements d’animaux.

Au-delà même des marchés télématiques, la gestion efficace ou innovante de l’information conditionne pratiquement toutes les étapes des différents processus, que ce soit pour :

- le fonctionnement des marchés eux mêmes,

- le suivi postérieur à l’attribution des lots (cas des bovins de boucherie vendus par télématique),

- les paiements et recouvrements, le traitement des 100 000 factures annuelles,

- l’utilisation des données par apporteurs dans le suivi commercial,

- la publicité des cours, l’argumentaire commercial basé sur l’évolution des prix.

- l’utilisation d’images vidéo pour certains marchés télématiques (génétique bovine)

Le savoir-faire spécifique et la capacité d’innovation sont liés en grande partie à un travail de normalisation de l’information (définition des lots de marchandises et de leurs conditions de vente). Enfin, la logistique est pleinement prise en compte, faisant l’objet d’une large gamme de services offerts aux apporteurs.

Les technologies de l’information jouent aussi un rôle au service de la notoriété et de la crédibilité de l’entreprise, données critiques dans ces métiers : c’est l’effet de vitrine, qui pourrait justifier un passage au multimédia, donc aux technologies du Web, pour des raisons de présentation. Aujourd’hui, en effet, la sophistication des méthodes est en contraste apparent avec la sobriété de moyens, notamment le « bricolage » auquel peut faire penser le marché télématique de temps réel (mais ces solutions sont éprouvées, fiables et robustes, avec un niveau de sécurité élevé.) Ceci étant, ce moyens devraient évoluer dans les années qui viennent. En effet, la SICAMOB engage à titre expérimental, le développement sur Internet d ’une partie de ses marchés bovins. Elle s’est associée pour ce faire, avec un partenaire technique spécialisé dans les marchés électroniques et qui possède une gamme d’outils informatiques de mise en marché, facilitant les uns, les prévisions d’apport, les autres, la vente sur catalogue, la vente aux enchères en temps réel, ou encore la vente par appel d’offres.

Le cas de la SICAMOB offre donc sur une longue période, une passionnante illustration du principe selon lequel, en matière de gestion de l’information, l’innovation réside beaucoup plus dans l’utilisation de l’information et dans l’organisation de la chaîne de recueil et de traitement.

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que dans les outils eux-mêmes. Enfin, cet exemple montre aussi que pour qu’il y ait « commerce électronique », il faut pouvoir maîtriser de nombreux métiers plus « traditionnels » dans les domaines du commerce et du service aux clients.

CONCLUSION

L’agriculture et les entreprises de son amont, de son aval et de son environnement de service sont entrées il y a déjà longtemps dans la « société de l’information » et l’intégration de l’information dans la production et le commerce continuera de se développer. Il n’est pas douteux que l’informatique communicante, qui prend aujourd’hui la forme d’Internet et du Web est l’un des éléments majeur de cette évolution. Mais au delà de ce constat et de cette attente, nous avons voulu attirer l’attention sur le risque de répéter de vieilles erreurs, mais aussi sur l’actualité de quelques règles de bon sens.

Nous craignons en particulier que des discours trop complaisants sur l’autonomie de l’agriculteur (ou de l’entreprise agro-alimentaire) dans la recherche d’informations, face aux progrès de la science et au marché international (ou à la nébuleuse des consommateurs achetant par Internet), fassent perdre de vue l’enjeu des médiations, et du nécessaire enjeu collectif de leur mise en place. Le rôle des médiateurs (prescripteurs, consultants, CRITT et centres d’interface, centres d’économie rurale ou commissaires aux comptes, conseillers de chambre ou prestataires techniques...) nous semble déterminant. Les pratiques de prestation de services, évolueront, doivent évoluer pour mieux prendre en compte les enjeux de l’information. L’information ne devient vraiment ressource stratégique que lorsque les procédures et les instruments qui permettent de la traiter sont définis dans le cadre d’une réflexion plus globale sur la stratégie des entreprises. Cela paraît bien tautologique, mais il n’est malheureusement pas inutile de le répéter .

Connaître non seulement sa stratégie propre, mais aussi celle de ses clients ! Les exemples positifs qui illustrent les propos ci-dessus ont fait l’objet d’un positionnement attentif: qu’il s’agisse de prestataires pour une gamme de services identifiée s’adressant à des clients identifiés, ou de commerçants intégrés assumant le risque d’une sélection de produits et exerçant toute la gamme des fonctions commerciales , etc...

Au-delà de la performance individuelle de chaque entreprise, laissons nous provoquer par l’idée du travail en réseau. Il y a une connivence, au moins apparente, entre cet enjeu et l’apport spécifique d’Internet. Mais pour le travail en réseau, le facteur déterminant sera un travail de coordination, de négociation entre entreprises. Comme on l’a vu, les solutions techniques, Internet ou l ’EDI, n’apportent pas automatiquement les réponses, et les potentialités de la technique (plus grande fluidité, communications plus simples, plus agréables, plus efficaces, meilleure intégration avec les procédures de l’entreprise, etc.), ne pourront s’exprimer que si un travail d’organisation important est réalisé en amont.

L’aventure est donc, sans doute, moins dans des prouesses techniques, que dans notre capacité à inventer les modalités de réseaux d’entreprises de production et de services, animés par la recherche d’intérêts communs entre entreprises, agriculteurs, distributeurs, etc.

C’est donc sur l’importance de prendre en compte ces deux enjeux : la coopération inter entreprises, et l’utilisation stratégique de l’Information, que nous souhaitons conclure.

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Notes et Études Économiques MINISTERE DE L’AGRICULTURE ET DE LA PECHE

Direction des Affaires Financières Renseignements :

Sous-Direction de l’Évaluation, de la Prospective et des Études - tél : 01.49.55.42.09 78, rue de Varenne - 75349 Paris 07 SP

Diffusion :Service Central des Enquêtes et Etudes Statistiques

Service des ventes - BP 88 31326 - Castanet Tolosan cédex

Prix : 65 F

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■ Internet et téléservices en agriculture et dans Pagroalimentaire

■ Agenda 2000 : les conséquences de l’accord de Berlin pour l’agriculture française

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Ré p u b liq u e Fr anç aise

M I N I S T È R E

DE L’ AGRICULTURE

ET DE LA PÊCHE

ÊD i r e c t i o n d e s A f f a i r e s F i n a n c i è r e s

Sous-Direction de l’Évaluation, de la Prospective et des Études

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NOTES ET ÉTUDES ÉCONOMIQUES

Directrice de la publication : Mireille RIOU-CANALS, DAF

Rédacteur en chef : Philippe BOYER, DAF

Membres du comité de lecture :

E r ic BARDON, SCOMAlain BLOGOWSKI, DAFBernard DECHAMBRE, DAFMagali DEMOTES MAINARD, DAFYves GEFFROY, DEPSEDenis HAIRY, DAFHervé LE GALL, DAFOlivier MARTIN DE LAGARDE, DERFJoël MATHURIN, DPEIEvelyne SIROTA, DAF

Composition : DAF/SDEPEImpression : Ministère de l’agriculture et de la pêche

Dépôt légal : à parution

ISSN : 1275-7535

Renseignements et diffusion : voir page 4 de couverture

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AGENDA 2000 :

LES CONSÉQUENCES DE L’ACCORD DE BERLIN

POUR L’AGRICULTURE FRANÇAISE

Christophe Blanc, Joël Mathurin, Alain Blogowski, Monique Dehaudt

Bureau de l’Analyse Economique et de la Prospective (DAF)

Bureau d ’Étude des Concours Publics à l’Agriculture (DAF)

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L’ESSENTIEL DE L’ARTICLE

Après la première réforme d’envergure de 1992, la PAC devait encore faire face à des contraintes nouvelles ou renforcées, et se préparer à l’approche d ’enjeux importants : reprise des négociations multilatérales sur l ’agriculture, débats sur le niveau des contributions financières de certains États membres, croissance de la production supérieure à celle de la demande intérieure, prochaine intégration des pays d ’Europe centrale et orientale, perspectives « prometteuses » des marchés m ondiaux...

Le contenu de l’accord agricole signé à Berlin en 1999 laisse prévoir une stabilisation de la dépense agricole (politique des marchés et actions agricoles structurelles) à 40,7 milliards d ’euros en moyenne sur 2000-2006 soit à un niveau proche de celui observé en 1999 (*). Le financement de ces dépenses par les États membres devrait connaître quelques ajustements, aboutissant à une répartition de l’effort budgétaire entre les États membres plus conforme à leur prospérité économique relative. Ainsi, en dépit de la forte progression des versements à l’Italie (sous l ’effet de la croissance des aides directes aux produits et de la nouvelle répartition des mesures structurelles), le solde net de ce pays baisse notablement. Il en est de même pour la France et, dans un moindre proportion, pour la Belgique, le Danemark, les Pays-Bas et l’Irlande (qui sort de la zone privilégiée dans les actions structurelles).

Les mesures adoptées en matière de politique des marchés agricoles, dans la lignée de la réforme de 1992, visent à rapprocher davantage les prix européens des prix extérieurs afin d ’accroître la compétitivité des productions communautaires. L ’impact de ces baisses de prix sur le revenu des producteurs est amorti par une nouvelle augmentation des aides directes. Un nouveau règlement de développement rural modifie les zonages mais reprend les principaux objectifs de la politique structurelle précédente, tout en accentuant nettement le volet agri-environnemental.

Ces mesures pourraient entraîner une baisse de 7% du revenu disponible moyen des exploitations agricoles françaises. La diminution est plus accentuée pour les exploitations productrices de céréales et d ’oléo-protéagineux (-23%), toutefois, la simple poursuite de la tendance antérieure de la croissance des rendements suffirait à annuler cet impact négatif des nouvelles mesures communautaires.

Les États membres sont autorisés à limiter le m ontant des aides directes allouées aux agriculteurs. Dans l’objectif d ’une répartition des concours publics plus équitable et tenant davantage compte des fonctions peu ou pas rémunérées par le marché assurées par les exploitations agricoles, la France a décider de pratiquer une « modulation » des aides en fonction de la dimension économiques des exploitations, et d ’en affecter le produit au cofinancement des contrats territoriaux d ’exploitation. La « modulation » qui devrait redistribuer ainsi 1 milliard de francs en « régime de croisière » affecterait 14% des exploitations françaises, à hauteur d ’un prélèvement moyen de 17 000 francs par exploitation contributrices, représentant 5% de leur revenu disponible.

(*) Note de la rédaction : les données budgétaires de cet article découlent de prévisions réalisées en avril 1999.

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AGENDA 2000 : LES CONSÉQUENCES DE L’ACCORD DE BERLIN POUR

L’AGRICULTURE FRANÇAISE

POURQUOI UNE NOUVELLE R E FO R M E ? LE DIAGNOSTIC DE LA COMMISSION EUROPEENNE.

Le 21 mai 1992 la première réforme d’envergure de la Politique Agricole Commune, créée 35 ans plus tôt, était adoptée par le Conseil des Ministres de l’Agriculture des douze États- membres de l’Union européenne.A peine achevée, cette réforme était déjà remise en question. En décembre 1995, la Commission européenne présentait en effet au Conseil européen de Madrid un nouveau document de stratégie agricole. Dès cette époque, ce document insistait sur : « / ’importance d ’améliorer la compétitivité des secteurs agricole et agroalimentaire européens, tant sur le marché intérieur, que sur le marché mondial, dans le cadre d ’une libéralisation des échanges et du développement attendu de la demande mondiale de denrées alimentaires ». Il soulignait la nécessité d’une évolution supplémentaire de la PAC, par le développement de la politique que la réforme de 1992 avait permis d’initier, ainsi que celle d’une politique rurale intégrée. Il recommandait également une simplification « radicale » de la législation, ainsi que la décentralisation de la mise en œuvre des mesures politiques.Un an plus tard, en novembre 1996, le premier rapport sur la cohésion se prononçait en faveur d’un développement plus « rationnel » de la production agricole, et ce, par une orientation plus marquée des prix en fonction des exigences du marché et la poursuite de l’ajustement des structures. Parallèlement, l’UE devrait s’efforcer de renforcer le potentiel économique et la valeur environnementale des zones rurales, ainsi que leur capacité à créer des emplois viables. Sur la base de ces idées, la Commission présentait le 16 juillet 1997 le document intitulé « AGENDA 2000 » qui constituait une première série de propositions concrètes « en vue de refonder la politique agricole commune et de la préparer au siècle prochain ». Elle estime alors nécessaire « d’approfondir la réforme de 1992 », c’est-à-dire de poursuivre le passage vers les prix du marché mondial et de compenser partiellement les pertes de recettes par une augmentation des aides directes au revenu octroyées aux agriculteurs. Pour défendre son approche, la Commission met en avant les arguments suivants : risques de nouveaux déséquilibres des marchés européens pour les principales productions de l’Union ; perspective d’un nouveau cycle de négociations commerciales ; aspiration à une agriculture plus respectueuse de l’environnement et plus soucieuse de qualité ; convergence de nombreuses analyses prospectives pour anticiper une conjoncture favorable sur la plupart des grands marchés mondiaux de produits agricoles ; préparation de l’élargissement de l’Union à six, puis onze nouveaux Etats-membres.De son côté, le Conseil reprend l’essentiel de ces arguments et «reconnaît l’importance de la réforme de la PAC pour l’Agenda 2000 dans son ensemble, et notamment le nouvel élargissement de l’Union européenne, et pour les prochaines négociations relatives à l’agriculture dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC>>. Il estime, en

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outre, nécessaire «d’adopter les réformes qui répondent réellement aux défis auxquels est, et sera, confrontée la PAC, compte tenu des préoccupations des consommateurs, de l’environnement et du fait que certains Etats-membres ou régions sont tributaires de types ou de secteurs spécifiques de production, [.....]».

Ces réformes devront permettre de «promouvoir un modèle pour l ’agriculture européenne qui en tant que secteur économique, doit être multifonctionnelle. durable, compétitive et répartie sur tout le territoire européen, y compris les régions à problèmes spécifiques » (souligné par nous).

Organisation mondiale du commerce : l’Europe en position d’accusée

Depuis sa naissance, la Politique Agricole Commune s'est trouvée en position d’accusée par ses principaux partenaires commerciaux. Les longues et difficiles tractations lors du dernier Round du GATT (l’Uruguay Round qui a duré près de sept ans, de 1986 à 1993) le démontrent. L'accord signé à Marrakech le 15 avril 1994, et qui a pris effet le 1er juillet 1995, impose à la PAC (pour la période 1995-2000) certaines contraintes :

1 imitation du volume de soutien à l'agriculture (prix et aides),reconnaissance des aides de la Politique Agricole Commune pouvant être remise en cause après le 31 décembre 2003 ("clause de paix"),modification de la protection extérieure aux frontières, c'est-à-dire transformation des prélèvements variables en droits de douane fixes et réduction de ces derniers étalée jusqu'en 2000,obligation d'ouvrir un accès minimum au marché européen,réduction des exportations subventionnées (volumes et crédits budgétaires)...

Ces accords deviennent progressivement de plus en plus contraignants pour les agriculteurs européens, notamment dans le secteur de la viande bovine (cf. tableau 20 en annexe).

Depuis 1995, l'organisation mondiale du commerce (OMC) a succédé au GATT. De nouvelles négociations vont s’ouvrir dans les prochains mois, malgré l’échec de Seattle. Dans ce cadre, la PAC va devoir répondre à de nouvelles exigences de nos partenaires (nouvelle baisse des subventions à l’exportation, ouverture accrue du marché européen aux produits des pays-tiers, diminution du montant global et modification de la nature du soutien interne à l’agriculture...).

Maîtriser les dépenses : un objectif commun à tous les États-membres

Le contexte économique européen conduit les Etats-membres à vouloir maîtriser les dépenses publiques, et notamment les dépenses agricoles. En outre, les pays qui contribuent le plus au financement de la PAC, comme l’Allemagne, revendiquent de plus en plus ouvertement un rééquilibrage de leur taux de retour (différence entre ce que versent les pays au budget communautaire et les sommes qui leur sont octroyées).

Une croissance de la production européenne plus rapide que la demande

Les résultats des études prévisionnelles réalisées - dès 1997 - par la Commission en matière d’évolution de l’offre et de la demande de produits agricoles aboutissaient à des excédents en forte croissance, notamment dans le secteur des céréales et de la viande bovine, si la PAC telle

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que définie en 1992 était poursuivie. Les raisons de ce déséquilibre croissant résident dans la poursuite rapide des gains de rendement (technologies, savoir faire accru,..), alors que, dans le même temps, la consommation intérieure n’est appelée à progresser que de façon limitée. La résorption durable des excédents nécessiterait donc : soit de développer la capacité exportatrice de l'Union européenne, soit d’encadrer strictement l'offre.

Les PECO : des marchés aujourd’hui, des concurrents demain ?

Pour les Pays d’Europe Centrale et Orientale (PECO), qui effectuent à des rythmes divers leur entrée dans l’économie de marché, des efforts d'adaptation très importants sont nécessaires à tous les niveaux et dans tous les secteurs. Bien que de nombreuses transformations soient déjà engagées, le rattrapage ne pourra réellement se faire qu'avec l'aide massive de l'UE.Pour le secteur agricole, les conséquences que cela suppose sur le budget communautaire seront étroitement liées aux écarts de prix qui pourraient subsister lors de l’entrée de ces pays au sein de l’Union. Dans ses analyses préparatoires à l'intégration des PECO, la Commission avance la nécessité de baisser les prix des produits agricoles sur le marché intérieur afin de les rapprocher de ceux pratiqués à l’Est. On peut toutefois observer que, déjà à l’heure actuelle, les prix payés aux producteurs agricoles sont, pour certains produits, et dans certains pays, égaux - voire supérieurs - à ceux perçus par les agriculteurs de l’Union. Les écarts les plus significatifs en terme de prix, abstraction faite des handicaps « hors prix » (qualité des produits, normes sanitaires, fragmentation de l’offre, ...), sont observables sur le lait et la viande bovine. Par contre, pour les viandes blanches et les céréales, les différences de prix sont moins marquées, voire inexistantes. Compte tenu du niveau des prix garantis décidés lors des accords de Berlin (cf. infra), il n’est pas évident que les écarts de prix entre les pays de l’Est et ceux de l’Ouest restent durablement en faveur des premiers.

Marchés mondiaux : des perspectives favorables ?

A l’époque où la Commission menait ses réflexions rappelons que, pour les principaux instituts mondiaux de prévision, les perspectives à long terme sur les principaux marchés agricoles se présentaient alors sous un angle particulièrement favorable pour les pays exportateurs. Les perspectives de développement de la consommation alimentaire, principalement dans les pays en voie de développement, liées à une possibilité limitée de développement de la production intérieure, devraient favoriser les échanges mondiaux pendant la prochaine décennie. Ces prévisions reposent sur l’analyse des deux facteurs essentiels qui influencent la demande de denrées alimentaires : la croissance de la population, et l’élévation des revenus. Or, les experts s’attendent à ce que la population mondiale augmente de plus de 85 millions de personnes par an entre 1995 et 2005. De plus, le développement de l’urbanisation influencera le schéma de la consommation alimentaire (croissance de la demande de céréales et de viandes blanches). Enfin, les perspectives de croissance des revenus mondiaux, en liaison avec la croissance économique, sont favorables, particulièrement dans les pays en voie de développement (rappelons que ces prévisions sont antérieures aux crises russes et asiatiques). Même si l’on peut anticiper un accroissement de la production mondiale de produits agricoles, celle-ci risque d ’être inférieure à celle de la demande. En effet, on devrait assister à une diminution de la superficie agricole utilisable, conséquence de l’augmentation de la pression foncière liée au développement urbain et à la raréfaction des ressources en eau douce, et à un ralentissement de la progression des rendements. Les prix des produits agricoles devraient donc rester soutenus jusqu’en l’an 2006, voire au-delà.

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Cette croissance des marchés mondiaux pourrait donc constituer une opportunité pour l'Europe agricole, notamment pour les productions céréalières, porcines et avicoles. Sur ces bases, jugées cependant nettement trop optimistes par de nombreux spécialistes de l’analyse des marchés mondiaux, la Commission en déduit que l'Union doit renforcer sa compétitivité afin d'être en mesure d'exporter au cours mondial.

Face à ces différentes contraintes, l'Union européenne se devait de réformer sa politique agricole commune. Schématiquement, le choix se posait alors entre :

Confirmer et renforcer l’orientation de 1992 vers une Europe agricole compétitive et ouverte sur le marché mondial et dont l'un des objectifs serait de maintenir sa position de premier exportateur mondial de produits agro-alimentaires. Cet objectif nécessitait de dépasser les contraintes de l’OMC, c'est à dire d’être en mesure d'exporter une partie de la production au prix mondial, sans restitution. Cette orientation impliquait une baisse des prix garantis et l’ajustement des aides directes à l'agriculture productive.Réorienter la nouvelle politique vers une Europe agricole dont la vocation serait de répondre en priorité aux besoins du marché intérieur. Dans ce cas, les exportations européennes seraient au maximum celles autorisées dans le cadre de l’OMC. Cette orientation conduirait à renforcer les moyens pour limiter l'offre.

Après deux ans d’âpres discussions, les quinze Etats-membres sont parvenus à un compromis qui renforce les orientations fixées en 1992. Les quinze chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne ont en effet signé, le 26 mars dernier, un accord global sur l’Agenda 2000 comprenant le financement de l’UE, la réforme de la PAC et des fonds structurels pour les années 2000-2006.

LES M ESURES ADOPTEES

Le cadre financier : 40,5 milliards d’euros pour la PAC

L’accord conclu à Berlin porte, pour la période 2000 - 2006, sur un montant de dépenses inférieur de 50 milliards € à celui initialement proposé par la Commission. Il maintient les dépenses en dessous du seuil de 1,27% du PNB, tout en permettant de consacrer près de 80 milliards d’euros pour les mesures liées à la pré-adhésion des PECO et à la préparation de l’élargissement, et 213 milliards aux actions structurelles.

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Les perspectives financières pour l ’Union

Millions d’euros - Prix 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006Rappel

1999Agriculture 40 920 42 800 43 900 43 770 42 760 41 930 41 660 40 440Dépenses de marché 36 620 38 480 39 570 39 430 38410 37 570 37 290Développement rural et 4 300 4 320 4 330 4 340 4 350 4 360 4 370accompagnement Dont transferts (1) 1 595 1 665 1 730 1 790 1 850 1 910 1 965Dont mesures d’accompagnement (2) 2 705 2 655 2 600 2 550 2 500 2 450 2 405Actions structurelles 32 045 31 455 30 865 30 285 29 595 29 595 29 170 39 030Fonds structurels 29 430 28 840 28 250 27 670 27 080 27 080 26 660Fonds de cohésion 2 615 2 615 2615 2 615 2515 2 515 2510

Autres politiques et réserves 15910 16010 15 920 15 830 15 990 16 150 16310 17 460Pré-adhésion 3 120 3 120 3 120 3 120 3 120 3 120 3 120Elargissement 0 0 6 450 9 030 11 610 14 200 16 780TOTAL 91 995 93 385 100 255 102 035 103 075 104 995 107 040 96 930

(1) Mesures financées auparavant par le FEOGA-Orienlation, à savoir : les indemnités compensatrices de handicaps naturels, les autres ex mesures 5a hors zone d ’objectif 1 et les ex mesures 5 b hors zones d ’objectif I.

(2) Mesures d accompagnement de la réforme de 1992, à savoir : pré-retraite, agri-environnement et boisement.

Source : In «AGENDA 2000» - Dossier réalisé par 1’apca - if 977-878 . Mai/Juin 1999,

Si le cadre financier adopté en mars 1999 permet d’assurer un niveau de dépenses de 40,5 milliards d’euros (en moyenne sur la période 2000-2006, et en monnaie constante) pour la mise en œuvre de la Politique Agricole Commune, on constate toutefois que le profil des dépenses liées au soutien des marchés présente la forme d’une courbe « en cloche » (augmentation de 36,6 à 39,4 milliards d’euros entre 2000 et 2003, puis décroissance jusqu’à 37,3 milliards en 2006), alors que le « deuxième pilier », avec 4,3 milliards d’euros, voit ses ressources maintenues constantes, et égales à environ 10% du budget agricole total.

Les nouvelles perspectives financières figurant dans les tableaux ci-dessous sont établies, rappelons-le, pour une période de sept ans (2000/2006), et en se fondant sur l'hypothèse que l'adhésion des premiers nouveaux Etats-membres interviendra dès 2002.

30 milliards d ’euros par an pour les fonds structurels

Destinés à soutenir les régions en retard de développement ou en reconversion, ou les pays dont le produit national brut (PNB) par habitant est inférieur à 90% de la moyenne européenne, les fonds structurels et de cohésion s’élèveront à 213 milliards d’euros (dont 18 pour le fonds de cohésion réservé à l’Espagne, à la Grèce, au Portugal et à l’Irlande). Les sommes disponibles pour les sept années à venir s’avèrent en définitive nettement inférieures à celles qui figuraient dans les premières propositions de la Commission (286 milliards), mais supérieures aux 200 milliards proposés par la France et les pays du Nord. Elles correspondent aux sommes effectivement dépensées au cours des sept dernières années1. Ces crédits, qui représentent en moyenne un tiers des sommes versées aux Etats-membres, constituent l’essentiel des ressources pour le Portugal (77%), l’Espagne (59%) et la Grèce (55%).

70% des fonds structurels, soit 136 milliards sur 7 ans, seront destinés aux régions en retard de développement dont le PIB par habitant est inférieur à 75% de la moyenne communautaire (objectif 1). Les zones relevant de l’objectif 2 (zones rurales fragiles, zones urbaines, zones en reconversion industrielle, zones dépendantes de la pêche) recevront 11,5 % des fonds (22,5 milliards d’euros). Enfin, l’objectif 3 (consacré exclusivement à l’emploi et à la cohésion sociale, sans délimitation géographique préalable) sera doté de 24 milliards d’euros.

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Estimation du poids des actions structurelles après Agenda 2000 (millions d ’euros courants - données annuelles moyennes)

DépensesTotales

Dont actions structurelles

Soit en %

Belgique 2 172 309 14%Danemark 1 583 114 7%Allemagne 11 467 4213 37%Grèce 6 512 3 588 55%Espagne 13 851 8 135 59%France 13 741 2 250 16%Irlande 2 720 495 18%Italie 10 294 4 376 43%Luxembourg 130 12 9%Pays-Bas 2 275 445 20%Autriche 1 573 250 16%Portugal 4211 3 260 77%Finlande 1 273 287 23%Suède 1 449 292 20%Royaume-Uni 7 436 2 376 32%CEE 13 587 0TOTAL 94 275 30 400 32%

Source : U A F / S D EPE / Bureau d ’étude des concours publics à l ’agriculture.

L’enveloppe qui sera attribuée à la France devrait se situer autour de 15 milliards de francs par an, somme équivalente à celle de Factuelle génération des fonds structurels. Enfin, on signalera que le total des aides annuelles reçues par un Etat membre au titre des fonds structurels ne pourra, en aucun cas, excéder 4% de son PNB. Cette disposition est destinée à éviter que le système n’explose avec l’arrivée des pays d’Europe centrale et orientale dont les situations économiques et sociales sont nettement plus dégradées que celles des actuels pays de l’Union. Elle répond également au souci des pays du Sud de l’Europe de ne pas voir les fonds structurels « glisser » massivement vers l’Est.

Des dépenses agricoles stabilisées

- Les crédits nécessaires au financement des dépenses liées à l’application de la Politique Agricole Commune (dépenses de marché) et des mesures d’accompagnement sont stabilisés à une moyenne de 40,7 milliards d’euros par an. En outre, le développement rural (hors mesures d’accompagnement et actions concernant les zones « objectif 1 »2 ) sera désormais financé, à hauteur d’environ 12,5 milliards € sur la période considérée, par la section Garantie du FEOGA, et non plus par la section Orientation (cf. tableau ci-dessus, chapitre « transferts »). Ce volet de la PAC, qualifié de « second pilier », est ainsi reconnu comme partie intégrante et indissociable de la politique agricole.

- La Commission et le Conseil des ministres de P ue sont invités à tenter de réaliser des économies supplémentaires pour que les dépenses totales pendant la période 2000-2006, à l'exclusion des mesures relatives au développement rural et des mesures vétérinaires, ne dépassent pas, en moyenne annuelle, 40,5 milliards d'euros. La Commission devra présenter au Conseil, en 2002, un rapport sur l'évolution des dépenses agricoles assorti, au besoin, de propositions appropriées.

^ Soit les régions considérées comme en retard de développement (soit les DOM pour la France).

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- La Commission devra entreprendre une révision générale du système des ressources propres, y compris au vu des conséquences de l'élargissement, et ce avant le 1er janvier 2006. Dans le cadre de cette révision, la question de la création de nouvelles ressources propres autonomes devra être également étudiée.

Peu de changements dans les contributions des différents Etats-membres

Avant d’examiner les modifications intervenues dans le système de financement du budget européen, rappelons que ce budget est -à l'heure actuelle - alimenté par cinq grandes catégories de ressources. Il s’agit, par ordre croissant : des droits de douane agricoles (0,7 milliard d’euros en 1998, soit 0,8% des ressources totales) ; des cotisations sucre et isoglucose pour 1,1 milliard (1,3%) ; des droits de douanes sur les autres produits, 11,1 milliards (13,3% des recettes) ; des ressources TVA (34,1 milliards, soit 40,9%) et des ressources PNB (35,9 milliards, 43% du total).

Maintien des ressources traditionnelles

Elles se composent des prélèvements agricoles, des cotisations sur la production et le stockage du sucre et des droits de douane. Ces ressources demeurent inchangées, mais le pourcentage retenu par les Etats-membres au titre des frais de perception (soit le coût forfaitaire estimé des frais de gestion) passe de 10% à 25% à partir de 2001. Le « manque à gagner » est transféré sur la ressource PNB (Produit National Brut). Cette mesure avantage les pays qui ont une forte activité portuaire, en particulier les Pays-Bas.

Baisse des ressources TVA

Le taux plafond passe de 1,16% de l’assiette en 1997 à 0,5% en 2004. Comme pour la rubrique précédente, le « manque à gagner » est également transféré sur la ressource PNB. Le basculement d’une partie des ressources calculées à partir des recettes TVA vers celles reposant sur le PNB représente un avantage de plusieurs centaines de millions d’euros pour l’Allemagne. Pour la France, cette modification entraîne également un gain d’environ 80 millions d’euros.

Ajustement du « chèque britannique »

Le financement du «chèque britannique» (2,5 milliards d’euros par an, en moyenne) sera, comme actuellement, réparti sur les autres Etats-membres en fonction de leur contribution assise sur la TVA. Deux ajustements mineurs contribueront à une baisse de 220 millions d’euros en 2006. Les participations de l’Allemagne, des Pays-Bas, de l’Autriche et la Suède au financement de cette «correction» seront progressivement diminuées. Ces baisses sont compensées par un accroissement de la contribution de tous les autres Etats-membres, et notamment de la France qui financera à terme à elle seule un tiers du «chèque britannique» (cf. tableau 2 en annexe).

Des économies pour l ’Allemagne, au détriment de l Italie

Toutes choses égales par ailleurs5, c’est-à-dire sur la base des produits nationaux bruts de l’année 1997, les modifications décrites ci-dessus se traduisent par une baisse sensible des contributions au budget européen pour quatre pays : l’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas et la

^ En fait, l’évolution du PNB des différents Etats-membres entre 1999 et 2005 permettra d’obtenir des ressources plus importantes. Les contributions effectives des Etats seront donc également différentes de celles calculées « toutes choses égales par ailleurs » (cf. estimations pages suivantes).

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Suède. Pour les onze autres elle augmente légèrement, voire fortement pour l’Italie qui finance à elle seule une part importante des économies allemandes. Pour la France, la contribution au budget de l’Union augmente de 1,6 milliard de francs (245 millions €), soit 2% par rapport à la situation de 1997. Cette légère progression est essentiellement imputable à la nouvelle répartition du financement du « chèque britannique », les modifications liées aux autres rubriques étant quasiment neutres.

Contributions des Etats-membres : les conséquences des accords de Berlin.

millions d’euros courants

Avant Après Variations

MA % MA % MA %Belgique 2 960 3,9 2 964 3,9 4 0,13Danemark 1 510 2,0 1 570 2,1 60 3,95Allemagne 21 590 28,3 20 481 26,8 -1 109 -5,14Grèce 1 165 1,5 1 185 1,6 20 1,72Espagne 5 113 6,7 5218 6,8 105 2,06France 13 290 17,4 13 535 17,7 245 1,85Irlande 726 1,0 725 0,9 -1 -0,10Italie 9 341 12,2 10 335 13,5 994 10,64Luxembourg 172 0,2 170 0,2 -2 -1,13Pays-Bas 4 738 6,2 4 404 5,8 -334 -7,04Autriche 2 022 2,6 1 922 2,5 -100 -4,93Portugal 1 015 1,3 1 011 1,3 -4 -0,39Finlande 1 069 1,4 1 114 1,5 45 4,21Suède 2 072 2,7 2 042 2,7 -30 -1,43Rovaume-Uni 9 625 12,6 9 729 12,7 104 1,08TOTAL 76 407 100 76 407 100 0 100

Source : d a f / s d e p e / b e c p a - Traitements b a e p

Ces résultats permettent, rappelons-le, d’évaluer toutes choses égales par ailleurs, les « gains » et les « pertes » que les nouvelles modalités de calcul des contributions apportent aux différents Etats-membres de l’Union. Ils ne doivent pas être confondus avec les évaluations des contributions effectives des différents pays après mise en œuvre des mesures prévues par Agenda 2000. En effet, outre la modification du mode de calcul des contributions, les accords de Berlin prévoient la mise en œuvre d’une série de mesures dont le coût budgétaire est loin d’être négligeable. Les résultats globaux de ces deux effets simultanés sont exposés dans le paragraphe suivant.L’augmentation d’environ un milliard d’euros de la contribution italienne au budget européen, et la baisse simultanée du financement allemand pour un montant presque identique, aboutissent à un sensible rééquilibrage des efforts contributifs, plus proches désormais des réalités économiques de ces deux pays.

Contribution au PNB de l’Union

Contribution au budget en 1997

Contribution au budget en 2000

Allemagne 26,0% 28,26% 26,81%

Italie 14,17% 12,23% 13,53%

France 17,22% 17,39% 17,71%

Source : d a f / s d e p e / b e c p a - Traitements b a e p

Baisse limitée du taux de retour français

L’accord signé en mars dernier par les quinze chefs de gouvernement de l’Union européenne se traduit, au niveau budgétaire, par une augmentation des dépenses de 17,5% par rapport à celles effectivement réalisées au cours de l’exercice 1997, et de 32% si l’on se réfère à la moyenne des paiements effectués au cours de la période 1994-1997 (cf. tableaux 3A, 3B et 3C en annexe

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pour plus de précisions). Alors que le montant global des dépenses augmente d’environ 24 milliards d’euros (70 milliards en moyenne sur la période 1994/1997, contre 94 milliards en moyenne sur les exercices 2000 à 2006), celui des crédits non répartis progresse de 5.4 milliards (46%), en raison principalement de la mise en place des aides pré-adhésion4.

L’évolution de la répartition des paiements aux différents Etats-membres met, quant à elle, en évidence :

- une très nette progression des retours dont bénéficierait l’Italie (+53% entre la période 1994- 1997 et les années 2000-2006), sous l’effet conjugué de l’augmentation des aides PAC et des aides structurelles,

- une progression minime, voire un recul, pour la Belgique, le Danemark, les Pays-Bas et l’Irlande. Pour la Belgique, ce résultat est lié à la faible utilisation des mesures d’accompagnement, alors que pour le Danemark l’explication réside dans la baisse des aides structurelles dont il serait victime. Les paiements à l’Irlande régresseraient de 3% du fait de sa sortie de l’objectif 1, et ceux aux Pays-Bas de 1% en liaison avec la fin du versement des aides exceptionnelles dont les agriculteurs hollandais ont pu bénéficier ces dernières années (peste porcine),

- des évolutions plus ou moins proches de la moyenne européenne pour les autres Etats- membres.

Si l’on compare les taux de retour5 calculés sur la base des réformes de l’Agenda 2000 et ceux des années 1994-1997, on constate qu’ils demeurent très élevés pour les quatre pays de la cohésion : 437% pour la Grèce, 333% pour le Portugal, 307% pour l’Irlande et 211% pour l’Espagne. On notera cependant que pour l’Irlande le taux de retour « Agenda 2000 » est en notable baisse par rapport à celui enregistré auparavant (415% en moyenne sur la période 1994-1997, contre 307% pour les années 2000 à 2006).Le Danemark passe du statut de bénéficiaire (taux de retour moyen de 113%) à celui de contributeur net (taux de retour anticipé de 81%). Malgré la forte augmentation de sa contribution au financement du « chèque britannique », la France enregistre une baisse limitée de son taux de retour (de 88 à 80%). La baisse reste également modérée pour l’Italie (de 85 à 78% ) et la Finlande (de 96 à 90%). Des quatre pays qui demandaient une baisse significative de leur contribution au budget de l’Union, seules la Suède et l’Allemagne enregistrent une légère progression de leurs taux de retour : de 54 à 57% pour la Suède, de 42 à 45% pour l’Allemagne. Inversement, l’Autriche et les Pays-Bas voient leurs taux de retour se dégrader. Pour ces deux pays, les effets positifs de la réforme du système des contributions au budget européen sont annulés par les conséquences financières de la réforme de la PAC.Les contributions nettes des Etats-membres (coûts supplémentaires pour les budgets nationaux) sont en progression pour tous les pays sauf la Grèce, l’Espagne et le Portugal qui bénéficient de l’aide accrue aux zones d’objectif 1 et des crédits dévolus au fonds de cohésion.

^ Les dépenses mentionnées ici, soit 94 milliards d ’euros, correspondent à des évaluations effectuées par le Bureau de l’analyse des concours publics à l’agriculture. Elles sont légèrement intérieures à celles mentionnées précédemment dans le tableau récapitulatif des ressources financières de l’Union. Cet écart est lié à des différences méthodologiques dans les estimations. Citons notamment, pour les estimations du Ministère, l’exclusion des dépenses liées à l’élargissement, l’absence de réforme laitière, la reprise des crédits de paiement, et non ceux relatifs aux engagements,...^ C’est-à-dire le rapport entre les versements aux Etats-membres (ce que le budget de l’Union rembourse aux pays au titre des dépenses effectuées par les Etats) et les contributions (ce que les pays versent effectivement au budget de l’Union).

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Evolution des soldes nationaux (a)(Ecarts entre les prévisions Agenda 2000 et la moyenne des exercices 1994 à 1997)

millions € courants Contributions des pays (A)

Versements aux Etats (B)

Solde net (B --A) Taux de retour (*)

Belgique + 784 + 107 - 677 - 13Danemark + 602 + 39 - 563 - 33Allemagne + 4 067 + 2 602 - 1 464 + 4

Grèce + 424 + 1 580 + 1 157 - 26Espagne + 2010 + 3 746 + 1 736 - 11France + 4 568 + 2 690 - 1 878 - 8Irlande + 210 - 86 - 296 - 108Italie + 5 273 + 3 574 - 1 699 - 7

Luxembourg + 46 + 24 - 23 - 3Pays-Bas + 762 - 31 - 793 - 8Autriche + 956 + 629 - 327 0Portugal + 248 + 797 + 549 - 3Finlande + 680 + 578 - 102 - 5

Suède + 1 055 + 693 - 362 + 6Royaume-Uni + 2 992 + 1 741 - 1 251 3

(a) Les résultats détaillés, pour les deux périodes, figurent en annexe dans les tableaux 3b et 3c.(*) Evolution en « points », c ’est-à-dire écart entre le taux de retour actuel et le taux de retour estimé après Agenda 2000

Source : d a f / s d e p e / b e c p a - Traitements b a e p

Pour la France, le coût net des réformes prévus dans le cadre de l’Agenda 2000 s’élèverait à près de 2 milliards d’euros par an (environ 12,5 milliards de francs). La croissance des dépenses est également sensible pour le Royaume-Uni (1,25 milliard €), l’Italie (1,7 milliard) et l’Allemagne (1,46 milliard).

Pour l’Allemagne qui, pendant toute la durée des négociations, exigeait une baisse importante de sa contribution nette au budget communautaire, les résultats obtenus sont pour le moins modestes. Le « prix de la présidence » est donc très élevé pour le gouvernement allemand et cette exigence, non satisfaite dans le cadre des accords de Berlin, pourrait ressurgir à l’occasion des discussions qui vont prochainement s’ouvrir entre les quinze pour préparer les négociations à l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

En ce qui concerne la structure des dépenses, telle qu’elle ressort des accords signés en mars dernier, on peut remarquer que les allouées au « second pilier », c’est-à-dire le développement rural, restent dix fois plus modestes que celles octroyés au premier (les dépenses de soutien et d’orientation des marchés). In fine, les dépenses en faveur du développement rural resteront donc stables et ne dépasseront pas 4,4 milliards d’euros en 2005, contre 37 milliards pour les marchés. En outre, en dépit de l’inscription sous une même rubrique (la section Garantie du FEOGA) de ces deux catégories de dépenses, il importe de rappeler qu’un éventuel transfert de l’une (les aides « marché ») vers l’autre (les aides au développement rural et à la « multifonctionnalité) reste néanmoins impossible. L’étanchéité est en effet absolue entre les rubriques 1A et 1B. Cette impossibilité permet de dissiper les craintes maintes fois exprimées dans certains milieux professionnels, qui craignaient, à terme, une diminution sensible dessoutiens à la production agricole « stricto sensu ». Seule la « dégressivité » des aides directes^

^ La dégressivité des aides directes (proposée par la France lors des négociations AGENDA 2000, et finalement rejetée par la Commission) visait à prévoir et à organiser, pour tous les producteurs de l’Union, ce transfert progressif des aides «marché» vers des soutiens plus larges au développement rural. Le principe constituait à diminuer progressivement les aides directes aux produits et à réaffecter tout, ou partie, des sommes disponibles à des mesures de développement rural.

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aurait réellement permis une telle réorientation des soutiens publics, réorientation entreprise au niveau national dès cette année par l’intermédiaire des Contrats Territoriaux d’Exploitation. Enfin, il importe de signaler que les accords de Berlin n’autorisent pas le report d’éventuelles sous-réalisations une année donnée sur l’année suivante. Cette contrainte interdit donc également de pouvoir, éventuellement, mettre en place des stratégies de « montée en charge » pour certaines mesures.

La réforme de la politique agricole commune

Avant de décrire les principales mesures adoptées à Berlin au printemps dernier, il est nécessaire de rappeler que celles-ci demeurent très étroitement liées aux propositions initiales de la Commission. Ces propositions, dont les premières furent formulées dès juillet 1997, reposaient sur des perspectives pessimistes en ce qui concerne les principales productions de l’Union : les céréales, la viande bovine et les produits laitiers. Pour les cultures arables, le rapport publié par la Commission prévoyait des stocks d’intervention de céréales d’environ 60 millions de tonnes et un fort déficit commercial dans les échanges d’oléagineux. En ce qui concerne la viande bovine, après une embellie liée aux mesures de restriction de l’offre, il est également anticipé un nouveau déséquilibre entre l’évolution de l’offre (en hausse) et de la demande (en baisse). Il en résulte que les stocks d’intervention devraient avoir tendance à se reconstituer, pour atteindre environ 1,5 million de tonnes en 2005. Enfin, pour les produits laitiers, la Commission anticipe également l’existence d’excédents importants.

Afin de pouvoir augmenter les exportations sans subventions, les experts communautaires envisagent donc, entre autres mesures, une baisse importante des prix garantis afin de poursuivre leur rapprochement avec ceux du marché mondial. Schématiquement il était proposé : une baisse de 20%, en une seule étape, du prix d’intervention des céréales ; un alignement des aides aux oléagineux sur celles attribuées aux céréales ; un taux de gel obligatoire ramené à zéro ; l’exclusion du maïs fourrager des aides aux céréales ; une baisse de 30%) du prix d’intervention de la viande bovine ; une augmentation des aides compensatrices bovines (plus favorable aux bovins mâles qu’aux vaches allaitantes) ; des enveloppes nationales, dites « de flexibilité », dont la répartition resterait à l’initiative des Etats ; une baisse de 15% du prix d’intervention des produits laitiers compensée, partiellement, par des aides directes. Enfin, la Commission proposait une modulation et un plafonnement des aides directes par exploitation. Après deux ans de négociations les principaux éléments de la réforme ont finalement été adoptés.

Néanmoins, les baisses de prix sont inférieures à celles initialement proposées, la réforme laitière est repoussée de plusieurs années et le gel obligatoire reste à un niveau élevé. Globalement, les modifications apportées aux propositions initiales sont plutôt favorables aux agriculteurs français.

Principaux éléments sectoriels

Les mesures finalement sont résumées dans l’encadré page suivante (cf. annexe pour plus de précisions).Rappelons qu’en 1998, c’est-à-dire avant le compromis de Berlin, les trois premières organisations communes des marchés (COP, viande bovine et produits laitiers) absorbaient à elles seules les deux tiers des dépenses du FEOGA-Garantie (cf. graphique ci-dessous). Les soutiens directs accordés aux céréales, aux oléagineux, aux protéagineux et au gel des terres comptant encore pour près de la moitié du total. Toute réforme dans ce secteur conduit donc à

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des mouvements financiers très importants entre les Etats-membres et, au sein même des Etats, entre les systèmes de production (cf. infra).Les seules aides directes aux céréales (hors riz et indemnisation du gel obligatoire) ayant atteint la somme de 12 milliards d’euros en 1998, une augmentation de 17% de ces transferts (pourcentage résultant des accords de Berlin) conduit donc à une hausse d’environ 2 milliards d’euros (plus de 13 milliards de francs) des soutiens aux producteurs de céréales.Chaque pays, compte tenu de l’importance des différents secteurs végétaux et animaux au sein de son économie agro-alimentaire, est donc amené à défendre durant les négociations les réformes qui lui sont les plus favorables.

Structure des dépenses du FEOGA-Garantie en 1998

□ t o p□ iutres cultures□ Bovins £3 LaitM Autres animaux M Autres mesures

Source : DAF / SDEPE / BECPA. Traitements BAEP

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RÉFORME DE LA PAC : PRINCIPALES MESURES

Les cultures arables.Pour les céréales, la baisse du prix d’intervention de 15% interviendra en deux étapes, lors des récoltes 2000 et 2001 et sera compensée à 50%. Les aides directes seront majorées pour atteindre 63 € la tonne en 2001. L’accord prévoit la possibilité de réduire davantage le prix d’intervention à partir de 2002/2003 si la situation du marché l’exige. Le niveau du taux de jachère est fixé à 10% ; la dérogation pour les petits producteurs (moins de 92 tonnes) est maintenue. Le soutien spécifique accordé aux producteurs de maïs est préservé ; les Etats-membres peuvent mettre en place une superficie de base avec des rendements spécifiques maïs. L’aide spécifique attribuée aux cultures d’oléagineux sera ramenée au niveau de l’aide accordée aux céréales en trois ans : 81,74 €/t pour la récolte 2000 ; 72,37 €/t en 2001, et 63 €/t ensuite. La fécule de pomme de terre bénéficiera d’une compensation à 75% de la baisse de prix garantis, en échange d’une réduction des contingents (-7,6% pour les pays dont le quota est supérieur à 100 000 tonnes ; -3,8% pour les autres). Pour les cultures non alimentaires et le tournesol, la possibilité d’un soutien est ouverte dans le cadre des enveloppes développement rural ou du règlement agri- environnemental. La date de début de paiement des aides est désormais fixée au 16 novembre.

La viande bovine.La baisse des prix garantis est limitée à 20% (contre 30% proposés initialement proposés par la Commission) pour atteindre 2 224 €/t en 2002/2003. L’intervention publique peut être déclenchée par la Commission en cas de crise grave ; un filet de sécurité (sans limitation de volume) est instauré à partir du 1er juillet 2002 pour le cas où le prix moyen des bovins mâles dans un Etat-membre (ou une région) serait inférieur à 1 560 € la tonne. Le rééquilibrage des aides en faveur du troupeau allaitant se traduit par la revalorisation de la PMTVA (Prime au Maintien du Troupeau de Vaches Allaitantes) qui passe de 180 à 200 euros. En outre, le complément national à la PMTVA est porté à 50 € maximum. Le plafond de PMTVA est fixé à 3 779 886 têtes pour la France. La PSBM (Prime Spéciale aux Bovins Mâles) est portée à 210 € pour les jeunes bovins, et à 300 € , en deux versements, pour les bœufs. Le plafond national de PSBM est de 714 000 têtes et l’âge minimum d’éligibilité à la prime est fixé, respectivement, à 9 et plus de 21 mois. Le complément extensif est fixé, pour les années 2000 et 2001, à 66 € pour un chargement inférieur à 1,6 UGB/ha et à 33 € entre 1,6 et 2 UGB/ha. A partir de 2002, il sera de 80 euros au-dessous de 1,4 UGB/ha, et de 40 euros entre 1,4 et 1,8 UGB/ha. Une prime unique à l’abattage des gros bovins (80 € par animal) et des veaux (50 €) est instituée. Des enveloppes nationales complémentaires (93 millions d’euros pour la France) sont octroyées aux Etats-membres qui décident de leur répartition. La prime Hérode à la transformation des veaux est autorisée (sur financement national uniquement) et le plafond de 120 000 kg de quotas conditionnant l’accès à la PMTVA est supprimé.

Le secteur laitierLa mise en œuvre de la réforme de l’OCM lait, notamment la baisse de 15% du prix d’intervention des produits laitiers, est reportée de cinq ans par rapport aux propositions initiales de la Commission. Le système des quotas sera réexaminé en 2003. Les quotas sont prorogés au moins jusqu’en 2006. Des quotas supplémentaires (1,4 million de tonnes) ont été accordés a cinq pays : l’Espagne, la Grèce, l’Irlande, le Royaume-Uni et l’Italie. La modalité de gestion du régime des quotas est assouplie, en particulier dans le sens de plus de subsidiarité pour la gestion de la réserve nationale. Le lien entre le quota et la terre peut être distendu, à la discrétion de chaque Etat-membre.

Le secteur viticoleL’interdiction de vinifier les moûts importés des pays tiers et celle de couper les vins communautaires avec des vins importés des pays tiers sont maintenues. L’allocation des droits nouveaux de plantation aux Etats-membres est fixé à 2%. Le contingent de 68 000 ha ainsi obtenu est réparti en 51 000 ha à distribuer entre 2000 et 2003 (dont 13 565 ha pour la France), le solde est conservé en réserve par la Commission. Le réexamen des possibilités de plantations nouvelles dans l’Union est prévu en 2003, puis tous les trois ans. Le régime de reconversion du vignoble est intégré dans l’OCM, Un contingent de 55 000 ha est envisagé au niveau de l’UE. Les plantations nouvelles des jeunes agriculteurs pourront continuer à être primées dans ce cadre. Enfin, de nouvelles dispositions en matière de gestion du marché (notamment le dispositif de distillation de crise), de pratiques œnologiques et d’organismes de filière seront progressivement mises en place.________________________________________

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Ainsi, on peut constater (cf. tableau ci-dessous) que les producteurs français perçoivent globalement 24% des aides directes octroyées, avec cependant certaines productions pour lesquelles cette proportion est significativement plus importante. 11 en est ainsi des « grandes cultures », et tout particulièrement des protéagineux (53% des aides directes à cette culture sont versées aux agriculteurs français), des oléagineux (35% des versements) et des céréales (30%). Pour les aides animales, les éleveurs français sont particulièrement concernés par les primes au maintien des troupeaux de vaches allaitantes (32% des aides versées) et par les aides à Intensification. L’analyse, ligne par ligne, des versements aux différents Etats-membres permet de mieux comprendre les positions prises lors des négociations, ainsi que la nature des alliances possibles.

Structure des retours aux principaux Etats-membres (exercice 1998 en % du total UE)

Allemagne Espagne France Irlande Italie Pays-Bas Rov.-UniTotal aides directes 14% 15% 24% 3% 12% 1% 13%COP 22% 9% 32% 1% 9% 1% 12%Céréales 22% 9% 30% 1% 9% 1% 12%Maïs 15% 11% 19% 0% 41% 5% 1%Autres céréales 23% 8% 32% 1% 5% 1% 13%Oléagineux 19% 11% 35% 0% 16% 0% 12%Protéagineux 13% 3% 53% 0% 2% 0% 17%Gel 25% 14% 30% 1% 4% 0% 11%Coton 0% 24% 0% 0% 0% 0% 0%Lin et chanvre 2% 33% 37% 0% 0% 4% 14%Huile d’olive 0% 48% 0% 0% 23% 0% 0%Tabac 3% 12% 10% 0% 30% 0% 0%TOTAL BOVINS 8% 9% 25% 13% 5% 1% 26%Veaux 3% 0% 10% 0% 4% 7% 70%Vaches allaitantes 5% 14% 32% 12% 6% 1% 18%Bovins mâles 16% 6% 19% 18% 4% 1% 23%Extensification 6% 13% 30% 14% 3% 0% 23%Prime ovine 2% 27% 10% 7% 8% 1% 30%Autres aides directes 6% 27% 10% 2% 32% 4% 2%TOTAL FEOGA 14% 14% 23% 4% 11% 4% 11%

Source : DAF / SDEPE / BECPA. Traitements BAEP

De nouvelles mesures

Outre la réforme des principales organisations communes de marché décrite précédemment, la Commission a introduit, ou renforcé, une série de mesures dites « horizontales ». Il s’agit, notamment :

- Du renforcement des exigences en matière d'environnement. Les Etats-membres devront définir des mesures environnementales appropriées devant être appliquées par les agriculteurs, ainsi que des sanctions en cas de non-respect de l'environnement, comprenant notamment la réduction des aides directes (cf. infra « l’éeo-eonditionnalité »).- De l’instauration d’un système autorisant les Etats-membres à moduler, dans certaines limites (20% maximum), les paiements directs par exploitation, en fonction du nombre d'emplois sur l'exploitation, de la prospérité globale de cette dernière, ou du montant total des aides directes reçues (cf. infra). La disposition initiale qui prévoyait des plafonds d ’aides directes par agriculteur a été supprimée.

Les fonds provenant des réductions d'aides, suite à des contrôles ou à des modulations, sont mis à la disposition des Etats-membres, à titre d'aide communautaire supplémentaire, pour la mise en œuvre de mesures agri-environnementales, les départs en retraite anticipée, le reboisement, et les indemnités compensatrices de handicaps naturels (ICHN).

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Renforcement de la politique de développement rural

Un règlement unique pour l ’ensemble des zones rurales

Le nouveau règlement, qui en abroge neuf, a pour objectif général de faire reposer la PAC sur un deuxième pilier, en complément du premier qui, traditionnellement, est constitué par l’ensemble des interventions de soutien des marchés. Ce « second pilier » vise à la reconnaissance et au développement du rôle multifonctionnel de l’agriculture dans le monde rural, et la création de nouvelles activités et sources de revenus dans l’ensemble des zones rurales. Reprenant les principaux objectifs de l’ancienne réglementation, c’est-à-dire notamment l’adaptation structurelle des secteurs agricoles et sylvicoles, l’accroissement de la compétitivité des zones rurales fragiles et de meilleures pratiques agricoles par rapport à l’environnement, le texte les élargit à la production non alimentaire, couvre le bien-être des animaux, étend le renforcement de la compétitivité du monde rural à toutes les zones rurales et développe la protection par l’agriculture de l’environnement et du patrimoine rural.

Amorcé en 1992 avec les trois mesures d’accompagnement de la réforme de la PAC, le transfert des financements sur la section Garantie du FEOGA couvre désormais les aides dans les zones défavorisées, ainsi que toutes les autres mesures de développement rural en dehors des régions d’objectif 1. Globalement, ce sont 30,37 milliards d’euros qui sont inscrits au budget du FEOGA Garantie pour la période 2000-2006.

Neuf mesures principales

Sont éligibles aux cofmancements communautaires :

- Les investissements dans les exploitations agricoles. Succédant aux PAM (plans d’amélioration matérielle), les investissements peuvent être aidés chez les agriculteurs à titre principal, ou secondaire, qui recherchent une meilleure viabilité économique de leur exploitation tout en respectant, au moins, les normes minimales communautaires existantes en matière d’environnement, d’hygiène et de bien-être des animaux. Le respect de nouvelles normes dans ces trois domaines pourra également faire l’objet d’aides.

- £ ’installation des jeunes agriculteurs. Elle peut, comme aujourd’hui, être aidée à travers une prime unique et une bonification des intérêts des prêts contractés. Là encore, la viabilité économique du projet doit être démontrée. Le respect des normes minimales dans les domaines de l’environnement, de l’hygiène et du bien-être des animaux est progressif

- La formation. Le soutien aux actions de formation professionnelle couvrant les activités agricoles et sylvicoles et leur conversion est notamment articulé avec la réorientation qualitative de la production et la protection de l’environnement.

- La préretraite. Désormais basée sur la reprise de l’existant, l’obligation faite au repreneur d’améliorer ou d’agrandir l’exploitation n’est plus exigée, sauf si la viabilité économique de l’exploitation en dépend.

- Les zones défavorisées et les zones soumises à des contraintes environnementales.Accordé désormais par hectare de terres agricoles, le soutien est maintenu dans les zones soumises à des handicaps naturels. Il s’accompagne de l’obligation de respecter les bonnes pratiques agricoles habituelles. Il reste possible de maintenir une approche nationale, tout en appliquant une certaine modulation. Le nouveau règlement prévoit, parallèlement aux zones

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défavorisées, la possibilité de zones soumises à des contraintes environnementales découlant de la réglementation communautaire.

- L ’agri-environnement. Largement inspirée de l’existant, cette mesure est la seule qui soit d’application obligatoire dans tous les Etats-membres et dont le taux de coflnancement communautaire est fixé au niveau maximum (75% dans les zones objectif 1, 50% en dehors).

- L ’amélioration de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles. Le dispositif mis en place a pour objectif d’aider des entreprises dont la viabilité économique peut être démontrée et qui satisfont aux normes minimales en matière d’environnement, d’hygiène et de bien-être des animaux. Les critères de choix des investissements sont simplifiés et assouplis.

- La sylviculture. Les soutiens au secteur forestier sont renforcés sur la base de sa triple fonction économique, écologique et sociale. Reprenant les aides antérieures, tant au titre du boisement de terres agricoles que de celui en faveur des forêts des zones rurales fragiles, le soutien est étendu aux paiements en faveur des forêts écologiquement fragiles et de l’entretien des coupe-feu par des mesures agricoles.

- L ’encouragement à l ’adaptation et au développement des zones rurales. Des aides peuvent également être accordées à des mesures liées aux activités agricoles et à leur conversion et liées aux activités rurales, qui ne relèvent pas du champ d’application des mesures précédentes.

Une rapide analyse des données qui figurent dans l’avant projet de budget pour le prochain exercice (cf. tableau ci-dessous) permet de mettre en évidence le poids prépondérant des mesures liées à l’agri-environnement. En 2000, sur les 3,587 milliards d’euros prévus, plus de la moitié (1 938 millions € très exactement) sera consacrée à cet objectif. Les budgets définitifs n’étant pas définitivement alloués, ces chiffres sont encore indicatifs. En fait, les sommes disponibles pour l’exercice 2000 devraient être légèrement supérieures à cette estimation, et atteindre 4 milliards.

Développement rural - Avant projet de budget 2000 (chiffres provisoires).

Mesure Budget MAInvestissements dans les exploitations 93Installation des jeunes agriculteurs 108Formation 3Préretraite (nouveau régime) 203Préretraite (ancien régime) 35Zones défavorisées 500Mesures agri-environnementales (nouveau) 1 349Mesures agri-environnementales (ancien) 589Transformation et commercialisation 110Sylviculture (nouveau) 317Boisement 104Adaptation et développement des zones rurales 146Aides structurelles d’avant 1992 20Evaluation 10

TOTAL 3 587Source : Agra Presse hebdo du 10 mai 1999.

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Nonobstant une ouverture à toutes les zones rurales, le nouveau règlement développement rural ne contient que peu de mesures nouvelles. Pour l’essentiel, il reprend les mesures existantes, tout en les simplifiant considérablement.Outre les modalités de financement et de contrôle de l’utilisation de ces fonds qui évoluent également de manière significative (financement transféré de la section Orientation à la section Garantie du FEOGA), une innovation majeure se situe en terme de programmation. Il n’est en effet plus possible de conduire les mesures structurelles indépendamment les unes des autres. Il convient désormais de veiller à leur articulation et à leur cohérence d’ensemble. Ceci impose aux Etats de reconstruire l’ensemble de leurs dispositifs structurels et d’effectuer une programmation globale des mesures de développement rural qui seront mises en œuvre dans les Etats Membres. Ils disposent d’un délai de 6 mois pour réaliser cet exercice au travers de « Plans de Développement Rural » (PDR). Au niveau français, on soulignera que l’article 33 du nouveau règlement sur le développement rural comprend un certain nombre de mesures qui peuvent concerner des non-agriculteurs, comme par exemple la rénovation des villages, les services de base en milieu rural, le tourisme et l’artisanat. Le partage entre agriculteurs et non- agriculteurs pourrait, en conséquence, faire l’objet de vives discussions dans certains départements.

DES EFFETS LIM ITES, M AIS FORTEM ENT DIFFERENCIES, SUR LE REVENU DES PRODUCTEURS FRANÇAIS.

L’évaluation des conséquences potentielles sur le revenu des agriculteurs français des mesures adoptées le 26 mars dernier à Berlin permet de mettre en évidence l’impact différencié, selon les régions et les systèmes de production, des réformes envisagées.

Les aides directes augmentent de 8 milliards...

Réalisées à partir du modèle PECARI développé par le Bureau de l’Evaluation et de la Prospective de la DAFE (cf. annexe pour le détail des hypothèses retenues), les premières analyses conduites “toutes choses égales par ailleurs” (c’est-à-dire sans tenir compte de l’adaptation des producteurs au nouveau contexte économique, ni hypothèse sur l’évolution du nombre et de la taille des exploitations agricoles françaises), permettent de constater que les aides directes versées aux agriculteurs augmentent de 7,8 milliards de francs (tableaux 10 et 11 en annexe). Elles passent de 47,9 milliards aujourd’hui (en 1997) à 55,7 milliards au terme de la réforme. Cette progression conduit donc à un accroissement très sensible du poids des aides directes dans la formation du revenu. Alors que les subventions constituaient, en moyenne, 51% du revenu disponible des agriculteurs «professionnels» en 1997, ce pourcentage s’établit à 63% au terme de la réforme (abstraction faite de la réforme de l ’OCM laitière, dont les conséquences n’ont pas été simulées dans cet exercice). L’aide moyenne par hectare de SAU passe de 1 800 à plus de 2 100 francs au cours de la période étudiée.La croissance globale des aides directes est essentiellement liée à celle des aides en faveur de l’élevage bovin. Pour l’ensemble du secteur agricole, sur les 7,8 milliards de recettes supplémentaires, 5,8 proviennent de la revalorisation des aides « bovines » et environ deux milliards « seulement » de l’augmentation des aides directes aux céréales, (cf. tableaux en annexe pour plus de précisions).On notera que les aides à l’abattage nouvellement instaurées représentent près de la moitié de l’augmentation des aides bovines. Les primes au maintien des troupeaux de vaches allaitantes

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sont nettement revalorisées (+ 40% pour les primes de base) ce qui constitue, par rapport aux propositions antérieures de la Commission, une amélioration sensible pour les éleveurs français.Contrairement à la situation qui a prévalu en 1992, les aides directes aux « grandes cultures » ne progressent que très modérément (+ 6% en moyenne). L’alignement des aides aux oléagineux sur celles attribuées aux céréales, ainsi que la hausse modérée des compensations céréalières (cf. ci-dessus) expliquent ce résultat.

L ’évolution des aides directes

Milliards de francs courants 1997 réforme accomplie EcartTOTAL AIDES DIRECTES 47,90 55,72 7,82

COP 32,36 34,22 1,86Céréales 22,26 24,66 2,40Jachères 2,36 3,50 1,13Oléagineux, protéagineux 7,73 6,05 - 1,67

BOVINS 6,77 12,74 5,75Bovins mâles 2,10 3,01 0,91Vaches allaitantes 4,67 6,52 1,85Prime à l’abattage 0 2,59 2,59Fonds de flexibilité 0 0,61 0,61

Source : RICA 1997 - PECARI - DAF/SDEPE/BAEP

L ’évolution des aides directes, en moyenne selon les orientations de production

F. par exploitation COP Viandebovine

Lait Ensemble

Aides 1997 255 670 143 320 58 340 118 090Aides réforme accomplie 266 060 198 500 77 040 137 370Variation 10 390 55 180 18 700 19 280Aides / ha 1997 2 400 1 900 1 100 1 800Aides / ha (réforme accomplie) 2 500 2 700 1 400 2 100Aides / revenu 1997 94% 95% 32% 51%Aides / revenu (réforme accomplie) 126% 129% 42% 63%

Source : RICA 1997 - PECARI - DAF/SDEPE/BAEP

In fine, cette nouvelle réforme de la PAC conduit à un rapprochement marqué du poids des aides directes entre les producteurs de «céréales, oléagineux et protéagineux» et les éleveurs de «bovins viande». En effet, au terme de la réforme, les aides s’établiront, en moyenne, à environ 2 500 francs par hectare et constitueront près de 130% du revenu disponible pour ces deux catégories de producteursCes résultats ne doivent pas faire oublier l’existence d’un très grand nombre de producteurs pour lesquels les aides directes sont faibles, voire inexistantes. Même après les réformes décidées en mars dernier, on peut estimer à 60 000 le nombre d’agriculteurs «professionnels» pour lesquels les aides directes aux produits sont nulles. Ces aides sont inférieures à 100 000 francs par exploitation pour 170000 autres producteurs et comprises entre 100 et 200000 francs pour 90 000 agriculteurs supplémentaires.En résumé, 80% des agriculteurs « professionnels », soit environ 320 000 individus perçoivent moins de 200 000 francs d’aides directes aux produits par an. Sur les 48 milliards de francs octroyés globalement, ils en touchent 46%, soit près de 22 milliards. A l’opposé, environ 8 000 producteurs se partagent 5 milliards de francs.Alors que la réduction des aides directes risque fort de figurer au menu des prochaines négociations à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), les mesures adoptées dans le cadre d’Agenda 2000 seront très probablement fortement contestées par nos partenaires. Elles aboutissent en effet à une augmentation des paiements directs (indépendamment de leur

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« couleur7 »), maintiennent une différenciation entre les cultures (suppléments pour le blé dur et les protéagineux), et ne vont pas vers une simplification en ce qui concerne les aides à l’élevage. L’alignement d’une partie des aides aux « grandes cultures » (céréales, oléagineux et jachères) constitue néanmoins un pas vers le classement de ces soutiens en « boîte verte ».

La concentration des aides directes (*)

Source : RICA 1997 - PECARI - DAF/SDEPE/BAEP

Compte tenu du poids très important des aides directes dans la formation du revenu disponible d’un grand nombre de producteurs français, il paraît difficilement possible de réduire celles-ci de façon importante dans un délai rapproché. L’avenir semble plutôt être à une baisse très progressive des soutiens directs aux produits (dégressivité), un « découplage » accentué de ceux-ci, et une « montée en puissance » des aides « découplées » susceptibles de répondre aux critères de classement en « boîte verte » (agri-environnement, multifonctionnalité, GTE...) .

Mais le revenu global pourrait baisser de 6 milliards

L’augmentation globale de 7,8 milliards de francs du montant des aides directes octroyées aux agriculteurs français ne compense que 56% des pertes de valeur ajoutée que subirait l’ensemble du secteur. En effet, compte tenu des baisses de prix anticipées, la valeur des livraisons baisserait de 16 milliards de francs, dont plus de la moitié (8,4 milliards) est imputable aux céréales. Les ventes de viande bovine chuteraient, quant à elles, d’environ 6,7 milliards de francs. En dépit de la hausse des aides directes et de la baisse des charges (diminution du prix des aliments du bétail suite à celle des céréales et baisse des intrants liée à l’augmentation des terres non cultivées), le revenu disponible8 de la « ferme France » baisserait donc de 6 milliards

7 Les instances internationales, notamment l’OMC, s’accordent pour classer les soutiens à l’agriculture en trois catégories. Très schématiquement, les soutiens sont répartis dans trois « boîtes ». La boîte « verte », qui contient les aides censées ne avoir d’effets distorsifs sur les échanges ; la boîte « orange », constituée des soutiens qui perturbent fortement les échanges ; la boîte « bleue », résultat des négociations de l’Uruguay round ou figurent, à titre transitoire, les aides dont le rôle distorsif est intermédiaire. Selon la couleur des boîtes dans lesquelles elles figurent, les aides doivent être démantelées à des rythmes différents, cf. annexe pour plus de précisions.^ Le revenu disponible est égal au produit brut total, augmenté des aides directes, auquel on retranche la valeurs des charges réelles (hors amortissements) et les remboursements d’emprunts. Il s’agit donc du revenu dégagé par l’activité agricole dont peut disposer la famille pour vivre et investir.

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de francs, ce qui correspond à une diminution de 7% par rapport au revenu dégagé en 1997 (cf. tableaux 12 et 13 en annexe).Au-delà de ce résultat moyen il importe de souligner que la réforme des OCM lait et viande bovine s’avère, compte tenu des hypothèses retenues (cf. méthodologie en annexe), moins pénalisantes pour les producteurs français que la réforme des « grandes cultures ». En effet, les systèmes de production spécialisés dans la production de céréales, d’oléagineux et de protéagineux seront probablement conduits à fournir des efforts substantiels pour faire face à la baisse des prix de marché prévue. Si la diminution des prix payés aux producteurs s’établissait, comme pour les prix garantis, à 15%, leur revenu disponible moyen baisserait de 23%.

Agenda 2000 : Conséquences potentielles sur le revenu moyen par exploitation

Orientation économique Variation moyenne du revenu disponible

Céréales, oléagineux et protéagineux -23%Bovins-lait - 1%Bovins-viande + 2%Autres orientations - 4%Ensemble - 7%

Source : r i c a 1997 - p é c a r i - d a f / s d e p e / b a e p

L’ampleur de ces variations s’explique, en partie, par la situation de référence (l’exercice 1997) où les prix des céréales se situaient à des niveaux relativement élevés et où le taux de gel obligatoire n ’était que de 5%, contre 10% dans les dernières propositions adoptées en mars dernier. Un scénario alternatif reposant sur un taux de gel plus faible et des cours plus soutenus conduirait à des évolutions nettement moins défavorables (cf. infra). A contrario, on notera que les exploitations bovines verraient, en moyenne, leurs pertes de recettes totalement compensées par l’augmentation des aides directes, ce qui était loin d’être le cas dans les propositions antérieures de la Commission. Les revenus moyens ne varieraient quasiment pas dans ces orientations (-1% en bovins-lait, + 2% en bovins-viande).

Des régions moins touchées

La baisse moyenne - toutes choses égales par ailleurs - de 23% du revenu disponible des 64000 exploitations professionnelles spécialisées dans la production de céréales, d’oléagineux et de protéagineux (fréquemment rassemblées sous l’acronyme « COP ») correspond à une diminution de leur résultat moyen évalué à 61 800 francs par exploitation (à partir d’un revenu moyen de 273 300 francs en 1997), soit environ 600 francs par hectare. Au niveau régional, les différences sont sensibles. Le niveau des baisses relatives s’échelonne en effet entre 17% en Champagne-Ardenne et 32% en Auvergne.

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Variation de revenu disponible des exploitations spécialisées « céréales, oléagineux et protéagineux » en % du revenu de 1997

EnsembleAuvergne ........ .

Midi-Pyrénées fSBÊmtmmÊmmÊiiÊitiSliSiÿÊSillBliMÊMlMàMlil KÊÊÊÊÊMÊÊMmmmÊÊÊÈÊÊiÊiiimai ^^^m

Poitou-CharentesAlsace WBttSmÊBIÊNÊKiàMIÈÊlÈÈÊiÈIIÊM^ ^m3ÈÈiilÊÊÊMim^MÊiimmÊimmmÊtmÈm

Centre m i i í í i í b í í í ^ ^

Pays de Loire

BourgogneHaute-Normandie WIÊÊÊBSÆmÊÊÊÊÊmiÊiimmHÊmtÊÊÊtÊtÊÊÊÊmmmmMmmmmmmmmm

lie de France liüHiHMP

Rhône-Alpes i i i ï i i i i i i i i i h i ' n r i " ' i ' i a » i i a i i H i H M i i B W i w i i ^

Picardie WHkMSÊMMÊÈÊMÈÈËËÊÊÊHÊÊÊmBÊÊKSKÊÊMIÊÊKtlÊKKKÊÈÊHmMNÊÊÊÊm

AquitaineLorraine WÊÊBÊÊÊÊÊÈÊKN^miiiÊMÊÈMiËÊàMmËMÊÈIÊtÊIÊÊUÊKÊB

-35 -30 -25 -20 -15 -10 -5 0

Source : RICA 1997 - PECARI - DAF/SDEPE/BAEP

Outre l’incidence des écarts dans la valeur absolue des revenus initiaux (408 000 francs en Champagne-Ardenne, 182 000 en Auvergne), plusieurs explications se conjuguent En premier lieu, intervient le degré de spécialisation des exploitations. Ainsi, pour les producteurs auvergnats spécialisés dans la production de COP, les livraisons de ces cultures représentent 87% de la valeur des livraisons totales. Au niveau national le «poids» de ces productions n’est, en moyenne, que de 78%.Moins diversifiées, les exploitations auvergnates orientées vers la production de «grandes cultures» sont donc plus sensibles que leurs homologues à une baisse du prix des céréales. La place des oléagineux dans l’assolement apporte un second élément d’explication. Ainsi, les deuxième et troisième régions les plus sensibles à la réforme, Midi-Pyrénées et Poitou- Charentes (baisses respectives de 28 et de 27% du revenu disponible), se caractérisent-elles par un poids des livraisons d’oléagineux dans le total des livraisons de «grandes cultures» supérieur à la moyenne nationale (respectivement 27 et 22% contre 18%). Inversement les producteurs situés en Aquitaine, région où les oléagineux n’occupent que 6% de la sole cultivée, ne verraient leurs revenus diminuer «que» de 20%.Pour les 40 000 exploitations professionnelles françaises spécialisées dans cette production, la réforme de l ’OCM viande bovine adoptée récemment à Berlin se traduirait - en moyenne - par une augmentation de 2% du revenu disponible. L’augmentation des aides directes serait, en moyenne par exploitation, supérieure de 2 300 francs à la baisse de valeur ajoutée.Les régions où le revenu progresse le plus sont celles où, non seulement les élevages extensifs sont dominants, mais également celles où l’activité d’engraissement est significative. Ainsi l’Auvergne, où les exploitations se caractérisent par un chargement réel faible et par la détention d’un nombre important de droits à prime pour les vaches allaitantes et taurillons, serait la région où les revenus connaîtraient les plus fortes hausses (7 900 francs en moyenne par exploitation, soit 6% du revenu disponible). Dans une moindre mesure, la situation de la Bourgogne est comparable à celle de l’Auvergne.

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Variation du revenu disponible des exploitations spécialisées dans la production de viandebovine

8%

.1 o% X---- — ,------------------------------------------ -— —— „ --------------------------- — --------------------------— ------------- -— ------ ------------------ ----------------------------------------------- --------------

Pays de la Loire Limousin Centre Midi-Pyrénées Bourgogne Auvergne Ens orientation

Source : RICA 1997 - PECARI - DAF/SDEPE/BAEP

Les élevages intensifs des Pays de Loire subiraient une perte de revenu de 8% liée au faible nombre de leurs droits à primes bovins mâles, comparé à la taille de leur cheptel. En effet, ces exploitations de petite taille sont handicapées par la contrainte de chargement qui conditionne l’éligibilité à la prime aux bovins mâles. De plus, pour les mêmes raisons, le nombre de droits à prime “complément extensif’ dont elles bénéficient actuellement sera, compte tenu des réformes adoptées, diminué de moitié. Néanmoins, la moindre baisse du prix d’intervention et l’instauration d’une prime à l’abattage permettent de limiter fortement la dégradation des résultats de ces systèmes de production intensifs. La pérennité de ces exploitations était gravement compromise avec les propositions antérieures qui auraient conduit, rappelons-le, à des pertes de revenu évaluées à 45%.

La réforme laitière ayant été repoussée, il n’y a pas dans ces travaux de simulation de baisse du prix d’intervention dans l ’OCM lait. L’évolution du revenu des exploitations laitières est donc uniquement liée à la baisse des prix de la viande bovine et des céréales, et au niveau de compensation par les primes correspondantes. L’impact de la réforme sur les exploitations spécialisées lait est donc relativement faible au niveau national (baisse de revenu de 2%).

QUELLES MARGES D ’ADAPTATION ?

Vers une poursuite de l’agrandissement et de l’augmentation des rendements ?

Les résultats précédents font abstraction des adaptations que les agriculteurs pourraient mettre en œuvre, des évolutions structurelles qui risquent de se poursuivre (même si l’on peut escompter que le rythme de disparition des exploitations se ralentisse au cours des prochaines années) et reposent sur des hypothèses de marché relativement pessimistes (taux de gel de 10%

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et baisse des prix de marché de 15% pour l’ensemble des céréales). Pour le secteur des « grandes cultures », secteur sur lequel pèsent potentiellement les plus graves incertitudes, nous avons simulé plusieurs scénarios : taux de gel moins élevé, cours des céréales plus soutenus, poursuite de l’augmentation des rendements, baisse des charges et agrandissement des exploitations.Les résultats de ces différents scénarios (cf. ci-dessous) permettent de nuancer fortement les craintes exprimées par de nombreux acteurs de la filière. En effet, on peut constater que la poursuite des gains de productivité (hors travail) à un rythme identique à celui observé au cours des 20 dernières années permettrait - à elle seule - de compenser intégralement les baisses de recettes liées à celle des cours et à l’augmentation du taux de gel.Par ailleurs, une meilleure tenue du marché, qui permettrait de voir les prix payés aux producteurs se stabiliser à des niveaux supérieurs aux prix garantis et de limiter l’ampleur de la jachère, serait également de nature à limiter les conséquences négatives de la réforme sur le revenu des producteurs de COP.Enfin, si la restructuration de l’agriculture, bien que notablement ralentie (sous l’effet à la fois de raisons démographiques et du renforcement du contrôle des structures prévu par la nouvelle loi d’orientation agricole), continuait néanmoins à se poursuivre, l’augmentation des surfaces cultivées serait à l’origine d’un supplément de recettes. L’importance de ces recettes nouvelles sera fonction de l’éventuelle croissance de l’efficacité économique ainsi dégagée.

Le revenu des producteurs de COP : Impacts de différents scénarios.

AGENDA 2000 Augmentation de revenu liée au :Région Toutes choses égales par Scénario Scénario Scénario Scénario Scénario

ailleurs n°l n°2 n°3 n°4 n°5Ile-de-France -22% 21% 9% 5% 7% 12%Champagne-Ard. -17% 18% 9% 3% 5% 13%Picardie -21% 21% 12% 4% 7% 13%Haute-Normandie -22% 23% 13% 5% 7% 17%Centre -24% 22% 10% 5% 7% 16%Bourgogne -23% 23% 10% 4% 6% 19%Lorraine -19% 19% 8% 4% 5% 10%Alsace -25% 24% 12% 5% 9% 20%Pays-de-la-Loire -23% 21% 12% 5% 7% 22%Poitou-Charentes -27% 24% 12% 5% 7% 22%Aquitaine -20% 20% 12% 5% 8% 17%Midi-Pyrénées -28% 22% 12% 5% 6% 16%Rhône-Alpes -22% 22% 11% 5% 8% 24%Auvergne -32% 28% 13% 7% 10% N DFrance entière -23% 21% 11% 4% 7% 16%

Source : RICA 1997 - PECARI - DAF/SDEPE/BAEP

AUGMENTATION DE REVENU, A HORIZON REFORME ACCOMPLIE, LIEES AUXDIFFERENTS SCENARIOS

Scénario n°l : Progression des rendements de 2% par an.Scénario n°2 : Baisse de la valeur globale des charges de 5%.Scénario n°3 : Taux de gel limité à 5% de la SCOP 1997.Scénario n°4 : Baisse des prix payés aux producteurs (entre 1997 et le terme de la réforme) limitée à 10% (en francs courants) pour toutes les céréales.Scénario n°5 : Augmentation de la SAU des exploitations de « grandes cultures », entre 1997 et le termede la réforme, égale à la moitié de l’augmentation constatée entre 1991 et 1997. Tous les autres facteurs(rendements, charges, capital,...) restent inchangés.

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Tous ces éléments amènent à nuancer fortement les résultats obtenus à partir d’hypothèses peu optimistes sur les prix de marché à horizon 2006 et «toutes choses égales par ailleurs». De plus, il importe de garder en mémoire que la situation économique et financière des producteurs de «grandes cultures» s’est considérablement améliorée au cours des dernières années. Entre 1991 et 1997, le revenu moyen des producteurs concernés a progressé, d’après les données issues des comptes de l’agriculture, de 66% en francs courants (cf. tableau 14 en annexe). Les exploitations sont aujourd’hui, en moyenne, plus grandes, mieux équipées et disposent de fonds propres plus élevés qu’au début des années quatre-vingt dix.

LES MESURES NATIONALES

La modulation des aides directes

Les principes

En application de l’article 4 du règlement horizontal qui permet aux Etats membres de l’Union européenne de moduler les aides directes octroyées aux agriculteurs, le ministre de l’agriculture a annoncé le 18 novembre dernier la mise en application d’un tel dispositif à compter de la prochaine campagne (1999/2000). Le produit financier de cette modulation servira à abonder le fonds de financement des contrats territoriaux d’exploitation (CTE) au titre de dotations supplémentaires du FEOGA. Les mesures « développement rural » permettant de financer les CTE étant des mesures à cofinancement national, il est nécessaire de dégager, à partir du budget national, des sommes identiques à celles issues de la modulation.Les premières estimations liées au nombre de CTE dont le financement sera requis au titre de l’exercice 2000 font, à l’heure actuelle, état d’un chiffre d’environ 40 000. Sur la base d’un complément de financement moyen de 50 000 francs par CTE, il est donc nécessaire de dégager un budget annuel de 2 milliards de francs, dont la moitié (soit un milliard) sera issue de la modulation des aides directes.Pour la première année d’application, la modulation des aides directes sera fondée sur la combinaison de trois critères : le montant total des aides perçues par les agriculteurs (à l’exclusion toutefois de certaines d’entre elles : ICHN, « prime à l’herbe », aides agri- environnementales,...), l’emploi et la prospérité globale de l’exploitation mesurée au travers de sa MBS (Marge Brute Standard ; cf. annexe pour plus de précisions). Seuls les agriculteurs qui perçoivent plus de 30 000 euros (environ 200 000 francs) d’aides directes, et dont la MBS totale est supérieure à 50 000 écus9 (ce qui correspond à environ 60 hectares de blé dans la région Centre), entrent dans le champ d’application du dispositif. Au terme de la réforme, compte tenu de l’augmentation des aides directes, on peut estimer à environ 60 000 le nombre d ’entreprises concernées, soit moins de 10% des exploitations agricoles françaises.

■ Pour toutes les exploitations dont la MBS est supérieure à 50 000 écus, et pour lesquelles le montant des aides directes aux produits est supérieur à 30 000 euros, le dispositif s’appliquera de la manière suivante :

9 les derniers coefficients de MBS actuellement disponibles sont ceux calculés sur la moyenne des trois années 1993- 1994-1995. C’est la raison pour laquelle ils figurent dans les publications du SCEES sous le libellé : coefficients de MBS « 94 ». Ils sont donc, compte tenu de la période de référence utilisée, exprimés en écus. Leur actualisation est actuellement en cours et de nouveaux coefficients devraient être disponibles avant la fin de l’année.

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> Première étave : prélèvement de 3% sur le montant des aides directes qui excède 30 000 euros,

> Deuxième étape : prélèvement variable (cf. mode de calcul ci-après) sur le montant des aides directes qui excède 30 000 euros, après prise en compte de l’emploi. La prise en compte de Vemploi se fa it de la manière suivante :

* Pour les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC), et uniquement pour ceux-ci, le principe de la transparence sera appliqué. Concrètement cela signifie que le montant total des aides dont bénéficient les exploitations concernées sera diminué de 30 000 euros par associé actif avant de calculer le montant du prélèvement, et que la MBS globale sera divisée par le nombre d’associés actifs pour déterminer le taux de prélèvement effectif. A titre d’illustration, un GAEC composé de trois associés actifs ne verra ses aides directes réduites que si le montant global de celles-ci excède 600 000 francs (trois fois le seuil initial),

> Pour tenir compte de la présence de travailleurs salariés (permanents ou non), une déduction égale au montant des charges salariales (salaires et charges sociales) payées par le chef d’exploitation, et plafonnée à 22 500 euros, sera appliquée avant de déterminer « l’assiette modulable ». Pour les formes sociétaires autres que les GAEC, le même abattement de 22 500 euros est également applicable aux associés exploitants à titre principal.

> Enfin, un abattement de 7 500 euros pourra être attribué aux associés exploitants à titre secondaire, aux conjoints collaborateurs et aux aides familiaux.

Ces sommes viennent en déduction des aides directes réellement octroyées pour déterminer « l’assiette modulable », qui est donc égale à ;

Montant des aides perçues, moins S 30 000 euros par chef d ’exploitation, moins■S 30 000 euros par associé actif (en plus du chef d ’exploitation) pour les GAEC, moins■S 22 500 euros par associé exploitant à titre principal, moinsS charges salariales (plafonnées à 22 500 euros) par salarié, moins S 7 500 euros par associé exploitant à titre secondaire, moinsS 7 500 euros par conjoint collaborateur et par aide familial.

A cette «assiette modulable» est ensuite appliqué un taux de modulation, calculé ainsi :

Taux ( en % ) = 0,25 * [(MBS totale de l ’exploitation - 50 000) /100 000 ].

M odula t ion des a ides : m ode de ca lcu l du taux de modula tion

Taux = ( X - A ) / ( B - A )

Variable utilisée p o u r la m odulation : M arge B rute Standard globale de l'exploitation A** 59 000 écus en M B S , B = ISO 900 é c m de M BS.

So u rc e : M in istè re de ¡a g r ic u ltu r e et de ta p è ch e - DA F / S D IÌP E / B A E P

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Pour les exploitations dont la MBS est supérieure à 150 000 écus, le taux de modulation est plafonné à 25%. Globalement, la modulation ne pourra, en aucun cas, aboutir à un prélèvement total supérieur à 20% du montant global des aides directes.Exemple : Pour un agriculteur qui dispose de 200 hectares de céréales (en supposant que l’aide moyenne est de 2 500 francs à l’hectare, et la MBS de 800 écus par hectare), la modulation sera égale à : 3% de (500 000 - 200 000), soit 9 000 francs, augmentée de (0,25 * (160 000 - 50 000) / 100 000) = 25% (application du plafond) de 300 000 = 75 000 francs. Au total les aides directes seront donc diminuées de 84 000 francs, ce qui correspond à environ 15% du total des aides directes reçues. Si l’agriculteur est en GAEC avec son fils, la modulation n’est que de : 3%*(500 000 - 200 000*2), soit de 3 000 francs, augmentée de 25% * ((160 000/2 - 50 000 )/l 00 000) = 7,5% de 100 000 = 7 500 francs. Au total les aides seront donc diminuées de 10 500 francs, ce qui correspond à environ 2% des sommes octroyées.

Des conséquences limitées pour la grande majorité des agriculteurs10.

La modulation des aides directes, selon le schéma décrit précédemment, aboutirait (sur les exploitations « professionnelles », et après prise en compte des mesures adoptées en mars dernier à Berlin) à une ressource budgétaire estimée à environ 1 milliard de francs.Sur l’ensemble des 406 000 exploitations «professionnelles» recensées en 1997, on peut estimer qu’environ 57 000 d’entre elles (soit 14%) verraient leurs aides réduites à partir de la prochaine campagne. Le taux de modulation moyen s’élèverait à 5%, ce qui représente une perte d’environ 17 000 francs par exploitation (cf. tableaux 15 et 16 en annexe). Le revenu de ces exploitations étant estimé ( à horizon réforme accomplie) à environ 350 000 francs, la modulation des aides entraînerait donc une baisse moyenne d’environ 5% du revenu disponible des exploitations « modulées ». On peut cependant noter que la grande majorité des exploitations touchées par la modulation ne se verrait appliquer qu’un faible taux de prélèvement. Pour 43 000 d’entre elles, soit 74% des exploitations modulées, le taux de prélèvement est inférieur à 5% et s’établit - en moyenne pour ce groupe - à 2% des aides octroyées. Pour ces dernières, la perte de recettes moyenne n’est que de 5 000 francs par exploitation, ce qui correspond à une baisse de moins de 2% du revenu disponible.Pour environ 12 000 exploitations le taux de modulation est compris entre 5 et 10%. La baisse moyenne des aides s’établit à 44 000 francs par exploitation et conduit à une diminution d’environ 13% du revenu disponible. Enfin, on peut noter que seulement moins de 2 000 exploitations seraient touchées par un prélèvement représentant plus de 15% des aides attribuées. Pour ces derniers, la perte moyenne s’élève (après prise en compte de l’emploi) à 131 000 francs, ce qui correspond à une baisse de 18% du montant des aides directes. On notera toutefois que ces exploitations disposent, en moyenne, d’une SAU de 275 hectares et qu’elles dégagent encore après réforme un revenu disponible de 535 000 francs (avant modulation).On peut également remarquer que, compte tenu de l’importance des déductions accordées au titre de l’emploi, 16 000 exploitations - sur les 57 000 concernées par le dispositif - ne se verront appliquer que le prélèvement linéaire de 3% sur le montant des aides excédant 30 000 euros.Compte tenu du mode de soutien actuellement appliqué aux différents secteurs de production, les principaux contributeurs sont composés de producteurs de céréales, d’oléagineux et de protéagineux. Les ressources budgétaires issues de la modulation proviendraient en effet pour 78% des exploitations professionnelles orientées vers ces productions, contre 7% pour les mixtes (grandes cultures avec herbivores) et 9% pour les « autres grandes cultures » (groupe

Les résultats présentés ci-après sont issus du modèle PECARI. D’autres estimations, réalisées à partir des enquêtes de structure du SCEES, sont également disponibles (cf. cartes 1 et 2 en annexe).

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composé essentiellement par les producteurs de betteraves, pommes de terre, tabac, légumes de plein champ, etc....). En conséquence, la moitié des producteurs de l’orientation «céréales, oléagineux et protéagineux » verra le montant de ses aides directes diminuer. Pour les exploitations concernées la baisse moyenne est estimée à 24 000 francs par entreprise, ce qui correspond à 6% des aides et à 8% du revenu disponible. A contrario, les éleveurs spécialisés dans la production de viande bovine seraient peu touchés par la modulation dans la mesure seulement 10% d’entre eux perçoivent un montant global d’aides directes supérieur à 200 000 francs et disposent d’une MBS supérieure à 50 000 écus. En dépit de la forte revalorisation des aides bovines décidée au printemps dernier, le montant moyen des aides directes perçues par les éleveurs reste très nettement inférieur à celui dont bénéficient les producteurs de « grandes cultures ». Les aides moyennes par hectare de SAU étant identiques (cf. supra), cet écart est essentiellement lié aux différences de dimension qui persistent entre les deux systèmes.

Les effets régionauxf*) de la modulation des aides directes conséquences sur les exploitations effectivement modulées11

Avant modulation Après modulation

Nombred'expl.

en % Aidesréforme

accomplie

Revenuréforme

accomplie

Retenue (F/ expl)

Total (mío. F)

% du total

% du revenu

% des aides

Ile-de-France 2 987 5% 353 200 358 000 23 100 69 7% -6% 7%

Champagne-Ardenne 5 385 9% 336 500 396 500 17 700 95 10% -4% 5%

Picardie 5 132 9% 355 100 355 900 17 800 91 9% -5% 5%

Haute-N ormandie 2 297 4% 341 600 290 700 15 300 35 4% -5% 4%

Centre 10 360 18% 380 400 316 600 21 000 218 22% -7% 6%

Basse-Normandie 1 671 3% 317 300 256 000 8 500 14 1% -3% 3%

Bourgogne 5 821 10% 375 900 318 400 18 300 106 11% -6% 5%

Nord Pas-de-Calais 1 095 2% 301 600 336 800 8 300 9 1% -2% 3%

Lorraine 2 872 5% 393 300 406 300 16 200 47 5% -4% 4%

Franche-Comté 661 1% 345 200 311 800 12 900 8 1% -4% 4%

Pays de la Loire 3 313 6% 309 500 303 300 8 500 28 3% -3% 3%

Poitou-Charentes 4 595 8% 362 600 227 300 14 500 67 7% - 6% 4%

Aquitaine 1 899 3% 423 800 335 600 33 800 64 7% - 10% 8%

Midi-pyrénées 3 345 6% 355 200 215 200 18 000 60 6% -8% 5%

Auvergne 1 459 3% 338 700 192 700 15 100 22 2% -8% 4%

Ensemble 57 021 100% 355 900 315 100 17 100 973 100% -5% 5%

(*) régions pour lesquelles le nombre d ’exploitations dans l ’échantillon est supérieur ou égal à 15.Source : RICA 1997 - PECARI - DAF/SDEPE/BAEP

Cet impact différencié selon les orientations de production se traduit également au niveau régional. Sur les 57 000 exploitations qui verraient leurs aides diminuer du fait de la modulation, 18% d’entre elles sont situées dans la région Centre. Elles contribuent pour 22% aux ressources budgétaires issues du dispositif et voient leur revenu disponible baisser de 7%. La Bourgogne fournit 10% des exploitations « modulées » et 11% du budget. Enfin, on notera que, si le nombre d’exploitations touchées par la modulation est faible en Aquitaine, le poids des aides dans la formation de leur revenu fait que, pour les 2 000 producteurs concernés le revenu disponible baisserait, en moyenne, de 10%.

11 Avant réaffectation des sommes ainsi obtenues aux bénéficiaires de CTE.

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Au-delà de ces résultats chiffrés, deux problèmes sont actuellement examinés par le ministre. Le premier concerne l’application de ce dispositif par l’ensemble de nos partenaires. Un mémorandum a été déposé en ce sens par le ministre de l’agriculture français au conseil informel de Dresde de mai 1999.Le second porte sur la modification des règles pratiques d ’application de la modulation afin de simplifier le dispositif et de mieux tenir compte de la prospérité globale des exploitations. En deux mots, il s’agirait de simplifier le calcul de la MBS globale en réduisant le nombre de rubriques nécessaires à sa détermination et/ou de mieux refléter simplement et de manière fiable la « prospérité » des entreprises.

La mise en œuvre de la modulation des aides directes liées aux produits pour financer les contrats territoriaux d’exploitation a suscité de vives réactions au sein d’une partie des organisations professionnelles agricoles. Au-delà de l’aspect « redistributif» affiché par le ministre, la principale crainte exprimée par de nombreux acteurs économiques du monde agricole repose sur la « montée en puissance » de cette mesure. A ce titre, l’instauration de la modulation est fréquemment comparée à celle de la CSG.On notera cependant que, le taux maximum de modulation étant fixé à 20% au niveau communautaire, seule une baisse significative des seuils d’application pourraient permettre de dégager de nouvelles ressources budgétaires si une amplification de la politique de réorientation des aides directes était décidée.

Le plan de régionalisation

Le plan de régionalisation des aides directes fixe les rendements historiques départementaux (voire infra-départementaux) sur lesquels sont assises les aides directes. Comportant une part départementale et une part nationale, leur montant s’échelonne à l’heure actuelle entre 1 300 et 3 300 francs par hectare pour les céréales, en fonction du niveau de productivité des terres. Pour la campagne à venir le plan de régionalisation reste identique à celui actuellement en vigueur. On rappellera que, pour la campagne 1998/99, les modifications décidées par le précédent ministre, Louis Le Pensec, sont devenues effectives. La modification de la pondération nationale (50% désormais, contre 33% auparavant) entraîne, dès cette année, une sensible redistribution des aides des régions à hauts rendements vers celles où les potentialités agronomiques sont plus limitées.Toutefois, dès l’année prochaine, il est prévu de poursuivre sur la voie d’une dé-régionalisation des aides directes aux grandes cultures afin de «fixer leur niveau de façon plus lisible et plus équitable, tout en prenant en compte les effets conjugués de ces modifications avec la mise en œuvre de la modulation des aides et de la nécessité de préserver les aides à l’irrigation. En effet, si une gestion plus cohérente de la ressource en eau doit être assurée, notamment dans certaines zones à haute valeur patrimoniale, l’irrigation ne doit pas être remise en cause là où elle est nécessaire» (Ministère de l’agriculture et de la pêche. Communiqué de presse du 28juillet 1999). Les résultats rassemblés dans le tableau 17 (cf. annexes) permettent de mesurer les enjeux pour les agriculteurs concernés d’une modification des règles actuellement en vigueur. Sur la base de deux scénarios fortement différenciés on peut constater que les pertes de revenu pourraient atteindre jusqu’à 10% pour les céréaliers de certaines régions du Nord de la France. A l’inverse, les revenus progresseraient pour les producteurs des régions dites « intermédiaires ». Selon le scénario retenu, l’ampleur de la redistribution varierait sensiblement.

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L’éco-conditionnalité

Dans le but de mieux intégrer les questions liées à l’environnement aux organisations communes de marché, le règlement horizontal d’Agenda 2000 a introduit une clause environnementale, dénommée également « éco-conditionnalité », dans son article 3 « exigences en matière de protection de l ’environnement ». La mise en œuvre de cet article est une obligation, mais il revient aux Etats membres d’en définir les modalités. La Commission européenne ne prévoit pas, pour l’instant, de règlement d’application. La latitude laissée aux Etats pour définir les modalités de mise en œuvre est grande, même s’il est spécifié que « les mesures sont appliquées de manière à assurer l’égalité de traitement entre les agriculteurs et à éviter les distorsions du marché et de la concurrence ».Le premier paragraphe de l’article 3 prévoit que « les Etats membres prennent les mesures environnementales qu’ils considèrent appropriées compte tenu de la situation des surfaces agricoles utilisées, ou des productions concernées, et qui correspondent aux effets potentiels de ces activités sur l’environnement. Ces mesures peuvent consister :

- à subordonner les aides à des engagements agri-environnementaux,

- en des exigences environnementales générales,

- en des exigences environnementales spécifiques constituant une condition d’octroi despaiements directs. »

La rédaction offre donc aux Etats une liste limitative de possibilités qui constitue de fait un cadre assez lâche. Les sanctions doivent être «appropriées et proportionnées à la gravité des conséquences écologiques du non-respect des exigences environnementales... ». Elles peuvent aller de la réduction des aides, à la suppression totale de celles-ci.Pour l’exercice prochain il a été décidé (cf. communiqué de presse ci-dessus mentionné) de « réserver le versement des aides majorées aux cultures irriguées aux agriculteurs qui sont en règle avec la police de l’eau et qui peuvent présenter une autorisation de prélèvement » afin de « signifier que la solidarité nationale et européenne ne peut légitimement s’exercer en faveur de ceux qui violent les lois et les règlements, et menacent l’environnement de leurs concitoyens ». Pour la campagne suivante, le versement des aides sera subordonné à la présence de compteurs afin de favoriser une bonne gestion des ressources en eau. Cette disposition vise à « prendre en compte l’intérêt de tous les acteurs dans la gestion d’une ressource aussi rare et précieuse que l’eau », tout en encourageant les agriculteurs à «adopter des pratiques plus respectueuses des ressources rares et de l’environnement, sans remettre en cause l’irrigation qui est indispensable au développement agricole de régions entières ».La nécessaire prise en compte des exigences environnementales par les agriculteurs vient donc d’être récemment et profondément réaffirmée par le ministre de l’agriculture. Elle vise à rappeler que « le Gouvernement souhaite encourager une agriculture respectueuse de l’environnement » à l’heure où les consommateurs exigent de plus en plus de garanties sur l’origine et le mode de fabrication des produits agricoles. La Politique Agricole Commune dont l’objectif, lors de sa création, était de fournir des produits alimentaires en quantités suffisantes à la population européenne doit désormais répondre à un nouveau défi : produire des denrées alimentaires en quantités suffisantes, si possible à moindre coût, dont l’origine soit certifiée et la « qualité » irréprochable. En outre, il est demandé aux agriculteurs d’occuper « harmonieusement » le territoire et de préserver l’environnement.Toutes ces revendications se traduisent par la très forte de revendications qualifiables «d’écologistes», ou de «naturalistes», dans tous les secteurs de la société, tant dans les grandes villes que dans les zones rurales. Il est donc raisonnable de penser que le consommateur sera de

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plus en plus sensible (et donc près à payer) aux signes de «qualité» affichés par les producteurs. Il est même envisageable que cette évolution débouche, à moyen terme, sur une exigence minimale des consommateurs qui se traduise par une absence de débouchés sur le marché intérieur pour les produits alors considérés comme « hors normes ».

L’enveloppe de flexibilité viande bovine.

Le mode de répartition de ces sommes, soit près de 613 millions de francs à horizon réforme accomplie, n’est pas encore définitivement arrêté. A l’heure actuelle, il semble que l’essentiel des sommes disponibles sera consacré au financement d’un complément de prime pour les animaux femelles. Les mesures envisagées sont les suivantes :

- Un complément de prime à l’abattage, de l’ordre de 40 francs par tête à partir de l’an 2000, pour toute femelle de plus de 8 mois. Ce complément pourrait progressivement « monter en puissance » pour s’élever à 120 francs/tête à l’issue de la réforme.

- Un complément de prime à l’abattage supplémentaire pour les génisses de race éligible à la PMTVA, qui pourrait entrer en vigueur dès l’an prochain pour un montant d’environ 350 francs par animal en l’an 2000 et, suivant le nombre de primes demandées, atteindre 750 francs par tête à partir de 2002.

- Un complément de PMTVA pour les mères des veaux élevés au pis, à partir de 2001, pour un montant estimatif global de 80 millions de francs. Ce dispositif prendrait la relève de l’actuel financement OFIVAL.

- L’ensemble de ces mesures pourraient, en fonction de l’évolution des marchés, être complété par des actions en faveur des productions sous signe officiel de qualité.

L’aide agri-environnementale au tournesol

Dés l’exercice 2000, et sous réserve d’un accord définitif de la Commission, une aide annuelle de 300 millions de francs devrait, sous certaines conditions, être attribuée aux producteurs de tournesol. La mesure, fondée sur une déclaration de la Commission reconnaissant l’intérêt de mesures agri-environnementales en faveur de la production de tournesol de printemps, en tant que production végétale économe en intrants, devrait être cofinancée à 50% par le FEOGA. Pour pouvoir bénéficier de cette aide complémentaire, les agriculteurs devront suivre un cahier des charges, cahier des charges qui reste encore à définir. En tout état de cause, la Commission a indiqué que ces aides complémentaires ne pouvaient être attribuées qu’à condition que les agriculteurs mettent en œuvre des pratiques culturales qui « aillent au-delà de la simple application des bonnes pratiques habituelles ». Cette dernière condition « agri- environnementale » est également requise pour que ces aides puissent être déclarées à l’OMC en « boîte verte ».Les premières estimations budgétaires conduisent à une aide moyenne qui pourrait se situer entre 500 et 600 francs par hectare.

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Les contrats territoriaux d’exploitation.

La mise en œuvre des Contrats Territoriaux d’Exploitation (CTE) - après plus de deux ans de discussions et de négociations avec les différents acteurs, tant au sein, qu’à l’extérieur, du monde agricole - est le symbole qui illustre de la manière la plus nette la réorientation de la politique agricole voulue par le Gouvernement. Dans l’esprit de ses initiateurs il s’agit « d’un instrument nouveau destiné à passer d’une logique d’aide à la production, à une logique de projet et de production de qualité ». (Intervention de Jean Glavany, Ministre de l’agriculture et de la Pêche, à la Bergerie nationale de Rambouillet le 29 juin 1999). Pour reprendre les termes de l’ancienne présidente du CNJA, Christiane Lambert, il s’agit « de passer d’une logique de guichet à une logique de projet ».La première caractéristique des CTE est de s'inscrire sur plusieurs années afin de permettre l’évolution des exploitations, en les renforçant si elles connaissent des difficultés économiques, ou en promouvant les bonnes pratiques agricoles respectueuses de l'environnement, de l'aménagement du territoire, de l'emploi, de l'organisation collective des producteurs et de la qualité des produits. La logique de projet nécessite que soit réalisé un audit de la situation de l'exploitation afin de prendre en compte l'existant, qui recouvre la situation de l'exploitation et des aides dont elle dispose. Le CTE est basé sur un engagement contractuel et volontaire de l’agriculteur.La seconde spécificité de ce dispositif tient dans l’association d’un volet économique et social et d ’un volet territorial et environnemental. Cette complémentarité à été maintes fois réaffirmée par le Ministre, qui a notamment déclaré à Rambouillet : «A mes yeux, le volet économique et social est fondamental car les agriculteurs sont avant tout des producteurs. De plus, la préservation et le développement de l'emploi est l'un des objectifs majeurs de ce dispositif. Mais le second volet a toute son importance car il permet de prendre en compte la multi- fonctionnalité de l'agriculture, cette notion nouvelle qui commence à être prise en compte en Europe, voire dans le reste du monde » (souligné par nous).La signature par l’agriculteur d’un contrat territorial d’exploitation ne remet pas en cause le droit à la perception des différentes aides qui lui sont octroyées au moment où il décide de s’engager dans cette nouvelle relation partenariale. Ainsi, contrairement aux craintes parfois exprimées, le CTE ne remet pas en cause l'attribution d'une Dotation aux Jeunes Agriculteurs (DJA). Par contre, un jeune agriculteur pourra bénéficier d'un soutien supplémentaire durant cinq ans en signant un CTE, prenant en compte le montant de cette DJA, lors de son installation. Les CTE ont pour ambition de prendre au maximum en compte la diversité de l'agriculture. La démarche retenue pour la mise en place de ces contrats devrait donc exclure les contrats types qui négligeraient la diversité des démarches de projet que le ministère souhaite développer. Ainsi, une exploitation dont la situation économique et financière est satisfaisante pourra trouver dans le CTE le moyen de développer le volet environnemental de son activité. Inversement, un éleveur situé en zone de montagne et pour lequel le revenu dégagé par son exploitation s’avère insuffisant pourra chercher à développer le volet économique de son exploitation en obtenant la reconnaissance de la qualité de ses produits et en recherchant une coopération avec les autres agriculteurs.Des « menus types », comprenant des mesures types établis par les préfectures, après avis des CDOA (Commission Départementale d’Orientation de l’Agriculture), pourront être proposés aux agriculteurs. Les mesures types seront développées au niveau national, et seront incluses dans des menus types proposés à chaque filière ou chaque terroir au sein d'un département. Ainsi, exemple cité par le ministre « dans mon département des Hautes-Pyrénées, un menu type pourra être proposé pour l'agriculture céréalière de la plaine, un pour l'agriculture de coteaux et un pour l'agriculture extensive de montagne. J'insiste sur ce point pour vous indiquer que nous ne souhaitons pas entrer dans une logique d'uniformisation. Chaque contrat type devra correspondre à un aspect spécifique de l'agriculture française ».

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Les deux volets sur lesquels reposeront les CTE (territorial et environnemental d’une part, socio- économique d’autre part), comprennent huit objectifs :

- Volet territorial-environnemental :

- gestion qualitative et quantitative de l’eau,

- valorisation des surfaces en herbe,

-action en faveur de la biodiversité et des zones humides,

- gestion des paysages et du patrimoine naturel et culturel,

- prévention des risques naturels et des incendies.

- Volet socio-économique :

- valorisation qualitative des produits,

- diversification des activités,

- maintien ou création d’emplois.L’ambition affichée est de signer 10 000 contrats territoriaux d’exploitation d’ici à la fin de l’année, avant d’atteindre le régime de croisière qui devrait voir la signature de 40 000 CTE chaque année à partir de l’an 2000. Sur une année pleine, le coût estimé du dispositif est d’environ 2 à 2,5 milliards de francs. Le financement en sera assuré, pour moitié, par les ressources communautaires dégagées par la modulation des aides directes (cf. supra), le solde provenant du budget national.

L ’AGRICULTURE EUROPEENNE A LA VEILLE DES PROCHAINES NEGOCIATIONS INTERNATIONALES.

Le modèle européen: une idée à défendre face aux ambitions américaines

Au moment où la Commission européenne entamait ses réflexions relatives à une nouvelle réforme de la Politique Agricole Commune, soit au milieu des années quatre-vingt dix, les perspectives économiques s’avéraient nettement plus favorables que celles qui prévalent actuellement. Les crises qui ont sévi en Russie et en Asie ont en effet profondément déjoué les prévisions et entraîné une baisse importante de la demande, et donc des prix des principaux produits agricoles. Entre le début et la fin de l’année 1998 les prix mondiaux ont reculé de 20% pour le blé, 26% pour le maïs et 33% pour le tourteau de soja. Les exportateurs européens sont donc confrontés à une concurrence accrue tant sur les prix, que sur la qualité des produits offerts. Les montants unitaires des restitutions à l’exportation atteignent de nouveau des valeurs élevées et certains produits trouvent de plus en plus difficilement des débouchés sur pays tiers. Rappelons qu’en 1998, si les exportations françaises de céréales sur pays tiers ont pu s’élever à plus de 10 millions de tonnes, il a été nécessaire de débourser plus de 1,7 milliard de francs de restitutions pour arriver à ce résultat (cf. tableau 18 en annexe). Les restitutions (subventions à l’exportation) ont représenté, cette année là, 20% de la valeur des produits vendus. En 1992 ce rapport avait atteint la proportion record de 80% ( il fallait alors dépenser plus de 9 milliards de francs en restitution pour être en mesure de vendre pour 11 milliards de francs de céréales...).

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Cette situation, qui fragilise l’agriculture européenne, se retrouve également outre Atlantique. Confronté à la baisse importante des prix mondiaux, doublés d’une forte contraction de la demande asiatique et de conditions climatiques très difficiles sur l’ensemble du territoire, le gouvernement américain a attribué 6 milliards de dollars d’aides à ses farmers en 1998. Pour cette année, les sommes qui seraient octroyées aux agriculteurs américains, en plus de celles versées «normalement» au titre du FAIRACT, pourraient atteindrent près de 9 milliards de dollars. La possibilité d’exporter sans aides des produits agricoles sur le marché mondial est donc actuellement impossible, tant pour l’Union européenne (restitutions) que pour les Etats-Unis (aides «d’urgence» aux fermiers, marketing loan, garanties de crédits...). La suppression de toute aide à l’exportation, réclamée par les pays du groupe de CAIRNS (Australie, Nouvelle- Zélande, Argentine, Brésil, Canada...) poserait donc des problèmes insurmontables à l’Union, mais également aux Etats-Unis.En ce qui concerne le « soutien interne », il est indispensable de rappeler que les aides au secteur agricole ne sont pas une «particularité» européenne. Sur la période 1993-1997, les dépenses du ministère de l’agriculture américain (USDA) se sont élevées, en moyenne, à près de 60 milliards de dollars par an. Bien que plus de la moitié de cette somme (36 milliards de dollars) soit consacrée à l’aide alimentaire intérieure, et donc considérée comme exclue du champ des aides à l’agriculture par les négociateurs américains, les effets de ces interventions publiques sur le revenu des producteurs sont loin d’être négligeables.Si, au regard des règles actuellement en vigueur à l’Organisation mondiale du commerce, il ne fait aucun doute que le soutien global à l’agriculture européenne soit élevé, et majoritairement exclu de la « boîte verte », l’angélisme n’est pas de mise. Sous des formes différentes, dont les effets sur les échanges mériteraient d’être mieux étudiés, de nombreux autres pays soutiennent également leur secteur agricole. En outre, comme le montrent les données reprises dans le tableau 19 en annexe, le soutien est très variable selon les produits. Si les USA se targuent de peu soutenir leurs producteurs de viande bovine, ou porcine, il n’en est pas de même pour le blé, le sucre et le lait. Pour ce dernier produit, le taux de soutien s’avère même plus élevé aux Etats-Unis que dans l’Union européenne.Par ailleurs, il serait réducteur de vouloir considérer l’agriculture uniquement sous l’angle « marché ». La prise en compte des autres fonctions remplies par les agriculteurs (occupation de l’espace, préservation de l’environnement, entretien des paysages...) impose que «produire à moindre coût » ne soit pas l’unique objectif assigné aux agriculteurs européens. Il n’est pas impensable que ces fonctions, non marchandes pour la plupart, soient rémunérées par les pouvoirs publics au moyen de transferts directs.Les mesures adoptées dans le cadre d’Agenda 2000 constituent un pas supplémentaire dans cette direction. Il semble néanmoins que les négociateurs soient restés au milieu du gué. En effet, la baisse des prix ne sera pas suffisante pour exporter sans subventions, les aides directes augmentent et restent encore partiellement, voire totalement, liées aux produits et le « second pilier » (développement rural) demeure nettement plus frêle que le premier.Quelle que soit l’issue des prochaines négociations, l’avenir de l’agriculture française passe autant - voire plus - par un développement des échanges avec intra-communautaires que par une bataille acharnée pour la conquête de parts de marché sur pays tiers. Rappelons qu’en un peu plus de dix ans (entre 1985 et 1997) les exportations françaises de produits agro-alimentaires au sein de l’Union sont passées de 60% à 72% du total de nos exportations totales, A l’heure actuelle les ventes de produits non transformés à destination des pays tiers ne représentent (cf. graphique ci-dessous) qu’une faible proportion de nos échanges.

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Solde agro-alimentaire français par produit et par zone (Exercice 1997 -E n milliards de francs)

Sources : CFCE et Chambres d ’agriculture - a p c a - Etudes économiques.

L’avenir repose également sur un développement des produits transformés à haute valeur ajoutée, accompagné du renforcement d’une «image» européenne des produits agricoles (terroir, mode de production, sécurité alimentaire...). Ainsi, l’interdiction des hormones et des organismes génétiquement modifiés (OGM) sur le territoire européen pourrait constituer un atout «qualité» pour les producteurs.Enfin, il faut rappeler que l’élargissement de l'Union aux PECO conduira à l’émergence d’une forte demande nouvelle de produits agro-alimentaires de qualité dite « Ouest européenne » de la part de millions de nouveaux consommateurs aisés.

En cumulant les deux réformes, les baisses de prix consenties par l’Union européenne au cours des dix dernières années sont de 35% pour la viande bovine, 50% pour les céréales et 15% pour le lait, avec les effets mécaniques induits pour la production de porcs et de volailles. Les changements intervenus en matiere de soutiens internes sont donc conséquents. Afin de préserver, malgré tout, la diversité de son agriculture l’Union européenne a choisi de maintenir sa politique d’organisation des marchés, conçue comme un ensemble cohérent. Ensemble fait, certes de préférences communautaires et d’aides à l’exportation, mais également de fortes contraintes en matière de maîtrise de la production. Elle a également fait le choix d’une politique agricole à budget constant, révisible dans ses montants et transparente dans ses affectations. Enfin, elle s’est engagée vers une évolution du soutien direct plus découplé, modulé et conditionnel. Cette politique globale, fréquemment qualifiée de de « modèle agricole européen » reste une idée à défendre, notamment face aux ambitions américaines.

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ANNEXES

LES CONSEQUENCES DES ACCORDS DE BERLIN SUR LE REVENU DES PRODUCTEURS

METHODOLOGIE

Les simulations ont été réalisées par le BEP (Bureau de l’Evaluation et de la Prospective) de la Direction des Affaires Financières et Economiques (DAFE) sur la base des données de l’exercice 1997 du RICA (Réseau d’information Comptable Agricole). Le modèle utilisé (PECARI) permet de simuler les résultats économiques et financiers à horizon réforme accomplie et de les comparer à ceux obtenus en 1997. Tous les écarts mentionnés dans cet article sont des variations par rapport à la situation observée en 1997 pour les exploitations «professionnelles». Les hypothèses de calcul sont les suivantes :

* Pas de réforme laitière à l ’horizon considéré (2005),

* Baisse des prix de 15% pour les céréales et de 20% pour la viande bovine,

* Taux de gel obligatoire de 10%,

* Revalorisation des primes céréalières (y compris maïs fourrage) de 54 à 63 euros/t,

* Baisse de la prime protéagineux de 78,5 à 72,5 euros/t

* Alignement de la prime aux oléagineux sur la prime céréalière : 63 euros/t,

* Complément national vache allaitante de 50 Euros par tête pour les 40 premières.

* Prime unitaire par animal de 210 Euros pour les taurillons, 150 pour les bœufs (deux fois) et 200 pour les vaches allaitantes,

* Prime à l ’abattage de 80 euros par tête pour les gros bovins et 50 euros pour les veaux,

* Enveloppe nationale de flexibilité (93,4 millions d ’euros) répartie de la manière suivante : 8 Euros par vache laitière, 7 par vache allaitante, 18 par bœuf et 13 par tourillon.

* Complément extensif de 40 euros pour les exploitations dont le chargement technique est compris entre 1,8 et 1,4 UGB par hectare de SFP (hors maïs) et 80 euros pour celles dont le chargement est inférieur à 1,4 UGB/ha.

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Tableau 1 : perspectives financières pour l ’UE-15 (crédits d ’engagement)

Millions d'euros ( prix 1999) 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006

1. AGRICULTURE 40 920 42 800 43 900 43 770 42 760 41 930 41 660

PAC 36 620 38 480 39 570 39 430 38 410 37 570 37 290

Développement rural 4 300 4 320 4 330 4 340 4 350 4 360 4 370

2.ACTIONS STRUCTURELLES 32 045 31 455 30 865 30 285 29 595 29 595 29 170

Fonds structurels 29 430 28 840 28 250 27 670 27 080 27 080 26 660

Fonds de cohésion 2 615 2 615 2 615 2 615 2 515 2 515 2510

3. POLITIQUES INTERNES 5 900 5 950 6 000 6 050 6100 6150 6 200

4. ACTIONS EXTERIEURES 4 550 4 560 4 570 4 580 4 590 4 600 4 610

5, ADMINISTRATION 4 560 4 600 4 700 4 800 4 900 5 000 5 100

6. RESERVES 900 900 650 400 400 400 400

Réserve monétaire 500 500 250 0 0 0 0

Réserve pour aides d'urgence 200 200 200 200 200 200 200

Réserve pour garantie de prêts 200 200 200 200 200 200 200

7. AIDE DE PRE-ADHESION 3120 3 120 3 120 3120 3120 3120 3 120

Agriculture 520 520 520 520 520 520 520

Instruments structurels 1 040 1 040 1 040 1 040 1 040 1 040 1 040

PHARE 1 560 1 560 1 560 1 560 1 560 1 560 1 560

TOTAL CREDITS D’ENGAGEMENT 91 995 93 385 93 805 93 005 91 465 90 795 90 260

TOTAL CREDITS DE PAIEMENT 89 590 91 070 94 130 94 740 91 720 89 910 89310

Soit en % du PNB 1,13% 1,12% 1,13% 1,11 % 1,05% 1,00% 0,97 %

Disponible pour l’adhésion 4 140 6 710 8 890 11 440 14 220

Agriculture 1 600 2 030 2 450 2 930 3 400

Autres dépenses 2 540 4 680 6 640 8 510 10 820

Plafond des crédits de paiement 89 590 91 070 98 270 101 45 0

100 61 0

101 35 0

103 530

Soit en % du PNB 1,13% 1,12% 1,18% 1,19% 1,15% 1,13% 1,13 %

Marge pour imprévus 0,14 % 0,15% 0,09 % 0,08 % 0,12% 0,14 % 0,14 %

Plafond des ressources propres 1,27% 1,27 % 1,27% 1,27% 1,27% 1,27% 1,27%

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Tableau 2 : Répartition du financement de la correction britannique

F. n % 1997 Agenda 2000

Belgique 4,3 5,4

Danemark 2,9 3,6

Allemagne 20,0 7,7

Grèce 2,1 2,6

Espagne 9,0 13,0

France 24,0 33,0

Irlande 1,2 1,4

Italie 19,0 25,0

Luxembourg 0,3 0,4

Pays-Bas 6,0 1,4

Autriche 3,5 0,8

Portugal 1,8 2,3

Finlande 2,1 2,6

Suède 3,8 0,8

TOTAL 100 100

Source : DAF / SDEPE / BAEP et BECPA

Tableau 3a : Les dépenses de l ’Union européenne en 2005

millions €

FEOGA-G FONDS Autrespolitiques

TOTAL Evolution (%) par rapport à

Dévlptrural

AutresActions

Structurels Decohésion

l’exercice1997

la moyenne 94-97

Belgique 29 1 050 309 784 2 172 9,6 5,2Danemark 28 1 287 114 154 1 583 3,5 2,5Allemagne 634 5 885 4 213 737 11 469 14,8 29,4

Grèce 106 2 666 3 147 441 152 6512 21,2 32,0Espagne 564 4 850 6 545 1 590 301 13 850 23,5 37,1France 725 10 041 2 250 726 13 742 12,6 24,4

Irlande 383 1 730 401 94 112 2 720 -17,8 -3,0Italie 668 4 796 4 376 454 10 294 23,4 53,2Lux, 9 31 12 78 130 23,0 21,9

Pays-Bas 31 1 459 445 340 2 275 -8,6 -1,3Autriche 410 736 250 177 1 573 19,4 7,8Portugal 166 600 2 820 440 185 4211 14,1 23,3Finlande 258 555 287 173 1 273 19,1 23,8

Suède 137 820 292 199 1 448 31,8 25,8Roy.-Uni 189 3 922 2 376 949 7 436 4,9 30,5

CEE 0 64 5567 13 651(*) 44,1 46,1

TOTAL 4 337 40 492 27 837 2 565 11 088 94 339 17,5 32,2(*) y compris 4,9 milliards ait titre des dépenses d ’administration et 3,12 milliards d ’aides pré-adhésion.

Source : DAF / SDEPE / BAEP et BECPA

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Tableau 3b : Le budget de l ’Union

millions € Agenda 2000Contributions Retours Retours nets Taux de retour

Belgique 3 588 2 172 -1416 60.5%Danemark 1 966 1 583 -383 80,5%Allemagne 25 235 11 467 -13768 45,4%Grèce 1 489 6512 5 023 437,3%Espagne 6 577 13 851 7 274 210,6%France 17 074 13 741 -3 333 80,5%Irlande 885 2 720 1 835 307.3%Italie 13 217 10 294 -2 923 77,9%Luxembourg 213 131 -82 61,5%Pays-Bas 5 229 2 275 -2 954 43,5%Autriche 2 392 1 573 -819 65,8%Portugal 1 264 4211 2 947 333,1%Finlande 1 408 1 273 -135 90,4%Suède 2 540 1 449 -1 091 57,0%Royaume-Uni 11 197 7 437 -3 760 66,4%CEE 0 13 587 13 587TOTAL 94 274 94 276

Source : DAF / SDEPE / BAEP et BECPA

Tableau 3c : Le budget de l ’Union

millions € Moyenne 1994-1997Contributions Retours Retours nets Taux de retour

Belgique 2 804 2 065 -739 73.6%Danemark I 364 1 544 180 113,2%Allemagne 21 169 8 865 -12 304 41,9%Grèce 1 066 4 932 3 866 462,9%Espagne 4 568 10 105 5 538 221,2%France 12 506 11 051 -1 455 88,4%Irlande 675 2 806 2 130 415,5%Italie 7 944 6 720 -1 224 84,6%Luxembourg 167 107 -60 64.3%Pays-Bas 4 468 2 306 -2 162 51,6%Autriche 1 437 944 -493 65,7%Portugal 1 016 3 414 2 398 335,9%Finlande 728 695 -33 95,5%Suède 1 485 756 -729 50,9%Rovaume-Uni 8 206 5 697 -2 509 69.4%CEE 0 8 284 8 284TOTAL 69 601 70 290

Source : DAF / SDEPE / BAEP et BECPA

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Tableau 4 : Les « Grandes cultures »(prix et paiements compensatoires en euros/tonne)

1999 2000 2001 2002 2006Céréales (y Prix d’intervention 119,19 110,25 101,31 101,31 101,31

compris maïs) Compensation 54,34 58,67 63 63 63Protéagineux Compensation 78,49 72,50 72,50 72,50 72,50

Oléagineux (a) Compensation 94,24 81,74 72,37 63 63Lin oléagineux Compensation 105,10 88,26 75,63 63 63

Z. traditionnelles 344,5 344,5 344,5 344,5 344,5Blé dur (b) Autres zones 138,9 138,9 138,9 138,9 138,9

Fécule de pomme de Prix minimal 209,78 194,05 178,31 178,31 178,31terre © Compensation 86,94 98,74 110,54 110,54 110,54

Ensilage d ’herbe Compensation Néant 58,67 63 63 63Gel des terres Compensation 68,83 58,67 63 63 63

Ministère de l’agriculture et de la pêche - DAF / SDEPE / BAEP

(a) : en équivalent/tonne/céréales - (b) : paiement supplémentaire à l ’hectare

Tableau 5 : Viande bovine : Prix et compensations

Euros par tonne, ou par animal 1999 2000 2001 2002 2006

Intervention 2 780 2 594 2410 2 224 2 224PRIX Soutien au marché 1 560 (a) 1 560

Taureau 135 160 185 210 210PRIMES Bœuf (x 2) 108,7 122 136 150 150

Vache allaitante 144,9 163 182 200 200DE BASE Abattage adulte 0 27 53 80 80

Abattage veau 0 17 33 50 50COMPLEMENT 50 50 50 50NATIONAL Vache allaitante 30,19

< 1 4 Q J J © 100 100 100 100COMPLEMENT © 33 33 ***EXTENSIF (b) >1,6 et <2,0 -5 J

UGB / ha SFP < 1,6 © 66 66 *** ***

>1,4 et < 1,8 © *** 40 40

< 1,4 © *** ¡jejfcsjc 80 80

Ministère de l’agriculture et de la pêche - DAF / s d e p e / BAEP (a) : Niveau net du filet de sécurité. (b) : deux possibilités . (c) : mode de calcul différent.

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Tableau 6 : Augmentation des quotas laitiers

* 1000 tonnes QUOTASACTUELS

AUGMENTATION ENTRE 1999 ET 2005

BELGIQUE 3 310,4 49,7DANEMARK 4 455,3 66,8ALLEMAGNE 27 864,8 418,0

GRECE 630,5 70,0ESPAGNE 5 567,0 550,0FRANCE 24 235,8 363,5

IRLANDE 5 245,8 150,0ITALIE 9 930,1 600,0

LUXEMBOURG 269,0 4,0PAYS-BAS 11 074,7 166,1AUTRICHE 2 749,4 41,2PORTUGAL 1 872,5 28,1FINLANDE 2 394,3 35,9

SUEDE 3 303,0 49,6ROYAUME-UNI 14 590,3 218,9 19,7

TOTAL UE 117 492,6 1 441,8 1 389,7 (*)(*) Augmentation effective dès l'exercice 2001/2002

Ministère de l’agriculture et de la pêche - d a f / s d e p e / b a e p

Tableau 7 : Les enveloppes nationales à horizon 2005

Millions € VIANDEBOVINE

LAIT

BELGIQUE 19,4 25,7DANEMARK 11,8 34,5

ALLEMAGNE 88,4 216,0GRECE 3,8 4,9

ESPAGNE 33,1 43,1FRANCE 93,4 187,9IRLANDE 31,4 40,7

ITALIE 65,6 77,0LUXEMBOURG 2,9 2,1

PAYS-BAS 25,3 85,8AUTRICHE 12,0 21,3PORTUGAL 6,2 14,5FINLANDE 6.2 18,6

SUEDE 9,2 25,6ROYAUME-UNI 63,8 113,1

TOTAL UE 472,5 910,8Ministère de l’agriculture et de la pêche - d a f /SDEPE / BAEP

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Tableau 8 : Les plafonds de primes bovines à horizon 2005

(en têtes) Vaches allaitantes Bovins mâles

1998 2005 1998 2005BELGIQUE 443 588 394 253 235 149 235 149

DANEMARK 136 191 112 932 277 110 277 110

ALLEMAGNE 774 566 639 535 1 782 700 1 782 700

GRECE 149 778 138 005 140 130 143 134

ESPAGNE 1 462 369 1 441 539 603 674 713 999

FRANCE 3 855 243 3 779 866 1 754 732 1 754 732

IRLANDE 1 109 363 1 102 620 1 002 458 1 077 458

ITALIE 787 993 621 611 598 746 598 746

LUXEMBOURG 14 765 18 537 18 962 18 962

PAYS-BAS 98 200 63 236 157 932 157 932

PORTUGAL 286 554 277 539 154 897 175 075

ROYAUME-UNI 1 805 323 1 699 511 1 419 811 1 419811

AUTRICHE 325 000 325 000 423 400 423 400

FINLANDE 55 000 55 000 250 000 250 000

SUEDE 155 000 155 000 250 000 250 000

TOTAL UE 11 458 933 10 820 184 9 069 701 9 278 208Ministère de l’agriculture et de la pêche - DAF / s d e p e / BAEP

Tableau 9 : Quelques mesures de développement rural Montants unitaires après Agenda 2000. (Valeurs en Euros)

- Aide à l'établissement1 des jeunes agriculteurs 25 000

- Régime de retraite anticipée 15 000 par cédant et par année150 000 montant total par cédant

3 500 par travailleur et par an35 000 montant total par travailleur

- Aide obligatoire dans les zones les moins favorisées (utilisées à des fins agricoles)Minimum 25 par hectareMaximum 200 par hectare

- Aide aux mesures agri-environnementales :Cultures annuelles 600 par hectareCultures pérennes spécialisées 900 par hectareAutres utilisations des terres 450 par hectare

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Tableau 10 : Evolution des aides directes

milliards de francs courants 1997 réformeaccomplie

Ecart (F.) Ecart (%)

AIDES BOVINES 6,77 12,74 5,75 85%PSBM 2,10 3,01 0,92 44%

Complément extensif 0,34 0,37 0.03 9%PMTVA 4,67 6,52 1,85 40%

Complément extensif 0,84 1,07 0,22 26%Complément national 0,58 0,95 0,37 64%

Primes à l’abattage 0 2,59 2,59 N.S.Vaches allaitantes 0 0,42 0,42 N.S.Autres bovins 0 2,18 2.18 N.S.

Flexibilité vaches laitières 0 0,22 0,22 N.S.Flexibilité vaches allaitantes 0 0,17 0,17 N.S.

Flexibilité bovins mâles 0 0,22 0,22 N.S.AIDES COP 32,36 34,22 1,86 6%Jachères 2,36 3,50 1,13 48%Céréales 22.26 24,66 2,40 11%Oléagineux 5,64 4,23 -1,41 -25%Protéagineux 2,09 1,82 -0,26 -13%AUTRES AIDES (*) 8,76 8,76 0 0%

Autres aides bovines 1,20 1,20 0 0%Prime Compensatrice Ovine 1,18 1,18 0 0%ICHN 2,02 2.02 0 0%Agri-environnement 1,45 1,45 0 0%

Autres aides directes 2,91 2,91 0 0%

TOTAL AIDES DIRECTES 47,90 55,72 7,82 16%(*) Supposées, par hypothèse, inchangées. - N.S. : % non significatif (division par zéro).

Ministère de l’agriculture et de la pêche - d a f / s d e p e / b a e p - p é c a r i

Tableau 11 : Evolution de la structure des aides directes

Milliards de francs %1997 réforme

accomplie1997 réforme

accomplieAIDES BOVINES 6,77 12,74 14.1% 22,8%

PSBM 2,10 3,01 4,4% 5,4%Complément extensif 0,34 0,37 0,7% 0,7%

PMTVA 4,67 6,52 9,8% 11,7%Complément extensif 0,84 1.07 1,8% 1,9%Complément national 0,58 0,95 1,2% 1,7%

Primes à l ’abattage 0 2,59 0% 4,6%Vaches allaitantes 0 0,42 0% 0,8%Autres bovins 0 2,18 0% 3,9%

Flexibilité vaches laitières 0 0,22 0% 0,4%Flexibilité vaches allaitantes 0 0,17 0% 0,3%Flexibilité bovins mâles 0 0,22 0% 0,4%

AIDES COP 32,36 34,22 67,6% 61,2%Jachères 2,36 3,50 4,9% 6,3%Céréales 22,26 24,66 46,5% 44,1%Oléagineux 5,64 4,23 11,8% 7,6%Protéagineux 2,09 1,82 4,4% 3,3%

AUTRES AIDES (*) 8,76 8,76 18,3% 16,1%TOTAL AIDES DIRECTES 47,90 55,72 100% 100%

(*) Supposées, par hypothèse, inchangées. - N.S. : % non significatif (division par zéro). Ministère de l’agriculture et de la pêche - DAF / s d e p e / BAEP - PECARI

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Tableau 12 : Evolution des principaux résultats économiques, selon les systèmes de production, entre 1997 et le terme de la réforme (en francs courants par exploitation)

COP LAIT VIANDE BOVINE TOTALNombre d’exploitations 63 525 67 924 40 267 405 603

Revenu en 1997 272 301 183 567 151 458 232 683Aides directes en 1997 255 670 58 344 143 319 118 089

sau en 1997 (ha) 105 53 74 64VARIATIONS

Livraisons totales -83 069 -24 563 -54 594 -39 350COP -79 219 -3 640 -1 731 -22 801

Céréales -70 901 -3 607 -1 695 -20 809Oléagineux -4 172 -13 -35 -925

Protéagineux -4 146 -20 0 -1 067Viande bovine -3 850 -20 923 -52 863 -16 549Aides directes 10 385 18 696 55 193 19 282

Charges -10 849 -3 726 -1 753 -4 682Aliments -191 -3 302 -1 621 -1 431

Charges culturales -10 658 -424 -133 -3 251Revenu disponible -61 836 -2 140 2 343 -15 385

Soit en % -23% -1% 2% -7%AIDES DIRECTESPar hectare en 1997 2 427 1 095 1 929 1 843

Par ha au terme de la réforme 2 526 1 446 2 672 2 143Aides / Revenu en 1997 94% 32% 95% 51%

Aides / revenu (réforme accomplie) 126% 42% 129% 63%Ministère de l’agriculture et de la pêche - d a f / s d e p e / b a e p - p é c a r i

Tableau 13 : Evolution des principaux résultats économiques

milliards de francs courants 1997 réformeaccomplie

Ecart (F.) Ecart (%)

Echantillon 7 496Univers 405 603

s a u (millions ha) 26,0Dont scop 12,1 12,1

Dont jachères 0,679 1,246 0.567 84%Dont COP 11,4 10,8 -0,567 -5%

Produit brut total 283,14 267,18 -15,96 -6%Dont COP 54,09 44,84 -9,25 -17%

Dont céréales 43,55 35,11 -8,44 -19%Dont oléagineux 7,63 7,26 -0,37 -5%

Dont protéagineux 2,91 2,48 -0,43 -15%Dont viande bovine 33,56 26,85 -6,71 -20%

AIDES DIRECTES 47,90 55,72 7,82 16%Dont c o p 32,36 34,20 1,86 6%

Dont viande bovine 6,77 12,52 5,75 85%Charges culturales 26,59 25,27 -1,32 -5%Aliments du bétail 11,61 11,03 -0,58 -5%

Excédent Brut 133,28 127,04 -6,24 -5%Revenu disponible 94,38 88,14 -6,24 -7%

Total charges 197,75 195,84 -1,90 -1%Aides / revenu 51% 63%

Aides / ha de s a u 1 843 2 143 300 16%Ministère de l’agriculture et de la pêche - d a f / s d e p e / b a e p - p é c a r i

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Tableau 14 : Evolution des résultats économiques des exploitations de « grandes cultures »

1991 1997 Ecart (F.) Ecart (%)

SAU (ha) 74 98 24 32%

Revenu disponible 174 000 285 000 111 000 64%

Par ha de s a u

Produit brut 9 265 7 182 -2 083 - 22%

+ Aides directes 179 2 303 2 124 N.S.

= Recettes 9 445 9 485 41 0%

- Charges 7 092 6 572 -519 -7 %

= Revenu disponible 2 353 2 913 560 24%

Echantillons complets - O TEX11 et 12 en 1991 ; 13 et 14 en 1997 - Francs courants. Ministère de l’agriculture et de la pêche - DAF / SDEPE / BAEP - PECARI

Tableau 15 : Modulation des aides directes (*)Les effets potentiels selon le montant des aides perçues

Aides directes (*1000 F.) 200 - 400 400 - 800 >800 France entièreUnivers 40 058 16 139 824 57 021UT A totales 1,55 2,15 2,97 1,74Dont salariées 0,28 0,57 0,97 0,37

Aides PAC réforme accomplie 279 500 508 700 1 079 400 355 900Revenu disponible réforme accomplie 262 800 412 300 954 400 315 100Modulation 6 900 35 800 142 600 17 100Taux de modulation 2% 7% 13% 5%Effet sur le revenu -3% -9% -15% -5%Prélèvements (millions) 278 578 118 973Prélèvements (%) 29% 59% 12% 100%

Ministère de l’agriculture et de la pêche - DAF / SDEPE / BAEP - PECARI.

Tableau 16 : Modulation des aides directes (*) Les effets potentiels selon les systèmes de production

OTEX COP Autres grandes cultures

Bovins viande Grandes cultures et herbivores

Nombre d’exploitations 31 409 7 461 3 838 8 157* en % de l’OTEX 49% 27% 10% 18%* en % des « modulées » 55% 13% 7% 14%

Aides PAC réforme accomplie 388 300 325 100 308 000 324 000Revenu réforme accomplie 302 100 419 000 253 500 281 500Modulation 24 000 12 000 6 000 9 000Taux de modulation 6% 4% 2% 3%Effet sur le revenu -8% -3% -3% -3%Prélèvement (millions) 745 90 24 70Prélèvement (% du total) 78% 9% 3% 7%

Ministère de l’agriculture et de la pêche - DAF / SDEPE / BAEP - PECARI.

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Tableau 17 : Les effets potentiels d ’une modification du plan de régionalisationsur les exploitations « COP »

Univers Revenu1997

Variation de recettes Scénario 1

Variation de recettes Scénario 2

F rancs % Francs %Ile-de-France 3 100 386 500 -27 100 -7% -19 300 -5%Champagne-Ardenne 4 900 408 400 -20 400 -5% -8 200 -2%Picardie 3 100 348 800 -34 900 -10% -38 400 -11%Hte-Normandie 1 800 295 000 -26 600 -9% -17 700 -6%Centre 12 000 331 700 -3 300 -1% -10 000 -3%Basse-Normandie 1 200 232 600 -7 000 -3% 2 300 1%Bourgogne 4 000 330 200 6 600 2% 3 300 1%Nord, Pas-de-Calais 1 000 168 000 -15 100 -9% -10 100 -6%Lorraine 1 900 464 000 13 900 3% 27 800 6%Alsace 1 800 186 200 -1 900 -1% -5 600 -3%Franche-Comté 500 320 100 12 800 4% 22 400 7%Pays-de-la-Loire 2 000 233 300 4 700 2% 0 0%Poitou-Charentes 6 100 229 300 2 300 1% 0 0%Aquitaine 6 000 181 800 3 600 2% 3 600 2%Midi-Pyrénées 8 800 171 900 8 600 5% 8 600 5%Rhône-Alpes 2 400 169 200 3 400 2% 3 400 2%Auvergne 1 500 181 700 10 900 6% 5 500 3%Ensemble 63 500 273 300 -2 700 -1% -2 700 -1%

Ministère de l’agriculture et de la pêche - DAF / s d e p e / b a e p - p é c a r i

Scénario n°l : Deux rendements au niveau national : 77,4 quintaux pour le maïs dans les départements qui disposent d’une « base maïs » et 58,7 quintaux dans les autres situations.

Scénario n°2 : Cinq rendements nationaux :> 61,1 quintaux pour les départements hors base nationale irriguée et hors base maïs,> 56,0 quintaux pour les départements appartenant à la base nationale irriguée, ou à la base

maïs,> 69,8 quintaux pour la base nationale irriguée,> 73,6 quintaux pour la base maïs see, et> 84,0 quintaux pour la base maïs irriguée.

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S im u l a t io n d e l ’im p a c t d e l a m o d u l a t i o n d e s a id e s s u r l e s

EXPLOITATIONS AGRICOLES : RESULTATS DEPARTEMENTAUX

Cette simulation a été établie par le SCEES sur la base des données de l’enquête sur la structure des exploitations de 1997, A chaque élément de structure ont été affectés les taux d’aide moyens par hectare ou par tête d’animal. Dans un deuxième temps, on a calculé, au niveau de chaque exploitation l’impact des mesures décidées de modulation des aides en tenant compte de l’ensemble des conditions prévues_______

Source : DAF, SCEES, SDSSR, Bureau Comptes et Revenus

Carte 1 : Part des exploitations concernées par la modulation des (% de l'ensemble des exploitations)

Carte 2 : Taux moyen de réduction des aides pour les concernées par la modulation (% des aides modulables)

France : 4,5

%

moins de 2,1

2,1 à 3,5

3,5 à 4,9

plus de 4,9

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Tableau 18 : Les exportations françaises de céréales

1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998Quantités totales exportées (1 ) Dont sur I’uePrix de vente sur I’ ue (F/t) Quantités exportées hors ue (1) Valeur des ventes (2) Restitutions (2)Prix de vente hors ue (F/t) Restitution / prix de vente (%)

35,019.3

1 41815,611.3 9,1

724 80%

36,6 20,2

1 285 16,4 12,0 8,1

729 68%

29.118.1

1 17311,07,84,3707

55%

30,8 19,5

1 157 11,3 9,4 3,1

833 33%

29,7 21,2

1 146 8,5 8,9 0,4

1 057 4%

31,2 20,7

1 06010.510.5

1,4 996 16%

31,4 20,8

1 000 10,6 8,5 1,7

807 20%

(1) millions de tonnes d ’équivalents grain. (2) en milliards de francs Source : DAF / SDEPE / BECPA

Tableau 19 : Estimation du soutien à l ’agriculture en 1998

UE Etats-Unis Australie Japon OCDESoutien aux producteurs (%) (1 ) 45 22 7 63 37Soutien par agriculteur (1000 $) 19 19 3 21 11Part du soutien dans le pib (%) 1,36 1,15 0,49 1,50 1,43Soutien par habitant ($) 381 363 92 449 249

Soutien par produit (%)Blé 56 38 4 86 45Oléagineux 49 11 2 36 22Sucre (équivalent raffiné) 43 41 3 61 43Lait 57 61 31 80 58Viande bovine 62 4 4 32 34Viande porcine 8 3 3 59 15

Source : OCDE(1): Le soutien, ou l ’estimation du soutien, aux producteurs en pourcentage exprime le rapport entre les transferts bruts des consommateurs et des contribuables au titre du soutien aux producteurs et les recettes brutes de / ’exploitation.

Tableau 20 : les volumes exportables avec subventions

(milliers de tonnes) 1986/90 1992 1995 2000Blé et farine 17 000 20 700 20 400 14 400Céréales secondaires 12 600 12 000 13 700 10 800Sucre 1 560 1 270Beurre 463 236 488 399Poudre de lait écrémé 308 335 335 272Fromages 385 421 426 321Viande bovine 1 030 1 324 1 137 822Viande de volaille 519 434 286Viande de porc 509 573 542 443

Ministère de l’agriculture et de la pêche - d a f /Sd e p e / b a e o .

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LA REFORME DE LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE

PRINCIPAUX ELEM ENTS SECTORIELS

Les cultures arables

Le prix d'intervention des céréales est réduit de 15 %, cette baisse s’effectuant en deux étapes, égales chacune à 7,5 % du prix d'intervention actuel (119,2 €/t). Ces modifications interviendront sur les campagnes 2000/2001 et 2001/2002. Parallèlement, sur la base d’un taux de compensation de 50%, les aides directes seront progressivement augmentées.Les paiements directs passeront en 2000/2001 à 58,5 €/t et à 63 €/t en 2001/2002 (multipliés par le rendement de référence régional historique pour les céréales). Une décision sur la réduction finale du prix d'intervention à appliquer à partir de la campagne 2002/2003 sera prise compte tenu de l'évolution du marché. Maintien des suppléments d’aide en vigueur pour les producteurs de blé dur “ traditionnel ” et “ non traditionnel

Maintien du système des majorations mensuelles pour les céréales au niveau actuel.

Les aides directes à l'hectare pour les graines oléagineuses et pour les graines de lin non textile seront diminuées à partir de la campagne 2000/2001 en trois étapes pour s’aligner sur les paiements des céréales en 2002/2003. Par conséquent, les contraintes en matière de zones de production imposées par l'accord de Blair House devraient pouvoir être levées à partir de la campagne 2002/2003. Le système de prix de référence pour les graines oléagineuses sera supprimé en 2000.Le Conseil européen demande à la Commission de suivre de près l'évolution du marché des oléagineux et de présenter un rapport dans un délai de deux ans à compter de la mise en application du nouveau régime. Au besoin, ce rapport sera assorti de propositions appropriées si le potentiel de production devait se détériorer sérieusement.Des mesures agro-environnementales pourront concerner spécifiquement le tournesol et le colza de printemps.La culture de protéagineux fera l'objet d'une aide directe additionnelle de 9,5 € par tonne (qui seront ajoutés à l'aide directe de base céréales).L'aide aux producteurs de pommes de terre destinées à la féculerie est désormais fixée à 118,41 €/t.Les sous-zones de base et les rendements spécifiques pour le maïs peuvent être conservés. Les superficies irriguées peuvent être définies comme des sous-zones de base assorties de rendements spécifiques.Les Etats membres dans lesquels l'ensilage du maïs n'est pas une culture traditionnelle pourront bénéficier d'aides à l'ensilage d'herbe dans le cadre des paiements directs pour les cultures arables et définir des sous-zones de base spécifiques pour l'ensilage d'herbe (sans modifier la superficie de base nationale) auxquelles s'appliquera le rendement de base pour les céréales.Le taux de base du gel obligatoire de terres est fixé, par défaut, à 10% sur toute la période 2000/2006. Ce taux pourra être annuellement révisé, à la hausse comme à la baisse, en fonction des conditions du marché. La dérogation pour les petits producteurs (moins de 92 tonnes) est maintenue.L'indemnisation de mise en jachère est fixée au même taux que pour les cultures arables (63 €/tonne).La mise en jachère facultative sera maintenue, moyennant des améliorations, notamment pour tenir compte de considérations d'ordre environnemental.

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La viande bovine

Baisse des prix garantis de 20% en trois étapes égales (2000/2001 à 2002/2003) moyennant une augmentation graduelle des primes. Le prix de base sera de 2 224 euros par tonne en 2002/2003. Il est de 2 780 €/t actuellementLe prix de base (pour le stockage privé) sera fixé au terme de la troisième et dernière réduction du niveau d'aide, c’est-à-dire le 1er juillet 2002. L'aide au stockage privé sera octroyée lorsque, comme c'est le cas dans le secteur de la viande porcine, les prix moyens du marché communautaire représenteront moins de 103% du prix de base.A partir du 1er juillet 2002, un système d'intervention conçu comme un "filet de sécurité" sera mis en place. Lorsque, dans un Etat membre (ou dans une région de ce dernier), les prix moyens du marché pour les taureaux ou les bœufs seront inférieurs au prix plancher de 1 560 €/t, des adjudications d'achat seront organisées par la Commission dans l'Etat membre concerné, selon la procédure du Comité de gestion.La Commission devra suivre de près l'évolution du marché européen et prendre, au besoin, les mesures nécessaires, notamment par des achats à l'intervention ad hoc.La prime spéciale de base pour les animaux mâles (PSBM ) sera portée en trois étapes (cf. tableau 5 ci-dessus) à 210 euros pour les jeunes bovins mâles et à 300 euros (payés en deux fois) pour les bœufs. La prime à la vache allaitante (PMTVA) sera portée à 200 euros en 2002 et continuera de se baser sur des plafonds individuels.La prime sera versée en une seule fois pour les jeunes bovins mâles et en deux fois pour les bœufs. La prime aux jeunes bovins mâles tient compte de la possibilité de conserver l'aide aux cultures arables pour le maïs à ensiler. Pour les animaux mâles, le régime continuera d’être encadré par une série de plafonds régionaux déterminant le nombre maximum de droits à primes.L'âge minimal requis pour le paiement des deux tranches de la prime spéciale aux animaux mâles est fixé respectivement à 9 mois (ou 185 kg de carcasse) et 21 mois et plus.Les plafonds régionaux pour la prime spéciale aux animaux mâles sont fixés sur la base des chiffres fournis pour 1996, après mise à jour. Le plafond est calculé conformément à la déclaration du Conseil de novembre 1996 (un seuil de 5% est prévu).Le complément national vache allaitante, qui s'ajoute à la prime de base communautaire, passe de 30 à 50 € par tête, pour les 40 premières vaches. Les droits à prime peuvent être utilisés pour des génisses jusqu'à concurrence de 20%.Instauration d’une prime à l'abattage qui sera versée directement à l'exploitant agricole sous réserve d'une période de rétention. Elle s'élèvera à 80 euros pour les taureaux, les bœufs, les vaches laitières, les vaches allaitantes et les génisses (à partir de 8 mois pour tous ces animaux) et à 50 euros pour les veaux (âgés de 1 à 7 mois, et dont la carcasse pèse moins de 160 kg).Dans chaque Etat-membre, deux plafonds sont fixés pour la prime à l'abattage, l'un pour les animaux adultes (taureaux, bœufs, vaches et génisses), l'autre pour les veaux. Ils sont calculés par rapport au nombre d'animaux abattus en 1995, auquel s'ajoutent les exportations d’animaux vivants vers les pays tiers pour la même armée, sur la base des données d'EUROSTAT ou de toute autre publication statistique officielle ayant reçu l'approbation de la Commission.Possibilité pour les Etat-membres de fixer un nombre maximal de primes spéciales par exploitation autre que celui fixé à 90 animaux par exploitation. Dans ce cas, les Etats- membres décident que les réductions du nombre de primes, indispensables lorsque le nombre de demandes de primes excède le plafond régional, ne s'appliquent pas aux petits exploitants dont la demande ne dépasse pas le nombre d’animaux fixé par l'Etat-membre. La réduction nécessaire pour respecter le plafond concerne uniquement les autres exploitants.Mise en place graduelle, entre les années 2000 et 2002, d’une enveloppe financière (dite également enveloppe de flexibilité) pour chaque Etat-membre afin de compléter les paiements relatifs aux bovins mâles et femelles, y compris aux vaches laitières. Ce mécanisme, qui vise

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également à encourager la production extensive, permettra aux Etats-membres de remédier aux différences régionales dans les pratiques et les conditions de production qui sont susceptibles de compliquer la restructuration.Pour les exercices 2000 et 2001, le montant des primes à l'extensification est fixé à 33 euros par animal lorsque le chargement est compris entre 1,6 et 2,0 UGB par hectare de SFP et à 66 euros s’il est inférieur à 1,6 UGB/ha. A partir de 2002, ces valeurs passent à 40 euros par animal quand le chargement est compris entre 1,4 et 1,8 UGB/ha et à 80 euros s’il est inférieur à 1,4 UGB/ha.Les seuils ci-dessus sont ceux retenus par la France. Rappelons qu’il était également possible de retenir une valeur unique ( 1,4 UGB/ha) donnant droit à une aide complémentaire identique pour tous les animaux (100 euros par tête). Signalons également que, désormais, tous les animaux présents sur l’exploitation, et non plus uniquement ceux qui bénéficient d’une prime, sont pris en compte pour le calcul du chargement. En outre, le maïs fourrager ne peut en aucun cas être comptabilisé comme surface fourragère.Le nombre total d'animaux éligibles à la prime spéciale et à la prime à la vache allaitante continuera d’être limité à 2 UGB(Unité Gros Bétail) par hectare de surface fourragère.Lorsque la densité d'occupation est inférieure à 1,4 UGB/ha, les Etats-membres peuvent prendre en compte l'extensification selon la formule initialement proposée par la Commission, c'est-à- dire 100 euros par animal.Les hectares pris en compte sont limités aux prairies temporaires et permanentes et à toutes les autres zones fourragères, à l'exception des cultures arables et notamment du maïs fourrager. L'obligation de mise en pâture effective des animaux durant la saison de végétation est remplacée par la condition que la superficie de pâturage représente au moins 50% de la zone fourragère totale déclarée.Définition par les Etats membres de leurs surfaces en "pâturage". Mais cette définition devra répondre au critère suivant : le "pâturage" est une superficie herbeuse qui, selon les pratiques agricoles locales, est destinée à la pâture des bovins et/ou des ovins. La superficie peut être utilisée à d'autres fins (pâture, production de foin, ensilage d'herbe) au cours de la même année.

Dans les Etats membres où plus de 50% du lait sont produits dans des zones de montagnes, la prime à l'extensification est également applicable aux vaches laitières élevées dans des exploitations se situant dans ces zones.

Le lait

Maintien du régime actuel des quotas. A partir de la campagne 2005/2006 seulement (report par rapport au compromis du 11 mars), baisse des prix d’intervention et mise en place de primes directes basées sur le quota par producteur et calculée de façon forfaitaire.Une enveloppe nationale relative à la production laitière, octroyée par l'Union aux Etats membres, viendra compléter le dispositif d’aide.Les prix d'intervention, pour le beurre et le lait écrémé en poudre, devraient diminuer de 15% en trois étapes, à partir de 2005.En 2000/2001 et 2001/2002, augmentation des quotas spécifiques, pour la Grèce, l’Espagne, l’Irlande du Nord et l’Italie sur deux ans.Les autres Etats-membres devraient bénéficier d'une augmentation de 1,5% de leurs quotas en trois étapes à partir de 2005.Globalement, au terme de la période de mise en œuvre, cela reviendra à une progression globale des quotas de 2,4 % pour l’ensemble de l’Union européenne.

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Le vin

Maintien jusqu'en 2010 de l'interdiction en vigueur concernant les nouvelles plantations, avec toutefois la constitution de réserves de droits de plantations nouvelles dans la limite de 68 000 hectares pour PUE, jusqu’au 31 décembre 2003 pour la production de VQPRD ou de vin de table. La Commission sera autorisée, via la procédure du comité de gestion, à attribuer des droits de plantation complémentaires (à partir de la réserve constituée) aux régions en mesure de justifier (débouchés) des besoins supplémentaires pouvant être couverts par une nouvelle distribution de droits.Pour recevoir des droits, chaque Etat-membre devra tenir un inventaire contenant des informations sur les superficies, les variétés et les droits de plantation.La possibilité d'utiliser des débouchés artificiels pour les produits non commercialisables, sont supprimés. La "distillation préventive", la "distillation obligatoire de vins de table" et la "distillation de soutien" sont abandonnées. Outre des mesures de distillation spécifiques pour le marché de l'alcool de bouche, une mesure de "distillation de crise", utilisable sur une base volontaire, sera introduite pour gérer les situations exceptionnelles de perturbation du marché.

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LA CLASSIFICATION DES SOUTIENS A L’AGRICULTURE.

Les soutiens à l’agriculture, quelle que soit leur nature (aides directes, prix garantis, subventions à l’exportation...), sont classés en fonction de leurs effets de distorsion sur les échanges, ou leurs effets sur la production. Ils sont, à l’heure actuelle, répartis dans trois « boîtes ». Selon la couleur des boites, on parle également de « couplage » (boîtes orange et bleue), ou de « découplage » (boîte verte).

LA BOITE VERTE

Sont classés en boîte verte, tous les soutiens dont les effets de distorsion sur les échanges, ou sur la production, sont nuls, ou au plus minimes. Ces soutiens, qualifiés de «découplés», ne font l’objet d’aucun engagement de réduction de la part des pays dans le cadre des accords signés en Avril 1994 à Marrakech. Considérés comme neutres, ces soutiens peuvent donc être augmentés sans limites. C’est sur cette base que les Etats-Unis se fondent pour accroître considérablement les aides à leurs agriculteurs (FAIR Act + aides d’urgence).Les mesures classées en boîte verte doivent être conformes aux critères de base suivants :

- le soutien doit être fourni dans le cadre d’un programme public financé par des fonds publics n’impliquant pas de transferts de la part des consommateurs,

- il ne doit pas avoir pour effet d’apporter un soutien des prix aux producteurs.

Parmi les mesures autorisées figurent celles relatives au « soutien du revenu découplé », à condition qu’elles satisfassent également aux conditions suivantes :

- Le droit à bénéficier de versements à ce titre sera déterminé d'après des critères clairement définis, tels que le revenu, la qualité de producteur ou de propriétaire foncier, l'utilisation de facteurs ou le niveau de la production au cours d'une période de base définie et fixe.

- Pour une année donnée, le montant de ces versements ne sera pas fonction ni établi sur la base du type ou du volume de la production (y compris les têtes de bétail) réalisée, par le producteur au cours d'une année suivant la période de base.

- Pour une année donnée, le montant de ces versements ne sera pas fonction, ni établi sur la base des prix, intérieurs ou internationaux, s'appliquant à une production réalisée au cours d'une année suivant la période de base.

- Pour une année donnée, le montant de ces versements ne sera pas fonction ni établi sur la base des facteurs de production employés au cours d'une année suivant la période de base.

- Il ne sera pas obligatoire de produire pour pouvoir bénéficier de ces versements.

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LA BOITE BLEUE

La boîte « bleue » à été créée au cours des négociations de l’Uruguay round afin que les aides compensatrices instaurée dans le cadre de la réforme de la PAC de 1992 puissent bénéficier d’un traitement particulier. Cette disposition particulière arrangeait également les États-Unis puisqu’elle leur permettait d’exclure également de la discussion les aides directes au revenu existantes à cette époque (les deficiency payments).Pour figurer dans cette boîte (paragraphe 5 de l’article 6 de l’Accord Agricole de l’Uruguay Round), les aides directes doivent être liées à un programme de limitation de la production et vérifier un des trois critères suivants :

- elles doivent être basées sur des surfaces ou des rendements fixes,

- versées pour un maximum correspondant à 85% d’une production d’une période de base,

- fondées, pour les aides à l’élevage, sur un nombre de têtes fixes.

LA BOITE JAUNE

Également qualifiée de « orange », ou même parfois de « rouge » (« amber » en anglais), elle regroupe tous les soutiens qui ne figurent dans les deux boîtes précédentes.

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Notes et Études Économiques MINISTERE DE L’AGRICULTURE ET DE LA PECHE

Direction des Affaires Financières Renseignements :

Sous-Direction de l’Évaluation, de la Prospective et des Études - tél : 01.49.55.42.09 78, rue de Varenne - 75349 Paris 07 SP

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Service des ventes - BP 88 31326 - Castanet Tolosan cédex

Prix : 65 F