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COLLEGE COOPERATIF PROVENCE ALPES MEDITERRANEE Centre agréé par le Ministère des Affaires Sociales et de la Santé Diplôme d’Etat d’Ingénierie Sociale Région PACA Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux : Quels leviers pour les IME ? Présenté par : Mme PETITE Laure Sous la direction de : Mr WEISLO Emmanuel Session de décembre 2016 Centre associé Institut Régional de Travail Social PACA et Corse

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COLLEGE COOPERATIF PROVENCE ALPES MEDITERRANEE

Centre agréé par le Ministère des Affaires Sociales et de la Santé

Diplôme d’Etat d’Ingénierie Sociale

Région PACA

Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

Présenté par : Mme PETITE Laure

Sous la direction de : Mr WEISLO Emmanuel

Session de décembre 2016

Centre associé

Institut Régional de Travail Social PACA et Corse

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Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux : Quels leviers pour les IME ?

REMERCIEMENTS

L’exercice de la recherche et la formulation du mémoire exigent un investissement

personnel qui se réalise avec le soutien d’un directeur de mémoire, la collaboration des

différents participants nommés dans cet écrit, l’appui des collègues de formation et de

terrain et surtout avec le soutien incontestable de ma famille.

Je tiens ainsi à remercier tout d’abord Emmanuel Weislo qui m’a accompagné avec

bienveillance dans ce parcours.

Merci à toutes celles et ceux qui ont accepté d’apporter leur contribution à la

recherche. Leurs témoignages ont été d’un grand éclairage. Certains m’ont ouvert les

portes de leur intimité, d’autres n’ont pas hésité à prendre sur leur temps personnel pour

me rencontrer. Toutes ces entrevues ont été enrichissantes pour la recherche mais

également d’un point de vue professionnel et personnel.

Toute ma gratitude se porte vers mes collègues de promotion qui ont vu en moi un

potentiel et qui m’ont fait part de leurs encouragements. Je tiens à présenter ma

reconnaissance envers mes collègues de travail qui ont subi mes absences pour formation

et qui voient à présent, en moi, la possibilité de faire évoluer les pratiques professionnelles.

Des remerciements particuliers vont à ma famille qui a supporté mon indisponibilité, mes

moments de doute et mes périodes d’isolement. Elle a su être protectrice dans les pires

moments d’incertitudes.

Je souhaite que ce travail soit à la hauteur de l’investissement de chacun et que tous

soient satisfaits de l’issue du travail accompli.

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SOMMAIRE

INTRODUCTION p 1

I HANDICAP MENTAL : QUELLES PRISES EN CHARGE ? p 6

1. Un panel de dispositifs p 6

1.1 Des organisations d’accompagnements spécialisés p 6

1.2 Accessibilité scolaire en milieu ordinaire p 9

1.3 Le bout du bout de la scolarisation p 21

1.4 Hétérogénéité et déficience en IME p 25

2. Élaboration de la problématique et hypothèses : accessibilité à la scolarité dans le droit

commun, quelles opportunités pour les IME ? p 30

2.1 Formulation du questionnement p 30

2.2 Propositions d'hypothèses p 31

II LA RECHERCHE DE TERRAIN p 33

1. Méthodologie p 33

1.1 Le corpus documentaire p 33

1.2 Le dispositif d’enquête par entretiens p 34

2. Les premiers résultats de l’enquête : la scolarisabilité p 36

2.1 Du point de vue des professionnels de l’Éducation nationale p 37

2.2 Vivre la scolarité de son enfant handicapé p 52

3. Des transformations conceptuelles : de l’éducabilité à l’inclusion p 64

3.1 Une approche de la désinstitutionalisation p 64

3.2 La dynamique européenne p 75

3.3 Les défis de l’inclusion scolaire p 79

3.4 L’innovation au service du handicap p 86

III ANALYSE DES INFORMATIONS ET PRECONISATIONS p 90

1. Tendances et perspectives des IME p 90

1.1 Configuration nouvelle des IME p 90

1.2 S’inspirer du modèle finlandais p 93

2. Les conditions de l’accessibilité scolaire aujourd’hui p 94

2.1 Formation et perfectionnement du personnel p 96

2.2 Ces petits riens qui nuisent aux familles p 100

2.3 Á propos de la coopération p 107

3. Des organisations d’éducation spécialisée en changement p 109

3.1 Déraciner les cultures professionnelles p 109

3.2 Éduquer à l’orientation professionnelle p 110

3.3 Le « case manager » p 112

CONCLUSION p 116

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TABLE DES SIGLES ET DES ABRÉVIATIONS

AESH : accompagnant des élèves en situation de handicap

ANAP : agence nationale d'appui à la performance

ANESM : agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services

sociaux et médico-sociaux

AMP : aide médico psychologique

ARS : Agence régionale de santé

ASH : adaptation scolaire et scolarisation des élèves handicapés

AVS : auxiliaire de vie scolaire

CAMPS : centre d’action médico-sociale précoce

CAP : certificat d'aptitude professionnelle

CAPA-SH : certificat d’aptitude professionnelle pour les aides spécialisées, les

enseignements adaptés et la scolarisation des élèves en situation de handicap

CAT : centre d'aide par le travail

CDAPH : Commission départementale pour l'autonomie des personnes handicapées

CFA : centre de formation des apprentis

CFA R FA : centre de formation d'apprentis régional formation adaptée

CFAS : centre de formation des apprentis spécialisé

CIF : classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé

CLIS : classe d’inclusion scolaire

CMPP : centre médico psycho pédagogique

CNED : Centre national d'enseignement à distance

CNRTL : Centre national de ressources textuelles et lexicales

CNSA : caisse nationale de solidarité pour l’autonomie

COFACE : confederation of family organisations in the european union

CPAM : caisse primaire d’assurance maladie

CPOM : contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens

CRA : centre ressources autisme

CREAI : Centre interrégional d’études, d’actions et d’informations en faveur des personnes

en situation de vulnérabilité

CVS : conseil à la vie sociale

DREES : Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques

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EGPA : enseignement général et professionnel adapté

EMS : établissements médico-sociaux

ESAT : établissement et service d'aide au travail

ESMS : établissement social et médico-social

ESPE : École supérieure du professorat et de l'éducation

ESS : équipe de suivi de scolarité

GEPSo : groupe national des établissements et services publics sociaux et médico-sociaux

IME : institut médico-éducatif

IMP : institut médico-pédagogique

IMPro : institut médico-professionnel

INSEE : Institut national de la statistique et des études économiques

ITEP : institut thérapeutique, éducatif et pédagogique

LEA : lycée d’enseignement adapté

LEP : lycée d’enseignement professionnel

MDPH : maison départementale des personnes en situation de handicap

MPA : matériel pédagogique adapté

OCDE : Organisation de coopération et de développement économique

OMS : organisation mondiale de la santé

PACA : Provence Alpes Cote d’Azur

PECS : système de communication par échange d’images

PPS : projet personnalisé de scolarité

RASED : réseau d’aide et de soutien aux élèves en difficultés

SAVS : service d’accompagnement à la vie sociale

SEES : section d'éducation et d'enseignement spécialisés

SEGPA : section d’enseignement général et professionnel adapté

SESSAD : service d’éducation spécialisée et de soins à domicile

SIPFP : section d'initiation et de première formation professionnelle

TED : trouble envahissant du développement

UAA : unité adaptée pour autistes

ULIS : unité locale d’inclusion scolaire

URIOPSS : union inter-régionale interfédérale des organismes privés non lucratifs

sanitaires et sociaux

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INTRODUCTION

Aujourd’hui le handicap est défini par l’OMS comme un mode de fonctionnement

susceptible de concerner tout à chacun à un moment ou à un autre de sa vie. Les

orientations politiques en faveur du handicap s’élaborent de plus en plus à l’échelle

internationale et se déclinent en matière d’accessibilité et de non-discrimination. La

question du handicap a entamé un processus de réagencement en profondeur transformant

ses professionnels, ses établissements et services, ses techniques, ses publics mais au-delà

elle met à l’épreuve les capacités de « vivre ensemble ». La loi du 11 février 2005 « pour

l’égalité des droits et des chances » refonde radicalement la politique française du

handicap, concept qui traverse l’ensemble de l’action publique. Nous allons ainsi nous

interroger, dix ans après cette loi, sur les évolutions qui marquent l’accès à la scolarité des

enfants handicapés en milieu ordinaire et ses conséquences mais aussi sur les défis qui se

dessinent pour le milieu spécialisé dans les années à venir.

Chaque année, entre 6000 et 8500 enfants naissent avec un handicap mental.

L’expression « handicap mental » qualifie à la fois des déficiences intellectuelles, des

troubles mentaux, des troubles du développement… et les répercussions qu’elles/ils

entraînent au quotidien. Bien que le handicap prenne une place importante dans leur vie,

les enfants et adolescents handicapés mentaux sont avant tout des individus désirant vivre

le plus possible avec et parmi les autres enfants de leur âge partageant les mêmes

préoccupations.

La mise en œuvre de la politique à destination des enfants et adolescents handicapés

et de leur famille s’inscrit dans un système complexe. Elle compte sur plusieurs types

d’acteurs publics : l’État, les agences régionales de santé (ARS), les conseils consultatifs

d’associations, les collectivités territoriales, les maisons départementales des personnes

handicapées (MDPH), l’agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements

et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) etc. Elle occasionne des inégalités de

territoire et également des prises en charges financières multiples (caisse primaire

d’assurance maladie (CPAM), conseil départemental, caisse nationale de solidarité pour

l’autonomie (CNSA)…).

Les missions de ces politiques publiques ont été longtemps garanties par les

institutions spécialisées, sectorisées en fonction des catégories de populations prises en

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charge. Nous entendons par milieu spécialisé ce qui par définition s'oppose au milieu

ordinaire comme les établissements scolaires dépendant de l'Éducation nationale. Quant

aux établissements spécialisés, ils relèvent d'autres ministères comme celui de la santé ou

des affaires sociales. Á partir des années 1980, la France commence à développer des

services de proximité, à domicile, permettant aux personnes en situation de handicap, le

maintien en famille, à l’école et au travail dès lors que cela est possible. Nous assistons

alors à un changement de modèle d’accompagnement, plus intégratif, tel que le

revendiquent les commissions aux personnes handicapées et les lois de 75. Les

transformations des accueils en établissement, par des places en service d’éducation

spécialisée et de soins à domicile (SESSAD) ou service d’accompagnement à la vie sociale

(SAVS), répondent-elles à ce moment à l’ensemble des besoins des usagers ? La question

de la désinstitutionalisation n’apparaitra que plus tard avec les recommandations du

Conseil de l’Europe dans les années 2000. Alors qu’il est prôné la fermeture des

établissements au profit des services de proximité, nous sommes actuellement en France

dans un système où les services de proximité cohabitent avec les établissements.

Actuellement, le nombre d’établissements ne varie pas, les effectifs de places d’accueil

stagnent et les services tels que les SESSAD sont en pleine expansion au détriment des

internats. Les services de proximité, aujourd’hui, suffisent-ils à répondre à l’ensemble des

problématiques générées par le handicap mental ? L’agencement des dispositifs

d’accompagnement en milieu ordinaire suffit-il à répondre à l’ensemble des besoins des

enfants et adolescents en situation de handicap ? Que penser alors du rapport entre les

pénuries de places en institut médico-éducatif (IME) et les situations d’enfants ou

adolescents handicapés, sans solution, sans prise en charge et sans scolarité ? Comment

peut-on envisager la réduction du nombre d’accueil en établissements alors qu’il existe des

listes d’attente pour y entrer ? La question majeure est donc de savoir si la

désinstitutionalisation à long terme aboutira à la fermeture des établissements ou à leur

transformation ?

Les processus de désinstitutionalisation et l’inclusion scolaire obligent à organiser de

nouveaux modes d’accompagnement pour le public porteur de handicap à destination du

droit commun. Si les principes de l’inclusion reposent sur l’idée de partager une vie

scolaire parmi des enfants ou adolescents du même âge, alors la réalisation de ce projet

demande de mettre à disposition des conditions pour s’y accommoder. Quelles sont-elles ?

Quelles seront alors les missions des IME et pour quel public ?

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Au travers cet écrit nous tenterons de répondre aux diverses questions qui se posent

au regard des processus engagés. Des enfants et des adolescents sont encore accompagnés

en IME, qui sont-ils ? Quel a été leur parcours en milieu ordinaire ? Les conditions de

l’inclusion sont-elles appropriées aux besoins de ces enfants ? Quel soutien le milieu

spécialisé pourrait-il développer pour favoriser davantage l’inclusion ? Les IME vont-ils

proposer d’autres offres de service ? Quels changements de pratiques professionnelles sont

à prévoir ?

Pour les enfants et adolescents ayant des besoins spécifiques, la scolarité et/ou un

accompagnement pluridisciplinaire prodigués par le milieu spécialisé se montrent plutôt

appropriés. Les IME offrent une prise en charge aux enfants souffrant d’autisme, de

déficiences, avec des troubles associés ; ils apparaissent comme un mode

d’accompagnement possible quand l’école ordinaire s’y refuse. Enfin ils répondent à la

question de l’orientation vers le secteur adulte des grands adolescents en situation de

handicap mental. C’est avec ce public hétérogène que les établissements spécialisés

doivent composer aujourd’hui.

Malgré les enquêtes en cours existantes, aucune aujourd’hui ne permet ni de retracer

le parcours scolaire des élèves, ni d’évaluer les bénéfices qu’ils peuvent en tirer en matière

de réussite scolaire ou d’insertion professionnelle. Néanmoins l’enquête réalisée permet de

répondre à l’interrogation suivante : l’inclusion scolaire s’adresse-t-elle à tous les élèves en

situation de handicap mental ? Nous notons des points faibles, des défaillances du système

scolaire vis-à-vis du handicap mental. Ainsi en pointant les difficultés, l’enquête met en

relief les conditions qui pourraient être améliorées par les dispositifs. Cet état des lieux met

en avant les opportunités pour les IME de mobiliser leurs compétences et d’apporter des

plus-values à leurs missions au sein des écoles, pourquoi pas sur le volet de la formation ou

sur des modes de coopérations ? En même temps ils peuvent diversifier l’offre en innovant

et en proposant des activités répondant aux objectifs du moment à savoir une éducation à

l’orientation professionnelle et la construction d’une plateforme d’accompagnement au

parcours.

La première partie du mémoire dressera un état des lieux des prises en charge du

handicap mental. Il met l’accent sur la scolarité de ces enfants et adolescents aussi bien en

milieu spécialisé qu’à l’école dite ordinaire. Arrivés à termes d’une scolarité dans le droit

commun ces enfants gagnent des dispositifs spécialisés offrant une continuité de parcours.

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En conséquence de quoi les IME accueillent un public très hétérogène. Fort de ce constat

nous problématiserons dans un contexte de désinstitutionalisation et d’inclusion scolaire,

les enjeux pour les IME. Nous constituerons des hypothèses sur les apports des IME au

public en situation de handicap mental.

La seconde partie posera le contexte de l’enquête. Cela suppose d’évoquer la

méthodologie de la recherche et les techniques employées. Une enquête auprès des acteurs

de l’Éducation nationale et des familles a été réalisée. La technique d’entretien est une

méthode qui a été sélectionnée, semblant correspondre au mieux à la recherche

d’informations. Á cette occasion nous circonscrirons les données conceptuelles de la

désinstitutionalisation et de l’éducation inclusive dans le contexte européen et socio-

économique que nous connaissons. Nous traiterons ensuite du handicap au travers du

prisme de l’innovation. Les premiers résultats montreront la tendance dans les discours, les

points communs et les discordances des propos des personnes interrogées.

La troisième partie concerne l’analyse de l’ensemble des données permettant

d’établir les perspectives d’évolution des IME, les enjeux et les conditions d’accueil. Alors

nous énoncerons les conditions relatives à l’accessibilité d’une inclusion scolaire en vue de

préconiser aux IME des leviers d’intervention sur les volets de la formation,

l’accompagnement des familles et de la nécessaire coopération entre les enseignants et les

professionnels spécialisés. Enfin nous essayerons d’inscrire les nouvelles perspectives

d’intervention sociale des IME qui ont, en tant qu’établissement porteur d’un projet de

mission d’intérêt général, un rôle sociétal. Nous verrons que les bouleversements des

pratiques professionnelles peuvent être une opportunité pour les IME de s’affirmer dans

leur expertise du handicap. Ils pourraient même prétendre, au vu de l’évolution du public

accueilli, être reconnus comme les acteurs privilégiés de l’orientation professionnelle des

adolescents en situation de handicap plus seulement vers le milieu spécialisé mais aussi en

direction du milieu ordinaire. Les évolutions des accompagnements pourraient amener à la

création de nouveaux métiers.

Ce mémoire va montrer que les impacts de la désinstitutionalisation et de l’inclusion

scolaire procurent aux IME, l’occasion de justifier de leur qualité de service. Le lecteur

trouvera divers types de données : quantitatives officielles et des éléments qualitatifs

constitués par l’enquête réalisée. La bibliographie en fin de document comporte de

nombreux ouvrages à propos du handicap, de l’inclusion, de la scolarisation, des revues

spécialisées et des articles de la presse associative ainsi que des rapports d’expertise. Elle

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est constituée également de sites internet, de ressources documentaires notamment de la

Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), de bilans

et d’expertises.

Dix ans après la promulgation de la loi sur l’égalité des droits et des chances, il

persiste des tensions entre le désir d’inclure dans les dispositifs ordinaires et les hésitations

quant au sort des établissements spécialisés. L’idée du mémoire est d’apporter des éléments

de compréhension des enjeux qui entourent le devenir des IME et de la redéfinition de leur

utilité sociale.

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I. HANDICAP MENTAL : QUELLES PRISES EN CHARGE ?

Mon cadre d’intervention professionnelle s’inscrit dans le champ de l’action sociale

auprès d’un public en situation de handicap mental et plus particulièrement auprès des

enfants, adolescents et jeunes majeurs au sein d’un IME. Comme le précise Guy Cauquil,

professeur de management public « les compétences aujourd’hui requises en matière

d’action sociale relèvent moins d’une logique de qualification technique que d’une capacité

à comprendre et mettre en perspective les différents paramètres de l’intervention sociale1 ».

C’est avec cette curiosité que j’ai entamé la formation du DEIS. L’exercice du mémoire

sous-tendu par la formation me permet de comprendre les enjeux des changements dans

l'organisation des IME dans un contexte d'évolution des politiques publiques du champ du

handicap. Le système d'organisation des institutions médico-sociales est en permanence en

transformation selon les commandes sociétales. Alors que dans le système éducatif les

jeunes handicapés bénéficient d’un secteur spécialisé, avec les dernières réformes,

l’inclusion dans le droit commun devient une perspective pour eux. Pourtant cet accueil ne

va pas de soi malgré les diverses tentatives d’accessibilité. Quels sont les dispositifs

proposés aux enfants et adolescents en situation de handicap ? Quelles sont les offres mises

à disposition du public en situation de handicap mental ? Quels sont les effets sur les

établissements médico-sociaux au tournant de 2005, loi du 11 février rappelant le principe

d’obligation scolaire ?

1. Un panel de dispositifs

Tandis que l’Éducation nationale apporte des solutions aux problèmes de scolarité des

enfants handicapés, elle prend place aux côtés du secteur médico-social dans la prise en

charge du handicap.

1.1. Des organisations d’accompagnements spécialisés

La mobilisation des familles pour l'accueil des personnes en situation de handicap

permet d’inscrire les préoccupations dans l’agenda public. Henri-Jacques Stiker, historien

et anthropologue, décrit historiquement les lieux d'accueil des personnes handicapées

comme une création par les familles pour « permettre l'éducation, la scolarisation, l'emploi

1 CAUQUIL G., « des compétences pour décider », Informations Sociales, n°38, 1

er octobre 1994, pp 50-59

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que la société, les parents ne peuvent pas donner2 ». L’institutionnalisation en

établissement social et médico-social (ESMS) incarne la mise en œuvre des dispositifs

répondant à ces besoins.

Graphique 1

Pour l’essentiel, les établissements tels que les IME sont les plus nombreux. Cette

offre représente près des deux tiers de la capacité d’accueil totale des ESMS. Les IME font

la promotion de l’éducation spécialisée. Organisés comme un équipement, ils accueillent

des enfants et adolescents atteints de handicap mental ayant des droits notifiés par la

commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Ils ont pour

mission de dispenser une éducation, un enseignement, d'orienter les jeunes présentant des

déficiences intellectuelles. S'appliquant au public en manque d'autonomie, ils contribuent à

la réduction des inégalités sociales et économiques par l'affirmation des droits et

l'amélioration des conditions de vie. Les établissements diversifient leurs actions,

notamment par des démarches de prévention, des initiatives d'insertion, d'assistance et

d'accompagnement social.

Ils sont autorisés par les ARS pour l'accueil de jeunes porteurs de handicap mental,

âgés de 6 à 20 ans. Toutefois la présence de jeunes adultes âgés de plus de vingt ans en

attente d'orientation est envisageable au titre de l’amendement Creton3. La prise en charge

proposée peut être envisagée sous deux régimes : internat ou semi-internat. Il est également

possible d'adapter le type d'accueil avec des temps partiels ou bien des accueils séquentiels.

2 STIKER H.-J., (2009), Les métamorphoses du handicap de 1970 à nos jours, soi-même avec les autres,

Presses Universitaires de Grenoble, Grenoble, 262 p 3 Loi n°89-18 du 13 janvier 1989 modifiant la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées

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Ces établissements sont ouverts 209 jours par an pour la plupart. L’ensemble de ce système

est financé par la CPAM par une coexistence du prix de journée fixé par les ARS ou d’une

dotation globale dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM)

et d’autres financements. Á savoir que la réforme sur la tarification est en cours4.

Les effectifs des usagers sont généralement répartis dans les services suivants :

- SEES (section d'éducation et d'enseignement spécialisés) qui propose des ateliers

éducatifs et de la scolarisation ; des rééducations et du soin pour les enfants et adolescents

jusqu'à 15 ans.

- SIPFP (section d'initiation et de première formation professionnelle) qui dispense

pour des jeunes de plus de 15 ans, des formations pratiques pré-qualifiant grâce aux ateliers

techniques et éducatifs ; propose des rééducations, du soin, une scolarité, des stages en

entreprises ou en établissements spécialisés comme les foyers de vie, les maisons d’accueil

spécialisé, les établissements et service d'aide au travail (ESAT).

- UAA (unité adaptée pour autistes) ou section TED (trouble envahissant du

développement) offre un accompagnement spécifique de soin, de rééducation, d'éducation

pour les jeunes souffrant d'autisme avec une déficience intellectuelle associée.

Il arrive que les services SESSAD soient rattachés à une structure. Ils s'adressent aux

enfants, adolescents et jeunes adultes présentant des troubles de l'apprentissage, scolarisés

en milieu « ordinaire » qui nécessitent un accompagnement éducatif à leur parcours

scolaire.

Le cadre organisationnel des IME se compose d’équipes pluridisciplinaires.

L'encadrement du public est composé de personnel socio-éducatif, éducateur spécialisé,

moniteur éducateur, éducateur technique, aide médico-psychologique (AMP), animateur

sportif. Le personnel enseignant, constituant les unités d’enseignement (UE), est détaché

par l'Éducation nationale pour dispenser les apprentissages de la lecture, du calcul, de

l'éveil culturel et pour accompagner le parcours de formations professionnelles. Le suivi

des soins et les rééducations, sont assurés par le personnel médical et para médical. Le

service médical et paramédical se compose d’orthophoniste, psychomotricien,

psychologue, infirmier, médecin, psychiatre… Les autres services composés de

professionnels de gestion et d’agents technique (administratif, direction, services généraux)

contribuent aux fonctions des établissements.

4 Le projet SERAFIN-PH (Services et Etablissements: Réforme pour une Adéquation des FINancements aux

parcours des Personnes Handicapées), lancé en janvier 2015 par la secrétaire d'Etat aux personnes

handicapées et à la lutte contre l'exclusion

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Quels leviers pour les IME ?

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Les projets d'établissement, élaborés par les structures, mettent en avant leur valeur et

leurs objectifs. Ils posent le cadre réglementaire et les conditions statutaires ainsi que les

bases du travail social en répondant aux besoins des usagers en rééquilibrant l’offre

existante. Moderniser les services existants, transformer l’offre de service, élaborer de

nouvelles perspectives de travail et évaluer les usagers sont autant de thèmes abordés dans

les projets. Les IME sont donc pensés comme des structures répondant aux demandes

complexes de prise en charge matérielle et d’accompagnement éducatif adaptés en offrant

un accompagnement global.

1.2. Accessibilité scolaire en milieu ordinaire

De la notion d’éducabilité à la démarche inclusive, des modifications sur la manière

de prendre en charge et d’accompagner l’enfant en situation de handicap mental n’ont cessé

de faire évoluer les dispositifs. Le système scolaire accueille un nombre croissant d’enfants

handicapés et s’est doté de dispositifs collectifs d’encadrement des élèves handicapés.

Tableau 1

Mode de scolarisation des enfants et adolescents en situation de handicap en 2014-2015

Scolarité en milieu ordinaire Établissements spécialisés (1)

Individuelle Collective Établissements hospitaliers Établissements médicaux et sociaux

Premier degré 103 908 47 504 5 399 60 168

Préélémentaire 30 113 6 991 2 390 20 385

Élémentaire 73 795 40 513 3 009 39 783

Second degré 75 941 32 588 2 066 6 705

Premier cycle 57 915 14 154 1 426 5 344

Second cycle 17 553 3 288 640 1 361

Autre niveau (2) 473 15 146 /// ///

Niveau indéterminé (3) /// /// 304 3 320

Total 179 849 80 092 7 769 70 193

/// Absence de données. (1) hors jeunes scolarisés pour de courtes périodes. (2) élèves fréquentant le second degré même sans en avoir le

niveau. (3) élèves scolarisés dans un établissement spécialisé dont le niveau est difficile à déterminer.

Source : Depp

Le tableau présenté indique la répartition des effectifs des enfants et adolescents

handicapés selon le mode de scolarisation. Nous pouvons remarquer que la proportion

d’enfants en situation de handicap, scolarisé en milieu ordinaire est très importante par

rapport à celle du milieu spécialisé. C’est pourquoi il apparaît opportun de s’intéresser aux

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Quels leviers pour les IME ?

10

divers dispositifs proposés par l’Éducation nationale.

Les politiques d’intégration en milieu scolaire d’enfants handicapés sont engagées

depuis la loi d’orientation5 des personnes handicapées de 1975. Sans cesse ajustées, ces

prérogatives sur la scolarisation en milieu ordinaire s'appuient sur le plan Handiscol qui

tente depuis 1999 de faire collaborer ensemble enseignants et professionnels spécialisés. Il

édite des guides pratiques, renforce les pilotages et est à l’initiative d’une cellule d’écoute.

a. La déficience intellectuelle à l’assaut de l’école

Selon le code de l’éducation et la loi de 20056, la scolarisation des enfants et

adolescents handicapés doit se dérouler en priorité en milieu ordinaire. Deux modes de

scolarisation sont proposés :

- une scolarisation individuelle

- une scolarisation collective

Quelques données chiffrées

La scolarisation en milieu ordinaire concerne 25 8710 élèves en situation de handicap

en France pour la rentrée 2014 soit 73 % de la population d’enfants présentant un

handicap7. En 2011, dans les Bouches du Rhône 5973

8 élèves handicapés fréquentent une

école ordinaire. D’ailleurs elle a été multipliée par deux depuis 2006 selon les estimations

du Centre interrégional d’études, d’actions et d’informations (CREAI). En même temps

elle a nécessité des ajustements de dispositifs d'accueil de ce public.

Le tableau ci-dessus montre que la scolarisation en milieu ordinaire dépend de la

forme d’expression du handicap. Il existe peu d’écart entre le premier et le second degré

quand il s’agit de handicap sensori-moteur. Par contre il y a une grande disparité quand les

élèves présentent des troubles mentaux.

5 Loi n° 75-534 du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées

6 Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté

des personnes handicapées 7 MDPH : au carrefour des politiques publiques, synthèse des rapports d'activité 2011 des MDPH, (2012),

CNSA, 102 p. 8 2006-2010 État des lieux de la scolarisation des enfants et adolescents handicapés de la région PACA,

(2010), CREAI PACA et Corse, 76 p.

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11

Tableau 2

L’histogramme suivant fait état d’un réel effort d’intégration des élèves handicapés

mentaux. D’après le graphique, les situations de troubles intellectuels et cognitifs sont en

nette progression depuis 2006.

Graphique 2

Les effectifs d’élèves handicapés scolarisés en milieu ordinaire selon la déficience en 2006 et en 2011(en millier)

Une étude du CREAI en PACA9 fait le constat suivant : le taux de scolarisation

dépendrait du type de handicap. Les enfants et adolescents porteurs d'un handicap mental,

scolarisés en milieu ordinaire souffrent de troubles psychiques pour 25,1 % et de troubles

cognitifs pour 34,2 % et la déficience légère est présente au sein des écoles à 28 %.

9 Données chiffrées sur le handicap en région 2014, (2014), CREAI PACA et Corse, 50 p.

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Quels leviers pour les IME ?

12

Ainsi la scolarité en milieu ordinaire s'adresserait davantage aux enfants qui

présentent des troubles de la fonction de connaissance tels que la mémoire, le langage, le

raisonnement, l'apprentissage, l'intelligence, la résolution de problèmes, la prise de

décision, la perception... Elle s'avère moins efficiente pour ceux souffrant d'une déficience

moyenne et encore moins pour ceux souffrant d'un handicap lourd. Même s’il est enregistré

une nette progression de l’inscription en classe des élèves handicapés, quand nous prenons

en compte l’origine du handicap, nous relevons que les élèves présentant un handicap

mental (déficience intellectuelle et handicap psychique) sont à moindre effectif dans le

second degré.

Parcours de scolarisation

Si la scolarisation en milieu ordinaire est de la compétence de l'Éducation nationale,

l'ouverture de droits spécifiques aux personnes en situation de handicap est de la

compétence des commissions départementales pour l’autonomie des personnes handicapées

(CDAPH).

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13

Lorsqu’il n’y a pas encore de reconnaissance du handicap une équipe éducative

composée de la famille, du chef d'établissement, d'une assistante sociale, de l'enseignant,

du médecin ou psychologue de l'Éducation nationale (pour les niveaux de préélémentaire

ou élémentaire) ou du conseiller d'orientation psychologue (pour le second degré) se réunit

afin de définir de l’opportunité de saisir la CDAPH. C’est à la famille de l’élève de faire

une demande auprès de la MDPH, soutenue par un référent de scolarité. « Cette

organisation place la famille au cœur du processus10

».

Le référent de scolarité est l’acteur central des actions conduites pour l’élève

handicapé11

. Il est le garant du projet personnalisé de scolarité (PPS) lorsque le handicap

est reconnu ; ce qui permet d'assurer une continuité de parcours et d’étayer les

aménagements. Le PPS est élaboré par une équipe pluridisciplinaire appelée équipe de

suivi de scolarisation (ESS) qui définit les modalités de scolarisation et les actions

pédagogiques, éducatives, médicales, paramédicales et psychologiques. Dans un rapport

parlementaire12

en date de novembre 2011, il est écrit que dans un PPS ce qui est important

c'est l'épanouissement de l’enfant plus que la réussite scolaire. Ce dernier point fait débat.

L’école ne doit-elle pas prodiguer les apprentissages fondamentaux tels que la lecture,

l’écriture, le calcul… ? Les élèves doivent se sentir bien au sein de l’école pour que les

apprentissages soient efficaces. Cependant si nous allons au bout d’un projet inclusif,

l’école doit apporter les outils nécessaires à l’inclusion sociale c’est-à-dire des savoir-faire

et des savoir-être. L’épanouissement de l’enfant ne peut être l’objectif d’un PPS ; il

manque des apprentissages fondamentaux qui au final feront défaut à l’inclusion sociale.

Le Geva-sco (annexe 1), outil d’évaluation pour l’élaboration du PPS, apporte les

éléments à l’élaboration du projet de formation. Ce recueil de situations scolaires renseigne

sur le degré d'autonomie dans la réalisation d'activités. Il sert d’outil de construction et de

réévaluation du parcours de formation du jeune.

10

SZYMANKIEWIEZ C., (2013), Le système éducatif en France, La documentation française, Paris, 346 p 11

Arrêté du 17 août 2006 relatif aux enseignants référents et à leurs secteurs d’intervention, paru au journal

officiel, n°192, du 20 août 2006 12

CHOSSY J-F., (2011), Rapport sur l'évolution des mentalités et changement du regard de la société sur les

personnes handicapées. Passer de la prise en charge... à la prise en compte, 127 p

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Quels leviers pour les IME ?

14

b. Scolarisation individualisée, une modalité répandue

La scolarisation individuelle concerne 138 000 élèves en situation de handicap en

France selon la CNSA13

. En PACA, le CREAI14

annonce une part plus importante de la

scolarisation individuelle.

Attribution d'une aide humaine

L’aménagement de la scolarité peut parfois conduire à mettre en place une aide

humaine. Elle est destinée à toute personne dont l'état physique ou psychique nécessite la

présence d'un tiers pour effectuer des tâches de la vie journalière d'un écolier au sein de

l'établissement scolaire.

- Accompagnement par le milieu spécialisé

Face à l’augmentation croissante des enfants handicapés dans les classes et la

nécessité d’aménagement de la scolarité, les politiques ont saisi l’importance de mettre en

œuvre des plans d’action visant entre autres à accroitre le nombre d’accompagnants. En

soutien à l’enfant, une forme d'aide humaine spécialisée apporte sa contribution à la

réalisation de la scolarité : le personnel des SESSAD. Le SESSAD est un service à

domicile qui comme l’indique un rapport du CREAI15

est à 46,7 % rattachés à un IME. Il

accompagne un nombre croissant d’enfants en milieu scolaire. Il se compose de

professionnels qualifiés qui interviennent auprès de l’enfant et de sa famille : éducateurs

spécialisés, éducateurs de jeunes enfants, assistante sociale, rééducateurs et thérapeutes. Ce

service ne se limite pas à l’accompagnement de la scolarité ; il intervient dans les actes de

la vie journalière, propose des rééducations, initie des projets d'insertion sociale et soutient

la famille dans son accompagnement.

Historiquement depuis le milieu des années 90, ces services ont été créés par des

associations par choix économique et par la volonté de diversifier leurs activités. Le

financement de ces équipements est moins couteux que celui d’un établissement.

Cependant les arguments économiques ne suffisent pas à expliquer leur progression. Ce

13

MDPH : au carrefour des politiques publiques, synthèse des rapports d'activité 2011 des MDPH, (2012),

CNSA, 102 p. 14

2006-2010 État des lieux de la scolarisation des enfants et adolescents handicapés de la région PACA,

(2010), CREAI PACA et Corse, 76 p. Données chiffrées sur le handicap en région 2014, (2014), CREAI

PACA et Corse, 50 p. 15

Pratiques territoriales des SESSAD en région PACA : le poids des héritages, (2012), CREAI PACA et

Corse, 66 p.

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Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

15

développement fait suite à un mouvement amorcé depuis quelques années, celui de la

désinstitutionalisation et de l’inclusion scolaire. Nous y reviendrons ultérieurement mais

nous pouvons d’ores et déjà annoncer que la « sessadisation » de l’action médico-sociale,

« traduit l'effort continu de soutien à la scolarisation en milieu ordinaire des enfants en

situation de handicap16

».

En 2014 la CNSA a permis d’augmenter de 12 250 places les effectifs des SESSAD

dont 5000 sont des transformations de places d’IME. Malgré ce plan annuel, cela ne couvre

pas l’ensemble des besoins d’accompagnement des enfants handicapés scolarisés.

L’accompagnement à la scolarité au sein de l’établissement scolaire ne dépend plus

uniquement de l’éducation spécialisée mais des services de l’Éducation nationale.

- Les accompagnants de l’Éducation nationale : AESH

L’élève porteur d’un handicap a la possibilité d’effectuer sa scolarité sans ou avec

une personne chargée d’apporter des aides dans l’école : accompagnant des élèves en

situation de handicap (AESH) ou AVS. Leurs modalités d'intervention sont fixées par la

circulaire du 11 juin 200317

et des précisions sont apportées par le décret du 27 juin 201418

,

à savoir que les AESH épaulent l'enseignant et améliorent l’environnement de l'enfant ou

de l’adolescent. Ils apportent un soutien dans les apprentissages et dans l'insertion sociale.

Jean-Marie Gillig19

considère cette aide humaine comme un facilitateur d’

« accessibilité physique », qu'il distingue de l'accessibilité pédagogique déployée par les

enseignants. L’aide humaine ne serait pas un substitut au professeur mais une aide à l’élève

pour agir seul. Cependant l’auteur précise qu’« il s’en faut de beaucoup pour que les

auxiliaires de vie scolaire (AVS) identifient clairement leur mission ».

Par ailleurs le manque de professionnalisme des accompagnants, « leur formation

(…) nettement insuffisante et ne fait l'objet d'aucun suivi20

» et la précarisation de ces

16

Programme pluri annuel de création de places en établissement et services pour un accompagnement du

handicap tout au long de la vie, (2011), CNSA, 33p. 17

Circulaire n°2003-092 du 11-6-2003 relative aux assistants d’éducation 18

Décret n° 2014-724 du 27 juin 2014 relatif aux conditions de recrutement et d’emploi des accompagnants

des élèves en situation de handicap 19

GILLIG J-M., « Où va la nouvelle politique de scolarisation des enfants et adolescents handicapé ? Faut-il

se réjouir ou continuer à s'inquiéter ? », La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, n°39,

novembre 2007, pp 117-131 20

ibid

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Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

16

emplois sont des problématiques soulevées, depuis 2005, dans quelques rapports

parlementaires21

.

Pour y remédier, depuis la rentrée 2014, les nouveaux accompagnants recrutés

doivent être titulaires d'un diplôme dans le domaine de l'aide à la personne.

Progressivement le statut d’AESH prend place, offrant plusieurs types

d'accompagnements :

- individuel s'occupant d'un seul enfant appelé anciennement AVS-i

- mutualisé affecté à plusieurs enfants sur de plus courtes durées quotidiennes,

nommé AVS-mutualisée

- collectif, ou AVS-co affecté à une classe spécifique comme une ULIS (unité locale

d’inclusion scolaire)

Profession émergente dans un contexte d'inclusion en France, ils accompagnent

72%22

des enfants handicapés du milieu ordinaire. 109 10023

élèves ont bénéficié de l’aide

humaine en 2014 soit quatre fois plus qu’en 2006 et cette tendance se vérifie sur le

territoire régional de PACA. Avec une progression de 10 % dans l'académie d'Aix-

Marseille, 60 %24

des jeunes en situation de handicap bénéficient de l’aide humaine pour

250025

AESH.

Les données de la CNSA montrent que les AESH permettent la scolarisation de

43 000 élèves en situation de handicap au premier degré et 10 000 au second degré. Dans

les mêmes proportions il existe cette différence d’effectifs d'après une étude26

du CREAI

PACA. Nous pouvons supposer qu’il y a moins de jeunes porteurs de handicap au second

degré donc la nécessité d'intervention d'aide humaine est moins justifiée ; soit le manque

d'aidants pour le second degré engendre moins de scolarisation d'enfants handicapés.

21

CHOSSY J-F., (2011), Rapport sur l'évolution des mentalités et changement du regard de la société sur les

personnes handicapées. Passer de la prise en charge... à la prise en compte, 127 p .GEOFFROY G., (2005),

Rapport parlementaire : La scolarisation des enfants handicapés loi du 11 février 2005. Conséquence sur les

relations entre les institutions scolaires et médico-sociales. Importance du partenariat avec les collectivités

locales, 24 p. KOMITES P., (2013), Professionnaliser les accompagnants pour la réussite des enfants et

adolescents en situation de handicap, Etat des lieux –préconisations, 79 p. 22

PROUCHANDY P. et ESPAGNOL P., (2007), « La scolarisation des enfants et adolescents handicapés »,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 15 octobre 2014 23

Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 22 décembre 2014 24

Pour l'égalité des chances des jeunes en situation de handicap dans notre région, (2010), CREAI PACA et

Corse, 88 p. 25

Entretien de professionnel n°6 26

2006-2010 État des lieux de la scolarisation des enfants et adolescents handicapés de la région PACA,

(2010), CREAI PACA et Corse, 62 p.

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Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

17

L'utilisation des AESH semble être un moyen plutôt développé pour l'inclusion

scolaire individuelle. Plus les besoins de l’enfant sont importants, plus la présence de

l'accompagnant est nécessaire, mais paradoxalement, l’importance du temps d'affectation

de l'aidant semble être un indicateur d’une limite à l'inclusion scolaire. En parallèle il est

relaté également que plus l'aide augmente, plus la scolarité est dispensée à temps partiel.

Les aides techniques pour favoriser les apprentissages

Soutenir la scolarisation des enfants et adolescents en situation de handicap, requiert

des moyens de compensation. Outre l’aide humaine nous évoquons dès à présent les

facilitateurs. Pour contribuer à une certaine autonomie dans les apprentissages, il existe des

aides techniques attribuées par la CDAPH en vertu du droit à la compensation.

Le matériel pédagogique adapté (MPA) est constitué à plus de 90 %27

de l'outil

informatique. L’ordinateur est attribué soit individuellement soit à l’établissement

d’accueil. Cette assistance exploite des logiciels adaptés et des livres numériques. Elle est

mise à profit pour des exercices, des cours numérisés ou comme outil de communication.

L’aménagement de l’environnement est également un moyen de faciliter

l’accessibilité. Dès lors que les conditions de vie de l’élève importent tout autant que ses

apprentissages, faciliter l'identification de lieux ressources dans les établissements

scolaires, tout comme d’adapter le positionnement dans la classe apparaît comme une

évidence.

c. Les classes spécialisées en établissement scolaire

Après avoir exploré la scolarité individuelle en milieu ordinaire, avec tous les

dispositifs d'aide, voyons la description de la scolarisation collective au sein des

établissements scolaires du premier et second degré. Elle concerne 79 31028

enfants et

adolescents en situation de handicap dont 3 88929

dans le seul département des Bouches du

Rhône.

27

SZYMANKIEWIEZ C., (2013), Le système éducatif en France, La documentation française, Paris, 346 p 28

Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 22 décembre 2014 29

2006-2010 État des lieux de la scolarisation des enfants et adolescents handicapés de la région PACA,

(2010), CREAI PACA et Corse, 62 p.

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Quels leviers pour les IME ?

18

La classe d'inclusion à l'école élémentaire

Dans le premier degré, les classes d'inclusion ou ULIS-école -réforme de la CLIS

(classe localisée pour l’inclusion scolaire) depuis septembre 2015- sont des classes

spécifiques dont l'implantation est au sein d'une école ordinaire. Elles accueillent les élèves

handicapés selon leurs handicaps (de sensori-moteur à TED). Pour chaque classe, des

dispositifs spécifiques sont alloués. Par exemple, l’ULIS TED aura un effectif de six

enfants au maximum avec l'aide de plusieurs AESH de manière à faciliter

l'accompagnement individualisé nécessaire pour réaliser des apprentissages. Les ULIS

« dys », caractéristiques de la dyslexie, la dyspraxie et la dysphasie, sont quant à elles une

spécificité en cours d'expérimentation.

L’ULIS-école, celle qui concerne les déficiences intellectuelles, se compose d'une

douzaine d'enfants âgés de six à douze ans. Un enseignant spécialisé ou parfois non

spécialisé, dispense les cours et apporte les apprentissages fondamentaux tels que la

lecture, l’écriture et le calcul. Il est secondé par un AESH. Ce mode d'enseignement existe

depuis 1991 et se nomme ULIS selon la circulaire n° 2015-129 du 31 août 201530

. Cette

scolarisation concerne 47 07031

élèves en France dont 1 92432

dans les Bouches du Rhône.

Le nombre d’ULIS-école est proportionnellement stable d'après la CNSA33

.

Au-delà des douze ans, selon les aptitudes et le projet individuel, il y a possibilité

d’intégrer une classe spécifique au collège. Si ce n’est pas le cas, l’orientation en IME peut

être préconisée. Il arrive parfois que l’orientation en IME soit statuée au cours du cycle.

Unité spécifique à partir du second degré

Les enfants sortant des classes spécialisées se dirigent pour la plupart vers le milieu

spécialisé et ne rejoignent pas nécessairement les ULIS-collège alors que ces derniers sont

la continuité des dispositifs inclusifs. Seulement 32 24034

élèves sont concernés en France à

la rentrée 2013. Un rapport du CREAI PACA et corse fait état dans les Bouches du Rhône

30

Circulaire n° 2015-129 du 31-8-2015, relative aux unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) 31

Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 22 décembre 2014 32

2006-2010 État des lieux de la scolarisation des enfants et adolescents handicapés de la région PACA,

(2010), CREAI PACA et Corse, 62 p. 33

MDPH : au carrefour des politiques publiques, synthèse des rapports d'activité 2011 des MDPH, (2012),

CNSA, 102 p. 34

Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 22 décembre 2014

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19

de 62435

élèves, répartis dans 85 unités dans l'académie d'Aix-Marseille. Les effectifs des

élèves entre le premier et le second degré sont quasiment divisés par deux36

. Toutefois des

améliorations sont constatées suite au maillage territorial engagé. Ainsi les effectifs des

élèves en ULIS sont en hausse de 21,1 % à 25 %37

en France et de 30%38

dans la seule

académie d'Aix-Marseille.

Les dispositifs ULIS qui sont proposés au collège jusqu'aux seize ans, voire plus, de

l'adolescent, s'adressent aux élèves disposant de capacités permettant leur participation aux

enseignements de certaines matières, en classe ordinaire de collège. Le premier dispositif

de ce genre a ouvert en 1995. L’ULIS-collège a été nommée ainsi selon la circulaire n°

2010-088 du 18 juin 2010. Elle offre la possibilité d’établir un portefeuille de compétences

sociales et scolaires et de poursuivre les apprentissages. Au-delà de l’ULIS-collège, il peut

être proposé le lycée d’enseignement général et professionnel ou des sections

d’enseignement adapté.

L'enseignement professionnel pour des élèves en situation de handicap

Au collège et au lycée, d'autres choix d'enseignement adapté sont proposés : les

enseignements général et professionnel adapté (EGPA). Ils s’adressent essentiellement aux

adolescents présentant des difficultés scolaires et sociales39

, néanmoins 5 %40

de leur

effectif sont constitués d’adolescents en situation de handicap. Ils ont pour ambition

l’acquisition de compétences, de connaissances et de culture correspondant à une formation

de qualification de niveau V. La scolarisation en section d’enseignement général et

professionnel adapté (SEGPA) se déroule au collège et se poursuit en lycée d’enseignement

adapté (LEA) par professionnalisation avec un accompagnement dans leurs apprentissages.

Ces dispositifs se développent mais restent encore en nombre insuffisant même si un effort

a été réalisé, avec une croissance de 6,3 %41

depuis 2007.

35

2006-2010 État des lieux de la scolarisation des enfants et adolescents handicapés de la région PACA,

(2010), CREAI et Corse, 62 p. 36

Éléments de connaissance sur l'intégration scolaire et sur le devenir après la classe de troisième des

enfants en situation de handicap en région PACA (2005), CREAI PACA et Corse, 37 p. 37

MDPH : au carrefour des politiques publiques, synthèse des rapports d'activité 2011 des MDPH (2012),

CNSA, 102 p. 38

Pour l'égalité des chances des jeunes en situation de handicap dans notre région, (2010), CREAI PACA et

Corse, 88 p. 39

SZYMANKIEWIEZ C., (2013), Le système éducatif en France, La documentation française, Paris, 346 p. 40

PROUCHANDY P. et ESPAGNOL P., (2007), « La scolarisation des enfants et adolescents handicapés »,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 15 octobre 2014 41

La scolarisation des jeunes handicapés, , Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance,

note d'information, mai 2012, [email protected], consulté le 6 octobre 2014

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Quels leviers pour les IME ?

20

d. Scolarisation en milieu ordinaire, de qui parle-t-on ?

L’inclusion ne parvient pas encore à s’adresser à l’ensemble des enfants et

adolescents en situation de handicap. Elle est somme toute plus accessible lorsqu’il s’agit

de troubles sensori-moteurs. Au terme de ce paragraphe nous allons tenter de dresser

un/des profils d’enfants et d’adolescents en situation de handicap mental pouvant accéder à

une scolarité en milieu ordinaire. Pour cela nous nous appuyons sur des données recueillies

dans divers rapports.

La scolarisation en milieu ordinaire semble de la volonté des pouvoirs publics, des

acteurs de l’Éducation national, de la volonté des associations de parents... mais parfois il

s'avère que les difficultés de l’enfant ne sont pas compatibles avec ce mode de

scolarisation. Le rapport de Chossy démontre que « c'est le milieu scolaire qui doit

s'adapter à l’enfant handicapé tout en sachant qu'il y a des limites posées par le handicap

lui-même et par certaines contraintes d'accessibilité au milieu scolaire qui peuvent être

difficiles à surmonter 42

». Plus le handicap est important moins l'inclusion semble possible,

« dès que les handicaps s'alourdissent, ce saupoudrage [accompagnements proposés pour

soutenir la scolarisation] s'avère très vite problématique ou insuffisant43

».

Les effectifs des enfants en situation de handicap scolarisés en établissement scolaire

ordinaire varient en fonction de l'âge et de la déficience. Dans l’académie d’Aix-Marseille,

75 %44

des élèves handicapés en milieu ordinaire ont des troubles des fonctions cognitives,

intellectuelles, du langage et du comportement. L'inclusion scolaire est proposée davantage

aux enfants porteurs d'une déficience légère et ne semble pas s’adresser aux enfants ayant

de grandes déficiences.

De l’école préélémentaire à l’entrée au collège, le nombre d’enfants handicapés

scolarisés en milieu ordinaire ne cesse de diminuer. S’ils ne sont pas en mesure de suivre

une scolarité ordinaire, même adaptée, c’est qu’ils présentent des pathologies et des

déficiences trop importantes. L’identification des déficiences est très compliquée à établir.

De nombreuses enquêtes de la DREES mettent en avant cette limite. Dans bien des

situations, les pathologies sont encore inconnues ou non identifiées, pour d’autres, il y a

une absence de diagnostic faute d’investigations médicales. Le handicap psychique se

42

CHOSSY J-F, (2011), Rapport sur l'évolution des mentalités et changement du regard de la société sur les

personnes handicapées. Passer de la prise en charge... à la prise en compte, 127 p. 43

BERZIN C., (2010), Accueillir les élèves en situation de handicap, Scérén, Amiens, 152 p 44

Pour l'égalité des chances des jeunes en situation de handicap dans notre région, (2010), CREAI PACA et

Corse, 88 p.

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Quels leviers pour les IME ?

21

remarque beaucoup plus dans les classes depuis 2001 ; ce constat est à l’identique en

établissements médico-sociaux (EMS) avec 47 %45

d’augmentation des effectifs. Ceci

ouvre le débat du diagnostic des troubles mentaux, de son évaluation, de son mode de prise

en charge… mais qui ne fait pas partie de l’objet de recherches du mémoire.

« Au-delà de seize ans, âge de fin de scolarité obligatoire, la scolarisation est peu

répandue, quel que soit le handicap46

». La fin du parcours d'inclusion scolaire en milieu

ordinaire semble se dessiner à l’issue du collège pour la plupart. Très peu peuvent

prétendre s’inscrire en ULIS-lycée et seuls quelques-uns accèdent à un certificat d’aptitude

professionnelle (CAP) par apprentissage. La voie possible pour les jeunes les conduit à un

diplôme de l’enseignement professionnel en centre de formation des apprentis (CFA) ou

CFAS spécialisé. Avec l’âge les conséquences de la déficience intellectuelle permettent de

moins en moins de poursuivre les apprentissages dans un cadre ordinaire. D’autre part le

manque de dispositifs au-delà de l’ULIS contraint à l’arrêt de la scolarité ordinaire.

1.3. Le bout du bout de la scolarisation

Quand il n’y a plus la possibilité de continuer le parcours en milieu ordinaire, il existe

d’autres solutions pour couvrir les besoins en scolarité des enfants et adolescents en

situation de handicap soit dans le secteur sanitaire soit dans le secteur médico-social. « Ces

parcours sont semés d'embûches pour les élèves handicapés, les ruptures sont importantes

et peu recensées47

». La responsabilité de la scolarité est alors transférée de l’Éducation

nationale vers le Secrétariat d'Etat chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre

l'exclusion, auprès de la ministre des Affaires Sociales et de la Santé.

Deux périodes marquent plus la fin de la scolarité en milieu ordinaire dans le

processus d'inclusion scolaire :

- la fin de l’ULIS-école avec l'entrée au collège

- la fin d’une ULIS-collège ou d’une SEGPA

L’entrée en primaire, l'entrée au collège... sont des étapes transitoires pour tous les

élèves. Ces changements semblent plus difficiles à vivre pour ces adolescents porteurs de

handicap. « Les adolescents souffrant de déficience mentale sont souvent dirigés vers

45

2001-2006 Évolutions marquantes dans les EMS à partir des données des enquêtes ES de la DREES,

(2010), CREAI PACA et Corse, 51 p. 46

PROUCHANDY P. et ESPAGNOL P., (2007), « La scolarisation des enfants et adolescents handicapés »,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 15 octobre 2014 47

SZYMANKIEWIEZ C., (2013), Le système éducatif en France, La documentation française, Paris, 346 p

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Quels leviers pour les IME ?

22

d'autres types de structure à l'issue de l'élémentaire, du collège ou une fois passé l'âge de

scolarité obligatoire 48

».

De fait, l’orientation au sein des établissements médico-sociaux est principalement

proposée vers douze ans et seize ans, quand il n’y a plus la possibilité d’inclusion en milieu

ordinaire. Elle est soumise aux décisions proposées par la CDAPH et à l’avis de la famille.

Emilie Potin49

souligne que l’orientation en établissement marquerait socialement et

scolairement les enfants même si elle est davantage adaptée. Pour ceux en situation de

handicap l’orientation en IME est aussi marquante car « ces changements entraînent une

césure des habitudes scolaires 50

». Pour autant cette orientation s’avère nécessaire si le

jeune désire s’inscrire dans une insertion socio-professionnelle.

Sur le territoire qui nous préoccupe, les constats sont à l’identique.

Graphique 3

Figure : Distribution des enfants et adolescents scolarisés dans le milieu ordinaire selon l'âge.

(Source : Enquêtes 3 et 12 de l’Éducation nationale. Exploitation : CREAI PACA Corse)

En PACA51

, 47 % des adolescents handicapés et scolarisés en milieu ordinaire entrent

en SIPFP et 4 % sont à domicile en attente de place en IME.

À ce stade de l'enquête nous pouvons présupposer que les structures comme les IME

accueillent principalement des enfants jeunes avec un handicap lourd ne pouvant prétendre

à une scolarité ordinaire. Ils accompagnent plutôt des adolescents porteurs d’un handicap

48

PROUCHANDY P. et ESPAGNOL P., (2007), « La scolarisation des enfants et adolescents handicapés »,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 15 octobre 2014 49

POTIN E., « Protection de l’enfant : parcours scolaire des enfants placés », Politique sociale et familiale,

n°112, juin 2013, pp 89-100 50

SZYMANKIEWIEZ C., (2013), Le système éducatif en France, La documentation française, Paris, 346 p 51

Éléments de connaissance sur l'intégration scolaire et sur le devenir après la classe de troisième des

enfants en situation de handicap en région PACA, (2005), CREAI PACA et Corse, 37 p.

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Quels leviers pour les IME ?

23

plus léger ou avec des troubles psychologiques, n’ayant plus la possibilité de poursuivre

leur scolarité et leur professionnalisation en milieu ordinaire.

a. La scolarisation en unité d’enseignement dans les IME

La CNSA annonce 68 249 places dans les IME en 2014 en France. Ces derniers

proposent une voie de scolarisation au sein des UE qui représentent 27 %52

des enfants en

situation de handicap mais 75 % des jeunes des IME. Si la création des UE n'apparaît au

journal officiel n° 17 que le 23 avril 2009 suite au décret du 30 décembre 200553

il n’en

demeure pas moins qu’antérieurement le personnel enseignant pouvait être mis à la

disposition d’un IME. Le projet pédagogique de ces unités est inclus dans le projet

d’établissement. Ces unités sont financées par l’Éducation nationale. La vacation de postes

d'enseignants est couverte par une convention entre les établissements et l'inspection

académique. Généralement les enseignants sont spécialisés mais il arrive que non. À partir

du moment où ils font la demande pour ces postes les enseignants non spécialisés peuvent

les obtenir. Pour en bénéficier, l’enfant ou l’adolescent doit faire partie des effectifs de

l’établissement.

Graphique 4

Si nous nous focalisons sur les

jeunes concernés par l’obligation

scolaire en IME, nous faisons le constat

que la scolarisation en milieu spécialisé

reste majoritaire en France.

52

Le secteur médico-social comprendre pour agir mieux (2013), CNSA et ANAP, 117 p. 53

Décret n° 2005-1752 du 30 décembre 2005 relatif au parcours de formation des élèves présentant un

handicap

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Quels leviers pour les IME ?

24

Dans la région PACA 87,8 %54

des enfants et adolescents, inscrits en IME,

bénéficient des Unités d'Enseignement. Sur ce même territoire les enfants concernés par

cette scolarisation sont essentiellement âgés de douze à dix-huit ans avec un pic à quinze

ans, présentant pour 78 %55

une déficience intellectuelle. La progression de la scolarité de

24 % à 40 % entre 2001 et 2005, en établissement, concerne les enfants et adolescents avec

un handicap moyen à profond d'après les études du CREAI56

. Un effort considérable a été

fait pour scolariser notamment les enfants porteurs d’autisme ou de troubles s’y

apparentant. Il reste quand même des jeunes sans place en IME, sans possibilités de

scolarisation ou accompagnés en IME mais ne pouvant bénéficier des UE.

b. Des enfants en situation de handicap sans scolarisation

Malgré la tendance à la faveur de la scolarisation des enfants handicapés, il existe

encore toutefois des enfants et adolescents pour qui la scolarisation n’est pas accessible

même en milieu spécialisé. L’inscription en IME ne signifie pas pour autant l’accès à la

scolarisation. Même au sein des UE la scolarisation ne s’adresse pas à tous les enfants et

adolescents. Le nombre d’enfants non scolarisés est en recul mais cela reste encore

insuffisant. En IME 15 %57

des enfants accueillis ne sont pas scolarisés alors qu’en 200158

la proportion était de 20 %. Ceci démontre la volonté d’ouvrir les apprentissages aux

d’enfants et d’adolescents en grande difficulté notamment ceux présentant un handicap

lourd, des capacités d'apprentissage et d’autonomie limitées. En France 15 00059

enfants

handicapés en âge d'être scolarisés n'y sont pas dont 5000 vivent à leur domicile. Pour ceux

nommés « sans solution » dans le rapport Piveteau60

, c'est-à-dire ceux n’ayant même pas de

place en établissement il devient urgent de repenser leur accompagnement et d’éviter ce

genre de situation. Alertés, les pouvoirs publics commencent à prendre la mesure des

conséquences de telles situations.

54

2006-2010 État des lieux de la scolarisation des enfants et adolescents handicapés de la région PACA,

(2010), CREAI PACA et Corse, 62 p. 55

Ibid 56

2001-2006 Évolutions marquantes dans les EMS à partir des données des enquêtes ES de la DREES,

(2010), CREAI PACA et Corse, 51 p. 57

LAFORCADE M., LAFORE R., MARABET B. et alii. (2013), « Les IME : Qui sont-ils ? Où vont-ils ?, 1

ère rencontre des IME », http://www.creai-aquitaine.org, consulté le 11 novembre 2013 58

LETOURMY A. et RAVAUD J-F., « Données sociales sur les personnes handicapées en France », Santé et

solidarité, n°2, 2005, pp 31-41 59

PROUCHANDY P. et ESPAGNOL P. (2007), « La scolarisation des enfants et adolescents handicapés »,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 15 octobre 2014

60 PIVETEAU D., (2014), « Zéro sans solution » : Le devoir collectif de permettre un parcours de vie sans

rupture, pour les personnes en situation de handicap et pour leurs proches, 87 p.

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Quels leviers pour les IME ?

25

Les effets des divers « plan autisme », des schémas nationaux sur les handicaps rares

et les plans « handiscol » semblent avoir généré une prise de conscience qui se manifeste

par une augmentation des dispositifs de scolarisation des enfants porteurs d’un handicap.

La démarche inclusive et les injonctions de la loi du 11 février 2005 ont favorisé la

scolarisation des enfants et adolescents souffrant de déficience intellectuelle légère dans le

milieu ordinaire ainsi que la scolarisation en milieu spécialisé des enfants et adolescents

plus lourdement déficients ou souffrant d’autisme.

Un rapport61

du CREAI mentionne que dans la région PACA la proportion de jeunes

non-scolarisés est à peu de chose près identique à celle du territoire français, soit 16 % des

six à dix-huit ans. Mais la non-scolarisation est plus importante chez les sujets âgés de dix-

sept à vingt ans. Un recul est marqué pour les moins de dix ans en PACA. Des efforts ont

ainsi été menés envers les plus jeunes.

1.4. Hétérogénéité et déficience en IME

La description des dispositifs à l’égard des enfants et adolescents en situation de

handicap mental en âge d’être scolarisés apporte un éclairage sur la complexité de la

sécurité de parcours pour ces jeunes. L’inclusion scolaire en milieu ordinaire a des limites.

Les capacités altérées inhérentes au handicap restreignent les apprentissages. Alors il en

résulte d’un moment ou à un autre une orientation vers un IME. Essayons à présent

d’identifier ce public accueilli en IME.

a. Le handicap, une définition multi factorielle et évolutive

Comme il n'existe pas de définition propre au handicap mental, l'orientation en milieu

spécialisé est envisagée sans critère universel. Elle est donc soumise à l’interprétation des

acteurs. Jean-René Loubat dans son ouvrage62

évoque que dans le champ du social, aucun

acteur ne perçoit les choses de la même manière au même moment.

Une approche synthétique de la notion de handicap

Plusieurs approches viennent se confronter :

61

2006-2010 État des lieux de la scolarisation des enfants et adolescents handicapés de la région PACA

(2010), CREAI PACA et Corse, 62 p. 62

LOUBAT J.-R., (2007), Promouvoir la relation de service en action sociale et médico-sociale, 2e édition,

Dunod, Paris, 360 p (p.27)

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Quels leviers pour les IME ?

26

-celles du ressort plus particulièrement du domaine médical en charge du diagnostic

et du traitement des perturbations et dysfonctionnement.

-celles du domaine social, donc des interactions entre l’individu et son

environnement. Le handicap ne peut être envisagé « en dehors de l'univers social qui le

produit63

». Cela implique que dans une situation précise la personne est autonome alors

que dans une autre, elle peut être en situation de handicap d’où le fait de parler de handicap

de situation.

Il existe donc deux approches qui ne sont pas dissociables l’une de l’autre. De là

s’inspire la classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé

(CIF). Elle s’appuie sur des concepts multidimensionnels qui mettent en avant l’interaction

dynamique entre plusieurs composantes :

- les fonctions organiques et les structures anatomiques des individus

- les activités que font les individus et les domaines de la vie auxquels ils participent

- les facteurs environnementaux qui influencent leur participation

- les facteurs personnels

La CIF ne classifie pas les individus mais bien le fonctionnement des individus. Elle

se veut un outil. Chaque catégorie étant formulée de manière neutre, il est nécessaire de

recourir à des codes qualificatifs pour décrire, selon les cas, les déficiences, les limitations

d’activité, les restrictions de participation, les obstacles ou les facilitateurs

environnementaux observés. De cette manière il est mesuré le handicap afin de lui attribuer

une compensation. Malgré ça le polymorphisme du handicap ne permet pas une lisibilité

claire des problèmes.

Les déficiences de l’intelligence

Le handicap est un concept évolutif en fonction de la société dans laquelle il se

caractérise. Jean-René Loubat explique que nous subissons l’influence d’une « doctrine

européenne d'inclusion64

». Aussi c’est dans ce contexte que nous traiterons des troubles

des fonctions mentales et psychiques.

Pour apporter un éclairage sur les déficiences intellectuelles, nous allons nous baser

63

BOUCHER N., « Handicap, recherche et changement social. L'émergence du paradigme émancipatoire

dans l'étude de l'exclusion sociale des personnes handicapées », lien social et politique, n° 50, automne 2003,

pp 147-164 64

LOUBAT J.-R., (2007), Promouvoir la relation de service en action sociale et médico-sociale, 2e édition,

Dunod, Paris, 360 p

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Quels leviers pour les IME ?

27

sur la définition de l’OMS : « la personne ayant une déficience intellectuelle a une capacité

plus limitée d’apprentissage et un développement intellectuel qui diffère de la moyenne des

gens ». Elle se traduit par une capacité sensiblement réduite de comprendre une

information nouvelle ou complexe, d’apprendre et d’appliquer de nouvelles compétences.

Il s’ensuit une aptitude diminuée à faire face à toute situation de manière indépendante.

Toutefois les dépendances qui en découlent ne dépendent pas seulement de troubles

ou de problèmes sanitaires. Les facteurs environnementaux contribuent à l’expression des

déficiences. Si les origines des déficiences sont multiples, résultant de maladies

congénitales ou acquises, d’accidents… les expressions des difficultés sont propres à

chaque individu. Voici quelques problèmes rencontrés du fait de la limitation des

ressources intellectuelles : comprendre son environnement, des concepts abstraits ou

généraux ; se repérer dans l’espace et/ou le temps ; fixer son attention ; mobiliser son

énergie ; mémoriser et traiter des informations ; maitriser le calcul et le raisonnement

logique ; comprendre les modes d’utilisation d’appareillage ; maitrise la lecture et/ou

l’écriture ; s’adapter aux changements imprévus ; prendre conscience des conventions

tacites de la vie en société.

Si à l’origine les IME s’occupaient en majorité des enfants présentant des déficiences

intellectuelles, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Les déficiences intellectuelles ne se traitent

pas comme les troubles mentaux (TED, psychoses, autisme…), c’est d’ailleurs toute la

problématique des derniers mouvements prônés par les politiques publiques dont nous

allons voir les effets sur les IME.

b. Mouvement du sanitaire vers le médico-social

Pour la première fois, la loi de 2005 incorpore officiellement les maladies psychiques

au sein de l’ensemble des handicaps. L’évolution des troubles mentaux pose les questions

du diagnostic, de ses mesures et de ses prises en charge. Pour Marcel Jaeger65

la crise

économique affaiblit les moyens mis à disposition des personnes souffrant de troubles

mentaux. Il en résulte un transfert de la population de malades mentaux du secteur sanitaire

vers les structures médico-sociales moins couteuses et du fait de la désinstitutionalisation

de la psychiatrie. Les nouvelles classifications font que la gestion institutionnelle d’une

65

JAEGER M., (2006), L'articulation du sanitaire et du social. Travail social et psychiatrie, 2eme édition,

Dunod, Paris, 166 p

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Quels leviers pour les IME ?

28

déficience intellectuelle s’apparente à celle des troubles psychiques. Il se dégage une

tendance incontestable : la prise en charge du trouble mental se réalise en grande partie

dans le secteur médico-social et non plus seulement dans le système de soins. La frontière

entre la psychiatrie et le champ du social est poreuse.

Les IME accueillent des jeunes déficients intellectuels mais certains usagers sont

porteurs de troubles associés comme des troubles du comportement, psychiques et

psychiatriques. Les parutions du CREAI66

, les revues du cahier de l’actif67

, la revue lien

social68

, les conférences des premières rencontres des IME en 2013 pour ne citer qu’eux,

font état de ce fait. Ainsi la proportion de jeunes déficients intellectuels est en diminution

depuis 2001 (80 % en 2001, 76,3 % en 2006 et 75 % en 2010)69

. À contrario ceux souffrant

de troubles de la personnalité, de la conduite, du comportement et de la relation, sont en

augmentation (13,1 % en 2001, 17 % en 2006 et 18,9 % en 2010)70

. Á cela s’ajoute la prise

en charge des enfants présentant des troubles autistiques pour 16 %71

.

L’hétérogénéité du public accueilli est généralisée à l’ensemble des structures,

qu’elles soient privées ou publiques. Les problématiques sont multiples et les déficiences

sont plurielles. Alors que le traitement dépend de chaque structure et de ses moyens, il n’en

demeure pas moins que les cohabitations sont difficiles et nuisent à la qualité de

l’accompagnement pour tous les IME.

Les mouvements du secteur sanitaire vers le secteur médico-social génèrent une

réadaptation des missions des établissements médico-sociaux et un réajustement des

agréments.

c. Les catégorisations du handicap au sein des IME

Qu'entend-on par public hétérogène dans une structure médico-éducative ? Le terme

hétérogène compose « des éléments constitutifs d'un ensemble : dont la nature, la structure

66

Évaluation des publics, adaptation des dispositifs : l'exemple des IME, IEM et IEAP, (2010), CREAI

Bretagne, 9 p. 67

LAFORE R., DIMBOUR T., LAFORCADE M. et alii « Après les lois de 2002, 2005, 2009, les IME…

Que sont-ils devenus ? Que vont-ils devenir ? », Les cahiers de l'actif, n° 444-445, mai-juin 2013, pp 11-189 68

GABERAN P., « IME : à nouveau public, nouvelles méthodes », Lien Social, n°914, 29 janvier 2009, pp

10-16 69

Établissement et service pour enfants et adolescents handicapés, résultat de l’enquête ES 2010, (2013),

DREES document de travail série statistique n° 177, 299 p 70

Ibid 71

LAFORE R., DIMBOUR T., LAFORCADE M. et alii « Après les lois de 2002, 2005, 2009, les IME…

Que sont-ils devenus ? Que vont-ils devenir ? », Les cahiers de l'actif, n° 444-445, mai-juin 2013, pp 11-189.

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Quels leviers pour les IME ?

29

ou la fonction est différente d'autres éléments de cet ensemble, de ce tout 72

». Ceci sous-

entend que dans un établissement, nous rencontrons des individus regroupés n’ayant pas les

mêmes caractéristiques, renforcés par une expression singulière des troubles multiples.

S’appuyant sur un établissement d’observation avec les éléments retirés et se référant

aux divers rapports produits par les CREAI de diverses régions, nous pouvons représenter

schématiquement les âges d’entrée en IME.

Les effectifs sont moindres en SEES qu’en SIPFP. Les entrées en IME se font

majoritairement entre douze et seize ans. Les grands adolescents et les jeunes majeurs sont

de plus en plus nombreux comme le démontre le graphique suivant :

Graphique 5

Âge d’entrée en IME

Les enfants orientés très tôt dans un IME présentent une déficience intellectuelle

moyenne ou profonde, des troubles associés, ou sont porteurs d’autisme avec une

déficience intellectuelle qui ne leur permet pas d’accéder à une scolarité ordinaire. Á

contrario, plus ils sont orientés tardivement en IME, moins grande est la déficience

cognitive. Cependant ils sont marqués par des troubles psychiques ou les troubles du

comportement ou de la personnalité, associés, souvent non décelés au préalable. La durée

de séjour dans un IME varie en fonction du handicap. En effet plus les déficiences sont

importantes, plus l’usager reste longtemps dans la structure. Ce constat est d’autant plus

vérifiable si l’individu souffre d’autisme.

72

http://www.cnrtl.fr/, consulté le 7 février 2014

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Quels leviers pour les IME ?

30

Face à ces évolutions du public, les IME se préoccupent de leur rôle, de leur mission,

de l’accompagnement qu’ils proposent afin d’assurer une qualité d’accueil.

2. Élaboration de la problématique et hypothèses : accessibilité à la scolarisation

dans le droit commun, quelles opportunités pour les IME ?

2.1 Formulation du questionnement

Suite aux grandes réformes de l’action sociale il s’agit de comprendre une des

nouvelles problématiques soulevées par l’application des lois de 2005 et les impacts sur les

interventions sociales dans les IME. Comment nous pourrions imaginer l’IME de demain ?

Par cet écrit nous apportons un éclairage sur le traitement du handicap mental des

enfants et adolescents ainsi que sur les processus de prise en charge saisis dans leur

dimension organisationnelle, politique et relationnelle. S’attacher à l’évolution des

représentations du handicap dans l’histoire est une manière de prendre en compte la façon

dont les individus d’une société pensent les problèmes liés au handicap. Les progrès des

dispositifs d’intervention montrent les transformations en profondeur des actions sociales.

La manière de prendre en charge le handicap se modifie, évolue, se transforme

progressivement. Ces mouvements s’inscrivent dans un contexte de crise économique et

dans un cadre réglementaire sous l’influence du Conseil de l’Europe. D’ailleurs on ne parle

plus de prise en charge mais d’accompagnement des enfants en situation de handicap par

des dispositifs. Sont-ils adaptés ? Sont-ils suffisamment nombreux ? Répondent-ils aux

besoins des enfants et aux demandes des familles ?

Le parcours scolaire semble dépendre du mode d’expression du handicap. Comment

alors a été vécue la scolarité en milieu ordinaire ? Comment les IME pourraient-ils apporter

leur contribution pour repousser les limites de l’inclusion scolaire ? Quelles propositions

les IME peuvent-ils présenter pour assurer la continuité de parcours de ces jeunes ?

Comment va évoluer l’hébergement en faveur du public handicapé ? Les services SIPFP

ont-ils intérêt à développer le champ de la professionnalisation ? La ré-inclusion en milieu

ordinaire peut-elle devenir un objectif pour les enfants des services SEES ? Les unités pour

enfants porteurs d’autisme sont-elles amenées à s’émanciper ? Il commence à être exigé

que les Unités d’Enseignements soient repositionnées au sein des écoles de secteur, quelles

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Quels leviers pour les IME ?

31

en seront les conséquences ? Le questionnement porte sur les apports que peuvent

prodiguer les IME. Nous avons vu qu’ils étaient interdépendants de la scolarité des enfants

et adolescents en situation de handicap. Or à un moment donné, les jeunes déficients

intellectuels, confrontés à la réalité des décalages par rapport à la norme, s’orientent d’une

manière ou d’une autre vers des dispositifs spécialisés.

Nous avons choisi de proposer deux éclairages ; un par le processus de

désinstitutionalisation et l’autre par celui de l’inclusion scolaire. La recherche d’une

meilleure inclusion scolaire et donc sociale, ne peut se concevoir que s’il est mis en place

des accompagnements hors des murs des IME par voie de désinstitutionalisation. C’est

pourquoi nous traitons des interactions désinstitutionalisation/inclusion sur un moment

particulier, important et significatif de l’obligation de scolarité entre 6 et 16 ans. Divers

scenarii peuvent être envisagés :

-la fermeture totale des établissements et dans ce cas tous les enfants et adolescents en

situation de handicap seraient inclus au sein des dispositifs de droit commun avec

l’accompagnement qui convient et le soutien de services de proximité

-les établissements transforment leur mode d’accueil en s’accommodant des

nouvelles formes d’accompagnement et diversifient leurs activités par la voie de

l’innovation.

En résumé, la problématique peut être formulée de la manière suivante : Au regard de

la désinstitutionalisation d’une part et de l’inclusion scolaire d’autre part, en quoi les IME

conservent-ils leur utilité ?

2.2 Proposition d’hypothèses

Nous avons constaté que l’inclusion scolaire en milieu ordinaire a ses limites. Le

processus d’inclusion pour une scolarité dans le droit commun ne permet pas aux enfants

déficients intellectuels de fréquenter l’école jusqu’à la professionnalisation. Les enfants

présentant une déficience moyenne à profonde et ceux ayant des troubles associés ne sont

pas scolarisés en milieu ordinaire. Une hypothèse importante se formule ainsi : Les IME

sont les plus adaptés pour offrir une scolarité et un accompagnement répondant aux

besoins spécifiques des enfants et surtout des adolescents en situation de handicap mental.

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Quels leviers pour les IME ?

32

Nous pouvons à cet égard poser deux sous-hypothèses :

- pour les enfants ayant une/des déficiences importantes, l’IME est le seul lieu

d’apprentissage cognitif et d’habiletés sociales possible.

- pour les adolescents, le manque de formations professionnelles implique que seuls

les IME préparent au mieux l’insertion socio-professionnelle.

La scolarisation des enfants en situation de handicap n’est plus seulement l’affaire

des établissements spécialisés. Il appartient à toute la collectivité de développer des

dispositifs permettant de répondre aux besoins et à chacun de trouver sa place dans la

société. Néanmoins il manque des moyens humains, techniques et des ressources

suffisantes pour accompagner spécifiquement les enfants et adolescents déficients

intellectuels. Nous émettons une autre hypothèse selon laquelle les IME sont en mesure de

diversifier leurs missions en proposant d’externaliser leurs services d’accompagnement

pour une meilleure fluidité des parcours inclusifs (Éducation nationale, famille,

périscolaire…).

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Quels leviers pour les IME ?

33

II. LA RECHERCHE DE TERRAIN

1. Méthodologie

La première partie du mémoire sert à borner l’étude réalisée. Maintenant que

l’ensemble des dispositifs et du vocable sont connus de tous dans leur ensemble, nous

pouvons commencer à dérouler l’enquête. Elle a lieu en trois temps :

-le recueil de données

-l’enquête de terrain

-le traitement des informations.

1.1 Le corpus documentaire

Ce paragraphe décrit la façon dont le recueil de données a été conduit. Les données

macro-sociales sont tirées d’organismes officiels comme la CNSA, le CREAI, le groupe

national des établissements et services publics sociaux et médico-sociaux (GEPSo), la

DREES et de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) auprès

des établissements médico-sociaux, des écoles, des MDPH etc. Elles sont intéressantes

dans le sens où elles indiquent la tendance globale du traitement de la scolarité des enfants

déficients dans les EMS et dans l’Éducation nationale. Elles font état des inégalités de

traitement selon les territoires, selon les troubles de l’enfant, selon l’âge etc.

L’exploitation des données ne peut se concevoir sans en rechercher le sens. La

littérature professionnelle de documents, d’ouvrages, de rapports et d’articles fournit un

matériel fructueux. C’est par cette littérature que nous pouvons apporter un éclairage sur la

question du traitement du handicap et confronter les points de vue. Il a été établi un lien

entre les institutions singulières que sont les IME et les politiques d’actions sociales car

analyser les formes générales d’action sociale c'est s’intéresser au changement qui engage

et prépare les interventions de demain. Un détour historique permet de rejoindre la période

actuelle et la conjoncture dans laquelle nous vivons. Il met en lumière l’héritage des IME

conçus comme un équipement et qui laisse des traces dans l’organisation des

établissements alors même qu’aujourd’hui on parle de « service ». Deux mouvements

viennent percuter l’organisation des IME : la désinstitutionalisation et l’inclusion scolaire.

Les transformations en cours dans la conception du handicap incombent de transposer

notamment l’éducation des enfants handicapés aux institutions de droits communs. En

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Quels leviers pour les IME ?

34

conséquence, l’organisation spécialisée est chahutée, doit s’adapter et faire preuve

d’innovation. Quelle sera la place des IME dans la planification territoriale ?

J’ai eu l’opportunité de participer à quelques conférences, à des séminaires, à des

colloques, à des journées de valorisation de la recherche, à des congrès portant sur

l’intervention sociale en IME mais aussi sur la scolarisation des enfants. Et l’étayage de

l’enquête repose non seulement sur une enquête par entretiens que je développerai plus bas,

mais également sur l’observation et le traitement des données microsociales au sein d’un

établissement (ESS, usage de référentiels, bilan de diagnostic, dossier de l’usager…). La

recherche de « terrain » s’appuie sur l’observation de situations réelles, des descriptions et

interaction des pratiques et sur la prise en compte dans ces descriptions des points de vue

subjectifs des acteurs (famille des usagers/ professionnels de l’Éducation nationale).

L’enquête réalisée a pour objectif d’identifier les besoins des enfants et adolescents

handicapés et de leur famille lors de la scolarisation en milieu ordinaire. Á partir du recueil

des informations, comment les IME pourraient-ils proposer des services de soutien aux

familles pour maintenir autant que faire ce peu la scolarisation dans le droit commun ?

Egalement l’enquête a pour but de cerner les problématiques rencontrées au sein des

institutions scolaires afin de voir quelles pourraient être les contributions des IME dans la

régulation de ces problématiques.

1.2 Le dispositif d’enquête par entretiens

Pour étudier les impacts de l’inclusion scolaire des enfants handicapés, le choix s’est

dirigé vers la méthode d’entretiens semi-directifs. La méthode par entretien vise une étude

de composantes non strictement représentatives et cependant caractéristiques de la

population. Bien entendu dans un souci de représentativité, il est recherché un

échantillonnage varié des personnes interrogées. La diversité du corpus interrogé reste une

priorité afin d’élargir au maximum l’éventail représentatif.

La construction au préalable d’une grille d’entretien rend possible l’identification

d’indicateurs servant à vérifier les hypothèses de départ. Le choix de ne pas interviewer les

éducateurs d’IME est une option motivée par l’intérêt de comprendre ce qui se passe en

amont d’une orientation en établissement. Les questions posées, comme un guide

d’entretien, sont conçues différemment selon le public auquel elles s’adressent. C’est

pourquoi deux grilles d’analyse sont nécessaires au dépouillement des entretiens. En effet

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Quels leviers pour les IME ?

35

le public interviewé se compose d’une part de professionnels de l’Éducation nationale,

qu’ils soient spécialisés ou non, en milieu ordinaire ou en milieu spécialisé et d’autre part

de familles d’enfants scolarisés en situation de handicap.

Parmi les professionnels, nous comptons des enseignants du 1er

degré en classe

ordinaire qui accueillent au moins un enfant handicapé et ceux de classes ULIS-école mais

aussi des enseignants du second degré de classe ULIS-collège et des enseignants d’UE

rattachés à un IME. Les ressources se sont également orientées vers un référent de

scolarité, spécialisé dans le handicap et vers d’un conseiller pédagogique en adaptation

scolaire, consultant en scolarisation des élèves handicapés (ASH).

Les entretiens ont été dirigés également vers les familles ayant des enfants en

situation de handicap, qu’elles soient nucléaires ou non, en activité ou pas... Ces familles

sont identifiées juridiquement comme ayant au moins un enfant en situation de handicap

reconnu par la MDPH, dans le cadre juridique d’obligation de scolarité.

Les objectifs de ces entretiens se déclinent en quelques points :

- analyser le sens que les acteurs, notamment les enseignants, donnent à leur pratique

- analyser le parcours inclusif tel qu’il est vécu par l’enfant et sa famille

- analyser le système, en l’occurrence ce qui se joue en amont d’une décision de la

CDAPH pour l’arrêt ou la poursuite de l’inclusion scolaire

- reconstituer le processus d’action, à savoir les facteurs qui déclenchent une

orientation et la fin du processus inclusif.

Les entretiens ont été réalisés après une prise de rendez-vous et une explication du

thème de la recherche. Dans un souci d’éthique, l'anonymat est respecté bien que les

entretiens soient enregistrés. La totalité des entrevues a été retranscrite. Notés Ep, les

entretiens auprès des professionnels ont été réalisés sur leur lieu de travail en dehors du

temps de présence des enfants ; tenant ainsi à signaler que les professionnels interviewés

ont fait preuve d’une grande disponibilité. Les entretiens sont un outil de collecte

d’informations représentatives des caractéristiques suivantes : Ancienneté et formation des

enseignants, accompagnement et aide dans la classe, pathologies rencontrées, critères

d’orientation en milieu spécialisé etc.

L’autre intérêt est de montrer en quoi une enquête qui interroge les parents d’élèves

handicapés soulève des obstacles méthodologiques spécifiques. Le contact avec les familles

a nécessité une approche en plusieurs temps : invitée à une réunion entre les parents et les

membres d’un établissement, le sujet d'étude a été présenté. Ensuite une prise de contact

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36

s'est faite par téléphone afin de respecter l'anonymat et la volonté des familles de participer

ou non à l’enquête. Enfin les entretiens se sont déroulés au domicile des familles, avec ou

sans la présence des enfants. Ces entretiens sont nommés Ef. L’étude de la scolarité des

enfants handicapés, par une approche représentative des entretiens, met en avant les

caractéristiques sectorielles des familles (âge, sexe, emploi, formation et parcours inclusif

de l’enfant).

Les guides d’entretien et deux exemples d’entretien retranscrits sont consultables en

annexe du mémoire tout comme un tableau d’analyse des entretiens. En annexe n° 2 est

proposée la grille d’entretien théorique constituée pour les professionnels de l’Éducation

nationale. La grille d’entretiens proposée aux familles est un support dont nous pouvons

prendre connaissance du contenu en annexe n° 3. Un exemple d’entretien auprès d’une

enseignante est retranscrit en annexe n° 4 ; celui réalisé dans une famille est visible en

annexe n° 5. Deux tableaux d’analyse, récapitulatifs des entretiens, sont en annexe n°6 et 9

du document.

La prise de notes, appuyé par les enregistrements, le travail distancié avec le recueil

de données statistiques et littéraires, permet de donner à l’analyse toute la rigueur attendue

par l’exercice de l’étude. Dans cette perspective, les bases de données qualitatives

construites avec un recueil de propos sont une opportunité pour étudier et comprendre les

liens entre le contexte familial, les éléments socioéconomiques et les expériences vécues

durant la scolarisation.

2. Les premiers résultats de l’enquête : la scolarisabilité

L’enquête a pour but de recueillir les témoignages des familles et des enseignants sur

leur expérience de l’inclusion scolaire. L’identification des critères d’inclusion réaliséé au

préalable permet de croiser les données récoltées par les entrevues et d’établir un état des

lieux des applications de l’inclusion et de la désinstitutionalisation.

Il a été réalisé une étude comparative des termes employés lors des entretiens. Sur

une quinzaine d’entretiens, les termes inclusion et intégration sont apparus de manière

inégale comme le montre le graphique ci-dessous.

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37

Les termes en rapport de l’inclusion sont réservés aux professionnels et un seul parent

les a utilisés. Tous les mots du registre de l’intégration font partie du discours des familles

et tendent à s’effacer dans les propos des enseignants. Ceci vient conforter l’idée que

l’usage du terme « inclusion » se généralise auprès des professionnels mais n’est pas

d’usage courant dans la société. Nous pouvons prétendre déjà que l’inclusion ne s’inscrit

pas encore dans le droit commun.

De même, pour avoir assisté à des conférences sur les méthodes alternatives

d’enseignement, les intervenants, qu’ils soient sociologues, enseignants spécialisés du

réseau d’aide et de soutien aux élèves en difficultés (RASED) et professeurs des écoles,

aucun n’a fait référence à l’utilisation de ces méthodes pour des enfants handicapés. Les

propos s’adressaient aux professionnels s’occupant d’enfants en difficultés et aux familles

en recherche d’une autre forme d’enseignement et aucunement tourné vers le handicap.

Spontanément les méthodes alternatives ne se dirigent pas vers un public handicapé.

L’inclusion n’a donc pas encore traversé tous les champs de l’éducation.

2.1. Du point de vue des professionnels de l’Éducation nationale

Dans cette partie, nous allons résumer les éléments importants qui se détachent des

entretiens. En annexe n° 2 du document se trouve les questions posées aux enseignants. Un

exemple d’entretien entièrement retranscrit est visible en annexe n° 4 du mémoire. Il a fallu

aller au-delà d’un simple tableau récapitulatif comprenant l’âge, le sexe, la formation,

l’ancienneté, les handicaps rencontrés au cours de la carrière des enseignants, tel qu’il est

visible ci-dessous et complété en annexe n° 6.

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38

Tableau 3

Modèle de tableau d’analyse

Le contenu démontre que les enseignants ne sont pas nécessairement formés pour

exercer leur profession en milieu spécialisé alors même que l’Éducation nationale propose

des formations et que tous les enseignants en milieu ordinaire sont confrontés à des enfants

porteurs de handicap mental. Les expériences de confrontation au handicap mental dont ils

font part, sont diverses. Ils sont en relation avec les SESSAD et ont déjà rencontré dans

leur classe des AESH qu’ils nomment AVS. Ils sont plus ou moins informés des

rééducations proposées aux enfants et méconnaissent pour la plupart les fonctionnements

des IME. Les critères d’orientation vers le milieu spécialisé varient selon l’enseignant, son

expérience et sa formation. Ces critères sont mentionnés sur les documents accessibles sur

le site du ministère de l’Éducation nationale73

dont en voici un résumé :

L’IME a vocation à accueillir des enfants et jeunes

- qui ont besoin d’une prise en charge spécialisée globale,

- qui manifestent un mal-être à l’école,

- dont les besoins complémentaires (éducatifs, thérapeutiques…) ne peuvent être

apportés au sein d’une classe ou en juxtaposition aux enseignements,

- pour qui, seule, une scolarisation à temps partiel peut être envisagée.

Nous constatons ainsi que les critères normatifs à l’orientation sont soumis à

73

http://www.ec72.fr/Files/100783/critere_orientation_ime.pdf ou

http://www.ecoles.ec56.org/IMG/pdf/Annexe_8_bis_Orientation_Reperes_IME.pdf, consulté le 4 mars 2014

Ep Ep1 … Ep8

Sexe M ou F Âge

Enseignante en milieu spécialisé (MS) ou milieu ordinaire (MO)

Ancienneté dans la profession

Formation spécialisée Oui /Non

Pathologies rencontrées

Relation avec les services à domicile, les rééducateurs et les AESH

Critères d'orientation vers le milieu spécialisé

Définition de l’inclusion scolaire

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Quels leviers pour les IME ?

39

l’interprétation des acteurs.

Comme les enseignants ont fait part d’expériences rencontrées avec des enfants en

situation de handicap, il a fallu croiser les données typographiques du handicap avec les

conditions d’accompagnement en classe et des services extérieurs ainsi que celles de la

famille. Afin de clarifier l’exploitation des données, la construction d’un outil d’analyse

spécifique a été nécessaire (un exemplaire vierge est visible en annexe n° 7). Il en résulte

une exploitation des données telle qu’elle va suivre.

a. Les problématiques référencées

La profession est représentée par les deux sexes. Il ne semble pas apparaître de

divergences dans les discours selon le sexe. Que l’enseignant soit un homme ou une

femme, il fait les mêmes observations et expose des points de vue assez comparables.

L’ancienneté dans la profession ne fait pas non plus varier les discours contrairement

à ce que nous aurions pu penser. Avec l’expérience, le nombre de situations est évidemment

bien différent.

La confrontation à la déficience

Les enseignants distinguent bien deux situations. L’une réalisée auprès des enfants

identifiés juridiquement comme handicapés et l’autre, où la question du diagnostic est

posée. L’inclusion réalisée alors même que l’enfant est identifié comme porteur d’un

handicap, relève parfois d’aménagements spécifiques, de moyens matériels et humains. Ils

facilitent l’adaptation de la scolarité, à condition qu’ils soient réalisés dans de bonnes

conditions d’accompagnement et adaptés aux besoins. Par contre ce qui semble poser

davantage de problèmes, ce sont les situations où les enfants ont des signes faisant penser à

une situation de handicap mais ne sont pas identifiés juridiquement. Dans ces situations, les

enseignants sont en difficultés. La solitude face aux situations critiques, les confrontations à

la violence et aux comportements déroutants éprouvent les professionnels de

l’enseignement qui demandent du soutien.

« Dans l'école on peut se retrouver avec des familles qui sont dans le « deni » du

handicap. Qui vont refuser les notifications MDPH, pour tel type d'établissements, type

IME ou ITEP et dont l’enfant va de droit être inscrit dans l'école, pas forcément dans une

classe spécialisée. Et vont peut-être même refuser un AVS et alors là, c'est encore un autre

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Quels leviers pour les IME ?

40

problème74

»

L’ensemble des enseignants interrogés est confronté à des enfants en situation de

handicap. Les pathologies rencontrées sont multiples et appartiennent toutes au champ du

handicap mental. Le terme « handicapé » est utilisé avec beaucoup de réserves au début des

entretiens. Des mots ou expressions sont employés afin de le détourner comme « difficultés

des apprentissages », « soucis »… Les enseignants adoptent des stratégies d’évitement. Les

pathologies sont référencées sous l’appellation dyslexie, dyspraxie, autisme et déficience

intellectuelle. Elles se regroupent par des syndromes comme la trisomie ou troubles des

fonctions cognitives. Puis quand l’interlocuteur semble plus à l’aise au cours de l’échange,

le mot « handicap » est plus facilement emprunté. Ce mot fait-il peur ? Est-il connoté de

manière négative ? Le mot « handicap » reste tabou encore aujourd’hui.

La difficile coopération

Le rôle du SESSAD est un peu flou pour les enseignants et les correspondances avec

ce service sont très variables. Le partenariat semble s’utiliser avec beaucoup de réserves.

La coopération reste exceptionnelle et dépend de la volonté de certains individus.

« J'ai travaillé avec le SESSAD quand j'étais en CLIS TED. Ils venaient les chercher

en classe, ils me les ramenaient. Je les voyais aux équipes de suivis éducatifs75

»

« Le SESSAD est là en tant que personne ressource, il émet un avis pour notifier. (…)

Le regard des collègues a été vachement important pour moi. (…) Mais chacun son

métier76

»

Unanimement les professionnels ont eu affaire à un moment donné dans leur carrière

à un AVS ou un AESH. Tous font le même constat : ce personnel n’est pas qualifié et peu

préparé à l’exercice de cette fonction. L’absentéisme dans ce corps de métier semble

perturber les enseignants au point qu’ils y font systématiquement allusion. La précarisation

de ces emplois ne favorise pas non plus l’investissement professionnel de cette pratique.

« L'AVS travaillait en frontal avec l'enfant, c'était du un pour un. C'est l'idéal (…)

L'année d'après j'en ai perdu une et l'autre était tout le temps en arrêt parce qu'elle avait

un problème de dos. Du coup ça été vachement plus dur. J'en avais qu'une seule et quand

74

Entretien Ep6 75

Entretien Ep3 76

Entretien Ep2

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elle était en classe avec une enfant, je me retrouvais avec tous les autres, toute seule (…) ils

y en avaient qui se barraient. Ils ouvraient la porte, ils se barraient. Je me disais : je lui

cours après ou je reste avec les autres enfants dans la classe ? Ce n’est pas évident77

»

Des outils pédagogiques et informatisés, des aides matérielles sont mis à la

disposition de l’élève. D’autres sont utilisables par les enseignants, pourtant ils ne les

évoquent jamais. Ce sont les conseillers pédagogiques et référents de scolarité qui

spontanément évoquent les outils susceptibles d’être mis à la disposition de l’enfant pour

lui simplifier les apprentissages. Alors nous pouvons nous questionner sur la pertinence de

ces outils qui ne paraissent pas exploités instinctivement et peu déployés dans les écoles.

Par contre l’élaboration des emplois du temps des élèves relève d’une grande attention. Le

planning est adapté à la fatigabilité de l’enfant ou de l’adolescent et à l’intérêt que chaque

enfant porte sur une matière ou aux compétences à valoriser dans certaines disciplines.

Les relations avec les rééducateurs sont à priori inexistantes. Les liens de travail avec

les établissements médico-éducatifs ne font pas partie des habitudes du métier mais

commencent à se développer en ULIS. Les enseignants ne seraient pas opposés à une

collaboration avec le milieu spécialisé, certain en sont même en demande.

« Les EMS (…) certains établissements qui fonctionnent très bien comme ça et qui

n’ont peut-être pas envie que l'Éducation nationale vienne mettre son nez dans les

situations. (...) faudra réfléchir à une complémentarité78

»

« L'année dernière j'ai fait un partenariat avec l'IME de P comme je travaillais sur

l'orientation. Avec des éducs spé, on est allé faire des ateliers professionnels en partenariat

avec « cheval soleil » et aussi avec une horticultrice pour faire un atelier horticulture (…)

on a fait un atelier connaissance de soi, connaissance des métiers79

»

Des relations compliquées avec les familles

D’après l’ensemble des professionnels de l’Éducation nationale, les relations avec les

familles sont compliquées pour diverses raisons. Trois semblent redondantes dans les

propos : le déni du handicap, les carences éducatives du milieu familial et le manque de

mobilisation des familles. Quelques interrogations sur ces difficultés méritent d’être

77

Entretien Ep3 78

Entretien Ep5 79

Entretien Ep2

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énoncées : Sont-elles inhérentes au handicap ? L’arrivée d’un enfant handicapé au sein

d’une classe ordinaire, influence-t-elle l’attitude vis-à-vis des familles ? Les carences

éducatives génèrent-elles du handicap ?

« C'est très difficile à partir du moment où les parents ne suivent pas derrière. Il y a

quasiment aucun recours pour faire avancer les choses. Donc on a quand même réussi à

obtenir une AVS en fin d'année, mais ça a été super dur. C'était juste un déni. Du coup ils

laissaient traîner, donc on avait du mal à les avoir en réunion. Quand ils n’étaient pas là

on était obligé d'annuler. Et donc ça a mis quasiment toute l'année pour se mettre en

place80

»

« L'inné l’acquis, c'est sûr que quand le milieu familial n'est pas porteur il peut être

aussi destructeur. Alors comment faire ? Mais malheureusement je m'aperçois aussi que

l'école même n'a pas les moyens de lutter, de redresser, de lutter. Le poids de la famille est

tel et encore plus quand il y a un handicap ; c'est même très difficile81

»

Le corps enseignant convient de la souffrance des familles, mais reconnaît qu’il n’est

pas préparé à de tels échanges. Il constate une faible mobilisation des familles et la

généralise à l’ensemble des parents puisque ce fait ne serait pas uniquement observable

envers des familles ayant un enfant en situation de handicap. Il s’agit effectivement d’un

état des lieux général sur la scolarité de l’ensemble des enfants. Ces propos sont soutenus

par des recherches réalisées par l’observatoire de la réussite éducative82

mais aussi par

divers textes. Par exemple Severine Kakpo83

évoque la « démission éducative » et le

« manque d’implication » dont l’origine serait un manque de confiance en l’institution

scolaire. D’un autre point de vue Pierre Perier écrit : « les enseignants sont loin de tous

partager l’idée d’un renforcement des droits des parents ou de leur plus grande présence

dans l’école, s’inquiétant de la confusion des rôles et de l’immixtion de certains dans le

domaine « réservé » de la classe et de la pédagogie. »84

. Le débat sur la participation des

familles à la vie scolaire reste donc ouvert et ce quel que soit l’enfant concerné mais ne fait

pas l’objet ici du thème de la recherche.

80

Entretien Ep3 81

Entretien Ep2 82

http://observatoire-reussite-educative.fr/, consulté le 17 janvier 2016 83

KAKPO S., « La mobilisation scolaire de familles populaires françaises. Entre défiances et appropriation

active des enjeux d’apprentissages », revue internationales d’éducation, n° 62, avril 2013, pp 109-118 84

PERIER P., « Les relations entre les familles et l’école : processus et enjeux », http://observatoire-reussite-

educative.fr/, consulté le 17 janvier 2016

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43

b. Ce que l’inclusion signifie aux enseignants

L’inclusion scolaire est vécue ou appréhendée de manière singulière selon les

professionnels et leur milieu d’intervention. Qu’ils soient spécialisés ou non, qu’ils

interviennent en milieu ordinaire ou spécialisé, les rapports à l’inclusion sont variables.

Quand les enseignants évoquent l’inclusion, ils font référence aux situations qu’ils ont

rencontrées dans le cadre de l’exercice de leur fonction. En milieu ordinaire ils parlent d’un

ou deux enfants par classe chaque année, qui sont, ou bien pourraient être en situation de

handicap. L’enfant handicapé semble faire partie de ce qui compose une classe à l’heure

actuelle. Selon les enseignants, l’accueil est réalisé comme pour chaque élève mais nous

verrons qu’il n’est pas ressenti de la sorte par les familles.

Dans les petits pas du quotidien dans la classe

L’inclusion permet à l’enseignant d’appréhender les apprentissages fondamentaux

telle est d’ailleurs la mission de l’école. Cependant elle est aussi une manière de développer

le vivre ensemble et la socialité qui relève de la capacité des hommes à vivre en société.

C’est ce que Serge Ebersold nomme la scolarisabilté, c’est à la capacité à être scolarisé.

« après faut être au clair avec les inclusions et ce qu'on y cherche. Est-ce que c'est

des connaissances dans la matière ? Ou est-ce qu'on travaille plus l'autonomie sociale, des

compétences sociales ou civiques ; c'est-à-dire être avec les autres, obéir à des règles de

collectivité85

»

« Jusqu'à la moyenne section ça va à peu près, les enseignantes sont assez souples,

elles n’ont pas trop d'exigences. Ça passe même s'il est en situation de handicap, même s'il

a des troubles des fonctions cognitives. On joue la carte plus de la socialisation, du vivre

ensemble, du devenir élève. Ça marche86

»

Tous les enseignants spécialisés ont en commun le discours selon lequel l’inclusion

permet aux enfants non handicapés de côtoyer le handicap. La démarche inclusive est

également un moyen de sensibiliser les autres enfants au handicap afin de changer les

représentations.

« Avec l'histoire du tutorat, à la pré-rentrée je fais le tour des classes du collège, je

85

Entretien Ep2 86

Entretien Ep6

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44

présente la structure. (…) Pour vous le handicap qu'est-ce que c'est ? (…) quels sont ceux

qui ont peur du handicap, parce qu'on peut en avoir peur ? Je comprends, c'est légitime, y

a pas de honte. Y en a un qui m'a dit « est ce que ça s'attrape ? ». Voilà ! Non rassure-toi ça

s'attrape pas ce n’est pas une maladie (…) tout le monde peut être handicapé. Pour le

moment ce sont eux, est ce qu’il faut les rejeter, leur interdire de vivre ? En général ça se

passe super bien87

»

« Mais moi je vois souvent G, assise dans son coin. Les autres, ils vont chercher, ils

s’engrainent tous, c'est un peu pénible. Je les vois pas trop se mélanger dans la cour avec

les autres88

» énonce une enseignante avec regret.

Lorsque nous nous adressons aux enseignants du milieu spécialisé, ils prétendent que

l’inclusion scolaire ne peut se concevoir sans une certaine autonomie. Alors il s’agit de

s’entendre sur l’évaluation du degré d’autonomie nécessaire pour réaliser l’inclusion et

surtout de s’entendre sur la définition de ce qu’est l’autonomie. Il est ainsi sous-entendu

que si l’enfant n’est pas propre, s’il n’a pas d’autonomie personnelle dans les actes du

quotidien même avec l’aide d’un tiers, il ne peut prétendre à s’inscrire dans un cadre de

classe ordinaire.

« Je pense que c'est plus pour réaffirmer le côté scolaire des CLIS de l'école, de ne

pas basculer dans la prise en charge des enfants pour ce qui n'a pas trait à l'éducation

banale89

»

Obstacles aux conditions d’accessibilité

Dans leurs discours, tous les enseignants font preuve de bonne volonté pour réaliser

l’inclusion, néanmoins cela ne suffit pas pour réussir une inclusion. Les paramètres

environnementaux ne permettent pas une optimisation de la pratique. Les classes

surchargées sont souvent avancées comme un argument portant atteinte à l’inclusion. Elles

ne facilitent pas l'accueil et ne permettent pas au professeur des écoles d’accorder

l'attention nécessaire à ce public, qui pourtant en a davantage besoin. Même le soutien des

AESH n’est pas suffisant pour combler le déficit attentionnel.

« J’en ai onze et certaines collègues vont jusqu'à 15. Je peux faire ce que je fais parce

87

Entretien Ep2 88

Entretien Ep7 89

Entretien Ep3

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45

que j'ai un petit effectif aussi. Mais les collègues qui en ont 25, 30, c'est ingérable90

»

« Pour que ça se passe vraiment, les inclusions, faut que ce soit dans les classes où il

n’y a pas 30 élèves. Parce que ce n’est pas possible de demander à un prof d'accueillir un

élève, convenablement, avec un handicap, avec 30 élèves. Je comprends aussi les profs qui

refusent (…) les classes elles sont justes pour 30 élèves si y a un 31ème qui arrive plus

l'AVS, il n’y a pas de place. Donc je pense que quand y a un dispositif spécial dans un

établissement faut vraiment que les effectifs soient diminués.91

»

Dans le cas des ULIS qui sont composées uniquement de jeunes en situation de

handicap, l’inclusion fait partie du projet de la classe. Ce projet de scolarité repose sur

l’inclusion en classe par niveau d’âge pour le collège et selon le niveau scolaire à l’école

élémentaire. Pour ce faire, des négociations sont entreprises entre enseignant et référant de

scolarité pour statuer sur le nombre d’heures d’inclusion, sur les matières où il est plus

propice au jeune d’être inclus et sur les objectifs des temps inclusifs. Les temps d’inclusion

sont mis en place qu’après un accord, quand une coopération est possible. Certains

enseignants prétendent qu’il faut imposer les temps inclusifs, alors que d’autres recherchent

davantage la coopération que l’injonction. Le bon sens voudrait que les temps en classe

ordinaire soient illimités mais en ULIS-école, les temps inclusifs ne dépassent pas 50 % de

l’emploi du temps de l’enfant et pour les enfants scolarisés individuellement, les temps

partiels sont de mises. Pour autant tous les enseignants sont convaincus, dans leurs discours

que les jeunes doivent profiter d’un temps d’inclusion. Dans les faits, ces moments

inclusifs se manifestent par des arrangements entre collègues, un interviewé emploie même

le terme « inclusion de confort92

». L’inclusion dépend de la volonté des enseignants

d’intégrer en classe ordinaire, plus que les capacités des jeunes à s’intégrer.

En 1999 l’OCDE, dans un rapport intitulé « l’inclusion scolaire des handicapés : des

établissements pour tous93

», il était fait le constat que l’intégration scolaire était redoutée

par les instituteurs prétendant la détérioration de leurs conditions de travail. Et dans la

littérature il est noté quelques motifs d’opposition à l’inclusion. Les critiques s’appuient sur

le fait que l’accueil des enfants handicapés trouble l’ordre public. Il modifie le rythme des

90

Entretien Ep2 91

Entretien Ep7 92

Entretien Ep6 93

http://www.oecd.org, consulté le 21 mai 2015

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46

apprentissages car les enfants en situation de handicap n’apprennent pas aussi vite que les

autres élèves. Les enfants de la communauté subissent les freins mais, également les

comportements perturbés des enfants en situation de handicap. Ainsi les opposants à

l’inclusion scolaire signalent que le processus freine le rythme des valides et leur évolution.

Or les entretiens menés cette année pour l’enquête ne font plus état de cela.

Un autre facteur non négligeable rend l’inclusion problématique : la répartition

géographique des classes inclusives. Les découpages géographiques des circonscriptions et

la localisation des classes inclusives rendent le dispositif moins simple à utiliser. Une classe

dans un établissement scolaire rural demande à développer des modes de transport

spécifique. Dans certaines situations les contraintes horaires des taxis qui véhiculent les

élèves, ne permettent pas aux adolescents d’ULIS d’assister aux premières heures de cours.

Parler d’inclusion, alors que les jeunes n’utilisent pas le même mode de transport que les

autres, est incohérent. Ils sont stigmatisés et cela ne facilite pas l’inclusion parmi les autres.

Mais comment faire quand on sait que tous les établissements scolaires de secteur n’ont pas

d’ULIS et que quand il y en a, les effectifs sont limités.

Schéma tiré des entretiens :

Voici donc une situation réelle où l’adolescent hébergé à Mérindol ne peut prétendre

à être inscrit au collège de Cadenet faute de place et est contraint d’être scolarisé en ULIS

dans un autre établissement. Evidemment aucune ligne de bus ne dessert ce trajet d’autant

plus qu’il y a un changement de département. Cette situation n’est malheureusement pas

exceptionnelle. Ces incohérences dues à l’inaccessibilité des dispositifs, aux contraintes

budgétaires (paiement des taxis alloués par le conseil départemental), aux inégalités

8 km

15 km

13 km

15 km

ULIS- collège

Collège sans ULIS

Trajet en taxi pour rejoindre la

classe d’ULIS d’affectation

Distance domicile-collège de secteur

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Quels leviers pour les IME ?

47

territoriales… ne bénéficient pas aux enfants et adolescents à besoins particuliers.

c. Quand l’orientation en IME se profile

Dans l'ensemble des entretiens, le handicap mental est associé à des troubles « dys ».

« Dys » est un terme utilisé pour rassembler l'ensemble des troubles tels que la dyspraxie,

dyslexie et la dysphasie. Reconnus comme handicap, ces troubles n'affectent pas la

compréhension des consignes et demandent des moyens de compensation. Ainsi la

technicité peut compenser les manifestations du trouble. Les aménagements rendent la

scolarité possible. Par contre quand il s'agit de déficiences intellectuelles, les moyens de

compensation se montrent moins efficaces. Pour les enfants déficients, les propos sur la

scolarité au sein des écoles ordinaires semblent plus nuancés. Quand il y a une déficience

intellectuelle, envisager une orientation en milieu spécialisé est-elle plus pertinente ?

La difficile évaluation de l’accessibilité didactique

Pour les enseignants du milieu ordinaire, principalement ceux des petites classes de

maternelle et ceux des premiers cycles, il leur incombe la responsabilité de repérer les

signes suggestifs d’un handicap. Les critères comportementaux alertent dans un premier

temps les professionnels et seulement ensuite viennent les signes annonciateurs de troubles

des apprentissages. Repérer une éventuelle déficience intellectuelle est rendue très difficile

dans la petite enfance. Le rapport à la norme est rendu plus complexe d’autant plus si

l’enfant est jeune. Les difficultés sont repérées dans l’identification des attitudes liées à un

handicap plus qu’aux compétences. Or quand l'enseignant n'a pas été formé sur le

handicap, son évaluation des critères comportementaux est subjective.

« Mais j'ai par exemple la collègue qui travaille en ULIS à La T : elle n’a que des

familles gitanes. Alors sans faire de racisme ni rien, ce sont des familles dont les enfants

sont bien souvent en difficultés non pas à cause d'un handicap cognitif(…) C’est des

enfants intelligents mais qui ont des difficultés à apprendre parce que ce n'est pas du tout la

culture de la famille94

»

Ainsi le premier élément qui alerte reste bien souvent le comportement et questionne

les enseignants. Quelles sont les origines des difficultés rencontrées ? Sont-elles liées à une

déficience ? Sont-elles la conséquence d’un milieu social carencé ? Le paradoxe de

94

Entretien Ep1

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Quels leviers pour les IME ?

48

l’inclusion scolaire, c’est qu’il est demandé d’inclure des enfants en situation de handicap

en classe alors même que les enseignants ne sont pas formés au handicap.

Quand il y a une pathologie avérée, un syndrome identifié, un diagnostic posé par le

corps médical, la notification par la CDAPH a déjà pris tout son sens. La confrontation au

handicap paraît plus facilitée pour les enseignants. Mais avant la notification, les

enseignants sont les premiers interlocuteurs des familles quand il y a des difficultés

d’apprentissage. Les problématiques soulevées ne sont pas toujours audibles et surtout

douloureuses à entendre pour les parents. Dans un sens c’est ce qui pourrait expliquer les

relations souvent difficiles, évoquées précédemment, entre les enseignants et les familles.

Dans la procédure d’orientation, les enseignants engagent leur responsabilité et portent le

poids d’une décision lourde de conséquences.

« À la dernière réunion éducative (…) tu te dis il n'est pas si violent que ça. Bon il ne

s’en sort pas scolairement par contre mais on ne va pas l'envoyer en IME parce que ça

passe. Et donc tu le gardes. Mais tu vois c'est un truc un peu flou, on te dit pas il a ce

critère-là, donc lui dépend de l'IME. C'est ça qui me gêne, c'est vraiment au feeling95

»

En gage d’objectivité, tous les professeurs des écoles ont à leur disposition de

nombreux tests pour mesurer les performances dans les apprentissages fondamentaux afin

d’évaluer le niveau de compétences scolaire. Ils s’appuient sur des critères définis par les

conseillers en adaptation scolaire et scolarisation des élèves handicapés (ASH) de

l’Éducation nationale (annexe n° 8) qui peuvent se résumer de la manière suivante :

- quand les écarts de compétences sont très importants,

- quand les contraintes de comportement qu’impose une vie de classe ne sont pas

assumées,

- quand les capacités de socialisation, de communication et d’autonomie sont

inconciliables avec une vie de classe.

« C'est ces feuillets-là au niveau scolaire qu'on remplit et envoie à la MDPH. Alors

évidemment on peut mettre des commentaires ; je pense que l'objectif est d'être

suffisamment objectif, que ce ne soit pas un ressenti de l'enseignant. Il sait ou il ne sait pas.

Alors on a un volet autonomie, initiative, compétences 6 et 7. (…) on ne juge pas par

rapport au handicap, on juge par rapport à la norme (…) C'est plus que réducteur96

»

95

Entretien Ep1 96

Entretien Ep2

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Quels leviers pour les IME ?

49

Les enseignants peuvent trouver du soutien auprès d’autres professionnels de

l’Éducation nationale, plus assermentés pour approfondir les évaluations. Ces derniers sont

les psychologues scolaires ou les médecins scolaires habilités à utiliser des tests

psychométriques. Les psychologues scolaires sont en capacité de faire passer les tests du

WISC toutefois ces professionnels sont peu nombreux (environ un pour vingt et une écoles)

et les tests restent très coûteux. Un quotient intellectuel, lorsqu’il est inférieur à 49,

correspondant à une déficience de moyenne à profonde. Cet indicateur signifie que la

scolarité est irréalisable même dans une classe spécifique.

Si l’élève a besoin de soin et d’éducation dont l’organisation est incompatible avec

une vie de classe ou si la scolarisation demande trop d’aménagements, alors l’élève n’a

plus sa place au sein de l’école ordinaire d’autant plus s’il manifeste un mal-être.

L’orientation en milieu spécialisé peut alors être envisagée. Cependant, l’enquête révèle

que les enseignants ne semblent pas tous connaître le contenu des critères formels proposés

par leur ministère. La formation permettrait-elle aux enseignants d'être plus au fait des

procédures d'orientation en milieu spécialisé ? Justement la spécialisation leur donne des

outils d'évaluation mais tous n’ont pas la volonté de se spécialiser dans le handicap, ni de

subir les contraintes d’une formation sur une année avec examen à la clé.

« On est formé à la différenciation. (…) tu as toujours plusieurs vitesses dans la

classe donc y a toujours un groupe, on va dire 1/3 pour qui tu vas épurer les consignes,

mettre plus de visuel etc, chose que je vais faire avec mes autistes mais en beaucoup plus

poussé, (…) mais tu n'es pas formé à ça bien spécialement. Tu n'es pas formé à un type de

handicap ou comment ils apprennent (…) Y a rien, tu vois, à ce niveau-là…97

»

L’expertise administrative

Les procédures de notification prennent beaucoup de temps et cette lenteur

administrative ne satisfait pas les enseignants interviewés. Les demandes d’aides

matérielles ou humaines sont instruites par la CDAPH et sont satisfaites dans un délai de

quatre mois à un an. Dès lors, peut enfin commencer le recrutement de l’AESH ou l’achat

d’ordinateur… Le conseiller pédagogique relativise ce qui est considéré comme de la

lenteur par le fait qu’au vu du nombre de dossiers instruits dans le département, finalement,

leur traitement est rapide.

97

Entretien Ep4

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50

« Donc c'est dommage que ça ait mis tant de temps. Je trouve que ce n’est pas

intéressant ni pour l'enfant ni pour l'instit que ça prenne tant de temps, qu'il n'y ait pas plus

de poids donné aux besoins de l’enfant et de l'école, même si les parents derrière ils ne

suivent pas. C'est juste un constat que j'ai fait98

»

Le choix des décisions appartient à la famille qui adhère au projet de notification ou

qui le refuse. Dans la mesure où la famille justifie son refus, il n’y a pas de raisons que la

notification se fasse. Parfois la stratégie d’évitement reste un outil de refus des démarches,

c’est pourquoi les enseignants parlent alors de « déni ».

« Quand la famille dit « non », même si à l'évidence tout le monde essaie de leur faire

comprendre ceci cela, « c'est non et c'est non ». C'est pour ça que les familles devraient

obligatoirement être accompagnées, une obligation de suivi social, parce qu'on en arrive à

des aberrations99

»

D’une manière générale les enseignants du milieu ordinaire estiment que certains

dossiers instruits par la CDAPH ne devraient pas dépendre de cette instance. Selon eux elle

ne prendrait pas les bonnes mesures. Tous à un moment donné de leur carrière ont été

amenés à contester les décisions de la CDAPH estimant qu’il s’agit plus de problèmes

sociaux, que de handicap.

« les familles quand on leur dit signer là ; mettez une croix, ils mettent une croix ;

vous aurez une allocation financière, le taxi sera gratuit... (…) la MDPH statue sur des

dossiers qui ne relèveraient pas forcément100

»

« Donc souvent tu te retrouves dans cette situation. Quand tu regardes, alors tu vois

bien lui, il est dans cette situation ; y a des soucis donc il a été signalé à la MDPH (…) ce

qui serait bien ce serait de régler le problème de la famille (…) La MDPH si tu veux ils

n’ont pas un budget indéfini. Donc finalement là on se sert de la MDPH pour résoudre un

truc qui ne dépend peut-être pas de la MDPH101

»

Suite aux entretiens, il s’avère que les enseignants n’ont guère rencontré de jeunes

porteurs de troubles psychiques. Ils considèrent l’autisme comme un handicap à part, à

98

Entretien Ep3 99

Entretien Ep2 100

Entretien Ep2 101

Entretien Ep1

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51

traiter avec toute sa spécificité. D’ailleurs les dispositifs prévus pour cette population sont

différents mais ne semblent pas non plus suffisants.

Encore de la méconnaissance du secteur spécialisé !

Si l’enfant présente des problèmes de comportement, il y a plus rapidement des

aménagements proposés comme le SESSAD. L’enquête révèle que les familles à faible

capital économique et culturel sont davantage soutenues par des services à domicile, plus

que les autres qui doivent se mobiliser considérablement.

Si le handicap mental est encore une énigme pour les instituteurs, globalement les

enseignants méconnaissent les dispositifs d’accompagnement et les missions des IME. Le

discours n’est pas négatif envers les IME mais ils ignorent le contenu des interventions

spécialisées. Par exemple pour les enseignants, les SESSAD doivent régler les problèmes

sociaux et les AESH doivent être sollicités quand il y a des problèmes de violence. Or ce ne

sont pas les missions pour lesquelles ils sont sollicités. Nous pouvons alors nous demander

si les représentants des professionnels spécialisés font suffisamment preuve de transmission

de leurs interventions auprès du grand public.

L'inclusion scolaire s'impose de fait mais parfois montre ses limites. Même si un

enfant vit bien son inclusion, il pourrait peut-être vivre mieux encore, dans un autre

dispositif plus spécialisé.

« Tu vois la petite qui était handicapée, quand elle est passée en CLIS. Alors c'est

vrai ça été bien pour toute ma classe parce qu'on a travaillé pour le handicap. Elle a

énormément évolué en socialisation, au niveau contact avec les autres, elle commençait à

apprendre leur prénom, à arriver à dire leur prénom, grâce à l'inclusion c'est clair. Mais

quand même passer en CLIS : ils étaient 6 au lieu de 30, ils faisaient du cheval, ils allaient

à la piscine, elle avait toutes ces activités l'après-midi comme à l'IME finalement102

»

Pour les ULIS la question de l’orientation se pose systématiquement en fin de cycle :

à savoir si le jeune se destine à poursuivre son parcours inclusif en collège ou lycée ou en

formation professionnelle ou bien s’il est préférable de l’engager vers une filière plus

spécialisée, vers un IME. Nous voyons bien ici la nécessité de développer de la coopération

entre les deux entités ULIS et IME. De la part des enseignants, il y a la volonté de travailler

102

Entretien Ep4

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Quels leviers pour les IME ?

52

en partenariat avec les professionnels des institutions spécialisées.

Les propos en faveur de l’inclusion ne dépendent pas de la formation des enseignants

ni de leur ancienneté mais plutôt du public qui est accueilli en classe. D’après les entretiens

l’inclusion ne peut s’adresser à tous les enfants porteurs d’un handicap. Ce qui est certain

c’est que l’adaptabilité du comportement est primordiale dans la vie de classe. Le

comportement est un des critères d’inclusion avant les compétences cognitives. Les

aptitudes sociales sont requises pour prétendre à l’inclusion. Le manque de place dans les

classes d’inclusion et dans les formations professionnelles pour adolescents, implique une

orientation en IME par défaut voire une rupture de parcours pour certains. Les enseignants

envisagent pour l’avenir de développer l’inclusion en s’associant davantage au milieu

spécialisé.

2.2. Vivre la scolarité de son enfant handicapé

Au cours du parcours scolaire de l’enfant, certains critères énoncés dans le discours

des familles mettent en avant des dispositions peu facilitatrices de l’inclusion en milieu

ordinaire. Certaines sont examinées dans cette partie. Il est question d’établir les relations

qui existent entre le parcours inclusif et les conditions de vie de l’enfant. Nous identifions

les facteurs favorables et défavorables à l’inclusion par l’analyse de la grille d’entretien qui

a été utilisée.

Tableau 4

Tableau récapitulatif des critères recherchés

Ef Ef1 … Ef6

Sexe M ou F

Age

Situation familiale

Situation professionnelle

ou niveau d’étude des parents

Pathologies de l’enfant

Parcours

Etayage du suivi

Critères d'orientation vers le

milieu spécialisé

Evaluation de l’orientation

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53

En annexe de ce document se trouve : les questions posées en vue du recueil de

données (annexe n° 3), le contenu du tableau en annexe n° 9 du mémoire et un exemple

d’entretien entièrement retranscrit (annexe n° 5).

a. Les rencontres avec des parents

La composition des familles est variable. Un tiers des familles sont nucléaires et

composées des deux parents vivant dans un même foyer. Les autres sont des familles

recomposées ou des femmes vivant seules.

Handicap, une histoire de femme

La personne la plus à même de parler de l'enfant et de son parcours est le plus souvent

la mère. Les entretiens se sont déroulés exclusivement avec des femmes malgré la présence

parfois du père de famille. Seules les mamans se sont rendues disponibles pour les

interviews. La gestion de l’éducation de l’enfant en situation de handicap incombe aux

femmes dans la plupart des situations rencontrées. L’accompagnement dans les différentes

prises en charge quotidienne est assuré en particulier par les mamans. Ce sont elles qui

conduisent aux séances de rééducation, qui se rendent aux réunions d’équipes de suivi de

scolarité, aux visites médicales…

Les femmes ayant un emploi représentent un sixième des personnes interrogées.

Certaines femmes ont même arrêté de travailler pour se consacrer à l’éducation de l’enfant

handicapé. C’est à elles que revient le sacrifice professionnel dans la majeure partie des

situations. L'éducation de l'enfant handicapé serait-elle uniquement du ressort des femmes ?

Il est vrai que s'occuper de l'éducation des enfants revient davantage aux femmes et cela se

confirme dans les ménages où il y a un enfant handicapé. Durant les entretiens peu

d’informations sont communiquées sur les hommes des familles. Quelques renseignements

peuvent se glaner ci ou là mais à la condition de poser clairement une question dirigée.

Spontanément le rôle du père dans l’éducation n’est pas évoqué.

Aucun entretien de couple unisexe n’a été possible, ces informations n’étant pas

répertoriées ou divulguées même lors des entretiens. Le hasard a fait que deux cinquièmes

des parents sont en difficultés économiques et sociales. Nous ne sommes pas en mesure de

faire des liens entre handicap et situation sociale des ménages telle que l’étude est menée.

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54

Vers une acceptation progressive d’un diagnostic

Dans les discours, le mot « handicapé » est très peu utilisé au profit du « retard » ou

« difficultés ». Le mot « handicap » est employé particulièrement lorsque les mamans font

référence aux autres enfants. Globalement leur enfant est toujours moins handicapé que les

autres.

Les familles contactées ont des enfants avec des pathologies diverses et des

syndromes variés, mais tous les enfants présentent une déficience intellectuelle. Il apparaît

dans l’enquête que la problématique soulevée par les familles relève de l’absence de

diagnostic. Pour les parents, il est important de pouvoir mettre un mot, de trouver une

explication aux troubles qu’ils ont constatée chez leur enfant. Cette souffrance est

perceptible dans l’ensemble des entretiens. N’y a-t-il pas de diagnostic ou bien les parents

résistent-ils à une catégorisation ? Ressentent-ils un jugement de leur mode de vie ?

« Je ne sais pas, ils ne veulent pas me faire de diagnostic. Et je comprends pas

pourquoi parce que du coup sans diagnostic y a pas de traitement adapté103

».

L’espoir, la peur, la communication du diagnostic sont des moments importants et

complexes de l’interaction de la famille avec les professionnels. D’un côté les attentes et

les exigences de diagnostic sont fortes pour les familles. D’un autre côté, les

professionnels, des médecins pour la plupart, pratiquent l’usage flou et hypothétique d’une

catégorisation justifiant qu’elle n’est pas utile au traitement de la déficience et évite les

effets d’étiquetage. Et pourtant faire reconnaître le trouble devient un enjeu important pour

que l’enfant bénéficie d’un accompagnement adapté par l’ouverture de droits spécifiques et

«déculpabilise » la famille.

Toutes les familles interrogées ont eu leur enfant scolarisé au moins en maternelle.

Globalement les propos sont respectueux vis-à-vis des enseignants qui se seraient montrés

très conciliants. Ceci n’empêche pas que les avis sont partagés sur la pratique inclusive en

milieu scolaire. Les critiques, dont nous verrons plus tard le contenu, portent plutôt sur les

conditions de l’inclusion plus que sur le personnel sur lequel ils ne rejettent pas la faute.

103

Entretien Ef5

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55

b. Une discrimination ressentie

Une interaction difficile

L’inclusion fait naitre des facteurs discriminants alors que ce ne sont pas les objectifs

de la loi de 2005. Pour accéder au moins à l’école préélémentaire l’enfant doit avoir déjà

acquis une certaine autonomie en rapport de son âge. Une des premières conditions pour

prétendre à une inclusion scolaire est, d’après les parents, l’acquisition de la propreté. Le

premier motif de refus de scolarité qui est évoqué est donc la non-acquisition de la

propreté. Parfois l'obtention d'un AESH est justifiée par ces circonstances.

« En gros l'enseignante a trouvé le prétexte de la propreté, comme il n'était pas

propre il n'était pas scolarisable. Mais à 4 ans elle pouvait le prendre qu'en présence de

l'AVS. Elle a trouvé un petit peu ce prétexte, voilà.104

»

Unanimement tous les entretiens évoquent les souffrances des enfants à l’école. Les

difficultés auxquelles les élèves handicapés sont confrontés au quotidien au sein d’une

classe entraînent des répercussions sur les attitudes à la maison. En grandes difficultés dans

les apprentissages fondamentaux, ils font l’objet de moquerie de la part de leurs camarades.

Ils se sentent dévalorisés et souffrent de la situation. Certains réagissent par le repli mais

d’autres développent des problèmes de comportement qui viennent se surajouter aux

difficultés cognitives. Pour l’enfant l’école est synonyme d’échec et d’exclusion. Les

enfants en situation de handicap ont la possibilité de vivre parmi d’autres enfants du même

âge mais en souffrent. D’un point de vue scolaire ils sont stimulés et cela leur permet

d’évoluer dans leurs apprentissages mais à quel prix ? Leur différence, leur comportement

inadapté, leur faiblesse de raisonnement, leur difficulté d’être en relation avec autrui les

distinguent des autres. L’école inclusive serait-elle finalement plus stigmatisante ?

Quelques parents considèrent que le système scolaire ne convient pas à la situation de

leur enfant. Ils émettent les hypothèses selon lesquelles les enseignants ne sont pas formés

au handicap et que les effectifs de classes ne permettent pas de répondre aux besoins

particuliers des enfants handicapés.

« La maîtresse aussi gentille qu'elle soit, était incapable de l'aider (…) parce que des

écoles de 28, 30 élèves forcément ils ne peuvent pas se focaliser sur un seul élève105

».

104

Entretien Ef1 105

Entretien Ef2

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56

Des énergies mobilisées

Les aménagements humains ou matériels ne vont pas de soi contrairement aux

intitulés des textes réglementaires. Des refus de la part de la CDAPH ne sont pas justifiés

selon les familles qui ne comprennent pas toujours les motifs. Les parents font part des

dysfonctionnements. Même quand la CDAPH notifie un aménagement, celui-ci n’est pas

nécessairement appliqué car les organismes décideurs ne sont pas ceux qui recrutent le

personnel ni ceux qui fournissent le matériel. Les familles les plus battantes obtiennent des

aides alors que celles qui sont moins combatives n’en obtiennent pas ou alors les acquièrent

dans des délais extrêmement longs. Certaines familles interrogées, soit les deux cinquièmes

mobilisent des ressources afin d’obtenir des aménagements. Elles vont jusqu’à chercher le

soutien des médias ou des appuis politiques.

« Donc là j'ai fait scandale, je suis allée rencontrer le maire, (…) le conseiller

général, du coup, j'ai écrit au préfet. J'ai fait un article dans la Provence éditions de S et

édition d'A et après j'ai envoyé tout ça en recommandé avec accusé de réception au

rectorat (tape sur la table). Et je leur ai dit maintenant je veux une AVS. Voyez hein avec

les courriers. Je me suis battue, j'ai crié très fort. E a passé les deux derniers mois sans

AVS mais, le jour de la rentrée en septembre il avait son AVS, qu'on a retiré à un autre

enfant je tiens à le dire106

».

Il leur faut déployer beaucoup d’énergie pour faire valoir leurs droits. Les mots

« combat », « lutte », « se battre »… sont couramment employés dans les entretiens. Les

mamans engagent une forte mobilisation, menée en solitaire et ne parviennent pas à se

liguer collectivement. Les situations de handicap sont finalement assez rares en classe,

surtout elles sont éparpillées dans beaucoup d’établissements scolaires. Les parents ne sont

pas nécessairement au courant des situations des autres enfants handicapés et ainsi ils ne

peuvent se rassembler. Nouvelle forme de discrimination : la situation de handicap favorise

l’isolement des familles.

c. Situations sur handicapantes pour les parents

L’isolement des familles

Les enfants en situation de handicap ont souvent un emploi du temps extrêmement

chargé. Ils combinent leur scolarité avec les rééducations en orthophonie, en

106

Entretien Ef1

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Quels leviers pour les IME ?

57

psychomotricité, en kinésithérapie... Selon l'âge et la nature du trouble ils sont suivis par un

psychologue ou un psychiatre. À cela se rajoutent des rendez-vous médicaux auprès de

spécialistes. La famille doit adapter son mode de vie à l'ensemble de ces contraintes qui

parfois ne sont pas conciliables avec un emploi à temps scolaire à plein temps.

« À l'époque je travaillais en collège (…) j'ai eu l'avantage d'être dans l’Éducation

nationale. Un, j'avais les vacances scolaires, et deux, je me suis présentée en disant que

moi j'ai des contraintes tel jour, tel jour, tel jour, et ils m'ont adapté l'emploi du temps en

fonction. (…) J'ai réussi à m'arranger avec ma mère (…). Elle faisait un accompagnement

une fois par semaine. Bon j'ai quand même réussi à jongler107

»

De plus les parents n’ont pas d'autres modes de garde que la famille. Dans certains

cas les familles ne peuvent pas compter sur le soutien des membres de la famille, tantes,

grands-parents… Une des raisons évoquées est l’éloignement géographique ; c’est

probablement la raison la plus acceptable pour les parents. S’intéresser au mode de garde,

au soutien familial et à la relève des aidants, c’est aussi montrer l’isolement relationnel

dans lequel sont plongées les familles d’enfant handicapé. Etre dans une situation

handicapante ne s’adresse pas seulement aux enfants porteurs d’un handicap mais aussi à

l’entourage.

Le sacrifice d’une carrière professionnelle

Les mamans qui travaillent doivent compter sur la bonne volonté de leur employeur

pour avoir des plannings adaptés aux horaires scolaires car l’accessibilité aux centres de

loisirs et autres systèmes de garderie est très compliquée du fait du handicap. Les mamans

en situation d’emploi ne peuvent se libérer constamment et doivent concilier leurs

obligations vis-à-vis de leur employeur avec l’emploi du temps de leur enfant. Alors

certaines dépensent des sommes considérables en mode de garde à domicile. Elles doivent

aussi pouvoir se libérer pour les prises en charge en rééducation et les divers rendez-vous

médicaux. Les familles ne bénéficiant pas du SESSAD ont davantage de contraintes du fait

de l’éclatement des prises en charge ambulatoires.

« Vous savez je suis une maman qui travaille, seule avec un enfant handicapé ; je ne

devrai pas travailler. (…) J'avais des nounous et j'ai payé des fortunes en nounous, en

personne qui me le récupérait d'un endroit à un autre. J'ai payé des fortunes pour ne pas

107

Entretien Ef1

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Quels leviers pour les IME ?

58

perdre mon travail parce que (…) quand on a un enfant handicapé, la place de la maman

c'est à la maison et pas au travail108

».

Des femmes font le choix d’arrêter leur activité professionnelle pour assurer le

quotidien si particulier d’un enfant en situation de handicap qui présente :

- une autonomie très limitée,

- un développement plus lent,

- des apprentissages du quotidien plus long,

- des risques inhérents à sa sécurité plus importants…

Les familles qui semblent le moins souffrir de l’organisation à laquelle il faut se

souscrire quand on a un enfant en situation de handicap, ce sont celles bénéficiant d’une

prise en charge par le service du SESSAD. Elles paraissent subir moins de contraintes.

« En fait les accompagnements pour E c'est l'IME, le SESSAD de P qui avait tout pris

en charge. Moi je m'occupais de rien109

».

Ces familles bénéficiant du SESSAD sont majoritairement, d’après l’enquête, les plus

démunies en matière de ressources économiques et culturelles. Celles en capacité de se

mobiliser ne peuvent compter que sur elles-mêmes et souffrent de ce manque de soutien.

Existe-t-il un lien entre attributions du SESSAD et situations familiales ? Il s’agirait pour

cela d’interroger ou d’assister aux commissions des CDAPH, mais il n’a pas été possible

d’exploiter cette piste.

La question est de savoir s’il faut proposer d’office un SESSAD aux parents d’enfant

handicapé dès lors que l’enfant est scolarisé ? Quelques enseignants se font cette réflexion

sur ce sujet. Il ne s’agirait pas de plonger les familles dans un mode d’assistanat mais plutôt

de se préoccuper de la situation des aidants sur le plan moral et financier. Nous détaillerons

ultérieurement, en troisième partie du mémoire, l’état de la réflexion sur les conditions de

vie des aidants. D’ailleurs elles deviennent une préoccupation des pouvoirs publics : depuis

2010 se déroule la journée nationale des aidants, dont la dernière s’est déroulée le 6 octobre

2014.

La surcharge administrative

Au-delà des complications du quotidien et des séances de rééducation, les parents

108

Entretien Ef5 109

Entretien Ef4

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Quels leviers pour les IME ?

59

doivent faire face à une machine bureaucratique. Une maman se mobilise pour obtenir une

AESH alors que la CDAPH ne lui en avait pas accordée. Une autre se bat pour le

recrutement d’un AESH bien qu’il lui soit accordé. Une autre encore devra se libérer de ses

obligations de travail pour se rendre en équipe de suivi de scolarité. Il existe encore de

nombreux exemples issus des témoignages. Malgré la réforme des MDPH en 2005 il y a

toujours un manque d’informations sur les dispositifs, les droits des personnes, les moyens,

les solutions alternatives. La demande est considérable à ce niveau.

« quand j'ai eu la notification pour la mise en IME, après m'être renseignée sur les

IME, j'ai dit « mais dans quel IME je le place ? », « oh ben ça vous cherchez » je cherche

toute seule ? Vous n’allez pas m'aider ? « Non, non mais vous allez sur le site

internet »110

».

Nous faisons ainsi le constat que les conditions de la gestion du quotidien pour les

familles avec un enfant handicapé sont très compliquées à gérer. Sans exagérer, nous

pouvons parler de situations sur handicapantes. En définitive le parcours inclusif est

finalement compliqué à gérer pour les familles n’ayant pas le soutien d’un SESSAD et les

bénéfices que les enfants en tirent seraient moindre au regard de l’investissement des

parents.

d. Quand l’école ne convient plus

Un choix imposé

Pour l’ensemble des familles, l’annonce du handicap a été un choc. Vient ensuite un

second heurt qui est l’arrêt de la scolarité ordinaire. Il vient marquer un peu plus la

différence par rapport à la normalité. La fin de la scolarité en milieu ordinaire vient

signifier une entrée en milieu spécialisé. L'orientation en IME n'est pas un événement banal

dans le parcours d'un enfant en situation de handicap. Elle occasionne une souffrance

morale pour la famille.

« Le fait d'accepter que son enfant est différent, psychologiquement c'est déjà

compliqué, alors si en plus il faut s’épuiser en allant à droite à gauche, sans compter

l'aspect financier que ça représente… Là je me dis (…) tu as fait ce qui était bien [le

placement en IME]111

»

110

Entretien Ef5 111

Entretien Ef1

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Quels leviers pour les IME ?

60

D’après les témoignages recueillis, les parents qui se rendent compte du mal-être de

l’enfant et de la stagnation des apprentissages envisagent d’eux-mêmes l’orientation en

IME.

« il a fait trois années à la CLIS de P. Ça se passait pas bien il ne faisait pas le

travail. Il souffrait il balançait tout112

».

Le dossier est examiné par la CDAPH qui notifie l’orientation en milieu spécialisé en

précisant les établissements vers lesquels se tourner. L’orientation en IME est une décision

soumise au choix de la famille. Cette dernière peut en effet la refuser. Dans ce cas

précisément le maintien en milieu ordinaire est maintenu à la condition que l’enfant soit

soumis à l’obligation de scolarité entre six et seize ans.

« Si je l’amène à l’IME, peut-être il progresse, peut-être le contraire. Il va faire

d’autre chose qui le rend malheureux. Pourquoi je prends ce risque-là ? Alors je cherche

un établissement où il y a des enfants normaux qui continuent le scolaire (…) mais pas

l’IME113

»

Les familles recherchent la proximité géographique dans la liste des établissements

qui leur sont proposés. Malheureusement les établissements spécialisés sont rarement à

proximité du domicile des parents. Toutefois le choix de l’établissement est un peu tronqué

car le nombre de places vacantes est totalement limité. La liste d'attente en structure vient

imposer une contrainte supplémentaire. Les familles relatent bien cette pression qui génère

des incertitudes dans la prise de décision. Dès qu’une place se libère, les familles la

saisissent. La décision est précipitée, ce qui laisse peu de temps à la réflexion. Alors que la

notification propose des établissements, il n'existe pas véritablement de choix possible,

l'enfant est accueilli là où il y a de la place.

« On a monté le dossier, on a eu l'accord de la MDPH, la notification et j'ai appelé

l'IME de R, qui m'a dit rapidement : « là il y a des places, et c'est maintenant qu'il faut les

prendre » (…) après je ne suis pas allée voir celui de S mais je sais y a beaucoup d'attente,

y a une liste d'attente qui est assez conséquente114

»

112

Entretien Ef3 113

Entretien Ef6 114

Entretien Ef1

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Quels leviers pour les IME ?

61

« J’ai eu beaucoup de mal à avoir l'assistante sociale au téléphone et quand j'ai fini

par l'avoir elle m'a dit « y a deux ans d'attente il n'est pas prioritaire, y a plein de gens sur

la liste » et on a eu la place en faisant intervenir le maire (...). Et c'est dégueulasse mais ça

marche beaucoup comme ça115

»

Malgré la mobilisation des parents il arrive qu'il n'y ait pas de place pour accueillir

l'enfant. Il manque des structures d'accueil notamment pour les enfants souffrant de

troubles du spectre autistique. L’entrée en établissement par le SESSAD est une manière

progressive est certainement plus tolérable de mettre un pied dans une structure d’autant

plus s’il est rattaché à un établissement.

La rationalisation de la décision

La première visite d’un établissement est un choc pour tous les parents. C’est là qu’il

y a une réelle confrontation au handicap. Les parents voient les autres enfants toujours

beaucoup plus handicapés que le leur. Cette première visite est vécue comme douloureuse

et plutôt traumatisante.

« Attendez, moi, la première fois quand je voyais des enfants handicapés (se tient le

ventre) ça m’a fait... je n’étais pas bien. Dans ma tête j'ai dit : je ne peux pas faire

autrement et puis c'est de là que j'ai pris l'habitude. Et j'ai dit à M de ne pas se moquer.

Moi j'aime pas qu'on se moque d’enfants handicapés comme ça116

».

« L’école ça va parce que les enfants ils ont presque le même âge. Mais à l’IME y a

des adultes, presque 18 ans, 20 ans et y en a qui sont malades mentaux aussi. Imagine

quand ils sortent dans la cour, ils sont ensemble, ah non j’ai peur pour mon fils (…) Je

vous dis la vérité, je suis une maman, j’ai 39 ans, j’ai été choquée 117

»

Cette première étape passée, les propos envers l’IME changent. L’IME est vu comme

un lieu d’accueil familial et sécurisant. Les petits effectifs de groupe, la disponibilité du

personnel apparaissent comme un mode d’accompagnement bienveillant. L'IME ne

s’annonce plus comme la fin des acquisitions possibles mais devient propice à l'évolution

de l’enfant. La famille peut « souffler118

», se sent « soulagée119

», elle était au bord de

115

Entretien Ef5 116

Entretien Ef3 117

Entretien Ef6 118

Entretien Ef5 119

Entretien Ef2

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Quels leviers pour les IME ?

62

« l’épuisement120

». Au sein de l’IME tout est pris en charge, les rééducations se font sur

place, le transport du domicile à l’IME est assuré par l’établissement, l’accueil est assuré

durant la moitié des vacances scolaires, les frais de nourriture sont inexistants, il y a une

assistance sociale à disposition pour les démarches administratives etc. La famille peut

alors envisager d’autres projets que celui de s’occuper de l’enfant handicapé. Elle peut se

consacrer davantage à la fratrie. La maman peut avoir des perspectives de carrière

professionnelle.

« Ça c'est goupillé, E est rentré à l'IME, je travaillais pas et puis bon je suis tombée

enceinte et I est arrivée. (…) j'ai un peu soufflé, c'est un temps où j'ai soufflé121

»

« Enfin l'IME m'aide beaucoup quand même, je suis contente de les avoir. Je suis

contente qu'il soit en internat, pour moi c'était primordial, je pouvais plus l'avoir à la

maison à plein temps. Je suis souvent en déplacement et mon mari ne peut pas gérer les

crises de comportement de N. Et du coup je suis très contente, l'IME m'a apporté plein de

choses122

».

Les mamans voient des changements dans le comportement de leur fils ou de leur

fille suite à l’accompagnement en IME. L’enfant paraît plus stable, continue ses

apprentissages et surtout est heureux.

« Il est content de partir, il part avec la banane. Il est content de revenir mais il est

content de partir aussi123

».

Un quart des entretiens relate des critiques sur l’établissement. Les relations entre les

familles et les institutions ne sont pas toutes simples. Il existe des points de divergences.

Nous sommes en droit de nous demander si le manque de place dans les structures a pour

conséquence de modérer la critique. Il y a finalement peu de marge de manœuvre pour les

familles quand elles sont en désaccord avec les décisions institutionnelles. Changer

d’établissements est une procédure longue et c’est aussi prendre le risque de n’avoir pas de

place ailleurs.

120

Entretien Ef1 121

Entretien Ef1 122

Entretien Ef5 123

Entretien Ef1

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63

Ainsi les IME sont considérés comme un lieu de répit pour les familles. Les parents

quand ils obtiennent une place en IME pour leur enfant semblent se convaincre que

l’inclusion scolaire n’était pas une bonne solution. Cherchent-ils à se persuader du

bienfondé de leur choix d’inscrire l’enfant en IME puisque leur enfant a fait la douloureuse

expérience de l’inclusion en milieu ordinaire ? Le milieu scolaire doit encore améliorer son

accompagnement s’il veut encore augmenter les chances de réussite de l’inclusion. Le

dispositif pourrait se rendre plus facilitant surtout pour les parents. Nous sommes

également en droit de nous demander si l’inclusion scolaire pour les enfants handicapés

mentaux est un dispositif adapté malgré les aménagements proposés.

Pour résumer, l’enquête met à jour les principes généraux de l’inclusion. Ils

dépendent du contexte local des dispositifs, du milieu géographique, du type de handicap,

de la personnalité de l’enfant, de la situation socio-économiques des familles, de la

mobilisation des mères, etc. En synthétisant les critères de l’inclusion et les situations

familiales nous pouvons dresser le tableau suivant :

Tableau 5

Famille

nucléaire

(FN)

ou femme

seule (FS)

Ressources

économiques

et culturelles

du foyer

Milieu

urbain

(U)

ou

rural

(R)

Moyen

de

locomotion

A

E

S

H

M

P

A

Formation

de l’

enseignant

Effectif

de

classe

Handicap, troubles

Déficiences

intellectuelles (DI)

Situation

A

FN + R + + + - > 30 DI sans problème

de comportement

Situation

B

FA - R - + + - > 30 DI avec problème

de comportement

En situation A, l’inclusion a toutes les chances de tenir longtemps, alors qu’en

situation B elle est compromise. Une femme seule sans moyen de locomotion vivant à la

campagne verra son enfant handicapé orienté rapidement en IME d’autant plus s’il présente

des problèmes de comportement. S’il y a des difficultés d’apprentissage, il y a parfois des

manifestations comportementales qui se surajoutent au handicap. Comme elles

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64

caractérisent un mal-être, l’enseignant s’en saisit pour montrer les limites de l’inclusion

scolaire. Un comportement incontrôlé ou incontrôlable débouche obligatoirement sur le

secteur spécialisé. Il arrive aussi que ces attitudes se rejouent à la maison, c’est donc à

partir de ces manifestations que les parents s’interrogent sur le maintien en milieu

ordinaire.

3. Des transformations conceptuelles : de l’éducabilité à l’inclusion

Les représentations du handicap évoluent et le regard de la société sur l’Autre dans sa

différence se modifie. Les façons, dont les individus d’une société pensent les problèmes

liés au handicap, changent. Les progrès dans l’intervention sociale auprès du handicap

montrent les transformations en profondeur des actions sociales. Aborder la

désinstitutionalisation sous l’angle des héritages historiques permet d’ouvrir la réflexion

sur l’évolution des modes de prise en charge et d’accompagnement du handicap, tout

comme les positions européennes en faveur de la promotion des droits des personnes

handicapées dont l’enjeu est de faire valoir les droits à la participation de chaque enfant à

une scolarité ordinaire.

3.1 Une approche de la désinstitutionalisation

Manière de préciser les propos, pour évoquer la désinstitutionalisation, il faut avant

toute chose définir ce que sont une institution et ses évolutions. L’institution comme

établissement a évolué pour donner le système actuel. Il est entendu par institution, un

établissement, une structure médico-éducative, un ensemble de services

d’accompagnement d’enfants et d’adolescents en situation de handicap. L’établissement

propose des interventions entre les murs d’une structure et se distingue des services d’aides

à domicile. Quelques initiatives proposent des actions éducatives « hors murs » mais elles

restent exceptionnelles.

a. Définir l’institution

Au mot « institution » correspondent deux définitions. La première définition fait état

d'une « norme ou pratique socialement sanctionnée, qui a valeur officielle, légale ;

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65

organisme visant à les maintenir : L’O.N.U est une institution internationale124

» ou

« ensemble des structures politiques et sociales établies par la loi ou la coutume et qui

régissent un État donné125

». L'autre définition détermine un « organisme public ou privé,

régime légal ou social, établi pour répondre à quelque besoin déterminé d'une société

donnée126

» auquel est attribué le synonyme « établissement ».

En France le terme « institution » fait référence à l’État, la famille, l'école,

l’Éducation nationale... dont le cadre fonctionnel d’existence est défini par des lois.

L'institutionnalisation est un processus qui permet de formaliser, de pérenniser et

d’accepter un système de relation sociale. Ce sont des comportements sociaux, réguliers et

reproductibles qui caractérisent l'institution et « permettent de résoudre les problèmes

d'action collective127

».

Alors il s'agit de s'entendre sur la définition d'institution. Elle peut se circonscrire

comme un système d'organisation et cette dernière définition convient au sujet qui nous

préoccupe. Tout au long de cet écrit, nous entendrons par « institution » ce qui fait

référence à un établissement, un système organisé et légiféré. Il ne se réduit pas à un lieu

physique, temporel où se déroule une activité organisée. C’est un site collectif permettant le

lien social et les relations sociales. Il facilite le rééquilibrage des désavantages et la

compensation du handicap. L’institut dispense des accompagnements sur le plan psychique,

physique et social grâce aux interventions pluridisciplinaires.

b. Évolution des instituts dans l’histoire

De l’enfermement à la notion éducabilité

Les Frères de la Merci ont ouvert la première institution spécialisée sous le nom de

« asile » en 1400. Elle était destinée aux mendiants, vagabonds et aux aliénés qui étaient

enfermés pour ne pas déranger l'ordre social. La notion de soin n'existait pas, ni celle de

différenciation des besoins. Grâce au regroupement des notables et des religieux, les

institutions spécialisées vont se développer au cours du XIIe

et XIIIe. Ces « Hôtels-dieu »

avaient pour vocation d'accueillir toutes personnes aliénées.

124

http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais, consulté le 12 avril 2014 125

http://www.cnrtl.fr/definition/institution, consulté le 15 avril 2015 126

http://www.cnrtl.fr/definition/institution, consulté le 15 avril 2015 127

SMYRL M., « Politics et policy dans les approches américaines des politiques publiques : effet

institutionnel et dynamique du changement », Revue Française de Science Politique, n°1, février 2002, pp

37-52

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66

La première institution spécialisée pour les enfants ouvre beaucoup plus tard au

XVIIe. Toujours de la compétence de l'église, sa mission avait pour prérogative, l’accueil

des enfants abandonnés et ceux qui étaient « différents ».

Après la Révolution Française, émerge les notions de soin et d'éducation. Les

établissements spécialisés ont commencé à proposer des moyens pour développer

l’éducabilité. Par exemple l'Abbé l'Épée a développé une méthode pour éduquer les sourds,

Valentin Haüy se consacre aux aveugles, Edouard Seguin s’intéresse aux arriérés128

... La

science et la médecine se préoccupent dès lors de ces enfants « différents » et façonnent des

méthodes d'éducation. La rééducation et l’éducation ne se concevaient qu’en étant séparée

de la famille, loin de la sphère publique. D’ailleurs les instituts étaient implantés loin du

regard, dans des sites excentrés des centres urbains pour la plupart.

Au XIXe, la société commence à prendre conscience qu'il n'y a pas de faute morale à

l’aliénation, mais plutôt une irresponsabilité mentale. L'institution est vécue comme un lieu

permettant un enseignement et une éducation pour favoriser l’évolution des enfants dits

« arriérés ». Le premier institut médico-pédagogique129

(IMP) est fondé par Désiré

Magloire Bourneville en 1893 dans la région parisienne, isolés de la vie publique. Il mettait

en place des prises en charge et des traitements s'adressant à des enfants affectés d'une

déficience intellectuelle et lutte pour la scolarisation des enfants inadaptés.

L’essor des établissements spécialisés

Avec la loi de Jules Ferry rendant l'école obligatoire, émerge le problème de la

scolarisation des enfants en difficultés. Alors que la scolarisation des enfants devient un

droit, celle des handicapés préoccupe encore peu. L’école publique est alors en rivalité avec

les écoles privées confessionnelles pour qui les élèves en difficulté nuisent à son image.

Ainsi les établissements scolaires publics ont pris l’engagement de proposer des classes de

perfectionnement en 1909. Pour ces derniers, l’enseignement est couvert par un enseignant

spécialisé. L'école commence à accepter les enfants présentant une déficience. Á peine trois

cents classes se sont ouvertes et elles n’ont pu couvrir l’ensemble des besoins. Parce que

quelques enfants étaient trop déficients, d’après l’ouvrage de Gérard Zribi et Jean-tristan

128

DE SEZE C., « Structure de prise en charge/MDPH. Dépistage précoce du handicap »,

http://www.udsmed.ustrasb.fr, consulté le 16 juillet 2014 129

DAGOT F., « Approche historique du concept de handicap », http://www.persee.fr, consulté le 10

décembre 2013

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Quels leviers pour les IME ?

67

Richard130

, pour accéder aux classes de perfectionnement il a fallu mobiliser d’autres

leviers.

En se regroupant par association, les parents d’enfants handicapés ont contribué après

la Seconde Guerre mondiale, à la construction et au développement des institutions sur

l'ensemble du territoire comme « une alternative à la relégation sociale ou à la

psychiatrisation des enfants souffrant de déficience131

». Pour Roland Janvier132

, ce

rassemblement collectif a permis de transformer l’énergie individuelle en énergie collective

pour lutter contre la loi du plus fort.

Progressivement, à partir de l’initiative associative et avec le soutien des pouvoirs

publics, va s’institutionnaliser une éducation spéciale. Les IMP se développent pour les

enfants déficients, âgés de moins de douze ans, les instituts médico-professionnels (IMPro)

et les centres d'aide par le travail (CAT) sont des lieux d'accueil pour « permettre

l'éducation, la scolarisation, l'emploi que la société, les parents ne peuvent pas donner133

».

Le gouvernement édite les décrets du 9 mars 1956134

, définissant les agréments et les

financements des établissements. Par la suite les IMP et IMPro vont se regrouper en IME

dès 1970, s’inspirant d'un modèle européen, pour un accueil plus large, plus diversifié et

intégratif. Ce type d’accueil d’après Gérard Zribi et Jean-tristan Richard135

trouve son

modèle aux Pays Bas.

En même temps François Bloch-Lainé, remet un rapport au Premier ministre intitulé

"Etude du problème général de l’inadaptation des personnes handicapées" en 1967 qui

ouvre la voie au texte d’orientation de 1975. Deux lois, éditées en 1975136

réforment le

système social, l’une sur les droits des personnes handicapées, l’autre sur le cadre juridique

des établissements. Ces dernières réglementent les conditions de création, de financement,

de formation et de statut du personnel des établissements et services du secteur. Le système

d'intervention découpe les problèmes sociaux en catégorie de public selon des logiques

130

ZRIBI G. et RICHARD J-T., (2013), Polyhandicaps et handicaps graves à expression multiple, concepts,

prises en charge, accompagnement, solutions, Presses de L'EHEPS, Rennes, 196 p 131

GABERAN P., « IME : à nouveau public, nouvelles méthodes », Lien Social, n°914, 29 janvier 2009, pp

10-16 132

JANVIER R., « désinstitutionalisation danger ou opportunité », http://www.rolandjanvier.org, consulté le

17 mars 2014 133

STIKER H.-J., (2009), Les métamorphoses du handicap de 1970 à nos jours, soi-même avec les autres,

Presses Universitaires de Grenoble, Grenoble, 262 p 134

Décret n°56-284 du 9 mars 1956 complétant le décret n° 46-1834 du 20 août 1946 modifié fixant les

conditions d’autorisation des établissements privés de cure et de prévention pour les soins aux assurés

sociaux 135

ZRIBI G. et RICHARD J-T., (2013), Polyhandicaps et handicaps graves à expression multiple, concepts,

prises en charge, accompagnement, solutions, Presses de L'EHEPS, Rennes, 196 p 136

Loi n° 75-534 du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées

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Quels leviers pour les IME ?

68

verticales, catégorielles et sectorielles. Il en découle des logiques de filières et des

établissements spécifiques, réglementés par des normes définies. Á la catégorie de

handicap est proposé un groupe de professionnels, de locaux ou d'équipement, un ratio

d'encadrement etc. Les mots-clés du système d'organisation se définissent par :

professionnalisation, spécificité, catégorie et cloisonnement.

Développement de projets intégratifs

Les lois de 75-534 du 30 juin 1975 définissent des droits fondamentaux dont le droit à

l’intégration scolaire et sociale pour les personnes handicapées. Elles fixent l’obligation

éducative pour les enfants et adolescents handicapés, en priorité en établissements scolaires

ordinaires et si nécessaire en centres spécifiques d’éducation. Elles préconisent le maintien

et l’accès aux personnes handicapées, chaque fois que possible, dans un cadre ordinaire de

travail et de vie. Les circulaires sur l’intégration s’enchaînent alors 1976, 1982, 1983, 1989,

1991. Elles déclinent sur tous les tons le principe selon lequel, il faut maintenir le jeune

avec un handicap à l’école ordinaire.

Les annexes XXIV introduisent la notion de prise en charge globale qui apparaît dans

les années 80 visant à optimiser l'intégration dans les différents domaines de la vie, de la

formation générale et professionnelle. La notion de parcours intervient à partir de ces

nouvelles dispositions. En même temps il est accordé plus de place aux familles

s’inscrivant comme un partenaire de la prise en charge. Pierre Savignat137

souligne que les

droits des familles sont réévalués et offrent aux parents les moyens de participer aux

décisions. Apparaîssent dès lors les notions de projet : projet personnalisé ou individualisé

et projet d'établissement.

À partir des années 90, la question sociale porte sur la participation des bénéficiaires

de l'aide sociale. De nouvelles politiques sociales s'orientent vers des mesures de non-

discrimination et de compensation des désavantages. L’action sociale se rénove. La

politique de réduction des coûts et l'allongement de la durée de vie nécessitent de concevoir

autrement les équipements138

. Les liens sociaux sont réévalués et transformés. C’est dans

ce contexte que la réforme de l’action sociale impose les grands principes législatifs de la

137

SAVIGNAT P. (2012), L'action sociale a-t-elle encore un avenir ? , Dunod, Paris, 215 p 138

GRENIER C. et LABOREL B., (2011), Les MDPH (Maisons Départementales des Personnes

Handicapées) : une organisation innovante dans le champ médico-social ? , Erès, Toulouse, 157 p

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Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

69

loi de 2002139

, garantissant les droits des usagers et promouvant l'innovation, la

planification et l'évaluation des dispositifs sociaux et médico-sociaux. L’extrait de la

synthèse concernant la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 prévoit :

« Affirmer et promouvoir les droits des usagers et leur entourage par la mise en place

du livret d'accueil, de la charte des droits et libertés, du contrat de séjour, d'un conciliateur

ou médiateur, d'un règlement de fonctionnement de l'établissement, d'un projet

d'établissements ou de service et d'un conseil de la vie sociale.

- Diversifier les missions et les offres en adaptant les structures aux besoins en

prenant en compte les évolutions depuis vingt ans des contenus des actions. La tarification

se voit annuelle et modulable selon les difficultés du public rencontré.

- Améliorer les dispositifs de pilotage afin de mieux articuler planification,

programmation, allocation de ressources pour une meilleure évaluation des besoins à

l’échelle régionale.

- Instaurer une coordination entre les différents acteurs en mettant en place des

référentiels d'évaluation pour garantir la continuité des prises en charge déjà engagées ».

Cette loi fait adopter les règles qui encadrent les établissements et les services, mais

selon Pierre Savignat140

, les objectifs seraient de réduire les dépenses sociales et de

maîtriser l'offre de l'action sociale qui ne cesse de croître depuis la fin des années 70. Pour

d’autres raisons, cette législation serait une réponse aux problématiques référencées. Selon

le point de vue de Johan Priou141

les établissements ne permettraient pas aux individus de

s’exprimer pleinement en tant que sujet. Pour Pierre Savignat142

et Gerard Zribi143

, cette loi

permet aux établissements de s’engager dans un rapprochement du sanitaire et du médico-

social pour éviter les ruptures de parcours des personnes en situation de handicap.

Afin d’aller encore plus loin dans les réformes, les lois du 11février 2005144

et la loi

HPST de 2009145

définissent un cadre de coordination entre tous les acteurs sociaux pour

une meilleure cohérence des projets, des investissements et pour une meilleure réponse aux

139

Loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale 140

SAVIGNAT P., (2012), L'action sociale a-t-elle encore un avenir ? , Dunod, Paris, 215 p 141

PRIOU J., (2007), Les nouveaux enjeux des politiques d'action sociale et médico-sociale : projet de vie et

participation sociale, Dunod, Paris, 326 p 142

SAVIGNAT P., (2012), L'action sociale a-t-elle encore un avenir ? , Dunod, Paris, 215 p 143

ZRIBI G. et RICHARD J-T., (2013), Polyhandicaps et handicaps graves à expression multiple, concepts,

prises en charge, accompagnement, solutions, Presses de L'EHEPS, Rennes, 196 p 144

Loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale 145

Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux

territoires

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Quels leviers pour les IME ?

70

besoins. Ces dernières lois modernisent les lois de 75 et renouvellent en profondeur des

modes d'accueil et d'accompagnement des personnes en situation de handicap qui tend vers

un accompagnement plus global du sujet avec une plus grande accessibilité aux dispositifs

de droit commun.

c. La naissance des politiques d’accessibilité

Accéder au droit commun signifie faire valoir ses droits comme tout a chacun :

scolarité, formation emploi… et sortir de l’établissement spécialisé. Au départ la

désinstitutionalisation est un terme désignant un processus. Émergente dans les années 60,

elle s’amplifie aujourd’hui sous l’effet conjugué de plusieurs facteurs :

-les mouvements d’empowerment faisant de l’usager un acteur à part entière auquel

l’institution s’adapte et répond en proposant un parcours personnalisé,

-les logiques de réseaux qui s’entremêlent (territoire, bassins d’emploi,

reconfiguration des collectivités…)

-les évolutions des politiques publiques (directives européennes pour l’inclusion), les

contraintes de la commande publique et les restrictions budgétaires.

L'empowerment

À l'origine, la désinstitutionalisation est un mouvement humanitaire apparu dans les

années 60 qui trouve sa source dans un mouvement aux États Unis intitulé « independant

living146

». Il repose sur trois principes : l'autodétermination, l'expertise de la personne

handicapée et l'autogestion des centres de ressources. Ce mouvement dépasse l'approche

individuelle et pathologique du handicap pour devenir comme certains auteurs l’énoncent

« un construit social et collectif147

».

Ainsi du point de vue de Roland Janvier148

, les politiques d'action sociale évoluent

vers des principes qui visent à tenir compte des besoins en plaçant les usagers comme

acteur du fonctionnement démocratique, comme détenteur de savoir-faire et comme

contribuant à la société solidaire. Ce « processus par lequel un individu ou un groupe

146

DORVIL H. et UTTMAN H., « 35 ans de désinstitutionalisation au Québec 1962-1996 », les défis de la

reconfiguration des services de santé mentale, avril 1999, pp. 106-173 147

BOUCHER N., « Handicap, recherche et changement social. L'émergence du paradigme émancipatoire

dans l'étude de l'exclusion sociale des personnes handicapées », lien social et politique, n° 50, automne 2003,

pp 147-164 148

JANVIER R., « désinstitutionalisation danger ou opportunité », http://www.rolandjanvier.org, consulté le

17 mars 2014

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Quels leviers pour les IME ?

71

acquiert les moyens de renforcer sa capacité d'action, de s'émanciper149

» désigne

l'empowerment. C’est un terme anglais intraduisible en français. L'empowerment vise à

assurer l'autonomie, le libre choix et l'émancipation des acteurs dans leur lieu de vie. Il

repose sur des logiques solidaires comme « ADT quart monde, travail collaboratif,

apprentissage en ligne, Do it yourself150

». L'idée est donc de faire par soi-même pour soi-

même. D’après le rapport « institution, désinstitutionalisation151

», il s'agit d'une démarche

de développement de l'autonomie et de l'indépendance. Cette conduite est destinée à aider

les personnes à gagner le contrôle de leur vie comme tous citoyens. Il est alors primordial

que l'accessibilité soit possible pour tous, dans l’ensemble des domaines : le travail, la

formation, l'habitat, les transports, la culture, les administrations, les lieux publics etc.

L’ensemble de ces mesures a pour objectifs de valoriser l'intégration sociale. Comme le

préconise Jean-René Loubat152

, la société doit moduler ses conditions de vie pour être

accessible à tout le monde pour « vivre ensemble ».

C’est une véritable transformation du lien social. Ce projet de société est très noble,

mais c’est sans compter sur la conjoncture économique dans la période que nous

connaissons.

Le mouvement de réduction des coûts

Depuis le milieu des années 70 il existe des circonstances démographiques et

économiques particulières :

- La crise du travail et du plein-emploi implique la paupérisation de la population et

engendre des dégâts sociaux. Les prélèvements sur la base du travail s’amenuisent alors

qu’en même temps la demande de prestations s’accroît. Cette crise se ressent d’autant plus

au sein de l'emploi des personnes en situation de handicap.

- Le vieillissement de la population, du fait des progrès de la médecine, suscite une

amélioration de la durée de vie mais une plus forte population d'invalides. La population

handicapée rencontre le phénomène de manière identique d’où l’émergence de la

problématique du vieillissement de la population handicapée.

- Les transformations des formes de la famille, les changements de relations

149

JOUVE B., « Politique publique et empowerment l'exception française », Economie et Humanisme,

n°379, décembre 2006, pp 99-101 150

https://fr.wikipedia.org/, consulté le 31 mars 2014 151

Institution, désinstitutionalisation, (2008), Conseil français des personnes handicapées, 53 p. 152

LOUBAT J.-R., (2007), Promouvoir la relation de service en action sociale et médico-sociale, 2e édition,

Dunod, Paris, 360 p

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Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

72

sociales etc.

Dans le rapport « 35 ans de désinstitutionalisation au Québec 1962-1996153

» il est

écrit que la crise financière a entraîné un mouvement visant à réduire les coûts et à

coordonner les services dans le secteur de la santé. Cette logique de diminution des

dépenses est aussi constatée par Yves Lecomte154

qui situe une accélération du processus

vers 1985 au Québec.

Dans ce contexte les situations sociales deviennent difficiles aussi en France. Les

prélèvements ne sont plus suffisants. L'équilibre entre les contributions et les demandes

sociales ne se fait plus. Les dispositifs entrent dans une logique économique. Par exemple

Michel Paquet155

décrit une expérience de dispositif d'appartements partagés, suivis par une

équipe d'accompagnement avec éducateurs, AMP, psychomotricien, infirmière... dont le

coût serait évalué à 50 000 € la place par an, alors que pour un dispositif traditionnel le coût

s’élèverait à plus de 57 000 € en moyenne156

. De fait les organisations subissent des

contraintes financières. Et pour Gérard Zribi et Jean Tristan Richard157

cette conjoncture

ralentit la création de places en établissement. Les coûts se réduisent en santé publique pour

être transférés aux associations privées. Elles aussi sont davantage soumises aux lois du

marché et sont confrontés à la concurrence en répondant aux appels à projet proposé par les

ARS, l’union inter-régionale interfédérale des organismes privés non lucratifs sanitaires et

sociaux (URIOPSS), les fonds européens... Ainsi tous les EMS ont intérêt à innover pour

relancer des activités porteuses, en répondant aux projets financés.

L’étude sur les MDPH de Corinne Grenier et Bernard Laborel158

démontre

qu’aujourd’hui il devient nécessaire de concevoir autrement les prises en charge par les

établissements. Le mouvement de désinstitutionalisation est l’occasion de réduire les coûts

153

DORVIL H. et UTTMAN H., « 35 ans de désinstitutionalisation au Québec 1962-1996 », les défis de la

reconfiguration des services de santé mentale, avril 1999, pp. 106-173 154

LECOMTE Y., « La dynamique de politique de désinstitutionalisation au Québec », Santé mentale au

Québec, volume XXII, n°2, 1997, pp 7-24 155

PAQUET M., « Etablissement et services : La France à la recherche d'un modèle de

désinstitutionalisation », Décryptage, n° 2823, 20 septembre 2013, pp 24-27 156

Pratiques territoriales des SESSAD en région PACA : le poids des héritages, (2012), CREAI PACA et

Corse, 66p. 157

ZRIBI G. et RICHARD J-T., (2013), Polyhandicaps et handicaps graves à expression multiple, concepts,

prises en charge, accompagnement, solutions, Presses de L'EHEPS, Rennes, 196 p 158

GRENIER C. et LABOREL B., (2011), Les MDPH (Maisons Départementales des Personnes

Handicapées) : une organisation innovante dans le champ médico-social ?, Erès, Toulouse, 157 p

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Quels leviers pour les IME ?

73

de l’aide sociale. Ainsi sous le prétexte d’un mouvement émancipatoire, il y a une volonté

économique de diminuer la part de l’État dans la redistribution des prestations et de l’offre

de service du médico-social.

Première vague de désinstitutionalisation en psychiatrie

La désinstitutionalisation a démarré en France à partir des années 60 au cœur du

système psychiatrique dont nous tirons la définition suivante : « ensemble de mesures

visant à supprimer les grandes institutions asilaires fermées du passé (…) au profit

d'institutions alternatives légères, intracommunautaires, associées à de petites unités

hospitalières largement ouvertes, et de soins ambulatoires en centre médico-psychologique

ou à domicile159

».

Des mouvements de protestations s'opposent à la psychiatrie institutionnelle. Elle est

vivement critiquée sur ses méthodes de soin, ses médications et ses rapports

soignant/soigné... Dans le rapport « 35 ans de désinstitutionalisation au Québec 1962-

1996 »160

, la désinstitutionalisation du secteur psychiatrique se réalise par une diminution

des hospitalisations et de l'institutionnalisation. Elle se traduit par une augmentation du

taux de sortie de l'asile et une diminution du nombre d'admissions dans les hôpitaux

psychiatriques. S’appuyant sur les mêmes principes, la France crée en concomitance des

services décentralisés comme le centre médico psycho-pédagogique (CMPP) légiféré par le

décret n° 66-146 du 18 février 1963.

La désinstitutionalisation des années 90 a annoncé la fermeture de lits en psychiatrie.

L'institution psychiatrique devient le lieu d'orientation vers des services extrahospitaliers

mais reste un lieu d'accueil pour les personnes souffrant de troubles massifs. Selon Marcel

Jaeger161

la transformation de la psychiatrie publique oriente les patients vers des structures

sociales et médico-sociales et d’une certaine manière réduit les coûts de la santé. Ce virage

ambulatoire, doit-il réduire au strict minimum les équipements dans la cité ?

En marche vers la désinstitutionalisation

Le champ de la psychiatrie a dressé le chemin de la rénovation par la

159

http://www.psychologies.com, consulté le 30 mars 2014 160

DORVIL H. ; UTTMAN H., « 35 ans de désinstitutionalisation au Québec 1962-1996 », les défis de la

reconfiguration des services de santé mentale, avril 1999, pp. 106-173 161

JAEGER M., « Psychiatrie Versus médico-social : Comment sortir des logiques de territoires ? », santé

mentale au Québec, volume XXX, n°1, 2005, pp 83-95

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Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

74

désinstitutionalisation. Certains auteurs critiquent l’institution. Ainsi Johan Priou162

souligne que les institutions sont trop isolées et peu ouvertes sur la société. Un autre auteur

comme Michel Paquet163

met en avant aussi une critique de l'institutionnalisation, qui serait

un processus global, coûteux et sur handicapant. Des études frappantes font également la

plaidoirie de la désinstitutionalisation. Une étude commandée par la Commission

européenne révèle que plus l'établissement est grand moins l'usager a de chance de faire

valoir sa participation et son inclusion dans la société. Ensuite il apparaît que chez les

enfants, l'institution provoquerait une mauvaise santé physique, un retard de

développement et un handicap supplémentaire ainsi que des dommages psychologiques.

Toujours dans ce même rapport, il est stipulé que le coût moyen pendant une semaine en

institution est 12,5 fois plus élevé qu'en famille. Par exemple, en Angleterre, un enfant

handicapé scolarisé en école spécialisée coûte quatre164

fois plus cher que s’il était scolarisé

en milieu ordinaire. Si l’institution s’avère nuisible, onéreuse et peu efficace, la

désinstitutionalisation s’avère nécessaire.

C’est entre autres pour ces raisons que la désinstitutionalisation commence à

s’appliquer dans d’autres secteurs comme celui du médico-social et de l’Éducation

nationale. François Dubet165

annonce le déclin des établissements sous leur forme actuelle

c’est-à-dire la fin des institutions traditionnelles. En revanche il ne soutient pas l’hypothèse

de la disparition des établissements. La désinstitutionalisation dont il est question dans les

textes internationaux, notamment au niveau européen, doit être perçue comme une

évolution du programme institutionnel. Le défi aujourd'hui serait de renouveler, de changer

le modèle, de s'adapter. Pour cet auteur, l'innovation passe par la construction de

« cluster166

», c'est-à-dire un regroupement, un partenariat afin de favoriser les échanges et

limiter les coûts. L'institution selon Roland Janvier167

doit refonder une nouvelle

organisation au service d'un projet de société. Il devient utile alors de créer et développer

162

PRIOU J., (2007), Les nouveaux enjeux des politiques d'action sociale et médico-sociale : projet de vie et

participation sociale, Dunod, Paris, 326 p 163

PAQUET M., « Établissement et services : La France à la recherche d'un modèle de

désinstitutionalisation », Décryptage, n° 2823, 6 septembre 2013, pp 24-27 164

ARMSTRONG F., « Intégration ou inclusion ? L'évolution de l'éducation spéciale en Angleterre. Une

étude de cas », Revue Française de pédagogie, n°134, janvier-février-mars 2001, pp 87-96 165

DUBET F., (2002), Le déclin de l'institution, Seuil, Paris, 421 p 166

Cluster : pôle de compétitivité où s’accumulent des savoir-faire dans un domaine technique. 167

JANVIER R., « désinstitutionalisation danger ou opportunité », http://www.rolandjanvier.org, consulté le

17 mars 2014

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75

d’autres systèmes d’accompagnement.

Valoriser la place des personnes handicapées comme consommateurs de prestations et

de services de proximité sont un des enjeux de la désinstitutionalisation. Il s'agit d'une

transformation du modèle organisationnel qui passe de l'équipement au service. « Le

développement de la polyvalence de réseau est déjà mis en place pour les personnes

âgées168

». Le recourt à des services privés pourrait éventuellement se réaliser en France

comme c’est déjà le cas dans certains pays de la communauté européenne. Un entretien

auprès d’un travailleur social de Finlande relate que dans une société inclusive, comme

c’est le cas dans son pays, les services sociaux sont de la compétence de la municipalité et

« si la ville n'a pas les capacités, elle achète les services d'un institut privé. Mais c’est la

ville qui doit organiser ces services169

».

Le processus de désinstitutionalisation évolue au gré des variables culturelles,

démographiques, politiques et économiques. Il vise à toucher les interventions sociales et à

rendre les personnes handicapées acteurs de leur parcours de vie.

3.2 La dynamique européenne

a. Les recommandations de l’Europe

Le Conseil de l’Europe influence les politiques sociales des pays communautaires. En

date du 3 février 2010, il a déclaré que « sauf circonstances exceptionnelles, aucun enfant

ne devrait être placé en institution ». Pourtant en Europe, un peu plus d’un million170

d’enfants et d'adultes handicapés vivent en établissement de long séjour dont un quart a un

handicap mental et les trois quarts ont une maladie mentale. En France le nombre de

placements en institution augmenterait d’après ce rapport pourtant le nombre de places

disponibles reste constant et les listes d’attente croissent.

Les recommandations de la Commission européenne insistent sur la transformation

du système résidentiel. Il y aurait 150 000 enfants171

dans l'Union Européenne placés en

établissements résidentiels. Dans ce rapport sont considérés comme établissements, les

écoles spécialisées, les pouponnières, les foyers pour handicapés mentaux, handicapés

physiques, ceux porteurs de troubles du comportement, les foyers pour délinquants ainsi

168

Entretien exploratoire auprès d'un directeur d'IME 169

Ep8, travailleur social finlandais 170

Rapport du groupe d'expert ad hoc sur la transition des soins en institution aux soins de proximité,

(2009), Commission européenne, 26 p. 171

Ibid

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Quels leviers pour les IME ?

76

que les foyers de convalescence. Cette forme de résidence est observable surtout dans les

pays occidentaux de l'Europe, alors que dans sa partie orientale et centrale le mode de

résidence des publics handicapés se déroule plus chez les parents. Notant une disparité

entre les États membres en ce qui concerne les conditions d'accueil des personnes

handicapées et afin de rendre égalitaire la prise en charge des personnes vulnérables, le

Conseil de l’Europe préconise la désinstitutionalisation s’inspirant de la charte des droits

fondamentaux de l'Union Européenne qui respecte les traités internationaux relatifs aux

droits de l'Homme. Avant d’être ratifiés par les parlements nationaux, les traités ont été

approuvés par :

- CEDH (convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés

fondamentales)

- CPT (convention européenne de sauvegarde pour la prévention de la torture et des

peines ou traitements inhumains ou dégradants)

- PIDCP (pacte international relatif aux droits civils et politiques)

- CDE (convention des droits de l'enfant)

- CERD (convention internationale sur l'élimination de toute forme de

discrimination raciale)

- CDPH (convention des droits des personnes handicapées)

Le Conseil de l’Europe qui se réunit quatre fois par an fixe les grands actes politiques

de l'Union. Alors le comité des ministres recommande aux 47 États membres de substituer

des services de proximité au placement en institution dans un délai raisonnable172

. Malgré

ces recommandations, tous les États membres n'en sont pas au même point dans le

processus. En vue de rallier au principe de désinstitutionalisation et de soutenir les

transformations, la déclaration du groupe européen d'experts sur la transition des

institutions vers les services à base communautaire, stipule en date du 4 février 2014, que

l'Union européenne s'engage à mettre en œuvre des fonds structurels et d'investissements

dans les sept années prochaines. Ces aides financières servent à développer des alternatives

à l’accueil résidentiel. Même si l'Europe peut financer les transformations des institutions,

la régulation des dispositifs ne fait pas partie de ses compétences.

172

www.coface-eu.org,consulté le 21 mars 2014

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Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

77

La France a été critiquée dans sa manière d’accompagner les usagers des

établissements par le Conseil de l’Europe des États membres sur la question de la

désinstitutionalisation. De plus, la commission régionale handicap, qui s’est réunie le 15

avril 2011, a évoqué que l’Etat français semble se complaire dans une sorte

d’autosatisfaction des avancées du dispositif législatif en référence à la loi 2005-102. Ainsi

que le préconise Michel Paquet173

, les structures en tant que lieu d'accueil à grands effectifs

devraient se modifier en montage de micro-structures coordonnées entre elles et proposer

en même temps des dispositifs de services de proximité. D’après le conseil français des

personnes handicapées les lieux résidentiels deviendraient des « services sociaux d’intérêt

général174

» qui s’adressent, dans le secteur médico-social, au public en manque

d'autonomie et aux exclus et contribue à la réduction des inégalités sociales et économiques

par l'affirmation des droits et l'amélioration des conditions de vie.

La désinstitutionalisation réforme l’organisation du passé qui ne correspond plus à

notre époque. Elle remet en cause l'action sociale des établissements, son utilité, son

intérêt, ses performances et ses démarches inclusives. Elle occasionne des transformations

des organisations modifiant ainsi les pratiques. L’établissement ne fait plus à la place de…

mais est garant du projet de l’usager et c’est la famille qui garantit l’éducation de son

enfant en situation de handicap. Grâce aux démarches participatives des familles et à

l'accessibilité universelle en cours, vont se développer des forces positives valorisant

l'intégration sociale.

b. Conséquences sur les interventions sociales en France

Les politiques d'action sociale en faveur de la désinstitutionalisation s'inspirent de

deux systèmes différents, l'un d'origine germano-latin et l'autre d'origine anglo-saxon et

scandinave. Le premier système germano-latin, il est construit sur des logiques d'assistanat

et de solidarité auxquelles les associations de parents sont encore très attachées. Pour

l’instant le modèle français correspond à cette logique. Quant au second système, il tend à

fermer tous les établissements et à appliquer la théorie de la solvabilisation c'est-à-dire à

fournir les moyens d'effectuer les paiements des prestations proposées. Cette politique

173

PAQUET M., « Établissement et services : La France à la recherche d'un modèle de

désinstitutionalisation », Décryptage, n° 2823, 6 septembre 2013, pp 24-27 174

Institution, désinstitutionalisation, (2008), Conseil français des personnes handicapées, 53 p.

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Quels leviers pour les IME ?

78

s'accompagne d'un fort élan de décentralisation des politiques du handicap. Une plus

grande autonomie est accordée aux échelons locaux vis-à-vis du pouvoir central réalisant

l’inflexion des dépenses budgétaires. Ce modèle aurait quand même tendance à s'étendre en

Europe.

En conséquence de quoi, les enjeux des politiques d'action sociale reposent sur des

principes qui visent à tenir compte des besoins en plaçant les usagers comme acteur d'un

fonctionnement démocratique, comme détenteur de savoir-faire, et contribuant à la société

solidaire. Les personnes handicapées se positionnent en tant que bénéficiaires de

prestations et en consommateur de services de proximité qui s’apparentent à des services

ambulatoires. Ces enjeux ambitionnent l'idée d'aider les personnes à gagner le contrôle de

leur vie comme tous citoyens. Les bénéficiaires des services de proximité préfèrent vivre

en société car ils rencontrent moins de problèmes liés à l'insécurité et à la solitude et en

général les services à domicile offrent une meilleure qualité de vie surtout pour les

enfants175

. L’accroissement des services de type SESSAD vient soutenir cette tendance

comme le prouve le tableau ci-dessous.

Tableau 6

175

Rapport du groupe d'expert ad hoc sur la transition des soins en institution aux soins de proximité,

(2009), Commission européenne, 26 p.

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Quels leviers pour les IME ?

79

Les effets de la désinstitutionalisation sur les IME, impliquent de s'engager dans une

« logique réticulaire »176

, un modèle hybride conçu d'établissements mais aussi de services

à domicile. Il s'agit de transformer le modèle organisationnel qui propose de l'équipement

en prestations de services. Cette transformation requiert une condition inéluctable selon

laquelle la société doit être plus inclusive. Si l’accessibilité devient réelle dans les

dispositifs de droit commun, alors les services de proximité peuvent davantage se

développer. Or aujourd’hui notre société n’est pas encore totalement inclusive.

3.3 Les défis de l’inclusion scolaire

Alors que dans le système éducatif, les jeunes handicapés bénéficient d’un secteur

spécialisé, à présent l’inclusion dans le droit commun vise tous les enfants. La loi du 11

février 2005 tente de faire décoller la politique d’intégration pourtant déjà suggérée par les

lois de 75 et traduisant l’idée d’une justice sociale. L’inclusion a un sens beaucoup plus

large que l’intégration ce qui implique des changements culturels. En se basant sur les

propos de Nicolas Lebrun177

l'inclusion est un concept récent qui succède à l'intégration.

L'auteur prétend que l'inclusion ne se résume pas à des processus d'insertion

professionnelle et d'intégration économique. Ce serait également une participation sociale,

culturelle et civique à la société. L'individu n'est plus intégré dans une société, dans un

groupe mais il fait partie de cet ensemble. Il assure que l’inclusion se mesure selon quatre

dimensions de participation à la société :

la consommation,

la production,

l'engagement politique

les interactions sociales.

L'inclusion se pratique dans les milieux de l'emploi, l'éducation, la culture, de

l'accessibilité spatiale et institutionnelle. Les normes changent et se transforment pour

construire un collectif qui inclut. Ce concept d'inclusion, pour certains auteurs, provoque

176

LAFORE R., DIMBOUR T., LAFORCADE M. et alii, « Après les lois de 2002, 2005, 2009, les IME…

Que sont-ils devenus ? Que vont-ils devenir ? », Les cahiers de l'actif, n° 444-445, mai-juin 2013, pp 11-189 177

LEBRUN N., « Cohésion et inclusion sociale Les concepts », Les cahiers de la solidarité, janvier 2009,

n°67, pp 1-11

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Quels leviers pour les IME ?

80

une « révolution178

», une « transformation179

» pour d'autres, sur le plan culturel, politique

et pratique. Comme le handicap est un concept qui s’inscrit dans un environnement social,

pour Corinne Grenier180

la communauté doit moduler ses conditions de vie dans des

démarches de « vivre ensemble » et proposer une société diversifiée afin de limiter les

phénomènes d’exclusion. Et Felicity Armstrong181

prétend que c'est le tout inclusif, le tout

adaptable à toute personne qui forge la société de demain.

J’ai fait le choix de traiter de l’inclusion scolaire car le thème de la recherche

s’adresse aux enfants en âge d’être scolarisés. Avant les lois de 75, L’Éducation nationale

voit son rôle décroître en matière d’enseignement spécialisé au profit du secteur médico-

social. Puis un renversement s’opère vers la fin des années 90, où la scolarisation des

enfants handicapés redevient de la compétence de L’Éducation nationale. Avec la

promulgation de la loi de 2005, 70 %182

des enfants et adolescents en situation de handicap

sont scolarisés en 2012 alors qu’en 1990 ils étaient de 66,3 %183

. L’école inclusive est

définie par sa dimension plus socialisante qu’instructive. Le processus de scolarisation en

école ordinaire n’a pas pour seul objectif l’acquisition des apprentissages fondamentaux,

mais dans l’esprit de la loi, il favorise l’égalité des chances.

Développer une culture inclusive au sein des écoles ordinaires oblige à se questionner

sur les intentions de cette forme d’éducation.

a. Vers une éducation inclusive

L’emploi du nom inclusion vient du latin includere signifiant enfermer ou renfermer.

Curieusement l’idée d’enferment caractérise ce mot. Pour autant une organisation sociale

devient inclusive, selon les propos de Charles Gardou184

, lorsqu’elle module son

fonctionnement pour permettre à tous d’y participer. En ce sens elle s’oppose à

l’intégration de l’individu qui, espérant s’intégrer, doit s’adapter à la structure. Aussi nous

178

GEOFFROY G., (2005), Rapport parlementaire : La scolarisation des enfants handicapés loi du 11 février

2005. Conséquence sur les relations entre les institutions scolaires et médico-sociales. Importance du

partenariat avec les collectivités locales, 24 p. 179

ARMSTRONG F., « Intégration ou inclusion ? L'évolution de l'éducation spéciale en Angleterre. Une

étude de cas », Revue Française de pédagogie, n°134, janvier-février-mars 2001, pp 87-96 180

GRENIER C. et LABOREL B., (2011), Les MDPH (Maisons Départementales des Personnes

Handicapées) : une organisation innovante dans le champ médico-social ? , Erès, Toulouse, 157 p 181

ARMSTRONG F., « Intégration ou inclusion ? L'évolution de l'éducation spéciale en Angleterre. Une

étude de cas », Revue Française de pédagogie, n°134, janvier-février-mars 2001, pp 87-96 182

MDPH : au carrefour des politiques publiques synthèse des rapports d'activité 2011 des MDPH (2012),

CNSA, 102p. 183

BERZIN C., (2010), Accueillir les élèves en situation de handicap, Scérén, Amiens, 152 p 184

GARDOU C., (2012), La société inclusive, parlons-en, Erès, Toulouse, 167 p

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Quels leviers pour les IME ?

81

présupposons que l’école, pour être inclusive doit adapter son organisation pour accueillir

les élèves en situation de handicap.

Ce changement social réclamé par l’Etat affiche haut et fort les principes d’égalité

pour tous les élèves. L’inclusion se détermine aujourd’hui comme un moyen de lutter

contre les inégalités entre les élèves. Maintenir en milieu ordinaire, quand c’est possible,

devient un droit au travers des politiques en faveur des personnes handicapées. Par exemple

le schéma régional d’organisation médico-sociale en PACA promulgué par les ARS,

mentionne clairement que parmi les objectifs du programme, s’inscrit la volonté de rendre

effectif le droit à la scolarité. Ceci implique des engagements de moyens humains et

matériels ainsi qu’une augmentation de la coopération entre les établissements spécialisés

et scolaires.

Selon le regard que nous portons sur l’inclusion, les objectifs divergent. D’un certain

point de vue, l’école permet de mieux préparer les enfants à une vie sociale. Pour ceux

déficients intellectuels, il est évident que ces enfants ne poursuivront pas des études

universitaires ou dans les grandes écoles. Néanmoins l’intelligence pratique qui peut être

développée au cours de la scolarité, complète le portefeuille de compétences de ses élèves.

L’expérience de la socialisation et le renforcement des savoir-faire donnent des atouts pour

s’insérer dans la société. Si auparavant on pensait que seuls les établissements spécialisés

permettaient l’épanouissement de l’enfant handicapé, aujourd’hui on pense que l’école peut

se vivre comme un lieu d’apprentissage des habiletés sociales.

Une politique inclusive cherche à transformer l’école et à élargir la participation de

tous les enfants quelles ques soient leurs différences. L'approche inclusive de l'éducation

est préconisée par la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes

handicapées. L’éducation inclusive repose sur les principes suivants :

Permettre le droit à l'éducation pour tous

Adapter des systèmes pour chacun.

La voie inclusive de l’éducation et plus particulièrement de la scolarité est un

phénomène à relier au contexte social. L’environnement étant considéré comme

handicapant, c’est à l’école de tout mettre en œuvre pour favoriser son accessibilité.

L’inclusion se distingue de l’intégration par le fait que ce n’est pas l’individu qui doit

s’assimiler à un groupe ou une société, mais bien un mode d’existence caractérisée par la

vie en groupe qui devrait s’adapter à tous. Pour ainsi dire, elle contribue à l'épanouissement

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82

et à la progression des enfants quels que soient leur déficience par une insertion dans le

tissu social. D'après Felicity Armstrong185

, l’inclusion a pour objectif de rendre la société

plus équitable, plus tolérante dans le sens où la différence serait acceptée et surtout

assimilée. Ce projet de société ambitieux s’inspire d’expériences menées dans les pays des

États membres. Par extension l'éducation inclusive, par l'utilisation d'enseignement,

d'apprentissages individualisés et de pédagogies adaptées, pourrait servir à tous les enfants

afin de lutter contre l'échec scolaire.

b. Lutte contre l'exil scolaire

Concernant l’inclusion scolaire, l’école devrait être en mesure de développer des

stratégies pour éviter que les élèves ne sortent du système scolaire sans avoir les

compétences nécessaires pour s’insérer dans la société. Un élève sur quatre n’est pas en

mesure de s’insérer dans la société, dont les deux tiers sont des garçons d’après un

rapport186

paru en 2013. Cette proportion comprend les élèves en situation de handicap,

donc ayant des difficultés scolaires, auxquelles s’ajoutent les élèves en difficulté scolaire

sans handicap, ceux dits en « grande difficulté scolaire ».

Le système éducatif met en évidence un ensemble de connaissances et de

compétences que les élèves sont censés ne pas ignorer à la fin de la scolarité obligatoire,

présenté dans le socle commun de connaissances et de compétences. L’école en général

procure aux individus une formation visant des prérequis tels que l’alphabétisation, la

maîtrise du temps et de l’espace, la gestion des biens et la gestion administrative, la sécurité

la communication… La logique inclusive contribue au développement des compétences

scolaires, relationnelles et sociales facilitant l’inscription sociale et professionnelle. Avec

ces habiletés le futur adulte est en mesure de s’en sortir dans la société dans laquelle il

évolue. Il n’en demeure pas moins que quelques enfants n’en ont pas la possibilité et pour

eux un cadre spécialisé est primordial. L’intégration ne peut réussir qu’à la condition que

les objectifs de l’inclusion soient bien définis. Il faudrait, pour Charles Gardou187

, que

l’école française se sorte d’une conception exclusive des enfants « dans la norme ». Pour

l’instant l’inclusion permet à l’enfant handicapé de profiter des échanges relationnels et

185

ARMSTRONG F., « Intégration ou inclusion ? L'évolution de l'éducation spéciale en Angleterre. Une

étude de cas », Revue Française de pédagogie, n°134, janvier-février-mars 2001, pp 87-96 186

DELAUBIER J-P. et SAURAT G., (2013) « le traitement de la grande difficulté au cours de la scolarité

obligatoire », rapport 2013-095, 169 p. 187

GARDOU C., (2012), La société inclusive, parlons-en, Erès, Toulouse, 167 p

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Quels leviers pour les IME ?

83

pédagogiques avec les autres élèves et avec les enseignants. L’évaluation de l’inclusion

s’appuie sur les activités qui se déroulent dans la classe mais aussi dans la cour, en

récréation et à la cantine. Ces dernières sont d’égale importance avec les apprentissages

fondamentaux que sont la lecture, l’écriture, les modes opératoires… Pourtant, sans

toutefois négliger les aspects socialisants, les enseignants privilégient beaucoup les

compétences cognitives. En témoigne ce propos tenu par un enseignant :

« y a pas que le vivre avec. Je pense que les compétences à attendre des inclusions ne

sont pas que le social. Il faut qu'ils avancent aussi dans les compétences. Pour l'ouverture

culturelle, lire des livres de son âge c'est bien aussi188

»

c. Par extension…

Le débat ne porte plus, comme à la fin du XIXe sur l’éducabilité des enfants

déficients mais bien sûr la scolarisabilité de certains d’entre eux. Les politiques publiques

en faveur du handicap privilégient l'inclusion en milieu ordinaire. Les plans Handiscol

témoignent de la tendance du système à aiguiller le public en situation de handicap vers le

milieu ordinaire.

Ce qui s’y cache

L’Éducation nationale a pour obligation d'accueillir tous les enfants selon les

dispositifs prévus par la loi 2005-102. Cette dernière s'appuie sur un droit fondamental,

celui de l'éducation : « pour l'égalité des chances ». La scolarisation des enfants handicapés

devient non pas un droit absolu mais une « modalité à privilégier chaque fois que

possible189

» car « chaque enfant qui le peut doit entrer à l'école ordinaire190

». Cette loi

pose le principe d'un accès au droit, dispensé prioritairement dans l'école ou l'établissement

scolaire le plus proche du domicile de l'élève. Se pose alors l’ambiguïté d’une obligation

par rapport à la faisabilité de la scolarisation.

N'y a-t-il pas aussi derrière la démarche d’inclusion, une volonté de transférer les

« institutions vers les services de base communautaire191

» dans le but de réduire les

dépenses sociales ? « Derrière ce choix idéologique (…) se cachent évidemment des choix

188

Entretien Ep7 189

BERZIN C., (2010), Accueillir les élèves en situation de handicap, Scérén, Amiens, 152 p. 190

CHOSSY J-F., (2011), Rapport sur l'évolution des mentalités et changement du regard de la société sur

les personnes handicapées. Passer de la prise en charge... à la prise en compte, 127 p. 191

http://www.cfhe.org/fonds.htlm, consulté le 1er

mai 2014

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Quels leviers pour les IME ?

84

budgétaires pesants : une vraie prise en compte des besoins particuliers des jeunes

handicapés est évidemment bien plus coûteuse que leur « inclusion » dans les classes

ordinaires192

». Rappelons que les dispositifs locaux en faveur du handicap sont financés

par la CNSA. Le budget de fonctionnement des établissements de type IME dépend du prix

de journée fixé par l’ARS et est financé par la caisse primaire d’assurance maladie, alors

que la responsabilité de la scolarité est affectée au ministère de l’Éducation nationale. Les

sources de financement de la scolarité sont diverses : l’État, la commune, le conseil

départemental et le conseil régional selon l’échelon de l’établissement scolaire.

L’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) a fait une

parution concernant l’« intégration des élèves à besoins particuliers » dans laquelle est

stipulée que les établissements spécialisés sont plus coûteux que les institutions scolaires

du milieu ordinaire. Pour Joël Zaffran193

c’est le même constat ; la dépense moyenne en

France d’un élève handicapé en établissement spécialisé est plus élevée que pour ce même

élève scolarisé en milieu ordinaire à temps plein. Dans ces circonstances la scolarité des

enfants handicapés est préconisée dans les établissements scolaires du milieu ordinaire.

D’autres enjeux

Pour autant les enjeux de la scolarisation des enfants en situation de handicap ne

réduisent pas à la dimension économique, ils sont multiples. Même si les objectifs de

l’inclusion scolaire ne sont pas clairement annoncés par la loi, on peut y voir un moyen de

socialisation pour les enfants handicapés mais aussi un moyen de faire évoluer le regard sur

le handicap. L'école inclusive est une manière de prendre en compte les différences. Elle

est le lieu où les mentalités peuvent évoluer car « l'école ordinaire est un laboratoire social

qui accroît la normalité194

». Dans l'article « Intégration ou inclusion ? Éléments pour

contribuer au débat195

», le collectif d'auteurs associe l'inclusion à une reconnaissance de la

diversité et évoque une avancée de l’école.

L’école est une confrontation à l’Autre, des enfants au handicap et des enseignants

sur le handicap. Même si nous constatons que le nombre d’enfants handicapés à l’école

192

BERZIN C., (2010), Accueillir les élèves en situation de handicap, Scérén, Amiens, 152p. 193

ZAFFRAN J., (2007), Quelle école pour les élèves handicapés ?, La découverte, Paris, 180 p 194

ibid 195

PLAISANCE E., BELMONT B., VERILLON A. et alii, « Intégration ou inclusion ? Éléments pour

contribuer au débat », La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, n° 37, premier trimestre 2007,

pp 159-164

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Quels leviers pour les IME ?

85

ordinaire augmente, cela ne veut pas dire pour autant que le public en a moins peur.

D’après le rapport de Chossy « l'inclusion à la scolarité, c'est finalement se préparer à un

rejet puisque le résultat en sera une fois de plus la stigmatisation196

». Un article du journal

« le monde » paru le 18 août 2010, relate qu’il existe encore une discrimination forte par

crainte que la présence des enfants handicapés fasse diminuer le niveau de performance des

enfants dits normaux. Le risque aussi pour les enfants handicapés, selon Jean-Marie

Gillig197

, serait de banaliser l’accompagnement des handicapés sans tenir compte de leurs

besoins spécifiques. L’uniformisation de l'éducation ferait alors perdre de vue la singularité

des individus.

L’accueil de l’enfant handicapé à l’école peut s’avérer bénéfique aux enfants non

handicapés. S’il contribue à changer les représentations sur le handicap, il entretient le

développement de la solidarité. D’ailleurs un sondage IFOP de 2015 adressé aux personnes

publiques, sous-entendu non confrontées au handicap, fait état du constat suivant : 39 %

des personnes sondées prétendent qu’il n’y a pas d’enfant handicapé dans l’établissement

scolaire fréquenté par son propre enfant. Parmi eux 40 % disent ne pas avoir eu d’actions

de sensibilisation sur le handicap. Enfin 45 % des personnes interrogées sont favorables à

l’ouverture de l’école aux enfants handicapés.

Avec l’inclusion à l'école, le milieu spécialisé n’aurait plus le monopole de

l’éducation des enfants handicapés. Il deviendrait un partenaire de l’école contribuant à la

compréhension des pathologies et de leur fonctionnement. La rencontre de ces deux

cultures différentes implique une adaptation au changement de la part du secteur médico-

social et de l’Éducation nationale. « Faire travailler ensemble de manière cohérente (…)

dans une structure unifiée (…) créer une culture commune, d'une part, en élevant pour tous

le niveau de qualification et, d'autre part, en donnant à la pédagogie une place

importante198

». La coopération entre professionnels spécialisés et enseignants apparaît

inévitable. Ainsi le milieu spécialisé pourrait devenir une ressource pour l'école. La

coexistence des deux modèles, spécialisé et ordinaire, implique une double appartenance

institutionnelle et nécessite de construire des passerelles entre les deux.

196

CHOSSY J-F., (2011), Rapport sur l'évolution des mentalités et changement du regard de la société sur

les personnes handicapées. Passer de la prise en charge... à la prise en compte, 127 p 197

GILLIG j-M., (1999), Intégrer l'enfant handicapé à l'école, Dunod, Paris, 258 p 198

ROBERT P., (2010), La Finlande : un modèle éducatif pour la France ? Les secrets de la réussite, ESF

éditeur, Issy les Moulineaux, 150 p

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Quels leviers pour les IME ?

86

3.4 L’innovation au service du handicap

Depuis le début de cette partie, nous avons soulevé les changements qui s’opèrent

dans la société et au niveau des dispositifs pour le traitement du handicap. Les nouvelles

interventions sociales inhérentes aux récentes conditions d’exercice de l’accompagnement

des enfants en situation de handicap, n’ont de cesse d’évoluer. Situer le processus

d’innovation dans l’évolution des dispositifs jusqu’aux dernières réformes en cours montre

le cheminement sinueux et les transformations des prises de charge des enfants et

adolescents en situation de handicap. J’ai fait donc le choix d’aborder ces évolutions par le

bais de l’innovation car il ouvre selon moi des perspectives sur l’avenir du travail social.

a. De l’expérimentation à l’innovation

Le mot « innovation » vient du latin « innovatio » qui signifie changement,

renouvellement. Joseph Schumpeter est un auteur de référence du début du XXe siècle qui

appréhende l’innovation sous un angle économique. Toutefois l’innovation désigne

également des progrès d’origine scientifique, technique, sociale ou culturelle. Dans son

ouvrage Gérald Gaglio199

fait référence à Patrice Flichy qui aborde le processus

d’innovation par une approche historique. Selon lui l’innovation continue sans cesse à se

développer. Norbert Alter200

rejoint Patrice Flichy quand il dit que le processus n’est jamais

achevé.

Selon Norbert Alter201

elle se distingue de l’invention à partir du moment où elle

s’inscrit dans le temps. Elle joue un rôle fondamental dans l’histoire par ces petits riens qui

transforment en profondeur la société. Pour l’auteur, quand une invention s’inscrit dans un

milieu social, alors elle devient une innovation. « Innover c’est « penser autrement », casser

les codes et changer de paradigme202

». Si l’invention entre dans une pratique courante,

qu’elle modifie les habitudes et qu’elle bouleverse les normes anciennes, alors elle se

conçoit comme une innovation.

199

GAGLIO G., (2011), Sociologie de l’innovation, PUF, Paris 126 p 200

ALTER N., (2003), L’innovation ordinaire, PUF, Paris, 278 p 201

Ibid 202

DORTIER J-F., « un nouveau mythe de la création », les grands dossiers des sciences humaines, n°38,

avril mai 2015, pp 6-8

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87

Au commencement du processus d’innovation, il y a la créativité. Entendons par

créativité, autre chose qu’un effet de mode éphémère s’oubliant vite. Gérald Gaglio203

précise l’innovation à partir de trois critères :

- la conception d’un dispositif

- l’intégration de la nouveauté

- le succès commercial

Norbert Alter détermine, quant à lui, l’innovation comme une activité banale dans

une organisation qui obéit aux lois économiques mais aussi culturelles et sociales. Il entend

par organisation « un ensemble structuré (de services, de personnes) formant une

association ou une institution ayant des buts déterminés »204

. L’organisation à laquelle nous

faisons référence dans cet écrit est bornée par le cadre juridique d'obligation de scolarité

pour les enfants de six à seize ans et elle s’appuie sur les politiques publiques en faveur du

handicap. Elle se compose de l’enfant en situation de handicap, de sa famille, du personnel

des écoles (directeur, psychologue scolaire, AESH, enseignant ou professeur, référent de

scolarité etc.), des membres de la CDAPH, des IME, des services SESSAD… C’est donc

au cœur de cette organisation que nous vérifierons la théorie de Norbert Alter selon

laquelle l’innovation fait émerger de nouvelles pratiques sociales dans l’organisation.

En s’appuyant sur ces définitions de l’innovation, l’inclusion scolaire et la

désinstitutionalisation peuvent se définir comme une innovation. En effet ces deux

processus nécessitent la création et le développement de nouveaux dispositifs comme les

ULIS, les SAVS, les ESS, les référents de scolarité... D’ailleurs on continue à chercher de

nouvelles formes d’intervention sociale comme c’est le cas à l’observatoire régional de

l’innovation en santé (ORIS), au pôle ressources recherche et intervention sociale de PACA

et des initiatives expérimentales se dressent un peu partout sur le territoire.

Une décennie après la loi de 2005, la société est toujours en construction de nouveaux

dispositifs qui tentent d’agrandir, d’un point de vue quantitatif, le nombre de places pour

les enfants en situation de handicap en milieu ordinaire, mais les effets de la loi n’ont pas

encore été complètement évalués à ce jour. Cependant nous pouvons dire que tout n’est pas

203

GAGLIO G., (2011), Sociologie de l’innovation, PUF, Paris 126 p 204

http://www.cnrtl.fr/definition/institution, consulté le 15 avril 2015

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88

encore propice à l’inclusion et les effets sur les représentations du handicap sont encore

modérés comme nous allons le démontrer avec l’enquête.

b. La séquence du processus

L’innovation s’inscrit dans une progression temporelle non linéaire. La séquence du

processus d’innovation reflète des mécanismes d’influence, de contraintes, de mimétisme,

de négociation, de réseau etc. Pour Norbert Alter205

l’innovation ordinaire se déroule selon

une courbe en S que nous pouvons représenter de la manière suivante :

Graphique 6

La fréquence cumulée mentionnée en ordonnée correspond au nombre d’utilisateurs

de l’innovation. Sur l’axe des abscisses est mentionné le temps représentant la durée de

l’innovation.

De t0 à t1 est une période pendant laquelle se produit l’incitation. Elle se caractérise par

l’initiative de quelques personnes, elles proposent d’élaborer d’autres usages.

En t2 commence la période de la diffusion de l’innovation. La diffusion se définit une fois

l’intérêt suscité par les nouveaux usages ; quelques adeptes adhèrent aux nouvelles

pratiques. Pour d’autres il existe encore des attitudes de blocage ou de retrait.

t3 correspond à la phase d’appropriation. L’ordre social est bouleversé mais l’innovation

fait de plus en plus d’adhérents. Elle s’appuie sur des croyances qui permettent de

s’engager dans le processus. L’appropriation est une phase de création du sens.

Nous pouvons alors remarquer un accroissement considérable du nombre

d’utilisateurs jusqu’en t4, moment de l’institutionnalisation de l’innovation. S’ensuit un

ralentissement des adhésions, le temps de convaincre les derniers résistants et enfin aboutir

205

ALTER N., (2003), L’innovation ordinaire, PUF, Paris, 278 p

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Quels leviers pour les IME ?

89

à l’existence d’une nouvelle norme. L’institutionnalisation correspond aux définitions de

nouvelles règles du jeu. Elle rend obligatoire une partie des pratiques développées (loi de

2005 par exemple). Cette phase du processus ne s’inscrit pas durablement dans le temps car

déjà d’autres innovations pointent à l’horizon.

Dans une période d’intégration il est provoqué des changements de pratiques

professionnelles. C’est ce que nous constatons et vérifierons au sein des écoles mais aussi

en cascade dans les IME. La prise en charge des enfants handicapés ne se pense plus entre

quatre murs d’un établissement spécialisé mais hors les murs. C’est ce que Jean-François

Bauduret206

a encore évoqué lors des 2èmes

journées des IME. On voit pointer l’évolution et

l’émergence de nouveaux métiers comme les chargés d’insertion en IME et de nouvelles

compétences dans les équipes comme les coordinateurs.

Selon Norbert Alter207

les changements de règles ou les transformations, déstabilisent

l’organisation. Pour que les acteurs se mobilisent, s’approprient les changements, il faut

qu’ils mettent du sens à l’action. L’innovation provoque des changements d’habitude. C’est

pour cela que la scolarité des enfants handicapés ne va pas de soi et génère des

problématiques.

Pour augmenter le nombre d’adhérents et transformer les pratiques, il faut être en

capacité d’identifier les facteurs favorables et défavorables de l’inclusion scolaire et de la

désinstitutionalisation afin d’améliorer les conditions de l’accompagnement des enfants et

adolescents en situation de handicap dans le tissu social. En effet, il est principal de mettre

en valeur l’information, la consultation et l’accompagnement au changement de toutes

celles et ceux qui accueillent ce public. Ainsi les transformations des pratiques

professionnelles s’appliqueront avec du sens, de la coopération dans l’intérêt de l’enfant.

Ainsi ce mémoire est une photographie instantanée des innovations engagées auprès

des enfants en situation de handicap tant à l’école qu’en IME. Se questionner aujourd’hui

sur l’innovation peut permettre de prévoir les changements à venir dans les IME et de

préparer ces établissements aux modifications de leurs pratiques sociales.

206

BAUDURET J-F, directeur de la CNSA et vice-président de l’ANAP lors de la conférence : Sortir de

l’IME, 2éme

journées nationales des IME, organisé par l’ancreai à Clermont-Ferrand les 4, 5 et 6 novembre

2015 207

ALTER N., (2003), L’innovation ordinaire, PUF, Paris, 278 p

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Quels leviers pour les IME ?

90

III ANALYSE DES INFORMATIONS ET PRECONISATIONS

Le principe de l’analyse des informations est toujours de faire des liens de

convergence ou de divergence, des liens d’oppositions ou de rapprochements, d’établir une

relation entre deux phénomènes. L’enquête de terrain permet d’avancer que dans un

environnement inclusif les IME sont en mesure de varier leur offre de service pour

répondre aux besoins du public ne pouvant pas ou plus être inclus dans les dispositifs de

droit commun. La politique d’inclusion scolaire modifie les rapports entre l’école ordinaire

et les établissements spécialisés. Et la désinstitutionalisation transforme le mode

d’intervention des établissements spécialisés.

1. Tendances et perspectives des IME

1.1 Configuration nouvelle des IME

Les recommandations en faveur de la désinstitutionalisation et l’inclusion scolaire ont

des conséquences sur les dispositifs et donc sur les IME. Montrer leur utilité revient à

justifier des enjeux pour les structures mais aussi pour la société dans sa globalité. Ces

derniers se définissent par rapport au secteur d’activité où ils sont mis en œuvre et par

rapport à la nature de l’activité. Les IME aspirent à faire progresser le bien-être des

individus dans la société par ces activités au profit des personnes ayant des besoins

spécifiques identifiés. Ils contribuent à réduire les inégalités, concourent à la solidarité, à la

sociabilité et à l'amélioration des conditions de vie.

Les IME sont une « activité collective 208

» composée de savoir, de règles de gestion,

d’identité professionnelle, de projets, de systèmes techniques de modalités de coordinations

et de négociations. Les experts de l’intervention sociale dans le champ du handicap mental

sont les IME. Ils démontrent un savoir-faire auprès des enfants exclus du système scolaire

ordinaire. Par leur capacité d’adaptation au public ils font preuve d’innovation. Ils

s’ouvrent vers la société en faisant participer les enfants handicapés à la vie de la cité. Le

208

ALTER N., ( 2003), L’innovation ordinaire, PUF, Paris, 278 p

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Quels leviers pour les IME ?

91

milieu spécialisé s’ouvre davantage sur l’extérieur. Faire sortir le handicap du système

spécialisé c’est déjà le faire participer à la société.

Les jeunes enfants accompagnés aujourd’hui en IME souffrent d’un handicap lourd,

ou d’une déficience intellectuelle profonde à modérée ou encore de troubles psychiques.

Un rapport du CREAI209

de 2010 indique que seulement 15 % des enfants accueillis en

EMS ne présentent pas de troubles associés. Donc la plupart des structures accueillent un

public qui souffre de pluri-handicap, une association de plusieurs déficiences ayant le

même degré de gravité. Par exemple ce peut être une déficience intellectuelle importante

avec des troubles de la relation. D’après ce rapport le taux de pluri-handicap a été multiplié

par quatre.

Ainsi les établissements spécialisés démontrent leur utilité en offrant un accueil à un

public souffrant de pluri-handicap et développent l’accueil du public souffrant d’autisme.

Lors d’une rencontre avec les membres des ARS, les responsables ont annoncé que les

moyens alloués diminuaient mis à part ceux décrétés suite au plan autisme. Le programme

interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie de 2014-

2017, édité par les ARS, montre une volonté de développer les places d’accueil pour les

enfants TED ou porteurs d’autisme soit par des créations soit par des transformations. Dans

les Bouches du Rhône il y a eu dix créations et vingt-quatre transformations de places pour

ces enfants en IME en 2014210

.

Les principes de désinstitutionalisation proposent aux IME de réduire légèrement le

nombre de places en structure et mettent en valeur les structures de plus petite taille, celles

de moins de cinquante places.

Comme l’indique le document ci-dessous, le nombre de petites structures croît au

détriment des structures à plus de cent cinquante places. Nous pouvons y voir comme un

moyen de rendre les établissements à l’échelle humaine. Les petites structures à taille

humaine permettent la participation des usagers à la vie sociale par l’utilisation des

équipements des communes.

209

2001-2006 Évolutions marquantes dans les EMS à partir des données des enquêtes ES de la DREES,

(2010), CREAI PACA et Corse, 51 p. 210

Programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie 2014-2017,

(2014), ARS, 13 p.

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Quels leviers pour les IME ?

92

Tableau et graphique 7

Toutefois, la constance du nombre de places attribué aux EMS ne permet pas de

satisfaire les demandes. L’inscription en établissement spécialisé n’est pas sans difficulté.

Le nombre de places en structure reste très insuffisant. L’ARS signale que les installations

en PACA sont en nombre insuffisant et le taux d’équipement régional est inférieur à celui

de la moyenne nationale211

. Les listes d’attente dans les établissements s’allongent et c’est

tout le paradoxe des processus de désinstitutionalisation et d’inclusion. Il faut donc trouver

d’autres solutions pour accompagner ces enfants en situation de handicap. Les ARS

privilégieraient le regroupement professionnel des différentes structures recherchant à

mutualiser les compétences afin de réduire les coûts. Il n’est pas question de fusionner en

grosse institution mais plutôt une manière de proposer aux institutions françaises un

réaménagement en service de proximité. Par extension les ressources proposées par les

services de proximité pourraient être utiles aussi pour les enfants en difficultés scolaires et

211

Programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie 2014-2017,

(2014), ARS, 13 p.

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Quels leviers pour les IME ?

93

pas seulement pour ceux en situation de handicap pour éviter que ces adolescents sortent du

système scolaire sans avoir les compétences nécessaires pour s’insérer dans la société.

Finalement c’est la disponibilité des places dans les dispositifs qui détermine

l’orientation et non les aptitudes de l’enfant ou de l’adolescent : s’il n’y a pas de place en

milieu ordinaire l’orientation tend vers le milieu spécialisé. Et s’il n’y a pas de possibilité

en établissement spécialisé du fait du manque de place, l’enfant sera maintenu en classe du

milieu ordinaire. Il ne s’agit pas réellement d’un choix mais plus d’une résolution par

défaut. Á ce jour, culturellement et techniquement, la scolarité en milieu ordinaire des

enfants présentant un handicap mental, ne s’adresse pas à tous, sur le territoire français et

les institutions françaises vont demeurer, non pas dans leur forme actuelle, elles vont devoir

transformer leurs activités, bouleverser leurs pratiques et changer les modes

d’accompagnement sans réduire la qualité des prises en charge.

1.2. S’inspirer du modèle finlandais

Le modèle d’inclusion Finlandaise peut être pris comme exemple. Pourquoi ? Parce

qu’il est le meilleur dispositif inclusif reconnu en Europe. Comme la Norvège ce pays a

inscrit l’inclusion dans sa Constitution. Alors que les États-membres de l’Europe212

comptent 1/4 d’enfants handicapés en âge scolaire en milieu ordinaire et les 3/4 en milieu

spécialisé, la Finlande compte quant à elle moins de 2 %213

des élèves scolarisés en milieu

spécialisé. L’opportunité de rencontrer un travailleur social finlandais a permis de

comparer les dispositifs inclusifs.

En Finlande c’est la commune qui prend en charge tous les besoins inhérents au

handicap. Un référent s’occupe de la coordination des dispositifs, il rencontre les familles,

donne des conseils et évalue les besoins et les moyens à mettre en œuvre sur le plan

quotidien, la vie familiale, la vie scolaire et professionnelle. Si la commune ne peut

satisfaire les demandes, elle s’adresse à des prestataires de services privés.

L’inclusion scolaire est rendue possible par le système scolaire finlandais qui propose

un mode opérationnel différent de celui de la France. La classe est composée en trois

groupes : les plus performants, ceux en difficultés et un petit groupe de trois ou quatre

212

PROUCHANDY P. et ESPAGNOL P., (2007), « La scolarisation des enfants et adolescents handicapés »,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 15 octobre 2014 213

ROBERT P., (2010), La Finlande : un modèle éducatif pour la France ? Les secrets de la réussite, ESF

éditeur, Issy les Moulineaux, 150 p

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Quels leviers pour les IME ?

94

enfants bénéficiant d’un soutien individualisé, aidé par une assistante d’éducation. Cette

dernière est une étudiante en École supérieure qui vise la professionnalisation d’enseignant.

L’inclusion dans ce pays tend à renforcer l’estime de soi, favoriser la motivation et

l’initiative. Le système éducatif Finlandais met toujours en avant ce que l’enfant fait de

bien et relègue les erreurs. Ce qui compte c’est le raisonnement et non un résultat final. Il

s’agit d’un tout autre mode de fonctionnement. Ce modèle éducatif place l’instruction en

dernier plan.

Quand le système ne suffit pas il existe des instituts qui sont considérés comme des

prestataires de services. Le risque encouru est la marchandisation de ces services dans un

climat de crise financière. Ce pays semble moins souffrir des contraintes d’aménagement

de la société au handicap car après la Seconde Guerre mondiale, la reconstruction a été

pensée avec le handicap. Le travailleur social finlandais interrogé a fait part de ses

interrogations lors de son arrivée en France :

« Moi quand je suis en France je trouvais pas les personnes handicapées, jamais. J'ai dit

mais ils sont où ? Ils sont tous dans un institut ? Ils sortent très peu. Après le 2ème jour,

Comment ils arrivent à déplacer ? Parce tu vois les trottoirs, tu vois les routes c'est pas

possible, c'est pas adapté. Dans un magasin même avec une poussette tu rentres pas. Nous

on a même, quand tu es mal voyante et que tu veux traverser la rue, tu as les feux avec les

piétons, tu as les feux avec du son et qui te dit que tu peux traverser. C'est des choses très

simples214

»

Dans ce pays les politiques inclusives sont bien antérieures à celles de la France. Les

dispositifs sont parmi les plus opérationnels d’Europe. Le modèle éducatif Finlandais

pourrait servir de modèle pour la France dans sa conception de l’enseignement mais aussi

dans son mode d’accessibilité.

2. Les conditions de l’accessibilité scolaire aujourd’hui

Nous avons vu avec l’enquête, que l’inclusion scolaire requiert des conditions

particulières pour être réalisée avec des objectifs cohérents. Par là même elle vise la

réduction du confinement des enfants handicapés et leur ségrégation en milieu spécialisé.

La scolarisation assure un enseignement didactique et procure des compétences pour

214

Entretien Ep8

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Quels leviers pour les IME ?

95

s’intégrer socialement. Celle des enfants handicapés repose sur un principe d’équité qui

consiste à offrir à tous les enfants une éducation qui leur permet de vivre ensemble dans

une société malgré les différences. Une éducation basée sur la tolérance et la solidarité

prend tout son sens avec l’accueil des enfants handicapés en classe. L’optimisation de la

scolarité donne l’occasion de préparer au mieux le futur adulte à sa vie en société. D’après

les témoignages de l’enquête, selon les circonstances, la scolarité pour les enfants porteurs

de handicap mental, ne se déroule pas dans la plénitude. Les familles plus que les

professionnels, remettent en cause la scolarité en milieu ordinaire pour les enfants. Il

apparaît qu’à ce jour les circonstances dans lesquelles se produit la scolarisation ne

semblent pas apporter les supports à la réalisation de l’épanouissement. La loi de 2005 et

les injonctions du ministère de l’Éducation nationale suffisent-elles à changer les pratiques

dans les écoles ? Les propos du conseiller pédagogique interrogé montrent combien le

changement est engagé, qu’il nécessite des adaptations, mais qu’il n’est pas encore accepté

de tous. Il reste encore à convaincre des acteurs de jouer le jeu de l’inclusion.

« C'est un changement de point de vue, complètement différent mais ça a du bon

parce que ça sous-entend que tout ce qui peut leur être profitable dans leur classe de

référence ça leur sera proposé. Et avec la contrainte pour le prof de la classe ordinaire

d'adapter ses supports ces pratiques pédagogiques, ça met un peu des révolutions215

»

La question de la scolarisation des enfants handicapés divise les acteurs du champ du

handicap. Les adhérents à l’inclusion à qui John Pull216

fait référence, dans son ouvrage,

pensent que l’inclusion précoce améliore les performances des enfants déficients. Les

opposants, quant à eux, évoquent qu’une éducation appropriée, profite davantage à l’enfant

handicapé. Pour certains, comme Joël Zaffran217

, la scolarisation individuelle est la

meilleure façon d’intégrer. Elle prépare l’enfant handicapé à la vie d’adulte en le

confrontant à une microsociété qu’est l’école. Cette condition apparaît comme la plus

favorable dans la perspective d’une préparation à la vie sociale. Pour d’autres comme

Felicity Armstrong218

, l’inclusion ne peut pas se dérouler de manière partielle. Et Charles

215

Entretien Ep6 216

PULL J., (2010), Intégration et inclusion scolaires, des modèles éducatifs attendus, l’Harmattan, Paris,

283p 217

ZAFFRAN J., (2007), Quelle école pour les élèves handicapés ?, La découverte, Paris, 180 p 218

ARMSTRONG F., « Intégration ou inclusion ? L'évolution de l'éducation spéciale en Angleterre. Une

étude de cas », Revue Française de pédagogie, n°134, janvier-février-mars 2001, pp 87-96

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Quels leviers pour les IME ?

96

Gardou219

propose une alternative aux propositions radicales en évoquant la flexibilité des

itinéraires éducatifs. Á qui et dans quelles conditions s’adresse l’inclusion scolaire

aujourd’hui en France ? En conséquence quelles seront les interventions des IME de

demain ?

2.1 Formation et perfectionnement du personnel

L’accompagnement d’un élève déficient à l’école ne va pas de soi. Il peut susciter

l’apparition de sentiments de compassion et de misérabilisme tout autant qu’il inspire de la

crainte et de la peur. Légitimement les enseignants se questionnent autour du phénomène

mis en place avec profusion et un peu au hasard et leurs avis semblent partagés tout comme

celui des parents. Les enseignants ont une énorme responsabilité auprès des jeunes pour

leur adaptation sociale. Éduquer ne veut pas dire uniquement faire ingurgiter des

connaissances, c’est aussi donner des directives de pensées, un apprentissage clair, des

méthodes du savoir et une connaissance suffisante du Civique et des comportements

sociaux.

Une opportunité pour les experts du handicap

La confrontation de l’école à une situation d’inclusion entraîne chez les acteurs

scolaires, aussi bien des conduites novatrices en adoptant les supports pédagogiques, que

des résistances au changement. L’inclusion scolaire va de pair avec une culture intégrative

qui ne s’acquiert pas spontanément. La formation favorise l’imprégnation des moyens mis

en œuvre pour augmenter les connaissances, développer les facultés notamment le

jugement. Il existe déjà une formation spécifique : le certificat d’aptitude professionnelle

pour les aides spécialisées, les enseignements adaptés et la scolarisation des élèves en

situation de handicap (CAPA-SH), qui s’adresse aux enseignants désireux de s’instruire sur

les troubles cognitifs et les troubles des apprentissages. L’organisation de la formation

comporte quatre-vingts heures formalisées en partie par l’analyse des besoins éducatifs

particuliers des élèves. Cette unité de formation repose sur la connaissance des maladies et

des situations de handicap et de ses répercussions sur l’accès aux apprentissages, la

communication et la socialisation. Ce module comporte aussi un volet intitulé : gestion de

l’hétérogénéité en classe, preuve que la problématique de l’hétérogénéité dans le champ du

219

GARDOU C., (2012), La société inclusive, parlons-en, Erès, Toulouse, 167p

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Quels leviers pour les IME ?

97

handicap mental est reconnue. Seuls les enseignants qui en font la demande peuvent

profiter de cette formation. Ils deviennent alors des enseignants spécialisés. Or la loi de

2005 impose à tous l’accueil d’enfants en situation de handicap, alors même que le cursus

de formation ne prévoit pas une instruction sur le handicap. Préparer les enseignants à

l’accueil des enfants en situation de handicap mental, présuppose de former ou d’informer

le personnel afin d’optimiser les chances de réussite.

C’est pour cela que nous nous sommes appuyés sur les théories de l’innovation dans

la première partie de l’exposé. L’inclusion s’inscrit dans un processus d’innovation. Se

référant à la courbe logistique de séquences du processus d’innovation de Norbert Alter220

,

nous faisons le constat que nous sommes dans la période de diffusion et d’appropriation de

l’innovation. Par rapport à la séquence du processus décrite par Norbert Alter, elle est dans

sa phase ascendante. On ne peut pas encore dire que l’inclusion est en voie

d’institutionnalisation même si de plus en plus d’enseignants adhèrent au concept. Ce qui

permet d’annoncer cela c’est que les effectifs d’enfants en situation de handicap, scolarisés

en milieu ordinaire, n’atteignent pas encore les 50 %. Sur le territoire national la

progression de ce mode de scolarisation en 2014, a doublé221

par rapport à 2006. En PACA

elle équivaut à 16 578222

élèves scolarisés en intégration collective ou individuelle à la

rentrée scolaire 2012-2013. Les troubles intellectuels et cognitifs constituent 34 % de ce

mode de scolarisation. L’innovation provoque des changements de règles ou des

transformations. Pour cela, Norbert Alter assure qu’il faut que les acteurs puissent mettre

du sens à leur action. Informer, accompagner, former, contribue à convaincre et démystifier

l’inclusion scolaire auprès des acteurs de l’enseignement par la formation. Un conseiller

pédagogique reconnaît les difficultés à faire évoluer les mentalités.

« C'est un peu lourd à faire bouger les choses même s'il y a de la bonne volonté,

même si y a des choses qui sont mises en place il y a des choses à optimiser223

»

Une enseignante disant « on appelle ça inclusion parce que l’intégration on n'y

arrivait pas. C'est pour ça qu'on a changé. L'inclusion c’est pour permettre l'intégration

220

ALTER N., (2003), L’innovation ordinaire, PUF, Paris, 278 p 221

Ministère de l’Éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche,

http://www.education.gouv.fr, consulté le 7 mai 2015 222

Données chiffrées sur le handicap en région 2014, (2014), CREAI PACA et Corse, 50 p. 223

Entretien Ep6

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98

des gens parce qu’on n’y arrivait pas. L’ULIS ça me plaît mais y a encore des mentalités à

changer, qui doivent évoluer parce que les élèves, eux, ils sont prêts224

»

Á ce jour l’École supérieure du professorat et de l'éducation (ESPE) ne prépare pas

les futurs professeurs des écoles à l’accueil d’élèves en situation de handicap. Seule la

formation ASH, spécialisation optionnelle est dispensée mais ne pourrait-on pas envisager

de l’étendre à la formation générale des professeurs des écoles ? En attendant une refonte

du système universitaire de formation, de petites initiatives peuvent être saisies.

Avec l’augmentation du nombre d’élèves handicapés scolarisés, les politiques

académiques se penchent sur la question de la formation des équipes éducatives. La

conférence nationale du handicap du 11 février 2014 fait part des enjeux de la rentrée 2015

qui seront entre autres, d’adapter la formation des maîtres d’ici à 2017-2018. L’occasion

pour les professionnels du milieu spécialisé de se faire connaître, d’échanger sur leurs

pratiques, de transmettre leurs savoir-faire. Les IME peuvent solliciter les organismes de

formation et leur soumettre des propositions d’interventions. Les enseignants sont en

demande d’échanges et de partages avec les spécialistes du handicap.

« Je suis allée à une formation la semaine dernière sur tout le secteur jusqu'à

Avignon, chacun pose ses questions, fait son truc. Y en a qui ont eu le cas qui disent ben

moi j'ai fait comme ça, y en a qui disent comme ça, mais ni la conseillère péda, ni

l'inspectrice, qui n'étaient pas là, disent : voilà dans ce cas il faut faire comme ça donc

chacun avance à vue.225

»

En même temps la nécessité de formation s’adresse aussi aux aidants. Concernant les

AESH, cette requête a été prise en compte depuis peu. Leur temps de formation de

soixante-douze heures comprend dans son module 2, les connaissances relatives aux

besoins des élèves handicapés et aux situations de handicap. Les AESH sont formés sur le

développement physique, psychologique, social, affectif, cognitif, de l’enfant et de

l’adolescent ; sur les besoins des personnes et des situations de handicap quelle qu’en soit

l’origine, et sur la notion de handicap, situation de handicap, représentation du handicap.

Qui mieux que les intervenants des IME peuvent apporter des réponses pratiques à leur

questionnement ? Pourquoi les éducateurs interviennent-ils si peu dans les formations pour

224

Entretien Ep7 225

Entretien Ep2

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Quels leviers pour les IME ?

99

AESH ? Les IME ont donc intérêt à se faire connaître comme site qualifiant expérimental

et identitaire.

Depuis le schéma départemental226

de la région PACA du 1er

mars 2012, des

formations communes entre le secteur médico-social et l’Éducation nationale sont à

l’œuvre mais sont encore trop peu proposées. Les ambitions de ces formations seront

évaluables d’ici à quelques années. En y participant, d’ores et déjà, il s’agit de faire valoir

la capacité d’expertise du terrain auprès des organisateurs.

Des actions de formation « sur-mesure »

Si les déficiences légères représentent un volume important en classe, un effort

particulier est réalisé auprès du public ayant des troubles envahissants du développement.

Par exemple « La Lettre du CREAI PACA227

» mentionne l’ouverture d’unités

d’enseignement en maternelle pour enfants autistes à la rentrée 2014 et 2015 en Corse. Les

prochains avis d’appels à projets portent sur la création dans chaque académie, d’une unité

d’enseignement en école maternelle pour les enfants avec autisme. La différenciation

pédagogique que nécessite le public autiste demande une formation bien particulière sur

l’accueil, l’accompagnement et les méthodes d’apprentissage permettant de transmettre des

connaissances scolaires, une guidance à la résolution des tâches. Prendre compte de la

qualité du fonctionnement cognitif de l’enfant requiert des aptitudes spécifiques. Pour

expliciter les implications de ce trouble il apparaît opportun de faire intervenir des tiers

appartenant au corps médical ou paramédical (neuropsychologue) ou encore des personnes

spécialisées dans les méthodes d’apprentissage pour autiste. Plus largement l’institution

scolaire doit mettre en place une réadaptation pédagogique aux besoins particuliers de

l’élève autiste et pour se faire elle peut trouver une guidance de la part des IME.

Également nous pouvons supposer que la déficience mentale rend plus mal à l’aise

que d’autres types de déficience par son caractère imprévisible et son étrangeté. Elle suscite

des interrogations. C’est pourquoi avant de s’engager dans l’inclusion les instituteurs

veulent s’assurer des compétences de l’enfant. La taxinomie du handicap ne suffit pas à

répondre aux interrogations des enseignants. Tous les enfants trisomiques ne sont pas

226

Analyse comparée des schémas départementaux « handicaps » de la région PACA en cours de validité au

1er

mars 2012, (2012), CREAI PACA et Corse, 32 p. 227

La Lettre du CREAI PACA et Corse n° 23, (janvier 2015), CREAI PACA et Corse

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Quels leviers pour les IME ?

100

identiques, aucun enfant n’est comparable à un autre. Les approches cliniques peuvent

venir éclairer certaines pratiques. Donc la formation des enseignants par une institution

spécialisée sur le handicap mental permettrait de lever ces incertitudes.

Et comme il a été constaté au travers des entretiens, les professionnels se perdent dans

les dispositifs ou bien en ont une mauvaise connaissance. Cet état des lieux est également

relaté dans la revue spécialisée GEPSo n° 126228

de 2013. L’auteur préconise la

coordination entre le secteur spécialisé et le secteur ordinaire permettant une orientation

plus adaptée aux besoins. Les informations propagées au large public ne sont pas encore

suffisamment explicites et méritent d’être clarifiées. La publicisation des dispositifs

adressée au droit commun pourrait être à l’initiative des IME et se généraliserait à un plus

grand territoire qui dépasserait l’action de « parcours handicap 13 » par exemple, réseau

social du handicap dans le département des Bouches du Rhône.

Plus globalement, à ce jour, seuls les enseignants qui en font la demande sont formés.

Peut-être serait-il pertinent de confronter les formations CAPSH de l’ESPE avec celle des

éducateurs spécialisés en tronc commun ? Charles Gardou estime que nous gagnerions à

développer dans les universités, « des sciences du handicap229

» pour faire le point

régulièrement sur les grandes avancées en ce domaine.

2.2. Ces petits riens qui nuisent aux familles

Le rôle revêtu tout au long de la carrière scolaire par la détermination et le

dynamisme des familles ne saurait être remis au second plan. La réussite scolaire est le fruit

d’un investissement des familles en matière de temps, d’énergie, de connaissance et de

compétences « alors il faut admettre qu’il y a inégalité entre les enfants handicapés dotés

par ailleurs des mêmes possibilités230

». Le capital culturel, social et économique des

familles, est une condition qui subordonne à l’accomplissement de l’inclusion. La

rhétorique du sujet de la démocratisation scolaire se pose. L’engagement familial participe

228

BRIENS J., « La désinstitutionalisation : Rupture ou alternative à vivre ensemble ? », bulletin du

Geps’info, n° 126, mars 2013, pp 10-11 229

GARDOU C., (2012), La société inclusive, parlons-en, Erès, Toulouse, 167p 230

LESAIN-DELABARRE J-M., « L'intégration scolaire en France : une dynamique paradoxale », revue

Française de pédagogie, n°496, mars-avril 2012, pp 47-59

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Quels leviers pour les IME ?

101

à la mise en scène de l’identité scolaire comme facilitateur capable de compenser les

dysfonctionnements liés aux contraintes organisationnelles de l’inclusion.

Le métier de parents

Le sociologue Joël Zaffran, dans son livre « quelle école pour les élèves

handicapés ? »231

, prétend en 2007 que les parents d’enfant handicapé se sentent obligés de

« bien éduquer » leur enfant pour que les enseignants ne mettent pas fin à l’intégration à

cause du comportement. Les entretiens réalisés au cours de l’année 2014-2015 ne révèlent

pas cette culpabilité. Néanmoins le comportement de l’enfant au sein d’une classe est un

critère influençant l’orientation. Il faut pour ses parents, plus que d’autres, veiller à ce que

leur enfant ne dérape pas car cela pourrait compromettre sa place en classe. Finalement les

enfants sont dans l’obligation de développer des compétences sociales presque plus

importantes que pour d’autres enfants. Quant aux parents, ils doivent entretenir des

interactions argumentatives avec les enseignants s’ils veulent que l’inclusion se poursuive.

L’auteur Joël Zaffran va même jusqu’à employer le terme de « métier de parent

intégrant232

».

Pour venir éclairer les propos il est établi le portrait d’une maman pour qui l’inclusion

a été un chemin de labeur nécessitant une forte mobilisation :

La famille de E est domiciliée dans un village du nord du département. Elle se

compose d’un papa exerçant une activité professionnelle comme ingénieur en informatique,

d’une maman mère au foyer ayant un niveau d’études à bac plus trois, d’E. et N., les deux

enfants.

E. est porteur d’un handicap qui n’a pas encore eu de diagnostic précis. Il présente un

retard global semble-t-il. Dès la petite enfance il a été suivi au centre d’action médico-

sociale précoce (CAMPS). Il est entré en école maternelle dans son village avec une

notification de la CDAPH pour une AVS. La maman travaillait dans un collège mais elle a

préféré scolariser son enfant à mi-temps car les multiples rééducations lui prenaient du

temps. Une négociation a été entreprise avec l’enseignante pour qu’elle accepte l’accueil de

E. Ce professeur des écoles s’est montré très conciliant malgré une classe de vingt-sept

élèves. La maman a également négocié ses horaires de travail avec son employeur. Le

temps complet de classe représentait trop de contraintes horaires, il lui fallait jongler entre

231

ZAFFRAN J., (2007), Quelle école pour les élèves handicapés ?, La découverte, Paris, 180 p 232

ibid

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Quels leviers pour les IME ?

102

les horaires de travail, les horaires des rééducations, le tout sans aide de la famille car

géographiquement elle était éloignée.

Deux mois avant la fin d’année scolaire, l’AVS annonce qu’elle ne renouvelle pas son

contrat, ce dernier ne couvrant pas la totalité de l’année scolaire. La maman prend les

devants et réclame une AVS. Il a fallu attendre la rentrée suivante, après de nombreux

courriers et des articles dans la presse pour obtenir une AVS pourtant notifiée par la

CDAPH. Après cette forte mobilisation la maman a dû quitter son emploi pour pouvoir

continuer à assurer les différents suivis de son fils et s’en occuper le mercredi.

Et puis au cours de cette dernière année de maternelle, il y a eu un constat que E. ne

pourrait pas suivre une scolarité en école élémentaire. Le CAMPS a convaincu la famille

d’une orientation vers un IME.

Comme les listes d’attente sont longues, le premier établissement proposé et visité a

été celui vers lequel se tourner. E. est entré en mai à l’IME. La maman se rend à l’évidence

que son fils est mieux accompagné en unité d’enseignement du fait de la spécialisation de

l’enseignante et du petit effectif des classes. Elle apprécie la disponibilité du personnel et la

centralisation des rééducations au cœur de la structure. La maman continue de se mobiliser

en faisant partie du conseil à la vie sociale (CVS) de l’établissement. Un an après elle

donnera naissance à une petite fille et envisage depuis cette année, soit trois ans après

l’entrée de E. en IME, de reprendre une activité professionnelle. E. commence à faire

quelques jours en internat afin de s’habituer à ce mode d’accompagnement. D’ici à

quelques mois l’orientation en internat sera statuée.

L’inclusion ne va pas de soi et reste un parcours compliqué et épuisant malgré les

efforts des acteurs scolaires. Face aux nombreux obstacles, malgré toute l’aide technique et

humaine nécessaire au maintien de la scolarité, l’option d’orientation vers le milieu

spécialisé peut apparaître libératrice. Effectivement si la résistance de l’intégration est

supérieure à l’énergie déployée, il est compréhensible que les familles se résignent à

l’orientation. Par son fonctionnement, le milieu spécialisé limite les dépenses d’énergie

pour la famille. La démobilisation et le fait que les parents se laissent prendre en main

quand l’enfant est admis en établissement, prend tout leur sens au vu des difficultés de

parcours. C’est pourquoi les IME peuvent devenir un lieu de répit. En ce sens les acteurs

des établissements médico-sociaux doivent prendre en compte cet état de fait pour

développer un mode d’accueil bienveillant envers les familles. Qualités intrinsèques des

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Quels leviers pour les IME ?

103

établissements sur les activités adaptées, l’encadrement et la surveillance, l’empathie

généralisée, sont un gage de bonnes pratiques qu’il s’agira encore de perfectionner.

Manque de lisibilité

Les dispositifs inclusifs engendrent des incertitudes pour les familles qui ne

parviennent pas à se projeter dans l’avenir à long terme. Á chaque fin d’année scolaire il se

pose la question de la continuité du parcours. C'est-à-dire que même quand la CDAPH se

prononce en faveur d’un maintien en milieu ordinaire, si les conditions d’accueil ne sont

pas appropriées, les enseignants peuvent s’y opposer ; ce qui est aussi le cas s’il n’y a pas

de place en classe d’inclusion. Quelques enseignants arguent la question de la sécurité due

aux enfants accueillis et la responsabilité pédagogique dans leur classe. Parfois la mise en

évidence de difficultés psychologiques présentées par l’élève devient une ressource

mobilisée par les enseignants pour légitimer leur demande de retrait de la classe. Ce n’est

donc plus la déficience qui fait la non-scolarisabilité de l’élève mais ses conséquences

psychologiques : manque de confiance en soi, difficultés dans la relation à l’autre, manque

de maturité, d’autonomie… Ces conditions génèrent des incertitudes quant à la poursuite

des cycles de la scolarité en milieu ordinaire. Les familles peuvent se mobiliser pour que

leur enfant ait toujours une place en classe. L’inclusion est une affaire de négociations entre

les parents et les enseignants avec parfois l’arbitrage du référent de scolarité. D’ailleurs les

entretiens laissent sous-entendre cette insécurité, renforcée par la décision de la CDAPH

qui met les parents devant une réalité à l’issue incertaine et angoissante.

La fragilité des parcours se retrouve dès la petite enfance. Dans un article233

paru en

2006, les auteurs énoncent que l’accompagnement médico-social précoce se heurte au

découpage par tranche d’âge et provoquerait des ruptures dans le parcours. Ensuite

l’interruption de l’accompagnement scolaire se situerait à l’adolescence. Le CREAI de

Bretagne234

fait part du constat que les adolescents sortant d’ULIS, de SEGPA ou d’EREA

après leurs seize ans, présentent des troubles de la personnalité qui demandent un

accompagnement thérapeutique. L’interrogation porte alors sur la question du diagnostic

qu’il s’agira d’améliorer. Là encore l’expertise des IME peut s’avérer utile.

233

PLAISANCE E., BOUVE C., SCHNEIDER C., « Petite enfance et handicap, quelles réponses au besoin

d'accueil ? », Recherche et prévision, n°84, juin 2006, pp 53-66 234

Évaluation des publics, adaptation des dispositifs : l'exemple des IME, IEM et IEAP n°34 (2010), CREAI

Bretagne, 9 p.

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Quels leviers pour les IME ?

104

Impacts des conditions des ménages

Soutenir les familles demande à les identifier d’abord. L’étude des derniers bilans de

diagnostic d’un IME, sur une centaine de familles durant trois ans, montre qu’il existe une

forte proportion de situations monoparentales, divorcées, ou séparées.

Tableau 8

Situations familiales en IME

2012 2013 2014

monoparentale 5% 10,5% 18%

Séparée/divorcée 35% 31% 36%

En couple /marié 60% 58,5% 46%

Les situations monoparentales sont en augmentation dans les structures. Maintenir un

enfant en milieu ordinaire s’avère-t-il beaucoup plus compliqué pour une femme seule ?

L’orientation en IME est-il une solution plus confortable pour les familles monoparentales

pour surmonter les difficultés affectives et économiques du quotidien ? La précarité

générée dans les ménages monoparentaux est une réelle question sociale à laquelle le

traitement par les politiques publiques en faveur du handicap ne suffit pas. Les IME

deviennent-ils des solutions à la précarisation des situations ?

D’autre part les entretiens révèlent que les parents les plus pauvres en ressources

culturelles, sont les moins contestataires des conditions de l’inclusion et sont également

ceux qui se mobilisent le moins pour maintenir inclusion. Ils sont assistés pour l’étayage

des prises en charge par un SESSAD et plus les prises en charge se multiplient, plus

l’orientation en milieu spécialisé se dessine comme une solution. Donc l’orientation en

IME est proposée plus précocement à ces familles.

Aujourd’hui, au-delà des temps de classe, c’est tout l’accompagnement de l’enfant

dans les rééducations, dans ses modes de garde qui compliquent l’aménagement de la

scolarité. Elle engage un coût financier non négligeable aux ménages malgré les

compensations financières allouées par les allocations.

« J'ai payé des fortunes pour ne pas perdre mon travail parce que j'étais seule avec

mon enfant. Et on m'a refusé le SESSAD parce que j'étais une maman qui travaille et avec

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Quels leviers pour les IME ?

105

un enfant handicapé. Et quand on a un enfant handicapé, la place de la maman c'est à la

maison et pas au travail235

»

Un sixième des mères interrogées avec enfant handicapé déclare vouloir retravailler

pour assurer l’avenir de ses enfants. Cette décision est indépendante du capital socio-

économique de la famille mais aura un impact à long terme pour les ressources des

ménages vieillissants.

Il est impératif de rationaliser les places en IME tout en tenant compte des situations

familiales. Et aussi pour les établissements de se doter d’un service social plus conséquent

permettant de traiter les situations complexes, d’être au plus près des familles et de leurs

difficultés socio-économiques. Par ailleurs les équipes éducatives doivent être formées à

travailler différemment avec les familles, avec leur souffrance, leurs dénis, leurs carences,

leurs moyens financiers, leurs compositions, leurs cultures… dans un principe de

coéducation. Il pourrait être préconisé d’inscrire dans les plans de formation le coaching

pédagogique qui présent les caractéristiques suivantes : selon la demande le coaching peut

être de résolution ou de développement. Le coaching de résolution est adopté lorsque la

personne est confrontée à un problème ponctuel ou récurrent, à ses limites, à son efficacité,

à ses relations, à son stress, à sa communication. Dans cette démarche, les valeurs, les

besoins, les désirs, les perceptions et les croyances du coaché sont décryptés. Le coaching

de développement est plus centré sur une situation cible qui sera analysée, ainsi que les

enjeux, les obstacles et les points d’appui, le but étant de développer les meilleurs moyens

d’atteindre une situation cible. Coacher les parents c’est leur apprendre comment aider leur

enfant et dans quelles conditions (plaisir d’apprendre, de faire ses devoirs), partager ses

angoisses, ses peurs ses inquiétudes et ses soucis scolaires, comment l’aider à avoir

confiance en lui, communiquer avec lui, comment créer un environnement dépourvut de

stress et d’angoisse ; c'est-à-dire savoir comment fonctionne l’enfant afin de mieux

favoriser son épanouissement.

La ruralité comme un frein

L’inégalité des traitements des territoires est flagrante avec des zones suréquipées qui

coexistent avec des quasi-déserts. En France, il existe de nombreuses disparités

235

Entretien Ef5

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Quels leviers pour les IME ?

106

d’équipements entre les territoires, par exemple le sud Vaucluse est un désert en matière

d’équipement médico-social. Le CREAI du Pays de la Loire236

fait part des disparités entre

les départements concernant l’orientation des adolescents de quinze à dix-huit ans. Deux

mêmes situations seront traitées différemment selon le territoire et l’équipement de ce

dernier.

D’après les témoignages recueillis, les conditions de l’inclusion scolaire aujourd’hui

ne sont pas à l’avantage des familles vivant en milieu rural. En effet pour celles qui vivent à

la campagne, les prises en charge en rééducation sont décentralisées, loin de l’école et du

domicile familial. La famille est alors dans l’obligation de se rendre disponible pour

réaliser les accompagnements. La gestion du quotidien, de la fratrie, de l’emploi qui n’est

pas toujours à proximité du domicile, sont certes des composants communs à tous, mais à

ceux-ci s’ajoute la complexité de la gestion concomitante du handicap. Même si un taxi est

parfois mis à disposition, il n’en demeure pas moins que l’enfant en situation de handicap a

un emploi du temps surchargé. Le temps passé dans les transports, les rééducations et les

rendez-vous médicaux provoquent une fatigue supplémentaire à ces enfants qui, déjà, sont

épuisés par la concentration intense dont ils doivent faire preuve au quotidien. Les mamans

témoignent de cela :

« vraiment son emploi du temps était plein. De toute manière je ne me suis pas battue

pour qu'il soit scolarisé davantage parce que de toute façon ce n’était pas... Après l'école,

rajouter l'orthophonie après ce n’est pas la peine. C'est un petit garçon, E c'est un petit

garçon qui est fatigable d'une manière générale. Son emploi du temps était déjà bien

chargé. C'était suffisant237

»

Les établissements comme les IME devront mettre en place une palette de services

sur chaque territoire dans une logique de proximité, s’appuyant sur l’expertise d’ingénieurs

sociaux qu’ils pourraient mobiliser.

De manière générale, l’inclusion n’est pas si bénéfique du point de vue des parents

même s’il y a des situations où l’inclusion scolaire avec certaines conditions que nous

avons repéré. Les parents réalisent que l’inclusion telle qu’elle est proposée ne convient pas

à leur enfant au regard des troubles de l’apprentissage et des difficultés liées à sa

236

Le devenir des IME, Étude régionale (2006/2007), CREAI Pays de la Loire, 83 p. 237

Entretien Ef1

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Quels leviers pour les IME ?

107

socialisation. Á l’IME, les conditions semblent plus appropriées à la poursuite des

apprentissages.

2.3 Á propos de la coopération

Programme institutionnel

Le milieu ordinaire et le milieu spécialisé pourraient se concevoir comme des entités

complémentaires, qui constituent un ensemble pour former un tout : l’éducation. L’école

devrait être accessible à tous. Or quand l’enfant n’en peut plus de l’école, quand les

relations avec ses camarades sont trop difficiles à gérer, quand l’enseignant est confronté à

des problématiques qu’il ne peut résoudre, l’intervention du champ spécialisé devient

nécessaire. Contrairement à l’école où l’enfant doit se dominer, le SESSAD et les IME sont

des endroits de libre expression du mal-être : crier, se mettre en crise parce qu’on en a

assez, parce qu’on n’en peut plus. Une maman dit à ce propos le comportement de son

enfant en classe : « Il n’avait pas envie de travailler. Quand il n’a pas envie, il n’a pas

envie. Quand il n’avait pas envie il balançait tout pour dire « je ne veux pas travailler238

»

Parfois l’enfant ne désire plus se rendre à l’école et c’est là l’un des enjeux des

établissements spécialisés : réconcilier l’enfant avec le système éducatif par le biais des

unités d’enseignement. Il s’agit d’une continuité de ce qui a déjà été entrepris au niveau des

apprentissages, c’est pourquoi les enseignants ont tout intérêt à rencontrer lors de la

réunion d’admission et lors des PPS, les anciens professeurs de l’élève. Ce n’est pas

d’actualité dans les établissements, la transition se fait pour l’instant via un dossier, et il

serait intéressant de formaliser autrement la passation.

Ce qui entre en jeu dans l’inclusion, ce ne sont pas uniquement les compétences ou

les résultats scolaires, mais aussi les interactions. La cohabitation de ces enfants aux profils

hétérogènes est décrite comme la principale des difficultés rencontrées par les enseignants.

D’après l’enquête les enseignants se sentent isolés face à ces situations et sont prêts à

accepter les interventions des professionnels spécialisés dans leur classe. Mais le secteur

médico-social est-il préparé à intervenir davantage dans l’école ? Il s’agit d’un

re/déplacement du lieu du programme institutionnel. L’obligation scolaire suppose un

238

Entretien Ef3

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Quels leviers pour les IME ?

108

engagement fort des acteurs (Institution, Éducation nationale, famille…) dont les logiques

doivent être rendues complémentaires. La créativité de chacun des partenaires doit faire

preuve d’originalité et de pertinences dans le cadre d’une collaboration assumée en

respectant les projets des jeunes et de leur famille.

Glissement du sanitaire vers les IME

Si le secteur spécialisé est en adéquation avec la déficience, il lui fait un bon accueil

mais se trouve plus en difficulté pour traiter des problématiques de l’autisme et de troubles

mentaux. Plusieurs innovations tentent de faire vivre l’idée d’une coordination et d’une

continuité des soins. Le manque d’équipement des dispositifs de soin, en psychiatrie

notamment, déplace les jeunes en souffrance vers le médico-social qui ne peut traiter les

troubles et ne correspond pas à leur problématique. Le glissement du sanitaire vers le

médico-social provoque un déphasage des interventions sociales. La multiplication des

actions d’articulation du sanitaire vers le médico-social pose la question de leur

coordination à l’échelle des acteurs de terrains mais aussi à l’échelon interministérielle.

D’ailleurs le compte rendu du GEPso239

propose de valoriser les accords entre le

milieu spécialisé et le système de soins car leur désaccord implique des ruptures de

parcours. Les associations d’usagers en santé mentale dénoncent les délais d’attente, des

prises en charge très lentes à démarrer et un manque de continuité des soins. Le rapport

Piveteau240

demande une réorganisation du secteur sanitaire et social. Ces secteurs

fonctionnent de façons diverses mais très autocentrées. La non-coopération entre

professionnels se caractérise par l’absence de rencontres soit par isolement, retrait ou

indifférence, méfiance ou désaccord éthique qui parfois peuvent aboutir à des actions

thérapeutiques contradictoires et de mauvaises orientations. Les propositions annoncées ne

sont pas de réserver des places dans les structures pour les « situations critiques » mais

plutôt d’accompagner les situations difficiles tout en maintenant les liens entre les

structures. Organiser la transversalité des parcours c’est initier des changements de

méthodes de travail pour tous ceux ayant affaire au handicap mental. Afin de garantir la

sécurité du parcours il apparaît urgent de monter des conventions avec les organismes de

239

BRIENS J., « La désinstitutionalisation : Rupture ou alternative à vivre ensemble ? », bulletin du

Geps’info, n° 126, mars 2013, pp 10-11 240

PIVETEAU D., (2014), « Zéro sans solution » : Le devoir collectif de permettre un parcours de vie sans

rupture, pour les personnes en situation de handicap et pour leurs proches, 87 p.

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Quels leviers pour les IME ?

109

soins publics et privés de psychiatrie manière de proposer un lieu de répit pour les IME

cette fois-ci.

3. Des organisations d’éducation spécialisée en changement

3.1. Déraciner les cultures professionnelles

La France a une approche différente du traitement du handicap par rapport à d’autres

pays européens. Dans les faits, comme nous indique l’enquête, et dans les esprits

l’inclusion progresse.

Les premières méthodes d’éducabilité datent du XIXe siècle et proposent des

procédés pédagogiques adaptés. De toute évidence nous constatons que les préoccupations

concernant les enfants « anormaux » sont bien antérieures à la loi de 2005. Désiré-Magloire

Bourneville considérait que l’épanouissement des enfants en difficultés pouvait se réaliser

parmi un groupe hétérogène en milieu scolaire. Á l’aube des années 60 et 70, les classes de

perfectionnement, qui à l’origine s’adressaient aux élèves handicapés, deviennent des

classes hétérogènes accueillant davantage d’élèves en difficultés scolaires. Saisissant

l’opportunité, le secteur médico-éducatif ne cessa d’occuper le domaine de l’éducation

spécialisée depuis l’après-guerre. L’Éducation nationale reprend du terrain avec la loi de

2005 qui va modifier les rapports entre l’école, les établissements spécialisés et les services

de soins. Les cultures professionnelles se rencontrent, elles qui depuis longtemps sont

nettement caractérisées et distantes.

Il commence à se développer une complémentarité entre l’école ordinaire et les

milieux spécialisés. La volonté d’une culture commune implique des formations conjointes

qui commencent à s’instaurer, comme en novembre 2014 où se sont déroulées des actions

communes de formation entre les ARS, la MDPH, des conseillers techniques et des

inspecteurs en ASH, des médecins et conseillers techniques des secteurs…

Le développement de l’inclusion scolaire bouleverse les pratiques professionnelles et

nécessite des moyens pour répondre à la demande. Or à ce jour les moyens matériels ou

humains, comme nous l’avons constaté lors des entretiens, ne semblent pas encore

suffisants. Il manque, entre autres, des places en classe d’inclusion, des places en IME, en

structure de soins, dispensées en ambulatoire, en accueil séquentiel etc. Outre les difficultés

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Quels leviers pour les IME ?

110

inhérentes à l’installation d’un programme inclusif, les changements engagés nécessitent

des bouleversements des cultures professionnelles.

Nous pouvons parler dans une moindre mesure du commencement de l’acceptation

du processus inclusif, « processus par lesquels un groupe social modifie les individus qui

lui viennent de l'extérieur et les intègre à sa propre civilisation241

». Selon Norbert Alter, la

règle veut que l’innovation bute toujours sur l’ordre établi. L’acceptation de l’inclusion ne

se décrète pas uniquement par la loi de 2005 ni par la formation, elle se négocie.

Néanmoins ce projet de société qui est de rendre l’école accessible à tous pour préparer de

futurs citoyens, fait encore débat.

Dans un rapport du CREAI242

de 2010, il apparaît que malgré ces lois, il demeure

encore des réticences de l’institution scolaire à pratiquer l’intégration. Il en est de même au

sein des établissements spécialisés qui présentent des caractéristiques communes, avec du

personnel-reclus pour reprendre les termes de Goffman. Universaliser l’inclusion dans cette

filière institutionnelle fait encore contestation alors que beaucoup d’experts constatent

qu’au bout d’un à deux ans, en général, en classe ordinaire, il y a réussite dans le sens où

l’école apporte un plus au niveau social. L’inclusion laisserait des traces positives en

matière de socialisation.

Réformer le système éducatif c’est aussi une manière de sensibiliser le grand public et

démystifier le handicap. Pour résumer les propos de ce chapitre il convient d’utiliser une

citation de Charles Gardou : « Transformer notre culture pour faire advenir une

communauté vraiment humaine, c’est ainsi autoriser les personnes en situation de handicap

à exister au-delà des préjugés, en favorisant l’expression de leurs potentiels, de leurs désirs

et de leur parole243

».

3.2 Éduquer à l’orientation professionnelle

Au vu de l’ensemble des éléments récoltés, nous pouvons valider l’hypothèse selon

laquelle le processus d’inclusion scolaire ne permet pas aux enfants avec déficience

intellectuelle de poursuivre leur scolarité jusqu’à son terme. Á ce jour la réalisation de la

scolarité en IME des adolescents semble plus adaptée à leur problématique et prépare

241

http://www.cnrtl.fr/, consulté le 13 juin 2015 242

Évaluation des publics, adaptation des dispositifs : l'exemple des IME, IEM et IEAP n°34, (2010), CREAI

Bretagne, 9 p. 243

GARDOU C., (2012), La société inclusive, parlons-en, Erès, Toulouse, 167p (p 120)

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Quels leviers pour les IME ?

111

mieux à l’orientation dans le secteur adulte. Avec le rétrécissement des dispositifs après le

collège, l’orientation professionnelle des adolescents en situation de handicap se révèle

problématique. Les adolescents ne semblent pas y être préparés et les enseignants

connaissent trop peu les parcours professionnels possibles pour les personnes en situation

de handicap. C’est pourquoi l’intervention sociale des établissements spécialisés se

montrerait plus compétente pour la recherche d’une orientation appropriée au futur adulte

en situation de handicap. Les établissements médico-éducatifs sont plus à même d’orienter

vers un secteur handicap/adulte.

Les acteurs de l’accompagnement à l’orientation en milieu ordinaire sont peu formés

et démunis face à ces publics qui revendiquent l’accès à la formation et à l’emploi. Les

enseignants qui préparent l’orientation professionnelle des adolescents relatent leurs

difficultés. Ils doivent mettre en place des stages professionnels mais l’isolement

géographique limite cet exercice ainsi que le manque de connaissances du milieu

professionnel accessible au handicap.

« Là où j'ai du mal cette année c’est de les préparer à la formation professionnelle.

Ça c’est vachement compliqué. Moi je voudrais qu'ils fassent des stages. Je voulais en

lancer cette année mais je ne suis pas de R. je connais pas du tout ; alors du coup on a

parlé des métiers qu'ils voulaient faire, des compétences qu'il fallait ; y a la coopérative

qui est venue, on va participer au forum des métiers. Il y a une ULIS lycée qui vient, la

MFR (…) Là c’est pareil je vais chercher avec la mairie s’ils ont un partenariat pour un

minibus ; passer une convention, un bus de 8 places que je peux conduire. C'est ça qui

freine ici dès qu'on veut aller quelque part244

»

On voudrait que les jeunes aient réglé à 16 ans ce que les jeunes « ordinaires » n’ont

pas réglé à 18 ans : stages, choix de formation, projet professionnel. Dans cette perspective

les IME sont confrontés à un défi pour répondre aux besoins en matière d’orientation telle

que le décret de 1990 l’opérationnalise : « l’orientation est le résultat du processus continu

d’élaboration et de réalisation du projet personnel de formation et d’insertion que l’élève

mène en fonction de ses aspirations et de ses capacités245

» ; pour cela un certain nombre de

dispositifs préparatoires à l’insertion professionnelle des adolescents handicapés sont

244

Entretien Ep7 245

Décret 90-484 du 14 juin 1990 relatif à l’orientation et à l’affectation des élèves

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112

préconisés. La transition vers l’âge adulte des jeunes handicapés et en particulier leur

insertion professionnelle reste encore sujette à de nombreux progrès. Les IME devront

jouer un rôle dans la réalisation des parcours de découverte des métiers et des formations,

dans l’accompagnement personnalisé, dans les mises en situation de stage en entreprise

adaptés ou spécialisée (ESAT), d’entretiens personnalisés, d’évaluation des potentialités de

travail… Ils pourront être force de proposition dans l’accompagnement spécifique au

moment où se vit la transition élève/travailleur. L’outil personnalisé qui sera proposé par

les IME devra répondre aux besoins d’éducation à l’orientation (développer une

connaissance de soi, une connaissance des métiers et des formations) et être capable de

construire un projet de vie personnalisé. Il serait même intéressant de construire un outil

d’évaluation faisant valoir les capacités, les compétences, les aptitudes à l’emploi,

s’appuyant sur les expériences de travail via les stages, sur des entretiens réguliers entre le

jeune et son accompagnateur (chargé d’insertion par exemple) qui met en avant les

aspirations, les potentialités et les choix. Ce serait un vecteur de compensation du handicap

pour promouvoir l’accessibilité aux formations et à l’emploi.

3.3 Le « case manager »

Dans cette partie nous dresserons une focale sur les prospectives des IME, non pas

comme de réelles nouveautés mais comme une suite logique d’une évolution qui obéit aux

tendances de la désinstitutionalisation et de l’inclusion scolaire. Il s’agit bien d’un

changement global et cohérent. L’inclusion passe par une brisure de l’enfermement faisant

tomber les murs physiques mais aussi comportementaux. Rappelons que la

désinstitutionalisation est déjà en marche depuis de nombreuses années au travers du

développement progressif de services d’accompagnement ou de soin en tous genres :

SEESSAD, SAVS, SAMSAH… (Les places en SESSAD se sont accrues depuis 15 ans à la

faveur de l’accompagnement d’enfant avec autisme et non déficient ou porteur de troubles

mentaux). Elle ne consiste pas seulement à remplacer les établissements par d’autres

services hors murs mais à reconfigurer les dispositifs. Ainsi nous nous intéressons à une

nouvelle organisation.

Encore trop cloisonnés, les IME ont tout intérêt de changer et d’adapter leur modèle.

Ils pourraient s’organiser comme une plateforme de coordination des interventions sociales

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113

dans le champ du handicap. Sous la forme d’offre de services, mais pas comme un

empilement de service, ils seraient au service des familles pour aider à la réalisation du

projet de vie de l’enfant handicapé. Une sorte de centre ressource, pour le public en

situation de handicap mental et sa famille, qui ferait le lien entre les acteurs, les usagers et

les dispositifs de territoire. Cette « plateforme ressources » s’adresserait à tous les usagers,

les enfants et adultes afin de fluidifier le parcours et proposer une cohérence du suivi entre

les dispositifs. En effet le parcours ne s’identifiera plus à son séjour en établissement mais

sera constitué, comme pour chacun d’entre nous, d’une série d’étapes et de changement en

tous genres (modes de vie, activités scolaires, professionnelles, formation…). Dans une

logique d’amélioration du procédé inclusif, suivant les principes de la

désinstitutionalisation, le coordinateur de parcours offrirait une vision globale des

problématiques sans se cantonner à la classification par catégorie d’âge ou par déficience

ou par territoire. Il pourrait se concevoir de la manière suivante :

Selon le schéma réalisé, il apparaît une vision plus transversale de

l’accompagnement. Ce processus consisterait à chaque fois que possible de solliciter les

dispositifs de droits communs. Dans ces perspectives, il serait tout à fait possible

d’envisager l’émergence d’un nouveau métier : coordinateur. En s’inspirant du modèle

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finlandais décrit précédemment, les professionnels en charge du parcours seraient des

accompagnants de la personne en situation de handicap tout au long de son parcours de vie.

Ils se distingueraient du référent MDPH qui oriente mais n’accompagne pas, qui est éloigné

des problématiques rencontrées au quotidien et des acteurs de terrain. Ils se distingueraient

du référent de scolarité dont sa tâche est de s’occuper de l’enseignement scolaire et parfois

professionnelle. Les missions des coordinateurs diffèrent de celles du SESSAD dans le sens

où l’accompagnement dépasserait le cadre familial et scolaire. Cette coordination

nécessiterait chez les opérateurs la création d’une cellule en charge :

- d’identifier la situation de chaque enfant reconnu comme handicapé mental,

- de réaliser un check up des besoins, des atouts, des ressources afin de planifier un

projet personnalisé de développement au plus juste des besoins et des conditions

requises,

- de créer du lien entre tous les acteurs qui s’occupent du jeune.

L’enjeu est de réussir à passer d’une logique de juxtaposition des réponses à un

maillage des réponses avec des dispositifs plus souples, en lien entre eux, instituant un

diagnostic partagé. Le Case Management est une méthode d'accompagnement spécifique

permettant de gérer les questions complexes relevant de l'action sociale, de la santé et de

l’éducation. Dans un processus coopératif, il propose des prestations de qualité répondant

aux besoins individuels. Cela pourrait initier une nouvelle profession au sein des IME, le

« case manager » : se présente comme un modèle d’intervention personnalisé auprès de cas

très complexes, avec pour triple objectif l’autonomie, la socialisation et l’accès à l’emploi

du bénéficiaire. Cette démarche, par essence personnalisée et transverse, implique des

acteurs issus d’univers très différents (psychologues, médecins, associations de familles,

secteur public…), que le case manager a pour mission de mettre en mouvement dans le

sens de la concrétisation du projet défini avec le jeune en situation de handicap.

En conclusion les IME pourraient devenir une plateforme collaborative qui offrirait

un ensemble de prestations, de services, répondant aux problématiques inhérentes à

l’accessibilité au milieu ordinaire ; allant du soutien à la parentalité, de l’aide à la

réalisation de l’inclusion auprès des enseignants, à la formation professionnelle et à

l’orientation des adolescents en situation de handicap. Néanmoins malgré cette organisation

qui demande l’accessibilité aux droits communs, il y aura toujours un public pour lequel

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Quels leviers pour les IME ?

115

cette propriété ne sera pas envisageable. Pour celui-là l’établissement devra demeurer dans

sa forme traditionnelle et impliquera un accueil pour les enfants plus lourdement

handicapés, pour les autistes avec une déficience intellectuelle, les polyhandicapés… Déjà

une étude du CREAI246

parue en 2010 fait le constat que dans les établissements

spécialisés, la scolarisation des enfants ayant une déficience moyenne a grimpé jusqu’à

66 % en 2006 alors qu’elle n’était que de 52 % en 2001. Á terme la scolarisation en milieu

spécialisée qui s’adresse aujourd’hui à 91 % à des enfants présentant une déficience légère,

devrait se réaliser dans le droit commun. L’ensemble de ces évolutions impliquerait de

modifier les projets d’établissement. Ce nouveau genre d’organisation présente des

conséquences sur des plans financiers, managérial, des pratiques professionnelles et

fonctionnelles (équipement adapté au handicap lourd, personnel spécialisé dans la

dépendance…). Les préconisations actuelles donneraient un nouvel élan aux modalités

d’accès au savoir sur les enfants en situation de handicap mental.

246

2001-2006 Évolutions marquantes dans les EMS à partir des données des enquêtes ES de la DREES,

(2010), CREAI PACA et Corse, 51 p.

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Quels leviers pour les IME ?

116

CONCLUSION

Nous avons vu que le champ du handicap a été transformé en profondeur, tant du

point de vue conceptuel que des cadres et des registres de l’action et des politiques

publiques. Nous avons constaté que le handicap interroge et exige des innovations pour

assurer la protection sociale.

La recherche dans le champ des déficiences intellectuelles s’est développée

considérablement au cours des dernières décennies. Toutefois il est important de

poursuivre les recherches247

afin d’établir les forces et les limites des interventions pour un

meilleur développement et accompagnement des enfants et adolescents avec déficience

intellectuelle. C’est ce à quoi contribue, en toute modestie, ce mémoire. Il tente de mieux

cerner les difficultés dans la vie scolaire des jeunes et de leurs proches, à chacun des cycles

de la vie ; ceci en identifiant les ressources, les stratégies, les adaptations à mettre en œuvre

par les acteurs de la scolarité quel que soit le milieu, inclusif ou non.

Nous sommes partis du constat de l’hétérogénéité du public accueilli en IME.

S’appuyant sur les politiques publiques en faveur du handicap, nous avons exploré deux

processus qui semblaient pertinents d’examiner avec attention pour l’expliquer : la

désinstitutionalisation et l’inclusion scolaire.

L’application des principes de la désinstitutionalisation vise à réduire l’intervention

sociale avec hébergement en établissement. Elle s’est beaucoup développée dans le secteur

sanitaire au départ et semble s’étendre au secteur médico-éducatif. Soutenue par les

instances européennes, elle donne lieu au développement de services de proximité. Encore

trop peu utilisé comme mode d’accompagnement dans le médico-social, ils ne permettent

pas de satisfaire l’ensemble des besoins et ne peuvent prétendre à répondre à l’ensemble

des demandes toujours croissantes. Quoi qu’on en dise, actuellement, les IME n’offrent pas

assez de places en établissement, ils ont des listes d’attente pour y entrer et laissent encore

des enfants et adolescents en situation de handicap sans solution et sans prise en charge.

Prétendre qu’il n’y a plus besoin d’établissements comme les IME, signifierait que tous les

enfants et adolescents accueillis actuellement en IME, aient tous leur place dans les écoles

247

Déficiences intellectuelles, expertise collective, synthèse et recommandations, (2016), INSERM, 80 p.

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Quels leviers pour les IME ?

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ordinaires et soient insérés dans tous les dispositifs de droit commun. La

désinstitutionalisation ne se met en pratique seulement si la société est plus inclusive, non

discriminante, dont l’accessibilité est réelle. Or nous nous apercevons qu’aujourd’hui la

situation observée ne fait pas totalement usage du principe inclusif.

Vient donc s’ajouter le deuxième processus étudié : l’inclusion scolaire. Elle a pour

principe de maintenir, en milieu ordinaire, l’enfant ou l’adolescent en situation de

handicap. Rendre possible l’accès à l’école des enfants handicapés, c’est donner la liberté

aux futurs adultes de la société de construire un nouveau « vivre ensemble ». Or l’enquête

a souligné que l’inclusion ne s’adresse pas aux enfants et encore moins aux adolescents

porteurs d’un handicap mental. Les conditions d’inclusion, aujourd’hui, ne sont pas à

l’avantage des jeunes ni des familles qui subissent des contraintes fortes. Bien vivre son

inclusion c’est offrir à l’enfant les moyens de s’épanouir, ce qui ne semble pas le cas pour

certains enfants. Non pas qu’il s’agisse de s’opposer à ce mouvement, mais pour qu’il soit

adéquat, des améliorations doivent être proposées. Aussi il semble nécessaire de maintenir

les établissements pour tous ces enfants qui ne peuvent prétendre la scolarisation ou pour

ceux désirant poursuivre leur professionnalisation. Ce sont ainsi des opportunités pour les

IME de faire valoir leur expertise.

Aujourd’hui les IME quittent leur représentation réticulaire de filière et adaptent leurs

accompagnements à un public souffrant de déficiences intellectuelles avec des troubles

associés, des troubles psychiques, de l’autisme, aux nouvelles configurations de la famille,

dans un contexte inclusif sur fond de crise économique et de restrictions budgétaires. Par

leur pluridisciplinarité les IME permettent de centraliser toutes les rééducations et par là

même simplifient le quotidien des familles. Les mères peuvent ainsi envisager d’autres

projets de vie que celui de s’occuper de leur enfant handicapé. Les IME deviennent un lieu

de répit pour les parents. Pour les enfants porteurs d’autisme avec déficience intellectuelle,

ils proposent la possibilité de suivre une scolarité et d’être pris en charge parmi d’autres

enfants du même âge tout en profitant de méthodes de stimulation comme par exemple le

système de communication par échange d’images (PECS)…

Les analyses, les réflexions et les perspectives précitées en troisième partie du

mémoire, permettent de conclure que les établissements spécialisés doivent réfléchir à

leurs attributions actuelles et futures pour proposer d’autres domaines de compétence et

d’autres missions. Les IME sont des organisations en mouvement et comme le signifie

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Quels leviers pour les IME ?

118

Norbert Alter, elles sont « le flux du changement des hommes et de leur action248

». Pour

innover, les IME pourraient développer des stratégies de formation, faisant part de leur

expertise dans le champ du handicap par la diffusion et la production de connaissances. Il

serait inventif que les IME deviennent une ressource pour les écoles du milieu ordinaire

proposant des formations aux enseignants, aux AESH, aux responsables des centres

d’accueil du peri-scolaire. Pour faciliter l’action des nouvelles pratiques, les IME ont pour

intérêt de produire de l’interconnaissance, c'est-à-dire de faire connaître les ressources,

d’en développer de nouvelles et surtout soutenir la formation interprofessionnelle.

Il pourrait être intéressant de transformer, pour une partie, les structures

d’accompagnement d’adolescents en service d’éducation professionnelle, d’aide à la

recherche de stage, de formation professionnelle, de recherche d’emploi. Les IME

pourraient proposer une scolarité plus professionnalisante en vue d’une orientation en

secteur adulte.

Une des préconisations du rapport Piveteau249

« zéro sans solution » porte sur le

soutien des établissements médico-sociaux comme accompagnant lors de situations

difficiles. « les IME (…) deviennent alors des partenaires ressources pour permettre une

plus grande compréhension des problématiques de l’enfant250

». Les professionnels de

l’action sanitaire, sociale et médico-sociale se heurtent à des situations de handicaps

dépendant de plusieurs champs institutionnels. Les IME pourraient alors proposer une

autre forme de prise en charge se rapprochant du « case managers » ou « gestionnaire de

cas » qui aurait en charge la coordination, serait une ressource multidisciplinaire et

multisectorielle, facilitant une continuité de parcours et un projet de vie plus adapté.

En conclusion, l’enquête révèle qu’aujourd’hui l’inclusion scolaire bénéficie aux

enfants ayant un handicap léger dont les parents sont engagés. Pour les familles les plus

démunis, les femmes seules notamment, l’établissement est une solution pour laquelle elles

trouvent des bénéfices tant sur le plan éducatif qu’économique. La prise en charge en

établissement permet de redonner vie à des projets professionnels. Finalement l’institution

spécialisée serait un moyen, dans certaines situations familiales, de lutter contre la

précarité des ménages avec un enfant handicapé. Il a ainsi été démontré que malgré les

248

ALTER N., (2003) L’innovation ordinaire, PUF, Paris, 278 p 249

PIVETEAU D., (2014), « Zéro sans solution » : Le devoir collectif de permettre un parcours de vie sans

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119

processus de désinstitutionalisation et d’inclusion scolaire, les IME font admettre leur

valeur s’adaptant aux conceptions contemporaines du handicap. Alors ils prouvent leur

utilité et renforcent l’idée qu’en France, les établissements médico-sociaux, tels qu’ils sont

conçus, sont toujours indispensables à l’accompagnement des enfants et adolescents en

situation de handicap.

L’argument de la loi n’est pas toujours efficace, longtemps cette loi ne fut pas

appliquée et c’est encore le cas aujourd’hui. Malgré les avancées notables et l’importance

des moyens déployés, l’inclusion scolaire continue à donner lieu à des attitudes allant à

l’encontre de sa finalité. Même si l’école revendique un principe d’égalité, elle rend les

élèves handicapés inégaux par la série d’épreuves qu’ils doivent franchir, dépendant des

ressources familiales et des supports disponibles pour l’accueil en classe. L’accessibilité

pour les jeunes porteur d’un handicap sensori-moteur semble plus réalisable que pour ceux

présentant des déficiences intellectuelles et/ou des troubles psychiques.

Les préconisations tirées des résultats de l’enquête n’engagent qu’une vision

parcellaire de la problématique. Nous pouvons nous demander quel est le devenir de ces

jeunes adultes en situation de handicap à la sortie des IME. Les dispositifs pour adultes

handicapés poursuivent-ils les mêmes engagements d’inclusion sociale et professionnelle ?

Qu’est-ce qui pose problème aux dispositifs pour adultes en situation de handicap dans

l’émergence des actions sociales desinstitutionalisées ? Ces interrogations soulèvent encore

la question de la continuité du parcours de l’usager en situation de handicap.

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Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

124

Santé, Société et Solidarité, n°2, 2005, pp 135-143

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ZAFFRAN J., (2007), Quelle école pour les élèves handicapés ?, La découverte, Paris,

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ZRIBI G. et RICHARD J-T., (2013), Polyhandicaps et handicaps graves à expression

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Rennes, 196 p

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2015 Les clés de l’aide à l’autonomie, (juin 2015), CNSA, 15 p.

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2001-2006 Évolutions marquantes dans les EMS à partir des données des enquêtes ES de

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Accompagnement des élèves en situation de handicap (L’). Les prescriptions : état des

lieux-propositions, rapport 2012-162, (février 2012), DELAUBIER J-P., AMARA F.,

GARAGLIO M., 56 p.

Accueil des enfants handicapés dans les établissements et services médico-sociaux, Études

et résultats (L'), (2013), DREES document de travail série statistique n°832, 6 p.

Analyse comparée des schémas départementaux « handicaps » de la région PACA en cours

de validité au 1er

mars 2012, (mars 2012), CREAI PACA et Corse, 32 p.

Déficiences intellectuelles, expertise collective, synthèse et recommandations, (février

2016), INSERM, 80 p.

Devenir des bénéficiaires d'une orientation prononcée par la CDAPH en établissement ou

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PETITE Laure - Mémoire DEIS

Nom du mémoire : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

125

service médico-social (2012), CREAI Languedoc-Roussillon, 97 p.

Devenir des IME, Étude régionale (Le) (2006, 2007), CREAI Pays de la Loire, 83 p.

Données chiffrées sur le handicap en région 2014, (2014), CREAI PACA et Corse, 50 p.

Éléments de connaissance sur l'intégration scolaire et sur le devenir après la classe de

troisième des enfants en situation de handicap en région PACA, (2005), CREAI PACA et

Corse, 37 p.

Établissement et service pour enfants et adolescents handicapés, résultat de l’enquête ES

2010, (2013), DREES document de travail série statistique n° 177 et (2004), n° 71, pp 11-

37

Éthique des établissements et services médico-sociaux (L'), (2012), recommandations

ANESM, 92 p.

Évaluation des publics, adaptation des dispositifs : l'exemple des IME, IEM et IEAP n°34,

(2010), CREAI Bretagne, 9 p.

Institution, désinstitutionalisation, (2008), Conseil Français des personnes Handicapées

pour les questions Européennes, 53 p.

Handicap en chiffres (Le), (2004), Centre Technique National d'Etudes et de Recherches

sur les Handicaps et les Inadaptations, 70 p.

Handicap et protection de l’enfance : des droits pour des enfants invisibles, (2015), Le

défenseur des droits, 119 p.

Lettre du CREAI PACA et Corse (La) n° 23, (janvier 2015), CREAI PACA et Corse

MDPH : au carrefour des politiques publiques, synthèse des rapports d'activité 2011 des

MDPH, (2012), CNSA, 102 p.

Pour l'égalité des chances des jeunes en situation de handicap dans notre région, (2010),

CREAI PACA et Corse, 88 p.

Pratiques territoriales des SESSAD en région PACA : le poids des héritages, (2012),

CREAI PACA et Corse, 66 p.

Professionnaliser les accompagnants pour la réussite des enfants et adolescents en

situation de handicap, Etat des lieux –préconisations, (2013), KOMITES P., 79 p.

Programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte

d’autonomie 2014-2017, (2014), ARS, 13 p.

Programme pluri annuel de création de places en établissement et services pour un

accompagnement du handicap tout au long de la vie, (2011), CNSA, 33p.

Répit : une nécessité et un droit pour les aidants familiaux (Le), (2010), Note de synthèse

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Quels leviers pour les IME ?

126

COFACE handicap, 8 p.

Scolarisation des jeunes handicapés (La), (mai 2012), Direction de l'évaluation, de la

prospective et de la performance, note d'information, 8 p.

Secteur médico-social comprendre pour agir mieux (Le), (2013), CNSA et ANAP, 117 p.

Traitement de la grande difficulté au cours de la scolarité obligatoire(le), rapport 2013-

095, (2013), DELAUBIER J-P. et SAURAT G., 169 p.

Transition des institutions vers les services à base communautaire (la), (2014), déclaration

du groupe Européens d'Experts, 192 p.

Rapport du groupe d'expert ad hoc sur la transition des soins en institution aux soins de

proximité, (2009), Commission européenne, 26 p.

Rapport parlementaire : La scolarisation des enfants handicapés loi du 11 février 2005.

Conséquence sur les relations entre les institutions scolaires et médico-sociales.

Importance du partenariat avec les collectivités locales, (2005), GEOFFROY G., 24 p.

Rapport triennal de l’Observatoire national sur la formation, la recherche et l’innovation

sur le handicap, (2011), La documentation Française, 258 p.

Rapport sur l'évolution des mentalités et changement du regard de la société sur les

personnes handicapées. Passer de la prise en charge... à la prise en compte, (2011),

CHOSSY J-F, 127 p.

« Zéro sans solution » : Le devoir collectif de permettre un parcours de vie sans rupture,

pour les personnes en situation de handicap et pour leurs proches, (2014), PIVETEAU D.,

87 p.

Conférences :

LOUBAT J-R. et alii., Pôle Ressources Recherche et Intervention Sociale, Les nouvelles

figures de l’intervention sociale, organisé à/par l’IRTS de Marseille et le Collège

coopératif d’Aix en Pce, le 26 novembre 2015

BAUDURET J-F., MAZEREAU P. et alii., Sortir de l’IME, 2éme

journées nationales des

IME, organisé par l’ancreai à Clermont-Ferrand les 4, 5 et 6 novembre 2015

Sites Internet :

Depp.diffusion@Éducation.gouv.fr,

http://observatoire-reussite-educative.fr/,

http://www.apajh.org,

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Quels leviers pour les IME ?

127

http://www.cahiers-pédagogique.com,

http://www.cfhe.org/fonds.htlm,

http://www.cnrtl.fr/,

http://www.cnrtl.fr/definition/institution,

http://www.ec72.fr/Files/100783/critere_orientation_ime.pdf,

http://www.creai-aquitaine.org

http://www.ecoles.ec56.org/IMG/pdf/Annexe_8_bis_Orientation_Reperes_IME.pdf,

http://www.Éducation.gouv.fr,

http://www.ilo.org/safework_bookshelf/french?content&nd=857170193,

http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATTEF0624,

http://www.irts-pacacorse.com/content/download/316/2012/file/bo_handicap.pdf,

http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais,

http://www.oecd.org,

http://www.persee.fr,

http://www.psychologies.com,

http://www.rolandjanvier.org,

http://www.udsmed.ustrasb.fr,

https://fr.wikipedia.org/,

www.coface-eu.org,consulté,

www.jbthiery.asso.fr,

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Quels leviers pour les IME ?

128

TABLE DES MATIERES

TABLE DES SIGLES ET DES ABRÉVIATIONS

INTRODUCTION p 1

I HANDICAP MENTAL : QUELLES PRISES EN CHARGE ? p 6

1. Un panel de dispositifs p 6

1.1 Des organisations d’accompagnements spécialisés p 6

1.2 Accessibilité scolaire en milieu ordinaire p 9

a. La déficience intellectuelle à l’assaut de l’école p 10

b. Scolarisation individualisée, une modalité répandue p 14

c. Les classes spécialisées en établissement scolaire p 17

d. Scolarisation en milieu ordinaire, de qui parle-t-on ? p 20

1.3 Le bout du bout de la scolarisation p 21

a. La scolarisation en unité d’enseignement dans les IME p 23

b. Des enfants en situation de handicap sans scolarisation p 24

1.4 Hétérogénéité et déficience en IME p 25

a. Le handicap, une définition multifactorielle et évolutive p 25

b. Mouvement du sanitaire vers le médico-social p 27

c. Les catégorisations du handicap au sein des IME p 28

2. Élaboration de la problématique et hypothèses : accessibilité à la scolarité dans

le droit commun, quelles opportunités pour les IME ?

p 30

2.1 Formulation du questionnement p 30

2.2 Propositions d'hypothèses p 31

II LA RECHERCHE DE TERRAIN p 33

1. Méthodologie p 33

1.1 Le corpus documentaire p 33

1.2 Le dispositif d’enquête par entretiens p 34

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2. Les premiers résultats de l’enquête : la scolarisabilité p 36

2.1 Du point de vue des professionnels de l’Éducation nationale p 37

a. Les problématiques référencées p 39

b. Ce que l’inclusion signifie aux enseignants p 43

c. Quand l’orientation en IME se profile p 47

2.2 Vivre la scolarité de son enfant handicapé p 52

a. Les rencontres avec des parents p 53

b. Une discrimination ressentie P 55

c. Situation sur-handicapante pour les parents P56

d. Quand l’école ne convient plus p 59

3. Des transformations conceptuelles : de l’éducabilité à l’inclusion p 64

3.1 Une approche de la désinstitutionalisation p 64

a. Définir l’institution p 64

b. Évolution des instituts dans l’histoire p 65

c. La naissance des politiques d’accessibilité p 70

3.2 La dynamique européenne p 75

a. Les recommandations de l’Europe p 75

b. Conséquences sur les interventions sociales en France p 77

3.3 Les défis de l’inclusion scolaire p 79

a. Vers une éducation inclusive p 80

b. Lutte contre l’exil scolaire p 82

c. Par extension… p 83

3.4 L’innovation au service du handicap p 86

a. De l’expérimentation à l’innovation p 86

b. La séquence du processus p 88

III ANALYSE DES INFORMATIONS ET PRECONISATIONS p 90

1. Tendances et perspectives des IME p 90

1.1 Configuration nouvelle des IME p 90

1.2 S’inspirer du modèle finlandais p 93

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2. Les conditions de l’accessibilité scolaire aujourd’hui p 94

2.1 Formation et perfectionnement du personnel p 96

2.2 Ces petits riens qui nuisent aux familles p 100

2.3 Á propos de la coopération p 107

3. Des organisations d’éducation spécialisée en changement p 109

3.1 Déraciner les cultures professionnelles p 109

3.2 Éduquer à l’orientation professionnelle p 110

3.3 Le « case manager » p 112

CONCLUSION p 116

BIBLIOGRAPHIE p 120

ANNEXES p131

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Quels leviers pour les IME ?

131

ANNEXES

TABLE DES ANNEXES

ANNEXE N° 1 : GEVA-SCO

ANNEXE N° 2 : GRILLE D'ENTRETIEN POUR LES PROFESSIONNELS

ANNEXE N° 3 : GRILLE D’ENTRETIEN POUR LES FAMILLES

ANNEXE N° 4 : ENTRETIEN D’UN PROFESSIONNEL

ANNEXE N° 5 : ENTRETIEN D’UNE FAMILLE

ANNEXE N° 6 : TABLEAU RECAPITULATIF DES ENTRETIENS DES

PROFESSIONNELS

ANNEXE N° 7 : OUTIL D’ANALYSE

ANNEXE N° 8 : CRITÈRES D’ORIENTATION

ANNEXE N° 9 : TABLEAU RECAPITULATIF DES ENTRETIENS DES FAMILLES

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ANNEXE N° 1

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ANNEXE N° 2

GRILLE D'ENTRETIEN POUR LES PROFESSIONNELS

Présentation du professionnel

identité : sexe, âge

Ancienneté dans l'enseignement ?

Formation : quel est votre parcours de formation, universitaire, IUFM avec ou sans

spécialisation ?

Quel est le contenu de la formation sur le handicap ?

Parmi les enfants qui ont été intégrés dans votre classe, parlez-nous de cas

d'intégration qui se sont bien passées ou mal passées ?

Quelles démarches administratives avez-vous effectuées pour les enfants pour que

se mettent en œuvre l'inclusion ?

Selon vous, comment les parents vivent-ils l'intégration ? Coopèrent-ils ? Et

comment se déroule cette collaboration ?

Rôle de l'enseignement auprès de l’enfant en situation de handicap

Quels sont la mission et le rôle de l'enseignant auprès de l’enfant handicapé ?

Bénéficiez-vous d'aides pour vos missions ? Quels sont les personnels impliqués dans

cette action auprès de l'enfant ? Sur quels critères ces personnes sont-elles recrutées ?

Y a-t-il d'autres structures intervenant dans la vie des enfants inclus dans votre classe ?

Selon vous quel est le rôle des services du SESSAD ? Quelles répercussions cela a-t-il

sur votre classe ?

Avez-vous connaissance des diverses prises en charge (orthophonie, psychomotricité,

rééducation...) de l'enfant en situation de handicap ? Êtes-vous en contact avec ces

divers professionnels ? Comment se déroule la collaboration ?

Connaissances des modalités d'orientation en milieu spécialisé

Quels sont, selon vous, les critères pour envisager une orientation en milieu

spécialisé ?

Comment se déroulent les prises de décisions d'une orientation en milieu

spécialisé ?

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Quels leviers pour les IME ?

137

Selon vous, les apprentissages fondamentaux sont-ils les seuls critères d'évaluation

pour une orientation en milieu spécialisé ? L'observation des temps récréatifs et

périscolaires est-elle prise en compte dans la décision ?

Quelle est l’influence des prises en charge par des AESH et/ou du SESSAD sur

l'orientation ?

Comment cela se passe si les parents sont en désaccord avec l’orientation ?

Quels bénéfices, difficultés, limites : pour l'enfant, pour les parents, pour les

personnels impliqués dans l'inclusion ?

Pour conclure en quelques phrases, comment définiriez-vous l'inclusion scolaire

des enfants handicapés ?

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138

ANNEXE N° 3

GRILLE D’ENTRETIEN POUR LES FAMILLES

Description de la famille

Sexe, âge

Situation familiale

Nombre d’enfants

Lieu de résidence

Profession et diplômes et ceux du conjoint

Connaissance du parcours de l'enfant

De quel handicap est-il porteur ?

Racontez son parcours scolaire ? Selon vous comment s'est déroulée la scolarité ?

Quelles démarches administratives avez-vous effectuées pour les enfants pour que se

mettent en œuvre l'inclusion ?

Quelles répercussions cela a-t-il eu sur son évolution ?

Comment qualifieriez-vous vos relations avec les enseignants ? Comment cela s'est-il

traduit ?

Collaborent-ils au projet d'inclusion ? Quels ont été les difficultés éventuelles et les

bénéfices ?

Quels sont les professionnels impliqués dans l'accompagnement de votre enfant ? AVS

ou autres... Comment qualifieriez-vous leurs interventions ?

Avez-vous de la famille pour vous épauler ?

Bénéficiait-il d'une prise en charge particulière comme de l'orthophonie, de la

psychomotricité, un suivi au CAMPS... avant l'orientation en IME ? Si oui lesquels ?

Y a-t-il eu l'intervention un service SESSAD dans la vie de votre enfant ? Si oui

comment cela s'est-il déroulé ?

Les impacts de l'orientation

Qu'est-ce qui a motivé l'orientation en IME ? Racontez le premier contact avec

l'établissement.

Comment avez-vous accueilli cette annonce ? Comment votre conjoint(e) a-t-il

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Quels leviers pour les IME ?

139

perçu cette décision ?

Quelles ont été les incidences de cette orientation sur votre vie et sur celle de votre

enfant ?

Depuis quand votre enfant a-t-il été orienté en IME ?

Selon vous l'inclusion scolaire est-elle adaptée au handicap ? Selon vous les

établissements répondent-ils aux besoins des enfants en situation de handicap ?

Avez-vous songez aux méthodes alternatives telles que les écoles Montesori ou

Steiner ?

En quelques mots, pour conclure, comment définiriez-vous-vous le parcours

scolaire de votre enfant ?

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Quels leviers pour les IME ?

140

ANNEXE N° 4

ENTRETIEN D’UN PROFESSIONNEL

Ep2

Mme F enseignante en ULIS au collège

Sexe : F

Âge : >40

Situation : enseignante spécialisée

Formation : spécialisée depuis 2008

Ancienneté : 20 ans

-Pourriez-vous me présenter l’inclusion en classe ?

Chez les enseignants du primaire c'est normalement quand ils détectent qu'il y a

quelque chose qui ne va pas il déclenchant une équipe éducative avec les parents. S'ils

veulent pousser le boucher un peu plus loin il y a des enseignants référents qui sont en lien

avec la MDPH. C'est lui qui est chargé de récupérer le dossier fait par la famille et les

enseignants. Ça passe devant une commission de la MDPH et c'est la MDPH qui oriente

après. Alors quels sont les éléments ?

Il y a sociale? Une enquête sociale ? Un bilan social ? En tout cas y a un bilan

médical, psychologique et scolaire. Et c’est au vu de ces trois dossiers que la MDPH

tranche.

Voilà un dossier scolaire : évaluation des compétences du 2nd

degré. C'est ce qu'on me

demande de remplir.

- Quelles démarches administratives avez-vous à effectuer ? La grille GEVA sco ?

Non geva sco c'est encore plus light, c'est basé sur les compétences du livret de

compétence que doit avoir chaque gamin dans le secteur ordinaire que les enseignants

doivent remplir. Nous c'est des croix à mettre dans les cases. Voilà comment on fait notre

évaluation. C'est évaluation des compétences du 2nd

degré et y a la même chose pour les

niveaux inférieurs, pour l'école primaire. On est sur du pallier 1, sur du langage de

maternelle et puis pallier 2 niveaux CFG. Alors nous c'est simple, chaque gamin doit avoir

sous une forme un livret personnalisé personnel de compétence, ce qu'on appelle LC, qui

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Quels leviers pour les IME ?

141

va devenir informatisé. Il y a 3 paliers dans ce livret poursuivi de la maternelle jusqu'au

collège. Pallier 1 c'est niveau CE1, alors quand on dit qu'un gamin a les compétences de

niveau 1 on dit qui équivaut à un CE1. Pallier 2 c'est fin CM2. Et pallier 3 c'est sorti du

collège, 3ème.

Nous en ULIS collège on est sur du pallier 1, pallier 2. Donc les élèves que j'ai malgré

leurs 15 ans et 16 ans ont un niveau scolaire de CE1, CE2 en majorité. Certains vont plus

loin aussi. Moi je fais tous mes apprentissages là-dessus, ses compétences-là qui ne sont

pas des compétences handicap. Compétences ordinaires que je suis parfois obligée de

subdiviser parce que pour acquérir hein je suis obligée de mettre des items supplémentaires

parce que certains items du pallier ne seront jamais acquis, même pas au 10ème de ce qu'il

faut connaître. C'est ces feuillets-là au niveau scolaire qu'on remplit et envoyés à la

MDPH. Alors évidemment on peut mettre des commentaires je pense que l'objectif est

d'être suffisamment objectif que ce ne soit pas un ressenti de l'enseignant. Il sait où il ne

sait pas.

-Tout ce qui a trait au comportement n’apparaît pas. Selon vous quelles répercussions le

comportement a-t-il sur l’inclusion ?

Alors on a un volet autonomie, initiative, compétences 6 et 7. Nous bizarrement, je

réfléchis car j'étais enseignante aussi et en dehors, et avant d’être formé dans le handicap,

c'est ça on ne juge pas par rapport au handicap, on juge par rapport à la norme. Et d'ailleurs

le geva sco c'est et c'est ça qui pour moi pose problème aussi. Par exemple le geva sco on

est obligé de le remplir et 'ailleurs on nous l'a martelé : « au regard de l'autonomie d'un

enfant du même âge ». Alors moi quand on m'a vu mettre des B, B, B, on m'a dit ; elle a 15

ans, est ce qu'à 15 ans on fait ça ? Ben j'ai dit ben non. Eh bien voilà tu ne dois remplir que

des C ou des D. alors après on contre balance avec des appréciations et c'est tout ce qu'il y

a (2tableaux). Voilà c'est tout au niveau du geva sco. C'est plus que réducteur. Alors là moi

je suis sur les 2, moi je suis fonctionnaire, donc je fais ce qu'on me dit de faire. C'est-à-dire

que j'en ai deux comme ça à remplir pour une orientation professionnelle bien je rempli les

deux. Pour chaque équipe de suivi on me demande de remplir ça systématiquement donc je

remplis en plus ça. Après je ne sais pas ce qu'il en est fait. Je me demande même si c'est

relayé à la MDPH ? Pas tout le temps à mon sens. Est-ce que c'est envoyé

systématiquement à toutes les équipes de suivi je pense pas. Voilà sur quoi ils se basent

pour faire l'orientation pour dire orienté en IME.

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Je suis allée à une formation la semaine dernière sur tout le secteur jusqu'à Avignon,

chacun pose ses questions, fait son truc. Y en a qui ont le cas et qui disent ben moi j'ai fait

comme ça, y en a qui disent comme ça, mais ni la conseillère péda, ni l'inspectrice, qui

n'était pas là, disent voilà dans ce cas il faut faire comme ça donc chacun avance à vue sous

couvert de son principal. C'est lui qui est vraiment, qui se pose en tant que hiérarchie. Donc

si le principal est d'accord on peut le faire, si le principal n'est pas d'accord on ne le fait

pas. Et moi j'ai vu des ULIS où y avait un problème entre l'enseignant d’ULIS et le

principal et l’inspectrice ASH ne prenaient pas position si le principal n'était pas d'accord.

Parce qu'elle n'a pas le pouvoir de le faire. Donc à nous de nous entendre pour qu'il y ait

une bonne entente. Il le faut d'ailleurs.

Alors comment fonctionne une ULIS, bien l’hétérogénéité du public on y est en

plein. Chaque élève a un emploi du temps différent. Puisque l'ULIS a vocation, du moins

de mon point de vue, d'inclure l'élève le plus possible dans les classes. Alors déjà nous on

respecte la loi de 2005 et en autres les circulaires sur les ULIS de 2010. C’est-à-dire que

les élèves sont inscrits au collège une classe de référence en fonction de leur classe d'âge

d'accord ? Ils sont inscrits en 6eme, inscrits en 5eme, inscrits en 4ème, inscrits en 3ème

en

fonction de leur âge. Et moi je dis je n'ai pas de classe, il n'y a pas de classe ULIS, c'est un

dispositif. Les gamins sont dans les classes et viennent ici en cas de besoin d'enseignement

adapté. Mais sinon ils ont vocation à suivre les cours avec leur classe. Comment ça se

détermine les inclusions? Parce que c'est bien ça le souci. En partenariat avec les parents

déjà, est ce que votre enfant… avec les collègues enseignants précédents quand les gamins

viennent de CLIS ou de primaire, avec l'enseignant référent qui connaît aussi les dossiers.

De base il faut aussi bien s'entendre avec les profs du collège qui ont parfois des

susceptibilités, des angoisses comme tout à chacun. Ils sont tous inclus de fait en sport et

en art plastique.

Alors ça donne ça : A, qui est un élève dyslexique, en grande difficulté au primaire,

dépressif etc qui a atterri ici, et je pense qu'au bout de 4 ans, d'ailleurs il va passer son

brevet pro il a vraiment bénéficié de façon très positive de l'ULIS, ça lui permet d'en être là

aujourd'hui alors qu'il relevait d'une 6ème

ordinaire avec un PAI mais lui était tellement mal

dans sa peau qu'il ne pouvait pas suivre. Il est en ULIS il s'en sort il a plus de 15 heures

d'inclusion. Là il est en ULIS alors que l'ULIS ce n’est quand même pas du soutien mais

vu le nombre d'heures d'inclusion, mon objectif à moi c'est qu'il soit soutenu pour ses

inclusions alors je fais du soutien pour lui. En revanche F qui est un élève de l'IME de P et

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lui il est inscrit en ULIS à mi-temps. Donc c'est d'abord un élève de l'IME inclut en ULIS à

mi-temps.

De mon point de vue un élève devrait obligatoirement, enfin la MDPH devrait

obligatoirement, enfin donner une injonction de soins, enfin de suivi. Ça devrait aller de

pair avec l'ULIS, avoir un suivi SESSAD au minimum. C'est une complémentarité, moi je

ne travaille pas le soin, y a plein de chose que je ne travaille pas. Si je me mets des

œillères, je suis dans le scolaire pur mais je m'aperçois que cette dimension évidemment ne

suffit pas à ces enfants-là. Et donc c'est bien pour ça je fais remonter aux parents que quand

ils sont au collège c'est pour apprendre. Si je m'aperçois qu'ils sont trop fatigables, même si

j'en tiens compte et que ça dépasse un volume horaire pour lequel il ne tire pas bénéfice du

collège, alors signal d'alarme, il faut trouver un complément d'accompagnement pour cet

enfant là parce qu'il reste assis là non ce n’est pas possible. Je ne veux pas. C'est quand on

peut plus apprendre, quand les méthodes, les adaptations pédagogiques, tout ce qui est ne

suffisent pas, c'est plus de l'ordre du psychologique, de l'ordre de la relation aux autres qu'il

ne sait pas gérer, de l'ordre du comportement, quelque chose que je peux pas décrypter et

« soigner » et traiter, je fais appel aux partenaires. C'est pas injonctif le SESSAD, j’ai une

famille qui a une orientation en SESSAD jusqu’en 2008, elle n'est pas effective. La famille

ne s'est pas déplacé, n'a pas pris rendez-vous avec le SESSAD parce que quand il rentre au

collège, pour eux, pour la famille l'enfant redevient normal. Le handicap est gommé,

surtout on ne remue pas le couteau dans la plaie et au collège tout va bien.

Après il y a d'autres élèves qui sont majoritairement en ULIS, après faut être au clair

avec les inclusions ce qu'on y cherche. Est-ce que c'est des connaissances dans la matière ?

Ou est ce qu'on travaille plus l'autonomie sociale ? Des compétences sociales ou civiques

c'est-à-dire être avec les autres, obéir à des règles de collectivité. C'est le cas pour lui, il est

en physique chimie en 3ème

mais il est non noté, ça c'est pareil les enseignants le savent et

l'acceptent, ils le notent pas, il suit en auditeur libre il est content il tire bénéfice quand

même parce que nous quand on fait des choses en science il réagit. En plus on lui demande

son avis, est-ce que tu es content, est-ce que tu veux continuer, oui ? Montre-moi tes

cahiers etc… C'est une négociation aussi, donc toutes ces inclusions on les fait sur une

période qui en général court sur un trimestre pour que ce soit en cohérence avec les

bulletins parce que sinon c'est compliqué. Au bout de la période on fait le point et moi je

demande d'abord l'avis du gamin. De toute façon on n'attend pas la fin du trimestre, on a

des informations de comment ça se passe, on a des informations par les profs mais j'aime

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bien que ce soit l'élève de lui-même qui dise les choses. C'est moins vécu comme un échec

de lui-même il arrive à dire : « oh là, là, madame ça devient trop compliqué, j'y arrive pas,

est ce que tu peux faire arrêter. » on voit si des photocopies, ça va t'aider, si on le reprend

en ULIS ça va t'aider, et si on te notait pas est ce que tu penses, est ce que la matière

t’intéresse ? On essaie de trouver toutes les adaptations, toutes les possibilités pour le

maintenir en inclusion. Mais si c'est une trop grande souffrance, on dit on t'écoute, on

arrête l'inclusion. Jusqu'à présent c'est comme ça que ça se passe et ça se passe très bien.

Donc lui élève trisomique il va en sport avec mon AVS. Une AVS co, collective,

AVSi normalement non dans les ULIS c'est très rare. Je la délègue elle part en sport lui et

lui aussi il est pris en charge par le SESSAD. D'ailleurs il va faire un stage d'une semaine

chez vous en janvier et je pense qu'il va avoir son orientation. Je l'ai suivi déjà 2ans il a

appris à lire, écrire, compter. L'indicateur c'est : est-ce qu'il y a un progrès ? Même tout

petit, est-ce qu'il apprend? Si ça n'apprend plus ça va plus. Moi je dirai, l'indication pour

moi de basculer en IME temps plein ce serait ça, est ce qu'il est en souffrance au collège ?

Est ce qu'il apprend ? Non alors ça sert à quoi ? Est-ce que il arrive à se repérer dans

lieux ? Non. Est ce qu'il peut discuter avec les collègues ? Non... peut-être qu'il peut faire

autre chose à travers les ateliers où il trouverait plus son compte, ou il serait bien, où il

s'épanouirait, apprendrait quelque chose et pourquoi pas après revenir.

-Selon vous, d’une façon générale, l’inclusion doit être obligatoire, facultative, basée sur le

volontariat ?

À la sortie de l'école primaire, à 11, 12 ans, jusqu’à 16 ans, fin d'obligation. Après vu

qu'il y a ULIS lycée il ne peut pas continuer après 16 ans. Nous c'est le gros travail on

voudrait que ça pousse un peu.

L’objectif de cette inclusion c'était de le faire venir en cours le mercredi c'est un

grand pas pour lui parce que lui « je suis fatigué » donc sur une matière qui le passionne il

y a la contrainte du cours d'histoire -géo, qui le passionne, le mercredi. Donc on en a

discuté avec la famille, ben oui voilà pour moi c'est toujours pousser un petit peu plus, c'est

gagner en …

Alors en fonction de tout ça moi j'ai un emploi du temps au jour le jour. Les emplois

du temps sont personnalisés. Je me considère comme une artisane de l'apprentissage. Mi

par exemple je dois savoir à tout moment où est qui et qui fait quoi. J'essaie de faire des

groupes de niveaux on va dire de besoin. Tout en sachant bien qu'ils n'ont pas tous le

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même niveau. Bon celui-là il a décroché il apprend à lire lui en même temps il est en math,

et elle, elle est chez l’orthophoniste. Eux c'est pareil sur les emplois du temps ils ont les

matières, et bien évidemment c'est rigide dans ce sens-là mais disons qu'il y a un cadre.

Après souvent, ça rassure et ils en ont besoin. Tous les matins on lit l'emploi du temps, bon

maintenant ils sont rodés, ils savent. On a un repère dans le temps et qu'est-ce qu'on y fait ?

Je me repère. Au départ je faisais des séquences un petit peu plus longues, un petit peu plus

courtes, ça dépendait mais vu qu'on a une sonnerie agressive et que quand ils entendent

que ça sonne et tout le monde... bon je me cale aux sonneries du collège ils sortent comme

les autres dans le couloir, ils rentrent après, sinon ils vont en inclusion. Vous voyez on

essaie de se caler sur la normalité du collège, plus les tuteurs qui viennent aussi (élèves des

autres classes qui s'inscrivent volontairement pour aider ceux d'ULIS).

C'est très personnalisé et le maître mot de tout ça en gros c'est comment développer

l'autonomie parce qu'ils sont 11. Il faut qu'ils sachent où sont leurs cahiers, il faut qu'ils

sachent ce qu’ils ont à faire, comment il faut faire, les outils d'aide à leur disposition,

comment les chercher parce que sinon c'est ingérable. Donc la première année, l'année de

6eme je le dis aux parents pour pas qu'ils s'affolent jusqu'à Noël au mois c'est mise en

place du cadre. Donc les apprentissages y en a très, très peu voir pas. Leur effort doit porter

sur ça. Une fois qu'ils sont à l'aise on apprend, je peux leur demander d’être déstabilisé

dans les apprentissages alors qu'avant ce n’est pas possible. Parce que y a des parents,

« oui mais ça il sait le faire » mais, temps mieux c'est fait exprès ; « à bon mais » faites-

moi confiance.

-Je vois que des jeunes bénéficient aussi d'orthophonie, comment se déroule ce

partenariat ?

Oui et c'est justement où, pour moi, le bât blesse aussi du point de vue des parents,

flûte on leur met à disposition tout un panel de possible dont ils doivent s'emparer. Alors

évidemment c'est douloureux parce que ça veut dire reconnaître le handicap, la difficulté.

Toute cette dimension psychologique là c'est là que je ne la maîtrise pas. J'en discute avec

les parents mais je reste que l'enseignante, eux c'est leur enfant si je dis des choses qui les

dérangent tout de suite après ça peut aboutir à « oui c'est parce que vous n’aimez pas mon

fils que etc ». J’ai bien compris que vu que j'avais les gamins 4 ans, j'avais intérêt quand

même à ce que les parents soient des partenaires pour pouvoir travailler tranquillement

avec les élèves. Ce n’est pas de la démagogie non plus parce que petit à petit j'avance mes

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pions quand même. C'est-à-dire faire prendre conscience que ça ce n'est pas possible, ça ce

n'est pas possible, ça ce n’est pas possible donc du coup les inclusions je m'en sers

énormément. Les collègues font des comptes rendus, en équipe de suivi je lis les comptes

rendus des collègues donc les parents s'aperçoivent que ce que je dis est relayé par d'autres

enseignants, dans d'autres contextes. Donc j'espère que petit à petit ça va participer à ce

que les familles voilà mais ce n’est pas toujours...

-Selon vous, comment les parents vivent-ils l’inclusion de leur enfant ?

Mais j'ai par exemple la collègue qui travaille en ULIS à la T, elle n’a que des

familles gitanes. Alors sans faire de racisme ni rien ce sont des familles dont les enfants

sont bien souvent en difficultés non pas à cause d'un handicap cognitif, je ne sais pas

comment dire, c'est des enfants intelligents mais qui ont des difficultés d'apprendre parce

que c'est pas du tout la culture de la famille. Et ils se retrouvent dans des dispositifs qui ne

leur conviennent quand même pas. Et donc ça créé des tensions mais les familles quand on

leur dit signer là, mettez une croix, ils mettent une croix, vous aurez une allocation

financière, le taxi sera gratuit... y a une dimension parfois, la MDPH statue sur des dossiers

qui relèveraient pas forcément.

-Collaborent-ils avec vous ?

Je dirai la 1/2. Moi j'avais fait un mémoire quand j’étais à l'IUFM à l'époque sur

Avignon « l’échec scolaire maladie sexuellement transmissible. L'inné l’acquis, c'est sûre

que quand le milieu familial n'est pas porteur il peut être aussi destructeur. Alors comment

faire ? Mais malheureusement je m'aperçois aussi que l'école même n'a pas les moyens de

lutter, de redresser, de lutter. Le poids de la famille est telle que et encore plus quand il y a

un handicap. C'est même très difficile. Quand la famille dit non, même si à l'évidence tout

le monde essaie de leur faire comprendre ceci cela, c'est non et c'est non. C'est pour ça que

les familles devraient obligatoirement être accompagnées, oui une obligation de suivi

social, parce qu'on en arrive à des aberrations. Les collègues nous ont dit que dans

certaines familles la personne handicapée est considérée comme un fournisseur de revenu

et on n’en a rien à faire qu’il travaille ou qu’il ne travaille pas. Il est dans son coin et la

famille gère l'allocation tous les mois.

Alors cette année j'en aurai 2 qui vont sortir d'ULIS et l'année prochaine j'en aurai 7

qui sortent. Ça fait 2 ans qu'on travaille l'orientation professionnelle et ce qui fait obstacle

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pour 3 d'entre eux, ils sont 9 ça fait 30 % c'est énorme mine de rien, c'est l'internat. Dormir

à l'extérieur, être obligé de dormir à l'internat. Le gamin dit « non, non je ne veux pas

dormir à l'internat » et la famille recule, « bon on verra plus tard » donc il se peut fort bien

qu'il reste à la maison. Et justement c'est des dimensions que le SESSAD pourrait

travailler.

-Selon vous quel est l’avenir scolaire des enfants que vous avez actuellement en inclusion ?

Alors il y a l'ULIS lycée, alors elle, j'ai eu ma collègue au téléphone, elle est à A il y

en a qu'une dans notre secteur, y en a dans les Bouches du Rhône mais du coup c'est

sectorisé, c'est compliqué on ne peut pas bon bref : ils ont vocation de préparer un CAP,

enfin être dans cette dynamique-là. Pour le CAP, y a 2volets, la partie théorique maths

français, la partie pratique. Elle au sein de l'ULIS lycée elle est un lycée professionnel elle

prépare plusieurs CAP. Donc ces gamins soient ils sont d'accord pour préparer les CAP qui

sont proposés au sein de l'établissement auquel cas elle les inclut le plus possible en math,

français et elle est reprend derrière. Mais moi ce n’est pas ce qu'il faudrait que je fasse mais

elle, c'est sa mission. La partie pratique est travaillée dans les ateliers. Si le gamin ne veut

pas faire le cap qui est proposé, à charge pour elle de trouver dans le bassin un endroit où il

pourrait préparer la pratique, SEGPA ou d'autres lycées professionnels. Si ce n’est pas

possible alors pendant cette année elle prépare la partie théorique ça repousse de 2 ans en

gros la partie pratique qui sera retravaillée à la sortie du lycée dans un autre contexte, peut-

être dans un CFA, je ne sais pas. C'est fait pour des gamins qui n'ont pas trop d'idées sur

leur avenir qui veulent rester dans les enseignements généraux. Est qu'il y a un niveau ?

Non il n'y a pas de niveau scolaire prérequis pour entrer en ULIS lycée. Maintenant si on

ne peut pas l'inclure ni en maths ni en français pour préparer le CAP, la partie théorique, il

n'a pas à être inclus ici. J'essaie de tenir compte de ça pour ne pas faire une erreur

d’orientation. Parce qu’après c'est tout un been. Il y a eu échec, ça se passe pas bien faut

revoir et tout.

Après il y a LEA (remplacement des EREA) : lycée d'enseignement adapté, c'est ce

qu'on propose normalement à la sortie de la SEGPA. Là c'est aussi pour préparer un CAP

mais avec des enseignements adaptés mais on, on n'est plus dans le champ du handicap, on

est dans le champ de l'adaptation. Ça veut dire que c'est MDPH, c'est handicap et difficulté

scolaire. Donc là on est dans la difficulté scolaire mais plus dans le handicap.

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- Quels sont, selon vous, les critères pour envisager une orientation en milieu spécialisé ?

Nous on a une définition « être empêché de façon prolongée... ». Pour nous handicap

ça veut pas dire retard mental. Mais pour les parents oui, handicap c'est le retard mental.

Donc LEA, pour des élèves qui ont le niveau autre que le pallier 1, ils doivent avoir le

pallier 2, c’est-à-dire niveau CM2, 6ème. Après il y a carrément le lycée professionnel,

c'est un niveau au-dessus. Là l'élève que j'ai, dyslexique il va aller en lycée pro.

Après on va sur le SIPFP, donc IMPRO, alors nous, on le vend, parce que c'est le terme,

comme potentiellement une formation CAP, parce que c'est le cas aussi chez vous ? Vous

pouvez préparer un CAP. Après on dit bien aussi à l'entrée à l'IMPRO il y a des

évaluations qui sont faites. Ben c'est tout. Et en l'occurrence sur le secteur il n’y en a qu'un,

le vôtre.

-y a-t-il d’autres structures intervenant ?

Oui mais les P pour y entrer... y une liste d'attente de 150000 places. Donc il n’y a

pas grand-chose. Cette année j'en ai 7 qui partent et j'en aurais 6 qui relèveraient de chez

vous. Et sur les 6 je ne sais pas, peut-être 2, un et demi qui pourraient faire un CAP. Sinon

qu'est-ce qu'ils font après, il reste chez eux, c'est la dernière solution. C'est l'horreur.

-Comment cette collaboration se traduit-elle avec les parents ?

L'année dernière il y a eu une réunion d'information avec les familles elle a été très

« les portes sont ouvertes, on vous accueille, on a de la place », c'est comme ça en tout cas

que les familles l'ont ressenties. Sauf qu’à l'arrivée ça n'a pas l'air d’être trop le cas. Il n’y a

pas place voire pas du tout. Donc là j'ai eu plusieurs familles mécontentes disant là « on

avait cru, on pensait que... ».

Là y a 3 ULIS dans le secteur, la mienne, celle de la T et celle de C. cette année j'en

ai 7 qui sortent, l'année prochaine c'est elle qui en a 7 qui sortent et qui relèvent aussi

pareil. Après y ale SESSAD « l.... » Mais y a problématique de l'internat moi j'ai un élève

qui a refusé à cause de ça. Donc ça veut dire que c'est une compétence qu'il faut que je

travaille en amont par un voyage scolaire mais ce n'est pas obligatoire et donc ceux qui en

auraient besoin disent non, disant c'est trop cher. On a beau dire que le collège prend en

charge, l'assistante sociale … non puis après c'est trop loin, c'est à Canne, justement je suis

resté dans le coin. Ce n’est pas à moi de travailler l'internat.

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Avec toute cette hétérogénéité, comment faire ? Me dire que je déplace ma classe

tout une après-midi chez vous, voir les locaux et tout ça. Y en a 3 qui vont pas être

intéressés et ça ne les concerne pas, ou y en a 2 qui relèveraient d'un IME plus profond,

visiter quoi ? Comment ? Envoyer les familles ils n'iront pas pour certains.

-Le moment de la première visite en établissement est important parce que handicap est

bien marqué, quelles difficultés rencontrez-vous ?

De toute façon j'ai le même cas dans la classe, j'ai un jeune trisomique dans la classe

donc ça se voit physiquement et j'ai des parents qui voulaient visiter parce que leur fils

était en CM2. J'ai dit oui, on m'a répondu mais en présence des élèves ? Oui pourquoi faut

les cacher ? Il y a un souci. Alors moi j'accueille et je l'intègre à la classe selon ce qu'on fait

et là y a la mère qui me dit « y a un trisomique en classe ?» oui alors tu demandes à ce

qu'on accueille ton enfant et toi tu ne peux pas accueillir les enfants des autres ? Tu n'as

pas un regard bienveillant sur les autres alors que toi tu veux qu'on soit bienveillant ? C'est

interpellant ! Avec l'histoire du tutorat, à la pré-rentrée je fais le tour des classes du collège,

je présente la structure. Maintenant ceux qui sont en 5eme, 4eme et 3eme me connaissent.

On discute librement du handicap. Pour vous le handicap qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce

que c'est un élève handicapé, alors c'est un élève qui a une jambe cassée, qui est en fauteuil

roulant, et y en a un toujours quand même qui finit par dire oui « y en a qui sont un peu »

(fait toc toc à la tête) oui tu veux parler du handicap mental ? Oui effectivement, il peut y

avoir, ne pas y avoir. Est-ce que ces élèves ont le droit d'aller au collège comme vous ? Ah

oui, ils sont généreux dans l'idée mais quels sont ceux qui ont peur du handicap, parce

qu'on peut en avoir peur ? Je comprends, c'est légitime, y a pas de honte. Y en a un qui m'a

dit « est ce que ça s'attrape ? ». Voilà ! Non ! Rassure-toi ça s'attrape pas ce n’est pas une

maladie ; quelque chose à la naissance, ou un accident de la vie, tout le monde peut devenir

handicapé. Tu as un accident tu t’es blessé à la tête tout le monde peut être handicapé. Pour

le moment ce sont eux, est-ce qu'il faut les rejeter, leur interdire de vivre ? En général ça se

passe super bien. » Et après aussi je le prends sur moi, je leur dis un peu plus de choses.

Par exemple on a eu un élève autiste qui est parti l'année dernière, il était toujours près de

son arbre dans la cour. J'ai dit vous avez dû vous demander pourquoi etc… Ben voilà sans

dire forcément les mots parce qu'il y a rien dans le dossier médical qui peut me permettre

de, si en revanche c'est établi dans le dossier médical, c'est au vu et au su de tout le monde,

inscrit parce que nous on n'a pas de secret partagé si c'est inscrit dans son dossier scolaire,

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c'est admis. Je dis voilà comment il fonctionne, il a peur de ça en revanche vous pouvez lui

parler comme ça il vous répondra. Dites-moi quelles questions vous vous posez et en

général ça se passe bien. Je pars du principe que ce qui n'est pas exprimé est fantasmé

obligatoirement. Pour lui il fait ci, pourquoi il nous bouscule ? Ben oui tu as vu il ne peut

pas parler donc lui s'il te touche il rentre en contact avec toi pose lui de question, et ça, ça

veut dire oui, et tu verras il te bousculera pas parce qu'il a commencé à te parler. Des

petites choses comme ça et ça marchent bien. Franchement ça dédramatise pas mal de

choses.

-Comment ça se passe la vie du collège pour les adolescents inclus ?

Ça l'est. Alors c'est pour ça que je tiens à cette sérénité. Quand un élève a besoin

d'aide il faut que les parents l'entendent et fassent appel au service d'aide qui est compétent.

Si c'est un suivi psy, il faut y aller. On alerte une fois, deux fois, trois fois, après c'est

l'équipe, après je leur fais peur. S’il est au collège c'est qu'il est capable de respecter le

cadre de vie du collège, s’il ne peut pas les respecter il faudra qu'on en tire les conclusions.

Alors est-ce-qu’on ne peut pas voir si en se faisant aider par des partenaires il peut être

mieux au collège, s'investir et apprendre. En général les parents ils rentrent là-dedans.

D'ailleurs ça pose certains problèmes. Certains enseignants du primaire notamment parce

que moi l'expérience que j'ai, alors on a le choix :

L’enseignante quand elle a un élève qui dysfonctionne, soit on se remet en cause

personnellement ça vexe. On se dit comment moi enseignante je n’arrive pas … donc on le

rejette, ça se passe très mal et c'est inconscient mais on fait tout pour l'exclure parce qu’on

ne sait pas le gérer et on le supporte pas.

Ou alors on fait genre on ne peut pas savoir ne pas gérer donc on va quand même

faire notre maximum mais en même temps notre minimum c’est-à-dire rabaisser nos

prétentions, c'est l'élève qui va rester au fond de la classe avec ses trois coloriages. Tout va

bien il est dans la classe il ne pose pas de problème mais il n’apprend rien.

Donc y a des écoles qui fonctionnent comme ça et donc au moment des passages du

passage en 6eme ou quoi on découvre que ce gamin-là pose un gros, gros problème au

collège et on ne comprend pas pourquoi avant y a pas eu de signalement, de PEC

particulière. C'est des dysfonctionnements à tous les niveaux. Parce que ça touche à

quelque chose de personnel. Même en mettant des croix dans des cases ce n’est pas ça qui

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résoudra le problème. Les enseignants ne le feront pas et feront non tout va très bien. Ah

bien chez moi tout va bien.

-Etes-vous suffisamment formés ?

Moi j'ai suivi le capaASH, la formation en un an à la fac, c'est très bien c'est génial,

sinon les enseignants ne sont pas formés à quoi que ce soit. Là quand même dans les textes

normalement ça doit faire partie de leur formation mais je ne sais pas à quel moment. Parce

qu'on recrute les enseignants à leur master, alors je ne sais pas si c'est dans leur master.

Non parce qu'on peut venir de plein de masters différents. Donc c'est après une fois qu'on a

passé le concours? Je ne sais pas. Justement je suis en dialogue avec une collègue qui va

passer le concours, elle a un master d'art plastiques donc je crois qu'ils sont directement

dans les écoles quand ils ont le concours, ils sont stagiaires directement.

Je le vois aussi au niveau du collège parce qu'il y a beaucoup de dyslexique certain,

en général ils ont tous un PAI et tout dépend du prof. Mme s'il y a un cadre pour le PAI

parfois dans certaines matières c'est plus ou moins mis en œuvre. Alors après moi j'en ai 11

et certaines collègues vont jusqu'à 15. Je peux faire ce que je fais parce que j'ai un petit

effectif aussi. Mais les collègues qui en n'ont 25, 30, c'est ingérable. Justement moi je

serais pour, je suis partie de l'aide aux devoirs pour les élèves le lundi et mardi pour voir un

petit peu les élèves donc pas handicapés mais qui ont des difficultés scolaires. Bien je dois

dire, je trouve, et puis je donne des cours personnellement, ça me passionne, il y a des

passerelles. On met les gens dans des cases en disant toi tu es handicapé, toi tu n'es pas

mais enfin c'est poreux. Donc ce qui serait génial ce serait de faire des groupes de besoins

mais c'est aussi mal vu si tu es dans le groupe de ceux qui suivent pas, qui ont des

difficultés, c'est mal vécu. Alors qu’il faudrait positiver le truc, dire ok tu travailles tu vas

voir tu vas apprendre tu vas comprendre, tu vas t'en sortir, tu vas avoir de meilleures notes,

puisqu'on est dans les notes ; avec des petites astuces qui encouragent. Parce que tous ces

gamins qui sont en difficultés ils ont des mauvaises notes donc au bout d'un moment ils

font les zouaves parce que c'est le seul moment de reconnaissance pour eux. Ils sont

intelligents et ils sont en colère contre la société. En ça en fait des gamins qui

dysfonctionnement alors que c'est des gamins qui ont tout pour réussir et c'est terrible. Moi

je me verrai bien faire des projets au sein du collège prenant un groupe. Mais allez faire

comprendre, faire admettre à l'inspectrice que en ULIS, alors ce serait autre chose, on se

mélangera pas, un cadre autre, on pourrait être personne ressource parce que handicap et

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152

difficultés scolaire ça se rejoint. Pourquoi pas à un moment donné de la semaine prendre

des groupes en dehors des heures ? J'ai eu des parents, comme leur enfant venait en ULIS

aidé, ils se sont demandés si ce n’était pas un moyen de les attirer et qu'est-ce que tu vas

faire en ULIS et comment ça tu vas aider ?

On est sur de l'humain c'est compliqué. Parce là tel que c'est fait, on créée de la

difficulté scolaire de plus en plus. C'est très compliqué. Et j'ai certains profs qui me disent

alors comment on note ? C'est simple vous êtes responsable de la note, vous mettez la note,

soit l’élève a les compétences que vous attendez et il a une bonne note, soit il les a pas il a

une mauvaise note. Alors tout de suite ils me disent ah oui mais quand même le pauvre. Il

y a la possibilité de ne pas noter, oui mais alors il veut une note lui quand même. Attention

parce que j'ai eu le cas aussi, quand l'enseignant d'inclusion met une note, les parents s'en

emparent et ça fait foi. « Ah oui mais mon fils il a 15 de moyenne en 3eme donc pourquoi

il est ». Donc vous êtes responsable de votre note quand vous mettez une note, il faut que

ça correspondent à quelque chose sinon ne noter pas. Et moi quand je fais des bulletins,

parce que le bulletin est en 2 parties, y a une partie bulletin adapté, que je remplis avec en

gros ULIS adapté, palier 1, 2, niveau CE1, CE2 niveau CP pour que ce soit bordé de façon

à ce que quand ils ont 16 en français de moyenne ce n'est pas 16 en 6eme, 16 en 4eme ou

16 en 3eme. C'est 16 sur le palier 1 dans les compétences qui sont écrites. Et puis y a un

bulletin pour l'inclusion fait par les profs. Et donc là ils notent aussi et sont responsables

sachant que les parents peuvent dire voilà « mon fils a 12 en anglais est ce que ... » faut

que ce soit cohérent.

C'est face à toutes ces difficultés rencontrées que je me suis dit.... donc on a mis en

place des choses. C'est un dispositif récent, il a 4 ans. Il y a des profs qui me disaient que

lui par exemple il n'arrive pas à retenir ses tables de multiplication est ce que dans le

contrôle tu peux accepter qu'il ait ses tables de Pythagore. « Oui mais alors les autres ils

n’ont pas » mais alors qu'est-ce que tu évalues ? Est-ce que c'est l'aptitude à raisonner

auquel cas les tables à la limite on en a rien à faire parce qu'avec la calculette bref, ou bien

est-ce que tu évalues la capacité à mémoriser les tables de multiplication et de s'en servir ?

C'est lourd quoi, pareil en français « ah en conjugaison il est nul » alors ça veut dire quoi il

est nul ? « Ah mais il ne retient pas les temps par cœur » comme la plupart des collégiens

d'ailleurs mais je dis est-ce que tu peux ne pas l'évaluer en conjugaison ? Mais en revanche

est ce qu'il comprend ? « Ah oui il comprend super-bien » donc plutôt que d'avoir une

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moyenne générale dégueulasse en français bien il va être non noté en conjugaison et avoir

en compréhension de texte, peut-être 14 ou 13.

-l'inclusion ça veut dire uniformiser le système ? Selon vous, l’inclusion doit être

obligatoire ?

Ah non. Et puis il y a une pression des programmes quand même, des parents.

J'essaie de dire aux profs, ok on fait le programme et si 50 % ne suivent pas ou n'a pas

compris ? À quoi ça sert ? Est-ce-qu’il ne vaut mieux pas tirer la sonnette d'alarme relayer

à l’inspection, je n'en sais rien. Disant voilà ça fait 5 années que 50 % de la classe ne suit

pas alors je me remets en cause en tant qu'enseignante parce que ça aussi il faut l'entendre

et le faire. Mais là est ce que vous pouvez m'aides, qu'est-ce que vous me proposez ? Parce

que venez me voir, inspectez-moi ou je ne sais pas voilà je suis coincé là je n’arrive pas

qu'est-ce qui coince ? Qu'est-ce qui ne va pas ? Alors il y a des enseignants qui se drapent

dans leur truc « moi je sais faire c'est aux élèves de s'adapter » mais quand on a, bien

souvent tout le monde en dessous de la moyenne, bien y a un problème. Normalement un

contrôle s'est fait pour qu'il y ait la moyenne pour la classe. Donc la moyenne de la classe

doit avoir la moyenne. Il y a au-dessus y a en dessous mais on doit avoir une marge de 50

% de la classe qui doit être dans la moyenne. Et 30 % en dessous en gros. Il y a d'un côté

les profs qui ne se remettent pas en question bien souvent, un jargon pédagogique qui est

hermétique. J'ai même une fois entendu dire une conseillère péda « c'est vecteur d'égalité

de chances » de ce jargon pédagogique. Ça allait loin parce que « les parents ne pouvant

pas aider à la maison parce que n'y comprenant rien du coup tous les apprentissages se font

au collège, en classe » appeler le deuxième complément d'objet direct, complément second

c'est bon quoi. Dire que pour trouver le sujet d'une phrase il faut mettre à la voix passive.

Parfois on marche sur la tête on complexifie énormément les choses au lieu d'aller à

l'essentiel. Et puis parfois il y a des choses qu’on n’est pas mûre de comprendre et ce n’est

pas pour autant qu'on ne peut pas ne pas avancer. Il suffit d'admettre « c'est comme ça à

quoi ça sert je ne peux pas t'expliquer c'est comme ça apprend comme ça « y a des choses à

changer et à faire évoluer. Moi ça me passionne parce que ça peut bouger même dans le

handicap.

Le problème, en parlant là, en réfléchissant, entre la CLIS et l'ULIS collège y a quand

même un gouffre c'est-à-dire qu’au niveau de la CLIS c'est là où tout se met en place, où

les parents découvrent l'ampleur des difficultés de leur gamin. Ils ne sont peut-être pas

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154

prêts à le gérer et du coup ça met toute la scolarité en primaire pour trouver les partenaires.

Parce qu’au collège je n’ai pas affaire à ce degré de handicap s'est orienté avant.

Là moi je vois au collège, j'ai assisté à un conseil de discipline d'un gamin de 3eme

qui a insulté plusieurs fois une prof. Au vu du dossier depuis la 6eme il s'est fait renvoyer

une foi deux jours, une fois une semaine en 5ème

... toute sa scolarité a été plus moins

chaotique : Vraiment des problèmes lors de comportements. Donc on arrive là il insulte la

prof, le principal dit « y a une souffrance » et la maman dit « oui je vais peut-être penser au

psychologue ». Je me dis comment en tant que parent, qui doit dire à la mère ? Alors le

psychologue ce n'est peut-être pas la panacée mais enfin essayer de trouver un partenaire

parce ce n’est pas normal. Il y a quelque chose. Et ça traîne. Après le problème on voit

bien que ça va crescendo, c'est l'étape après il passe à l'acte ? On est démuni, qu'est-ce on

fait obligation scolaire jusqu'à 16 ans y a pas d'injonction possible, y a pas … alors on

laisse.

- Quelles difficultés rencontrez-vous pour mener à bien l’action d’inclusion ?

Par exemple la psy fait pas de suivi, c'est des tests et des dossiers, pas terrible, pas

très gratifiant comme truc. Non ce n’est pas possible. Alors le problème et on le voit bien

c'est que ces élèves-là sont en souffrance eux-mêmes et la classe aussi. Et donc personne

n'apprend. Moi je dis que déjà quand on orientait en CLIS ou ULIS, on devrait avoir un

suivi, un SESSAD, un suivi psy obligatoire. Que la famille sente qu'il y a un cadre.

L'année dernière j'ai fait un partenariat avec l'IME de P comme je travaillais sur

l'orientation. Avec des éducs spé, on est allé faire des ateliers professionnels en partenariat

avec « cheval soleil » ; aussi avec une horticultrice pour faire un atelier horticulture. C'est

deux ateliers qu'on a fait puis ici en classe on a fait un atelier connaissance de soi,

connaissance des métiers. Pour pouvoir toucher tous les élèves, pour que les parents n'aient

rien à dire, on fait passer ça sur un temps scolaire. C'est passé au conseil d'administration, a

été validé, les déplacements, le cheval, ça été pris sur le budget du collège, on n'a pas

demandé un sous aux familles, histoire de dire que l’enfant passait par les 3 ateliers pro

avec des éducs spé et des enseignantes. Le SESSAD est là en tant que personne ressource,

il émet un avis pour notifier. Après on a fait une évaluation. Dans les gestes professionnels,

quand il y a 3 consignes enchaînées c'est difficile ; il faut faire une consigne et une

tâche...repérage dans l'espace... d'en tirer des choses complémentaires à la partie

enseignement. Le regard des collègues a été vachement important pour moi. Moi je suis

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dans ma bulle 1+1=2. Mais chacun son métier. Des compétences plus transversales, plus

sociales ont pu être notées par l'éduc, les relations à l'adulte ; est ce qu'il faut qu'il

fonctionne en binôme etc ; dans un groupe est ce qu'il est leader ou l’inverse, des choses

que moi je vais peut-être ressentir mais pas forcément mettre des mots dessus ; ou je vais

même passer complètement à côté parce qu'en frontal ça se voit peut-être pas. C'est des

aptitudes scolaires qui sont induites par la classe et des gestes professionnels dont je me

rends même plus compte. Cela a été très éclairant pour moi et justement pour les familles.

On a fait le bilan. Pour les enfants qui n'étaient pas notifiés on a dit est ce que vous

souhaitez rencontrer les éducs, sinon je vous passe les évaluations. Interrompu par

téléphone. Je ne sais pas si j’ai répondu à vos question ?

- merci beaucoup pour vos informations.

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ANNEXE N° 5

ENTRETIEN D’UNE FAMILLE

E2f

Mme F

Sexe : F

Âge : 41 ans

Profession : sans profession, fleuriste puis assistante maternelle

Niveau d'étude : bac

Situation familiale : mariée, 4 enfants dont V né en 2002, 3ème

de la fratrie

Profession du conjoint : « dans le commerce» propriétaire de sa boutique

-Quel a été le parcours de V ?

Il devait avoir un suivi SESSAD, voilà oui c'est ça SESSAD. Et il s’est trouvé le jour

de la réunion SESSAD, on nous a parlés de l'IME et là ça m'est apparu comme une

évidence. Je me suis dit c'est ce qui lui faut à V, c'est hors cursus scolaire traditionnel on va

dire et c'est ce qui lui faut. Pour moi c'était une évidence qu'il lui fallait ça. Voilà.

-Auparavant, je n’ai pas regardé le dossier, je préfère que vous me donniez vos

impressions.

Si c'est le vécu de V, son histoire, en gros c'est un enfant qui a toujours eu du retard

sur son développement. Et ça c'est vraiment confirmé à son entrée en maternelle. Voilà.

Déjà il n’est pas rentré en première année de maternelle, il est rentré qu'en deuxième année

de maternelle puisqu'il n'était pas propre déjà il avait un gros retard là-dessus de propreté.

Donc et en plus je ne le sentais pas du tout enter à l'école à ce moment-là. Et donc il est

rentré en deuxième année de maternelle et là tout de suite les problèmes ont été

évidemment pointés du doigt. C'est-à-dire qu'il avait un retard par rapport aux autres

enfants, un retard d'apprentissage. Il était beaucoup plus long que les autres à apprendre. Il

était en décalage, il avait du mal à se fondre dans le groupe, enfin dans un groupe scolaire.

Donc voilà ça été une première année un petit peu particulière, un petit peu en dents de

scie, voilà.

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-Á l'issue de cette première année on vous a proposé une AVS ?

Non pas du tout rein du tout la première année, rien ne s'est passé concrètement à part

me pointer du doigt que mon fils avait beaucoup de choses qui n'allaient pas. Mais rien de

concret qui s'est fait à ce moment-là, rien du tout.

-Vous étiez en bon contact avec l'institutrice ?

Avec l'institutrice ? Oui, oui, on parlait souvent du cas de V mais bon à ce moment-là

rien de, voilà heu, à part une mise en place, un entretien avec quelqu'un du RASED à ce

moment-là qui a pris en charge V, qui avait déjà fait un cas d'étude sur V, parce que

justement c'est un petit peu un cas hors normes qui n'entraient pas bien dans les cases, où

on n’arrivait pas bien à situer le problème et où on pouvait le situer. Voilà déjà ça

commençait là.

Et puis s'en est suivi donc un maintien en deuxième section de maternelle l'année

suivante qui n’a servi strictement à rien. Il s’est ennuyé on va dire, complètement ennuyé

heu ça le faisait pas avancer, ça le faisait pas grandir, heu. J'avais plutôt l'impression qu'on

me pointait moi du doigt que voilà. On m'a envoyé voir des psychologues, voir des psy en

voulez-vous. Enfin n’y a rien de concret qui s'est fait en, en, ces trois années de maternelle.

Si vous voulez il a fait une grande section de maternelle rien ne s'est fait concrètement.

Ensuite il est rentré au CP il là c'est cette maîtresse au CP qui a vraiment décelé qu'il

y a avait un gros problème chez V pour l'apprentissage de la lecture etc. c'est qui a

commencé un petit peu à sonner l'alerte. Donc là ont commencé les premières demandes

d'AVS. Qui ont été systématiquement refusées. C'est-à-dire qu'on nous l'a refusé en CP, on

nous l'a refusé en heu ça deuxième année, attendez que je ne dise pas de bêtises, oui V a

fait deux CP. Non il a fait une année de CP, l'AVS a été refusée, on l'a fait passer en CE1,

je me demande encore pourquoi, il ne savait lire ni écrire, ni compter en espérant que là

une AVS serait trouvée. Et là rebelote on nous a refusés, j'ai deux refus d'AVS.

-On vous a donné les raisons de ces refus ?

Heu non pas du tout. Non, non, je dois encore avoir les courriers je peux vous

retrouver ça. Voilà c'est simplement un refus simple et catégorique. Donc on nous a refusé

l'AVS deux années de suite, à deux reprises et ensuite V a eu un suivi orthophonique qui a

donc duré toute son année de CE1. Donc un bilan a été fait c'est là que la dyslexie est sortie

suite au bilan orthophonique. Il y a eu deux bilans de fait donc les deux bilans ont bien

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appuyé sur le fait que V est dyslexique sévère. Et donc ensuite à partir du moment où la

dyslexie est sortie on a commencé un petit peu à s'occuper du cas de V. Vraiment à son

cas, un peu moins aux retombées psychologiques qu'aurait pu avoir cet enfant. Voilà.

-C'est souvent ce problème de diagnostic.

Complètement. Déjà les rendez-vous sont hypers longs pour avoir un rendez-vous

chez l'orthophoniste. C'est très compliqué donc on n’est pas très aidé là-dessus. Heu il y a

eu aussi des rencontres avec une pédopsychiatre, non je dis des bêtises, heu neuropédiatre,

rendez-vous qui à mon sens qui était, enfin décisif qui allait un petit peu déceler tous les

problèmes de V. Le rendez-vous allait durer, heu on a déjà mi trois mois pour avoir le

rendez-vous et le jour du rendez-vous, le rendez-vous a duré dix minutes. On lui a fait des

réflexes, on l'a pesé, on l'a mesuré, on l'a fait marcher en équilibre sur un pied etc. Et (geste

de la main) le bilan de ça voilà (fait signe 0 avec les doigts). Ce n’est pas vraiment ce que

j'attendais ce bilan. Le bilan chez la neuropédiatre, moi je l'attendais vraiment parce que

pour moi c'était là où on allait vraiment pouvoir peut-être mieux comprendre ce qui se

passait pour V. Donc je m'attendais à ce qu'on lui fasse des électroencéphalogrammes, des

scanners peut être, enfin c'est ce qu'on m'avait laissé entendre de ce rendez-vous. Et puis

non il s'est rien passé.

-Vous étiez en cabinet libéral ?

Non à l’hôpital, à l’hôpital d'Aix d'ailleurs. Et il s’est rien passé, je vous dis le

rendez-vous a duré dix minutes, un quart d'heure. Et tout ça pour aucun retour finalement

on n'a jamais trop su ce qu'il en retournait de ce rendez-vous. Donc voilà un parcours très

compliqué.

-Donc à l'issu de ce CE1 ?

Heu, c'est vraiment le CE1 qui était un petit peu décisif, une première équipe

éducative, en début d’année pour bien pointer, enfin redire ce qu'on savait déjà : C’est-à-

dire que V avait de grosses difficultés. Et à la deuxième réunion d'équipe éducative, on

nous a proposé, enfin là qu'on nous a proposé un suivi, donc un suivi SESSAD.

Donc on a pris un rendez-vous, et c'est le jour de ce rendez-vous que tout s’est

déclenché en fait puisque j'ai rencontré donc la directrice adjointe, enfin je ne sais pas si

c'est la directrice adjointe, Nicole C ? Qui nous a, on a rencontré elle, on a rencontré la

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dame qui devait suivre V au SESSAD et puis finalement quand on a discuté avec Nicole,

c'est là que tout c'est débloqué quand elle nous a parlé de l'IME. Voilà elle nous a expliqué

un peu la différence entre le SESSAD et l'IME. Et là pour moi ça été une évidence. On est

arrivé pile poil à temps parce qu'il restait deux places. C'était vraiment sur le fil. Et c'est

comme ça que l'inscription s'est faite, ça c'était donc, on l'a rencontré en septembre, et à

savoir qu’à la fin de son CE1, V, on ne savait pas du tout où V allait être. C’est-à-dire

qu'on nous proposait des écoles, enfin des classes, des écoles avec des classes spécialisées.

Sauf que moi je n'ai pas le permis, mon mari il travaille, il a un magasin donc il ne peut pas

aller chercher V à quatre heures et demie. Enfin bon en septembre on savait toujours pas

où V allait être scolarisé puisque pendant juillet août quand on essayait de contacter

l'inspection académique, vous ne pouvez pas les contacter. Donc je vous dis, l'IME ça été

vraiment le soulagement.

-Alors on a vu que vous aviez changé d'avis par rapport à l’orientation SESSAD, qu'est-ce

qui vous a motivé pour ce changement, sachant que SESSAD favorise le maintien en école

ordinaire ?

L'école « traditionnelle » ça convenait plus du tout. V partait le matin avec la boule

au ventre, il sortait de l'école le soir, il était en pleure tous les soirs quand j'allais le

chercher à l'école parce qu'on s'était moqué de lui parce qu'il n'y arrivait pas. Il se sous

évaluait, enfin bon les séquelles sont encore là je veux dire. V a presque douze ans il se fait

encore pipi dessus la nuit, il porte encore, encore, des couches la nuit. Donc les séquelles

ont été vraiment très importantes. Les moqueries, les mises à l’écart, qu’il n’ait pas de

copain, oui voilà il a très, très mal vécu ses années d'école. À chaque fois c'était un rejet

systématique. La maîtresse aussi gentille qu'elle soit elle était incapable de l'aider de faire

un cas par cas parce que des écoles de 28, 30 élèves forcément ils ne peuvent pas se

focaliser sur un seul élève. Donc heu voilà ça été les deux finalement le fait qu'il puisse

quitter le cursus scolaire normal, de toute façon on m'avait bien fait comprendre que V

n'avait plus sa place dans ce cursus-là. On m'a bien fait comprendre qu'il retardait les

autres, ça perturbait les autres.

-Il avait des problèmes de comportement ?

Absolument pas. Tout ce qui est toujours ressorti c'est que V a toujours été un enfant

calme et posé, jamais de problèmes de comportement. Oui ça lui est déjà arrivé de

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s’innerver parce qu'il n'arrivait pas à faire, une frustration qui était créée chez lui mais bon

de là à dire qu'il a eu de gros problèmes de comportement, non ce n’était pas le genre de

gamin à se lever de sa place ou quoique ce soit, au contraire il a plutôt tendance à rester

dans son coin à attendre que le temps passe. Pour l'école c'était ça il attendait que le temps

passe. Que les journées se passent donc nous l'école il était juste à côté (montre par la

fenêtre à 20m) il passait ses journées, la classe donne, la fenêtre de sa classe donnait sur

notre balcon. Et la maîtresse me disait qu'il passait ses journées à regarder par la fenêtre à

voir s’il ne me voyait pas à travers la fenêtre s’il ne me voyait pas sur le balcon. Donc pas

évident.

Non ça n’a pas été évident du tout puis de voir qu'on était incapable de l'aider. Aussi

on avait beau faire ce qu'on voulait, ce qu'on pouvait, voilà on a essayé de lui apprendre à

lire, mais c'était trop pour lui je veux dire. L’école plus le fait de rentrer le soir d'avoir de la

lecture à faire le soir ça tournait au drame pour lui. Parce qu'il n'y arrivait pas donc pour lui

c'était trop pesant.

-Il n'a pas eu de rééducation avec une orthophoniste ?

Si pendant son année de CE1.

-Il y a eu la première phase de test comme vous l'évoquiez puis il y a eu une rééducation.

Y a eu le test pour mettre un nom sur ce qu'il avait et un suivi.

-L’enseignante se mettait-elle en relation avec l'orthophoniste ?

Ben c'est là que ça a commencé à bouger, à changer. C'est quand l'orthophoniste qui

s'occupait de Va, ils ont fait une réunion éducative et ils ont convient donc l'orthophoniste.

Et c'est elle qui a vraiment pointé du doigt qu’au niveau de V il y a vraiment de gros, gros

soucis qu'il fallait vraiment agir vite avant qu'il soit trop tard pour V. Parce que justement il

prenait un retard considérable. Et c'est à partir de là que ça a commencé un petit peu à

bouger.

-C'est curieux que cette dyslexie soit diagnostiquée si tard ?

Ah mais c'est ce que je n'arrive pas à comprendre. C'est qu'il y a eu un tel désintérêt

finalement sur le cas de V. Pour c'était un peu un désintérêt. Les problèmes on les a vus

très tôt, dès son entrée en deuxième année de maternelle très tôt on a vu qu'il y avait des

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problèmes, on a senti que c'était un enfant qui agissait différemment des autres et on s'est

pas intéressé, enfin on n'a pas cherché un lien direct chez lui moteur. Non on a d'abord

regardé ce qui se passe autour de lui, sa vie, comment on s'occupait de lui comment est-ce

qu'il vivait, ça été plutôt ça. Une suspicion de mauvaise éducation.

-On cherché plus des carences éducatives qu'un trouble

Tout à fait. C'est ça. Ça été plutôt ça.

-Ça a dû être difficile à vivre pour vous.

Ben ce n’est pas évident, on se sent pointé du doigt, on se sent déjà soi-même,

comment dire coupable, on se dit qu'est-ce qu’on n’a pas fait, qu'est-ce qu'on aurait dû

faire, est ce qu'on a raté quelque chose. Ce n’est pas évident, ce n'est vraiment pas évident

après y a le cap, la reconnaissance est là quand on reçoit la première lettre de la MDPH

avec le taux d'invalidité de votre enfant, c'est un choc. Je veux dire faut accepter déjà que

V n’est pas comme les « autres », il est un peu différent ça maintenant c'est intégré par

toute la famille. Au contraire on fait en sorte justement qu’il ne se sente pas à l’écart dans

la famille qu'il soit bien inclus. Mais en même temps la première fois que vous remplissez

un dossier à la MDPH, quand vous recevez une allocation pour enfant handicapé tout ça,

ça vous ramène au fait que oui quelque part il y a un handicap, ce n’est pas évident, ce

n’est pas évident du tout. Il faut le passer, maintenant il faut l'intégrer mais c'est vrai que

sur le moment... mais d'un autre côté on se dit ben voilà, on a arrêté de nous pointer du

doigt, nous et enfin on s'occupe de V. C'est lui qu'on est en train de voir, son intérêt à lui.

C'est ce qu'on a vu à l'IME. De toute manière ils se sont vraiment occupés de son cas sans

chercher à ce qu'il se passait autour. C'est le cas de V qui est pris en charge. Ça a réussi

largement bien ! (Sourire)

- V vit mieux les choses peut-être ?

Ça été radical là le changement. Le premier jour quand on est allé visiter, parce qu'il

y avait une première journée de visite, fallait faire visiter les lieux, tout de suite, bon, ben,

tout le monde lui a parlé, les enfants qui étaient là-bas sont venus vers lui pour lui parler,

pour l'inclure, l'ont fait asseoir, manger une crêpe enfin bon il s'est senti tout de suite inclus

c'est vraiment ici. Ça lui a plu. Je pense que pour lui ça été l'évidence qu'il allait avoir des

copains. Donc pour lui tout de suite il était ravi, et c'était fini, il partait plus avec la boule

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162

au ventre et cette angoisse. Le soir il revient le soir toujours super content. Ça été pour lui

un changement radical.

-Ça lui a permis de souffler

Tout simplement. Complètement, et sur son impact psychologique, ça a fait que ça

lui a débloqué quelque part quelque chose. Ça été bien géré, on s'est bien occupé de lui

tous les corps de métier ce sont bien complémentés pour faire en sorte qu'il progresse. Le

fait est qu'il a progressé puisqu'en deux ans il est arrivé à lire, à écrire et en partie à

compter. Quelle fierté !

J'avais toujours dit le jour où mon fils, où V sait lire et écrire pour moi c'est comme

s'il avait passé le bac. Voilà tout ce que je souhaitais pour lui c'est qu'au moins il sache lire

et écrire. Peu importe les études qu'il fera derrière mais au moins ça, c'était. Je ne voulais

pas qu'il reste comme ça sans ça. C'est tellement important dans la vie maintenant je ne

veux pas qu'il vive après en marge. Donc voilà.

-Vous êtes plutôt satisfaite de l'orientation. Est-ce que vous aviez eu connaissances de

méthodes alternatives style Montessori ?

Oui j'en ai entendu parler mais plus tard. Mais c'est en ayant mon fils à l'IME que j'ai

commencé un petit peu justement à m’intéresser à tout ce qui était alternatif. Je ne savais

pas qu'il y avait des alternatives ou très peu j'en avais entendu parler comme ça, mais je ne

savais pas des alternatives à l'école traditionnelle. Donc maintenant que je le sais j'avoue

que c'est plutôt intéressant. C'est une approche de l'école traditionnelle qui est très tentante.

D'ailleurs mon regret c'est qu'il n'y ait pas une école Montessori dans le secteur sans qu'il

ait lieu à ce que V reste en internat qu'il puisse y aller tous les jours, honnêtement je n'aurai

pas hésité, je n'aurai pas hésité. Parce que leur approche de l'éducation est complètement

différente, c'est une très belle approche.

-Comme vous me décrivez V, c'est des méthodes qui sembleraient convenir à V. Et ce qu'il

manque c'est l'information aux familles de ces dispositifs

Tout à fait ce n’est pas, ce genre de choses ne circule pas et des petites notes

informatives qui permettraient de, même chez les orthophonistes. Pour les avoir fréquentés,

avoir vu plusieurs orthophonistes, j'en ai pas entendu plus parler que ça. C'est dommage,

c'est vraiment très, très, dommage. Je pense que ça c'est plus par le biais d'internet que ça

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163

ressort. C’est-à-dire que moi je me suis intéressée ben à la dyslexie vraiment parce que je

ne connaissais pas vraiment le monde de la dyslexie. Je sais que ça englobe plusieurs

choses la dyslexie, ce n’est pas que la dyslexie, c'est la dyspraxie, c'est la dysphasie et heu

voilà quand on ne connaît pas tout ça et je sais que beaucoup de ces parents qui ont des,

des enfants qui ont ce genre de problème, ont eu recours à des écoles alternatives. Et ça a

super bien fonctionné. Oui je regrette vraiment de ne pas en avoir une dans le secteur.

Sinon je pense que j'aurais pu prendre cette route-là. Mais malheureusement y en a pas et

on est obligé, malgré qu'il soit très bien à l'IME ça lui convienne, mais pour la suite des

événements je, ça me fais un petit peu peur. Je sais qu'il lui faut, une ré-incursion dans

l'école traditionnelle mais en même temps ça fait un petit peu peur. Toujours peur qu'il y

ait ces moqueries qui reviennent, qu'il y ait un retour un peu en arrière pour lui. Le fait qu'il

soit confronté à des enfants... ça me fait un peu peur. Je sais que pour lui pour son

développement, sa maturité, c'est important mais je ne sais pas si on n’aura pas un retour

un peu négatif dans le sens, on verra bien.

-Il faut voir avec les professionnels, les enseignants et la psychologue, pour vivre ce retour

au mieux comme une expérience positive et voir aussi avec V.

Je lui en ai parlé à V lui très ok, très content.

-Ça peut se faire de manière progressive

Oui c'est que je veux de toute manière. Que ça se fasse progressivement. Je pense que

ce qui va se faire c'est une incursion dans les premiers temps, deux fois par semaine deux

demi-journées par semaine. À l'école, commencer par une école primaire pas tout de suite

au collège parce que ce serait trop faire un pas en avant. Tout doucement le réhabituer

après si je vois que ça convient pas et qu'il y a encore des problèmes de moqueries etc je

crois que là, là faudra trouver une autre voie ça c'est sûr. Je n’ai pas envie que ses progrès

s’arrêtent là et qu’ils se sentent encore, non ce serait vraiment trop dommage, trop

dommage. Il a fait trop de parcours jusqu'à maintenant en peu de temps en plus donc ce

serait vraiment dommage de perdre tout ça. On verra bien, on va laisser les choses venir,

les choses se faire. Voilà.

-Vous avez plusieurs enfants ?

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164

Oui V c'est le troisième, y a une grande qui a 20 ans, son frère qui a 14 ans et ensuite

un tout petit qui a 1 an. C'est le troisième de la fratrie. Ça été longtemps, longtemps, le

petit dernier (rire) mais bon ça se passe bien. Il a une bonne relation avec sa grande sœur,

une très, très bonne relation ils ont une relation assez privilégiée tous les deux. Bon avec

son frère c'est des rapports de garçons donc ils n’ont que deux ans d’écart finalement. Bon

c'est des fois un peu conflictuelles mais bon forcément V étant un peu en décalage, son

frère étant plutôt adolescent en fait, donc quelques fois ça se chamaille un peu. Et puis le

petit dernier, on a été content de le voir arriver donc tout se passe bien là-dessus.

-Vous travaillez ?

Non, non. J'ai arrêté de travailler à partir du deuxième en fait. J'ai arrêté de travailler

pour me consacrer aux enfants.

-Vous travailliez avec votre mari ?

Non, non, j'ai fait des études en tant que fleuriste. Et par contre j'ai arrêté parce que

ça ne cadrait pas avec un enfant parce que c'était le dimanche, enfin les week-ends et les

jours fériés et les fêtes. Et ensuite j'ai travaillé dans les écoles, je faisais le ménage dans les

écoles, je faisais la garderie.

-Je vois que vous êtes dans l'éducation, vous avez envie de chercher

Oui, oui, ça m'a toujours bien intéressé. Puis bon surtout avec un enfant comme V

donc forcément.

-Vous auriez pu vous contenter de dire il est dyslexique et c'est tout

Non moi je voulais comprendre ce que c'était la dyslexie. D'ailleurs on sait toujours

pas ce que c'est vraiment la dyslexie encore. Le problème il est là c'est qu'il a très peu, on

sait toujours pas les causes d'où elles viennent finalement. Concrètement on sait si ça vient

du développement, si c'est, si y a des causes génétiques, on ne sait encore pas.

-Par contre on connaît des méthodes et saviez-vous qu'il existe des CLIS « dys » ?

Oui, c'est ce qui était prévu à la base pour V, avant l'IME. C'était sur Cavaillon je

crois. Mais nous le souci c'est que Cavaillon ça faisait trop loin pour lui. C'était vraiment

trop compliqué pour lui. C'est pour ça quand on nous a proposé ça et qu'il en avait une sur

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165

Mallemort à 5 km, et nous on nous le proposait de le mettre à Cavaillon qui est à une

vingtaine de km. Donc on s'est dit y a carrément un problème quelque part. On ne peut pas.

C'est pour ça je vous dis quand on devait s'occuper de ça, quand on a eu vent de l'IME, on

s'est dit après tout finalement.

Pourquoi on le met dans une école où il va devoir aller de rendez-vous en rendez-

vous. C’est-à-dire qu'il va devoir être finalement, ballotté toute la journée peut être toute la

semaine d'un endroit à un autre pour aller au rendez-vous, pour aller voir une

orthophoniste, un autre jour pour voir, pour la psychomotricienne enfin etc beaucoup de

choses les psys alors que là tout est regroupé sur place. ON s’est dit autant prendre cette

option-là.

Puis bon je me doutais bien que le fait que V soit avec des enfants de tous cas on va

dire, de tous cas de handicap, plus ou moins grave, je me suis dit que de toute manière ça

pouvait lui servir, pour lui. Puis pour nos enfants à nous pour qu'ils voient un petit peu qu'il

y ait des enfants différents c'est pas mal si on peut leur apprendre un peu plus de tolérance.

Je pense que tant qu’ils n’ont pas mis le nez dedans on a beau leur dire mais voilà. Je sais

que mes enfants sont plus concernés par le sujet, d'ailleurs ma fille c'est des études là-

dedans qu'elle veut faire, qu'elle a commencé à faire, justement pour être éducatrice

spécialisée. Quelque part c'est... je pense que c'est important. Enfin voilà le parcours de V.

Le parcours de V est très atypique.

-Ce que vous me racontez là c'est le discours d'autres parents, qui ont fait le parcours du

combattant, qui se sont battus, dont le diagnostic a été posé tardivement

Oui c'est insupportable surtout qu'on dit, on prend pour excuse que ça ne se descelle

que à partir de, de mi-CE1 parce que c’est vraiment au moment de l’acquisition de la

lecture que ça peut se voir. Je suis persuadée qu'avec une mise en place de beaucoup de

choses je pense que dès la maternelle on peut déjà commencer à avoir une suspicion au

moins sen troisième année de maternelle, une suspicion de quelque chose, enfin je pense.

Ce serait tellement moins de temps perdu parce que finalement ça fait les trois années de

maternelle plus l'année de CP, plus l'année de CE1 pour peu que l’enfant redouble son CE1

ça lui fait encore une année, enfin c'est long, c'est très long. V je vous dis il est arrivé à 10

ans à l'IME, il savait ni lire ni écrire, c'est énorme 10 ans. C'est énorme. On se demande si

un jour il y arrivera. Bon maintenant on se demande si c'est rattrapable. Heureusement c'est

rattrapable mais...

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166

-Oui vous vous dite si on avait vu plus tôt on aurait pensé à l'IME plutôt du coup les choses

seraient

Bien sûr, les choses se seraient passées plus tôt. Plutôt que de lui faire passer un CP,

un CE1 des écoles traditionnelles, on aurait fait ça, au lieu de rentrer en CP il serait rentré

en IME, peut-être qu'on en aurait fini avec tout ça. Déjà la réintroduction à l'école serait

déjà bien entamée. Là ce ne sera pas avant l'année prochaine. Donc y a encore le facteur de

l'âge qui vient par-dessus. L'an prochain V aura 12 ans, même plus que 12 ans au moment

de la rentrée, de la nouvelle rentrée, eux s’il doit aller à l'école il va se retrouver à l'école

avec des enfants dont la moyenne d'âge maximum 9ans, 10 ans et lui il aura 12 ans.

Heureusement que physiquement il n'a pas encore le physique d'un adolescent, voilà on va

peut-être arriver à pallier là-dessus. Mais bon quand même ça fait un petit peu peur. Si les

choses avaient été prises beaucoup plus en amont... peut-être qu’on n’en serait pas là à se

poser ces questions-là, à se faire du souci à ce niveau-là. Enfin oui, et encore on se dit

qu'on n'est pas les parents les plus touchés. Il y a des parents où c'est bien plus grave, ils ne

sont pas sortis d'affaire, y en a qui attendent encore des structures qui peuvent accueillir

leur enfant.

-Vous faites partie d'une association de parents ?

Non, non c'est, et puis par manque de temps, pis après j'ai dû m'occuper de maman,

puisque maman était malade et est décédée l'année dernière. Par manque de temps je n’ai

pas pu m'investir là-dedans. J'ai eu le bébé aussi ça faisait beaucoup de choses en même

temps. Mais heu pourquoi pas oui par la suite. Ça peut aider.

-Et au niveau de votre entourage proche, vous avez du soutien ?

Oui la famille est au courant mais bon. Ben faire les accompagnements pas vraiment

car chacun travaille etc mais c'est vrai que c'est un petit peu compliqué là-dessus parce que

moi n'ayant pas le permis, n'ayant pas de voiture, c'est très compliqué donc bon. On prend

sur le temps de mon mari quand y a une réunion, quand vraiment y a un rendez-vous très

important on fait en sorte qu'il ferme le magasin, heureusement qu'il est indépendant là-

dessus mais bon c'est vrai qu'une demi-journée journée de fermée c'est une demi-journée

de perdue. ET c'est vrai qu'à l'époque où on faisait des allers-retours d'un rendez-vous à un

autre ce n’était pas évident il fallait arriver à jongler entre tout ça. Mais bon

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167

-Ça engage un coût financier

Eh oui, et on nous dit pas. On nous a dit qu'il avait droit à une allocation même si

minime qu'elle soit nous c'est l'IME qui nous en a parlé. C'est l'assistante sociale de l'IME

qui nous en a parlé. Donc ne savait pas.

Alors au début on s'est tâté de la prendre parce qu'on s'est dit quand même, on se

sentait pas, peut-être pas le droit de l'avoir. Bon V marche, V n'a pas besoin d'appareillage

puis bon on nous a dit aussi prenez, enfin l'assistante sociale nous a dit que oui on y avait

droit, prenez-là ne serait-ce que pour payer le fait que V porte toujours des couches la nuit,

le fait que ce seront des enfants qui auront tendance à peut-être plus se salir que d'autres, à

plus déchirer leur vêtement que d'autres parce que ou tout autre raison que d'autres.

Finalement on l'a pris.

-C'est vrai que faire un dossier un MDPH, ça ravive des choses

C’est sure ça rajoute encore, c'est quelque chose qui est vraiment inscrit c'est pour lui,

c'est de l'argent qu'on lui place pour lui de toute manière. On place une partie pour lui plus

tard, peut-être qu'il aura besoin pour passer son permis ou des choses comme ça ou pour

débuter dans sa vie d'adulte. On ne sait pas comment ça va être donc ce sera toujours un

petit coup de pouce pour lui. Il y a, peut-être qu'il faudra qu'il passe le permis dans des

conditions spéciales je ne sais pas ça dépendra comment il sera à ce moment-là. Ce sera

toujours ça pour lui. Ce n'est pas l'argent, ce n’est pas l'argent qui compte mais c'est vrai

c'est toujours des démarches en plus.

-Elles viennent marquer d'un sceau quelque chose

C’est ça c'est vraiment ça. Mais bon le cheminement est fait là-dessus on l'a intégré

on l'a... mais ça été les premiers temps, les premiers temps ce n’était pas facile. Faut

accepter c'est tout. Faut accepter, bon on le sait notre enfant est différent. Quelque part je

l'ai toujours senti, parce que j'ai été très, beaucoup plus, comment dire ? Plus, sur V que je

l'ai plus cocooné que les autres, je l'ai plus surprotégé que les autres. Alors sur le coup

quand tout a commencé je me suis dit que c'est parce que je l'ai trop surprotégé justement.

Voilà je me suis beaucoup remise en cause moi aussi puis c'est l'orthophoniste qui suivait

V qui m'a dit déculpabilisez-vous vous auriez été comme ça ou une mère beaucoup plus

laxiste, votre enfant aurait eu les mêmes difficultés donc faut vous déculpabiliser là-dessus.

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Quels leviers pour les IME ?

168

Il y avait un flaire quelque part. V n'était pas un bébé comme les autres, déjà, il avait

son propre rythme, il avait voilà. C'est que quand on met tout en corrélation et quand je

vois, rapport à la dyslexie, ils expliquent bien, on voit justement par le comportement à

l'âge bébé déjà puisqu'il y a des retards psychomoteurs etc. C'est vrai que V est le cas

typique de, déjà une majorité de garçons, donc V est déjà un garçon. C'est souvent des

gauchers, V est gaucher. Donc il a vraiment l'archétype même du dyslexique en fait quand

on regarde bien. Hein il a marché tard, il a parlé tard, il a tout fait tard donc voilà.

-Son papa comment il a accepté ?

Je ne sais pas lequel des deux l'a mieux accepté finalement. Je sais pas, pour lui il ne

voyait pas vraiment le problème. Pour lui, c’est-à-dire que comme il n'y a pas de handicap

physique, il a eu plus de mal peut-être à intégrer le fait que justement c'est un handicap

pour son fils. Pour lui il avait un problème pour apprendre à lire, à écrire, il était plus lent,

pour lui ce n’était pas un handicap. Vraiment pour qu'il comprenne il a fallu que les

démarches se fassent auprès de la MDPH pour que là il comprenne que vraiment ben oui

c'est vraiment un handicap. Puis quand il a vu ben l'IME, quand il a vu les enfants à l'IME,

ça été, ça été un peu un choc quand même pour lui. Parce qu'il s'est dit quand on voit

certains enfants ils sont quand même marqués par le handicap... même si ce n’est pas

physique on le voit dans leur comportement, là je crois que pour lui ça été vraiment un

choc il a réalisé que vraiment... mais bon voilà il est très prévenant auprès de ses enfants et

là-dessus y a pas de soucis. Maintenant ça va il a bien intégré la chose.

Mais c'est vrai il a fallu du temps autant pour l'un que pour l'autre. Chacun à son

rythme, chacun… voilà, voilà.

-Les conséquences de cette prise en charge en IME sur votre vie ont-elles changée votre

vie ?

À en bien. En bien. Qu’en positif. Nous du fait que V n'était pas bien à l'école ça

nous rendait pas bien forcément nous aussi, ça va de pair. Là on sait qu'il part le matin, il

est content de partir. Il rentre le soir, quand le bus est là il fait la fête dans le bus on est

content, on le voit arrivé, il est content. Il va goûter, il est bien. Oui ça a eu des

répercussions positives et ça eu des répercussions directement liées à, sur la vie à la

maison, dans le sens où V est moins, pas dans l'agressivité mais moins dans la frustration,

moins dans les pleurs. C’est-à-dire que pendant longtemps on lui disait un petit truc, on le

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169

reprend sur quelque chose, il fondait en larmes parce que pour lui tout était agression

finalement. Tout était pris comme une agression. Donc du coup on a un enfant qui est

beaucoup plus zen à la maison. Oui les répercussions sont positives, très positives. Après

oui tout est positif parce qu’on n’a pas de répercussions sur le plan du rythme de vie

puisque V le bus vient le chercher devant le portail, et le ramène devant le portail. Ce n’est

pas une contrainte là-dessus. Ça l'aurait été s'il avait fallu l'amener tous les matins ou si V

avait été en internat. Là oui ça aurait tout coupé la fratrie donc là ça aurait été beaucoup

plus compliqué à gérer. Y a pas eu de répercussions finalement financières puisque tout est

pris en charge à 100 %. Donc que du positif du fait que V se sente mieux.

-Au niveau de l'encadrement de l'IME ?

Les réunions y en ont trois dans l'année plus en dehors du fait si on en a besoin. Ben

on a un cahier de liaison mais si on a une question à poser sur, ou prendre un rendez-vous,

ils sont très dispo là-dessus. Tous autant qu'il faut que ce soit les médecins, la psychologue,

enfin tous les corps de métier qui travaillent au sein de l'IME. Donc non tout ce passe, y a

une bonne cohésion entre les parents et, et puis y a cet esprit familial aussi qui est là, avec

les fêtes de fin d'année, qui resserrent un peu les liens. On apprend à connaître aussi les

parents des autres enfants. C'est pas mal aussi. Tout de suite on est mis au courant quand il

se passe quelque chose. Toutes les semaines on a un petit bilan de comment c'est passé la

semaine pour V, bon maintenant cette année, il est chez les plus grands, il y a un système

de croix. En fonction de la couleur de la croix la semaine s'est plus ou moins bien passée.

Enfin voilà là-dessus tout va bien.

-Et ce système-là n'était pas mis en place entre l'enseignant et vous quand il était à l'école ?

Pas du tout, enfin on se croisait le soir devant l'école, en même temps je me mets à la

place de l'enseignante elle était aux limites de ses capacités pour V. Elle faisait ce qu'elle

pouvait mais voilà elle essayait de l'envoyer en classe quand il était au CE1, un petit peu au

CP pour le mettre un petit peu à niveau voilà ce n’était pas suffisant mais elle faisait ce

qu'elle pouvait. Je pense que si elle avait été aidée d'une AVS, ce qu'on avait demandé, ça

aurait été d'un grand soulagement pour elle. Elle me le disait souvent l'enseignante. Elle

aurait eu quelqu'un pour expliquer les consignes elle ne pouvait pas constamment ré

expliquer toutes les consignes à V. Vu qu'il a aussi des problèmes de la mémoire, enfin elle

ne pouvait pas lui répéter constamment les consignes. V elle lui expliquait une consigne, à

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170

la fin de la consigne il ne se rappelait déjà plus du début. Forcement quand on disait prend

ton cahier rouge, il se souvenait de rouge mais plus du cahier. C'est compliqué, c'est un peu

compliqué quand ils sont 28 élèves dans la classe.

-Il y a beaucoup de bonne volonté mais très peu de moyens qu’en pensez-vous ?

Oui très peu de moyens. C'est ça. Moi j'en veux beaucoup à sa première école à V ,

parce que avant on était à L, il a fait toute sa maternelle et sa première année de CP. Pour

sa première année de CP son enseignante était vraiment très bien, c'est elle qui a

commencé à tirer la sonnette. Mais quand il était en maternelle, voilà on a beaucoup été

regardé d'un mauvais œil. C'était beaucoup dans le jugement plutôt que dans la recherche

réelle de ce que pouvait avoir V. Alors que si déjà là les enseignantes à la maternelle

avaient commencé à plus se préoccuper du cas de V que peut-être là on aurait gagné un

peu de temps. Plutôt que nous envoyer voir les psy. Les psychothérapies en famille je n’en

vois pas l’intérêt. Sérieusement quand on nous a proposé ça on y est allé une fois avec mon

mari, on a dit c'est terminé on n'y va plus. Quand on commence à vous demander alors

qu'est ce qui s'est passé pendant votre grossesse, et votre maman comment s'occupait-elle

de vous ? Enfin, ok là je veux bien qu'à un moment donné on essaye de comprendre un peu

l'historique familial mais de là à remonter « et votre maman comment s'occupait-elle de

vous ? » pour savoir ce que mon fils a, il faut quand même abréger la chose et s’intéresser

un peu plus à l’enfant lui-même.

-Vous sentiez une explication physiologique

Oui y avait pour moi un problème moteur. Il y avait quelque chose en lui qui avait du

mal à fonctionner. Ce n’était pas psychologique pour moi. J'ai toujours su que ce n’était

pas psychologique. Quelque chose en lui qui se faisait pas, en lui ou je ne sais quoi qui se

faisait pas. Pour l'école pour l'extérieur c'était psychologique. S’il n’arrivait pas à faire c'est

que psychologiquement y avait quelque chose voilà. Alors qu’on est une famille tout à fait

normale, un papa, une maman, voilà le noyau, le cocon familial qu'il faut, y a pas lieu. Il

n'est pas issu de parents divorcés, séparés où il pourrait y avoir un lien de cause à effet.

Ben non. Donc jen'ai pas bien compris leur approche à ce moment-là. Donc c'est pour ça

que j'étais persuadé que c'était du temps de perdu ça n'a pas avancé à grand-chose. Enfin

voilà.

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Quels leviers pour les IME ?

171

Par rapport à l'IME, je pense que c'est le rythme scolaire qui y fait beaucoup. Le travail sur

ce rythme un peu nordique, c’est-à-dire travailler le matin et être en relâche l'après-midi.

Travail la demi-journée et le reste que ce soit des activités sportives ou éducatives c'est

complet différent pour moi c'est le modèle. Pour moi à mon sens c'est le modèle rêvé. C'est

bien dommage qu’on n’ait pas ça chez nous (rire). Ouais

-Je vous remercie d'être revenu sur ce parcours

Merci à vous si ça peut aider, si ça peut faire bouger peut être les choses.

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ANNEXE N° 6

TABLEAU RECAPITULATIF DES ENTRETIENS DES PROFESSIONNELS

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Ep sexe

M ou

F

Enseignante en

milieu

spécialisé (MS)

ou milieu

ordinaire (MO)

âge Formation

spécialisée

Oui / Non

Ancienneté

dans la

profession

Pathologies

rencontrées

Relation avec les

services à domicile, les

rééducateurs et les

AESH

Critères d'orientation

vers le milieu

spécialisé

Définition de

l’inclusion

scolaire

Ep1

M MO

<40 NON 14 ans en MO Dyspraxie

Dyslexie

Alcoolisme

fœtal

DI (déficience

intellectuelle)

violence

Aide matérielle comme

l’ordinateur (+)

AVS (-) – SESSAD (-) –

orthophoniste –

psychologue scolaire (-)

Violence – test QI – si

pas suffisamment

d’aide en classe

Vécu par les

parents comme

la fin d’un

système – trop

peu de clis, trop

pleine et leurs

situations

géographiques

posent

problèmes

Ep2

F MO >40 OUI # 20 ans

MO puis CLIS et

ULIS

Trisomie

Retard mental

autisme

AVS co (+) –SESSAD

(+)

Comportement par

rapport documents

officiel, la relation à

l’autre- les adaptations

pédagogiques ne suffit

plus –pas de dispositif

adapté en sortie de

collège ULIS

Inclusion

obligatoire de

fait en ULIS –

développe des

compétences

sociales –

développe

l’autonomie de

l’adolescent – si

pas possibilité

d’inclure alors

orientation en

MS – respect du

cadre de vie du

collège –

prépare

l’orientation

professionnelle

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174

Ep3

F MS <40 NON 11 ans

SEGPA CLIS

maternelle CP

Autisme

« profil

saillant »

SESSAD (-) – hôpital de

jour (+) – AVS (-)

Problèmes de

comportement avec

des crises –si pas

d’apprentissage

fondamentaux à

réaliser – ne se

prononce pas pour une

orientation : laisse la

chance

IME vécu

comme la fin

d’un système –

c’est un poids

pour

l’enseignant –

parle

d’intégration –

parfois mise en

danger de

l’enseignant –

avec des

moyens

matériels et de

comportement

d’élève de la

part des enfants

handicapés

alors il peut y

avoir de

l’inclusion

sinon ce n’est

pas possible

Ep4

F MS <40 OUI 3 ans

Maternelle CM1

Dyspraxie

DI

dyslexie

AVS (+) – SESSAD (-)

–psychologue scolaire

Propreté – si

souffrance de l’enfant

– si trouble des

fonctions cognitives –

si besoin d’effectif plus

réduit

L’inclusion ne

peut se

concevoir dans

les grandes

classes de 30

élèves – le

recrutement des

AVS est trop

problématique

pour faciliter

l’inclusion –

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175

cependant

l’inclusion

permet de

travailler avec

les autres

enfants la

différence

Ep5

M MO >40 OUI # 20 dont 3 ans

en MS comme

référant de

scolarité

Classe de

perfectionnement

Trouble des

fonctions

cognitives

Dys

TED

Trouble

multiples

AVS i, co, mutualisé (-)

– aide matérielle (+-)

A la demande de la

famille – si l’aide

proposée n’est pas

suffisante – si pas

possible pour les

enseignants

d’envisager une suite

de parcours dans le

milieu ordinaire – tous

les IME ne

fonctionnent pas de la

même manière

L’inclusion fait

partie d’un

projet – la CLIS

accueille des

enfants

handicapés

alors

qu’auparavant

elle était

proposée aux

enfants en

difficultés –utile

pour rencontrer

d’autres enfants

Ep6 M MS >40 OUI # 20 ans

Conseiller

pédagogique

Dys

Autisme

Trouble du

comportement

SESSAD (-) – AVSi, co

(+-) –appareillage

spécifique (+) – maître

PAR (+)

Selon les critères

prédéfinis par

l’éducation nationale

pour les troubles des

fonctions cognitives –

quand ce n’est pas

compatible avec une

entrée au CP –

apprentissages décalés

par rapport aux normes

– recherche des

perspectives d’avenir –

si l’enseignant est en

Etre dans une

école normale

c’est important

pour la famille

– les

évaluations

doivent être

adaptées mais

garder en tête

les critères

d’âge –

contraintes pour

les enseignants

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176

détresse - mais nécessaire,

c’est une

véritable

révolution

demandant de

modifier les

cultures

professionnelles

y compris celles

des institutions

Ep7 F M0 < 40 OUI depuis

5ans

MO environ 3

ans

CLIS TED 5ans

UE 2ans

SESSAD apar 2

ans

Dyspraxie

Dyslexie

Autisme

Trouble des

fonctions

cognitives

Handicap

moteur

Matériel adapté par elle-

même

Manque de logiciel à

reconnaissance vocale

AESH n’y faisant que

très peu référence

1/7 ULIS orientation

envisagée car trouble +

psy, violence.

Inclusion

favorise

l’ouverture

culturelle. Pas

uniquement sur

le plan social.

Intégrer un

travail. Tenir

compte

fatigabilité.

Pour que

fonctionne faut

relation++ avec

les profs et

diminuer les

effectifs de

classe. Adapter

les contrôles de

connaissance.

Pour changer

les mentalités

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177

ANNEXE N° 7 :

OUTIL D’ANALYSE

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178

ANNEXE N° 8

CRITÈRES D’ORIENTATION

par l’Éducation nationale

CRITÈRES D’ORIENTATION EN ULIS

Handicap avéré : « constitue un handicap toute limitation d’activité ou restriction de

participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne, en

raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions

physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un

trouble de la santé invalidant. »

La demande d’orientation doit être étayée par le questionnaire «Complément

d’information à l’orientation des élèves scolarisés dans le premier degré » renseigné

par l’enseignant de l’élève faisant l’objet de la demande d’orientation ou de

réorientation.

ULIS 1 : Handicap mental / Troubles des Fonctions Cognitives (TFC-DI)

1 Capacités nécessaires à l’orientation en ULIS 1 :

- A accéder à des apprentissages scolaires

- A fréquenter une classe ordinaire à temps partiel

- Autonomie personnelle et de déplacement minimum

- Respect des règles de vie collective

- Conduites sociales compatibles avec la vie de groupe

2 - Reconnaissance du handicap :

Cf. Guide barème, évaluation de :

1-Conscience et capacités intellectuelles (tests psychométriques)

2-Capacités relationnelles et comportement

3-La communication

4-Conduites et actes élémentaires de la vie quotidienne

5-Capacités générales d’autonomie et de socialisation

Cf. nomenclature OMS : Déficience intellectuelle

Légère 50 < QI < 69

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179

Moyenne 35 < QI < 49

Grave 20 < QI < 34

Profonde QI < 20

3 - Conditions nécessaires à l’orientation en ULIS 1 :

- Compatibilité avec la vie de groupe.

- Projet d’orientation accompagné d’un projet de soins.

- Etre porteur d’une déficience intellectuelle moyenne si elle n’est pas associée à

des capacités altérées (cf. guide barème).

- Etre porteur d’une déficience intellectuelle légère associée à des capacités altérées

(cf. guide barème).

- L’accueil en ULIS 1 des élèves présentant une déficience grave ou

profonde ou d’une déficience intellectuelle moyenne associée à des capacités

altérées, n’est envisageable que dans le cadre d’un partenariat conventionné avec

un IME ou en attente d’admission en IME.

- L’orientation d’élèves présentant un handicap associé type moteur ou sensoriel

n’est pas exclue si elle est compatible avec les capacités nécessaires et les

conditions précitées.

Concernant les troubles psychiques graves ET sans déficience intellectuelle : la

scolarisation de ces élèves ne relève pas d'une orientation en ULIS.

L'accueil en ULIS 1 ou en classe de cycle de ces élèves n'est envisageable que dans le

cadre d'un partenariat conventionné* entre l'école et la structure d'accueil du médico-

social.

Concernant les élèves présentant des difficultés psychologiques dont l’expression

(notamment l’intensité des troubles du comportement) perturbe la socialisation et

l’accès aux apprentissages ET sans déficience intellectuelle : la scolarisation de ces

élèves ne relève pas d’une orientation en ULIS.

L'accueil en ULIS 1 ou en classe de cycle de ces élèves n'est envisageable que dans le

cadre d'un partenariat conventionné* entre l'école et la structure d'accueil du médico-

social.

Lorsque les critères d’orientation ne sont pas remplis, la scolarité en ULIS est mise en

œuvre (transport, accompagnement éducatif,..) par l’établissement médicosocial dans le

cadre de son Projet Individuel d’Accompagnement.

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180

CRITÈRES D’ORIENTATION EN ULIS COLLEGE

La demande d’orientation doit être étayée par le questionnaire « Complément

d’information à l’orientation des élèves scolarisés dans le second degré » renseigné

par l’enseignant de l’élève faisant l’objet de la demande d’orientation ou de

réorientation.

ULIS TFC-DI : Troubles des Fonctions Cognitives ou mentales

1 - Capacités nécessaires à l’orientation en ULIS TFC-DI :

- A suivre des apprentissages scolaires de niveau cycle 2

- A fréquenter une classe ordinaire à temps partiel

- Autonomie personnelle et de déplacement minimum

- Respect des règles de vie collective

- Conduites sociales compatibles avec la vie de groupe

2 - Reconnaissance du handicap :

Cf. Guide barème, évaluation de :

1-Conscience et capacités intellectuelles (tests psychométriques)

2-Capacité relationnelle et comportement

3-La communication

4-Conduites et actes élémentaires de la vie quotidienne

5-Capacité générale d’autonomie et de socialisation

3 - Conditions nécessaires à l’orientation en ULIS TFC-DI :

- Compatibilité avec la vie de groupe.

- Projet d’orientation accompagné d’un projet de soins.

- Etre porteur d’une déficience intellectuelle moyenne si elle n’est pas associée à

des capacités altérées (cf. guide barème)

- Etre porteur d’une déficience intellectuelle légère associée à des capacités altérées

(cf. guide barème).

- L’accueil en ULIS TFC-DI d’élèves présentant une déficience grave ou

profonde ou d’une déficience intellectuelle moyenne associée à des capacités

altérées, n’est envisageable que dans le cadre d’un partenariat conventionné avec

un IME* ou en attente d’admission en IME.

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181

- L’orientation d’élèves présentant un handicap associé type moteur ou sensoriel

n’est pas exclue si elle est compatible avec les capacités nécessaires et les

conditions pré-citées.

Concernant les troubles psychiques graves ET sans déficience intellectuelle : La

scolarisation de ces élèves ne relève pas d'une orientation en ULIS.

L'accueil en ULIS TFC-DI ou en classe de cycle de ces élèves n'est envisageable que

dans le cadre d'un partenariat conventionné entre l'école et la structure d'accueil du

médico-social.

Concernant les élèves présentant des difficultés psychologiques dont l’expression

(notamment l’intensité des troubles du comportement) perturbe la socialisation et

l’accès aux apprentissages ET sans déficience intellectuelle : La scolarisation de ces

élèves ne relève pas d’une orientation en ULIS.

L'accueil en ULIS TFC-DI ou en classe de cycle de ces élèves n'est envisageable que

dans le cadre d'un partenariat conventionné entre l'école et la structure d'accueil du

médico-social.

* Lorsque les critères d’orientation ne sont pas remplis, la scolarité en ULIS est mise

en œuvre (transport, accompagnement éducatif,..) par l’établissement médicosocial

dans le cadre de son Projet Individuel d’Accompagnement

ULIS TED : Troubles Envahissant du Développement

1 - Capacités nécessaires à l’orientation en ULIS TED :

- A accéder à des apprentissages scolaires

- A fréquenter une classe ordinaire à temps partiel avec ou sans aide humaine

2 - Reconnaissance du handicap :

Bilan effectué dans un Centre de Ressource ou dans un inter-secteur de psychiatrie

infanto-juvénile (évaluations ET diagnostic).

3 - Conditions nécessaires à l’orientation en ULIS TED :

-Suivi médico-psychologique ou sanitaire effectif.

-Lorsque l’élève ne peut être orienté sur une ULIS TED (capacités nécessaires

non conformes), son accueil en milieu ordinaire (sur une ULIS TED) peut

être envisagé :

-dans le cadre d’un projet de soins avec le secteur sanitaire, ou

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182

-dans le cadre d’un partenariat conventionné *avec sa structure de soins

du secteur médico-social.

CRITÈRES D’ORIENTATION EN IME

Repères pour l’orientation en IME :

L’orientation en IME relève de la compétence de la CDA, instance de la MDA.

L’affectation en IME ne relève pas de la compétence de l’Inspecteur d’Académie. Les

IME accueillent prioritairement des enfants et jeunes handicapés, pour lesquels la vie

quotidienne en école et en établissement scolaire requiert des aptitudes

comportementales et relationnelles, ainsi que des capacités d’autonomie et de

communication, qu’ils ne possèdent pas toujours. Ces enfants et adolescents demandent

un accompagnement et un encadrement éducatifs importants que ne peuvent pas offrir

les établissements scolaires (malgré les aides de type AVS ou SESSAD). L’IME

prend en charge les soins, médicaux et paramédicaux, les transports, l’infrastructure

scolaire et souvent, l’hébergement.

Objectifs :

L’objectif principal rejoint celui des CLIS et UPI, l’accès aux apprentissages

fondamentaux, à l’insertion sociale et professionnelle. Pour y parvenir, les jeunes ont

besoin d’une pluralité d’interventions, faites par une équipe ajustée en permanence et qui

travaille ensemble.

1 Elèves issus de toute classe ordinaire, d’ULIS, d’autres établissements

spécialisés

2 Enfants et jeunes non scolarisés

Critères :

L’IME a vocation à accueillir des enfants et jeunes qui ont besoin d’une prise en charge

spécialisée globale.

-qui manifestent un mal-être à l’Ecole,

-dont les besoins complémentaires (éducatifs, thérapeutiques…) ne peuvent être

apportés au sein d’une classe ou en juxtaposition aux enseignements.

-pour qui, seule, une scolarisation à temps partiel peut être envisagée.

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183

Compétences :

-Jeunes pour lesquels les acquis et les compétences à viser marquent un écart très

important avec les attendus des classes d’âges en présence, dans l’école ou

l’établissement.

-Difficulté à assumer les contraintes et exigences minimales de comportement

qu’implique la vie à l’école ou au collège,

-Capacité de communication incompatible avec les apprentissages scolaires et la vie

collective.

Efficience intellectuelle

-relèvent du retard mental (QI inférieur à 50),

-Troubles importants des fonctions cognitives,

-Immaturité affective,

-Insécurité.

Attention particulière :

-L’IME n’a pas vocation à accueillir des élèves qui peuvent tirer profit d’une

scolarisation dans leur école ou établissement scolaire de référence grâce à des dispositifs

adaptés ou de consolidation,

-Si les familles demandent, pour leur enfant, une prise en charge éducative adaptée, elles

souhaitent aussi que cette dernière ait une dimension scolaire. Les élèves sont la plupart

du temps inscrits dans l’Unité d’Enseignement de l’IME (Unité d’Enseignement qui peut

être externalisée dans un établissement scolaire ordinaire),

-Des temps partagés « école ou établissement ordinaire/IME » peuvent être mis en

place pour certains élèves,

-Les élèves appelés à fréquenter un IME, peuvent être ou rester inscrits (inscription

inactive) dans leur établissement ou école de référence.

Source : Critères d’orientation en CLIS :

http://www.ash13.ien.13.ac-aix-marseille.fr/spip/IMG/pdf/Annexe_12E_Criteres_orientation_CLIS.pdf

Critères d’orientation en ULIS :

http://www.ash13.ien.13.ac-aix-marseille.fr/spip/IMG/pdf/Annexe_12Ebis_Criteres_orientation_ULIS_Post-ULIS.pdf

Critères d’orientation en SEGPA :

http://www.ecoles.ec56.org/IMG/pdf/Annexes_8bis_Criteres_orientation_SEGPA.pdf

Critères d’orientation en IME :

http://www.ec72.fr/Files/100783/critere_orientation_ime.pdfouhttp://www.ecoles.ec56.org/IMG/pdf/Annexe_8_bis_Orientation_Reperes

_IME.pdf

Repères pour l’orientation ;http://www.ecoles.ec56.org/spip.php?article462

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184

ANNEXE N° 9

TABLEAU RECAPITULATIF DES ENTRETIENS DES FAMILLES

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185

Ef sexe

M

ou

F

Situation

familiale

âge Situation

professionnelle

Ou niveau d’étude

des parents

Etayage du

suivi

Parcours Critères d'orientation

vers le milieu spécialisé

Evaluation de

l’orientation

Ef1

F Mariée 2

enfants

39 Mme Sans emploi,

niveau bac+3

Mr ingénieur

informatique

Camps

(psy,

psychomot,

éduc), psy,

AVSi,

grands-

parents

Crèche, maternelle, IME

Combat pour AVS

épuisement donc arrêt travail

problème de diagnostic

bienveillance des enseignants

Guidé par camps

Pression des places

d’accueil

Recherche de bénéfice

pour enfant

Diff accepter notif

MDPH mais approche en

douceur

Pas poss de continuer à

l’école

Qualité de

l’encadrement en

IME : dispo, familial

Petit effectif de

groupe

Guide dans les

démarches

Enfant heureux

Ef2

F Mariée 4

enfants

>40 Mme sans emploi

niveau bac

Mr commerçant

RASED,

psy, ortho,

neuro

Pas AVS

car refusé à

chaque

demande

problème de diagnostic

maternelle, 2 CP, CE1

bienveillance des derniers

enseignants

souffrance par rapport autres

camardes

diff de gestion de l’emploi du

temps

en IME en voie de ré-

inclusion

Souffrance de l’enfant

Pression p/r liste

d’accueil

Diff à accepter notif

MDPH

Eloignement des CLIS

p/r domicile

Soulagement

Débloqué P/r

apprentissage

Enfant heureux

Dispo des

professionnels,

familiale

IME œuvre dans

intérêt enfant

Ef3

F Seule, 3

enfants

<40 Sans profession

niveau culturel

<collège

SESSAD

CAMSP

Psy, ortho,

psychomot,

AVS

Taxi

Maternelle, CLIS 3 ans

Problème comportement

Trop difficile

Besoin d’aide même à la

maison

Pense qu’elle ne sait pas

faire et éduc font mieux

Influence du SESSAD

Enfant ne veut pas

travailler

Conflit ++ à la maison

Amélioration

comportement dans

famille

Internat permet de

souffler

Plus d’apprentissages

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186

Pas aide

famille

Maman s’intéresse

peu à ce qui se passe

dans IME

Ef4

F Divorcée,

2 enfants

<40 Sans profession,

AAH

SESSAD

Ortho

Aide

famille

CP, CLIS

Enfant malheureux à l’école

N’arrive pas à apprendre

malgré aide SESSAD et

autres associations

Peu d’intérêt sur ce

qui se passe à l’IME

Ef5

F Séparée,

remariée 3

enfants

<40 Mme Cadre dans

aéronautique

Mr sans emploi

Père Cadre en

informatique

CMP,

psychiatre,

ortho,

psychomot,

psy

Pas aide

famille

Jeune fille

au-paire,

nourrice

Crèche, CP Angleterre, CP en

Fr, CLIS, Montessori, institut

spé, MFR

Aucun dispo adapté, parcours

chaotique

Pas d’accompagnement quand

apprend handicap et ses

limites

Mauvaise orientation

Violence, rejet, en conflit

Diagnostic trop tardif

Contre l’intégration

Enseignement pas adapté

Quand vie familiale plus

compatible avec tous les

accompagnements

Liste d’attente

IME ne parvient pas à

gérer les problèmes

de comportement

Peu de PEC spé

Internat permet de

souffler

Mélange avec cas

sociaux donc (-)

Ef6 F Mariée 3

enfants

39 Au foyer, BTS

bureautique

Mr ouvrier agricole

CAMPS,

AVS en

maternelle,

AVSco

CLIS,

ortho,

SESSAD,

psychomot

Maternelle, 2 moyenne-

section, après GS orientation

en CLIS. Difficultés 1er mois

de CLIS car pas transport

donc pas école. CLIS trop loin

maman sans permis papa

travaillant. Suspension de taxi

un jour par semaine à la 3eme

année CLIS car erreur de la

secrétaire cg. Angoisse

famille quand y a problèmes

administratifs

Un enfant avec des

difficultés à l’école, il

sait lire, il est propre,

comme moi, il mange

correctement, il est

sociable, qu’est-ce qu’il

va faire à l’IME ?

Comme y a de plus en

plus de PEC, propose

IME

Rythme épuisant pour

l’enfant : ramassage

scolaire étendu +

orthophonie le soir.

Rythme diff des

autres enfants de la

maison stigmatise car

maman peut pas faire

accompagnement.

Difficultés du regard

des autres parents.

manque de place dans

dispositif CLIS

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NOM : PETITE Prénom : Laure Session de soutenance : Décembre 2016

FORMATION : DIPLOME D’ETAT D’INGENIERIE SOCIALE

TITRE : Nouvelles interventions sociales en établissements médico-sociaux :

Quels leviers pour les IME ?

RESUME :

Ce travail présente une étude des impacts sur les IME des politiques publiques en

faveur des enfants et adolescents en situation de handicap mental. Le sujet traité est

destiné à celles et ceux qui s’interrogent sur l’hétérogénéité du public accueilli en

établissement spécialisé. Un état des lieux des dispositifs actuels en action en faveur des

enfants présentant des déficiences intellectuelles invite le lecteur à s’interroger sur les

enjeux à venir pour les IME dans le contexte socio-économique dans lequel ils évoluent.

L’étude montre combien les processus de désinstitutionalisation prônés par l’Europe et

d’inclusion scolaire influencent l’organisation des IME et leur mode d’accompagnement.

La « désinstitutionalisation » incite à développer l’offre de services de proximité tout

en faisant la promotion des accueils en institution de petite taille. Parallèlement,

« l’inclusion scolaire » dans les dispositifs de droit commun propose une accessibilité à

l’enseignement sous certaines conditions. Quelles sont-elles ? Á qui s’adresse l’inclusion

scolaire en milieu ordinaire ? Comment vont alors évoluer les IME ? Voici quelques

questions auxquelles cet écrit va tenter de répondre. Fait de recueils de données

constituées de rapports, de données statistiques, d’ouvrages, d’articles parus dans les

revues spécialisées et d’une enquête par entretiens semi-directifs, réalisée auprès de

professionnels de l’Éducation nationale et de familles, il dressera une vue d’ensemble du

paysage inclusif en milieu rural. La méthode d’enquête par entretiens utilisée a permis de

tenir compte de réalités vécues par les acteurs. Les résultats ont fait l’objet d’une analyse

rendant compte de la situation actuelle des dispositifs.

L’innovation s’invite alors dans l’organisation des IME et modifie les pratiques

professionnelles dans le champ du handicap. Cet écrit propose quelques préconisations

non exhaustives dans le champ de la formation, de l’éducation professionnelle et du « case

management ».

MOTS CLES : Handicap mental, Désinstitutionalisation, Inclusion scolaire, IME,

Innovation

NOMBRE DE PAGES : 119 Volume(s) annexé(s) : 0 1 2

CENTRE DE FORMATION :

Collège Coopératif Provence Alpes Méditerranée

Europôle Méditerranéen de l’Arbois, BP 50099

13793 AIX-EN-PROVENCE cedex 3

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