Notes de lecture f imbert

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Francis Imbert, Pour une praxis pédagogique, éditions Matrice, Paris, 1985, 409 p. Notes de lecture Olivier Francomme juin 2008 Commentaires : tout au long de ce livre, les seuls exemples, appuis expérimentaux sont ceux de la classe en pédagogie institutionnelle, de la classe Freinet. Cela montre une fois de plus la pertinence de déplacer le laboratoire directement sur le terrain. Je mettrais un petit bémol dans certaines généralisations : les agrégés, les profs de lycées, les instituteurs.. (p 141) comme si ces catégories étaient homogènes. Préfacé par Jacques Ardoino Sur la complexité : J. Ardoino « la réalité éducative et pédagogique est complexe. Elle se trouve devoir être gérée par des gens qui refusent obstinément cette complexité. Il y a beaucoup d’études sur l’éducation et bien peu de recherches… Les praticiens qui ne se résignent pas à enseigner d’une façon désincarnée, bureaucratique, qui, au sens de la distinction proposée par F. Imbert, s’appuient résolument sur une praxis, ont un travail de nature clinique dans leur approche relationnelle, individuelle et groupale.Pour l’auteur, le travail pédagogique plein (c’est à dire non réduit à des procédures) est, en tout premier lieu, un travail sur le langage. En matière de pratiques pédagogiques (et didactique), dommage qu’il y ait des faussetés « la simulation constituant le ressort essentiel de beaucoup de formes pédagogiques ». Sur le concept de multiréférentialité (p L) dans l’approche complexe des sciences de l’éducation : la complexité s’oppose à l’ambition simplificatrice de la science cartésienne qui vise à diviser la difficulté. La réalité n’est pas réductible par découpage ni par décomposition en éléments simples. Par contre elle n’interdit pas le repérage ou la distinction au sein d’ensembles à partir de méthodes appropriées. Cela suppose une vision systémique, compréhensive et herméneutique. Reconnaître et postuler la complexité d’une réalité, c’et en admettre sa nature à la fois homogène et hétérogène, son opacité, sa multi- dimensionnalité, exigeant pour une compréhension plus fine, une multiréférentialité. En particulier elle s’oppose à un idéal « suspect » de transparence véhiculée par la technocratie contemporaine, et appelle à une autre forme de rationalité nécessaire pour sortir des impasses d’une pensée simplifiante, véritable forme de la barbarie moderne. Francis Imbert

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Francis Imbert, Pour une praxis pédagogique, éditions Matrice, Paris, 1985, 409 p.

Notes de lecture Olivier Francomme juin 2008

Commentaires : tout au long de ce livre, les seuls exemples, appuis expérimentaux sont ceux de la classe en pédagogie institutionnelle, de la classe Freinet. Cela montre une fois de plus la pertinence de déplacer le laboratoire directement sur le terrain. Je mettrais un petit bémol dans certaines généralisations : les agrégés, les profs de lycées, les instituteurs.. (p 141) comme si ces catégories étaient homogènes.

Préfacé par Jacques Ardoino

Sur la complexité : J. Ardoino « la réalité éducative et pédagogique est complexe. Elle se trouve devoir être gérée par des gens qui refusent obstinément cette complexité.Il y a beaucoup d’études sur l’éducation et bien peu de recherches…Les praticiens qui ne se résignent pas à enseigner d’une façon désincarnée, bureaucratique, qui, au sens de la distinction proposée par F. Imbert, s’appuient résolument sur une praxis, ont un travail de nature clinique dans leur approche relationnelle, individuelle et groupale.Pour l’auteur, le travail pédagogique plein (c’est à dire non réduit à des procédures) est, en tout premier lieu, un travail sur le langage.En matière de pratiques pédagogiques (et didactique), dommage qu’il y ait des faussetés « la simulation constituant le ressort essentiel de beaucoup de formes pédagogiques ».Sur le concept de multiréférentialité (p L) dans l’approche complexe des sciences de l’éducation : la complexité s’oppose à l’ambition simplificatrice de la science cartésienne qui vise à diviser la difficulté. La réalité n’est pas réductible par découpage ni par décomposition en éléments simples. Par contre elle n’interdit pas le repérage ou la distinction au sein d’ensembles à partir de méthodes appropriées. Cela suppose une vision systémique, compréhensive et herméneutique.Reconnaître et postuler la complexité d’une réalité, c’et en admettre sa nature à la fois homogène et hétérogène, son opacité, sa multi-dimensionnalité, exigeant pour une compréhension plus fine, une multiréférentialité. En particulier elle s’oppose à un idéal « suspect » de transparence véhiculée par la technocratie contemporaine, et appelle à une autre forme de rationalité nécessaire pour sortir des impasses d’une pensée simplifiante, véritable forme de la barbarie moderne.

Francis ImbertLa question de la praxisMarx définit la praxis comme l’activité matérielle des hommes, et les rapports matériels qu’ils établissent les uns avec les autres à l’intérieur d’un groupe social. La praxis est indissociable du projet révolutionnaire, il s’agit de transformer le monde en vue de surmonter l’aliénation humaine. C’est un projet émancipateur.Il en va de même pour Castoriadis (en 1975) : « nous appelons praxis ce faire par lequel l’autre ou les autres sont visés comme l’agent essentiel du développement de leur propre autonomie. »La pratique est un faire pour occuper le temps !

La dialectique formateur / formé : G. Snyders (Pédagogie progressiste 1971)« Seul le maître peut conduire l’enfant à dépasser son point de vue trop étroit. » Mais ce faisant, il ôte au groupe d’enfants tous les moyens autonomes de produire un savoir, d’élaborer par eux-mêmes leur conscience. Dans cette dialectique, Le formateur est immuable, et le formé doit se déplacer vers le formateur…

Chap II : la praxis et la subversion de la méconnaissance instituée (p 28)Trois institutions : état, famille et école, relèguent l’enfance, la coupent de tout investissement / engagement dans le champ social. Il faut subvertir la méconnaissance instituée (méconnaissance de la nature donnée au statut de l’enfance historicisé).La naturalisation de l’enfance fonctionne dans le double registre de l’institutionnel et du psychologique. Dans ce sens, Freinet s’inscrivait en faux quand il disait : « l’enfant est de même nature que l’homme ».

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Il faut lever le voile de la méconnaissance, démasquer les opérations idéologiques de naturalisation, réhistoriciser l’institution.À l’origine, la formation des instituteurs a été confiée aux philosophes, qui se sont mis au service de la morale de classe. Les penseurs d’Etat opéraient l’affermissement de l’ordre bourgeois.L’éducation suppose un inférieur et un supérieur. (civilisé / sauvage : E Durkheim relevait l’autorité monarchique du maître sur les enfants1).La médicalisation et la réduction des échecs scolaires à des causes psychologiques est une autre déviance actuelle du système qui permet à l’école de s’innocenter, de se dégager de ses responsabilités.Le handicap culturel (et les pédagogies de compensation) continuent à détourner l’attention du milieu scolaire vers les familles. Pour que la culture du maître devienne partie intégrante du monde de l’enfant, il faut que la culture de l’enfant soit partie intégrante du monde des maîtres2.La praxis peut se situer dans le plan de l’élaboration primaire.

Seconde partie : Praxis et temporalité p 53chap III Praxis, temps et espace p 57Le temps est lié au processus donc à la praxis. La classe Freinet, ou PI fonctionne comme une machine, comme un réseau dan lequel des effets de sens peuvent se développer.

chap IV : Innovation et création p 66L’auteur aborde les principales dérives sous couvert de pseudo « innovations » : une gestion sans consistance institutionnelle, une simulation d’ouverture, Une innovation qui ne rencontre pas d’obstacle n’est pas une innovation ( S. Moscovici 1976).Une autre dérive : la scolastique de la totalité.L’autonomie dont la praxis ouvre le projet, ne peut se penser comme une fin définie, pré-inscrite dans un plan, mais plutôt comme un commencement, une entrée dans un processus indéterminé. (p 80) La praxis se nourrit d’un projet dont le terme n’est pas posé au préalable.

Chap V : Temps et projet p 89Pour conclure Temps et projet pédagogique.Sur le rapport au passé, l’obstacle à la mobilisation d’une praxis pédagogique réside dans l’absence de tout projet éducatif au-delà de tout projet de société, mais aussi dans l’oubli de la temporalité, celle de la méconnaissance consciente ou inconsciente du passé. Vouloir faire table rase du passé c’est souvent répéter celui-ci !Dans un projet, le programme peut invalider le sens du projet.Trouver n’est rien, le difficile est de s’ajouter ce qu’on trouve. C’est un travail dialectique entre l’avenir et le passé permettant de briser ses éventuelles fermetures.La praxis propose une pensée de l’inachèvement, que l’on peut caractériser par une stratégie de l’entrisme, le mouvement permanent par lequel l’homme s’efforce jusqu’au terme de son existence, d’entrer dans la vie.

Troisième partie : Clôture et ouverture dans la relation pédagogique. p 105Chap. 6 : Suture et médiation p 109Une suture, c’est une relation rigide, non mobilisable, achevée, non transformable. (p 113)Le langage devient parole mortifère lorsque l’explication moyenne, la parole fonctionnelle, efface les différences, et occulte, étouffe la parole singulière, entreprise toute entière au service de la maîtrise.La dépendance fonctionnelle et aliénante d’un homme à un autre confisque toujours la parole, et l’espace intersubjectif est encombré jusqu’à l’étouffement par la technique ou la prétendue sagesse. (Denis Vasse p 117)Définition du sujet selon Hégel : médiation entre son propre devenir autre et soi même. mouvement qu’empêche la suture)Chap VII : La dialectique du banal et de la banalisation p 121

1 In « l’éducation morale » 1925.2 B. Bernstein « langage et clases sociales ». 1975

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La banalisation est souvent une mise en œuvre de l’oubli. Dans le banal, le réel tend à prendre la place de l’imaginaire. L’identité est déjà accomplie et non plus exigence à accomplir. L’enfant banalisé est vidé de tout imprévu, de tout devenir autonome.L’élève est évidé (de lui-même, de sa pulsion de savoir, de sa parole) c’est la condition fondatrice de l’efficace des Maîtres. On vide l’enfant de sa dimension de sujet. Les techniques Freinet tendent à substituer la relation magistrale d’enseignement à un dispositif d’apprentissage autonome.La logique de la spécialisation des enseignants est aussi source d’impasse. (mettre des enfants ne parlant pas français dans des ghettos) .Chap VIII : Le bon élève p 134 ou l’élève « bien adapté » ! de bonne nature !Il y a une déviance des pédagogies actives : elles ouvrent, la richesse des relations inter-personnelles, mais pour occulter la distribution inégale du pouvoir. Elles enrichissent le vécu de la classe sans toucher au registre institutionnel. Les élèves sont conviés à s’exprimer, à dialoguer, à participer, non afin d’aboutir à la prise en charge de leur procès de travail (d’apprentissage), mais afin d’accepter plus aisément les décisions du maître, les programmes, les normes et finalités institués de l’enseignement, défendus ou intériorisés par les enseignants et en définitive, l’idéologie du savoir qu’on veut leur imposer. Réné Loureau.

Quatrième partie : Narcissisme et idéologie p 159Chap IX Moi-idéal et idéal du moi. p 163 J. Lacan3 : le moi-idéal éclaire le champ de l’imaginaire (narcissique et spéculaire), l’idéal du moi celui du symbolique, des règles et des valeurs, qui structure, au delà de l’imaginaire, toute relation humaine.L’avantage d’une praxis, c’est qu’elle se dégage de tout miroir idéologique, narcissique en promouvant l’existence de sujets. L’articulation institutionnelle de la praxis contourne le rapport de force Maître / élèves. supérieur / inférieur (Jules Ferry), colonisateur / colonisé (Emile Durkheim : l’enfant = degré 0 de la civilisation), civilisé / sauvage (Alfred Binet).L’absence d’un réel projet d’éducation de la société entraîne des non-dits dans le discours idéologique qui fait que faute de pouvoir s’avouer, l’autorité risque de faire un retour plus massif.Chap. X : L’enfant planète. p 179C’est celui dont rien ne sort, à l’intérieur duquel rien n’entre, sur lequel des images peuvent circuler ou se refléter. Il se tait, se terre, refoule en lui le sujet. Peter Handke.Champ X Le corps enseignant et l’inter-dit . p 189Le savoir véritable se gagne contre « l’être bien connu » des choses et des personnes. Hegel.Le bien connu étant le familier, le notoire, l’évident : le non pensé (la suture).Lacan : en parlant à l’enfant son langage, (la violence par exemple), on ne lui rend pas pour autant la parole. Il ne faut ni vider l’enfant de sa réalité socioéconomique, culturelle,…), ni le coller à cette réalité

Chap. XII Formation et praxis p 200Il existe une forme de flânerie sociopédagogique qui se coule dans un rapport spectaculaire d’extériorité, de réparation. Ce rapport rend les enseignants inefficaces et malheureux4. Ce rapport tourne le dos à la réalité.Parlant des enseignants en formation, Francis Imbert aborde un des problèmes des chercheurs qu’il pose ainsi : « ils cheminent seuls, comme ils l’ont toujours été devant l’acquisition d’un savoir individuel, libres de restituer à volonté des fragments à qui veut bien les entendre. (p 205) »… ils interrogent le milieu comme un touriste fait l’effort d’imaginer le peuple qui vivait dans tel paysage… Guy Debord complète : « Illusion de la rencontre, défaillance de la faculté de rencontre, telles apparaissent les caractéristiques de cette relation spectaculaire qui substitue à la vie réelle et à la praxis la fausse conscience de l’idéologie.Pour cela l’auteur propose de raccrocher la vie de classe à la vie réelle, ou de créer des réseaux d’échanges de savoirs (Claire Hébert Suffrin).

3 J. Lacan 1975 Les écrits techniques de Freud, Paris, éd du Seuil.4 Guy Debord « Le spectacle est l’idéologie par excellence parce qu’il expose et manifeste dans sa plénitude l’essence de tout système idéologique : l’appauvrissement, l’asservissement et la négation de la vie réelle. Le spectacle est matériellement l’expression de la séparation et de l’éloignement entre l’homme et l’homme.

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Cinquième partie : Pédagogie et politique p 213Il existe selon l’auteur trois constellations différentes : une constellation marxiste5, une constellation de libéralisme avancé, inspirée de la rationalisation managériale (pédagogie par objectifs), et une constellation républicaine ferryste visant « le retour aux valeur de l’école traditionnelle »6.

Seule la prise en charge de la complexité peut assurer les conditions d’une praxis pédagogique. Première constellationSelon Castoriadis,le capitalisme essaie d’exclure les hommes de la direction de leur propre activité, mais en même temps il doit obtenir leur participation à cette activité. L’objectif de l’école est de transformer l’ensemble des rapports d’éducation, d’instaurer des rapports d’éducation qui favorisent la mise en cause de l’ensemble des rapports sociaux, au lieu de conduire à leur acceptation. L’école et l’entreprise ne sont pas comparables, même si l’école est aussi traversée par les divisions sociales (p 224). L’école ne comprend pas de processus de production structuré a priori en opposition de classe. C’est une structure relationnelle.Deuxième constellationElle relève de la conception « machinique » de l’école, telle la pédagogie par objectif. Quand elle n’a pas pour but le refoulement, mais élucidation et appropriation, elle peut contribuer à un plus grand repérage et une meilleure articulation des moyens permettant d’assurer et de valider le projet. Mais souvent elle penche du côté d’une maîtrise des situations et des acteurs, exclusive d’une vision d’autonomie. De plus, politiquement le parallèle a été fait avec le mode de l’entreprise (par D. Hameline).

Chap XIII : À propos de l’articulation du pédagogique et du politique p 228Dans la perspective d’une pédagogie sociale, l’adulte a un rôle important à jouer.La réalité sociale a « plusieurs niveaux » articulés selon B. Charlot (groupe classe, organisation, institution). Les tenants de l’analyse institutionnelle (Lapassade, Lourau et Ardoino) oppose une transversalité institutionnelle à cette stratification. L’institution traverse tous les niveaux d’une formation sociale déterminée.B. Charlot isole le groupe classe et le réduit à un simple groupe relationnel alors qu’il est traversé de part en part par la société, à tous les niveaux : économique, culturel, politique,..Quelles sont les oppressions du groupe classe : la hiérarchie, la concurrence.. qui sont passées sous silence. Mais il y a aussi, la vénération du savoir, l’obéissance, …La classe n’est pas une micro-société isolée et protégée de la macro-société. Le maître a un rôle de médiateur, il y a nécessité de s’ouvrir sur le monde du travail.

Chap XIV Management et nouvelle pédagogie p 259L’acte éducatif s’articule au changement selon deux voies : une voie intrinsèque, constitutif de l’acte éducatif ; et une voie extrinsèque, qui doit tenir compte du changement constitutif d’une société en constante évolution.Le rôle profond des procédures participatives, quels qu’en puissent être les différents aspects formels, c’est l’ajustement des buts personnels des hommes aux objectifs de développement de l’entreprise. (Barbier 1977)

Chap XV : Du simple et du complexe dans le champ éducatif. p 280Dès 1975, G. Avanzini7 réclame une néo-directivité, fondée sur de solides connaissances objectives. On évacue donc le psychologique, le psycho-sociologique et l’institutionnel.Un système complexe ne se réduit pas à une catégorie d’éléments homogènes, ni a un seul niveau d’organisation, ni il ne relève d’un type de relations linéaires entre ces éléments et ces niveaux. Une approche multidimensionnelle et multi rationnelle est nécessaire8 : repérage et articulation des différentes dimensions constitutives de la situation éducative et corrélativement, le repérage et l’articulation des

5 Constellation représentée par Bernard Charlot avec « La mystification pédagogique », 1976.6 Constellation représentée par JC Milner, avec « De l’école », 1984.7 In « Immobilisme et éducation dans l’éducation scolaire », 1975.

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différents référentiels ou des différentes perspectives qu’il convient de mobiliser afin de penser cette multi rationalité.La classe est un ensemble d’élèves (psychologie), un lieu de rencontre (relationnel), un lieu de dynamiques (groupe), une organisation (objectifs, programmation,..), une institution (règles, normes, ..).Rappel de l’auteur, pour « l’instruction », quelles que soient les méthodes et les objectifs spécifiques, elle est porteuse d’un modèle de socialisation, de sens et de valeurs socialement orientées. Pour Jules Ferry, c’était le chauvinisme national, respect de la propriété,de la hiérarchie,..)Selon Milner l’école ce sont quatre choses : des savoirs, des savoirs transmissibles, des spécialistes chargés de ces savoirs transmissibles, et une institution reconnueLes relations entre la recherche et l’éducation nationale sont difficiles : par exemple au moment du plan Guichard, Louis Legrand note p 302 : « il y a toujours en France conjonction objective des orientations conservatrices d’un pouvoir soucieux de canaliser et de contrôler l’innovation et celles des corps d’inspection dont la fonction naturelle est l’imposition de la norme. Ainsi meurent les réformes. »Sur l’échec des réformes :-Il y a une cause politique : la France est gouvernée par les conservateurs-Il y a un verrou financier : toutes les propositions de réforme ont insisté sur la nécessité de prévoir des formations (dont permanente), aucun moyen n’y est alloué. Au second degré, il n’y a aucune formation pédagogique initiale.-Il y a l’absence totale de perspective scientifique en matière de recherche éducative et de développement. Il s’agit de rester marginal et de sauvegarder le système antérieur.On en revient aux questions fondamentales : quelles sont les dimensions constitutives de la situation scolaire ? Approche simpliste de l’enseignement ou vision complexe ? Une praxis effective étayée sur l’ouverture de la pratique enseignante à l’ensemble des dimensions psychologiques conscientes et inconscientes, techniques et organisationnelles, hors desquelles elle se réduit à une abstraction, ou encore, à une pratique vide de tout sens.

L’école ne peut pas tout, elle doit mettre des limites à cette inflation qui la conduit à vouloir se substituer aux familles, à la religion, et aux centres thérapeutiques.La socialisation n’est pas une dimension supplémentaire, elle est le résultat : une pédagogie pour laquelle les activités scolaires, en tant que telles, constituent l’occasion pour chacun d’en passer par le défilé des rituels, des règles et des lois.

Chap XVI : L’histoire à reculons p 331En 1860, 87% des ouvriers savaient lire (p 334) Jules Ferry n’a apporté qu’une alphabétisation « étatique ». Tout au long du XIX° siècle, une instruction se développe dans les corps de métiers, une instruction sans école , une instruction mutuelle que l’état républicain frryste va progressivement réduire, au point de la faire disparaître de nos mémoires. La vocation de l’état serait-elle de réduire les pouvoirs autonomes de la société civile ?

Sixième partie : Les avatars de la maîtrise. p 341Chap XVII Un projet et sa mouvance p343Sur le travail de thèse de P Imbert : « (re) donner la parole à l’enfant. » Avec tous les risques de biais : n’entendre que la parole convenue, parler à la place de l’enfant, …

Quand le formé devient formateur (p 350), le risque de points aveugles : le processus de production, la contradiction de la position de formateur (fusion, coexistence pacifique, statut ?), étiquette éthique Le problème soulevé par l’idéologie : elle épuise le projet dans la nécessité d’une cohérence immédiate. p353Sur la relation au savoir : le miroir qui ne laisse rien perdre de ce qu’il représente offre au savoir qui s’y contemple sa propre image comme fin à réaliser9. Savoir bouclé, savoir mortifère. Car ce savoir qui se prend au piège du miroir, « prend au piège sans le vouloir le sujet parlant ».

8 approche proposée par J Ardoino in «  « Problématique de la relation Maître-Elève et Dynamique de la classe »Education nationale 8 juin 1967.9 D. Vasse, 1982, p 68 : « le poids du réel, la souffrance »

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L’enfant banalisé, moyen, à sa façon résiste. Il conserve un arrière plan de sens inépuisable, une redoutable dimension d’inconnu (j’ajouterai de mise en doute de l’autre).Ouvrir la connaissance, ouvrir l’enfant à son propre infini, implique d’en passer par la médiation du cotexte, l’observation de l’interaction et des pratiques réciproques du « sujet »et de son « objet ». p 358

Chap. XVIII : La question du sujet p 368La recherche dans les sciences de l’éducation ne peut pas avoir, par essence, le modèle des sciences positives, la neutralité et l’extériorité du chercheur. (R. Lourau 1973)S. Freud : Si nous ne comprenons pas l’enfant c’est que nous ne comprenons pas notre propre enfance.La psychanalyse comme paradigme d’une autoréflexion généralisée : l’implication réciproque des deux sujets s’y trouve essentielle, non accidentelle.La situation analytique est bien productrice de savoir, mais ce savoir est co-construit par l’analyste et l’analysant. Habermas : le travail intellectuel est réparti entre le médecin et le patient… de plus, les connaissances analytiques ne peuvent avoir de sens et de validité pour l’analyse qu’après avoir été acceptées comme connaissance par l’analysé lui même. Perso : on peut même considérer que l’analyste devienne l’instrument de mesure au travers des perturbations provoquées par les « patients » en lui. (proposition de G Devereux).L’analyste sourd interpose son propre conscient entre l’inconscient du patient et le sien, à la seule fin de se défendre des réverbérations de l’inconscient du patient dans le sien propre. Ce faisant, cet analyste rétablit une distance entre « dehors » et « dedans », « sujet » et « objet », qui paralyse le processus d’auto réflexion.