Note brigitte daudet

25
1 Club Territoires maritimes Vendredi 07 Décembre 2012 PARIS Grands projets de villes Grands projets de ports Quelles échelles spatio-temporelles pour quelles gouvernances? Le cas de la Vallée de Seine NOTE STRATEGIQUE & PROSPECTIVE Brigitte Daudet, Professeur Ecole de Management de Normandie 30, rue de Richelieu 76 087 Le Havre (France) b.daudet@em-normandie.fr Tel : 011-33-(0)2-32-92-59-93 Avec la collaboration de et le soutien de

description

Pour le club « territoires maritimes » de la FNAU, organisé par l’AURH à Paris le 7 décembre dernier, une note prospective a été proposée par Brigitte DAUDET

Transcript of Note brigitte daudet

Page 1: Note brigitte daudet

1

Club Territoires maritimes

Vendredi 07 Décembre 2012 PARIS

Grands projets de villes Grands projets de ports

Quelles échelles spatio-temporelles

pour quelles gouvernances?

Le cas de la Vallée de Seine

NOTE STRATEGIQUE & PROSPECTIVE

Brigitte Daudet, Professeur Ecole de Management de Normandie 30, rue de Richelieu 76 087 Le Havre (France) [email protected] Tel : 011-33-(0)2-32-92-59-93

Avec la collaboration de

et le soutien de

Page 2: Note brigitte daudet

2

Note de l’auteur

La présente contribution s’inscrit dans le cadre de réflexions portées depuis plusieurs années

sur l’évolution des relations entre les espaces urbains et les territoires portuaires. D’abord

porté sur la dynamique de gestion d’un grand projet urbain, le travail de recherche s’est

étendu progressivement à l’interaction dynamique entre un grand projet urbain et un grand

projet portuaire. Sur le plan méthodologique, les mêmes référents et les mêmes outils

permettent de faire converger le grand projet urbain et le grand projet portuaire. La

concertation et la conciliation demeurent au cœur de l’évolution fonctionnelle et stratégique

du pilotage du grand projet.

Au fil des travaux, l’auteur a pris conscience que la logique du grand projet se trouvait en

quelque sorte sublimée par les problématiques liées aux espaces « entre », « au contact »,

« en interpénétration spatiale et fonctionnelle ». La gestion d’un grand projet de ville, d’un

grand projet de port ou les deux en simultanée est une question de périmètre. Périmètre

temporel. Périmètre fonctionnel. Périmètre de compétences. Périmètres juridiques.

Périmètre « citoyen et sociétal », Etc. Bref, un empilement dynamique de strates avec des

pondérations sur les poids respectifs de chacun des facteurs et des acteurs qui interagissent

pour faire et défaire des grands projets de ville et des grands projets de ports. La question de

recherche qui découle relève finalement de deux dimensions :

- quelles échelles de lecture devons-nous considérer dans l’évolution dynamique des

relations entre des espaces urbains et portuaires de plus en plus distendus ?

- quelles gouvernances au pluriel mettre en place pour administrer et orchestrer ces

espaces-tampons en mutation perpétuelle ?

Le rapport exécutif proposé aux membres du Club Territoires maritimes de la FNAU élabore quelques

pistes de réflexions pour structurer une recherche appliquée au service des acteurs et des

décideurs territoriaux. Les agences d’urbanisme, dans leur mission de planification et de

conseils, font parties des acteurs majeurs à considérer dans ces débats ouverts sur la

gouvernance.

Page 3: Note brigitte daudet

3

A l’heure des fusions en Normandie des Chambres de commerce, des fusions

d’intercommunalités (projet d’agrandissement du périmètre de la CODAH et élargissement

effectué pour le périmètre de la CREA), du développement des opérations du GIE portuaire

HAROPA1 et des aspirations à toujours plus concentrer les communes en groupement

d’intérêts mutualisés, les question d’échelle d’espace, de temps et de gouvernance sont

totalement ouvertes.

La présente réflexion se décline en trois parties :

- un rappel succinct des fondamentaux de la gestion du grand projet avec des

considérations méthodologiques appliquées aux réalités urbaines et portuaires

modernes ;

- la proposition de changer d’échelle de lecture en prenant les ensembles urbains

comme des Espaces Métropolitains Elargis (EME) et les domaines portuaires comme

des Corridors Logistico-Portuaires (CLP) comme unité de référence. L’auteur cherche

à démontrer que ces EME et CLP redimensionnent l’appréciation des relations entre

les villes et les ports; et enfin,

- une troisième partie exploratoire qui cherche à définir les bases d’une gouvernance

originale en phase avec les interactions dynamiques et parfois antinomiques entre

EME, CLP et toutes les composantes du secteur privé sans oublier la sphère politique.

Une synthèse bibliographique des productions de l’auteur sur le sujet suit cette note.

Brigitte Daudet

Professeur

Ecole de Management de Normandie

Le Havre – France

1 HAROPA HAROPA est le regroupement des trois ports de la Vallée de Seine : Port de Paris, Grand Port Maritime de Rouen et Grand Port Maritime du Havre, au sein d’un Groupement d’Intérêt Economique (GIE) constitué en janvier 2012. « HAROPA » qui reprend les deux premières lettres et syllabes des villes évoque la coopération et les synergies entre les trois ports. Il renvoie également au métier en tant que contraction de « Harbours of Paris ». HAROPA se positionne aujourd’hui comme le premier complexe portuaire français et le 4e port européen en matière de trafic. (Voir carte 1)

Page 4: Note brigitte daudet

4

Carte 1

Source A.U.R.H.

Bibliographie sélective sur le sujet de l’auteur

Daudet, B., Alix, Y., (2012) « De l’héritage des relations ville-port… aux enjeux de gouverner

des espaces métropolitains et des corridors logistico-portuaires pour le « bien-vivre »

d’acteurs-consommateurs-citoyens. Revue Portus Plus N°3. RETE Asociación para la

colaboración entre Puertos et Ciudades.

Daudet, B., 2012, « Gouvernance des territoires ville-port : empreintes locales, concurrences

régionales et enjeux globaux ». Organisation et territoires. Volume 21, Numéro 2 & 3. A venir

(en partenariat avec Y. Alix)

Page 5: Note brigitte daudet

5

Daudet, B., 2011, « Les corridors maritimes et les villes portuaires : mégatendances,

problématiques et solutions applicables ». Rencontre internationale de Québec : définir la

relation ville-port de demain. 10 au 12 Avril 2011. Québec – Canada. (en partenariat avec Y.

Alix)

Daudet, B., 2010, « Grands projets urbains et portuaires : pour une reconsidération des

conciliations, concertations et confrontations ». 12th International Conference Cities and

Ports. 15/19 Novembre 2010. Buenos-Aires & Rosario. Argentina.

Daudet, B., 2009, « Développement portuaire et enjeux durables. L’interface Ville/Port ».

Conférence-Débat. EM Normandie. 3 Mars 2009. Compte-rendu non publié.

Remerciements

Á Yann Alix, Délégué Général de la Fondation SEFACIL, pour sa relecture et ses

commentaires

Á la fondation SEFACIL pour son soutien et ses réseaux

Á Madame Juliette Duszynski, chef de projet AURH, pour sa relecture et ses commentaires

Page 6: Note brigitte daudet

6

1- En guise d’introduction : quelques fondements méthodologiques sur le Grand

Projet et ses applications pratiques sur les milieux urbains et portuaires

L’objet n’est pas ici de caricaturer une foisonnante littérature pluridisciplinaire sur les

définitions protéiformes et contradictoires de ce qu’est ou n’est pas un grand projet.

L’ambition consiste par contre à considérer les réalités inhérentes au grand projet dans le

contexte si particulier d’espaces, de surfaces, de territoires urbano-portuaires (ou portuaro-

urbains) où les ruptures ne se manifestent pas nécessairement par des lignes, des murs, des

symboles et encore moins des pratiques. Les densités, les intensités, les temporalités des

relations ville/port obligent une forme d’adaptation de facto des repères du grand projet.

L’imagination et la projection d’un grand projet de ville, d’un grand projet de port, ou pire,

d’un grand projet urbano-portuaire touchent directement les héritages spatio-temporels de

la ville, du port et très souvent des deux. Des espaces vécus, des espaces construits, des

espaces de transition se voient perturbés par les dimensionnements d’un grand projet par

essence complexe. Le grand projet a ceci d’encore plus vrai dans une relation ville/port qu’il

s’inscrit dans la gestion de moult parties prenantes nécessitant un effort de transversalité

afin de garantir qu’au final le sens et les objectifs de ce projet seront respectés et atteints. Il

se caractérise par le fait qu’il est totalement occasionnel, unique et ne bénéficie que peu ou

pas d’antériorité ni de retour d’expérience. Or, même si tous les ports se ressemblent de

plus en plus, il n’existe peu ou prou aucune formule de reproductibilité lors que l’on entame

le processus d’élaboration d’un grand projet sur un port. Au-delà des approches

techniciennes et technologiques, c’est l’intégration du grand projet portuaire dans son

environnement immatériel qu’il s’avère sûrement le plus difficile à cerner. Le grand projet de

ville et de port touche l’affect, le sensible, un degré d’acceptabilité par des populations, des

usagers, des visiteurs avec en contre champs des héritages, des interprétations, des

fonctionnalités parfois longues de plusieurs centaines d’années.

Page 7: Note brigitte daudet

7

Bien sûr, et dans une livraison en vrac, le grand projet condense :

- Une finalité stratégique

- Un marquage politique

- Une orientation économique

- Une avancée technologique

- Une dimension logistique

- Une empreinte territoriale

- Une opportunité culturelle

- Une nécessaire communication

- Une gouvernance structurée, voire réinventée (car la dimension territoriale innovante

du projet Grand Paris Vallée de Seine impose une gouvernance à inventer)

La liste est bien loin d’être exhaustive mais le caractère holistique complexifie le rôle et la

projection des aménageurs de grands projets dans le contexte urbano-portuaire. Une ville

portuaire somatise l’irrationalité souvent incompatible entre le temps et l’espace. Une ville

s’inscrit dans des spatialités locales/régionales avec des circonscriptions politiques et

administratives sclérosantes alors que le port, avec « ses» grands projets, ne peut s’inscrire

que dans le global avec en ligne de mire le champ des relations commerciales et

économiques qui se tisseront avec l’opportunité de voir émerger une super infrastructure.

Au-delà de l’ambition de marquer l’histoire par une construction remarquable, l’édile et ses

aménageurs de grands projets urbains auront aussi à cœur de maîtriser les temporalités de

son projet. Temporalité politique, Temporalité de la construction, temporalité de la maîtrise

du projet et temporalité de la vie intrinsèque de l’ouvrage préoccupent l’urbain comme il ne

préoccupe pas tout à fait le portuaire. Paul Scherrer, directeur de Port 2000, a déclaré lors

d’un séminaire au Havre en 2008 que la construction de la première tranche de PORT 2000

relevait du même ordre d’idée que de construire une Cathédrale les pieds dans l’eau avec

tout de même l’immense privilège pour lui d’avoir pu poser la première et la dernière

pierre !

Page 8: Note brigitte daudet

8

Les caractérisations du grand projet dans le contexte urbain et portuaire retrouvent

évidemment des accointances, notamment dans la gestion des conflits ouverts de parties

prenantes non convergentes ou les inaltérables problématiques de gouvernance d’ensemble.

Ces éléments s’exacerbent peut-être d’autant plus quand l’on se trouve dans des villes

portuaires où les vagues de réappropriation des friches industrialo-portuaires par la ville

succèdent aux ambitions de réaménagement de foncier portuaire au sein des villes.

La cohabitation dynamique de grands projets urbains et de grands projets portuaires sur des

espaces parfois superposés exige aussi de s’intéresser aux interfaces. La gestion des

territoires aux confluences de grands projets de nature parfois très différente constitue un

enjeu particulier. Dans l’outillage méthodologique du grand projet, ces espaces transitoires

ou en interrelations dynamiques (avec des dominantes tantôt urbaines, tantôt portuaires)

deviennent des laboratoires d’expérimentations. Sur le plan opérationnel, des mondes se

rencontrent au moment où l’invasion physique d’un grand projet portuaire vient grignoter

des marges d’urbanité. Même chose dans l’autre sens où la domanialité portuaire souffre

difficilement de voir amputer ses territoires par des grandes opérations urbaines.

La gestion de ces interfaces devient un enjeu en soi. Cela s’avère d’autant plus pertinent

quand les échelles spatiales et temporelles se diluent avec la taille intrinsèque des grands

projets.

2- Quelles échelles de lecture devons-nous considérer dans l’évolution dynamique des

relations entre des espaces urbains et portuaires de plus en plus distendus ?

La relation ville-port demande une lecture systémique où des vocabulaires pluriels décrivent

des réalités multidisciplinaires. La complexité des terminologies relève autant de la

sémantique que de l’épistémologie mais finalement c’est l’acception des mots faite par les

différents groupes d’intérêts qui prime. En clair, le juriste, le sociologue, le géographe ou

encore l’économiste ou l’urbaniste peuvent utiliser des mots ou des concepts différents pour

décrire des réalités identiques.

Page 9: Note brigitte daudet

9

Tout comme le citoyen, l’usager ou le consommateur peuvent revendiquer une lecture de la

relation ville-port avec des référents particuliers. L’acceptation des termes demeure en soi

un problème dans l’analyse dynamique, spatiale et temporelle des relations entre une ville

et un port.

La figure 1 ci-après met en perspective cette lecture protéiforme de la relation ville-port,

mettant volontairement de côté les dimensions historiques et patrimoniales. Bien sûr, cette

énumération de termes est toute sauf exhaustive mais a l’audace de montrer la somme

complexe des interactions dynamiques qui caractérise finalement tout projet de relations

entre une ville et son port, entre un port et sa ville.

Bien entendu, à l’échelle de lecture se greffe l’échelle des intérêts des grandes catégories

d’acteurs qui composent l’écosystème humain de l’espace ville-port. L’analyse des

interactions entre les différentes familles d’intérêts s’avère d’autant plus complexe si l’on

cherche à en pondérer le poids dans la gestion des concertations.

Figure 1

Les modalités de l’analyse des relations ville-port ou les difficultés d’une lecture

pluridisciplinaire systémique

Source : Yann Alix & Brigitte Daudet, 2011

VILLE PORT

INTEGRATION ORGANIQUE

GEOGRAPHIE PHYSIQUE

SOCIETES / SOCIOLOGIES / ETHNOGRAPHIES

ECONOMIES / COMMERCES / FINANCES / FISCALITES

ARCHITECTURES / URBANISMES / AMENAGEMENTS / ECOLOGIES

Espaces Surfaces Territoires Ruptures Pratiques Symboles Empreintes

Densité Intensité TransversalitéTemporalité Acceptabilité Connectivité Accessibilité

FONCTIONS OPERATIONS INVESTISSEMENTS POLITIQUES STRATEGIES ACTEURS

VILLE PORT INTEGRATION ORGANIQUE

GEOGRAPHIE PHYSIQUE

SOCIETES / SOCIOLOGIES / ETHNOGRAPHIES

ECONOMIES / COMMERCES / FINANCES / FISCALITES

ARCHITECTURES / URBANISMES / AMENAGEMENTS / ECOLOGIES

VILLE PORT INTEGRATION ORGANIQUE

GEOGRAPHIE PHYSIQUE

SOCIETES / SOCIOLOGIES / ETHNOGRAPHIES

ECONOMIES / COMMERCES / FINANCES / FISCALITES

ARCHITECTURES / URBANISMES / AMENAGEMENTS / ECOLOGIES

VILLE PORT INTEGRATION ORGANIQUE

GEOGRAPHIE PHYSIQUE

SOCIETES / SOCIOLOGIES / ETHNOGRAPHIES

ECONOMIES / COMMERCES / FINANCES / FISCALITES

ARCHITECTURES / URBANISMES / AMENAGEMENTS / ECOLOGIES

Espaces Surfaces Territoires Ruptures Pratiques Symboles Empreintes Espaces Surfaces Territoires Ruptures Pratiques Symboles Empreintes

Densité Intensité TransversalitéTemporalité Acceptabilité Connectivité AccessibilitéDensité Intensité TransversalitéTemporalité Acceptabilité Connectivité Accessibilité

FONCTIONS OPERATIONS INVESTISSEMENTS POLITIQUES STRATEGIES ACTEURS FONCTIONS OPERATIONS INVESTISSEMENTS POLITIQUES STRATEGIES ACTEURS

VILLE PORT INTEGRATION ORGANIQUE

GEOGRAPHIE PHYSIQUE

VILLE PORT INTEGRATION ORGANIQUE

GEOGRAPHIE PHYSIQUE

SOCIETES / SOCIOLOGIES / ETHNOGRAPHIES

ECONOMIES / COMMERCES / FINANCES / FISCALITES

ARCHITECTURES / URBANISMES / AMENAGEMENTS / ECOLOGIES

SOCIETES / SOCIOLOGIES / ETHNOGRAPHIES

ECONOMIES / COMMERCES / FINANCES / FISCALITES

ARCHITECTURES / URBANISMES / AMENAGEMENTS / ECOLOGIES

Page 10: Note brigitte daudet

10

Le projet conteneurisé Port 2000 au Havre représente un modèle de complexité des

relations entre parties prenantes. Juste un exemple : les observateurs de la faune des marais

de la rive droite de la Seine se sont associés aux habitants d’Honfleur de la rive gauche pour

exprimer leurs mécontentements particuliers. Les premiers exprimaient la crainte de voir

détruire des écosystèmes fragiles avec notamment le rôle perpétuel du cycle des marais sur

des biotopes originaux. Les seconds percevaient les futures grues portiques de 40 mètres de

haut comme des pollutions visuelles (voire sonores) avec comme conséquence directe la

dévalorisation potentielle de leurs investissements immobiliers. Ce double exemple rend

compte de la diversité des revendications citoyennes et sociétales que les promoteurs de

Port 2000 durent considérer dans l’élaboration de mesures compensatoires. Cela exige

autant une forme de hiérarchisation des récriminations qu’une évaluation des actions à

mettre en place pour tenter d’obtenir un consensus acceptable par l’ensemble des parties

prenantes impliquées dans chaque dossier particulier. La « parade » méthodologique passe

dorénavant par des recensements systématiques lors de réunions publiques où les débats

demeurent totalement ouverts. Ces lieux d’expression citoyenne alourdissent

considérablement la gestion des grands projets mais devient un passage obligé exigeant une

grande mobilisation de personnels et de compétences. Ces débats publics peuvent tout

autant être sources d’inspiration et de « bonnes idées » venant enrichir les projets.

La cartographie de toutes les parties prenantes est une composante essentielle de la

difficulté de l’analyse de la relation ville-port. De surcroît, la pondération des poids respectifs

incarnés par chaque catégorie d’acteurs rend l’exercice aussi complexe qu’unique, ce qui

correspond fidèlement au caractère non –reproductible du grand projet ! La figure 2 ci-après

illustre ces interactions dynamiques entre parties prenantes, qu’elles soient publiques,

privées, collectives, individuelles ou civiles.

Page 11: Note brigitte daudet

11

Figure 2

Ecosystème des interactions dynamiques entre parties prenantes des grands projets

Source : Yann Alix & Brigitte Daudet, 2011

Chaque grande catégorie de parties prenantes présente sa propre hiérarchisation des

priorités et intérêts liés au développement d’un grand projet portuaire ou un grand projet

urbain (ou les deux). Prenons l’exemple des développements très médiatisés des terminaux

gaziers dans les pays développés comme la France, le Canada ou les Etats-Unis. Plusieurs

grands projets, souvent localisés en dehors des espaces métropolisés, ont été tout

simplement abandonnés faute de consensus entre parties prenantes. Quand des

promoteurs (public ou privé) argumentent sur la conjugaison entre leurs intérêts

économiques particuliers et les ambitions énergétiques portées par une politique nationale,

cela n’empêche pas des collectifs de riverains de contester l’ancrage foncier du projet.

ECONOMIQUES

SOCIETALES

ENVIRONNEMENTALES

FONCIERES

parties

prenantes

individuelles

parties

prenantes

privées parties

prenantes

civiles

parties

prenantes

publiques

parties

prenantes

collectives

Grands projets urbains

Grands projets portuaires

POLITIQUES

ECONOMIQUES

SOCIETALES

ENVIRONNEMENTALES

FONCIERES

parties

prenantes

individuelles

parties

prenantes

privées parties

prenantes

civiles

parties

prenantes

publiques

parties

prenantes

collectives

Grands projets urbains

Grands projets portuaires

POLITIQUES

Page 12: Note brigitte daudet

12

Les risques technologiques majeurs ou les conséquences environnementales sont

argumentés par des riverains qui se voient retourner des discours tout aussi sociétaux

qu’environnementaux de la part des experts et investisseurs! Les premiers voient une

menace majeure dans l’opportunité d’implantation alors que les seconds tendent à prouver

l’opportunité exceptionnelle de la localisation du terminal… pour les riverains !

L’interpénétration des échelles d’intérêts se mêlent aux échelles spatiales et aux échelles

temporelles. Toute la complexité de la gestion des relations ville-port se trouve synthétisée

dans cette formule.

Carte 2 - Les emboitements d’échelles

Source A.U.R.H.

Page 13: Note brigitte daudet

13

3- L’Espace Métropolitain Elargi (EME) et le Corridor Logistico-Portuaire (CLP) comme

nouvelle échelle spatio-temporelle des relations ville-port

Pour définir les modalités de la gouvernance des relations entre grands projets urbains et

portuaires , encore faut-il s’entendre sur les délimitations spatiale et temporelle recouvertes

par des projets qui apparaissent toujours plus « grands », toujours plus « complexes » et

finalement toujours plus « polémiques » avec l’expression décomplexée des parties

prenantes.

L’Espace Métropolitain Elargi se caractérise par une dilution spatiale du bâti et une

concentration humaine importante. L’EME présente une concentration importante de

services et de loisirs où les citoyens peuvent jouir d’une qualité de vie et d’un bien-être

revendiqués. Les espaces apparaissent contraints avec des usages et des revendications qui

intensifient le recours aux processus de concertation et de conciliation. L’EME s’intègre dans

des schémas de transport où le maillage, la connectivité des réseaux et la mobilité

deviennent des arguments d’attractivité territoriale. L’EME dispose d’une visibilité

institutionnelle et d’un pouvoir de lobbying pour que ses intérêts communautarisés à

l’échelle de l’EME puissent disposer de décisions favorables (à l’échelle de l’Etat-Nation, des

institutions européennes ou encore auprès des centres de décisions des entreprises privés

nationales & internationales, etc.). Ecosystème complexe et dynamique, l’EME voit se

décupler les difficultés à faire converger une approbation unanime sur les décisions, qu’elles

soient petites ou grandes. Cela s’explique évidemment par la taille de l’EME et

l’hétérogénéité des points de vue défendus et exprimés par des organes, des fédérations et

des groupes de citoyens toujours plus organisés et informés. En ce sens, l’EME se confronte

à une gouvernance en mille-feuilles où les pré-carrés historiques, stratégiques et

symboliques ne s’effacent que rarement face au compromis. Un des objectifs de l’EME est

de faire cohabiter ces divergences, voire ces clivages, notamment dans la gouvernance

collective et politique d’espaces mosaïques.

L’EME trouve sa cohérence, voire sa raison d’être objective, dans les mises en concurrence

et les compétitions entre territoires. L’EME doit lisser ses divergences pour présenter un

territoire disposant d’une stratégie durable de développement économique.

Page 14: Note brigitte daudet

14

Les organes de représentation de l’EME ont comme impérieuse ambition de co-construire

les conditions d’une attractivité pérenne. En ce sens, l’EME ne doit surtout pas représenter

une énième couche du mille-feuilles administratif mais bien incarner l’expression d’un

organe de référence avec qui il s’avère indispensable de discuter pour pouvoir investir le

territoire gouverné.

Pour les Corridors Logistico-Portuaires (CLP), ils relèvent de territoires aux multiples

gouvernances publiques qui cherchent à pérenniser l’avenir économique et social des

espaces administrés. Le tout s’inscrit dans une mouvance générale de décentralisation

politique et d’autonomisation des espaces régionaux. Les processus de décentralisation ou

de dessaisissement conduisent au transfert de responsabilités vers des intérêts privés qui

investissent dans certaines activités de transport. Les CLP s’inscrivent dans un marché de

transport ouvert avec une très forte concurrence internationale. Les déréglementations et

réformes institutionnelles ont conduit à une plus grande compétition entre les EME, les

interfaces portuaires et leurs CLP. Evidemment, ces considérations exigent que l’on

considère à sa juste valeur l’impact des choix stratégiques prônés par de puissantes

multinationales du transport et de la logistique. Les CLP se confrontent les uns les autres au

gré de compétitions globalisées orchestrées par des firmes capables d’être investies de

manière simultanée sur plusieurs CLP immédiatement concurrents. Autre approche

stratégique, autre dimension structurante, autre échelle d’influence : le rôle de la

Communauté Européenne. Avec ses grandes orientations en matière d’aménagements

infrastructurels pour un transport durable au sein de l’espace communautaire, l’Union

européenne joue une partition communautaire où chaque CLP cherche à tirer un maximum

de profit.

Un CLP exprime aussi la dilution spatiale des investissements logistiques, symbole de

l’ancrage physique et organisationnel des entreprises en charge de gérer les flux de

marchandises à des échelles autant locale que planétaire. C’est toute la différence avec une

zone industrialo-portuaire où la dépendance entre l’infrastructure portuaire et

l’infrastructure industrielle apparaissait totale. Un CLP cherche à structurer une offre

complète de services et de transport sur un territoire étendu.

Page 15: Note brigitte daudet

15

La fidélisation de mètres carrés logistiques et l’implantation de services à valeur ajoutée sur

des espaces éloignés des quais maritimes constituent une condition sine qua none du

rayonnement d’un CLP. Que l’on évoque l’Extended Gateway belge, le Thames Gateway en

Grande-Bretagne ou en France, le GIE HAROPA, tous constituent de superbes

représentations marketing de CLP en quête de fixation d’investissements, de valeur et de

services. Le port (ou les ports) sont les terminaisons (et/ou les portes d’entrées) de systèmes

de transport intégrés au service d’EME plus ou moins structurés et construits. Le GIE

HAROPA s’est articulé dans la mouvance des réflexions stratégiques et politiques du Grand

Paris maritime.

Le concept de Seine Gateway proposé et défendu par l’AURH corrobore cette vision

intégrée d’un CLP au service d’un EME où un EME ne peut se développer dans l’économie

mondiale d’aujourd’hui sans une structuration efficace d’un CLP !

Les deux représentations des deux figures 3 et 4 expriment de manière graphique

l’interpénétration des échelles spatiales et temporelles de l’EME et du CLP.

Figure 3

Les Corridors Logistico-Portuaires et les Espaces Métropolitains Elargis :

interpénétration des échelles de temps et d’espace

Source : Yann Alix & Brigitte Daudet, 2011

ESPACES METROPOLITAINS ELARGIS

CORRIDORS LOGISTICO-PORTUAIRES

ENJEUX

BESOINS

FINANCEMENTS

INTERETS

STRATEGIES

INF

RA

ST

RU

CT

UR

ES

SU

PE

RS

TR

UC

TU

RE

S IN

FR

AS

TR

UC

TU

RE

S

SU

PE

RS

TR

UC

TU

RE

S

Concurrence / compétitions mondialisées

Revendications localisées / régionalisées

• Opérateurs globaux de terminaux

• Armements mondiaux

• Prestataires Logistiques intégrés

• Chargeurs Grands Comptes

• Citoyens &Usagers

• Ecologue urbain & néo-urbain

• Nautisme, balnéo, pêche(s), etc.

• Touristes & visiteurs

ESPACES METROPOLITAINS ELARGIS

CORRIDORS LOGISTICO-PORTUAIRES

ENJEUX

BESOINS

FINANCEMENTS

INTERETS

STRATEGIES

ENJEUX

BESOINS

FINANCEMENTS

INTERETS

STRATEGIES

INF

RA

ST

RU

CT

UR

ES

SU

PE

RS

TR

UC

TU

RE

S IN

FR

AS

TR

UC

TU

RE

S

SU

PE

RS

TR

UC

TU

RE

S

Concurrence / compétitions mondialisées

Revendications localisées / régionalisées

• Opérateurs globaux de terminaux

• Armements mondiaux

• Prestataires Logistiques intégrés

• Chargeurs Grands Comptes

• Citoyens &Usagers

• Ecologue urbain & néo-urbain

• Nautisme, balnéo, pêche(s), etc.

• Touristes & visiteurs

Page 16: Note brigitte daudet

16

La dimension temporelle s’impose comme un élément essentiel du CLP.

Ce dernier doit tout autant prendre en considération le temps d’un mandat politique que la

durée de vie d’une infrastructure lourde ou le temps de la rentabilité financière de la mise

en zone franche d’espaces fonciers par exemple. Un CLP et son succès économique,

logistique, voire même financier, se construit sur du temps long.

Cette dimension temporelle préfigure les modalités et pré requis de la gouvernance du CLP

mais aussi de l’EME. L’engagement des parties prenantes « décideurs et chef d’orchestre »

de la gouvernance doivent s’entendre autant :

- sur les hiérarchisations des priorités ;

- que sur le calendrier des exécutions ;

- que sur la localisation des investissements consentis ; ou encore,

- le degré et la vitesse avec lesquels les rentabilités et retours sur investissements doivent

être calculées.

Figure 4

Les Corridors Logistico-Portuaires et les Espaces Métropolitains Elargis :

interpénétration des échelles de temps et d’espace

Source : Alix et Daudet 2011 & 2012

Espace Métropolitain Elargi

Réhabilitation & réappropriation des waterfronts

Croisières

Bluefield Terminal & Greenfield Terminal

Sanctuarisationécologique

Croisières

Port

Ville

globale régionale locale régionale globale

CORRIDORS

Centres de distribution

Clientèles

Zones log

Zones logZones

log

EME SE

Terminaux intérieursZones log

Espace Métropolitain Elargi

Réhabilitation & réappropriation des waterfronts

Croisières

Bluefield Terminal & Greenfield Terminal

Sanctuarisationécologique

Croisières

Port

Ville

globale régionale locale régionale globale

CORRIDORS

Centres de distribution

Clientèles

Zones log

Zones logZones

log

EME SE

Terminaux intérieursZones log

Page 17: Note brigitte daudet

17

4- Réflexions ouvertes sur le modèle d’une gouvernance intégrée pour gérer les relations

entre EME et CLP : analyse à partir de l’axe Seine

Alors que rien ne semble encore acté et que tout demeure ouvert, nous prendrons comme

support des présentes propositions le cas de la Vallée de Seine. Rappelons que l’initiative

française de la valorisation de la Vallée de Seine part de la proposition d’Antoine Grumbach

de constituer « Seine Métropole » en réponse à l’appel à projet Grand Paris lancé par le Chef

de l’Etat, Nicolas Sarkozy, pour le dessein de Paris. Dans sa réponse, Antoine Grumbach

propose un projet d’ampleur, celui de la Vallée de Seine, en postulant que Paris, ville-monde,

doit impérativement se constituer une façade maritime et s’articuler sur un grand port de

taille mondiale, en utilisant l’artère fluviale naturelle qu’est la Seine. Cette idée a été reprise

avec force par Nicolas Sarkozy le 29 avril 2009, qui l’a ensuite amplifiée le 16 juillet 2009

dans son discours portant sur la politique maritime de la France.

Suite au colloque « Paris Rouen Le Havre, Seine d’avenir », organisé au Havre le 4 mai 2010

et réunissant un millier de personnes (élus, institutions, établissements publics, industriels,

universitaires…), les six agences d’urbanisme de la Vallée de Seine ont été mobilisées par

leurs élus pour être les chevilles ouvrières de ce grand projet (agences d’urbanisme : Ile de

France, Paris, Seine Aval, Rouen, Caen, Le Havre).

Les collectivités locales, les Chambres de Commerce et d’Industrie, les ports,…. Un ensemble

de forces vives publiques et privées ont contribué à l’accompagnement du projet Vallée de

Seine. Cette mobilisation a trouvé son expression notamment à travers le débat public

(lancé en avril 2011 par l’Etat) sur le tracé de la ligne nouvelle Paris-Normandie (LNPN, ligne

fret et passagers)et le raccordement ferroviaire du Havre aux grands corridors de fret

européens.

Parallèlement, le 21 avril 2011, le Chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy, confiait à Antoine

Rufenacht, ancien Maire du Havre, une mission de Commissaire général au développement

de la Vallée de Seine (mission qui a rendu ses conclusions en février 2012 sous forme d’un

rapport remis au Premier Ministre et qui a été dissoute par décret du Premier Minsitre en

novembre 2012).

Page 18: Note brigitte daudet

18

Le Groupement d’Intérêt Economique HAROPA marque une première évolution dans la

structuration du corridor logistico-industrialo-portuaire de l’axe Seine. A terme, les synergies

doivent permettre de construire une véritable stratégie concertée à l’échelle non plus d’une

entité portuaire mais bien d’un groupement de trois ports qui conservent leur autonomie

pleine et entière (Figure 5). Pour de nombreux acteurs privés, le CLP de l’axe Seine existe

déjà depuis longtemps par l’intégration des activités stratégiques des corridors de la chimie,

du pétrole ou encore de l’automobile. Néanmoins, le GIE HAROPA va plus loin en cherchant

les bases de nouvelles typologies de gouvernance où les priorités d’investissements et les

outils d’aide à la décision devront être mutualisés. Dans un souci de compétitivité du

territoire séquanien par rapport aux solutions belges, londoniennes ou rotterdamoises, la

construction d’un CLP articulé sur trois entités portuaires complémentaires s’avère

fondamentale.

Figure 5

Représentation commerciale et marketing du CLP HAROPA

Source : HAROPA 2012

Page 19: Note brigitte daudet

19

A l’heure d’aujourd’hui, le grand chantier reste de convertir HAROPA en une structure de

gouvernance légitime avec une cohérence reconnue par les trois ports et surtout par les

investisseurs et opérateurs logistiques.

A l’échelle des trois villes, les clivages paraissent encore plus évidents avec aucune ambition

de construire véritablement un « super EME » depuis Le Havre jusqu’à Paris. A l’instar des

trois ports, les trois entités urbaines présentent trois modèles distincts de développement

avec des politiques de projets axés directement sur les réalités locales et les besoins des

riverains. Les édiles et les aménageurs de l’espace métropolitain ont à cœur de maîtriser les

temporalités des projets dans leurs espaces de circonscription. Temporalité de la

construction, temporalité de la maîtrise du projet et temporalité de la vie intrinsèque de

l’ouvrage préoccupent l’aménageur métropolitain sous le regard alerte des riverains, futurs

utilisateurs des ouvrages mais aussi payeurs de taxe.

Les villes ne partagent que très rarement leurs intérêts dans une vision élargie d’une

métropole unique et cohérente. A cet égard, Paris constitue en soi un super EME alors que

Le Havre et Rouen demeurent des villes moyennes ne disposant pas a proprement parlé de

la taille critique d’un EME. Les chambres de commerce et d’industrie et les agences

d’urbanisme travaillent pour faire émerger une cohérence d’ensemble au projet et une

cohérence d’acteurs. La gouvernance d’un ensemble unifié est au cœur du processus de

réflexion où la créativité peut remettre en cause les découpages administratifs et

institutionnels. Un organe public de gestion et de décision devrait alors émerger pour

assumer une vision stratégique d’un espace métropolitain élargi qui reste par ailleurs à

délimiter physiquement (aujourd’hui le périmètre intègre grosso modo les 3 régions d’Ile de

France, Haute et Basse Normandie). In fine, nous assistons à un tâtonnement institutionnel

inéluctable en vue de co-construire une armature administrative sur un ensemble

hétéroclite et polynucléaire.

Page 20: Note brigitte daudet

20

Ces réflexions sont à mettre en perspective des considérations d’affaires des opérateurs et

investisseurs privés. Les concurrences dans la localisation des investissements et la

concentration des flux physiques de marchandises concourent à l’édification de corridors

massifiés. Les stratégies des opérateurs et des organisateurs de transport font et défont des

massifications de trafics sur l’autel de la fiabilité, de la disponibilité et du moindre coût des

services. Dans ce contexte, il est essentiel de considérer la « couche » du CLP en quasi

symbiose avec celle des EME en garantissant une représentativité et un pouvoir d’expression

des besoins de la part de tout le secteur privé. La figure synthèse ci-après propose les bases

d’une gouvernance totalement originale, reposant sur trois piliers :

- Un GIE HAROPA à la tête du CLP de l’axe Seine;

- Un GIM (Groupement d’Intérêt Métropolitain représentant les territoires et intégrant les

agences de développement économique et les agences d’urbanisme) à la tête de l’EME

de l’axe Seine; et,

- Un UMPAX+ (Union Maritime et Portuaire de l’Axe Seine avec le + qui englobe une

représentativité de l’ensemble des forces vives privées et parapubliques intégrées dans

les grands projets urbains)

Figure 6

Pour une gouvernance revisitée du CLP et des EME de l’axe Seine

Source : Brigitte Daudet 2012

GIE du CLP

HAROPA

GIM de l’EME Axe Seine

UMPAX + Sphère privée

GouvernanceStratégique &

opérationnelle

GP GP GP

GP GP

GP

GP GP

GP

Programme politique national du Grand Paris

GIE du CLP

HAROPA

GIM de l’EME Axe Seine

UMPAX + Sphère privée

GouvernanceStratégique &

opérationnelle

GP GP GP

GP GP

GP

GP GP

GP

Programme politique national du Grand Paris

Page 21: Note brigitte daudet

21

Le GIE du CLP HAROPA

Le groupement des trois ports de l’axe Seine est une réalité depuis une année maintenant.

La solution Haropa s’impose avec la proposition commerciale et marketing d’un complexe

logistique intégré. Les bases d’une gouvernance du GIE ont été jetées avec une présidence

annuelle tournante assurée de manière successive par les directeurs généraux des trois

entités. Les directeurs du GIE (commercial, communication, réseaux, etc.) sont d’ores et déjà

en place avec des équipes dédiées qui travaillent pour transformer HAROPA en une réalité

fonctionnelle et opérationnelle compétitive à l’échelle nationale et internationale.

Cette avancée stratégique marque un véritable changement de paradigme avec des entités

portuaires ouvertement recentrées sur les clients, les territoires… et les citoyens. Dans ce

sens, une représentativité du CLP par la présence de sommités d’HAROPA dans la

gouvernance proposée dans le présent rapport est une réalité tangible et pragmatique. La

présence d’HAROPA sur l’organe de gouvernance permet d’exprimer le point de vue des

places portuaires et de leurs gestionnaires sur tous les grands projets (qu’ils soient

portuaires mais aussi métropolitains à partir du moment où ils concernent les interfaces et

les interrelations avec les activités économiques, logistiques et domaniales portuaires).

Le GIM de l’EME de l’axe Seine

Malgré toutes les difficultés administratives, institutionnelles et juridiques (et la liste est loin

d’être exhaustive), la naissance d’un Groupe d’Intérêt Métropolitain est tout sauf une

énième couche du mille-feuilles administratif français. Un GIM de l’EME de l’axe Seine

regroupe les agences d’urbanisme d’un territoire défini spatialement par les réalités

économiques, logistiques et urbaines de la relation ville-port. Cette délimitation

méthodologique évite de déborder sur des marges trop éloignées des réalités de gestion,

d’exploitation et de développement des interfaces entre les activités portuaires et les

développements urbains. Les agences d’urbanismes mutualisent au sein du GIM leurs

expertises territoriales, leurs outils méthodologiques, leurs capacités d’observation et

d’analyse, etc.

Page 22: Note brigitte daudet

22

Elles peuvent surtout, au sein d’un GIM, orchestrer une vision commune et intégrée de la

prospective des relations entre EME et CLP. Elles assument pleinement leur rôle d’assistance

et de conseil au service du territoire. D’un point de vue organique, les agences d’urbanisme

disposent d’une forte représentativité de toutes les sphères publiques et parapubliques. En

soi, leur présence sur un GIM permet de consolider une expertise et un point de vue sur tous

les dossiers touchant la gestion des relations et des développements entre les grands projets

métropolitains et les grands projets portuaires, logistiques et industriels sur l’axe Seine.

A l’instar de ce que l’on voit se construire au sein du GIE HAROPA, la mutualisation, voire la

fusion, de services et de prestations, donnerait au GIM une « voix au chapitre » nettement

plus dimensionnée quand il sera venu le temps de discuter des relations entre EME et CLP

sur tout l’axe Seine. Ce GIM ne doit pas se limiter aux agences d’urbanisme mais bien

s’ouvrir à un panel représentatif de tous les EPCI (Etablissement Public de Coopération

Intercommunale) du périmètre géographique et fonctionnelle préalablement défini. Par un

système d’élections, plusieurs membres auraient alors en charge d’exprimer les positions de

tous les EPCI concernés de près ou de loin par l’évolution des relations entre les EME et le

CLP de l’axe Seine. Le GIM ne doit pas être une réminiscence fonctionnelle et thématique

d’une DATAR ou d’un organisme public du genre (Etablissement public, Opération d’Intérêt

National,…). Le GIM doit disposer au sein de l’organe de gouvernance des mêmes

prérogatives et des mêmes dispositions que le GIE du CLP pour décider des choix

stratégiques et opérationnels sur tout l’axe Seine.

L’UMPAX +

Une gouvernance déconnectée de la sphère privée est vouée nécessairement à l’échec.

L’UMPAX + doit être l’expression collective du plus grand nombre de syndicats

professionnels, d’entreprises (petites, moyennes ou grandes) et d’investisseurs privés

présents sur l’axe Seine. L’UMPAX + doit réussir à dépasser les clivages de place portuaire et

s’ériger en un garant de l’écoute des besoins, des prérogatives et des doléances de tout le

secteur privé.

Page 23: Note brigitte daudet

23

Un collège représentatif siège sur la gouvernance pour exprimer une vision et un

pragmatisme de toutes les composantes plurielles de la communauté privée impliquée

directement dans les grands projets métropolitains et portuaires. L’UMPAX + doit aussi et

surtout faire aboutir des consensus au moment des choix et décisions opérationnels. A ce

titre, c’est une véritable révolution qui pourrait s’opérer avec l’avènement d’un UMPAX + sur

l’axe Seine. Toutes les filières et clusters (pour introduire dans le sujet les questions de R&D,

de formations…) présents sur l’axe Seine devraient dans un UMPAX + trouver des consensus

au sein même du secteur privé dans son sens le plus large et extensif possible. Dépassant les

carcans sectoriels (ou la simple taille de l’établissement), l’UMPAX + doit symboliser

l’expression d’une vision stratégique et prospective dans le but de co-construire avec le GIE

et le GIM les fondements du succès des relations entre un CLP et des EME sur le territoire de

l’axe Seine.

Le plus de l’UMPAX fait cohabiter les sociétés privés des mondes maritimes, portuaires et

logistiques avec celles actives dans les développements urbains et métropolitains. Les

exploitants et développeurs des grands projets urbains doivent trouver une place dans

l’expression des besoins au sein de l’organe de gouvernance.

En guise de conclusion : la nécessaire impulsion politique pour une légitimité stratégique

nationale.

L’organe de gouvernance tel que proposé, creuset de l’expression du GIE, du GIM et de

l’UMPAX +, ne peut être effectif sans un « sceau de garantie » de l’Etat. Sans tomber dans

une vision centralisatrice ou jacobine, la légitimité de cet organe de gouvernance passe par

une véritable commande qui tombe de l’Etat avec des engagements en moyens humains,

physiques et financiers. Sous la tutelle directe d’un Commissariat ou d’un Ministère (ou sous

l’égide du Premier Ministre, voire du Président de la République), cet organe de

gouvernance travaille sur les consensus en devenant une interface d’expressions et de

médiation.

Page 24: Note brigitte daudet

24

A l’heure où l’Etat français et son gouvernement parlent de choc de compétitivité et de

redressement productif, une stratégie prospective nationale pourrait s’esquisser avec la

définition de CLP, d’EME et d’UMPAX + reposant sur les grandes vocations industrielles et

stratégiques du territoire national. Dans le cadre d’une compétitivité exacerbée entre

territoires, la consolidation des énergies, des investissements et des intérêts sur des

corridors massifiés et des nœuds centraux de production/décision s’imposent. Orchestrer,

gérer, animer et développer de manière optimale des espaces métropolitains élargis sur

lesquels s’articulent des corridors logistico-portuaires constitue la clé de voute économique

de régions entières.

Le modèle esquissé aujourd’hui s’intéresse à l’axe Seine et se concentre sur la thématique

des relations ville-port dans un contexte d’expansion métropolitain, portuaire et logistique.

Cette organisation et cette gouvernance visent à optimiser le déploiement de grands projets

sur les territoires et les communautés. La maximisation des retombées et la minimisation

des effets négatifs des futurs grands projets structurants les EME et le CLP de l’axe Seine

peuvent tout à fait être reproduits en fonction des spécialités des territoires français. Une

telle démarche pourrait voir le jour sur l’axe de transport de la Garonne avec les espaces

métropolitains élargis de Bordeaux/Toulouse avec l’activité aéronautique au cœur des

problématiques. Même chose sur la construction navale et la région des Pays de Loire si l’on

veut rester uniquement concentré sur le transport et la logistique.

Et pour conclure sur des éléments de prospective, cette gouvernance d’un nouveau genre

devra aller plus loin encore en intégrant des notions de productivité et de rentabilité sur

l’évaluation a posteriori des grands projets mis en place. En d’autres termes, l’efficience et

l’efficacité des deniers publics investis dans les EME et le CLP de l’axe Seine devront être

évaluées, qualifiées et quantifiées selon des méthodologies d’un nouveau genre. L’organe de

gouvernance, à la convergence du GIE, du GIM et de l’UMPAX+, aura aussi la responsabilité

d’évaluer les performances des grands projets dans le cadre élargi des relations entre EME et

CLP. En s’inspirant largement des pratiques du secteur privé, l’organe de gouvernance sera

aussi un organe de surveillance pour que les optimisations logistiques et métropolitaines

soient garanties via un travail amont de type collaboratif.

Page 25: Note brigitte daudet

25

Une telle gouvernance et un tel dispositif transgressent les usages et les héritages,

particulièrement dans la densité administrative française. Les expériences internationales

démontrent que la créativité et l’innovation bouleversent les rapports entre les parties

prenantes. L’axe Seine a été mis au cœur d’une ambition politique. Le GIE HAROPA

manifeste l’envie de faire bouger les lignes, mêmes les plus conservatrices. Cette note

exploratoire a pour ambition de provoquer le débat pour que l’innovation puisse faire naitre

les conditions gagnantes d’une attractivité territoriale optimisée avec des EME et un CLP en

symbiose.