NO 21 : FRANC-MAÇONNERIE ET ASTROLOGIE · 3 « Pénible est la route qui mène de la terre à la...

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Les Cahiers de la Franc-maçonnerie N O 21 : FRANC-MAÇONNERIE ET ASTROLOGIE Par le « Collectif des cahiers »

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Les Cahiers de la Franc-maçonnerie

NO 21 : FRANC-MAÇONNERIE ET ASTROLOGIE

Par le « Collectif des cahiers »

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« Pénible est la route qui mène de la terre à la voûte étoilée1. »

L’astrologie •

L’astrologie a, de nos jours, fort mauvaise réputation. Les dictionnaires courants la définissent généralement comme « une fausse science prétendant prédire l’avenir ».

C’est pourquoi le mot « astrologie » évoque aussitôt les horoscopes dans les journaux, les « méchants scorpions » et les « lions vaniteux ». On peut donc se demander ce que l’astrologie pourrait bien faire en Franc-maçonnerie.

l Définition : L’astrologie ou le discours des astres

Étymologiquement parlant, l’astrologie est le « discours rationnel (logos) des astres ». Les astrologues la définissent ainsi : « L’astrologie est d’une façon générale la discipline de découverte, d’étude et d’utilisation des rapports constants qui existent entre l’état et les mouvements du ciel et des événements ou processus terrestres2. »

D’après cette définition, on fera remarquer qu’avant d’étudier les rapports existant entre les mouvements du ciel et les processus terrestres, il est nécessaire de connaître les mouvements du ciel. Donc pas d’astrologie sans astronomie.

1. Sénèque, Hercule furieux, in Tragédies, t. 1, Les Belles Lettres.2. Marianne Verneuil, Dictionnaire pratique des sciences occultes, Monaco, Les Documents d’art, 1950.

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D’ailleurs, dans le monde gréco-romain, il y avait un seul mot pour désigner les deux. Dans d’autres contrées, on parlait de la « science du ciel » ou des étoiles. Au Tibet, l’astrologue était le « Seigneur des étoiles ». En Inde, l’astrologie se nomme depuis toujours Jyotish, « Lumière », « Sagesse » et dans les Védas, les textes fondateurs de la tradition, 400 000 vers lui sont consacrés.

Si de nos jours, en Occident, les « astrologues » ne connaissent bien souvent pas grand-chose aux mouvements du ciel, « montent » le thème astral « à l’ordinateur », il n’en était pas de même autrefois. De fait, l’astrologie contemporaine – nommée autrefois « astrologie généthliaque » –, qui s’occupe exclusivement des individus à partir de leur « ciel de naissance », ne représente qu’une infime partie de ce qu’était l’astrologie des Anciens.

Les événements et processus terrestres ne se limitaient pas aux « destins» des individus humains, d’autant que le destin d’un individu (issu en grande partie de son caractère et de son comportement) était considéré comme devant s’intégrer dans un tout sans l’analyse duquel rien n’avait de sens.

U Les événements et processus terrestres concernés par l’astrologie dans la tradition

En fait, étaient concernés par l’astrologie tous les événements qui se produisent sur la terre des hommes, que les anciens appelaient « le monde sublunaire » (sous la Lune, autrement dit sur la Terre), soit :

Le climat avec ses alternances de glaciations et de réchauffements, les déluges, l’embrasement final de la Terre.

Les tremblements de terre et les éruptions volcaniques, la météorologie.

La vie et l’évolution des trois règnes, minéral, végétal et animal, individuellement et collectivement.

Les récoltes, les épidémies, les famines.

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La naissance, l’évolution et la chute des empires. Les révolutions, les guerres.

En ce qui concerne les humains, elle se reliait étroitement à la médecine, comme cela est encore le cas aujourd’hui en Inde et au Tibet. Ainsi fut créé à Lhassa sous le règne du XIIIe Dalaï-lama (1876-1933) le Men Tsi Khang, « le collège de médecine et d’astrologie ». Après l’invasion chinoise et l’exil a été fondé à Dharamsala en Inde un Tibetan Medical Center qui comprend un institut astrologique.

Cette façon de concevoir l’astrologie traversa les siècles jusque dans l’Occident chrétien.

Ainsi, Pierre d’Ailly (1350 – 1420), confesseur de Charles VI et cardinal, « écrivit un ouvrage dans lequel il expliquait comment les conjonctions des planètes concordaient avec les révolutions, les chutes des empires et des religions3 ».

U L’état et les mouvements du ciel dans la tradition

Le monde sublunaire, celui où vivaient les hommes, était considéré comme dépendant du système solaire, lui-même dépendant d’un ensemble plus vaste, lequel s’intégrait à l’univers qui subissait des cycles de création et de destruction successifs, dont les durées se comptaient en milliards d’années4.

Ainsi l’antique science astrologique, s’intéressant à la place de l’homme dans l’Univers et optant pour la pluralité des mondes5, étudiait-elle :

3. Renée Simon, in préface au livre d’Henri de Boulainvilliers, Astrologie mondiale. Histoire du mouvement de l’apogée du Soleil, Éditions du Nouvel Humanisme.4. Ces grands cycles décrits par la mythologie indienne sont également présents dans les mythes mésopotamiens et furent connus des Grecs.5. Jean-Paul II, en déclarant : « L’Église n’exclut pas l’existence d’autres êtres intelligents dans l’univers », ce qui revenait à affirmer la pluralité des mondes, renouait avec la tradition chrétienne originale que l’Église avait rejetée au moment de l’adoption de la réforme grégorienne, mais contre l’opinion de nombreux clercs. Citons entre autres Étienne Tempier dans sa condamnation des thèses averroïstes (1277).

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• Les grands cycles de l’UniversLes années, prétendues mythiques, de Brahma qui se

comptent en milliards d’années…

• La formation du système solaire, les mouvements de ses différents composants

En ce qui concerne cette connaissance, on en trouve des traces dans le monde gréco-romain sous forme de mythes. Il en est ainsi de la célèbre Théogonie d’Hésiode (vIIIe siècle av. J.-C.). Théogonie signifie « naissance » ou « origine » des dieux, les dieux désignant les planètes et peut-être même les formations qui les précédèrent. Marcus Manilius6, dans son Astronomicon dédié à César Auguste, il y a deux mille ans, attirait ainsi notre attention sur l’importance astronomique de ce mythe :

« Il [Hésiode] célèbre les dieux et ceux dont ils tirent leur origine ; il décrit le chaos engendrant la terre, l’enfance du monde sous l’empire du chaos, les astres, premières productions de la nature, chancelant encore dans leur marche ; les vieux Titans, le berceau du grand Jupiter… »

Les Grecs nous ont d’ailleurs avertis : les poésies d’Homère et d’Hésiode sont en rapport avec l’astronomie. Il est vrai toutefois qu’il est bien difficile d’en faire le décryptage. Platon lui-même déclarait qu’on n’y comprenait plus rien7.

• Les grands cycles de la Terre et du système solaireMouvements du système solaire par rapport à la galaxie…

6. Marcus Manilius, Les Astrologiques ou la Science sacrée du Ciel, Planète/Denoël, coll. « Bibliotheca Hermetica », 1970.7. Platon, Timée.

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• Les cycles dus au mouvement de toupie de la Terre8

Ils engendrent le phénomène appelé « précession des équinoxes » avec les « grandes années » d’environ 26 000 ans et les « mois » de 2 160 ans connus aujourd’hui sous le nom d’ères (l’ère du Verseau par exemple, dans laquelle nous sommes en train d’entrer en quittant celle des Poissons).

Ainsi, d’après les Anciens, il fallait d’abord étudier les très grands cycles, y intégrer les cycles des ères, puis ceux des nations et enfin ceux des individus.

A.S V

8. Les historiens de l’astronomie attribuent à tort la découverte de ce phénomène à Hipparque (v. -190 -120) mais comme Aristote (-384 -322) dans son livre Du Ciel (II, 12) nie le toupillage des astres, il est évident que ce phénomène était connu à son époque.