New De Kankakee à Redwater - ACFA · 2019. 11. 11. · volumineux dossier de sa demande pour un «...

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Je me suis souvent demandé pourquoi mon grand-père Edouard Soucy, charpentier et menuisier dans la ville de Kankakee près de Chicago, était parti à l’âge de 50 ans pour trouver un « homestead » dans la région de Redwater en Alberta. En 1878, Edouard avait épousé Herméline Plante à l’Île Dupas au Québec. De leurs six enfants, cinq ont survécu : Edouard, Alfred, Zenon, Diana et Alexandrine. Après le décès d’Herméline, Edouard est allé aux États-Unis où il s’est remarié avec ma grand-mère Mary Arpin (fille de Fabien Arpin et Philomène Gadbois) le 26 octobre 1892. Les nouveaux mariés se sont installés à Kankakee en 1900 et les trois fils d’Edouard habitaient avec eux. Edouard et Mary ont eu sept enfants : Anna, Laura (décédée en 1896), Armand, Alma, Lea, Noëlla et Donat (mon père, né en 1907). Ils vivaient assez à l’aise dans leur propre maison. J’ai découvert que Samuel Soucy, le frère aîné d’Edouard, était venu le premier dans l’Ouest et avait persuadé d’autres membres de la famille d’obtenir des « homesteads » à Redwater. Leur père, Bruno Soucy qui était veuf, est arrivé en 1906, suivi de ses fils Joseph et Edouard en juillet 1908. Edouard vivait avec son père dans son « shack » pendant qu’il se préparait pour l’arrivée de sa famille. Il a dû défricher quelques acres, utiliser les arbres pour bâtir une assez grande maison en « logs », ainsi que des abris pour ses animaux (vaches, chevaux, cochons, poules). Finalement, il a fait venir Mary et leurs enfants. Ils sont partis de Kankakee en train le 16 novembre 1909, ont traversé la frontière à Emerson au Manitoba et sont arrivés chez Samuel Soucy à Edmonton le 20 novembre. Dix jours plus tard, ils ont voyagé en traîneau avec Samuel, arrivant au « homestead » à 18 h le 1 er décembre. Pourquoi Edouard a-t-il exigé un tel trajet? Mon père avait seulement 2 ans. La misère venait de commencer! Mary n’était pas habituée au froid et à un plancher de terre. Heureusement, elle avait apporté dix couvertures chaudes de Kankakee. Le fait que leurs meubles ont été retenus à la douane a beaucoup dérangé la famille. Est-ce surprenant que toutes les photos présentaient Mary sans sourire? Les Soucy ont éprouvé de la tristesse quand Bruno est décédé le 2 janvier à l’hôpital Miséricorde d’Edmonton. Le 13 octobre précédent, quand Bruno traversait une clôture, son fusil de chasse s’était déchargé dans son épaule. Bruno, mon arrière-grand-père, avait 86 ans. Edouard et Mary ont perdu deux filles à Redwater. Le 12 septembre 1912, Alma est morte d’hydropisie; elle avait à peine 15 ans. Noëlla, âgée de 13 ans, est décédée le 7 août 1916 quand ses cheveux sont restés pris dans le « séparateur ». La vie de fermier sur un « homestead » était simple. Il n’y avait ni eau courante, ni électricité. Les Soucy allaient à l’église St. Clare sur le « homestead » voisin de Joseph Soucy, qui gérait le bureau de poste de Val Soucy dans sa maison. Au début, il n’y avait pas d’école. Anna, l’aînée de la famille qui avait fait ses études chez les religieuses à Kankakee, faisait la classe à ses frères et sœurs. Après son mariage avec Xiste Poissant en 1916, Anna est allée vivre sur un « homestead » à Egremont. Armand, l’aîné des garçons, est parti après avoir épousé Yvonne Robert en 1920. Maintenant, il n’y avait que deux enfants à la maison. Lea pouvait aider sa mère à faire De Kankakee à Redwater Volume 3, numéro 7 - Septembre 2011 Ce mois-ci, Avant que j’oublie vous présente l’histoire d’Edouard Soucy et de sa famille qui se sont établis à Redwater. Éloi écrit sur le pionnier Louis Rousselle et une immigrante native de la Sierra Leone nous raconte son histoire. Bonne rentrée à tous! Edouard et Mary Soucy à Kankakee en 1892. Mary Soucy et ses enfants sur le « homestead » en 1910 : Armand, Anna, Alma, Lea, Noëlla. En avant : Donat, mon père. Un vieux « séparateur » chez ma tante Lea à Redwater. 1911 Le Canada « Le gouvernement fédéral procède à la création d’un troupeau de plus de mille bisons à Wainwright. » Source : D’année en année : de 1659 à 2000 : une présentation synchronique des événements historiques franco-albertains / France Levasseur-Ouimet Ph.D, page 140 À quel endroit Louis Rouselle est-il né? Faites-nous parvenir votre réponse, par la poste ou par courriel, avant le 31 octobre 2011 et courez la chance de gagner le livre Les francophones de l’Alberta. Par courriel : [email protected] Par la poste : ACFA - A/s Concours - Avant que j’oublie 8627, rue Marie-Anne-Gaboury (91 e Rue) Bureau 303 Edmonton (AB) T6C 3N1 Réponse à la question du mois de mai 2011 : Alexandre Loiselle est associé à la ville de Sylvan Lake. Bravo à la gagnante : Irène Boisvert d’Edmonton! Réponse à la question du mois de juin 2011 : La traversée en mer à bord du bateau « Le Sicilian » pour plusieurs membres de la famille Ulliac au printemps 1914 a duré 17 jours. Bravo au gagnant : Ken Shields d’Edmonton! Suite de l’article en page 2...

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• Semaine du 1er au 7 septembre 2011 • LE FRANCO
Je me suis souvent demandé pourquoi mon grand-père Edouard Soucy, charpentier et menuisier dans la ville de Kankakee près de Chicago, était parti à l’âge de 50 ans pour trouver un « homestead » dans la région de Redwater en Alberta.
En 1878, Edouard avait épousé Herméline Plante à l’Île Dupas au Québec. De leurs six enfants, cinq ont survécu : Edouard, Alfred, Zenon, Diana et Alexandrine. Après le décès d’Herméline, Edouard est allé aux États-Unis où il s’est remarié avec ma grand-mère Mary Arpin (fille de Fabien Arpin et Philomène Gadbois) le 26 octobre 1892. Les nouveaux mariés se sont installés à Kankakee en 1900 et les trois fils d’Edouard habitaient avec eux. Edouard et Mary ont eu sept enfants : Anna, Laura (décédée en 1896), Armand, Alma, Lea, Noëlla et Donat (mon père, né en 1907). Ils vivaient assez à l’aise dans leur propre maison.
J’ai découvert que Samuel Soucy, le frère aîné d’Edouard, était venu le premier dans l’Ouest et avait persuadé d’autres membres de la famille d’obtenir des « homesteads » à Redwater. Leur père, Bruno Soucy qui était veuf, est arrivé en 1906, suivi de ses fils Joseph et Edouard en juillet 1908.
Edouard vivait avec son père dans son « shack » pendant qu’il se préparait pour l’arrivée de sa
famille. Il a dû défricher quelques acres, utiliser les arbres pour bâtir une assez grande maison en « logs », ainsi que des abris pour ses animaux (vaches, chevaux, cochons, poules).
Finalement, il a fait venir Mary et leurs enfants. Ils sont partis de Kankakee en train le 16 novembre 1909, ont traversé la frontière à Emerson au Manitoba et sont arrivés chez Samuel Soucy à Edmonton le 20 novembre.
Dix jours plus tard, ils ont voyagé en traîneau avec Samuel, arrivant au « homestead » à 18 h le 1er décembre. Pourquoi Edouard
a-t-il exigé un tel trajet? Mon père avait seulement 2 ans.
La misère venait de commencer! Mary n’était pas habituée au froid et à un plancher de terre. Heureusement, elle avait apporté dix couvertures chaudes de Kankakee. Le fait que leurs meubles ont été retenus à la douane a beaucoup dérangé la famille. Est-ce surprenant que toutes les photos présentaient Mary sans sourire?
Les Soucy ont éprouvé de la tristesse quand Bruno est décédé le 2 janvier à l’hôpital Miséricorde d’Edmonton. Le 13 octobre précédent, quand Bruno traversait une clôture, son fusil de chasse s’était déchargé dans son épaule. Bruno, mon arrière-grand-père, avait 86 ans. Edouard et Mary ont perdu deux filles à Redwater. Le 12 septembre 1912, Alma est morte d’hydropisie; elle avait à peine 15 ans. Noëlla, âgée de 13 ans, est décédée le 7 août 1916 quand ses cheveux sont restés pris dans le « séparateur ».
La vie de fermier sur un « homestead » était simple. Il n’y avait ni eau courante, ni électricité. Les Soucy allaient à l’église St. Clare sur le « homestead » voisin de Joseph Soucy, qui gérait le bureau de poste de Val Soucy dans sa maison. Au début, il n’y avait pas d’école. Anna, l’aînée de la famille qui avait fait ses études chez les
religieuses à Kankakee, faisait la classe à ses frères et sœurs.
Après son mariage avec Xiste Poissant en 1916, Anna est allée vivre sur un « homestead » à Egremont. Armand, l’aîné des garçons, est parti après avoir épousé Yvonne Robert en 1920.
Maintenant, il n’y avait que deux enfants à la maison. Lea pouvait aider sa mère à faire
De Kankakee à Redwater
Volume 3, numéro 7 - Septembre 2011
Ce mois-ci, Avant que j’oublie vous présente l’histoire d’Edouard Soucy et de sa famille qui se sont établis à Redwater. Éloi écrit sur le pionnier Louis Rousselle et une immigrante native de la Sierra Leone nous raconte son histoire. Bonne rentrée à tous!
Edouard et Mary Soucy à Kankakee en 1892.
Mary Soucy et ses enfants sur le « homestead » en 1910 : Armand, Anna, Alma, Lea, Noëlla. En avant : Donat, mon père. Un vieux « séparateur » chez
ma tante Lea à Redwater.
1911 Le Canada
la création d’un
troupeau de plus de
mille bisons à Wainwright. » Source : D’année en année : de 1659 à 2000 : une présentation
synchronique des événements historiques franco-albertains / France Levasseur-Ouimet Ph.D, page 140
À quel endroit Louis Rouselle est-il né?
Faites-nous parvenir votre réponse, par la poste ou par courriel, avant le 31 octobre 2011 et courez la chance de gagner le livre Les francophones de l’Alberta.
Par courriel : [email protected]
Par la poste : ACFA - A/s Concours - Avant que j’oublie 8627, rue Marie-Anne-Gaboury (91e Rue) Bureau 303 Edmonton (AB) T6C 3N1
Réponse à la question du mois de mai 2011 :
Alexandre Loiselle est associé à la ville de Sylvan Lake.
Bravo à la gagnante : Irène Boisvert d’Edmonton!
Réponse à la question du mois de juin 2011 :
La traversée en mer à bord du bateau « Le Sicilian » pour plusieurs membres
de la famille Ulliac au printemps 1914 a duré 17 jours.
Bravo au gagnant : Ken Shields d’Edmonton!
Suite de l’article en page 2...
LE FRANCO • Semaine du 1er au 7 septembre 2011 •
Septembre 2011, page 2
la cuisine, le ménage, la lessive, le repassage, le raccommodage et le jardinage.
Donat devait faire le travail régulier de la ferme avec son père, par exemple, travailler dans les champs, faire le train et réparer les clôtures.
Par conséquent, Donat est allé à l’école Pinehurst seulement quelques années, devant s’absenter pendant les semences, la fenaison et les récoltes. C’était beaucoup pour un jeune adolescent.
En comparaison de leur situation à Kankakee, Edouard et sa famille menaient une vie assez pauvre. Afin de joindre les deux bouts, Edouard a dû augmenter ses revenus en travaillant pour ses voisins. Pendant trois étés, il a travaillé comme charpentier à Edmonton, où il a aidé
à construire l’église Sacred Heart et l’école St. Mary.
La famille voyageait en « buggy » ou en « sleigh », les deux tirés par des chevaux. Un voyage à Edmonton pouvait prendre quelques jours. Edouard a même marché à Edmonton à plusieurs reprises.
Vers 1923, Edouard et Donat ont bâti une nouvelle maison blanche à deux étages. Quel progrès! Donat a planté de beaux peupliers qui servaient comme point de repère quand j’allais visiter le « homestead » de mon grand-père. J’avais de la peine de voir cette maison négligée et brune (sans peinture), devenue grenier et abri pour les oiseaux et souris.
Dès 1930, Donat s’est occupé du « homestead » car son père n’était
plus jeune. Edouard avait un chien très fidèle et il aimait fumer sa pipe. Atteint de cancer sur sa lèvre qui s’est répandu à sa joue, le vieillard est décédé chez lui le 9 mai 1935 à l’âge de 77 ans.
Lea et Donat sont restés sur le « homestead » pour prendre soin de leur mère. Donat a épousé Albertine Royer le 20 avril 1936. L’année suivante, Lea s’est mariée avec Sinaï
Godard. Moi, je suis née en 1939 et ma sœur est née 13 mois après. Nous avons grandi dans la maison blanche jusqu’en 1944 quand nos parents ont décidé d’aller vivre sur une ferme à Lamoureux.
Je n’ai pas connu Mary, ma grand- mère, car elle est morte le 19 novembre 1939 à l’hôpital St. Joseph à Edmonton. Elle était alitée, aveugle et sourde. Mes grands- parents Edouard et Mary Soucy reposent dans le cimetière Sacred Heart à Gibbons.
Je crois que mon grand-père aimait l’aventure et n’avait pas peur de travailler dur, de se salir en devenant fermier. Peut-être qu’il voulait seulement un changement d’environnement. Edouard et Mary Soucy étaient certainement courageux malgré leurs épreuves. Ils devaient être fiers d’avoir élevé leur famille dans la foi catholique.
Par Lorraine Fiske, auteure de From France to America: Descendants
of Jean Soucy dit Lavigne, Canada - United States 1665 - 2010. Ce livre est disponible à la Société
généalogique du Nord-Ouest.
De Kankakee à Redwater...
La maison blanche construite sur le « homestead » de mes grands-parents vers 1923.
Mes grands-parents Edouard et Mary Soucy avec mon père
Donat vers 1933.
Anniversaires 25 ans :
« Le 27 septembre 1986, Yvon Mahé, du bureau d’éducation de l’ACFA, crée la Fédération des
parents francophones de l’Alberta (FPFA), un organisme provincial sans but lucratif qui s’est donné pour mission de favoriser la participation dynamique des parents à l’éducation de leurs en- fants au foyer, dans les institutions éducatives et dans la communauté francophone de l’Alberta.
Hélène Gignac en est la première présidente. Par la suite, la FPFA doit son essor à la participation active de ses 60 associations-membres.» p.369.
« Décès de Maurice Lavallée le 1er août. » p.370.
Source : le livre de France Levasseur-Ouimet, D’année en année de 1659 à 2000
• Semaine du 1er au 7 septembre 2011 • LE FRANCO
Septembre 2011, page 3
En 2006, quand je faisais de la recherche dans le Calgary Herald, je suis tombé sur cette courte nouvelle dans l’édition du 24 décembre 1889 : « Louis Rousselle, the original squatter on the town site is in Calgary today. » C’était la première fois que je rencontrais ce nom et tout de suite, j’ai eu envie d’en savoir davantage sur ce pionnier de Calgary.
Au fil de mes recherches, j’ai reconnu son nom et j’ai continué à accumuler de l’information sur ce personnage. C’est quand j’ai consulté le volumineux dossier de sa demande pour un « homestead » que j’ai compris le rôle qu’il a joué dans l’établissement de Calgary. Je vous raconte son histoire en bref.
Louis est né à Lachine au Québec vers 1823 et il est entré au service de la Compagnie de la Baie d’Hudson en 1847. Il est resté à son emploi dans l’Ouest canadien jusqu’en 1866.
C’est dans le registre du Fort des Prairies (Edmonton) que nous retrouvons son mariage bénit par le père Albert Lacombe le 8 mai 1855. Il avait épousé Angélique Tessier, une Métisse, fille de Jean-Marie Tessier et de Josephte, une Crie. Angélique avait été baptisée par le père Jean-Baptiste Thibault en 1842 alors qu’elle avait 11 ans.
Nous retrouvons le baptême de leurs quatre enfants dans les registres de la paroisse de Saint-Joachim à Edmonton : Angélique (1858), Louis (1860), André (1862) et Johnny (1864). Leurs enfants parlaient le français. La preuve est qu’en 1885, on a dû expliquer à Angélique « en français » un document rédigé en anglais qu’elle devait signer.
Nous ne savons pas quel métier a exercé Louis lorsqu’il a quitté la Compagnie de la Baie d’Hudson. Ils sont sûrement restés dans la région d’Edmonton et Saint-Albert jusqu’en 1875 puisqu’ils ont souvent été témoins à des baptêmes, à des mariages et à des sépultures.
Louis et Angélique sont déménagés dans la région de Calgary vers 1876. Leur fille aînée,
Angélique, y avait marié Joseph Butlin en 1878. Louis a fait la chasse au bison pendant une année et avait transporté des marchandises soit dans la région de Fort McLeod ou vers Edmonton.
En 1880, Louis avait acheté une propriété de George Emerson sur la rive est de la rivière Elbow, dans le quart sud-est de la section 14 du « township » 24. Ce George Emerson avait acheté la propriété d’un Métis, Antoine Godin, qui avait construit la première bâtisse sur le terrain en 1876. La résidence d’Antoine était près du poste de la Baie d’Hudson qui avait été construit l’année précédente. Ce poste était connu comme le Fort Brisebois dans ce temps-là.
L’installation de Louis serait demeurée sans histoire si l’arpentage des terres et si le projet de construire la ligne de chemin de fer n’avaient pas eu lieu. D’abord, Louis était légalement le propriétaire de son terrain, mais l’arpentage des terres du nord-ouest en sections a fait que tous ceux qui étaient déjà établis devaient quand même faire une demande de « homestead » pour « légaliser » leur nouveau droit de propriété. Du jour au lendemain, presque, le statut légal de Louis est passé de celui de propriétaire à celui de squatter.
Comme la ligne de chemin de fer en construction (1882-1883) passait tout près de sa résidence, son terrain venait de prendre une plus grande
valeur et des entrepreneurs de Calgary voulaient l’acheter. Archibald McVittie, un homme bien en vue de Calgary a fait une offre d’achat à Louis. Il lui offrait 10 000 $ pour sa propriété une fois qu’il aurait obtenu les titres de propriété.
Pour compliquer la situation, les dirigeants de la Compagnie de la Baie d’Hudson, qui n’avaient pas fait d’objection à l’installation du Métis Godin tout près du fort, réclamèrent des droits de propriété sur le terrain occupé par Louis. Louis avait beau parler de sa maison, la compagnie l’appelait une cabane; aux yeux de la compagnie, Godin, le propriétaire original n’était plus un Métis, mais un Indien.
Les pères Oblats, qui étaient aussi établis à Calgary depuis quelques années, durent intervenir pour faire valoir les droits de Louis Rousselle qui reçut finalement « les patentes » de son « homestead » en octobre 1885. Notons que Louis avait offert au père Albert Lacombe une parcelle de son terrain pour la construction d’une église, l’église Saint-Patrice, bénite en 1883.
Louis et Angélique déménagèrent peu après dans la région de Wolf Creek pour y rejoindre leurs fils, Louis et André. (Sur la route qui mène de Calgary à Edmonton, le motel Wolf Creek est dans la région où ils habitaient.) Dans les dernières années de sa vie, avec ses fils, Louis s’est occupé de transporter des marchandises en provenance de Calgary le long de la Edmonton Trail.
Le 9 mars 1891, Louis quitta Wolf Creek pour aller à la rencontre de son fils, John, qui était parti de Calgary avec de la marchandise. Il fut pris dans une tempête et perdit son chemin. Comme le rapporta le Calgary Tribune, il est fort probable que dans son énervement il serait mort subitement. Le Calgary Daily Herald écrivit que ses lecteurs regretteront d’apprendre le décès d’un « typical old timer ».
Le corps de Louis Rousselle a été inhumé dans le cimetière de la mission Notre-Dame des Sept Douleurs à Hobbema en présence de ses trois fils.
par Éloi DeGrâce, archiviste
Louis Rousselle, pionnier de Calgary
Carte d’arpentage de Calgary en 1883. Archives Provinciales 83.421, plan de township 24, range 1, W 5.
Annonce du décès de Louis Rousselle, Calgary Daily Herald, 11 mars 1891, p.1. Annonce du décès de Louis Rousselle, Calgary
Tribune, 11 mars 1891, p.1.
LE FRANCO • Semaine du 1er au 7 septembre 2011 •
Septembre 2011, page 4
Mon pays d’origine est la Sierra Leone. La rébellion des années 1990 m’a forcée à quitter le pays. Avec ma mère, ma sœur et mes deux frères, nous sommes partis pour la Guinée voisine en 1997. C’est au cours de ce tragique et regrettable conflit que nous avons perdu notre père (paix à son âme), mort comme beaucoup de ses compagnons de l’armée régulière sierra-léonaise.
Réfugiée en Guinée durant cinq ans, j’ai mis à profit mon séjour dans ce pays pour apprendre la langue française, sans oublier de me faire des amis. La Guinée est d’ailleurs devenue mon premier pays d’adoption, car mon mari est Guinéen. Je l’avais connu là-bas bien avant qu’on se retrouve ici.
Tout en fréquentant l’école des réfugiés libériens et sierra-léonais de Lanbanyi, dans la banlieue nord de Conakry, je faisais du bénévolat au sein de l’Organisation internationale pour les migrations, grâce à la recommandation d’un de mes professeurs. C’est en travaillant dans cet organisme pour aider les gens dans le besoin qu’est née ma vocation de travailleuse sociale et mon goût d’être au service des gens. J’ai poursuivi cette première expérience jusqu’à mon départ pour le Canada en avril 2003.
Mon arrivée au Canada a été rendue possible par le parrainage initié par un de mes oncles qui vivait depuis plusieurs années ici avec d’autres membres de sa famille, au sens africain du terme. Son parrainage était appuyé par l’organisme chrétien les Sœurs de la Charité, en partenariat avec le gouvernement canadien. Grâce à ce programme humanitaire, mon frère aîné et moi sommes arrivés les premiers, suivis plus tard par ma mère, ma jeune sœur et mon petit frère.
Arrivée au Canada, j’ai trouvé un pays complètement différent, surtout sur le plan climatique. Je trouvais le printemps assez dur, mais ce n’était rien à côté de l’hiver qui allait suivre.
Au plan humain, je n’étais pas trop dépaysée, parce que nous avions été accueillis par les familles de mes oncles dans un environnement culturel qui n’avait pas tout à fait changé. Je parlais déjà l’anglais et je n’ai donc pas rencontré de barrière à ce niveau. Cet atout m’a facilité
l’accès à des services et à des organismes comme le Catholic Social Services. Le soutien des oncles m’a aidée, encouragée et rassurée.
Par contre, trouver du travail était un défi difficile à surmonter, avec tous les préjugés négatifs qui nous collent à la peau. Comme me familiariser avec le transport en commun. Et puis, les gens qui viennent d’Afrique ne mangent pas la même nourriture et les lieux d’achats sont difficiles d’accès en transports en commun. Ces choses ne se règlent qu’avec le temps et la patience.
Ensuite, trouver une école convenable pour poursuivre mes études n’a pas été facile. J’ai fini par être admise à Grant McEwan d’où je suis sortie diplômée en assistance dentaire. Mes études et mon travail chez KFC ont facilité mon intégration. Ce qui a permis ensuite mon embauche comme assistante dentaire chez Westmount Dental Clinic où j’ai travaillé pendant un an.
Être utile à mes deux communautés Mais le désir de changement et mon
penchant pour l’humanitaire m’ont poussée vers un autre emploi. Aujourd’hui, je suis en congé parental, mais sinon je travaille comme agente de réhabilitation et d’insertion pour le compte de Good Samaritian Society depuis 2005. J’adore ce travail parce que faire une différence dans la vie d’autrui est très valorisant pour moi. Sans des agents comme nous, la vie serait autrement plus dure pour certaines personnes qui souffrent d’insuffisances multiples et diverses. J’ai également été très active dans le bénévolat ici, notamment à l’hôpital Royal Alexandra, au centre-ville d’Edmonton.
Mon rêve est de créer mon propre business dans le domaine humanitaire en établissant un partenariat efficace entre les organismes œuvrant dans ce secteur et l’Afrique où les besoins en la matière sont considérables. De la sorte, je pourrais être utile à mes deux communautés tout en profitant des joies de voir grandir notre petite Germaine.
Aux nouveaux arrivants, si je peux me permettre un conseil, je leur dirais de se former afin d’accroître leurs chances d’intégration et de succès. Ne pas se focaliser sur la recherche de l’argent, sauf pour ceux qui peuvent combiner les deux, comme ce fut mon cas et celui de tant d’autres.
Ma vocation : améliorer la vie d’autrui
Sierra Leone Population : 6,4 millions
Capitale : Freetown
Fête nationale : 27 avril
La Sierra Leone ne fait pas partie de l’Organisation internationale de la Francophonie et très peu de gens parlent le français dans ce pays.
Chassée en 1997 de sa ville natale Freetown en Sierra Leone par la guerre, Kadie Turay a d’abord fui en Guinée avec les rescapés de sa famille. Elle n’était alors qu’en 12e année et commençait une vie de réfugiée qui a duré cinq ans, mais qui lui a permis d’apprendre le français. Marquée par la souffrance des gens, elle a aussi été bénévole pour le compte de l’Organisation internationale pour les migrations et c’est là qu’est née sa vocation d’être au service des nécessiteux. C’est également là qu’elle fit la connaissance de Benjamin Soumah, qui partage sa vie aujourd’hui et avec lequel elle a une charmante petite fille. Elle vit depuis avril 2005 à Edmonton, où elle a suivi une formation d’assistante dentaire.
Kadie Turay