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« Sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire. » (Lénine, 1902, Que faire ?) Les dossiers du PCMLM 1949 et la Chine populaire Les communes populaires chinoises Mai 2014 (1 re édition) Parti Communiste Marxiste-Léniniste-Maoïste de France

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« Sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire. »

(Lénine, 1902, Que faire ?)

Les dossiers du PCMLM

1949 et la Chine populaire

Les communes populaires chinoises

Mai 2014 (1re édition)

Parti Communiste Marxiste-Léniniste-Maoïste de France

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Résumé

À la naissance de la « République Populaire » de Chine, en 1949, le Parti Communiste avait pour tâcheprincipale de construire de la démocratie populaire, comme le défendait déjà Mao Zedong en 1945. Pourremplir cet objectif, le Parti Communiste conduit la révolution agraire, avec d'abord confiscation desterres aux propriétaires puis promotion des coopératives à partir de 1953. Il entreprend également laconfiscation et la nationalisation des entreprises de la bourgeoisie compradore et du système bancaire.L'industrie fait l'objet d'un développement sans précédent avec l'aide de l'Union Soviétique. Ces grandescampagnes amènent de grands progrès mais, dès 1955, il y a une offensive contre-révolutionnaire et leParti est infiltré par les révisionnistes. Mao Zedong souligne alors l'importance de comprendre ladiversité des contradictions de la société chinoise. Afin de lutter contre la dérive bureaucratique, le PartiCommuniste de Chine lance, en 1957, le Grand Bond en Avant. Faisant appel aux masses pour relancerla modernisation et la collectivisation, il voit notamment naître les communes populaires. Cependant,occultant les contradictions existantes et faisant preuve d'un volontarisme gauchiste très fort, le GrandBond en Avant n'a finalement pas été à la hauteur des attentes qu'il a suscitées.

Table des matières1. La Chine, démocratie populaire..............................................................................................................22. L'objectif de la Démocratie Nouvelle......................................................................................................43. Les premiers succès.................................................................................................................................64. La tendance droitiste et la lutte menée contre elle.................................................................................95. Le Grand Bond en Avant......................................................................................................................106. Les problèmes du Grand Bond.............................................................................................................11

1. La Chine, démocratie populaire

Après l'effondrement du régime nazi enAllemagne, et étant donné le rôle joué parl'Union Soviétique dans ce processus, beaucoupde pays d’Europe de l'est sont devenus des« démocraties populaires ». Ce fut le cas pour laBulgarie, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, laPologne, la République Démocratiqued'Allemagne, la Roumanie et l'Albanie. Ce fut lecas pour la Yougoslavie également mais cettedernière a trahi très rapidement en rejoignant lecamp de l'impérialisme des États-Unisd'Amérique.

La situation dans ces pays était la suivante :le régime nouvellement établi était protégé desforces réactionnaires par l'Armée Rouge. Grâceà cela, le front des patriotes organisés par lescommunistes a pu se développer en démocratie,écraser les fascistes et évoluer doucement vers

une première étape du socialisme. Dans certainspays, comme la Tchécoslovaquie, le PartiCommuniste était la force la plus importante.Dans la plupart des autres pays en revanche, eten particulier en Pologne et en Hongrie, lasituation était inversée, et cela a créé d'énormesdifficultés.

On retrouve ce même processus dans deuxpays d'Asie : l'Armée Rouge (d'URSS) n'y a paslibéré le pays mais a fourni un appui stratégiqueimportant aux forces armées communistes quiont libéré la Chine et la moitié nord de laCorée. Quand le Parti Communiste a libéré laChine en 1949 pour former la « RépubliquePopulaire », le pays est devenu en pratiquesimilaire aux « démocraties populaires »d'Europe. Ce n'est pas le socialisme qui a étéorganisé, mais une union des forces progressistessous la direction du Parti Communiste.

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Mao Zedong, le 30 juin 1949, dans undocument écrit à l'occasion de laCommémoration du 28e Anniversaire du PartiCommuniste de Chine intitulé De la dictaturedémocratique populaire, explique :

« L'expérience principale et fondamentaleacquise jusqu'à présent par le peuplechinois se résume en deux points :1) A l'intérieur du pays, éveiller les massespopulaires. Cela signifie unir la classeouvrière, la paysannerie, la petitebourgeoisie urbaine et la bourgeoisienationale en vue de former un front uniplacé sous la direction de la classeouvrière et, à partir de là, édifier un Etatde dictature démocratique populaire dirigépar la classe ouvrière et basé sur l'alliancedes ouvriers et des paysans.

2) A l'extérieur, nous unir, en une luttecommune, avec les nations du monde quinous traitent sur un pied d'égalité, ainsiqu'avec les peuples de tous les pays. Celasignifie nous unir avec l'Union soviétique,les pays de démocratie populaire ainsiqu'avec le prolétariat et les larges massespopulaires de tous les autres pays en vuede former un front uni international. (...)« On peut remporter la victoire mêmesans l'aide internationale. » C'est là une

idée fausse. A l'époque où existel'impérialisme, il est impossible qu'unevéritable révolution populaire puisse, dansquelque pays que cc soit, remporter lavictoire sans l'aide, sous différentesformes, des forces révolutionnairesinternationales ; et même si la victoireétait remportée, elle ne pourrait êtreconsolidée.Cela est vrai pour la victoire et laconsolidation de la grande Révolutiond'Octobre, ainsi que Lénine et Stalinenous l'ont dit il y a longtemps. C'est vraiégalement pour l'écrasement des troispuissances impérialistes pendant laSeconde guerre mondiale et pour lacréation des États de démocratiepopulaire. Et c'est vrai également pour leprésent et l 'avenir de la Chine populaire.Réfléchissez : sans l'existence de l'Unionsoviétique, sans la victoire sur le fascismedans la Seconde guerre mondiale, sans ladéfaite de l'impérialisme japonais, sans lanaissance des États de démocratiepopulaire, sans la lutte des nationsopprimées d'Orient qui se lèvent, et sansla lutte des masses populaires des États-Unis, d'Angleterre, de France,d'Allemagne, d'Italie, du Japon etd'autres pays capitalistes contre lesréactionnaires qui les dominent, sans leconcours de tous ces facteurs, les forcesréactionnaires internationales qui pèsentsur nous auraient certainement été on nesait combien de fois supérieures à cequ'elles sont.Aurions-nous pu remporter la victoiredans de telles conditions ? Évidemmentnon. Et même s'il y avait eu victoire, ellen'aurait pu être consolidée. »

La Chine traversait en effet une criseprofonde, après avoir subi la domination desseigneurs de guerre et la guerre d'agressionimpérialiste du Japon. Le retour à une situationéconomique équivalente à celle d'avant-guerre, etl'organisation pratique du nouvel État à tous lesniveaux, allaient prendre des années, dans unpays qui, avant même tout cela, était semi-colonial semi-féodal.

L'Armée de Libération du Peuple avait libéréle pays de l'impérialisme, et brisé la bourgeoisiecompradore – la situation militaire étaitfavorable, comme en Europe de l'est. Mais lasociété nouvelle, la « démocratie nouvelle »,devait encore être construite – une constructiondifficile, comme en Europe de l'est.

En 1949, le Parti Communiste était enfin

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venu à bout de l'aspect semi-colonial de laChine et a mis en place la révolution agraire quimarqua la fin de l'aspect semi-féodal. L'objectifétait ensuite l'établissement de la DémocratieNouvelle. C'est dans ce sens que Mao Zedong aprésenté, le 21 septembre 1949, à l'occasion dela première Session Plénière de la Conférenceconsultative politique du peuple chinois, sondiscours d'introduction intitulé « Le PeupleChinois est debout ! »

Voici comment il présente la situation :

« Notre œuvre révolutionnaire n'est pasencore achevée, la Guerre populaire deLibération et le mouvementrévolutionnaire du peuple continuent leuravance, et nous devons poursuivre nosefforts. Les impérialistes et lesréactionnaires du pays ne se résignerontjamais à leur défaite ; ils se débattrontjusqu'à la fin.Même quand la paix et l'ordre auront étérétablis dans l'ensemble du pays, ilscontinueront par tous les moyens à selivrer au sabotage et à provoquer destroubles, et chercheront à tout instant àrétablir leur domination en Chine. Celaest certain, indubitable ; nous ne devonsdonc en aucun cas relâcher notrevigilance.Notre régime d'Etat, la dictaturedémocratique populaire, constitue unearme puissante pour préserver lesconquêtes de la révolution populaire etcontrecarrer les complots de restaurationfomentés par les ennemis de l'intérieur etde l'extérieur ; tenons fermement cettearme en main.Sur le plan international, il nous faut nousunir avec tous les pays et tous les peuplesépris de paix et de liberté, et en premierlieu, avec l'Union soviétique et les pays dedémocratie nouvelle ; ainsi nous ne seronspas seuls dans la lutte pour préserver lesconquêtes de la révolution populaire etdéjouer les complots de restauration desennemis de l'intérieur et de l'extérieur.Tant que nous maintiendrons la dictaturedémocratique populaire et que nous seronsunis avec nos amis de l'étranger, nousserons toujours victorieux.La dictature démocratique populaire etl'union avec nos amis de l'étranger nouspermettront d'obtenir des succès rapidesdans notre édification. La tâche de laconstruction économique à l'échellenationale nous attend. Nous disposonspour cela d'excellentes conditions : unepopulation de 475 millions d'habitants etun territoire de 9.600.000 kilomètrescarrés. Des difficultés, nous en aurons, et

même en grand nombre, mais noussommes persuadés que notre peuple lessurmontera toutes par sa lutte héroïque.Et sous ce rapport, le peuple chinoispossède une très riche expérience. Si nosprédécesseurs et nous-mêmes avons putraverser une longue période extrêmementdifficile et vaincre les puissantsréactionnaires de l'intérieur et del'extérieur, pourquoi ne serions-nous pasen mesure, après la victoire, d'édifier unpays prospère et florissant ?Tant que nous conserverons notre style detravail fait de dur labeur et d'âpre lutte,tant que nous resterons unis, tant quenous maintiendrons la dictaturedémocratique populaire et que nous seronsunis avec nos amis de l'étranger, nouspourrons remporter rapidement la victoiresur le front économique.L'essor de l'édification économiques'accompagnera nécessairement d'un essorde l'édification culturelle. Le temps estrévolu où les Chinois étaient considéréscomme des gens incultes. Nousapparaîtrons dans le monde comme unenation ayant une culture hautementdéveloppée. »

2. L'objectif de la Démocratie Nouvelle

L'objectif de la Démocratie Nouvelle étaitdéjà compris depuis longtemps par Mao Zedong.

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Et sa compréhension de la situation chinoise aen effet été intégrée par le Parti Communiste deChine. Lors de son septième congrès, du 23 avrilau 11 juin 1945, 754 délégués représentant 1,2millions membres du parti ont soutenu lerapport de Mao Zedong intitulé Dugouvernement de coalition.

Mao Zedong explique dans ce rapport :

« Que préconisons-nous donc dans cesconditions ? Nous préconisons d'établir,après la défaite complète de l'envahisseurjaponais, un régime d’État, que nousappellerons démocratie nouvelle et quisera une alliance démocratique à caractèrede front uni, fondée sur l'immensemajorité de la population et placée sous ladirection de la classe ouvrière.Ce régime d’État répondra véritablementaux exigences de l'immense majorité de lapopulation, parce qu'il pourra êtreapprouvé, et qu'en fait il est déjàapprouvé, tout d 'abord par des millionsd'ouvriers de l'industrie et par desdizaines de millions d'ouvriers artisanauxet de salariés agricoles, ensuite par lapaysannerie, qui constitue les 80 pour centde la population chinoise, soit 360 millionsd'habitants sur 450 millions, enfin par lanombreuse petite bourgeoisie des villes, labourgeoisie nationale, les hobereauxéclairés et les autres patriotes.(...)La démocratie nouvelle que nouspréconisons vise, sur le plan politique, àl'affranchissement du joug étranger, à laliquidation de l'oppression intérieure,féodale et fasciste, puis, à l'instaurationd'un régime politique qui sera fondé, nonsur la démocratie de type ancien, mais surle front uni de toutes les classesdémocratiques.(...)Le principe d'organisation du pouvoir dedémocratie nouvelle sera le centralismedémocratique ; les assemblées populairesdétermineront les grandes lignes politiqueset éliront les gouvernements aux différentséchelons. Ce système sera à la foisdémocratique et centralisé, c'est-à-direque la centralisation sera fondée sur ladémocratie, et la démocratie pratiquéesous une direction centralisée. Lui seulpermettra de réaliser une large démocratieen donnant aux assemblées populaires, àtous les échelons, la plénitude du pouvoir ;en même temps, il assurera lacentralisation dans le règlement desaffaires d’État en donnant auxgouvernements établis à tous les échelonsla possibilité d'accomplir d'une manièrecentralisée toutes les tâches qui leur serontconfiées par les assemblées populairescorrespondantes tout en garantissant aupeuple la liberté d'exercer les activités

démocratiques indispensables.L'armée et les autres forces armées serontune partie constitutive importante del'appareil du pouvoir de démocratienouvelle ; sans elles, on ne pourraitassurer la défense de l’État. Toutes lesforces armées de l’État de démocratienouvelle, comme les autres organes dupouvoir, appartiendront au peuple etassumeront la charge de le défendre. Ellesse distingueront entièrement de la vieillearmée, de la vieille police et des autresanciennes forces armées, qui appartiennentà une petite minorité et qui oppriment lepeuple.(...)Nous autres communistes, nous nedissimulons jamais nos aspirationspolitiques. Il est certain, indubitable, quenotre programme pour l'avenir, ouprogramme maximum, a pour but deconduire la Chine au socialisme et aucommunisme. Le nom même de notreParti ainsi que notre conception marxistedu monde indiquent clairement cet idéalsuprême que nous voulons réaliser dansl'avenir, idéal infiniment beau et radieux.Tout communiste, en entrant au Parti, aen vue deux objectifs bien définis :révolution de démocratie nouvelle dans leprésent, socialisme et communisme dansl'avenir ; il luttera pour leur réalisation endépit de l'hostilité, des calomnies, desinjures ou des railleries d'adversairesstupides et abjects du communisme. Acelles-ci nous nous opposerons résolument.Quant aux sceptiques qui n'ont pasd'intentions malveillantes, nous ne devonspas les attaquer, mais leur donner avecpatience et bienveillance leséclaircissements nécessaires. Tout cela estparfaitement clair, établi, sans équivoquepossible.Mais, en Chine, tout communiste, toutsympathisant du communisme doit lutterd'abord pour les objectifs de l'étapeprésente : combattre l'oppressionétrangère et briser le joug féodal,soustraire notre peuple au sort tragiqued'un pays colonial, semi-colonial et semi-féodal, édifier une Chine de démocratienouvelle dirigée par le prolétariat et ayantpour tâche principale l'affranchissement dela paysannerie, c'est-à-dire une Chine destrois principes du peuple révolutionnairesdu Dr Sun Yat-sen, une Chineindépendante, libre, démocratique, unifiée,forte et prospère.Et c'est ce que nous faisons ; depuis vingt-quatre ans, nous, les communistes, nousmenons, avec la grande masse du peuplechinois, une lutte héroïque pour atteindrece but.Si un communiste ou un sympathisant nelutte pas pour ces objectifs mais secontente de disserter du socialisme et du

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communisme, s'il dédaigne la révolutiondémocratique bourgeoise et relâche ouralentit tant soit peu ses efforts, si, pourcette cause, il manque si peu que ce soitde dévouement et de zèle, s'il répugne àverser son sang ou à sacrifier sa vie pourelle, c'est donc qu'il commet,consciemment ou inconsciemment, desactes de trahison plus ou moins gravesenvers le socialisme et le communisme etqu'il n'est pas un communiste conscient etdévoué. On ne peut arriver au socialismequ'en passant par l'étape de ladémocratie, c'est une loi du marxisme.Et en Chine, la lutte pour la démocratiesera encore longue. Ce serait une purechimère que de vouloir construire unesociété socialiste sur les ruines d'un ordrecolonial, semi-colonial et semi-féodal sansl'existence d'un État unifié de démocratienouvelle, sans le développement du secteurd’État de l'économie de démocratienouvelle, du secteur privé capitaliste et dusecteur coopératif, sans le développementd'une culture nationale et scientifique desmasses populaires, c'est-à-dire d'uneculture de démocratie nouvelle. sansl'émancipation et le développement del'initiative individuelle de centaines demillions d'hommes, en un mot, sans unerévolution démocratique bourgeoise,conséquente et de type nouveau, dirigéepar le Parti communiste. »

Une des conséquences du 7e congrès a été quela « pensée Mao Zedong » est devenue la lignede la nouvelle constitution du parti, suite à une« Résolution sur certaines questionshistoriques » qui considérait que l'analysecommuniste correcte de la Chine était celle deMao Zedong. Il a aussi été élu secrétaire généraldu Comité Central et, à la fin du mois d'août1945, secrétaire du Conseil Militaire réorganisédu Comité Central.

3. Les premiers succès

Durant la période 1945-1949, l'ArméePopulaire de Libération, composée d'un milliondeux cent mille soldats et officiers, a dûaffronter le Guomindang (4,3 millions desoldats) qui bénéficiait du soutien del'impérialisme américain, avec 50.000 marinespour protéger les sites stratégiques, 100.000autres dans la province côtière du Shandong,ainsi que de l'équipement, de l'entraînement etdes transports fournis à quelque 500.000 soldats.Mais la capacité à mobiliser les masses autour

de l'idéologie communiste – la guerre populaire– a été la clé du succès. Dans la bataille décisivede Hsupeng, 800.000 soldats du Guomindangont dû affronter seulement 660.000 soldats del'Armée Populaire de Libération, mais cesderniers recevaient de l'assistance de 600.000soldats irréguliers et de 5,3 millions depersonnes.

Dans ce contexte de victoire sur toute laChine continentale en 1949, la situation étaittrès difficile en raison de l'inflation, des pénuriesde nourriture, mais aussi de la rareté destransports et des moyens de communication. Leschemins de fer étaient détruits. La Chine n'avaitmême pas de service météorologique, ni d'usinesde bicyclettes. Pas seulement à cause de laguerre : la situation arriérée de la Chineaggravait la situation. Pour cette raison, lapremière tâche du Parti Communiste de Chineétait de réaliser la révolution agraire, et lespropriétaires ont vu leurs terres confisquées etredistribuées aux masses. Cela rentrait dans lecadre de la Révolution de la DémocratieNouvelle, qui avait établi des tribunauxpopulaires à tous les niveaux de juridiction, cesderniers jugeant et condamnant lespropriétaires.

Dans la Démocratie Nouvelle, l’Étatencourageait les associations de paysans, lesentreprises d'artisanat et de fabrication d'outils,les milices populaires et les nouveaux systèmesd'irrigation, pour faire triompher le nouveau surl'ancien. A partir de 1953, l’État a fait lapromotion de structures coopératives quimutualisaient l'utilisation des engrais, dessemences et de l'équipement. En 1957, presque90 % des paysans avaient déjà intégré lescoopératives.

Mais la rupture avec les bases fondamentalesde la pénétration impérialiste, bien sûr, n'étaitpas suffisante. C'est ainsi que dans les villes, lesentreprises de la bourgeoisie compradoreinféodée à l'impérialisme ont été confisquées parl’État. La bourgeoisie nationale, qui étaitextrêmement faible, a pu continuer à produire et

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à vendre ses marchandises, mais avec des prix,des salaires et des conditions de travailréglementées. Le système bancaire a éténationalisé et placé sous le contrôle de laBanque Populaire de Chine. Ainsi dès 1952,l'inflation a pu être maîtrisée, une nouvellemonnaie en dur, le « yuan », est apparue, et lesecteur capitaliste ne contrôlait que 17 % del'industrie. Entre 1949 et 1957, la productionalimentaire a doublé. Entre 1949 et 1954, letaux moyen des revenus nationaux a connuchaque année une augmentation de 9 %.

L'Union Soviétique a joué un grand rôle dansce processus. Sept cent projets dedéveloppement ont vu le jour, du personnelsoviétique a été mis à disposition, et desétudiants chinois sont partis étudier en UnionSoviétique. Deux-cent-dix-neuf usines ont étéentièrement construites par les soviétiques : desaciéries, des raffineries, des usines aéronautiqueset de camions, des centrales électriques. L'UnionSoviétique a également fourni des modèles pourd'autres types d'usines, conçu des plans pour

des milliers de machines et autres équipements,aidé à l'organisation et à la gestion de laproduction, etc. Un premier plan quinquennal avu le jour en 1953, notamment dans le but debâtir une industrie forte dans les domaines del'acier, des produits chimiques et du charbon.

Entre 1952 et 1957, la production en millionsde tonnes est passée de 64 à 124 pour lecharbon, de 1,9 à 5,24 pour l'acier, de 194 à 740pour l'engrais chimique, et de 0,44 à 2 pour lepétrole brut. Le nombre de machines-outils estpassé de 13 734 à 80 000, et la productiond'électricité de 7,26 à 19,1 milliers de millionsde kilowatts.

Le Parti Communiste a aussi lancé descampagnes pour promouvoir ce mouvement.L'une d'entre elles se nommait la campagne des« Trois Anti » : anti-corruption, anti-gaspillageet anti-bureaucratie. Une autre campagne, en1952, avait pour nom les « Cinq Anti » : anti-pots-de-vin, anti-vol des propriétés d’État, anti-évasion fiscale, anti-triche dans les contratsgouvernementaux, et anti-vol des donnéeséconomiques d’État. La nouvelle loi sur lemariage, établie dès 1950, donnait aux femmesles mêmes droits que les hommes, et avait pourslogan : « Les hommes et les femmes sontégaux ; chacun(e) a de la valeur ».

Ainsi, en 1954, les conditions étaient réuniespour établir la première constitution de laRépublique Populaire de Chine. Mais lescontradictions à l'intérieur du pays étaientcependant passées au niveau supérieur. Uneréponse importante, en 1955, fut la « Directivede lancement de la lutte pour éradiquer leséléments contre-révolutionnaires cachés », afinde débarrasser l’État des éléments opportunistesmissionnés par le Guomindang, les propriétaireset les intellectuels. Afin de poursuivre cemouvement contre la bureaucratie, le Parti alancé en avril 1956 la campagne des CentFleurs. Mao Zedong a théorisé ce principe en1957 dans un célèbre document intitulé De lajuste résolution des contradictions au sein dupeuple.

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Selon Mao Zedong, il y avait un manque decompréhension de la diversité de cescontradictions et du fait qu'on devait donc lesrésoudre de différentes façons. Il explique :

« Les contradictions entre nous et nosennemis sont des contradictionsantagonistes. Au sein du peuple, lescontradictions entre travailleurs ne sontpas antagonistes et les contradictionsentre classe exploitée et classe exploiteuseprésentent, outre leur aspect antagoniste,un aspect non antagoniste [… ]Sur quelle base les mots d'ordre « Quecent fleurs s'épanouissent, que cent écolesrivalisent » et « Coexistence à long termeet contrôle mutuel » ont-ils été lancés ? Ilsl'ont été d'après les conditions concrètesde la Chine, sur la base de lareconnaissance des différentescontradictions qui existent toujours dansla société socialiste et en raison du besoinurgent du pays d'accélérer sondéveloppement économique et culturel.La politique « Que cent fleurss'épanouissent, que cent écoles rivalisent »vise à stimuler le développement de l'artet le progrès de la science, ainsi quel'épanouissement de la culture socialistedans notre pays. Dans les arts, formesdifférentes et styles différents devraient sedévelopper librement, et dans les sciences,les écoles différentes s'affronter librement.Il serait, à notre avis, préjudiciable audéveloppement de l'art et de la science derecourir aux mesures administratives pourimposer tel style ou telle école et interdiretel autre style ou telle autre école. Le vraiet le faux en art et en science est unequestion qui doit être résolue par la librediscussion dans les milieux artistiques etscientifiques, par la pratique de l'art et dela science et non par des méthodessimplistes.Pour déterminer ce qui est juste et ce quiest erroné, l'épreuve du temps est souventnécessaire. Au cours de l'Histoire, ce quiest nouveau et juste n'est souvent pasreconnu par la majorité des hommes aumoment de son apparition et ne peut sedévelopper que dans la lutte, à travers desvicissitudes.Il arrive souvent qu'au début ce qui estjuste et bon ne soit pas reconnu pour une« fleur odorante », mais considéré commeune « herbe vénéneuse ». En leur temps,la théorie de Copernic sur le systèmesolaire et la théorie de l'évolution deDarwin furent considérées comme erronéeset elles ne s'imposèrent qu'après une lutteâpre et difficile.L'histoire de notre pays offre nombred'exemples semblables. Dans la sociétésocialiste, les conditions nécessaires à la

croissance des choses nouvelles sontfoncièrement différentes, et bien meilleuresque dans l'ancienne société. Cependant, ilest encore fréquent que les forcesnaissantes soient refoulées et des opinionsraisonnables étouffées.Il arrive aussi qu'on entrave la croissancedes choses nouvelles non par volontédélibérée de les étouffer, mais par manquede discernement. C'est pourquoi, pourdéterminer ce qui est juste et ce qui esterroné en science et en art, il faut adopterune attitude prudente, encourager la librediscussion et se garder de tirer desconclusions hâtives. Nous estimons quec'est une telle attitude qui permettrad'assurer au mieux le développement de lascience et de l'art […]

L'idéologie de la bourgeoisie et celle de lapetite bourgeoisie trouveront sûrement àse manifester. A coup sûr, ces deux classess'obstineront à s'affirmer par tous lesmoyens, dans les questions politiques etidéologiques. Il est impossible qu'il en soitautrement. Nous ne devons pas recourir àdes méthodes de répression pour lesempêcher de s'exprimer ; nous devons leleur permettre, et en même temps engagerun débat avec elles et critiquer leurs idéesde façon appropriée.Il est hors de doute que nous devonssoumettre à la critique toute espèced'idées erronées. Certes, on aurait tort dene pas critiquer les idées erronées et de les

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regarder tranquillement se répandrepartout et s'emparer du marché – touteerreur est à critiquer, toute herbevénéneuse est à combattre.Mais cette critique ne doit pas êtredogmatique ; il faut écarter la méthodemétaphysique et faire tout son possiblepour employer la méthode dialectique.Une analyse scientifique et uneargumentation pleinement convaincantesont ici de rigueur. Une critiquedogmatique ne donne aucun résultat. Nouscombattons toute herbe vénéneuse, mais ilfaut distinguer avec soin ce qui estréellement herbe vénéneuse et ce qui estréellement fleur odorante. Nous devonsensemble, les masses et nous, apprendre àfaire soigneusement cette distinction et, ennous servant de méthodes correctes, luttercontre les herbes vénéneuses. »

4. La tendance droitiste et la luttemenée contre elle

Il existait déjà un fort courant révisionnistedans le Parti lui-même, un courant s'opposant àla collectivisation, ayant les mêmes positionsque Tito, Władysław Gomułka, etc. dans lespays d'Europe de l'Est. Avec l'attaque de NikitaKhrouchtchev contre Staline et son coup d'étaten Union Soviétique, les révisionnistes de Chineont pensé qu'il était possible, pour eux aussi, deprendre le pouvoir. Cela s'illustre par le nombrede fois où Liu Shaoqi, le président du pays,mentionne Mao Zedong dans les rapports ducongrès du Parti Communiste de Chine : 104fois en 1954, et seulement 4 fois en 1956.

Mais ce n'est pas tout : en 1956, le Partisupprima de sa constitution le principe de« pensée Mao Zedong ». Ainsi, les révisionnistesse sont emparés de la campagne des Cent Fleurspour encourager la critique du régime et pourorganiser un coup d’État. C'est également lesens du document du Parti Communiste deChine au sujet de Staline, qui défend ce dernierdes accusations ouvertes de Khrouchtchev, maisde manière plutôt tiède et contradictoire. Il estaisé de voir cela comme un « compromis » quiallait bientôt disparaître, avec le début de lalutte des deux lignes.

Il est nécessaire de rappeler qui étaient lesprincipaux protagonistes dans la direction du

Parti. Mao Zedong était le leader, mais il yavait aussi Liu Shaoqi, un « droitiste »considéré comme le « numéro deux », et quijouait un rôle clé dans les affaires internes duParti. Zhou Enlai, le premier ministre, étaitplutôt « centriste » et avait un rôle trèsimportant dans les affaires internationales, maisaussi dans l'administration. Il y avait aussiDeng Xiaoping, à la tête du Secrétariat du PartiCommuniste de Chine, qui allait bientôt devenirle leader de la faction droitière.

Donc le Parti, qui était passé de 4,5 millionsde membres en 1949, à 10,7 millions de membresen 1956, était plus fort et mieux organisé, maisinfiltré par les révisionnistes. Néanmoins, à cetteépoque, le Parti a quand même réussi à réagirde manière ferme grâce à une autre campagne,le Mouvement Anti-Droitiste, qui ciblaitquelques 500.000 personnes. Et la ligne a dûêtre rectifiée afin d'éviter le triomphe durévisionnisme. La première étape fut lanationalisation des derniers restes capitalistes del'industrie, du commerce et de l'artisanat.

En 1956, toutes les entreprises industriellesappartenaient soit à l’État (67,5 % d'entreelles), soit à des partenariats public-privé.Presque 92 % des travailleurs de l'artisanatétaient organisés en coopératives. De la mêmemanière, l'agriculture a été collectivisée, et MaoZedong a été au centre de la production d'un« Programme National pour l'Agriculture ». Un« petit bond » a été réalisé, grâce à uneaugmentation de 60 % des investissements. MaoZedong a ensuite publié un document intitulé« Au sujet des dix principales relations » : ilsouhaitait un léger changement de ratio pourl'investissement dans l'industrie légère parrapport à l'investissement dans l'industrielourde, de 1 pour 8 à 1 pour 7. L'objectif étaitde soutenir l'agriculture collectivisée grâce à lafournitures de matières premières issues del'industrie légère. C'était d'autant plusnécessaire qu'en 1956, 6,3 millions de personnesavaient migré vers les villes, ce qui a nécessitél'utilisation d'un septième des réserves de grainde l’État. Le développement équilibré de

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l'économie socialiste était très difficile, et lasituation chinoise complexe, avec les grandesinondations de 1956 et une mauvaise récolte en1967, encore due aux conditions climatiques.

La capacité de planification était très faible.En 1952, la Commission de Planification d’Étatétait seulement en mesure d'organiser au niveaunational la production et la distribution de 28articles. Ce nombre est passé à 96 en 1953, à134 en 1954, à 163 en 1955, et à 235 en 1956.Mais il y avait d'autres problèmes. L'approcheadministrative, éloignée des réalités locales,empêchait clairement le plein développement dela collectivisation et entraînait des dérivesbureaucratiques.

La campagne des « Cent Fleurs » n'étant pasen mesure de solutionner les problèmes, elle setermina le 8 juin 1957, à l'occasion d'unéditorial dans le Renmin Ribao, le « Quotidiendu Peuple », et un autre mouvementcommença : c'était le « Grand Bond en Avant ».L'objectif était en effet de trouver une voieentre les droitistes, qui souhaitaient des mesureslibérales dans les campagnes et une fin à lacollectivisation, et ceux qui voulaient suivre lemodèle bureaucratique qui prévalait dansl'URSS de Nikita Khrouchtchev. Naturellement,cela n'était qu'une question de priorités pour lesdroitistes car leurs deux camps partageaient lesmêmes valeurs. Tous les droitistes en appelaientà plus de flexibilité, au sens libéral du terme,avec l'individu au centre du processus.

5. Le Grand Bond en Avant

Pour les authentiques communistes de Chine,la question était très facile à comprendre. Ilsdevaient faire face à deux dangers, qui formaientune possibilité imminente de restaurationcontre-révolutionnaire. Le premier danger étaitla tentation pragmatique d'autoriser lesentreprises capitalistes comme un « outil » dudéveloppement des forces productives. Le seconddanger était la prise du pouvoir par lesspécialistes et les cadres d’État, entraînant ladestruction du Parti. En URSS, la première

menace était portée principalement par leboukharinisme et le trotskysme, et le secondepar la clique de Khrouchtchev.

Dans ce contexte, il ne restait qu'une seulepossibilité : faire appel aux masses. Laisser librecours au pouvoir des masses était la seule optionpour moderniser l'économie chinoise dans cettesituation terrible, sans quoi le pouvoir seraitrevenu dans les mains des partisans de larestauration du capitalisme. Telle est lasignification du Grand Bond en Avant.Idéologiquement parlant, cette réponse n'étaitpas encore caractérisée par une approche« maoïste » à proprement parler. Mao Zedongne faisait que suivre la position que Stalineavait développé dans les années 1940 et 1950, etqui était marquée par un certain subjectivisme.

En oubliant que les contradictions sontinternes, les communistes pensaient à l'époquequ'il était possible d'intervenir de l'extérieurpour transformer la matière et la rendreconforme aux besoins humains. C'est pour cetteraison que le Grand Bond en Avant avait deuxaspects : d'une part, c'était une modernisationet une défense de la collectivisation ; d'autrepart, c'était l'expression d'une tendancesubjectiviste de la petite bourgeoisie de typeanarcho-syndicaliste. En effet, le Grand Bond enavant était un appel au développement desforces productives, sans subordination auxspécialistes, en utilisant l'expérience des massesafin de généraliser les solutions pratiques etfaciles.

Comme on le sait, l'étape cruciale a été laformation des communes populaires. L'objectifétait de franchir un cap dans le processus defusion des structures paysannes. Les paysansdevaient œuvrer conjointement à la production,mais aussi aux réalités de la vie quotidienne,tels que la cuisine ou l'école. A la fin du moisd'août 1958, 37.780 foyers étaient réunis au seinde 8730 communes populaires. Seulement unmois plus tard, 121.940 foyers étaient regroupésdans 26.425 communes populaires. Cela veutdire que 75.000 coopératives ont disparu, pour

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que les masses paysannes s'organisent au niveaunational en communes populaires, une formesocialement plus développée. Chaque communese composait en moyenne de 22.000 personnesqu'il fallait organiser politiquement, afin qu'ellespuissent former de réelles unités de production.

Cela impliquait que les communes populairessoient autosuffisantes à tous les niveaux, que cesoit la fabrication d'engrais, la construction defourneaux pour la production de fonte brute,l'organisation d'écoles (la plupart des gensétaient encore analphabètes) et de patrouilles,ainsi que la structuration de leur propreadministration. En ce qui concerne le travail, ily avait deux niveaux de production : la brigadeet l'équipe, chaque commune populaire étantcomposée de seize brigades, regroupant chacunesept équipes d'environ 200 personnes chacune.Les équipes prenaient en charge le travailagricole, les brigades les activités intermédiaires(ateliers, écoles élémentaires), alors que lescommunes géraient les petites usines, leshôpitaux, les lycées, etc.

Pour la vie de tous les jours, il y avait descuisines, des cantines et des crèches collectives.La construction de réservoirs, de bassins, depuits et de canaux d'irrigation s'est généralisée.De façon notable, c'est à cette période qu'a eulieu la construction du canal « DrapeauRouge », long de 71 kilomètres. On estime quedurant le Grand Bond en Avant et pour la seuleannée 1958, 580 millions de mètres cubes deterre ont été déplacés. En effet les communespopulaires n'étaient pas coupées les unes desautres, et des travaux collectifs furent bienentendu organisés au niveau national. La gestionau niveau national était d'une grandeimportance – la première usine nationale detracteurs a enfin vu le jour en 1958. Maisl'aspect principal du Grand Bond en Avant étaitde maintenir la cohérence du développementéconomique, en mobilisant les masses pourendiguer la menace d'un coup d’État contre-révolutionnaire.

Les espérances étaient grandes ; on espéraitque la production locale d'acier permettrait derattraper la production du Royaume-Uni enseulement quinze ans.

6. Les problèmes du Grand Bond

Le Grand Bond n'a pas été à la hauteur desattentes du Parti Communiste, les terriblesconditions climatiques, avec des sécheresses etdes inondations à grande échelle, étant leproblème principal. La production agricole abaissé de 13 % en 1959, et de 14 % en 1960. En1961, la production était redescendue au mêmeniveau qu'en 1952. L’État chinois a dû acheter 5millions de tonnes de céréales par an sur lemarché international. Mais ce n'était pas tout.L'URSS soutenait une faction révisionniste et ainterrompu son aide à la Chine dans sonentreprise de sabotage de la lutte anti-révisionniste initiée par Mao Zedong. En 1960,15 000 ingénieurs et employés soviétiquesquittèrent la Chine du jour au lendemain, aprèsavoir détruit tous les plans en leur possession.

Cela a mis un frein brutal à la production

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industrielle, qui a chuté de 38 % en 1961, etencore de 16 % en 1962. Mais il y eut aussi deserreurs dues à la subjectivité, et similaires àcelles commises en URSS au début des années1950. La méthode du Grand Bond en Avant sefondait correctement sur le matérialismedialectique. Néanmoins, elle séparait l'histoiredes humains du mouvement de la matière engénéral. Il y avait donc un volontarismegauchiste très fort, qui s'efforçait de résoudre lesproblèmes là où ils apparaissaient. Par exemple,comme la science n'étant pas assez présentedans les masses, l'acier produit dans lescampagnes était souvent inutilisable, et mêmeune mobilisation de masse gigantesque nepouvait pas compenser cela.

Voici un autre exemple très célèbre : lacampagne des Quatre Parasites contre lesmoineaux, les rats, les mouches et lesmoustiques. On pensait à l'époque que cesanimaux étaient en concurrence avec leshumains, et que leur extermination amèneraitun état d'équilibre dans la production àdestination des humains, comme il était calculéque les rats consommaient 350 millions de kilosde nourriture, et chaque moineau 3 kilos decéréales. C'était aussi une question d'hygiènepour les masses.

Bien sûr, cela était une erreur subjectivistequi séparait de façon abstraite ces animaux dela biosphère en général. Le fait de détruire lesnids et d'effrayer les oiseaux (par exemple entapant avec des casseroles) encourageait laprolifération des insectes. Les moineaux ont étéremplacés par les cafards sur la liste desparasites, mais cela est arrivé trop tard et detoute façon le principe restait inchangé. Enconsidérant que l'Humain devait conquérir laNature, Mao Zedong a suivi la même voieerronée que l'URSS des années 1950.

La construction et l'amélioration de 85millions de toilettes avait un sens, laconstruction de 1,6 millions de fossés également,mais la lutte contre les animaux était unmanque de compréhension de la réalité dans son

ensemble. De même pour la déforestationmassive, ou la tendance prononcée àl'urbanisation qui a vu la population urbainegonfler de 57 millions à 100 millions depersonnes entre 1949 et 1957.

Il y avait une planification, mais elleconsidérait de façon unilatérale ledéveloppement des forces productives commeune nécessité intrinsèque. Nous retrouvons ici leserreurs de Staline, qui consistaient à occulter lescontradictions existantes, principalement entrevilles et campagnes, et entre travail manuel ettravail intellectuel.

Mao Zedong comprenait cela, mais lasituation était déjà difficile. En Avril 1959, ildut se retirer de sa fonction de Président de laRépublique Populaire de Chine, pour êtreremplacé par le droitier Liu Shoaqi. Au cours del'été de la même année, Mao Zedong dut faireface à une tentative de coup d’État par leMinistre de la Défense Peng Dehuai, qui se soldapar un échec. Mais tout cela a tout de même

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marqué le début de l’ascension de DengXiaoping, qui fit en 1962 ce commentaire célèbresur l'agriculture « Peu importe que le chat soitblanc ou noir, pourvu qu'il attrape la souris ».

Il y avait deux lignes, d'une côté celle deMao Zedong, et de l'autre celle de Liu Shaoqi etde Deng Xiaoping. L'affrontement étaitinévitable, et ainsi Mao Zedong appela à laGrande Révolution Culturelle Prolétarienne.

Première publication : mai 2014

IllustrationsPremière page : Zhang Ruji, Sheng Cijun et Tian Yuwen, Vive le Parti Communiste de Chine

(1964)p3 : Yu Yunje, Célébrons dans l'allégresse et l'enthousiasme la publication et la constitution de

la République Populaire de Chine (1954)p4 : Yang Furu, Dès le chant du coq, nous nous rendons au champs (1955) – en haut à gauche,

il est écrit : Pendant le chant du coq, l'Orient rougit. On participeactivement à laproduction et on aime le travail.

p7 : Zhang Yuqing, En regardant les chrysanthèmes (1957) – Plusieurs variétés dechrysanthèmes poussent dans le jardin, des fleurs magnifiques aux couleursmerveil leuses. Mais il ne faut pas oublier le jardinier : ce sont ses mains habiles etcourageuses qui les ont plantées.

p8 : Zhang Yuqing, Installation de la lumière électrique à la coopérative (1957) – sur labannière accrochée au mur, il est écrit : Coopérative de la victoire

p11 : Chen Gupin et Chen Huiguan, Le plaisir d'une récolte abondante (1961) – sur la botte deriz, il est écrit : La Commune Populaire, c'est bien

p12 : Jin Meisheng, Choisissez de bonnes semences, augmentez le rendement (1965)

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