Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse...

134
© Aline Vancompernolle, 2019 Nature des rapports de confiance ou du « contrat de communication » entre un usager et son média Mémoire Aline Vancompernolle Maîtrise en communication publique - avec mémoire Maître ès arts (M.A.) Québec, Canada

Transcript of Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse...

Page 1: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

© Aline Vancompernolle, 2019

Nature des rapports de confiance ou du « contrat de communication » entre un usager et son média

Mémoire

Aline Vancompernolle

Maîtrise en communication publique - avec mémoire

Maître ès arts (M.A.)

Québec, Canada

Page 2: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

Nature des rapports de confiance ou du « contrat de communication » entre

un usager et son média

Maîtrise en Communication publique avec mémoire

Aline Vancompernolle

Sous la direction de :

Colette Brin, directrice de recherche

Page 3: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

ii

Résumé

Les radios parlées conservatrices, nées aux États-Unis, ont servi de modèle aux radios

d’opinion de Québec dans le but de capter une audience et la maintenir à l’écoute le plus

longtemps possible. Ce modèle économique à succès, basé sur le spectacle et la

provocation, compte de fidèles adeptes à Québec mais aussi des détracteurs qui les

accusent de favoriser les divisions. Notre étude se penche sur le public de ces deux radios,

CHOI Radio X et FM93. Nous avons cherché à établir, grâce à nos entretiens avec 16

auditeurs, la nature de la confiance qui les unit à leur station et à définir le type de contrat

de communication qui se met en place, à savoir, le système relationnel basé sur des règles

et des attentes réciproques entre les acteurs. Les recherches théoriques sur l’exposition

sélective et le biais de confirmation, la confiance et le contrat de communication nous ont

permis de formuler des propositions de recherche combinant l’adhésion forte des auditeurs

au discours de la radio, leur grande fidélité, leur engagement fort et la confiance importante

qu’ils ont dans la station qu’ils écoutent. Notre analyse nous a permis d’identifier trois profils

d’auditeurs de ces radios qui montrent une prise de recul plus importante vis-à-vis du

discours de la radio que ne le suggéraient les recherches.

Page 4: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

iii

Abstract

Conservative talk radio, born in the US, served as a model for talk radio in Quebec City in

order to capture the audience and maintain it as much as possible. This successful economic

model, based on entertainment and provocation, has loyal listeners in Quebec City but also

opponents accusing the radio of fostering divisions. Our study examines the public of the

two most popular radio stations, CHOI Radio X and FM93. We aimed to draw up, thanks to

our interviews with 16 listeners, the nature of trust uniting them with their station and to

define the type of “communication contract”, which designates a relational system based on

rules and reciprocal expectations between the actors. Theorical research on selective

exposure and confirmation bias, trust and communication contract helped us to build

research proposals combining audiences’ strong adhesion to the radios’ content, loyalty,

strong engagement and great trust they have in the radio station they listen to. Our analysis

led us to identify three profiles of listeners showing more distance toward the radio content

than suggested by previous research.

Page 5: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

iv

Table des matières

Résumé .............................................................................................................................. ii

Abstract ............................................................................................................................. iii

Table des matières ............................................................................................................ iv

Liste des figures, tableaux, illustrations ............................................................................. vii

Remerciements ................................................................................................................ viii

Introduction ........................................................................................................................ 1

Chapitre 1 Problématique .................................................................................................. 4

1. Problématique générale de la recherche : différenciation médiatique et cadrages idéologiques ................................................................................................................... 4

1.1. L’hyperconcurrence et l’obligation de différenciation ........................................ 4 1.2. L’adhésion idéologique ..................................................................................... 7

2. Problème spécifique : le rapport de confiance des usagers avec leur média ........... 8 2.1. Définition des radios parlées ou radios d’opinion .............................................. 9 2.2. Les médias alternatifs opposés aux médias grand public ................................. 9 2.3. L’exemple américain : des messages partisans et négatifs pour capter l’audience ................................................................................................................. 10 2.4. L’exemple québécois inspiré du style américain ............................................. 11 2.5. Le contexte de méfiance ................................................................................ 11 2.6. Adhésion, influence et polarisation ................................................................. 12

3. Objectif de recherche ............................................................................................ 13 4. Question de recherche .......................................................................................... 14 5. Contributions attendues de la recherche ............................................................... 15

Chapitre 2 Cadre théorique et état des connaissances .................................................... 16

1. L’exposition sélective et le biais de confirmation à la base du choix médiatique .... 16 1.1. Diversité des sources et exposition sélective ................................................. 16 1.2. Théorie de la dissonance cognitive et biais de confirmation ........................... 17 1.3. Le biais de confirmation critiqué ..................................................................... 18

2. Le rôle de la confiance dans les relations médias-usagers .................................... 19 2.1. Qu'est-ce que la confiance ? .......................................................................... 19

2.1.1. La confiance dans les médias ................................................................. 20 2.1.2. À travers la confiance, la crédibilité ......................................................... 21

2.2. Confiance égale consommation ..................................................................... 22 2.2.1. Vers l’influence ........................................................................................ 22

2.3. Scepticisme égale consommation alternative ................................................. 23 2.4. Rejet des médias grand public ....................................................................... 23 2.5. La confiance dans les médias associée à la confiance dans les institutions politiques .................................................................................................................. 24 2.6. Confiance égale sélection de l'information ..................................................... 24

2.6.1. Aux États-Unis, Limbaugh choisit son actualité ....................................... 25 2.6.2. Des ressemblances entre les radios d’opinion américaines et celles de Québec 25

3. Le contrat de communication associé aux talk-shows politiques ........................... 26 3.1. Définition du concept ...................................................................................... 26

Page 6: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

v

3.2. Application aux médias .................................................................................. 27 3.3. Le contrat de lecture, modèle du contrat de communication ........................... 27 3.4. Application aux talk-shows politiques ............................................................. 28

3.4.1. Trois composantes .................................................................................. 28 3.4.2. La création d’une communauté à travers les interactions ........................ 29

3.5. Application à la radio ...................................................................................... 30 3.5.1. La proximité ............................................................................................ 30 3.5.2. Temps et distribution de parole ............................................................... 30

3.6. L’exemple américain ...................................................................................... 30 3.7. L’exemple québécois...................................................................................... 31 3.8. La place du code d’éthique ............................................................................ 35

3.8.1. Les règles aux États-Unis ....................................................................... 35 3.8.2. Le cadre réglementaire canadien ............................................................ 35

4. Vers la polarisation ................................................................................................ 37 5. Propositions de recherche ..................................................................................... 38

Chapitre 3 Méthodologie de recherche ............................................................................ 40

1. Échantillon et méthode d’échantillonnage ............................................................. 40 1.1. Explication du choix ....................................................................................... 40 1.2. Description de la population de référence de la recherche ............................. 41

1.2.1. Caractéristiques des auditeurs américains .............................................. 41 1.2.2. Caractéristiques des auditeurs québécois ............................................... 42

1.3. Le recrutement ............................................................................................... 43 1.4. Des incitatifs et conditions favorables ............................................................. 44

2. Rappel des objectifs et méthode retenue pour la recherche .................................. 44 2.1. Exploration et comparaison ............................................................................ 44 2.2. L’approche qualitative .................................................................................... 45 2.3. Technique principale de collecte des données ............................................... 46

2.3.1. La technique des entretiens individuels ................................................... 46 2.3.2. Les entretiens semi-dirigés ..................................................................... 46 2.3.3. Le nombre de participants ....................................................................... 47 2.3.4. Schéma d'entrevue ................................................................................. 47 2.3.5. Des questions en lien avec les propositions de recherche ...................... 48

3. Recrutement et déroulement des entrevues .......................................................... 49 3.1. Le recrutement ............................................................................................... 49 3.2. Le déroulement des entrevues ....................................................................... 50

Chapitre 4 Présentation et analyse des résultats ............................................................. 51

1. Démarche initiale d’analyse ................................................................................... 52 1.1. Analyse thématique ........................................................................................ 52

1.1.1. La compilation des données .................................................................... 52 1.1.2. La recherche de thèmes.......................................................................... 53 1.1.3. La liste des thèmes ................................................................................. 54

1.2. La recherche de profils ................................................................................... 57 2. Analyse des résultats par thèmes.......................................................................... 57

2.1. Fidélité à la station ......................................................................................... 57 2.1.1. Le choix de l’exposition à un média ......................................................... 58

2.2. Les motivations .............................................................................................. 61 2.2.1. Principales raisons d’écoute de la radio de Québec ................................ 62

2.3. Les réactions émotionnelles suscitées par la radio ......................................... 65 2.4. Interactions .................................................................................................... 66

Page 7: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

vi

2.4.1. Les moyens de l’interaction ..................................................................... 66 2.4.2. Les raisons de l’interaction ...................................................................... 67 2.4.3. Les raisons de la non-interaction ............................................................. 69 2.4.4. Les types d’opinions exprimées .............................................................. 69 2.4.5. Les discussions en dehors des ondes ..................................................... 71

2.5. Adhésion ........................................................................................................ 72 2.5.1. L’adhésion à travers la confiance accordée aux animateurs ................... 73 2.5.2. L’adhésion remise en question ................................................................ 75 2.5.3. L’adhésion à travers l’attitude vis-à-vis des autres journaux .................... 77 2.5.4. Une adhésion mitigée : confiance mitigée dans la radio et dans les autres médias 79

2.6. Engagement ................................................................................................... 80 2.6.1. Changement d’avis : un engagement mitigé............................................ 80 2.6.2. Davantage d’engagement en termes d’actions ........................................ 81 2.6.3. Vote : 100% de participation ................................................................... 82 2.6.4. À la défense de la radio........................................................................... 83

2.7. Résumé des principaux résultats ................................................................... 85 2.7.1. Vision d’ensemble : points communs et différences ................................ 86

3. Interprétation des résultats .................................................................................... 88 3.1. L’échelle d’Hofstetter : attention et engagement ............................................. 88 3.2. Des profils d’usagers ...................................................................................... 89

3.2.1. À la recherche de profils.......................................................................... 89 4. Discussion ............................................................................................................. 94

Conclusion ..................................................................................................................... 100

Bibliographie .................................................................................................................. 107

Annexe A Courriel de recrutement Université Laval ....................................................... 114

Annexe B Affiche de recrutement................................................................................... 116

Annexe C Message de recrutement plateforme Reddit .................................................. 118

Annexe D Certificat d’éthique ......................................................................................... 119

Annexe E Questionnaire d’entretien ............................................................................... 122

Annexe F Questionnaire de données personnelles ........................................................ 124

Annexe G Tableau Excel des profils .............................................................................. 125

Page 8: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

vii

Liste des figures, tableaux, illustrations

- Tableau 1 : Grille d’analyse des thèmes et du sous-thème………………………………..84

Page 9: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

viii

Remerciements

J’aimerais adresser un énorme merci à ma directrice de recherche, Colette Brin, pour avoir

accepté de superviser cette maîtrise, pour le suivi qu’elle a effectué, pour ses conseils

avisés et son temps que je sais précieux.

J’aimerais ensuite remercier tous ceux et celles qui se sont intéressés à mon sujet et m’ont

apporté leurs conseils et soutien. Mes études ont également reçu un soutien financier

pendant cette maîtrise grâce à un Prix d’excellence des professeurs et professeures du

Département d’information et communication et au programme de bourse La Capitale.

Enfin, cette maîtrise n’aurait pas été possible sans la participation des auditeurs qui ont

accepté de prendre de leur temps pour répondre à mes questions. Je les en remercie.

Pour terminer, j’adresse mes remerciements à ma famille, mes amis et mon compagnon

pour leur soutien sans faille et sans qui je n’aurai pu accomplir ce travail.

Page 10: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

1

Introduction

Les radios d’opinion de Québec font depuis des décennies l’objet de controverses et de

critiques. Leurs détracteurs les appellent « radios poubelles » ; dans son ouvrage récent,

Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de

confrontation ». Depuis leur création il y a 40 ans, les deux principales stations de radio

parlée à Québec, CHOI Radio X et FM93, font couler beaucoup d’encre. En 2004, la cause

de CHOI Radio X et de son animateur vedette Jeff Fillion a même déplacé des foules au

nom de la défense de la liberté d’expression.

Malgré une offre médiatique abondante à Québec notamment depuis l’apparition d’internet,

les radios parlées continuent à attirer des auditoires importants. Leur recette est un mélange

de spectacle, d’opinion et de provocation et ce, dans le but de maintenir l’audience le plus

longtemps à l’écoute pour récolter des parts de marché et faire du profit (Marcoux et

Tremblay, 2005 : 9 ; Giroux et Sauvageau, 2009 : 5 ; Payette, 2015 : 13). Cette recette

gagnante suscite des critiques, notamment quant au contenu diffusé en ondes accusé d’être

« haineux et raciste » (Payette, 2019 : 34).

Ces radios se sont inspirées d’un format existant aux États-Unis, dans lequel un animateur-

vedette présente ses opinions, le plus souvent très conservatrices, à des auditeurs fidèles

qui expriment leur assentiment à travers une prise de parole en direct pendant les périodes

réservées aux lignes ouvertes. Selon certains chercheurs, une relation de confiance se bâtit

entre les auditeurs et ces radios sur la base d’un rejet des médias traditionnels (Tsfati et

Cappella, 2003). Ces médias « alternatifs » veulent offrir un contenu différent, à la fois dans

les nouvelles qu’ils diffusent, mais aussi dans les points de vue exprimés. Les messages

diffusés s’en prennent souvent directement aux journalistes des médias traditionnels, les

présentant comme indignes de confiance, et salissant leur réputation (Ibid. : 521). Le plus

écouté de ces animateurs de radio américaine est Rush Limbaugh qui enregistre chaque

semaine, selon les chiffres de juillet 2019, 15,5 millions d’auditeurs. Il est suivi de près par

Sean Hannity qui en compte 15 millions par semaine (Talkers Magazine, 2019).

Ces médias alternatifs évoluent désormais dans un contexte général de méfiance vis-à-vis

des médias traditionnels et de la politique, surtout depuis le déferlement de fausses

Page 11: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

2

nouvelles durant les élections présidentielles américaines de 2016. À cette période, aux

États-Unis, les chiffres de la confiance des Américains dans les médias traditionnels sont

d’ailleurs tombés au plus bas, avec un taux de 32% (Swift, Gallup News, 2016). Si au

Canada, cette méfiance vis-à-vis des médias est un peu moins grande, les Canadiens se

disent toutefois préoccupés par la prolifération des fausses nouvelles (Sauvageau, Thibault

et Trudel, 2018) et confus quant à leur capacité à faire la distinction entre l’information et la

désinformation (Turvey, Fondation pour le journalisme canadien, 2019).

Certains chercheurs (Hollifield, 2006 ; Payette, 2015 et 2019) s’inquiètent de la décision

consciente de ces organisations médiatiques d’orienter leurs contenus vers une idéologie

politique. Selon Hollifield, les nouvelles teintées idéologiquement peuvent faire pencher les

audiences vers des idées plus extrêmes et augmenter les divisions dans la société (2006 :

65). Les recherches effectuées sur les radios d’opinion montrent qu’à la suite d’une écoute

prolongée, le public construit de mauvaises perceptions politiques du fait d’une exposition

à des idées biaisées qui seraient néfastes, notamment pour le processus démocratique et

la qualité des débats publics (Garrett, Weeks et Neo, 2016 : 332 ; Giroux et Sauvageau,

2009 : 43).

Notre étude se penche sur le public des radios d’opinion à Québec dans le but de contribuer

à la connaissance et à la compréhension de la relation qui le lie à son média, grâce à une

série d’entretiens auprès d’auditeurs de CHOI Radio X et FM93. Elle s’intéresse à leurs

habitudes de consommation mais aussi aux liens qui se créent entre eux et leur station pour

mesurer la place qu’elle prend dans leur vie. Nous nous interrogeons également sur les

raisons qui poussent les auditeurs à faire le choix de se brancher sur ces stations jour après

jour. Nous cherchons à savoir si des liens de confiance se sont tissés au fil du temps et si

la relation entre les auditeurs et leur radio à Québec correspond au portrait qu’en fait la

recherche aux États-Unis. Nous nous inspirons du concept du contrat de communication,

qui définit les termes de la relation entre un média et son public, ce que l’un propose et ce

que l’autre est en mesure d’attendre (Jeanneret et Patrin-Leclère, 2004). Notre étude

s’appuie également sur les recherches précédentes menées sur les radios de Québec

(Giroux et Sauvageau, 2009 ; Payette, 2015 et 2019 ; Marcoux et Tremblay, 2005 ; Lemieux,

2012 ; Vincent, Laforest et Turbide, 2007 ; Couture et Fiset, 2005).

Page 12: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

3

Dans le premier chapitre, nous présentons notre objet de recherche et notre problématique

générale sur les radios d’opinion : qui sont-elles, comment fonctionnent-elles, dans quel

contexte médiatique concurrentiel évoluent-elles, de quoi est composé leur message mais

aussi pourquoi font-elles autant polémique?

Le deuxième chapitre fait état des recherches théoriques effectuées, tout d’abord sur

l’exposition sélective et le biais de confirmation entrant en jeu dans le choix d’un média, puis

sur la manière dont s’établissent les liens de confiance entre les auditeurs et le type de

média spécifique que sont les radios parlées d’opinion et, enfin sur le contrat de

communication qui se met en place dans un talk-show radiophonique entre le média et son

usager, système structuré de relations basé sur des règles connues et des attentes

réciproques. À la fin de ce chapitre, nous formulons trois propositions de recherche

combinant l’adhésion forte des auditeurs au discours de la radio, leur grande fidélité, leur

engagement fort et la confiance importante qu’ils ont dans la station qu’ils écoutent.

Le troisième chapitre est consacré à la présentation de la méthodologie mise en place pour

effectuer cette recherche. Notre étude veut s’inscrire dans le domaine des études

qualitatives, c’est-à-dire qu’elle cherche à étudier en profondeur un phénomène à travers

les propos des personnes interrogées, plutôt que de fournir une mesure générale de l’écoute

et des attitudes de l’ensemble de l’auditoire. C’est la raison pour laquelle nous avons fait

appel à un petit nombre d’auditeurs de ces radios et pris le temps de les interroger

individuellement sur leurs pratiques et leurs perceptions.

Le quatrième et dernier chapitre présente l’analyse des données recueillies lors des

entretiens. Celle-ci se base sur les propositions théoriques émises à la suite de la

compilation de la revue de littérature. Notre étude établit trois profils d’utilisateurs des radios

d’opinion de Québec à travers les relations que ces derniers ont avec leur station.

En conclusion, nous revenons sur les résultats obtenus et la contribution de cette recherche.

Nous proposons également des pistes pour d’autres études sur le sujet.

Page 13: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

4

Chapitre 1 Problématique

1. Problématique générale de la recherche : différenciation médiatique et cadrages

idéologiques

Les médias se définissent comme des entreprises différentes des autres. « Les fabricants

de l’information prétendent mettre l’intérêt général au-dessus de leur propre intérêt

économique : informer est une mission, le lecteur n’est pas envisagé comme consommateur

mais comme citoyen » (Jeanneret et Patrin-Leclère, 2004 : 138). Toutefois, malgré cette

mission de service public, les médias doivent, depuis plusieurs décennies déjà, répondre à

une logique économique pour exister et, ainsi, se positionner dans un univers de

concurrence (Véron, 1985). Selon Véron, qui évoque la tension entre service public et

impératif économique dans son « contrat de lecture », les médias doivent également

recueillir la confiance de leurs usagers pour qu’ils leur restent fidèles le plus longtemps

possible.

1.1. L’hyperconcurrence et l’obligation de différenciation

La croissance exponentielle de l’offre d’information, notamment due à la pénétration rapide

d’internet depuis 25 ans, a créé une situation de forte concurrence entre les entreprises

médiatiques (Brin, Charron et de Bonville, 2004). Hollifield établit une relation entre le niveau

de concurrence et la performance des médias, de même que la manière dont les

changements dans la structure du marché médiatique peuvent affecter le public (2006). En

effet, les usagers des médias peuvent, grâce aux moyens techniques contemporains,

passer d’un média à un autre, d’une information à une autre, par un simple clic ou encore

en appuyant sur le bouton d’une télécommande. Ils ne prennent le temps de lire que les

articles qui les intéressent et balaient le reste de l’actualité en mode « zapping ». Brin,

Charron et de Bonville voient, à travers ces changements et la bataille concurrentielle que

se font les différents médias, une transformation forcée des pratiques journalistiques (2004 :

26). Ainsi la concurrence, qui se jouait depuis la fin du 19e siècle entre les entreprises de

presse, s’est déplacée vers les messages produits par les journalistes. « L’enjeu de cette

concurrence est la captation de l’attention de plus en plus volatile d’un public extrêmement

Page 14: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

5

sollicité et qui dispose des moyens techniques et culturels pour exercer ses choix librement

et instantanément » (Charron et de Bonville, 2004 : 276).

Hollifield propose une mesure de la concurrence, définie par la compétition pour les

ressources du marché, à partir de six variables : les utilités et opportunités de gratification

du consommateur, le temps des consommateurs, leur argent, le contenu des nouvelles, la

publicité et la force de travail que sont les journalistes professionnels (2006 : 66). En termes

économiques, la concurrence peut être vue comme une force positive qui améliore le

service dans l’intérêt du public : l’accroissement de la compétition amène davantage de

choix et par la force, une baisse des prix tout en produisant des produits de meilleure qualité.

L’économie des médias diffère, cependant, du modèle économique classique car elle ne

peut ni créer de marge, ni se différencier de ses concurrents par les coûts de production ou

les prix de vente (Ibid. : 61). C’est ainsi que cette explosion de l’offre d’informations a produit

un effet négatif. Elle a renforcé la concurrence à l’extrême, à la fois en termes de recherche

d’audience et de revenus publicitaires. La distinction entre les médias a été de plus en plus

floue, d’autant que les avancées technologiques ont effacé les frontières géographiques

entre les marchés, ce qui a élargi le champ dans lequel se livre la bataille de la concurrence

(Brin, Charron et de Bonville, 2004 : 26). Cela a créé une situation d’hyperconcurrence où

les profits sont devenus quasi nuls (Hollifield, 2006 : 60).

Dans ce contexte, les médias, ainsi que les journalistes, voient leur capacité de retenir

l’attention du public diminuer. Ils doivent alors constamment innover pour adapter leur

discours à cette situation d’hyperconcurrence. Il en va de la survie des entreprises

médiatiques (Charron et de Bonville, 2004 : 292). Ils n’ont d’autre choix que de se distinguer,

se diversifier ou se spécialiser. Ils doivent proposer des contenus perçus comme uniques

aux yeux de chaque usager et serrer au plus près de ses préférences de manière à accroître

l’attraction du discours (Hollifield, 2006 : 61). En effet, chacun voit le média qu’il consomme

d’un point de vue personnel, selon ses propres idées et ainsi, le consomme suivant une

utilité qui sera la sienne (par exemple, le divertissement, l’interaction sociale, la surveillance

de l’environnement, la compréhension de soi ou encore la prise de décision) (Ibid.). Cela

rend la pertinence des médias très variable selon chaque usager. La différenciation permet

alors à chaque média de capter la loyauté d’un segment spécifique de consommateurs et

ainsi réduire la concurrence directe (Ibid. : 63).

Page 15: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

6

L’un des leviers sur lequel les organisations médiatiques peuvent jouer pour augmenter leur

audience et ne pas subir négativement la concurrence est l’investissement dans des

informations de qualité (Ibid.). Cependant, dans un contexte d’hyperconcurrence, il est très

difficile, voire impossible pour les organisations médiatiques d’investir un montant important

dans des articles de qualité car cela signifierait augmenter la force de travail pour laisser le

temps au journaliste de fournir un contenu de qualité, selon Hollifield (Ibid. : 62).

Dans ce contexte, les organisations médiatiques n’ont pas d’autre alternative que de choisir

des stratégies de différenciation à bas coûts, ce qui produit un contenu de mauvaise qualité.

Elles se focalisent sur les nouvelles qui attirent le public et sont rapides à produire comme

le sport, les scandales, le sexe, les nouvelles sensationnelles ou les célébrités (Ibid. : 64).

La dramatisation, l’humour ou la polémique mais aussi le langage populaire et le ton de la

conversation sont d’autres procédés utilisés, toujours dans le but d’attirer l’attention (Brin,

Charron et de Bonville, 2004 : 27). Ce constat est repris par Payette concernant le type

spécifique d’émission examiné dans la présente étude : « Le coût d’un talk show de radio,

une émission avec un seul ou un petit nombre d’animateurs, coûte en effet infiniment moins

cher à produire que la mise sur pied d’une infrastructure permettant de rapporter et de traiter

de l’information, comme une salle de nouvelles et un réseau de correspondants » (2015 :

13).

L’autre stratégie à bas coût choisie par les médias est de différencier la production des

nouvelles sur la base de l’idéologie (Hollifield, 2006 : 64), la mise en valeur d’un certain

« point de vue » (Brin, Charron et de Bonville, 2004 : 27). Il ne s’agit plus de « montrer le

monde » mais de projeter un certain regard sur le monde. Le public ne chercherait plus

l’information brute mais « une ‘’perspective’’ structurée et, de préférence, familière et

largement redondante » (Brin, Charron et de Bonville, 2004 : 27). Hollifield cite en ce sens

les idées de Festinger (1957) sur le fait qu’un usager rechercherait la satisfaction à travers

des nouvelles qui sont en accord avec ses idées préexistantes (nous reviendrons sur ce

point dans notre chapitre 2). Une stratégie de différenciation basée sur l’idéologie

permettrait ainsi de rassembler un segment spécifique de consommateurs qui seraient

adeptes des idées du média et lui seraient loyaux.

Page 16: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

7

1.2. L’adhésion idéologique

Hollifield s’inquiète cependant de la décision consciente de certaines organisations

médiatiques d’orienter leurs contenus selon une idéologie politique, ethnique ou religieuse.

À son avis, les nouvelles teintées idéologiquement peuvent faire pencher les usagers vers

des idées plus extrêmes et augmenter les divisions entre les différents groupes de la société

(2006 : 65). L’auteure rappelle également qu’il existe un lien possible entre la réception de

nouvelles idéologiquement biaisées et la mauvaise information ou les perceptions erronées

des usagers (Ibid. : 66).

En effet, si les nouvelles et les commentaires sur l’actualité sont basés sur une idéologie

qui ne présente qu’un seul point de vue, les usagers qui consomment ces médias n’ont

accès qu’à une certaine gamme de perspectives sur l’actualité. Si un média choisit une ligne

éditoriale spécifique et un positionnement politique unidirectionnel, sa manière de présenter

l’information offrira une vision incomplète et biaisée des idées et des enjeux politiques

existants aux usagers de ces médias. Et il est possible de supposer qu’en choisissant un

média et en lui accordant sa confiance, un usager accepte le point de vue présenté par ce

média ; car accorder sa confiance aux médias signifie accepter l'image du monde qu'ils

présentent (Tsafi, 2002). Si cette vision est incomplète et biaisée, les usagers l’accepteront

telle quelle, ce qui pourrait les conduire à des perceptions politiques erronées (Garrett,

Weeks et Neo, 2016 : 332). Et, selon les chercheurs, ces mauvaises perceptions peuvent

avoir des incidences sur la démocratie : « Misperceptions pose a fundamental challenge to

democracy. A democratic state cannot ensure well-informed decision making when citizens

are unable to agree about the political realities to which they must respond » (Ibid.).

Cet aspect prend toute son importance du fait que les médias jouent un rôle central dans la

société : ils informent le public des événements et des grandes questions sociales et

assurent une fonction de surveillance vis-à-vis du gouvernement. Si ces rôles ne pouvaient

plus être remplis, cela serait préjudiciable pour la société (Hollifield, 2006 : 60).

L’hyperconcurrence qui conduit à une différenciation excessive, incluant la différenciation

idéologique, va donc à l’encontre de l’intérêt des usagers (Ibid. : 67).

Giroux et Sauvageau considèrent également une diversité de contenu au sein d’un même

média comme étant utile à la démocratie. Ils affirment, concernant les radios d’opinion,

Page 17: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

8

radios que nous avons choisi d’étudier : « La démocratie serait bien servie si, en période

électorale par exemple, ces stations [de radio] permettaient la confrontation d’opinions

variées. Les auditeurs de ces stations pourraient soupeser la valeur de ces arguments

divergents et faire leur choix de manière avisée » (2009 : 43).

2. Problème spécifique : le rapport de confiance des usagers avec leur média

Nous avons choisi de nous pencher sur l’étude d’un format médiatique spécifique qui

reprend les caractéristiques décrites plus haut, à savoir, se différencier à travers une

idéologie. Il s’agit des radios parlées ou radios d’opinion. Elles sont présentes à la fois aux

États-Unis et dans la ville de Québec et sont souvent comparées les unes aux autres, la

radio québécoise s’inspirant du style américain (Payette, 2015 et 2019 ; Lemieux, 2012).

Ces radios sont politisées. Les idées qu’elles diffusent penchent essentiellement vers un

bord du spectre politique. Aux États-Unis, la talk radio conservatrice est apparue dans les

années 1980. Ses émissions ont été conçues par les leaders politiques conservateurs pour

contourner les médias traditionnels et diffuser leur message directement aux citoyens (Mort,

2012 : 103). À Québec, les radios parlées existent depuis 40 ans mais se sont développées

encore plus depuis ces dix dernières années en premier lieu pour répondre à une logique

financière : elles visent la rentabilité en mettant l’accent sur l’aspect spectaculaire favorisant

des positions polarisées (Payette, 2015 : 13).

Nous avons choisi de baser nos éléments théoriques sur les recherches et données

existantes concernant les radios parlées américaines dans le but d’examiner la situation

telle qu’elle existe dans la ville de Québec. Nous voulons mettre en parallèle les résultats

pour savoir s’il est possible de retrouver certaines caractéristiques communes entre les

pratiques radiophoniques et les perceptions des auditeurs dans les deux pays en ce qui

concerne les rapports de confiance mis en place avec leur média. De tels rapprochements

n’ont pas été effectués dans de précédentes recherches et permettraient d’enrichir les

connaissances sur les relations existantes entre les radios d’opinion de Québec et leurs

usagers. Cette recherche pourrait orienter d’autres études futures sur le phénomène.

Page 18: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

9

2.1. Définition des radios parlées ou radios d’opinion

Les radios parlées ou radios d’opinion présentent les informations selon un format bien

défini qui met en avant l'opinion. Lyons en donne une première définition : « First, talk radio

is relatively unfiltered, with few gatekeepers. Second, talk radio allows ordinary people to be

heard (...) Third, talk radio is interactive. It is an ongoing conversation between the host and

his/her audience » (2008 : 151). Pour Turow, Cappella et Jamieson : « Talk radio is an

intimate medium in which the caller is generally anonymous and in which callers and hosts

participate in spontaneous interaction » (1996 : 5). Barker et Knight y intègrent la

composante politique : « Political talk radio may be defined as call-in shows that emphasize

discussion of politicians, elections, and public policy issues » (2000 : 151).

Dans leur activité, les radios parlées commentent l’information tout en transmettant des faits.

Parler de radio d'opinion équivaut ainsi à parler de points de vue diffusés sur les ondes. The

Cable and Broadcasting Yearbook classe la talk radio notamment conservatrice dans le

genre hybride de l'infotainment. Le genre mélange des éléments de hard news avec de

l'humour, de la dérision et du sarcasme, tout en sachant que l'élément primaire et explicite

est la politique (Mort, 2012 : 103). Tsfati et Cappella incluent la political talk radio (PTR) et

les informations politiques sur internet dans un type de médias appelés en anglais non-

mainstream (2003 : 509), que nous traduisons ici par l’expression « médias alternatifs ».

2.2. Les médias alternatifs opposés aux médias grand public

Les médias alternatifs ont été dénommés ainsi par opposition aux médias dits mainstream

ou grand public. Cardon et Granjon opposent, eux, les expressions « médias dominants »

et « médias alternatifs » (2010). Ces médias veulent proposer, comme leur nom l’indique,

une option différente de celle des médias grand public, une critique (Ibid.). Il s’agit là de la

première des différences qu’ils mettent en avant : se présenter comme une alternative aux

institutions médiatiques grand public. « People who seek non-mainstream news would

probably find it not in USA Today but rather on the Limbaugh Show » (Tsfati et Cappella,

2003 : 510).

Les différences se retrouvent à la fois en genre et en format. Par exemple, dans la PTR

(Political Talk Radio) américaine, les émissions donnent l'apparence d'une interaction avec

Page 19: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

10

le public par l’option des appels à l’animateur. La différence est aussi perceptible en termes

de contenu : les médias alternatifs présentent un contenu différent des médias traditionnels,

que ce soit dans l'information elle-même ou dans les points de vue. « Talk radio can be seen

as serving the public’s need for different forms of news » (Cappella et Jamieson, 1997 :

212). La recherche des nouvelles est d'ailleurs la première raison de consommation

avancée par les auditeurs de la PTR avant le divertissement selon l’étude menée par

Hofstetter et al. auprès d’auditeurs de la radio parlée américaine (1994 : 473). Autre point

de différenciation, les médias alternatifs critiquent les médias grand public pour leur

couverture des nouvelles, à leur avis déficiente. Ils considèrent que les informations qu’ils

diffusent sont biaisées et ne penchent que vers un bord politique. Le plus écouté de ces

critiques à la radio américaine, Rush Limbaugh, a fait l’objet de nombreuses études (Turow,

Cappella et Jamieson, 1996 ; Bennett, 2009 ; Barker, 1998 ; Lee et Cappella, 2001 ; Mort,

2012 ; Barker et Knight, 2000 ; Jones, 1998). Avec 15,5 millions d’auditeurs par semaine, il

rassemble la plus forte audience de la PTR aux États-Unis (Talkers Magazine, 2019).

2.3. L’exemple américain : des messages partisans et négatifs pour capter l’audience

Dans son émission, Rush Limbaugh prétend que les médias sont biaisés et manquent

d'équité dans leur traitement des candidats, qu'ils ne couvrent pas les Démocrates et les

Républicains de la même manière (Tsfati et Cappella, 2003 : 521). Il présente les

journalistes des médias traditionnels comme n'étant pas dignes de confiance : il les salit,

attaque leur crédibilité et leur réputation. Il ridiculise l'éthique du journalisme (Ibid.). Il remet

directement en question les faits présentés par les journaux ou les orientent pour qu'ils

correspondent à ses objectifs idéologiques (Tsfati, 2002 : 121). Les messages sont clairs,

partisans et unidirectionnels (Jones, 2002 : 161). Ils sont également volontairement négatifs,

car l'effet d'arguments négatifs serait plus important que celui des arguments positifs (Barker

et Knight, 2000 : 164). Des mécanismes de sélection de l’information et de sensibilisation à

la politique sont utilisés, le but étant davantage de maximiser l'audience et de divertir que

de servir un forum d'expression publique (Hofstetter et al, 1999 : 355). À l'inverse, les médias

traditionnels ne sont pas tendres avec les PTR. L'analyse de Turow, Cappella et Jamieson

montre une couverture médiatique négative des PTR par les médias grand public, se

focalisant sur les propos les plus extrêmes ce qui, pour les auditeurs, ne reflète pas leur

expérience et pourrait attiser leur cynisme envers ces médias (1996 : 4).

Page 20: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

11

2.4. L’exemple québécois inspiré du style américain

Les stations de radio parlée commerciales de Québec ont très souvent été comparées aux

radios parlées américaines, à la fois par les chercheurs (Marcoux et Tremblay, 2005 ;

Turbide, Vincent et Laforest, 2010) et par les animateurs de ces radios eux-mêmes (Bilefsky,

New York Times, 2018). De la même manière que les radios américaines, elles s’opposent,

dans leurs méthodes et leurs propos, aux médias grand public. Pour ce qui est du contenu

du message diffusé et de la manière dont ce dernier est diffusé, Payette utilise à Québec le

terme de « confrontation » pour décrire les radios dans son livre Les brutes et La punaise,

évoquant « un phénomène de peur existant à Québec » et un « climat de haine » (2019 :

28). La chercheuse fait également le lien avec les radios américaines :

Aux États-Unis, des chercheurs soutiennent que les auditeurs des radios de confrontation s’équipent non seulement en opinions publiques, mais aussi de tout un vocabulaire, d’une armature intellectuelle. Les radios mettraient ainsi des mots dans la bouche de bon nombre de leurs adeptes, qui y trouvent un prêt-à-penser pour habiller leur ressentiment, leur colère ou leur anxiété (Ibid. : 34).

2.5. Le contexte de méfiance

Les médias alternatifs ne sont pas nouveaux dans le paysage médiatique. Ce qui a changé

en revanche est leur nombre et, en partie, leur mode de diffusion. L’émergence d’internet

comme source principale d’information politique a, en effet, transformé l’exposition aux

nouvelles des Américains, notamment parce qu’elle a donné de la voix à des mouvances

politiques auparavant marginalisées et créé des espaces faisant la promotion de contenu

explicitement idéologique (Stroud, 2011). Ce contenu biaisé peut conduire à des

perceptions politiques erronées (Garrett, Weeks et Neo, 2016 : 332).

De plus, les médias alternatifs évoluent désormais dans un contexte général de méfiance à

l’égard des médias d’information traditionnels (Swift, Gallup News, 2016). Nye et Zelikow

ont noté un lien entre la baisse de confiance dans le système politique et l'apparition d'un

nouveau type de médias, « more independent, negative, and assertive » (1997). Ces médias

plus critiques présentent, comme nous l’avons expliqué, une alternative à la manière dont

les nouvelles politiques sont présentées par les médias traditionnels. En ce sens, leurs

usagers sélectionnent un certain type d'opinion, « a certain way of framing politics »

(Hopmann, Shehata et Strömbäck, 2015 : 793). La dernière campagne présidentielle

Page 21: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

12

américaine a accentué, côté américain, l’intérêt porté à ces médias alternatifs positionnés

très à droite car ils soutenaient et diffusaient les idées présentées par le candidat

républicain.

Si la confiance à l’égard des médias semble meilleure au Canada et au Québec qu’aux

États-Unis (Papineau, Le Devoir, 2018), il reste que « les Québécois se sentent souvent

comme le dindon de la farce. 58 % des répondants locaux estiment que les organisations

médiatiques s’inquiètent davantage de leur lectorat ou de leurs cotes d’écoute que de la

transmission d’information de qualité » (Ibid.). À cela s’ajoute une inquiétude face à la

diffusion des fausses nouvelles (Sauvageau, Thibault et Trudel, 2018). Les Canadiens ont

affirmé « avoir de la difficulté à distinguer la vérité de la désinformation dans les nouvelles »

(Turvey, Fondation pour le journalisme canadien, 2019). Cette confusion conduit, pour 85%

des 2300 Canadiens interrogés en 2019 par la Fondation, à ne pas savoir à qui accorder sa

confiance.

2.6. Adhésion, influence et polarisation

Dans ce contexte de méfiance, les médias doivent tout de même parvenir à rallier un public

et susciter sa confiance. L’existence même des radios tient à l’adhésion de leurs auditeurs.

Les fans de Rush Limbaugh, par exemple, montrent leur coopération et résument leur

adhésion unanime par un « ditto » (« idem ») en réponse à l'auditeur précédent ou aux

propos de l'animateur. Cela se faisant systématiquement dans son émission, une

expression caractérisant ses auditeurs-admirateurs est née, ce sont les « dittoheads ».

Les usagers qui ont fait le choix de consommer ces radios les ont choisies parmi toutes les

options médiatiques existantes. Rush Limbaugh, engagé comme animateur de

divertissement, est devenu un meneur pour ses auditeurs dévoués qui se retrouvent dans

ses idées et les suivent. Il ne cache pas son intention d'influencer politiquement ses

auditeurs (Barker et Knight, 2000 : 151). Les chercheurs reprennent les termes de Limbaugh

en juillet 1996 : « “I think you people can be persuaded. . . I believe that the most effective

way to persuade people is not to wag a finger in their face, but to speak to them in a way

that makes them think that they reached certain conclusions on their own” » (Ibid. : 152).

Page 22: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

13

Le but de la political talk radio est de stimuler l'attention des auditeurs et de fait, de les

engager politiquement (Hofstetter et al, 1999). Lyons définit d'ailleurs le fait même d'écouter

la PTR comme une activité politique (2008 : 162). En écoutant ce type de radio, les choix

politiques ne sont jamais contredits : ils sont, au contraire, renforcés. Rush Limbaugh

positionne intentionnellement les autres médias à gauche de l’échiquier politique pour

justifier l’équilibre qu’il dit créer en ne diffusant que des idées de droite (Mort, 2012 :

104). L'exposition à la PTR soutient les penchants idéologiques et partisans. Elle est liée à

des attitudes radicales vis-à-vis de la politique et du gouvernement (Jones, 2002 ; Pfau et

al., 1998). Hofstetter et al. ont montré que l’écoute de la PTR contribue à informer mais

aussi à désinformer, notamment dans le cas de la radio conservatrice (1999 : 353).

Les craintes émises par les chercheurs à propos de l’exposition à un seul point de vue et la

critique des autres concernent la démocratie mais aussi les débats politiques. Les usagers

des radios parlées d’opinion voudront-ils participer à des débats qui induisent la

confrontation d’idées et éventuellement la recherche d’un terrain d’entente entre les

différentes positions? Ces partisans pourraient rester campés sur leurs positions, ce qui

engendrerait une plus forte polarisation et rendrait ces débats impossibles. Notre étude,

même si elle ne pourra certainement pas proposer une réponse définitive à cette question,

va chercher à décrire les perceptions des usagers des radios d’opinion à Québec, ainsi qu’à

caractériser les relations qu’ils entretiennent avec leur station et la place que cette dernière

tient dans leur vie. Sauf erreur, cette recherche n’a jamais été faite pour ces radios à

Québec.

3. Objectif de recherche

Notre recherche s’attachera à étudier une partie du phénomène de la radio parlée, soit la

confiance qu’elle suscite auprès de ses auditeurs. Nous chercherons à comprendre la

nature de cette confiance.

La consommation médiatique de tout type de média, grand public ou alternatif, est basée

sur un rapport de confiance entre le média et ses usagers. Ces derniers font le choix de

chaque média qu'ils consomment dans l’idée qu’il répondra à leurs attentes. Pour générer

de la confiance, un média doit formuler la promesse d'une offre d'information à ses usagers,

Page 23: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

14

selon des critères qu’il saura conserver dans le temps et qu'il aura définis à travers un

« contrat » tacite (c’est-à-dire le format, le contenu, l'angle de traitement, la ligne éditoriale

ou encore la périodicité). Cette attente confortée, théoriquement, l'usager pourra rester

fidèle à ce média et lui accorder sa confiance. Cette confiance pourra sans cesse être

renouvelée dans le temps. Un « contrat de communication » sera créé entre l'usager et son

média.

4. Question de recherche

Au regard de ces informations, nous examinerons la consommation des radios d’opinion à

Québec, notamment dans la manière dont s’établit le rapport de confiance et le « contrat de

communication » entre les usagers et leur média. Nous chercherons à déterminer si les

radios d'opinion de Québec ressemblent aux talk radio américaines, dans la manière dont

la confiance leur est accordée par leurs auditeurs, selon les recherches présentées à ce

sujet. Dans le show de Rush Limbaugh par exemple, l’approbation systématique recherchée

par l’animateur vise à créer une relation de confiance pour influencer politiquement les

auditeurs (Barker et Knight, 2000 ; Mort, 2012).

Notre question générale de recherche est la suivante :

Les rapports de confiance et, par extension, le « contrat de communication » passé

entre les usagers des radios d'opinion de Québec et leur média sont-ils similaires à

ceux des auditeurs d’émissions de talk radio conservatrices américaines, tels que

décrits dans les travaux de recherche ?

Nous nous appuierons sur le concept du biais de confirmation, sur les recherches effectuées

sur la confiance dans les médias et les théories du « contrat de communication » ainsi que

sur les résultats d’études réalisées au Québec et aux États-Unis sur les effets des radios

parlées pour formuler les propositions de recherche à évaluer dans le cadre de cette étude.

Page 24: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

15

5. Contributions attendues de la recherche

Les résultats de notre recherche permettront d'apporter une meilleure compréhension des

mécanismes qui entrent en jeu dans le choix d'une source d'information jugée crédible et

donc digne de confiance par un usager, ainsi que la manière dont elle est acceptée pour

susciter la confiance sur le long terme. L'étude permettra d’apporter des éléments de

connaissance concernant les perceptions des auditeurs des radios d’opinion de Québec vis-

à-vis de leur média et la place que ces radios occupent dans leur vie au quotidien. Elle vise

à enrichir la connaissance dans ce domaine et apporter des éléments de complément à la

compréhension du phénomène des radios d’opinion dans la ville de Québec. Elle permettra

également d’examiner les perceptions d'auditeurs québécois en lien avec celles des

usagers américains, telles que nous les avons observées dans la littérature scientifique.

En termes d'applications sociales, cette étude vise à contribuer à la réflexion sur l'état de la

sphère publique actuelle dans un contexte de diversification et de différenciation des

sources médiatiques, ainsi que de forte polarisation polarisation et de fragmentation des

audiences. Ce dernier phénomène pourrait menacer l'idée même du vivre ensemble à partir

d’une participation de chacun au débat démocratique. La compréhension du phénomène

lui-même peut amener les professionnels des médias à s'interroger sur leurs pratiques et la

manière dont elles touchent le public mais aussi les auditeurs à se poser la question de

leurs choix médiatiques dans un univers saturé de médias et d’information.

Page 25: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

16

Chapitre 2 Cadre théorique et état des

connaissances

La talk radio ou radio d'opinion est un format d'émission médiatique qui répond à certains

critères, que ce soit vis-à-vis de son médium, la radio ; du type d'émission lui-même, le

format parlé ; de la manière dont il s'adresse à ses auditeurs ; ou du temps de parole qui

est donné à chacun des acteurs. Dans la première partie de ce chapitre, nous partirons du

principe que les usagers choisissent un média en fonction de leurs propres idées et

orientations politiques. Dans la deuxième partie, nous parlerons du lien de confiance qui lie

l’usager et le média qu’il a choisi, notamment le lien spécifique qui pourra être créé dans le

cas des émissions de radio parlée. Enfin, dans la troisième partie du chapitre, nous

présenterons la talk radio au travers du concept de « contrat de communication » qui définit

les caractéristiques de la communication médiatique entre deux participants à un acte de

communication.

1. L’exposition sélective et le biais de confirmation à la base du choix médiatique

1.1. Diversité des sources et exposition sélective

L’exposition aux médias, qu’ils soient grand public ou alternatifs, ne se fait pas de manière

aléatoire. Elle est choisie par les usagers. Le but de ceux qui s’exposent aux médias est

d’obtenir une certaine connaissance du monde. Tsfati et Cappella pensent qu'il est

impossible de ne pas sélectionner l’exposition médiatique, « because we are not physically

capable of paying continuous attention to information, political or otherwise » (2003 : 508).

De plus, comme nous l’avons évoqué dans notre chapitre précédent, le développement de

l’offre médiatique depuis les années 1970 et son explosion depuis l’apparition d’internet, ont

dispersé l’attention et réduit le temps que le public porte aux nouvelles. Les usagers

reçoivent un nombre infini d’options médiatiques et n’ont pas d’autre possibilité que de faire

un choix. Ils choisissent donc de s’exposer à tel ou tel média. Puisqu’un choix doit se faire,

il convient de déterminer le mécanisme qui motive le choix des usagers.

Page 26: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

17

Déjà en 1948, Lazarsfeld et al. ont montré que l'exposition est toujours sélective. Ils ont

établi une relation positive entre les opinions des individus et ce qu'ils choisissent d'écouter

ou de lire (Ibid. : 164). Lipset et al. évoquent le fait que la plupart des gens s’exposent, la

plupart du temps, à une sorte de propagande avec laquelle ils sont dès le départ d’accord

(1954).

Les recherches ont également tenté de comprendre les conséquences de l’exposition

sélective aux médias. Elles envisagent aujourd’hui deux options : la première verrait la

réduction des différends du fait de l’exposition à des choix variés ; la seconde envisage au

contraire, du fait d'une grande diversité de choix en ligne, que les usagers seraient éloignés

des perspectives qui diffèrent des leurs, soit par choix, soit par sélection des moteurs de

recherche (Garrett, Weeks et Neo, 2016 : 333). Cette deuxième perspective s’inspire en

partie de la théorie de la dissonance cognitive et du concept de biais de confirmation.

1.2. Théorie de la dissonance cognitive et biais de confirmation

La théorie proposée par le chercheur en psychologie sociale Leon Festinger en 1957 décrit

l’inconfort mental subi par une personne qui se trouve exposée à des idées, des croyances

ou des valeurs qui sont en contradiction avec les siennes. Cette personne cherche alors,

par ses actions, à réduire cet inconfort, autrement appelé dissonance cognitive, pour aligner

ses perceptions du monde avec ses actions. Pour faire face à une idée qui le met mal à

l’aise, un individu peut choisir d’agir de différentes manières : il peut choisir de nier ou

d’ignorer l’information qui a créé la dissonance, il peut justifier son comportement en

modifiant l’information conflictuelle, il peut justifier son comportement en se basant sur une

nouvelle information en accord avec ses idées ou changer son comportement pour être en

accord avec l’information entendue.

Pour éviter tout inconfort mental cependant, un autre comportement a été identifié à travers

cette théorie. Il est décrit par le concept du biais de confirmation. Un individu peut choisir de

ne s’exposer qu’à des messages qui s'alignent sur ses attitudes préexistantes plutôt que

des messages qui vont à l'encontre de celles-ci. Il sélectionne les informations qui réduisent

la dissonance en évitant l'information en contradiction avec ses pensées ou ses croyances

et recherche des messages qui le confortent.

Page 27: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

18

Appliquée à l’exposition médiatique, cette théorie montre les usagers comme cherchant à

s’exposer à des médias qui diffusent des idées et des opinions se rapprochant des leurs

plutôt qu’à des médias publiant des idées opposées aux leurs. Ils recherchent ainsi la

confirmation de leurs idées dans leurs choix de consommation médiatique et évitent

l'exposition à des idées opposées ; ce comportement induit un biais de confirmation. Suivant

la théorie, l'exposition médiatique sélective permet aux usagers de défendre leurs attitudes,

leurs croyances et leurs comportements en cherchant une information qui les soutienne et

en évitant l'information qui pourrait les remettre en question (Hart et al., 2009 : 556). Pour

Iyengar et Hahn, les usagers pensant fermement que leurs idées sont correctes chercheront

à les voir soutenues par le média qu'ils consomment (2009 : 20). Pour sa part, Stroud

avance que l'attitude partisane engendre la consommation d'un certain type de médias et

que l’exposition sélective augmente avec le temps (2011).

La sélection ne serait pas tournée uniquement vers les nouvelles politiques (p. ex : la guerre

en Irak) mais aussi vers des nouvelles qui le sont moins, par exemple le système de santé

ou les voyages, à un degré moindre cependant (Iyengar et Hahn, 2009 : 23). Les chercheurs

ont constaté cette orientation auprès des usagers conservateurs vis-à-vis de Fox News,

média lui aussi conservateur, et prédisent l'amplification de ce type d'attitude par la force de

l'habitude dans le temps, peu importe le sujet (Ibid. : 34). L’étude de Westerwick, Johnson

et Knobloch-Westerwick (2017) montre que l’important, au moment de la réception de

l’information par les usagers, est de voir leurs idées confirmées, peu importe la qualité

perçue de la source. La qualité de la source ne prend de l’importance qu’au moment du

traitement de l’information.

1.3. Le biais de confirmation critiqué

Malgré la popularité du concept de biais de confirmation (Knobloch-Westerwick, Mothes et

Polavin, 2017, Hart et al., 2009), ce dernier a été remis en cause, notamment par Sears et

Freedman en 1967 qui, après évaluation de différentes recherches empiriques effectuées,

ne retiennent que l'hypothèse d'exposition sélective. Certaines études indiquent que le

processus d'évitement de l'exposition à d'autres types de nouvelles n'est pas systématique

(Garrett, Weeks et Neo, 2016 : 333). Nous reviendrons sur cette idée plus loin dans le

chapitre en abordant le sujet de la consommation médiatique des usagers des radios

d’opinion. D’autres encore précisent que certains usagers peuvent ajuster leur attitude après

Page 28: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

19

avoir été exposés à un contenu qui ne reflète pas leurs idées (Westerwick, Johnson et

Knobloch-Westerwick, 2017).

Sears et Freedman mettent en avant d'autres facteurs, comme l'éducation et la classe

sociale des usagers consommateurs des différents médias, ainsi que l'utilité perçue de

l'information reçue et l'exposition antérieure à un sujet donné, renvoyant aux connaissances

et opinions acquises sur le sujet. Sears et Freedman concluent que si l'exposition sélective

n'est pas toujours avérée, c'est peut-être au moment de l'évaluation de l'information reçue

qu'une résistance peut opérer et la sélection s'effectuer (Ibid.).

2. Le rôle de la confiance dans les relations médias-usagers

En matière de consommation médiatique, les usagers font des choix. Outre la volonté de

réduire la dissonance, les recherches ont également montré un lien positif entre la

consommation d'un média et la confiance accordée à celui-ci (Hopmann, Shehata et

Strömbäck, 2015). Des chercheurs (Tsfati, 2002 et 2008 ; Hopmann, Shehata et Strömbäck,

2015 ; Tsfati et Cappella, 2003 ; Lucassen et Schraagen, 2012) se sont penchés sur la

manière dont la confiance est donnée à un média mais aussi sur les conséquences

éventuelles d'un manque de confiance des usagers dans les institutions médiatiques. Ils

montrent que ces conséquences sont directement liées aux raisons de la consommation de

la talk radio.

2.1. Qu'est-ce que la confiance ?

Le concept de confiance est utilisé en sciences sociales pour désigner les relations qui se

mettent en place dans le temps entre une personne qui place sa confiance et une autre en

qui la confiance a été placée. La confiance émerge quand les deux parties en présence

peuvent évaluer la fiabilité de l'autre au fil du temps (Guerrero, 2007). Les deux parties se

basent sur la croyance que la personne à qui ils donnent leur confiance n'en abusera pas.

La confiance est perçue comme centrale dans la production de l’ordre social. Au sens

économique du terme, les deux parties doivent avoir l'objectif de satisfaire leurs intérêts

(Coleman, 1990 : 96). La confiance est supposée rapporter plus qu'elle ne ferait perdre

(Ibid.). Il s'agit d'une question de perception, cependant, liée à une certaine dimension

d'incertitude. Pour que la confiance soit établie, celui à qui la confiance est donnée doit avoir

Page 29: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

20

un minimum de crédibilité1 aux yeux de celui qui la place. Tsfati place la crédibilité comme

élément central dans l'accord de la confiance. Le chercheur voit également la confiance

comme un acte volontaire créant des relations dans le temps (2002).

2.1.1. La confiance dans les médias

La confiance est la raison d'être de la profession de journaliste (Tsfati, 2008). Cette dernière

est également associée à la crédibilité, sous-phénomène de la confiance. L'influence des

médias d'information est plus importante quand ils sont perçus comme crédibles. La

confiance se définit comme une croyance en la fiabilité de l'autre, centrale pour l'ordre social

comme pour le journalisme. La notion de confiance dans les médias a été souvent discutée

dans les recherches. Certaines études associent la confiance au respect de l'impartialité

dans la couverture médiatique, d'autres à la crédibilité en se focalisant sur le contenu

factuel, d'autres encore se basent directement sur l'indice de confiance envers le média

(Hopmann, Shehata et Strömbäck, 2015 : 779).

Tsfati et Cappella ajoutent l'exactitude, l'absence de biais, la fiabilité et le fait de raconter

l’entièreté des faits parmi les composantes de la confiance dans les médias (2003 : 507).

Trois notions sont essentielles pour eux : l'exactitude, la crédibilité et l'objectivité (Ibid. :

519).

Tsfati (2002) distingue, d’un côté, la relation individuelle des usagers à leurs médias et, de

l’autre, l'intérêt des professionnels des médias quant à l’exercice de leur métier. D’un côté,

les intérêts sont diversifiés et variables selon les usagers : ils peuvent chercher à s'informer,

à se divertir, à passer le temps ou encore à se sentir connectés avec les autres. De l’autre,

les intérêts des professionnels des médias à exercer leur métier sont aussi diversifiés que

la question financière, la réputation, l'accomplissement personnel mais aussi l'acquisition

de l'influence. Dans cette relation, les intérêts des deux sont mis en interaction. Du côté des

usagers cependant, il existe une incertitude à propos du contenu des nouvelles car il est

difficile de vérifier leur validité ou encore l'équité produite après l'interprétation de la réalité

1 La définition de ce mot sera abordée un peu plus loin.

Page 30: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

21

faite par les professionnels des médias. « Hence, the uncertainty feature of mistrust applies

to audience-media relations » (Ibid. : 17).

Lucassen et Schraagen voient, eux, la confiance par paliers. Selon leur modèle testé sur

les recherches des usagers de Wikipédia, la confiance dans l'information (ici, au sens large)

est influencée par la confiance dans sa source ; celle-ci est influencée par la confiance dans

le moyen de diffusion (journal, TV, radio, internet), elle-même influencée par la propension

générale à la confiance (2012). Pour eux, les usagers ne passent pas leur temps à vérifier

la crédibilité de l'information mais s'appuient plutôt sur celle de la source qui était un

indicateur solide de crédibilité, avant l'ère d'internet (Ibid. : 566). L'évaluation de la crédibilité

est présentée comme essentielle pour réduire le risque associé au fait de faire confiance

(Ibid. : 567). En effet, un usager qui recherche une information veut en apprendre davantage

sur un sujet qu'il ignore en partie. Il ne pourra donc pas vérifier par lui-même la véracité de

ce qu'il apprend. Il se fiera donc à la source lui ayant déjà fourni des expériences positives

auparavant pour obtenir cette nouvelle information. L'opposé s'avère aussi vrai avec une

source ayant offert une expérience négative. Pour Lucassen et Schraagen, la notion de

temps est essentielle : la crédibilité perçue de la source doit l'être dans la durée (Ibid. : 568).

2.1.2. À travers la confiance, la crédibilité

En ce qui concerne la crédibilité, les différentes tentatives de lui apporter une définition

montrent qu'il s'agit d'un concept complexe et multidimensionnel (Gaziano, 1988 : 269). La

chercheuse trouve tout de même des caractéristiques récurrentes dans les questions des

sondages pour évaluer la crédibilité d’un média comme, par exemple, la présence perçue

d’un biais, une couverture trop basée sur les mauvaises nouvelles, la manière dont le média

traite certains groupes, dont il traite les gens en général, l’attitude de surveillance du média

envers le gouvernement, la comparaison du média avec d’autres institutions et enfin le type

de personnes qui sont les plus critiques envers ce média (Ibid.).

Lucassen et Schraagen considèrent que la manière la plus traditionnelle de vérifier la

crédibilité est la considération apportée aux sources d'information. Elles doivent avoir la

connaissance appropriée, l'expertise pour donner la bonne information mais aussi être

fiables, et avoir l'intention de fournir la bonne information (2012 : 568).

Page 31: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

22

Sachant que l'utilisation des médias est liée aux opportunités, aux motivations et aux

capacités des usagers, cette relation avec un média ou les médias en général ne pourra

qu'être individuelle et l'expérience propre à chacun des usagers.

2.2. Confiance égale consommation

Le lien positif entre la consommation d’un média et la confiance qui lui est accordée est

illustré par le fait que les usagers consomment uniquement des médias auxquels ils font

confiance (Tsfati, 2010). S'ils ne faisaient pas confiance à un média au départ, ils devraient

logiquement moins avoir tendance à le consommer. Ainsi, pour le chercheur, la corrélation

entre l'utilisation d'un média et la confiance dans ce média devrait être comprise comme un

effet de sélection (Ibid.). Un usager sélectionne un média car il a confiance en ce média.

L'hypothèse inverse est également valable selon Hopmann, Shehata et Strömbäck : la

corrélation entre la consommation d'un média et la confiance dans ce média pourrait être

comprise comme un effet des médias (2015 : 779). Pour les chercheurs, la relation au temps

serait la plus importante en termes de confiance envers les médias car l'utilisation continue

d'un type spécifique de média conduirait à davantage de confiance dans ce média (Ibid.).

Les médias ne cessent d’ailleurs de déclarer qu’ils sont dignes de confiance et tentent

constamment d’en convaincre les usagers qui les consomment.

2.2.1. Vers l’influence

Une fois la confiance et la crédibilité obtenues, une influence peut alors s'opérer. Les travaux

incontournables de Hovland et Weiss sur la persuasion ont montré que le changement

d'opinion à la suite de la réception d'une information provenant d'une source jugée crédible

était bien supérieur à celui constaté avec une source jugée non crédible (1951 : 650). Mais

ils ont aussi montré que les opinions préalables d'un usager sur un sujet de société donné

ont un impact sur le jugement de la crédibilité d'une source (Ibid. : 641). Le même constat

est repris par Flanagin et Metzger (2017) qui soulignent l'importance de la crédibilité de la

source, de même que l'autorité qui lui est conférée dans le processus de persuasion. La

persuasion est efficace quand l'énonciateur partage les mêmes valeurs et attitudes que le

récepteur, et que sa position est cohérente avec ces valeurs.

Page 32: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

23

2.3. Scepticisme égale consommation alternative

Les raisons qui poussent les usagers à choisir un média et à lui accorder leur confiance sont

étroitement liées à la crédibilité qu'ils accordent à ce média (Tsfati, 2002 : 19). À l’inverse,

Tsfati et Cappella (2003) ont montré que le manque de crédibilité perçu peut être la cause

du rejet d’un média. Les chercheurs définissent cette attitude comme le scepticisme vis-à-

vis des médias, notamment des médias grand public :

For example, media skepticism is the feeling that the mainstream media are neither credible nor reliable, that journalists do not live by their professional standards, and that the news media get in the way of society rather than help society. Media skepticism is the perception that journalists are not fair and objective in their reports, that they do not always tell the whole story, and that they would sacrifice accuracy and precision for personal and commercial gains. (Ibid. : 506).

Les sceptiques, qui s'identifient à partir de perceptions privées et subjectives, se tournent

alors vers d'autres médias que les médias traditionnels, à la recherche d'alternatives. S'ils

ne font pas confiance aux médias, ces usagers consommeront moins de médias grand

public, et davantage de médias alternatifs que les usagers qui font confiance aux grands

médias (Ibid. : 504). Ainsi, les médias grand public et alternatifs s'opposent. Tsfati et

Cappella incluent la political talk radio (PTR) et les informations politiques sur internet dans

les médias alternatifs (Ibid. : 509).

2.4. Rejet des médias grand public

Ce serait donc le manque de confiance dans l'un qui pousserait à la consommation et la

confiance dans l'autre. Les sceptiques chercheront davantage de médias alternatifs,

notamment la PTR, que les usagers qui ont confiance dans les médias (Tsfati et Cappella,

2003 : 518). Même si Hopmann, Shehata et Strömbäck sont davantage partagés sur les

causes (à savoir si ces usagers se tournent vers les médias alternatifs simplement parce

qu’ils ne font pas confiance aux médias traditionnels ou pour d'autres raisons), ils en arrivent

à la même conclusion : l’exposition aux médias alternatifs conduit à moins de confiance

dans les médias grand public (2015 : 780). En conséquence, ces usagers les consomment

moins (Tsfati, 2002). Une exposition aux médias alternatifs pourrait donc attiser et amplifier

le manque de confiance déjà existant puisque les propos qui y sont tenus vont les conforter

Page 33: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

24

et les renforcer dans leurs positions. La PTR est directement pointée du doigt : « In sum,

talk radio shows such as Limbaugh’s are yet another easily accessible and very popular

media outlet for anti-media and counter-media materials. The growth of PTR in recent year

is thus potentially related to the dramatic increase in public media skepticism » (Ibid.: 121).

Le chercheur précise tout de même que la consommation des médias alternatifs est, pour

le moment, le fait d’une minorité d’usagers.

2.5. La confiance dans les médias associée à la confiance dans les institutions politiques

Selon Cappella et Jamieson, médias et politique sont si fortement liés que la confiance dans

l'une des institutions va influencer la confiance donnée à l'autre (1997). La façon dont les

médias présentent la politique pourrait donc avoir des effets sur la perception du public à

leur égard.

Si certains chercheurs trouvent un lien positif entre la consommation des médias et la

confiance dans le système politique, Cappella et Jamieson (1997) ont conclu à une

tendance contraire : les médias d'information contribuent à une baisse de confiance dans le

système politique, qui conduit à ce qu'ils ont nommé le cynisme politique. Ce dernier est

notamment relié à une perception du média se focalisant sur des stratégies et des éléments

de conflits politiques (Strömbäck, Djerf-Pierre, Shehata, 2016 : 90). Des sondages publiés

aux États-Unis par Gaziano montrent qu'une majorité de répondants pense que les journaux

ne peuvent diffuser des nouvelles équitables s'ils soutiennent une idéologie politique (1988).

L'attitude des médias traditionnels envers le politique devrait, pour ne pas être vue comme

partisane, rester neutre ou agir comme chien de garde. De même, un sensationnalisme jugé

trop important ou trop de mauvaises nouvelles sont perçus comme négatifs pour le média.

2.6. Confiance égale sélection de l'information

Que les usagers soient sceptiques ou non, leur exposition médiatique suivra un schéma qui

les conduira vers des médias auxquels ils ont confiance dans le but d'obtenir une

connaissance du monde. Car l'accès à un média plutôt qu’à un autre et à la connaissance

qu’il apporte reste un facteur déterminant permettant de prédire les conséquences des choix

de l’usager. En effet, nombre des attitudes et opinions sont basées, non pas sur l'expérience

Page 34: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

25

directe, mais sur ce qui est entendu à la radio ou lu dans les journaux (Hovland et Weiss,

1951 : 639).

2.6.1. Aux États-Unis, Limbaugh choisit son actualité

En ce qui concerne les sujets discutés par Limbaugh dans son émission, ils sont différents

de ceux des autres programmes du même type ainsi que de ceux des médias grand public

dans ce sens où ils sont sélectionnés en fonction d'intérêts choisis par l'animateur. Ils

concernent surtout la politique et l’économie nationales. Les critiques sont fréquentes et

intenses contre les leaders politiques nationaux (Yanovitzky et Cappella, 2001 : 394). De

plus, il insiste auprès de ses auditeurs sur leur responsabilité et le fait qu'ils peuvent faire

une différence. Les priorités de Limbaugh ont été identifiées comme aussi différentes de

celles des médias grand public qu'elles le sont des autres talk-shows radio conservateurs

(qui se focalisent sur la politique étrangère et militaire) (Turow, Cappella et Jamieson, 1996 :

3). Pour ces chercheurs, les auditeurs de Limbaugh s'opposent davantage que d'autres

groupes à l'intervention gouvernementale dans les affaires et ne font pas confiance au

gouvernement. Ce sont les plus critiques contre le gouvernement. Ces positions sont liées

aux sujets choisis par l'animateur (Ibid. : 4). Limbaugh promeut une forme de pureté

conservatrice caractérisée par une foi absolue dans les principes économiques du laissez-

faire (Jones, 2002 : 162).

2.6.2. Des ressemblances entre les radios d’opinion américaines et celles de

Québec

À Québec, les radios d'opinion sont également politiquement empreintes de conservatisme.

Le contenu de leurs propos est donc à tendance conservatrice ou néo-conservatrice. Ils

favorisent les libertés individuelles et l'expressivité sans la contrainte d'instances de

régulation comme cela existe aux États-Unis. Ils sont pour le libre marché, critiquent

l'intervention gouvernementale ainsi que l'existence des services publics et des syndicats

(Marcoux et Tremblay, 2005 : 6). La radio d'opinion de Québec a officiellement reçu, par le

passé, l'appui des partis politiques conservateurs. Comme Limbaugh, les animateurs

s'adressent à leurs auditeurs en les décrivant comme des acteurs qui, en agissant, peuvent

faire la différence (Lemieux, 2012 : 4).

Page 35: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

26

La relation qui se met ainsi en place entre les animateurs et leur public est basée notamment

sur la confiance mais aussi sur la crédibilité accordée par le public aux animateurs. Elles

sont une des conditions d’élaboration du contrat de communication qui « définit en somme

la position (la « posture », le statut, l’identité, la fonction) des acteurs les uns face aux autres

et, par conséquent, la nature de la relation entre eux » (Brin, Charron et de Bonville, 2004 :

28).

3. Le contrat de communication associé aux talk-shows politiques

3.1. Définition du concept

Le « contrat de communication » a été d’abord défini dans le domaine de l’analyse de

discours pour caractériser les conditions d’une relation interpersonnelle. Quand deux sujets

entrent en communication, ils veulent se comprendre. La reconnaissance de la finalité de la

situation de communication, de l’identité des participants, des propos tenus et des

circonstances de l'échange sont les conditions qui facilitent cette compréhension

(Charaudeau, 2000). Cela se fait dans le temps (Charaudeau, 1995 : 158). Les sujets

communicants ont chacun un but à atteindre et pour cela, suivent des règles communes,

connues des deux parties (Chabrol, 2012 : 103). Ces règles deviennent des normes

déterminées à travers des types de discours qui sont mémorisés. Engagées dans un projet

d’influence, les deux parties comprennent qu’elles doivent justifier la légitimité et la

crédibilité de leurs propos (Charaudeau, 1995 : 159). « C’est en vertu de ce contrat que

chacun sait, dans une certaine mesure, à quoi s’attendre de l’autre » (Brin, Charron et de

Bonville, 2004 : 28).

Pour Charaudeau, le contrat de communication se base sur trois enjeux : légitimation,

crédibilité et captation. En ce qui concerne la légitimation, il faut « persuader son

interlocuteur que sa prise de parole et sa manière de parler correspondent bien à la position

d’autorité qui lui est conférée par son statut » (2006 : 352). Pour ce qui est de la crédibilité,

il faut « faire croire à l’interlocuteur que ce qu’il dit est “digne de foi” » (Ibid.). Enfin, la

captation doit permettre de « faire en sorte que l’interlocuteur adhère de façon absolue (non

rationnelle) à ce qu’il dit » (Ibid.). Le contrat de communication tel qu'il est présenté

correspond à un idéal.

Page 36: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

27

3.2. Application aux médias

Dans la communication médiatique, le contrat de Charaudeau a deux visées (2000) : une

visée d'information, soit la production d’un discours considéré comme véridique donc

légitime et crédible, et une visée de captation, qui utilise des procédés comme la

surdramatisation pour augmenter son auditoire et ses revenus.

Appliqué à la presse, le contrat de communication apparaît sous la forme d’une

communication sociale, imprimée et périodique (de Bonville, 2004 : 132). Pour de Bonville,

l’expression « contrat de communication » désigne réellement un « contrat » (Ibid. : 133).

Les agents participant à la réalisation de ce contrat (éditeurs, scripteurs, lecteurs, sources

d’informations, annonceurs, etc.) le font selon une configuration spécifique de règles

connues et d’attentes réciproques :

En effet, lorsqu'un lecteur s'abonne à un périodique ou en achète un exemplaire, il le fait sur la base de ce qu'il en connaît. S'il n'y trouve pas ce qu'il cherche, il ne renouvelle pas son abonnement ou cesse de se procurer les exemplaires du périodique. Il peut agir de même si l'éditeur modifie les conditions implicites du contrat, en changeant l'orientation politique d'un journal, par exemple. Comme sur tous les marchés, ce contrat s'établit en fonction de l'offre et de la demande (…) En somme, un contrat de communication est un système structuré de relations (Ibid. : 133-134).

3.3. Le contrat de lecture, modèle du contrat de communication

Un modèle du contrat de communication a été développé par Veron (1985) qui définit dans

son « contrat de lecture » l'union d'un titre de presse à ses lecteurs. Dans sa vision, le lecteur

n'est pas considéré comme un consommateur, mais comme un citoyen. De la même

manière, le média ne se donne pas le rôle d'engranger de l'argent mais a pour mission de

se mettre au service de l'intérêt général en fournissant des informations. Jeanneret et Patrin-

Leclère résument l'idée du « contrat de lecture » : « Il désigne une situation de

communication médiatique (l’énonciateur délivre un produit fini) inscrite dans la durée

(fidélisation des destinataires) et fondée sur une compétence professionnelle (crédibilité de

l’énonciateur) » (2004 : 139). Cet aspect marketing du contrat a été développée dans le

contexte d'une économie capitaliste et dans le principe où un journal doit générer des

revenus pour continuer d'exister comme nous l’avons évoqué dans le chapitre 1. Le contrat

Page 37: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

28

« désigne alors la relation qui engage l’organisation vis-à-vis de ses publics, dans son

univers de concurrence » (Ibid. : 137).

3.4. Application aux talk-shows politiques

Bien que conçu pour la presse écrite, le modèle du contrat de communication s’applique

aussi aux médias audiovisuels, y compris les talk-shows politiques qui font l’objet de la

présente étude.

3.4.1. Trois composantes

Basé sur la reconnaissance d’une autorité et d’une crédibilité, le contrat de communication

médiatique définit un ensemble de règles et de normes associées à un type d’émission

médiatique. En fonction de l’équilibre donné au duo visée d’information et visée de

captation, la nature du contrat diffère. Le contenu proposé par l’émission et la relation que

le média entretient avec ses usagers peuvent faire pencher le contrat vers l’une ou l’autre

des deux visées.

Le talk-show politique à la radio comme celui de Rush Limbaugh possède ses

caractéristiques propres à l’intérieur du contrat de communication médiatique ; on peut donc

parler d’un sous-contrat de communication (Jeanneret et Patrin-Leclère, 2004 : 136 ;

Becqueret, 2007 : 208). Charaudeau, Lochard et Soulages définissent trois composantes

du talk-show, à la télévision comme à la radio : « spectacularisation, truth and the

construction of a public space » (2012 : 53). La « spectacularisation » reprend l'idée de

captation. Dans ce processus, le discours fait appel à l'émotion, qui triomphe souvent de la

raison (Charaudeau, 2010). Associés à des personnalités, les talk-shows affichent leur

objectif de capturer la plus large audience possible. Cela autorise des personnalités à

chercher le verdict de l'audience directement.

Certains shows donnent priorité à des appelants anonymes n'ayant a priori aucune expertise

particulière et leur permettent de s'exprimer dans un vaste dialogue à propos de questions

de société (Herbst, 1995 : 271). Ils mettent en scène des gens ordinaires qui doivent

représenter l'ensemble des usagers selon le principe suivant : « I involve you, you identify

yourself » (Charaudeau, Lochard et Soulages, 2012 : 53). Les talk-shows jouent sur l'intimité

Page 38: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

29

et la confession pour donner l’impression que les participants s'ouvrent et créer ainsi une

relation de proximité et d'identification.

L'aspect « vérité » du talk-show s'attache à faire penser que les opinions exprimées sont

les seules opinions authentiques : « Watch the real » (Ibid.). Cette « vérité » produit un effet.

Ainsi, l'exposition de l'opinion d'un individu, sa vision des choses, après avoir été partagée

devient celle du sens commun (Ibid. : 54). Enfin, la composante « construction of a public

space » est présente dans le fait que le talk-show offre des discours politiques qui ont pour

vocation d'exposer des idées et de provoquer un débat sur la construction et l'organisation

de la vie en société.

3.4.2. La création d’une communauté à travers les interactions

La participation du public par le biais d'interventions en direct est l’une des manifestations

les plus caractéristiques du talk-show, constituant « un genre à part entière » (Granier,

2011 : 54). Ce principe permet d'effacer partiellement le système de diffusion unidirectionnel

du média qui veut que le destinataire ne puisse pas répondre aux messages médiatiques.

Des lieux de rencontres sont créés autour de propos relatant des savoirs et des croyances

des participants. Les intervenants prennent des rôles pour construire une communauté de

parole, qui pourrait devenir avec le temps un vrai réseau social (Becqueret, 2007 : 205). Les

témoignages peuvent créer un esprit communautaire. Les plateformes peuvent également

constituer un forum pour communiquer des émotions (Herbst, 1995 : 271).

Des études empiriques américaines ont sondé les motivations des participants à ce type

d'émission et montraient à l’époque que 38% disaient appeler pour exprimer une opinion ;

27% parce qu'ils voulaient s'engager dans une discussion réciproque avec l'animateur ou

les autres appelants, qu'ils soient d'accord avec eux ou non ; d'autres disaient qu'ils

voulaient partager une opinion, s'impliquer dans des relations interpersonnelles ou encore

corriger un discours incorrect (Herbst, 1995 : 269). Selon Turow, la raison principale des

appelants était de vouloir satisfaire leur besoin de communication interpersonnelle (1974 :

171). Selon Turow, Cappella et Jamieson, les appelants sont des communicants plus actifs

que les auditeurs qui ne font qu’écouter. Ils sont également plus actifs politiquement (1996 :

11).

Page 39: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

30

3.5. Application à la radio

3.5.1. La proximité

En ce qui concerne la radio, le modèle du contrat devient le « contrat d'émission » (Granier,

2011 : 53). La radio permet aux animateurs d'entretenir une proximité avec leurs auditeurs.

Elle génère de véritables espaces d'échanges communicationnels, plus qu'ailleurs. La radio

a façonné son identité de marque par la construction d'une dynamique interactionnelle avec

le public (Lyons, 2008 : 151), ceci bien avant l'apparition de cette norme sur l'espace

numérique.

Les situations de communication interactives qu'elle propose sont normées et déterminées.

En utilisant l'interactivité, elle crée intimité, confidence, voire confidentialité car l'anonyme

est invité à parler (Charaudeau, 1997). La parole transporte l'authenticité, la cible est

considérée affectivement, « l’affect prime sur la rationalité. » (Becqueret, 2007 : 212).

3.5.2. Temps et distribution de parole

La radio parlée offre la possibilité à l'usager de s'exprimer selon des temps de parole

déterminés. L'animateur, figure principale, reste largement dominant dans un programme

souvent égocentré (Becqueret, 2007). Il s'agit d'une narration : l'animateur prend la parole

puis laisse place, lors des temps laissés aux interventions extérieures, à une coopération

entre l'auditeur et lui. La relation entre l'animateur et l'auditeur est souvent présentée sous

forme horizontale, ce qui engendre une relation familière. L'animateur fait des assertions

qu'il demande aux auditeurs de valider.

3.6. L’exemple américain

L'émission de Rush Limbaugh est une bonne illustration de ce principe de répartition de la

parole. La participation des auditeurs est essentiellement articulée autour de leur adhésion

et leur support au propos de l'animateur-vedette. Les auditeurs coopèrent et résument leur

adhésion unanime par un « ditto » avec l'auditeur précédent ou les propos de l'animateur.

Cela se faisant systématiquement avec Rush Limbaugh, une expression caractérisant ses

auditeurs-admirateurs est née, ce sont les « dittoheads ». Les autres appelants sont des

Page 40: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

31

contestataires caricaturés autorisés à s'exprimer pour maintenir le niveau de conflit

nécessaire. Le but est de capter l'intérêt des auditeurs pour maximiser l'audience et les

gains (Barker et Knight, 2000 : 153). Il faut mettre en avant Rush Limbaugh lui-même et non

les auditeurs. Il met un point d'honneur à proclamer la « vérité » selon son point de vue qui

est affiché clairement (Mort, 2012 : 103). Il adopte une attitude d'engagement en affichant

dire ce qu'il pense réellement pour justifier sa légitimité et obtenir la crédibilité dont il a

besoin. Sa « vérité » ne souffre aucune discussion.

Ses auditeurs réguliers auront une tendance à s'intéresser aux questions de société, à

suivre l'actualité de près et à consommer toute autre forme de média, de même qu'à être

engagés dans des activités politiques (Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 3, 11 ; Jones,

2002 ; Hofstetter et al., 1994 ; Bennett, 2009 : 80). Le but de la talk radio est de stimuler

l'attention des auditeurs et de fait, de les engager politiquement (Hofstetter et al, 1999).

Lyons définit d'ailleurs le fait même d'écouter la PTR comme une activité politique (2008 :

162). Hofstetter et al. ont montré qu'écouter la PTR amène à davantage d'information mais

aussi de désinformation, notamment à l'écoute de la radio conservatrice (1999 : 353).

3.7. L’exemple québécois

À Québec, une dizaine de radios privées se partagent le marché de la capitale provinciale.

Deux, identifiées par Giroux et Sauvageau en 2009, CHOI Radio X et FM93, se sont

spécialisées dans la talk radio (à l'américaine), encore appelée radio d'opinion (Lemieux,

2012 ; Giroux et Sauvageau, 2009). Ce type de programme est basé sur le même concept

répondant à la visée de captation : un animateur-vedette ayant beaucoup de marge de

manœuvre pour s'exprimer, en général entouré de co-animateurs, et qui traite des nouvelles

sur le mode de l'opinion. À Québec cependant, on n'y parle pas seulement de politique.

« Tous les sujets y passent : les nouvelles du jour, le sport, les activités artistiques, la vie

des vedettes de même que les préoccupations personnelles de l’équipe sur les ondes

(« dans le coin où j’habite,… », « en discutant hier avec des amis,…») » (Giroux et

Sauvageau, 2009 : 8). Suivant le principe du contrat de conversation et le modèle américain,

il initie un dialogue direct avec des invités sur le plateau et des auditeurs-appelants.

L'animateur donne le ton à l'émission ; les auditeurs, eux, sont plutôt passifs (Marcoux et

Tremblay, 2005 : 9), ce qui peut engendrer la coopération et l'influence imaginée dans le

contrat de communication mais limite l'interinfluence. Le concept propose le même mélange

Page 41: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

32

d'information et de spectacle (infotainment) que les programmes américains. Il cherche, par

les propos tenus, à attirer le maximum d'audience pour un maximum de profit et, selon

Marcoux et Tremblay, n'hésite donc pas à provoquer ou à choquer par des excès de langage

et du jaunisme (Ibid.), pour maintenir les auditeurs à l'écoute le plus longtemps possible,

jour après jour (Giroux et Sauvageau, 2009 : 5). La recherche de la fidélisation des auditeurs

est présente pour engendrer du profit. Ses animateurs, notamment Jean-François Fillion,

animateur de CHOI Radio X, se comparent volontiers à ceux de la talk radio américaine et

s'inspirent de la manière dont Rush Limbaugh ou Howard Stern ont su provoquer et attirer

l'attention (Bilefsky, New York Times, 2018 ; Payette, 2019 : 37).

• Un contenu inconstant

Vincent, Laforest et Turbide (2007) décrivent le discours des radios parlées de Québec

confus et rempli de contradictions : « informer/divertir ; peindre la réalité/faire dans la

caricature ; être doué de clairvoyance/être ordinaire, comme tout le monde ; faire partie des

êtres de pouvoir/faire partie des dépossédés, des sans parole ; influencer le discours

social/tenir des propos anodins, etc. » (Ibid. : 189). Marcoux et Tremblay (2005) n'ont pas

non plus trouvé de réelle constance, ni de cohérence dans les propos tenus. Les animateurs

peuvent changer d'idée au gré de leurs envies et du moment. Ils utilisent des opinions pour

former des opinions, ce qui rejoint le principe de co-construction de sens avec les auditeurs-

appelants.

« La construction du discours se présente comme un système ouvert dont la fonction semble

essentiellement de mettre continuellement des opinions en partage – opinions qui ont par

ailleurs la faculté de naviguer d’un état d’âme à l’autre et fluctuant au gré des humeurs – à

partir desquelles s’ouvriraient continuellement de nouveaux sujets » (Marcoux et Tremblay,

2005 : 7).

Les opinions sont libérées de toute contrainte sur la base du partage de la « vérité », il est

possible de tout dire, « la vérité devenant l’état de fait » (Ibid.). Le principe de vérité et

d'engagement de l'animateur est utilisé, de la même manière que le fait Rush Limbaugh,

pour créer une légitimité et engendrer la crédibilité. Mais devant cette incohérence et

l'absence de grandes idées d'ensemble structurant le discours, Marcoux et Tremblay

montrent une analyse des propos faite à partir du système discursif et non pas à partir du

Page 42: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

33

référent idéologico-politique (2005). C'est-à-dire que le discours fait sans cesse appel au

sens commun plus qu'il ne répond à un raisonnement. C'est la prédominance de l'émotion

contre la raison. Les prises de positions ponctuelles et changeantes ne permettent pas de

prise de recul ou d'analyse. Les animateurs cherchent des auditeurs qui vont adhérer

totalement à leurs propos. Ils se présentent comme étant les semblables des auditeurs, se

mettent sur un pied d'égalité pour créer un sentiment d'appartenance. Ils établissent

également des exigences pour faire partie du groupe ou ne pas en faire partie (Lemieux,

2012 : 6).

• Des auditeurs conquis

Ces radios sont devenues populaires à Québec vers la fin des années 19902. L'audience y

est très réceptive et crée une communauté autour de l'animateur, des groupes identitaires

regroupés autour d'une appartenance radiophonique commune (Lemieux, 2012 : 2).

« L’information, le commerce, le spectacle, tout se mêle ici dans une formule qui repose

finalement sur l’identification forte de l’auditeur à la personnalité qui s’agite derrière son

micro » (Payette, 2019 : 113). Les recherches effectuées sur le sujet ont montré une très

forte emprise sur les auditeurs qui les a déjà, dans le passé, poussés à l'action. « Même si

le contenu discursif est éphémère, le laps de temps pendant lequel les auditeurs y adhèrent,

si court soit-il, les captive et les fascine : il les mobilise » (Marcoux et Tremblay, 2005 : 8).

Les propos des animateurs sont suivis pratiquement à la lettre par leurs fans, comme c'est

le cas du côté de Limbaugh. Les radios misent d’ailleurs sur la « mobilisation émotive de

leurs auditeurs » (Payette, 2019 : 36). En interrogeant les auditeurs de CHOI Radio X,

Marcoux et Tremblay n'ont pas trouvé d'autres arguments que ceux des animateurs repris

pour justifier leurs idées (2005 : 7). Et cette capacité à mobiliser leurs auditoires a été

identifiée plusieurs fois par les chercheurs, notamment pour inciter les auditeurs à se rendre

aux urnes (Payette, 2015) et attirer l'attention des autres médias qui, pour les dénoncer, les

re-citent et donc rediffusent leurs messages (Turbide, Vincent et Laforest, 2010 ; Payette,

2015). Les auditeurs écoutent ces radios car ils rejettent « le discours ‘’politically correct’’

2 L’animateur André Arthur était déjà populaire avant cette période.

Page 43: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

34

typique des autres stations, perçu comme une contrainte à la liberté de pensée et de

jugement » (Couture et Fiset, 2005 : 1).

Les auditeurs sont tout de même de grands consommateurs d'information et s'informent par

d'autres moyens que la seule radio d'opinion, notamment par Le Journal de Québec

(Marcoux et Tremblay, 2005 : 5). Pourtant à l'inverse des auditeurs des talk radio politiques

américaines, 85% des auditeurs québécois disaient en 2005 n'avoir jamais participé à des

activités sociales ou politiques et ne se montraient pas réellement intéressés par ce type

d'activités (Ibid. : 6). Cependant, l'écoute de la radio en a poussé plusieurs aux urnes qui

affirmaient durant les entretiens n'avoir jamais voté dans le passé. Et le résultat a été visible

durant les élections partielles de l’automne 2004 dans la circonscription de Vanier avec la

victoire surprise du candidat de l’ADQ soutenu par CHOI Radio X (Ibid. : 42-43). Les

chercheurs ont enregistré un taux de participation des auditeurs des radios parlées de

Québec supérieur à la moyenne des votants (75% contre 60-70%). En général, les auditeurs

interrogés affichaient une préférence pour le Parti conservateur au fédéral et l’ADQ au

provincial. Cependant Marcoux et Tremblay concluent que ces usagers seraient tout de

même davantage attirés par le consumérisme que par l'engagement politique ou social

(2005).

La présence d’animateurs-vedettes joue un rôle important dans la stratégie commerciale

des stations. Jeff Fillion à CHOI Radio X, par exemple, a mobilisé les foules par le passé.

Son style et ses propos volontiers provocateurs imitaient ceux de Rush Limbaugh et

d’Howard Stern dont il dit lui-même largement s’inspirer (Bilefsky, New York Times, 2018).

Dans les années 2000, il enregistrait les meilleures cotes d’écoute dans la région de Québec

(Payette, 2019 : 37). Il est celui qui a joué un rôle central dans le retrait de la licence de la

station en 2004 à la suite des nombreuses plaintes contre les propos tenus qu’ils avaient

tenus sur les ondes. Après plusieurs années d’absence, il est revenu à son poste et anime

aujourd’hui une émission le midi sur CHOI Radio X (Ibid.). Un sondage Numeris paru dans

le Journal de Québec en 2018 rapporte que Jeff Fillion est l'animateur le plus écouté sur la

tranche horaire du midi, et enregistre une hausse de plus de 3000 auditeurs par rapport à

l'année précédente (Grondin, Le Journal de Québec, 2018 ; Numeris, 2018).

Page 44: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

35

Les différentes recherches décrivent Jeff Fillion et les autres animateurs de ces radios

comme les principaux porte-parole contemporains des idées de droite à Québec, bien que

cette ville soit depuis longtemps largement teintée de conservatisme.

3.8. La place du code d’éthique

3.8.1. Les règles aux États-Unis

Comme nous l’avons évoqué plus tôt, les animateurs de radio ne se considèrent pas comme

des journalistes. Ils diffusent des opinions à partir de faits qu’ils rapportent souvent d’autres

médias. Les positions idéologiques qu’ils adoptent ont souvent fait parler d’elles. Pour les

chercheurs Faris et al. (2017) et Payette (2019), l'apparition de positions extrémistes a été

possible sur les ondes AM aux États-Unis après l'abandon en 1987 de la fairness doctrine

mise en place en 1949 par la Commission fédérale des communications (FCC). Cette

doctrine voulait que les détenteurs de droits de diffusion présentent tous les sujets

concernant le public, même les sujets controversés et qu'ils le fassent de manière honnête,

équitable et équilibrée. « The end of the fairness doctrine paved the way for talk radio as we

know it today. Neither hosts nor stations currently have an obligation to provide balance or

voice to competing views » (Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 7). Les animateurs de

talk-shows conservateurs, notamment Rush Limbaugh, ont immédiatement saisi l’occasion

pour avancer leur argument principal : l’expression de leurs idées offre un équilibre dans

l’univers médiatique. Rush Limbaugh annonce : « I am equal time » (Ibid.). Selon ces

animateurs, ils fournissent des informations que les médias traditionnels refusent de diffuser

(Ibid.). Ils se plaisent à ne pas devoir suivre de règles d'équité dans leur programme (Jones,

2002 : 161 ; Mort, 2012 : 103) et, dans le Limbaugh Show, les auditeurs-appelants

contestataires sont tournés en dérision. Le contrôle des appels est parfois tel qu’ils sont

programmés à l'avance (Barker et Knight, 2000 : 153).

3.8.2. Le cadre réglementaire canadien

Si comme aux États-Unis, l’animateur des radios d’opinion de Québec oriente souvent le

débat dans le sens de ses intérêts et préjugés (Marcoux et Tremblay, 2005 : 9), le Canada

est doté d’instances de régulation dont les pouvoirs d’intervention sont plus importants. Ces

Page 45: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

36

instances sont, cependant, devenues passives, voire négligentes selon Payette (2019 :

141).

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) est

l’organisme qui délivre les permis de diffusion aux stations de radio canadiennes. Il exige

qu’elles suivent la loi canadienne requérant « une programmation équilibrée qui renseigne,

éclaire et divertit » et « dans la mesure du possible, offre au public l’occasion de prendre

connaissance d’opinions divergentes sur des sujets qui l’intéressent » (Ibid. : 130). Depuis

1991, le CRTC ne traite plus lui-même les plaintes déposées contre les médias. Il a délégué

au Conseil canadien des normes de la radio-télévision (CCNR) le soin de l’application du

code de déontologie de l’Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR) et la saisie des

réclamations des auditeurs jugeant avoir été victimes de propos offensants diffusés sur les

ondes (Payette, 2019 : 132 ; Giroux et Sauvageau, 2009 : 6). Ce code de

déontologie demande « aux diffuseurs qu’ils traitent les sujets d’actualité de manière

‘’complète, juste et appropriée’’ » (Giroux et Sauvageau, Ibid.).

Parallèlement, le Conseil de presse du Québec (CPQ), entend lui aussi les plaintes

adressées contre les stations de radio mais ne peut donner que des blâmes moraux, sans

imposer amende ou pénalité. Précisons que « selon la définition retenue par le CPQ, les

animateurs sont des journalistes puisqu’ils traitent publiquement de sujets d’actualité »

(Payette, 2019 : 139). Les animateurs s’inscrivent dans le registre du journalisme d’opinion,

selon le guide de déontologie de la profession. De ce fait, au même titre que les autres

journalistes, ils se doivent de respecter la déontologie de la profession établie par le CPQ

qui demande de présenter une information « exacte, rigoureuse dans son raisonnement et

complète » (Ibid. : 140).

En 2004, après de nombreuses plaintes à l’égard de la radio d'opinion CHOI Radio X, le

CRTC a révoqué la licence de diffusion de la station. La décision avait, à l'époque, été

largement contestée, constituant pour certains une atteinte à la liberté d'expression. Privée

de licence, la radio tenue par le groupe Genex a ensuite changé de main pour être rachetée

par le groupe RNC Médias (Payette, 2019 ; Radio Canada, 2019).

Page 46: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

37

4. Vers la polarisation

La consommation de médias alternatifs peut avoir des conséquences sur les idées des

usagers (Garrett, Weeks et Neo, 2016 : 335). Mais pas n'importe lesquels : les usagers aux

convictions les plus fortes ou les mieux informés auraient les attitudes les plus biaisées

(Gvirsman, 2014 : 91). En ce qui concerne la PTR, l'étude de Jamieson et Cappella a trouvé

des positions plus polarisées chez les auditeurs de Rush Limbaugh après l'écoute

d'enregistrements de PTR conservatrice et libérale (2008). L'exposition à la PTR soutient

les penchants idéologiques et partisans. Elle est liée à des attitudes vis-à-vis de la politique

et du gouvernement plus extrêmes (Jones, 2002 ; Pfau et al., 1998). Pour Jones, les

animateurs font davantage que prêcher à des convertis (2002). Pour ces usagers, s'ils

reçoivent une information qui soutient leurs idéaux, ils concluront que leurs visions sont les

bonnes, tout en obscurcissant souvent la réalité (Hart et al., 2009 : 555 ; Jones, 2002 : 160).

Ainsi, le fait de choisir un média en fonction d'affinités et de croyances politiques engendre

des préférences médiatiques nettes mais aussi des attitudes plus extrêmes, menant à la

polarisation (Gvirsman, 2014). L'exposition continue à des arguments renforçant les

opinions y contribue. Tsfati, Stroud et Chotiner, font le même constat (2014 : 8), ainsi que

Jones (2002).

Stroud a montré en 2010 que les effets de l'exposition sélective sur la polarisation sont plus

forts que les effets de la polarisation sur l'exposition sélective. L'étude de Feldman indique

également que certains usagers ne font plus la différence entre des opinions et des

nouvelles si elles rejoignent leurs idées (2008 : 26). Un sondage publié par le Pew Research

Center en 2018 va également dans ce sens : seuls 26% des adultes américains sont pu

correctement identifier cinq faits et 35% cinq opinions parmi les énoncés qui leur ont été

fournis.

La polarisation peut également être renforcée par une implication personnelle dans les

relations avec la radio, de même que par la discussion avec d'autres personnes partageant

les mêmes idées et valeurs. D'ailleurs, 71% des auditeurs de la PTR américaine rapportent

avoir discuté de sujets entendus à la radio et 23% avoir agi à la suite de ce qu'ils avaient

entendu à la radio (Hofstetter et al., 1994). Ce fut également le cas à Québec en 2004 où

l'appel des radios avait mobilisé 50 000 manifestants au nom de la « liberté d'expression »

contre la menace de fermeture de la radio d'opinion CHOI Radio X (Payette, 2019 : 38).

Page 47: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

38

Dans la talk radio, le fait qu'une idée soit exprimée à l'antenne lui donne plus de légitimité

car cette idée est partagée par un animateur charismatique avec des millions ou des milliers

d'auditeurs, notamment dans le cas de Limbaugh aux États-Unis (Jones, 2002 : 160) ou de

Jeff Fillion à Québec. La volonté de conformité à la pression du groupe et à la norme peut

influencer l'adhésion aux idées (Barker, 1998 : 261). L'auditeur entouré de personnes

soutenant ses idées politiques se sentira plus fort et plus engagé, il pourra également

diffuser ses idées (Ibid. : 271). Écouter Rush Limbaugh fera évoluer les opinions vers un

plus fort conservatisme et une antipathie envers les cibles favorites de l'animateur (Barker

et Knight, 2000 : 168). À Québec, les radios d'opinion mobilisent leurs auditeurs pour les

encourager à la participation politique. « La capacité de ces radios à déterminer les

programmes politiques de la nation, leur influence idéologique et leur engagement dans les

campagnes électorales n’ont rien d’anodin » (Payette, 2019 : 54). La chercheuse utilise le

terme de propagande pour parler des activités politiques des radios d’opinion de Québec

(Ibid. : 55).

La diffusion d’idées extrêmes et l’adhésion qu’elles génèrent mène à une polarisation vue

comme limitative dans le processus démocratique. Les usagers éloignés par des idées

politiques opposées évoluent dans des sphères publiques différenciées (Gvirsman, 2014 :

75-77). Cependant, les médias, en réaction à ce phénomène, ont tendance à injecter

davantage de contenus biaisés politiquement que l'inverse, ce dans le but de gagner des

parts de marché (Iyengar et Hahn, 2009 : 33).

5. Propositions de recherche

Dans le cadre de notre étude, comme il ne nous est pas possible d’analyser toutes les

caractéristiques de la relation de confiance qu’entretiennent les auditeurs avec les radios

parlées de Québec, nous allons nous attacher à en explorer quelques-unes qui nous

apparaissent particulièrement significatives relativement à nos objectifs et à notre question

de recherche, à la lumière de l’état des connaissances et du cadre théorique que nous

venons de présenter.

Proposition 1 : Les auditeurs reconnaissent une forme d’autorité à la radio parlée (ou à

l’animateur) qu’ils écoutent, lui attribuent de la crédibilité et lui font confiance. Ils sont

méfiants envers les autres médias ;

Page 48: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

39

P2 : Le « contrat » est caractérisé par une adhésion forte des auditeurs au discours de la

radio et de ses animateurs, par une fidélité au programme dans le temps et un niveau

d'engagement important dans leur écoute (ils discutent des propos qu’ils ont entendus

autour d’eux ou même téléphonent à la radio) ;

P3 : L’écoute assidue de ces radios est associée à des opinions, voire des actions politiques

ou sociales conformes aux idées véhiculées.

Page 49: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

40

Chapitre 3 Méthodologie de recherche

Nous expliquerons dans ce chapitre le choix d’approche méthodologique effectué, à savoir

la démarche établie en lien avec l’objectif de la recherche et les questions qui en découlent.

Puis nous présenterons la technique de collecte de données choisie, celle des entretiens

individuels semi-dirigés en détaillant ses avantages et enfin les contraintes auxquelles nous

avons dû faire face.

1. Échantillon et méthode d’échantillonnage

1.1. Explication du choix

Puisque l'étude vise à connaître les perceptions des usagers, la collecte de données

primaires pour tenter de répondre à la question de recherche a été faite directement auprès

des auditeurs des radios d'opinion. Ces radios ont été identifiées dans le précédent chapitre

décrivant le cadre théorique de la recherche. Les deux principales stations de la ville de

Québec spécialisées dans la talk radio (à l'américaine) aussi appelée radio d'opinion

(Lemieux, 2012 ; Giroux et Sauvageau, 2009), identifiées par Giroux et Sauvageau en 2009,

sont CHOI Radio X et FM93.

Selon les propositions de recherche qui ont été formulées au précédent chapitre, il s'agit de

connaître et comprendre l'adhésion des auditeurs, leur fidélité ainsi que leur niveau

d'engagement dans l'écoute de la station (discussion informelle avec leur entourage de

propos entendus, interventions en direct sur les ondes). Nous voulions aussi mettre en

parallèle les témoignages recueillis avec les résultats d’études sur les auditeurs des talk

radio conservatrices américaines comme le Rush Limbaugh Show. Il nous apparaissait donc

indispensable de nous adresser à des auditeurs réguliers de l’une ou l’autre station (ou les

deux) pour obtenir des données fiables et pertinentes.

Pour sélectionner les participants, nous avons constitué un échantillon de type intentionnel,

non probabiliste, en sélectionnant les interviewés sur la condition qu'ils consomment les

radios d'opinion CHOI Radio X et FM93 sur une base régulière, c’est-à-dire au minimum

deux fois par semaine, ce seuil ayant été fixé dans les études déjà effectuées sur le sujet

Page 50: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

41

(Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 3, 12). Les usagers interrogés sont des habitués de

ces radios et peuvent avoir même participé en appelant l’une ou l’autre station pour discuter

directement avec les animateurs.

1.2. Description de la population de référence de la recherche

À la suite des remarques de Sears et Freedman (1967) concernant les caractéristiques

sociodémographiques des consommateurs des médias et l'influence possible que celles-ci

pourraient avoir sur le choix de l'exposition à un média, nous allons présenter les profils

d’auditeurs de la radio identifiés par les recherches effectuées sur le sujet, à la fois aux

États-Unis et à Québec.

1.2.1. Caractéristiques des auditeurs américains

Les résultats de sondages analysés par Gaziano (1988) identifiaient deux groupes

d'usagers critiques des médias aux États-Unis. Précisons que leurs perceptions négatives

s’appliquent aux médias en général plutôt qu'à leur média de prédilection. Le premier groupe

est caractérisé par un fort niveau d'éducation, des revenus élevés, une forte consommation

médiatique, une forte connaissance et une grande expérience des médias ainsi que par des

attitudes conservatrices. L'autre groupe se situe, lui, à l'opposé de l'échelle socio-

économique. Il est moins éduqué, a moins de connaissances des médias et des grandes

questions de société. Lee (2010) confirme ces informations : le cynisme serait lié à un haut

niveau de conservatisme et à une forte adhésion au Parti républicain. Les auditeurs de

Limbaugh sont, eux, plus conservateurs (70%) et plus républicains (61,4%) que les

auditeurs des autres talk-shows conservateurs, comme ceux de Sean Hannity ou Bob Grant

(47,8% conservateurs et 44,8% républicains) (Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 13). Les

auditeurs de Limbaugh sont plus concernés par les valeurs de sécurité, de tradition et de

conformité (sécurité de la famille, sécurité nationale, ordre social, propreté, harmonie,

stabilité) que les auditeurs de talk-shows libéraux (Lyons, 2008 : 153). Ce sont d'ailleurs des

sujets souvent évoqués et mis en valeur par leur animateur-vedette. Les auditeurs de la

PTR en général sont majoritairement des hommes (69.2%) et à 90.5% des Blancs.

De plus, l'écoute de la talk radio aux États-Unis dépend en partie de données

démographiques et de styles de vie : « Working people are more likely to hear PTR, because

Page 51: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

42

they can listen to the radio while commuting to and from work, unlike those who are

unemployed » (Tsfati, 2002 : 435).

Enfin, des similarités entre les auditeurs se retrouvent en termes de participation politique,

d'emploi des médias, de sens de l'efficacité politique, de conscience des questions de

société, de suivi de la politique, de connaissance personnelle assumée et de connaissance

effective des questions politiques (Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 32 ; Hofstetter et

al., 1999 : 355).

1.2.2. Caractéristiques des auditeurs québécois

Les recherches et sondages ont montré que les auditeurs des radios d'opinion de Québec

étaient en majorité des hommes et en grande partie âgés entre 18 et 34 ans (Marcoux et

Tremblay, 2005 ; Lemieux 2012 ; Couture et Fiset, 2005). Il s'agit principalement d'hommes,

à 66%, politiquement conservateurs. Les recherches ne s'accordent pas toutes concernant

la catégorie socio-professionnelle des auditeurs. Pour Marcoux et Tremblay et Lemieux, les

auditeurs sont des jeunes hommes au statut d'emploi et au niveau de vie précaires par

rapport à la population totale de Québec qui est en grande partie constituée de

fonctionnaires. Ils sont employés dans le secteur privé inférieur, ont un faible taux de

syndicalisation, une faible sécurité d'emploi et peu d'options de promotion (Marcoux et

Tremblay, 2005 : 4). Ils appartiennent à la classe moyenne inférieure. Quant à ceux qui font

encore des études, ils se dirigent vers le même type d'emploi, selon les chercheurs. Leurs

habitudes de vie sont liées à celles de la génération X qui baigne dans la société de loisirs

et de consommation à laquelle ils ne peuvent pas accéder complètement. Ce sont des

individus à forte conscience individuelle (Couture et Fiset, 2005 : 1). Ils sont de grands

consommateurs d'information et s'informent par d'autres biais que la seule radio d'opinion,

lisent le Journal de Québec, regardaient TQS (en 2005). Ils choisissent d'autres médias

privés (Marcoux et Tremblay, 2005 : 5). La recherche de Giroux et Sauvageau (2009) ajoute

également un pourcentage significatif, un peu plus de 30% de « cols blancs »,

professionnels et cadres supérieurs, parmi les auditeurs.

Il semble donc que le genre des auditeurs, de même que leur appartenance politique, leur

propension à consommer des médias et à s'intéresser à l'actualité soient des

Page 52: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

43

caractéristiques communes aux radios des deux pays. Les données concernant les

catégories sociales d'appartenance pourraient également se rejoindre. Des différences

pourraient s'observer en termes de tranches d'âges.

Cependant, le public lui-même ne peut être considéré comme une masse uniforme mais

doit plutôt être vu comme une somme d'usagers aux connaissances différentes. C'est ce

que nous allons nous attacher à prendre en compte dans notre recherche.

1.3. Le recrutement

Pour des raisons pratiques d'obtention du consentement et parce que l'objet de la recherche

ne porte pas sur des personnes mineures, nous avons recruté des personnes adultes, à

savoir de plus de 18 ans, qui est l'âge légal de la majorité au Québec. L’échantillon se voulait

diversifié, en cherchant à être le plus représentatif possible de l'éventail des auditeurs qui

écoutent régulièrement ces stations de radio, en termes d’âge, de sexe et de catégorie

sociodémographique. Les études réalisées sur le thème des radios ont été utilisées comme

base pour définir un panel représentatif.

Tout d'abord, les recherches et sondages ont montré que les auditeurs des radios d'opinion

de Québec sont en majorité des hommes (66%) et en grande partie des jeunes âgés entre

18 et 34 ans (près de 60%). L’audience est ensuite constituée à plus de 25% par les 35-44

ans (Marcoux et Tremblay, 2005 ; Giroux et Sauvageau, 2009). Pour joindre une partie de

la tranche la plus jeune du public, nous avons utilisé le courriel de recrutement rejoignant

les étudiants et les membres du personnel de l'Université Laval (voir annexe A).

Nous avons tenté de joindre les 18-34 ans qui n’étaient pas étudiants par le même biais que

les travailleurs. Les auditeurs des radios parlées de Québec sont typiquement employés

dans le secteur privé inférieur, dans les domaines techniques, des ventes et des services

(Marcoux et Tremblay, 2005 : 14). Pour atteindre cette population, nous avons procédé à

un affichage annonçant l’étude dans différents supermarchés de quartiers ciblés de Québec,

ainsi que dans des salles de sport et magasins de rénovation, endroits étant susceptibles

d’accueillir la clientèle cible. L’affiche précisait également en détails le but de l’étude, la

durée, la compensation offerte et invitait les personnes intéressées à y participer (voir

annexe B). Les supermarchés ont été ciblés dans les quartiers où le profil socio-économique

Page 53: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

44

des habitants rejoignait celui des auditeurs des radios d’opinion et où les résultats

électoraux correspondaient aux idées véhiculées par ces radios, notamment dans les

quartiers populaires en périphérie de la ville et dans la banlieue de Québec, y compris la

rive sud. Une annonce a également été postée sur Reddit, plateforme de discussion en

ligne, dans un forum intitulé « Québec » qui compte 44607 membres (voir annexe C). Cette

forme de recrutement est suggérée par l'étude de Shatz (2017).

1.4. Des incitatifs et conditions favorables

À l’instar des conclusions de l'étude de Marcoux et Tremblay (2005) sur les comportements

de ces auditeurs qui sont des adeptes de la société de consommation, nous avons convenu

que des incitatifs seraient utilisés dans les annonces pour pouvoir obtenir un nombre

suffisant de participants. Les récompenses offertes étaient des cartes-cadeaux placées

dans des enveloppes à tirer au sort à la fin de chaque entrevue.

Pour des raisons pratiques et pour offrir aux participants un environnement favorable à la

discussion informelle, il a été proposé, en fonction de la disponibilité des participants, de les

rencontrer dans un lieu de leur choix dans la ville de Québec, à la condition que l'endroit

soit tranquille et peu bruyant. Le but de la recherche étant de recueillir les perceptions des

participants et donc de faciliter leur libre expression, des conditions favorables devaient être

créées. Rappelons que les radios d’opinion et par extension leurs auditeurs n’ont pas, à

Québec, une perception très positive de l’Université Laval, et plus particulièrement des

chercheurs en sciences humaines et sociales. Au vu de cette contrainte, la stratégie de

recrutement se voulait la plus ciblée possible pour parvenir à toucher les populations visées

mais cherchait aussi à faire tomber une éventuelle résistance à la participation.

2. Rappel des objectifs et méthode retenue pour la recherche

2.1. Exploration et comparaison

La question de recherche de ce mémoire est posée de manière exploratoire, c'est-à-dire

qu'elle cherche à comprendre la nature du phénomène qu'elle veut explorer. Elle est donc

ouverte. Elle « permet la description en profondeur et l'enclenchement d'un processus

inductif » (Gauthier, 2009 : 171). L'approche choisie voudra ainsi « s'imprégner de l'essence

Page 54: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

45

d'une situation, d'en capter la complexité et d'en interpréter le sens » (Ibid. : 172), tout en

se basant sur les recherches antérieures effectuées sur le sujet pour proposer des pistes

de recherche à explorer. Ce choix implique une approche mixte, basée à la fois sur une

démarche inductive propre aux recherches qualitatives qui veut laisser une certaine

ouverture à l’interprétation des résultats obtenus au moment d’effectuer l’analyse de

données mais aussi une démarche déductive qui va permettre de mettre les résultats

obtenus en parallèle avec les conclusions de précédentes études sur la question. En effet,

une mise en parallèle est effectuée dans cette étude entre les perceptions des auditeurs

des radios d'opinion à Québec et les perceptions des auditeurs des talk radio américaines,

dont le modèle a largement inspiré des animateurs comme Jeff Fillion, selon ses propres

dires (Bilefsky, New York Times, 2018).

2.2. L’approche qualitative

Pour répondre à la question de recherche, l’approche qualitative a été choisie. Il s'agit de

l’approche généralement retenue par les chercheurs qui font des études sur la réception

s'ils veulent « percer le sens que les acteurs donnent à leurs comportements, à leurs

croyances ou aux événements auxquels ils font face » (Mace et Pétry, 2017 : 87). C’est

notamment celle choisie dans le cadre des études portant sur le contrat de lecture défini par

Véron pour recueillir les opinions des usagers « en réception » mais également dans celles

effectuées par Stuart Hall, théoricien des Cultural Studies, qui a développé en 1973 une

théorie de la réception décrivant l’interprétation des textes effectués par les auditeurs à partir

de leurs expériences et de leur bagage culturel. Dans le cadre de ces travaux, des lecteurs

ont été interviewés individuellement ou en groupe (Granier, 2011 : 53). Ces études

permettent de prendre en compte ce que reçoit le lecteur, la façon dont il est interpellé et la

représentation qu’il se fait de lui-même (Lévy, 2010). À travers les entretiens, nous nous

intéressons à ce qu'Onwuegbuzie et Leech décrivent comme une « réalité sociale et

subjective » (2005) qu'il paraît difficile de saisir et mesurer par une approche quantitative.

Une approche qualitative permet, en effet, de privilégier sur le terrain des rencontres

approfondies avec les participants. Il s'agit de la démarche la plus adaptée à la discussion

car elle permet de poser des questions ouvertes aux participants, sans trop les diriger par

des questions fermées ou à choix multiple comme le ferait une démarche quantitative. Elle

veut laisser les participants libres de donner de longues réponses pour exprimer leurs

Page 55: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

46

habitudes de consommation radiophonique, leurs choix, leur perception des messages,

mais aussi les relations qu'ils entretiennent avec leur média.

2.3. Technique principale de collecte des données

2.3.1. La technique des entretiens individuels

La technique de collecte des données qui a été choisie est celle des entretiens individuels.

Elle permet d'établir un contact direct et personnel avec chacun des participants un par un

dans le but de comprendre le sens de l'activité de consommation médiatique (Mace et Pétry,

2017 ; Savoie-Zajc, 2009). Elle permet au participant de s'exprimer en étant seul avec

l'interviewer, aussi librement qu'il le souhaite (Mace et Pétry, 2017 : 92-93), sur un mode qui

ressemble à celui de la conversation (Savoie-Zajc, 2009 : 340). Cette technique est définie

par Savoie-Zajc comme « une interaction verbale entre des personnes qui s'engagent

volontairement dans une pareille relation afin de partager un savoir d'expertise et ce, pour

pouvoir dégager conjointement une compréhension d'un phénomène d'intérêt pour les

personnes en présence » (2009 : 339).

2.3.2. Les entretiens semi-dirigés

Pour ce faire, nous nous sommes rendue dans un lieu défini avec les participants pour les

rencontrer individuellement. Les entretiens ont été effectués de manière semi-dirigée, c'est-

à-dire qu'ils étaient soumis à une certaine structure, notamment dans l'ordre et le choix des

thématiques abordées mais laissaient aux participants toute la liberté de s’exprimer sur la

question posée. Ils duraient environ une heure pour avoir le temps d'aborder tous les

thèmes, sans trop aller au-delà cependant pour maintenir la concentration des participants

pendant l'entretien et ne pas abuser de leur temps. Les participants étaient informés de la

durée approximative de l'entrevue lors des échanges préalables pour qu'ils puissent

s'organiser et s'y préparer. Les objectifs de l'étude et la confidentialité des propos recueillis

étaient rappelés au début de chaque entretien et leur consentement était pris concernant

l’enregistrement des propos de la conversation (voir annexe D).

Page 56: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

47

Durant l’entrevue, la parole était largement laissée aux participants pour leur permettre de

s'exprimer librement afin d'obtenir les réponses les plus détaillées possible. L’étude voulant

comprendre les perceptions et non les juger ou les critiquer, un soin tout particulier a été

pris par l’intervieweuse afin de mettre en confiance les participants qui, au début de

l’entretien, pouvaient être intimidés ou méfiants. Cela s’est exprimé en termes d’accueil et

de présentation de l’entrevue avant de commencer. L’intervieweuse voulait ensuite guider

le fil de la conversation en fixant un thème et obtenir des réponses aux questions préparées,

sans pour autant diriger les participants et sans vouloir orienter leurs réponses, ce qui

pouvait rendre celles-ci non utilisables pour l'analyse. Les notes de l'entretien ont ensuite

été consignées au propre pour être analysées.

2.3.3. Le nombre de participants

Dans le cadre de la réalisation d'un mémoire de maîtrise, il faut assurément faire des choix

visant à limiter l'étendue de la recherche pour des questions évidentes de temps mais aussi

de moyens et de budget. Le nombre de participants interrogés voulait donc s'échelonner

entre dix et quinze personnes, car il s'agit ici d'un « ordre de grandeur habituel que l'on

rencontre dans la pratique de ce genre de recherche » (Savoie-Zajc, 2009 : 349). Ce nombre

pouvait être éventuellement modifié si les réponses enregistrées ne permettaient pas

d’arriver à la saturation théorique. Arriver à la saturation théorique, c'est-à-dire au point que

les nouvelles données issues d'entretiens additionnels n'apportent plus rien à l'étude, est

l'idéal. Il était cependant difficile de prévoir quel serait le degré de saturation à atteindre

dans cette recherche, et celle-ci devait prendre en compte les contraintes de temps et de

budget qui lui étaient propres. L’objectif était d'arriver au meilleur compromis possible entre

la saturation théorique et le nombre initial d'entretiens prévu.

Les entretiens ont été enregistrés avec l'accord des participants et les réponses entendues

analysées selon une grille détaillée dans le chapitre suivant, grille visant à permettre de

confronter les renseignements obtenus.

2.3.4. Schéma d'entrevue

Pour mener à bien les entretiens, il fallait établir un schéma d'entrevue spécifique aux

besoins de la recherche. Après avoir déterminé les caractéristiques des participants retenus

Page 57: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

48

pour passer les entretiens, il restait à établir la structure de l'entrevue. Celle-ci s’est faite à

l'aide d'un questionnaire qui regroupait toutes les questions nécessaires pour répondre à la

question de recherche de cette étude. Pour nous aider dans la préparation du questionnaire,

nous avons tenu compte de notre cadre théorique et de nos propositions de recherche, mais

aussi des études précédentes recueillant la perception des auditeurs des radios d’opinion

aux États-Unis (Coleman, Morrison et Anthony, 2012 ; Turow, Cappella et Jamieson, 1996 ;

Hofstetter et al., 1994 ; Hofstetter et Gianos, 1997 ; Lyons, 2008 ; Lee, 2002 ; Tramer et

Jeffres, 1983) et à Québec, notamment l’étude de Marcoux et Tremblay (2005) qui avait,

elle aussi, procédé à des entretiens individuels.

2.3.5. Des questions en lien avec les propositions de recherche

Les questions ont été établies en fonction des propositions de recherche définies à partir de

l’état des connaissances et du cadre théorique : il s’agissait tout d'abord d’établir s’il y avait

une adhésion forte des auditeurs au discours de la radio et de ses animateurs par une

fidélité au programme dans le temps et un niveau d'engagement important dans leur écoute.

Ensuite, nous cherchions à savoir si la reconnaissance d'une autorité et l'attribution de la

crédibilité et de la confiance à cette radio passait par une méfiance envers les autres

médias. Enfin, nous les avons interrogés sur leur engagement politique et leur vote. Nous

avons préparé vingt-six questions pour tenter de répondre aux propositions de recherche

(voir annexe E).

Les questions se voulaient les plus ouvertes possibles, en orientant les participants sur des

thèmes. Des questions pratiques concernant les habitudes de consommation ont été

posées au début de l'entretien pour mettre à l’aise les participants. Les questions

demandant davantage de réflexion concernant la perception des participants sur les

animateurs et les émissions qu’ils écoutent ont été posées par la suite.

Les questions choisies et les thématiques évoquées se voulaient les plus claires possibles

pour être comprises par tous les participants sans ambiguïté quant à leur signification et à

leur interprétation. Un pré-test a été effectué auprès de personnes de l’entourage de

l’auteure et extérieures à la recherche. Le questionnaire a également été testé auprès d’un

participant volontaire recommandé par notre direction de recherche. Cette première

entrevue jugée très intéressante a été gardée pour être incluse dans l’échantillon final.

Page 58: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

49

À la fin de l'entretien, un questionnaire papier a été fourni aux participants pour obtenir

certaines informations sociodémographiques : âge, sexe, état civil, occupation, niveau de

scolarité, quartier ou ville de résidence (voir annexe F).

3. Recrutement et déroulement des entrevues

3.1. Le recrutement

Dès la réception de l’approbation du projet par le Comité d’éthique de la recherche, nous

avons envoyé le courriel de recrutement de l’étude à l’Université Laval qui a diffusé le

message à la liste des étudiants, des professeurs et du personnel de l’Université les 28 et

29 mars 2019. Les premières réponses ont été reçues le jour même. Le week-end des 30

et 31 mars a été consacré à la pose d’affiches dans les quartiers ciblés de Québec, à savoir

Beauport, Charlesbourg, Neufchâtel-Lebourgneuf, les Rivières, Saint-Émile et L’Ancienne-

Lorette. Neuf supermarchés ont accepté d’afficher l’annonce, ainsi que sept salles de sport,

deux quincailleries, un centre communautaire et un magasin Tigre Géant.

Ce même week-end, nous avons réalisé l’entretien pilote.

Dans la semaine qui a suivi nos démarches de recrutement, nous avons reçu dix-neuf

réponses dans notre boîte courriel de l’Université. Quinze personnes ont donné suite et

accepté de participer à une entrevue. Le recrutement s’est avéré plus facile et plus rapide

que prévu. Aucun des participants n’a fait part d’appréhension quant à la participation à une

étude réalisée à l’Université Laval. Les conditions de leur participation semblaient

parfaitement comprises. Deux participants ont souhaité fixer un rendez-vous dans un lieu

de leur choix, à savoir leur bureau, tandis que les treize autres se sont déplacés à

l’Université Laval, dans un local au bâtiment du pavillon Louis-Jacques-Casault.

Le nombre final de participants, fixé à seize, ayant été jugé suffisant selon les critères

mentionnés précédemment, aucune autre session de recrutement n’a été effectuée.

Page 59: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

50

3.2. Le déroulement des entrevues

Les entrevues ont été menées entre le samedi 30 mars et le mercredi 10 avril 2019. Une

seule personne a dirigé les entrevues, à savoir l’étudiante effectuant le mémoire. L’accueil

a été tout particulièrement soigné pour mettre les participants à l’aise dès leur arrivée. Il leur

a ensuite été demandé de remplir les formulaires de consentement en deux exemplaires, le

premier leur étant destiné et le second étant gardé par l’intervieweuse (voir annexe D). Le

caractère anonyme de l’étude a été rappelé et la permission des participants a été

demandée pour procéder à l’enregistrement des propos de la conversation tout en rappelant

qu’ils ne seraient utilisés à aucune autre fin que celle de l’étude.

L’intervieweuse prenant des notes en même temps que l’enregistrement était effectué, les

quelques secondes nécessaires à l’écriture étaient intentionnellement rallongées pour

laisser le temps aux participants de poursuivre leur réflexion sur la question posée et se

sentir à l’aise pour ajouter une information supplémentaire. Les questions ont en majeure

partie été posées dans l’ordre prévu, excepté si le participant répondait de lui-même à une

question avant que celle-ci ne soit posée. L’intervieweuse s’est permis de demander aux

participants des explications ou des précisions à la suite de certaines des réponses qui

nécessitaient un approfondissement. À la fin de chaque entrevue, nous avons demandé aux

participants s’ils voyaient un point qui n’aurait pas été évoqué à travers la discussion ou s’ils

voulaient ajouter ou préciser un élément de réponse.

À la fin de chaque entrevue, les participants ont rempli une fiche de données personnelles

leur demandant de sélectionner leur tranche d’âge, leur sexe, leur état civil, leur occupation,

leur niveau de scolarité et leur quartier de résidence. Ils ont ensuite tiré au sort une

enveloppe parmi les trois proposées dans lesquelles était offerte une carte-cadeau de 20$

Itunes, Netflix ou Cinéplex. Un participant a cependant refusé le cadeau, indiquant qu’il

participait à l’étude uniquement pour aider à la recherche et n’en voulait aucune

récompense. À l’inverse, un autre participant a explicitement demandé avant l’entretien une

carte Cinéplex car il n’était pas intéressé par les deux autres options détaillées dans

l’annonce. Sa demande a été satisfaite.

À la suite des entrevues, les entretiens et les notes ont été consignés et stockés pour n’être

accessibles que de la chercheuse avant d’être analysées.

Page 60: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

51

Chapitre 4 Présentation et analyse des résultats

Seize entrevues ont été effectuées. Dix hommes et six femmes, âgés de 18 ans à plus de

55 ans ont été interrogés. Ils sont en couple, mariés ou célibataires ; étudiants, en emploi

ou retraités. Ils sont diplômés de l’école secondaire, du cégep ou de l’université. Ils résident

tous dans la région de Québec. Selon les critères de recrutement, les participants écoutent

tous l’une des deux radios, CHOI Radio X ou FM93, ou les deux, au moins deux fois par

semaine.

Présentons tout d’abord les caractéristiques sociodémographiques des participants : le

pourcentage d’hommes (62,5%) est plus important que celui des femmes. Ces résultats

sont similaires à ceux publiés dans les précédentes études qui montraient le pourcentage

d’hommes (66 %) plus important que celui des femmes. Le pourcentage des 18-34 ans est

le plus élevé avec 56 % (9 participants sur 16), chiffre similaire à ceux de l’étude de Marcoux

et Tremblay (2005 : 21). Dans notre étude, un quart (4 sur 16) ont entre 35 et 44 ans. Ici,

ces chiffres sont relativement plus élevés que ceux des chercheurs qui enregistrent 16 %

des auditeurs. Enfin, un auditeur a entre 45 et 54 ans et deux ont plus de 55 ans.

La majorité des participants sont en couple (10 sur 16), contre deux participants mariés et

quatre célibataires. En ce qui concerne les niveaux d’éducation des participants, ils

s’échelonnent du secondaire au doctorat : niveau secondaire (1 participant sur 16, soit

6,25 %) ; niveau collégial et pré-universitaire (6, soit 37,5 %) ; niveau universitaire de

premier cycle, du certificat au baccalauréat (7, soit 43,75 %) ; de deuxième cycle (1, soit

6,25 %) et de troisième cycle (1, soit 6,25 %). Marcoux et Tremblay (2005) ont enregistré,

eux, des résultats quelque peu différents : secondaire : 45 %, collégial : 35 % et

universitaire : 20 %. Et pour ce qui est des professions, elles s’inscrivent dans des secteurs

variés. En voici la liste : informaticien (2), mécanicien, aide technique, chercheuse à la

retraite, agente de bureau, secrétaire, étudiant (4), technicienne en documentation, employé

de service client, serveuse, policier et journaliste à la retraite.

Les participants habitent Québec et sa région. Dans la ville de Québec, plusieurs secteurs

ont été cités comme Sainte-Foy (4 fois), Beauport (2 fois), Charlesbourg (2 fois), Loretteville,

Cap-Rouge, Saint-Jean-Baptiste, le Vieux-Québec. En périphérie, Lévis a été cité ainsi que

Page 61: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

52

Saint-Henri, Saint-Raymond et Neuville. L’étude de Marcoux et Tremblay (2005) évoque

plus globalement la provenance des auditeurs de la grande région de Québec.

Dans ce chapitre, nous allons présenter une analyse des entrevues réalisées. Notre analyse

s’inspire des techniques existantes dans le domaine des études qualitatives (Anadon et

Savoie-Zajc, 2009 ; Meyer et Avery, 2008) mais aussi de la stratégie mise en place par

Chacon dans sa thèse de doctorat, notamment concernant l’analyse d’entretiens réalisés

auprès de journalistes (2017). Nous avons attribué une lettre à chaque auditeur qui reprend

la position dans le classement de notre tableau d’analyse, en fonction de l’ordre dans lequel

les entrevues ont eu lieu.

Dans une première partie, nous allons tout d’abord expliquer la démarche initiale mise en

place dans l’analyse des données. Puis, dans une seconde partie, nous allons présenter les

résultats par thèmes. Notre troisième partie nous servira à analyser plus en détail ces

résultats et à entamer une discussion à propos de ces derniers.

1. Démarche initiale d’analyse

1.1. Analyse thématique

Nous avons choisi le processus de l’analyse thématique pour analyser les données

recueillies. Ce dernier consiste à rechercher des motifs (patterns) présents et récurrents

dans les réponses des auditeurs (Boyatzis, 1998). À la suite d’une première écoute des

enregistrements et à la relecture des notes prises lors des entrevues, une recherche de

thèmes a été effectuée.

1.1.1. La compilation des données

L’utilisation d’un logiciel d’usage général a été privilégiée pour effectuer l’analyse. Ce type

de logiciel peut faciliter l’analyse qualitative (La Pelle, 2004). Notre choix s’est porté sur

Excel. Ce logiciel d’usage courant, souvent associé aux analyses quantitatives à cause de

ses fonctions de calculs, offre des options pratiques, facilitant l’analyse qualitative. Il permet

Page 62: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

53

de visualiser facilement l’information grâce aux tableaux et offre des fonctions de tri des

données par colonnes, ce qui permet de repérer des fréquences et définir des profils.

1.1.2. La recherche de thèmes

Les thèmes choisis permettent de décrire et d’organiser les observations dans le but de les

interpréter. Selon Boyatzis (1998), les thèmes peuvent être identifiés de manière inductive

à partir des observations, de manière déductive à partir des données déjà existantes ou

encore par la combinaison des deux. La dernière option est celle qui s’approche finalement

le plus de notre démarche.

Précisons que nous avons travaillé à tisser notre analyse au fur et à mesure que nous

avancions dans la restitution des données, ce qui correspond à une démarche itérative,

c’est-à-dire que nous avons déterminé une succession de solutions possibles au fil de

l’analyse. Sachant que les questions posées aux participants avaient été spécialement

rédigées en lien avec nos propositions de recherche (le détail de ces dernières apparaît

dans notre point suivant), il était facile d’imaginer des thèmes à partir du questionnaire

d’entretien, comme la consommation, l’adhésion, l’engagement ou encore l’interaction. La

formulation des questions se voulait la plus ouverte possible pour laisser place à

l’expression des idées personnelles des auditeurs interrogés. Elle a permis l’apparition de

nouveaux thèmes à travers l’éventail de réponses données par les participants. Les écoutes

suivantes réalisées sur les enregistrements et la collecte des données effectuées sur le

logiciel Excel ont ensuite permis de confirmer la liste et de présenter une liste définitive de

thèmes.

Page 63: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

54

1.1.3. La liste des thèmes

Une première liste de thèmes généraux a été établie en fonction des propositions de

recherche définies3 et des questions posées :

• les habitudes de consommation (moment d’écoute dans la journée, station, fidélité

en nombre d’années, durée d’écoute quotidienne ou hebdomadaire, activités

pendant l’écoute)

• raisons de l’écoute

• interactions (appels, discussions, lignes ouvertes)

• degré de confiance (dans la station, dans l’animateur et ses propos, accord ou

désaccord avec les propos, attitude vis-à-vis des autres journaux)

• implication et engagement (changement d’avis à la suite des propos, actions, vote,

défense de la radio, réactions émotionnelles)

Après une première écoute des enregistrements, un tableau d’analyse Excel a été créé en

tenant compte des catégories principales et des sous-catégories détaillées entre

parenthèses. Ce tableau a permis une première tentative d’analyse thématique. Nous nous

sommes, à ce moment, rendue compte que certaines informations étaient manquantes ou

incomplètes. Des questions complémentaires sur la durée, la fréquence d’écoute et la

fréquence de désaccord des participants avec les animateurs ont alors été posées à

certains participants par courriel. Ces données ont été jugées importantes pour témoigner

des habitudes d’écoute et du degré de confiance accordé à la (ou aux) station(s)

consommée(s). Presque tous les participants sollicités nous ont répondu dans un délai

allant de quelques jours à quelques semaines.

3 P1 : Les auditeurs reconnaissent une forme d’autorité à la radio parlée (ou à l’animateur) qu’ils écoutent, lui attribuent de la

crédibilité et lui font confiance. Ils sont méfiants envers les autres médias ; P2 : Le « contrat » est caractérisé par une adhésion forte des auditeurs au discours de la radio et de ses animateurs, par une fidélité au programme dans le temps et un niveau d'engagement important dans leur écoute (ils discutent des propos qu’ils ont entendus autour d’eux ou même téléphonent à la radio) ; P3 : L’écoute assidue de ces radios est associée à des opinions, voire des actions politiques ou sociales conformes aux idées véhiculées.

Page 64: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

55

Quelques changements à ces thèmes ont été effectués par la suite. Ainsi, « les habitudes

de consommation » ont été incorporées au thème plus large de « fidélité » qui se retrouvait

dans les propositions de recherche. Le thème « degré de confiance » est devenu

« adhésion » car ce dernier a été jugé plus représentatif de l’ensemble des données

analysées, il correspondait également davantage aux idées présentes dans les propositions

de recherche. Le dernier thème est devenu uniquement « engagement » et la catégorie

« réactions émotionnelles » a été déplacée comme étant un sous-thème de la « motivation »

car il semblait plus logique d’associer les émotions aux motivations de l’écoute.

Voici la liste finale des thèmes généraux :

1. Fidélité

Ce thème regroupe toutes les habitudes de consommation de la radio des auditeurs

interrogés, détaillant la manière dont la radio les accompagne dans leur quotidien, la façon

dont ils l’ont intégrée à leur vie. En effet, les auditeurs ont donné des détails concernant les

moments d’écoute dans la journée, la durée d’écoute quotidienne ou hebdomadaire mais

aussi le lieu où ils écoutent la radio en général. Le lieu d’écoute détermine également leurs

activités au moment où ils écoutent. Les participants ont précisé laquelle des deux stations

ils écoutaient ou encore s’ils écoutaient les deux. Ils ont enfin indiqué depuis combien

d’années ils écoutaient la (ou les) station(s) qu’ils avaient choisie(s). Dans ce thème seront

abordées les idées présentées dans la 2e proposition de recherche.

2. Motivations

Dans ce thème sont regroupées les raisons de l’écoute. Il a été demandé aux auditeurs

d’expliquer leur choix, l’usage qu’ils faisaient de la radio et la satisfaction qu’ils en retiraient.

Dans ce thème seront abordées les idées présentées dans les première et deuxième

propositions de recherche.

3. Réactions émotionnelles

Les recherches sur le contrat de communication ont montré l’existence de certaines

émotions suscitées par l’écoute de la radio (Charaudeau, 2010). Nous ajoutons ici les

Page 65: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

56

réactions émotionnelles ressenties par les auditeurs à l’écoute de la radio en tant que sous-

thème à la motivation. Dans ce sous-thème seront abordées les idées présentées dans la

2e proposition de recherche.

4. Interactions

Ce thème regroupe les interactions effectuées en lien avec la radio. Il peut s’agir des appels

émis par les participants à la radio, des messages textes, des courriels ou encore de la

participation à une émission. Les auditeurs interrogés ont également donné leur opinion sur

les lignes ouvertes auxquelles ils ont ou non participé. Enfin, les participants ont fait état des

discussions suscitées à la suite de l’écoute de la radio avec une ou des personnes de leur

entourage. Dans ce thème seront abordées les idées présentées dans la 2e proposition de

recherche.

5. Adhésion

Ce thème aborde la question de la confiance accordée aux stations de radio CHOI Radio X

et FM93 mais aussi aux autres médias à Québec et ailleurs. Dans ce thème sont aussi

développées les questions du degré de confiance accordée aux animateurs à travers les

notions de sincérité et de compétence, l’accord ou le désaccord des auditeurs interrogés

avec les propos tenus à la radio mais aussi l’opinion générale de ces auditeurs sur la station.

Les réponses à ces questions vont montrer le degré d’adhésion des participants aux propos

de la radio. Dans ce thème seront abordées les idées présentées dans la 1ère proposition

de recherche.

6. Engagement

Ce dernier thème est relié à la question de l’attitude adoptée à la suite des propos tenus par

les animateurs et de l’influence que ces derniers peuvent avoir : les auditeurs interrogés

ont-ils déjà changé d’avis ou agi en termes d’action politique, sociale ou commerciale? Les

auditeurs votent-ils? Défendent-ils leur station quand ils la sentent attaquée ou quand ils la

comparent à d’autres? Les réponses des participants à ces questions vont permettre de

dégager la présence ou non d’un engagement dans leur attitude vis-à-vis de la radio. Dans

ce thème seront abordées les idées présentées dans la 3e proposition de recherche.

Page 66: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

57

1.2. La recherche de profils

Un second niveau d’analyse a ensuite été mis en place en découpant les précédents thèmes

en 14 sous-catégories. Les propositions de recherche émises à la suite de la présentation

de notre cadre théorique mettaient en avant la possible présence d’un certain type d’attitude

des auditeurs des radios d’opinion de Québec. Un second tableau d’analyse Excel a été

créé pour mettre en exergue des profils en voulant répondre à la question suivante : le profil

identifié à travers les recherches théoriques se retrouve-t-il dans l’attitude des participants

interrogés dans notre étude ou, au contraire, est-il possible d’identifier d’autres profils,

différents de celui présenté dans les propositions de recherche ? Compte tenu de la

démarche itérative mise en place dans notre analyse, nous reviendrons sur ce travail dans

la partie 3, après l’analyse thématique générale.

2. Analyse des résultats par thèmes

Nous allons, dans cette partie, présenter les résultats obtenus lors de l’analyse thématique.

L’ordre proposé des thèmes correspond à l’ordre mis en place durant les entrevues au

moment de poser les questions, qui visait à obtenir tout d’abord des informations concernant

les habitudes de consommation quotidienne pour mettre à l’aise les participants avant

d’entrer dans des questions demandant davantage de réflexion et de détails concernant

l’opinion et la perception.

2.1. Fidélité à la station

Ce premier thème regroupe toutes les habitudes de consommation des participants, du

choix de la station au moment d’écoute dans la journée, en passant par la fidélité en nombre

d’années. Il vise à connaître les relations que les participants entretiennent avec leur station,

la fréquence avec laquelle ils la consomment et la manière dont ils la laissent entrer dans

leur vie. Ce thème a été créé en lien avec les questions posées dans le questionnaire.

Page 67: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

58

2.1.1. Le choix de l’exposition à un média

• FM93 et CHOI Radio X à parts égales

Le hasard du recrutement a divisé les interviewés en parts pratiquement égales : six

auditeurs de CHOI Radio X, six auditeurs de FM93 et quatre auditeurs des deux stations.

Aucune sélection n’a été anticipée dans ce sens lors du recrutement. Les participants à

l’étude ont tous fait le choix de s’exposer aux radios d’opinion parmi le choix de stations de

radio proposé dans la ville de Québec et ses alentours. Rappelons que Tsfati et Cappella

pensent qu'il est impossible pour un usager de ne pas sélectionner l’exposition médiatique :

« because we are not physically capable of paying continuous attention to information,

political or otherwise » (2003 : 508). Un des participants a cependant mentionné l’absence

d’options, jugeant le choix trop restreint à Québec : « On n’a pas grand choix à Québec, il y

en a pas tant que ça » (auditeur E), tandis qu’un autre a comparé Québec avec les autres

villes en affichant son enthousiasme devant l’existence des radios d’opinion, absentes

ailleurs, et en soulignant que :

C’est unique. J’en parle avec d’autres gens qui viennent d’ailleurs et ce genre de personnes-là (les animateurs des radios de Québec) se feraient censurer. Juste ça, on est choyés. Ces personnes-là ont essayé d’aller à Montréal et il se sont fait écraser. Les gens trouvent ça agressant, quelqu’un qui a une opinion qui diverge de leur opinion mais moi j’aime ça : t’as une opinion différente, je t’écoute (auditeur B).

• Des heures d’écoute classiques : le matin et au retour du travail

Les habitudes de consommation des médias radiophoniques ont fait l’objet de multiples

études et sondages. Les auditeurs des stations ont tendance à les consommer le matin, en

se rendant au travail, et en fin de journée, au retour. Les plages horaires du matin s’étendent

entre 6h et 10h, et le retour entre 14h et 18h (Charlton, Giroux et Lemieux, 2016 : 56).

Généralement cette consommation se fait dans la voiture et ce, pour 60% des auditeurs de

la radio au Québec (Ibid.). Les radios s’adressent donc majoritairement aux propriétaires de

véhicules motorisés.

Les participants à notre étude, auditeurs des radios d’opinion de Québec, rejoignent en

grande partie les statistiques d’écoute enregistrées par les sondages, même si trois d’entre

Page 68: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

59

eux (moins d’un quart) ont déclaré essentiellement écouter la radio à d’autres moments de

la journée, comme le soir ou pendant la journée et dans d’autres lieux, comme à la maison

et au travail. Au Québec, la consommation de la radio à la maison représente 31% des

auditeurs contre 7% au travail ou en étudiant (Ibid.). Un tiers des participants (5 sur 16)

profitent également de la possibilité de réécouter les émissions qu’ils auraient ratées en

podcasts, à d’autres moments de la journée.

• Une fidélité importante dans le temps

Le contrat de lecture tel que défini par Véron (1985) présente la fidélité comme étant une

composante essentielle des relations qui lient un usager à son média. Elle est associée à la

création de relations de confiance durables et à la reconnaissance d’une compétence

professionnelle de l’énonciateur qu’est, ici, l’animateur.

Les participants interrogés écoutent, pour la majeure partie, la radio depuis plusieurs

années. Moins d’un quart (3 sur 16) a déclaré écouter sa station depuis moins de 5 ans,

tous sont âgés entre 18 et 34 ans. Trois écoutent leur radio depuis 5 à 9 ans, quatre depuis

10 à 14 ans, cinq depuis 15 à 20 ans et un depuis plus de 20 ans. Les deux tiers des

participants, âgés en majorité de plus de 35 ans, écoutent ainsi la radio depuis 10 ans ou

plus. Plus des trois quarts l’écoutent depuis plus de 5 ans. Les participants sont donc de

fidèles auditeurs dans la durée. Ils connaissent bien la radio, ses animateurs et son discours

puisque certains ont même évoqué les discours d’anciens animateurs ou les ont comparés

à travers le temps :

(André) Arthur soulevait des points que personne ne soulevait et qui, par la suite, se vérifiaient, en dépit de toute la polémique que ça pouvait créer. Effectivement, il soulevait la poussière, il y avait des conséquences et ce que j’ai trouvé dommage, c’est que personne ne l’a jamais admis. Or si quelqu’un écoute la radio tout le temps, il se rend compte que ses informations étaient à 99% vérifiables et vérifiées, confirmées. Et pourtant, ils disent le ‘’controversé Arthur’’ (auditeur F).

« Je pense qu’ils (les animateurs) ont une éthique de travail, par rapport à ce que j’écoute

là, parce que je sais que dans les années 90, c’était pas nécessairement le cas. Mais je

trouve qu’on s’est éloigné de ce qu’on appelait les radios poubelles » (auditeur L).

Page 69: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

60

« Bouchard en 10 ans a changé complètement. (...) Il est capable de passer outre son

idéologie de façon à élargir son auditoire » (auditeur Q).

« J’ai une certaine appartenance, c’est clair, ça fait tellement longtemps, tellement

d’années » (auditeur N).

• La durée moyenne d’écoute

À la fidélité en nombre d’années, s’ajoute la durée moyenne d’écoute par jour et par

semaine. Plus un auditeur choisit d’écouter d’un média, plus il sera exposé au message

véhiculé par ce dernier. Et le but des radios de Québec est de maintenir les auditeurs à

l’écoute le plus longtemps possible, jour après jour (Giroux et Sauvageau, 2009 : 5), ceci

dans le but d’augmenter leurs revenus dans un contexte concurrentiel. Limbaugh, aux États-

Unis, a lui aussi ce souci lorsqu’il utilise intentionnellement un discours conflictuel et négatif

(Barker et Knight, 2000 : 153, 164).

Turow, Cappella et Jamieson (1996) considèrent les auditeurs écoutant au moins deux fois

par semaine la radio comme étant des auditeurs réguliers. C’est la raison pour laquelle nous

avions retenu cette mesure dans nos critères de recrutement. Dans son étude, Lyons définit

les membres de l’audience de la PTR conservatrice comme étant des auditeurs qui écoutent

n’importe quel animateur de PTR conservateur aux États-Unis au moins 15 minutes chaque

semaine (2008 : 155).

Les auditeurs interrogés n’écoutent, pour la majorité, pas la radio tous les jours de la

semaine : 9 sur 16, soit un peu moins des deux tiers, écoutent la radio du lundi au vendredi

contre 5 sur 16 tous les jours et un trois fois par semaine. Pour certains, malgré nos relances

par courriel concernant la durée exacte de l’écoute, l’information n’a pu être obtenue

précisément. Un auditeur n’a pas répondu sur la fréquence et un n’a pas répondu sur le

nombre d’heures. Pour les autres, trois sur 16 écoutent une heure ou moins par jour, cinq

écoutent entre 1h30 et 2h, quatre autres écoutent entre 3 et 5h, un écoute 6h et un autre

écoute entre 1 et 6h. Ces chiffres sont donc largement plus importants que les audiences

mesurées dans les études américaines mais aussi au Québec. En effet, dans le rapport du

Centre d’études sur les médias, les usagers québécois passent 24,1 minutes par jour à

écouter la radio (Charlton, Giroux et Lemieux, 2016). Dans notre présente étude, le

Page 70: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

61

minimum de temps cité (d’après les réponses données seulement et non les données

manquantes) se rapproche d’une heure d’écoute par jour. Cela se justifie cependant compte

tenu des critères de recrutement qui voulaient interroger des auditeurs réguliers. Les

participants sont donc de grands consommateurs de la (ou les) station(s) qu’ils ont

choisie(s). La majorité des auditeurs sont donc à la fois fidèles et assidus dans l’écoute.

Stroud a fait le constat qu’avec le temps, l’exposition continue à des arguments renforce les

opinions et la polarisation (2010). Tsfati, Stroud et Chotiner, font le même constat (2014 :

8), de même que Jones (2002). Les positions des auditeurs peuvent ainsi évoluer dans le

temps. La question de l’évolution des positions idéologiques n’était, dans cette étude, pas

mesurée et, à deux exceptions près, les participants ne se sont pas exprimés sur ce point.

Nous avons tout de même jugé utile de noter la position de ces deux auditeurs. D’origine

étrangère, les deux participants qui se sont branchés, chacun depuis 8 ans, sur les radios

FM93 et CHOI Radio X par curiosité à l’égard du phénomène dont ils avaient entendu parler

ont, semble-t-il, évolué dans leur perception. Ils ont fini par s’habituer au discours, sans

particulièrement y adhérer ou changer d’avis. Ils rapportent tous les deux des changements

d’attitude vis-à-vis du discours entendu au fil du temps :

« Il y a longtemps, dans les premiers temps, je m’offusquais. Mais avec le temps, d’être

offusqué, je suis parti à rire, je dis ok, non, t’as vraiment dit ça, tu penses vraiment ça? »

(auditeur J).

À propos de la fréquence du désaccord, « Il y a quelques années (...), ça arrivait souvent.

Moins actuellement, je trouve qu’actuellement il (Sylvain Bouchard) met vraiment de l’eau

dans son vin » (auditeur Q).

2.2. Les motivations

Ce thème aborde les raisons qui sont liées à l’écoute de la radio d’opinion. Cette partie

présente également un sous-thème comportant les réactions émotionnelles suscitées par

l’écoute de cette radio. Pour permettre l’analyse des données relatives aux raisons de

l’écoute, nous allons d’abord présenter quelques éléments théoriques qui n’apparaissent

pas dans notre chapitre 2 sur le cadre théorique. La position de ces éléments dans le

présent chapitre est liée à la démarche itérative mise en place dans notre analyse. En effet,

Page 71: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

62

les éléments présentés par les auditeurs lors des entrevues n’avaient pas été envisagés ou

développés dans notre présentation théorique. Il nous semble donc logique de faire

intervenir ici ces éléments aidant à l’interprétation dans cette partie plutôt qu’au préalable,

dans le but de rendre la démarche d’analyse la plus transparente possible. Le thème de la

motivation est, lui, apparu à la suite des réponses données par les participants.

2.2.1. Principales raisons d’écoute de la radio de Québec

• La théorie des usages et gratifications

Nous présentons ici cette théorie car sa pertinence, qui n’avait pas été considérée au

moment d’élaborer le cadre théorique, est apparue au moment de l’analyse des données.

La théorie des usages et gratifications pose, en effet, la question, non de l’effet des médias

sur les usagers, mais de l’utilisation des médias par les usagers et des besoins

psychologiques et sociaux qu’ils cherchent à satisfaire. Les chercheurs Katz, Blumler et

Gurevitch ont tenté d’expliquer le phénomène en interrogeant des individus sur la façon dont

ils utilisent certains médias, au lieu d’autres ressources dans leur environnement, afin de

satisfaire leurs besoins et atteindre leurs objectifs (1974). Ainsi, ils voyaient l’auditoire

comme étant plus actif que passif, un auditoire qui est capable de choisir le média qu’il

consomme. L’étude avait pour but de décrire les motivations des individus dans leur usage

du média qu’ils avaient choisi.

La théorie des usages et gratifications s’inscrit dans le courant fonctionnaliste. Ce courant

de pensée de la communication attribue des fonctions aux médias. Les motivations

individuelles sont ainsi associées aux quatre fonctions principales des médias, telles que

définies par Lasswell - la surveillance de l’environnement sociopolitique, soit la fonction

informative ; la coordination, soit la fonction éditoriale qui doit interpréter l’information et

formuler des recommandations face aux événements rapportés ; la transmission, soit la

fonction éducative ; et enfin les loisirs, soit la fonction de divertissement qui sert à distraire

et à amuser (Wright, 1960). McQuail, Blumler et Brown (1972) choisissent, eux, quatre

catégories : la distraction pour changer la routine, se changer les idées, ne pas penser aux

problèmes et évacuer des tensions ; l’interaction sociale pour remplacer les relations

amicales et pour socialiser ; l’identification personnelle pour développer et maintenir une

identité, explorer la réalité et renforcer les valeurs ; et la surveillance pour rechercher,

Page 72: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

63

partager des informations et apprendre. Katz, Blumler et Gurevitch (1974) définissent pour

leur part les sources de gratification des médias. Ils en identifient trois : le contenu des

médias, l’exposition aux médias et l’influence du contexte social sur l’exposition aux médias.

Chaque média offrirait ainsi une combinaison unique de contenu caractéristique.

En ce qui concerne la PTR, les usages identifiés par les chercheurs, notamment concernant

l’écoute du show de Rush Limbaugh, évoquent entre autres l’appréciation du contenu,

notamment en termes de points de vue. L’animateur et l’auditeur qui appelle disent à

l’auditoire ce qu’il a envie d’entendre (Jones, 2002 : 160). Les chercheurs évoquent

également la recherche de l’information (près de la moitié des motivations données par les

interviewés de l’étude américaine de Hofstetter et al,. 1994 : 473) ou encore le

divertissement, l’intérêt personnel, passer le temps, le contact social. Kohut, Zukin, et

Bowman (1993) y ajoutent le fait de rester au courant des questions de société et

événements en cours, d’apprendre la manière dont les autres se sentent concernant ces

questions. La motivation de la recherche de l’information reste, dans les deux cas, plus citée

que le divertissement. Cette recherche d’information peut être effectuée pour plusieurs

raisons, comme la surveillance qui permettrait de connaître les positions de personnes

ayant des opinions opposées aux siennes ou le renforcement des opinions existantes (Atkin,

1973). L’exposition sélective et la dissonance cognitive qui veut que l’usager cherche à

réduire la dissonance liée à l’écoute d’opinions contraires sont aussi mentionnées comme

étant d’autres raisons pouvant conduire au choix de tel ou tel média (Lyons, 2008 : 151).

• Les résultats enregistrés

Dans le but de déterminer les usages de la radio des participants, la question des raisons

du choix de l’écoute des radios FM93 et CHOI Radio X a été posée aux participants. Ces

derniers pouvaient citer autant de réponses qu’ils le souhaitaient. Celles citées par les

chercheurs américains se retrouvent dans les propos recueillis auprès des participants de

Québec mais pas dans le même ordre. D’autres raisons, qui n’avaient pas été évoquées

dans les précédentes recherches, apparaissent également.

Page 73: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

64

Voici toutes les réponses en commençant par les plus souvent citées :

• l’affection pour les opinions et le débat (citée par 12 participants sur 16) ;

• l’appréciation du contenu et des sujets traités (11 participants sur 16) ;

• la détente, l’humour, le divertissement (9 participants sur 16) ;

• l’écoute de points de vue différents pas entendus ailleurs (8) et le franc-parler des

animateurs (2) ;

• le partage de l’opinion et des points de vue des animateurs (7) ;

• la réflexion que permet l’écoute (7) et l’apprentissage (6) ;

• l’information (6) et la possibilité de se tenir au courant de l’actualité (5) ;

• l’affection pour les animateurs (6) ;

• l’écoute de points de vue diversifiés (5) ;

• l’habitude (4) ;

• la curiosité (4) ;

• la possibilité de comprendre un discours opposé au sien (4) et de confronter ses

opinions (2) ;

• entendre la vérité, l’heure juste (2) et des propos objectifs (1)

• la proximité que permet la radio (2) et briser l’isolement (1) ;

• le manque de confiance dans les autres médias (1).

Il est également à noter qu’en répondant à la question sur les raisons de l’écoute, 10

participants sur 16 ont déclaré avoir été introduits à l’écoute de la radio pour la première fois

par un tiers (famille, amis, collègues). Dans la majorité des cas, il s’agissait de membres de

la famille, notamment des parents.

Les participants ont également fait un parallèle entre leur radio et les radios concurrentes,

qu’ils n’écoutent pas. Ces informations pourraient être ajoutées aux raisons pour lesquelles

les participants ont choisi leur radio. Six auditeurs ont déclaré que les concurrents ne les

rejoignaient pas, trois ont exprimé leur souhait de recevoir davantage d’options anglophones

qu’ils écouteraient volontiers, deux ont évoqué le côté trop solennel, sérieux et ennuyeux

de Radio Canada qui ne diffuse que des nouvelles pures sans opinions et enfin, un que la

radio « tout info » n’était pas bonne ici au Québec et n’offrait pas assez de fond. Il n’a donné

aucun nom de station en particulier mais faisait une comparaison avec la France.

Page 74: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

65

• L’opinion et le débat, contenu spécifique de la radio, et l’humour mis en avant

Ainsi, la spécificité du contenu de la radio, à savoir la diffusion d’opinion et de débat, de

même que le contenu et les sujets traités par la radio arrivent en tête des motivations, cités

par trois quarts des participants ou presque. L’idée renvoie à l’étude de Jones (2002 : 160)

et à l’une des sources de gratification des médias définies par Katz, Blumler et Gurevitch

(1974). Il est également intéressant de noter que la motivation de la recherche de

l’information apparaît dans un position différente ici de celle des études américaines sur la

consommation de la PTR où elle arrivait en tête (Hofstetter et al,. 1994 : 473 ; Kohut, Zukin,

et Bowman, 1993). La détente et l’humour recueillent, ici, un peu plus de la moitié des

raisons de l’écoute, sans qu’elle soit systématiquement reliée à l’information. Le concept

d’infotainment, associé, entre autres, à la talk radio et son fonctionnement est cependant

revenu quelquefois dans les propos des auditeurs interrogés.

Il semble donc que les auditeurs des radios de Québec écoutent la radio davantage pour

l’aspect opinion et débat mêlé à l’humour et au divertissement que pour l’information qui

vient en tête des raisons données par les auditeurs de la PTR américaine. L’aspect

différencié des radios d’opinion qui apportent des points de vue différents des autres médias

est également apprécié par la moitié des auditeurs. Ceci revient donc là encore à la

spécificité du contenu de la radio d’opinion.

De même, le partage des opinions diffusées à la radio a été évoqué par 7 des participants

sur 16. Cette idée se rapproche de l’exposition sélective et du biais de confirmation que

nous évoquerons à la fin de ce point. De plus, le fait de rester au courant des questions de

société, évoqué dans l’étude de Kohut, Zukin, et Bowman (1993) arrive après l’information

et a été cité par 5 participants sur 16. La fonction de surveillance décrite par Atkin (1973),

est, elle, exprimée sous la forme de « l’apprentissage », cité 6 fois et « la possibilité de

comprendre un discours opposé au sien » (4 fois). Nous reviendrons également sur ce

dernier point dans notre analyse.

2.3. Les réactions émotionnelles suscitées par la radio

Outre les raisons conscientes du choix de la radio, Charaudeau (2010) décrit dans le contrat

de communication, l’usage d’un discours faisant appel à l’émotion plus qu’à la raison pour

Page 75: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

66

capter les auditeurs. Nous avons voulu voir si les participants avaient évoqué des émotions

en parlant de la radio qui pourraient justifier le choix de l’écoute des radios de Québec. Au

cours des entretiens, 15 participants sur 16 ont évoqué diverses réactions émotionnelles

relatives à la radio, ce qu’ils ressentaient vis-à-vis de la radio ou encore la manière dont la

radio les faisaient se sentir : ils aiment la radio (4) ; les propos les dérangent (3) ; la curiosité

(3), l’attachement (2) ; la confiance (2) ; le plaisir (2) ; la colère (2) ; la déception (1) ; la

passion (1) ; le côté vicieux de l’écoute (1) ; le plaisir morbide (1) ; le fait d’être offusqué (1).

Ces résultats montrent que la radio provoque toute une gamme d’émotions. Il est également

à noter que les émotions ressenties ne sont pas uniquement positives concernant l’écoute

de la radio puisque seulement 7 peuvent être considérées comme telles (l’amour, la

curiosité, l’attachement, la confiance, le plaisir et la passion), contre 4 tendant plutôt vers

des sentiments négatifs (le fait d’être dérangé, la colère, la déception, le fait d’être offusqué).

Restent le côté vicieux de l’écoute et le plaisir morbide, plutôt nuancés, notamment si on

considère la manière dont ils ont été présentés par les deux auditeurs qui semblaient y

trouver un certain plaisir.

2.4. Interactions

Ce troisième thème regroupe toutes les interactions effectuées soit directement avec la

radio, soit avec d’autres personnes à propos du contenu entendu à la radio. Le but est

d’examiner l’impact des propos de la radio et les réactions qu’ils suscitent. Les auditeurs

s’impliquent-ils dans ce qu’ils écoutent en participant directement au dialogue à travers les

lignes ouvertes, discutent-ils des propos de la radio avec d’autres ou en restent-ils éloignés?

Ce thème a été créé en lien avec les questions posées dans le questionnaire.

2.4.1. Les moyens de l’interaction

La participation du public par le biais d'interventions en direct est une des manifestations les

plus caractéristiques du talk-show politique (Granier, 2011 : 54). Appeler la radio permet

d’exprimer, avec ses propres mots, des sentiments intenses. Le principe même de ce genre

de radio est de permettre à un appelant, généralement anonyme, de participer à une

interaction spontanée avec l’animateur, ce qui donne une impression d’intimité (Turow,

Page 76: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

67

Cappella et Jamieson, 1996 : 5). Les citoyens ont, grâce à la radio, la possibilité de

s’exprimer sur les affaires publiques sans être pour autant des experts (Herbst, 1995 : 271).

Dans notre étude, la participation des auditeurs sous forme d’interaction avec la radio ne

revêt pas la même importance pour tous les participants interrogés. Elle est, en effet,

largement inégale. Neuf des 16 répondants ont déclaré avoir interagi avec leur station, soit

un peu plus de la moitié des participants, contre sept auditeurs se montrant plus passifs.

Leurs interactions se divisent en appels (pour 5 d’entre eux), en courriels (4 auditeurs), en

messages textes (2) et en participation à des émissions en studio (2). Précisons que la

majorité d’entre eux ont fait plus d’une interaction, de plusieurs manières différentes.

Voici quelques-unes des réponses sur la question :

Quand le sujet m’interpelle et quand j’ai de quoi à dire j’appelle. C’est deux, trois fois par année. (...) J’ai déjà participé à une émission de radio un soir, ça fait très longtemps, c’était une émission sur les célibataires et puis ils demandaient des gens pour venir parler de leur situation, j’étais allée. (...) Et ils ont fait une émission sur les changements de carrière, j’y suis allée pour parler de ça parce que j’en ai fait une dans ma vie (auditeur H).

« J’ai à quelques reprises envoyé des messages par courriel. (...) Cinq fois dans ces 20

années. Je donnais une opinion parce que le sujet était en lien avec mon métier à ce

moment-là. Et j’ai déjà participé à une émission, je suis déjà allée en studio participer à une

émission, voilà quelques années. (...) C’est une super belle expérience » (auditeur N).

2.4.2. Les raisons de l’interaction

Les auditeurs ont exprimé les raisons qui justifient leur intervention :

• l’envie de partage (citée 5 fois), par exemple : « La discussion qu’il y avait me

rejoignait parce que j’avais passé par là tout récemment, fait que j’avais envie de

partager ce que moi j’avais vécu » (auditeur C) ;

• l’envie de faire une rectification (4 fois) ;

• l’envie de donner son avis (3 fois).

Page 77: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

68

Ces interventions marquent ici l’envie d’appartenance à une communauté (Becqueret,

2007 : 205), notion qui sera citée au cours des entrevues par plusieurs des appelants, en

lien avec leur appréciation de la radio en tant que média : « Je suis membre du cartel4 (lancé

dans « Bouchard en parle »). (...) C’est mon émission préférée. Je fais partie de la gang.

Quand il en parle, ça m’interpelle parce que moi je suis membre » (auditeur G).

En parlant de la radio : « À la base, c’est des amis et des collègues de travail qui l’écoutaient,

les premières fois que je l’ai écoutée, (...) c’en est devenu une habitude parce que les gens

avec qui j’étais l’écoutaient et j’ai développé un plaisir à l’écouter tout simplement »

(auditeur C).

L’envie de rectification, elle, nuance quelque peu cette idée car elle dénote une prise de

recul des auditeurs vis-à-vis des propos. En effet, ils prennent le temps de la vérification

pour émettre un jugement sur la question :

« J’ai déjà envoyé des courriels pour les corriger sur des choses. (...) J’avais écrit pour dire

d’arrêter de dire « les chevals », j’avais envoyé des documents pertinents sur le sujet. C’est

la seule fois que j’ai communiqué avec eux pour cesser de propager des erreurs

grammaticales » (auditeur L).

« Des fois je les texte parce que je les reprends. Quand ils parlent de mathématiques, quand

ils font des calculs en nombre, des fois ça fait deux pas mal. Ils donnent des chiffres mais

ça marche pas » (auditeur E).

Il est intéressant de faire le parallèle, ici, avec les raisons des interventions données par les

auditeurs américains. En ce qui concerne les statistiques de participation elles-mêmes, il

est difficile de faire une comparaison exacte car les études américaines partent d’une

comparaison entre les gens qui écoutent et n’écoutent pas la radio. Pour ce qui est des

raisons de l’interaction avec la radio, elles sont similaires à celles qui ont été données par

les auditeurs québécois de l’étude, dans un ordre différent cependant puisqu’aux États-Unis,

4 Le cartel du FM93, créé par Sylvain Bouchard le 12 mars 2019 dans son émission, est un rassemblement de

consommateurs qui leur permet d’obtenir des rabais pour des produits de consommation.

Page 78: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

69

l’envie d’exprimer une opinion était citée plus souvent que les autres raisons (Herbst, 1995 :

269). La présente étude rejoint quelque peu la conclusion de Turow qui montrait que la

raison principale des appelants était de vouloir satisfaire leur besoin de communication

interpersonnelle (1974 : 171).

2.4.3. Les raisons de la non-interaction

Les sept auditeurs qui n’ont pas interagi avec la station ont également précisé la raison pour

laquelle ils ne l’ont pas fait. Certains en ont cité plusieurs : la gêne (citée 3 fois), la peur

d’avoir tort (2 fois), le stress (2 fois), le manque de temps (2 fois), l’inutilité (2 fois), la volonté

d’écouter plus que de participer (2 fois), la crainte d’affronter la réponse des auditeurs (1

fois), la volonté de ne pas donner de leçon (1 fois) et le fait d’avoir tenté mais pas réussi (1

fois).

2.4.4. Les types d’opinions exprimées

• L’opinion sur la radio

Parmi les participants qui ont interagi avec la station, tous ont donné un avis positif sur la

radio en tant que média (en comparaison avec la télévision ou internet). Il ne s’agissait pas

ici d’une réponse à une question posée mais de considérations venues spontanément

durant la conversation. Diverses idées ont été évoquées : celle de communauté, d’attention

portée aux paroles, d’accès facile, mais aussi de côté humain, l’aspect « complet » du

média, les voix, la proximité, l’appartenance, le fait d’entrer dans la vie des animateurs, le

côté flexible et mobile qui accompagne dans les activités, l’absence de barrière avec la

présence des lignes ouvertes et les interactions en direct, la présence dans la solitude ou

encore le bris de l’isolement. Un aspect négatif, le manque d’interaction dû au fait que les

appels sont limités à certaines heures, a été cité une fois.

Les participants qui n’ont pas appelé la station se sont beaucoup moins exprimés sur le

sujet par eux-mêmes. Trois n’en ont pas du tout parlé, les autres ont été brefs. Un auditeur

a évoqué la proximité, la facilité d’accès et les voix. Les autres ont parlé de l’idée du lien et

l’affection pour les lignes ouvertes.

Page 79: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

70

Il semble donc que les auditeurs qui s’impliquent en appelant la radio ressentent et

expriment davantage les effets du média radio sur eux. Ces perceptions de la radio

rejoignent l’idée du contrat de communication radiophonique qui met en avant le principe de

création d’une communauté de parole, qui peut devenir avec le temps un vrai réseau social

(Becqueret, 2007 : 205). De plus, le fait que les talk-shows jouent sur l'intimité et la

confession permet de créer une relation de proximité et d'identification (Charaudeau,

Lochard et Soulages, 2012 : 53). L'audience qui appelle semble être réceptive et attentive,

ce qui crée, pour Lemieux, une communauté autour de l'animateur, des groupes identitaires

regroupés autour d'une appartenance radiophonique commune (2012 : 2). Ceci est

cependant à nuancer par l’envie de rectifier les propos diffusés qui, elle, marque davantage

une distance qu’une adhésion.

• L’opinion sur les lignes ouvertes

Selon les recherches effectuées sur le talk-show et le contrat de communication, le but des

lignes ouvertes est de mettre en scène des gens ordinaires qui représentent l'ensemble des

usagers (Charaudeau, Lochard et Soulages, 2012 : 53). Le talk-show permettrait, en effet,

aux auditeurs de s’identifier à l’intervenant, membre de l’audience, qui s’exprime en direct.

Les participants ont été invités à donner leur opinion sur les lignes ouvertes et à dire s’ils

étaient le plus souvent d’accord ou pas d’accord avec les auditeurs qui appellent, dans le

but de savoir s’ils s’identifient ou non à ces derniers. Dix des auditeurs interrogés, soit les

deux tiers des participants, ont affiché une opinion positive des lignes ouvertes, contre trois

opinions négatives. Trois autres ont montré une opinion plus nuancée. L’expression de

l’accord avec les autres auditeurs qui appellent est, lui, plus divisé : cinq sont globalement

d’accord avec les propos des auditeurs qu’ils entendent sur les ondes, deux sont plutôt

d’accord, trois sont à moitié d’accord, trois sont plutôt pas d’accord et trois autres ne sont

pas d’accord. Les opinions sur les lignes ouvertes sont toutefois cohérentes avec l’avis sur

l’accord. Les auditeurs qui sont d’accord avec l’opinion des appelants sont tous favorables

aux lignes ouvertes et les auditeurs qui ne sont pas favorables aux lignes ouvertes sont les

mêmes qui ne sont pas d’accord avec les appelants.

Marcoux et Tremblay ont observé que l'animateur donne le ton à l'émission et que les

auditeurs, eux, sont plutôt passifs (2005 : 9). Certains des participants se sont exprimés sur

Page 80: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

71

ce point en disant que les auditeurs confirment systématiquement les propos des

animateurs (auditeurs J, K, L et P), tout en admettant le fait que les personnes le disent

« moins bien » (auditeur K) mais que la personne qui appelle se sent valorisée (auditeur J).

Plusieurs ont souligné l’impolitesse, la grossièreté, le manque de pertinence ou encore

l'extrémisme des propos de certains auditeurs (auditeurs F, H, N, P, Q). D’autres ont jugé

que les lignes ouvertes permettent de prendre le pouls de la population (auditeur I), qu’elles

alimentent la discussion (auditeur C) ou encore qu’elles permettent d’entendre des avis

extérieurs (auditeur E). Il semble donc que l’identification aux propos des autres auditeurs

doit largement être nuancé.

2.4.5. Les discussions en dehors des ondes

Hofstetter et al. ont élaboré une échelle d’activité visant à montrer l’implication des usagers

dans l’écoute de la radio (1999 : 357). Celle-ci inclut les discussions des propos entendus

à la radio avec un tiers (nous développerons davantage cette échelle dans notre partie 3

sur les profils des usagers). Dans une précédente étude, le chercheur avait montré que 71%

des auditeurs de la PTR américaine rapportent avoir discuté de sujets entendus à la radio.

« Political talk radio appears to have had a significant impact on the interpersonal

communication » (Hofstetter et al., 1994 : 473).

Cette affirmation est largement corroborée par notre étude puisque les réponses vont bien

au-delà de ces chiffres : 100% des auditeurs interrogés ont déclaré avoir discuté des propos

entendus à la radio. Cela montre une écoute active de la radio telle que la définissent

Hofstetter et al. (Ibid.). La fréquence varie cependant. Deux participants sur 16 ont déclaré

discuter des propos tous les jours, trois plusieurs fois par semaine, cinq une fois par semaine

et deux plusieurs fois par mois. Quatre n’ont pas été précis dans leur réponse sur ce point.

Tous discutent des propos entendus avec la famille ou le conjoint. Neuf, soit plus de la

moitié, discutent avec plus d’une personne, trois ne discutent qu’avec la famille, trois autres

qu’avec le conjoint. Les autres personnes mentionnées sont les collègues, le patron et les

amis.

La majorité (10 participants sur 16) a déclaré discuter des propos entendus à la radio avec

des personnes partageant les mêmes valeurs qu’eux, cela ne signifie cependant pas

Page 81: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

72

forcément que les propos sont les mêmes que ceux de la radio, comme nous l’avons

évoqué. Six ont, à l’inverse, déclaré discuter des propos de la radio avec des personnes de

leur entourage, conjoint ou famille, n’ayant pas le même avis qu’eux. Cela confirme donc en

partie l’idée que les auditeurs chercheraient à discuter avec des personnes partageant le

même point de vue, ce qui leur procurerait le sentiment d’être plus forts, plus engagés et

favoriserait la diffusion de leurs idées (Barker, 1998 : 271). Ces résultats rejoignent

également l’une des raisons données pour l’écoute de la radio, à savoir l’affection pour les

opinions et le débat qui, pour six des auditeurs interrogés, se traduit par des discussions-

débats avec leurs proches concernant des propos entendus à la radio. Un exemple :

J’aime beaucoup l’histoire puis il y avait un sujet que j’ai entendu cette semaine sur Mère Teresa. Le sujet c’était comme quoi qu’elle avait profité de son pouvoir pour venir à ses fins, à ce qu’elle est devenue. Ils [les animateurs] l’ont quand même critiquée (...) Pendant une demi-heure de temps, ils sortaient des histoires sur elle qui surprend. (...) J’en ai parlé avec ma blonde, j’ai eu le débat avec elle. J’ai pris les informations que j’avais et elle, de son côté, défendait la personne. Ça c’est le fun. Avoir des débats comme ça, c’est comme exercer ton cerveau, ça développe ton cerveau en gros (auditeur B).

Pour discuter, une fois par semaine sûrement, on se rencontre chez mes parents. On parle de ce qui se passe. Ma soeur l’écoute, ma mère l’écoute, ils écoutent beaucoup plus la radio que la télé. Sur le 3e lien, ma soeur demeure côté sud, on parle des avantages et des inconvénients. Mon neveu, lui, est vert, il vient d’avoir 19 ans, ça prend le métro, l’autobus, enlever les voitures. Il est mobilisé. C’est correct aussi, c’est normal. On va s’obstiner, j’aime bien discuter avec eux. Il est Québec Solidaire, moi je suis de la CAQ, après ça, on change d’idée. (...) On a des idées toutes différentes, c’est drôle, on se respecte, faut se respecter par exemple (auditeur F).

« Ça arrive que je dise à mon père, là, arrête de faire ton Bouchard (...) On est le genre de

famille où on discute fort. Des fois, il me sort textuellement des phrases que Sylvain

Bouchard a pu dire dans son émission » (auditeur L).

2.5. Adhésion

Ce thème vise à analyser les données concernant le degré d’adhésion des auditeurs au

discours de la radio. Des questions concernant le degré de confiance envers les animateurs,

envers la radio et envers les autres médias ont été posées ainsi que sur la fréquence de

désaccord avec les propos tenus à la radio. Les propos des participants concernant l’opinion

Page 82: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

73

générale qu’ils ont de la radio qu’ils écoutent ont également été analysés. Ce thème a été

créé en lien avec les questions posées dans le questionnaire.

2.5.1. L’adhésion à travers la confiance accordée aux animateurs

• L’opinion générale sur les animateurs

Les recherches associent positivement le choix de l’écoute d’un média à la confiance

accordée à celui-ci (Hopmann, Shehata et Strömbäck, 2015 ; Tsfati, 2002 et 2010). La

confiance dans l'information est influencée par la confiance dans sa source (Lucassen et

Schraagen, 2012). Les animateurs des radios de Québec ont été présentés, dans les

précédentes études réalisées sur le sujet, comme des vedettes dont les propos sont

largement suivis, qui créeraient une communauté autour d’eux (Lemieux, 2012 : 2).

Nous avons demandé aux participants quelle était leur opinion sur les animateurs qu’ils

écoutaient. La question se voulait intentionnellement ouverte pour ne pas réduire les options

de réponses. Huit auditeurs sur 16, soit la moitié des participants, ont exprimé une opinion

positive sur les animateurs. En ce qui concerne l’autre moitié, deux sont mitigés, un est

négatif et les cinq autres ont exprimé des opinions différentes en fonction des animateurs.

• Le positif

Parmi les adjectifs ou expressions à caractère positif, ont été cités : ils sont intéressants

(5 fois) ; « je les aime » a été utilisé (4 fois) et « je les adore » (1 fois) ; ils sont drôles (4 fois) ;

ils sont respectueux (3 fois) ; ils ont un franc-parler (2 fois) ; j’ai l’impression de les connaître

(2 fois) ; ils sont vrais, authentiques (2 fois) ; ils sont sympathiques (1 fois) ; ils ont un bon

vocabulaire (1 fois) ; ils sont à l’aise (1 fois) ; ils sont préparés (1 fois) ; ils tiennent leurs

promesses (1 fois) ; ils sont divertissants (1 fois) ; ils ont du culot (1 fois) ; ils sont crédibles

(1 fois) ; attachement aux animateurs (1 fois).

Certains sentiments positifs exprimés vis-à-vis des animateurs comme : « ils sont vrais,

authentiques ; j’ai l’impression de les connaître ; ils sont crédibles ; attachement aux

animateurs » rappellent l’une des composantes du talk-show développée dans le contrat de

communication. L’aspect « vérité » identifiée par Charaudeau, Lochard et Soulages est

Page 83: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

74

présenté comme visant à faire penser que les opinions exprimées sont les seules

authentiques (2012 : 53) et que les animateurs sont à égalité avec les auditeurs à travers

une relation présentée sous forme horizontale, ce qui va engendrer une relation familière

(Becqueret, 2007) et donc une impression de les connaître qui peut conduire à un certain

attachement.

• Le négatif

Des adjectifs à caractère négatif et nuancé ont également été cités par les auditeurs qui

avaient des avis plus mitigés ou négatifs : ils font le show (2 fois) ; ils en rajoutent (2 fois) ;

je ne les connais pas (1 fois) ; je ne les prends pas au sérieux (1 fois) ; ils n’ont pas la vérité

infuse (1 fois) ; certains font de la démagogie et de la propagande, ils ont des opinions

extrêmes (1 fois) ; ils sont hautains (1 fois) ; je n’aime pas certaines voix (1 fois) ; ils coupent

la parole (1 fois). Les affirmations de Marcoux et Tremblay concernant les propos des

animateurs qui cherchent à provoquer et choquer par des excès de langage et du jaunisme

(2005) se retrouvent ici à travers l’opinion d’un seul des auditeurs.

Les opinions concernant les animateurs ne penchent ainsi pas franchement d’un côté ou de

l’autre, bien que les expressions considérées comme positives surpassent en nombre (32)

les expressions négatives ou nuancées (11).

• L’adhésion à travers la crédibilité accordée aux animateurs

Le contrat de communication et les recherches sur la confiance évoquent la crédibilité

comme étant un élément essentiel de la confiance qui mène à l’adhésion (Jeanneret et

Patrin-Leclère, 2004 : 139 ; Charaudeau, 2006 : 352 ; Tsfati, 2002 : 19). Nous avons posé

deux questions permettant de reconnaître la crédibilité accordée aux animateurs. La

première s’attache à connaître le degré de sincérité estimé des animateurs, tandis que la

seconde évoque la compétence.

Les opinions des participants sont plutôt mitigées concernant la sincérité. La moitié des

auditeurs sont nuancés. Quelques-unes de leurs réponses : « la sincérité? C’est dur à dire »

(auditeur B) ; « je ne les ai jamais rencontrés, ils donnent un produit » (auditeur D) ; « ils

disent ce qu’ils pensent mais il y a toujours un côté théâtral » (auditeur I); « ça dépend des

Page 84: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

75

animateurs et des moments » (auditeur K) ; « des fois j’ai l’impression qu’ils en ajoutent un

peu trop (...), c’est ambigu, ça semble faussé » (auditeur N); « je ne suis pas dans leur tête »

(auditeur M). Six auditeurs les pensent sincères et un seul pense qu’ils ne le sont pas : « ils

ne sont pas sincères, ils s’adaptent » (auditeur Q).

Concernant la compétence, il semble que la reconnaissance est plus franche. Douze des

16 participants considèrent les animateurs comme étant compétents dans le domaine des

« télécommunications » et de l’animation mais aussi dans la manière dont ils font leur travail.

Cinq ont prononcé le mot « confiance » à leur égard. Les quatre restants sont mitigés en ce

qui concerne la compétence : « C’est pas égal d’un (animateur) à l’autre » (auditeur N) ; « Il

semble, à écouter la radio, j’ai l’impression qu’on exige moins de qualité de niveau de

connaissance de français, de la langue. (...) Je sens qu’il y a un laisser-aller dans ce sens-

là » (auditeur F).

Certains des auditeurs qui ont exprimé des opinions mitigées envers les animateurs le sont

également concernant la sincérité mais il n’existe pas de réelle cohérence entre les opinions

positives globales sur les animateurs et l’association à la sincérité et la compétence. Seuls

trois des huit participants qui ont une opinion positive de la radio les trouvent entièrement

sincères et compétents. Il semble donc qu’une partie seulement des auditeurs jugent les

animateurs totalement crédibles.

2.5.2. L’adhésion remise en question

• Les auditeurs en désaccord

Aux États-Unis, les auditeurs de Rush Limbaugh sont appelés des « dittoheads » car ils

sont systématiquement d’accord avec les propos de l’animateur. Cependant, les recherches

d’Hofstetter et al. ont montré des désaccords importants des auditeurs américains avec les

propos des animateurs de talk-shows : seulement 5% affirment être toujours d’accord avec

les animateurs, 33% sont d’accord la plupart du temps, 52% quelquefois et 10% sont

d’accord très peu souvent (1994 : 473). De plus, selon Lyons, entre 10 et 16% de l’audience

des PTR resterait loyale à des animateurs avec lesquels elle est en désaccord, ceci dans

un but affiché de surveillance (2008 : 162). Cette partie de l’audience serait donc à l’écoute

des autres avec lesquels elle est clairement en désaccord concernant les positions

Page 85: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

76

politiques pour surveiller, contrôler ce qui est dit. Ceci reprend les résultats de l’étude d’Atkin

concernant les raisons liées à l’exposition sélective (1973). Lyons précise que les

animateurs aiment entretenir la relation avec cette audience opposée à leurs propos en la

faisant intervenir sur les ondes pour assurer le show et maintenir l’audience en alerte

(2008).

La question posée aux participants était la suivante : leur arrive-t-il d’être en désaccord avec

les animateurs qu’ils écoutent ? Les chiffres recueillis sont encore plus éloquents qu’aux

États-Unis : tous les participants interrogés ont été, au moins une fois, en désaccord avec

l’animateur. En ce qui concerne la fréquence, celle-ci varie. Un peu plus d’un tiers des

participants, soit six auditeurs, est en désaccord au moins une fois par jour et un quart l’est

entre une et trois fois par semaine. Deux participants ont évoqué cet indice en pourcentage,

un est en désaccord entre 40 et 60% du temps et l’autre 35% du temps. Deux autres ont

déclaré être rarement en désaccord. Pour le dernier, il a indiqué par rapport à son

désaccord : « ce n’est pas important » (auditeur B).

Les auditeurs interrogés ont donné des raisons expliquant leur désaccord : ils ne partagent

pas les idées entendues (7) ; il y a de l’exagération (1) ; les idées sont trop arrêtées (1).

En mettant en relation plusieurs des réponses, il semble que les auditeurs qui ont dit avoir

des opinions mitigées sur les animateurs et ceux qui appellent la station pour faire des

rectifications semblent plus souvent en désaccord que les autres. Il ne s’agit pourtant pas

forcément d’une écoute liée à la fonction de surveillance car ces participants n’ont pas

marqué de désaccord clair avec les idées politiques développées sur les ondes. La volonté

de rectifier les propos peut être une façon d’aider les animateurs à bien faire leur travail et

d’apporter ses connaissances pour contribuer au savoir collectif. En ce qui concerne la

surveillance décrite par Atkin (1973) qui indique que l’audience écoute des propos et des

idées politiques avec lesquels elle est clairement en désaccord, seul un auditeur sur les 16

a ouvertement affirmé écouter la radio dans ce but :

Pour voir ce qui se dit et un petit peu comprendre parce que je sais qu’il y a énormément de monde qui écoute ces radios-là, j’avais été conscientisé, ma conjointe m’a expliqué, c’est ce qu’on appelle les radios poubelles. J’ai commencé à écouter par curiosité et je continue à écouter de temps en temps pour me dire : c’est ça qu’on envoie à la population qui peut prendre toutes ces

Page 86: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

77

informations-là comme de l’information réelle et véridique alors que ce sont, à mon sens, des informations complètement tronquées (...) Je comprends mieux quand j’entends certains discours des amis, des collègues (auditeur J).

Le désaccord, même fréquent de certains des participants, ne semble toutefois avoir affecté

ni la consommation de la radio sur le long terme, ni la loyauté des participants puisque plus

des deux tiers la consomment depuis cinq ans ou plus.

• La poursuite de l’écoute malgré le désaccord

Le désaccord n’empêche pas les participants de continuer à écouter la radio. Deux tiers des

auditeurs interrogés, soit 10 sur 16, ont répondu, quand il leur était demandé ce qu’ils

faisaient en cas de désaccord, qu’ils continuaient à écouter la radio. Parmi les six autres,

deux arrêtent d’écouter puis reviennent à l’occasion, deux attendent et stoppent quelquefois

s’ils continuent à être en désaccord, un change de poste et un autre arrête d’écouter (mais

rarement). Ils donnent plusieurs raisons au changement (toutes n’ont été citées qu’une

fois) : ils n’aiment pas le ton, il y a trop de publicité, c’est inintéressant, ce sont des niaiseries.

Les auditeurs qui changent de poste ou arrêtent d’écouter sont ceux qui sont en désaccord

au moins une fois par semaine. Parmi ceux qui sont en désaccord tous les jours, seul un

fait l’action de changer de poste. Les autres expliquent d’ailleurs les raisons de la poursuite

de l’écoute malgré le désaccord : ils aimeraient savoir pourquoi l’animateur pense ainsi et

en apprendre davantage sur sa position (4) ; ils ne donnent pas d’importance au désaccord

(3) ; ils aiment le désaccord (1) ; ils veulent conforter leur avis (1); ils aiment étudier l’attitude

et le revirement de l’animateur (1).

Cette attitude renvoie à l’affection déclarée des auditeurs pour le débat.

2.5.3. L’adhésion à travers l’attitude vis-à-vis des autres journaux

• Consommation importante de nouvelles

Les auditeurs réguliers de la PTR américaine ont été jugés, dans les recherches, comme

étant de grands consommateurs de nouvelles provenant de tout type de médias et comme

étant des connaisseurs en matière de politique et sur les questions de société en général,

Page 87: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

78

par rapport à ceux qui n’écoutent pas la PTR (Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 3). Le

même constat a été fait pour les auditeurs de Québec, qui s’informeraient par Le Journal de

Québec et d’autres médias privés (Marcoux et Tremblay, 2005 : 5).

Les résultats de l’étude confirment ce point. Rappelons que les répondants à l’étude sont

déjà de grands consommateurs de radio et qu’ils consomment leur station au minimum deux

fois plus que la durée d’écoute moyenne de la radio des Québécois chaque jour. Un quart

des participants (4 sur 16) a tout de même indiqué utiliser principalement la radio comme

source d’information. Pour ce qui est des autres, pour deux tiers des participants, Le Journal

de Québec arrive en bonne place parmi les lectures citées (10 participants sur 16).

Parmi les autres sources consultées, internet arrive en tête (13 participants sur 16) dont le

moteur de recherche Google (5) ; les bases de données scientifiques (2) ; MSN (1) ;

Facebook (1) ; le compte Twitter de Donald Trump (1). Ensuite arrivent les journaux de la

ville de Québec pour deux tiers des auditeurs (10 sur 16) dont Le Journal de Québec (10

sur 10) et Le Soleil (3 sur 10), puis les autres journaux de la province (10 participants sur

16) dont La Presse (6), Le Devoir (4), Le Journal de Montréal (3). La télévision a été citée 6

fois, notamment TVA (4 fois) et les médias américains 4 fois (Huffington Post, CNN et Fox

News). Radio-Canada a été citée deux fois.

• Intérêt marqué pour l’information

Les trois quarts des auditeurs interrogés montrent un grand intérêt pour l’information en

donnant une note de 4 ou 5 sur une échelle de 1 à 5 (5 étant le maximum d’intérêt possible).

La note la plus faible, 2, a été donnée par un seul auditeur.

Les participants se jugent eux-mêmes globalement au courant des dernières nouvelles,

davantage au Québec cependant que dans le monde. Dans le détail, un peu plus de la

moitié des participants (9 sur 16) se déclarent au courant de l’actualité partout, cinq

nuancent l’idée en évoquant une meilleure connaissance du Québec que du reste du monde

(parmi eux, trois écoutent principalement la radio comme source d’information), un se dit

« pas assez » au courant et un autre « trop au courant ».

Cela rejoint, là encore, les résultats des précédentes recherches sur la question.

Page 88: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

79

2.5.4. Une adhésion mitigée : confiance mitigée dans la radio et dans les autres

médias

Pour les chercheurs, la consommation de médias alternatifs comme la PTR est liée à un

manque de confiance dans les autres médias (Tsfati et Cappella, 2003 : 504). Les

recherches américaines ont montré que les auditeurs de la PTR étaient plus critiques des

médias de masse que ceux qui ne l’écoutent pas. Et les auditeurs de Rush Limbaugh sont

encore plus critiques que les auditeurs de la PTR en général (Turow, Cappella et Jamieson,

1996 : 4). Ces auditeurs voient dans les médias de masse un portrait incohérent avec leur

expérience de la PTR qui se focalise sur les extraits les plus extrêmes (Ibid.).

Pour explorer cette hypothèse, nous avons cherché à savoir si les auditeurs percevaient

des différences entre ce qu’ils entendaient à la radio et ce qu’ils entendaient ou voyaient

dans les autres médias, qu’ils consomment pour la grande majorité d’entre eux. Seul un des

participants a déclaré ne voir aucune différence entre les deux. Pour plus de la moitié des

auditeurs qui voient ou entendent une différence (8 sur 15 ; notons que les participants ont

souvent donné plusieurs réponses), les informations sont similaires dans les faits mais le

traitement des nouvelles est différent. Sept ont précisé qu’en effet, il s’agissait à la base des

mêmes sources (les radios d’opinion reprennent les nouvelles publiées par les médias

d’information). Six, à l’inverse, y voient des informations différentes. Cinq ont déclaré faire

la différence entre l’opinion et les faits.

En ce qui concerne les raisons données pour expliquer les différences, certains défendent

les positions de la radio, tandis que d’autres, moins nombreux, choisissent de prendre parti

pour les autres médias. Trois donnent, en effet, une opinion positive des autres médias

contre sept opinions négatives. À l’inverse, cinq donnent une opinion positive de la radio

contre quatre opinions négatives. Il faut noter qu’un participant donne des opinions positives

à la fois sur la radio et les autres médias et que trois ont des opinions négatives sur les

deux. Pour décrire leur opinion, quatre participants ont dit que les autres médias étaient

biaisés, tandis que quatre autres pensent, à l’inverse, que la radio est biaisée. Parmi ces

dernières réponses, un auditeur considère à la fois les autres médias et la radio comme

biaisés.

Page 89: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

80

La dernière partie de la question concernait la confiance. Elle demandait à quelle source les

participants faisaient le plus confiance quand ils voyaient des différences. Ici, les partisans

à nouveau sont divisés. Quatre sur quinze choisissent la radio, quatre choisissent les autres

médias et sept sont mitigés : ils accordent leur confiance également aux deux ou, au

contraire, ne font confiance à aucun des deux. Parmi les quatre accordant leur confiance à

la radio, trois la considèrent comme leur source d’information principale.

Il semble donc qu’un peu plus de la moitié des participants aient une opinion négative des

autres médias. Il faut cependant prendre en compte le fait que quatre d’entre eux expriment

une opinion négative à la fois sur la radio et sur les autres médias. En termes de confiance,

seulement deux des huit participants qui expriment de la méfiance envers les autres médias

marquent leur confiance dans la radio, les six autres étant mitigés.

Le lien établi par les chercheurs entre la méfiance envers les autres médias et la confiance

accordée à la radio semble ici loin d’être évident. Il semble que majoritairement, les

participants se montrent plutôt nuancés, avec des positions mitigées quant à leur confiance

et leur adhésion envers les autres médias mais aussi envers la radio d’opinion qu’ils ont

choisi de consommer.

2.6. Engagement

Dans cette dernière partie, nous avons cherché à savoir quelles étaient les conséquences

de l’écoute de la radio, notamment en termes d’engagement. Nos questions avaient pour

but de savoir si l’écoute de la radio avait une influence quelconque, par exemple, si elle

pouvait faire changer d’avis les auditeurs ou encore les engager politiquement,

économiquement ou socialement. Il est à noter qu’au fil des réponses certains participants

prenaient spontanément la défense de la radio quand ils la sentaient attaquée. Ce thème a

été créé en lien avec les questions posées dans le questionnaire.

2.6.1. Changement d’avis : un engagement mitigé

Les recherches montrent une influence importante des radios. Nous avons cherché à savoir

si les paroles entendues à la radio avaient fait changer d’avis les auditeurs.

Page 90: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

81

Plus de la moitié des participants, à savoir 9 sur 16 ont déclaré avoir changé d’avis après

avoir entendu certains propos à la radio. Quatre se souviennent d’un sujet spécifique. Pour

six, la fréquence n’est pas connue mais l’un d’entre eux a déclaré changer d’avis tout le

temps et être influencé par la radio, un autre pas fréquemment et un troisième parfois. Ceux

qui n’ont pas changé d’avis ont affirmé que la radio les a confortés dans leurs idées (deux

participants) ou qu’ils ont mieux compris le point de vue opposé (deux participants). Deux

autres affirment avoir en général des idées arrêtées sur les choses.

2.6.2. Davantage d’engagement en termes d’actions

Selon une étude américaine réalisée auprès d’auditeurs des PTR, 23% ont affirmé avoir agi

à la suite de ce qu'ils avaient entendu à la radio (Hofstetter et al., 1994). Il peut s’agir de

manifestations politiques ou encore d’actions sociales. Les auditeurs de Québec semblaient

moins intéressés par ce type d'activités d’après les précédentes études (Marcoux et

Tremblay, 2005 : 6) bien qu’ils aient été nombreux à se déplacer pour défendre CHOI

Radio X en 2004. Parmi les auditeurs interrogés dans notre étude, deux se souviennent

avoir participé à la marche pour défendre CHOI Radio X, l’un d’entre eux est allé manifester

à la fois à Québec et à Ottawa.

Les participants sont plus nombreux à passer à l’action qu’à changer d’opinion. Presque

trois quarts des participants ont agi à la suite de propos entendus à la radio (11 sur 16), en

agissant souvent plusieurs fois. Le type d’action enregistré est à la fois politique (les

participants ont cité les exemples des marches, des pétitions ou encore du vote) mais aussi

commercial (ils ont cité l’achat d’un produit après avoir entendu une publicité à la radio ou

la recherche d’une promotion) (6 citations chacun). Quatre participants ont exprimé avoir

effectué des dons, deux ont participé à des concours, d’autres ont assisté à des spectacles

ou sont partis en voyage organisé avec la radio. L’attirance pour le consumérisme relevé

par Marcoux et Tremblay (2005) se vérifie donc ici mais, finalement, tout autant que l’action

politique ou sociale qui semblait, de leur côté, être moins importante. Précisons tout de

même que les 144 participants de l’étude québécoise publiée en 2005 avaient été recrutés

parmi les plus fervents défenseurs de la station CHOI Radio X lors des manifestations de

2004.

Page 91: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

82

2.6.3. Vote : 100% de participation

Les études américaines montrent que les auditeurs de la radio parlée conservatrice sont

plus intéressés par la politique et ont davantage tendance à voter que le reste de la

population (Hofstetter, 1999 : 363). Les résultats de notre étude confirment cette affirmation.

En effet, tous les participants à l’étude ont indiqué qu’ils votaient à chaque élection. Trois

auditeurs ont même indiqué que l’écoute de la radio les avait influencés ou aidés dans leur

choix.

Lyons prédit qu’au fil du temps, les auditeurs voteront de la manière indiquée par l’animateur

qu’ils écoutent (2008 : 162). Selon Jones, les trois quarts des auditeurs de la PTR

américaine seraient conservateurs (2002 : 164). À Québec, il semble difficile de définir une

ligne de vote claire au regard du fait que les animateurs peuvent changer d'idée au gré de

leurs envies et du moment. Ils utilisent des opinions pour former des opinions, ce qui rejoint

le principe de co-construction de sens avec les auditeurs-appelants (Marcoux et Tremblay

(2005 : 7). Cependant, les chercheurs ont trouvé une tendance clairement conservatrice

dans le vote, notamment au fédéral.

Ces affirmations sont corroborées ici dans notre étude. La moitié des participants ont

reconnu voter pour le Parti conservateur du Canada au fédéral (8 sur 16), un quart a voté

pour le Parti libéral du Canada (4 sur 16). Les autres votes se divisent entre le Bloc

québécois (2), le Nouveau parti démocratique (1), le Parti vert du Canada (1). Un votant

n’affiche aucun parti, il s’agit de l’auditeur qui s’est posé en totale opposition avec les propos

tenus par la radio. Pour ce qui est du provincial, une grande partie des votes se sont dirigés

vers la Coalition avenir Québec qui enregistre presque la moitié des votants (7 sur 16). Le

Parti libéral du Québec a 4 votes et le reste est divisé entre le Parti conservateur du Québec,

le Parti Québécois, Québec solidaire, le Parti vert du Québec, l’Action démocratique du

Québec et le NPD-Québec. Certains ont hésité entre deux partis. Notons que 12 des

participants sur 16, soit les trois quarts n’affichent pas un choix politique fixe dans le temps

ou sont quelque peu indécis.

Page 92: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

83

2.6.4. À la défense de la radio

Au cours de l’entretien, plus de la moitié des participants ont spontanément défendu leur

radio contre les accusations qui pouvaient peser sur elle. Cinq de ces neuf auditeurs

écoutent CHOI Radio X et deux écoutent à la fois CHOI Radio X et FM93. Cette information

est précisée ici car, au cours de son histoire, CHOI Radio X a fait davantage l’objet

d’attaques, notamment en 2004, que FM93. Dans leur discours, certains des auditeurs

interrogés comprenaient les réticences que d’autres pouvaient éprouver à écouter ces

radios : « ce n’est pas fait pour tout le monde », « on doit connecter, la radio doit nous

rejoindre pour l’écouter » (auditeur B) « Je sais qu’il y a autant de monde qui aime et qui

déteste. Moi, ça me rejoint » (auditeur P). D’autres critiquent les attaques : « les gens

utilisent des extraits pris hors contexte » (auditeur C, H et O), « les personnes qui critiquent

n’ont pas écouté » (auditeur B, N et O), « je suis tannée du discours de haine contre la radio,

les auditeurs ne sont pas des pantins » (auditeur H, N et O), « je ressens les critiques

comme une attaque » (auditeur N), « ce n’est plus la radio du passé, elle a changé »

(auditeur N, O et L), « je veux démontrer que les gens qui écoutent ne sont pas des

radicaux » (auditeur O).

L’expression « radio poubelle » déjà utilisée parmi la population de la ville pour décrire ces

radios a été reprise par un tiers des participants (5 sur 16), un autre les appelle « les

fameuses radios de Québec » (auditeur N). Certains lient cette expression de « radio

poubelle » à la curiosité qui les a poussés à écouter, d’autres défendent les radios malgré

la critique qu’ils savent existante, d’autres encore la décrivent comme un phénomène

cherchant à provoquer pour faire de l’argent.

La défense de leur radio marque un sentiment très net d’appartenance et de reconnaissance

de leur statut d’auditeur, notamment parce que ces marques de soutien sont apparues

d’elles-mêmes sans être la réponse à une question posée.

Le tableau suivant résume les thèmes, le sous-thème et les éléments associés à chaque

thème et sous-thème.

Page 93: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

84

Tableau 1 : Grille d’analyse des thèmes et du sous-thème

Thèmes Sous-thème Éléments associés aux

thèmes

Fidélité Nom de la station

Moment d’écoute et activité

Nombre d’années d’écoute

Fréquence

Motivations Raisons de l’écoute

Réactions émotionnelles Réactions positives

Réactions négatives

Interactions Moyens d’interaction

Raisons de l’interaction

Raisons de la non-

interaction

Types d’opinions

exprimées sur la radio

Opinion sur les lignes

ouvertes

Discussion en dehors des

ondes

Adhésion Opinion générale sur les

animateurs : le positif et le

négatif

Page 94: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

85

Crédibilité accordée aux

animateurs

Désaccord et fréquence du

désaccord

Attitude malgré le

désaccord

Attitude vis-à-vis des autres

journaux : consommation

Intérêt pour l’information

Confiance dans la radio

et/ou confiance dans les

autres médias

Engagement Changement d’avis

Actions

Vote

Défense de la radio

2.7. Résumé des principaux résultats

Afin de mieux comprendre le tableau général qui peut être dressé à travers les résultats

présentés dans les points précédents, nous avons cherché à établir une vision d’ensemble,

notamment en cherchant quelles pouvaient être les réponses communes à tous les

auditeurs interrogés mais aussi quelles étaient les grandes divisions apparaissant dans les

réponses et enfin dégager des observations générales.

Page 95: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

86

2.7.1. Vision d’ensemble : points communs et différences

• Où se trouve l’unanimité?

Trois éléments font l’unanimité parmi les participants : tous discutent des propos qu’ils ont

entendus à la radio avec un tiers, la famille ou le conjoint. Tous se trouvent à un moment en

désaccord avec la radio, cependant pas à la même fréquence. Et enfin, tous votent.

Ces réponses sont cohérentes avec les résultats des recherches effectuées sur les

auditeurs de la PTR américaine, mais aussi avec les précédentes recherches conduites sur

les auditeurs de Québec. La discussion avec les proches montre l’attention portée aux

propos des médias et une envie de partage d’idées. Le désaccord montre également une

écoute attentive ainsi qu’une confrontation avec ses propres idées et valeurs faites au

moment de l’écoute mais aussi possiblement au moment de l’évaluation de l’information,

comme le suggèrent Sears et Freedman (1967). Rappelons que les auditeurs ont

majoritairement rapporté aimer le débat. Et le vote marque un engagement en tant que

citoyen et un intérêt pour les affaires publiques.

• Observations générales

Les grandes tendances sont constituées des réponses qui remportent presque la majorité

mais pas l’unanimité parmi les participants à l’étude. Elles se retrouvent d’abord dans les

habitudes d’écoute et la fidélité à la station : nombreux sont les auditeurs qui l’écoutent

depuis des années, de nombreuses heures par semaine le matin et le soir dans leur voiture.

L’écoute provoque chez eux des émotions et ils aiment y entendre des opinions et des

débats. Les auditeurs jugent majoritairement les animateurs compétents dans leur travail,

ce qui participe à les rendre crédibles dans leurs propos. Leur consommation de

l’information et notamment d’autres médias est très assidue, marquant un intérêt pour les

affaires publiques en général et une connaissance de l’actualité, ce qu’ils reconnaissent

d’ailleurs eux-mêmes en se disant majoritairement au courant de l’actualité. Concernant

l’action, nombreux sont les auditeurs qui ont affirmé agir après avoir entendu les propos de

leur radio. Il peut s’agir d’actions à la fois politiques comme des pétitions, des marches, des

manifestations, des vigiles mais aussi des actions commerciales comme l’achat et la

consommation d’un produit à la suite de publicités diffusées à la radio, la participation à des

Page 96: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

87

concours ou encore des actions sociales avec des dons. Enfin, l’indécision quant au vote

est aussi une des caractéristiques dominantes dans les résultats.

Même si une forte tendance ne signifie pas l’unanimité, elle montre un penchant des

participants dans un sens plutôt que dans l’autre. Une des caractéristiques du contrat de

communication qui est la fidélité est ici présente, de même que la manifestation d’émotions

suscitées par la radio. La caractéristique de la fidélité peut cependant être reliée au mode

de recrutement qui visait à interroger des auditeurs assidus de la radio et prêts à s’exprimer

sur le sujet. Elle ne représente peut-être donc pas l’ensemble des auditeurs des radios

d’opinion de Québec. Les précédentes recherches menées sur ces radios montrent

également l’intérêt pour les affaires publiques, à travers à la fois le vote mais aussi la

consommation importante d’informations. Enfin, l’action est une caractéristique de

l’engagement présentée dans les recherches.

• Des divisions importantes

Les résultats de cette étude nous amènent à nuancer d’autres caractéristiques pourtant

décrites dans les recherches américaines et québécoises concernant les auditeurs des

radios d’opinion. Tout d’abord, les auditeurs ne partagent pas tous les opinions diffusées à

la radio. Il en va de même avec les opinions présentées par les auditeurs qui participent aux

lignes ouvertes. Par ailleurs, la moitié seulement des participants partage ses idées en direct

à la radio à travers les appels, les interactions par messages textes, les courriels ou en

participant à des émissions. Concernant les animateurs, la moitié des auditeurs exprime

des commentaires négatifs à leur égard et un peu moins de la moitié les juge sincères. De

même, la confiance envers les médias, que ce soit la radio ou les autres médias, est mitigée.

La radio d’opinion n’a pas non plus fait changer tous les participants d’avis mais uniquement

un peu plus de la moitié. Soulignons sur ce point que selon les recherches d’Hovland et

Weiss sur la persuasion, la crédibilité accordée au média paraît importante dans ce

processus. En effet, le changement d'opinion qu’ils avaient enregistré à la réception d'une

information provenant d'une source jugée crédible était bien supérieur à celui constaté avec

une source jugée non crédible (1951 : 650). Mais les chercheurs ont démontré

empiriquement que les opinions préalables d'un usager sur un sujet de société donné ont

un impact sur le jugement de la crédibilité d'une source (Ibid. : 641). Il nous est cependant

difficile de mesurer ce paramètre au regard de chaque information reçue par les participants.

Page 97: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

88

Tous les participants n’ont, enfin, pas pris la défense de la radio face aux détracteurs,

seulement la moitié se sont exprimés dans ce sens.

Contrairement aux recherches sur le sujet et aux propositions de recherche qui ont été

émises montrant une adhésion inconditionnelle aux propos des deux stations de radio et

des animateurs, il semblerait que les auditeurs prennent davantage de recul quant aux idées

diffusées et aux propos des animateurs, à qui ils n’attribuent pas une entière crédibilité. Il

en va de même pour l’influence des propos de la radio qui ne font changer d’avis qu’un peu

plus de la moitié des auditeurs interrogés, même s’ils font davantage agir. Il semble aussi

qu’une moitié des participants est plutôt mitigée concernant la confiance à accorder aux

médias qu’ils consomment en général, que ce soit la radio d’opinion ou les médias de

masse. Les recherches et nos propositions de recherche, dans ce sens, décrivaient un

partage des opinions de la radio majoritaire, une absence de remise en question des propos

de la radio et une méfiance dirigée uniquement vers les médias de masse.

3. Interprétation des résultats

À la lumière des données recueillies, nous avons jugé intéressant d’apporter quelques

éléments théoriques supplémentaires qui n’étaient pas apparus au moment où nous avons

présenté notre chapitre 2 contenant le cadre théorique. C’est la raison pour laquelle cette

section apparaît ici.

3.1. L’échelle d’Hofstetter : attention et engagement

Hofstetter et al. ont établi une échelle graduelle permettant de mesurer l’activité liée à

l’écoute des radios parlées politiques (political talk activity) (1999 : 357). Cette échelle

cherche à aller au-delà de la simple mesure de fréquence d’exposition, elle veut mesurer

les activités qui sont liées à l’écoute. Elle inclut progressivement différents critères. Tout

d’abord, elle calcule le nombre de personnes qui n’écoutent pas la radio d’opinion (nous ne

prendrons pas, dans notre cas, cette première étape en compte puisque tous nos

répondants écoutent la radio), ensuite, ceux qui ne font qu’écouter ; puis les auditeurs qui

parlent à quelqu’un de ce qu’ils ont entendu à la radio. Elle ajoute ensuite à l’écoute et à la

discussion, l’action et enfin, additionne l’écoute, la discussion, l’action et les appels à la

Page 98: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

89

radio. L’échelle est basée sur le principe que la talk radio stimule l’attention des auditeurs

et les engage, notamment dans divers aspects des problèmes politiques.

Dans notre étude, 16 participants sur 16 écoutent la radio d’opinion et discutent des propos,

12 sur 16 écoutent, discutent et agissent et enfin, 8 sur 16 écoutent, discutent, agissent et

appellent la radio. Cette dernière mesure totalise exactement la moitié des participants. Ces

derniers seraient donc les plus attentifs et les plus engagés dans l’écoute de la radio.

Écouter la radio parlée stimule l’attention et, comme c’est le cas pour la moitié des

répondants, implique et suscite l’adhésion active des auditeurs. La radio « engage » selon

le terme utilisé en anglais par les auteurs (Ibid. : 356). Selon les recherches effectuées sur

les appelants aux États-Unis, ces derniers sont jugés comme étant de meilleurs

communicants et plus politiquement actifs que les autres auditeurs (Turow, Cappella et

Jamieson, 1996 : 11).

Nous avons ensuite associé cette mesure au vote conservateur, comme le font Hofstetter

et al. dans leur étude (1999), ce qui devrait être corrélé avec une activité plus importante

due au partage des idées diffusées par la radio. Dans notre étude, il ne reste alors que 6

participants sur 16 qui, en plus d’être attentifs et engagés, partagent en partie les idées

diffusées sur les ondes (les personnes qui ont voté pour des partis de droite ne sont pas

toutes celles qui ont dit partager les opinions de la radio).

3.2. Des profils d’usagers

En répondant à nos questions, chaque participant a donné son point de vue et sa perception

du média qu’il a choisi d’écouter. Ceci nous a d’abord permis d’étudier les résultats à travers

des thèmes généraux que nous avons présentés dans la section précédente. Les réponses

ont également permis de dessiner des profils d’usagers de la radio que nous allons détailler

maintenant.

3.2.1. À la recherche de profils

Comme nous l’avons expliqué dans la section 1.2. de ce chapitre, après la première étape

de l’analyse des données, nous avons créé un second tableau Excel qui voulait regrouper

les réponses à certaines questions. Le but était de tenter de dresser des profils d’utilisateurs.

Page 99: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

90

Ce second tableau, de par sa petite taille et son découpage plus détaillé, permettait de

visualiser des profils parmi les réponses des auditeurs, tout en tenant compte du mieux

possible des nuances que ces derniers avaient apportées à leurs réponses. Les

propositions de recherche issues de la théorie recueillie sur le sujet de la consommation, de

la confiance et du contrat de communication ont offert une base de travail établissant les

relations possibles entre un usager et son média. Nous nous sommes basée sur ces liens

et sur les réponses dégagées à travers les thèmes de notre point précédent pour dégager

des attitudes d’auditeurs vis-à-vis de la radio et les avons déclinées en 14 sous-catégories.

Nous avons ensuite cherché à savoir quelles réponses et attitudes se rapprochaient le plus

d’une adhésion forte au discours de la radio, d’une grande fidélité, d’un engagement fort et

d’une grande confiance dans la radio, attitude qui se rapproche le plus de celle décrite dans

les propositions de recherche.

Des codes de couleur ont été utilisés pour faciliter le repérage entre les auditeurs aux

caractéristiques d’adhésion, de fidélité, d’engagement et de confiance forts et les autres.

Voici ces codes : le rouge pour la première catégorie d’auditeurs qui semblaient remplir le

plus ces caractéristiques, le jaune pour les auditeurs qui semblaient les remplir le moins et

le bleu pour ceux qui semblaient mitigés (voir annexe G).

Nous avons défini une liste de sous-catégories qui représente les caractéristiques de la

consommation des radios d’opinion établies à partir des propositions théoriques du second

chapitre.

Rappelons les trois propositions de recherche :

P1 : Les auditeurs reconnaissent une forme d’autorité à la radio parlée (ou à l’animateur)

qu’ils écoutent, lui attribuent de la crédibilité et lui font confiance. Ils sont méfiants envers

les autres médias.

P2 : Le « contrat » est caractérisé par une adhésion forte des auditeurs au discours de la

radio et de ses animateurs, par une fidélité au programme dans le temps et un niveau

d'engagement important dans leur écoute (ils discutent des propos qu’ils ont entendus

autour d’eux ou même téléphonent à la radio).

Page 100: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

91

P3 : L’écoute assidue de ces radios est associée à des opinions, voire des actions politiques

ou sociales conformes aux idées véhiculées.

Voici les 14 sous-catégories utilisées pour établir des profils (l’ordre présenté ici n’a pas

d’importance spécifique). Ces derniers ont été finalisés à la suite de la première écoute des

entretiens puis lors d’une préanalyse des enregistrements. Le but est de voir si l’attitude des

participants correspond ou non aux sous-catégories présentées :

1. interaction avec la radio

2. discussion des propos entendus à la radio

3. opinion positive de la radio

4. opinion positive des animateurs

5. action à la suite des propos entendus à la radio

6. changement d’avis à la suite des propos entendus à la radio

7. rare désaccord

8. confiance dans la radio

9. manque de confiance dans les autres médias

10. fidélité à la radio

11. partage des idées de la radio

12. vote conservateur

13. longue durée d’écoute

14. défense de la radio

Dans notre tableau, si l’attitude des participants correspondait à la sous-catégorie, un

crochet y était coché. Nous avons d’abord testé notre grille sur les participants qui avaient

vraisemblablement, selon les résultats de l’analyse thématique, l’adhésion, la fidélité,

l’engagement et la confiance les plus importants envers la radio : leur source principale

d’information est la radio, ils partagent les opinions de la radio, ont indiqué une confiance

dans la radio et un rejet des autres médias. Il s’agissait des auditeurs B, C, F, H, G, M et P.

Nous avons vérifié le nombre de sous-catégories qui correspondaient à leur attitude. Leurs

réponses correspondaient au moins à 10 des sous-catégories sur 14, sauf pour un des

participants. Nous avons ensuite réalisé la même démarche pour le reste des participants.

Nous nous sommes aperçue que certains avaient une attitude très peu positive envers la

Page 101: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

92

radio, tandis que l’attitude d’autres était plus partagée. À partir de cette mesure, nous avons

créé les profils d’utilisateurs que voici :

• Profil 1

L’attitude enregistrée vis-à-vis de ces 14 sous-catégories a permis de créer un premier profil

d’auditeurs les plus ressemblants aux propositions de recherche présentées. Sur ces sept

auditeurs sur qui nous avons tout d’abord testé les sous-catégories, six ont montré une

attitude correspondant à un nombre important des critères mentionnés plus haut. Il est à

noter cependant qu’aucun des auditeurs interrogés ne remplit les 14 sous-catégories.

Cependant, six auditeurs sur les 16 participants remplissent entre 10 et 13 de ces sous-

catégories.

Nous avons ainsi affiné leur profil : ces auditeurs ont une opinion positive de la radio et de

ses animateurs, leur attribuent de la crédibilité et leur font confiance. Ils adhèrent fortement

au discours de la radio et de ses animateurs, partagent les opinions qui y sont émises et

sont rarement en désaccord avec les propos tenus. Ils sont fidèles au programme dans le

temps et leur durée d’écoute chaque jour est élevée. Ils ont un niveau d'engagement

important dans leur écoute, ils discutent des propos qu’ils ont entendus autour d’eux et

prennent la défense de la radio. Leur écoute est associée à des actions politiques ou

sociales conformes aux idées véhiculées. Ils votent pour le parti Conservateur au fédéral.

Ce premier profil se rapproche du profil de l’auditeur type dressé par les recherches sur le

sujet, à la fois aux États-Unis et au Québec.

• Profil 2

Pour les auditeurs qui ne répondaient pas à ces sous-catégories, il a fallu imaginer d’autres

profils types. Nous avons tout d’abord cherché à savoir quels auditeurs remplissaient le

moins les 14 sous-catégories établis dans le second tableau. Deux participants s’avéraient

être en opposition presque totale avec les six premiers. Leur attitude ne correspondait, en

effet, qu’à deux ou trois des 14 sous-catégories du tableau. Nous avons ensuite cherché à

établir leurs points communs afin de proposer un second profil.

Page 102: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

93

Voici leur profil : ces auditeurs écoutent la radio dans un but de divertissement, voire même

de dérision : la radio les fait rire. Ils ne partagent pas les idées de la radio et sont très

critiques sur son contenu mais ils reconnaissent de la compétence aux animateurs. Même

s’ils sont en désaccord très régulier avec la radio, ils ne changent pas de poste et continuent

leur écoute. Ils montrent de l’intérêt à entendre ce qui se dit à la radio pour mieux

comprendre les autres. Ils ont été influencés par un tiers pour l’écoute de la radio et écoutent

désormais par habitude. Ils n’ont jamais téléphoné à la station, ni agi à la suite de propos

entendus à la radio mais discutent avec leur conjoint des propos entendus. Ils consomment

les autres médias et ont davantage confiance dans les médias de masse, autres que la

radio. Ils ne votent pas pour le parti Conservateur.

Ce second profil se rapproche du profil de surveillance.

• Profil 3

Il restait alors à déterminer le troisième et dernier profil qui concernait le reste des

participants, soit la moitié des répondants (8 sur 16). Ce dernier profil rassemble les usagers

qui remplissent entre 6 et 9 des 14 sous-catégories. Il a fallu ensuite chercher les points

communs à tous ces auditeurs.

Voici leur profil : Ils ont une vision positive de la radio qu’ils écoutent pendant une longue

durée chaque semaine, même s’ils ne partagent pas les opinions qui y sont diffusées. Ils

sont souvent en désaccord avec les propos des animateurs et sont mitigés quant à leur

sincérité. Ils discutent des propos entendus à la radio avec des membres de leur famille et

aiment les opinions et les débats. Ils n’accordent pas leur entière confiance à la radio et sont

mitigés dans leur position : soit ils accordent leur confiance à la radio autant qu’aux autres

médias, soit à aucun des deux. Ils votent.

Leur profil indique que ces auditeurs sont attentifs au média qu’ils écoutent et l’affectionnent,

d’autant qu’ils l’écoutent longtemps. Ils aiment les opinions et les débats qu’ils entendent

mais prennent du recul par rapport aux propos tenus à la radio mais aussi par rapport à ce

qu’ils entendent dans les autres médias. Ils sont aussi moins engagés envers la radio à la

fois dans l’action mais aussi dans la défense de la radio que le profil 1. Ce type de profil

n’était pas réellement présent dans les recherches précédentes effectuées sur le sujet.

Page 103: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

94

Rappelons cependant que l’étude de Marcoux et Tremblay avait voulu interroger les plus

fervents des auditeurs de la radio. Dans la présente étude, ce profil concerne la moitié des

participants, auditeurs des radios d’opinion de Québec.

4. Discussion

Nous allons ici discuter des résultats obtenus au regard des propositions théoriques et de

la littérature existante sur le sujet de la consommation, de la confiance et du contrat de

communication que nous avons présentée dans notre chapitre 2.

Pour débuter avec la théorie du biais de confirmation, il s’avère qu’une partie des auditeurs,

soit 7 sur 16, dit partager les opinions de la radio. Ceci apparaît conforme à l’hypothèse de

Stroud selon laquelle c'est l'attitude partisane qui engendre la consommation d'un certain

type de médias (2011) : dans notre étude, les auditeurs expliquent avoir fait le choix de ce

média pour cette raison. Iyengar et Hahn montrent, eux, que les usagers pensant fermement

avoir des idées correctes chercheront à les voir soutenues par le média qu'ils consomment

(2009 : 20) et ce, pas uniquement concernant les sujets politiques mais toute sorte de sujets,

par exemple le système de santé ou les voyages, à un degré moindre cependant (Ibid. : 23).

Dans notre étude, les auditeurs ont affirmé écouter et apprécier d’autres sujets à la radio

que les nouvelles politiques.

Il est cependant difficile de montrer la présence du biais de confirmation car il s’agit d’un

phénomène inconscient et concernant la raison du choix de la radio, les sept participants

n’ont pas directement mentionné chercher à renforcer leurs idées et croyances existantes.

Il est néanmoins possible de conclure à la présence d’une exposition sélective. Les usagers

interrogés ont tous fait le choix de la consommation de leur média donc de s’exposer au

type de discours et aux idées qui y sont présentées, ce dans la durée. Précisons également

que certains ont affirmé l’avoir choisi parce qu’ils partageaient les opinions de la radio mais

aussi parce qu’ils rejetaient les faits et idées présentés par les autres médias (3 auditeurs

sur 16).

Nos résultats vont dans le sens des recherches de Lazarsfeld et al. qui montraient que

l'exposition était toujours sélective. Cependant, la relation positive que les chercheurs ont

établie entre les opinions des individus et ce qu'ils choisissent d'écouter ou de lire

Page 104: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

95

(1948 : 164) n’est pas si évidente car dans notre étude, les participants n’ont pas tous

affirmé partager les opinions diffusées par les radios parlées de Québec (7 sur 16) et

d’autres ont ouvertement admis écouter pour comprendre un discours opposé au leur et se

confronter à des positions différentes (5 sur 16). Si l’exposition sélective est avérée, il est

cependant difficile d’en connaître les conséquences. Garrett, Weeks et Neo avaient émis

deux possibilités, la première étant que ce choix conduit à la réduction des différends du fait

de l’exposition à des idées variées et la seconde que ce choix éloignerait les participants

des perspectives qui diffèrent des leurs (2016 : 333). Les conséquences de l’exposition aux

propos de la radio n’ont pas ici fait l’objet d’une question spécifique posée aux participants.

Pour ce qui est de la théorie de la dissonance cognitive défendue par Festinger (1957), du

fait qu’une partie des auditeurs interrogés se trouvent confrontés à des messages qui sont

en contradiction avec leurs pensées et leurs croyances, ils ne cherchent donc pas à recevoir

des messages qui les soutiennent. Cette théorie pourrait davantage s’appliquer aux usagers

qui ont affirmé partager les opinions de la radio mais là encore, rien ne montre qu’ils font

délibérément le choix de renforcer leurs opinions en écoutant les radios parlées. Il semble

ici, au vu des analyses, que l’importance d’écouter un média qui rejoint ses propres idées

soit relative et que l’intérêt pour l’aspect commentaire de la nouvelle à travers les opinions

et les débats qui sont entendus à la radio pourrait primer sur la volonté de se voir conforter

dans ses idées.

Pour ce qui est du lien de confiance présenté dans notre cadre théorique, il n’apparaît pas

de manière évidente dans les résultats de notre recherche, ni dans le lien positif entre la

confiance et la consommation d’un média défini par Hopmann, Shehata et Strömbäck

(2015) et Tsfati (2010) ni à travers la notion de crédibilité. Les participants ont, en effet,

déclaré ne pas faire entièrement confiance à la radio et tous n’accordent pas de crédibilité

à l’animateur qu’ils écoutent. Le même constat est à effectuer quant au lien établi par Tsfati

et Cappella entre la consommation des médias alternatifs que sont les radios parlées et le

rejet des médias traditionnels (2003) puisque seule une partie des participants a tenu des

propos hostiles contre les médias traditionnels. La confiance des participants étant répartie

presque pour moitié entre la radio et les autres médias, ou donnée également aux deux ou

encore à aucun des deux, il est impossible d’établir un lien direct entre le choix du FM93 ou

de CHOI Radio X, le rejet des autres médias ou encore la confiance qui leur est accordée.

Le processus de persuasion qui en découlerait selon Flanagin et Metzger (2017) ne peut

Page 105: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

96

donc être établi puisque la crédibilité accordée à la source et l’autorité qui lui est conférée

ne sont pas assez significatives. Cela est confirmé par le fait que seule une partie des

participants a déclaré avoir changé d’avis ou agi à la suite des propos entendus à la radio.

Il semble donc que le lien qui est mis en place entre les auditeurs et leur radio soit d’une

nature plus complexe que le simple lien de confiance défini par les chercheurs. Il semblerait

que même si le lien de confiance n’est pas réellement présent, certains auditeurs

choisissent tout de même de consommer la radio et d’y rester fidèles depuis plusieurs

années. Ces derniers montrent alors une certaine méfiance envers les propos qui y sont

tenus ou les informations qui y sont données. Ces auditeurs-là aiment se fier à plusieurs

sources et choisissent d’utiliser la radio pour entamer une réflexion ou se faire une opinion

sur certaines questions de société à partir de points de vue qui, pour eux, n’existent pas

ailleurs dans les nouvelles.

Concernant le contrat de communication, certaines des caractéristiques énoncées par les

chercheurs comme Véron (1985) sont bien présentes : la situation de communication

médiatique, à savoir la diffusion d’un produit fini, est existante, et à quelques exceptions

près, les auditeurs interrogés restent fidèles à la radio pendant de nombreuses années. Ils

en font une consommation quotidienne ou hebdomadaire importante comparée à la

moyenne de la consommation médiatique au Québec. Cependant, le fait que cette

communication soit fondée sur une compétence professionnelle des animateurs est quelque

peu à nuancer : trois quarts des auditeurs les ont jugés compétents.

Ici, le principe de captation du contrat de communication à travers l’utilisation d’éléments de

spectacle, de « show » (ce terme a été utilisé plusieurs fois par quelques participants) pour

maintenir les auditeurs à l'écoute le plus longtemps possible, jour après jour (Giroux et

Sauvageau, 2009 : 5 ; Charaudeau, Lochard et Soulages, 2012) semble bel et bien présent.

Cependant, l’adhésion de façon absolue aux propos des animateurs également présent

dans le principe de captation de Charaudeau (2006 : 352) est largement à nuancer puisque

nous avons parlé du manque de sincérité totale attribué aux animateurs (7 participants sur

16 les jugent sincères). L’esprit communautaire et la proximité des talk-shows

radiophoniques définis par Becqueret (2007) et Herbst (1995) ont été plusieurs fois évoqués

par les auditeurs. Selon les réponses de notre étude, la talk radio stimule l'attention des

auditeurs et les engage politiquement (Hofstetter et al, 1999). Tous ont affirmé toujours voter

Page 106: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

97

bien que le choix des partis n’aille pas toujours dans le sens des tendances de la radio. Et

conformément aux résultats des précédentes études, les auditeurs sont de grands

consommateurs d'information et s'informent par d'autres moyens que la seule radio

d'opinion, notamment par Le Journal de Québec (Marcoux et Tremblay, 2005 : 5).

Il semble donc, concernant le contrat de communication, que le contrat défini

spécifiquement pour la radio parlée soit celui qui s’approche le plus des affirmations et des

perceptions des auditeurs. Ce contrat est cependant à nuancer car tous les auditeurs

interrogés ne semblent pas unis de la même manière avec leur radio. Cette nuance

concerne notamment l’adhésion aux propos de la radio, la participation aux échanges avec

la communauté en direct et la crédibilité qui est attribuée aux animateurs. Selon les profils

que nous avons établis, il serait possible d’établir différents contrats de communication

incluant des nuances différenciées d’engagement, d’adhésion et de confiance. Voici les

options que nous présentons ci-dessous en associant les différents profils aux propositions

de recherche présentées dans cette étude :

Les résultats de la présente étude montrent des disparités parmi les auditeurs. Si un peu

plus du tiers des auditeurs (soit 6 sur 16) interrogés présentent des caractéristiques dans

leur écoute qui rejoignent celles de nos propositions de recherche fondées sur les

précédentes recherches sur la question, il semble que la majorité (soit 10 sur 16) ne rejoigne

qu’une partie de ces caractéristiques et s’éloigne du reste. Nous pouvons donc indiquer que

le contenu des propositions de recherche est présent à travers l’ensemble des perceptions

des auditeurs mais qu’aucun auditeur, ni aucun profil d’auditeurs n’a une attitude leur

correspondant à lui seul. Le profil 1 est cependant celui qui les rejoint le plus. À la lumière

des résultats obtenus, nous proposons donc de reformuler les propositions de recherche en

y intégrant certaines nuances pour chacun des profils :

Profil 1 :

P1 : Les auditeurs reconnaissent une forme d’autorité à la radio parlée (ou à l’animateur)

qu’ils écoutent, lui attribuent de la crédibilité et lui font confiance. Mais ils n’expriment pas

tous une méfiance envers les autres médias.

Page 107: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

98

P2 : Le « contrat » est caractérisé par une adhésion forte des auditeurs au discours de la

radio et de ses animateurs, par une fidélité au programme dans le temps et un niveau

d'engagement important dans leur écoute (ils discutent des propos qu’ils ont entendus

autour d’eux) mais seul un petit groupe d’auditeurs présente la caractéristique de s’exprimer

directement à la radio par des appels, des messages ou la participation à des émissions.

P3 : L’écoute assidue de ces radios est associée à des actions politiques ou sociales

conformes aux idées véhiculées, mais seulement pour une partie d’entre eux à un

changement d’opinion.

Profil 2 :

P1 : Les auditeurs ne reconnaissent aucune forme d’autorité à la radio parlée (ou à

l’animateur) qu’ils écoutent, ne lui attribuent aucune crédibilité et ne lui font pas confiance.

Ils ont confiance dans les autres médias davantage que dans la radio.

P2 : Le « contrat » est caractérisé par un niveau d'engagement important dans leur écoute

(ils discutent des propos qu’ils ont entendus autour d’eux) mais pas par une adhésion forte

des auditeurs au discours de la radio et de ses animateurs, ni par une fidélité au programme

dans le temps.

P3 : L’écoute assidue de ces radios n’est pas associée à des opinions ou des actions

politiques ou sociales conformes aux idées véhiculées.

Profil 3 :

P1 : Les auditeurs sont partagés quant à la reconnaissance d’une forme d’autorité à la radio

parlée (ou à l’animateur) qu’ils écoutent. Seule la moitié lui attribue de la crédibilité et lui fait

confiance. Ils ne sont généralement pas méfiants envers les autres médias.

P2 : Le « contrat » est caractérisé par une fidélité au programme dans le temps et un niveau

d'engagement important dans leur écoute (ils discutent des propos qu’ils ont entendus

autour d’eux) mais pas par une adhésion forte des auditeurs au discours de la radio et de

ses animateurs.

Page 108: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

99

P3 : L’écoute assidue de ces radios n’est pas ouvertement associée à des opinions, elle

l’est davantage à des actions politiques ou sociales conformes aux idées véhiculées.

Les seules caractéristiques qui rejoignent tous les participants sont donc : le retour sur les

propos tenus par la discussion avec des membres de la famille concernant le contenu de la

station, le désaccord existant avec les propos des animateurs, bien que la fréquence varie

et enfin, l’engagement de citoyen à travers le vote. Toutes ces caractéristiques se retrouvent

dans de précédentes études. Cependant, l’adhésion et la confiance mitigée de la moitié des

participants malgré l’appréciation de la radio et l’écoute prolongée apparaissent ici comme

de nouvelles caractéristiques à intégrer dans des études futures sur les profils des usagers.

L’existence d’un tel profil restera ici à vérifier à une plus grande échelle.

Page 109: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

100

Conclusion

Dans le contexte d’hyperconcurrence actuel, les médias doivent se faire une place et trouver

un créneau pour pouvoir engendrer des profits. Deux radios à Québec se sont positionnées

depuis trente ans, et surtout depuis les dix dernières années sur celui de l’opinion. Elles ont

pris leur modèle sur les radios parlées conservatrices américaines (Payette, 2019 ; Lemieux,

2012). Leurs prises de position sur des sujets d’actualité et de politique sont loin de faire

l’unanimité dans la ville de Québec et leurs propos parfois extrêmes ont déjà fait l’objet de

plusieurs sanctions ayant mené en 2004 à la révocation de la licence de CHOI Radio X.

Le but de la présente recherche n’était pas de prendre position sur le contenu ou le style

des radios d’opinion de Québec mais plutôt d’offrir une meilleure connaissance et

compréhension des perceptions de l’audience vis-à-vis de ces deux radios à travers la voix

de 16 de leurs auditeurs. Nous voulions offrir un regard sur les habitudes de consommation

et la nature du lien qui unit les auditeurs à leur radio au regard des perspectives théoriques

du biais de confirmation, du contrat de communication et des recherches effectuées sur la

confiance. Nous voulions également explorer les raisons qui poussent ces auditeurs à se

brancher chaque jour ou presque sur leur station, de ce à longueur d’année. Bien sûr, nous

aurions pu choisir un échantillon plus grand qui aurait même pu être composé d’opposants

à la radio pour comparer les perceptions. Cette étude étant limitée à la fois en termes de

temps et de moyens, il a fallu faire des choix.

Les usagers ont fait, comme le suggèrent les études sur l’exposition sélective et les résultats

de notre étude, le choix du média qu’ils consomment. Ils l’ont fait pour des raisons qui leur

sont propres. Ces raisons peuvent varier d’un individu à l’autre, comme le montrent à la fois

les études sur les usages et gratifications mais aussi notre analyse. Il a cependant été

possible d’identifier des observations générales quant aux motivations des auditeurs

interrogés dans le cadre de notre recherche.

Les auditeurs se retrouvent majoritairement autour de l’affection pour les opinions et le

débat, ce qui constitue la raison d’être de ces radios. Ils échangent d’ailleurs tous autour

des propos qu’ils ont entendus à la radio. Ces échanges ne sont cependant pas toujours

basés sur l’approbation des propos des radios d’opinion. Il semble donc, que les auditeurs

Page 110: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

101

soient d’accord avec CHOI Radio X et FM93 ou non, que les propos qu’elles diffusent ne

les laissent pas indifférents et que les radios d’opinion font parler d’elles. Le dernier livre

publié il y a quelques mois sur le sujet par Dominique Payette en est la preuve. L’auteure

cite d’ailleurs de nombreux articles de journaux locaux et blogs traitant du sujet. Les

journaux ont déjà souvent repris et commenté les propos des radios d’opinion. Concernant

cette couverture médiatique souvent négative, les études américaines ont montré qu’elle ne

reflétait souvent pas l’expérience de la radio faite par ses auditeurs et pourrait attiser le

cynisme envers les autres médias (Turow, Cappella et Jamieson, 1996 : 4). La prise de

défense spontanée de plus de la moitié des participants envers leur radio montre à la fois

une prise de conscience des attaques subies par les stations et un sentiment

d’appartenance à une communauté. Rappelons que deux tiers des auditeurs interrogés ont

été introduits à l’écoute de la radio par un membre de la famille, un ami ou un collègue.

Concernant l’attitude vis-à-vis des autres médias, notre étude montre des nuances. Le

scepticisme mis en avant par Tsfati et Cappella (2003) qui défend l’idée que les auditeurs

des PTR seraient plus sceptiques envers les autres médias en réaction au fait qu’ils ne font

pas confiance à leur couverture n’est pas totalement attestée dans notre étude. Un peu plus

d’un tiers des participants seulement a affiché un manque de confiance envers les autres

médias. Il s’agit du même tiers qui a confiance dans la radio, s’engage, est fidèle et adhère

fortement aux propos de la radio.

Les autres participants, eux, semblent largement partagés entre accorder leur confiance à

la radio, aux autres médias, aux deux ou encore à aucun des deux. Ils prennent davantage

de recul face aux propos, ils n’affichent pas une confiance systématique, sont souvent en

désaccord avec la radio et jugent que les animateurs manquent de sincérité. Ce qui

n’empêche pas ces auditeurs d’être fidèles depuis de nombreuses années. Il semblerait

donc que le lien entre la confiance et la consommation mis en évidence par Tsfati (2010) ne

soit pas si évident dans les résultats de notre étude.

L’aspect « spectaculaire » décrit à la fois par les études réalisées à Québec et par les

théories du contrat de communication relatives au talk-show est souvent revenu dans les

réponses de cette partie des auditeurs précédemment cités comme étant une raison

poussant à l’écoute. Ce mélange d’information et d’humour appelé infotainment connaît son

succès à Québec, ce qui permet aux radios parlées d’opinion d’être écoutées sans être

Page 111: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

102

toujours prises au sérieux. Cet aspect est encore plus évident chez deux des participants

(correspondant au profil 2) qui sont entièrement en désaccord avec les propos entendus. Ils

prennent la radio en dérision dans le but de s’informer et de surveiller les propos diffusés

sur les ondes. Cela décrit à nouveau une radio qui ne laisse pas indifférent.

Il semble qu’aux États-Unis les PTR aient abandonné l’idée d’une couverture équitable,

notamment parce que la suppression de la fairness doctrine ne les y contraint plus depuis

1987. Devant l’attitude ouvertement affichée de Rush Limbaugh d’influencer ses auditeurs,

les auditeurs américains seraient-ils moins sensibles à cette obligation d’équité et se

laisseraient-ils davantage influencer? Les recherches sur la confiance accordée à ces radios

(Jamieson et Cappella, 2008 ; Garrett, Weeks et Neo, 2016 ; Tsfati, Stroud et Chotiner,

2014 ; Tsfati et Cappella, 2003) et les sondages sur la confiance accordée aux médias et

au système politique en général (Swift, Gallup News, 2016 ; Nye et Zelikow, 1997) montrent

aux États-Unis une méfiance vis-à-vis des médias traditionnels et du système politique

menant à une plus grande polarisation.

Au Québec, les sondages sur la confiance envers les médias traditionnels révèlent des

résultats moins alarmants (Papineau, Le Devoir, 2018). Les résultats de notre étude

semblent également montrer une prise de recul vis-à-vis des radios d’opinion qui

n’apparaissait pas dans les études américaines, ni d’ailleurs, dans les précédentes études

menées sur le sujet à Québec. Rappelons cependant que l’étude de Marcoux et Tremblay

à Québec (2005) avait été faite auprès des plus fervents défenseurs de CHOI Radio X au

moment des manifestations contre la fermeture de la station. Il est aussi possible que les

résultats de notre étude ne soient pas des plus représentatifs, ceci pouvant être dû, entre

autres, à la taille de l’échantillon que nous avons constitué. Il est également possible que

les auditeurs aient voulu contrecarrer les idées reçues sur les auditeurs de ces radios. Les

participants se diraient alors moins influencés par les radios qu’ils ne le seraient en réalité.

Nous détaillerons ce point plus bas, dans les limites de l’étude sur le possible biais de

sélection dû au recrutement sur une base volontaire.

Au regard de nos résultats, et pour répondre à notre question de recherche, la relation de

confiance et le contrat de communication se présentent différemment selon les trois profils

d’usagers que nous avons identifiés parmi les participants à l’étude. Les relations entre les

auditeurs et leur radio vont de l’adhésion, l’engagement, la fidélité et la confiance la plus

Page 112: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

103

forte pour une partie, à la prise en dérision des propos tenus pour un faible nombre, en

passant par une attitude mitigée de la moitié des auditeurs. Nous ne pouvons donc pas

définir un contrat de communication unique qui regrouperait tous les usagers d’un média.

Il est également utile de prendre en compte la théorie des usages et gratifications, dont la

pertinence a émergé lors de l’analyse des données, pour y trouver des relations plus

diversifiées et individualisées entre un usager et son média. La théorie propose, comme

nous l’avons présenté, de se concentrer sur les raisons identifiées par l’usager lui-même

concernant l’utilisation du média qu’il a choisi plutôt que de concentrer sur les effets des

médias. Cette théorie présente, cependant, des limites à prendre en compte. McQuail

précise que l’usage d’un média est circonstanciel et qu’il est préférable de chercher les

usages d’un type spécifique de média (1994), comme par exemple la PTR, plutôt que des

médias dans leur ensemble. Cette nuance se retrouve dans les résultats que nous avons

mis en relief ici. Mais la théorie est reconnue utile par Sundar et Limperos (2013) qui

soutiennent que « usage implies volitional action, not simply passive reception ». Parmi la

multitude de choix médiatiques qui s’offre aux usagers aujourd’hui, le principe de choix est

logiquement présent. Ceci revient à confirmer la présence d’une exposition sélective,

comme nous l’avons présenté plus haut. L’attitude des participants qui ont tous donné

plusieurs réponses pour justifier le choix de leur radio montre qu’il s’agit bien d’un choix

intentionnel.

Pour conclure, nous nous étions interrogés au début de cette recherche sur les critiques

portées à l’encontre des radios d’opinion dont l’écoute conduirait à la polarisation et

entraverait la poursuite d’un débat démocratique. Quelle serait la conséquence de l’intérêt

porté à ces radios et des débats qu’elles suscitent pour la démocratie ? Répondre à cette

question reviendrait à choisir entre l’une des deux options présentées par Garrett, Weeks

et Neo (2016) concernant les conséquences de l’écoute de la radio d’opinion : soit ce choix

conduit à la réduction des différends du fait de l’exposition à des idées variées, soit il éloigne

les participants des perspectives qui diffèrent des leurs. Pour Giroux et Sauvageau : « La

démocratie serait bien servie si, en période électorale par exemple, ces stations

permettaient la confrontation d’opinions variées. Les auditeurs de ces stations pourraient

soupeser la valeur de ces arguments divergents et faire leur choix de manière avisée »

(2009 : 43). Sachant que les opinions diffusées à la radio ne restent que des opinions et

que celles-ci penchent davantage vers un bord politique plutôt qu’un autre, la seule façon

Page 113: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

104

pour les usagers des médias de recueillir toutes les opinions présentes sur le spectre

politique dans le but de prendre une décision éclairée en tant que citoyen est de diversifier

leurs sources d’information. Dans notre étude, seul un quart des auditeurs interrogés

affirment utiliser la radio comme source d’information principale. Ce résultat est plutôt

encourageant et va à l’encontre de l’idée des « bulles de filtres » ou « chambres d’écho »,

évoquant, par la personnalisation des recherches en ligne, une sélection algorithmique de

l’information selon des choix qui correspondent le plus aux préférences des usagers, ce qui

limite l’accès à certaines informations et en élimine d’autres (Pariser, 2011).

Les limites de la recherche

Il est important de souligner que cette étude ne peut et ne vise pas à être généralisée à

toute l’audience des radios d’opinion de Québec. Son objectif est de dresser un portrait de

la consommation et des perceptions d’un nombre limité de participants et ce, à un moment

donné dans le temps. La recherche qualitative permet surtout de contribuer à une

compréhension plus riche d'un phénomène à partir de la profondeur des entretiens, de leur

durée et de la grande variété des réponses possibles.

Rappelons le contexte des entretiens et la manière de poser les questions qui, même s’ils

se voulaient être les plus neutres possibles, ont pu influencer les résultats d’une façon ou

d’une autre. En ce qui concerne le critère de cohérence interne, il fallait le plus possible se

détacher d’éventuelles idées préconçues vis-à-vis du lien de confiance entre un usager et

un média que nous ne consommons pas, et en aucun cas rattacher les questions à des

conceptions politiques personnelles. Pour cela, nous avons testé le questionnaire à

l'avance.

Il faut également noter que, même si le processus d’analyse doit être le plus transparent et

systématique possible, l’analyse qualitative demande une constante prise de décision de la

chercheuse en termes d’importance à accorder aux différents thèmes et aux données

recueillies, ainsi qu’aux limites à donner à l’étendue de l’analyse (Chacon, 2017). Ces

décisions ont été prises en se basant sur les recherches existantes identifiées dans le cadre

théorique mais aussi en prenant en compte la contrainte de temps et en ayant toujours en

tête la perspective limitée de généralisation de l’analyse de par son caractère ponctuel dans

le temps (la recherche voulait recueillir les perceptions des auditeurs à un moment donné,

Page 114: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

105

sachant que ces dernières peuvent évoluer dans le temps) et limitatif en termes de nombre

de participants.

De même, la technique d’échantillonnage non aléatoire et basée sur le volontariat des

participants peut également constituer une limite à notre étude. Il est difficile de déterminer

la représentativité de l’échantillon sélectionné. Nous avions exprimé des craintes dans le

processus de recrutement quant à l’intérêt des participants pour ce type de recherche, du

fait de l’image qu’ils pouvaient avoir de l’Université Laval et de la recherche en général. Les

auditeurs de la radio se sentant effectivement mal à l’aise pour s’exprimer dans une étude

n’auraient peut-être tout simplement pas répondu. Les moins réticents qui ont bien voulu

s’exprimer sont peut-être ceux qui prendraient davantage de recul vis-à-vis de la radio. Ils

se seraient ainsi sentis plus à l’aise de participer à une étude pour parler de leur perception

à propos de radios qui ont fait l’objet de controverses et de plaintes, comme plusieurs l’ont

fait remarquer en prenant la défense des radios. Il serait possible, pour tenter de réduire le

biais possiblement créé par l’autosélection, d’ajouter une question demandant aux

participants pourquoi ils ont accepté de contribuer à la recherche. Rappelons que lors du

recrutement, les réponses ont été plus nombreuses et plus rapides que nous ne l’avions

imaginé, ce qui montre une volonté, de la part des participants qui se sont présentés à

l’entrevue, de partager leurs idées, leurs opinions et leurs perceptions avec l’intervieweuse.

Enfin, en ce qui concerne la mise en parallèle faite avec l’audience américaine dans cette

étude, elle ne s’est basée que sur notre recension des travaux antérieurs. Il ne s’agit pas

d’une comparaison empirique à proprement parler. Nous n’avons pas posé les mêmes

questions que celles des études américaines, dont certaines ont été réalisées il y a quelques

décennies.

Les pistes de recherches futures

Cette recherche s’est intéressée à la perception des usagers à un moment donné dans un

contexte donné, car elle était limitée en termes de budget et de temps. Elle ne s’est pas

penchée sur l’évolution des perceptions et des positions idéologiques sur des périodes

d’écoute précises. Cette donnée aurait permis de mesurer l’influence des radios dans le

temps et les changements d’opinion à travers une échelle temporelle pour évaluer la

polarisation. Il aurait également été intéressant de mesurer la fidélité d’écoute et

Page 115: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

106

l’importance de l’influence subie, notamment auprès des auditeurs qui se disent critiques,

pour savoir si ces dernières résistent au temps.

De plus, notre étude a cherché à recueillir la perception des auditeurs vis-à-vis de leur

propre consommation. Elle n’a en aucun cas fait état de la perception de ces mêmes

auditeurs vis-à-vis des tiers, des autres auditeurs. Elle n’a également interrogé aucun

auditeur d’autres radios ou médias existant à Québec, ce qui aurait permis une comparaison

des perceptions. L’organisation d’entrevues auprès d’auditeurs américains aurait permis

l’obtention de données similaires et ainsi apporté davantage d’éléments offrant la possibilité

d’une véritable dimension comparative. Les contraintes de temps et de budget empêchaient

de telles extensions mais il aurait été intéressant de pouvoir étendre les recherches à ces

questions.

Enfin, au regard des résultats obtenus dans cette étude, il serait utile de valider les profils

d’auditeurs que nous avons identifiés à travers une étude réalisée auprès d’un échantillon

plus large, une étude tournée vers une collecte de données quantitatives par exemple.

Page 116: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

107

Bibliographie

ANADON, Martha et Lorraine SAVOIE-ZAJC (2009) « L’analyse qualitative des données ». Recherches qualitatives. Vol. 28, no 1, p. 1-7.

ATKIN, Charles K. (1973) « Instrumental utilities and information seeking », dans Clarke, Peter, dir., New Models of Communication Research. Newbury Park, CA : Sage, p. 205–242.

BARKER, David C. (1998) « The Talk Radio Community : Nontraditional Social Networks and Political Participation ». Social Science Quarterly. Vol. 79, no 2, p. 261-272.

BARKER, David et Kathleen KNIGHT (2000) « Political Talk Radio and Public Opinion ». Public Opinion Quarterly. Vol. 64, p. 149–170.

BECQUERET, Nicolas (2007) « Un modèle d'analyse du discours des émissions interactives radiophoniques ». Recherches en communication. No 26, p. 203-223.

BENNETT, Stephen E. (2009) « Who Listens to Rush Limbaugh's Radio Program and the Relationship Between Listening to Limbaugh and Knowledge of Public Affairs, 1994-2006 » Journal of Radio & Audio Media. Vol. 16, no 1, p. 66-82.

BILEFSKY, Dan (2018) « Quebec’s ‘Trash Radio’ Host Fires Up Outrage, and Big Ratings ». En ligne. 18 août. New York Times. https://www.nytimes.com/2018/08/18/world/canada/quebec-trash-radio-jeff-fillion.html Consulté le 18 août 2018.

BOYATZIS, Richard E. (1998) Transforming Qualitative Information. Thematic Analysis and Code Development. London : Sage Publications, 200 p.

BRIN, Colette, CHARRON, Jean et Jean DE BONVILLE (2004) Nature et transformations du journalisme. Théories et recherches empiriques. Québec : Presses de l’Université Laval, 454 p.

CAPPELLA, Joseph. N. et JAMIESON, Kathleen Hall (1997) Spiral of Cynicism: The Press and the Public Good. New-York : Oxford University Press, 336 p.

CARDON, Dominique et Fabien GRANJON (2010) Médiactivistes. Paris : Presses de Sciences-Po, 152 p.

CHABROL, Claude (2012) « Pour une psychologie sociale de la communication ». Connexions. Vol.2, no 98, p. 99-108.

CHACON, Geneviève (2017) La production de l’actualité politique à l’ère numérique : Une étude de la pratique des journalistes de la Tribune de la presse sur les réseaux socionumériques. Thèse de doctorat en communication publique, Université Laval, 244 p.

CHARAUDEAU, Patrick (2006) « Identité sociale et identité discursive, le fondement de la compétence communicationnelle ». Niterói. No 21, p. 339-354.

CHARAUDEAU, Patrick (1995) « Le dialogue dans un modèle de discours ». Cahiers de linguistique française. No 17, p. 141-178.

CHARAUDEAU, Patrick (1997) Le discours d’information médiatique. La construction du miroir social. Paris : Nathan, Institut national de l’audiovisuel, 286 p.

Page 117: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

108

CHARAUDEAU, Patrick (2000) « L’événement dans le contrat médiatique ». Dossiers de l’audiovisuel. No 91. http://www.patrick-charaudeau.com/L-evenement-dans-le-contrat.html Consulté le 23 juin 2018.

CHARAUDEAU, Patrick (2010) « Une éthique du discours médiatique est-elle possible ? ». Communication. Vol. 27, no 2, p. 51-75.

CHARAUDEAU, Patrick, LOCHARD, Guy et Jean-Claude SOULAGES (2012) « Between Citizen Image and Consumer Discourse: Talk-Shows on French Television – Issues, History, Analysis ». Critical Studies in Television, Manchester University Press. Vol. 7, no 2, p. 52-67.

CHARLTON, Sébastien, GIROUX, Daniel et Michel LEMIEUX (2016) Les Québécois et l’information à l’ère du numérique. Centre d’études sur les médias, Université Laval, 107 p.

CHARRON, Jean et Jean DE BONVILLE (2004) « Le journalisme et le marché : de la concurrence à l’hyperconcurrence », dans Brin, Colette, Charron, Jean, et de Bonville, Jean, dir., Nature et transformations du journalisme. Théories et recherches empiriques. Québec : Presses de l’Université Laval, p. 273-316.

COLEMAN, James (1990) Foundations of Social Theory. Cambridge, MA : Belknap Press of Harvard University Press, 993 p.

COLEMAN, Stephen, MORRISON, David E. et Scott ANTHONY (2012) « A Constructivist Study of Trust in the News ». Journalism Studies. Vol. 13, no 1, p. 37-53.

COUTURE, Patrick et David FISET (2005) La radio à Québec et ses auditeurs. Rapport final présenté à la Ligue des droits et libertés, Université Laval, 118 p.

DE BONVILLE, Jean (2004) « Problèmes de la périodisation du changement en histoire de la presse », dans Brin, Colette, Charron, Jean, et de Bonville, Jean, dir., Nature et transformations du journalisme. Théories et recherches empiriques. Québec : Presses de l’Université Laval, p. 121-140.

FARIS, Robert M., HAL, Roberts, ETLING, Bruce, BOURASSA, Nikki, ZUCKERMAN, Ethan, and Yochai BENKLER (2017) Partisanship, Propaganda, and Disinformation: Online Media and the 2016 U.S. Presidential Election. Berkman Klein Center for Internet & Society Research Paper. En ligne. http://nrs.harvard.edu/urn-3:HUL.InstRepos:33759251 Consulté le 18 juin 2018.

FELDMAN, Lauren (2008) The Tension between Receiver Bias and Journalist Bias in Opinionated News: A Study of Information Processing. Conference Papers, National Communication Association, p. 1-47.

FESTINGER, Leon (1957) A Theory of Cognitive Dissonance. Stanford, CA : Stanford University Press, 291 p.

FLANAGIN, Andrew J. et Miriam J. METZGER (2017) « Digital media and perception of source credibility in political communication », dans The Oxford Handbook of Political Communication. En ligne. https://www.oxfordhandbooks.com/view/10.1093/oxfordhb/9780199793471.001.0001/oxfordhb-9780199793471-e-65. Consulté le 9 août 2018

GARRETT, R. Kelly, WEEKS Brian E. et Rachel L. NEO (2016) « Driving a Wedge Between Evidence and Beliefs : How Online Ideological News Exposure Promotes Political Misperceptions». Journal Of Computer-Mediated Communication. Vol. 21, no 5, p. 331-348.

GAUTHIER, Benoît (2009) « La structure de la preuve », dans Recherche sociale, De la problématique à la collecte des données. 6e édition. Québec : Presses de l'Université du Québec, p. 169-199.

Page 118: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

109

GAZIANO, Cecilie (1988) « How credible is the credibility crisis? » Journalism Quarterly. Vol 65, no 2, p. 267-278.

GIROUX, Daniel et Florian SAUVAGEAU (2009) Radio parlée, élections et démocratie. Centre d'études sur les médias. Cahier-médias, no 18, 50 p.

GRANIER, Jean-Maxence (2011) « Du contrat de lecture au contrat de conversation ». Communication & langages. Vol. 169, no 3, p. 51-62.

GRONDIN, Marie-Renée (2018) « Sondage Numeris : ICI Radio-Canada Première, la station la plus écoutée de Québec ». Le Journal de Québec. En ligne. 24 mai. https://www.journaldequebec.com/2018/05/24/sondage-numeris-ici-radio-canada-premiere-la-station-la-plus-ecoutee-de-quebec Consulté le 20 septembre 2018.

GUERRERO Alejandro (2007) « Government, Trust in », Blackwell Encyclopedia of Sociology online. En ligne. http://www.sociologyencyclopedia.com/public/tocnode?query=social+integration&widen=1&result_number=50&topics=psychology&from=search&id=g9781405124331_yr2015_chunk_g978140512433113_ss1-86&type=or&fuzzy=0&slop=1#citation Consulté le 12 mars 2018.

GVIRSMAN, Shira Dvir (2014) « It’s Not That We Don’t Know, It’s That We Don’t Care : Explaining Why Selective Exposure Polarizes Attitudes ». Mass Communication and Society. Vol. 17, no 1, p. 74–97.

HALL, Stuart (1973) Encoding and Decoding in the Television Discourse. Birmingham (West Midlands) : Centre for Contemporary Cultural Studies, University of Birmingham, 19 p.

HART, William, ALBARRACIN, Dolores, EAGLY, Alice H., BRECHAN, Inge, LINDBERG, Matthew J. et Lisa MERRILL (2009) « Feeling Validated Versus Being Correct: A Meta-Analysis of Selective Exposure to Information ». Psychological Bulletin. Vol. 135, no 4, p. 555–588.

HERBST, Susan (1995) « On Electronic Public Space: Talk Shows in Theoretical Perspective ». Political Communication. Vol. 12, p. 236-274.

HOFSTETTER, Richard C., BARKER, David, SMITH James T., ZARI Gina M. et Thomas A. INGRASSIA (1999) « Information, Misinformation, and Political Talk Radio ». Political Research Quarterly. Vol. 52, no 2, p. 353-369.

HOFSTETTER, Richard C., DONOVAN, Mark C., KLAUBER, Meville R., COLE Alexandra, HUIE, Carolyn J. et Toshiyuki YUASA (1994) « Political Talk Radio: A Stereotype Reconsidered ». Political Research Quarterly. Vol. 47, no 2, p. 467-479.

HOFSTETTER, Richard et Christopher L. GIANOS (1997) « Political Talk Radio: Actions Speak Louder than Words». Journal of Broadcasting & Electronic Media. Vol. 41, no 4, p. 501-515.

HOLLIFIELD, C. Ann (2006) « News Media Performance in Hypercompetitive Markets: An Extended Model of Effects». International Journal on Media Management. Vol. 8, no 2, p. 60-69.

HOPMANN, David Nicolas, SHEHATA, Adam et Jesper STROMBACK (2015) « Contagious Media Effects: How Media Use and Exposure to Game-Framed News Influence Media Trust ». Mass Communication and Society. Vol. 18, no 6, p. 776-798.

HOVLAND, Carl et Walter WEISS (1951) « The influence of source credibility on communication effectiveness ». Public Opinion Quarterly. Vol. 15, no 4, p. 635-650.

IYENGAR, Shanto et Kyu S. HAHN (2009). « Red Media, Blue Media: Evidence of Ideological Selectivity in Media Use ». Journal of Communication. Vol. 59, no 1, p. 19–39.

Page 119: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

110

JAMIESON, Kathleen Hall et Joseph N. CAPPELLA (2008) Echo Chamber: Rush Limbaugh and the Conservative Media Establishment. New York : Oxford University Press, 320 p.

JEANNERET, Yves et Valérie PATRIN-LECLÈRE (2004) « La métaphore du contrat ». Hermès. No 38, p. 133-140.

JONES, David A. (1998) « Political Talk Radio: The Limbaugh Effect on Primary Voters ». Political Communication. Vol. 15, no 3, p. 367-381.

JONES, David A. (2002) « The Polarizing Effect of New Media Messages » International Journal of Public Opinion Research. Vol. 14, no 2, p. 158-174.

KATZ, Elihu, BLUMLER, Jay G. et Michael GUREVITCH (1974) « Uses and Gratifications Research ». Public Opinion Quarterly. Vol. 37, no 4, p. 509-523.

KNOBLOCH-WESTERWICK, Silvia, MOTHES, Cornelia et Nick POLAVIN (2017) « Confirmation Bias, Ingroup Bias, and Negativity Bias in Selective Exposure to Political Information ». Communication Research. p. 1–21.

KOHUT, Andrew, ZUKIN, Cliff et Carol BOWMAN (1993) The Vocal Minority in American Politics. Washington, DC: The Times Mirror Center for the People and the Press, 108 p.

LA PELLE, Nancy (2004) « Simplifying Qualitative Data Analysis Using General Purpose Software Tools ». Field Methods. Vol. 16, no 1, p. 85-108.

LAZARSFELD, Paul F., BERELSON, Bernard, and Hazel GAUDET (1948) The People's Choice: How the Voter Makes Up His Mind in a Presidential Campaign. New York: Columbia University Press, 178 p.

LEE, Francis (2002) « Radio Phone-in Talk Shows as Politically Significant Infotainment in Hong Kong ». Press/Politics. Vol. 7, no 4, p. 57-79.

LEE Gangheong et Joseph N. CAPPELLA (2001) « The Effects of Political Talk Radio on Political Attitude Formation: Exposure Versus Knowledge». Political Communication. Vol. 18, p. 369-394.

LEE, Tien-Tsung (2010) « Why They Don’t Trust the Media: An Examination of Factors Predicting Trust ». American Behavioral Scientist. Vol. 54, no 1, p. 8-21.

LEMIEUX, Olivier (2012) « L'affaire CHOI-FM... Construction identitaire ou prédisposition sociologique ». Cahiers de recherche en politique appliquée. Vol. 4, no 3, p. 1-18.

LÉVY Dominique (2010) « Du contrat de lecture à l’expérience ». La Presse magazine. En ligne. 6 mai. http://www.pressemagazine.com/tribune/du-contrat-de-lecture-a-l-experience.html Consulté le 23 juin 2018.

LIPSET Seymour M., LAZARSFELD, Paul F., BARTON Allen, and Juan LINZ (1954) « The Psychology of Voting: An Analysis of Political Behavior », dans Lindzey, Gardner, dir., Handbook of Social Psychology. Vol. 2, Cambridge : Addison-Wesley, p. 1124-1176.

LUCASSEN, Teun et Jan Maarten SCHRAAGEN (2012) « Propensity to trust and the influence of source and medium cues in credibility evaluation ». Journal of Information Science. Vol. 38, no 6, p. 566-577.

LYONS, Jeffrey K. (2008) « Political Talk Radio and Values: Finding Support for the Two-Value Political Ideology Model ». Journal of Radio & Audio Media. Vol. 15, no 2, p. 150-166.

Page 120: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

111

MACE, Gordon et François PÉTRY (1997) Guide d'élaboration d'un projet de recherche. 3e édition. Québec : Presses de l'Université Laval, 170 p.

MARCOUX, Jean-Michel et Jean-François TREMBLAY (2005) Le néopopulisme de CHOI-FM : De l'expansion de la logique consumériste - Profil socioéconomique et sociopolitique des auditeurs mobilisés. Rapport de recherche. Centre d'études sur les médias, Université Laval, 80 p.

MCQUAIL, Denis (1994) Mass Communication Theory : An Introduction. 3e édition. London, Thousand Oaks, New Delhi : Sage Publications, 416 p.

MCQUAIL, Denis, BLUMLER, Jay G., et BROWN, John. R. (1972) « The television audience: A revised perspective », dans McQuail, Denis, dir., Sociology of Mass Communication : selected readings. Harmondsworth : Penguin modern sociology readings, p. 135-165.

MEYER, Daniel Z. et Leanne M. AVERY (2009) « Excel as a Qualitative Data Analysis Tool ». Field Methods. Vol. 21, no 1, p. 91–112.

MITCHELL, Amy, GOTTFRIED, Jeffrey, BARTHEL, Michael et Nami SUMIDA (2018) « Distinguishing Between Factual and Opinion Statements in the News ». En ligne. 18 juin. Pew Research Center. http://www.journalism.org/2018/06/18/distinguishing-between-factual-and-opinion-statements-in-the-news/ Consulté le 11 octobre 2018.

MORT, Sébastien (2012) « Truth and Partisan Media in the USA: Conservative Talk Radio, Fox News and the Assault on Objectivity ». Revue française d’études américaines. Vol. 3, no 133, p. 97-112.

NUMERIS (2018) « Numeris Sondage Radio ». En ligne. Printemps 2018. Beez Créativité Média. http://beez.ca/app/uploads/2018/05/BEEZ_Presentation_NUMERIS_P18.pdf Consulté le 22 janvier 2018.

NYE, Joseph S., Jr., et Philip D. ZELIKOW (1997) « Conclusions : Reflections, Conjectures, and Puzzles » dans Nye, Joseph S., Zelikow, Philip D. et King, David C., dir., Why People Don´t Trust Government. Cambridge : Harvard University Press, p. 253–281.

ONWUEGBUZIE, Anthony J. et Nancy L. LEECH (2005) « Taking the ‘‘Q’’ Out of Research: Teaching Research Methodology Courses Without the Divide Between Quantitative and Qualitative Paradigms ». Quality and Quantity. Vol. 39, p. 267-296.

PAPINEAU, Philippe (2018) « La crédibilité des journalistes en forte hausse ». Le Devoir. En ligne. 28 mars. https://www.ledevoir.com/culture/medias/523791/la-credibilite-des-journalistes-en-forte-hausse-au-quebec Consulté le 15 mai 2018.

PARISER, Eli (2011) « The User is the Content », dans The Filter Bubble: What the Internet Is Hiding from You. New York : Penguin, p 47-76.

PAYETTE, Dominique (2019) Les brutes et la punaise : Les radios-poubelle, la liberté d’expression et le commerce des injures. Montréal : Lux Éditeur, 148 p.

PAYETTE, Dominique (2015) L'information à Québec, un enjeu capital. Rapport réalisé à la demande de l’ancienne première ministre du Québec, Pauline Marois. Québec, 52 p.

PFAU, Michael, MOY, Patricia, HOLBERT, Lance R., SZABO, Erin A, LIN, Wei-Kuo et Weiwu ZHANG (1998) « The Influence of Political Talk Radio on Confidence in Democratic Institutions ». Journalism & Mass Communication Quarterly. Vol. 75, no 4, p. 730-745.

RADIO CANADA (2019) « Il y a 15 ans : la liberté d’expression selon CHOI-FM ». Radio Canada archives. En ligne. 11 juillet. https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1216479/radio-x-licence-choi-quebec-crtc-jeff-fillion-archives Consulté le 14 août 2019.

Page 121: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

112

SAUVAGEAU Florian, THIBAULT Simon et Pierre TRUDEL (2018) Les fausses nouvelles : nouveaux visages, nouveaux défis. Comment déterminer la valeur de l’information dans les sociétés démocratiques ? Québec : Presses de l’Université Laval, 263 p.

SAVOIE-ZAJC, Lorraine (2009) « L'entrevue semi-dirigée », dans Recherche sociale, De la problématique à la collecte des données. 6e édition. Québec : Presses de l'Université du Québec. p. 337-361.

SEARS, David O., et FREEDMAN, Jonathan L. (1967) « Selective Exposure to Information: A Critical Review ». Public Opinion Quarterly. Vol. 31, no 2, p. 194–213.

SHATZ, Itamar (2017) « Fast, Free, and Targeted: Reddit as a Source for Recruiting Participants Online ». Social Science Computer Review. Vol. 35, p.537-549.

STROMBACK, Jesper, DJERF-PIERRE, Monika et Adam SHEHATA (2016) « A Question of Time? A Longitudinal Analysis of the Relationship between News Media Consumption and Political Trust ». The International Journal of Press/Politics. Vol. 21, no 1, p. 88– 110.

STROUD, Natalie Jomini (2011) Niche News : The Politics of News Choice. New-York : Oxford University Press, 272 p.

STROUD, Natalie Jomini (2010) « Polarization and Partisan Selective Exposure ». Journal of Communication. Vol. 60, no 3, p. 556-576.

SUNDAR, S. Shyam. et Anthony M. LIMPEROS (2013) « Uses and Grats 2.0 : New Gratifications for New Media ». Journal of Broadcasting & Electronic Media. Vol. 57, no 4, p. 504–525.

SWIFT, Art (2016) « American’s Trust in Media Mass Sinks to a New Low ». Gallup News. En ligne. 14 septembre. http://news.gallup.com/poll/195542/americans-trust-mass-media-sinks-new-low.aspx Consulté le 16 septembre 2017.

TALKERS MAGAZINE (2019) « Top Talk Audiences ». Talkers Magazine. En ligne. Juillet. http://www.talkers.com/top-talk-audiences/ Consulté le 14 août 2019.

TRAMER, Harriet et Leo W. JEFFRES (1983) « Talk radio-forum and companion ». Journal of Broadcasting. Vol. 27, no 3, p. 297-300.

TSFATI, Yariv (2008) « Journalists, Credibility of », dans The International Encyclopedia of Communication. http://www.communicationencyclopedia.com.acces.bibl.ulaval.ca/subscriber/tocnode.html?id=g9781405131995_chunk_g978140513199515_ss8-1 Consulté le 12 mars 2018.

TSFATI, Yariv (2010). « Online news exposure and trust in the mainstream media: Exploring possible associations ». American Behavioral Scientist. Vol. 54, p. 22–42.

TSFATI, Yariv (2002) The Consequences of Mistrust in the News Media. Media Skepticism as a Moderator in Media Effects and as a Factor Influencing News Media Exposure. Thèse de doctorat, University of Pennsylvania, ProQuest Dissertations Publishing, 488 p.

TSFATI, Yariv et Joseph N. CAPPELLA (2003) « Do People Watch What They Do Not Trust? Exploring the Association Between News Media Skepticism and Exposure ». Communication Research. Vol. 30, no 5, p. 504-529.

TSFATI, Yariv, STROUD, Natalie Jomini et Adi CHOTINER (2014) « Exposure to Ideological News and Perceived Opinion Climate ». The International Journal of Press/Politics. Vol. 19, no 1, p. 3-23.

Page 122: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

113

TURBIDE, Olivier, VINCENT, Diane et Marty LAFOREST (2010) « The Circulation of Discourse : The Case of Deprecating Remarks on Trash Radio ». Discourse Studies. Vol. 12, no 6, p. 785-801.

TUROW, Joseph (1974) « Talk Show Radio as Interpersonal Communication ». Journal of Broadcasting & Electronic Media. Vol. 18, no 2, p. 171-180.

TUROW, Joseph, CAPPELLA Joseph N. et Kathleen Hall JAMIESON (1996) Call-In Political Talk Radio : Background, Content, Audiences, Portrayal in Mainstream Media. Report Annenberg Public Policy Center, University of Pennsylvania, no 5, 68 p.

TURVEY, Natalie (2019) « Google News Initiative s'associe à la FJC pour lutter contre les fausses nouvelles ». En ligne. http://cjf-fjc.ca/fr/actufut%C3%A9 Consulté le 5 juillet 2019.

VERON, Eliseo (1985) « L'analyse du contrat de lecture : une nouvelle méthode pour les études de positionnement des supports presse », dans Médias : expériences, recherches actuelles, applications (séminaire). Paris : Institut de recherches et d’études publicitaires, p. 203-229.

VINCENT, Diane, LAFOREST, Marty et Olivier TURBIDE (2007) « Une boîte de Pandore, De l’analyse de discours radiophoniques à l’intervention sociale ». Communication. Vol. 25, no 2, p. 187-199.

WESTERWICK, Axel, JOHNSON, Benjamin K. et Silvia KNOBLOCH-WESTERWICK (2017) « Confirmation Biases in Selective Exposure to Political Online Information: Source Bias vs. Content Bias ». Communication Monographs. Vol. 84, no 3, p. 343-364.

WRIGHT, Charles R. (1960) « Functional analysis and mass communication ». Public Opinion Quarterly. Vol. 24, no 4, p. 605-620.

YANOVITZKY, Itzhak et Joseph N. Cappella (2001) « Effect of Call-In Political Talk Radio Shows on Their Audiences: Evidence from a Mutli-Wave Panel Analysis ». International Journal of Public Opinion. Vol. 13, no 4, p. 377-397.

Page 123: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

114

Annexe A Courriel de recrutement Université Laval

A : [email protected] Objet : Étude sur les radios parlées à Québec

Vous écoutez CHOI-98.1 Radio X ou

93.3 ?

Venez me parler de votre radio préférée !

Je suis étudiante à la maîtrise en Communication publique et suis actuellement à la recherche de participants pour une étude sur les radios parlées à Québec intitulée « Nature du rapport de confiance ou du "contrat de communication" entre usager et média ». Cette étude vise à connaître les habitudes de consommation des auditeurs et les rapports de confiance qu’ils établissent avec leur radio. Les participants seront conviés à un entretien d’environ une heure. Un cadeau de remerciement d’une valeur de 20$ est offert sous forme de cartes-cadeaux Netflix ou iTunes ou Cineplex par tirage au sort à la fin de l’entretien.

Critères de sélection :

• Être âgé de 18 ans et plus

• Écouter CHOI-98.1 Radio X ou 93.3, ou les deux stations, au minimum deux fois par semaine

Pour de plus amples informations ou pour participer à cette étude, n’hésitez pas à me contacter : [email protected]

Au plaisir de vous accueillir,

Aline Vancompernolle, étudiante à la maîtrise en Communication publique.

Page 124: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

115

Je suis dirigée par Colette Brin, professeur titulaire du département d’Information et de Communication de l’Université Laval et directrice du Centre d’études sur les médias. Ce projet a été approuvé par le Comité d’éthique de la recherche de l’Université Laval : No d’approbation 2018-345 / 05-03-2019

Page 125: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

116

Annexe B Affiche de recrutement

Vous écoutez

CHOI-98.1 Radio X ou FM93 ?

Venez parler de votre radio

préférée ! *Vous avez plus de 18 ans, vous écoutez la radio au moins deux fois

par semaine et vous êtes d’accord pour participer à une étude réalisée par Aline Vancompernolle, étudiante à l’Université Laval

*Je vous attends pour parler de vos émissions préférées et de la confiance que vous avez en votre radio

(L’entretien durera environ une heure. L’étude s’intitule « Nature du rapport de confiance ou du "contrat de communication" entre usager et média », elle vise à connaître les

habitudes de consommation des auditeurs et les rapports de confiance qu’ils établissent

Page 126: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

117

avec leur radio. Elle est réalisée sous la direction de la professeure Colette Brin. L’étude a été approuvée par le Comité d’éthique de la recherche de l’Université Laval :

No d’approbation 2018-345 / 05-03-2019).

*Chaque participant aura un prix d’une valeur de 20$ : cartes Netflix ou

iTunes ou Cineplex.

Pour plus de renseignements et participer à l’étude, contactez :

alin

e.v

anco

mp

ern

olle

.

1@

ula

va

l.ca

alin

e.v

anco

mp

ern

olle

.

1@

ula

va

l.ca

alin

e.v

anco

mp

ern

olle

.

1@

ula

va

l.ca

alin

e.v

anco

mp

ern

olle

.

1@

ula

va

l.ca

alin

e.v

anco

mp

ern

olle

.

1@

ula

va

l.ca

alin

e.v

anco

mp

ern

olle

.

1@

ula

va

l.ca

alin

e.v

anco

mp

ern

olle

.

1@

ula

va

l.ca

Page 127: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

118

Annexe C Message de recrutement plateforme

Reddit

Vous écoutez

CHOI-98.1 Radio X ou FM93 ?

Venez me parler de votre radio préférée !

Je suis étudiante et je réalise une étude pour l’Université Laval.

Si vous avez plus de 18 ans et êtes d’accord pour participer à une étude, je vous attends pour parler des émissions que vous aimez et

de la confiance que vous avez en votre radio.

Des cadeaux à gagner d’une valeur de 20$ : carte Netflix ou iTunes ou encore Cineplex. Chaque participant aura un lot.

Pour plus de renseignements et participer à l’étude, contactez-moi : [email protected]

(L’entretien durera environ une heure. L’étude s’intitule « Nature du rapport de confiance ou du "contrat de communication" entre usager et média », elle vise à connaître les habitudes de

consommation des auditeurs et les rapports de confiance qu’ils établissent avec leur radio. Elle est réalisée sous la direction de la professeure Colette Brin. L’étude a été approuvée par le Comité

d’éthique de la recherche de l’Université Laval : No d’approbation 2018-345 / 05-03-2019).

Page 128: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

119

Annexe D Certificat d’éthique

Formulaire de consentement

Présentation du chercheur Cette recherche est réalisée dans le cadre du projet de maîtrise d’Aline Vancompernolle, dirigé par Colette Brin, du Département d’Information et de Communication à l’Université Laval. Avant d’accepter de participer à ce projet de recherche, veuillez prendre le temps de lire et de comprendre les renseignements qui suivent. Ce document vous explique le but de ce projet de recherche, ses procédures, avantages, risques et inconvénients. Nous vous invitons à poser toutes les questions que vous jugerez utiles à la personne qui vous présente ce document. Nature de l’étude La recherche a pour but d’établir la nature des rapports de confiance ou le « contrat de communication » passé entre les usagers et leur média, ici, les radios d'opinion de Québec. Déroulement de la participation Votre participation à cette recherche consiste à participer à une entrevue, d’une durée d’environ une heure, qui sera enregistrée avec votre accord. L’entrevue se déroulera dans un lieu défini entre vous et l’étudiante qui réalise le projet. Elle portera sur les éléments suivants:

• éléments d'information sur votre consommation de la radio et vos habitudes d’écoute;

• éléments sur vos rapports avec la radio et ses animateurs, notamment la confiance que vous leur accordez;

• éléments sur votre consommation des médias en général et votre intérêt pour l’actualité;

• éléments sur l’influence éventuelle de la radio sur vos opinions et vos comportements.

Avantages, risques ou inconvénients possibles liés à votre participation Le fait de participer à cette recherche vous offre une occasion de réfléchir et de discuter en toute confidentialité sur vos habitudes de consommation radiophoniques et vos rapports avec votre média. Il est possible que le fait de raconter votre expérience vous mette mal à l’aise ou vous intimide. Si cela se produit, n’hésitez pas à en parler avec la personne qui mène l’entrevue. Celle-ci pourra changer de question ou détailler davantage si vous en exprimez le besoin. Vous pouvez choisir de ne pas répondre à une ou plusieurs questions. Participation volontaire et droit de retrait Vous êtes libre de participer à ce projet de recherche. Vous pouvez aussi mettre fin à votre participation sans conséquence négative ou préjudice et sans avoir à justifier votre décision. Si vous décidez de mettre fin à votre participation, il est important d’en prévenir la chercheuse dont les coordonnées sont incluses dans ce document. Tous les renseignements personnels vous concernant seront alors détruits.

Page 129: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

120

Confidentialité et gestion des données Les mesures suivantes seront appliquées pour assurer la confidentialité des renseignements fournis par les participants:

• les noms des participants ne paraîtront dans aucun rapport; • les divers documents de la recherche seront codifiés et seul le chercheur aura

accès à la liste des noms et des codes; • les résultats individuels des participants ne seront communiqués à personne

d’autre que la chercheuse et sa directrice de recherche; • les matériaux de la recherche, incluant les données et les enregistrements,

seront conservés (ex : lieu, matériel sous clé ou données sur ordinateur protégés par un mot de passe). Ils seront détruits deux ans après la fin de la recherche, soit juin 2021;

• la recherche fera éventuellement l'objet de publications dans des revues scientifiques, et aucun participant ne pourra y être identifié ;

• un court résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en indiquant l’adresse où ils aimeraient recevoir le document, juste après l’espace prévu pour leur signature.

Compensation Un lot tiré au sort d’une valeur de 20$ (sous forme de carte-cadeau) vous sera remis afin de compenser les frais encourus par votre participation à ce projet de recherche. Remerciements Votre collaboration est précieuse pour nous permettre de réaliser cette étude et nous vous remercions d’y participer. Signatures Je soussigné(e) ______________________________consens librement à participer à la recherche intitulée : « Nature des rapports de confiance ou du "contrat de communication" entre un usager et son média ». J’ai pris connaissance du formulaire et j’ai compris le but, la nature, les avantages, les risques et les inconvénients du projet de recherche. Je suis satisfait(e) des explications, précisions et réponses que le chercheur m’a fournies, le cas échéant, quant à ma participation à ce projet. __________________________________________ ________________________ Signature du participant, de la participante Date Un court résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en indiquant l’adresse où ils aimeraient recevoir le document. Les résultats ne seront pas disponibles avant le 30 juin 2019. Si cette adresse changeait d’ici cette date, vous êtes invité(e) à informer la chercheure de la nouvelle adresse où vous souhaitez recevoir ce document. L’adresse (électronique ou postale) à laquelle je souhaite recevoir un court résumé des résultats de la recherche est la suivante :

Page 130: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

121

J’ai expliqué le but, la nature, les avantages, les risques et les inconvénients du projet de recherche au participant. J’ai répondu au meilleur de ma connaissance aux questions posées et j’ai vérifié la compréhension du participant. __________________________________________ _______________________ Signature du chercheur Date Renseignements supplémentaires Si vous avez des questions sur la recherche, sur les implications de votre participation ou si vous souhaitez vous retirer de la recherche, veuillez communiquer avec Aline Vancompernolle (étudiante à l’Université Laval), au numéro de téléphone suivant : (XXX) XXX-XXXX, ou à l’adresse courriel suivante : [email protected]. Plaintes ou critiques Toute plainte ou critique sur ce projet de recherche pourra être adressée au Bureau de l'Ombudsman de l'Université Laval : Pavillon Alphonse-Desjardins, bureau 3320 2325, rue de l’Université Université Laval Québec (Québec) G1V 0A6 Renseignements - Secrétariat : (418) 656-3081 Ligne sans frais : 1-866-323-2271 Courriel : [email protected]

Copie du participant

Page 131: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

122

Annexe E Questionnaire d’entretien

1. À quel moment de la journée allumez-vous votre poste de radio ?

2. Quelles émissions écoutez-vous en particulier ?

3. Depuis combien de temps écoutez-vous ces émissions ?

4. Quelles activités faites-vous en parallèle quand vous allumez la radio ?

5. Où et à quel moment de la journée écoutez-vous le plus souvent ?

6. Quels sont vos sujets préférés dans l'émission que vous écoutez ?

7. Pourquoi choisissez-vous celles-là en particulier ?

8. Avez-vous déjà appelé la station ? Si oui, pourquoi ? Avez-vous appelé plusieurs fois ? Pouvez-vous me parler un peu d'une conversation que vous avez eue ?

9. En général, discutez-vous de ce que vous avez entendu à la radio avec votre famille, vos amis ou des collègues ? Si oui, à quelle fréquence ? Vous rappelez-vous une conversation ?

10. Que pensez-vous des animateurs que vous entendez ?

11. Que pensez-vous de leur sincérité ? Et de leur compétence ?

12. Si vous deviez donner une ou plusieurs raisons pour lesquelles vous avez choisi ce programme, lesquelles seraient-elles ?

13. Arrive-t-il que vous ne soyez pas d'accord avec ce que dit l'animateur ? Dans ses conditions, que faites-vous ?

14. Comment vous informez-vous ?

15. Est-ce que vous consultez d'autres sources d'information que la radio ? Si oui, lesquelles ?

16. Quel intérêt portez-vous aux nouvelles et à l'actualité une échelle de 1 à 5 ?

17. Vous considérez-vous au courant de l'actualité au Québec et en général dans le monde ?

18. Quels sont les sujets qui vous intéressent le plus quand vous écoutez les nouvelles?

19. Entendez-vous des différences entre ce que vous écoutez à la radio et les nouvelles que vous recevez à partir d'autres sources ? Si oui, lesquelles ?

Page 132: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

123

20. Quelle est votre interprétation de ces différences ? / Pourquoi pensez-vous qu'il y a des différences ? S'il y a des différences, à quelle source faites-vous davantage confiance ? Pourquoi ?

21. Que pensez-vous du fait que les auditeurs appellent et donnent leur avis en direct?

22. Êtes-vous le plus souvent d'accord ou pas d'accord avec leur avis ?

23. Avez-vous déjà changé d'avis à la suite des propos que vous avez entendus à la radio ? Si oui, pouvez-vous raconter à quel sujet ?

24. Est-ce que vous avez déjà eu envie d'appeler pour donner votre avis ?

25. Est-ce que vous avez déjà agi à la suite de quelque chose que vous avez entendu à la radio ? Si oui, était-ce une action dans le domaine politique ? Dans le domaine social ? Pouvez-vous raconter ce que vous avez fait ?

26. Votez-vous ? Est-ce qu'un parti vous attire plus qu'un autre, au fédéral, au provincial?

Page 133: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

124

Annexe F Questionnaire de données personnelles

Âge : 18-34 ans 35-44 ans 45-54 ans 54 ans et plus

Sexe : Homme Femme

État civil : Célibataire En couple Marié Divorcé Veuf

Occupation : ………………………………………………………………

Niveau de scolarité : ………………………………………………………………………

Quartier de résidence dans la ville : ……………………………………………………………………..

……………………………………………………….

Page 134: Nature des rapports de confiance ou du « contrat de ...Les brutes et la punaise, la chercheuse Dominique Payette parle plutôt de « radios de confrontation ». Depuis leur création

125

Annexe G Tableau Excel des profils

Auditeurs B C D E F G H I J K L M N O P Q -interaction avec la radio V V V V V V V V V

-discussion V V V V V V V V V V V V V V V V

-opinion + de la radio V V V V V V V V V V V V V

-opinion + des anim V V V V V V V V V

-action V V V V V V V V V V V

-change d'avis V V V V V V V V V

-rarement désaccord V V V V V

-confiance dans la radio V V V V V

-manque de confiance autres médias V V V V V V

-fidélité V V V V V V V V V V V V V

-partage idées de radio V V V V V V V

-vote conservateur V V V V V V V V V

-longue durée d'écoute V V V V V V V V V ? V V V V

-défense de la radio V V V V V V V V