MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

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MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME DOSSIER DE PRÉPARATION À LA VISITE musée De L’œuvre Notre-Dame 3, pLace Du château musée de l’œuvre Notre-Dame Service éducatif des musées, 2016 www.musees.strasbourg.eu Réservations et informations Musée Zoologique : 03 68 85 04 89 du lundi au jeudi de 14h à 17h Les autres musées : 03 68 98 51 54 du lundi au vendredi de 8h30 à 12h30 (vacances scolaires de 9h à 12h)

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MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

DOSSIER DE PRÉPARATION À LA VISITE

musée De L’œuvre Notre-Dame3, pLace Du château

musée de l’œuvre Notre-Dame

Service éducatif des musées, 2016www.musees.strasbourg.eu

Réservations et informations Musée Zoologique : 03 68 85 04 89

du lundi au jeudi de 14h à 17hLes autres musées : 03 68 98 51 54

du lundi au vendredi de 8h30 à 12h30 (vacances scolaires de 9h à 12h)

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Sommaire

LE MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

Histoire du musée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 4Bâtiments de l’Œuvre Notre-Dame . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 5Présentation des collections : 7 siècles d’art en Alsace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 6

UN MUSÉE D’ART RELIGIEUX

L’art comme support de dévotion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 7L’art du retableun retable au musée : le retable à la vierge de Ivo strigelLa dévotion privée au musée

Aller plus loin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 14L’âge des ateliers aux XIve-Xve sièclesLa représentation du divin

LIRE LE MOYEN ÂGE AU MUSÉE

La société médiévale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 21priercombattretravailler

Aller plus loin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 25pistes pédagogiques

Le jardin au Moyen Âge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 26Le jardin utileLe jardin d’agrémentLe jardin à travers des œuvres du musée

Aller plus loin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 34pistes pédagogiquesFiche descriptive de la visite accueillie : Du jardin au paradis

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LA CATHÉDRALE AU MUSÉE

La salle des administrateurs de l’Œuvre Notre-Dame . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 40La salle de la Loge, 1582 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 41Des éléments originaux de la cathédrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 41

Le décor sculpté des portails de la cathédraleLes trois portails du massif occidental (1280-1300)Le portail centralLe portail saint-Laurent (transept nord)Le portail du transept sud Le jubé, un élément démonté au XvIIe et reconstitué au muséeLe vitrail

Aller plus loin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 53La technique du vitrailles phases de construction de la cathédralepistes pédagogiquesDescription de la visite accueillie : La cathédrale s’invite au musée

VERS LES TEMPS MODERNES

Le portrait au musée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 61L’icône et le principe de réalitéNaissance du portrait moderneL’image de l’artisteLe portrait en représentationLe portrait comme système

Aller plus loin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 69

La nature morte au travers des œuvres de Sébastien Stoskopff . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 71De la nature morte... à la vanitéLecture d’une vanité

Aller plus loin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 77pistes pédagogiquesDescription de la visite accueillie : Vies silencieuses

ANNEXES

Visiter le musée/ Informations pratiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 83Plan d’orientation du musée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 85

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LE MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

situé au pied de la cathédrale, le musée de l’œuvre Notre-Dame propose unedécouverte de sept siècles d’art à strasbourg et dans la région du rhinsupérieur. ses riches collections médiévales et renaissance témoignent dupassé prestigieux de la ville, qui fut du XIIIe au XvIe siècle l’un des plusimportants centre artistique de l’empire germanique.

Les chefs d’œuvre de la statuaire provenant de la cathédrale — l’église, lasynagogue ou le fameux tentateur — y côtoient les plus beaux témoignages del’art haut rhénan des Xve et XvIe siècles (sculptures de Nicolas Gerhaert deLeyde, peintures de conrad Witz et hans Baldung Grien, vitraux de peterhemmel d’andlau).

ce parcours, synthèse de tous les arts, s’accomplit dans le cadre architecturalparticulier du musée : derrière les pignons de la maison de l’œuvre Notre-Dame, affectée depuis le XIIIe siècle à l’administration du chantier de lacathédrale, les décors intérieurs et le jardinet gothique participent intimementdu passé strasbourgeois.

Histoire du musée

La création du musée et son installation dans la maison de l’œuvre Notre-Dame sont dues à Hans Haug, conservateur puis directeur des musées destrasbourg de 1919 à 1963. artisan de la réorganisation d’une grande partiedes collections des musées de la ville, mettant en valeur ces siècles du MoyenÂge et de la Renaissance, « essentiels à la formation de l’alsace moderne,siècles où strasbourg construisit sa cathédrale et la plupart de ses églises, oùelle conquit ses libertés municipales, où elle connut la succession des formesd’esprit qu’ont reflété l’art roman et l’art gothique, où la ville devint le berceaude l’imprimerie, et bientôt le grand centre rhénan de l’humanisme et de laréforme ».

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Le musée prit le nom des bâtiments qu’il occupait et fut ouvert au public dès1931. Il présentait alors au rez-de-chaussée les ensembles lapidaires déposésde la cathédrale et une section de ferronnerie, et dans les étages les sectionsde mobilier, tapisseries et vitraux, ainsi que la statuaire en bois et une salleconsacrée à l’iconographie de la cathédrale. Il connut ensuite plusieurs phasesd’agrandissement et l’adjonction successive d’ensembles de peintures,d’orfèvrerie, d’archéologie, de mobilier et de sculptures romanes. cescollections provenaient des musées, mais aussi des fonds collectés par lasociété pour la conservation des monuments historiques d’alsace, constituésen particulier à la suite des nombreuses destructions affectant des édificesromans ou gothiques opérés à la fin du XIXe siècle.

plusieurs maisons et décors intérieurs strasbourgeois, soustraits à ladémolition, ainsi qu’un grand nombre d’éléments architecturaux anciens,furent aussi progressivement réimplantés sur le site. ce n’est qu’en 1956 quehans haug acheva le parcours complet, promenade à travers sept siècles d’artconçue comme une suite de dialogues entre les œuvres et leur cadrearchitectural.

Bâtiments de l’Œuvre Notre-Dame

Le musée est installé dans un ensemble architectural dont le noyau est laMaison de l’Œuvre Notre-Dame, siège depuis le XIIIe siècle de l’institutionchargée de la collecte et de la gestion des fonds nécessaires à la constructionet à l’entretien de la cathédrale. cette maison prit le nom de Frauenhaus(maison de Notre-Dame), et accueillit durant plusieurs siècles la recette etl’administration de l’œuvre Notre-Dame, le logement du receveur et celui del’architecte, enfin la loge des maçons et tailleurs de pierre de la cathédrale quiformaient une corporation distincte de la tribu des maçons et tailleurs de pierrede la ville.

Les deux corps du bâtiment de l’œuvre Notre-Dame flanquent le côté sud de laplace de la cathédrale. celui de gauche, au pignon en simples gradins, date de1347 et fut remanié en particulier au XvIe siècle. celui de droite, au pignon àriche décor de volutes et de vases, a été construit en 1579 sur les plans del’architecte hans thoman uhlberger en un style renaissance mêlé deréminiscences de la fin de l’époque gothique. Les deux corps, réunis par desgaleries, sont desservis par un superbe escalier en vis dû au même architecte.tout le rez-de-chaussée du bâtiment renaissance est occupé par l’anciennesalle de réunion des maçons et tailleurs de pierre de la cathédrale, dont lesmurs portent les restes de peintures murales attribuées à Wendel Dietterlin etpartiellement surpeintes à la fin du XIXe siècle. Deux colonnes portent cinq

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compartiments de plafond et une voûte, rendue nécessaire par la présence aupremier étage du caveau des archives. uhlberger a fait figurer sa marque detâcheron et celle de l’œuvre Notre-Dame sur les deux clefs de voûte.

Présentation des collections : 7 siècles d’art en Alsace

De la célèbre tête romane « de Wissembourg », l’un des plus anciens vitrauxconnus, aux corbeilles de verres peintes par le maître de la nature mortesébastien stoskopff au milieu du XvIIe siècle, les collections de peinture,sculpture, vitraux, orfèvrerie ou mobilier du musée de l’œuvre Notre-Damemanifestent la vitalité de l’art strasbourgeois au cours du moyen âge et de larenaissance.

La statuaire du XIIIe siècle provenant de la cathédrale de strasbourgconstitue l'un des ensembles les plus prestigieux du musée. Les sculpturesfurent pour la plupart déposées au moment de la révolution. elles furentparfois réimplantées sur l'édifice, puis à nouveau déposées au tout début duXXe siècle pour les garantir contre les intempéries et la pollution. sur lemonument ont pris place des copies.Les sculptures, provenant pour la plupart des portails et du jubé, se rattachentaux ateliers successifs auxquels l'on doit la construction du transept et duportail sud, puis du jubé, enfin de la nef et des portails occidentaux de lacathédrale.

Le second étage du musée, suite de petites salles de caractère intime auxboiseries gothiques rapportées, est entièrement consacré aux arts duXVe siècle. Les collections témoignent de l'extraordinaire essor artistique quise manifeste à strasbourg et dans toute la plaine du rhin supérieur à la fin dumoyen âge. La peinture de retables, la sculpture sur bois et sur pierre, lagravure, le vitrail, la tapisserie et l'orfèvrerie connaissent un développementconsidérable à strasbourg comme à colmar, Bâle ou Fribourg, et s'enrichissenttout au long du siècle d'influences multiples, en particulier bourguignonnes etflamandes. Dans tous les domaines, quelques très grands artistes influencentl'évolution des arts bien au-delà des limites de la province. Le sculpteur Nicolasde Leyde, le peintre et graveur colmarien martin schongauer, le graveur e. s.de strasbourg, le peintre bâlois conrad Witz, le maître verrier peter hemmeld'andlau marquent cette période extraordinairement féconde.

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UN MUSÉE D’ART RELIGIEUX

L’art comme support de dévotion

pour le christianisme occidental, l’image doit contribuer à l’édification dupeuple. c’est dans ce contexte que naît et se développe le retable, décord’église, élément de liturgie et œuvre d’art.si les commanditaires les plus actifs appartiennent au clergé et, plusparticulièrement aux ordres monastiques, à partir du Xve siècle, il y a inflationdes commandes laïques, émanant non seulement des corporations, desconfréries, voire des municipalités, mais également de citadins aisés.en effet si l’image se développe dans la sphère publique, elle n’est pas absentede la sphère privée. on la rencontre alors sous d’autres formes : petitespeintures, gravures, retables portatifs, livres d’heures, ouvrages de piété,souvent rédigés en langue vulgaire, qui offrent un support à la méditationcontemplative individuelle.Dans la piété de l’époque, l’achat d’une image de dévotion devenait un actesymbolique. Le propriétaire acquérait une « icône domestique », qui était nonseulement un support de dévotion mais aussi un certificat de piété : les imagesdevenaient ainsi les garantes visibles d’une attitude intérieure.à la fin du moyen âge la dévotion par l’image devient une pratique générale.

L’art du retable

La réalisation d’un retable d’autel est le fruit d’un travail collectif quiréunit menuisiers, sculpteurs et peintres, souvent sous la directiond’un seul maître responsable de l’entreprise.L’usage du contrat écrit, qui lie l’exécutant et son client, segénéralise à la fin du moyen âge. ce document livre d’importantesindications sur les montants des paiements, les délais d’exécution,les matériaux utilisés ou le programme iconographique, parfoismême exprime en détails certaines exigences spéciales ducommanditaire.

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Le retable est unsystème d’imagesdont le support estune structure debois ou de pierrequi surmonte l’auteld’une église.

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L’abondance remarquable de la production sculptée est servie par l’essoréconomique des villes et l’organisation du marché. si les sculpteurs sedéplacent fréquemment au gré des commandes, les œuvres d’art aussivoyagent aisément suivant les mêmes chemins que les marchandises, lesretables souabes empruntant ainsi les routes commerciales qui mènent, parexemple, vers les alpes. riches cathédrales ou modestes églises paroissiales, monastères, chapelles etoratoires particuliers s’ornent alors de multiples retables en bois sculptédressés sur le maître-autel, sur les autels secondaires ou contre les piliers desnefs.

au Xve siècle, le retable sculpté prend une ampleur sans précédent dans saforme spécifiquement germanique. Dans le chœur des églises et des chapelles, il s’étire en hauteur jusqu’à lavoûte et, détaché du mur, s’inscrit harmonieusement dans l’espace intérieur dumonument où la lumière, largement diffusée par les fenêtres gothiques,enveloppe les sculptures et accentue la légèreté de la structure. surélevée parla prédelle au-dessus de la table d’autel, la caisse abrite de grandes figuressculptées sous des dais flamboyants. elle est munie de volets mobiles, peintsà l’extérieur et souvent ornés de bas-reliefs à l’intérieur, et surmontée d’uncouronnement élancé et ajouré, composé de statuettes et d’élémentsarchitecturaux. à l’ouverture et à la fermeture des volets imposées par le calendrier liturgiquerépond une progression formelle et iconographique délibérée qui fait passerdes simples peintures des volets aux sculptures de la caisse, les images lesplus sacrées et les plus élaborées. Il est fermé les jours ordinaires ou de deuils.

La caisse et la prédelle des retables, généralement en bois résineux, étaientconfectionnées par les menuisiers souvent chargés aussi de sculpter leséléments décoratifs. Les statuettes du couronnement, les figures de la caisseet de la prédelle, les reliefs des volets étaient l’œuvre des sculpteurs. L’emploidu tilleul, bois léger et tendre qui se prête bien à toutes les virtuosités de l’outil,est une spécificité de la sculpture gothique tardive de l’allemagne méridionale,mais d’autres essences sont utilisées parallèlement, ainsi le chêne et le noyerdans les pays rhénans et le pin dans les régions alpines.Les sculptures étaient travaillées couchées, fixées sur la tête et sous la basepar un étau, et taillées dans une pièce de bois principale à laquelle pouvaientêtre assemblés par des chevilles des éléments secondaires en saillie, commeles mains ou certains accessoires. Les figures étaient généralement évidées àl’arrière afin de permettre au bois de jouer sans se fendre.

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Un retable au musée : le retable à la Vierge de Ivo Strigel

Retable à la ViergeAtelier de Ivo StrigelMemmingen (Souabe) vers 1505-1510tilleul polychrome et panneaux de sapin123 x 96 x 22 cm(partie centrale)provient de l’église de Morissen dans les Grisonssalle 29

L’atelier de la famille strigel est l’un des grandsateliers de souabe (sud-ouest de l’empiregermanique). créé à memmingen par hans strigelau milieu du Xve siècle, puis dirigé par son fils Ivoentre 1462 et 1516, cet atelier a exercé trèsrapidement un quasi monopole dans laproduction de retables peints et sculptés pour lesvallées voisines.

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La surface du bois est en principe dissimulée par une riche polychromie,complémentaire du travail du sculpteur. posées sur une ou plusieurs couchesde préparation, les couleurs et les feuilles d’or ou d’argent sont rehaussées dedécors variés et complexes. Des « brocarts appliqués » imitent les précieuxtissus de soie, les motifs a sgraffito sur les bordures des vêtements et les glacistransparents appliqués sur l’or ou l’argent donnent un reflet coloré au métal.L’aspect des carnations où sont peints délicatement les veines, les sourcils etde petites mèches en prolongation des chevelures sculptées, cherche à imiterla coloration naturelle des chairs et accentue l’expression des visages.

La polychromie dans son ensemble souligne la présence physique des figuressculptées mais accuse surtout par sa richesse chatoyante et irréelle lecaractère éminemment précieux d’images sacrées à l’échelle du divin, hors dumonde des humains.

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Fermé les jours ordinaires de la semaine, durant l’avent et le carême. La partieextérieure constitue une sorte d’introduction à la perfection spirituelle etartistique de l’intérieur.

Le retable de la Vierge de Ivo Striegel

Volets mobiles

Saint Placide

Saint Maurice

Le Christentouré desapôtres

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ouvert les jours de fêtes liturgiques. Il révèle alors à la lueur des cierges lasplendeur et les mystères religieux de l’intérieur.

Saint Flori n

Dais sculptéformé d’un arc trilobé

La Vierge à l’Enfant

Saint Lucius

Caissecentrale

Prédellepartie inférieure

d’un tableaud’autel

Le Christentouré desapôtres

PhylactèreBanderole portant le textede la parole sacrée ou le

nom d’un personnage

Le retable de la Vierge de Ivo Striegel

SaintSébastien

SaintFlorian

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La dévotion privée au musée

si on trouve des petits retables dans un certain nombre de chapelles privées,la dévotion privée se traduit aussi par la multiplication d’images de toutesnatures.

Vierge en prière dans un oratoire Suiveur de Conrad Witz1440/50huile sur bois39,6 x 28,4 cmsalle 21

La vierge sous les traits d’une jeune fille est représentéeagenouillée devant un autel dans une petite chapelle, elleest entourée d’anges. elle est vêtue d’une robe verte etporte un collier de perles dans les cheveux. sur l’autel estposée une châsse ouverte représentant trois statues(David et deux prophètes). Devant la châsse se placentdeux candélabres argentés et un livre ouvert. L’oratoire estvoûté ; les arêtes sont de pierre rouge et le reste del’architecture est crépi de blanc. un grand rideau rouge sedéploie derrière la v ierge. Il est entrebâillé sur la droite etlaisse un passage à quatre anges. au-dessus du rideauapparaissent à mi-corps trois anges qui chantent. on notela présence d’une couronne de roses au-dessus de lachâsse, le sol de la chapelle est recouvert de roses rougeset blanches.

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Les Amants trépassés Souabevers 1470huile sur panneau de sapin62,2 x 40 cmsalle 23

Le panneau figurant le couple des amants trépassésappartenait auparavant à un double portrait macabre dontil constituait le revers. sur l’avers, un Couple d'amoureux,est aujourd’hui conservé au musée de cleveland (états-unis). La mise en regard des deux peintures fonctionnecomme une méditation sur la vanité des choses terrestreset la fragilité de l’existence, « ce que nous sommes vous ledeviendrez ». ce type de tableau, dont la formule estapparue au milieu du Xve siècle, se rattache à despratiques de dévotion privée. Les corps nus d’un homme et d’une femme sont drapésdans des suaires. une libellule ou « demoiselle de la mort »(selon le terme médiéval) est posée sur le bras del’homme. Le réalisme brutal de la scène et la paradoxalerobustesse des corps décharnés et rongés par la vermineest une allusion dramatique à la fugacité de la jeunesse,de la beauté et de l'amour. cette œuvre s'inscrit dans latradition germanique de la représentation de la mort etsemble s'inspirer d'une pointe-sèche de l'un des grandsmaîtres anonymes de la gravure allemande de ladeuxième moitié du Xve siècle, le maître du Livre deraison, représentant Le Jeune homme et la mort. untemps attribué à tort au jeune mathias Grünewald, cepanneau a été depuis donné avec vraisemblance à unmaître d'ulm en souabe dans le sud de l'empiregermanique.

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Aller plus loin

L’âge des ateliers aux XIVe-XVe siècles

Un cadre corporatifLe métier de peintre et de sculpteur s’exerce dans le cadre d’une corporation.comme tous les travailleurs manuels qui produisent et vendent eux-mêmesleur ouvrage, ils sont réunis en « corps », fixent les règles de la formation,arbitrent les litiges et secourent les défavorisés. Le maître doit acquérir le droit de bourgeoisie dans la ville où il installe sonatelier et doit s’inscrire à la corporation dont dépend son métier. Le nombre de ses compagnons et de ses apprentis, la durée du tempsd’apprentissage ou du voyage des compagnons peuvent être fixés avecprécision par les règles corporatives.L’aisance matérielle et la situation sociale des maîtres est très variable à la findu moyen âge. certains peuvent bénéficier d’une position élevée dans la cité,être bourgmestre ou membre du conseil. Leur art attire parfois les louangesdes princes, mais ils ne sont pas véritablement attachés à un souveraincomme dans les cours européennes autour de 1400 et à la renaissance. Le travail collectif est favorisé sous la direction du maître qui répartit les tâchesentres ses compagnons et en surveille l’exécution. Un métier héritéLe choix de devenir un artiste est rarement une vocation. Le métier futur exercépar l’enfant est dicté par les parents, qui décident de l’entrée dans unapprentissage. Le plus souvent le fils continue le métier des aïeux. La structuredes ateliers est familiale et héréditaire. Les femmes n’ont pas leur place dansces successions.

L’apprentissageL’idée d’un « don » pour exercer une telle profession est étrangère à la mentalitéde l’époque. à défaut d’un talent, d’autres qualités sont requises chez lesapprentis. L’apprentissage commence vers l’âge de dix ans, il est long etcomplexe. L’enfant vit chez le maître, il a un statut qui le place entre lesdomestiques et les enfants de la famille. Il partage une chambre avec sescondisciples, mange à la table du maître mais reçoit une nourriture plusmodeste. Durant les premières années il ne reçoit aucune rétribution, et ilarrive que sa famille paie pour son entretien. à mesure qu’il devient capable,et donc utile, il commence à être payé.Le maître a une autorité totale sur les garçons qui lui sont confiés. Il arrive deles adopter. pendant ces années, la vie de l’apprenti est quasi monacale. L’enfant est initié aux tâches matérielles. au sein de l’entreprise sont

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fabriquést matériel et ingrédients – les pinceaux et les couleurs – et lessupports sont apprêtés.

autour de 1400, dans un traité, il Libro dell’arte (le livre de l’art), cenninocennini énumère les tâches imposées aux jeunes peintres :

« (…) Le point de départ de tous ces travaux manuels, c’est le dessin et lapeinture. ces deux parties exigent de savoir écraser et broyer, appliquer lacolle, recouvrir d’une toile, enduire de plâtre, le racler et le polir, faire desornements en relief, avec du plâtre, passer du bol, dorer, brunir, faire de latempera, des fonds, épousseter, gratter, greneler ou grener finement, marquerles contours, peindre, orner, vernir sur panneau ou sur un retable. pourtravailler sur un mur, il faut mouiller, enduire, lisser, polir, dessiner, peindre àfresque, achever à sec, détremper, faire des ornements et finir (le travail) surmur. »

cennini enseigne ensuite comment préparer un parchemin, un papier chiffonou un papier à décalquer ; la manière de travailler sur le verre ; de mettre enplace les tesselles, ou morceaux de mosaïque, qui peuvent être en verre coloré,en pierre, ou consister en de petits bouts de tuyaux de plume, en grains demillet ou fragments de coquille d’œufs. Il explique la technique qui permet depréparer les queues des écureuils qu’on nomme « petits gris » ou les soies deporc pour les réunir en pinceaux. Il dit comment réaliser une colle, « avecplusieurs sortes de poissons » ou « avec des bouts de museaux de chevrette,des pieds, des nerfs et beaucoup de fragments de peau ». surtout il expose les recettes pour préparer les différents pigments, à partir deterres, de pierres ou de plantes, broyées puis détrempées pour en faire unepâte. Il leur apprend à utiliser chaque pigment, en fonction de sa composition,selon l’effet recherché et la technique utilisée – peinture à l’eau et à l’œuf surdu parchemin, peinture à la colle sur un support de bois, ou encore à l’eauseule sur la préparation humide…

Premières responsabilitésL’atelier est un centre de production, les apprentis n’y reçoivent donc pas unenseignement théorique. c’est en exécutant les tâches subalternes pour lesœuvres commandées au maître que le garçon se fait la main.Il commence par poser la couleur dans les vastes aplats qui forment le fond desfresques. Il dore les panneaux, réalise les auréoles.Il apprend ensuite à moduler la teinte (clair-obscur) et reçoit la tâche de peindreles vêtements qui enveloppent les personnages.Il met en couleur les architectures, les rochers qui constituent le décor surlequel se détachent les figures préalablement tracées par le maître. après quelques années il commence à intervenir sur le dessin même.

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Il reporte sur le support définitif la composition esquissée sur un patron enl’agrandissant par une mise au carreau. Il se charge des bordures, ou des petites peintures incrustées dansl’architecture des retables. à la fin on lui confie l’exécution de commandes de second ordre. Il a alorslicence d’inventer des compositions. Il devient compagnon. Il est rétribuécomme un ouvrier confirmé. Les étapes du cursus sont les mêmes lorsqu’il s’agit d’un sculpteur.

La représentation du divin

comment les religions présentent et se représentent-elles le divin, latranscendance, les êtres supérieurs ?toute religion est porteuse d’une vision du monde et de l’au-delà et statued’emblée sur la possibilité de cet au-delà. elle tient une position déterminéequant à la figuration du divin. cette position peut varier selon les temps et leslieux. Dans certaines d’entre elles la figuration du divin fut la règle. Il n’est que desonger, entres autres, à celles de l’Égypte et de la Grèce ancienne, ou del’Amérique précolombienne, qui ont multiplié les images ornementales oucultuelles de leurs dieux.à l’inverse les monothéismes abrahamiques (judaïsme, christianisme, islam)se singularisent par une pratique restrictive voire totalement abstinente en lamatière — pas d’image de Dieu au départ. ces trois religions ne sont pashostiles à la figuration comme telle mais seulement à celle de Dieu. Leurinterdiction de le figurer découle de l’interdiction des images de culte formuléedans le Décalogue, cœur de la torah : eX. 20,4 « tu n’auras pas d’autres dieuxdevant moi. tu ne feras aucune image sculptée, rien qui ressemble à ce qui estdans les cieux, là-haut, ou sur la terre, ici-bas, ou dans les eaux, au-dessous dela terre. »Le Dieu commun aux trois monothéismes abrahamiques n’a eu ni le mêmestatut ni la même situation iconique dans chacun d’eux.

Dans le judaïsme : L’interdiction de toute image cultuelle de Dieu promulguéedans le Décalogue n’est pas pour autant opposée à la figuration comme telle,mais de l’origine à nos jours l’interdiction de faire de Dieu la moindre peintureanthropomorphe a été une constante. Il est admis depuis les premiers sièclesde notre ère, que Dieu peut être évoqué par des signes indirects : ainsi la main,le tétragramme, l’ange, la Gloire ou le reflet de sa Gloire sur ses fidèles, maisjamais donc une image ayant valeur de portrait. son nom n’est jamaisprononcé ni écrit, on pratique son évocation par contournement : « l’éternel ouadonaï, béni soit-il ».

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Dans l’islam : Le statut iconique de Dieu est encore plus restrictif que dans lejudaïsme. seul est tolérée la graphie plus ou moins stylisée de son Nom. Lalettre du coran, pourtant ne condamne pas les images religieuses, maisseulement les idoles pré-islamiques. elle entraîne toutefois à considérer que lafabrication et surtout la vénération des images, leur usage cultuel oudévotionnel, seraient une grave rechute dans le paganisme. Quelques hadithsrevêtus de l’autorité du prophète condamnent l’image des êtres vivants en tantqu’elle paraît rivaliser avec l’activité créatrice de Dieu et revêtir de ce fait uncaractère quasi-blasphématoire. D’où une réticence séculaire de l’islam à lafiguration. toute image de Dieu, en tout cas, y est bannie. Le caractèrefoncièrement impensable de la figuration d’allah semble avoir été étendu à sonprophète, rarement représenté et toujours avec un visage sans traits et jamaissous forme de portrait. cela explique l’absence de toute image figurative dansles mosquées, les madrasa, les sépultures, les manuscrits du coran, d’où ledéveloppement d’un art décoratif abstrait et l’essor de la calligraphie. en ce qui concerne la prononciation de son nom, contrairement au judaïsmeelle est encouragée, pourvu qu’elle soit digne.

Dans le christianisme : s’il a manifesté très tôt sa préférence pour lareprésentation du christ, celle-ci a néanmoins connu des vicissitudes.Jésus n’a manifesté aucun intérêt pour les images plastiques, les apôtres nonplus. Ils semblent n’avoir voulu compter que sur la parole et l’exemplecommunicatif de la vie des témoins.mais le monde romain, dans lequel se développe le christianisme, regorged’images. Dès le IIIe siècle, des représentations sont faites dans lescatacombes et sur des objets quotidiens.en 386 à compter du décret de théodose le christianisme devient religiond’état. Les absides des églises sont alors décorées de représentations duchrist, des apôtres et des saints. un véritable culte chrétien des images estattesté.Le mode figuratif qui caractérise le mieux l’art chrétien consiste à figurer Dieuen christ, c’est-à-dire faire l’effigie de celui qui a dit « Qui m’a vu a vu le père »(Jn 14,9) et dont le premier concile de Nicée en 325 a proclamé qu’il est« Dieu né de Dieu, Lumière née de la lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu, demême nature que le père ».La question des images reçut un cadre normatif sanctionné par la plus hauteautorité quand, vers 599-600, le pape Grégoire le Grand réprouva l’adorationdes images mais les défendit en tant que « livre des gens incultes ». entre 726 et 843, l’empire Byzantin est ravagé par la querelle des images. Leconflit se termine par la victoire des partisans des images les iconodules contreles briseurs d’images les iconoclastes. Ils énoncent au concile de Nicée en 787la formule dogmatique de l’avenir : « car les honneurs rendus aux images setransmettent à ce qu’elles représentent, et qui vénère l’image vénère en elle

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l’être qu’elle figure ». cela stimula puissamment sa figuration sous trois grandsmodes :- par des symboles indirects - en Dieu masculin, âgé, omnipotent, chargé des attributs des différentes

formes de pouvoir - sa figuration en christ par la suite l’art médiéval, en Orient comme en Occident, a regorgé d’imagesdu christ, sur tous les supports, dans tous les styles et dans tous les formats.Images portraits comme celle du christ pantocrator byzantin, christ en croix ;images narratives du christ (Naissance, enfance, passion, résurrection).peu à peu des images de Dieu autres que celles du christ voient le jour, ellesvont proliférer en occident. La plupart de ces images impliquent par leur seuleexistence que l’on tient désormais pour licite de figurer le père en homme. au XIIe siècle plusieurs types de représentation de la trinité apparaissent : sousla forme de trois hommes, tête à trois visages, trône de grâce (père assistenant le christ en croix).La diversification et bientôt la prolifération de ces images osant explorer lemystère intime de Dieu constituent un fait de civilisation de première grandeuret ne semblent pas avoir été programmées par les autorités de l’église, maisrésulter d’une « poussée » à l’œuvre sur plusieurs siècles. Durant les quatre derniers siècles du Moyen Âge (XIIe- Xve), la règle duchristomorphisme de la représentation du Dieu chrétien perd du terrain. elleest battue en brèche par la diffusion de l’image du père, qui tend à assumer lafonction de théophanie glorieuse délaissée par un christ de plus en plusmarqué par la souffrance.à la même époque (XIIIe–Xve), sous l’influence de l’art byzantin, on assiste à lamontée en puissance de l’image pathétique du christ de douleur. Dès le XIIIe

siècle, la croix commence à l’emporter sur la gloire et un puissant processusd’humanisation de la figure de Dieu s’amorce, qui triomphera au Xvesiècle dansl’art de la spiritualité. L’art se met à détailler comme jamais il ne l’avait faitauparavant, le corps meurtri du christ, ses plaies…À partir du XIVe siècle, la production d’art religieux connaît une forteprogression, due en particulier au développement de la dévotion privée. elle sedouble de la multiplication des thèmes représentés. Les saints (qui sont choisiscomme protecteurs aussi bien des personnes privées que des communautéset des villes), leur martyre, concurrencent l’image du christ. Vers la RéformeL’utilisation des images est justifiée durant tout le moyen âge en occident partrois arguments cités par les théologiens : ce sont les livres des gens incultes,elles stimulent la dévotion et rappellent l’exemple des saints. contrairementaux sacrements et aux reliques, leur aspect et leur mode d’utilisation ne sontpas régis par des règles strictes, et l’église n’en organise aucune censure. Ilarrive parfois que des mesures soient prises lorsqu’une image crée scandale,

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par exemple lorsqu’elle constitue de manière avérée un moyen frauduleuxd’extorquer de l’argent aux pèlerins. certains théologiens s’inquiètent pourtantde la diffusion de thèmes qu’ils jugent hétérodoxes ou peu convenables. JeanGerson, chancelier de la sorbonne au début du Xve siècle, puis saint antonin,archevêque de Florence, émettent des critiques envers certaines images, maisleurs écrits ne sont pas suivis d’effet ; le plus souvent l’église se méfie plus dela critique des images que des images elles-mêmes, car cette critique estfréquente dans les milieux hérétiques. peu avant la Réforme, l’humaniste érasme de rotterdam considère certainsaspects du culte chrétien des images comme des superstitions ridicules. pourles réformateurs, la parole de Dieu retransmise par les écritures prime sur lerituel. Les images et les cérémonies sont rejetées comme caractéristiquesd’une église fourvoyée. martin Luther, l’initiateur de la réforme souhaite avanttout mettre fin à la pratique des bonnes œuvres, car seule la foi en Jésus-christpeut servir de justificatif devant Dieu.cette condamnation, qui ôte tout fondement théologique aux donations et doncaux images, fournit aux réformés radicaux des arguments en faveur del’iconoclasme. Dès 1522 dans plusieurs villes de l’empire germanique et de lasuisse des pamphlets produits sous la forme de tracts dénoncent le culte desimages comme idolâtrie.

Images détruites, images transforméesL’influence de la réforme sur l’enlèvement des images est très variable selonles villes. alors que dans les régions calvinistes les destructions et l’évacuationsont systématiques, les régions luthériennes conservent une grande partie dudécor de leurs églises.à strasbourg une première poussée d’iconoclasme se produit en septembre1524 menée surtout par les artisans. L’autorité de la ville, le magistrat,intervient à partir de 1525 dans le sens d’un iconoclasme discret, progressif etbien réglementé. Les années 1529-1530 voient l’officialisation du processusde la réforme à strasbourg, avec l’abolition de la messe et le retrait presquetotal des images.

La représentation du Divin dans l’Église réforméeen rejetant le décor médiéval des églises, la Réforme suscite l’apparition d’uneculture matérielle qui lui est propre. Dépouillées de leurs images et souventbadigeonnées de blanc, les églises se transforment en salles de prédication.Dans un souci d’humilité, les objets en métaux précieux sont remplacés par descalices de bois et ou d’étain. L’activité des orfèvres s’oriente alors vers laproduction de pièces profanes de prestige pour les corporations et la bourgeoisie.La représentation de Dieu n’étant plus acceptée, on invente un symbole, letétragramme, triangle de la trinité avec un œil inscrit en son centre. La figurationdes saints est par contre maintenue sur certains sceaux et monnaies.

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Le statut de l’image dans l’Église catholique à partir de la Contre RéformeLors du Concile de Trente (1545-1563), il est énoncé que l’église veilledésormais à ce que les peintres respectent à la lettre les écritures.L’eucharistie, le culte des saints et la dévotion à la vierge seront abondammentreprésentés. partant du principe que l’image doit instruire les fidèles, le concileinsiste sur ce qu’il convient de bannir des églises. Les peintres devrontdistinguer le sacré du profane, ils ne devront pas offenser la pudeur, la peintureexige une lecture simple, immédiatement compréhensible. Le peuple doitpouvoir s’identifier aux figures des saints, se sentir concerné par le message,et l’image doit être le ressort émotif de la piété.continuité de ces principes : au XvIIIe siècle, le pape Benoît XIv énoncera que« Dieu peut être figuré tel que l’écriture rapporte qu’il a daigné apparaître », ledroit étant tacitement reconnu aux artistes de combiner les théophaniesbibliques en leur empruntant divers motifs, pour les besoins de la figuration dela trinité. Il en est encore ainsi aujourd’hui.

Pistes pédagogiques

pour mettre en valeur la peinture comme support de dévotion

œuvres abordéesLa Prière du riche et du pauvre

s’attacher à : Décrypter symboliquement le tableau, mettre en lumière la fonction dupanneau : support de dévotion délivrant un message religieux. Noter les moyens plastiques employés par le peintre pour arriver à ses fins(liberté prise par rapport à l’échelle, création de liens entre différentes scènes,représentation de ce qui est caché, etc.)Fabriquer une image ou un film (croquis, montage photo, mise en scène avecprise de vue, vidéo, etc.) reprenant la même fonction : faire passer unmessage, un discours, par l’image. essayer d’exploiter les moyens plastiquesutilisés par le peintre.

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LIRE LE MOYEN ÂGE AU MUSÉE

La société médiévale

Le moyen âge qui s’étend sur plus de 10 siècles est une période présente sousde nombreux aspects au musée de l’œuvre Notre-Dame. Il nous a sembléintéressant de partir de la citation d’adalbéron, évêque de Laon, qui en l’an1020 caractérise ainsi la société du moyen âge dans le poème au roirobert XI :

« on croit que la maison de Dieu sur terre est une, mais elle est triple. Les unsprient, d’autres combattent et d’autres enfin travaillent. Les trois ordres sontindispensables l’un à l’autre : l’activité de l’un permet aux deux autres devivre ».

La société médiévale est en effet divisée en trois ordres et cette divisionsemble immuable : ceux qui prient (le clergé) , ceux qui combattent (leschevaliers) et ceux qui travaillent (les paysans et les artisans).

Le parcours proposé suit cette division tripartite.

Prier

Dotée d’une organisation puissante, l’église est au cœurde la société médiévale. à sa tête, le roi reçoit sacouronne de Dieu. tous les occidentaux ont le sentimentd’appartenir à une même communauté, la chrétienté. L’église gouverne l’ensemble de la société. elle édicte sespropres lois, a ses tribunaux et possède d’immensesdomaines fonciers. Le catholicisme est alors la seulereligion en europe et sa pratique est obligatoire.

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Linteau à l’agneau pascalfin Xle siècleAncienne église romane de Mutzigg rès rosesalle 2

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Les fidèles considèrent que l’essentiel pour le croyant est d’assurer son salut.afin d’échapper à l’enfer, ils demandent la protection des saints dont ilsespèrent souvent des miracles. pour vivre leur foi et accéder au paradis, ilsentreprennent des pèlerinages, vénèrent les reliques et construisent desédifices religieux.Dans chaque ville, dans chaque village, la première construction de pierre avecle château est l’église, car la maison de Dieu doit être solide.

Dans les salles 2 et 3 sont déposés de nombreux éléments d’architecture ayantappartenu à des édifices religieux : chapiteaux, cuves baptismales, vantaux,portes, vitraux, linteaux, bénitiers. ces différents éléments historiés véhiculentles symboles de la foi.Leurs provenances sont diverses, strasbourg, Bergholtz-Zell, eschau,Bischoffsheim, mutzig, cela montre à quel point la religion catholique imprègnel’environnement. Les fidèles assurent leur salut en faisant « de bonnes œuvres », ce qui permetde financer les constructions d’églises. Dans le musée on peu également aborder cet ordre dans toutes les sallesconsacrées à la cathédrale de strasbourg. enfin, de nombreuses peinturesreligieuses permettent de saisir les pratiques de dévotion.

Combattre

Les siècles du moyen âge sont jalonnés de guerres. La guerremédiévale c’est d’abord une longue suite de querelles entreseigneurs, de sièges, de chevauchées de courte durée. Lesbatailles ont lieu surtout en été et sont interdites les dimancheset pendant le carême. c’est aussi près de trois siècles decroisades qui entraînent loin d’europe des armées de chevaliers.c’est encore de 1337 à 1453 la guerre de cent ans qui met faceà face anglais et Français.L’armée est composée de soldats à pied (piétaille), de soldats àcheval et en armure souvent issus de familles nobles. La guerreest l’activité essentielle des chevaliers. Ils ont un idéal commun,combattre pour défendre ceux qui prient (le clergé) et ceux quitravaillent (les paysans). Leur équipement coûte cher. Il fautposséder une terre de 150 hectares pour entretenir un chevalier.La guerre est un moyen de mettre à l’épreuve le courage et labravoure mais aussi d’obtenir des revenus, grâce aux pillages etaux rançons. à côté de cette activité essentielle, les chasses et les tournoispermettent aux chevaliers de se distraire en temps de paix. Lesromans courtois racontent leurs exploits.

Le martyre de sainte Ursule et des 11000 Vierges (détail)Rhin supérieur huile sur panneau de bois vers 1450 salle 23

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ainsi unis par leur mode de vie et leur idéal, les chevaliers ont à partir du XIe

siècle le sentiment d’appartenir à la noblesse, un groupe d’hommes différentsdes autres.

L’évolution de l’armement et les différentes techniques de combat peuvent selire dans ce choix d’œuvres :

Fragments du Saint Sépulcre, cathédrale de Strasbourg,C hapelle Sainte-Catherine vers 1340 salle 11

cinq combattants sont représentés avec les caractéristiques suivantes :- une tenue de combat et des armes d’attaque : arc, épée, marteau… - des éléments de protection : cottes de mailles ou haubert. Les 3000anneaux de la cotte de maille nécessitent environ 10kg de fer.

Chevalier Cathédrale de Strasbourg, facade occidentale Portail central, contrefort sud fin XIIe siècle salle 7

Tourelle à créneaux défendue par deux soldats Strasbourg, ancienne maison « Zum Zinneneck » début XVIe sièclecour 4

Homme avec épée et banderole, XVIe siècleHomme en armure, XVIe sièclesalle 39

Le martyre de sainte Ursule et des 11000 Vierges Rhin supérieur huile sur panneau de bois vers 1450 salle 23

ces chevaliers peuvent s’identifier grâce à leur blason. à l’origine les emblèmesdes chevaliers étaient cousus ou peints sur les cottes de mailles et lesboucliers. cela permettait de savoir à qui on avait affaire, reconnaître l’ami oul’ennemi sous le casque. L’art des armoiries dépassa bientôt le champ debataille pour gagner les salles de château.

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Hugues Zorn de Bulach Gisant provenant de la Chapelle Zorn, église Saint-Pierre-le-Jeune puisconservé au château d’Osthouse et acquis par le musée en 1993.Strasbourg vers 1320salle 11

ou encore Bas relief funéraire avec couple agenouillé début XVIIe siècle, Breuschwickersheim

Travailler

90% de la population du moyen âge compose le troisième ordre,celui qui travaille. ce sont pour l’essentiel des paysans. Le mondedes campagnes est pourtant rarement représenté. Les travaux deschamps sont parfois présents dans le décor sculpté des églises oudes livres d’heures. on peut approcher par contre une autrecomposante de ceux qui travaillent : les artisans.

Conrad Witz, Sainte Madeleine et sainte Catherine (détail), vers 1444-1446salle 25une place du centre ville de Bâle, des échoppes dont celle d’unsculpeur occupent le rez-de-chaussée des maisons

La Vie de sainte Attale, vers 1450 La Vie de sainte Odile, vers 1470 Tapisseries strasbourgeoises salle 21on y voit le travail des maçons, des charpentiers, lors de la construction dumonastère de sainte-odile.

Trois Pèlerins en route vers Saint-Jacques-de-Compostelle s'arrêtent àl'auberge de Toulouse Maître strasbourgeois anonyme fin XVe siècle salle 24 c’est un des grands pèlerinages de l’époque, il existe même un guide dupèlerin qui indique les itinéraires ainsi que les gîtes d’étape ; sur cette peintureune auberge qui devait se trouver sur le chemin de saint-Jacques- de-compostelle.

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Aller plus loin

Pistes pédagogiques

pour mettre en valeur le travail de l’homme

Œuvres abordéesun des retables que conserve le musée

S’attacher à retrouver tous les verbes d’action qui rendent compte du travail des hommesqui ont créé ce retable.Lister les matériaux et techniques utilisés.retrouver les traces de la vie de l’œuvre (trous de vers, pièces manquantes,usure de la polychromie, etc.), faire des hypothèses sur ce qui a pu lesprovoquer.

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Le jardin au Moyen Âge

Le jardin est l’un des cadres de vie préféré de la vie médiévale.au musée on le rencontre sous divers aspects. tout d’abord sousla forme d’un jardin reconstitué en 1937 par hans haug. cejardin se trouve à l’emplacement d’une ancienne cour, il permetd’aborder les deux formes du jardin médiéval- le jardin utile- le jardin d’agrémenton peut aussi approcher les jardins médiévaux à partir d’uncertain nombre d’œuvres du musée, vitraux ou peintures.

Le jardin utile

Les jardins de simples (plantes médicinales) évoquent souventles jardins monastiques : en effet les moines ont joué un grandrôle au moyen âge dans le développement de la connaissancedes plantes et de leur utilisation. La règle de saint Benoît leurenjoint en effet, de prendre soin de l’âme des chrétiens, maisaussi de leur corps. cependant la culture des plantesmédicinales n’était pas le privilège des monastères : on laretrouve dans tous les jardins. Le moyen âge a fait grand usagedes plantes, en raison de leurs vertus thérapeutiques réelles ouimaginaires souvent liées au nom ou à la forme de celles-ci.

au centre du jardin médiéval reconstitué au musée, neuf carrésde plates-bandes, allant trois par trois, accueillent les plantesornementales, les plantes médicinales, les plantescondimentaires et aromatiques.L’ensemble évoque à la fois le symbolisme religieux, lesconnaissances et pratiques médicinales ainsi que les croyancespopulaires. Les parterres ne reconstituent pas la réalité ; parexemple dans le carré de plantes médicinales, il n’a pas étépossible vu ses dimensions restreintes, de cultiver toutes lesplantes recommandées par les auteurs anciens. on s’estcontenté de quelques échantillons.

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Fenouil

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Le jardin utile

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DES PLANTES MÉDICINALES

Pivoine officinalepaeonia officinalis L.Famille : renonculacées« BeoNIa » de sainte hildegarde

sud-européennes et asiatiques, les pivoines sont rarementspontanées en France. Les médecins de l’antiquité lesrecommandaient contre l’épilepsie ; elle furent employéesdans ce but jusqu’au XIXe siècle. Les fleurs et les racines ren-flées exercent une action apaisante et équilibrante, maissont déconseillées aux femmes enceintes. Les graines sonttoxiques.

Houblonhumulus lupulus L.Famille : canabinacées« humuLoNe » du polyptyque de st-Germain et decharlemagne

cette liane vivace eurasiatique est employée sous toutes sesformes ; depuis les cônes qui aromatisent les cervoises et lesbières, jusqu’aux cendres qui sont utilisées en verrerie. Lehoublon ne semble cultivé en europe qu’à partir du IXe siècle.son effet irritant pour les muqueuses, narcotique à fortedose, peut provoquer des troubles nerveux. cependant onrecommande les cônes dans les oreillers pour lutter contrel’insomnie. outre ses actions efficaces reconnues en médeci-ne, ses bourgeons sont consommés comme plante potagère.

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pivoine officinale

houblon

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DES PLANTES CONDIMENTAIRES

Cumin de Hollandecarvicarum carvi L.Famille : ombellifères« careIum » de charlemagne

Inconnu des anciens qui n’utilisaient que le vrai cumin, lecarvi fut cependant recherché et cultivé au moyen âge pourses propriétés médicinales comparables à celles du fenouilet des autres ombellifères carminatives. cultivé aujourd’hui,surtout dans le nord de l’europe comme condiment et aro-mate dans les soupes, pains et fromages, le carvi est connusous le nom de cumin de hollande.

Cibouletteallium schoenoprasum L.Famille : liliacées« BrItLas » de charlemagne

Fréquente d’europe du nord à l’asie, la ciboulette tire sonnom scientifique de sa ressemblance avec un petit jonc.connue dès le moyen âge pour ses propriétés condimen-taires et médicinales, elle occupe toujours une place impor-tante dans les jardins d’europe. on la connaît aussi sous lesvocables de civette ou appétit.

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cumin de hollande

ciboulette

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Le jardin d’agrément

tous les hommes du moyen âge aspirent à un jardin idéal. Il s’agit d’abord pourl’homme de retrouver le paradis perdu, le jardin d’Éden. toute la conceptiondes jardins du moyen âge découle de la Genèse, du récit de la vie originelle del’homme dans le jardin d’éden, et de son éviction après le péché.à travers ce récit, la culture chrétienne a recueilli l’héritage des anciennescivilisations de l’orient, magnifiant la culture, l’eau et le miracle des jardins. Lenom du jardin des origines « éden » fut traduit par l’expression jardin des

délices. Le texte fondateur de la Genèse fixait deux caractéristiquesessentielles du jardin médiéval : la clôture -- qui constitue le jardin en espacesacré, séparé du reste du monde -- et la présence de l’eau vivifiante, fleuve duparadis dans l’écriture, fontaine de la vie dans l’iconographie.un autre texte de la Bible donne sa forme et sa signification au jardin médiéval,le Cantique des Cantiques. ce dialogue amoureux entre l’époux et l’épouse,que l’on attribuait à la sagesse de salomon, assimile l’époux à la figure duchrist, tandis que l’épouse est tantôt celle de l’église, tantôt celle de l’âme. àla suite de ces commentaires, le thème du jardin clos est particulièrementprésent dans la vie religieuse, l’hortus conclusus figure le lieu de l’unionamoureuse entre l’âme et Dieu, l’époux descendu dans son jardin. cette

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Jardin reconstituédu musée

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mystique explique le nombre de représentations de jardins clos issues decommunautés monastiques, en particulier féminines. Le jardin clos devientalors une image du monastère même, et entrer dans la vie monastiqueéquivaut à entrer au paradis. à partir du XIIIe siècle, dans le cadre dudéveloppement du culte de la vierge, toute une vague de nouveauxcommentaires assimile l’épouse à la vierge, figure typologique de l’église, à lafois mère et épouse du christ. La vierge répond au caractère d’hortusconclusus : elle est un jardin car elle a été fécondée, elle a donné naissance ausauveur mais elle est restée chaste, seul Dieu l’a rendue féconde.La représentation de la vierge comme jardin clos devient ainsi une illustrationde la maternité virginale de marie et de l’incarnation.à partir de l’assimilation entre la Vierge et la fiancée du Cantique desCantiques, paradis et jardin d’éden ont tendance à se confondre.Les représentations de la vierge dans un jardin de paradis se multiplient au Xve

siècle. La vierge y est souvent entourée de roses, elle apparaît comme une roseau milieu des roses. selon les auteurs chrétiens, le paradis était fleuri de rosessans épines ; ces dernières symbolisant le péché, ne survinrent qu’après lachute. La rose au parfum suave évoque la passion du christ ou des martyrslorsqu’elle est teintée de leur sang ; mais surtout, la reine des fleurs a étéassociée à la reine des cieux, et le culte de la Vierge s’est exprimé enparticulier à travers celui de la rose.La réappropriation du jardin paradisiaque se fait grâce à la littérature, qui créeun jardin allégorique, lieu de prédilection d’un amour courtois mêlant avecambiguïté sacré et profane. avec le Roman de la rose, un modèle s’établit demanière durable : celui du jardin comme lieu d’un bonheur idéal, où la rosedésigne la femme aimée. Dans ce jardin de rêve se mêlent la tradition poétiqueantique et les mythes paradisiaques bibliques liés aux notions de fidélité,d’abondance et d’éternelle jeunesse. comme l’éden, c’est un jardin clos, l’espace y est planté d’herbes et de fleursmulticolores, ombragé d’arbres, animé par le mouvement et le bruit d’eaud’une fontaine ou d’une source, et par le chant des oiseaux qui, dans le verger« chantent des lais d’amour et des sonnets courtois ». clôture de l’espace,variété des couleurs, des parfums et des plantes, ombrage des arbres,musique de l’eau et chant des oiseaux deviennent des éléments obligatoiresdu bonheur terrestre. Le verger ou jardin de plaisance est le lieu où se réalisel’idéal courtois, par l’épanouissement de l’amour au milieu de la jouissance detous les sens et de l’harmonie retrouvée avec la nature.

D’après Le petit Journal des grandes expositions « Sur la terre comme au ciel »,Jardins d’occident à la fin du moyen âge, exposition du 5 juin au 16 septembre2002, au musée national du moyen âge, paris.

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Le jardin à travers des œuvres du musée

Le musée de l’œuvre Notre-Dame possède un certain nombre d’œuvres qui ontpu servir de référence pour créer le jardin médiéval.

Adam au Jardin du Paradis, vitrail attribué à Thiébaut deLixheim, 3e quart du XVe siècle, église Saint-Pierre-le Vieux,Strasbourg207 x 66 cm salle 20

L’adam au jardin du paradis a été restauré à la fin du XIXe

siècle. Le panneau supérieur cintré, les filets de bordure etune partie du fond de feuillage ont été rajoutés à cetteépoque.Il s’agit du panneau gauche d’un triptyque qui comprenaitève à droite, au centre l’arbre de la connaissance du bienet du mal avec le serpent de la tentation.à l’intérieur du jardin du paradis ceint d’un mur crénelé,adam dans sa nudité originelle tend le bras vers l’arbre dela connaissance. Devant la muraille est agenouillé unchanoine donateur, vêtu d’une aube et d’un mantelet defourrure. en bas à droite, un perroquet donne la becquée àses petits.

Quand Dieu crée l’homme, il le place dans un jardin, celui-ci n’apparaît clos que lorsque l’homme en est expulsé parDieu pour « éviter qu’il prenne aussi de l’arbre de vie, enmange et vive à jamais ». cette clôture est jaune doré,couleur qui symbolise la lumière divine, le monde céleste.adam est représenté selon les codes de l’image au moyenâge, l’élément le plus important étant le plus grand.

Le jardin est aussi l’allégorie des étapes de la vie.- l’ensemencement = le temps de la création- la germination et le développement = le temps de laréconciliation de Dieu et des hommes grâce au christ- la récolte = la fin des temps

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DossIer De préparatIoN à La vIsIteMUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

La Vierge au JardinetSouabe ou Rhin supérieur huile sur panneau de sapin 45 x 36 cmsalle 26

Le thème de la vierge au jardinet, apparu dans les artsfigurés au début du Xve siècle, a connu une fortuneconsidérable auprès des peintres de l’école rhénane. Liéà la mystique du tendre développée dès le XIve siècle dansles couvents des nonnes, ce motif printanier fait référenceau goût du moyen âge pour les jardins privés, appeléscourtils ou paradis. Les fleurs qui tapissent le gazon,roses, œillets et pâquerettes, sont symboliques et presquetoujours liées à l’iconographie de la vierge.

Symbolique des plantes contenues dans le tableau rose rouge : passion du christplantain : chemin qui mène à Dieuœillet : témoignage de chasteté, plante des fiançaillescar la vierge est la fiancée de Dieupissenlit : amertume et douleur de la passion du christpâquerette : innocence

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Aller plus loin

Pistes pédagogiques

pour comprendre le lien entre l’homme du moyen âge et les plantes

Lire les remèdes préconisés par hildegarde von Bingen, mystique du moyenâge (1098-1179), par exemple pour comprendre le symbolisme qui s’attache àla guérison par les plantes, dans un registre de rite et croyance et non dans leregistre simple du soin. (voir Le Livre des subtilités des créatures divines, XIIe

siècle, éd. Jerôme millon)en atelier d’écriture, inventer ses propres recettes poétiques pour guérir sesmaux, ceux des autres, de la société, etc.

pour exploiter la différence entre motifs végétaux imaginaires etreprésentations réalistes.

Œuvres abordées sculptures de la salle romane : la seule représentation réaliste est une feuillede vigne sur un chapiteau.

représentation des plantes dans le vitrail d’Adam au Jardin du Paradis et dansla Vierge au Jardinet.

à l’aide d’un herbier, identifier (ou tenter d’identifier) les plantes représentées.

en arts plastiques, pour saisir la différence entre représentation réaliste etformes imaginaires, s’exercer au dessin d’observation d’une part (dans lejardinet médiéval, par exemple) et à l’invention de motifs végétaux d’autre part(en procédant par combinaison de détails différents trouvés dans la salleromane par exemple).

pour saisir les différentes fonctions des jardins (utilitaire, symbolique,esthétique) et ce qu’ils révèlent d’un fonctionnement social :

Faire une recherche sur les différents types de jardins existants (du jardin zenau jardin anglais en passant bien sûr par les différents types de jardinsmédiévaux) puis tenter de trouver des classifications pertinentes (critèresformels, critères fonctionnels, etc.). en tirer des conclusions sur ce que révèlentles jardins du fonctionnement d’une société ou d’un groupe.

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DossIer De préparatIoN à La vIsIteMUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

pour saisir le rattachement des symboles à une société :

Le lien symbolique entre une image et une idée est un lien culturellementconstruit et appris et non évident. Les symboles sont donc liés à un temps et àun lieu donnés, ils ne sont pas universels. on peut faire une recherche surl’évolution de la signification symbolique de certaines plantes (la rose oul’œillet, par exemple) ou sur la transformation de certains symboles païens parle christianisme (l’arbre de la connaissance, par exemple) pour fairecomprendre aux jeunes visiteurs l’importance du lien symbolique dans lacommunication humaine. on peut élargir sur la variation des significationssymboliques de certains éléments à travers les cultures.

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Fiche descriptive de la visite accueillie

Niveau :

de 5 à 10 ans - de la maternelle, grande section au cm2

Du jardin au paradisl’hiver ou l’été

servIce éDucatIF - paLaIs rohaN - 2 pLace Du châteautéL : 03 88 52 50 04 - FaX : 03 88 52 50 41

musée De L’œuvre Notre-Dame3, pLace Du château

une promenade à travers les jardins représentés dans les œuvres mènera les jeunes visi-teurs jusqu'au jardinet gothique du musée. elle leur fera découvrir l'importance des jardinspour les gens du moyen âge ainsi que leur dimension symbolique. elle leur permettra aussid’apprécier la finesse et la variété des motifs végétaux représentés sur les œuvres queconserve le musée.

Deux versions de cette visite existent. si le parcours mené par le médiateur est le mêmedans les deux versions, la partie atelier (menée par le responsable du groupe) varie selonla saison ou les conditions météorologiques :

- L’été, du jardin au paradis (septembre, mai, juin), la partie atelier se déroule aujardinet gothique.- L’hiver, du jardin au paradis (d’octobre à avril ou en cas de mauvais temps), lapartie atelier se déroule dans la salle romane du musée.Un cycle conjuguant ces deux versions est possible (voir en fin de document).

Préparation indispensable avant la venue au musée(voir dossier-diapositives Du Jardin au paradis)

Niveau : de la grande section de maternelle au CE1 pour que la visite soit une occasion d'échanges riches entre le médiateur et lesenfants, il est utile de travailler au préalable sur l'histoire d'adam et d'ève. pour

aider le responsable de groupe, un dossier, intitulé Du jardin au paradis, comprenant denombreuses reproductions d'œuvres représentant cette histoire et des pistes pédagogiquesest disponible en prêt.

Niveau : du CE2 au CM2- Les œuvres, que les jeunes découvriront lors du parcours, sont religieuses. pour leur per-mettre de comprendre la place de la religion au moyen âge et la fonction des œuvres qu'ilsverront au musée, il est utile d'étudier l'organisation de la société au moyen âge (les troisordres : ceux qui se battent, ceux qui prient et ceux qui travaillent).- on peut également évoquer une des fonctions des œuvres religieuses (éduquer les fidèles,dont la majorité ne sait pas lire).

Au-delà de 15 jeunesvisiteurs, le groupe est

scindé en deux.Le responsable du groupe

prend alors en chargeune partie de la visite, il

est donc indispensable dela préparer (voir page

suivante).

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- Lors de la visite, les jeunes visiteurs seront amenés à rencontrer des représentations sym-boliques, il serait intéressant qu'ils sachent au préalable ce qu'est un symbole. on peut lesy préparer facilement par un travail sur quelques symboles très courants (la colombe de lapaix, le cœur, le symbolisme des couleurs, etc.).Préparation à la visite organisée pour les responsables de groupeDes présentations de la visite sont proposées en début d’année scolaire (se reporter au pro-gramme des actions éducatives ou contacter stéphanie Baunet au 03.88.52.50.04).au-delà de 15 jeunes visiteurs, le responsable de groupe et le médiateur culturel prennent encharge un demi-groupe chacun pendant 45 minutes puis les deux groupes permutent.Les jeunes visiteurs encadrés par le médiateur réalisent le parcours indiqué ci-dessous.

Déroulement du parcours avec le médiateur Les jeunes visiteurs remontent dans le temps du Xve au XIe siècle, découvrent différentesreprésentations du paradis. Ils sont amenés à les analyser mais aussi à en décoder la sym-bolique. Le parcours se termine au jardin médiéval reconstitué dans la cour de l'hôtel ducerf où jardins représentés et jardin réel seront comparés.œuvres étudiées :Adam au jardin du paradis, vitrail attribué à thiébaud de Lixheim, 3e quart du Xve siècle,saint-pierre-le-vieux, strasbourg.Le Doute de saint Joseph, maître strasbourgeois, vers 1410-1420.Vierge au jardinet, souabe ou rhin supérieur, fin Xve.Linteau à figuration allégorique, Bergholtz-Zell, 1ère moitié du XIe siècle.

VERSION HIVER

Descriptif des ateliers conduits par le responsable de groupe(matériel fourni par le service éducatif)

Les jeunes pris en charge par le responsable de groupe rechercheront, à partir dedifférents indices, les motifs végétaux sculptés de la salle romane. Ils en garde-ront trace sous forme de croquis, de frottages ou de photos qui pourront donnerlieu à une exploitation plastique par la suite. Ils pourront également, à partir de10 ans, relever, sur les cartels, la provenance des sculptures identifiées grâce auxindices.

Atelier 1Indices : copies de motifs en plâtre - photocopies en relief.ces copies ne respectent pas l'échelle, la forme générale de l'objet et sa matière,

il est donc intéressant de travailler sur les différences entre copie et original.une fois l'original trouvé à partir de la copie, l'enfant garde trace de sa découverte en réali-sant un frottage à l'aide d'une photocopie en relief.Atelier 2Indices : croquis incomplets.Le jeune visiteur recherche le motif original puis complète le croquis.Atelier 3 Indices : photos de détails.

FIche DéscrIptIveDU JARDIN AU PARADIS

Attention Les jeunes visiteurs tra-

vaillent en autonomiedans une salle assez

grande. Il est impératifqu'ils ne touchent pas les

œuvres. or celles-ci neleur sembleront pas fra-

giles et sont à leur portée.Il faut donc les sensibili-ser à cette contrainte et

prévoir suffisammentd’accompagnateurs pré-

parés à leur tâche d'enca-drement.

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DossIer De préparatIoN à La vIsIteMUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

Le jeune recherche la sculpture correspondante à partir d'une photo. Il garde trace dumotif en en réalisant un croquis pour les plus grands. Des photocopies de photos sontdisponibles pour les plus jeunes.

VERSION ÉTÉ

Propositions d'activités à mener au jardinet gothique(tout le matériel est fourni par le médiateur)

Tous niveaux- observation individuelle de ce qui différencie le jardinet gothique d'un jardin « actuel »puis mise en commun. explication de l'aspect symbolique de certains éléments.- observation des carrés de plantes, découverte de leurs fonctions et de l'organisationdu jardin.

Niveaux : Élémentaire, cycle 3 - travail sur le plan.- observation de reproductions d'herbiers puis réalisation de trois croquis (un par typede plantes). L'ensemble des croquis réalisés pouvant devenir l'herbier de la classe.maternelle, grande section, élémentaire cycle 2- recherche des plantes réelles à partir des reproductions d'herbiers.- éventuellement travail sur le plan ou/et croquis simple selon le niveau.

VERSION L’HIVER ET L’ÉTÉ DU JARDIN AU PARADIS (CYCLE DE DEUX VISITES)

La 1ère visite correspond à la visite version hiver (le médiateur mène leparcours, le responsable du groupe mène l’atelier dans la salle romane).Lors de la 2e visite, après une courte introduction, c’est le médiateur quimène la partie atelier au jardin avec un demi-groupe. pendant ce temps,le responsable du groupe réalise avec l'autre groupe un circuit de remiseen mémoire des œuvres. Les jeunes visiteurs retrouvent le parcours réa-lisé avec le médiateur lors de leur 1ère visite puis expliquent au respon-sable du groupe, devant chaque œuvre, ce qu'ils en ont retenu. ce par-cours se termine au jardin médiéval où les deux groupes permutent.

Exploitation après la visiteLe dossier-diapositives Du jardin au paradis propose des pistes pédago-giques. Il contient également les diapositives des œuvres analysées pen-dant la visite ainsi que de nombreuses reproductions (photocopies cou-leurs plastifiées) d'œuvres représentant l'histoire de la Genèse. Il estdonc possible de travailler sur des représentations du paradis de tousstyles et époques.

pour le cycle, les deux datesde visite doivent être

réservées en même tempspour éviter tout risque de

confusion avec des visitesisolées.

Merci au responsable dugroupe d’appeler le

médiateur (le numéro figuresur la confirmation de

réservation) pour lui spécifierle fonctionnement en cycle,

quelques jours avant la 2e

visite

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LA CATHÉDRALE AU MUSÉE

« L’église pontificale, nommée ” Munster ”, magnifiquement bâtie en pierre detaille, s’élève en une très ample construction, ornée de deux tours, dont l’une,achevée, œuvre admirable, cache sa tête dans les nuages. » aeneas silvius piccolomini, Germania, 1432

La cathédrale dont la construction s’est étalée sur environ deux siècles etdemi, se retrouve sous plusieurs aspects au musée de l’œuvre Notre-Dame.

Les plans de la cathédraleLa vingtaine de plans et projets conservés des maîtres d’œuvres successifstémoigne de la vitalité du chantier de la cathédrale. certains des projets ont étéexécutés, d’autres partiellement abandonnés, mais cet ensemble rarissimepermet de suivre la genèse du monument. ces documents révèlent à quel pointce chantier a permis la rencontre des conceptions venues de France, d’Italie oudu sud de l’empire. ces grandes épures tracées à l’encre et au crayon surparchemin sont d’une extrême fragilité et ne sont plus exposées au public (desreproductions papier ou diapositives sont disponibles au musée).

L’institution chargée de sa constructionL’œuvre Notre-Dame était une fabrique laïque chargée de réunir et de gérer lesfonds nécessaires à la construction de la cathédrale. une salle de séance pourla loge des maçons et des tailleurs de pierre présidée par un maître d’œuvre yétait installée. La ville contrôlait le budget, nommait les receveurs et lesadministrateurs.

DossIer De préparatIoN à La vIsIteMUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

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DossIer De préparatIoN à La vIsIteMUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

La salle des administrateurs de l’Œuvre Notre-Dame(salle 31)

elle faisait office de salle de réunions et de délibérations. Le receveur(Schaffner), de l’œuvre Notre-Dame devait annuellement y rendre compte,avec les administrateurs, de sa gestion devant les délégués du magistrat de laville.Datant de 1582, réalisées d’après les dessins du maître d’œuvre de lacathédrale hans thoman uhlberger, les boiseries de la salle sont d’uneordonnance sobre et classique et témoignent de la pénétration tardive du stylerenaissance (welsch art) dans les arts du bois à strasbourg. elles comptentparmi les plus beaux échantillons de la décoration intérieure alsacienne de larenaissance.aux fenêtres sont exposés deux vitraux armoriés offerts par les administrateurset le receveur au moment de leur nomination.sous un linteau peint où l’on peut lire « renovatum 1604 », s’ouvre le caveaudes archives et bureau du receveur. Lieu de conservation d’archives de valeur,cette petite pièce voûtée, au sol dallé, a été conçue pour prévenir le vol etl’incendie. La porte est pourvue d’un battant en fer à serrure compliquée, lafenêtre est grillagée et possède des contrevents en fer.cette véritable chambre forte abritait autrefois les titres de propriété, lesregistres, les comptes, actes, plans et dessins de la cathédrale.

Table à calculer ou abaquefin du XVIe siècle, début du XVIIe sièclenoyer, chêne et os

cette table permettait d’effectuer (grâce à des jetons) lesopérations nécessaires à la comptabilité de l’œuvre :encaissement des recettes (fermages, ventes de bois,donations…) et décompte des dépenses (achat dematériaux, paie des ouvriers...).sur le plateau figurent deux « calculettes » (grilles decalcul) identiques divisées en lignes et colonnes parallèlescorrespondant aux différents ordres d’unités.en partant du bas vers le haut, les lignes horizontalescorrespondent aux unités, dizaines, centaines, et ainsi desuite. Les colonnes verticales sont associées aux unitésmonétaires de l’époque : heller (ou demi denier), denier,sou (ou sol), et livre (12 deniers valaient 1 sol et 24 solsvalaient 1 livre).Le calcul se fait du bas vers le haut et de la droite vers lagauche, en ajoutant, en ôtant ou en reportant un ou

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Speculum vite humanae,1471, imprimé à augsbourg

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plusieurs jetons d’une division à l’autre. ainsi, dès que le nombre de jetonsdépasse 10 dans l’unité, on ajoute un jeton sur la ligne au-dessus, à l’unitésupérieure ; et dès qu’il y a 12 jetons dans la colonne des deniers, on ajoute unjeton dans la colonne des sols, etc.une polémique au début du XvIe siècle va opposer les abacistes (tenants ducalcul par jetons) aux algoristes (défendant le calcul à la plume, ancêtre desméthodes actuelles), mais ce n’est qu’avec la révolution française que l’usagede l’abaque fut interdit dans les écoles et les administrations.

La salle de la Loge, 1582 (salle 5)

tout le rez-de-chaussée du bâtiment renaissance est occupé par l’anciennesalle de réunion des maçons et tailleurs de pierre de la cathédrale, quiformaient une corporation distincte de la corporation des maçons et tailleursde pierre de la ville. cette loge strasbourgeoise, tout comme l’institution del’œuvre Notre-Dame, a survécu à l’achèvement du gros œuvre de la cathédraleen 1439. elle a été élue en 1459 loge suprême du saint empire romaingermanique, distinction qu’elle a conservée jusqu’en 1707. La salle de la Loge a peu changé depuis son achèvement en 1582, datevisible sur les lambris de part et d’autre de la porte d’entrée. Deux colonnes àchapiteaux ioniques portent cinq compartiments de plafond lambrissé et unevoûte en pierre. celle-ci supporte la chambre forte ou caveau des archives aupremier étage. L’architecte a fait figurer sur les deux clefs de la voûte sa propremarque, signe d’identification, et celle de l’œuvre Notre-Dame surmontéed’une croix. Les murs, couverts de boiseries en partie basse, conservent enpartie haute les restes de peintures murales à motifs de grotesques (visagesgrimaçants).Les œuvres exposées dans cette salle se rattachent à l’activité desmaîtres d’œuvres de la cathédrale au XVe et au début du XVIe siècle.

Des éléments originaux de la cathédrale

outre des vitraux et des éléments architecturaux, une cinquantaine de statuesde la cathédrale sont exposées au musée.

Les grandes phases de destruction ou de dépose des œuvres de lacathédrale entre le XVIe et le XXe siècleL’avènement de la Réforme à strasbourg de 1524 à 1530 n’a pas altérél’aspect des portails de la cathédrale. Les documents relatant les destructionsn’indiquent pratiquement pas d’atteintes aux œuvres décorant l’extérieur des

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églises. Furent seulement enlevées les sculptures, peintures et reliques« provocantes » liées au culte de la vierge et des saints.L’importance du vandalisme révolutionnaire est connue. selon les sources,235 statues furent déposées à la suite des arrêtés du 4 puis du 5 Frimaire anII ordonnant la destruction systématique des statues de la cathédrale en tantque symboles de l’ordre ancien. mais la plupart furent déposées avec soin etregagnèrent assez rapidement leur emplacement primitif sur l’édifice.Quelques figures ou ensembles emblématiques comme la vierge et le salomondu grand gâble du portail central de la façade occidentale, ou les apôtres duportail sud, disparurent complètement. Des travaux de recréation des dizainesde pièces disparues furent rapidement entrepris, en particulier sous ladirection de l’architecte Gustave Klotz qui dirigea l’œuvre Notre-Dame de 1830à 1870.une partie des sculptures, en particulier celles provenant des portails, furent ànouveau déposées au début du XXe siècle, mais cette fois-ci à des fins deprotection. elles rejoignirent la maison de l’œuvre Notre-Dame, devenuedepuis le XIXe siècle le lieu de dépôt des fragments et souvenirs de lacathédrale. elles furent progressivement remplacées sur l’édifice par descopies.on ne possède que très peu de documents sur la restauration des sculpturesde la cathédrale in situ. une recherche archivistique est encore à réaliser. onpeut par contre constater sur la plupart des statues la présence denombreuses pièces en grès, de dimensions parfois très réduites, scellées avecun mortier à base de gomme-laque et maintenues à l’aide de goujons en ferscellés au plomb. elles sont recouvertes de dépôts de pollution et de badigeonscolorés destinés à harmoniser la couleur de surface. Il est donc certain que cefurent des pièces installées au fur et à mesure que la pollution rongeait lesœuvres, surtout dans la deuxième moitié du XIXe siècle. D’autres piècesréalisées en plâtre correspondent aux restaurations menées soit à des fins decopie, soit à des fins de présentation au public au moment de la création dumusée en 1931.

Le décor sculpté des portails de la cathédrale et leur présenceau musée

Principe du décor sculpté de la cathédraleDans le principe du décor des cathédrales, les sculptures très présentes n’ontpas vraiment d’autonomie. La statuaire propose comme dans les autrescathédrales gothiques un vaste programme d’enseignement théologique. àstrasbourg, son iconographie est d’une richesse et d’une cohérence rarementégalées.

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Les sources possibles du programme de la façade occidentale, qui s’articuleautour du salut de l’âme, ont souvent été attribuées au grand théologien albertle Grand qui aurait séjourné à strasbourg vers 1260. cette statuaire permet delire aussi l’évolution du style gothique. en effet, sa réalisation s’étend dupremier quart du XIIIe siècle à la fin du Xve siècle.La cathédrale déploie à l’ouest, sur sa façade principale, un ensemble de troisportails. un nombre impressionnant de sculptures en pied et de reliefs yprennent place : on compte 74 rondes-bosses aux ébrasements, en retour deceux-ci et au gâble principal, 10 dalles travaillées en relief aux tympans(montrant 21 scènes), 138 petites statues et petits groupes sculptés auxvoussures, 24 reliefs aux socles des grandes figures du portail méridional, 26autres reliefs sur les degrés, dans les écoinçons et au sommet du gâbleprincipal. au surplus, les contreforts délimitant les portails présentent quelquesdrôleries sculptées en bas-relief, deux rondes-bosses dominent le portailcentral à gauche et à droite, des statues équestres surplombent le tout.une cinquantaine de statues et reliefs originaux ainsi que des élémentsarchitecturaux sont conservés au musée de l’œuvre Notre-Dame.

Les trois portails du massif occidental (1280-1300)(salle 7)

chacun des trois portails abrite une série de sculptures monumentales dansses ébrasements.

Portail sudVierges sages, Vierges folles, le Tentateursept sculptures des piédroits sont exposées au musée, ellesillustrent la parabole des Vierges sages accueillies par le divinépoux, et des Vierges folles. ce récit précède celui du Jugement Dernier dans l’évangile selonsaint matthieu. Les Vierges sages, jeunes filles souriantes etfamilières, tiennent leur lampe à huile droite, alors que les Viergesfolles la renversent symboliquement. Le Tentateur, élégant jeune homme habillé à la mode du temps,présente une pomme avec assurance, mais masque mal son dosenvahi de crapauds, lézards et serpents. ce thème, connu depuisle XIIe siècle, n’avait auparavant fait l’objet que de figurations dansla miniature ou la sculpture de petite dimension. très en faveurdans l’empire germanique, il se retrouve également à la mêmeépoque dans les cathédrales de magdebourg, puis de Fribourg-en-Brisgau et de Bâle.

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DossIer De préparatIoN à La vIsIteMUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

Portail centralprophètes dans les ébrasements

Le gâble, il surmonte le portail centralLes éléments authentiques du grand gâble surmontant le portailcentral de la façade occidentale de la cathédrale occupent tout lefond de la salle du jubé. Il s’agit d’une transcription du textebiblique décrivant le trône de salomon dans le premier livre desrois. placé au centre, ce trône a subi les destructionsrévolutionnaires et seule subsiste la tête du roi salomon, quipréfigure ici le christ. Le long des rampants prennent place desmusiciens. Deux lions s’appuient au marchepied du trône et douzelionceaux symbolisant les tribus d’Israël s’ébattent sur les degrésdécorés de bas-reliefs représentant des animaux fantastiques. plus haut un autre trône accueillait la statue de la vierge à l’enfant,aujourd’hui disparue.

Portail nordVertus terrassant les vices Deux vertus issues de ce portail se trouvent au musée

Portail Saint-Laurent (transept nord)(salle 5)

Le long du mur occidental de la salle de la loge s’alignent huitsculptures provenant du portail saint-Laurent, érigé entre 1494 et1505 dans le prolongement du transept. Deux autres sculpturesdu même ensemble, figurant la vierge et saint Laurent, sontplacées de l’autre côté de la salle dans le coin gauche. L’ensemble

de ces dix figures monumentales, chef-d’œuvre du gothique tardif, est dû ausculpteur Johan von ach (Jean d’aix). Les trois Rois Mages et le Serviteur du Roimaure flanquaient le contrefort gauche du portail, aux côtés de la Vierge àl’Enfant. Quatre saints entouraient le contrefort droit, à la suite de la grandestatue de Saint Laurent placée aujourd’hui près de la vierge. Les statues de Jean d’aix sont remarquables par la caractérisation desphysionomies — voir le type ethnique des deux africains — et une sensibilité durendu de l’épiderme que l’on ne retrouve que chez les meilleurs sculpteurs decette époque. cette volonté de réalisme est contredite toutefois par lesattitudes contorsionnées des personnages et les draperies pesantes quienferment les corps.

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DossIer De préparatIoN à La vIsIteMUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

cet ensemble a fait l’objet d’une campagne de restauration entre 1997 et2001. seul le Serviteur du Roi maure a été laissé en l’état afin de garder letémoignage de l’aspect antérieur des sculptures. (voir fiche restaurations, salle 5)

Portail du transept sud(salle 7)

Église et Synagogueun atelier extraordinairement novateur conçoit, entre 1225 et1235, les parties supérieures du croisillon sud et le pilier desanges, puis les tympans des deux portails sud et le couple del'église et de la synagogue placé de part et d'autre de ces portails.ces deux figures de femmes, allégories des religions chrétienne etjudaïque, comptent parmi les plus célèbres chefs-d’œuvre de l'artoccidental du moyen âge. La Synagogue vaincue et l’Église triomphante appartiennent àune symbolique traditionnelle dont les représentations semultiplient à partir du milieu du XIIIe siècle. à gauche, l'églisevictorieuse et couronnée, tenant dans ses mains le calice et labannière que surmonte la croix, considère avec assurance lasynagogue. celle-ci, qui tient une lance brisée, détourne sa têteaux yeux bandés, expression de son refus de reconnaître dans lechrist le messie attendu. elle paraît laisser tomber les tables de laLoi, symbole de l’ancien testament dépassé. ces figures élancées

sont empreintes d'une très grande humanité. toutes deux caractérisent labrève période de raffinement qui marque la fin du règne des hohenstaufen. Lafinesse des drapés fluides, qui laissent percevoir la densité des corps, ainsi queles poses majestueuses, renvoient également à la statuaire de l'antiquité, quibénéficie au début du XIIIe siècle d'un regain d'intérêt désigné sous le nom de« renaissance antique ».La proximité stylistique de ces sculptures avec la statuaire de la cathédrale dechartres a été soulignée, mais des rapprochements ont également été établisavec la statuaire bourguignonne et celle de la cathédrale de sens. seloncertains spécialistes, les sculpteurs partis de Sens auraient gagné Chartres,puis la Bourgogne avant de rejoindre strasbourg, alors que d'autres concluentplutôt à la simultanéité de ces chantiers. on a également souligné l'expressivitédramatique de ces deux figures, qui relèverait à la fois des grands courantsfrançais et germaniques.

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Page 46: MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

Saints etanges

Le Jugementdernier

Le Tentateur et les

Vierges folles

Le ChristÉpoux et les ViergesSages

Façade occidentale, portail sud

Gravure, d’après J.J. arhardt,XvIIe siècle, strasbourg,cabinet des estampes et des Dessins.

Page 47: MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

Les lionceauxsymbolisant les 12 tribusd’Israël

Vierge àl’Enfant en trône

Scènes de la Bible,

Évangélisteset docteurs de l’Église

Salomon surson trône

Prophètes

La Passion du Christ

Prophètes

Tête de Dieu le Père

Vierge àl’Enfant

Façade occidentale, portail central

Gravure d’a. aubry, deuxième moitié du XvIIe sièclestrasbourg, cabinet des estampes et des Dessins.

Page 48: MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

Saints etanges

Enfance duChrist

Vertusterrassantles vices

Façade occidentale, portail nord

Gravure, d’aprèsJ.J. arhardt, XvIIe sièclestrasbourg, cabinetdes estampes et des Dessins.

Page 49: MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

Vierge àl’Enfant

Rois Mages

Saint Laurent

Saints

Portail du transept nord, Saint-Laurent

Martyre deSaint Laurent

Lithographie, émile simon, XIXe siècle, strasbourg

Page 50: MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

Dormition

Funérailles

Église Couronnement Synagogue

Roi Salomon

Assomption

Portail du transept sud, portail de la justice

Gravure d’Isaac Brunn, 1617strasbourg, cabinet des estampes et des Dessins.

Page 51: MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

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Le jubé, un élément démonté au XVIIe siècle et reconstitué aumusée (salle 7)

à l’entrée de la salle ont été reconstituées deux travées de l’ancien jubé dela cathédrale. Dû à un nouvel atelier présent à strasbourg peu après le milieudu XIIIe siècle, ce jubé à sept arcatures, édifié à l’extrémité est de la nef, étaitdestiné à isoler les fidèles des messes et des offices célébrés dans lechœur. Il fut démoli en 1682 après la réintroduction du culte catholique à lacathédrale pour répondre à l’esthétique et à la liturgie nouvelles prônées par lacontre-réforme. Il nous est toutefois connu par plusieurs gravures et dessinsdu XvIIe siècle.

Neuf figures d’apôtres, un diacre ainsi que plusieurs fragments de reliefs desgâbles ont pu être conservés et sont présentés aujourd’hui au musée. cessculptures témoignent d’une proximité stylistique avec la statuaire de lacathédrale de Reims, dont la façade constituait le plus grand chantier del’époque, ainsi qu’avec les apôtres de la Sainte-Chapelle de Paris. L’ensembledes apôtres entourait initialement une vierge à l’enfant disparue après ladémolition du jubé. La vierge aurait appartenu à un collectionneur lorrain avantd’être vendue en angleterre et acquise par le metropolitan museum de NewYork.

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Gravure sur cuivre réalisée d’après un dessin de J.J. arhardt. vers 1660, strasbourg, cabinet des estampes et des Dessins.

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Le vitrail

Durant tout le moyen âge, strasbourg et l’alsace occupent une placeprédominante dans l’art du vitrail. peu de vitraux de la cathédrale sontconservés au musée de l’œuvre Notre-Dame. celui figurant un empereur enmajesté est exemplaire à plus d’un titre. son interprétation et sa localisationdans l’édifice restent encore incertaines et illustrent bien le perpétuelquestionnement que peuvent susciter certaines œuvres d’art.

L’Empereur en majestéAncienne façade romane ou partie inférieure du chœur romandernier quart du XIIe siècle 208 x 100 cmsalle 3La qualité, la taille et l’iconographie laissent penser que cette figureroyale a été confectionnée pour un édifice de l’importance de Notre-Dame de strasbourg. De plus on trouve trace de ces panneaux en1447 et au moment où ils furent réparés en 1855, même si leurlocalisation dans la cathédrale a changé à plusieurs reprises.

trônant dans l’axe d’une composition de deux panneaux, unsouverain chrétien présente avec gravité les attributs quiproclament sa dignité : couronne à arceaux, sceptre fleuronné etglobe crucifère.somptueusement vêtu, nimbé, il n’est pas nommé.Derrière le dessin d’un siège précieux, apparaissent, représentés àune échelle inférieure, les bustes de deux dignitaires : à la gauchedu souverain, un homme barbu, les mains jointes devant lui ; del’autre côté, un jeune porte épée. Les rehauts de broderies et depierreries, nombreux, sont formulés de la même manière que dans

les fragments que l’on a conservés de la suite des rois romans faits pour lecollatéral nord de la cathédrale.

Le roi ou l’empereur trônant n’est désigné par aucune inscription. peut-être sedéployait-elle initialement dans l’arcade qui devait abriter la figure ou dans lepanneau à ses pieds. mais il se pourrait aussi qu’elle n’ait jamais existé, lafigure se distinguait suffisamment de celle des autres personnages par sonattitude, il est assis sur un trône.c’est à une tradition ottonienne voire carolingienne que se rattache cettereprésentation : le souverain représentant la puissance impériale est entouréde deux dignitaires faisant référence dans ces panneaux au pouvoir temporelseulement. La distinction recherchée par son nimbe a incité divers auteurs àreconnaître en lui henri II, canonisé en 1146, ou charlemagne canonisé en1165 et accompagné de roland, le porte glaive, et de son ami olivier.(voir thème Portrait)

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Aller plus loin

La technique du vitrail

La technique médiévale du vitrail est bien connue par de nombreux textes detoutes époques du XIIe au XIXe siècle, dont les plus célèbres restent ceux écritspar le moine allemand théophile, du début du XIIe siècle, ou par antoine de piseà la fin du XIve siècle.

La réalisation d’un vitrail nécessite du verre et du plomb : La fabrication du verre Le verre est composé de silice obtenue à partir de sable, à laquelle on ajoutedes éléments qui permettent d’en abaisser le point de fusion - soit de la potasse obtenue à partir de cendres de végétaux (hêtre ou fougères) - soit de la soude obtenue à partir de cendres de végétaux marins (algues ousalicorne). La composition du verre conditionne son vieillissement : les verrespotassiques, majoritaires au XIIIe siècle, s’altèrent en se dévitrifiant (la potasseest extraite par l’eau de pluie qui coule sur la face externe du vitrail, ou secondense en face interne). Ils sont noircis de dépôts d’altération, ou percés decratères. à partir du XIve siècle, l’introduction de soude en plus ou moinsgrande quantité modifie et réduit ce phénomène d’altération des verres.Le verre est soufflé en plateaux jusqu’au XvIe siècle, puis en manchons (grossebulle). Il a la particularité d’être teinté dans la masse, grâce à l’introductiond’éléments qui colorent la pâte de verre : l’oxyde de cobalt donne du bleu ;l’oxyde de cuivre donne du rouge ou du vert selon son degré d’oxydation ; lemanganèse donne du violet et le fer et l’antimoine, du jaune. ceci conditionnela technique de fabrication : au sein du vitrail, chaque élément donne lieu à lacoupe d’une pièce de verre différente selon la couleur souhaitée, qui seracernée d’un plomb.

La création d’un vitrail nécessite, en premier lieu, l’établissement d’unemaquette ou « patron ».D’abord à échelle réduite, puis à échelle 1, ce patron doit aussi fournir le tracédu plomb. au XIIIe siècle, le papier n’étant pas d’usage courant, le peintreverrier se servait d’une table de bois qu’il blanchissait à la craie : le dessin duvitrail et le tracé du plomb y étaient reportés en noir.Les pièces de verre étaient ensuite posées sur cette table de bois. Le tracé duvitrail étant visible par transparence au travers du verre, la coupe de verre étaitalors réalisée au fer rouge. Le fer, chauffé « au rouge », était posé sur le verresuivant le tracé de coupe désiré. une fêlure se produisait alors, notammentlorsqu’on humectait de salive, avec le doigt, l’endroit où le fer avait étéappliqué. La coupe de verre était ensuite rectifiée au grugeoir. on prenait soin

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de réserver un espace pour le passage du plomb.si complexe que puisse nous paraître cette technique aujourd’hui perdue, lespeintres verriers du moyen âge n’ont pas hésité à tailler des pièces de verre detrès grande taille et de formes extrêmement complexes. La coupe au fer rougea été pratiquée jusqu’au XvIe siècle. à la fin du XvIe siècle, on voit apparaîtrel’usage du diamant, qui reste encore utilisé de nos jours, quoiqueprogressivement remplacé, depuis la fin du XXe siècle, par les molettes,roulettes ou « toyos ».

Peindre sur le verreQuand tous les morceaux du futur vitrail sont découpés, le maître verrier peutse consacrer à la peinture. sur le verre il trace les plis des costumes, les traitsdes visages, des motifs géométriques ou végétaux… pour cela il trempe sonpinceau dans une matière de couleur, la « grisaille ». elle est traditionnellementde couleur noire, en alsace et en allemagne, ou brune plus au sud de la Franceet de l’europe. Le modelé des figures est optenu en opacifiant le verre decouleur par des traits de grisaille.

La grisaille est constituée généralement de pigments de fer broyés dans unfondant vitreux plus fusible que le verre sur laquelle elle est appliquée.sous forme de poudre, elle se dilue à l’urine (au XIIe siècle), au vinaigre ou àl’eau, puis s’applique au pinceau. Pour se fixer au verre, elle doit être cuiteà 630°C environ. Les techniques de peinture s’affinent au cours des siècles : partant d’un simpletrait souligné d’un lavis au XIIe et XIIIe siècle, le peintre verrier maîtrise desmodelés de plus en plus complexes au XvIe siècle. D’autres couleurs font leurapparition à partir du XIve siècle, permettant de colorer une même pièce deverre sans être obligé de changer de verre de couleur et d’ajouter un plomb : lejaune d’argent d’abord --- teinture composée de sels d’argent qui pénètrentcertains verres lors de la cuisson et les colorent en jaune --- permet de teintercheveux, barbes et ornements. La sanguine et le « jean-cousin », à partir du Xve

siècle, donnent des carnations orangées. Les émaux, d’abord bleus au Xve

siècle, puis verts, rouges ou violets au XvIe et au XvIIe siècle, sont des couleurstransparentes, au contraire de la grisaille opaque.

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Après cuisson des peintures, on peut passer au montage en plomb :Le sertissageLe plomb a un profil en h, entre les ailes duquel on insère le verre. Le plomb,mou, cerne les pièces de verre. Il est coupé aux intersections et ces dernièressont soudées à l’aide d’un mélange d’étain et de plomb. Le plomb est unélément de soutien du vitrail qui lui confère une grande solidité et unesouplesse qui perm et à l’ensemble de résister aux vents. c’est aussi unélément d’une grande importance picturale : tracé par l’artiste, il vientsouligner et renforcer la composition. Fabriqué au sein de l’atelier du peintreverrier, contrairement au verre, c’est une production unique et typique d’unatelier de par sa composition et sa morphologie.

Le vitrail est finalement posé au sein de la baie à laquelle il est destiné.constitué de panneaux d’environ 60 par 80 cm, assemblés à l’aide d’uneserrurerie métallique qui en assure le maintien : barlotières et vergettes.

à partir d’une conférence d’anne pinto, restauratrice de vitraux.

BibliographieJean Lafond - Le vitrail, origines, technique, destinées - édition Florilège, 1966- 1978 - 1998marcel aubert, Louis Grodecki, andré chastel - Le vitrail français - éditionmondes, 1958Nicole Blondel - Le vitrail, vocabulaire typologique et technique - ImprimerieNationale, paris 1993

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Phases de la construction de la cathédrale : quelques dates

1015 Fondation de la cathédrale par l’évêque Wernher dehabsbourg

12e siècle série d’incendies

Fin 12e siècle Début de la reconstruction du chœur et du transept nord

après 1225 arrivée du premier maître gothique : croisillon sud, pilier duJugement Dernier et statues de l’église et de la synagogue

1240-1275 reconstruction de la nef jusqu’à la façade romane

après 1248 construction du Jubé

1277 Début de la construction de la façade ouest actuelle

1284 première mention du nom de erwin de steinbach

1286 L’administration de l’œuvre Notre-Dame passe des mains del’évêque à celles de la ville

1280-1290 construction des portails de la façade avec leurs statues

1340-1370 élévation des deux tours de la façade et de la Galerie desapôtres

vers 1384 élévation du beffroi par michel de Fribourg

1399-1419 construction de l’octogone de la flèche par ulrich d’ensingen

1419-1439 élévation de la flèche par Jean hültz

1485 chaire du prédicateur Geiler par hans hammer

1495-1505 construction de la chapelle et du portail saint-Laurent

1525-1529 Introduction de la réforme et du culte luthérien

1574 mise en fonctionnement de l’horloge astronomique

1681 La cathédrale est rendue au culte catholique

1682 Démolition du jubé, transformation du chœur

1772-1778 Disparition des échoppes entourant la cathédrale, remplacéespar des galeries en style gothique par Jean-Laurent Goetz

1792 Dépose et destruction de nombreuses sculptures

1813-1855 réparation des dégâts causés par la révolution

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Pistes pédagogiques

pour une approche plastique et sensible de la sculpture gothique

Œuvres abordéesL’église et la synagogueLes vierges sages et vierges follesLes statues du portail saint-Laurent

S’attacher à la posture et aux proportionss’amuser à reprendre la pause des statues, pour en apprécier ledéhanchement ou les libertés que prend le sculpteur par rapport auxpossibilités anatomiques.mesurer le rapport proportionnel tête – tronc – jambe – largeur d’épaule àl’aide de bandes de papier maintenues à bout de bras à une certaine distancedes statues pour se rendre compte de l’étirement éventuel des corps.

S’attacher au rapport du vêtement et du corps- s’interroger sur le rapport qu’entretient le vêtement avec le corps, est-il « prèsdu corps » (l’église et la synagogue), le corps est-il au contraire « noyé » dans unflot de plis cassés (certaines statues du portail saint-Laurent) ?- Faire un croquis rapide pour garder trace des observations.- rechercher les références derrière la représentation de la figure humaine :référence à la statuaire antique (l’église et la synagogue) ou référence à lamode de l’époque (le tentateur). proposer des documents iconographiques deréférence pour permettre aux jeunes visiteurs de réaliser des comparaisons.

S’attacher à l’observation des drapés- Faire un dessin précis d’un détail de drapé de chacune des sculpturesétudiées. se munir de papier de couleur pour pouvoir utiliser noir, gris et blancpour indiquer ombres et lumière et rendre une impression de relief. se munird’un morceau de carton percé d’un trou rectangulaire ou carré d’environ 1 cmpour cadrer plus facilement la zone à dessiner (en regardant à travers le trou).- à partir de photos numériques de détails significatifs des différents drapés,engager les jeunes visiteurs à retrouver les statues concernées avantd’entamer une analyse de l’œuvre.

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pour saisir la fonction « narrative » de certains groupes sculptés

- avant la visite, demander aux jeunes visiteurs de réaliser un projet deprogramme iconographique rendant compte d’un récit biblique (les viergesfolles, les vierges sages), ou créant des figures allégoriques (l’église et lasynagogue). Le projet peut être réalisé soit sous forme de croquis, soit sousforme de mime. La visite au musée permet de comparer le choix des jeunesavec les statues originales.- Faire une recherche iconographique à partir d’une histoire ou à partir d’unthème (l’expression de la puissance ; réalisme / idéalisation ; référence àl’antique ou référence à la vie quotidienne de l’époque, etc.).

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Fiche descriptive de la visite accueillie

NIveau : de 8 à 12 ans - du ce2 au cm2

La cathédrale s’invite au muséeLe langage des images

[…] ce qu'est l'écriture pour ceux qui savent lire, la peinture l'est pour les illettrés quiregardent les images.Grégoire le Grand, vers l'an 600, lettre adressée à l’évêque sexenus de marseille

Il faut dire que les images n'ont pas été introduites dans l'Église sans motifraisonnable. […] Elles ont été inventées à cause du manque d'instruction des gensordinaires qui ne peuvent pas lire et qui pourraient ainsi par les sculptures et lespeintures comprendre davantage les mystères de notre foi comme s'ils avaient deslivres.saint Bonaventure, 3e Livre des sentences, IX, I, II ; XIIIe siècle

on pourrait croire que les œuvres de la cathédrale ont un don d'ubiquité, voici qu'onles voit à plusieurs endroits à la fois…mais qu'on ne s'y trompe pas, celles du musée sont bien les originales. Les jeunesvisiteurs font leur connaissance au musée puis les replacent dans leur contexted'origine.

Durée : 1h30

Objectifsapprocher une époque à travers des œuvres en donnant des clés pour la lecture desimages au moyen âge Faire le lien entre le musée (lieu d'exposition actuelle) et la cathédrale(emplacement d'origine).

musée De L’œuvre Notre-Dame3, pLace Du château

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Pour préparer la visite(en prêt au service éducatif des musées)Dossier de l'exposition « Les bâtisseurs de cathédrale »Le petit livre d'une grande cathédrale, cécile Dupeux et serge Bloch, 1991

Déroulement de la visiteaprès une introduction au musée, deux types d'œuvres sont interrogées, un vitrail etun groupe de sculptures : « L'Empereur en majesté » (dernier quart du XIIe siècle )et « Les Vierges sages et les Vierges folles » (portail sud de la façade occidentale,vers 1280-1300).Les jeunes visiteurs replacent ensuite le groupe de sculptures dans le contexte del'ensemble des portails de la façade occidentale de la cathédrale. si l’accès à la cathédrale est possible dans de bonnes conditions, le médiateurmontrera à l'intérieur l'un des vitraux de la suite des souverains du bas-côté nordafin d’évoquer le pouvoir royal et ses liens avec l'église.en conclusion, l'animateur présentera la cathédrale en tant que lieu de viequotidienne.

FIche DescrIptIveLA CATHÉDRALE S’INVITE AU MUSÉE

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VERS LES TEMPS MODERNESL’art s’ouvre à l’observation de l’homme et du monde

Le portrait au musée

pour faire un portrait : « les parties du corps qui sont laides, et dela même façon celles qui donnent peu de plaisir, devraient êtrecouvertes par des drapés, des frondes ou par la main. Lesanciens ont peint le portrait d’antigonos seulement du côté duvisage où l’œil ne manquait pas. on dit que la tête de périclèsétait longue et laide, c’est pourquoi il était portraituré par lespeintres et les sculpteurs portant un casque. D’après plutarque,

quand les peintres antiques (dé)peignaient des rois, ils corrigeaient les défautsque l’on ne voulait pas laisser apercevoir, et ce, tout en gardant laressemblance ».alberti, De la peinture (1434)

L’icône et le principe de réalité

L’icône autour du vIe siècle en orient devient objet de culte au même titre queles reliques des saints. elle pénètre en occident à la suite des croisades etinfluence l’art occidental. cette tendance perdure dans l’Italie du XIve siècle. Lavierge à l’enfant par exemple n’est pas représentée comme un personnage enchair et en os, mais toujours comme une image de culte, c’est-à-dire en tantqu’icône. toutefois apparaissent des personnages extérieurs, anges et saints, et surtoutles donateurs. entre l’image du donateur et sa physionomie réelle, il n’y a pasde ressemblance jusqu’au Xve siècle. c’est que la notion même de portraitressemblant n’a pas cours avant 1300. Il s’agissait moins de reconnaître lespersonnages que d’identifier leur fonction à partir de signes propres à unecatégorie ou à une classe de la société. armoiries, costumes, objetsemblématiques, inscriptions, participent « du principe de réalité » qui permetde différencier les personnages.

Du verbe po(u)r traire =dessiner, représenter

trait pour trait.

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Saint Conrad de Constance et donateur de Duntzenheim Strasbourg vers 1480-85Huile et tempera sur bois de sapin142 cm x 39 cmsalle 26

Il s’agit du fragment d’un retable montrant un donateuragenouillé, pour lequel intercède son saint patron. Il estintéressant de noter la disproportion entre les deux, sans douteaccusée par la présence du carrelage, c’est-à-dire un espaceillusionniste. Le donateur est d’échelle réduite pour respecter lahiérarchie sacrée, il s’agenouille humblement aux pieds de lafigure de saint conrad. Il est vêtu d’un manteau aux longuesmanches et au col doublé de fourrure, couvert d’une étole noire.c’est l’image d’un notable, ammeister de strasbourg de 1523 à1529 et exportateur de vin. son image est individualisée, maisl’artiste est apparemment largement tributaire de typesphysionomiques. Le visage du saint évêque est égalementcaractéristique du répertoire général de cet artiste.ce qui permettrait d’identifier le personnage, ce n’est sans doutepas la ressemblance de l’image avec son modèle, mais plutôt sesarmoiries, posées en vignette sur le fond du carrelage.

Naissance du portrait moderne

c’est à partir du milieu du XIve siècle que le portrait individuelnettement caractérisé et n’obéissant plus « au principe deréalité » se trouve formulé. Il faut en chercher les sources chez lesrois de France qui dès philippe le Bel se font représenter eux-mêmes. mais c’est dans l’image du donateur que vont seproduire les principales innovations qui annoncent le portraitmoderne. Initialement plus petit que les autres figures, ledonateur peu à peu atteint leur taille, comme dans la Viergetenant l’Enfant de l’épitaphe de la cathédrale de strasbourg,réalisée par Nicolas de Leyde. ce sculpteur du milieu du Xve siècle

donne à ses portraits une énergie vitale qui les transfigure. La ressemblance,ou plutôt la vraisemblance avec des personnages vivants y est frappante. onaboutit à une humanisation du sacré.avec la renaissance on aborde la seconde phase de formation du portraitmoderne. pour qu’il soit ressemblant et vrai le portrait doit non seulementrestituer les traits physionomiques mais aussi le caractère du sujet.

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L’expressionpeintres et sculpteurs ont été sensibles aux différents registres de l’expressionbien avant de maîtriser l’art du portrait. L’artiste au moyen âge appréhende lemonde comme une entité, un univers où la difformité ou le grotesque semanifestent au même titre que l’harmonie et la beauté comme une créationdivine. L’expression des sentiments, traduite longtemps par des mimiques etdes gestes archétypaux, ressort de plus en plus de l’observation du réel, et dela recherche à travers la physionomie d’un visage, du frémissement de la vie.au XvIe siècle, l’intérêt pour la physionomie expressive aboutit de façonexemplaire, chez un Nicolas de Leyde à des œuvres dont l’intensité dramatiquerésulte de l’aptitude à rendre une tension psychologique. Dès cette mêmeépoque, les traités physiognomoniques vont chercher à déterminer descaractères à partir des traits du visage et la renaissance, avec la mise envaleur de l’individu, va ouvrir l’art du portrait à la connaissance de la natureprofonde de l’homme. au XvIIe siècle les théories de Lavater, basées sur lesconcordances tempérament-morphologie, relancent l’intérêt pour laphysiognomonie et l’expression des passions. De cet héritage devait naître lacaricature, synthèse de la satire sociale et de la déformation grotesque issuedu moyen âge. De hogarth à Daumier ou töpffer elle connaît son âge d’or auXIXe siècle et se servira du portrait pour dénoncer, à travers l’individu, lesmœurs d’une époque.

La silhouetteune légende rapportée par pline situe l’origine de la peinture dans le contourde l’ombre d’un homme, tracé sur un mur par une jeune corinthiennesouhaitant conserver de lui une image avant son départ pour la guerre. Ledessin au trait d’une silhouette est en effet ce qui s’exécute le plus rapidementmais le profil a aussi l’avantage de se mémoriser le plus aisément et derestituer les caractères les plus marquants d’une physionomie. Dès l’antiquité,les souverains prirent ainsi l’habitude de faire figurer leur profil sur lesmédailles et monnaies, dans le but de perpétuer leur image. Lorsque le MoyenÂge invente le portrait, il a recours d’abord au profil qui, éludant le regard,caractérise sans fard les traits d’un visage. c’est avec la recherche del’intériorité d’un être qu’à partir de la Renaissance, l’artiste privilégiera la vuede trois-quarts ou de face. revivifiée à l’époque néo-classique, lareprésentation de profil, qui se répand sur les médaillons, reliefs et miniatures,aboutit à la vogue du portrait « en silhouette », tracé ou découpé, procédémécanique et rapide de reproduction qui popularisera, avant la photographie,la mode du portrait, ainsi accessible à tous.

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Le busteBuste d’homme accoudé Nicolas Gerhaert de Leyde, vers 1467grès rose ; H.44 cmsalle 25

Le buste constitue sans doute la forme la plusconstante que prend le portrait depuis l’antiquitéjusqu’au XXe siècle. peint ou sculpté, en médaille oudécoupé en silhouette, il magnifie la partie la plus« noble » du corps, c’est-à-dire celle où loge le cœur etle cerveau : elle devient ainsi représentative des traitsles plus caractéristiques de la physionomie et de lapsychologie d’un individu singulier.L’idée de représenter l’homme sous la forme d’unbuste, est conforme à une croyance ancienneproclamant que le visage – en tout cas le haut ducorps – est la partie la plus noble, et aussi la pluspropre à l’expression.

cet extraordinaire Buste d’homme accoudé, chef-d’œuvre de la sculpturegothique, est attribué à Nicolas Gerhaert de Leyde, qui domine à la fin du Xve

siècle l’école des sculpteurs strasbourgeois.

Le personnage est présenté plongé dans ses pensées. La position de ses brasrepliés l’un sur l’autre et de sa tête inclinée crée une sorte de spirale quisuggère le retrait sur soi dans une intense méditation. Il tient dans la maingauche un objet terminé par un pommeau godronné à demi dissimulé sous lepan du vêtement qui n’a jamais pu être reconnu précisément (arme, outil,canne ?). L’observation minutieuse et sensible de la réalité est remarquable, etil faut souligner en particulier le rendu extrêmement précis de l’épidermeparcouru de fines rides et le naturel du geste du personnage. La force del’expression repose d’abord sur la composition mobile, articulée dans l’espace.mais, bien au-delà de la simple imitation de l’apparence physique, le sculpteurparvient ici à saisir avec acuité la vie intérieure de son modèle.ce motif du « buste accoudé », représentation d’un personnage en fort reliefappuyé à un élément d’architecture, connaîtra à la suite de Nicolas de Leydeune très grande faveur dans tout le sud de l’empire. mais ses successeurs ne sont jamais parvenus à égaler sa maîtrise dansl’analyse psychologique.Nicolas Gerhaert de Leyde, tenu pour l’un des artistes les plus importants dela fin du moyen âge septentrional, détermine un tournant décisif dansl’évolution de la sculpture germanique sur le plan tant formel

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qu’iconographique. D’origine vraisemblablement néerlandaise comme leprécise son nom, il semble s’être formé dans les territoires du duché deBourgogne au contact de l’art burgondo-flamand. sa connaissance de l’art dusculpteur sluter est indéniable, au travers en particulier de ses recherches surla plasticité des corps et sur le rendu des physionomies. mais il n’amalheureusement laissé qu’un très petit nombre d’œuvres.présent à strasbourg entre 1462 et 1467, il obtient la commande de ladécoration sculptée du portail de la chancellerie en 1463. Il exécute l’annéesuivante l’épitaphe du chanoine de Busnang dans la chapelle saint-Jean de lacathédrale. en 1467, il travaille encore à strasbourg à la réalisation d’uncrucifix en pierre destiné au cimetière de Baden-Baden, puis se rend à la courde Frédéric III à Wiener-Neustadt, où il réalise la conception générale dumausolée de l’empereur. Il meurt avant son achèvement en 1473.tandis que la tradition classique, issue de l’antiquité, impose au buste unecertaine solennité, le moyen âge introduit un buste non pas artificiellementamputé, mais se présentant comme appuyé sur une allège, par exemple dansl’encadrement d’une baie. La présence de bras et surtout le geste des mainsaugmentent l’expression et sollicitent par conséquent le spectateur : tout celarenforce une conception naturaliste très éloignée du buste classique qui tendplutôt à établir des types universels.

L’image de l’artiste

L’autoportrait au sens moderne du terme, remonte à la renaissance. à cetteépoque le statut de l’artiste se modifie profondément. attaché aux coursprincières, son identité professionnelle s’affirme. Il commence à signer sesœuvres et à se mettre en scène, souvent dans des représentations de saint Lucpeignant la vierge et l’enfant, soulignant ainsi son rôle de créateur. Lesnouvelles conceptions artistiques font de lui un « pur esprit » comparable à unsavant, et non plus seulement un technicien habile. Du XvIe au XIXe siècle lesprincipes de représentation de l’artiste par lui-même ne varient guère. Il sesoucie principalement d’identité psychologique ou professionnelle. à partir duXIXe siècle, le peintre qui se détache de la réalité, se préoccupe moins deressemblance. ses autoportraits deviennent un prétexte pour témoigner de sesconceptions de la peinture.

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Le portrait en représentation

Dès la haute antiquité, les détenteurs de l’autorité ont éprouvé le besoin de sefaire représenter par une image d’eux-mêmes dont la fonction, d’essencemagique, était à la fois d’assurer leur immortalité et d’affirmer leur pouvoir. sià l’époque romaine domine le souci de reproduire les caractères individuelsd’un visage, par la suite le hiératisme dans la composition et la placecroissante occupée par les attributs du pouvoir (regalia) vont faire du portraitdu souverain l’image symbolique de la puissance temporelle.

L’Empereur en majestéAncienne façade romane ou partie inférieure duchœur romandernier quart du XIIe siècle 208 x 100 cmsalle 3

Le vitrail monumental de l’Empereur en majesté aété longtemps considéré comme unereprésentation de charlemagne. Figuré sur untrône, nimbé et portant les insignes de l’empire,ce souverain était peut-être placé au centre de lafaçade ouest ou dans l’axe du chœur oriental de lacathédrale romane. Il fait partie d’un cycle de roiset d’empereur qui sont peut-être là en tant quesaints mais évidemment aussi en tant quesouverains. L’empereur est également considérécomme le premier serviteur du christ et incarneles vertus chrétiennes. La stricte frontalité et la fixité qui caractérisentcette figure comme toutes celles de cet ensemblesont issues des traditions byzantines, mais le goûtde l’ornement, sensible en particulier dans letraitement des bordures des vêtements, évoqueplutôt les créations de l’orfèvrerie mosane.relativement bien conservée dans ses partiesprincipales, l’œuvre porte cependant les marquesde restaurations anciennes : la tête du dignitairefiguré à gauche a été refaite au milieu du XIve

siècle. (voir aussi thème cathédrale)

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Le portrait comme système

se faire portraiturer correspond ici moins à offrir de soi une image conforme,qu’à se conformer à certains types. Ils se sont constitués dès l’antiquité etcorrespondent à une « vulgarisation des modèles culturels ».

Portrait d’Ambrosius Volmar KellerHans Baldung Grien, 1538Peinture sur panneau de tilleul97 cm x 71 cmsalle 30

Le portrait d’ambrosius volmar Keller, chanoine del’église saint-pierre-le-Jeune de strasbourg à partirde 1537, est entré au musée en 1890 par don del’empereur Guillaume II. D’après l’une deschroniques strasbourgeoises, il fut longtempsexposé dans la salle capitulaire de l’église saint-thomas de strasbourg, où il était entré vers 1550probablement comme don de Jean sturm,fondateur de l’université protestante destrasbourg.

ce personnage de belle prestance est représentéde trois quarts, drapé dans un ample manteaurouge. Il tient un livre fermé sur la tranche duquelest inscrit son nom. Derrière lui à gauche, un cepde vigne s’élève le long d’une tenture. celle-ci

ménage à droite une ouverture vers un paysage tourmenté où l’on aperçoit desruines de châteaux forts. Il s’agit ici du premier portrait dans lequel BaldungGrien accorde une place si importante au paysage. Dans le coin inférieurgauche du panneau figure la date de sa réalisation, 1538, ainsi que lemonogramme de l’artiste hB. L’attention du chanoine est dirigée vers lespectateur, les éléments associés à la composition étant emblématiques. Lavigne représentée sans grappe pourrait signifier que le sarment ne dispenseplus le vin de l’eucharistie à la suite de la réforme.

Hans Baldung Grien est l’un des artistes à la fois les plus représentatifs et lesplus originaux des débuts de la renaissance dans la région du rhin supérieur.ce peintre et graveur de grande notoriété, né en souabe en 1484/85 maisélevé à strasbourg, commence son apprentissage dans cette ville et le poursuitdans l’atelier de Dürer à Nuremberg de 1503 à 1507. Il se réinstalle ensuitedéfinitivement à strasbourg, qu’il ne quitte que de 1512 à 1517 pour exécuter

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le retable du maître-autel de la cathédrale de Fribourg-en-Brisgau. Il meurt àstrasbourg en 1545. hans Baldung Grien n’a pas laissé d’école, mais son influence s’est fait sentirsur un certain nombre d’œuvres strasbourgeoises de la première moitié du XvIe

siècle, peintures, mais aussi vitraux, sculptures ou illustrations de livres dont ilréalisa de nombreuses planches pour des éditeurs strasbourgeois. Il eut unatelier qui s’inspira de certains de ses dessins. Profondément marqué par l’humanisme, Baldung Grien s’attache à lareprésentation de sujets profanes et en particulier à l’art très récent duportrait. Il nous a transmis avec une rare acuité les visages de princes,théologiens, médecins ou musiciens qui furent ses contemporains et souventses amis.

D’après le catalogue d’exposition à qui ressemblons-nous ? Le portait dans lesmusées de Strasbourg, sous la direction de roland recht et marie-JeanneGeyer, éd. Les musées de la ville de strasbourg, 1988.

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Aller plus loin

poursuivre l’exploration portraits dans les autres muséesLes faire « parler » avec l’animation portraitsDossier-diapositives Portraits

Pistes pédagogiquesD’une représentation symbolique au portrait

Œuvres abordéesN’importe quel portrait du musée

pour étudier les caractéristiques et les fonctions de ce genre particulier

S’attacher à - lister ce qui permet d’identifier l’individu dans le tableau, de quel ordre sont

les renseignements trouvés ? réalisme de la physionomie ? expression dessentiments du personnage ? attributs ? place dans la hiérarchie sociale ?appartenance à une famille, à un groupe ? par quels moyens le peintreindividualise-t-il la personne représentée ?

- lister de manière générale toutes les fonctions possibles du portrait. Fairedes essais de classification des portraits du musée, aller voir d’autresportraits dans d’autres musées, continuer cette classification. essayer d’entirer des conclusions sur l’évolution de la représentation de la figurehumaine.

- à partir des fonctions du portrait répertoriées, comparer la façon dont on« produisait » des « portraits » assumant telle ou telle fonction, avantl’avènement de la photographie et de la reproductibilité de l’image etaujourd’hui. Discuter des rapports qu’entretiennent différentes sociétésanciennes et contemporaines avec la représentation de la figure humaine.

pour aborder le portrait d’un point de vue plus plastique

Œuvres abordéesN’importe quel portrait du musée

S’attacher à - caractériser de façon subjective le portrait, noter ses ressentis, ses

impressions, le faire parler, inventer son histoire (atelier d’écriture). puisessayer de comprendre ce qui, dans le tableau, a généré ces ressentis :composition, posture, expression, couleurs, intention de l’artiste, ducommanditaire, etc. pour aboutir à une compréhension plastique (et plus

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objective) du tableau. - cette démarche est celle mise en œuvre dans la visite « De vous à moi. Les

portraits vous parlent... » au musée des Beaux-arts. celle-ci peut constituerun prolongement intéressant à la visite du musée de l’œuvre Notre-Dame.

pour voir les portraits autrement

avant d’aborder les portraits de façon plus « sérieuse », on peut proposer unephase introductive sous forme d’atelier d’écriture, atelier qui permet d’observerle tableau de façon individuelle et de déceler des détails qui « ne sautent pasaux yeux ».ces propositions d’écriture se pratiquent individuellement, sans indicationspréalables sur l’œuvre (hormis son titre), une mise en commun collective aprèsune dizaine de minutes permet à chacun d’enrichir sa vision grâce auxpropositions des autres.

chacun peut tirer au sort parmi les propositions suivantes :- Faire l’inventaire des choses qu’on ne voit pas.- Faire l’inventaire des choses qui pourraient être autrement.- Faire l’inventaire des choses auxquelles on n’ose pas penser en regardant le

tableau.- Faire l’inventaire des choses qu’on aimerait rajouter.

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La nature morte à travers les œuvres de Sébastien Stoskopff

L’histoire des natures mortes s’ouvre dès l’antiquité. on raconte que le peintrele plus célèbre piraikos, vendait très cher ses « victuailles » et que Zeuxisrivalisant avec la nature, trompait les oiseaux qui venaient picorer ses raisinspeints.Il y eut aussi les fameuses mosaïques romaines appelées « La chambre malbalayée» et les natures mortes peintes directement sur les murs à pompéi (lesfresques).mais il faut attendre le XvIIe siècle, pour que s’épanouisse ce genre pictural quilaisse la place au silence, voire à la méditation. on y voit des objets, desanimaux morts, des fleurs, des fruits… ce sont des vies « coyes » (vies coites)que l’on nommera plus tard natures mortes. Le musée de l’œuvre Notre-Dame nous permet une approche de ce genregrâce à sébastien stoskopff considéré comme l’un des peintres de naturemorte les plus remarquables du XVIIe siècle.c’est hans haug, créateur du musée de l’œuvre Notre-Dame, qui fut l’artisanprincipal de la redécouverte de sébastien stoskopff. Il fit acquérir entre 1931et 1959 pour les musées de strasbourg huit de ses plus belles œuvres sur laquarantaine alors identifiées, considérant l’artiste comme une figureemblématique de l’art alsacien par son caractère à la fois international etprofondément régional.

De la nature morte...

Tout voir, tout savoir, tout avoirDepuis la seconde moitié du XvIe siècle et jusqu’au début du XvIIIe siècle,l’époque des grandes explorations et des progrès de la technique, la « culturede la curiosité » triomphe. Le souci du détail et de l’exactitude du rendu desobjets poussé au point d’en faire un simulacre peint va de pair avec cette miseà l’honneur de l’observation, la préoccupation de tout comprendre et de toutsavoir sur l’homme et l’univers. Le monde ainsi miniaturisé en peinture, oùchaque élément est identifiable dans tous ses détails, s’adresse à l’individu quile regarde et l’invite à la méditation de manière intime. car ici, le peintre, à laplace de Dieu, recrée le monde à sa mesure : le spectateur par son regard, lepossède.

Illusion peinte : la vanité ultime des chosesréalistes, peintes avec le plus grand respect pour les apparences sensibles, lesnatures mortes, collections peintes, portent en même temps une lourde chargesymbolique. L’œil trompé est attiré par les merveilles, il les désire mais

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représentations illusoires, elles lui sont inévitablement interdites.Admiration du savoir-fairesi selon la légende, les oiseaux et les chiens sont trompés par l’illusionpicturale, il est rare que le spectateur le soit tout à fait. Nous sommes plutôtémerveillés par l’exactitude, la dextérité du peintre. si les yeux se laissenttromper, l’esprit ne l’est point.

... à la vanité

c’est une nature morte au crâne, souvent baignée d’une lumière particulière,elle évoque, grâce entre autres à la présence d’objets symboliques, un sablier,un miroir, une bougie… la mort qui, quoi qu’on fasse de sa vie, arrive toujoursau bout du chemin.

Lecture d’une vanité

Grande VanitéSigné sur le bahut à droite du flacon :StosKopff1641huile sur toile125 cm x 165 cmsalle 31

La composition, très rigoureuse, est soulignée horizontalement par lesdifférents plans, verticalement à droite et à gauche, et subtilement animée pardes obliques (le luth, les livres, la gravure, l’épée) qui, à la fois, introduisent laprofondeur dans les plans échelonnés et conduisent le regard de l’un à l’autre. mais l’œuvre peut se lire également comme une composition centrée autourdu crâne qui, posé sur la boîte de copeaux et entouré de livres, apparaîtcomme le véritable pivot, tant du point de vue de la structure que de lasignification. sébastien stoskopff a repris ici un schéma de compositionassociant le luth renversé, le miroir, le globe céleste avec le compas, identiqueà celui des cinq sens ou l’été de 1633, mais inversé. L’effet général estpourtant complètement différent, dû en partie au traitement de la lumière, àla fois égale et contrastée. venant de gauche, elle isole et modèle les formesde manière uniforme mais très artificiellement, elle ne touche que les objets,les éclairant très vivement et les faisant jaillir du fond obscur, dont les

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articulations sont à peine visibles.La tonalité globale du tableau est dorée et sombre, avec quelques taches derouge, plus vives, qui rompent la monochromie des tons allant du blanc au brunou au gris. cette manière de traiter la couleur n’est pas pour autant monotone,elle est plutôt le fruit d’une intéressante recherche sur le rapport entre lecoloris, la lumière et la matière : la lumière confère aux blancs plus d’éclat, auxocres plus de profondeur, plus de velouté, selon ses variations à la surface desobjets. L’individualisation et la précision de chaque matière sont certes évidentes,mais stoskopff propose aussi une autre approche de l’objet par la restitutiondes effets de brillance et de transparence. ceux-ci sont travaillés par touchesplus claires, paradoxalement beaucoup plus épaisses la plupart du temps :dans la bouteille au premier plan, l’opacité presque noire devient limpide pardes touches dorées ou tout à fait blanches. L’impression de transparence estrenforcée par la luminosité qui semble traverser le flacon et qui éclaire letabouret à droite, alors que l’ombre se projette un peu plus loin. pour les piècesd’orfèvrerie, le procédé est analogue, mais avec une différence : chaquefacette est ponctuée d’une touche blanche, épaisse, qui donne l’effet debrillance.Le traitement de la composition, allié à celui de la lumière, accentue ladisposition des objets dans l’espace : ceux-ci apparaissent commejuxtaposés autour du crâne, qui porte la signification de l’œuvre. Le rapportentre l’agencement des objets et celui des cabinets de curiosités a souvent étéavancé, mais les naturalia et artificiali sont remplacés par des illustrationsdirectes des activités humaines, ici véritablement mises en scène comme dansun théâtre. ces activités sont évoquées dans le quatrain que sébastienstoskopff a pris soin de faire figurer dans le tableau :

« Kunst, Reichtum, Macht und Kühnheit stirbetDie Welt und all ihr Thun verdirbertEin ewiges kommt nach dieser ZeitIhr thoren, flieht die Eitelkeit »

« Art, richesse, puissance et courage meurent.Du monde et de ses œuvres rien ne demeureAprès ce temps viendra l’éternitéO Fous ! fuyez la vanité ».

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Composition74

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Symbolique L’artiste construit son tableau comme le poète son quatrain. Dans le premiervers, les termes sont juxtaposés sans mots de liaison. cette forme poétique estcourante chez les poètes allemands dans le deuxième quart et le milieu duXvIIe siècle. stoskopff adopte ce procédé littéraire en une juxtapositionanalogue, presque didactique, des objets. La Grande Vanité n’apparaît alorsplus comme une œuvre archaïque, mais bien comme une rhétorique tout à faitconforme au goût de l’époque. ainsi, par l’accord intime entre le sens et laforme, sébastien stoskopff nous propose une représentation tout à fait neuvede la vanité.

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« Car enfin, qu'est-ce que l'homme dans la nature ? Un néant à l'égard de l'infini, un tout à l'égarddu néant, un milieu entre rien et tout. Infiniment éloigné de comprendre les extrêmes, la fin deschoses et leur principe sont pour lui invinciblement cachés dans un secret impénétrable,également incapable de voir le néant d'où il est tiré, et l'infini où il est englouti. »

Blaise Pascal, Les Pensées

SYMBOLIQUE

Crânefous !

fuyez lavanité

Eau de viel’immortalité ?

Luthart

Globele ciel quiéchappe à toutemesure

Scapinla

comédiehumaine

Compasmesure

du temps

Quatrainla clé dutableau

Chandeliersrichesse

Miroir qui ne reflèterien. Ouvert

sur l’abîme ?

Sablierle temps qui passe

Heaumepuissanceet courage

Livresévoquent-ils la vanité dusavoir ou permettent-ilsde comprendre la vanité

de toutes choses ?

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Aller plus loinLa nature morte, carnet de croquisLa nature morte, dossier centré sur les travaux d’écriture

Pistes pédagogiques

Pour saisir le sens caché des natures mortes

Œuvre abordéeLes Cinq sens ou l’Été

s’attacher à déceler la vanité sous la nature morte- Dessiner la vue aérienne de l’espace représenté par le tableau. on se rendcompte alors que la table n’est pas plus large qu’une planche, que le jeud’échec a une forme trapézoïdale, qu’il n’y a pas de place pour le personnagequi tient la corbeille de fruits, que les fruits vont tomber, que le mur présentedes décrochements étranges.- essayer de reprendre la pose du personnage (notamment de son bras gaucheet de sa main droite). on se rend compte alors qu’elle ne peut tenir un panierainsi, qu’elle ne saisit pas le fruit de sa main droite malgré les apparences, quela position de ses doigts est improbable.- enfin, se demander d’où vient la lumière, se rendre compte qu’elle vient de lagauche et que l’ouverture sur la droite n’a aucune incidence sur la luminositéde la pièce, s’apercevoir que la corde du luth est cassée.

après avoir sans difficulté identifié les objets se rapportant à chacun des sens(1er niveau d’analyse), on s’aperçoit par le 2d niveau d’analyse proposé ci-dessus, que stoskopff nous signifie que les sens, s’ils sont notre seul accès aumonde, sont aussi trompeurs… on peut enfin confirmer cette découverte dusens caché (la vanité derrière la nature morte) en lisant les derniers versets dupsaume 76 reproduit fidèlement sur la partition :

Offrés vos dons à luy qui estTerrible à venger son méprisA luy qui peult quand il luy plaistVendanger des Rois les esprits.

Œuvre abordéeCorbeille de verres et pâté

s’attacher à déceler toutes les oppositions sur lesquelles joue le peintreLister ces oppositions… - Fragilité du verre / solidité de la pierre mais le verre est intact et la pierre estébréchée…

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- Immatérialité de la lumière / matérialité de la peinture qui la représente, lesverres ne sont pas représentés par leurs contours matériels, c’est la lumièrequi se pose sur eux que le peintre représente.- oppositions entre trois manières de peindre différentes, extrêmement précisepour la corbeille, simple trait ou voile blanc qui définit le verre par la lumière,touche large et lâche pour le pâté.- opacité, densité (matité du pâté) / transparence du verre, finesse de lacorbeille- Lourdeur, compacité du pâté / fragilité du verre, etc.

Pour aborder la Grande Vanité d’un point de vue plastique

Œuvre abordéeLa Grande Vanité (mais cette démarche fonctionne avec n’importe queltableau…)

s’attacher à comprendre les moyens plastiques employés par le peintre- La composition : sur un transparent (ou calque) sur lequel on a figuré lecontour du tableau, tracer au pastel (ou crayon de couleur) verticales,horizontales, obliques (une couleur par direction) qui structurent le tableau.- Les points forts : sur un transparent (ou calque) posé sur la productionréalisée précédemment, faire le croquis de 3 éléments qui frappent le plus.- La lumière : sur un 3e transparent (ou calque) posé sur les deux productionsprécédentes, n’indiquer que la lumière au pastel blanc.

Variante : indiquer la lumière avec pastel et crayon blanc sur la photocopie surpapier gris ou sur transparent du tableau.superposer les 3 transparents… Décrypter la symbolique du tableau.

Variante : même chose sur des transparents sur lesquels figure le contour dutableau et le crâne (les proportions justes étant parfois difficiles à trouver pourdes jeunes peu habitués à dessiner).

Pour voir les natures mortes autrement

avant d’aborder les natures mortes, on peut proposer une phase introductivesous forme d’atelier d’écriture, atelier qui permet d’observer le tableau defaçon individuelle et de déceler des détails qui « ne sautent pas aux yeux ».ces propositions d’écriture se pratiquent individuellement, sans indicationspréalables sur l’œuvre (hormis son titre), une mise en commun collective aprèsune dizaine de minutes permet à chacun d’enrichir sa vision grâce auxpropositions des autres.chacun peut tirer au sort parmi les propositions suivantes :

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- Faire l’inventaire des choses qu’on ne voit pas.- Faire l’inventaire des choses qui pourraient être autrement.- Faire l’inventaire des choses auxquelles on n’ose pas penser en regardant letableau.- Faire l’inventaire des choses qu’on aimerait rajouter.

pour saisir les questions intemporelles que soulèvent les vanités renvoyant ànotre propre époque…

après la visite, s’attacher à créer sa propre vanité, avec des objetscontemporains, s’amuser à les choisir pour leur caractère symbolique ou leuraspect esthétique, les mettre en scène, les éclairer, bref, expérimenter tous lesdomaines d’intervention d’un artiste. Garder trace ensuite sous forme decroquis de photos ou de vidéo de cette vanité contemporaine.

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VIES SILENCIEUSESDÉCRYPTER LES SENS CACHÉS DES NATURESMORTES DE SÉBASTIEN STOSKOPFF

Durée : 1h30 à 1h45

Objectifs

l permettre aux jeunes visiteurs d'apprécier les natures mortes de sébastien stoskopffdans toutes leurs dimensions.

l comprendre la symbolique utilisée par les peintres de natures mortes dans leursœuvres.

l Découvrir le caractère polysémique des œuvres grâce à l'observation fine et àl'interprétation de leurs caractéristiques iconographiques et plastiques.

l Faire le lien entre l'œuvre d'un artiste et les préoccupations d'une époque (XvIIe siècle).

Œuvres abordées

l Les Cinq Sens, ou l’Été, 1633l Grande Vanité, 1641

Déroulement

Lors de l'introduction, le médiateur présente l'enjeu de la visite (décrypter les “secrets” dequelques tableaux derrière le sens premier), rappelle l'existence des genres en peinture,retrace en quelques mots la vie de sébastien stoskopff et évoque quelques référenceshistoriques concernant le XvIIe siècle.

Le groupe, s’il excède 15 personnes, est ensuite séparé en deux.Le médiateur amène alors l’un des demi-groupes à retrouver les significations cachées dutableau Les Cinq Sens ou l’Été. une première lecture de l’œuvre permet aux jeunesvisiteurs de faire le lien entre sens et objets représentés. puis, par petites équipes, ilsobservent finement certaines parties de l’œuvre et interprètent les surprenants résultats

Fiche descriptive de la visite accueillie

NIveau : de 8 à 20 ans

musée De L’œuvre Notre-Dame3, pLace Du château

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de ces observations. Ils découvrent ainsi la vanité qui se profile derrière l’allégorie descinq sens.

pendant ce temps le responsable du groupe aborde la Grande Vanité avec l’autre moitiédu groupe grâce à une activité de croquis afin de mieux comprendre les moyensplastiques employés par le peintre. Le médiateur lui fournit tout le matériel nécessaire. Ledossier de préparation à la visite du musée de l’œuvre Notre-Dame décrit p. 84 l’activitéproposée et donne tous les renseignements nécessaires dans le chapitre consacré à lanature morte de sébastien stoskopff (p.77 à 85). ce dossier peut être retiré au serviceéducatif, palais rohan. une fiche rappelant les consignes et résumant les caractéristiquesessentielles de l’oeuvre est fournie au responsable du groupe accompagnée du matériel(elle est également annexée au présent document).

Les deux groupes permutent après 35 minutes environ.

Préparer et prolonger la visite

Les jeunes visiteurs seront amenés à réaliser des observations très fines, il est nécessairede les sensibiliser avant la visite à quelques points du règlement intérieur des muséesvisant à préserver les œuvres : ne pas s’approcher à moins d’un mètre des tableaux,montrer les détails non avec un crayon ou un quelconque objet, mais avec le doigt orientéparallèlement à la toile et non perpendiculairement.

Il est utile, pour gagner du temps, de diviser le groupe en 6 sous-groupes, chacun d’entreeux choisissant un rapporteur.

Il est intéressant en préparation et en prolongement, selon le niveau des jeunes visiteurs,d’étudier le contexte historique du XvIIe siècle, le statut de l’artiste à cette époque, les cinqgenres en peinture, quelques textes ou poèmes du XvIe ou XvIIe siècle, l’intérêt de l’époquepour l’inventaire du monde et la science, l’évolution dans la représentation du monde(copernic, Galilée, Bruno, Kepler).

on pourra reprendre la thématique des natures mortes et vanités en arts visuels et travaillerà sa transposition à notre époque (photographie, installation, performance). on peutégalement faire le lien avec l’œuvre de nombreux artistes contemporains.

Le musée des Beaux-arts de strasbourg (au palais rohan) conserve une très importantecollection de natures mortes que les jeunes visiteurs découvriront avec profit (Willem claeszheda, pieter claesz, Willem Kalf, Jacques Linard, Louise moillon, chardin, etc.

FIche DescrIptIveVIES SILENCIEUSES

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DossIer De préparatIoN à La vIsIteMUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

Sébastien Stoskopff, Grande Vanité, 1641

Description de l’activité à mener par le responsable du groupe -durée : environ 35 minutes

Matérielchacun aura besoin d’un sous-main, d’un crayon de couleur, d’un crayon à papier, d’uncrayon blanc et de 3 feuilles de calque comportant le contour du tableau.

Quelques consignes pour aborder la Grande Vanité d’un point de vueplastique

1ère consigne : sur une feuille de calque, avec le crayon de couleur, tracez les lignesimportantes du tableau (verticales, horizontales, obliques).

2e consigne : superposez maintenant une 2e feuille de claque sur la 1ère et dessinez au crayonà papier 3 éléments que vous jugez importants en respectant leurs places et proportions.

3e consigne : superposez enfin une 3e feuille de claque sur les 2 premières et indiquez leszones de lumière avec le crayon blanc.

vous aurez ainsi porté trois regards très différents sur la Grande vanité en retrouvant sacomposition rigoureuse (consigne 1), en appréciant le rendu des différents objets (consigne2) et en amorçant un questionnement autour de leur signification, en observant le traitementde la lumière (consigne 3) qui isole et modèle les formes des objets pour les mettre en valeur.

Il reste maintenant à en comprendre le sens symbolique

Que représentent : - le luth ? (l’art)- les hanaps ? (la richesse)- les éléments de l’armure et l’épée ? (la puissance, le courage)- les livres? (le savoir)- la gravure ? (d’après une gravure de Jacques callot : scapin, la comédie humaine)- le crâne ? (la mort)- le sablier ? (le temps qui passe)

ces éléments sont à relier au quatrain écrit sur l’ardoise représentée à gauche en bas dutableau et qui en donne la clé :

Kunst, Reichtum, Macht und Künheit stirbet Art, richesse, puissance et courage meurtDie Welt und alle Ihr Thun verdirbet Du monde et de ses oeuvres rien nedemeureEin ewiges komt nach dieser Zeit Après ce temps viendra l’éternitéIhr Thoren, flieht die Eitelkeit O Fous ! fuyez la vanité

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ANNEXES

Visiter le musée / Informations pratiqueswww.musees-strasbourg.org

musée de l’œuvre Notre-Dame3, place du château67076 strasbourg cedexfermé le lundi

service éducatif des musées2, place du château67076 strasbourg cedextél. 03 88 52 50 04/ Fax. 03 88 52 50 41Du lundi au vendredi de 14 h à 17 h

Visites de groupespour toute visite de groupe, avec un médiateur ou en autonomie laréservation est indispensable auprès du service éducatif environ 10 jours àl’avancepar téléphone : du lundi au vendredi de 8h30 à 12h30 au 03 88 88 50 50réservation en ligne : www.musees-strasbourg.org (visites, ateliers - visites degroupes - demande en ligne)

Horairesaccueil des groupes par l’équipe du service éducatif mardi, mercredi, jeudi et vendredi de 9h à 18hLundi de 9h à 12h et de 14h à 18hsamedi de 9h à 12h

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Le musée est fermé le 1er janvier, le vendredi saint, le 1er mai, le 1er et le 11novembre et le 25 décembre.

Visite en autonomietous les jours (sauf le lundi) de 10h à 18haudioguide en français, anglais, allemand, disponible à l’accueil du musée del’œuvre Notre-Dame.

Tarifs- avec un médiateurForfait pour la visite (durée moyenne 1h30) : 13 euros par groupe, payables àla caisse le jour de la visite, gratuité pour les Zep

- Gratuité de l’entréemoins de 18 ansGroupes d’étudiants et accompagnateurspersonnes en situation de handicap, de recherche d’emploi ou bénéficiairesde l’aide sociale, sur présentation d’un justificatiftitulaires de la carte édu’passpour tous le premier dimanche du mois

- La carte édu’passvalable de septembre à septembre 5,60 euros accessible à toute personne occupant une fonction d’éducation,d’encadrement ou d’animationen vente aux caisses des musées, sur présentation d’une pièce justificatived’exercice et d’une photo d’identitéstrictement personnelle, cette carte doit être présentée à la caisse lors dechaque visite pour obtenir un billet d’entrée gratuit.

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suiTe De la visiTe

1. accueil )))1

2. sculpTure roMaNe eN alsace )))20Galerie reconstituée du cloître d’eschau (v. 1180) )))212cuves baptismales, linteaux, tailloirs (XIe-XIIe s.) vitrail : tête de christ, Wissembourg ? (XIe s.) )))211

3. viTraux Des xiie eT xiiie siècles )))30vitraux provenant de la cathédrale romane et pièces issuesde plusieurs églises alsaciennes )))31, 32, 33, 34

4. cour priNcipale )))40(accès depuis la salle des vitraux)à gauche, aile renaissance de la maison de l’œuvre Notre-Dame, construite de 1579 à 1582 par hans thomanuhlbergerà droite, aile gothique de 1347, sculpture strasbourgeoise duXIIIe au XvIIe siècle

5. salle De la loge Des Tailleurs De pierre, 1582 )))50

statues du portail saint-Laurent de la cathédrale, 1503,remplacées par des copies sur l’édifice )))52Diverses sculptures du Xve siècle issues de la cathédrale

)))51

7. chefs-D’œuvre goThiques De la caThÉDrale )))70église et synagogue du portail sud (v. 1230) )))72tentateur, vierges sages et vierges folles du portail droit dela façade occidentale (v. 1280-1290) )))74sculptures de l’ancien jubé (v. 1250) )))73Grand gâble du portail central )))76

9. JarDiNeT goThique )))90(accès par le corridor 8)plantations dans la tradition des jardins médiévauxcollection de dalles funéraires

10. et 11. sculpTure Du xive siècleGisant de hugues Zorn (v. 1320)

13. cÉraMique Du MoyeN Âge eT De la reNaissaNce )))130

rez-De-chaussÉe

JarDINetGothIQue

saLLe Du JuBé

12

34

cour

LocaLpéDaGoGIQue

cour

accueIL

cour 5

7

913

1110

8

par l’escalier 12 vers le palier iNTerMÉDiaire

Plan d’orientation dumusée

85

Page 86: MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

suiTe De la visiTe

14. à 18. obJeTs D’arT, orfèvrerie, ivoires Du MoyeNÂge au xviie siècle )))170, 171, 172, 173

repreNDre l’escalier 12 qui coNDuiT au 2e ÉTage

palier iNTerMÉDiaire17

15

1816

14

12

20. viTraux alsacieNs Des xive eT xve siècles )))200œuvres de l’atelier de peter hemmel d’andlau (fin Xve s.)vitraux provenant de l’église st-pierre-le-vieux, strasbourg

)))203

21. à 26. l’essor arTisTique Du xve siècle

21. le DÉbuT Du xve siècle )))210Doute de Joseph et Nativité de la Vierge, panneaux peints(v. 1410-1420) )))213Le Christ et saint Jean, bois polychrome (v. 1430) )))214tapisseries strasbourgeoises (v. 1450-70) )))216Boiseries médiévales rapportées provenant d’une maisonstrasbourgeoise (fin Xve s.)

22. sculpTure alsacieNNe eNTre 1430 eT 1470Boiseries et mobilier )))220, 221, 222reliefs de la chartreuse de strasbourg (v. 1470) )))223

23. et 24. peiNTure eT sculpTure Du xve siècle )))231Les amants trépassés, v. 1470 )))232

25. sculptures de Nicolas Gerhaert de Leyde (v. 1464-1467))))250, 251, 252

Bustes d’hommes accoudés, bois polychromeconrad Witz, Sainte Catherine et sainte Madeleine, huile sur bois(v. 1444-1446) )))253

26. peiNTure eT sculpTure De 1470 à 1520retable de saint sébastien de Neuwiller-les-savernesculpture (Xve s.)

DeuxièMe ÉTage

suiTe De la visiTe au preMier ÉTage

20

25

24

2322

21

19

26

12

DesceNDre D’uN ÉTage par l’escalier eN vis, coNsTruiT eN 1580

par l’archiTecTe haNs ThoMaN uhlberger

accès salle 29 par le couloir 28

86

Page 87: MUSÉE DE L’ŒUVRE NOTRE-DAME

suiTe De la visiTe

29. et 30. peiNTure Du DÉbuT Du xvie siècle )))300œuvres de hans Baldung Grien (schwäbisch-Gmünd 1484 -strasbourg 1545) )))301, 302

31. aNcieNNe salle De rÉuNioN Des aDMiNisTraTeursDe l’œuvre NoTre-DaMe )))310table à calculer du receveur de l’œuvre )))311Boiseries (1582) sébastien stoskopff, Grande Vanité (1641)

32. cabiNeT De Travail Du receveur eT chaMbre-forTeDes archives De l’œuvre NoTre-DaMe

33. à 39. Mobilier alsacieN eT rhÉNaN Du xviie siècle.arT alsacieN Des xvie eT xviie siècles

34. série d’armoires alsaciennes à sept colonnes (1618-1704) )))340

35. collection de verrerie

36. mobilier (XvIIe et XvIIIe s.)

37. Natures mortes de sébastien stoskopff (strasbourg 1557 - Idstein 1657) )))370, 371, 372, 373

38. et 39. mobilier alsacien et du sud de l’empire germanique(XvIIe s.). vitraux d’appartement (XvIe-XvIIe s.)

suiTe De la visiTe

preMier ÉTage

sorTie eT reTour à l’accueil par l’escalier eN vis ))) 400

accès salle 33 par le couloir 28

31

3034

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87