Modèles couplés hydraulique/thermique de la nappe ...

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Swiss Bull. angew. Geol. Vol. 14/1+2, 2009 S. 47-64 Modèles couplés hydraulique/thermique de la nappe alluviale de la plaine du Rhône et modélisation de l’implantation d’un système de refroidissement eau-eau à l’hôpital cantonal de Sion (VS, Suisse) Boris Matti 1 , Laurent Tacher 2 1 Muttoni & Beffa SA, Via Cantonale 15, CH-6760 Faido [[email protected]] 2 GEOLEP, Station 18, CH-1015 Lausanne [laurent.tacher@epfl.ch] Mots-clés: Géothermie, hydrogéologie, pompe à chaleur (PAC), modélisation numérique, nappe alluviale du Rhône Résumé Cet article décrit les modèles tridimensionnels hydrogéologiques et hydro-thermiques en vue de l’étude et de l’exécution d’un système de refroidis- sement (PAC) eau-eau supplémentaire de grande puissance pour l’hôpital de Sion (VS). Cette étude permet de répondre aux questions suivantes: Est- ce que l’introduction de nouvelles installations per- turbera le fonctionnement du système? L’aquifère peut-il fournir de tels débits? Et, est-ce que la per- formance des puits et pompes à chaleur déjà exis- tants sera affectée? Hydrauliquement, les modèles numériques ont montré toute l’importance que tiennent les conditions aux limites dans la dyna- mique du système (i. e. Rhône et relations atmosphère/aquifère). Du point de vue thermique, se sont les transferts de chaleur par la surface, via la zone non-saturée, qui contrôlent thermiquement le système, marquant ainsi bien les fluctuations saisonnières atmosphériques (> ½ des flux ther- miques entrant et sortant). Les simulations numé- riques montrent que les puits actuels, fonctionnant principalement en été pour le refroidissement, n’influencent thermiquement pas d’une manière importante l’aquifère (1 % de la recharge en cha- leur annuelle). L’extension maximale du panache de chaleur de ICHV et SUVA en aval est d’une cen- taine de mètres (maximum 200 m). La distance minimale préconisée pour de nouvelles installa- tions géothermiques serait ainsi de 200 mètres. D’un point de vue hydraulique et thermique il ne semble pas avoir de restriction au rajout de nou- veaux ouvrages. Riassunto Quest'articolo descrive modelli tridimensionali idrogeologici ed idrotermali in previsione dello stu- dio e dell'esecuzione di un sistema supplementare di raffreddamento acqua-acqua (PAC) di grande potenza per l'ospedale di Sion (VS). Questo studio permette di rispondere alle domande seguenti: L'introduzione di nuovi impianti perturberà il fun- zionamento del sistema? L’acquifero può fornire tali flussi? Ed il rendimento dei pozzi e delle pompe a calore già esistenti sarà influenzata? Idraulica- mente, i modelli hanno dimostrato tutta l'impor- tanza influenzata dalle condizioni ai limiti nella dinamica del sistema (fiume Rodano e relazioni atmosfera/acquifero). Dal punto di vista termico, i trasferimenti di calore con la superficie, via la zona non saturata, controllano termicamente il sistema e segnalano così bene le fluttuazioni stagionali atmosferiche (> ½ dei flussi termici in entrata ed in uscita). Le simulazioni mostrano che i pozzi attuali, funzionanti soprattutto in estate per il raffredda- mento, non influenzano termicamente in modo importante l’acquifero (1% della ricarica in calore annuale). L'estensione massima del pennacchio di calore, a valle degli stabili ICHV e SUVA è di un cen- tinaio di metri (massimo 200 m). La distanza mini- ma raccomandata per nuovi impianti geotermici sarebbe così di 200 metri. Da un punto di vista idraulico e termico non sembra avere restrizioni all'aggiunta di nuovi sistemi di pompaggio. 47 geologi 1-2.2009:geologi 2.06 09.02.10 15:24 Pagina 47

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Swiss Bull. angew. Geol. Vol. 14/1+2, 2009 S. 47-64

Modèles couplés hydraulique/thermique de la nappe alluviale de laplaine du Rhône et modélisation de l’implantation d’un système derefroidissement eau-eau à l’hôpital cantonal de Sion (VS, Suisse)Boris Matti1, Laurent Tacher2

1 Muttoni & Beffa SA, Via Cantonale 15, CH-6760 Faido[[email protected]]

2 GEOLEP, Station 18, CH-1015 Lausanne[[email protected]]

Mots-clés: Géothermie, hydrogéologie, pompe à chaleur (PAC), modélisation numérique, nappe alluvialedu Rhône

RésuméCet article décrit les modèles tridimensionnelshydrogéologiques et hydro-thermiques en vue del’étude et de l’exécution d’un système de refroidis-sement (PAC) eau-eau supplémentaire de grandepuissance pour l’hôpital de Sion (VS). Cette étudepermet de répondre aux questions suivantes: Est-ce que l’introduction de nouvelles installations per-turbera le fonctionnement du système? L’aquifèrepeut-il fournir de tels débits? Et, est-ce que la per-formance des puits et pompes à chaleur déjà exis-tants sera affectée? Hydrauliquement, les modèlesnumériques ont montré toute l’importance quetiennent les conditions aux limites dans la dyna-mique du système (i. e. Rhône et relationsatmosphère/aquifère). Du point de vue thermique,se sont les transferts de chaleur par la surface, viala zone non-saturée, qui contrôlent thermiquementle système, marquant ainsi bien les fluctuationssaisonnières atmosphériques (> ½ des flux ther-miques entrant et sortant). Les simulations numé-riques montrent que les puits actuels, fonctionnantprincipalement en été pour le refroidissement,n’influencent thermiquement pas d’une manièreimportante l’aquifère (1 % de la recharge en cha-leur annuelle). L’extension maximale du panachede chaleur de ICHV et SUVA en aval est d’une cen-taine de mètres (maximum 200 m). La distanceminimale préconisée pour de nouvelles installa-tions géothermiques serait ainsi de 200 mètres.D’un point de vue hydraulique et thermique il nesemble pas avoir de restriction au rajout de nou-veaux ouvrages.

RiassuntoQuest'articolo descrive modelli tridimensionaliidrogeologici ed idrotermali in previsione dello stu-dio e dell'esecuzione di un sistema supplementaredi raffreddamento acqua-acqua (PAC) di grandepotenza per l'ospedale di Sion (VS). Questo studiopermette di rispondere alle domande seguenti:L'introduzione di nuovi impianti perturberà il fun-zionamento del sistema? L’acquifero può forniretali flussi? Ed il rendimento dei pozzi e delle pompea calore già esistenti sarà influenzata? Idraulica-mente, i modelli hanno dimostrato tutta l'impor-tanza influenzata dalle condizioni ai limiti nelladinamica del sistema (fiume Rodano e relazioniatmosfera/acquifero). Dal punto di vista termico, itrasferimenti di calore con la superficie, via la zonanon saturata, controllano termicamente il sistemae segnalano così bene le fluttuazioni stagionaliatmosferiche (> ½ dei flussi termici in entrata ed inuscita). Le simulazioni mostrano che i pozzi attuali,funzionanti soprattutto in estate per il raffredda-mento, non influenzano termicamente in modoimportante l’acquifero (1% della ricarica in caloreannuale). L'estensione massima del pennacchio dicalore, a valle degli stabili ICHV e SUVA è di un cen-tinaio di metri (massimo 200 m). La distanza mini-ma raccomandata per nuovi impianti geotermicisarebbe così di 200 metri. Da un punto di vistaidraulico e termico non sembra avere restrizioniall'aggiunta di nuovi sistemi di pompaggio.

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1. Introduction

Cette étude a été réalisée par le GEOLEP(Laboratoire de géologie de l’ingénieur et del’environnement de l’Ecole Polytechnique deLausanne) à la demande du Bureau d’EtudesGéologiques de Aproz (BEG SA), en vue del’étude et de l’exécution d’un système derefroidissement eau-eau de grande puissan-ce pour les hôpitaux de Sion. Cet article pré-sente les points importants de cette étude,le rapport complet peut être consultéauprès du BEG SA ou du GEOLEP (Matti2007, étude n°0707). En outre, dans cet arti-cle il est largement fait référence aux rap-ports hydrogéologiques ci-dessous dont cet-te étude représente la suite. Le lecteur ytrouvera les informations géologiques ethydrogéologiques qui pourraient ne pasfigurer ici:• Installation de refroidissement et pompe à

chaleur (PAC) (Etude n°3546, BEG, avril2004);

• Installation de refroidissement (Etuden°3546, BEG, mai 2005);

• Norme d’exploitation de l’aquifère phréa-tique du Rhône par doublets géother-miques eau-eau (Tacher 1999, GEOLEP).

Tous les calculs ont été effectués avec lelogiciel Feflow®.

La puissance prévue de l’installation(1150 kW) implique à priori de forts débitsd’eau prélevés puis re-injectés dans l’aquifè-re. Il convient par conséquent de s’assurerpar modélisation que l’aquifère peut fournirde tels débits, que le système n’en perturberapas de manière importante le fonctionne-ment et que la performance des puits et pom-pes à chaleur déjà existant ne sera pas affec-tée. A savoir la SUVA et les hôpitaux de Sion(ICHV), chacun possédant un doublet prélè-vement/réinjection dont les débits sontrespectivement 3500 m3/jour et 1800 m3/jour.

D’un point de vue géologique, la stratigra-phie des terrains aquifères du secteur deChampsec présente des intercalations limo-

neuses, reconnues par forage, dont l’effetdoit être considéré dans les modèles propo-sés. Par ailleurs, la profondeur à laquelle estinstallée la partie filtrante (environ 30 m)des ouvrages existants ou prévus doit aussiêtre représentée par les modèles. Pour cesraisons, les modèles sont tridimensionnels,et les paramètres physiques sont issus deréalisations aléatoires stochastiques, repré-sentant la variabilité observée (Gelhar1986).D’un point de vue hydrodynamique, les gra-viers sableux constituant la majeure partiedes terrains, la transition entre la zone satu-rée et non-saturée de l’aquifère est assezmarquée. La modélisation en régime saturéest donc proposée, justifiée notamment parles faibles rabattements observés lors d’es-sais de pompage. L’alimentation par les eauxde surface via la zone non-saturée serareprésentée par un retard de l’infiltration àtravers un coefficient de transfert. Ce typede modèle est un bon compromis entre lesmodèles non-saturé et saturé. Les bilanshydrauliques seront ainsi légèrement sures-timés, mais au regard de l’incertitude liée àla cote du fond de l’aquifère (fixée arbitraire-ment à 40 m) elle reste minime. Des tests ontégalement été effectués en écoulement non-saturé, mais devant la méconnaissance desparamètres physiques à considérer enhydraulique et également en thermique ilsont été abandonnés. L’approche par milieuxsaturés dans ces contextes géologiques sejustifie pleinement. Les phases de modélisation sont les suivan-tes :1. Fabrication de la géométrie du modèle

(basée sur les données géologiques ettopographiques fournies par le BEG);

2. Recherche et introduction de conditionsaux limites;

3. Calage sur les conditions de 2005 parcomparaison avec les données;

4. Introduction des nouveaux puits et calculde leur impact sur l’aquifère et les ouvra-

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ges existants, du point de vue hydrau-lique et thermique. Réalisation de varian-tes destinées à trouver la configurationoptimale.

2. Modèle coupléhydraulique/thermique

Localisation et géométrie

La zone modélisée est située dans la plaine allu-viale du Rhône à hauteur de Sion. Elle s’étendd’Est en Ouest sur une longueur de 4.6 km etune largeur de 2 km en amont et 1.3 km en avaldu site prévu (Fig. 1). Son extension amont aété limitée à la hauteur du piézomètre BacBr8(coordonnées 596’900/121'200), et en aval à lahauteur du piézomètre LM6 (coordonnées592’600/118’500). La superficie du domaine d’é-tude est approximativement de 8 km2. L’exten-sion du modèle largement supérieure à la zoneétudiée (Hôpitaux cantonaux de Sion), permetde s’affranchir en partie des effets des condi-tions aux limites. Latéralement, la géométrieest limitée par le pourtour de la pleine du Rhô-ne. Sa base correspond à une profondeur de40 m fixée arbitrairement, tandis que sa limitesupérieure est constituée par la topographie.Le modèle 3D est constitué de 73’542 élémentsfinis prismatiques triangulaires et 135’960nœuds, distribués selon 20 couches (21 interfa-ces). Les couches possèdent des épaisseursrelativement constantes. Le maillage est affinélocalement à proximité des ouvrages pouraméliorer la précision des calculs dans leszones à fort gradient hydraulique.

Période de simulation

La période modélisée s’étend du 1er janvier2005 au 31 décembre 2005. Cette année n’estpas une année particulière d’un point de vuehydrogéologique, mais elle a été choisiepour les chroniques débits/températurescomplètes des puits de ICHV et SUVA, ainsique pour les mesures en continu (journaliè-

res) existant pour quatre piézomètres(BacBr8, LM6, RN14 et 04I52). Ces mesurespermettent de caler d’une façon optimale lemodèle.

Champs de paramètres

S’agissant de modélisation en régime trans-itoire saturé, les paramètres à fixer sont, pourla partie hydrogéologique, la conductivitéhydraulique k et le coefficient d’emmagasine-ment spécifique Ss, et pour la partie géother-mique, la porosité, la conductivité, la capacitéet la diversité thermique du fluide et du soli-de. Ces valeurs sont établis par l’exploitationdes essais de pompage (voir rapports BEG2004, 2005), des logs de forages, et par lesbesoins du calibrage (ajustement des poten-tiels calculés aux potentiels mesurés). Dû à lanature des matériaux (gravier, sable et limon)d’une part, et d’autre part à la structure detype alluvial, le milieu est extrêmement hété-rogène, verticalement et horizontalement,comme en attestent les relevés de sondage. Ledétail de cette hétérogénéité n’est connuqu’aux sondages, de sorte que sa représenta-tion exacte est difficile. Ainsi les valeurs deconductivités hydrauliques et thermiques,ainsi que de la porosité, sont issues de réali-sations aléatoires stochastiques (Gelhar1986), représentant la variabilité observée. En régime transitoire et saturé, le coefficientd’emmagasinement Ss gouverne l’amplitudeet la rapidité de la réponse du modèle auxvariations d’infiltration. Le modèle est dutype «saturé captif». Sa nature libre estcependant simulée par un fort emmagasine-ment (Ss = 0.01). La porosité a été ajustée selon la formule deBretjinski (de Marsily 1986), qui décrit larelation perméabilité/porosité dans lesmilieux sablo-graveleux isotropes. Dansnotre cas la porosité des formations limo-neuses pourrait donc être sous-évaluée. Onobtient pour 1E-5 < K < 2E-3 [m/s] des poro-sités 0.2 < φ < 0.24 [-]. Toutes ces valeurssont résumée dans le tableau 1.

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Fig. 1: Localisation et géométrie du modèle. En noir extension du modèle numérique. Indication des pié-zomètres utilisés pour la calibration du modèle (04I52 et RN14) et pour l’attribution conditions auxlimites (LM6 et BacBr8).

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Conditions aux limites

Les conditions aux limites (Fig. 2) considé-rées dans ces modèles sont les suivantes:• l’infiltration efficace, sous forme de flux

hydraulique imposé à la surface du modèle;• l’alimentation par la limite amont sous for-

me de conditions de potentiel (limite àcharge imposée);

• l’exutoire par la limite aval, sous forme deconditions de potentiel (limite à chargeimposée). Les valeurs imposées aux diffé-rentes conditions aux limites sont tiréesde chroniques journalières de l’année2005;

• transfert nappe-rivière, sous forme deconditions de flux entrants et sortants.

Concernant la partie géothermique:• température imposée variable au sommet

et dépendant de celle de l’aquifère (condi-tions de Cauchy);

• température imposée sur la face amont;• flux géothermique à la base;• températures mensuelles du Rhône impo-

sées aux interfaces 1 et 2 afin que la pro-fondeur de ce dernier soit d’environ 3 mèt-res.

Tab 1: Champs de paramètres physiques.

3. Discussion sur le choix desconditions aux limites

La caractéristique principale apparaissantdans les simulations proposées est la grandeimportance du Rhône sur les aquifères de lavallée du Rhône, tant du point de vuehydraulique que thermique. Dès lors il estimportant dans les simulations que la rela-tion nappe-aquifère soit aussi précise quepossible. La question du choix des condi-tions aux limites pour représenter le Rhônes’est posée. Normalement les objets à modé-liser de type «rivière» sont représentés pardes conditions aux limites à charge imposéede type Cauchy. Les conditions de type Cau-chy sont des conditions de charges impo-sées, variable dans le temps, mais dont l’in-tensité est calculée en tout point de la surfa-ce et à tout moment comme une fonction dela différence de potentiel entre la nappe et larivière. Cela permet de représenter d’unefaçon optimale les relations nappe-rivière. Sila nappe est plus haute que la rivière, elle val’infiltrer, et au contraire si elle est plus bas-se elle la drainera. Dans le cas étudié, lesnombreux tests réalisés n’ont pas donnéentière satisfaction pour des raisons liéesaux différentes sources d’incertitudes surles variables intervenant dans le calcul desparamètres de transfert; soit les donnéestopographiques, la hauteur d’eau du Rhône,l’épaisseur et perméabilités de colmatage dulit du Rhône. Les potentiels hydrauliques

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simulés ne reproduisaient pas d’une maniè-re satisfaisante les potentiels mesurés auxdeux piézomètres de référence (04I52 etRN14) utilisés dans la calibration du modèle.Les courbes calculées n’étaient pas synchro-nes avec celles mesurées et présentaientdes écarts de l’ordre du mètre. Afin de pou-voir reproduire l’hydrodynamique observéedu système, des flux plutôt que des poten-tiels ont donc été imposés aux nœuds del’interface supérieure du modèle. Cettemanière de procéder s’est avérée satisfai-sante. Ces flux varient dans le temps (Fig. 2)afin de simuler une exfiltration de la nappevers le fleuve en hiver et une infiltration enété. L’intensité de ces échanges est dans unpremier temps tirée des études de Schürch(1999) et de Tacher (1999) et dans un deuxiè-me temps modifiée pour les besoins du cala-

ge. Le principe retenu est une infiltration duRhône des mois de mai à octobre, le reste del’année le Rhône est drainant. Les valeurs deflux calculés dans Schürch (1999) pour larégion du Bois de Finges varient de 900 à1000 l/s en périodes de hautes eaux. Celarevient à considérer un flux approximatifvariant de -1 m/j (drainant) de 1 m/j (infil-trant). Valeur également adoptée et discutéepar Tacher (1999) dans l’étude numériquesur les normes d’exploitation de l’aquifèredu Rhône. Ces études ont démontrés l’im-portance du Rhône dans la dynamique desaquifère de la plaine du Rhône, avec un débitd’infiltration de l’ordre de 1 m3/s ce flux pré-senterait jusqu’à 75% de la recharge totalede l'aquifère. Ce débit d'infiltration restanttout de même faible par rapport au débitmoyen du Rhône (environ 140 m3/s).

Fig. 2: Conditions aux limites imposées et conditions de flux hydraulique imposées aux noeuds de l’inter-face supérieure pour représenter les relations d’infiltration/drainage entre le Rhône et l’aquifère.A] Conditions de flux discutées dans Schürch 1999 et Tacher 1999 (infiltration = valeur positive). B]Chronique annuelle de conditions de flux imposée dans le modèle après calibration (infiltration =valeur positive). C] Conditions de température imposées au Rhône sur un cycle annuel. D] Evolu-tion annuelle des températures atmosphériques (Tatm) pour les conditions de Cauchy.

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Fig. 3: Températures dans le modèle selon la profondeur et la saison. Les températures indiquées sontrelevées aux 21 interfaces du modèle, soit tous les deux mètres environ. Le graphique A] repré-sente le profil de température pour le modèle ICHV2007 avec une zone non-saturée épaisse de 9 m.Le graphique B] montre le même profil pour une zone non saturée épaisse de 2 m.

Le fonctionnement saisonnier des installa-tions prévues ou existantes nécessite unemodélisation en régime transitoire. En fonc-tion des données hydrologiques disponiblesl’année retenue est celle de 2005. Pour repré-senter l’impact thermique de l’ensemble desinstallations, les modèles sont du type coupléhydraulique/thermique. Dans la gamme destempératures prévues, il est considéré queles variations de température n’affectent pasles propriétés de l’eau ni du milieu perméa-ble. Pour simuler les échanges thermiques del’aquifère avec l’atmosphère, des conditionsde Cauchy sont imposées à tous les nœudsde l’interface 1 (sommet du modèle). Lesconditions de Cauchy sont des conditions deflux thermique imposé, variable dans letemps, mais dont l’intensité est calculée entout point de la surface et à tout momentcomme une fonction de la différence de tem-pérature entre l’atmosphère et l’intérieur dumodèle. Cela permet de représenter le faitqu’à température atmosphérique égale, leflux thermique entrant (été) est plus impor-tant au droit des régions froides du modèle,et notamment des PAC. Ainsi, on tient comptedu fait qu’en refroidissant l’aquifère, on enfavorise la recharge thermique. Le flux ther-mique qT est en pratique imposé sous formede température atmosphérique Tatm (pou-vant varier dans le temps) et d’un coefficientde transfert Φ dont la valeur dépend de la

conductivité thermique de la zone non-satu-rée λNS ainsi que de son épaisseur e. Ce coef-ficient amortit la température atmosphériqued’autant plus que la zone non saturée est iso-lante et épaisse. Le coefficient de transfert estdistribué selon Φ = λNS / e [Jm-2s-1K-1]. L’é-paisseur de la zone non saturée est variabledans le modèle et a été déterminée en sous-trayant les potentiels calculés par le modèlehydrologique en hautes eaux (t = 200 jours)aux cotes topographiques. La conductivitéthermique retenue pour la zone non saturéevaut 0.9 [Jm-2/s]. De Marsily (1986) indique0.4-0.8 pour des sables secs. Angehrn (1992)donne une fourchette entre 0.8 et 1.4 pourdes graviers, et 0.3 pour un sol sec.

Une condition aux limites à températureimposée a été considérée sur la face amont.Elle permet de représenter l’apport en cha-leur venant de l’amont des limites du modè-le. Elle n’est cependant pas appliquée à lazone d’hétérothermie s’étendant sur les pre-miers quinze mètres du modèle (Fig. 3). Cet-te zone étant caractérisée par de très fortesvariations saisonnières de température, Ilest très difficile d’y appliquer des conditionsaux limites représentatives.Le flux géothermique est simulé en imposantun flux thermique constant qT = 4700 Jm-2j-1

= 0.055 Wm-2 (Burger et al. 1985) à tous lesnœuds de la base du modèle.

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Finalement, les eaux du Rhône, s’infiltrant enété, ont une température variable selon la sai-son. Aux nœuds représentant les échangeshydrauliques Rhône/aquifère, les températu-res varient entre 4°C en hiver et 9°C en été.

4. Calibration et validité du modèle

La phase délicate de calibration du modèle aété effectuée sur la base de deux points demesures. Des données piézométriques jour-nalières sont fournies par des sondes à pres-sion aux piézomètres 04I52 et RN14. La cali-bration s’est faite principalement en variantles flux entrants et sortants du Rhône. Sonimportance dans la dynamique du systèmele justifie. Les paramètres physiques telsque la conductivité hydraulique k et le coef-ficient d’emmagasinement Ss n’ont pas faitl’objet de sérieux réajustements. Les condi-tions aux limites de bords (amont et aval)n’ont pas été modifiées.

5. Méthode de simulation despompes à chaleur (PAC)

Les doublets sont constitués d’un puits deprélèvement et d’un puits de réinjection,entre lesquels est installée une pompe à cha-leur (PAC). La puissance des PAC varie selonle débit circulant dans le doublet ainsi queselon la différence de température entre leprélèvement et la réinjection. En aval dudoublet, se développe une plume d’eaurefroidie. Sous l’effet de la dispersion, cetteeau se mélange à de l’eau n’ayant pas circulédans la PAC, de sorte qu’au delà d’une cer-taine distance, la plume de froid s’estompe.En outre, vu la proximité du toit de l’aquifèreà la surface topographique, un réchauffe-ment estival et des déperditions hivernalessont à prendre en compte. S’y ajoute le fluxgéothermique. La configuration adoptée est celle discutéedans Tacher (1999), soit une pompe à cha-leur représentée par un nœud à température

imposée et deux nœuds à flux hydrauliqueimposé. Cette configuration s’approche dela réalité du doublet. A un nœud, représen-tant le puits de réinjection, on impose unetempérature et un flux hydraulique entrant(Fig. 4). A un autre nœud, situé en amont, onimpose un flux hydraulique sortant, d’égaleintensité, et pas de condition sur la tempéra-ture. Bien qu’il n’y ait pas de connexion ent-re les deux nœuds, le dispositif représente leprélèvement d’eau (avec sa chaleur) à unendroit, et sa réinjection à une températureinférieure. Les chroniques de débits de pré-lèvement et de réinjection ont été fourniespar le bureau BEG (Fig. 4). Le système actuelcomprend deux ouvrages thermiques, celuides hôpitaux de Sion (ICHV) et celui de laSUVA. Chaque ouvrage est constitué de deuxdoublets eau-eau. Les hôpitaux de Sion utili-sent leur système de mai à septembre com-me système de refroidissement, tandis quela SUVA l’utilise également en hiver commepompe à chaleur (de octobre à avril). L’ICHVtourne avec un débit de 1800 m3/jour et laSUVA à 1000 m3/jour en hiver et 4000 m3/jouren été. Les températures réinjectées sontvariables dans le temps pour les deux ouvra-ges.

6. Résultats − comportement hydro-dynamique de la nappe du Rhône

Modèle hydrodynamique

Le calcul a été effectué avec les conditionsaux limites décrites précédemment. Lesconditions initiales proviennent du calcul enrégime permanent avec les conditions auxlimites du 1er janvier 2005 (temps = 0).Les valeurs calculées et mesurées aux piézo-mètres RN14 et 04I52 montrent une excellen-te corrélation linéaire de respectivement de93% et 89% (Fig. 5).Les différences maximales observées sontde l’ordre de 30 cm aux périodes de hauteseaux. La montée et la redescente des cour-bes sont synchrones avec les observations.

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Fig. 4: Chroniques des prélèvement/réinjection et des températures.

Bilan hydraulique

En régime transitoire, le total des débitsentrant à tout instant n’est pas forcémentégal aux débits sortant (Tab. 2). La différen-ce (bilan) provient de la capacité de stocka-ge de l’aquifère. On constate que la différen-ce entre les débits entrant et sortant est de3%. Le système présente un équilibrehydraulique remarquable. Globalement surl’année 2005, nous remarquons que lesdébits entrants sont relativement bien dis-tribués entre la limite amont (40%), le Rhône(30%) et l’infiltration de surface (30%). Ces

proportions montrent que ces limites jouentchacune un rôle important et non négligea-ble dans la dynamique de l’aquifère. Parcontre, les débits sortants, distribués entrela limite aval (33%), le Rhône (20%) et l’éva-potranspiration (47%), présentent des diffé-rences notables. L’évapotranspiration sem-ble jouer un rôle majeur dans la dynamiquegénérale. Le transfert hydrique par cettedernière est par ailleurs plus important enintensité que l’apport par les précipitations.De ce point de vue l’aquifère présenteannuellement un fort déficit hydrique, com-pensé d’une part par les apports en amont

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Fig. 5: Potentiels hydrauliques mesurés et calculés aux points (avec corrélations linéaires) de référenceRN14 et 04I52.

Tab. 2:Bilans hydrauliques calculéspour année 2005.

et vraisemblablement par les infiltrations duRhône. Notons tout de même que l’apport hydriquedu Rhône calculé est une conséquencedirecte des conditions aux limites à fluximposé choisies. Cependant, ces flux ont éténécessaires pour simuler les potentielshydrauliques observés, et l’on peut considé-rer que sa contribution hydraulique calculéeest réaliste. Les bilans mensuels sont princi-palement positifs (quantité d’eau entrante

supérieure à celle sortante). Cependant latendance s’inverse lors de périodes à faiblesinfiltrations, démontrant la relative grandeimportance de l’évapotranspiration dans ladynamique du modèle.

Champ de potentiel

Les potentiels hydrauliques calculésdécroissent assez régulièrement vers le bas

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de l’aquifère de 490 m à 482 m pour août etde 489 m à 481 m pour février. Le gradientqui est constant et relativement faible vaut0.002. Le niveau piézométrique se trouve àdes profondeurs variables selon la saison etla localisation géographique. D’une manièregénérale la profondeur de l’aquifère se situeentre 1 et 11 mètres pour les zones présen-tant un fort relief. En août le niveau piézo-métrique est plus haut d’environ 20 cm. Lebattement annuel mesuré journalièrementaux stations RN14 et 04I52 est de l’ordre dumètre. Au printemps le Rhône infiltre forte-ment l’aquifère. Cette période correspond àla fonte des neiges. Des quantités d’eau trèsimportantes affluent depuis les vallées jus-qu’à dans la plaine du Rhône, alors qu’unepartie s’infiltre directement dans les diversaquifères alluviaux, une autre partie s’écou-le directement dans le Rhône, augmentantconsidérablement son niveau d’eau et sondébit. A la station LH 2011 des variations del’ordre de 2 m sont observées entre janvieret juillet. En hiver la tendance s’inverse, leRhône a un niveau d’eau très bas, les poten-tiels s’inversent, et localement il va drainerl’aquifère.

Vitesses d’écoulement

Les vitesses d’écoulement ne varient pasavec la profondeur. Une vitesse annuellemoyenne de l’ordre de 0.2 m/jour a été calcu-lée. Elle varie sensiblement en hautes eaux(0.3 m/jour) et basses eaux (0.12 m/jour).

Relation nappe-rivière

L'aquifère est fortement alimenté par l'eaudu fleuve par un flux de l’ordre de 2 m3/s cequi représente une moyenne annuelle d’en-viron 30% de la recharge totale de l'aquifère.Dans les modèles, le rôle du Rhône est pro-bablement surévalué en raison du choix desconditions aux limites à flux imposés. Mal-gré cela, la dynamique du système a été cor-

rectement reproduite. La chronique des fluxobtenue après calibration, montre une plusimportante contribution du Rhône en pério-de de fonte glaciaire (printemps) que durantles hautes eaux des mois d’août et septem-bre. L’hydrodynamique de l’aquifère estcontrôlée au printemps par le débit impor-tant du Rhône et par les apports de bords.Les apports de bords sont constitués par leseaux infiltrées en amont du modèle. On voitque la baisse du niveau du Rhône mesuréeau point LH 2011 débute dès la mi-août. Dansnotre modèle cette descente est un peu plusavancée (fin juillet). Cette différence est liéeau fait que pour les besoins de calibrationnous avons du décaler de quelques jours(environ vingt) la période de drainage afinde pouvoir reproduire les chroniques depotentiels hydrauliques observées aux pié-zomètres RN14 et 04I52. Les raisons de cedécalage proviennent vraisemblablement dufait que notre modèle réagit globalementplus lentement. La réactivité du modèle esten partie contrôlé par le coefficient d’emma-gasinement Ss, qui dans notre modèle estvraisemblablement trop grand. Dans la réali-té le système ne doit pas être libre dans saglobalité. Des zones aux propriétés forte-ment captives doivent exister de part etd’autres de l’aquifère pouvant influencerlocalement les pressions hydrauliques. Ceszones difficilement identifiables dans laréalité ont été volontairement ignorées.

Bilan thermique

Globalement sur l’année 2005, nous remar-quons que le bilan thermique est négatif (lesystème perd plus de chaleur qu’il n’engagne). Le système perd de l’énergie enhiver et en automne, tandis que les saisonsestivales (été et printemps) compensentdans une moindre mesure ce déficit. La dif-férence de l’ordre de 10% reste néanmoinsminime, considérant que ces valeurs cor-respondent à l’année 2005, et qu’ellesdevraient être discutées sur des périodes de

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minimum cent ans. Les années exceptionnel-lement chaudes telles que 2003 permettentun rééquilibrage par une réalimentation enchaleur supérieure aux moyennes. En détail,les flux entrants sont distribués entre lesapports de surface (52%), la limite amont(28%), le Rhône (17%) et le flux géother-mique (3%). Ce dernier représentant quequelques pourcents des apports globaux. Lamajorité des apports proviennent ainsi destransferts entre l’atmosphère et l’aquifère,et secondairement de la limite amont et duRhône. Concernant les flux sortants, ils sontdistribués entre les transferts de surface(62%), la limite avale (22%), le Rhône (16%).Nous constatons que les pertes de chaleurpar la surface sont importantes et pas entiè-rement compensées par la recharge estivale.Les pertes par le Rhône sont inférieures à20%, tandis que la limite avale (flux sortant)et approximativement égale au flux entrantpar la limite amont (~25%). Ces bilans ther-miques indiquent que les relations avec l’at-mosphère gouvernent la température dansl’aquifère. Les fluctuations saisonnières detempérature dans la zone d’hétérothermieen témoignent. Les ordres de grandeur desflux thermiques sont approximativement de1E12 [J⋅j-1] pour les échanges aquifè-re/atmosphère, de 5E11 [J⋅j-1] pour le fluxthermique associé à l’eau entrant par la faceverticale amont et de 5E10 [J⋅j-1] pour le fluxgéothermique. La recharge thermique esti-vale via la zone non-saturée, peu épaisse,compense dans une moindre mesure les per-tes hivernales. Comme constatés pour l’hy-draulique, les transferts de surface sont trèsimportants dans la dynamique globale.

Champ de température

Les températures calculées dans le modèles’étendent en hiver de 4°C (températureimposée aux Rhône) à 9°C, et en été de 9°C(température imposée aux Rhône) à 12°C ensurface. Les variations de température del’aquifère semblent davantage dues aux fluc-

tuations de la température atmosphériquequ’à l’infiltration depuis le Rhône. Les fluc-tuations annuelles de températureatmosphérique et des eaux d’infiltration duRhône induisent une stratification des tem-pératures de l’aquifère. En subsurface, lestempératures oscillent entre 8.6°C en hiveret 10.8°C en été. Ces valeurs sont compara-bles aux mesures de GEOVAL (1986). En pro-fondeur, l’effet saisonnier est atténué. Dès 15m de profondeur, la température est à peuprès constante, voisine de 10.8°C (Fig. 3).Cette épaisseur d’hétérothermie marquéeest compatible avec les valeurs bibliogra-phiques (Tacher 1999, Recordon 1985). Lesprofils de températures calculés montrentégalement un déphasage de l’effet saison-nier. Par exemple, le profil vertical en hivermontre un maximum vers 10 m de profon-deur qui correspondrait à la propagationatténuée de l’été précédent. Les mesureseffectuées dans la région de St-Léonard(GEOTEST 1989) montrent des profils detempérature semblables.La distribution de température en profon-deur varie fortement avec l’épaisseur de lacouche non-saturée. L’alimentation en cha-leur diminue avec l’augmentation de l’épais-seur de la zone non-saturée. La limite entreles zones d’hétérothermie et d’homothermiene semble cependant pas varier.

Relations thermiques Nappe-Rivière

En été, l’infiltration d’eau du fleuve est per-ceptible sur quelques dizaines de mètres.Son panache thermique s’étend sur une dis-tance maximale de 500 m latéralement dansla direction d’écoulement et de quelquesdizaines de mètres verticalement. Cepen-dant, les variations de température de l’a-quifère semblent davantage dues aux fluc-tuations de température atmosphériquequ’à l’infiltration depuis le Rhône. Notonstoutefois que des mesures effectuées aupuits de pompage de la SUVA montrentcependant que des eaux pouvant provenir

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du Rhône seraient pompées. Ces eauxseraient infiltrées en amont à l’extérieur deslimites du modèle.

7. Modèle avec PAC

Comme illustré dans la figure 4, les deux sys-tèmes de doublets ICHV et SUVA ont descadences de pompage et d’injection différen-tes selon les saisons. Leur effet sur le systèmea été étudié à partir de bilans saisonniers.L’exploitation de chaleur dans l’aquifère estcompensée par la recharge thermique estiva-le via la zone non-saturée variablement épais-se. Ce phénomène est probablement confortépar le fait que l’été est aussi la période deshautes eaux dans l’aquifère, ce qui favoriseencore l’échange de chaleur avec l’atmosphè-re. D’un point de vue thermique, l’influencedes pompes à chaleur est minime. La chaleurqui transite par ces pompes s’élève à 1% (voirbilans thermiques dans tableaux 3 et 4). Les

Tab 3: Bilans hydraulique et thermique hiver et printemps.

pompes à chaleur, avec leur fonctionnementprincipalement estival, contribuent à larecharge thermique du système. D’un point de vue hydraulique, les pompes dela SUVA fonctionnent en hiver avec de faiblesdébits de l’ordre de 1000 m3/jour. En été,lorsque ICHV fonctionne également, les débitsextraits sont de l’ordre de 5800 m3/jour. Cesdébits ne représentent pas un déséquilibrepour le système étant donné qu’ils sont immé-diatement restitués.Les systèmes de refroidissement ICHV etSUVA représentent annuellement 1% de larecharge en chaleur de l’aquifère à l’échelledu modèle. De ce point de vue il n’y a aucu-ne restriction à l’installation de nouveauxsystèmes.

7.1 Zones d’influence des PAC

L’analyse des données disponibles (BEG2004, 2005) montre que les doublets ther-

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Tab 4: Bilans hydraulique et thermique été et automne.

miques actuels (ICHV et SUVA) mis en placefonctionnent correctement. Les puits de pré-lèvement de l'ICHV sont distants de 200 mdes puits de prélèvement et d'infiltration dela SUVA. Le puits de rejet est distant respec-tivement de 200 et 110 m. Cependant, desessais de pompage ont montré (BEG 2005)que le rayon d'influence du rabattement dupuits de prélèvement de ICHV dépasse les 80m, pour atteindre environ 120 m. Il en va trèsprobablement de même pour les puits de laSUVA. Cela signifie que les cônes de rabatte-ment et de hausse des puits implantés dansce secteur s'interpénètrent et qu'il y ainfluence réciproque.Les modélisations numériques ont égale-ment démontré que les puits ICHV et SUVAsont trop rapprochés. L’analyse des modèlesnumériques met en évidence des interféren-ces possibles entre les puits (Fig. 6). Les eauxpompées par les puits ICHV proviennent enpartie des eaux réinjectées en aval par laSUVA. Ces résultats expliquent en partie le

fait que les eaux pompées à ICHV présententdes températures supérieures à la normale.Les eaux réinjectées par ICHV sont distri-buées en aval créant un panache d’une cen-taine de mètres de largeur et de longueur. Leseaux réinjectées par la SUVA forment égale-ment un panache de direction SW d’une cen-taine de mètres. Précisons toutefois que cespanaches ne présentent pas des températu-res élevées. Après 400 m, les températuresréinjectées s’équilibrent avec l’aquifère et ladifférence de température est inférieure à0.1°C. Il convient également de rappeler queSUVA pompe l’eau à environ 14 m de profondpour la réinjecter à 26 m de profondeur. ICHVpompe et rejette l’eau entre 20 et 35 m deprofond. Concernant les pompes de ICHV, les simula-tions montrent que durant les 80 premiersjours de fonctionnement les perturbationsthermiques sont minimes. A t = 275 (octo-bre), représentant la fin de la période d’utili-sation, la majeure partie du panache d’eau

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Fig. 6: Interférence entre les puits de prélèvement et de réinjection de ICHV et SUVA.

chaude rejeté est pompée en amont par lespuits de prélèvement. Ces résultats confir-ment en partie les résultats de l’essai depompage effectué en 2005 (BEG 2005). Lepuits d'infiltration Pi2 enregistrait une bais-se de 6 cm durant le palier à 800 l/min lorsde l’essai de pompage simple dans Pp2 avecrejet dans la conduite. Le rabattement dansle puits de prélèvement Pp2 était plus faiblelors de l’essai avec rejet dans le puits d'infil-tration Pi2 montrant qu’une fraction (19%)de l’eau provenant du puits d’infiltrationretournait à son point de départ. En conclu-sion, la réinjection d’eau réchauffée augmen-te la température initiale de l’eau pompée.En revanche, les simulations concernant lespompes de la SUVA ne montrent aucuneinterférence entre puits de rejet et de pom-

page. La distance verticale et horizontale estsuffisamment importante pour éviter lesinterférences. Les eaux pompées provien-nent principalement de la surface.Finalement à la fin de la période de fonction-nement des pompes ICHV, l’extension maxi-male du panache de chaleur en aval est d’u-ne centaine de mètres (~200 m). Au-delà l’é-quilibre thermique s’opère et les eaux chau-des rejetées sont mélangées aux eauxlocales, indiquant des températures de10.8°C en moyenne.En conclusion la distance minimale préconi-sée pour de nouvelles installations géother-miques serait de 200 m. A titre de sécuritéleur localisation ne devrait pas se situerdans une distance de 1500 à 3000 m en avaldes doublets en exploitation. Cette distance

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a été déterminée par les zones d’influencedes puits de réinjection (Fig. 6).

Cette analyse permet de proposer desvariantes. Les futures installations devraientse situer en dehors des panaches possiblesd’eaux réinjectées par ICHV et SUVA, et sipossible se situer à une profondeur adéqua-te, permettant de pomper des eaux superfi-cielles plus froides. Ce dispositif augmente-rait le rendement des systèmes de refroidis-sement et éviterait dans une certaine mesu-re de possibles interférences.

7.2 Influences de nouveaux PAC

Diverses variantes de doublet pour systèmede refroidissement eau-eau pompant l’eau àenviron 15 m de profond et la rejetant à 25 mde profond ont été testées pour déterminerl’influence sur l’aquifère. Cette configurationpermet de pomper des eaux moins profondeshors influence des puits de rejet de ICHV etSUVA. Un fonctionnant hivernal pour leréchauffement a également été traité. Lesdébits souhaités sont de l’ordre de 4200 l/min(soit 2100 l/min par puits, 3024 m3/jour/puits).Globalement lorsque les puits sont utiliséspour le refroidissement la contributionannuelle à la recharge en chaleur représente1.6%, contre 1% pour l’état actuel (à savoirseulement avec les systèmes ICHV et SUVA).Les variantes tenant compte d’un fonction-nement également hivernal, montrent queles puits représentent une perte en chaleurtrès minime de 0.24% pour le système. Doncde ce point de vue il n’y aurait aucune res-triction à l’installation de nouveaux systè-mes fonctionnant également en hiver pour leréchauffement. Le système a thermique-ment de la réserve.

8. Conclusions

Hydrauliquement, les modèles numériquesont montré toute l’importance que tient le

Rhône dans la dynamique du système. Mis àpart le Rhône, les relations atmosphè-re/aquifère se sont également montréesdéterminantes (1/3 des flux hydrauliquesentrant et 1/2 des flux sortant). Du point de vue thermique, le Rhône ne sem-ble jouer qu’un rôle mineur dans la distribu-tion de la chaleur dans les modèles, étantdonné que son panache thermique s’étendsur une distance maximale de 500 m latéra-lement dans la direction d’écoulement et dequelques dizaines de mètres verticalement.Son importance pourrait être plus importan-te en amont des limites du modèle, où ilpourrait constituer une source d’apport nonnégligeable d’eau froide. Les transferts dechaleur par la surface contrôlent thermique-ment le système, plus de la moitié des fluxthermiques entrant et sortant transitant parcette surface via la zone non-saturée, mar-quant bien les fluctuations saisonnièresatmosphériques. L’épaisseur de la zone non-saturée contrôle la recharge thermique,notamment la recharge estivale, qui com-pense en partie les pertes hivernales. Lalimite entre les zones d’homothermie etd’hétérothermie a été définie à environ quin-ze mètres. Au-delà de cette profondeur latempérature est constante et vaut 10.8°C.

Actuellement, deux installations de refroi-dissement sont installées, ICHV et SUVA. Lesmesures effectuées sur les puits de ICHV ain-si que les modèles numériques montrentque le puits 1 de l’ICHV fonctionne parfaite-ment, captant des eaux de température inva-riable. Le puits 2 de prélèvement de l’ICHVest perturbé par les puits de rejet, ce qui faitqu’à sa mise en service, la température natu-relle de 10.8°C monte en 2-3 semaines à11.3°C. Cette valeur de 11.3°C vaut la moyen-ne entre les puits de rejet 1 (~11.1°C) et 2(~11.5°C). Le puits de pompage n°2 prélèvesurtout les eaux de rejet alors que le puits 1pompe des eaux provenant de l’amont. Lestempératures de pompage de la SUVA mesu-rées montrent de possibles connexions avecles eaux de surface. Des températures bas-

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ses ont été mesurées aux puits de pompagede la SUVA en 2005 et 2006 (8°C août 2005 et7.5°C juillet 2006). Ces températures sonttrès similaires à celles de la nappe superfi-cielle en amont (BacBR4) mais avec 2 moisde retard (7-8°C en mai 2005 et 12°C en octo-bre pour le piézomètre BacBR4, 7-8°C enjuillet et 12°C en décembre pour SUVA). Celapeut indiquer que le Rhône s’infiltre forte-ment en amont en période de hautes eaux etamènerait des eaux à 5-6°C en avril-mai et à8-9°C en juin-septembre. Ces eaux arriventen environ un mois au piézomètre BacBR4 eten deux ou trois mois à la SUVA. SUVA pom-pe ainsi des eaux superficielles plus froides. Les simulations numériques montrent queles puits actuels, fonctionnant principale-ment en été pour le refroidissement, n’in-fluencent thermiquement pas d’une manièreimportante l’aquifère à l’échelle du modèle(1% de la recharge en chaleur annuelle).L’extension maximale du panache de cha-leur de ICHV et SUVA en aval est d’une cen-taine de mètres (maximum 200 m). D’unpoint de vue hydraulique et thermique, il n’ya aucune restriction quand à la perspectived’installation de nouveaux systèmes géo-thermiques dans l’aquifère de la nappe allu-viale du Rhône. Cependant, la distance mini-male préconisée pour de nouvelles installa-tions géothermiques est de 200 m. Par sécu-rité, leur localisation ne devrait pas se situerdans une distance minimale de 1500 à 3000m en aval des doublets en exploitation, dis-tance déterminée par les zones d’influencedes puits de réinjection. Toutefois, les simulations numériques ontmontré que, d’une part dû aux fortes perméa-bilités du milieu, et d’autre part dû aux débitsimposés (jusqu’à 3000 m3/jours/puits), defortes interférences existent entre les puitsde prélèvement et de réinjection d’un mêmedoublet. Un espacement inférieur à 170 m ent-re les puits de prélèvement et de réinjectionperturbe fortement les températures de pom-page, pouvant augmenter la température deseaux prélevées de plus de 2°C. Une distanced’au minimum 170 m entre les puits de prélè-

vement et de pompage atténuant fortementces interférences (augmentation de tempéra-ture des eaux pompées inférieure à 0.5°C) estrecommandée.

Globalement, lorsque les puits sont utiliséspour le refroidissement, leur contributionannuelle à la recharge en chaleur représente1.6%, contre 1% pour le système actuel (àsavoir ICHV et SUVA). Les variantes tenantcompte d’un fonctionnement égalementhivernal, montrent que les puits représen-tent une perte en chaleur. Cette perte enchaleur reste toutefois très minime (0.24%de la perte en chaleur du système).

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