Modèle de développement de la sentibilité interculturelle

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Le Modèle de Développe- ment de Sensibilité Intercul- turelle (MDSI) est largement reconnu comme un modèle de recherche en Communica- tion Interculturelle. Si les fon- dements conceptuels de ce modèle sont complexes, cet article, rédigé par l’auteur du modèle, le Dr Milton Bennett a pour ambition de présenter de manière simplifiée et abor- dable les concepts de base. Le Modèle de Développement de Sensibilité Interculturelle (MDSI) a été crée par Milton J. Bennett, Ph. D, (1986- 1993) comme un cadre pour expli- quer les réactions face aux différences culturelles. Dans un contexte académique ou entrepreneurial, il observe que les individus confrontés aux différences de quelque manière que ce soit, ont développé des compétences en communication intercul- turelle. En reprenant des con- cepts de psychologie cogni- tive et de constructivisme, il a organisé ces observations en six étapes d’augmentation de sensibilité aux différences culturelles. L’hypothèse de ce modèle se base sur l’idée que plus la manière de vivre une con- frontation à la différence cul- turelle devient complexe et sophistiquée, plus les compé- tences en termes de relations interculturelles augmentent. Chaque étape représente une structure cognitive par- ticulière, qui s’exprime dans différentes attitudes et com- portements vis à vis des dif- férences culturelles. En re- connaissant l’orientation cog- nitive sous jacente vis à vis de la différence, il serait pos- sible de prédire des compor- tements et attitudes, et ainsi orienter l’encadrement péda- gogique pour faciliter la tran- sition vers l’étape suivante. Les trois premières étapes du MDSI sont dites ethnocen- triques : notre propre culture est au centre de notre per- ception de la réalité. Déni : dans l’étape de déni des différences culturelles, je considère ma propre cul- ture comme la seule culture réelle. Les autres cultures sont évitées par une isolation physique ou psychologique des différences. Les per- sonnes vivant l’étape de Déni ne s’intéressent pas aux dif- férences culturelles, et peu- vent même réagir agressive- ment pour éliminer une dif- férence qui les affecte. Défense : dans l’étape de défense contre la différence, ma propre culture est la seule culture valable. Le monde est alors divisé en deux parties : nous et eux dans lequel le nous est supérieur et le eux est inférieur. Durant cette étape de défense on se sent menacé par la différence cul- turelle et on a donc tendance à être très critique vis à vis des autres cultures, que les autres soient nos hôtes, nos invités ou des gens d’origine différentes vivant dans notre société. Minimisation : L’étape de minimisation des différenc- es culturelles correspond à l’étape dans laquelle les élé- ments de ma vision du monde sont considérés universels. Ces valeurs universelles ten- dent à minimiser les différenc- es culturelles et les autres cul- tures sont souvent tribalisées ou romancées. Durant cette étape, on s’attache surtout aux points communs, et on peut avoir tendance à vouloir corriger le comportement des autres pour qu’ils répondent à nos attentes. Les trois étapes suivantes sont dites ethnorelativistes : ces étapes plus élaborées incluent l’expérience de sa propre culture comme un re- gard porté sur le monde par- mi d’autres regards tout aussi complexes. Acceptation : l’étape d’ac- ceptation des différences cul- turelles correspond à l’étape durant laquelle je considère ma propre culture comme une parmi d’autres cultures tout aussi complexes. Accep- tation ne veut pas dire accord – les différences culturelles pouvant être jugées néga- tivement, mais ce jugement n’est plus ethnocentrique. Les personnes vivant l’étape Modèle de Développement de Sensibilité Interculturelle (MDSI) par Milton J. Bennett 25

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Modèle de développement de la sentibilité interculturelle

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Le Modèle de Développe-ment de Sensibilité Intercul-turelle (MDSI) est largement reconnu comme un modèle de recherche en Communica-tion Interculturelle. Si les fon-dements conceptuels de ce modèle sont complexes, cet article, rédigé par l’auteur du modèle, le Dr Milton Bennett a pour ambition de présenter de manière simplifiée et abor-dable les concepts de base.

Le Modèle de Développement de Sensibilité Interculturelle (MDSI) a été crée par Milton J. Bennett, Ph. D, (1986- 1993) comme un cadre pour expli-quer les réactions face aux différences culturelles. Dans un contexte académique ou entrepreneurial, il observe que les individus confrontés aux différences de quelque manière que ce soit, ont développé des compétences en communication intercul-turelle. En reprenant des con-cepts de psychologie cogni-tive et de constructivisme, il a organisé ces observations en six étapes d’augmentation de sensibilité aux différences culturelles.

L’hypothèse de ce modèle se base sur l’idée que plus la manière de vivre une con-frontation à la différence cul-turelle devient complexe et sophistiquée, plus les compé-tences en termes de relations interculturelles augmentent. Chaque étape représente une structure cognitive par-

ticulière, qui s’exprime dans différentes attitudes et com-portements vis à vis des dif-férences culturelles. En re-connaissant l’orientation cog-nitive sous jacente vis à vis de la différence, il serait pos-sible de prédire des compor-tements et attitudes, et ainsi orienter l’encadrement péda-gogique pour faciliter la tran-sition vers l’étape suivante.

Les trois premières étapes du MDSI sont dites ethnocen-triques : notre propre culture est au centre de notre per-ception de la réalité.

Déni : dans l’étape de déni des différences culturelles, je considère ma propre cul-ture comme la seule culture réelle. Les autres cultures sont évitées par une isolation physique ou psychologique des différences. Les per-sonnes vivant l’étape de Déni ne s’intéressent pas aux dif-férences culturelles, et peu-vent même réagir agressive-ment pour éliminer une dif-férence qui les affecte.

Défense : dans l’étape de défense contre la différence, ma propre culture est la seule culture valable. Le monde est alors divisé en deux parties : nous et eux dans lequel le nous est supérieur et le eux est inférieur. Durant cette étape de défense on se sent menacé par la différence cul-turelle et on a donc tendance à être très critique vis à vis

des autres cultures, que les autres soient nos hôtes, nos invités ou des gens d’origine différentes vivant dans notre société. Minimisation : L’étape de minimisation des différenc-es culturelles correspond à l’étape dans laquelle les élé-ments de ma vision du monde sont considérés universels. Ces valeurs universelles ten-dent à minimiser les différenc-es culturelles et les autres cul-tures sont souvent tribalisées ou romancées. Durant cette étape, on s’attache surtout aux points communs, et on peut avoir tendance à vouloir corriger le comportement des autres pour qu’ils répondent à nos attentes.

Les trois étapes suivantes sont dites ethnorelativistes : ces étapes plus élaborées incluent l’expérience de sa propre culture comme un re-gard porté sur le monde par-mi d’autres regards tout aussi complexes.

Acceptation : l’étape d’ac-ceptation des différences cul-turelles correspond à l’étape durant laquelle je considère ma propre culture comme une parmi d’autres cultures tout aussi complexes. Accep-tation ne veut pas dire accord – les différences culturelles pouvant être jugées néga-tivement, mais ce jugement n’est plus ethnocentrique. Les personnes vivant l’étape

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d’acceptation tendent à être curieuses et respectueuses vis à vis des différences cul-turelles.

Adaptation : l’étape d’adap-tation correspond à la capaci-té de percevoir que les autres cultures ont des manières différentes de voir le monde et de commencer à y pren-dre part en ajustant son pro-pre comportement et ses ré-flexions pour se conformer à l’autre contexte culturel. Du-rant cette phase d’adaptation, on est capable de regarder le monde à travers «d’autres yeux» et peuvent changer leur

comportement pour commu-niquer de manière plus effi-cace dans une autre culture.

Intégration : cette étape correspond à la capacité d’intégrer différentes manières de voir le monde, en consi-dérant notre propre «mar-ginalité culturelle». L’étape d’intégration n’implique pas nécessairement un degré d’amélioration par rapport à l’étape d’Adaptation dans les situations nécessitant des compétences interculturel-les, mais est assez commune dans les groupes de minori-tés non dominants, les expa-

triés de longue durée ou les «nomades du monde».

Le modèle du MDSI a été utilisé ces quinze dernières années pour développer un curriculum d’éducation inter-culturelle et des programmes de formation. Le contenu de l’analyse de l’Etude a démon-tré la pertinence de la descrip-tion des étapes et a permis de mettre à jour l’idée qu’une mesure rigoureuse des états cognitifs sous jacents pour-rait mener à un outil utile pour une évaluation personnelle ou de groupe.

Modèle de Développement de Sensibilité

Intercuturelle (Illustration de Julien Peyre)

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