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Mobilité Inventer la mobilité de demain Conférence du 19 juin 2013 Retrouvez les interviews des intervenants sur www.autoroutes.fr/fr/colloque -inventer-mobilite-demain.htm PIERRE SERNE STIF MATTHEW CLICK HNBT SOPHIE MOUGARD STIF JEAN-MARC JANCOVICI Carbone 4 Mines Paris Tech JULIE RIEG Chronos JEAN-JACK QUEYRANNE Conseil Régional Rhône Alpes FRANÇOIS GOULARD Conseil Régional du Morbihan DENIS BAUPIN Député BÉNÉDICTE TILLOY Transilien SNCF PIERRE COPPEY ASFA OLIVIER FAURE Député THIERRY GUIMBAUD MEDDE MICHEL BLEITRACH Union des Transports Publics et Ferroviaires JEAN-BERNARD KOVARIK DG Infrastructures, des Transports et de la Mer BERTRAND LEMOINE Atelier International du Grand Paris JEAN-MARC OFFNER Agence d’urbanisme Bordeaux métropole Aquitaine Morceaux choisis des débats animés par Antoine Boudet, chef de service, Les Echos, et Jean-Marc Vittori, éditorialiste, Les Echos. Autour de quatre tables rondes, une vingtaine d’experts ont débattu sur les meilleures pistes à suivre en matière de mobilité. DANIEL BURSAUX DG Infrastructures, des Transports et de la Mer CYRIL BECQUART BuzzCar PIERRE-OLIVIER CAREL Fédération Nationale des Transports de Voyageurs ANDRÉ BROTO Cofiroute

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Mobilité

Inventer la mobilité de demain

Conférence du 19 juin 2013

Retrouvez les interviews des intervenants sur

www.autoroutes.fr/fr/colloque -inventer-mobilite-demain.htm

PIERRE SERNE

STIF

MATTHEW CLICK

HNBTSOPHIE MOUGARD

STIF

JEAN-MARC JANCOVICI

Carbone 4 Mines Paris Tech

JULIE RIEG

Chronos

JEAN-JACK QUEYRANNE

Conseil Régional Rhône Alpes

FRANÇOIS GOULARD

Conseil Régional du Morbihan

DENIS BAUPIN

Député

BÉNÉDICTE TILLOY

Transilien SNCF

PIERRE COPPEY

ASFA

OLIVIER FAURE

Député

THIERRY GUIMBAUD

MEDDE

MICHEL BLEITRACH

Union des Transports Publics et Ferroviaires

JEAN-BERNARD KOVARIK

DG Infrastructures, des Transports et de la Mer

BERTRAND LEMOINE

Atelier International du Grand Paris

JEAN-MARC OFFNERAgence d’urbanisme Bordeaux métropole Aquitaine

Morceaux choisis des débats animés par Antoine Boudet, chef de service, Les Echos, et Jean-Marc Vittori, éditorialiste, Les Echos.

Autour de quatre tables rondes, une vingtaine d’experts ont débattu sur les meilleures pistes à suivre en

matière de mobilité.

DANIEL BURSAUX

DG Infrastructures, des Transports et de la Mer

CYRIL BECQUART

BuzzCar

PIERRE-OLIVIER CAREL

Fédération Nationale des Transports de Voyageurs

ANDRÉ BROTO

Cofiroute

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« Inventer la mobilité de demain », était le défi proposé par l’ASFA (Association des sociétés françaises d’autoroutes et d’ouvrages à péage) dans le cadre d’un colloque organisé le 19 juin dernier en partenariat avec Les Echos. C’est avec brio qu’une vingtaine d’experts est venue en dé-battre, au fil de quatre tables rondes abordant tour à tour les problématiques économiques, sociétales ou politiques liées à cette modernisa-tion nécessaire des réseaux et des usages en zone péri-urbaine. Bonne nouvelle, les pistes de réflexion et les solutions sont potentiellement très nombreuses, bien qu’elles ne fassent pas toujours l’unanimité.

IL EST URGENT DE S’INTÉRESSER AU PÉRI-URBAIN« En matière de mobilité péri-urbaine, les équations de transport sont plus compliquées qu’ailleurs. Il faut donc redoubler d’imagination et d’innovation pour trouver les bonnes solutions. Il faut aussi encourager les initiatives et valider le concept de routes intelligentes » a rappellé en guise d’introduction Daniel Bursaux, directeur général des infrastructures, des transports

et de la mer (DGITM). Problème, les secteurs péri-urbains semblent encore relativement délaissés par la classe politique. « Ce sont effectivement des territoires orphelins. Aucun grand élu ne s’y intéresse, on est dans le déni du réel. Il faut pourtant accepter que l’étalement urbain plus ou moins vertueux existe. Il est urgent de s’y intéresser, du point de vue de la mobilité, pour que ce péri-urbain soit durable et accep-té dans sa diversité » assure Jean-Marc Offner, ingénieur-urbaniste et politologue, directeur général de l’agence d’urbanisme Bordeaux métropole Aquitaine.

Car le péri-urbain est complexe. Ni rural, ni central, c’est en général une zone pavillonnaire peu dense qui nécessite un traitement particulier de la mobi-lité. Les stratégies mises en place dans les grandes agglomérations ne s’y prêtent pas, pas plus que celles mises en oeuvre en zones rurales. Dévelop-per des services de mobilité à un prix raisonnable et accessibles au plus grand nombre constitue donc un défi majeur. Pour les acteurs du secteur, il faut réussir à être créatif, malgré un contexte économique difficile. «  Sur fond de contraction

Autour de la cité

Inventer la mobilité de demain

Il faut penser la mobilité sans crois-sance. Surmonter les défis de la mobilité, c’est éviter l’explosion sociale.JEAN-MARC JANCOVICI

MobilitéConférence du 19 juin 2013

3 QUESTIONS ÀPIERRE COPPEY, PRÉSIDENT DE L’ASFA

Quel était l’objectif de ce colloque ?La réunion portait sur la contribution que nous pourrions ap-porter à l’amélioration des transports péri-urbains. Le réseau autoroutier français a été conçu en étoile, et pour réaliser des liaisons interurbaines. Aujourd’hui, on sent bien qu’avec le dé-veloppement de l’urbanisation, les besoins de transports ne peuvent pas être entièrement satisfaits par la seule solution ferroviaire, et que les solutions que proposent les concession-

naires d’autoroutes — à savoir des investissements capaci-taires permettant d’accueillir des transports en commun, des autobus sur autoroute — apporteraient une solution à la fois souple économique, rapide et pragmatique au problème des transports péri-urbains. Il faut se souvenir que la congestion autour des villes, c’est de la qualité de vie en moins pour nos concitoyens qui passent leur temps et qui le perdent dans leur voiture, et c’est aussi une perte d’efficacité économique. Le bilan peut-être très négatif, alors que des solutions existent. Je voudrais ajouter que cette question n’est pas exclusivement parisienne, contrairement à ce que l’on a tendance à penser

La mobilité de demain se décide aujourd’hui. Autour de quatre tables rondes, une vingtaine d’experts ont débattu sur les meilleures pistes à suivre, les modes alternatifs, la mise en place d’une gouvernance et les solutions possibles de financement pour réussir à fluidifier les réseaux de transport saturés aujourd’hui. Morceaux choisis.

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énergétique, la solvabilité des personnes situées en couronne péri-urbaine va probablement bais-ser. Il faut pourtant préserver un minimum de mo-bilité, qui demande des moyens, sous peine d’ex-plosion sociale. Il faut éviter une forme de précarité énergétique dans les transports, mais apporter des services différents de la voiture pour tous qui cessera – et cesse déjà - d’être accessible » souligne Jean-Marc Jancovici, associé de Carbone 4 et enseignant à Mines Paristech.

PENSER L’USAGE DE LA VOITURE AUTREMENTPour désaturer les réseaux, faut-il supprimer les autos ? Une idée jugée saugrenue, dans la mesure où dans le secteur péri-urbain, la voiture garde une efficacité considérable. « Le véritable enjeu n’est pas de faire disparaître les voitures, mais de faire vivre la voiture autrement  » propose Jean-Marc Offner. Selon lui, deux axes sont inévitables : la voiture doit à la fois être pensée comme un mode de transport collectif et comme un mode de transport public. Transport collectif, par exemple avec le covoiturage, plébiscité même s’il n’est pas simple de mettre plusieurs personnes dans une voiture pour les trajets quotidiens. Trans-port public, aussi, via l’autopartage, comme le propose aussi la société de location de voitures entre particuliers Buzzcar venue partager son expérience. «  Nous voulons donner aux usagers le pouvoir et les outils de prendre le contrôle de leur propre mobilité automobile. En moyenne une voiture coûte plus de 6000€/an et n’est utilisée réellement que 5% du temps.  Buzzcar  souhaite améliorer l’usage de la voiture. Bénéfices à la clé  : moins de voitures, moins de parkings, moins de gaspillage, moins de trajets inutiles en voi-ture, moins de CO2  » a expliqué Cyril Becquart, responsable process et expérience utilisateur chez

Buzzcar. La société compte déjà 3000 voitures dans son parc. Il faut aussi trouver des moyens iné-dits, ou diversifiés, pour réussir à diminuer les pics de trafic. « A partir du moment où on ne peut pas faire de nouvelles infrastructures partout, il faut que celles qui existent servent plus et mieux tout au long de la journée » conclut Jean-Marc Offner. Pour Pierre-Olivier Carel, responsable de l’action territoriale à la FNTV, l’autocar peut aussi être vu « comme le premier moyen de covoiturage. C’est une réponse économiquement intéressante avec une bonne qualité de service ».

FAVORISER UNE APPROCHE MULTI-MODALE ET MULTI-USAGEComment faire mieux ? Tous s’accordent à dire que la mobilité future ne proviendra pas d’une seule innovation, mais de la combinaison de plusieurs d’entre-elles. « Il ne faut pas envisager une seule solution de mobilité, mais plusieurs qui permettent de multiplier les moyens d’assurer le transport quo-tidien. Il est aussi important de mener des expéri-mentations à grande échelle » assure Jean-Marc Jancovici. Pour Jean-Bernard Kovarik, adjoint au directeur général de la DGITM, il s’agit surtout d’être audacieux. « Les solutions traditionnellement en-visagées ne sont certainement pas universelles, elles ne sont pas adaptées à tous les territoires. C’est la raison pour laquelle il faut essayer de mettre en oeuvre des solutions multi-modales et multi-usages » a-t-il expliqué. Encore faut-il qu’elles soient pertinentes, économiques et écologiques.

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elle est très présente aussi dans les autres grandes métropoles françaises comme Lyon, Toulouse, Bordeaux, Strasbourg ou Nantes.

La classe politique en a-t-elle conscience ?Quand on discute avec les élus locaux, ils sont très conscients que le bilan carbone d’un bus sur autoroute est souvent très avantageux, en particulier dans le péri-urbain. Le recours au transport collectif routier y est bien souvent plus adapté, plus économique, donc plus écologique. Les contributions que les sociétés d’autoroutes peuvent apporter à l’amélioration des

transports péri-urbains sont significatives et rencontrent les attentes des élus.

Répondre à ces problématiques de mobilité. Est-ce une question d’argent, de temps ou de décideurs ?Ce que le colloque a montré c’est que les questions de trans-port génèrent des besoins de financements qui sont colossaux et posent des questions de gouvernance qui sont devenues très compliquées, puisqu’elles combinent les compétences des autorités organisatrices de transport et des opérateurs. Cela nécessite beaucoup de temps et de volonté politique. •

PIERRE SERNE Il faut que les sources de financement qui sont des

leviers très largement utilisés par l’Etat deviennent des leviers dans les mains des collectivités qui organisent et

qui investissent dans les transports en commun.

Le péri-urbain, orphelin des

politiques publiques.JEAN-MARC OFFNER

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Mais les exemples ne manquent pas, même si pour la plupart, il ne s’agit encore que d’expérimenta-tions, dans ce laboratoire géant que sont les zones péri-urbaines. Par exemple, la réservation de voies de bus sur les grands axes est une piste sérieuse, tout autant que la mise en place de voies à péage modulé. Dans un tout autre genre, certains pro-posent la généralisation du travail à distance, pour tenter de réduire le nombre de travailleurs sur les routes le matin. Travailler sur la composante de temps est aussi une piste à privilégier, selon Bénedicte Tilloy, directrice générale de SNCF Transilien. « Il faudrait par exemple que les entreprises puissent proposer à leurs salariés qui le peuvent d’avoir des horaires décalés. De notre expérience, les jours de pont, où le plan de trans-port est le même et qu’il y a beaucoup moins de voyageurs, la ponctualité est au rendez-vous. Le fait d’étaler la pointe permet d’avoir un meilleur confort à bord, mais aussi d’avoir une exploitation beaucoup plus efficace » détaille-t-elle.

LA GOUVERNANCE, UNE EXIGENCEAdopter un mode multi-modal et multi-usages pose cependant de nouveaux défis. Il faut coor-donner ! Dans ce contexte, l’idée d’une gouver-nance unifiée, capable d’optimiser le fonctionne-ment des diverses infrastructures, et de veiller à une meilleure concertation des acteurs est essen-tielle. « La mise en place progressive d’un disposi-tif de gouvernance urbaine est en effet un moyen d’assurer la cohérence et l’efficacité de la mobilité dans la ville » confirme Sophie Mougard, direc-trice générale du Syndicat des transports d’Île-de-France (STIF). Une démarche qui doit d’ailleurs impérativement être réalisée main dans la main avec l’Etat et les administrations décentralisées, lesquelles doivent être dotées de moyens tech-niques, financiers et humains supplémentaires.

En somme, les acteurs doivent avancer ensemble sur un schéma directeur pour organiser l’ensemble des transports en commun, qu’ils soient RER, tram, train, bus... Avec cependant un bémol. « Ces derniers doivent être hiérarchisés, on ne peut

raisonnablement pas mettre des transports collectifs guidés de même qualité partout et avoir le retour sur investissement espéré » prévient Michel Bleitrach, président de l’Union des Transports Publics et Ferroviaires. Selon lui, bien que nous soyons en retard sur les autres pays européens, la mise en place d’une gouvernance peut effective-ment tout changer.

Mais rien n’est encore gagné. La mise en oeuvre de cette gouvernance implique une politique de transformation, de conduite du changement. «  Il est essentiel que les acteurs réfléchissent de concert, afin qu’ils s’approprient ces nouveaux sujets et construisent une vision commune. Il faut être sûr que tout le monde joue le jeu, sinon, l’ap-propriation risque d’être très longue et difficile  » a rappelé Julie Rieg, sociologue et directrice de développement du Groupe Chronos.

Il ne faudra cependant pas passer à côté de l’essentiel. Pour Thierry Guimbaud, directeur des services de transport du Ministère de l’Ecologie, du développement durable et de l’énergie,   « ce qui détermine le bon périmètre de la gouvernance, c’est le voyageur ». Une idée confirmée par Sophie Mougard. « Il faut effectivement  mettre le voya-geur au cœur de la réflexion, dans une logique de géographie des territoires. Il convient de prendre en compte la chaine de déplacement et trouver une logique qui peut convenir aux usagers, afin d’établir la feuille de route du plan de déplacement urbain de demain ».

L’INTERCONNEXION EST CRUCIALE Ce qui fera la force de la mobilité de demain passera aussi par la réussite de l’interconnexion des réseaux, avec plusieurs modes de transport mis en série. « Il faut que les réseaux routiers et les réseaux ferrés au voisinage des grandes villes fonctionnent comme un seul réseau au service des besoins de mobilité de nos concitoyens » résume André Broto, directeur général adjoint de Cofiroute. Un mouvement encore à initier. « Les idées sont là. Elles ont été mises en œuvre, il y a

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Il faut faciliter la connexion du ré-seau routier et du réseau ferroviaire. Les idées et les infrastructures sont là. Le problème c’est le passage à l’acte.ANDRÉ BROTO

Il faut avancer sur un schéma directeur pour organiser l’ensemble des transports en commun. Ces derniers doivent être hiérarchisés.MICHEL BLEITRACH

JEAN-MARC OFFNER

Peut-on penser la voiture autrement ? Oui. Il faut qu’elle soit pensée à la fois comme un mode de transport collectif et comme un mode de transport public

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15 ans sur l’A14 et une dizaine d’années sur l’A10 et il y a probablement une vingtaine d’années à Madrid. Près de 90 % de l’infrastructure existe, les autoroutes, les voies rapides et les gares existent. Le problème c’est la mise en æuvre » assène-t-il. La Région Rhônes-Alpes vient de franchir le pas. « Nous avons travaillé sur la connexion des sys-tèmes de transport collectifs, avec une solution innovante d’un ticket unique à prix réduit pour plusieurs réseaux différents  » a expliqué Jean-Jack Queyranne, président du Conseil Régional Rhône-Alpes (voir encadré).

L’enjeu de cette interconnexion vient aussi du fait que les acteurs sont confrontés à une saturation de plus en plus grande du réseau. « Pour assurer une bonne interconnexion, il faut tisser un réseau plus efficace. Il devient impératif pour nous d’avoir une vision à long terme de la connexion par exemple en disposant de dessertes de proximité. Cela pose pour nous la réflexion de la gare  » explique Bénédicte Tilloy. Attention, cependant, à suffisamment prendre de la hauteur. « Il ne suffit pas de relier, il faut que les flux soient gérables. Il est important de garder une vision transver-sale et regarder comment l’offre peut se conju-guer avec le reste. Il ne s’agit pas seulement de réaliser un maillage des transports entre eux, mais l’ensemble des déplacements doivent être pensés d’une manière globale » précise Bertrand Lemoine, directeur général de l’Atelier International du Grand Paris.

DE NOUVELLES PISTES POUR LES FINANCEMENTS DE LA MOBILITÉRepenser les déplacements, moderniser les réseaux, inventer de nouveaux usages, oui, mais avec quel financement ? La question reste sans équivoque l’enjeu majeur de cette nouvelle mobilité. Et une grande source de débats ! Si le financement est aujourd’hui le principal obsta-cle à la modernisation, demain, il sera le principal potentiel d’amélioration et de développement du réseau. Mais les ressources et les moyens publics étant de plus en plus contraints, il faut faire appel au secteur privé. « Cela oblige à trouver d’autres pistes pour financer l’amélioration du réseau. Elles sont assez nombreuses et tant mieux car il sera impossible de compter sur une seule piste  » souligne Pierre Serne, vice-président de la région Ile-de-France et vice-président du Syndicat des

transports d’Ile de France. Par exemple, la dépé-nalisation des amendes de stationnement, l’ajout d’une «taxe touristes», d’une fiscalité nouvelle sur les surfaces de parking, l’usage qui pourrait être fait sur l’écotaxe poids lourds ou d’autres types de fiscalité écologique sont autant de sources potentielles de financement évoquées. Dans ce contexte, l’implication des collectivités locales sera cruciale. « Ces sources de finance-ment qui sont des leviers très largement utilisés par l’Etat doivent en effet devenir des leviers dans les mains des collectivités qui organisent et qui in-vestissent dans les transports en commun. C’est très compliqué de devoir dépendre systémati-quement du bon vouloir du gouvernement ou du législateur pour faire bouger ne serait-ce qu’à la marge, un certain nombre de leviers de fiscalité même existants aujourd’hui comme le versement transport ou la TIPP » ajoute Pierre Serne.

L’USAGER DOIT-IL PAYER ?Est-ce à l’usager de payer ? Pour François Goulard, président du Conseil Général du Morbihan, c’est oui. « Un bon moyen pour trouver des sources de financement, c’est évidemment la contribution

Quelles solutions pour mieux

gérer les heures de pointe des RER ?

Par exemple étaler la pointe avec des

horaires décalés.BÉNÉDICTE TILLOY

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Penser la mobilité, c’est réfléchir aux

motifs des déplacements.

JULIE RIEG

JEAN-JACK QUEYRANNE, PRÉSIDENT DU CONSEIL RÉGIONAL RHÔNES-ALPESL’EXEMPLE LYONNAIS : TROIS RÉSEAUX SUR UN SEUL TITRE DE TRANSPORTNous avons en effet créé un syndicat métropolitain de transport, où l’on retrouve la communauté urbaine de Lyon, la métropole de Saint-Etienne, le pays Viennois, et les portes de l’Isère, c’est à dire le secteur de Bourgoin-Jallieu. Objectif : réflé-chir ensemble à une organisation optimisée des transports favorisant la connexion entre les réseaux afin de garantir un meilleur service rendu à l’usager. En septembre prochain, nous offrirons un nouveau titre de transport unique, destiné aux usagers mobiles sur 3 réseaux de transports (TER, Tram et métro). Ce type d’initiative de-vrait renforcer l’attrait des transports collectifs. Plutôt que de prendre la voiture à Saint-Etienne par exemple, et d’essayer de pénétrer dans Lyon au moment où l’ag-glomération est congestionnée, le voyageur peut choisir d’autres moyens. C’est un gain écologique et économique. Concernant les transports collectifs, il ne faut pas systématiquement opposer la voiture individuelle, car celle-ci permet bien souvent à l’usager des TER péri-urbains de se rendre à la gare ou de rejoindre un parking relais, autre volet important des actions portées par le syndicat mixte des trans-ports pour l’aire métropolitaine lyonnaise. Cependant, à terme, je pense que nous n’échapperons pas à une réfléxion sociétale sur le temps étalé, faute de pouvoir financer «toujours plus» des transports collectifs en heure de pointe.Plus de voyageurs, de trains plus capacitaires, des parkings relais gigantesques, tout cela finira par coûter trop cher à la société qui alors inventera un autre modèle de partage de la mobilité durant la journée afin de rompre le cercle vicieux d’une demande toujours plus forte en heures de pointe alors que les trains sont vides ou presque le reste de la journée.

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des usagers. En France d’ailleurs, nous avons un taux moyen de participation qui se situe en des-sous des autres pays d’Europe, et c’est un vrai problème  » constate-t-il. Juste impensable pour Pierre Serne. « Les usagers n’accepteront pas des augmentations fortes en période de pression sur le pouvoir d’achat, il y a une acceptabilité sociale qui est aujourd’hui impossible, notamment aussi en raison de l’état du réseau. On a l’obligation d’amé-liorer fortement le réseau de transport en commun en Île-de-France avant d’envisager d’approcher le prix du coût d’usage » a-t-il expliqué.

Pourtant, certaines initiatives semblent d’ores et déjà fonctionner, notament à l’étranger. A commencer par la mise en place de péages à modulation tarifaire, qui permettent d’acheter du temps de parcours. Spécialiste de la ques-tion, Matthew Click directeur associé chez HNTB Corporation, en est convaincu. « Malgré les réticences de départ, nous avons des données qui prouvent que cela marche  » a-t-il résumé. Au Etats-Unis, 38 projets dans 10 états sont déjà déployés. En France, l’exemple du Duplex de l’A86 évoqué par Pierre Coppey, président de l’ASFA, confirme que cette nouvelle généra-tion de voies peut être une manière d’offrir un véritable service à l’usager, comme par exemple le temps de parcours garanti. De plus, les usagers de ces voies alternatives contribuent à alléger la congestion des autres routes. Un véritable succès confirme Pierre Coppey. «  Nos tarifs ont été bien acceptés par nos clients. Il n’y a, à ma connaissance, aucun problème de tra-fic, ces infrastructures ont rencontré leur public. Certains de nos clients nous ont confirmé que cette infrastructure avait même changé leur vie. Leur gain de temps est mesurable ».

Serait-ce donc une voie royale pour trouver des financements ? « Cela peut être un bon moyen de financer les infrastructures. Mais je ne pense pas que ce soit une voie d’avenir pour toute l’Île-de-France voire la France » a tempéré Pierre Serne.

Pour certains, ce type d’approche nouvelle est même très élitiste. « Les gens qui ont besoin d’aller vite, ne sont pas forcément les plus riches » sou-ligne François Goulard. Pas un souci, pour Matthew Click, les usagers n’utilisant ces voies que lorsque c’est nécessaire, et ayant toujours le choix de les emprunter ou non. «  Je trouve cela respectueux d’offrir le choix à l’usager. Quand les initiatives sa-tisfont les besoins, et permettent en plus de trou-ver des financements, c’est bien. Mais c’est une approche réellement nouvelle  ! » ajoute François Goulard.

Autre piste de financement évoquée, « l’utilisation des leviers incitatifs aux comportements, comme une sorte de bonus malus par exemple sur le type de véhicule  » propose Denis Baupin, député de Paris. Imposer une taxe en fonction de la taille du véhicule, favorisant les plus économes en carbu-rant et les plus petits n’a cependant pas été du goût de tous. « Monsieur Baupin exprime sa vision du transport qui privilégie l’écologie. Ce raisonne-ment respectable ne semble pas s’ancrer dans la vraie vie » a taclé François Goulard. Même son de cloche chez Pierre Coppey. « Il vaut mieux cher-cher des financements pour des projets tels que les bus sur les autoroutes plutôt que de chercher des modulations de tarification sur des véhicules déjà largement taxés  ». A l’image de la situation au Brésil, l’augmentation des tarifs des titres de transports peut-être un risque de tension sociale.

C’est ce qu’à confirmé Olivier Faure, député de Seine-et-Marne. « Quelques centimes de trop ont cristallisé un malaise social plus profond du coût de la vie. Cela a suffit à faire descendre dans la rue des milliers de jeunes. Cela pourrait arriver chez nous, parce que la situation dans les transports en Île-de-France est de plus en plus difficile  ». Comme au Brésil, les tensions de la société fran-çaise passent aussi par les transports ! Le député plaide donc pour un équilibre entre les transports, les opérateurs et les régions, pour avoir de la qualité. «  Je souhaite qu’il y ait de nouveau de l’espérance, c’est à nous de la faire fructifier, de l’encourager, de faire vivre cette autre façon de vivre les transports et de réussir ensemble une mobilité durable » a-t-il conclu.  •

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Le réseau auto-routier peut contri-buer à la mobilité péri-urbaine, avec des solutions à la fois souples, éco-nomiques, rapides et pragmatiques. PIERRE COPPEY

On est pour la com-plémentarité des modes de transport. Les exploitations d’autocars existent pour répondre à un besoin, et sont capables d’apporter une valeur écono-mique intéressante et une meilleure qualité de service. PIERRE-OLIVIER CAREL

JEAN-JACK QUEYRANNE

Nous n’échapperons pas à une réflexion sociétale sur le temps étalé, faute de pouvoir financer «toujours plus» des transports collectifs en heure de pointe.