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Thème n°7 : Intégration, conflit, changement social Chapitre 11 : La conflictualité sociale : pathologie, facteur de cohésion ou moteur du changement social ? Notions du programme à découvrir et à acquérir : Conflits sociaux, mouvements sociaux, régulation des conflits, syndicat Acquis de première : Conflits INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES : On montrera que les conflits peuvent être appréhendés à partir de grilles de lecture contrastées : comme pathologie de l’intégration ou comme facteur de cohésion ; comme moteur du changement social ou comme résistance au changement. On s’intéressera plus particulièrement aux mutations des conflits du travail et des conflits sociétaux en mettant en évidence la diversité des acteurs, des enjeux, des formes et des finalités de l’action collective. Problématique : Dans quelle mesure les conflits sociaux sont-ils le signe d'une société anomique? Les conflits sociaux sont-ils un moteur du changement social ? Les conflits du travail ont-ils disparu ? Objectifs : A la fin du chapitre vous serez capable de… Plan du chapitre : I- Le sens sociologique des conflits sociaux A) La conflictualité sociale, signe pathologique ou facteur de cohésion sociale ? B)Les conflits sociaux : freins ou moteurs du changement social ? II- Comment évoluent les conflits sociaux dans les sociétés

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Thème n°7 : Intégration, conflit, changement social

Chapitre 11 : La conflictualité sociale : pathologie, facteur de cohésion ou moteur du changement social ?

Notions du programme à découvrir et à acquérir : Conflits sociaux, mouvements sociaux, régulation des conflits, syndicatAcquis de première : Conflits

INDICATIONS COMPLÉMENTAIRES : On montrera que les conflits peuvent être appréhendés à partir de grilles de lecture contrastées : comme pathologie de l’intégration ou comme facteur de cohésion ; comme moteur du changement social ou comme résistance au changement. On s’intéressera plus particulièrement aux mutations des conflits du travail et des conflits sociétaux en mettant en évidence la diversité des acteurs, des enjeux, des formes et des finalités de l’action collective.

Problématique :

Dans quelle mesure les conflits sociaux sont-ils le signe d'une société anomique? Les conflits sociaux sont-ils un moteur du changement social ? Les conflits du travail ont-ils disparu ?

Objectifs : A la fin du chapitre vous serez capable de…

➢ Définir les notions au programme➢ Rendre compte des différentes interprétations des conflits sociaux➢ Rendre compte de l'évolution des conflits sociaux : émergences des nouveaux mouvements

sociaux et transformations des conflits du travail.➢ Distinguer les conflits qui correspondent aux nouveaux mouvements sociaux des conflits

traditionnels.

Plan du chapitre :

I- Le sens sociologique des conflits sociauxA) La conflictualité sociale, signe pathologique ou facteur de cohésion sociale ?B) Les conflits sociaux : freins ou moteurs du changement social ?

II- Comment évoluent les conflits sociaux dans les sociétés contemporaines ?A) L ‘émergence de nouveaux mouvements sociaux…B) … n’implique pas pour autant la disparition des conflits du travail

I- Le sens sociologique des conflits sociaux

A) La conflictualité sociale, signe pathologique ou facteur de cohésion sociale ?

§1- L’analyse durkheimienne: les conflits perçus comme dysfonctionnement social

Document 1: Le conflit comme forme pathologique de l'intégration sociale (Durkheim)

Pour l'auteur des Règles de la méthode sociologique (1895), toute société normale implique la mise en œuvre de mécanismes d'intégration qui limitent considérablement l'ampleur des conflits. [...] Élaborée au moment où la France connaît un fort développement des luttes sociales, […] l’œuvre de Durkheim concerne les moyens de rétablir cette intégration si indispensable au fonctionnement de l'ordre social. [...] Il en vient ainsi à considérer la crise morale de la société française si propice à l'épanouissement des conflits extrêmes comme le résultat d'une grave déficience de la fonction régulatrice que doivent toujours exercer à ses yeux les normes collectives.

Pierre Birnbaum, « Conflits », in Raymond Boudon (dir.), Traité de sociologie, PUF, 1992

Les sociétés modernes présentent certains symptômes pathologiques, avant tout l'insuffisante intégration de l'individu dans la société. […] Pour expliquer les conflits sociaux, Émile Durkheim utilise donc cette conception d'un dysfonctionnement social auquel il faut remédier. Il ne croit pas aux vertus du développement des luttes sociales et du socialisme et considère plutôt l'« agitation sociale » comme un obstacle au retour à un état non pathologique.

G. Gil, « Emile Durkheim », leconflit.com, 26 mai 2008

1- Montrez dans quelle mesure le conflit est le signe d’un dysfonctionnement social.

Document 2: L'exemple des émeutes de 2005

Inédites davantage dans leur ampleur que par leur forme, ces émeutes comportaient [...] une évidente dimension protestataire. Impulsées par la mort de deux jeunes poursuivis par la police, elles exprimaient une protestation véhémente (violente) devant la stigmatisation (ravivée peu de temps auparavant par des propos du ministère de l’Intérieur [N. Sarkozy]) et le harcèlement policier de la jeunesse des banlieues populaires. Mais, dépourvues de porte-parole à même d’exprimer des positions et revendications claires, elles ont été dépossédées de leur signification et de leur portée par une multiplicité de commentateurs en concurrence pour l’imposition de leur « juste interprétation » - du symptôme de l’emprise des « groupes islamistes » ou des « bandes mafieuses » sur de nouvelles « zones de non-droit » pour les plus conservateurs à la glorification du soulèvement des masses opprimées[...]. Le terme de proto-politique proposé par Gérard Mauger est sans doute celui qui leur convient le mieux, tant le « répertoire d’action des émeutiers » [...] s’apparente plus facilement au nihilisme [qui ne croit plus en rien] désespéré d’une action de « classes dangereuses » qu’à une action politique consciente – même violente – de « classes laborieuses » reste que si les émeutes de 2005 ne relèvent pas pleinement des mouvements sociaux, elles n’en n’ont pas moins cristallisé la figure du « jeune casseur de banlieue » qui hante désormais les imaginaires tant policiers, politiques et médiatiques que militants. »

Lilian Mathieu, « La Démocratie protestataire », 2011

1- Pourquoi les émeutes de banlieue ne peuvent pas être considérées comme un mouvement social?2- Dans quelle mesure ces émeutes viennent confirmer la thèse durkeimienne du conflit comme pathologie sociale?

§2- Les conflits comme facteur de cohésion sociale

Document 3: Les théories de Simmel et de Coser sur le conflit

Doc a :[Le sociologue allemand Simmel] considère [...] le conflit comme une forme d'association combinant l'harmonie et la discorde. Affirmer que la lutte constitue une forme d'association est paradoxal : le conflit n'est-il pas une forme de dissociation plutôt que d'association ? Simmel le conteste et avance sa thèse centrale. Le conflit est une forme d'interaction et donc d'association ; toute association contient un élément de conflit. […] Bien sûr, le conflit est d'abord le signe d'une opposition et d'une hostilité, mais comme il unit dans une même lutte et à propos d'un même litige les opposants, il en résulte […] qu'il n'y a pas d'opposition sans adhésion, pas de dissensus sans consensus. Si l'on fait exception du cas limite de la guerre d'extermination, […] le conflit présuppose bien la reconnaissance de l'existence de l'ennemi et de ses intérêts car, sans intérêts et sans enjeu commun, il n'y aurait guère de conflit, puisque celui-ci serait sans objet.

F. Vandenberghe, La sociologie de Georg Simmel, La découverte, coll. Repères, 2011Doc b :Il arrive souvent que certains groupes perdent leur unité, parce qu’ils n’ont plus d’adversaires.. C’est pourquoi la victoire totale d’un groupe sur ses ennemis n’est pas toujours heureuse au sens sociologique du terme ; car cela diminue son énergie, qui garantit sa cohésion, et les forces de dissolution, toujours à l’oeuvre, gagnent du terrain. Il peut même être politiquement habile de veiller à ce que l’on ait des ennemis, afin que les éléments du groupe gardent leur unité consciente et active, parce que c’est leur intérêt vital. Ce dernier exemple nous conduit à cette intensification de la fonction de rassemblement du conflit : grâce à lui, non seulement une unité existante se concentre plus énergiquement sur elle-même, éliminant tous les éléments qui pourraient brouiller la netteté de ses contours face à l’ennemi - mais encore, des personnes et des groupes qui sans cela n’auraient rien à faire ensemble sont amenés à se rassembler.

Georg Simmel, Le conflit (1908), Circé, 1992Doc c :Le conflit ne trouble pas toujours le fonctionnement des rapports au sein desquels il survient, il est même parfois nécessaire au maintien de ces rapports. Quand ils n'ont pas d'issue pour exprimer leur hostilité vis-à-vis les uns des autres les membres du groupe se sentent complètement écrasés et risquent de se retirer. En libérant des sentiments refoulés le conflit sert à maintenir les rapports. Les systèmes sociaux fournissent des institutions spécifiques qui servent à évacuer les sentiments agressifs et hostiles. Ces institutions jouant le rôle de soupapes de sûreté maintiennent le système en évitant d'autres conflits probables ou en réduisant les effets explosifs. Elles fournissent des objets de substitution sur lesquels se déplacent les sentiments hostiles […] Grâce à ces soupapes de sûreté l'hostilité ne se dirige pas contre l'objet initial [du conflit].

Lewis Coser, Les fonctions du conflit social, PUF, 1982.

1- Donnez des titres au document et soulignez un argument par document qui met en lumière que les conflits, loin d’être une pathologie, peuvent remplir une fonction d’intégration.

Synthèse A)

Solidarités, soupape de sécurité, socialisent, le sentiment d’appartenance, d’institutionnalisation des conflits, pathologie, relations sociales

Pour Emile Durkheim, la division du travail fonde la solidarité organique dans les sociétés modernes. Toutefois, il considère aussi que le conflit, inhérent aux relations sociales, s’exacerbe quand les règles sociales s’affaiblissent. Ainsi analyse-t-il l’augmentation inconsidérée des conflits comme la manifestation d’une rupture des ……………………………………………. et donc une ………………………………………………. de la division du travail, de l’intégration sociale puisque pour Durkheim, la société moderne fonctionne comme un corps biologique dont chaque organe a une fonction.

A l’inverse, le conflit peut être vu comme une relation créatrice de liens et de solidarité. Il permet ainsi de construire des ……………………………………………………………. entre ceux qui sont en conflit car ces derniers renforcent les liens sociaux au sein du groupe et créent des liens de sociabilité entre les membres du groupe qui se ……………………………………………….. entre eux. D’autre part, le conflit renforce ………………………………………………………………… au groupe. Ainsi, le conflit de 1936 a permis à la classe ouvrière d'affirmer son identité et de trouver sa place dans la société française. Ils sont arrivés à montrer le pouvoir de leur force collective et à remettre en cause le pouvoir absolu du patron. Les ouvriers ont su construire une image positive de leur rôle dans l'économie et de leur savoir faire. Pour finir, on peut évoquer le rôle de « …………………………………………………….. » que peut remplir le conflit social, qui peut permettre une évacuation des tensions sociales, évitant ainsi un conflit social majeur. Loin d’être dangereux pour l’ordre social, ils peuvent permettre de le maintenir et d’éviter des débordement violent s’ils sont correctement régulés. On parle dans ce cas ……………………………………………………………………...

B) Les conflits sociaux : freins ou moteurs du changement social ?

§3- Les conflits sociaux peuvent permettre le changement social.

Document 4 : La lutte des classes, moteur de l'histoire (Karl Marx)

L'histoire de toute société jusqu'à nos jours n'a été que l'histoire de la lutte des classes. Homme libre et esclave, patricien et plébéien, baron et serf, maître de jurande et compagnon, en un mot oppresseurs et opprimés, en opposition constante, ont mené une guerre ininterrompue, tantôt ouverte, tantôt dissimulée, une guerre qui finissait toujours soit par une transformation révolutionnaire de la société toute entière, soit par la destruction des deux classes en lutte.

Karl Marx et Friedrich Engels, Manifeste du parti communiste, 1847-1848, Flammarion, [1998]

Marx [...] est le premier à avoir fait du conflit un paradigme, c'est-à-dire un schéma d'explication générale des sociétés. Pour Marx, la réalité sociale est parcourue de tensions, c'est un lieu de luttes traversées d'éléments contradictoires. Cette lutte [...] traverse, oriente, détermine toute l'histoire de l'humanité. [...] La lutte n'est pas qu'économique, elle est aussi sociale car ce qui est en jeu, ce sont les relations et les types de relations qui s'établissent dans et par la production, à savoir le rapport capital/travail, le rapport entre une bourgeoisie qui possède les moyens de production et le prolétariat qui n'a que sa force de travail pour vivre.

Jean-Michel Denis (dir.), Le conflit en grève ?, La dispute, 2005

1- Rappelez la conception marxiste des classes sociales.2- Expliquez comment, selon l'analyse marxiste, le conflit peut être source de changement social

Document 5: Radicalisation du féminisme et bouleversement de la place des femmes

1- A partir de l'exemple du féminisme, montrez que les mouvements sociaux font évoluer les normes et les valeurs.

§4- Cependant, les conflits peuvent aussi exprimer une résistance au changement

Document 6 : Manifester pour faire corps

Ouvriers et médecins, notaires et agriculteurs, parents d’élèves, étudiants et lycéens ou retraités, ont désormais recours à la « manif » pour se faire entendre. […] Pourquoi cette volonté d’interpeller directement les pouvoirs publics et de se mettre en scène ? La manifestation est d’abord un moyen de « se compter », de « faire corps » et de construire des identités catégorielles. […] Elle est aussi, dans une démocratie représentative rigide comme la nôtre, l’un des seuls moyens de faire entendre sa voix en dehors des élections. […]La rue est le chemin le plus court de la politisation et de l’apprentissage du métier de citoyen. Et cela, les élus le savent bien, qui, dans le jeune manifestant d’aujourd’hui voient pointer le futur électeur.

O. Fillieule, Le Monde Magazine, 23 Octobre 2010

Document 7: Des conflits offensifs aux conflits défensifs ?

Une caractéristique commune semble réunir [les mouvements sociaux contemporains] : dans leur écrasante majorité, ils expriment à un titre ou à un autre une volonté de résistance à la dégradation de la situation économique et à la remise en cause d'un modèle de société dont les services publics et la protection sociale constituent depuis la Libération les principales instances d'intégration.Le constat s'impose d'emblée, s'agissant des mouvements directement engagés sur les terrains de l'emploi ou des services publics, telles les innombrables mobilisations de salariés contre la fermeture de leur entreprise, les protestations contre la fragilisation des services publics (hôpitaux, enseignement, recherche, transports en commun, services postaux...) ou les résistances à la restriction de la protection sociale. [...]L'esprit offensif hérité de mai 1968 s'est dissipé, laissant la place à une posture défensive : davantage que la revendication de nouveaux droits ou avantages, c'est leur préservation devant ce qui les menace qui tend à prévaloir. [...] Le même constat vaut aussi pour d'autres mouvements, plus ou moins distants du monde du travail, comme celui des sans-papiers.

Lilian Mathieu, La démocratie protestataire, 2011.

1- Dans quelle mesure les conflits sociaux contemporains peuvent-il être qualifiés de défensifs ? 2- Peut-on en déduire que les acteurs mobilisés dans le cadre de ces conflits résistent systématiquement au changement ?

Document 8 : Manifestation contre la loi travail

1- Illustrez le fait que le conflit peut aussi exprimer une résistance au changement

Synthèse B)

Marxiste, rapport de force, s’opposer, mouvements sociaux, modernisation, conflits défensifs, lutte des classes, déclin des institutions, normes

Si l’analyse …………………………………………….. apparaît aujourd’hui datée, force est de constater que les grandes luttes sociales, notamment les grandes grèves de 1936, 1968, ont permis la construction d’une société salariale fondée sur le caractère protecteur du statut de salarié. Que cela soit sous couvert de ……………………….……………………………………. (voir doc 4) ou de divers ………………………………………………………………………. ( féministe, etc), on constate que les conflits sont producteurs de …………………………………………, de lois et d’idéaux collectifs qui permettent à la société d’évoluer vers un ordre voulu par ses citoyens. Par exemple, le mouvement féministe a contribué à imposer :– de nouvelles normes sociales et de nouvelles valeurs (l’idée que les hommes et les femmes devaient être égaux non seulement en droit mais dans les faits.– des changements institutionnels : loi sur le harcèlement, divorce par consentement mutuel , création de ministères durant les années soixante-dix à partir de revendications portées par des mouvements sociaux (ministère du Droit des femmes).

Cependant, les évolutions récentes montrent que certains conflits visent plus particulièrement à ……………………………….………………………………. à des transformations sociales jugées défavorables ou peu souhaitables par certains acteurs. On peut ainsi observer qu'un certain nombre de conflits prennent pour enjeux la résistance au changement, en particulier lorsque ceux-ci s'incarnent dans la « ……………………………………………. » des entreprises ou de l'État présentée comme « nécessaire » mais qui viendrait menacer le statut et l’identité conférés aux personnes par la société au travers du travail. On parlera ainsi de ……………………………………………………………………... Ces auteurs soulignent que les conflits qu'engendrent, par exemple, les délocalisations, la transformation des services publics ou, plus largement, les conséquences de la mondialisation se font au nom de la défense de statuts et de l'intégration contre les effets jugés menaçants de ces transformations. Qui plus est, le …………………………………………………………………….. fédératrices et mobilisatrices (syndicats, Parti communiste, etc) tend à renverser …………………………………………………………………………. au détriment des protetataires. Le caractère défensif de certains mouvements pourrait ainsi traduire d'abord un affaiblissement des ressources des groupes concernés, par exemple des ressources politiques des ouvriers qui ne bénéficient plus d'une représentation aussi importante et organisée que par le passé.

II- Comment évoluent les conflits sociaux dans les sociétés contemporaines?

A) L'émergence de nouveaux mouvements sociaux…

§1- Vers un déclin des conflits du travail

Document 9 : L'évolution des conflits traditionnels du travail (grèves)

Document 10: Vers une diminution des conflits du travail ?

Avec le déclin relatif de l’industrie, le mode d’organisation de la conflictualité qui a marqué les Trente Glorieuses tirerait lui aussi sa révérence. Si l’univers de l’usine, avec ses concentrations ouvrières, sa forte implantation syndicale, avait pu favoriser les grandes grèves de la période, l’économie des services bouleverserait la logique du conflit. Un salariat fragmenté et éparpillé dans de petites unités de production rendrait désormais difficile l’implantation syndicale et la construction de solidarités. Si la grève survit, ce serait désormais au sein du secteur public, de l’Éducation nationale, à la SNCF, où les employés jouissent de la sécurité de l’emploi. Le grand conflit de 1995 a même fait entrer une nouvelle notion dans le vocabulaire politique, celui de la « grève par procuration », les salariés du secteur public se mobilisant aussi pour leurs collègues du privé. Certes, des conflits ouvriers éclatent encore ici et là, marqués parfois par une radicalité inédite : séquestration de dirigeants, menace de sabotage voire d’écoterrorisme… Il s’agirait cependant de mouvements essentiellement défensifs, réagissant le plus souvent à la nouvelle brutale de la fermeture de l’usine. Dans ces grèves qui ne parviennent pas à imposer beaucoup plus qu’un montant d’indemnités de départ, il ne faudrait voir autre chose que le chant du cygne de la classe ouvrière. Bref, les conflits au travail seraient sur le déclin.

Xavier de la Vega, "Travail, salaires, retraites, La lutte continue", Sciences Humaines, juin 2011.

1- En quoi peut-on parler d'un déclin des conflits du travail ?

§2- Les nouveaux mouvements sociaux dans une société post-matérialiste

Document 11: Valeurs post-matérialistes et transformation des conflits

Ronald Inglehart montre que, dans les sociétés occidentales, la satisfaction des besoins matériels de base pour l'essentiel de la population déplace les demandes vers des revendications plus qualitatives de participation, de préservation de l'autonomie, de qualité de vie, de contrôle des processus de travail. En effet, les anciennes générations qui ont connu la récession des années 1930 et la Seconde Guerre Mondiale ont été socialisées dans un contexte de privation matérielle : elles auraient ainsi tendance à privilégier la satisfaction des besoins matériels, notamment la croissance économique, la lutte contre la hausse des prix et la sécurité.Les nouvelles générations, qui ont bénéficié de la croissance économique des Trente Glorieuses, privilégient la satisfaction des besoins supérieurs et valorisent d'autres valeurs comme la qualité de vie, la liberté d'expression ou la participation politique des citoyens. Le passage de valeurs matérialistes à des valeurs post-matérialistes expliquerait l'existence de nouveaux mouvements sociaux. Inglehart qualifie de révolution silencieuse cette évolution.Le développement des valeurs d'estime de soi et la montée de la compétence politique, due à la hausse du niveau d'instruction, conduit à une plus forte demande de participation politique.

R. Inglehart, The silent Revolution, Princeton University Press, 1977

1- Qu'est-ce qu'une valeur postmatérialiste ?2- En quoi le développement des valeurs postmatérialistes modifie-t-il les mouvements sociaux ?

Document 12: NMS : transformation des acteurs, des formes et des enjeux

Synthèse A)

Déclin, nouveaux mouvements sociaux, post-matérialsites, privé,droits culturels, structurelles, conflits sociaux, conjoncturels

Plusieurs observations alimentent la thèse d'un ………………………………………. de la conflictualité sociale, c'est-

à-dire d'une diminution du nombre et de l'intensité des conflits sociaux, en particulier des conflits du travail: La diminution du nombre de journée individuelles non travaillées : en France, selon la DARES, on est passé de plus de 4 millions de journées individuelles non travaillées en 1976 à moins de 200 000 en 2004.Cette chute est particulièrement importante dans le secteur …………………………………..; la grève ne survivrait plus réellement que dans le secteur public, où elle baisse également.- Des explications ………………………………………… : la transformation de la structure des emplois, joue en la défaveur du taux de syndicalisation. La désindustrialisation provoque une diminution de la part des ouvriers dans la population active, or le syndicalisme trouve son origine dans les mouvements ouvriers.

- Des éléments …………………………………………. : l'augmentation du chômage et le développementdes formes atypiques d'emplois sont moins favorables au conflit, les salariés craignant pour les emplois. La précarité et l'existence d'un parcours dans l'emploi plus instable favorisent également l'effritement du collectif du travail. Cela peut également expliquer que les grèves soient désormais surtout le fait des salariés du secteur public, qui sont dans une situation souvent moins précaire que les salariés du secteur privé.

Ces mutations sont expliquées par Ronald Inglehart, dans la « La révolution silencieuse », publié en 1977, qui souligne que les ……………………………………………………………………………. apparus dans les années 1960 s’appuient davantage sur des valeurs «……………………………………………………………….». Les conflits concerneraient moins la répartition des ressources, les revenus, les salaires ou le pouvoir que des questions liées à l'identité, à la reconnaissance ou aux «……………..............................…………....... ». Ceci résulte du développement, de la hausse du niveau d’instruction qui génère altruisme et solidarité (intérêt porté aux générations futures, par exemple), l'égalité hommesfemmes, le respect de l’environnement,...Ce sont sur ces nouvelles bases culturelles que se structuraient de nouveaux conflits sociaux autour de nouvelles causes. Ces « NMS » renouvellent souvent la forme des ………………………………………………………… :la grève et la manifestation chères au mouvement ouvrier ne sont plus les seuls modes d'action, on assiste à une valorisation de la dimension créative et ludique, au développement d'actions spectaculaires qui interpellent autant l'opinion publique et les medias que les gouvernants (exemples : préservatif géant sur la Concorde ou « die-in » par Act Up ; fauchages d'OGM ; actions anti-nucléaire de Greenpeace, par exemple parapente se posant sur une centrale pour montrer qu'elle n'est pas assez sécurisée...).

B) … n’implique pas pour autant la disparition des conflits du travail

Document 14: Un « retour de la question sociale » plutôt que de nouveaux mouvements sociaux ?

1- La reprise de la conflictualité observée depuis les années 1990 se fait-elle uniquement sur des enjeux post-matérialistes ?2- Expliquez la dernière phrase du texte.

Document 15 : Des conflits du travail en hausse ?

1- Pourquoi peut-on dire que les conflits du travail changent de forme ?

Synthèse B)

Mutation, mode de vie, revendications matérielles, mode de conflit, condition de travail, NMS, post-matérialistes

Plutôt qu'un déclin, il faut parler d'une …………………………………………. des conflits du travail: le recul du nombre de jours de grève est à relativiser et la grève n'est plus le seul ……………………………………………………. du travail. Hormis la grève longue, toutes les formes de conflit ont augmenté. On constate ainsi une hausse significative du nombre d'entreprises touchés par des conflits entre la fin des années 1990 et le début des années 2000, même si les conflits qui augmentent le plus sont ceux sans arrêt de travail.Les …………………………………………….. n’ont pas fait disparaître les conflits du travail, ces derniers se sont transformés.

De plus, on peut faire plusieurs critiques à ces analyses en termes de « nouveaux mouvements sociaux ». Ces mouvements sociaux ne sont pas si nouveaux que cela puisque des revendications ………………………………………………….. ont toujours été un sujet de débat comme en témoigne l’obtention des semaines de congés payés en 1936. En outre, les revendications matérialistes sont loin d’avoir disparues. Comme l’a démontré Olivier Filleule dans son étude des manifestations de rue en France, les ……………………………………………………………………. (salaires, emplois, conditions de travail, etc.) l’emportent nettement sur les griefs « post- matérialistes » (la question des retraites en France, les mouvements d'opposition aux politiques d'austérité en Europe, ou encore le mouvement « Occupy Wall Street » aux États- Unis qui a fait des inégalités économiques son principal cheval de bataille). Pour finir, l’opposition entre revendications « matérielles » et « post- matérialistes » doit être nuancée car certaines revendications (salaires, temps de travail, etc) impliquent à la fois des changements ………………………………………… et de …………………………………………

Sujets de Bacs:

EC1 : - Montrez, à l'aide d'un exemple, que les conflits peuvent être un moyen de résistance au changement social.

- Illustrez la diversité des enjeux des conflits sociaux.- À l'aide de trois exemples de votre choix, vous mettrez en évidence les mutations des conflits sociaux.

EC3 : - Vous montrerez que les conflits sociaux se sont transformés en France depuis les années 1970.- Vous montrerez que les conflits sociaux peuvent être un facteur de cohésion sociale.

Dissertation: - Quels peuvent-être les effets des conflits sociaux sur le changement social ?

Auteurs du chapitre

Karl MarxRonal Inglehart