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Document imprimé le 09/11/2013 à 19:36 par Fereydoun Rasti (id:149240 :: mail:[email protected] :: mdp:040288 Document strictement réservé aux étudiants du Centre de Formation Juridique Toute reproduction, même partielle, est interdite. Code barre d'identification Méthodologie Méthodologie juridique Valentine FOUACHE Thèmes abordés : Méthodologie juridique Le commentaire de décision, exercice réputé difficile, a pour objet : 1) la découverte et l'énoncé en termes juridiques du problème de droit posé à la juridiction qui a rendu la décision à commenter. 2) l'analyse critique de la solution donnée par cette décision. Deux écueils à éviter et un conseil à suivre : Commenter n’est pas disserter ! Le commentaire d’arrêt n’est pas un prétexte à disserter . L’objectif est de « coller » en permanence à l’arrêt étudié. Vous devez prendre l’arrêt comme le point de départ et le point d’arrivée de votre analyse. En d’autres termes, formellement, l’arrêt doit être présent dans votre commentaire toutes les 7 ou 8 lignes. Le candidat qui maîtrise le commentaire d’arrêt est celui qui sait opérer un va-et-vient permanent entre ses connaissances et l’arrêt commenté. Commenter n’est pas paraphraser ! L’autre écueil consiste à recopier l’arrêt (faits, procédure, décision des juges du fond, pourvoi et décision de la Cour de cassation). Les candidats qui n’ont pas grand chose à dire tombent dans ce travers qui les amène à tourner en rond sans jamais prendre de hauteur. Pourtant, aucune décision ne devrait faire « sécher » un candidat car il y a des « trucs et astuces » qui lui permettent de sauver sa copie en exploitant un minimum de connaissances, en utilisant le Code civil, en maîtrisant la technique de cassation et en respectant scrupuleusement la méthode du commentaire. Commenter n’est pas paraphraser mais tenter un va-et-vient permanent entre ses connaissances et la manière dont la http://www.centredeformationjuridique.com/E-learning/v3/soutien/inte... 1 sur 21 09/11/2013 19:35

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Méthodologie

Méthodologie juridique

Valentine FOUACHE

Thèmes abordés :

Méthodologie juridique

Le commentaire de décision, exercice réputé difficile, a pour objet :

1) la découverte et l'énoncé en termes juridiques du problème de droit posé à la juridiction qui a rendu la décisionà commenter.

2) l'analyse critique de la solution donnée par cette décision.

Deux écueils à éviter et un conseil à suivre :

Commenter n’est pas disserter !

Le commentaire d’arrêt n’est pas un prétexte à disserter. L’objectif est de « coller » en permanence à l’arrêtétudié. Vous devez prendre l’arrêt comme le point de départ et le point d’arrivée de votre analyse. En d’autrestermes, formellement, l’arrêt doit être présent dans votre commentaire toutes les 7 ou 8 lignes. Le candidat qui maîtrisele commentaire d’arrêt est celui qui sait opérer un va-et-vient permanent entre ses connaissances et l’arrêt commenté.

Commenter n’est pas paraphraser !

L’autre écueil consiste à recopier l’arrêt (faits, procédure, décision des juges du fond, pourvoi et décision de la Cour decassation). Les candidats qui n’ont pas grand chose à dire tombent dans ce travers qui les amène à tourner en rond sansjamais prendre de hauteur. Pourtant, aucune décision ne devrait faire « sécher » un candidat car il y a des « trucs etastuces » qui lui permettent de sauver sa copie en exploitant un minimum de connaissances, en utilisant le Code civil,en maîtrisant la technique de cassation et en respectant scrupuleusement la méthode du commentaire. Commentern’est pas paraphraser mais tenter un va-et-vient permanent entre ses connaissances et la manière dont la

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question a été résolue dans la décision commentée.

Commenter, c’est expliquer, analyser et apprécier

1/ Commenter un arrêt consiste à retrouver le sens, la valeur et la portée de la décision. Vous devez servir l’arrêt cequi signifie que vous êtes censés, d’une part, réintégrer la décision au sein du droit positif (la loi, la jurisprudenceantérieure, postérieure, la doctrine) et, d’autre part, décortiquer la décision et son raisonnement afin de soulignerl’apport de la décision et ce qui pourrait en faire la singularité.

2/ Commenter c’est aussi critiquer, de manière positive ou négative. Souvent les candidats doutent d’avoir lescapacités d’apprécier, en bien ou en mal, une décision rendue par les magistrats les plus prestigieux de France.Pourtant, plusieurs raisons justifient que vous n’hésitiez pas à procéder à une telle critique.

* Tout d’abord, il n’est pas exclu que les magistrats commettent des erreurs. Vous avez dû en entendre parler àl’occasion d’une autre décision, d’un cours dispensé par un enseignant ou d’une note doctrinale rédigée par un auteurqui ne partageait pas le point de vue de cet arrêt.

* Ensuite, il ne s’agit pas de s’exprimer de manière irrespectueuse et de dire que la cour de cassation n’a rien compris.Vous devez surtout vous souligner la singularité de la décision : « il est étonnant que la Cour de cassation ait choiside prendre telle position lorsque l’on sait que… ».

* On peut également s’en sortir en posant des questions car commenter c’est plus souvent s’interroger qu’affirmer: « on peut se demander pourquoi la Cour de cassation a choisi d’utiliser telle formule … plutôt que… ».

* Le plus souvent, en outre, cette décision est un choix fait par la Cour de cassation parmi plusieurs hypothèses.Analyser la décision c’est aussi se demander pourquoi cette solution a été choisie plutôt que les 4 ou 5 autrespossibles.

* Enfin, la question résolue par la Cour de cassation peut être débattue et contestée par la doctrine, par les juges dufond, voire par d’autres chambres de la Cour de cassation. Cela devrait vous faire prendre conscience qu’il n’y apas une Vérité. A vous, dans un commentaire d’arrêt, d’expliquer sur quoi, pourquoi et comment le choix a été fait parla Cour de cassation.

Avant d'entreprendre la rédaction du commentaire sur ce modèle, et pour y réussir, il faut se livrer à une préparationtrès minutieuse.

Section 1. 1re étape : l’analyse du sujet et la préparation (45minutes)

A. Lecture attentive de l’arrêt

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La première étape lors de la préparation d’un commentaire d’arrêt consiste dans une lecture très attentive de ladécision. On ne souligne rien, on ne note rien. On se contente de lire la décision sans être distrait par une toute autreactivité intellectuelle. Si vous êtes certain d’avoir compris l’arrêt lors de la première lecture, vous pouvez alorscommencer à construire votre commentaire au moyen d’un travail préalable sur le brouillon.

B. Construction du commentaire

1. 1ère étape : reconstitution des faits et de la procédure

En relisant la décision, on reconstitue chronologiquement les faits qui ont engendré le litige et les actes deprocédure (assignation, jugement, arrêt d'appel, etc.) qui ont précédé la décision à étudier, sans oublierl’essentiel que constitue la motivation des décisions.

Certains candidats ont tendance à trop en faire dire à l’arrêt. Il ne faut pas ajouter aux faits tels qu’ils vous sontprésentés lors de l’examen. Evitez d’imaginer des faits qui vous simplifieraient certes la compréhension de ladécision mais seraient nécessairement une simple spéculation souvent erronée.

2. 2ème étape : énoncé du problème juridique posé à la juridiction qui a rendu la décision

a) Qu’est-ce qu’un problème de droit ?

Cette phase est fondamentale car elle va conditionner l’ensemble de votre commentaire. Il s'agit de cernerexactement la question juridique résolue par la décision et de l'exprimer en termes juridiques précis. La logique de cetteétape est facile à comprendre : retrouver la question à partir de la réponse donnée par la juridiction. Cependant,vous ne devez pas vous contenter de mettre sous forme interrogative la réponse donnée par la juridiction.

Un exemple non juridique vous éclairera : imaginez que la Cour de cassation affirme : « les murs de la salle sontblancs » ou « les murs de cette salle sont sales ». La question de droit n’est pas « est-ce que les murs de cette sallesont blancs ? » ou « est-ce que les murs de cette salle sont propres ? ». La bonne formulation est la suivante : « Dequelle couleur sont les murs de cette salle ? » ou « Dans quel état sont les murs de cette salle ? ». Appliquée au droit,la logique est la même. Il faut retrouver une formulation suffisamment abstraite de la question à laquelle la juridiction adonné une réponse.

b) A partir de quoi établit-on le problème de droit ?

Lorsque vous êtes amenés à commenter un arrêt, il s’agit souvent d’une décision de la Cour de cassation. Pour leformuler, vous êtes censé vous appuyer sur la décision de la Cour de cassation (attendu (+ chapeau + visa pour lesarrêts de cassation)). Cependant, même si le problème s’appuie essentiellement sur la décision de la Cour de cassation,il n’est pas interdit de comparer la thèse de la Cour de cassation avec la thèse opposée qui est, soit la décision desjuges du fond si c’est un arrêt de cassation, soit le pourvoi si c’est un arrêt de rejet. La confrontation des deux thèsesopposées est facilitée par une tournure grammaticale souvent utilisée par la Cour suprême : la thèse de l'arrêtattaqué est présentée la première et introduite par la locution conjonctive "au motif que", et la thèsedu pourvoi vient ensuite, introduite par la conjonction "alors que". Cette confrontation va vous permettre demieux délimiter l’objet du débat et d’éviter de poser un problème de droit qui serait hors sujet. En effet, la Cour decassation ne répond, généralement, qu’aux questions qui lui ont été posées et qui ont été débattues devant la

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cour d’appel. Si vous n’y prenez garde vous risqueriez de trop en faire dire à l’attendu de la Cour de cassation.

c) Quelle forme doit prendre un problème de droit ?

Le problème de droit peut être formulé de manière interrogative ou affirmative. Cependant, il nedoit être ni trop précis ni trop large.

* Trop précis, vous risqueriez d’exclure du sujet une partie du raisonnement de la Cour decassation. Prenons un arrêt sur la réticence dolosive qui aborde tant la question du silence gardé enl’absence d’obligation d’information et la preuve du caractère intentionnel de la réticence dolosive.Le problème de droit ne doit pas seulement évoquer la question des liens entre le dol et l’obligationd’information mais intégrer aussi la question du caractère intentionnel. Le mieux est parfois dechoisir la formule suivante : « à quelles conditions la réticence dolosive peut-elle être sanctionnéepar la nullité du contrat au fondement de l’article 1116 du Code civil ? ».

* Il ne faut pas non plus que le problème de droit soit formulé de manière trop générale. Il fautqu’à la lecture du problème on devine l’apport et la singularité de la décision. Si on reprend lemême exemple, on ne peut se contenter de dire « les magistrats de la Cour de cassation étaientexposés à l’épineux problème consistant à savoir si le dol entraine la nullité du contrat ». On neperçoit pas à sa lecture l’originalité de la décision commentée.

3. 3ème étape : recherche des idées et des connaissances

L’objectif est double : réintégrer la décision commentée dans un ensemble de connaissances et décortiquer la décisionpour déterminer son apport et son originalité.

a) L’approche de la décision « en bloc » par la réintégration de l’arrêt ausein de vos connaissances

* Sélection des informations :

Cette première étape permet de prendre l’arrêt en bloc et de rechercher les informations en rapport avec le thèmeabordé. Si un arrêt porte, par exemple, sur la force obligatoire d’une promesse unilatérale de vente, il faut solliciter lesparties de mon cours se rapportant aux contrats préparatoires. Cependant, je ne dois pas reprendre toutes mesconnaissances sur le sujet. Je perdrais du temps et risquerais de faire un hors sujet. Aussi, dès la réunion desinformations sur le brouillon, je fais un tri, une sélection des informations, directement ou indirectement en rapportavec la décision commentée. Cela ne signifie pas que les informations ne portent que sur la promesse unilatérale devente. Ainsi le pacte de préférence lui aussi est abordé sous l’angle de la force obligatoire et la comparaison peut êtrefructueuse. Je tente alors dans mon cours de rechercher les arrêts antérieurs rendus sur le sujet ainsi que les arrêtspostérieurs si l’arrêt est plus ou moins ancien. Si j’ai connaissance d’une controverse doctrinale sur le sujet je

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l’évoque également rapidement sur mon brouillon. Je n’oublie pas les lois postérieures ou, le plus souventactuellement, les projets de réforme qui peuvent m’aider à situer cette décision dans le temps et dans l’espace.

* Confrontation à l’arrêt :

Toutes ces informations, même si elles sont générales, doivent être confrontées à l’arrêt. Vous devez formellementsur votre brouillon commencer à comparer ces informations avec la manière dont l’arrêt les a mises en œuvre.

L’arrêt va-t-il dans le même sens que la jurisprudence antérieure ? Opère-t-il un revirement de jurisprudence ? Est-ceun arrêt isolé, ce qui relativiserait l’existence d’un véritable revirement jusqu’à ce qu’il soit confirmé ? Est-ce un arrêtqui, sans opérer un revirement, clarifie une question autrefois ambiguë ou au contraire n’apporte pas leséclaircissements attendus ? Adopte-t-il la position d’une minorité ou d’une majorité d’auteurs sur une questioncontroversée ?

* La forme de l’arrêt est-elle importante ?

L’analyse en bloc suppose également d’étudier la forme de l’arrêt.

* On peut pour ne pas trop s’engager, du moins lorsqu’on n’a jamais entendu parlé de l’arrêt, dire qu’il a « les alluresd’un arrêt de principe ». Quels sont les indices de ce type d’arrêt de la Cour de cassation ? L’attendu est rédigé demanière générale avec des termes généraux. Un chapeau en haut de l’arrêt, pour les arrêts de cassation, ou unchapeau intérieur, pour les arrêts de rejet, est aussi un signe important. Au contraire, un attendu circonstancié, factuelqui reprend les faits et les noms des parties n’a pas les allures d’un arrêt de principe. Cela ne signifie pas qu’il n’a pasd’importance car un arrêt d’espèce peut prendre une position originale sur une question très débattue ou dans undomaine où les arrêts sont rares. Simplement sa portée restera toute relative.

* Vous pouvez également relever le motif de cassation. Si l’arrêt est cassé pour défaut de base légale, la Cour decassation reproche aux juges du fond d’avoir mal motivé leur décision ne lui permettant pas d’opérer son contrôle. Lacassation n’est pas très grave. En revanche, la cassation pour violation ou fausse application ou mauvaiseapplication de la loi est un motif de cassation plus important. Relevez-le formellement.

* Enfin, certaines formules de la Cour de cassation peuvent être soulignées car elles attestent du contrôle léger ouétroit exercé par la Cour de cassation et permettent de juger de la portée de la décision. Lorsqu’elle dit « la courd’appel a retenu à bon droit… » ou « a exactement retenu… », ce sont généralement les signes d’un contrôle étroitde la Cour de cassation qu’il faut souligner.

Finalement, toutes ces remarques de forme sont un moyen de commenter l’arrêt tout en collant à celui-ci en sollicitanttrès peu de connaissances théoriques.

Cette première étape est importante mais elle ne suffit pas à opérer un véritable commentaire. Il faut maintenantdécortiquer la décision.

b) L’approche chirurgicale de la décision ou comment décortiquer ladécision commentée ?

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- Il convient, tout d’abord, de décortiquer la décision et ses motifs. Il faut reprendre la formule choisie par la Cour decassation et expliquer le sens des mots volontairement choisis. Expliquer peut-être que ce sens est ambigu ou quela Cour de cassation n’en précise pas le sens. Il faut reprendre chaque mot utilisé par l’attendu pour être sûr de nepas passer à côté d’une évolution. Certes, tous les mots ne sont pas matière à commentaire mais vous ne pouvez lesavoir qu’après vous être posés la question.

- Il faut comparer la formule de la Cour de cassation avec des arrêts antérieurs. Ces arrêts font partie de votrecours ou sont dans le Code civil qui doit vous servir d’appoint pour étayer les informations utiles qui vous font parfoisdéfaut. Vérifier si la formule est exactement la même qu’un arrêt antérieur. Si c’est le cas, la Cour de cassationsouhaite faire passer un message afin que le lien entre ces deux arrêts pourtant apparemment différents soit établi.

- Vous devez également avoir égard au visa. Si le visa est un article général et solennel, il faut le souligner etl’affirmer (visa de l’article 1134 du Code civil de l’article 1382). Il peut s’agir également d’un véritable principegénéral du droit dont vous devez expliquer la force normative et le contenu (ex. : nul ne peut causer de troublesanormaux de voisinage). Parfois le visa donne tout son sens à l’arrêt. Par exemple, dans l’arrêt Chronopost de laChambre commerciale du 22 octobre 1996, c’est le visa de la cause (art. 1131 C. civ.) qui permet de comprendrel’originalité de la décision. Dans un arrêt rendu par la troisième Chambre civile de la Cour de cassation sur l’offre et larupture avant l’expiration du délai, du 7 mai 2008, le visa de l’article 1134 du Code civil a amené la doctrine às’interroger sur la sanction possible (dommages et intérêts sur un fondement contractuel ou exécution forcée ?).

- Décortiquer suppose de comparer les motifs de la Cour de cassation avec ceux de la cour d’appel ou dujugement dont la décision a été cassée ou avec le ou les moyens du pourvoi (divisé en deux ou plusieurs branches).La confrontation permet de mieux comprendre, mieux analyser et mieux apprécier la décision rendue par la Cour decassation.

- Décortiquer, enfin, c’est comparer la formule choisie par la Cour de cassation avec la jurisprudencepostérieure, les lois postérieures ou les projets de réforme postérieurs. Par exemple, l’avant-projet Catala, l’avant-projet Terré et les deux projets de réforme du droit des contrats (juillet 2008 et février 2009) de la Chancellerie peuventêtre sollicités. En droit de la responsabilité, notez que seul l’avant-projet Catala aborde cette question et qu’il sera leseul avant-projet à exploiter dans un commentaire portant sur la responsabilité civile. L’avant-projet Terré et les projetsde la Chancellerie ne portent effectivement que sur le droit des contrats.

c) Bilan provisoire

- Ton dogmatique ou modéré ? Après avoir étudié l’arrêt « en bloc » puis « de manière chirurgicale », il vous reste àdresser un bilan provisoire : l’arrêt règle définitivement une question. La décision peut être franche et dogmatique oumesurée et réaliste.

- Les juges bottent en touche ! Les juges ont botté en touche et le vrai problème n’a pas été réglé ni même abordé.

- Le silence est d’or et doit être commenté : le commentaire consiste aussi à analyser ce qui n’a pas été dit et quiaurait dû l’être.

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- Clarté ou ambiguïté de la solution : La solution peut aussi manquer de clarté et être relativement ambiguë.

- Arrêt « tendance » ou « rétro » ? Enfin, l’arrêt peut être « tendance » ou à contre-courant de la jurisprudencedominante. Dites-le. La solution pourrait, s’il s’agit d’une position contraire à celle des autres chambres de la Cour decassation, être résolue soit par l’intermédiaire d’une chambre mixte de la Cour de cassation, soit par décision dupremier président de la Cour de cassation par la réunion en assemblée plénière. Cette affirmation permet de montrerque vous connaissez les grands principes de l’organisation juridictionnelle de la Cour de cassation.

4. 4ème étape : établissement d'un plan

Il s'agit de donner au devoir une architecture propre à faire ressortir l'intérêt de la question traitée. Les juristessont attachés au plan en deux parties qui ne doivent jamais être l'exposé successif des deux thèses enprésence. Les deux parties sont la division logique tirée de la question de droit. Ces deux parties sont censées serépondre et se compléter. Quant aux commentaires d’arrêts comparés, ils répondent à la même logique. Ils reposentsur un même problème de droit et doivent être commentés ensemble tout au long du devoir. Les deux parties nedoivent absolument jamais consister en l’étude de chaque arrêt dans chacune des parties.

Il existe plusieurs méthodes pour trouver un plan de commentaire d’arrêt mais avant cela il convient de rappeler lesprincipes directeurs du plan de commentaire.

a) Les principes directeurs du plan de commentaire d’arrêt

* Il n’y a pas, en principe, un seul plan de commentaire. Il varie selon l’arrêt. C’est une réalité. Cependant certains trucset astuces permettent de trouver un plan-type.

* Le plan de commentaire d’arrêt est construit par référence à l’arrêt commenté, le plus souvent un arrêt de la Cour decassation. On ne construit donc pas le plan par rapport à la décision des juges du fond ou par rapport aupourvoi, même si le corps du devoir peut s’y référer de temps en temps.

* Ensuite, le plan doit coller à l’arrêt et ne pas ressembler à un plan de dissertation. Du moins, si plan dedissertation il y a, il est « retouché », « camouflé » afin qu’il « colle » davantage à l’arrêt commenté.

* Un plan de commentaire comporte toujours deux parties et deux sous-parties. Cette règle de principe connaît desexceptions. Mais la tentative est risquée et malvenue pour un examen d’entrée au CRFPA où il convient, du moins àl’écrit, de ne pas prendre trop de risques.

* Il n’est pas nécessaire d’aller jusqu’au 1° et 2°, ce qui ne signifie pas que les sous-parties seront rédigées sansrigueur. De nouveau, chaque paragraphe doit correspondre à une idée-force ou doit être consacré à l’exposé d’unexemple.

* Les titres doivent comme dans tout travail de rédaction être précis, clairs et explicites. Il faut également qu’ilspartent de l’arrêt et « collent » à l’arrêt. Il faut éviter les titres trop généraux qu’on utilise habituellement pour lesdissertations.

b) La recherche de plan

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?. Les parties principales (I et II)

Il existe plusieurs façons de trouver un bon plan de commentaire d’arrêt.

1re hypothèse : deux attendus portant sur deux questions de droit distinctes :

L’arrêt à commenter comporte deux attendus portant sur des problèmes de droit différents. Il suffit dans ce cas deconsacrer une partie à chaque problème de droit. C’est l’hypothèse la plus simple, encore faut-il que les deuxattendus soient au programme. A défaut, vous devez écarter l’attendu sans lien avec le programme de droit concerné etne construire votre plan que sur l’attendu qui est dans le sujet.

2ème hypothèse : la scission d’attendu ou la méthode dite du découpage (40 % des cas)

Il est assez fréquent que l’attendu de la Cour de cassation soit construit de manière logique. Il suffit alors de scinderl’attendu en deux afin de retrouver le raisonnement en deux temps de la Cour de cassation. Cette techniquepermet souvent d’opter pour un plan qui ressemble à un découpage classique Principe/limite ou principe/conditions.La ponctuation aide à retrouver la logique du raisonnement. Deux exemples peuvent illustrer ce type d’attendu :

1er ex. : « Si le bénéficiaire d’un pacte de préférence peut demander la nullité et la substitution dans les droits du tiers,(la scission se situe ici) c’est à la condition que ce tiers ait connaissance de l’existence du pacte de préférence et del’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir ». Il suffit de consacrer une première partie au principe ainsi posé etd’exposer dans une seconde partie les limites ou les conditions de sa mise en œuvre.

2ème ex. : « Le silence, à lui seul, ne vaut pas acceptation ». L’attendu est court mais la scission reste toujourspossible. Il faut utiliser dans cet exemple la ponctuation. Ce qu’il y a à l’extérieur des virgules est la première partie (leprincipe), alors que ce qui figure à l’intérieur des virgules est la seconde partie, les exceptions.

3ème hypothèse : s’inspirer d’un plan de dissertation, de cours ou de manuels, qu’il faut camoufler (30 % des cas) :

Si les deux premières hypothèses ne fonctionnent pas, il convient d’opter pour un plan de dissertation classique (v.supra) et de camoufler les titres afin qu’ils collent davantage à l’arrêt commenté. Le plan conditions/effets oudomaine/régime peut ainsi fonctionner.

1er exemple, un arrêt qui porterait sur les conditions du dol et qui envisagerait dans le même attendu les sanctions(nullité et responsabilité) se prête assez bien au plan conditions/effets. Mais il faut alors l’adapter à l’arrêt . Cela peutdonner : I. Un durcissement des conditions du dol par réticence/II. Un encadrement strict des sanctions du dol parréticence.

2ème exemple : Le plan domaine/régime est assez fréquent pour des arrêts de responsabilité civile, notammentportant sur la responsabilité du fait d’autrui. Ce qui peut donner en adaptant le plan à l’arrêt : I. L’extension du domaine(de la responsabilité du fait d’autrui)/ II. La précision du régime (de la responsabilité du fait d’autrui).

4ème hypothèse : plans uniques en fonction du thème abordé :

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* L’hypothèse des solutions très discutées :

Il existe certains thèmes pour lesquels le plan est toujours le même en raison des questions récurrentes quel’arrêt véhicule. Dans cette hypothèse, vous pourriez avoir connaissance des deux axes de pensée qui reviennentfréquemment dans le discours des auteurs et les notes d’arrêt. Pour certains arrêts dont les solutions sont très discutées,la première partie sert toujours à exposer la confirmation et la seconde à présenter la discussion.

- 1er exemple, un arrêt sur la promesse unilatérale de vente :

Si c’est la force obligatoire de la PUV qui est concernée, le plan est toujours le même en raison des critiques maintesfois formulées contre la prise de position de la troisième Chambre civile de la Cour de cassation. Ainsi la premièrepartie est toujours consacrée à l’exposé de la solution et de ses fondements. La seconde partie est critique et tentede mettre en lumière les insuffisances et les incohérences de la solution et d’envisager son avenir. Cela donne danstous les cas : I. L’éviction confirmée de toute exécution forcée de la PUV/II. L’éviction discutée de toute exécutionforcée de la PUV.

- 2ème exemple : un arrêt sur l’empiètement en droit des biens :

La question de l’empiètement qui serait un droit discrétionnaire est ainsi souvent l’objet d’arrêts critiquables etcritiqués. Dans ce contexte, la première partie est aussi consacrée à la confirmation du caractère discrétionnaire dudroit de démolition en matière d’empiètement et la deuxième partie est utilisée pour apprécier et critiquer lecaractère discrétionnaire de ce droit. Cela donnerait : I. La confirmation du caractère discrétionnaire du droit dedémolition/II. La contestation du caractère discrétionnaire du droit de démolition.

* L’hypothèse des arrêts reposant sur une règle de droit dualiste :

Certains thèmes sont toujours traités de la même manière car ils véhiculent une règle de droit qui, elle-même,s’appuie sur un raisonnement en deux temps. Par exemple, la fonction probatoire de l’article 2276 du Codecivil. Tout arrêt portant sur cette question se construit toujours en deux temps : I. La présomption de titre translatif auprofit du possesseur/II. L’objet de la preuve à la charge du prétendu propriétaire.

5ème hypothèse : le plan « par défaut » qui n’est pas un plan « bateau » ou la méthode dite distributive :

Le plan « par défaut » est celui qui convient à tous les arrêts à défaut d’un plan propre à l’arrêt commenté. Iln’est pas un plan « bateau » qui pourrait laisser entendre que la note serait moins bonne avec ce type de plan et qu’ils’agit de sauver une copie. C’est un plan qui doit être choisi à défaut de pouvoir appliquer une des 4 hypothèsesprécédentes. Ce plan classique sied à toute décision. Elle consiste à expliquer l’arrêt dans la première partie et àapprécier l’arrêt dans une seconde partie. I. Présentation/II. Appréciation. Bien entendu, il ne faut pas utiliser cestermes et toute la difficulté sera de trouver des intitulés qui collent à l’arrêt commenté et derrière lesquels on retrouve laprésentation en première partie et l’appréciation en seconde. Souvent, à dire vrai, le plan « par défaut » peutcorrespondre à des découpages déjà évoqués dans les 4 premières hypothèses. Par ex. : I. La confirmation du caractèrediscrétionnaire du droit de démolition/II. La contestation du caractère discrétionnaire du droit de démolition revient àprésenter dans un I et à apprécier dans un II !

?. Les sous-parties (A et B) :

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Quel que soit le plan choisi, les sous-parties ont toujours le même rôle à jouer dans un commentaire d’arrêt.Connaître leurs attributions respectives, c’est gagner du temps le jour de l’examen car même si vous n’avez pas idéedes parties principales de votre plan vous pouvez sur votre brouillon commencer à répartir les informations réunies,dans les différentes sous-parties. Il suffit de prendre une page de brouillon pour chaque sous-partie et de répartir vosconnaissances et vos réflexions sur l’arrêt sur chaque feuillet.

* La fonction du IA :

La forme :

Cette sous-partie joue toujours le même rôle. Il s’agit d’amener le sujet traité et de poser les données du problème.Même si cette sous-partie est un peu plus « détachée » de l’arrêt vous devez toujours ramener vos développements àl’arrêt, même si c’est de manière artificielle. Une astuce, pour ne pas oublier : commencez par l’arrêt pour ensuitedéfinir et expliquer les concepts et problèmes abordés par l’arrêt. Par exemple : « la Cour de cassation devaitapprécier si la société A pouvait se rétracter de sa promesse unilatérale de vente avant l’expiration du délai fixé au 30mai 2008. La force obligatoire de la PUV est une question classique des contrats préparatoires. Un contratpréparatoire vient comme son nom l’indique préparer le contrat définitif. Il appartient à ce processus de formation ducontrat par étapes successives qu’on appelle la punctation. Depuis quelques années, les arrêts se multiplient mettant,comme en l’espèce, à l’épreuve la force obligatoire de ces contrats, spécialement la PUV. La PUV est un contratunilatéral… ».

Le fond :

En principe, figurent dans cette sous-partie les définitions des concepts que l’arrêt véhicule, la jurisprudenceantérieure, les controverses doctrinales sur un sujet. Cependant, vous devez exposer ces différents points au servicede l’arrêt. Il faut donc partir de l’arrêt et revenir à l’arrêt po ur chaque exposé.

Par exemple, si l’arrêt commenté est un revirement de jurisprudence et qu’il s’agit d’un arrêt de cassation, il y a defortes chances pour que la décision des juges du fond soit conforme à la jurisprudence antérieure que ne suit plus laCour de cassation. Dans ce cas, lorsqu’il est fait état de la jurisprudence antérieure, il suffit pour coller à l’arrêt derapprocher le raisonnement de la cour d’appel et celui de la jurisprudence antérieure. Par ex. : « par un arrêt de lapremière Chambre civile de la Cour de cassation du 30 avril 1997, la Cour de cassation avait déjà refusé aubénéficiaire d’un pacte de préférence la possibilité d’obtenir la substitution dans les droits du tiers en cas de mauvaisefoi de sa part. C’est d’ailleurs cette position classique qu’adopte en l’espèce la cour d’appel lorsqu’elle affirme que…».

La même chose peut être faite avec un argument soulevé par le pourvoi et auquel n’adhère pas la Cour de cassation.L’objectif est d’éviter que les informations données dans le IA ne soient considérées que comme des informationsthéoriques. Il faut, lors de la rédaction de votre commentaire, que vous montriez en permanence à votre correcteur quetout ce qui est dit est destiné à mieux comprendre, analyser et apprécier la décision commentée. Il faut donc pour celaun va-et-vient permanent entre vos connaissances et l’arrêt, même si parfois cela vous paraît artificiel.

* La fonction du IB et du IIA :

Ces deux sous-parties sont le cœur du commentaire d’arrêt. Toutes les explications, les analyses et les appréciations

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de la décision doivent figurer dans ces deux sous-parties. La répartition des informations entre ces deuxsous-parties dépend, logiquement, du plan choisi. Cependant, il y a des règles générales assez stables sur leurcontenu respectif.

- Le IB est généralement composé des informations suivantes : les commentaires sur la forme de l’arrêt (attendu aux« allures d’arrêt de principe » ou attendu circonstancié motifs de cassation les formules telles que « à bon droit » « aexactement retenu ») positionnement de l’arrêt par rapport à ce qui a été exposé dans le IA (par rapport à lajurisprudence antérieure ou à la doctrine) l’explication de l’arrêt (le sens du raisonnement, le sens des mots).

- Le IIA répond généralement aux questions suivantes : La formule est-elle claire ? Toutes les questions ont-ellesété abordées ? Les vrais problèmes n’ont-ils pas été éludés ? N’y avait-il pas d’autres solutions possibles ? Lasolution est-elle mesurée ou dogmatique et radicale ? La solution ne produit-elle pas des effets pervers ? La décisionest-elle adaptée à la pratique ? Est-ce que des zones d’ombre persistent ? La solution est-elle opportune ? Quelleest la politique que véhicule cette décision ? Quelle philosophie de la responsabilité ou du contrat cet arrêt met enexergue ? Quelle est la portée de l’arrêt (souvent conditionnée par la forme de la décision et la généralité del’attendu) ?

Pour répondre correctement aux attentes des correcteurs, vous êtes censés connaître les grands débats qui agitent lamatière. Par exemple, l’analyse économique est très à la mode en droit des contrats et en droit de la responsabilité.L’harmonisation du droit européen des contrats est également fréquemment abordée.

*** ASTUCES : si vous avez eu la chance de lire une note sur un arrêt récent que vous êtes amené à commenter lejour de l’examen, il n’est pas nécessaire de citer un auteur en particulier. Il suffit de reprendre pour soi les critiquesgénérales qui peuvent être formulées contre l’arrêt (trop libéral et pourquoi ? trop imprécis et pourquoi ? trop rigoureuxet pourquoi ?). En revanche, dès qu’il s’agit d’une appréciation personnelle et originale d’un auteur, vous devezciter l’auteur. Le mieux est de citer le moins possible la doctrine et de vous réapproprier les observations que vousavez pu lire sur l’arrêt.

* La fonction du IIB :

A l’instar du IA il est un peu plus détaché de l’arrêt mais vous devez alors redoubler d’effort pour qu’il n’en soit pasainsi et toujours partir de l’arrêt. Le IIB sert généralement à donner plus d’ampleur dans le temps et dans l’espaceà l’arrêt.

On y trouve : la jurisprudence postérieure qui permet de confirmer ou de relativiser l’arrêt commenté les loispostérieures qui combattent l’arrêt commenté ou le sacralisent les projets de réforme figurent généralement danscette sous-partie (avant-projet Périnet-Marquet en droit des biens avant-projet Catala, Terré et projets de la Chancellerieen droit des contrats avant-projet Catala en droit de la responsabilité). Le IIB sert également parfois à exposer desremèdes, à faire des propositions en réponse aux maux ou aux effets pervers évoqués dans le IIA.

? En définitive, même si vous n’avez pas de plan en tête, vous pouvez répartir les informations sur chaque feuillet devotre brouillon consacré à une sous-partie et trouver par induction les titres correspondant à chaque sous-partie. C’estle contenu qui vous guidera dans le choix des intitulés.

*** ASTUCES : les fonctions des différentes sous-parties sont des indications. Il arrive que les informations seretrouvent dans une autre sous-partie que celle qui lui est habituellement attribuée. Pourquoi ? Car l’objectif est de

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procéder à une répartition équilibrée des informations dans les différentes sous-parties. Si vous avez beaucoupde choses à dire en IA conservez-les pour le IB. Si vous avez peu de choses à dire dans le IIB et que vous n’enmanquez pas dans le IIA, conservez quelques développements critiques par exemple pour le IIB. A vous de gérer lesinformations et de les répartir intelligemment pour que l’ensemble soit équilibré.

Section 2. 2ème étape : la rédaction du commentaire (1 heure et 45minutes)

Plus votre rédaction est claire et fluide plus le fond sera mis en valeur. Il faut privilégier pour celades phrases courtes, des mots simples et une orthographe et une grammaire irréprochables.

A. L'introduction

Toute introduction est généralement composée de 4 paragraphes. Rien n’est dit sur l’arrêt en dehors des quatreparagraphes qui vont suivre. Aucune appréciation, aucune question de fond ne doivent être abordées à ce stade.

1er paragraphe : l’accroche :

Le premier paragraphe est consacré à l’accroche. Cette accroche peut être composée d’une citation en lien avec l’arrêtou tout simplement d’un mouvement général dans lequel l’arrêt est réintégré. Formellement, à la fin de ce premierparagraphe de 5 ou 6 lignes, il faut citer l’arrêt.

* En droit des contrats, un arrêt sur la force obligatoire de la promesse unilatérale de vente (PUV) peut être intégrédans plusieurs mouvements différents.

1er ex. : « Il a souvent été rappelé que la période précontractuelle était un « no man’s land juridique » (D. Mazeaud)en raison du silence gardé par le Code civil et d’une jurisprudence hésitante. Cette hésitation facteur d’insécuritéjuridique, est perceptible à la lecture de cet arrêt rendu par la première Chambre civile de la Cour de cassation du 3avril 2007 ».

2nd ex. : « L’analyse économique est une idéologie qui gagne la sphère du droit français des contrats. Dans le cadredes avant-contrats, cet arrêt de la première Chambre civile de la Cour de cassation du 3 avril 2007 fournit uneillustration des effets pervers d’une telle analyse ».

En droit des biens, il existe des points de départ assez classiques qui peuvent être adaptés à de nombreux arrêts.

Par exemple : « le Code civil de 1804 est resté, en droit des biens, quasiment intact depuis son origine. C’est lajurisprudence qui a su revitaliser ses dispositions comme en atteste cet arrêt rendu par la troisième Chambre civile dela Cour de cassation du 2 avril 2008 en matière d’immeuble par destination ».

2ème paragraphe : exposé des faits et de la procédure

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Il s’agit d’exposer uniquement les faits pertinents (les dates sont parfois nécessaires selon le problème posé) et laprocédure sans ajouter d’éléments qui seraient le fruit de votre imagination. On n’essaye pas, par exemple, de devinerce qu’a pu dire un tribunal de première instance si rien n’est précisé !

Attention : on ne recopie pas les attendus, ni les expressions spécifiquement judiciaires, telles que "le sieur X" et "ladame Y". En revanche, il est important d’utiliser les mêmes mots clefs que ceux utilisés par les juridictions pour éviterles contre-sens et les approximations.

3ème paragraphe : énoncé du problème de droit :

Il faut formuler le problème de droit, la question juridique posée à la Cour de cassation ou à lajuridiction dont la décision est commentée, en respectant les conseils prodigués précédemment lorsde l’étape de préparation.

Après l'énoncé du problème de droit, on indique la solution donnée par l'arrêt commenté sans prendre parti. Sil’attendu est court, on le recopie. S’il est long, on le synthétise en évitant les mots approximatifs qui risqueraient devirer au contre-sens.

4ème paragraphe : annonce de plan :

Le plan est expliqué en 2-3 lignes avant d’être annoncé formellement pour éviter touteincompréhension. Veillez à utiliser dans les annonces exactement les mêmes mots que ceux quevous utiliserez pour les intitulés. Il est fréquent que les candidats utilisent des mots différents desintitulés pour éviter l’impression de répétition. Mais ce malaise esthétique fait partie du jeu. Doncveillez à ce que les titres soient exactement les mêmes que ceux annoncés.

B. La rédaction

Il convient seulement de rappeler que le commentaire n'est ni une paraphrase de l'arrêt, ni une récitation ducours ; il est donc important de toujours partir de l’arrêt à commenter et des mots clefs utilisés pour ensuite lescommenter. Il faut toujours garder à l’esprit que c’est cette décision qui est à commenter et non la partie du cours sur lethème à réciter.

Une petite astuce pour cela, partez de la décision à commenter pour remonter vers vos connaissances sanstomber dans l’écueil de la paraphrase. Il faut montrer formellement à votre correcteur que vous êtes en permanencecollé à l’arrêt. Veillez ainsi à ce que toutes les 7 ou 8 lignes, l’arrêt (faits, motifs de la cour d’appel, pourvoi, motifs de laCour de cassation) apparaisse.

Toute sous-partie est composée de deux ou trois paragraphes. Chaque paragraphe correspond, soit à une idéeforce, soit à un thème fédérateur (ex. définitions, jurisprudence antérieure, doctrine). Vous devez être rigoureux dans larédaction. Il faut que le correcteur sente une progression dans vos développements, comme les fonctions desdifférentes sous-parties vous y invitent. Le IA on amène doucement les données du problème le IB on explique laplace de l’arrêt dans son environnement juridique en expliquant le sens des concepts sollicités le IIA on met en lumièreles faiblesses ou les insuffisances de l’arrêt pour retomber dans le IIB en ouvrant sur des considérations plus larges.

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Enfin, n’oubliez pas de soigner les annonces, conclusions intermédiaires et transitions.

La conclusion n’est pas nécessaire.

Retenez l’essentiel

- Lire attentivement l’arrêt et bien distinguer les différentes informations (faits, procédure, motifsdes juges du fond, pourvoi, motifs de l’arrêt de la Cour de cassation).

- Il faut expliquer, analyser et apprécier le sens, la valeur et la portée de l’arrêt.

- Il faut coller en permanence à l’arrêt commenté.

- Il faut en permanence confronter ses connaissances et les informations réunies, à la décisioncommentée (aux faits, aux motifs du jugement ou de l’arrêt de la cour d’appel, au pourvoi et auxmotifs de l’arrêt de la Cour de cassation).

- Réintégrez l’arrêt pris « en bloc » dans le ou les thèmes généraux du cours. Situez l’arrêt dans letemps (qu’y a-t-il avant et après en termes de jurisprudence, lois, projets) et dans l’espace (lesquestions directement traitées, les questions indirectement évoquées, les questions sur lesquelles ladécision pourrait avoir des incidences).

- Décortiquez l’arrêt de manière « chirurgicale » pour apprécier la forme, pour soupeser les mots, leton, la formulation, les fondements, les effets…

- Réintégrez et décortiquez en opérant toujours un va-et-vient permanent entre les informationsréunies et la manière dont l’arrêt les applique (évoquer l’arrêt toutes les 7 ou 8 lignes).

- Dire clairement si l’arrêt innove, est classique, clarifie une question ou botte en touche en évitantle vrai problème…

- Plan en deux parties et deux sous-parties.

- Plan et intitulés qui « collent » à l’arrêt, même de manière artificielle (évitez donc les titres tropgénéraux).

- Veillez à ce que le « cœur » du commentaire figure dans les IB et IIA.

- IA qui sert souvent à poser les données du problème (définition, jurisprudence antérieure,controverses doctrinales…).

- IIB qui sert à ouvrir sur d’éventuelles propositions, des projets de réforme, des décisionspostérieures à la décision commentée ou des lois postérieures qui consacrent ou combattent lajurisprudence exposée.

- Une introduction en 4 paragraphes avec une accroche « sexy ».

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- Un problème de droit formulé de manière ni trop large ni trop restrictive.

- Une rédaction structurée : chaque paragraphe correspond à une idée force (forme et fond) ou unthème (définition, loi, jurisprudence, doctrine).

Annexe

Conseils pour le commentaire de décision sous forme d’exemple

Un premier exemple, sous forme de plan détaillé, permettra d’illustrer la méthode distributive (5ème

hypothèse) (Section 1), un second exemple, entièrement rédigé, celle du découpage (2ème

hypothèse) (Section 2).

Section 1. Cass. civ. I, 3 mai 2000, Bull. n° 131

Vu l'article 1116 du Code civil ;

Attendu qu'en 1986, Mme Boucher a vendu aux enchères publiques cinquante photographies deBaldus au prix de 1 000 francs chacune ; qu'en 1989, elle a retrouvé l'acquéreur, M. Clin, et lui avendu successivement trente-cinq photographies, puis cinquante autres photographies de Baldus, aumême prix qu'elle avait fixé ; que l'information pénale du chef d'escroquerie, ouverte sur la plainteavec constitution de partie civile de Mme Boucher, qui avait appris que M. Baldus était unphotographe de très grande notoriété, a été close par une ordonnance de non-lieu ; que MmeBoucher a alors assigné son acheteur en nullité des ventes pour dol ;

Attendu que pour condamner M. Clin à payer à Mme Boucher la somme de 1 915 000 francsreprésentant la restitution en valeur des photographies vendues lors des ventes de gré à gré de1989, après déduction du prix de vente de 85 000 francs encaissé par Mme Boucher, l'arrêt attaqué,après avoir relevé qu'avant de conclure avec Mme Boucher les ventes de 1989, M. Clin avait déjàvendu des photographies de Baldus qu'il avait achetées aux enchères publiques à des prix sansrapport avec leur prix d'achat, retient qu'il savait donc qu'en achetant de nouvelles photographiesau prix de 1 000 francs l'unité, il contractait à un prix dérisoire par rapport à la valeur des clichéssur le marché de l'art, manquant ainsi à l'obligation de contracter de bonne foi qui pèse sur toutcontractant et que, par sa réticence à lui faire connaître la valeur exacte des photographies, M. Clina incité Mme Boucher à conclure une vente qu'elle n'aurait pas envisagée dans ces conditions ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'aucune obligation d'information ne pesait sur l'acheteur, lacour d'appel a violé le texte susvisé ;

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I. Le rejet de la nullité pour réticence dolosive

L’existence d’une intention de tromper est une condition nécessaire de la nullité pour réticencedolosive (A), celle-ci suppose également une obligation d’information, non reconnue en l’espèce(B).

A. L’existence d’une intention de tromper

L’arrêt est rendu au visa de l’art. 1116 du Code civil, relatif au dol (on commence parl’arrêt) .

Définition traditionnelle du dol : élément matériel (manœuvres) et élément moral (intentionde tromper) (on définit tout en se raccrochant à l’arrêt).

Puis, admission par la jurisprudence de la réticence dolosive : c’est un dol sans élémentmatériel, le simple silence, une omission, suffit (exposé rapide d’une jurisprudencedésormais constante).

C’est sur cette jurisprudence que s’appuie le pourvoi, car il était établi que l’acheteurconnaissait la valeur des photographies et a volontairement gardé le silence sur cet élémentdéterminant du consentement du vendeur (on trouve par le biais du pourvoi un moyen decoller à l’arrêt) .

B. L’absence d’obligation d’information

Selon l’arrêt, aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur (on part de l’attendude l’arrêt) .

Il s’en déduit qu’une obligation d’information est nécessaire et qu’elle n’est passystématiquement reconnue lorsqu’une partie dispose d’informations susceptibles dedéterminer le consentement de l’autre. La violation d’une obligation d’information est doncune condition propre au dol par réticence (on explique le fondement, le sens, la justificationde l’arrêt et on compare à la jurisprudence antérieure exposé dans le IA).

L’arrêt rejette ainsi la thèse d’un courant doctrinal, selon laquelle l’exigence de bonne foidans la formation du contrat impose une transparence complète (on compare l’arrêt à ce

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qu’on a pu dire sur la doctrine en IA).

II. La portée du rejet de la nullité pour réticence dolosive

Afin de préciser la portée de la décision, on doit rechercher le critère de l’obligation d’information(A) et examiner si la nullité pourrait être obtenue par d’autres moyens de droit (B).

A. Le critère de l’obligation d’information

L’arrêt affirme qu’aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur, il ne précise paspourquoi (on part toujours de l’arrêt) .

La jurisprudence admet d’ailleurs qu’une obligation d’information puisse peser sur unacheteur, notamment dans l’hypothèse où le dirigeant d’une société se porte acquéreur desactions. Toutefois, dans ce cas, il existe un devoir particulier de loyauté entre les parties, cequi n’était pas le cas en l’espèce (on compare avec la jurisprudence postérieure quirelativise la portée de l’arrêt en matière de devoir fiduciaire).

Faut-il en déduire qu’en l’absence de devoir particulier de loyauté, il ne peut jamais y avoird’obligation d’information ? Ce n’est pas sûr, car d’autres éléments de fait peuvent expliquerla solution : l’information retenue portait sur la valeur de la chose et était aisément accessibleau vendeur c’est le vendeur qui a pris l’initiative du contrat et proposé le prix (on s’interrogesur l’arrêt, on se pose des questions même si on n’a pas les réponses).

Le 17 janvier 2007 la Cour de cassation va plus loin en posant un principe plus général (toutacquéreur, même professionnel, n’a pas à informer le vendeur de la valeur du bien vendu). Ily a désormais une jurisprudence Baldus et la portée du principe posé est désormais générale(on évoque la jurisprudence postérieure à la fin du IIA alors que cela figurehabituellement dans un IIB mais l’importance de la solution directement en rapportavec l’arrêt justifie que l’information remonte dans le IIA) .

B. La possibilité d’invoquer d’autres moyens

Devant la cour de renvoi, la nullité ne pourra pas être obtenue sur le terrain de l’erreur : ils’agit d’une erreur sur la valeur (on extrapole toujours en partant de la décision).

En revanche, le vendeur pourra invoquer l’absence de cause, car on peut estimer que le prixpayé est dérisoire par rapport à la valeur de la chose, mais l’appréciation du caractèredérisoire du prix relève du pouvoir souverain des juges du fond (ibid.).

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La même conception a été consacrée par les différents projets de réforme (Catala et projets dela Chancellerie) (on aborde les projets de réforme)

Section 2. Cass. civ. II, 2 juin 2005 (IEJ Nanterre 2005, Droit desobligations)

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 18 février 2003), que M. X..., venu acheter des piècesautomobiles à M. Z... Y..., garagiste, a chuté dans la fosse de vidange située à l’intérieur du garagede celui-ci ; qu’il a assigné M. Z... Y... ainsi que son assureur, la Mutuelle du Mans assurances, enresponsabilité et indemnisation ;

Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de l’avoir débouté de ses demandes, alors, selon le moyen :

1 / que, selon l’article 1384, alinéa 1er, du Code civil, la faute du gardien ne l’exonère totalementde sa responsabilité que si elle constitue un cas de force majeure ; que le garagiste étant gardien dela fosse de vidange, chose instrument du dommage, il ne pouvait être totalement exonéré de saresponsabilité que si le comportement de la victime était imprévisible et irrésistible ; que la courd’appel s’étant bornée à relever que le comportement de la victime était à l’origine exclusive de sondommage, sans caractériser les éléments de la force majeure, a directement violé le texte précité ;

2 / que l’intervention de la fosse de vidange, qui n’était ni couverte ni éclairée, dans la réalisationdu dommage subi par M. X..., ressortait des constatations des juges du fond ; qu’en considérantcependant que ladite fosse n’avait pas de rôle causal avec la chute de la victime, la cour d’appel aviolé l’article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

Mais attendu que l’arrêt retient qu’il ne résulte pas des éléments de la cause que M. X... ait étéautorisé à pénétrer à l’intérieur du garage où était située la fosse de vidange dans laquelle il esttombé, ou même que M. Z... Y... se soit rendu compte de sa présence ;

Qu’en l’état de ces constatations et énonciations, la cour d’appel a pu décider que M. X... nedémontrait pas que la fosse de vidange, en raison d’un caractère anormal, avait été l’instrument deson dommage ;

D’où il suit que le moyen, qui est inopérant en sa première branche, n’est pas fondé pour le surplus;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

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____________

Bien que d’espèce (et non destiné à la publication au Bulletin), l’arrêt rendu le 2 juin 2005 par ladeuxième Chambre civile de la Cour de cassation fait une application intéressante des règles de laresponsabilité du fait des choses.

Monsieur X..., venu acheter des pièces automobiles à M. Z... Y..., garagiste, s’est introduit sansautorisation et à l’insu de ce dernier à l’intérieur du garage. Ayant alors chuté dans la fosse devidange, qui n’était ni couverte ni éclairée, il a recherché la responsabilité du garagiste et de sonassureur. Débouté par les juges du fond, au motif que son comportement était à l’origine exclusivede son dommage, Monsieur X s’est pourvu en cassation. Dans son pourvoi, il fait valoir, d’une part,que selon l’article 1384, alinéa 1er, du Code civil, la faute du gardien ne l’exonère totalement de saresponsabilité que si elle constitue un cas de force majeure, non caractérisé en l’espèce, et, d’autrepart, que le rôle causal de la fosse de vidange dans la réalisation du dommage résultait de ce qu’ellen’était ni couverte ni éclairée.

Le problème de droit auquel était confrontée la Cour de cassation peut donc être formulé ainsi : ungaragiste, gardien d’une fosse de vidange ni couverte ni éclairée, doit-il répondre du dommagerésultant de la chute d’un client qui s’est introduit à l’intérieur du garage sans son autorisation et àson insu ? La Cour de cassation répond par la négative à cette question, estimant que la cour d’appela pu estimer, dans les circonstances de l’espèce, que la victime ne démontrait pas que la fosse devidange, en raison d’un caractère anormal, avait été l’instrument de son dommage.

Autrement dit, c’est en raison de l’absence de rôle actif de la chose (I), que l’argument tiré del’absence de force majeure était inopérant (II).

I. L’absence de rôle actif de la chose

La solution retenue est intéressante en ce qu’elle rappelle l’exigence d’un rôle actif de la chose (A),et par la façon dont l’absence de rôle actif est caractérisé en l’espèce (B).

A. L’exigence de preuve d’un rôle actif de la chose

Aux termes de l’article 1384, alinéa 1er, du Code civil, auquel la jurisprudence reconnaît depuis lafin du XIXe siècle la valeur d’une règle de droit autonome, on est responsable du fait des choses quel’on a sous sa garde. Selon une jurisprudence constante depuis l’arrêt Jand’heur (1930), laresponsabilité du fait des choses est susceptible de s’appliquer à toutes les choses, y compris auxchoses inertes non intrinsèquement dangereuses. Toutefois, pour que la responsabilité du gardien

puisse être engagée, il ne suffit pas que l’article 1384, alinéa 1er, soit applicable, mais il faut enoutre que les conditions auxquelles il subordonne cette responsabilité soient remplies. Il faut ainsinotamment que le dommage soit imputable « au fait » de la chose, c'est-à-dire que celle-ci ait jouéun rôle causal suffisant. La jurisprudence ne se contente pas, en effet, d’un quelconque rôle causalde la chose au sens de l’équivalence des conditions, mais elle exige qu’elle ait été « l’instrument du

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dommage ». S’agissant, comme en l’espèce, d’une chose inerte, cela signifie traditionnellement quela chose doit avoir occupé une « position anormale » ou avoir été « en mauvais état », étant préciséque la charge de la preuve incombe à la victime (par ex. Cass. civ. II, 11 janv. 1995, Bull. n° 18). Enretenant, en l’espèce, que « M. X... ne démontrait pas que la fosse de vidange, en raison d’uncaractère anormal, avait été l’instrument de son dommage », elle confirme cette exigencetraditionnelle par une formule synthétique.

Bien qu’il ne s’agisse nullement d’une solution nouvelle, ce rappel n’est pas dépourvu d’intérêt.Quelques arrêts récents, dont la portée était controversée, avaient en effet pu faire douter dumaintien de l’exigence d’un rôle anormal de la chose, la Cour de cassation ayant semblé secontenter d’un heurt entre la chose inerte (baie vitrée, boîte aux lettres, plot en ciment) et la victime,pour en déduire que la chose avait été l’instrument du dommage. En l’espèce, une telle conceptionlarge de la notion d’instrument du dommage aurait conduit à l’admission de la responsabilité dugardien, sous la seule réserve du caractère exonératoire de la faute de la victime. Or, ici la faute dela victime n’intervient pas en tant que cause d’exonération, mais en amont, dans la détermination ducaractère anormal de la chose.

B. L’appréciation du rôle actif de la chose

Selon le pourvoi, l’intervention de la fosse de vidange, dans la réalisation du dommage subi par M.X... pouvait se déduire de ce qu’elle n’était ni couverte ni éclairée. Autrement dit, c’était ladangerosité de la chose qui devrait permettre de caractériser son anormalité. A première vue, cettethèse pouvait sembler conforme à la jurisprudence. Ainsi, il a été jugé que le sol avait étél’instrument du dommage provoqué par une chute s’il était anormalement glissant (Cass. civ. II, 11déc. 2003, Bull. n° 386) à l’inverse, une baie vitrée n’est pas l’instrument du dommage résultantd’une collision si elle a été correctement signalée (Cass. civ. II, 28 mai 1986, Bull. n° 85).

Pour écarter néanmoins le caractère anormal de la chose, la Cour de cassation relève « qu’il nerésulte pas des éléments de la cause que M. X... ait été autorisé à pénétrer à l’intérieur du garageoù était située la fosse de vidange dans laquelle il est tombé, ou même que M. Z... Y... se soit renducompte de sa présence ». Selon l’arrêt, c’est « en l’état de ces constatations et énonciations » que «la cour d’appel a pu décider que M. X... ne démontrait pas que la fosse de vidange, en raison d’uncaractère anormal, avait été l’instrument de son dommage ».

La solution montre que le caractère normal ou anormal d’une chose inerte au regard de l’article

1384, alinéa 1er du Code civil doit s’apprécier par rapport à son environnement. Dans un lieu quin’est pas ouvert au public, tel le garage où est survenu l’accident en l’espèce, une source de dangerspeut ne pas être anormale, alors qu’elle le serait assurément dans un lieu public.

II. L’absence inopérante d’un cas de force majeure

Bien que le pourvoi n’ait pas tort d’affirmer que le comportement de la victime n’était pasconstitutif d’un cas de force majeure en l’espèce (A), son argumentation est inopérante (B).

A. L’absence de force majeure exonératoire

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Il ne pouvait pas faire de doute, en l’espèce, que la victime avait commis une faute d’imprudence ens’introduisant, sans autorisation, à l’intérieur du garage. Depuis l’abandon de l’éphémèrejurisprudence Desmares (1982 à 1987), laquelle avait dénié tout caractère exonératoire à la faute dela victime, une telle faute est de nature à exonérer partiellement le gardien de la chose, à moinsqu’elle ne soit constitutive d’un cas de force majeure, auquel cas elle est totalement exonératoire.

Or, il ne pouvait pas davantage faire de doute, dans les circonstances de l’espèce, que l’imprudencede la victime n’était pas constitutive d’un cas de force majeure. Traditionnellement, celle-ci sedéfinit par trois attributs : l’extériorité, l’imprévisibilité et l’irrésistibilité, étant précisé que les deuxpremiers constituent en réalité des indices du dernier, qui constitue l’attribut essentiel de la forcemajeure. En l’espèce, le pourvoi se borne à rappeler que le comportement de la victime devait êtreimprévisible et irrésistible, mais l’oubli apparent du critère d’extériorité s’explique simplement parle fait que le comportement de la victime est nécessairement extérieur au gardien. Quant aux critèresd’irrésistibilité et d’imprévisibilité, ils n’étaient, à l’évidence, pas remplis : il aurait suffi desécuriser l’accès à l’intérieur du garage pour éviter que des clients ne s’y introduisent.

Le grief du pourvoi, s’il était donc fondé, était néanmoins inopérant.

B. Le caractère inopérant de l’absence de force majeure exonératoire

En réalité, il importait peu, en l’espèce, que le comportement de la victime fût ou non constitutifd’un cas de force majeure. En effet, pour que la question de l’exonération du responsable puisse seposer, il faut, d’abord, que les conditions de sa responsabilité soient réunies. Or, on a vu que teln’était pas le cas, faute de rôle actif de la chose.

Finalement, l’arrêt illustre parfaitement comment, à travers l’exigence d’un rôle actif de la chose,des considérations liées à la faute, tant du gardien que de la victime, peuvent resurgir dans le cadrede la responsabilité du fait des choses, qui est pourtant une responsabilité de plein droit. En effet, laresponsabilité du gardien est écartée parce qu’il n’a rien à se reprocher, le dommage n’étantimputable qu’à l’imprudence de la victime. Au moins pour les choses inertes, le régime de laresponsabilité du fait des choses rapproche celle-ci d’une responsabilité pour faute.

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