Méningiome papillaire : une forme rarissime et agressive de méningiome

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Annales de pathologie (2013) 33, 49—52 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com CAS ANATOMOCLINIQUE Méningiome papillaire : une forme rarissime et agressive de méningiome Papillary meningioma: A very rare and aggressive variant of meningioma Maxime Benchetrit a , Damien Ambrosetti a , Nathalie Vincent b , Stéphane Chanalet c , Christine Soler d , Juliette Haudebourg a , Fanny Burel-Vandenbos a,a Laboratoire central d’anatomie pathologique, hôpital Pasteur, CHU de Nice, 30, avenue de la Voie-Romaine, 06000 Nice, France b Service de neurochirurgie, CHU de Nice, 06000 Nice, France c Service de radiologie, CHU de Nice, 06000 Nice, France d Service de pédiatrie, CHU de Nice, 06000 Nice, France Accepté pour publication le 3 septembre 2012 Disponible sur Internet le 8 evrier 2013 MOTS CLÉS Méningiome ; Papillaire ; Mauvais pronostic Résumé Les méningiomes papillaires (MP) sont une variante très rare et agressive de méningiome, survenant préférentiellement chez les sujets jeunes. Ils se caractérisent histologi- quement par une disposition papillaire ou périvasculaire des cellules tumorales. Nous rapportons le cas d’un MP frontal droit chez un adolescent de 16 ans. Le diagnostic différentiel se posait avec les autres tumeurs intracrâniennes d’architecture papillaire, primitives ou secondaires. Le diagnostic de MP ne doit pas être méconnu du fait du caractère malin de ces tumeurs, avec un risque élevé d’invasion cérébrale, de récidive locale et de métastases. © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. KEYWORDS Meningioma; Papillary; Poor prognosis Summary Papillary meningioma (MP) is a rare and aggressive variant of meningioma, occur- ring preferentially in young subjects. Histopathological features of papillary meningiomas are characterized by papillary or perivascular pseudorosette patterns. We report the case of a right frontal MP in a 16-year-old boy. Differential diagnosis included other primitive or secon- dary intracranial papillary neoplasms. MP diagnosis should not be missed due to its aggressive behavior with brain invasion, local recurrence and metastases. © 2013 Published by Elsevier Masson SAS. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (F. Burel-Vandenbos). 0242-6498/$ see front matter © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2012.09.227

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Annales de pathologie (2013) 33, 49—52

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

CAS ANATOMOCLINIQUE

Méningiome papillaire : une forme rarissime etagressive de méningiome

Papillary meningioma: A very rare and aggressive variant of meningioma

Maxime Benchetrit a, Damien Ambrosetti a,Nathalie Vincentb, Stéphane Chanaletc,Christine Solerd, Juliette Haudebourga,Fanny Burel-Vandenbosa,∗

a Laboratoire central d’anatomie pathologique, hôpital Pasteur, CHU de Nice, 30, avenue dela Voie-Romaine, 06000 Nice, France

b Service de neurochirurgie, CHU de Nice, 06000 Nice, Francec Service de radiologie, CHU de Nice, 06000 Nice, Franced Service de pédiatrie, CHU de Nice, 06000 Nice, France

Accepté pour publication le 3 sDisponible sur Internet le 8 fevr

MOTS CLÉSMéningiome ;Papillaire ;Mauvais pronostic

Résumé Les méningiomes paméningiome, survenant préférenquement par une disposition paple cas d’un MP frontal droit cheavec les autres tumeurs intracrLe diagnostic de MP ne doit pas

un risque élevé d’invasion céréb© 2013 Publié par Elsevier Masso

KEYWORDSMeningioma;Papillary;Poor prognosis

Summary Papillary meningiomring preferentially in young subjcharacterized by papillary or pright frontal MP in a 16-year-olddary intracranial papillary neoplbehavior with brain invasion, loc© 2013 Published by Elsevier Ma

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (F. Burel-Vandenbos)

0242-6498/$ — see front matter © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2012.09.227

eptembre 2012ier 2013

pillaires (MP) sont une variante très rare et agressive detiellement chez les sujets jeunes. Ils se caractérisent histologi-illaire ou périvasculaire des cellules tumorales. Nous rapportonsz un adolescent de 16 ans. Le diagnostic différentiel se posaitâniennes d’architecture papillaire, primitives ou secondaires.être méconnu du fait du caractère malin de ces tumeurs, avecrale, de récidive locale et de métastases.n SAS.

a (MP) is a rare and aggressive variant of meningioma, occur-ects. Histopathological features of papillary meningiomas areerivascular pseudorosette patterns. We report the case of a

boy. Differential diagnosis included other primitive or secon-asms. MP diagnosis should not be missed due to its aggressiveal recurrence and metastases.

sson SAS.

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50 M. Benchetrit et al.

Figure 1. A. IRM cérébrale, coupe axiale pondérée en T2 FLAIR : masse frontale droite extra-axiale de 6,4 × 6,3 × 6,3 cm partiellementkystique et hémorragique, s’accompagnant d’un effet de masse et d’un engagement sous-falcoriel. B. IRM, coupe axiale en séquence T1 avecinjection de gadolinium : rehaussement hétérogène de la tumeur qui lyse l’os frontal et la paroi supérieure de l’orbite droite.A. Axial T2 FLAIR-weighted brain MRI: 6.4 × 6.3 × 6.3 cm right frontal lobe mass with cystic and haemorrhagic areas, mass effect andfrontal herniation. B. Axial T1 MRI with gadolinium: heterogeneous tumour enhancement, with osteolysis of the frontal bone and upperportion of the right orbit.

Figure 2. Architecture tumorale essentiellement papillaire et pseudopapillaire (A ; HES × 100) ou en pseudorosettes périvasculaires (B ;HES × 100), avec des territoires d’allure hémangiopéricytaire (C ; HES × 200). Les cellules tumorales, rondes ou fusiformes, montraient unnoyau arrondi ou ovalaire doté d’un petit nucléole (D ; HES × 200).Predominant papillary and pseudopapillary growth pattern (A; HES × 100), or perivascular pseudorosette arrangement (B; HES × 100),mixed with haemangiopericytoma-like areas (C; HES × 200). Tumour cells harboured round to elongated nuclei, with small solitary nucleoli(D; HES × 200).

ie poentin

Méningiome papillaire

Figure 3. Positivité des cellules tumorales en immuno-histochimTumour cells showing immunoreactivity for EMA (A; × 400) and vim

Introduction

Le méningiome papillaire (MP) est une forme histologiqueparticulière de méningiome, atteignant des sujets jeunes etmontrant une tendance à la récidive ainsi qu’un potentielmétastatique important. Du fait de son mauvais pronostic,l’OMS le classe comme un méningiome de grade III. Il secaractérise histologiquement par une disposition périvascu-laire ou pseudopapillaire des cellules tumorales sur tout oupartie de la tumeur. De par sa rareté et sa survenue chez dessujets jeunes, le diagnostic différentiel peut être difficileavec les autres tumeurs papillaires. Nous décrivons le casd’un méningiome papillaire chez un adolescent de 16 ans etdiscutons les arguments permettant d’affirmer le diagnostic.

Observation

Un adolescent de 16 ans était hospitalisé en urgencepour hypertension intracrânienne. Il présentait des cépha-

lées évoluant depuis deux mois. L’imagerie par résonancemagnétique (IRM) cérébrale (Fig. 1) montrait une massefrontale droite extra-axiale de 6,4 cm de grand axe, avecune composante kystique, se rehaussant de manière hété-rogène après injection de gadolinium. La lésion lysaitl’os frontal et la paroi supérieure de l’orbite droite,et s’accompagnait d’un effet de masse avec engage-ment sous-falcoriel. Le matériel d’exérèse de 13 g étaitconstitué de multiples fragments blanchâtres et hémor-ragiques. L’examen microscopique montrait une tumeurs’organisant essentiellement en papilles (Fig. 2A) et enpseudorosettes périvasculaires (Fig. 2B). Il s’y associaitdes territoires d’allure hémangiopéricytaire (Fig. 2C) etméningiomateux typiques. Les cellules étaient rondes oufusiformes au noyau arrondi ou ovalaire, vésiculeux, dotéd’un petit nucléole. On notait de rares pseudo-inclusionsintranucléaires. Les atypies cytonucléaires restaient modé-rées (Fig. 2D). L’index mitotique était de quatre mitosespour dix champs à l’objectif 40. Il existait de multiplesmicro-foyers nécrotiques, un envahissement du tissu céré-bral et d’importants remaniements hémorragiques. L’étudeimmuno-histochimique montrait une positivité de l’antigèneépithélial de membrane (EMA), de la vimentine (Fig. 3A etB) et des récepteurs à la progestérone (RP). La cytokéra-tine totale, la protéine gliale fibrillaire acide (GFAP) et le

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ur l’EMA (A ; × 400) et la vimentine (B ; × 400).e (B; × 400).

CD34 étaient négatifs. INI1 était positif. L’index de proliféra-tion était à 10 %. La recherche de signe de neurofibromatosede type 2 était négative. Une radiothérapie complémentaireétait proposée.

Discussion

Le méningiome papillaire est une variante rare de ménin-giome, représentant 1 à 2,5 % des cas. Sa présentationclinique est particulière, survenant chez des sujets jeunes(moyenne d’âge de 36 ans, avec 20 % des cas diagnostiquéschez des enfants de moins de 18 ans) [1,2]. Histologi-quement, cette forme inhabituelle pose des problèmesde diagnostic différentiel avec d’autres lésions papil-laires intracrâniennes, primitives ou secondaires [3]. Dansnotre cas, la localisation extra-axiale et le profil immuno-histochimique (positivité de l’EMA, de la vimentine et desRP, négativité de la GFAP et du CD34) faisaient suspecterl’origine méningiomateuse de la tumeur. La négativité de

la GFAP permettait d’éliminer une tumeur gliale papillaire,épendymome papillaire ou astroblastome. La tumeur papil-laire de la glande pinéale [4] et le papillome des plexuschoroïdes [3,5] présentent une localisation différente etn’expriment que peu ou pas l’EMA. Un adénocarcinomepapillaire métastatique, peu probable à cet âge, était éli-miné sur la positivité de la vimentine.

Ces difficultés diagnostiques sont majorées dans les MPdénués de territoires méningiomateux typiques ou dans lescas négatifs pour l’EMA. Il a été montré que l’étude ultra-structurale pouvait être alors d’une aide précieuse [6].

Les MP sont des tumeurs agressives, avec un taux de sur-vie à cinq ans de 30 % [1]. Ce pronostic péjoratif est lié à unrisque élevé de récidive (59 %) dû à une invasion fréquentedu parenchyme cérébral (47 %) ou au caractère kystique sou-vent retrouvé dans les MP, par opposition aux méningiomesclassiques [7,8]. Ces kystes se formeraient par la confluencede microkystes ou de foyers nécrotico-hémorragiques. Laprésence de cellules tumorales résiduelles dans une paroikystique incomplètement réséquée serait à l’origine de réci-dives [9]. Les métastases sont fréquentes (23,5 %) [2], etsont axiales leptoméningées ou extra-axiales, essentielle-ment pulmonaires. Le traitement est chirurgical, et uneradiothérapie complémentaire est généralement indiquée[10].

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éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

éférences

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