Mémoire (dépôt final) version finale

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PARTAGE DES TÂCHES FAMILIALES ET PERCEPTION D’INIQUITÉ AU SEIN DU COUPLE : RÔLE MODÉRATEUR DE L’IMPRESSION DE COMPTER POUR LES ENFANTS MÉMOIRE DOCTORAL PRÉSENTÉ À LA FACULTÉ DES ÉTUDES SUPÉRIEURES ET DE LA RECHERCHE EN VUE DE L’OBTENTION DU DOCTORAT PROFESSIONNEL EN PSYCHOLOGIE (D.Psy.) SHAWNA McGEE, B.A. (spéc.) ÉCOLE DE PSYCHOLOGIE FACULTÉ DES SCIENCES DE LA SANTÉ ET DES SERVICES COMMUNAUTAIRES UNIVERSITÉ DE MONCTON SEPTEMBRE 2015

Transcript of Mémoire (dépôt final) version finale

PARTAGE DES TÂCHES FAMILIALES ET

PERCEPTION D’INIQUITÉ AU SEIN DU COUPLE :

RÔLE MODÉRATEUR DE L’IMPRESSION DE COMPTER POUR LES ENFANTS

MÉMOIRE DOCTORAL PRÉSENTÉ À LA FACULTÉ DES ÉTUDES

SUPÉRIEURES ET DE LA RECHERCHE EN VUE DE L’OBTENTION DU

DOCTORAT PROFESSIONNEL EN PSYCHOLOGIE (D.Psy.)

SHAWNA McGEE, B.A. (spéc.)

ÉCOLE DE PSYCHOLOGIE

FACULTÉ DES SCIENCES DE LA SANTÉ

ET DES SERVICES COMMUNAUTAIRES

UNIVERSITÉ DE MONCTON

SEPTEMBRE 2015

À ma famille et mon conjoint, pour votre

appui continu tout au long de mes études

iii

REMERCIEMENTS

J’aimerais prendre ce moment pour remercier les multiples gens qui m’ont

accompagnée dans l’aventure qui a mené à ce mémoire. Tout d’abord, je tiens à

remercier Mylène Lachance-Grzela, Ph.D., professeure de l’Université de Moncton qui a

agit en tant que directrice de mon mémoire doctoral. Son soutien continu tout au long de

la réalisation de cette étude ainsi que sa bonne humeur lors de nos rencontres a rendu

une tâche exigeante, très plaisante. Je me sens très chanceuse d’avoir travaillé sous sa

supervision pour ce mémoire et je suis très honorée d’avoir été sa première étudiante

doctorale.

Je souhaite également remercier les autres membres de mon jury : l’évaluatrice

interne, Ann Beaton, Ph.D., professeure à l’Université de Moncton, l’évaluatrice externe,

Tamarha Pierce, Ph.D., professeure à l’Université Laval ainsi que le président de la

soutenance, Jacques Richard, Ph.D., professeur à l’Université de Moncton. J’ai

beaucoup apprécié le temps et l’effort que vous avez consacrés à l’évaluation de mon

mémoire doctoral.

Je tiens aussi à remercier ma famille, en particulier mes parents, pour leur appui

pendant mes études. De plus, j’aimerais remercier mes amies ainsi que mes collègues au

doctorat pour leur soutien continu. Enfin, je tiens à remercier mon conjoint Mario qui

m’a accompagnée tout au long de cette belle aventure. Je n’aurais jamais pu compléter

ce mémoire sans sa patience, son encouragement continu et son sens de l’humour.

iv

COMPOSITION DU JURY

Président : Jacques Richard, Ph.D., L.Psych.

École de psychologie

Université de Moncton

Directrice du mémoire doctoral : Mylène Lachance-Grzela, Ph.D., L.Psych.

École de psychologie

Université de Moncton

Évaluatrice interne : Ann Beaton, Ph.D.

École de psychologie

Université de Moncton

Évaluatrice externe : Tamarha Pierce, Ph.D.

École de psychologie

Université Laval

SOMMAIRE

Bien que les dernières décennies aient été marquées par une évolution importante

quant à la place des femmes dans la sphère publique et sur le marché du travail, il est

toujours possible d’observer des inégalités entre les hommes et les femmes dans la

sphère privée. En autres, il est documenté que les femmes accomplissent la grande

majorité des tâches non-rémunérées à la maison. Un paradoxe émerge à cet effet alors

que les femmes tendent à décrire ce partage inégal comme étant juste et équitable pour

elles. Les chercheurs tentent d’expliquer ce phénomène et plusieurs se sont appuyés sur

la théorie de la justice distributive pour approfondir leur compréhension. Récemment,

des auteurs se sont penchés sur les récompenses émotionnelles que les femmes peuvent

retirer de l’accomplissement de ce travail pour démystifier le paradoxe. La présente

étude avait pour objectif de vérifier si une variable émotionnelle liée aux enfants, plus

précisément l’impression de compter pour eux, influence la relation entre la contribution

relative de la femme au partage des tâches familiales et sa perception d’iniquité quant à

ce partage. Cette étude corrélationnelle s’appuie sur un échantillon de 232 femmes ayant

au moins un enfant âgé de 2 à 12 ans et étant en couple avec l’autre parent. Les résultats

révèlent que, dans cet échantillon, l’impression de compter pour les enfants modère la

relation entre la contribution des femmes aux tâches familiales et leurs perceptions

d’iniquité. Autrement dit, dans le contexte où les femmes ont peu l’impression de

compter pour leurs enfants, le sentiment d’injustice quant au partage des tâches

familiales monte plus rapidement avec leur contribution que les femmes ayant une plus

forte impression de compter pour leurs enfants. Ces données indiquent que l’impression

de compter dans la vie des enfants a un impact dans la relation entre la contribution des

mères au partage des tâches familiales dans le couple et le sentiment d’injustice que ce

partage génère. Les implications cliniques et sociales de ces résultats ainsi que les

avenues futures en recherche sont présentées et discutées.

vi

TABLE DES MATIÈRES

LISTE DES TABLEAUX ............................................................................................... vii

LISTE DES FIGURES ................................................................................................... viii

CHAPITRE PREMIER ..................................................................................................... 1

Introduction générale ................................................................................................. 1

1.1. La conceptualisation des tâches non-rémunérées ...................................... 2

1.2. Le partage des tâches non-rémunérées ....................................................... 3

1.3. Les perceptions d’équité quant au partage des tâches non-rémunérées ..... 3

1.4. Les perceptions d’équité : une question d’émotions? ................................ 7

1.5. L’impression de compter pour ses enfants ................................................. 8

1.6. Buts et hypothèses de la présente étude ..................................................... 9

CHAPITRE II .................................................................................................................. 12

Méthode .................................................................................................................... 12

2.1. Participantes ............................................................................................. 12

2.2. Procédure .................................................................................................. 12

2.3. Matériel..................................................................................................... 13

2.3.1. Partage des tâches familiales ........................................................ 13

2.3.1.1. Contribution relative ......................................................... 13

2.3.1.2. Contribution absolue ......................................................... 14

2.3.2. Perception d’iniquité quant au partage des tâches familiales ....... 14

2.3.3. Impression de compter pour ses enfants ....................................... 14

2.3.4. Covariables ................................................................................... 16

2.3.4.1. Données sociodémographiques ........................................ 16

2.3.4.2. Impression de compter pour le partenaire ........................ 17

CHAPITRE III ................................................................................................................. 18

Résultats .................................................................................................................... 18

3.1. Analyses préliminaires ............................................................................. 18

3.1.1. Analyse en composantes principales ............................................ 18

3.1.2. Analyse des statistiques descriptives ............................................ 24

3.2. Analyses principales ................................................................................. 27

3.2.1. Postulats de base de la régression multiple .................................. 27

3.2.2. Régression multiple hiérarchique ................................................. 28

CHAPITRE IV ................................................................................................................. 33

Discussion ................................................................................................................. 33

4.1. Limites ...................................................................................................... 37

4.2. Avenues futures ........................................................................................ 38

4.3. Implications cliniques et sociales ............................................................. 39

RÉFÉRENCES ................................................................................................................. 41

ANNEXE A LISTE INITIALE DES ITEMS DE L’IMPRESSION DE COMPTER

POUR LES ENFANTS .................................................................................................... 46

ANNEXE B LISTE FINALE DES ITEMS DE L’IMPRESSION DE COMPTER

POUR LES ENFANTS .................................................................................................... 49

vii

LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1. Matrice des types. .................................................................................... 21

Tableau 2. Matrice de structure. ................................................................................ 22

Tableau 3. Statistiques descriptives des covariables et des variables à l’étude. ....... 25

Tableau 4. Corrélations entre les variables continues. .............................................. 26

Tableau 5. Régression multiple hiérarchique prédisant la perception d’iniquité de

la femme. ................................................................................................. 30

viii

LISTE DES FIGURES

Figure 1. Modèle postulé dans lequel l’impression de compter pour ses enfants

sert de variable modératrice. .................................................................... 10

Figure 2. Graphique des valeurs propres du premier essai de l’ACP (avec critère

de Kaiser). ................................................................................................ 19

Figure 3. Le rôle modérateur de l’impression de compter pour les enfants dans la

relation entre la contribution relative de la femme au partage des tâches

familiales et sa perception d’iniquité dans le couple. .............................. 32

CHAPITRE PREMIER

Introduction générale

Alors que l’égalité entre les hommes et les femmes est valorisée dans notre société,

il est toujours possible d’observer des injustices envers les femmes. Depuis plusieurs

décennies, les femmes ont vécu des changements majeurs quant au rôle assumé dans la

famille et sur le marché du travail (Percheski, 2008). Traditionnellement, les rôles

étaient divisés selon le genre : les hommes travaillaient hors du foyer afin de parvenir

aux besoins financiers de leur famille alors que les femmes s’occupaient des enfants et

accomplissaient la grande majorité des tâches ménagères (Bartley, Blanton, & Gilliard,

2005; Claffey & Mickelson, 2009). De plus en plus, les femmes occupent des postes à

l’extérieur du foyer et contribuent au revenu familial. De 1970 à 2001, Raley, Mattingly

et Bianchi (2006) ont observé une augmentation d’environ 30% des couples à deux

revenus, c’est-à-dire dans lesquels les deux partenaires occupent des emplois rémunérés.

Aujourd’hui, parmi l’ensemble des Canadiens de plus de 15 ans, il est estimé que 66%

des hommes ainsi que 58% des femmes travaillent à l’extérieur de la maison (Statistique

Canada, 2012). Plus précisément, le taux d’emploi des femmes canadiennes ayant un

enfant de moins de six ans était de 68% en 2012, plus du double de ce qu’il était en 1976

(31,4%; Statistique Canada, 2012).

En raison des changements importants dans la sphère publique, les chercheurs

s’attendaient à observer des changements similaires dans la sphère familiale. Un des

principaux changements qui était attendu d’observer chez les couples à deux revenus

était l’établissement d’un partage relativement égal du travail domestique (Claffey &

Mickelson, 2009; Coltrane, 2000). Toutefois, la littérature en psychologie sociale et

familiale révèle que les femmes continuent à consacrer plus de temps à accomplir le

travail domestique que les hommes (Bartley et al., 2005; Coltrane, 2000; Lachance-

Grzela & Bouchard, 2010). Même les femmes qui possèdent un haut niveau d’éducation

(Gager & Hohmann-Marriott, 2006), qui s’identifient comme étant plutôt égalitaires, qui

possèdent un revenu élevé et qui travaillent autant d’heures à l’extérieur de la maison

que leur partenaire rapportent qu’elles accomplissent la majeure partie du travail

domestique (Claffey & Mickelson, 2009). Cette tendance a été observée dans plusieurs

2

pays et cultures (Greenstein, 2009; Knudsen & Waerness, 2008; Meggiolaro, 2014;

Pinto & Coltrane, 2009) et persiste avec le temps (Killewald & Gough, 2010; Neilson &

Stanfors, 2014).

1.1. La conceptualisation des tâches non-rémunérées

Plus précisément, le travail domestique fait référence à l’ensemble des tâches non-

rémunérées qui sont accomplies dans le but de combler les besoins des membres de la

famille ou afin d’entretenir le foyer (Lachance-Grzela, 2014). Certaines tâches qui sont

généralement incluses dans cette conceptualisation sont celles entourant la planification

et la préparation des repas, le ménage, le lavage des vêtements, les courses, l’entretien

de la maison, de la cour et des voitures, la gestion des factures et le transport des

membres de la famille (e.g., Badr & Acitelli, 2008; Lee & Waite, 2010; Lincoln, 2008).

Certains chercheurs font la distinction entre les tâches routinières, aussi décrites comme

étant les tâches typiquement féminines, et les tâches intermittentes, aussi décrites comme

étant les tâches typiquement masculines (Bartley et al., 2005; Batalova & Cohen, 2002).

Selon cette conceptualisation, les tâches routinières font référence à celles qui sont

constamment à refaire, qui doivent être accomplies tous les jours et qui exigent

beaucoup de temps (e.g., cuisiner, nettoyer après les repas). Par comparaison, les tâches

intermittentes font référence à celles qui sont accomplies moins souvent, qui peuvent

être faites lorsque le temps le permet et qui demandent moins de temps (e.g., sortir les

poubelles, tondre le gazon). Certains auteurs considèrent les soins aux enfants comme

une des tâches non-rémunérées (Badr & Acitelli, 2008; Hook, 2006).

Dans la présente étude, je m’intéresse plus particulièrement aux tâches dites

familiales, soit celles de nature routinière qui risquent d’être accomplies en présence des

membres de la famille : la préparation des repas, les tâches liées au nettoyage, le lavage,

les courses, les soins des enfants et le transport des enfants (voir Badr & Acitelli, 2008

pour une conceptualisation similaire). Ces tâches ont la particularité d’être effectuées

dans le but de répondre directement aux besoins des membres de la famille.

3

1.2. Le partage des tâches non-rémunérées

Un des résultats reproduit le plus fréquemment dans la littérature en psychologie

sociale est à l’effet que les femmes complètent environ deux tiers des tâches non-

rémunérées effectuées au sein du couple (Bartley et al., 2005; Claffey & Mickelson,

2009; Fuwa & Cohen, 2007). Certaines études suggèrent que cette proportion peut

s’élever jusqu’à trois quarts (Greenstein, 2009; Knudsen & Waerness, 2008; Poortman

& Van Der Lippe, 2009). Dans les années 2000, plusieurs études longitudinales ont

documenté l’évolution de la contribution des hommes et des femmes au partage des

tâches (e.g. Cunningham, 2007; Killewald & Gough, 2010; Neilson & Stanfors, 2014;

Sayer, 2005). Dans l’ensemble, elles révèlent que les femmes en accomplissent moins

que dans le passé et que les hommes contribuent plus qu’auparavant (Coltrane, 2000;

Sayer, 2005). En fait, une étude longitudinale de grande envergure effectuée par Bianchi

et ses collaborateurs (2000) s’appuyant sur des données recueillies entre 1965 et 1995

révèle que les femmes passent de moins en moins de temps aux tâches ménagères d’une

décennie à l’autre. Parallèlement, les hommes ont augmenté leur contribution de 1965 à

1985, mais ensuite leur implication a plafonné. Malgré le resserrement de l’écart, la

contribution des mères reste encore beaucoup plus élevée que celle des pères (Killewald

& Gough, 2010; Sayer, 2005). Ainsi, l’écart entre les contributions des femmes et des

hommes se maintient. Certains pourraient croire que le fait d’observer un partage des

tâches inégalitaire au sein des couples s’explique par le type de tâches étudiées.

Toutefois, des données révèlent que les femmes sont responsables de la majorité des

tâches non-rémunérées que l’on s’intéresse aux tâches routinières seulement ou aux

tâches routinières et intermittentes combinées (Bianchi, Milkie, Sayer, & Robinson,

2000; Kroska, 2004).

1.3. Les perceptions d’équité quant au partage des tâches non-rémunérées

Le lien entre le partage des tâches non-rémunérées et les perceptions d’équité dans

le couple a souvent été étudié dans la littérature en psychologie conjugale. Des travaux

révèlent qu’il existe un lien entre l’intensité de l’inégalité dans la contribution de chaque

partenaire et l’intensité du sentiment d’injustice qu’elle génère. Plus spécifiquement,

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Claffey et Mickelson (2009) ont conclu que le partage des tâches non-rémunérées est lié

négativement aux perceptions d’équité. Essentiellement, plus les femmes accomplissent

des tâches non-rémunérées, moins elles jugent ce partage comme étant juste. Dans le

même ordre d’idée, Öun (2013) a conclu que plus le partage des tâches non-rémunérées

est égal dans le couple, plus les partenaires auront tendance à juger ce partage comme

étant juste, et ce, dans plusieurs pays. Malgré la présence de ce lien, de nombreux

chercheurs ont trouvé qu’un partage inégal des tâches non-rémunérées évoque un

sentiment de justice au sein de plusieurs couples (Braun, Lewin-Epstein, Stier, &

Baumgärtner, 2008; Gager & Hohmann-Marriott, 2006; Kawamura & Brown, 2010).

Plus précisément, Gager et Hohmann-Marriott (2006) ont conclu que bien que les

femmes travaillent à la maison en moyenne près de 20 heures de plus par semaine que

les hommes, 70% d’entre elles jugent ce partage inégal comme étant juste. Il importe de

noter que près de la moitié des femmes de leur échantillon ne travaillaient pas à

l’extérieur de la maison au moment de l’étude. Braun et ses collaborateurs (2008) ont

documenté cette tendance dans plusieurs pays, tels que l’Australie, les États-Unis,

l’Espagne, le Chili et plusieurs autres. Près de 45% des femmes de leur échantillon ont

jugé le partage dans lequel elles accomplissent la majorité des tâches comme étant

équitable pour elles-mêmes (Braun et al., 2008). Des résultats similaires ont été obtenus

une décennie plus tôt. Lennon et Rosenfield (1994) ont trouvé que les femmes

accomplissaient la grande majorité, soit près de deux tiers des tâches non-rémunérées et

qu’environ 60% d’elles jugeaient cette distribution inégale comme étant équitable et

juste.

En dépit du fait que certaines femmes soient satisfaites d’un partage inégal des

tâches, l’étude de la perception d’équité qui découle de cet arrangement est importante

pour diverses raisons. De façon générale, la division du travail non-rémunéré permet de

faire lumière sur les relations de pouvoir au sein des couples (Davis & Greenstein, 2013).

De même, l’étude du travail domestique contribue à la compréhension non seulement

des couples en général, mais aussi du fonctionnement de la société (Treas & Lui, 2013).

En fait, les chercheurs argumentent que l’inégalité dans la sphère familiale nuit à la

capacité des femmes à atteindre l’égalité dans la sphère publique (Lothaller, Mikula, &

5

Schoebi, 2009; Poeschl, 2008). De plus, les chercheurs dans le domaine s’entendent

pour dire que ces injustices ont un impact négatif sur la relation conjugale ainsi que sur

le fonctionnement psychologique de l’individu (Claffey & Mickelson, 2009; Coltrane,

2000; Lennon & Rosenfield, 1994). D’abord, Claffey et Mickelson (2009) ont trouvé

que plus les femmes perçoivent qu’elles accomplissent de tâches non-rémunérées que

leur partenaire et moins elles ont l’impression que ce partage est juste, plus elles ont

tendance à rapporter de la détresse personnelle et conjugale. De plus, Lennon et

Rosenfield (1994) ont conclu que les femmes qui perçoivent le partage des tâches non-

rémunérées comme étant injuste rapportaient plus de symptômes dépressifs que les

femmes qui le perçoivent comme étant équitable. C’est d’ailleurs pour toutes ces raisons

que de plus en plus d’intérêt est manifesté à l’égard des perceptions d’équité quant à la

division des tâches non-rémunérées dans le couple.

En effet, la réalité que plusieurs femmes jugent un partage inégal des tâches non-

rémunérées comme étant juste représente un des plus grands paradoxes dans la

littérature en psychologie sociale et les chercheurs dans le domaine tentent de

l’expliquer depuis longtemps (Baxter & Western, 1998; Coltrane, 2000). La contribution

des femmes au partage des tâches non-rémunérés n’explique pas complètement leurs

perceptions d’équité (Braun et al., 2008). Par conséquent, plusieurs chercheurs ont

étudié les raisons pour lesquelles certaines femmes perçoivent un partage inégal des

tâches non-rémunérées comme étant juste et équitable (e.g. Braun et al., 2008; DeMaris

& Longmore, 1996; Kawamura & Brown, 2010; Lachance-Grzela, 2012; Sanchez &

Kane, 1996).

Une explication à l’avant-plan dans la littérature récente est celle de la théorie de

la justice distributive. Essentiellement, cette théorie propose que les perceptions d’équité

des femmes sont influencées par trois éléments : les agents de comparaison, les

rationalisations ainsi que les compensations (Major, 1987 in Thompson, 1991). D’abord,

les agents de comparaison englobent tous les cadres de références ainsi que les normes

avec lesquelles les femmes se comparent dans le but d’évaluer l’équité concernant le

partage des tâches non-rémunérées (Thompson, 1991). Des études à cet effet révèlent

6

que les femmes comparent leur situation à leur propre expérience antérieure ou à la

situation des autres (e.g. la contribution des autres femmes ou celle de leur partenaire)

afin de juger le partage des tâches comme étant soit juste ou injuste (e.g. Gager, 1998;

Hawkins, Marshall, & Meiners, 1995). Des auteurs suggèrent aussi que les femmes se

comparent à des normes établies dans leur société, telles que l’équité du genre et le

rapport des salaires hommes/femmes pour évaluer le partage des tâches non-rémunérées

dans leur couple (Braun et al., 2008; Greenstein, 2009).

En ce qui a trait aux rationalisations, elles font référence aux raisons ou aux

explications que donnent les femmes afin de justifier leur situation. En d’autres mots, les

femmes qui considèrent que le partage inégal des tâches non-rémunérées est justifié

auraient moins tendance à le juger comme étant inéquitable (Thompson, 1991). Les

femmes utilisent donc des principes de légitimation pour déterminer leurs perceptions

d’équité (Braun et al., 2008). Selon les travaux de Braun et ses collègues (2008), ces

principes peuvent être divisés en trois catégories : l’idéologie du genre, les ressources

relatives de chaque partenaire ainsi que le temps disponible. Ainsi, leurs résultats

révèlent que les femmes seront plus susceptibles de juger qu’un partage inégal des

tâches non-rémunérées est inéquitable lorsqu’elles entretiennent une attitude égalitaire,

lorsqu’elles dépendent moins des ressources financières de leur partenaire et lorsqu’elles

passent autant de temps que leur conjoint sur le marché de travail (Braun et al., 2008).

Dans le même ordre d’idées, les compensations reçues influencent aussi les

perceptions d’équité quant au partage des tâches non-rémunérées. En fait, les

compensations comprennent toutes les mérites et les récompenses que les femmes

reçoivent ou s’attendent de recevoir en échange au partage des tâches non-rémunérées

(Thompson, 1991). Par exemple, Thompson (1991) argumente que les femmes ne jugent

pas nécessairement un partage inégal des tâches non-rémunérées comme étant injuste

parce qu’elles valorisent les relations affectives avec leur famille qui en découlent.

Effectivement, Sanchez et Kane (1996) ont conclu que les femmes qui valorisent le

travail domestique ont plus tendance à juger le partage des tâches comme étant juste.

Jusqu’à présent, les chercheurs se sont plutôt concentrés sur les rationalisations ainsi que

7

les agents de comparaisons afin d’étudier les raisons pour lesquelles certaines femmes

jugent un partage inégal des tâches non-rémunérées comme étant juste. Depuis peu, des

chercheurs ont soutenu qu’il importe de se pencher sur les compensations en général

(DeMaris & Longmore, 1996; Thompson, 1991) et plus précisément, sur celles d’ordre

émotionnel (Kawamura & Brown, 2010; Lachance-Grzela, 2012) qui pourraient

permettre de mieux comprendre les perceptions d’équité des femmes.

1.4. Les perceptions d’équité : une question d’émotions?

Récemment, des chercheurs ont avancé qu’il serait pertinent d’explorer les

variables situationnelles telles que l’impression d’être soutenu par son partenaire ou les

membres de sa famille, dans l’étude des tâches rémunérées et non-rémunérées des

femmes (voir Bouchard & Poirier, 2011 et Bun Lam, McHale, & Crouter, 2012 pour une

argumentation similaire). Dans le même ordre d’idées, Lee et Waite (2010) suggèrent

que les contextes relationnels dans lesquels le partage des tâches a lieu sont importants

pour les femmes. Thompson (1991) a aussi argumenté que les compensations

relationnelles sont plus importantes que les récompenses que les femmes reçoivent

directement en accomplissant les tâches non-rémunérées. En d’autres mots, les femmes

n’apprécient pas nécessairement les tâches qu’elles accomplissent, mais plutôt les

avantages relationnels qui en découlent.

D’ailleurs, certains auteurs se sont penchés sur des compensations d’ordre

émotionnel afin d’expliquer pourquoi certaines femmes perçoivent un partage inégal des

tâches non-rémunérées comme étant juste. Des auteurs ont considéré le sentiment de

valorisation comme une récompense d’ordre émotionnel (e.g. Kawamura & Brown,

2010; Lachance-Grzela, 2012). Plus précisément, des auteurs ont examiné le rôle que

joue l’impression de compter aux yeux de son partenaire dans l’apparition du sentiment

d’équité. L’impression de compter aux yeux de son partenaire se définit comme étant le

niveau de préoccupation qu’un partenaire démontre pour l’autre (Kawamura & Brown,

2010). Les résultats obtenus révèlent que plus une femme a l’impression d’être

importante aux yeux de son partenaire, plus elle aura tendance à percevoir un partage

8

inégal des tâches comme étant juste, et ce, peu importe la part des tâches qu’elle

accomplit (Kawamura & Brown, 2010).

De façon similaire, Lachance-Grzela (2012) a trouvé que le fait de se sentir

importante aux yeux de son partenaire agit également comme effet modérateur dans la

relation entre les attitudes quant aux rôles sexuels et les perceptions d’équité dans le

couple. Plus précisément, les femmes utilisent leurs attitudes quant aux rôles sexuels

pour juger un partage inégal des tâches non-rémunérées comme inéquitable seulement

lorsqu’elles perçoivent qu’elles sont moins importantes aux yeux de leur partenaire

(Lachance-Grzela, 2012). En d’autres mots, lorsqu’une femme sent que son conjoint la

valorise et qu’elle est importante pour lui, elle sera plus portée à trouver qu’il est

équitable qu’elle soit responsable de la majorité des travaux ménagers même si elle

valorise grandement l’équité entre les sexes. Ainsi, on peut conclure que les

compensations d’ordre émotionnel, tel que le sentiment de compter aux yeux de son

partenaire, ne doivent pas être niées dans la relation entre le partage des tâches non-

rémunérées et les perceptions d’équité de la femme.

1.5. L’impression de compter pour ses enfants

D’autres résultats révèlent que les tâches non-rémunérées se multiplient lorsqu’une

famille se fonde (Bianchi et al., 2000; Coltrane, 2000; Craig, 2006a). En particulier, des

chercheurs ont conclu que les femmes consacrent plus de temps aux tâches ménagères

(Gupta, 2006; Sayer, 2005) et moins de temps au travail rémunéré lorsqu’elles occupent

aussi le rôle de parent (Neilson & Stanfors, 2014). Ainsi, on peut croire que les enfants

ont un impact important sur les dynamiques entre parents. En effet, des chercheurs

soutiennent qu’on doit s’intéresser davantage au rôle que jouent les enfants dans le

fonctionnement parental, particulièrement en ce qui concerne la perception du partage

des tâches entre conjoints (voir Bun Lam et al., 2012 pour une argumentation similaire).

Dans le même ordre d’idée, des résultats d’études suggèrent qu’il importe de considérer

l’influence des enfants sur l’identité parentale, notamment en ce qui a trait à

l’impression de compter pour ses enfants (Marshall & Lambert, 2006; Schieman &

Taylor, 2001). Dans leur étude, Schieman et Taylor (2001) ont trouvé que le fait d’être

9

parent évoque un plus grand sentiment d’importance en général. Des auteurs ont aussi

avancé qu’il serait difficile, sinon impossible, d’occuper un rôle, tel que le rôle parental,

sans en retirer une reconnaissance ou une récompense (Marshall & Lambert, 2006). On

pourrait donc postuler que les parents peuvent se sentir récompensés lorsqu’ils

accomplissent des tâches non-rémunérées liées à la famille. Certains auteurs

s’intéressent à la contribution directe des enfants au partage des tâches non-rémunérées

(e.g. Gershuny & Sullivan, 2014; Lee, Schneider, & Waite, 2003), mais on néglige les

compensations émotionnelles que les parents pourraient recevoir de la part de leurs

enfants en accomplissant ces tâches.

Dans leur étude qualitative, Marshall et Lambert (2006) ont conclu que

l’impression de compter pour les enfants découle des interactions avec ces derniers. Plus

précisément, ils ont trouvé que les parents ont l’impression de compter dans la vie de

leurs enfants lorsqu’ils comblent leurs besoins physiques et émotionnels. En effet, la

présence de cette impression de compter pour les enfants avait aussi été suggérée par

d’autres auteurs, sans toutefois être testée empiriquement. Pearlin et Turner (1987) ont

argumenté que l’interaction avec les enfants permet aux parents de se sentir importants à

leurs yeux. Ces données suggèrent que les évaluations qu’une femme fait du partage des

tâches liées à la famille pourraient être influencées par son impression de compter pour

ses enfants. En d’autres mots, il semble pertinent de croire qu’une femme peut être

moins satisfaite d’un partage inégal des tâches familiales lorsqu’elle reçoit peu de

récompenses émotionnelles des membres de sa famille en accomplissant ces tâches.

Inversement, lorsqu’elle reçoit une compensation en accomplissant les tâches familiales,

elle risque de percevoir le partage comme étant plutôt juste, peu importe sa contribution.

1.6. Buts et hypothèses de la présente étude

Tel qu’indiqué par Braun et ses collaborateurs (2008), à elle seule, la division des

tâches non-rémunérées n’est pas suffisante pour expliquer les perceptions d’équité des

femmes. Afin de mieux comprendre l’équité, il importe d’étudier la complexité du lien

entre les deux variables. En d’autres mots, on doit s’intéresser aux effets d’interaction

qui pourraient permettre de mieux expliquer les perceptions d’équité des femmes (Braun

10

et al., 2008). Cela dit, le but de la présente étude est de vérifier si l’impression de

compter pour ses enfants agit comme effet modérateur dans la relation entre la

contribution relative de la femme au partage des tâches non-rémunérées liées à la famille

et sa perception d’iniquité dans le couple concernant ces mêmes tâches. Plus

précisément, l’objectif est de vérifier si l’impression de compter pour ses enfants

modifie la force ou la direction de la relation entre le partage des tâches familiales et les

perceptions d’iniquité, et ce, chez les mères d’enfants âgés entre 2 et 12 ans. Le choix de

ce groupe d’âge découle du fait que les parents d’enfants âgés entre 2 et 12 ans se

distinguent considérablement de ceux qui vivent la transition parentale et de ceux dont

les enfants traversent l’adolescence.

Globalement, je m’attends à observer que l’impression de compter pour les enfants

modèrera la relation entre la contribution relative de la femme au partage des tâches

familiales et sa perception d’iniquité quant à ces tâches (Hypothèse 1). Autrement dit, je

m’attends à ce que l’impact de la contribution de la femme aux tâches familiales,

relative à celle de son partenaire, sur sa perception d’iniquité dans le couple diffèrera

selon son niveau d’impression de compter pour ses enfants. Le modèle proposé est

illustré à la Figure 1.

Figure 1. Modèle postulé dans lequel l’impression de compter pour ses enfants sert de

variable modératrice.

Premièrement, il est postulé que lorsque les mères auront une moins forte

impression de compter pour leurs enfants, une augmentation de leur contribution au

partage des tâches familiales, relative à celle de leur partenaire, sera liée à un

Impression de

compter pour ses

enfants (MO)

Perception d’iniquité

(Y)

Contribution relative

au partage des tâches

familiales (X)

11

accroissement de la perception d’injustice (Hypothèse 1a). En d’autres mots, dans le

contexte où les femmes retirent moins de récompenses émotionnelles de la part de leurs

enfants en accomplissant les tâches familiales, il est attendu que plus elles accomplissent

ces tâches, plus elles seront portées à dire qu’elles sont insatisfaites de cet arrangement.

Deuxièmement, il est également attendu que lorsque les femmes ont une forte

impression de compter pour leurs enfants, plus leur contribution au partage des tâches

familiales est grande, plus elles seront portées à dire qu’elles en sont insatisfaites.

Toutefois, l’association sera moins forte que chez les femmes ayant une faible

impression de compter (Hypothèse 1b). Autrement dit, il est postulé que la perception

d’iniquité des femmes qui ont une plus forte impression de compter pour leurs enfants

sera aussi influencée par leur contribution au partage des tâches familiales, mais que

cette association sera moins prononcée que chez les femmes ayant une faible impression

de compter.

CHAPITRE II

Méthode

Le présent chapitre traite de la méthode utilisée pour réaliser cette recherche. Les

participantes, la procédure ainsi que le matériel utilisé sont présentés dans les sections

suivantes.

2.1. Participantes

L’échantillon est composé de 232 mères ayant au moins un enfant âgé entre 2 et

12 ans et qui sont toujours en couple avec le père de leur(s) enfant(s). Les répondantes

provenaient soit de l’Ontario (58%), du Nouveau-Brunswick (34%), du Québec (5%) ou

d’une autre région (3%). Les participantes étaient mariées (77%) ou cohabitantes (23%).

L’étendue de la durée de la relation avec le partenaire variait d’une à 29 années, avec

11,5 années en moyenne (écart-type = 4,8). L’âge moyen des participantes était de 34

ans (écart-type = 5,2) avec une étendue de 21 à 50 ans. En moyenne, 1,6 enfants âgés de

2 à 12 ans habitaient avec les participantes (écart-type = 0,70) avec une étendue d’un à 5

enfants. En ce qui a trait à leur statut socioéconomique, l’étendue du nombre d’années

de scolarité, incluant l’éducation primaire, secondaire et postsecondaire variait de 7 à 24

années, avec 16 années en moyenne (écart-type = 2,6). De plus, 76% des femmes

occupaient un emploi rémunéré (12% de l’échantillon étaient en congé parental au

moment de leur participation) et 12% n’occupaient pas un emploi rémunéré lors de leur

participation à l’étude. Parmi celles qui occupaient un emploi rémunéré et qui n’étaient

pas en congé parental au moment de l’étude, le nombre d’heures de travail moyen était

de 36 heures par semaine (écart-type = 10,5), avec une étendue de 2 à 80 heures. Le

revenu annuel personnel médian de l’ensemble des femmes se situait entre 50 000$ et

59 000$, alors que celui de leur partenaire se situait entre 60 000$ et 69 000$.

2.2. Procédure

Après avoir reçu l’approbation déontologique du Comité d’éthique de la recherche

avec les êtres humains (CER) de l’Université de Moncton, les participantes ont été

recrutées par l’entreprise des médias sociaux (e.g. Facebook) et des centres de garde.

Certaines femmes ont été recrutées par bouche à oreille. Une invitation à participer à

13

l’étude a été affichée sur la page de plusieurs groupes de mères et de parents sur

Facebook. De même, un dépliant a été remis aux mères dans certains centres de garde.

Essentiellement, le message qui a été affiché sur Facebook et qui figurait sur le dépliant

expliquait les conditions de l’étude et les mères étaient invitées à suivre le lien les

menant au site web de Survey Monkey où elles pouvaient remplir le questionnaire en

français ou en anglais. De même, elles pouvaient décliner si elles ne satisfaisaient pas les

critères de sélection. Un formulaire de consentement expliquait clairement le but de la

recherche et que les données seraient traitées de manière confidentielle. Le formulaire

servait aussi à rappeler aux participantes qu’elles pouvaient se retirer de la recherche à

tout moment.

2.3. Matériel

2.3.1. Partage des tâches familiales

2.3.1.1. Contribution relative

La première mesure sert à évaluer la contribution relative de chacun des

partenaires aux tâches non-rémunérées liées à la famille. Elle est composée de six items,

chacun portant sur une tâche spécifique. Les tâches incluses dans la mesure sont celles

qui sont routinières et qui risquent d’être accomplies dans la présence des membres de la

famille, c’est-à-dire, la préparation des repas, les tâches liées au nettoyage, le lavage, les

courses, les soins des enfants et le transport des enfants. Pour chacun des items, les

répondantes doivent indiquer qui accomplit généralement la tâche, à l’aide d’une échelle

allant de 1 (presque toujours mon partenaire) à 7 (presque toujours moi) où 4 signifie

que les deux partenaires partagent la tâche également. Le score total est la moyenne des

scores aux items. Plus le score se rapproche de 7, plus la femme accomplit les tâches

non-rémunérées (voir Claffey & Mickelson, 2009 et Knudsen & Waerness, 2008 pour

des mesures similaires). Le coefficient de l’alpha de Cronbach de cette mesure est de

0,67.

14

2.3.1.2. Contribution absolue

De façon similaire, un deuxième questionnaire sert à vérifier le nombre d’heures

total que la femme et son partenaire ont passé à accomplir les tâches non-rémunérées au

courant de la dernière semaine. La contribution absolue de chacun des partenaires à ces

tâches est mesurée à l’aide des items suivants : « Au courant de la dernière semaine,

combien d’heure(s) avez-vous passée(s) à accomplir des tâches non-rémunérées? » et «

Au courant de la dernière semaine, combien d’heure(s) avez-vous passée(s) à accomplir

les soins aux enfants? ». Ces mêmes questions sont posées en ce qui a trait à la

contribution du partenaire (voir Knudsen & Warness, 2008 pour une mesure similaire).

La contribution absolue au partage des tâches servira au calcul des statistiques

descriptives.

2.3.2. Perception d’iniquité quant au partage des tâches familiales

La perception d’iniquité dans le couple en ce qui a trait au partage des tâches non-

rémunérées liées à la famille est mesurée à l’aide de trois items provenant de la mesure

de la perception d’équité dans le couple élaborée par Claffey et Mickelson (2009).

L’échelle originale à cinq items sert à mesurer l’ensemble des tâches non-rémunérées

(liées ou non à la famille). La mesure adaptée comprend les catégories de tâches

suivantes: la préparation des repas, les tâches liées au nettoyage et les soins des enfants.

La tâche des participantes consiste à indiquer leur perception d’iniquité quant à chaque

catégorie de tâches familiales. Les choix de réponses varient de 1 (très injuste pour mon

partenaire) à 5 (très injuste pour moi). Contrairement à l’échelle originale, l’échelle

utilisée permet aux répondantes d’indiquer que le partage est équitable pour les deux (3

= équitable pour les deux). Un score global est calculé en trouvant la moyenne des

scores aux différents items. Plus la moyenne est élevée, plus le partage des tâches

familiales est perçu comme étant injuste pour la répondante. Le coefficient de l’alpha de

Cronbach de la mesure est de 0,63.

2.3.3. Impression de compter pour ses enfants

L’échelle de l’impression de compter pour ses enfants a été conçue pour le bien de

la présente étude. Cette mesure a été créée à partir des résultats de l’étude qualitative de

15

Marshall et Lambert (2006) portant sur l’impression des parents de compter ou d’avoir

une importance pour leurs enfants. Ces chercheurs ont envoyé un questionnaire avec

questions ouvertes auprès de 47 parents canadiens et américains d’enfants âgés de 5 à 12

ans. Leur objectif primaire était d’explorer de quelle façon les parents perçoivent qu’ils

sont importants pour leurs enfants d’âge scolaire. Une analyse conceptuelle a permis aux

auteurs de faire ressortir des catégories conceptuelles ainsi que des thèmes qui

revenaient le plus souvent dans les entrevues auprès des parents. Leurs analyses

qualitatives les ont menés à suggérer que le concept de compter pour les

enfants engloberait deux catégories conceptuelles principales : l’engagement et

l’exclusivité. D’abord, la perception d’avoir une importance pour les enfants découle de

l’engagement à combler les besoins des enfants et de participer dans des activités

communes. Alors, la catégorie d’engagement se divise dans deux sous-catégories: le

sentiment d’être nécessaire comme parent et le partage de temps et d’espace avec son

enfant. Ensuite, l’impression de compter pour les enfants découle aussi de l’exclusivité

du parent dans la vie de l’enfant. Le fait de recevoir de l’attention de la part de son

enfant et d’avoir une influence sur son enfant mène à un sentiment d’importance chez

les parents. Cette grande catégorie se divise donc en deux sous-catégories : l’attention

accordée au parent et le fait de marquer profondément son enfant (Marshall & Lambert,

2006).

À partir de ces thèmes proposés par Marshall et Lambert (2006), les items qui ont

servi à créer l’échelle de l’impression de compter pour ses enfants utilisée dans la

présente étude ont été élaborés. La liste initiale comprenait 16 items. Par la suite, trois

mères d’enfants âgés de 2 à 12 ans ont été invitées à lire, évaluer et commenter la clarté

et la pertinence des items pour mesurer le concept visé. Cette démarche a mené à l’ajout

de cinq items permettant de tenir compte d’éléments supplémentaires qui pourraient

influencer l’impression de compter pour ses enfants. Ainsi la liste complète d’items

utilisés dans le but de créer notre mesure quantitative de l’impression de compter pour

les enfants comportait 21 items au total. Ces items sont présentés à l’Annexe A.

16

Afin de tenir compte du sentiment d’être nécessaire comme parent, on retrouve des

items comme « À quelle fréquence vos enfants s’ennuient-ils de vous lorsque vous

n’êtes pas avec eux pour une longue période de temps (e.g. pour la nuit ou quelques

jours)? » et « À quelle fréquence vos enfants font-ils appel à vous pour du réconfort

lorsqu’ils sont tristes? ». Pour ce qui est de la question du partage de temps et d’espace

avec son enfant, on retrouve des items tels que « À quelle fréquence vos enfants vous

demandent-ils de participer à un rituel spécial avec eux (e.g. lire un livre avant d’aller au

lit, soirée de films)? » et « À quelle fréquence vos enfants font-ils des activités avec

vous? ». D’autres items, tel que le suivant, permettent d’évaluer l’attention accordée au

parent : « À quelle fréquence vos enfants démontrent-ils de l’affection verbale ou non

verbale à votre égard? (e.g. une note, un baiser, un câlin, dire « Je t’aime ») ».

Finalement, l’impression des mères de marquer leurs enfants est évaluée à l’aide d’items

tels que « À quelle fréquence avez-vous l’impression d’influencer positivement le

développement de vos enfants? » et « À quelle fréquence vos enfants sont-ils honnêtes

avec vous? ». La tâche des répondantes consiste à répondre à chaque item sur une

échelle allant de 1 (presque jamais) à 4 (presque toujours). Deux items évaluent aussi

l’impression de compter pour ses enfants en général : « À quelle fréquence ressentez-

vous que vos enfants ont besoin de vous? » et « À quelle fréquence éprouvez-vous le

sentiment de compter pour vos enfants? ». Si la mère avait plus d’un enfant, elle devait

répondre pour l’ensemble de ses enfants âgés entre 2 et 12 ans.

2.3.4. Covariables

2.3.4.1. Données sociodémographiques

Un questionnaire sociodémographique permet de recueillir une série de données,

telles que l’âge de la répondante, son nombre d’années de scolarité et celui de son

partenaire, son nombre d’heures de travail hebdomadaire et celui de son partenaire ainsi

que son revenu annuel personnel et celui de son partenaire. La différence entre les

partenaires en ce qui a trait au nombre d’heures de travail rémunéré est calculée en

soustrayant le nombre d’heures de travail hebdomadaire de la femme de celui de son

partenaire. Ainsi, un score positif indique que la femme a plus de temps disponible que

son partenaire pour accomplir les tâches familiales, alors qu’un score négatif indique

17

qu’elle en a moins que lui. Ces données ont servi de covariables dans l’analyse

principale. De même, ce questionnaire permet de recueillir d’autres données

démographiques qui servent à décrire l’échantillon (e.g. le statut conjugal de la

répondante, la région d’où elle provient et le nombre d’enfants âgés entre 2 et 12 ans qui

habitent avec la participante).

2.3.4.2. Impression de compter pour le partenaire

L’impression de compter pour le partenaire est mesurée à l’aide d’une échelle de

14 items élaborée par Kawamura et Brown (2010). Des items, tels que « À quelle

fréquence votre partenaire critique-t-il vos idées? » et « À quelle fréquence votre

partenaire vous fait sentir qu’il est là pour vous lorsque vous avez vraiment besoin de

lui? » sont à répondre sur une échelle à quatre points allant de 1 (presque jamais) à 4

(presque toujours). Le score total, allant de 1 à 4, est calculé en faisant la moyenne des

scores aux items après que les items qui doivent l’être sont inversés. Un score élevé

représente une forte impression de compter pour le partenaire. Le coefficient de l’alpha

de Cronbach s’élève à 0,89.

CHAPITRE III

Résultats

Cette section traite des résultats des analyses statistiques qui ont permis de

vérifier le modèle à l’étude. D’abord, les analyses préliminaires comprenant une analyse

en composantes principales ainsi que les statistiques descriptives sont présentées. Les

analyses principales, notamment la régression multiple hiérarchique et ses postulats de

base sont ensuite examinées.

3.1. Analyses préliminaires

3.1.1. Analyse en composantes principales

D’abord, une analyse en composantes principales (ACP) a été effectuée sur les 21

items de la mesure de l’impression de compter pour les enfants dans le but de vérifier la

structure de l’instrument (la liste initiale des items est présentée à l’Annexe A). L’ACP

cherche à expliquer la variance observée dans l’ensemble des données initiales en se

limitant à un nombre réduit de composantes. En d’autres mots, l’ACP vise à extraire des

regroupements de variables qui permettent de mieux représenter l’ensemble des données

originales (Fabrigar, Wegener, MacCallum, & Strahan, 1999). Une ACP a été appliquée

plutôt qu’une analyse factorielle puisque cette dernière nécessite une bonne base

théorique au préalable. Alors que ces variables n’ont jamais été traitées de façon

empirique et qu’une base théorique solide n’a pas encore été établie, l’ACP qui inclut les

variances uniques ainsi que la variance des erreurs a été privilégiée (voir Brown, 2009

pour une argumentation similaire).

L’étude de la matrice de corrélations entre les items a mené à l’élimination de

quatre items (2, 13, 14 et 18) puisqu’une grande partie (80 % ou plus) des coefficients de

corrélation pour ces variables n’étaient pas suffisamment élevés (< 0,25; Field, 2009).

Une ACP avec une rotation oblique (Oblimin) a d’abord été effectuée sur les 17

variables restantes de la mesure de l’impression de compter pour les enfants. Les

résultats du premier essai de l’ACP indiquent que 53,95 % de la variance est expliquée

par quatre composantes ayant des valeurs propres qui dépassent le critère de Kaiser (1).

19

Toutefois, l’analyse du graphique de valeurs propres et son point d’inflexion suggère

qu’une solution à deux composantes serait aussi possible (Figure 2). D’ailleurs, le critère

de Kaiser ne semble pas être adéquat puisqu’aucune des valeurs de communauté après

l’extraction n’est plus élevée que 0,7 (Field, 2009).

Figure 2. Graphique des valeurs propres du premier essai de l’ACP (avec critère de

Kaiser)

Conséquemment, les solutions ayant de deux à quatre composantes ont été

examinées et la solution à deux composantes avec la rotation oblique (Oblimin) a été

jugée comme la méthode la plus appropriée statistiquement et conceptuellement pour la

mesure. Sur la base de ces tests, les items 5 et 19 ont été éliminés puisque leur poids de

saturation ne rencontre pas le seuil de 0,4 (Field, 2009). L’ACP finale, comprenant les

données des 217 femmes ayant répondu à l’ensemble des 15 items de la mesure,

explique 42,31 % de la variance totale. L’indice global de Kaiser-Meyer-Olkin (KMO)

est de 0,86 et les indices de KMO aux items individuels sont tous plus élevés que la

limite de 0,5 ce qui suggère que la taille de l’échantillon est adéquate pour effectuer une

0

1

2

3

4

5

6

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17

20

ACP (Field, 2009). De même, le dernier test de sphéricité de Bartlett est significatif, x2

(105) = 836,92, p < ,001, ce qui indique que les corrélations entre les items sont

suffisamment fortes pour effectuer une ACP. Une corrélation significative a été obtenue

entre les deux composantes, ce qui justifie une rotation oblique (r = 0,41).

Le poids de saturation des deux composantes sur chaque item est illustré dans la

matrice des types (Tableau 1). Les valeurs plus élevées que 0,4 sont en caractère gras.

La matrice de structure (Tableau 2) vient confirmer la conceptualisation à deux

composantes. Les deux composantes saturent l’item 4 dans la matrice de structure, mais

le poids associé est plus élevé pour la deuxième composante.

21

Tableau 1. Matrice des types

Poids associé aux composantes après la rotation

Impression de compter

pour les enfants

Ouverture de l’enfant

vers la mère

16. À quelle fréquence vos enfants démontrent-ils de l’affection verbale ou non verbale à votre égard?

,760

-,028

17. À quelle fréquence avez-vous l’impression d’influencer positivement le développement de vos enfants?

,701 -,062

9. À quelle fréquence vos enfants font-ils des activités avec vous?

,677 ,099

21. À quelle fréquence ressentez-vous que vos enfants ont besoin de vous?

,677 -,086

6. À quelle fréquence vos enfants font-ils appel à vous pour du réconfort lorsqu’ils sont tristes?

,625 -,022

15. À quelle fréquence vos enfants vous demandent-ils de participer à un rituel spécial avec eux?

,572 -,109

1. À quelle fréquence éprouvez-vous le sentiment de compter pour vos enfants?

,566 ,102

8. À quelle fréquence vos enfants s’ennuient-ils de vous lorsque vous n’êtes pas avec eux pour une longue période de temps?

,534 ,118

7. À quelle fréquence vos enfants sont-ils honnêtes avec vous?

,529 ,106

20. À quelle fréquence vos enfants cherchent-ils de l’encouragement de votre part lorsqu’ils accomplissent une tâche?

,441 ,107

3. À quelle fréquence vos enfants acceptent-ils des compromis pour vous?

-,132 ,833

10. À quelle fréquence vos enfants s’inquiètent-ils à votre sujet quand vous êtes malade, stressée ou préoccupée?

,055 ,730

12. À quelle fréquence vos enfants partagent-ils des informations personnelles avec vous?

-,011 ,680

11. À quelle fréquence vos enfants demandent-ils de passer du temps seuls avec vous?

,062 ,560

4. À quelle fréquence vos enfants reconnaissent-ils l’aide ou les conseils que vous leur offrez?

,242 ,505

Valeurs propres

4,768

1,578

% de variance

31,783

10,522

α

,806

,716

Note. Les poids de saturation plus élevés que 0,4 sont en caractère gras.

22

Tableau 2. Matrice de structure

Poids associé aux composantes après la rotation

Impression de compter

pour les enfants

Ouverture de l’enfant

vers la mère

16. À quelle fréquence vos enfants démontrent-ils de l’affection verbale ou non verbale à votre égard?

,749

,281

9. À quelle fréquence vos enfants font-ils des activités avec vous?

,718 ,374

17. À quelle fréquence avez-vous l’impression d’influencer positivement le développement de vos enfants?

,676 ,223

21. À quelle fréquence ressentez-vous que vos enfants ont besoin de vous?

,641 ,189

6. À quelle fréquence vos enfants font-ils appel à vous pour du réconfort lorsqu’ils sont tristes?

,616 ,232

1. À quelle fréquence éprouvez-vous le sentiment de compter pour vos enfants?

,607 ,332

8. À quelle fréquence vos enfants s’ennuient-ils de vous lorsque vous n’êtes pas avec eux pour une longue

période de temps?

,583 ,336

7. À quelle fréquence vos enfants sont-ils honnêtes avec vous?

,572 ,322

15. À quelle fréquence vos enfants vous demandent-ils de participer à un rituel spécial avec eux?

,527 ,123

20. À quelle fréquence vos enfants cherchent-ils de l’encouragement de votre part lorsqu’ils accomplissent

une tâche?

,485 ,287

3. À quelle fréquence vos enfants acceptent-ils des compromis pour vous?

,207 ,779

10. À quelle fréquence vos enfants s’inquiètent-ils à votre sujet quand vous êtes malade, stressée ou

préoccupée?

,352 ,752

12. À quelle fréquence vos enfants partagent-ils des informations personnelles avec vous?

,266 ,676

4. À quelle fréquence vos enfants reconnaissent-ils l’aide ou les conseils que vous leur offrez?

,448 ,604

11. À quelle fréquence vos enfants demandent-ils de passer du temps seuls avec vous?

,290 ,586

Note. Les poids de saturation plus élevés que 0,4 sont en caractère gras.

23

Contrairement à ce qu’avaient proposé Marshall et Lambert (2006) à la suite de

leur étude qualitative, les composantes qui sont ressorties se classent sous deux sous-

échelles. La première composante englobe des thèmes liés à la réciprocité entre la mère

et ses enfants. Plus précisément, les items qui s’y rapportent sont liés soit à

l’engagement de l’enfant vers le parent (e.g. l’honnêteté avec le parent), soit à

l’influence du parent sur l’enfant (e.g. l’influence du parent sur le développement de

l’enfant) ou à l’engagement bidirectionnel (e.g. les activités ou les rituels conjoints). La

première composante sature aussi les deux items généraux de l’impression de compter

pour les enfants. Conséquemment, il semble pertinent de croire que cette sous-échelle

englobe le concept de l’impression de compter pour les enfants en général. La deuxième

composante se centre plutôt sur l’ouverture de l’enfant à l’égard de la mère (e.g. le

partage de l’information personnelle). En somme, l’ACP suggère qu’ensemble, les deux

composantes forment une mesure évaluant la qualité du lien émotionnel entre la mère et

ses enfants, tout en ayant une sous-échelle mesurant plus précisément l’impression de

compter pour les enfants et une sous-échelle évaluant l’ouverture de l’enfant à l’égard de

la mère.

Une analyse de la fiabilité (mesurée à l’aide de l’alpha de Cronbach) révèle que la

cohérence interne de la mesure complète est forte (α = 0,826). De plus, l’analyse

suggère que la fiabilité des sous-échelles est également bonne. La cohérence interne de

la sous-échelle de l’impression de la mère de compter pour ses enfants est bonne et de la

sous-échelle de l’ouverture de l’enfant à l’égard de sa mère est satisfaisante.

Compte tenu de ces résultats, la sous-échelle de l’impression de compter pour les

enfants comportant 10 items est jugée adéquate pour répondre aux objectifs de la

présente étude et sera donc utilisée dans les analyses statistiques (voir la liste d’items à

l’Annexe B). Un score total, allant de 1 à 4, est donc calculé à partir des données brutes,

en faisant la moyenne des scores aux items. Plus le score est élevé, plus la mère a

l’impression de compter pour ses enfants.

24

3.1.2. Analyse des statistiques descriptives

L’analyse des statistiques descriptives de l’échantillon révèle que les femmes

rapportent en général un partage inégal des tâches familiales dans lequel elles sont

responsables de la majorité des tâches familiales (moyenne = 5,15; écart-type = 0,89), un

haut niveau d’impression de compter pour leurs enfants (moyenne = 3,64; écart-type =

0,35) et une légère perception d’injustice pour elles-mêmes quant au partage des tâches

familiales (moyenne = 3,33; écart-type = 0,5). Plus précisément, on observe que les

femmes de cet échantillon jugent le partage des tâches familiales comme étant soit

injuste pour leur partenaire (6%), juste pour les deux partenaires (43%) ou, encore,

injuste pour elles (51%). En ce qui concerne leur contribution absolue à l’ensemble des

tâches non-rémunérées (incluant les tâches intermittentes et les tâches routinières), les

femmes rapportent avoir passé 68 heures en moyenne lors de la dernière semaine à en

accomplir. Plus précisément, elles rapportent avoir passé 14 heures (écart-type = 14,01)

aux tâches ménagères et 54 heures (écart-type = 45,84) aux soins des enfants. Les

femmes rapportent que leurs partenaires ont consacré près de la moitié moins de temps

qu’elles à de telles tâches au cours de la dernière semaine, soit une moyenne de 35

heures (écart-type = 33,66). Elles rapportent qu’ils ont passé 9 heures (écart-type = 9,90)

à accomplir des tâches ménagères et 26 heures (écart-type = 30,27) aux soins des enfants.

Le tableau 3 présente les moyennes et les écarts-types pour les variables à l’étude.

Des corrélations de Pearson ont été calculées pour les couples de variables continues.

Ces corrélations sont décrites dans le tableau 4. Tel que postulé, la contribution relative

de la femme au partage des tâches familiales est corrélée de façon positive (r = 0,544; p

< 0,001) avec la perception d’iniquité de la femme. En d’autres mots, plus la femme

accomplit de tâches non-rémunérées liées à la famille relativement à son partenaire, plus

elle perçoit le partage comme étant injuste.

25

Tableau 3. Statistiques descriptives des covariables et des variables à l’étude

n

Moyenne

Écart-type

Étendue

Minimum Maximum

Covariables

Âge

232 33,46 5,21 21 50

Années de scolarité de

la femme

232 16,18 2,60 7 24

Années de scolarité du

partenaire

232 15,01 2,86 7 26

Différence d’heures de

travail rémunéré1

227 16,61 23,01 -45 95

Impression de compter

pour le partenaire

225 3,34 ,55 1,42 4

Variable indépendante

Contribution relative au

partage des tâches

familiales

232 5,15 ,89 2,83 7

Variable modératrice

Impression de compter

pour les enfants

231 3,64 ,35 2,4 4

Variable dépendante

Perception d’iniquité

quant aux tâches

familiales

232 3,33 ,50 2 5

1La différence du nombre d’heures de travail rémunéré des partenaires a été calculée en soustrayant le

nombre d’heures de travail hebdomadaire de la femme de celui de son partenaire. Ainsi, un score positif

indique que la femme a plus de temps disponible que son partenaire pour accomplir les tâches familiales,

alors qu’un score négatif indique qu’elle en a moins que lui.

26

Tableau 4. Corrélations entre les variables continues (n = 232)

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

1. Âge

-

2. Années de scolarité

,07 -

3. Années de scolarité du partenaire

,18** ,53*** -

4. Différence d’heures de travail

rémunéré

5. Revenu annuel

6. Revenu annuel du partenaire

-,20**

,28***

,06

-,13

,43***

,10

-,08

,26***

,17**

-

-,34***

,25***

-

,08

-

7. Impression de compter pour le

partenaire

-,08 ,03 ,05 -,09 ,04 -,02 -

8. Impression de compter pour les

enfants

-,24*** ,04 ,05 ,03 -,01 ,15* ,24*** -

9. Contribution relative au partage des

tâches familiales

-,04 -,19** -,10 ,32*** -,13* ,10 -,18** ,11 -

10. Perception d’iniquité

,06 -,14* -,13* ,16* -,01 ,06 -,31*** -,03 ,54*** -

*p < 0,05. **p < 0,01. ***p < 0,001.

27

3.2. Analyses principales

3.2.1. Postulats de base de la régression multiple

Les différents postulats de base de la régression multiple hiérarchique suggérés par

Field (2009) ont été vérifiés. D’abord, les postulats concernant la taille de l’échantillon

et de la variance des variables d’intérêt ont été vérifiés et sont respectés. L’étude des

statistiques de dissymétrie et de kurtose révèle des problèmes de dissymétrie pour les

variables de la perception d’iniquité et l’impression de compter pour les enfants. Puisque

cette distribution dissymétrique était attendue (plus d’observations aux niveaux élevés

de l’impression de compter et plus d’observations près d’équitable pour les deux et très

peu inéquitable pour moi), aucune transformation des variables n’a eu lieu. De même,

l’examen de l’histogramme des résidus standardisés du modèle complet révèle une

courbe normale ce qui indique que les erreurs sont distribuées de façon normale. L’étude

du diagramme de dispersion confirme également que ce postulat est respecté. D’ailleurs,

l’analyse de la statistique de Durbin-Watson (2,009) indique que les erreurs sont

indépendantes (±2; Field, 2009). Ensuite, les postulats d’homoscédasticité et de linéarité

ont été évalués. L’examen des diagrammes de dispersion des régressions partielles

révèle que le postulat d’homoscédasticité n’est pas atteint pour la variable de

l’impression de compter pour les enfants. Ainsi, la variance des résidus à chaque niveau

de l’impression de compter pour les enfants augmente. Autrement dit, il a présence

d’hétéroscédasticité. L’examen des diagrammes de dispersion révèle aussi que la

relation entre la variable dépendante et les variables indépendantes est linéaire.

En ce qui a trait aux données extrêmes, l’examen des diagnostics des observations

révèle qu’aucune valeur n’est plus élevée que le seuil de 3,29 ce qui suggère que le

modèle représente bien l’échantillon en considérant toutes les observations. Bien qu’il

ne semble pas avoir présence de données extrêmes, d’autres postulats de base plus

spécifiques ont été vérifiés. D’abord, les valeurs de Cook ne dépassent pas le seuil de 1,

ce qui suggère qu’en général, aucune des observations individuelles n’a trop d’influence

sur le modèle. De même, l’influence de la variable dépendante sur les variables

prédictives, mesurée par la valeur de levier, doit être moins élevée que deux fois sa

moyenne (Field, 2009). Aucune des valeurs de levier ne dépasse ce critère. Selon Field

28

(2009), une distance de Mahalanobis, mesurant l’écart entre les observations et la

moyenne des valeurs prédictives, plus élevée que 25 pour un échantillon de 500 ou 15

pour 100 sujets pourrait être problématique. Conséquemment, six observations ont dû

être éliminées afin d’éviter d’utiliser des données déviantes multivariées dans la

régression multiple. Dans le même ordre d’idées, les valeurs DFBeta standardisées sont

toutes inférieures à 1 ce qui indique qu’aucune des observations individuelles n’exerce

une influence excessive sur les paramètres du modèle de régression (Field, 2009).

L’analyse des statistiques de colinéarité (la tolérance et le facteur d’inflation de la

variance) révèle que la multicolinéarité ne pose pas un problème pour cet échantillon.

Par contre, l’analyse des diagnostics de colinéarité révèle qu’une corrélation positive

existe entre le nombre d’années de scolarité de la femme et celui de son partenaire, ce

qui était attendu. Conséquemment, aucune des variables n’a été éliminée. Bref, l’analyse

des postulats de base suggère que la régression multiple hiérarchique peut être effectuée,

tout en interprétant les résultats avec prudence.

3.2.2. Régression multiple hiérarchique

Une régression multiple hiérarchique a alors été effectuée dans le but de vérifier si

l’impression de compter pour les enfants modère la relation entre la contribution relative

au partage des tâches familiales et la perception d’iniquité de la femme, tout en

contrôlant pour son âge, le nombre d’années de scolarité de la répondante et de son

partenaire, le revenu annuel personnel de la répondante et de son partenaire, la

différence d’heures de travail rémunéré et son impression de compter pour le partenaire.

Afin d’appuyer l’hypothèse que l’impression de compter pour les enfants (Z) agit

comme effet modérateur dans la relation entre la contribution relative de la femme au

partage des tâches liées à la famille (X) et sa perception d’iniquité dans le couple, l’effet

d’interaction XZ doit être significatif lorsqu’on contrôle pour X et Z séparément (Baron

& Kenny, 1986).

D’abord, les covariables, la variable indépendante ainsi que la variable

modératrice ont été entrées dans le premier bloc de la régression. Ensuite, l’effet

29

d’interaction entre le modérateur et la variable indépendante a été ajouté au deuxième

bloc. Suivant une recommandation de Holmbeck (2002) et de Aiken et West (1991), la

variable indépendante et la variable modératrice ont été centrées avant d’être multipliées

et entrées dans la régression dans le but de faciliter l’interprétation. Si l’effet

d’interaction est significatif lorsqu’on contrôle pour la variable indépendante et le

modérateur, la méthode de Holmbeck (2002) sera appliquée dans le but de comprendre

l’interaction.

Les résultats de la régression multiple hiérarchique sont présentés dans le tableau 5.

Le modèle complet explique 38,2% de la variance au niveau de la perception d’iniquité,

F(10, 196) = 12,02, p < ,001. L’effet d’interaction entre l’impression de compter pour

les enfants et la contribution relative aux tâches familiales est significatif, β = -,16, p

< ,01, Δr2 = ,02.

30

Tableau 5. Régression multiple hiérarchique prédisant la perception d’iniquité de la femme

Variables indépendantes

B

Erreur standard

β

Δr2

r2

Bloc 1

,36***

Âge

,005 ,006 ,056

Années de scolarité

,009 ,015 ,045

Années de scolarité du partenaire

-,023 ,013 -,125

Revenu annuel

,013 ,013 ,074

Revenu annuel du partenaire

,007 ,012 ,035

Différence d’heures de travail rémunéré

,000 ,001 ,000

Impression de compter pour le partenaire

-,192 ,056 -,208**

Contribution relative au partage des tâches familiales

,267 ,034 ,488***

Impression de compter pour les enfants

-,128 ,091 -,087

Bloc 2

,02** ,38**

Âge

,004 ,006 ,039

Années de scolarité

,013 ,015 ,069

Années de scolarité du partenaire

-,025 ,013 -,135a

Revenu annuel

,011 ,012 ,060

Revenu annuel du partenaire

,006 ,012 ,031

Différence d’heures de travail rémunéré

,000 ,001 -,020

Impression de compter pour le partenaire

-,185 ,055 -,200**

Contribution relative au partage des tâches familiales

,293 ,035 ,535***

Impression de compter pour les enfants

-,168 ,091 -,114

Contribution relative au partage des tâches familiales X Impression de compter pour les enfants

-,331 ,126 -,157**

* p < 0,05. ** p < 0,01. ***p < 0,001. ap = 0,05

31

Afin d’interpréter l’effet d’interaction significatif, des analyses post hoc sont

effectuées (Holmbeck, 2002). Tel que postulé, l’impression de compter pour les enfants

sert d’effet modérateur dans la relation entre la contribution de la femme au partage des

tâches familiales et sa perception d’iniquité dans le couple. Deux régressions ont été

effectuées : une qui génère une pente quand le modérateur est à 1 écart-type au-dessus

de la moyenne (forte impression de compter pour les enfants) et une qui génère une

pente quand le modérateur est à 1 écart-type en dessous de la moyenne (faible

impression de compter pour les enfants). Les mêmes covariables utilisées dans les

analyses précédentes sont entrées dans les analyses. Les analyses post hoc (Figure 3)

concernant la relation entre la contribution relative au partage des tâches familiales et la

perception d’iniquité de la femme sont significatives lorsque l’impression de compter

pour les enfants est élevée, β = 0,33; p < 0,001 (B = 0,18; E.S. = 0,05). La relation entre

la contribution relative aux tâches familiales et la perception d’iniquité est aussi

significative lorsque l’impression de compter pour les enfants est moins élevée, β =

0,74; p < 0,001 (B = 0,40; E.S. = 0,06).

Les résultats d’une comparaison entre les coefficients de régression (voir

Paternoster, Brame, Mazerolle, & Piquero, 1998 et Clogg, Petkova, & Haritou, 1995)

révèlent que la pente calculée pour une forte impression de compter pour les enfants est

significativement différente de celle qui a été calculée pour une moins forte impression

de compter pour les enfants, Z = - 2,98; p < 0,01. Alors, lorsque la femme a une forte ou

une faible impression de compter pour ses enfants, plus sa contribution au partage des

tâches familiales augmente, plus son sentiment d’injustice s’accroit. Toutefois, l’effet est

plus prononcé lorsque la femme a une faible impression de compter pour ses enfants.

Autrement dit, pour les femmes ayant peu l’impression de compter pour leurs enfants, le

sentiment d’injustice quant au partage des tâches monte plus rapidement avec leur

contribution que les femmes ayant une plus forte impression de compter pour leurs

enfants.

32

Figure 3. Le rôle modérateur de l’impression de compter pour les enfants dans la relation

entre la contribution relative de la femme au partage des tâches familiales et sa

perception d’iniquité dans le couple

3.5

4

4.5

-1 é.t. + 1 é.t

Per

cep

tio

n d

'iniq

uit

é

Contribution relative aux tâches familiales

Faible

impression de

compter

Forte impression

de compter

CHAPITRE IV

Discussion

Cette étude visait à faire la lumière sur les perceptions d’équité des femmes quant

au partage des tâches familiales dans le couple. Plus précisément, je cherchais à vérifier

si, chez les mères d’enfants âgés de 2 à 12 ans, l’impression de compter pour les enfants

influence la relation entre leur contribution au partage des tâches familiales, relative à

celle de leur partenaire, et leur perception d’iniquité quant à ces mêmes tâches.

L’impression de compter pour les enfants a été conceptualisée comme étant le sentiment

d’être importante pour ses enfants et a été mesurée à l’aide d’une échelle créée à cet

effet.

Dans l’ensemble, cette étude réitère certaines observations antérieures

documentées dans la littérature en psychologie sociale et conjugale. D’abord, nos

résultats soutiennent les données retrouvées dans la littérature suggérant que les femmes

accomplissent la grande majorité des tâches familiales. Plus précisément, les femmes de

notre échantillon rapportent passer près de deux fois plus de temps que leur partenaire à

accomplir l’ensemble des tâches ménagères qui répondent directement aux besoins des

membres de la famille, ce qui appuient les résultats retrouvés dans la littérature (voir

Fuwa & Cohen, 2007 pour des résultats similaires). Cette tendance se tient même quand

on considère également les soins aux enfants. De même, les résultats obtenus vont de

pair avec ceux des études récentes suggérant que les femmes ne jugent pas

nécessairement un partage inégal comme étant très injuste (voir Braun et al., 2008 et

Kawamura & Brown, 2010), mais que le sentiment d’injustice augmente avec

l’accroissement de leur contribution au partage des tâches (voir Claffey & Mickelson,

2009). En effet, les mères de notre échantillon jugent, en moyenne, un partage dans

lequel elles accomplissent la majorité des tâches liées à la famille comme étant que

légèrement injuste pour elle-même. De plus, près de la moitié des femmes jugent le

partage comme étant juste pour elles ou pour les deux partenaires et l’autre moitié des

femmes le jugent comme étant injuste pour elles. Toutefois, la perception d’injustice des

femmes de cette étude augmente aussi plus elles contribuent à l’accomplissement des

tâches familiales dans le couple.

34

Ces résultats préliminaires appuient l’idée défendue par Braun et ses collègues

(2008) à l’effet que la contribution au partage des tâches non-rémunérées n’est pas

suffisante pour expliquer les perceptions d’équité dans le couple. Ils soutiennent

également la proposition initiale qu’il est important de se pencher sur les variables

modératrices, particulièrement celles d’ordre émotionnel, qui interagissent avec le

partage des tâches pour prédire les perceptions d’équité. À ce niveau, les analyses

principales de la présente étude ont permis d’identifier un des facteurs d’ordre

émotionnel qui distinguent les femmes pour lesquelles une haute contribution au partage

des tâches familiales est liée à un accroissement élevé du sentiment d’injustice de celles

pour lesquelles une haute contribution est liée à un accroissement moins élevé de la

perception d’iniquité.

La présente étude complémente les résultats antérieurs visant à appuyer la validité

de la théorie de la justice distributive pour mieux comprendre l’équité dans le couple.

Cette théorie soutient que les perceptions d’équité des femmes sont influencées par les

agents de comparaison, les rationalisations attribuées au travail ainsi que les

compensations reçues pour les tâches accomplies (Thompson, 1991). Alors que les

études antérieures ont surtout documenté l’impact des rationalisations ainsi que des

agents de comparaison pour comprendre les raisons pour lesquelles les femmes jugent

généralement un partage inégal des tâches non-rémunérées comme étant juste, les

résultats de la présente étude et ceux de d’autres études récentes documentent le rôle des

compensations reçues (voir aussi Kawamura & Brown, 2010 et Lachance-Grzela, 2012).

Effectivement, cette étude révèle que les compensations, notamment celles d’ordre

émotionnel, influencent la perception d’iniquité des femmes au sein du couple. Ces

résultats viennent donc appuyer la composante récompenses de la théorie de la justice

distributive.

Plus précisément, les résultats obtenus soutiennent l’hypothèse du rôle modérateur

de l’impression de compter pour les enfants dans le lien entre la contribution relative de

la femme au partage des tâches familiales et sa perception d’iniquité quant au partage de

35

cet ensemble de tâches (Hypothèse 1). Plus précisément, l’impression de compter pour

les enfants vient modifier la force de la relation entre la contribution relative de la

femme au partage des tâches familiales et leur perception d’iniquité quant à ces mêmes

tâches. Ces résultats appuient l’idée générale que les compensations d’ordre émotionnel

que reçoivent les mères de la part de leurs enfants ont une influence sur leur perception

d’iniquité concernant le partage des tâches non-rémunérées liées à la famille effectué

avec le conjoint. Lorsque les femmes ont peu l’impression de compter pour leurs enfants,

plus leur contribution aux tâches familiales est grande par rapport à celle de leur conjoint,

plus elles sont portées à juger que le partage est inéquitable (Hypothèse 1a). Ces

résultats suggèrent qu’en l’absence d’une compensation émotionnelle, telle que le fait de

se sentir importante pour ses enfants, plus son investissement dans le partage des tâches

familiales est grand, plus la femme sera portée à juger que c’est injuste pour elle.

Il avait aussi été postulé que lorsque les femmes ont une forte impression de

compter pour leurs enfants, plus leur contribution relative au partage des tâches

familiales s’accroit, plus leur perception d’iniquité quant à ces même tâches s’accroit.

Toutefois, il avait été postulé que l’association serait moins prononcée que chez les

femmes ayant une faible impression de compter pour les enfants (Hypothèse 1b). À cet

effet, les résultats de la présente étude appuient cette hypothèse. Plus précisément,

lorsque les femmes rapportent une forte impression de compter pour leurs enfants, plus

leur contribution relative aux tâches familiales s’accroit, plus elles sont, elles aussi,

insatisfaites de cet arrangement. Par contre, dans ce contexte, l’insatisfaction s’accroit

moins drastiquement que chez les femmes ayant une faible impression de compter pour

leurs enfants. En d’autres mots, une plus grande contribution au partage des tâches

familiales est liée à une augmentation de la perception d’injustice chez les mères en

général, mais l’augmentation est plus considérable lorsqu’elles ont une plus faible

impression de compter pour leurs enfants, c’est-à-dire lorsqu’elles se sentent peu

récompensées émotionnellement.

Il importe de souligner que ces résultats sont obtenus au-delà de l’impact de

certains facteurs déjà connus comme ayant un impact sur le partage des tâches et les

36

perceptions d’équité. L’effet modérateur de l’impression de compter pour ses enfants a

été trouvé tout en maintenant constantes les ressources des femmes et de leur partenaire,

la disponibilité des femmes relativement à leur partenaire et l’impression de compter

pour son partenaire, soit une variable émotionnelle qui avait déjà été étudiée dans ce

contexte (voir Kawamura & Brown, 2010 et Lachance-Grzela, 2012). Ces résultats

suggèrent que nous ayons affaire à un effet modérateur robuste.

Il est documenté qu’en réponse aux pressions de temps, les femmes ont souvent

tendance à jongler les tâches ménagères ainsi que les soins aux enfants simultanément

(Craig, 2006b), tendance appelée « multitasking » en anglais (Spink, Cole, & Waller,

2008). Par exemple, pour maximiser son temps, une mère pourrait préparer un repas tout

en aidant son enfant avec ses devoirs. Ce multitasking est d’ailleurs décrit par les

femmes comme étant une expérience positive lorsqu’il est accompli en présence des

enfants (Offer & Schneider, 2011). Dans cette optique, il semble plausible que

l’accomplissement des tâches familiales puisse créer des opportunités de contact auprès

des enfants qui permettent aux mères de développer une relation étroite avec eux.

Lorsque, dans ce contexte, les mères ont la chance de recevoir de l’affection de la part

de leurs enfants ou de les réconforter dans les moments difficiles, de faire des activités

ou de participer à un rituel spécial avec eux, elles peuvent sentir qu’elles influencent

positivement leur développement et, par conséquent, se sentir importantes à leurs yeux.

Cela représenterait une valorisation considérable pour les mères et pourrait expliquer

qu’elles soient moins portées à remettre en question l’état actuel du fonctionnement

familial par comparaison aux femmes dont l’implication ne mène pas à une valorisation

aussi gratifiante. Ceci expliquerait pourquoi un partage inégal des tâches familiales

n’évoque pas nécessairement un sentiment d’insatisfaction chez les femmes. En fait,

cette gratification pourrait également expliquer des résultats antérieurs révélant que les

femmes jugent certaines tâches, comme le nettoyage, la préparation des repas et les soins

aux enfants de façon positive (Kroska, 2003; Poortman & Van Der Lippe, 2009).

Bref, cette étude contribue de diverses façons à la littérature concernant le

fonctionnement familial et, plus précisément, l’équité dans le couple. D’abord, ces

37

résultats répondent aux chercheurs qui ont révélé qu’il serait primordial d’étudier les

variables émotionnelles dans le cadre des perceptions d’équité quant au partage des

tâches (voir Kawamura & Brown, 2010; Lachance-Grzela, 2012) afin de mieux

comprendre le paradoxe de la perception de justice quant à un partage inégal des tâches.

La présente étude permet également de combler une lacune dans la littérature en offrant

un appui empirique à la composante de compensation de la théorie de la justice

distributive. De plus, une mesure a été créée afin d’évaluer l’impression de compter pour

ses enfants, un concept qui pourrait être important pour explorer le fonctionnement et les

dynamiques familiales en général. Cette mesure, ayant une forte cohérence interne,

pourrait permettre aussi d’évaluer le concept de l’impression de compter pour ses

enfants dans des études futures.

4.1. Limites

Bien que cette étude permette l’avancement des connaissances dans le domaine de

la psychologie sociale, elle possède tout de même certaines limites. D’abord, les sujets

qui composent l’échantillon n’ont pas été choisis de façon aléatoire. Aussi, l’échantillon

consiste généralement de femmes scolarisées, ayant un revenu relativement élevé et

rapportant un niveau plutôt élevé d’impression de compter pour leurs enfants. Dans le

même ordre d’idées, la mesure de l’impression de compter pour ses enfants a été créée à

partir d’un échantillon plutôt homogène de femmes. Conséquemment, les résultats de

cette étude devraient être généralisés avec prudence et, à l’avenir, être répliqués avec un

échantillon de femmes plus diversifié, notamment avec plus de femmes ayant peu

l’impression de compter pour leurs enfants.

De plus, le devis de recherche corrélationnel et transversal fait en sorte qu’un lien

causal entre la contribution relative des femmes au partage des tâches familiales et leur

perception d’iniquité quant à ces mêmes tâches ne peut pas être confirmé. Une étude

longitudinale sur le sujet devrait être conduite pour tenter de répliquer les résultats et

ainsi appuyer les liens proposés. De surcroit, les mesures utilisées sont des mesures

subjectives et les questionnaires basés sur le rappel contribuent aux erreurs de mesure.

Afin de corriger l’impact de ces dernières limites, un journal de temps ne requérant pas

38

le rappel pourrait être utilisé à l’avenir (voir Bianchi et al., 2000; Hook, 2006 ayant

utilisé cette méthode).

4.2. Avenues futures

Compte tenu du fait que l’étude des compensations d’ordre émotionnel et de

l’impression de compter est relativement jeune, diverses avenues de recherches futures

peuvent être envisagées. D’abord, les études futures pourraient explorer le rôle de

l’appréciation des enfants plus âgés dans la relation entre la contribution de la femme au

partage des tâches et sa perception d’équité. Il se pourrait que l’impression de compter

pour ses enfants soit une récompense émotionnelle qui diminue plus les enfants

deviennent indépendants et développent leur propre système de soutien social. Il serait

donc avantageux de vérifier si l’impression de compter reste aussi importante ou si, à

l’inverse, l’interaction entre la contribution des mères au partage des tâches familiales et

l’appréciation démontrée par les enfants plus âgés prédit de façon plus forte les

perceptions d’équité des mères. De même, il serait intéressant de vérifier si l’effet

d’interaction entre la contribution au partage des tâches et l’impression de compter pour

ses enfants serait médiatisé par la qualité de la relation entre le parent et son enfant. Il se

peut que l’impact de l’interaction entre la contribution de la femme aux tâches et

l’impression de compter pour ses enfants sur sa perception d’équité dans le couple soit

expliquée par la qualité du lien entre la mère et ses enfants. Pour cette raison, il serait

avantageux d’explorer ce modèle de modération-médiatisée dans les recherches futures.

Quoiqu’il soit important de comprendre ce qui motive les mères à s’impliquer dans

le milieu familial, il est aussi primordial d’étudier les facteurs qui motivent les pères à

s’investir davantage dans les tâches liées à la famille. En ce qui a trait à la révolution des

genres, des avancements significatifs ont eu lieu sur le marché du travail. Toutefois, ces

avancements n’ont pas été répliqués dans la sphère domestique (Craig, 2006a;

Goldscheider, Bernhardt, & Lappegard, 2014). Afin d’atteindre l’égalité dans le milieu

familial, il importe de s’intéresser aussi aux motivations qui poussent les hommes à

s’impliquer davantage. À la lumière de la littérature récente suggérant que l’implication

des hommes aurait tendance à s’accroitre de façon plus importante en ce qui a trait aux

39

soins des enfants (voir Goldscheider et al., 2014), il serait intéressant de vérifier si les

hommes s’impliquent davantage dans les contextes où leur contribution est

accompagnée par un accroissement de l’impression de compter pour les enfants.

4.3. Implications cliniques et sociales

Les résultats de la présente étude ont diverses implications sur le plan clinique et

social. D’abord, la littérature en psychologie conjugale documente un lien entre la

perception d’injustice ainsi que le niveau de détresse personnelle (Lennon & Rosenfield,

1994) et conjugale (Claffey & Mickelson, 2009). La majorité des femmes de notre

échantillon ont jugé le partage des tâches familiales comme étant injuste pour elles.

Compte tenu du fait que les femmes sont généralement insatisfaites quant au partage

inégal des tâches et que ces inégalités peuvent découler de d’autres problématiques

latentes, il semblerait que le travail domestique soit un thème important à aborder auprès

des couples qui cherchent du soutien professionnel.

Tel que mentionné antérieurement, des avancements significatifs ont eu lieu sur le

marché du travail, mais les femmes vivent encore des inégalités dans la sphère

domestique (Craig, 2006a; Goldscheider et al., 2014). Sur le plan social, des chercheurs

ont argumenté que l’inégalité dans la sphère familiale nuit à la capacité des femmes à

atteindre l’égalité dans la sphère publique (Poeschl, 2008; Lothaller et al., 2009). De

façon similaire, d’autres défendent l’idée qu’une division plus égale des tâches

domestiques entre les parents pourrait mener à une augmentation de l’égalité à la maison

et au travail pour les générations futures (Croft, Schmader, Block, & Scott Baron, 2014).

Certains vont jusqu’à suggérer que l’atteinte de l’égalité dans la sphère domestique

permettrait à la révolution des genres de se compléter (voir Goldscheider et al., 2014

pour une argumentation similaire). En s’appuyant sur ces arguments, il semble qu’il

serait donc avantageux de chercher à réduire la contribution des femmes aux tâches

familiales ou à augmenter celle des hommes afin d’atteindre l’égalité non seulement au

travail, mais aussi à la maison.

40

Bref, les résultats de cette étude révèlent que les récompenses que les mères

reçoivent de leurs enfants jouent un rôle important dans l’évaluation qu’elles font du

fonctionnement de la famille et, plus précisément, de l’équité quant au partage des

tâches effectué avec leur conjoint. L’impression de compter pour les enfants vient

modifier la force de la relation entre leur contribution relative au partage des tâches

familiales et leur perception d’iniquité quant à ce partage. Compte tenu que les enfants

apprennent par la socialisation et que certains d’entre eux observent leur mère retirer une

satisfaction en accomplissant des tâches en leur présence, ceci pourrait favoriser la

transmission intergénérationnelle des patrons quant au partage des tâches familiales.

Cette transmission pourrait expliquer, en partie, pourquoi l’atteinte de l’égalité dans la

sphère domestique, et la révolution des genres en général, se fait lentement et

difficilement. Ceci étant dit, l’intérêt marqué et continu pour les questions d’égalité et

d’équité, la meilleure compréhension qui en découle ainsi que le fait que les hommes

prennent un rôle de plus en plus actif au sein de la famille (voir Goldscheider et al.,

2014) semblent pouvoir justifier un certain optimisme.

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ANNEXE A

LISTE INITIALE DES ITEMS DE L’IMPRESSION DE COMPTER POUR LES

ENFANTS

LISTE INITIALE DES ITEMS DE L’IMPRESSION DE COMPTER POUR LES

ENFANTS

1. À quelle fréquence éprouvez-vous le sentiment de compter aux yeux de vos enfants?

2. À quelle fréquence vos enfants demandent-ils pour de l’aide ou des conseils?

3. À quelle fréquence vos enfants acceptent-ils des compromis pour vous (ex.

visionner un film de votre choix afin de passer du temps avec vous) ?

4. À quelle fréquence vos enfants reconnaissent-ils l’aide ou les conseils que vous leur

offrez?

5. À quelle fréquence vos enfants semblent-ils être influencés par votre opinion?

6. À quelle fréquence vos enfants font-ils appel à vous pour du réconfort lorsqu’ils sont

tristes?

7. À quelle fréquence vos enfants sont-ils honnêtes avec vous?

8. À quelle fréquence vos enfants s’ennuient-ils de vous lorsque vous n’êtes pas avec

eux pour une longue période de temps (ex. pour la nuit ou quelques jours)?

9. À quelle fréquence vos enfants font-ils des activités avec vous?

10. À quelle fréquence vos enfants s’inquiètent-ils à votre sujet quand vous êtes

malade, stressé(e) ou préoccupé(e)?

11. À quelle fréquence vos enfants demandent-ils de passer du temps seuls avec vous?

12. À quelle fréquence vos enfants partagent-ils des informations personnelles avec

vous (ex. insécurités, réussites, sentiments, situations qui les préoccupent)?

13. À quelle fréquence vos enfants choisissent-ils de jouer à la maison au lieu de chez

leurs ami-e-s?

14. À quelle fréquence vos enfants vous racontent-ils leur journée?

15. À quelle fréquence vos enfants vous demandent-ils de participer à un rituel spécial

avec eux (ex. lire un livre avant d’aller au lit, soirée de films) ?

16. À quelle fréquence vos enfants démontrent-ils de l’affection verbale ou non verbale

à votre égard (ex. une note, un baiser, un câlin, dire « Je t’aime »)?

17. À quelle fréquence avez-vous l’impression d’influencer positivement le

développement de vos enfants?

48

18. À quelle fréquence recevez-vous de la rétroaction positive concernant le

développement de vos enfants (ex. de la part des enseignant-e-s, membres de la famille,

ami-e-s)?

19. À quelle fréquence vos enfants cherchent-ils à vous plaire ou à obtenir votre

approbation?

20. À quelle fréquence vos enfants cherchent-ils de l’encouragement de votre part

lorsqu’ils accomplissent une tâche?

21. À quelle fréquence ressentez-vous que vos enfants ont besoin de vous?

ANNEXE B

LISTE FINALE DES ITEMS DE L’IMPRESSION DE COMPTER POUR LES

ENFANTS

LISTE FINALE DES ITEMS DE L’IMPRESSION DE COMPTER POUR LES

ENFANTS

1. À quelle fréquence éprouvez-vous le sentiment de compter aux yeux de vos enfants?

2. À quelle fréquence vos enfants font-ils appel à vous pour du réconfort lorsqu’ils sont

tristes?

3. À quelle fréquence vos enfants sont-ils honnêtes avec vous?

4. À quelle fréquence vos enfants s’ennuient-ils de vous lorsque vous n’êtes pas avec

eux pour une longue période de temps (ex. pour la nuit ou quelques jours)?

5. À quelle fréquence vos enfants font-ils des activités avec vous?

6. À quelle fréquence vos enfants vous demandent-ils de participer à un rituel spécial

avec eux (ex. lire un livre avant d’aller au lit, soirée de films) ?

7. À quelle fréquence vos enfants démontrent-ils de l’affection verbale ou non verbale à

votre égard (ex. une note, un baiser, un câlin, dire « Je t’aime »)?

8. À quelle fréquence avez-vous l’impression d’influencer positivement le

développement de vos enfants?

9. À quelle fréquence vos enfants cherchent-ils de l’encouragement de votre part

lorsqu’ils accomplissent une tâche?

10. À quelle fréquence ressentez-vous que vos enfants ont besoin de vous?