Memoire changement climatique en Bourgogne · Les impacts du changement climatique ont d’abord...

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MÉMOIRE Présenté par : Anne-Cerise Tissot Dans le cadre de la dominante d’approfondissement : IDEA (Ingénierie de l’Environnement, Eau, Déchets et Aménagements durables) Changement climatique en Bourgogne : analyse des impacts et des pistes d’adaptation Pour l’obtention du : DIPLÔME D’INGENIEUR d’AGROPARISTECH Cursus ingénieur agronome et du DIPLÔME D’AGRONOMIE APPROFONDIE Stage effectué du 01/03/2011 au 31/08/2011 A : Alterre Bourgogne, 9 bd Rembrandt, 21000 Dijon Enseignants-responsables : Erwan Personne Caroline Maury Maître de stage : Hélène Toussaint Soutenu le : 22 Septembre 2011

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MÉMOIRE

Présenté par : Anne-Cerise Tissot Dans le cadre de la dominante d’approfondissement : IDEA (Ingénierie de l’Environnement, Eau, Déchets et Aménagements durab les)

Changement climatique en Bourgogne : analyse des im pacts et des pistes d’adaptation

Pour l’obtention du :

DIPLÔME D’INGENIEUR d’AGROPARISTECH

Cursus ingénieur agronome

et du DIPLÔME D’AGRONOMIE APPROFONDIE

Stage effectué du 01/03/2011 au 31/08/2011 A : Alterre Bourgogne, 9 bd Rembrandt, 21000 Dijon Enseignants -responsables : Erwan Personne Caroline Maury

Maître de stage : Hélène Toussaint

Soutenu le : 22 Septembre 2011

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RREEMMEERRCCIIEEMMEENNTTSS

En premier lieu, je tiens à remercier ma maître de stage Hélène Toussaint, qui m’a fait confiance, m’a guidée, et avec qui j’ai eu beaucoup de plaisir à travailler et à échanger. Merci également à mes enseignants tuteurs Erwan Personne et Caroline Maury, disponibles et de bon conseil. J’ai apprécié participer à la dynamique régionale dans laquelle s’est intégrée cette étude et rencontrer ses acteurs notamment Franck Dumaître de l’ADEME Bourgogne, Florent Duval du Conseil régional de Bourgogne, Renaud Durand de la DREAL Bourgogne et les climatologues Yves Richard et Thierry Castel du CRC. François Bertrand et Elsa Richard de l’Université de Tours m’ont permis de prendre du recul et de bien travailler les aspects méthodologiques : merci pour leur vision enrichissante et leur disponibilité. Je tenais également à remercier l’ensemble de l’équipe d’Alterre Bourgogne qui m’a accueillie chaleureusement.

Enfin, merci à toutes les personnes que j’ai enquêtées au cours de ce stage, qui m’ont aidée et fait partager leur savoir sans hésitation, donnant ainsi toute sa substance à ce mémoire : Olivier Bardet, Emmanuel Bayle, Manuella Bellouard, Benjamin Bois, Anne-Laure Brochet, Jean Croisel, Cédric Cuccia, Marie-Cécile Deconninck, Gérard Duc, Christophe Fouilland, Bernard Frochot, Maurice Giroud, Vincent Godreau, Benjamin Grosjean, Bruno Maestri, Jean-Michel Menant, Alexandre Mercier, Odile Meurgues, Samy Mezani, Gérard Million, Isabelle Millot, Nathalie Mionetto, Christine Monamy, Guillaume Morvan, Viviane Perrier-Gritti, Etienne Petit, Marie-Sophie Petit, Gaël Piedoie, Arnaud Rochot, Christelle Rousselet, François Roze, Didier Sauvage, Claude Tillier, Nicolas Varanguin, Antoine Villard, Eric Vincent, Frédérique Bourgeois, Marianne Zeller…

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LLIISSTTEE DDEESS AACCRROONNYYMMEESS

ADEME Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie BIVB Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne BRGM Bureau des Recherches Géologiques et Minières CCNUCC Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques CRC Centre de Recherche de Climatologie DREAL Direction Régionale de l’Environnement de l’Aménagement et du Logement ETP Evapotranspiration Potentielle FCBA Institut technologique Forêt Cellulose Bois-construction Ameublement GES Gaz à Effet de Serre GIEC Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat ICU Îlot de Chaleur Urbain INSEE Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques OMM Organisation météorologique mondiale ONERC Observatoire National sur les Effets du Réchauffement Climatique OREB Observatoire Régional de l’Environnement en Bourgogne PCET Plan Climat Energie Territorial PECB Programme Energie Climat Bourgogne PIB Produit Intérieur Brut PLU Plan Local d’Urbanisme PNACC Plan National d’Adaptation au Changement Climatique PNUE Programme des Nations Unies pour l’Environnement ppm parties par million PPR Plan de Prévention des Risques SAGE Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux SCoT Schéma de Cohérence Territorial SRCAE Schéma Régional Climat Air Energie SRES Special Report on Emissions Scenarios UNESCO United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization

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TTAABBLLEE DDEESS MMAATTIIEERREESS

Introduction ............................................................................................................................................. 1 I. La Bourgogne face au changement climatique .................................................................................... 2

1. La Bourgogne, une région médiane ................................................................................................ 2 a. Une région à dominante rurale… ................................................................................................ 2 b. …Sous une triple influence climatique ....................................................................................... 3

2. Le changement climatique : à quoi doit-on s’adapter ? ................................................................. 4 a. La réalité du changement climatique et son évolution à l’échelle du globe .............................. 4 b. Des scénarios mondiaux à la réalité régionale ........................................................................... 6 c. Le climat en Bourgogne – Evolutions passées et à venir ............................................................ 7

3. La nécessité d’agir ........................................................................................................................... 8 a. Atténuation et adaptation : deux approches complémentaires ................................................ 8 b. L’action régionale : les travaux réalisés et en cours en Bourgogne ........................................... 9 c. Une étude pour accompagner la dynamique régionale ........................................................... 11

II. Une double analyse basée sur des enquêtes .................................................................................... 12 1. Des concepts clés au cadre méthodologique utilisé ..................................................................... 12

a. Qu’est-ce que s’adapter ? ......................................................................................................... 12 b. Le changement climatique, vecteur de nouvelles inégalités ? ................................................. 14 c. Cadre méthodologique utilisé ................................................................................................... 16

2. Le choix d’une analyse d’abord en râteau .................................................................................... 17 a. Une méthodologie qui s’appuie sur un comité scientifique ..................................................... 17 b. Une analyse en deux temps ...................................................................................................... 17 c. Les choix de thématiques réalisés ............................................................................................ 18

3. Méthode de collecte et de traitement des données .................................................................... 19 a. Une approche combinant objectivation et perception … ......................................................... 19 b. …Basée sur des enquêtes… ....................................................................................................... 20 c. …Et la concertation ................................................................................................................... 21

III. L’adaptation en Bourgogne : Etat des lieux des connaissances et des actions par thematique….23 1. Des niveaux de connaissances hétérogènes ................................................................................. 23

a. Une difficulté d’estimer la qualité des connaissances .............................................................. 23 b. Entre connaissance des experts et perception des acteurs ..................................................... 23 c. Quelques certitudes et de nombreuses incertitudes ............................................................... 24

2. Des thématiques différemment préparées au changement climatique ...................................... 25 a. La biodiversité : le grand témoin du changement climatique ? ............................................... 25 b. La forêt : entre croissance et dépérissements ......................................................................... 27 c. La vigne : des impacts positifs mais jusqu’à quand ? ................................................................ 29 d. Les grandes cultures : entre impacts locaux et impacts mondiaux .......................................... 32 e. L’élevage : un secteur rendu vulnérable par sa crise structurelle ............................................ 33 f. La santé humaine : de multiples incidences possibles, difficiles à prédire ............................... 35 g. L’urbanisme et l’aménagement : la recrudescence des îlots de chaleur.................................. 37 h. Les risques naturels : comment intégrer la modification des références ? ............................. 39

3. En résumé : trois étapes pour une politique d’adaptation ........................................................... 41 IV. Analyse critique des resultats sous un angle transversal ................................................................. 42

1. Analyse des impacts ...................................................................................................................... 42 a. Leur expression ......................................................................................................................... 42 b. Leur perception ........................................................................................................................ 43

2. Analyse des modes d’adaptation .................................................................................................. 44

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a. S’adapter selon sa connaissance des impacts .......................................................................... 45 b. S’adapter selon les outils disponibles ....................................................................................... 45 c. Les politiques publiques catalyseurs de l’adaptation ? ............................................................ 46

3. Les conditions d’une adaptation réussie ...................................................................................... 47 a. La nécessité d’une cohérence entre stratégies au sein de la thématique............................... 47 b. La nécessité d’une cohérence territoriale ................................................................................ 48 c. Qu’est-ce qu’une adaptation réussie ? ..................................................................................... 49

Conclusion ............................................................................................................................................. 50 Bibliographie.......................................................................................................................................... 51 Annexes ................................................................................................................................................. 55

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IINNTTRROODDUUCCTTIIOONN

Mercredi 20 juillet 2011, le premier Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) est présenté aux français car, suite aux leçons de 2003, l’adaptation est devenue une réalité politique. L’action sera essentiellement locale puisque les impacts du changement climatique diffèrent selon les régions. Ces dernières doivent alors décliner l’adaptation à leur échelle, selon leur contexte, notamment à travers sa prise en compte dans les Schémas Régionaux Air Energie Climat (SRCAE). En Bourgogne, les travaux d’Alterre Bourgogne (association1 soumise à la loi de 1901), dans la continuité de ceux de l’Observatoire régional de l’environnement en Bourgogne (OREB) dont elle est issue, donnent à la région une longueur d’avance. Les impacts du changement climatique ont d’abord été recensés dans une publication sur les conséquences de la canicule de 20032. Ils ont ensuite fait l’objet d’une réflexion plus large3 à travers le croisement d’observations au cours de tables rondes. Suite à l’élargissement, en 2006, des compétences de l’OREB (créé en 1993), menant à la création d’Alterre Bourgogne, ces travaux ont alors pu être approfondis et étendus au sujet de l’adaptation dans le cadre de ses nouvelles missions d’accompagnement et d’évaluation des politiques publiques. En effet, au-delà des constats et des visions sur l’avenir, l’adaptation au changement climatique pose la question de l’action et du rôle des politiques publiques locales. La sensibilisation et l’accompagnement des acteurs locaux sont des préalables à toute action d’envergure sur un territoire. Et c’est à ce niveau que peut se positionner Alterre Bourgogne, agence régionale de d’environnement et du développement soutenable. A quoi devrons-nous nous adapter ? Comment se traduira le changement climatique sur nos activités en Bourgogne ? Lesquelles sont les plus fragiles ? Quels outils mettre en place ? Cette étude « Changement climatique en Bourgogne : analyse des impacts et des pistes d’adaptation », commandée par Alterre Bourgogne, fait un état des lieux des réponses à ces questions en Bourgogne. Nous verrons d’abord en quoi cette région est parmi les plus avancées en France et la justification de nos choix méthodologiques, validés par un comité scientifique, d’une approche par thématique. Les principaux résultats issus d’une quarantaine d’enquêtes seront livrés par secteurs et domaines (biodiversité, forêt, vigne, grande culture, élevage, santé, urbanisme et risques naturels) puis analysés de manière transversale afin de les mettre en perspective. Nous finirons par esquisser que signifie une adaptation réussie, en espérant que ce travail sera utile aux politiques territoriales…

1 Ces principaux financeurs sont le Conseil régional de Bourgogne, l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de

l'énergie (ADEME) et la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL). 2 « Sécheresse et canicule 2003 : la Bourgogne face aux aléas climatiques » (OREB, 2004)

3 « La Bourgogne face aux changements climatiques » (OREB, 2005)

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QQUUEELLQQUUEESS CCHHIIFFFFRREESS CCLLEESS ((INSEE, 2010) Superficie : 31 600 km², 6

ème région de France métropolitaine

Population : 1 630 000 habitants, 16ème

région PIB : 43 milliards d’euros, 16

ème région

II.. LLAA BBOOUURRGGOOGGNNEE FFAACCEE AAUU CCHHAANNGGEEMMEENNTT CCLLIIMMAATTIIQQUUEE

Pour bien comprendre l’objet et l’intérêt de cette étude, il est nécessaire, avant toute chose, de connaître dans quel contexte elle se situe. Après une brève présentation de la région et de ses enjeux, nous esquisserons les principales tendances d’évolution du climat et la réponse de la Bourgogne à cette situation.

1. La Bourgogne, une région médiane

a. Une région à dominante rurale… La Bourgogne, composée de quatre départements (Yonne, Nièvre, Côte-d’Or, Saône-et-Loire) se situe dans le quart Nord-Est de la France (cf. Figure 1). Economiquement, il s’agit d’une région intermédiaire, où le secteur tertiaire est légèrement moins développé que la moyenne et l’industrie un peu plus avec deux pôles de compétitivité labellisés : «goût-nutrition-santé» et « Nucléaire en Bourgogne ». Les

secteurs agricoles et forestiers tiennent une part

importante de l’économie par rapport à d’autres régions :

o La Bourgogne est la deuxième région agricole française derrière la Champagne-Ardenne (INSEE, 2010) avec trois principales productions qui façonnent fortement le paysage (cf. Figure 2) : - L’élevage bovin allaitant, responsable de la prédominance du bocage (photographie 4)

autour du Morvan et au Sud de la Saône-et-Loire ; - La grande culture (photographie 1) présente surtout dans le Nord et l’Est de la région avec

comme rotation principale colza-blé-orge. Elle occupe une place de plus en plus importante au détriment de surfaces bocagères.

- La viticulture (photographie 3), qui occupe une surface beaucoup plus limitée, le long de la côte entre Dijon et Mâcon et près d’Auxerre dans l’Yonne.

o Le taux de boisement de la région s'élève à plus de 30%, la plaçant au 6ème rang des régions

françaises. Il s’agit essentiellement de feuillus (>80%) dont plus des trois quarts en Chêne et près de 10% en Hêtre. Concernant les conifères, 40 % sont des Douglas qui, d’implantation récente, se situent sur le Morvan (photographie 2) et ses annexes cristallines.

Enfin, la Bourgogne est une zone de passage pour le tourisme : les séjours en hôtel durent en moyenne 1,3 jours (contre 2,2 pour la moyenne nationale) et 2,6 jours en camping (contre 5 pour la moyenne nationale). La densité de population est faible avec une cinquantaine d’habitants au km², soit deux fois moins que la moyenne de France métropolitaine. Les départements de Saône-et-Loire et de Côte-d’Or représentent les deux tiers de la population régionale. L’agglomération de la capitale régionale (Dijon) regroupe 390 000 habitants, soit plus que la

Figure 1 : Localisation de la Bourgogne (Source : www.cartesfrance.fr)

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population totale de la Nièvre ou de l’Yonne. La région se classe parmi les moins dynamiques de France en termes de démographie avec une population plutôt

âgée. Notons un nombre élevé de résidences secondaires dans l’Yonne et la Saône-et-Loire, lié à la proximité des régions parisienne et lyonnaise. A titre d’exemple, 25% de la population du Pays Puisaye Forterre (dans l’Yonne) y résident de manière intermittente.

Selon les projections tendancielles de l’INSEE (2010) la Bourgogne devrait tout de même connaître une croissance de sa population, essentiellement du fait de ces migrations en provenance d’Ile-de-France et de Rhône-Alpes.

b. …Sous une triple influence climatique La géomorphologie de la région est structurée autour

du massif granitique du Morvan (qui culmine à 901m). Celui-ci, prolongé au Nord-Est par le seuil de Bourgogne (plateaux calcaires), forme un axe de relief Nord-Est/Sud-Ouest séparant deux grandes plaines : au Nord-Ouest l’extrémité du Bassin parisien (Gâtinais) et à l’Est le fossé Bressan (plaine de Saône). Plusieurs influences climatiques se répartissent également autour du Morvan (cf. Figure 3) dont la partie la plus élevée est sous un climat semi-montagnard. Elles expliquent la présence d’espèces caractéristiques : on retrouve la jacinthe des bois (atlantique) dans le Morvan, l’érable de Montpellier (méditerranéenne) dans la plaine de Saône ou encore des gentianes (montagnardes) et des sabots de Vénus (continentale) (Chiffaut et Vaucoulon, 2004).

Or on décline souvent le changement climatique selon le climat dominant. Comment le climat bourguignon va-t-il alors évoluer ? Quelle tendance suivra-t-il ?

Figure 3 : Géomorphologie de la Bourgogne et influences climatiques (à partir de www.bourgogne.environnement.gouv.fr)

Figure 2 : Paysages de Bourgogne (à partir d'une carte de la DIREN Bourgogne)

1

2

3

4

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2. Le changement climatique : à quoi doit-on s’adapter ?

a. La réalité du changement climatique et son évolution à l’échelle du globe

�� UUnn cchhaannggeemmeenntt cclliimmaattiiqquuee eesstt bbiieenn eenn ccoouurrss

Si quelques voix contradictoires s’élèvent encore, la communauté scientifique reconnait assez largement l’existence d’un changement climatique. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), créé en 1988 par l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), affirme dans son dernier rapport de synthèse que « le réchauffement du système

climatique est sans équivoque » (GIEC, 2007a). Ce changement est déjà en cours et se manifeste à l’échelle de la planète à travers trois principaux indicateurs représentés sur la Figure 4 : l’augmentation de la température moyenne (0,8 ± 0,2 °C depuis 1870) et du niveau moyen de la mer ainsi que la baisse de la couverture neigeuse dans l’hémisphère Nord. Les débats ont surtout lieu autour de la question de la cause de ce réchauffement climatique. Il est aujourd’hui admis, comme l’a souligné l’académie des sciences (Puget et al., 2010), que ce phénomène puisse être imputé à l’augmentation de la teneur atmosphérique de gaz à effet de serre (GES) comme le dioxyde de carbone (CO2), elle-même « incontestablement » due à l’activité humaine. En effet, la concentration de CO2 n’a cessé d’augmenter depuis le début de l’ère industrielle, passant d’une moyenne de 280 ppm (partie par million) avant 1750 à 388 ppm en 2009 (Puget et al., 2010)…

�� PPaass uunn mmaaiiss ddeess cchhaannggeemmeennttss cclliimmaattiiqquueess

Aux prémisses de l’apparition de cette problématique, il était surtout question de « réchauffement climatique », puis les scientifiques ont préféré parler « du changement climatique » et enfin « des changements climatiques ». En effet, si l’augmentation globale de la température planétaire a été le signal le plus évident d’un changement du climat, la réalité est bien plus complexe (GIEC, 2007b) : o Le réchauffement est hétérogène (cf. Figure 5) dans l’espace (plus important sur les continents

que sur les océans par exemple) et dans le temps (plus marqué l’été que l’hiver en Europe) ; o Il y a également une modification hétérogène du régime des pluies selon les régions du globe

(augmentation en Europe du Nord mais baisse en Méditerranée) et au cours de l’année ; o Enfin les modifications du régime de température, de pluie et de vent induisent des changements

régionaux de fréquence et d’amplitude d’évènements extrêmes. Si certaines tendances sont confirmées (augmentation de la fréquence des vagues de chaleur et des fortes précipitations par exemple), d’autres restent très difficiles à analyser (tempêtes, cyclones…).

Figure 4 : Variations de la température et du niveau de la mer à l'échelle du globe et de la couverture neigeuse dans l'hémisphère Nord (GIEC, 2007a)

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Ainsi il n’y a pas un mais des changements climatiques, s’exprimant différemment dans l’espace et dans le temps. La question est maintenant de savoir comment ces changements évolueront…

�� VVeerrss qquueellllee éévvoolluuttiioonn dduu cclliimmaatt mmoonnddiiaall ?? LLeess ssccéénnaarriiooss dduu GGIIEECC..

A l’échelle planétaire, les modèles utilisés par le GIEC donnent un aperçu de ce que pourrait être le climat d’ici à 2100. Ils se basent sur différents scénarios d’émission de GES selon l’évolution démographique, la croissance économique, le degré de mondialisation, les progrès technologiques…. On peut classer ces scénarios selon deux axes de développement (cf. Figure 6) : tourné vers l’économie (A) ou l’environnement (B), mondialisé (1) ou régionalisé (2). Cela forme alors quatre « canevas » décrits dans le SRES (Special Report on Emissions Scenarios) (GIEC, 2000).

A1F1

A1B

A1T

Energie non fossile

Energie fossile

A2

B2

A1

B1

Plus environnemental

Plus économique

Plus mondial Plus régional

SCENARIO OPTIMISTE

Les scénarios B1, les plus optimistes en termes d’émissions de GES, prédisent un monde convergent avec des changements rapides vers une économie de services et d'information. L'accent est mis sur des solutions mondiales orientées vers une viabilité environnementale.

Les scénarios B2 sont orientés vers la protection de l'environnement et l'équité sociale avec un accent sur des solutions locales. La population mondiale s'accroît de manière continue (mais à un rythme plus faible que dans les autres scénarios), le développement économique est intermédiaire, l'évolution technologique est moins rapide mais plus diverse.

SCENARIO PESSIMISTE

Les scénarios A2 décrivent un monde très hétérogène fondé sur un développement économique plutôt régional, et avec un accroissement continu de la population mondiale.

SCENARIO MEDIAN

Les scénarios A1 correspondent à un monde futur dans lequel la croissance économique sera très rapide avec une réduction substantielle des différences régionales et où la population mondiale atteindra un maximum au milieu du siècle pour décliner ensuite. Ils se scindent en trois groupes selon le type d’énergie développé : qu’elle soit fossile (A1FI), non fossile (A1T) ou équilibrée entre les deux types (A1B) ; ce dernier étant considéré comme le scénario médian.

Figure 6 : Principaux scénarios du GIEC

Figure 5 : Tendances mondiales de températures de 1979 à 2005 estimées à la surface et dans la troposphère (GIEC, 2007b). Le gris indique les secteurs dont les données sont incomplètes.

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Quel que soit le scénario choisi, une accentuation des phénomènes déjà observés au cours du XXe siècle est à prévoir (GIEC, 2007a) : accélération du réchauffement avec des variations jamais observées au cours du dernier millénaire (cf. Figure 7) et augmentation des précipitations aux latitudes élevées.

Ce qui distingue les résultats des différents scénarios est l’amplitude de ces changements : à l’horizon 2100, les prévisions d’augmentation de la température varient de 1,1 à 6,4°C par rapport à la fin du XXème siècle (cf. Tableau 1).

Ce sont donc les choix de société qui conditionneront l’ampleur du changement climatique. Aujourd’hui, avec une dizaine d’années de recul, on s’aperçoit que les émissions de GES entre 2000 et 2009 correspondent à une des hypothèses les plus pessimistes (A1F1), menant à un réchauffement de 4°C en 2100... Ces résultats sont valables à l’échelle mondiale. Qu’en sera-t-il en Bourgogne, région sous l’influence de trois types de climats ?

b. Des scénarios mondiaux à la réalité régionale Comme nous l’avons déjà mis en avant, les modélisations montrent des changements climatiques différents selon les régions du globe. Quel que soit le scénario que nous suivrons, ces disparités persisteront voire s’aggraveront. Or les modèles mondiaux ne sont pas faits pour une analyse fine de l’évolution des climats locaux car leur « maille » est trop large (aujourd’hui 60x60km en France). Les résultats fournis par Météo France (cf. Figure 8) donnent un aperçu de ce que pourrait être la situation en Bourgogne à la fin du XXIe siècle (augmentation de 2 à 4°C). Mais les fourchettes données sont larges et les différences infrarégionales invisibles. De même, le GIEC prévoit une diminution des précipitations en Méditerranée en été et une augmentation des précipitations sur la façade atlantique en hiver : qu’en sera-t-il alors en Bourgogne, à la fois sous ces deux influences?

Figure 8 : Prévisions d’écart de température en été en France Métropolitaine entre la période 2070-2099 et la période de référence 1960-1989 selon les scénarios A2 et B2 (Météo-France)

Figure 7 : Variations de la température de la surface de la Terre : de 1000 à 2100 (PNUE, 2009)

Tableau 1: Projections des variations de températures (°C) de la surface du globe pour 2090-2099 par rapport à 1980-1999 selon les scénarios (GIEC, 2007a)

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Ainsi, il devient intéressant d’utiliser des modèles régionaux d’évolution du climat, d’autant plus que la région est soumise à plusieurs influences climatiques (cf. page 3). Or, il se trouve que la Bourgogne est une des rares régions à bénéficier d’un Centre de Recherche de Climatologie (CRC). Grâce aux travaux de ses chercheurs, menés en collaboration avec Météo France, un modèle climatique régional (maille de 5km de côté) est utilisé. Il a été testé en simulant le climat bourguignon sur les 20 dernières années et en comparant les résultats avec les données réelles. Après différents ajustements, le modèle est apparu comme bon, notamment pour les températures. Sur la base de ces résultats, il est possible d’analyser l’évolution récente du climat en Bourgogne et les projections pour le siècle en cours…

c. Le climat en Bourgogne – Evolutions passées et à venir

�� UUnn rréécchhaauuffffeemmeenntt,, ddoouubblléé dd’’uunnee rruuppttuurree,, eett qquuii ddeevvrraaiitt ss’’aacccceennttuueerr En étudiant les données météorologiques de la région depuis 1961, les climatologues du CRC ont mis en évidence : o Qu’il y a bien eu une

augmentation globale des températures (d’environ 1,9°C)

supérieure à la moyenne planétaire ;

o Qu’il y a eu une rupture entre 1987 et 1988 (cf. Figure 9), à partir de laquelle l’augmentation de température s’est accélérée. Ce phénomène serait relié à un changement dans la NAO (North Atlantic Oscillation), variation naturelle du climat déterminant les dépressions de l'hémisphère Nord.

Ce réchauffement s’est traduit par une diminution du nombre de jours de gel et une augmentation de celui de jours chauds menant à un allongement de la période de végétation. Concernant les simulations pour le climat à venir, le modèle utilisé par le CRC montre, pour 2031-2040, un réchauffement particulièrement marqué en été et le jour, allant de 1,2 à 2,4°C pour le scénario A2 (cf. Figure 10), ce qui est cohérent avec les prévisions de Météo-France. Il est intéressant de noter que le réchauffement est plus marqué dans le Sud de la région en été, tandis qu’en hiver il est maximal au Nord.

�� UUnnee éévvoolluuttiioonn ppeeuu mmaarrqquuééee ddeess pprréécciippiittaattiioonnss En comparant le volume des précipitations avant et après la rupture de 1987, on ne constate pas de modification importante des pluies. Sur la Figure 11, on observe une

Figure 10 : Simulations de l'évolution des températures pour 2031-2040 par rapport à 1971-1980 pour le scénario A2 (CRC)

Figure 9 : Augmentation des températures en Bourgogne et changement de tendance en 1987 (Cuccia, 2008)

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légère augmentation des précipitations (en bleu) en hiver (de l’ordre de 20 mm par mois en octobre et en novembre) mais celle-ci n’est pas statistiquement significative. Ces observations concordent avec les simulations des scénarios A1B et A2 (cf. Figure 12) à l’horizon 2030 présentant une hausse des précipitations hivernales (d’octobre à mars) notamment au Nord de la région. Cependant, à l’horizon 2080, celles-ci devraient finalement diminuer (80 à 95% selon le scénario) surtout dans la partie Sud-Ouest de la région. Concernant les précipitations estivales qui, pour le moment, ne semblent pas évoluer, elles devraient diminuer dès 2050 pour atteindre en 2080 environ 80% de leur volume de référence (1971-2000).

Ainsi la Bourgogne devrait continuer à voir ses températures augmenter, notamment le jour et en été et la pluviométrie légèrement diminuer surtout l’été. Par ailleurs, même à précipitations égales, si la température augmente, l’évapotranspiration s’accroitra, ce qui induira une hausse générale des besoins en eau. Maintenant que les tendances sont connues, que peut-on faire ?

3. La nécessité d’agir

a. Atténuation et adaptation : deux approches complémentaires Le changement climatique est bien en marche et c’est l’homme qui en est la cause. Or les conséquences pourraient être dramatiques. En effet, un grand nombre de systèmes naturels et activités dépendent fortement du climat. Le GIEC (2007a) a recensé de nombreuses études démontrant que de multiples systèmes physiques et biologiques subiront de profondes perturbations du fait du changement climatique : extinctions d’amphibiens, blanchiment du corail, augmentation des populations soumises au risque inondation, baisse de la production agricole… S’il ne faut pas être alarmiste, la plupart des conséquences du changement climatique seront négatives à l’échelle de la planète. De plus, on ne peut pas « éviter » le changement climatique : les temps de séjours des différents GES dans l’atmosphère peuvent être assez longs (plus de 100 ans

Figure 12 : Simulation de l'évolution des précipitations d'avril à septembre (à gauche) et d’octobre à mars (à droite) en pourcentage par rapport à 1971-2000 en Bourgogne (Météo France)

Avril à septembre Octobre à mars

Figure 11 : Comparaison des précipitations moyennes en Bourgogne avant et après rupture (72 stations pour 1961-1987 et 128 pour 1989-2009) (CRC)

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pour le CO2) et les changements engendrés par l’augmentation de l’effet de serre ont une certaine inertie. On voit sur la Figure 14 que malgré la réduction des émissions de CO2 et la stabilisation de sa concentration dans l’atmosphère, l’air continue à se réchauffer pendant quelques siècles et le niveau de la mer s’élève encore pendant des millénaires…

En revanche, comme cela a été vu précédemment, les choix de société définiront l’ampleur du changement climatique : une politique d’atténuation des concentrations atmosphériques de GES permettrait d’en limiter l’envergure. Cela peut se faire par deux principales voies : la diminution des émissions anthropiques de GES et le stockage des GES sous une autre forme physique. Pour être efficace, cette stratégie doit être d’ampleur mondiale… En parallèle, il est aussi nécessaire de s’adapter car changement climatique il y a et il y aura. L’adaptation nécessite, elle, des stratégies plus régionalisées car comme nous l’avons vu les changements climatiques et leurs impacts sont hétérogènes dans l’espace. La Figure 13 illustre la complémentarité de ces deux approches : l’atténuation s’attache à limiter l’amplitude du phénomène tandis que l’adaptation est tournée vers les activités humaines. Nous nous focaliserons sur cette dernière car elle constitue le cœur de cette étude.

b. L’action régionale : les travaux réalisés et en cours en Bourgogne

�� DDeess ssttrraattééggiieess iinntteerrnnaattiioonnaalleess eett nnaattiioonnaalleess aauuxx aaccttiioonnss llooccaalleess

Si les discussions internationales sur le changement climatique ont débuté dès 1992 avec l’ouverture de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC), le sujet de

l’adaptation est arrivé assez tard. Au plan européen, les réflexions sur l’adaptation sont engagées à partir de 2005, notamment avec la mise en place par la Commission d’un groupe de travail « Impacts and adaptation » aboutissant à la rédaction d’un livre vert (CCE, 2007) puis d’un livre blanc (CCE, 2009). En France, un Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC) existe depuis 2001.Mais ce n’est qu’en juillet 2011 qu’un « Plan national d’adaptation au changement

Figure 14 : Illustration des temps de réponse de changements climatiques après réduction des émissions de CO2 et stabilisation de sa concentration entre 450 et 1000 ppm (GIEC, 2001b)

Figure 13 : Positionnements respectifs des politiques d'atténuation et d'adaptation

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climatique » (PNACC) a été élaboré par le gouvernement suite à la « Stratégie nationale d’adaptation au changement climatique» publiée quatre ans auparavant (ONERC, 2007). Le sujet est donc relativement nouveau. L’adaptation concerne

essentiellement des actions

territoriales ou sectorielles. Les premiers rapports de l’ONERC étaient d’ailleurs orientés dans ce sens (ONERC, 2004 ; ONERC, 2005), constatant que « les collectivités locales ont un rôle essentiel à jouer ». Il existe aujourd’hui plusieurs niveaux politiques de prise en compte de l’adaptation au changement climatique en France

(cf. Figure 15). Au niveau territorial, les Plans Climat Energie Territoriaux (PCET), démarches volontaires instituées par le premier plan climat (2004), doivent prendre en compte l’adaptation. Depuis, suite au Grenelle de l’environnement, la loi portant "engagement national pour l'environnement" de 2010 a instauré la mise en place de Schémas Régionaux Climat Air Energie (SRCAE) obligatoires et qui doivent comporter un volet adaptation.

�� LLaa BBoouurrggooggnnee,, uunnee rrééggiioonn rreellaattiivveemmeenntt eenn aavvaannccee ?? Avec quinze collectivités en cours d’élaboration de PCET (cf. Annexe 1), la Bourgogne est la 4ème région française (ex-æquo avec le Languedoc-Roussillon) en nombre de PCET. Elle a aussi lancé la construction de son SRCAE cette année et devrait l’avoir terminé fin 2011, parmi les premières régions de France (cf. Annexe 1). La région a, par ailleurs, signé un Programme Energie Climat Bourgogne (PECB) avec l’ADEME et la DREAL dans le cadre du contrat de projets Etat-Région 2007-2013. Il définit un programme d'actions et attribue des financements aux collectivités, aux entreprises et, dans certains cas, aux particuliers qui rentrent dans ce cadre (principalement tourné vers l’atténuation). Il appuie également certains PCET (neuf ont été retenus suite à un appel à projet). En amont et en parallèle à ces dynamiques, suite aux travaux de l’OREB sur les impacts du changement climatique en 2005, Alterre Bourgogne s’est penché sur le thème de l’adaptation depuis 2008 en collaboration avec un groupe d’acteurs et d’experts à travers un « observatoire partenarial » informel. Ces réflexions complétées par des enquêtes individuelles ont permis à Hélène Toussaint de rédiger un Repères4 (cf. Figure 16) sur cette thématique. A l’issue de ce travail collaboratif, dans le but d’approfondir une thématique transversale, une étude rassemblant plusieurs équipes de

4 Publication trimestrielle de l’agence de 12 à 16 pages tirée à 5 000 exemplaires et diffusée aux collectivités, aux

administrations, aux bibliothèques municipales, aux établissements d'enseignement, aux associations, à la presse…

Figure 16 : Couverture du Repères n°46 (Alterre Bourgogne, 2008)

Figure 15 : La prise en compte politique de l'adaptation au changement climatique aux différentes échelles territoriales en France

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chercheurs (climatologie, pédologie, hydrologie, sociologie) a été menée sur les impacts du changement climatique sur la ressource en eau et les vulnérabilités qui en découlent (Alterre Bourgogne, 2009).

c. Une étude pour accompagner la dynamique régionale A la suite de ces différents travaux, Alterre Bourgogne et l’ADEME ont décidé de porter un Projet pluriannuel (2010 à 2012) intitulé « Adaptation au changement climatique en Bourgogne - Contribution à l’élaboration des stratégies d’adaptation régionale et territoriales ». Financé, entre autres, dans le cadre du PECB., ce projet, composé de quatre sous-projets (cf. Figure 17), a un double objectif : o Contribuer à l’identification d’orientations stratégiques régionales qui seront inscrites au volet

adaptation du SRCAE ; o Concevoir une méthodologie pour aider les territoires à mettre en place le volet adaptation de

leur PCET. Pour réaliser ces deux objectifs, il est nécessaire d’avoir une connaissance préalable du changement climatique en Bourgogne (1a confié au CRC), de ses effets potentiels (1b) et des vulnérabilités associées (1c). C’est à ce niveau que s’inscrit le travail qu’Alterre Bourgogne a souhaité me confier.

Figure 17 : Articulation entre les sous-projets du projet "Adaptation au changement climatique en Bourgogne"

L’objectif de cette étude est de faire un état des lieux des connaissances et des perceptions régionales des impacts du changement climatique, des vulnérabilités et des pistes d’adaptations.

Réalisation : Etudiantes d’AgroSup’Dijon

Réalisation : CRC

Réalisation : Alterre Bourgogne et ADEME Réalisation : Multi partenariale

Réalisation : Alterre Bourgogne et ADEME

Réalisation : Alterre Bourgogne

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IIII.. UUNNEE DDOOUUBBLLEE AANNAALLYYSSEE BBAASSEEEE SSUURR DDEESS EENNQQUUEETTEESS

Peu d’études régionales ont été réalisées sur l’adaptation au changement climatique en France et aucune méthodologie claire n’est vraiment définie. Si une méthodologie d’analyse de la vulnérabilité des territoires a récemment été travaillée par la SOGREAH (Przydrozny et al., 2010) puis reprise par le Ministère de d’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement (MEDTL, 2011), elle reste assez générale et ne correspond pas à l’objectif de cette étude. Il nous a donc semblé important de consacrer une partie de ce mémoire à la définition du cadre méthodologique que nous avons construit tout au long de l’étude.

1. Des concepts clés au cadre méthodologique utilisé Dès le début de ce travail, en parcourant la bibliographie sur l’adaptation au changement climatique, il est apparu que la terminologie associée à ce sujet était très riche : adaptation, capacité d’adaptation, adaptabilité, vulnérabilité, sensibilité, résilience, résistance, aléa, risque… Cependant ces concepts sont souvent imprécis, leurs définitions (lorsqu’elles sont données) ainsi que leurs relations diffèrent selon les ouvrages. Cette confusion a d’ailleurs été soulignée par de nombreux auteurs (Brooks, 2003 ; Reghezza, 2007 ; Quenault et Bertrand, 2010). Il parait donc nécessaire d’identifier les principaux concepts et de nous positionner clairement par rapport à leurs différentes définitions. Ces choix nous permettront de préciser le cadre théorique que nous avons adopté pour cette étude et de garder une continuité dans l’analyse par la suite. A la fin de ce mémoire, nous reviendrons sur ces concepts centraux et tenterons d’en faire une analyse critique au vu des résultats de l’étude.

a. Qu’est-ce que s’adapter ? Tout d’abord, il convient de mieux définir le concept central de cette étude : l’adaptation.

�� LL’’aaddaappttaattiioonn

Dans la Stratégie nationale d’adaptation au changement climatique, l’ONERC (2007) définit l’adaptation comme l’« ajustement des systèmes naturels ou humains face à un environnement changeant ». Cette définition, bien que générale, met déjà en exergue deux principes fondamentaux : on s’adapte toujours à quelque chose (« environnement changeant ») et cela se traduit par une modification (« ajustement ») qu’elle soit physiologique, technique, organisationnelle, comportementale... S’adapter suppose donc d’avoir d’abord identifié un changement (s’adapter à quoi ?) et les moyens d’y parvenir (comment s’adapter ?). Pour le GIEC (2001a), l’adaptation est une « réaction des systèmes naturels ou anthropiques aux stimuli climatiques réels ou prévus ou à leurs effets, en vue d’en atténuer les inconvénients ou d’en exploiter les avantages ». Trois nouvelles notions en ressortent :

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La notion d’impact, synonyme d’effet, se réfère aux modifications engendrées par le changement climatique sur un système.

Le concept de résilience, à l’origine utilisé en physique pour désigner la résistance d’un matériau au choc, a été introduit en écologie par C.S. Holling en 1973, pour décrire la persistance des systèmes naturels face à des perturbations. En 2004, Holling et ses collègues (Walker et al., 2004) définissent plus précisément la résilience des systèmes socio-écologiques comme « la capacité d’un système à absorber un changement perturbant et à se réorganiser en intégrant ce changement, tout en conservant essentiellement la même fonction, la même structure, la même identité et les mêmes capacités de réaction ».

L’ONERC (2007) définit l’aléa

comme un « événement naturel susceptible de se produire et dont on s’efforce d’évaluer la probabilité ». Il s’agit d’une manifestation d’un phénomène climatique susceptible d’occasionner des dommages (tempête, canicule, gel). On peut le caractériser par son intensité, sa localisation, sa durée et sa fréquence d’occurrence. Dans le cas du changement climatique, la modification des régimes de température, de pluie et de vent induisent une modification des aléas.

o Le changement climatique engendre des « stimuli climatiques » sur les systèmes. Lorsqu’ils provoquent des perturbations, on parle généralement d’aléas climatiques.

o Ces aléas engendrent des impacts qui peuvent être

positifs (« avantages ») ou négatifs (« inconvénients »). Les stimuli étant « réels ou prévus », leurs impacts peuvent être observés ou seulement pressentis. De même, ils peuvent être directs ou indirects (à travers d’autres systèmes)

o L’adaptation apparaît comme un moyen de gérer ces

impacts (« atténuer » ou «exploiter »). C’est une troisième définition inspirée de celle défendue par De Perthuis et al. (2010) que nous utiliserons par la suite car elle met l’accent sur la place du choix et de l’action des sociétés : l’adaptation est l’ensemble des évolutions d’organisation, de localisation, de techniques et de

comportement que les sociétés devront opérer pour limiter les impacts négatifs des changements

climatiques et maximiser leurs effets bénéfiques. Notons que l’ajustement des systèmes naturels disparait volontairement de la définition : ce dernier sera traité comme un impact du changement climatique sur les écosystèmes.

�� LLaa ccaappaacciittéé dd''aaddaappttaattiioonn eett ll’’aaddaappttaabbiilliittéé Une expression souvent utilisée pour traiter du sujet de l’adaptation est la capacité d’adaptation ou adaptabilité. Sa définition est souvent imprécise, renvoyant simplement au concept d’adaptation (GIEC5, 2001a) sans réellement définir ce que l’on met derrière le mot « capacité ». Tous les types de ressources sont évoqués par les auteurs (Winograd, n.d. ; Fuessel et Klein, 2002) : économiques, sociales, humaines, technologiques, institutionnelles… Quenault et Bertrand (2010) rappellent que certains auteurs assimilent l’adaptabilité à une combinaison de la résilience et de la résistance (aptitude à résister aux impacts sans subir de dégâts). Ceci induit évidemment une certaine confusion de termes. En réalité, la résilience repose sur deux notions fondamentales : la possibilité de réagir face à un changement (ce qui le distingue de la résistance) et le retour à un état d’équilibre proche du précédent (ce qui le distingue de la capacité d’adaptation). On pourrait considérer la résilience comme une capacité intrinsèque d’un système à absorber, sans être significativement modifié, des impacts du changement climatique.

5 « Capacité d’un système de s’adapter aux changements climatiques (...) de façon à atténuer les dommages potentiels, à

tirer parti des possibilités offertes et à faire face aux conséquences ».

Définition

Définition

Définition

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La capacité d’adaptation est souvent vue comme une caractéristique inhérente à un système, indépendante de la décision de s’adapter (Brooks, 2003). Cependant, le problème est plus complexe et s’il n’y a généralement pas d’adaptation sans décision, il n’y a pas de décision sans possibilité d’adaptation. C’est pourquoi, nous avons préféré adopter une approche plus globale qui combine facteurs « endogènes » et « exogènes» : par capacité d’adaptation nous entendons l’existence de

possibilités d’adaptation aux impacts du changement climatique et de moyens pour les mettre en

œuvre. La décision de s’adapter y est donc incluse. Ainsi l’adaptation au changement climatique est la mise en œuvre de la capacité d’adaptation d’un système (souvent lorsque la résilience de celui-ci est trop faible) afin d’en limiter les impacts négatifs et de tirer parti des impacts positifs. En effet, les activités humaines ne sont pas toutes égales face au changement climatique : certaines en bénéficieront (on parle alors d’opportunité) tandis que d’autres seront pénalisées du fait de leur vulnérabilité…

b. Le changement climatique, vecteur de nouvelles inégalités ? Les termes de vulnérabilité et de sensibilité sont souvent utilisés pour décrire les différences de fragilité des systèmes au changement climatique et justifier la nécessité de s’adapter. Cependant, « il n’y a pas davantage consensus sur la vulnérabilité elle-même et son lien à l’adaptation » (Quenault et Bertrand, 2010). En effet, sa compréhension est peut-être encore plus difficile. La définition quelque peu absconse du GIEC (2001a), pourtant reprise par d’autres auteurs (Fuessel et Klein, 2002) donne un aperçu de cette complexité : la vulnérabilité est la « mesure dans laquelle un système est sensible – ou incapable de faire face – aux effets défavorables des changements climatiques, y compris la variabilité du climat et les phénomènes extrêmes. La vulnérabilité est fonction de la nature, de l’ampleur et du rythme de la variation du climat à laquelle le système considéré est exposé, de la sensibilité de ce système et de sa capacité d’adaptation ». L’ONERC (2007), plus bref, la définit comme le « degré par lequel un système risque de subir ou d’être affecté négativement par les effets néfastes des changements climatiques ». Il en ressort deux principales caractéristiques de la vulnérabilité : o Elle traduit le fait que les systèmes peuvent être impactés de manière plus ou moins forte

(« degré ») par le changement climatique. En effet, face aux changements climatiques, les systèmes n’apparaissent pas égaux, à la fois en terme d’exposition, d’impacts et de capacité à y faire face. Par exemple, certaines catégories de population, de santé plus fragile ou étant isolées, apparaîtront plus vulnérables face à l’augmentation des canicules.

o Elle a une connotation négative (« effets néfastes »). En général, on oppose vulnérabilité à opportunité (effets positifs).

Deux approches sont alors possibles (Quenault et Bertrand, 2010 ; Kelly et Adger, 2000) : o Celle du « point d’arrivée » (« end

point »), illustrée sur la Figure 18 : la vulnérabilité représente « les impacts nets du changement climatique une fois l’adaptation mise en œuvre ». C’est la capacité d’adaptation qui détermine alors l’étendue de la vulnérabilité.

o Et celle du « point de départ » (« starting point ») : la vulnérabilité est Figure 18 : Exemple d'une approche "end point" de la

vulnérabilité (Fuessel et Klein, 2002)

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La notion de risque naturel est souvent associée à la probabilité de manifestation d’un aléa climatique, soit comme la probabilité de dommages suite à l’occurrence de cet aléa (Brooks, 2003). Cependant, ces approches quantitatives perdent de leur sens lorsqu’aucun calcul n’est possible. Nous choisirons une définition plus générale, où le risque est la conjonction spatio-temporelle d’un aléa et d’enjeux (humains, économiques ou environnementaux) pouvant être impactés. Cela permet de mettre l’accent sur cette dualité entre aléa et enjeux, souvent utilisée dans les politiques de gestion du risque. Dans le cas du changement climatique, les risques peuvent évoluer à travers la modification des aléas mais aussi de la présence d’enjeux voire même de leur définition.

La notion de sensibilité, parfois confondue avec celle de vulnérabilité, a souvent une définition très générale comme celle du GIEC (2001a), où c’est la « proportion dans laquelle un système est influencé, favorablement ou défavorablement, par des stimuli liés au climat ». Fuessel et Klein (2002) rapprochent le concept de sensibilité à celui de la relation dose-effet : plus un système est sensible à un aléa, plus les effets de ce dernier seront importants. Face au manque de définition claire et précise, nous avons fait le choix de considérer la sensibilité comme la part intrinsèque de la vulnérabilité d’un système.

une caractéristique générale d’un système, générée par de multiples facteurs et processus qui représente « une prédisposition du système à être affecté ou endommagé par les impacts du changement climatique ». Ici c’est la vulnérabilité qui conditionne la capacité d’adaptation.

Une autre approche, également utilisée dans la littérature (Brooks, 2003 ; Winograd, n .d. ; Provitolo, 2009), propose de définir deux types de vulnérabilité :

o La vulnérabilité « biophysique », qui correspond à la vision des climatologues : c’est la probabilité d’occurrence et d’impact d’un aléa climatique sur un système. Dans cette approche, proche de celle du risque, l’accent est mis sur les caractéristiques de l’aléa et l’exposition du système à cet aléa. Cela correspond à la deuxième partie de la définition du GIEC citée plus haut.

o La vulnérabilité « sociale » ou « inhérente », défendue par les sociologues : c’est un état préexistant du système (déterminants politiques, socioéconomiques, culturels et institutionnels) qui le rend susceptible de subir des dégâts s’il est exposé à un aléa. Cela correspond cette fois à la première partie de la définition du GIEC citée plus haut.

Dans le premier cas, la vulnérabilité est forcément liée à un aléa précis : on est vulnérable à la sécheresse, à une tempête etc. Dans le deuxième, la vulnérabilité peut être spécifique à un aléa (bâtiment mal isolé contre la chaleur par exemple), comme être générale (comme les populations pauvres).

Pour cette étude, nous avons choisi d’aborder la question de la vulnérabilité sous un angle assez large, intuitivement proche de la vulnérabilité « inhérente » et de l’approche « starting point ». En effet, il nous semble plus pertinent de travailler sur la réponse du système aux aléas seulement sur son exposition : cela permettra de comprendre l’inégale répartition des impacts et de leurs conséquences. Il serait alors possible d’identifier des cibles prioritaires d’actions permettant de réduire leur vulnérabilité, ce qui constitue en soi une adaptation. Ainsi, nous définissons la vulnérabilité comme la prédisposition d’un système, engendrée par différents

facteurs (intrinsèques et exogènes), à subir des impacts

négatifs d’un ou plusieurs aléas. La propension d’un système à être exposé à un aléa sera donc également prise en compte, ce qui rend cette définition plus large que les précédentes. La vulnérabilité « intrinsèque» du système est ici assimilée à la notion de sensibilité.

Définition

Définition

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c. Cadre méthodologique utilisé

La Figure 19 représente les différents concepts tels que nous les avons adoptés :

Figure 19 : Proposition de schéma reprenant des concepts associés à l'adaptation au changement climatique

Le changement climatique induit un changement d’exposition du système aux différents aléas. Selon la vulnérabilité du système, définie par ses caractéristiques intrinsèques (sensibilité) et exogènes, les impacts potentiels ou réels seront plus ou moins importants (qu’ils soient positifs ou négatifs). Nous considérons que c’est la conjonction de l’importance des impacts, de la résilience du système

et de sa capacité d’adaptation qui définit l’ampleur de l’adaptation et donc du changement du système. Ces trois facteurs influent différemment sur la modification du système : o Plus la résilience est forte, moins le système sera modifié ; o A l’inverse, plus les impacts sont importants, plus le système sera changé ; o Enfin, une faible capacité d’adaptation peut se traduire soit par un faible changement du

système soit par une mutation voire la disparition du système. C’est donc dans ce cadre méthodologique que nous avons travaillé. Nous avons notamment ciblé l’étude sur l’identification des impacts car ils sont relativement observables et mesurables en comparaison à la vulnérabilité ou à la résilience. Les différences d’impacts nous renseigneront sur les facteurs de vulnérabilité des systèmes. De même, nous avons recherché des pistes d’adaptation, qui nous ont alors éclairées indirectement sur les capacités d’adaptation. La résilience, elle, a été mise de côté car elle ne représente pas une modification importante des systèmes. Or un de nos objectifs est de voir en quoi le changement climatique remet en cause certaines activités humaines.

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2. Le choix d’une analyse d’abord en râteau Pour analyser les impacts du changement climatique et les adaptations, le projet initial (cf. page 11) envisageait une approche sectorielle puis transversale : en quoi est-elle justifiée ? Qu’entend-on par le mot « secteur » ?

a. Une méthodologie qui s’appuie sur un comité scientifique Même si des travaux ont déjà été réalisés par Alterre Bourgogne, cette étude reste assez exploratoire avec peu de bibliographie méthodologique sur laquelle se baser. C’est pourquoi nous avons souhaité réunir un comité scientifique de suivi afin de bien asseoir la méthodologie et les directions prises au cours de nos travaux. Celui-ci est composé (cf. Annexe 2) d’experts des sciences sociales (une sociologue de l’INRA et des géographes de l’Université de Tours) et des sciences physiques (deux climatologues du CRC) mais aussi des acteurs régionaux (ADEME Bourgogne et Conseil régional de Bourgogne) et bien évidemment les personnes encadrant cette étude (mes deux enseignants-tuteurs et ma maître de stage). Nous avons eu plusieurs échanges avec les différents membres du comité, notamment avec l’Université de Tours, sur des points de définition et de méthode. De plus, ce comité s’est réuni deux fois en visioconférence : o Le 1er avril 2011, soit un mois après le début de mon stage, sur la méthodologie de collecte et de

traitement des données ainsi que le planning prévisionnel ; o Le 28 juin 2011 pour un point sur l’avancement de l’étude, la suite des travaux et du plan de ce

mémoire. Ce comité nous a permis d’affiner notre approche, de nous poser de nouvelles questions et d’articuler les attentes à la fois scientifiques et sociétales comme nous allons le voir dans la suite.

b. Une analyse en deux temps Etant donnée la complexité des phénomènes liés au changement climatique, le comité a validé l’approche sous deux angles : l’analyse « en râteau » i.e. par thématique puis l’analyse transversale.

�� 11eerr tteemmppss :: ll’’aannaallyyssee ppaarr tthhéémmaattiiqquuee

Concernant l’analyse thématique, il nous faut, en premier lieu, convenir du système à étudier : qui s’adapte ? quel ensemble doit-on considérer ? On trouve dans la littérature des découpages différents : par secteurs économiques (agriculture, industrie…), géographiques (par régions), par milieux (littoral, montagne, ville) et par domaines transversaux souvent environnementaux (biodiversité, eau…). Le cadre de l’étude étant régional, le découpage géographique ne nous a pas semblé approprié (ce qui n’exclut pas une analyse des différences infrarégionales). Nous avons choisi d’aborder l’adaptation au changement climatique à travers l’analyse à la fois de « secteurs » économiques (agriculture, élevage, viticulture, sylviculture) et de « domaines » (santé, biodiversité, risques naturels, urbanisme et aménagement) même si les démarches ne sont pas tout à fait comparables.

�� 22èèmmee tteemmppss :: ll’’aannaallyyssee ttrraannssvveerrssaallee Nous n’avons pas défini le cadre de l’analyse transversale a priori. En effet, cela nécessite de maîtriser le sujet mais aussi d’avoir pris un recul suffisant. Elle a donc été construite au fur et à

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mesure de l’étude. Fruit de nos réflexions basées sur les recherches bibliographiques, les enquêtes et les échanges avec les membres du comité de suivi et ma maître de stage, cette analyse a pris la forme d’une grille d’analyse des impacts et des pistes d’adaptation (cf. IV).

�� DDéérroouulleemmeenntt ddee ll’’ééttuuddee Afin de conduire ces deux analyses, des travaux préalables ont dus être réalisés : identification des thématiques à étudier, des acteurs à rencontrer, recherches bibliographiques, enquêtes, rédaction de documents intermédiaires… Le planning des six mois de stage a dû être rapidement précisé (cf. Figure 20). De plus, dans le cadre de la participation d’Alterre Bourgogne à la définition d’orientations stratégiques régionales (cf. page 11), il a été décidé que nos travaux alimenteraient les débats du séminaire du 9 juin 2011 sur l’adaptation au changement climatique organisé dans le cadre de la concertation du SRCAE. Il a alors fallu adapter notre étude à cet impératif en termes de rythme mais aussi de contenu…

c. Les choix de thématiques réalisés Dans la bibliographie, l’adaptation au changement climatique porte sur de nombreux thèmes : agriculture, viticulture, pêche, forêt, artisanat, industrie, habitat, urbanisme, bâtiment, énergie, transport, santé, commerce, banque et assurance, formation, patrimoine, sport, loisirs, risques, eau, biodiversité, montagne, littoral, tourisme…. Cela n’est pas étonnant car le changement climatique peu potentiellement toucher tous les aspects de la vie humaine. Il a donc fallu faire une sélection des thématiques les plus importantes pour la Bourgogne. Plusieurs critères de choix entrent en compte : la dépendance du système au climat mais aussi l’importance économique, sociale, environnementale et paysagère de la thématique en Bourgogne. Voici les thématiques que nous avons choisi d’étudier et leur justification : o La biodiversité : elle est aux premières loges du changement climatique. Etant à la croisée de

différentes influences climatiques, il est intéressant d’analyser comment la biodiversité bourguignonne va évoluer… De plus, il s’agit d’une thématique qui prend de plus en plus d’importance en Bourgogne comme ailleurs.

o La forêt : elle recouvre près d’un tiers du territoire régional et a une importance économique non négligeable, la Bourgogne étant la première région de production de bois brut à partir de feuillus et de Douglas6. Elle est assez dépendante du climat, notamment des évènements extrêmes.

o La vigne : présente sur trois des départements de la région (la Nièvre est rattachée au vignoble de la Loire), avec ses 600 « climats7 », elle fait partie du patrimoine de la région et de son image de marque (99% du vignoble en AOC). Elle est fortement climato-dépendante et c’est un poids économique fort car elle compte pour 30% (BIVB, 2011) de l’emploi et de la valeur de la production agricole régionale. C’est aussi une attractivité touristique.

o Les grandes cultures : La production agricole, fortement corrélée au climat, constitue un des éléments caractéristiques de la Bourgogne, spécialisée dans les cultures d’hiver (blé, orge, colza).

6 Agreste Bourgogne, 2007

7 « Climat » est un terme bourguignon signifiant « lieu-dit »

Figure 20 : Schéma des différentes étapes de l'étude

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o L’élevage : responsable des paysages de bocage, l’élevage bovin allaitant (Charollais) est le troisième grand type de production agricole en Bourgogne. Basé sur des systèmes herbagés, les impacts du changement climatique sont à analyser sur la production de fourrages et les conséquences sur la conduite du troupeau.

o La santé : c’est un domaine d’importance sociale forte. Même s’il n’y a, a priori, pas de spécificités régionales, la canicule de 2003 a eu des conséquences suffisamment fortes en Bourgogne pour justifier de se pencher sur la question.

o L’urbanisme et l’aménagement du territoire : le changement climatique pourrait remettre en question l’occupation du sol, l’organisation de nos sociétés et nos modes de vie. Dans le cadre d’une approche régionale, l’urbanisme et l’aménagement peuvent apporter une dimension spatiale en lien avec l’habitat et les activités humaines à la question de l’adaptation.

o Les risques naturels : même si en Bourgogne ceux-ci sont assez peu de nature cataclysmique, ils peuvent impacter fortement des activités économiques et occasionner des dégâts matériels. Ils sont aussi très dépendants du climat : leur ampleur et leur fréquence pourraient être significativement modifiées…

D’autres thématiques ont été écartées pour différentes raisons, notamment : o Le domaine de l’eau car il est déjà étudié par ailleurs (cf. page 11) ; o Le tourisme, celui-ci étant relativement faible en Bourgogne (cf. page 2) ; o L’industrie du fait de sa faible dépendance au climat (du moins à court et moyen terme) et du

peu de données et de spécificités régionales. o Le secteur énergétique, peu présent en Bourgogne. Une fois la méthodologie assise et les thématiques d’étude définies, la question est maintenant de savoir comment concrètement récolter les données nécessaires et comment les organiser.

3. Méthode de collecte et de traitement des données

a. Une approche combinant objectivation et perception … Le changement climatique est encore un sujet contesté, il est nécessaire d’objectiver ses impacts, faits et chiffres à l’appui. Du fait de sa complexité, cela en fait un sujet de recherche mais, pour le moment, peu d’informations sont réellement disponibles. Les avis des experts doivent alors souvent être complétés par la perception des acteurs. Celle-ci n’est pas sans intérêt car c’est souvent sur elle que se basent des décisions et la mise en œuvre d’actions. Pour ces différentes raisons, nous avons décidé, avec l’appui du comité de suivi, de baser l’étude à la fois sur des données « chaudes » provenant d’enquêtes auprès d’experts et d’acteurs régionaux et sur des données « froides » tirées de la bibliographie. Cette double approche nous a permis de brosser un tableau assez complet des enjeux que représente actuellement l’adaptation au changement climatique en Bourgogne. Ces deux approches ont été menées de front, pour en comprendre les différences et les complémentarités. Une synthèse bibliographique a été réalisée pour chaque thématique en amont des enquêtes afin d’avoir un aperçu des principaux impacts et pistes d’adaptation et de pouvoir mieux approfondir les enquêtes. Les enquêtes étaient ensuite retranscrites sous forme de compte-rendu. Enfin des synthèses thématiques ont été rédigées afin de réunir les deux types de données dans un même document tout en les discriminant (données issues des enquêtes en italique). Elles sont disponibles en Annexes 5 à 12.

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b. … Basée sur des enquêtes … Etant donné le temps imparti, nous avons décidé d’enquêter trois à cinq personnes par thématique (voire plus pour les secteurs de la vigne et de la forêt). Cela signifie que, à l’instar des thématiques, il a fallu opérer des choix concernant le ciblage des experts à enquêter. Nous avons tenté de couvrir l’ensemble des maillons des secteurs et des domaines : recherche, organismes professionnels, institutions, collectivités… Deux domaines ont été traités de manière différente (biodiversité et santé), une entrée par thème (respectivement par ensembles d’espèces et types de maladies) nous ayant semblé plus pertinente. Le choix final des personnes à contacter a été réalisé en concertation avec ma maître de stage à partir de ses propres contacts ainsi que de mes recherches sur les sites internet des divers organismes. Le chargé de mission « biodiversité » d’Alterre Bourgogne (David Michelin) m’a également conseillé certains de ses contacts. Enfin, d’autres personnes ressources (environ 3-4) m’ont été indiquées au fur et à mesure des enquêtes. Au final, quarante personnes ont été enquêtées. La liste des personnes rencontrées par secteur est donnée en Annexe 4. La plupart des entretiens ont été menés en face à face individuel (hormis deux par téléphone). Seul le domaine de l’urbanisme et de l’aménagement a fait l’objet d’une enquête collective sous forme de groupe de travail afin d’avoir une vision globale sur cette thématique très transversale. Celle-ci a été complétée par un entretien individuel ultérieur, en réaction aux résultats du groupe de travail. Lors de la prise de contact (par mail et ou par téléphone), peu d’informations sur le sujet étaient données afin de ne pas influencer la réflexion des experts. Le sujet de l’adaptation étant souvent mal connu ou du moins peu travaillé, nous avons opté pour des entretiens assez informels à base de questions ouvertes. La grille d’entretien n’a pas non plus été fournie afin d’obtenir des réactions les plus spontanées possibles. Cette dernière a été travaillée avec ma maître de stage puis comparée à celle réalisée par des étudiantes d’AgroSup’Dijon ayant réalisé des enquêtes similaires au Pays Sud Bourgogne (cf. page 11). Elle a ensuite été soumise au comité scientifique pour avis. Elle est disponible en Annexe 3. Après une brève présentation de l’étude, des thématiques abordées et des acteurs rencontrés, la trame des entretiens était généralement la suivante : o Présentation de l’enquêté, de son travail, de sa structure : cela permet de mettre en confiance

la personne, de mieux cerner son champ de compétence et d’identifier d’éventuelles questions concernant la prise en compte des impacts du changement climatique ;

o Présentation des spécificités de la thématique en Bourgogne et de ses liens avec le climat ; o Enumération des impacts du changement climatique sur la thématique, en essayant de

distinguer s’ils sont observés ou pressentis, directs ou indirects, et d’identifier s’ils sont ressentis comme positifs ou négatifs et pourquoi. Cela a mené à l’identification de facteurs de vulnérabilité ;

o Identification de pistes d’adaptation déjà mises en place ou en réflexion en mettant en avant les freins et les opportunités ;

o Conseils sur d’autres acteurs à rencontrer ou des références bibliographiques à consulter. Une question sur la gouvernance de l’adaptation (Qui doit donner l’impulsion ?) a été rajoutée après la réunion du 1er comité scientifique alors que certains acteurs avaient déjà été enquêtés dans les secteurs de la vigne et de la forêt. Nous ne l’avions pas incluse à l’origine car le sujet nous semblait trop « neuf » pour que les enquêtés y aient réfléchi, ce qui, a posteriori c’est révélé plutôt vrai.

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Notons que cette étude faisant partie d’une dynamique régionale, il n’était pas nécessaire de réaliser des enquêtes exhaustives afin de récolter le maximum de données. L’objectif était plus de faire un point sur l’avancement de la réflexion et de l’action régionale en termes d’adaptation. Cette thématique sera l’occasion d’autres enquêtes et réunions ultérieures permettant d’entretenir une certaine dynamique territoriale.

c. … Et la concertation Du fait de notre participation à l’organisation du séminaire sur le volet adaptation du SRCAE, en parallèle à l’étude, nous avons profité de cette occasion pour soumettre nos premiers résultats à un plus large public et prendre du recul. L’objectif de ce séminaire était à la fois de sensibiliser les acteurs à l’adaptation au changement climatique et d’identifier des orientations régionales. Il a été construit en deux étapes avec, le matin des conférences du CRC, de Météo France et d’Alterre Bourgogne exposant les enjeux de l’adaptation en Bourgogne et l’après-midi trois ateliers thématiques de concertation animés par un bureau d’études (Aequilibrium Conseil). Les ateliers, réunissant chacun une trentaine de personnes, se sont déroulés en plusieurs temps : o Présentation des impacts observés sur les thématiques de l’atelier par un orateur (membre du

comité de pilotage du séminaire) et expression accords et désaccords des participants ; o Déroulement similaire pour les impacts pressentis du changement climatique ; o Expression des participants sur des pistes d’adaptation en partant d’une feuille blanche (afin de

ne pas influencer les résultats) en deux ou trois sous-groupes ; o Echange les sous-groupes pour comparer leurs résultats et préparer une synthèse à présenter en

plénière. Notre participation à ce séminaire a été de plusieurs ordres et nous en avons tiré parti de différentes manières : o Nous avons pris part à toutes les réunions de préparation (quatre) qui ont été le lieu de

nombreuses questions, nous obligeant à prendre du recul ; o Nous avons eu la charge de préparer les trois ateliers prévus pour l’après-midi, qui reprenaient

les principales thématiques de l’étude (forêt-vigne ; grande culture-élevage-biodiversité ; urbanisme et aménagement-risques naturels). Cela a été l’occasion de synthétiser les principaux

résultats ; o Nous avons présenté nous-mêmes les impacts recensés lors des ateliers8, ce qui nous a permis de

confronter nos résultats à d’autres acteurs du territoire et de les compléter. Par ailleurs, notre implication dans ce séminaire m’ont conduit à produire deux nouveaux types de documents, qui n’étaient pas initialement prévus : les présentations sur les impacts observés et prévus du changement climatique nécessaires pour chaque atelier, et des fiches thématiques. A destination des animateurs du bureau d’étude et des orateurs, ces dernières synthétisent les principaux impacts et pistes d’adaptation par thématique en deux à trois pages afin qu’ils puissent avoir un aperçu du sujet et aient la possibilité de s’y référer lors des débats. Elles sont disponibles en Annexes 13 à 20. Un code couleur a d’ailleurs été utilisé pour distinguer les points qui font spécifiquement débat et les points qui sont globalement consensuels mais importants à aborder. A posteriori, ces fiches thématiques, associées aux synthèses plus longues, pourront également être utilisables par les animateurs des PCET bourguignons (sous-projet « accompagner les territoires »).

8 Atelier grandes cultures-élevage-biodiversité : Hélène Toussaint (maître de stage) ; Atelier vigne-forêt : Anne-Cerise Tissot.

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Ainsi, au-delà de l’objectif initial de réaliser le sous-projet « Analyser les enjeux thématiques », mon stage a contribué à d’autres sous-projets (cf. Figure 21), qui ont eux-mêmes permis de mettre en perspective mon travail.

Figure 21 : Utilisation des travaux et des documents réalisés dans les sous-projets du projet "Adaptation au changement climatique en Bourgogne"

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IIIIII.. LL’’AADDAAPPTTAATTIIOONN EENN BBOOUURRGGOOGGNNEE :: EETTAATT DDEESS LLIIEEUUXX DDEESS CCOONNNNAAIISSSSAANNCCEESS EETT

DDEESS AACCTTIIOONNSS PPAARR TTHHEEMMAATTIIQQUUEE

Le contexte et les choix méthodologiques ayant été exposés, cette partie présente les principaux résultats obtenus lors de cette étude pour chacune des thématiques enquêtées.

1. Des niveaux de connaissances hétérogènes

a. Une difficulté d’estimer la qualité des connaissances Afin d’avoir une idée générale de l’état d’avancement des connaissances du sujet de l’adaptation au changement climatique en Bourgogne, il nous a semblé intéressant d’analyser et de comparer les informations issues de la bibliographie (« froides ») et des enquêtes (« chaudes ») par thématique. Il est toutefois assez difficile de réellement quantifier la richesse de ces données. C’est pourquoi nous en fournissons ici une évaluation qualitative (cf. Tableau 2). Nous avons apprécié la connaissance du sujet par les enquêtés selon : la durée d’entretien, le nombre d’impacts et de pistes d’adaptation fournies, la précision des éléments donnés, leur pertinence par rapport à la bibliographie, la prise en compte du sujet dans leur travail… Concernant la richesse de la bibliographie, ont été considérés : le nombre de publications trouvées, l’existence d’ouvrages récapitulatifs comme d’articles spécifiques à certains impacts et/ou pistes d’adaptation, le nombre d’impacts et de pistes d’adaptation évoqués… Il y a évidemment de nombreux biais à la comparaison des thématiques et des deux types de données : les thématiques ont été définies différemment, le nombre d’enquêtés varie, le choix des enquêtés a été relativement arbitraire, ma connaissance préalable de certaines thématiques (grandes cultures, élevage) et ma méconnaissance d’autres (urbanisme, santé) peuvent aussi influer…

b. Entre connaissance des experts et perception des acteurs On constate sur le Tableau 2 que la connaissance des enquêtés et la richesse de la bibliographie sont souvent au même niveau, ce qui semble assez logique. Trois thématiques font exception, sans toutefois présenter un écart maximal (« faible » contre « bonne ») : la biodiversité et les grandes cultures présentent une bibliographie moyennement riche mais la connaissance du sujet par les

Domaines et secteurs

Nombre d'enquêtés

Connaissance du sujet par les

enquêtés Richesse de la bibliographie

Biodiversité 5 + ++

Forêt 6 +++ +++

Vigne 7 +++ ++

Grandes cultures 5 + ++

Elevage 4 + +

Santé 5 ++ ++

Urbanisme et aménagement 5 + +

Risques naturels 3 + +

Total 40

+ : faible ++ : moyenne +++ : bonne

Tableau 2 : Récapitulatif du nombre d'enquêtés et évaluation de la richesse des données récoltées

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enquêtés est relativement faible ; à l’inverse, les enquêtés viticoles sont généralement très au fait du sujet alors que la bibliographie est moyennement riche. Ces différences sont difficiles à expliquer, sauf peut-être pour la biodiversité, où la plupart des impacts du changement nécessitent des observations fines, qui ne correspondent pas à la réalité du terrain. La connaissance doit alors passer par des travaux de recherche qui ne sont pas conduits en Bourgogne… Les secteurs de la vigne ainsi que de la forêt ont été les plus approfondis avec respectivement sept et six enquêtés qui avaient généralement une bonne connaissance du sujet. La forêt est également la thématique la plus riche au niveau bibliographique. Une hypothèse d’explication serait que ces deux secteurs ont des stratégies à long terme du fait de la durée de vie des arbres (50-100 ans) et de la vigne (40-60 ans) et sont concernés par les impacts économiques du changement climatique. Leurs choix d’aujourd’hui sont leurs choix pour demain car ils auront des conséquences sur plusieurs dizaines d’années. Par exemple, un Chêne planté aujourd’hui devra se développer sous les climats d’aujourd’hui à 2100… Une différence notable entre ces deux secteurs est que la vigne a à la fois des objectifs de long terme mais aussi de court terme avec des revenus annuels liés à l’effet millésime. Cela pourrait expliquer le fait que les données bibliographiques sont un peu moins conséquentes. De plus, les effets du changement climatique sont déjà assez bien observés dans ces deux secteurs, ce qui rend l’adaptation d’autant plus légitime. Les connaissances et réflexion les moins avancées sont dans le domaine de l’élevage, des risques

naturels et de l’urbanisme et l’aménagement. En ce qui concerne l’élevage on peut avancer l’hypothèse que la situation actuelle est déjà critique en Bourgogne, que les acteurs régionaux ont d’autres sujets prioritaires, de plus court terme, à traiter. De plus, les effets du changement climatique ne sont pas encore constatés de manière claire. Pour les risques naturels et l’urbanisme, ce sont des domaines fortement réglementés (Etat en position centrale avec des fonctionnaires régulièrement mutés) et segmentés laissant peu de place à l’initiative et à l’implication des acteurs locaux (lourdeur administrative). Enfin, la biodiversité, la santé et les grandes cultures sont dans un état d’avancement

intermédiaire. Cela tient sans doute, pour les deux premiers, d’un manque d’observations fines et de coordination des différents acteurs de ces domaines malgré des forts impacts potentiels sur ces secteurs. Concernant les grandes cultures, il s’agit d’un secteur « habitué » à s’adapter sans cesse au climat et dont les préoccupations ne dépassent généralement pas quelques années. Toutes ces différences mettent en avant le fait que l’on peut qualifier certains enquêtés d’ « experts » car ils ont des connaissances relativement fines des impacts, tandis que d’autres transmettent leur perception d’ « acteurs », tournée vers la prise de décision et l’action. Dans les secteurs les plus avancés comme la vigne ou la forêt, cette distinction n’est pas aussi nette, beaucoup d’acteurs étant également des experts. A l’inverse, dans les domaines comme les risques naturels, où la réflexion est moins aboutie, les enquêtés sont principalement des acteurs.

c. Quelques certitudes et de nombreuses incertitudes Il est important de noter que globalement, il y a une bonne cohérence entre les données fournies

par les différents enquêtés et la bibliographie. Comme cela était attendu, cette dernière fournie généralement des données plus quantifiées et précisent les processus impliqués tandis que les enquêtés ont permis de décliner ces données sur le territoire bourguignon. De même, les ateliers du séminaire du SRCAE sur l’adaptation ont confirmé nos résultats pour toutes les thématiques abordées à cette occasion, aucune contradiction importante n’étant apparue. Certains impacts, communs à différentes thématiques, sont ressortis assez fortement :

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o Une accélération des rythmes biologiques du fait d’une satisfaction plus rapide et plus fréquente des besoins en chaleur : les principaux phénomènes phénologiques9 sont plus précoces et des désynchronisations entre espèces sont à prévoir.

o Une remontée générale des aires géographiques des espèces vers le Nord et en altitude du fait de l’augmentation des températures : une augmentation de 1°C de la température décalerait les enveloppes géographiques d’environ 160km vers le Nord ou de 160m en altitude.

o Une modification des dynamiques des pathogènes par la conjonction de ces deux précédents phénomènes : accélération des cycles de développement voire augmentation du nombre de générations, désynchronisations entre les ravageurs et leurs hôtes et remontée des aires de répartition des insectes et des maladies qu’ils peuvent transmettre. Etant donné la multiplicité et la complexité des phénomènes impliqués, il est très difficile de prévoir l’évolution de la pression globale des pathogènes, d‘autant plus que la sensibilité des hôtes devrait aussi être modifiée.

o Une augmentation des problèmes liés aux canicules et à la sécheresse, qui est favorisée par la combinaison de l’augmentation de l’ETP10 du fait de la hausse des températures et la baisse prévue des précipitations printanières et estivales.

o Une croissance accélérée des végétaux. La principale cause invoquée est l’augmentation de la teneur en CO2 atmosphérique car celui-ci stimule la photosynthèse. Dans certains cas, l’allongement de la période de végétation renforce cet effet. Les incertitudes portent sur l’éventuel frein que peut constituer l’augmentation des sécheresses ainsi que sur les conséquences de cette croissance accélérée sur la qualité des produits.

Ces grandes familles d’impacts se déclinent et sont gérées différemment selon les thématiques.

2. Des thématiques différemment préparées au changement

climatique Les points qui vont être présentés résument l’essentiel des résultats par thématique, en insistant sur les pistes d’adaptation. L’ordonnancement des données a été adapté à la logique de chaque thématique. Les synthèses plus détaillés et avec les références bibliographiques (ici non indiquées pour plus de lisibilité) sont en Annexes 5 à 12.

a. La biodiversité : le grand témoin du changement climatique ?

Le suivi systématique des espèces est trop récent en Bourgogne pour analyser de manière fine les impacts du changement climatique sur la biodiversité. Cependant, quelques grandes tendances peuvent être données.

�� LL’’aaddaappttaattiioonn ddeess eessppèècceess Schématiquement, face au changement climatique, les espèces peuvent s’adapter de deux manières (non exclusives) grâce à leur plasticité phénotypique et/ou à la sélection génétique : o Par des modifications physiologiques et comportementales (cf. page 25) mises en avant par

diverses études nationales et internationales mais relativement peu constatées en Bourgogne, faute d’observations (sauf dans le cas de la vigne) ;

9 La phénologie est l’étude de l’occurrence d’événements périodiques de la vie animale et végétale en relation avec le

climat, par exemple la floraison des plantes, la coloration des feuilles à l’automne, l’arrivée des oiseaux migrateurs etc. (Source : www.obs-saisons.fr/about/phenologie) 10

L’ETP ou évapotranspiration potentielle correspond à la quantité d'eau (lorsque celle-ci n’est pas limitante) totale transférée du sol vers l'atmosphère par évaporation au niveau du sol et transpiration des plantes.

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o En changeant leur aire de répartition : en Bourgogne, l’apparition et la progression de trois espèces d’oiseaux (le Guêpier d’Europe, la Fauvette mélanocéphale et le Héron garde-bœufs) ainsi que d’une plante (l’Ambroisie à feuilles d’armoise) seraient dues à ce phénomène.

Ces adaptations du vivant au changement climatique peuvent être des impacts directs comme indirects (cf. Figure 22). En effet, les adaptations d’une espèce λ auront des conséquences sur d’autres espèces et vice-versa. Cela peut provoquer des

désynchronisations entre niveaux trophiques, espèces compétitives ou ayant des stratégies de coopération…

Ces modifications impacteront les habitats et représentent des risques d’extinction d’espèces mais aussi d’invasions, également favorisés par d’autres impacts anthropiques (fragmentation des milieux…). Enfin, le changement climatique aura sans doute des impacts directs sur les habitats et donc sur les espèces présentes. En Bourgogne, les points de surveillance concernent principalement les habitats semi-montagnards et les tourbières du Morvan ainsi que les habitats aquatiques.

�� LLeess ccoonnssééqquueenncceess ssuurr llaa bbiiooddiivveerrssiittéé Les conséquences de ces impacts sur les trois échelles traditionnelles de la biodiversité (génétique, spécifique et éco-systémique) sont relativement mal connues et rarement évoquées au cours des entretiens. Notons qu’à l’échelle européenne, les résultats du LECA (Laboratoire d’Ecologie Alpine) indiquent que si l’on suit le scénario A1 (comme c’est le cas aujourd’hui) on aurait alors une perte de 60 à 70% des espèces végétales en Bourgogne.

�� QQuueellllee aaddaappttaattiioonn ddee llaa ggeessttiioonn ddee llaa bbiiooddiivveerrssiittéé ?? Ces résultats posent la question de l’adaptation des modes de gestion de la biodiversité. La réflexion est assez neuve et donc relativement pauvre, que soit dans la littérature ou sur le terrain. On peut tout de même citer quelques pistes et les questions fondamentales que cela pose. Le changement climatique n’est actuellement pas pris en compte dans les politiques de gestion et de conservation de la biodiversité : on ne rend pas une espèce prioritaire où au contraire délaissée selon l’impact qu’aura le changement climatique sur elle. Les décisions sont prises par rapport à la rareté de l’espèce et à son évolution (mais pas la cause de cette évolution). Cependant, au vu des résultats précédents, il est clair que les habitats et les espèces vont évoluer avec le changement climatique. Or pour les experts rencontrés, il n’y a pas lieu de protéger des espèces qui ne sont plus adaptées au climat : il serait impensable et impossible d’aller contre l’évolution du climat.

L’idée serait plutôt de faciliter l’adaptation des espèces. Les corridors biologiques permettraient par exemple aux espèces de changer de milieu. En ce qui concerne les espaces protégés, on peut se poser la question de la pertinence de leur emplacement pour demain : seront-ils encore valables dans un futur marqué par le changement climatique ? La désignation devrait peut-être plutôt se fonder, non seulement sur la valeur actuelle des zones caractéristiques de la diversité biologique,

Figure 22 : Proposition de schéma des impacts directs et indirects du changement climatique sur les espèces

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mais aussi sur la valeur future escomptée. On peut ainsi imaginer des limites de zones protégées plus fluctuantes, modifiables en fonction de l’évolution de la distribution de la flore ou de la faune protégée. La difficulté évidente de mise en place de tels systèmes explique sans doute pourquoi ils n’ont jamais été testés.

b. La forêt : entre croissance et dépérissements

L’aval de la filière forestière (première et deuxième transformations) ne témoigne que de peu d’inquiétude face au changement climatique contrairement aux gestionnaires forestiers. Cependant, elle devra penser à s’adapter aux futures caractéristiques des arbres qui seront à disposition… En effet, le changement climatique risque de modifier les forêts bourguignonnes à travers des impacts à la fois positifs et négatifs. Les plus craints sont ceux liés aux évènements extrêmes car ils ont des conséquences désastreuses sur plusieurs années. Cependant, il n’y a pas de tendance claire de leur évolution en France. A l’inverse d’autres effets sont assez bien décrits dans la littérature et par les acteurs…

�� UUnnee ccrrooiissssaannccee aaccccéélléérrééee mmaaiiss jjuussqquu’’àà qquuaanndd ?? Une accélération de la croissance des arbres a été nettement enregistrée en Bourgogne comme dans le reste l’hémisphère Nord. Elle s’explique par l’augmentation de la teneur en CO2 atmosphérique (cf. page 25) et l’allongement de la période de végétation. En effet, une augmentation de 1°C de la température annuelle se traduit en moyenne par un débourrement plus précoce de 6 jours (cf. page 25) et un jaunissement retardé de 5 jours induisant une augmentation de la durée de la saison de végétation d’une dizaine de jours. Même si les conséquences de cette croissance accélérée sont encore mal appréhendées, certains experts évoquent la possibilité d’un accroissement de la sensibilité des arbres aux contraintes du milieu et d’une dégradation des propriétés technologiques du bois notamment pour le Chêne à merrain (destiné à la fabrication de tonneaux) qui doit croître lentement.

Par ailleurs, cette accélération de la croissance peut se heurter aux deux principales limitations de l’effet du CO2 atmosphérique : l’alimentation en eau et la disponibilité en éléments nutritifs. L’effet fertilisant des pollutions azotées (liées aux activités agricoles et industrielles) a pour le moment permis de suivre le rythme de croissance mais on peut se demander jusqu’à quand cela sera le cas. Par ailleurs, les sécheresses, qui devraient être de plus en plus fréquentes (cf. page 25), pénaliseront fortement la croissance des arbres, et ce sur plusieurs années. Si, globalement, les feuillus y sont plus résistants que les résineux (différences de régulation de la transpiration), certaines essences présentes en Bourgogne sont particulièrement sensibles (Chêne pédonculé et Hêtre) du fait de leurs besoins importants en eau. Les conditions édaphiques des peuplements peuvent également influer sur leur vulnérabilité à la sécheresse : le type de sol, l’exposition, l’altitude… Enfin, le changement climatique induirait le développement de certains parasites et maladies (cf. page 25). L’exemple le plus connu est la remontée de la chenille processionnaire du pin (27km par décennie au cours des 30 dernières années). Le développement de certaines maladies thermophiles (encre du Châtaignier et du Chêne, oïdium du Chêne…) pourrait également s’accentuer.

�� VVeerrss uunnee nnoouuvveellllee rrééppaarrttiittiioonn ddeess eesssseenncceess ??

De la même manière que les parasites remontent vers le Nord, les aires de répartition des essences changent avec l’augmentation des températures. Un déplacement altitudinal de certaines essences depuis 1905 a déjà été mis en évidence dans différentes régions de France. Des cartes de répartition

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potentielle de groupes d'espèces ont été établies pour 2100 selon les scénarios B2 et A2 du GIEC (cf. Figure 23). Une augmentation de la température moyenne de 2 °C entraînerait un triplement des

surfaces des espèces méditerranéennes (Olivier, Chêne vert, Pins) et une forte régression des espèces du groupe continental alors confinées au quart Nord-Est et aux zones montagneuses. Or les essences plus méridionales étant généralement de productivité plus faible, cela aurait des

conséquences importantes sur la production de bois des forêts françaises. En Bourgogne, on observerait une forte régression du Chêne pédonculé, de certains résineux ainsi que du Hêtre que l’on ne retrouverait plus que sur les versants exposés Nord et en altitude. Le Chêne vert, aujourd’hui limité par le gel printanier, pourrait apparaître et devenir commun Saône-et-Loire…

Si ces projections donnent de grandes tendances, ces résultats sont fortement discutés par les

experts car d’autres facteurs entrent en compte : concurrence des essences en place, fragmentation des espaces, types de sylviculture… De plus, la plasticité individuelle (difficile à prédire) et la diversité génétique intraspécifique des essences n’a pas été prise en compte. En effet, si la plupart des essences résineuses ont un potentiel génétique adaptatif relativement faible, de récents travaux ont montré que la capacité d’adaptation génétique du cortège d’espèces «chênes tempérés» est importante et rapide (évolutions fortes en une ou deux générations seulement). Mais ce potentiel d’adaptation s’exprimera-t-il dans le contexte d’une forêt souvent morcelée et artificialisée ? La révision du choix des essences soulève alors de nombreuses questions pour les gestionnaires : o Faut-il installer des essences adaptées aux cartes climatiques de 2050, ou de 2100 ? Et à quel

moment opérer cette transformation des peuplements ? Dès maintenant, à l’occasion de reboisements, ou ponctuellement, lorsque se manifesteront des dépérissements ? Aujourd’hui, on peut déjà remplacer les espèces actuellement mal-adaptées au contexte édaphique : dans bien des cas leur inadaptation s’accroîtra sous l’effet du changement climatique. Par exemple, en Bourgogne, les experts s’accordent pour dire qu’il ne faudra pas favoriser les essences en limite édaphique comme l’Epicéa en deçà de 700m d’altitude ou le Hêtre au niveau des plateaux calcaires (sols trop superficiels).

o Faut-il garder les mêmes essences mais aller rechercher de nouvelles provenances (du Sud par exemple) ? Ou bien implanter de nouvelles essences ? Pour le moment, en Bourgogne, le climat n’est pas suffisamment stable pour permettre l’installation d’essences méditerranéennes (risques de gel). Cependant, des tests à petite échelle sont réalisés sur différentes essences comme pour le Cèdre. La création de peuplements « améliorés » résistants à la sécheresse ou à de fortes températures est également discutée. Le FCBA11 souhaite conduire un tel programme sur le Douglas en Bourgogne.

11

Institut Technologique Forêt Cellulose Bois-construction Ameublement

B2 Répartition actuelle

Répartition en 2100

Figure 23 : Répartition actuelle et en 2100 des groupes d'espèces en France (Roman-Amat, 2007)

A2

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o Ne risque-t-on pas de sous-estimer les facultés d’adaptation des espèces et des écosystèmes et d’intervenir de façon inadéquate, voire néfaste ? La régénération naturelle des espèces adaptées à leur contexte stationnel permettrait une adaptation progressive des essences et le maintien d’un couvert lors du renouvellement du peuplement.

�� LLeess ccoonndduuiitteess ssyyllvviiccoolleess :: ddeess ssttrraattééggiieess dd’’aaddaappttaattiioonn ddiivveerrssiiffiiééeess

En matière de conduite sylvicole, plusieurs écoles s’affrontent au sein des experts : o Opter pour une dynamisation des sylvicultures avec des rotations plus courtes : cela permettrait

de diminuer la probabilité que le peuplement subisse des évènements extrêmes lors de son développement, de répondre à l’accélération de la croissance des arbres et de limiter les stades âgés où les peuplements sont plus sensibles. Un des inconvénients majeurs soulevé par les acteurs est le risque d’épuisement des sols.

o Accroître la stabilité des peuplements face aux aléas climatiques en repensant certaines pratiques sylvicoles (éclaircies, densités de plantation, amendements…). Elles viseraient à préserver la qualité des sols et à élaborer une conduite sylvicole économe en eau.

o Diversifier les peuplements par le mélange d’essences et/ou l’irrégularisation afin de « ne pas mettre tous les œufs dans le même panier ». En général plus coûteuses (car plus difficiles), ces techniques permettent une meilleure occupation verticale de l’espace aérien et souterrain (concurrence pour les ressources en eau et en éléments minéraux limitée), une meilleure résistance aux maladies et aux évènements climatiques des peuplements et une meilleure reprise de la croissance végétale après un évènement extrême. De plus, le mélange peut être une façon d’introduire progressivement des espèces plus adaptées aux conditions futures, sans trop anticiper la disparition des espèces actuellement dominantes. En Bourgogne, l’Office National des Forêts (ONF) propose par exemple de privilégier des Chênaies mixtes au niveau de la plaine de Saône et du Nivernais avec du Chêne pédonculé, plus productif et du Chêne sessile plus résistant à la sécheresse. En fonction des systèmes de commercialisation et d’exploitation, ces types de gestion ne sont toutefois pas applicables partout. En Bourgogne, il est actuellement en place dans certaines forêts de feuillus et commence à être développé pour les résineux.

c. La vigne : des impacts positifs mais jusqu’à quand ?

Les conséquences du changement climatique sur la vigne commencent à être bien connues. Elles ont notamment fait l’objet d’un colloque international « Réchauffement climatique, quels impacts probables sur les vignobles ? » sous l’égide de la chaire UNESCO Vin et Culture (Perard et al., 2007).

�� UUnnee mmeeiilllleeuurree mmaattuurraattiioonn eett uunnee aauuggmmeennttaattiioonn ddeess rreennddeemmeennttss La hausse des températures a déjà provoqué une accélération générale de la phénologie (cf. page 25) de la vigne (débourrement excepté) permettant une meilleure maturation des raisins. On vendange maintenant trois semaines à un mois plus tôt qu’avant la rupture climatique de 1987 dans des conditions plus sèches, peu propices à la pourriture grise (qui est le principal problème sanitaire du vignoble bourguignon). En plus d’être décalées, les interventions se concentrent dans le temps du fait du rapprochement des cycles des vignobles tardifs et précoces lié au raccourcissement de la période de végétation de la vigne. Ces phénomènes induisent donc des modifications de l’organisation du travail qui constituent alors une première adaptation du secteur. En parallèle, une augmentation du poids des grappes de près de 50% (de 40g à 60g) a été observée depuis 1994 chez les principaux cépages bourguignons (Pinot noir et Chardonnay), avec toutefois de fortes variations interannuelles. Cette tendance est principalement attribuée à l’effet du CO2 (cf. page 25) mais aussi à un phénomène plus général : l’augmentation de vigueur des ceps (mesurée par

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le diamètre des sarments), elle aussi impactée par le changement climatique. Plus un pied est vigoureux, plus il produira de grappes et plus celles-ci seront grosses. Bien qu’a priori il soit intéressant d’avoir des rendements plus élevés, cela peut aussi avoir des conséquences négatives : effet de dilution des tanins et des arômes du fait de l’augmentation du nombre de raisins et de leur taille, dépassement du rendement maximal12 fixé par appellation, sensibilité accrue aux maladies... Par ailleurs, d’autres impacts, pressentis par les acteurs, soulèvent des inquiétudes car ils pourraient contrebalancer cette augmentation de rendement : o Une augmentation trop importante du stress hydrique et du rayonnement (risque de grillure)

induirait des effets notables, négatifs sur la croissance de la vigne ; o Une évolution du gel printanier est crainte mais le réchauffement climatique induisant des effets

antagonistes, il est difficile de dire quel paramètre prédominera (il semble diminuer dans le Chablisien);

o Une aggravation du risque d’érosion, avec des précipitations hivernales plus importantes menant à une perte des éléments fins du sol et donc d’une partie du « terroir13 » ;

o Une remontée de maladies venues du Sud (cf. page 25) pourrait aussi poser problème. Mais les avis des experts bourguignons divergent : certains observent une remontée de plus en plus fréquente de l’oïdium, un développement des maladies du bois, ou encore de la flavescence dorée (remontée de la cicadelle).

�� QQuueell eeffffeett ssuurr lleess vviinnss ??

En Bourgogne, on observe plutôt des effets positifs sur la qualité du vin avec de meilleurs

millésimes, plus faciles à obtenir que dans les années 1970. Ceci peut s’expliquer par une meilleure maturation des vins précédemment évoquée et l’effet d’un stress hydrique modéré plus fréquent. Mais jusqu’à quand le changement climatique sera-t-il bénéfique sur la qualité des vins ? Si les vins de Bourgogne d’aujourd’hui ne sont déjà plus les mêmes que ceux des années 1970, ceux de demain seront encore différents. Plusieurs problèmes pourraient se poser : un stress hydrique qui devient excessif, une augmentation de la teneur en sucres plus rapide que celle des composés aromatiques, une dégradation de la qualité aromatique des vins du fait de nuits moins fraîches, une dynamique thermique de la vinification perturbée par la récolte de raisins « chauds »… C’est le Pinot noir, cépage particulièrement difficile à conduire, qui risque d’être le plus impacté par ces processus car il contient peu de composés phénoliques et est très sensible au climat. A long terme, il y aura donc des évolutions aromatiques (voire de typicité) pour l’ensemble des vins bourguignons qui deviendront sans doute plus riches, plus alcoolisés et peut-être aussi plus homogènes. La question est alors de savoir si l’évolution des goûts des consommateurs ira dans le même sens…

�� AAggiirr ssuurr llee mmaattéérriieell ggéénnééttiiqquuee Trois leviers permettent d’adapter le vignoble au changement climatique : o Les cépages : la diversité génétique des cépages constitue en elle-même un moyen d’adaptation.

Un conservatoire est actuellement en cours de mise en place au niveau régional afin de préserver le plus de types génétiques possibles. Une autre solution serait de changer de cépage : on peut imaginer introduire des cépages plus tardifs comme la Syrah. Cependant, cette solution est

12

Toute production supplémentaire n’est pas commercialisable sauf en cas d’accident climatique l’année suivante. 13

Le « terroir » englobe à la fois des facteurs naturels (type et profondeur de sol, exposition de la parcelle, altitude, conditions climatiques…) et des facteurs humains (méthodes culturales de la taille jusqu'aux vendanges, vinification, élevage), véhiculant des valeurs d'origine, de tradition et de typicité (BIVB, 2011).

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refusée par beaucoup d’acteurs car les cépages font partie du terroir bourguignon et leur choix est contraint par les règles d'appellation d'origine et les exigences du marché.

o Les clones : l’amélioration variétale peut être considérée comme un moyen pertinent d'adaptation notamment en privilégiant un caractère tardif ou en limitant les rendements. Cependant, il faut une vingtaine d’années pour sélectionner une nouvelle « génération » de clones. De plus, certains acteurs regrettent que ces derniers constituent une homogénéisation du patrimoine génétique (trois clones représentent déjà 90% du Chablisien).

o Les porte-greffes (partie entre le sol et le greffon) : outre la tolérance au phylloxéra, le porte-greffe contribue à l'adaptation au milieu et peut donc être vecteur d’une meilleure résistance à la sécheresse en influant sur les capacités d’extraction de l’eau du sol. Bien que les viticulteurs aient beaucoup plus de liberté pour le choix du porte-greffe que pour le cépage, cette solution est rarement évoquée, si ce n’est dans la littérature.

�� AAggiirr ssuurr lleess pprraattiiqquueess ccuullttuurraalleess Si on prend l’exemple de 2003, certains viticulteurs ont eu des vins de qualité non satisfaisante et leurs voisins de très bons : cette différence s’explique par leurs choix techniques non seulement de 2003 mais aussi des années précédentes. Un deuxième levier d’adaptation consiste donc en la modification des pratiques culturales. Les pistes à l’étude portent sur : o La limitation des rendements : l’éclaircissage14 actuellement pratiqué n’est pas une solution

durable car la vigne met alors en réserve ce qui était destiné aux grappes enlevées, ce qui augmente sa vigueur… Depuis 4 ans, la Chambre d’agriculture de l’Yonne et le BIVB15 conduisent une expérimentation sur la maîtrise de la vigueur à travers une taille au moment des vendanges.

o La lutte conte la sécheresse en jouant soit sur la disponibilité de l’eau soit sur l’efficience d’utilisation de cette ressource : réduction des surfaces foliaires, enracinement plus profond, mycorhization, enherbement… L’irrigation est actuellement interdite pour les AOC Bourguignons et il y a peu de chances pour que cela change.

o La lutte contre l’échaudage et la grillure : l’idée est de créer de l’ombrage de façon à protéger les grappes du rayonnement. Ces mesures peuvent entrer en contradiction avec celles concernant la lutte contre la sécheresse (création d’ombrage versus effeuillage).

o La lutte contre les nouvelles maladies : les acteurs comptent utiliser les travaux ayant déjà été réalisés dans le pourtour méditerranéen.

�� AAggiirr ssuurr ll’’iiddeennttiittéé ddeess vviinnss eett ddee llaa vviiggnnee

Les vins de Bourgogne étant monocépages, cela limite les possibilités d’adaptation dont l’utilisation de mélanges qui permettrait de jouer sur les proportions d’une année sur l’autre. Avec la meilleure maturation, la chaptalisation (ajout de sucres) est de moins en moins utilisée : les réflexions se tournent maintenant plutôt vers la diminution du taux d’alcool… Une dernière stratégie d’adaptation, plus radicale, serait un changement de milieu i.e. déplacer les vignobles et faire, par exemple, du Bourgogne en Champagne. En effet, on constate une remontée des conditions culturales : celles des années 1970 se retrouvent aujourd’hui déplacées d’environ 100 km vers le Nord et 200m en altitude en Bourgogne. Cependant, déplacer le vignoble paraît invraisemblable pour la plupart des acteurs et il y a peu de marge de manœuvre dans le système actuel de délimitation. Par ailleurs, le climat n’est pas le seul facteur qui doit être pris en compte : les caractéristiques physiques des parcelles et le savoir-faire des viticulteurs sont aussi déterminants.

14

Pratique consistant à enlever certaines grappes en amont de la maturation. 15

Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne

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d. Les grandes cultures : entre impacts locaux et impacts mondiaux

Les travaux sur impacts du changement climatique sur les grandes cultures sont relativement récents. Le projet national Climator (Brisson et Levrault, 2010) « Changement climatique, agriculture et forêt en France : simulations d’impacts sur les principales espèces », associé à l’expérience de terrain ont permis d’esquisser les impacts sur le végétal pour la plupart des grandes cultures présentes en Bourgogne (blé, colza, maïs et tournesol).

�� DDeess eeffffeettss vvaarriiaabblleess sseelloonn lleess aallééaass cclliimmaattiiqquueess En grandes cultures, l’impact du changement climatique est souvent décliné par aléa climatique : o L’augmentation de la teneur en CO2 atmosphérique stimule la production de biomasse (cf. page

25) et influe donc positivement sur les rendements ; o La hausse du risque de sécheresse printanière et estivale (cf. page 25) est l’impact le plus craint

par les acteurs car celle-ci pénalise fortement certaines cultures notamment sur ses sols séchant et/ou superficiels (plateaux calcaires et terres à graviers de la Tille et de la Saône par exemple). Par contre, les sols hydromorphes (comme en Bresse et Puisaye) sont généralement bénéficiaires. La vulnérabilité des cultures à la sécheresse dépend de leur sensibilité mais aussi des conditions de culture et des choix variétaux opérés et surtout du stade où elle survient.

o Des températures estivales élevées risquent aussi de limiter les rendements notamment lors de la formation et du remplissage des grains (concurrence entre photosynthèse et photo-respiration, accroissement de la respiration nocturne, fermeture stomatique…). Le seuil à partir duquel ce phénomène appelé « échaudage thermique » apparait est différent selon les espèces, le blé et le tournesol y étant particulièrement sensibles.

o Le gel automnal et d’hiver, pénalisant pour les cultures, devraient être plus rares du fait du réchauffement. Cependant, le gel de printemps risque, lui, d’augmenter si les cultures sont trop précoces. L’orge et les cultures de printemps y sont particulièrement sensibles.

D’après les simulations du projet Climator, sans changement de variété, on devrait constater à Dijon : o Un augmentation significative de rendement du blé de l’ordre de 1,5t/ha dans le futur lointain

(2070-2099) par rapport à la période de référence (1970-1999) en raison d’une augmentation du nombre de grains sous l’effet fertilisant du CO2 ;

o Une augmentation significative de rendement du colza de 0,6 t/ha dans le futur proche (2020-2049) et de 0,9t/ha dans le futur lointain principalement grâce à la diminution des gels hivernaux ;

o Aucune évolution significative pour le tournesol ; o Une diminution de la production de maïs grain de l’ordre de 0,3t/ha dans le futur proche et de

0,8t/ha dans le futur lointain du fait du raccourcissement de la période de remplissage des grains et de l’augmentation du déficit hydrique estival.

Ces calculs ne prennent toutefois pas en compte l’impact du changement climatique sur les maladies et les ravageurs, très difficile à prévoir car plusieurs effets interagiront (cf. page25). De plus, le changement climatique devrait provoquer une augmentation de la variabilité interannuelle des rendements due à l’augmentation des anomalies climatiques…

�� DDeess mmooddiiffiiccaattiioonnss ddee rrééfféérreenncceess qquuii ppoosseenntt pprroobbllèèmmeess mmaaiiss oouuvvrreenntt aauussssii ddee nnoouuvveelllleess

ppoossssiibbiilliittééss De manière générale, une culture est choisie et implantée en fonction du profil pédoclimatique d’un secteur. Or, le changement climatique va provoquer une déstabilisation des références climatiques utilisées et à l’heure actuelle, le futur profil climatique bourguignon reste très incertain.

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En parallèle, l’accélération des rythmes phénologiques (cf. page 25) impacte de nombreux aspects de la conduite des cultures, avec notamment : o La modification du calendrier cultural et des conditions dans lesquelles les interventions se font ; o La modification de la concordance entre certains stades sensibles et les aléas climatiques ; o Une libération plus précoce des terres menant à l’allongement de la durée d’interculture

(attention au risque de lixiviation des nitrates) et à l’élargissement des choix rotationnels (nouvelles possibilités de cultures dans les zones jusqu’ici trop fraîches).

Ces décalages nécessitent alors une réorganisation du travail de la part des exploitants mais aussi une refonte des systèmes de culture utilisés.

�� DDeess aaddaappttaattiioonnss cceennttrrééeess ssuurr llee mmaattéérriieell vvééggééttaall …… La plupart des adaptations évoquées lors des enquêtes concernent la révision du type de variété et de culture utilisés : o Privilégier des variétés résistantes au stress hydrique ou plus précoces (somme de température

atteinte avant le déficit hydrique) ; o Continuer à favoriser les cultures d’hiver afin d’éviter le stress hydrique printanier et estival ; o Implanter des cultures moins consommatrices d’eau : le tournesol ou l’orge pourraient être

favorisés comme alternatives au maïs et au blé ; de nouvelles espèces pourraient aussi être implantées comme le sorgho ou certaines légumineuses comme le pois ou la luzerne ;

o Utiliser des mélanges variétaux ou miser sur la diversité spatiale (différentes cultures et variétés). Cependant, cela est pour le moment très peu pratiqué en Bourgogne et pose des problèmes de débouchés.

Quelques solutions techniques sont parfois envisagées par les acteurs mais concernent surtout l’irrigation, assez peu développée en Bourgogne. Cependant, des tensions existent déjà sur la ressource, surtout en période estivale. D’autres approches comme le non-labour peuvent favoriser la matière organique et de garder ainsi une certaine fraîcheur…

�� …… MMaaiiss ccoonnttrraaiinntteess ppaarr llee mmaarrcchhéé L'examen des chroniques des années 1976, 1989, 2003 et 2005 montre que l'impact économique des sécheresses dépend beaucoup du contexte formé par les politiques agricoles (notamment la PAC) et les marchés mondiaux. De manière générale, les années où les rendements baisseront, il y aura sans doute une augmentation des prix, ce qui compensera en partie les agriculteurs. De plus, depuis quelques années, des assurances récoltes permettent de lisser les résultats. En revanche, les organismes stockeurs auront sans doute du mal à honorer en volumes les contrats d’approvisionnement et à réaliser des dimensionnements d’investissements. La question centrale est finalement celle des effets du changement climatique sur les marchés mondiaux. Or ceux-ci sont difficiles à prévoir et très peu évoqués par les acteurs enquêtés. Pour le moment, il n’y a pas de réelle remise en cause des modèles existants du fait du changement climatique même si celui-ci pourrait très bien se révéler être une opportunité.

e. L’élevage : un secteur rendu vulnérable par sa crise structurelle

Nous allons ici nous concentrer sur l’élevage allaitant qui est largement dominant en Bourgogne tant par son cheptel que par ses surfaces fourragères. Le changement climatique impacte l’élevage allaitant sur ces deux aspects (cf. Figure 24).

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�� LLeess rreessssoouurrcceess aalliimmeennttaaiirreess aauu ccœœuurr ddeess pprrééooccccuuppaattiioonnss Comme pour les autres productions végétales, le changement climatique stimule la production

fourragère à travers l’effet fertilisant du CO2 (cf. page 25) mais induit aussi un risque accru de stress hydrique, particulièrement craint par les éleveurs. Si différentes simulations indiquent un impact modéré et plutôt positif du changement climatique sur les niveaux de production fourragère en France avec une augmentation de l’ordre de 5 a 20 % des rendements d’ici a 2100, de fortes variations interannuelles sont toutefois attendues, pouvant mettre en péril certaines exploitations. En parallèle à cette augmentation prévue de la production de fourrage, une nette modification de sa

répartition au cours de l’année devrait se profiler avec : o Une meilleure production en hiver et au printemps mais une diminution en été ; o Un allongement de la période de production et donc une exploitation (fauche ou pâturage) plus

tôt au printemps et plus tard en fin d’année, à condition que les parcelles soient praticables, ce qui n’est pas si évident.

Par ailleurs, la qualité des fourrages risque également d’être affectée : modification de la composition florale des prairies naturelles, augmentation de la valeur énergétique, réduction de la valeur azotée. En cas de forte baisse des rendements fourragers, les conséquences peuvent être désastreuses comme en 1973, 1983 ou encore 2003 : o Complémentation des animaux avec de la paille au champ ou avec des aliments pour les veaux,

les prix de ces derniers étant alors généralement élevés (cf. Figure 24) ; o Réimplantation les prairies détruites, ce qui peut se révéler très couteux ; o Moindre valorisation des animaux à la vente du fait de l’altération de leur croissance. On a alors une forte augmentation des charges opérationnelles associée à une baisse des revenus…

�� TToouutt llee ssyyssttèèmmee ffoouurrrraaggeerr àà aaddaapptteerr ?? Tous les aspects de la conduite fourragère pourraient être concernés : o Quels fourrages utiliser ? Là encore, les cultures fourragères économes en eau, plus résistantes

à la sécheresse ou à la chaleur sont à favoriser (luzerne, sorgho...). Le problème est qu’il y aura sans doute des années humides et des années sèches : des mélanges pourraient alors être utiles.

o Quels types de conduite ? Il est « impensable » de mettre en place de l’irrigation (trop coûteuse) mais d’autres solutions pourraient être envisagées. On peut penser à une gestion tournante des pâturages, comme cela est pratiqué en élevage laitier : une meilleure exploitation des pâtures en fonction du risque de sécheresse et des sols permettrait d’optimiser les fourrages. La plupart des

Figure 24 : Proposition de schéma récapitulant les impacts du changement climatique sur l'élevage

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prairies bourguignonnes sont naturelles : si elles n’évoluent pas assez vite, il faudra alors les retourner…Cela pose aussi la question de l’adéquation entre les besoins alimentaires du bétail et la disponibilité du fourrage. Un décalage des vêlages permettrait de mieux les faire coïncider ainsi que d’avoir un meilleur prix de vente mais il s’agit d’une lourde modification du système d’élevage.

o Quelle gestion des stocks ? On ne peut pas prévoir si un été sera sec ou non. Pour faire face à cet inconnu, l’éleveur fait traditionnellement des stocks de fourrages, ce qui nécessite une bonne organisation du travail et gestion des parcelles. La quantité et surtout la forme de stockage seront sans doute à adapter…

�� LLaa ssaannttéé aanniimmaallee,, llee ddeeuuxxiièèmmee ggrraanndd ddééffii ppoosséé ppaarr llee cchhaannggeemmeenntt cclliimmaattiiqquuee Un deuxième grand impact du changement climatique sur l’élevage concerne la santé des animaux. L’augmentation de température pourrait notamment engendrer: o Une baisse importante de la fécondité du cheptel (déficit alimentaire et hydrique) en période

caniculaire, comme cela a eu lieu en 2003. Cependant les acteurs notent que les systèmes allaitants bourguignons sont peu vulnérables car les animaux sont souvent à l’extérieur dans un bocage, encore largement présent, leur fournissant suffisamment d’ombre.

o Une recrudescence des pneumopathies s’il y a des changements brusques de températures. o Un développement du parasitisme (cycles accélérés) toutefois potentiellement freinée par la

sécheresse. Du fait de leur antagonisme, ces deux conditions combinées peuvent rendre le système instable avec des variations de contamination interannuelles très fortes.

o Une remontée de maladies méridionales vers le Nord (cf. page 25). En France, l’émergence de trois maladies infectieuses vectorielles « exotiques » est crainte par les experts : la fièvre catarrhale, la fièvre de West Nile et la fièvre de la Vallée du Rift. Les deux dernières, étant des zoonoses (peuvent être transmises à l’homme), sont d’autant plus redoutées.

Notons que les animaux peuvent être assez vulnérables à de nouvelles maladies car l’immunité s’acquiert de plus en plus difficilement du fait des modes de conduite d’élevage (vaccinations systématiques, traitements puissants…).

�� DDeess mmeessuurreess eesssseennttiieelllleemmeenntt pprréévveennttiivveess eenn rrééfflleexxiioonn Pour anticiper les potentielles crises sanitaires, comme celle de la fièvre catarrhale ovine, une veille sanitaire s’impose. Il est également important de communiquer avec le réseau de vétérinaires de terrain sur les maladies qui risquent de se développer afin qu’ils sachent comment les reconnaître et quelles actions entreprendre. Enfin, le changement climatique va sans doute influer sur les débouchés commerciaux mais la question reste entière. Pour beaucoup d’experts, les systèmes d’élevage allaitant en Bourgogne doivent de toute manière être revisités car ils sont en crise structurelle et trop vulnérables. Le changement climatique pourrait être l’élément déclencheur de ce renouveau…

f. La santé humaine : de multiples incidences possibles, difficiles à prédire Le changement climatique aura des incidences sur la santé humaine, à la fois directes (liées aux effets physiologiques de la chaleur et du froid) et indirectes. Le problème est que la plupart des maladies susceptibles d’évoluer est très difficile à suivre. Les rapports nationaux sur les risques sanitaires et les experts régionaux s’accordent sur trois principaux types d’impacts en France…

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�� LLeess ccaanniiccuulleess :: ddaannggeerr nn°° 11 ??

Le premier effet cité du changement climatique sur la santé est généralement l’augmentation de la mortalité estivale du fait de canicules de plus en plus fréquentes. En 2003, la Bourgogne est arrivée au troisième rang des régions françaises les plus éprouvées avec une augmentation de près de 40% de la mortalité en août. Cela s’explique par la conjonction de températures particulièrement élevées, de nuit comme de jour, et d’une proportion de personnes âgées supérieure à la moyenne nationale. Une hausse du nombre de décès durant les jours les plus chauds est à craindre du fait de l’augmentation de l’intensité et la fréquence des vagues de chaleur ainsi que du vieillissement de la population et de sa concentration dans les zones urbaines... Il y aurait alors progressivement une inversion des pics de mortalité entre l’hiver et l’été. Cependant, des vagues de froid exceptionnelles pourront toujours se produire et la population, s’habituant à des températures en moyenne plus élevées, pourrait y devenir plus sensible.

�� DDeess eeffffeettss iinnddiirreeccttss ssuurr llaa ssaannttéé eett ll’’eexxppoossiittiioonn aauuxx rriissqquueess ddeess ppooppuullaattiioonnss Le changement climatique pourrait modifier certains aspects de la qualité de vie en Bourgogne, notamment : o Un meilleur confort d’hiver et un moindre confort d’été ; o Une augmentation des cancers de la peau du fait de la combinaison de l’augmentation de

l’ensoleillement estival, de l’exposition susceptible d’être plus fréquente (développement des sorties à l’extérieur) et d’une diminution de la couche d’ozone ;

o Une baisse de la qualité de l’air avec notamment un renforcement de la pollution à l’ozone lié à la hausse des températures. Or l’ozone accroit les risques d’infarctus et d’AVC chez les personnes vulnérables (personnes âgées, hypertendues ou ayant des problèmes respiratoires).

o Un développement des allergies liées aux pollens (qui ont déjà doublé en 20 ans) car le changement climatique pourrait induire une augmentation des concentrations de pollens ainsi qu’une précocité des saisons polliniques. De plus, l’arrivée d’espèces méridionales, dont certaines fortement allergisantes comme l’ambroisie (cf. page 26) accentuerait le phénomène.

o Une dégradation de la quantité et de la qualité de l’eau : diminution de la ressource en eau l’été, phénomènes pluvieux très forts pouvant entrainer la submersion de certains captages d’eau potable, blooms algaux toxiques plus fréquents, développement possible des « maladies des mains sales » (fièvre typhoïde, choléra…)... A l’inverse, une augmentation de l’ensoleillement estival favoriserait l’autoépuration des eaux.

Enfin, certains enquêtés mettent en avant le fait que les inégalités sociales risquent de se creuser et que les catégories socioprofessionnelles les plus défavorisées soient les plus exposées aux impacts du changement climatique …

�� LL’’éémmeerrggeennccee ddee mmaallaaddiieess iinnffeeccttiieeuusseess ppaarrffooiiss eexxoottiiqquueess

Le changement climatique engendrera des modifications de la dissémination, de l’installation et du développement d’espèces de vecteurs et d’agents infectieux (cf. page 25). Il est toutefois très difficile de prédire l’évolution globale du risque épidémiologique.

Un groupe d’experts, mis en place par l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, a identifié quatre zoonoses, généralement considérées comme « exotiques », qui pourraient concerner le territoire français dans les prochaines années : la fièvre de la vallée du Rift, la fièvre de West Nile,

les leishmanioses et la leptospirose. La réapparition du paludisme est beaucoup plus discutée et semble, au final, peu probable. Une remontée d’autres maladies vectorielles comme la maladie de Lyme (déjà présente en Bourgogne) est probable.

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�� SSuurrvveeiilllleerr,, aapppprrooffoonnddiirr lleess ccoonnnnaaiissssaanncceess eett aannttiicciippeerr,, mmaaiittrreess mmoottss ddee ll’’aaddaappttaattiioonn Qu'elle soit physiologique, comportementale (modification des habitudes, du lieu de vie..) ou technologique, l'adaptation humaine existe, notamment en ce qui concerne les variations de température : le seuil thermique au-dessus duquel le nombre des décès augmente fortement est nettement plus élevé dans les climats chauds (31°C à Paris contre 41°C à Séville). En France, il existe assez peu de dispositifs propres à l’adaptation au changement climatique dans le domaine de la santé. Plusieurs pistes peuvent être suivies en parallèle : o Mettre en place des réseaux de surveillance sanitaire et épidémiologique. La Bourgogne a la

chance de bénéficier d’observatoires des infarctus (Côte-d’Or) et des AVC (Dijon), rares en France o Contrôler les installations et lieux à risques : renforcement de la surveillance de la chaîne du

froid, du contrôle de la qualité sanitaire des rejets, rehaussement des captages… o Renforcer la recherche sur les impacts du réchauffement climatique, leur perception dans la

population et les comportements subséquents en termes d’exposition et d’adaptation. o Sensibiliser la population, réaliser des plans de prévention et former le personnel soignant et

des systématiciens (ornithologues, entomologistes, écologues,…). Enfin, de manière générale, le bâti a un rôle important à jouer dans l’adaptation au changement climatique mais les enquêtés regrettent le manque d’échanges entre le monde de la santé et de l’urbanisme. Il serait intéressant de développer des actions ou du moins des réflexions communes notamment sur la sélection des lieux à construire, les îlots de chaleur, les matériaux de construction, l’isolation …

g. L’urbanisme et l’aménagement : la recrudescence des îlots de chaleur L’urbanisme et l’aménagement du territoire conditionnent la qualité des bassins de vie. Les impacts du changement climatique dans ce domaine se feront alors ressentir sur la population…

�� UUnn ccoonnffoorrtt dd’’ééttéé qquuii rriissqquuee ddee ssee ddééggrraaddeerr La baisse du confort thermique estival, liée au phénomène de canicule décrit précédemment (cf. page 35), est accentuée dans les villes par le phénomène d’îlot de chaleur urbain (ICU) : les températures de l'air dans certaines zones urbaines sont supérieures à celles des zones rurales qui les entourent. L’écart maximal peut aller de 2°C pour une ville de 1000 habitants jusqu’à 12°C pour une de plusieurs millions d’habitants. Cet écart de température dépend de plusieurs facteurs climatiques (vitesse du vent, couverture nuageuse …) mais aussi de facteurs anthropiques (production de chaleur anthropique, forme urbaine, bâti, minéralité des villes...). Les ICU ne sont pas une conséquence du changement climatique mais ce dernier les aggrave. Tout le monde est touché par cette question, car au-delà des problèmes de santé publique que cela pose (cf. page 35), c’est aussi la productivité du travail qui est affectée surtout en extérieur ou dans des environnements déjà chauds (pressings…).

�� SS’’aaddaapptteerr àà ttoouutteess lleess éécchheelllleess Adapter l’habitat et l’urbanisme signifie d’une part, favoriser un meilleur confort thermique et d’autre part, atténuer l’effet d’îlot de chaleur urbain. L’architecture et l’urbanisme étant très réglementés, des modifications des normes et des règles seront sans doute nécessaires. Cela pose aussi la question des savoir-faire et de la formation des professionnels… L’adaptation se fera à différentes échelles spatiales :

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o Celle du bâtiment avec des solutions architecturales : matériaux (plus ou moins réfléchissants), isolation (particulièrement sur les toitures), type et position des surfaces vitrées, toits et murs végétaux, puits provençaux… Les acteurs se posent surtout des questions pour le bâti d’hier (1950 à 1990 voire à aujourd’hui) qui est le plus sensible et le plus difficile à adapter (des techniques existent mais peuvent être coûteuses et poser des problèmes architecturaux).

o Celle de la rue ou du quartier avec des solutions d’urbanisme pour augmenter l’albédo et les surfaces végétalisées, et limiter l’effet canyon (i.e. le « piégeage » des rayonnements dans les espaces urbains) : orientation des rues, ombrages, mise en place de revêtements réfléchissants la lumière, création de parcs et jardins, végétalisation des aires de stationnements…

o Celle de la ville à travers l’aménagement des zones de vie et de travail pour une meilleure interpénétration des zones urbaines et végétales. La trame verte et bleue peut être l’occasion de mener cette réflexion. L’intégration de la thématique dans les schémas de cohérence territoriale (SCoT) et les plans locaux d’urbanisme (PLU) serait également un moyen d’ancrer l’adaptation dans l’aménagement et la planification.

La végétalisation est une solution commune à toutes les échelles spatiales. En effet, les arbres sont un outil efficace de lutte contre les îlots de chaleur, notamment grâce à leur effet d’ombrage et au phénomène d’évapotranspiration qui, en consommant de l’énergie, abaisse la température alentour et créé des zones fraîches. Elle peut aussi venir en réponse à différentes problématiques connexes : stockage et épuration des eaux de pluie et de ruissellement, recharge des nappes, sans oublier les fonctions sociales… La principale difficulté soulevée par les acteurs pour réintroduire le végétal dans le minéral urbain est le peu de foncier disponible pour créer des espaces verts. Cet obstacle passé, il ne faudra pas oublier de planter des espèces végétales adaptées au climat futur et d’éviter les espèces à fort pouvoir allergisant comme le Bouleau…

�� UUnnee mmooddiiffiiccaattiioonn ddeess ccoommppoorrtteemmeennttss eett ddeess mmoouuvveemmeennttss ddee ppooppuullaattiioonn

On peut aussi limiter l’ICU en réduisant les dégagements anthropiques de chaleur dus à la circulation automobile, aux activités industrielles, au chauffage et à la climatisation des bâtiments. Cela suppose un changement de comportement. En parallèle, on pourrait imaginer décaler les horaires de travail en été, comme cela s’est produit à certains endroits lors de la canicule de 2003. Par ailleurs, les experts régionaux soulignent l’importance d’identifier et de protéger les populations fragiles. Ce sont généralement des personnes isolées avec qui il faut alors (re)créer des liens sociaux. Enfin, que ce soit au niveau du tourisme ou des lieux de résidence, le Sud de la France pourrait devenir moins attractif, notamment en ce qui concerne les personnes âgées, du fait de l’inconfort thermique. La ruralité et la présence de nombreux points d’eau en Bourgogne constituent un avantage comparatif pour la région : le changement climatique pourrait la rendre plus attractive notamment pour les habitants de la région parisienne et lyonnaise du fait de leur proximité. Il s’agit là d’une opportunité à développer. La Bourgogne pourrait devenir une terre d’accueil pour « réfugiés » climatiques ou, plus modestement, une destination de tourisme vert… La modification des migrations due au changement climatique aura des implications sur les besoins d’investissement (offre d’hébergements, voies de communication, services …). D’autres impacts sont pressentis notamment sur les risques : augmentation des inondations et du phénomène de retrait-gonflement des argiles. Ceux-ci seront traités dans le paragraphe suivant…

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h. Les risques naturels : comment intégrer la modification des références ? En Bourgogne, les risques naturels sont, de manière générale, assez peu prononcés par rapport à d’autres régions. Cependant, il est pressenti que les deux principaux risques présents (inondations et retrait-gonflement d’argiles) s’aggraveront avec le changement climatique.

�� VVeerrss qquueellllee mmooddiiffiiccaattiioonn dduu rriissqquuee iinnoonnddaattiioonn ??

On distingue deux types d’inondations : o Le débordement de cours d'eau (principal risque en Bourgogne) : il s'agit de crues faisant suite à

un épisode pluvieux important. Dans la région, elles sont généralement lentes, comme dans le Val de Saône, et donc prévisibles. Mais elles peuvent être plus rapides, comme dans la vallée de l'Ouche, avec des risques pour la population. L’extension de l’urbanisation dans des zones à risques augmente cette rapidité et la probabilité d’exposition des populations : en Bourgogne, 5 à 10% des logements étaient exposés au risque inondation en 2006.

o Les ruissellements : ce type d'inondation fait suite à des orages intenses ou de fortes pluies entraînant le ruissellement de l'eau et la saturation des réseaux de drainage et de récolte d’eau. Certains territoires sont plus vulnérables du fait de l’imperméabilisation excessive des sols qui réduit la capacité d’infiltration, ou de la présence d’aménagements favorisant le ruissellement. Par exemple, en Bourgogne, dans la côte viticole, il y a eu par endroits une extension telle du vignoble (notamment avec des plantations dans le sol de la pente) que cela a engendré des coulées de boue.

Les tendances pour l’avenir en matière de fréquence et d’intensité des inondations seront étroitement liées aux changements de régimes des précipitations et des débits de rivières. Cependant, il n’y a pas, à l’échelle de la Bourgogne, de connaissances de cet impact (très difficile à prévoir étant donné la complexité des systèmes hydrographiques). Selon l’Agence européenne pour l’environnement, les épisodes de précipitations intenses augmenteront vraisemblablement en fréquence et les précipitations hivernales prendraient plus souvent la forme de pluies en raison de températures supérieures. Cela provoquerait ainsi un risque accru d’inondations en Europe par débordement et ruissellement. Ainsi, il est possible que les crues soient plus fréquentes, se passent à des périodes différentes de l’année, soient supérieures aux crues de référence (en général, centennales) ou encore changent de régime et devenir plus torrentielles, et donc plus dangereuses pour l’homme. Face à ces constats, plusieurs adaptations sont envisageables : o Réévaluer l’aléa : avec le changement climatique, les références d’hier ne seront peut-être plus

valables demain. Il est important de réévaluer les risques de façon régulière afin de ne pas se laisser surprendre.

o Réaliser des actions de prévention : préserver les zones humides (qui jouent un rôle tampon), limiter l’imperméabilisation des sols, mettre en place des aménagements de rétention, réhausser les infrastructures de transport, redimensionner les systèmes d’assainissement et de drainage… Les SAGE16 et les documents d’urbanisme sont des opportunités pour favoriser de tels aménagements.

o Limiter l’exposition des populations en maîtrisant l’occupation du sol et en imposant des normes de construction dans les zones à risque (éviter les maisons de plein pied, placement des réseaux en hauteur, matériaux plus résistants à l’eau, construction sur pilotis…). Une piste d’adaptation serait alors de favoriser la mise en place de plans de prévention des risques (PPR)

16

Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux

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qui, annexés au PLU, permettent d’imposer de telles mesures. Pour ceux déjà existant, il faudrait alors les mettre à jour régulièrement…

�� VVeerrss uunnee aauuggmmeennttaattiioonn dduu pphhéénnoommèènnee ddee rreettrraaiitt--ggoonnfflleemmeenntt ddeess aarrggiilleess

Il s’agit du deuxième risque naturel en Bourgogne après le risque inondation. Le phénomène de retrait-gonflement des argiles est dû à des variations de teneur en eau des sols : lors de fortes sécheresses estivales, les sols se rétractent, des fissures se créent par compression sur les habitations sensibles, puis deviennent visibles en hiver lorsque les argiles gonflent. S’il n’y a généralement pas de risques pour la santé humaine, les conséquences financières sont importantes : les dommages aux biens sont souvent considérables et irréversibles, ce qui nécessite de démolir les constructions. De 1989 à 2006, l’état de catastrophe naturelle pour le retrait-gonflement des argiles a couté plus de 46 millions d’euros en Bourgogne. Suivant la nature des sols, certaines zones géographiques seront évidemment davantage affectées que d’autres. Par ailleurs, le bâti récent (des années 1960 à 1990) notamment les lotissements avec des maisons relativement légères (avec des fondations superficielles) sont particulièrement vulnérables à ce phénomène. L’augmentation de l’intensité et de la fréquence des sécheresses, la hausse des températures, et les précipitations intenses favorisent le retrait-gonflement des argiles, et le changement climatique annoncé pourrait provoquer la conjonction de ces phénomènes. Ainsi, on prévoit une augmentation du risque de retrait gonflement des argiles comme cela s’est manifesté lors de la canicule de 2003. Pour estimer et donc réduire la vulnérabilité du bâti, quelques moyens techniques existent : o L’utilisation des cartes de l’aléa réalisées par le BRGM (actuellement, 15% de la région est en aléa

moyen et 50% en aléa faible) et l’application plus stricte des règles de construction actuelles pour les bâtiments neufs ;

o Le développement d’outils d’évaluation de la vulnérabilité pour les bâtiments existants. De manière générale, les acteurs pensent que l’adaptation passera par la généralisation des études géotechniques et la mise en place de PPR. En Côte d’Or, face à l’augmentation de ce risque, des PPR seront prochainement prescrits sur les communes ayant au moins 1% de leur surface communale en « aléa faible » sur la carte réalisée par le BRGM : 486 des 707 communes devraient être concernées.

�� VVeerrss ll’’aaggggrraavvaattiioonn dd’’aauuttrreess rriissqquueess ggééoollooggiiqquueess,, aauujjoouurrdd’’hhuuii ffaaiibblleess Une fois les risques existants traités, il faut aussi envisager ceux qui, aujourd’hui faibles et peu connus, pourraient s’aggraver. Plusieurs risques géologiques seraient ainsi à surveiller. Tout d’abord, les cavités souterraines (karst) sont assez nombreuses en Bourgogne (entre 3000 et 4000 référencées). Un changement du régime de précipitations, modifierait la dynamique des eaux souterraines et pourrait induire un battement des nappes : les cavités ne sont plus constamment en eau et peuvent alors s’effondrer lors d’un évènement hydrique fort (orage, rupture de canalisation…), entrainant avec elles les constructions sus-jascentes. De même, les éboulements qui se produisent en général lors d’épisodes de gel-dégel pourraient alors augmenter avec la hausse des températures. Mais la plupart des falaises sont bien surveillées et les moyens techniques existent pour les stabiliser : il y a relativement peu d’enjeu. Les coulées de boue, qui se situent surtout dans les zones viticoles (notamment le Chablisien), les glissements de terrains et l’érosion des berges, peu nombreux en Bourgogne, sont aussi à surveiller. Il est intéressant de noter que la plupart des acteurs sont relativement démunis face aux impacts du changement climatique sur les risques naturels et très peu d’outils d’adaptation non réglementaires sont envisagés…

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3. En résumé : trois étapes pour une politique d’adaptation On peut dégager quelques grandes tendances de ces résultats thématiques. Tout d’abord, dans toutes les thématiques, s’adapter au changement climatique signifie d’abord de le prendre en compte dans ses stratégies. Du fait de la nouveauté de ce sujet, la surveillance (veille sanitaire pour la santé humaine, animale et végétale), la recherche (variétés résistantes à la sécheresse, nouveaux matériaux..) et la sensibilisation au sens large (information du public, formation des professionnels…) sont des adaptations communes à toutes les thématiques. Dans les secteurs économiques liés au vivant, trois types de modifications des systèmes en eux-mêmes sont envisagés : o Des modifications du matériel génétique (espèces et variétés, essences et provenances, cépages

et clones, mélanges) qui peuvent parfois être controversées ; o Des changements de pratiques (culturales, sylvicoles, viticoles et d’élevage) qui peuvent être

associés à des changements d’organisation (calendrier des interventions, gestion des stocks fourragers) ;

o Une réorientation du secteur, très peu évoquée par les acteurs, vers de nouveaux débouchés ou en fonction d’un marché lui-même impacté.

Intuitivement, on peut distinguer différentes étapes d’adaptation pour chaque système : o Améliorer sa connaissance des impacts : cela nécessite des travaux de recherche, la mise en

place de réseaux d’observation et de surveillance… o Trouver les moyens de s’y adapter : parfois ils existent et sont seulement à réajuster mais

l’expérimentation de terrain est souvent nécessaire pour en trouver de nouveaux. o Mettre en place ces changements de pratiques et de comportement : cela peut se faire à

travers la sensibilisation des populations et des acteurs, la formation, le conseil technique et des investissements. Parfois, les modifications peuvent concerner le fonctionnement et les orientations stratégiques du secteur : cette adaptation, plus profonde, implique que soient menés des prospectives, des concertations, de lourds investissements…

Ces différentes étapes ne s’excluent pas mais suivent un ordre logique. Plus l’importance des impacts du changement climatique sera forte plus les systèmes devront aller loin dans leurs stratégies d’adaptation. La Figure 25 illustre l’état d’avancement des différentes thématiques étudiées par rapport à ces trois grandes étapes en Bourgogne. Certaines thématiques n’en sont qu’à la première étape mais ont très largement approfondi la connaissance de leurs impacts (biodiversité, santé…) tandis que d’autres sont plus avancées mais de manière plus superficielle (grande cultures, risques naturels…). La forêt et la vigne se détachent assez fortement par un début de mise en œuvre d’adaptations et leur connaissance relativement fine des impacts. La plupart des thématiques consolident leurs connaissances des impacts et commencent tout juste à rechercher des outils d’adaptation…

Figure 25 : Proposition de schéma de l'état d'avancement des thématiques étudiées en Bourgogne

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IIVV.. AANNAALLYYSSEE CCRRIITTIIQQUUEE DDEESS RREESSUULLTTAATTSS SSOOUUSS UUNN AANNGGLLEE TTRRAANNSSVVEERRSSAALL

Cette dernière partie livre un début d’analyse transversale en proposant une grille d’interprétation des impacts et des pistes d’adaptation pour aboutir à la caractérisation d’une adaptation réussie.

1. Analyse des impacts

a. Leur expression L’expression des impacts du changement climatique sur les systèmes est complexe : o Ils peuvent être directs ou indirects. La Figure 26 récapitule les principaux types d’impacts directs

et indirects du changement climatique sur les huit thématiques étudiées. Par soucis de simplification et de lisibilité, certaines flèches ont été laissées sans explications : elles témoignent d’une modification (baisse ou augmentation) encore difficile à déterminer. Nous ne considérons ici que les principaux changements climatiques : l’augmentation de la température et la baisse des précipitations printanières et estivales, qui combinées, augmentent le risque de sécheresse.

Figure 26 : Schéma récapitulatif des principaux impacts directs et indirects du changement climatique (CC) sur les thématiques étudiées

o Il n’y a rarement qu’un seul impact : différents effets, parfois difficiles à distinguer, se

combinent. Ces impacts combinés peuvent :

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Si pour le moment le changement climatique permet une meilleure maturation de raisins, à long terme celle-ci sera sans doute trop rapide et les arômes seront alors « brûlés » (cf. page 30).

Dans le cas de la biodiversité, l’impact d’autres phénomènes anthropiques (changement d’usage des terres, protection de certaines espèces,…) rend difficile l’attribution de telle ou telle apparition ou disparition d’espèces (cf. Figure 27).

C’est par exemple le cas de l’augmentation de croissance des arbres (cf. page 27) ou des grappes de vigne (cf. page 29).

Exemple

- Se renforcer l’un l’autre (synergie) : c’est le cas de l’augmentation de l’ensoleillement combinée à une exposition plus longue (du fait de la hausse des températures) menant à une augmentation probable des cancers de la peau (cf. page 36).

- Avoir des effets antagonistes, comme l’augmentation de la teneur en CO2 atmosphérique qui stimule la photosynthèse et l’aggravation du risque de sécheresse, délétère pour les végétaux. Dans ce deuxième cas, il est alors souvent difficile d’évaluer la résultante de la combinaison. Parfois, celle-ci peut induire de fortes variations interannuelles comme dans le cas pressenti de l’évolution du parasitisme en élevage (cf. page 35).

o Les impacts peuvent s’exprimer de manière différente

au cours du temps (court, moyen et long terme) : c’est pourquoi certains impacts sont déjà observés tandis que d’autres ne sont que pressentis. Par conséquent, le résultat d’une combinaison d’impacts peut aussi évoluer dans le temps.

Enfin, des différences territoriales existent même si elles ont été peu étudiées ici. Elles sont à relier à des différences de vulnérabilité des systèmes : une sécheresse peut être bénéfique pour des cultures sur sols hydromorphes et négative sur des sols superficiels ou séchants (cf. page 32). La préexistence de fragilités peut rendre certains systèmes plus vulnérables. C’est l’exemple de l’élevage, déjà en difficulté structurelle, qui est vulnérable aux variations interannuelles ; ou encore des personnes ayant des maladies chroniques (hypertension, diabète etc.), plus sensibles aux canicules. De plus, les évolutions socio-économiques impacteront la vulnérabilité des systèmes : elle est donc non seulement variable dans l’espace mais aussi dans le temps. Cette complexité, conjuguée à l’incertitude relativement grande quant à l’expression du changement climatique, rend ces impacts difficiles à appréhender…

b. Leur perception

Nous avons vu que les impacts du changement climatique peuvent généralement être classés en trois niveaux de perception : o Certains sont observés, voire mesurés : ce sont généralement des variables déjà suivies (pour

d’autres raisons) qui révèlent des changements de tendances alors attribués au changement climatique. L’observation est parfois délicate, comme dans le cas des

modifications physiologiques des espèces (cf. page 25) et nécessite alors des travaux de recherche. Une fois l’observation réalisée, la question est de savoir quelle part attribuer au changement climatique… En effet, il ressort de cette étude que les acteurs et les experts ont de réelles difficultés à attribuer des évolutions à un facteur précis comme le changement climatique : il s’agit souvent de phénomènes multifactoriels où le changement climatique peut avoir un rôle plus ou moins déterminant.

Figure 27 : Effets relatifs des principaux facteurs ayant un impact négatif sur la biodiversité à l'horizon 2100 (Thuiller, 2007)

Exemple

Exemple

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Dans le secteur de l’élevage, la remontée par le Sud de la fièvre catarrhale ovine (FCO) était pressentie : en réalité c’est par le Benelux qu’elle est apparue en 2006…

C’est l’exemple des vins bourguignons : leur qualité aromatique semble meilleure aujourd’hui que dans les années 1970 mais de nombreux problèmes pourraient se manifester à moyen et long terme transformant cette opportunité en handicap (cf. page 30).

Dans le secteur de la forêt les décisions se prennent pour plusieurs dizaines d’années. Or il est très difficile de trouver des essences à la fois adaptées au climat d’aujourd’hui, de 2050 et de 2100 (cf. page 28)…

o Certains sont pressentis par les acteurs et les experts parce qu’ils connaissent bien la relation entre leur thématique avec le climat. L’analogie ou la généralisation d’exemples ponctuels peuvent aider à anticiper ces impacts. Mais la perception des impacts du changement climatique nécessite un recul suffisant afin de pouvoir ségréguer les différents facteurs d’évolution et de s’affranchir des variations interannuelles parfois trompeuses. La différence entre impacts observés et pressentis n’est pas toujours évidente : par exemple, de nombreux acteurs se réfèrent aux impacts de la sécheresse de 1976 ou de la canicule de 2003 pour imaginer de quoi demain sera fait. Enfin, il faut rester vigilant : même si certains impacts sont pressentis, ils peuvent se manifester de manière différente ou d’autres, inattendus, peuvent aussi apparaître.

o Enfin d’autres sont modélisés, principalement grâce à des travaux de recherche comme ceux sur

la répartition des essences forestières (cf. page 27) ou du projet Climator (cf. page 32). La complexité des impacts, décrite plus haut, est toutefois difficile à intégrer dans les modélisations.

Les acteurs interprètent ensuite les impacts comme positifs ou négatifs pour leur secteur ou domaine. Cette interprétation peut varier dans le temps : certains impacts peuvent être une opportunité aujourd’hui et négatifs demain, et vice-versa. Ces variations dans le temps sont difficiles à intégrer pour les acteurs qui ont eux-aussi leur propre échelle de décision.

Enfin ces effets sont différents selon l’échelle spatiale considérée : les rendements de blé augmenteront peut-être en Bourgogne mais à l’échelle du globe, rien n’en est moins sûr...

Ainsi, comme l’indique Bertrand (2010), l’appréciation des effets est « variable suivant les échelles spatiales et temporelles retenues ». Elle dépend aussi des capacités d’adaptation des systèmes : selon l’adaptation mise en place, un impact, identifié au départ comme négatif peut se révéler être une opportunité…

2. Analyse des modes d’adaptation Une fois un impact perçu et interprété, les acteurs ont tout intérêt à mettre en place des adaptations car ce sont leurs activités qui sont touchées. C’est pourquoi, à l’inverse des politiques d’atténuation, des adaptations peuvent apparaître de façon très ascendante « en dehors de toute obligation ou incitation émanant des niveaux supérieurs » (Bertrand, 2010). L’adaptation vise alors généralement : o A éviter (par exemple implanter des cultures d’hiver pour esquiver la sécheresse estivale) ou

diminuer (comme implanter des espèces plus résistantes à la sécheresse) les effets des impacts négatifs ;

o A profiter des impacts positifs (du type dynamisation de la sylviculture en parallèle à l’augmentation de croissance des arbres).

Exemple

Exemple

Exemple

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Les PPR pourraient se révéler utiles dans le cas de l’aggravation des risques naturels (cf. page 39).

L’isolation thermique des bâtiments est une mesure d’atténuation et d’adaptation

Créer des assemblages de cépages en Bourgogne permettrait de mieux maîtriser les impacts du changement climatique sur les vins.

a. S’adapter selon sa connaissance des impacts On peut facilement distinguer deux principaux modes d’adaptation selon la connaissance des impacts (observés ou pressentis) : o L’adaptation réactive, que le GIEC (2001a) nomme « adaptation réactionnelle » : elle répond à

un impact observé, qui a déjà eu lieu. Par exemple, les viticulteurs décalent les dates d’intervention suite à l’accélération de la phénologie de la vigne.

o L’adaptation anticipative : elle précède l’observation des effets des changements climatiques.

On parle aussi d’adaptation « proactive » (GIEC, 2001a). Nous avons constaté deux niveaux d’adaptation anticipative selon qu’elle corresponde :

- à un impact spécifique, pressenti ou modélisé (par exemple implanter des cultures moins consommatrices d’eau pour faire face à l’augmentation du risque de sécheresse) ;

- à un inconnu plus complexe ; Ce sont alors des stratégies de diversification afin de « ne pas mettre tous les œufs dans le même panier » (comme l’utilisation de mélanges d’essences dans le secteur de la forêt) et de diminution de la vulnérabilité générale du système (en accroissant la stabilité des peuplements forestiers par exemple).

L’adaptation anticipative utilise des ressources d’aujourd’hui pour des besoins de demain souvent incertains. Ceci la rend plus difficile à définir et à justifier que l’adaptation réactive. En effet, des décisions sont souvent plus aisément prises et acceptées après une crise. Par contre, même si les coûts d’adaptation sont encore très difficiles à évaluer, ils seraient sans doute moins élevés dans le cadre d’une adaptation anticipative que réactive : « il vaut mieux prévenir que guérir ». De même que la barrière entre impact observé et impact pressenti est parfois floue, la frontière entre adaptation anticipative et adaptation réactive est également parfois difficile à tracer. De Perthuis et al. (2010) l’illustre à travers l’exemple du Plan Climat adopté en France après la canicule de 2003 qui peut être interprété à la fois comme une réaction à l’évènement de 2003, et comme une manière d’anticiper des évènements similaires dans le futur.

b. S’adapter selon les outils disponibles Dans les deux cas précédents, les outils à utiliser existent déjà plus ou moins. Il est intéressant de s’y pencher car cela conditionnera la facilité que certains secteurs auront à s’adapter. Nous avons défini trois niveaux d’adaptation selon leur spécificité au changement climatique : o L’adaptation opportune : les outils existent déjà ou sont

en cours de mise en œuvre pour des raisons autres que l’adaptation au changement climatique. Mais ils peuvent être mobilisés et mis à profit dans le cadre de l’adaptation.

o L’adaptation combinée : les outils s’imposent pour des raisons multiples, dont l’adaptation au changement climatique (poids plus ou moins important).

o L’adaptation spécifique : les outils d’adaptation ne sont pas utilisés actuellement, et seront à mettre en place spécifiquement pour s’adapter au changement climatique.

A partir de l’identification et de la clarification des pistes

Exemple

Exemple

Exemple

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Secteurs de l’élevage et des grandes cultures…

d’adaptation, il est intéressant d’identifier les leviers nécessaires à la mise en place de ces outils. Nous les avons regroupés en cinq catégories assez intuitives : o La recherche et l’expérimentation (R) o L’observation et la surveillance (O) o La sensibilisation, la formation et le conseil (F) o Les infrastructures et le matériel (I) o La concertation et la prospective (C) Certaines adaptations, presque automatiques ne nécessitent pas de levier : elles sont spontanées17 (S). Afin d’établir une base de réflexion pour élaborer des politiques d’adaptation, nous proposons d’ordonner les pistes d’adaptation dans un tableau utilisant ces différentes classifications. Le Tableau 3 ci-dessous donne l’exemple du secteur de la vigne:

Tableau 3 : Proposition d'un tableau croisé des types d'adaptation

exemple de la vigne

Adaptation réactive

Face aux impacts observés Adaptation anticipative

Face aux impacts pressentis

Adaptation

opportune

Utilisation de clones (R)

Mise en place de bandes enherbées (R ; F)

Adaptation

combinée

Abandon des dispositifs de lutte contre le gel printanier (S)

Création d’un conservatoire génétique (R ; O ; I)

Adaptation

spécifique

Décalage de la date de la taille (R ; S)

Changement de cépages (R ; S ; C)

Ce tableau est aisément rempli pour les thématiques les plus avancées où les impacts sont relativement bien recensés et les pistes assez nombreuses. En revanche, ce tableau est difficile à compléter pour les thématiques où les impacts sont essentiellement pressentis (comme pour la santé) ou celles ayant peu de pistes d’adaptation (la biodiversité par exemple) et l’exercice devient au final assez inutile… Dans les cas où la réflexion est suffisamment avancée, nous pensons que ce tableau peut servir d’armature aux stratégies d’adaptation et être utile lors de concertations : les décideurs pourront ajouter, à chaque mesure, une note sur sa facilité de mise en œuvre ou son degré de priorité.

c. Les politiques publiques catalyseurs de l’adaptation ? Si l’adaptation est relativement ascendante (cf. page 44), elle n’en reste pas moins parfois coûteuse et peut nécessiter l’appui voire l’impulsion de politiques publiques. Même si l’adaptation bénéficie à ceux qui la mettent en place (car elle produit des « biens privés »), plusieurs caractéristiques du changement climatique font que l’intervention publique est effectivement justifiée (De Perthuis et al., 2010) : o La prise en compte du long terme dans les décisions privées

d’investissement est insuffisante. De plus, certaines actions d’adaptation peuvent ne pas être rentables du point de vue privé, mais l’être du point de vue de la collectivité. ;

17

Le GIEC (2001a) oppose l’adaptation « spontanée » à l’adaptation « prévue » résultant de « décisions stratégiques délibérées, fondées sur une perception claire des conditions qui ont changé et sur les mesures qu’il convient de prendre pour revenir, s’en tenir ou parvenir à la situation souhaitée ».

Exemple

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Dans le secteur de la vigne, la réglementation des AOC limite les adaptations car elle fixe le cépage utilisé, interdit l’irrigation, limite les rendements…

La pratique de l’éclaircissage en vigne (cf. page 31) est contre-productive à moyen terme car elle vise à limiter les rendements de l’année mais renforce indirectement la vigueur (mise en réserve) et donc les rendements des années suivantes…

o La diffusion de l’information disponible sur le changement climatique, ses impacts, et les options d’adaptation est insuffisante : les pouvoirs publics peuvent avoir un rôle important dans la production de connaissance (R ; O) et sa diffusion auprès de tous (F) ;

o Une coordination est nécessaire: l’action publique peut faciliter la négociation entre les acteurs concernés (C) et évaluer les conséquences négatives que certaines adaptations peuvent avoir sur d’autres acteurs ;

o Certaines adaptations relèvent de la responsabilité

publique : c’est le cas des risques naturels ou de l’urbanisme. Par ailleurs, la réglementation peut entraver certaines adaptations ;

o Les inégalités s’accroitront avec le changement climatique : certains acteurs ne pourront peut-être pas être en mesure de financer eux-mêmes les mesures d’adaptation, même si ces mesures sont dans leur intérêt…

Au cours des entretiens, les acteurs ont souvent cité les pouvoirs publics comme initiateurs d’adaptation. Toutes les ressources publiques (Knoepfel et al., 2006) peuvent être utilisées pour actionner ces leviers (cf. Figure 28) : appui politique, subventions, règlementation, ressources humaines...

L’important est tout simplement de les identifier et de les mobiliser…

3. Les conditions d’une adaptation réussie

L’adaptation réussie est rarement définie en tant que telle : elle est simplement opposée à sa négative, la maladaptation. Cette dernière, définie par le GIEC comme « un changement dans les systèmes naturels ou humains qui conduit à augmenter la vulnérabilité au lieu de la réduire », provient d’après De Perthuis et al. (2010) de deux principales causes : o Des mesures appropriées étant donné les connaissances actuelles mais qui se révèlent par la

suite inadéquates car l’impact s’est traduit de manière inattendue. Ce premier type de maladaptation ne serait a priori pas évitable.

o De mauvais choix ex-ante du fait d’une mauvaise prise en compte de l’information disponible. Cela peut induire de nouveaux problèmes au sein du système mais aussi sur d’autres thématiques…

a. La nécessité d’une cohérence entre stratégies au sein de la thématique Pour bien s’adapter, chaque secteur ou domaine doit analyser les mesures d’adaptation envisagées sous plusieurs angles : o La durabilité : toute adaptation n’est pas

durable en elle-même ; elle peut, sans le

Figure 28 : Proposition d'utilisation de certaines ressources publiques pour actionner les leviers de l'adaptation

Exemple

Exemple

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La pratique de l’effeuillage qui vise à limiter la consommation en eau entre en contradiction avec la volonté de créer de l’ombrage afin de protéger les grappes d’un rayonnement trop fort (cf. page 31).

Dans le domaine de l’urbanisme, stratégies d’adaptation et d’atténuation peuvent s’opposer : les ventilateurs et climatiseurs sont les premiers réflexes d’adaptation face à la hausse des températures estivales. Cependant, cette solution est une aberration du point de vue énergétique. De même, il faudra faire attention à l’éventuel antagonisme entre adaptation au changement climatique et protection du patrimoine…

On peut notamment s’attendre à ce que les modifications de pratiques des secteurs liés au sol (forêt, vigne, grande culture, élevage) et l’urbanisme impactent largement la biodiversité.

La surveillance des maladies et des insectes venant du Sud pourrait être coordonnée entre plusieurs domaines (santé, biodiversité) et secteurs (élevage, grandes cultures, vigne et forêt).

vouloir, renforcer certains impacts du changement climatique qu’elle essaie de contrer. o La cohérence entre elles : toutes les pistes

d’adaptation ne sont pas compatibles entre elles, elles peuvent se contrer l’une l’autre.

o Cohérence avec les autres stratégies du

secteur ou du domaine : ssi l’adaptation peut être mise en œuvre en parallèle à d’autres stratégies (cf. adaptation opportune ou combinée), elle peut aussi entrer en conflit avec certaines d’entre elles.

b. La nécessité d’une cohérence territoriale Il ne peut pas y avoir d’adaptation optimale d’un secteur ou d’un domaine si elle se fait indépendamment des autres car : o De la même manière que le changement climatique

induit des impacts indirects à travers d’autres systèmes, les mesures d’adaptation mises en œuvre dans une thématique impacteront les autres (cf. Figure 29) ;

Figure 29 : Proposition de schéma des interactions entre stratégies d’adaptation

o Certaines synergies pourraient avoir lieu et

réduiraient les coûts de l’adaptation en augmentant son efficacité ;

Exemple

Exemple

Exemple

Exemple

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La ressource en eau pourrait être source de conflit entre les différents secteurs étudiés ainsi qu’avec d’autres usagers (industries, collectivités, particuliers…)

o A l’inverse des tensions pourraient apparaître rendant l’adaptation difficile pour chacune des thématiques impliquées…

c. Qu’est-ce qu’une adaptation réussie ? Ainsi, pour être réussie, une adaptation doit être en cohérence non seulement avec les autres stratégies du système mais aussi avec celles d’autres thématiques : il s’agit d’une approche de développement durable, où un processus de concertation semble être une étape indispensable. Enfin, du fait des incertitudes liées au changement climatique et de l’expression différentielle des impacts dans le temps, l’adaptation doit être, avant tout, évolutive. Cela permettra alors peut-être d’esquiver aussi le premier type de maladaptation cité par De Perthuis et al. (cf. page 47), classé comme inévitable… La Figure 30 en résume les principales étapes.

Figure 30: Proposition de schéma du processus d’adaptation

Exemple

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CCOONNCCLLUUSSIIOONN

A posteriori, le choix d’une analyse d’abord en râteau semble approprié car le sujet de l’adaptation est récent et les études actuelles sont principalement sectorielles. Si l’on peut regretter que les thématiques n’aient pas été définies de manière plus rigoureuse, la superposition de certaines problématiques (comme le confort estival traité à la fois dans le domaine de la santé et de l’urbanisme) a permis de multiplier les points de vue. D’une manière générale, cette étude a contribué à enclencher une dynamique régionale que se soit à travers notre participation à l’organisation du séminaire du SRCAE sur l’adaptation ou la rencontre d’acteurs et d’experts au fil des enquêtes. La plupart des enquêtés ont débuté l’entretien en signalant leur méconnaissance du sujet et leur interrogation quant à la pertinence des éléments qu’ils pouvaient apporter. Malgré cela, les entretiens ont duré en moyenne une heure et demie : au fur et à mesure de la conversation, les acteurs ont pris conscience des implications du changement climatique dans leur domaine et des pistes d’adaptation possibles. Ce décalage est sans doute dû au fait que la plupart de ces personnes rencontrées n’avaient tout simplement jamais eu l’occasion de réfléchir de manière approfondie à ce sujet. Ce dernier nécessite une certaine prise de recul et d’adopter une vision prospective. Les entretiens leur ont alors permis d’initier cette réflexion et le séminaire du SRCAE d’échanger leurs points de vue. Cependant, le travail ne fait que commencer car, comme nous l’avons vu, l’adaptation est un processus. On peut encore approfondir ce travail par thématique, notamment avec quelques enquêtes supplémentaires. Mais, le plus important est de le rendre accessible à ceux qui pourraient en avoir l’utilité. Nous avons constaté lors des ateliers du SRCAE et de réunions informelles que les acteurs locaux et les animateurs de PCET étaient intéressés par les résultats de cette étude. La mise à disposition et l’appropriation de ces derniers est primordiale. Cela pourrait par exemple être facilité par la création d’une boîte à outils et une analyse plus fine des vulnérabilités territoriales. La grille proposée page 46 pourrait être utilisée afin d’approfondir les pistes d’adaptation et d’établir des priorités par thématiques lors de groupes de travail. Enfin des rencontres transversales devraient être organisées afin d’éviter incohérences et contradictions. Tout ceci ne pourra évidemment se réaliser qu’avec l’appui des politiques publiques…

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Changement climatique en Bourgogne : analyse des impacts et des pistes d’adaptation

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Annexe 1 - PCET et SRACE en Bourgogne

AANNNNEEXXEESS

Annexe 1. PCET et SRCAE en Bourgogne

Figure 31 : Localisation des collectivités engagées dans un PCET en Bourgogne

Figure 32 : Calendrier prévisionnel d'établissement des SRCAE (Assemblée nationale, 2011)

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Annexe 2 - Liste des membres du comité scientifique de suivi du stage

Annexe 2. Liste des membres du comité scientifique de suivi du stage

Nom Fonction Organisme

Erwan PERSONNE Enseignant - tuteur

Enseignant Chercheur AgroParisTech - UFR Physique de l'Environnement & Régulation Biologique des Echanges

Caroline MAURY Enseignant - tuteur

Maître de conférences AgroParisTech - UFR Développement local et aménagement des territoires

Hélène TOUSSAINT Maître de stage

Chargée de mission observation-évaluation

Alterre Bourgogne

Franck DUMAITRE Chargé de mission ADEME Bourgogne – Pôle Villes et territoires durables

Florent DUVAL Chargé de mission politiques territoriales

Conseil régional de Bourgogne

François BERTRAND Ingénieur de recherche Université François Rabelais de Tours – MSH Villes et Territoires Elsa RICHARD Doctorante

Sandrine PETIT Ingénieur de recherche INRA - Laboratoire de recherche sur les innovations socio-techniques et organisationnelles en agriculture

Yves RICHARD Professeur Université de Bourgogne – Centre de Recherche en Climatologie Thierry CASTEL Maître de conférences

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Annexe 3 - Grille d’entretien

Annexe 3. Grille d’entretien

Présentation de l’étude :

Objectifs : Identifier les principaux impacts du changement climatique dans différents secteurs en Bourgogne, des stratégies d’adaptation et des vulnérabilités territoriales � mise à jour et approfondissement d’un précédent travail réalisé en 2008. Avancées : - Sélection de quelques secteurs particulièrement touchés par le changement climatique : la viticulture, la forêt, l’agriculture, l’élevage, la santé, les risques naturels, l’urbanisme et la biodiversité. - Dans le secteur : synthèse bibliographique en cours + rdv avec acteurs de la filière (les nommer)

Spécificités de la thématique en Bourgogne

- Présentation de la thématique en

Bourgogne, des spécificités géographiques et des défis majeurs

- Rôle/position de la structure dans ce secteur ? Actualités

Données bibliographiques

Sensibilité au climat

- Variables climatiques clés dans la

thématique en Bourgogne? - Evènements climatiques particuliers qui

peuvent mettre en péril la thématique ou au contraire l’améliorer en Bourgogne?

Données bibliographiques

Exposition - Impacts du changement climatique

Aujourd’hui et à court terme : - Quels effets ? Sont-ils positifs/négatifs ?

Pourquoi ? - Différences géographiques ?

Données bibliographiques

Demain à moyen et long terme : - Quels impacts? Sont-ils positifs/négatifs ?

Pourquoi ? Données bibliographiques

- Recherches en cours/prévues sur les impacts ? - Différences géographiques ? - Relations d’interdépendance avec d’autres secteurs qui sont eux/aussi susceptibles de subir les

effets du changement climatique ? Vulnérabilité au changement climatique

Facteurs socio-économiques, physiques ou

environnementaux susceptibles d’augmenter la vulnérabilité la thématique au changement climatique ?

Données bibliographiques

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Annexe 3 - Grille d’entretien

Adaptation au changement climatique

Aujourd’hui et à court terme : Données bibliographiques - Thématique déjà préparée aux effets du changement climatique ? - Au niveau de la structure ? veille particulière, des mesures d’anticipation ?

� Si oui : Comment ? Qui ? Quelles sont les difficultés/ facilitateurs ?

Quels sont les résultats ?

- Phase de transition entre aujourd’hui et demain ? Demain à moyen et long terme : Données bibliographiques - Comment le secteur s’adaptera demain ? - Au niveau de la structure ? Que pensez-vous qu’il faudrait faire ? - Quelles seront les difficultés/facilitateurs ? - Recherches en cours/prévues sur l’adaptation ?

Gouvernance : Qui devrait prendre en charge la question de l’adaptation/donner l’impulsion ? Pour quelle question ? A quel niveau ? Conclusion de l’enquête

Remerciements

- Acteurs de la thématique intéressants de rencontrer ? - Etudes ou des documents conseillés ?

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Changement climatique en Bourgogne : analyse des impacts et des pistes d’adaptation

AABBSSTTRRAACCTT

This study is part of a larger project entitled “Adaptation to climate change in Burgundy – Participation in the definition of regional and territorial adaptive strategies”, carried out by both the agency for the environment and energy (ADEME) and the regional agency for the environment and sustainable development (Alterre Bourgogne). It is aimed at assessing regional knowledge and perception of climate change impacts and analyzing adaptation strategies in Burgundy. It also contributed to provide basic information for the debates of the seminar preparing the adaptation part of the Regional Climate Air Energy Plan (SRCAE) of Burgundy.

With the support of a scientific committee, the choice was made to begin with an analysis by

themes. These were chosen according to their importance in Burgundy (which is a rural region of the North-East of France) and their link to climate: four economic sectors were selected (forestry, vine growing, field crop and animal husbandry) as well as four fields (biodiversity, health, urban planning and natural hazards). For each theme, impacts and adaptations were found through bibliographical searches and interviews (40) with regional experts and players. This double approach allowed us to gather both quantitative and qualitative data.

Productions bound to the ground (field crop, animal husbandry, forestry and vine growing)

have numerous common impacts. First of all, the increase of temperatures leads to a general acceleration of biological processes and a shift of geographical areas of species northward and in altitude. As a consequence, there will certainly be a change in the dynamics of diseases but the outcome is uncertain because of the complexity of the involved phenomena. Thanks to the fertilizing affect of carbon dioxide, so far, there seems to be an increase of the yields but its consequences on the quality of the final products are still difficult to comprehend. Nevertheless, the increase of drought, the potential modification of diseases and extreme events could counterbalance this effect.

Human health is likely to be impacted through the development of exotic diseases and a

general decline of thermal comfort, aggravated by urban heat islands. Natural hazards also represent a danger for the populations, in particular if the rate of flow of floods is modified. These can also cause equipment damage as well as swelling soil hazards increased by droughts. Finally, because of these various impacts, movements of population are expected: Burgundy could become a destination for green tourism or even a host region for “climate refugees”…

Generally speaking, the impacts of climate change can be direct or indirect and often

combine. Their perception by regional players depends on spatiotemporal vulnerabilities and on how the sectors and fields are structured. Most of the themes are only beginning to discover them. The sectors of vine growing and forestry seem, however, to be more advanced. It can probably be explained by their need to have long-term views. The proposed adaptive measures differ according to whether the impacts are really observed or anticipated and only a few are already implemented. A transverse analysis highlights the need for coherence between the measures of adaptation of a system and its other strategies as well as those the other themes. To be optimal, adaptation must evolve and be coordinated: public policies can be used as a catalyst to this sustainable approach. A dynamics has been started in Burgundy and must be supported in order to accompany local players in their apprehension of this problem in their activities.

Key-words : climate change, adaptation, impacts, Burgundy

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Changement climatique en Bourgogne : analyse des impacts et des pistes d’adaptation

RRÉÉSSUUMMÉÉ

Cette étude fait partie d’un projet pluriannuel porté par l’ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie) et Alterre Bourgogne (agence régionale de l’environnement et du développement soutenable) intitulé « Adaptation au changement climatique en Bourgogne – Contribution à l’élaboration de stratégies d’adaptation régionale et territoriales ». Elle vise à réaliser un état des lieux de la perception et des connaissances régionales des impacts du changement climatique et des pistes d’adaptation. Elle a également servi de base aux échanges du séminaire de préparation du volet adaptation du SRCAE (Schéma Régional Climat Air Energie) de Bourgogne.

Avec l’appui d’un comité scientifique de suivi, le choix a été fait de débuter avec une analyse par thématiques. Celles-ci ont été choisies selon leur importance en Bourgogne (région rurale) et leur dépendance au climat : quatre secteurs économiques ont été sélectionnés (forêt, vigne, grande culture et élevage) ainsi que quatre domaines (biodiversité, santé, urbanisme et risques naturels). Pour chaque thématique, les impacts et les adaptations ont été recensés à travers des recherches bibliographiques et des enquêtes (40) auprès d’acteurs et d’experts régionaux. Cette double approche, entre objectivation et perception, nous a permis d’ancrer le sujet sur le territoire.

Les productions liées au sol (élevage, grandes cultures, forêt et vigne) comptent de nombreux impacts communs. Tout d’abord, l’augmentation de température induit une accélération générale de la phénologie et une remontée des aires géographiques des espèces vers le Nord et en altitude. Ceci induit une modification des dynamiques des pathogènes et des insectes dont l’issue est incertaine du fait de la complexité des phénomènes impliqués. En termes de production, grâce à la fertilisation par le CO2, il semble y avoir pour le moment une hausse des rendements dont les conséquences sur la qualité des produits finaux sont encore difficiles à appréhender. Cependant l’augmentation du risque de sécheresse, la modification potentielle des pathogènes et des évènements extrêmes pourraient contrebalancer cet effet.

La santé humaine est impactée à travers une possible remontée de maladies exotiques, parfois par le biais de l’élevage (zoonoses). Une baisse générale du confort d’été, aggravée par l’augmentation des ilots de chaleur urbains, est à envisager. Enfin les risques naturels représentent également un danger pour les populations, notamment si le régime des inondations est modifié. Ces dernières peuvent aussi occasionner des dégâts matériels tout comme le retrait-gonflement des argiles favorisé par les sécheresses. Enfin, du fait de ces différents impacts des mouvements de population sont à prévoir, la Bourgogne a peut-être une carte à jouer comme terre d’accueil pour « réfugiés » climatiques ou, plus modestement, comme destination de tourisme vert…

Cette étude a mis en évidence la complexité des impacts du changement climatique qui peuvent être direct ou indirects et souvent se combinent. Leur perception par les acteurs régionaux dépend des vulnérabilités spatio-temporelles et de la structuration des secteurs et des domaines. La plupart des thématiques commencent seulement à les découvrir. Les secteurs de la vigne et de la forêt semblent toutefois plus avancés, en lien avec leur nécessité d’avoir une vision à long terme. Selon que les impacts soient réellement observés ou seulement pressentis, les pistes d’adaptations diffèrent mais très peu sont déjà en place. Une analyse transversale a mis en avant la nécessité d’une cohérence entre les mesures d’adaptation d’un système et ses autres stratégies ainsi que celles des autres thématiques. Pour être optimale, l’adaptation doit être évolutive et concertée : les politiques publiques peuvent alors servir de catalyseur à cette démarche de développement durable. Si une dynamique a été lancée en Bourgogne, il convient de l’entretenir et d’accompagner les acteurs locaux afin qu’ils incluent cette problématique dans leurs activités. Mots clés : changement climatique, adaptation, impacts, Bourgogne