MEMOIRE 4_REGIS Anthony

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Résumé :

Ce mémoire porte sur l’évolutivité des espaces publics d’un tissu industriel et leur

capacité à produire une image de la ville. En partant de l’analyse de la ville de Port-de-Bouc,

une ville née de ses industries et dont le tissu industriel est encore très présent aujourd’hui,

l’objectif est de montrer par quels processus deux de ses espaces publics ont pu évoluer pour

donner une nouvelle image de la ville. Il s’agit du Cours Landrivon et du Port Renaissance. Le

premier étant issu d’une évolution du tissu industriel au court du temps, le second d’une

mutation brusque de ce même tissu industriel, par la volonté de la ville de fabriquer un cœur de

ville à la place de la friche des anciens Chantiers et Ateliers de Provence. Nous verrons alors

que les notions d’évolutivité, d’espace public et d’image de la ville sont fortement liées. Une

bonne évolutivité permet de modifier et de modeler plus facilement un espace public et comme

l’image de la ville est avant tout perçue depuis l’espace public par les habitants, la modification

de cet espace public provoque alors la modification de l’image de la ville. De plus, nous verrons

aussi que l’image globale de la ville est composée d’un assemblage d’images secondaires qui

peuvent justement correspondre à différents espaces publics de la ville. Ainsi, c’est en apportant

des modifications sur plusieurs espaces publics d’une ville que l’on peut modifier durablement

son image. Nous verrons donc à travers le cas de Port-de-Bouc, les différents processus mis en

œuvre pour que l’évolution d’un espace public puisse changer l’image de la ville.

Mots clés :

Espace public ; Image de la ville ; Evolutivité ; Tissu industriel ; Dialectique forme / usage

Photo de couverture :

Anonyme, Le cargo bananier Fort Caroline en construction, Collection Association French Lines.

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Remerciements :

Pour la réalisation de ce mémoire, plusieurs personnes m’ont été indispensables. Je tiens

tout d’abord à remercier ma directrice de mémoire Alexandra Biehler, pour m’avoir

judicieusement aiguillé dans ce travail, ainsi que Stephane Hanrot, Marion Serre et Clément

Pécqueux pour nous avoir, moi et les autres étudiants, habillement conseillés dans la

méthodologie du mémoire.

Je remercie également la mairie de Port-de-Bouc et spécialement Frédéric Allio,

responsable des Archives Communales de Port-de-Bouc, pour m’avoir été d’une grande aide

dans ma recherche de documents historiques, ainsi que Céline Felices, responsable du Service

de Coordination Culturelle de Port-de-Bouc, pour m’avoir soigneusement confié les cartes

historiques et documents figurés nécessaires à la réalisation de ce mémoire.

Je voulais aussi remercier les différentes bibliothèques dans lesquelles j’ai pu trouver

les renseignements indispensables à ma recherche : celle de l’école d’architecture de Marseille,

mais aussi la médiathèque Boris Vian de Port-de-Bouc, ainsi que les archives départementales

des Bouches-du-Rhône.

Et je tiens enfin à remercier les différents habitants Port-de-Boucains que j’ai pu

interroger dans les rues de la ville, pour m’avoir donné de précieuses informations avec

beaucoup de gentillesse et de courtoisie.

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Sommaire

Résumé : ..................................................................................................................................................................................... 3

Mots clés : .................................................................................................................................................................................. 3

Remerciements : ........................................................................................................................................................................ 5

Sommaire ................................................................................................................................................................................... 7

INTRODUCTION : .............................................................................................................................................. 9

I. PORT-DE-BOUC : UNE VILLE EN PERPETUEL BOULEVERSEMENT .................................................................. 11

1.1. LA VILLE VIRTUELLE DE NAPOLEON BONAPARTE .................................................................................................... 11

1.2. DEVELOPPEMENT DE PORT-DE-BOUC AUTOUR DU NOUVEAU CANAL D’ARLES A BOUC ................................................. 13

1.3. LES CHANTIERS ET ATELIERS DE PROVENCE, CŒUR DE LA VILLE ................................................................................. 15

1.4. L’APRES CHANTIERS, LA RECONVERSION .............................................................................................................. 18

II. CONSEQUENCES SUR LA VILLE .................................................................................................................... 23

2.1. EVOLUTIVITE DU TISSU URBAIN .......................................................................................................................... 23

2.2. CARACTERISTIQUES DE L’ESPACE PUBLIC .............................................................................................................. 24

2.3. FORMATION DE L’IMAGE DE LA VILLE .................................................................................................................. 26

III. DEUX ESPACES PUBLICS AUX MODES DE CONSTITUTIONS OPPOSES ......................................................... 29

3.1. LE COURS LANDRIVON : UN ESPACE PUBLIC DANS UN TISSU INDUSTRIEL EN CONSTANTE EVOLUTION ................................ 30

3.1.1. Les origines du Cours Landrivon ........................................................................................................ 30

3.1.2. Son évolution lors de la période des Chantiers et Ateliers de Provence ............................................. 33

3.1.3. Après la fermeture des Chantiers et Ateliers de Provence, quel avenir ? .......................................... 37

3.2. LE PORT RENAISSANCE : UN ESPACE PUBLIC ISSU D’UNE MUTATION DU TISSU INDUSTRIEL ............................................. 40

IV. DONNER UNE NOUVELLE IMAGE DE PORT-DE-BOUC ? .............................................................................. 45

4.1. PORT-DE-BOUC, UNE VILLE EVOLUTIVE ............................................................................................................... 45

4.2. LES ACTIONS POSSIBLES POUR FAIRE EVOLUER UN ESPACE PUBLIC ............................................................................. 46

4.3. L’ESPACE PUBLIC COMME DETERMINANT PRINCIPAL DE L’IMAGE DE LA VILLE ............................................................... 48

CONCLUSION .................................................................................................................................................. 51

Bibliographie ............................................................................................................................................................................ 53

Table des illustrations .............................................................................................................................................................. 55

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Introduction :

Depuis le déclin des activités industrielles dans les années 1970, de nombreuses villes

autrefois totalement vouées à l’industrie doivent faire face à ce changement de paradigme et

trouver des solutions qui les mèneront vers une nouvelle destinée. En effet, certaines villes se

retrouvent aujourd’hui avec un passé industriel omniprésent : des voies orthogonales pour

rentabiliser l’espace, des industries encore présentes, des friches, des anciens bâtiments

industriels reconvertis, des cités ouvrières, des anciens quais de déchargement, des ports

industriels, etc. Mais quand cela commence à être un frein au développement d’une ville et à

dégrader son image ou celle de l’un de ses quartiers, il convient de se poser des questions quant

au devenir de ce tissu industriel. « C’est seulement depuis les années 1990 que l’on commence

à se poser ce genre de questions en France » (Boucher-Hedenstrom, 1994) et on s’aperçoit

aujourd’hui qu’un grand nombre de villes doivent faire face à ce problème. La reconversion de

ces tissus industriels permet d’une part de donner un nouvel usage aux bâtiments industriels,

s’ils sont conservés, mais aussi de requalifier les espaces publics attenants afin de les redonner

à la ville. Ils deviennent alors un moteur au développement d’une ville ou d’un quartier et non

plus un obstacle.

J’aimerais donc m’intéresser à l’évolutivité des espaces publics d’un tissu industriel

c’est-à-dire à leur capacité à pouvoir intégrer de nouveaux usages, différents de ceux pour

lesquels ils ont été conçus, et ainsi à changer le regard sur une ville. En effet, les qualités de

l’espace public d’une cité, sa forme, ses usages, la façon dont on le perçoit, participent

grandement à donner à la ville ses caractéristiques, son image. L’objet serait donc d’analyser

l’espace public d’une ville autrefois vouée à l’industrie et de voir comment ces espaces, issus

d’un tissu industriel, ont pu évoluer pour lui donner une nouvelle image.

Pour effectuer cette analyse, je prendrais comme objet d’étude la ville de Port-de-Bouc

car cette ville a toujours eu un caractère industriel. C’est même de cette industrie que Port-de-

Bouc est née. Quand la plupart des villages se sont formés autour de leur église, Port-de-Bouc

s’est formé autour de ses industries. Que ce soit des usines chimiques, pétrolières, de fabrication

de charbon, des industries liées à la pêche, ou les chantiers navals, c’est leur implantation sur

ce bout de territoire qui, en ramenant la main d’œuvre nécessaire, ont permis à Port-de-Bouc

de se construire. Mais depuis les années 1970 et le déclin des activités industrielles, la ville a

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dû s’adapter et changer ses modes de fonctionnements. Les chantiers navals ont laissé place au

port de plaisance Renaissance et les entrepôts à des ensembles de logements. Mais l’histoire

industrielle de Port-de-Bouc reste présente, il n’y a pas eu de table rase puis de projet urbain

pour remodeler la ville, les rues sont les mêmes, les places aussi, certains bâtiments industriels

sont toujours présents, en activité ou pas, d’autres ont été réhabilités. L’espace public garde

donc les traces de ce tissu industriel, mais doit aujourd’hui répondre à une tout autre

problématique car Port-de-Bouc tend peu à peu à devenir une ville balnéaire, touristique,

festive, où il fait bon vivre. C’est donc le lieu idéal pour travailler sur l’évolutivité des espaces

publics d’un tissu industriel.

Pour cela, il sera analysé tout d’abord les différentes phases urbaines par lesquelles est

passé Port-de-Bouc, depuis sa naissance jusqu’à aujourd’hui, pour voir quels ont été les

moments charnière de son développement qui lui ont permis de devenir ce qu’elle est

aujourd’hui. Nous verrons ensuite l’impact de ce développement sur l’espace public de la ville

et sur son image, en définissant les notions importantes qui y sont liées. Puis deux espaces

publics de Port-de-Bouc seront plus particulièrement étudiés. Il s’agit du Cours Landrivon et

du Port Renaissance. Le premier ayant traversé toute l’histoire contemporaine de la ville, avec

tous les bouleversements que cela inclue, et le second étant une reconversion de l’ancien site

des Chantiers et Ateliers de Provence, plus récente. Par une analyse de ces deux espaces publics,

il s’agira de montrer deux attitudes différentes envers le tissu industriel de la ville. Pour le Cours

Landrivon ce tissu a pu évoluer au cours du temps, avec quelques réaménagements, alors que

pour le Port Renaissance il a été totalement reconverti. Et enfin, il sera question dans une

dernière partie de voir ce que ces deux attitudes envers l’espace public de ce tissu industriel ont

apportés à Port-de-Bouc, qu’est-ce qui les différencie aujourd’hui et quelle image donnent-ils

de cette ville. Cela permettra d’interroger l’évolutivité des espaces publics d’un tissu industriel

afin de voir quelles actions sur ces espaces publics permettent de donner une certaine image de

la ville.

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I. PORT-DE-BOUC : UNE VILLE EN PERPETUEL

BOULEVERSEMENT

Port-de-Bouc est une ville relativement nouvelle. Anciennement un hameau de la

commune de Fos-sur-Mer, elle ne devient indépendante qu’en 1866. Mais en seulement un

siècle et demi d’histoire elle a connu un nombre de bouleversements urbains que des villes plus

anciennes n’ont peut-être jamais connu, ou alors dans une période plus longue. Sa particularité

se trouve donc dans cet enchaînement de retournements de situation dans un laps de temps très

bref à l’échelle d’une ville.

Pour identifier les différentes phases de développement de la ville de Port-de-Bouc, je

m’appuierais sur la notion de « mode de composition urbaine » de Michel Coquery (1982). Il

distingue quatre modes de compositions urbaines différents en Europe Occidentale. Il appelle

le premier « le geste du prince », qui « résulte de la volonté d’un pouvoir absolu, de type

monarchique ». Puis il y a le mode de composition « ordinaire et populaire » où « la ville se

crée et s’ordonne par juxtaposition et imbrication d’espaces bâtis, à forte valeur d’usage ».

Ensuite, celui de la « ville libérale » qui définit la ville industrielle où est présente une

« rationalité évidente, celle dictant une anticipation génératrice de profit, qui estompe

progressivement les valeurs d’usages et les significations culturelles de l’espace ». Et enfin le

mode de composition « technocratique et bureaucratique » qui est « porteur de la dimension

planificatrice de l’espace, où l’Etat est chargé d’arbitrer les contradictions issues du mode de

composition de la ville libérale ». Mais il nous alerte sur le fait que ces quatre modes de

compositions « peuvent avoir un ordre différent suivant les villes et ne sont pas isolés, mais

existent les uns avec les autres. […] Chaque ville est une combinaison de ces quatre modes de

composition, l’un dominant généralement les autres ». L’objectif sera donc ici d’appliquer cette

analyse à Port-de-Bouc en essayant de voir quels modes de compositions urbaines se sont

succédés depuis le début du développement de la ville et ensuite déterminer celui qui aura

dominé les autres.

1.1. La ville virtuelle de Napoléon Bonaparte

L’histoire urbaine de Port-de-Bouc ne commence réellement que lorsque Napoléon,

alors inspecteur des forteresses et batteries de la côte, visite ce morceau de territoire un 8 février

1794 et y voit l’emplacement idéal pour « une ville de plusieurs milliers d’habitants avec un

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port militaire, d’importants chantiers de constructions et le creusement d’un Canal d’Arles à

Bouc » (Crétinon, 2004, p.70). Mais à cette époque-là, Port-de-Bouc n’était constitué que d’un

petit hameau nommé La Lèque, dépendant de Fos-sur-Mer, et du Fort-de-Bouc, dépendant de

Martigues. « Le premier comptant 22 habitants et le second 25 » (Joly, 2005). On comprend

alors pourquoi Crétinon définit le projet de Napoléon comme « un rêve pharaonique » (2004,

p.69). Néanmoins, plusieurs projets seront proposés par M. Bondon, ingénieur en chef de 1re

classe au Corps Royal des Ponts et Chaussés (Figures 1 et 2).

Mais ces différents projets ne seront jamais réalisés dans leur totalité car « en 1805,

l’entretien des armées impériales exigeait des fonds de plus en plus colossaux, annihilant ainsi

l’amorce d’une politique de grands travaux annoncée » (Crétinon, 2004, p.69). Seuls La Jetée

de 1814 à 1820 et le Canal d’Arles à Bouc de 1802 à 1842 seront réalisés. Durant toutes ces

années de construction, Port-de-Bouc restera donc « une ville virtuelle née de l’imagination

d’un homme » (Joly, 2005) car n’ayant jamais vu le jour. Alexandre Dumas effectue en 1934

un voyage dans le midi de la France et, de passage à Port-de-Bouc, écrira ces mots : « C’est une

ville magnifique que Bouc, seulement elle a le malheur contraire à celui du cheval de Roland :

le cheval de Roland n’avait qu’un vice, celui d’être mort ; la ville de Bouc n’a qu’un seul défaut,

celui de n’être pas née » (Dumas, 1853).

Figure 2 : Plan de M.Bondon, 1805 (Crétinon, 2004) Figure 1 : Plan de M.Bondon, 1802 (Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

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Cette première phase dans le développement urbain de Port-de-Bouc pourrait donc

s’apparenter au mode de composition dit du « geste du prince » par Michel Coquery (1982) où

l’on voit que l’avenir de la ville est sous l’influence d’une seule et même personne, l’empereur

Napoléon 1er, qui décide de construire une ville entière et des infrastructures militaires sur un

territoire quasiment désertique (Figures 3 et 4). Malgré l’inachèvement de ce projet, le Canal

d’Arles à Bouc fut construit, et heureusement, car c’est grâce à lui que les premières activités

industrielles ont commencées à voir le jour et que Port-de-Bouc a pu commencer à se

développer.

1.2. Développement de Port-de-Bouc autour du nouveau Canal d’Arles à Bouc

Une fois le Canal ouvert à la circulation fluviale, Port-de-Bouc devient un port de

commerce. Plusieurs industries s’installent, parmi-elles une usine de charbons agglomérés en

1870, puis une fonderie de plomb et des salins en 1850. Cela entraînera une hausse de la

population ouvrière. « Des maisons et des commerces se construisent alors à l’embouchure du

Canal » (Joly, 2005) (Figures 5). Ce nouveau quartier sera appelé « le quartier du Canal, et se

Figure 4 : La Lèque en 1820 (AD Bouches-du-Rhône)

Figure 3 : Port-de-Bouc en 1830 (Document personnel à partir d’un plan de 1830. Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

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positionne comme centralité, alors que celui de La Lèque, le plus ancien, se développe

parallèlement » (Cristini, 2007). Mais ensuite, « même avec le Canal et le creusement du Chenal

de Caronte entre 1846 et 1863, permettant une navigation plus aisée depuis la mer jusqu’à

l’embouchure du Canal et surtout un accès à l’Etang-de-Berre, Port-de-Bouc a un

développement quasiment nul » (Cristini, 2007).

En 1866, Port-de-Bouc devient enfin une commune indépendante de Fos-sur-Mer. De

nouvelles industries s’installent alors sur son territoire : la sécherie de morue « Cabissol » en

1876, une fabrique de chaux et de tuiles en 1888 et la première raffinerie de pétrole de la région

« La phocéenne » en 1894.

Cette seconde phase du développement urbain de Port-de-Bouc pourrait être une

association à la fois du mode de composition « ordinaire et populaire » et du mode de

composition de « la ville libérale » de Michel Coquery (1982). En effet, nous avons d’une part

des habitations qui s’installent petit à petit à l’embouchure du Canal, avec des commerces, une

église, une école et une place qui sépare les bâtiments de l’eau, nommé Cours Landrivon. Tout

Figure 5 : Port-de-Bouc en 1844 (Document personnel à partir d’un plan de 1844. Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

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nous laisserait croire que nous sommes en présence d’un village ordinaire. Mais d’autre part, il

y a ces industries qui s’installent sur les berges du Canal ou du Chenal de Caronte, signe d’une

industrialisation naissante sur ce territoire. C’est là que l’on voit la différence entre Port-de-

Bouc et la plupart des autres villes. Ces dernières ce sont généralement développées en tant que

« village typique », avec tout ce que cela représente, bien avant que l’industrialisation ne vienne

frapper à leur porte. Pour Port-de-Bouc c’est l’inverse, l’industrie est arrivée, grâce à la

construction du Canal d’Arles à Bouc, alors que seul un petit hameau de 22 habitants était

présent, et ensuite on a construit les maisons et équipements pour accueillir la main d’œuvre.

Ainsi les deux modes de composition se sont développés en même temps, l’un avec l’autre, et

même l’un ayant besoin de l’autre, alors que dans la plupart des autres villes, comme Martigues

par exemple, l’industrialisation est arrivée alors que la ville était déjà bien constituée. Et cette

industrialisation de Port-de-Bouc ne s’arrêtera pas là, un grand évènement se prépare.

1.3. Les Chantiers et Ateliers de Provence, cœur de la ville

Figure 7 : Port-de-Bouc en 1920 (Document personnel à partir d’un plan de 1920. Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

Figure 6 : Port-de-Bouc en 1902 (Document personnel à partir d’un plan de 1902. Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

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Le passage au 20ème siècle sera marqué à la fois par l’installation d’industries lourdes

sur le territoire de Port-de-Bouc (Figures 6 et 7), avec les usines chimiques Saint Gobain et

Kulhmann en 1915, la société la Vieille Montagne en 1920, les usines Verminck en 1923 et la

raffinerie de pétrole de « Lavéra » en 1924, mais ce qui marquera durablement la ville est

l’ouverture d’un chantier de construction navale en 1899 : les Chantiers et Ateliers de Provence

(CAP) (Figures 8). Ces chantiers donneront un tout entre visage à Port-de-Bouc, à la fois dans

sa composition urbaine que dans sa composition sociale.

Figure 10 : Port-de-Bouc, années 1940 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 8 : Chantiers et Ateliers de Provence, avec Cours Landrivon sur la droite, années 1950 (Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

Figure 9 : Port-de-Bouc, années 1930 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

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« En trois ans, la population a presque doublé » (Bouffartigue, 1984) passant de 1300 à

2500 habitants. Ce sont des ouvriers venant des villes environnantes comme Martigues, Fos-

sur-Mer, Saint-Mitre-les-Remparts ou La Ciotat, mais aussi venant de pays étrangers comme

l’Italie, l’Espagne, la Grèce, l’Arménie, Malte ou le Nord de l’Afrique qui posent leurs valises

à Port-de-Bouc. Tous ces immigrés vont alors construire « une nouvelle communauté humaine.

A travers le dur labeur quotidien, les grèves, les luttes et les fêtes lors des lancements de

bateaux, se tisse peu à peu la conscience d’une identité commune » (Site internet de la mairie

de Port-de-Bouc, 2014). Port-de-Bouc devient alors une ville multiculturelle « avec son âme

ouvrière, ses modes de vies, sa fraternité, son instinct de solidarité et sa force de résistance »

(Site de la mairie de Port-de-Bouc, 2014). Les CAP auront aussi leur importance dans la vie

familiale car quasiment chaque famille a un membre y travaillant, les liens sociaux entre les

différentes familles deviennent alors plus importants. Durant cette période toute la ville tournait

autour des CAP, si bien que pour les habitants « il n’y avait rien avant le chantier, le chantier

c’est Port-de-Bouc » (Bouffartigue, 1984). Le chantier était donc le cœur de la ville aussi bien

socialement que géographiquement.

Figure 12 : Port-de-Bouc, années 1960 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 11 : Port-de-Bouc, années 1950 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

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En effet, les Chantiers et Ateliers de Provence furent construits entre les deux quartiers

historiques de Port-de-Bouc, celui de La Lèque, et celui du Canal. De ce fait, « la double polarité

de la ville se renforce » (Cristini, 2007). Il y a d’un côté les habitants de Port-de-Bouc qui

étaient là avant les chantiers et qui habitent majoritairement dans le quartier du Canal et de

l’autre les ouvriers immigrés qui habitent majoritairement dans le quartier de La Lèque où une

cité ouvrière fut construite par la direction des CAP en 1929. Ainsi, pendant toutes ses années

d’activité, la ville tout entière tournait autour des chantiers, certains disaient même : « quand

les chantiers s’enrhume, tout port de bouc éternue » (La Marseillaise, 2014). On imagine donc

que lorsque ces chantiers viendront à disparaître en 1966, ce sera un grand bouleversement pour

la ville.

Pour cette période du développement urbain de Port-de-Bouc, nous sommes donc

complètement dans le mode de composition de « la ville libérale » de Michel Coquery (1982).

Ce sont vraiment les industries qui dictent l’évolution urbaine de la ville, entre l’emplacement

des CAP en cœur de ville, puis les autres industries comme l’usine Saint Gobain qui marquent

fortement le territoire, les voies ferrées qui permettent d’acheminer les marchandises, matériaux

et matières premières, les cités ouvrières qui permettent de loger les travailleurs des différentes

usines et les rues très orthogonales qui se mettent en place pour rentabiliser l’espace et les

déplacements. Comme nous l’avons vu précédemment, c’est la ville tout entière qui tourne

autour de ses industries. Après la fermeture des CAP et le déclin progressif des autres industries

dans les années 1970, Port-de-Bouc sera alors contraint de trouver des solutions pour réorienter

la ville vers d’autres modes de fonctionnements.

1.4. L’après Chantiers, la reconversion

Une fois les chantiers fermés en 1966, quelques entreprises essayeront de reprendre le

flambeau, mais en vain, « Provence Industrie ferme en 1969 et Delatte-Levivier en 1974 »

(Bouffartigue, 1984). Pendant plusieurs années, le site restera à l’état de friches « leur fermeture

a laissé un grand vide dans le cœur de la ville » (Cristini, 2007). Autre conséquence, beaucoup

d’ouvriers se retrouvent sans emploi, c’est « le point de départ d’une déstructuration profonde

du tissu social local » (Bouffartigue, 1984). Puis en 1969, un nouveau port se creuse à Fos-sur-

Mer, il est vu comme une nouvelle chance pour ces anciens ouvriers des chantiers qui

« pouvaient être transférables par leur qualification de type chantier même hors construction

naval » (Bouffartigue, 1984). Mais ce nouveau port attire aussi d’autres ouvriers venus d’autres

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horizons et Port-de-Bouc doit faire face à l’afflux de ces nouvelles populations. La ville engage

alors la construction de nombreux logements sociaux et un déséquilibre emplois-résidence

apparait « Port-de-Bouc devient une cité dortoir entre 1968 et 1975 » (Bouffartigue, 1984)

(Figures 13, 14 et 15).

Mais en 1975, les créations d’emplois cessent à Fos, « les travailleurs qualifiés et stabilisés

partent pour accession à la propriété à l’extérieur de la ville, Port-de-Bouc spécialise son

hébergement des couches les plus pauvres. Cela entraine une crise d’identité à l’origine d’une

série d’initiatives » (Bouffartigue, 1984).

En 1977, la commune devient propriétaire des anciens terrains des chantiers et une

Enquête d’Utilité Publique est lancée pour reconstruire et requalifier cette friche en cœur de

ville. Plusieurs projets ont été proposés, il fut d’abord question de l’avenir des berges et des

anciennes cales des chantiers, puis de l’avenir des anciens bâtiments industriels. De ce que j’ai

pu comprendre, les deux volets n’ont pas vraiment été conçus en même temps. Il fut d’abord

question des berges dont la requalification devait servir principalement à relier les deux

quartiers historiques du Canal et de La Lèque. Pour cela, il fut décidé de construire un port de

plaisance, en 1983, baptisé « Port Renaissance », un nom plein de significations (Figures 16,

17 et 18).

Figure 13 : Quartier des Aigues Douces en fond, 1978 (AD des Bouches-du-Rhône)

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Cela marque donc « l’essor des activités de plaisances à Port-de-Bouc, comme en France

et en Méditerranée » (Cristini, 2007). Ce port montre l’envie de la ville de mettre en avant ses

atouts touristiques avec « la proximité du Rhône grâce au Canal d’Arles à Bouc, de la Côte

Bleue, ou de la Camargue » (Cristini, 2007). L’objet est donc à la fois d’attirer les plaisanciers

mais aussi de restituer le littoral aux habitants de Port-de-Bouc. De plus, un nouveau port de

pêche sera mis en service en 1985, complété par une Criée au poisson en 1988, ce qui marque

aussi l’envie de Port-de-Bouc de revenir à ses origines, la pêche, pour redresser l’activité du

territoire. Un second port de pêche fera son apparition à l’Anse Aubran après requalification.

Voilà pour ce qui est du volet relatif aux berges des anciens Chantiers et Ateliers de Provence.

Pour celui concernant les anciens bâtiments des chantiers, il sera décidé d’en conserver une

partie, notamment le Bâtiment A, dans lequel étaient regroupés les bureaux des CAP, pour en

faire des commerces en rez-de-chaussée, des bureaux au premier étage et des logements au

second. Puis, lors de l’Enquête d’Utilité Publique lancée par la ville, les habitants ont signifiés

qu’ils manquaient d’équipements culturels, de services et de commerces dans la ville et qu’ils

étaient obligés de se déplacer à Martigues ou Fos-sur-Mer pour y avoir accès. Ainsi, c’est pour

cela que par exemple un cinéma a été créé dans l’ancienne église du Cours Landrivon, qu’un

centre commercial a vu le jour derrière le Bâtiment A et que des services ont pris place aux rez-

de-chaussée des nouveaux bâtiments.

Figure 15 : Port-de-Bouc, années 1980 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 14 : Port-de-Bouc, années 1970 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

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Figure 18 : Port-de-Bouc, années 2000 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 16 : Port Renaissance, années 2000 (AD Bouches-du-Rhône)

Figure 17 : Port-de-Bouc, années 1990 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 22

Cette phase de développement urbain de Port-de-Bouc correspondra donc à celle du

mode de composition de la ville « technocratique et bureaucratique » de Michel Coquery

(1982) car on voit la volonté de la ville de se saisir des problèmes liés à son passé industriel,

avec notamment les chantiers qui sont passés d’élément moteur de la ville à un obstacle pour

son développement, afin de trouver des solutions et donner un nouvel avenir à Port-de-Bouc.

Cela s’est traduit par la reconversion de cette friche en cœur de ville. Les Chantiers et Ateliers

de Provence deviennent le Port Renaissance. Un nouveau virage est alors engagé, Port-de-Bouc

passe de l’ère industriel à l’ère de la plaisance, du tourisme, des festivités, de la balnéarité.

Mais comme vous l’aurez compris, le mode de composition qui a le plus marqué la ville

de Port-de-Bouc est celui de « la ville libérale » ou autrement dit de la ville industrielle. Cette

ville est véritablement née de ses industries, et cela se sent encore aujourd’hui même avec les

efforts réalisés pour lui redonner un côté « ville balnéaire ». Les rues orthogonales, les traces

des anciens bâtiments industriels, les terrains vagues laissés par la démolition des cités ouvrières

de La Lèque, le Canal, les traces des anciens chemins de fer, tout est encore là pour nous

rappeler ce passé, Jean-Claude Izzo disait même « ça sent la ville qui a souffert » (1981). Depuis

cela s’est amélioré mais on sent encore ce passé dans les rues de Port-de-Bouc.

Figure 19 : Enchaînement des différents modes de composition avec point de bascule représentant le passage de l’ère industrielle à l’ère du tourisme avec la construction du Port Renaissance (Document personnel)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 23

II. CONSEQUENCES SUR LA VILLE

Cette succession et cet enchevêtrement de ces différents mode de composition urbaine

au cours de l’histoire de Port-de-Bouc, dans un temps relativement restreint, a provoqué des

bouleversements urbains importants. Nous allons voir ici les conséquences que ces

bouleversements ont provoqués sur le tissu urbain, l’espace public et l’image de la ville de Port-

de-Bouc.

2.1. Evolutivité du tissu urbain

Pour comprendre comment le tissu urbain de Port-de-Bouc a pu s’adapter face à ces

bouleversements, il convient tout d’abord de définir le terme « évolutivité ». L’évolutivité est

la capacité d’un objet à pouvoir se modifier dans le temps. Si nous prenons comme objet la

ville, une étude réalisée par l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Ile-de-France (2010)

nous indique qu’il existe trois dimensions à prendre en compte dans l’évolutivité du tissu

urbain : « la trame urbaine avec le découpage des îlots, la structure foncière et le partage de

l’espace public, la forme architecturale qui intègre la programmation et la définition des

gabarits et des formes architecturales, et enfin les aspects juridiques qui s’ajoutent à ces deux

dimensions à travers les règlements diverses ». Ici nous nous intéresserons surtout à la trame

urbaine de Port-de-Bouc qui permet de comprendre l’évolutivité à l’échelle de la ville plutôt

que la forme architecturale qui se situe à l’échelle du bâtiment.

L’apparition de la première trace d’un tissu urbain concorde sans étonnements avec la

construction du canal d’Arles à Bouc entre 1802 et 1842. C’est à ce moment-là que plusieurs

bâtiments d’habitations ou industriels s’agglomèrent pour former le quartier du Canal ou pour

développer celui de la Lèque. Les chemins se transforment peu à peu en rues, et une certaine

logique apparait dans l’aménagement du territoire. Un tissu industriel commence à se mettre en

place avec des voies orthogonales permettant d’accéder aux différentes industries avec le

maximum de rentabilité. Selon l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Ile-de-France

(2010) « une trame régulière permet de rationaliser l’usage de l’espace et de faciliter l’évolution

du tissu à long terme en évitant les délaissés, l’absence de repères et les difficultés de

redécoupages ultérieurs ». Port-de-Bouc serait donc, grâce à sa trame orthogonale, une ville

facilement évolutive.

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 24

Ensuite, il convient de différencier les termes « évolution » et « mutation » car le tissu

urbain peu subir ces deux types de transformation au cours du temps. Selon les définitions du

CNRTL1, une évolution serait un « processus continu de transformation, un passage progressif

d'un état à un autre » alors qu’une mutation serait « un changement brusque, spectaculaire et

profond ». L’aspect temporel est donc très important pour différencier les deux termes. Selon

Gauthier Bernard (2003), « le défaut d’évolutivité conduit à des évolutions radicales en un

temps court », c’est-à-dire à des mutations. Ainsi une évolution est plutôt un processus long

alors qu’une mutation est quelque chose de beaucoup plus bref. De plus, conjointement à cet

aspect temporel, il y a aussi un aspect formel qui différencie les deux termes. Une mutation est

plus de l’ordre de la substitution, du remplacement d’un objet par un autre, alors qu’une

évolution modifie un objet mais en gardant une partie de ses caractéristiques en mémoire, ce

n’est pas une table rase comme la mutation, mais un accompagnement d’un état à un autre. Pour

l’évolutivité d’un objet on parlerait plus de sa capacité à s’adapter alors que pour sa mutabilité

on parlerait plus de sa capacité à être réversible. Concernant la ville de Port-de-Bouc, nous

étudierons dans la suite de ce mémoire deux espaces publics issu de ces deux types de

transformation du tissu urbain : le Cours Landrivon qui a su évoluer depuis sa création jusqu’à

aujourd’hui et le Port Renaissance issu d’une mutation des anciens sites des Chantiers et

Ateliers de Provence.

Ensuite, la question de l’évolutivité de la ville se rattache aussi à celle de sa durabilité.

En effet, toujours selon l’étude réalisée par l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Ile-de-

France (2010), « l’urbanisme, s’il veut être durable, doit intégrer en amont ses transformations

futures pour les faciliter, produire de la ville durable c’est avant tout s’interroger sur son

devenir ». Ainsi, pour que la ville soit durable, il faut qu’elle soit évolutive. En ce sens, nous

pouvons dire que Port-de-Bouc est une ville durable car elle porte en elle les caractères d’une

ville évolutive grâce à sa trame urbaine orthogonale. Mais cette durabilité a aussi des

répercutions sur l’espace public de la ville.

2.2. Caractéristiques de l’espace public

Selon Gauthier Bernard (2003), il y a plusieurs niveaux de durabilité. Ainsi, « la voirie

a une durée de vie généralement supérieure à celle du bâti, par exemple les voies médiévales

subsistent aujourd’hui. Puis le parcellaire a une logique de durabilité différente, il peut être fixé

1 Centre National de Ressource Textuelles et Lexicales. Disponible sur : http://www.cnrtl.fr

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 25

par le bâti ou en contraindre la position. Sa durée de vie est donc de ce fait supérieure à celle

du bâti mais inférieure à celle de la voirie ». On a alors la voirie qui est la plus durable, puis le

parcellaire et enfin le bâti. Si on considère que l’espace public se trouve à l’interface entre la

voirie et le bâti, cela veut dire que cet espace public pourra subsister durant plusieurs décennies

voir même plusieurs siècles tout en étant modelé par les différents bâtiments qui le borderont

au cours du temps. Une ville durable peu alors provoquer des espaces publics dont la forme

perdure dans le temps mais dont l’usage pourra changer au fil des années. Ainsi un espace

public conçu au départ dans une forme et pour un usage précis pourra se retrouver plusieurs

années plus tard avec un usage différent. C’est ce décalage entre les besoins qui ont produit un

espace public à un temps donné et ce qu’on en fait plusieurs décennies ou siècles plus tard qui

est intéressant. C’est ce que confirme Michel Coquery (1982) en nous montrant dans son article

qu’« à l’échelle historique, les formes urbaine perdurent, s’inscrivent dans le temps […] alors

que les usages prévus à l’origine, qui étaient en principe en adéquation avec les formes,

changent alors que la forme demeure inchangée », il parle alors de « dialectique du contenant

et du contenu ». Nous verrons dans la suite de ce mémoire l’exemple du Cours Landrivon qui,

comme nous l’avons vu précédemment, est un espace public qui a évolué depuis sa création

jusqu’à aujourd’hui, mais dont les usages actuels ne correspondent plus à ceux pour lesquels il

a été conçu alors que sa forme reste quasiment inchangée.

Avec cette dialectique forme / usage, nous venons de voir quels étaient les deux

constituants de l’espace public. Si on prend la définition de Gauthier Bernard (2003), « il est

formé par les espaces libres publics affectés à des usages publics, et de ce qui est visible depuis

ces espaces. Il comprend donc pour partie le paysage urbain et les façades formant interface

entre l’espace public et l’espace privé de l’intérieur des bâtiments », l’espace public est donc

constitué à la fois de sa composition physique en terme de forme, mais aussi de son caractère

symbolique avec ses usages et ses pratiques. L’espace public est donc « matériel et

immatériel ».

Thierry Paquot (2009) fait lui la différence entre l’espace public au singulier et les

espaces publics au pluriel . Le premier est le « lieu du débat politique, de confrontation des

opinions privées, et de circulation des diverses points de vue. Il relève du vocabulaire de la

philosophie politique. Et il n’est pas géographique ou territorial ». Il donne comme exemple les

journaux, les salons ou les cafés. Quant au second, se sont « des endroits accessibles au public

qui permet le libre mouvement de chacun dans le double respect de l’accessibilité et de la

gratuité. Il est en majorité physique et délimité géographiquement. Et il met en relation les gens

en remplissant une fonction essentielle de la vie collective : la communication ». Ce sont les

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 26

espaces publics que l’on connait, les places, les rues ou les parcs. Mais en conclusion, il nous

montre que les deux sont en réalité indissociables.

2.3. Formation de l’image de la ville

Après avoir défini la notion d’espace public, il sera question ici de sa contribution quant

à la production d’une image de la ville. Etant donné que nous percevons la ville au travers de

cet espace public, cette perception contribuera fortement à donner une image de la ville. En

effet, Kevin Lynch (2010) nous montre que « l’image d’une ville est réparti en plusieurs

éléments : les voies, les points de repères, les limites, les nœuds et les quartiers » mais nous

affirme ensuite que « pour beaucoup de gens ce sont les voies qui sont les éléments

prédominants de leur image car ils observent la ville quand ils circulent et les autres éléments

de l'environnement sont disposés et mis en relation le long de ces voies ». Ainsi, si l’on

considère les voies comme des espaces publics, ils tiennent bien la place la plus importante

dans la constitution d’une image de la ville.

Ensuite, il nous expose que « l’image de l'environnement peut s'analyser à travers trois

composantes : identité, structure et signification ». L’identité c’est le fait de savoir si l’objet

en question est reconnaissable et se distingue des autres objets, c’est « l’identité dans le sens

d'individualité ou d'unicité ». La structure c’est « la relation spatiale de l'objet avec l'observateur

et avec les autres objets ». Et la signification c’est bien entendu ce que cet objet signifie pour

les personnes qui le perçoivent. Mais ces trois composantes qui forment l’image d’un

environnement ne sont pas perçues de la même manière par tous les individus.

En effet, toujours selon Lynch (2010) « les images de l'environnement sont les résultats

d'une opération de va-et-vient entre l'observateur et son milieu. L'observateur choisi, organise

et charge de sens ce qu’il voit, l’image ainsi mise en valeur limite et amplifie alors ce qui est

vu tandis qu'elle-même est mise à l'épreuve des impressions sensorielles filtrées en un processus

constant d'interaction. Ainsi l'image d'une réalité donnée peut présenter des variations

significatives d'un observateur l’autre ». Ces deux schémas d’Antoine Bailly (1978) montrent

bien les processus mis en œuvre par chaque individu pour former sa propre image.

Figure 20 : Formation de l’image (Bailly, 1978)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 27

On comprend alors que chaque individu se fera sa propre image d’un environnement

commun. Puis il nous montre ensuite que pour qu’une image perdure dans le temps, il faut

qu’elle puisse rester dans les mémoires. Ce schéma montre le processus de mémorisation mise

en œuvre par chacun lors de la formation d’une image.

Figure 21 : Processus de perception (Bailly, 1978)

Figure 22 : Perception et mémorisation (Bailly, 1978)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 28

Mais sachant tout cela, maintenant il s’agit de savoir comment peut-on influencer cette

image produite dans l’esprit de chacun ? Dans un premier temps, Kevin Lynch (2010) sépare

les trois composantes de l’image avec l’identité et la structure qui forment à eux deux la forme

physique, et la signification qui est plus symbolique. En tant qu’architecte, urbanistes ou

paysagiste, c’est sur la forme physique que nous aurons le plus d’influence et donc sur l’identité

et la structure de l’image. D’ailleurs, Lynch (2010) nous invite à « concentrer notre attention

sur la clarté physique de l'image et laisser la signification se développer sans que nous

l'orientions directement ». En effet, comme on le voit dans le précédent schéma de Bailly

(1978), la signification d’un environnement est le fruit d’un processus complexe propre à

chaque individu. Vouloir la modifier reviendrait à vouloir « rééduquer celui qui perçoit cet

environnement » (Lynch, 2010). Néanmoins, Lynch nous indique que la signification d’un

environnement peut être influencée par « sa signification sociale, sa fonction, son histoire ou

même son nom » mais il est plus difficile, à notre niveau, d’avoir un impact sur ces choses-là.

Pour finir sur la notion d’image de la ville, il reste un dernier détail, celui de l’échelle

de l’image. En analysant ses études réalisées sur différentes villes, Lynch (2010) remarque que

les images des différentes personnes interrogées « étaient en général disposées sur une série de

niveaux correspondant en gros à l'échelle de la zone considérée, si bien que l'observateur se

déplaçait suivant ses besoins d'une image située au niveau de la rue à d'autres situées au niveau

du voisinage de la ville ou de l'aire métropolitaine ». Il nous affirme alors que « cette disposition

par niveau est indispensable dans un environnement vaste et complexe ».

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 29

III. DEUX ESPACES PUBLICS AUX MODES DE

CONSTITUTIONS OPPOSES

Nous allons nous intéresser dans cette troisième partie à deux espaces publics

particuliers de Port-de-Bouc. Il s’agit du Cours Landrivon et du Port Renaissance. Le premier

étant issu d’une évolution du tissu industriel, le second d’une mutation. Il s’agira donc de

comprendre la genèse de ces espaces publics, qu’est-ce qui leur a donné naissance, comment

sont-ils arrivés à leur état actuel et qu’est ce qui les différencie. Pour cela nous nous appuierons

sur le concept de « mode de composition » de Michel Coquery (1982). Nous avons vu

précédemment les quatre modes de composition d’Europe Occidentale proposés par Michel

Coquery (1982) et avons essayé de définir l’ordre dans lequel ils se sont succédé à Port-de-

Bouc pour ensuite conclure que c’était le mode de composition dit « libéral » qui avait dominé

les autres. Mais selon Coquery (1982), chacun de ces modes de compositions urbaine est « un

processus social mis en action dans le but de produire un espace d’habitat et de travail

comprenant toutes les fonctions utiles au moment historique considéré, donnant, dans le même

mouvement, une forme et une signification particulière à cet espace. Il s’agit d’un processus

complexe qui a des déterminants en amonts et des effets en aval ». Ces modes de compositions

sont donc produits par des déterminants et ensuite engendrent des effets, tel que nous pouvons

le voir dans le schéma suivant.

Figure 23 : Déterminants et effets d’un mode de composition, les flèches en pointillé représentent des usages (Michel Coquery, 1982)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 30

L’objectif sera donc ici d’identifier, pour ces deux espaces publics et selon le mode de

composition dans lequel ils sont nés, quels ont été leurs déterminants et leurs effets et ensuite

voir comment tout cela a pu évoluer.

3.1. Le Cours Landrivon : un espace public dans un tissu industriel en constante évolution

3.1.1. Les origines du Cours Landrivon

Le Cours Landrivon est né de la construction de l’embouchure du Canal d’Arles à Bouc.

La construction du Canal dans sa globalité s’est étalée de 1802 à 1842, mais l’embouchure fut

construite en dernière, comme le témoigne cette carte de 1830 où elle n’est toujours pas réalisée.

Alfred Saurel (1862), qui était un contemporain de cette époque, nous affirme que « le

Canal fut livré au commerce sur tout son parcours qu'en 1835 ou 1836 ». On peut ainsi conclure

que la construction de l’embouchure du Canal d’Arles à Bouc et ainsi du Cours Landrivon s’est

réalisée entre 1830 et 1836. Jusqu’en 1842, ce ne sont donc que des travaux de « finitions » qui

ont permis de compléter la réalisation du Canal. Le déterminant principal qui est à l’origine de

la naissance du Cours Landrivon est donc d’ordre historique et économique, car issu de la

volonté de Napoléon de construire une ville sur ce territoire quasiment désertique, et de la

construction du Canal d’Arles à Bouc permettant des échanges de marchandises.

Figure 25 : Carte de 1844 (Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

Figure 24 : Carte de 1830 (Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 31

Une fois cette embouchure crée, les premières habitations commencent à se construire

comme l’indiquait un décret du 21 ventôse, an XIII (12 mars 1805) « qu’il serait fait choix d'un

emplacement propre à former des magasins près de l'embouchure du canal d'Arles et même à y

établir par la suite une ville à mesure que le Port-de-Bouc acquerrait plus d'importance »

(Saurel, 1862). C’est ainsi que le quartier du Canal vu le jour. Les prémisses du tracé orthogonal

de la ville commencent alors à être visible « les maisons y sont bâties avec un ordre suivi, les

alignements sont indiqués, les rues tracées et si, par l'effet de l'imagination, on réunit tous les

fragments épars de quartier, on aura une petite ville parfaitement régulière est admirablement

distribuée » (Saurel, 1862).

Mais jusqu’au début du 20ème siècle le Cours Landrivon restera dans son état d’origine,

une grande étendue de terre battue. Il servira alors principalement de quai d’accostage pour les

tartares de pèche et de déchargement pour les navires transitant par le Canal d’Arles à Bouc. Il

est même appelé en ce temps-ci le « Quai Landrivon ». En effet, « le quartier du canal s'occupe

à peu près exclusivement de commerce » nous confirme Saurel (1862), « c'est là que sont les

dépôts de houilles, de pierre calcaire, de minerai, de bois de construction, de vin, d'huile, de sel,

c'est là que les marchandises montant ou descendant le canal sont transbordées d’un navire à

l'autre et que se font toutes les opérations de cabotage » (Crétinon, 2004). Pendant cette période,

la vie du Cours Landrivon était alors essentiellement commerciale (Figures 26 et 27).

Figure 26 : Cours Landrivon dans les années 1880 (AD Bouches-du-Rhône)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 32

Puis en 1866, Port-de-Bouc devint une commune détachée de Fos-sur-Mer et là

commencent de nouveaux travaux car « sur le plan urbain tout était à créer » (Crétinon, 2004).

Même si le quartier du Canal était déjà bien développé, « l’absence de voies et de moyens de

communication commodes contribuait à isoler Port-de-Bouc et à freiner sérieusement son

démarrage économique », c’est ainsi qu’une voie communale fut créée pour rejoindre celle qui

reliait Martigues à Fos-sur-Mer. S’en suivront d’autres améliorations avec notamment en 1876

la mise en place d’une borne fontaine où « forains et autres maquignons y conduisait les bêtes

pour les faire boire » (Crétinon, 2004) (Figures 28), puis des lavoirs publics et des lieux

d'aisances, ainsi qu’un éclairage public au gaz hydrocarburé en 1896.

La vie sociale commence alors à se développer sur ce Cours Landrivon, en marge de

l’activité commerciale. « Tout ce petit monde se retrouve de bon matin sur la place du canal

pour le marché aux herbes, fruits, volailles, gibiers, poissons et autres comestibles qui se tient

quotidiennement de 5h à 9h du matin. En 1878 à la suite d'une pétition des habitants de la Lèque

il se tiendra alternativement un jour au Canal, un jour à la Lèque » (Crétinon, 2004).

Figure 27 : Evolution du Cours Landrivon, années 1836-1866 (Document personnel à partir de plans de 1830 et 1844. Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 33

L’inauguration de la mairie en 1893 ainsi que celle de la nouvelle église en 1881

rajoutera encore un peu plus d’importance sociale au Cours Landrivon (Figures 29). On imagine

alors les rassemblements devant la mairie et après les mariages ou les baptêmes. Le Cours

Landrivon perd peu à peu sa fonction commerciale même si elle reste importante jusqu’au début

du 20ème siècle.

3.1.2. Son évolution lors de la période des Chantiers et Ateliers de Provence

Lorsque les Chantiers et Ateliers de Provence s’installent en 1899, le Cours Landrivon

subit de nouvelles modifications. Nous avons vu précédemment que ce sont ces chantiers qui

vont vraiment révéler le caractère et l’identité de Port-de-Bouc, avec cet esprit communautaire

très présent. Ces chantiers vont donc avoir un énorme impact sur la vie sociale de la ville et

donc forcément sur ses espaces publics et leurs pratiques.

Figure 29 : Evolution du Cours Landrivon, années 1880-1890 (Document personnel à partir d’un plan de 1902. Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

Figure 28 : Evolution du Cours Landrivon, années 1860-1870 (Document personnel à partir de plans de 1844 et 1902. Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 34

Pour ce qui est du Cours Landrivon « les premiers platanes vont être plantés au début

des années 1900 et les premiers cafés voient le jour comme le Bar de la Paix, le Central Bar, le

Commerce et la Bourse, ainsi que des boutiques, bazars, merceries, boulangeries, la mairie et

des bureaux d'agence maritime » (Crétinon, 2004) (Figures 30, 31 et 32). C’est à cette période

que les premières fêtes votives apparaissent. Elles sont alors au nombre de trois par années dont

celle de Saint-Louis qui était « très attendu et devenait alors le rendez-vous de toute la jeunesse

du canton qui venait se mesurer dans les courses de bateaux à la voile et à l'aviron, les courses

à âne, le grimper au mât de cocagne et le traditionnel tournoi de joute, tandis que les danseurs

se pressaient dans les bals populaires » (Crétinon, 2004). En ce temps-là, trois salles de cinéma

existaient à Port-de-Bouc, « les dimanches soir, à la sortie des cinémas, toute la jeunesse Port-

de-Boucaine se retrouvait sur le cours […] combien d'idylles sont-elles nées de cette promenade

vespérale sous les platanes du Cours Landrivon » (Crétinon, 2004). Avec la troisième rangée

de platane qui arrive dans le courant des années 1930, la fonction commerciale perd encore un

peu plus d’importance même si elle reste toutefois présente. Les pêcheurs viennent encore y

accoster pour décharger leur poisson frais, mais cette place aspire de plus en plus à devenir un

cœur de ville, lieu de rassemblement.

Figure 32 : Cours Landrivon, 1901 (AD Bouches-du-Rhône)

Figure 31 : Central Bar, 1912 (AD Bouches-du-Rhône)

Figure 30 : Evolution du Cours Landrivon, années 1900-1920 (Document personnel à partir de plans de 1902 et 1920. Photothèque, service de coordination culturel de Port-de-Bouc. Droits réservés)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 35

En effet, le Cours Landrivon a aussi été « le témoin des grandes heures de la vie Port-

de-Boucaine, les plus sombres comme les plus heureuses » (Crétinon, 2004). Il a été le lieu de

plusieurs manifestations des différents ouvriers, les dockers en 1932, les ouvriers des CAP en

1936 où Jean Claude Izzo se rappelle cette photo où « les ouvriers de Port-de-Bouc

brandissaient leur point militant tout en tenant fermement de l'autre main une paire de boule de

pétanque, ou encore lors du fameux « lock-out » de Juin à Octobre 1949. Il est aussi à noter que

« le premier commissariat de police de Port-de-Bouc a ouvert au début des années 1920 à côté

de la mairie sur le Cours Landrivon mais sera transféré rue Fernand Bonnet peu avant la guerre

1939-1945 » (Crétinon, 2004). Ce commissariat faisait suite à une demande des habitants de

Port-de-Bouc provoquée par leur crainte de voir arriver un nombre toujours croissant d’ouvriers

étrangers dans leurs rues. Ensuite, l’établissement d’un jardin au Sud du Cours Landrivon dans

les années 1950 marquera un tournant car cela montre qu’il devient vraiment une place publique

avec des lieux de repos et de loisirs (Figures 36, 37 et 38). D’ailleurs, même si l’on continue à

accoster sur ses berges, le dépôt de marchandise se fait principalement sur l’autre berge en face

du Cours Landrivon.

Figure 35 : Fontaine du Cours Landrivon (AD Bouches-du-Rhône)

Figure 34 : Evènement sur le Cours Landrivon (AD Bouche-du-Rhône)

Figure 33 : Evolution du Cours Landrivon, années 1920-1930 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 36

Un dernier aménagement viendra s’ajouter dans les années 1950, celui de l’extension et

de la modernisation de l’éclairage électrique public, installé depuis 1907. « Le voyageur qui de

nuit franchissez le canal par le train était impressionné par cette perspective de lumière le long

des berges sous les platanes du cours Landrivon et qui se prolonge dans les eaux du port »

(Crétinon, 2004). Port-de-Bouc devient alors une ville lumineuse et donne l’image d’une ville

vivante, illuminée par tous cet éclairage, mais aussi vivante socialement par tous ces

rassemblements festifs. La vie quotidienne au temps des chantiers était aussi marquée par ce

bruit, ce bruit que générait le chantier à longueur de journée, « la vie était rythmée par les sirènes

des ateliers aux heures de prise et de fin de service, par le claquement sec des riveteuses, les

coups sourds frappés par des chaudronniers que l'on devinait là-bas au fond de la coque, le

grincement des grues, immenses échassiers, et le grondement régulier du pont roulant »

(Crétinon, 2004). Le chantier tenait donc vraiment une place importante dans l’image de la

ville.

Figure 38 : Jardin au Sud du Cours Landrivon (AD Bouches-du-Rhône)

Figure 37 : Cours Landrivon, années 1960 (AD Bouches-du-Rhône)

Figure 36 : Evolution du Cours Landrivon, années 1940-1950 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 37

3.1.3. Après la fermeture des Chantiers et Ateliers de Provence, quel avenir ?

Lorsque les chantiers ont fermés en 1966, c’est toute la ville qui s’est arrêtée. Même si

les différents évènements, eux, n’ont pas cessés, ce n’était plus les mêmes. Les chantiers se sont

très vite transformés en friches et sont devenus en quelque temps plus que le fantôme d’un passé

glorieux et on pourrait presque croire que cela s’est généralisé à toute la ville. « Les trois salles

de cinéma ont fermées tour à tour dans les années 1960, l’église proche du Cours Landrivon est

déplacée en bordure de l’avenue Maurice Thorez en 1974 » (Crétinon, 2004), et Port-de-Bouc

est devenue une cité dortoir où l’emploi se fait rare. Le Cours Landrivon aussi a vieilli

« quelques platanes étaient malades et les problèmes de circulation et de stationnement étaient

quotidiens » (Crétinon, 2004). En effet, jusque dans les années 1950, le Cours Landrivon ne

disposait toujours pas de délimitation des voies, les habitants pouvaient circuler assez

librement. Mais avec la généralisation de la voiture, il fallut impérativement créer une voie de

circulation et des parkings, ce qui fut le cas dans les années 1960. Mais la voiture pris de plus

en plus de place, ce qui provoqua au fil du temps une réduction de l’espace piéton, lieu de

rassemblement, pour finalement le cloisonner en deux espaces distincts, celui situé devant la

mairie, sous les platanes, et celui situé au Sud, avec le jardin (Figures 39, 40 et 41).

Figure 39 : Cours Landrivon, années 1970 (AD Bouche-du-Rhones)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 38

Mais dans les années 1980, un nouveau projet pointe le bout de son nez, les anciens

Chantiers et Ateliers de Provence vont être reconvertis pour donner place à un ensemble de

bâtiments nouveaux et à un port de plaisance. A la suite de ce projet, le Cours Landrivon va

faire l’objet dans les années 1990 d’un important programme de rénovation : « un kiosque à

musique, une réplique du pont Van Gogh, des espaces floraux, un petit jardin public ont été

aménagés ou érigés tandis qu'une aire de promenade longe le canal, agrémentée de banquettes

de repos où sont dessinés sur des plaques de céramique quelques navires représentatifs de la

construction navale à Port-de-Bouc de 1900 jusqu'aux années 60 […] les vieux platanes du

cours partagent maintenant leur domaine avec des micocouliers tandis que les palmiers ont

préférés la quiétude des berges du canal. Enfin la liaison avec la rue Gambetta (la traverse Bully

était jusqu'ici une impasse), un éclairage modernisé, des façades remises à neuf et la création

d'espaces piétonniers pavés constituent autant d'aménagements souhaités et réussis qui rendent

au cours Landrivon une jeunesse nouvelle » (Crétinon, 2004).

Figure 41 : Evolution du Cours Landrivon, années 1970 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 40 : Evolution du Cours Landrivon, années 1960 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 39

Le Cours Landrivon est donc rationnalisé dans sa composition, notamment au niveau de

la circulation des voitures et de leur stationnement (Figures 42, 43 et 44). Mais l’espace public

entendu comme Thierry Paquot, lieu de communication et d’échange, est encore un peu plus

diminué, se concentrant véritablement sur l’espace devant la mairie. Néanmoins, au niveau de

la culture et des loisirs, Port-de-Bouc connais dans les années 1980 un souffle nouveau. Un

nouveau cinéma ouvre en 1989 à l’emplacement de l’ancienne église proche du Cours

Landrivon, il sert aussi de cadre à certains concerts de musique de chambre par exemple. Même

en étant encore un peu réduit, ce Cours Landrivon reste donc très fortement utilisé pour les

différents évènements au cours de l’année, avec notamment les marchés un jour sur deux, le

marché de Noël, les différentes soirées musicales les soirs d’été, le feu d’artifice, la fête des

pêcheurs, le tournoi de joutes provençales, la fête Nationale ou encore les différentes fêtes

foraines. Le Cours Landrivon est donc véritablement l’espace centrale de la ville, le lieu où

tous les habitants se rassemblent lors des différents évènements qui ponctuent l’année. Ainsi,

« les diverses et nombreuses activités culturelles, sportives, festives, la plaisance, les plages, les

espaces boisés, attirent maintenant des vacanciers chaque année plus nombreux. Le tourisme

notion nouvelles à Port-de-Bouc se développe peu à peu » (Crétinon, 2004).

Figure 43 : Evolution du Cours Landrivon, années 1990-2015 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 42 : Evolution du Cours Landrivon, années 1990 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 40

Cette évolution du Cours Landrivon nous montre comment cet espace public c’est

transformé au cours du temps. A l’origine destiné à une utilisation exclusivement commerciale,

ses usages ce sont peu à peu modifiés, devenant une place de marché, puis le parvis de la mairie,

celui de l’église, puis devenant le lieu de promenades nocturnes à la sortie des cinéma avec un

jardin intime, le lieu de nombreuses fêtes durant les Chantiers et Ateliers de Provences, puis

l’arrivée de la voiture avec tous les problèmes que cela implique, s’en suivra une diminution de

l’espace public au sens de Paquot, mais qui provoquera une remise en avant des loisirs et

festivités, encore plus puissants aujourd’hui qu’à l’époque des Chantiers et Ateliers de

Provence. Cet espace public a donc su évoluer au cours du temps, en modifiant la forme pour

qu’elle corresponde aux nouveaux usages.

3.2. Le Port Renaissance : un espace public issu d’une mutation du tissu industriel

Nous allons voir maintenant le cas du Port Renaissance issu d’une mutation du tissu

industriel. Après la fermeture des Chantiers et Ateliers de Provence, le site est resté en friche

pendant plusieurs années. Port-de-Bouc commence alors à se poser des questions quant au

devenir de ces bâtiments industriels abandonnés. Jean-Claude Izzo se souvient d’un certain

Figure 44 : Nouveaux aménagements du Cours Landrivon (Photos personnelles)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 41

André Bénédetto qui se mit à imaginer « un immense centre touristique que les anciens

chantiers pourrait devenir, restaurant avec une vue panoramique sur la mer, jeu de boules,

artisanat des différentes communautés Port-de-Boucaines, soirée folklorique, salle d'exposition

des Archives, des photos, et même on pourrait ramener un bateau à son point de naissance. De

quoi contraindre les guides Bleus et Michelin à modifier leur itinéraire provençal. Bien sûr à la

place, et ce serait aussi une sacrée revanche, on pourrait construire une belle usine toute neuve

employant le double d'ouvrier que n'en employait alors les chantiers. Plus de problèmes pour

les jeunes de Port-de-Bouc dont la plupart sont au chômage. Entre tourisme et industrie, entre

l'occupation du sol par les « estrangiers » et l'occupation du sol par l'exploitation, Port-de-Bouc

balance ». La ville essaiera d’abord de faire revivre le site des chantiers par l’installation de

nouvelles entreprises, comme l’avait imaginé André Bénédetto, mais en vain, aucune ne tiendra

le coup. Il sera alors décidé de reconvertir le site et de réaliser un ensemble immobilier avec un

port de plaisance, « ce sera la plus importante opération d'aménagement urbain jamais

entreprise par la ville depuis sa création » (Crétinon, 2004). Le déterminant qui sera à l’origine

de cette mutation du tissu industriel, est l’ambition de « redonner naissance à un centre-ville

car port de bouc n’en avait pas » (La Marseillaise, 2014) afin « de restaurer une forme

d’animation urbaine et plus symboliquement de restituer une identité à la ville » (Bouffartigues,

1984). L’objectif est donc vraiment de donner un nouveau visage à Port-de-Bouc et de trouver

une solution pour sortir la ville du désarroi suite à la fermeture des Chantiers et Ateliers de

Provence.

Figure 47 : CAP détruit en 1980 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 45 : CAP en activité en 1960 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 46 : CAP en friche en 1970 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 42

Le Port de plaisance est alors réalisé en 1983 et l’aménagement immobilier qui prend

place sur le site des anciens chantiers suivront de près. Le projet retenu ne conserve qu’un seul

bâtiment des anciens Chantiers et Ateliers de Provence, la Bâtiment A, réhabilité en bureaux et

logement, les autres sont détruits. Puis les rues sont prolongées pour recréer un maillage

permettant de traverser ce grand espace inaccessible et enfin de nouveaux bâtiments prennent

place avec notamment des logements, un centre commercial et la criée au poisson (Figures 45

à 49).

Si nous nous concentrons sur les bâtiments et les espaces qui bordent le port de

plaisance, nous pouvons observer premièrement qu’un alignement est opéré autour de la darse.

Au rez-de-chaussée de ces bâtiments sont implantés des restaurants et des services permettant

de faire vivre le pourtour du port de plaisance. La criée au poisson permet quant à elle de faire

la liaison avec le Cours Landrivon.

Figure 49 : Construiction de l’ensemble immobilier de 1985 à 2010 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 51 : Grand espace indifférencié, 2015 (Photo personnelle)

Figure 48 : Construction Port Renaissance en 1983 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 50 : Restaurants en Rdc, 2015 (Photo personnelle)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 43

Mais quand nous observons le côté Ouest du port de plaisance, de grands espaces libres

sont présents, constitué d’un espace naturel ou plutôt d’un terrain vague et d’un grand parking

où l’on peine à trouver la sortie car aucuns éléments au sol ne délimite une voirie praticable ou

un chemin piéton, hormis celui longeant les bords du port (Figures 50 à 53). L’interrogation sur

l’usage de ces grands espaces vient alors, pourquoi n’y a-t-il pas d’ensemble immobilier

permettant par exemple de continuer l’alignement engagé au niveau de la darse ? Pourquoi avoir

laissé ce grand espace vide, constitué uniquement d’une grande étendue de bitume ? La réponse

se trouve justement dans l’usage que les Port-de-Boucains ont donné à cet espace.

Figure 53 : Plan du port de plaisance en 2015 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 55 : Sardinades de Port-de-Bouc, 2014 (www.visitprovence.com)

Figure 52 : Plan du port de plaisance en 2015 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Figure 54 : Plan du port de plaisance en 2015 (Document personnel à partir de photos aériennes, Géoportail)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 44

En effet, de nouvelles animations apparaissent, avec notamment le concours de l’Ecaille

d’Argent qui est un concours de pêche au tout-gros, organisé par la Société Nautique, puis les

puces nautiques, rassemblant tous les passionnés du monde de la mer. Mais ce qui marquera

l’usage de cet espace est en premier lieu les fameuses Sardinades (Figures 54 et 55). « Les

premières Sardinades ont lieux en 1988. Le succès a été très rapide et en quelques années les

Sardinades sont devenues une véritable institution. On vient maintenant des quatre coins du

département en famille les soirs d'été de juillet et août, en bordure du Port Renaissance, dans

une ambiance de convivialité, goûter aux fameuses sardines du jour avec en fond sonore la

musique et les chants d'un groupe d'animation » (Crétinon, 2004). C’est donc l’usage qui est ici

mis en avant, et qui domine sur la forme. On peut même imaginer que d’autres bâtiments étaient

prévus à la construction le long des quais du port de plaisance mais face à l’engouement de ces

Sardinades, ces opérations ont été annulées (Figure 56). Cette mutation du tissu industriel

montre donc qu’elle a permis d’une part de fabriquer une nouvelle centralité dans la ville de

Port-de-Bouc, mais aussi d’affirmer sa nouvelle identité, celle d’une ville tournée vers la mer,

la plaisance, les festivités, les loisirs, le tourisme. « Un autre argument en faveur du tourisme

est venu s'ajouter il y a peu lorsque les plages de Port-de-Bouc on obtenue le label Pavillon

Bleu d'Europe en 2000, 2001, 2002, 2003 et 2004. Un tel label sanctionne des années d'efforts

en faveur de notre environnement littoral et les remontées médiatiques qu'il induit concours à

donner une image nouvelle de la cité et sans doute de nouvelles orientations » (Crétinon, 2004).

Port-de-Bouc devient aussi une « ville fleurie » avec une première étoile obtenue en 1996 et

une seconde en 1999. Cela montre donc bien que Port-de-Bouc arrive peu à peu à sortir de son

passé industriel qui a fait sa gloire mais aussi son malheur lors de son déclin. Une nouvelle

ligne d’horizon apparaît dans le paysage, c’est le début d’une nouvelle ère dans l’histoire de la

ville.

Figure 56 : Dessin montrant les bâtiments qui devaient être construit sur le lieu des Sardinades (AC Port-de-Bouc)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 45

IV. DONNER UNE NOUVELLE IMAGE DE PORT-DE-BOUC ?

Après avoir analysé la manière dont ces deux espaces publics s’étaient développés au

cours du temps pour devenir ce qu’ils sont aujourd’hui, nous allons maintenant voir les

processus mis en œuvre pour donner une nouvelle image de la ville de Port-de-Bouc. Au regard

des notions que nous avons abordés dans la deuxième partie, nous essaierons de décrypter par

quels moyens est-il possible de modifier l’image d’une ville à travers la constitution de ses

espaces publics.

4.1. Port-de-Bouc, une ville évolutive

Tout d’abord, en ce qui concerne l’évolutivité du tissu industriel, nous avons pu

remarquer que le Cours Landrivon a pu facilement passer d’une utilisation essentiellement

commerciale à une utilisation de place publique, lieu de rassemblements et d’évènements. Cela

s’est fait par transformations successives au cours du temps, dans un processus long, mais cela

montre toute la flexibilité d’un tissu orthogonal. Un espace public de forme rectangulaire peut

être modelé et segmenté de mille façons différentes, chose qui est beaucoup plus compliquée

lorsque l’on se retrouve face à un tissu de village dont les rues sont courbes et les espaces

publics de formes diverses et variées. Par contre, pour ce qui est du Port Renaissance, qui lui

n’est pas issu d’évolutions successives du tissu industriel mais d’une mutation, le problème est

tout autre. Les friches des Chantiers et Ateliers de Provence séparaient littéralement la ville en

deux et constituaient un obstacle au développement de la ville. De plus, ces grands bâtiments

industriels en cœur de ville ne donnaient pas une très bonne image de cette dernière. Plutôt que

de les reconvertir, sauf pour le Bâtiment A, il a été décidé de la détruire pour reconstruire un

ensemble immobilier à la place. Il y a donc eu un manque d’évolutivité à l’échelle

architecturale, mais pas à celui de la trame urbaine. En effet, pour en revenir à cette trame

orthogonale, elle a permis de reconstruire à la place des CAP des bâtiments ayant des usages

totalement différents. De bâtiments industriels nous sommes passés à des bureaux, logements

et commerces. Ce qui montre là aussi la flexibilité de cette trame, qui en prolongeant facilement

les voies, permet de redéfinir des îlots plus petits et de leur donner un nouvel usage. Nous

discuterons plus tard de la pertinence de ce qui a été fait concernant le Port Renaissance et ses

abords, mais de manière globale, cette trame orthogonale a permis une bonne évolutivité de la

ville de Port-de-Bouc.

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 46

Ensuite, j’aimerais parler un peu plus de cette notion d’évolutivité. Au regard de ce que

nous venons de voir, il se trouve que l’évolutivité d’un objet dépend de l’échelle à laquelle on

le regarde. Si l’on veut parler de la ville, son évolutivité serait sa capacité à intégrer un ensemble

d’évolutions et de mutations dans son tissu urbain. Ainsi, l’évolution d’une ville serait

constituée de l’ensemble des évolutions et des mutations de ses bâtiments, espaces publics,

voiries, etc. Et si l’on prend un bâtiment, son évolutivité serait elle-même constituée de

l’ensemble des évolutions et mutations qu’il pourrait intégrer, par exemple sur sa structure, ses

usages, sa distribution, etc. Ainsi, pour ce qui est de Port-de-Bouc, son tissu orthogonal permet

une bonne évolutivité, mais c’est l’ensemble des évolutions et mutations en différents lieux de

la ville qui permettra son évolution globale vers de futures ambitions. Mais si nous parlons

d’évolution de l’espace public, nous allons voir maintenant sur quels paramètres nous pouvons

jouer pour lui permettre d’évoluer.

4.2. Les actions possibles pour faire évoluer un espace public

Nous avons vu précédemment que l’espace public était à la fois matériel et immatériel,

constitué par des formes et des usages, et qu’il était possible qu’un décalage apparaisse au cours

du temps. Un espace public conçu au départ avec une forme en adéquation avec un usage précis

peut se retrouver plusieurs années plus tard avec la même forme mais un usage totalement

différent. C’est ce qu’il s’est passé pour le Cours Landrivon, conçu initialement pour servir de

quai de déchargement, il est devenu peu à peu une place publique, lieu de rassemblement pour

tous les Port-de-Boucains. Ce décalage soulève la question de savoir lequel des deux est

responsable de l’autre au départ ? Est-ce la forme qui crée l’usage ou l’inverse ? Et ensuite

lequel des deux influence l’autre pour faire évoluer l’espace public ?

Dans l’esprit des concepteurs tel les architectes et urbanistes, ou en tout cas pour ce qui

est de ma part, je pense qu’il y a toujours l’usage qui prévaut sur la forme. Il y a toujours un

usage en premier, avec notamment les questions, qu’est-ce qu’on va faire ici ? Pour qui ? Et

pourquoi ? Et ensuite on fabrique une forme pour cet usage. Je pense, qu’il y a peu d’architectes

ou urbanistes qui fabriquent une forme sans penser à quels usages elle sera destinée. Ainsi, lors

de la naissance d’un espace public ce serait l’usage qui crée la forme. Mais une fois cet espace

public construit, il sera forcément amené à évoluer dans les années à venir. Et ces évolutions

peuvent être orientées soit par l’usage soit par la forme. Il n’y a plus d’ordre de priorité par la

suite, les deux interagissent ensemble.

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 47

Si nous prenons l’exemple du Cours Landrivon, de nouveaux usages sont apparus au

cours du temps, l’usage commercial s’est peu à peu effacé pour laisser place à des usages liés

à la vie en communauté avec des marchés et rassemblements lors de fêtes. Des platanes ont

alors été progressivement implantés jusqu’à recouvrir tout l’espace et des parcs ont été

aménagés. C’est donc l’usage qui a été à l’origine des changements de la forme du Cours

Landrivon. Mais aujourd’hui cette forme avec notamment ces platanes, peut bloquer certains

usages. Ensuite, si nous prenons le Port Renaissance comme autre exemple, c’est l’inverse, la

forme indifférenciée qui est la grande esplanade goudronnée a permis de créer un usage, les

Sardinades, mais devant l’ampleur de sa réussite, cet usage bloque la forme, car toute nouvelle

transformation sur la forme de cet espace public pourrait faire cesser les Sardinades. Ainsi, pour

le Cours Landrivon, les nouveaux usages ont modifié la forme mais ensuite cette forme a bloqué

certains usages, et pour le Port Renaissance c’est l’inverse, la forme a créé un usage qui a ensuite

bloqué la forme. Pour conclure, au départ je pense que c’est toujours l’usage qui définit une

forme et donc un espace public, mais ensuite les deux interagissent ensemble, avec la

dominance de l’un ou de l’autre, pour faire évoluer l’espace public dans le temps.

Ensuite, l’espace public est, comme nous l’avons vu, constitué d’une forme et d’un

usage, mais je pense que la forme est elle-même constituée de deux composantes distinctes. Il

y aurait d’abord ce que j’appellerais la forme globale qui serait la délimitation de l’espace

public par la relation entre plein et vide, ce qui lui donnerait ses dimensions. Mais si l’on en

restait là, de simples dimensions pourraient donner naissance à un très grand nombre d’espaces

publics différents. Vient donc ensuite la forme spécifique qui serait constituée des différents

éléments qui constituent l’espace public, à savoir le mobilier urbain, la végétation, la nature du

sol, la composition des façades, etc (Figure 57). Ce deuxième aspect permettrait alors de donner

à un espace public quelconque toutes les caractéristiques dont il a besoin pour devenir un espace

public unique. C’est ensuite en jouant sur ces deux formes ainsi que sur l’usage d’un espace

public que nous pouvons le faire évoluer et ainsi modifier son image.

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 48

4.3. L’espace public comme déterminant principal de l’image de la ville

Concernant l’image de la ville, nous avions montrés que c’était principalement à travers

la perception de l’espace public qu’elle se formait dans les esprits, et qu’elle était constituée de

trois composantes, l’identité, la structure et la signification. Puis nous avions aussi vu que c’était

surtout sur l’identité et la structure de l’image que nous pouvions agir en tant qu’architecte,

laissant la signification se développer dans l’esprit de chaque individu. De plus, Kevin Lynch

nous indiquait que l’identité et la structure de l’image d’un objet serait induits par sa forme

physique et la signification de cette image par l’aspect symbolique qu’il représente dans les

esprits. Si l’on fait le rapprochement entre l’espace public et l’image de la ville, sachant que le

premier et principalement à l’origine du second, on pourrait alors émettre l’hypothèse que la

forme de l’espace public serait à l’origine de l’identité et de la structure de l’image qu’il produit,

et ses usages à l’origine de la signification de l’image. Et si l’on va encore un peu plus loin,

sachant que la forme de l’espace public est constituée d’une forme globale et d’une forme

spécifique, la forme globale pourrait être à l’origine de l’identité de l’image et la forme

spécifique de la structure de l’image. On aurait ainsi le schéma suivant.

Figure 57 : Différences entre forme globale et forme spécifique (Document personnel)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 49

Ensuite, nous avons aussi vu que les habitants d’une ville n’avaient pas qu’une image

globale de leur ville, mais plusieurs niveaux d’images à différentes échelles selon la zone

considérée. Ainsi, je pense que l’image générale d’une ville serait constituée d’un assortiment

d’images secondaires, c’est-à-dire d’image de parties de ville, de quartiers, de rues ou de places.

Par conséquent, s’il est possible d’influencer ces images secondaires, au travers de leur identité,

leur structure ou leur signification, il serait alors possible d’influencer l’image générale de la

ville. Cela nous renvoie à ce que nous avons dit concernant l’évolutivité, c’est-à-dire que

l’évolution à l’échelle de la ville est en fait constituée de l’ensemble des évolutions et des

mutations à l’échelle des bâtiments, quartiers, ou espaces publics. On pourrait donc là aussi

faire un rapprochement entre la notion d’évolutivité et d’image de la ville, en admettant que

c’est par cet ensemble d’évolution et de mutations à l’échelle locale que nous pouvons changer

les images secondaires qui leur correspondent et ainsi changer l’image globale de la ville.

Pour ce qui est de Port-de-Bouc, son tissu orthogonal pourrait alors être perçu comme

avantageux car permettant facilement ces mutations et évolutions à l’échelle locale. Cela

permettrait ensuite de modifier l’image de ces morceaux de ville pour ensuite modifier l’image

globale de la ville. Ainsi, les modifications apportées sur le Cours Landrivon ou sur le Port

Renaissance modifie leur image auprès des habitants et participent alors à modifier l’image de

la ville. Et nous le voyons bien aujourd’hui, ces deux espaces publics, par l’image qu’ils

donnent, celle d’espaces dédiés à la convivialité, la rencontre, le loisir, etc, donnent une

nouvelle image de la ville qui tend à devenir une ville balnéaire et touristique. L’attention

apportée à ces espaces publics sera donc la clé de la ville de Port-de-Bouc, pour atteindre ses

objectifs de ville où il fait bon vivre

Figure 58 : Relation entre espace public et image de la ville (Document personnel)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 50

Figure 59 : Schéma récapitulatif des processus permettant de former une nouvelle image de la ville (Document personnel)

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 51

Conclusion

Cette étude de l’évolution des espaces publics d’une ville industrielle comme Port-de-

Bouc nous a amené à comprendre par quels mécanismes il est possible de changer l’image

d’une ville autrefois vouée à l’industrie. « Port-de-Bouc a été marquée dès sa naissance du saut

de l'industrie » disait Charles Cretinon (2004), et nous avons pu le constater en parcourant

l’histoire du développement urbain de la ville. Mais même avec le déclin des activités

industrielles dans les années 1970 et la disparition de nombreuses industries tel les Chantiers et

Ateliers de Provence, cette atmosphère ouvrière est toujours présente lorsqu’on parcourt les

rues de Port-de-Bouc. Mais maintenant que ces industries ne sont plus là, comment faire prendre

un nouveau virage à cette ville, comment changer son image, tout en gardant en mémoire son

passé ?

Nous avons vu deux actions possibles sur le tissu industriel de Port-de-Bouc, un espace

public issu d’une évolution de ce tissu industriel, le Cours Landrivon, et un autre espace public

issu d’une mutation de ce tissu industriel, le Port Renaissance. L’évolution permet de modifier

un espace public et de le modeler au cours du temps, même si à l’origine il était prévu pour

d’autres usages, alors que la mutation permet de fabriquer un nouvel espace public dont la forme

correspond totalement à l’usage que l’on veut en faire. Et Port-de-Bouc ayant une trame urbaine

facilement évolutive grâce à son orthogonalité, ces évolutions et ces mutations peuvent donc

facilement s’opérer dans ce tissu industriel. De plus, nous avons montré que ces évolutions ou

ces mutations sur l’espace public se faisait par une modification de leurs formes et de leurs

usages qui eux-mêmes déterminent l’identité, la structure et la signification de l’image de la

ville perçue par les habitants. Ainsi, selon comment nous agissons sur l’espace public, cela va

directement agir sur l’image de la ville. Nous pouvons donc résumer cela dans le fait qu’une

bonne évolutivité de la ville permet plus facilement de faire évoluer ou de faire muter ses

espaces publics en modifiant leurs formes et leurs usages et cela influencera ensuite l’image de

la ville. Et pour finir, étant donné que l’image globale de la ville est constituée de plusieurs

images secondaires correspondant par exemple aux différents espaces publics de la ville, c’est

en modifiant ces espaces publics que l’on améliore leur image et ainsi celle de la ville. Cela

peut paraître évident mais il est nécessaire de comprendre tous les processus sous-jacents à cette

réflexion pour pouvoir l’appliquer correctement et savoir sur quels leviers tirer afin d’arriver

au résultat attendu.

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 52

Concernant le champ d’action de l’architecte, même si nous ne pouvons agir directement

que sur la forme de l’espace public, cela ne veut pas dire que nous n’avons aucune emprise sur

l’usage de cet espace public. Puisque les deux sont liés et sont indissociables, en agissant sur la

forme nous agissons indirectement sur l’usage. Mais il est difficile d’agir directement sur

l’usage, on ne peut pas obliger les habitants à utiliser un espace de tel ou tel manière. Je pense

que le processus le mieux adapté pour modifier un espace public serait de partir de l’usage

qu’en font les habitants et ensuite de redéfinir une forme en adéquation avec ces usages. Ainsi,

ce serait les habitants eux-mêmes qui donneraient l’usage et la forme du nouvel espace public,

et comme cet espace public et principalement à l’origine de l’image de la ville, ce serait au final

les habitants qui seraient la source de la nouvelle image de la ville. Je pense que c’est comme

cela qu’il faudrait fonctionner, plutôt que d’imposer un espace public avec un usage et une

forme précise, dans le but de donner une certaine image de la ville, en espérant que les habitants

y adhèrent.

Port-de-Bouc est donc face à sa destinée, elle tient en elle toutes les armes nécessaires

pour changer son image, et elle a déjà réalisé un grand pas dans cette démarche. Mais elle

gardera toujours les traces de son passé industriel et je pense que ce n’est pas une mauvaise

chose, bien au contraire, elle peut en faire sa force. C’est peut-être même dans cette

juxtaposition ou plutôt se mélange entre ville industrielle et ville balnéaire qu’elle trouvera sa

voie. L’image de cette ville sera toujours contrastée, mais c’est peut-être cela qui fait sa

particularité et qui fera sa force. « Il n'y a pas ici les souffles lourds de l’haleine des fleurs qui

m'ont enivrées autour de Nice, d'Antibes et de Cannes, cependant j'aime également cette côte à

cause de ce qu'elle a de simple, de franc, et de rude » (Crétinon, 2004).

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 53

Bibliographie

Ouvrage : ASTIER Philippe, La recomposition du territoire social des chantiers navals de la Ciotat, mémoire de séminaire S9 ENSA Marseille, directrices de mémoire : GIRARD Muriel, BIEHLER Alexandra, 2011. BAILLY Antoine, La perception de l’espace urbain, Paris : Edition 74, 1978, 264 p. BARJOT Dominique, SARRE Claude-Alain, DOMENICHINO Jean, GALLIMARD Renaud, WORONOFF Denis, Le patrimoine industriel des Bouches-du-Rhône, Marseille : Chambre de Commerce et d’Industrie Marseille-Provence, 2000, 220 p. BOUCHER-HEDENSTROM Frédérique, Aménagement et reconversion des espaces industriels, Paris : Ministère du Logement, 1994, 87 p. CRETINON Charles, STROZZI Robert, Port-de-Bouc, des Origines à nos jours, Aix-en-Provence : Edisud, 2004, 247 p. CRISTINI Aurélie, Port-de-Bouc : Projet de port de plaisance et aménagement de la façade maritime, PFE ENSA Marseille, directeur d’étude : URBAIN Pascal, 2007. DOMENICHINO Jean, Une ville en chantier, La construction navale à Port-de-Bouc de 1900 à 1966, Aix-en-Provence : Edisud, 1989, 350 p. DUMAS Alexandre, Impressions de voyage, midi de la France, Paris : Michel Lévy Frères, Libraires Editeurs, 1853. GALLEY Jean-Sébastien, Port-de-Bouc : Un front de mer urbain, PFE ENSA Marseille, directeur d’étude : URBAIN Pascal, 2006. GASNIER Marina, Patrimoine industriel et technique, Perspectives et retour sur 30 ans de politiques publiques au service des territoires, Lyon : Editions Lieux Dits, 2011, 304 p. GAUTHIEZ Bernard, Espace Urbain, Vocabulaire et morphologie, Collection Vocabulaire, Paris : Editions du Patrimoine, 2003, 496 p. LYNCH Kevin, L’image de la cité, Paris : Dunod, 2010, 221 p. PAQUOT Thierry, L’espace public, Collections Repères, Lassay-les-Châteaux : La découverte, 2009, 125 p. ROS Jo, Je t’écris de mémoire, Pantin : Le Temps des Cerises, 2002, 143 p. Contenant le texte de IZZO Jean-Claude, Du bon usage de la réalité, 1981, qui est un recueil de mémoires d’habitants de Port-de-Bouc. SAUREL Alfred, Histoire de Martigues et de Port-de-Bouc, Collection Rediviva, Nimes : C.LACOUR, Editeur, 1995 (réimpression de l’édition de 1862), 164 p.

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 54

Port-de-Bouc, Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement des Bouches-du-Rhône, Marseille : Les Editions Générales, 2004. Evolutivité des tissus urbain, L’impact de la trame et de la forme architecturale, Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Ile-de-France, Paris : IAU Ile-de-France, 2010. Archive : BOUFFARTIGUE Paul, CORNU Roger, Du chantier naval à la ville, la mémoire ouvrière de Port-de-Bouc, Aix-en-Provence : Laboratoire d’Economie et de Sociologie du Travail, 1984, Archives Départementales des Bouches-du-Rhône, côte : ALPHA 399, 242 p. JOLY Roland, Antoine ou la passion d’une vie. Une histoire de Port-de-Bouc, ville mosaïque, Marseille : Cci Marseille, 2005, Archives Communales de Port-de-Bouc, 219 p. Ville de Port-de-Bouc, Résultats de l’enquête d’opinion publique pour la reconversion des Chantiers et Ateliers de Provence, Société provençale d’équipement, 1981, Archives Communales de Port-de-Bouc Article : COQUERY Michel, « La notion de « mode de composition urbaine » : un outil opératoire en urbanisme (le cas de l’Afrique Noire) », in. Bulletin de la Société Languedocienne de Géographie, Tome 16, Fascicule 1-2, Montpellier, 1982, pp. 123-143. Site web : MAIRIE DE PORT-DE-BOUC. Disponible sur : http://www.portdebouc.fr/ [05/10/2014] PROVENCE WEB, Port-de-Bouc. Disponible sur : http://www.provenceweb.fr/f/bouches/portbouc/portbouc.htm [24/11/2014] LA MARSEILLAISE, BIZOT Raymond, La fin des Chantiers de Provence. Disponible sur : http://www.lamarseillaise.fr/culture/patrimoine/20572-la-fin-des-chantiers-de-provence [24/11/2014] LA MARSEILLAISE, BIZOT Raymond, Les Chantiers et Ateliers de Provence. Disponible sur : http://www.lamarseillaise.fr/culture/patrimoine/20572-la-fin-des-chantiers-de-provence [24/11/2014]

Séminaire S9 AVT 2014-2015 - 55

Table des illustrations FIGURE 1 : PLAN DE M.BONDON, 1802 (PHOTOTHEQUE, SERVICE DE COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS

RESERVES) ....................................................................................................................................................... 12

FIGURE 2 : PLAN DE M.BONDON, 1805 (CRETINON, 2004) ............................................................................................. 12

FIGURE 3 : PORT-DE-BOUC EN 1830 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR D’UN PLAN DE 1830. PHOTOTHEQUE, SERVICE DE

COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) ............................................................................. 13

FIGURE 4 : LA LEQUE EN 1820 (AD BOUCHES-DU-RHONE) ............................................................................................... 13

FIGURE 5 : PORT-DE-BOUC EN 1844 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR D’UN PLAN DE 1844. PHOTOTHEQUE, SERVICE DE

COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) ............................................................................. 14

FIGURE 6 : PORT-DE-BOUC EN 1902 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR D’UN PLAN DE 1902. PHOTOTHEQUE, SERVICE DE

COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) ............................................................................. 15

FIGURE 7 : PORT-DE-BOUC EN 1920 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR D’UN PLAN DE 1920. PHOTOTHEQUE, SERVICE DE

COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) ............................................................................. 15

FIGURE 8 : CHANTIERS ET ATELIERS DE PROVENCE, AVEC COURS LANDRIVON SUR LA DROITE, ANNEES 1950 (PHOTOTHEQUE, SERVICE

DE COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) ......................................................................... 16

FIGURE 9 : PORT-DE-BOUC, ANNEES 1930 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ................... 16

FIGURE 10 : PORT-DE-BOUC, ANNEES 1940 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ................. 16

FIGURE 11 : PORT-DE-BOUC, ANNEES 1950 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ................. 17

FIGURE 12 : PORT-DE-BOUC, ANNEES 1960 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ................. 17

FIGURE 13 : QUARTIER DES AIGUES DOUCES EN FOND, 1978 (AD DES BOUCHES-DU-RHONE) ................................................. 19

FIGURE 14 : PORT-DE-BOUC, ANNEES 1970 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ................. 20

FIGURE 15 : PORT-DE-BOUC, ANNEES 1980 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ................. 20

FIGURE 16 : PORT RENAISSANCE, ANNEES 2000 (AD BOUCHES-DU-RHONE) ........................................................................ 21

FIGURE 17 : PORT-DE-BOUC, ANNEES 1990 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ................. 21

FIGURE 18 : PORT-DE-BOUC, ANNEES 2000 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ................. 21

FIGURE 19 : ENCHAINEMENT DES DIFFERENTS MODES DE COMPOSITION AVEC POINT DE BASCULE REPRESENTANT LE PASSAGE DE L’ERE

INDUSTRIELLE A L’ERE DU TOURISME AVEC LA CONSTRUCTION DU PORT RENAISSANCE (DOCUMENT PERSONNEL)................. 22

FIGURE 20 : FORMATION DE L’IMAGE (BAILLY, 1978) ...................................................................................................... 26

FIGURE 21 : PROCESSUS DE PERCEPTION (BAILLY, 1978) .................................................................................................. 27

FIGURE 22 : PERCEPTION ET MEMORISATION (BAILLY, 1978)............................................................................................. 27

FIGURE 23 : DETERMINANTS ET EFFETS D’UN MODE DE COMPOSITION, LES FLECHES EN POINTILLE REPRESENTENT DES USAGES (MICHEL

COQUERY, 1982) ............................................................................................................................................. 29

FIGURE 24 : CARTE DE 1830 (PHOTOTHEQUE, SERVICE DE COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) ........ 30

FIGURE 25 : CARTE DE 1844 (PHOTOTHEQUE, SERVICE DE COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) ........ 30

FIGURE 26 : COURS LANDRIVON DANS LES ANNEES 1880 (AD BOUCHES-DU-RHONE) ............................................................ 31

FIGURE 27 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1836-1866 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PLANS DE 1830 ET

1844. PHOTOTHEQUE, SERVICE DE COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) .............................. 32

FIGURE 28 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1860-1870 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PLANS DE 1844 ET

1902. PHOTOTHEQUE, SERVICE DE COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) .............................. 33

FIGURE 29 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1880-1890 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR D’UN PLAN DE 1902.

PHOTOTHEQUE, SERVICE DE COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES)........................................ 33

FIGURE 30 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1900-1920 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PLANS DE 1902 ET

1920. PHOTOTHEQUE, SERVICE DE COORDINATION CULTUREL DE PORT-DE-BOUC. DROITS RESERVES) .............................. 34

FIGURE 31 : CENTRAL BAR, 1912 (AD BOUCHES-DU-RHONE) ........................................................................................... 34

FIGURE 32 : COURS LANDRIVON, 1901 (AD BOUCHES-DU-RHONE) ................................................................................... 34

FIGURE 33 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1920-1930 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES,

GEOPORTAIL)................................................................................................................................................... 35

FIGURE 34 : EVENEMENT SUR LE COURS LANDRIVON (AD BOUCHE-DU-RHONE).................................................................... 35

FIGURE 35 : FONTAINE DU COURS LANDRIVON (AD BOUCHES-DU-RHONE) .......................................................................... 35

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FIGURE 36 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1940-1950 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES,

GEOPORTAIL)................................................................................................................................................... 36

FIGURE 37 : COURS LANDRIVON, ANNEES 1960 (AD BOUCHES-DU-RHONE) ........................................................................ 36

FIGURE 38 : JARDIN AU SUD DU COURS LANDRIVON (AD BOUCHES-DU-RHONE) ................................................................... 36

FIGURE 39 : COURS LANDRIVON, ANNEES 1970 (AD BOUCHE-DU-RHONES) ........................................................................ 37

FIGURE 40 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1960 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES,

GEOPORTAIL)................................................................................................................................................... 38

FIGURE 41 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1970 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES,

GEOPORTAIL)................................................................................................................................................... 38

FIGURE 42 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1990 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES,

GEOPORTAIL)................................................................................................................................................... 39

FIGURE 43 : EVOLUTION DU COURS LANDRIVON, ANNEES 1990-2015 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES,

GEOPORTAIL)................................................................................................................................................... 39

FIGURE 44 : NOUVEAUX AMENAGEMENTS DU COURS LANDRIVON (PHOTOS PERSONNELLES) ................................................... 40

FIGURE 45 : CAP EN ACTIVITE EN 1960 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ....................... 41

FIGURE 46 : CAP EN FRICHE EN 1970 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ......................... 41

FIGURE 47 : CAP DETRUIT EN 1980 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ............................ 41

FIGURE 48 : CONSTRUCTION PORT RENAISSANCE EN 1983 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL)

..................................................................................................................................................................... 42

FIGURE 49 : CONSTRUICTION DE L’ENSEMBLE IMMOBILIER DE 1985 A 2010 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS

AERIENNES, GEOPORTAIL) .................................................................................................................................. 42

FIGURE 50 : RESTAURANTS EN RDC, 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ..................................................................................... 42

FIGURE 51 : GRAND ESPACE INDIFFERENCIE, 2015 (PHOTO PERSONNELLE) ........................................................................... 42

FIGURE 52 : PLAN DU PORT DE PLAISANCE EN 2015 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ....... 43

FIGURE 53 : PLAN DU PORT DE PLAISANCE EN 2015 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ....... 43

FIGURE 54 : PLAN DU PORT DE PLAISANCE EN 2015 (DOCUMENT PERSONNEL A PARTIR DE PHOTOS AERIENNES, GEOPORTAIL) ....... 43

FIGURE 55 : SARDINADES DE PORT-DE-BOUC, 2014 (WWW.VISITPROVENCE.COM) ............................................................... 43

FIGURE 56 : DESSIN MONTRANT LES BATIMENTS QUI DEVAIENT ETRE CONSTRUIT SUR LE LIEU DES SARDINADES (AC PORT-DE-BOUC) 44

FIGURE 57 : DIFFERENCES ENTRE FORME GLOBALE ET FORME SPECIFIQUE (DOCUMENT PERSONNEL) .......................................... 48

FIGURE 58 : RELATION ENTRE ESPACE PUBLIC ET IMAGE DE LA VILLE (DOCUMENT PERSONNEL) .................................................. 49

FIGURE 59 : SCHEMA RECAPITULATIF DES PROCESSUS PERMETTANT DE FORMER UNE NOUVELLE IMAGE DE LA VILLE (DOCUMENT

PERSONNEL) .................................................................................................................................................... 50