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Mécanique des Structures et Approximations Numériques janvier 2016 S. Drapier Département Mécanique et Procédés d’Elaboration Centre Science des Matériaux et des Structures & LGF UMR CNRS 5307 École Nationale Supérieure des Mines de Saint-Étienne 158, cours Fauriel 42023 Saint-Étienne Cedex 2 bureau J3-15, tél :00-79

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Mécanique des Structureset

Approximations Numériques

janvier 2016

S. Drapier

Département Mécanique et Procédés d’ElaborationCentre Science des Matériaux et des Structures & LGF UMR CNRS 5307

École Nationale Supérieure des Mines de Saint-Étienne158, cours Fauriel

42023 Saint-Étienne Cedex 2

bureau J3-15, tél :00-79

Introduction générale

La mécanique des milieux continus, ou MMC, est la base de la résolution de pro-blèmes en mécanique des solides et mécanique des fluides. Si la MMC permet de traitertout type de problème, la résolution analytique simultanée des 3 équations d’équilibre entout point du domaine considéré, devient vite insurmontable pour être utilisée directementdans le dimensionnement des produits industriels courants. Dans le cas de la mécaniquedes solides, les ingénieurs ont isolé des cas particuliers de la MMC, où via certaines hy-pothèses sur les géométries et le chargement, la résolution peut se faire plus aisément. Cedomaine de la mécanique des solides se nomme la mécanique des structures et se définit,par opposition à la MMC, comme la mécanique des solides de dimensions finies où unedes dimensions au moins est très faible devant les autres.

Les théories cinématiques qui sous-tendent la mécanique des structures ont étémises au point dans les 2 derniers siècles pour le dimensionnement des structures. Dansle même temps la résistance des matériaux, ou RdM, était mise en place comme uncadre particulier de la mécanique où des hypothèses supplémentaires simplifient encoreles problèmes à traiter. Dans ce cours, la théorie des poutres sera plus particulièrementdéveloppée (Figure 1) et ensuite étendue à la théorie des plaques, ceci principalement dansle cadre de la RdM.

On verra, à travers cette introduction à la mécanique des structures, que bienavant que les résolution numériques ne soient disponibles, le dimensionnement desstructures à l’aide de ces approches répondait, au moins en première approximation, à laplupart des cas de la vie courante. On peut toutefois noter que pour les cas complexes,les calculs s’alourdissent considérablement, et le bon sens de l’ingénieur doit primer dansle choix des hypothèses à poser pour mener à bien ces résolutions, que ce soit de façonanalytique ou bien numérique.

L’introduction de la théorie des poutres en RdM peut être envisagée principale-ment de 2 façons différentes. Une première approche consiste à partir des considérationsparticulières pour des grandes familles d’exemples. Une telle approche nécessite une bonneconnaissance et une bonne maîtrise de la modélisation des problèmes physiques à résoudre.Une approche plus systématique, choisie ici, permet de poser la formulation rigoureusede la théorie des poutres à partir de considérations purement mécaniques. Cette théorietout à fait générale sera ensuite appliquée aux cas plus simples permettant d’isoler lescomportements linéaires en traction, flexion simple, et en torsion. Les comportementsnon-linéaires seront ensuite abordés, et la mécanique des plaques sera décrite à partir

i

ii

d’une cinématique proche de celle des poutres. Au fur et à mesure des exemples traités,le lien entre les problèmes physiques et leur formulation devra apparaître de plus en plusnaturellement.

Enfin, même si les solutions proposées dans le cas des structures simples restentd’un grand intérêt, il apparaîtra rapidement, dans le cas des plaques notamment, quela résolution analytique est de portée limitée. On comprend alors que la conception desystèmes avancés, de plus en plus complexes et multi-physiques (aéroélasticité/structure,thermo-mécanique, biomécanique, . . .) ne pourra se faire à l’aide de solutions simplifiéesseulement. Au contraire, la conception et le dimensionnement de structures doit s’appuyerde façon systématique sur les 2 types d’approches, analytique pour accéder rapidement àdes ordres de grandeur, puis numérique pour prendre en compte plus finement des com-portements extrêmes et/ou locaux. En effet, l’avancée conjointe des connaissances dansle domaine du comportement des matériaux et de la puissance de calcul des ordinateursfait que le recours aux simulations numériques, et souvent au calcul intensif (massivementparallèle), est dorénavant systématique et pointue. Il faut toutefois noter que l’utilisationde ces simulations ne peut se faire sans connaissance avancée en mécanique, et notammenten mécanique des structures qui reste la base dans la formulation des éléments finis struc-turaux largement répandus en conception. Seule une bonne connaissance de ces éléments,et donc des hypothèses qui ont amené à leur formulation, ainsi que des méthodes de ré-solution numériques correspondantes, permet de mener à bien, de façon optimale et sûre,des calculs de dimensionnement des structures. Une extension à la résolution numériquedes problèmes de mécanique est donc proposée en fin de ce cours, avec un accent parti-culier mis sur la mécanique numérique des structures. Ce chapitre représente égalementun avant-goût du module 2 mis en place à la rentrée 2009-2010 dans l’option Matériauxet Mécanique, intitulé ’Mécanique numérique’, et qui se concentre exclusivement sur lesméthodes numériques et la simulation en mécanique.

Quelques ouvrages de référence— Introduction à la mécanique des milieux continus, P.Germain et P.Muller, Éd.

Masson 1995, collection Enseignement de la physique,— Mécanique des Structures, Tome 2 Poutres, S.Laroze et J.-J. Barrau, Éd. Mas-

son 1991,— Cours de Mécanique des Milieux Continus de 1ère année de l’École Nationale

Supérieure des Mines de Saint-Étienne, R. Fortunier, 2000 et H. Klöcker, 2003.— Theories of elastic plates, V.Panc, Éd. Noordhoff International Publishing 1975,

collection Mechanics of Structures.— Finite element simulations of heat transfers, J.-M. Bergheau et R. Fortunier,

ISTE - J. Wiley, ISBN 9781848210530, 2008.

iii

(a)

(b)

(c)

(d)

Figure 1: Exemples de structure : (a) poutre ventrale en composite carbone/époxyde d’unAirbus A340 : 16 mètres de long pour 1600 kg, (b) la plus grande pale d’éolienne aumonde (LM61.5 par LMGlasfiber) : 61,5 m de long pour 17,7 tonnes ; composite verre /époxyde. (c) exemple de tablier de pont soumis à des charges de roulement et une pousséeaérodynamique, et (d) caisson central de voilure A380 - concept et réalisation

Table des matières

1 Théorie des poutres 2

1.1 Rappels de MMC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

1.2 Mécanique des structures et RdM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.2.1 Définition des structures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.2.2 Résistance des Matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

1.2.3 Hypothèses des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.3 Cinématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.3.1 Torseur des déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

1.3.2 Bilan de la cinématique de poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

1.4 Contraintes et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

1.4.1 Torseur des efforts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

1.4.2 Énergie de déformation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

1.5 Élasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

1.5.1 Loi de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

1.5.2 Conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

1.6 Méthode de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

1.6.1 Calcul des efforts internes - Équations d’équilibre . . . . . . . . . . 21

1.6.2 Calcul des déplacements et des rotations . . . . . . . . . . . . . . . 28

1.6.3 Calcul des états de contraintes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

1.7 Bilan de la théorie des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

2 Théorie des poutres droites 34

2.1 Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan . . . . . . . . . . . . . . 35

2.1.1 Simplifications dans le cas des poutres à plan moyen chargées dansce plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

2.1.2 Interprétation des grandeurs cinématiques et statiques . . . . . . . 36

2.1.3 Prise en compte du cisaillement transverse . . . . . . . . . . . . . . 37

2.1.4 Formulation des problèmes de flexion-tension . . . . . . . . . . . . . 38

v

vi

2.2 Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

2.2.1 Tension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

2.2.2 Flexion simple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

2.2.3 Flexion déviée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

2.2.4 Sollicitation composée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

2.2.5 Torsion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

2.3 Bilan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

3 Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 62

3.1 Rappels - calcul du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

3.1.1 Simplifications dans le cadre de la RdM . . . . . . . . . . . . . . . . 63

3.1.2 Travail dans le cas des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

3.2 Théorèmes énergétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

3.2.1 Théorème de réciprocité ou de Maxwell-Betti . . . . . . . . . . . . 67

3.2.2 Théorème de Castigliano . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

3.3 Hyperstatisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

3.4 Résolution des systèmes hyperstatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

3.4.1 Principe de superposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

3.4.2 Théorème de Ménabréa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

4 Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 78

4.1 Flambage des poutres droites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

4.1.1 Équations non-linéaires de la statique des poutres droites . . . . . . 81

4.1.2 Application à une poutre droite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

4.1.3 Extension aux calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88

4.2 Modes et fréquences propres de vibration en flexion dans les poutres droites 90

4.2.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90

4.2.2 Équations de la dynamique des poutres droites à plan moyen . . . . 90

4.2.3 Vibrations libres - application à la flexion simple . . . . . . . . . . . 91

4.2.4 Vibrations libres - calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . 95

4.3 Extension : réponse post-bifurquée d’une poutre . . . . . . . . . . . . . . . 96

4.3.1 Poutre homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97

4.3.2 Poutre sur fondation élastique à deux paramètres . . . . . . . . . . 102

vii

5 Plaques 110

5.1 Plaques et coques - généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

5.1.1 Définition d’une plaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112

5.1.2 Cas des coques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112

5.2 Plaques planes de Love-Kirchhoff . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113

5.2.1 Cinématique en flexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114

5.2.2 Champ de déplacement complet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116

5.2.3 Déformations et contraintes généralisées . . . . . . . . . . . . . . . 117

5.2.4 Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122

5.2.5 Introduction des efforts tranchants . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125

5.2.6 Exemples de plaque de Love-Kirchhoff en flexion . . . . . . . . . . . 131

5.3 Plaques de Hencky-Mindlin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134

5.3.1 Cinématique et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134

5.3.2 Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135

5.3.3 Lois de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137

6 Approximations numériques 140

6.1 Notions de base sur les approximations numériques en mécanique . . . . . 141

6.2 Approximations numériques les plus courantes en élasto-statique . . . . . . 142

6.2.1 Résidus pondérés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144

6.2.2 Formulation intégrale faible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146

6.2.3 Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148

6.3 Applications à la mécanique des structures : Barre soumise à son poids propre149

6.3.1 Solution analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151

6.3.2 Résolution par différences finies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152

6.3.3 Méthodes de collocation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

6.3.4 Méthode de Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157

6.3.5 De la méthode de Galerkin aux éléments finis . . . . . . . . . . . . 163

6.4 Conclusions sur les méthodes numériques en mécanique des structures . . . 173

7 Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 176

7.1 Rappel sur les torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

7.1.1 Définition d’un torseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

7.1.2 Produit scalaire de deux torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178

1

7.1.3 Dérivation d’un torseur dans un repère mobile . . . . . . . . . . . . 178

7.2 Calcul variationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180

7.2.1 Extremum d’une intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180

7.2.2 Condition d’Euler-Lagrange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181

7.2.3 Cas où la dérivée seconde intervient . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182

7.2.4 Importance des conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . 183

7.2.5 Cas d’une fonctionnelle faisant intervenir des dérivées en temps eten espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183

7.2.6 Remarque : Indépendance des formes de y dans la fonctionnelle I . 185

7.3 Cinétique - Dynamique - Énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185

7.3.1 Moments et autres caractéristiques du mouvement des corps . . . . 185

7.3.2 Théorème de Huygens-Koënigs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

7.3.3 Tenseurs d’inertie pour des géométries courantes . . . . . . . . . . . 188

7.3.4 Cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189

7.3.5 Dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192

7.3.6 Principe Fondamental de la Dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . 192

7.3.7 Théorème de l’énergie cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194

7.4 Principe des puissances virtuelles - PPV - et lien avec les autres principesde la mécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194

7.4.1 Principe des Travaux Virtuels et Principe de Hamilton pour lessystèmes discrets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195

7.4.2 Forme proposée par Lagrange pour les systèmes discrets . . . . . . 198

7.4.3 Généralisation aux systèmes discrets non-conservatifs . . . . . . . . 199

7.4.4 Principe de Hamilton pour les systèmes continus . . . . . . . . . . 201

7.4.5 Liens avec le PPV/PTV, et le Principe de Hamilton dans les milieuxcontinus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206

7.5 Concepts de stabilité des équilibres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209

7.5.1 Stabilité des équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209

7.5.2 Définition d’un équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 210

7.5.3 Petites oscillations autour d’une configuration d’équilibre . . . . . . 210

7.5.4 Stabilité d’un équilibre paramétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . 211

7.5.5 Linéarisation des énergies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213

1.

Théorie des poutres

Sommaire1.1 Rappels de MMC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

1.2 Mécanique des structures et RdM . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.2.1 Définition des structures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.2.2 Résistance des Matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

1.2.3 Hypothèses des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.3 Cinématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.3.1 Torseur des déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

1.3.2 Bilan de la cinématique de poutres . . . . . . . . . . . . . . . . 13

1.4 Contraintes et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

1.4.1 Torseur des efforts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

1.4.2 Énergie de déformation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

1.5 Élasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

1.5.1 Loi de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

1.5.2 Conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

1.6 Méthode de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

1.6.1 Calcul des efforts internes - Équations d’équilibre . . . . . . . 21

1.6.2 Calcul des déplacements et des rotations . . . . . . . . . . . . . 28

1.6.3 Calcul des états de contraintes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

1.7 Bilan de la théorie des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

2

Théorie des poutres 3

Dans ce chapitre, la théorie des poutres est présentée d’un point de vue général.Une grande partie des développements, notamment concernant la définition des grandeurscinématiques et statiques en 3D, est tirée du document Mécanique des milieux continusprésenté en première année du cycle ICM de l’ÉNSM.SE par le professeur H.Klöcker(centre SMS).

1.1 Rappels de MMC

La mécanique des milieux continus permet de caractériser le comportement phy-sique de milieux continus, solides ou fluides (schématisé Figure 1.1), soumis à des solli-citations extérieures (forces de volume

−→f ou ponctuelles

−→F d (ou forces surfaciques), ou

déplacements −→u d). Dans la résolution d’un problème, des équations d’équilibre définissentl’équilibre de tout élément de matière occupant un domaine Ω (Eq. 1.2). Sur ses frontières(∂Ω) le milieu est en contact avec l’extérieur. Dans le cas des solides (Figure 1.1), cescontacts peuvent correspondre à des efforts imposés (sur ∂ΩF Eq. 1.3) ou des déplace-ments imposés (sur ∂Ωu Eq.1.1). Finalement, la loi de comportement (Eq. 1.4) permet derelier les 2 grandeurs duales que sont les contraintes, notées ici σ(−→x ), et les déplacementsdont dérivent les déformations, notées ici ε(−→x ). Le problème est alors complètement posé(fermé) et peut être résolu, en utilisant les équations rappelées ci-dessous dans le cadrede la dynamique des milieux continus (Eqs 1.1 à 1.4).

Figure 1.1: Représentation générale d’un solide occupant un domaine Ω, de frontière ∂Ω

(∂Ω = ∂Ωu ∪ ∂ΩF et ∂Ωu ∩ ∂ΩF =Ø), soumis à des sollicitations extérieures.

On rappelle qu’un champ de déplacement vérifiant les conditions aux limites ciné-matiques est dit cinématiquement admissible ou C.A.. Un champ de contraintes vérifiantles équations d’équilibre au bord ou conditions aux limites statiques et les équations

Théorie des poutres 4

d’équilibre intérieur est dit statiquement admissible ou S.A.. On comprend bien alors quela résolution d’un problème posé en déplacements est plus simple car la famille de champsde déplacements C.A., à laquelle appartient la solution, est simple à poser. Par contre,résoudre un problème posé en contraintes est plus complexe puisque la famille des champsS.A, à laquelle le champ de contraintes solution appartient, doit vérifier à la fois les condi-tions aux limites statiques et les équations d’équilibre intérieur. Il est donc peu aisé deposer a priori des familles de champs de contraintes solution.

1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.

−→u (−→x , t) = −→u d(−→x , t) ,∀ −→x ∈ ∂Ωu (1.1)

2. Équilibre intérieur

∂σij(−→x , t)

∂xj+ fi(

−→x , t) = ρui(−→x , t) ,∀ −→x ∈ Ω (1.2)

3. Équilibre au bord

σij(−→x , t)nj(−→x ) = F d

i (−→x , t) ,∀ −→x ∈ ∂ΩF (1.3)

4. Loi de comportementσij = Lijklεkl (1.4)

1.2 Mécanique des structures et RdM

1.2.1 Définition des structures

La mécanique des structures se définit comme la mécanique des solides de dimen-sions finies où une des dimensions au moins est faible devant les autres. La mécaniquedes structures couvre donc un grand nombre de géométries dont les plus courantes sontles poutres (1D), les plaques et coques (2D), et les solides axisymétriques (2D) (Figure1.2). En observant la géométrie des structures étudiées, des hypothèses peuvent êtrefaites quant à la cinématique qui prévaut dans ces solides. Toute la difficulté de ce typed’approche réside dans le choix judicieux de cette cinématique qui doit être suffisammentriche pour observer tous les phénomènes rencontrés durant l’utilisation des structuresconsidérées, mais assez simple pour permettre des résolutions analytiques. Ce point seravu en détail dans ce cours.

On peut remarquer que ces structures sont également utilisées dans les simulationsnumériques, telles que les simulations par éléments finis par exemple. Dans ce cas, commelors de la résolution analytique d’ailleurs, les temps de calcul nécessaires à la résolutiond’un problème sont amplement plus faibles que si le même problème était traité avec uneapproche de type MMC (3D dans un calcul par éléments finis).

Théorie des poutres 5

Figure 1.2: Type de structures

1.2.2 Résistance des Matériaux

La résistance des matériaux est un cadre restreint, mais utilisable pour la plu-part des applications courantes, pour traiter des problèmes de mécanique des structures.Principalement, les hypothèses simplificatrices de la RdM portent sur des conditions deréversibilité et de linéarité. Les études en RdM sont conduites sous les hypothèses sui-vantes :

— cadre de l’HPP : petites déformations, petits déplacements (pas de flambageou de striction par exemple),

— les matériaux constitutifs sont élastiques linéaires isotropes,— les problèmes appartiennent au domaine de la statique, ou sont supposés quasi-

statiques,— principe de Saint-Venant : loin de son point d’application, une sollicitation

extérieure peut être remplacée par son torseur équivalent,— principe de superposition : quelque soit l’ordre d’application des efforts exté-

rieurs sur un solide, l’état final est invariant.Sous ces hypothèses, la RdM permet de traiter des problèmes de poutres, plaques,

coques, ... Il faut maintenant introduire la notion de modélisation géométrique des solides.Ceci fait l’objet du paragraphe suivant qui traite plus particulièrement de la théorie despoutres.

Théorie des poutres 6

1.2.3 Hypothèses des poutres

Les hypothèses sur la géométrie des poutres permettent de représenter un solide3D élancé par sa ligne moyenne. Ceci s’applique également aux plaques et coques où cettefois-ci l’épaisseur étant faible devant les autres dimensions le solide est remplacé par lefeuillet moyen correspondant.

Définition d’un poutre

Une poutre est un solide engendré par une aire plane S qui est déplacée dansl’espace, de sorte que durant son mouvement le centre de gravité G de la section S

parcourt une ligne donnée L, et que l’aire se maintienne constamment normale à cettesurface (Figure 1.3). De plus, la section peut varier au cours de ce parcours, mais de façoncontinue, i.e. le profil ne doit pas présenter de discontinuités. La ligne L est appelée fibremoyenne de la poutre. Une poutre est dite :

— gauche si la ligne L suit une courbe gauche,— plane si la ligne L suit une courbe plane,— droite si la ligne L suit une droite.

Figure 1.3: Définition géométrique d’une poutre

Une poutre à plan moyen est une poutre dont la section S possède un plan desymétrie. Cette hypothèse est finalement peu restrictive et permet de traiter de trés nom-breux cas (Figure 1 page iii). Enfin, si la fibre moyenne est une courbe fermée, on parlerad’anneau (les sections droites initiale et finale sont confondues).

Finalement, les hypothèses permettant de classifier un solide comme étant unepoutre sont les suivantes :

— un élancement de la poutre suffisant :L

supL2, L3> 5 et

L2

L3

≤ 10 (L2 et L3

étant les dimensions caractéristiques respectivement selon les directions −→x2 et−→x3),

— un rayon de courbure de L grand devant les dimensions transversales,

Théorie des poutres 7

— un profil sans discontinuité.Remarque : des problèmes complexes associant un grand nombre de poutres ont été large-ment utilisés au cours des 2 derniers siècles. Ces structures sont dites structures réticuléesou treillis. Les cas les plus typiques sont par exemple la Tour Eiffel, constituée de treillisà plusieurs échelles, imbriqués pour former des structures de plus en plus imposantes,et finalement constituant la Tour elle-même. De nombreux autres exemples d’applica-tion existent pour ces approches où des méthodes de calcul propres ont été développéesspécifiquement (méthode graphique de Crémona par exemple). Dans le cadre de cette in-troduction à la RdM, seules les poutres seront étudiées, offrant suffisamment d’exemplesd’application pour donner une vision rapide mais détaillée de la RdM.

Grandeurs physiques

La théorie élastique des poutres est basée sur celle des milieux curvilignes. Uneposition sur la poutre sera caractérisée uniquement par l’abscisse curviligne l d’un pointsur la fibre moyenne L. Le reste de la géométrie, c’est-à-dire la section S, sera caractériséen chaque point G(x1) de la fibre moyenne, pour un matériau constitutif homogène, par :

— la section S de la poutre obtenue sous la forme :

S(x1) =

∫S(x1)

ds =

∫S(x1)

dx2dx3

— des moments d’ordre 1 nuls puisque le point G de la fibre moyenne est le centrede gravité de la section S :∫

S(x1)

x2ds =

∫S(x1)

x3ds = 0

— des moments d’ordre 2, ou moments quadratiques (plans) :

I2(x1) =

∫S(x1)

x23ds et I3 =

∫S(x1)

x22ds

— un moment produit, différent de 0 pour les sections non-symétriques ou dontles axes de symétrie (−→x2 ,−→x3 ) ne sont pas confondus avec le repère global :

I23(x1) =

∫S(x1)

x2x3ds

— un moment de giration ou moment quadratique polaire :

I0(x1) =

∫S(x1)

(x22 + x2

3)ds = I2(x1) + I3(x1)

Par exemple, pour une section S circulaire, de rayon R, on a I2 = I3 = πR4

4et

I23 = 0, tandis que pour une section rectangulaire, de hauteur L2 et largeur et L3, on aI2 =

L2L33

12, I3 =

L32L3

12et I23 = 0.

Théorie des poutres 8

Repère de Frenet

Dans le cas général d’une poutre paramétrée par son abscisse curviligne s, on peutdéfinir pour des raisons de commodité un trièdre direct, le repère de Frenet (−→τ ,−→n ,

−→b )

(Table 1.1). Les grandeurs locales peuvent être exprimées dans ce repère, et les dérivationslocales suivent les règles indiquées ci-après, avec les rayons de courbures R1 et R2 définisdans les plans (M,−→τ ,−→n ) et (M,−→τ ,

−→b ) respectivement.

d−→τds

=−→τ ′ =

−→nR1

d−→nds

=−→n′ = −

−→τR1

−−→b

R2

d−→b

ds=−→b′ =

−→nR2

n

bM

(s)t

Repère de Frenet.

Table 1.1: Définition du repère de Frenet pour une abscisse courante s.

Avertissement : Dans la première partie de ce cours, nous établirons les équations dansle cas plus particulier des poutres où les courbures restent faibles. L’extension, auxpoutres quelconques, de la théorie développée ici passe par le prise en compte des cour-bures dans la dérivation des grandeurs cinématiques et statiques par rapport à l’abscissecurviligne s, selon les règles rappelées ici. Ceci ne modifie pas fondamentalement les ré-sultats présentés dans cette première partie, mais introduit une complexité qui n’est pasnécessaire pour poser les bases des théories de poutre ; cette complexité apparaît dans lescouplages des comportements, tels que le couplage traction-flexion par exemple dans lespoutres courbes. Il en est de même pour les coques vis-à-vis des plaques.

d

ds

−→τ−→n−→b

=

0

1

R1(s)0

− 1

R1(s)0 − 1

R2(s)

01

R2(s)0

−→τ−→n−→b

1.3 Cinématique

Dans ce document, nous nous limiterons à la cinématique des déplacements is-sue de l’hypothèse de Navier. D’autres cinématiques existent, elles sont dites ’enrichies’et répondent à une besoin de précision accrue dans la prise en compte du cisaillementnotamment. Certaines de ces théories sont présentées dans le cas spécifique des maté-riaux composites, au Chapitre 5 du support de cours ’Mécanique des Composites Hautes

Théorie des poutres 9

Performances’ disponible à l’adresse http://www.emse.fr/~drapier/index_fichiers/CoursPDF/Composites/Composites-Drapier-2014.pdf.

Selon l’hypothèse de Navier, au cours de la déformation de la poutre, la sectiondroite S reste droite (elle ne subit aucun gauchissement). Cette section S subit donc :

— un mouvement de corps rigide,— une déformation dans son plan.

Mouvement de corps rigide de S

Figure 1.4: Hypothèse cinématique de Navier

La Figure 1.4 illustre la caractérisation du mouvement de corps rigide de la sectionS par un vecteur de déplacement −→u et un vecteur de rotation −→r appliqués à son centrede gravité G (voir également Figure 1.5). Le déplacement d’un point M de la section S(−−→GM = x2

−→x2 + x3−→x3) dû à ce mouvement de corps rigide sera de la forme :

−−−−−→u(M,x1) = −→u M(x1) =

−−→u(G)(x1) +

−−→MG ∧

−−→r(G)(x1)

= −→u (x1) +−−→MG ∧ −→r (x1)

ce qui peut encore se mettre sous la forme du torseur des déplacements exprimé au pointG (voir ’Rappel sur les torseurs’ page 177), dont les éléments de réduction au point Gsont les vecteurs −→u et −→r représentant respectivement le déplacement et la rotation de lasection S en ce point :

UM(x1) =

−→r (x1)

−→uM(x1) = −→u (x1) +−−→MG ∧ −→r (x1)

(M)

(1.5)

On voit ici l’intérêt de la théorie des poutres, où le déplacement d’un pointM quelconquede la poutre s’exprime complètement à partir des déplacements et rotations du centrede gravité de la section S contenant ce point. Les déplacements de tous les points de

Théorie des poutres 10

ce solide 3D sont donc représentés par les déplacements et les rotations des centres degravité, ramenant le problème tridimensionnel à une modélisation unidimensionnelle.

Dans l’hypothèse des petites perturbations le vecteur−−→GM (position d’un point

courant par rapport au centre de gravité de la section) est contenu, avant et après dé-formation, dans le plan formé par les vecteurs −→x 2 et −→x 3 portés par la section S. Lescomposantes du vecteur −→u M s’écrivent donc dans le repère local de la section S :

−→u M =

∣∣∣∣∣∣∣u1

u2

u3

+

∣∣∣∣∣∣∣r2x3 − r3x2

−r1x3

r1x2

Dans l’hypothèse des petites perturbations, on calcule le tenseur des déformationsau point M , ε

M(x1), comme la partie symétrique du tenseur gradient des déplacements

en ce point, dM

(x1) (Eq. 1.6). Comme les vecteurs −→u et −→r s’appliquent au point G de lasection S, et donc sur la ligne L, ils ne dépendent que de l’abscisse curviligne l sur cetteligne. Les seuls gradients non nuls pour ces vecteurs sont donc ceux mettant en jeu lapremière coordonnée x1, tandis que la dépendance en x2 et x3 est donnée explicitementpar l’équation précédente. Dans la suite, nous noterons x′ la dérivée de toute quantité xpar rapport à la première coordonnée. Ceci permet d’écrire :

dM

(x1) =

u′1 + r′2x3 − r′3x2 −r3 r2

u′2 − r′1x3 0 −r1

u′3 + r′1x2 r1 0

(1.6)

On peut remarquer dans cette équation que les dérivée mises en jeu sont des dé-rivées totales, résultant de la formulation unidimensionnelle de la cinématique de poutre.Mais dans le cas d’une poutre courbe par exemple, ces dérivées devront prendre en comptele fait que le repère (−→x 1,

−→x 2,−→x 3) "tourne" lorsque l’on parcourt la fibre moyenne L. On

recourt alors à une définition prenant en compte les courbures, tel que dans le repère deFrénet.

À partir du tenseur gradient des déplacements dM

(x1), on peut maintenant obtenirle tenseur des déformations ε

M(x1) par sa partie symétrique. On constate que ce tenseur ne

possède que trois termes non nuls qui sont une déformation normale (ε11) et 2 glissementsqui sont le double des cisaillements entre deux sections voisines (2ε12, 2ε13 - Figure 1.5) :

ε11 = u′1 + r′2x3 − r′3x2

2ε12 = u′2 − r′1x3 − r3

2ε13 = u′3 + r′1x2 + r2

Le mouvement de corps rigide de la section S ne produit donc pas directement dedéformations dans le plan de cette section (la section ne peut "s’écraser" ni se cisaillerdans son plan). Les seules déformations existantes correspondent au déplacement relatifdes sections d’abscisses curvilignes consécutives (Figure 1.5).

Théorie des poutres 11

Figure 1.5: Déformations dans les sections.

Figure 1.6: Illustration des contraintes normales nulles sur les faces d’une poutre à sectionprismatique.

Déformation dans le plan de S

Le plan de la section S contient les vecteurs −→x 2 et −→x 3. Il s’ensuit qu’une déforma-tion dans son plan (une déformation plane) ne produira que des déformations ε22, ε23 etε33. Ces déformations doivent permettre de satisfaire les conditions aux limites au bordde la section. En effet, sur ces bords libres de contraintes extérieures, on doit vérifier quele vecteur contrainte relatif à la normale sortante à la section soit nul. Dans le cas d’unesection prismatique, les vecteurs contraintes par rapport aux normales −→x 2 et −→x 3 sontbien nuls (σ · −→n (−→x ) =

−→0 ) (Figure 1.6). Cette condition conduit à σ22 = σ23 = σ33 = 0 en

x2 = ±L2

2∩x3 = ±L3

2. On a également σ12 = 0 sur la face de normale −→x 2 et σ13 = 0 sur la

face de normale −→x 3. Toutefois ces dernières conditions sont difficilement vérifiables avecles théories classiques des poutres, mais sont acceptables dans les cas les plus courantscomme nous le verrons sur un exemple en TD dans le chapitre 2.

Dans le cas de poutres homogènes, on fait souvent l’hypothèse que les contraintes

Théorie des poutres 12

σ22, σ33 et σ23 sont nulles dans toute la section S. Pour cette composante du cisaillement,cette condition est bien vérifiée pour un matériau isotrope (σ23 ⇔ ε23 = 0). Pour lescontraintes normales, ceci peut se justifier compte-tenu de l’épaisseur et de la largeur dela section qui sont des dimensions faibles. Les contraintes étant nulles sur les bords, ellesne peuvent se développer sur des dimensions aussi faibles, et sont donc également nulles àl’intérieur de la section. En considérant un matériau à comportement élastique isotrope,cette hypothèse nous donne les valeurs suivantes pour les déformations dans la section S(λ et µ sont les coefficients de Lamé du matériau 1) :

2µε22 + λ(ε11 + ε22 + ε33) = 0

2µε23 = 0

2µε33 + λ(ε11 + ε22 + ε33) = 0

ε23 = 0

ε22 = ε33 = − λ2(λ+µ)

ε11

On constate que, dans ce cas, les déformations normales ε22 et ε33 de la section Sdans son plan sont complètement déterminées à partir de la composante ε11 calculée àpartir de son mouvement de corps rigide. Ces déformations résultent uniquement de l’effetde Poisson induit par des déformations normales ε11, et sont donc faibles puisque la plusgrande dimension de la section doit être au plus de 1

10de la longueur de la poutre, soit

pour un matériau courant (ε22, ε33) ' ν sup(L2,L3)L

< 3100

. Ces déformations sont donc biennégligeables devant les déformations engendrées par le déplacement relatif des sections(ε11,ε12,ε13). C’est là tout l’intérêt de la théorie des poutres qui permet de simplifierconsidérablement les problèmes à résoudre, les ramenant du 3D au 1D.

Degrés de liberté

Les résultats précédents nous montrent que le mouvement du solide peut êtrecomplètement déterminé à partir des vecteurs −→u et −→r de la Figure 1.4. La cinématiquedes déplacements ainsi mise en place permet de concentrer les inconnues du problème surla fibre moyenne L de la poutre. Le solide tridimensionnel est remplacé par la ligne L.Chaque point de la ligne dispose de six degrés de libertés au lieu de trois (les déplacementsdans les trois directions). Ces six degrés de liberté sont :

— les déplacements dans les trois directions du point G de la ligne L, représentéspar le vecteur −→u , de composantes u1, u2 et u3,

— la rotation de la section S, représentée par le vecteur rotation −→r , de compo-santes r1, r2 et r3, appliqué au point G.

1.3.1 Torseur des déformations

Les hypothèses faites sur la cinématique des déplacements dans la poutre nousconduisent au tenseur symétrique suivant des déformations en un point M quelconque

1. σij = 2µεij + λεppδij et εij = 1+νE σij − ν

Eσppδij avec E le module d’Young et G le module decisaillement du matériau isotrope

Théorie des poutres 13

d’une section S :

εM

=

ε11 = u′1 + r′2x3 − r′3x2 ε12 ε13

ε12 = 12(u′2 − r′1x3 − r3) ε22 = − λ

2(λ+µ)ε11 ε23 = 0

ε31 = 12(u′3 + r′1x2 + r2) ε23 = 0 ε33 = − λ

2(λ+µ)ε11

Ce tenseur des déformations ne comporte que trois termes indépendants : ε11, ε12 et ε13. EnRdM, ces termes sont associés sous la forme d’un vecteur −→eM , appelé vecteur déformation :

−→eM(x1) =

ε11(M,x1)

2ε12(M,x1)

2ε13(M,x1)

Le vecteur −→eM contient une dilatation dans la direction de la fibre moyenne comme

premier terme, puis des glissements (doubles des cisaillements entre deux sections voi-sines). Il représente la déformation du milieu curviligne au point M . Cette déformationpeut à son tour être exprimée en fonction d’une déformation −→e dite de membrane et d’ungradient de rotation appelé courbure −→κ au point G sous la forme :

−→eM(x1) = −→e (x1) +−−→MG ∧ −→κ (x1)

où −→e et −→κ , éléments de réduction de la déformation au point G de S, constituent letorseur des déformations défini par :

−→e (x1) = −→u ′(x1) +−→x 1 ∧ −→r (x1) =

u′1u′2 − r3

u′3 + r2

et −→κ (x1) = −→r ′(x1) =

r′1r′2r′3

(1.7)

ce qui peut encore s’écrire de façon similaire au déplacement en un point M de la section(Eq. 1.5) :

εM(x1) =

−→κ (x1)

−→eM(x1) = −→e (x1) +−−→MG ∧ −→κ (x1)

(M)

1.3.2 Bilan de la cinématique de poutres

— déplacements :

UM(x1) =

−→r (x1)

−→uM(x1) = −→u (x1) +−−→MG ∧ −→r (x1)

(M)

Théorie des poutres 14

— déformations :

εM(x1) =

−→κ (x1)

−→eM(x1) = −→e (x1) +−−→MG ∧ −→κ (x1)

=

u′1u′2 − r3

u′3 + r2

+

0

−x2

−x3

∧r′1r′2r′3

(M)

On peut remarquer que l’écriture avec des torseurs permet également d’écrire directement

les déformations par dérivation du torseur cinématique εM =d

dx1

UM, voir Eq. 7.2

’Rappel sur les torseurs’ page 177.

1.4 Contraintes et déformations

1.4.1 Torseur des efforts

L’hypothèse de Saint-Venant, présentée précédemment, consiste à supposer queloin de leur point d’application les efforts agissant sur S peuvent être schématisés par letorseur des efforts équivalent τ(x1), dont les éléments de réduction sont une force

−→R (x1)

et un moment−→M(x1), appliqués au centre de gravité G de S (Figure 1.7). Dans le cas

d’efforts extérieurs appliqués à la poutre, à l’abscisse xi, le torseur des actions extérieurpeut par exemple (Figure 1.7) être :

F(xi) =

−→R (xi)

−→M(xi)

(Gi)

(1.8)

Pour les efforts intérieurs, les éléments de réduction se déduisent naturellement del’intégration des contraintes induites par les sections voisines sur la section S considérée(Figure 1.8). D’après les hypothèses faites sur les contraintes dans le plan d’une sectionS, les seules contraintes non nulles dans le solide sont σ11, σ12 et σ13. En RdM, cescontraintes sont associées dans un vecteur −→tM , appelé vecteur contrainte, qui représenteles efforts de cohésion ou efforts intérieurs. Par convention, on définit ces efforts internesentre 2 sections voisines, comme les efforts exercés par une section de gauche (S−) surune section de droite (S+) (Figure 1.8) en comptant les abscisses curvilignes croissantesselon −→x 1 :

−→tM(x1) =

σ11(M,x1)

σ12(M,x1)

σ13(M,x1)

Comme la normale à S est le vecteur −→x 1 (dans le cadre des petites perturbations

la configuration finale est confondue avec la configuration initiale), on peut remarquer que

Théorie des poutres 15

Figure 1.7: Illustration du principe de Saint-Venant : (a) chargement sur la poutre, et (b)torseur équivalent sur la ligne moyenne.

le vecteur contrainte −→tM(x1) coïncide avec celui défini en mécanique des milieux continus,agissant sur un élément de surface contenu dans S.

Figure 1.8: Définition des efforts intérieurs, torseur des efforts intérieurs.

Dans le cas des efforts intérieurs à la poutre, les efforts agissant sur S résultent del’intégration du vecteur contrainte sur la section, et sont appelées contraintes généralisées.On distingue les contraintes généralisées de membrane et de flexion résultant respective-ment de l’intégration des contraintes sur la section et de l’intégration des contraintesprenant en compte l’éloignement du point considéré par rapport au centre de gravité dela section. Les efforts de membrane sont définis ci-dessous par les relations 1.9 et sontillustrés sur la Figure 1.9 :

Théorie des poutres 16

−→R (x1) =

∫S(x1)

−→tM(x1)ds

=

effort NORMAL : N(x1) =

∫S(x1)

σ11(M,x1)ds

effort TRANCHANT / −→x2 : T2(x1) =

∫S(x1)

σ12(M,x1)ds

effort TRANCHANT / −→x3 : T3(x1) =

∫S(x1)

σ13(M,x1)ds

(1.9)

Figure 1.9: Contraintes généralisées de membrane.

Les moments sont définis par les relations 1.10 et illustrés sur la Figure 1.10 :

−→M(x1) =

∫S(x1)

−−→GM ∧ −→tM(x1)ds

=

moment de TORSION : Mt(x1) =

∫S(x1)

(x2σ13(M,x1)− x3σ12(M,x1))ds

moment de FLEXION / −→x2 : Mf2(x1) =

∫S(x1)

x3σ11(M,x1)ds

moment de FLEXION / −→x3 : Mf3(x1) =

∫S(x1)

−x2σ11(M,x1)ds

(1.10)

Figure 1.10: Contraintes généralisées de flexion.

Théorie des poutres 17

Finalement, le torseur des efforts intérieurs s’écrit en fonction de l’abscisse du point consi-déré le long de la ligne moyenne G(x1) :

τ(x1)(G) =

−→R (x1) =

N(x1)

T2(x1)

T3(x1)

−→M(x1) =

Mt(x1)

Mf2(x1)

Mf3(x1)

(G)

1.4.2 Énergie de déformation

En élasticité, l’énergie de déformation du solide de volume V peut s’écrire W =12

∫Vσ(−→x ) : ε(−→x )dv. En RdM, puisque les hypothèses portant sur la géométrie et la ci-

nématique ont conduit à formuler un problème purement unidimensionnel, cette énergiepeut être écrite simplement à l’aide des composantes des torseurs des efforts et des défor-mations. En effet, en utilisant la définition des vecteurs déformation −→eM(x1) et contrainte−→tM(x1), on obtient :

W (−→u (−→x )) = 12

∫V

σ(−→x ) : ε(−→x )dV =1

2

∫L

∫S

σ(−→x ) : ε(−→x )dsdl

= 12

∫L

∫S

−→tM(x1).−→eM(x1)dsdl

= 12

∫L

∫S

−→tM(x1).(−→e (x1) +−→κ (x1) ∧

−−→GM)dsdl

=1

2

∫L

(−→e (x1).

∫S

−→tM(x1)ds+−→κ (x1).

∫S

−−→GM ∧ −→tM(x1)ds

)dl

↓ (par définition des éléments de réduction)

=1

2

∫L

(−→R (x1).−→e (x1) +

−→M(x1).−→κ (x1))dl

(1.11)

Ceci montre que les forces−→R (x1) agissant sur la fibre moyenne L sont associées

à la déformation −→e (x1) de membrane, tandis que les moments−→M(x1) sont associés à

sa courbure −→κ (x1) (gradient de la rotation). Cette dualité résulte de l’intégration desgrandeurs physiques sur la section S(x1) de la poutre, et reste également valable dansles structures de type plaques et coques. On trouvera dans certaines approches de lamécanique des structures, ces grandeurs appelées contraintes généralisées pour le torseurdes efforts et déformations généralisées pour le torseur des déformations. L’énergie dedéformation de la poutre (Eq. 1.12) peut s’écrire en utilisant le produit scalaire de torseursdéfinit par la somme des produits croisés des éléments de réduction des torseurs considérés,

Théorie des poutres 18

dépendant seulement de la position x1 (voir Eq. 7.1 dans ’Rappel sur les torseurs’ page177) :

W (−→u (x1)) =1

2

∫L

τ(x1) · ε(x1) dl

=1

2

∫L

(Nu′1 + T2(u′2 − r3) + T3(u′3 + r2) +Mtr′1 +Mf2r

′2 +Mf3r

′3) dl

(1.12)

1.5 Élasticité

La RdM peut s’appliquer à beaucoup de matériaux constitutifs différents. Géné-ralement, en première approximation les matériaux sont supposés homogènes élastiqueslinéaires isotropes (HELI). La loi de comportement permet de relier les contraintes auxdéformations, dernier élément nécessaire à la résolution de tout problème en mécanique.Le cadre de la statique sera adopté ici (∂σij(

−→x ,t)∂xj

+ fi(−→x , t) = 0).

1.5.1 Loi de comportement

La connaissance des déformations en tout point M du milieu curviligne permetd’obtenir les contraintes en utilisant la loi de comportement. Nous nous sommes limitésau cas d’un comportement élastique linéaire isotrope. En notant λ et µ les coefficients deLamé du matériau constituant la poutre, on a donc :

σ11 = µ(3λ+2µ)λ+µ

ε11 = Eε11 = E(u′1 + r′2x3 − r′3x2)

σ12 = 2µε12 = G(u′2 − r′1x3 − r3)

σ13 = 2µε13 = G(u′3 + r′1x2 + r2)

(1.13)

Dans cette équation, E désigne le module d’Young du matériau et G le module de ci-saillement associé. À partir de ces contraintes, il est possible de calculer les éléments deréduction des efforts appliqués en un point G quelconque de la ligne L sous la forme :

−→R (x1) =

∫S

σ11ds = ESu′1 = ESe1∫S

σ12ds = GS(u′2 − r3) = GSe2∫S

σ13ds = GS(u′3 + r2) = GSe3

−→M(x1) =

∫S

(x2σ13 − x3σ12)ds = GI0r′1 = GI0κ1∫

S

x3σ11ds = E(I2r′2 − I23r

′3) = E(I2κ2 − I23κ3)∫

S

−x2σ11ds = E(−I23r′2 + I3r

′3) = E(I3κ3 − I23κ2)

Théorie des poutres 19

On constate alors que le torseur des efforts s’écrit relativement simplement enfonction du torseur des déformations sous la forme :

N

T2

T3

Mt

Mf2

Mf3

=

ES 0 0 0 0 0

0 GS 0 0 0 0

0 0 GS 0 0 0

0 0 0 GI0 0 0

0 0 0 0 EI2 −EI23

0 0 0 0 −EI23 EI3

.

e1

e2

e3

κ1

κ2

κ3

(1.14)

Cette loi de comportement peut se réécrire en utilisant les sous-matrices 3 × 3

ci-dessous (Eq. 1.15). On constate que pour les poutres homogènes considérées ici lescomportements en membrane et en flexion sont totalement indépendants ([B] = [0]).Dans le cas de poutres constituées de matériaux composites par exemple, dont les axesd’orthotropie ne sont pas confondus avec les axes des sections, ces comportements ne sontpas indépendants. :

−→R (x1)−→M(x1)

=

[[A] [B]

[B] [D]

−→e (x1)−→κ (x1)

⇔ τ(x1) = [L] ε(x1) (1.15)

Remarque : en cisaillement l’approximation faite sur la distribution des déformations,supposées constantes dans la section, conduit à surestimer la rigidité. Par des considé-rations énergétiques, on introduit un coefficient correcteur, dit coefficient de correctionen cisaillement qui permet de prendre en compte la répartition parabolique (contraintenulle sur les faces et non-nulle au centre de la section) réelle à l’aide d’une répartitionconstante sur la section. Ce coefficient est noté généralement kα, avec α = 2, 3, il est égalà 5

6pour une section rectangulaire (voir §5.3.3). La loi de comportement en cisaillement

s’écrit donc :Tα(x1) = kαGS eα (α = 2, 3)

1.5.2 Conditions aux limites

Nous avons vu que, selon l’hypothèse de Navier (sections droites), chaque pointdu milieu curviligne (sur la fibre moyenne) possède six degrés de libertés. Ces degrés deliberté servent à représenter :

— le déplacement de la fibre moyenne (vecteur déplacement −→u ),— la rotation de la section droite (vecteur rotation −→r ).

De même, selon l’hypothèse de Saint-Venant (efforts concentrés), les efforts internes (decohésion) dans un milieu curviligne sont représentés par deux vecteurs, et donc six com-posantes, qui sont :

— les forces de cohésion de la fibre moyenne (vecteur force−→R ),

Théorie des poutres 20

— les moments de cohésion de la fibre moyenne (vecteur moment−→M).

Les conditions aux limites sur une poutre porteront donc sur ces six degrés deliberté et ces six efforts de cohésion. La frontière ∂Ω (2D) sur laquelle s’appliquent cesconditions dans un milieu 3D (Figure 1.1), sera donc remplacée par des abscisses surla fibre moyenne (1D) pour les poutres. En chacun de ces abscisses, six informationsdoivent apparaître explicitement. Le nombre de degrés de liberté et d’efforts connus, etleur combinaison, dépend essentiellement du type de liaison rencontré. Les conditions auxlimites en déplacements les plus communes sont les suivantes :

— l’encastrement : si une poutre est encastrée à l’une de ses extrémités, alors ence point on a −→u = −→r =

−→0 , et les efforts résultants

−→R et

−→M sont inconnus.

— la rotule : une rotule empêche tout déplacement en ce point, −→u =−→0 , mais

laisse les rotations libres. En contre-partie, les moments transmissibles en cepoint sont nuls, soit

−→M =

−→0 , tandis que les forces de réaction sont inconnues.

— l’appui simple : un appui simple empêche un déplacement dans une direction,par exemple u3 = 0, et laisse libre les autres degrés de liberté. Le seul effort decohésion non nul sera alors T3.

Ces conditions aux limites sont d’une grande importance pour l’intégration deséquations d’équilibre (obtention des efforts internes) et de la cinématique (obtention desdéplacements). Pour déterminer les conditions aux limites en efforts, il est important dese fixer un sens de parcours de la ligne moyenne L. En effet, le torseur des efforts τ(x1)est lié au vecteur contrainte −→tM , et donc à la normale à la section S. Comme la normale àconsidérer est toujours sortante, le torseur des efforts sera affecté d’un signe opposé entreles deux côtés de la poutre. En général, la convention de signe suivante est adoptée (voirpar exemple l’expression des termes de bords dans le principe des travaux virtuels - Eq.1.20-b). En parcourant la ligne L de la gauche vers la droite :

— le torseur des efforts est affecté d’un signe + à droite du segment considéré surla poutre (la normale sortante de S est −→x 1),

— le torseur des efforts est affecté d’un signe − à gauche du segment considérésur la poutre (la normale sortante de S est −−→x 1).

1.6 Méthode de résolution

La résolution du problème de poutre peut avoir des buts différents, ce qui condi-tionne en grande partie la stratégie de résolution à adopter. On peut par exemple sou-haiter connaître des informations ponctuelles, comme un déplacement maximum ou lescontraintes en des points précis. Dans ce cas, la résolution complète du problème n’estpas toujours nécessaire, et des méthodes seront présentées ultérieurement pour obtenirces informations ponctuelles. Dans la plupart des cas par contre, le lieu des déplacementsou contraintes maximales n’est pas connu à priori, ce qui nécessite de caractériser com-plètement les champs de déplacements et contraintes solutions.

Théorie des poutres 21

Il faut noter dés à présent que l’équilibre extérieur de la poutre étudiée, vis-à-visdes sollicitations et des conditions aux limites cinématiques imposées, peut être vérifiépar un bilan des forces extérieurs, sans nécessité de connaître les efforts de cohésion ouefforts internes qui règnent à l’intérieur de la poutre. À l’opposé, dans l’optique d’undimensionnement nous chercherons à connaître ces efforts de cohésion, définissant lescontraintes dans les sections. Dans ce cas, les efforts extérieurs de réaction, résultantdes conditions cinématiques imposées, seront inutiles pour vérifier l’équilibre intérieuret pourront être connus a posteriori. Par contre les développements pourront devenirrapidement lourds. Le point clef de la résolution des problèmes de RdM passe de toutemanière par la connaissance de ces efforts internes à la poutre. La stratégie de résolutionpermettra de connaître ces efforts avec plus ou moins de développements, et sera souventla combinaison de l’équilibre extérieur et de l’équilibre intérieur de la poutre.

Pour le moment, la recherche des efforts intérieurs, en vue de dimensionner lespoutres, sera notre objectif unique. Dans ce cas, la résolution du problème peut se basersur la connaissance des équations d’équilibre intérieur de tronçons de poutre représenta-tifs. Nous nous proposons dans cette partie d’établir ces équations dans le cadre le plusgénéral possible, et de les utiliser dans le chapitre suivant pour résoudre les problèmes depoutre. L’identification des efforts internes par transport des efforts extérieurs est égale-ment présentée rapidement.

1.6.1 Calcul des efforts internes - Équations d’équilibre

Dans le cas général, la résolution du problème passe par la détermination desefforts internes. La méthode la plus rigoureuse pour déterminer ces efforts est similaireà la résolution d’un problème de MMC : intégration des équations d’équilibre en veillantà avoir autant de conditions aux limites que nécessaire. Pour des problèmes simples, telsque ceux introduits dans le chapitre suivant consacré à la théorie des poutres à planmoyen, ces équations peuvent se dériver de l’équilibre de tronçons de poutres de longueurélémentaire. Pour une approche générale, un des moyens les plus systématiques pourparvenir à exprimer ces équations d’équilibre et les conditions aux limites correspondantesconsiste à utiliser le Principe des puissances virtuelles ou PPV.

On rappelle que le PPV (Eq. 1.16) exprime l’équilibre, c’est à dire l’égalité entre lapuissance virtuelle développée par les efforts intérieurs P∗int(

−→u∗) et la puissance virtuelle

développée par les efforts extérieurs P∗ext(−→u∗) dans un champ de déplacement virtuel quel-

conque−→u∗. Ainsi, il y équivalence entre le PPV et l’expression des équations d’équilibre

et des conditions aux limites statiques associées. Les conditions aux limites cinématiquessont quant à elles incluses dans le PPV si le champs virtuel est CA. Dans notre cas, ondéfinit un champ de déplacements virtuel −→u ∗M , qui se traduit par un torseur de déplace-ment virtuel U∗(x1) d’éléments de réduction −→u ∗(x1) un déplacement virtuel, et −→r ∗(x1)

une rotation virtuelle sur la fibre moyenne L. Ce déplacement virtuel produit un champ

Théorie des poutres 22

de déformations virtuel ε∗M

dans chaque section S (Figure 1.11).

Figure 1.11: Segment d’une poutre où l’on applique le principe des travaux virtuels : passagedu solide 3D à la description de type poutre.

On étudie ici les efforts internes à la poutre, c’est-à-dire les efforts de cohésion dansun tronçon de poutre libre de tout chargement extérieur. On verra plus tard, que chaqueeffort ou déplacement imposé nécessite de découper notre poutre en autant de tronçonslibres de sollicitations extérieures. On note −→t dM le vecteur contrainte qui règne sur lessections terminales, et qui représente l’action des tronçons voisins sur le tronçon isolé.Toutefois, ce vecteur contrainte peut tout aussi bien être imposé par l’extérieur si l’unedes surfaces extrémités S1 et S2 est une surface terminale de la poutre. Pour ce tronçonde poutre, comme seules ces surfaces extrémités S1 et S2 sont soumises à un chargementextérieur, l’intégration du travail virtuel des efforts extérieurs sur la frontière du volumeV se traduit par une intégrale sur la surface S aux points extrémités du segment de Lconsidéré. On remarque que sur S1 (Figure 1.11), la normale sortante à la section estforcément opposée au sens de parcours de la fibre moyenne (vecteur −−→x 1). Cela donnel’expression suivante du principe des travaux virtuels :

Théorie des poutres 23

−∫V

σM

: ε∗Mdv︸ ︷︷ ︸ +

∫V

−→f v.−→u ∗Mdv +

(∫S2

−→t dM .−→u ∗Mds−

∫S1

−→t dM .−→u ∗Mds

)︸ ︷︷ ︸ = 0,∀−→u∗

P∗int(−→u∗) + P∗ext(

−→u∗) = 0,∀−→u∗

(1.16)

Contribution des efforts extérieurs

Dans cette équation 1.16, −→t dM est le vecteur contrainte appliqué sur la section Sconsidérée (avec une normale sortante). Les deux derniers termes de la puissance virtuelledes efforts extérieurs peuvent donc être calculés assez simplement en remplaçant le champvirtuel −→u ∗M par la cinématique issue de l’hypothèse de Navier (torseur des déplacementsvirtuels U∗(x1)). On obtient pour une section St quelconque (soit S1, soit S2), au signenégatif prés pour S1 :∫

St

−→t dM .−→u ∗Mds =

∫St

−→t dM .(

−→u ∗ +−→r ∗ ∧−−→GM)ds

= −→u ∗.∫St

−→t dMds+−→r ∗.

∫St

−−→GM ∧ −→t dMds

=−→R d.−→u ∗ +

−→Md.−→r ∗

=Fd. U∗

(1.17)

De même, l’intégrale sur V des forces de volume−→f v devient :∫

S(x1)

−→f v.−→u ∗Mdv =

∫S

−→f v.(−→u ∗ +−→r ∗ ∧

−−→GM)ds

= −→u ∗.∫S

−→f vds+−→r ∗.

∫S

−−→GM ∧

−→f vds

= −→p (−→x 1).−→u ∗(−→x 1) +−→c (−→x 1).−→r ∗(−→x 1))

= Fv . U∗

(1.18)

Les vecteur −→p (−→x 1) et −→c (−→x 1) ainsi introduits, éléments de réduction du torseur des effortslinéiques, représentent respectivement :

— une force par unité de longueur répartie sur la fibre moyenne (pour −→p ),— un couple par unité de longueur réparti sur la fibre moyenne (pour −→c ).

Remarque : En toute rigueur, des forces réparties peuvent s’appliquer sur les faces dela poutre (cf Figure 1.11). La contribution de ces efforts peut être calculée de la même

Théorie des poutres 24

façon que pour les forces de volume ci-dessus :∫∂S(x1)

−→f s.−→u ∗Mds =

∫∂S

−→f s.(−→u ∗ +−→r ∗ ∧

−−→GM)dΣ

= −→u ∗.∫∂S

−→f s dΣ +−→r ∗.

∫∂S

−−→GM ∧

−→f s dΣ

Toutefois, la présence de ces efforts est extrêmement rare compte tenu des hypothèses quiconduisent à considérer une structure comme une poutre. Nous négligerons les contribu-tions correspondantes dans la suite des calculs qui viendraient simplement s’ajouter auxefforts extérieurs répartis −→p et −→c définis ci-dessus.

Contribution des efforts intérieurs

En utilisant la même méthode que pour l’équation 1.11 (calcul de l’énergie dedéformation), puis la définition du torseur des déplacements, puis enfin une intégrationpar parties, le premier terme de l’expression à annuler dans le principe des travaux virtuelss’écrit de la façon suivante :

∫V

σM

: ε∗Mdv =

∫L

(−→R (x1).−→e ∗(x1) +

−→M(x1).−→κ ∗(x1))dl

=

∫L

R1u∗′1 +R2(u∗

′2 − r∗3) +R3(u∗

′3 + r∗2)

+M1r∗′1 +M2r

∗′2 +M3r

∗′3

dl

↓ Théorème de la divergence∫L

x′ydl = −∫L

xy′dl + [xy]l2l1

=

∫L

−R′1u∗1 −R′2u∗2 −R′3u∗3−M ′1r∗1 − (M ′

2 −R3)r∗2 − (M ′3 +R2)r∗3

dl

+−→R (l2).−→u ∗(l2)−

−→R (l1).−→u ∗(l1)

+−→M(l2).−→r ∗(l2)−

−→M(l1).−→r ∗(l1)

= −∫ l2

l1

(−→R ′.−→u ∗ + (

−→M ′ +−→x 1 ∧

−→R ).−→r ∗)dl

+−→R (l2).−→u ∗(l2)−

−→R (l1).−→u ∗(l1)

+−→M(l2).−→r ∗(l2)−

−→M(l1).−→r ∗(l1)

= −∫ l2

l1

d

dx1

τ . U∗ dl + [τ . U∗]l2l1

(1.19)

Théorie des poutres 25

On montre en effet que l’expression de la dérivée d’un torseur, et notamment du torseurdes efforts internes, s’écrit au centre de gravité de la section G (Eq. 7.3 page 179) :

d

dx1

τ(x1)(G) =

−→R′(x1)

−→M ′(x1) +−→x1 ∧

−→R (x1)

(G)

Équations d’équilibre d’un tronçon de poutre

En utilisant l’ensemble de ces résultats (Eq 1.19= Eq 1.17+Eq1.18+Eq??), le prin-cipe des travaux virtuels s’écrit simplement de la façon suivante (Eqs 1.20) sur tout seg-ment de la fibre moyenne ne contenant pas d’effort ponctuel :

∀(l1, l2) ∈ L, ∀(−→u ∗,−→r ∗)∫ l2

l1

((−→R ′ +−→p ).−→u ∗ + (

−→M ′ +−→x 1 ∧

−→R +−→c ).−→r ∗

)dl (1.20a)

+[(−→R d.−→u ∗ +

−→Md.−→r ∗

)−(−→R.−→u ∗ +

−→M.−→r ∗

)]l2l1

= 0 (1.20b)

ou en écriture torsorielle :

∀(l1, l2) ∈ L, ∀ U∗ ,

∫ l2

l1

(d

dx1

τ+ Fv). U∗ dl +

[(Fd− τ

). U∗

]l2l1

= 0

Cette équation doit être vérifiée sur tout segment, et pour tout champ de déplacementvirtuel, i.e. pour tout torseur U∗. Sachant que l’intégrale ne peut être nulle que si laquantité intégrée est nulle si elle est continue (voir Annexes- Chapitre 7, §7.2.2 page 182),on choisit le champ virtuel nul au bord et non-nul à l’intérieur de la poutre. De l’équation(1.20a) on déduit les équations d’équilibre des milieux curvilignes (Eq. 4.13), à comparerà l’équilibre des milieux continus (

−→divσ(−→x )+

−→f (−→x ) =

−→0 ). C’est à partir de ces équations

que tout problème de poutre peut être résolu de manière rigoureuse :

Équations d’équilibre intérieur des poutres

d

dx1

τ+ Fv = 0 ⇔

−→R ′(x1) +−→p (x1) =

−→0

−→M ′(x1) +−→x 1 ∧

−→R (x1) +−→c (x1) =

−→0

(1.21)

Théorie des poutres 26

Les équations d’équilibre sont deux équations vectorielles. Elles conduisent à sixéquations différentielles scalaires qui traduisent l’équilibre mécanique du milieu unidimen-sionnel. Les forces volumiques sont représentées par les vecteurs −→p (forces réparties surle segment) et −→c (couples répartis sur le segment). L’intégration de ces équations dif-férentielles nécessite six conditions aux limites. Ces conditions sont obtenues aux pointsd’abscisse l1 et l2, extrémités du segment considéré, à partir de l’expression des termesde bord du PPV (Eq. 1.20b) en choisissant un champ de déplacement virtuel nul à l’inté-rieur de la poutre et non-nul aux bords. Ces équations (Eq. 1.22) traduisent simplementle fait que les efforts internes doivent être égaux aux efforts imposés aux même endroits(σ(−→xF ) · −→n =

−→t d(−→xF ) en MMC) :

τ(li)=Fd

(li)(1.22)

En complément de ces conditions aux limites, si un torseur d’efforts F i(Gi), d’éléments

de réduction Ri(Gi) et M i(Gi), est imposé sur la section Si du tronçon considéré (Figure1.12), une équation des discontinuités apparaît. Cette équation peut s’exprimer à l’aidedu PPV, modifié par la contribution de ces efforts : [| τ |](xi) le saut des efforts internesdans la puissance virtuelle des efforts internes, et F i(xi)

dans la puissance virtuelle desefforts imposés. On n’a plus alors simplement égalité entre les efforts internes et les effortsimposés, mais ces efforts viennent se superposer aux efforts extérieurs. Cette superpositiondonne lieu à un saut des efforts intérieurs qui peut s’exprimer en considérant 2 sectionsinfiniment proches. Ce saut s’écrit, en prenant en compte le sens de parcours de la poutre :[| τ |](xi) =

τ(x+

i )−τ(x−i )

. Finalement cette équation de discontinuité s’écrit :

[| τ |](xi) =τ(x+

i )−τ(x−i )

= −

F i

(xi)(1.23)

Figure 1.12: Torseur d’efforts extérieurs appliqué sur une section Si du tronçon étudié.

On notera que les équations d’équilibre au bord de la poutre (Eq. 1.22) se déduisentde cette condition (Eq. 1.23) en écrivant que

τ(l−1 )

etτ(l+2 )

sont nuls, soit

τ(l+1 )

=

−F1(x1) etτ(l−2 )

= F2(x2).

Théorie des poutres 27

Identification des efforts internes par transport des efforts extérieurs

Les efforts internes peuvent être identifiés rapidement, en recourant à l’équilibreextérieur de la poutre. En effet, chaque tronçon de la poutre isolé doit être en équilibresous l’action, d’une part des efforts de cohésion, et d’autre part des efforts extérieursimposés (Figure 4.20). Il suffit donc de procéder par la pensée à des coupes successivesle long de l’abscisse curviligne, et de vérifier l’équilibre de ces tronçons pour identifier lesefforts internes en tout point de l’abscisse.

Figure 1.13: Identification des efforts internes qui règnent dans une section située en A

par transport des efforts extérieurs à cet abscisse.

Considérons un tronçon de poutre en équilibre sous l’action d’un torseur d’actionsterminales en li dont les éléments de réduction sont définis en ce point :

F d(li)

(li)

(Figure 4.20). Effectuons une coupure imaginaire de ce tronçon en un point A de l’abscissecurviligne. La section située en A est donc en équilibre sous l’action d’une part des actionsextérieures terminales s’exerçant en li, et d’autre part sous l’action des efforts de cohésionqui règnent en A (τ(A)) et qui représentent l’action de la section voisine située enx1 = A− (par définition des effort internes, efforts de la section de GAUCHE sur lasection de DROITE). Rappelons que la normale sortante est dans ce cas −−→x1. Finalement,l’équilibre s’écrit simplement, en prenant soin de transporter en A le torseur des actionsextérieures :

−τ(A) +F d

(A)= 0

⇒ τ(A) =F d

(A)

(1.24)

Les efforts intérieurs sont rapidement identifiés par transport des efforts extérieurs s’exer-çant sur le tronçon isolé. Cette identification permet de traiter rapidement les problèmessimples, mais rappelons que la vérification de l’équilibre extérieur est un préalable incon-tournable pour cette identification. Cet équilibre peut poser des problèmes, notammentdans le cas des problèmes hyperstatiques pour lesquels une surabondance d’inconnues sta-

Théorie des poutres 28

tiques ne peut être levée sans recourir à des méthodes complémentaires telles que cellesprésentées dans le chapitre 3 de ce document.

1.6.2 Calcul des déplacements et des rotations

La connaissance du torseur des efforts intérieurs τ(x1)(G) sur le segment per-met, par la loi de comportement, d’obtenir les éléments de réduction (déformations demembrane −→e (x1) et de courbure −→κ (x1)) du torseur des déformations dans la poutre. Cetorseur est relié au torseur des déplacements (vecteur déplacement −→u (x1) et vecteur ro-tation −→r (x1)) par les relations introduites précédemment (Eq. 1.7). L’intégration des sixéquations différentielles ainsi obtenues permet de connaître le torseur des déplacementsen tout point de la fibre moyenne de la poutre, et donc le champ de déplacement parla cinématique introduite. Lors de l’intégration, il est nécessaire d’utiliser six conditionsaux limites cinématiques, qui s’ajoutent aux six conditions aux limites en efforts utiliséesprécédemment (Eq. 1.22). Globalement, sur chaque segment considéré, les conditions auxlimites (aux points d’abscisse l1 et l2) que l’on doit appliquer sont au nombre de douze.Ceci correspond aux six degrés de liberté de chaque côté du segment. En chaque pointd’abscisse l1 et l2, on doit donc connaître :

(u1 ou N) ET (u2 ou T2) ET (u3 ou T3)

ET (r1 ou Mt) ET (r2 ou Mf2) ET (r3 ou Mf3)

En pratique, il arrive que certaines conditions aux limites proviennent de considé-rations de symétrie. Dans ce cas, les conditions portent sur la continuité des déplacementset/ou de leurs dérivées . Par exemple, en flexion trois points sur une poutre à plan moyen(voir exercice Flexion 2), par des considérations physiques on écrira la continuité desdéplacements (−→u ), des pentes (−→u ′) et des rotations (−→r ) au centre.

1.6.3 Calcul des états de contraintes

Il est souvent essentiel de pouvoir connaître les contraintes qui règnent dans les sec-tions, par exemple pour vérifier que les limites à rupture ou la limite d’élasticité n’ont pasété dépassées. Comme la théorie des poutres est basée sur l’intégration de ces contraintessur les section (Eqs. 1.9-1.10), les contraintes locales doivent être déduites des informationsmoyennes.

Pour ce faire, on peut utiliser d’une part la loi de comportement de la structure,notée [L], qui relie le torseur des efforts internes au torseur des déformations (Eq. 1.14),et d’autre part la loi de comportement matériau qui relie les contraintes aux déformationslocales (Eq. 1.13). En effet, les déformations qui règnent dans la section sont calculées àpartir des éléments de réduction du torseur des déformations connus au centre de gravité

Théorie des poutres 29

de la section. On peut donc recalculer les déformations en tout point de la section et endéduire les contraintes correspondantes.

Contrainte normale

La contrainte normale est directement reliée à la déformation normale (Eq. 1.13)par le module d’Young dans le cas d’un matériau isotrope. Par ailleurs l’effort normalest relié d’une part à la déformation de membrane (e1) et d’autre part aux courbures deflexion (κ2 et κ3). En résumé, on a :

σ11(−→x ) = Eε11 = Eu′1︸︷︷︸ + E(r′2x3 − r′3x2)︸ ︷︷ ︸

= σm11(−→x ) + σf11(−→x )et

N(x1) = ESu′1(x1)

Mf2(x1) = EI2r′2(x1)− EI23r

′3(x1)

Mf3(x1) = −EI23r′2(x1) + EI3r

′3(x1)

Contribution de la déformation de membrane Pour le terme de membrane, l’expression dela contrainte est évidente, et recoupe le résultat classique où la contrainte est directementégale à l’effort appliqué rapporté à la surface de la section sollicitée :

u′(x1) =σm11(−→x )

E=

N(x1)

ES(x1)⇒ σm11(M,x1) = σm11(x1) =

N(x1)

S(x1)

Contribution de la déformation de flexion Cette part de la contrainte normale est évaluéeassez simplement dans le cas où les moments produits sont nuls, c’est-à-dire pour dessections à plan de symétrie et des efforts appliqués dans ce plan (pour une expression pluscompl !te, voir Eq. 2.6 page 51)). Dans ce cas :

σf11(x1,M) =Mf2(x1)

I2(x1)x3 −

Mf3(x1)

I3(x1)x2

Pour des sections non-symétriques ou des efforts appliqués hors de ce plan desymétrie, on a alors de la flexion déviée, introduite au §2.2.3 pour les poutres droites.

Expression complète de la contrainte normale Finalement la contrainte normale est lasomme des contributions des termes de membrane et de flexion (Figure 1.14), et s’écritde manière générale :

σ11(x1,M) =N(x1)

S(x1)+Mf2(x1)

I2(x1)x3 −

Mf3(x1)

I3(x1)x2

Dans les cas courants, la contrainte est maximale sur les fibres extrêmes des sections, i.e.en x2 = ±L2

2et x3 = ±L3

2. La ’rigidité de tension’ est directement liée à la surface de la

section transverse, tandis que la ’rigidité de flexion’ dépend des moments quadratiquesde la section, c’est-à-dire de la forme de la section. Ce dernier point est abordé en détailsdans les exercices sur la flexion simple.

Théorie des poutres 30

Figure 1.14: Représentation plane de la contrainte normale : contributions de (a) mem-brane et (b) flexion.

Contraintes de cisaillements

Comme dans le cas de la contrainte normale, les contraintes de cisaillements dé-pendent de termes de membrane (e2 et e3) et de courbure (κ1) :

σ12(−→x ) = Gε12 = G(u′2 − r3)︸ ︷︷ ︸ + Gr′1x3︸ ︷︷ ︸= σm12(−→x ) + σt12(−→x )

σ13(−→x ) = Gε13 = G(u′3 + r2)︸ ︷︷ ︸ + Gr′1x2︸ ︷︷ ︸= σm13(−→x ) + σt13(−→x )

et

T2(x1) = GS(u′2(x1)− r3(x1))

T3(x1) = GS(u′3(x1) + r2(x1))

Mt(x1) = GI0r′1(x1)

(1.25)

Si les termes de membrane s’expriment simplement, par contre la contribution descontraintes de cisaillement dans la torsion ne s’exprime simplement que dans le cas desections circulaires où les contributions de σ12 et σ13 sont identiques (notée σ1r(x1, r)).Au final, les contraintes de cisaillements sont :

σm12(x1) =T2(x1)

S(x1)σm13(x1) =

T3(x1)

S(x1)

τ(x1, r) = σ1r(x1, r) = f (σt12(x1, r), σt13(x1, r))(Rc)

=Mt(x1)

I0(x1)r

avec r la position radiale du point M dans un système de coordonnée cylindrique (Rc)

attaché à la section circulaire centrée en G, et τ(r, x1) la contrainte de cisaillement dansce repère. La contrainte due à la torsion seule sera établie plus précisément dans le casd’une poutre droite soumise à un moment de torsion terminal (58). On remarque quepour la partie membrane des contraintes de cisaillement, seule la section transverse estimportante, tandis que pour la torsion le moment quadratique polaire représente la rigidité’géométrique’ de la section.

Théorie des poutres 31

1.7 Bilan de la théorie des poutres

Le dimensionnement des poutres passe généralement par la résolution des équationsd’équilibre intérieur (Eq. 1.27). Pour intégrer ces équations différentielles en efforts, ondispose des conditions aux limites cinématiques (Eq. 1.26), utilisables via la loi de compor-tement (Eq. 1.29), ainsi que des conditions d’équilibre au bord (Eq. 1.28). Les équationsdes discontinuités sont également nécessaires si des efforts sont appliqués ailleurs qu’auxextrémités de la poutre (Eq. 1.28). Enfin, lorsque les déplacements sont connus les défor-mations peuvent être calculées (Eq. 1.30) et les contraintes évaluées en tout point à partirdes efforts internes (Eq. 1.31).

Théorie des poutres 32

Bilan de la théorie des poutres

1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.

U(li)=Ud

(li),∀ li ∈ l1, l2 (1.26)

2. Équilibre intérieur

d

dx1

τ+Fv = 0 ⇔

−→R ′(x1) +−→p (x1) =

−→0

−→M ′(x1) +−→x 1 ∧

−→R (x1) +−→c (x1) =

−→0

,∀x1 ∈ [0, L]

(1.27)

3. Équilibre au bord et discontinuités

τ(li)=Fd

(li),∀ li ∈ l1, l2

[| τ |](xi) =τ(x+

i )−τ(x−i )

= −F i(xi)

,∀ xi ∈ [0, L](1.28)

4. Loi de comportement −→R (x1)−→M(x1)

=

[[A] [B]

[B] [D]

−→e (x1)−→κ (x1)

⇔ τ(x1) = [L] ε(x1) (1.29)

5. Relations utiles :— Relations déplacements/déformations −→r ′(x1) = −→κ (x1)

−→u ′(x1) +−→x 1 ∧ −→r (x1) = −→e (x1)(1.30)

— Expressions des contraintes en fonction des efforts internes

tension : σm11(x1) =N(x1)

S(x1)

flexion : σf11(x1,M) =Mf2(x1)

I2(x1)x3 −

Mf3(x1)

I3(x1)x2

cisaillement : σm1α(x1) =Tα(x1)

S(x1)(α = 2, 3)

torsion : τ(x1, r) = f (σt1α(r, x1))(Rc)=Mt(x1)

I0(x1)r

(1.31)

2.

Théorie des poutres droites

Sommaire2.1 Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan . . . . . . . 35

2.1.1 Simplifications dans le cas des poutres à plan moyen chargéesdans ce plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

2.1.2 Interprétation des grandeurs cinématiques et statiques . . . . . 36

2.1.3 Prise en compte du cisaillement transverse . . . . . . . . . . . . 37

2.1.4 Formulation des problèmes de flexion-tension . . . . . . . . . . 38

2.2 Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

2.2.1 Tension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

2.2.2 Flexion simple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

2.2.3 Flexion déviée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

2.2.4 Sollicitation composée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

2.2.5 Torsion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

2.3 Bilan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

34

Théorie des poutres droites 35

Généralement, les poutres présentent des sections et des courbes moyennes dont lesparticularités peuvent être utilisées pour réduire la complexité des problèmes traités. Dansla plupart des cas en effet, les sections présentent des symétries, c’est la cas en particulierdes poutres à plans moyens. De plus, les poutres droites sont les plus largement utilisées.

2.1 Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan

Dans le cas des poutres courbes, la rotation du repère de la section par rapport aurepère de référence doit être pris en compte, par exemple en utilisant un repère de Frénet.Les poutres droites ont la particularité de posséder une ligne moyenne rectiligne. Dans cecas les axes du repère de référence et du repère attaché aux sections sont confondus, et lerestent dans le cadre HPP. On notera dorénavant ce repère R(O,−→x ,−→y ,−→z ).

Comme il a été défini au début de ce document, les poutres à plans moyens sontdes poutres dont la section présente un plan de symétrie (Figure 2.1). Généralement cespoutres sont chargées dans le plan de symétrie de la section, on parle alors de poutres àplan moyen chargées dans leur plan. Des sections à plan moyen plus particulières peuventêtre utilisées, il s’agit des profils creux ou de profils ouverts (Figure 2.1). Dans le cas desprofils ne possédant pas de plan de symétrie par rapport à −→y , le centre de gravité n’estplus confondu avec le centre géométrique, il y a donc apparition de flexion déviée. De plusdans le cas des profils ouverts, des théories spécifiques doivent être utilisées, notammentpour prendre en compte le cisaillement qui peut se développer dans les parois minces dessections. Dans cette introduction à la RdM, nous nous limiterons aux sections ferméesprésentant 2 plans de symétrie (xGy et xGz), telles que les 3 premières sections de laFigure 2.1.

Figure 2.1: Exemples de sections à plans moyens et section ouverte.

Ces hypothèses de symétrie conduisent à des problèmes beaucoup plus simples queles cas généraux présentés jusqu’alors. En effet dans ce cas, les moments produits dessections sont nuls, il n’y a donc pas de couplage entre les 2 déformations de flexion (voirEq. 1.14). On supposera de plus que le chargement s’applique dans le plan de symétrie dela section, ce qui évite notamment la prise en compte de la flexion déviée.

Théorie des poutres droites 36

2.1.1 Simplifications dans le cas des poutres à plan moyen char-gées dans ce plan

Lorsqu’une poutre à plan moyen est chargée dans son plan, les efforts internes entout point d’abscisse x (qui joue ici le rôle de l’abscisse curviligne l) sont contenus dansle plan du chargement et sont :

— une réaction−→R dans le plan xOy, donc avec deux composantes,

— un moment−→M dirigé selon Oz, donc avec une composante.

Les deux composantes de−→R sont alors notées N (effort normal) et T2 = T (effort tran-

chant), tandis que la composante non nulle de−→M est notée M3 = M (moment de flexion).

De même, les déplacements de tout point de la poutre (y compris des points situéshors de la ligne moyenne) sont représentés par :

— un vecteur déplacement de la fibre moyenne −→u dans le plan xOy,— un vecteur rotation −→r de la section selon Oz.

Les deux composantes non nulles de −→u sont notées ux = u (déplacement normal) etuy = v (flèche), tandis que la composante non nulle de −→r est notée rz = φ (rotation).Nous voyons dans ce cas que nous travaillons sur trois degrés de liberté (au lieu de six).Les équations d’équilibre (Eqs. 4.13) deviennent dans ce cas fonctions des efforts N , T ,et M , eux-même fonctions de l’abscisse x sur la poutre. Elles s’écrivent :

N ′(x) + px(x) = 0

T ′(x) + py(x) = 0

M ′(x) + T (x) + cz(x) = 0

On remarque dans ces équations que les charges et couples répartis sur la fibremoyenne de la poutre (issus des forces volumiques) se réduisent à :

— une force par unité de longueur −→p avec seulement deux composantes non nullespx et py,

— un couple par unité de longueur −→c porté par l’axe z.

Le problème à traiter dans le cas des poutres droites à plan moyen chargées dans ceplan est totalement plan, et grandement simplifié par rapport au cas des poutres courbesdans l’espace. On note que la torsion n’apparaît pas ici, c’est en effet un mécanisme quifait intervenir une rotation hors du plan de symétrie des sections (κ1(x1) = r′1(x1)). Cettesollicitation sera traitée séparément.

2.1.2 Interprétation des grandeurs cinématiques et statiques

Dans ce cas plan de la théorie des poutres, on peut donner aisément une interpré-tation physique simple des quantités telles que la rotation des sections. Les hypothèses depoutre ont conduit à poser une cinématique dans laquelle le déplacement de tout point

Théorie des poutres droites 37

M de la section s’exprime en fonction des déplacements plans du centre de gravité (u(x)

et v(x)) de la section et d’une rotation (φ(x)) de cette section (Figure 2.2).

Figure 2.2: Cinématique de poutre, sans cisaillement (Bernoulli) et avec cisaillement (Ti-moshenko).

2.1.3 Prise en compte du cisaillement transverse

Dans la cinématique sans cisaillement ou de Bernoulli, les sections sont supposéesrester normales à la ligne moyenne (φ(x) = dv(x)

dx). Dans ce cas, la connaissance du dépla-

cement de la ligne moyenne suffit, par des considérations géométriques simples, à définircomplètement les déformations de membrane et de courbure. Dans la cinématique aveccisaillement ou de Timoshenko, la rotation totale de la section (φ(x)) est indépendantede la rotation de la section due à la flexion (dv(x)

dx) . Cet effet peut-être schématisé sim-

plement en flexion pure : la flèche totale est la somme de la flèche de la poutre possédantuniquement une rigidité de flexion et de la flèche de la même poutre possédant cette fois-ciune rigidité de cisaillement uniquement (Figure 2.2). Dans cette théorie, le cisaillement(γ(x)) est donc la différence de la rotation totale (φ(x)) et de la rotation due à la flexion(dv(x)

dx). Ou vu autrement, pour une flèche donnée, le cisaillement provoque une rotation

totale moindre par rapport à la flexion seule. Ce point sera abordé plus en détails dansles applications ci-dessous. Finalement, les théories avec et sans cisaillement reposent sur

Théorie des poutres droites 38

les cinématiques suivantes :

Bernoulli - sans cisaillement Timoshenko - avec cisaillement uM(x, y) = u(x)− ydv(x)

dxvM(x, y) = v(x)

uM(x, y) = u(x)− yφ(x)

vM(x, y) = v(x)(γ(x) = dv(x)

dx− φ(x)

) (2.1)

Pour la théorie avec cisaillement, l’introduction du cisaillement nécessite de corri-ger la contribution de cette rigidité. En effet, compte-tenu de l’hypothèse de répartitionconstante du cisaillement dans l’épaisseur de la poutre (γ fonction de x seul), la réparti-tion réelle qui est parabolique (maximum au centre et condition de contraintes nulles surles bords) est légèrement surestimée. On introduit un coefficient de correction, souventnoté k, qui permet d’ajuster cette approximation. Ce coefficient est calculé à partir deconsidérations énergétiques, il est égal à 5

6pour une section prismatique (voir §5.3.3). La

loi de comportement en cisaillement s’écrit donc : T (x) = kGSγ(x)

2.1.4 Formulation des problèmes de flexion-tension

Au final, les problèmes de flexion-tension pour les poutres droites tels que repré-senté sur la Figure 2.3, sont complètement formulés grâce aux équations suivantes donnéespour la théorie avec cisaillement.

Figure 2.3: Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan : conditions aux limites enx1 et x2 et chargements répartis et concentrés en xi.

Théorie des poutres droites 39

Bilan de la théorie des poutres droites chargées dans leur plan moyen

1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.

u(xi) = ud, v(xi) = vd, φ(xi) = φd

2. Équilibre intérieurN ′(x) + px(x) = 0

T ′(x) + py(x) = 0

M ′(x) + T (x) + cz(x) = 0

3. Équilibre au bord et discontinuités

N(xj) = Nd(xj) N(x+i )−N(x−i ) = −Nd(xi)

T (xj) = T d(xj) T (x+i )− T (x−i ) = −T d(xi)

M(xj) = Md(xj) M(x+i )−M(x−i ) = −Md(xi)

4. Loi de comportement

N(x) = ESdu(x)

dx

T (x) = kGSγ(x)

M(x) = EIdφ(x)

dx

5. Relations utiles :— Relations déplacements/déformations

ε(x) = u′(x)− yφ′(x)

γ(x) = v′(x)− φ(x)

— Expressions des contraintes en fonction des efforts internes

tension : σmxx(x) =N(x)

S(x)

flexion : σfxx(x, y) = −M(x)

I(x)y

cisaillement : σxy(x) =T (x)

S(x)

En pratique, la contribution du cisaillement dans la rigidité de la poutre est souventnégligée. En effet, ce terme est très souvent d’un ordre de grandeur inférieur au terme derotation φ(x) lors du calcul de la flèche v(x). Ceci est illustré dans les second et troisième

Théorie des poutres droites 40

exemples de flexion traités ci-dessous (exercice Flexion 2 et Flexion 3 ). On remarquefinalement que, en négligeant la contribution du cisaillement, et en dérivant la dernièreéquation d’équilibre, on obtient une équation différentielle en v(x) etM(x). Cette équationest souvent utilisée pour obtenir rapidement la flèche de la poutre en fonction du momentM(x) calculé par transport des actions extérieures en un point x quelconque de l’abscisse.La méthode est appelée double intégration de la ligne élastique :

EIv(x)′′ = M(x)

2.2 Applications

Les sollicitations des poutres droites à plans moyens étudiées ici sont soit de latension ou de la flexion, ou leur combinaison. Ces 2 sollicitations, imposées dans le plande symétrie de la poutre, sont étudiées à travers des exercices. La torsion est ensuiteabordée séparément, pour des arbres cylindriques.

2.2.1 Tension

Dans le cadre de la théorie en HPP présentée jusqu’alors, dans une poutre sollicitéeen tension, seule la contrainte normale est non nulle. On sait de plus que cette contrainteest constante dans l’épaisseur de la poutre.

Tension 1 : exemple de base On considère une poutre à plan moyen de longueur lchargée dans son plan en tension par un effort normal ponctuel (vecteur Fx.−→x ) appliquéen B (Figure 2.4). On notera E le module d’Young du matériau constitutif et S la sectionde la poutre constante ici.

Figure 2.4: Poutre droite à plan moyen chargée en tension par un effort terminal normal.

Théorie des poutres droites 41

1. Résolution complète— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités

cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).— Résoudre complètement le problème

2. Résolution par transport des efforts extérieurs— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.— En déduire le torseur des déformations.— Donner le déplacement longitudinal de la poutre en tout point x, en prenant

en compte les conditions aux limites cinématiques.— Tracer le profil de la contrainte normale le long de la poutre.— Choisir une section rectangulaire de poutre, pour une largeur b fixée, telle

que la limite élastique σ0 du matériau constitutif ne soit pas dépassée.

Tension : utilisation des continuités et discontinuités On considère la mêmepoutre, mais le chargement est ici un chargement réparti d’intensité constante P quis’applique seulement sur une partie [AB] de la poutre (Figure 2.5).

Figure 2.5: Poutre droite à plan moyen soumise à un chargement réparti.

1. Résolution complète— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités

cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.

2. Résolution par transport des efforts extérieurs— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.— En déduire le torseur des déformations.— Donner le déplacement longitudinal de la poutre en tout point x.— Tracer le profil des contraintes le long de la poutre.— Quelle est la contrainte maximale dans cette poutre ?

Théorie des poutres droites 42

— Choisir une section de poutre, pour une largeur b fixée, telle que la limiteélastique σ0 du matériau constitutif ne soit pas dépassée.

2.2.2 Flexion simple

Les équations d’équilibre ont été présentées ci-dessus, il reste à expliciter lescontraintes engendrées par la flexion des poutres. En se rappelant que la cinématiques’exprime par rapport aux grandeurs mesurées au centre de la section, on en déduit quela répartition de la contrainte normale à travers l’épaisseur est linéaire.

Flexion 1 : Flexion simple d’une poutre console

Considérons la poutre représentée sur la Figure 2.6 sollicitée par une force ponc-tuelle (vecteur

−→Fy(l)) en son extrémité B (x = l). On notera E le module d’Young du

matériau,G son module de cisaillement, S la section de la poutre et I son moment d’inertiepar rapport à l’axe Oz.

Figure 2.6: Flexion simple d’une poutre à plan moyen

1. Résolution complète— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités

cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.— Tracer les profils des efforts tranchants et des moments fléchissants.

2. Résolution par transport des efforts extérieurs— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.— En déduire le torseur des déformations.— Donner la flèche et la rotation de la poutre en tout point x, en utilisant la

méthode de la double intégration, et donner leur profil.

3. Influence du cisaillement

Théorie des poutres droites 43

— Montrer que la contribution de l’effort tranchant peut être négligée dansles expressions des déplacements obtenues ci-dessus (vflex

vcis), dans le cas des

matériaux isotropes. On notera r le degrés d’anisotropie (r = EG).

— Évaluer la limite d’utilisation de la théorie de Timoshenko, pour ce pro-blème. On notera que le degrés d’anisotropie peut atteindre une valeur li-mite supérieure à 35 pour des matériaux composites isotropes transversesde type carbone/époxyde.

4. Choix d’une section en fonction de sa rigidité de flexion— Évaluer et comparer les moments quadratiques des sections (a) et (b) pré-

sentées sur la Figure 2.7.— Comparer les moments quadratiques et les masses des sections en I et sand-

wich par rapport à la section pleine en fonction de k. On considérera del’acier, et de la mousse PUR pour l’âme du sandwich, avec un rapport derigidité Ea

Ep= 5 · 10−2.

Figure 2.7: Profils de section considérés : (a) section rectangulaire pleine, (b) section enI, et (c) matériau sandwich.

Théorie des poutres droites 44

Remarques sur la rigidité en flexion des sections de type profilé et sandwich

On note Ihom le moment d’inertie de la section homogène (Figure 2.7-a) :

Ihom/G =

∫ b/2

−b/2

∫ h/2

−h/2y2dy =

2b

3

(h

2

)3

(2.2)

Pour la poutre en I (Figure 2.7-b), le moment quadratique est calculé en 2 parties. Il fauttout d’abord évaluer la contribution de la partie centrale (l’âme dans les sandwichs), puiscelle des deux peaux. Pour l’âme, le calcul est similaire à celui de la poutre homogène(Eq. 2.2), avec une largeur kb pour la section en I et b pour le sandwich. Pour les deuxpeaux (les voiles dans la section en I), on utilise soit une intégrale de bornes ayant pourorigine le centre de section, soit le théorème d’Huyghens qui permet de rapporter le calculdu moment d’inertie par rapport à la ligne moyenne d’une peau à la ligne moyenne dela poutre sandwich (Eq. 2.3). Ainsi, un terme supplémentaire apparaît dans le calcul dumoment d’inertie des peaux (des voiles). Il est constitué du produit de l’aire de la sectiontransverse des peaux par le carré de la distance entre la ligne moyenne d’une peau etcelle du sandwich. La rigidité équivalente de flexion de la poutre sandwich < EI >sand estproche de celle de la section en I, calculée en deux parties, mais ici le matériaux constitutifn’est pas le même dans toute la section de la poutre (Eq. 2.4).

II/G = Iame/G + 2Ipeau/G

=

∫ kb/2

−kb/2

∫ h/2+kh)

−(h/2−kh)

y2dy + 2

(∫ b/2

−b/2

∫ h/2

(h/2−kh)

y2dy

)

ou∫ kb/2

−kb/2

∫ (h/2+kh)

−(h/2−kh)

y2dy + 2

(∫ b/2

−b/2

∫ kh/2

−kh/2y2dy + bkh

(h− kh

2

)2)

=2kb

3

(h

2− kh

)3

+ 2

(b(kh)3

12+bkh

4(h− kh)2

)(2.3)

< EI >sand/G =

∫ b/2

−b/2

∫ h/2

−h/2E(y) y2dy = EaIame/G + 2EpIpeau/G

=2Eab

3

(h

2− kh

)3

+ 2Ep

(b(kh)3

12+bkh

4(h− kh)2

) (2.4)

Les matériaux sandwich généralement rencontrés dans les applications industrielles pos-sèdent les caractéristiques suivantes (Eq. 2.5) (hp est l’épaisseur des peaux et ha estl’épaisseur de l’âme).

0, 02 <hpha

< 0, 1

0, 001 <EaEp

< 0, 02

(2.5)

Théorie des poutres droites 45

Figure 2.8: Effet sandwich : rigidité et masse du sandwich d’épaisseur ha + 2hp rapportéà la section d’épaisseur 2hp (Epeau = 103Eame et ρame = 0, 09ρpeau).

Ainsi, en considérant ces ordres de grandeurs pour les rapports des épaisseurs etdes modules, on montre que le troisième terme de la relation (2.4) est prépondérant devantles deux autres. En effet, si on note respectivement < EI >i

s (i = 1..3) les trois termescomposant la rigidité équivalente de flexion de la poutre sandwich (Eq. 2.4), les rapportssuivants peuvent être établis :

< EI >1s

< EI >3s

' Eaha6Ephp

<1

6

< EI >2s

< EI >3s

' kh2

3h2a

<1

300

La rigidité de flexion propre des peaux rapportée à la ligne moyenne du sandwichconstitue donc le terme prépondérant de l’expression de la rigidité globale de flexion(< EI >sand). C’est donc l’assemblage des deux constituants qui confère à l’ensemble unerigidité équivalente conséquente en flexion, c’est l’effet sandwich. Pour illustrer cet effet,on calcul la rigidité du sandwich formé par des peaux d’épaisseur hp séparées par une âmed’une épaisseur ha. On vérifie aisément que la rigidité du sandwich est beaucoup plus élevéeque la rigidité de la section constituée des mêmes peaux seules, formant un matériau massifd’épaisseur 2hp (Figure 2.8), et ceci pour une masse sensiblement identique. La rigiditéde membrane est, quant à elle, très peu modifiée. On voit ici tout l’intérêt de l’utilisationde ce type de section, notamment dans le secteur des transports où l’allégement est unsouci constant.

Plus généralement, on peut "gagner de la matière" en utilisant ce type de section,

Théorie des poutres droites 46

ou de manière équivalente des profils creux, en utilisant les matériaux les plus rigides leplus loin du centre de flexion de la section. L’intérêt de ces sections peut être mis enévidence en représentant la rigidité de flexion et la masse de la section en I (Figure 2.9-a)et de la section sandwich (Figure 2.9-b), rapportées à la rigidité de flexion et la massede la section de même dimension mais homogène. Sur la Figure 2.9 (k est le rapport desépaisseurs de peaux par rapport à l’épaisseur totale dans les sections en I (Figure 2.7-b) etsandwich (Figure 2.7-c)) on peut voir que pour un gain de masse appréciable, on obtientdes rigidités très proches de celles de la section homogène.

Théorie des poutres droites 47

(a)

(b)

Figure 2.9: Rigidités et masse des sections (a) en I, et (b) matériau sandwich (Epeau =

103Eame et ρame = 0, 09ρpeau) .

Théorie des poutres droites 48

Flexion 2 : Flexion trois points

La Figure 2.10 représente une poutre à plan moyen sollicitée en flexion trois pointsdans son plan par une force

−→Fy. Par symétrie, nous allons utiliser le segment 0 ≤ x ≤ l/2

pour traiter le problème, en posant des conditions de symétrie en x = l/2. Du fait decette symétrie, la sollicitation ponctuelle

−→Fy est diminuée de moitié. Une théorie avec

cisaillement sera utilisée pour résoudre ce problème.

Figure 2.10: Flexion trois points d’une poutre à plan moyen.

1. Résolution complète— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités

cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.

Donner la flèche et la rotation maximale ainsi que les abscisses de cesmaxima.

— Tracer les profils des efforts tranchants et des moments fléchissants.

2. Résolution par transport des efforts extérieurs— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.

Attention aux réactions aux appuis ! ! !— En déduire le torseur des déformations.— Donner la flèche et la rotation de la poutre en tout point x, et tracer leur

profil.

3. Influence du cisaillement— Montrer que la contribution de l’effort tranchant peut être négligée dans

les expressions des déplacements obtenues ci-dessus (vflexvcis

), dans le cas desmatériaux isotropes. On notera r le degrés d’anisotropie (r = E

G).

— Évaluer la limite d’utilisation de la théorie de Timoshenko, pour ce pro-blème. On notera que le degrés d’anisotropie peut atteindre une valeur li-mite supérieure à 35 pour des matériaux composites isotropes transversesde type carbone/époxyde.

Théorie des poutres droites 49

On a vu que le cisaillement peut être négligé dans le cas des matériaux courants(r ' 2, 6), mais doit être pris en compte dans le cas des matériaux dont le rapport d’or-thotropie est élevé. C’est le cas des matériaux composites par exemple, où le cisaillementn’est plus une fonction du module d’Young et du coefficient de Poisson, et pour lesquelsle rapport peut atteindre des valeurs élevées, de l’ordre de 35. Il faut également préciserque plus la poutre est élancée, plus le cisaillement est négligeable. On utilise d’ailleursun essai dit Short Beam Shear Test pour déterminer la résistance en cisaillement interla-minaire dans les poutres composites. Il s’agit d’un essai de flexion 3 points, tel que celuiprésenté ci-dessus sur la Figure (2.10), mais dont les appuis sont si rapprochés (l = 5h)que le cisaillement contrôle en grande partie la réponse de la poutre.Dans la suite desapplications, le cisaillement sera négligé afin d’alléger les développements analytiques.

La flexion 3 points est un essai couramment utilisé dans l’industrie pour caracté-riser les matériaux. Pourtant, cet essai, s’il a l’avantage d’être simple à mettre en œuvre,pose de nombreux problèmes pour des mesures de résistance. En effet, le profil des effortstranchants et des moments fléchissants montre clairement que ces 2 grandeurs sont maxi-males au centre de la poutre. De plus, sous l’appui central, la poutre subit un écrasementtransverse (εyy). La concomitance de ces valeurs extrêmes au centre de la poutre conduitsystématiquement à une rupture sous l’appui central, rendant difficile l’identification dumode de rupture et l’état de contraintes à l’intérieur de la poutre au moment de la rup-ture. Un moyen simple de pallier à cette rupture ’incontrôlée’ est de mettre en œuvre unessai de flexion 4 points (Figure 2.11), traité ci-dessous.

Flexion 3 : Flexion quatre points

Nous allons étudier la flexion quatre points d’une poutre à plan moyen. Les ca-ractéristiques mécaniques et géométriques de la poutre étudiée sont identiques à cellesutilisées dans les exemples précédents (voir Figure 2.11). Dans ce problème, une théoriesans cisaillement sera considérée. Il faut noter qu’il est possible d’étudier avec cette théoriel’évolution de la contrainte de cisaillement le long de la poutre. En effet, l’effort tranchantexiste, et il va engendrer des contraintes de cisaillement, mais qui ici ne vont pas influersur la rotation des sections et donc la flèche. Simplement, aucune loi de comportement nepermet de dériver la déformation de cisaillement à partir de l’effort tranchant.

1. Résolution complète— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités

cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.— Tracer les profils des efforts tranchants et des moments fléchissants.— Tracer la déformée.— Comparer ces répartitions avec celles de l’essai de flexion 3 points.

2. Résolution par transport des efforts extérieurs

Théorie des poutres droites 50

Figure 2.11: Flexion 4 points d’une poutre à plan moyen.

— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.— En déduire le torseur des déformations.— Donner la flèche et la rotation de la poutre en tout point x.

Flexion 4 : Poutre d’égale résistance Les poutres en flexion sont très répanduesdans les applications technologiques courantes. On peut souhaiter avoir des poutres ditesd’égale résistance, c’est-à-dire que l’état de contrainte soit le même partout dans la poutre.Ceci assure une homogénéité dans toute la poutre, et donne l’assurance qu’en tout point dela poutre la résistance du matériau constitutif ne sera pas dépassée si le dimensionnementest effectué correctement.

Nous allons appliquer ce principe à la poutre console vue précédemment (Figure2.6) qui est chargée dans un premier temps par un effort ponctuel terminal comme dansl’exercice Flexion 1 , puis dans une autre configuration avec cette fois-ci un effort répartivertical d’intensité py constante (Figure 2.12). La section de cette poutre est rectangulaire,de largeur b et de hauteur h.

Figure 2.12: Poutre console soumise à une charge répartie py constante.

1. Résolution du problème posé sur la Figure 2.12

Théorie des poutres droites 51

— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantitéscinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).

— Exprimer les déplacements en tout point x.— Tracer le diagramme des efforts tranchants et des moments fléchissants.

2. Expliciter, pour les 2 cas de chargements, la contrainte normale maximale, enfonction du moment de flexion maximum et des dimensions de la section quipeuvent dépendre de x.

3. Donner le profil de la poutre si la largeur b est fixe (variation de la hauteurh(x)).

4. Donner le profil de la poutre si la hauteur h est fixe (variation de la largeurb(x)).

2.2.3 Flexion déviée

La flexion déviée se produit lorsque les moments produits de la section ne sontpas nuls. Ce peut être le cas par exemple lorsque les directions principales d’inertie dela section ne sont pas confondues avec les axes du repère de référence, ou bien pourles sections ne possédant pas de plans de symétrie. On retrouve alors le résultat énoncéprécédemment (Eq. 1.14), où le moment fléchissant Mfz est dû pour une part à la flexionselon −→z , mais également à de la flexion selon −→y . Ce qui donne dans une théorie sanscisaillement :

Mfz(x) = EIGzv′′(x)− EIGyzw′′(x)

où IGy, IGz et IGyz sont respectivement le moment quadratique de la section par rapportà l’axe −→y , par rapport à l’axe −→z , et le moment produit. w′′ est la courbure due à la flècheselon −→z . Dans ce cas la contrainte normale se calcule en prenant en compte les grandeurssuivant les 2 axes concernés.

L’expression de la contrainte normale s’établit à partir des lois de comportementen flexion (Mfz = f(v′′, w′′) et Mfy = f(v′′, w′′)), en explicitant les courbures et en lesintroduisant dans l’expression de la contrainte normale, telle qu’exprimée par exempledans l’équation 1.25 page 29. Au final, l’expression complète de la composante de flexionde la contrainte normale s’écrit :

σfxx(x) = −Mfz(x)yIGy − zIGyzIGyIGz − I2

Gyz

+Mfy(x)zIGy − yIGyzIGyIGz − I2

Gyz

(2.6)

Poutre à section quelconque

Considérons une section quelconque mais constituée d’un matériau homogène. Oncomprend bien que les directions principales dites d’inertie 1 de cette section ne seront pas

1. En fait ces propriété dites - abusivement - d’inertie ne sont pas liées directement au comporte-ment dynamique, mais par extension représentent les propriétés géométriques et matériaux de la section

Théorie des poutres droites 52

directement confondues avec les axes du repère global (Figure 2.13-a). Pour le montrerplus rigoureusement, déterminons dans un premier temps les coordonnées du centre degravité de cette section. Ensuite, les directions principales d’inertie seront déterminées endiagonalisant le tenseur d’inertie de cette section, dans le plan (G,−→y ,−→z ).

O

(s)y

zzG

yG

G

α

z'

y'

O

y

z

zG

yG

G

e

h

b

(S1)

(S2)(S3)

(a) (b)

Figure 2.13: Description géométrique de la section : (a) centre de gravité et directionsprincipales d’inertie pour une section quelconque, et (b) section en L.

Dans le plan (O,−→y ,−→z ), les coordonnées du centre de gravité se calculent par ladéfinition même de ce point particulier de la section, qui est tel que :

centre de gravité en 3D centre d’une section homogène en 2D

−→xG(x) =

∫ ∫ ∫Ω

−→x dΩ∫ ∫ ∫Ω

ρdΩ yG(x) =

∫ ∫S(x)

y ds∫ ∫S(x)

ds

zG =

∫ ∫S(x)

z ds∫ ∫S(x)

ds

(2.7)

Le terme au numérateur est appelé le moment statique de la section par rapport à l’originedu repère O, on le notera JOz et JOy ci-dessous. Ce moment est évidemment nul lorsqu’onle calcule par rapport au centre de gravité G.

Lorsque les coordonnées du point G sont déterminées, les moments quadratiqueset produit peuvent être calculés par rapport à ce point, et relativement aux axes durepère global, dans le repère centré en G par exemple (RG = (G,−→y ,−→z )). D’après lesrelations page 7 rappelées ci-dessous, on obtient le tenseur d’inertie de la section (en 2D)par rapport au centre de gravité, appelé alors tenseur central d’inertie :

I(G,S)(RG)

=

IGy =

∫ ∫S(x)

z2ds −IGyz = −∫ ∫

S(x)

yzds

−IGyz = −∫ ∫

S(x)

yzds IGz =

∫ ∫S(x)

y2ds

(G,−→y ,−→z )

(2.8)

qualifiant son comportement mécanique en termes de rigidité

Théorie des poutres droites 53

Ces moments peuvent également se calculer par rapport à un système d’axesorthogonaux centré en G, formant un angle α par rapport à l’axe −→z par exemple -

α = −→z G−→z′ - tel que représenté sur la Figure 2.13. En introduisant le changement de base

(G,−→y , z) (G,−→y′ , z′) avec le tenseur P

(RG→R′G)de changement de base (orthogonal si

les bases sont orthonormées directes) tel que−→x′ = P

(RG→R′G)· −→x en 2D :

P(RG→R′G)

=

[cosα − sinα

sinα cosα

](RG→R′G)

et en notant que le tenseur d’inertie est d’ordre 2, ce changement de base s’écrit :

I(G,S)(R′G)

=(P

(RG→R′G)

)T· I(G,S)

(RG)· P

(RG→R′G)

ce qui conduit finalement aux expressions des moments par rapport à ce nouveau systèmed’axe : ∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

IGy′ =1

2(IGy + IGz) +

1

2(IGy − IGz) cos 2α− IGyz sin 2α

IGz′ =1

2(IGy + IGz) +

1

2(IGz − IGy) cos 2α + IGyz sin 2α

−IGy′z′ =1

2(IGz − IGy) sin 2α− IGyz cos 2α

Remarque : Les moments produits sont stockés sous la forme −IGyz = −∫ ∫

S(x)yzds,

il faut être très attentif au signe, selon qu’on écrit la forme tensorielle ou non. Ici on aexprimé le terme hors-diagonal de la forme tensorielle, soit −IGy′z′ pour être cohérent.

On en déduit encore, que inversement, l’angle α entre le repère RG et le repère prin-cipal d’inertie R′G, tel que le moment produit est nul, s’exprime en fonction des momentscaractéristiques de la section

tan 2α =2 IGyz

IGy − IGzPlus généralement, déterminer les axes principaux de la section, pour lesquels le momentproduit est nul, se fait par diagonalisation du tenseur d’inertie. Il s’agit de déterminerles vecteurs propres −→xi associés aux valeurs propres Ii de ce tenseur. Ces valeurs propresreprésentent la projection du tenseur sur les directions propres associées, soit I(G,S)

(RG)·

−→xi = Ii · −→xi . Ou encore, pour que la solution triviale ne soit pas solution :

det

([IGy − Ii −IGyz−IGyz IGz − Ii

])(G,−→y ,−→z )

= I2i − (IGy + IGz) Ii +

(IGyIGz − I2

Gyz

)= 0

d’où on déduit les valeurs prises par les moments d’inertie principaux, solution de l’équa-tion du second degré en I

I(max,min) =IGy + IGz

√(IGz − IGy

2

)2

+ I2Gyz

Théorie des poutres droites 54

Sans entrer dans les détails, ces valeurs propres sont réelles et distinctes, et les vecteurspropres correspondant sont donnés par

−→z′1 =

(IGy − IGz −

√(IGy − IGz)2 + 4I2

Gyz

−2IGyz

)(G,−→y ,−→z )

−→z′2 =

(IGy − IGz +

√(IGy − IGz)2 + 4I2

Gyz

−2IGyz

)(G,−→y ,−→z )

Illustration sur la cas de la poutre console - TP

Pour illustrer ces calculs de propriétés géométriques de sections, et pour étudierla flexion déviée, considérons une section en L telle que présentée sur la Figure 2.13, dehauteur h, de largeur b, et d’épaisseur de voile e, constituée d’un matériaux homogène detype PVC :

— Dimensions : e=3,5 mm, h=3 cm et b=2 cm ; longueur ` = 70 cm

— Propriétés mécaniques : module d’Young 0, 35 GPa < E < 2, 5GPa. Ici E =

1 GPa

1. Pour ce cas de la cornière en L (Figure 2.13), nous allons procéder comme indi-qué ci-dessus dans le cas général. On pourra raisonner en termes de 3 surfacescomposant cette cornière, telles que présentées sur la Figure 2.13 : 2 rectanglescomposant les ailes - (S1)/(z, y) ∈ [0, h]× [0, e] et (S2)/(z, y) ∈ [0, b]× [0, h]) -auxquels on retranchera le carré (S3)/(z, y) ∈ [0, e]× [0, e] :(a) Calculer la position du centre de gravité. Pour cela déterminer d’abord la

surface S puis les moments statiques JOz et JOy de la sectionRéponses

yG =JS1Oz + JS2

Oz − JS3Oz

S1 + S2 − S3

=e2

(h2 + be− e2)

e (h+ b− e)zG =

e2

(he+ b2 − e2)

e (h+ b− e)

A.N.

S = 162, 75 mm2 yG = 10, 3 mm zG = 5, 3 mm

(b) Déterminer les moments quadratiques par rapport à l’origine du repère IOz,IOy, et IOyz puis par rapport au centre de gravité IGz, IGy et IGyz - utiliserle théorème de Huygens par exemple. On rappelle (Eq. 7.32), à toutes finsutiles, que ce théorème permet d’exprimer le tenseur d’inertie d’un solide parrapport à n’importe quel axe en connaissant le tenseur d’inertie exprimé enson centre de gravité calculé par rapport à un axe colinéaire. Pour la sectionde poutre étudiée ici, la relation inverse donne donc :

IG(RG)

= IO(RG)− S

z2G −yGzG

−yGzG y2G

(RG)

(2.9)

Théorie des poutres droites 55

Réponses ∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

IOz = IS1Oz + IS2

Oz − IS3Oz =

e

3(h3 + be2 − e3)

IOy =e

3(he2 + b3 − e3)

IOyz =e2

4(b2 + h2 − e2)

A.N.

IOz = 31.735 mm4 IOy = 9.712 mm4 IOyz = 3.943 mm4

∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

IGz =(b− e)e3 + eh3

3− y2

GS

IGy =eb3 + (h− e)e3

3− z2

GS

−IGyz = −e2

4(b2 + h2 − e2) + yGzGS

A.N.

IGz = 14.475 mm4 IGy = 5.143 mm4 IGyz = −4.936 mm4

(c) Calculer les directions principales et valeurs des moments principaux pourexprimer le tenseur central d’inertie.Réponses A.N. On associe la plus petite valeur propre Imin au premiervecteur propre

−→z′1 et la plus grande valeur propre Imax au second vecteur

propre−→z′2 :

−→z′2 (G,−→y ,−→z ) =

(0, 396

0, 918

)et−→z′1 (G,−→y ,−→z ) / =

−→z′1 ·−→z′2 = 0 α2 = −→z G

−→z′2 = 23, 3

∣∣∣∣∣ Imax = 16.601 mm4

Imin = 3.016 mm4

2. Afin de comparer ces prévisions avec le comportement réel de la poutre, réaliserles mesures suivantes avec le montage mis à disposition :

(a) Mesurer le déplacement l’extrémité de la poutre (déplacement latéral et/oule déplacement le long de l’axe portant l’effort), en fonction de l’angle de lasollicitation par rapport à la poutre. En déduire les directions principalesd’inertie.

Théorie des poutres droites 56

(b) Comparer les grandeurs prévues par la théorie des poutres appliquée aucas de la poutre console prenant en compte la flexion déviée, aux valeursrelevées avec le TP de poutre console.

v(x) =F

E

(x3

6− lx

2

2

)IGy

IGyIGz − I2Gyz

w(x) =F

E

(x3

6− lx

2

2

)IGyz

IGyIGz − I2Gyz

Sur la Figure 2.14 est représenté la norme du déplacement de l’extrémité de la

poutre console en fonction de l’angle α =−→y′G−→y entre la direction de la sollicitation et la

direction principale−→y′ (voir Figure 2.13). On vérifie bien que le déplacement maximum

correspond à la plus petite valeur propre Imin associée à l’angle α = −66, 7 , et quele déplacement minimum correspond à la seconde valeur propre Imax associée à l’angleα = 23, 3 . On rappel que la rigidité en flexion d’une poutre s’exprime par rapport à l’axeperpendiculaire au plan contenant la déformée - Mfz = f(v′′, Iz).

angle entre la sollicitation et le repère principal dela section

Nor

me

du

dép

lace

men

t de

l'ext

rém

ité

-66,7°23,3°

Figure 2.14: Déplacement de l’extrémité de la poutre console en fonction de l’angle α entrela sollicitation et la direction principale de la section en L de la Figure 2.13.

Les évolutions des déplacements correspondants au problème résolu sont égalementreprésentés sur la Figure 2.15, en coordonnées polaires.

Pour information, les industriels fournissent des données géométriques pour lesprofils qu’ils commercialisent. La Figure 2.16 présente un exemple de données pour unprofilé en L, fourni par exemple par Arcelor-Mittal.

Théorie des poutres droites 57

x

y

−3 −2 −1 0 1 2 3 4

−3

−2

−1

0

1

2

3

x

y

−3 −2 −1 0 1 2 3 4

−3

−2

−1

0

1

2

3

(a) (b)

Figure 2.15: Représentation polaire des déplacements à l’extrémité de la poutre console àsection en L - les échelles sont les mêmes : (a) déplacement selon l’axe d’application del’effort, et (b) dans la direction perdendiculaire.

Figure 2.16: Données pour une poutre à section en L - source Arcelor-Mittal.

Théorie des poutres droites 58

Figure 2.17: Poutre sollicitée en flexion et en tension

2.2.4 Sollicitation composée

Expliciter l’état de contraintes (σxx,σxy) qui règne dans la poutre ci-dessous (Figure2.17) sollicitée en flexion-tension.

2.2.5 Torsion

La torsion est une sollicitation rencontrée trés fréquemment, et plus spécialementdans les arbres de transmission par exemple. Ces arbres sont dans la plus grande partiedes applications de section cylindrique à section circulaire, creuse ou pleine. Les sectionscarrées remplissent la même fonction mais servent le plus souvent à transmettre les mo-ments de torsion en évitant d’utiliser des accouplements. En tenant un raisonnementanalogue à celui qui permet d’expliquer l’avantage des poutres en I en flexion, on com-prend bien qu’en torsion les fibres matérielles périphériques sont les plus sollicitées. Dansl’exercice ci-dessous, on démontre sur un cas simple l’intérêt d’utiliser des tubes creuxpour transmettre des couples.

On rappel que les expressions des contraintes de cisaillement font apparaître lescontributions des termes de membrane et des termes de courbure, appelée torsion dansce cas particulier (Eqs. 1.25). C’est le différentiel de contraintes de cisaillement de part etd’autre du centre de gravité qui va induire de la torsion. Ceci est illustré sur la Figure 2.18,d’abord (Figure 2.18-a) dans un repère cylindrique Rc = (G,−→x ,−→er ,−→eθ ) où ces contraintessont contenues dans un plan (G,−→x ,−→er ) invariant par rotation autour de l’axe de la poutre,et également dans une section prismatique (Figure 2.18-b) où la torsion apparaît parexemple si des contraintes de cisaillement σxy(x,M) opposées en intensité règnent en± b

2.−→z dans le plan (G,−→x ,−→y ). Pour simplifier les calculs, dans le repère cylindrique les

contraintes de cisaillement σxr(x, r) s’écrivent :

σxr(x, r) = Gεmxr(x) +Gεtxr(x, r)

Théorie des poutres droites 59

x

err G

dxe

xrγ

θ

M

M'

y

z

(x )2

(x )3

xG

Mt

dx

(a) (b)

Figure 2.18: Longueur élémentaire de poutre soumise à de la torsion : (a) section circu-laire, et (b) section prismatique.

En considérant une sollicitation de torsion pure, notons la rotation entre 2 sections voisinesr1.−→x = ω.−→x et la déformation correspondante εtxr(x, r) = γxr(x, r), tels qu’illustrés sur la

Figure 2.18-a. La déformation de cisaillement induite par la torsion peut alors s’exprimergéométriquement sur ce tronçon de poutre de longueur dx, en calculant la longueur del’arc de cercle caractérisant le déplacement d’un point M initial vers un point M ′ final,à une distance r du centre de gravité G, pour une rotation élémentaire dω. En petitesperturbations, on a la relation :

γxr(x, r)

r=dω

dx.

Comme dans le cas de la flexion, il suffit alors d’exprimer la courbure en fonction desgrandeurs agissant à l’échelle de la poutre, et d’introduire cette courbure dans la loide comportement locale du matériaux en cisaillement pour obtenir l’expression de lacontrainte de cisaillement locale, en torsion pure, en fonction du moment de torsion et dumoment quadratique polaire :

Mt(x) = GI0dω

dx σxr(x, r) = Gγxr(x, r) = G

dxr =

Mt(x)

I0(x)r

Dans le cas plus général où la poutre est soumise à un effort tranchant, comme en flexionla contrainte totale est la somme des contraintes de cisaillement de membrane et de flexion(torsion).

Passons à une application du problème de torsion. Soit une poutre de sectioncirculaire, soumise à un moment de torsion d’intensité Mt en son extrémité l et encastréeà son autre extrémité O (Figure 2.19). Cette poutre de moment polaire I0 est constituéed’un matériau homogène isotrope élastique linéaire de module de cisaillement G.

1. Déterminer pour les 2 sections considérées (diamètres D1 et D2 extérieur / kD2

intérieur) les moments d’inertie polaires I10 et I2

0 .

Théorie des poutres droites 60

Figure 2.19: Poutre sollicitée en torsion. 2 sections circulaires sont considérées (a) pleineet (b) creuse.

2. Calculer pour ces 2 sections les contraintes de cisaillement dans les arbres.

3. La contrainte limite τ0 est la même pour les 2 sections. Déterminer le rapportde leur diamètre puis de leur masse.

4. Calculer ces rapports des diamètres et des masses pour k = 0, 7.

2.3 Bilan

Au travers de ces applications, nous avons mis en évidence 2 façons de résoudreles problèmes de RdM :

— utiliser le transport des torseurs des efforts extérieurs pour exprimer le torseurdes efforts internes dans les sections. Les contraintes peuvent alors être obtenuesdirectement à partir de ces efforts internes, et les déplacements sont connus enintégrant,

— résoudre complètement les équations d’équilibre intérieur de la poutre en utili-sant les conditions aux limites cinématiques, les conditions d’équilibre au bord,et les équations de discontinuités.

Dans le premier cas, la connaissance des efforts extérieurs réduit les développementsnécessaires à la résolution, mais l’équilibre extérieur doit être connu et peut se révélerindéterminé dans certains cas, par exemple dans les cas hyperstatiques où les liaisonsavec l’extérieur sont surabondantes. Ces cas sont traités dans le chapitre suivant. Dansle second cas, les développements peuvent rapidement devenir lourds mais permettentde résoudre certains problèmes dont l’équilibre extérieur n’est pas connu. Finalement,au cours des exemples traités, les problèmes ont pu être résolus de manière optimale enmixant ces 2 méthodes.

Dans ces exemples, la sollicitation de tension a d’abord été abordée, et ne posepas de problème majeur. Dans le cas de la flexion on a pu observer que le cisaillementpeut être négligé dans la plupart des cas, et que par conséquent une théorie de Bernoullipeut être utilisée en première approximation. Cette théorie, si elle ne permet pas de

Théorie des poutres droites 61

prendre en compte la rigidité de cisaillement, permet tout de même de caractériser l’étatde contrainte de cisaillement. Quant à la rigidité de flexion, l’utilisation de sections creusesou de sandwichs est tout à fait pertinente puisque ce sont les fibres matérielles les pluséloignées de l’axe neutre qui donnent la rigidité de flexion de la section. Il en va demême dans le cas de la torsion. Enfin, pour les sollicitations combinées, compte-tenu deshypothèses de réversibilité et de linéarité de la RdM, les effets des sollicitations sur lesdifférents axes se superposent.

3.

Théorèmes énergétiques -Hyperstatisme

Sommaire3.1 Rappels - calcul du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

3.1.1 Simplifications dans le cadre de la RdM . . . . . . . . . . . . . 63

3.1.2 Travail dans le cas des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

3.2 Théorèmes énergétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

3.2.1 Théorème de réciprocité ou de Maxwell-Betti . . . . . . . . . . 67

3.2.2 Théorème de Castigliano . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

3.3 Hyperstatisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

3.4 Résolution des systèmes hyperstatiques . . . . . . . . . . . . . 74

3.4.1 Principe de superposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

3.4.2 Théorème de Ménabréa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

62

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 63

Comme nous l’avons vu dans les exemples précédents, la résolution complète desproblèmes de plus en plus réalistes devient vite lourde. Qui plus est, la connaissancedu champ de déplacement complet n’est pas toujours nécessaire, par exemple pour ledimensionnement qui se base sur les contraintes maximales rencontrées dans la structure.Il existe des méthodes pour connaître ponctuellement une information telle qu’un dépla-cement, et donc une contrainte. La connaissance de cette information peut égalements’avérer nécessaire dans le cas des problèmes ’ouverts’ tels que les cas hyperstatiques parexemple, dans lesquels les seules équations d’équilibre extérieur ne sont plus suffisantespour la résolution.

Les théorèmes énergétiques permettent de connaître assez rapidement des informa-tions ponctuelles. Ils se basent sur le bilan énergétique du problème posé, ce bilan étantfortement simplifié dans le cadre des hypothèses de la résistance des matériaux : pas dedissipations, cadre de travail statique et hypothèse des petites perturbations, matériauxélastiques linéaires (homogènes). Ces techniques sont basées sur la connaissance du bilanénergétique du système étudié, via le calcul du travail produit par les efforts extérieurs.

3.1 Rappels - calcul du travail

Considérons, pour des raisons de simplicité, un système d’efforts appliqué sur lafrontière ∂ΩF d’un solide, tel que dans le cas général représenté sur la Figure 1.1 page3 par exemple. Le travail produit entre deux instants t1 et t2 par ces efforts

−→F d dans le

champ de vitesse−→u (−→x ) est défini par :

W (−→u (−→x , t)) =

∫ t2

t1

(∫∂ΩF

−→F d(−→x , t) · −→u (−→x , t) dΩF

)dt (3.1)

3.1.1 Simplifications dans le cadre de la RdM

Dans le cadre de la RdM, l’intensité des efforts est indépendante du temps, leurpoint d’application peut par contre être en mouvement. Toutefois, dans le cadre de l’hy-pothèse des petites perturbations, cette position est confondue avec la position dans l’étatinitial (sauf dans de le cas des problèmes non-linéaires géométriques sur lequel nous re-viendrons dans le chapitre 4). Le champ cinématique est de plus la dérivée par rapportau temps du champ des déplacements :

−→u (−→x , t) = d

dt−→u (−→x , t). On peut alors calculer le

travail fournit par le système d’efforts entre l’état initial et l’état final, états qui peuventêtre définis par les positions du système à ces instants. Pour un effort ponctuel, ce travail

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 64

s’écrit :

W (−→u (−→x ), t)) =

∫ t2

t1

−→F d(−→x , t) · −→u (−→x , t) dt =

∫ −→x (t2)

−→x (t1)

−→F d(−→x ) ·

−→du(−→x , t)

↓ en HPP et si −→x (t1) =−→0 : −→x (t2) = −→x (t1) +−→u (−→x (t1)) =

−→0 +−→u (−→x )

=

∫ −→u (−→x )

0

−→F d(−→u ) · d−→u

3.1.2 Travail dans le cas des poutres

Dans le cas des poutres, les efforts extérieurs sont définis par des efforts et des mo-ments, respectivement résultante et moment du torseur des actions extérieures F(x1)(M)

appliqué sur la ligne moyenne, tel que défini dans l’équation 1.8 page 14 par exemple. Dansce cas, le travail des efforts extérieurs s’exprime en faisant intervenir le torseur des dépla-cements de la ligne moyenne U(M) tel que défini dans l’équation 1.5 page 9. On peutalors calculer le travail fourni par le système d’efforts entre l’état initial et l’état finaldéfini par le torseur des déplacements :

W (U(x1)) =

∫ U(x1)

0

F(U)(M)·dU(M) =

∫ −→r (x1)

0

−→M(−→r )·d−→r (x1)+

∫ −→u (x1)

0

−→R (−→u )·d−→u (x1)

(3.2)

À partir de cette dernière forme du travail (Eq. 3.2), on peut alors calculer letravail d’un système d’efforts. On distingue deux cas, selon que les efforts dépendent desdéplacements ou non.

Efforts indépendants des déplacements

Le calcul est direct et se ramène au produit scalaire des efforts et des déplacementsde leurs points d’application. Par exemple, pour un système discret de n efforts et nmoments, on a :

W (U(−→x )) =n∑i=1

(−→F (−→xi ) · −→u (−→xi ) +

−→M(−→xi ) · −→ri (−→xi )

)(3.3)

Efforts dépendants des déplacements (et inversement)

S’il existe une relation entre les efforts et les déplacements, cette relation ne peutêtre que linéaire en RdM compte-tenu du cadre HPP et de l’élasticité linéaire. Dans cecas le calcul du travail fait apparaître un coefficient 1

2provenant de l’intégration de cette

relation linéaire. Le cas typique de base est celui d’un ressort unidimensionnel linéaire

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 65

de rigidité k qui fournit un effort de rappel proportionnel au déplacement imposé à sonextrémité libre u(x) :

W (u(x)) =

∫ u(x)

0

k ξ dξ =1

2k u(x)2

— pour un ensemble d’efforts extérieurs, on peut définir un tenseur de rigidité, notéLe, reliant l’effort appliqué et le déplacement résultant du point d’application, etde la même manière un tenseur de compliance, notéMe, reliant ce déplacementà l’effort imposé correspondant. Ces tenseurs seront précisés dans la partiesuivante. Pour un système d’efforts ponctuels discrets, le travail s’écrit :

W (U(−→x )) =1

2

n∑i=1

(−→Fe(−→xi ) · Mi

e ·−→Fe(−→xi ))

)=

1

2

n∑i=1

(−→u (−→xi ) · Lie · −→u (−→xi ))) (3.4)

Ce calcul du travail des efforts extérieurs s’étend sans difficulté aux effortsrépartis et moments ponctuels et répartis.

— pour les efforts intérieurs, une relation similaire a été définie préalablement parla relation 1.15 dans le cas des poutres. Comme il s’agit de quantités internes àla poutre, la relation entre le torseur des efforts intérieurs (contraintes intégréessur la section) et les déformations aux points correspondants, c’est à dire lesdéplacements par unité de longueur de la poutre, est appelée loi de comporte-ment : τ(x1) = [L] ε(x1). Le travail produit par ces efforts dans le champde déplacement correspondant est alors appelé énergie de déformation interneou élastique dans le cas de l’élasticité. Dans le cas des poutres, en utilisant laloi de comportement définie en 1.14, pour une section symétrique, cette énergiede déformation par unité de longueur s’écrit :

d W (−→u (−→x ))

d x1

=1

2

(−→R (x1).−→e (x1) +

−→M(x1).−→κ (x1)

)=

1

2

(N2

ES+T 2

2

GS+T 2

3

GS+M2

t

GI0

+M2

f2

EI2

+M2

f3

EI3

) (3.5)

Coefficients d’influence

Certaines démonstrations des théorèmes énergétiques que nous allons étudier sontfacilitées en recourant à des coefficients dits coefficients d’influence, permettant de relierles efforts imposés et les déplacements résultants en tout point du solide sollicité. Cescoefficients se définissent intuitivement, par analogie avec les ressorts, tout comme dansle cas de la méthode des éléments finis.

Par exemple si on applique un effort−→F1 au point M1 d’un solide, cet effort induit

un déplacement de ce point d’application. Le travail effectué par cet effort dans le dépla-cement de son point d’application étant le produit scalaire de l’effort et du déplacement

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 66

résultant, considérons simplement le déplacement dans la direction de l’effort imposé. Cedéplacement est relié à l’effort par le coefficient d’influence u11 qui a donc la dimensiond’une souplesse (’inverse de la raideur’) :

u1(M1) = F1 u11

On en déduit alors facilement l’expression du travail de cet effort F1 dans le déplacementu1 :

WF1 =1

2F1 u1 =

1

2F 2

1 u11

Ceci se généralise aisément si le déplacement en un point Mi dans la direction de l’effortFi correspondant du solide considéré, résulte de l’application d’un ensemble de n effortsFj :

ui =n∑j=1

uijFj

Donc le travail effectué par l’effort Fi dans ce déplacement est :

WFi =1

2Fi

n∑j=1

uijFj

Finalement, le travail développé par l’ensemble des n efforts Fi dans le déplacement ré-sultant est :

WT =1

2

n∑i=1

Fi ui =1

2

n∑i=1

Fi

n∑j=1

Fj uij (3.6)

On montrera ci-dessous la symétrie des coefficient uij qui forment, dans une écriturevectorielle de discrétisation du système, une matrice dite matrice de souplesse symétriqueet définie positive.

3.2 Théorèmes énergétiques

Compte-tenu des hypothèses simplificatrices de la RdM, notamment concernantd’une part les vitesses de chargement supposées suffisamment lentes pour ne pas engen-drer de dissipations, et d’autre part les matériaux élastiques, le bilan énergétique estextrêmement simple : le travail fourni par les sollicitations extérieures est intégralementstocké en énergie de déformation élastique à l’intérieur de la structure se déformant sousle chargement imposé. Ceci permet, connaissant le système des actions extérieures, dedéduire des informations précieuses quant à l’état de déformation interne de la structure.

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 67

3.2.1 Théorème de réciprocité ou de Maxwell-Betti

L’idée de base de ce théorème consiste à utiliser le principe de superposition :quelque soit l’ordre d’application des actions extérieures, l’état final du système est iden-tique (hypothèses de linéarités géométriques et matériaux). L’utilisation de ce théorèmefait souvent appel à des chargements fictifs, sur la géométrie étudiée, de façon à fairetravailler le terme inconnu recherché (souvent un déplacement).

Illustration sur un exemple

Considérons l’exemple de la poutre console représenté sur la Figure (1) du Tableau3.1 page 68, sollicitée en flexion par un effort −FC appliqué en C à l’abscisse lC . Lescaractéristiques de la poutre sont celles utilisées jusqu’ici : l, E, S, I. On souhaite connaîtrela flèche v(x = l) = vB de l’extrémité de cette poutre. La résolution simultanée desdeux équations différentielles du quatrième ordre caractérisant l’équilibre intérieur de ceproblème conduit à l’expression de la flèche de l’extrémité de cette poutre :

vB =FC l

2C

6 EI(lC − 3l))

Cette résolution nécessite des calculs assez longs. Par contre, ce résultat peut être dé-terminé presqu’immédiatement en montrant que les coefficients d’influence vBC = vCB.C’est-à-dire que le déplacement du point B induit par l’application d’un effort unitaireen C est identique au déplacement du point C lorsque qu’un déplacement unitaire estappliqué en B. L’intérêt étant ici que ce dernier cas de chargement est connu et déjàrésolu (cf exercice Flexion 1).

Considérons pour cela le cas de cette poutre que l’on charge par l’effort FC etégalement par un effort terminal FB qui permet de faire ’travailler’ le terme inconnurecherché vB (Tab. 3.1). On vient superposer un problème fictif associé sur le chargementréel.

Dans le premier cas (Tab. 3.1-(1) et (1’)), on sollicite la poutre console successive-ment par l’effort FC en C (1) puis par un effort terminal FB en B (1’). Le travail totalW Tot

1 est la somme de trois termes, le premier dû au travail de l’effort C dans le déplace-ment résultant de son application (1), le second est le travail produit par l’effort B dansle déplacement résultant de son application (1’), et enfin le troisième terme correspond autravail produit par l’effort FC dans le déplacement résultant de l’application de FB (1’).On notera que dans ce dernier terme, le déplacement du point d’application C ne dépendpas de l’effort FC . Dans le second cas (Tab. 3.1-(2) et (2’)), on considère la même poutreconsole chargée cette fois-ci d’abord par l’effort terminal FB puis par l’effort FC . De partle principe de superposition, le travail total doit être identique pour ces deux scénari. Ilen découle que les termes suivants ne peuvent être qu’identiques :

W Tot1 = W Tot

2 ⇔ FB.vBC .FC = FC .vCB.FB ⇒ vBC = vCB

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 68

(1) (2)

W1 =1

2F 2C .vCC W2 =

1

2F 2B.vBB

(1’) (2’)

W ′1 =

1

2F 2B.vBB + FB.vBC .FC W ′

2 =1

2F 2C .vCC + FC .vCB.FB

W Tot1 =

1

2F 2C .vCC +

1

2F 2B.vBB+ FB.vBC .FC W Tot

2 =1

2F 2B.vBB +

1

2F 2C .vCC+ FC .vCB.FB

Table 3.1: Illustration du théorème de Maxwell-Betti

Finalement, connaissant la flèche du point C sous un chargement unitaire appliquéen B, on obtient directement la flèche du point B sous un chargement quelconque appliquéen C. On a établi précédemment que pour la poutre console telle que représentée sur laFigure 2.6 page 42, le déplacement v§(x) de tout point de cette poutre sollicitée par uneffort terminal d’intensité −F est v§(x) = F x2

6EI(x − 3l). Donc dans notre cas, on obtient

directement la flèche pour un effort d’intensité −FC :

v§(x = lc) =FC l

2C

6EI(lC − 3l) = vB

ce qui correspond bien au résultat qu’on peut obtenir en résolvant le problème par leséquations d’équilibre. On notera toutefois que ce résultat est une information ponctuelle

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 69

qui ne possède pas l’attrait de la solution complète permettant de connaître le déplacementen tous points et surtout l’état de contrainte le long de l’abscisse.

Exemple 2

Considérons un second exemple représenté sur la Figure 3.1-(a). On cherche ledéplacement du point central D d’une poutre sollicitée en flexion trois points par uneffort situé à une distance lC < l

2. De nouveau, la résolution de ce problème est longue.

On connaît par ailleurs la solution d’un problème de flexion trois points classique avecun effort central. On peut donc utiliser cette sollicitation fictive pour faire ’travailler’ ledéplacement central (Figure 3.1-(b)).

Figure 3.1: Poutre en flexion trois points avec chargement excentré : (a) problème réel et(b) problème fictif associé.

L’expression v§(x) de la flèche pour la flexion trois points avec chargement centrala été établie dans l’exemple Flexion 2 du chapitre précédent. On a donc immédiatementla solution de notre problème de flexion trois points excentré :

vD = v§(x = lC) = F.vDC =F lC48EI

(3l2 − 4l2C

)

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 70

Exemple 3

La poutre console étudiée précédemment est maintenant sollicitée par 3 effortsponctuels F1, F2 et F3, tel que présenté sur la Figure 3.2. On cherche la flèche à l’extrémitéde cette poutre v(x = l) = vB. La résolution des quatre équations d’équilibre interneconduit à déterminer 16 constantes d’intégration. Comme dans le premier exemple, enutilisant le chargement fictif associé appliqué en B, on peut résoudre très facilement ceproblème.

Figure 3.2: Poutre console sous 3 charges.

La flèche v§(x) étant connue pour la poutre console chargée à son extrémité, ondétermine aisément les coefficients d’influence de notre problème et donc la flèche totalevB :

F1.vBA1 = F1l21

6 EI(l1 − 3l)

+

F2.vBA2 = F2l22

6 EI(l2 − 3l)

+

F3.vBA3 = F3l23

6 EI(l3 − 3l)

vB =1

6 EI(F1 l

21 (l1 − 3l) + F2 l

22 (l2 − 3l) + F3 l

23 (l3 − 3l))

3.2.2 Théorème de Castigliano

Ce théorème, d’une utilisation triviale, fournit un précieux outil pour traiter lesproblèmes de RdM, notamment les problèmes hyperstatiques sur lesquels nous reviendronsplus loin dans ce document. Son utilisation nécessite le calcul de l’énergie de déformationdu système. C’est en minimisant cette énergie de déformation qu’une relation est établieentre un effort, respectivement un moment, et le déplacement du point d’application dansla direction de cet effort, respectivement l’angle de rotation correspondant. En reprenant

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 71

l’expression du travail proposée dans l’équation 3.6 qui permet de faire apparaître claire-ment toutes les dépendances des efforts par rapport aux déplacements, on démontre trèsaisément le théorème de Castigliano à l’aide des coefficients d’influence. La minimisationde l’énergie de déformation, ou du travail des efforts extérieurs donnés, par rapport à uneffort par exemple donne :

∂WT

∂Fi=

∂Fi

(1

2

n∑i=1

Fi

n∑j=1

Fj uij

)=

1

2

∂Fi(F 2

1 u11 + + . . .+ F 22 u22 + F 2

nunn + 2F1F2u12 + . . .)

= F1u1i + F2u2i + . . .+ Fiuii + . . .+ Fnuni

=n∑k=1

Fk uik

↓ par définition= ui

soit le déplacement du point d’application de cet effort. Comme l’énergie de déformationinterne est égale strictement au travail produit par les efforts extérieurs, on a finalementles relations suivantes :

∂W (F1, . . . , Fn)

∂Fi=∂Wint(U)

∂Fi= ui

Remarque : il faut, lorsqu’on utilise l’énergie de déformation du système, faire apparaîtretous les efforts extérieurs, même si un ou plusieurs peuvent s’exprimer en fonction desautres.

L’application de ce théorème au cas de la poutre console sollicitée en son extrémité(Figure 2.6 page 42) permet de déterminer rapidement la flèche de l’extrémité. Il faut noterque l’effort est négatif et donc que pour obtenir le déplacement dans la direction positive,il faut prendre l’opposé de la minimisation de l’énergie de déformation par rapport àl’effort F :

Wint =1

2

∫ l

0

EI

(d2v

dx2

)2

dx =1

2 EI

∫ l

0

M2(x) dx =1

2 EI

∫ l

0

[F (x− l)]2 dx

→ v(x = l) =∂Wint

∂(−F )= −∂Wint

∂F=−F l3

3 EI

Bien évidemment, dans ce cas, le travail des efforts extérieurs ne peut être utilisé puisque ledéplacement recherché est nécessaire pour le calcul de ce travail. En pratique, on recourraau travail des actions extérieures essentiellement dans le théorème de Ménabréa qui reposesur la nullité du travail produit par les efforts de réactions. Ceci est présenté plus loindans ce document.

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 72

3.3 Hyperstatisme

Un système est dit hyperstatique si certaines liaisons sont surabondantes, c’est-à-dire si leur suppression ne remet pas en cause l’équilibre statique du système, et lesmouvements de corps rigides sont supprimés. Le degrés d’hyperstatisme est défini par lenombre de liaisons surabondantes qu’a le système avec l’extérieur. Ceci se traduit par unnombre insuffisant d’équations pour résoudre le problème de l’équilibre statique extérieur :q = n− p avec q le degré d’hyperstatisme, n le nombre de liaisons avec l’extérieur, et p lenombre d’équations de la statique.

De nombreux exemples existent dans la pratique, les systèmes isostatiques étanttrès peu nombreux dans la vie courante (pourquoi mettre systématiquement quatre piedsaux tables, alors qu’on sait pertinemment que la patte surabondante doit être réglable ! !).Dans notre cas des poutres, on trouve souvent des arbres de transmission reposant sur plusd’appuis que nécessaires, ceci bien souvent dans un but de sécurité, ou de réduction desdimensions (réduction des portées) ou encore de modification du spectre des vibrationsqui est lié à la longueur libre. Pour ce qui nous concerne, voici sur la Figure 3.3 deuxexemples de problèmes de poutres hyperstatiques d’ordre 1, la liaison surabondante estreprésentée en pointillés.

Figure 3.3: Problèmes hyperstatiques d’ordre 1 : exemple 1 (a) et exemple 2 (b).

Considérons par exemple le cas de la Figure 3.3-(a). Si on veut caractériser l’équi-libre statique global de la poutre, on a à disposition les équations de la statique, et comme

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 73

inconnues les efforts appliqués sur la poutre :— bilan des efforts donnés en C et en E :

τ FC

ext→ S

(C)

=

∣∣∣∣∣ 0

−F

∣∣∣ 0

(C)

τ FE

ext→ S

(E)

=

∣∣∣∣∣ 0

−F

∣∣∣ 0

(E)

— bilan des efforts de réaction aux appuis en Mi où Mi = A,B,D :

τ Ri

réact→ S

(Mi)

=

∣∣∣∣∣ 0

Ri

∣∣∣ 0

(Mi)

Les réactions constituent donc les inconnues, et sont donc au nombre de 3. Pour résoudrele problème, on dispose des équations de la statique qui caractérisent l’équilibre extérieur :

— forces :∑−→

F ext→ S =

∣∣∣∣∣ 0

RA − F +RD − F +RB

=∣∣∣ 0

— moments :∑−→

M(−→F ext→ S,P) =

−→MP +

∑−−→PM ∧

τ FM

ext→ S

(P )

avec M,P ∈A,B,C,D,E et M 6= P . Quelque soit le choix de M et P pour calculer lesmoments, on a toujours une seule équation.

Au final, on a donc 2 relations pour 3 inconnues. Il faut trouver une équationsupplémentaire pour caractériser la solution de l’équilibre extérieur. C’est à ce niveauque les théorèmes énergétiques peuvent être utilisés idéalement, comme nous le verronsci-dessous. Lorsque cette équation supplémentaire est trouvée, il suffit alors d’exprimerles moments de flexion, puis la flèche par intégration de la ligne élastique par exemple.

On peut toutefois remarquer que si l’équilibre extérieur ne peut être caractérisépour ces cas hyperstatiques, en revanche l’équilibre intérieur peut être vérifié. Par exemple,la résolution de l’exemple 2 (Figure 3.3) est possible à partir des équations d’équilibreintérieur, en recourant aux quatre équations de discontinuité qui permettent de déterminerquatre des huit constantes résultant de l’intégration des deux équations différentielles duquatrième ordre pour les deux zones. Les constantes restantes étant déterminées par les2 conditions cinématiques et statiques aux bords de la poutre, soit 4 conditions :

0 < x ≤ l2

l2< x ≤ l

v(x) =F

32 EI

(11 x3

3− 3lx2

)v(x) =

F

8 EI

(−5 x3

12+

5 lx2

4− l2x+

l3

6

)

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 74

3.4 Résolution des systèmes hyperstatiques

La résolution des systèmes hyperstatiques est comparable à la résolution d’un sys-tème isostatique lorsque le nombre d’équations suffisant est explicité, voir Tableau 3.2.On a deux moyens de déterminer ces équations supplémentaires qui sont les théorèmesénergétiques, et le principe de superposition lui-même.

système ISOSTATIQUE système HYPERSTATIQUE

→ résolution complète → résolution complète

- équilibre intérieur → M(x) et v(x) - équilibre intérieur + éq. de (dis)continuitélimitée et fastidieuse → M(x) et v(x)

- équilibre global → M(x) → intégration → v(x) - équilibre global IMPOSSIBLEsouvent PLUS RAPIDE +

th. énergétique ou superposition︸ ︷︷ ︸→ M(x) → intégration → v(x)

→ une donnée → une donnéethéorème énergétique - RAPIDE théorème énergétique

Table 3.2: Synthèse de la résolution d’un problème de poutre en flexion.

3.4.1 Principe de superposition

Dans notre cadre linéaire (HPP et élasticité linéaire), le problème hyperstatiquepeut être décomposé en problèmes isostatiques dont les solutions sont connues. Ensuite,par application du principe de superposition, la flèche du problème initial est déterminée.

Dans le cas de l’exemple 1, présenté sur la Figure 3.3-(a), on superpose une poutresoumise à de la flexion quatre points (Figure 3.4-1), et la même poutre en flexion troispoints soumise à un effort central d’intensité (Figure 3.4-2) RD égal à la réaction produitepar l’appui central du problème initial. La flèche totale étant la superposition de ces deuxproblèmes, le déplacement au centre doit être nul pour satisfaire la condition cinématiqueimposée par l’appui central. Cette condition conduit finalement à une relation permettantde déterminer l’effort de réaction, et donc par suite d’expliciter les moments et donc lesflèches :

v(x =l

2) = vD = vD1 + vD2 = − 11 Fl3

384 EI+RD l3

48 EI= 0 ⇒ RD =

11 F

8

Pour l’exemple 2 le même type de décomposition peut être utilisé (Figure 3.5).L’effort de réaction est déterminé de façon similaire à l’exemple 1 :

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 75

Figure 3.4: Décomposition de l’exemple 1 en problèmes isostatiques de solution connue.

v(x = l) = vB = vB1 + vB2 = − 5 Fl3

48 EI+RB l

3

3 EI= 0 ⇒ RB =

5 F

16(3.7)

Figure 3.5: Décomposition de l’exemple 2 en problèmes isostatiques de solution connue.

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 76

3.4.2 Théorème de Ménabréa

Un des inconvénients majeurs de cette technique de superposition est la connais-sance des problèmes isostatiques simples. Il existe, avec les théorème énergétiques, unmoyen plus rapide de déterminer une de ces informations sans connaître la solution desproblèmes fictifs introduits. Dans le cas des appuis par exemple, le théorème de Ménabréaest commode à utiliser. Il s’agit simplement d’un cas particulier du théorème de Casti-gliano où le déplacement déduit de la minimisation de l’énergie déformation est nul carcette minimisation a lieu par rapport à des efforts de réaction dont le travail est nul dansle déplacement réel cinématiquement admissible. Ces efforts de réaction étant considéréscomme un chargement extérieur à part entière.

L’énoncé du théorème de Ménabréa est le suivant : soit un système hyperstatique(S) et un système isostatique associé (S0). Considérons le système isostatique (S0) soumisaux charges données Fi et aux réactions hyperstatiques Rj. L’état d’équilibre des deuxsystèmes étant identique :

W (S) = W (S0) = f(Fi, Rj)

Aux points d’appui on a donc, d’après Castigliano :

∂WS0(Fi, Rj))

∂Rj

= 0

Ce qui nous fournit autant d’équations supplémentaires que d’inconnues hyperstatiques.Dans le cas de l’exemple 2 représenté sur la Figure 3.3-(b), le système isostatique associéest obtenu en remplaçant l’appui terminal par un effort de réaction RB pris positif, defaçon similaire au principe de superposition schématisé sur la Figure 3.5. Mais ici les deuxefforts F et RB sont appliqués dans le même temps. L’énergie de déformation se calculealors à partir des moments de flexion exprimés dans les deux zones de la poutre à partirde ces deux efforts :

— zone 1 : l2< x ≤ l τext→ 1(M) =

∣∣∣∣∣ 0

RB

∣∣∣ (l − x)RB

(M)

— zone 2 : 0 ≤ x < l2 τext→ 2(M) =

∣∣∣∣∣ 0

RB − F

∣∣∣ (l − x)RB −(l2− x)F

(M)

L’énergie de déformation peut être calculée, et la minimisation de cette énergie par rapport

Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme 77

à l’effort de réaction nous fournit l’expression de cette réaction :

WS0(F,RB) =1

2 EI

∫ l2

0

[(l − x)RB −

(l

2− x)F

]2

dx+1

2 EI

∫ l

l2

[(l − x)RB]2 dx

↓∂WS0(F,RB)

∂RB

= 0 =1

EI

∫ l

0

(l − x)2RB dx−1

EI

∫ l2

0

(l − x)(l

2− x)F dx

RB =5F

16

ce qui, fort heureusement, correspond bien au résultat obtenu par le principe de superpo-sition (Eq. 3.7).

4.

Extension aux problèmes non-linéaireset dynamiques

Sommaire4.1 Flambage des poutres droites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

4.1.1 Équations non-linéaires de la statique des poutres droites . . . 81

4.1.2 Application à une poutre droite . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

4.1.3 Extension aux calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . 88

4.2 Modes et fréquences propres de vibration en flexion dans lespoutres droites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90

4.2.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90

4.2.2 Équations de la dynamique des poutres droites à plan moyen . 90

4.2.3 Vibrations libres - application à la flexion simple . . . . . . . . 91

4.2.4 Vibrations libres - calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . 95

4.3 Extension : réponse post-bifurquée d’une poutre . . . . . . . . 96

4.3.1 Poutre homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97

4.3.2 Poutre sur fondation élastique à deux paramètres . . . . . . . . 102

78

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 79

4.1 Flambage des poutres droites

Introduction générale

En Résistance des Matériaux "classique", il n’existe pas de couplage entre les com-portements en tension, flexion ou encore torsion. Cette hypothèse, qui peut sembler trèsrestrictive, permet de résoudre un très grand nombre de cas concrets de structures gé-nériques supportant des charges de fonctionnement courantes. On peut, pourtant, danscertains cas vouloir dimensionner des structures contre des comportements non-linéairesd’une point de vue géométrique. Par exemple, une surcharge rencontrée ponctuellement(séisme, accident, ..) ne devra pas générer des distorsions géométriques susceptibles d’alté-rer la géométrie et donc les propriétés de la structure, de telle sorte que le fonctionnementnormal sera assuré pour la durée de vie prévue. Ces distorsions peuvent par exemple êtregénérées, pour des poutres, par une flèche trop importante qui engendrerait de la torsionappelée déversement.

Pour illustrer ces phénomènes, nous nous concentrerons sur un type de non-linéaritégéométrique, le flambage qui apparaît sous un chargement de compression axiale pour unepoutre ou dans le plan pour une plaque. Lorsque ce chargement déstabilisant augmente etatteint une valeur dite critique, le comportement va alors devenir instable. Le phénomènede flambage va apparaître, caractérisé par le passage d’un état où règne principalement dela compression (terme de membrane), à une configuration où la flexion est prépondérante(courbure).

Il existe de nombreux exemples de comportements de type flambage, et l’étude deces phénomènes instables donne lieu à de nombreuses études tant analytiques que numé-riques ou expérimentales. On peut noter que les études analytiques s’appuient sur desoutils mathématiques trés pointus qui permettent par exemple de prévoir le comporte-ment post-bifurqué des structures simples, c’est-à-dire la (non)stabilité qui caractérise lecomportement après l’apparition du flambage. À titre d’illustration, on peut voir sur laFigure 4.1 le mode (la déformée) de flambage d’origine thermique d’un rail soumis à ungradient de température élevé (-40 ;40C dans les pays nordiques) et le mode de flambaged’un cylindre en compression axiale. Ces 2 structures représentent 2 grands types de com-portement qui sont respectivement sur-critiques, où la structure est encore susceptible desupporter le chargement imposé, et sous-critique où la ruine de la structure survient dèsque l’instabilité se produit.

Le phénomène de flambage

Le cas typique de la règle que l’on comprime illustre parfaitement le phénomène deflambage (voir Figure 4.2 page 81 et Figure 4.3 page 83). Pour appréhender ce comporte-ment, traçons l’évolution de la flèche au centre de cette poutre en fonction du chargement

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 80

(a) (b)

Figure 4.1: (a) Flambage d’origine thermique d’un rail,(b) flambage en compression axialed’un cylindre isotrope

(Figure 4.2). On constate que dans la première partie du chargement, en l’absence de dé-faut géométrique, avant le point de bifurcation le chargement augmente sans donner lieu àde la flexion. La poutre est en compression et subit un raccourcissement proportionnel auchargement (∆l

l= −F

ES). Lorsque la charge imposée atteint la charge critique Fc, la flexion

apparaît et la flèche tend vers l’infini sans accroissement de l’effort. En réalité, cette flècheest limitée car la réponse complète charge-déplacement est de type parabolique (Figure4.2).

D’un point de vue pratique, la rupture de la poutre intervient lorsque la limiteà rupture du matériau est dépassée. C’est donc la caractérisation de cet effort critiquequi est primordiale, car l’apparition de l’instabilité est généralement associée à un étatinstable. Ceci est d’autant plus vrai dans les cas d’instabilités sous-critiques rencontrésdans les problèmes de type coque, où le point de bifurcation correspond à l’effondrementde la structure (cf boîte métallique de boisson, ou Figure 4.1-b). De plus on voit qu’enprésence de défauts (Figure 4.2), la charge à laquelle apparaît l’instabilité diminue. Donc laréponse de la structure réelle sera majorée par cette force critiques. L’influence des défautspeut engendrer des baisses trés importantes, jusqu’à 70 - 80 % de la charge critique. Ledimensionnement des structures vis-à-vis du flambage est une problème extrêmementdélicat, du fait de la nature instable de ce phénomène, ce qui en fait un des principauxfacteurs de dimensionnement.

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 81

(a)

(b)

Figure 4.2: Poutre libre-libre en compression : (a) montage de flambage rotulé , (b) ré-ponse charge-déplacement vertical : réponse fondamentale et en présence d’imperfectionsgéométriques.

4.1.1 Équations non-linéaires de la statique des poutres droites

Nous nous intéresserons ici plus particulièrement à la caractérisation analytiquedu flambage des poutres droites à plan moyens chargées dans ce plan (en abrégé poutresdroites à plan moyen). La théorie utilisée sera de type Bernoulli, i.e. ne prenant pas encompte le cisaillement qui est tout à fait négligeable ici. Nous verrons que les chargescritiques et les modes de flambage dépendent à la fois des caractéristiques mécaniques(rigidité = module d’Young E), géométriques (section S et moment quadratique parrapport à −→z , I) de la poutre, mais également des conditions aux limites du problèmetraité. Les principes exposés ici restent valables dans le cas de structures plus complexes,mais la détermination de la charge critique fait alors appel à des méthodes de résolutionnumériques.

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 82

Origine de la non-linéarité géométrique dans le cas du flambage

Dans la formulation classique HPP, on considère que la géométrie initiale estconfondue avec la géométrie finale, ce qui permet d’écrire toutes les grandeurs dans unrepère unique. Ceci est valable lorsque les déplacements, ou plus rigoureusement les défor-mations, restent infinitésimales. Lorsqu’on passe en grandes déformations et/ou en grandsdéplacements, il faut prendre en compte la nouvelle géométrie et l’actualiser. C’est cettedépendance de la géométrie vis-à-vis des déplacements qui induit la non-linéarité géomé-trique. Numériquement, dans les codes de calculs par éléments finis par exemple, on résoutle problème de manière incrémentale, en recalculant à chaque itération les positions detous les points (−→xi = −−→xi−1 + −→u (−→xi )). D’un point de vue analytique, on essaie de linéari-ser le problème à résoudre. C’est cette démarche que nous adoptons ici, en justifiant leshypothèses qui conduisent au problème linéaire associé.

Dans le cas du flambage des structures, on se restreint à prendre en compte unseul terme non-linéaire, appelé rotations modérées, valable pour des rotations des sections< 10, c’est-à-dire à mi-chemin entre les rotations infinitésimales et les grandes rotations.C’est par ce terme que la déformation de membrane, classiquement reliée uniquement àla déformation due au déplacement u(−→x ), va dépendre également de la flèche v(−→x ).

On montre qu’en première approximation, le phénomène de flambage se produità contrainte constante (Figure 4.2). En effet, pour une poutre inextensible sur appuissimples (poutre elastica, Euler 1745 ) un accroissement de l’effort de 1

8% correspond à

l’augmentation de l’angle de rotation des sections de 0,01 rad (0, 57), cette rotationétant identique en tous points pour une courbure constante. On peut donc estimer que ladétermination de la charge critique peut se faire à l’aide d’un modèle linéarisé dans lequella contrainte axiale est supposée constante dans la poutre. Bien évidemment, la réponselorsqu’on s’éloigne du point de bifurcation, doit être recherchée à l’aide d’un modèle plusraffiné.

D’un point de vue de la MMC, ce terme de rotation modérée est une des com-posantes de la partie non-linéaire du tenseur des déformations de Green-Lagrange, notéeγNL(−→u ), que l’on rappelle ci-dessous :

γ(−→u ) =1

2(∇−→u +∇t−→u ) +

1

2∇−→u · ∇t−→u = ε(−→u ) + γNL(−→u ) (4.1)

Déformation de membrane incluant les rotations modérées

Nous avons vu dans le cadre de la statique que les équations des poutres quel-conques peuvent se déduire, via le Principe des Puissances Virtuelles, de la formulationgénérale de l’équilibre statique des milieux continus. Dans le cas qui nous intéresse ici, plu-tôt que de passer par les déformations des milieux continus, nous allons chercher la formede la déformation de membrane qui permet de relier le raccourcissement de la poutre à

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 83

l’état de flexion. C’est par cette composante du tenseur des déformations, que le couplagetension-flexion est introduit dans le problème linéarisé.

Considérons la poutre ci-dessous (Figure 4.3) en appui simple, soumise à un char-gement de compression F.−→x en X = 0 et bloquée en translation le long de −→x en X = l.Un point situé à l’abscisse

−→X sera après flambage situé en −→x :

Position initiale Position après flambage

−→X =

X

0

−→x =

X + u(X)

v(X)

⇒ d−→x =

dx = dX +

du(X)

dXdX

dy =dv(X)

dXdX

Figure 4.3: Poutre sur appuis simples en compression

Raccourcissement et déformation non-linéaire Le problème de flambage est intrin-sèquement non-linéaire, mais de part la formulation adoptée, la non-linéarité va dispa-raître. En effet, conformément à la remarque sur la contrainte dans la poutre pour descharges proches de la charge critique, on considère que la contrainte dans la poutre nevarie pas le long de l’axe de la poutre : le flambage se produit à contrainte, et donc dé-formation, constante. Cette hypothèse est vérifiée expérimentalement pour des structuresélancées, c’est-à-dire lorsque les effets de bords sont négligeables. Elle est intégrée dans laformulation choisie, c’est elle qui permet de linéariser le problème.

Le raccourcissement local correspondant à la déformation de membrane ε(−→x ) dela fibre moyenne s’exprime en fonction des déplacements du point

−→X intégrés le long de

l’abscisse (curviligne). Ce raccourcissement est dû pour une part à l’effet du chargementde compression, et d’autre part à l’apparition de la flexion. On sait que le raccourcissementtotal de la poutre s’écrit :

δ =

∫ l

0

ds−∫ l

0

dX

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 84

en supposant que la déformation est constante dans la poutre, on peut exprimer la défor-mation moyenne, et donc la déformation locale :

ε =δ

l=

∫ l

0

ds∫ l

0

dX

− 1 =ds

dX− 1

ce qui finalement conduit à l’expression de la déformation locale. En utilisant les expres-sions des incréments dx et dy cette déformation de membrane s’écrit :

ε =ds

dX− 1 avec ds2 = dx2 + dy2 = dX2

((1 + u

′)2 + v

′2)

Simplifications Finalement, l’expression de la déformation est connue, et peut se sim-plifier en première approximation :

ds

dX=√

1 + 2u′ + u′2 + v′2 ' 1 +2u′ + u

′2 + v′2

2

On a donc l’expression de la déformation. Des simplifications peuvent encore être faites encomparant les ordres de grandeurs des différents termes intervenant dans cette expression.En effet, l’apparition du flambage induit des rotations des sections qui, bien qu’étantfaibles, sont plus grandes que le raccourcissement de membrane dû à la compression :

u′, v′ << 1

u′ << v′

⇒ ds

dX' 1 + u′ +

v′2

2⇒ ε = u′ +

v′2

2

et θ ∼ tan θ =dy

dx=

v′

1 + u′' v′ ⇒ courbure

ds' dθ

dX= v”

Remarque on notera que cette expression peut être calculée à partir de l’expression dutenseur des déformations non-linéaires des milieux continus (Eq.4.1) appliqué aux poutres,en prenant en compte les simplifications faites ci-dessus.

Finalement, l’énergie de déformation s’écrit toujours de la même façon, mais avecune expression de la déformation de membrane qui dépend de la flèche ε(u′, v′) :

Wint =1

2

∫ l

0

(ESε2(u′, v′) + EIv

′′2)ds (4.2)

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 85

Équations d’équilibres

En utilisant l’expression de la déformation de membrane établie ci-dessus (ε =

u′ +v′2

2), on peut déduire les équations d’équilibre du problème en utilisant le Principe

des Puissances Virtuelles. On considérera ici le cas d’une poutre sur laquelle le systèmed’efforts appliqué se limite à un effort ponctuel de compression qui agit en x = l (Fi-gure 4.4). Donc le travail virtuel des efforts extérieurs est W ∗

ext = −Fu∗(l). On introduitles notations classiques pour l’effort normal (N(x) = ESε(x)) et le moment de flexion

(M(x) = EId2v(x)

dx2). Il faut noter que le terme de rotation modérée, introduit dans la dé-

formation virtuelle, prend en compte la non-linéarité du phénomène. La rotation virtuellev′∗ est en effet en produit avec un terme représentant le moment induit par le décalage

de l’effort normal par rapport à la ligne moyenne de la poutre (Nv′) :∫ l

0

(N(x)

(u′∗ + v

′v′∗)

+Mz(x)v′′∗)dx+ Fu∗(l) = 0,∀(u∗, v∗)C.A.

après intégration par parties, on exprime tous les termes en fonction des déplacementsvirtuels :

∫ l

0

(−N ′(x)u∗(x) + −(N(x)v′(x))′ +M ′′(x) v∗(x)) dx+

[Nu∗ +Nv′v∗ +Mv

′∗ −M ′v∗]l

0+ Fu∗(l) = 0, ∀(u∗, v∗)C.A.

En choisissant judicieusement les champs virtuels, on arrive aux équations d’équilibreintérieur suivantes, les équations aux bords étant fonction des conditions aux limites.Dans le cas traité ici, on a N(l) = −F :

Équilibre intérieur C.L cinématiques + statiques

N ′(x) = 0

(N(x)v′(x))′ −M ′′(x) = 0

x = (0, l)

u = 0 ou N = 0(= Nd)

v = 0 ou M ′ −Nv′ = 0

v′ = 0 ou M = 0(= Md)

4.1.2 Application à une poutre droite

Poutre droite sur appuis simples

Nous étudions le cas de la poutre sur appuis simples présentée sur la Figure 4.4.

1/ Montrer que le système à résoudre s’écrit (equation 4.3) :

EId4v(x)

dx4+ F

d2v(x)

dx2= 0 (4.3)

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 86

Figure 4.4: Poutre sur appuis simples en compression

2/ Donner les conditions aux limites correspondant au problème de la Figure 4.4.

3/ Montrer que le champ de déplacement solution s’écrit, en posant k2 =F

EI

v(x) = A+Bx+ C cos kx+D sin kx

4/Montrer que ce problème possède 2 solutions : une solution droite et une solutionfléchie.

5/ Montrer que la pulsation de rang n solution est :

k =nπ

l, n ∈ Z

6/ Montrer que la charge critique et le déplacement solutions sont :

F = EI(nπl

)2

v(x) = D sinnπx

l

7/ Tracer les courbes charge-déplacement ainsi que la déformée correspondant aux3 premiers modes.

Poutre droite encastrée-encastrée Nous étudions maintenant la même poutre, maiscette fois-ci les conditions aux limites sont de type encastré à ses 2 extrémités (Figure4.5). On recherchera les solutions symétriques par rapport à x = l

2.

1/ Donner les conditions aux limites permettant de résoudre ce problème.

Finalement, on constate que la charge critique de flambage dépend à la fois dumatériau constitutif, mais aussi de la géométrie de la poutre. En effet, c’est le rapportentre la rigidité de tension et la rigidité de flexion qui représente la capacité de la poutre à

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 87

Figure 4.5: Poutre droite encastrés-encastrée en compression

supporter la compression directe sans fléchir, ce qu’on caractérise par le rayon de girationde la section : r =

√IS. On peut exprimer la solution pour le cas de la poutre homogène

traité ci-dessus, en fonction des conditions cinématiques imposées aux limites de la poutre(Eq. 4.4). En effet, on peut constater expérimentalement que la charge évolue en fonctionde ces conditions, comme illustré sur la figure 4.6.

Figure 4.6: Illustration de la charge de flambe pour une même poutre possédant différentesconditions aux limites.

Ainsi, la charge de flambage est connue en fonction du paramètre α qui prend en compteles conditions aux limites (Tableau 4.1). Ce qu’on retrouve dans les expériences présentéessur la figure ci-dessus (Figure 4.6).

Fc(α) = απ2EI

L2(4.4)

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 88

Cond. Lim. Coefficient α

λRotulé-Rotulé 1

λEncastré-Rotulé 2.05

λEncastré-Encastré 4

λEncastré-Libre 1/4

Table 4.1: Valeurs du coefficient α (Eq. 4.4) en fonction des conditions aux limitesappliquées à la poutre homogène.

Remarque 1 Dans certains ouvrages, la notion de longueur équivalente est introduite.Il s’agit de remplacer la longueur de la poutre par une longueur telle que les conditionsaux limites sont intégrées, sans avoir à modifier les relations donnant la force critique.Ceci revient simplement à intégrer le coefficient α utilisé ci-dessus, soit Le = L√

α.

Remarque 2 Le flambement dans l’espace implique que la plus petite des rigidités dela poutre devra être considérée, i.e. le flambage se produira dans le plan contenant cetteplus petite rigidité.

Remarque 3 La présence d’un défaut géométrique va abaisser la charge critique, commeillustré schématiquement sur la Figure 4.2-b. Le défaut le plus délétère sera celui dontla forme correspondra au premier mode ; ceci est valable quelle que soit la structureconsidérée. Dans le cas des poutres, un défaut d’amplitude v0 sur le premier mode conduità l’expression de la relation charge-déplacement suivante, qui correspond à l’augmentationde ce défaut en fonction du chargement :

F (v) = Fc

1− 1

1 +v

v0

(4.5)

4.1.3 Extension aux calculs numériques

Lien avec les calculs aux valeurs propres

Les problèmes de flambage, ainsi que les problèmes de calculs vibratoires sont tréssouvent résolus, en première approche grâce à des calculs aux valeurs propres. On rappelleque ces calculs sont de la forme : [A]− λ[B] = [0].

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 89

Notre problème de flambage dans les poutres droites s’écrit :∫ l

0

(N(x)

(u′∗ + v

′v′∗)

+M(x)v′′∗)dx+ Fu∗(l) = 0, ∀(u∗, v∗)C.A.

ce qui peut encore se simplifier en utilisant les relations N ′(x) = 0 et N(l) = −F = N(x).On peut alors réécrire le problème à résoudre sous la forme :

kel(v, v∗)− Fkσ(v, v∗) = 0,∀v∗ ∈ C.A.

avec

kel(v, v

∗) =

∫ l

0

EIv′′(x)v∗′′(x)dx

kσ(v, v∗) =

∫ l

0

v′(x)v∗′(x)dx

dans ces expressions on reconnaît la rigidité élastique de flexion kel, et une nouvelle rigiditéqui exprime l’influence de la géométrie sur la rigidité de la structure kσ, appelée rigiditégéométrique.

Cette formulation est celle utilisée dans les codes de calculs par éléments finis,aussi bien pour les milieux continus que pour les structures, ou encore la mécanique desfluides. On utilise dans ces codes des calculs aux valeurs propres qui fournissent les chargescritiques d’apparition des instabilités, mais aussi les modes propres associés définis à uneconstante multiplicative prés.

États de contraintes associés au flambage

Si on veut connaître l’état de contraintes dans une structure, les calculs de valeurspropres ne suffisent pas puisque les modes propres associés sont définis à une constantemultiplicative près. Il est donc nécessaire de mener un calcul complet non-linéaire enaugmentant le chargement progressivement, jusqu’à atteindre le point de bifurcation quicaractérise le passage d’une configuration stable à une configuration instable (voir Figure4.2 page 81). D’un point de vue numérique, ce point de bifurcation correspond à l’annula-tion de l’un des pivots de la matrice de rigidité du système, qui alors n’est plus inversible.Il faut donc, pour passer ou seulement détecter ce point, introduire un défaut géométriquede sorte qu’on s’éloigne légèrement de la branche fondamentale de la réponse.

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 90

4.2 Modes et fréquences propres de vibration en flexiondans les poutres droites

4.2.1 Introduction

Dans les problèmes traités dans le cadre de la statique, on suppose que le charge-ment imposé (déplacement, efforts, température, ...) passe instantanément de sa valeurinitiale à sa valeur finale, faisant ainsi passer le milieu considéré d’une configuration ini-tiale stable à une autre configuration contrainte mais stable. Les paramètres à calculer(contraintes, déformations, déplacements, réactions, ...) sont relatifs à l’état final et parconséquent ne dépendent pas du temps.

Dans le cadre de la dynamique au contraire les chargements imposés peuvent varierdans le temps. De plus, même dans la configuration initiale le milieu peut être caracté-risé par des fonctions du temps (conditions de position et de vitesse). Les paramètresà calculer sont donc également des fonctions du temps, et de nouvelles grandeurs appa-raissent pour caractériser le mouvement, c’est-à-dire la variation de configuration dansle temps. Ce sont les paramètres cinématiques tels que les vitesses, les accélérations, lesfréquences, ... qui n’existent pas dans le cas de la statique. Ce domaine de la dynamiquedes solides et des structures est un vaste champs de l’ingénierie. La démarche spécifiqueappliquée ici aux poutres est détaillée dans le cadre des systèmes discrets et continusdans le support de cours http://www.emse.fr/~drapier/index_fichiers/CoursPDF/Dynamique-3A/Dynamique-SDrapier-janvier2012.pdf.

Nous nous intéresserons ici plus particulièrement aux vibrations libres des poutresdroites à plan moyens chargées dans ce plan (en abrégé poutres droites à plan moyen,Figure 2.2), c’est à dire la réponse vibratoire caractérisée par les modes et pulsationspropres. Ces caractéristiques intrinsèques aux structures considérées dépendent à la foisdes caractéristiques mécaniques (rigidité = module d’Young E), géométriques (section Set moment quadratique par rapport à −→z I) et de masse (masse volumique ρ).

4.2.2 Équations de la dynamique des poutres droites à planmoyen

Nous avons vu dans le cadre de la statique que les équations des poutres quel-conques peuvent se déduire, via le Principe des Puissances Virtuelles, de la formulationgénérale de l’équilibre statique des milieux continus.

Dans le cadre de la dynamique, la démarche est similaire. Elle fait cette fois-ci intervenir les accélérations, c’est à dire les variations dans le temps des vitesses dessections des poutres. Pour les poutres droites à plan moyen, le vecteur des déplacements

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 91

d’un point M d’une section de la poutre représentée sur la Figure 2.2 page 37 est dans lecadre de la dynamique :

−→u (−→x , t) =

uM(−→x , t) = u(−→x0, t)− yφ(−→x0, t)

vM(−→x , t) = v(−→x0, t)

Donc les accélérations correspondantes s’écrivent :

−→γ (−→x , t) =

uM(−→x , t) = u(−→x0, t)− yφ(−→x0, t)

vM(−→x , t) = v(−→x0, t)

où la notation utilisée est définie par X =∂2X

∂t2. De façon similaire, on définit les dérivées

partielles par rapport à x, X ′ =∂X

∂x.

Finalement, en intégrant sur la section de la poutre la puissance virtuelle dévelop-pée par le terme d’origine inertielle des équations de la dynamique des milieux continus(ρ est la masse volumique du milieu constitutif supposé homogène dans toute la section) :∫

Ω

ρ−→u (−→x , t)−→u ∗(−→x , t)dΩ =

∫ l

0

ρ

∫S

[(u− yφ

)(u∗ − yφ∗) + (vv∗)

]dl

=

∫ l

0

(ρS [uu∗ + vv∗] + ρIφφ∗

)dl

on arrive aux équations d’équilibre dynamique des poutres (Tableau 4.2-b, page 92) :

4.2.3 Vibrations libres - application à la flexion simple

Calcul de vibrations libres

Le calcul des modes et fréquences propres d’une poutre est très utilisé dans l’analysevibratoire de ces éléments de structure. Il permet de déterminer la réponse intrinsèque àla structure, c’est à dire qui ne dépend pas des sollicitations extérieures, et qui définit lespectre des fréquences et déformées (modes) qu’il faudra éviter de solliciter si l’on veutque la structure n’ait pas un comportement critique.

Notamment, la connaissance des fréquences propres permet de dimensionner lessections de manière à éviter les phénomènes de résonance. Ce phénomène bien connu derésonance survient lorsque la fréquence d’une ou plusieurs sollicitations extérieures esten phase, ou très peu déphasé (proche), d’une des fréquences propres du système. On aalors, en l’absence d’amortissement, l’amplitude de la déformée qui tend rapidement versl’infini, ce qui conduit généralement à la ruine de la structure. Pour exemple, on peutciter le décret interdisant les marches militaires sur les ouvrages civils tels que les ponts,ceci suite à l’effondrement d’un pont sous les pas cadencés d’un régiment.

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 92

(a) (b)

⇓ ⇓

1/ Champ C.A. - C.I.

. −→u (−→x , t) =−→ud(−→x , t)−→x ∈ ∂Ωu ,∀t

.

−→u (−→x , tj) = −→u (j)

−→u (−→x , tj) =

−→u (j)

∀ −→x

2/Équilibre intérieur∂σij(

−→x , t)∂xj

+ fi(−→x , t) = ρui(

−→x , t)

3/Équilibre au bordσij(−→x , t)nj(−→x ) = F d

i (−→x , t)∀ −→x ∈ ∂ΩF

4/Loi de comportementσij(x, t) = Lijklεkl(x, t)

1/ Champ C.A. - C.I.. u(xi, t) = udi (t), v(xi, t) = vdi (t), φ(xi, t) = φdi (t) ,∀t

.

u(x, tj) = u(j), v(x, tj) = v(j), φ(x, tj) = φ(j)

u(x, tj) = u(j), v(x, tj) = v(j), φ(x, tj) = φ(j), ∀−→x

2/ Équilibre intérieur∂N(x, t)

∂x+ px(x, t) = ρS

∂2u(x, t)

∂t2

∂T (x, t)

∂x+ py(x, t) = ρS

∂2v(x, t)

∂t2

∂M(x, t)

∂x+ T (x, t) + cz(x, t) = ρI

∂2φ(x, t)

∂t2

3/ Équilibre au bordN(xi, t) = N i(t), T (xi, t) = T i(t), M(xi, t) = M i(t)

4/ Loi de comportement

N(x, t) = ES∂u(x, t)

∂xT (x, t) = kGSγ(x, t)

(γ(x, t) = ∂v(x,t)

∂x− φ(x, t)

)M(x, t) = EI

∂φ(x, t)

∂x

Table 4.2: Correspondances des équilibres dynamiques d’un milieu continu et d’une poutredroite à plan moyen.

Lorsque le spectre des fréquences propres est connu on peut, en modifiant la géo-métrie ou la masse volumique des sections, décaler le spectre ou bien modifier son étendue.

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 93

Dans le cadre de la vibro-accoustique par exemple, la note émise par un diapason dépendde la géométrie (longueur, section) des branches aussi bien que du matériau employé.

Le calcul de modes propres est quant à lui notamment utilisé dans le domaine del’analyse modale qui consiste à exprimer le déplacement quelconque d’un structure dansla base (infinie dans le cas des milieux continus) formée par ses vecteurs propres. C’estune technique couramment employée au niveau analytique aussi bien que dans les codesde calculs par éléments finis par exemple, qui permet de réduire considérablement la tailledu système à résoudre. La connaissance de cette base modale permet également d’étudierla stabilité d’une structure soumise à une excitation proportionnelle à un ou plusieursmodes propres.

Vibrations libres d’une poutre en flexion simple

Nous étudions plus spécifiquement les vibrations libres d’une poutre en flexionsimple. Les déformations de cisaillement seront négligées. On montre par ailleurs que leterme inertiel relatif à −→z (ρIφ(x, t)) peut être négligé devant les effets engendrés parl’accélération due au déplacement transverse (ρSv(x, t)).

Dans le cadre de la flexion, seules les équations d’équilibre relativement auxvecteurs −→y et −→z de la base de référence sont utilisées. Les vibrations libres de la poutresont analysées lorsque l’ensemble des efforts est nul. Pour la suite de cette approche, lecisaillement sera négligé dans les poutres.

1/ Montrer que le système à résoudre s’écrit (équation 4.6) :

∂2v(x, t)

∂t2= −EI

ρS

∂4v(x, t)

∂x4(4.6)

2/ On recherche la solution de ce problème spatio-temporel sous la forme découpléesuivante v(x, t) = ψ(x)β(t). En désignant par ω la pulsation propre du système, montrerque ce problème (Eq. 4.6) se met sous la forme d’une équation différentielle à variables

séparables (Eq. 4.7) où α4 = ω2 ρS

EIzest une constante positive :

d4ψ(x)

dx4= α4ψ(x)︸ ︷︷ ︸ d2β(t)

dt2+ ω2β(t) = 0︸ ︷︷ ︸

(I) (II)

(4.7)

3/ Montrer que la solution générale est de la forme :

v(x, t) = (B1 sinαx+B2 cosαx+B3 sinhαx+B4 coshαx)A cos (ωt− ϕ)

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 94

Figure 4.7: Poutre droite sur appui simple.

Poutre sur appuis simples

La poutre considérée repose sur 2 appuis simples, comme indiqué sur la Figure 4.9.

1/ Donner les conditions aux limites, en déduire les équations en espace qui per-mettront de résoudre le problème.

2/ Montrer que la nieme pulsation propre du système est :

ωn =n2π2

l2

√EIzρS

(4.8)

3/ D’après la formulation qui conduit à l’équation (4.6), on obtient désormais unsystème qui caractérise l’équilibre pour toute pulsation de rang n. Écrire la solution de cesystème :

vn(x, t) = ψn(x)βn(t)

4/ La solution exacte de ce problème étant la somme des solutions particulières derang n, montrer qu’elle s’écrit sous la forme :

v(x, t) =∞∑n=1

Bn sinnπx

lcos (ωnt− ϕn)

où les Bn sont des constantes, les modes étant définis à une constante multiplicative prés.Les déphasage ϕn sont déterminés grâce aux conditions initiales (à t = 0).

5/ Tracer les premiers modes propres en fonction de x en prenant B1 = 1.

La solution générale des vibrations libres étant connue, un calcul d’analyse modalepermettra, par exemple, de connaître facilement la réponse de la structure à une solli-citation générale. Par exemple, si la poutre étudiée est sollicitée en son milieu par uneimpulsion, les modes propres pairs ne seront pas "actifs", car le déplacement résultant nepourra être qu’impair : pas de point d’inflexion au centre, sous la charge.

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 95

4.2.4 Vibrations libres - calculs numériques

La détermination des calculs de modes et fréquences propres de vibration faitégalement appel à ces calculs aux valeurs propres. En effet, la formulation du problèmedynamique à résoudre en flexion (avec ρ la masse volumique du matériau constitutif) est :

∂2v(x, t)

∂t2− EI

ρS

∂4v(x, t)

∂x4= 0

En prenant une solution de la forme v(x, t) = V (x)eiωt, on peut reformuler le problème àrésoudre :

kel(V, V∗)− ω2

∫ l

0

ρSV (x)V ∗(x)dx = 0

où ω2 est l’ensemble des fréquences propres recherché.

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 96

4.3 Extension : réponse post-bifurquée d’une poutre

Nous venons de caractériser le point critique où des poutres simples en compressionpassent de la solution fondamentale (équilibre comprimé a = 0) à une solution secondaire(équilibre fléchi). La détermination des charges critiques est possible grâce à la résolutiondu problème d’équilibre linéarisé, elles constituent en effet les valeurs propres de ce pro-blème. Cependant, il parait indispensable de caractériser plus complètement le comporte-ment de cette poutre ou d’une structure après le "dépassement" d’un point de bifurcation.Le cadre linéaire est abandonné, il est alors nécessaire de travailler sur la formulation non-linéaire de l’équilibre, seule capable de caractériser l’équilibre non-linéaire géométrique dusystème. L’objectif principal de cette étude non-linéaire doit être de discuter la nature dela branche bifurquée (symétrique ou non-symétrique) et surtout sa stabilité (comporte-ment sur-critique (Figure7.5-(a)) ou comportement sous-critique (Figure 7.5-(b))).

λ!

a!

(0,!λc)!

branche fondamentale

défaut croissant

branche secondaire

(0,!λc)!

λ!

a!

Figure 4.8: Comportements post-bifurqués sur-critique (a) et sous-critique (b).

La résolution complète du problème non-linéaire est néanmoins très délicate. C’est pour-quoi, des résultats analytiques ne seront accessibles qu’en simplifiant le problème non-linéaire près du point de bifurcation afin de connaître le comportement initial de la branchebifurquée. Ce résultat local est très important puisque nous allons voir que l’équation pro-posée pour la branche bifurquée est aussi valable loin du point de bifurcation lorsqu’unecomparaison avec les éléments finis est effectuée. Deux approches sont présentées ici etnous verrons que leur "philosophie" générale est très semblable ainsi que leur résultatdans notre cadre simple, l’objectif de ces méthodes étant de présenter un développementde la charge appliquée et de la déformée près du point de bifurcation. Le comportementpost-bifurqué de la poutre homogène sera traité à l’aide de la réduction de Lyapounov etSchmidt présentée de manière très rigoureuse dans [Léger et al., 1998]. Pour la poutre surfondation élastique, une méthode classique de perturbation est présentée, à l’aide d’undéveloppement en séries de la charge et de la déformée.

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 97

4.3.1 Poutre homogène

Résolution du problème linéarisé

Pour connaître le comportement post-flambé d’une poutre homogène, c’est-à-direcaractérisée par une longueur L et une rigidité en flexion EI, la modélisation la plussimple est celle de la poutre elastica proposée par Euler en 1745. L’hypothèse principalede la poutre elastica est de supposer que l’allongement de la ligne moyenne est nul. Lavariable cinématique caractérisant le comportement de la structure est alors tout simple-ment l’angle de rotation des sections de la poutre par rapport à la position initiale, notéθ tel que schématisé sur la Figure 4.3.

L’énergie de déformation de la poutre se limite donc à la seule écriture de sonénergie de flexion. Dans le cas présenté, la longueur de la poutre ne variant pas, on peutécrire directement ds = dx, ce qui conduit à une expression de la courbure simplifiée dθ

ds.

L’énergie de flexion est donc donnée par l’équation (4.9).

Wf =1

2

∫ L

0

EI

(dθ

dx

)2

dx (4.9)

Le travail des efforts extérieurs est simplement donné par le produit du chargementextérieur λ avec le raccourcissement ∆ dû à la flexion de la poutre (Eq. 4.10).

Wext = λ∆ = λ

∫ L

0

(1− cos θ)dx (4.10)

d’où l’écriture de l’énergie potentielle (Eq. 4.11).

E(λ, θ) = Wf −Wext =1

2

∫ L

0

(EI

(dθ

dx

)2

− 2λ(1− cos θ)

)dx (4.11)

Le calcul de la variation de l’énergie potentielle conduit à l’équation (4.12) qui doitêtre nulle à l’équilibre compte tenu de la stationnarité de E(λ, θ).

δE(λ, θ) =

∫ L

0

(EIθ′δθ′ − λ sin θδθ) dx = 0 (4.12)

Une intégration par parties sur le premier terme de (4.12) conduit à l’écriture del’équation d’équilibre à l’intérieur de la poutre (Eq. 4.13).

EIθ′′ + λ sin θ = 0 (4.13)

L’équation (4.13) n’est pas linéaire et compte tenu de ce qui a été dit précédem-ment, il suffit de linéariser cette équation pour obtenir la charge critique. Ce qui est

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 98

possible en écrivant qu’au premier ordre, sin θ = θ. L’équation linéarisée est alors lasuivante (Eq. 4.14).

EIθ′′ + λθ = 0 (4.14)

La résolution de (4.14) est classique et la charge critique est obtenue en posantθ(x) = Θ cos(πx/L), ce qui conduit à l’expression suivante pour la charge critique (Eq.4.15) :

λc =π2EI

L2(4.15)

Comportement post-bifurqué

Réduction de Lyapounov et Schmidt Le cadre général de la théorie du post-flambage est un système élastique caractérisé par la fonctionnelle énergie potentielleE(u, λ) et par l’ensemble des déplacements cinématiquement admissibles (C.A.). Commenous avons pu déjà le voir, les équations d’équilibre du problème sont obtenues à partirde la stationnarité de l’énergie potentielle (Eq. 4.16).

δE(λ, u) = 0 ∀ δu C.A.(0) (4.16)

On peut donc définir un opérateur différentiel f(λ, u) de l’espace vectoriel C.A.(0),défini par la relation (4.17). Il peut s’écrire sous la forme d’une somme d’un terme linéaire(L(λ)u), quadratique (Q(u, u)) et d’ordre supérieur (Eq. 4.18). A l’équilibre cet opérateurest nul car δE est linéaire par rapport à δu.

< f(λ, u), δu >= δE(λ, u) (4.17)

f(λ, u) = L(λ)u+Q(u, u) + r(λ, u) (4.18)

On peut noter que le terme linéaire provient directement de la seconde variationde l’énergie potentielle (< L(λ)u, δu >= δE2(λ, u)). Ainsi, tant que L(λ) est inversible, labranche fondamentale (u = 0) sera solution, un point de bifurcation va apparaître lorsqueL(λ) ne sera plus inversible, ce qui revient à résoudre le problème classique linéarisé. Cetterésolution conduit à obtenir une charge critique λc et le but de l’analyse post-flambageest d’étudier les solutions de l’équation f(λ, u) = 0 au voisinage de λc. La première étapeconsiste à donner un développement de Taylor de l’énergie potentielle pour u et (λ− λc)petits (Eq. 4.19).

E(λ, u) = E0 + E2(λ, u) + E3(λc, u) + θ((λ− λc)u3 + u4) (4.19)

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 99

En identifiant avec les termes présentés dans l’équation (4.18), on peut écrire :< L(λ)u, δu >= δE2(λ, u; δu)

< Q(u, u), δu >= δE3(λc, u; δu)

r(λ, u) = θ((λ− λc)u2 + u3)

(4.20)

On note U l’élément qui génère le noyau de l’opérateur linéaire (dim=1), on adonc L(λc)U = 0. L’idée de la méthode de Lyapounov et Schmidt est de décomposerl’inconnue "u" du problème en une partie proportionnelle au noyau de L(λc) et une partieorthogonale à ce noyau (Eq. 4.21). En effet, on admet que l’équation L(λc)u = f admetune solution si et seulement si "f" est orthogonal au mode de flambage U , c’est-à-dire quela projection de v sur le noyau est nulle (Eq. 4.22). On utilise donc l’inversibilité partiellede L(λc) pour décomposer l’écriture de u près du point de bifurcation.

u = aU + v a ∈ R, v ∈ U⊥ (4.21)

∫ L

0

f(x)U(x)dx = 0 (4.22)

On peut de même définir un opérateur de projection sur U⊥ (Eq. 4.23).

P (u) = u(x)− U(x)

∫ L

0

u(x)U(x)dx∫ L

0

U2(x)dx

(4.23)

La première étape consiste à donner une expression approchée de v. L’idée est deprojeter l’équation f(λ, u) = 0 sur U⊥ à l’aide du projecteur P afin d’utiliser l’inversibilitéde L(λc) dans l’espace vectoriel U⊥ (corollaire du théorème du rang). L’équation ainsiprojetée permet d’obtenir localement une solution unique pour v grâce au théorème desfonctions implicites (Eq. 4.24).

v(a, λ) = a2v2 + θ(a(λ− λc) + a3) avec v2 = −L−1(λc)P (Q(U,U)) (4.24)

Le problème projeté sur U⊥ peut en fait être interprété comme un problème deminimisation partielle de l’énergie par rapport à v. La deuxième étape consiste à reporterla solution trouvée pour v dans la forme de l’énergie potentielle qui sera alors appeléeénergie potentielle réduite et qui va dépendre de a et λ. Cette énergie sera notée F (λ, a).La dernière équation du problème est obtenue en écrivant que l’énergie potentielle réduiteest stationnaire, ce qui conduit à la relation (4.25).

∂F

∂a(λ, a) = 0 (4.25)

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 100

Au voisinage d’un point critique, nous n’avons qu’une approximation de v mais quiest suffisante, en général, pour discuter la nature de la bifurcation. L’étude du système estainsi ramenée à celle d’une seule équation scalaire que l’on appelle équation de bifurcation.Celle-ci peut être présentée sous une forme un peu plus explicite pour la discussion de lanature de la branche bifurquée.

En effet, si on part de la forme donnée par l’équation (4.26) pour l’énergie poten-tielle, on peut lui donner une expression approchée en faisant apparaître les déplacementsconnus U et v2.

E(λ, u) = E0 + E2(λ, u) + E3(λ, u) + E4(λ, u) (4.26)

La forme approchée de l’expression (4.26) est donnée par l’équation (4.27) avec E ′2la dérivée de E2 par rapport à λ.

F (λ, a) = (λ− λc)a2E ′2(λc, U) + a3E3(λc, U) + a4(E4(λc, U)− E2(λc, v2)) (4.27)

D’où l’équation de la branche bifurquée qui peut se mettre localement sous la forme(4.28) avec les coefficients Ci définis par les relations (4.29).

λ = λc + C1a+ C2a2 (4.28)

C1 = −3E3(λc, U)

2E ′2(λc, U)

C2 = −2(E4(λc, U)− E2(λc, v2))

E ′2(λc, U)

(4.29)

La symétrie (C1 = 0 ou C1 6= 0) et la stabilité (signe de C2) de la branche peuventainsi être discutées.

Application au cas de la poutre homogène Si on reprend l’exemple de la poutrehomogène traité dans le premier paragraphe de cette section, l’énergie potentielle pouvaitse mettre sous la forme suivante (Eq. 4.30) :

E(λ, θ) =1

2

∫ L

0

(EI

(dθ

dx

)2

− 2λ(1− cos θ)

)dx (4.30)

Par analogie avec la forme de l’énergie potentielle donnée dans l’équation (4.26),une forme approchée de (4.30) est déterminée (Eq. 4.32) grâce au développement limitéde cos θ, pour θ petit (Eq. 4.31).

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 101

cos θ = 1− θ2

2+θ4

24(4.31)

E(λ, θ) = E2(λ, θ) + E4(λ, θ) (4.32)

avec

E2(λ, θ) =1

2

∫ L

0

(EI

(dθ

dx

)2

+ λθ2

)dx

E4(λ, θ) = − 1

24

∫ L

0

λθ4dx

Comme cela a été présenté dans la résolution du problème linéarisé, l’expression dumode de flambage est donnée par θ(x) = a cos(πx/L) et la charge critique est celle de larelation (4.15). Ainsi, l’équation de la branche bifurquée présentée dans le cadre théoriqueprécédent peut être évaluée. Il faut tout d’abord déterminer une expression approchéede v2 (Eq. 4.24) qui dans notre cas est très simple puisqu’en première approximation,elle est nulle (Q(θ, θ) = 0). Les coefficients Ci peuvent ainsi être déterminés en prenantU = cos(πx/L), v2 = 0 et λc = π2EI/L2 (Eqs. 4.33).

C1 = 0 car E3(λ, u) = 0

C2 = −2E4(λc, U)

E ′2(λc, U)=

π2EI

12L2

∫ L

0

cos4(πx/L)dx

1

2

∫ L

0

cos2(πx/L)dx

=

π2EI

12L2

3L

81

2

L

2

=π2EI

8L2

(4.33)

L’équation de la branche bifurquée est donc la suivante (Eq. 4.34) :

λ = λc +π2EI

8L2a2 (4.34)

Cette branche est symétrique et son comportement est stable (C2 > 0). Un résultatidentique est trouvé en raisonnant sur le déplacement transverse de la poutre au lieu deconsidérer l’angle θ. La constante C2 est alors donnée par C2 = π4EI/(8L4). Le produitπ2/L2 supplémentaire dans cette expression provient de la première approximation de θqui est en fait la dérivée de la flèche.

Ce qui est plus remarquable, c’est que l’équation de la branche construite dansun cadre restreint, c’est-à-dire près du point de bifurcation, est aussi valable pour desdéplacements a important. Ce point est mis en évidence grâce à une comparaison avecdes résultats éléments finis obtenus par une analyse non-linéaire sous ABAQUSTM . Non-seulement la validité locale de l’équation (4.34) est indéniable prés du point de bifurcation,

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 102

Figure 4.9: Comportement post-bifurqué pour une poutre homogène : comparaison branchethéorique et calculs E.F. non-linéaires.

mais elle est aussi soulignée pour des valeurs élevées de a (Fig. 4.9). Outre la courbethéorique, la courbe E.F. présentée correspond à un calcul sur une poutre dont la valeurdu défaut sur le premier mode de flambage est 0.001 mm.

Un autre point important est de signaler que dans ce cas simple, la partie ortho-gonale au mode est nulle, l’étude aurait pu donc se faire en considérant seulement que ladéformée après flambage correspondait à un accroissement du premier mode de flambage(θ(x) = Θ cos(πx/L)). Des résultats identiques auraient donc été trouvées en réinjectantdirectement ce mode dans la forme de l’énergie potentielle et en minimisant par rapportau paramètre a. Cette méthode est une méthode approchée, elle est parfois utilisée etcorrespond en fait à une méthode dite de Ritz où la difficulté majeure consiste à postulerdés le départ une représentation correcte du champ de déplacement. Dans notre exemplesimple, l’accroissement du mode constitue le terme prépondérant du champ de déplace-ment après le passage du point de bifurcation et donc la méthode de Ritz constitue unetrès bonne approximation.

4.3.2 Poutre sur fondation élastique à deux paramètres

Le cas du flambage d’une poutre sur une fondation élastique est très répandu etlargement utilisé. En effet, ce cas générique permet de représenter de nombreux étatslimites de l’ingénierie, par exemple le comportement de couches minces sur des substrats,... Dans ces modèles, contrairement au cas de la poutre homogène vu ci-dessus, la solutionbifurquée résulte de l’équilibre entre la propension de la poutre à fléchir et la rigidité dela fondation qui s’oppose (ou accompagne) ce mouvement. On trouvera donc une solution

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 103

du mode critique (lors du passage du point de bifurcation) de forme harmonique, maiscette fois avec des harmoniques de rangs plus grandes que 1.

Comme nous avons pu le voir, la réduction de Lyapounov et Schmidt a été élaboréedans un cadre très rigoureux et très formel. La difficulté principale réside dans la déter-mination de l’expression approchée de la partie orthogonale au mode (v). Pour le cas dela poutre sur fondation élastique, une autre méthode est présentée mais la "philosophiegénérale" reste sensiblement la même. Elle est appelée méthode régulière de perturbationet consiste à écrire le champ de déplacement et la charge appliquée sous forme de sériesvalides près du point de bifurcation (Eq. 4.35) où w(x) représente le déplacement trans-verse de la poutre selon −→x3 conformément à la Figure 4.10, et a l’amplitude du premiermode de flambage.

w(x) = aw1(x) + a2w2(x) + a3w3(x)

λ = λc + aλ1 + a2λ2

(4.35)

1

e3

.e2 .e3 e1

Figure 4.10: Modèle de poutre sur fondation élastique, de rigidité normale k et de rigiditéen cisaillement k1.

Contrairement à l’exemple précédent de la poutre homogène, nous allons travaillerdirectement sur l’équation d’équilibre de la poutre sur fondation, celle-ci étant obtenuebien entendu par la stationnarité de l’énergie potentielle. L’équation non-linéaire (4.36)traduit l’équilibre de la poutre en grandes déformations ou k représente la rigidité trans-verse de la fondation et k1 la rigidité en cisaillement transverse (le ’ correspond à la dérivéepar rapport à x). Cette équation a déjà été présentée par de nombreux auteurs ([Lee &Waas, 1996], [Wu & Zhong, 1999]).

EI(w′′′′+ 4w′′′w′′w′+w′′3) +λw′′(1−w′2)−12 + kw(1−w′2)− k1w

′′(1−w′2)−12 = 0 (4.36)

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 104

Résolution du problème linéarisé

La résolution du problème linéarisé va nous conduire à l’expression de la chargecritique de la poutre sur fondation, il suffit pour cela de conserver les termes linéairesprésents dans (4.36). L’équation d’équilibre linéarisée est alors la suivante (Eq. 4.37).

EIw′′′′ + λw′′ + kw − k1w′′ = 0 (4.37)

Afin de résoudre cette équation différentielle du quatrième ordre, on pose les no-tations suivantes, α2

1 = (λ − k1)/EI et α2 = k/EI. La solution de l’équation (4.37) estdonnée par (4.38).

w(x) = A cos(ω1x) +B sin(ω1x) + C cos(ω2x) +D sin(ω2x) (4.38)

avec

ω21 =

α21 +

√α4

1 − 4α2

2

ω22 =

α21 −

√α4

1 − 4α2

2

La prise en compte des conditions aux limites (w(0) = w(L) = w′′(0) = w′′(L) = 0)conduit au système matriciel suivant :

1 0 1 0

cosω1L sinω1L cosω2L sinω2L

−ω21 0 −ω2

2 0

−ω21 cosω1L −ω2

1 sinω1L −ω22 cosω2L −ω2

2 sinω2L

A

B

C

D

=

0

0

0

0

Pour ne pas avoir la solution triviale (A = B = C = D = 0), le déterminant de la

matrice 4× 4 doit être nul, ce qui conduit à la condition (4.39).

sin(ω1L) = 0 ou sin(ω2L) = 0 (4.39)

Ces deux conditions conduisent à la même relation (Eq. 4.40) avec n ∈ N quicorrespond en fait au nombre de demi-ondes le long de la poutre.

α21 = α2

L2

n2π2+n2π2

L2(4.40)

En remplaçant α21 et α2 par leur expression respective, la charge critique est écrite

sous la forme (4.41) avec ω = nπ/L.

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 105

λc = EIω2 +k

ω2+ k1 (4.41)

Cette charge critique sera minimale pour nc > 1, la valeur de nc est obtenue parminimisation de (4.41) par rapport à n (Eq. 4.42).

nc =L

π4

√k

EI(4.42)

Comportement post-bifurqué

On adopte donc la décomposition en séries (Eqs. 4.35) du champ de déplacementtransverse et de la charge appliquée, w(x) et λ sont alors remplacés par ces expressionsdans la forme non-linéaire de l’énergie potentielle (Eq. 4.36). On rappelle que a est unpetit paramètre qui matérialise l’amplitude du premier mode. Dans la forme approchéede l’équation d’équilibre ainsi obtenue, seuls les termes en a, a2 et a3 sont conservés ettrois équations sont ainsi déduites en regroupant chacune des puissances de a (Eqs. 4.43).

EIw′′′′1 + λcw′′1 + kw1 − k1w

′′1 = 0 (4.43a)

EIw′′′′2 + λcw′′2 + kw2 − k1w

′′2 = −P1w

′′1 (4.43b)

EIw′′′′3 + λcw′′3 + kw3 − k1w

′′3 = −EI(4w′′′1 w

′′1w′1 + w′′1

3)− λ1w

′′2 (4.43c)

−λ2w′′1 −

λc2w′′1w

′1

2+ kw1w

′1

2+k1

2w′′1w

′1

2

Il reste maintenant à résoudre chacune de ces trois équations afin de déterminerles différents termes de la série. Pour l’équation (4.43a), la résolution est simple car onretrouve l’équation d’équilibre linéarisée, la solution w1(x) associée est donc la suivante(Eq. 4.44).

w1(x) = sin(ωx) (4.44)

Pour la deuxième équation (Eq. 4.43b), la solution w1 déjà trouvée peut être re-portée dans le second membre. La seule solution possible pour w2 est de poser w2(x) =

b sin(ωx), ce qui conduit à la condition de nullité de λ1 et donc à la solution trivialew2(x) = 0 pour w2.

bEIω4 − bλcω2 + bk + bk1ω2 = λ1ω

2

=⇒ b (EIω4 − λcω2 + k + k1ω2)︸ ︷︷ ︸

=0

= λ1ω2

=⇒

λ1 = 0

w2(x) = 0

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 106

La résolution de la troisième équation (Eq. 4.43c) passe tout d’abord par l’évalua-tion du second membre (Eq. 4.45) qui est maintenant possible grâce aux résolutions desdeux premières équations.

−EI(4w′′′1 w′′1w′1 + w′′1

3)− λ1w′′2 − λ2w

′′1 −

λc2w′′1w

′1

2 + kw1w′1

2 +k1

2w′′1w

′1

2

=

(−EI

8ω6 +

3

8kω2 + λ2ω

2

)sin(ωx) +

3

8(kω2 − 3EIω6) sin(3ωx)

(4.45)

Comme pour la résolution de (4.43b), on retrouve la nullité du coefficient multi-plicatif de sin(ωx), ce qui permet de déterminer λ2 (Eq. 4.46).

λ2 =EI

8ω4 − 3

8k (4.46)

L’équation à résoudre (Eq. 4.43c) peut donc être réécrite afin de déterminer ledernier terme du développement de w(x) (Eq. 4.47).

EIw′′′′3 + λcw′′3 + kw3 − k1w

′′3 =

3

8(kω2 − 3EIω6) sin(3ωx) (4.47)

D’où l’expression de w3(x) obtenue facilement en posant w3(x) = c sin(3ωx) et enidentifiant la constante c (Eq. 4.48).

w3(x) =3ω2

64

(k − 3EIω4

9EIω4 − k

)sin(3ωx) (4.48)

Ainsi, l’écriture complète du déplacement transverse et de la charge appliquée prèsdu point de bifurcation est la suivante (Eq. 4.49) :

w(x) = a sin(ωx) + a3 3ω2

64

(k − 3EIω4

9EIω4 − k

)sin(3ωx)

λ = λc + a2

(EI

8ω4 − 3

8k

) (4.49)

On retrouve ainsi l’équation de la branche bifurquée qui comme pour la poutrehomogène est symétrique, la stabilité de celle-ci sera fonction du signe de λ2. Pour déter-miner le signe de λ2, il est nécessaire de trouver son expression lorsque λc est minimumet donc correspond à la charge critique de la poutre. La minimisation de λc par rapport àn, déjà établie pour déterminer nc (4.42) conduit à la condition (4.50), ce qui permet dedéterminer λ2 (Eq. 4.51).

ω4 =k

EI(4.50)

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 107

λ2 =k

8− 3k

8= −k

4(4.51)

Ainsi, lorsque la charge critique est minimale, le comportement post-bifurqué estinstable. Le second terme de λ2, lié à la rigidité de la fondation, est prépondérant devantle terme de flexion de la poutre. Il est de plus intéressant de noter que ce terme de flexioncorrespond exactement au terme déjà trouvé dans le cadre de la poutre homogène avecn = 1. Les deux méthodes conduisent donc aux deux mêmes résultats concernant ladétermination du comportement post-flambage près du point de bifurcation.

Une autre remarque concerne le terme d’ordre 3 du champ de déplacement trans-verse qui est complètement négligeable devant a. En effet, des estimations numériquesmontrent que même pour une valeur de a assez importante devant la longueur L de lapoutre (a/L = 0.04), l’amplitude de ce terme n’atteint pas 1% de la valeur de a. Deplus, on remarque que λ2 est indépendant de k1, ce qui montre que le cisaillement ne joueaucun rôle dans le comportement post-bifurqué de la poutre, cependant celui-ci joue unrôle relativement important pour la valeur de la charge critique λc.

Figure 4.11: Comportement post-bifurqué pour une poutre sur fondation à un paramètre :comparaison branche théorique et calculs E.F. non-linéaires (EI = 1.12 107 mm4, L =

400 mm, k = 100 N.mm−2).

Comme pour la poutre homogène, un très bon accord avec un calcul non-linéaireE.F. est mis en évidence (Fig. 4.11). Pour ce calcul, la fondation a été modélisée grâce àl’option ∗FOUNDATION qui permet d’appliquer des charges linéiques proportionnellesà une constante le long d’une poutre. Cette constante est directement associée au para-mètre k déjà introduit. Les calculs présentés dans la figure (4.11) sont ceux d’une poutresur fondation à un paramètre mais nous avons vu que le terme de cisaillement n’intervenait

Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 108

pas dans le comportement post-bifurqué. Outre la courbe théorique, les autres courbesproviennent de calculs effectués à partir d’un défaut initial sur le mode pour trois valeursdifférentes (a0 = 0.001mm; 0.005mm; 0.01mm).

Références bibliographique

Lee & Waas, 1996 Lee, S. and Waas, A. (1996). Initial post-buckling behavior of afinite beam on an elastic foundation. Int. J. Non-Linear Mechanics, 31(3) :313–328.

Léger et al., 1998 Léger, A., Combescure, A., and Potier-Ferry, M. (1998). Bifurca-tion, flambage, stabilité en mécanique des structures. Technical report, IPSI.

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Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques 109

5.

Plaques

Sommaire5.1 Plaques et coques - généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

5.1.1 Définition d’une plaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112

5.1.2 Cas des coques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112

5.2 Plaques planes de Love-Kirchhoff . . . . . . . . . . . . . . . . . 113

5.2.1 Cinématique en flexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114

5.2.2 Champ de déplacement complet . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116

5.2.3 Déformations et contraintes généralisées . . . . . . . . . . . . . 117

5.2.4 Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122

5.2.5 Introduction des efforts tranchants . . . . . . . . . . . . . . . . 125

5.2.6 Exemples de plaque de Love-Kirchhoff en flexion . . . . . . . . 131

5.3 Plaques de Hencky-Mindlin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134

5.3.1 Cinématique et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134

5.3.2 Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135

5.3.3 Lois de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137

110

Plaques 111

Nous avons vu que les poutres, solides monodimensionnels, dérivaient de simplifi-cations géométrique et cinématique d’un milieu 3D. Le principe de base est que, compte-tenu des faibles dimensions des sections par rapport à la dimension principale de la lignemoyenne, le déplacement de tout point de la poutre peut être exprimé simplement en fonc-tion des déplacements et rotations des sections mesurés en leur centre de gravité. Dans lecas des plaques et coques, cette fois seule une des dimensions est faible devant les autres.L’idée reste la même que dans les poutres, à savoir que le déplacement, dans l’espace,de tout point de la plaque peut s’exprimer en fonction des déplacements et rotations dessections (brins) qui se comportent comme des solides (barres) indéformables. Mais cettefois, les sections (voisines) sont reliées entre elles par un feuillet moyen (Figure 5.1), doncdans le plan, et non plus le long d’une ligne moyenne.

La différence entre plaque et coque peut être comparée à la distinction qui est faiteentre poutres droites et poutres courbes. Si bien que les problèmes de coques deviennentassez vite complexes à traiter du fait de l’expression des grandeurs physiques, et doncdes équilibres statiques, par rapport à la courbure locale. Les modèles de plaque et decoques font encore actuellement l’objet de nombreux développements scientifiques, essen-tiellement pour représenter le plus finement possible les effets ’3D’ avec le moins d’effortsde calculs. Dans notre cas, les théories ’classiques’ sont développées et assimilées dans lecas des plaques.

À travers ce chapitre, on recourra systématiquement au Principe des PuissancesVirtuelles pour établir les équations d’équilibre intérieur et aux bords. Pour cela, on partirade la cinématique posée qui nous permettra d’exprimer les déformations par dérivation.Ensuite, les contraintes seront déduites, via la loi de comportement qui prendra uneforme particulière. Finalement, le PPV pourra être explicité complètement, et le choixparticulier du champ de déplacement virtuel conduira aux équations d’équilibres. L’intérêtde l’utilisation du PPV dans le cas des plaques et coques devient vite évident compte-tenu de la complexité des équilibres, notamment sur les bords qui peuvent être aussi bienrectilignes que courbes. Dans ce dernier cas, l’intuition seule du mécanicien peut êtrerapidement mise en défaut.

5.1 Plaques et coques - généralités

Il existe différentes configurations de plaques. Dans la littérature, les plaques sonttrès souvent classées selon leur géométrie (plaque plane, circulaire), la sollicitation subie(charges ponctuelles, réparties), mais également selon leur comportement type (mem-brane, flexion) et la prise en compte ou non du cisaillement transverse. Pour ce dernieraspect, on distingue les plaques sans cisaillement (souvent minces et homogènes dans leurépaisseur), dites plaques de Love-Kirchhoff, et les plaques prenant en compte le cisaille-ment (souvent épaisses et/ou hétérogènes dans leur épaisseur), dites plaques de Hencky-Mindlin. On peut rapprocher ces théories des cinématiques de poutres, respectivement

Plaques 112

Bernoulli et Timoshenko.

5.1.1 Définition d’une plaque

On appelle plaque un corps solide dont une des dimensions (appelée épaisseur) estpetite devant les autres. Typiquement, le rapport de la taille caractéristique de la plaquesur l’épaisseur est : R

h> 5. La surface moyenne de la plaque, appelée également feuillet

moyen, est plane. On note ω le domaine de l’espace occupé par le plan moyen de la plaque

(Figure 5.1). Le corps occupe le domaine Ω =

x1

x2

x3

/

(x1

x2

)∈ ω, |x3| ≤ h

2

.

Figure 5.1: Définition d’une plaque et système d’efforts associé.

Comme dans le cas des poutres, les grandeurs vont maintenant être définies nonplus en 3D, mais dans le plan et selon l’épaisseur de la plaque. Nous allons donc distinguerles grandeurs (déplacements, déformations, efforts, contraintes, ...) relatives au plan de laplaque et dans la direction transverse. Posons, par convention, que les indices grecques(α, β, δ, γ, . . .) prennent les valeurs de 1 à 2, les indices romains (i, j, k, l,m, . . .) étantréservés aux sommations de 1 à 3. Dans ce cas, les efforts par exemple (volumiques etsurfaciques) seront décomposés de la façon suivante (voir Figure 5.1) :

−→f (−→x ) = fα(−→x )−→x α + f3(−→x )−→x3

−→F d(−→x ) = F d

α(−→x )−→x α + F d3 (−→x )−→x3

α = 1, 2

5.1.2 Cas des coques

Dans le cas général des coques, le plan moyen est courbe (Figure 5.2). Il en résulteque toutes les grandeurs s’expriment par rapport aux courbures locales. On distingue

Plaques 113

alors divers cas selon que la coque est simplement courbée, à courbure double, ou encorecylindrique.

Figure 5.2: Définition d’une coque et repère local.

5.2 Plaques planes de Love-Kirchhoff

Dans le cas des plaques de Love-Kirchhoff, le cisaillement transverse est négligé,principalement du fait l’épaisseur supposée très petite devant la taille caractéristique duplan de la plaque. Cette théorie s’applique donc en premier lieu aux plaques minces,c’est-à-dire dont le rapport de la taille caractéristique sur l’épaisseur R

h≥ 10.

Pour cette étude des plaques, nous nous plaçons dans le cadre de la RdM et faisonsles hypothèses classiques des petites déformations et des petits déplacements (HPP). Dansce cadre, la configuration géométrique finale sera confondue avec la configuration initiale(pas de forces suiveuses par exemple). Le matériau constitutif de la plaque est homogèneélastique linéaire isotrope.

Hypothèses de Love-Kirchhoff et flexion pure

Le cadre des plaques de Love-Kirchhoff repose sur les hypothèses suivantes :Hyp. L-K1 Dans le cadre de l’hypothèse de Love-Kirchhoff, la cinématique d’un brinde matière normal au plan moyen s’apparente au mouvement d’un corps solide (pas dedéformation transverse possible). Ceci équivaut à l’hypothèse de Navier dans les poutres.

Hyp. L-K2 La seconde hypothèse de Love-Kirchhoff est que ce ’brin’ isolé par l’espritreste perpendiculaire au plan moyen tout au long de la déformation. Ceci équivaut à

Plaques 114

l’hypothèse de Bernoulli pour les poutres, conduisant à négliger les déformations de ci-saillement.

À partir de la première de ces hypothèses, on déduit que le déplacement per-pendiculaire à la plaque est indépendant de la variable x3 de l’épaisseur. Il est égal audéplacement du centre de gravité du brin :

u3(x1, x2, x3) = u3(x1, x2, 0) = w(x1, x2) (5.1)

5.2.1 Cinématique en flexion

Afin de simplifier la mise en place de la théorie des plaques de Love-Kirchhoff,dans un premier temps nous considérerons uniquement le cas de la flexion simple. Dansce cadre, on suppose que les efforts imposés sont uniquement des efforts transverses, c’est-à-dire qu’aucune sollicitation statique volumique (fα(−→x ) = 0) ou ponctuelle (F d

α(−→x ) =

0), et aucun déplacement de membrane qui pourrait donner lieu à des déplacements demembrane, n’est imposé dans le plan moyen. Les seuls chargements sont, pour le moment,f3(−→x ) 6= 0, F d

3 (−→x ) 6= 0 et des moments appliqués sur le bord de la plaque.

Nous avons établi la forme du déplacement transverse en tout point de la plaque(Eq. 5.1), on peut alors définir le champ de déplacement 2D caractérisant le déplacementde tout point de la plaque. Toujours dans le cas de la flexion pure, pour définir ce champde déplacement, on peut raisonner de deux façons différentes.

Intégration des déformationsOn suppose que les efforts imposés restent faibles. On en déduit directement que lesconditions de bord libre sont vérifiées pour la surface :

σ(xα, x3 = ±h2) · −→n = 0 avec −→n = −→x3,∀−→xα ∈ ω

→ σ13 = σ23 = σ33 = 0⇔ σi3 = 0(5.2)

D’après la minceur supposée de la plaque, on peut penser que ces contraintes vont êtrenulles également à l’intérieur de la plaque. Pour un matériau constitutif élastique linéaire,ceci correspond à des déformations εα3 ≈ 0 (σα3 = 2µεα3) :

2εα3 ≈ 0 =∂uα∂x3

+∂w

∂xα

↓ on intègre en x3

→ uα(x1, x2, x3) = uα(x1, x2, 0)− x3∂w

∂xα+O(x2

3)

Comme pour l’instant seule la flexion est considérée, le déplacement de membrane dufeuillet moyen uα(x1, x2, 0) est pris nul. Finalement, le champ de déplacement de flexion

Plaques 115

en HPP s’écrit simplement : uα(x1, x2, x3) = −x3∂w(x1, x2)

∂xα.

Construction géométriqueOn peut également observer le déplacement des brins matériels entre l’état initial etl’état final, comme représenté sur la Figure 5.3. Dans le cas de la flexion pure, les points

Figure 5.3: Rotation des brins due à la flexion seule.

de la ligne moyenne ne subissent pas de déplacement dans le plan, mais seulement desdéplacements transverses tels que précisés dans l’Eq. 5.1. Considérons les rotations dessections dues à la flexion dans les deux plans (O,−→x1,

−→x3) et (O,−→x2,−→x3), telles que présentées

respectivement sur les Figures 5.4-a et 5.4-b.

Considérons la rotation des sections dans le plan (O,−→x1,−→x3), représentée sur la Figure 5.4-

a. Le déplacement d’un point M a donc deux composantes dans ce plan : −→u (x1, x2, x3) =

w(x1, x2)−→x3 +−−−→MM ′. Cette distance

−−−→MM ′ se calcule à partir de l’angle φ2 et de l’altitude

du point M , ce qui dans notre cas conduit à :

−−−→MM ′ =

(x3 sinφ2

x3 (1− cosφ2)

)(O,−→x1,−→x3)

Compte-tenu de l’hypothèse des petites rotations, cette expression se simplifie : sinα ≈ α

et cosα ≈ 1. Ce qui conduit à−−−→MM ′ = x3φ2

−→x1.

L’angle de rotation φ2 est, grâce à l’hypothèse L-K2, par construction géométriquedirectement égal à la variation du déplacement transverse le long de −→x1. On notera quepour avoir une rotation positive, il est nécessaire d’imposer un déplacement transversenégatif, comme illustré sur la Figure 5.4-a. Au final, le déplacement résultant s’écrit alors

Plaques 116

(a) (b)

Figure 5.4: Rotation des sections dans (a) le plan (O, x1, x3) et (b) dans le plan (O, x2, x3)

pour une plaque en flexion pure.

simplement en fonction de l’altitude et du gradient de déplacement transverse :

φ2(xα) = −∂w(x1, x2)

∂x1

u1(−→x ) = −x3∂w(xα)

∂x1

(5.3)

En considérant les mêmes hypothèses dans le plan (O,−→x2,−→x3), on aboutit au champ

de déplacement complet pour les plaques minces en flexion pure (Eq. 5.4). On notera que,conformément à la Figure 5.4-b, la rotation φ1 est positive pour un déplacement transversepositif :

−→u (−→x ) =

uα(−→x ) = −x3

∂w(x1, x2)

∂xα

w(−→x ) = w(x1, x2)

(5.4)

Dans la suite, on pourra noter, pour des raisons de concision, les dérivées partielles avecdes indices : ∂f

∂xi= f,i.

5.2.2 Champ de déplacement complet

Les déplacements étant établis pour la flexion seule, nous pouvons aisément étendrece champ de déplacement de façon à représenter tous les déplacements dans l’espace detout point de la plaque. Comme dans le cas des poutres droites à plan moyen (Eq. 2.1),le torseur de déplacement de tout point de la plaque s’écrit simplement à partir desdéplacements de membrane et des rotations du centre de gravité du brin considéré. Maisici, les rotations et les déplacements de membrane se décomposent selon les deux directionsdu plan de la plaque :

−→φ (xα) = φ1(xα)−→x1 + φ2(xα)−→x2 et −→u (xα) = u1(xα)−→x1 + u2(xα)−→x2.

Plaques 117

Le déplacement peut se mettre sous la forme d’un torseur des déplacements :

UM(xα) =

−→φ (xα) =

∣∣∣∣∣∣∣w,2(xα)

−w,1(xα)

0

−→uM(xα) = −→u (xα) +−−→MG ∧

−→φ (xα)

=

∣∣∣∣∣∣∣u1(xα)

u2(xα)

w(xα)

+

∣∣∣∣∣∣∣0

0

−x3

∧w,2(xα)

−w,1(xα)

0

∣∣∣∣∣∣∣=

∣∣∣∣∣ uα(xα)− x3w,α(xα)

w(xα)

(M)

(5.5)

5.2.3 Déformations et contraintes généralisées

Connaissant le champ de déplacement, le tenseur des déformations se déduit sim-plement dans le cas des plaques. La loi de comportement permet ensuite d’en déduire lescontraintes, puis les contraintes généralisées.

Déformations

es déformations s’écrivent donc simplement, en petites déformations, comme lapartie symétrique du gradient des déplacements. En petites déformations et dans notrecadre 2D , dans un repère cartésien le tenseur gradient des déplacements est :

∇(−→u ) =

∂u1(xα)

∂x1

− x3∂2w(xα)

∂x21

∂u1(xα)

∂x2

− x3∂2w(xα)

∂x1∂x2

0

∂u2(xα)

∂x1

− x3∂2w(xα)

∂x2∂x1

∂u2(xα)

∂x2

− x3∂2w(xα)

∂x22

0

0 0 0

(5.6)

Compte-tenu de la forme de ce tenseur, on l’écrit généralement directement sous uneforme 2D simplifiée. On peut, de plus, faire apparaître les tenseurs de déformations demembrane, noté e(xα), et de courbure, noté κ(xα), mais en 2D :

ε2D(xα) =

∂u1(xα)

∂x1

12

(∂u1(xα)

∂x2

+∂u2(xα)

∂x1

)sym

∂u2(xα)

∂x2

︸ ︷︷ ︸

+ x3

−∂

2w(xα)

∂x21

−∂2w(xα)

∂x1∂x2

sym −∂2w(xα)

∂x22

︸ ︷︷ ︸

= e(xα) + x3κ(xα)(5.7)

Plaques 118

ou encore sous forme indicielle, ces déformations s’écrivent :

ε2Dαβ (xα) =

1

2

(∂uα∂xβ

+∂uβ∂xα

)︸ ︷︷ ︸ + x3

(−∂

2w(xα)

∂xα∂xβ

)︸ ︷︷ ︸

= eαβ(xα) + x3καβ(xα)

Contraintes généralisées

Connaissant les déformations généralisées, il est très simple d’expliciter lescontraintes via la loi de comportement du matériau constitutif, puis les contraintes géné-ralisées. Ces contraintes généralisées résultent, par définition, de l’intégrale sur l’épaisseurde la plaque du torseur résultant du transport du vecteur contrainte (relativement à lanormale courante) au centre de gravité du brin considéré. On définit, comme dans le casdes poutres 3D, les contraintes généralisées de membrane (Eq. 5.8a) et de courbure (Eq.5.8b), qui ont respectivement la dimension de force par unité de longueur et de momentpar unité de longueur :

Nαβ(xα) =

∫x3

σ2Dαβ (xα)dx3 (5.8a)

Mαβ(xα) =

∫x3

x3σ2Dαβ (xα)dx3 (5.8b)

On peut représenter ces contraintes généralisées sur une plaque, comme sur la Figure5.5 dans le cas d’une plaque rectangulaire, possédant donc deux normales −→x1 et −→x2. Lescontraintes généralisées de membrane sont représentées aisément (Figure 5.5-a). Les mo-ments de flexion M11 et M22 sont également représentés assez intuitivement, par contre lemoment de torsion M12 dû aux contraintes de cisaillements est plus délicat à représenter,il tend en fait à gauchir le plan de la plaque (Figure 5.5-b).

Loi de comportement

Nous pouvons maintenant relier les contraintes aux déformations, puis lescontraintes généralisées au torseur des déformations (Eq. 5.7). Considérons pour cela unmatériau constitutif isotrope élastique linéaire. La loi de comportement ’matériau’ s’écritdonc classiquement, en raideur ou en souplesse :

σ11 = (λ+ 2µ)ε11 + λε22 + λε33

σ22 = λε11 + (λ+ 2µ)ε22 + λε33

σ33 = λε11 + λε22 + (λ+ 2µ)ε33

σ12 = 2µε12

σα3 = 2µεα3

ε11 =σ11

E− ν

E(σ22 + σ33)

ε22 =σ22

E− ν

E(σ11 + σ33)

ε33 =σ33

E− ν

E(σ11 + σ22)

ε12 =σ12

2G

εα3 =σα3

2G

Plaques 119

(a)

(b)

Figure 5.5: Contraintes généralisées (a) de membrane et (b) de flexion sur une surfaceélémentaire de plaque.

On rappelle que les conditions de bords libres se traduisent par σi3 = 0 (Eq.5.2). Nous avons vérifié σα3 = 0 pour établir la cinématique des plaques minces. Parcontre, il reste à vérifier σ33 = 0. Cette condition conduit, via la loi de comportementécrite en souplesse, à une déformation normale transverse ε33 non nulle, ce qui va àl’encontre de la cinématique établie qui donne une composante 33 nulle pour le tenseurde déformations (Eq. 5.6). En fait, cette déformation normale transverse à la plaque estinduite par effet de Poisson, elle est donc proportionnelle aux déformations de membranes :ε33(−→x ) = −νε22(−→x ) = −νε11(−→x ). La déformation normale transverse est donc, pour lesmatériaux courants, de l’ordre de 30% des déformations dans le plan. Mais, compte-tenu

Plaques 120

de l’épaisseur de la plaque qui est au maximum de 110

de la taille caractéristique du plan,la variation de l’épaisseur de la plaque est donc très faible, en l’occurrence : ν h

R< 3

100.

L’erreur commise en utilisant la cinématique négligeant cette déformation est donctrès faible. On peut toutefois, sans problème, prendre en compte cette déformation. Ense plaçant dans une hypothèse de contraintes planes valable pour des plaques fines, lacondition de contrainte normale transverse nulle en surface de la plaque est vérifiée, etune relation entre la déformation normale transverse ε33 et les déformations normales ε11

et ε22 dans le plan en découle :

σ33 = λε11 + λε22 + (λ+ 2µ)ε33 = 0⇒ ε33 = − λ

λ+ 2µ(ε11 + ε22) (5.9)

La loi de comportement en contraintes planes s’exprime simplement :

ε11 =1

E(σ11 − νσ22)

ε22 =1

E(σ22 − νσ11)︸ ︷︷ ︸↓

ε11 + νε22 =1− ν2

Eσ11

ε22 + νε11 =1− ν2

Eσ22

(5.10)

ce qui se met classiquement sous la forme matricielle suivante :

σ2Dαβ =

E

1− ν2

[(1− ν)ε2D

αβ + νε2Dγγ δαβ

](5.11)

La loi de comportement de la plaque s’exprime simplement, en introduisant la loide comportement en contraintes planes (Eq. 5.11) dans les expressions des contraintesgénéralisées (Eqs. 5.8a et 5.8b) :

Nαβ(xα) =

∫x3

E

1− ν2

[(1− ν)ε2D

αβ + νε2Dγγ δαβ

]dx3

Mαβ(xα) =

∫x3

E x3

1− ν2

[(1− ν)ε2D

αβ + νε2Dγγ δαβ

]dx3

Dans le cas le plus général, où le matériau constitutif peut varier à travers l’épais-seur de la plaque, comme dans le cas des matériaux composites stratifiés par exemple, onobtient comme dans le cas des poutres 3D (Eq. 1.15) une expression générale :

Nαβ(xα)

Mαβ(xα)

=

[[A] [B]

[B] [D]

eαβ(xα)

καβ(xα)

(5.13)

Plaques 121

où les sous-matrices [A], [D] et [B] représentent respectivement les rigidités de membrane,de flexion, et le couplage entre les comportements de membrane et de flexion. Pour uneplaque homogène possédant des propriétés mécaniques identiques dans toute son épais-seur, la sous-matrice [B] est nulle et les comportements de membrane et de courbure sontindépendants. Les rigidités de membrane et flexion se réduisent à des scalaires :

Nαβ(xα) =E(xα) h

1− ν2(xα)︸ ︷︷ ︸ [(1− ν)eαβ + νeγγδαβ] (5.14a)

A(xα) =

∫ h2

−h2

E(xα)

1− ν2(xα)dx3

Mαβ(xα) =E(xα) h3

12(1− ν2(xα))︸ ︷︷ ︸ [(1− ν)καβ + νκγγδαβ] (5.14b)

D(xα) =

∫ h2

−h2

E(xα) x23

1− ν2(xα)dx3

avec A(xα) la rigidité de membrane et D(xα) la rigidité de flexion qui peuvent le caséchéant dépendre de la position sur la plaque. Comme dans le cas des poutres, la rigidité demembrane dépend essentiellement de la surface latérale de la plaque, tandis que la rigiditéde flexion dépend essentiellement de l’épaisseur de la plaque. On retrouve également deslois de comportement de forme similaire à celles des poutres pour une section symétriquepar exemple : N(x1) = ESe1(x1) et Mfα(x1) = EIακα (Eqs. 1.14).

Remarque : afin d’être consistant du point de vue de l’énergie issue des termes decisaillement, il est nécessaire de préciser la mesure du cisaillement considérée ainsi quela façon d’exprimer la loi de comportement. Pour cela, comparons l’énergie de déforma-tion en cisaillement caractérisant la plaque sous diverses formes. Partant de l’énergie dedéformation en cisaillement

Wcis =1

2

∫Ω

(σ12(−→x )ε12(−→x ) + σ12(−→x )ε21(−→x )) dΩ =1

2

∫Ω

2 σ12(−→x )ε12(−→x )dΩ

=1

2

∫ω

2

(∫x3

σ12(xα)ε12(xα) dx3

)dω

=1

2

∫ω

2

(∫x3

2 G ε12(xα) ε12(xα) dx3

)dω =

1

2

∫ω

4 G h ε212(xα)dω

(5.15)

et par définition de l’énergie de déformation en cisaillement dans le cas des plaques :

Wcis =1

2

∫ω

(N12(xα) e12(xα) + N21(xα) e21(xα)) dω =1

2

∫ω

2N12(xα) e12(xα)dω

avec la loi de comportement en membrane de la plaque qui s’écrit, pour un matériauconstitutif homogène isotrope élastique linéaire :

Nαβ(xα) =E(xα) h

1− ν2(xα)[(1− ν)eαβ + ν eγγδαβ] N12(xα) =

E h

1 + νe12(xα) = 2 G h e12(xα)

Plaques 122

l’énergie de déformation en cisaillement s’écrit alors :

Wcis =1

2

∫ω

4 G h e212(xα)dω

par définition de (5.15)−−−−−−−−−−−−−→ e12 = ε12

Par contre, le stockage sous la forme de Voigt (passage d’un tenseur d’ordre 2 symé-trique à un vecteur à 6 composantes) est tel que la contribution de l’effort de cisaillementapparaît une seule fois :

N11

N22

N12

=

× × ×× × ×× × G h

·

e11

e22

e12

et dans ce cas la déformation considérée sera, en général, celle au sens de l’ingénieure12 = 2ε12 (et la courbure double κ12 2κ12) afin de ne pas modifier la structure dela loi de comportement ’matériau’, et obtenir une énergie de cisaillement cohérente avecl’expression (5.15) issue de l’expression générale :

Wcis =1

2

∫ω

N12(xα) e12(xα)dω =1

2

∫ω

4 G h ε212(xα)dω

5.2.4 Équations d’équilibre

Équilibre intérieur

Pour établir ces équations d’équilibre, nous allons recourir au PPV. Établissonstout d’abord la puissance virtuelle des efforts intérieurs (défini en 1.19 page 24) en choi-sissant un champ virtuel de la forme de la cinématique de Love-Kirchhoff :

P∗int(−→u∗) = −

∫Ω

σM

: ε∗MdΩ

= −∫ω

(∫x3

σ2D(xα) : ε2D ∗(xα)dx3

)dω

= −∫ω

(∫x3

σ2D(xα) :(e∗(xα) + x3κ

∗(xα))dx3

)dω

= −∫ω

(∫x3

σ2D(xα)dx3

)︸ ︷︷ ︸ : e∗(xα)dω −

∫ω

(∫x3

x3σ2D(xα)dx3

)︸ ︷︷ ︸ : κ∗(xα)dω

N(xα) M(xα)(5.16)

En introduisant les tenseurs des contraintes généralisées de membrane (N(xα) défini dansl’Eq. 5.8a) et de flexion (ou moments fléchissants M(xα) définis dans l’Eq. 5.8b) dans cetteexpression de la puissance virtuelle des efforts intérieurs, on aboutit à

P∗int(−→u∗) = −

∫ω

(Nαβ(xα)e∗αβ(xα) + Mαβ(xα)κ∗αβ(xα)

)dω

Plaques 123

L’écriture du PPV requiert l’écriture de la puissance virtuelle des actions exté-rieures. Pour cela, définissons la pression p(xα) qui règne sur la plaque suivant la normale−→x3. Cette pression, définie dans l’Eq. 5.17a est la somme de l’intégration sur l’épaisseur desforces de volume relativement à la normale à la plaque, mais aussi du différentiel d’effortssurfaciques appliqués de part et d’autre de la plaque (Figure 5.6). Il existe d’autre partdes efforts répartis dans le plan de la plaque réunis dans un terme pα(xα) (5.17b).

p(xα) = F+3 (xα) + F−3 (xα) +

∫ h2

−h2

f3(xα)dx3 (5.17a)

avec

F+

3 (xα) = σ(xα,h2) · −→x3

F−3 (xα) = −σ(xα,−h2

) · −→x3

pα(xα) =

∫ h2

−h2

fα(xα)dx3 (5.17b)

Enfin des efforts et moments sont imposés sur le contour ∂ω de la plaque de normale−→ν (xα). La puissance virtuelle induite par ces termes de bord, qui sont des réactionssur ∂ωu et des contraintes statiques sur ∂ωF , est un peu plus délicate à expliciter, nousnous y intéresserons plus spécifiquement ultérieurement. Pour l’instant, regroupons lacontribution de ces efforts imposés par le contact avec l’extérieur sous le terme P∗contact(

−→u∗).

Figure 5.6: Efforts extérieurs agissant sur une plaque.

Finalement, le PPV s’écrit pour les plaques de Love-Kirchhoff :

P∗int(−→u∗) + P∗ext(

−→u∗) = 0,∀−→u∗

⇔ −∫ω

(Nαβ(xα)e∗αβ(xα) + Mαβ(xα)κ∗αβ(xα)

)dω+∫

ω

(p(xα)w∗(xα) + pα(xα)u∗α(xα)) dω + P∗contact(−→u∗) = 0,∀

−→u∗

(5.18)

Plaques 124

Essayons d’exprimer ces quantités de façon homogène par rapport au déplacement virtuel.Notamment la puissance virtuelle des efforts intérieurs peut être intégrée par partie pourfaire apparaître les grandeurs à l’intérieur de la plaque et sur ses bords :

P∗int(−→u∗) = −

∫ω

(Nαβ(xα)e∗αβ(xα) + Mαβ(xα)κ∗αβ(xα)

)dω

↓ par symétrie des tenseurs des déformations

= −∫ω

(Nαβ(xα)u∗α,β(xα)−Mαβ(xα)w∗,αβ(xα)

)dω

↓ intégration par parties en β

=

∫ω

(Nαβ,βu

∗α −Mαβ,βw

∗,α

)dω −

∫∂ω

(Nαβu

∗α −Mαβw

∗,α

)νβds

↓ intégration par parties en α

=

∫ω

(Nαβ,βu∗α + Mαβ,αβw

∗) dω −∫∂ω

(Nαβνβu

∗α −Mαβνβw

∗,α + Mαβ,βναw

∗) ds︸ ︷︷ ︸=

∫ω

(Nαβ,βu∗α + Mαβ,αβw

∗) dω − P∗int bord(−→u∗)

(5.19)La composante de la puissance virtuelle des efforts intérieurs le long du bord de la plaque,notée P∗int bord(

−→u∗), sera utilisée ultérieurement pour expliciter les conditions statiques et

cinématiques sur ce bord.

Nous cherchons ici à établir les équations d’équilibre intérieur. Écrivons le PPV(Eq. 5.18) en utilisant la nouvelle forme de la puissance virtuelle des efforts intérieurs (Eq.5.19) : ∫

ω

(Nαβ,βu∗α + Mαβ,αβw

∗ + pw∗ + pαu∗α) dω − P∗intbord(

−→u∗) + P∗contact(

−→u∗) = 0, ∀

−→u∗

(5.20)En choisissant un champ virtuel nul au bord de la plaque et non nul à l’intérieur, on endéduit aisément les équations d’équilibre locales qui sont découplées entre membrane etdirection transverse :

Nαβ,β(xα) + pα(xα) = 0 (5.21a)

Mαβ,αβ(xα) + p(xα) = 0 (5.21b)

Remarque : on notera la similitude de ces équations avec, par exemple, les équationsd’équilibre des poutres droites de Bernoulli : dN(x)

dx+ px = 0 et −d2M(x)

dx2+ py = 0 en

l’absence de moments répartis.

Plaques 125

Équations de Navier

Ces équations d’équilibre en contraintes (Eqs. 5.21) peuvent s’exprimer en fonctiondes déplacements seulement en y injectant les lois de comportement (Eqs. 5.14a et 5.14b),ce sont alors les équations de Navier. Considérons le cas de la flexion pure par exemple,pour une plaque dont les propriétés géométriques et mécaniques sont invariantes dansl’espace : D(xα),α = 0. Dans ce cas, les équations de Navier sont :

Mαβ,αβ(xα) + p(xα) = 0 ⇔ D (1− ν)καβ,αβ + νκγγ,αβδαβ+ p(xα) = 0

⇔ D

(1− ν)∂2καβ∂xα∂xβ

+ ν∂2κγγ∂xα∂xβ

δαβ︸ ︷︷ ︸+ p(xα) = 0

ν∂2κγγ∂x2

α

en remarquant que 2∂2κ12(xα)

∂x1∂x2

=∂2κ11(xα)

∂x22

+∂2κ22(xα)

∂x21

= 2∂4w(xα)

∂x21∂x

22

⇔ −D(∂4w(xα)

∂x41

+ 2∂4w(xα)

∂x21∂x

22

+∂4w(xα)

∂x42

)+ p(xα) = 0

↓ ∆· = ∂2·∂x2

1

+∂2·∂x2

2

Laplacien en cartésien

⇔ −D ∆2w(xα) + p(xα) = 0

(5.22)

Remarque : de nouveau, cette expression est comparable à l’équation d’équilibre locald’une poutre droite de Bernoulli en flexion pure : −EI d

4v(x)dx4

+ py = 0

5.2.5 Introduction des efforts tranchants

Pour expliciter complètement le problème à résoudre, il reste à établir les conditionsd’équilibre au bord. Dans ce cas, il est nécessaire d’introduire les efforts tranchants quijusqu’ici n’ont pas été pris en compte. En effet, même si les déformations de cisaillementtransverse sont négligées, comme dans le cas des poutres de Bernoulli il est indispensablede prendre en compte ces efforts tranchants susceptibles d’induire notamment de la flexion.

Par définition, les efforts tranchants résultent de l’intégration sur l’épaisseur descontraintes de cisaillement :

Qα(xα) =

∫x3

σα3(xα)dx3 (5.23)

Plaques 126

Pour caractériser l’équilibre de la plaque en prenant en compte ces efforts tran-chants, considérons l’équilibre d’un élément de plaque en projection dans le plan et àtravers l’épaisseur :

(3D)∂σij∂xj

+ fi (2D)

∂σαβ∂xβ

+∂σα3

∂x3

+ fα = 0

∂σα3

∂xα+∂σ33

∂x3

+ f3 = 0

(5.24)

La seconde équation peut être intégrée directement :∫ h2

−h2

(σi3,i + f3)dx3 =

∫ h2

−h2

(∂σα3

∂xα+∂σ33

∂x3

+ f3

)dx3 = 0

=∂Qα

∂xα+ [σ33(x3)]

h2

−h2

+

∫ h2

−h2

f3(xα)dx3︸ ︷︷ ︸= Qα,α + p(xα) = 0 (5.25)

Cette équation traduit l’équilibre entre les effort répartis transverses et la variation desefforts tranchants dans le plan.

Faisons maintenant apparaître les moments de flexion, tels que définis en 5.8b.Pour cela considérons la première équation, qui caractérise l’équilibre dans le plan, etintégrons son produit avec l’altitude à travers la plaque :∫ h

2

−h2

x3 (σαi,i + fα)dx3 =

∫ h2

−h2

x3

(∂σαβ∂xβ

+∂σα3

∂x3

+ fα

)dx3 = 0

=∂

∂xβ

∫ h2

−h2

x3σαβdx3︸ ︷︷ ︸−∫ h

2

−h2

1× σα3dx3︸ ︷︷ ︸+ [x3 σα3(x3)]h2

−h2︸ ︷︷ ︸

=∂

∂xβMαβ − Qα + 0(Eq. 5.2) (5.26)

Finalement, les équations d’équilibre intérieur sont :

Équations d’équilibre intérieur des plaques de Love-Kirchoff

Plaques 127

Nαβ,β(xα) + pα(xα) = 0 (5.27a)

Mαβ,β(xα)−Qα(xα) = 0 (5.27b)

Qα,α(xα) + p(xα) = 0 (5.27c)

On note que les équations 5.27b et 5.27c combinées sont équivalentes à l’équation 5.21bétablie précédemment sans les efforts tranchants.

Remarque : on notera la similitude de ces équations avec, par exemple, les équationsd’équilibre des poutres droites de Bernoulli : dN(x)

dx+ px = 0, dM(x)

dx+ T (x) + cZ = 0, et

dT (x)dx

+ py = 0.

Conditions au bord

Pour définir complètement le problème, il reste à exprimer les conditions aux limitesstatiques et cinématiques, c’est-à-dire sur le bord ∂ω de la plaque. Afin de déterminer laforme des efforts que l’on peut imposer sur le bord de la plaque, on propose d’utiliser lestermes de bord du PPV tel que définis dans l’Eq. 5.19. Considérons dans cet équilibre unchamp virtuel nul à l’intérieur du domaine. La nullité des puissances virtuelles développéespar les réactions aux appuis conduit à trois types de conditions aux limites s’excluant surles bords :

(Eq.5.20) → P∗intbord(−→u∗) = P∗contact(

−→u∗),∀

−→u∗ ∈ ∂ω

m

P∗contact(−→u∗) =

∫∂ω

(Nαβνβu

∗α −Mαβνβw

∗,α + Mαβ,βνα︸ ︷︷ ︸w∗

)ds (5.28)

Qανα d’après (5.27b)

m Nαβνβ = 0

Mαβνβ = 0

Qανα = 0

ou

uα(xα) = 0

w,α(xα) = 0

w(xα) = 0

(5.29)

On peut donc affiner les types de conditions cinématiques et statiques que l’onpeut imposer sur la plaque, qui sont de la forme des conditions ci-dessus (Eq. 5.29). Ilsuffit alors d’exprimer le travail des efforts de contact induits par les efforts extérieurs etles réactions, soit :

Plaques 128

P∗intbord(−→u∗) = P∗contact(

−→u∗),∀

−→u∗ ∈ ∂ω

m∫∂ω

(Nαβνβu

∗α −Mαβνβw

∗,α + Qαναw

∗) ds =

∫∂ωF

(Ndαβνβu

∗α −Md

αβνβw∗,α + Qd

αναw∗) ds+(5.30)∫

∂ωu

(Nαβνβu

d∗α −Mαβνβw

d∗,α + Qαναw

d∗) ds(5.31)

Le travail virtuel produit par les efforts de réaction étant nul (Eq. 5.31), seul le termesur le bord ∂ωF est non nul (Eq. 5.30). On en déduit les conditions statiques sur lebord en prenant un champ de déplacement virtuel non-nul sur ce bord, et les conditionscinématiques se déduisent naturellement pour un champ cinématiquement admissible. Aufinal, les conditions complètes sont :

(Nαβ − Nd

αβ

)νβ =(

Mαβ −Mdαβ

)νβ =(

Qα −Qdα

)να =

ou champ−→u C.A.

uα(xα) = udα(xα)

w,α(xα) = wd,α(xα)

w(xα) = wd(xα)

(5.32)

Il est essentiel de remarquer à ce point que l’intégration des équations de Navier enflexion pure par exemple (Eq. 5.22) requiert quatre conditions aux limites. Or, nous avonsici trois conditions aux limites sur chaque bord, soit une condition de plus que nécessaire.Par exemple, pour un bord libre de normale −→ν = −→x 1, on a les conditions qui se déduisentde (5.29) :

M11 = 0

M12 = 0

Q1 = 0

(5.33)

En fait cette forme de conditions aux limites (Eq. 5.28) a été initialement introduite parPoisson, mais Kirchhoff a montré (en 1850 !) que ces trois conditions étaient redondantes,et que deux seulement suffisaient pour déterminer complètement les flèches satisfaisantles équations de Navier (Eq. 5.22). En fait ce problème se ramène à déterminer localementles conditions aux limites à appliquer. En effet, la condition cinématique portant sur legradient (w∗,α) peut ne pas être triviale dans la plupart des cas. Et si on calcule ce gradientpar rapport au repère global, on ne dispose pas des bonnes informations pour poser lesconditions aux limites qui s’expriment par rapport au bord, et donc par rapport à la baselocale formée par les vecteurs tangent et normal à l’abscisse curviligne s. Calculons cegradient :

−−→grad (w(xα)) =

∂w(xα)

∂s

∂s

∂xα

−→xα︸ ︷︷ ︸ +∂w(xα)

∂ν

∂ν

∂xα

−→xα︸ ︷︷ ︸=

∂w(xα)

∂s−→τ +

∂w(xα)

∂ν−→ν

Plaques 129

Donc la condition w∗,α(xα) se traduit par :

w∗,α(xα)⇔ ∂w∗(xα)

∂sτα +

∂w∗(xα)

∂ννα = 0

Cette dernière condition n’étant pas triviale, essayons d’exprimer la puissance virtuelle desefforts de bord en utilisant le calcul de ce gradient (Eq. 5.34). Considérons tout d’abordl’expression faisant intervenir le gradient du déplacement transverse :∫∂ω

Mαβνβw∗,αds =

∫∂ω

Mαβνβ

(∂w∗(xα)

∂sτα +

∂w∗(xα)

∂ννα

)ds

↓ remarque : le bord n’a pas de bord !⇒∫∂ω

f∂g

∂sds = −

∫∂ω

∂f

∂sgds

= −∫∂ω

(∂

∂s(Mαβνβταw

∗)−Mαβνβνα∂w∗

∂ν

)ds (5.34)

En utilisant cette expression pour expliciter la puissance virtuelle des actions de contact(Eq.5.28), on aboutit aux conditions suivantes :

P∗contact(−→u∗) =

∫∂ω

(Nαβνβu

∗α +

(∂

∂s(Mαβνβτα) + Mαβ,βνα︸ ︷︷ ︸

)w∗ −Mαβνβνα

∂w∗

∂ν

)dS

F (M,Q)

Nαβνβ = 0

∂s(Mαβνβτα) + Qανα = F (M,Q) = 0

Mαβνβνα = 0

ou

uα(xα) = 0

w(xα) = 0

∂w(xα)

∂ν= 0

(5.35)

Dans ces équations d’équilibre au bord, la seconde quantité F (M,Q) est la plus difficileà appréhender, elle correspond en fait à un effort vertical.

Considérons l’exemple de plaque ci-dessous (Figure 5.7), de dimension a selon −→x 1

et b selon −→x 2 et dont les faces référencées de 1 à 4 sont respectivement libre, encastrée,en appui simple, et libre.

Plaques 130

Figure 5.7: Illustration des conditions aux limites.

Les conditions aux limites correspondantes se déduisent de 5.35 et s’écrivent :

Face 1 : xα ∈ a, 0 ≤ x2 ≤ bnormale −→ν = −→x 1 et −→τ = −→x2N11 = N12 = 0

M12,2 + Q1 = 0

M11 = 0

Face 2 : xα ∈ 0 ≤ x1 ≤ a, bnormale −→ν = −→x 2 et −→τ = −→x1u1 = u2 = 0

w = 0∂w

∂x2

= 0

Face 3 : xα ∈ 0, 0 ≤ x2 ≤ bnormale −→ν = −−→x 1 et −→τ = −→x2N11 = N12 = 0

w = 0

M11 = 0

Face 4 : xα ∈ 0 ≤ x1 ≤ a, 0normale −→ν = −−→x 2 et −→τ = −→x1N22 = N12 = 0

M12,1 + Q2 = 0

M22 = 0

(5.36)

Plaques 131

5.2.6 Exemples de plaque de Love-Kirchhoff en flexion

Comme les équations d’équilibre deviennent rapidement complexes à résoudre ana-lytiquement dans le cas des plaques, nous allons traiter deux cas simples. Le premier casest une plaque circulaire soumise à un champ de pression. La formulation du problèmeen coordonnées cylindriques du problème ramène la résolution à un problème 1D dontla solution s’exprime analytiquement. Dans le second cas, une plaque carrée est considé-rée. La solution est plus complexe, et on propose une approximation de Galerkin pourl’expliciter.

Flexion d’une plaque circulaire

On considère la plaque circulaire représentée sur la Figure 5.8, de rayon R, d’épais-seur h, constituée d’un matériau homogène élastique linéaire isotrope de module d’YoungE et de coefficient de Poisson ν. La plaque étant suffisamment mince par rapport à sonrayon, et dans un état de flexion pure, on se placera dans le cadre de la théorie de Love-Kirchhoff. Les conditions aux limites appliquées sur le contour de la plaque seront préciséesultérieurement.

Figure 5.8: Plaque circulaire soumise à un champ de pression uniforme.

On rappelle qu’en coordonnées cylindriques, dans le cas des plaques, les gradients,les courbures, et les laplaciens d’un scalaire sont les suivants :

−−→grad U(r, θ) =

∂U(r, θ)

∂r−→er +

1

r

∂U(r, θ)

∂θ−→eθ

= ur−→er + uθ

−→eθ

κ(r, θ) = −grad−−→grad w(r, θ)

et

−grad−−→grad U(r, θ) = −

∂ur∂r

1

r

∂ur∂θ− uθ

r∂uθ∂r

1

r

∂uθ∂θ

+urr

(−→er ,−→eθ ,−→x3)

4U(r, θ) =1

r

∂r

(r∂U

∂r

)+

1

r2

∂2U

∂θ2

Plaques 132

1. Équilibre : écrire les équations d’équilibre en déplacement.

2. Le problème étant entièrement axisymétrique (chargement, matériau et géomé-trie), indiquer la condition que doit vérifier le déplacement transverse w(r, θ).

3. Montrer que l’équilibre de la plaque, écrit en déplacement, s’exprime :p r

D= − ∂

∂r

(r∂4w∂r

)4. Montrer que la solution de cet équilibre s’écrit :

w(r) = − p r4

64 D+B1r

2 ln r +B2r2 +B3 ln r +B4

5. Proposer les conditions aux limites permettant de déterminer B1 et B3. No-tamment, quelles valeurs vont prendre la flèche w et le moment Mrr au centrede la plaque ?

6. Résoudre le problème dans le cas d’un bord encastré. Représenter la solution.

Pour cette même plaque mais simplement appuyée, avec un couple −c.−→eθ réparti sur sonpourtour, la solution est :

w(r) = − p

64 D

(r4 −R4

)+

r2 −R2

2D(1 + ν)

(c+

p R2

8(3 + ν)

)

Approximations cinématiques

On considère maintenant la plaque carrée représentée sur la Figure 5.9, de dimen-sions 2a×2a, d’épaisseur h, constituée d’un matériau homogène élastique linéaire isotropede module d’Young E, coefficient de Poisson ν et de densité ρ. La plaque est complète-ment encastrée sur son pourtour extérieur et soumise à son propre poids. La plaque étantsuffisamment mince par rapport à ses autres dimensions, et dans un état de flexion pure,on se placera dans le cadre de la théorie de Love-Kirchhoff.

Figure 5.9: Plaque carrée encastrée sur son contour et soumise à son propre poids.

Dans ce cas, la solution ne peut plus être trouvée analytiquement. Nous allons doncrecourir à une approximation cinématique de Galerkin. On rappelle que ce type d’approxi-mation du champ de déplacement solution doit vérifier les conditions cinématiques qu’ilfaut donc expliciter.

Plaques 133

1. Expliciter la force qui s’exerce par unité de surface.

2. Indiquer l’ensemble des champs de déplacement cinématiquement admissibles.

3. Approximation de Galerkin

(a) Quelles sont les conditions que doivent satisfaire les constante C et k pourque f(x, y) = (1 + C cos kx) (1 + C cos ky) soit C.A.

(b) Dans la suite on ne considérera que les fonctions f1 et f2, oùfn(x, y) =

(1 + (−1)1+n cos n π x

a

) (1 + (−1)1+n cos n π y

a

). Représenter

f1(x, 0) et f2(x, 0)

On rappelle que l’approximation de Galerkin repose sur la formulation faibledu problème (voir le chapitre suivant pour plus de détails) pour laquellel’inconnue et la fonction test sont choisies dans un base de fonctions vérifiantles conditions aux limites naturelles du problème, d’où la sélection de la basede fonctions que nous venons d’effectuer. Dans cette formulation faible, quicorrespond ici au principe des puissances virtuelles tel qu’explicité dans l’Eq.5.18 par exemple, l’inconnue (le champ de déplacement réel) est recherchéecomme une combinaison des n fonctions de la base retenue, et la fonctiontest (le champ de déplacement virtuel) est successivement prise égale aux nfonctions de cette base.

w(x, y) =n∑i=1

fi(x, y)Qi et w∗(x, y) = f1, f2, ..., fn

Au final, on aboutit à un système algébrique symétrique de n équations àrésoudre, qui peuvent se mettre aisément sous forme matricielle. C’est cetype d’approche qui a donné lieu aux approximations de type éléments finis,qui ont comme avantage supplémentaire de donner aux coefficients inconnusune signification physique (degrés de liberté de la discrétisation) :Dans notre cas, montrer que le PPV se réduit à :∫

ω

Mαβκ∗αβdω +

∫ω

ρghw∗dω = 0,∀w∗C.A(0)

(c) Montrer, en introduisant l’approximation, que le système à résoudre est dela forme :

W (f1, f1) . . . W (f1, fn)

... . . . ...

W (fn, f1) . . . W (fn, fn)

︸ ︷︷ ︸

·

Q1

...

Qn

︸ ︷︷ ︸=

−∫ω

ρghf1dω

...

−∫ω

ρghfndω

︸ ︷︷ ︸[A] · Q = F

Plaques 134

avec W (fi, fj) = D

∫ω

(1− ν)fi,αβfj,αβ + νfi,γγfj,γγ dω

(d) En considérant une seule fonction f1(x, y) (et donc un seul coefficient Q1),montrer que la solution de notre problèmes est :

w(x, y) =−4a2 ρgh

2W (f1, f1)f1(x, y)

avec W (f1, f1) = D [7π4(1− ν) + 6π4ν] l’énergie de déformation correspon-dant au terme A11 de la matrice de rigidité du système.

5.3 Plaques de Hencky-Mindlin

Nous avons étudié les plaques de Love-Kirchhoff, plaques dont l’épaisseur est faibledevant les dimensions caractéristiques du plan de la plaque. Dans le cas des plaques dites’épaisses’, cette théorie est mise en défaut et s’éloigne des solutions de la mécanique 3D.En effet, le cisaillement transverse devient essentiel dans ces plaques, ou bien lorsquele matériau constitutif est de type orthotrope, ou encore dans le cas des sanwichs oùle cisaillement se développe de façon privilégiée. Ces considérations sont identiques àcelles rencontrées dans les poutres, et la théorie de Love-Kirchhoff correspond à celle deBernoulli pour les poutres, tandis que la théorie de Hencky-Mindlin que nous étudions icicorrespond à celle de Timoshenko dans les poutres.

Les plaques dites épaisses peuvent être définies pour des rapports 5 ≤ Rh≤ 10,

R étant la taille caractéristique du plan de la plaque. Ces plaques sont plus largementutilisées dans les applications numériques, notamment parce que la représentation dumilieu 3D par ces modèles de plaque est plus réaliste.

5.3.1 Cinématique et déformations

Par rapport aux plaques de Love-Kirchhoff, la cinématique de ces plaques variepar l’expression des angles de rotation des sections qui cette fois ne sont plus directementégaux au gradient de déplacement transverse, comme dans l’Eq. 5.3, mais sont des quan-tités indépendantes. Dans ce cas le champ de déplacement s’écrit, par analogie avec la

Plaques 135

cinématique de Love-Kirchhoff :

UM(xα) =

−→θ (xα) =

∣∣∣∣∣∣∣φ1 = θ2(xα)

φ2 = −θ1(xα)

0

−→uM(xα) = −→u (xα) +−−→MG ∧

−→θ (xα)

=

∣∣∣∣∣∣∣u1(xα)

u2(xα)

w(xα)

+

∣∣∣∣∣∣∣0

0

−x3

∧θ2(xα)

−θ1(xα)

0

∣∣∣∣∣∣∣=

∣∣∣∣∣ uα(xα)− x3θα(xα)

w(xα)

(M)

(5.37)

d’où l’on tire les déformations associées, notées HM , composées des déformations de typeLove-Kirchhoff dont les courbures dépendent maintenant directement des angles (ε2D

αβ ), etdes déformations de cisaillement (εα3) :

εHM(xα) = ε2Dαβ (xα)−→xα ⊗−→xβ + εα3(xα)−→xα ⊗−→x3 (5.38)

avec

ε2Dαβ (xα) =

1

2

(∂uα∂xβ

+∂uβ∂xα

)︸ ︷︷ ︸ − x3

1

2

(∂θα∂xβ

+∂θβ∂xα

)︸ ︷︷ ︸

= eαβ(xα) + x3καβ(xα)

et

2εα3 =∂w

∂xα− θα

(5.39)

Le tenseur des contraintes dans cette cinématique doit être complété en consé-quence puisque les déformations de cisaillement transverses sont maintenant non nulles :

σHM =

σ11 σ12 σ13

” σ22 σ23

” ” 0

(5.40)

5.3.2 Équations d’équilibre

Utilisons le PPV pour établir les équations d’équilibre. La puissance virtuelle desefforts intérieurs s’écrit, en notant que les contraintes de cisaillement sont doubles pour

Plaques 136

obtenir le travail effectué en 3D (2σα3εα3 = σα3εα3 + σ3αε3α) :

P∗int(−→u∗) = −

∫Ω

σM

: ε∗MdΩ

= −∫ω

(∫x3

σ2D(xα) : ε2D ∗(xα)dx3 + 2

∫x3

σα3(xα)ε∗α3(xα)dx3

)dω

= −∫ω

(N(xα) : e∗(xα) + M(xα) : κ∗(xα) + 2Qα(xα)ε∗α3(xα)

)dω

(5.41)

ce qui peut encore se mettre sous une forme incluant des déplacements et rotations uni-quement (en notant la symétrie des déformations de membrane et de courbure), et qu’onintègre ensuite par parties pour faire apparaître l’équilibre intérieur et les actions decontact :

P∗int(−→u∗) = −

∫ω

(Nαβ(xα)u∗α,β(xα)−Mαβ(xα)θ∗α,β(xα) + Qα(xα)

(w∗,α − θ∗α

))dω

↓ intégrations par parties en α et β

=

∫ω

(Nαβ,βu∗α − (Mαβ,β −Qα) θ∗α + Qα,αw

∗) dω−∫∂ω

(Nαβνβu∗α −Mαβνβθ

∗α + Qαναw

∗) ds︸ ︷︷ ︸=

∫ω

(Nαβ,βu∗α − (Mαβ,β −Qα) θ∗α + Qαw

∗) dω − P∗int bord(−→u∗)

(5.42)

et la puissance des efforts extérieurs s’écrit :

P∗ext(−→u∗) =

∫ω

(p(xα)w∗(xα) + pα(xα)u∗α(xα)) dω + P∗contact(−→u∗)

On identifie immédiatement les équations d’équilibre intérieur. Elles correspondentaux équations des plaques de Love-Kirchhoff lorsque les efforts tranchants sont pris encompte (Eqs. 5.27a, 5.27b, et 5.27c), obtenues plus directement ici. Ces équations sontrappelées ci-dessous.

Nαβ,β(xα) + pα(xα) = 0

Mαβ,β(xα)−Qα(xα) = 0

Qα,α(xα) + p(xα) = 0

En ce qui concerne les équations d’équilibre au bord, on obtient cette fois des conditions

Plaques 137

plus simples que pour les plaques de Love-Kirchhoff :Nαβνβ = 0

Qανα = 0

Mαβνβ = 0

ou

uα(xα) = 0

w(xα) = 0

θα(xα) = 0

Les conditions aux limites sont donc plus ’naturelles’ ici, et pour l’exemple de laplaque traité précédemment (Figure 5.7, page 130), elles deviennent :

Face 1 : xα ∈ a, 0 ≤ x2 ≤ bnormale −→ν = −→x 1 et −→τ = −→x2N11 = N12 = 0

Q1 = 0

M11 = M12 = 0

Face 2 : xα ∈ 0 ≤ x1 ≤ a, bnormale −→ν = −→x 2 et −→τ = −→x1uα = 0

w = 0

θ1 = θ2 = 0

Face 3 : xα ∈ 0, 0 ≤ x2 ≤ bnormale −→ν = −−→x 1 et −→τ = −→x2N11 = N12 = 0

w = 0

M11 = M12 = 0

Face 4 : xα ∈ 0 ≤ x1 ≤ a, 0normale −→ν = −−→x 2 et −→τ = −→x1N22 = N12 = 0

Q2 = 0

M22 = M12 = 0

(5.44)

5.3.3 Lois de comportement

Les lois de comportement reliant les efforts et moments généralisés aux déforma-tions et courbures généralisées, respectivement 5.14a et 5.14b, restent valables. Il fautsimplement introduire ici la loi de comportement qui relie les efforts tranchants aux dé-formations de cisaillement, comme dans le cas des poutres de Timoshenko.

Dans les plaques minces, nous avons posé que εα3 est indépendant de x3, de plus on a larelation de comportement au niveau d’un élément de matière σα3 = Gεα3. Par définition(éq. 5.23) on a donc l’effort tranchant qui s’écrit :

Qα(xα) = 2G

∫x3

εα3dx3 = Gh

(∂w

∂xα− θα

)mais σα3 ne peut pas être constant dans l’épaisseur de la plaque puisque cette composanteest nulle sur les faces libres de la plaque, et non nulle dans la plaque. En utilisant l’équation

Plaques 138

d’équilibre en contraintes selon les axes −→x α (éqs 5.24), on a :

∂σα3

∂x3

= −∂σαβ∂xβ

↓ en flexion pure

= −x312

h3

∂Mαβ

∂xβ

↓ d’après (5.27b)

= −x312

h3Qα

donc σα3 est parabolique dans l’épaisseur de la plaque, et plus précisément est de la forme(σα3(x3 = ±h/2) = 0)

σα3(xα) =

(1− 4 x2

3

h2

)3

2 hQα(xα) (5.45)

Pour obtenir la ’bonne’ loi de comportement en cisaillement, il faut comparerl’énergie de déformation que l’on aurait en 3D et celle qu’on a dans notre théorie desplaques :

wcis = 12

∫ h2

−h2

2 σα3(xα)εα3(xα) dx3

=1

2G

∫ h2

−h2

((1− 4 x2

3

h2

)3

2 h

)2

dx3 QαQα

=

(5

6

)1

2GhQαQα

(5.46)

on a donc un rapport de 56entre les distributions de la théorie des plaques et une théorie

qui serait 3D. On reconnaît ce rapport déjà introduit dans les poutres de section rectan-gulaire et appelé coefficient de correction en cisaillement. Donc la loi de comportement encisaillement s’écrit :

Qα(xα) =5

6Gh

(∂w

∂xα− θα

)(5.47)

6.

Approximations numériques

Sommaire6.1 Notions de base sur les approximations numériques en mé-

canique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141

6.2 Approximations numériques les plus courantes en élasto-statique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142

6.2.1 Résidus pondérés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144

6.2.2 Formulation intégrale faible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146

6.2.3 Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148

6.3 Applications à la mécanique des structures : Barre soumiseà son poids propre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149

6.3.1 Solution analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151

6.3.2 Résolution par différences finies . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152

6.3.3 Méthodes de collocation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

6.3.4 Méthode de Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157

6.3.5 De la méthode de Galerkin aux éléments finis . . . . . . . . . . 163

6.4 Conclusions sur les méthodes numériques en mécanique desstructures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173

140

Approximations numériques 141

Dans ce chapitre, on propose de présenter assez succinctement les approximationsnumériques utilisées couramment en mécanique. Si les éléments finis sont aujourd’huilargement utilisés dans le monde industriel, en fonction des domaines scientifiquesdont sont issus les problèmes à résoudre, d’autres approximations numériques restentégalement employées. Par exemple, les volumes finis sont largement répandus en chimiecar cette méthode est basée sur la notion de bilan des flux de matière circulant àtravers un volume, notion courante en chimie. De la même manière, les différencesfinies présentent de nombreux avantages dans les domaines de la physique tels que lathermique par exemple. On note également que les couplages de différentes méthodesnumériques est souvent de mise, soit parce que les problèmes sont de nature de plus enplus multi-physiques, soit parce que la résolution peut être mieux adaptée en fonctionde la nature des équations à résoudre. C’est le cas par exemple en dynamique desstructures où la résolution en espace est généralement réalisée par éléments finis alorsque l’intégration de la réponse en temps est réalisée par différences finies. Nous nousintéresserons plus particulièrement ici aux méthodes qui ont donné naissance aux élé-ments finis pour finir par la méthode des éléments finis qui sera vue dans un cadre statique.

Ce chapitre constitue la base de l’UP ’Mécanique numérique’ du master Mécaniqueet Ingénierie, parcours Modélisation et Simulation Numérique, et qui se concentrera ex-clusivement sur les méthodes numériques et leurs applications en mécanique. Ce domaineconstitue un thème de recherche industriel et académique en constant renouvellementdepuis les années 90, il est connu et plus compréhensible sous le vocable ComputationalMechanics, c’est-à-dire le lien entre l’informatique, les mathématiques appliquées, et lamécanique, et couvre un vaste champ d’application allant du calcul intensif à l’intégrationd’outils spécifiques dans de grands codes industriels.

6.1 Notions de base sur les approximations numériquesen mécanique

Les notions d’approximation de la solution en mécanique sont de diverses natures.Comme dans le cas des structures, ces approximations peuvent porter sur la simplification’géométrique’ conduisant à une simplification de la cinématique. C’est le cas des théoriesde poutres, plaques, coques, ... Les approximations peuvent également porter sur le com-portement du milieu étudié, le comportement idéal le plus basique étant de type Hookéen.Enfin, si malgré ces diverses simplifications le problème ne peut toujours pas être résolude façon simple, c’est-à-dire que le champ solution ne peut être trouvé analytiquement, oneffectue alors des approximations semi-analytiques, ou plus généralement des approxima-tions qui de par la taille des systèmes engendrés sont presque systématiquement résolus

Approximations numériques 142

de façon numérique.

Ces approximations numériques sont nombreuses, nous verrons ici le cas des ap-proximations les plus courantes basées sur la formulation de type Résidus pondérés duproblème posé. De façon très grossière, ce type de formulation consiste à minimiser unrésidu (une fonction à valeur réelle) en cherchant à annuler le produit de ce résidu avecdes fonctions de pondération bien choisies. Toute la problématique est présente dansce terme bien choisies. En effet, partant d’une formulation donnée du problème de mé-canique, ces approximations numériques diffèrent par les contraintes imposées au champsolution et au champ test (fonctions de pondération). En imposant des contraintes dedérivabilité forte sur le champ solution recherché, on formule le problème de façon forte.Par contre en partant de la formulation faible, i.e. en partageant les contraintes de dé-rivabilité sur le champ réel et le champ test, on formule la plupart des approximationsnumériques rencontrées dans les sciences pour l’ingénieur. Seule la méthode des élémentsde frontière diffère de cette formulation faible, puisqu’on va rejeter le problème à résoudresur ses frontières, ceci en imposant les contraintes de dérivabilité sur les fonctions test.

Cette section 6.1 présentant les approximations numériques les plus répanduess’inspire du premier chapitre de l’excellent ouvrage de J.-M Bergheau (ENISE) et R.Fortunier (EMSE) intitulé ’Finite Element Simulation of Heat Transfer’(ISTE Ltd andJohn Wiley & Sons Inc, ISBN-10 : 1848210531). Les applications numériques sont enpartie adaptées de cet ouvrage. Un grand merci aux auteurs !

6.2 Approximations numériques les plus courantes enélasto-statique

L’exemple de résolution d’un problème élasto-statique simple permet de mettre enévidence les grandes notions que nous verrons en détails dans ce chapitre. Considéronsle problème classique d’équilibre mécanique (Figure 6.1) formulé à partir de l’équation

Approximations numériques 143

d’équilibre d’un élément de volume et des conditions aux limites associées cinématiques(Dirichlet ou en déplacement) et statiques (Neumann ou en contraintes/efforts) :

Figure 6.1: Représentation générale d’un solide occupant un domaine Ω, de frontière ∂Ω

(∂Ω = ∂Ωu ∪ ∂ΩF et ∂Ωu ∩ ∂ΩF =Ø), soumis à des sollicitations extérieures.

∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

−→divσ(−→x , t) +

−→f (−→x , t) = ρ−→u i(

−→x , t) ,∀ −→x ∈ Ω

avec les conditions aux limites−→u (−→x , t) = −→u d(−→x , t) ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

σ(−→x , t)−→n (−→x ) =−→F d(−→x , t) ,∀ −→x ∈ ∂ΩF

et la loi de comportement correspondanteσ(−→x , t) = L(−→x , t) : ε(−→x , t)

(6.1)

L’équilibre mécanique peut également s’écrire en fonction du champ de déplacement seule-ment sous la forme dite ’en déplacement’ appelées équations de ’Lamé-Clapeyron’ ou de’Navier’. En effet, en introduisant la loi de comportement, la divergence des contraintess’écrit en fonction des déformations qui sont la partie symétrique du gradient du dépla-cement. Pour un milieu homogène isotrope obéissant à une loi de comportement linéaire,et dans un cadre HPP, on obtient facilement l’équilibre en statique :

µ−→4−→u + (λ+ µ)

−−→grad (div−→u ) +

−→f (−→x ) =

−→0 (6.2)

avec λ et µ les coefficients de Lamé du matériau constitutif. On voit que ce problèmeest par nature elliptique et fait intervenir un laplacien, soit des dérivées d’ordre 2 del’inconnue. Ceci va guider le choix des méthodes d’approximation à utiliser.

Approximations numériques 144

On peut proposer une forme plus générale de ce problème de mécanique (Eq.6.1) en introduisant un opérateur A agissant sur le champ de déplacement recherché.Compte-tenu des hypothèses restrictives posées, cet opérateur est linéaire dans notre cas.La résolution de cette équation conduit bien évidemment à l’expression du champ dedéplacement, dont on déduit aisément les déformations, puis les contraintes via la loi decomportement. Le problème à résoudre s’écrit donc :∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

Trouver une fonction −→u ∈ U telle que

R(−→u ) = A−→u +−→f =

−→0 , ∀−→x ∈ Ω

avec les conditions aux limites−→u (−→x , t) = −→u d(−→x , t) ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

σ(−→x , t)−→n (−→x ) =−→F d(−→x , t) ,∀ −→x ∈ ∂ΩF

(6.3)

où U est un espace de fonctions vérifiant les conditions aux limites de Dirichlet, soitdes fonctions C.A. (cinématiquement admissibles), dont on précisera ultérieurement lescontraintes en termes de dérivabilité / intégration notamment.

6.2.1 Résidus pondérés

Pour résoudre ce problème, qui sauf dans quelques cas particuliers n’a pas desolution analytique, on se propose d’intégrer cette équation d’équilibre, le résidu R(−→u ),sur tout le domaine Ω et d’en calculer le produit avec des fonctions tests continues.Pour que cette équation soit identiquement nulle, le produit avec n’importe laquelle deces fonctions doit rester nul. On notera qu’à ce stade, la seule condition que doiventremplir ces fonctions tests est qu’elles soient intégrables sur le domaine. Notons V cetespace de fonctions. Par contre, le champ solution doit être au moins 2 fois différentiable,conformément à la remarque précédente sur la présence d’un laplacien du déplacementdans les équations de Lamé-Clapeyron (Eq. 6.2). En ce sens, la formulation est dite forte.En introduisant le produit scalaire tel que

∫Ω

(f · g) dΩ = 〈f, g〉, dont la définition plusprécise nécessiterait de s’attarder sur l’analyse fonctionnelle, le problème à résoudre estdonc :

∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

Trouver une fonction −→u ∈ U telle que

〈R(−→u ),−→v 〉 = 〈A−→u ,−→v 〉+⟨−→f ,−→v

⟩, ∀−→v ∈ V

avec les conditions aux limites−→u (−→x , t) = −→u d(−→x , t) , ∀ −→x ∈ ∂Ωu

σ(−→x , t)−→n (−→x ) =−→F d(−→x , t) ,∀ −→x ∈ ∂ΩF

(6.4)

Approximations numériques 145

Partant de cette formulation, le choix des fonctions test va nous permettre deformuler 3 formes d’approximations de ce problème que nous détaillerons dans la suitede ce chapitre : collocation par points, collocation par sous-domaine, et volumes finis quiseront mis en œuvre par la suite sur des exemples plus précis :

1. Si V est un ensemble de distributions de Dirac, on formule la résolution parcollocation par point, c’est à dire qu’on cherche la solution en des pointsdonnés :

V = δ−→xi , i = 1..n

→ 〈R(−→u ),−→v 〉 = 〈A−→u , δ−→xi〉+⟨−→f , δ−→xi

⟩= 0

= R(−→u )|−→x=−→xi = 0, ∀ i = 1..n

(6.5)

2. Si V est une base de fonctions constantes par sous-domaine, on formule la réso-lution par collocation par sous-domaine ce qui revient à chercher les fonc-tions qui vérifient l’équilibre sur des sous-domaines disjoints mais dont l’unionforme le domaine Ω :

V = δΩi , i = 1..n

→ 〈R(−→u ),−→v 〉 = 〈A−→u , δΩi〉+⟨−→f , δΩi

⟩= 0

↓ Par définition du produit scalaire

=

∫Ω

R(−→u ) · δΩi dΩi =

∫Ωi

R(−→u ) dΩi = 0, ∀ i = 1..n

= R(−→u )|Ω=Ωi = 0, ∀ i = 1..n(6.6)

3. Partant de cette dernière forme de champ test, en utilisant le théorème de la di-vergence (ou Ostrogradsky) appliqué à l’équilibre mécanique écrit en contraintes(Eq. 6.1), on formule la résolution par volumes finis. Globalement, on véri-fie que le flux de contraintes sur la frontière du sous-domaine Ωi, appelé alorsvolume de contrôle, est équilibré par les forces volumiques imposées :

V = δΩi , i = 1..n

→ R(−→u )|Ω=Ωi = 0, ∀ i = 1..n

=

∫Ωi

(−→divσ +

−→f)dΩi = 0, ∀i = 1..n

= −∫∂Ωi

σ · −→n dωi +

∫Ωi

−→f dΩi = 0, ∀i = 1..n

(6.7)

Approximations numériques 146

6.2.2 Formulation intégrale faible

Le problème initial, écrit en 6.3 sous une forme générale peut être reformulé pourdonner une formulation intégrale faible à résoudre. Cette formulation, équivalente auprincipe des puissances virtuelles (Eq. 7.79) introduit précédemment pour les poutres(Eq. 1.16) puis les plaques (Eq. 5.18), a l’avantage de requérir des conditions de dériva-bilité moindre sur les fonctions issues de l’espace des solutions U tout en augmentant lescontraintes de dérivabilité sur les fonctions de l’espace test V .

Partant du problème à résoudre, utilisons le théorème de la divergence pour ’re-porter’ les dérivations du champ réel vers le champ test dans le terme d’équilibre descontraintes. Nous supposons ici que l’opérateur 〈A·, ·〉 est un opérateur auto-adjoint (ouhermitien), i.e. il vérifie 〈A−→u ,−→v 〉 = 〈−→u ,A−→v 〉, ce qui est le cas quasi-systématiquementen physique ’classique’, et que les propriétés du milieu sont homogènes :

〈A−→u ,−→v 〉 =

∫Ω

−→divσ(−→x ) · −→v (−→x ) dΩ

=

∫Ω

−→div

(L(−→x ) : ε(−→x )

)· −→v (−→x ) dΩ

=

∫Ω

−→div

(L(−→x ) : ∇(−→u (−→x ))

)· −→v (−→x ) dΩ

= −∫

Ω

∇−→u (−→x ) : L(−→x ) : ∇t−→v (−→x ) dΩ +

∫∂Ω

(L(−→x ) : ∇−→u (−→x )

)· −→n · −→v (−→x ) dω

(6.8)On constate que le terme représentant l’équilibre intérieur est maintenant symétrique ence qui concerne les contraintes de dérivabilité des fonctions issues de U et V . Sans entrerdans les détails, la régularité requise correspond maintenant au premier espace de Sobolev,généralement noté H1(Ω), regroupant les fonctions de carré intégrable sur Ω et dont lesdérivées sont également de carré intégrable.

Un aspect important de cette formulation faible consiste à aboutir à une expressionunique contenant l’équilibre et les conditions aux limites essentielles (en déplacement) etnaturelles (en contraintes). Dans ce cas, le parallèle avec le PPV est valable pour un PPVformulé en déplacements. Une des différences majeures de la formulation faible par rapportaux différentes méthodes vues jusqu’ici est que les conditions essentielles sont introduitesen imposant que les fonctions de l’espace U vérifient ces conditions aux limites, soit :

U =−→u ∈ H1(Ω)/−→u (−→x , t) = −→u d(−→x , t) ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

.

D’autre part, les fonctions test sont choisies telles qu’elles s’annulent sur la frontière∂Ωu où les conditions de Dirichlet sont imposées. En effet, toute fonction −→u affectéed’une perturbation reste admissible tant que les conditions essentielles sont vérifiées(−→u + −→v = −→u d ⇒ −→v = 0 ,∀ −→x ∈ ∂Ωu). D’un point de vue mathématique, le cadredu calcul des variations conduit au même résultat, ce qui revient à considérer que les

Approximations numériques 147

fonctions de pondération −→v expriment les variations du champ réel −→u (voir Eq. 6.12). Ilrésulte de ces considérations que l’espace des fonctions tests est tel que

V =−→v ∈ H1(Ω)/−→v (−→x , t) = 0 ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

.

On en déduit immédiatement que l’intégrale de surface (second terme de l’Eq. 6.8) selimite alors à l’intégrale des contraintes sur la surface ∂ΩF , soit le flux de déplacement :∫

∂Ω

(L(−→x ) : ∇−→u (−→x )

)· −→n · −→v (−→x ) dω =

∫∂ΩF

σ(−→x ) · −→n · −→v (−→x ) dω

=

∫∂ΩF

−→F d(−→x ) · −→v (−→x ) dω

(6.9)

Le problème à résoudre s’écrit alors :

∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

Trouver−→u ∈ U tel que pour tout−→v ∈ V :

−∫

Ω

∇−→u (−→x ) : L(−→x ) : ∇t−→v (−→x ) dΩ +

∫Ω

−→f (−→x ) · −→v (−→x ) dΩ +

∫∂ΩF

−→F d(−→x ) · −→v (−→x ) dω = 0

avec U =−→u ∈ H1(Ω)/−→u (−→x ) = −→u d(−→x ) ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

et V = −→v ∈ H1(Ω)/−→v (−→x ) = 0 ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

(6.10)

Ce type de formulation continue se prête extrêmement bien au calcul numériquecar elle permet de manipuler des fonctions scalaires. D’autre part, trouver la solution decette nouvelle formulation (Eq. 6.10) d’un problème mécanique peut être vu comme larecherche d’un extremum. On montre en effet que la solution minimise et rend stationnaireune fonctionnelle (fonction de fonction), strictement convexe dans un cadre linéaire, doncpossédant un minimum unique, appelée Énergie Potentielle. Le théorème de l’ÉnergiePotentielle que nous ne détaillerons pas ici permet de montrer que l’équilibre (stableou instable) correspond au champ annulant la première variation de cette fonctionnelleformée par la différence entre l’énergie de déformation du système et le travail des effortsdonnés :

∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

Trouver−→u ∈ U qui minimise :

Π(−→u ) =1

2

∫Ω

∇−→u (−→x ) : L(−→x ) : ∇t−→u (−→x ) dΩ−∫

Ω

−→f (−→x ) · −→u (−→x ) dΩ−

∫∂ΩF

−→F d(−→x ) · −→u (−→x ) dω

avec U =−→u ∈ H1(Ω)/−→u (−→x ) = −→u d(−→x ) ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

(6.11)

Approximations numériques 148

Quelques notions de calcul des variations sont rappelées en Annexe-Chapitre 7 §7.2 page180. En quelques mots, le principe du calcul variationnel consiste à chercher à minimiserl’écart entre la solution réelle, ici −→u (x), et une solution perturbée, représentée par une fa-mille de fonctions proches de la solution, δ−→u (x) = α−→v (x) avec α→ 0, qui se superposentà cette solution réelle. On comprend bien alors pourquoi cette variation doit s’annuler surle bord ∂Ωu. On retiendra finalement que la recherche du minimum d’une fonctionnelleconvexe correspond à trouver le champ qui annule sa première variation, c’est à dire quirend nulle la valeur prise par la fonctionnelle pour une faible perturbation autour de lasolution, montrant qu’un extrémum est bien atteint. Pour revenir à notre cas, la minimisa-tion de l’énergie potentielle conduit à chercher le champ de déplacement −→u ∈ U annulantla première variation δΠ(−→u ) de Π(−→u ), ceci pour toute variation admissible δ−→u ∈ V , i.eCA(0) :∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

Trouver−→u ∈ U tel que pour tout δ−→u ∈ V :

δΠ(−→u ) =

∫Ω

∇−→u (−→x ) : L(−→x ) : ∇tδ−→u (−→x ) dΩ

−∫

Ω

−→f (−→x ) · δ−→u (−→x ) dΩ−

∫∂ΩF

−→F d(−→x ) · δ−→u (−→x ) dω = 0

avec U =−→u ∈ H1(Ω)/−→u (−→x ) = −→u d(−→x ) ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

et V = δ−→u ∈ H1(Ω)/δ−→u (−→x ) = 0 ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

(6.12)

Cette expression unique intégrant les équations d’équilibre et les conditions auxlimites permet de résoudre numériquement l’équilibre mécanique, elle correspond au prin-cipe des puissances virtuelles formulé en déplacement en prenant le champ virtuel égalà la variation du champ réel (Eqs. 1.16 et 5.18). C’est à partir de cette expression queles approximations de type Galerkin, Ritz-Galerkin, et finalement les éléments finis (endéplacements) sont formulés.

6.2.3 Galerkin

Partant de l’expression variationnelle de l’équilibre mécanique tel que présenté en6.12, des méthodes numériques, donc approchées, ont été construites. La plus répanduede ces méthodes est la méthode de Galerkin (Boris. G. Galerkin, mathématicien Russe,1871-1942). Il s’agit ici de travailler sur des sous-espaces de dimension finie Un et V n issusde U et V respectivement, conduisant à un système discret. La méthode de Galerkinutilise la propriété que tout élément

−→u de U peut être construit à partir d’un seul élément

particulier −→u ? de cet espace, perturbé par une fonction issue de l’espace de test V (noté−→u ici), soit :

−→u = −→u ? + α−→u avec α ∈ R∗ petit. Il s’agit donc de construire un problème

approché où l’approximation de la solution et les fonctions test sont issues d’un mêmesous-espace de dimension finie :

Un =−→u ∈ H1(Ω)/

−→u = −→u ? +−→u avec −→u ∈ V n

(6.13)

Approximations numériques 149

On notera que si le terme particulier u? dépend x, il sera intégré à la résolution duproblème. Généralement, ce terme exprime des conditions particulières que le champ dedéplacement solution doit vérifier (Dirichlet en particulier), il s’écrit donc par rapport àdes données du problème. Ce terme sera donc présent dans le problème à résoudre commeune partie du second membre. Ceci est illustré dans l’exemple d’application (6.3.4 page158)

En introduisant cette approximation dans la formulation faible (Eq. 6.10 ou 6.12),et notamment dans le terme de puissance virtuelle des efforts intérieurs, on aboutit auproblème discret de dimension n à résoudre :∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

Trouver−→u ∈ Un tel que pour tout−→v ∈ V n :

−∫

Ω

∇−→u (−→x ) : L(−→x ) : ∇t−→v (−→x ) dΩ +

∫Ω

−→f (−→x ) · −→v (−→x ) dΩ +

∫∂ΩF

−→F d(−→x ) · −→v (−→x ) dω = 0

avec Un =−→u ∈ H1(Ω)/

−→u = −→u ? +−→u ,∀ −→x ∈ Ω, avec −→u ∈ V n et

−→u = −→u d,∀ −→x ∈ ∂Ωu

et V n = −→v ∈ H1(Ω)/−→v (−→x ) = 0 ,∀ −→x ∈ ∂Ωu

(6.14)

Lorsque la dimension du problème discret augmente, on tend vers la solutionexacte. On retrouve ici, écrit de façon tout à fait générale, la méthode qui est utiliséepour résoudre le second exercice sur les plaques (cf §5.2.6). De plus, nous verrons surl’exemple ci-dessous que la méthode des éléments finis est un cas particulier de choix deces fonctions d’approximation, où la solution va être approchée par une combinaison defonctions dont les valeurs sont connues en des points particuliers. L’intérêt de cette mé-thode pour les ingénieurs est double, il s’agit d’une part de la coïncidence entre découpagephysique (maillage) et découpage nécessaire à la résolution à l’aide de polynômes d’ordrepeu élevé, et d’autre part du sens physique des résultats qui sont des grandeurs prises ences mêmes points particuliers, les valeur nodales.

6.3 Applications à la mécanique des structures : Barresoumise à son poids propre

Afin de mettre en pratique les notions introduites ci-dessus, nous allons considérerun exemple en mécanique des structures, une barre en tension-compression. Ce problèmeoffre une résolution très simple, ceci nous permettra d’évaluer la pertinence des approxi-mations numériques utilisées dans un second temps. Nous allons d’abord envisager unerésolution directe par différences finies, puis par les méthodes de collocation à partir dela formulation de type ’Résidus Pondérés’, et enfin grâce à la formulation faible qui nouspermettra d’aboutir à la formulation d’un élément fini en tension.

Approximations numériques 150

Considérons une poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan telle que vu au§2.1. Cette poutre de section constante (section S = largeur b x hauteur h) et consti-tuée d’un matériau homogène élastique isotrope (module d’Young E, masse volumique ρ)travaille uniquement en tension-compression. Comme indiqué sur la Figure 6.2, elle estbloquée en déplacement à son origine u(x = 0) = 0 et soumise à une déplacement donné àson extrémité u(x = l) = ud. Cette poutre est soumise à un effort linéïque correspondantà son poids propre (ρgS). Les équations caractérisant cet équilibre s’écrivent :

Figure 6.2: Poutre droite soumise à son propre poids et un déplacement imposé.

1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.

u(0) = 0 et u(x = l) = ud

2. Équilibre intérieurdN(x)

dx+ ρgS = 0

3. Équilibre au bord et discontinuités

4. Loi de comportement

N(x) = ESdu(x)

dx

Approximations numériques 151

5. Relations utiles : tension :σmxx(x) =

N(x)

S(x)

6.3.1 Solution analytique

La solution analytique de ce problème est facilement déduite de la résolution ana-lytique, elle est représentée sur la Figure 6.3 ci-dessous et s’écrit :

u(x) =udx

l− ρgx

2 E(x− l) (6.15)

Pour la suite des applications numériques, nous considérons les valeurs suivantes pour lesgrandeurs physiques du problème :

— longueur de la poutre l = 1 m

— section de la poutre h = 20 mm et b = 10 mm

— module d’Young du matériau constitutif E = 210 · 103N.m−2

— masse volumique du matériau rho = 7, 8 · 103kg.m−3

— accélération de la pesanteur g = 9, 8m.s−2

— déplacement imposé ud = 5 cm ;

0 0.2 0.4 0.6 0.8 10

0.01

0.02

0.03

0.04

0.05

0.06

0.07

0.08

0.09

x (m)

Dép

lace

men

t (m

)

Solution analytique

Figure 6.3: Solution analytique pour le cas d’une poutre droite correspondant à la Figure6.2.

Approximations numériques 152

6.3.2 Résolution par différences finies

La méthode des différences finies est une méthode de résolution directe, au mêmetitre que l’intégration analytique des équations. Cette méthode bien connue consiste àremplacer les dérivations, soit les variations d’une quantité par rapport à une longueur ouun temps élémentaire (infinitésimale), par des différences de cette même quantité évaluéeen des points précis éloignés d’une distance (d’un temps) finie connue. On effectue un’découpage’ du problème à résoudre.

Dans notre cas, considérons n + 1 points également répartis le long de l’axe de lapoutre (entre x = 0 et x = l), tels que l’abscisse d’un point xi = i∆x (avec ∆x = l

n

et i = 0, . . . , n) est connue à partir de l’indice i. En ces points xi, le déplacement, notéui, est recherché. Comme indiqué, cherchons à exprimer la différentielle totale d’ordre 2caractérisant l’équilibre de notre problème aux points intérieurs du domaine (i = 1, ..n−1) comme la différence de ces déplacements pris à des points distants de ∆x, soit unedifférence centrée d’ordre 2. Finalement, notre problème s’écrit :

d

dx

(ES

du(x)

dx

)+ ρgS = 0 ,∀x ∈ [0, l] et u(0) = 0, u(l) = ud

n−1∑i=1

(ES

ui+1 − 2ui + ui−1

∆x2+ ρgS = 0

)et u0 = 0, un = ud

(6.16)

Concernant les conditions aux limites, elles doivent être prises en compte directe-ment dans le système à résoudre. Les conditions de Dirichlet sont prises en compte enimposant la valeur donnée à l’inconnue au point correspondant. Ici, il s’agit de u0 = 0 etun = ud. Si une condition de Neumann devait être imposée (N(l) = Nd par exemple), ilfaudrait alors raisonner à l’aide d’une différence finie prenant en compte la valeur connuela plus proche : u0 et u1 ou un−1 et un (N(l) = Nd ES

∆x(un − un−1) = Nd).

Finalement, le système discret à résoudre est linéaire, de la forme

−ui+1 + 2ui − ui−1 =ρg

E∆x2,

ce qui conduit au système algébrique de forme tribande suivant dont la résolution fournit

Approximations numériques 153

les déplacements ui :

1 0 0 . . . 0 0 0

−1 2 −1 . . . 0 0 0

0 −1 2 . . . 0 0 0

......

... . . . ......

...

0 0 0 . . . 2 −1 0

0 0 0 . . . −1 2 −1

0 0 0 . . . 0 0 1

︸ ︷︷ ︸

·

u0

u1

u2

...

un−2

un−1

un

︸ ︷︷ ︸

=

0ρgE

∆x2

ρgE

∆x2

...

ρgE

∆x2

ρgE

∆x2

ud

︸ ︷︷ ︸[K] · Q = F

(6.17)

La résolution de ce système fournit les solutions représentées sur la Figure 6.4 oùsont tracés les déplacements pour un nombre d’intervalles le long de la poutre correspon-dant à n = 5, n = 10, n = 20, et n = 50. On vérifie bien que la solution approchéetend vers la solution exacte. La particularité ici est que la solution exacte est polynô-miale d’ordre 2, donc assez facile à approcher. Si le calcul des contraintes est envisagé,il est réalisé à partir de cette solution approchée en prenant des valeurs de déplacementsponctuelles, les ui.

En conclusion, l’intégration par différences finies de ce problème simple peut donnersatisfaction, en notant que le système est à réécrire quand les conditions aux limiteschangent. Par contre, pour des problèmes plus complexes, avec des variations fortes de laréponse, la taille du problème pour aboutir à une convergence convenable peut devenirconséquente puisqu’en toute rigueur on tend vers la solution réelle quand n tend versl’infini.

6.3.3 Méthodes de collocation

Les méthodes de collocation permettent de résoudre le problème initial, tel queposé en 6.3 page 144, mais reformulé à l’aide des résidus pondérés (Eq. 6.4 page 144). Sinous appliquons la même approche à notre cas particulier de barre, nous arrivons à laformulation équivalente, utilisant un espace de fonctions test à définir et qui s’écrit :∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

Trouver une fonction u ∈ U(C.A.)/∀v ∈ V∫ l

0

v ·(d

dx

(ES

du(x)

dx

)+ ρgS

)dx = 0

avec les conditions aux limitesu(0) = 0 et u(l) = ud

(6.18)

Il reste maintenant, dans cette formulation intégrale, à préciser l’espace V danslequel les fonctions test vont être choisies, ce qui conduira à une résolution par collocation

Approximations numériques 154

0 0.2 0.4 0.6 0.8 10

0.01

0.02

0.03

0.04

0.05

0.06

0.07

0.08

x (m)

Dép

lace

men

t (m

)

Solution analytiquen=50n=20n=10n=5

Figure 6.4: Solution analytique et par différences finies pour le cas d’une poutre droitecorrespondant à la Figure 6.2.

par point et collocation par sous-domaine, comme indiqué de façon générale précédem-ment.

Collocation par points

Pour résoudre, comme par différences finies nous allons réaliser un découpage dela géométrie, et ramener la résolution en des points particuliers. Conservons le découpagetel que la solution soit recherchée en n + 1 points également répartis le long de l’axe dela poutre (entre x = 0 et x = l), d’abscisse xi = i∆x (avec ∆x = l

net i = 0, . . . , n)

connue à partir de l’indice i. Choisissons comme espace V des fonctions test, l’ensembledes distributions de Dirac associé à ces points : V = δ−→xi , i = 0..n. La résolution consistedonc à trouver une approximation de la fonction u(x) différentiable 2 fois, satisfaisantles conditions aux limites, et annulant le résidu en chacun des points xi : R(−→u )|−→x=−→xi =

0, ∀i = 0..n. Puisqu’on travaille sur une approximation de u(x) et non pas sur des valeursui comme dans le cas des différences finies par exemple, on obtient alors n+ 3 équationscorrespondant à l’équilibre écrit en les n + 1 points, complétés par les conditions aux

Approximations numériques 155

limites ; soit pour des propriétés constantes de la barre :

∫ l

0

v ·(d

dx

(ES

du(x)

dx

)+ ρgS

)dx = 0

n∑i=0

(ES

d2u

dx2|xi + ρgS = 0

)et u(x0) = 0 , u(xn) = ud

(6.19)

Si les grandeurs physiques dépendent de la position le long de la barre, elles seront doncévaluées en les abscisses xi, les points de collocation.

Choisissons maintenant pour l’espace des solutions U l’espace des polynômes dutype u(x) = a0 + a1x+ . . .+ apx

p. Compte-tenu des contraintes de dérivabilité fortes surcette solution, on doit au minimum avoir des polynômes d’ordre 2. Les 3 coefficients de cespolynômes seront donc déterminés par les n+ 3 relations, donc n = 0, ce qui correspondà une collocation en un seul point. Il s’agit du minimum pour que l’approximation ait unsens. Dans ce cas, le système à résoudre s’écrit : 1 0 0

0 0 2

1 l l2

·

a0

a1

a2

=

0

−ρgE

ud

(6.20)

on en déduit immédiatement la solution : a0 = 0, a1 = udl− a2l et a2 = − ρg

2 Esoit la

solution exacte : u(x) = ud xl− ρg x

2 E(x− l).

De façon générale, l’espace U doit correspondre aux polynômes d’ordre n+ 2 (avecn ≥ 0 le nombre d’intervalles). Avec une approximation du type u(x) = a0 + a1x+ a2x

2 +

. . . + an+2xn+2 le système à résoudre dépend bien des valeurs prises par les grandeurs

mises en jeu dans l’équation à résoudre, et notamment la dérivée seconde du déplacementévaluée aux xi, il s’écrit :

1 0 0 0 . . . 0

0 0 2 6x1 . . . (n+ 2)(n+ 1)xn1

......

......

...

0 0 2 6xn . . . (n+ 2)(n+ 1)xnn

0 0 2 6xn+1 . . . (n+ 2)(n+ 1)xnn+1

1 l l2 l3 . . . ln

·

a0

a1

...

an

an+1

an+2

=

0

−ρgE

−ρgE...−ρg

E

−ρgE

ud

(6.21)

Comme on peut le constater, le système est relativement mal conditionné (pas depropriété remarquable de [K] comme pour les différences finies par exemple). De plus,lorsque la géométrie devient complexe, la taille du système augmente considérablement,ainsi que l’ordre des polynômes. On peut alors, par connaissance du problème, travaillersur une distribution non-régulière de points dans les zones de fort gradient par exemple.

Approximations numériques 156

C’est d’ailleurs le choix de la position et du nombre de ces points où sont évaluées lesquantités qui peut être problématique. On notera enfin que dans ce type de méthode lechoix de l’approximation doit être consistante avec le choix du nombre de points, i.e.il doit conduire à un système inversible, comportant donc un nombre de relations égalau nombre de coefficients à identifier. Ici, le choix des polynômes d’ordre n + 2 permetd’aboutir à un système de n+ 3 équations à n+ 3 inconnues.

Collocation par sous-domaines

Le découpage du domaine sur lequel le problème doit être résolu conduit ici à définirdes volumes de contrôle, ou des longueurs dans notre cas 1D. Comme précédemment, ces nsegments de longueur ∆x = l

nsont délimités par les n+1 points d’abscisse xi−1 = (i−1)∆x

et xi = i∆x pour i = 1, . . . , n. Le déplacement ui supposé constant sur chaque longueurde contrôle li = [xi−1, xi] sera supposé positionné en son centre. Comme indiqué en débutde ce chapitre, choisissons comme espace V des fonctions test V = δΩi , i = 1..n, soitdes fonctions tests constantes sur chaque sous-domaine et non nulles uniquement surce sous-domaine. Finalement, la résolution consiste à trouver la distribution des ui(x),satisfaisant les conditions aux limites, et annulant le résidu sur chaque sous-domaine li :R(−→u )|Ω=Ωi = 0, ∀i = 1..n.

Les dérivées peuvent, par exemple, être calculées par différences finies. On rap-pelle que les fonctions de pondération sont choisies constantes sur chaque longueur decontrôle. On obtient alors n équations linéaires qui expriment le résidu sur chaque sous-domaine. Si les grandeurs physiques (propriétés, chargement extérieur, . . .) dépendent dela position sur chaque longueur de contrôle, il faut évidemment calculer les intégralescorrespondantes. Dans notre cas, le problème à résoudre formulé en 6.18 devient :∫ l

0

v ·(d

dx

(ES

du(x)

dx

)+ ρgS

)dx = 0

n−1∑i=2

(∫ xi

xi−1

(ES

ui+1 − 2ui + ui−1

∆x2+ ρgS

)dx = 0

)et u1 = 0, un = ud

(6.22)

qu’on exprime sous la forme d’un système linéaire intégrant les conditions aux limitesassociées :

Approximations numériques 157

1 0 0 . . . 0 0 0

−1 2 −1 . . . 0 0 0

0 −1 2 . . . 0 0 0

......

... . . . ......

...

0 0 0 . . . 2 −1 0

0 0 0 . . . −1 2 −1

0 0 0 . . . 0 0 1

︸ ︷︷ ︸

·

u1

u2

u3

...

un−1

un

︸ ︷︷ ︸

=

0∫ x2x1

ρgE

∆x dx∫ x3x2

ρgE

∆x dx

...∫ xn−1

xn−2

ρgE

∆x dx

ud

︸ ︷︷ ︸[K] · Q = F

(6.23)

Dans notre cas, les grandeurs sont constantes, et leur intégration conduit à unsecond membre constant. Les résultats sont présentés sur la Figure 6.5. On vérifie queplus le nombre de domaines augmente plus l’approximation tend vers la solution exacte.Si les résultats semblent moins précis, à taille de système équivalente, que la collocationpar points par exemple, ce type d’approximation est pourtant fréquemment utilisée, cecipour 2 raisons essentielles. Tout d’abord, dans des cas complexes la collocation par sous-domaines est plus simple d’utilisation car plus systématique puisque les contraintes dedérivabilité n’apparaissent pas ici, il n’y pas pas non plus de polynôme à choisir en fonctiondu problème à résoudre. En second lieu, la collocation par sous-domaines conjugue uneformulation simple de type différences finies avec la notion de bilan par volume élémentairetrès répandu dans des domaines telles que la chimie ou la thermique où les inconnuesscalaires sont facilement manipulées connaissant les flux.

6.3.4 Méthode de Galerkin

Comme indiqué précédemment, la méthode de Galerkin telle qu’utilisée dans lesecond exercice sur les plaques (§5.2.6 page 132), est à l’origine de la méthode par élémentsfinis. Formulons notre problème de barre conformément à la formulation Eqs. 6.14∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

Trouver u ∈ Un tel que pour tout v ∈ V n :∫ l

0

(−ESdu(x)

dx

dv(x)

dx+ ρgS v(x)

)dx = 0

avec Un =u ∈ H1([0, l])/u = u? + u , ∀ x ∈ [0, l], avec u ∈ V n et u(0) = 0 , u(l) = ud

et V n = v ∈ H1([0, l])/v(0) = v(l) = 0

(6.24)

Voyons maintenant le choix qui peut être réalisé pour les espaces de dimensionfinie Un et V n.

Approximations numériques 158

0 0.2 0.4 0.6 0.8 10

0.01

0.02

0.03

0.04

0.05

0.06

0.07

0.08

x (m)

Dép

lace

men

t (m

)

Solution analytiquen=20n=50n=100

Figure 6.5: Solution analytique et par collocation par sous-domaines pour le cas d’unepoutre droite correspondant à la Figure 6.2.

Fonctions polynômiales

Le choix des bases de fonctions d’approximation, définissant les espaces Un et V n,est guidé par la contrainte de vérifier les conditions essentielles. Considérons, de façongénérale, que ces fonctions C.A. forment une approximation du type :

v(x) =n∑i=1

βi φi (6.25)

où les βi sont n paramètres scalaires. La quantité à annuler correspondant au système6.24 sous forme discrète devient alors la somme de n quantités :

n∑i=1

βi

∫ l

0

(−ESdu(x)

dx

dφ(x)i

dx+ ρgS φ(x)i

)dx = 0, ∀ βi (6.26)

Ces n quantités devant s’annuler quelles que soient les fonctions tests, soit quels que soientles coefficients βi, on abouti à n équations indépendantes en u(x) à résoudre. Choisissonsmaintenant l’espace Un des fonctions d’approximation de la solution construites à partir

Approximations numériques 159

de la somme d’une solution particulière, vérifiant notamment les conditions aux limitescinématiques, et de fonctions de l’espace des fonctions test V n, soit une approximationdu type de celle proposée de façon générale en 6.13, où les paramètres scalaires αi sontles inconnues à déterminer :

u(x) = u? +n∑j=1

αj φ(x)j (6.27)

On notera que si le terme particulier u? est une fonction de x, il dépend de données duproblème telles que des déplacement imposés, et sera donc présent dans le problème àrésoudre comme une partie du second membre. Ceci est illustré ci-dessous.

On aboutit finalement à un système linéaire carré symétrique de dimension n× navec les inconnues αj solution de :

n∑j=1

(∫ l

0

(ES

dφ(x)j

dx

dφ(x)i

dx

)dx

)αj =

∫ l

0

ρgS φ(x)i dx−∫ l

0

ESdu?(x)

dx

dφ(x)i

dxdx

(6.28)

Illustrons maintenant une des difficultés de cette méthode : le choix de la based’approximation. Dans notre cas particulier, les conditions aux limites cinématiques sontu(0) = 0 et u(l) = ud. On doit donc considérer l’espace V n engendré par les polynômesayant pour racine x = 0 et x = l. Par exemple :

v(x) =n∑i=1

βi (x (x− l))i/2 (6.29)

où les βi sont n paramètres scalaires. Il en découle que l’approximation du champ réels’écrit :

u(x) =ud x

2l2(x+ l) +

n∑j=1

αj (x (x− l))j/2 (6.30)

car ce champ doit être C.A et vérifier, notamment, u(l) = ud. Le système finalementobtenu s’écrit donc :

n∑j=1

(∫ l

0

ESi j

4(2x− l)2 (x (x− l))i/2+j/2−2 dx

)αj =

∫ l

0

ρgS (x (x− l))i/2 dx

−ES∫ l

0

i

2

ud

2l2(2x+ l) (2x− l) (x (x− l))i/2−1 dx, ∀ βi

(6.31)

Afin de simplifier les calculs, considérons le cas de cette même barre, mais dontl’origine du repère est décalée de −l : 0 −l et l 0, et sur laquelle un effort Rd

d’intensité ρ g l2E

+ ud

lest appliqué en x = −l. La solution dans ce cas est solution du

Approximations numériques 160

problème reformulé pour faire apparaître également le travail de l’effort terminal Rd affectéd’un signe − car la normale sortante est orientée vers les −→x négatifs :

u(x) = ud(

1 +x

l

)− ρgx

2 E(x+ l) . (6.32)

et la formulation intégrale faible devient :∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣

Trouver u ∈ Un tel que pour tout v ∈ V n :∫ 0

−l

(−ESdu(x)

dx

dv(x)

dx+ ρgS v(x)

)dx−Rdv(−l) = 0

avec Un =u ∈ H1([0, l])/u = u? + v , ∀ x ∈ [0, l], avec v ∈ V n et u(0) = ud

et V n = v ∈ H1([0, l])/v(0) = 0

(6.33)On vérifie que cet effort Rd appliqué en x = −l correspond bien à la condition u(−l) = 0.Finalement, ceci nous donne comme condition essentielle u(0) = ud et comme conditionnaturelle N(−l) = Rd. La condition C.A.(0) pour les fonctions tests, soit u(0) = 0 ici,nous permet d’utiliser une approximation par des monômes xi (i = 1, . . . , n) :

v(x) =n∑i=1

βi xi (6.34)

La quantité à annuler correspondant au système 6.33 sous forme discrète devient alors lasomme de n quantités :

n∑i=1

βi

(∫ 0

−l

(−ESdu(x)

dxi xi−1 + ρgS xi

)dx−Rd(−l)i

)= 0 (6.35)

L’espace Un est construit à partir de fonctions C.A. complétées par des fonctions issuesde l’espace des fonctions test V n, soit :

u(x) = ud +n∑j=1

αj xj (6.36)

où les paramètres scalaires αi sont les inconnues à déterminer. En introduisant cette ap-proximation dans l’expression (6.35) valable pour tout coefficient βi, on aboutit finalementà un système linéaire carré symétrique de dimension n× n :

n∑j=1

(∫ 0

−lES j i xi+j−2 dx

)αj =

∫ 0

−lρgS xi dx−Rd(−l)i (6.37)

Approximations numériques 161

ou encore, sous une forme proche de celle des approximations précédentes :

∫ 0

−ldx

∫ 0

−l2x dx . . .

∫ 0

−lnxn−1 dx∫ 0

−l2x dx

∫ 0

−l4x2 dx . . .

∫ 0

−l2nxn dx

... . . . ......∫ 0

−ln xn−1 dx

∫ 0

−l2n xn dx . . .

∫ 0

−ln2 x2n−2 dx

︸ ︷︷ ︸

·

α1

α2

...

αn

︸ ︷︷ ︸=

∫ 0

−l

ρg

Ex dx− Rd

ES(−l)∫ 0

−l

ρg

Ex2 dx− Rd

ES(−l)2

...∫ 0

−l

ρg

Exn dx− Rd

ES(−l)n

︸ ︷︷ ︸[K] · Q = F

(6.38)avec les composantes des matrices du système discret :

Kij =

∫ 0

−lES j i xi+j−2 dx

Qi = αi

Fi =

∫ 0

−lρgS xi dx−Rd(−l)i

(6.39)

La résolution de ce système conduit aux résultats présentés sur la Figure 6.6 ci-dessous. Pour n = 1, soit une approximation linéaire, on ne vérifie que les conditions auxlimites évidemment, et pour n = 2, on retrouve la solution exacte qui est parabolique(Eq. 6.32).

On voit que la convergence vers la solution exacte dépend de la dimension n desespaces choisis. Les avantages de cette méthode sont nombreux. En premier lieu, elle per-met de proposer une écriture assez systématique pour les grandeurs [K] et F. D’autrepart le système obtenu est symétrique défini positif, ne posant donc pas de problèmeparticulier pour être résolu par des solveurs directs standards. Par contre, pour des pro-blèmes même simples, on peut arriver rapidement à des systèmes de taille conséquente.La prise en compte de gradients, ou d’effets locaux, est notamment difficile avec ce typed’approches car l’interpolation doit être suffisamment riche, ce qui implique que la tailledu système croît extrêmement rapidement. D’autre part, dans le cas de problèmes bi outri-dimensionnels la recherche de solution approchée vérifiant les conditions auxlimites essentielles s’avère souvent impossible. Pour pallier à ces inconvénients,l’utilisation de polynômes d’ordre élevé peut être remplacée par l’utilisation de plusieursfonctions définies sur des sous-domaines. Ceci correspond notamment à la méthode deséléments finis étudiée ci-dessous.

Méthode de Ritz

Pour être complet, il faut indiquer qu’une méthode aboutissant au même système(Eq. 6.38) est souvent rencontrée dans la littérature sous le nom de méthode de Ritz

Approximations numériques 162

−1 −0.8 −0.6 −0.4 −0.2 00

0.01

0.02

0.03

0.04

0.05

0.06

0.07

0.08

x (m)

Dép

lace

men

t (m

)

Solution analytiquen=1n=2

Figure 6.6: Solution analytique et par approximation polynômiale dans la méthode deGalerkin pour le cas d’une poutre droite correspondant à la Figure 6.2.

(W. Ritz, mathématicien suisse, 1878-1909). Cette méthode est utilisée sous le nom deRitz-Galerkin en mécanique et dans une procédure itérative nommée Rayleigh-Ritz en dy-namique/physique des ondes. Dans le cas qui nous intéresse, cette méthode variationnelleconsiste à rechercher la solution réelle dans un espace de dimension finie Un en partantde l’énergie du système, soit l’énergie potentielle π(u) dans notre cas. L’approximationde la solution est introduite dans cette énergie, et la solution qui rend stationnaire cetteénergie est celle qui annule sa première variation. On aboutit finalement à n équations àn inconnues, équivalent au même système que celui de l’Eq. 6.26, et finalement au mêmesystème carré défini positif que celui de la méthode de Galerkin (Eq. 6.37) :

Approximations numériques 163

π(u) ' π(u) δπ(u) =∂π(u)

∂αiδu = 0, ∀δu ∈ V n

⇔ ∂π(u)

∂αi= 0, i = 1, . . . , n

⇔ ∂

∂αi

(1

2

∫ 0

−l

(ES

d

dx

(n∑i=1

αixi

)d

dx

(n∑j=1

αjxj

)− ρgS

(n∑i=1

αixi

))dx−Rd(−l)i = 0

)

⇔j=n∑j=1

(∫ 0

−l

(ES j i xi+j−2

)dx

)αj =

∫ 0

−lρgS xi dx−Rd(−l)i, i = 1, . . . , n

⇔ (Eq. 6.37, Galerkin)(6.40)

6.3.5 De la méthode de Galerkin aux éléments finis

Partant de cette méthode de Galerkin, nous allons dans un premier temps leverune des difficultés qui porte sur l’ordre élevé de l’approximation, en travaillant sur dessous-domaines sur lesquels l’approximation peut être plus basique. Conservons pour celale découpage utilisé pour la collocation par sous-domaine, et tel que la barre soit l’unionde n segments de longueur lx = l

ndélimités par n + 1 points. Afin de travailler sur ces

sous-domaines, l’espace des fonctions test est composé de fonctions continues qui varientlinéairement sur chaque segment li = [xi−1, xi], comme présenté sur la Figure 6.7 et définiestelles que :

Ni(x) =

x− xi−1

lxsi xi−1 ≤ x ≤ xi

xi+1 − xlx

si xi ≤ x ≤ xi+1

0 sinon

(6.41)

On notera que n + 1 fonctions sont générées ainsi, en prolongeant aux extrémités lesfonctions telles que N1(−l) = Nn+1(0) = 1, soit x0 = −(l + lx) et xn+2 = lx.

L’espace des fonctions test choisi doit assurer que les fonctions sont C.A.(0)(v(0) =

Nn+1(0) = 0 ici), prenons les niemes première fonctions Ni(x) (i = 1, . . . , n) :

v(x) =n∑i=1

βi Ni(x) (6.42)

L’approximation d’ordre n ainsi obtenue est formée de la combinaison linéaire de valeursv1, v2, . . . , vn prises par les fonctions aux points x1, x2, . . . , xn. Entre ces points, la fonctionest interpolée linéairement par construction des fonction Ni(x). La quantité à annulerreprésentant l’équilibre s’écrit alors :

n∑i=1

βi

(∫ 0

−l

(−ESdu(x)

dx

dNi(x)

dx+ ρgS Ni(x)

)dx

)−RdN1(−l) = 0, i = 1, . . . , n

(6.43)

Approximations numériques 164

Figure 6.7: Fonctions linéaires par morceaux.

l’information sur l’effort terminal apparaissant naturellement en x = −l, c’est-à-dire enproduit avec la fonction N1(x) définie telle que N1(−l) = 1. Comme précédemment, onintroduit dans cette quantité nulle pour tout βi l’approximation du champ solution qui estde la forme ’champ C.A.’ + ’approximation issue de V n’, où le champ C.A. est représentépar le terme u? = Nn+1(x)ud avec Nn+1(x) définie telle que Nn+1(0) = 1 :

u(x) = Nn+1(x)ud +n∑j=1

uj Nj(x) (6.44)

où les paramètres scalaires ui sont les inconnues à déterminer. En introduisant cetteapproximation dans l’expression 6.43 on aboutit finalement à un système linéaire carrésymétrique de dimension n× n de la forme du système 6.38 :

n∑j=1

(∫ 0

−lES

dNj(x)

dx

dNi(x)

dxdx

)uj =

∫ 0

−lρgS Ni(x) dx−RdN1(−l), i = 1, . . . , n

(6.45)ou encore, sous une forme proche de celle des approximations précédentes :

n∑j=1

Kij Qj = Fi, i = 1, . . . , n (6.46)

avec les composantes des matrices du système discret :

Kij =

∫ 0

−lES

dNj(x)

dx

dNi(x)

dxdx

Fi =

∫ 0

−lρgS Ni(x) dx−RdN1(−l)

Qi = ui ,les déplacements aux abscisses xi

(6.47)

Si on construit ce système, les calculs des composantes Kij et Fi se font en prenanten compte le domaine de définition des fonctions de l’espace test V n. Ces fonctions sont

Approximations numériques 165

en effet définies telles que Ni(x) 6= 0 pour x ∈ [xi−1, xi+1]. Les intégrales sont donc définiessur ce même intervalle de longueur 2 lx et non plus sur toute la poutre. On se ramènebien à une résolution locale. Par exemple :

Kij =

∫ 0

−lES

dNj(x)

dx

dNi(x)

dxdx

= ES

∫ min(xj+1,xi+1)

max(xj−1,xi−1)

dNj(x)

dx

dNi(x)

dxdx

(6.48)

car les fonctions sont définies par morceaux, comme illustré sur la Figure 6.8 ci-dessous.

Figure 6.8: Distribution des fonctions d’approximation pour notre problème de poutre.

En utilisant la définition des fonctions d’approximation (Eq. 6.41), on calcule lestermes de la matrice de rigidité. Par exemple, pour les premières fonction de formeN1(x)/x ∈ [x1, x2] et N2(x)/x ∈ [x1, x3] :

K11 = ES

∫ x2

x1

dN1(x)

dx

dN1(x)

dxdx

=ES

lx

K22 = ES

∫ x3

x1

dN2(x)

dx

dN2(x)

dxdx

= ES

∫ x2

x1

dN2(x)

dx

dN2(x)

dxdx+ ES

∫ x3

x2

dN2(x)

dx

dN2(x)

dxdx

=2 ES

lx

K12 = ES

∫ x2

x1

dN1(x)

dx

dN2(x)

dxdx

= ES

∫ x2

x1

(1

lx

)(−1

lx

)dx

=−ESlx

(6.49)

Approximations numériques 166

et ceux du vecteur des efforts extérieurs :

F1 =

∫ 0

−lρgS N1(x) dx−RdN1(−l)

=

∫ x2

x1

ρgS

(x2 − xlx

)−Rd

= ρgS lx2−Rd

F2 =

∫ 0

−lρgS N2(x) dx−RdN2(−l)

=

∫ x2

x1

ρgS

(x− x2

lx

)dx+

∫ x3

x2

ρgS

(x3 − xlx

)dx

= ρgSlx

(6.50)

On voit que les seuls termes non nuls de la matrice de rigidité, ceux pour lesquelsune partie de l’intervalle de définition des fonctions Ni(x) et Nj(x) est commun, sont lestermes de type |i− j| ≤ 1. Une explication ’mécanique’ peut être donnée à ceci, il s’agitde l’assemblage des rigidités définies sur chaque intervalle, ce que nous verrons dans lasuite. Finalement, le système à résoudre est un système tri-diagonale de la forme :

1 −1 0 . . . 0 0

−1 2 −1 . . . 0 0

0 −1 2 . . . 0 0

......

... . . . ......

. . . . . . . . . . . . 2 −1

. . . . . . . . . . . . −1 2

·

u1

u2

u3

...

un−1

un

=

12ρgl2xE− Rdlx

ES

ρgl2xE

ρgl2xE

...

ρgl2xE

12ρgl2xE

(6.51)

Comme précédemment on vérifie sur la Figure 6.9 que plus la dimension de l’es-pace d’approximation est grande, plus on approche la solution exacte. Cette approxi-mation correspond à une approximation de type éléments finis qui présente les mêmesavantages qu’une approche de type Galerkin, i.e. conduit à un système carré symétriquedéfini positif. Par contre une telle approche présente un double avantage par rapportaux autres approximations : le découpage, ou maillage, du domaine étudié permet dediminuer le degré des fonctions d’approximation par rapport aux approximations polynô-miales recherchées sur le domaine d’étude, et les coefficients solution ont une significationphysique directement interprétable par l’ingénieur, il s’agit des valeurs prises par l’ap-proximation du champ solution aux noeuds du maillage puisqu’en ces points les fonctions

Approximations numériques 167

−1 −0.8 −0.6 −0.4 −0.2 00

0.01

0.02

0.03

0.04

0.05

0.06

0.07

0.08

x (m)

Dép

lace

men

t (m

)

Solution analytiquen=2n=5n=10

Figure 6.9: Solution analytique et par éléments finis pour le cas d’une poutre droite cor-respondant à la Figure 6.2.

d’approximation sont unitaires. Enfin, le recours aux intégrations numériques permet derendre systématique l’utilisation de cette technique, ces intégrations numériques sont trèssouvent du type intégration de Gauss.

Il reste, afin de rendre l’utilisation de ce type d’approximations plus ’intuitif’, àdonner un sens physique aux grandeurs intervenant dans l’équilibre écrit sur le domaine,et considérés sur chaque sous-domaine. De plus, les conditions aux limites de Dirichlet,qui peuvent s’avérer problématique à prendre en compte dans les cas complexes, doiventêtre traitées de façon plus systématique. Une vision de ce type est proposée ci-dessous.

Les éléments finis en mécanique des structures

La méthode des éléments finis, pour être utilisable ’en routine’ doit être systé-matique dans son écriture, son implémentation, et son utilisation. Illustrons cela sur laformulation d’un élément fini de barre en tension correspondant au problème de notrebarre soumise à son propre poids.

Approximations numériques 168

Soit un élément de barre défini par ses abscisses x1 et x2 et les déplacements u1

et u2 correspondants mesurés en ces points. On choisit, indépendamment des condi-tions aux limites de Dirichlet, une interpolation linéaire pour le déplacement, i.e. ledéplacement à l’intérieur de l’élément (x ∈ [x1, x2]) est une combinaison linéaire desdéplacements nodaux u1 et u2 :

u(x) = u1 N1(x) + u2 N2(x)

= < N1(x) , N2(x) > ·

u1

u2

= < N(x) > · u

(6.52)

Ce type d’approximation basé sur la valeur du déplacement nodal nous assure égalementque le déplacement est continu entre 2 éléments contigüs.

Pour des raisons de commodité de stockage, et également pour assurer une bonneprécision des intégrations numériques des quantités élémentaires, il est classique de recou-rir à un élément de référence. Cet élément fictif possède une géométrie fixe permettantde ne pas faire apparaître explicitement les bornes d’intégration de l’élément réel dans lescalculs et également de s’assurer que la géométrie sur laquelle ces calculs sont réalisés ne sedéforme pas, ce qui assure une qualité optimale des intégrations numériques. Considéronscet élément de référence défini pour la variable ξ ∈ [−1, 1] tel que présenté sur la Figure6.10 ci-dessous.

Figure 6.10: Définition de l’élément réel et de l’élément de référence.

Dans ce cas, le passage entre l’élément réel et l’élément de référence se fait enécrivant la position sur l’élément réel comme la combinaison linéaire des positions connuesaux extrémités de l’élément, soit :

x(ξ) = x1 N1(ξ) + x2 N2(ξ) (6.53)

ce qui équivaut à une interpolation géométrique linéaire, tout comme l’interpolation endéplacements. L’élément fini que nous formulons ici est dit isoparamétrique. Les expres-sions de ces fonctions d’interpolation s’établissent aisément en écrivant que d’après 6.52,

Approximations numériques 169

on a :u(x1) = u1 N1(−1) + u2 N2(−1) = u1

u(x2) = u1 N1(1) + u2 N2(1) = u2

(6.54)

soit des fonctions d’interpolation :N1(ξ) = −ξ − 1

2

N2(ξ) =ξ + 1

2

(6.55)

Revenons maintenant au problème de notre barre telle que présentée sur la Figure6.2 page 150. Lorsque nous formulons l’élément fini, nous cherchons à résoudre le problèmede l’équilibre de cette barre dans son ensemble, écrit dans les Eqs. 6.24, et plus précisémentl’expression :∫ 0

−l

(−ESdu(x)

dx

dv(x)

dx+ ρgS v(x)

)dx = 0 , ∀v C.A.(0)+ cond. limites

Introduisons, comme dans la méthode de Galerkin, l’approximation du champ test vdans cette expression. Cette approximation est de la forme proposée dans l’Eq.6.52, oùles déplacements nodaux u1 et u2 se réfèrent aux déplacements mesurés aux extrémitésde chacun des éléments de longueur le. Comme la barre est maintenant maillée par deséléments de longueur le, l’intégrale sur la barre devient égale à la somme des intégralesdes grandeurs définies pour chaque élément e :∫

le−EeSe

du(x)

dx

d

dx

(< N1(x) , N2(x) > ·

v1

v2

)dx . . .

. . .+

∫leρegSe

(< N1(x) , N2(x) > ·

v1

v2

)dx

(6.56)

Les conditions aux limites de Dirichlet et de Neumann seront introduites ultérieurementdans le système. Pour simplifier les écritures, supposons que les grandeurs physiques nevarient pas sur la longueur de l’élément. En introduisant enfin l’approximation de u(x)

par la même interpolation linéaire, nous aboutissons au système caractérisant l’équilibred’un élément :

−EeSe∫le

v1

v2

Td

dx< N1(x) , N2(x) >T d

dx< N1(x) , N2(x) >

u1

u2

dx . . .

. . .+ ρegSe

v1

v2

T ∫le< N1(x) , N2(x) >T dx = 0 ,

v1

v2

T

C.A.(0)+ cond. limites + cond. raccord

(6.57)

Approximations numériques 170

Considérant que notre poutre est maillée avec des éléments numérotés de 1 à n etque les n+ 1 degrés de liberté correspondants sont numérotés de façon à ce que l’élémenti ait pour extrémités xi et xi+1, l’équilibre discrétisé de notre poutre s’écrit :

−E1S1

∫ x2

x1

v1

v2

Td

dx< N1(x), N2(x) >T d

dx< N1(x), N2(x) >

u1

u2

dx

−E2S2

∫ x3

x2

v2

v3

Td

dx< N1(x), N2(x) >T d

dx< N1(x), N2(x) >

u2

u3

dx . . .

−EnSn∫ xn+1

xn

vnvn+1

Td

dx< N1(x), N2(x) >T d

dx< N1(x), N2(x) >

unun+1

dx

+ρ1gS1

∫ x2

x1

v1

v2

T

< N1(x), N2(x) >T

+ρ2gS2

∫ x3

x2

v2

v3

T

< N1(x), N2(x) >T . . .

+ρngSn∫ xn+1

xn

vnvn+1

T

< N1(x), N2(x) >T dx = 0 , ∀vT C.A.(0)+ cond. limites

(6.58)On voit bien, dans cette formulation que les noeuds ’intermédiaires’ vont contribuer 2fois à la rigidité et aux efforts appliqués sur l’ensemble. Ceci rejoint la remarque sur lesintégrations des éléments de la matrice de rigidité dans la méthode de Galerkin (Eqs.6.49 page 165) ci-dessus, où cette contribution apparaissait naturellement au travers dudomaine de définition des fonctions d’approximation. Ici, les éléments finis sont intuitive-ment assemblés par rapport aux degrés de liberté communs. Le système qui en découleest très simple, tridiagonal symétrique carré et défini positif, identique aux conditions auxlimites prés au système issu de l’approximation de Galerkin (Eqs. 6.51 page 166) puisqueles interpolations sont linéaires également.

Notons que l’assemblage des grandeurs élémentaires, en 2D et 3D ou plus générale-ment dés que les connectivités deviennent multiples, ne conduit pas à ce type de systèmecar les noeuds peuvent être communs à plusieurs éléments. Il s’agit alors de stocker lesgrandeurs globales du système de façon à minimiser la largeur de bande, caractéristiquedu nombre d’inversions à effectuer pour calculer la solution.

Comme nous utilisons un élément de référence pour généraliser les calculs, définis-

Approximations numériques 171

sons les grandeurs élémentaires calculées sur un élément de longueur le :

Déplacements nodaux qei = ui

Rigidité Keij = EeSe

∫ xi+1

xi

dNj(ξ)

dx

dNi(ξ)

dxdx

= EeSe∫ 1

−1

dNj(ξ)

dNi(ξ)

(2

le

)dξ

=

EeSe

lesi i = j

−EeSe

lesi i 6= j

Efforts extérieurs F ei = ρegeSe

∫ 1

−1

Ni(ξ)

(le

2

)dξ

= ρegeSe(le

2

)

(6.59)

Figure 6.11: Barre en tension modélisée avec 2 éléments finis.

Posons le système à résoudre pour une discrétisation en 2 éléments de notre barreen tension soumise à son propre poids, tel que sur la Figure 6.11-a. Les conditions aux li-mites du problème avec changement d’origine sont N(−l) = Rd et u(0) = ud. La conditionaux limites de Neumann est introduite directement dans le système puisque la contribu-tion de cet effort ponctuel agit comme un force extérieure produisant un travail dansle déplacement u1. Comme dans le cas de la méthode de Galerkin, cette condition deNeumann est prise en compte très facilement. La condition de Dirichlet est quant à elleprise en compte par élimination, avec une méthode vue ci-après. Le système avec effortterminal s’écrit donc :

EeSe

le

1 −1 0

−1 1 + 1 −1

0 −1 1

u1

u2

u3 = ud

=

ρegSe l

e

2−Rd

ρegeSele

ρegeSe le

2

(6.60)

La longueur le des éléments étant égale à la demi-longueur de la poutre réelle, et lespropriétés matériaux et géométriques étant les mêmes pour ces éléments, notre système

Approximations numériques 172

devient : 1 −1 0

−1 2 −1

0 −1 1

u1

u2

u3 = ud

=

12ρg(l2

)2 − Rd

ESl2

ρg(l2

)2

12ρg(l2

)2

(6.61)

ce qui correspond bien au système (6.51) obtenu précédemment, en définissant des fonc-tions de forme locales sur chaque sous-domaine. Mais ici la présentation de la méthodepermet une approche plus physique, puisque les grandeurs globales que sont la rigidité etle chargement extérieur peuvent être vues simplement comme la somme des contributionsde chaque élément à l’ensemble.

Il reste enfin à prendre en compte la condition aux limites de Dirichlet qui ici n’estpas incluse dans l’espace des solutions. Pour simplifier les choses, revenons au problèmeinitial de la Figure 6.11-b tel que u(0) = 0 et u(l) = ud. Soit, en termes de degrés deliberté (ddl) : u1 = 0 et u3 = ud. La condition homogène peut être traitée en réduisantle système, i.e. en éliminant les contributions relatives à ce degrés de liberté. On obtientbien une solution à ce problème qui n’est plus singulier puisqu’un mouvement de corpsrigide est bloqué, ce qui assure de pouvoir solliciter la structure. Mais dans les codes decalcul industriels, l’assemblage des grandeurs élémentaires est une opération coûteuse, etredimensionner le système obtenu est très rarement employé. On préférera garder la tailledu système en annulant les contributions correspondants au ddl et le terme diagonal àl’unité : 1 0 0

0 2 −1

0 −1 1

u1

u2

u3 = ud

=

0

ρg l2

4

ρg l2

8

(6.62)

Dans le cas de conditions non-homogènes, on peut procéder de plusieurs façons, et notam-ment par élimination. Il s’agit de la solution la plus directe que nous utiliserons ici pourdes raisons de clarté, mais qui dans les codes industriels n’est jamais employée pour lesraisons de redimensionnement évoquées précédemment. On préférera plutôt procéder parpénalisation (ou méthode du terme diagonal dominant) ou en introduisant des inconnuessupplémentaires appelées Multiplicateurs de Lagrange, le principe étant d’introduire desgrandeurs équivalentes aux efforts de réaction produits par ces ddls imposés.

De façon générale, si nD conditions de Dirichlet sont imposées, le système à résoudrepossède (en 3D), 3n − nD ddl car le champ test est C.A.(0) (équilibre ∀−→v C.A.(0)), i.e.les déplacements imposés sont annulés. Ceci conduit à annuler le travail virtuel des effortsde réaction. Considérons plutôt le cas où ce champ test est simplement C.A. L’équilibres’écrit alors :vlvb

T [Kll] [Kbl]

T

[Kbl] [Kbb]

ulub

vlvb

T FlFb

−vbT Rb = 0 ,∀

vlvb

C.A.

où les termes de rigidité relatifs aux ddls libres notés ul sont regroupés dans une sous-matrice [Kll] et un vecteur des efforts extérieurs connus Fl. De la même façon, les termes

Approximations numériques 173

relatifs aux nD ddls imposés notés ub sont regroupés dans la sous-matrice [Kbb] et unvecteur des efforts extérieurs connus Fb complété par les efforts de réaction Rb. Lasous-matrice [Kbl] relie les contributions ’croisées’ des ddls imposés et inconnus.

La solution recherchée ul est donc solution de :

[Kll] ul = Fl − [Kbl]T ub

avec ub =ud. Dans notre cas, la condition u3 = ud conduit à résoudre :

K22u2 = F2 −K23ud

⇔ u2 = ρg l2

8E+ ud

2

(6.63)

soit la solution exacte en x = l2(pour mémoire u(x) = udx

l− ρgx

2 E(x− l)) tel que représenté

sur la Figure 6.9 page 167.

Pour information, l’utilisation d’une pénalité pour assurer u3 = ud reviendrait àimposer une réaction R3 = α

(ud − u3

)avec α un scalaire à choisir grand (de l’ordre de

105−8, ou plus généralement max(Kij)). Le travail des efforts de réaction étant nul, lacondition sera d’autant mieux vérifiée que α sera grand. Par contre le système sera alorsmal conditionné car en introduisant ces efforts de réaction, le système à résoudre est : [Kll] [Kbl]

T

[Kbl] [Kbb] + α [I]

ulub

=

FlFb+ α

ud (6.64)

On remarquera par ailleurs que les réactions introduites n’apparaissent plus dans ce sys-tème final où α peut être assimilé à une rigidité.

6.4 Conclusions sur les méthodes numériques en méca-nique des structures

On vient de voir, à travers un exemple simple, que la méthode des éléments finisest la méthode idéale pour le dimensionnement dans une démarche de conception destructures. Cette méthode s’appuie sur des méthodes générales plus anciennes mais quipeuvent s’avérer assez lourdes, même pour des cas simples.

Par contre, il ne faut pas oublier que le dimensionnement des systèmes mécaniquesfait de plus en plus appel à des simulations multi-physiques dans lesquels diverses mé-thodes numériques peuvent être combinées. C’est d’ailleurs ces approches combinées quidonnent lieu, aujourd’hui, au plus gros effort en simulation numérique chez les industriels.Ces méthodes complexes et faisant appel à des calculs de grandes taille sur des calcula-teurs parallèle ou distribués, vont bien au-delà de l’objectif de cette courte introduction,mais les principes de base restent les mêmes : résolution des équations de conservation

Approximations numériques 174

de masse, d’énergie, d’espèce chimique, de quantité de mouvement, ... Avec la questionde fond qui doit rester dans l’esprit de tout ingénieur : quelle est la qualité (représentati-vité) de la solution obtenue ? Une première idée peut être proposée à travers une solutionanalytique du type de celles vues en début de ce document, ensuite des tests de conver-gence et stabilité doivent être conduits. Mais ceci relève des cours spécifiques du masterMécanique et Ingénierie, parcours Modélisation et Simulation Numérique ...

Approximations numériques 175

7.

Rappels - Éléments et Principes de lamécanique

Sommaire7.1 Rappel sur les torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

7.1.1 Définition d’un torseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

7.1.2 Produit scalaire de deux torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . 178

7.1.3 Dérivation d’un torseur dans un repère mobile . . . . . . . . . . 178

7.2 Calcul variationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180

7.2.1 Extremum d’une intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180

7.2.2 Condition d’Euler-Lagrange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181

7.2.3 Cas où la dérivée seconde intervient . . . . . . . . . . . . . . . 182

7.2.4 Importance des conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . 183

7.2.5 Cas d’une fonctionnelle faisant intervenir des dérivées en tempset en espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183

7.2.6 Remarque : Indépendance des formes de y dans la fonctionnelle I 185

7.3 Cinétique - Dynamique - Énergétique . . . . . . . . . . . . . . 185

7.3.1 Moments et autres caractéristiques du mouvement des corps . . 185

7.3.2 Théorème de Huygens-Koënigs . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

7.3.3 Tenseurs d’inertie pour des géométries courantes . . . . . . . . 188

7.3.4 Cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189

7.3.5 Dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192

7.3.6 Principe Fondamental de la Dynamique . . . . . . . . . . . . . 192

7.3.7 Théorème de l’énergie cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194

7.4 Principe des puissances virtuelles - PPV - et lien avec lesautres principes de la mécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . 194

7.4.1 Principe des Travaux Virtuels et Principe de Hamilton pour lessystèmes discrets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195

7.4.2 Forme proposée par Lagrange pour les systèmes discrets . . . . 198

7.4.3 Généralisation aux systèmes discrets non-conservatifs . . . . . 199

7.4.4 Principe de Hamilton pour les systèmes continus . . . . . . . . 201

176

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 177

7.4.5 Liens avec le PPV/PTV, et le Principe de Hamilton dans lesmilieux continus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206

7.5 Concepts de stabilité des équilibres . . . . . . . . . . . . . . . . 2097.5.1 Stabilité des équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2097.5.2 Définition d’un équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2107.5.3 Petites oscillations autour d’une configuration d’équilibre . . . 2107.5.4 Stabilité d’un équilibre paramétrique . . . . . . . . . . . . . . . 2117.5.5 Linéarisation des énergies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213

7.1 Rappel sur les torseurs

7.1.1 Définition d’un torseur

Un torseur se définit en un point P et dans un repère (R) par ses éléments deréduction qui sont la résultante (

−→RB) et le moment (

−→MB) associé. La propriété essentielle

est que le moment, lorsqu’il est exprimé en un point différent, en un point A par exemple,devient :

−→MA =

−→MB +

−→AB ∧

−→RB

Par exemple le champ de vitesse−→V (P ∈ S) d’un solide (S) dans son mouvement

par rapport à un repère de référence (R0) est connu à travers le torseur cinématiquesuivant, d’éléments de réduction

−→Ω (S/R0) et

−→V (P,S/R0), exprimé au point P de (S) :

VS(P,S/R0) =

−→Ω (S/R0)

−→V (P,S/R0) =

−−→PM ∧

−→Ω (S/R0)

(P,S/R0)

Dans la suite, les torseurs seront supposés exprimés par rapport au repère de référencedu mouvement, ici R0, et explicités dans ce même repère afin d’alléger les notations. Si cetorseur est transporté au point A, la résultante reste inchangée mais le moment résultantdevient :

−→V (A,S/R0) =

−→V (P,S/R0) +

−→AP ∧

−→Ω (S/R0)

Le torseur cinématique exprimé en ce point devient alors :

VS(A,S/R0) =

−→Ω (S/R0)

−→V (A,S/R0) =

−→V (P,S/R0) +

−→AP ∧

−→Ω (S/R0)

(A,S/R0)

Ces propriétés, et celles énoncées ci-dessus, du torseur cinématique sont généraleset s’appliquent sans aucune restriction aux torseurs des efforts (statiques), torseur ciné-tique, dynamique, ou encore dans le cas des poutres aux torseurs des déformations ou descontraintes.

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 178

7.1.2 Produit scalaire de deux torseurs

On montre trés facilement (Eqs. 7.1 ci-dessous) que le produit de 2 torseurs seramène aux produits croisés des éléments de réductions des torseurs. Il en découle doncque ce produit est indépendant du point où sont exprimés les 2 torseurs. Prenons parexemple le produit du torseur des efforts par le torseur des déformations, soit l’équivalentde l’énergie de déformation pour une poutre (voir §1.4.2, Chapitre 1, Théorie des poutres) :

τM(x1) . εM(x1) =

=

−→R (x1)

−−→MM(x1) =

−→M(x1) +

−−→MG ∧

−→R (x1)

(M)

.

−→r (x1)

−→eM(x1) = −→e (x1) +−−→MG ∧

−→r′ (x1)

(M)

=−→R (x1).−→eM(x1) +

−−→MM(x1).

−→r′ (x1)

=−→R (x1).

(−→e (x1) +−−→MG ∧

−→r′ (x1)

)+(−→M(x1) +

−−→MG ∧

−→R (x1)

)−→r′ (x1)

=−→R (x1).−→e (x1) +

−→R (x1).

(−−→MG ∧

−→r′ (x1)

)+(−−→MG ∧

−→R (x1)

).−→r′ (x1)︸ ︷︷ ︸+

−→M(x1).

−→r′ (x1)

= 0

=−→R (x1).−→e (x1) +

−→M(x1).

−→r′ (x1)

(7.1)

7.1.3 Dérivation d’un torseur dans un repère mobile

On démontre, à partir d’éléments de calculs tensoriels, que la dérivée d’un torseurpar rapport à un repère mobile s’écrit, par exemple pour les déformations εM(x1) :

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 179

εM(x1) =d

dx1

UM

=d

dx1

−→r (x1)

−→uM(x1) = −→u (x1) +−−→MG ∧ −→r (x1)

(M)

=

d

dx1

−→r (x1)

d

dx1

−→uM(x1) =d

dx1

−→u (x1) +−→x1 ∧ −→r (x1) +−−→MG ∧ d

dx1

−→r (x1)

(M)

=

−→r′ (x1)

−→eM(x1) = −→e (x1) +−−→MG ∧

−→r′ (x1)

(M)

(7.2)pour les détails de la démonstration, on pourra se référer à l’ouvrage deP.Germain&P.Muller, référencé en début de ce cours. L’illustration peut se faire avecle torseur des actions intérieures d’une poutre écrit au centre de gravité de la sectioncourante,

τ(x1)(G) =

−→R (x1)

−→M(x1)

(G)

En considérant les éléments de réduction en un point O fixe, la dérivée s’exprime en cemême point O :

d

dx1

τ(x1)(O) =

d

dx1

−→R (x1)

d

dx1

−→M(x1) +−→x1 ∧

−→R (x1) +

−→OG ∧ d

dx1

−→R (x1)

(O)

Ce qui conduit aux éléments de réduction de la dérivée du torseur des efforts internes,exprimé en G et tel que présenté au §1.6.1 dans la théorie des poutres :

d

dx1

τ(x1)(G) =

−→R′(x1)

−→M ′(x1) +−→x1 ∧

−→R (x1)

(G)

(7.3)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 180

7.2 Calcul variationnel

Le calcul variationnel, ou calcul des variations, est une branche de l’analyse fonc-tionnelle qui consiste à rechercher des solutions conduisant à un optimum (maximumou minimum) d’un fonctionnelle, une fonction de fonction à valeur réelle. C’est un outilpuissant qui permet de caractériser une famille de solution, i.e. admissible au sens desrestrictions qui doivent être vérifiées en termes de régularité (C1) et de conditions aux li-mites, naturelles (Neumann) et essentielles (Dirichlet) en mécanique des milieux continus- voir Les Principes Variationnels par M. Bonvalet, collection Principes Mathématiquesde la Physique - 2, Ed. Masson 1993.

Ce type d’approche permet, par exemple, de caractériser une famille d’approxi-mations dans les méthodes d’homogénéisation (cf support de cours de Mécanique desComposites Hautes Performances). Plus de détails peuvent être trouvés dans d’autresbranches de la physique, par exemple dans l’ouvrage de M. Bonvalet cité ci-dessus.

7.2.1 Extremum d’une intégrale

On cherche l’extremum d’une intégrale de la forme :

I (y(x)) =

∫ x2

x1

Φ(y, y′, x)dx (7.4)

avec comme conditions aux limites y(x1) = 0 et y(x2) = 0. Ce problème est dit problèmede Lagrange, et nous comprendrons rapidement pourquoi dans la suite où il s’agira deminimiser le Lagrangien d’un système, avec des conditions aux extrémités fixes.

On cherche parmi toutes les fonctions y(x) possibles, celles qui conduisent à unevaleur extrêmale de I (y(x)). On note y(x) la famille des fonctions qui réalisent cet extrê-mum. On peut exprimer toutes les fonctions possibles y(x) en fonction des y(x), moduloune famille de fonctions arbitraires η(x) :

y(x) = y(x) + αη(x) (7.5)

où α est une constante.

On voit clairement que la fonctionnelle I réalise un minimum lorsque la valeurinduite par la partie arbitraire η(x) de y(x) est nulle. Dit autrement, la fonctionnelleΨ(α) = I(y(x) + αη(x)) vérifie l’inégalité (choisissons par commodité la notion de mini-mum pour l’extremum de cette fonctionnelle arbitraire) :

Ψ(0) ≤ Ψ(α) (7.6)

pour tout α assez petit.

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 181

On aura donc un minimum de I lorsque α est nul, ou encore la dérivée par rapportà α est nulle quand α est nul (en réalité tend vers 0) :

δI = Ψ′(0) =

[dI (y(x))

]α→0

et les C.L.

η(x1) = 0

η(x2) = 0(7.7)

ce qu’on peut également réécrire sous une forme plus classique, en introduisant un déve-loppement de Taylor

δI = limα→0

(I (y(x) + αη(x))− I(y(x))

α

)= 0 et les C.L.

δy(x1) = 0

δy(x2) = 0

On définit ainsi la notion de variation, et on peut réécrire y(x) = y + δy(x). Enintroduisant cette notation, on peut désormais utiliser le formalisme habituel du calculdifférentiel (7.8) où δy est associé à y mais n’est pas sa différentielle ; elle représenteune famille de fonctions proches (voir figure 7.2.1). Finalement, le calcul des variationsde l’intégrale permet de rechercher "simplement" une fonction dont la forme conduit àréaliser un extrêmum sur l’intervalle donné.

f =1

2k(y2 + y

′2)⇒ δ(f) =∂f

∂yδy +

∂f

∂y′δy′

= k(yδy + y′δy′)

(7.8)

— dy est un accroissement cor-respondant à y(x + dx) =

y(x) + dy

— δy est la valeur que prendraune fonction voisine, en l’oc-currence y+δy, pour une va-leur unique de la variable x.

7.2.2 Condition d’Euler-Lagrange

En reportant dans l’expression de I (7.4), la forme générale des fonctions à tester(7.5), on obtient une forme de I qui peut être développée selon le théorème de Taylor-MacLaurin en supposant que y et y′ sont des fonctions indépendantes (voir 7.2.6) :∫ x2

x1

Φ(y + δy, y′ + δy′, x)dx =

∫ x2

x1

Φ(y, y′, x)dx + α

∫ x2

x1

[∂Φ

∂yη(x) +

∂Φ

∂y′η′(x)

]dx +T.O.S.

⇔ I(y) = I(y) + δI(y, δy)(7.9)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 182

avec le dernier terme δI qui est appelé première variation de I, et qui peut se réécrire parintégration par parties en fonction des conditions aux limites :

δI =

∫ x2

x1

[∂Φ

∂yδy +

∂Φ

∂y′δy′]dx

=

∫ x2

x1

[∂Φ

∂y− d

dx

∂Φ

∂y′

]δy dx+ α

[∂Φ

∂y′η(x)

]x2x1

=

∫ x2

x1

[∂Φ

∂y− d

dx

∂Φ

∂y′

]δy dx+

[∂Φ

∂y′δy

]x2x1

(7.10)

Notons la propriété suivante, appelée également Lemme fondamental du calcul

des variations : Si l’intégrale∫ t2

t1

f(t) δf(t) dt est nulle pour toute fonction δf(t)

continue et nulle au voisinage de t = t1 et t = t2, alors la fonction f(t) est identiquementnulle si elle est continue.

En repartant de l’expression précédente de la première variation de I, fonctionnelleà minimiser, et avec les conditions aux limites précisées en (7.7), pour que I (y(x)) soitextremum, il est nécessaire et suffisant que δI soit nul en tout point du domaine, donc :

∂Φ

∂y− d

dx

∂Φ

∂y′= 0 (Condition d’Euler- Lagrange) (7.11)

7.2.3 Cas où la dérivée seconde intervient

I (y(x)) =

∫ x2

x1

Φ(y, y′, y′′, x)dx (7.12)

aprés 2 intégrations par parties successives, on obtient la forme suivante de la premièrevariation de δI :

δI =

∫ x2

x1

(∂Φ

∂y− d

dx

∂Φ

∂y′

)δy dx+ α

[∂Φ

∂y′η(x)

]x2x1

+

∫ x2

x1

d2

dx2

∂Φ

∂y′′δy dx+ α

[∂Φ

∂y′′η′(x)

]x2x1

− α[d

dx

∂Φ

∂y′′η(x)

]x2x1

=

∫ x2

x1

(∂Φ

∂y− d

dx

∂Φ

∂y′+

d2

dx2

∂Φ

∂y′′

)δy dx+

[(∂Φ

∂y′− d

dx

∂Φ

∂y′′

)δy +

∂Φ

∂y′′δy′]x1x2

= 0(7.13)

ce qui conduit à la condition d’Euler-Lagrange suivante :

∂Φ

∂y− d

dx

∂Φ

∂y′+

d2

dx2

∂Φ

∂y′′= 0 (7.14)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 183

et aux conditions aux limites associées :(∂Φ

∂y′− d

dx

∂Φ

∂y′′

)|(x1,x2) = 0

∂Φ

∂y′′|(x1,x2) = 0

(7.15)

7.2.4 Importance des conditions aux limites

Traitons le cas d’une barre homogène en flexion statique. Sans entre dans les détails,l’énergie de déformation d’un tel système s’écrit sous la forme :

I (y(x)) =

∫ l

0

(ky′′2 − 2ρy

)dx (7.16)

où y est un déplacement transverse à la poutre, k est une rigidité et ρ est une masselinéique. Après intégrations par parties, la première variation de I est :

δI (y(x)) =

∫ l

0

(ky′′′′ − ρ) δydx+ [−ky′′′(x)δy(x) + ky′′(x)δy′]l0 (7.17)

Ainsi, l’extrêmum de I conduit à vérifier que cette première variation est nulle entout point du domaine. On voit que le premier terme de cette expression, qui correspond àla condition d’Euler-Lagrange (7.14), est bien nulle en tout point de ]0, l[, par conséquenton a une équation du quatrième ordre en y à résoudre ce qui implique la connaissancede 4 conditions aux limites. Comme l’expression de δI doit être nulle, les termes de borddoivent donc s’annuler également pour toutes "fonctions test" δy et δy′. On a donc lestermes de bord, conformément à l’expression générale de (7.20), qui doivent s’annuler :

δI (y(x)) = [−ky′′′(x)δy(x) + ky′′(x)δy′]l0

soit au total quatre conditions portant soit sur y′′(x) ou y′′′(x) ou bien sur la fonctiontest δy(x) ou δy′(x) qui, on le rappelle, sont supposées indépendantes (voir 7.2.6).

"Il ressort immédiatement de l’observation des situations précédentes que le calculdes variations présente la précieuse caractéristique de mettre spontanément en évidencele nombre exact de conditions aux limites auxquelles il est nécessaire de satisfaire, ce quiest un élément de contrôle souvent très précieux dans le traitement de problèmes."

7.2.5 Cas d’une fonctionnelle faisant intervenir des dérivées entemps et en espace

Dans le cas du principe d’Hamilton (cf §7.4.4 page 201), le Lagrangien du sys-tème fait intervenir des dépendances en espace et en temps. Nous proposons d’établir la

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 184

condition de minimisation d’Euler-Lagrange pour ce cas :

I (y(x)) =

∫ t2

t1

(∫ l

0

Φ(y, y′, y, y′, x) dx

)dt (7.18)

La première variation de I est :

δI (y(x)) =

∫ t2

t1

(∫ x2

x1

∂Φ

∂yδy +

∂Φ

∂y′δy′ +

∂Φ

∂yδy +

∂Φ

∂y′δy′dx

)dt (7.19)

En effectuant l’intégration par parties en espace,

δI (y(x)) =

∫ t2

t1

(∫ x2

x1

∂Φ

∂yδy − ∂

∂x

(∂Φ

∂y′

)δy +

∂Φ

∂yδy +− ∂

∂x

(∂Φ

∂y′

)δy

dx

)dt

+

∫ t2

t1

[∂Φ

∂y′δy +

∂Φ

∂y′δy

]x1x2

dt

= 0(7.20)

puis l’intégration par parties en temps :

δI (y(x)) =

∫ t2

t1

(∫ x2

x1

∂Φ

∂y− ∂

∂x

(∂Φ

∂y′

)− ∂

∂t

(∂Φ

∂y

)+∂

∂t

(∂

∂x

(∂Φ

∂y′

))δy dx

)dt

+

∫ t2

t1

[∂Φ

∂y′δy − ∂

∂t

(∂Φ

∂y′

)δy

]x1x2

dt+

[[∂Φ

∂y′δy

]t1t2

]x1x2

= 0(7.21)

ce qui conduit à la condition de minimisation de d’Euler-Lagrange :

∂Φ

∂y− ∂

∂x

(∂Φ

∂y′

)− ∂

∂t

(∂Φ

∂y

)+∂

∂t

(∂

∂x

(∂Φ

∂y′

))= 0, ∀t, ∀x (7.22)

et aux conditions aux limites associées, sachant que le champ virtuel est nul aux instantst1 et t2, ce qui annule le dernier terme de l’expression 7.21 :[

∂Φ

∂y′δy − ∂

∂t

(∂Φ

∂y′

)]x2x1

= 0, ∀t (7.23)

Si, de plus, des conditions sont imposées sur la valeur de la fonctionnelle à sesbornes en espace du type [Φ(y, y′, y, y′, x)y]x2x1 , comme c’est la cas par exemple dans lessolides de type barres, cordes, et poutres, pour les efforts et moments terminaux, lesconditions aux limites ci-dessus (7.23) sont complétées et deviennent :[

∂Φ

∂y′− ∂

∂t

(∂Φ

∂y′

)+∂Φ

∂y

]x2x1

= 0, ∀t (7.24)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 185

7.2.6 Remarque : Indépendance des formes de y dans la fonction-nelle I

Le problème physique posé avec cette formulation a pour solution la fonction y(x)

dont la dérivée y′(x) dépend, bien évidemment. Quelle est alors l’hypothèse, si hypothèseil y a, qui permet de supposer que y et y′ sont indépendantes ?

On étudie maintenant le cas d’une fonctionnelle F qui dépend de y et d’une autreforme de y, notée g(y). On a alors la différentielle de la fonctionnelle :

dF =∂F (y, g(y), x)

∂ydy +

∂F (y, g(y), x)

∂g(y)

dg(y)

dydy (7.25)

si, par exemple, g(y) est la différentielle telle que g(y) =dy

dx= y′, alors la différentielle de

F devient :dF =

∂F (y, g(y), x)

∂ydy +

∂F (y, g(y), x)

∂dy

dx

d

dy

dy

dxdy

=∂F (y, g(y), x)

∂ydy +

∂F (y, g(y), x)

∂y′dy′

(7.26)

par extension (7.7), il vient naturellement :

δI =∂F (y, g(y), x)

∂yδy +

∂F (y, g(y), x)

∂y′δy′ (7.27)

Sans supposer aucune indépendance de y(x) et y′(x), on arrive naturellement auxrésultats connus (7.10). Il n’y a donc aucune hypothèse physique sous jacente, et cettedémarche calculatoire peut s’appliquer de façon systématique à toute fonctionnelle dé-pendant de n’importe quelle forme de fonctions.

7.3 Cinétique - Dynamique - Énergétique

7.3.1 Moments et autres caractéristiques du mouvement descorps

On étudie un solide (S) dans son mouvement par rapport au repère de référence(R0).

Centre d’inertie

Le centre d’inertie G d’un solide (S) de masse m est défini par :

m−→OG =

∫(S)

−→OP dm en particulier

∫(S)

−→GP dm = 0 (7.28)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 186

Tenseur d’inertie d’un ensemble matériel

Le tenseur d’inertie du solide, ou système de solides, (S) est défini par :

I(0,S).−→u =

∫(S)

−→OP ∧ (

−→OP ∧ −→u )dm (7.29)

où le vecteur −→u (−→x ) est un vecteur arbitraire. Si par exemple, ce vecteur est la vitesse derotation du solide S par rapport au repère R0,−→ω (S/R0), alors l’expression 7.29 correspondau moment cinétique du système, telle que définie en 7.36 ou encore telle qu’utilisée dansle calcul de l’énergie cinétique (7.40 par exemple).

Dans un repère orthonormé, le tenseur d’inertie est représenté par la matrice sy-métrique suivante :

I(0,S)(R0) =

∫(S)

(y2 + z2) dm −∫

(S)

xy dm −∫

(S)

xz dm

−∫

(S)

xy dm

∫(S)

(x2 + z2) dm −∫

(S)

yz dm

−∫

(S)

xz dm −∫

(S)

yz dm

∫(S)

(x2 + y2) dm

(R0)

(7.30)

ou encore :

I(0,S)(R0) =

Ixx −Ixy −Ixz

−Ixy Iyy −Iyz

−Ixz −Iyz Izz

(R0)

(7.31)

avec— Ixx, Iyy, et Izz les moments d’inertie, respectivement par rapport à l’axe

−→Ox, à

l’axe−→Oy et l’axe

−→Oz

— Ixy, Iyz, et Ixz les produits d’inertie, ou moments produits, respectivement parrapport aux axes

−→Ox et

−→Oy,−→Oy et

−→Oz,−→Ox et

−→Oz

Les moments peuvent être calculés par rapport à un plan de référence, ou bienencore par rapport à une droite ou à un point de référence. Par rapport à un plan de réfé-rence, les moments d’inertie deviennent, par exemple par rapport au plan yOz (d’équationx = 0) :

I(S/x = 0) =

∫(S)

x2dm

par conséquent le moment d’inertie Ixx est :

Ixx(O,S) =

∫(S)

(y2 + z2)dm = I(S/y = 0) + I(S/z = 0)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 187

Également, le moment d’inertie par rapport à l’origine O du repère (R0), appelé momentd’inertie polaire, s’écrit :

I0(S/O) =

∫(S)

(x2 + y2 + z2)dm = I(S/x = 0) + I(S/y = 0) + I(S/z = 0)

= Ixx(O,S) + Iyy(O,S) + Izz(O,S)

= trace(I(0,S))

Le tenseur d’inertie de (S) par rapport à une droite (∆), correspondant donc à unmouvement de rotation est donné par :

I(S/∆)R0

= −→u .[I(0,S).−→u

]où −→u est un vecteur unitaire porté par la droite (∆). Partant de cette définition, on peutdéfinir les axes principaux d’inertie d’un solide (S), tels que dans le repère généré parces axes le tenseur d’inertie I(O,S) est diagonal. Un tel repère est généré par la base devecteurs propres du tenseur d’inertie.

7.3.2 Théorème de Huygens-Koënigs

Ce théorème permet d’exprimer, entre autres choses, le tenseur d’inertie I(0,S)

d’un solide (S) de masse M(S) relativement à O, origine du repère (R0), en fonction dutenseur d’inertie I(G,S) du même solide exprimé par rapport à son centre d’inertie G,appelé tenseur central d’inertie :

I(0,S)(R0) = I(G,S)(R0) +M(S)

y2G + z2

G −xGyG −xGzG

−xGyG x2G + z2

G −yGzG

−xGzG −yGzG x2G + y2

G

(R0)

(7.32)

Cette relation peut également se mettre sous la forme suivante :

I(O,S) = I(G,S) +M(S)(−→OG2Id−

−→OG⊗

−→OG)

Par exemple pour un cas plan tel que décrit dans la Figure 7.1, les moments etproduits d’inertie par rapport à O l’origine du repère s’écrivent en fonction de grandeursexprimées par rapport au centre de gravité G et en fonction de la position de G. Dans lecas le plus simple, sur

−→Oy par exemple, on a :

Iyy(O,S) = IY Y (G,S) +M(S)z2G

Iyz(O,S) = IY Z(G,S)−M(S)yGzG

I0(S/0) = IG(G,S) +M(S)(x2G + y2

G + z2G)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 188

Figure 7.1: Section dans le plan (Oyz) et repère local (GYZ) associé

7.3.3 Tenseurs d’inertie pour des géométries courantes

Figure 7.2: Solides courants : barre de masse m et longueur 2` et disque de masse m etrayon R

Voici quelques exemples de tenseurs d’inertie pour des solides de géométries cou-rantes. Pour une barre de masse m et de longueur 2` dont l’axe est confondu avec l’axe−→Ox du repère (R0) et dont le centre de gravité est confondu avec l’origine du repère (R0)

(figure 7.2) :

I(0, barre)(R0) =

0 0 0

0m`2

30

0 0m`2

3

(R0)

(7.33)

Pour un disque de masse m et de rayon R dont l’axe de révolution coïncide avec

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 189

l’axe−→Oz du repère (R0) (voir figure 7.2) :

I(0, disque)(R0) =

mR2

20 0

0mR2

20

0 0 mR2

(R0)

(7.34)

et pour un cerceau de même masse et même rayon, on a :

I(0, cerceau)(R0)

=1

2I(0, disque)(R0) (7.35)

7.3.4 Cinétique

Rappel : torseur cinématique

Comme introduit en début de ce chapitre, un torseur se définit en un point P etdans un repère (R) par ses éléments de réduction qui sont la résultante et le champ desmoments associé. Le champ de vitesse

−→V (P ∈ S) d’un solide (S) dans son mouvement par

rapport à un repère de référence (R0) est connu à travers le torseur cinématique suivant,d’éléments de réduction

−→Ω (S/R0) et

−→V (P,S/R0), exprimé au point P de (S) :

VS(P,S/R0) =

−→Ω (S/R0)

−→V (P,S/R0) =

−−→PM ∧

−→Ω (S/R0)

(P,S/R0)

Dans la suite, les torseurs seront supposés exprimés par rapport au repère de référencedu mouvement, ici R0, et explicités dans ce même repère afin d’alléger les notations. Si cetorseur est transporté au point A, la résultante reste inchangée mais le moment résultantdevient :

−→V (A,S/R0) =

−→V (P,S/R0) +

−→AP ∧

−→Ω (S/R0)

Remarque Les mêmes définitions s’appliquent aux champs de vecteurs définis en toutpoint M du domaine. Si

−→Ω (S/R0) est une densité vectorielle volumique, on aura

VS(P,S/R0) =

∫S

−→Ω (M ∈ S/R0)dS∫

S

−−→PM ∧

−→Ω (M ∈ S/R0)dS

(P,S/R0)

Torseur cinétique

Les éléments de réduction (composantes) du torseur cinétique, aussi appelé torseurdes quantités de mouvement, dans le mouvement du système (S) par rapport au repère

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 190

de référence (R0), sont définis de la manière suivante au point A quelconque (7.36). Larésultante est appelée quantité de mouvement ou résultante cinétique, et le moment estappelé moment cinétique :

CS(A,S/R0) =

−→C (S/R0) =

∫(S)

−→V (P ∈ S/R0)dm

−→H (A,S/R0) =

∫(S)

−→AP ∧

−→V (P ∈ S/R0)dm

(A,S/R0)

(7.36)

où−→V (P ∈ S/R0) désigne la densité massique de vitesse au point P , appartenant au solide

(S), dans son mouvement par rapport au référentiel (R0). En se plaçant en un point Adu repère (R0), et en introduisant le repère central d’inertie (RG) dont l’origine est G etdont les axes sont colinéaires aux axes de base du repère (R0), i.e.

−→Ω (RG/R0) =

−→0 , les

éléments de réduction du torseur cinétique deviennent :

CS(A,S/R0) =

−→C (S/R0) = M

−→V (G ∈ S/R0)

−→H (A,S/R0) =

−→H (G,S/RG) +

−→AG ∧ M(S)

−→V (G ∈ S/R0)

(A,S/R0)

(7.37)

Cette dernière expression permet de poser que :— la quantité de mouvement du système est égale à celle du centre d’inertie G

affecté de la masse totale M du système,— le moment cinétique par rapport à un point A est la somme de son moment

cinétique par rapport à G, centre d’inertie, dans le mouvement du systèmeautour de G, et du moment cinétique par rapport à A de la masse totale M(S)

supposée concentrée en G. Cette dernière propriété découle du théorème deKoënig.

Énergie cinétique

Expressions générales Par définition l’énergie cinétique T (S/R0) du système (S) parrapport au repère (R0) est la quantité suivante :

T (S/R0) =1

2

∫(S)

−→V 2(P ∈ S/R0)dm (7.38)

Cette définition s’étend sans difficulté au cas d’un système de solides, constitué deN masses ponctuelles mk situées aux points Pk, animés de vitesses

−→V (Pk ∈ S/R0) par

rapport au référentiel (R0) :

T (S/R0) =1

2

N∑k=1

mk

−→V 2(Pk ∈ S/R0) (7.39)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 191

et si le système (S) apparaît comme la réunion de plusieurs sous-ensembles disjoints,tels que (S) = S1 ∪ S2 ∪ . . . ∪ SN , l’énergie totale se déduit des énergies cinétiques dessous-ensembles :

T (S/R0) = T (S1/R0) + T (S2/R0) + . . .+ T (SN/R0)

Expressions par rapport à un point quelconque Dans le cas d’un système solide,le champ de vitesse

−→V (P ∈ S) est connu à travers le torseur cinématique de (S) dans son

mouvement par rapport à (R0) : VS(A,S/R0). En introduisant, dans la définition généralede l’énergie cinétique (7.38), l’expression générale du champs de déplacement au sein dusolide (S), on obtient l’expression suivante de l’énergie cinétique calculée en un pointquelconque P .

T (S/R0) =1

2

[M−→V 2(P ∈ S/R0) + 2M

−→V (P ∈ S/R0)

(−→Ω (S/R0) · I(G,S)

)+−→Ω (S/R0) ·

(I(P,S) ·

−→Ω (S/R0)

)](7.40)

Un cas particulier très utile correspond à un point P fixe. Alors, seule la composantede rotation dans le mouvement de (S) par rapport à (R0) est à l’origine de l’existence del’énergie cinétique :

Tp(S/R0) =1

2

−→Ω (S/R0) ·

(I(P,S) ·

−→Ω (S/R0)

)Expression en fonction du centre d’inertie L’énergie cinétique peut s’exprimeren fonction de la vitesse du centre d’inertie et de la rotation du solide (S) dans sonmouvement par rapport à (R0) :

T (S/R0) =1

2M−→V 2(G ∈ S/R0) +

1

2

−→Ω (S/R0) ·

(I(G,S) ·

−→Ω (S/R0)

)=

1

2M−→V 2(G ∈ S/R0) + TG(S/R0)

(7.41)

ce qui se met également sous la forme de produits de torseurs :

T (S/R0) =1

2

M−→V (G,S/R0)

I(G,S) ·−→Ω (S/R0)

(G,S/R0)

·

−→Ω (S/R0)

−→V (G,S/R0)

(G,S/R0)

=1

2CS(G,S/R0) · VS(G,S/R0)

Cette dernière expression (7.41) correspond à l’application du théorème de Koënigdans le cas de l’énergie cinétique : l’énergie cinétique totale du solide S est égale à lasomme de l’énergie cinétique dans son mouvement autour de son centre d’inertie, et del’énergie cinétique développée par la translation de sa masse M totale concentrée en G.

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 192

7.3.5 Dynamique

Torseur dynamique

Le torseur dynamique est aussi appelé torseur des quantités d’accélération. Il estdéfini en fonction de la distribution massique des accélérations −→γ (P ∈ S/R0) de la ma-nière suivante :

DS(A,S/R0) =

−→D(S/R0) =

∫(S)

−→γ (P ∈ S/R0)dm

−→K (A,S/R0) =

∫(S)

−→AP ∧ −→γ (P ∈ S/R0)dm

(A,S/R0)

(7.42)

Le moment dynamique du mouvement de (S) par rapport au repère (R0) s’exprime éga-lement en tout point A de (S) en fonction du moment cinétique

−→H (A,S/R0) défini pré-

cédemment. Pour un solide de masse invariante :

−→K (A,S/R0) =

d−→H (A,S/R0)

dt+−→V (A,S/R0) ∧

−→C (A,S/R0) (7.43)

Cette expression se simplifie si le point A est fixe par rapport au repère du mouvement (R0)

(−→V (A,S/R0) =

−→0 ), et donc au centre d’inertie G du système. Ce torseur des quantités

d’accélération se simplifie et s’écrit en fonction du torseur cinétique :

DS(G,S/R0) =

−→D(S/R0) =

D−→C (S/R0)

Dt= M−→γ (G ∈ S/R0)

−→K (G,S/R0) =

D−→H (G,S/R0)

Dt

(G,S/R0)

(7.44)

en notant que la dérivée étant relative au repère du mouvement, une expression eulériennepour ces formulations locales nécessite d’introduire une dérivée particulaire notée D

Dt-

cf support de cours de J. Bruchon Mécanique des Milieux Continus dans la MajeureMécanique 2014-2015.

7.3.6 Principe Fondamental de la Dynamique

L’énoncé du PFD permet de relier directement l’ensemble des efforts extérieurs(voir remarque ci-dessous) appliqués à un système en mouvement τext→S(A,S/R0) parrapport à un repère (R0), au torseur des quantités d’accélération galliléennes DaS(A,S/R0)

de ce système :

Principe Fondamental de la Dynamique

τext→S(A,S/R0) = DaS(A,S/R0) (7.45)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 193

Forces fictives

Si le repère (R0) du mouvement n’est pas galliléen 1 le torseur des efforts extérieursdoit inclure les forces dites fictives qui dérivent de la loi de composition des accélérationset qui peuvent être classées dans les forces à distances au même titre que les effortsvolumiques produits par l’attraction gravitationnelle par exemple.

En effet, le PFD s’énonce en prenant comme accélération l’accélération dite absolueou accélération galliléenne (−→γ a). Il est donc nécessaire, lorsque le mouvement n’est pasgalliléen, de prendre en compte les forces d’inertie dues à l’accélération d’entraînement(−→γ e) et la force de Coriolis (−→γ c) qui se déduisent de la loi de composition des accélérations.Soit le PFD prenant en compte ces forces fictives lorsqu’elles existent :

τext→S(G,S/R0) + −m−→γ e(G ∈ S/R0)+ −m−→γ c(G ∈ S/R0) = m−→γ r(G ∈ S/R0)(7.46)

Ce système d’équations (7.46), un peu plus général que le PFD (7.45) est égalementappelé Équations universelles de l’équilibre et du mouvement.

Théorèmes de la quantité de mouvement et du moment cinétique

En se limitant aux cas où l’équilibre est considéré en un point fixe par rapport aurepère du mouvement (R0), le torseur des actions dynamiques DaS est directement égalà la dérivée par rapport au temps du torseur cinétique (7.44).

τext→S(A,S/R) =D

DtCS(A,S/R) (7.47)

De plus, pour des systèmes (S) de contenu invariable, cette nouvelle forme du PFD(7.47) donne deux équation vectorielles respectivement appelées Théorème de la quantitéde mouvement (7.48-a) et Théorème du moment cinétique (7.48-b). Comme précédem-ment, les forces fictives doivent être introduites dans le torseur des actions extérieures sile repère du mouvement (R0) n’est pas galliléen. On peut noter que seul le théorème dumoment cinétique impose que le point auquel il est appliqué soit fixe par rapport au repèredu mouvement, le théorème de la quantité de mouvement s’appliquant sur la résultanteindépendante du point considéré :

∑−→F ext→S(M) =

d−→C (S/R0)

dt(7.48a)

∑−→M(−→F ext→S(M), A) =

d−→H (A,S/R0)

dt(7.48b)

1. des axes de référence galliléens sont définis à une translation rectiligne uniforme près par rapportà l’un d’entre eux choisi en particulier

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 194

7.3.7 Théorème de l’énergie cinétique

Pour un système (S) constitué de partitions, la puissance totale développée par cesystème dans son mouvement par rapport à un repère de référence (R0) conduit à l’ex-pression du théorème de l’énergie cinétique. En première approximation, cette expressionest le PFD en produit avec le champ des vitesses qui règne dans chaque partition dusystème. On a ainsi un équilibre entre la puissance développée par les efforts extérieursPext(S/R0) et les efforts dérivant de l’énergie cinétique. Les efforts internes à chaquepartition Pint(S/R0) et inter-partitions Pdeff (S/R0) étant également considérés.

Finalement, pour toute partition d’un système, la somme des puissances des forcesextérieures au système et des forces intérieures relatives à la partition envisagée, dansle mouvement réel, est égale à la dérivée par rapport au temps de l’énergie cinétiquedu système augmentée de la somme des puissances des déformations entre les différentesparties du système :

Pint(S/R0) + Pext(S/R0) =D T (S/R0)

Dt+∑Pdeff (S/R0) (7.49)

Dans le mouvement autour du centre d’inertie le théorème de l’énergie cinétique s’ap-plique sans introduire d’autres forces que celles que l’on doit considérer dans le repère dumouvement (R0), i.e. aucune force fictive d’origine inertielle.

7.4 Principe des puissances virtuelles - PPV - et lienavec les autres principes de la mécanique

Le principe des puissances virtuelles - PPV - est un outil extrêmement puissant,qui permet notamment d’expliciter les conditions d’équilibre et de stationnarité d’un sys-tème. Des formulations écrites en termes de potentiels (externe, interne, de dissipation),telles que le principe de Hamilton peuvent être utilisées dans les cas de systèmes conser-vatifs et/ou dont les efforts dérivent d’un potentiel, et dans un cadre linéaire géométriqueet matériaux. Par contre, le PPV offre une écriture beaucoup plus générique. L’expres-sion du PPV devient alors la base de l’écriture d’un équilibre, et peut correspondre souscertaines conditions vérifiées par le champs virtuel, à la formulation faible du problèmeécrit en déplacements ou en efforts. Ce principe sera d’abord introduit sur des systèmesdiscrets puis étendu aux systèmes continus, dynamiques puis statiques.

Remarques : Les notions utilisées ici sur les systèmes discrets - liaisons holo-nômes, paramétrisation de Lagrange, structure de l’énergie cinétique, ...- sont dé-taillées dans le support de cours Dynamique des Solides et des Structures disponible àl’adresse http://www.emse.fr/~drapier/index_fichiers/CoursPDF/Dynamique-3A/Dynamique-SDrapier-janvier2012.pdf.

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 195

7.4.1 Principe des Travaux Virtuels et Principe de Hamilton pourles systèmes discrets

Considérons un cas linéaire, du point de vue géométrique et du point de vue ma-tériau. Pour cela, considérons le cas le plus simple qui soit, un point matériel k, associé àune masse mk :

— soumis a un champ de forces−→X de composante Xi, i = 1, 2, 3, qui peuvent être

des forces volumiques données ou bien des efforts de réaction dûs aux conditionscinématiques imposées au système

— l’équilibre dynamique est caractérisé par le PFD (Eq. 7.45) :

mk ui − Xi = 0

Principe des Travaux Virtuels - PTV

Imaginons une trajectoire −→u ′(t) distincte de −→u (t), mais suffisamment proche. Ondéfinit le déplacement virtuel δ−→u par δ−→u = −→u ′ − −→u (figure 7.3). Par définition le dé-placement virtuel est arbitraire pour t1 < t < t2, il représente un écart par rapport audéplacement réel. C’est en cherchant à minimiser cet écart que la formulation variation-nelle permet de trouver le champ réel, seule solution de l’équilibre. On retrouve ici lanotion de famille de fonctions admissibles proches de la solution, introduite comme basedu calcul variationnel au §7.2.

Figure 7.3: Trajectoire virtuelle.

Les conditions aux limites cinématiques doivent être vérifiées par le champ de déplacement réel, qui est dit Cinématiquement Admissible (C.A.). Il faut donc que le champvirtuel soit Cinématiquement Admissible à 0 (C.A.(0)), c’est à dire que les conditions auxlimites cinématiques soient vérifiées, et donc que les perturbations imposées au champs dedéplacement soient nulles. En effet, si au point P le déplacement −→u d est imposé, l’écartà cette quantité donnée ne peut qu’être nulle, puisque le champ réel est C.A. (7.50). Ce

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 196

raisonnement tient aussi pour les Conditions Initiales (en temps), et le champ virtueldevra être nul aux bornes t1 et t2, il sera noté C.I.(0).

−→u (P ) = −→u d−→u (P )+ δ−→u (P ) = −→u d

⇓δ−→u (P ) =

−→0

(7.50)

L’énoncé du PTV pour les systèmes discrets de dimension N est donc le suivant :

N∑k=1

3∑i=1

(mk uik − Xik) δuik = 0, ∀δuik C.A.(0), C.I.(0) (7.51)

Réciproquement, si le PTV est vérifié, quelque soit le champ virtuel répondant aux res-trictions ci-dessus, alors l’équilibre est satisfait. Le PTV représente la contribution éner-gétique des puissances développées, dans un champ de déplacement virtuel C.A.(0), pard’une part les efforts d’origine inertielle et d’autre part les efforts extérieurs au système.Nous verrons son extension aux milieux continus, ci-après.

Principe de Hamilton

Le principe de Hamilton n’est rien d’autre que le PTV intégré dans le temps. Ilest donc nécessaire de pouvoir définir des potentiels dont dérivent les grandeurs statiqueset dynamiques du PFD. Partons de notre écriture du PTV (7.51) et intégrons-le dansle temps, en supposant que le système ne présente que des liaison holonômes, i.e. dontl’expression permet une intégration en temps.

∫ t2

t1

(N∑k=1

3∑i=1

(mk uik − Xik) δuik

)dt = 0, ∀δuik C.A.(0), C.I.(0) (7.52)

Nous allons exprimer ce principe en utilisant des formes potentielles, et pour celanous supposerons que les masses sont indépendantes du temps. On peut remarquer l’iden-tité suivante concernant les effort d’origine inertielle :

d

dt(mk uikδuik) = mk uikδuik +mk uikδuik

= mk uikδuik + δ

[1

2mk uikuik

]on retrouve la définition de l’énergie cinétique (7.39) pour le points matériels

⇓d

dt(mk uikδuik) = mk uikδuik + δT (uik, uik, t)

(7.53)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 197

Il faut maintenant définir l’énergie potentielle, qui dans le cas des systèmes discrets,se déduit de l’expression des efforts extérieurs et des efforts de liaison intérieurs. Onsuppose ici que ces efforts Xik dérivent d’un potentiel V :

−→F (−→x ) = −

−→∇V (−→x , t). Pour

mémoire, les forces dérivant d’un potentiel peuvent conservatives, ou non (cf potentielsde dissipation au §7.4.3).

Pour simplifier les écritures, on utilisera ici la notion de coordonnée généraliséequi permet, dans les systèmes discrets, de passer d’une paramétrisation en fonction descoordonnées matérielles (−→x , −→u (−→x )) et vitesses associées (

−→u (−→x )), à une paramétrisation

optimale en termes de coordonnées généralisées (qs) et vitesses associées (qs). En écrivantle travail virtuel δWQs (ou le travail élémentaire) des efforts généralisés :

δWQs =N∑k=1

3∑i=1

Xikδuik =n∑s=1

Qsδqs = −δV (qs) (7.54)

On a ainsi l’expression des efforts généralisés et du potentiel correspondant qui se déduitde l’expression du travail virtuel :

∃V (qs) /∂V (qs)

∂qs= −Qs

(δV =

s∑n=1

∂V (qs)

∂qsδqs

)(7.55)

Si nous revenons à notre expression initiale de l’intégration dans le temps du PTV(7.53), en introduisant l’expression du potentiel des efforts généralisés (7.54) et l’expressionde l’énergie cinétique (7.53) quadratique en les coordonnées généralisées et les vitessesgénéralisées, le principe de Hamilton (7.52) peut s’écrire sous la forme :[

N∑k=1

3∑i=1

−mk uik δuik

]t2t1

+ δ

∫ t2

t1

(T (qs, qs, t)− V (qs)) dt = 0, ∀δuik C.A.(0), C.I.(0)

(7.56)

compte-tenu des restrictions sur les valeurs du champ virtuel en t1 et t2, le premier termede cette expression est nul et on obtient l’énoncé du Principe de Hamilton.

Principe de Hamilton pour les systèmes conservatifs

La trajectoire réelle du système est celle qui rend stationnaire l’intégrale∫ t2t1

(T (qs, qs, t)− V (qs)) dt par rapport à toute variation arbitraire de déplacement C.A.(0)

entre 2 instants t1 et t2, mais s’annulant aux extrémités de l’intervalle :δ

∫ t2

t1

(T (qs, qs, t)− V (qs)) dt = 0

δqs(t1) = δqs(t2) = 0

(7.57)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 198

7.4.2 Forme proposée par Lagrange pour les systèmes discrets

La forme proposée par Lagrange est beaucoup plus générale car elle ne se limitepas aux systèmes conservatifs. On exprime les équations du mouvement en fonction descoordonnées généralisées. Pour la variation de l’énergie cinétique, T (qs, qs, t), on obtient :

δT (S, R0) =n∑s=1

(∂T

∂qsδqs +

∂T

∂qsδqs

)(7.58)

On connaît également la forme du potentiel des efforts extérieurs (7.54) en fonction descoordonnées généralisées. On peut donc écrire le principe de Hamilton (7.57) sous la formesuivante :∫ t2

t1

(n∑s=1

(∂T

∂qs+Qs

)δqs +

∂T

∂qsδqs

)dt = 0, ∀δqs C.A.(0), C.I.(0) (7.59)

On intègre par parties le second terme :∫ t2

t1

∂T

∂qsδqs dt =

[∂T

∂qsδqs

]t2t1

−∫ t2

t1

d

dt

(∂T

∂qs

)δqs dt

‖0 car δqs C.I.(0)

(7.60)

Finalement, l’équilibre est équivalent à :∫ t2

t1

(n∑s=1

[− d

dt

(∂T

∂qs

)+∂T

∂qs+Qs

]δqs

)dt = 0, ∀δqs C.A.(0), C.I.(0) (7.61)

cette égalité étant vraie quelque soit le champ virtuel, la condition (7.61) équivaut doncà n équations scalaires, appelées Équations de Lagrange, valables pour l’instant dans lecadre d’un système conservatif :

− d

dt

(∂T

∂qs

)︸ ︷︷ ︸ +

∂T

∂qs︸︷︷︸ + Qs︸︷︷︸ = 0 , s = 1 . . . n

a b c

(7.62)

les termes a, b représentant les forces d’inertie généralisées associées au ddl qs, et le termec représentant les forces généralisées extérieures (et intérieures comme nous le préciseronsdans la suite).

On reconnaît dans la structure de ces équations, la condition de minimisation desfonctionnelles d’Euler-Lagrange (voir Eq. 7.11), pour la fonctionnelle présentée dans leprincipe de Hamilton (7.57). Cette expression est complétée par la suite dans le cadre dessystèmes dissipatifs.

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 199

7.4.3 Généralisation aux systèmes discrets non-conservatifs

Les forces généralisée intérieures et extérieures au système peuvent être classéesselon leur type (élastiques, conservatives, dissipatives, ...) ce qui permet de formuler leséquations de Lagrange dans un cadre tout à fait général. Ces forces sont dites conservativessi le travail virtuel associé est récupérable.

1/ Forces intérieures

Forces de liaison Les forces de liaison sont internes au systèmes, elles résultent descontraintes cinématiques imposées. Exemple, une liaison entre 2 masses :Xi1 + Xi2 = 0

(action - réaction). Le travail virtuel associé au déplacement virtuel (δui1, δui2) est nulpuisque nous avons vu que le champ virtuel est C.A.(0), c’est-à-dire que les déplacementsvirtuels imposés sont nuls.

En conséquence, les forces de liaison ne contribuent pas aux forces généraliséesagissant sur l’ensemble du système. C’est un des attraits essentiels la mécanique Lagran-gienne.

Forces élastiques Dans un corps déformable, le travail est stocké sous forme récupé-rable. Les forces élastiques dérivent d’un potentiel élastique, ou potentiel de déformationqui s’exprime en calculant le travail virtuel δWel effectué par ces effort internes dans ledéplacement virtuel δ−→u :

δWel =N∑k=1

3∑i=1

∂Vint(qs)

∂uikδuik =

n∑s=1

Qsδqs = −δVint(qs) (7.63)

On en déduit l’expression des forces internes généralisées et du potentiel de défor-mation :

∃ Vint(qs) / Qs = −∂Vint(qs)∂qs

(7.64)

Forces dissipatives Ces forces sont de sens opposé au vecteur vitesse, orientées dansla même direction. Elles sont fonction du module du vecteur vitesse.

Les liaisons non-parfaites peuvent être dissipatives, c’est souvent le cas dans les sys-tèmes réels. Un autre exemple de force dissipative est l’effort de rappel d’origine visqueused’un amortisseur tel que dans un oscillateur amorti.

On montre que le travail virtuel de ces forces dissipatives agissant sur le systèmesest non-nul. On introduit un potentiel de dissipation D :

∃ D(qs) / −∂D(qs)

∂qs= Qs

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 200

La puissance dissipée est donnée par :

Pdiss =n∑s=1

Qsqs = −n∑s=1

∂D(qs)

∂qsqs

On montre que la fonction D(qs) est homogène d’ordre m en fonction des vitesses géné-ralisées, donc d’ordre m− 1 pour les forces dissipatives généralisées qui en dérivent :

— m = 1 : frottement sec— m = 2 : frottement visqueux— m = 3 : traînée aérodynamique (turbulence)

Donc la puissance dissipée vaut :

Pdiss = −n∑s=1

mD(qs)qs

On peut noter que les forces extérieures peuvent également être dissipatives, par exempleen présence de contacts.

2/ Forces extérieures

Forces conservatives Comme nous l’avons vu précédemment, elles dérivent d’un po-tentiel (7.55) :

∃ Vext(qs) / Qs = −∂Vext∂qs

Le travail virtuel de ces forces sur un cycle est nul :

δWext−cons =

∮Qsδqs = 0

Forces non-conservatives Leur travail virtuel ne peut se simplifier comme dans lescas précédents, il s’exprime en fonction des efforts extérieurs (7.54) et des déplacementscourants dérivés par rapport aux coordonnées généralisées :

δWnon−cons = −∑n

s=1Qsδqs =N∑k=1

3∑i=1

Xikδuik

=∑N

k=1

3∑i=1

n∑s=1

Xik∂uik∂qs

δqs

Ce qui donne l’expression des efforts généralisés associés :

Qs(t) =3∑i=1

N∑k=1

Xik∂uik∂qs

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 201

Au bilan la prise en comptes des forces non-conservatives internes et externes dansle calcul du bilan énergétique du système donne :

d

dt(T (qs, qs, t) + V (qs, qs)) = −mD(qs) +

n∑s=1

Qs(t)qs

où le potentiel total V (qs) = Vint(qs) + Vext(qs)

Équations de Lagrange dans le cas général

Dans le cas général d’un système non-conservatif à liaisons cinématiques holo-nômes, les équations de Lagrange prennent en compte les forces intérieures et extérieures,dissipatives et conservatives, introduites précédemment. Au final, le mouvement du sys-tème est caractérisé par s équations correspondant aux s degrés de liberté du système :

Équations de Lagrange pour les sytèmes non-conservatifs

− d

dt

(∂T (qs, qs, t)

∂qs

)+∂T (qs, qs, t)

∂qs− ∂V (qs)

∂qs− ∂D(qs)

∂qs+Qs(t) = 0 , s = 1 . . . n

(7.65)

avecQs(t) : les forces extérieures généralisées non-conservativesV (qs) = Vint(qs) + Vext(qs) : le potentiel totalV ∗(qs) = V (qs)−T0(qs, t) : le potentiel modifié par l’énergie cinétique d’entraî-nement linéaire en les coordonnéesD(qs) : le potentiel de dissipationFs =

∑ns=1 Grs les forces gyroscopiques généralisées

Toutes les notions introduites ci-dessus restent évidemment valables dans le cas dessystèmes continus. Bien évidemment la notion de potentiel des actions intérieures devraêtre précisée puisque nous considérerons, généralement, une unique partition dans le casdes milieus continus.

7.4.4 Principe de Hamilton pour les systèmes continus

Dans ces systèmes continus le principe de Hamilton établi précédemment (Eq. 7.57)pour des systèmes discrets conservatifs reste bien évidemment valable. On rappel que ceprincipe est basé sur la minimisation de la fonctionnelle appelée Lagrangien du système,définie comme la différence entre l’énergie cinétique du système et son énergie potentielleextérieure et intérieure. Dans le cas des milieux continus, cette dernière quantité est

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 202

classiquement appelée énergie de déformation élastique. Le principe de Hamilton s’écritentre deux instants t1 et t2 pour un système continu : δ

∫ t2

t1

L(−→u ,−→u , t) dt = δ

∫ t2

t1

(T (−→u ,−→u , t)− Vext(−→u )−W (−→u )

)dt = 0,

∀ δ−→u (−→x , t) C.A.(0) et C.I.(0)

(7.66)

Les relations entre le PPV / PTV, et le Principe de Hamilton sont explicitéesplus en détails ci-après §7.4.5 page 206. On rappel que le principe de Hamilton s’écrità partir des potentiels des actions extérieures et intérieures, c’est-à-dire du potentiel dedéformation pour ce dernier terme. Considérons un milieu continu Ω quelconque de massevolumique ρ supposée constante, tel que représenté sur la figure 7.4. Ce milieu est enéquilibre sous l’action d’efforts extérieurs volumiques fi et surfaciques F d

i appliqués sursa frontière ∂ΩF . Les conditions aux limites cinématiques de ce milieu sont quant à ellesappliquées sur la surface ∂Ωu (−→u (−→x ) = −→u d(−→x ), ∀−→x ∈ ∂Ωu) et l’on a les conditionssuivantes sur ces deux surfaces complémentaires : ∂ΩF ∪ ∂Ωu = et ∂ΩF ∩ ∂Ωu = ∂Ω

Figure 7.4: Solide (S) quelconque, occupant un volume Ω, en équilibre sous l’action d’ef-forts extérieurs, et conditions aux limites associées.

Définition des potentiels

Pour ce milieu continu, la densité d’énergie cinétique s’exprime de manière trivialeet on définit w(γ) (éq. 7.67b) la densité d’énergie de déformation et vext(−→u ) (éq. 7.67a)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 203

la densité de potentiel des actions extérieures conservatives telles que :

∃vext(−→u ) /

∂vext∂−→u

|Ω = −−→f

(δvvolext(

−→u ) = −δwvolext

)∂vext∂−→u

|∂ΩF = −−→F d

(δvsurfext (−→u ) = −δwsurfext

) (7.67a)

∃ w(γ) /∂w

∂γ= S(γ)

(δw = S(γ) : δγ

)(7.67b)

où S est le second tenseur des contraintes de Piola-Kirchhoff et γ est le tenseur desdéformations de Green-Lagrange, son dual au sens de l’énergie de déformations définiew(γ). Sans entrer dans les détails de cette formulation en description Lagrangienne, c’est-à-dire sur la configuration non-déformée, nous nous limitons ici aux petites perturbations.D’ailleurs dans le cadre de la formulation de Hamilton, les forces extérieures ne peuventque dériver d’un potentiel, elles sont donc conservatives. Ceci exclue de fait les forcessuiveuses telles que les pressions qui agissent sur la configuration géométrique courante,et dont le travail dépendra des déplacements solutions, ceux justement recherchés.

La prise en compte des grandes déformations et des grands déplacements est écartéeici, il en découle que la mesure des contraintes peut se ramener au tenseur de Cauchy, σ,et le tenseur des déformations de Green-Lagrange associé se limite à sa partie linéarisée,notée ε. L’effet des pré-contraintes par exemple, telle que la pré-tension dans les cordesvibrantes, peut être pris en compte différemment pour ces cas spécifiques. Pour les casgénéraux que nous traitons ici, le tenseur des déformations est :

ε(−→u ) =1

2

(∇−→u +t ∇−→u

)ou encore, en notation indicielle εij =

1

2(ui,j + uj,i) (7.68)

On définit de manière courante l’énergie interne de déformation par l’intégrale dutravail fournit par les contraintes dans les déformations correspondantes, ce qui dans le casde contraintes indépendantes explicitement du temps se ramène au calcul sur le trajet dedéformation. L’énergie complémentaire, notée w∗(σ), est duale et se définit par l’intégralesur le trajet de contrainte du travail fourni par les déformations dans le solide (Table7.4.4). Ces deux grandeurs énergétiques permettent de définir la loi de comportement,relation entre contraintes et déformations ; aussi bien également dans le cas des grandesdéformations où les mesures de contraintes et de déformations doivent alors être adaptéesaux formulations choisies, Lagrangienne ou Eulérienne notamment.

On peut maintenant calculer sur le domaine entier les quantités intervenant dansle principe de Hamilton :

Vext(−→u ) =

∫Ω

vvolext dΩ +

∫∂ΩF

vsurfext dΩF = −∫

Ω

−→f (−→x , t)−→u (x, t) dΩ−

∫∂ΩF

−→F d(−→x , t)−→u (x, t)dωF

Vint(−→u ) =

∫Ω

w(−→u )dΩ

(=

1

2

∫Ω

σ(ε) : ε(−→u ) dΩ pour un matériau linéaire)

T (−→u ) =

1

2

∫Ω

ρ(−→u)2

(7.69)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 204

w(ε) =

∫ εij

0

σij dεij ∂w(ε)

∂εij= σij

w∗(σ) =

∫ σij

0

εij dσij ∂w∗(σ)

∂σij= εij

Loi de comportement et énergies associées.

Table 7.1: Définition des énergies de déformation et de déformation complémentaire, etleur signification physique en lien avec la loi de comportement.

Dérivation des équations d’équilibre

Partant des expressions des potentiels présentées en 7.69, le principe de Hamilton(eq. 7.66) devient :

δ

∫ t2

t1

L(−→u ,−→u , t)dt =

∫ t2

t1

(∫Ω

[ρui δui − σij(ε)δεij(−→u ) + fi(

−→x , t)δui]dΩ +

∫∂ΩF

Fi(−→x , t)δuidΩF

)dt

= 0 ,∀ δ−→u (−→x , t) C.A.(0) et C.I(0)(7.70)

en utilisant les conditions de vitesses nulles aux instants extrêmes, i.e. pour un champde vitesse C.I.(0), on obtient après intégration par partie en temps du terme inertielprovenant de la variation de l’énergie cinétique :∫ t2

t1

ρui δui dt = [ρuiδui]t2t1︸ ︷︷ ︸ −

∫ t2

t1

ρui δui dt

0

(7.71)

et la variation de l’énergie de déformation s’écrit classiquement, en remarquant la symétriedu tenseur des déformations et du tenseur des contraintes, et la nullité de la variation des

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 205

déplacements imposés sur ∂Ωu (δ−→u C.A(0)) :∫Ω

σij(ε) δεij(−→u ) =

∫Ω

σij(ε) δui,j dΩ

↓ Intégration par parties

= −∫

Ω

σij,j(ε) δui dΩ +

∫Ω

(σij(ε) δui

),jdΩ

↓ Ostrogradski⇔ th. de la divergence en 3D

= −∫

Ω

σij,j(ε) δui dΩ +

∫∂ΩF

(σij(ε) δui

)nj dΩF

(7.72)Finalement, en substituant les expressions 7.71 et 7.72 dans l’expression du principe deHamilton (eq. 7.70), on aboutit à une fonctionnelle faisant intervenir deux quantités dis-tinctes, respectivement dans le solide et sur sa frontière où les efforts sont imposés :

δ

∫ t2

t1

L(−→u ,−→u , t) dt =∫ t2

t1

(∫Ω

(−ρui + σij,j(ε) + fi

)δui dΩ +

∫∂ΩF

(F di − σij nj

)δui dΩF

)dt

= 0 ,∀ δ−→u (−→x ) C.A.(0) et C.I(0)

(7.73)

Le champ virtuel étant par définition arbitraire, et compte-tenu des conditions denullité de ce champ aux instants extrêmes t1 et t2, d’aprés le lemme de l’intégrale nulle, laquantité dans l’intégrale en temps est nulle quelque soit le champ virtuel continu sur Ω.Choisissons le champ virtuel non-nul à l’intérieur du solide (7.74a) et nul sur sa frontière,puis inversement nul à l’intérieur et non-nul sur sa frontière (7.74b). La condition denullité est donc satisfaite si et seulement si les équations suivantes sont vérifiées, ce sontles équations caractérisant l’équilibre dynamique :−→u (−→x ) 6= −→0 , ∀−→x ∈ Ω

∪−→u (−→x ) =

−→0 , ∀−→x ∈ ∂ΩF

⇒ σij,j + fi = ρui dans Ω et ∀t(7.74a)

−→u (−→x ) =−→0 , ∀−→x ∈ Ω

∪−→u (−→x ) 6= −→0 , ∀−→x ∈ ∂ΩF

⇒ Fi = σij nj sur ∂ΩF et ∀t (7.74b)

On notera que la condition de minimisation d’Euler-Lagrange est une généralisationdu principe de Hamilton à toute fonctionnelle convexe. D’ailleurs on montrera, pour uncas simple, que ces équations d’équilibre se déduisent directement de cette condition deminimisation sans autre calcul.

À partir de ces équations d’équilibre, on peut traiter n’importe quel problème dedynamique de milieux continus. Il faut toutefois noter qu’on aborde souvent de manièredistincte deux types de problèmes de dynamique : propagation d’ondes et vibrations. Dans

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 206

cette distinction ’fictive’ interviennent en premier lieu les propriétés de conduction de cesmouvements (vitesse de propagation), notamment la célérité caractérisant l’aptitude dusolide à propager ces mouvements entre des points matériels voisins. Selon la vitesse depropagation, les mouvements pourront devenir coopératifs ou non. En général, la vitesse depropagation des ondes est beaucoup plus grande que les vitesses résultant de la vibrationdes structures, propagation d’ondes et vibrations peuvent donc assez fréquemment êtredissociées lorsque le spectre des sollicitations reste dans des plages connues par avance.

7.4.5 Liens avec le PPV/PTV, et le Principe de Hamilton dansles milieux continus

On peut aisément remarquer que les différentes formulations connues de l’équilibre(PPV/PTV, Principe de Hamilton, Principe de d’Alembert, PFD) d’un système dériventde la même expression, mais sont utilisées selon que les efforts sont ou non proportionnelsau temps, et dépendent ou non du champ de déplacement, ce qui indique la présence denon-linéarités géométriques dans ce dernier cas.

En effet, le théorème de l’énergie cinétique peut être vu comme la forme intégralescalaire du PFD (7.45) : si les équations vectorielles sont toutes identiquement nulles, leursomme reste nulle. Il suffit de faire "travailler" le PFD dans le champ cinématique entout point du solide. En se limitant aux cas où l’équilibre est considéré en un point fixepar rapport au repère du mouvement (R0), le torseur des actions dynamiques DaS estdirectement égal à la dérivée par rapport au temps du torseur cinétique (7.44), et on peutécrire en tout point :(

τext→S(A,S/R0) −D

DtCS(A,S/R0)

)·−→V (A,S/R0) = 0, ∀−→x ∈ Ω

Dans le cadre général des solides déformables (Figure 7.4), on utilise la formeintégrale en espace (sur le solide (S) occupant le domaine Ω et son bord ∂Ωf ) de cetteformulation. Les efforts ne se limitent plus aux efforts extérieurs, et il faut alors intégrerles efforts internes, et plus précisément expliciter l’énergie de déformation produite parles efforts de cohésion dans le champs de déplacement interne au milieu. Finalement,l’équilibre exprime que, pour toute partition d’un système, la somme des puissances desforces extérieures au système et des forces intérieures relatives à la partition envisagée,dans le mouvement réel, est égale à la dérivée par rapport au temps de l’énergie cinétiquedu système augmentée de la somme des puissances induites par les déformations entre lesdifférentes parties du système :

Pint(S/R0) + Pext(S/R0) =D T (S/R0)

Dt+∑Pdeff (S/R0) (7.75)

Nous nous limiterons désormais au cas où le milieu est continu, i.e. il n’existequ’une seule partition constituant le milieu à elle seule. Pour la partie inertielle des efforts

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 207

extérieurs, on utilise les expressions des grandeurs cinétiques et dynamiques telles qu’ex-primées aux centres de gravité d’une partition - respectivement les équations 7.37 et 7.44-soit en tous les points du domaine dans la formulation pour un milieu continu. Comptetenu des expressions des quantités cinétiques et dynamiques la contribution des effortsd’origine inertielle peut s’écrire à partir de la dérivée temporelle de l’énergie cinétique(Eq. 7.41 : dT (Ω/R0)

dΩ= 1

2M(−→x )

−→V 2(−→x ,S/R0)), ici dans son expression eulérienne :

D T (S/R0)

Dt=

D

Dt

1

2

∫Ω(t)

ρ(−→x )(−→V (−→x ,S/R0)

)2

dΩ(t)

↓ Conservation de la masse locale

Dρ(−→x , t)Dt

=∂ρ

∂t+ div(ρ−→v ) = 0

=1

2

∫Ω

ρ(−→x )d

dt

(−→V (−→x ,S/R0)

)2

=

∫Ω

ρ(−→x )−→γ (−→x ,S/R0) ·−→V (−→x ,S/R0) dΩ

(7.76)avec ρ(−→x ) la masse volumique du solide. On peut rappeler que par définition de larésultante dynamique exprimée au centre de gravité de la partition considérée (7.44),on retrouve les mêmes expressions pour les efforts d’origine inertielle : D

−→C (G,S/R0)

Dt=

M−→γ (−→x ,S/R0)

Dans cette formulation intégrale, les efforts peuvent dépendre du temps, et lestenseurs des contraintes et des vitesses de déformation sont introduits comme dans ladéfinition des potentiels utilisés pour le principe de Hamilton (Eq. 7.69) : σ(−→u ) est lamesure du champ des contraintes qui règne dans le solide au point courant −→x , et ε(

−→V )

est le tenseur des vitesses de déformations associé. Ces deux grandeurs dépendant duchamp des vitesses

−→V (−→x ,S/R0). Pour simplifier l’expression, le champ de vitesse est

supposé cinématiquement admissible à 0 (C.A.(0)), i.e. les déplacements imposés sur ∂Ωu

étant annulés :∫Ω

−→τ vol→S(−→x , t) ·−→V (−→x ,S/R0) dΩ +

∫∂ΩF

−→τ surf→S(−→x , t) ·−→V (−→x ,S/R0) dωF−∫

Ω

σ(−→u , t) : ε(−→V ) dΩ =

∫Ω

ρ(−→x )D

Dt

(−→V (−→x ,S/R0)

)2

dΩ, ∀−→V (−→x ,S/R0)C.A.(0) et C.I.(0)

(7.77)

avec−→f (−→x , t) = −→τ surf→S(−→x , t) et

−→F d(−→x , t) = −→τ surf→S(−→x , t), et −→u (−→x ) = D

Dt−→u (−→x ) pour

retrouver les expressions des potentiels définis précédemment (7.69).

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 208

PPV et PTV

Á partir de cette expression générale (7.77), la correspondance avec le Principe desPuissances Virtuelles est direct si l’on remarque que la puissance développée par les effortsd’origine inertielle s’écrit, en introduisant la définition (7.42) de la résultante dynamique(−→D(S/R0) =

∫(S)−→γ (P ∈ S/R)dm), comme montré ci-dessus (7.76) :

D T (S/R0)

Dt=

∫Ω

ρ(−→x )−→γ (−→x ,S/R0) ·−→V (−→x ,S/R0) dΩ (7.78)

Alors en prenant le champ de vitesses réel égal au champ de vitesse virtuel−→V ∗(M ∈ S)

C.A.(0), on a l’expression classique de l’équilibre qui fait intervenir la puissance virtuelledes quantités d’accélérations P∗acc(

−→u∗,S/R0) :

P∗int(−→u∗,S/R0) + P∗ext(

−→u∗,S/R0) = P∗acc(

−→u∗,S/R0), ∀

−→u∗(−→x )C.A.(0) et C.I.(0) (7.79)

avec par définition la puissance virtuelle des efforts internes :

P∗int(−→u∗,S/R0) = −

∫Ω

σ(−→u ) : ε∗(−→u∗) dΩ

L’équilibre correspondant à cette équation étant identiquement nulle, en se restrei-gnant au cadre des petites perturbations pour des solides à comportement linéaire, et dansle cas d’efforts extérieurs indépendants du temps, on peut considérer une forme intégraledans le temps, faisant intervenir les expressions des travaux et des énergies. Dans ce cadreles intégrales en temps de ces puissances conduisent aux expressions des travaux virtuelsqui dépendent uniquement du champ de déplacement −→u ∗(M) associé à la vitesse virtuelle−→V ∗(M) :

∫Ω

−→τ vol→S(−→x ) ·−→u∗(−→x ,S/R0) dΩ +

∫∂ΩF

−→τ surf→S(−→x ) ·−→u∗(−→x ) dωF−∫

Ω

σ(ε) : ε∗(−→u∗) dΩ−

∫Ω

ρ(−→x )−→γ (−→x ,S/R0) ·−→u∗(−→x ) dΩ = 0, ∀

−→u∗(−→x ) C.A.(0)

(7.80)

Le théorème de l’énergie potentielle, et le théorème de l’énergie poten-tielle complémentaire ne sont rien d’autre qu’un cas particulier dans un cadre statique,de ces formulations intégrales basées sur des potentiels. Les détails de ces formulations sontaccessibles dans le support de cours de J. Bruchon Mécanique des Milieux Continus dansla Majeure Mécanique 2014-2015. Il s’agit, dans ce cas, de définir des potentiels, commedans le cas du principe de Hamilton, mais indépendamment du temps, dont dérivent à lafois l’énergie de déformation et le potentiel des actions extérieures.

A l’opposé, pour être plus général, on formule souvent le PPV faisant intervenir lapuissance virtuelle au lieu des travaux virtuels. On pourra arguer que ces quantités étant

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 209

virtuelles, on peut décider qu’on choisit le champ virtuel de la dimension d’un déplacementou d’une vitesse. La différence entre PTV et PPV se situe surtout au niveau de l’intégra-tion des non-linéarités et dépendances diverses (en temps, en espace). Classiquement, lePPV intégrera tout type de dépendance des contraintes vis-à-vis des déformations, et plusgénéralement les non-linéarités. Prenons le champs virtuel égal à la variation du champsréel pour simplifier :

−→V ∗(−→x ,S/R) = δ−→u (−→x , t). Ce champs est donc C.A.(0). Utilisons-le

dans l’expression (7.77) établie à partir du principe de Hamilton :

−∫

Ω(t)

σ(ε, t) : δε(−→u , t) dΩ(t) +

∫Ω(t)

−→f (−→x , t) · δ−→u (−→x , t) dΩ(t) +

∫∂ΩF (t)

−→F d(−→x , t) · δ−→u (−→x , t) dωF (t)

=

∫Ω(t)

ρ(−→x , t)−→γ (−→x ,S/R) · δ−→u (−→x , t) dΩ(t), ∀ δ−→u (−→x , t) C.A.(0) et C.I.(0)

(7.81)ou sous la forme plus générique encore faisant apparaître simplement les énergies et po-tentiels :

−∫

Ω(t)

δw(ε, t) dΩ(t)

︸ ︷︷ ︸+

∫Ω(t)

δwvolext(−→u ,−→x , t) dΩ(t) +

∫∂ΩF (t)

δwsurfext (−→u ,−→x , t) dωF (t)

︸ ︷︷ ︸δPin(−→u , t) δPext(−→u , t)

=

∫Ω(t)

ρ(−→x , t)−→u (−→x ,S/R) · δ−→u (−→x , t) dΩ(t)

︸ ︷︷ ︸, ∀ δ−→u (−→x , t) C.A.(0)C.I.(0)

δPacc(−→u , t)

(7.82)

7.5 Concepts de stabilité des équilibres

Nous avons vu dans les parties précédentes que les équations de Lagrange carac-térisent l’équilibre dynamique d’un système (7.65). Ces équations différentielles d’ordre 2peuvent être résolues, de façon numérique ou encore analytique.

7.5.1 Stabilité des équilibre

Lorsque l’équilibre est caractérisé, se pose alors la question de la stabilité de cetéquilibre. Dans cette partie, sur la base de l’équilibre des systèmes dynamiques discretsà N ddl, la stabilité de cet équilibre va être étudiée. Tous les concepts introduits dans lecas des systèmes discrets restent valables dans le cas des milieus continus.

Grâce à une linéarisation des équations d’équilibre autour d’un point d’équilibre,la stabilité du système peut être caractérisée. Dans le cas d’une résolution numérique,l’équilibre d’un système dynamique peut être recherché par diverses méthodes : intégrationde Newmark par exemple ou encore θ-Wilson. Ces méthodes de résolution sont souples,

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 210

et vont permettre de trouver rapidement les solutions de l’équilibre du système étudié.Par contre, ces méthodes doivent être adaptées à chaque famille de cas, notamment enfonction de l’amortissement du système considéré.

Les résolutions analytiques ne sont possibles que dans les cas simples. Pourtant cesméthodes de résolution fournissent les bases des résolution numériques. On peut grâce àces approches :

— déterminer des positions d’équilibre— déterminer le mouvement au voisinage de cette position— déterminer des mouvements stationnaires— déterminer les oscillations autour des mouvements stationnaires

7.5.2 Définition d’un équilibre

L’équilibre au temps t0 peut être par rapport à un seul paramètre ou paramétrique :— équilibre par rapport à un paramètre qj (qj est donné, et n’évolue pas dans le

temps)qi(t0) = qi0, qi(t0) = qi0, si i 6= j

qi(t0) = qje, qi(t0) = 0, si i = j

qj(t) = qje ,∀ t

— équilibre paramétrique

qi(t0) = qie, ∀ iqi(t0) = 0 ∀ i

qi(t) = qie , ∀ t, ∀ i

7.5.3 Petites oscillations autour d’une configuration d’équilibre

Sans entrer dans les détails, pour un système à liaisons scléronômes ne dépendantpas du temps ni des vitesses, l’énergie cinétique se limite à sa partie quadratique envitesse (T (t, q, ¯q) = T2(q, ¯q)). Ce qui donne pour les équations de Lagrange expriméespour l’équilibre paramétrique qe = (q1e, q2e, q3e, ..., qne) :

− d

dt

(∂T2(qe, ¯qe)

∂qi

)︸ ︷︷ ︸ +

∂T2(qe, ¯qe)

∂qi︸ ︷︷ ︸ = −Qi =∂V (qe)

∂qi︸ ︷︷ ︸, ∀i0 0 ⇓

V (q)

(7.83)

avec le premier terme qui s’annule car la dérivée de l’énergie cinétique par rapport auxvitesses est une forme linéaire des vitesses uniquement, le second terme quant à lui étantinvariant par nullité des vitesses autour de l’équilibre. Remarque : pour un système entranslation rectiligne uniforme, l’énergie cinétique relative reste inchangée, ces conclusionsrestent donc valables.

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 211

On voit donc que l’équilibre dépend du potentiel (des efforts extérieurs et inté-rieurs dans le cas général), résultat classique de la statique pour un système conservatif :l’énergie fournie par les efforts extérieurs est intégralement stockée en énergie intérieure(de déformation). Pour la solution qe, ce potentiel sera un minimum relatif (V (0) = K),et un minimum absolu si le potentiel est strictement convexe (∂2V

∂q2i> 0). La condition

nécessaire et suffisante pour cet équilibre s’exprime simplement :

∂V (qe)

∂qi= 0, ∀i

Ceci se généralise pour tout système, caractérisé par les équations de Lagrange dans lecas général (7.65). Dans ce cas le potentiel est modifié pour tenir compte de l’énergiecinétique d’entraînement :

∂V ∗(qe)

∂qi= 0, ∀i avec V ∗ = V − T0

L’équilibre étant caractérisé, il faut maintenant pouvoir répondre à la questionessentielle de la stabilité de cet équilibre :

♦ l’équilibre est-il stable ?♦ que se passe-t-il si on décale légèrement de cette position d’équilibre ?

7.5.4 Stabilité d’un équilibre paramétrique

Par définition, un équilibre est dit stable si le système étant dans des conditionsinitiales voisines de l’équilibre, la trajectoire du système reste dans un voisinage de laposition d’équilibre. Ceci s’écrit de façon formelle :

l’état qe = (q1e, q2e, q3e, ..., qne) est dit stable si et seulement si

∀ ε > 0

µ > 0

∃ η > 0

ν > 0

/ ∀ qi(t0) = qi0

qi(t0) = qi0

vérifiant

|qi0 − qie| ≤ η

|qi0| ≤ ν

on ait ∀t ≥ t0, ∃|qi(t)− qie| ≤ ε

|qi(t)| ≤ µ

Si ε et µ sont ’petits’, la stabilité est dite conditionnelle, et si ε et ν sont ∞, la stabilitéest dite globale. Ces expressions indiquent que l’évolution de la position courante estnécessairement bornée en déplacement et en vitesse. Ou de façon énergétique, la stabilitéd’un équilibre s’énonce de la façon suivante : la position d’équilibre est stable lorsqu’ilexiste une borne d’énergie ε∗ telle que, si l’énergie communiquée est ε < ε∗, on a T ≤ ε

à tout instant ultérieur, l’égalité n’ayant lieu qu’à l’équilibre. Cette caractérisation del’équilibre nécessite la résolution des équations différentielles traduisant le mouvementautour de la position d’équilibre lorsque l’on décale le système par rapport à sa positioninstantanée. Ces équations étant souvent non-linéaires, il est bien souvent impossible de

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 212

les résoudre directement. Nous verrons dans le paragraphe suivant une approximation deces équations d’équilibre.

Pour le moment, on peut proposer une définition plus intuitive de la stabilité. Nousavons vu que l’équilibre d’un système conservatif à liaisons scléronômes est caractérisé parl’invariance de la somme du potentiel des efforts conservatifs et de l’énergie cinétique (Eq?? : d

dt(T (q, ¯q) + V (q)) = 0). Le potentiel des efforts extérieurs V étant défini à une

constante prés, posons q(t0) = 0. Ceci implique que V (t0) = 0. Un système sera stable siet seulement si l’énergie cinétique du système diminue pour toute position à un instantultérieur, ce qui se traduit par un minimum relatif, autour de la position d’équilibre, dupotentiel des efforts extérieurs du système (Eq. 7.84).

Figure 7.5: Pendule simple dans une configuration (a) stable et (b) instable.

T (q, ¯q) + V (q) = ε à t = t0 ,or V (0) = 0

⇒ T (t0) = ε et T (t) ≤ ε (< ε∗)

⇒ V (t) ≥ 0 , alors V (t0) est un minimum relatif

(7.84)

On voit que la stabilité dépend donc du potentiel des efforts. Ceci se comprendaisément avec l’exemple de base du pendule simple (Figure 7.5). Ce concept s’étend grâceau théorème de Lejeune-Dirichlet qui fournit, sous certaines hypothèses, une conditionsuffisante de stabilité de l’équilibre :

Théorème de Lejeune-Dirichlet : soit un système S dont les liaisons sont in-dépendantes du temps, soumis à des forces dérivant d’un potentiel indépen-dant du temps. Si pour une position d’équilibre qe du système, le po-

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 213

tentiel est un minimum strict, alors qe est une position d’équilibre stable.

La stabilité dépendra donc de la convexité du potentiel. C’est un résultat classique,à la base du traitement des problèmes d’instabilité des structures par exemple. Il endécoule que la recherche de l’équilibre du système linéarité peut donc se faire en minimisantle potentiel. Le cas le plus illustratif est celui du ressort, dont le potentiel est strictementconvexe et dont la recherche d’un extrêmum conduit à l’équilibre. Pour des systèmes qui nesont plus strictement convexes, par exemple présentant des non-linéarités géométriques, larecherche de la stabilité se fait, par extension, en étudiant le signe de la partie quadratiquedu potentiel s’il existe, ou de façon équivalente la seconde variation du potentiel. Si unpotentiel ne peut être défini, on étudie alors la variation première de la formulation faible(du PPV ).

7.5.5 Linéarisation des énergies

Afin d’étudier la stabilité des équilibres, nous venons de voir qu’il faut pouvoircaractériser la convexité de l’énergie potentielle. Pour rechercher cette convexité, il fautévaluer les termes quadratiques du potentiel des efforts conservatifs. Procédons à un dé-veloppement linéaire de ce potentiel, au voisinage de la configuration d’équilibre q0 = 0 :

V (q) = V (0) +n∑s=1

(∂V

∂qs

)|q0=0

qs +1

2

n∑s=1

n∑r=1

(∂2V

∂qs∂qr

)|q0=0

qsqr +O(q3)

Puisque le système est en équilibre ∂V∂qs

= 0, et le potentiel étant défini à uneconstante près, on a également V (0) = 0. Finalement, la courbure du potentiel est donnéepar le seul terme restant, qui doit être positif pour que la stabilité soit assurée :

V (q) =1

2

n∑s=1

n∑r=1

krsqsqr > 0 pour q 6= 0

avec :krs = ksr =

(∂2V

∂qs∂qr

)|q0=0

Matriciellement la partie quadratique du potentiel s’écrit :

V (q) =1

2qt K q > 0 pour q 6= 0

K, matrice de raideur linéaire du système, est donc symétrique et définie positive pourassurer la stabilité.

De même pour l’énergie cinétique, on se limite au cas où le système ne subit pasd’entraînement. L’énergie cinétique se réduit donc à l’énergie cinétique relative qui est uneforme quadratique des vitesses. La linéarisation autour de l’équilibre (q0 = 0, ¯q(t0) = 0)

Rappels - Éléments et Principes de la mécanique 214

conduit également à éliminer les dépendances par rapport aux coordonnées généralisées.Le développement s’effectue donc uniquement par rapport aux vitesses :

T2(q, ¯q) = T2(0) +n∑s=1

(∂T2

∂qs

)|¯q0=0

qs +1

2

n∑s=1

n∑r=1

(∂2T2

∂qs∂qr

)|¯q0=0

qsqr +O(¯q3)

T2(¯q) =1

2

n∑s=1

n∑r=1

mrsqsqr avec mrs = msr =

(∂2T2

∂qs∂qr

)|¯q0=0

Matriciellement la partie quadratique de l’énergie cinétique s’écrit avec M la matrice demasse linéaire symétrique et définie positive du système :

T2(¯q) =1

2¯qtM ¯q > 0 pour ¯q 6= 0