mbengue.pdf

download mbengue.pdf

of 22

Transcript of mbengue.pdf

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    1/22

    1

    POSITIONS PISTMOLOGIQUES ET OUTILS DE RECHERCHE ENMANAGEMENT STRATGIQUE

    Ababacar Mbengue

    Professeur des UniversitsUniversit de Reims

    57, rue Pierre Taittinger59096 REIMS Cedextl : 03 26 05 38 01fax : 03 26 05 38 69

    e-mail : [email protected]

    Isabelle Vandangeon - DerumezEURISTIK upres-a cnrs 5055

    Centre de recherche de lIAE de lUniversit Jean Moulin, Lyon 315, quai Claude BernardBP 0638

    69239 Lyon Cedex 02tel : 04 72 72 21 58

    Fax : 04 72 72 45 50e-mail : [email protected]

    Mots cls : outils qualitatifs, outils quantitatifs, pistmologie, neutralit des outils.

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    2/22

    2

    POSITIONS PISTMOLOGIQUES ET OUTILS DE RECHERCHE ENMANAGEMENT STRATGIQUE

    Lexamen de la littrature rcente en management stratgique conduit constater quuneimportance de plus en plus grande est accorde aux considrations pistmologiques. De

    plus en plus souvent, les auteurs prcisent et explicitent la position pistmologique de

    leur recherche. Dans le mme temps, des numros spciaux de revues et des colloques

    acadmiques sont entirement consacrs au thme particulier de lpistmologie des

    sciences de gestion.

    Paradoxalement, ce regain dintrt pour lpistmologie saccompagne parfois de

    prjugs tenaces. Par exemple, lide est largement rpandue selon laquelle lusage des

    outils de recherche quantitatifs est rserv aux recherches positivistes et que,

    inversement, les outils qualitatifs sont ceux quil convient dutiliser dans les

    recherches constructivistes ou interprtatives . Or, des outils quantitatifs peuvent

    fort bien tre mobiliss dans des recherches constructivistes ou interprtatives, au sein de

    dmarches inductives o la ralit est subjective voire construite. De mme, de nombreux

    outils qualitatifs sont utilisables dans le cadre de recherches positivistes.

    Cet article fait rfrence aux outils et non aux mthodes de la recherche. Il

    sappuie sur la distinction entre les diffrents niveaux d'analyse et de rflexion en sciences

    humaines propose par Delruelles-Vosswinkel (1980). Selon cet auteur, les mthodes

    constituent l'itinraire de la recherche, et englobent la fois les tapes de choix, de

    production, de recueil, de traitement, danalyse (ou interprtation) des donnes, etc. Les

    outils, quant eux, interviennent sur une ou plusieurs des tapes prcites. Ils constituentles modes d'investigation et les procds d'analyse. Une mme mthode de recherche

    peut ainsi utiliser de multiples outils.

    Lobjet de cet article est dessayer de clarifier la notion de position pistmologique et

    dexaminer son lien avec les outils de recherche disponibles. Le texte est structur en

    deux sections. La premire met en vidence le fait que la position pistmologique dune

    recherche peut sanalyser en une srie de positions lmentaires sur des continuums

    lmentaires. La deuxime section de larticle montre que les outils sont neutres par

    rapport la position pistmologique de la recherche.

    Premire section : Espace des positions pistmologiques

    Quil soit sur le point de sengager dans une recherche nouvelle ou quil soit en situation

    dexaminer une recherche dj effectue, le chercheur est amen sinterroger sur un

    certain nombre de points pouvant porter aussi bien sur les donnes elles-mmes que sur

    la valeur scientifique des rsultats attendus ou obtenus. Un tel constat peut suffire

    justifier la pertinence et limportance de lexplicitation du positionnement

    pistmologique des travaux de recherche.

    Le postulat de cet article est que toute recherche reflte une position pistmologique,que cette dernire soit affiche et revendique ou non par son auteur. Il est analogue

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    3/22

    3

    celui parfois pos au sujet de lexistence de stratgies au sein des entreprises. Partant

    donc du postulat de lexistence, de facto, des positions pistmologiques, cet article

    propose de les caractriser suivant quatre dimensions qui sont, en quelque sorte, autant

    daxes dans un espace gomtrique. Ces quatre axes sont : 1) le statut accord aux

    donnes ; 2) le mode de collecte des donnes ; 3) la relation entre la thorie et lesobservations empiriques et 4) les critres de scientificit de la recherche (valeur

    scientifique des rsultats attendus). Les axes sont ensuite dtaills dans une srie de

    continuums lmentaires qui prcisent les positions extrmes ainsi que, le cas chant,

    des positions intermdiaires.

    1 - Le statut accord aux donnes :

    Selon Denzin et Lincoln (1994), les choix pratiques concernant le droulement de la

    recherche dpendent de la question de recherche qui, elle-mme, est fortement lie au

    contexte dans lequel se droule cette recherche : savoir, quelles donnes sont

    disponibles et quel type dtude le chercheur peut raliser dans ce contexte ? Pour

    rpondre ces questions il convient de sinterroger sur le statut mme des donnes. Ce

    dernier est dtermin par la vision de la ralit. Celle-ci peut tre considre comme

    ayant une essence propre donc comme objective et dtermine par des lois naturelles, ou

    au contraire comme un construit rsultant de lexprience d'acteurs sociaux.

    Interprte

    Objective Construite

    Les donnes sontdes mesures de la

    ralit qui est

    considre

    comme objective.

    Les donnes sont desinterprtations de la ralit

    qui peut tre considre

    comme objective.

    Les donnes sont desinterprtations de la

    ralit qui est considre

    comme subjective.

    Les donnes sont lersultat dune

    construction par

    interaction entre le

    chercheur et lobjet

    tudi.

    La ralit est unique la ralit est multiple

    Principe du Holisme mthodologique selon

    lequel : les ensembles sociaux sont censs avoir

    des finalits ou des fonctions qui ne peuvent tre

    rduites aux croyances, attitudes et actions desindividus qui les composent (Blaug, 1982, 44)

    Principe de lindividualisme mthodologique selon

    lequel : on ne peut considrer comme adquates les

    explications des phnomnes sociaux, politiques et

    conomiques, que si elles sont formules en termes decroyances, dattitudes et de dcisions individuelles .

    (Blaug, 1982, 44)

    Les donnes

    existent en tant

    que telle et

    prcdent

    lintervention du

    chercheur.

    Cest au chercheur, travers

    les reprsentations des

    acteurs, de trouver lunicit

    de la ralit.

    Le chercheur, par son

    interprtation des

    donnes, se fait une

    reprsentation la plus

    proche possible de la

    faon dont les acteurs

    peroivent eux-mmes la

    ralit.

    Ce nest que par son

    exprience du monde que

    le chercheur accde au

    monde.

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    4/22

    4

    Les phnomnes

    sociaux existent

    objectivement

    (Comte, cit par

    Le Moigne,1990b).

    La ralit se dfinit comme

    une qualit appartenant

    des phnomnes que nous

    connaissons comme ayant

    une existence indpendantede notre propre volont ,

    toutefois il existe une

    construction sociale de cette

    ralit, qui sexprime par la

    totalit subjective des

    significations de laction.

    Lactivit humaine produit

    un monde de choses .

    (Berger et Luckman, 1996,

    7, 30).

    Les phnomnes sociaux

    sont interprts

    diffremment par chacun

    des acteurs, y compris par

    le chercheur lui mme(Lincoln et Guba, 1985).

    Les individus crent le

    monde qui les entoure par

    leurs actions guides par

    leurs finalits (Le

    Moigne, 1990b).

    La nature objective des donnes renvoie lide dun dterminisme sous-jacent. Ainsi, la

    ralit, disposant dune essence propre, est connaissable par des lois immuables qui

    rgissent son comportement. A loppos, si la ralit est construite, elle nexiste que par

    les interventions, les actions des individus.

    Dterminisme Volontarisme

    La ralit est dtermine par des

    lois naturelles, des mcanismes

    immuables, dans le temps et dans

    lespace (Hannan et Freeman,1977). Le pass permet

    dexpliquer le prsent qui lui

    mme permet de prdire lavenir.

    Dans les mmes conditions, les

    mmes causes entraneront

    systmatiquement les mmes

    effets (Avenier, 1989, 203).

    Il existe des phnomnes quasi-

    naturels qui sont lintersection

    entre lintentionnalit et les lois

    naturelles (McKelvey, 1997) Des acteurs part entire qui,

    lintrieur des contraintes

    souvent trs lourdes que leur

    impose le systme , disposent

    dune marge de libert quils

    utilisent de faon stratgique

    dans leurs interactions avec les

    autres (Crozier et Friedberg,

    1977, 29-30).

    La ralit nest quune

    construction sociale et nexiste

    qu travers lexprience et les

    actions humaines (Le Moigne,1990b).

    Le sujet ne connat les objets

    qu travers ses propres activits,

    mais il napprend se connatre

    lui-mme quen agissant sur les

    objets (Piaget, 1970, 105).

    Ltre humain - et ltre

    humain seulement - est

    responsable de sa pense de sa

    connaissance et donc de ce quil

    fait (Von Glasersfeld, 1988,

    20).

    Lobjet de la science est alors de

    dcouvrir ces lois (Koenig,

    1993).

    Lobjet de la science est de

    dcouvrir et de comprendre les

    mcanismes par lesquels laction

    organise agit sur les

    phnomnes (Crozier et

    Friedberg, 1977).

    La science organise le monde en

    sorganisant elle-mme (Le

    Moigne, 1990b).

    Lobjet de la recherche est alors

    dtudier les oprations au moyen

    desquelles nous constituons notre

    exprience du monde (Von

    Glasersfeld, 1988).

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    5/22

    5

    Il existe des relations de causes

    effets, qui permettent de

    dcomposer la ralit en un

    ensemble de propositions relies

    entre elles par des liens logiques :principe de la logique formelle

    (A. Comte, cit par Le Moigne,

    1990b).

    Bien que les phnomnes

    organisationnels soient

    dtermins par des lois de causes

    effets, ils prennent forme dans

    un monde de confusion rendantimprvisibles les rsultats des

    actions engages : consquences

    non anticipes des actions

    ordinaires (March, 1981).

    Linteraction entre les lments

    composant le systme donne lieu

    des relations circulaires qui

    traduisent limpossibilit de

    dterminer si une action est lacause ou leffet dune autre

    action (Watzlawick, Weakland et

    Fisch, 1975).

    2 - Le mode de collecte des donnes :

    Lessence de la ralit, et donc le statut que le chercheur alloue aux donnes, influence

    directement le mode de collecte de ces dernires. Ainsi, lorsque la donne est considrecomme objective, donc existant en dehors de toute interprtation humaine, il y a

    indpendance entre le chercheur et lobjet de ltude. A linverse, lorsque la donne

    rsulte dune construction sociale, il existe alors une forte interdpendance entre le

    chercheur et lobjet de ltude.

    Indpendance du Interdpendance du

    chercheur et de chercheur et de

    lobjet de ltude lobjet de ltude

    Le chercheur observe

    des faits mesurs par desdonnes. Les donnes

    utilises par le

    chercheur sont

    froides (terme

    employ par Girin,

    1986) cest dire

    quelles constituent des

    matriaux prexistants

    dont llaboration nest

    pas lie linvestigation

    en cours.

    Le chercheur interprte

    des faits mesurs par desdonnes objectives

    (Miles et Huberman,

    1991).

    Le chercheur interprte

    des donnes issues desreprsentations

    subjectives des individus

    qui interprtent eux

    mmes le phnomne

    tudi (Lincoln et Guba,

    1985).

    Le chercheur et les

    acteurs du systmeconstruisent en mme

    temps les donnes,

    lesquelles rsultent de

    leur exprience mutuelle

    de la ralit (Le Moigne,

    1990b).

    Les faits sociaux doivent tre traits comme des

    choses. Ainsi, il importe que le chercheur sefforce

    de les considrer par un ct o ils se prsentent

    isols de leurs manifestations individuelles

    (Durkheim, 1987, 45).

    Il importe dailleurs que le chercheur dfinisse au

    pralable lobjet sur lequel portera ltude

    (Durkheim, 1987).

    Lhomme, en tant que sujet conscient dou de

    parole et de multiples symbolismes, ne peut tre

    objectif (Piaget, 1970).

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    6/22

    6

    Linstrument de collecte

    est objectif. Quels que

    soient le chercheur

    confront au sujet de

    ltude et le mode decollecte utilis, les faits

    resterons objectifs.

    Linstrument de collecte

    doit garantir lobjectivit

    des donnes. Ainsi, cest

    en mettant en uvre des

    stratgies de collecteadquates que le

    chercheur peut garantir

    lobjectivit des faits

    tudis (Miles et

    Huberman, 1991).

    Linstrument de collecte

    est subjectif. Cest au

    chercheur de sassurer,

    au cours de la collecte

    des donnes, que soninterprtation concide

    avec celle des individus

    qui exprimentent eux-

    mmes lobjet de ltude

    (Lincoln et Guba, 1985).

    Linstrument de collecte

    est constitu des

    reprsentations du

    chercheur en interaction

    avec celles des acteurs.Le chercheur est donc

    lintrieur de lobjet de

    ltude (Von

    Glasersfeld, 1988).

    3 - La relation entre la thorie et les observations empiriques :

    Au cours de toute recherche, la dmarche suivie par le chercheur pose la question

    fondamentale de la relation entre la thorie et les observations empiriques : laconnaissance produite est-elle le fruit des observations empiriques ou au contraire la

    connaissance thorique prcde-t-elle les observations empiriques (qui servent alors de

    vrification la connaissance initiale) ? Entre les deux, la connaissance se construit par

    interaction entre la thorie et les donnes empiriques.

    La connaissance

    se construit

    La connaissance Lexprience

    prcde lexprience empirique prcde

    empirique la connaissance

    Dmarche

    hypothtico-

    dductive de

    vrification : la

    recherche

    consiste

    senqurir des

    observations

    qui se

    soumettent la

    thorie.

    Dmarche

    hypothtico-

    dductive de

    falsification :

    la recherche

    consiste

    senqurir des

    observations

    qui ne se

    soumettent

    pas la

    thorie(Popper,

    1984).

    Dmarche

    hypothtico-

    inductive : la

    recherche

    consiste alterner

    ou superposer la

    dduction et

    linduction

    (Crozier et

    Friedberg, 1977,

    Miles et

    Huberman, 1991,Glaser et Strauss,

    1967, Pettigrew,

    1985).

    Dmarche

    constructive: la

    recherche

    consiste

    fabriquer des

    construits pour

    rendre compte

    dun processus

    de construction

    (Le Moigne,

    1985).

    Dmarche

    dinduction non

    dmonstrative:

    la recherche

    consiste

    mettre partir

    des observations

    des conjectures

    quil convient

    de tester par la

    suite (abduction

    selon Koenig,1993 ou

    adduction selon

    Blaug, 1982).

    Dmarche

    inductive

    dmonstrative:

    la recherche

    consiste

    observer

    librement et

    sans prjugs,

    et tirer de

    cette

    observations

    des loisuniverselles.

    Le chercheur connat lavance

    ce quil peut dcouvrir (Kirk et

    Miller, 1986). Il part dnoncs

    dmontrables pour en construire

    de nouveaux (Petit Robert).

    Le chercheur dcouvre par ses

    observations. Il met ensuite des

    lois ou des conjectures. Le

    chercheur remonte des faits la

    loi (Petit Robert).

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    7/22

    7

    Il est possible

    dobserver la

    ralit dans sa

    globalit et

    donc de vrifierles hypothses

    initiales partir

    de tous les cas

    de figure

    possibles. Le

    chercheur se

    trouve rarement

    dans cette

    situation.

    Ne pouvant

    apprhender

    la ralit dans

    sa globalit, le

    chercheur doitse contenter

    de trouver les

    lments

    infirmant ses

    hypothses.

    Le chercheur

    qui utilise

    comme base

    dobservation

    un chantillon

    et procde par

    infrencestatistique se

    trouve souvent

    dans cette

    situation.

    La connaissance

    sexprime en

    termes de

    propositions

    (donc thoriques)mais galement

    en termes

    pratiques. Dans

    la vie de tous les

    jours nous

    acqurons des

    connaissances et

    les amliorons

    par une

    succession

    ininterrompue de

    conjectures et derfutations, qui

    utilisent la

    mthode bien

    connue des essais

    et des erreurs.

    (Blaug, 1982,

    14).

    Lintelligence

    organise le

    monde en

    sorganisant

    elle-mme. La

    connaissance

    devient alors

    lactualisation

    des possibles

    mais aussi la

    cration de

    nouveaux

    possibles

    (Piaget cit par

    Le Moigne,

    1990b, 106)

    Il existe des

    modes de

    raisonnement

    qui permettent

    de passer duchaos que

    constitue le

    monde rel

    une essai de

    conjectures sur

    la relation

    effective que

    vrifie un

    ensemble de

    variables

    pertinentes par

    rapport aumodle tudi

    (Blaug, 1982,

    16)

    Les

    observations

    issues de la

    ralit sont

    considrescomme vraies.

    Ainsi toute

    proposition

    rsultant dune

    analyse

    logique peut

    tre considre

    comme vraie.

    La ralit est

    alors

    apprhendable

    dans saglobalit, ce

    qui

    concrtement

    est rarement le

    cas.

    Le chercheur sinscrit dans une

    dmarche de test de modle

    labor partir de la thorie.

    Le chercheur sinscrit dans une

    dmarche dinfrence de

    dcouvertes de rgularits

    partir dobservations empiriques.

    Les observations et les

    expriences sont faites pour

    tester ou pour faire la lumire

    sur une thorie, et seules les

    observations qui sy rapportent

    sont dignes dtre notes

    (Chalmers, 1982, 67).

    Des thories prcises,

    clairement formules, sont une

    condition pralable pour que

    des noncs dobservation

    soient prcis. En ce sens, lathorie prcde lobservation.

    (Chalmers, 1982, 61).

    La connaissance ne peut tre

    quissue de la ralit qui contient

    elle-mme la vrit.

    La dmarche de recherche est

    alors dfinie avant

    lintervention du chercheur sur

    le terrain.

    La dmarche de recherche est

    mergente, mme si le chercheur

    peut au dpart formaliser les

    grandes lignes de son approche du

    terrain (Lincoln et Guba, 1985).

    La dmarche de recherche est

    dfinie avant lintervention du

    chercheur sur le terrain.

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    8/22

    8

    4 - Les critres de scientificit de la recherche:

    Selon Piaget (1970), les questionnements portant sur la validit de la recherche sont un

    des deux lments permettant dvaluer le progrs de la connaissance scientifique (lautre

    lment tant le passage dun niveau dtermin de la connaissance un autre niveau).Ainsi le chercheur, par lestimation de la validit de sa recherche, est en mesure dvaluer

    les connaissances produites en termes damlioration ou de rgression, de structure

    formelle des connaissances.

    Loutil garantit La valeur de la connaissance

    la valeur de la est construite par le

    connaissance et la processus de ltude et

    gnralisation des dpend de son contexte de

    rsultats construction

    La mthode, si elle est

    fiable et valide, garantit

    des rsultats non

    biaiss :

    - un instrument de

    mesure fiable produit les

    mmes rsultats quelle

    que soit la personne qui

    lutilise et nimporte

    quel moment ;

    - un instrument de

    mesure valide donne

    toujours la bonnerponse (Kirk et Miller,

    1986).

    Les connaissances sont

    dmontres. Elles sont

    apprhendes en termes

    de vrai ou de faux

    (Blaug, 1982).

    La dmarche suivie par le chercheur doit lui

    permettre de garantir des rsultats non biaiss

    (Yin, 1990, Miles et Huberman, 1991, Glaser et

    Strauss, 1967, Denzin et Lincoln, 1994).

    Les connaissances sont argumentes. Cest au

    chercheur de convaincre que son processus de

    recherche lui permet de construire des

    connaissances valides (Denzin et Lincoln, 1994).

    Ainsi, le chercheur doit tre en mesure de retracer

    l histoire de sa recherche, dindiquer quelles

    dcisions ont t prises tout au long de ltude et de

    les justifier (Mucchielli, 1996).

    La validit de la

    connaissance se mesure

    par la capacit du

    chercheur exprimer en

    termes clairs les

    axiomes sur lesquels il

    fonde explicitement ses

    raisonnements et

    argumentations (Le

    Moigne, cit par Girod

    et Perret, 1997).

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    9/22

    9

    critre de vrifiabilit:une proposition

    synthtique na de sens

    que si et seulement si

    elle est susceptible dtre

    vrifie empiriquement(Blaug, 1982)

    critre deconfirmabilit: degrde probabilit avec

    lequel les noncs sont

    confirms

    (gnralisation)

    critre de rfutabilit:une thorie est rfutable

    lorsque certains rsultats

    peuvent linfirmer

    (Popper, 1984)

    critre de validit duconstruit: la dmarchede recherche est mme

    de rpondre clairement

    aux questions de

    recherchecritre de validitinterne: les relationscausales mises en

    vidence par le

    chercheur sont correctes

    (il nexiste pas dautres

    explications)

    critre de validitexterne: tablir ledomaine dans lequel les

    rsultats dune tude

    peuvent tre gnralisscritre de fiabilit:dmontrer que la

    dmarche de recherche

    peut tre reproduite avec

    les mmes rsultats.

    (Yin, 1990)

    critre de crdibilit:accrotre la probabilit

    que des rsultats

    crdibles vont tre

    produits (dmontrer la

    crdibilit des rsultatsen les faisant approuver

    par les sujets

    constructeurs des

    multiples ralits)

    critre detransfrabilit:rechercher des

    similarits contextuelles

    dans lesquelles les

    rsultats puissent tre

    tendus

    critre de dpendance:vrifier la cohrence

    entre les donnes

    initiales dune part, le

    produit de ltude et la

    dmarche dautre part

    (audit du processus de

    recherche)

    critre deconfirmabilit: lesdonnes sont-elles ou

    non confirmables ? ce

    qui est vrifi par lamise en uvre de laudit

    du processus de

    recherche.

    (Lincoln et Guba, 1985).

    critre dadquation :une connaissance est

    valide ds lors quelle

    convient une situation

    donne ce qui oblige le

    chercheur vrifier queles noncs et les

    modles permettent de

    rsoudre un problme

    donn (Glasersfed,

    1988)

    critredenseignabilit: lesconnaissances ne sont

    pas dmontres elles

    sont argumentes et

    donc la fois

    constructibles etreproductibles de faon

    permettre leur

    intelligibilit pour son

    interlocuteur (Le

    Moigne, 1990b);

    Les rsultats sont ici

    gnralisables : ce qui

    est vrai un moment

    donn et dans un lieu

    donn est aussi vrai un

    autre moment et dans un

    autre lieu sous certaines

    conditions.Principe de la

    gnralisation

    statistique.

    Les rsultats doivent tre

    reproductibles. Il

    importe alors de

    conduire dautres tudes

    qui vont supporter les

    rsultats actuels ou au

    contraire supporter une

    explication rivale.Principe de la

    gnralisation

    analytique (Yin, 1990).

    La gnralisation nest

    pas lobjectif de ltude.

    Toutefois, elle reste un

    principe plus ou moins

    fort pour accorder aux

    rsultats une certaine

    vracit. Ainsi, le

    chercheur doit-il mettreen vidence les critres

    ou les situations dans

    lesquels ses rsultats

    peuvent tre tendus.

    La connaissance se

    construit localement.

    Pas de gnralisation

    des rsultats, le modle

    construit na pas pour

    fonction de gnrer des

    hypothses vrifier,

    mais de contribuer lintelligibilit (Piaget,

    1986, cit par Le

    Moigne, 1990b).

    Deuxime section: Neutralit des outils de recherche qualitatifs et quantitatifs.

    Lobjectif de cette partie est de montrer la neutralit des outils danalyse qualitatifs et

    quantitatifs indpendamment de la position pistmologique de la recherche. Pourappuyer largumentation, il est montr que la distinction entre qualitatif et quantitatif

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    10/22

    10

    nest pas pertinente pour expliquer le positionnement de la recherche selon les

    continuums prsents en premire partie. Ainsi, pour la plupart des positionnements, il

    est possible dutiliser de faon complmentaire des outils qualitatifs et quantitatifs.

    Laccent est par la suite mis sur les limites et les avantages des diffrents outils, quils

    soient qualitatifs ou quantitatifs. Largumentation est illustre dexemples de rechercheconduites par diffrents auteurs.

    1 - Le statut accord aux donnes :

    Une bonne faon dtudier la relation entre le statut des donnes et les outils de

    recherche en management stratgique consiste sinterroger sur la notion de mesure .

    Certains auteurs estiment quil est possible de mesurer des faits observs mais quaucune

    mesure nest possible lorsque le phnomne tudi fait intervenir des hommes. Par

    exemple, pour Piaget (1970), la seule science de lhomme susceptible dutiliser la mesure

    est la dmographie. Dans ce cas, la mesure est fournie par le nombre dindividus

    prsentant telle ou telle caractristique alors quen psychologie, en sociologie ou en

    ethnographie la mesure serait difficilement ralisable compte tenu de labsence dunit

    gnrale et de la complexit des phnomnes tudis.

    Cette position se rvle excessive. Tout dabord, lessor de la psychomtrie qui est

    devenue une discipline florissante invalide lhypothse dimpossibilit de la mesure dans

    des domaines comme la psychologie. Ensuite, des phnomnes issus des actions des

    individus ou des groupes sociaux peuvent galement tre mesurs. Par exemple, dans

    une tude sur les mondes sociaux des entreprises, Francfort, Osty, Sainsaulieu et Uhalde

    (1995) procdent la mesure de cinq grands ensembles de variables explicitant lesformes de dveloppement conomique et social que lon peut rencontrer dans les

    entreprises contemporaines en France. Lun dentre eux concerne les enjeux dacteurs et

    les relations de pouvoir qui y sont associes, comprenant le contexte, les caractristiques

    des acteurs, les relations stratgiques dveloppes. Ces trois dernires variables,

    considres comme latentes (non directement observables), sont mesures par dautres

    variables qui, elles, sont directement observables. Par exemple, les relations stratgiques

    dveloppes sont mesures par la nature des relations stratgiques (en distinguant les

    alliances, la ngociation et lopposition) ainsi que par lvolution des relations

    stratgiques de chaque acteur qui elle se mesure selon lintensit du changement,

    lanciennet du changement et le type dvolution des relations.

    Sil est galement possible de mesurer des phnomnes lis aux hommes, il nen reste pas

    moins que lunit de mesure choisie nest pas systmatiquement objective et peut

    dpendre de la subjectivit du chercheur susceptible de linterprter selon sa propre

    exprience et sa propre connaissance. Si lon considre que la ralit est objective et

    unique, lenjeu consiste utiliser des mesures fiables et valides. Si, par contre, on

    considre que la ralit est subjective et multiple, le problme nest plus alors de

    sassurer de lobjectivit de la mesure mais de sassurer quelle retrace bien les

    interprtations des diffrents acteurs impliqus dans le phnomne tudi et non pas la

    vision du chercheur. Si, enfin, on considre que les donnes sont le rsultats dune

    construction par interaction entre le chercheur et lobjet (ou le phnomne tudi),lobjectif nest plus de dterminer une mesure du phnomne mais de construire un mode

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    11/22

    11

    opratoire, volutif, qui permette de passer de la description dun phnomne son

    interprtation sous forme de construits en interaction. Le principe de construction rside

    dans ce cas au niveau de la reconnaissance, de la fabrication, de la suppression ou de la

    transformation dobjets (Morand, 1995). Laccent est alors mis sur le processus

    dabstraction qui dcrit le passage du niveau concret un niveau abstrait, en tenantcompte des lments de lobjet observ et de leurs interconnexions.

    En somme, il apparat que le chercheur peut mesurer aussi bien des donnes objectives,

    subjectives que construites.

    2 - Le mode de collecte des donnes :

    La collecte des donnes pose le problme de lindpendance du chercheur vis vis de

    lobjet ou du phnomne tudi. Dans un cas, les donnes prexistent lintervention du

    chercheur qui ne fait que collecter des informations sur lesquelles il nagit pas. Dans

    lautre cas, les donnes sont construites par le chercheur et les acteurs au fur et mesure

    du droulement de ltude.

    Bien souvent, les questionnaires sont rattachs des tudes o il existe une indpendance

    entre le chercheur et lobjet tudi (le questionnaire tant considr comme un outil de

    mesure de la ralit). En effet, on confre cet outil de collecte des vertus de mesurer

    objectivement des objets ou phnomnes du monde rel. Or, plusieurs lments font qu'il

    est difficile d'affirmer quun questionnaire mesure une ralit indpendante la fois du

    chercheur et du rpondant (donc une ralit objective). Tout d'abord, le sujet mme du

    questionnaire ne se limite pas systmatiquement un objet ou phnomne objectif. Denombreuses tudes mobilisant cet outil portent sur des reprsentations, des attitudes

    mentales, des motivations, des opinions, etc. Ensuite, il est difficile d'envisager la

    neutralit du chercheur vis vis de la donne collecte. Pourtois et Desmet (1988)

    montrent par exemple que le simple fait d'interroger une personne sur une opinion peut

    susciter la cration d'une opinion chez cette personne alors quau pralable elle n'en avait

    pas. De plus, lors de la formulation des questions, le chercheur fait intervenir (de faon

    volontaire ou involontaire) ses propres prsupposs, son idologie, son cadre de pens,

    et peut ainsi induire les rponses. Enfin, les rponses apportes par les rpondants

    peuvent introduire des biais au niveau de la mesure du phnomne. Par exemple, le

    rpondant, par sa rponse, cherche atteindre un but extrieur l'tude. Il se fait alors sapropre reprsentation de l'objectif de l'enqute et formule ses rponses, non pas en

    fonction de ce qu'il pense rellement, mais en fonction de l'ide qu'il se fait de l'utilisation

    ultrieure de ses rponses. Ce faisant, il produit des "rponses instrumentales" (Pourtois

    et Desmet, 1988).

    De tels lments ne permettent pas d'affirmer que le questionnaire garantit l'absence

    d'interaction entre le chercheur et l'objet ou le phnomne tudi. Toutefois, pour

    parvenir un certain niveau de neutralit (de mesure objective), le chercheur peut mettre

    en uvre certaines tactiques telles que :

    - viter d'utiliser des termes trop chargs d'affectif ou de jugement qui peuvent modifier

    le contenu des rponses ;

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    12/22

    12

    - utiliser des chelles de mesure labores par d'autres chercheurs pour ne pas orienter

    les questions selon son opinion ;

    - pr-tester son questionnaire afin de s'assurer que les questions poses n'induisent pas

    les rponses, etc.

    En considrant le questionnaire non plus comme un instrument de mesure objectif mais

    comme un moyen de collecter un grand nombre d'information en un temps relativement

    limit, il est alors possible dlargir son champ dutilisation au sein des recherches. Il peut

    alors tre introduit dans des dmarches de recherches prnant l'interdpendance entre le

    chercheur et le phnomne tudi. Cest ainsi quun nombre croissant dethnologues et

    de chercheurs qualitatifs mobilisent une instrumentation pr-structure (tels que les

    questionnaires ou les entretiens directifs) notamment lorsquils tudient plus dune

    institution ou communaut et quils souhaitent tablir des lments de comparaison

    (Miles et Huberman, 1991). Par exemple, Barley (1990) analyse limpact dun

    changement technologique sur lvolution de la structure sociale dans les hpitaux. Pour

    ce faire il conduit une observation participante quil complte par un ensemble de

    questionnaires pourtant sur les conversations techniques et sociales entre radiologues et

    techniciens. Les rsultats de ces questionnaires lui permettent alors de vrifier les

    observations qualitatives portant sur les relations entre radiologues et techniciens et

    dtablir un graphique reprsentant le rseau social de chaque dpartement. Il dtermine

    ainsi la structure globale qui merge des divers rles jous par les acteurs au cours de

    leurs relations.

    Lobservation neutre est galement un outil de collecte largement mobilis au sein de

    recherches prnant lindpendance du chercheur par rapport lobjet de ltude. En

    effet, une telle mthode permet au chercheur de conserver une certaine distance aveclobjet. Toutefois, encore ce niveau, se pose le problme de linterprtation par le

    chercheur des phnomnes quil observe, voire de leffet de sa prsence sur le

    phnomne lui-mme. En effet, pour garantir une telle neutralit il faudrait tre en

    mesure de mettre en uvre le principe de "tabula rasa", d'une observation purement

    objective et sans prjugs. Or, comme le met en vidence Chalmers (1987), chacun

    interprte selon sa propre personnalit, son exprience, sa logique de raisonnement les

    phnomnes qu'ils observe. Ainsi, deux chercheurs tmoins de la mme scne au mme

    endroit voient la mme chose mais linterprtent diffremment. Face ce constat rien

    n'empche alors le chercheur d'utiliser l'outil d'observation neutre dans une recherche o

    l'interdpendance chercheur phnomne observ est reconnue. En effet, dans ce typede recherche le souci dobjectivit du chercheur ou dinterprtation des observations est

    alors moins important. Par exemple, dans son tude de type ethnographique au sein de

    diffrents hpitaux, Barley (1990) montre quune observation participante soutenue peut

    parfois tre ennuyeuse notamment lorsquelle concerne des phnomnes mcaniques et

    rptitifs. Il propose alors de crer des indicateurs quil renseigne sous forme de base de

    donnes en se comportant cette fois comme une camra (il note le dbut et la fin, les

    vnements, actions et interactions ralises au cours dun examen particulier) .

    Les entretiens, quant eux, sont souvent rattachs des recherches o il est difficile de

    postuler la neutralit du chercheur par rapport lobjet tudi, soit parce que le

    chercheur interprte lui-mme les propos des personnes interroges, soit parce que lespersonnes interroges interprtent les phnomnes observs. Toutefois, il est possible

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    13/22

    13

    dutiliser un tel outil de collecte, mme lorsque la recherche impose une certaine distance

    entre le chercheur et lobjet de ltude. Le principe est alors de mettre en oeuvre

    diffrentes tactiques , selon les termes employs par Miles et Huberman (1991) et par

    Yin (1990) afin de garantir, soit une certaine objectivit au sein des propos recueillis, soit

    que les interprtations du chercheur sont relativement proches de celles des personnesinterroges. Ces tactiques peuvent tre par exemple, de multiplier les interviews, ou

    encore de diversifier les rpondants (position hirarchique au sein de lorganisation,

    degr dimplication au niveau du phnomne tudi, etc.). La structuration de lentretien

    (utilisation dun guide plus ou moins bien formalis) permet galement de diriger le

    discours des personnes interroges et de limiter les interprtations possibles. La

    validation des analyses par les rpondants limite les biais dus aux interprtations du

    chercheur (Lincoln et Guba, 1985). La triangulation thorique (utilisation de thories

    concurrentes pour interprter les donnes) peut tre utilise pour clairer diffremment

    les informations collectes et favoriser ainsi la crdibilit des interprtations (Pourtois et

    Desmet, 1988).

    Lobservation participante (tude naturaliste) met en relation directe le chercheur avec la

    socit tudie, dans laquelle il va vivre un certain temps. Cette relation est elle-mme

    analyse et exploite (le chercheur par exemple va noter ses perceptions, ses sentiments

    ses attentes). Elle est en gnral mobilise dans des tudes o il existe une interrelation

    entre le chercheur et lobjet tudi. Toutefois, mme dans ce cas, l'observation

    participant peut poser des problmes. Tout d'abord, il existe des recherches

    ethnographiques o il nest pas possible de mettre en uvre un tel outil de collecte des

    donnes (Muccielli, 1996). Il se peut en effet que le thme de la recherche rende

    impossible une telle observation pour des problmes dthique par exemple (observation

    dactes dlictueux, etc.) ou encore que le chercheur lui-mme ne puisse sinsrer dans legroupe ou la socit (par exemple tude pourtant sur des enfants). Ensuite, lobservation

    participante pose le problme de la validit et de la fiabilit des interprtations dues la

    subjectivit du chercheur lui-mme. Pour limiter les effets dun tel biais, Adler et Adler

    (1994) proposent par exemple de se reposer non plus sur un, mais sur une quipe

    dobservateurs (ce qui suppose bien sr de former les observateurs aux techniques

    dobservations et de dlimiter le champ de ltude). Le chercheur peut galement tester

    les propositions qui mergent au fur et mesure de son tude (Adler et Adler, 1994). La

    transparence du chercheur est un lment essentiel pour garantir la fiabilit des

    informations recueillies (Pourtois et Desmet, 1988). Une telle transparence peut se

    raliser au travers de la tenue systmatique du cahier de bord de l'observation (danslequel le chercheur note son tat desprit au moment de lobservation). Enfin, pour

    limiter leffet de la prsence du chercheur sur le phnomne observ, lobservateur peut

    augmenter son temps de prsence dans le site. Ces tactiques, visant limiter les biais lis

    la subjectivit du chercheur ainsi qu leffet de sa prsence, permettent d'tendre

    l'utilisation de l'observation participante des designs de recherche prnant une certaine

    indpendance entre le chercheur et lobjet ou le phnomne tudi (Yin, 1990).

    On voit bien, au niveau des outils de collecte des donnes, quil est possible de multiplier

    les utilisations dun outil dans des contextes de recherche diffrents. Les deux principaux

    problmes rsident alors au niveau du statut de la donne elle-mme et de la position du

    chercheur par rapport lobjet de ltude. Loutil de collecte doit tre utilis par lechercheur de faon sassurer que le statut quil donne initialement aux informations

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    14/22

    14

    collectes est bien conserv par loutil. Lutilisation de loutil doit galement respecter la

    position du chercheur par rapport lobjet ou phnomne tudi. Ce nest donc pas

    loutil lui-mme qui doit tre rattach une situation de recherche particulire mais cette

    situation qui doit dicter lutilisation et la mise en oeuvre, par le chercheur, des diffrents

    outils disponibles.

    Une notion importante est introduire au del de l'ide d'interaction entre le chercheur et

    l'objet ou phnomne tudi : celle de la relation que le chercheur tablit entre la ralit

    qu'il observe et le caractre plus ou moins gnralisable de ses rsultats. Dans ce

    contexte se pose le problme de l'chantillonnage qui concerne la fois les outils

    qualitatifs et quantitatifs. L encore le choix de l'outil de collecte des donnes (qualitatif

    ou quantitatif) est indpendant de la position du chercheur quant la gnralisation

    possible de ses rsultats. En effet, le point principal concerne avant tout l'chantillonnage

    statistique (caractre reprsentatif de l'chantillon) lorsque les rsultats sont extrapol

    la ralit dans sa globalit, ou au contraire l'chantillonnage analytique (le choix des

    sources de donnes en fonction des objectifs de l'tude) lorsque les rsultats ne sont pas

    extrapols au del de la situation de l'tude (Yin, 1990).

    3 - La relation entre la thorie et les observations empiriques :

    Trois positions se distinguent selon que la thorie prcde ou non lexprience empirique

    ou que les deux interagissent dans la construction des connaissances. Les outils alors

    mobiliss sont trs divers, allant du traitement (ou de lorganisation) des informations

    recueillies leur analyse.

    Dans les recherches de type hypothtico-dductive (la thorie prcde lexprience

    empirique), il est souvent recommand au chercheur dutiliser des donnes

    dexprimentation pour tester les hypothses. En effet, lexprimentation est le moyen

    privilgi de prouver quune variable quelconque est la cause dune autre variable.

    Lenjeu crucial rside alors dans la matrise des sources de variations autres que celles

    que lon souhaite mesurer. Toutefois, il est difficile, voire impossible de contrler toutes

    les variables. Ainsi, le chercheur se contente-t-il de contrler uniquement les variables

    quil estime importantes. Il peut galement procder par affectation alatoire des units

    dexpriences (individus ou objets soumis lexprimentation). Cette randomisation lui

    permet alors dcarter la plupart des explications alternatives (Cook et Campbell, 1979).Toutefois, mme dans ce dernier cas, il est plus facile de procder la randomisation

    dobjets que dindividus, de groupes sociaux ou encore dorganisations. Il est en outre

    plus difficile de procder une rpartition alatoire sur le terrain dune recherche quen

    laboratoire. Pour ces diffrentes raisons, le chercheur en management est plus souvent en

    situation de quasi-exprientation (Campbell et Stanley, 1966). La quasi-exprimentation

    rpond alors deux frustrations du chercheur : une rticence croissante se contenter

    dtudes exprimentales en laboratoire, qui se rvlent souvent dune pertinence

    thorique et pratique limite et une insatisfaction concernant les mthodes non

    exprimentales lorsquil sagit de procder des infrences causales.

    Malgr ses limites, lexprimentation nen reste pas moins un outil intressant mettre enuvre au sein de recherches utilisant une dmarche autre quhypothtico-dductive.

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    15/22

    15

    Ainsi, H. Garfinkel (Cit par Muccielli, 1996) a-t-il recours une exprimentation pour

    analyser la faon dont les individus comprennent et interprtent des changes verbaux ou

    des situations sociales en gnral. Sans poser au pralable dhypothse quant la

    raction des tudiants, il leur demande de poser dix questions concernant un problme

    donn auquel ils sont confronts. Lexprimentateur fournit ensuite les rponses oui ou non de faon alatoire aux questions des tudiants. Le rsultat montre que, bien

    que les rponses soient alatoires, les tudiants entendent les rponses de

    lexprimentateur comme des rponses pertinentes, mme lorsquils sont surpris par

    certaines dentre elles. Ils reconstruisent alors un sens logique partir des nouveaux

    lments que les rponses semblent leur fournir. Dans ce cas, lexprimentation permet

    au chercheur de sassurer que les rponses donnes aux questions nont pas de sens

    (puisquelles sont donnes de faon alatoire). Il est probable quune tude

    ethnographique naurait pas fourni les mmes rsultats, puisquen situation normale, le

    rpondant cherche toujours donner une rponse cohrente par rapport la question

    pose.

    Si lexprimentation peut tre mobilise dans des recherches non hypothtico-inductive,

    il en est de mme pour les outils quantitatifs danalyse causale (analyse de rgression,

    quations structurelles, analyse des cheminements, analyse de la variance, etc.). En effet,

    bien souvent, de tels outils sont prconiss pour tester un modle pralablement construit

    laide de la thorie. Ainsi, le chercheur btit un modle quil teste sur des donnes

    empiriques. Que les rsultats du test le conduisent rejeter ou retenir, avec une

    certaine marge derreur, le modle en question, aucune autre action nest prvue. Cette

    utilisation des mthodes statistiques explicatives selon une approche purement

    confirmatoire est, en pratique trs peu utilise par les chercheurs. En effet, le plus

    souvent, de telles mthodes sont mobilises dans des dmarches de comparaison(alternative models) ou de gnration de modles (models generation). Dans le

    premier cas, le chercheur dispose de plusieurs modles alternatifs quil value sur le

    mme jeu de donnes empiriques, pour retenir le meilleur modle. Dans le second cas, le

    chercheur commence avec un modle dtermin, le teste sur un jeu de donnes

    pertinentes, puis laffine (en particulier, en liminant les relations non significatives et en

    ajoutant des relations significatives pralablement omises). Cest ainsi que le chercheur

    teste et amliore de faon itrative le modle pour parvenir une version satisfaisante

    (Aaker et Bagozzi, 1979). Quelle que soit la dmarche suivie, (confirmation,

    comparaison ou gnration), lutilisation de telles mthodes explicatives suppose de

    disposer de modle plus ou moins finaliss. Si dans une dmarche de type dductive, lechercheur sappuie sur les thories existantes pour laborer les modles tester, il peut

    trs bien adopter une dmarche purement inductive pour faire merger de donnes

    empiriques les variables et relations entre variables. Toutefois, si, toujours dans une

    dmarche inductive, le chercheur souhaite aller plus loin que la simple mise en vidence

    de relations entre variables et dmontrer la causalit, il doit alors confronter les rsultats

    ( savoir le modle mis en vidence) avec la thorie existante afin de valider la causalit.

    En effet la mise en vidence dune relation statistiquement significative par une mthode

    quantitative explicative nquivaut pas dmontrer la causalit. De mme, dans une

    approche abductive, loutil quantitatif peut tre mobilis pour confronter le modle issu

    de la premire phase de la recherche (laboration du modle partir des donnes du

    terrain complt) dautres situations (principe de la gnralisation statistique) ou dessituations considres comme proches (principe de la gnralisation analytique).

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    16/22

    16

    Les outils qualitatifs, bien que prconiss dans le cadre de recherches abductives ou

    inductives, peuvent galement tre mobiliss lors du test dun modle ou de propositions

    (approche hypothtico-dductive). En effet, il existe des situations dans lesquelles les

    donnes rsultant dentretiens ou de documents sont insuffisantes pour utiliser des outilsquantitatifs. Dans ce cas le chercheur tablit une rgle de dcision lui permettant de

    dterminer quand il doit infirmer ou corroborer une hypothse partir darguments

    provenant des donnes recueillies. Pour faciliter la dtermination de la rgle de dcision,

    le chercheur sappuie sur la nature des hypothses. Celles-ci peuvent tre considre

    comme soit purement confirmables, soit purement rfutables ou encore la fois

    confirmable et rfutable (Zaltman, Pinson, et Angelmar, 1973).

    La plupart des recherches sinscrivant dans une dmarche inductive (non dmonstrative),

    hypothtico-inductive ou encore constructive sont confrontes au problme de la

    condensation et du traitement de linformation de base. En effet, ces dernires sont en

    gnrale trs nombreuses et pas toujours directement lies au phnomne tudi. Le

    chercheur doit alors, avant de procder leur analyse, condenser ces informations (Miles

    et Huberman, 1991). Cette condensation qui vise regrouper, simplifier, voire

    transformer les donnes brutes (principe de conceptualisation) est le plus souvent ralise

    par lintermdiaire doutils danalyse de contenu (compte tenu des sources des donnes :

    entretiens, observations, documents, etc.). Or ces outils font souvent appel des

    techniques quantitatives de faon intuitive. Miles et Huberman (1991) proposent par

    exemple des tactiques de comptage, de regroupement, de subdivision, dtablissement de

    relation entre le gnral et le particulier, et de factorisation pour effectuer le passage de

    la donne brute au concept (procdure de codage). Glaser et Strauss (1967) ont, quant

    eux, mis au point une tactique plus structure de codage ouvert (pour passer desdonnes de base aux concepts) ou de codage axial (pour tablir les liens entre les

    concepts). Ces outils qualitatifs prsentent linconvnient dtre relativement lourds

    mettre en oeuvre surtout lorsquils sont mis en oeuvre pour lensemble des donnes de

    base. Il existe alors des outils quantitatifs qui permettent au chercheur de systmatiser la

    catgorisation des donnes de base et la mise en vidence de leurs interrelations. Ainsi,

    des mthodes danalyse des donnes, comme lanalyse des correspondances, lanalyse

    factorielle ou les analyses typologiques (analyse de classification) constituent des moyens

    fructueux et trs simples dutilisation permettant de faire merger des concepts partir

    de donnes empiriques. De mme lanalyse dune matrice de corrlation peut faire

    merger des possibilits de liens entre concepts. Toutefois, il est vident que pour mettreen oeuvre de tels outils le chercheur doit disposer de mesures, ce qui suppose un

    minimum de traitement pralable des donnes textuelles (codage des donnes). Par

    exemple, Francfort, Osty, Sainsaulieu et Uhalde (1995), dans leur tude sur le monde

    sociaux des entreprises, utilisent des analyses multi-factorielles pour traiter les donnes

    issues de plus de 4000 entretiens. Pour faciliter le passage de lanalyse qualitative

    monographique la comparaison des tudes de cas (au nombre de 81), ils procdent au

    codage des donnes recueillies (pour les rendre statistiquement comparables).

    Lanalyse factoriel fournit alors une lecture synthtique des liens multidimensionnels

    entre les indicateurs (variables de codage) qui vont ensemble, qui entretiennent des liens

    structurels forts, exprimant les courants fondamentaux de tension dans une collectivit

    diverse. Une analyse bien construite dpasse mme ce stade pour rvler non passimplement des liens entre indicateurs mais bien des modles synthtique, des

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    17/22

    17

    attitudes latentes, qui dpassent chaque indicateur spar, qui nest en quelque sorte

    quune rsultante dune cause en amont, cause rvle par un axe factoriel. (Francfort,

    Osty, Sainsaulieu et Uhalde, 1995; 42). Les auteurs utilisent galement une mthode de

    classification ascendante hirarchique afin de crer diffrentes typologies qui leur

    permettront ensuite de caractriser les diffrents mondes sociaux.

    De mme que pour les outils de collecte des donnes, nous constatons que le

    rattachement dun outil qualitatif ou quantitatif une dmarche de recherche spcifique

    limite les possibilits de traitement et danalyse des donnes et par l mme ltendue des

    rsultats. La mobilisation doutils de diffrentes natures (qualitatif et quantitatifs) permet

    souvent denrichir les rsultats ou daller plus loin dans la dmarche de modlisation

    (notamment procder la gnralisation statistique ou analytique des rsultats). Aussi

    est-ce la dmarche elle-mme qui doit dicter lutilisation des outils.

    4 - Les critres de scientificit de la recherche:

    Les critres de scientificit de la recherche sont ici abords en termes doutils

    garantissant la gnralisation des rsultats ou de processus de recherche permettant de

    construire des connaissances valides mais fortement dpendantes du contexte. A ce

    niveau on distinguera deux grands ensembles doutils: les outils quantitatifs analytiques

    qui permettent dvaluer et tester un modle et les mthodes qualitatives qui mettent en

    oeuvre un processus de recherche complet allant de la collecte des donnes la

    production de connaissances.

    Il est facilement admis que les outils statistiques analytiques permettent de garantir lavaleur de la connaissance et la gnralisation des rsultats. Or dans la mise en oeuvre

    mme de ces outils plusieurs problmes susceptibles de se poser au chercheur, peuvent

    introduire des biais. Le premier fait rfrence la spcification du modle lui-mme.

    Ainsi, il existe en modlisation quantitative deux types de modles complmentaires : un

    modle de mesure reliant les variables latentes leurs indicateurs de mesure (ou variables

    observes) et un modle dquations structurelles traduisant un ensemble de relations de

    cause effet entre des variables latentes ou des variables observes qui ne reprsentent

    pas des variables latentes. Or au sein du modle de mesure plusieurs natures de relations

    peuvent tre identifies : non directionnelles (simple association), rflectives (la variable

    latente est la cause de variables observes) ou formatives (la variable latente estdtermine par une combinaison linaire de variables observes). Il revient alors au

    chercheur de dterminer, avant lutilisation de loutil de modlisation, la nature des

    relations entre variables latentes et observes. Le chercheur peut sappuyer entirement

    sur la littrature existante afin de limiter, si tel est son objectif, les biais lis sa propre

    subjectivit. Le mme type de problme se pose lors de llaboration du modle

    dquations structurelles. Celui-ci doit en effet dterminer la nature des relations :

    association simple, causalit simple, causalit rciproque. Cest encore la littrature qui

    fournit le moyen de limiter lintervention de la propre subjectivit du chercheur. Un autre

    problme concerne les conditions dutilisation des outils analytiques. En effet, en dehors

    de la taille de lchantillon relativement importante pour garantir des rsultats statistiques

    fiables, il importe que les donnes utilises lors de la modlisation suivent unedistribution de loi normale. Or il est difficile dans la ralit dobtenir de telles donnes.

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    18/22

    18

    Le chercheur est alors amen traiter les donnes brutes afin de pouvoir rpondre

    aux exigences de la modlisation statistique. Ces diffrents lments montrent quel

    point il faut tre rigoureux dans la mise en oeuvre des outils statistiques dvaluation et

    de test de modle. Ainsi si loutil lui-mme peut tre qualifi de scientifique, la faon

    dont il est utilis au sein des recherches ne lest pas toujours. Pourtant, comme nouslavons vu dans la section prcdente, de tels outils peuvent tre utiles dans la phase

    finale de test dun modle labor en suivant une dmarche qualitative. Ils permettent en

    effet de conclure plus facilement la possible gnralisation statistique ou analytique

    dudit modle.

    A linverse des outils quantitatifs, il est souvent reproch aux mthodes qualitatives leur

    caractre intuitif, leur manque de rigueur et leur fort ancrage dans le contexte dtude

    (Yin, 1990). De nombreux auteurs se dfendent de tels prjugs en laborant de

    vritables stratgies de recherche permettant de structurer la collecte, la condensation et

    lanalyse des donnes. De telles stratgies garantissent le caractre reproductible des

    rsultats. Ils se dfendent ainsi de produire des rsultats statistiquement gnralisables

    tout en assurant la crdibilit de leur recherche. Par exemple, Strauss et Corbin (1990,

    24) dfinissent la thorie enracine comme une mthode de recherche qualitative qui

    utilise un ensemble systmatique de procdures afin de dvelopper de faon inductive

    une thorie enracine dans un phnomne . Ils prcisent ensuite que, ne sinscrivant pas

    dans une dmarche de gnralisation statistique, il importe alors de redfinir les critres

    classiques dvaluation dune recherche (Cf. premire section, paragraphe 4). De

    lautrect, Miles et Huberman (1991) prsentent leur dmarche de recherche comme

    tant compose de trois flux dactivits : la condensation des donnes (slection,

    centration, simplification, abstraction et transformation des donnes brutes), la

    prsentation des donnes (assemblage organis dinformations qui permettent de tirer desconclusions et de passer laction) et llaboration et la vrification de conclusions

    (noter les rgularits, les schmas, les explications, les configurations, etc. mais aussi

    tester les significations quant leur plausibilit, leur solidit, leur confirmabilit, en un

    mot leur validit).

    Si les dmarches dveloppes par ces auteurs leurs permettent de garantir la crdibilit

    de leur recherche, il nen reste pas moins quelles pourraient gagner tendre plus

    largement la porte de leurs rsultats. Si les auteurs mettent en avant le caractre

    transfrable des rsultats, dans la pratique le vritable transfert est peu souvent ralis.

    Or comme le met en vidence Larsson (1993), lanalyse qualitative si elle permet

    dapprofondir le cas, gagnerait tre complte par une analyse quantitative portant surde nombreux cas. Cette dernire analyse permettrait notamment de mettre laccent sur

    des schmas transversaux de multiples cas, sur les cas dviants. Il limiterait galement

    les biais lis au choix initial du cas, etc. Larsson (1993) propose alors une dmarche dont

    le point de dpart concerne la slection dun groupe dtudes de cas relevant de la

    question de recherche. Ces cas sont cods selon un schma qui permet de passer de la

    description qualitative des variables quantitatives. Il importe dutiliser plusieurs codeurs

    pour procder au codage des cas et de mesurer la fiabilit inter-codage. Cette procdure

    termine, il est alors possible de passer lanalyse statistique de donnes codes. Ce type

    de dmarche est celle retenue dans ltude des processus de prise de dcision non

    structurs ralise par Mintzberg, Raisinghani et Thoret (1976). On pourrait galement

    envisager que cette stratgie de systmatisation et de gnralisation de lanalyse soit

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    19/22

    19

    prcde dune tude plus approfondie dun unique cas visant faire merger un schma

    gnral qui serait rvalu en fonction des rsultats de lanalyse quantitative.

    Conclusion :

    Les dveloppements prcdents mettent en vidence deux lments importants quechaque chercheur devrait prendre en considration avant de sengager dans une tude

    quelconque. Tout dabord, il existe de nombreuses faons de faire de la recherche si lon

    se rfre la diversit du statut des donnes, des modes de collecte de ces donnes, de la

    relation entre la thorie et les observations empiriques et des critres de scientificit de la

    recherche. Toutefois, bien souvent le chercheur senferme dans un paradigme donn (de

    type positiviste, constructiviste ou encore interprtatif), procde des associations

    parfois trop rapides entre notamment la dmarche et le statut des donnes ou entre la

    dmarche et les critres de scientificit de la recherche. Ces associations lobligent alors

    rattacher certains outils certaines situations de recherche et limitent par consquent

    lutilisation desdits outils. Ensuite, comme il a t montr dans la seconde section, la

    position du chercheur selon les diffrents continuums ne doit pas lui dicter le choix de la

    nature de loutil (qualitative ou quantitative) mais la faon dont il va mettre en uvre cet

    outil. En raisonnant ainsi le chercheur augmente le nombre doutils susceptibles dtre

    mobiliss au sein de sa recherche.

    Cependant, quel que soit son choix en matire doutils, le chercheur doit toujours garder

    lesprit deux questions fondamentales :

    - quel est le statut des rsultats mis en vidence ;

    - quelle est la contribution de la recherche en matire de connaissances pouvant tre

    mises en pratique.

    La rponse la premire question est fortement lie la position du chercheur selon lepremier continuum : le statut des donnes et notamment le caractre dtermin ou

    construit de la ralit. Ainsi, comme on la vu en premire partie, gauche du

    continuum, les rsultats de la recherche font office de loi (recherche de rgularits). Plus

    on sloigne vers la droite, plus les rsultats tendent mettre en vidence les marges de

    manoeuvre des acteurs par rapport des lois externes quils ne matrisent pas. A

    lextrme droite, les rsultats de la recherche montrent comment la connaissance (ou la

    ralit) se construit quotidiennement. La rponse la seconde question est, quant elle,

    dpendante de la position du chercheur selon le dernier continuum : critre de

    scientificit de la recherche, plus particulirement le caractre rplicable ou non des

    rsultats. Ainsi sopposent des recherches dont les rsultats sont a priorignralisableset des recherches dont les rsultats sont fortement ancrs dans un contexte local. Entre

    les deux, les rsultats de recherche, sils ne sont pas gnralisables quelle que soit la

    situation, peuvent tout du moins tre tendus des contextes prsentant des

    caractristiques proches de celles du contexte dans lequel ils ont t produits. La

    possibilit dapplication des rsultats dautres situations seffectue donc en fonction des

    similitudes entre lesdites situations. Ensuite, il a t montr que la plupart des outils,

    quils soient qualitatifs ou quantitatifs, prsentent certes de nombreux avantages mais

    restent toutefois limits dans leur mise en uvre (Cf. les conditions dapplications) ou au

    niveau des rsultats quils fournissent. Ainsi, cest en combinant lutilisation de ces

    diffrents outils que le chercheur peut alors accrotre la porte de ses rsultats et garantir

    la qualit intrinsque de sa recherche.

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    20/22

    20

    Par cette position nous rejoignons ici lide dveloppe par Martinet (1990 :23) selon

    laquelle: Admettons plutt le pluralisme mthodologique contrl - aucune mthode

    na a priori, le monopole de la rigueur et de la raison - qui veille au travail conceptuel,

    lexplication de ses prsupposs, la pertinence, la cohrence et lefficacit des

    modlisations, la lisibilit des cheminements entre termes thoriques et termesempiriques, la communicabilit des noncs... . A cela, il importe dajouter que

    lintrt mme dune recherche est de produire des connaissances actionnables (Argyris,

    1995), savoir des connaissances qui outre le fait quelles soient susceptibles de fournir

    des conseils, soient galement en mesure de produire des rponses concrtes aux

    problmes complexes auxquels sont confronts les dirigeants. Ainsi, les rsultats des

    recherches devraient pouvoir tre accessibles sous une forme qui permette leur

    appropriation par les dirigeants dentreprise (Chanal, Lesca, Martinet, 1996).

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    21/22

    21

    Bibliographie:- Aaker, D.A. et R.P. Bagozzi (1979), Unobservable Variables in Structural Equation

    Model with an Application in Industrial Selling. Journal of Marketing Research, 16,

    147-158.

    - Adler, Patricia A., et Peter Adler, (1994), Observational Techniques , dansHandbook of Qualitative Research, by Norman K. Denzin et Yvonna S. Lincoln, Sage

    Publications ; 377-391.

    - Argyris, Chris, (1995), Savoir pour agir : Surmonter les obstacles lapprentissage

    organisationnel, InterEditions, Paris.

    - Avenier Marie-Jos, (1989), Mthodes de terrain et recherche en management

    stratgique ,Economies et Socits, N14, 199-218.

    - Barley, Stephen R., (1990), Images of Imaging : Notes on Doing Longitudinal Field

    Work , Organization Science, Vol 1, N 3 ; 220-247.

    - Berger, Peter, et Thomas Luckmann, (1996), La construction sociale de la ralit,

    Collection Socits, Paris, Editions Mridiens Klincksieck.

    - Blaug, M., (1982),La Mthodologie Economique, Ed Economica, Paris.

    - Campbell D.T. et J.C. Stanley (1966), Experimental and quasi-experimental designs

    for research. Chicago :Rand McNally College Publishing Company.

    - Chalmers, Alan F., (1987), Qu'est-ce que la science? Popper, Kuhn, Lakatos,

    Feyerabend, Editions La Dcouverte, Paris.

    - Chanal, Valerie, Humber Lesca et Alain-Charles Martinet, (1996), Recherche

    ingnierique et connaissances procdurales en sciences de gestion: rflexions

    pistmologiques et mthodologiques ,Revue Franaise de Gestion.

    - Cook T.D. et D.T. Campbell (1979), Quasi-experimentation. Design and Analysis

    issues for field settings. Boston :Houghton Mifflin Company.

    - Crozier, Michel et Erhard Friedberg, (1977),Lacteur et le systme : les contraintes delaction collective, Editions du Seuil, Paris.

    - Delruelles-Vosswinkel, (1980) Quatre moments dans l'analyse sociologique : les

    techniques, les mthodes, les thories moyenne porte, les thories gnrales , dans

    Revue de l'institut de Sociologie, Ed. De l'Universit de Bruxelles.

    - Denzin, Norman K. et Yvonna S. Lincoln, (1994) Entering the Field of Qualitative

    Research , inHandbook of Qualitative Research, by Norman K. Denzin et Yvonna S.

    Lincoln, Sage Publications ; 1-17.

    - Durkheim, Emile, Les rgles de la mthode sociologique, Paris, Quadrige / Presses

    Universitaires de France, 1987,

    - Francfort, Isabelle, Florence Osty, Renaud Sainsaulieu et Marc Uhalde, Les mondessociaux de lentreprise, ed Descle de Brouwer, collection Sociologie Economique,

    Paris, 1995

    - Girod, Martine et Vronique Perret, (1997), Le problme des critres de validit de la

    connaissance dans les pistmologies constructivistes: une solution pragmatique? ,

    Confrence Constructivisme et Sciences de gestion- Lille, 23 Octobre 1997.

    - Glaser, Barney et Anselm L. Strauss, (1967), The discovery of Grounded Theory :

    Strategies for Qualitative Research, Aldine de Gruter, New York.

    - Hannan, Michael T. et John Freeman, (1977), The Population Ecology of

    Organizations ,American Journal of Sociology, Vol 82, N5 ; 929-964.

    - Kirk, Jerome et Marc L. Miller, (1986), Reliability and Validity in Qualitative

    Research, CA : Sage, Newbury Park.

  • 7/25/2019 mbengue.pdf

    22/22

    22

    - Koenig, Grard, (1993), Production de la connaissance et constitution de pratiques

    organisationnelles ,Revue de Gestion des Ressources Humaines ; 4-17.

    - Larsson, Rikard, (1993), Case survey methodology: quantitative analysis of patterns

    across case study ,Academy of Management Journal, Vol 36, N6, 1515-1546.

    - Le Moigne, Jean Louis, (1990a), La modlisation des systmes complexes, EditionDunod, Bordas, Paris.

    - Le Moigne, Jean Louis, (1990b), Epistmologies constructivistes et sciences de

    lorganisation , dans Epistmologie et Sciences de Gestion, Coordonn par Alain -

    Charles Martinet, Ed Economica, Paris ; 81-140.

    - Lincoln, Yvonna S. et Norman Denzin, (1985), Naturalistic Inquiry, Beverly Hills,

    Sage Publications.

    - March, James G., (1981), Footnotes to Organizational Change , Administrative

    Science Quarterly, Vol 26, 563-577.

    - Martinet, Alain - Charles, (1990), Grandes questions pistmologiques et sciences de

    gestion , dans Epistmologie et Sciences de Gestion, Coordonn par Alain - Charles

    Martinet, Ed Economica, Paris ; 9-29.

    - Mc Kelvey, Bill, (1997), Quasi-natural Organization Science , Oganization Science,

    Vol 8, N4, 352-380.

    - Miles M.B. et A.M. Huberman, (1991),Analyse des donnes qualitatives : Recueil de

    nouvelles mthodes, De Boeck Universit.

    - Mintzberg, Henry, Duru Raisinhani et Andr Theoret, (1976), The Structure of

    Unstructured Decision Processes ,Administrative Science Quarterly, Vol 21 ; 246-275.

    - Morand, Bernard, (1995), Statut pistmologique des modles dans la conception des

    systmes dinformation ,Ingnierie des systmes dinformation, Vol 3, N5, 665-700.

    - Mucchielli, Alex, (1996),Dictionnaire des mthodes qualitatives en sciences humaines

    et sociales, Editions Armand Colin.- Pettigrew, Andrew M., (1985), The Awakening Giant : Continuity and Change in ICI,

    Blackwell ed, Oxford.

    - Piaget, Jean, (1970), Epistmologie des sciences de lhomme, Editions Gallimard,

    Paris.

    - Popper, Karl R.,La logique de la dcouverte scientifique, Editions Payot, Paris, 1984

    - Pourtois, Jean-Pierre et Huguette Desmet, (1988),Epistmologie et instrumentation en

    sciences humaines, Pierre Mardaga Editeur, Lige Bruxelles.

    - Strauss, Anselm, et Juliet Corbin, (1990), Basics of Qualitative Research: Grounded

    theory procedures and techniques, Sage Publications.

    - Von Glasersfeld, Ernst, Introduction un constructivisme radical, dans Linventionde la ralit: comment savons-nous ce que nous croyons savoir? Contributions au

    constructivisme, dirig par Paul Watzlawick, Editions du Seuil, Paris, 1988.

    - Watzlawick, Paul, Effet ou Cause et Les prdictions qui se vrifient delles-

    mmes , dans Linvention de la ralit: comment savons-nous ce que nous croyons

    savoir? Contributions au constructivisme, dirig par Paul Watzlawick, Editions du Seuil,

    Paris, 1988.

    - Watzlawick, Paul, John Weakland et Richard Fisch, (1975), Changements : Paradoxes

    et psychothrapie, Editions du Seuil, Paris.

    - Yin, Robert K, (1990), Case Study Research : Design and Methods, Applied Social

    Research Methods series, Vol 5, CA : Sage, Newbury Park.

    - Zaltman, C., C. Pinson, et R. Angelmar, (1973),Metatheory and Consumer Research,New York, Holt, Reinhart and Winston.